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Troisième séance du mardi 29 juin 2004

278e séance de la session ordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

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ASSURANCE MALADIE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'assurance maladie (nos 1675, 1703).

Exception d'irrecevabilité

M. le président. J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le secrétaire d'État à l'assurance maladie, un an après la réforme inique des retraites, vous récidivez. Vous ouvrez, à la veille du mois de juillet, un marathon législatif, au cours duquel vous entendez brader un acquis majeur de notre société : la sécurité sociale.

Contre vents et marées, vous maintenez d'une main ferme la barre de votre frêle esquif sur le cap de la régression. Aux ordres du capitaine Seillière (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), vous partez à l'abordage de l'île au trésor pour la finance : l'assurance maladie. Il y a, en effet, un trésor à se partager, à faire fructifier, que le Gouvernement en mission que vous représentez ne peut pas laisser échapper plus longtemps à la rentabilité financière et au marché des assurances.

À l'image de votre gouvernement, votre projet de loi de réforme de l'assurance maladie a un double visage : communicant sur certains points pour mieux masquer des réformes structurantes pour l'avenir. Comme ce gouvernement aussi, il se rend coupable de laisser filer le déficit. Il sera ainsi encore plus facile de faire passer auprès de nos concitoyens une privatisation rampante de notre protection sociale, caractérisée par la baisse du niveau de prise en charge collective. En laissant s'aggraver le déficit - car le nouveau plan d'austérité proposé ne réglera rien -, vous créez en réalité un trou idéologique pour mieux imposer les sacrifices exigés aux seuls assurés sociaux.

Nous considérons, nous aussi, qu'une réforme est nécessaire pour permettre à la sécurité sociale de continuer d'assurer sa mission dans l'esprit de sa création, qui veut que chacun participe selon ses moyens pour que chacun utilise selon ses besoins. Mais, contrairement à vous, nous souhaitons l'engager sur des bases financières plus justes, plus saines et correspondant davantage aux différents rapports parus sur le sujet, en particulier celui de la mission d'information présidée par notre président, Jean-Louis Debré.

Nous connaissons tous la situation financière de la sécurité sociale aujourd'hui. Les veilles recettes de maîtrise comptable, comme de financement, que vous proposez ont déjà été utilisées par les uns et les autres. Toutes ayant échoué, d'autres mesures doivent être envisagées. D'ailleurs, la note de la direction de la prévision du ministère de l'économie ne s'y trompe pas, estimant que le déficit oscillerait entre 7 et 15 milliards d'euros dans trois ans, c'est-à-dire autant qu'aujourd'hui. Autrement dit, vous ne réglerez rien. J'ai sous les yeux, non pas la note officielle du ministère, mais un tableau comparatif qui montre, dans la colonne de gauche, les réductions de dépenses auxquelles vous prétendez arriver - 15 milliards - et, dans la colonne de droite, celles que Bercy estime possibles : 7,8 milliards. On peut se tromper, mais tout de même pas du simple au double ! On ne peut pas dire qu'il y ait une visée stratégique commune aux deux ministères.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. La vérité est à gauche ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. On saura un jour qui disait vrai et qui disait faux. Pour l'heure, je pencherai, exceptionnellement, en faveur de la version des technocrates : la vérité est plutôt à droite. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La colonne de gauche est mauvaise. Les 15 milliards de réductions de dépenses prévus ne seront en fait que 7,8 milliards. Je tiens le document à votre disposition.

Je ne peux pas croire que Bercy ait fait des comptes d'apothicaire. Une erreur si grossière est impossible avec à sa tête un ministre d'une telle compétence. Ou alors, il ne mériterait pas d'être ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) De deux choses l'une : ou c'est lui qui se trompe ou c'est vous, monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale. Une différence d'un milliard, on pourrait la comprendre mais, là, on va du simple au double ! Cela laisse songeur.

Nous ne tomberons pas dans le piège que vous voulez nous tendre, consistant à faire une véritable promotion du déficit de la sécurité sociale. Cette stratégie délibérée n'a d'autre but que de convaincre les Françaises et les Français qu'une réforme structurelle, fondée sur une diminution des droits, est absolument nécessaire et inévitable.

Contrairement à ce que l'on affirme ici ou là, nous sommes loin d'être le pays qui, en matière de protection sociale, dépense le plus par habitant. Une étude montre que nous sommes derrière l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark ou encore les Pays-Bas. A ce sujet, je dispose aussi d'une fiche que vous pouvez consulter.

Mais j'ai encore d'autres chiffres de source officielle - Eurostat, pas L'Humanité - qui montrent que la part des dépenses de santé dans le produit intérieur brut en France est de 9,5 % contre 14 % aux États-unis, où près de 40 millions de personnes n'ont pas accès à la santé. Avouez que notre système de sécurité sociale est bien meilleur et que libéralisme et privatisation ne sont pas la panacée.

Nous ne dépensons pas plus que les autres mais toute votre réforme s'appuie sur le fait qu'on dépense trop à cause des médecins, à cause des malades. Vous voulez réduire les dépenses, mais ce n'est pas ainsi que vous y parviendrez parce que la réalité n'est pas celle que vous dites. Tout au long du débat, nous récuserons ces affirmations de façon argumentée, ce que je viens de commencer à faire avec mes fiches, tant il est vrai qu'il ne faut jamais avancer de chiffres sans en donner les références. D'autant que, derrière cette attitude coupable, un véritable plan stratégique de gouvernance, calqué sur le rapport Chadelat, s'engage. Vous avancez masqué, mais vous avancez. J'y reviendrai.

Pour nous, l'accroissement des dépenses relève plus d'une crise de financement du système de santé et de protection sociale que d'une irresponsabilité des assurés sociaux, comme on veut bien le dire.

Ne leur faites pas endosser une faute qui, en fait, est la conséquence d'un dogme économique selon lequel le coût du travail étant trop élevé dans notre pays et les charges trop lourdes, il faudrait continuellement les baisser. On voit ce que cela donne pour le chômage !

C'est principalement la crise économique qui a entraîné celle du financement de la protection sociale, et notamment de la branche maladie. En effet, le financement assis sur les cotisations en fonction des salaires a subi de plein fouet la montée du chômage, ainsi que les exonérations de charges dites « sur les bas salaires » qui étaient censées constituer un remède au chômage. Cela explique largement l'évolution du déficit de la sécurité sociale depuis 1980.

Au total, le taux de cotisations employeur au niveau du SMIC est passé, en dix ans, de 30,2 % à 4,2 %. Cela aurait dû permettre la création d'un nombre extraordinaire d'emplois, mais cela n'a pas été le cas. La part du financement des cotisations en faveur de la protection sociale ne cesse de diminuer depuis des années.

Les effets positifs de ces allégements restent à démontrer. En effet, les exonérations de cotisations sociales patronales plombent les comptes sociaux et tirent les salaires vers le bas, mais je ne vois pas où est l'intérêt, sinon pour le patronat, qui bénéficie d'un effet d'aubaine, et pour la haute finance. Je vous donnerai tout à l'heure quelques chiffres sur les profits des entreprises et les salaires des patrons des sociétés cotées au CAC 40.

Il est donc clair que le déficit du système de santé est lié en priorité à une insuffisance de recettes plutôt qu'au seul problème des dépenses.

Il faut faire des économies partout où on le peut - ce n'est pas le problème -, mais on ne comblera pas le déficit uniquement en réduisant les dépenses. Il y a déjà tellement de gens qui ne sont pas bien soignés aujourd'hui et qui n'ont que la sécurité sociale des pauvres - je veux parler de ces 6 millions de personnes qui ne sont pas salariées et qui n'ont que la CMU ! Lorsque la sécurité sociale a été créée, à la Libération, dans un pays dévasté par la guerre, la couverture de base englobait l'ensemble des soins, quels que soient les moyens des gens. Cela n'est plus le cas, et l'on va encore aggraver les choses.

Par ailleurs, le dépassement systématique et croissant de l'ONDAM depuis 1998 met en évidence une défaillance des instruments et des procédures de régulation, ainsi que des actions structurelles sur les comportements des professionnels, des patients et sur l'organisation des soins.

Entendons par là que le déficit traduit aussi l'échec des réformes fondées sur la maîtrise comptable des dépenses.

M. Marc Bernier. C'est vrai !

M. Maxime Gremetz. Souvenons-nous du Livre blanc sur les systèmes de santé et d'assurance maladie, présenté en 1994 par Raymond Soubie, constituant la trame de tous les plans de réforme des systèmes de santé des années quatre-vingt-dix ! Ce rapport à contribué à répandre l'idée selon laquelle l'assurance maladie devait être certes maintenue, mais à la condition d'être réduite dans l'optique d'une réduction des prélèvements obligatoires, en particulier des prélèvements sociaux « pesant » sur les entreprises.

Le plan Juppé a repris ce raisonnement en procédant à l'accroissement massif des prélèvements sur les salaires et les revenus de transferts concernant les retraités et les chômeurs. Il a organisé la réduction drastique des prestations à partir d'une nouvelle organisation du système de santé et a institutionnalisé une nouvelle montée de la fiscalisation reportée sur les ménages avec la CSG - ce n'est certes pas Juppé qui l'a créée, c'est Rocard ; il faut toujours faire preuve de franchise et de clarté ! - et la CRDS afin de réduire les cotisations patronales censées peser sur l'emploi.

Les parlementaires communistes se sont toujours opposés à cette fiscalisation. Le MEDEF a déclaré ne plus vouloir participer à la solidarité nationale. Selon lui, le système de solidarité nationale ne doit plus être fondé sur les richesses produites dans les entreprises. C'était pourtant l'originalité de la sécurité sociale lorsqu'elle a été créée. Et si ce ne sont pas les patrons qui paient, ce sont les Françaises et les Français qui devront payer, alors qu'ils acquittent déjà l'impôt. Ce financement fait porter la quasi-totalité des ressources de la protection sociale sur les revenus du travail, ce qui est particulièrement injuste et contraire à l'esprit de 1945.

Les plans de réforme du système de santé depuis 1994 ont revêtu deux formes essentielles : des mesures d'économies au sens strict et des réformes mettant en œuvre la maîtrise comptable des dépenses de santé.

D'une manière générale, les mesures d'économies ont tenté de limiter simultanément la demande de soins et l'offre de soins. Toutefois, ces plans, malgré leur apparente radicalité, n'ont pas réussi à dégager une véritable régulation efficace du système de santé. Ils ont d'abord organisé un rationnement aveugle qui réduit à court terme les dépenses et produit finalement leur reprise à moyen terme.

Ce n'est rien de moins que ce qu'ont dénoncé les parlementaires communistes dans un passé proche . C'est pourquoi nous n'avons jamais voté la loi de financement de la sécurité sociale sous le précédent gouvernement.

Et ce n'est rien de moins que ce qu'ont observé les membres de la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie en reconnaissant l'inefficacité des plans de redressement successifs et des outils de maîtrise.

En effet, depuis 1996, en application des ordonnances Juppé, un objectif national de dépense d'assurance maladie est fixé dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Cet objectif, l'ONDAM, a été régulièrement dépassé. Cela ne fait que démontrer l'impossibilité de « décréter » un taux directeur des dépenses de santé.

Pourtant, ces rationnements ont asphyxié les hôpitaux publics, les conduisant au bord de la rupture. Le numerus clausus, aussi bien dans le secteur hospitalier que pour la médecine de ville, a engendré une insuffisance criante du nombre de médecins et de personnels dans de nombreuses disciplines. On manque de généralistes, de gynécologues-obstétriciens, d'urgentistes et de nombreuses spécialités à l'hôpital sont souvent sinistrées. Et votre réforme s'enferme dans cette impasse !

La façon dont les 35 heures ont été appliquées à l'hôpital a révélé l'insuffisance notoire des emplois créés. Partout l'on constate la nécessité de créer des emplois non seulement en quantité, mais aussi en qualité - il faut former les futurs médecins et personnels de santé. Il y a donc urgence à sortir d'une insuffisance manifeste des moyens de financement et à faire sauter l'enveloppe globale limitée comme la tarification à l'activité.

Cette tarification est lourde de conséquences. D'un point de vue conceptuel, il s'agit de faire passer les établissements de santé de la sphère du sanitaire à la sphère de l'économie, ou plutôt de la rentabilité. En termes appropriés, il s'agirait de « faire passer les établissements de santé de l'état de centres de coûts à celui de centres de profits ».

Cela signifie, sur un plan fonctionnel, que les établissements de santé ne seront plus abondés financièrement en fonction des objectifs de dépenses pour satisfaire la population, mais qu'ils seront dotés d'un financement calculé en fonction de leurs recettes. Plus ils auront de recettes, plus ils auront pris les bons cas en laissant les autres de côté, plus ils feront de la rentabilité, plus ils auront de moyens.

Or ces recettes seront elles-mêmes le résultat d'une évaluation moyenne nationale des tarifs des prestations de soins effectuées par tous les établissements de santé indépendamment de leur spécificité et de leur environnement, calculée à partir de la technique des groupes de malades homogènes et des pratiques homogènes de soins.

On voit bien la logique à l'œuvre et ses conséquences pour les malades. Cette volonté de transformer en centres de profit les établissements de santé conduira ces derniers à rechercher un minimum de retours sur investissements. Or les conséquences de ces pratiques sont connues : la sélection des malades selon les pathologies. Les pathologies financièrement lourdes seront délestées du développement de l'établissement. Et avec les pathologies, se sont les malades qui seront aussi exclus des soins.

Vous avez vous-même reconnu, monsieur le ministre, dans une lettre adressée à la présidente du conseil d'administration de l'hôpital de Toulouse, les limites de la T2A. Je vous cite : « L'application de la tarification à l'activité montrerait une prise en compte insuffisante de certaines situations atypiques. »

En conséquence, non seulement votre réforme ne prend pas la mesure du défi qui se pose dès aujourd'hui, mais, quand elle prétend le faire, c'est sur les assurés sociaux que tout se reporte pour mieux les acculer. De ce point de vue, on ne mesure pas toujours combien cette réforme est grave ! La santé risque de devenir dépendante des moyens que chaque personne pourra y consacrer.

En effet, l'autre point fondamental de votre texte est la stigmatisation des assurés sociaux.

Concernant les recettes, alors qu'il faut dès cette année apporter des réponses pour éviter que le déficit ne se creuse davantage, vous vous contentez de colmater. Vous affirmez même que nous ne pouvons être sûrs que l'équilibre des comptes sera atteint d'ici à 2007. Faudra-t-il donc prévoir de nouvelles restrictions et un nouveau plan d'austérité, comme le subodore Bercy ?

Pour tenter de sauver la face, vous appliquez ou majorez quelques taxes et contributions à la charge de l'industrie pharmaceutique pour récupérer quelques centaines de millions d'euros. Connaissez-vous le montant des profits des trusts pharmaceutiques ? Ce sont les plus élevés de toutes les industries. Or cela ne leur coûtera que quelques centaines de millions d'euros, contre 14 milliards pour les assurés sociaux !

Vous faites croire que vous mettez à contribution les entreprises, mais c'est une goutte d'eau dans l'océan : seulement 1 milliard sur 15 milliards ! Dans le même temps, vous accordez 20 milliards d'euros d'exonérations de cotisations patronales sans exiger de contrepartie, vous laissez tranquilles les revenus boursiers des plus grands patrons des entreprises du CAC 40, lesquels ne cessent d'augmenter !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Mais non !

M. Maxime Gremetz. Vous m'affirmez que cela n'est pas vrai ? Alors, vos experts ne doivent pas être très bons, car ils ne vous donnent pas les bons chiffres. Vous êtes manifestement fâché avec les chiffres ! Vous êtes sans doute un bon médecin, mais pas un bon financier. J'espère que c'est votre femme qui gère votre bourse ! (Sourires.)

M. Jean Leonetti. Ce discours est d'une médiocrité !

M. Maxime Gremetz. Les chiffres, je vais vous les donner : plus 51 % pour le PDG d'Alcatel - vous me direz peut-être que cela n'est pas beaucoup !

Mais il y a mieux : les revenus du PDG de Michelin augmentent de 146 % et ceux du PDG de Schneider de 38 %. Voulez-vous d'autres noms ? Thierry Desmarest, Martin Bouygues, Franck Riboud, Lindsay Owen-Jones, Édouard Michelin, Daniel Bernard et Antoine Zacharias, patrons de Total, Bouygues, Danone, L'Oréal, Michelin, Carrefour et Vinci, sont évidemment exonérés de cotisations patronales. Je tiens les chiffres à votre disposition, car je n'affirme jamais rien sans avoir les données en main. Et je cite ma source : Infographie.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce n'est pas une source !

M. Maxime Gremetz. Si vous ne voulez pas de cette fiche, je peux en produire d'autres, encore plus complètes. La première ne mentionne que les patrons qui ont les plus gros revenus ; la seconde cite quarante noms au total : les quarante du CAC 40. (Rires.) C'est un jeu de mots dont je ne suis pas l'auteur : je ne suis pas assez intelligent pour cela. (Sourires.)

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. M. Gremetz est modeste, en plus !

M. Maxime Gremetz. Toujours pour réaliser des économies de bouts de chandelles, vous incitez les caisses d'assurance maladie à renforcer les contrôles tous azimuts et vous engagez une vague d'économies dont les victimes seront encore et toujours les assurés sociaux. Vous commencez par la restriction des ALD, les affections de longue durée, et la chasse aux arrêts de travail. Mais vous ne dites rien des patrons qui ne déclarent pas les accidents du travail.

M. Jacques Remiller. Cela n'existe pas !

M. Maxime Gremetz. Je peux pourtant vous en fournir une longue liste !

Vous continuez en poursuivant le déremboursement des médicaments et la définition d'un panier de soins. Vous restreignez le champ des soins remboursables. Vous créez un forfait hospitalier pour la médecine de ville avec la franchise d'un euro.

Le dossier médical personnel, qui s'inscrit dans la même démarche de maîtrise comptable, servira de support à un relevé d'informations sur la consommation médicale de chaque assuré, que vous espérez ainsi culpabiliser. Celles-ci devront être protégées de toutes les mauvaises intentions. Je m'étonne d'ailleurs que personne n'ait mentionné les inquiétudes de l'Ordre des médecins. Connaissez-vous sa position, monsieur le ministre ? Je vais vous citer un article du Monde, puisque vous niez l'évidence : « S'il n'est pas opposé à une réforme du système de l'assurance maladie, le Conseil national de l'Ordre des médecins regrette vivement de ne pas avoir été associé à la rédaction du projet de loi que l'Assemblée examinera à partir du 29 juin. »

M. Jean-Marie Le Guen. C'est le dialogue tel que le pratique le Gouvernement 

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie. Ces informations ne sont plus exactes : j'ai rencontré les représentants de l'Ordre national des médecins la semaine dernière.

M. Maxime Gremetz. J'ai trouvé des indications importantes sur d'autres questions à propos desquelles je m'interrogeais.

L'institution ordinale juge que, faute de garantie, les médecins ne pourront pas utiliser le dossier médical personnel. Le président du Conseil national de l'Ordre, le Dr Michel Ducloux - je cite son nom pour que vous puissiez vérifier ces informations auprès de lui - a déclaré au Monde que « certains organismes ne devront en aucune façon pouvoir héberger le dossier [...] notamment [les] caisses d'assurance maladie et de retraite ou [les] assurances professionnelles. S'ils avaient accès aux données du dossier, ces organismes pourraient en effet être en situation de nuire aux assurés. »

Je n'invente rien. Je ne fais que citer les propos du Conseil de l'Ordre. Si vous trouvez que celui-ci n'est pas bon, changez-le ! Pour ma part, n'étant pas médecin, je m'en remets à ses propos.

Le Dr Ducloux soulève un autre point dont personne ne parle. Il s'inquiète des conséquences du système du médecin traitant. Je le cite : « Le projet de loi envisage un espace de liberté tarifaire offert aux spécialistes, dès lors que leurs patients n'auront pas consulté préalablement en première intention le médecin traitant. Cette disposition ne peut être acceptée en l'état, car elle fait de la liberté tarifaire une sanction qu'un médecin spécialiste infligerait à son patient en raison du comportement de ce dernier. » Le Conseil national de l'Ordre demande enfin que le rôle qu'il joue dans la permanence des soins soit consacré par la loi.

Tout cela figure dans le document que je viens de lire.

M. André Chassaigne. C'est un document révélateur !

M. Maxime Gremetz. Il serait facile de me dire que je ne comprends rien à ces problèmes. C'est pourquoi je m'en remets au président du Conseil National de l'Ordre des médecins.

M. Philippe Auberger. Cet Ordre des médecins que vous vouliez torpiller en 1981 !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je pense qu'il va falloir changer le projet de loi car, dans sa rédaction actuelle, il ne donne pas satisfaction !

Ainsi, vous prévoyez de réaliser au total près de 10 milliards d'euros d'économies au détriment des malades. Mais, si l'on regarde du côté des recettes escomptées, votre parti pris est encore plus criant. C'est clair, vous vous en tenez à un mot d'ordre : surtout, ne pas faire payer les grandes entreprises, l'addition étant pour l'assuré social et les générations futures.

M. Philippe Auberger. Et la C3S ?

M. Maxime Gremetz. Comment trouvez-vous, en effet, les 5 milliards de recettes qui viendront s'ajouter aux 10 milliards d'économies dont je viens de donner le détail ? Par l'augmentation de 6,2 à 6,6 % de la CSG des retraités, ce qui représente un total de 560 millions ;...

M. Philippe Auberger. La mesure ne concerne que les retraités imposables !

M. Maxime Gremetz. ...par l'extension de l'assiette de 95 à 97 % de la CSG des salariés, soit un petit milliard ; par la hausse de la CSG de 0,7 point sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placement des ménages, ce qui rapportera 630 millions ; par la hausse de la CSG sur les produits des jeux, ce qui rapportera 100 millions et par le transfert de recettes fiscales - lesquelles ? On ne sait pas - qui fournira un milliard.

Vient ensuite une mesure qui consiste, à vous entendre, à « toucher aux entreprises » : le relèvement de 0,03 % de la C3S pour 780 millions !

M. Philippe Auberger. Une paille ! (Sourires.)

M. André Chassaigne. C'est un cadeau pour les patrons !

M. Maxime Gremetz. C'est formidable ! Comparez les contributions respectives des salariés et des entreprises. Voilà votre sens de l'effort partagé, de la solidarité, de l'esprit d'équité !

Mais ce choix n'est pas étonnant. Il s'inscrit dans la droite ligne de votre politique qui consiste à multiplier sans distinction les cadeaux aux plus fortunés et aux entreprises.

Après la baisse de l'impôt sur le revenu des plus riches, qui diminue de 2,5 milliards, et de l'impôt sur la fortune, qui baisse de 500 millions, il va falloir régler la facture des promesses électorales, qui s'élève à 7,8 milliards d'euros, alors même que le ministre de l'économie demande à ses collègues de faire des économies d'un montant à peu près équivalent. Vrai ou faux ?

Je vous rappelle qu'aux 150 millions d'euros de compensations accordées en décembre aux buralistes, s'ajoutent 1,5 milliard d'euros d'allégements de charges accordé à la mi-mars aux restaurateurs pour les dix-huit mois prochains, 2,5 milliards d'exonération de taxe professionnelle promise urbi et orbi par Jacques Chirac aux entreprises, 400 millions qu'il va falloir débourser avant la fin du premier trimestre en échange du rachat des jours de RTT des personnels hospitaliers, 3 milliards d'euros promis aux chercheurs - qui s'inquiètent à juste titre de la réalité de cet engagement -, sans oublier le coup de pouce de 311 millions que viennent d'obtenir d'autres catégories ou les 35 millions d'aides accordés en urgence, début janvier, aux filières laitière et porcine.

L'addition des cadeaux préélectoraux que vient de concéder Jean-Pierre Raffarin s'élève à plus de 7,8 milliards d'euros ! N'est-ce pas impressionnant ? Si quelqu'un peut citer d'autres chiffres que les miens, qu'il monte à la tribune et nous comparerons nos sources !

Et encore, cette liste déjà longue ne tient pas compte de la promesse du Président de la République de ramener à 5,5 % le taux de TVA dans la restauration, ce qui représenterait 3 milliards de manque à gagner supplémentaire pour les caisses de l'État dès 2005.

Tout nous laisse à penser que cette stratégie de gagne-petit ne sert que la cause idéologique de la privatisation de la sécurité sociale guidée par une nouvelle gouvernance.

En effet, le déficit de l'assurance maladie fournit un alibi majeur à votre stratégie de privatisation partielle - ou plutôt rampante - du système de santé. Les dysfonctionnements nombreux, qui résultent de restrictions budgétaires, et le malaise des personnels hospitaliers, toutes catégories confondues, viennent également nourrir le réquisitoire de ceux qui ont entrepris de désolidariser le système de santé.

Ainsi, dans un document officiel diffusé dès novembre 2001 et intitulé « Pour une nouvelle architecture des régimes de protection sociale », le MEDEF affirmait que le système de santé serait à bout de souffle et que ses dépenses seraient « en dérive permanente ». Quel jugement pertinent !

Ce document va marquer le retour en force des postulats libéraux concernant l'organisation des systèmes de santé. La croissance des dépenses devenue « incontrôlable » exigerait qu'on laisse croître, afin de limiter les dépenses publiques, la part des dépenses à la charge des ménages, ceux-ci n'ayant plus d'autre solution que de se couvrir par l'assurance privée. On réduit de plus en plus la couverture de base et l'on dit aux gens de s'assurer eux-mêmes.

Qui n'a pas vu de publicités à ce sujet ? Le message est clair ! Il répond à l'intention exprimée par le Premier ministre, le 13 octobre 2003, lors de l'installation du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

Pour déclencher ces réactions en chaîne de la privatisation et faire éclater le système de santé solidaire, le « panier de soins » constitue le détonateur priviligé du projet.

L'idée du « panier de soins » a ainsi retrouvé une vigueur singulière à travers les propositions du MEDEF, avant d'alimenter les projets de réforme du Gouvernement. On comprend le sens que celui-ci veut lui donner quand on entend le Premier ministre s'interroger sur le champ souhaitable de prise en charge des fractures de ski ou des chutes dans la rue, ou lorsqu'on vous entend dire, monsieur le ministre, qu'il faut « dépenser mieux pour soigner mieux ». En fait, le « panier de soins » est bel et bien l'instrument privilégié de la privatisation.

Vous instituez une haute autorité de santé, qualifiée abusivement - c'est le moins qu'on puisse dire - d'indépendante. Je ne vais pas vous rappeler comment celle-ci est créée ni qui désigne ses membres.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Où est le problème ?

M. Maxime Gremetz. Et vous la prétendez indépendante ? C'est formidable !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur de la commission spéciale. Caricature !

M. Maxime Gremetz. L'indépendance, cela se gagne et cela se conquiert. On n'est pas tout à fait indépendant quand on est désigné par quelqu'un.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Penseriez-vous en ce moment aux électeurs qui vous ont désigné ? (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. De même, quand on est ministre, on n'est pas tout à fait indépendant. Et c'est encore le cas quand on est rapporteur.

À ce propos, monsieur le rapporteur, vous avez cité tout à l'heure le ministre Ambroise Croizat parmi les créateurs de la sécurité sociale, mais vous ne l'avez placé qu'en troisième position. Est-ce parce qu'il est communiste que, dans votre esprit, il doit être relégué au troisième rang ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. J'ai cité de Gaulle, Pierre Laroque et Ambroise Croizat.

M. Maxime Gremetz. De Gaulle n'a pas créé la sécurité sociale ! Ce sont les communistes qui en ont eu l'idée et ils ont demandé à Ambroise Croizat, qui était ministre, de porter ce projet. La sécurité sociale est un fruit du Conseil national de la Résistance.

Vous avez rayé Ambroise Croizat en citant avant lui de Gaulle, puis Laroque. Vous vous rendez compte ? Vous placez un technocrate avant un ministre !

Monsieur le ministre, je vous mets en garde : M. le rapporteur ne fait pas grand cas des ministres, jusqu'au jour où il le sera lui-même. Mais, à vrai dire, je pense qu'il a peu de chances.

M. le président. On reste plus longtemps ancien ministre que ministre !

M. Maxime Gremetz. On rêve d'être ministre et, quand on l'est, en général, cela ne dure pas. Après, on est effectivement ancien ministre.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Donc, il vaut mieux être futur ministre ?

M. Maxime Gremetz. Ou pas ministre du tout !

M. le président. Donc vous n'avez guère de chance de le devenir un jour, monsieur Gremetz...

M. Daniel Paul. On ne sait jamais ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Surtout je ne veux pas l'être !

Vous créez donc une Haute autorité, abusivement qualifiée d'indépendante, qui aura plusieurs missions : vérifier le service médical rendu, contribuer à la réflexion sur le niveau des remboursements et le périmètre de prise en charge par l'assurance maladie - avec un regard particulier sur les ALD - et veiller à l'élaboration des référentiels de bon usage de soins ou de bonne pratique. Bien entendu, monsieur le ministre, vous tentez de rassurer ceux qui s'inquiètent des nouveaux déremboursements qui pourraient être recommandés, en faisant valoir le caractère scientifique et l'indépendance de cette autorité. Mais, en général, quand des commissions de ce type comprennent de nombreux scientifiques, elles ne savent pas très bien compter. Les scientifiques doivent rester dans leur rôle de conseils.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Quel mépris pour les scientifiques !

M. Maxime Gremetz. Au contraire, je pense qu'il ne faut pas les détourner une seule seconde de leurs recherches et leur faire perdre du temps en les enrôlant dans une telle commission. Quel gâchis humain !

M. Jean-Marie Le Guen. Et quelle confusion !

M. Maxime Gremetz. En outre, rien ne dit que les experts se détermineront seulement en fonction de critères thérapeutiques et de santé publique, sans faire intervenir l'objectif comptable de la réduction des dépenses publiques.

Dans le même esprit, vous créez l'union des complémentaires, qui participeront aux orientations et à l'élaboration du périmètre d'intervention de l'assurance maladie. Plus précisément, votre schéma de gouvernance les fait officiellement entrer dans le circuit de gestion.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Et alors ?

M. Maxime Gremetz. Je vous dis ce que nous en pensons, ainsi que les administrateurs de la sécurité sociale.

Les complémentaires seront en effet présentes au sein du conseil de l'assurance maladie et elles participeront à la définition du périmètre de l'assurance maladie. Du reste, le président de la FFSA s'est félicité que le projet ouvre le champ de la santé aux assureurs. Certes, vous vous êtes empressé de le démentir, monsieur le secrétaire d'État, car vous vous êtes senti démasqué, mais trop tard : le mal était fait. Actuellement, le périmètre d'intervention des complémentaires est encore limité, mais il est déjà plus important qu'hier. Alors, qu'en sera-t-il demain, surtout quand les vagues de déremboursement accroîtront leur rôle ?

Instaurer un « panier de soins » revient à spécifier les soins pris en charge par une assurance maladie de base remodelée selon une liste, par essence limitative, établie et modifiée périodiquement par le Parlement suivant les recommandations dites « scientifiques » de la Haute autorité de santé. C'est une véritable usine à gaz !

M. André Chassaigne. Et le panier peut être percé !

M. Maxime Gremetz. Ces recommandations seront reprises par le « super-directeur » de la Caisse nationale d'assurance maladie, indépendant puisqu'il sera nommé par le ministre. Que deviennent le conseil d'administration et les élections à la sécurité sociale ? Une gouvernance moderne voudrait non seulement que l'État, notamment le Parlement, soit présent dans la gestion de l'assurance maladie, mais aussi et surtout que celle-ci, qui est financée par les cotisations salariales et patronales, soit gérée par les représentants démocratiquement élus des employeurs et des salariés.

Vous faites tourner la roue de l'histoire à l'envers !

M. André Chassaigne. C'est du centralisme !

M. Maxime Gremetz. Vous me répondrez que les élections à la sécurité sociale ont été supprimées en 1983 et qu'elles n'ont jamais été rétablies depuis. C'est vrai, et je trouve cela fort dommage.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Il fallait le dire à Mitterrand !

M. Maxime Gremetz. Je le lui ai dit, et à Jospin aussi. Plusieurs années de suite, nous avons déposé des amendements pour proposer leur rétablissement, mais ils n'ont jamais été votés.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Et vous n'avez pas démissionné !

M. André Chassaigne. Ce ne sont pas des godillots qui vont nous donner des leçons !

M. Maxime Gremetz. Je suis là pour défendre les gens et proposer ! Le Premier ministre prétend que nous n'avons pas de projet, mais il n'a même pas lu nos propositions, qui figurent dans le document que je lui ai remis. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je le lui ai offert, ainsi qu'aux ministres, mais si vous en voulez un exemplaire, il faudra payer, comme les autres. Tenez, j'en offre un aussi au Président de l'Assemblée. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Nous jouons cartes sur table. Nous avons des propositions, dont tous nos amendements s'inspirent ! Que vous les contestiez, c'est la règle du jeu démocratique, mais ne niez pas qu'elles existent : débattons projet contre projet !

Vous vous référez aux quatre piliers de la sécurité sociale, mais vous en cassez trois et demi ! Nous, nous voulons les consolider, en tenant compte de l'évolution de la France, de l'Europe et du monde, ainsi que des nouveaux besoins de santé. D'ailleurs, les fondateurs de la sécurité sociale n'avaient pas exclu que l'on crée d'autres branches correspondant à d'autres risques. Le système qu'ils ont créé a été conçu comme une base et non comme une fin en soi.

En fait, vous essayez d'organiser la mainmise de l'État sur l'assurance maladie, pour mieux préparer sa privatisation. Il n'y a là aucune contradiction : d'abord, vous contrôlez tout par le haut,...

M. Pierre Goldberg. Et ensuite on brade !

M. Maxime Gremetz. ...puis vous ferez entrer le privé par le bas, comme pour EDF et GDF.

Après une discussion avec les complémentaires, le « super-directeur » déterminera le panier de soins minimal remboursable selon les recommandations de la Haute autorité. Puis les complémentaires se chargeront d'un commun accord de rembourser le reste.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce n'est pas dans la loi !

M. Maxime Gremetz. Il y a la loi, mais il y a aussi tout ce que vous ne dites pas et que vous voulez cacher. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est quand on prétend agir au nom du bien que l'on fait le plus de mal. Nous ne sommes pas dupes !

M. André Chassaigne. C'est une bombe à retardement !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous n'avez même plus confiance en l'État !

M. Maxime Gremetz. Mais l'État, c'est qui ? (« C'est nous ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pétain aussi, c'était l'État ! (Murmures sur mêmes bancs.) Je dis cela parce que c'est l'exemple qui me vient à l'esprit. L'État ne dicte pas sa loi d'en haut, tel Dieu, pour ceux qui y croient. Il y a un gouvernement qui met en œuvre une politique.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous ne croyez en rien, vous !

M. Maxime Gremetz. Si, je crois à l'intégrité, à l'honnêteté et au progrès. Et je pense que votre projet est totalement injuste pour les salariés, les personnes âgées et les chômeurs. C'est une grande différence entre nous !

Avec ce texte, l'État garde la mainmise sur le minimum assuré à l'ensemble des assurés sociaux, notamment aux plus pauvres, alors que les plus fortunés, assurés par leur complémentaire, ne subiront aucune limitation. Mais du coup, la couverture de soins « hors panier » nécessiterait la souscription, auprès d'une mutuelle ou d'une compagnie d'assurance privée, d'une assurance complémentaire santé fondée sur un principe différent de nos complémentaires actuelles. En effet, ce n'est plus pour la prise en charge d'un ticket modérateur qu'il s'agirait de se couvrir, mais pour pouvoir bénéficier, dès le premier euro, de la prise en charge des soins sortis du panier de base.

Bien entendu, monsieur le président de la commission, comme un tel projet ne peut être annoncé sans détour, les argumentations en faveur du « panier de soins » sont paradoxales. Ainsi, vous faites appel à la « responsabilisation » de l'usager, afin de le convaincre que la limitation des dépenses de santé remboursables serait une nécessité.

L'architecture que vous retenez pour la gouvernance est bien, à cet égard, celle du rapport Chadelat, qui préconise une assurance maladie à trois étages : une couverture de base aux contours définis à la fois par des tickets modérateurs et un certain nombre de soins pris en charge à 100 % - mais dont la liste serait par nature limitée -, une couverture complémentaire de base aux contours précisément définis par les pouvoirs publics, sur laquelle viendrait se greffer l'aide à l'accès à une complémentaire proposée par le Gouvernement, puis des contrats privés d'assurance maladie personnalisés susceptibles de couvrir les dépenses restant à la charge des ménages.

Bien évidemment, cette diversité des couvertures suppose de facto un système de santé à plusieurs vitesses.

Vous ouvrez cette perspective en assurant l'aide à la complémentaire et en prévoyant, en dehors de la franchise d'un euro, que les fluctuations des remboursements ou les dépassements d'honoraires seront pris en charge par les complémentaires.

Vous ne pouvez cacher plus longtemps que cette « responsabilisation » dont vous parlez vise à faire augmenter la part des dépenses couvertes par les complémentaires santé. Certains, dans les rangs de la majorité, imaginent même une participation directe des assureurs privés dans la gestion de la couverture de base, reprenant le vieux rêve de Claude Bébéar, que vous ne connaissez peut-être pas tous...

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Si !

M. Maxime Gremetz. ...le rêve de l'ancien président d'AXA, que je connais bien, de gérer l'assurance maladie dès le premier franc.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Parlez-nous donc de la Mutualité française et de M. Davant !

M. Maxime Gremetz. Pour le moment, je parle de M. Bébéar.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Il est à la retraite !

M. Maxime Gremetz. Voulez-vous que je vous indique le montant de ses revenus ? Il a beau être en retraite, c'est formidable : avec les fonds de pension, les stock-options, les salaires, les jetons dans toutes ses sociétés, croyez-moi, c'est toujours l'un des patrons les plus riches.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Fantasmes !

M. Maxime Gremetz. Quand on est patron, on n'est jamais vraiment en retraite, on a toujours les jetons de présence qui tombent, et si vous ne le savez pas, c'est que vous êtes naïf, monsieur le rapporteur ! (Sourires.) Prenez Mme Bettencourt, par exemple, vous croyez que pour elle les jetons ne continuent pas à rentrer tous les jours ? Je sais ce que je dis, puisqu'elle est en Picardie !

Quant au baron Seillière, toujours en pleine activité - lui aussi en Picardie - je n'en parle même pas.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Lui aussi, il a des jetons qui tombent ? Mais pourquoi ne nous parlez-vous pas de M. Davant ?

M. Maxime Gremetz. Mais je n'ai rien à faire avec ce Davant dont vous me parlez ! S'il n'est pas classé dans les patrons du CAC 40, je ne le connais pas...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Je vois, vous ne fréquentez que la haute société !

M. Maxime Gremetz. J'ai bien le droit de citer qui je veux, et Bébéar, c'est vraiment un phénomène extraordinaire. Quant à M. Davant, il dit ce qu'il veut, c'est un citoyen libre...

M. le secrétaire d'État à l'assurance maladie. C'est un chasseur, donc il ne faut pas l'attaquer ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. M. Davant n'est pas le seul à s'occuper de mutualité complémentaire, et en l'occurrence, ce n'est pas de lui que je parle.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Vous préférez le capital à la mutualité !

M. Maxime Gremetz. Toutefois, conscients de la difficulté de prétendre que la solidarité du système de santé ne serait pas entamée, les partisans du « panier de soins », dont le Premier ministre, se sont empressés d'arguer que des dispositions adaptées seraient prises pour que chacun bénéficie d'une complémentaire santé quel que soit son revenu.

C'est le sens de votre proposition, que j'évoquais il y a quelques minutes. Mais je vous ferai trois remarques.

Tout d'abord, retenir l'idée du crédit d'impôt, c'est réduire, avouez-le, l'impact de la mesure, car tout le monde ne paye pas l'impôt. Il y aura donc des inégalités. Vous savez qu'en Picardie, par exemple, 60 % des gens ne paient pas d'impôt.

Ensuite, le montant de l'aide serait d'environ 150 euros par an,...

M. Daniel Paul. C'est bien peu !

M. Maxime Gremetz. ...mais tous les spécialistes s'accordent à dire qu'aujourd'hui une complémentaire pour une couverture moyenne coûte entre 50 et 100 euros par mois.

M. Daniel Paul. Cherchez l'erreur !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Mais c'est faux !

M. Maxime Gremetz. Ce sont les spécialistes qui le disent. Il faudra que je vous apporte une documentation sur ce sujet également car, manifestement, vous en manquez, au ministère !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Non, ce n'est pas la peine !

M. Maxime Gremetz. Mais si, j'y tiens ! Il faut savoir de quoi l'on parle.

Donc, sur 50 à 100 euros, le Gouvernement offre 12,50 euros par mois. Il a beau faire le généreux, mais la réalité est là.

M. Pierre Goldberg. C'est une aide au rabais !

M. Maxime Gremetz. Enfin, si la volonté du gouvernement est de favoriser l'accès aux complémentaires, c'est bien le signe que celles-ci vont prendre une importance croissante dans le remboursement, donc que le champ du remboursement par l'assurance maladie va se réduire ! C'est un aveu, et de taille. Vous dites clairement aux gens que l'assurance maladie va couvrir moins aujourd'hui qu'hier et avant-hier.

C'est ce système que préparent votre projet et votre action au quotidien, comme celle à venir.

Devant les dangers qui guettent notre système de protection sociale, nous vous avons remis des propositions pour une modernisation de notre sécurité sociale, un vrai projet de protection sociale, fidèle à l'esprit des fondateurs de notre système en 1945, mais adapté aux besoins et aux évolutions de la société d'aujourd'hui.

Ces propositions s'appuient principalement sur cinq axes : démocratie, prévention, accès de tous aux soins, mesures exceptionnelles pour l'hôpital, et nouveau financement. Ces principes sont indissociables.

La démocratie doit être un pilier de notre système de protection sociale. Qui doit déterminer la politique de santé et de protection sociale ? Qui, et comment ?

Définition des orientations et des actions prioritaires en santé publique, des moyens et de l'organisation sanitaires, des niveaux de couverture sociale, évaluation des budgets nécessaires et choix des modes de financement : tout cela doit sortir des cercles étroits de décisions. Quelqu'un, cet après-midi, a parlé de technocrates - M. Sarkozy, je crois. Nicolas Sarkozy s'entend, parce qu'il y a aussi Guillaume, mais il ne faut pas confondre.

M. Philippe Auberger. Décidément, vous fréquentez beaucoup le MEDEF !

M. Maxime Gremetz. Est-ce aux parlementaires seuls de décider ? Chaque année, on nous demande de voter un « objectif de dépenses », l'ONDAM, que l'on sait délibérément sous-estimé, tout en nous interdisant, pratiquement, de nous intéresser aux recettes de la sécurité sociale.

Les médecins et autres professionnels de santé, sommés de réduire ou de limiter leur activité, sont peu à peu entrés dans un état d'amertume, de conflit permanent.

Les établissements de soins, corsetés dans des enveloppes budgétaires délibérément sous-dimensionnées, sont contraints à des réorganisations drastiques, à des fermetures de lits, de services, par le bras armé de cette politique comptable de la santé, les ARH, les agences régionales d'hospitalisation, sortes de préfectures sanitaires qui taillent, coupent, redessinent - sans demander l'avis de personne - le tissu sanitaire régional et national au mépris des avis et des demandes des personnels et populations concernées.

L'élaboration de la politique de santé publique et d'assurance maladie doit devenir l'affaire des citoyens, mais la gestion doit demeurer l'affaire des représentants des assurés sociaux, et pas d'un « super-directeur ».

M. Pierre Goldberg. Tout à fait !

M. Maxime Gremetz. Il ne suffira pas de régionaliser le système de santé, comme le voudraient certains, dans vos rangs, dans le but limpide d'en faire supporter partiellement le coût aux contribuables, au risque d'accentuer les inégalités déjà fortes - trop fortes - entre régions. C'est une démocratie participative associant, à tous les échelons, du local au national, les assurés sociaux, les experts, les élus, les syndicats et associations, les professionnels de santé, qu'il s'agit d'impulser afin de faciliter l'expression des besoins et de préparer les meilleurs choix. Et cela en commençant par démocratiser la gestion de la sécurité sociale par le rétablissement des élections comme nous le proposons.

Au contraire, votre texte crée une mainmise de l'État sur l'assurance maladie, avec la désignation par le ministre du « super-directeur » qui aura les moyens de gérer et de décider.

La prévention doit être le second pilier. « Mieux vaut prévenir que guérir » : l'adage n'a rien perdu de son actualité. Produit d'une longue histoire, la santé reste aujourd'hui largement perçue comme un état de non-maladie. En pratique, le volet curatif l'emporte toujours sur le préventif. Les discours mettent certes plus volontiers l'accent sur la prévention, mais celle-ci reste le parent pauvre des budgets et des politiques sanitaires.

M. Pierre Goldberg. Tout à fait !

M. Maxime Gremetz. Et votre projet de loi de santé publique est bien loin de la pleine prise en compte de la définition plus juste de la santé proposée par l'Organisation mondiale de la santé : un état complet de bien-être physique, psychique et social. Dans une telle optique, l'environnement économique et social, les conditions de vie et de travail jouent un rôle clé, comme déterminants de l'état sanitaire de la population, et non pas seulement les comportements individuels.

Concernant le travail, par exemple, source de maladies et cause d'accidents dont un grand nombre ne sont toujours pas reconnus - là, je pourrais vous emmener voir certaines choses -, il s'agirait de donner aux salariés et aux syndicats toute latitude pour en négocier les conditions, l'organisation, chaque fois que celles-ci peuvent mettre en danger la santé. Par ailleurs, les méfaits de la précarité, du boulot en intérim ou dans la sous-traitance, devraient être reconnus, et ces systèmes d'abaissement du coût du travail, au prix de la santé des gens, combattus.

Mais, pour cela, encore faudrait-il que le rôle de la médecine du travail soit revalorisé, son indépendance à l'égard du patronat garantie, et le nombre de ses médecins accru : ses effectifs - environ 6 000 équivalents temps plein - lui interdisent souvent de se rendre sur les postes de travail. La même pénurie est à déplorer du côté des inspecteurs du travail, qui sont un peu plus de 400 pour 14 millions de salariés.

Par ailleurs, un effort semblable devrait être engagé en faveur de la médecine scolaire, sachant le rôle de véritable sentinelle de la santé que jouent ici aussi médecins et infirmières. Aujourd'hui, on en compte en tout et pour tout 6 700 pour 8 000 collèges et lycées, et 55 000 écoles et maternelles.

Enfin, pour que la prévention devienne un droit pour tous, ne faudrait-il pas trouver les moyens d'assurer une visite médicale annuelle pour les chômeurs, les exclus, et les retraités ? Il devrait s'agir d'une visite gratuite, bien sûr, car ils n'ont pas les moyens de la payer.

M. Pierre Goldberg. Tout à fait !

M. Maxime Gremetz. Comme on le voit, une véritable politique de prévention appelle un investissement humain et financier considérable.

L'accès de tous aux soins doit être le troisième pilier. Pour cela, il faut faire sauter les barrières qui freinent l'exercice de ce droit, dont la liste est longue : baisses des taux de remboursement des médicaments, instauration du secteur II pour la médecine libérale, autorisant les dépassements d'honoraires au-delà du tarif couvert par la « sécu », mise en place du forfait hospitalier et augmentation de celui-ci, blocage à un niveau aujourd'hui ridiculement bas des prix de référence de la sécurité sociale pour les lunettes et les prothèses dentaires, alors que les prix du marché se sont envolés.

Le sens caché de votre projet pour la protection sociale, que je viens de mettre en lumière, érigera des barrières financières supplémentaires.

La politique dite de « responsabilisation » conduira donc tout droit à une aggravation des inégalités devant l'accès aux soins. D'ores et déjà, 14 % de la population déclarent renoncer à des soins pour des raisons financières. Ce pourcentage grimpe à 23 % dans la catégorie des plus bas revenus - moins de 750 euros - et à 30 % parmi les chômeurs. C'est la vérité, vous pouvez regarder les chiffres et les études qui ont été faites.

M. Pierre Goldberg. Vous entendez, à droite, ou vous n'en avez rien à faire ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Il fallait le dire avant !

M. Maxime Gremetz. Il faut regarder les chiffres, sans oublier que, derrière ceux-ci, il y a des vies entières, des êtres humains.

La multiplication des barrières ou des menaces de déremboursement provoquera un accès plus difficile aux soins conduisant à retarder le recours au système sanitaire, qui intervient alors dans un état de santé plus dégradé et donc naturellement plus « coûteux ».

On le voit, la dérive actuelle vers un système de soins à l'accès de plus en plus payant cumule les préjudices : elle est source d'inégalités, facteur de détérioration de la santé, et s'avère financièrement contre-productive.

La cause de la santé publique impose de mettre en échec ce projet, de renverser la tendance, en renforçant le rôle de service public de la sécurité sociale et en reprenant la marche vers la gratuité - celle de 1945.

M. Pierre Goldberg. Bravo !

M. Maxime Gremetz. Dans un premier temps, celle-ci pourra s'appliquer aux soins découlant de la médecine préventive, afin d'accroître son efficacité. Certes, ce n'est pas du jour au lendemain qu'on parviendra à la gratuité. Mais il faut s'acheminer sur cette voie. Pour commencer, cette gratuité pourra s'appliquer aussi aux soins des personnes dépendantes, âgées ou non, dont l'état de santé nécessite un recours intensif au système sanitaire.

L'accès aux soins c'est aussi l'accès au médicament.

Aujourd'hui, l'industrie pharmaceutique choisit l'orientation de ses recherches ou, selon son bon vouloir, en sacrifie des domaines entiers, au mépris des besoins. Elle peut commercialiser aussi, sous le nom d'innovation, un principe actif à peine remanié. Elle échappe, par cette entourloupe, à la tombée dans le domaine public de ses molécules les plus rentables. Elle détermine seule, depuis juillet 2003, le prix de vente de ses nouveautés.

M. Pierre Goldberg. Eh oui !

M. Maxime Gremetz. L'industrie pharmaceutique a, de tout temps, brillé pour son sens des affaires. Et en France, la complexe réglementation qui entoure la mise sur le marché des médicaments et le contrôle de leur efficacité facilitent sa liberté de mouvement. Les firmes ont en tout cas repéré les failles du système et les exploitent à l'envi.

Le dispositif d'attribution de l'autorisation de mise sur le marché - AMM - et le contrôle du service médical rendu est insatisfaisant et conduit à cette aberration : les firmes pharmaceutiques peuvent faire entrer dans les officines des produits dénommés médicaments sur la base de tests qu'elles réalisent elles-mêmes, produits qu'ensuite la commission de transparence classe parfois dans la catégorie des médicaments les plus médiocres pour justifier un remboursement minimal.

Dans tous les cas, le malade paie pour une régulation mal organisée, qui fait naître le doute sur la qualité du médicament proposé à la prescription, et qui se double, depuis l'été dernier, d'une liberté de prix pour les innovations, laquelle ravit les professionnels du médicament.

Ajoutée à la liberté depuis longtemps acquise des prix des nouveaux médicaments à l'hôpital, consécutive à l'absence de concurrence sur des molécules très pointues, cette disposition alourdit la facture de la branche maladie de la sécurité sociale, comme le pointe la Cour des comptes, qui consacre un chapitre important à cette question hautement sensible - je vous renvoie à la lecture de ce document fort intéressant.

La santé publique comme le souci des finances de la sécu exigent une véritable maîtrise publique de l'industrie pharmaceutique. Au niveau de la recherche, il ne devrait plus être possible qu'une firme sacrifie un domaine d'investigation d'intérêt général pour de stricts motifs de rentabilité.

En ce domaine aussi, nous ferons des propositions immédiates et présenterons des amendements, car nous ne pouvons plus attendre.

Par ailleurs, le développement du service public hospitalier doit être une priorité.

Cela suppose, monsieur le ministre, la suspension immédiate du plan hôpital 2 007,...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ah bon !

M. Maxime Gremetz. ...dont j'ai déjà évoqué les méfaits en particulier concernant le financement. Tous les personnels hospitaliers, des médecins aux personnels soignants, demandent cette suspension.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. C'est n'importe quoi !

M. Maxime Gremetz. Or, aujourd'hui, on nous annonce que la réforme concernant l'hôpital fera l'objet d'une ordonnance. Démocratie, quand tu nous tiens ! Concertation, quand tu nous tiens ! Au bout du compte, on préfère choisir la procédure des ordonnances pour éviter le débat...

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il y a eu concertation !

M. Maxime Gremetz. Quand on sait qu'il n'y a déjà pas eu de débat avec le personnel hospitalier...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ouvrez les yeux, monsieur Gremetz, il n'y a pas que la CGT !

M. Maxime Gremetz. Tous les personnels hospitaliers - je les ai rencontrés, comme vous sans doute - demandent la suspension de ce plan. Ils veulent se faire entendre et participer réellement à l'élaboration d'une réforme portant sur la place de l'hôpital dans le système de santé publique.

Dans le même temps, il faut engager sans tarder un plan pluriannuel de formation en nombre suffisant pour pallier les pénuries de professionnels de santé à venir, qui va s'accentuant.

Vous n'avez que timidement relevé le numerus clausus, en effet. Or, les rapports officiels portent à 9 300 le nombre de médecins à former d'ici à cinq ans et à 40 000 le nombre d'infirmières. Pour ces dernières, nous renouvelons donc notre proposition visant à rendre plus attractive leur formation en prévoyant un salaire et la prise en charge de l'hébergement dès l'entrée à l'école d'infirmière. Cela se fait bien pour d'autres professions. Cela permettrait, en outre, d'améliorer le service public en direction de personnes, souvent âgées ou handicapées, qui en ont bien besoin. Je pense là, plus précisément, aux professions médico-sociales.

Enfin, le financement est le nerf de la guerre.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Et l'exception d'irrecevabilité dans tout ça ?

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président de la commission, écoutez donc l'orateur ! Sinon, tout dialogue est impossible. Comment pourriez-vous répondre à mes questions, si vous ne m'écoutez pas ? Vous n'entendrez même pas mes propositions ! Moi, je n'interromps jamais personne ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En tout cas lorsque je suis rapporteur.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Quelle mauvaise foi !

M. Maxime Gremetz. Dans ce débat, on parle donc de gouvernance, d'organisation de la santé, du système... Bref, c'est une histoire de spécialistes et je n'en suis pas un. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) N'étant pas toubib, je ne me sens pas très compétent en la matière, d'autant que même les toubibs ont du mal à s'y retrouver, parfois.

En tout cas, il est clair qu'on ne parle pas de financement. Cet aspect du problème se résume en quelques mots : on nous propose de réduire le déficit en diminuant les dépenses et en augmentant les cotisations.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Elémentaire, mon cher Watson !

M. Philippe Auberger. C'est l'austérité façon Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Or ce raisonnement est un peu simpliste. Il existe en effet d'autres sources de financement auxquelles vous ne pensez jamais. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ainsi, il y a 147 milliards d'euros de profits financiers qui ne sont pas investis.

M. Pierre Goldberg. Eh oui !

M. Maxime Gremetz. C'est le fruit des richesses produites dans notre pays par le travail des uns et des autres. Or quelle est leur contribution à la solidarité nationale ? Zéro centime. Trouvez-vous que cela soit juste ? Quelque 1 % de cette somme représenterait pourtant 15 milliards et cette contribution ne mettrait personne sur la paille.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Non, cela représenterait 1,47 milliard.

M. Maxime Gremetz. Soit !

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. M. Gremetz est manifestement perdu dans ses fiches !

M. Maxime Gremetz. En tout état de cause, on ne veut pas toucher à cette somme.

De même, pourquoi ne pas accepter de modifier l'assiette des cotisations ? J'ai donné les chiffres, tout à l'heure : les cotisations patronales sont de 4 % aujourd'hui, contre 14 % pour les salariés. Dans ces conditions, est-il normal de continuer à donner 20 milliards d'euros d'exonérations à tout le monde ?

M. Pierre Goldberg. Non !

M. Maxime Gremetz. On ne parle jamais des 2 milliards de dettes des patrons à la sécurité sociale.

M. Pierre Goldberg. Il n'en est jamais question !

M. Maxime Gremetz. Et que devient le produit de l'augmentation des taxes sur les tabacs, qui devait initialement servir à soigner les gens, envers et contre eux ? Est-il affecté à la sécurité sociale pour soigner les victimes du tabagisme ?

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Oui !

M. Maxime Gremetz. S'agissant des taxes sur l'alcool, vous n'avez rien prévu. Il est vrai que les producteurs de tabac sont beaucoup moins nombreux que les producteurs d'alcool... Monsieur le président de la commission, vous avez même fait supprimer la taxe qui portait sur une petite bière.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. En effet !

M. Maxime Gremetz. Nous proposons, pour notre part, une modulation des exonérations. Aujourd'hui, celles-ci profitent en effet tant aux multinationales qu'aux PME. Or nous considérons que ce n'est pas juste. Il faut prévoir des dispositions particulières, et notamment un abaissement des charges, pour les entreprises qui veulent créer de l'emploi, se développer, investir, innover. En revanche, celles qui jouent sur la spéculation doivent supporter une augmentation des charges. Voilà un moyen d'encourager ceux qui veulent créer de l'emploi, favoriser la formation et développer la production !

La question du financement renvoie avant tout à celle de l'emploi et de la croissance économique. C'est la remontée du chômage qui, ces deux dernières années, a creusé le trou de la sécurité sociale. De ce point de vue, la politique gouvernementale consistant à comprimer les dépenses publiques et sociales et, ainsi, à plomber la consommation, principal ressort de la croissance, n'augure évidemment rien de bon. Or il faut savoir qu'un point de produit intérieur brut en moins représente un manque à gagner de deux milliards d'euros de cotisations sociales. Et 100 000 chômeurs de plus signifient une perte de 1,3 milliard d'euros pour la sécurité sociale si l'on prend en compte les recettes en moins et les prestations chômage en plus.

Je n'oublie pas non plus votre course effrénée en faveur des exonérations de cotisations sociales patronales, qui dépassent aujourd'hui les 20 milliards d'euros et atteindront 21 milliards dans le prochain projet de budget. Le coût pour la sécurité sociale est de l'ordre de 3 milliards d'euros, les 17 milliards restants étant payés par le contribuable, à la place de l'employeur. Ainsi, le salarié paie deux fois !

Cette disposition devait permettre de réduire le coût du travail et donc de créer des emplois, nous répète-t-on. Or, c'est un échec cuisant, puisque le nombre des créations d'emplois n'a pas augmenté. C'est le contraire qui s'est produit. Il faut donc trouver un autre moyen d'encourager véritablement les entreprises effectivement désireuses de le faire à créer des emplois.

L'un de ces moyens est la bonification d'emprunts bancaires ciblée et contrôlée. Il s'agit de baisser de façon sélective les charges financières qui pèsent sur le crédit, mais également de diriger ce crédit vers des investissements propres à sécuriser l'emploi et la formation. Il s'agit ensuite de réduire les recours aux marchés financiers, en France et en Europe, en donnant une nouvelle orientation à la Banque centrale européenne et en instaurant une baisse sélective des taux d'intérêt. Il faudrait faciliter le recours au crédit pour les projets d'investissements en fonction des créations effectives d'emplois et des formations qu'ils génèrent, et rendre au contraire le crédit plus cher pour les projets destructeurs d'emplois ou visant une croissance purement financière.

Le Gouvernement, monsieur le ministre, comme M. Seillière, balaie d'un revers de main tout prélèvement supplémentaire à la source sur les richesses créées par le travail, en arguant, sans toutefois jamais fournir de véritable démonstration, que cela jouerait contre l'emploi.

Et si, au contraire, il était possible d'affecter une plus grande part de cette richesse à la santé tout en développant l'emploi ?

M. Pierre Goldberg. Tout à fait !

M. Maxime Gremetz. Cette réforme comporterait deux volets. Le premier consisterait à taxer les revenus financiers des entreprises, qui, aujourd'hui, échappent à toute cotisation sociale. Ces revenus, pour l'essentiel des produits des jeux de la bourse, représentent la bagatelle de 165 milliards d'euros en 2002.

S'ils étaient soumis à une cotisation du même taux que celle prélevée sur les salaires, la sécurité sociale engrangerait près de 16 milliards d'euros de ressources nouvelles ! On nous répond que cette recette serait aléatoire, ces profits fluctuant fortement d'une année à l'autre. Vous savez, en général, ces profits ne fluctuent pas beaucoup. Ils se portent toujours bien et sont toujours au rendez-vous des affaires. Ce prélèvement n'en aurait pas moins une réelle portée en incitant les entreprises à se détourner de la spéculation et à s'orienter vers des investissements productifs.

Le second volet, le plus essentiel, est la refonte des cotisations patronales. Aujourd'hui, plus une entreprise embauche et verse des salaires élevés, plus elle paie de cotisations. À l'inverse, une société qui comprime l'emploi ou le précarise, limite les salaires et privilégie la croissance financière contribue moins à la protection sociale. Ainsi le système actuel pénalise-t-il les industries de main-d'œuvre, comme le BTP ou la métallurgie, tout en avantageant des secteurs comme les assurances et les banques. Notre réforme consiste à renverser cette logique.

Pourquoi ne pas instaurer deux taux de cotisation différents : un taux amoindri pour les entreprises qui augmentent la part des salaires dans la valeur ajoutée et un taux alourdi pour celles qui diminuent cette part ? Cette réforme aurait le mérite d'enclencher une nouvelle logique d'efficacité, fondée non pas sur la baisse des coûts salariaux mais sur le développement des dépenses humaines, sociales et d'innovation, autrement dit la création d'emplois, l'élévation des salaires et le développement de la formation.

Ce serait une manière de responsabiliser réellement non seulement les individus mais les employeurs, vis-à-vis des finances de la sécurité sociale, en pesant sur le mode de gestion des entreprises. Tout en assurant des ressources durables à la protection sociale, cette réforme aurait enfin le mérite de réhabiliter véritablement le travail.

Je vais à présent récapituler. Suis-je dans les temps, monsieur le président ?

M. le président. Il vous reste deux minutes !

M. Maxime Gremetz. Cela devrait me suffire !

M. le président. Alors, ne perdez pas de temps !

M. Maxime Gremetz. Je suis excellent, parce que je suis tout à fait dans les temps ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Si vous le dites !

M. le président. Monsieur Mallié !

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, ils commencent à m'interrompre !

M. le président. Monsieur Gremetz, vous n'êtes pas homme à vous laisser interrompre. Poursuivez !

M. Maxime Gremetz. Nous connaissons vos sources de financement et nous comparons.

Monsieur le ministre, je vous rappelle que 1 % d'augmentation de salaire, ce sont 2,5 milliards supplémentaires.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Et l'irrecevabilité ?

M. Maxime Gremetz. Mais 100 000 chômeurs de moins, c'est 1,3 milliard d'euros de plus pour la sécurité sociale ; la contribution sociale sur les revenus financiers et revenus boursiers nous rapporterait 16 milliards d'euros, et la suppression des exonérations de cotisations sociales patronales 20 milliards d'euros. Enfin, une augmentation d'un point des cotisations patronales représente 6 milliards d'euros. Cela fait un total de 45,8 milliards d'euros !

Tout est dit. Certains choix politiques permettraient de répondre à tous ces besoins. Tout au long de nos débats, nous vous ferons des propositions, car c'est le sens de notre projet, que vous connaissez déjà ou que vous découvrirez à travers nos amendements.

Pour conclure, la démonstration a été faite que votre projet de réforme est loin de garantir l'exercice de nos principes constitutionnels, et en particulier ceux qu'énonce le préambule de la Constitution de 1946 :

« La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.

«  Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. »

Parce que le droit à la santé est remis en cause, que le droit à une sécurité sociale est en danger, nous vous demandons d'adopter cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur le président, s'il est clair que l'exception d'irrecevabilité ne se justifie pas, M. Gremetz a posé de vraies questions, auxquelles j'aimerais répondre.

Tout d'abord, les Français souhaitent-ils une réforme ? Oui, nous sommes d'accord sur ce point. Comme le confirment de nombreuses enquêtes d'opinion, 75 % des Français souhaitent une réforme de l'assurance maladie.

M. Daniel Paul. Laquelle ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est exactement ainsi qu'il faut poser la question : quelle réforme souhaitent-ils ?

Monsieur Gremetz, j'évoquerai, pour commencer, le plan « Hôpital 2007 ». Je crois que tout le monde est d'accord pour dire que nous ne pouvons pas laisser subsister en l'état le budget global. Actuellement, qu'un service soit plein ou vide, il reçoit à la fin de l'année la même somme. L'hôpital est le dernier organisme dont le financement soit sans rapport avec l'activité.

Le plan « Hôpital 2007 » contient deux éléments importants : la tarification à l'activité et la gouvernance.

Concernant la tarification à l'activité, nous proposons, comme en Allemagne sous l'impulsion de M. Schröder, d'aller vers un mélange de tarification à l'activité et d'enveloppes destinées à des missions d'intérêt général, pour les services à haute technicité comme pour les urgences ou la médecine interne.

Pour améliorer la gouvernance de l'hôpital, nous sommes décidés à mettre en place des pôles médicaux, articulés autour des malades, des spécialités et des appareils. C'est un point qu'il nous semble important de dynamiser.

J'en viens à la nécessité de créer une Haute autorité de santé publique, dont le caractère scientifique garantira l'indépendance.

M. Daniel Paul. Oh !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il n'appartient pas en effet au ministre de la santé, ni au Parlement, ni à un groupe de pression comme l'industrie pharmaceutique - vous avez raison sur ce point - de décider de ce qui doit être remboursé et de ce qui ne doit pas l'être.

La Haute autorité scientifique de santé publique donnera son avis sur les médicaments et sur l'utilité des actes médicaux. Mais, contrairement à ce que vous avez affirmé, la Haute autorité ne décidera pas, car c'est à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie qu'il appartiendra de décider. En bref, la Haute autorité aura un rôle de conseil scientifique, l'UNCAM celui de la décision finale.

Monsieur Gremetz, nous ne voulons procéder à aucun déremboursement. Nous n'avons pas souhaité suivre la voie de tous les plans de sauvegarde de l'assurance maladie qui nous sont proposés depuis vingt ans.

Enfin, monsieur Gremetz, je souhaite répondre précisément à quelques-unes de vos questions.

Tout d'abord, je voudrais rétablir la vérité à propos de l'Ordre des médecins. J'ai lu comme vous l'article paru dans la presse il y a une dizaine de jours. Nous avons depuis reçu des représentants de l'Ordre des médecins. Cela s'est passé la semaine dernière, en présence de M. Xavier Bertrand...

M. Jean-Marie Le Guen. Alors ils mentent ?

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Pas du tout ! Lorsqu'ils ont écrit cet article, nous ne les avions pas encore reçus. Depuis, nous avons eu l'occasion, au cours d'une réunion, de faire un travail approfondi sur ce texte.

Vous avez évoqué l'ouverture de l'assurance maladie aux assureurs privés. Contrairement aux précédents plans en faveur de l'assurance maladie, ce plan n'accroît pas le champ des assurances complémentaires.

Enfin, monsieur Gremetz, vous n'avez peut-être pas lu ce projet de loi dans sa globalité. Vous indiquez que nous modifions les règles de prise en charge des honoraires médicaux par les complémentaires. Or, rien de tel ne figure dans ce texte.

En effet, nous avons un problème avec les complémentaires. Mme Aubry a mis en place la CMU en dépit de ce qu'affirmaient certains partenaires sociaux et contre les conseils de la mutualité française. Or la CMU comporte un effet de seuil. Cela signifie qu'au-dessous de 566,70 euros par personne et par mois, on a droit à tout, et qu'avec 567 euros, on n'a droit à rien.

M. Jean-Marie Le Guen. Mais vous ne changez rien !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. C'est pourquoi le Premier ministre a décidé, pour les deux millions de Français qui se trouvent à 15 % au-dessus du seuil, d'accorder en moyenne 150 euros par personne et par an, sous forme de crédit d'impôt.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cela recrée un effet de seuil !

M. Jean-Marie Le Guen. En effet, cela ne change rien à l'effet de seuil !

M. Bernard Deflesselles. Mais si !

M. Jean-Marie Le Guen. Vous verrez, on va bien s'amuser sur ce sujet-là !

M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Gremetz, j'ajoute que cette réforme, qui était nécessaire - sur ce point nous sommes d'accord -, est une réforme structurelle et, surtout, qu'elle est équitable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. J'informe l'Assemblée que, sur le vote de l'exception d'irrecevabilité, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Dans les explications de vote sur l'exception d'irrecevabilité, la parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Bernard Perrut. Nous avons écouté avec beaucoup d'attention, sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, notre collègue Maxime Gremetz, qui s'est montré fidèle à ses convictions et à son analyse de l'environnement économique, voire de la vie de l'entreprise. Il n'aura toutefois pas su nous convaincre, et ne saurait nous entraîner à voter cette exception d'irrecevabilité.

Cependant, mon cher collègue, nous partageons peut-être vos vues sur deux points. Premièrement, nous regrettons tout autant que vous que cette réforme n'ait pas été engagée plus tôt. En effet, le précédent gouvernement, que vous souteniez et qui comptait des ministres issus de vos rangs, aurait pu entreprendre cette réforme.

M. Claude Goasguen. Très bien !

M. Bernard Perrut. Le pays a trop tardé en effet à l'engager, alors que gouverner c'est prévoir. Vous l'avez vous-même reconnu, monsieur Gremetz, et nous partageons totalement ce point de vue : le précédent gouvernement nous a laissé le soin d'engager nombre de projets, tant en ce qui concerne la dépendance que les retraites, et aujourd'hui la sécurité sociale.

Nous partageons également votre diagnostic à propos du déficit structurel de l'assurance maladie. Nous ne pouvons pas continuer dans cette voie, et laisser ce déficit continuer à se creuser de 23 000 euros par minute. Ce déficit est le fruit notamment d'une crise de légitimité, d'une crise d'organisation. Nous ne pouvons que confirmer un tel diagnostic.

Mais, s'agissant des remèdes à apporter, nous préférons aux vôtres ceux de nos ministres, qui nous proposent une réforme fondée sur l'exigence de vérité, expriment une volonté et nous appellent tous à la responsabilité.

Je ne m'étendrai pas sur l'exigence de vérité, si ce n'est pour rappeler qu'une telle exigence suppose qu'on tienne compte de l'évolution de la société, de la hausse de l'espérance de vie, des progrès thérapeutiques et des nouvelles demandes des usagers de notre système de soins. Face à cette exigence de vérité, Philippe Douste-Blazy et Xavier Bertrand, et à travers eux l'ensemble du Gouvernement, ont choisi une attitude responsable et pragmatique. Vous faites quelques allusions, à la fin de votre intervention, à une prétendue violation de la Constitution. En réalité, loin de remettre en cause le droit à la santé, ce projet vise à le préserver. Philippe Douste-Blazy, dans un entretien publié par un quotidien d'hier, a justement résumé ce plan par le triptyque « liberté, égalité, fraternité ». En effet ce texte assure au patient la liberté de choix du médecin, et au médecin la liberté de prescription ; un égal accès aux soins pour tous ; enfin le respect du principe de fraternité, qui impose que chacun contribue à cet important effort.

Pour toutes ces raisons, le groupe de l'UMP ne peut vous suivre dans cette exception d'irrecevabilité. Le projet qui nous est proposé aujourd'hui est non seulement indispensable, il est pour notre société un projet d'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marc Ayrault. J'ai écouté attentivement cet après-midi l'intervention de M. le Premier ministre, mais j'ai surtout été frappé par la faible présence des députés de l'UMP : il y avait encore moins de monde que ce soir ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Et les socialistes alors !

M. Lionnel Luca. On rêve !

M. Jean-Marc Ayrault. Je salue d'autant plus la présence de ceux qui sont là ce soir. Il n'en reste pas moins que sur les 365 députés que compte le groupe UMP, il n'y en avait pas plus de cinquante en séance.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Et cinq socialistes !

M. Jean-Marc Ayrault. J'ai aussi été frappé par le peu d'enthousiasme qui a accueilli l'intervention du Premier ministre, comme si le doute s'était emparé des esprits. Et quand ce fut à votre tour de monter à la tribune, monsieur Douste-Blazy, le climat s'est encore alourdi. Vous n'avez pas convaincu, monsieur le ministre. Comment du reste pourriez-vous convaincre quand vous appeler réforme ce qui n'est qu'un énième plan de replâtrage...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Pas vous !

M. Jean-Marc Ayrault. ...comme nous en connaissons, c'est vrai, depuis vingt ans ? Il aurait fallu s'attaquer au cœur des difficultés, mais vous n'en avez ni le courage, ni l'ambition.

M. Claude Goasguen. Quel culot !

M. Bernard Deflesselles. Qu'avez-vous fait en cinq ans ?

M. Jean-Marc Ayrault. Il me suffit, mesdames et messieurs de la majorité, de vous rappeler des chiffres que je sais douloureux à vos oreilles. Depuis 2002, depuis que vous êtes au pouvoir - et nous sommes en 2004 -, le déficit n'a fait que s'aggraver, pour atteindre des chiffres jamais vus jusqu'alors.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. L'aggravation avait commencé avant 2002.

M. Jean-Marc Ayrault. Le déficit atteint aujourd'hui plus de 35 milliards d'euros. Vous n'avez pris aucune mesure pour endiguer cette dérive ; au contraire, vous avez augmenté le tarif de la consultation médicale. Je ne dis pas que vous aviez tort d'engager cette augmentation, et cette question de la rémunération, des médecins généralistes notamment, est encore devant nous.

M. Lionnel Luca. Parce que vous n'aviez rien fait !

M. Jean-Marc Ayrault. Mais je vous reproche de l'avoir décidée sans contrepartie, de façon unilatérale.

Vous avez laissé la situation évoluer spontanément, et spontanément elle s'est bien entendu aggravée, et le déficit s'est accru. Ce n'est pas le déficit en soi qui est en cause, c'est la manière dont on le maîtrise, dont on régule la situation.

M. Lionnel Luca. Pas vous !

M. Jean-Marc Ayrault. Et votre plan ne va qu'aggraver encore la situation. Vous l'admettez vous-même d'ailleurs : dans l'incapacité de faire face aux difficultés auxquelles vous êtes confrontés, vous allez jusqu'à prévoir que l'aggravation durera jusqu'en 2007, en espérant que la situation s'améliore d'elle-même. Pour prendre en compte cette aggravation, vous préférez allonger la durée du remboursement de la dette sociale. Il y a là quelque chose de profondément scandaleux, voire d'immoral,...

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Ce n'est pas à vous de parler de morale !

M. Jean-Marc Ayrault. ...qui est même contestée par une partie des membres de votre majorité, et que nous dénonçons, nous les députés socialistes, avec la plus grande fermeté. Vous ne pourrez pas, monsieur Bur, esquiver cette question au cours de nos débats : vous devrez notamment répondre aux propositions alternatives que nous vous ferons par nos amendements. Il est immoral de renvoyer, comme vous le faites, le poids de la dette sur les générations futures. C'est là une attitude inacceptable quand on est responsable d'un pays.

M. Lionnel Luca. Ça vous va bien de dire ça !

M. Jean-Marc Ayrault. Vous avez même le cynisme de renvoyer cette responsabilité aux gouvernements et aux majorités futures, comme vous l'avez déjà fait pour les retraites.

M. Claude Goasguen. C'est énorme !

M. Jean-Marc Ayrault. Vous avez en effet pris rendez-vous en 2008 pour les retraites, en gageant l'équilibre de notre régime de retraites sur le pari de la baisse du chômage. Or, pour l'instant, aucun chiffre n'indique, malheureusement, qu'on va dans ce sens, au contraire. Au rendez-vous des retraites s'ajoutera donc celui de l'assurance maladie.

Si nous lançons aujourd'hui un cri d'alarme, c'est parce que nous voulons sauver la sécurité sociale. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Elle est bien bonne, celle-là !

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Que n'avez-vous lancé votre cri il y a cinq ans !

M. Jean-Marc Ayrault. Je me contenterai de vous renvoyer aux chiffres, mon cher collègue : lorsque vous êtes arrivés au pouvoir, les comptes de la sécurité sociale étaient à l'équilibre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Faux ! Ils avaient commencé à se dégrader !

M. Jean-Marc Ayrault. Je parle bien des comptes de la sécurité sociale.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Et moi de ceux de l'assurance maladie !

M. Jean-Marc Ayrault. Je terminerai, monsieur le président, en disant à M. le ministre, que nous ne sommes pas là simplement pour faire des déclarations de principe, ni même pour dénoncer l'absence d'ambition et de projet de réforme du Gouvernement : nous sommes là aussi pour faire des propositions. Nous les avons résumées dans un document que nous appelons « Les dix alternatives » à votre projet,...

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Où les cachiez-vous pendant cinq ans ?

M. Jean-Marc Ayrault. ...à un plan qui conduit inéluctablement à l'austérité médicale, faute d'avoir le courage de s'attaquer aux maux qui frappent le cœur même de l'organisation de notre système de soins.

M. Claude Goasguen. C'est vous qui parlez d'irresponsabilité !

M. Jean-Marc Ayrault. Un tel plan nous conduit inéluctablement à l'assurance privée. Et à ce propos notre collègue Gremetz a donné, à l'occasion de sa défense de l'exception d'irrecevabilité, un certain nombre d'arguments qui ne sont pas sans intérêt.

Nous déclinerons ces propositions, monsieur le ministre, en autant d'amendements qu'il le faudra. Vous n'aurez plus alors les échappatoires que vous trouvez sur les plateaux de télévision : on n'est plus là dans le show-business médiatique que vous affectionnez tant. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Vos propos sont scandaleux !

M. Jean-Marc Ayrault. Il ne s'agit plus en effet de vous présenter en majesté dans des publications particulièrement people, mais d'assumer vos responsabilités, en face de l'opposition, qui vous fera des propositions concrètes à travers ses amendements. Nous verrons bien alors ce qu'il en est.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. C'est ça, on verra !

M. le président. Je vous remercie, monsieur Ayrault...

M. Jean-Marc Ayrault. Ce sera alors pour vous l'épreuve de vérité, monsieur le ministre, et vous ne pourrez pas vous en sortir aussi facilement. Voilà toutes les raisons qui, dès ce soir, justifient notre vote en faveur de l'exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Jean-Luc Préel. Le groupe Union pour la démocratie française ne votera pas, bien entendu, l'exception d'irrecevabilité, M. Gremetz n'ayant en rien démontré l'inconstitutionnalité du texte. Mais c'est la loi du genre : son but était en réalité de dire pendant une heure et demie tout le bien qu'il pensait de ce texte, et de l'importance de réformer et de préserver notre système d'assurance maladie.

Le ministre a répondu à l'instant à certains des points qui avaient été évoqués par Maxime Gremetz. Chacun convient avec lui qu'il est urgent de réformer notre système de soins si l'on veut préserver la solidarité qu'il assure et et à laquelle les Français sont très attachés. Ils savent que ce système est aujourd'hui en péril : la crise frappe tous ses secteurs et le déficit est abyssal, comme l'a répété le ministre après Jean-François Mattei il y a quelques mois. Si rien n'était fait, ce système serait gravement menacé.

Si le diagnostic est partagé, surtout depuis les travaux du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, l'étiologie est moins claire, et le traitement plus difficile, car douloureux pour chacun. Tous souhaitent en effet que soit assuré l'égal accès de tous à des soins de qualité, et améliorée l'efficience du système, c'est-à-dire le ratio coût-efficacité, par une évaluation qui assure la meilleure utilisation de chaque euro. Le projet du Gouvernement n'est certes pas parfait, mais nous avons entendu le ministre nous dire qu'il était attentif aux travaux des parlementaires, et prêt à accepter les amendements qui l'amélioreraient. Or nous souhaitons précisément améliorer certains points de ce projet.

Nous proposerons d'abord des moyens de remédier au déficit cumulé. M. Bur l'a dit : il est immoral de faire supporter le poids de ce déficit par les générations futures, qui auront déjà à assumer, entre autres, le coût de la dépendance et des retraites. Nous souhaitons améliorer la gouvernance du système : il s'agit en particulier de préciser ce qui doit relever de la gestion paritaire en matière de caisse de retraites, d'accidents du travail et de maladies professionnelles.

Nos propositions visent ensuite à assurer la mise en œuvre d'une réelle maîtrise médicalisée des dépenses de santé, qui passe par la responsabilisation des acteurs, grâce à une meilleure évaluation des actes. Et ces acteurs ne seront vraiment responsabilisés que s'ils sont associés, en amont aux décisions, et en aval à la gestion. C'est pourquoi nous souhaitons de vrais conseils régionaux de santé, et la mise en place, dès ce texte, d'agences régionales de santé, responsables uniques de la santé au niveau régional, qu'il s'agisse de la médecine ambulatoire ou des établissements de soins, de la prévention ou de l'éducation, voire de la formation des professionnels de santé.

C'est parce que nous pensons que cette réforme est urgente et nécessaire que nous souhaitons améliorer ce projet de loi, à travers les amendements que nous vous proposerons. Voilà pourquoi nous sommes impatients d'entrer véritablement dans le débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M.  Daniel Paul, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Daniel Paul. En 1996, une majorité a voté le changement de statut de France Télécom.

M. Pierre Lellouche. Et heureusement pour France Télécom !

M. Daniel Paul. Il y a quelques heures, la même majorité a dénationalisé EDF-GDF en modifiant leur statut.

M. Pierre Lellouche. Là encore heureusement !

M. Daniel Paul. Il y a quelques mois, la même majorité a changé le système des retraites, non pas pour le sauver, mais pour le démolir progressivement.

M. Yves Bur, président de la commission spéciale. Mensonges ! Tissu de mensonges !

M. Daniel Paul. Il y a quelques jours, votre même majorité a voté un texte dangereusement insuffisant pour venir en aide aux personnes en situation de handicap. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aujourd'hui, sur la sécurité sociale, la même logique conduit votre politique : votre texte constitue une étape non pas pour sauver, mais pour casser la sécurité sociale.

Cette remise en cause remonte à 1967. Jamais la droite ni le patronat n'ont accepté ce qui a été mis en place à la Libération. Jamais ! L'objectif a toujours été de remettre en cause ce grand acquis social. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aujourd'hui, vous prétextez une aggravation de la situation pour faire accroire à la fatalité des remèdes que vous prétendez apporter et pour les rendre irréversibles. Or la réforme que vous voulez mettre en place sera inopérante face aux enjeux. Elle s'éloigne de la gratuité pour s'orienter vers une conception individualiste de notre vie sociale. Votre projet ne répond pas non plus aux exigences d'une réforme, car vous refusez de mettre en place les recettes nécessaires en face des besoins.

Tout le monde s'accorde sur les nouvelles dépenses à prendre en charge : le vieillissement de la population, la cherté des soins hospitaliers et les problèmes de périnatalité. Ce sont de vrais problèmes.

Or, en répondant à M. Gremetz après l'exception d'irrecevabilité, ni M. le ministre ni le représentant de l'UMP n'ont abordé la question du financement des dépenses qui sont constatées. La solution dépend pourtant des recettes à mettre en place.

Votre objectif est de faire payer les usagers et les salariés, en épargnant autant que possible les entreprises, c'est-à-dire ceux qui, pourtant, pourraient payer.

Il y a quelques années, notre assemblée a mis en place une commission d'enquête sur l'utilisation des fonds publics par les grands groupes. Elle a constaté l'existence, dans ces grands groupes, de véritables trésors de guerre ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre Lellouche. Comme la CGT à EDF !

M. Daniel Paul. D'où viennent ces trésors de guerre ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Cela ne vous plaît pas ! C'est bon signe !

Ils sont tout simplement le résultat d'une politique antisalariale et antisociale, du développement du chômage et de la précarité !

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Il faut évoluer, un peu !

M. Pierre Lellouche. 3 600 cégétistes !

M. Daniel Paul. Sanofi a acheté Aventis près de 50 milliards d'euros, dont une trentaine provenaient de ce fameux trésor de guerre ! C'est là que nous voulons faire porter l'effort de financement.

Il est anormal que ces sommes considérables échappent totalement au financement de la protection sociale dans notre pays, en particulier de la sécurité sociale.

De la même manière, nous souhaitons une augmentation du financement de la caisse des accidents du travail et de celle des maladies professionnelles, dont le patronat veut aujourd'hui se débarrasser en les mettant à la charge du régime général.

Monsieur le ministre, ces questions relatives au financement réel permettant de pérenniser le système de sécurité sociale sont-elles, pour vous, taboues ? Vous n'avez en effet rien répondu à M. Gremetz à ce sujet.

Vous ne serez donc pas surpris que nous votions cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'exception d'irrecevabilité.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 194

              Nombre de suffrages exprimés 193

              Majorité absolue 97

        Pour l'adoption 43

        Contre 150

L'Assemblée nationale n'a pas adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Rappel au règlement

M. Bernard Accoyer. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.

M. Bernard Accoyer. Je serai très bref, monsieur le président.

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58, alinéa 1, de notre règlement.

Tout à l'heure, le président du groupe socialiste, Jean-Marc Ayrault, a mis en cause l'assiduité des députés du groupe UMP. Or, à l'issue de ce vote, je lui fais remarquer qu'il n'a qu'à comparer la partie gauche de l'hémicycle avec celle de droite et constater le résultat du vote ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je tiens à lui dire de manière très directe qu'il ne faut pas confondre la forme et le fond. Si, pendant cinq ans de gouvernement Jospin, aucune réforme n'a été entreprise ni en matière de protection sociale et d'assurance maladie, ni pour les retraites, et si, aujourd'hui, aucune proposition alternative sérieuse n'est avancée par l'opposition (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.), c'est parce que c'est de notre côté que se trouvent le progrès et l'avenir de la protection sociale de la nation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous indique que 8 500 amendements ont été déposés sur ce texte - pour l'instant, cela peut encore changer... (Sourires .)

M. Alain Néri. Ça peut s'améliorer !

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Mercredi 30 juin 2004, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1675, relatif à l'assurance maladie :

Rapport, n° 1703, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission spéciale.

À vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures trente-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot