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Deuxième séance du mercredi 28 avril 2004 204e séance de la session ordinaire 2003-2004 Adoption de l'ensemble du projet de loi. M. le ministre.
vice-présidente Mme la présidente. La séance est ouverte. (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi modifiant la loi n° 2003-322 du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France (nos 1484, 1552). La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, mesdames, messieurs les députés, il y a guère plus d'un an, vous avez adopté une loi relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France. Cette loi, qui a, comme vous le savez, été promulguée le 9 avril 2003, avait pour objet de construire un dispositif pour accompagner la privatisation d'Air France dans l'intérêt de l'entreprise et de ses salariés. Elle permettait, déjà, de protéger sa licence et ses droits de trafic, de maintenir la représentation des différentes catégories de personnel dans son conseil d'administration et de donner du temps aux partenaires sociaux - deux ans - pour négocier des accords d'entreprise. Elle offrait également des possibilités aux salariés qui le souhaitaient de bénéficier de conditions préférentielles pour entrer dans le capital de leur entreprise à l'occasion de la mise sur le marché d'actions d'Air France par l'Etat. Je rappelle que ni la loi de 2003, ni le projet qui vous est soumis ce soir, ne permettent la privatisation proprement dite. Le principe de la privatisation a été voté en 1993 et n'a jamais été remis en cause, depuis, par aucun gouvernement, ni par le Parlement. En revanche, l'adoption de la loi du 9 avril 2003 aura été un signal très fort du Gouvernement et du Parlement pour confirmer notre volonté de développer Air France et de lui permettre de nouer des alliances encore plus intégrées. En votant cette loi, vous avez permis l'union de deux grandes compagnies aériennes européennes. Vous avez surtout permis de créer la première entreprise européenne de transport aérien qui est d'ores et déjà un champion mondial. Ce géant européen représente beaucoup. Ce sont des centaines de milliers d'emplois directs et indirects en France et en Europe. Ce sont des emplois durables dans des entreprises saines, dans des entreprises où un service de qualité est totalement payé par le client. Il est aussi un formidable outil d'attractivité et de rayonnement pour la France, les Pays-Bas et l'Europe à travers plus d'une centaine de destinations long-courrier qui sont mises en correspondance avec nos régions grâce aux hubs de ces compagnies. Dès juillet 2002, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et moi-même avions annoncé la décision du Gouvernement de lancer le processus de privatisation d'Air France, conformément à la loi de 1993. Cette décision intervenait alors qu'Air France était l'une des rares compagnies en Europe et dans le monde à ne pas avoir subi de pertes importantes lors de la crise profonde amorcée au printemps 2001. Cette crise a été dramatiquement aggravée par les attentats du 11 septembre, par la situation géopolitique qui s'en est suivie, enfin, par des crises sanitaires en Asie. Ce n'est que depuis quelques mois que le trafic des compagnies européennes, et notamment celui d'Air France, a amorcé une reprise. Tout au long de ces crises, et jusqu'à aujourd'hui, Air France a su, grâce à la qualité de ses dirigeants et de ses salariés, dégager des résultats positifs et garder une structure financière saine avec un endettement raisonnable et décroissant. Les années 1990 ont vu Air France accomplir un redressement remarquable, qui a permis une première ouverture de son capital en 1999. Air France s'est alors attachée à se positionner dans une alliance de taille mondiale. Ainsi, en juin 2000, Air France a participé à la création de SkyTeam, avec Delta Airlines, AeroMexico et Korean Airlines, compagnies qui ont été rejointes par la suite par Alitalia et la compagnie tchèque CSA. Ce contexte a conduit le Gouvernement à considérer, avec pragmatisme, que l'intérêt d'Air France et de ses salariés et ses perspectives de développement, notamment au sein de SkyTeam, militaient pour une réduction de la part de 54 % que l'Etat détient dans le capital de la compagnie. La loi du 9 avril 2003 a préparé la mutation d'Air France, entreprise publique, en une entreprise privée en entourant cette opération de privatisation des meilleures garanties pour l'entreprise et ses salariés. Cependant, depuis le printemps 2003, un fait majeur est intervenu dans le transport aérien européen qui conduit le Gouvernement à vous soumettre aujourd'hui le présent projet de loi. Il s'agit de la signature, le 16 octobre 2003, entre Air France et la compagnie néerlandaise KLM, d'un accord prévoyant le rapprochement des deux compagnies pour créer le premier groupe européen de transport aérien. Ni KLM, ni l'Etat néerlandais, qui en est un actionnaire minoritaire, mais de référence, n'auraient accepté un rapprochement avec Air France si le Gouvernement ne s'était pas engagé à privatiser Air France. Ce rapprochement, dont le Gouvernement se félicite - et il n'est pas le seul - est le premier acte de la consolidation du transport aérien européen qui était attendu par tous les observateurs du secteur. La réaction des grandes compagnies concurrentes d'Air France est significative. D'abord sceptiques, elles ont ensuite affirmé qu'elles comptaient, elles aussi, participer à ce mouvement de consolidation, indispensable pour que les trois premiers groupes de transport aérien européens, structurés autour d'Air France, de Lufthansa et de British Airways, atteignent une taille critique leur permettant de lutter à armes égales avec leurs puissantes concurrentes américaines et asiatiques. Croire que le statu quo aurait pu être maintenu en conservant Air France dans le secteur public est une erreur. La participation à une grande alliance mondiale est aujourd'hui une nécessité pour une compagnie comme Air France qui ambitionne d'être présente partout dans le monde. La participation à la consolidation du secteur qui s'amorce aujourd'hui me semble également une nécessité pour ne pas courir le risque d'être, demain, marginalisée. Les accords passés entre Air France et KLM me semblent clairement démontrer une anticipation de ce que sera le transport aérien de demain. Ils ont été approuvés par les autorités européennes et américaines de la concurrence. Ils prévoient la création d'un groupe composé d'une société holding cotée en bourse - l'actuelle société Air France - et de deux compagnies aériennes filiales, KLM et une société de droit français à laquelle seront transférés l'actif et le personnel de l'actuelle société Air France. Bien que la position de chacune des deux compagnies paraisse symétrique, Air France sera évidemment en position de piloter le groupe. La mise en œuvre de ces accords a commencé, au début du mois d'avril, avec le lancement par Air France d'une offre publique d'échange sur les actions de la société KLM. Cette offre, dont il est prévu qu'elle se termine le 3 mai prochain, si elle est couronnée de succès, comme je le souhaite, se traduira par l'émission par la société Air France de nouvelles actions qui seront attribuées aux actionnaires de KLM en échange de leurs actions de la compagnie néerlandaise. L'augmentation du capital d'Air France, qui en résultera, entraînera une dilution de la part du capital d'Air France détenue par l'Etat et, mécaniquement, sa privatisation. Dans le même temps, KLM deviendra une filiale de la société Air France. La perspective de la filialisation de l'activité de la compagnie Air France nécessite de compléter les dispositions de la loi du 9 avril 2003 qui s'appliquaient uniquement aux compagnies directement cotées en bourse ou spécifiquement à la personne morale « société Air France ». Il s'agit d'aménagements à caractère essentiellement technique. Ainsi, le projet qui vous est soumis prévoit, en son article 1er, d'étendre le dispositif de protection des droits de trafic et de la licence d'exploitation. Limité aux compagnies directement cotées dans la loi du 9 avril, il étend le dispositif à des sociétés cotées ayant pour principale activité la prise de participations dans le capital de compagnies. Cela permettra de protéger la licence d'exploitation et les droits de trafic de la future filiale qui sera la compagnie aérienne issue de la société Air France, bien que cette nouvelle société ne soit pas cotée en bourse En deuxième lieu, les articles 2 à 4 visent à modifier les dispositions devant accompagner la transformation d'Air France en société privée pour tenir compte de la perspective de la filialisation de la compagnie. Les salariés transférés à la nouvelle filiale de transport aérien continueront de bénéficier d'une période de transition - au plus deux ans - avant la disparition du statut du personnel pour négocier des accords d'entreprise. Les règles applicables aux administrateurs salariés élus par les salariés, tout comme celles applicables à la composition des comités d'établissement et du comité central d'entreprise, le seront également à la filiale. Ces dispositions garantiront la totale neutralité - je répète, la totale neutralité - du changement de structure pour l'application des dispositions sociales prévues par la loi du 9 avril 2003. Enfin, l'article 5 du projet précise que l'échange de salaire contre des actions, institué par la loi du 9 avril 2003 - toujours elle - et ouvert à tous les salariés de la société, sur la base du volontariat, restera possible après la filialisation de l'activité de la compagnie Air France. En outre, afin que la part du capital pouvant faire l'objet de cet échange ne soit pas affectée par l'augmentation de capital liée à la prise de contrôle de KLM par Air France, cette part sera calculée sur la base du capital existant au 9 avril 2003. Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les grandes lignes des aménagements techniques qui figurent dans ce projet de loi. En conclusion, je souhaite réaffirmer qu'une fois le groupe Air France-KLM constitué, le Gouvernement entend réduire sa participation à son capital, en gardant le souci, bien évidemment, de l'intérêt des contribuables. Les modalités de cette réduction, qui dépendront des conditions du marché, seront fixées en temps utile par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. M. Charles de Courson, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir été le rapporteur, au nom de la commission des finances, de la loi du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France, je suis chargé aujourd'hui de vous présenter un texte modifiant cette loi sur un certain nombre de points techniques, compte tenu de l'accord signé, le 16 octobre 2003, entre Air France et KLM, qui conduira, à l'issue de l'offre publique d'échange amicale en cours, au transfert vers le secteur privé de la majorité du capital de la compagnie nationale, par simple dilution de la part de l'Etat. Le principe de la privatisation d'Air France a été acté lors du vote par le Parlement de la loi du 19 juillet 1993, sur laquelle, rappelons-le, l'actuelle opposition n'est pas revenue pendant les cinq années qu'elle a passées au pouvoir. L'ouverture du capital de la future ex-entreprise publique a été retardée jusqu'à ce que les conditions économiques et boursières la permettent : en février 1999, le gouvernement Jospin a cédé plus de 44 % du capital détenu par l'Etat. Les fluctuations des marchés n'ont pas permis d'aller au-delà depuis lors, même si le gouvernement Raffarin II, en juillet 2002, avait annoncé qu'il désengagerait l'Etat sous la barre des 50 % du capital. Je ne reviendrai pas longuement sur la nécessité et l'intérêt national de la privatisation d'Air France. Je m'en étais déjà expliqué à l'occasion de l'examen de la loi du 9 avril 2003, et je me contenterai donc de vous rappeler les quatre raisons pour lesquelles, selon moi, mais aussi selon la majorité et selon toutes les personnes responsables, il faut résolument s'engager dans cette privatisation. M. Jean-Pierre Blazy. L'opposition serait donc irresponsable ? M. Charles de Courson, rapporteur. Premièrement, l'activité d'Air France est commerciale. Je me tue à le répéter à certains de nos collègues de l'opposition, qui ne veulent pas l'entendre, elle ne relève pas d'une mission de service public, car le secteur du transport aérien est essentiellement concurrentiel. M. Jean-Pierre Blazy. On le sait ! M. Charles de Courson, rapporteur. Mes chers collègues, les activités d'Air France relevant du service public et de l'aménagement du territoire s'établissent à 6,2 % du chiffre d'affaires total de la compagnie, la compensation versée par l'Etat à ce titre représentant 0,1 % du chiffre d'affaires. Deuxièmement, le caractère public d'Air France, au regard du statut de toutes les autres grandes compagnies aériennes, est une anomalie dans le monde. Ce n'est d'ailleurs que grâce à la perspective de privatisation du futur mari que sa fiancée, KLM, lui a donné son consentement ! Une clause suspensive des accords prévoit en effet que, sans privatisation, ce rapprochement européen ne se fera pas. Troisièmement, la disparition du caractère public de la compagnie nationale est nécessaire à son développement capitalistique, car l'Etat ne peut, ne souhaite, ni n'a le droit, au regard du droit communautaire de la concurrence, d'investir un euro de plus pour le développement d'Air France. Et vous savez pourquoi : la recapitalisation de la compagnie a été effectuée pour solde de tout compte. Or une entreprise qui ne peut plus se développer est condamnée à mourir à petit feu. M. Jean-Pierre Blazy. Mais non ! M. Charles de Courson, rapporteur. Quatrièmement, l'Etat n'a pas à être actionnaire majoritaire d'une société commerciale dont l'activité est concurrentielle. C'est contraire à l'équité et le plus souvent contre-productif. Souvenez-vous des trop nombreuses carences de l'Etat actionnaire décrites dans un long rapport par notre collègue Diefenbacher, ici présent. L'accord conclu le 16 octobre 2003 entre les deux sociétés conduira, de fait, à une privatisation par dilution de la part de l'Etat dans le capital ainsi augmenté d'Air France : il en détiendra 43,7 %, contre 54 % aujourd'hui. Mais aucun délai n'a été fixé pour descendre à 20 % du capital, conformément aux engagements de l'Etat - fixer un délai aujourd'hui n'aurait pas été le meilleur moyen de défendre les intérêts patrimoniaux de l'Etat. Il faut cependant procéder à quelques aménagements techniques des dispositions législatives régissant Air France, telles qu'elles résultent de la loi du 9 avril 2003, laquelle avait pour objectif d'anticiper une cession de parts de l'Etat. Le présent projet de loi permet ainsi de tenir compte, sur le plan juridique, d'une privatisation découlant d'une augmentation de capital et d'une filialisation d'Air France dans le cadre d'un rapprochement stratégique avec une autre entreprise communautaire de transport aérien. Ce texte, d'ailleurs, traduit en fait une insuffisance d'Europe. Si l'Europe du transport aérien était beaucoup plus intégrée, il n'y aurait eu nul besoin d'élaborer de savants montages juridiques pour préserver les droits de trafic, qui, hélas ! restent encore nationaux. Si l'Europe aérienne avançait plus vite, il ne serait pas nécessaire de légiférer aujourd'hui. En l'absence de clause communautaire communément reconnue dans les accords internationaux régissant le transport aérien, la nationalité des actionnariats doit être préservée, au moins de manière transitoire. Ce projet de loi marque donc une nouvelle étape, accomplie par deux entreprises commerciales, vers plus d'Europe, au bénéfice de l'ensemble des consommateurs d'un marché unique encore plus vaste avec les dix nouveaux pays entrants. Il ne s'agit pas de la correction d'une quelconque « scorie » de la loi du 9 avril 2003, un an après son adoption par le Parlement ; sans cette loi, le rapprochement entre Air France et KLM n'aurait pas été possible et la privatisation n'aurait pu se concrétiser. Je vous rappelle d'ailleurs ce que notre collègue Blanc a dit devant la commission : les négociations secrètes qu'il a menées avec les compagnies européennes Iberia et Alitalia échouèrent sur le problème du caractère public d'Air France, les deux gouvernements concernés ayant refusé qu'elles aillent plus avant. Il s'agit donc seulement aujourd'hui, pour le Parlement, de légiférer afin de tenir compte d'une opportunité saisie par Air France, à la suite de la loi de 2003, dans le droit-fil de ce qui était déjà l'intention du législateur : privatiser et renforcer la compagnie nationale. Les réalités économiques ayant déjà dépassé le droit, il est nécessaire de l'adapter. Le dispositif de protection des droits de trafic et la licence d'exploitation accordée à l'actuelle société Air France seront maintenus, en tenant compte de la filialisation de la société. Il faut souligner que le schéma retenu pour l'opération de rapprochement entre Air France et KLM renforcera l'actionnariat étranger au sein de la holding, rendant ainsi plus probable la mise en œuvre de la procédure de cession forcée destinée à garantir les droits de trafic d'Air France, dont la loi du 9 avril 2003 prévoit l'éventualité. Toujours dans la perspective de la filialisation d'Air France, le texte modifie les dispositions de la loi du 9 avril 2003 qui devaient accompagner la transformation d'Air France en société privée, notamment pour permettre aux salariés transférés à la nouvelle filiale de transport aérien de continuer de bénéficier d'une période transitoire de deux ans au plus avant la disparition du statut actuel du personnel au profit d'une convention collective, ainsi que pour maintenir la représentation spécifique des salariés au sein du conseil d'administration de la future société opérationnelle. Enfin, l'échange salaire contre actions institué par la loi du 9 avril 2003 et ouvert à tous les salariés de la société, sur la base du volontariat, restera possible après la filialisation d'Air France. Cependant, pour que la part du capital pouvant faire l'objet de cet échange ne soit pas affectée par l'augmentation de capital résultant de la prise de contrôle de KLM par Air France, cette part demeurera calculée sur la base du capital existant au 9 avril 2003, ce qui n'est que justice, les salariés de KLM ne pouvant accéder à cet avantage. Une certaine émotion s'est toutefois manifestée au sein du personnel d'Air France,... M. Frédéric Dutoit. Emotion légitime ! M. Charles de Courson, rapporteur. ...en raison de l'absence, dans le projet de loi, de toute disposition concernant l'âge de cessation d'activité du personnel navigant commercial. En effet, alors que les pilotes, en vertu du code de l'aviation civile, doivent cesser leur activité dès soixante ans - ce qui n'empêche pas certains d'entre eux de continuer de travailler à l'étranger -,... M. Jean-Pierre Blazy. Et alors ? M. Charles de Courson, rapporteur. ...les personnels navigants commerciaux partent théoriquement en préretraite à cinquante-cinq ans et, dans les faits, en moyenne, dès cinquante-deux ans et demi - certains partent donc avant -, en vertu d'une disposition du statut du personnel de la compagnie qui leur assure une indemnisation financière tout à fait honorable. Si nous ne prenions pas de disposition législative, les hôtesses et stewards perdraient le bénéfice de cette préretraite. Il convient donc de combler cette lacune du texte, par la voie de l'amendement n° 6 portant article additionnel après l'article 3, que vous propose d'adopter la commission des finances. L'ensemble de ces aménagements purement techniques, s'ils se bornent à maintenir l'état du droit en vigueur, n'en sont pas moins porteurs d'avenir... M. Jean-Pierre Blazy. On en reparlera ! M. Charles de Courson, rapporteur. ...car ils rendent possible l'évolution d'Air France, gage de sa compétitivité, de sa croissance et donc de sa survie dans l'environnement difficile et cyclique du transport aérien. En conclusion, cette loi constitue un petit pas pour le droit, mais surtout un véritable décollage... M. Jean-Pierre Blazy. Attention au crash ! M. Charles de Courson, rapporteur. ...pour que la compagnie nationale se hisse, avec KLM, au rang des trois grands regroupements européens futurs qui domineront le ciel européen dans les années à venir. C'est pourquoi, mes chers collègues, je compte sur votre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy. M. Jean-Pierre Blazy. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons ne serait, selon le Gouvernement, qu'une simple adaptation technique de la loi du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien. Quel bel euphémisme pour masquer la libéralisation à marche forcée, la privatisation inconséquente et dangereuse d'Air France, que son statut d'entreprise publique n'a empêché ni d'enregistrer des résultats bénéficiaires dans un secteur économique pourtant sinistré, ni de conclure des accords commerciaux ! M. Frédéric Dutoit. C'est vrai ! M. Jean-Pierre Blazy. Vous faites le choix du libéralisme le plus débridé, contre l'intérêt général, au détriment des salariés, des passagers et des riverains des aéroports. M. Frédéric Dutoit. Très bien ! M. Jean-Pierre Blazy. L'adaptation de la loi du 9 avril 2003 est, dites-vous, rendue nécessaire par la fusion entre Air France et KLM, annoncée le 16 octobre dernier. Conséquence du mouvement de libéralisation qui s'intensifie depuis les années quatre-vingt-dix dans le transport aérien, cette fusion doit donner naissance à un groupe leader en Europe et premier dans le monde par son chiffre d'affaires - 19,2 milliards d'euros -, au terme d'une offre publique d'échange amicale lancée par Air France sur les titres KLM. Il est prévu que le futur groupe Air France-KLM, issu du rapprochement entre les deux compagnies, soit composé d'une société holding cotée en bourse, l'actuelle société Air France, et de deux filiales, compagnies aériennes : KLM et une nouvelle société de droit français à laquelle seront transférés l'actif et le personnel de l'actuelle société Air France. C'est donc la perspective de ce rapprochement entre Air France et KLM et la filialisation de l'activité d'Air France qui nous conduisent à examiner ce texte dit « technique ». Il convient cependant avant tout de s'interroger sur les raisons économiques de la fusion. Il y a tout juste deux ans, Jean-Cyril Spinetta, le président d'Air France, écrivait, dans Les nouveaux défis du transport aérien : « Un état des forces en présence dans le transport aérien [...] démontre que les sociétés qui travaillent dans des systèmes d'alliances arrivent à des niveaux d'intégration en termes de structure et de process souvent supérieurs à ceux auxquels parviennent des entreprises après que l'une a pris le contrôle de l'autre. » Jean-Cyril Spinetta jugeait donc que, dans le secteur aérien, les participations capitalistiques ne sont pas indispensables. Il précisait qu'elles n'offrent d'avantages décisifs « ni aux clients, ni aux salariés, ni à l'actionnaire, ni à l'environnement ». Des alliances comme SkyTeam ont en effet permis à Air France de se développer sans fusion en utilisant, via plusieurs partenaires, des droits de trafic extra-européens. Pourquoi alors opter pour la fusion, si ce n'est pour permettre et favoriser au passage la privatisation de fait de la compagnie française ? En effet, l'Etat, qui détient aujourd'hui 54 % du capital d'Air France, verra sa part tomber à 43,7 %, ses droits de vote passer de 54,7 % à 44,7 % dans le holding de tête Air France - KLM qui doit contrôler les deux compagnies, les actionnaires de KLM possédant alors respectivement 17,9 % du capital et 18,3 % des droits de vote, les actionnaires privés d'Air France et le personnel se partageant le reste du capital. Le Gouvernement, qui appelle de ses vœux une baisse de la participation de l'Etat dans la compagnie à hauteur d'au moins 20 %, trouvera donc, il est vrai, l'intérêt financier qu'il recherche dans une opération entraînant, de fait, « mécaniquement » la privatisation de la compagnie. Mais, monsieur le ministre, votre politique libérale débridée n'a aucune prise sur la réalité. Par un dogmatisme d'un autre âge, vous entendez parachever la politique lancée par les gouvernements Balladur et Juppé. La loi du 19 juillet 1993 prévoyait déjà le transfert au secteur privé du capital d'Air France, la compagnie figurant parmi la liste des sociétés « privatisables » par décret. Votre ancien collègue au Gouvernement, M. Mer, annonçait, dès le 29 juillet 2002, le lancement du processus de privatisation d'Air France, l'objectif revendiqué par le Gouvernement étant, sans ambiguïté, de ramener la part de l'Etat dans le capital de 54 % à 20 % au plus. Pourtant, en 2002, le Premier ministre, dans sa première déclaration de politique générale, annonçait que le Gouvernement procéderait à des privatisations, certes, mais « au cas par cas, en tenant compte d'abord de l'intérêt des entreprises et de leurs perspectives d'alliances et de développement ». La privatisation d'Air France répond-elle à cette exigence fixée par le Premier ministre lui-même ? Assurément non ! Permettez moi donc, à nouveau, de rappeler que l'histoire récente d'Air France est celle d'une réussite économique dans un contexte pourtant difficile. Air France, est une société publique - encore ! - performante. Elle est la deuxième compagnie européenne après Lufthansa, la troisième mondiale pour le transport de passagers internationaux et la quatrième pour le fret international. Les résultats sont régulièrement bénéficiaires alors que le marché du transport aérien, à la suite des attentats du 11 septembre, puis de l'épidémie de SRAS et, enfin, de la guerre en Irak, vit une grave crise, même si elle semble s'apaiser, et alors même que de nombreuses compagnies ont été dans l'obligation de licencier massivement pour éviter le crash économique. Air France, avec son statut d'entreprise publique que vous estimez inefficace, a ainsi réalisé, en 2002, le seul résultat bénéficiaire en Europe, si l'on excepte ceux des compagnies low cost, et le troisième dans le monde. Elle a ainsi montré que son statut d'entreprise publique lui permettait, contrairement aux théories de certains libéraux, de réagir efficacement face aux crises qui ne manquent pas de secouer le marché du transport aérien. Cette crise a également montré l'incapacité à réagir des compagnies aériennes privées : British Airways, KLM et Lufthansa ont enregistré, dans la même période, de gros déficits, tout cela ayant évidemment d'importantes conséquences économiques et sociales. Monsieur de Courson, considérez-vous ces résultats exceptionnels d'Air France comme « une anomalie dans l'Union européenne et dans le monde », comme vous le disiez de son statut d'entreprise publique ? De surcroît, aujourd'hui, l'endettement de la société est maîtrisé et sa structure financière est saine. Quel est l'argument essentiel du Gouvernement, du rapporteur et, derrière lui, de toute la majorité pour justifier la privatisation d'Air France ? La disparition du caractère public de la compagnie serait nécessaire à son développement, nous dit-on. Voilà bien une vieille lune de la droite quand il s'agit de parler des entreprises publiques : enfermées dans une gestion étatique d'un autre âge, victimes de la volonté collectiviste des gouvernements socialo-communistes, sclérosées par un statut archaïque, elles seraient incapables de réagir aux évolutions du marché, isolées sur la scène internationale et freinées dans leur développement. Ces arguments ont le mérite de la simplicité. Je les trouve pour ma part plutôt simplistes. Il convient, en effet, d'être plus rigoureux et plus précis dans l'analyse de la situation. Mes chers collègues, la politique de développement d'Air France a été un succès puisqu'elle a été à l'origine de la création, en juin 2000, du réseau SkyTeam, lequel regroupe désormais les compagnies Delta Airlines, Korean Air, AeroMexico, la compagnie tchèque CSA et Alitalia. SkyTeam représente 13 % du trafic mondial. Ce système d'alliances, nous sommes tous d'accord sur ce point, a permis à Air France, sous statut d'entreprise publique, d'étendre son réseau et ses possibilités de commercialisation. SkyTeam est d'ailleurs en voie d'élargissement. Ce succès démontre que le statut d'entreprise publique n'est pas un frein pour de telles alliances commerciales, ni d'ailleurs pour certains rapprochements capitalistiques comme le montre celui avec Alitalia portant sur 2 % du capital, ce qui est, c'est vrai, symbolique. Alitalia se trouve d'ailleurs, aujourd'hui, dans une situation difficile et devrait connaître prochainement un mouvement social. Air France a su se développer, c'est incontestable, et son développement commercial ne justifie en rien un changement de statut. Monsieur le ministre, vous avancez également, l'argument selon lequel cette privatisation permettrait des opérations de recapitalisation par appel aux marchés financiers. Par définition, cette affirmation est exacte. Mais l'exemple de 1994 démontre qu'une opération de recapitalisation décidée par l'Etat était possible. Les règles européennes exigeaient uniquement que l'Etat se comporte en « actionnaire de droit commun », sans fausser le jeu de la concurrence. Il n'était pas question de privatisation, monsieur le ministre ! L'évolution d'Air France par une ouverture du capital était largement suffisante ! C'est seulement le gouvernement de droite de 1993 qui, sans y être obligé, avait pris l'engagement de privatiser la compagnie, une fois le redressement assuré. En 1998, en ouvrant le capital, pour une faible part,... M. Charles de Courson. A hauteur de 44 % ! M. Jean-Pierre Blazy....en direction notamment des salariés, le gouvernement de Lionel Jospin ne faisait pas le choix de la privatisation. La privatisation permettra-t-elle, alors, - autre argument - d'accélérer la modernisation de la flotte d'Air France ? Là encore, l'argument n'est guère recevable. La flotte d'Air France est jeune, donc très bien portante et renouvelée régulièrement : ses appareils ont un peu plus de huit ans en moyenne contre dix pour les autres compagnies internationales. En une décennie, la compagnie a donc su surmonter une grave crise, se restructurer, moderniser sa flotte, résister à la chute du trafic consécutive aux attentats du 11 septembre 2001 et réaliser un réseau d'alliances aujourd'hui formalisé par SkyTeam. Aujourd'hui, Air France est une compagnie rentable, qui conforte sa position sur les cinq continents, notamment en Europe, et sur l'Atlantique où elle gagne des parts de marché. Existe-t-il une compagnie aérienne privée aux résultats semblables dans le monde ? Au lieu de s'interroger sur les difficultés et les erreurs de compagnies souvent présentées comme modèles, je pense notamment à British Airways, le Gouvernement préfère s'accrocher, coûte que coûte, à un projet idéologique libéral qui n'a aucune prise sur la réalité économique du transport aérien. Pourtant, certains exemples sont riches d'enseignement : British Airways a ainsi annoncé, en janvier dernier, qu'elle devait réduire ses coûts annuels de 435 millions d'euros. Ce montant correspond à la suppression de 3 000 à 4 000 emplois sur deux ans, qui s'ajoutent aux 12 000 emplois supprimés depuis 2001. Les résultats de cette compagnie n'ont cessé de diminuer depuis deux ans, son trafic de passagers a fortement baissé en Europe, notamment du fait de la concurrence des compagnies low cost, EasyJet ou Ryanair. British Airways, en plus de mesures sociales drastiques, a également décidé d'annuler des dizaines de liaisons non rentables. Cette compagnie rencontre donc de grandes difficultés. Elle a connu ces derniers mois un climat social dégradé. Le nombre des suppressions d'emplois y est tel que des responsables syndicaux estiment même qu'il sera impossible de continuer à faire voler tous les avions de la flotte. Par ailleurs, depuis la fin de l'année 2001, American Airlines a supprimé 27 000 emplois, US Airways 12 000, Delta Airlines 13 000, Air Canada 9 000. La faillite de Swissair se sera traduite, quant à elle, par la suppression de 9 000 emplois. Quant aux résultats des compagnies aériennes américaines, pour le premier trimestre 2004, ils ne sont pas beaucoup plus rassurants : American Airlines a accusé une perte nette de 166 millions de dollars, Northwest de 230 millions de dollars, Continental Airlines de 124 millions ; Delta Airlines affiche, elle, une perte, supérieure aux attentes, de 383 millions de dollars. Jusqu'à présent, Air France a mieux résisté aux conséquences du ralentissement du trafic aérien. On voit donc bien la différence entre une gestion purement privée et une gestion publique, où la visée à long terme prime sur les circonstances conjoncturelles et où l'intérêt général du secteur et l'intérêt des salariés sont pris en compte ! Monsieur le ministre, que serait devenue Air France, en 1993, alors que l'entreprise connaissait de graves difficultés, si son actionnaire n'avait pas été l'Etat ? Quel investisseur privé aurait mobilisé plus de 3 milliards d'euros pour la redresser ? Comment Air France privatisée aurait-elle traversé la crise consécutive au 11 septembre 2001 ? Pensez-vous honnêtement que des actionnaires privés auraient préféré réduire leurs profits et faire le choix politique de défendre l'emploi et de ne procéder à aucun licenciement sec ? Que l'on ne se méprenne pas : si le marché est amené à supplanter l'Etat, sa logique ne sera pas la même. Soumettre la compagnie au marché, c'est la soumettre aux fluctuations et à la volatilité de ce dernier. L'Etat présente des garanties de stabilité que n'offrent pas des actionnaires privés. Ceux-ci, en période de crise, ne soutiendront pas la compagnie mais feront tout pour vendre leurs actions au plus vite, aggravant encore un peu plus la situation. Et je ne parle pas des risques d'externalisation du fret et de la maintenance, ni encore de la baisse possible du niveau de sécurité, que nous pouvons redouter à juste titre. Air France, mes chers collègues, est le parfait exemple de la réussite, du développement, du rayonnement et de l'efficacité d'une entreprise à capital public majoritaire ! Dans le contexte actuel, difficile pour le transport aérien, auquel s'ajoutent la faiblesse de l'élasticité de la demande de transport aérien et la concurrence croissante - et néanmoins utile - du TGV, la volonté de lancer à tout prix le processus de privatisation d'Air France témoigne d'une posture idéologique imprudente qui refuse de prendre en compte la réalité économique internationale très mouvante du transport aérien, qui nie la crise financière et boursière et qui, socialement, risque de déstabiliser durablement la compagnie aérienne. Ce constat suffit à prouver que seuls l'idéologie et le dogmatisme libéral comptent aux yeux de la majorité. Aucun élément rationnel ne peut conforter le choix de privatiser cette entreprise publique. C'est donc, au contraire, par pragmatisme, par réalisme que nous nous opposons à la privatisation d'Air France. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Christian Ménard. Par démagogie ! M. Jean-Pierre Blazy. Et ce ne sont pas les arguments pour s'opposer à cette privatisation qui manquent. En premier lieu, votre démarche revient à brader purement et simplement l'entreprise publique. En tout état de cause, on ne peut que constater qu'Air France, malgré sa bonne santé financière et sa situation, que je viens de rappeler, a perdu une grande partie de sa valeur boursière du fait de la tendance générale du marché : la valorisation de la part totale de l'Etat est passée de plus de 3 milliards d'euros au début de 2002 à 873 millions au 30 septembre de la même année, avec un cours de l'action à 7 euros. Aujourd'hui, ce cours est revenu aux alentours de 14 euros. Le Gouvernement escompte, par cette privatisation, un niveau de recettes proche d'un milliard d'euros, conformément au montant inscrit en loi de finances initiale. Mais, mes chers collègues, même à ce niveau de recettes, le Gouvernement n'obtiendrait même pas un tiers du coût qu'a représenté, en 1994, pour les contribuables - dont vous parlez beaucoup, monsieur le ministre ! - l'opération de recapitalisation d'Air France, soit plus de 3 milliards d'euros - 20 milliards de francs. La volatilité des prix du marché ne permettra pas à l'Etat, en privatisant Air France, d'obtenir une juste rémunération de ce bien public. De ce fait, il aura véritablement bradé la compagnie nationale, je le répète ! Votre volonté de privatiser Air France répond à deux motivations principales : une motivation idéologique, tout d'abord, car pour les libéraux que vous êtes, seule la gestion privée est efficace et performante et une motivation budgétaire, ensuite, car le Gouvernement, confronté aux difficultés budgétaires qu'implique sa politique fiscalement, économiquement et socialement injuste, se trouve dans l'obligation de trouver, dans les plus brefs délais, de l'argent frais pour faire face à la situation catastrophique dans laquelle ladite politique, qui ne produit aucun résultat en matière d'emploi ou de croissance, nous a conduits. Tout « bon père de famille » que vous prétendez être pour la gestion des affaires publiques - c'est ainsi, en tout cas, que s'exprimait récemment à la télévision le nouveau ministre des finances - vous vous apprêtez à brader l'un de nos fleurons industriels, vous menacez l'avenir du pavillon français dans le transport aérien et vous déstabilisez les salariés pour assurer vos fins de mois ! Car, bien évidemment, 1es conséquences sociales du changement de statut de la compagnie ne cessent de nous inquiéter. Le personnel d'Air France dispose pour le moment d'un statut spécifique plus protecteur que le droit du travail, en raison notamment des spécificités liées à la nature de leur travail. La privatisation risque de remettre en cause ce statut spécifique, et il est naturel que les salariés s'inquiètent du changement de statut qui va s'opérer au cours des prochaines années. Avec eux, nous ne pouvons que nous interroger sur le délai « d'une durée maximale de deux ans » pour conduire les négociations menant à une convention collective destinée à remplacer le statut réglementaire sera-t-il suffisant ? Cette période transitoire ne signifie nullement que les salariés auront le pouvoir de maintenir le niveau actuel de protection qu'offre leur statut. Il s'agit donc d'une régression sociale programmée à plus ou moins long terme. A l'heure actuelle, les personnels navigants commerciaux, par exemple, sont mis à la retraite à cinquante-cinq ans... M. Charles de Courson, rapporteur. Et même avant ! M. Jean-Pierre Blazy. ...en raison des difficultés particulières de leurs conditions de travail. Quel sera l'âge de la cessation d'activité de ces personnels à l'avenir ? La transformation du statut d'entreprise publique en entreprise de droit privé aura notamment pour conséquence de faire entrer les personnels navigants de l'aéronautique civile dans le lot commun des salariés du secteur privé qui, pour profiter d'une retraite à taux plein, devront travailler plus longtemps. C'est inévitable. Certes, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui ne traite pas de cette importante question de l'âge de la cessation d'activité pour les personnels d'Air France. Mais nous l'aborderons à l'occasion de l'examen des amendements. Comme le rappelle notre rapporteur, « les questions de sécurité s'agissant de l'âge de départ à la retraite sont bien évidemment au cœur de cette problématique », et en tant que membre de la mission d'information parlementaire sur la sécurité du transport aérien de voyageurs, présidée par Odile Saugues, je ne peux qu'être préoccupé, comme tous mes collègues, par cette question majeure qui n'est pas seulement d'ordre social. Alors que la politique libérale du Gouvernement et de la majorité a été sanctionnée par les électeurs à l'occasion des élections régionales et cantonales, alors que le Président de la République, puis le Premier ministre ne cessent de parler du social et de projets sociaux, alors même qu'il y a un ministre de la cohésion sociale dans ce gouvernement, force est de constater, monsieur le ministre, que, s'agissant du présent projet de loi, nous ne percevons pas clairement la vision sociale de la privatisation que vous appelez de vos vœux. Nous venons de parler de la perte du statut spécifique des personnels d'Air France. Nous pouvons également affirmer qu'au moment où les plans sociaux se multiplient, où le secteur aérien, français et international, traverse une crise qui a mis en grande difficulté de nombreuses compagnies aériennes, vouloir privatiser, c'est aller contre l'emploi et précisément contre le social. Aucune orientation n'a été définie par le Gouvernement pour dynamiser l'emploi dans le secteur du transport aérien. A ce titre, d'ailleurs, il y a une contradiction flagrante entre la privatisation d'Air France et la demande que lui a adressée récemment le Gouvernement de reclasser les salariés d'Air Lib. Air France a été sollicitée par le Gouvernement pour reprendre une partie des salariés d'Air Liberté, mais peut-on réellement croire qu'une entreprise sur le point d'être privatisée puisse procéder à des embauches massives ? Je vous rappelle d'ailleurs que la cellule de reclassement d'Air Lib n'a réussi à retrouver du travail que pour 74 % des 2 500 salariés inscrits auprès d'elle. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer et M. Charles de Courson, rapporteur. « Que » ? ! M. Jean-Pierre Blazy. Et vous avez vous-même souligné lors d'une précédente séance de questions au Gouvernement, monsieur le ministre, qu'Air France, compagnie publique, a « assuré un tiers de ces réussites ». Le Gouvernement a pu faire appel à la compagnie nationale pour reclasser les anciens salariés d'Air Lib uniquement parce qu'elle est encore à capital public majoritaire. Quand l'Etat ne sera plus qu'un actionnaire parmi tant d'autres, de tels reclassements seront impossibles. Par ailleurs, nous avons de fortes inquiétudes quand à la façon dont vont être exercées les missions de service public qui, aujourd'hui, échoient à Air France. Car si, monsieur le rapporteur - et nous en sommes d'accord -, Air France n'est pas une entreprise de service public, elle assure cependant des missions de service public à hauteur de 6 %... M. Charles de Courson, rapporteur. De son chiffre d'affaires ! M. Jean-Pierre Blazy. ...même s'il s'agit de 6 % de son chiffre d'affaires. M. Charles de Courson, rapporteur. Il n'y a pas qu'Air France ! M. Jean-Pierre Blazy. Je songe notamment à la desserte de l'outre-mer dans la perspective de la continuité territoriale qui est une obligation de nature constitutionnelle. Sur ces dessertes d'outre-mer, les obligations de service public concernent l'exploitation des services tout au long de l'année, avec au moins une fréquence hebdomadaire, le respect du préavis de six mois avant l'interruption des services, un nombre d'annulations de vols ne dépassant pas 10 % du programme déposé, l'existence d'un tarif « enfant » réduit de 33 %, etc. Jusqu'au début 2001, cinq compagnies françaises reliaient la métropole aux Antilles et à la Réunion. Deux compagnies, Air France et AOM, desservaient le département de la Guyane. La desserte de l'outre-mer est aujourd'hui mise à mal par la faillite d'Air Lib, et le sera demain par la privatisation d'Air France. Déjà confrontés à une situation économique et sociale difficile, les territoires et départements d'outre-mer redoutent les conséquences de cette privatisation et leurs élus s'en font l'écho. Ils se demandent si Air France privatisée sera toujours en mesure de respecter ses obligations de service public, si la compagnie augmentera le nombre de ses rotations vers l'outre-mer, si elle définira une politique complémentaire de celle des autres compagnies assurant la desserte de l'outre-mer, en bref, si Air France entend faire des choix politiques - qui auront un coût - en faveur de la continuité territoriale ou si la concurrence et les objectifs de profit présideront seuls à son développement vers l'outre-mer. Le choix de la privatisation-fusion contribuera à accélérer la déréglementation du trafic aérien intra-européen et risque de conduire à des résultats identiques à ceux que l'on observe aux Etats-Unis après la déréglementation du trafic intérieur américain, avec des conséquences négatives sur les territoires : suppression de lignes à faible trafic, concurrence exacerbée sur les lignes à trafic élevé, au total, plus de suppressions de liaisons que de créations, diminution des fréquences entre les hubs majeurs et les aéroports secondaires, abandon des liaisons non rentables. Tout cela, vous ne pouvez le nier, a été observé aux Etats-Unis. En outre, clients et consommateurs ne sont pas forcément gagnants du fait de l'instabilité des tarifs qui ont souvent augmenté sur les lignes courtes. Mme Odile Saugues. Tout cela est dû à la dérégulation ! M. Jean-Pierre Blazy. Les salaires ont diminué, les conditions de travail des personnels se sont dégradées, mais la productivité n'a pas crû pour autant. Les compagnies à faible coût se sont développées. Bref, les inconvénients pour les usagers, pour les salariés et pour l'équilibre du territoire l'ont emporté sur les avantages. La privatisation d'Air France aura donc, si cette logique prévaut, de graves conséquences sur la politique d'aménagement du territoire. Nous savons tous que les aéroports sont des outils à la fois de croissance économique et d'aménagement du territoire. A côté de la plate-forme de Roissy, qui est le hub principal d'Air France et dont le développement n'est pas sans poser des problèmes de nuisances que vous ne prenez pas suffisamment en compte, l'offre de transport aérien s'est aussi structurée autour des plates-formes de correspondance régionales qu'il faut conforter. Nous avons besoin d'un véritable pôle public de transport aérien dynamique et ouvert contribuant, en complémentarité avec les autres modes de transport, à l'aménagement de notre territoire, dans la perspective du développement durable dont on parle tant et qui doit aussi s'appliquer au transport aérien. Outre le fait que vous abandonnez le principe même de la péréquation tarifaire, condition sine qua non d'un développement équilibré de notre territoire qui ne vise pas seulement l'exploitation des lignes rentables, vous n'intégrez pas la