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Deuxième séance du mardi 4 mai 2004

207e séance de la session ordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

PROFANATION DU CIMETIÈRE JUIF D'HERRLISHEIM

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Christ, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Jean-Louis Christ. Monsieur le Premier ministre, jeudi dernier le cimetière israélite d'Herrlisheim, dans le Haut-Rhin, a été le théâtre d'actes de vandalisme inhumains et révoltants : 127 tombes ont été profanées par des inscriptions pronazies et antisémites. Des symboles particulièrement odieux, tels que des croix gammées, et des slogans nazis ont été tracés à la peinture rouge sur les stèles.

Ces faits à connotation raciale, xénophobe et antisémite sont d'une rare gravité et ont suscité l'indignation de toute la communauté nationale. La venue immédiate sur les lieux de M. le ministre de l'intérieur a permis d'exprimer au nom du Gouvernement l'émotion et la solidarité de la nation à la communauté juive d'Alsace.

A l'heure où la construction européenne franchit une nouvelle étape, nous devons réaffirmer les valeurs essentielles de la République. Nous devons combattre avec la plus grande fermeté ces actes contraires à tous nos idéaux, d'autant plus que des actes de vandalisme tout aussi condamnables ont été commis ces derniers jours dans d'autres cimetières de France.

Monsieur le Premier ministre, notre nation a le devoir de tout mettre en œuvre pour l'édification d'un monde de respect, de tolérance et de fraternité. Pouvez-vous nous indiquer les mesures que le Gouvernement envisage de prendre afin de combattre avec la plus grande fermeté le racisme et l'antisémitisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Tous, nous avons été profondément choqués par ces actes odieux, inadmissibles en France. Au nom de l'Assemblée nationale dans son ensemble, je tiens à exprimer la profonde émotion avec laquelle nous les avons ressentis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. le Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, ces actes d'antisémitisme et de racisme ont profondément blessé la France. Je le sais, tous, sur les bancs de l'Assemblée, vous partagez la même émotion face à une violence inacceptable car c'est la France, dans son ensemble, qui s'en trouve atteinte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Je l'affirme avec la même détermination et la même conviction que le chef de l'Etat : de tels événements doivent donner l'occasion à la communauté nationale de se rassembler autour de ses valeurs. Les actes de profanation qui ont visé la communauté juive, comme ceux qui avaient précédemment visé des mosquées ou ceux qui ont visé des cimetières ou des églises nous ont pareillement atteints : ils témoignent d'une même intolérance et d'une même violence, qui nient toutes les valeurs liées au respect d'autrui.

Personne ne doit se sentir désigné en particulier par cet appel à l'unité nationale, qui est tout autant un appel au respect des convictions de chacun et au respect des valeurs qui fondent notre République.

Afin de faire face à une telle situation, il nous appartient de conduire trois types d'actions.

En premier lieu, il convient de regarder la vérité en face. Et la vérité, c'est que les actes d'antisémitisme et de racisme, qui avaient baissé en 2003, ont augmenté en 2004. J'appelle chacune et chacun d'entre vous à faire preuve de lucidité : le racisme et la violence représentent des menaces réelles pour notre société. Nous devons les affronter en toute connaissance de cause.

Mme Martine David. C'est vrai !

M. le Premier ministre. Une telle attitude doit être partagée, j'y tiens. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité à plusieurs reprises que les membres du Gouvernement regardent des émissions qui, captées en France grâce aux antennes paraboliques, prônent la haine, afin que, tous, nous soyons lucides sur ceux qui, dans notre pays, complices ou non du terrorisme, sont des militants de la haine, c'est-à-dire des adversaires de la République.

La prévention constitue notre deuxième objectif : il est nécessaire d'augmenter, grâce à une meilleure information et à l'éducation, la capacité de la société dans son ensemble à lutter contre de tels appels à la haine : il faut promouvoir les valeurs de respect et de tolérance. Nous avons pris des mesures de protection des écoles religieuses, des lieux de cultes et de toutes les personnes qui, à un moment ou à un autre, peuvent se sentir menacées. Je le répète aux uns et aux autres : la communauté nationale ne peut pas accepter que certains, par des menaces, tentent de dresser les Français les uns contre les autres.

L'éducation nationale est naturellement engagée dans ces actions de prévention et d'information. C'est la raison pour laquelle nous avons diffusé un livret républicain qui contient les rappels nécessaires et apporte une meilleure connaissance et du fait religieux et des valeurs de la République. Il appartient à l'école, lieu premier de la République, d'inculquer les valeurs de respect et de tolérance.

C'est pourquoi, monsieur le député, les tristes événements qui se sont déroulés en Alsace donneront lieu à une manifestation œcuménique du souvenir, qui permettra de rappeler aux jeunes la part que l'éducation doit prendre à l'action en faveur de l'esprit de tolérance et de respect. Afin d'en témoigner, le ministre de l'éducation assistera à la cérémonie.

Vérité et prévention, certes, mais également répression ! Tel est le troisième aspect de l'action que nous avons à mener. Mesdames et messieurs les députés, grâce à toutes les dispositions législatives que vous avez adoptées lors du vote de la loi Lellouche, nous disposons désormais d'une législation plus sévère contre tous ceux qui développent, dans notre société, des initiatives relevant de l'antisémitisme ou du racisme que nous ne pouvons tolérer. Nous sommes en possession de l'arsenal juridique permettant à la justice de faire preuve de fermeté, y compris par l'expulsion de tous les prétendus imams qui ne sont en fait que des prédicateurs politiques qui n'ont rien à voir avec l'expression de la religion. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française, et sur quelques bancs du groupe socialiste.) Oui au fait religieux ! Oui au respect des religions ! Dans notre République, la pratique religieuse doit être libre. Mais si le citoyen doit se sentir libre de ses idées et de ses convictions, il doit également sentir au-dessus de lui qu'en toutes circonstances, les règles de la République s'imposent à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

PROJET DE LOI RELATIF À L'AUTONOMIE DES PERSONNES ÂGÉES ET DES PERSONNES HANDICAPÉES

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, dans la lutte contre l'antisémitisme et contre le racisme, vous venez d'en appeler au rassemblement. Je m'en félicite. Les propos polémiques tenus la semaine dernière dans cet hémicycle par un membre de votre gouvernement n'en sont que plus regrettables. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La vigueur du débat démocratique ne saurait justifier de tels dérapages. Personne, au sein de cet hémicycle, ne peut être accusé de faiblesse devant l'antisémitisme et le racisme. Monsieur le président de l'Assemblée nationale, vous l'avez rappelé la semaine dernière, c'est le combat de tous les républicains. La récente profanation du cimetière juif d'Herrlisheim, en Alsace, appelle une réaction ferme et unanime contre tous les actes antisémites ou racistes, quel que soit le gouvernement sous lequel ils ont lieu. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) La dignité de cette assemblée impose que nous refusions les effets de tribune. (« Oui ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Votre devoir est de faire respecter cette règle. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je le crois - je l'espère, du moins -, tous, nous pouvons nous retrouver sur le principe suivant : face à l'antisémitisme et au racisme, le rassemblement est la force des démocraties, toute division les affaiblit.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ne provoquez pas, alors !

M. Jean-Marc Ayrault. C'est dans cet esprit, monsieur le Premier ministre, et dans le cadre d'un débat clair, ferme et déterminé, que je souhaite vous interroger sur l'avenir de notre système d'assurance maladie. (Vives exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Oui !

Monsieur le président, une telle réaction est étonnante !

M. le président. Mes chers collègues, laissez M. Ayrault terminer.

M. Jean-Marc Ayrault. La majorité, semble-t-il, préfère la polémique au débat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Après un rappel qui m'apparaissait nécessaire, compte tenu des incidents de la semaine dernière, j'ouvre le débat par la question suivante.

Monsieur le Premier ministre, je vous interpelle sur votre projet de loi relatif à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Comment, en effet, ne pas souligner la contradiction qui consiste à créer une assurance maladie à part pour la dépendance alors que nous ne connaissons pas encore l'architecture de la réforme actuellement en préparation ? Ce ne sont pas les propos de M. Douste-Blazy devant la mission d'information parlementaire qui sont susceptibles de nous éclairer.

Votre texte, monsieur le Premier ministre, comporte de graves défauts. Ces défauts concernent en premier lieu son principe, à savoir la création d'une caisse spécifique qui crée un régime à deux vitesses. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le risque est grand que la prise en charge, par nature plus coûteuse, des personnes âgées et des personnes handicapées ne soit restreinte. C'est l'égalité des soins qui est mise en cause.

La seconde carence est d'ordre financier : en choisissant de faire travailler un jour de plus, non payé, vous commettez la même erreur que dans le dossier des retraites : vous faites supporter l'effort de solidarité aux seuls salariés et vous allez jusqu'à remettre en cause la durée légale du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Pour toutes ces raisons, monsieur le Premier ministre, je vous demande de surseoir à l'examen, prévu ce soir, de ce texte, tant que la réforme globale de l'assurance-maladie n'aura pas été présentée. (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Vous le savez, cette question se pose au sein même de votre majorité. Si vous ne souhaitez pas écouter l'opposition, monsieur le Premier ministre, écoutez du moins votre majorité. J'attends, dans tous les cas, une réponse claire sur le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. le Premier ministre. Monsieur Ayrault, je répondrai à vos deux questions.

La première concerne l'antisémitisme : pour moi le débat est clos. Le chef de l'Etat s'est exprimé. L'antisémitisme est pour la société française un sujet suffisamment grave : il ne saurait nourrir aucune polémique supplémentaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

En ce qui concerne votre seconde question, permettez-moi de vous rappeler que vous avez souhaité, comme d'autres sur les bancs de cette assemblée, que l'assurance maladie et la dépendance ne soient pas traitées par voie d'ordonnances mais donnent lieu, sur les questions de santé, à un débat parlementaire ouvert. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman. Les Français aussi !

M. le Premier ministre. Qui souhaite un débat parlementaire ouvert ne peut exiger un calendrier précis. Néanmoins, soyez-en certain, je ne serai pas le premier ministre qui, après les événements de l'été dernier, n'aura pas demandé à l'Assemblée nationale de prendre à temps les décisions qui s'imposent pour nous permettre de faire face à la gravité de la situation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri et M. Augustin Bonrepaux. Vous en avez mis du temps !

M. le Premier ministre. Vous cherchez à me conduire à l'absence de décision - je le vois bien - alors qu'il est nécessaire d'agir face à une situation dont nous avons tous mesuré la gravité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous le savions déjà depuis un certain temps, mais tout s'est passé comme si nous l'ignorions : le vieillissement de la population a contraint notre pays à relever deux défis.


D'une part, il aura fallu que nous fassions la réforme des retraites pour que l'on regarde en face cette réalité auparavant ignorée et que l'on prenne conscience qu'il y avait de moins en moins de cotisants et de plus en plus de retraités.

D'autre part, cette évolution s'accompagne de l'aspiration à vivre plus longtemps et plus heureux.

Que ce soit pour les personnes âgées ou pour les personnes dépendantes, je souhaite véritablement qu'une action nationale forte puisse être engagée. Il nous faut 9 milliards d'euros d'ici à 2008 pour être à la hauteur de leurs attentes. Or je me refuse à demander à la représentation nationale de dire oui à des prestations et de se taire sur les financements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La responsabilité de mon gouvernement est de dire oui aux prestations, mais également de dire oui aux efforts nécessaires.

Après une discussion ouverte où le Gouvernement s'est montré attentif à la représentation nationale, nous avons accepté de tenir compte des idées des uns et des autres. Le jour national de solidarité est assuré par le travail de tous. (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il procède de la fraternité véritable, qui n'est pas dans les mots ou les slogans, ni sur les pancartes, mais dans l'effort de tous au service de nos aînés et de toutes les personnes qui ont besoin de nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il s'agit non pas d'en appeler à l'effort des autres, mais de s'engager individuellement pour la solidarité.

Oui à la journée nationale de solidarité, choisie librement selon les entreprises ou les services publics, sachant qu'il existe évidemment une solution de repli : quand il n'y a pas d'accord possible, ce sera le lundi de Pentecôte. Mais nous souhaitons qu'il y ait un accord.

Dois-je vous rappeler, monsieur Ayrault, que vous faites partie de ceux qui ont signé une pétition nationale lancée par le journal La Vie pour demander qu'une journée de solidarité par le travail assure un tel financement ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Accoyer et M. René Couanau. C'est vrai !

M. le Premier ministre. Je tiens à votre disposition le document que vous avez signé, vous et un certain nombre de vos amis. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le Premier ministre. Vous vous êtes engagé dans cette voie mais aujourd'hui, du seul fait que cette proposition émane du Gouvernement, vous dites non ! Franchement, tenons-nous-en à des attitudes constructives ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) La solidarité avec les personnes âgées et les personnes dépendantes devrait vous inciter à faire preuve d'un peu plus de continuité dans vos convictions. (Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent. - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

SOUTIEN À L'INDUSTRIE MUSICALE

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Pierre-Christophe Baguet. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.

Deuxième industrie culturelle de France, l'industrie musicale souffre, principalement à cause du piratage sur l'Internet. Au premier trimestre 2004, son chiffre d'affaire a chuté de 21 %. Tous les acteurs du secteur sont gravement touchés : auteurs, compositeurs, producteurs et éditeurs, mais aussi les 130 000 salariés. De nombreux plans sociaux se préparent. Il est donc urgent de mettre en place des actions efficaces.

Si les éditeurs, de leur côté, doivent faire des efforts d'adaptation, des actions d'éducation et de prévention n'en sont pas moins nécessaires pour lutter contre les mauvaises habitudes : le piratage est un acte illégal qui nuit à la création artistique et doit être réprimé.

Nous attendons tous beaucoup de la transposition de la directive européenne sur le droit d'auteur. Hélas ! son examen ne cesse d'être reporté.

Enfin, il faut soutenir la diversité culturelle par une réduction à 5,5 % de la TVA sur les disques et donner davantage de moyens à l'observatoire de la musique.

Prévention, répression du piratage et soutien à la diversité musicale : monsieur le ministre, sur toutes ces actions nécessaires et urgentes, le groupe UDF souhaiterait vous entendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, vous avez raison d'insister sur la gravité de la situation, car la baisse du chiffre d'affaire de l'industrie du disque est en effet préoccupante et des plans sociaux se profilent à l'horizon.

Au festival du Printemps de Bourges, qui a pourtant été une grande réussite, j'ai perçu l'inquiétude des artistes, des professionnels et de l'ensemble de ceux qui militent pour la diversité culturelle.

Pour répondre à votre interpellation, j'insisterai sur quatre points.

Premièrement, la lutte contre le piratage. Tous ensemble, nous devons tenir un langage de responsabilité aux plus jeunes de nos concitoyens : vive la liberté, vive le téléchargement de musique grâce à l'Internet, mais également : vive l'esprit de responsabilité ! En effet, si l'accès à la musique grâce à l'Internet se fait de manière irresponsable, ce sont alors les auteurs, les compositeurs et les interprètes qui en pâtiront et, au-delà, c'est la diversité culturelle qui sera battue en brèche.

Deuxièmement, vous avez raison de souligner qu'une action européenne est nécessaire. En marge du festival de Cannes, l'ensemble des ministres de la culture de l'Union européenne auront une réunion de travail consacrée au problème du piratage tant pour le cinéma que pour la musique.

Troisièmement, je n'oublie pas une mesure difficile à obtenir : la baisse de la TVA sur le disque.

M. Alain Madelin. Une excellente mesure !

M. le ministre de la culture et de la communication. Je me rendrai dans les jours prochains à Bruxelles pour prolonger l'action entreprise auprès la Commission européenne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quatrièmement, vous avez insisté à juste titre sur la nécessité d'une transposition rapide de la directive européenne sur les droits d'auteur. Le Gouvernement est en train d'y travailler afin que ce soit chose faite avant l'été, de façon compatible avec le calendrier de l'Assemblée nationale.

Je recevrai le 13 mai l'ensemble des professionnels directement concernés pour traiter cette question qui, j'y insiste, non seulement appelle une réponse politique et juridique, mais engage aussi la responsabilité individuelle de tous ceux qui aiment la musique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

JOURNÉE NATIONALE DE SOLIDARITÉ
AVEC LES PERSONNES ÂGÉES ET HANDICAPÉES

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Monsieur le Premier ministre, permettez-moi de vous dire que la réponse que vous avez faite à M. Ayrault tout à l'heure n'est pas satisfaisante. Je vais donc reformuler la question de manière plus précise encore.

Tout d'abord, avec l'immense majorité de nos concitoyens, nous saluons la victoire historique des chômeurs « recalculés ». Ce que vous n'avez pas voulu leur accorder, ils vous l'ont imposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Ils ont été rétablis dans leurs droits alors qu'ils en avaient été arbitrairement privés. Cet événement montre que votre gouvernement affaibli est contraint de céder face à des mouvements sociaux forts et populaires.

Cependant, en repoussant l'exigence du remboursement de la dette de l'UNEDIC à l'égard de l'Etat, le Gouvernement se fait solidaire du MEDEF (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) en l'exonérant de toute contribution à la solidarité nationale envers les chômeurs, alors même qu'il est responsable de leur situation.

Solidarité encore avec le MEDEF, monsieur le Premier ministre, lorsque vous décrétez l'allongement du temps de travail des salariés - fait sans précédent dans l'histoire du pays - par la suppression d'un jour férié ou de son équivalent au nom de l'aide aux personnes âgées et handicapées : en réalité, seul un tiers du bénéfice de cette journée profitera à ces dernières, le reste allant au patronat.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mensonge !

M. Maxime Gremetz. C'est tout simplement scandaleux : après qu'il a empoché les 20 milliards d'exonération de cotisations sociales, profité de la baisse des impôts pour les plus riches - 2 milliards d'euros - ainsi que des 500 millions que représente l'exonération de l'impôt sur les grandes fortunes, et dans l'attente de la baisse de la taxe professionnelle à hauteur de 2,5 milliards d'euros, voilà la suppression d'un jour férié - en d'autres termes : du travail supplémentaire gratuit !

Monsieur le Premier ministre, écoutez les six Français sur dix qui expriment aujourd'hui leur opposition totale à ce projet de régression sociale, ainsi que les organisations syndicales qui toutes rejettent le texte. Vous avez préféré négocier avec votre majorité pour faire taire ses divisions plutôt que de discuter réellement avec les partenaires sociaux de la prise en charge de la dépendance par la sécurité sociale.

Monsieur le Premier ministre, la décence commande que vous retiriez votre projet. Mettez fin à cette solidarité indécente avec le MEDEF et écoutez les Français en faisant le choix d'une autre solidarité et en prenant l'argent là où il est, comme nous le proposons. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux personnes âgées. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées. Monsieur le député, nous allons mettre le pays en conformité avec sa démographie en prenant en compte cette véritable révolution sociale qu'est le vieillissement.

En effet, nous allons demander aux Français un jour de solidarité. (« Pas à tous ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Cela représente 7 heures de solidarité, soit 4 % des 175 heures de RTT : ce n'est nullement, comme vous l'insinuez, une remise en cause des 35 heures !

M. Georges Tron. Si seulement !...

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Cette mesure exceptionnelle va nous permettre d'accompagner et d'anticiper le vieillissement et de prendre en compte l'ensemble des problèmes du handicap. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. François Liberti. Vous ne croyez même pas à ce que vous dites !

M. Augustin Bonrepaux. Baratin !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Nous allons faire ce qu'il était indispensable de faire dans notre pays depuis de nombreuses années et nous allons financer ce que vous n'avez pas financé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ce que vous avez voulu faire avec des mots, nous allons le concrétiser avec des actes, monsieur le député, et les Françaises et les Français, dans leur grande générosité, vont nous accompagner.

M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vous, ce sont les travailleurs qui vont payer !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Il est faux de dire que le jour de solidarité ne sera pas rémunéré : il le sera (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe des députés socialistes.) Il s'agit d'une cotisation juste et équitable, d'autant que les revenus du capital seront eux aussi taxés.

Tel sera l'objet du débat que nous allons engager ici même dès ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

RELANCE DE LA CONSOMMATION

M. le président. La parole est à M. Alain Marleix, pour le groupe UMP.

M. Alain Marleix. M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a déjà montré, en l'espace d'un mois, qu'il avait pour objectif de maîtriser les dépenses de l'Etat - sujet dont il a été beaucoup question ici même et dans les médias : je ne reviendrai donc pas sur cette impérieuse nécessité.

S'agissant de la politique industrielle dont notre pays a besoin, il a également fait preuve d'un grand volontarisme, comme en témoigne, entre autres, l'exemple récent de la fusion entre Sanofi et Aventis.

Aujourd'hui, après son audition par la commission des finances, il a tenu une conférence de presse aux cours de laquelle il a affirmé qu'il entendait relancer l'activité en soutenant la consommation de nos concitoyens. A cet effet, il a notamment annoncé des mesures destinées à faciliter les donations.

Monsieur le ministre délégué à l'industrie, en l'absence de M. le ministre d'Etat, pourriez-vous préciser à la représentation nationale quelles sont les mesures que vous prendrez pour soutenir la consommation et quel bénéfice vous en attendez pour la reprise de l'activité économique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.


M. Patrick Devedjian,
ministre délégué à l'industrie. Monsieur Marleix, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Nicolas Sarkozy, actuellement retenu au Sénat.

De nombreuses mesures ont été annoncées en matière de donations. Mais les choses sont simples : à partir du 1er juin  de cette année et jusqu'au 31 mai 2005, soit pendant un an, les parents et grands-parents pourront faire une donation d'un maximum de 20 000 euros, soit 130 000 francs, à chacun de leurs enfants ou petits-enfants. Ils pourront le faire en totale franchise d'impôts et selon un formalisme réduit à sa plus simple expression. A leur déclaration d'impôts, ils joindront une feuille intercalaire, sur laquelle ils porteront le nom du donateur, le nom du bénéficiaire et le montant de la somme donnée.

Il s'agit d'une mesure simple, destinée à venir en aide aux jeunes, et qui permettra, en outre, de relancer la consommation en désépargnant des sommes un peu stériles.

Cette mesure n'est pas la seule, mais il nous faudrait plus de temps pour toutes les évoquer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

ASSURANCE CHOMAGE

M. le président. La parole est à Mme Nadine Morano, pour le groupe UMP.

Mme Nadine Morano. Monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la cohésion sociale, le chômage est une situation difficile pour la personne concernée, un drame pour toute la famille et une souffrance collective pour la société.

Les élus doivent se mobiliser pour répondre à ce douloureux problème, en donnant à notre société les moyens de mieux fonctionner pour que chacun trouve sa place sur le marché de l'emploi, et en assurant une vraie solidarité au profit des personnes en recherche d'emploi.

Aujourd'hui, l'assurance chômage est lourdement déficitaire : entre 7 et 8 milliards d'euros cumulés.

Monsieur le ministre, le Président de la République vous a confié une mission importante : assurer la cohésion sociale. Avec cœur, générosité et réalisme économique, vous avez rencontré les partenaires sociaux, syndicats et patronat, gestionnaires de l'assurance chômage. Vous avez annoncé hier soir le rétablissement des droits des personnes dites « recalculées ».

Pouvez-vous nous dire quelle fut la teneur exacte des échanges lors de cette réunion et nous préciser comment sera prise en charge cette réintégration ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Madame Morano, vous savez que le régime d'assurance chômage, géré par les partenaires sociaux, a connu une double crise.

D'abord, une crise de paiement, née d'un certain nombre de contentieux de nature administrative, qui s'inscrivait dans le cadre d'une procédure devant le Conseil d'Etat. Une telle situation, alarmante, aurait pu aboutir au remboursement d'indemnités et de cotisations. Le Premier ministre m'a autorisé à intervenir, soit par agrément, soit par décret, afin que l'UNEDIC puisse continuer, dans la sérénité, à honorer ses engagements à l'égard des chômeurs.

Ensuite, une crise provoquée par la réforme qui a concerné ceux qu'on appelle les « recalculés ». 650 000 familles ne savaient pas, au fil des situations judiciaires, quel serait leur sort ! Plusieurs décisions de justice, dont l'une est célèbre, établirent qu'un droit acquis de bonne foi était un droit ; que celui-ci ressemblait furieusement à un contrat, ce que d'aucuns avaient pourtant combattu à l'époque. Là encore, le Premier ministre m'a autorisé à rencontrer les partenaires sociaux qui avaient appelé à l'aide le Gouvernement, car ils n'arrivaient pas à dénouer cette situation extrêmement compliquée.

Le paritarisme ne consiste pas à laisser les partenaires se débrouiller, mais à être présent. Nous avons donc rencontré chacun des partenaires sociaux et trouvé une solution qui, globalement, satisfait tout le monde. Les « recalculés », comme on dit malheureusement, seront réintégrés dans leurs droits et retrouveront un peu de sérénité.

Le financement de cette réintégration est clair : une ponction de 3 milliards d'euros sur l'année 2000 était en suspens, pour un solde de 1,2 milliard d'euros. Cette créance, détenue par l'Etat et repoussée d'année en année, à chaque fois au mois de juin, virait au psychodrame pour les gestionnaires de l'UNEDIC. L'Etat a fait l'effort de considérer que cette créance serait récupérée sur les excédents de l'UNEDIC. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

LOGEMENT SOCIAL

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit, pour le groupe socialiste.

Mme Annick Lepetit. Monsieur le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, vous avez été interrogé la semaine dernière par mon collègue Pierre Bourguignon sur la réalité que vous entendez donner à la mise en œuvre de la cohésion sociale. Vous êtes resté silencieux. Pourtant, à entendre le Président de la République, la cohésion sociale est devenue la priorité absolue du gouvernement Raffarin III. Reste que celui-là même vous impose d'énormes restrictions budgétaires : 650 millions d'euros, dont 220 concernent le logement et l'urbanisme, restrictions qui s'ajoutent aux baisses catastrophiques déjà votées par votre majorité.

Le scandale n'est pas tant de faire des économies que d'en faire là où il y a urgence absolue. La crise du logement est sans précédent dans notre pays. Elle frappe un nombre de plus en plus important de nos concitoyens, quelles que soient les régions : 3 millions d'entre eux sont mal logés, 86 000 sont sans logis, les listes des demandeurs de logements sociaux s'allongent. Or cela fait deux ans que vous faites des économies sur le logement !

Monsieur le ministre, comment parler sans cesse de cohésion sociale tout en baissant sans cesse les crédits ? Vous affirmez que le logement est un de axes essentiels de la cohésion sociale ! Expliquez-nous comment, avec 220 millions d'euros en moins, vous construirez les 80 000 logements sociaux promis pour cette année. D'autant que, selon votre ministère, l'objectif serait même d'en construire davantage. Expliquez-nous aussi comment, avec 220 millions d'euros en moins, vous pourrez revaloriser les aides personnelles au logement - mesure prévue pour juillet.

A des questions concrètes, nous souhaitons des réponses concrètes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au logement.

M. Marc-Philippe Daubresse, secrétaire d'Etat au logement. Madame la députée, vous connaissez bien la mécanique parlementaire : il y a chaque année des régulations budgétaires, chaque année des demandes et des réponses, chaque année des réserves de précaution.

Chacun des membres du Gouvernement est solidaire de cette discipline collective visant à réduire les déficits et la dette de l'Etat. Il y en a qui creusent les trous, et il y en a qui sont là pour remplir les caisses ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Le Président de la République a réaffirmé la semaine dernière, devant le corps préfectoral, que la cohésion sociale était une priorité absolue, en matière d'emploi comme de logement.

M. Christian Bataille. Avec quels moyens ?

M. le secrétaire d'Etat au logement. Il a tracé la feuille de route du Gouvernement en assignant, pour les années qui viennent, un objectif supérieur à 80 000 logements sociaux par an. Lorsque les socialistes étaient au pouvoir, il n'en avait été construit que 50 000 par an !

L'objectif est ambitieux, comme l'est celui de la rénovation urbaine. Il sera tenu. Jean-Louis Borloo présentera avant l'été, devant le Parlement, un plan de cohésion qui, à l'évidence, nécessitera un changement de braquet. Ce plan sera financé.

Face à la grave crise du logement, deux attitudes sont possibles : une attitude démagogique, et une attitude volontariste. Nous avons choisi la seconde ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

REFORME DE L'ASSURANCE MALADIE

M. le président. La parole est à M. Pierre-Louis Fagniez, pour le groupe UMP.

M. Pierre-Louis Fagniez. Monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, notre système de protection sociale est confronté à de graves difficultés. Le Gouvernement s'est engagé dans la réforme.

Votre objectif est de soigner mieux en dépensant mieux, principe auquel on ne peut que souscrire.

Pour mener à bien cette importante réforme, vous avez lancé une vaste concertation avec les partenaires sociaux et l'ensemble des acteurs concernés. Ce matin même, vous avez été auditionné par la mission parlementaire, dirigée avec autorité par notre cher Président (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Parmi les axes évoqués, figure le dossier médical partagé, dont nous sommes nombreux à reconnaître, à l'instar de tous les spécialistes, l'efficacité en matière de coordination des soins.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce dossier médical partagé et les modalités de son développement ? Plus généralement, quel est l'état d'avancement de la réforme que vous pilotez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Dans le cadre du calendrier fixé par le Premier ministre, Xavier Bertrand et moi-même sommes en train de préparer le plan de réforme de l'assurance maladie, qui comportera plusieurs étapes.

La première étape passe par un nouveau mode gestion, de gouvernance, de pilotage de l'assurance maladie. Et j'ai l'honneur d'annoncer à la représentation nationale que, dès vendredi, la plupart des responsables des syndicats et des partenaires sociaux, qui s'occupent aujourd'hui déjà de l'assurance maladie, viendront au ministère de la santé et de la protection sociale.

La deuxième étape passe par la responsabilisation des Français : usagers, malades, mais aussi professionnels de santé. Nous souhaitons que chaque Français dispose obligatoirement d'un dossier médical partagé. Les syndicats de médecins libéraux ont accepté cette idée et choisi de jouer le jeu.

Les médecins pourront connaître en quelques minutes tous les actes médicaux, tous les traitements et les antécédents du patient. La mise en place de ce dossier permettra d'améliorer la coordination des soins, le suivi des patients, la collection des données épidémiologiques dont notre système de santé publique a cruellement besoin, et enfin d'améliorer l'évaluation des pratiques médicales par les professions de santé elles-mêmes.

En conclusion, monsieur le député, c'est un système « gagnant-gagnant » : gagnant pour le malade, dont les soins et les traitements seront mieux coordonnés, pour le médecin qui sera mieux informé et plus vite, et surtout pour l'assurance maladie, puisqu'on va enfin pouvoir éviter les pratiques doubles ou triples, en tout cas injustifiées.

Voilà comment j'entends renforcer la responsabilisation des Français... à l'inverse de ce qu'avait fait l'actuelle opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

ISLAMISME

M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo, pour le groupe UMP.

M. Pierre Cardo. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Ces dernières semaines, deux mesures d'expulsion ont été prises à l'encontre d'imams : la première concernait l'imam salafiste de Vénissieux, la seconde le responsable d'une mosquée parisienne, soupçonné d'être l'animateur, pour la France, d'un mouvement extrémiste islamique turc prônant le recours à la violence et au terrorisme.

J'approuve la vigilance et la fermeté dont le Gouvernement fait preuve à l'égard de quelques imams radicaux ou gestionnaires de lieux de culte infiltrés par des personnes qui prônent des idées contraires aux valeurs de notre république.

Cependant, je crois nécessaire d'attirer l'attention de tous, et particulièrement la vôtre, monsieur le ministre, sur le danger que fait courir à notre pays le risque d'amalgame.

Ces dérives, qui sont l'expression de comportements communautaristes et de logiques d'exclusion portent atteinte à la cohésion sociale, mais ne sont le fait que d'une minorité de personnes. Elles ne sont ni la voix de l'Islam, ni celle ne nos compatriotes musulmans. Mais elles inquiètent chacun, musulman ou non.

Monsieur le ministre, comment envisagez-vous de combattre les intégrismes, tout en évitant l'amalgame et en permettant à la nation française de vivre avec sérénité sa laïcité comme sa pluralité cultuelle, plus particulièrement dans les quartiers dits sensibles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, face à la nouvelle menace terroriste, vous l'avez rappelé, nous avons un devoir de vigilance. Cette menace existe en Europe - les attentats de Madrid l'ont montré - et ne peut être négligée en France puisque notre pays a été cité par certains groupes terroristes. D'autant que les tensions internationales sont nombreuses et le calendrier chargé. Un projet d'attentat vient d'être déjoué à Istanbul contre le prochain sommet de l'OTAN.

Face à cette menace, ma responsabilité est de protéger les Français et je dois me montrer ferme, tant en matière judiciaire, pour remonter les filières et démanteler les réseaux, qu'en matière administrative, pour les cas d'urgence qui justifient une expulsion : je ne peux admettre la présence sur le sol français de ressortissants étrangers qui tiennent des discours extrémistes appelant à la haine et à la violence, qui sont liés à la mouvance terroriste.

Je veux m'acquitter de ce devoir dans le respect des règles de l'Etat de droit. Certes, des difficultés juridiques peuvent apparaître, mais nous les surmonterons, y compris, si nécessaire, par une modification de la loi. A cet égard, je veux vous dire ici toute ma détermination. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Nous avons aussi, ensemble, vous l'avez rappelé également, un devoir de justice pour éviter tout amalgame entre islam et islamisme, entre islam et intégrisme. L'immense majorité des musulmans de France vivent en paix dans notre pays, dans le respect des valeurs de la République, alors même qu'ils sont victimes d'actes de racisme et de xénophobie inacceptables. De tels actes ont augmenté au cours du premier trimestre 2004, comme en témoignent les agressions répétées qui se sont produites à Strasbourg contre des lieux de culte et des commerçants musulmans.

Dans ce contexte, je veux saluer la mobilisation des responsables du culte musulman, tant sur le plan national que régional. Ils veulent apporter des solutions pour une meilleure organisation du culte musulman, en matière de formation des imams, de recrutement des aumôniers, de financement des salles de prière. L'enjeu est essentiel. C'est pourquoi nous voulons accompagner et encourager ces efforts qui renforcent notre cohésion nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

VIOLENCES CONTRE LES PERSONNES

M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche, pour le groupe socialiste.

M. Christophe Caresche. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, votre ministère vient de publier des statistiques alarmantes sur la montée de la violence dans notre pays : les crimes et délits contre les personnes ont progressé de 7,3 % en 2003 et de 10,07 % depuis le début de l'année 2004 ; les homicides de plus de 10 % ; les tentatives d'homicide de plus 17,37 % ; les coups et blessures volontaires de plus 7,97 %. Ces violences ne concernent pas seulement les violences conjugales ou intrafamiliales, comme vient de le déclarer, il y a quelques minutes, votre prédécesseur - qui, soit dit en passant, continue de commenter les chiffres de la délinquance.

Ces chiffres doivent être pris, aujourd'hui comme hier, avec la distance nécessaire, mais ils traduisent une inquiétante augmentation des agressions physiques dans notre pays. La montée de la violence n'est, certes, pas nouvelle.

M. Thierry Mariani. Vous en savez quelque chose !

M. Christophe Caresche. Mais elle se poursuit à un rythme inégalé. Elle s'est accélérée ces deux dernières années. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Tel est le véritable bilan dont vous avez hérité : il y a aujourd'hui plus de Français agressés dans notre pays qu'il y a deux ans. (Mêmes mouvements.)

Vous semblez prendre la mesure de cette situation, il est vrai très dégradée, et vouloir renoncer à certaines dispositions particulièrement critiquables, comme l'automaticité des peines. Il ne suffit pas, en effet, de remplir les prisons pour traiter la délinquance. Nous verrons si vos actes confirment vos intentions et si votre majorité vous soutient dans cette orientation. Nous verrons également si les moyens humains et matériels suivront. Sachez, cependant, que nous ne cautionnerons pas une réforme de l'outil statistique, qui aurait pour objectif inavoué de minimiser la progression des violences sur les personnes.

Monsieur le ministre, il est temps d'agir : comment comptez-vous endiguer la violence dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Francis Delattre. Bouffon !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, j'ai cru percevoir, au travers de votre question, une légère suspicion...

Mme Martine David. Plutôt un constat !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... qui ne me paraît pas de mise, compte tenu des efforts remarquables qui ont été engagés au cours des deux dernières années. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Je tiens ici à rendre hommage à l'action, puisque vous le mettez en cause, de mon prédécesseur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Soyons précis : quelle est la vérité sur la délinquance dans notre pays ? D'un côté, il y a, effectivement, une baisse générale de la délinquance en France.

M. Bernard Roman. Mais...

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En particulier, la criminalité a baissé de 3,38 % en 2003 et les faits de voie publique ont diminué de 9 %. De l'autre côté, se poursuit depuis près de vingt ans, une augmentation des atteintes aux personnes.

M. Bernard Roman. Elle s'accélère !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Pour le premier trimestre 2004, cette augmentation est de l'ordre de 10 %. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) C'est vrai sur la voie publique, dans les écoles, mais aussi dans les familles où sont commis mauvais traitements contre enfants, violences conjugales ou agressions sexuelles.

Notre outil statistique, qui comporte des incohérences et des contradictions, demande à être adapté.

M. Jérôme Lambert. Mieux vaudrait s'attaquer à la violence plutôt qu'aux statistiques !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le non-paiement de pension alimentaire, la non-représentation d'enfant figurent, par exemple, dans le chiffre des atteintes aux personnes, mais pas les violences contraventionnelles telles que coups de poing et gifles entraînant moins de huit jours d'incapacité de travail. Quant aux vols avec violence, ils sont comptabilisés dans les chiffres de la délinquance de voie publique.

Je me félicite de la mise en place de l'observatoire, que vous avez vous-même, monsieur Caresche, appelé de vos vœux dans votre rapport conjoint avec Robert Pandraud. J'ai demandé à son président de préciser la notion d'atteinte aux personnes afin de mieux dégager des réponses opérationnelles. En aucun cas, il ne s'agit de changer l'outil statistique de référence, dit « 4001 », qui permet de fixer le nombre des crimes et délits. Il s'agit, au contraire, de le préciser et de l'améliorer, dans une volonté de transparence. Je fais de la lutte contre les atteintes aux personnes une priorité, je l'ai dit devant les préfets.

M. Albert Facon. Marchand de sable !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous pourrons, lors des prochaines conférences avec la police et la gendarmerie, prendre toutes les mesures opérationnelles en ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

SOLIDARITÉ ENVERS LES PERSONNES ÂGÉES
OU HANDICAPÉES

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour le groupe UMP.

M. Dominique Tian. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué aux personnes âgées.

L'Assemblée nationale commencera ce soir l'examen du projet de loi relatif au dispositif de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser l'ensemble des objectifs poursuivis par ce texte, notamment les réalisations concrètes qui en découleront sur le terrain, tout particulièrement avant la période estivale ?

Nous savons que les Français sont prêts à se mobiliser pour de nobles causes et savent faire preuve de solidarité. Cependant, nombre de nos concitoyens se sont émus de la disparition possible du lundi de Pentecôte comme jour férié. M. le Premier ministre nous a indiqué que, après une large concertation, la position du Gouvernement a évolué vers la mise en place d'un système plus souple. C'est pourquoi je souhaiterais que vous informiez la représentation nationale sur les modalités selon lesquelles les entreprises et le secteur public devront gérer ce temps consacré à la solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Albert Facon. La Saint-Hubert, jour férié !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux personnes âgées.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées. Monsieur le député, ainsi que M. le Premier ministre l'a, en effet, souhaité :...

M. Albert Facon. M. Falco l'a fait !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. ... le jour de solidarité sera fixé librement, dans les secteurs public et privé, après concertation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Seules les entreprises qui n'auront pas réussi à trouver un accord sur cette journée se verront imposer le lundi de Pentecôte. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Nous espérons que la liberté de choix ainsi donnée permettra à chacun d'effectuer librement son effort de solidarité, indispensable dans notre pays.

M. René André. Très bien !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Je veux vous donner deux chiffres pour illustrer les effets de cet effort de solidarité. Sur les 650 000 lits actuellement disponibles dans nos établissements, un tiers seulement sont médicalisés.

M. Patrick Lemasle. Il ne fallait pas geler les crédits !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. L'effort consenti nous permettra d'en médicaliser 160 000 en 2004. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Sur sept personnes âgées de plus de soixante-quinze ans aujourd'hui soignées à domicile, une seule bénéficie d'un SIAD. Grâce à l'effort de solidarité nationale, nous créerons 17 000 postes. Vous voyez ainsi ce que cet effort a de généreux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, nous pourrons financer et pérenniser l'APA, ce que le Gouvernement précédent n'avait pas prévu. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Martine David. Avec quel argent ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Nous prouverons ainsi, mesdames, messieurs les députés, que les Françaises et les Français sont généreux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

INONDATIONS

M. le président. La parole est à M. Roland Chassain, pour le groupe UMP.

M. Roland Chassain. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales.

Le 9 décembre dernier, le jour même de la visite en Arles de M. Nicolas Sarkozy, M. le Premier ministre annonçait, devant notre assemblée, un nombre important de mesures à la suite des inondations qui ont touché le sud de la France, en particulier le pays d'Arles. Le 19 décembre, à l'Hôtel Matignon, devant les élus des zones concernées, l'engagement de l'Etat était confirmé, notamment avec l'annonce de la création d'un syndicat mixte unique et interrégional regroupant les sept maîtres d'ouvrage chargés des digues du Rhône. Le préfet de la région Rhône-Alpes était chargé, à cette fin, d'une mission interrégionale.

Cinq mois après ces terribles intempéries, pouvez-vous tracer le bilan de l'action engagée et nous en indiquer les prochaines étapes ?

Par ailleurs, vous savez, monsieur le ministre, que l'entreprise Lustucru envisage la fermeture de son site industriel d'Arles. Les conséquences en seraient dramatiques pour les 146 salariés de l'entreprise et pour la riziculture camarguaise. Quelles sont les actions engagées par l'Etat pour tenter de maintenir cette activité sur le site d'Arles ? En cas d'échec des discussions avec les dirigeants de l'entreprise, pouvez-vous confirmer que l'Etat exigera le remboursement des financements publics affectés au redémarrage de l'activité, afin de venir en aide aux salariés privés d'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur le député, vous avez rappelé à juste titre les mesures importantes décidées et annoncées par le Premier ministre en décembre dernier, à la suite des inondations qui ont touché le sud de la France. Je puis vous confirmer que le Gouvernement suit très attentivement la mise en œuvre effective de ces mesures.

Vous m'interrogez précisément sur la situation de l'entreprise Lustucru, que ces inondations ont contrainte à cesser son activité. Le Gouvernement est très attentif aux conséquences économiques et sociales de ce drame. En ce moment même, le préfet de région conduit des négociations qui rassemblent les délégués syndicaux, la direction de Panzani, l'expert-comptable diligenté par le comité d'entreprise, ainsi que les services de l'Etat, de la région, du département et de la commune. Elles portent en particulier sur des propositions, qui ont été avancées par l'Etat et les collectivités territoriales, soit de reconstruction de l'usine sur un autre site, soit de réhabilitation de l'usine existante. Il faudra évidemment nous montrer très incitatifs dans les mois qui viennent.

Je voudrais vous apporter deux précisions. D'abord, la direction de l'entreprise s'est engagée - c'est important pour les producteurs de la région - à maintenir en volume ses approvisionnements de riz et de blé dur provenant de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Ensuite, la mission interministérielle chargée des mutations économiques est mobilisée pour suivre cette affaire avec beaucoup d'attention, et je me tiens, moi-même, à votre disposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Hélène Mignon.)

PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

    3

CONTRAT DE VOLONTARIAT DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale (n°s 1515, 1 556).

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des affaires étrangères, mesdames, messieurs les députés, je me réjouis de renouer aujourd'hui, dans le cadre de mes nouvelles fonctions, avec l'Assemblée nationale, et je suis heureux de pouvoir le faire à l'occasion de la présentation du projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale.

Il s'agit d'un texte important qui vise à répondre tout à la fois aux besoins des populations des pays en développement ou victimes de catastrophes, besoins qui, comme vous le savez, sont immenses partout dans le monde, et à la volonté de solidarité exprimée par la société française. Nos compatriotes, jeunes et moins jeunes, manifestent en effet leur générosité envers les populations les plus démunies ou les plus éprouvées et ont le désir de leur venir en aide

Un vaste mouvement associatif s'est développé dans notre pays en faveur de l'aide au développement et de l'action humanitaire. Il appartient à l'Etat de permettre aux acteurs qui y sont engagés d'intervenir avec efficacité et dans un cadre juridique sûr.

Or les associations demandaient depuis plusieurs années, sans succès, un statut du volontaire de solidarité internationale. Nous avons voulu répondre à cette demande. Aussi le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui a-t-il fait l'objet d'une concertation longue et approfondie entre les organisations non gouvernementales et les services de l'Etat, parmi lesquels, bien sûr, le ministère des affaires étrangères.

Je tiens à souligner le rôle essentiel de coordination joué par le comité de liaison des ONG de volontariat et à saluer l'impulsion décisive donnée par mon prédécesseur, Pierre-André Wiltzer. Je suis très heureux et très fier de parachever le travail qu'il a conduit et de montrer ainsi la volonté du Gouvernement de poursuivre et de faire aboutir une réforme souhaitée par l'ensemble des acteurs concernés.

Une des raisons de cette réforme est que les deux régimes qui régissent actuellement les missions de volontaires à l'étranger ne couvrent que partiellement les différentes formes de volontariat

Le premier d'entre eux, le volontariat civil international, est bien adapté pour l'Etat et les entreprises. En revanche, bien que ce soit théoriquement possible, la loi du 14 mars 2000 qui l'organise n'est pas utilisée par les associations. En effet, outre la limite d'âge fixée à vingt-huit ans, elle institue une relation de droit public qui ne correspond ni à leur approche ni à leurs besoins. De plus, le montant de l'indemnité du volontaire international est trop élevé et il n'y a pas d'aide spécifique de l'Etat.

Quant au second statut, le volontariat associatif, actuellement défini par un décret du 30 janvier 1995, il ne concerne qu'une partie du volontariat associatif de solidarité internationale, à savoir l'envoi de volontaires majeurs - sans limite d'âge - pour des missions d'au moins un an sous la responsabilité d'associations agréées par l'Etat, qui prend à sa charge une partie du coût des missions. Ce volontariat s'exerce spécifiquement dans le domaine de l'humanitaire et, surtout, dans l'aide au développement. Il concerne environ 2 200 personnes.

Le décret de 1995 a constitué, nous le reconnaissons, un progrès important par rapport à la situation précédente, notamment en incitant les associations à assurer aux volontaires une couverture sociale de qualité. Toutefois, ce régime présente un point faible sur le plan juridique : la définition de la nature spécifique du contrat entre une association et un volontaire relève de la loi et non d'un décret. De plus, le décret ne couvre pas les missions inférieures à un an qui sont pourtant estimées à plusieurs milliers par an, notamment pour les actions humanitaires d'urgence.

Il était donc indispensable de créer un cadre juridique sûr qui s'applique à l'ensemble des missions de volontariat. C'est pourquoi la nécessité d'une loi spécifique au volontariat associatif s'est imposée. Pour la première fois, une loi couvrira l'ensemble des formes de volontariat associatif de solidarité internationale dans tous les pays hors de l'Union européenne et quels que soient l'âge du volontaire, la durée de la mission et son mode de financement.

Les missions de volontariat seront ouvertes aux Français et aux autres nationalités de l'Union européenne, mais aussi aux étrangers résidant régulièrement en France. La commission des affaires étrangères propose de supprimer toute condition de nationalité et c'est bien volontiers que je donnerai mon accord sur cette proposition.

En termes juridiques, la nouveauté est l'institution d'un type de contrat sui generis qui "organise une collaboration désintéressée" entre une association agréée et une personne majeure.

Ce contrat est de droit privé, pour respecter la liberté de l'engagement entre l'association et le volontaire. Il est limité dans le temps et dérogatoire au code du travail, en raison de son caractère spécifique. Il s'agit, en effet, de permettre, à celles et à ceux qui le souhaitent, de consacrer un temps de leur vie à des actions de solidarité, c'est-à-dire à des actions n'ayant aucun but lucratif et relevant exclusivement de l'intérêt général.

En contrepartie, le projet de loi précise les obligations des associations et organise en particulier la protection sociale des volontaires. Cela constitue même l'essentiel de la loi.

Un décret et des arrêtés d'application préciseront certaines dispositions du texte, en particulier la procédure d'agrément par le ministère des affaires étrangères - cela inclut les critères pris en compte.

La loi instituera une commission paritaire dite "du volontariat de solidarité internationale", qui permettra la nécessaire concertation entre les administrations et les associations. Cette commission sera notamment consultée sur les demandes d'agrément et le montant minimum de l'indemnité. Mais elle sera surtout un lieu d'échanges permanent entre les associations et l'Etat, permettant les adaptations qu'exige une réalité très diverse et en évolution constante. C'est à cause de cette réalité diverse que la loi doit garder la plus grande généralité possible : toute précision visant telle ou telle catégorie de volontariat risque en effet d'avoir des effets négatifs sur d'autres catégories.

Il ne me semble donc pas opportun de faire figurer trop de dispositions dans la loi. Le décret, pour sa part, est parfaitement transparent et je prends l'engagement que toutes les suggestions pertinentes seront prises en compte, et tout particulièrement celles venant du rapporteur qui, pour avoir été lui-même ministre de la coopération et de la francophonie, connaît très bien ces questions.

De même, la loi n'aborde pas la question du financement des missions de volontariat, car ce n'est pas une loi de finances. Ces missions pourront être financées, comme c'est le cas actuellement, par les ressources propres des associations, par des fonds européens ou internationaux, par des collectivités territoriales et par le ministère des affaires étrangères. Celui-ci, en particulier, maintiendra un mécanisme de cofinancement des missions de longue durée, très proche de celui actuellement en vigueur dans le cadre du décret de 1995. J'ai par ailleurs l'intention de renforcer les moyens budgétaires consacrés au volontariat.

Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les grandes lignes du projet de loi sur lequel vous êtes appelés à vous prononcer. A ce stade et avant que votre rapporteur s'exprime, je tiens à saluer le remarquable travail accompli par la commission des affaires étrangères sous l'impulsion de son président et à remercier mon ami Jacques Godfrain, pour la qualité de son rapport. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires étrangères.

M. Jacques Godfrain, rapporteur de la commission des affaires étrangères. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie, mes chers collègues, les besoins de solidarité internationale sont immenses, partout dans le monde. En France, de très nombreux jeunes - et moins jeunes d'ailleurs - expriment le désir de venir en aide aux plus démunis, comme aux victimes de catastrophes naturelles ou de conflits armés, et souhaitent participer au développement à travers des actions de coopération. Cela est conforme à notre culture nationale, et c'est bien ainsi.

Ces jeunes souhaitent s'engager dans des organisations de solidarité internationale pour servir la cause qu'ils défendent. Cet engagement personnel traduit une réelle générosité et un grand sens des responsabilités, et je salue le Gouvernement d'avoir pris l'initiative du projet de loi qui l'encourage.

Depuis de nombreux mois, une étroite concertation s'est établie entre le ministère, les associations et les ONG. Cette remarque vaut non seulement pour vous-même, monsieur le ministre, mais aussi pour votre prédécesseur, dont vous avez salué l'action.

Cet engagement prend le plus souvent la forme du volontariat de solidarité internationale. Ce statut est aujourd'hui minimal. Les organisations non gouvernementales et les services de l'Etat ont donc, de concert, souhaité élargir et adapter ce statut, qui - c'est le moins que l'on puisse dire - manquait de cohérence.

Je voudrais, monsieur le monsieur le ministre, rappeler ce qui existe actuellement. Le volontariat à l'étranger est un statut juridique morcelé. Il relève de la loi de 2 000, comme vous l'avez signalé dans votre discours et du décret du 30 janvier 1995.

Je ne peux manquer de signaler l'existence de ce que l'on appelle l'Association française des volontaires du progrès, qui réunissait environ 300 jeunes en 2003. Ces jeunes accomplissaient des missions d'une durée minimum de deux ans, majoritairement en Afrique francophone, grâce à une subvention du ministère des affaires étrangères couvrant les deux tiers du budget de l'association. Ils accomplissaient - je tiens à le préciser à cette tribune - une mission de service public.

Cette réforme conforte le volontariat de solidarité, mais exige également des engagements financiers.

Le projet de loi sur le volontariat de solidarité internationale est donc l'aboutissement d'un processus de concertation. Il s'appuie sur une convergence objective d'intérêts entre les pouvoirs publics et les associations. Le volontariat répond, en effet, à des besoins criants dans les pays en développement et à une volonté d'engagement solidaire de ces jeunes - et moins jeunes - qu'il faut encourager.

Le projet de loi vise aussi à promouvoir un cadre juridique adapté au développement au volontariat. Il est créé un contrat spécifique qui organise une « collaboration désintéressée » - c'est l'expression employée - entre l'association et le volontaire, ce qui écarte l'application du code du travail. Ce contrat écrit est défini par ses signataires, qui doivent répondre à des conditions de nationalité et d'agrément, et par son objet : « l'accomplissement d'une mission d'intérêt général à l'étranger dans les domaines de la coopération au développement et de l'action humanitaire ».

Le projet ouvre ainsi la possibilité d'accéder au statut de volontaire, non seulement aux Français et aux ressortissants de l'Union européenne, mais aussi aux ressortissants des Etats membres de l'Espace économique européen et aux étrangers non communautaires ayant la qualité de résidents en France. Compte tenu du nombre d'étrangers employés par des associations françaises - entre 180 et 200 personnes -, je proposerai à la commission d'aménager la condition de nationalité, sans pour autant ouvrir très largement cette possibilité.

La rupture éventuelle du contrat exige un préavis d'au moins un mois et, quel que soit les cas, il appartient à l'association d'assurer le retour du volontaire vers son lieu de résidence habituel.

Afin de faciliter la réinsertion de celui-ci, le projet de loi prévoit qu'un certificat d'accomplissement de volontariat international soit délivré à l'issue de la mission. Et je vous proposerai par le biais des amendements d'exiger du volontaire un rapport de mission, qui sera publiable. L'ensemble des compétences acquises dans l'exécution de sa mission pourra être pris en compte au titre de la validation des acquis de l'expérience quand elles ont un rapport direct avec le contenu d'un diplôme.

A son retour de mission, le volontaire se verra, s'il est salarié de droit privé ouvrir des droits à l'indemnisation de chômage.

On observe donc, à ce niveau, une amélioration tant de l'indemnisation du chômage que de la validation des acquis.

Le projet de loi ne contient pas de dispositions particulières concernant les contrats en cours conclus sur le fondement du décret de janvier 1995 précité. Je souhaite que des précisions soient apportées à cet égard, afin d'éviter la multiplication des contentieux.

Aussi, je suggère de préciser dans un article additionnel que la loi entrera en vigueur trois mois après sa promulgation, afin que les décrets d'application soient publiés dans des délais raisonnables. Il s'agit là d'une précaution. Je suis prêt à retirer cet amendement si le Gouvernement s'engage à prendre ces décrets dans des délais assez brefs.

On précisera par ailleurs que les contrats de volontariat conclus avant l'entrée en vigueur de la loi resteront régis, jusqu'à leur date d'échéance, par le décret de 1995.

Le champ géographique du volontariat est élargi : n'en sont plus exclus que les États membres de l'Union européenne et ceux appartenant à l'Espace économique européen. En revanche, la durée des missions est encadrée. Elle est limitée à deux ans et la durée cumulée des missions accomplies par un volontaire, de façon continue ou non, ne peut excéder six ans, ce qui méritera réflexion lors de la discussion des articles.

Les conditions matérielles de la mission sont encadrées : prise en charge des voyages par l'association, congés payés de deux jours par mois, formation avant le départ, versement d'une indemnité permettant une vie décente - en moyenne, 152 euros par mois. Cette indemnité n'est pas imposable. Elle est exonérée de cotisations sociales. Elle est arrêtée de façon contractuelle pour chaque volontaire, mais plafonnée au montant de l'indemnité des volontaires civils. La protection sociale doit «  être d'un niveau au moins égal à celui du régime général de la sécurité sociale française », et ses coûts sont à la charge de l'association.

Le recours à la commission du volontariat a fait l'objet d'un débat au sein de la commission des affaires étrangères. L'agrément délivré par le ministère des affaires étrangères pour une durée limitée sera désormais nécessaire à l'envoi de volontaires, que leur mission fasse l'objet d'un financement public ou non.

Une Commission du volontariat de solidarité internationale, composée de manière paritaire de représentants des associations de volontariat et de représentants de l'État  est instituée. Nous examinerons un amendement concernant la composition de cette commission qui, pour répondre au souhait du Gouvernement, devrait rester paritaire.

Le financement de ce dispositif est un point important. Le contrat de volontariat de solidarité internationale implique des charges nouvelles pour les associations. De plus, l'ouverture des financements à des missions d'une durée plus courte devrait augmenter le nombre des associations qui sollicitent un agrément. Il conviendra que le budget consacré au volontariat associatif soit mieux adapté.

La promotion du volontariat de solidarité internationale devra être accompagnée d'un effort budgétaire soutenu. En effet, le budget consacré au volontariat sur le crédit du ministère des affaires étrangères est resté stable depuis de nombreuses années. Doté de 19,6 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2003, l'article 20 du chapitre 42-13 du budget du ministère des affaires étrangères a été amputé de 10 % de ses crédits en février 2003, puis affecté par un gel des crédits de report, ce qui a placé certaines associations dans des situations très difficiles.

Le budget pour 2004, dont la dotation est stable, ne devrait pas subir de gel. En effet, il a été confirmé au rapporteur que, si la maîtrise des dépenses de l'Etat constituait une priorité du Gouvernement, les crédits affectés au financement de secteurs plus particulièrement prioritaires, comme l'action extérieure de la France et l'aide publique au développement, ne devraient pas subir d'amputation.

Pour la commission des affaires étrangères, l'adoption de ce projet de loi s'impose, pour permettre une mise en place du cadre législatif et réglementaire couvrant toutes - ou presque - les formes de volontariat international, lequel sera articulé autour de deux textes : la loi de 2000 et la nouvelle loi, qui organisera une relation de collaboration désintéressée entre une association et un volontaire de solidarité internationale.

Cette égalité de traitement est en elle-même un signe que les pouvoirs publics attachent une égale importance à l'une et à l'autre forme de volontariat international.

Par ailleurs, ce texte conforte cette spécificité française qu'est le volontariat, sorte de bénévolat indemnisé, qui s'inscrit dans une démarche de générosité.

M. René André. Très bien !

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Je salue le fait, monsieur le ministre, que vous entamiez votre mandat, par l'examen de ce projet de loi qui se situe dans le droit fil de la culture française en matière internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel Destot, pour le groupe socialiste.

M. Michel Destot. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat - chacun en convient - est important.

Important parce que très attendu par tous ceux qui font vivre, souvent avec beaucoup de détermination et de générosité, notre politique de solidarité internationale.

Il est important aussi, me semble-t-il, à un moment où nombreux sont ceux qui doutent de notre capacité à intervenir face à une mondialisation, qui est, aux yeux de certains, porteuse de menaces et qui, en tout cas, offre bien peu d'humanité pour le plus grand nombre.

C'est pourquoi la commission des affaires étrangères a décidé de créer une mission d'information sur les ONG françaises - mission que j'ai l'honneur de présider et dont mon collègue Roland Blum assure les fonctions essentielles de rapporteur. Nous avons entamé nos travaux, ce matin, par l'audition des représentants de Coordination Sud.

Nombre de questions qui seront abordées lors de l'examen de ce projet de loi sont au cœur des préoccupations exprimées par les acteurs de terrain de la solidarité internationale, acteurs qui présentent à l'étranger ce que j'appellerai «  le beau visage de la France ».

Pour notre pays, ces questions ne sont ni mineures, ni marginales. vous l'avez vous-même souligné, monsieur le ministre.

A la fin de l'année 1998, les organisations non gouvernementales regroupaient près de 1 750 volontaires français, oeuvrant dans quatre-vingt-six pays. Ce sont aujourd'hui 2 200 volontaires qui se sont engagés pour des missions de solidarité internationale. C'est dire si le volontariat a connu un développement sans précédent au cours de ces dernières années. Le droit devait prendre en compte cette évolution.

Le principe même de ce projet de loi sur le contrat de volontariat de solidarité internationale est par conséquent une bonne nouvelle pour le monde humanitaire associatif, d'autant qu'il vise à combler un vide juridique en donnant force de loi à des pratiques qui, bien que conformes au décret de 1995, demeuraient fragiles dans la mesure où elles pouvaient être attaquées en justice en raison de leur non-conformité au droit du travail.

Nous devons aller au fond des choses. Il convient de lutter efficacement contre la précarisation du statut de volontaire et pour un financement pérenne, faute de quoi ce texte ne sera qu'un effet d'annonce sur la  possible multiplication du nombre des volontaires et sur la « magnifique » générosité de la société française, masquant dans le même temps, l'insuffisance de l'engagement de l'Etat au regard des besoins nécessaires.


J'ai apprécié, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vos propos d'ouverture ; nous verrons en tout cas s'il est possible de progresser au cours du débat. Mais nous n'avons pas encore atteint l'objectif final d'une loi qui permettrait la reconnaissance tant juridique qu'institutionnelle et sociale du volontariat, la protection du citoyen volontaire et, enfin, la garantie d'une juste implication financière de l'Etat pour soutenir efficacement les associations.

Je reprendrai rapidement ces trois points, sans esprit de polémique, car le sujet ne s'y prête pas.

D'abord, votre texte ne présente pas suffisamment encore de garanties sur le plan social.

Dans 80 % des cas, les humanitaires sont des « volontaires », conformément au décret de 1995. Or ce statut, vous le savez, ne leur donne pas droit aux ASSEDIC. Ne restent, pour assurer l'existence au retour de mission, que l'indemnité de subsistance, de 610 à 1 676 euros par mois, et une prime de réinsertion - 3 658 euros au maximum pour deux ans de « service » - versée si le volontaire n'a pas trouvé de travail trois mois après son retour. Le résultat, c'est que de nombreux ex-volontaires doivent demander le RMI pour s'en sortir et risquent, ce faisant, de s'éloigner progressivement du marché du travail.

Votre projet de loi ne prend donc pas suffisamment en compte le problème de la reconversion. Pour de nombreux humanitaires, celle-ci est souvent difficile. L'humanitaire a, disons-le, un côté exaltant. Le retour à la vie normale beaucoup moins ! L'envers du décor, c'est pour beaucoup un moment de décompression, peut-être de déphasage, en tout cas une étape d'autant plus difficile à négocier que la mission aura été intense et les responsabilités nombreuses. Après avoir côtoyé la guerre, la famine et le plus souvent la misère, les bénévoles de retour comprennent moins bien les préoccupations matérielles de leurs proches. Et, après des années de volontariat, ils ne savent pas toujours comment transposer leur expérience dans le secteur marchand. De leur côté, les employeurs peuvent craindre d'embaucher des gens au profil quelque peu atypique et qu'ils peuvent imaginer par trop utopistes. Le droit du travail doit donc les protéger et créer un environnement favorable à leur insertion professionnelle. Il y va également de l'intérêt de nos entreprises qui ne peuvent se priver de personnels qualifiés qui auront accumulé à l'étranger des expériences professionnelles particulièrement précieuses pour notre pays.

Face aux graves difficultés sociales rencontrées par les bénévoles de retour de mission, votre texte pouvait être à mes yeux plus ambitieux, car l'enjeu était de taille pour le milieu humanitaire français : éviter la fuite d'une grande partie du personnel expérimenté des ONG françaises vers des ONG étrangères, particulièrement anglo-saxonnes, qui offrent aux expatriés de la solidarité internationale tout à la fois de meilleures garanties sociales et une plus grande reconnaissance professionnelle. Voyez, monsieur le ministre, le mode de fonctionnement de pays à forte culture humanitaire comme l'Allemagne ou l'Angleterre. La France doit tenir son rang dans un secteur dans lequel le savoir-faire de ses ONG, vous l'avez très justement rappelé, est reconnu dans le monde entier.

Le groupe socialiste avait présenté un amendement visant à faire en sorte que le volontariat de solidarité internationale bénéficie de l'aide financière de l'Etat, au titre de la protection sociale du volontaire, de l'assurance chômage et d'une prime forfaitaire de réinsertion pour les volontaires de retour en France. Ce dispositif devait, estimions-nous, bénéficier aux demandeurs d'emplois, nombreux à ne pas remplir les conditions d'attribution du RMI. Il est en effet du devoir de l'Etat d'aider les volontaires à surmonter au moins financièrement ces difficultés de réinsertion. Certes, le volontaire de retour peut toucher pendant neuf mois une prime forfaitaire de réinsertion versée par le ministère des affaires etrangères, mais cette disposition s'annule lorsque l'association n'est pas reconnue et si la durée de la mission est inférieure à un an.

A cet amendement, vous avez opposé l'article 40. Je le regrette, et avec nous, on peut le penser, beaucoup d'associations. Cela dit, monsieur le ministre, je suis prêt à vous entendre, comme j'ai cru entendre M. le rapporteur. Si vous avez d'autres pistes, d'autres solutions de cette nature, sociales et financières, à nous proposer, nous sommes prêts à vous accompagner.

Notre deuxième souci était de limiter la précarité du statut de volontaire. Nos craintes à cet égard se sont apaisées après le travail en commission. Un amendement de mon collègue Jean-Paul Bacquet a été retenu, dans l'esprit tout au moins, qui vise à limiter à trois ans la durée maximale des missions accomplies de façon continue ou discontinue par un volontaire et qui prévoit la requalification du contrat de volontariat en contrat à durée indéterminée en cas de dépassement de ce délai.

Cet amendement répond à la diversité des types de missions que l'on rencontre dans le monde du volontariat international. Leur multiplication tend à favoriser la précarisation des volontaires et freine toute possibilité de s'engager de manière professionnelle dans ce type d'activité comme cela se pratique déjà dans les pays anglo-saxons notamment. Encadrer strictement les missions dans le temps - trois ans - et préciser le temps au-delà duquel celles-ci s'apparentent à un véritable emploi permettrait de développer des actions de solidarité internationales longues, tout en évitant que ce type de contrat n'enferme dans une situation précaire ceux qui souhaitent en faire leur profession.

Notre rapporteur a donné un avis favorable à l'amendement de M. Jean-Paul Bacquet - en tout cas dans son esprit. J'appelle votre attention sur le fait que cette durée répond aux conditions fixées par l'article 3 en matière de validation des acquis. Refuser de prolonger les missions au-delà de trois ans dans le cadre du salariat dissuadera, du moins peut-on le penser, les associations de recruter à moindre coût des personnels qui pourraient d'ores et déjà se prévaloir d'une qualification professionnelle reconnue dans la solidarité internationale.

Se pose enfin la question - M. le rapporteur y a lui aussi fait allusion - des moyens budgétaires nécessaires pour soutenir le travail des ONG de solidarité internationale ; sur ce point, notre vigilance n'a pas lieu de s'affaiblir. Connaissant la situation des finances de l'Etat, tout porte à croire que sa participation - 8,4 % - au financement des associations de solidarité ne progressera pas dans le budget pour 2005... Compte tenu de la façon, peu « centrale », dont est généralement organisé l'examen de son budget, les arbitrages se font rarement au profit du ministère des affaires étrangères. Je ne me fais guère d'illusions pour 2005, et je ne vois malheureusement pas comment la ligne de crédits destinée aux organisations non gouvernementales augmenterait. J'aimerais être démenti, monsieur le ministre, et si vous nous annonciez une bonne nouvelle, je me rallierais volontiers à votre point de vue.

A partir du moment où nous votons un texte qui élargira le nombre d'attributaires de l'aide de l'Etat aux volontaires internationaux dans le cadre d'un budget constant, nous prenons le risque d'affaiblir les associations de développement, à commencer par celles qui ont le plus de mal à se financer par la voie de la levée de fonds. On peut craindre que les associations de volontariat financièrement les plus fragiles ne se retrouvent pénalisées si le montant global de l'aide apportée par le budget de l'Etat reste inchangé tandis que le nombre de volontaires concernés par le nouveau statut s'accroîtra. Les associations intervenant dans l'aide humanitaire d'urgence disposent d'une capacité à lever des fonds beaucoup plus importante que les associations axées sur le développement, beaucoup plus dépendantes des dotations budgétaires allouées par l'Etat - M. Godfrain vient au demeurant de rappeler que celles-ci n'avaient pas été revalorisées depuis plus de quinze ans.

Or le texte, alors même qu'il élargit considérablement le champ de l'ouverture du droit à une aide publique, ne comporte pas le moindre engagement financier de l'Etat - force nous est de nous en remettre aux propos du ministre et du rapporteur - alors que la ligne de crédits destinée au soutien aux ONG, répétons-le, est restée inchangée depuis 1987. Certaines ONG peuvent légitimement craindre que l'éparpillement de maigres crédits ne réduise leurs capacités d'action. Donner le statut de volontaires de la solidarité internationale à 20 000 personnes au lieu de 2 000 actuellement et n'en financer que 5 000 avec les mêmes 20 millions d'euros qu'en 1987, c'est s'offrir un bel effet d'affichage politique sur « la France généreuse qui augmente son aide publique au développement » tout en laissant tomber nombre d'ONG et d'actions sur le terrain.

Nous attentons vos réponses, monsieur le ministre, sur les moyens financiers nouveaux qui permettraient de rendre votre loi vraiment applicable. En l'absence de garantie sociale pour le statut de volontaire et compte tenu des risques que votre texte fait peser sur l'existence même de certaines associations de développement, le groupe socialiste déterminera son vote en fonction de vos réponses. Il ne dépend que de vous, monsieur le ministre, que nous puissions vous approuver pleinement.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Leteurtre, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Claude Leteurtre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre d'une mondialisation de plus en plus prononcée, l'heure est plus que jamais au dialogue et à la coopération, mais également au développement économique et culturel. Vu sous cet angle, le volontariat international doit être considéré comme l'un des éléments du rayonnement de la France à l'étranger. Il offre à nombre de Français, le plus souvent jeunes, la possibilité de participer à des actions très diversifiées dans des pays autres que ceux de l'Union européenne. Il faut souligner que cette forme d'engagement trouve de plus en plus de candidats en France et plus largement en Europe - ce dont, bien évidemment, le groupe UDF se réjouit.

La solidarité entre les peuples ne s'exprime pas seulement par la voie de la coopération et de la diplomatie. Elle s'enracine également dans la générosité et le dévouement de milliers de femmes et d'hommes prêts à sacrifier une période de leur vie pour rendre service aux populations les plus démunies dans le cadre d'une action humanitaire.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui a fait l'objet d'une concertation longue et approfondie avec les ONG. Il s'agit de répondre aux attentes et aux besoins des acteurs de terrain : le contrat de volontariat de solidarité internationale est donc particulièrement attendu par les associations françaises engagées dans des actions internationales. Ce texte permettra de combler le vide juridique préjudiciable au développement du volontariat solidaire en se substituant au décret de 1995.

Le statut de volontaire dans un cadre associatif devait de toute urgence être rénové sous peine d'être attaqué en justice en raison de sa non-conformité au droit du travail. De surcroît, les associations se heurtent à de sérieuses difficultés pour entrer dans le cadre de la loi de 2000. Ainsi sera renforcée l'égalité de traitement entre un volontariat civil, adapté aux besoins de l'Etat et des entreprises, et un volontariat solidaire dans le cadre d'une relation de collaboration désintéressée liant une association et un volontaire de solidarité internationale.

Mais si ce projet de loi est une reconnaissance de la valeur de l'action des organisations de solidarité internationale, il apporte aussi une reconnaissance pour les volontaires eux-mêmes. Ceux-ci peuvent en espérer une meilleure prise en compte, dans leur parcours professionnel, des acquis de cette expérience généreuse, riche et formatrice. Aussi le groupe UDF se réjouit-il de voir le deuxième alinéa de l'article 4 obliger les associations à assurer une formation aux volontaires. Cette formation leur sera à l'évidence utile dans le cadre de leurs missions, mais également dans leur parcours personnel. A l'heure où l'accent est mis sur la formation professionnelle, le volontariat solidaire pourra ainsi être considéré comme un facteur d'amélioration des possibilités d'emploi des volontaires, tant dans le cadre des ONG que dans celui d'une recherche d'emploi en France.


Enfin, il me paraît primordial que, quelles que soient les raisons du retour du volontaire, ce soit l'association qui assure les conditions matérielles de ce retour jusqu'au lieu de résidence habituelle.

Mais le texte issu du Sénat doit encore être amélioré par notre assemblée sur des points décisifs. Le groupe UDF soutient en particulier les amendements de la commission des affaires étrangères, qui ramènent de six à trois ans la durée maximale des missions dans le cadre légal du volontariat.

Au-delà de cette durée, il nous paraît, en effet, nécessaire que le volontaire bascule dans un CDI. Ces dispositions permettront de responsabiliser les personnes qui choisissent le volontariat de solidarité internationale. Elles éviteront, notamment, qu'elles ne se lancent à corps perdu dans ce type d'activité aux dépens de leur propre intérêt personnel. Les associations d'anciens volontaires de la solidarité constatent en effet qu'un nombre croissant de volontaires, évalué aujourd'hui autour de 30 %, se retrouvent dans une situation de grande précarité, sans ressources financières, sans couverture sociale, sans avoir cotisé parce qu'ils sont restés trop longtemps éloignés des réalités professionnelles. Il faut donc encourager, au-delà d'une période en quelque sorte probatoire d'une durée raisonnablement courte, la professionnalisation de ce type d'activités. C'est le moyen de garantir le bon niveau des ressources humaines engagées sur le terrain aux côtés des plus défavorisés et d'éviter que d'anciens volontaires de retour au pays après des années au service des plus pauvres ne deviennent eux-mêmes, injustement, des « cas sociaux » bien malgré eux.

C'est pourquoi il est si important, en plus de l'accession du volontaire à la validation des acquis de l'expérience, d'adopter l'amendement de la commission à l'article 3 qui rend obligatoire la délivrance au volontaire, par l'association, d'un certificat d'accomplissement du VSI et la remise par le volontaire d'un rapport d'activité. Ce certificat et ce rapport pourront faciliter l'insertion professionnelle et sociale du volontaire et lui permettre de valoriser son expérience dans le cadre d'une éventuelle recherche d'emploi.

Je souhaiterais faire un dernier commentaire au sujet de la commission consultative du volontariat de solidarité internationale. Le groupe UDF approuve la rédaction proposée par le rapporteur de la commission des affaires étrangères, qui introduit dans la composition de cette commission la présence de deux parlementaires, un député et un sénateur. Mais ne faudrait-il pas également associer à cette commission des représentants des volontaires ou des associations d'anciens volontaires...

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Tout à fait !

M. Claude Leteurtre. ...afin qu'elle prenne en compte dans chacun des avis qu'elle sera amenée à rendre, les retours d'expérience ? Nous aurons sans doute l'occasion d'en discuter dans le détail lors de l'examen des articles.

Bien sûr, ce projet de loi ne lève pas tous les obstacles liés au développement de la coopération et du volontariat humanitaire. De réelles inquiétudes subsistent quant au financement de ces contrats. Certaines ONG, les plus petites, craignent que l'éparpillement des crédits qui n'ont pas augmenté depuis plusieurs années ne réduise leurs capacités d'action à néant. Ces craintes sont d'autant plus justifiées que le projet de loi élargit considérablement le champ de l'ouverture du droit à une aide publique. Il faut bien reconnaître que nous ne disposons d'aucune indication à ce sujet, et notre collègue Bruno Bourg-Broc s'en est inquiété à juste titre en commission.

Je souhaite, monsieur le ministre, que vous éclairiez la représentation nationale sur ce point essentiel qui conditionne en grande partie la réussite de ce projet de loi.

En conclusion, le groupe UDF, sous réserve de l'adoption des amendements du rapporteur, votera ce texte qui permettra d'aider les nombreuses ONG dont nous saluons l'action aux côtés des populations plongées dans la guerre ou le dénuement. J'espère que cette ambition fera l'objet d'un vaste consensus au sein de notre assemblée. Il y va, ne l'oublions pas, du positionnement de la France sur le plan international et de la construction d'un modèle de citoyenneté inspiré des droits de l'homme. En tant qu'ancien membre d'une ONG, je me permets de vous dire, monsieur le ministre, que ce texte est bon, intelligent et pragmatique. Il ne reste plus qu'à lui donner le lustre et l'éclat de la générosité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Liberti, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. François Liberti. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, chers collègues, ce projet de loi répond à deux objectifs généraux. Il s'agit, d'une part, de favoriser l'engagement de nos jeunes concitoyens dans des actions de solidarité internationale et, d'autre part, de renforcer la politique d'aide au développement.

Autrement dit, il s'agit de permettre à celles et à ceux qui le souhaitent, de consacrer un temps dans leur vie à des actions n'ayant aucun but lucratif et relevant exclusivement de l'intérêt général.

En ce sens, le groupe des députés communistes et républicains ne peut ici que réaffirmer son soutien de principe à ce type d'engagement citoyen, qui offre des perspectives alternatives au modèle de la mondialisation libérale fondé sur la loi du profit, la loi du plus fort.

Le volontariat international revêt aussi une dimension particulière, qui relève de valeurs humanistes et d'aspirations collectives, qui font de plus en plus défaut à nos sociétés matérialistes et individualistes.

Pour toutes ces raisons, nos concitoyens doivent être soutenus et protégés lorsqu'ils s'engagent dans cette aventure citoyenne. D'autant que les jeunes sont nombreux à vouloir s'engager au sein d'une association et, que dans le même temps, le volontariat se professionnalise.

Cependant, le volontariat ne doit pas se substituer à l'action de l'Etat en matière d'aide au développement. En d'autres termes, le volontariat international ne doit pas être synonyme de désengagement de l'Etat, de la France, car la solidarité internationale doit se manifester également à ce niveau.

Aussi, si un tel engagement citoyen doit être valorisé et soutenu, parce que c'est un signal fort contre la marchandisation de notre société, il est évident qu'il doit être juridiquement encadré pour ne pas être dénaturé et devenir un salariat déguisé.

Il s'agit donc d'encadrer ce type d'initiatives, dans l'intérêt même des acteurs concernés. La difficulté tient au fait que le contrat de volontariat de solidarité internationale n'est pas un contrat de travail de droit commun. L'article 1er du projet de loi le définit comme organisant une collaboration désintéressée entre une association agréée et une personne majeure pour « l'accomplissement d'une mission d'intérêt général à l'étranger dans les domaines de la coopération au développement et de l'action humanitaire ». Cette définition législative n'est pas assez précise et présente des carences que le Gouvernement souhaiterait pallier par un décret. Est-ce vraiment l'instrument normatif adéquat ?

Plus généralement, nous restons circonspects à l'égard de la disposition du projet de loi prévoyant que certains détails du texte devront être apportés a posteriori, par le biais de règlements d'application. Le projet de loi fixe un cadre général, laissant aux décrets et arrêtés, c'est-à-dire au Gouvernement, le soin de le préciser loin du regard de la représentation nationale.

Ce renvoi constitue une source d'insécurité juridique, alors même que l'objectif principal de ce texte est de renforcer la protection légale des associations et des volontaires. Le recours aux règlements d'application ne doit pas constituer un moyen pour le Gouvernement de revenir sur les quelques avancées du projet de loi.

C'est pourquoi cette étape devra de toute manière s'appuyer sur une nouvelle consultation des associations concernées, pour améliorer la procédure d'agrément par le ministère des affaires étrangères, y compris les critères qui seront pris en compte.

L'engagement doit s'accompagner de garanties juridiques et sociales si l'on veut à la fois protéger les associations et les volontaires et éviter de créer des obstacles à l'engagement de ces derniers.

Le développement du volontariat solidaire suppose que lui soit donné un fondement juridique adapté et sécurisant. Cet objectif doit s'inscrire dans le cadre d'un équilibre entre l'intérêt des associations et celui des volontaires.

Actuellement, le volontariat civil international est organisé par la loi du 14 mars 2000. Ce système est adapté aux besoins et attentes de l'Etat et des entreprises, mais pas à ceux des associations. Cette loi institue en effet une limite de vingt-huit ans et un rapport juridique de droit public, qui ne correspondent pas à la spécificité des associations et du profil général du volontaire.

Par ailleurs, le volontariat associatif est actuellement défini par un décret du 30 janvier 1995. Celui-ci concerne une partie du volontariat associatif de solidarité internationale, c'est-à-dire l'envoi de volontaires majeurs, sans limite d'âge, pour des missions d'au moins un an sous la responsabilité d'associations agréées par l'Etat, qui prend à sa charge une partie du coût des missions.

Or ce régime présente une faille juridique majeure : il ne couvre pas les missions inférieures à un an, alors même que ce type d'actions représente près de mille opérations par an, parmi lesquelles les actions humanitaires d'urgence.

En ce sens, nous soutenons l'institution d'un contrat qui « organise une collaboration désintéressée » entre une association agréée et une personne majeure.

Mais au-delà de la situation des associations, à laquelle nous attachons une attention particulière dans ce dispositif, le sort des volontaires eux-mêmes mériterait une réflexion approfondie de votre part.

Nous devons veiller au respect des devoirs des associations envers les volontaires. Or le manquement des associations n'est prévu par aucun moyen, ni aucune sanction.

Plus généralement, nous faisons part de notre inquiétude sur le faible accompagnement des volontaires à l'occasion de leur retour de mission. Ces jeunes volontaires ne bénéficient, à la fin de leur contrat, d'aucune aide financière ni d'allocations chômage, leur action de volontariat n'étant pas juridiquement assimilable à un emploi.

Il s'agit d'une carence flagrante du présent projet de loi. En fin de contrat, dans la très grande majorité des cas, les volontaires sont confrontés à des situations très difficiles, notamment aux plans financier, matériel et professionnel, qui les plongent parfois dans un isolement et un mal-être profond. Leur engagement mérite-t-il un tel dénouement ?

Nous considérons que le système de volontariat en vigueur s'avère, au-delà d'une certaine durée, source de précarité et d'insécurité. Ainsi, le projet ne prévoit qu'une cotisation minimale au régime général « vieillesse » et n'ouvre pas droit aux ASSEDIC.

Ce dernier point est crucial car il peut plonger les volontaires en fin de contrat dans une situation de précarité dramatique, comme l'a montré l'enquête de résonances humanitaires

En outre, cela rend la reconversion des volontaires de la solidarité internationale difficile, puisque ceux-ci ne disposent pas des ressources suffisantes pour réorienter leur carrière professionnelle.

C'est pourquoi nous vous proposons d'améliorer le texte, en particulier sur la problématique de la réinsertion professionnelle et la validation des acquis et de l'expérience, qui constituent une des inquiétudes centrales des volontaires.

Plus généralement, le projet de loi part de bonnes intentions car il précise la place des associations dans le nouveau dispositif du volontariat international. Mais nous ne sommes pas dupes. La question des moyens est largement éludée et ce n'est pas sans raison que les associations craignent les effets pervers de ce dispositif, compte tenu de l'absence des crédits nécessaires à sa mise en œuvre concrète.

Le groupe des députés communistes et républicains votera ce texte si celui-ci fait l'objet d'améliorations en faveur des acteurs de la solidarité internationale, notamment sur le volet financier. Mais si tel n'était pas le cas, il ne pourrait le voter en l'état.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Bourg-Broc, pour le groupe de l'UMP.

M. Bruno Bourg-Broc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la solidarité internationale, dans son volet « aide humanitaire » ou dans celui de la coopération en faveur du développement, fait indéniablement partie de la culture de nos concitoyens. Mais elle ne serait que virtuelle sans la mondialisation des échanges et des cultures.

Et c'est parce que la culture française est généreuse qu'un tel projet, même si ses innovations sont limitées, peut voir le jour. Ce projet a le mérite de rassembler des dispositifs épars et de combler les lacunes du précédent système. Désormais, et même si ce texte n'est pas parfait, il met en place un cadre légal offrant un statut officiel pour le volontaire civil engagé dans le cadre d'une association ; une reconnaissance de la générosité des Français, de leur engagement personnel, et de leur don de soi ; des procédés nous donnant techniquement les moyens de nos ambitions en matière de coopération internationale.

Vous nous avez exposé, monsieur le ministre, les objectifs de ce texte. J'aimerais cependant apporter quelques précisions concernant les conséquences positives, aux plans national et international, du projet qui nous est présenté.


Ce projet de loi permettra à la France de mobiliser plus de volontaires grâce à un cadre légal solide, complétant ainsi l'aide publique au développement. Comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre, le volontariat de solidarité internationale, tel qu'il est organisé aujourd'hui dans le cadre du décret de 1995, se heurte à deux difficultés majeures, auxquelles le texte remédie.

La fragilité du cadre réglementaire ne permettait pas de définir correctement les droits et obligations de l'association et du volontaire, lequel n'était en outre pas couvert lorsque sa mission excédait un an. La création de ce nouveau contrat sui generis pallie ces inconvénients. Désormais, le volontaire s'engage à partir de dispositions légales précises qui lui garantissent le sérieux et l'utilité d'une mission devenant d'intérêt général.

Contrat de droit privé, sa durée est précisée et garantit une réinsertion accompagnée. Une formation préalable est dispensée, une affiliation à un régime de sécurité sociale prévu et une indemnité versée. C'est donc en étant assuré d'être utile, protégé et formé que s'engage le volontaire, dont le statut sera intermédiaire entre le bénévolat et le salariat.

Un amendement adopté en commission, relatif à la formation du volontaire, doit, à mes yeux, être précisé. En effet, le volontaire doit remettre un rapport d'activité à l'association afin de faciliter sa réinsertion et pour que les associations soient informées du déroulement de la mission. Si le principe du rapport est intéressant, il peut devenir trop contraignant, notamment dans l'hypothèse de courtes missions. Nous y reviendrons sans doute lors de l'examen des articles.

Afin de garantir le sérieux des missions de volontariat, les associations seront agréées Un décret pris prochainement précisera ainsi les critères d'agrément et instituera la commission paritaire du volontariat de solidarité internationale. Elle présentera le double avantage de permettre une concertation constante entre l'administration et les associations et de servir de base de consultation des demandes d'agrément ou pour fixer les montants des indemnités.

Je souhaite que cette commission puisse promouvoir un code de bonnes pratiques en ce qui concerne les droits et devoirs des volontaires et des associations, qui doivent notamment pouvoir œuvrer à la réinsertion professionnelle après l'expiration de leur contrat de mission.

Par la flexibilité, la souplesse et la rigueur instaurées, conjuguées à une sécurité juridique pour le volontaire comme pour l'association, qu'il propose, ce texte incitera davantage de personnes à devenir volontaires de solidarité internationale. Le contrat de solidarité internationale constitue ainsi un excellent soutien à la politique de la France en matière d'aides publiques au développement.

Le Président de la République, on le sait, souhaite privilégier davantage encore notre aide internationale. Ce texte va dans ce sens, d'autant que, s'agissant des aides financières de l'Etat, un mécanisme proche de celui instauré par le décret de 1995 sera maintenu. Nous savons que le budget du ministère des affaires étrangères pour 2004 y consacre près de 20 millions d'euros. Ce texte devrait conduire à une augmentation massive du nombre de volontaires que nous devrons accompagner par financement d'Etat. Il faudra sans doute réfléchir à un financement plus adapté, comme je l'ai indiqué lors de l'examen en commission, probablement en augmentant le montant des subventions accordées aux associations et en prévoyant leur programmation.

De même, il aurait été intéressant que le texte prévoie le principe et les modalités de ce financement. D'autres avant moi ont regretté qu'il n'en soit pas ainsi.

Il s'agit également de concilier la solidarité internationale collective, exprimée par les aides d'Etat, et la solidarité individuelle. Nous retrouvons ainsi les valeurs de la France que nous nous efforçons de promouvoir et d'exporter : générosité, respect de l'autre, entraide. C'est dans le même esprit que travaillent les ONG de volontariat. C'est la raison pour laquelle elles ont été largement consultées. J'espère qu'elles continueront de l'être s'agissant des textes d'application.

Ce projet donne donc à la France les moyens d'être digne de sa position sur la scène internationale, tout comme elle se montre digne de la générosité de ses concitoyens.

En effet, et cela a aussi été rappelé. Il y a six ans, près de 1 800 volontaires français œuvraient dans quatre-vingt-six pays. Pour autant, à l'époque 26 % d'entre eux, soit près du tiers, étaient des coopérants militaires. Aujourd'hui, plus de 2 200 volontaires sont engagés dans ces missions internationales. Après la suppression de la limite d'âge, nous pouvons nous attendre à ce que ce nombre augmente considérablement. Non seulement c'est une chance formidable pour le pays accueillant le volontaire en mission, mais encore c'est un atout pour la société française qui pourra s'enrichir d'expériences internationales multiples. On ne revient jamais tout à fait le même de ce genre de missions humainement difficiles.

En outre, si la majorité de ces volontaires sont des jeunes, ils exporteront dans ces pays leur élan et leur fougue et ils en reviendront formés. Mais n'oublions pas qu'une grande partie de ces volontaires est plus âgée. Dès lors, ils exporteront l'expérience française et leur savoir-faire, pour importer un autre regard sur nous-mêmes. C'est un apprentissage réciproque dans le respect de la diversité culturelle.

Ce projet constitue en outre indirectement un nouvel élan pour la francophonie, laquelle est elle-même fondée sur les principes de respect de la différence, d'apport mutuel, d'engagement. En tant que président délégué de la section française de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, je ne peux rester insensible à cette démarche.

En excluant de son champ d'application le territoire de l'Union européenne, il s'agit essentiellement de promouvoir l'indispensable dialogue Nord-Sud. L'Afrique, l'Asie, resteront des lieux de mission.

De plus, permettre aux ressortissants des pays membres de l'Union européenne de participer et de s'impliquer dans ces missions constitue une nouvelle manifestation de l'esprit européen qui guide désormais nos actions internationales. Sans vouloir nous flatter, réjouissons-nous de constater que la France est le chef de file d'un mouvement de solidarité qui, de facto, deviendra européen. Car ce système ne restera pas isolé bien longtemps. S'il n'existe pas encore d'équivalent chez nos voisins, cela ne tardera sans doute pas. À cet égard, c'est aussi un texte d'exportation.

Pour conclure, monsieur le ministre, ce projet de loi permettra à un grand nombre de nos ressortissants d'exprimer plus librement leurs élans de générosité dans un cadre juridique stable, au sein d'associations agrées et dans un esprit de formation mutuelle.

Ce texte était très attendu. Bien entendu, le groupe UMP le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Henriette Martinez, pour le groupe UMP.

Mme Henriette Martinez. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n'entrerai pas dans le détail de ce projet, d'une part, parce qu'il a fait l'objet d'une longue préparation avec les associations concernées, qui en sont globalement satisfaites, et, d'autre part, parce que cela a été fait excellemment par notre rapporteur, Jacques Godfrain, président de l'Association française des volontaires du progrès. Tout au plus puis-je souhaiter que le Gouvernement ne mesure pas son soutien financier à un dispositif attendu depuis de nombreuses années. Mais de ce point de vue, je ne suis pas trop inquiète après le nouvel arbitrage rendu publiquement par le Président de la République en faveur des crédits du ministère des affaires étrangères en général et de l'aide au développement en particulier.

Vous nous avez indiqué qu'avec ce projet, votre objectif, est double. Il s'agit, en premier lieu, de favoriser l'engagement de nos compatriotes, jeunes et moins jeunes, dans des actions de solidarité internationale. Je crois que le texte que vous nous proposez permettra d'atteindre ce but. Vous entendez, en second lieu, renforcer l'efficacité de notre aide au développement. Nous ne pouvons qu'y souscrire.

Permettez-moi cependant de vous faire part de mes réflexions quant à l'efficacité de notre aide au développement. Vous n'ignorez pas qu'un grand nombre d'actions de développement initialement réussies grâce à l'aide internationale finissent par échouer lorsque aucune compétence locale ne vient prendre le relais de l'assistance étrangère. De ce point de vue, il risque d'en aller des interventions des nouveaux volontaires de solidarité internationale comme de celles de feu l'assistance technique française. En effet, après une baisse de 95 % de ses effectifs, il ne paraît pas excessif d'en parler au passé.

Réduits aux seules ressources de leur pays, les professionnels locaux ne retrouvent pas des conditions de vie et de travail convenables, notamment où l'on aurait le plus besoin d'eux, c'est-à-dire auprès des populations les plus défavorisées, dans les zones rurales ou périurbaines. Ils préfèrent donc exercer dans les quartiers les moins pauvres des capitales où ils peuvent compléter dans le secteur privé les trop maigres salaires de la fonction publique, ou bien travailler pour les organisations internationales et les ONG du Nord, voire s'expatrier dans les pays développés.

C'est particulièrement vrai dans les domaines de la santé et de l'éducation, qui sont pourtant les principales conditions du développement durable. Par exemple, dans un domaine aussi délicat que stratégique, puisqu'il résume à lui seul le déni des droits des femmes, que celui des fistules obstétricales, comment voulez-vous que la campagne mondiale lancée à l'initiative de l'UNFPA puisse prospérer au-delà de la période initiale des programmes soutenus par le Nord si les équipes africaines se retrouvent ensuite confrontées à une population trop pauvre pour assumer les coûts des interventions ? Et je n'évoquerai pas les volets prévention et réinsertion, pourtant indispensables à l'éradication de ce que beaucoup considèrent comme une seconde lèpre.

Soyons précis. Votre prédécesseur vous a laissé en héritage une proposition de Mme Obaid, présidente de l'UNFPA, que j'ai reçue récemment à l'Assemblée nationale, pour l'éradication de ces fistules au Bénin et au Tchad. Durant les deux années que durerait ce programme, chaque traitement serait subventionné à hauteur de 160 euros, à répartir entre chirurgiens, infirmiers et autres soignants. Mais après, les États ne pourront prendre le relais, pas plus que ces malheureuses femmes qui n'auront plus qu'à camper interminablement et misérablement dans la cour de l'hôpital, comme j'en ai vu à Niamey, en attendant le passage éventuel d'un chirurgien expatrié pour les opérer.

Monsieur le ministre, les plus avisées des ONG ont tiré les leçons de ces situations et prévoient désormais dans leur budget des compléments pour les professionnels locaux. Ne serait-il pas temps que, surmontant leur répugnance à financer des dépenses de fonctionnement, les bailleurs publics regardent à leur tour les réalités en face et se décident à prendre directement en charge l'amélioration des conditions de vie et de travail des professionnels de santé africains, en sorte que ceux-ci puissent accepter d'exercer là où les populations ont besoin d'eux, là où doit commencer le développement durable ?

Tel est le souhait que je tenais à formuler et dont la prise en compte ultérieure viendrait compléter, amplifier et surtout pérenniser les dispositifs d'aide mis en place grâce au volontariat de solidarité internationale.

J'espère pouvoir travailler avec vous sur ces propositions, monsieur le ministre, dans le cadre du groupe d'étude « population et développement » que je préside, avec l'ensemble de mes collèges membres de ce groupe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe UMP.

M. Philippe Vitel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques mois, le Premier ministre m'a chargé d'une mission parlementaire et m'a demandé de réfléchir aux moyens d'améliorer les relations entre les ONG et les entreprises dans le cadre de l'action humanitaire d'urgence.

Bien au-delà du cadre ainsi défini, cette mission m'a permis de m'imprégner des diverses problématiques constituant toutes un frein au développement de l'action humanitaire française, dont la faiblesse du cadre juridique régissant le volontariat de solidarité internationale. De plus, il s'agissait de répondre à une situation particulière liée à la suspension du statut de volontaire du service national et à laquelle la loi du 14 mars 2000 ne paraissait pas totalement adaptée.


Parallèlement à ces impasses juridiques, il existe aujourd'hui dans notre pays un formidable engouement, une énorme générosité, s'exprimant par un désir de venir en aide aux populations les plus démunies ou à celles victimes de catastrophes naturelles. D'un côté les besoins sont énormes, de l'autre nos concitoyens sont volontaires pour intervenir.

Il manquait un lien à tout cela. Aujourd'hui, monsieur le ministre, le texte que vous nous proposez en deuxième lecture répond au double objectif de favoriser l'engagement de nos compatriotes dans les actions de solidarité internationale et de renforcer l'efficacité de notre aide au développement. Ainsi, le Gouvernement encourage l'engagement sur le terrain et lui donne un cadre juridique attractif.

Actuellement, plusieurs cadres juridiques de volontariat de solidarité internationale coexistent : la loi du 14 mars 2000, relative au volontariat civil, qui vise à prendre la suite du service national de coopération, ne concerne que les jeunes de dix-huit à vingt-huit ans et place les volontaires sous un régime de droit public qui ne paraît pas adapté à l'action des associations ; le décret du 30 janvier 1995, relatif aux volontaires et aux associations de volontariat pour la solidarité internationale, fixe un cadre juridique, notamment en matière sociale, de la mission de volontaire organisée par le décret du 15 mars 1986 relatif aux associations de volontariat et aux volontaires pour le développement.

Aujourd'hui, monsieur le ministre, l'Etat, les ONG et les organisations de solidarité internationale peuvent se féliciter du net progrès que va générer ce texte, donnant un statut plus solide et un cadre juridique plus adapté et plus sûr aux volontaires. Cette loi vise, en effet, à sécuriser le régime juridique du contrat de volontariat de solidarité internationale jusqu'alors régi par un simple décret de 1995. Ce volontariat, je le rappelle, s'exerce spécifiquement dans le domaine de l'aide l'humanitaire et surtout dans l'aide au développement. Il concerne aujourd'hui 2 200 personnes environ, mais ce sont plus de 20 000 personnes qui seraient désireuses d'aller donner un coup de main, dont une forte proportion de seniors d'ailleurs.

Ainsi, plusieurs milliers de missions inférieures à un an seront prises en compte par ce nouveau cadre juridique, notamment les actions humanitaires d'urgence. Pour la première fois, une loi couvrira l'ensemble des formes de volontariat associatif de solidarité internationale dans tous les pays hors de l'Union européenne, quels que soient l'âge, la durée de la mission et son mode de financement.

Cette loi instaure un vrai contrat de droit privé qui organise une collaboration claire entre une association agréée et un volontaire. L'indemnité versée est spécifique car elle ne constitue, à proprement parler, ni un salaire, ni une rémunération. Elle n'est soumise en France ni à l'impôt sur le revenu, ni aux cotisations ou contributions sociales. Ainsi, le volontariat trouve enfin son cadre légal, mettant fin à ce que certains ont appelé le « tourisme humanitaire ». C'est un nouveau souffle pour le volontariat français.

Monsieur le ministre, grâce à ce texte les nouveaux missionnaires de l'humanitaire sont en route ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Merci, monsieur le député.

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Discussion des articles

Mme la présidente. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Destot.

M. Michel Destot. Monsieur le ministre, je souhaite connaître vos intentions en matière de financement.

Bien entendu, nous partageons les objectifs généreux de l'article 1er, mais je me permets de revenir sur la question essentielle - laquelle est à mon avis du devoir de l'Etat -, qui consiste à aider les volontaires à surmonter, au moins financièrement, les difficultés de réinsertion. Ainsi que je l'ai dit tout à l'heure, le groupe socialiste avait déposé un amendement tendant à faire bénéficier le volontaire d'une aide financière de l'Etat en le rendant éligible à l'assurance chômage et à la prime forfaitaire de réinsertion. Mais cet amendement est tombé sous le coup de l'article 40.

Comment envisagez-vous, notamment dans le cadre de la loi de finances pour 2005, de prendre en compte ces différents aspects et comment pouvons-nous répondre à l'ensemble des associations et des organisations non gouvernementales qui attendent un engagement concret sur le plan financier, social et statutaire ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur Destot, effectivement l'article 40 a été opposé à votre amendement, mais dans le même temps je ne veux pas esquiver la question de fond, à savoir la volonté du Gouvernement d'augmenter très sensiblement les financements qui vont concerner les ONG et, de ce fait, le nouveau dispositif de volontariat de solidarité internationale.

Tout à l'heure, vous avez indiqué avoir reçu les représentants de Coordination Sud. Je les ai reçus moi-même ce matin et j'ai pu leur annoncer la décision prise récemment d'augmenter les crédits pour 2004 de 12 millions d'euros dès le mois de mai.

Par ailleurs, vous le savez, monsieur Destot, le 11 mars dernier s'est tenu un comité restreint présidé par le Président de la République. A cette occasion, les intentions du Gouvernement en matière d'aide au développement ont été réaffirmées très clairement. Bien que ce ne soit pas l'objet de la discussion d'aujourd'hui, puisque nous ne sommes pas en loi de finances, je peux vous dire que, dès l'année prochaine, nous atteindrons un demi point de PIB, et nous voulons continuer, de manière à arriver à 0,7 point de PIB en 2012, ce qui représente des sommes très importantes.

S'ajoutent à cela les diverses interventions que fera l'Etat français dans le cadre de nouveaux financements. Je pense, en particulier, à la nouvelle facilité qui a été souhaitée par la partie britannique pour intervenir sur les grands objectifs du millénaire.

En conséquence, je peux vous répondre, sans faire une réponse de circonstance, qu'après des années de financements resserrés dus, non à l'action de tel ou tel ministre ou de tel ou tel gouvernement, mais tout simplement à la situation des finances publiques, nous sommes entrés dans une période - et plus spécifiquement dans les deux ans à venir - dans laquelle l'aide au développement sera accrue.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

Mme la présidente. Sur l'article 2, je suis saisie d'un amendement n° 2, deuxième rectification.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Par cet amendement la commission entend préciser que le volontaire de solidarité internationale ne peut accomplir de mission dans les Etats membres de l'Union européenne ni dans l'Etat dont il est ressortissant.

En revanche, cette disposition n'empêcherait pas les ONG, notamment humanitaires, de prendre dans leurs rangs des volontaires des pays où elles interviennent. Il est important en effet que les associations continuent d'essaimer.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Cet amendement va dans le bon sens. Toute référence à un critère de nationalité pour le volontaire de solidarité internationale aurait évidemment un caractère tout à fait étrange, car il contreviendrait à l'idée qui est la nôtre de couvrir les volontariats les plus divers, et ceux précisément qui concernent l'action internationale.

J'ajoute que les grandes ONG humanitaires comptent parmi leurs volontaires des ressortissants de pays extérieurs à l'Union européenne qui accomplissent des missions en dehors de leur pays et de l'Union européenne. Si la loi maintenait un critère de nationalité, ces volontaires se retrouveraient hors la loi, si je puis dire.

Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 2, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3

Mme la présidente. Sur l'article 3, je suis saisie de l'amendement n° 14.

Cet amendement n'est pas défendu.

Je suis saisie de deux amendements, nos 3 et 19, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 3.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Nous proposons de rédiger ainsi le dernier alinéa de l'article 3 : « A l'issue de sa mission, l'association délivre au volontaire un certificat d'accomplissement du volontariat de solidarité internationale. Le volontaire remet à l'association un rapport d'activité ».

J'ai été très sensible aux propos de ceux qui se préoccupent du retour du volontaire dans la vie professionnelle. Présenter un rapport d'activité peut être un bon viatique pour ce dernier et peut lui permettre d'être considéré comme il se doit par son futur employeur.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 19 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3.

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Le Gouvernement souhaite évidemment que la preuve de l'action engagée par le volontaire soit donnée par l'association ou l'organisme qui l'aura employé. En revanche, je crains que l'obligation de remettre un rapport d'activité ne soit un peu compliquée.

Mieux vaut faire état dans la loi du certificat d'accomplissement du volontariat de solidarité internationale et s'en remettre au décret pour ce qui concerne le rapport d'activité. C'est dans ce cadre que seraient précisées les circonstances de la mission : action humanitaire d'urgence, mission de développement de quelques semaines ou de trois ans par exemple. J'en prends l'engagement devant vous.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Nous prenons acte de l'engagement du Gouvernement et je retire l'amendement n° 3 au profit de l'amendement n° 19.

Mme la présidente. L'amendement n° 3 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié par l'amendement n° 19.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)


Article 4

Mme la présidente. Sur l'article 4, je suis saisie d'un amendement, n° 4.

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 5.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Cet amendement ayant été adopté à l'initiative de M.  Bacquet, je laisse à M.  Destot le soin de le défendre.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Destot.

M. Michel Destot. Nous voulons en effet limiter à trois ans les contrats liant les volontaires aux associations et qui peuvent porter sur plusieurs missions de durée variable. Prolonger au-delà de trois ans des contrats qui ne sont pas de droit commun risquerait d'entraîner une précarisation croissante des volontaires.

Je remercie notre rapporteur d'avoir repris cette idée et trouvé une rédaction qui nous convient.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Le Gouvernement est d'un avis différent sur ce point.

Cet amendement remettrait gravement en cause la philosophie générale du texte. La durée cumulée d'un maximum de six ans pour des missions de volontariat figure dans le décret de 1995. Il est logique d'imposer une telle limite dans la mesure où l'état de volontaire de solidarité internationale ne saurait en aucun cas être permanent, à la différence du salariat par exemple. Il est également logique de réexaminer au bout de deux ans le cas minoritaire des contrats plus longs. C'est pourquoi le Gouvernement avait accepté la limitation des contrats à deux ans maximum lors de la discussion au Sénat.

Il est vrai que la très grande majorité des volontaires n'accomplit pas de mission continue d'une durée supérieure à trois ans mais les cas de figure sont multiples. Certains accomplissent une mission de deux ans après leurs études, puis une autre de deux ou trois ans après la cinquantaine. Un préretraité pourrait partir à cinquante-cinq ans pour une mission de cinq ans. Pourquoi les en empêcher ? Et ces exemples correspondent à une réalité ; ils nous ont d'ailleurs été présentés par les ONG elles-mêmes. Encore une fois, la loi doit être suffisamment générale pour couvrir des cas de figure très différents et une précision destinée à mieux protéger telle catégorie pourrait avoir des conséquences négatives sur une autre.

Nous proposons donc que soit confié à la commission de volontariat un rôle fondamental pour définir les bonnes pratiques concernant plus généralement les expatriés envoyés en mission par les ONG, qu'ils soient volontaires ou salariés.

Contrairement à ce que j'ai entendu à plusieurs reprises, le salarié expatrié, surtout s'il part de nombreuses années, n'est pas assuré d'une bonne réinsertion à son retour. Ce n'est pas parce qu'on est expatrié longtemps qu'on se réinsérera mieux, c'est même plutôt l'inverse.

D'après l'exposé des motifs de l'amendement, il est écrit que le volontariat freinerait toute possibilité de s'engager de manière professionnelle dans les activités d'urgence et de développement. Ce n'est pas l'objectif du texte ni la réalité du volontariat de solidarité internationale. Les volontaires, dans leur majorité, exercent un métier dans leur pays et consacrent occasionnellement quelques jours ou quelques semaines à la solidarité internationale, c'est fréquemment le cas pour les actions d'urgence. Ou bien, ils prennent ou reprennent une activité professionnelle classique à leur retour après une mission de longue durée, d'un à trois ans. Le volontariat de solidarité internationale n'est donc pas une préparation au salariat humanitaire expatrié, même si certains volontaires choisissent cette voie après leur mission.

Pour éviter de s'enfermer dans un cadre trop strict, je propose d'en rester à la rédaction du Gouvernement et j'émets un avis défavorable à l'amendement n° 5.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Destot.

M. Michel Destot. Je regrette la position du Gouvernement. Nous cherchons à nous opposer non au volontariat mais à la précarité. Or il existe au bout de trois ans, toutes les associations nous l'ont confirmé, un risque de précarisation d'autant plus grand qu'on aura introduit trop de souplesse, même si je conviens volontiers avec vous, monsieur le ministre, que les cas sont différents.

Par ailleurs, la durée de trois ans retenue dans l'amendement répond aux conditions fixées par l'article 3 en matière de validation des acquis.

Notre proposition est donc cohérente, et la commission l'a adoptée à l'unanimité.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. En effet, cet amendement a fait l'unanimité, mais je comprends la préoccupation de M. le ministre. Peut-être pourrait-on introduire dans le texte le mot « renouvelable ». En tout état de cause, la rédaction du Gouvernement n'interdit pas un nouveau contrat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 15.

Cet amendement n'est pas défendu.

Je suis saisie d'un amendement n° 6.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

Mme la présidente. La parole est à M. René André, inscrit sur l'article.

M. René André. Je me fais ici l'interprète de nos collègues sénateurs des Français de l'étranger. Il est important que les volontaires de solidarité internationale puissent bénéficier, s'ils le souhaitent, de la protection d'un régime de sécurité sociale et non d'une assurance privée. Le Président de la République a encore tout récemment rappelé la priorité absolue qu'il accordait à la cohésion sociale, et le Sénat, à la sagesse duquel s'en était remis le Gouvernement, s'est inscrit dans cette perspective en modifiant l'article 5 du projet de loi. Mais le Gouvernement a déposé un amendement pour revenir à la rédaction initiale qui ne tenait pas compte du décret de 1995 qui assure aux Français expatriés une protection par la sécurité sociale.

La caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger couvre 15 000 Français expatriés, et il me paraîtrait normal, comme aux sénateurs représentant les Français de l'étranger, que les volontaires de solidarité internationale puissent bénéficier de la même protection sociale.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. M. André m'avait prévenu qu'il reprendrait la discussion qui a déjà eu lieu au Sénat, à l'initiative de sénateurs des Français de l'étranger.

Faut-il fournir une couverture juridique et sociale sûre aux volontaires de solidarité internationale ? Bien sûr ! Faut-il impérativement que la couverture sociale passe par l'affiliation à la caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger ? Il ne nous paraît pas souhaitable, ni juridiquement, ni financièrement, de confier un monopole à un assureur, quel qu'il soit. Je crains même, et je l'ai expliqué à M. Cantegrit qui a présenté l'amendement au Sénat, qu'une telle disposition ne soit pas conforme aux réglementations européennes. C'est la raison pour laquelle je m'y étais opposé. Devant la levée de boucliers, je m'en étais remis à la sagesse de la Haute assemblée, mais le Gouvernement a jugé préférable de demander le rétablissement du texte d'origine.

Mme la présidente. Sur l'article 5, je suis saisie d'un amendement n° 1.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. L'amendement propose donc de revenir à la rédaction initiale qui impose une couverture sociale et juridique, mais il n'y a pas de raison d'imposer l'affiliation des volontaires de solidarité internationale à une caisse, indépendamment de sa qualité.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement du Gouvernement. Nous connaissons la très grande qualité de gestion de la caisse des Français de l'étranger et nous sommes convaincus que, de leur propre choix, les associations se tourneront vers elle pour assurer la couverture de leurs volontaires. (Sourires.)

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. M. Godfrain a été élevé chez les Jésuites !

Mme la présidente. La parole est à M. René André.

M. René André. J'insiste seulement sur le souci de nos collègues d'assurer non seulement aux expatriés mais aussi aux volontaires la meilleure couverture sociale et la meilleure protection de solidarité. Selon eux, et je partage leur avis, c'est la caisse des Français de l'étranger qui la fournit.

J'ai bien compris l'observation de M. le ministre, mais le décret de 1995 donnait déjà le monopole à ladite caisse pour les expatriés. Alors pourquoi ne pas reprendre le même dispositif pour les volontaires ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Il s'agit d'une loi, et non plus d'un décret, et les contraintes au regard du droit européen ne sont pas les mêmes.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article, modifié par l'amendement n° 1.

(L'article, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Après l'article 6

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement, n° 7 rectifié, portant article additionnel après l'article 6.

Il fait l'objet de deux sous-amendements, nos 13 et 18.

La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 7 rectifié.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. La commission consultative a été citée à plusieurs reprises, c'est la preuve de son importance. Nous souhaiterions que son rôle soit précisé dans le texte. Elle doit être prioritaire, mais cela peut être précisé dans le décret d'application. Surtout nous voulons élargir sa composition à des représentants des organisations non gouvernementales, des organisations syndicales, ainsi qu'à un député et à un sénateur - à chaque chambre de les désigner comme elle l'entend, mais les rapporteurs du budget de la coopération dont le rôle n'est pas négligeable pourraient remplir cet office.

Nous pourrions trouver une formule de compromis en retirant les deux sous-amendements sous réserve que le Gouvernement accepte le principe de parité dans le décret d'application.

Mme la présidente. Je vais donner lecture de l'amendement n° 7, deuxième rectification : « Il est institué une commission consultative du volontariat de solidarité internationale composée de représentants des associations de volontariat, des volontaires, des organisations non gouvernementales, des organisations syndicales et de représentants des pouvoirs publics, dont un député et un sénateur. Cette commission donne un avis sur toute question relative au volontariat de solidarité internationale. »

Nous sommes d'accord, monsieur le rapporteur ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Je comprends le souci de M. le rapporteur et je ne vois pas d'objection à ce que la commission compte un député et un sénateur, ce qui est conforme à la tradition démocratique.

En revanche, je m'inquiète d'un amendement qui tendrait à introduire la représentation syndicale dans cette instance. Je n'ai rien contre, mais il ne faudrait pas transformer cette commission en usine à gaz et en faire un organisme lourd dont le travail serait surchargé par des débats sans grand rapport avec son objet. Il s'agit seulement d'une instance de concertation avec les associations, lesquelles sont déjà représentées.

Autrement dit, je voudrais que l'on s'en tienne à la rédaction adoptée au Sénat en ajoutant éventuellement à la composition de la commission un député et un sénateur.

Mme la présidente. Si je comprends bien, monsieur le ministre, vous vous en tenez à la rédaction initiale de l'amendement n° 7 rectifié.

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Exactement, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Bianco, pour défendre le sous-amendement n° 13.


M. Jean-Louis Bianco
. Je défendrai, au nom de mes collègues Bacquet et Destot, le sous-amendement n° 13 dont le contenu a été, si j'ai bien compris, intégré dans l'amendement n° 7, deuxième rectification. M. le ministre craint que la commission en question ne devienne une usine à gaz, mais n'oublions pas qu'elle n'aura qu'une mission consultative. Grâce au travail effectué en commission, des progrès importants ont été accomplis sur ce texte, et nous le voterions si nous nous mettions d'accord sur ce sous-amendement. Cette commission n'étant qu'un organisme consultatif, pourquoi ne pas lui donner une base aussi large que possible ? Nous l'avons constaté tout à l'heure, alors que nous débattions du délai de trois ans, ces métiers peuvent s'apparenter à un véritable salariat. Les ONG, même si elles ne représentent pas directement les associations de volontaires. sont particulièrement intéressées et suivent attentivement nos débats.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Leteurtre.

M. Claude Leteurtre. Nous savons d'expérience qu'il peut y avoir des conflits d'intérêt entre les ONG et les volontaires. Ces derniers doivent être représentés au sein de la commission. C'est d'ailleurs ce à quoi tend mon sous-amendement n° 18.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 13 ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Nous devons trouver une solution intelligente. La préoccupation du Gouvernement concernant la parité et l'équilibre est parfaitement légitime. Cet équilibre se trouvera dans le décret. Nous pouvons considérer qu'il s'agit là d'une ouverture.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Bourg-Broc.

M. Bruno Bourg-Broc. Soit nous faisons confiance au Gouvernement, soit nous ne lui faisons pas confiance. Nous pouvons nous accorder sur des principes, mais il revient au décret de fixer la composition exacte de la commission.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 13 ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. M. Bourg-Broc a anticipé mes propos.

Nous devons nous en tenir au principe de parité avec la présence d'un député et d'un sénateur, ainsi que de représentants des associations et des ONG, et renvoyer au décret la composition détaillée de la commission, après concertation avec les associations elles-mêmes. Il est, en effet, très difficile de définir qui peuvent être ces représentants tant les structures sont multiples. Je n'ai par ailleurs aucune idée de la nature des syndicats représentatifs.

Le vote pourra alors être unanime.

M. René André et M. Bruno Bourg-Broc. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Bianco.

M. Jean-Louis Bianco. Nous sommes d'accord sur plusieurs points. Le souhait de la parité et le renvoi de la composition de la commission à un décret me paraissent tout à fait légitimes. En revanche, un point de désaccord subsiste. Le ministre est favorable à la parité avec, d'un côté, des représentants des pouvoirs publics - un député et un sénateur - et, de l'autre, des représentants des associations, laissant au décret le soin de préciser la composition de la commission. Je souhaiterais, quant à moi, que soit prévue dans la loi la présence des associations de volontaires, d'anciens volontaires, de syndicats et d'organisations non gouvernementales, le choix de la méthode reposant sur le décret.

M. le ministre et M. Leteurtre ont eu raison de parler de conflits d'intérêt. Il semble toutefois nécessaire que puissent s'exprimer dans cette commission consultative les volontaires, les anciens volontaires qui peuvent éventuellement avoir un point de vue légèrement différent, les ONG et les syndicats. Le Gouvernement et le Parlement, de par la présence d'un député et d'un sénateur, pourront connaître la palette des avis. Il appartiendra ensuite au pouvoir exécutif de décider.

Mme la présidente. Déposez-vous un sous-amendement précisant qu'il y aura un décret ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Ce sera précisé ultérieurement.

Je ne voudrais pas que M. Bianco pense que c'est, chez moi, une obsession. Je voudrais toutefois que cette commission soit fonctionnelle. Je crains qu'impliquer l'ensemble des partenaires de la solidarité internationale - anciens volontaires et syndicats dont je ne sais lesquels ils sont - n'empêche finalement cette commission de fonctionner simplement et qu'elle ne devienne un organisme complexe. En sa qualité d'ancien secrétaire général de l'Elysée, M. Bianco doit connaître les problèmes de fonctionnement des commissions comportant trop de membres.

Je souhaiterais donc qu'il retire le sous-amendement, et que l'on s'en tienne à la rédaction proposée par la commission, le Gouvernement prenant l'engagement de définir par décret une composition paritaire en accord avec les ONG.

Mme la présidente. Qu'en pense la commission ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Je voudrais convaincre notre collègue...

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Nous sommes deux à essayer !

M. Jacques Godfrain, rapporteur. ...de l'engagement fort du Gouvernement. Pour notre part, nous y sommes sensibles. Nous sommes en première lecture. Nous devons parvenir à une solution positive. L'idée même du volontariat a besoin de cette unanimité.

Mme la présidente. Voulez-vous ajouter une précision, monsieur Bianco ?

M. Jean-Louis Bianco. Je suis sensible à l'engagement du ministre. Je ne comprends malheureusement toujours pas pourquoi il serait complexe que toutes les parties prenantes - ce qui ne représente qu'une, deux ou trois personnes de plus - siègent au sein de cette commission consultative, d'autant plus que nous laissons au décret le soin de fixer les modalités. Il existe des commissions beaucoup plus lourdes et compliquées.

Je maintiens donc le sous-amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 13.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Leteurtre, pour présenter le sous-amendement n° 18.

M. Claude Leteurtre. J'ai bien conscience de l'effort considérable du ministre quant à la définition de la parité et je comprends sa volonté. Toutefois, je sais d'expérience que la voix de l'ONG organisationnelle n'est pas obligatoirement la même que celle des volontaires.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Comment allez-vous, monsieur Leteurtre, trouver un volontaire pour représenter 2 000 personnes aux fonctions et aux responsabilités si différentes ? Cela deviendrait d'une complexité folle. Je suis d'accord sur le principe, mais je demande, là aussi, que ce tout cela soit renvoyé à un décret. Nous en discuterons avec les organisations elles-mêmes.

M. Bruno Bourg-Broc. C'est d'une grande sagesse !

Mme la présidente. Maintenez-vous votre sous-amendement, monsieur Leteurtre ?

M. Claude Leteurtre. J'ai entendu le ministre, qui a décidé de tenir compte de mon souhait dans le décret.

Je retire donc le sous-amendement.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 18 est retiré.

Maintenez-vous l'amendement n° 7, deuxième rectification, monsieur le rapporteur ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Je le retire, Madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 7, deuxième rectification est retiré.

Maintenez-vous l'amendement n° 7 rectifié, monsieur le rapporteur ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Cet amendement est également retiré.

Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié est retiré.

Article 7

Mme la présidente. Sur l'article 7, je suis saisie d'un amendement n° 16.

Cet amendement n'est pas défendu.

Je suis saisie de l'amendement n° 8.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Cet amendement prévoit que la commission du volontariat doit être consultée sur les montants minimum et maximum de l'indemnité versée par les associations aux volontaires avant que le ministère des affaires étrangères ne fixe le barème.

Par ailleurs, cet amendement de forme substitue à la notion de pays, celle d'Etat, juridiquement plus précise.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Favorable. Nous avions prévu de le préciser dans le décret, mais si M. le rapporteur souhaite que cela figure dans la loi, je ne m'y opposerai pas.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7, modifié par l'amendement n° 8.

(L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)

Article 7 bis

Mme la présidente. Je suis saisie de l'amendement n° 9, tendant à supprimer l'article 7 bis.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Cet amendement est retiré.

Mme la présidente. L'amendement n° 9 est retiré.

Je mets aux voix l'article 7 bis.

(L'article 7 bis est adopté.)

Article 8

Mme la présidente. Sur l'article 8, je suis saisie de l'amendement n° 17.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Cet amendement est retiré.

Mme la présidente. L'amendement n° 17 est retiré.

Je suis saisie de l'amendement n° 10.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 8, modifié par l'amendement n° 10.

(L'article 8, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 8

Mme la présidente. Je suis saisie de l'amendement n° 11 rectifié, portant article additionnel après l'article 8.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Afin de renforcer la sécurité juridique et d'éviter d'éventuels contentieux - ce qui est un point essentiel -, il convient de préciser quel est le sort des contrats de volontariat de solidarité internationale en cours et de déterminer dans quelles conditions les dispositions nouvelles plus protectrices des volontaires s'appliqueront.

De même, il convient que les associations conservent leur agrément jusqu'à l'expiration de la convention de volontariat.

Tel est l'objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Je comprends la préoccupation du rapporteur. A dire vrai, les contrats déjà conclus dans le cadre du décret resteront en vigueur. Les agréments continueront d'être validés. Donc, il ne nous paraissait pas absolument indispensable de l'ajouter dans le texte de loi.

Cet amendement pourrait être retiré, au bénéfice de l'engagement formel du Gouvernement de faire en sorte que le décret d'application soit prêt dans les délais les plus rapides. A défaut, je m'en remettrais à la sagesse de l'Assemblée, car je ne veux pas compliquer la tâche de la commission. Je reconnais qu'elle a soulevé une difficulté liée à des fins de contrat à laquelle nous ne pouvons pas être totalement insensibles.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.


M. Jacques Godfrain
, rapporteur. Compte tenu de ce que vient de dire M. le ministre, je préfère maintenir l'amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Article 9

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 9.

(L'article 9 est adopté.)

Explication de vote

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Bianco, pour une explication de vote au nom du groupe socialiste.

M. Jean-Louis Bianco. Madame la présidente, je voudrais saluer le travail accompli par la commission et M. le rapporteur, ainsi que les pas effectués par M. le ministre. Un dernier pas n'a malheureusement pu être franchi sur la composition de la commission du volontariat.

Par conséquent, le groupe socialiste s'abstiendra, mais cette abstention doit être considérée comme positive. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) S'agissant du petit point qui nous sépare encore, monsieur le ministre, j'espère que nous pourrons trouver un accord en deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

    4

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :

Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1350, relatif au dispositif de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées :

M. Denis Jacquat, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 1540).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot