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Première séance du jeudi 14 octobre 2004

15e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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SPORT PROFESSIONNEL

Discussion d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Édouard Landrain et M. Jean-Marie Geveaux portant diverses dispositions relatives au sport professionnel (nos 1758, 1831).

La parole est à M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, mes chers collègues, la proposition de loi que j'ai l'honneur de vous présenter ce matin est un texte technique et c'est le troisième texte relatif au sport que l'Assemblée est appelée à examiner à la suite des états généraux du sport qui se sont tenus du 16 septembre au 8 décembre 2002.

La présente proposition s'inspire plus précisément du rapport commandé au mois de septembre 2003 par vous-même, monsieur le ministre, à M. Jean-Pierre Denis, inspecteur des finances, sur certains aspects du sport professionnel en France, ainsi que des consultations auprès des parties concernées menées depuis lors par les deux auteurs de la proposition.

Parmi les recommandations figurant dans ce rapport rendu public au mois de novembre 2003, deux apparaissent prioritaires aux yeux des auteurs de cette proposition de loi, à savoir l'allégement et la modernisation des prélèvements sur les clubs professionnels et la reconnaissance à l'ensemble des joueurs professionnels d'un droit à l'image sur le modèle de celui des artistes interprètes.

Cette proposition de loi se penche également sur plusieurs autres aspects du sport professionnel que sont la sécurisation de la situation de travail des sportifs sélectionnés en équipes de France, l'assouplissement des règles relatives à la multipropriété des sociétés sportives et la participation de celles-ci au fonctionnement des fédérations sportives.

Premier axe du texte : rendre plus performants les clubs professionnels français relevant des principaux sports collectifs.

De nombreuses études relèvent le déficit de compétitivité des clubs professionnels français vis-à-vis de leurs principaux concurrents que sont les clubs britanniques, espagnols et italiens.

Aussi est-il proposé de tirer les conséquences de la nature plurielle des recettes tirées de l'activité des sportifs évoluant dans les sports collectifs professionnels et d'examiner la pertinence de certaines taxes qui grèvent les finances des clubs.

Premier point : la rémunération de l'image collective des équipes professionnelles.

L'idée qui sous-tend cette réforme est qu'une part croissante de la rémunération versée au joueur salarié est la contrepartie de l'exploitation de l'image collective de l'équipe par le biais des droits télévisés hors direct, du marchandisage et des droits dérivés.

Le fait que cette exploitation se déroule en dehors de la présence physique du joueur justifie le rapprochement avec le mode de rémunération des artistes interprètes - voire des mannequins -, tel qu'il est défini par l'article L. 762-2 du code du travail. Il apparaît dès lors naturel de considérer qu'une fraction du montant de la rémunération, que le texte limite à 30 %, corresponde de manière forfaitaire au produit de cette activité, qui perd ainsi son caractère de salaire au bénéfice de celui de redevance.

Aujourd'hui cette mesure apparaît encore plus nécessaire, comme le souligne le rapport Denis, afin que le droit d'image ne soit pas réservé aux seuls sportifs susceptibles de bénéficier de contrats d'image individuels.

Deuxième point : la suppression d'une taxe au fondement incertain.

De manière tout à fait logique, les clubs professionnels sont assujettis, dans les conditions de droit commun, à la taxe d'apprentissage et à la participation des employeurs à la formation professionnelle continue.

Il en va différemment en ce qui concerne la contribution spécifique due au titre des contrats à durée déterminée, dont le dispositif figure à l'article L.931-20 du code du travail. Cet article fait obligation à l'ensemble des entreprises, et donc aux sociétés sportives, d'acquitter une cotisation de 1 % sur les salaires versés aux titulaires d'un contrat à durée déterminée afin de financer le congé individuel de formation, le CIF.

Or, si le contrat à durée indéterminée est désormais la norme afin de pourvoir aux emplois permanents, le secteur du sport professionnel a toujours eu recours au contrat à durée déterminée en raison de la difficulté qu'il y aurait à gérer un club si chaque joueur pouvait, comme c'est le cas dans le contrat à durée indéterminée, rompre le contrat à tout moment.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le sport professionnel fait partie des secteurs d'activité énumérés à l'article D. 121-2 du code du travail dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée.

La disposition du texte s'appliquera, bien sûr, aux joueurs professionnels, aux joueurs « pro » stagiaires, mais aussi aux entraîneurs.

Deuxième axe du texte : améliorer divers aspects de la pratique professionnelle du sport.

Premier point : la clarification de la situation des joueurs internationaux.

Les rapports entre les clubs sportifs qui emploient les joueurs et la fédération délégataire correspondant à cette discipline sont régis par des conventions passées entre les fédérations et les ligues professionnelles créées pour la représentation, la gestion et la coordination des activités professionnelles de ladite discipline.

Si aujourd'hui, pratiquement seule la Fédération française de football, en accord avec la Ligue de football professionnel, est à peu près dans les clous, il n'en est pas de même pour la plupart des autres disciplines. C'est pour cette raison que le procédé de mise à disposition des joueurs par leur employeur méritait d'être amélioré.

Dans l'optique de clarifier rapidement les ambiguïtés - essentiellement dans les disciplines autres que le football - qui illustrent le décalage entre les règles de droit commun et la pratique sportive professionnelle, nous proposons de compléter l'article L.125-3 du code du travail par une exception destinée à sécuriser le statut du sportif professionnel mis à disposition d'une sélection nationale, et ce en raison des risques liés, notamment, aux accidents du travail.

Deuxième point : l'assouplissement des règles de multipropriété.

L'article 15-1 de la loi du 16 juillet 1984 modifiée relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, dont la rédaction est issue de la loi du 28 décembre 1999, dispose qu'il est interdit à toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société constituée conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 11 et dont l'objet social porte sur une même discipline sportive. Toute cession opérée en violation de ces dispositions est nulle.

Le législateur a entendu ainsi protéger l'intégrité des compétitions sportives en évitant tout risque d'atteinte à l'incertitude du résultat sportif du fait du contrôle par la même personne de plusieurs sociétés sportives participant conjointement à une compétition.

Cette réglementation est une illustration des rapports incertains entretenus entre la réglementation du sport professionnel avec celle de la concurrence économique.

Le droit communautaire a, au contraire, entendu appliquer directement le droit de la concurrence au secteur du sport professionnel qui est considéré comme une activité économique pure et simple. Cette position originelle, dont l'arrêt Bosman est la parfaite illustration, a heureusement évolué, notamment à l'initiative de la France, afin de reconnaître la spécificité des compétitions sportives.

Cette réglementation ne prohibe donc pas systématiquement la détention de titres de plusieurs sociétés sportives ayant la même activité, au contraire de l'actuelle rédaction de l'article 15-1.

Selon votre rapporteur il est nécessaire d'assouplir la réglementation française afin de se rapprocher de la position européenne qui s'attache à établir une stricte adéquation entre le but recherché et les restrictions au droit commun de la concurrence. C'est pourquoi l'article 4 de la proposition de loi autorise, de façon limitée, un actionnaire à détenir des titres de plusieurs sociétés sportives d'une même discipline, en lui interdisant cependant d'en avoir le contrôle économique. Cette disposition devrait permettre d'accroître les possibilités d'engagement de certains investisseurs dans les clubs professionnels.

Troisième point : la réintégration des sociétés dans la vie fédérale.

Le développement de la professionnalisation de plusieurs disciplines collectives a conduit le législateur à rendre obligatoire la création, à côté de l'association support régie par la loi de 1901 sur les associations, de sociétés commerciales dès lors que le montant des recettes ou le montant total des rémunérations des sportifs dépasse des seuils fixés par décret en Conseil d'État.

Ces sociétés prennent la forme soit d'une SARL, société à responsabilité limitée, soit d'une SAOS, société anonyme à objet sportif, soit, éventuellement, d'une société anonyme sportive professionnelle.

Dans ce contexte, il convient de réparer un oubli dans la rédaction de l'article 16 de la loi du 16 juillet 1984 précitée, qui ne mentionne pas lesdites sociétés parmi les entités auxquelles les fédérations peuvent conférer la qualité de membre. Cette adjonction est d'autant plus naturelle que, dans sa version antérieure à la loi du 6 juillet 2000, cet article disposait que les sociétés commerciales faisaient de droit parti des fédérations. La perspective de renouvellement des instances dirigeantes de l'ensemble des fédérations rend cette réintégration d'autant plus nécessaire. C'est donc un retour pur et simple à la case départ.

Pour conclure, mes chers collègues, ce texte entend apporter une nouvelle contribution à la modernisation des règles encadrant la pratique professionnelle du sport, dans l'optique de permettre aux différents acteurs de rivaliser plus équitablement avec leurs homologues européens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je souhaiterais, avant que les différents orateurs ne s'expriment sur la proposition de loi qui vient de vous être présentée, saluer l'initiative prise par M. Édouard Landrain et M. Jean-Marie Geveaux, dont je connais l'intérêt et l'attachement qu'ils portent au développement du sport en France.

Ce texte propose des mesures concrètes et efficaces pour répondre à un certain nombre de préoccupations du monde du sport professionnel.

Les attentes relayées auprès des auteurs de la proposition de la loi, lors des consultations qu'ils ont menées, se sont exprimées de manière identique au sein du comité de suivi que j'ai installé en février dernier, afin de débattre des nouvelles évolutions à apporter à l'encadrement juridique du sport professionnel français.

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui rejoint totalement les orientations approuvées le 1er juin dernier par le comité de suivi, qui rassemble l'ensemble des acteurs du sport professionnel en France : fédérations sportives, ligues, organismes représentatifs des entraîneurs et des joueurs.

Les travaux de ce comité s'inscrivent dans une démarche interministérielle qui témoigne de l'intérêt porté par le Gouvernement à un secteur qui contribue au rayonnement de la France et à son attractivité économique.

Ces travaux ont été portés à la connaissance des auteurs de la proposition de loi. Je suis heureux qu'ils aient contribué à enrichir les réflexions qui ont conduit à l'élaboration du texte défendu par M. Landrain et M. Geveaux.

L'adoption - je l'espère - de ce texte marquera une nouvelle avancée dans la prise en compte des conditions de compétitivité et d'attractivité de nos clubs professionnels, après les premiers aménagements apportés par la loi du 1er août 2003 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.

Comme vous le savez, j'ai souhaité que cette loi desserre un certain nombre de contraintes pesant sur l'ensemble des disciplines ayant une dimension professionnelle.

Ses dispositions portent, je le rappelle, sur l'utilisation du numéro d'affiliation, le droit des marques et la cession des droits d'exploitation audiovisuelle. Elles produisent aujourd'hui leur plein effet, l'ensemble des décrets d'application ayant été pris, comme je m'y étais engagé, dans des délais très rapides.

J'avais, à l'époque du vote de la loi, indiqué que je n'excluais pas d'autres évolutions, convaincu de la nécessité d'aller plus loin dans les réformes, afin de rétablir le déficit de compétitivité dont souffrent les clubs professionnels français par rapport à leurs principaux concurrents européens.

J'avais confié à Jean-Pierre Denis, inspecteur des finances, l'établissement d'un rapport visant à dresser une analyse exhaustive des raisons empêchant les clubs français de rivaliser équitablement avec leurs homologues européens.

Plusieurs des dispositions contenues dans la présente proposition de loi sont conformes aux préconisations de ce rapport, comme l'a souligné le rapporteur.

Il s'agit notamment de la reconnaissance d'une rémunération du droit à l'image pour les sports collectifs, de la sécurisation de la situation de travail des sportifs sélectionnés en équipe de France, et de la suppression du versement du 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée.

Les mesures proposées sur ces trois points sont fondées sur une analyse pertinente de la réalité des situations vécues dans le domaine du sport professionnel.

En matière de droit à l'image collective, ces mesures permettent également la souplesse nécessaire à la mise en place de solutions différenciées selon les disciplines sportives. C'est pourquoi je ne doute pas qu'elles recueillent un accord consensuel tant de la part des joueurs que des clubs.

Le dispositif proposé en matière de droit à l'image n'instaure en rien un statut spécifique, dérogatoire, des sportifs professionnels, mais s'inscrit dans une conception moderne de la pratique sportive professionnelle, dont il reconnaît la réalité économique. Faute de cette reconnaissance, des dispositifs de droit à l'image individuelle ont été créés dans des conditions souvent contestables, car insuffisamment transparentes.

La levée de l'interdiction absolue de la multipropriété des sociétés sportives me paraît de nature à renforcer l'attractivité de nos clubs professionnels vis-à-vis des investisseurs et met notre droit en conformité avec la réglementation européenne en matière de libre circulation des capitaux, ce qui, pour moi, est une priorité.

Cette mesure préserve l'aléa sportif en interdisant la prise de contrôle de plus d'une société dans une même discipline, ce qui est primordial.

Enfin, la participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations − dans la mesure, bien sûr, où ces dernières le souhaitent − procède du même esprit d'ouverture que celui qui a guidé les évolutions introduites par la loi du 1er août 2003 − ouverture aux partenaires économiques des fédérations −, dans le respect des principes d'organisation du sport mis en valeur lors des États généraux du sport.