nécessaire complémentarité des modes de transport et des infrastructures dans un souci d'économie d'énergie et de réduction de la pollution. Chacun le sait, ce qui fait surtout la force d'Air France, c'est qu'elle valorise et utilise très bien ses atouts principaux que sont SkyTeam et le hub de Roissy. Sur ce dernier point, il est essentiel pour Air France d'avoir une vision claire des perspectives de développement - forcément limitées - de Roissy dans le cadre d'une politique de développement durable du transport aérien. Il est bien plus déterminant pour la pérennité de l'entreprise de répondre à la question de la réalisation du troisième aéroport dans le Grand bassin parisien, que vous refusez pour l'heure. A ce sujet, et à la suite de l'annonce de la fusion entre Air France et KLM, M. Bussereau, ancien secrétaire d'Etat aux transports, avait cru trouver dans cet événement important la justification de sa thèse contre la création d'un troisième aéroport dans le Grand bassin parisien. En souhaitant que cette alliance économique et commerciale enterre définitivement le projet de troisième aéroport, il a développé un argument fallacieux et un peu court pour justifier cet abandon, car on ne voit pas en quoi une alliance entre les deux compagnies aériennes permettrait de limiter le trafic aérien sur l'aéroport de Roissy, Air France représentant 60 % de cette activité. De plus, l'inquiétude du personnel de KLM et de nombreux Néerlandais concernant l'avenir de l'aéroport d'Amsterdam, dans un ensemble dominé par Air France, ne peut que faire craindre une augmentation du trafic à Roissy. Le patron de KLM rappelait d'ailleurs qu'« il y a trop de hubs » en Europe, et que « cela signifie qu'une rationalisation est nécessaire. » Nous pouvons craindre que cette « rationalisation » se fasse encore une fois au détriment des Franciliens, par une augmentation du trafic. M. Bussereau a démontré à quel point le rapport d'information parlementaire sur « l'avenir du transport aérien et la politique aéroportuaire », présenté par François-Michel Gonnot, était un rapport de commande, visant à justifier le choix fait par le Gouvernement d'abandonner le site de Chaulnes en Picardie - dans votre région, monsieur le ministre - pour implanter le troisième aéroport parisien. M. Frédéric Soulier. Cela n'a rien à voir avec le sujet ! M. Jean-Pierre Blazy. La politique aéroportuaire et la politique des compagnies ont un rapport, mon cher collègue ! M. Frédéric Soulier. Non, aucun ! M. Jean-Pierre Blazy. Si vous ne le voyez pas, j'en suis désolé pour vous ! Le Gouvernement est dans une logique économique libérale qui ne tient compte ni de l'environnement ni des nuisances subies depuis trop longtemps par une grande partie des riverains tant en Ile-de-France qu'en province. Ce sera plus encore demain la politique du laisser-aller et du laisser-faire dans le transport aérien, ce sera encore plus de dérégulation, et le risque est grand également pour les aéroports de province. Le réseau aéroportuaire dont vous avez parlé, monsieur le ministre, entre Paris et les aéroports régionaux, intégrant même Vatry, monsieur le rapporteur, n'est à mes yeux qu'un réseau purement virtuel. Il le sera encore plus demain si nous adoptons ce texte. C'est une logique économique et sociale qui tourne le dos au développement durable du transport aérien en France et en Europe. Après Air France, vous vous apprêtez à changer le statut de l'établissement public Aéroports de Paris pour ouvrir la voie à sa privatisation. Vous avez donc fait le choix d'une politique ultralibérale du transport aérien, dans une conjoncture européenne et mondiale très incertaine, au mépris de l'intérêt économique de la nation comme de celui des salariés. Mes chers collègues, ne nous engageons pas dans une aventure périlleuse. Nous prendrions le risque de sacrifier l'avenir du transport aérien national. Nous devons plutôt, dans le cadre européen, rechercher l'équilibre entre la nécessaire efficacité économique, le choix industriel, et la préservation des missions de service public et d'intérêt général, c'est-à-dire le choix de société. Il est encore temps d'y réfléchir. C'est pourquoi je vous propose de voter la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur Blazy, je vous livre spontanément ma réaction : vous m'avez paru embarrassé... M. Jean-Pierre Blazy. Pas du tout ! M. Charles de Courson, rapporteur. C'est vrai ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Cette motion de procédure aura permis d'allonger le débat, mais elle n'aura apporté, à mon sens, aucun argument convaincant. M. Jean-Pierre Blazy. Répondez-moi ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Je vais vous répondre. Je ne faisais que vous livrer une première impression. Vous avez d'abord parlé de « posture idéologique ». Mais la décision de privatiser une entreprise n'a rien d'idéologique. Vous-mêmes y avez eu recours lorsque vous étiez au pouvoir. Vous a-t-on alors reproché une posture idéologique ? Non ! D'autant plus qu'en le faisant, vous avez permis - j'y reviendrai - la création de grands groupes. Il ne s'agit pas de posture idéologique, mais simplement d'un peu de pragmatisme. Je citerai, pour le montrer, trois exemples relevant des compétences de mon ministère. Premièrement, Air France. La compagnie évolue dans un système fortement concurrentiel, auquel un statut privé se révèle plus adapté. Vous avez évoqué le service public. Il est exact qu'Air France remplit des missions de service public, comme elle continuera d'ailleurs à le faire demain. Il suffira que la société réponde aux appels d'offres : si elle est la mieux placée, la mission pourra être financée par une subvention d'équilibre. Voilà comment on remplit des missions de service public ! En ce domaine, rappelons-le, ce n'est pas le statut de l'entreprise qui compte, mais le type de mission. Deuxième exemple, Aéroports de Paris. Cet établissement public subit également une certaine concurrence, mais il a une importance stratégique. Nous ne le privatisons donc pas, mais nous en ouvrons le capital et changeons le statut, afin de permettre à des partenaires privés de nous aider à gérer le site aéroportuaire de façon toujours plus performante, et à le rendre le plus attractif possible pour les compagnies aériennes. Nous avons besoin d'ADP pour satisfaire encore mieux les compagnies présentes sur notre territoire. Troisième exemple, les autoroutes. Là non plus, il n'est pas question de posture idéologique. J'ai souhaité que les sociétés autoroutières demeurent publiques afin que leurs bénéfices servent à financer certaines infrastructures, et le Premier ministre a arbitré dans mon sens. Trois cas, trois réponses différentes, toutes pragmatiques. Rien d'idéologique. M. Frédéric Soulier. Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Vous vous êtes montré discret sur ce qui s'est passé en 1994, tout en ayant évoqué la recapitalisation d'Air France. Ayez donc la gentillesse d'aller jusqu'au bout et de le dire clairement : c'est bien la majorité actuelle qui a eu le courage d'opérer cette recapitalisation, en dehors, une fois de plus, de toute considération idéologique. Nous n'avons fait que répondre à une demande. M. Jacques Le Guen. Eh oui ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Et si, aujourd'hui, Air France est dans l'état de santé que l'on connaît, c'est parce que nous avons su, au bon moment, lui apporter les 20 milliards de francs dont elle avait besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) En revanche, vous-mêmes avez eu cette posture idéologique quand vous avez touché à l'aérien. A cet égard, vous n'auriez pas dû citer le cas d'Air Lib. Voilà le cas d'une entreprise que vous avez voulu lancer sans aucun capital. Résultat : un crash qui, hélas ! a mis au tapis 3 100 personnes. Le sujet aurait donc mérité de votre part un peu de discrétion. En effet, je le dis très clairement : l'ancienne majorité est responsable de cette erreur. Et c'est à nous qu'est revenu le devoir moral de la réparer, en mettant en place, à Orly, une cellule de reclassement dotée d'importants moyens. Nous n'avons reclassé que 74 % du personnel, dites-vous. Mais en un an, ce n'est déjà pas mal. Et je ne désespère pas d'en reclasser la totalité, peut-être en un an et demi. M. Jean-Pierre Blazy. Mais pas à Air France ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Un quart a rejoint Air France, et 50 % d'autres entreprises. Il reste encore 25 % des salariés à reclasser, dont une grande partie sont des pilotes. Or vous savez combien la tâche est difficile s'agissant de ces derniers. Je vous en supplie, ne parlons pas de posture idéologique. C'est véritablement ringard. De même, il n'est pas très chic de votre part de mettre en cause celui qui a été élu « manager de l'année 2003 ». Vous citez M. Spinetta en laissant entendre qu'il serait opposé à l'opération de privatisation, alors qu'il nous demande chaque jour si le projet de loi avance ! Prendriez-vous aujourd'hui la responsabilité d'empêcher la fusion avec KLM ? Ne pas voter ce projet de loi aboutirait en effet à ce résultat. M. Frédéric Soulier. Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Vous avez parlé de privatisation à marche forcée. Il n'en est rien. Je me souviens du débat que nous avons eu en mars et en avril 2003, lors de l'examen de la loi relative au transport aérien, qui organisait la privatisation prévue depuis 1993, je le rappelle, et que vous n'avez jamais remise en cause. Vous aviez alors attiré l'attention sur le fait que le cours de l'action Air France s'élevait à 7 euros. Depuis, la loi a été promulguée. Avez-vous eu la curiosité de consulter le cours ? L'action vaut aujourd'hui plus de 14 euros ! La loi que nous avons adoptée l'année dernière n'a donc pas empêché les investisseurs d'apprécier cette valeur ! M. Jean-Pierre Blazy. Grâce aux bons résultats de l'entreprise ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. On ne peut donc pas parler de marche forcée. C'est Air France qui imprime le rythme, elle qui, en octobre, a conclu un accord avec KLM et lancé l'OPE dont la clôture est prévue le 3 mai. Nous ne faisons qu'adapter la législation pour en permettre la réalisation et faire d'Air France la plus grande compagnie européenne. Il est en revanche un domaine où je vous suis totalement, c'est quand vous faites l'apologie d'Air France et de ses performances. Je suis tout à fait d'accord avec vous : la compagnie fait preuve d'une remarquable réussite, parce qu'elle a été recapitalisée au bon moment, bénéficie d'une bonne direction et est animée par des salariés de grande qualité, mais aussi parce que des choix pertinents ont été effectués. Pourquoi donc voulez-vous refuser à ceux-là mêmes qui, depuis des années, prennent ces décisions dont vous saluez les résultats, le droit de faire certains choix qui exigent l'adoption du texte de loi qui vous est soumis ? Quoi qu'il en soit, je partage votre avis sur les qualités d'Air France. C'est grâce à sa direction et à ses salariés que la compagnie s'est développée, et qu'elle a résisté à la fois à ses crises internes et aux crises internationales. Les propres dirigeants le disent depuis une décennie : l'avenir d'Air France passe par la fusion avec des partenaires. Or - mais vous le savez déjà, et c'est pourquoi j'ai pu percevoir votre gêne -, aucun partenaire ne peut être trouvé avec le statut actuel : les candidats se sauveraient s'ils pensaient que l'Etat pourrait demeurer majoritaire dans l'entreprise. J'ai d'ailleurs reçu mon homologue néerlandaise qui, pour donner son accord à la fusion entre Air France et KLM, voulait que l'Etat français lui confirme son intention de réduire à moins de 50 % sa participation au capital de la compagnie. Tout cela ne relève donc pas du discours, mais est l'expression de la réalité : c'est grâce à la promesse faite par votre serviteur qu'elle a donné son aval. Je rappellerai enfin, pour lui rendre hommage, que la majorité précédente, que vous souteniez, avait organisé la privatisation d'Aerospatiale par fusion avec Matra. Cette décision a permis de constituer un géant de la construction aéronautique et de la défense. Or elle se justifiait par les mêmes arguments que la privatisation d'Air France. C'est la même chance que nous voulons donner à la compagnie aérienne. Le rapprochement en cours avec KLM en est la concrétisation. Nous avons confiance dans Air France et dans ses salariés. Pourquoi donc brider cette entreprise qui peut devenir, le mois prochain, un géant mondial ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur. M. Charles de Courson, rapporteur. Je le dirai à mon cher collègue Blazy : nombre de ses arguments sont fallacieux, laborieux et archaïques. M. Jean-Pierre Blazy. Tout ça ? (Sourires.) M. Charles de Courson, rapporteur. Il a tenté d'abord d'utiliser une déclaration de M. Spinetta pour laisser croire que ce dernier était contre l'accord conclu avec KLM. Mais c'est lui-même qui l'a négocié ! Qu'a dit le président de la compagnie ? Que des accords commerciaux étaient souvent préférables à des accords capitalistiques. Il nous a expliqué pourquoi en commission : au moment de l'échec du rapprochement avec Alitalia - le refus du gouvernement italien étant motivé par le fait que l'Etat français détenait la majorité du capital d'Air France -, il n'a pris qu'une participation symbolique de 3 %. N'essayez donc pas, monsieur Blazy, de détourner les propos de M. Spinetta. Il est inutile que nous suspendions la séance pour lui demander de confirmer ce que vous savez déjà : il est favorable à l'accord. M. Jean-Pierre Blazy. Aucun doute là-dessus ! M. Charles de Courson, rapporteur. Vous avez prétendu ensuite que cet accord ne serait pas dans l'intérêt de l'entreprise. Mais, monsieur Blazy, lorsque, en 1993-1994, nous avons recapitalisé la société de 20 milliards de francs pour la sauver de la faillite, rappelez-vous ce que furent les négociations avec Bruxelles, et notamment quelle était la condition exigée par la Commission pour accepter l'opération : que le gouvernement français s'engage par écrit à ce qu'il n'y ait plus jamais d'augmentation de capital : c'était la « der des der » ! M. Jean-Pierre Blazy. Il ne s'est pas engagé à privatiser ! M. Charles de Courson, rapporteur. Suivez mon raisonnement, mon cher collègue : le gouvernement que vous avez soutenu a vendu 44 % de parts. Si Air France a besoin de capitaux propres et augmente son capital de plus de 8 %, la part de l'Etat se situera, par dilution, en dessous de 50 %. En raison de la vente que vous avez décidée, Air France se retrouverait dans une situation d'asphyxie financière si elle n'était pas privatisée. Autre argument : il s'agirait d'une opération capitalistique. Non, monsieur Blazy, pas au sens où vous l'entendez : il s'agit d'un échange d'actions, non d'une vente. Vous parlez de modernisation de la flotte, mais celle-ci ne peut être réalisée que si la société en a les moyens, que ce soit sous forme de crédit-bail ou d'achat direct. Vous comparez également la situation d'Air France et celle des sociétés aériennes américaines. Mais il n'est heureusement pas arrivé en France ce qui est arrivé aux Etats-Unis, c'est-à-dire les attentats du 11 septembre, qui ont entraîné l'effondrement de 30 à 40 % du trafic voyageurs pendant des mois. Dans ces conditions, qu'elle soit publique ou privée, une société ne peut que s'effondrer. Imaginez qu'un attentat de même ampleur soit commis à Paris, au point que la plupart des gens renoncent à prendre l'avion. Le résultat serait le même, quel que soit le statut des compagnies aériennes ! Ne faites donc pas de comparaisons qui n'ont aucun sens. Heureusement, le marché français ne s'est pas effondré comme le marché américain, parce que les attentats n'ont pas eu lieu en France, mais aux Etats-Unis. Mme Odile Saugues. Nous ne parlons pas de ça ! M. Charles de Courson, rapporteur. J'en viens à la prétendue motivation budgétaire. Il n'y en a aucune. Pas un euro n'entrera dans les caisses de l'Etat à la suite de la fusion entre Air France et KLM. Le Gouvernement français s'est engagé à réduire à environ 20 % sa participation au capital à la demande du gouvernement néerlandais, afin de garantir l'équilibre de l'accord et d'éviter la domination d'Air France. Il ne s'agit pas d'une initiative française. Vous agitez également la menace d'un danger pour le personnel. Je l'ai pourtant expliqué il y a un an : contrairement à ce que vous pourriez croire, leur statut n'est pas plus protecteur qu'une convention collective, pour la simple raison qu'on ne peut pas distribuer plus de richesses que l'on en crée. J'ai d'ailleurs rappelé que le statut du personnel d'Air France permettait les licenciements. Ce n'est pas un statut de fonctionnaire. Les systèmes de préretraite, etc., c'est très bien tant que l'on en a les moyens. Une société peut développer la cohésion sociale et accorder des avantages sociaux si elle marche bien, si elle est compétitive et réalise des bénéfices. Mais vous n'en trouverez aucune qui peut améliorer la situation de son personnel et recruter tout en étant en déficit : cela n'existe pas.
Enfin, s'agissant des DOM-TOM, vous savez que Air France est très critiquée, y compris par des membres de votre groupe, qui trouvent que les tarifs proposés sont trop élevés. J'en parlais encore avec l'un d'entre eux à midi. M. Philippe Edmond-Mariette. Et ça risque d'être pire ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Pourquoi ? M. Charles de Courson, rapporteur. La privatisation ne change rien, c'est un problème de concurrence. Si l'Etat et les collectivités locales veulent des dessertes plus fréquentes et sont d'accord pour les payer, ils feront un appel d'offres. Aujourd'hui, je vous le rappelle, vous ne pouvez pas confier à Air France un service public sans un appel d'offres. Que la compagnie soit publique ou privée, cela ne change donc rien. Au fond, mon cher collègue, alors que vous n'êtes pas du tout de cette sensibilité, votre intervention s'apparente à celle d'un parti qui fait son fonds de commerce des peurs de la société. Nous, nous n'avons pas peur de l'avenir. Nous pensons au contraire qu'une société est plus équilibrée quand elle affronte la haute mer, les problèmes, les difficultés, et qu'on trouve les solutions. L'avenir d'Air France dépend du vote de cette loi. Vous qui êtes profondément européen, comment pouvez-vous défendre le maintien de compagnies nationales dans toute l'Europe ? Croyez-vous encore que ça peut marcher ? Je vais vous dire une réalité très dure : toutes les compagnies, petites ou moyennes, sont condamnées à mort en Europe si elles restent nationales. Souvenez-vous de Sabena ! De profondis, elle est morte, il n'en reste rien. Souvenez-vous de Swissair ! Elle est morte, il n'en reste rien. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Et Alitalia est en difficulté ! M. Charles de Courson, rapporteur. Alitalia est en difficulté, en effet. Tout le monde sait qu'il ne restera que trois grands groupes en Europe, autour de British Airways, de Lufthansa et d'Air France. Air France a été la première compagnie à avoir le courage de monter un système juridique, qui est certes compliqué, mais qui était nécessaire du fait de l'insuffisance du droit communautaire dans ce domaine. Grâce à cette initiative, elle est en train de construire l'Europe de demain. Comment un homme profondément européen comme vous peut-il ne pas voter un texte qui va dans le sens de la construction du ciel européen ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Le Guen, pour une explication de vote au nom du groupe UMP. M. Jacques Le Guen. Libéralisme débridé, régression sociale etc., M. Blazy a développé les mêmes arguments que d'habitude dans sa question préalable. Au conservatisme caractéristique des socialistes, nous préférons une modernisation des statuts de l'entreprise Air France afin de lui permettre de poursuivre son développement et de créer de nouvelles complémentarités européennes et mondiales avec KLM, et c'est pour cette raison que nous ne voterons pas la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?... Je mets aux voix la question préalable. (La question préalable n'est pas adoptée.) Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Frédéric Dutoit. M. Frédéric Dutoit. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 1993, le gouvernement Balladur rendait publique une liste de vingt et une entreprises qu'il jugeait « privatisables ». Seules deux entreprises de cette liste sont encore à capitaux publics majoritaires, la SNECMA et Air France, mais l'objectif sera bientôt atteint en ce qui concerne la première, si l'on en croit les récentes déclarations concernant le devenir du grand groupe aéronautique et spatial. Pour ce qui est d'Air France, l'essentiel est déjà fait, si j'ose dire, puisque la loi du 9 avril 2003 crée les conditions d'un changement de propriété. Il ne restait plus qu'à saisir la première occasion pour désengager l'Etat du capital de la compagnie aérienne. Le rapprochement entre Air France et la compagnie néerlandaise KLM est venu à point nommé. A la suite des accords signés le 16 octobre 2003 qui prévoient que le nouveau groupe sera composé d'une société holding et de deux filiales compagnies aériennes, la dernière étape du plan de privatisation a été engagée le 5 avril 2004 avec le début de l'offre publique d'échange faite par Air France aux actionnaires de la compagnie néerlandaise KLM. Au terme de cette opération, l'Etat va descendre largement en dessous des 50 % de participation dans le capital d'Air France, ce qui va se solder mécaniquement par la privatisation de la société. Aussi, le texte dont nous entamons l'examen aujourd'hui nous propose d'apporter des modifications techniques à la loi du 9 avril 2003 afin de tirer les conséquences législatives de la fusion entre les deux compagnies aériennes. Les aléas de la guerre économique sans merci ayant pour objet de conquérir le ciel européen nous offrent donc l'occasion de réaffirmer à quel point cette privatisation absolument antiéconomique, anti-industrielle et antidémocratique couvre votre gouvernement de ridicule, monsieur le ministre. De toutes les privatisations engagées, elle est peut-être la plus délirante. Cela n'est pourtant pas facile au regard de ce qui s'est fait dans d'autres secteurs, en particulier les communications électroniques. Dans ce secteur, un véritable scandale économique se joue puisque des millions d'euros sont dépensés, sans vision d'ensemble, pour établir des réseaux qui font doublons à l'heure du numérique alors qu'il serait plus que jamais nécessaire de canaliser les moyens en vue d'un équipement en fibre optique sans lequel la révolution de l'Internet haut débit sera tuée dans l'œuf. Le summum de l'ubuesque, si l'on peut dire, est atteint avec la privatisation d'Air France, compagnie aérienne née en 1933, nationalisée en 1945, maillon essentiel de l'industrie aéronautique européenne, accomplissant qui plus est des missions de service public et d'aménagement du territoire. Air France est l'une des seules compagnies à avoir enregistré des bénéfices et à avoir créé des emplois ces dernières années, en dépit de la crise qui a suivi les attentats du 11 septembre, crise qui a d'ailleurs touché tous les pays dans le monde. Quel peut donc être l'intérêt de soumettre une compagnie nationale à un surcroît d'instabilité conjoncturelle lorsque l'on connaît la volatilité intrinsèque des marchés financiers ? Dans un secteur à très haute intensité capitalistique, où les coûts sont très difficilement compressibles, à moins de vouloir jouer les apprentis sorciers et de mettre en danger la sécurité des passagers, dans un secteur où l'extrême sensibilité aux aléas conjoncturels est la règle - outre les répercussions du 11 septembre, on peut évoquer l'impact de l'épidémie de SRAS, ou de la deuxième guerre en Irak -, dans un secteur où, dans la meilleure des situations, seuls 1 à 3 % de marge bénéficiaire annuelle peuvent être dégagés, une telle stratégie de privatisation laisse perplexe. Au regard des graves turbulences actuelles, le choix de privatiser, d'ailleurs rejeté par l'immense majorité des 70 000 salariés, semble suicidaire. Le nouveau ministre de l'économie et des finances est allé vanter les mérites du modèle américain. Parlons-en ! En 1978, était voté l'Airline Deregulation Act, qui décidait une déréglementation sans précédent du secteur. En vingt-quatre ans, 6 milliards de dollars de profit ont été enregistrés. Depuis deux ans, 12 milliards de perte ont été accumulés. Au final, les Etats-Unis, fidèles à leur tradition interventionniste, ont soutenu massivement leurs compagnies. Le Trésor américain a déjà déboursé pas moins de 15 milliards de dollars en aides diverses. Le gouvernement français fait donc le chemin inverse. Privatiser pour recapitaliser plus tard ou bien privatiser pour saupoudrer ensuite de discours compassionnels les futurs plans sociaux : l'alternative que vous nous proposez est grotesque ! Selon l'expression consacrée, la raison d'Etat a ses raisons que la raison ne connaît pas. Malgré tout, le choix de la privatisation semble répondre à deux sortes de considérations. Tout d'abord, fruit d'un dogmatisme idéologique indécrottable, il est l'expression de la vivacité de la vulgate néo-conservatrice qui a colonisé les esprits depuis une vingtaine d'années. Nous savons que l'article 294 du traité de l'Union européenne ne préjuge en rien du régime de la propriété des entreprises. Cependant, au nom de la construction européenne, de la mondialisation, etc., le leitmotiv des privatisations fait office de panacée. Pourtant, leur bilan est tellement contestable et contesté qu'il nous est refusé obstinément tout débat contradictoire à ce sujet. Ensuite, ce choix est la marque de considérations bassement comptables. Trop occupé depuis le début de la législature à organiser en toute connaissance de cause un transfert massif de richesses au profit des plus nantis, comme en témoignent la politique fiscale mais aussi la démolition du système de retraite par répartition et demain, certainement, le démantèlement de la sécurité sociale, le Gouvernement se trouve face à un bilan désastreux. Aussi, l'équipe Raffarin, soucieuse de gérer en bon père de famille, se trouve contrainte de vendre les bijoux de famille pour générer quelques menues rentrées budgétaires. M. Christian Ménard. Staline, c'était le petit père du peuple ! Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Dutoit ! M. Frédéric Dutoit. Les injures... M. Christian Ménard. C'est une injure ? M. Frédéric Dutoit. Je prends cela comme une injure, monsieur ! Une telle politique a ses limites, monsieur le ministre, car, de ces bijoux-là, on ne dispose pas à foison. L'honnête homme demandait il y a bien longtemps aux philosophes utilitaristes qu'elle était l'utilité de l'utilité. Ces derniers avaient grande peine à masquer leur embarras. Aujourd'hui, même Nicolas Sarkozy nous explique qu'il est juste et bon de vendre des actifs. S'il était parmi nous, je ne manquerais pas de lui demander ce qu'il compte vendre lorsqu'il n'y aura plus aucun actif à vendre. Nous serions bien curieux d'entendre sa réponse. M. Joël Beaugendre. On peut vendre la place du Colonel-Fabien ! M. Frédéric Dutoit. Si cela pouvait permettre à la France de se relever, je le ferais volontiers ! Monsieur le ministre, vous avez souhaité une belle réussite à ce nouveau fleuron du transport aérien. Un certain orgueil national se flatte de la naissance du premier groupe européen, troisième groupe mondial. Cependant, aurez-vous l'audace de souhaiter bon vent aux 4 500 salariés de KLM victimes d'un plan social ? L'avenir des salariés est plus que jamais incertain avec la réduction significative de la participation de l'Etat, qui était jusqu'à présent un gage de stabilité pour les partenaires privés aussi bien que pour les constructeurs, dont Airbus, car susceptible de prendre toutes ses responsabilités en cas de difficultés. La fusion avec KLM et son corollaire, la privatisation, présentent un certain nombre de risques : la présence de doublons associée à l'augmentation du poids de l'actionnariat privé pourrait entraîner des licenciements ; les résultats déficitaires de KLM pourraient menacer le fragile équilibre financier du nouveau groupe dans son ensemble. On ne voit décidément pas en quoi une privatisation, même assortie d'une fusion entre deux compagnies, se révélerait plus intéressante pour nouer des partenariats commerciaux fructueux. L'alliance SkyTeam lancée avec Delta Airlines a déjà rendu possibles nombre de synergies qui privent votre argumentation de tout fondement et renforcent notre conviction que seuls des partis pris idéologiques et budgétaires, se souciant comme une guigne de la spécificité du transport aérien et de la pérennité des emplois afférents, motivent votre frénésie de privatisation. Bien entendu, vous l'aurez compris, les député-e-s communistes et républicains ne voteront pas ce texte, ce qui ne sera une surprise pour personne. Croyez bien qu'en ce qui me concerne, il ne s'agit pas d'un vote dogmatique ou idéologique (« Non ! » sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), ne vous en déplaise. Mme la présidente. Mes chers collègues, j'aimerais que, comme M. Dutoit, chacun d'entre vous respecte son temps de parole pour que nous puissions terminer ce soir à une heure raisonnable. La parole est à M. Jacques Le Guen. M. Jacques Le Guen. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui, le marché européen du transport aérien est dominé par trois grandes compagnies, qui représentent chacune plus de 15 % du marché. Air France occupe la première place, avec 17,2 %, devant British Airways, 17 %, et Lufthansa, 16 %. Ce partage équilibré se retrouve au niveau des grandes alliances : Air France, membre de SkyTeam, British Airways, membre de Oneworld, et Lufthansa, de Star Alliance. Au cours de nos débats en avril 2003, nous avions tous signalé que Air France avait mieux résisté que la plupart des compagnies aériennes à la crise mondiale du secteur aérien. En effet, au cours de l'exercice 2002-2003, elle est passée du deuxième au premier rang des compagnies européennes, tous réseaux de passagers confondus. Par rapport aux autres compagnies européennes, elle a gagné 1,1 point de parts de marché au cours de cet exercice. Les raisons de ces succès sont connues : la qualité et la position géographique du hub de Roissy, la qualité de la flotte des appareils, et, surtout, les bonnes performances de l'alliance SkyTeam avec AeroMexico, Delta Airlines, Korean Air et CSA, alliance qui poursuit son développement. L'accord intervenu en août 2002 entre Delta et les compagnies américaines Continental Airlines et Northwest Airlines permet d'envisager l'élargissement de l'alliance à ces deux compagnies. Il est à noter que KLM est le partenaire européen de Continental Airlines et de Northwest Airlines. La fusion de KLM et d'Air France sera favorable à l'élargissement de l'alliance SkyTeam. C'est donc dans ce contexte que s'inscrit l'accord conclu entre Air France et KLM.
L'objectif de la lettre d'intention, signée le 30 septembre 2003, entre le président d'Air France et celui de KLM, est clair : il s'agit de la "création du premier groupe aérien européen, démarche s'inscrivant dans un processus de consolidation des alliances, qui permettra à Air France d'assurer son développement et sa rentabilité dans le futur". Ce nouveau groupe deviendra leader au niveau mondial, le premier en termes de chiffre d'affaires - 19 milliards d'euros - et le troisième pour le trafic, avec une flotte de 556 avions et un effectif actuel de 106 000 personnes. La fusion de KLM et d'Air France est une bonne chose pour la France et pour l'Europe pour quatre raisons essentielles. Premièrement, bien que l'opération aboutisse à la création du plus gros groupe aérien en Europe, l'enquête de la Commission européenne a montré que les réseaux des deux compagnies étaient largement complémentaires. En effet, Air France est plus présente que KLM dans le sud de l'Europe et en Afrique, par exemple, alors que KLM exploite un nombre plus grand de liaisons vers l'Europe du Nord et l'Extrême-Orient. Deuxièmement, l'union des deux compagnies permettra aux clients de KLM d'avoir accès à plus de quatre-vingt-dix nouvelles destinations ; ceux d'Air France se verront proposer quarante nouvelles liaisons. Les améliorations du service qui résulteront de la réunion des réseaux devraient profiter aux consommateurs. Troisièmement, la formule qui a été retenue préserve l'image et l'identité de deux compagnies fortement enracinées dans leurs pays respectifs. Une société cotée « Air France-KLM » sera détenue par les actuels actionnaires d'Air France et de KLM, et contrôlera deux sociétés opérationnelles « Air France » et « KLM ». Quatrièmement, le mariage d'Air France et de KLM fait passer la part de l'Etat dans la compagnie française sous la barre des 50 %. En effet, il était indispensable, pour donner aux investisseurs le pouvoir d'orienter réellement le devenir de la compagnie et de prendre les décisions stratégiques qui s'imposent, que l'Etat diminue rapidement sa participation au capital. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Absolument. M. Jacques Le Guen. L'offre publique d'échange en cours permettra la privatisation de la compagnie française. Ainsi, l'Etat, qui détient aujourd'hui 54,4 % des actions Air France, verrait sa part tomber à 43,7 % dans la holding de tête Air France-KLM, qui doit contrôler les deux compagnies. Les actionnaires de KLM posséderaient alors 19 % de la holding, le capital restant se partageant entre les actionnaires privés d'Air France et le personnel pour respectivement 26,6 % et 10,7 %. Cet accord suscite cependant quelques préoccupations. Un tel rapprochement, dans un contexte marqué par de nombreuses incertitudes macroéconomiques, inquiète les salariés d'Air France et de ses filiales. L'une des principales difficultés porte sur le positionnement des compagnies régionales dans le futur groupe. Air France se devait de répondre aux préoccupations et inquiétudes que cette fusion suscite chez les 3 000 salariés des deux compagnies régionales. La semaine dernière une grève a d'ailleurs touché Brit Air et Régional. Les pilotes des compagnies filiales françaises, notamment les 900 pilotes de Brit Air et de Régional, filiales de transport régional du groupe Air France, se sont largement exprimés. Ils souhaitent, d'une part, des garanties quant à leur statut et à l'évolution de carrière au sein de la nouvelle entité et, d'autre part, la protection de leur périmètre d'activité. Je me réjouis que la grève des personnels navigants techniques des compagnies aériennes ait pris fin mercredi dernier et que le protocole d'accord signé entre les directions de Brit Air et de Régional, filiales d'Air France, et les syndicats définisse une méthode et un calendrier qui permettront, dans un délai de six mois, d'aboutir à un accord entre les partenaires sociaux. Cet accord précisera l'activité de Brit Air au sein du groupe Air France et garantira la protection et le développement de l'emploi à Brit Air. Toutes les conditions sont donc réunies pour que la fusion d'Air France et de KLM soit un succès. Le projet de loi qui nous est soumis a pour but de rendre la loi du 8 avril 2003 applicable à la situation qui résultera de ce projet de fusion. Le dispositif qui nous est proposé est satisfaisant en ce qu'il confirme les garanties accordées aux salariés. Ainsi, l'article 3 prévoit que le statut du personnel en vigueur à la date du transfert au secteur privé de la majorité du capital continue de s'appliquer jusqu'à la date d'entrée de la convention ou des accords d'entreprise ; ces accords devant, en effet, se substituer au statut actuel. La filiale ainsi créée devra poursuivre la négociation collective entre les syndicats et la direction d'Air France. En outre, les dispositions relatives au développement de l'actionnariat salarié sont maintenues, et notamment l'offre d'échange de salaires contre actions sur la base du volontariat reste toujours possible. Je rappelle que ce mécanisme, réservé aux seuls pilotes en 1999, a été ouvert à tous les salariés volontaires par la loi du 9 avril 2003. Par ailleurs, le texte qui nous est soumis dispose que l'entreprise conservera les modalités actuelles de participation des salariés à la gestion de l'entreprise. Il confirme les mesures dérogatoires relatives à la composition du conseil d'administration d'Air France qui, tout en se rapprochant du droit commun, maintient une représentation plus importante que celle prévue par le droit commun. Le projet confirme aussi que la nouvelle filiale conservera l'actuelle composition dérogatoire des comités d'établissement et du comité central d'entreprise. Ainsi, ce texte s'inscrit parfaitement dans le prolongement de la loi du 9 avril 2003 qui tend notamment à assurer le maintien des droits acquis des salariés. Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe UMP votera le projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. La parole est à Mme Odile Saugues. Mme Odile Saugues. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous débattons aujourd'hui est une adaptation technique de la loi du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien, notamment à la société Air France, texte que nous avons examiné les 11 et 12 mars 2003. Une adaptation, certes, mais dans un contexte très différent, puisque l'offre publique d'échange d'Air France sur KLM est sur le point d'aboutir, et aura pour conséquence de ramener la part de l'Etat français dans Air France de 54,4 % à 43,7 % puis, à terme, à 20 %. Nous nous trouvons donc face à la privatisation de fait de l'une des dernières compagnies européennes aériennes publiques. Air France entre, tout comme Lufthansa en 1997 ou encore Iberia en 2001, dans le mouvement général des privatisations. Les ambitions de ce rapprochement d'Air France et de KLM - unique dans l'histoire du transport aérien - sont pour certaines avouées. Il s'agit d'abord de constituer le plus grand pôle de transport aérien d'Europe avec pour stratégie affichée le double hub de Roissy et Schiphol. Le groupe, à la tête d'une flotte de 518 appareils, devient ainsi le premier groupe mondial en termes de chiffre d'affaires, avec 19,7 milliards d'euros ; il se place au troisième rang pour le trafic avec 66 millions de passagers et en deuxième position mondiale pour le fret - Air France Cargo-KLM Cargo - immédiatement derrière Fédéral Express. Enfin, le groupe SkyTeam détiendra 21 % du marché mondial avec plus de 260 millions de voyageurs ; on assiste ainsi à un partage du monde en trois entre Star Alliance, SkyTeam et Oneworld. D'autres raisons, beaucoup moins visibles, sont les caractéristiques d'une approche libérale. La rédaction des articles 2 et 4 du texte qui envisagent des « opérations donnant lieu à l'apport de tout ou partie de l'actif de la société Air France », nous fait appréhender un risque de démantèlement de la société Air France telle qu'elle existe actuellement. Par ailleurs, dans cette fusion, Air France serait réduite à une simple holding financière, qui contrôlerait des transporteurs aériens dont KLM et une nouvelle société de droit français à laquelle aucun nom n'est donné. Comment seront définies les activités de cette seconde filiale de droit français ? Quel en sera le périmètre ? Vous comprendrez les inquiétudes des salariés et des clients d'une société à laquelle ils sont attachés par un lien de confiance. On voit se profiler la cession de pans entiers de l'entreprise. Depuis trois mois, les inquiétudes du personnel se font sentir : le personnel au sol d'Air France a observé des arrêts de travail sporadiques ; les chefs d'avion, qui craignent de voir leur effectif diminué de 20 à 25 %, ont déposé plusieurs préavis de grève, les agents de pistes ont effectué des débrayages, un préavis de grève a également été déposé à Air France Cargo ; enfin les personnels navigants commerciaux participent également au mouvement. A Toulouse, les syndicats estiment le nombre de postes menacés par la fusion, entre 400 et 500 sur les 2 000 postes que compte le groupe français dans la région. Enfin, le plan Air France de réduction des coûts de 15 % sur le marché européen entre 2004 et 2007, soit 100 millions d'euros pour la première année, puis 300 millions pour la deuxième et 600 millions pour la troisième année, est entré en vigueur au 1er avril. Cette réduction passera inévitablement par une diminution du nombre de personnels navigants commerciaux. Par ailleurs, les inquiétudes sont multiples lorsque l'on sait que la compagnie comptera un peu plus de 104 000 salariés et devra composer avec une faible marge de manœuvre, d'autant que les salariés de KLM ont obtenu une garantie d'emploi de cinq ans au lieu des trois années prévues dans un premier temps, alors que celle du personnel au sol d'Air France arrive à échéance le 10 juillet 2005. Dans ces conditions, comment ne voir que la réussite de cette fusion et l'expansion certaine du groupe « Air France-KLM » et omettre la précarité des personnels qui seront soumis aux fluctuations et à la volatilité des marchés boursiers, aux délocalisations, à la sous-traitance et l'externalisation tant pratiquées par les grands groupes internationaux ? Enfin, il est indispensable d'insister sur le fait que le rapprochement entre Air France et KLM soulève d'autres inquiétudes car cette fusion a pour conséquence l'enterrement du troisième aéroport. Ce projet, qui visait à soulager les populations vivant à proximité de Roissy, devait se situer à moins de cinquante kilomètres de Roissy et à moins d'une heure de voie ferrée de Paris. Or la création du groupe entraîne de fait l'installation d'un troisième aéroport situé à 500 kilomètres de Paris ! Je vous laisse apprécier la logique qui préside à un tel choix au mépris des intérêts des riverains et des citoyens. M. Jean-Pierre Blazy. Très bien ! Mme Odile Saugues. Dérégulation aux USA, dérégulation en Europe, élargissement de l'Europe et ouverture à de nouveaux opérateurs, privatisation d'Air France et d'Aéroports de Paris : le monde de l'aérien bouge. Si cette opportunité devait être un vecteur de qualité et d'amélioration de services, d'optimisation de l'offre et de l'accès facilité d'un plus grand nombre au transport aérien, nous ne pourrions que nous en féliciter. Mais je crains bien qu'à cet instant il ne soit surtout question d'augmentation des profits par la diminution des coûts salariaux et donc de détérioration des conditions de travail du personnel. Le transport aérien a un coût, la qualité du service et la paix sociale également, mais la sécurité du transport aérien, donc celle des citoyens et des salariés qui sont à leur service, plus encore et les résultats des travaux de la mission parlementaire que je conduis sur cet important sujet d'actualité me font un devoir de vous en alerter. Vous ne serez donc pas surpris, monsieur le ministre, que nous ne votions pas ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Gantier. M. Gilbert Gantier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon discours sera très bref compte tenu de l'aspect formel du projet de loi que nous examinons aujourd'hui, d'autant plus que le M. le ministre et M. le rapporteur ont exprimé très clairement les enjeux de ce texte et les raisons fort légitimes qui nous conduisent aujourd'hui à modifier une loi que nous avons adoptée l'an passé. Au-delà de l'aspect formel et nécessaire de ce projet de loi, je me bornerai à présenter deux observations. En premier lieu, je tiens à féliciter M. de Robien, qui a mené avec brio le dossier de la privatisation d'Air France et de l'accord avec KLM. Cette privatisation, qui avait pris un retard très important du fait du refus de la précédente majorité de donner les moyens à Air France de devenir le leader européen du transport aérien, devenait une question urgente compte tenu de l'aspect hyperconcurrentiel de ce marché. Monsieur le ministre, vous avez su, en peu de temps, mettre en place les adaptations juridiques nécessaires à la privatisation, avec la loi du 9 avril 2003, puis encourager l'alliance avec KLM qui fait d'Air France le leader naturel du ciel européen. Enfin, vous revenez dans un délai record devant le Parlement pour lui soumettre les modifications qu'impose la mise en place de la fusion, modifications que, je le souligne, nous ne pouvions pas anticiper l'an passé puisqu'elles sont liées à la nature même de l'accord qui est intervenu entre les deux compagnies postérieurement à la loi du 9 avril 2003.
En effet, les compagnies aériennes sont tributaires de droits de trafic et de licences d'exploitation dont la délivrance est très réglementée. Les règles ont, pour la plupart été édictées lors de la signature des accords IATA, il y a aujourd'hui plus d'un demi-siècle. Il est, notamment, stipulé que la majorité du capital doit être détenue par des actionnaires nationaux. Ces règles, que l'on pourrait à juste titre considérer comme obsolètes à l'heure du marché unique européen, montrent bien le retard pris dans le domaine des transports aériens par la réglementation européenne. Nous ne pouvons pourtant ignorer l'importance des transports pour la construction d'un espace européen intégré, condition sine qua non d'une prise de conscience européenne que l'UDF appelle de ses vœux. Pourtant, il semble que l'on tarde à mettre en place un droit communautaire qui faciliterait les rapprochements dans le domaine du transport aérien. Monsieur le ministre, connaissant votre attachement à la construction européenne et vos nombreuses initiatives dans ce domaine, je ne doute pas que vous pourrez prochainement nous donner des éléments d'information sur cette question essentielle qu'est la construction d'une Europe des transports. La position du groupe UDF est constante : lorsque nous estimons qu'une réforme est imparfaite ou injuste, nous la repoussons ; en revanche, lorsque nous estimons que le Gouvernement mène une politique efficace et juste, comme c'est le cas dans le dossier Air France, nous la soutenons sans réserve. C'est pourquoi au nom du groupe UDF, je voterai ce texte sans la moindre hésitation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel. M. Victorin Lurel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la compagnie nationale Air France a bien travaillé ! Avant de décider de sa privatisation et de son rapprochement avec KLM, il me semble que nous devrions examiner l'avenir du secteur aérien français sous le prisme des attentes de nos compatriotes. L'Etat ne doit en aucune manière se désengager d'Air France et du secteur aérien. L'avenir de cette grande société ne doit pas être appréhendé sous le seul angle économique, et il faut tenir compte des intérêts de l'outre-mer. Il est indéniable que la situation actuelle de la desserte aérienne de l'outre-mer est inacceptable, en raison principalement des pratiques tarifaires d'Air France, et qu'il convient d'imposer des obligations de service public pour encadrer les pratiques tarifaires des compagnies. La continuité territoriale entre l'outre-mer et la métropole est indispensable pour assurer le développement économique de nos régions et l'égalité de tous les Français, qu'ils soient originaires de métropole ou de l'outre-mer. Or le coût prohibitif du transport entre la métropole et l'outre-mer prive ce principe de toute effectivité. Ainsi, le duopole de fait des compagnies desservant les Antilles - Air France et Corsair - ne permet pas de faire chuter les prix. On ne peut que constater que ces compagnies pratiquent toute l'année des prix voisins, variant de 470 euros en période creuse à 1 200 euros en période de congés ! La justification de ces tarifs n'est pas économique, puisque les deux entreprises n'ont pas le même « point mort ». Selon certaines sources, le coût du siège au kilomètre - le fameux ESKO - serait, à destination des Antilles, de trois centimes d'euros pour Air France et de deux pour Corsair. Durant la saison estivale, les vols « secs » reviennent plus cher qu'un « package » vol-hôtel, et un voyageur paie deux fois plus cher pour aller de Paris aux Antilles qu'aux Etats-Unis - en août dernier, un aller-retour Paris-New York était proposé à 585 euros, alors qu'il en coûtait 1 200 pour se rendre aux Antilles. Ces compagnies aériennes abusent réellement d'une position dominante. Une administration aussi importante que l'AP-HP débourse 1 208 euros, hors taxes et frais d'aéroport, pour les billets de ses agents originaires d'outre-mer dans le cadre de leur congé bonifié ! Or, aucune justification n'est fournie, notamment par la direction d'Air France, quant au coût élevé de ces dessertes. Malheureusement, cette opacité va encore plus loin. En décembre 2002, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, a mené une enquête en raison de soupçons d'entente entre compagnies aériennes, mais l'administration elle-même a refusé de transmettre le rapport à M. Beaugendre, chargé d'une mission parlementaire sur ce sujet. Je me tourne donc vers vous, monsieur le ministre des transports - à défaut de votre collègue de l'économie et des finances -, pour connaître le contenu exact de ce rapport et, surtout, les suites judiciaires qui lui ont été données. Ce rapport établit en tout cas clairement que la politique commerciale des compagnies aériennes, caractérisée par la technique du yield management, consiste à maximiser la recette en faisant varier le prix du billet en fonction de la demande, en ignorant les coûts. Notre excellent collègue Charles-Amédée de Courson dira sans doute que le prix n'a rien à voir avec les coûts, mais qu'il répond à la loi de l'offre et de la demande ! Toujours est-il que l'écart entre le coût et le prix est tel qu'Air France et Corsair bénéficient d'une véritable rente de situation. Les compagnies sont ainsi amenées, au fur et à mesure des achats, à fermer les classes de réservation les moins chères et à augmenter le quota de sièges dans les classes les plus chères. Ainsi, la direction de la concurrence a constaté une augmentation similaire et simultanée des tarifs, une identité tarifaire entre les deux compagnies incriminées et une raréfaction des billets à tarif réduit, aussi bien en basse qu'en haute saison. Au vu de cette situation, j'avais pris l'initiative, avec l'accord du groupe socialiste, de demander la création d'une mission d'information parlementaire sur les conditions économiques de la desserte aérienne de l'outre-mer, en vue, notamment, de connaître la composition des coûts de liaisons aériennes et de déterminer les conditions d'une baisse des prix de ces liaisons. Cette mission a finalement été confiée par le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire à Joël Beaugendre. Or, notre collègue a déclaré qu'il lui avait été très difficile d'évaluer la rentabilité des lignes aériennes, la direction d'Air France lui ayant refusé, au nom du secret commercial, l'accès à la comptabilité analytique par ligne exploitée. Qu'un membre de notre assemblée en mission se voie refuser la communication de documents évidemment nécessaires au bon accomplissement de celle-ci est une situation inacceptable, fermement condamnée unanimement par la commission, à l'initiative de son président, qui a par ailleurs explicitement donné, par avance, son accord à la création d'une commission d'enquête afin d'exiger de la société Air France la communication cette comptabilité analytique. Le premier amendement que j'aurai l'honneur de vous proposer vise précisément à ce que cette comptabilité analytique soit fournie, et son adoption permettra certainement d'éviter d'aller jusqu'à la création d'une commission d'enquête La situation actuelle de la desserte aérienne de l'outre-mer est proprement inacceptable et justifie pleinement que nous saisissions à nouveau l'occasion de la discussion de ce texte pour vous proposer des solutions. Il y a maintenant plus d'un an, monsieur le ministre, à cette même tribune, je vous interpellais déjà à ce propos lors de la discussion de la loi du 9 avril 2003, que vous proposez aujourd'hui de modifier. Vous m'aviez, à l'époque, assuré que le projet de loi de programme pour l'outre-mer apporterait des solutions au problème de la continuité territoriale. Or, le ministère de l'outre-mer, les députés de la majorité - si l'on ne me dément pas ! - et les associations intéressées, comme le Collectif des Antillais, Guyanais et Réunionnais, constatent aujourd'hui qu'il n'en a rien été. Ni l'exonération de charges patronales de sécurité sociale pour le personnel employé par les compagnies aériennes sur les dessertes entre la métropole et l'outre-mer, décidée pour créer quelques emplois plutôt que pour faire baisser les prix, ni la fameuse dotation de continuité territoriale ne permettent une baisse effective du prix du billet, et donc l'effectivité du principe de continuité territoriale. En effet, cette dotation de 30 millions d'euros représente 11,50 euros par Ultramarin, alors que chaque Corse en reçoit 616 au titre de la solidarité nationale - ce dont je me réjouis, bien sûr, pour nos amis corses ! De plus, le mode de financement de cette mesure est plus que critiquable. Politiquement, d'abord : ces 30 millions d'euros sont financés par une hausse des taxes sur les billets d'avion, donc par une contribution de chaque voyageur, au lieu d'être pris en charge par la solidarité nationale. Juridiquement, ensuite : le rapporteur de ce projet de loi, notre éminent collègue, Charles-Amédée de Courson, également rapporteur du budget des transports, a très bien montré que le support budgétaire choisi - le FIATA - n'est pas compatible avec la nature de la dépense, et que son utilisation est manifestement contraire à la loi organique du 1er août 2001. Un autre support budgétaire est donc nécessaire pour 2005. Mme Odile Saugues. C'est tout à fait exact ! M. Victorin Lurel. Si cette somme est imputée sur le budget de l'outre-mer, ma crainte est que cette imputation se fasse au détriment d'autres dépenses de ce budget. Peut-être eût-il mieux valu l'imputer sur le budget du ministère de l'intérieur, comme c'est le cas pour la Corse. Nous critiquons donc l'attribution de subventions aux compagnies sans contrôle, qui ne permet pas d'en vérifier la répercussion sur les prix pratiqués. Enfin, le fameux passeport-mobilité, destiné principalement aux étudiants, est une déception, et la diminution drastique des crédits correspondants prouve que ce système trop complexe ne fonctionne pas. Dès lors, comment parvenir à une baisse effective des billets d'avion à destination de l'outre-mer ? Nous sommes très nombreux, tant sur les bancs du groupe socialiste, qui a déposé à mon initiative une proposition de loi très précise, que sur ceux de l'UDF et de l'UMP, qui ont déposé une proposition de loi identique à l'initiative de Jean-Christophe Lagarde, à demander une extension du système de continuité territoriale mis en œuvre pour la Corse et l'imposition d'obligations de service public - ou OSP - à la desserte aérienne de l'outre-mer. Sans continuité, l'égalité entre citoyens ne peut être que fictive. Si donc nous plaidons, avec le Collectif des Antillais, Guyanais et Réunionnais, association active et particulièrement déterminée à obtenir des avancées concrètes dans ce domaine, pour l'imposition d'obligations de service public, c'est-à-dire pour l'extension du système qui s'applique à la Corse, ce n'est ni par a priori idéologique ni par laxisme ou aveuglement budgétaires. Le caractère quasi-monopolistique de la desserte aérienne de l'outre-mer est source d'abus, et l'organisation d'un semblant de concurrence par la création d'une troisième compagnie n'ont pas provoqué la baisse de tarifs attendue. Pour nous, socialistes - et, d'ailleurs, pour vous aussi, députés de l'UDF et même de l'UMP qui êtes cosignataires de la proposition de loi de M. Lagarde, il ne s'agit donc aucunement de plaider pour un service public monopolistique, mais pour un interventionnisme public consistant à imposer des OSP dans le secteur aérien, puisque le laisser-faire et la concurrence ne permettent pas de satisfaire nos besoins. Les OSP qui s'appliquent actuellement aux dessertes entre les départements français d'Amérique et la métropole sont légères et ignorent pratiquement la question tarifaire. En effet, ces OSP dites « ouvertes », qui permettent d'imposer des contraintes au service régulier d'une ligne, visent essentiellement à garantir une régularité de la desserte et des offres minimales en termes de capacité. Celles qui s'appliquent à la desserte de la Corse, prévoyant notamment un tarif maximum pour une catégorie donnée et des tarifs spéciaux, sont autrement plus lourdes. L'extension de ce système coûterait cher, mais un cofinancement de telles OSP par l'Etat et l'Europe est tout à fait envisageable, comme l'affirmait M. Barnier, alors commissaire européen chargé de la politique régionale, le 31 octobre 2003 à Fort-de-France, lors de la neuvième conférence des présidents de régions ultra-périphériques. Dès lors, cette solution n'apparaît plus irréaliste. Je tiens à y insister pour mon excellent collègue de Courson :... M. Jean-Pierre Blazy. Encore « excellent » ! M. Victorin Lurel. ...il y a bien là, compte tenu du caractère monopolistique de la desserte de l'outre-mer, une mission de service public.
M. Philippe Edmond-Mariette. Au mépris de l'égalité des chances ! M. Victorin Lurel. Et ce serait inacceptable. Dès lors, la solution fondée sur le lien dogmatique entre concurrence et baisse des prix apparaît inopérante. J'aurai l'occasion, en défendant mon second amendement, de vous proposer d'arriver, par la concertation, à l'élaboration d'OSP dites « fermées » permettant d'imposer notamment des prix plafonds. Devenu président de région, j'ai payé cinq millions de francs une étude - ce n'est pas moi qui l'ai commandée, mais mon prédécesseur - montrant qu'il serait possible d'avoir toute l'année, en lissant les tarifs, des prix-plafonds de 750 euros, dont 150 euros pourraient être pris en charge par l'Etat et par l'Europe. Cette solution n'a pas été étudiée par les pouvoirs publics. Au contraire, monsieur le ministre, vous vous désengagez, et vous enfermez davantage encore l'outre-mer dans son insularité en prétendant que la concurrence fera chuter les prix ! M. Jean-Pierre Blazy. Vous avez raison, monsieur Lurel ! M. Victorin Lurel. Pour tous ces motifs, je ne voterai pas ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Mme la présidente. La parole est à M. Jean Proriol. M. Jean Proriol. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui se définit non seulement comme un texte de complément, s'agissant des précisions apportées à la loi du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France, mais aussi comme un texte de ratification, puisqu'il vise à transposer et à rendre effectivement applicables les dispositions déjà adoptées en 2003 à la future filiale de droit français née de l'accord signé le 16 octobre dernier en vue de constituer le groupe Air France-KLM. Je ne reviendrai pas en détail sur le contexte et les éléments de cet accord, déjà largement exposés par vous-même, monsieur le ministre, ainsi que par notre excellent rapporteur. De même, - je vous rassure -, je ne ferai pas l'exégèse des cinq articles, très techniques, qui rendent juridiquement possible la création de ce qui devrait devenir le premier groupe européen de transport aérien et même le premier transporteur mondial en chiffre d'affaire, devançant ainsi American Airlines. Mon propos est ailleurs. En premier lieu, il s'agit de rétablir quelques vérités sur le processus de privatisation et sur les effets de la libéralisation du marché aérien. Il serait déjà équivoque de prétendre que ce texte ne fonderait pas concrètement la privatisation du groupe Air France au motif, comme chacun le sait, que celle-ci résultera en fait de l'offre publique d'échange lancée par le groupe français depuis le 5 avril dernier sur son concurrent néerlandais KLM, et qui sera close dans quelques jours. Cette OPE fera mécaniquement passer l'Etat français sous la barre fatidique de la détention des 50 % du capital. Mais combien serait plus grande encore l'hypocrisie qui consisterait à affirmer que ce processus aurait débuté avec les deux textes relatifs à Air France examinés sous cette législature. En effet, c'est bien notre majorité qui a ouvert la voie de la privatisation en inscrivant la compagnie sur la liste des entreprises privatisables annexée à la loi du 19 juillet 1993 et dont le décret d'application, passé me semble-t-il presque inaperçu, vient seulement d'être pris le 3 octobre dernier, dix ans plus tard... Même la gauche n'avait pas jugé bon de revenir sur cette loi et, de fait, l'ouverture du capital s'est bien réalisée dès 1999, sous le gouvernement Jospin. Il faut tout autant démonter le mythe des privatisations qui conduiraient au fiasco économique, alors que la bonne gestion de l'Etat actionnaire aboutirait au résultat contraire. Les exemples sont légion qui démentent une telle caricature : ceux-là mêmes qui dénoncent les difficultés financières des compagnies anglo-saxonnes privatisées ne peuvent, en effet, taire le fait que les choix de gestion de la compagnie publique nationale se sont quelquefois révélés hasardeux, notamment durant une partie des années 1990. Bonne gestion des entreprises de l'Etat actionnaire et dérives gestionnaires des groupes privées : une telle présentation ne convainc plus personne. Les chiffres sont éloquents : le groupe Air France a dû bénéficier en 1994 d'une recapitalisation à hauteur de vingt milliards de francs, financée par le budget de l'Etat. La commission d'enquête parlementaire sur la gestion des entreprises publiques, créée afin d'améliorer le système de prise de décision, a d'ailleurs récemment mis en évidence les défaillances de l'Etat actionnaire, qui n'a pas toujours correctement exercé ses prérogatives, ainsi que les erreurs de gestion de certains dirigeants et les entorses aux procédures réglementaires. En outre, les bouleversements en cours du ciel européen imposent des adaptations à la compagnie Air France. Le maintien de l'Etat actionnaire serait un pur anachronisme. Lors de l'examen en commission des finances du projet de loi d'avril 2003, Christian Blanc a rappelé que lors des tractations commerciales avec la compagnie Iberia, en 1997-1998, la détention majoritaire des capitaux publics avait été clairement invoquée comme obstacle à tout partenariat. Entre 1998 et 2003, si un gain de 15 % de parts de marché a été enregistré sur le secteur Amérique, le transport aérien français a néanmoins été en proie à une détérioration de sa compétitivité aboutissant à l'abandon de 1,8% de parts de marché au profit des exploitants étrangers. Selon La Revue de l'aviation civile, l'insuffisance de fonds propres est très préjudiciable en cas de crises graves. L'agonie d'Air Littoral, lâché par les investisseurs, l'a d'ailleurs démontré. De plus, le niveau excessif des charges sociales en France nous interpelle car, comme pour les transports maritimes, il plombe littéralement les compagnies aériennes françaises, incapables de lutter à armes égales avec leurs concurrents étrangers sur certains marchés. Dès lors, la privatisation se révèle un moyen déterminant pour consolider les alliances et maintenir la compétitivité de la compagnie au niveau européen et international. L'alliance Air France-KLM n'est pas un marché de dupes : les bons résultats d'Air France sur le dernier exercice et la situation critique de la compagnie KLM étayent bien plus qu'ils ne mettent en cause l'accord de fusion. Le transporteur français apportera sa solidité et sa capacité en termes de ressources financières et humaines, tandis que KLM permettra au groupe ainsi formé de renforcer sa présence sur le segment de l'Atlantique Nord et lui offrira la possibilité d'être dorénavant présent sur deux des quatre plates-formes que comptent le continent : Paris et Amsterdam. En second lieu, l'examen de ce texte soulève le problème de la définition du rôle de l'Etat dans un secteur concurrentiel. Le délégué général de la Fédération nationale de l'aviation marchande estime que deux segments de marché méritent une plus grande attention : le charter, où des développements de capacités sont possibles, et le transport régional, où la segmentation du marché peut permettre à des opérateurs d'intervenir sur des niches délaissées ou insuffisamment exploitées. C'est en ce sens que les acteurs locaux et nationaux doivent se mobiliser afin de lutter pour que la disponibilité financière et la hiérarchisation de la gestion des dessertes ne conduisent pas à l'abandon de certaines liaisons indispensables à l'aménagement et à la dynamique économique de nos territoires. L'ancien système des monopoles étatiques nationaux est définitivement enterré. Il revient donc aux acteurs impliqués d'inventer un nouveau type de régulation conciliant les impératifs du marché concurrentiel du transport aérien et la répartition des liaisons sur le sol national. Nous approuvons les mesures proposées par le Gouvernement, que ce soit le transfert de certains aéroports d'intérêt régional et local aux collectivités territoriales ou à leurs groupements dans le cadre de la loi de décentralisation, ou encore le statut de sociétés de droit commun à capitaux publics pour les aéroports régionaux d'intérêt national et international. Ces mesures vont dans le bon sens. Mme Odile Saugues. C'est vous qui le dites ! M. Jean Proriol. Elles ne résolvent pas pour autant tous les problèmes. Force est de constater la quasi-absence de liaisons internationales à partir des aéroports régionaux, a contrario de ce qui existe dans d'autres grands Etats européens. De telles liaisons mériteraient d'être développées. Je conclurai en rappelant que notre pays dispose de nombreuses lignes dites « de service public » ou « d'aménagement du territoire », qui reçoivent des aides du fonds de péréquation nationale, le FIATA, financé par une taxe sur les billets d'avion, ainsi que par les collectivités locales. Ces instruments de régulation créés par la loi du 4 février 1995 s'avèrent aujourd'hui partiellement inadaptés, faute notamment d'avoir été suffisamment dotés financièrement, en particulier depuis 1997. Ils méritent d'être largement revus. Comme je l'ai déclaré à plusieurs reprises à cette tribune, une politique volontariste doit être engagée. Elle ne doit en rien se réduire à un enjeu simpliste axé sur la dichotomie entre entreprise publique et privée, mais concerner aussi les relations entre les entreprises publiques. Ainsi, le hub régional auvergnat est indispensable au développement économique de l'Auvergne et du Massif central et les élus de l'Auvergne, dont je fais partie, n'y voient pas de concurrence au grand aéroport de Saint-Exupéry. Nous nous accordons sur la nécessité de mettre en place une approche en termes de liaisons de service public, conformément aux conclusions du rapport d'information sénatorial sur le fonctionnement du FIATA et l'avenir des lignes aériennes régionales présenté en mai 2001. Vos réponses aux questions orales ou écrites posées par les parlementaires vont dans le même sens. La signature de conventions pluripartites s'impose. Elles devraient préciser le cahier des charges imposées aux liaisons concernées en contrepartie de l'aide publique octroyée. Je souhaite profiter de l'examen de ce projet de loi pour vous demander quel est l'état des pistes de réflexion que vous avez déjà évoquées, s'agissant notamment de la réforme du mode de financement et d'attribution du FIATA. Gageons en tout cas que les élus de la majorité seront attentifs aux choix du futur opérateur ainsi consolidé grâce à un accord de fusion qui, n'en doutons pas, sera bénéfique à la compagnie française. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. La parole est à M. Joël Beaugendre, dernier orateur inscrit. M. Joël Beaugendre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mesdames, messieurs, en avril 2003, nous avons été appelés à nous prononcer sur les dispositions nécessaires à l'accompagnement de la privatisation d'Air France, qui ont concerné la protection de la licence d'exploitation, les droits de trafic, la transition entre le statut du personnel et le régime de la négociation collective, ainsi que la représentation des salariés et un système d'échange de salaires contre des actions. Le 16 octobre 2003, les compagnies Air France et KLM concluaient un accord visant à créer un groupe européen de transport aérien. Le projet de loi présenté aujourd'hui vise à faciliter le rapprochement de ces deux sociétés, en optimisant les conditions de transfert de la majorité du capital d'Air France dans le secteur privé. Le transport aérien dépendant des fluctuations économiques, de tels partenariats permettraient de faire face à la concurrence. L'initiative de ce projet intervient dans des conditions favorables pour la compagnie française puisque celle-ci a bien résisté à la crise que traverse la desserte aérienne : elle est l'une des compagnies européennes les plus compétitives. Monsieur le ministre, tout en reconnaissant le bien-fondé de ce projet de loi, qui protège la compagnie, ses salariés et ses droits de trafic, j'ose espérer qu'il ne se révélera pas défavorable à la desserte aérienne d'outre-mer. Aussi me paraît-il essentiel de rappeler à chacun que, en 2003, l'Assemblée nationale a voté la loi de programme pour l'outre-mer qui a eu le courage et l'ambition de donner un contenu concret à la continuité territoriale. Il s'agit encore aujourd'hui de compenser les handicaps liés à l'éloignement et à l'insularité de nos régions, qui pénalisent leur dynamisme économique. La liaison aérienne reste le seul moyen de transport entre la France et ses régions ultramarines. Par conséquent, les conditions d'offre de transport doivent être adaptées en termes de tarifs aux besoins des collectivités d'outre-mer. Les Français ultramarins doivent pouvoir se déplacer facilement. Les principes européens de libre circulation des personnes et des marchandises s'en trouveraient ainsi renforcés. Selon le droit communautaire des obligations de service public, la desserte aérienne de l'outre-mer constitue un service public puisque d'autres types de transport ne permettent nullement d'assurer un service rapide, adéquat et continu. J'espère donc que ce nouveau statut, taillé sur mesure pour Air France, n'annulera nullement sa mission et ses obligations de service public. Celles-ci sont vitales pour l'économie en outre-mer et essentielles pour l'effectivité de la continuité territoriale ; elles ne doivent souffrir ni d'une distorsion entre l'espace européen et l'espace infranational, ni d'une exploitation des liaisons concernées par des avions largement amortis, de plus de vingt ans d'âge, contrairement à ce que j'ai entendu tout à l'heure. Je voudrais rappeler, au terme de cette intervention, que la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire m'a confié une mission visant à étudier la formation des prix concernant la desserte outre-mer. Les renseignements que nous avons recueillis étaient entourés d'une certaine opacité. Cette mission n'est pas terminée, puisque le président Ollier a écrit à Air France pour lui demander des informations complémentaires. Notre travail devrait avoir des prolongements dans les jours à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Victorin Lurel. Bravo ! Vous allez donc voter mon amendement ! Mme la présidente. La discussion générale est close. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je vais m'efforcer de répondre de la manière la plus concise possible à chacun des intervenants. Monsieur Dutoit, vous affirmez que cette loi induit le désengagement de l'Etat. Non, lisez bien le texte, aucun article n'induit un tel désengagement. Ce texte permet l'accord avec KLM, et en aucun cas l'Etat ne vend des actions. Il faut que ce soit clair et net. En revanche, ce texte permet de sauvegarder les intérêts des salariés, ainsi que leur bonne représentation au conseil d'administration. C'est bien ce projet de loi qui le permet. Ne pas le voter, c'est donc ne pas permettre de sauvegarder leurs intérêts, c'est ne pas permettre qu'ils soient représentés au conseil d'administration, c'est aussi leur interdire de faire un échange salaires contre actions. Lorsque le gouvernement précédent avait ouvert le capital d'Air France, il n'avait protégé que les pilotes. Nous, grâce à la loi du 9 avril 2003 que nous vous proposons de modifier, nous permettons à tous les salariés, qu'ils soient modestes ou moins modestes, de devenir actionnaires d'Air France. M. Jean-Pierre Blazy. C'est un argument fallacieux ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. C'est un progrès social considérable que vous refuseriez aux salariés si jamais vous mainteniez la posture que vous avez adoptée en termes si éloquents à la tribune. Enfin, en termes de stratégie de regroupement européen - et la plupart d'entre vous sont pro-européens -,... M. Jean-Pierre Blazy. Pas dans n'importe quelles conditions ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. ...ne pas voter cette loi, ce serait jeter KLM dans les bras de Lufthansa ou de British Airways, qui serait très heureuse de faire l'opération qu'Air France est justement en train de réussir. M. Jean-Pierre Blazy. Dans quel état se trouve KLM ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Vous voyez donc les enjeux très importants de cette loi et les conséquences néfastes qui s'ensuivraient si l'Assemblée adoptait votre position. Monsieur Le Guen, je vous remercie pour votre soutien et votre confiance. Vous avez beaucoup insisté sur les préoccupations des filiales d'Air France. Nous pouvons, c'est vrai, saluer à cette occasion la grande qualité du dialogue entre les partenaires sociaux qui a permis, vous le savez, d'aboutir à un premier protocole afin que chacun trouve sa place au sein du nouveau grand ensemble Air France-KLM. Madame Saugues, non, la compagnie aérienne Air France ne disparaît pas ! Il y a une société holding et il y a une compagnie aérienne filiale qui s'appelle Air France. Or, vous avez dit - relisez bien votre texte - que la compagnie Air France « disparaissait ». Eh bien, je vous rassure, ce n'est pas le cas. Puisque vous avez dressé un tableau social apocalyptique, je vous répète que ce texte représente un vrai progrès social en même temps qu'il ouvre des perspectives de développement par les capacités d'investissement qu'il permet de voir se profiler. Et l'actionnariat pour tous est un vrai progrès social. Vous avez fait une incidente en évoquant le troisième aéroport. Quand je suis arrivé à la tête de ce ministère, je suis bien placé pour le savoir, il n'y avait pas de projet de troisième aéroport. M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas vrai ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Non seulement il n'y avait pas de projet, mais il n'y avait même pas de financement pour toutes les promesses qui avaient été faites au cours des cinq ans s'agissant des infrastructures. M. Bernard Accoyer. C'est une habitude, chez les socialistes ! C'est même un principe de fonctionnement socialiste, monsieur le ministre ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. C'est nous qui, lors du CIADT du 18 décembre 2003, avons annoncé tous les projets d'infrastructure nouveaux nécessaires à la France et qui avons mis en place un système de financement relativement simple : les dividendes autoroutiers vont financer les infrastructures. Vous, vous nous avez laissé une ardoise de 15 milliards d'euros, excusez du peu ! M. Bernard Accoyer. Une de plus ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur Lurel, vous avez fait un raisonnement auquel je ne peux absolument rien répondre. En schématisant un peu, j'en conviens, votre discours consiste à dire : la desserte de l'outre-mer est inacceptable - et on peut en effet juger que les prix sont élevés - et puisqu'elle est inacceptable, il ne faut pas changer le statut d'Air France. Je ne comprends pas cette logique-là ! M. Victorin Lurel. Ce n'est pas ce que j'ai dit ! Je vous ai reproché de ne pas réglementer la concurrence pour faire baisser les prix ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Mais vous voyez bien que le statut actuel d'Air France ne permet pas, d'après vos propres dires, une desserte satisfaisante de l'outre-mer. Et vous pouvez estimer, effectivement, que les prix sont chers. Sur la nécessaire évolution du capital d'Air France, je ne vais pas me répéter. Monsieur Dutoit, madame Saugues, je ne peux pas vous laisser dire que la sécurité sera mise en cause. C'est grave, ce que vous dites ! M. Bernard Accoyer. C'est fou ! C'est incroyable ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. M. de Courson a dit sur ce point ce qu'il fallait dire. Laisser entendre qu'à travers ce changement de statut, la sécurité serait fragilisée, c'est grave. M. Bernard Accoyer. C'est anti-patriotique ! Mme Odile Saugues. Vous caricaturez mes propos ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Madame Saugues, imaginez qu'un client d'Air France vous entende. Que peut-il penser ? Mme Saugues, qui est une femme responsable, qui est une élue du peuple, me dit qu'il y aura moins de sécurité le 3 ou le 4 mai prochain si Air France change de statut. Non, soyons responsables, madame Saugues ! Mme Odile Saugues. Vous caricaturez ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Non ! Vous avez parlé de sécurité, et je trouve que ce n'est pas bien. Je ne peux pas vous laisser dire que la sécurité sera mise en cause. Les entreprises françaises, que leurs actionnaires soient privés ou publics, font l'objet de nombreux contrôles - les contrôles OACI et SAFA - et elles ont toutes des comportements tout à fait satisfaisants. Pour ce qui est de la réduction des coûts, il s'agit d'un objectif sain, dont bénéficie le client, comme le souligne d'ailleurs votre collègue Lurel, qui trouve que les coûts d'Air France seraient supérieurs de 50 % à ceux de Corsair. Il y a donc des efforts à faire. La maîtrise des coûts recherchée par Air France depuis des années est un élément essentiel pour résister à la concurrence, ce qui est également important du point de vue social car cela garantit des emplois, tout en améliorant l'offre aux voyageurs. Je répondrai aux autres aspects de votre intervention, monsieur Lurel, à l'occasion de la discussion de vos amendements. Monsieur Gantier, je vous remercie de la confiance que vous mettez dans ce très beau projet. Vous avez souligné l'utilité et l'importance d'une véritable Europe du transport aérien. A cet égard, le marché intracommunautaire est une réalité depuis le 1er janvier 2003, mais il reste du chemin à faire vis-à-vis des pays tiers. Les choses évoluent progressivement et de façon satisfaisante. La négociation est engagée avec les Etats-Unis : elle va contribuer à construire l'Europe des transports. Nous avons d'ailleurs donné mandat à Mme la commissaire européenne pour négocier au nom des Etats membres. Cela prend du temps, mais nous devons persévérer. Quoi qu'il en soit, la loi que vous soutenez est l'une des occasions de franchir ces obstacles. Monsieur Proriol, vous m'avez interrogé sur le FIATA. Pour l'aménagement du territoire, le budget 2003 est de 16 millions d'euros et de 28 millions d'euros en 2004. C'est un effort sans précédent pour offrir du service public sur certaines dessertes. S'agissant du hub de Clermont-Ferrand, il est pérennisé. Air France s'est engagé à maintenir des liaisons avec onze villes françaises et trois capitales européennes. Le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien va évoluer pour mieux attribuer les aides en fonction de la disponibilité de moyens d'acheminement alternatifs. Un décret sera signé très prochainement. Monsieur Beaugendre, il est évident que l'accord KLM ne remet nullement en cause la desserte de l'outre-mer. Je comprends que vous jugiez excessif le coût de cette desserte. Et je suivrai bien sûr très attentivement les conclusions de la mission à laquelle vous participez. Nous aurons certainement des éléments qui nous permettront de progresser et d'apporter une attention encore plus soutenue à la desserte de l'outre-mer. Je crois avoir répondu à tous les orateurs. J'apporterai d'autres éléments de réponse au cours de la discussion des articles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement. Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 13, portant article additionnel avant l'article 1er. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le soutenir. M. Victorin Lurel. Comme j'ai eu l'occasion de le dire dans la discussion générale, cet amendement tend à demander à la compagnie Air France la remise de sa comptabilité analytique par réseau et par ligne. On nous a opposé - et on a opposé à notre collègue Beaugendre - l'argument du secret commercial. Apparemment, c'est pire qu'un secret défense. C'est pourquoi le président Ollier n'a pas hésité à demander la création d'une commission d'enquête, pour ne pas se voir opposer ce fameux secret commercial. S'agissant d'Air France et de Corsair, nous voulons connaître la formation des prix. Notre excellent collègue Charles-Amédée de Courson nous dit que les prix n'ont rien à voir avec les coûts. Je suis peut-être dépassé, je suis peut-être archaïque, mais enfin j'ai appris que les coûts pouvaient conditionner la formation des prix, et que la technique du yield management, qui consiste à ne même pas fixer au coût marginal le prix des billets, permettait à Air France de dégager des marges considérables. On sait que 350 euros à 400 euros dégagent une marge considérable pour Air France comme pour les autres compagnies. Je ne peux pas comprendre qu'un parlementaire chargé d'une mission d'information se voie interdire l'accès à la comptabilité analytique d'Air France. Plus étonnant encore, monsieur le ministre, vous-même avez refusé de fournir le rapport de la direction générale de la concurrence et de la consommation, où il est fait état d'abus de position dominante. M. Franck Gilard. C'est incroyable ! M. Victorin Lurel. Le conseil de la concurrence devrait pour le moins être saisi. Au-delà des a priori idéologiques et des positions de principe sur le secteur public et les missions de service public, telles que les ont défendues mes collègues du groupe socialiste, il est certain que la privatisation d'Air France aura des effets collatéraux dévastateurs pour l'outre-mer. Le fait est aujourd'hui que la concurrence ne permet pas de peser sur les prix. A la faveur de votre ambition - que l'on peut comprendre, et même appuyer parfois - de créer un champion national, le mastodonte qui naîtra demain pourra à tout moment tuer ses concurrents. Nous en savons déjà quelque chose : la troisième compagnie, Air Caraïbes, récemment créée, connaît déjà quelques difficultés et mériterait d'être aidée. Autrement dit, la concurrence non réglementée ne permet pas de diminuer les prix. C'est pourquoi il faut connaître leur processus de formation, et donc avoir accès à la comptabilité analytique d'Air France, comme je vous le propose dans mon amendement. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. Je suis un peu gêné : notre collègue vient en fait de défendre son amendement n° 12 alors que nous en étions à l'amendement n° 13 ! Accepteriez-vous, madame la présidente, que nous discutions en même temps des amendements nos 12 et 13 ? Mme la présidente. Il vaut mieux, en effet, d'autant que notre collègue, à ce que j'ai cru comprendre, a en fait défendu ses deux amendements. M. Victorin Lurel. Non, je n'ai défendu, par erreur, que mon amendement n° 12. M. Charles de Courson, rapporteur. Absolument, et c'est bien ce qui m'ennuie. Mme la présidente. Dans ce cas, inversons... M. Charles de Courson, rapporteur. Je vais donc répondre sur amendement n° 12. Notre collègue voudrait subordonner l'entrée en vigueur de la loi à la transmission au Gouvernement de la comptabilité analytique d'Air France. C'est tout à fait inconstitutionnel : la loi entre en vigueur sans conditions. C'est au surplus contraire aux règles de la concurrence : Air France, société commerciale, n'a pas à dévoiler publiquement ses secrets industriels. Nous ne pouvons donc accepter un tel amendement. Cela dit, monsieur Lurel, votre but véritable n'est pas là : en fait, vous voudriez essayer de comprendre les tarifications d'Air France. Croyez-en mon expérience de magistrat qui, dans une autre vie, a eu l'occasion de contrôler Air France : quand bien même vous auriez sa comptabilité analytique, vous ne pourriez pas en tirer grand-chose... Mme la présidente. Je vais appeler l'amendement n° 13 avant de demander l'avis du Gouvernement sur les deux amendements. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Très bien. Nous gagnerons ainsi du temps. Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel. M. Victorin Lurel. Effectivement, nous irons un peu plus vite et je vous en remercie, madame la présidente. La loi du 9 avril 2003 a abrogé, par son article 6, la possibilité d'imposer des obligations de service public à la société Air France. Mon amendement n° 13 a pour objet de réintroduire cette possibilité dans le cadre de la réglementation européenne. L'article 4-1 du règlement (CEE) 2408/92 prévoit en effet qu'un Etat peut imposer des obligations de service public vers des aéroports de périphérie ou de zones de développement si ces liaisons sont considérées comme vitales pour le développement économique, dans le cas où le seul intérêt commercial des transporteurs ne les pousserait pas à assurer un service adéquat. Or tel est bien le cas : le seul intérêt commercial d'Air France, Corsair ou qui sais-je encore ne prend pas compte la nécessité vitale de notre développement économique et va même jusqu'à compromettre l'effectivité de la liberté d'aller et venir partout sur le territoire de la République. On peut prétendre qu'il n'y a pas de mission de service public et laisser faire entre Paris et Marseille ; mais nous, comme le disait notre collègue Beaugendre, nous n'avons qu'une seule possibilité : prendre l'avion. Or il nous arrive de devoir débourser jusqu'à 16 000, voire 20 000 francs - c'est plus parlant en francs - pour un billet. J'ai moi-même été victime de ces pratiques proprement ahurissantes. On peut soutenir, par idéologie - j'ai parlé de théologie - et fidélité au dogme libéral, que la concurrence fait baisser les prix. Encore faut-il qu'elle soit encadrée. Et le seul moyen est d'imposer aux compagnies des obligations de service public, autrement dit une contrainte qui permettrait aux usagers, aux 2 100 000 ultramarins comme aux millions de nos compatriotes vivant sur le territoire métropolitain, de voyager non pas gratuitement, mais à un prix raisonnable. Non seulement ce n'est pas le cas aujourd'hui, mais je prétends que la fusion d'Air France et de KLM, quand bien même elle aboutira, certes, à constituer un bel outil, créera des dommages collatéraux considérables pour l'outre-mer, car elle contribuera à renforcer un monopole ; et vous connaissez, en théorie comme en pratique, les effets du monopole. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 13 ? M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement est parfaitement inutile. Pourquoi ? D'abord parce que le projet ne remet nullement en cause les obligations de service public. Ajoutons qu'il est satisfait par la réglementation communautaire... M. Victorin Lurel. Cela ne concerne que très peu la tarification ! M. Charles de Courson, rapporteur. Pour remplir une obligation de service public, on est désormais tenu de faire appel à la concurrence, par le biais de délégations de service public. M. Victorin Lurel. Mais la région n'est pas compétente pour cela ! M. Charles de Courson, rapporteur. Votre amendement, mon cher collègue, est totalement inutile. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Vous avez raison, monsieur Lurel : la fusion d'Air France et de KLM donnera un bel outil. Mais vous ne pouvez pas dire qu'elle desservira l'outre-mer. Plus une entreprise est performante, plus elle peut faire des prix. Ce qui manque à l'outre-mer, c'est la concurrence, seule capable de les faire baisser. M. Philippe Edmond-Mariette. Non ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. La fusion ne renforce pas le monopole. Ce pourrait être le cas si KLM desservait aujourd'hui les Antilles aux côtés d'Air France, ce qui conduirait à n'avoir plus qu'une compagnie au lieu de deux. Mais, à ma connaissance, KLM ne dessert pas Fort-de-France... Quant aux obligations de service public, régies par le droit communautaire, elles ne s'imposent pas à une entreprise, mais à une ligne. Libre aux compagnies de desservir ou non la ligne en question, sachant qu'elle est grevée de certaines contraintes. Ajoutons que la création, actuellement à l'examen, d'un observatoire sera de nature à garantir la transparence que vous souhaitez dans l'amendement n° 12. La desserte aérienne des départements d'outre-mer est essentielle, j'en suis d'accord. Vous parlez de concertation. Mais pourquoi passer par la loi pour l'imposer ? Et pourquoi se limiter à Air France ? N'oublions pas que ce projet de loi ne concerne qu'Air France, dans la perspective notamment de sa fusion avec KLM. Votre amendement n° 13 ne répondrait en aucun cas avec votre souci, au demeurant parfaitement légitime. Beaucoup de parlementaires réclament le droit au choix et je suis de leur avis : je suis contre l'incitation au monopole sur l'outre-mer. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement donne un avis défavorable aux amendements nos 13 et 12. Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Edmond-Mariette. M. Philippe Edmond-Mariette. Madame la présidente, j'aimerais proposer un sous-amendement à l'amendement n° 13. Est-ce possible ? Mme la présidente. Non, pas maintenant. M. Jean-Pierre Blazy. Pourquoi ? Mme la présidente. Il aurait fallu le présenter par écrit. M. Philippe Edmond-Mariette. Je vous le présente par écrit, madame la présidente... Mme la présidente. Mais je n'ai rien d'écrit. M. Philippe Edmond-Mariette. Après avoir entendu la réponse de M. Lurel à l'observation de M. de Courson, j'aurais proposé d'ajouter, après les mots : « services aériens réguliers intracommunautaires », les mots : « notamment avec l'outre-mer », et, après les mots : « la société Air France », de rédiger ainsi la fin de l'amendement n° 13 : « sera rendue obligatoire, le cas échéant, dans le cadre d'une OSP. » M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Cela n'a rien à voir avec le texte ! Mme la présidente. Ce n'est pas possible, monsieur Edmond-Mariette. Cela reviendrait en fait à totalement modifier l'amendement. La parole est à M. Victorin Lurel. M. Victorin Lurel. Je ne peux pas admettre ce que vient de dire M. le ministre. Je prétends ici, pour le vivre avec nombre d'ultramarins, que la concurrence n'a jamais fait baisser les prix. C'est précisément lorsqu'il y avait monopole et contrôle de l'Etat que les tarifs aériens étaient raisonnables. Depuis que tout a été dérégulé, ils ont explosé. Je répète, comme l'a dit tout à l'heure mon collègue Beaugendre, que la privatisation d'Air France et son rapprochement avec KLM ne doivent pas se faire au détriment de l'outre-mer. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Nous sommes bien d'accord. M. Victorin Lurel. Je soutiens que le phénomène d'explosion des prix dont nous sommes victimes depuis quelque temps a toutes chances de se poursuivre. Air France, de fait de sa puissance, mais également, force est de l'admettre, de la qualité de ses prestations,... M. Philippe Edmond-Mariette. A étouffé la concurrence ! M. Victorin Lurel. ...a toujours su étouffer toute concurrence. Air France est devenue une référence obligée et c'est elle qui fixe en fait les prix. M. Jean-Pierre Blazy. Parfaitement ! Il faut regarder les choses en face ! M. Victorin Lurel. Vous nous accusez d'idéologie, d'être contre le marché et contre la privatisation. Nous disons seulement que cette privatisation n'aboutira qu'à renforcer un monopole de fait. M. Charles de Courson, rapporteur. Cela ne changera rien ! M. Victorin Lurel. Il aura certes une autre forme juridique, mais il continuera d'exister et nos ressortissants paieront toujours des prix exorbitants pour aller chez eux. Je vous donne rendez-vous, monsieur le ministre, dans quelque temps pour faire honnêtement le bilan de cette opération. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Très bien ! Je souscris à cette idée. M. Jean-Pierre Blazy. Nous serons redevenus la majorité ! Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 13. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 12. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 14. La parole est à Mme Odile Saugues, pour le soutenir. Mme Odile Saugues. L'amendement n° 14 vise à permettre à l'Etat d'intervenir lorsque les intérêts nationaux sont en jeu ou lorsque le bon accomplissement des missions d'intérêt général l'exigent, à l'exemple du mécanisme de golden share introduit par le gouvernement néerlandais et qui lui donne la possibilité de reprendre le contrôle de sa compagnie KLM s'il en est besoin. Ce dispositif est beaucoup plus large que celui proposé par le gouvernement français. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement, car comme les précédents, il n'a pas été déposé dans les délais réglementaires. A titre personnel, j'y suis défavorable car il est inutile, cela pour deux raisons. D'une part, la loi du 9 avril 2003 a créé un mécanisme de cession forcée des tiers mis en œuvre par la compagnie ou sa holding afin de protéger la licence et les droits de trafic du côté français. D'autre part, l'argument du parallélisme entre Air France et KLM est nul et non avenu car le pourcentage du capital de KLM qui est détenu par l'Etat néerlandais est très minoritaire. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il y a une golden share. Mais l'accord limite celle-ci à trois ans, renouvelable trois fois un an. C'est-à-dire qu'au bout de trois ans au minimum et de six ans au maximum, elle disparaîtra. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Avis défavorable. Cet amendement est incompatible avec l'accord. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 14. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Sur l'article 1er, je suis saisie d'un amendement n° 1. La parole est M. le rapporteur, pour le soutenir. M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement affine la rédaction du projet de loi, s'agissant de la définition des holdings pouvant bénéficier de la procédure de cession forcée de titres. Il précise ainsi que la détention du capital d'une filiale par une holding peut être soit directe, soit indirecte. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Avis favorable parce que cet amendement précise bien le champ d'application du dispositif de cession forcée. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1. (L'amendement est adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 2. La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir. M. Charles de Courson, rapporteur. C'est un amendement de conséquence. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Avis favorable. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 2. (L'amendement est adopté.) Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés. (L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.) Mme la présidente. Sur l'article 2, je suis saisie d'un amendement n° 8. La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le soutenir. M. Frédéric Dutoit. Le présent amendement vise à clarifier la rédaction de l'article 2 de ce projet de loi. Des amendements analogues seront, d'ailleurs, présentés aux articles 3, 4 et 5, qui appellent eux aussi des éclaircissements. Il s'agit de lever une ambiguïté née de la contradiction entre l'exposé des motifs et la lettre du projet qui nous est soumis. Cette ambiguïté nourrit nombre d'inquiétudes chez les 70 000 salariés du groupe Air France. Ces inquiétudes relayées par les représentants du personnel sont d'autant plus vivaces que les plans de réduction des coûts annoncés par Jean-Cyril Spinetta succèdent aux plans de réduction des coûts et que la menace de plans sociaux plane à la veille de la fusion avec KLM, entreprise lourdement déficitaire. En outre, ces inquiétudes sont renforcées par l'impact psychologique de l'annonce selon laquelle les 70 000 salariés du groupe ne travailleront plus pour la société Air France, appelée à devenir une holding, mais pour une nouvelle compagnie de droit français dont on ne connaît même pas encore le nom ! Alors, dans ce contexte particulièrement tendu, quelle est l'ambiguïté que nous vous demandons de lever ? Dans l'exposé des motifs, il est écrit que les accords signés le 16 octobre 2003 entre Air France et KLM « prévoient que le groupe "Air France-KLM" issu du rapprochement entre les deux compagnies sera composé d'une société holding cotée en bourse, l'actuelle société Air France, et de deux filiales compagnies aériennes, KLM et une nouvelle société de droit français à laquelle sera apporté l'ensemble des activités et du personnel de l'actuelle société Air France ». Il importe de mettre en parallèle cet extrait de l'exposé des motifs avec un membre de phrase que l'on retrouve dans le projet de loi. Je le cite : « en cas d'opération donnant lieu à l'apport de tout ou partie de l'actif de la société Air France à une autre société, titulaire d'une licence d'exploitation de transporteur aérien. » D'un côté, dans l'exposé des motifs, on lit que l'ensemble des activités et du personnel d'Air France sera apporté à la nouvelle compagnie. De l'autre, dans le projet de loi, il est fait référence à l'apport de « tout ou partie » de l'actif d'Air France à la nouvelle compagnie. L'ambiguïté n'est-elle pas manifeste ? En effet, « l'ensemble » et « tout ou partie » ce n'est pas la même chose. Il ne faut pas être un éminent linguiste pour s'en rendre compte ! Aussi que faut-il conclure de ce souci délibéré d'instiller la confusion dans l'esprit des salariés et de leurs représentants ? Doit-on comprendre que des pans entiers de l'activité de l'actuelle société Air France, par exemple l'informatique, le fret, la maintenance, la distribution, la formation, la piste, le passage, etc resteraient à l'extérieur de la nouvelle société via la naissance de filiales ou le recours à des sous-traitants ? Les salariés de ces éventuelles sociétés filiales ou sous-traitantes perdraient-ils le bénéfice de ce qu'il est convenu d'appeler les « droits Air France » ? La contradiction manifeste entre l'exposé des motifs et la rédaction proposée dans le projet de loi suscite nombre d'interrogations. Interrogations renforcées par les déclarations du rapporteur en commission des finances. M. de Courson a, en effet, donné à penser que la structure du groupe « Air France-KLM » était appelée à évoluer rapidement lorsqu'il a déclaré qu'il s'agit « d'éviter d'être amené à légiférer une troisième fois si Air France, filialisée, devait par la suite se sous-filialiser ». Cette référence à une éventuelle sous-filialisation a fait l'effet d'une bombe ! Mme Odile Saugues. Tout à fait ! M. Frédéric Dutoit. La privatisation, contre laquelle nous continuons à nous élever, est déjà suffisamment grave et préoccupante pour le personnel sommé de s'adapter sans broncher, qu'il n'est pas possible de jouer avec les mots ... et les nerfs de 70 000 salariés. Une clarification s'impose, monsieur le ministre. Vous leur devez des réponses. Et nos amendements vous invitent à préciser les choses. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission? M. Charles de Courson, rapporteur. Mon cher collègue, que se passerait-il si nous adoptions votre amendement, qui au demeurant n'a pas été examiné par la commission ? Nous aurions une société holding qui posséderait 100 % de la filiale Air France, laquelle posséderait une très forte majorité de KLM. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Oui. M. Charles de Courson, rapporteur. Il y a deux types d'actifs au niveau de la holding, les actifs physiques et les actifs financiers. Supprimer les mots « tout ou partie », serait contraire à l'accord passé entre KLM et Air France. Votre amendement consiste ni plus ni moins à annuler l'accord. La vraie question n'est pas celle-ci, mais celle du statut de la future holding : sera-t-elle purement financière ou pourra-t-elle avoir d'autres activités ? Dans le schéma actuel, la holding est purement financière, mais le texte n'interdirait pas, comme je l'ai indiqué en commission, d'aller vers une autre organisation si les responsables du groupe KLM Air France le souhaitaient. Mais ce n'est pas ce qui a été signé dans l'accord. J'ajoute, monsieur Dutoit, qu'il faut maintenir les actifs financiers dans la holding. Voilà une raison supplémentaire de ne pas voter votre amendement. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Je suis tout à fait d'accord sur ce que vient de dire M. de Courson. Vous avez une société holding et deux compagnies filiales, Air France et KLM. Si vous substituez aux mots « tout ou partie » les mots « l'ensemble », c'est tout KLM qui devient filiale de la filiale, c'est-à-dire une sous-filiale. Ce n'est pas ce qui figure dans l'accord et cela le mettrait en péril. Par ailleurs, je vous rappelle que l'expression utilisée n'est qu'une traduction littérale du support juridique, l'article L. 236-22 du code du commerce. C'est sur la base de cet article que sera opéré le transfert de l'ensemble des actifs et des passifs de l'actuelle société Air France à la nouvelle société opérationnelle. Air France s'y est engagée afin de mettre en place la structure de gouvernance du nouveau groupe : une holding, deux compagnies. J'indique aussi que l'amendement proposé irait à l'encontre de l'objectif visé par Air France car il ne permettrait pas à la compagnie de mettre en place la gouvernance retenue dans le cadre des accords avec KLM. Selon vous, monsieur Dutoit, Air France devrait apporter à la nouvelle filiale opérationnelle Air France tous ses actifs, y compris les actions qu'elle possède au capital de KLM. KLM deviendrait alors une sous-filiale de la nouvelle filiale opérationnelle Air France. Tel n'est évidemment pas le but recherché. M. Jacques Le Guen. Très bien ! Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 8. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2. (L'article 2 est adopté.) Mme la présidente. Sur l'article 3, je suis saisie d'un amendement n° 3. La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir. M. Charles de Courson, rapporteur. Amendement de simplification rédactionnelle. Il n'est pas de bonne technique législative d'insérer dans une loi déjà publiée une disposition non codifiée. Le premier alinéa de l'article 3 du présent projet de loi constitue une mesure nouvelle qui n'a pas sa place dans une loi antérieure régissant une autre situation. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Tout ce qui simplifie sans dénaturer recueille l'avis favorable du Gouvernement ! Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 3. (L'amendement est adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 9. La parole est à M. Frédéric Dutoit. M. Frédéric Dutoit. Cet amendement a déjà été défendu. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission? M. Charles de Courson, rapporteur. Défavorable. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Défavorable. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 9. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 17. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir. M. Jean-Pierre Blazy. Puisque les salariés d'Air France vont perdre à terme le bénéfice du leur statut particulier, il serait inéquitable que les salariés pendant les deux ans prévus pour négocier les nouveaux textes contractuels, soient également privés des quelques rares dispositions plus favorables déjà applicables dans les autres entreprises du secteur, prévues à la convention collective nationale de branche. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission? M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'émets un avis défavorable. Notre collègue a déjà déposé cet amendement il y a un an et celui-ci avait été rejeté. Mme Odile Saugues. Ce n'est pas un argument. M. Jean-Pierre Blazy. La majorité aurait pu évoluer sur ce sujet... M. Charles de Courson, rapporteur. Par ailleurs, et surtout, la convention collective de branche, par définition, ne s'applique pas actuellement à Air France, qui est une entreprise sous statut. La disparition du statut, dans deux ans, et son remplacement par une convention collective d'entreprise sera évidemment plus favorable que la convention collective de branche. Sinon, ce n'est même pas la peine de la négocier ! Faites confiance aux partenaires sociaux, qui sont majeurs et responsables ! Une partie des syndicats a signé un accord sur la base duquel ils vont négocier une nouvelle convention. Laissez-les faire ! Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Je rappelle que le code du travail, article L. 134-1, ne permet pas l'application de conventions collectives aux salariés soumis à un statut réglementaire que leur entreprise soit publique ou privée. En outre, je m'étonne, monsieur Blazy, que vous ne fassiez pas confiance aux partenaires sociaux, c'est démagogique ! Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 17. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 4. La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir. M. Charles de Courson, rapporteur. Il s'agit aussi d'un amendement de conséquence. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Favorable. Mme la présidente. Sur cet amendement n° 4, je suis saisie d'un sous-amendement n° 15 rectifié. La parole est à Mme Odile Saugues, pour le soutenir. Mme Odile Saugues. Il s'agit de donner un peu plus de souplesse et de temps aux représentants des salariés pour négocier leur nouveau statut, soit six ans au lieu de deux. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ? M. Charles de Courson, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission. À titre personnel, je n'y suis pas favorable. On a réduit de neuf ans à six ans le mandat des sénateurs. M. Jean-Pierre Blazy. Je ne vois pas le rapport. M. Charles de Courson, rapporteur. Faudrait-il donner le temps du mandat de sénateur pour cette négociation ? (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) S'ils n'ont pas obtenu de résultats en six ans, ils n'en auront jamais. Plus sérieusement, l'an dernier, je vous ai proposé un amendement que vous avez adopté, mes chers collègues, permettant d'engager immédiatement les négociations sociales dans la perspective de la privatisation. Comme je le rappelais tout à l'heure, c'est sur cette base qu'un accord relatif à la méthode de négociation a été adopté par plusieurs syndicats, en janvier dernier. Tout cela va dans le bon sens. Les représentants syndicaux que j'ai rencontrés m'ont semblé prêts à négocier. Je propose donc de repousser ce sous-amendement. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Madame Saugues, le délai de deux ans est déjà supérieur au droit commun qui s'applique lorsqu'un accord est dénoncé. Ensuite, prévoir six ans est une nouvelle marque de défiance à l'égard des partenaires sociaux. Enfin, je vous rappelle que c'est dans les périodes d'incertitude que les salariés sont le plus mal à l'aise. Pourquoi prolonger, de façon cruelle, cette période d'incertitude ? Le Gouvernement est donc très défavorable au sous-amendement. Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 15 rectifié. (Le sous-amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 4. (L'amendement est adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 5. La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir. M. Charles de Courson. Il s'agit d'un amendement de précision. Mme la présidente. Quel est l'avis du gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Favorable. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 5. (L'amendement est adopté.) Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié par l'amendement n° 5. (L'article 3, ainsi modifié, est adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 6 rectifié portant article additionnel après l'article 3. La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir. M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement est très important et fait suite à de longues discussions avec les représentants du personnel navigant commercial et des syndicats. En l'état actuel du droit, le passage d'un régime statutaire à une convention collective de droit commun supprimerait la limite d'âge d'activité du personnel navigant commercial, qui est actuellement fixée à cinquante-cinq ans. Cette limite n'est d'ailleurs pas la même partout en Europe : elle peut être, par exemple, de cinquante-six ou cinquante-huit ans. L'amendement vous propose de fixer une limite d'âge d'activité par décret. Cela ne veut pas dire que le personnel doit prendre sa retraite à cet âge, même si environ 90 % le font, les autres, certains parce qu'ils ont commencé assez tard, choisissant de continuer leur carrière dans une autre activité. Le second objet de l'amendement est de régler, dans son troisième paragraphe, un problème d'interprétation jurisprudentielle concernant l'indemnisation des personnes qui partent à cinquante-cinq ans parce qu'elles n'acceptent pas une reconversion ou de continuer leur carrière dans une autre activité. Certains tribunaux considéraient leur départ comme un licenciement et d'autres comme une cessation d'activité ne relevant donc pas du même régime d'indemnisation. L'amendement, pour clarifier les choses, fixe le montant de l'indemnité de départ, sachant toutefois qu'il ne s'agit que de l'indemnité minimale, qui représente environ un dixième de l'indemnité conventionnelle. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement qui permet de garantir la continuité du statut pour le personnel de cabine. Le décret qui sera pris dès la promulgation de la loi s'inscrira dans la stricte continuité du statut, avec la même durée d'activité. Je remercie M. de Courson d'avoir déposé cet amendement. Mme la présidente. Sur l'amendement n° 6 rectifié, je suis saisie d'un sous-amendement n° 7. La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le soutenir. M. Frédéric Dutoit. Après trente à trente-cinq années d'activité dans un avion, les hôtesses et stewards conservent-ils les mêmes réflexes ? Compte tenu de la pénibilité du travail, de ses exigences, les personnels navigants commerciaux et leurs représentants, forts de leur expérience, répondent par la négative. La sécurité aérienne n'aurait rien à gagner à un passage au dispositif général issu de la récente loi Fillon qui ferait augmenter mécaniquement de façon significative l'âge moyen du personnel navigant chargé notamment de l'organisation des opérations d'évacuation d'urgence. Dans ces conditions, l'Assemblée serait particulièrement avisée d'adopter ce sous-amendement. La loi devrait ainsi préciser que le personnel naviguant de l'aéronautique ne peut exercer aucune activité de pilote, copilote ou de membre du personnel de cabine dans le transport aérien public au-delà d'un âge limite fixé à soixante ans pour le personnel navigant de la section A et à cinquante-cinq ans pour celui de la section D du registre prévu à l'article L. 421-3 du code de l'aviation civile. Cela ne signifie pas, bien entendu, que la vie professionnelle de ces salariés doive s'achever brutalement une fois la date butoir atteinte. Ces salariés ont droit à une formation et à un reclassement dans un emploi au sol. L'article L. 421-9 du code de l'aviation civile ne vise aujourd'hui que le personnel naviguant de la section A. L'amendement n° 6 présenté par M. de Courson au nom de la commission des finances entend modifier cet article pour intégrer des dispositions relatives au personnel naviguant de la section D. Il ne fait pourtant pas l'unanimité car il renvoie à un décret pour fixer la limite d'âge. À nos yeux, l'argument selon lequel ce n'est pas à la loi mais au pouvoir réglementaire de fixer la limite d'âge n'est pas sérieux. Par exemple, le code des pensions civiles et militaires contient des dispositions législatives relatives aux limites d'âge. Le législateur peut et doit prendre toutes ses responsabilités. Le sous-amendement n° 7 tend donc à ce que l'âge limite soit déterminé par la loi, au terme d'un débat démocratique, et non par décret, dans le secret d'un cabinet ministériel. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. La commission a repoussé ce sous-amendement. Le problème est double. Si les limites d'âge de départ à la retraite sont du domaine législatif, les limites d'âge d'activité appartiennent au domaine réglementaire. L'Assemblée vient de voter l'amendement qui résout le problème du personnel navigant commercial. Je n'ai pas déposé d'amendement relatif au personnel navigant technique parce que, si, en France, sa limite d'âge d'activité est fixée à soixante ans, celle-ci varie selon les pays. Cela crée d'ailleurs une situation extravagante : un avion ne peut pas survoler la France, où la limite est fixée à soixante ans, si son pilote a plus de soixante ans. Mme Odile Saugues. Ce n'est pas contrôlé ! M. Charles de Courson, rapporteur. Si, c'est tout à fait contrôlable ! Les personnels qui sont issus de l'École nationale de l'aviation civile commencent leur carrière aux alentours de vingt-cinq ans. À soixante ans, après seulement trente-cinq ans de carrière, ils n'ont pas une retraite pleine. Une partie du personnel navigant technique demande donc de relever cette limite, mais les syndicats préfèrent la laisser inchangée. En outre, une réflexion est en cours au sein de l'OACI. Celle-ci recommande de fixer la limite d'âge à soixante ans pour les pilotes - pour les copilotes, c'est différent - mais on se demande si elle ne doit pas être relevée. Je demande le rejet du sous-amendement n° 7 car je pense qu'il est trop tôt pour statuer sur la question. J'ajoute qu'un gouvernement, quel qu'il soit, pourrait parfaitement demander l'application de l'article 37 de la Constitution et intégrer cette disposition dans le domaine réglementaire. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Avis défavorable au sous-amendement. Fixer l'âge limite d'activité en cabinet par décret plutôt que par la loi facilitera le dialogue social. En outre, il ne revient pas à la loi mais au pouvoir réglementaire de fixer cet âge limite d'activité. Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 7. (Le sous-amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié. (L'amendement est adopté.) Mme la présidente. Les amendements nos 18 de M. Idiart et 16 de Mme Saugues sont devenus sans objet. Mme la présidente. L'amendement n° 10 de M. Dutoit est devenu sans objet. Je mets aux voix l'article 4. (L'article 4 est adopté.) Mme la présidente. L'amendement n° 11 de M. Dutoit est devenu sans objet. Je mets aux voix l'article 5. (L'article 5 est adopté.) Mme la présidente. Je suis saisi d'un amendement n° 19 portant article additionnel après l'article 5. La parole est à Mme Odile Saugues, pour le soutenir. Mme Odile Saugues. Cet amendement vise à préserver les obligations de service public d'Air France, au premier rang desquels la desserte de l'ensemble du territoire dans des conditions de tarif et de sécurité équitables pour tous les usagers. Cet amendement prévoit de mettre en place rapidement un cadre assurant le respect de ce principe et son évaluation régulière. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j'y suis défavorable. Son premier alinéa est en effet contraire à la réglementation communautaire puisque l'Etat peut prévoir, par convention, de demander aux transporteurs aériens de remplir certaines missions d'intérêt général. Je vois renvoie à la discussion que nous avons eue sur les DOM et les TOM. En outre, le FIATA n'est aucunement remis en cause par ce texte. Enfin, l'évaluation annuelle proposée dans le deuxième alinéa relève du Parlement et notamment des rapporteurs spéciaux pour l'aviation civile et pour l'aménagement du territoire. Les deux alinéas de l'amendement étant inutiles, à titre personnel, j'en demande le rejet. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Par ailleurs, l'établissement de dessertes d'aménagement du territoire relève aujourd'hui de l'initiative des collectivités locales, l'Etat pouvant participer à leur financement dans la limite bien évidement du budget voté pour le FIATA. Telles sont les deux raisons pour lesquelles j'émets un avis défavorable sur cet amendement. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 19. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 20. La parole est à Mme Odile Saugues, pour le soutenir. Mme Odile Saugues. Par l'amendement n° 20, nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la place des hubs dans la politique d'aménagement du territoire, en vue d'examiner la possibilité d'accorder une aide aux lignes régionales transitant par ces hubs. Mme la présidente. Ne pourrait-on employer un mot français à la place de hub ? M. Jean-Pierre Blazy. Moyeux, par exemple ! (Sourires.) Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. Ma chère collègue Odile Saugues, je ne me permettrai pas de faire une observation sur cet anglicisme. M. Jean-Pierre Blazy. Appliquons la loi Toubon ! M. Charles de Courson, rapporteur. Sur le fond, ce serait un rapport de plus, de surcroît inutile car les rapporteurs spéciaux peuvent se pencher sur ces questions à tout moment. En outre, il semble que cet amendement soit un cavalier législatif car le présent projet de loi n'a pas pour objet de s'intéresser aux hubs. Quels peuvent bien être les effets collatéraux d'une éventuelle privatisation d'Air France sur les hubs, sachant que l'accord passé avec KLM prévoit le maintien pendant au moins plusieurs années des implantations à Schiphol et à Roissy-Orly ? M. Jean-Pierre Blazy. On pourrait choisir Vatry ! Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Disons-le franchement, cet amendement qui concerne en fait « la plate-forme de correspondances », de Clermont-Ferrand, pour parler en bon français, a pour objet d'interpeller le Gouvernement sur l'avenir de cette ville, à moins que je ne me trompe, madame Saugues. Mme Odile Saugues. Pas seulement Clermont-Ferrand. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Entre autres, si vous voulez. Je vous signale que le budget du FIATA a augmenté considérablement en 2004 puisqu'il est passé de 16 à 28 millions d'euros. Il est bon de le rappeler car un tel effort n'avait pas été fait par le passé. Je veux aussi saluer le comportement exemplaire du groupe Air France sur ce dossier. En effet, avec sa filiale régionale CAE, il a pris l'initiative, il y a près de deux ans, de lancer une large concertation avec le département du Puy-de-Dôme, la région Auvergne, les élus de Clermont-Ferrand et le représentant de l'Etat sur l'avenir de cette plate-forme. Au terme de cette longue concertation, Air France a pris l'engagement, en février dernier je crois, de pérenniser seize liaisons avec les plus grandes villes françaises, ainsi que avec trois villes européennes. Il a même apporté des améliorations en faveur des usagers clermontois en créant une desserte quotidienne supplémentaire avec Paris et s'est engagé à maintenir à Clermont-Ferrand le centre de maintenance régional de la CAE. Le Gouvernement est donc défavorable à ce cavalier législatif qui intervient sur une loi qui n'a pas pour objet particulier de défendre les plates-formes de correspondance mais de faciliter la « liaison » entre KLM et Air France. Mme la présidente. La parole est à Mme Odile Saugues. Mme Odile Saugues. Monsieur le ministre, l'examen de cet amendement vous aura au moins permis de nous rassurer sur l'avenir du hub clermontois, malgré la privatisation d'Air France car certaines rumeurs alimentaient nos craintes. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 20. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 21. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir. M. Jean-Pierre Blazy. J'entends déjà les réponses du rapporteur et du ministre à ma proposition ! Si, comme je l'ai démontré, Air France apparaît comme un bon élève puisque l'âge moyen de sa flotte est de 8,3 ans, il faut l'encourager à acheter des appareils plus modernes, plus sûrs et moins bruyants. C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, que les sociétés de transport aérien ne puissent utiliser des aéronefs de plus de dix ans. Il est à craindre, en effet, que la privatisation prochaine ne permette plus un renouvellement régulier de la flotte, comme on le voit déjà dans de nombreuses compagnies privatisées. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. J'aime beaucoup mon collègue Blazy, mais son amendement m'a inquiété fortement. J'ai donc appelé Air France pour lui demander combien de ses 245 appareils avaient plus de dix ans. La réponse est 118 ! Si nous adoptions votre amendement, monsieur Blazy, il faudrait déclasser près de la moitié de la flotte. Vous voulez tuer la compagnie ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Exactement ! M. Charles de Courson, rapporteur. Je suis scandalisé par une telle proposition qui aboutirait à une destruction, à des licenciements massifs de personnels. C'est donc un amendement antisocial en plus d'être antiéconomique ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. Cela permettrait de construire des Airbus ! M. Charles de Courson, rapporteur. J'ajouterai un argument d'ordre technique : un avion bien entretenu peut voler pendant vingt-cinq ans. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Bien sûr ! M. Charles de Courson, rapporteur. Il faut donc repousser cet amendement antisocial, anti-technique et antiéconomique. M. Jacques Le Guen. Très bien ! Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Je partage totalement le sentiment exprimé par M. de Courson. M. Blazy, qui semblait un peu gêné en défendant son amendement, sait fort bien que la majorité des avions de toutes les compagnies aériennes ont plus de dix ans. Monsieur Blazy, vous voulez tuer le transport aérien dans le monde et tuer les compagnies aériennes qui existent encore. Après le désastre d'Air Lib auquel vous avez contribué, ça suffit ! Avis défavorable, donc. Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy. M. Jean-Pierre Blazy. Epargnez-nous de telles caricatures ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mme la présidente. Mes chers collègues, laissez M. Blazy s'exprimer ! M. Jean-Pierre Blazy. Après le rapporteur, voilà que le ministre en rajoute ! Parlons sérieusement. Certes, nous concevons que cette proposition soit difficile à appliquer pour des raisons économiques. Pour autant, au travers de ce débat sur Air France et plus globalement sur le transport aérien, il s'agit de poser à la fois la question des nuisances et celle de la sécurité. Les nuisances dont souffrent les riverains et les incidents et accidents qui peuvent se produire dans l'aviation civile sont des sujets trop graves pour être abordés de façon aussi caricaturale, à la fois par le rapporteur et le ministre. M. Philippe Edmond-Mariette. Les plus vieux avions sont outre-mer ! Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 21. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 22. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir. M. Jean-Pierre Blazy. On va encore me dire qu'il s'agit d'un cavalier et que je me répète puisque j'ai déjà soulevé cette question l'année dernière. D'ailleurs, je dois reconnaître que j'avais essuyé un échec sous le précédent gouvernement - vous voyez, je suis objectif. La disposition que je présente ici aurait mérité un examen attentif. La fusion inversée entre UTA et Air France a été autorisée en 1992, donc sous une autre majorité. Comme j'ai été saisi à de nombreuses reprises par des associations d'ex-salariés d'UTA, je me devais d'intervenir une fois de plus sur cette question et proposer la disposition suivante : « A compter de la date du transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Air France, des négociations seront engagées par celle-ci afin de régler le contentieux né de la fusion UTA-Air France afin d'indemniser les ex-salariés d'UTA par une distribution d'actions ». A l'époque, les salariés d'UTA ont été lésés. Au-delà des contentieux qui sont réglés, mais mal, par les tribunaux, il serait temps de solder enfin dignement cette affaire. Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. M. Jean-Pierre Blazy. L'année dernière, si. M. Charles de Courson, rapporteur. J'y arrive, monsieur Blazy. Cet amendement est grave puisqu'il porte atteinte à l'un des fondements constitutionnels de la séparation des pouvoirs. M. Franck Gilard. Tout à fait ! M. Charles de Courson, rapporteur. Je vous rappelle que des décisions du juge judiciaire sont intervenues et que vous ne pouvez aller ainsi contre l'autorité de la chose jugée. Je m'étonne qu'un homme aussi respectueux de la magistrature et des décisions de justice... M. Jean-Pierre Blazy. Les salariés d'UTA ont été lésés. Vous n'êtes pas sensible à cet argument ? M. Charles de Courson, rapporteur. ...puisse critiquer les décisions de justice. M. Jean-Pierre Blazy. Caricature, encore ! M. Charles de Courson, rapporteur. Vous avez trop reproché à certains, dans un passé très récent, de critiquer des décisions de justice pour le faire sous forme d'amendement, ce qui est bien plus grave. M. Jean-Pierre Blazy. Vous êtes antisocial, monsieur de Courson ! Mme la présidente. Monsieur Blazy, laissez M. le rapporteur s'exprimer. M. Charles de Courson, rapporteur. Comme vous l'avez rappelé avec honnêteté, vos propres amis politiques ne vous ont pas suivi par le passé. M. Jean-Pierre Blazy. Il ont eu tort ! M. Charles de Courson, rapporteur. Il y a un an, j'avais invité mes collègues à le repousser. Pour ces trois raisons, mes chers collègues, je ne doute pas que vous serez unanimes pour rejeter l'amendement de M. Blazy. Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. On ne peut en effet aller contre l'autorité de la chose jugée. Ne rouvrons pas un dossier pour lequel les tribunaux ont donné raison à Air France, y compris la Cour de cassation. En outre, cet amendement n'a aucun lien avec le présent projet de loi. Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy. M. Jean-Pierre Blazy. Vous caricaturez une fois de plus. Je le répète, des salariés d'UTA ont été lésés. Vous utilisez un argument un peu facile selon lequel je voudrais mettre en cause la justice. La justice sociale commanderait de mettre à profit la privatisation d'Air France pour réparer le préjudice subi par les ex-salariés d'UTA qui ont été contraints à engager des actions contentieuses. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 22. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 23. La parole est à M. Joël Beaugendre, pour le soutenir. M. Joël Beaugendre. Cet amendement va dans le même sens que plusieurs amendements précédents. Il vise à s'assurer que, dans le cadre de la filialisation des compagnies aériennes et du changement de statut d'Air France, les obligations de service public s'appliquent automatiquement en faveur de la desserte de l'outre-mer français. Cependant, si M. le ministre apaise mes craintes, je retirerai mon amendement Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ? M. Charles de Courson, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'y suis défavorable... M. Victorin Lurel. Vous êtes sans cœur, monsieur de Courson ! M. Charles de Courson, rapporteur. ...parce qu'il est satisfait par le droit communautaire. M. Victorin Lurel. Il faut venir dans l'outre-mer ! vous ne connaissez que le département de la Marne ! Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ? M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. M. Beaugendre a raison d'insister, mais les obligations de service public s'imposent, bien sûr, aux transporteurs qui opèrent sur les lignes concernées, qu'il s'agisse d'Air France, de ses filiales ou d'autres compagnies. La réglementation communautaire le prévoit d'ores et déjà. En revanche, il est vrai que nous devons continuer à travailler sur la desserte de l'outre-mer. Un grand pas a été franchi avec la continuité territoriale et nous devons prolonger l'important travail accompli, notamment par votre mission, monsieur Beaugendre. Certaines de ses propositions devraient connaître des suites concrètes et positives, je pense par exemple à la création d'un observatoire. Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel. M. Victorin Lurel. Je me sens obligé de soutenir mon collègue Beaugendre car M. le ministre et M. le rapporteur réduisent les conclusions de sa mission à la seule création d'un observatoire. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Ce n'est pas ce que j'ai dit ! M. Victorin Lurel. Je vous rappelle que la loi de programme de 1986, la loi Pons, avait déjà créé un observatoire des prix aériens et maritimes. Cela n'a rien donné ! D'ailleurs, on ne l'a jamais fait vivre. Vos réponses, pardonnez-moi de vous le dire avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, sont cosmétiques et artificielles. Mon collègue a raison, il n'en sortira rien ! Il s'est vu opposer toutes sortes d'obstacles, y compris de la part de votre propre administration. Comment peut-on vouloir privatiser en oubliant l'outre-mer ? L'outre-mer, c'est la République ! Monsieur le ministre, vous n'êtes jamais venu chez nous. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Mais si ! M. Jean-Pierre Blazy. Pour des vacances ! M. Victorin Lurel. Venez donc. Vous aussi, monsieur le rapporteur. J'apprécie beaucoup votre humour. M. Joël Beaugendre. Madame la présidente, je retire mon amendement. M. Philippe Edmond-Mariette. Je le reprends, madame la présidente. Mme la présidente. Monsieur Edmond-Mariette, vous avez la parole. M. Philippe Edmond-Mariette. Nous comprenons parfaitement la philosophie de la loi mais son intitulé est « Modification de la loi relative aux entreprises de transport et notamment Air France ». Monsieur le ministre, si j'ai eu la chance de voyager une fois à vos côtés, c'est parce que, la veille, le vol régulier n'avait pas pu partir de Fort-de-France à cause d'une panne. J'ai dû prendre la « boucle » et passer par Cayenne pour venir jusqu'ici. Les appareils d'Air France qui desservent l'outre-mer sont les plus vieux du réseau transatlantique. Personne ne peut le contester ! M. Victorin Lurel. C'est vrai ! M. Philippe Edmond-Mariette. Ensuite, la concurrence introduite dans la desserte ultramarine a abouti à l'inverse de ce qu'elle aurait dû entraîner selon notre rapporteur ! M. Victorin Lurel. Eh oui ! M. Philippe Edmond-Mariette. A cause de la situation de quasi-monopole d'Air France. Même privatisée avec une holding détenant la société chargée de l'exploitation du réseau, ses moyens au regard de ceux de l'observatoire - qui seront inopérants - sont tels que le problème ne sera pas réglé. Pourtant, aujourd'hui, tant que l'Etat était maître du jeu, nous pouvions encore faire respecter les propos de M. le Président de la République. Ne déclarait-il pas il y a vingt-quatre heures en recevant les préfets, monsieur le ministre, qu'il souhaitait encore plus de cohésion sociale ? Si nous ne prévoyons pas de protection, le handicap structurel des DOM sera de nouveau aggravé. Je ne doute pas que, demain matin, la nouvelle compagnie qui opérera nous imposera des prix contre lesquels même la volonté de M. de Robien ne pourra rien ! Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. D'après M. Lurel, je ne retiendrais qu'une proposition de la mission de M. Beaugendre. J'ai dit qu'on devrait pouvoir donner « des suites concrètes et positives » à certaines propositions, en particulier à la création d'un observatoire. Vous ne m'avez pas écouté, monsieur Lurel ! M. Jean-Pierre Blazy. Ce sont des mots ! Mme la présidente. La parole est à M. Joël Beaugendre. M. Joël Beaugendre. Madame la présidente, il n'est pas question ce soir de discuter des obligations de service public, et par exemple d'exiger des avions de moins de vingt ans. Je voulais seulement avoir l'assurance que les obligations de service public que nous aurons à définir plus tard seront appliquées par les filiales d'Air France. La réponse de M. le ministre me satisfait. M. Victorin Lurel. Il faut des garanties tarifaires ! Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. A la question simple de M. Beaugendre, je réponds par l'affirmative. Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 23 retiré par M. Beaugendre et repris par M. Edmond-Mariette. (L'amendement n'est pas adopté.) Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains. M. Frédéric Dutoit. Après avoir entendu M. le ministre et M. le rapporteur, je voudrais les rassurer sur mon engagement envers les salariés d'Air France pour qu'ils puissent bénéficier des meilleures conditions dans leur future entreprise. Comme j'ai eu l'occasion de le dire dans la discussion générale, l'essentiel en matière de privatisation d'Air France est déjà fait, puisque la loi du 9 avril 2003 a créé les conditions d'un changement de propriété. Le présent projet de loi n'est que le prolongement de l'action et de la politique menée dans ce secteur. Je tiens tout de même à souligner que le Gouvernement continue d'appliquer de façon dogmatique des principes qui ne devraient plus avoir cours. Rien ne dit que la concurrence fait baisser les prix. C'est totalement faux ! M. Charles de Courson, rapporteur. Elle ne les augmente pas ! M. Frédéric Dutoit. A l'exemple ce qui se pratique encore à la SNCF, Air France doit appliquer une tarification qui permette une certaine solidarité nationale, en particulier envers les territoires les plus éloignés de la métropole, c'est-à-dire l'outre-mer. C'est une question d'égalité devant le transport aérien que la mission de service public que vous voulez donner à la future entreprise privée ne garantira absolument pas. Enfin, nous voulons tous, monsieur le rapporteur, une Europe forte de dix nouveaux membres qui verra le jour le 1er mai, c'est-à-dire après-demain. Cela étant, elle ne pourra jamais être l'Europe des peuples si elle a pour seuls critères - et le transport aérien en est une nouvelle illustration - le marché et la concurrence. Il faut aussi créer une Europe de la solidarité, du social, de la culture, et même, j'ose le dire, de la fraternité. Alors, et alors seulement, les peuples seront les acteurs de l'Europe. Mais l'Europe que vous nous proposez, c'est celle de la division. M. Philippe Edmond-Mariette et M. Victorin Lurel. Très juste ! Mme la présidente. La parole est à Mme Odile Saugues, pour le groupe socialiste. Mme Odile Saugues. Ce texte s'inscrit dans la droite ligne de celui sur la privatisation d'Air France que nous avons refusé de voter il y a an. Avec le recul, nous n'avons pas changé d'avis, pas plus que nous ne sommes pas rassurés sur la démarche du Gouvernement qui est résolument libérale. La privatisation n'apportera pas d'amélioration, ni aux clients en termes de prix, ni aux salariés en termes de rémunération, ni aux territoires d'outre-mer en termes de desserte. Nous nous sommes heurtés à l'incompréhension, voire à quelques ricanements de la majorité. Pourtant, nos inquiétudes sont sérieuses et notre collègue a eu raison de parler de solidarité. Nous étant opposés à la privatisation, nous restons hostiles à toutes les démarches qui lui font suite. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur. Je lui rappelle que nous en sommes aux explications de vote. M. Charles de Courson, rapporteur. En tant que rapporteur spécial du budget des transports aériens et rapporteur du texte, je ne peux pas laisser dire que plus il y a de concurrence, plus les prix augmentent ! M. Jean-Pierre Blazy. Et aux Etats-Unis ? M. Charles de Courson, rapporteur. C'est un constat empirique, et non une question d'idéologie ! Vos affirmations vont à l'encontre de toute l'histoire économique. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.) Vous savez bien que ce sont le monopole et l'oligopole qui poussent les prix à la hausse ! M. Jean-Pierre Blazy. Ce sera bien un oligopole ! M. Charles de Courson, rapporteur. Je me suis efforcé de vous expliquer que l'objet de ce projet de loi n'a rien à voir avec le problème que vous soulevez. Que l'opérateur soit public ou privé, le problème reste le même ! Mais vous vous acharnez à le nier. Air France, vous le savez bien, monsieur Lurel, est une entreprise publique depuis plus de cinquante ans. Est-ce que ça a changé quoi que ce soit ? M. Victorin Lurel. Les prix étaient plus bas quand l'Etat intervenait ! M. Charles de Courson, rapporteur. Mais revenons à la question de fond. J'appelle tous mes collègues à voter ce texte dans l'intérêt de notre pays, de l'Europe et des salariés tant de KLM que d'Air France. Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Gantier, pour le groupe UDF. M. Gilbert Gantier. Notre groupe votera bien entendu ce texte qui constitue un progrès tout à fait indispensable. Il est évident qu'une compagnie aérienne doit pouvoir opérer dans un cadre juridique cohérent. Compte tenu de l'accord intervenu entre KLM et Air France, il fallait modifier le projet de loi que nous avions voté il y a un an. Nous nous réjouissons de voir le transport aérien français se développer pour devenir l'un des premiers en Europe, et peut-être dans le monde. Mme la présidente. Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi. (L'ensemble du projet de loi est adopté.) Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Je vous remercie, madame la présidente, d'avoir présidé brillamment nos débats et je remercie la majorité d'avoir soutenu le projet. Je donne rendez-vous à l'opposition dans quelques mois, ou quelques années - où que nous siégions alors - pour faire le bilan. Nous avons sauvé Air France une première fois en 1994 alors que cette compagnie était condamnée. Grâce à nous, vous avez ensuite pu vendre une grande partie du capital. M. Jean-Pierre Blazy. N'importe quoi ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer . Aujourd'hui, s'ouvrent de formidables perspectives pour l'entreprise et pour le pavillon français. Cette loi permettra de protéger, d'une part le personnel en assurant son avenir et en lui donnant une représentation, d'autre part les droits de trafic. Mesdames et messieurs les députés de la majorité, vous avez bien agi alors que je crois, même si je respecte votre point de vue, que vous avez commis, mesdames et messieurs de l'opposition, une grave erreur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE Mme la présidente. Ce jeudi soir, à vingt et une heures trente, séance publique : Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 762, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. M. Francis Delattre, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration de la République (n° 1537). La séance est levée. (La séance est levée, le jeudi 29 avril 2004, à une heure quinze.) Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale, jean pinchot |