Vous savez combien je suis attaché à maintenir, au sein des fédérations, l'unité du sport et l'esprit de solidarité qui doit perdurer entre les mondes amateur et professionnel. La mesure proposée vient attester du lien entre ces deux secteurs et donne un fondement légal à ce principe de solidarité.

Le courage politique tient davantage à cette exigence d'unité qu'à des gesticulations idéologiques ou à l'adoption de lois qu'on s'empresse ensuite de ne pas appliquer.

Pour toutes ces raisons − notamment parce qu'elle comporte des mesures qui pourront bénéficier à l'ensemble des familles du sport professionnel français −, le Gouvernement soutient l'adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais saluer l'action et la démarche de M. le ministre des sports.

D'une part, vous avez su, monsieur le ministre, nouer d'excellentes relations avec les parlementaires, députés ou sénateurs. L'an dernier, nous avons procédé à l'examen de la proposition de loi sénatoriale de Bernard Murat relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives. Aujourd'hui, c'est l'Assemblée nationale qui reprend l'initiative, avec le texte de nos collègues Jean-Marie Geveaux et Édouard Landrain − ou Édouard Landrain et Jean-Marie Geveaux, tous deux travaillant en parfaite symbiose. (Sourires.)

D'autre part, vous avez su nouer un dialogue avec l'ensemble des acteurs du mouvement sportif à l'occasion des états généraux du sport qui se sont tenus à la fin de l'année 2002 et qui avaient, pour feuille de route, la modernisation du sport français.

Les deux propositions de loi auxquelles j'ai fait allusion sont issues, pour une part importante, de ce dialogue avec le monde sportif, lequel avait souvent eu l'impression, au cours des années précédentes, de ne pas être réellement écouté.

Vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, le texte que nous examinons aujourd'hui est conforme aux conclusions des groupes de travail mis en place dans le prolongement du rapport de Jean-Pierre Denis. Les mesures qu'il propose répondent à l'objectif d'amélioration de la compétitivité des clubs professionnels français.

Comme je ne peux détailler chacune de ces mesures, je me contenterai de rappeler celles qui sont essentielles : la reconnaissance d'un droit à l'image pour tous les joueurs professionnels, sur le modèle de celui dont bénéficient les artistes interprètes ; la sécurisation de la situation juridique des sportifs sélectionnés en équipe de France, pour éviter tout risque de qualification en prêt de main d'œuvre illicite et pour leur assurer une protection sociale optimale, notamment au regard des accidents du travail ; l'exonération du prélèvement « 1 % CDD » pour les clubs professionnels, puisque, dans leur activité, le CDD est par nature la norme ; un aménagement du régime de multipropriété compatible avec le maintien du principe de l'équité sportive ; la possibilité, accordée aux fédérations sportives, d'octroyer la qualité de membre aux sociétés sportives dès lors que, de fait, elles participent à leur fonctionnement, notamment par des redistributions financières ; une solidarité ouverte sur le fondement de la solidarité entre les deux secteurs − professionnel et amateur − qui est la marque de l'organisation du sport en France.

Ne nous méprenons pas, le sujet traité est particulièrement complexe, d'abord parce qu'il existe, dans notre pays, des pesanteurs historiques et sociologiques qui ont considérablement retardé la mise en place des structures adaptées au professionnalisme, ensuite parce que ces sujets sont fortement contraints par le droit communautaire, celui de la concurrence, les exigences de la libre circulation des personnes et le droit à l'information, et enfin parce qu'il est difficile de dégager des synthèses.

D'un côté, nous sommes soucieux de l'attractivité de nos clubs, dans un contexte de concurrence accrue au niveau européen et international. Nous ne pouvons plus faire abstraction des rapports grandissant entre sport, argent et médias, non plus que de toute cette économie de l'immatériel qui draine beaucoup d'argent et dans laquelle l'image est devenue une valeur patrimoniale susceptible d'une exploitation à outrance.

D'un autre côté, nous devons veiller à ce que les mutations en cours ne provoquent pas la désintégration du sport unitaire en deux camps, l'élite et la masse, et la dissolution de leurs liens de dépendance mutuelle, qui sont naturels.

Édouard Landrain et Jean-Marie Geveaux − Jean-Marie Geveaux et Édouard Landrain (Sourires) − nous proposent un texte particulièrement équilibré qui va aider le mouvement sportif à s'adapter à son environnement socio-économique. Je salue leur travail et celui de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on peut discerner trois avis sur la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui : il y a ceux qui estiment qu'elle n'est pas assez ambitieuse et qu'on est encore trop éloigné des facilités offertes aux grands clubs européens ; il y a ceux qui considèrent qu'elle est faite pour les riches et qu'elle les avantage ; il y a ceux qui, enfin, la jugent modérée, perfectible certes, mais réfléchie.

Vous vous en doutez, je fais partie de ces derniers. En effet, cette loi est modérée, car elle tient compte des besoins de tous. La meilleure preuve en est que tous − disciplines professionnelles, fédérations, ligues, unions de joueurs, unions des présidents de clubs, CNOSF − l'ont trouvée convenable, acceptable, devant certes être améliorée dans l'avenir, mais tenant compte de leurs besoins immédiats. Mieux, tous nous ont demandé de faire vite, car leurs inquiétudes sont grandes, leurs besoins pressants. À leurs yeux, l'important est de disposer d'une loi qui les aide, même si elle n'est pas totalement parfaite.

Autre preuve de la qualité de cette proposition de loi, elle est née − vous l'avez rappelé, monsieur le ministre − des discussions des commissions qui, pendant des mois à travers toute la France, ont travaillé dans le cadre des états généraux du sport.

Enfin, elle a été pensée dans le respect des recommandations du rapport que Jean-Pierre Denis, inspecteur des finances, vous a remis en novembre 2003. Depuis de longs mois, Jean-Marie Geveaux et moi − moi et Jean-Marie Geveaux (Sourires) − avons reçu, consulté tout ce que notre pays compte de responsables du sport professionnel, dans toutes les disciplines. Tous nous ont recommandé de faire vite. Une niche parlementaire se présentait : nous voici ! Merci, monsieur le président de la commission des affaires sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Merci, monsieur le membre de la commission des finances !

M. Édouard Landrain. Notre proposition de loi comporte un exposé des motifs large, ouvrant de nouvelles pistes pour le futur, et six articles.

Le premier porte sur la rémunération du droit à l'image. Une base de travail est établie, avec la référence au statut des artistes interprètes et mannequins. Il s'agit simplement de reconnaître des droits aux sportifs professionnels, dès lors qu'ils « donnent à voir » non seulement à l'occasion des rencontres sportives, mais aussi grâce à l'exploitation commerciale de leurs prestations. Les joueurs professionnels sont salariés. Ils paient l'impôt et continueront de le payer. La grande différence est que les clubs verront leurs charges diminuer.

Ainsi, le titre VIII − portant sur certaines catégories de travailleurs et d'entreprises − du Livre septième du code du travail, relatif à des « Dispositions particulières à certaines professions », est complété par un chapitre V intitulé « Sportifs professionnels ». La disposition proposée prévoit des pondérations : la part de la redevance ne pourra excéder 30 % de la rémunération brute totale versée au joueur. Un pourcentage moindre pourra être défini pour chaque discipline par les partenaires sociaux. La disposition ne s'appliquera pas à la part de rémunération inférieure au double du plafond de la sécurité sociale, ce qui représente une garantie pour les fédérations ou clubs aux salaires modestes. Cet article simple, souple, a obtenu l'accord de tous nos auditeurs.

Je rends hommage à Guy Drut qui, en son temps, avait souhaité mettre en place un dispositif équivalent. Des décrets d'application étaient en préparation lorsque les aléas politiques ont fait que la loi Drut est devenue une loi Lamour, qui s'inscrit, en tout cas, dans la continuité.

L'article 2 vient combler un vide juridique : les joueurs français sélectionnés en équipe de France restant salariés de leur club d'origine, il y avait un risque de pénalisation en main-d'œuvre illicite, ce qui eût été un comble. L'article propose simplement de sécuriser définitivement la situation de travail d'un joueur sélectionné en équipe de France et, surtout, de lui assurer protection sociale et garantie d'accès au régime d'assurance contre les accidents du travail.

L'article 3 est marqué au coin du bon sens. Sur tous les CDD est effectué un prélèvement de 1 % pour financer le congé individuel de formation et le congé de bilan de compétences. Justifiable et nécessaire pour la plupart des CDD, cette mesure paraît totalement farfelue si on l'applique aux sports professionnels où les contrats à temps sont la seule possibilité, les CDI n'étant même pas imaginables. Quant à la formation, elle est quotidienne, dans le cadre de la fonction elle-même.

La Commission européenne nous pressait de prendre une décision telle que celle proposée à l'article 4. Nous avons choisi d'agir avec précaution, puisqu'il n'est pas possible d'avoir le contrôle économique dans les sociétés sportives ou associations intéressées.

Quant à l'article 5, il marque, lui aussi, un retour au bon sens. Que les sociétés sportives puissent être membres de la fédération, quoi de plus normal ? Ainsi, le trop bien pensé politiquement correct de l'époque sera corrigé.

En conclusion, l'UMP votera bien entendu le texte. Elle en a été le moteur, mais il n'est que l'aboutissement des longues réflexions du monde sportif et de ses représentations. Ce texte n'est pas celui d'une discipline particulière, le football, comme certains ont voulu le faire croire, et il est applicable à l'ensemble du monde sportif professionnel.

Il reste certes quelques ambiguïtés à lever, et vous répondrez tout à l'heure, monsieur le ministre, lors de l'examen des articles, sur celles concernant le système fiscal applicable à la part de la redevance. Dans le futur, il nous faudra également songer au plan d'épargne salariale pour aider à la reconversion des sportifs professionnels. Il nous faudra réfléchir à l'éventuel remplacement de la taxe sur les spectacles par une TVA à taux réduit.

Il nous faudra rechercher une harmonisation des règles européennes, notamment fiscales, qui soit applicable à l'ensemble des pays.

Puis, il nous faudra traiter un problème toujours d'actualité, celui des agents sportifs. Là aussi, moralité oblige, il faudra bien, un jour, prendre des décisions, attendre ne ferait que renforcer le désordre actuel. À ce propos, je livre à votre sagacité cette information pour le moins étonnante : les agents sportifs m'ont fait parvenir un courrier pour demander de figurer dans la loi elle-même à titre d'intermédiaires pour la gestion du droit à l'image, ce qui est pour le moins étonnant.

En conclusion, j'espère, mes chers collègues, que vous voterez ce texte modéré et applicable à tous. Le monde sportif, je vous l'assure, nous observe et, légitimement, nous jugera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur le fond, cette proposition de loi relative au sport professionnel avait de quoi rassembler sur ces bancs les députés qui, d'une manière générale, reconnaissent au sport des vertus de lien social et aux champions des vertus identitaires. Cette proposition de loi avait de quoi rassembler également ceux qui sont flattés de la qualité de la formation sportive à la française et qui éprouvent quelque fierté à voir les produits de ces écoles évoluer dans nos championnats nationaux.

Mais sur la forme, ce texte n'emporte pas l'adhésion du groupe socialiste et je vais vous expliquer pourquoi celui-ci votera contre.

Chacun s'accorde à penser que les compétitions à l'échelle européenne ne se disputent pas à armes égales. Les exemples ne manquent pas.

Les instances dirigeantes du football français tempêtent notamment contre le coût de revient d'un salarié d'un club français par rapport à un joueur de même niveau évoluant dans d'autres pays européens. La concurrence est faussée.

Il n'est pas concevable en effet qu'une dette d'un milliard de francs affectant le Real de Madrid puisse être effacée d'un coup de baguette magique par le pouvoir espagnol.

Il n'est pas normal que le total des déficits des clubs de première et deuxième divisions italiennes s'élève presque à 2 milliards d'euros alors que le chiffre d'affaires du Calcio s'élève à peine à 1,4 milliard d'euros. Il n'est pas normal que les dettes fiscales des clubs italiens pèsent 510 millions d'euros, dont 110 pour les deux seuls clubs romains, la Lazio et la Roma.

Il n'est pas normal qu'en France, la Direction nationale de contrôle de gestion des clubs surveille et punit les mauvais élèves aux mauvais budgets alors qu'ailleurs, tout serait permis ou presque.

Alors que faire ? Assurément, la meilleure idée serait d'harmoniser au niveau du sport européen les règles du jeu en matière fiscale et sociale. Vaste programme, comme aurait dit le général de Gaulle, qui nous renvoie au débat sur l'Europe, c'est-à-dire à l'infini ou dans les ténèbres.

Et c'est ainsi que chacun arrange ses affaires dans son coin, en se cachant à peine.

Et c'est ainsi que nos collègues qui portent cette proposition de loi ont, eux, choisi un dispositif dont l'essentiel consiste à alléger les charges des clubs professionnels.

C'est une méthode. Ce n'est pas la nôtre, parce que ce n'est pas la bonne.

Ce n'est pas la bonne parce que son but n'est pas de rendre performant les sports professionnels français, mais de rendre performants, financièrement, le football français, tant pis pour les autres.

M. Édouard Landrain. Ce n'est pas vrai !

M. Henri Nayrou. Il eut été préférable de brasser d'autres idées du rapport de M. Denis pour affronter courageusement les réalités d'un sport professionnel qui versent désormais dans le business et pour traiter de manière globale les avantages et les inconvénients de notre législation par rapport aux autres.

Un exemple parmi d'autres, ce texte met justement l'accent sur la concurrence déloyale subie par les clubs du football français parce que nos stars trouvent mieux ailleurs, et net d'impôt.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Eh oui !

M. Henri Nayrou. Mais il se garde bien d'indiquer, à l'inverse du rapport Denis, qu'en matière de fiscalité personnelle, ces mêmes champions, comme tous les citoyens français d'ailleurs, bénéficient d'avantages certains par rapport aux autres pays européens.

La méthode n'est pas bonne enfin parce qu'il n'est pas possible de justifier, aux yeux de tous, une fiscalité sur mesure pour quelques-uns au moment où ce gouvernement se prépare à lancer sa grande loi de cohésion sociale.

On comprend mieux dès lors les raisons pour lesquelles ce n'est pas le ministre des sports qui porte ce texte comme il eut été logique, cette proposition de loi se situant dans la continuité de la loi Lamour de 2003.

Des cinq articles qui nous concernent dans cette proposition de loi, deux nous donnent de l'urticaire.

M. Édouard Landrain. Il faut aller chercher le médecin !

M. Henri Nayrou. Deux autres suscitent le débat. Seul l'article 2 nous permet de vous rejoindre. En effet, la solution qu'il propose pour offrir une plus grande sécurisation juridique des sportifs sélectionnés dans les équipes de France nous paraît bien adaptée au regard du droit positif.

L'article 4, qui lève l'interdiction absolue de la multipropriété des sociétés sportives, permettra de faire un pas supplémentaire vers l'assimilation de l'entreprise sportive à l'entreprise de droit commun.

M. François Rochebloine. Une assimilation partielle !

M. Henri Nayrou. Il marque un recul incontestable de la prééminence du sport sur l'économie, ce qui n'est nullement étonnant de la part de cette majorité.

M. Édouard Landrain. Vous oubliez l'Europe !

M. Henri Nayrou. En dépit des griefs formulés par la Commission européenne sur la restriction de prise de participation dans le capital d'entreprises pratiquant une même discipline sportive, il nous paraissait primordial de garantir un minimum d'éthique sportive et d'équité dans les compétitions, ce qui figurait d'ailleurs dans les termes de la déclaration de Nice.

Tel n'est pas l'esprit de cet article. Ce n'est pas le fait que celui-ci prévoie que le multi-actionnaire ne pourra pas avoir le contrôle effectif de deux clubs qui nous fera changer d'avis. Et encore moins le contexte actuel, qui fait apparaître des irruptions d'argent à l'origine plus ou moins douteuse,...

M. François Rochebloine. Oh !

M. Henri Nayrou. ...évolution qui commence à émouvoir - il était temps - les instances internationales et françaises.

M. Jean-Claude Beauchaud. Eh oui !

M. Henri Nayrou. J'en profite d'ailleurs, monsieur le ministre, pour remarquer avec intérêt votre position sur la cotation en bourse des clubs professionnels. Elle vous vaut des critiques de la part de certains présidents de clubs de football, qui, à nos yeux, valent des compliments. Tenez bon !

L'argent est nécessaire, le fric ne l'est pas.

L'article 5, qui autorise les sociétés sportives à être membres des fédérations, se situe quant à lui dans la droite ligne de la loi Lamour.

Or, d'une part, la loi Buffet prévoyait que les sociétés commerciales puissent participer au fonctionnement des fédérations sous forme contractuelle, principe commun à l'activité commerciale, et non par adhésion, principe commun au fait associatif.

D'autre part, l'architecture actuelle du mouvement sportif - fédérations-ligues-syndicats - est suffisante pour que chacun trouve la place qui lui revient dans le dispositif. Désormais, le risque sera grand de voir les fédérations affaiblies et, par la même occasion, les missions de service public que votre ministère, monsieur Lamour, leur attribue à titre officiel remises en cause.

Nous nous opposerons donc à ce nouveau pas en avant du sport professionnel dans les instances du sport pour tous.

M. Édouard Landrain. On vous jugera !

M. Henri Nayrou. J'en viens aux articles 1 et 3, qui proposent un nouveau type de droit à l'image et la suppression du 1 % sur les contrats à durée déterminée pour la formation et la reconversion. Ils ont en commun le fait qu'ils créent deux nouvelles formes dérogatoires en matière sociale et fiscale au profit des clubs professionnels.

Le but avoué est clair. D'abord, ces articles concernent le football et, à un degré moindre, le basket.

M. Édouard Landrain. Et le rugby !

M. Henri Nayrou. Et surtout, ils visent à fournir des marges bénéficiaires aux clubs français afin d'obtenir des moyens supplémentaires pour rivaliser avec les grands clubs européens.

Dans une remarquable plaquette, véritable amour de lobbying, présentée par le président de la Ligue du football professionnel Frédéric Thiriez, il est écrit que le cercle sera vertueux : plus d'argent, moins de stars expatriées, plus de résultats réguliers sur la scène internationale, donc plus d'attractivité au niveau national, plus de recettes, plus de salaires et, pour boucler la boucle, plus de rentrées sociales et fiscales.

M. François Rochebloine. Eh oui !

M. Henri Nayrou. Le raisonnement est optimiste, la solution l'est moins. J'y vois en effet une objection majeure. S'il est exact que ce nouveau dispositif permettra à des grands clubs d'économiser des sommes importantes liées aux charges sans que la majorité des salariés du football soit moins bien rétribuée, son application ne manquera pas de poser un problème dans les autres sports professionnels, où les joueurs, ayant des salaires plus modestes, auraient tout intérêt à cotiser sur une base la plus large possible.

M. Édouard Landrain. Ils pourront le faire !

M. Henri Nayrou. Quant à l'article 3, s'il relève aussi de la même philosophie, celle qui consiste à alléger les charges par tous les moyens, son application soulève encore plus d'oppositions.

Le fait qu'en sport professionnel, la norme soit le CDD et non le CDI justifiait que l'on se penchât sur les effets que cette adaptation imposée engendre sur les prélèvements obligatoires. Mais les auteurs de cette proposition de loi, poussés par les états généraux du sport, le rapport Denis et les puissantes forces du football professionnel, s'y sont tellement penchés qu'ils ont fini par tomber dans le panneau.

La suppression du 1 % sur les CDD d'usage est choquante, d'abord parce qu'elle permettra d'échapper à une règle commune et noble, qui est le financement de la formation et de la reconversion des sportifs.

Ensuite, parce qu'elle permettra d'exclure du champ des prélèvements obligatoires des très hauts salaires dont bénéficient des joueurs qui n'auront aucun souci de formation et de reconversion à la fin de leur carrière.

Enfin, et c'est l'objection la plus importante à nos yeux, parce que la grande masse des professionnels sportifs, qui sont loin de toucher des sommes mirobolantes, qui connaissent déjà et qui connaîtront plus tard des problèmes à l'heure de se reconvertir, seront privés des ressources générées par cet apport de 1 %.

M. Édouard Landrain. Nous n'empêchons rien !

M. Henri Nayrou. Ce n'est pas concevable. Et je vais vous donner un exemple qui éclairera l'Assemblée. Figurez-vous que le rugby est en train de recréer ce que l'article 3 est en train de supprimer, c'est-à-dire un fonds propre sur les salaires afin de pallier les méfaits de cette proposition de loi qui n'est même pas encore votée. Provale, le syndicat des rugbymen professionnels, avait fait savoir, dans le cadre d'un groupe de travail, son opposition à la suppression de cette taxe...

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. C'est faux !

M. Édouard Landrain. Ils sont d'accord, nous les avons rencontrés !

M. Henri Nayrou. ...au motif cohérent que ses adhérents, dont les salaires vont du smic à 15 000 euros, ont un besoin évident de financement de formation en prolongement de leur carrière. C'est pour cette raison que la Fédération de rugby, la Ligue des pros et le syndicat Provale ont créé, le 9 février 2004, une association, l'Agence 15, chargée d'utiliser le produit Fongecif du 1 % des CDD pour venir en aide aux rugbymen en difficulté.

C'est parce que cet article 3 lui fermera, par la voie législative, cet accès nécessaire aux moyens de formation que le rugby, via un accord de branche entre toutes les composantes, va porter lui-même un fonds propre alimenté par le 1 % sur les salaires mais qui sera forcément moins efficace que celui qui va disparaître.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. C'est faux ! On va vous expliquer pourquoi.

M. Henri Nayrou. Les responsables du rugby m'ont d'ailleurs dit hier qu'ils regrettaient cette nouvelle entorse à la solidarité des sportifs de la part du football. Il est vrai que le football est le contributeur le plus puissant de cette taxe, c'est lui qui a provoqué cette loi et qui en sera le seul véritable bénéficiaire.

M. Édouard Landrain. Jaloux ! (Sourires.)

M. Henri Nayrou. À elle seule, cette initiative de sauvegarde, générée par la suppression par la loi d'une mesure juste, suffit à expliquer notre vote négatif sur l'ensemble du texte. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Rochebloine. Abstenez-vous au moins !

M. Henri Nayrou. Ce gouvernement nous avait expliqué qu'il voulait supprimer les niches fiscales. Or, voilà qu'il en crée de nouvelles, sous couvert de la grandeur du sport français.

M. Guy Drut. Cela n'a rien à voir !

M. Henri Nayrou. Est-il besoin de rappeler qu'il est plus aisé de créer une niche que de la supprimer. Car dans chaque niche, il y a un chien de garde. (Sourires.)

Nous aurions apprécié que le Gouvernement, sa majorité ainsi que les instances du football s'attaquent à un fléau autrement plus emblématique que ces dérogations à la règle fiscale. Je veux parler, justement à propos de ces CDD d'usage qui ont financièrement bon dos, de l'anomalie constituée par ces contrats à durée déterminée dont l'usage est précisément de ne pas respecter ladite durée déterminée.

Je veux parler des effets collatéraux de ces transferts de joueurs qui interviennent six mois seulement après la signature d'un contrat de sept ans et qui entraînent des dépenses insensées, des commissions abusives et des compromissions dont la justice est actuellement saisie.

Là était, à notre sens, le cercle vertueux que veut promouvoir la Ligue du football professionnel. Là sont les millions d'euros qui partent en fumée, ou ailleurs, et qui seraient les bienvenus pour garder nos meilleurs joueurs dans notre championnat. Or la loi qui interdit ces pratiques douteuses et coûteuses existe. C'est la loi Buffet, que le ministre Lamour et Philippe Piat, président du syndicat des footballeurs professionnels, demandent, chacun de leur côté, à la Fédération française de football et à la Ligue d'appliquer, seulement d'appliquer.

M. Édouard Landrain. Nous les avons reçus !

M. Henri Nayrou. Nous nous rangeons à leurs côtés pour que cessent de telles pratiques.

Cette proposition de loi va donc être votée sans notre assentiment. Je souhaite avec sincérité que les sports collectifs français puissent rivaliser un jour à arguments égaux avec les autres pays européens. Mais j'aurais préféré que ces arguments n'entament pas la solidarité du sport que nous magnifions tous sur les estrades et qu'ils n'altèrent pas l'esprit de cohésion sociale que va défendre bientôt le ministre Borloo dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Cette proposition de loi est le fruit de nombreux travaux ayant fait suite aux états généraux du sport qui avaient mobilisé tous les acteurs du sport français, à l'échelon tant national que local, et que vous avez mis en place, monsieur le ministre, dès votre arrivée au ministère des sports.

Je pense notamment au rapport commandé à M. Jean-Pierre Denis, inspecteur des finances, en août 2003 et aux nombreuses consultations effectuées auprès des professionnels du secteur par les auteurs de la proposition de loi, nos collègues et amis Édouard Landrain et Jean-Marie Geveaux.

Je pense également à l'étude d'un important cabinet de consultants parisien, qui a montré la nécessité de faire évoluer les règles sociales et fiscales s'appliquant désormais aux sportifs professionnels. Celles-ci doivent prendre en compte la spécificité de leur activité et, plus particulièrement pour le football, relever le déficit de compétitivité des clubs professionnels français par rapport aux principaux clubs britanniques, espagnols et italiens. Une étude montre que 280 joueurs français évoluent à l'étranger et que l'on peut estimer la perte d'imposition sur le revenu à 16 millions d'euros et à 35 millions d'euros pour les charges sociales.

Cette nécessité de faire évoluer les règles sociales et fiscales pour les sportifs professionnels n'est pas nouvelle et constitue, à mes yeux, un véritable défi à relever dans les années à venir. Il s'agit, en effet, d'offrir à nos meilleurs sportifs toutes les raisons de rester dans les clubs français et de s'entraîner dans les structures nationales. Je pense ici aux professionnels ainsi qu'aux jeunes sportifs formés à l'INSEP ou dans les différents centres de formation.

Il s'agit non seulement de rêver, mais aussi de maintenir notre « savoir-faire » dans le domaine du sport, de donner plus de portée aux valeurs du sport et de faire en sorte que les sportifs professionnels continuent à jouer leur rôle de « locomotive » pour les jeunes sportifs formés sur notre territoire.

Aujourd'hui, le sport professionnel en France compte 3 500 sportifs parmi les 14 millions de licenciés et les 26 millions de pratiquants. Ces sportifs évoluent majoritairement dans le football, où ils sont plus de 1 000 cette année pour 44 clubs de football à statut professionnel.

Les représentants du sport professionnel demandent davantage de souplesse et d'autonomie dans leur gestion du personnel et dans leur organisation. La proposition de loi répond à ce souhait. Elle adapte positivement la situation du sport professionnel au regard des prélèvements sociaux en allégeant et en modernisant les prélèvements sur les clubs professionnels et en reconnaissant à l'ensemble des joueurs professionnels un droit à l'image sur le modèle de celui des artistes interprètes.

Cette proposition a le mérite d'être réaliste. Par ailleurs, elle permettra la sécurisation des sportifs sélectionnés en équipe de France. Elle modernisera les règles qui encadrent la pratique professionnelle du sport par l'assouplissement des dispositions relatives à la multipropriété des sociétés sportives. Enfin, elle autorisera la participation de celles-ci au fonctionnement des fédérations sportives. Cet assouplissement permettra aux différents acteurs de se hisser au niveau de leurs homologues européens.

S'agissant du droit à l'image, le texte que nous examinons reconnaît, pour l'ensemble des joueurs professionnels, un droit à l'image collective sur le modèle de celui des artistes interprètes. Cela répond à une demande légitime des milieux sportifs que le groupe UDF soutient . Je vous rappelle pour mémoire que Jean Arthuis, alors ministre de l'économie et des finances, avait fait une telle suggestion qui n'avait pu être suivie d'effets en raison de la dissolution de l'Assemblée nationale, suggestion qui figurait également dans le programme présidentiel de François Bayrou en 2002 auquel avait fortement participé mon ami et collègue Édouard Landrain. (Sourires.)

La rémunération de l'image collective des équipes professionnelles permettra qu'une part de celle-ci, versée aux joueurs salariés, soit la contrepartie effective de l'exploitation médiatique de l'image collective de l'équipe à laquelle ils appartiennent.

Cette proposition vise à rapprocher le statut du sportif professionnel du statut des artistes interprètes, sans créer de statut particulier. Ce choix se justifie, car l'exploitation de l'image du sportif se déroule en dehors de sa présence physique, comme pour les artistes interprètes.

Il apparaît dès lors naturel de considérer qu'une fraction du montant de la rémunération, que le texte limite à 30 %, correspond de manière forfaitaire au produit de cette activité, qui perd ainsi son caractère de salaire au bénéfice de celui de redevance.

La proposition a aussi pour mérite de ne pas réserver le droit à l'image aux seuls sportifs susceptibles de bénéficier de contrats d'image individuels et, surtout, elle fait l'unanimité chez les différents acteurs du sport professionnel, comme l'a très justement dit Édouard Landrain.

J'avais déposé en commission des affaires, culturelles, familiales et sociales, un amendement, qu'a défendu mon collègue et ami Pierre-Christophe Baguet, pour que l'accord collectif relatif aux modalités de fixation de la rémunération représentative du droit à l'image soit conclu pour l'ensemble des sportifs et non par discipline.

Je souhaitais également que ce droit s'applique dès le premier euro et pour l'ensemble des sportifs, par souci d'équité. Il m'était apparu nécessaire de permettre à toutes les disciplines d'en bénéficier et de ne pas privilégier un sport par rapport à un autre ou un sportif par rapport à un autre.

Je n'ai pas redéposé cet amendement en séance publique, car il m'a paru nécessaire de laisser à la négociation collective la possibilité de prévoir un pourcentage différent sur le droit à l'image et surtout parce que le seuil retenu par le texte de deux plafonds de la sécurité sociale - soit 59 524 euros par an -a été fixé en accord avec les syndicats des joueurs et les présidents de clubs, afin de ne pas les pénaliser quant à leurs droits sociaux : maladie, chômage et retraite.

Ainsi, le sportif qui va bénéficier d'un droit à l'image dans une proportion de 30 % maximum de sa rémunération brute totale ne paiera pas de charges sociales, pas plus que son employeur sur cette partie-là. Libre à lui de se constituer un capital. Permettez-moi, à ce moment de la discussion, de vous rappeler les propositions formulées par le groupe UDF lors de la réforme des retraites, qui auraient permis d'assurer des compléments de revenus à leurs bénéficiaires avec la généralisation du système Préfon dont bénéficient déjà les fonctionnaires. Ce dispositif incitatif, mais facultatif, aurait permis de diversifier les modes de financement de ce complément retraite.

Mais revenons au sujet ! Le droit à l'image semble, au final, ne concerner que les sports professionnels les plus médiatisés et qui génèrent beaucoup de profits, notamment le football, et ne touchera finalement que moins de la moitié des joueurs qui évoluent en ligue l et en ligue 2.

Je comprends bien que l'objectif recherché est d'aider les clubs à conserver leurs sportifs, malgré la « concurrence déloyale » dues aux différences de législations fiscales et sociales avec leurs homologues européens, sans porter atteinte aux droits sociaux des sportifs. Mais n'a-t-on pas exclu trop de bénéficiaires du droit à l'image ? On peut se poser la question.

La proposition de loi prévoit, dans un souci de réalisme, l'allégement et la modernisation des prélèvements sur les clubs professionnels par la suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée pour financer le congé individuel de formation des entraîneurs et des joueurs professionnels , dès lors que ceux-ci ne correspondent pas à des emplois précaires. Cette disposition du code du travail vise les CDD conclus pour des emplois précaires, alors même que l'entreprise aurait pu créer un emploi stable par contrat à durée indéterminée - CDI.

Ce versement est distinct de tous les autres auxquels les entreprises sont tenues pour la formation par un texte législatif ou contractuel. Il n'est pas dû lorsque le CDD s'est poursuivi par un CDI. Or, s'agissant du sport professionnel, il est d'usage constant de recourir de façon systématique aux CDD. En effet, le CDD constitue la norme. Ainsi, l'argumentation de la précarité et l'incitation à conclure des CDI, qui a motivé l'instauration du 1 % sur des CDD, ne sauraient valoir pour le sport professionnel. En conséquence, les clubs sont justifiés à bénéficier de l'exonération de 1 % sur les CDD.

Sur ce point , j'ai déposé un amendement, qui a été rejeté en commission des affaires culturelles, familiales et sociales, visant à demander l'annulation des procédures administratives en cours au titre du recouvrement de ce prélèvement. En effet, l'examen des procédures en cours montre que des disparités de traitement existent entre les clubs, mais nous aurons l'occasion d'y revenir lors de l'examen de cet amendement. Par souci d'équité, il importe que chaque club soit logé à la même « enseigne ».

Enfin, s'agissant des joueurs sélectionnés en équipe de France, il me semble utile de rappeler que cette sélection est avant tout un honneur. Il existe d'ailleurs une obligation pour un joueur d'accepter une sélection. Cette obligation est appliquée et toutes les fédérations prennent déjà des sanctions en cas de refus.

Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse. Si l'on peut se féliciter de la victoire - un peu dans la douleur - de l'équipe de France hier soir par deux à zéro, on ne peut que regretter que certains joueurs, qui ont acquis la notoriété dans cette équipe, aient décidé de la quitter tout en continuant à jouer dans leur club.

Pour conclure, cette proposition de loi va dans le bon sens. Aussi le groupe UDF la soutiendra-t-il. Elle permettra de mettre un terme au décalage qui existe entre la pratique et la réalité du sport professionnel, même si le vrai débat est celui de l'harmonisation des règles fiscales et sociales européenne pour éviter toute concurrence déloyale entre les clubs...

M. Hervé Morin. Très juste!

M. François Rochebloine. ... et rester attractifs face à l'Italie, l'Espagne ou encore l'Angleterre. Ce débat, cher au groupe UDF, mériterait de se tenir devant cette assemblée.

Un autre débat mérite aussi toute notre attention. Il s'agit de celui concernant le sport de masse. Nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion de votre budget, monsieur le ministre. Aurons-nous enfin l'occasion de débattre de ce que je qualifierai d'Arlésienne, à savoir la situation des bénévoles qui sont de moins en moins nombreux dans le monde sportif ?

J'espère, monsieur le ministre, que vous aurez à cœur de porter ces sujets devant notre assemblée avant la fin de cette législature. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, nous examinons aujourd'hui, dans le cadre d'une « niche » parlementaire, une proposition de loi relative au sport professionnel. Ce texte fait suite aux concertations organisées lors des états généraux du sport en 2002, aux travaux des groupes mis en place par le ministère chargé des sports et au rapport de Jean-Pierre Denis.

Cette proposition de loi prétend donc être conforme aux conclusions de ces divers travaux et répondre à l'objectif d'amélioration de la compétitivité des clubs professionnels français dans un contexte de concurrence accrue au niveau européen. Il s'agirait, en outre, de renforcer l'attractivité des clubs professionnels dans un secteur économique dont l'importance est croissante.

La reconnaissance d'une rémunération du droit à l'image dans les sports collectifs repose sur les constats suivants : seuls quelques sportifs bénéficient de ce droit alors que tous les joueurs participent au rayonnement médiatique du club et un nombre croissant de clubs versent à leurs sportifs salariés des droits d'image afin de soustraire une partie de leur rémunération aux charges sociales.

L'objectif ici est d'exonérer des charges habituelles les recettes qui proviendraient de ce droit, en considérant ces recettes non plus comme un salaire, mais comme une redevance. Vous tentez de vous justifier en prétendant que cette mesure permettra d'augmenter le nombre des bénéficiaires.

Au plan social, les conséquences de cette disposition ne seront pas négligeables. En effet, seule la partie « salaire » de la rémunération servira de base au calcul des prestations et cotisations sociales. Cela impliquera, au plan fiscal, que la partie redevance sera imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et ne supportera ni la TVA ni la taxe professionnelle.

Vous raisonnez en termes de défiscalisation. Vous n'évoquez même pas la question des plafonds, de la mutualisation. Bref, vous allez encore une fois favoriser les plus riches , sans même résoudre le problème posé ! Où en est la table ronde entre diffuseurs et organisateurs, destinée à débattre du coût exorbitant des retransmissions et de la perversité d'un système qui fragilise le mouvement sportif ?

La solution réside dans l'instauration d'un code de bonne conduite et non pas dans la dérive qui conduirait à coter les clubs en bourse. Marie-George Buffet l'affirmait dans son audition du 8 novembre 2000 : « A côté des subventions publiques, les contrats avec les télévisions doivent être maîtrisés par les fédérations qui redistribueront ensuite les moyens disponibles ».

Votre référence prétendument pertinente aux artistes interprètes conduit à une conception dangereuse du sport, considéré désormais comme un spectacle et non plus comme un ensemble de compétitions régies par une éthique partagée par tous.

Cette question du droit à l'image aurait donc mérité une plus large concertation avec le mouvement sportif. Vous êtes-vous seulement interrogé, monsieur le ministre, sur les conséquences dans le domaine de la rediffusion et sur les projections fiscales de ces mesures ?

La France peut s'enorgueillir de son système de contrôle des finances des clubs, mais le vrai problème, c'est que d'autres pays ne le possèdent pas et s'endettent pour obtenir les meilleurs joueurs. Renforcer la compétitivité nécessiterait de se battre à l'échelon européen pour harmoniser les réglementations.

Ici se trouve la vraie distorsion de concurrence et, à l'instar de ce qui a été engagé dans la lutte contre le dopage, il conviendrait d'impulser une politique volontariste afin d'harmoniser ces modes de régulation comptable. Vous êtes certainement en mesure, monsieur le ministre, de nous éclairer aujourd'hui sur cette question spécifique.

La suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée est une mesure de régression sociale en parfaite adéquation avec votre logique de démolition du code du travail.

S'il est vrai que le sportif professionnel a une activité temporaire dont nul ne peut fixer l'échéance en cas d'abandon, de blessure ou de choix de l'employeur, celui-ci exerce en revanche une activité constante dont la pérennité n'est pas différente de celles des autres activités. Il peut être, lui aussi, soumis à un dépôt de bilan ou à une faillite.

Pourtant, le résultat sportif, qui peut parfois conditionner l'existence de la société sportive, n'est qu'un aléa spécifique. Tant pour le sportif, dont la carrière va rarement au-delà de trente ou trente-cinq ans et pour qui se pose le problème de la reconversion, que pour l'employeur, le prélèvement est justifié. Nous sommes donc totalement opposés à cette mesure et nous souhaiterions connaître vos engagements concernant la question spécifique de la reconversion des sportifs.

La levée de l'interdiction absolue de la multipropriété des sociétés sportives est sans doute le point le plus scandaleux de cette proposition de loi. Vous prétendez que l'interdiction de la multipropriété ne serait plus adaptée aux réalités économiques et qu'il faudrait en outre se mettre en conformité avec le droit communautaire.

Pourtant, la multipropriété - autre appellation du processus de concentration -, avec les passerelles qu'elle établit entre le sport et la finance, est contraire à l'éthique sportive. Le maintien du rôle social du sport suppose le respect par les différents acteurs d'un socle commun de principes sportifs. Ce fondement ne saurait survivre si le pouvoir de l'argent devient la seule norme de référence.

Pire encore, la participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations va rompre les équilibres maintenus à force de courage politique.

Une fédération est un système très solidaire, organisé dans le respect de deux principes : l'égalité des chances et la recherche de l'excellence. Cela impose une chaîne de solidarité concrétisée par la redistribution des moyens et du savoir-faire jusqu'à la base, pour que puisse émerger une nouvelle élite. Et cela nécessite donc une organisation unie, cohérente, solidaire et démocratique. Le système sportif a besoin de ces solidarités, et donc d'échapper au moins pour partie à des règles communautaires. La compétition ne s'accommode pas forcément de la loi du marché.

Pourtant, contrairement à ce que vous affirmez, ce texte vise à mercantiliser un peu plus le mouvement sportif, déjà pénétré par les sociétés à but lucratif à la suite du texte adopté à l'été 2003. Il s'agit aussi d'utiliser un peu plus le sport professionnel comme outil de formatage de l'ensemble de la pratique ; il deviendra davantage la référence, l'exemple à reproduire.

Oui, monsieur le ministre et messieurs les députés de la majorité, dans votre esprit, le sport n'est rien d'autre qu'un produit marchand dans une société marchande.

M. Richard Mallié. Encore ! Vous ne pourriez pas évoluer un peu ?

M. Bernard Depierre. Impossible, c'est une stalinienne !

Mme Muguette Jacquaint. Ce que je dis est pourtant la vérité, messieurs !

Et comme toute activité marchande, le sport professionnel est constitué, régi et déterminé par des règles qui le conduisent à la concurrence, à la sélection, à la concentration et à la recherche du profit.

M. Richard Mallié. On n'est plus au XIXe siècle !

Mme Muguette Jacquaint. La question est de savoir comment on évolue !

Mme Janine Jambu. De surcroît, cette proposition de loi confère au sport professionnel une position plus forte dans les instances de décision du mouvement sportif. Elle consacre la séparation entre le sport professionnel et le reste de ce mouvement.

Le sport a un rôle de ferment de l'identité et de trait d'union entre les femmes et les hommes. On peut penser que le mouvement sportif au sein duquel vivent les valeurs de l'éducation, du respect mutuel, de la responsabilité ou de la solidarité n'appréciera pas cette nouvelle poussée libérale.

La déclaration annexée au traité de Nice constituait une première étape sur la voie qui permettait au mouvement sportif européen et aux États de préserver le sens du sport et de veiller à son développement, tant au niveau amateur qu'au niveau professionnel.

Parmi ses dix-sept points figuraient notamment la reconnaissance du rôle des fédérations nationales, la protection des politiques de formation, l'interdiction de la multipropriété des clubs et la nécessité de réglementer les transferts de joueurs.

Je rappelle très brièvement que cette déclaration a permis d'évoquer la protection des jeunes sportifs dans les transactions commerciales dont ils peuvent faire l'objet, les risques que représentent pour l'équité de la compétition la propriété ou le contrôle économique par un même opérateur de plusieurs clubs sportifs, la nécessité de développer les initiatives favorisant la mutualisation d'une partie des recettes provenant de la vente des droits de retransmission télévisuelle pour qu'en bénéficient tous les niveaux et toutes les disciplines de pratique sportive, la pratique des activités physiques et sportives pour les personnes handicapées et le rôle économique et social du bénévolat sportif.

La déclaration de Nice ne valide pas le concept d'exception sportive, qui a pour objet d'écarter le sport des règles du traité de Maastricht, mais elle prend en compte les « caractéristiques spécifiques du sport ». Cette déclaration solennelle ne doit pas rester lettre morte. La responsabilité de vous y conformer vous incombait donc.

Comme le dopage, la violence dans les stades et la corruption, l'omniprésence de la dimension économique au détriment d'une évolution plus équilibrée du sport est un mal qu'il faut combattre. Cette proposition de loi ne contribuera pas à renforcer la fonction éducative et sociale du sport, bien au contraire - et tout cela est en parfaite cohérence avec la régression budgétaire qui se prépare. C'est peut-être pour cela que le Gouvernement avance masqué et envoie les députés de la majorité en tirailleurs !

Pour toutes ces raisons et au nom des principes que nous défendons, nous voterons contre ce texte sans aucune hésitation. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Juillot.

M. Dominique Juillot. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, familiales, sociales et, pourquoi pas, sportives,...

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Pourquoi pas, en effet ! (Sourires.)

M. Dominique Juillot. ...monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après les deux textes législatifs de décembre 2002 et d'avril 2003, puis le long débat intervenu à l'occasion des états généraux du sport et fixant une nouvelle organisation des activités physiques et sportives, il était nécessaire de se pencher concrètement sur certains aspects du sport professionnel en France, et notamment sur son manque de compétitivité.

Vous l'avez fait, monsieur le ministre, grâce à la pugnacité de M. le rapporteur et de M. Landrain, du groupe d'études sur le sport et l'éducation sportive de l'Assemblée nationale, et surtout avec le soutien de l'ensemble des ligues et clubs sportifs professionnels, toutes disciplines confondues, ce qui a bien évidemment son importance dans un paysage sportif français donnant parfois l'impression d'être dominé par le football.

Vous l'avez fait sans idéologie, avec pragmatisme, et sans crainte de créer une nouvelle niche fiscale ou sociale qui aurait pu être dénoncée au nom de l'égalité devant l'impôt.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Dominique Juillot. De fait, cette réforme est juste. Elle prend en compte les spécificités du métier de sportif professionnel, telles que la durée d'exercice de son activité, par nature courte, la forme de son contrat, toujours à durée déterminée, l'obligation d'être à la disposition de l'équipe de France, de changer d'employeur avec tous les risques que cela comporte tant pour soi que pour son club.

Toutes ces spécificités entraînaient un désavantage rédhibitoire pour les clubs français face à la concurrence européenne. On ne pouvait pas éternellement déplorer l'absence de nos clubs dans les phases finales des grandes compétitions ou la fuite de nos meilleurs joueurs dans les championnats étrangers, et ne rien faire.

De plus, loin d'opposer l'amateur au professionnel, ce texte, en encourageant nos meilleurs sportifs à rester en France et en valorisant nos clubs à travers de meilleurs classements probables dans les différentes compétitions, aura un effet de levier important pour la pratique sportive de masse, laquelle est toujours attirée par les performances des meilleurs.

Le droit à l'image collective permettra un lien direct entre les sportifs et les entreprises qui investissent dans le sport, ainsi qu'une meilleure lisibilité de leurs engagements. Ce droit ne concerne pas uniquement les quelques sportifs les mieux rémunérés de France, mais une grande majorité de joueurs professionnels dans les disciplines les plus représentatives. Il attirera les tissus économiques locaux,...

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Tout à fait !

M. Dominique Juillot. ...qui y verront une plus grande transparence dans l'emploi de leurs contributions, ces entreprises préférant communiquer à travers les valeurs de solidarité beaucoup mieux véhiculées par une équipe entière que par tel ou tel joueur à titre individuel.

M. Édouard Landrain. Très juste !

M. Dominique Juillot. Parce qu'il favorise la participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations, ce texte devrait rassurer les investisseurs potentiels en leur permettant de participer aux décisions prises par celles-ci, qui ne sont évidemment pas sans incidence sur leur engagement. Il leur permettra de contribuer au développement du sport amateur en investissant dans la formation de jeunes joueurs car ils en percevront alors le retour.

Les liens et le principe de solidarité fondamental entre les deux secteurs amateur et professionnel seront ainsi non seulement préservés, mais même renforcés. Je préfère une complémentarité entre les fédérations, les ligues et les partenaires au modèle américain de ligues fermées, même avec des mécanismes régulateurs,...

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Très bien !

M. Dominique Juillot. ...modèle qui n'appartient pas à la culture européenne et a fortiori à la culture latine, et qui aboutirait à coup sûr à un appauvrissement de nos associations basées sur le bénévolat.

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. C'est juste.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Dominique Juillot. Il ne peut y avoir en France de sport professionnel sans sport amateur, puisque tous les sportifs professionnels français sont issus d'associations formatrices, au contraire des États-Unis dont le vivier se trouve dans le sport scolaire et universitaire, qui a malheureusement presque totalement disparu dans notre pays.

M. François Rochebloine. Eh oui !

M. Dominique Juillot. Si vous me le permettez, monsieur le ministre, en dehors des points évoqués tout à l'heure par notre collègue Édouard Landrain, il restera à regarder de près les réglementations régissant les relations entre les différentes collectivités et les clubs professionnels.

On a l'impression d'une grande hypocrisie lorsqu'on observe les gesticulations à faire pour justifier l'aide directe des collectivités aux clubs ou le temps passé à comptabiliser les heures effectuées en actions sociales, avec le risque permanent pour la collectivité de s'attirer une remarque de la Cour des comptes ou de voir remise en cause telle ou telle subvention.

L'association sportive couplée à la section professionnelle participe au quotidien, à la vie dans les quartiers, à l'intégration et à la cohésion sociale. Cela ne se quantifie pas à l'euro près. D'autres secteurs consommateurs de beaucoup plus de fonds publics ne se posent pas tant de questions et ont beaucoup moins à justifier les différentes aides qu'ils perçoivent.

Laissons donc davantage aux élus la responsabilité de choisir le bon niveau d'implication de leur collectivité dans le sport. L'électeur saura bien leur faire savoir, à un moment ou à un autre, si leur politique était équilibrée. À défaut, on risquerait de voir nombre de collectivités se désengager du sport et, par là même, entraîner un désinvestissement des entreprises, notamment dans les sports un peu moins médiatisés, ce qui aurait pour effet de réduire la diversité nécessaire en matière d'offre de pratiques sportives.

Cette diversité nécessaire est également mise à mal par les choix très sélectifs opérés par la télévision, notamment publique, qui ne joue plus son rôle de régulation. Le paysage audiovisuel sportif étant de plus en plus réduit, le public se détourne de bon nombre de disciplines, qu'il ne redécouvre qu'à l'occasion des jeux olympiques.

M. Édouard Landrain. Très juste !

M. Dominique Juillot. Les clubs, les fédérations, ainsi privés de toute exposition médiatique, éprouvent beaucoup de difficultés à trouver des partenaires économiques. À cet égard, il me semble qu'une réflexion associant les relais régionaux de France 3 pourrait être menée, mais cela ne se fera certainement pas naturellement.

En conclusion, cette proposition de loi représente, pour le sport professionnel, une véritable bouffée d'oxygène. Elle sécurise l'avenir de nos joueurs en France en amenant de la transparence dans leurs rémunérations, elle renforce la compétitivité de nos clubs et elle est un signe fort de soutien adressé à tous les dirigeants, acteurs économiques et collectivités qui s'investissent afin de faire du sport un vecteur d'attractivité supplémentaire pour la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Beauchaud.

M. Jean-Claude Beauchaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'évoquer les différents articles de la proposition de loi, j'aimerais vous dire combien je suis surpris de ne pas avoir pu l'examiner plus longuement. Le calendrier que l'on nous a proposé était très serré.

M. Édouard Landrain. Ceux qui connaissent le problème savent que c'était suffisant !

M. Jean-Claude Beauchaud. Dans le monde du sport, nous avons l'habitude de jouer plus collectif.

M. Henri Nayrou. C'est vrai !

M. Jean-Claude Beauchaud. Le président Thiriez, que notre collègue Landrain, président du groupe d'études sur le sport de notre assemblée, nous a invités à auditionner dans quelques jours, aurait ainsi pu nous éclairer plus amplement sur les revendications de la ligue en la matière. Mais peut-être le fera-t-il en vue du match retour.

M. Édouard Landrain. Cette proposition de loi concerne toutes les disciplines !

M. Dominique Juillot. Vous ne connaissez pas les autres ligues, monsieur Beauchaud !

M. Jean-Claude Beauchaud. Je crois bien connaître le monde sportif, mon cher collègue. En tout état de cause, il m'aurait paru opportun qu'il adresse le cahier de doléances de la Ligue de football à l'ensemble des membres de la commission.

L'intention était-elle de prendre de vitesse le projet de loi qui était en cours de préparation au ministère des sports, mais qui, manifestement, était loin de faire l'unanimité au sein du mouvement sportif ? L'agacement de ce dernier est, du reste, fort compréhensible, eu égard au désengagement budgétaire de l'État, qui devrait se traduire par une baisse de 3 % pour 2005.

M. François Rochebloine. C'est autre chose : nous en reparlerons plus tard !

M. Jean-Claude Beauchaud. Je parle de la forme, mon cher collègue.

Ces dispositions ne concernant que le sport professionnel, et surtout son élite, on peut aisément comprendre que les responsables associatifs, garants du sport de masse, ne voient pas d'un très bon œil que l'essentiel des attentions du ministère soit concentré sur un renforcement de l'attractivité des clubs professionnels et que la problématique générale du développement des pratiques soit, une fois de plus, reléguée dans le chapitre des déclarations d'intention et autres discours vertueux.

Avant d'entrer dans le détail, je préciserai que ce texte n'a d'autre objet que d'apporter une réponse à des attentes très « ciblées » émanant du sport professionnel, notamment du football professionnel, sur les problèmes du droit à l'image et de la multipropriété des clubs. Dans son intervention, M. Nayrou a parfaitement traité de la forme de ce texte et de sa portée générale.

À l'approche parcellaire de ces quelques articles, j'aurai bien entendu préféré un projet de loi d'ensemble qui aurait pu reprendre différentes pistes du rapport Denis.

L'article 1er va dans le sens de ce que souhaitent les sportifs professionnels en les assimilant fiscalement aux artistes interprètes et en leur accordant un taux d'imposition moindre pour les revenus qu'ils perçoivent au titre du droit à l'image. Cette disposition, qui assimile le sport à une activité culturelle à part entière, devrait permettre d'améliorer la compétitivité des clubs français dans le contexte européen. Soit. Mais elle ne doit pas constituer le premier étage d'une fusée, le premier pas vers une exclusion, à terme, des sportifs professionnels du droit commun fiscal et social. Or, comment ne pas envisager cette éventualité future quand la possibilité d'une exonération de taxe professionnelle et de TVA est longuement développée dans l'exposé des motifs de la proposition de loi ? Fort heureusement, cette mesure ne figure pas dans le dispositif et, je l'espère, pour longtemps. Elle constituerait en effet une évolution inacceptable qui bafouerait le principe de justice fiscale auquel nous devrions tous - enfin, je le pense - adhérer.

La sécurisation juridique de la situation des sportifs sélectionnés en équipe de France - prévue à l'article 2 - est souhaitable et concerne enfin tous les sports. Le dispositif devrait en effet assurer aux sportifs sélectionnés une meilleure protection sociale en leur garantissant l'accès au régime d'accidents du travail. Son application future devra toutefois retenir toute notre attention, car il n'est absolument pas souhaitable que cette disposition - et c'est le risque - entraîne des transferts de charges vers les fédérations, lesquelles - est-il besoin de le rappeler ? - sont financées pour partie par les licences des sportifs de tout poil qui, eux, paient pour s'adonner à leur passion. Il serait inacceptable d'assister à une inflation du prix des licences, déjà malheureusement parfois très élevé pour les pratiquants, ou pour leurs parents dans le cas des plus jeunes.

J'en viens maintenant à l'article 3, qui, vous vous en doutez, me laisse pour le moins perplexe. Celui-ci vise en effet à supprimer le prélèvement de 1 % sur la masse salariale pour les contrats à durée déterminée. Je veux bien admettre que le CDD d'usage est la norme dans le monde du sport professionnel, au même titre que le CDI dans le code du travail. Dans la pratique, d'ailleurs, peu de CDD sont menés jusqu'à leur terme : ils sont souvent résiliés au gré des opportunités financières, sur le marché des transferts. Les pratiques nées du mercato d'hiver en sont la preuve la plus flagrante, réduisant la notion de contrat de travail à une notion d'intérim, décidément très en vogue dans notre pays. Cela dit, au vu des émoluments dévolus à ces CDD, il ne me paraît pas tolérable d'évoquer ces allégements sans les mettre en parallèle avec la surtaxe de 1 % qui continuera de frapper allègrement les mêmes types de contrats au SMIC. Appliquer cette disposition reviendrait encore à faire un cadeau à ceux qui en ont le moins besoin !

En outre, le monde du sport professionnel, qui s'est peu à peu mué en éleveur de champions, laisse chaque année de plus en plus de jeunes sans avenir après quelques années de vie dorée. Dans ce contexte, les problèmes de formation et de reconversion professionnelle deviennent un enjeu majeur et un problème vital pour nombre d'entre eux. Or, si la surtaxe de 1 % pour la formation professionnelle doit disparaître, aucune solution alternative n'a été envisagée. Il est vrai que le suivi professionnel et social des ex-futures stars n'est pas la préoccupation majeure des « investisseurs-gestionnaires » qui dirigent les clubs professionnels.

En tant que défenseur du sport et de l'éthique qui doit l'animer, je suis tout particulièrement inquiet de la proposition contenue dans l'article 4. Comment peut-on prétendre préserver l'équité d'une compétition quand on s'apprête à autoriser la multipropriété dans les sociétés sportives ? Une telle mesure serait de nature à favoriser la détention de titres de plusieurs sociétés sportives par un actionnaire unique, qui ne devrait tout de même pas en détenir le contrôle économique. La prééminence du sport sur l'économie serait ainsi battue en brèche. Comment ne pas imaginer qu'une telle disposition permettrait des manœuvres susceptibles d'influencer le comportement d'une équipe, voire d'un joueur, lors d'une compétition ? Dois-je rappeler que les instances internationales du football se sont inquiétées de tels phénomènes lorsqu'ils ont été initiés par un milliardaire russe, propriétaire du club de foot de Chelsea ? Nous devrions donc faire preuve de beaucoup de prudence et retirer cet article.

La loi Lamour du 1er août 2003 avait ouvert une brèche dans le principe qui consacrait la fonction de réseau associatif des fédérations, en permettant à celles-ci d'être administrées et gérées selon des logiques plus commerciales qu'associatives. Comme si cela ne suffisait pas, on nous propose aujourd'hui de permettre à une fédération d'octroyer la qualité de membre aux sociétés sportives. À titre de rappel, je précise que la loi Buffet prévoyait une participation des sociétés sportives par contractualisation, pratique qui relève de l'activité commerciale, et non par adhésion, laquelle est en principe réservée au fait associatif. Cette distinction permettrait, somme toute, d'éviter toute confusion des genres.

Je me suis laissé dire que, lors de la dernière assemblée générale de la fédération française de football, le président Simonet avait dû faire face à une levée de bouclier de la part des représentants du foot amateur, lorsqu'il a avancé des arguments en faveur de cette disposition. L'ensemble des petits clubs, où règnent le bénévolat et la notion de sport plaisir, et qui sont, par ailleurs, un véritable vivier pour les clubs professionnels, sont tout particulièrement remontés à l'idée de voir, une fois de plus, la Ligue professionnelle, porte-parole des sociétés sportives, exercer une tutelle au détriment de la masse des pratiquants.

Persuadé que ces dispositions ne régleront ni les problèmes de nos sportifs professionnels ni ceux qui agitent la sphère footballistique européenne et conscient que nous ne devons pas creuser le fossé entre, d'une part, les amateurs et leurs dirigeants méritants et, d'autre part, l'ensemble du sport spectacle et commercial, en dépit de ses dérives, je ne voterai pas ce texte. Pour autant, je ne suis ni un gesticulateur ni un rétrograde : je crois être fidèle à mon passé de pratiquant et de dirigeant sportif et associatif bénévole. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Depierre.

M. Bernard Depierre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a un peu plus d'un an, nous adoptions la loi relative à l'organisation et à la promotion des activités sportives. Elle faisait suite, pour partie, aux états généraux du sport, qui avaient réuni l'ensemble du monde sportif français.

Face aux enjeux spécifiques du sport professionnel, vous avez demandé, monsieur le ministre, qu'un rapport fasse le point sur sa situation dans notre pays. Celui-ci vous a été remis et il dénonce la différence de compétitivité entre les clubs français et ceux d'autres pays européens, différence due au poids des charges sociales et fiscales dans notre pays. La concurrence de l'Espagne et de l'Italie pour tous les sports, de l'Allemagne pour le football et de la Grande-Bretagne pour le football et le rugby est terrible, et notre pays perd un à un tous ses meilleurs joueurs professionnels.

Ces constats sont à l'origine de la proposition de loi de nos collègues Jean-Marie Geveaux et Édouard Landrain, que je salue. Elle vise à redonner force et compétitivité à nos clubs professionnels. Le droit à l'image, qui sera assimilé au régime des artistes interprètes, permettra, dans la limite de 30 % du salaire des joueurs, de réduire les charges sociales pour les clubs.

L'ensemble des dispositions de la proposition de loi ayant été évoqué, je souhaiterais, monsieur le président, mes chers collègues, apporter quelques précisions sur la suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée, qui ne manquera pas de soulever les questions suivantes. Comment justifier cette exonération pour des revenus aussi élevés que ceux des sportifs professionnels ? Comment assurer la reconversion des sportifs si l'on supprime cette cotisation patronale ?

Revenons, tout d'abord, sur la motivation qui a conduit le législateur à décider de prélever 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée. L'objet de ce prélèvement était d'encourager la transformation des emplois temporaires en emplois durables. Il est légitime que les employeurs embauchant des salariés sous contrat à durée déterminée soient redevables d'une contribution spécifique dont l'objectif est, aux termes de la loi, de « faire reculer la proposition d'emplois précaires en facilitant leur transformation en emplois stables ». Ne sont donc concernés, dans l'esprit de la loi, que les CDD conclus pour des emplois précaires. Or, les contrats des sportifs professionnels sont loin d'être des emplois subsidiaires, ou même de court terme.

De plus, les CDD sont aujourd'hui la norme dans le sport professionnel. Les joueurs et les entraîneurs sont engagés pour des durées nécessairement limitées et le CDD dit d'usage constitue le droit commun des sportifs. Il leur est ainsi possible de conclure plusieurs CDD successifs avec le même club employeur, sans être contraints notamment de respecter un délai minimum entre deux contrats. Manifestement, le sport professionnel ne devrait donc pas entrer dans le champ d'application de cette disposition.

Enfin, la mesure tend, ainsi que l'ensemble de la proposition de loi, à rendre à nouveau concurrentiels les clubs français, sans pour autant déséquilibrer le budget de l'État. Les grands clubs sportifs européens se font en effet concurrence sur un marché unique. Dans ce contexte, le fossé se creuse progressivement entre les clubs français à vocation européenne et leurs grands concurrents étrangers, qui non seulement ont souvent un poids économique supérieur, mais supportent des charges sociales et fiscales moindres. Ainsi, quand un joueur moyen de la ligue 1 de football coûte 100 euros à un club français, il n'en coûte que 59 à un club anglais.

M. François Rochebloine. Eh oui !

M. Bernard Depierre. Une autre question se pose alors : comment assurer la reconversion des sportifs professionnels si l'on supprime cette cotisation aux CIF ?

La question se posait déjà, alors même que les clubs professionnels versaient cette cotisation, car les congés individuels de formation ne profitent pas aux sportifs.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Tout à fait !

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. Très juste !

M. Bernard Depierre. L'essentiel de leur reconversion est actuellement assuré par leurs syndicats professionnels, auxquels ils cotisent.

M. Édouard Landrain. Très juste !

M. Bernard Depierre. La question était posée avant et reste donc posée. Pour permettre à tous les professionnels de se constituer un capital durant leur carrière en vue de leur reconversion, il serait intéressant, par exemple, de réfléchir avec les professionnels sur la mise en place d'un plan d'épargne salariale alimenté par des revenus provenant des diverses primes de résultats des compétitions auxquelles ils participent.

Notre assemblée peut se féliciter de l'absence d'opposition majeure de principe à cette proposition de loi,...

M. Henri Nayrou. Voire !

M. Bernard Depierre. ...montrant qu'au-delà des familles politiques, c'est bien le même souci de défendre le monde sportif français dans un contexte de concurrence qu'il ne peut affronter, fragilisé par les taxes et les cotisations sociales, et ce malgré le savoir-faire des entraîneurs et le talent des sportifs français, qu'il convient de saluer (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La discussion générale est close.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

Discussion des articles

M. le président. J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

Article 1er

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou, seul inscrit sur l'article 1er.

M. Henri Nayrou. Je pensais que M. le ministre répondrait aux orateurs à l'issue de la discussion générale et que le rapporteur ferait de même...

L'article 1er ne modifie pas le droit à l'image individuelle. Les grandes stars du sport français s' accommodent fort aisément de la législation actuelle. Il s'agit du droit à l'image collectif et de la division des revenus en deux parties, ceux du contrat sportif proprement dit avec les charges afférentes et ceux qui seront exonérés.

Les éléments des recettes à prendre en compte pour la détermination du pourcentage forfaitaire correspondront à l'exploitation de l'image collective de l'équipe hors la présence des joueurs : les droits audiovisuels hors direct, les magazines télévisuels, la billetterie, le merchandising, les contrats de parrainage et publicité, les contrats de prestations de services passés avec les collectivités territoriales.

L'exposé des motifs évoque également l'exonération possible de la rémunération du droit à l'image de taxe professionnelle et de TVA.

Si nous sommes d'accord pour considérer le sport comme une activité culturelle à part entière, nous ne pouvons adhérer à ces dispositions pour des raisons de justice et d'équité fiscale. Nous nous abstiendrons donc sur cet article sans en demander la permission à M. Depierre. (Sourires.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 11.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 5 rectifié.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. La convention collective est le seul outil juridique reconnu par le code du travail : la référence à la notion d'accords spécifiques doit donc être supprimée.

La notion de convention collective suffit pour permettre de tenir compte des accords reconnus par la jurisprudence comme en tenant lieu en son absence.

Tel est le sens de l'amendement n° 5 rectifié.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. La commission a accepté cet amendement. La rédaction proposée nous a paru tout à fait justifiée dans la mesure où elle reprend le terme générique de « convention collective ».

M. le président. La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. De notre point de vue, il fallait laisser à chacune des disciplines la possibilité d'intervenir spécifiquement. Cela étant, nous nous rallions aux explications données par M. le ministre. Nous acceptons donc cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié.

Mme Janine Jambu. Contre.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement 12. Il s'agit d'une correction grammaticale.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 10. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Article 2

M. le président. Sur l'article 2, je suis saisi d'un amendement n° 6.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. L'article 2 trouve, au chapitre relatif au sport professionnel de la proposition de loi, créé par l'article 1er, une insertion plus adaptée à son contenu.

Dans ce chapitre du code du travail seront ainsi rassemblées les dispositions qui modifient le code du travail et qui sont relatives au sport professionnel.

Tel est le sens de l'amendement n° 6.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. La commission a accepté cet amendement. Il lui a paru judicieux et préférable, en effet, de regrouper les dispositions relatives au sport professionnel dans un chapitre spécifique.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3

M. le président. Sur l'article 3, je suis saisi d'un amendement n° 1.

La parole est à M. Jean-Claude Beauchaud, pour le soutenir.

M. Jean-Claude Beauchaud. L'article 3 supprime le prélèvement de 1 % de la masse salariale sur les contrats à durée déterminée des sportifs professionnels au prétexte que le « CDD » d'usage est admis dans le sport professionnel et « qu'il en constitue la norme ».

Dans la logique d'allégement et de régression du droit social qui prévaut actuellement, les clubs professionnels n'auront plus à payer cette taxe qui sert pourtant à financer le congé individuel de formation et le congé de bilan de compétences. Les salaires élevés du sport professionnel relèveront donc de l'article L. 122-1-1, qui déroge au principe selon lequel un CDI est la norme du contrat de travail.

Le recul de l'emploi précaire et la participation à l'effort de formation et de reconversion sont pourtant indispensables pour les sportifs professionnels. Il est donc normal que les clubs y participent. Une plus grande solidarité est nécessaire entre tous les footballeurs, d'une part, et tous les sportifs, quelle que soit la discipline pratiquée, d'autre part.

Cet amendement vise donc à supprimer l'article 3.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. D'abord, les sportifs professionnels en CDD n'occupent pas forcément un emploi précaire. Ensuite, et cela a été excellemment rappelé par notre collègue Depierre, les sportifs professionnels n'ont pratiquement pas recours au CIF. Ils s'organisent, au travers de leur discipline, avec les associations montées avec les joueurs professionnels. Enfin, eu égard au code du travail, et compte tenu du fait que le CDD est d'usage dans les clubs sportifs professionnels, il est tout à fait logique qu'on les dispense du versement de ce 1 %.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Je reprendrai les arguments de M. Geveaux. En effet, les congés de formation ne sont pas utilisés par les sportifs professionnels. Ils ne sont pas adaptés à la problématique de reconversion des sportifs de haut niveau.

M. Henri Nayrou. Et voilà !

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Nayrou, vous avez expliqué tout à l'heure que le rugby avait commencé à mettre en place un nouveau dispositif avant même qu'il ne soit question de ce texte. C'est bien la preuve que le CIF n'est pas adapté à la problématique du sport professionnel.

Par ailleurs, les partenaires sociaux, clubs employeurs et syndicats de joueurs de tous les sports, et pas simplement du football - encore une fois cette loi intéresse tout le sport professionnel -, se sont engagés à créer un véritable outil de formation et de reconversion, comme l'a fait le rugby en amont. Nous veillerons, bien évidemment, à ce que ces conventions et ces contrats soient mis en place dans l'ensemble des secteurs du sport professionnel français.

Répétons-le encore une fois, il faut agir parce que le CIF ne fonctionne pas. En tout état de cause, ce texte n'empêchera pas les joueurs professionnels de continuer à cotiser au sein du fonds de formation professionnelle, comme c'était le cas précédemment.

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Je suis plus qu'étonné par la teneur des arguments des députés de la majorité et du ministre : ils s'appuient sur les caractéristiques spécifiques du CDD « d'usage » pour proposer une exonération du 1 % pour les heures de formation-reconversion, faisant semblant de ne pas voir l'évidence. En fait, le milieu du football a fait pression sur les parlementaires de la majorité pour ne plus avoir à payer ce 1 %. Il les a convaincus de renvoyer les partenaires à des accords de branche. Cela s'est déjà fait pour le rugby et cela va se faire avec le football. D'aucuns m'ont déjà signalé, en effet, qu'un fonds propre serait créé pour le rugby : les joueurs cotiseront à 0,2 % et non plus à 1 %.

S'agissant du rugby, il est évident que la règle du 1% n'était pas respectée par tous les clubs professionnels, certains ayant des problèmes de trésorerie. Désormais, un fonds propre va être créé. Mais il sera forcément moins efficace que celui qui était alimenté par le 1 %.

Ne nous cachons pas derrière les mots, il y a l'esprit, la lettre et, surtout, les conséquences : c'est un coup de plus qui est porté à la solidarité sportive telle que nous la célébrons tous, le samedi ou le dimanche.

Mme Muguette Jacquaint. Bien sûr !

M. le président. La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. J'ai fait tout à l'heure appel au bon sens. Il semble que je n'ai pas été entendu par tous. Les explications d'Henri Nayrou sont pour le moins tortueuses. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Les propos tenus par le rapporteur, le ministre et Bernard Depierre auraient dû pourtant éclairer tous les esprits, même les plus opaques. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.-Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Je laisse à M. Landrain la responsabilité du mot « tortueux », que, par charité chrétienne, je ne lui renverrai pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Jean-Claude Beauchaud. Très bien !

M. le président. Voilà qui vous honore, monsieur Nayrou. Je note que c'est la première fois que je vous entends parler de « charité chrétienne ». (Sourires.)

M. François Rochebloine. Il n'est jamais trop tard ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7, qui fait l'objet d'un sous-amendement n° 4, deuxième rectification.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. L'amendement n° 7 est un amendement de forme, pour lequel je pourrais reprendre l'argumentaire que j'ai développé à l'article 2.

L'insertion du contenu de l'article 3 dans le chapitre relatif au sport professionnel introduit dans le code du travail par l'article 1er s'avère plus appropriée. Ainsi seront rassemblées dans ce chapitre les dispositions relatives au sport professionnel.

À cette fin, l'amendement du Gouvernement propose de rédiger ainsi l'article 3 : « Le chapitre V du livre VII du titre VIII du code du travail est complété par un article L. 785-3 ainsi rédigé : "Art. L. 785-3 : Le versement prévu par l'article L. 931-20 ci-après n'est pas dû en cas de contrat à durée déterminée conclu en application du 3° de l'article L. 122-1-1 dans le secteur d'activité du sport professionnel". »

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour soutenir le sous-amendement n° 4, deuxième rectification.

M. François Rochebloine. Notre groupe est très favorable à l'amendement que vient de nous présenter M. le ministre, mais je souhaiterais le compléter par un sous-amendement afin d'annuler les procédures administratives en cours à la date de la publication de la présente loi.

Nous souhaitons instaurer davantage d'équité dans le traitement des clubs professionnels et de sécuriser leur situation financière.

Les clubs connaissent aujourd'hui des situations très différentes : certains clubs n'ont pas été contrôlés ; d'autres ont été contrôlés, mais non poursuivis ; d'autres enfin ont été contrôlés et sont poursuivis. Il existe même des différences entre des clubs ayant été contrôlés par le même inspecteur. Certes, les contrôles ont été effectués sur plusieurs années - et je ne mets absolument pas en doute la sincérité des personnes les effectuant, je ne me le permettrais pas -, mais un inspecteur a pu contrôler tel club à un moment donné en ayant une position assez souple quant au paiement de la cotisation de 1 % sur les CDD, puis tel autre club quelques années plus tard en ayant pour instruction d'appliquer strictement les dispositions en vigueur.

Du fait de ces différences de traitement, les clubs de notre pays se trouvent aujourd'hui dans des situations très variées. Je crois savoir qu'actuellement une dizaine de clubs sont poursuivis et subissent une procédure de redressement, et que des sommes relativement importantes sont en jeu.

Je souhaite donc, dans un souci d'équité entre les clubs professionnels, que ce sous-amendement soit adopté et complète l'amendement du ministre, que je souhaite également voir adopter.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement et sur l'amendement en discussion ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. Le problème que soulève M. Rochebloine dans son sous-amendement est réel, personne ne peut l'ignorer. Toutefois, la commission a rejeté ce sous-amendement, pour une raison très simple : la loi ne peut avoir d'effet rétroactif sur les procédures existantes. Cela me paraît tout à fait logique.

M. Loïc Bouvard. Il faut le savoir !

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. Quant à l'amendement du Gouvernement, il rejoint la volonté exprimée dans l'article 2 de regrouper dans un même chapitre les dispositions relatives au sport professionnel. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 4 rectifié ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Je partage le sentiment exprimé par l'auteur du sous-amendement sur ce qu'il a appelé équité en matière de gestion des clubs professionnels. Malheureusement, je le répète à mon tour, adopter ce sous-amendement rendrait la loi rétroactive, ce que nous ne pouvons pas accepter.

M. François Rochebloine. Mais cela s'est déjà fait !

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Certes, mais vous le savez bien, l'adoption d'une disposition entraînant la rétroactivité de la loi rendrait les choses très complexes. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. François Rochebloine. C'est dommage !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Chacun étant dans son rôle, monsieur le ministre, il est normal que vous défendiez la position qui est la vôtre. Cependant, l'Assemblée nationale est souveraine. Je vous rappelle qu'il y a quelques années, Nicolas Sarkozy, après avoir défendu la position que vous avez soutenue, avait demandé à l'Assemblée d'adopter une position contraire dans le cadre d'un autre projet de loi. Nous avions donc voté en ce sens, ce qui avait permis de donner un effet rétroactif à la loi alors en discussion.

J'ai présenté ce sous-amendement en commission, où le rapporteur m'a fait la même réponse. Néanmoins, malgré la position du ministre, que je comprends, j'invite aujourd'hui mes collègues à légiférer en toute équité et à remettre les pendules à zéro dans le domaine du sport professionnel. Les mêmes inspecteurs ont accompli le même travail à quelques années d'écart, mais les clubs sont traités très différemment. Revenir sur de telles inégalités serait une mesure de justice ; or notre assemblée - qui est souveraine, je le répète - est très sensible à la justice.

M. le président. La parole est à M. Denis Merville.

M. Denis Merville. Pour ma part, j'aurais tendance à approuver le sous-amendement de notre collègue Rochebloine. Cela dit, je sais bien que la loi ne peut être rétroactive et que cela pourrait poser quelques problèmes.

Il me semble toutefois que le Gouvernement pourrait adresser des directives ou des circulaires à l'administration fiscale pour qu'elle accorde aux personnes de bonne foi une remise gracieuse. La loi ne pouvant pas être rétroactive, il faudrait demander au ministre de l'économie et des finances de donner des instructions en ce sens.

M. André Schneider. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. Encore une fois, j'en appelle au bon sens. Je suggère à notre ami Baguet, compte tenu des difficultés que M. le ministre a évoquées tout à l'heure, de soumettre le problème à la commission des finances pour tenter de s'en saisir de la façon dont l'a suggéré ce spécialiste de la fiscalité qu'est M. Merville.

Sur le fond, tout le monde est d'accord : les difficultés qui viennent d'être évoquées sont indéniables. Je pourrais être favorable au sous-amendement, mais avec tellement de réserves que je me range à l'avis de M. le ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. François Rochebloine. Vous êtes meilleur d'habitude, monsieur Landrain !

M. Henri Nayrou. C'est un peu tortueux ! (Sourires.)

M. le président. Monsieur Nayrou, n'imitez pas M. Landrain.

M. André Schneider. Où est passée la charité chrétienne ?

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Par charité chrétienne, je ne répondrai pas à mon collègue et ami Édouard Landrain ! (Sourires.)

Je peux comprendre la position du ministre, mais que nous apportera le fait de nous tourner vers la commission des finances pour résoudre le problème ?

Comme l'a dit très justement M. Pierre-Christophe Baguet, nous avons la possibilité aujourd'hui de prendre une mesure d'équité, en attendant de voir ce qu'en dira le Conseil d'État. Après tout, nous l'avons déjà fait.

J'en appelle à la sagesse de l'Assemblée. Si seulement M. le ministre pouvait en faire autant. En tout cas, le Parlement, lui, prendra ses responsabilités !

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Je souhaite simplement faire remarquer que l'itinéraire employé par M. Landrain n'est pas absolument rectiligne ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 4 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 3 est ainsi rédigé.

Article 4

M. le président. Sur l'article 4, je suis saisi d'un amendement n° 2.

La parole est à M. Jean-Claude Beauchaud. pour le soutenir.

M. Jean-Claude Beauchaud. Cet amendement propose de supprimer l'article 4. En effet, il convient de maintenir l'interdiction d'être actionnaire de plusieurs clubs, car c'est le moyen le plus sûr de préserver l'équité d'une compétition sportive et d'éviter des manœuvres pouvant influencer le comportement d'une équipe lors d'une compétition.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. Je précise que si l'on peut être actionnaire dans plusieurs sociétés sportives, on ne peut en revanche être majoritaire que dans une seule.

L'article 3 répond par ailleurs aux directives européennes. Un certain nombre de clubs risquent de faire l'objet de procédures si l'on ne modifie pas notre législation dans ce domaine-là. Nous devons répondre à leur attente et permettre aux investisseurs de prendre position. N'oublions pas que les clubs professionnels ont besoin de la participation d'investisseurs privés pour fonctionner et atteindre un niveau comparable à celui des autres clubs européens.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Avis défavorable.

Plus on s'arc-boute sur des positions du type de celle que vient de soutenir M.Beauchaud, plus on apporte de l'eau au moulin de ceux qui veulent créer des ligues fermées au sein du sport professionnel.

Plusieurs députés du groupe UMP. Absolument !

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Aujourd'hui, la logique de ceux que vous appelez les « ultra-libéraux » est de créer des ligues fermées, sur le modèle anglo-saxon. Au Québec, par exemple, où j'ai séjourné très récemment, j'ai pu constater ce qui se passe quand les ligues sont fermées. Savez-vous, mesdames et messieurs les députés, que le club de baseball de Montréal - les Expos - vient d'être vendu à Washington ? Vous pouvez en tirer les conclusions que vous voulez, mais si vous souhaitez donner du grain à moudre à ceux qui veulent organiser en Europe ce type de circuit fermé, continuez à avoir une position aussi extrême sur le principe de multipropriété.

Bien entendu, la mise en œuvre de ce principe exige des contrôles très stricts, et ce sera d'ailleurs l'objet d'un prochain amendement du Gouvernement.

Cela étant dit, nous devons ouvrir autant que nous le pouvons le sport aux investisseurs qui acceptent le principe de championnat ouvert. Faute de quoi nous aurons dans notre pays des ligues fermées et des championnats fermés. Vous en conviendrez avec moi, nous ne le souhaitons pas !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Il s'agit d'un amendement de précision qui tend à modifier la référence à l'article du code du commerce qui définit la notion de contrôle d'une entreprise. Cette référence est plus large dans l'article L. 233-16 que dans l'article L. 233-3 et répond mieux à l'objectif recherché.

Le contrôle exclusif doit en effet porter à la fois sur la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote, sur le droit d'exercer une influence dominante, sur le contrôle d'une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d'associés et, enfin, sur l'influence notable exercée sur la gestion et la politique financière d'une entreprise.

Cet amendement tend à élargir le champ des interdictions de la prise de contrôle par le biais de la multipropriété.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. La commission est très favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Édouard Landrain.

M. Édouard Landrain. Premièrement, la Commission européenne nous a fait grief de ne pas être en conformité, d'une façon générale, avec le droit communautaire.

Deuxièmement, il est normal de fixer des garanties pour éviter les abus. Nous ne pouvons qu'applaudir la décision qu'a prise M. le ministre. Il nous faut voter cet amendement qui relève du bon sens.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié par l'amendement n° 8.

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

M. le président. Sur l'article 5, je suis saisi d'un amendement n° 3.

La parole est à M. Jean-Claude Beauchaud, pour le soutenir.

M. Jean-Claude Beauchaud. Nous proposons de supprimer l'article 5, qui constitue une remise en cause fondamentale de l'organisation des fédérations. Leurs membres doivent rester essentiellement issus du milieu sportif associatif.

L'intégration des sociétés sportives à but lucratif dans la vie des fédérations sportives remettra incontestablement en cause la place des associations sportives et conduira demain à privilégier la logique commerciale, au détriment du sport de masse auquel nous tenons beaucoup.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. Pourquoi, monsieur Beauchaud, diaboliser ainsi le rôle des sociétés sportives ? Il ne faut pas exagérer ! Il serait par ailleurs incompréhensible qu'elles ne soient pas associées à la vie fédérale. Pour cette raison, la commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Nous devons, là encore, faire face à nos responsabilités. Selon vous, monsieur le député, les structures professionnelles ne devraient pas pouvoir adhérer aux fédérations. Expliquez-moi dans ce cas le fait que les centres équestres commerciaux puissent s'affilier à la Fédération française d'équitation, en totale contradiction avec la loi de 2000. Comment peut-on faire voter une loi tout en tolérant que son application contourne les principes qu'elle pose ?

Sachez ensuite, monsieur le député, qu'à mon arrivée à la tête du ministère j'ai trouvé cinq ou six fédérations à l'agonie, entre autres la Fédération française de ski. Comme vous le savez, nous avons trouvé une solution, en concertation avec l'ensemble des partenaires du développement du ski dans notre pays, moniteurs de ski, gestionnaires de remontées mécaniques ou de stations de montagne : tous ont participé à la rénovation de la fédération, qui est de nouveau sur de bons rails et vient d'élire un nouveau président. Voilà ce que je pense être une vision moderne et adaptée de l'organisation du sport dans notre pays, propre à remédier à la situation financière catastrophique que connaissent certaines fédérations. Il était de bon sens de revenir à l'esprit de la loi du 16 juillet 1984, qui, à l'inverse de la loi de 2000, acceptait la présence de sociétés sportives au sein des fédérations.

M. le président. La parole est à M. Dominique Juillot.

M. Dominique Juillot. On ne peut pas prétendre vouloir faire coopérer le monde associatif et le milieu professionnel et éliminer ce dernier des fédérations, lui interdisant ainsi de participer à la prise de décisions qui ont des répercussions importantes pour lui.

Puis, on ne peut pas ignorer la réalité : il n'y a pas de club professionnel sans support associatif. Chacun peut constater tous les jours dans sa ville que le sport professionnel aide l'association sportive, et il n'y a pas d'association dynamique sans le soutien du sport professionnel. C'est donc un faux débat qui est engagé aujourd'hui, cet article visant précisément à faciliter l'entente et la coopération entre les deux secteurs.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6

M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi d'un amendement n° 9.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Cet amendement propose une autre rédaction de l'article 6, parce que le gage retenu n'était pas pertinent. Il s'agit de faire application des dispositions prévues à l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale prévoyant la compensation intégrale par le budget de l'État de toute exonération ou réduction de charges sociales.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Marie Geveaux, rapporteur. La commission a émis un avis favorable à cet amendement tout à fait logique, comme vient de le montrer l'explication pertinente de M. le ministre.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Édouard Landrain, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire

M. Édouard Landrain. Ce matin nous avons fait œuvre utile sur cinq points cruciaux. Ces mesures, je le répète, nous étaient demandées par les représentants de toutes les disciplines sportives : vous n'en trouverez pas qui s'y soient opposés.

Comme l'a dit M. le rapporteur, cette loi donnera une bouffée d'oxygène aux clubs professionnels. Elle améliorera ainsi la situation du sport professionnel français au regard de l'Europe, où il faisait jusqu'à présent figure de déshérité. Tout le monde déplorait cette situation, mais personne ne faisait rien. Enfin, monsieur le ministre, nous agissons.

Mme Muguette Jacquaint. On verra la réaction des associations !

M. Édouard Landrain. Il restera des points à améliorer : nous avons parlé de l'épargne salariale, des problèmes de temps de travail, qui concernent aussi le sport professionnel. Vous qui êtes spécialiste de ces questions, monsieur le président, vous m'expliquerez peut-être comment on peut appliquer les 35 heures au sport professionnel, car je ne vois pas très bien comment c'est possible ! Il faudra sans doute prévoir une dérogation, comme on l'a fait pour les cadres dirigeants, car pour l'instant le problème n'est pas réglé, laissant le monde du sport professionnel à la merci d'éventuels procès. La loi devra donc, monsieur le ministre, se pencher aussi sur ces questions, comme elle le fait en ce qui concerne le recours aux joueurs professionnels en équipe de France, dans le respect du code du travail et des règles sociales.

Le Parlement continuera à travailler sur ces questions, en parfaite collaboration, je l'espère, avec les différentes ligues et fédérations. Elles sont en effet conscientes de ces problèmes qu'elles rencontrent quotidiennement. Sans doute pourrons-nous avec elles, monsieur le ministre, dans les prochaines années, voire les prochains mois, mettre en place un système qui mette le sport français définitivement à l'abri de toute attaque. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Beauchaud, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Claude Beauchaud. Nous nous sommes déjà beaucoup exprimés sur cette proposition de loi, et nous avons montré au cours des débats qu'elle était certainement nécessaire sur certains points, comme cela a été dit. C'est pourquoi nous nous sommes abstenus sur l'article 1er, concernant le droit à l'image, qui nous satisfait en partie. Nous avons par ailleurs voté en faveur de l'article 2 parce qu'il nous paraît important de sécuriser la mise à disposition des sportifs professionnels en sélection nationale.

En revanche, nous avons relevé dans les articles 3, 4 et 5 de nombreux points négatifs, contrairement à ce que vient de dire notre collègue de l'UMP. Sans vouloir faire de faux procès à la ligue de football professionnel, qui a fait en l'occurrence son travail de lobbying, j'ai l'impression que ce texte aurait pu s'intituler « proposition de loi portant diverses dispositions relatives à la pratique du football professionnel ».

M. Dominique Juillot. C'est faux !

M. Édouard Landrain. Et le basket ! Et le rugby !

M. Jean-Claude Beauchaud. C'est la solidarité même entre les diverses fédérations et les pratiquants du sport que ces articles remettent en cause. Ce qui nous importe, à nous, c'est la pratique sportive de masse, quel que soit le sport. (« Nous aussi ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce qui nous importe, c'est l'éducation sportive des jeunes. Ce qui nous importe, c'est de soutenir les milliers de bénévoles qui font fonctionner le sport français en assurant la formation des jeunes, alimentant ainsi les clubs professionnels. C'est cela qui est remis en cause par ces articles. Ces bénévoles sont insuffisamment soutenus, comme le confirmera l'examen du budget du ministère des sports, au moment où la solidarité entre clubs professionnels et pratiquants de masse est remise en cause.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cette proposition de loi.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. François Rochebloine. Je serai bref, monsieur le président. Je voudrais tout d'abord m'associer, une fois de plus, à ce que vient de dire mon collègue Landrain. Nous avons effectivement fait œuvre utile ce matin en débattant de cette proposition de loi très réaliste.

Je suis en revanche surpris par la position de nos collègues Beauchaud et Bayrou, qui pourtant connaissent très bien le milieu sportif. Il n'est pas question d'opposer le sport professionnel au sport de masse ; simplement nous traitons ce matin du sport professionnel.

Je remercie nos collègues Geveaux et Landrain d'avoir déposé cette proposition de loi parce qu'elle apporte des adaptations positives à la situation du sport professionnel, ce dont on ne peut que se féliciter. Je suis persuadé que c'est ce que fera, non seulement le milieu du sport professionnel, mais aussi tout le milieu sportif, dans toutes ses disciplines. Ce sera sans aucun doute le cas du football, mais également du basket, du rugby et d'autres disciplines. On doit particulièrement se féliciter de ce que cette proposition de loi régularise une situation de fait, car rien n'est plus dommageable que l'hypocrisie. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Mme Muguette Jacquaint. Nous allons peut-être entendre encore nos collègues de la majorité nous reprocher de manquer de bon sens. Mais il ne faut pas confondre bon sens et sens unique.

Au terme de ce débat, je tiens à exprimer ma totale opposition à cette proposition de loi. Sous la pression d'un lobby qui ne se cache même plus - Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football, ne déclare-t-il pas ce matin dans la presse : « J'ai ma proposition de loi qui passe à l'Assemblée » - vous vous apprêtez à tourner le dos à la solidarité sportive et à privilégier les sportifs et les clubs les plus riches.

L'exonération partielle des charges sociales pour rémunérer le droit à l'image des quelques sportifs les mieux payés, non seulement ne résoudra pas le problème posé mais entraînera en plus un manque à gagner pour la sécurité sociale de près de quarante millions d'euros. Belle économie quand on nous assène qu'il faut équilibrer les comptes sociaux !

De même, l'exonération de la taxe de 1 % sur les contrats à durée déterminée ne résoudra jamais la question de la reconversion des sportifs. Pire encore : alors que la France, grâce à la détermination de Marie - George Buffet, avait réussi à faire reconnaître l'exception sportive à l'échelon européen, vous allez, en levant l'interdiction d'être actionnaire de plusieurs clubs, en consacrant l'influence grandissante des sociétés sportives dans les fédérations, engager le mouvement sportif dans une dérive dangereuse vers le « tout business », le dumping social et fiscal. Je ne m'étendrai pas davantage, après les explications lumineuses de ma collègue Janine Jambu, mais vous aurez compris que nous voterons contre ce texte sans aucune hésitation.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

    2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique.

Déclaration du Gouvernement sur la candidature de la Turquie à l'Union européenne et débat sur cette déclaration.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 1614, relatif au développement des territoires ruraux :

Rapport, n° 1828, de MM. Yves Coussain, Jean-Claude Lemoine et Francis Saint-Léger au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot