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Deuxième séance du jeudi 2 décembre 2004

84e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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COHÉSION SOCIALE

Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d'urgence

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, de programmation pour la cohésion sociale (nos 1911, 1930).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée aux amendements portant articles additionnels après l'article 29.

Après l'article 29

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 647.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

M. Francis Vercamer. Cet amendement, que j'ai déjà évoqué à plusieurs reprises, vise à inciter les entreprises à embaucher sous contrat à durée indéterminée les titulaires d'un contrat d'avenir à l'issue de leur contrat, en leur accordant un crédit d'impôt.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 647.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La commission a repoussé cet amendement qui institue un crédit d'impôt de 1 600 euros pour les entreprises embauchant un ex-bénéficiaire d'un contrat d'avenir. Elle a considéré que ce dispositif se superposerait à l'aide budgétaire qui est déjà prévue dans le texte dans les mêmes conditions et qui est d'environ 1 500 euros. Il en coûterait à l'État environ 200 millions d'euros par an de 2006 à 2009, ce que le Gouvernement estime ne pas être à sa portée.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué aux relations du travail, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 647.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail. Nos conclusions sont identiques à celles exprimées par Mme la rapporteure au nom de la commission.

Je vous rappelle, monsieur Vercamer, que les personnes pour lesquelles une embauche immédiate dans les conditions normales ne serait pas possible pourront se voir offrir un contrat initiative emploi en entreprise. En outre, le III de l'article L.322-4-12 du code du travail prévoit une prime de bonne fin. Ma réponse sera la même pour l'amendement suivant, l'amendement n°649 rectifié.

Pour ces raisons, le Gouvernement souhaite le retrait de ces deux amendements.

M. Francis Vercamer. Je retire l'amendement n° 647, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 647 est retiré.

Je suis saisie d'un amendement n° 649 rectifié.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

M. Francis Vercamer. L'amendement n° 649 propose en effet le même dispositif que l'amendement précédent, pour les bénéficiaires du RMA - à ce titre, il aurait d'ailleurs plus sa place, me semble-t-il, dans l'article 33. Mais, à la différence du contrat d'avenir, il n'existe pas, pour l'embauche des bénéficiaires de RMA, d'aide gouvernementale à l'embauche. La réponse du Gouvernement ne peut donc pas être la même pour les deux amendements.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Vous avez raison, monsieur Vercamer. La position du Gouvernement est malgré tout identique.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Même avis que précédemment.

Mme la présidente. Monsieur Vercamer, maintenez-vous l'amendement n° 649 rectifié ?

M. Francis Vercamer. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 649 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 988 rectifié.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Dans les départements d'outre-mer, l'agence d'insertion exerce une compétence globale en matière de revenu minimum d'insertion. Dans un souci de cohérence, il est proposé de lui confier la mise en œuvre des contrats d'avenir conclus avec des bénéficiaires du RMI.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement n'a pas été examiné en commission mais, à titre personnel, j'y suis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon.

Mme Hélène Mignon. Je voudrais simplement demander à M. le ministre si les agences d'insertion existent bien partout. Nous savons qu'il y a eu de gros problèmes pour les mettre en place dans certains territoires.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Les élus du groupe UMP des départements d'outre-mer m'ont demandé de les représenter cet après-midi. Je partage tout à fait l'avis de Mme de Panafieu et je suis donc favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 988 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Article 30

Mme la présidente. Sur l'article 30, je suis saisie d'un amendement n° 125.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 125.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 989.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Je confirme, en réponse à la question de Mme Mignon, qu'il existe bien des agences d'insertion partout.

Ces agences sont chargées de l'insertion des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion. En outre, la loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et création du revenu minimum d'activité a confié aux agences les compétences relatives aux décisions individuelles concernant l'allocation elle-même. Enfin, l'article L.522-18 du code de l'action sociale et des familles précise que, dans les DOM, les attributions du département pour la mise en œuvre du revenu minimum d'activité sont exercées par les agences.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission mais, à titre personnel, j'y suis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 989.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 30, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 30, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 31, 31 bis et 32

Mme la présidente. Les articles n°s 31, 31 bis et 32 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(Les articles n°s 31, 31 bis et 32, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Article 33

Mme la présidente. Sur l'article 33, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. J'interviens également au nom de Rodolphe Thomas qui a dû s'absenter aujourd'hui.

Il y a un an, l'Assemblée nationale adoptait le projet de loi sur la décentralisation du RMI et la création du RMA, texte sur lequel Rodolphe Thomas et moi-même étions beaucoup intervenus. Aujourd'hui, nous pouvons dresser un bilan. Le RMA s'avère un échec, ainsi que nous l'avions prédit. Cet échec est en partie dû au fait que les départements ne réalisent pas les actions d'insertion prévues.

Nous avions alors présenté un certain nombre d'amendements mais nous n'avions pas été beaucoup écoutés par le Gouvernement. Aujourd'hui, nous sommes heureux de constater que le texte qui nous est présenté reprend certaines de nos propositions dans ce contrat d'insertion-RMA.

D'abord, sur les cotisations sociales du RMA. Leur calcul sur une partie de l'allocation seulement empêchait de considérer le RMA comme un vrai salaire. Notre revendication de l'époque est a priori satisfaite.

Ensuite, sur l'orientation du RMA. Le nombre de RMA était très faible, surtout dans le secteur marchand, car ce n'était pas un vrai contrat. Il avait été mal conçu. Si nous sommes bien sûr tout à fait d'accord pour réorienter les actions d'insertion vers le secteur marchand, nous demandons que le secteur marchand soit traité de la même façon que le secteur non-marchand. Il n'y a pas de raison de faire deux poids, deux mesures : nous devons être justes avec les entreprises qui vont entrer dans ce dispositif du RMA et qui, à ce titre, vont devenir des acteurs de l'insertion par l'économie.

Nous avons déposé des amendements qui prévoient une aide de l'État pour inciter à l'embauche de ces salariés qui bénéficient d'un contrat RMA dans des emplois pérennes, des CDI, à l'issue de ce contrat. C'était, je le rappelle, une revendication du groupe UDF. Un RMA à durée déterminée n'offre pas vraiment une vision d'avenir pour ceux qui sont bénéficiaires des allocations de chômage.

Nous aimerions que le Gouvernement donne au secteur marchand les mêmes avantages qu'au secteur non-marchand, sans pour autant parler d'effet d'aubaine. Quand on donne quelque chose au secteur non-marchand, on appelle ça une incitation à l'embauche et quand on donne la même chose au secteur marchand, on crie à l'effet d'aubaine. Pourquoi les chefs des entreprises privées seraient-ils considérés uniquement comme des chasseurs de primes, alors que les collectivités territoriales, en bénéficiant des mêmes aides, ne le seraient pas du tout ? Les deux doivent être traités de la même façon.

Nous devons créer de vraies passerelles vers les contrats à durée indéterminée, et ne pas proposer uniquement des contrats à durée déterminée aux demandeurs d'emplois et aux exclus de la société. Le contrat à durée indéterminée est le seul moyen pour que ces personnes puissent se réinsérer dans la société.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.


M. Jacques Desallangre
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Avec cet article 33, dont nous demanderons la suppression, revoilà le RMA ! Ainsi, à peine un an après son adoption, nous sommes de nouveau amenés à légiférer sur ce contrat que nous avions qualifié à l'époque d'« OVNI » au regard du droit du travail.

À l'occasion du projet de loi de cohésion sociale, on aurait pu espérer une réécriture complète de ce dispositif. À l'évidence, revoir le dispositif RMI-RMA est une nécessité tant la vocation d'insertion, qui constitue sa raison d'être et qui a fait couler beaucoup d'encre lors de sa création, est absente de ses applications concrètes.

Oui, le RMI est devenu un dispositif d'indemnisation de substitution consécutif aux écrémages des statistiques publiques du chômage. Oui, il est devenu un outil de traitement social de l'exclusion. Oui, il a échoué dans ses missions.

Pour autant, la réforme que vous portez est-elle la réponse à cette situation ? Pensez-vous honnêtement, monsieur le ministre, que le transfert de la compétence du pilotage du RMI vers le département, tel que l'a défini la loi instaurant le RMA, réponde aux besoins de la population bénéficiaire du RMI ? Pensez-vous que le revenu minimum d'activité soit devenu un nouveau contrat de travail grassement subventionné par l'État ? Pensez-vous qu'il réponde au phénomène d'exclusion qui frappe une partie grandissante de notre population ?

Nous ne le pensions pas à l'époque et la suite nous a donné raison. Malheureusement, vous, vous persistez dans votre position.

Ce que le Gouvernement évoquait comme une « rénovation du RMI » - mais qui n'est rien d'autre qu'une phase supplémentaire de la décentralisation, ou plutôt du désengagement de l'État de la gestion du social au détriment des départements - s'est fait, ainsi que chacun s'en doutait, sans les financements adéquats. Drôle de conception de la solidarité, qui ne tient pas compte de ce que représente réellement la prise en charge du RMI par les départements, notamment quand le nombre de RMIstes augmente de 10 % en un an !

Ces mesures touchent en priorité les allocataires des départements les plus pauvres car leur nombre est d'autant plus important que le département est sinistré en matière d'emploi. Et, dès lors que l'on constate la baisse généralisée du niveau de l'emploi en France, on mesure que nous ne sommes pas au bout de nos peines.

En déséquilibrant le budget solidarité des départements, le Gouvernement déséquilibre le traitement du RMI en fonction de la richesse et de la politique sociale de chacun d'eux, comme si la misère des allocataires du RMI ne suffisait pas et qu'il faille y ajouter une autre exclusion, liée à l'endroit où ils vivent !

Par ailleurs, la nature de ce contrat l'a conduit là ou il devait aller : à l'échec. Quelle collectivité pouvait cautionner un tel engagement avec un RMIste ? Il n'y a que l'employeur qui y gagne. Comment faire signer à qui que ce soit un contrat de travail précaire, sous-payé et dépourvu des droits sociaux qui accompagnent naturellement la signature d'un contrat ? Vous ne nous ferez pas croire que la raison de cet échec se trouve dans le boycott du dispositif par les collectivités locales !

Devant ce constat, on aurait pu imaginer une réforme d'ampleur de l'ensemble du dispositif, alors que vous vous contentez d'un toilettage qui laissera d'actualité l'ensemble de nos amendements, ceux-là mêmes que nous avions défendus il y a un an et que nous continuerons de défendre avec conviction.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon.

Mme Hélène Mignon. Nous pourrions presque nous réjouir que, pratiquement un an après sa mise en place, le Gouvernement soit obligé de revoir le dispositif du RMI-RMA, dans le sens que nous avions souhaité lors de nos débats de l'année dernière.

Nous soulignions alors qu'il était regrettable que les droits sociaux soient calculés sur le salaire, et non sur l'ensemble de la somme perçue par les personnes remises au travail.

Au reste, j'insiste sur le fait qu'il faut faire accompagner celles-ci par un référent, comme dans les autres dispositifs.

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. C'est bien ce que prévoit ce texte !

Mme Hélène Mignon. Quand on rencontre les chefs d'entreprise, ils le disent eux-mêmes : les salariés d'une entreprise ne peuvent pas accompagner quelqu'un qui éprouve des difficultés sociales ou des problèmes de santé. Ils peuvent seulement se consacrer à la formation professionnelle, à condition toutefois que le niveau de la personne qui arrive dans l'entreprise ne soit pas trop faible, auquel cas il vaudrait mieux qu'elle passe par une entreprise d'insertion au lieu d'entrer directement dans le secteur marchand.

Une question reste posée : même si la base de leurs droits sociaux est élargie, ceux qui reviennent ainsi vers l'emploi ne sont toujours pas comptés dans les effectifs globaux de l'entreprise, ce qui est également le cas, nous l'avons vu tout à l'heure, pour d'autres contrats. Cela montre qu'il y a deux catégories de salariés dans l'entreprise.

Quant à l'aide financière ou l'incitation à l'embauche, mes collègues et moi pensons qu'elles ne vont pas nécessairement dans le bon sens. En fait, soit l'employeur a besoin d'embaucher, et il s'efforce de recruter les effectifs nécessaires, soit il n'en a pas besoin, et il ne le fera pas, même s'il perçoit une aide. Aucun chef d'entreprise ne prendra la décision d'embaucher une personne dont il n'aurait pas besoin.

M. Jacques Desallangre. Bien sûr !

Mme Hélène Mignon. Le délai ouvrant droit à aborder le RMA est d'un an. Or il semblerait que, pour bénéficier des contrats dont nous avons parlé ce matin, il suffise de bénéficier du RMI depuis six mois. Il me semble souhaitable d'étendre cette mesure au RMA, dans un souci d'uniformisation et de simplification.

J'invite notre collègue Francis Vercamer à ne pas se faire trop d'illusion. Les employeurs « chasseurs de primes » se rencontrent aussi bien dans les collectivités territoriales que dans le secteur marchand ! D'ailleurs, nous les connaissons tous.

Mme Martine Billard. En effet !

Mme Hélène Mignon. Ainsi, je ne suis pas nécessairement pour la suppression de l'article 33, mais je pense qu'il faut y apporter des précisions et prendre en compte certaines remarques. En outre, il faut que les sommes que l'État doit aux départements au titre de la prise en charge du RMI soient versées le plus rapidement possible.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat. Un projet de loi sur la cohésion sociale suppose une approche globale. C'est pourquoi le volet emploi de ce texte doit contenir des propositions diversifiées et, dans le cadre de cette diversification, il est logique que le secteur marchand soit approché.

C'est en effet un secteur difficile. Les chiffres le montrent, un an après la mise en place du RMA. Je me souviens d'ailleurs que, au cours de nos débats de l'an dernier, certains de nos collègues craignaient que ce dispositif ne suscite l'appétit de chasseurs de prime et annonçaient un effet d'aubaine. S'ils avaient eu raison, le système aurait probablement mieux fonctionné !

Cela n'a pas été le cas. Ce dispositif s'adresse en effet à des gens en très grande difficulté, qui n'ont plus le rythme du travail. Or la logique commerciale réclame - même si c'est malheureux - des gens opérationnels.

M. le ministre délégué aux relations du travail l'a dit hier à plusieurs reprises : il faut donner des marchepieds aux personnes, en tenant compte de leurs qualités. Nous sommes devant une boîte à outils et nous devons trouver le système d'emplois aidés qui leur convienne le mieux.

Mon collègue et ami Francis Vercamer l'a bien montré tout à l'heure, ainsi que certains députés de l'opposition, comme Mme Mignon : on peut améliorer le dispositif en ce qui concerne les droits sociaux - nous sommes nombreux à l'avoir demandé l'an dernier - et on peut égaliser les règles entre secteur marchand et secteur non-marchand en répondant à une demande de visibilité. Enfin, si l'on veut que les chefs d'entreprise citoyens aient des entreprises citoyennes, il faut que le système soit rapidement mis en place.

Je souhaite également que le délai de perception du RMI exigé pour obtenir un RMA soit le plus bref possible, de façon à ce que les personnes concernées ne s'éloignent pas durablement de l'emploi.

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. C'est juste !

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. En effet !

M. Denis Jacquat. À ces réserves près, le groupe UMP considère que le Gouvernement propose dans cet article 33 une mise en cohérence du contrat insertion-revenu minimum d'activité avec les autres systèmes d'emploi aidé, pour le plus grand bien d'une population qu'il faut sortir de l'ornière.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. J'ai l'impression que nous avons battu un record : un an à peine après sa mise en place, le Gouvernement doit convenir que sa loi ne répond pas aux objectifs qu'il lui avait fixés.

Je me rappelle les longs débats que nous avions eus l'an dernier et le rejet par le Gouvernement de certains amendements adoptés en commission, notamment ceux de Mme Boutin, qui était la rapporteure du texte. Et le voilà contraint de revoir sa copie, à la faveur du présent projet de loi !

N'aurait-il pas été plus simple qu'il écoute les députés, notamment ceux de sa propre majorité ? Il se serait évité de passer de nouveau du temps sur le même sujet.

Souvenez-vous que le ministre en charge du projet de loi, M. Fillon, avait osé répondre, quand on lui faisait remarquer que le RMA apportait des avantages sociaux inférieurs à ceux dont bénéficie n'importe quel salarié, notamment en matière de retraite, que c'était « toujours mieux que rien ». Cette phrase m'est restée en mémoire. Il fallait oser la prononcer ! Mais il semble que le Gouvernement, face à une levée de boucliers, ait finalement opté pour un alignement des droits sociaux avec les autres types de contrat.

On nous annonce par ailleurs qu'il suffira désormais d'être au RMI pendant six mois pour obtenir un RMA. C'est un problème dont nous avions discuté longuement lors de la création du RMA et de la modification du RMI. On a l'impression que tous les débats qui ont eu lieu à l'époque avec l'ensemble des associations, à l'Assemblée ou au Sénat, n'ont servi à rien, puisqu'il faut les recommencer.

Il y a certes une nouveauté, dont il a été question tout à l'heure : dorénavant, on proposera systématiquement la modulation annuelle des horaires de travail pour les contrats aidés. Je répète qu'il me semble surprenant de partir des besoins des entreprises, plutôt que de ceux des salariés en difficulté. Une loi de cohésion sociale ne devrait-elle pas être centrée sur l'être humain plutôt que sur l'entreprise ? Or, si le rapport insiste sur la nécessité d'une modulation, c'est afin de tenir compte des besoins des entreprises.

Encore une remarque : le contrat est renouvelable deux fois dans la limite de dix-huit mois. On peut se demander pourquoi avoir prévu deux contrats. Pourquoi le CIE et le CI-RMA ? Si l'on a affaire à des publics en grande difficulté qui ne peuvent pas reprendre tout de suite un emploi dans une entreprise avec des horaires et des tâches très précis, il faut un contrat taillé sur mesure pour prendre en compte leurs difficultés. Mais on a l'impression qu'aucun de ces contrats ne répond à de tels objectifs, alors qu'ils auront tous deux pour effet de faire baisser le coût du travail dans les entreprises.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 243, 344 et 595, visant à la suppression de l'article 33.

Peut-on considérer que vous avez défendu l'amendement n° 243, monsieur Desallangre ?

M. Jacques Desallangre. Non, je souhaiterais le défendre maintenant.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Nous avons tout notre temps, n'est-ce pas, madame la présidente ?

M. Denis Jacquat. Oui, monsieur Desallangre, nous avons devant nous toute la soirée, et même tout le week-end !

M. Jacques Desallangre. L'article 33 vise à étendre le contrat d'insertion et le revenu minimum d'activité aux allocataires de l'allocation spécifique de solidarité qui, ce n'est un secret pour personne, rencontrent des difficultés particulières d'accès à l'emploi.

À cette fin, il a pour objet de recentrer le dispositif sur le secteur marchand, de diminuer la durée hebdomadaire de travail et d'abaisser les charges sociales supportées par les employeurs. Mais ce qui est inquiétant est qu'il vient compléter une kyrielle de contrats précaires, notamment le contrat d'avenir, le dernier en date et le plus précaire de tous, créé à l'article 29 du projet de loi.

Il est également source d'insécurité sociale. En effet, en travaillant, les anciens RMIstes ne deviendront pas moins pauvres, puisque le contrat de vingt heures par semaine représentera, par rapport au RMI, un gain financier de 180 euros. Or leur changement de situation entraînera des frais de transport ou de garde d'enfants qui viendront grever ce maigre gain financier.

Pour les employeurs, en revanche, ce contrat représente une nouvelle aubaine, sans aucune obligation de formation, de tutorat ou d'embauche en CDI à l'issue du contrat. Ils bénéficieront ainsi d'une main-d'œuvre meilleur marché.

Si, pour les bénéficiaires du RMI, de l'allocation de parent isolé ou de l'allocation spécifique de solidarité, une orientation vers l'emploi, vers une activité ou vers un stage est souhaitable, le temps nécessaire à la formation doit être pris en compte dans un vrai contrat d'insertion.


Si les personnes en insertion retrouvent trop rapidement un emploi, elles risquent de ne pas pouvoir respecter, à tout moment et en tout lieu, les termes de leur contrat et donc de se voir immédiatement sanctionner.

Par ailleurs, l'orientation vers l'emploi dans le secteur associatif peut être admise dans la mesure où la participation à des activités d'utilité publique et sociale s'inscrit dans une perspective d'insertion sociale et professionnelle, mais une telle orientation sera dangereuse dans le secteur marchand, car le contrat d'insertion-RMA favorisera le développement d'une main-d'œuvre bon marché, l'un des objectifs du MEDEF.

Enfin, vous répétez à l'envi qu'il est nécessaire d'assurer la formation des personnes les plus éloignées de l'emploi, afin de multiplier leurs chances d'insertion durable et stable. De ce point de vue, la rédaction issue de la loi du 18 décembre 2003 présentait l'avantage de prévoir des actions d'orientation professionnelle, de tutorat, de suivi individualisé, d'accompagnement, de formation professionnelle et de validation des acquis de l'expérience. Or, dans la refonte que vous proposez, ces actions disparaissent, et c'est inacceptable.

Non seulement le dispositif n'est pas remis en cause, mais les modifications apportées par l'article 33 ne tiennent pas compte des critiques qui avaient souligné les raisons de son échec. Il s'agit donc d'un toilettage inutile, inefficace et, à certains égards, régressif. Aussi demandons-nous la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Permettez-moi de souligner un paradoxe. Ces amendements supprimeraient, non pas le RMA, mais les nouveaux avantages dont bénéficieront ses titulaires, notamment en matière de protection sociale.

M. Rodolphe Thomas. Très juste !

M. le ministre délégué aux relations du travail. J'avoue donc ne pas comprendre la proposition de M. Desallangre,...

M. Jacques Desallangre. Vous ne me comprenez jamais, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux relations du travail. ...qui semble ainsi se satisfaire de l'ancien système.

Par ailleurs, le RMA demeure un contrat dont l'exécution est suivie par deux référents, l'un dans l'entreprise, l'autre à l'extérieur - nous l'avons évoqué à propos des maisons de l'emploi. En outre, le contrat peut prévoir une formation.

M. Jacques Desallangre. « Peut » prévoir. Tout est là !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Nous avons donc choisi un dispositif souple et modulable.

J'ajoute que certains pays ont mis en place un système équivalent au RMA qui permet la réinsertion de personnes durablement éloignées de l'emploi.

Il est vrai que le CI-RMA a démarré très lentement, puisque, six mois après son entrée en vigueur, moins de 200 contrats étaient signés et nous en espérions 1 500. Mais le Gouvernement étudie, en liaison avec les départements qui le souhaitent et avec les fédérations professionnelles, les possibilités offertes par certains métiers qui souffrent d'une pénurie de main-d'œuvre et qui sont susceptibles d'offrir des débouchés - je pense notamment au bâtiment.

Le CI-RMA est un outil utile. Il peut être un marchepied dans un parcours de retour vers un emploi durable. Nous ne pouvons donc qu'être défavorables à ces trois amendements de suppression.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 243, 344 et 595.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 345.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Le Sénat a souhaité remplacer systématiquement la mention du « bénéficiaire » par celle du « titulaire » du RMI. Or il ne s'agit certainement pas d'une simple question de vocabulaire : les sénateurs avaient certainement une petite idée derrière la tête.

Pour le calcul du RMI sont prises en compte, outre la personne qui en fait la demande, les membres de sa famille, qu'il s'agisse des enfants majeurs qui sont à sa charge ou de son conjoint, si ceux-ci n'ont pas de revenus. Chacun d'entre eux est en quelque sorte bénéficiaire d'un RMI familial et peut, à ce titre, postuler à tous les dispositifs d'aide, notamment aux contrats aidés. Or je crains que le remplacement de « titulaires » par « bénéficiaires » ne permette de restreindre, à terme, l'accès aux dispositifs d'aide au retour à l'emploi notamment aux seuls titulaires du RMI, c'est-à-dire à celui ou à celle qui en aura fait la demande officielle. Je souhaite donc que l'on rétablisse la rédaction actuelle du code du travail, afin d'éviter que des dizaines de milliers de personnes puissent être privées de leurs droits.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement, mais elle s'est également interrogée sur la terminologie employée. À cet égard, madame la ministre à l'intégration, nous attendons une clarification.

Les auteurs de l'amendement n° 345 estiment que le RMI étant une prestation accordée aux foyers et non aux personnes, les bénéficiaires du RMI n'en sont pas forcément les titulaires. Or si seul l'un d'entre eux était titulaire, cela créerait une inégalité juridique entre les membres d'un même foyer, voire d'un même couple, alors que, je le rappelle, le code civil a fait l'objet de réformes bienvenues qui posent le principe de l'égalité entre les hommes et les femmes.

Face à cette terminologie variée, une clarification est nécessaire. Aussi aimerions-nous connaître la position du Gouvernement sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement.

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Cet amendement renvoie aux amendements n°s 133 de la commission et 376 de Mme Billard, MM Cochet et Mamère, qui ont pour objet de supprimer l'article 33 ter, lequel a été adopté lors de l'examen du projet de loi au Sénat. Si cet article est supprimé par votre assemblée, l'amendement n° 345 n'a plus lieu d'être.

Cela dit, le Gouvernement souhaite qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur les termes utilisés, qui peuvent avoir des conséquences sur les droits ouverts aux personnes concernées. En outre, conformément à son objectif de simplification juridique et administrative, il souhaite ne pas complexifier ou alourdir les textes en vigueur par des mesures qui nécessiteraient de nombreuses modifications réglementaires infructueuses.

Je propose donc que cet amendement soit retiré au bénéfice de la suppression de l'article 33 ter proposée par les amendements n°s 133 et 376. Pour être tout à fait claire, j'ajoute, madame la députée, que le Gouvernement souhaite que l'on conserve le terme de « bénéficiaires ».

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Alors, il faut adopter l'amendement !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Il me semble que la conclusion de Mme la ministre contredit son argumentation.

Mme la présidente. Je ne crois pas. Si j'ai bien compris, madame la ministre, vous acceptez la demande de Mme Billard, tout en précisant qu'elle sera satisfaite par la suppression de l'article 33 ter.

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. C'est bien cela, madame la présidente, et le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 345.

Mme la présidente. Poursuivez, monsieur Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Cette précision est importante, car les mots ne sont pas innocents : titulaire et bénéficiaire, ce n'est pas la même chose. Je me félicite de la position du Gouvernement et je remercie Mme la rapporteure.

Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Denis Jacquat, vice-président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Comme l'a fort bien indiqué Mme de Panafieu, le terme de « bénéficiaires » est celui qui est habituellement employé et il confère aux personnes concernées un statut qui leur ouvre des droits. Par ailleurs, comme certains ont toujours l'impression que l'on cherche à dissimuler quelque chose, il me semble préférable, en tant que vice-président de la commission et orateur au nom du groupe UMP, de conserver le mot « bénéficiaires ».

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 345.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 993.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Il s'agit d'un amendement de coordination, en cohérence avec les modifications résultant de l'adoption de l'amendement n° 120 concernant le contrat d'avenir. Comme ce dernier, le CI-RMA peut tenir lieu de contrat d'insertion, ce qui n'empêche pas les conseils généraux qui le souhaiteraient de signer un tel contrat d'insertion, qui permet une approche globale de la personne.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 993.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 244.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Cet amendement a pour objet d'insérer, après le premier alinéa de l'article 33, l'alinéa suivant :

« Cette convention a pour objet la définition d'un projet d'insertion sociale et professionnelle du bénéficiaire du contrat. Elle doit notamment prévoir des actions d'orientation professionnelle, d'accompagnement individualisé dans l'emploi, de formation professionnelle et de validation des acquis de l'expérience. »

Pour souligner l'opportunité de son texte, le Gouvernement a multiplié les annonces en faveur de l'insertion par l'emploi et la formation. Ainsi, M. le ministre de la cohésion sociale n'a de cesse de mettre en avant son contrat d'avenir, qui allie « véritable travail », dit-il, et formation. Mais pourquoi ce qui serait vrai en matière de formation dans le secteur non marchand ne le serait pas dans le secteur marchand, c'est-à-dire dans les entreprises ?

Par un tour de passe-passe, ce qui était possible hier ne le sera plus demain. Le texte qui portait création du RMA était loin de nous réjouir, mais il présentait au moins l'avantage de comporter des mesures en faveur de la formation. Là, il en est dépourvu, et cela le rend encore plus inacceptable. Nous proposons donc de préciser le contenu du contrat d'insertion-RMA et d'assortir celui-ci d'une véritable obligation de formation et d'accompagnement.

Monsieur le ministre, l'échec du RMI à favoriser l'insertion tient essentiellement à l'insuffisance de la formation. Qu'il s'agisse du contenu de l'accompagnement ou des droits du salarié, la rédaction actuelle est insuffisante. Nous tenons à ce que soit assuré le droit à la formation.

Encore une fois, refuser une telle disposition viendrait nous conforter dans l'idée que vous vous souciez bien moins de l'insertion du bénéficiaire de minima sociaux que de l'effet d'aubaine que le dispositif peut représenter pour l'employeur.

L'objet d'un tel dispositif devrait être de permettre à ces personnes de regagner durablement le milieu de l'emploi et de retrouver ainsi le chemin d'une insertion durable. Or, l'article 33 ne comprend aucune disposition qui leur permettrait d'acquérir une formation professionnelle qualifiante ou une validation des acquis professionnels qui pourrait être un tremplin et leur ouvrir les portes du travail à durée indéterminée. Nous proposons donc que soient prévues des actions de formation obligatoire.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Défavorable. Encore une fois, le RMA a pour objectif de favoriser le retour à l'emploi en entreprise. Les personnes concernées bénéficient d'un suivi individualisé, d'un tutorat obligatoire et l'employeur doit produire régulièrement un bilan de parcours d'insertion. Imposer une obligation spécifique supplémentaire aux entreprises les dissuaderait d'embaucher.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Le contenu de la convention est déjà précisé dans l'article L. 322-4-15-2 du code du travail qui n'est pas modifié par le projet de loi. Nous ne sommes donc pas favorables à l'amendement. Du reste, j'ai déjà eu l'occasion de répondre à ce sujet lorsque a été évoquée la présence éventuelle d'une formation dans le contrat.


Je souligne que la mise en œuvre des contrats d'insertion-RMA dépend en grande partie des politiques départementales. Je ne voudrais pas, en citant tel ou tel département, créer une polémique inutile, mais force est de reconnaître que le Val-de-Marne ou la Seine-Saint-Denis comptent entre 3 et 6 % de contrats signés, tandis que d'autres départements de la région Île-de-France atteignent des taux de 40 à 60 %.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 244.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 245.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Cet amendement tend à interdire le recours à un RMA lorsque l'employeur a procédé à un licenciement pour motif économique dans l'année précédant cet emploi, plutôt que dans les six mois comme prévu par le projet de loi.

Il s'agit ici, à l'instar de ce que nous avons proposé pour les précédents contrats aidés, d'apporter plusieurs garanties sérieuses afin de limiter l'effet d'aubaine que pourrait constituer ce genre de contrat.

Pour justifier notre démarche, je reprendrai les propos tenus par M. le ministre du travail au Sénat lors de la séance du mardi 2 novembre : « L'article améliore le RMA en recentrant le dispositif sur le secteur marchand pour augmenter les chances de retour à l'emploi des bénéficiaires. Restent, il est vrai, deux préoccupations. Éviter d'abord la substitution (...). S'assurer ensuite, du respect de ses obligations par l'employeur. »

M. le ministre délégué aux relations du travail. Exact !

M. Jacques Desallangre. Un point nous rassemble, un autre nous sépare. Nous nous retrouvons sur la nécessité de se prémunir contre tout effet de substitution et de faire en sorte que l'employeur respecte ses obligations.

En revanche, contrairement à vous, nous ne sommes pas convaincus que les garanties du texte soient suffisantes. Il nous semble tout à fait impératif d'ajouter des conditions supplémentaires pour éviter tout recours facile et déconnecté de l'esprit du RMA de la part d'employeurs peu scrupuleux.

C'est pourquoi nous proposons avec cet amendement de rallonger le délai ouvrant droit à l'embauche d'un contrat d'insertion-RMA suite à un licenciement, en le portant de six mois à un an.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Mêmes causes, mêmes effets. Je me suis déjà exprimée au nom de la commission au sujet du CIE. Pour la même raison, la commission a rejeté cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable. Je remercie M. Desallangre de m'avoir cité, mais il nous paraît que le délai de six mois suffit à limiter les éventuels abus. Un allongement de ce délai ne paraît donc pas justifié. Nous serons toutefois attentifs à ce problème.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 245.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 63.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Cet amendement vise à compléter la première phrase du b) de l'article 33 du projet de loi par les mots « , ni de la rupture d'un contrat à durée déterminée ».

Monsieur le ministre, plus de souplesse ne doit pas signifier moins de garanties, moins de garde-fous. C'est exactement le sens de cet amendement : pas de rigidité dans le dispositif, mais des garanties. J'espère que vous serez sensible à la portée de cet amendement car vous semblez regretter l'absence d'enthousiasme en faveur du contrat insertion-RMA. Il y a de véritables raisons à cela, et notre rapporteur en donne quelques-unes.

En mai, plus de la moitié des conseils généraux ne s'étaient pas encore prononcés sur des mesures d'application locale du dispositif. En juillet 2004, 150 CI-RMA seulement étaient en cours de validité dans vingt et un départements métropolitains. Sur 93 conventions pour lesquelles cette information est disponible, 66 ont été signées avec un employeur du secteur marchand et 27 avec un employeur du secteur non marchand.

Ce démarrage pénible est certes lié à des facteurs conjoncturels, comme le souligne notre rapporteur : « délais nécessaires à la parution des textes d'application - publiés au Journal officiel le 30 mars 2004 ; impact des élections cantonales, presque à la même date, qui ont entraîné des changements d'exécutifs départementaux ; peut-être attentisme tant que la loi relative aux libertés et responsabilités locales n'était pas adoptée définitivement et donc les nouvelles compétences des départements dans le domaine social délimitées... »

L'une des principales raisons ne figure pas dans le rapport : c'est le caractère inadmissible de ce sous-contrat, un contrat représentant une régression sociale sans précédent en matière de contrat aidé !

Il faut donc le réhabiliter et en corriger les plus mauvais effets. C'est le sens de cet amendement, qui vise à supprimer tout effet d'aubaine en proposant qu'un CI-RMA ne puisse intervenir sur un poste pour lequel un CDD a été rompu. Cette proposition répond parfaitement à la préoccupation exprimée par M. le ministre de limiter l'effet de substitution.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Pour les mêmes raisons que celles exprimées précédemment, la commission a repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Les dispositions actuelles du code du travail sont suffisantes. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 63.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 64.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Cet amendement vise à compléter l'article 33 du projet de loi par l'alinéa suivant :

« Il ne peut être procédé à l'embauche de plus de deux salariés consécutifs sous contrat insertion-revenu minimum d'insertion sur le même poste lorsque ce renouvellement répond aux cas prévus à l'article L. 122-1-1. »

Toujours pour répondre au souci de M. le ministre - j'espère que vous appréciez nos efforts, monsieur le ministre (Sourires) - qui craint les effets de substitution, nous proposons ce nouvel amendement visant à en limiter les risques.

L'article L. 122-1-1 précise les cas où le recours à un CDD est autorisé. Il s'agit notamment des cas de remplacement d'un salarié absent, d'attente de l'entrée en service effective du salarié recruté par contrat à durée indéterminée appelé à le remplacer, d'accroissement temporaire d'activité, d'emplois à caractère saisonnier, ou encore des métiers qualifiés de dangereux.

En effet, dans ces circonstances, on pourrait imaginer l'effet d'aubaine pour l'employeur qui préférerait à un contrat à durée limitée, un autre contrat à durée limité mais aux obligations sociales beaucoup moins astreignantes pour lui.

Nous proposons donc un amendement de bon sens qui viendrait utilement préciser le dispositif RMA, dont la rédaction actuelle nous semble toujours inacceptable.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Vous savez que le Gouvernement n'a pas souhaité multiplier les règles particulières dans la loi et corseter à l'excès le dispositif (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le recours est encadré par la loi et le conseil général ou le service public de l'emploi disposent d'un pouvoir d'appréciation qui leur permet de s'assurer que les conditions dans lesquelles les contrats successifs sont conclus sont bien conformes aux objectifs d'insertion de la loi et n'alimentent pas les effets d'aubaine. Dans la mesure où il existe déjà un moyen permettant d'éviter ces effets indésirables, nous ne sommes pas favorables à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 64.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 639.

Cet amendement est-il défendu ?

M. Francis Vercamer. Il est retiré, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 639 est retiré.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Merci !

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 992.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Afin de renforcer le parcours d'insertion du bénéficiaire du RMA et dans l'objectif d'adapter la durée du travail aux capacités de la personne et à son projet d'insertion professionnel sur la base du diagnostic préalable - établi à l'aide du référent, qui peut être celui de la maison de l'emploi - les modalités de recours à un CI-RMA doivent être assouplies, sur le modèle prévu pour l'économie générale du CIE. Le CI-RMA pourra désormais être un contrat à temps partiel ou à temps plein, notamment à l'occasion des renouvellements par voie d'avenant.

En outre, autoriser une durée du travail supérieure à vingt heures permettra de majorer la rémunération du salarié sans entraîner pour autant une dépense publique supplémentaire. Tel est l'esprit de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement n'a pas été examiné en commission, mais j'y suis favorable à titre personnel.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 992.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 127.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il s'agit d'un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 127.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 65.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Nous proposons de compléter le 5° de l'article 33 du projet de loi par l'alinéa suivant :

« c) Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « A l'issue, le bénéficiaire d'un contrat insertion-revenu minimum d'activité est prioritaire pour pourvoir à un emploi vacant au sein de l'entreprise dans sa catégorie professionnelle ».

Cet amendement reprend l'une de nos préoccupations récurrentes, relative à la sortie du dispositif. Nous avons d'ailleurs fait une proposition similaire à l'article 26.

L'enjeu est de faciliter la sortie du contrat aidé et l'intégration à un emploi stable et durable. Les contrats aidés ont en effet pour vocation essentielle de constituer des tremplins vers l'emploi durable. Si nous n'avions pas cette ambition, ces contrats deviendraient encore davantage synonyme d'effet d'aubaine pour l'employeur.

Il faut donc faire preuve d'imagination pour créer un dispositif de sortie. Nous avons écarté la solution de l'incitation fiscale, d'autres expériences de ce type s'étant révélées peu concluantes et lourdement pénalisantes pour le budget de la nation.

En outre, il faut en finir avec ce financement public de l'emploi qui demeure stérile. Depuis vingt ans, les aides publiques pour l'emploi se multiplient, sans effets réels en contrepartie. J'en veux pour preuve les récentes décisions du Gouvernement en ce domaine : allégement de l'ISF, 20 milliards d'exonération de cotisations sociales en 2004, 17 milliards en 2005, versement du RMI aux employeurs, et caetera...

M. Pierre Cardo. L'ISF ne concerne pas les entreprises !

M. Jacques Desallangre. Pendant ce temps, le chômage ne se contente pas de stagner : il augmente ! Nous proposons donc de rendre ces contrats utiles en faisant de leurs titulaires des prioritaires pour l'embauche dans l'entreprise si un poste est vacant sur le même type d'emploi sur lequel le contrat aidé a été signé.

C'est une proposition opérante, réaliste et qui s'inscrit raisonnablement dans le dispositif proposé à cet article.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. L'amendement a été repoussé par la commission.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable. L'éventuelle embauche d'un bénéficiaire d'un CI-RMA à la sortie du contrat est un sujet qui doit être traité par la convention.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je regrette cette position, car si l'on veut vraiment que les contrats aidés constituent des tremplins, il serait normal que les intéressés soient prioritaires pour postuler à un emploi vacant dans l'entreprise.

Au sein d'une petite entreprise ne comprenant qu'un seul site, le problème ne se pose pas vraiment : les emplois vacants sont connus de tous et chacun peut donc facilement y postuler et rencontrer le chef d'entreprise ou le responsable des ressources humaines.

En revanche, dans les entreprises plus importantes, en particulier celles comportant plusieurs sites, le titulaire d'un RMA ne sera pas forcément informé de l'existence d'emplois vacants qui pourraient correspondre à son profil, d'autant que l'obligation d'affichage des emplois vacants n'est pas toujours respectée dans les entreprises. Il ne me semble donc pas inutile d'accorder une priorité d'embauche à ces salariés.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cardo.

M. Pierre Cardo. Il arrive que de bonnes idées aillent à l'encontre de l'objectif visé. On a déjà observé au sujet de certains contrats aidés que plus on imposait de contraintes, plus on risquait de fragiliser les personnes concernées.

M. Jacques Desallangre. Il ne s'agit pas de contraindre !

M. Pierre Cardo. En l'occurrence, si un employeur sait qu'il doit accorder la priorité aux titulaires d'un CI-RMA - il faudrait de toute façon préciser le contenu juridique du concept de priorité - il est évident qu'il cherchera dès le départ à embaucher les meilleurs candidats. Il y aura donc un effet d'écrémage - déjà observé pour les CES et les emplois jeunes, dans le privé comme dans le public - contraire à l'effet recherché.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. M. Cardo nous dit que si l'on impose un salarié à un employeur qui n'en veut pas, celui-ci ne le gardera pas. Dans ce cas, pourquoi l'aurait-il gardé pendant tout le temps où le contrat était aidé ?

M. Pierre Cardo. Je vous expliquerai cela une autre fois ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 65.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 128.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il s'agit d'un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 128.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 129 rectifié.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Amendement de clarification.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je souhaite une précision concernant l'API : si l'enfant dépasse entre-temps l'âge de trois ans, que se passe-t-il pour la personne concernée ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il est précisé que le versement de l'allocation est rétabli ou maintenu si la personne remplit les conditions.

Mme Martine Billard. Mais elle ne les remplit plus, puisque l'enfant a plus de trois ans !

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat.


M. Denis Jacquat
,
vice-président de la commission. La question est pertinente. Lorsque l'enfant a trois ans, l'API disparaît et on change de système : on passe au RMI, par exemple.

Mme Martine Billard. La personne devra donc refaire toutes les démarches !

M. Denis Jacquat, vice-président de la commission. Le Gouvernement est sage et prendra les mesures de simplification adéquates. (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 129 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 990 et 130, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 990.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Cet amendement vise à permettre à tout bénéficiaire du RMI qui a déjà une activité rémunérée à temps très partiel de pouvoir cumuler un CI-RMA à temps partiel puisque cette possibilité reste ouverte dans la loi. Il s'agit en fait de lever une disposition trop restrictive.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 990 et pour présenter l'amendement n° 130.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. L'amendement n° 990 n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis favorable, à titre personnel. Et son adoption ferait tomber l'amendement de la commission.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 990.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 130 tombe.

Je suis saisie d'un amendement n° 131 de la commission.

Il s'agit d'un amendement de coordination.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 131.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 66.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Cet amendement vise à supprimer le 8° de l'article 33.

Nous savons bien que, depuis longtemps, le MEDEF, référence incontournable, se bat pour avoir des contrats aidés dans le secteur marchand : le RMA lui apporte une réponse encore plus satisfaisante. Ainsi, pour vingt heures au SMIC pendant dix-huit mois, renouvelables tous les six mois, l'employeur chargé de verser la totalité du RMA au bénéficiaire, soit 608 euros brut par mois, percevra une aide équivalente au montant du RMI pour une personne isolée, soit 417 euros bruts. C'est ce que nous proposons précisément de supprimer.

Je fais observer au passage qu'il s'agit là d'un nouveau cadeau au patronat, car le montant du RMI accordé par la loi de décembre 2003 était de 367 euros. En fait, vous augmentez l'aide de 12 %.

Le différentiel à la charge de l'employeur s'établira donc à 190 euros et c'est uniquement sur la base de ce différentiel que seront calculées les cotisations sociales.

II s'agit là d'un aspect très choquant : pour la première fois une allocation à la personne sera versée à l'employeur. Selon nous, cette formule ne va pas manquer d'ailleurs de soulever des problèmes de constitutionnalité.

Quoi qu'il en soit, ce revenu mixte entre prestation sociale et salaire fait les affaires de l'employeur qui peut disposer d'un salarié vingt heures minimum par semaine en assumant seulement 37 % de ce coût. Dès lors, il aura intérêt à embaucher quatre salariés sur la base d'un contrat d'insertion-RMA qu'un salarié à temps plein au SMIC horaire sur la base d'un CDI ou d'un CDD.

Derrière le RMA se renforce donc une logique que l'on qualifiera, suivant la nature du jugement que l'on porte, soit d'assouplissement, soit de flexibilisation à outrance du droit du travail. En tout état de cause, c'est inacceptable.

Le RMA cumule tous ces handicaps et demeurera un échec. Nous proposons donc de supprimer le versement de cette aide à l'employeur.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement pour des raisons déjà exposées à propos du contrat d'avenir et que je ne reprendrai pas ici.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Avis défavorable. Cet amendement remettrait en cause l'équilibre qui caractérise l'activation d'une dépense de solidarité en une aide à l'emploi.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cardo.

M. Pierre Cardo. Je souhaite m'exprimer sur une question de principe plutôt que sur l'amendement lui-même. Je ne voterai pas cet amendement par solidarité avec le Gouvernement. Mais je tiens à rappeler que je n'ai jamais été très favorable au principe du RMA, même si c'est pour des raisons différentes de celles exposées par M. Desallangre.

Je ne considère pas, en effet, que l'entreprise soit le lieu idéal pour réinsérer des personnes éloignées de l'emploi. Verser de l'argent à un employeur pour favoriser la réinsertion de ces gens dans le privé ne me paraît pas être la meilleure méthode. D'autres structures pourraient être sollicitées. Pour moi, l'entreprise est un lieu d'insertion.

Je n'approuve pas pour autant l'ensemble des arguments que vous avez développés, monsieur Desallangre. C'est une position de principe. J'ai été employeur et j'ai recruté, mais je n'ai jamais créé d'emploi parce qu'il y avait une prime à la clé. Si j'ai créé des emplois, c'est parce qu'il y avait un marché. Quant à parler d'effet d'aubaine, laissez-moi sourire ! Pour avoir recruté un certain nombre de RMIstes, je peux vous dire que, lorsque des personnes sont très éloignées de l'emploi, on ne peut vraiment pas parler de cadeau fait à l'employeur, même avec le versement du RMI. Le travail d'accompagnement nécessaire pour permettre à la personne d'avoir un comportement plus adapté à l'entreprise est loin d'être évident, en effet.

M. Hervé Novelli. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 66.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 991.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Cet amendement vise à étendre la portée de l'actuel article L. 322-4-15-6 aux bénéficiaires de l'ASS.

Avec l'extension du CI-RMA aux bénéficiaires de l'ASS, il est en effet nécessaire, s'agissant des CI-RMA conclus par ces derniers, de permettre aux organismes tels les ASSEDIC de se voir confier la gestion de l'aide par l'État. Cette disposition est de nature législative, en l'absence d'habilitation législative de portée générale permettant la gestion d'une aide d'État par le régime d'assurance chômage. À titre d'exemple, une mesure similaire s'est avérée nécessaire pour la gestion du dispositif de prime hôtellerie-café-restaurant par les ASSEDIC.

L'absence d'une telle disposition viserait à exclure les ASSEDIC de la gestion de l'aide dans le cadre des CI-RMA, alors même que cet amendement en introduit seulement la faculté. Il ne préjuge pas du choix d'autres opérateurs comme le CNASEA.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est juste de la souplesse !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Exactement ! Je note, monsieur Le Bouillonnec que vous vous convertissez ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le ministre, je vous renvoie simplement à votre doctrine !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission n'a pas examiné cet amendement, auquel je suis favorable, à titre personnel.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Monsieur le ministre, je n'ai pas compris vos explications. Certes, vous voulez introduire de la souplesse et vous cherchez à nous convaincre du bien-fondé de cette démarche. Mais vous y mettez tant de conviction qu'on finit par se perdre dans les modalités d'application. Ainsi, que viennent faire ici les ASSEDIC ? Vous dites que c'est juste une latitude. À force d'ouvrir des latitudes, je me demande cependant comment vous allez bâtir votre temple de Babylone, tel Nabuchodonosor, et, surtout, comment vous en sortirez ! Que viennent faire les ASSEDIC, organisme éminemment respectable, dans cette affaire ? Essayez donc de nous convaincre calmement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Pour sortir du temple, monsieur Le Garrec, il faut des tuyaux simples : j'en propose un qui relie directement l'entreprise aux ASSEDIC.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 991.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 883.

La parole est à Mme Françoise de Panafieu, pour le soutenir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Amendement de coordination.

J'ajoute que, pour prendre en compte l'adoption de l'amendement n° 345 de Mme Billard, il convient de remplacer le mot « titulaires » par le mot « bénéficiaires ».

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 883 tel qu'il vient d'être rectifié.

(L'amendement, ainsi rectifié, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 642.

Cet amendement est-il défendu ?

M. Francis Vercamer. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 642.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 33, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 33, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 33

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 949.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Amendement de coordination et de précaution. Nous proposons d'assurer la continuité du droit en vigueur en exonérant les CAE et les contrats d'avenir de taxe sur les salaires, comme c'est déjà le cas pour les CES et les CEC. Cet amendement ayant été gagé, il faudra supprimer le paragraphe VIII si le Gouvernement y est favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Le Gouvernement est favorable à l'amendement et lève le gage.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 949, compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Article 33 bis

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 33 bis.

(L'article 33 bis est adopté.)

Après l'article 33 bis

Mme la présidente. Après l'article 33 bis, je suis saisie d'un amendement n° 753.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux relations du travail. L'article 33 du projet de loi procède à la réforme du CI-RMA pour en faire un contrat recentré sur le secteur marchand ouvrant droit à un statut social de droit commun. Il convient dès lors de revenir aux règles de droit commun en matière fiscale et de supprimer l'exonération prévue à l'article 81 du code général des impôts.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 753.

(L'amendement est adopté.)

Article 33 ter

Mme la présidente. Sur l'article 33 ter, je suis saisie de deux amendements identiques nos 133 et 376.

La parole est à Mme Martine Billard, pour les soutenir.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. S'agissant de RMI, on ne parle depuis un moment que de personnes très éloignées de l'emploi. Mais attention, de nos jours, on peut passer de l'emploi au RMI si on n'a pas accumulé suffisamment de droits pour bénéficier du chômage ou, a fortiori, de l'ASS. Toutes les personnes au RMI ne sont donc pas forcément éloignées de l'emploi. (« Très juste ! » sur divers bancs.)

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Le Gouvernement, pour les raisons exposées tout à l'heure, approuve la suppression de l'article 33 ter.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 133 et 376.

(Ces amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 33 ter est supprimé.


Après l'article 33
ter

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 134 et 482, portant article additionnel après l'article 33 ter.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 134.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Je laisse M. Vercamer présenter le sien, madame la présidente, puisque nos amendements sont identiques !

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement n° 482.

M. Francis Vercamer. Dans le code des marchés publics, nous avons introduit l'insertion par l'économique en la présentant comme un élément important pour la construction des bâtiments des collectivités territoriales, mais sans aller jusqu'à en faire un critère de choix. Cet amendement vise donc à insérer, dans le premier alinéa du II de l'article 53 du code des marchés publics, après les mots : « en matière de protection de l'environnement », les mots : « ses performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté ». Ainsi, les performances d'une entreprise en matière d'insertion des demandeurs d'emploi deviendront l'un des critères du choix des collectivités, dans le cadre de la passation de marchés publics.

Mme la présidente. L'avis de la commission est naturellement favorable.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Cet amendement ouvre dans le code des marchés publics la possibilité de prendre en compte l'emploi de personnes en difficulté, en ce qui concerne les clauses de réalisation des marchés dans les cahiers des charges. C'est un élément important, auquel le Gouvernement est favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 134 et 482.

(Ces amendements sont adoptés.)

Article 34

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, inscrit sur l'article.

M. Francis Vercamer. Nous abordons le chapitre IV de ce texte, consacré au développement des nouvelles formes d'emploi, au soutien à l'activité économique et à l'accompagnement des mutations économiques.

Quelques associations locales m'ont dit être satisfaites des objectifs du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale : fixer des règles, créer des maisons de l'emploi, mettre en place de nouveaux contrats et instaurer un certain nombre de dispositifs. Mais elles m'ont également demandé ce que devient l'expérimentation.

Certes, les maisons de l'emploi proviennent d'une expérimentation. M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a créé, à Valenciennes, une sorte de maison de l'emploi, et cette expérience lui a permis de construire ce projet de loi. C'est une bonne chose, car la création des maisons de l'emploi est une idée intéressante, qui va permettre de coordonner l'ensemble des acteurs de terrain. Ne peut-on recourir à d'autres expérimentations ? En Basse-Normandie, l'association « Un travail pour chacun » m'a parlé d'une expérimentation différente. Ses responsables aimeraient connaître l'avis du ministre sur l'expérimentation en matière de développement de nouveaux emplois. Je n'ai pu déposer d'amendement à ce sujet, mais je voudrais savoir ce qu'en pense le ministre.

On m'a également proposé la création de fonds territoriaux d'investissement pour l'emploi. Ce dispositif, de dimension locale, permettrait de développer l'emploi au sein d'une région.

Mme la présidente. L'amendement n° 543 n'est pas défendu.

Je mets aux voix l'article 34.

(L'article 34 est adopté.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Madame la présidente, pouvez-vous nous accorder une suspension de séance de dix minutes, pour réunir notre groupe ?

Mme la présidente. Je vous accorde cinq minutes !

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Après l'article 34

Mme la présidente. L'amendement n° 542, portant article additionnel après l'article 34, n'est pas défendu.

Je suis saisie de six amendements, nos 815, troisième rectification, 247, troisième rectification, 530, 531, 248 rectifié et 529 pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 815, troisième rectification, et 247, troisième rectification, sont identiques, ainsi que les amendements nos 248 rectifié et 529.

L'amendement n° 815, troisième rectification, fait l'objet de deux sous-amendements identiques, nos 975 et 1004.

La parole est à Mme la ministre déléguée, pour soutenir l'amendement n° 815, troisième rectification.

Mme la ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion. L'amendement n° 815, troisième rectification, du Gouvernement et l'amendement n° 247, troisième rectification, de M. Tian étant identiques, je laisse M. Jacquat présenter ce dernier.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir l'amendement n° 247, troisième rectification.

M. Denis Jacquat. Cet amendement donne aux EPCI une compétence optionnelle supplémentaire en matière d'action sociale, dont la mise en œuvre serait confiée à un centre intercommunal d'action sociale.

Mme la présidente. La parole est à M. François Scellier, pour soutenir le sous-amendement n° 975.

M. François Scellier. Ce sous-amendement modeste vise à apporter une précision. Dans la mesure où la loi établit les responsabilités départementales dans l'ensemble du secteur social, il me paraît souhaitable de compléter le texte en indiquant que cette nouvelle compétence sociale d'intérêt communautaire s'inscrit bien dans les orientations du schéma départemental d'organisation sociale et médico-sociale, prévues par l'article L. 312-5 du code de l'action sociale et des familles.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir le sous-amendement n° 1004.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. La loi relative aux responsabilités locales ayant conforté le département dans son rôle de chef de file des politiques sociales, il nous semble nécessaire d'éviter les incohérences.

Les départements souhaitent privilégier une logique de partenariat avec les collectivités locales et les conseils intercommunaux d'action sociale.

Le dispositif que nous vous proposons inscrirait les compétences des CIAS dans les orientations des schémas départementaux d'organisation sociale et médico-sociale. Cette précision ne laisserait subsister aucune confusion. De plus, une telle cohérence présenterait l'intérêt de pallier toutes les carences qui existent en matière d'intervention sociale.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux sous-amendements ?

Mme la ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Comme l'a indiqué M. Jacquat, les actions développées par les EPCI dans le cadre de l'action sociale d'intérêt communautaire devront prendre en compte, compléter ou prolonger les orientations du schéma départemental d'organisation sociale et médico-sociale.

Toutefois, le Gouvernement considère qu'il n'est pas souhaitable d'instaurer une contrainte législative, qui pourrait être comprise comme une limitation à la liberté des communes.

C'est pourquoi le Gouvernement souhaiterait que ces sous-amendements soient retirés, en rappelant à leurs auteurs que l'action sociale est une compétence facultative pour les communes. Cette compétence doit être complémentaire et en cohérence avec les dispositifs existants. Quoi qu'il en soit, une contrainte supplémentaire ne nous semble pas nécessaire. Le Gouvernement est donc défavorable à ces sous-amendements.

Mme la présidente. Maintenez-vous vos sous-amendements, mes chers collègues ?

M. François Scellier. Tout à fait !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je le maintiens, et je voudrais ajouter quelques mots, madame la présidente !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.


M. Jean-Yves Le Bouillonnec
.
Il y a un problème, madame la ministre. Nous sommes dans le cas où une compétence optionnelle est transférée à une intercommunalité.

Je rappelle que pour que l'établissement public de coopération intercommunale ait pris en charge une compétence optionnelle, il faut que les communes l'aient accepté. C'est la loi. L'argument invoqué n'est donc pas fondé.

Pour qu'une communauté de communes ou une communauté d'agglomération exerce une compétence, il faut une double délibération : celle du conseil de la communauté et celle de tous les conseils municipaux des communes qui la composent. C'est la loi. Il n'y a pas d'autre possibilité : il faut un accord de toutes les communes.

Il est donc impossible qu'une compétence optionnelle soit transférée contre la volonté de l'une des communes membres de l'EPCI. Étant précisé qu'on n'en est plus au stade du débat sur l'entrée dans l'EPCI qui est d'une autre nature.

Madame la ministre, le cas que vous évoquez pour justifier votre refus de voir les compétences sociales d'intérêt communautaire inscrites dans les orientations du schéma départemental n'est pas fondé. Nous sommes bien dans le cas où des communes ont accepté le transfert de la compétence à l'établissement public de coopération intercommunale. À ce moment-là, il est important que cette compétence optionnelle, que l'établissement public de coopération intercommunale va exercer, le soit dans le cadre du schéma départemental d'organisation sociale et médico-sociale - c'est ce que propose notre sous-amendement -, sachant que la loi a donné aux départements la possibilité de conduire ce schéma.

Nous sommes dans le cas où le département a lui-même ce schéma - mais il n'y est pas obligé. Nous sommes donc bien dans la « souplesse » chère au ministre Larcher : premièrement, des communes ont accepté le transfert de l'option ; deuxièmement, des départements ont développé le schéma ; enfin, tous ceux ayant fait ces transferts de compétence, ou ces orientations - et là, par contre, l'État ne peut pas ne pas être intéressé - ont décidé de le faire dans la cohérence.

Ces sous-amendements ne visent qu'à placer tout le monde dans une démarche de cohérence, comme je l'ai rappelé tout à l'heure. Il s'agit surtout de pouvoir palier toutes les carences en matière d'intervention, c'est-à-dire de faire en sorte que, à tout moment, sur tous les territoires, les solutions d'action sociale puissent être mises en œuvre. C'est pourquoi nous maintenons notre sous-amendement.

Mme la présidente. J'avais omis de demander l'avis de la commission sur les deux sous-amendements, madame la rapporteure !

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Comme vous êtes une très bonne présidente, madame, on vous pardonne ! (Sourires.)

M. Denis Jacquat, vice-président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Excellente présidente !

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Je ne comprends pas bien pourquoi l'on veut rajouter indéfiniment des dispositions dans le texte.

Il n'est pas question de shunter les communautés de communes et les communautés d'agglomérations ! Simplement, il ne convient pas d'ajouter une contrainte à l'exercice de la compétence action sociale d'intérêt communautaire, contrainte qui, en outre, pourrait nuire à la liberté des communes.

Pourquoi ajouter un élément qui va de soi ? À titre personnel, j'émets un avis défavorable à ces deux sous-amendements, non examinés par la commission,.

M. Denis Jacquat, vice-président de la commission des affaires culturelles. Quelle analyse !

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon, pour défendre les amendements nos 530 et 531.

Mme Hélène Mignon. Je ne reprendrai pas toute l'argumentation développée à l'instant par M. Le Bouillonnec. Je dirai seulement que, effectivement, cela ne va pas de soi, contrairement à ce que prétendent Mme la rapporteure ou Mme la ministre. Il nous faut être très conscients que des difficultés pourront se poser lorsqu'il s'agira de mettre en œuvre les politiques auxquelles nous serons tous très attachés les uns et les autres.

Faisons donc très attention et décidons-nous calmement, mais en toute conscience, sachant que des blocages pourront apparaître si nous ne sommes pas très fermes et rigoureux dans les décisions que nous prenons.

Mme la présidente. L'amendement nos 248 rectifié est défendu. L'amendement identique n° 529 l'est-il également, madame Mignon ?

Mme Hélène Mignon. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les sous-amendements nos 975 et 1004.

(Ces sous-amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 815, troisième rectification, et 247, troisième rectification.

(Ces amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Les amendements nos 530, 531, 248 rectifié et 529 tombent.

Article 35

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec, inscrit sur l'article 35.

M. Jean Le Garrec. Par la même occasion, je présenterai l'amendement de suppression de l'article, n° 596, de Mme Mignon.

Madame la ministre, j'avoue que l'article 35 me pose un problème. Non pas sur l'aide que l'on peut apporter, par exemple, à un RMIste voulant créer ou reprendre une entreprise, mais sur la forme que prend cette aide. Le recours à un tuteur ou à une personne quelconque apportant son appui me semble être une approche dangereuse. En outre, offrir à la personne apportant une aide un abattement fiscal, c'est trop peu ou trop ! Quelle sera cette aide et comment sera-t-elle prise en charge ?

Je peux témoigner, pour avoir beaucoup travaillé sur le sujet, que la création ou la reprise d'une entreprise est toujours extrêmement difficile. En général, les difficultés apparaissent au cours de la deuxième année et, bien souvent, ceux qui, de bonne volonté, se sont engagés dans cette action - et on ne peut que les encourager - sont confrontés à des problèmes souvent dramatiques.

Or il existe des structures compétentes et spécialisées en la matière, dénommées « boutiques de gestion ». Il en existe dans plusieurs régions. Contractualisées avec l'État, elles bénéficient de soutiens financiers, ont une grande expérience en la matière et peuvent apporter un véritable appui aux créateurs d'entreprise, mieux : un appui à l'analyse même du projet de reprise ou de création.

Bien souvent, il arrive qu'un projet ne soit pas suffisamment étayé pour aboutir - j'en connais plusieurs exemples.

La démarche consistant à obtenir l'appui de quelqu'un - même avec une expérience professionnelle et avec un conventionnement par le biais d'une maison de l'emploi, comme le prévoit l'article -, mais qui n'a pas forcément une expérience et une maîtrise en la matière, m'apparaît non seulement insuffisante, mais aussi de nature à faire courir des risques qui peuvent être graves à celui qui se lancera dans une telle action.

J'ajoute, enfin, que le faire par le biais d'un abattement fiscal n'a pas beaucoup de sens.

Je ne méconnais pas la nécessité d'apporter un soutien. Mais le dispositif prévu par l'article 35 risque d'être inadapté à la nature du problème, et donc inopérant.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 351 et 596, de suppression de l'article.

L'amendement n° 596 a été défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable. Loin d'être effrayée par un tutorat qui aide un titulaire du RMI ou un demandeur d'emploi à créer ou à reprendre une entreprise, elle estime que cette initiative peut être réellement intéressante.

Toutes les personnes consultées au cours des auditions l'ont dit : le facteur humain est déterminant dans la réussite d'une reprise ou d'une création d'entreprise. Pour qu'un projet aboutisse, l'accompagnement personnalisé compte beaucoup. C'est la raison d'être de ce dispositif d'encouragement et de valorisation du tutorat.

Je rappelle qu'une procédure de contrôle de ce nouveau dispositif est prévue par le biais des maisons de l'emploi. Les craintes d'intéressement à la charité individuelle ne semblent donc pas a priori fondées, en tout cas pas susceptibles d'être détectées !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Il est utile de rappeler que plus du tiers des créateurs d'entreprise sont des demandeurs d'emploi ou des personnes bénéficiant d'un minimum social et que le taux de survie de ces entreprises est au moins égal à celui des autres créations, ce dont on ne peut que se réjouir. Le dispositif, en contribuant à l'insertion, sera une solution efficace.

Naturellement, il y a des systèmes d'accompagnement ; M. Le Garrec les a évoqués. Nous savons que l'accompagnement dans la durée, le tutorat, est le fait de bénévoles. C'est eux qu'il faut encourager au premier chef dans l'accomplissement de leurs fonctions.

À nos yeux, le dispositif est novateur. Il est une chance offerte à la création d'entreprises et à la réinsertion professionnelle, et constitue un élément important en termes d'emplois et de cohésion sociale. C'est un outil utile.

Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements de suppression de l'article.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Novelli.

M. Hervé Novelli. Je suis contre les amendements de suppression de l'article. Le Gouvernement a fait de grands efforts pour soutenir la création d'entreprises, depuis la loi Dutreil jusqu'aux projets bientôt en discussion. Nous en constatons d'ailleurs les premiers effets.

Supprimer la création d'une déduction fiscale permettant aux tuteurs de soutenir les créateurs d'entreprise demandeurs d'emploi me semble tout à fait paradoxal. Ce serait envoyer un signal très défavorable aux chômeurs créateurs d'entreprise. Que M. Le Garrec accompagne cette demande me semble très surprenant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Le débat ne porte pas sur la nécessité d'aider les créateurs d'entreprise - sur laquelle nous nous retrouvons tous -, mais sur la façon de le faire. Le moyen qui nous est proposé dans l'article 35 n'est pas, en fait, l'institution d'une réduction d'impôt, mais la création d'une niche fiscale : voilà où se situe le désaccord. Ne pourrait-on pas trouver autre chose qu'une niche fiscale pour aider les créateurs d'entreprise ?


D'autre part, la multiplication des dispositifs de ce type risque d'introduire une concurrence entre les différentes aides aux personnes en difficulté, notamment dans les dispositifs d'aide alimentaire. On se souvient de ce qui s'est passé avec l'amendement Coluche : voilà qu'on recommence avec cet article. En général, dans leurs dons, les contribuables se concentrent sur un ou deux thèmes seulement. Or ceux qui sont sensibilisés à la nécessité d'aider les personnes en difficulté vont devoir choisir entre plusieurs dispositifs. Ainsi, on ne constatera aucun accroissement des dispositifs d'aide, mais une nouvelle répartition des subsides aux dépens de ceux qui existent déjà.

Je demande donc au Gouvernement de trouver une autre solution, car celle-ci me semble très mauvaise.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. M. Novelli intervient et, brusquement, toute mon attention est en éveil : il doit y avoir un piège quelque part. (Sourires.)

M. Hervé Novelli. Mais non !

M. Jean Le Garrec. Je dis cela très cordialement, nous sommes accoutumés à ce genre de débats.

Soyons clairs : nous sommes et avons toujours été favorables à la création d'entreprises.

M. Hervé Novelli. Bonne nouvelle !

M. Jean Le Garrec. Monsieur Novelli, c'est moi qui ai fait la première contractualisation avec les boutiques de gestion et le dispositif EDEN a été mis en place avec les emplois-jeunes.

D'autre part, nous pensons également qu'il faut aider les créateurs et, plus encore, les repreneurs d'entreprise, car il est souvent plus difficile de reprendre que de créer.

Enfin, les boutiques de gestion existent depuis des années. Alliant la compétence à l'expérience, elles obtiennent des résultats remarquables. Grâce à leur travail, on a pu éviter que le taux de mortalité des premières et deuxièmes années ne soit beaucoup plus élevé. Ces structures sont soutenues par la puissance publique et on peut les développer encore. Pourquoi aller chercher ailleurs quelqu'un qui, dans des conditions qu'on ne connaît guère, apportera un soutien à des expériences qu'on ne connaît pas mieux ? Et pourquoi créer en outre une niche fiscale, alors même que vous passez votre temps à vouloir en supprimer, souvent avec raison ? Que diable allez-vous faire dans cette galère ? − pour paraphraser Molière. Demandons-nous plutôt quelle est la meilleure méthode pour soutenir les créateurs. Des instruments existent, essayons de voir s'ils sont appropriés. Mais, de grâce, ne créons pas de nouvelles niches fiscales.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 351 et 596.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. Jean Le Garrec. Et une niche fiscale de plus !

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 884.

La parole est à Mme Françoise de Panafieu, pour le soutenir.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. C'est un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 884.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 35, modifié par l'amendement n° 884.

(L'article 35, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 35

Mme la présidente. Après l'article 35, je suis saisie d'un amendement n° 520 rectifié.

La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Fourgous. Cet amendement propose de mettre en place un contrat export supplémentaire afin de créer un peu plus d'emplois, de développer la richesse, d'accroître la compétitivité des entreprises − même si je sais bien que, pour certains, cette dernière expression est un gros mot.

En matière d'exportations, il importe que les contrats soient aussi souples que possible. On compte quelque 100 000 entreprises ou PME exportatrices, ce qui n'est pas suffisant. Chaque milliard d'euros d'exportations génère 15 000 emplois en France. L'enjeu mérite qu'on fasse preuve d'audace réformatrice.

Chacun sait que le droit du travail est rigide et ne tient pas compte de la situation de nos PME exportatrices. Le contrat d'export que je propose offre un cadre pour gérer des durées de mission qui sont difficiles à déterminer à l'avance et pour lesquelles la souplesse s'impose. Il est bien beau de parler toujours du social, mais, dans un pays qui détient le record du chômage et de la durée du chômage, il ne faut employer certains mots vidés de leur sens qu'avec la plus grande prudence. Restons humbles et pragmatiques, voyons ce qui marche, pensons aux Français avant de nous adonner à nos petits jeux idéologiques.

Ce dispositif est inspiré du contrat de chantier dans le bâtiment. Il apporte aux salariés des garanties dans le cadre d'accords de branche ou d'entreprise. C'est un bon levier pour créer 50 000 entreprises exportatrices dans les trois années à venir.

Mme Martine Billard. Au moins !

M. Daniel Paul. C'est trop modeste !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a accepté cet amendement. Ce contrat répond à un besoin général, notamment − M. Fourgous vient de le rappeler − pour les petites et moyennes entreprises, à qui elle offre des outils leur permettant de développer leur capacité d'exportation.

Le contrat proposé est calqué sur le contrat de chantier, utilisé dans le secteur du BTP. Il est conclu pour la réalisation d'une mission à l'exportation, effectuée en majeure partie à l'extérieur de notre territoire national. Dans les deux cas, il existe une mission déterminée dont on sait qu'elle aura une échéance, mais dont le terme précis reste inconnu et ne peut donc être fixé à l'avance.

M. Fourgous l'a également rappelé, ce contrat pourra être conclu soit dans le cadre d'un accord collectif de branche, soit dans celui d'un accord d'entreprise majoritaire au sens de la loi du 4 mai 2004. Cette possibilité de cadrage constitue un verrou satisfaisant.

Dans le même esprit, le contrat est entouré de diverses garanties : sa durée minimale de six mois, l'existence de contreparties en termes de rémunérations et d'indemnités de licenciement, de formation ou de reclassement.

C'est donc une mesure intéressante et la commission a adopté cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean Le Garrec. Attention, monsieur le ministre, c'est un amendement Fourgous !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Le Gouvernement avait annoncé, par la voix du ministre délégué au commerce extérieur, qu'il prendrait des initiatives afin de favoriser le recrutement dans les entreprises exportatrices, notamment les plus petites, et pour mieux prendre en compte la spécificité de l'activité des salariés chargés d'une mission à l'export.

L'amendement répond à cet objectif, en s'inspirant du régime applicable aux fins de chantier. Il prévoit en contrepartie des garanties pour les salariés. Le champ de la mesure est encadré par la loi et sa mise en œuvre passe par la négociation collective. Nous y sommes donc favorables.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Bien que je sois un défenseur du CDI, cet amendement me paraît fort intéressant. Pour ce genre de mission, c'est exactement le type de contrat qui s'impose. J'ai moi-même été chef d'une entreprise qui exportait. En la matière, il n'y pas trente-six solutions. La plupart du temps, l'entreprise a recours à un agent commercial indépendant, qui n'a donc pas de contrat de travail et n'est pas couvert par le droit du travail. Elle peut rompre le contrat commercial qui les lie dès qu'elle le souhaite, par exemple si l'agent ne fait pas le travail pour lequel elle le rémunère.

Le contrat proposé par cet amendement a l'avantage d'établir un lien de subordination qui permet à une entreprise d'engager un salarié chargé de l'exportation et lui assure une couverture sociale. Ce ne peut être qu'un contrat à durée déterminée, puisqu'une entreprise exportatrice est à la merci d'aléas internationaux qui peuvent bouleverser l'environnement économique. Il suffit de penser à la suppression des quotas dans le textile qui, du jour au lendemain, a entraîné l'effondrement des marchés et créé des difficultés à bien des entreprises.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. À en croire les orateurs, le droit actuel ne permettrait pas de licencier un salarié dont le poste de travail ne correspond plus à une activité de son entreprise. Pourtant, l'arrêt d'une mission confiée à un salarié qui travaille à l'exportation, par exemple à la suite d'une modification du marché, est un motif de licenciement accepté par les tribunaux.

M. Pierre Cardo. Mais il y a des procédures !

Mme Martine Billard. On n'a pas besoin d'inventer un nouveau contrat de travail pour permettre cela. C'est d'ailleurs permis même pour des entreprises qui n'exportent pas ou pour des petites entreprises, qui peuvent licencier lorsqu'elles n'ont plus d'emploi correspondant aux attributions du salarié ou lorsqu'il y a un désaccord avec un cadre.

M. Pierre Cardo. C'est une procédure de licenciement économique qui est très lourde !

Mme Martine Billard. Cet amendement précise que l'indemnité de licenciement accordée aux salariés ne peut être « inférieure au montant de l'indemnité légale de licenciement ». C'est quand même la moindre des choses, puisque cela figure dans le code du travail ! Mais cela pourrait permettre aussi que l'indemnité de licenciement ne soit plus celle fixée par la convention collective. Or la baisse des indemnités de licenciement est aujourd'hui l'un des chevaux de bataille du MEDEF

M. Jean-Michel Fourgous. C'est de l'idéologie !

Mme Martine Billard. C'est tout ce que vous trouvez à dire ? Lorsque la présence d'un salarié dans l'entreprise a été courte, les indemnités de licenciement sont réduites à pas grand-chose. Les indemnités mirifiques dont parlent la télévision et les journaux ne sont versées ...

M. Jacques Desallangre et M. Daniel Paul. Qu'aux patrons !

Mme Martine Billard. ... qu'aux chefs d'entreprise et à quelques rares cadres supérieurs. Les autres sont loin de recevoir ce que touchent certains chefs d'entreprise bien connus.

Je ne vois donc pas ce qu'apporte cet article additionnel, si ce n'est qu'il dispense de respecter les clauses des conventions portant sur l'indemnité de licenciement économique.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Toujours la recherche effrénée de la souplesse ! Mais la souplesse, pour certains, c'est de revenir sur la protection des salariés et sur des avantages justement concédés par le patronat. Aujourd'hui, quand une entreprise n'a plus de travail pour un salarié, elle le licencie pour des motifs économiques. Encore faut-il qu'elle prouve le caractère économique du licenciement. Cela vaut également lorsqu'il n'y a plus de travail à l'exportation.

En fait, cet amendement est une amorce, timide mais symptomatique, du contrat de mission.

M. Jean Le Garrec. Il a raison !

M. Jacques Desallangre. Il s'élargira pour parvenir à cette flexibilité, à cette modération salariale chères à certains − je dois encore citer le MEDEF, qui est leur inspirateur − pour qui les coûts salariaux sont insupportables. Il est vrai que les journaux financiers publient tous les jours les résultats d'entreprises dont les bénéfices n'ont augmenté que de 25 à 30 % !

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Il me paraît important de préciser que la chambre sociale de la Cour de cassation n'accepte pas, comme motif de licenciement d'un salarié employé essentiellement à l'export, la disparition d'un marché à l'exportation. Elle considère en effet qu'il faut également regarder si les autres activités de l'entreprise justifient ce licenciement. Ainsi, la législation actuelle n'offre aucune souplesse aux entreprises exportatrices. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Voilà une intervention qui justifie toutes nos inquiétudes. Il est bien normal que la chambre sociale de la Cour de cassation n'accepte pas un licenciement sans regarder d'abord si les activités de l'entreprise ne permettent pas de continuer à employer ce salarié. Mme Billard a donc entièrement raison.


Je ne comprends pas ! Monsieur Wauquiez, vous venez de tenir des propos énormes, que vous auriez mieux fait de taire car ils apportent de l'eau à notre moulin : c'est clairement la réapparition du contrat de mission.

M. Hervé Novelli. Et alors ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Le Garrec. Nous y sommes opposés.

Par ailleurs, il est fait référence à un accord de branche sans qu'il ait été discuté avec les partenaires sociaux de la nature de ce contrat. En d'autres termes, au nom du dialogue social, on prend une décision sans en avoir discuté au préalable avec les partenaires sociaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Il n'est question dans cet amendement que d'un accord collectif, lequel décidera du reste, et non d'un contrat de mission.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais non, c'est l'inverse que cela signifie !

M. Francis Vercamer. Dans des contrats de mission courts, le CDD est bien plus protecteur qu'un CDI. Avec un CDI et moins de deux ans d'ancienneté, vous n'avez quasiment aucune protection ; avec un CDD, vous avez au moins la protection de la durée du contrat. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.

M. Jean-Michel Fourgous. Je voudrais remercier M. Vercamer pour ses remarques fondées sur la compétence. Cela fait du bien d'entendre de temps en temps, dans cet hémicycle, des personnes qui parlent en se fondant sur des compétences et non à partir d'a priori idéologiques. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Certaines personnes, en effet, passent leur temps à faire un code du travail qui ressemble plus à un code de lutte de classes qu'à autre chose. Nous, nous sommes là pour l'emploi, pour les Français ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre. Mais quelle prétention ! Vous n'avez pas à donner de leçons !

M. Jean-Michel Fourgous. M. Wauquiez a évoqué avec justesse le fonctionnement juridique, ce qui montre bien que certaines déclarations sont très hâtives...

M. Jacques Desallangre. Quel mépris ! Moi, j'ai travaillé vingt-sept ans en entreprise !

M. Jean-Michel Fourgous. Madame Billard, j'ai lu dans la presse que, selon vous, je fréquentais les salons et ne connaissais rien à la réalité. Je vous rappelle que je suis le seul député né à Montreuil, comme M. Brard l'a dit, et que je suis élu de Trappes. Je ne vois donc pas très bien ce qui vous a autorisé à faire des déclarations sur mon manque de sens des réalités. Ces déclarations, péjoratives, sont peu appréciées. Cela prouve que vous ne connaissez pas la réalité des gens à qui vous parlez.

M. Jacques Desallangre. C'est bien prétentieux ! Donneur de leçons !

M. Jean-Michel Fourgous. Vous parlez d'emploi sans rien y connaître.

Mme Martine Billard. Mais qu'est-ce que vous en savez ?

M. Jacques Desallangre. J'ai passé 27 ans en entreprise et je ne connaîtrais rien du travail ?

Mme la présidente. Laissez M. Fourgous s'exprimer !

M. Jean-Michel Fourgous. L'exportation est quelque chose de très particulier, je le sais pour avoir exporté et créé des emplois à l'exportation.

M. Jacques Desallangre. Prétentieux !

M. Jean-Michel Fourgous. Actuellement, les entrepreneurs contournent la législation. Cet amendement permet d'éviter les contournements et de donner une sécurité à beaucoup de gens qui travaillent dans l'exportation dans de très mauvaises conditions, sans contrat, avec un simple engagement déclaratif, et sont exposés à toutes les aventures. Il est fondé sur le réalisme, le pragmatisme et la compétence économique et non sur l'idéologie qui se manifeste encore trop souvent dans notre pays.

M. Jacques Desallangre. Madame la présidente, j'ai été mis en cause personnellement. Je demande la parole !

Mme la présidente. Vous connaissez le règlement aussi bien que moi, monsieur Desallangre : vous aurez la parole en fin de séance.

M. Jacques Desallangre. Soit.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Un milliard d'euros d'exportations en plus, c'est 15 000 emplois créés.

M. Laurent Wauquiez et M. Jean-Michel Fourgous. Bien sûr !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Or notre objectif est bien de créer de l'emploi.

Avant de parler de licenciements, parlons d'embauche. On ne réinvente pas un nouveau contrat de travail, on s'inspire d'un contrat de chantier, en introduisant des éléments de souplesse pour l'entreprise et des garanties : indemnités de fin de contrat, garanties en termes de formation. Le dispositif est ouvert uniquement par accord collectif. M. Vercamer et d'autres ont bien mis en évidence les besoins qu'ont les PME de disposer de prospecteurs de marchés à l'export. Il n'est que de voir comment d'autres pays, à l'intérieur de l'Union, ont donné à leurs PME les capacités de conquérir des marchés extérieurs. L'essentiel est que nous développions les emplois dans notre pays. C'est notre objectif ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 520 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Madame la présidente, je vais vous demander de suspendre quelques instants la séance, pour réunir mon groupe.

Les termes dans lesquels M. Fourgous nous met en cause ne sont pas acceptables, car il n'a réagi à nos arguments qu'en nous renvoyant à notre prétendue incompétence.

Il me semble pourtant que, depuis plusieurs jours, nous tenons des propos qui reflètent, à défaut d'unanimité, une certaine compétence. Monsieur Fourgous, je peux vous donner des leçons de droit du travail quand vous le voudrez ! Et je ne considère pas pour autant que vous êtes incompétent en la matière.

Ce n'est pas parce que je n'ai pas été chef d'entreprise que je ne sais pas ce que c'est qu'un conflit du travail !

Je vous demande donc, madame la présidente, dix minutes de suspension de séance, afin que nous reprenions le débat dans des conditions plus sereines.


Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures quinze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 36

Mme la présidente. Sur l'article 36, je suis saisie d'un amendement, n° 135, de la commission.

La parole est à M. Denis Jacquat, pour le soutenir.

M. Denis Jacquat, vice-président de la commission. Cet amendement de conséquence vise à permettre aux maisons de l'emploi de participer à la mise en œuvre des mesures prévues par l'article L. 321-16 du code du travail tel qu'il résulte de l'article 37-6 du présent projet, à savoir, en cas de licenciement collectif affectant l'équilibre des bassins d'emplois, la participation obligatoire des entreprises à la création d'activités et au développement des emplois, ainsi qu'à des actions pour atténuer les effets du licenciement sur les autres entreprises.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Nous verrons, à l'article suivant notamment, le rôle important que les maisons de l'emploi auront à jouer dans toutes les actions de reclassement personnalisé.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 135.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 36, modifié par l'amendement n° 135.

(L'article 36, ainsi modifié, est adopté.)

Article 37

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul, inscrit sur l'article 37.

M. Daniel Paul. L'article 37 autorise le recours à l'intérim pour l'embauche de personnes rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi ou lorsque l'employeur s'engage à assurer un complément de formation professionnelle au salarié. Autrement dit, il étend encore davantage les possibilités de recours à l'intérim et permet donc aux employeurs d'avoir à leur disposition de la main-d'œuvre flexible. Si les motifs de recours à l'intérim indiqués par le code du travail peuvent éventuellement se justifier - à condition que l'entreprise n'en abuse pas -, il s'agit ici de proposer des contrats d'intérim en lieu et place de contrats stables, uniquement parce qu'ils s'adressent à des personnes en situation d'exclusion. Ce n'est pas, pour nous en tout cas, leur rendre service.

Le Gouvernement encourage à nouveau l'emploi précaire, ce qui va très certainement satisfaire le patronat, qui l'utilise malheureusement fréquemment, et plus particulièrement les grandes agences d'intérim. Comment peut-on sérieusement affirmer, comme M. Philippe Marcel, président d'Adecco France, dans La Tribune du 11 octobre dernier : « L'intérim est un facteur de cohésion sociale » ? (Rires sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est une lecture que je vous conseille, monsieur le ministre. Sachant qu'en 2003 22 % des missions d'intérim ont été conclues pour une journée, on voit bien l'effet tout à fait néfaste qu'aura ce texte sur la cohésion sociale.

M. Jean-Michel Fourgous. Mieux vaut rester au chômage ?

M. Daniel Paul. Cher collègue, j'ai entendu récemment le baron Seillière : il n'était pas satisfait du Gouvernement. Mais je le soupçonne de jouer avec lui à un petit jeu destiné à mieux faire passer la pilule. Ce que souhaite le baron Seillière, et que vous souhaitez sans oser le reconnaître, c'est tout simplement remettre en cause le CDD - pour celui-ci je suis d'accord -, mais aussi le CDI qu'il faudrait, d'après moi, plutôt consolider, pour les remplacer par des contrats dits de mission. Voilà ce que vous voulez : tout pousser dans le sens de la flexibilité.

M. Jacques Desallangre. Eh oui !

M. Daniel Paul. Dès lors que vous y serez parvenus, vous reprendrez à nouveau le débat sur les cotisations patronales, cher au baron.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Si vous en reveniez à l'intérim ?

M. Daniel Paul. Trop chères pour le baron, les cotisations patronales ! Il faudrait les aligner sur ce qui existe chez nos concurrents. Mais même débarrassé des cotisations patronales, le salaire net sera encore supérieur à ce qu'il est ailleurs. Que demanderez-vous à supprimer alors ? Taillerez-vous dans l'os ?

M. Jean-Michel Fourgous. Il ne faudrait toucher à rien !

M. Daniel Paul. Les intérimaires sont les premiers à dénoncer leur statut instable. Ils ont des difficultés sérieuses pour trouver un logement, contracter un crédit, financer leurs déplacements, le lieu de travail étant variable d'une mission à l'autre. Ils ont également des difficultés pour organiser la garde de leurs enfants compte tenu de la diversité des missions proposées. La liste des inconvénients est longue.

Quant à l'idée qu'une formation pourrait être offerte aux salariés par l'entreprise de travail temporaire, elle est inacceptable. Ce n'est pas à une entreprise non qualifiée dans la formation professionnelle, et de surcroît créatrice d'emplois précaires, qu'il faut donner les moyens d'assurer des stages de formation professionnelle.

M. Jean-Michel Fourgous. Et vous, que proposez-vous ?

M. Daniel Paul. La philosophie de cet article est, une fois de plus, d'inspiration profondément libérale.

M. Jean-Michel Fourgous. C'est encore le baron Seillière qui est derrière tout cela !

M. Daniel Paul. Le Gouvernement démantèle l'ANPE, prive l'AFPA de sa mission de formation au profit du secteur privé, qui sera autorisé à assurer des missions de service public. Tout est dit : l'article 37 illustre bien la philosophie de ce projet de loi dit de cohésion sociale, qui n'est en réalité qu'un rideau de fumée. C'est pourquoi nous en demandons la suppression.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements de suppression de l'article, nos 377 et 259.

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 377.

Mme Martine Billard. Je ferai tout d'abord observer à nos collègues de l'UMP que, pour juger de la compétence des personnes, il faut les connaître. Personnellement, je ne fonde pas mon jugement sur le lieu de naissance, le sexe, la couleur de peau ou la religion, mais sur l'attitude au travail. Au sein de l'entreprise, il y a effectivement des points de vue différents selon qu'on est chef de l'entreprise ou salarié. Ils peuvent être complémentaires ou opposés, mais pas meilleurs ni moins bons.

M. Jean-Michel Fourgous. Vous les opposez pourtant !

Mme Martine Billard. Jusqu'à présent, le travail temporaire dans notre pays est autorisé pour remplacer des salariés absents ou pour répondre à des nécessités exceptionnelles de l'entreprise. C'est même parfois, pour certains salariés, un mode de travail choisi, notamment pour les jeunes ou pour des travailleurs qui, ayant changé d'orientation professionnelle, se reconstruisent une expérience professionnelle. Mais en aucun cas l'intérim ne doit devenir un mode de gestion de l'emploi.

Le travail temporaire d'insertion était jusqu'à maintenant à la charge des entreprises de travail temporaire d'insertion. Or les entreprises de travail temporaires traditionnelles n'aiment pas beaucoup ces ETTI, qu'elles considèrent comme des concurrentes.

La conséquence à craindre de l'adoption de l'article 37 est la dérégulation du droit du travail en matière de travail temporaire, ce qui cassera un peu plus encore le code du travail. D'ailleurs, le projet de loi, s'il ne touche pas à l'équilibre obtenu sur les licenciements économiques, introduit par diverses fenêtres - le texte lui-même, mais aussi les amendements de M. Fourgous - des modifications du code du travail qui n'étaient pas annoncées. Nous n'avons pas fini d'en voir, dans cette loi sur la cohésion sociale, des mesures tendant à détricoter le code du travail !

M. Jean-Michel Fourgous. Elles créeront des emplois !

Mme Martine Billard. Elles créeront surtout des travailleurs pauvres ! Aujourd'hui, 25 % des SDF sont salariés. Voulez-vous faire monter ce taux à 50 % ? Belle solution que de leur fournir un travail, mais pas les moyens de se loger, de se nourrir, d'élever leurs enfants ou de se soigner !

M. Jean-Michel Fourgous. Caricature idéologique !

Mme Martine Billard. C'est un modèle de société que vous pouvez défendre, mais ce n'est pas celui des Verts.

M. Jean-Michel Fourgous. Quelles compétences avez-vous ?

Mme Martine Billard. Notre pays est l'un des plus riches de la planète. Nous pensons qu'il doit se donner les moyens d'offrir à l'ensemble de nos concitoyens un travail qui leur permette de vivre dignement et d'élever leur famille.

M. Jean-Michel Fourgous. C'est vous qui détenez le record du nombre de chômeurs et de la durée du chômage !

Mme la présidente. Monsieur Fourgous, seule Mme Billard a la parole.

Mme Martine Billard. En réalité, l'article 37 vise à casser le code du travail et aboutira à casser les ETTI. Entre les grosses entreprises de travail temporaire et les petites ETTI qui remettent le pied à l'étrier à un grand nombre de salariés, la concurrence sera telle que, bien évidemment, c'est le mastodonte qui gagnera. Il est rare que David gagne contre Goliath ! C'est pourquoi je propose de supprimer cet article. À défaut, je proposerai des amendements tendant à conserver la spécificité des ETTI. J'attends d'ailleurs des éclaircissements de la part du Gouvernement sur les places respectives des entreprises de travail temporaire traditionnelles et des ETTI.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour soutenir l'amendement n° 259.

M. Jacques Desallangre. L'article 37 est une nouvelle illustration de la recherche obsessionnelle de flexibilité, qui passe par la mise en cause des droits protecteurs du salarié. Que M. Fourgous se transforme un instant en travailleur intérimaire et qu'il aille demander un logement à l'office public d'HLM de son secteur ou un crédit à la banque. Quand il s'entendra répondre : « Vous n'avez pas un travail stable », il comprendra, lui qui est si favorable à la flexibilité, cette situation kafkaïenne qui fait que quand on est flexible, on est démuni.

M. Jean-Michel Fourgous. Mieux vaut rester au chômage ?

M. Jacques Desallangre. Vous avez tort, mon cher collègue, de considérer que lorsqu'on a été salarié toute sa vie, on est d'une race inférieure à celle d'un employeur. J'ai travaillé, dès l'âge de dix-sept ans, pendant trente-cinq ans et ne suis devenu député qu'une fois à la retraite.

M. Jean-Michel Fourgous. Baratin !

M. Jacques Desallangre. Je reçois en ce moment des lettres d'entrepreneurs pour qui, dans la poursuite de la performance de l'entreprise, l'embauche est un risque. Je ne le sais que trop : au bout de vingt-sept ans dans la même entreprise, je me suis fait virer ! J'ai été licencié économique parce que mes patrons avaient fait de mauvais choix. Or je n'ai jamais vu un patron se faire licencier pour incompétence !

M. Jean-Michel Fourgous. Combien d'emplois avez-vous créé ? Quand et où ?

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Je vais essayer de calmer le débat en expliquant pourquoi la commission s'est prononcée contre ces amendements. Pour nous, le travail intérimaire est d'abord le moyen de garder le contact avec le monde du travail et d'éviter l'engrenage de l'exclusion. Ensuite, il constitue un marchepied vers des emplois plus stables. Ainsi, au bout d'un an, 30 % des intérimaires obtiennent un CDI et 10 % un CDD débouchant, dans plus d'un cas sur trois, sur un CDI.

M. Jacques Desallangre. C'est Alice au pays des merveilles !

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Les ETTI continueront d'exister et conserveront leur spécificité, de même que coexistent aujourd'hui parfaitement des contrats à durée déterminée spécifiquement tournés vers l'insertion et des contrats à durée déterminée de droit commun.

Pour achever de vous convaincre, je donnerai encore d'autres chiffres produits par l'institut BVA en octobre 2004 : 82 % des salariés hors intérim considèrent aujourd'hui que le travail temporaire est très utile ou assez utile pour trouver un emploi ; l'entrée en travail temporaire est motivée à 64 % par la volonté de trouver un emploi rapide ; 91 % des salariés intérimaires ont une bonne opinion du travail temporaire.

M. Jacques Desallangre. Ils m'auraient raconté des bêtises ? Ils sont heureux alors ?

M. Daniel Paul. Vive l'intérim !

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cessez donc de jeter l'anathème sur le travail temporaire. Ces chiffres sont suffisamment éloquents pour que la commission ait rejeté l'amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?


M. le ministre délégué aux relations du travail.
Évitons la caricature.

Il me paraît, tout d'abord, utile de rappeler que, sur les 15,5 millions de salariés du privé, 3,3 % sont en intérim et 91 % en CDI. Et Mme la rapporteur a indiqué des chiffres qui montrent que, souvent, le travail en intérim découle d'un choix ou est utilisé comme un tremplin.

J'ajoute que l'article 37 prévoit un véritable encadrement. La mise à disposition d'un salarié d'une entreprise de travail temporaire auprès d'un utilisateur se fera « en application de dispositions législatives ou réglementaires, ou d'un accord de branche étendu ». L'article a pour but de faire bénéficier les salariés temporaires des garanties et protections accordées par le code du travail aux titulaires d'un contrat à durée déterminée.

N'oublions pas non plus que, depuis vingt ans, des conventions prévoient de la formation dans le cadre de l'intérim. Il est donc faux d'affirmer qu'il n'existe aucune possibilité de formation.

Enfin, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire au début du débat, la France défend, dans le cadre de la discussion d'un avant-projet de directive européenne relative à l'intérim, la position la plus ferme, prônant l'égalité de traitement dès le premier jour.

En conclusion, l'intérim est un outil qui favorise l'insertion tout en permettant de faire des choix, encadrés par des règles. Voilà pourquoi le Gouvernement est défavorable à la suppression de l'article 37.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon.

Mme Hélène Mignon. Il faut considérer la question à la fois sous l'angle des employeurs et sous celui des travailleurs.

Les entreprises de travail temporaire jouent, c'est vrai, un rôle dans notre économie. Le travail temporaire est une réalité mais, s'il correspond pour certains à un choix de vie et s'il facilite, dans certains cas, l'accès à l'emploi, il faut bien voir aussi qu'il est un moyen pour de nombreux chefs d'entreprise de contourner le temps trop court de la période d'essai qu'ils ont pourtant accepté dans les conventions collectives.

Dans la réalité, ceux qui profitent de ce que leur offrent les entreprises de travail temporaire sont ceux qui ne sont pas très éloignés du travail ou ceux qui, pour des raisons quelconques, ont fait ce choix. Ce que je crains, c'est qu'il y ait un écrémage qui se fasse automatiquement du fait de l'obligation de résultat auquel sont soumises également ces entreprises. Dès lors, les personnes ayant des difficultés d'insertion, auxquelles cet article est censé s'adresser, devraient pouvoir s'adresser en priorité aux entreprises de travail temporaire d'insertion.

J'ai bien peur que la disposition que vous prévoyez ne creuse encore le fossé séparant ceux qui sont proches de l'insertion et ceux qui en sont éloignés.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Très juste !

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 377 et 259.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 272.

Cet amendement est-il défendu ?

M. Denis Jacquat. Oui, madame la présidente. M. Colombier m'a demandé de le défendre.

L'article 37 autorise le recours à l'intérim dans deux nouveaux cas : pour l'embauche de personnes rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi ou lorsque l'employeur s'engage à assurer un complément de formation professionnelle au salarié.

Si la seconde hypothèse apparaît légitime, on peut s'interroger en revanche sur l'opportunité du premier cas. En effet, le texte ne précise pas les critères qui seront retenus pour déterminer la difficulté des personnes concernées. L'objet de l'amendement de M. Colombier est donc de limiter les possibilités de recours à l'intérim aux cas où l'utilisateur s'engage à assurer un complément de formation professionnelle au salarié.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement car il est contraire à la logique que je viens d'exposer, qui est fondée sur l'orientation du travail temporaire dans la perspective de l'accès à l'emploi durable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je veux insister sur l'inquiétude que suscite cet article chez les ETTI. L'employeur n'est soumis à aucune obligation d'accompagnement ou de formation permettant à ceux qui sont considérés en difficulté de profiter de cet emploi temporaire pour rebondir, comme si l'on considérait que l'emploi était suffisant en soi. Prévoyez au moins une obligation de validation des acquis ! Sinon la personne en difficulté ira d'emploi temporaire en emploi temporaire sans parvenir à franchir le pas nécessaire pour occuper un emploi « standard » !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 272.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 346.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Cet amendement tend à réserver les dispositions prévues à l'article 37 aux seules entreprises de travail temporaire d'insertion.

Une question à ce propos, monsieur le ministre : par ordonnance du 18 décembre 2003, le Gouvernement a supprimé l'exonération de cotisations sociales spécifique aux ETTI à compter du 1er juillet 2005. Il est donc nécessaire de compenser cette suppression par une revalorisation significative de l'aide au poste. Vous aviez annoncé qu'elle serait portée à 51 000 euros dans le projet de loi de finances pour 2005. Je dois avouer que je n'ai pas vérifié, mais les entreprises d'insertion estiment que cette revalorisation, pour être complète, devrait être de 54 000 euros. Il faut savoir, en effet, que, depuis deux ans, de nombreuses entreprises d'insertion ont été obligées de mettre la clé sous la porte faute de financement. Comme nous sommes tous d'accord pour reconnaître leur utilité en matière d'insertion, il serait peut-être utile de leur donner un coup de pouce. Et cela créerait des emplois.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable.

Je confirme à Mme Billard que l'aide dont elle a parlé est passée de 24 000 euros à 51 000 euros dans le projet de loi de finances pour 2005. Il y a donc bien un effort particulier en faveur des entreprises d'insertion.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 346.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 600.

La parole est à Mme Hélène Mignon, pour le soutenir.

Mme Hélène Mignon. Le 1° de l'article 37 aura pour effet d'entraîner une nouvelle dérégulation du droit du travail, puisqu'il permet la conclusion de contrats précaires pour l'exécution de tâches permanentes relevant de l'activité normale de l'entreprise. De plus, comme je l'ai déjà indiqué, aucune précision sur la nature des difficultés des personnes n'étant apportée, on peut légitimement craindre que certains employeurs abusent de la situation de faiblesse de ces salariés.

On se demande donc à quel public s'adressent ces dispositions et comment on aidera les personnes concernées à reprendre pied. C'est pourquoi l'amendement tend à supprimer ce paragraphe.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable, pour les raisons que nous avons déjà exposées.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Je reprends à mon compte l'argumentation de Mme Mignon. C'est toujours la même volonté, plus ou moins masquée, qui est à l'œuvre dans tous ces articles.

Il est vrai que l'article 37 entraînera une dérégulation du droit du travail. On recourra davantage aux accords entre représentants des employeurs et ceux des salariés qu'à la loi, alors que les relations employeurs-employés sont devenues plus difficiles.

Qu'il favorise la conclusion de contrats précaires pour l'exécution de tâches permanentes, cela saute également aux yeux.

Le fait, enfin, qu'il n'y ait aucune précision sur la nature des difficultés des personnes laisse cette définition à la libre appréciation de celui qui embauche, ce qui me laisse craindre que cela n'aboutisse à placer certains en situation d'infériorité et d'autres en situation de supériorité. Ce n'est pas un rapport satisfaisant.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 600.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 443.

La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Fourgous. Cet amendement tend à simplifier les recours à l'intérim et à apporter un peu de souplesse, notamment entre les périodes de formation et les périodes de travail.

Il faut bien comprendre que l'on ne crée pas des emplois à coup de déclarations incantatoires contre l'entreprise. Il faut la comprendre et l'aborder dans un rapport non de force mais d'intelligence. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre. Cette remarque est excellente ! C'est exactement ce que disait Messier !

M. Jean-Michel Fourgous. Ne critiquez pas sans connaître. Savez-vous que, après six mois de chômage, il y a une augmentation de près de 40 % des divorces, un développement de l'éthylisme, des drames et des problèmes de santé divers ?

Mme Martine Billard. Quel rapport ? Venez-en à votre amendement !

M. Jean-Michel Fourgous. Ne voyez-vous donc pas l'intérêt de l'intérim ? Ne peut-on sortir des images caricaturales qui en sont données ainsi que de l'entreprise, et des attaques incessantes qui leur sont portées ?

L'intérim est un moyen pour les jeunes d'entrer dans le monde du travail : ils sont 100 000 chaque année à accéder à leur premier emploi par le biais du travail temporaire.

Il faut sortir des archaïsmes idéologiques que certains expriment ici. Nous sommes l'un des rares pays où une partie de la classe politique puisse tenir ce genre de propos. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Martine Billard. Vous allez les entendre encore pendant un certain temps !

M. Jean-Michel Fourgous. Pour résoudre le chômage, il faut lever les freins à l'embauche, qui sont plus idéologiques qu'autre chose. Il y va de l'intérêt de nos jeunes et du pays tout entier.

En même temps, il faut arrêter d'obliger les acteurs économiques à contourner la loi comme on le fait actuellement. Il faut voir la réalité telle qu'elle est et ne pas en rester à une opposition riches-pauvres, patrons-salariés.

Mme Hélène Mignon et M. Jacques Desallangre. Mais elle existe !

M. Jean-Michel Fourgous. Rappelez-vous que 80 % des patrons ont été des salariés. L'opposition entre les deux est proprement une atteinte à l'intelligence.

M. Jacques Desallangre. Nous avons dit qu'ils étaient différents.

M. Jean-Michel Fourgous. Cela étant dit,...

Mme la présidente. Oui, venez-en à la défense de votre amendement, monsieur Fourgous !

M. Jean-Michel Fourgous. ...mon amendement tend à simplifier les choses. Aucune piste ne doit être écartée. Ce qui est en jeu, c'est l'emploi des Français, qui souffrent d'un chômage record en Europe.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement.

Il y est proposé que l'exercice de l'activité professionnelle réalisée par un intérimaire titulaire d'un contrat de professionnalisation constitue un nouveau cas de recours au travail temporaire. Le contrat de professionnalisation ayant été créé par la loi du 4 mai 2004, l'adaptation proposée paraît prématurée, puisque le temps a manqué pour établir un bilan.

Je tiens également à rappeler à l'Assemblée que les entreprises de travail temporaire sont soumises à une réglementation très précise. En particulier, leurs obligations en matière de formation sont supérieures à celles d'une entreprise classique : 0,30 % contre 0,20 %.

Les entreprises de travail temporaire ont tellement évolué à la fois dans la manière d'envoyer leurs salariés dans une entreprise et dans leur vie même d'entreprise qu'elles n'ont plus rien de comparables avec celles qui existaient il y a encore dix ans.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Votre amendement, monsieur Fourgous, nous apparaît restrictif au regard des dispositions prévues dans le projet et limiterait le champ d'application de l'article aux seuls contrats de professionnalisation alors qu'il vise toutes les situations où un complément de formation est assuré aux salariés.

C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions que vous puissiez retirer votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.

M. Jean-Michel Fourgous. En attendant qu'un bilan des contrats de professionnalisation soit effectué, je me range à l'avis de la commission et du Gouvernement et retire mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 443 est retiré.

Je mets aux voix l'article 37.

(L'article 37 est adopté.)

Après l'article 37

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 37.

La parole est à Mme Hélène Mignon, pour soutenir l'amendement n° 598 rectifié.

Mme Hélène Mignon. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 598 rectifié.

(L'amendement est adopté.)


Mme la présidente.
Je suis saisie d'un amendement n ° 599.

La parole est à Mme Hélène Mignon, pour le défendre.

Mme Hélène Mignon. L'amendement n° 599 est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n°599.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n ° 597.

La parole est à Mme Hélène Mignon, pour le défendre.

Mme Hélène Mignon. Il est judicieux que le Fonds départemental pour l'insertion soit utilisé prioritairement pour des actions d'insertion par l'activité économique, en tenant compte des stratégies territoriales de l'emploi et des bassins d'emploi en particulier.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement a été repoussé.

Cette précision n'est pas apparue nécessaire, puisque le fonds qui existe actuellement peut déjà financer ce genre d'activités.

La rédaction retenue ne nous paraît pas opportune. Aux termes du premier alinéa, le fonds serait « destiné exclusivement aux organismes » ; quant au deuxième alinéa, il indique :   « Le fonds finance prioritairement des projets présentés par ces organismes... ». Ces expressions ne nous semblent pas avoir leur place dans ce texte.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Madame Mignon, l'utilisation du Fonds départemental pour l'insertion fait systématiquement l'objet d'un avis du conseil départemental d'insertion par l'activité économique.

À ce titre, il doit bien sûr prendre en compte les orientations stratégiques programmées dans le cadre du plan départemental d'insertion.

Sur le fond, cet amendement n'apporte pas de modification relative au FDI et vise à remonter au niveau législatif des dispositions qui sont, en fait, d'ordre réglementaire.

J'apprécierais que vous le retiriez. Faute de quoi, je serais contrainte de demande à l'Assemblée de le repousser.

Mme Hélène Mignon. Je retire l'amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 597 est retiré.

L'amendement n° 800 n'est pas défendu.

Article 37 bis

Mme la présidente. Sur l'article 37 bis, je suis saisie d'un amendement n° 885.

La parole est à Mme Françoise de Panafieu, pour le défendre.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il s'agit d'un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 885.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 37 bis, modifié par l'amendement n° 885.

(L'article 37 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 37 bis

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 136, portant article additionnel après l'article 37 bis.

La parole est à M. Denis Jacquat, pour le défendre.

M. Denis Jacquat, vice-président de la commission des affaires culturelles. Je présente cet amendement au nom de Mme de Panafieu, mais surtout de M. Door et de plusieurs collègues de la commission des affaires culturelles.

Les villages d'enfants sont des structures sociales autorisées par le président du conseil général pour prendre en charge des enfants relevant de mesures administratives ou judiciaires de protection de l'enfance.

Nés en France dans les années 50, à partir d'une première expérience réalisée en Autriche en 1946, les villages d'enfants sont constitués de maisons dans lesquelles sont accueillies des fratries d'enfants élevés et pris en charge au quotidien par une éducatrice familiale assurant une responsabilité permanente auprès des enfants. Un directeur et une équipe technique pluridisciplinaire interviennent également en appui de l'éducatrice familiale.

Deux associations gèrent en France aujourd'hui des villages d'enfants - SOS villages d'enfants et Le mouvement pour les villages d'enfants -, associations qui existent dans seize départements. Ces structures ont une place particulière dans les dispositifs d'accueil relevant de la protection de l'enfance, car elles permettent la prise en charge de grandes fratries, en évitant la séparation des frères et sœurs. Elles offrent une prise en charge de type familial grâce à l'engagement dans la durée des éducatrices familiales auprès des enfants, qu'elles élèvent parfois jusqu'à leur majorité.

Afin de consolider le fonctionnement de ces structures, il est nécessaire aujourd'hui d'inscrire le travail effectué par les éducatrices familiales travaillant dans les villages d'enfants dans un cadre juridique, ce qui n'est pas le cas actuellement. Les dispositions prévues par cet amendement devraient mettre un terme aux nombreux conflits, élevés le plus souvent devant les tribunaux des prud'hommes, entre salariés et employeurs, faute d'un cadre juridique approprié, et permettre ainsi de pérenniser ces formes d'accueil qui répondent, de façon adaptée, aux besoins de certains enfants pris en charge dans le cadre de la protection de l'enfance.

À cette fin, cet amendement définit un dispositif de décompte de la durée du travail spécifique et adapté à la fonction exercée par les éducateurs et aides familiaux qui les remplacent certaines semaines, selon des modalités de présence identiques auprès des enfants. Cette durée est définie en nombre de journées de travail sur l'année, le nombre de journées, fixé par voie de convention collective ou d'accord d'entreprise, ne devant pas dépasser un plafond annuel de 258 jours.

Ce dispositif spécifique, en tant qu'il permet de déroger notamment au repos quotidien et hebdomadaire, est introduit au sein du livre VII du code du travail réservé à certaines professions particulières.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Nous connaissons tous l'importance des villages d'enfants. Ils permettent la garde commune de frères et sœurs, évitant la division de fratries.

Il est donc important de réaménager le temps de travail des éducateurs et des aides familiaux. C'est la raison pour laquelle la commission a adopté cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Le Gouvernement partage l'analyse qui est faite de ce problème difficile.

Avis favorable à l'amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n°136.

(L'amendement est adopté.)

Article 37 ter

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements nos 67, 350 et 577, visant à supprimer l'article 37 ter.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour défendre l'amendement n° 67.

M. Jacques Desallangre. L'article 37 ter est bien ce que l'on peut appeler un cavalier législatif, car son lien avec la loi de programmation pour la cohésion sociale reste à démontrer. Je souhaite bien du courage à celui qui voudrait s'y aventurer.

Cet article introduit par la majorité au Sénat vise à revenir sur la législation du travail de nuit dans certaines professions : la télévision, la radio, certains métiers du spectacle, mais aussi la presse dont l'un des magnats est également sénateur - vous l'avez reconnu. Cet amendement a été voté en sa présence sans qu'il proteste - on peut donc considérer qu'il était consentant.

Cet article vise à raccourcir la durée selon laquelle le travail est considéré comme travail de nuit.

Aujourd'hui, le travail de nuit se situe entre vingt et une heures et sept heures du matin. La modification propose de ramener l'intervalle entre vingt-quatre heures et sept heures, sauf accord définissant une autre période. En tout état de cause, cette période déterminée par accord ne pourra pas dépasser vingt-quatre heures - cinq heures.

En d'autres termes, si l'on rapproche cette modification législative de la réalité de la vie de l'entreprise, les pressions seront énormes et la notion de travail de nuit sera réduite au créneau minuit - cinq heures !

C'est ainsi qu'on obtient une diminution des garanties pour les salariés comme des droits à compensation. De la sorte, les travailleurs de nuit bénéficieront a minima de contreparties, au titre des périodes de nuit pendant lesquelles ils sont occupés, sous forme de repos compensateurs et, le cas échéant, sous forme de compensations salariales.

C'est un nouveau recul social, au sein d'un texte censé encore une fois incarner le visage social du Gouvernement. C'est vraiment Janus.

Au Sénat, le ministre du travail avait clairement affiché, non pas son rejet de l'idée, mais l'avis défavorable que lui inspirait l'amendement. Il semblerait qu'il n'ait pas mis assez de conviction dans ses propos, car sa majorité ne l'a pas suivi. Sans doute parce que les principaux intéressés par cet article étaient également les sénateurs présents au moment du vote.

Nous vous donnons, monsieur le ministre, une seconde chance, en déposant cet amendement de suppression de l'article 37 ter.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour défendre l'amendement n° 350.

Mme Martine Billard. Je voudrais d'abord faire une remarque de méthode.

Il y a un an, le ministre s'était engagé à ne pas faire de modifications fondamentales du code du travail sans négociations avec les partenaires sociaux. Pourtant l'article 37 ter se situe bien dans le cadre d'une modification du code du travail, sans qu'aucune négociation se soit préalablement déroulée et sans qu'ait été recueilli l'avis des partenaires sociaux. Cela signifie-t-il que la parole du précédent ministre n'engage le Gouvernement que tant qu'il conserve son poste et que son successeur n'est nullement tenu de respecter les engagements pris ? C'est là le premier problème.

Sur le fond, aux arguments de notre collègue Jacques Desallangre, j'ajouterai un point : la durée du travail de nuit pourra être modifiée par accord de branche, d'entreprise - ou d'établissement ! On ne peut pas accepter une telle dérégulation quand il s'agit de la santé des personnes. Cela exigerait au moins une négociation préalable entre partenaires sociaux, et j'espère, monsieur le ministre, que, comme au Sénat, vous allez manifester votre désaccord avec cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon, pour défendre l'amendement n ° 577.

Mme Hélène Mignon. Lorsque nous avons accepté naguère le travail de nuit des salariés, nous avons auditionnés des membres de syndicats, des salariés, des chefs d'entreprise, mais aussi des professeurs de médecine et de physiologie. Et nous avons fixé les horaires inscrits dans la loi, en tenant compte de ce qui pouvait être nocif pour la santé. Nous avons retenu des plages horaires les plus susceptibles de donner lieu à une baisse de l'attention, facteur d'accidents. C'est pourquoi nous souhaitons, monsieur le ministre, que cet article soit supprimé.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements de suppression ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission les a rejetés. L'article prend en compte une exigence de souplesse au regard de la spécificité de certains métiers, notamment du secteur culturel.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Le Gouvernement a le même avis qu'au Sénat et s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Nous avions souhaité la voie de la négociation collective, mais cela ne signifie pas qu'il faille figer les choses.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Quand s'est posée, il y a quelques années, la question du travail de nuit à la suite d'une directive européenne sur l'égalité des hommes et des femmes, le groupe communiste avait dit qu'il existait deux façons de concevoir cette égalité : soit d'obliger les femmes à travailler la nuit, soit l'interdire aux hommes, sauf exceptions, évidemment.

C'est malheureusement la mauvaise égalité qui a été retenue par la majorité de l'époque.

Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous êtes en train de changer beaucoup de choses : vous changez même la durée de la nuit. C'est toujours l'été désormais dans le code du travail  (Sourires) : toute l'année le soleil se couche à minuit et se lève à cinq heures !

Nous souhaitons bien évidemment la suppression de l'article 37 ter.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 67, 350 et 577.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 734 et 996, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 734 fait l'objet d'un sous-amendement n° 996.

La parole est à M. Alain Joyandet, pour défendre l'amendement n° 734.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le ministre, je souhaite obtenir quelques précisions du Gouvernement.

La presse écrite d'information générale quotidienne rencontre beaucoup de difficultés. À la suite du texte voté au Sénat, nous avons rédigé un amendement visant à exclure un certain nombre d'activités des dispositions relatives au travail de nuit - dispositions qui compliquent beaucoup les activités de la presse.


J'envisageais de retirer mon amendement n° 734 au profit du 510 rectifié de M. Hamelin. Mais comme je vois que mon amendement a été sous-amendé par le Gouvernement, je ne le retire pas. Cela dit, je souhaite que le Gouvernement nous explique comment il voit les choses, car du point de vue technique, il y a quelque chose qui m'échappe.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 734 et présenter le sous-amendement n° 996.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Il s'agit de supprimer le II de l'amendement n° 734.

La plage horaire de la période de nuit a été portée à vingt-quatre - sept heures dans le secteur de la presse, comme ceux du spectacle, du cinéma, de l'audiovisuel et des discothèques. L'amendement n° 734 vise à exclure la distribution de presse de ce nouveau régime au motif qu'il ne serait pas adapté aux spécificités de ce secteur.

Par cohérence, si la distribution de presse est exclue de la nouvelle plage horaire instituée à l'article 37 ter, elle doit l'être également du nouveau régime de contrepartie lié à cette nouvelle plage.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 734, sous réserve de l'adoption de son sous-amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour présenter l'amendement n° 510 rectifié.

M. Jean-Michel Fourgous. Je vais corroborer les commentaires de M. Joyandet et de M. le ministre.

Les entreprises de presse quotidienne connaissent de graves difficultés, et la nouvelle plage horaire touche particulièrement la période de la distribution, qui a lieu tôt le matin. Si on la soumet à ce nouveau régime, on annule l'effet des aides qu'on lui consent par ailleurs. Il faut donc exclure la distribution.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement et sur le sous-amendement du Gouvernement ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Le sous-amendement n° 996 du Gouvernement n'a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j'y suis favorable, ainsi qu'à l'amendement n° 734 ainsi sous-amendé.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Joyandet.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. J'ai bien compris que le Gouvernement considère qu'on ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre.

Je lui fais confiance, mais je me permets de lui faire remarquer que la presse et notamment les syndicats de la presse quotidienne régionale m'ont fait savoir - je suis co-animateur du groupe d'études sur la presse dans notre assemblée - qu'ils avaient une interprétation différente sur les conséquences de la suppression du II de mon amendement, suppression qui, selon eux, priverait la presse d'un certain nombre d'avantages professionnels.

Cela dit, je suis d'accord pour me rallier au sous-amendement du Gouvernement à condition que, d'ici à la CMP, on examine ce qu'il en est et qu'on revoie les choses si nécessaire.

M. le ministre délégué aux relations du travail. C'est d'accord !

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Le groupe UDF soutient les deux amendements. En revanche, il me semble - mais je ne suis pas un spécialiste de ces questions - que le sous-amendement du Gouvernement vise à rendre obligatoire la compensation pour travail de nuit. Or ce n'est pas au Gouvernement de fixer ce qui relève de la convention collective et des accords entre les salariés et l'employeur. J'aimerais donc avoir des explications complémentaires pour pouvoir me prononcer.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.

M. Jean-Michel Fourgous. La vraie question porte sur les tournées de portage qui s'effectuent de cinq heures à sept heures. Modifie-t-on la législation appliquée à ces deux heures ? Si tel est le cas, ce sera coûteux.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Joyandet.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. Ce débat devient tellement technique, qu'il vaudrait mieux le reporter.

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. En effet, réglons cela en CMP.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. Les patrons de presse s'inquiètent de la suppression du II de l'amendement pour tout ce qui concerne les activités qui sont visées au troisième alinéa de l'article L. 213-1-1 du code du travail et pour lesquelles, lorsque la durée effective du travail de nuit est inférieure à la durée légale, les contreparties visées aux deux alinéas précédents ne seront pas obligatoirement données sous forme de repos compensateur.

Je suggère que nous en restions là, afin de ne pas prolonger les débats, et de revoir ces aspects techniques ultérieurement.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Oui !

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. Pour l'instant, nous nous en tiendrons à l'avis de la commission sur le sous-amendement et l'amendement n° 734, dont l'adoption fera tomber l'amendement n° 510 rectifié. S'il y a un problème, nous y reviendrons en CMP.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Tout à fait !

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 996.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 734, modifié par le sous-amendement n° 996.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 510 rectifié tombe.

Je mets aux voix l'article 37 ter, modifié par l'amendement n° 734 modifié.

(L'article 37 ter, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 37 ter

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 37 ter.

La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour soutenir l'amendement n° 737.

M. Jean-Michel Fourgous. Cet amendement a pour objet de clarifier les règles applicables aux temps de trajet siège chantier dans le bâtiment, conformément aux usages et aux conventions collectives de cette profession. En effet, temps de travail et durée du trajet, ce n'est pas la même chose. Il s'agit donc de savoir quand commence le décompte du temps de travail : quand le salarié arrive au siège de l'entreprise ou sur le chantier ?

Jusqu'aux lois Aubry, le temps de travail effectif était celui effectué sur le chantier. Depuis les 35 heures, la gestion des RTT a rendu les choses très difficiles. Elles sont en effet incompatibles avec la charge de travail et la pénurie de main-d'œuvre que subit actuellement le bâtiment et qui commence à devenir préoccupante. Cela a fait exploser les heures supplémentaires, donc les charges et les factures, et a entraîné nombre d'entreprises dans la spirale de l'échec.

Le secteur du bâtiment est moins bien traité que les autres secteurs d'activité. De plus, les contentieux sont nombreux, et les chefs d'entreprise s'irritent de devoir passer un quart de leur temps avec les avocats.

Mme Hélène Mignon. À qui la faute ?

M. Jean-Michel Fourgous. Un entrepreneur qui crée de l'emploi n'a pas à être sans cesse incriminé par la loi. Il faut donc prévenir une judiciarisation excessive qui menace l'existence de nombreuses petites entreprises du bâtiment, et donc des milliers d'emplois dans ce secteur. Celles-ci attendent, monsieur le ministre, un signe de notre part.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement non parce qu'il n'est pas intéressant, mais parce qu'elle lui a préféré l'amendement n° 200 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Même avis que la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Et on continue à assister à un détricotage, à un démantèlement en règle du contrat de travail et de la protection du salarié !

Ici, on nous dit que, pendant qu'il est dans le véhicule entre le siège et le chantier, l'employé ne fait rien, donc il n'est pas question de le payer.

M. Jean-Michel Fourgous. Il a une prime !

M. Jacques Desallangre. Mais il est au travail. Et si vous considérez que ce n'est pas le cas, que se passera-t-il en cas d'accident ? N'étant plus au travail, il ne sera plus protégé !

M. Jean-Michel Fourgous. Il est assuré ! Il a des primes !

M. Jacques Desallangre. Bien sûr, que quelqu'un passe une demi-heure dans un véhicule inconfortable pour aller travailler, cela vous enrage. Il faudrait peut-être même lui donner quelque chose à faire pendant le trajet !

M. Jean-Michel Fourgous. Caricature ! Incompétence !

M. Jacques Desallangre. Il est proprement scandaleux d'oser faire une telle proposition dans cette enceinte !

M. Hervé Novelli. C'est du Zola !

M. Hervé Novelli. C'est vous qui êtes scandaleux !

Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 737...

M. Jean-Michel Fourgous. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 737 est retiré.

Je suis saisie d'un amendement n° 200 rectifié.

La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour le soutenir.

M. Jean-Michel Fourgous. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Au Sénat, nous avions demandé du temps pour procéder à une évaluation. Maintenant que c'est fait, le Gouvernement est favorable à la mesure proposée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Encore un amendement qui rentre par la fenêtre et qui n'a pas grand-chose à voir avec la cohésion sociale.

Détricotons cet amendement, chers collègues.

« Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif. » À l'évidence, le salarié qui se rend chez un client ne travaille pas pour l'entreprise pendant la durée de son déplacement.

Je poursuis : « Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail,... ». Dans le secteur de l'informatique, que je connais bien pour y avoir travaillé, on peut être amené à se déplacer dans la journée pour aller voir un client. Qu'est-ce que cela a à voir avec le temps de déplacement entre le domicile et l'entreprise, quand il faut aller d'un client à l'autre ? Mais il fallait bien trouver un argument pour justifier cet amendement.

Admettons que le salarié mette une demi-heure entre son domicile et son lieu de travail habituel. Dans ce cas, notre collègue Fourgous nous dit qu'il ne s'agit plus de temps de travail effectif si dans la journée, le salarié va du siège de l'entreprise chez un client, et que cela prenne une demi-heure, soit la même durée que celle entre son domicile et le siège de l'entreprise. Il devra donc une demi-heure de temps de travail à son employeur. Cela signifie que l'on allonge la journée de travail. C'est irrecevable, et cela introduit une inégalité entre les salariés. Certains mettent une heure et demie de trajet pour se rendre de leur domicile à leur lieu de travail, d'autres un quart d'heure. En cas de déplacement long pour aller chez un client, ils seront traités différemment. C'est incohérent. Monsieur le ministre, je ne comprends pas que vous acceptiez un tel amendement !


Prenons le cas d'un salarié dont le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail est d'une demi-heure, ce qui n'est même pas la moyenne francilienne, admettons qu'il ait à se rendre quatre fois dans la semaine chez un client pour un temps de trajet d'une demi-heure à chaque fois : ce seront deux heures de temps de travail qu'il devra à son chef d'entreprise. Si la durée de son déplacement professionnel est cette fois-ci d'une heure, soit une demi-heure de plus que le temps normal de trajet, son chef d'entreprise lui devra une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos. Mais notre collègue est très humain et précise qu'il ne saurait y avoir de perte de salaire.

Monsieur le ministre, il aurait été plus sage de donner un avis défavorable à cet amendement. Quand il faudra appliquer la disposition qu'il propose, vous verrez quel travail cela donnera aux juges et aux tribunaux prud'homaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je continue la lecture de l'amendement : si le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail « dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière, déterminée par convention ou accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur... ».

M. Hervé Novelli. « Prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel » !

M. Daniel Paul. Vous êtes en train de détricoter le droit du travail, avec autant de patience que Pénélope,...

M. Christian Vanneste. Nous attendons que le travail revienne, comme Ulysse !

M. Daniel Paul. ...mais en vous contentant de détruire.

Ces questions ne relèveront désormais plus du droit du travail mais d'une convention interne. Autrement dit, c'est le droit patronal qui va s'instaurer dans les entreprises, au détriment des salariés.

M. Hervé Novelli. Quelle confiance dans les syndicats !

M. Daniel Paul. Nous sommes donc évidemment défavorable à l'amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.

M. Jean-Michel Fourgous. Madame Billard, considérer le temps de déplacement comme du temps de travail effectif revient à faire varier le temps de travail en fonction du lieu du domicile du salarié. Imaginez les effets d'une telle conception !

Mme Martine Billard. Retirez donc votre amendement !

M. Jean-Michel Fourgous. Le législateur a déjà exclu les temps de pause et d'habillage du temps de travail effectif. La disposition proposée est donc tout à fait cohérente.

Sinon comment traiter le cas du salarié devant faire l'aller-retour en Australie dans la semaine pour des raisons professionnelles ? Je dis cela en plaisantant, mais j'aimerais que vous sortiez de la logique de l'affrontement permanent entre patrons et salariés.

Mme Martine Billard. La disposition proposée est inapplicable !

M. Jean-Michel Fourgous. Je vous rappelle qu'il s'agit de créer des emplois et de sortir de leur malheur des gens qui souffrent.

Soyons compétents et intelligents.

Mme Martine Billard. Vous ne faites certainement pas preuve de compétence avec cet amendement qui ne tient pas la route !

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon.

Mme Hélène Mignon. Cet amendement est en effet inapplicable. Nous sommes tous attachés à la cohésion sociale, sans laquelle notre république serait mise en danger. Mais avec ce plan, vous semblez tout faire pour qu'elle ne puisse pas être effective. Cessez d'opposer en permanence ceux qui voudraient faire travailler les gens à ceux qui voudraient ne pas les faire travailler ! C'est une erreur d'analyse fondamentale. Nous souhaitons tous que ceux qui le veulent et qui le peuvent aient un emploi, afin que soit reconnue leur dignité, dans la société comme dans leur famille. Or, c'est cette dignité même qui est remise en cause par toute une série d'amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 200 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme Martine Billard. Ce sera inapplicable !

M. Jean-Michel Fourgous. Les 35 heures, on les applique bien ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. L'amendement n° 283 rectifié n'est pas défendu.

Article 37 quater

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 378.

La parole est à Mme Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. La disposition prévue par cet amendement apparaît encore plus utile pour les salariés, après le vote de l'amendement n° 200 rectifié.

L'amendement du Sénat, à l'origine de l'article 37 quater, me paraît intéressant et je l'aurais voté. Je suis tout à fait favorable à ce que les salariés soient formés pour mieux comprendre la gestion de l'entreprise et les difficultés auxquelles elle est confrontée. Mais dans le même temps, ils doivent aussi intégrer une connaissance du droit du travail : c'est ce que je propose ici, pour respecter un parallélisme des formes. D'ailleurs M. Fourgous devrait voter mon amendement, lui qui affirme être contre l'affrontement salariés-patrons.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. L'avis de la commission est défavorable. Il convient de ne pas surcharger une liste d'obligations, déjà longue, dans le cadre des négociations triennales. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Par ailleurs, la formation au droit du travail constitue plutôt une prérogative des partenaires sociaux, qu'il importe de préserver en tant que telle.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Madame la présidente, je veux d'abord préciser que, pour le Gouvernement, l'amendement n° 200 rectifié concerne avant tout les temps de trajet inhabituels, comme les déplacements aériens de longue durée.

Mme Martine Billard. Ce n'est pas ce qui est écrit !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Par accord collectif, il s'agira de fixer un mode de calcul des temps de trajet afin que les choses soient claires et qu'il n'y ait pas d'inégalités entre les salariés suivant leur lieu de résidence.

S'agissant de l'amendement de Mme Billard, il est en effet souhaitable que chaque salarié puisse se former au droit du travail pour mieux comprendre les droits et devoirs respectifs des employeurs et des salariés. C'est du reste pourquoi la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social permet aux employeurs de proposer de telles formations au sein d'un plan de formation et d'inciter les salariés à s'y engager dans le cadre de la mise en œuvre de leur droit individuel à la formation. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à l'adoption de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 378.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 37 quater.

(L'article 37 quater est adopté.)

Après l'article 37 quater

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 37 quater.

La parole est à Mme Hélène Mignon, pour soutenir l'amendement n° 865.

Mme Hélène Mignon. Cet amendement vise à ce que les salariés des entreprises soient obligatoirement représentés dans les conseils d'administration par des administrateurs élus par les salariés. Cela contribuera à établir de bonnes relations entre les salariés et les employeurs.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement vise à rendre obligatoire dans les conseils d'administration des sociétés anonymes la présence d'administrateurs élus, soit par le personnel de la société, soit par le personnel de la société et celui de ses filiales directes ou indirectes dont le siège social est sur le territoire français. Or cette disposition ne rentre pas dans le cadre de cette discussion.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Une modification portant sur les règles constitutives des sociétés commerciales n'a pas sa place dans un tel projet de loi. En outre, l'article L. 225-27 du code de commerce laisse ouverte une telle faculté. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 865.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 69.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. Pour lutter contre les licenciements abusifs et infondés, il convient de responsabiliser davantage les chefs d'entreprise et de rendre la sanction dissuasive.

Actuellement, à de rares exceptions comme celle du licenciement d'une salariée enceinte, le code du travail ne prévoit pas la nullité pour les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse. Le plus souvent, la condamnation de l'employeur ouvre droit à réparation mais n'empêche pas la suppression d'emploi. Depuis plusieurs années, la Cour de cassation a voulu combler cette lacune et a consacré le recours à la sanction de nullité dans sa jurisprudence pour généraliser le droit à réintégration ou tout au moins garantir une indemnisation forfaitaire conséquente. Pour éviter que la justification du licenciement par l'employeur soit une simple formalité, il importe donc lui donner de la consistance.

Notre amendement vise à élargir le champ des articles du projet de loi au-delà des entreprises disposant d'un comité d'entreprise - qui ne représentent guère plus de 20 % des licenciements économiques - afin de couvrir l'ensemble des licenciements, collectifs comme individuels, quels qu'en soient les motifs. Cela permettrait de réguler le recours intempestif aux licenciements pour motif personnel qui, malheureusement, masquent bien souvent un marchandage individuel pour échapper aux dispositions plus protectrices du licenciement économique.

Une étude de la DARES indique que cette forme de rupture du contrat de travail a, bien étrangement, augmenté de 26 % entre 1998 et 2001, au cours d'une période de conjoncture pourtant favorable. Parmi les explications les plus crédibles à cette poussée soudaine, la DARES met l'accent sur « une logique d'évitement des plans sociaux », « le licenciement pour motif personnel étant l'un des moyens de réduire ou de recomposer la main d'œuvre dans le cadre des restructurations ». La récente condamnation du groupe Alcatel pour avoir négocié frauduleusement 180 licenciements personnels dans le cadre d'un plan d'arrêt d'activité sur son site de Conflans-Sainte-Honorine témoigne de cette dérive.

Enfin, monsieur le ministre, vous qui préparez une réforme de la participation et de l'actionnariat salarié, permettez-moi de vous rappeler les propos de l'un de vos prédécesseurs au ministère du travail, Georges Gorse, qui défendait dans cet hémicycle la loi du 13 juillet 1973, celle-là même qui a instauré l'obligation de cause réelle et sérieuse en cas de licenciement, en ces termes : « Comment veut-on que le salarié accepte de se considérer comme participant et de se comporter comme tel si, alors qu'on lui promet un intéressement aux bénéfices et qu'on le fait même accéder au titre d'actionnaire, il a conscience d'être à chaque instant à la merci d'une décision unilatérale, incontrôlée ou incontrôlable ? ».

Je vous invite, en acceptant cet amendement, à vous inscrire dans le sillon tracé par ce ministre clairvoyant de Georges Pompidou. Depuis 1973, l'insécurité sociale et le chômage se sont accrus, et l'heure nous semble venue de consolider le garde-fou institué à cette époque.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement ?


M. Dominique Dord
,
rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Cet amendement constitue en quelque sorte une transition entre ce que nous discutons depuis quelques heures et l'article 37-1 qui traite du licenciement économique. Là, il s'agit de toutes les formes de licenciements.

La commission a rejeté cet amendement parce qu'il étendrait considérablement le champ de la nullité du licenciement avec les conséquences que vous avez évoquées, notamment le droit à réintégration.

La définition du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse est maintenant fixée depuis 1986. Lorsque vous étiez au pouvoir, vous n'avez pas jugé utile de revenir dessus, même pas dans la loi de modernisation sociale qui a pourtant remis en cause toute une série de dispositions. Il nous semble qu'aujourd'hui la loi fait bien les choses. La jurisprudence a un réel pouvoir d'appréciation et garantit une indemnité minimale au salarié.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Comme M. le rapporteur, nous trouvons que les dispositions adoptées depuis 1986 sont équilibrées et nous ne souhaitons pas les voir modifiées. Nous sommes donc défavorables à l'amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 69.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 73.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le soutenir.

M. Jacques Desallangre. Cet amendement, qui traite de la responsabilisation des entreprises donneuses d'ordre, entend apporter une réponse pragmatique au problème des entreprises sous-traitantes placées dans un état de dépendance économique par rapport aux entreprises donneuses d'ordre, avec souvent comme conséquence de profonds désordres et des mises en faillite des entreprises sous-traitantes.

Actuellement, 66 % des salariés travaillent dans une très petite entreprise ou dans une petite et moyenne entreprise. Mais, pour reprendre les conclusions de l'économiste Philippe Moati, cette déconcentration économique masque en réalité un renforcement de la concentration financière qui profite aux groupes multinationaux. Car, aujourd'hui, un salarié sur deux travaille dans une entreprise contrôlée par un groupe, et la part des PME contrôlées par un groupe représente 42 % de l'ensemble des salariés des PME.

De fait, le recours massif à la sous-traitance permet à de grandes entreprises ou à des groupes d'externaliser des activités, tout en conservant leur pouvoir de décision sinon de négociation.

Au-delà des gains escomptés en flexibilité et en abaissement des coûts salariaux, les grandes firmes externalisent ainsi très souvent aussi leurs suppressions d'emploi. Car le passage en sous-traitance leur permet de s'exonérer de nombre de règles du code du travail et plus particulièrement de leurs obligations en matière de licenciement économique, qu'il s'agisse de la justification du licenciement ou bien des conséquences en matière d'indemnisation ou d'obligation de reclassement.

Les licenciements économiques réalisés dans ces conditions échappent en effet souvent à un véritable contrôle du motif, le champ d'appréciation étant limité à l'entreprise sous-traitante. En outre, ils ne permettent pas la mise en œuvre de procédures d'information et de consultation conséquentes et limitent la recherche de solutions de reclassement efficaces, les capacités du sous-traitant étant généralement réduites.

Le dispositif que nous proposons ouvre la possibilité au dirigeant de l'entreprise sous-traitante comme aux représentants du personnel de cette dernière de recourir à un cadre d'appréciation et de débat commun, responsabilisant l'entreprise dominante. En clair, le comité d'entreprise de la firme donneuse d'ordre devrait être saisi de tout projet de nature à affecter l'emploi dans l'entreprise sous-traitante et qui résulterait d'une décision de la première.

Le comité d'entreprise se verrait alors adjoindre, avec voix délibérative, les représentants élus de l'entreprise sous-traitante. Le comité ainsi élargi examinerait non seulement les fondements économiques mais également un projet de plan social élaboré conjointement par les directions des deux entreprises. Il disposerait, en cas d'insuffisance du plan social, des mêmes attributions qu'un comité « classique ».

Cette procédure s'inscrit dans l'avènement progressif dans notre droit de la notion d'unité économique et sociale. À l'origine, le législateur l'a introduite dans l'article L. 431-1 du code du travail, afin d'établir un lien entre des structures juridiquement distinctes pour permettre la mise en place d'institutions représentatives communes du personnel. Depuis, la notion a été invoquée par le législateur pour favoriser la conclusion d'accords de participation, d'intéressement et d'épargne salariale.

Admettons donc tous ensemble qu'il serait mal venu de ne pas reconnaître la pertinence de cette notion pour traiter du principal sujet de préoccupation des salariés et des entreprises, à savoir l'emploi, les restructurations et les licenciements.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Dord, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.

Comme pour l'amendement précédent, il s'agit d'une idée ancienne et récurrente du groupe des député-e-s communistes et républicains, qui est fondée d'ailleurs. En effet, en cas de licenciements économiques, l'entreprise sous-traitante est souvent prévenue trop tard et mise devant le fait accompli avec toute la chaîne de catastrophes qui s'ensuit. Vous aviez déjà défendu et développé longuement cette idée lors de l'élaboration de la proposition de loi qui a donné lieu à la loi de janvier 2002, mais la majorité de l'époque n'avait pas cru bon de la retenir.

M. Jacques Desallangre. Hélas !

M. Dominique Dord, rapporteur. On choisit ses amis, mon cher collègue !

Mme Hélène Mignon. On va voir ce que vous allez faire !

M. Daniel Paul. Il est permis d'espérer !

M. Dominique Dord, rapporteur. En tout cas, je salue votre constance.

M. Jacques Desallangre. Merci !

M. Dominique Dord, rapporteur. Mais très franchement, on voit très mal comment une telle disposition sera applicable.

Qu'un employeur d'une entreprise sous-traitante estime qu'une décision d'une entreprise donneuse d'ordre engendre des difficultés économiques : c'est une situation que l'on rencontrera tous les jours !

Quant au comité interentreprises avec l'entreprise donneuse d'ordre et les entreprises sous-traitantes, où s'arrêtera-t-il ? Combien d'entreprises devra-t-il représenter ? Tout le monde salue l'intention, mais elle est juridiquement inapplicable. D'où le rejet de l'amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Comme vient de le dire le rapporteur, les députés communistes et républicains ont de la constance. Mais, face à des réalités, quand il y a mutation économique, lorsqu'il n'y a plus d'ordres à donner, ne faut-il pas plutôt imaginer la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences ? Ne faut-il pas imaginer la voie de l'accord qui permet la formation ? Ne faut-il pas imaginer le reclassement ? Ne faut-il pas imaginer une passerelle pour les hommes plutôt que des digues de sable ?

Vous savez, on ne lutte pas contre les inondations uniquement en construisant des digues. Encore faut-il prévoir.

M. Hervé Novelli. C'est la météo sociale !

M. le ministre délégué aux relations du travail. C'est vraiment cette démarche de prévision, de dialogue plutôt que de conflit que l'on va retrouver tout au long de nos débats aujourd'hui. Nul n'ignore les problèmes subis par les entreprises sous-traitantes, mais ce n'est pas par ce type de digue qu'on traitera le problème.

M. Hervé Novelli. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. L'usine de Renault Sandouville, dans la banlieue havraise - mais ce n'est qu'un exemple - a externalisé il y a quelques années une grande partie de ses services. Dans le cadre de l'aménagement du territoire, il fallait installer des activités industrielles dans des zones un peu plus éloignées, en Basse-Normandie, etc. Progressivement, on s'est aperçu que les stocks n'étaient plus dans les entreprises mais sur les routes, générant ainsi de la pollution. On a donc créé, autour de ces grandes entreprises, des parcs d'équipementiers dont les locaux appartiennent à la maison mère. Bien sûr, ce n'était plus les mêmes salariés, car, entre-temps, on avait fait des plans sociaux un peu partout. Ces parcs d'équipementiers sont renouvelables tous les sept ans, ce qui correspond à la durée de vie d'un modèle.

Faurecia est l'une de ces entreprises, et elle vient de s'entendre dire par Renault qu'elle devait baisser ses coûts de 4 %. Certes, ce n'est pas beaucoup, sauf que cela se répète chaque année ! La compétitivité du groupe Renault doit être « avalée », si j'ose dire, par ses sous-traitants. Conséquence pour Faurecia : sur la centaine de salariés sur le site de Sandouville, une quarantaine va devoir partir.

Nous reviendrons sans cesse sur le sujet, car nous considérons qu'il faut mettre un terme aux externalisations de cette nature. Il faut responsabiliser les maisons mères à l'égard de leurs sous-traitants et surtout de leurs salariés. Ce sont souvent les mêmes salariés que l'on a renvoyés il y a quelques années et qui depuis se « promènent » entre la Basse-Normandie, la vallée de la Seine et maintenant l'Eure. Il faut mettre de l'ordre pour qu'il y ait cohérence, responsabilité des donneurs d'ordre à l'égard de tous leurs salariés.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 73.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 829.

Cet amendement est-il défendu ?

Mme Hélène Mignon. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Dord, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux relations du travail. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 829.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 37-1

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 37-1.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Nous arrivons à un sujet ajouté au texte par le Gouvernement lors du débat au Sénat : les licenciements économiques.

Je pense que c'est une erreur d'avoir voulu inclure la réforme de la loi de modernisation sociale dans le présent texte. Certes, on peut comprendre que certains dispositifs puissent y figurer, mais on pourrait penser la même chose de dispositions portant sur la lutte contre les discriminations ou le handicap par exemple.

Vous comprendrez donc que le groupe UDF s'interroge quant à la manière dont ont été introduits ces articles dans le présent projet de loi.

Par ailleurs, faute d'accord, le Gouvernement a tenté d'élaborer un texte car la période de suspension de vingt-quatre mois de certaines dispositions de la loi de modernisation sociales arrivait à son terme. Je vous rappelle que, dès le départ, l'UDF était pour l'abrogation des dispositions en question, ce qui nous aurait évité une telle précipitation. Le Gouvernement a donc été contraint de rédiger rapidement un texte, afin de réformer la loi de modernisation sociale en abrogeant un certain nombre de ses articles. La méthode nous paraît un peu délicate. En effet, certains partenaires sociaux critiquent le texte, notamment parce la motivation économique n'a pas été vraiment définie et qu'une ambiguïté existe.

Le rapporteur et le ministre nous répondent qu'il n'est pas besoin de définir le motif économique, puisque la jurisprudence est constante. J'appelle cela un déni de démocratie ! Depuis quand les juges font-ils la loi ? Ils ne font que l'appliquer. Dire qu'on ne légifère pas parce que les juges ont tranché, je pense que c'est la démocratie à l'envers. Vous comprenez donc que je sois surpris par ce genre d'argumentation qui a été développée à différentes reprises, à la fois par le rapporteur et le ministre.


Outre cet argument, la méthode utilisée laisse à désirer. Indiquer dans un premier temps que la sauvegarde de la compétitivité était un motif valable de licenciement économique et devait être inscrite comme telle dans la loi, avant de se rétracter, pourrait laisser penser que le Gouvernement a changé d'avis et provoquer alors un revirement de jurisprudence. Les juges se déterminent aussi d'après les débats parlementaires. La jurisprudence constante cesserait alors de l'être ! Votre argument selon lequel la jurisprudence constante nous dispense de légiférer risque de tomber dans les années qui viennent.

L'enjeu n'est pas anodin dans la mesure où la Cour de cassation aura à se prononcer sur de tels cas en moyenne dix ans après que les conseils de prud'hommes auront eu à en connaître. Autrement dit, pendant cette période, l'incertitude sera totale et elle hypothéquera lourdement l'avenir des petites et moyennes entreprises.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer une fois pour toutes en nous donnant votre définition du licenciement pour motif économique, qui figurera ainsi au Journal officiel ?

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous entamons l'examen des articles concernant le droit du travail. Cependant, événement rare, j'ai sur l'article 37-1 et ceux qui suivent une analyse quelque peu différente de celle de M. Vercamer. Il me semble, au contraire, que les dispositions relatives au droit du travail et aux licenciements font partie intégrante d'un projet de loi qui porte sur la cohésion sociale.

Nous devons en effet arrêter de concevoir le droit du licenciement comme un droit passif connexe à celui de la faillite. Il faut sortir de l'approche française qui consiste à ne décider les licenciements économiques qu'à la dernière extrémité. Il faut agir plus en amont, par une gestion prévisionnelle des licenciements, et en aval, pour favoriser les reclassements. Tel est bien l'objectif des articles 37-1 et suivants.

Il n'est pas inutile de revenir rapidement sur la loi Guigou du 17 janvier 2002, votée en urgence pour calmer une agitation médiatique. Elle entendait limiter le licenciement pour motif économique en organisant une procédure extraordinairement compliquée : concertation en amont, séparation du livre III et du livre IV du code du travail - ce qui est une absurdité -, négociation obligatoire sur les 35 heures, second constat de carence et réunion de la dernière chance en aval. Les critiques ont fusé, Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit du travail peu suspect de complaisance politique, parlant de « mistigri juridique » et de « larmes de crocodile ». Il en est résulté en tout et pour tout une insécurité juridique non seulement pour les entreprises, mais aussi pour les salariés : une incertitude interminable et de longs mois perdus à attendre au lieu de mettre immédiatement en place des conventions de reclassement. Nous connaissons la suite avec la suspension des dispositions de la loi Guigou par la loi du 3 janvier 2003, suspension prolongée avec la loi du 30 juin 2004.

Il est regrettable que la négociation sociale n'ait pas abouti, mais il faut tout de même porter au crédit du Gouvernement la différence de méthode avec son prédécesseur : il a laissé sa chance à la négociation sociale. Les débats qui ont eu lieu entre les partenaires sociaux sont une source d'inspiration pour nous aujourd'hui.

S'agissant de la remarque de M. Vercamer sur la définition du licenciement économique, je me demande si elle ne serait pas mieux venue à propos de l'article 37-3.

M. Dominique Dord, rapporteur. Mais il voit loin, M. Vercamer !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Nous en arrivons aux articles tant attendus, relatifs aux licenciements économiques. Ils ont été introduits à la hussarde par le Gouvernement au beau milieu de son projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. Tout un symbole ! La méthode a déjà fait couler beaucoup d'encre. À l'issue d'un dialogue social mené au pas de charge, où seules les attentes du MEDEF ont été entendues, même s'il affiche une colère de posture, vous avez surpris les partenaires sociaux par votre volonté de légiférer en un éclair. La suite était prévisible : soit vous déposiez un projet de loi autonome, mais l'embouteillage du calendrier parlementaire en fin d'année ne lui laissait que peu de chance d'aboutir, soit, n'en étant plus à une contradiction près, vous introduisiez au cœur d'un texte social des mesures qui font régresser de quinze ans le droit du travail. Vous aurez beau faire, vous ne parviendrez pas à faire passer les articles concernés pour des mesures de progrès social.

Vous entonnez de vieilles rengaines idéologiques sur les contraintes insurmontables qui pèsent sur les entreprises pour tenter de masquer le retour en arrière qu'orchestre l'article 37-1.

Comment pouvez-vous prétendre renforcer dans le même temps ce que vous appelez la « cohésion sociale » - tel est le nom que vous lui avez choisi - et la compétitivité des entreprises ? Autrement dit, d'un côté, une certaine harmonie collective, un mieux-vivre et, de l'autre, pour utiliser le décodeur patronal, l'exploitation des salariés au profit exclusif des actionnaires ! C'est un non-sens total. Les dispositions qui suivent sont bien loin de toute idée de redistribution, elles inaugurent le chantage à l'emploi, la jurisprudence Bosch appliquée au débat législatif !

Depuis quinze jours, nous assistons à une véritable comédie. Vous nous présentez un texte prétendument équilibré, au motif qu'il est rejeté par le MEDEF. Mais il ne faut pas s'y tromper, il s'agit bien d'un recul historique en matière sociale qui le satisfait pleinement, je l'ai déjà dit. Vous ne serez pas surpris que nous votions contre l'article 37-1 après avoir démontré la nocivité de chacune de ses dispositions.

La loi de modernisation sociale n'attaquait pas frontalement la déferlante des licenciements et la précarisation de l'emploi, désormais soumis aux fluctuations du marché. Ce n'était pas une révolution. Pourtant, la droite parlementaire et le MEDEF n'ont même pas pu supporter des mesures que nous avions jugées trop timides il y a quatre ans. Nous craignons que les huit articles dont nous commençons l'examen ne constituent les prémices d'une remise en cause de l'idée même de code du travail. Après tout, dans certains pays de l'Europe en construction, il n'existe pas de code du travail, pas ou peu de code de sécurité sociale, et l'école publique n'a pas du tout le même sens que celui que nous lui donnons. Tirer toujours vers le bas, c'est ce dont rêve le patronat, et vous vous en faites les assistants zélés.

Comme chaque année, à l'approche des fêtes, le Gouvernement a toujours un petit geste en faveur du patronat. En 2002, la fin de l'année a été marquée par la suppression des commissions de contrôle de l'utilisation des fonds publics ainsi que par les dispositifs d'assouplissement des 35 heures et par la loi dite « Fillon » de suspension de certains articles de la loi de modernisation sociale - processus qui se conclut aujourd'hui par une abrogation. En 2003, le RMA était voté, cependant que la loi réformant le dialogue social faisait voler en éclats le principe de faveur. Cette année, à la veille de Noël, vous nous demandez de légiférer à la hâte sur les licenciements économiques en remettant en cause quinze ans de législation protectrice, au moins partiellement, des salariés. Ainsi, après l'adoption de ce texte, le baron Seillière et son dauphin Guillaume Sarkozy pourront sabrer le champagne sous le sapin de Noël : le petit soulier du patron des patrons déborde déjà de cadeaux tombés de la hotte du M. Raffarin. Leur fierté de licencier et de délocaliser trouvera une fois de plus sa juste récompense.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Novelli.

M. Hervé Novelli. Nous abordons maintenant une série d'articles concernant les restructurations économiques.

L'article 37-1, qui vise à abroger définitivement des dispositions de la loi Guigou, est le bienvenu parce qu'il tire les conséquences de la suspension intervenue avec le vote de la loi « Fillon », qui était le prélude à une période de concertation et de négociation avec les partenaires sociaux. Malgré une prolongation, cette période de dialogue social n'a pas été couronnée de succès, et, au bout de vingt-quatre mois, nous voici revenus au point de départ.

Il y a deux ans, j'étais de ceux qui pensaient qu'une abrogation immédiate était de très loin préférable à une suspension, non par esprit de revanche, mais parce que la solution qui avait été choisie était source d'insécurité juridique et d'incertitude politique. Une incertitude juridique : on ne savait pas si, oui ou non, on allait en revenir au dispositif Guigou. Une incertitude politique : on ne savait pas quelle serait l'attitude du Gouvernement à l'issue de la période de suspension. Je suis très satisfait que le Gouvernement tourne définitivement la page en abrogeant le dispositif Guigou, mais la méthode suivie donne à réfléchir. Sans doute aurait-il fallu s'y prendre autrement.

Dans un débat qui porte sur les mutations économiques, il n'est pas possible de considérer comme taboue la définition du licenciement économique, qui constitue justement le cœur de la problématique. À l'heure de la mondialisation et d'un contexte compétitif de plus en plus difficile pour nos entreprises, nous ne devons pas les priver du droit de se restructurer quand elles anticipent des difficultés de nature à compromettre leur compétitivité. Aujourd'hui, dans un contexte de mondialisation, perdre sa compétitivité, c'est pour une entreprise la mort assurée. La sauvegarde de la compétitivité économique constitue donc un motif légitime de restructuration. D'ailleurs, à ce sujet, la jurisprudence de la Cour de cassation est constante. Dans l'arrêt Silec rendu en assemblée plénière le 8 décembre 2000, elle déclare que « les licenciements ont une cause économique réelle et sérieuse lorsqu'il est établi que la réorganisation de l'entreprise, qui entraîne des suppressions d'emplois, est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ».

L'alternative est donc la suivante : soit nous considérons que cette jurisprudence est suffisante, et il n'est pas nécessaire de légiférer, soit nous l'inscrivons dans la loi. Le président Canivet, premier président de la Cour de cassation, déclarait le 30 novembre dans Les Échos à qui il avait accordé une interview : « En pure théorie, la jurisprudence n'est pas une source autonome de droit ». L'option législative est donc ouverte, et je souhaiterais connaître la position du Gouvernement, monsieur le ministre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Mignon.


Mme Hélène Mignon
. Le Gouvernement touche enfin au but qu'il s'était fixé : l'abrogation des articles de la loi de modernisation sociale suspendus l'an dernier.

En effet, à compter du 3 janvier 2003 - date de promulgation de la loi Fillon -, les articles les plus importants du volet « licenciements économiques » de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 ont été suspendus pour une période maximale de dix-huit mois, prorogée de douze mois à compter de la publication d'un projet de loi relatif à la prévention des licenciements économiques, à l'information et la consultation des représentants des personnels et au plan de sauvegarde de l'emploi, compte tenu des résultats de la négociation interprofessionnelle qui, dans l'intervalle, devait s'engager à ce sujet. Durant la période de suspension, les dispositions antérieures à la loi de modernisation sociale ont été expressément rétablies.

Vous avez ainsi suspendu l'obligation de négocier la réduction du temps de travail à 35 heures, préalablement à l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi - faute de quoi la procédure de licenciement était suspendue. Vous avez évoqué les pressions qui nous auraient conduits à voter ce texte, mais dois-je rappeler que si nous avions adopté l'« amendement Michelin », c'était pour protéger les salariés ?

Vous avez également suspendu d'autres dispositions : l'obligation d'informer les représentants du personnel, préalablement à toute annonce publique sur des mesures pouvant modifier de façon importante les conditions de travail ou d'emploi des salariés ; la dissociation des procédures d'information et de consultation des salariés relatives à un projet de restructuration avec licenciements collectifs ; l'obligation de réaliser une étude d'impact social et territorial en cas de décision par les organes de direction de l'entreprise d'une cessation d'activité totale ou partielle touchant au moins cent salariés ou d'un projet de développement susceptible d'affecter les conditions d'emploi et de travail des salariés ; l'extension des prérogatives du comité d'entreprise, autorisé, en cas de compression d'effectifs, à formuler des propositions alternatives à celles de l'employeur et à faire jouer un droit d'opposition avec recours au médiateur en cas de divergence importante entre ses propositions et celles de l'entreprise ; enfin, la suppression du critère des qualités professionnelles pour établir l'ordre des licenciements économiques et l'extension des pouvoirs de l'administration en matière de plans sociaux.

Telles sont, monsieur le ministre, les dispositions dont vous demandez aujourd'hui l'abrogation. Vous comprendrez facilement que, loin de nous y montrer favorables, nous nous y opposerons quant à nous fermement.

Vous avez commencé à détricoter le code du travail. Jusqu'où irez-vous ? Pourra-t-on encore longtemps évoquer un droit du travail alors que l'on s'achemine tout simplement vers un non-droit du travail ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Un couple de salariés me faisait part récemment de sa crainte d'entendre des mauvaises nouvelles chaque fois qu'il allumait son poste de télévision à l'heure des informations. L'abrogation de l'ensemble de ces mesures fera partie des prochaines très mauvaises nouvelles.

M. Jacques Desallangre. C'est vrai !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Vous ne pouvez pas soutenir, mes chers collègues, que nous commençons l'examen des dispositions relatives au code du travail, puisque nous avons déjà beaucoup touché à celui-ci dans les articles précédents. Mais il s'agit présentement d'examiner les articles introduits dans le texte initial par la lettre rectificative du Gouvernement.

Il ne suffit pas de regretter l'abrogation des onze articles de la loi de modernisation sociale suspendus l'année dernière. Comment ne pas trouver dommage qu'au passage on renonce à l'étude d'impact social et territorial, alors même que vous nous aviez expliqué que l'abrogation des dispositions suspendues serait compensée par l'accent mis sur l'anticipation ? L'étude d'impact en cas de fermeture d'une entreprise relève pourtant bien de l'anticipation des conséquences d'un plan social sur l'avenir du territoire concerné. Vous supprimez donc les conditions d'une réelle anticipation, laquelle constituait un apport très intéressant.

Qui pourrait en effet se prononcer contre l'anticipation ? Mais il conviendrait de commencer par s'attaquer aux difficultés que rencontrent trop souvent les comités d'entreprise pour obtenir de la part de la direction des informations quand un plan de licenciement économique se profile à l'horizon, alors même que c'est un de leurs droits. Sinon, la disposition proposée restera un vœu pieu. J'avoue être sceptique.

D'aucuns ici viennent nous expliquer que les salariés préfèrent des propositions de reclassement à des délais avant d'être licenciés. L'argument n'est valable que pour les salariés qui peuvent espérer obtenir un quelconque reclassement ! Mais quelles perspectives peuvent avoir le salarié d'un bassin d'emploi qui connaît un taux de chômage très élevé, ou encore l'homme et la femme de cinquante ans passés qui n'ont pour toute formation que d'avoir travaillé dans la même entreprise depuis l'âge de dix-sept ans ? Dans ces cas-là, il est vrai, on préfère que du temps s'écoule avant d'être licencié,...

M. Laurent Wauquiez. Ce n'est pas vrai !

Mme Martine Billard. ...afin de conserver le plus longtemps possible un revenu meilleur que celui que l'on percevra au chômage et de pouvoir obtenir des droits plus intéressants aux indemnités de chômage ou à la retraite. Aussi, ne recourez pas à des arguments de facilité,...

M. Christian Vanneste. Ce sont de vrais arguments !

Mme Martine Billard. ...qui ne pourraient être valables que si le chômage ne touchait pas 10 % de la population active et que nous ne nous trouvions pas, comme vous le reconnaissez vous-même, dans une situation économique difficile, en raison, dites-vous, du problème de compétitivité des entreprises françaises.

Il est vrai que, dans certains secteurs économiques, des entreprises connaissent des problèmes de compétitivité.

M. Hervé Novelli. De sauvegarde !

Mme Martine Billard. Mais le manque de compétitivité peut être lié dans certains cas à de mauvaises prévisions ou à une mauvaise gestion de l'entreprise.

M. Laurent Wauquiez. Personne n'est parfait !

Mme Martine Billard. Comment ne pas penser notamment à Vivendi,...

M. Jacques Desallangre. Ou à Alstom !

Mme Martine Billard. ...ou à Alstom, deux entreprises qui, à l'origine, n'avaient aucune raison de rencontrer des difficultés économiques ? Leur mauvaise gestion a provoqué des dizaines, voire des centaines de licenciements !

M. Hervé Novelli. Ça arrive !

Mme Martine Billard. La compétitivité économique...

M. Hervé Novelli. La sauvegarde !

Mme Martine Billard. ...n'est un argument recevable que dans de rares cas, non pas dans tous ! Et qu'est-ce que la compétitivité économique ?

M. Jean-Michel Fourgous. Pour vous, c'est un gros mot !

Mme Martine Billard. Est-ce doubler, tripler, voire quadrupler les marges ou, au contraire, savoir réaliser une marge honnête qui permette à une entreprise de réinvestir et d'élargir son champ d'intervention ? La compétitivité - des exemples récents l'ont montré - peut consister à augmenter de façon très importante la rémunération des actionnaires. Elle aboutit alors à la création de bulles spéculatives, qui permettent d'investir dans des fonds de pension,...

M. Hervé Novelli. Heureusement qu'on les a créés ! Ce n'est pas vous qui l'auriez fait !

Mme Martine Billard. ...lesquels entretiennent à leur tour la spéculation immobilière qui sévit dans nos villes, si bien qu'on n'arrive plus à contrôler les mécanismes que l'on a contribué à créer !

Je reviendrai sur quelques-unes des dispositions prévues par ces articles, mais je peux d'ores et déjà annoncer au nom des députés verts que je voterai contre l'ensemble des articles modifiant les conditions du licenciement économique.

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. M. Novelli possède au moins une grande qualité, celle de poser clairement les problèmes. Il a évoqué les difficultés liées à la mondialisation, à la bataille économique et à la compétitivité. Mais il sait aussi bien que moi que la compétitivité d'une entreprise est liée à de nombreux facteurs, comme la recherche, la formation, la structure et l'organisation de l'entreprise ou la capacité d'évaluation des marchés - je suis loin d'être exhaustif !

M. Jean-Michel Fourgous. Et les financements qui lui sont accordés !

M. Jean Le Garrec. Au nombre de ces facteurs - M. Novelli le sait aussi bien que moi - appartient encore la capacité à évaluer le coût de la valeur travail dans le coût total d'un produit. Or nous ne recourons pas suffisamment à une telle analyse, si bien que notre jugement - y compris celui de M. Novelli - s'en trouve faussé. Le PDG de Renault a clairement reconnu que, dans le coût de production d'une voiture, le « coût ouvrier » s'élève à 300 euros seulement et que l'augmentation de la durée du travail dans une grande usine automobile allemande ne rapportera que 10 euros, un gain absolument dérisoire au regard de la compétitivité de l'entreprise ! Telle est la réalité !

M. Pierre Cardo. Le coût du travail ouvrier n'entre pas seul en ligne de compte dans le coût de production d'une voiture ! Et celui des cadres et des chercheurs ?

M. Jean Le Garrec. Il peut exister dans certains cas un problème réel de masse salariale - je ne l'exclus pas et des remarques ont été faites en ce sens. Ce problème doit être analysé et la question des licenciements peut alors se poser. Chacun sait que les auteurs de la loi de modernisation sociale avaient eu le souci d'une approche équilibrée. On nous l'a assez reproché !

M. Jacques Desallangre. Effectivement ! Et je continue de le faire !

M. Jean Le Garrec. J'assume tout à fait les choix qui ont été faits à l'époque.

Cela dit. qui peut récuser qu'en France l'étude d'impact demeure insuffisante, alors qu'elle est nécessaire, et que le regard porté sur l'entreprise n'anticipe pas suffisamment les évolutions ? Nous avons eu le souci de prendre en compte toutes ces questions.

M. Novelli a eu le mérite de poser la question de la nécessité des licenciements pour assurer la compétitivité de l'entreprise.

M. Hervé Novelli. La sauvegarde de l'entreprise !

M. Laurent Wauquiez. La sauvegarde de la compétitivité économique des entreprises !

M. Jean Le Garrec. La sauvegarde de l'entreprise, soit ! Mais c'est retrouver d'une autre façon la question de la compétitivité. Monsieur Novelli, ne jouons pas sur les mots !

Or la difficulté réside dans le fait de considérer l'emploi comme la seule variable d'ajustement - vous le savez comme moi. Je ne dis pas que vous faites preuve en la matière de cynisme - là n'est pas la question -, mais comment accepter que l'emploi puisse se retrouver au premier rang ? M. le président Canivet a raison de rappeler qu'une chose est de laisser la jurisprudence s'adapter aux évolutions, une autre de figer des dispositions en les inscrivant dans la loi. Il s'agit là de deux démarches totalement différentes ! Vous avez eu raison, monsieur Novelli, de poser le problème, mais je veux faire confiance au ministre pour distinguer respectivement ce qui relève de la loi et de la jurisprudence, laquelle est le regard porté à un moment donné sur une situation donnée. La crainte de voir l'emploi devenir la seule variable d'ajustement disparaîtra alors. Dans le cas contraire, le Gouvernement renforcerait ce risque, sans pour autant embrasser dans toute leur ampleur les problèmes posés par la sauvegarde des entreprises.

J'ai beau être en désaccord avec ce gouvernement, je veux rester confiant en la matière et espérer qu'il ne commettra pas une telle erreur !

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Il me semble nécessaire de dénoncer une nouvelle fois la méthode utilisée par le Gouvernement. Il a en effet dans un premier temps habilement présenté aux organisations un avant-projet de loi provocateur, inspiré des thèses les plus libérales (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) défendues par...

M. Jean-Michel Fourgous. Le MEDEF !

M. Jacques Desallangre. ...le MEDEF, exactement ! La méthode est intelligente et, pour n'être pas nouvelle, n'en continue pas moins de donner des résultats. Dans un second temps, le Gouvernement a dévoilé, au travers de l'article 37-1 et suivants, une version en quelque sorte édulcorée et marquée de légers reculs, mais des reculs sans conséquence sur la cohérence de la stratégie pernicieuse de la majorité, laquelle vise à saper le droit protecteur des salariés.

On habille tout ça de belles propositions, notamment sur l'anticipation. Je peux vous citer des exemples, pris sur le terrain, de la conduite des entreprises en matière d'anticipation.


En 1999, à Soissons, l'entreprise Wolber, filiale à 99,99 % de Michelin, a licencié en plein mois de juillet, alors qu'aucun problème n'avait été signalé lors du comité d'entreprise qui s'était tenu un mois auparavant. Au total, 451 personnes ont été littéralement virées et ont reçu leur lettre de licenciement alors qu'elles étaient en vacances ! Est-ce cela, l'anticipation ?

Nous ne sommes pas dupes : le Premier ministre peut bien mettre en garde le MEDEF lorsque celui-ci affiche des revendications trop libérales, ce n'est qu'un jeu. Ils se comprennent fort bien l'un l'autre, et la philosophie gouvernementale demeure la recherche obstinée du moins-disant social, afin de rendre les licenciements plus aisés, plus rapides et moins coûteux pour le patronat. Il est éloquent - et particulièrement inquiétant - que M. Novelli juge cet article bienvenu, tout en demandant au Gouvernement d'aller encore plus loin. On peut lui reconnaître une belle constance et une grande franchise : il veut clairement répondre aux souhaits du MEDEF, dont il partage l'analyse en invoquant une compétitivité dont il faudra bien, un jour, déterminer la nature. Si Michelin a licencié 451 personnes à Soissons, c'est parce que l'usine ne lui rapportait que 1 % de marge nette. Telle est sa conception de la compétitivité. Bien entendu, cela ne plombait pas l'entreprise, mais il était insupportable de ne gagner que 1 % sur cette petite unité ! En délocalisant en Inde, Michelin gagne beaucoup plus, certes, mais la collectivité nationale y a-t-elle gagné ? Elle aura dû prendre en charge 451 chômeurs, car, contrairement à ce qu'a affirmé M. Larcher, ce ne sont pas 18 personnes qu'il reste à recaser, mais 18 personnes seulement qui ont retrouvé du travail.

Le contexte économique et social ne se prête pourtant pas aux mesures contenues dans ce texte. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Fillon, les plans sociaux se sont succédé, touchant l'ensemble de nos régions : 1 300 en 2003, soit 30 % de plus que l'année précédente - ces chiffres sont incontestables, puisqu'il proviennent de l'étude de la DARES. Malheureusement, cette dégradation se poursuit. Le chômage, au sens du Bureau international du travail, a connu sa plus forte hausse de l'année au mois d'août dernier : 1,2 %. Notre pays compte actuellement plus de 2,7 millions de demandeurs d'emploi. Le taux de chômage s'élève à 9,9 %. Les moins de vingt-cinq ans sont particulièrement touchés, avec un taux de 21,5 %, soit 432 700 jeunes chômeurs : 25 900 de plus qu'en 2003. Et le Gouvernement voudrait continuer de faire croire que sa politique est la bonne, alors que ces chiffres en sont le désaveu !

Les nombreuses contradictions de ce projet de loi aggraveront encore la situation, mais rien n'y fait : malgré la gravité de la situation, le Gouvernement non seulement maintient son cap, mais veut encore accentuer la précarisation du monde salarié et la démolition du code du travail.

Le patronat, quant à lui, obtient ce qu'il souhaite. Du reste, lors de la suspension des articles de la loi de modernisation sociale, le président du MEDEF n'avait-t-il pas confié qu'il « doutait très fort de la capacité qu'auraient les syndicats à accepter les propositions des employeurs dans ce domaine, et réciproquement » ? La cause semblait donc entendue.

Vous savez très bien que les mesures proposées ne visent pas à prévenir les licenciements, encore moins à les interdire, surtout quand les salariés ont manifestement affaire à des patrons soucieux avant tout de dividendes et de stock options. M. Michelin a augmenté son salaire de 144 % : voilà au moins un patron qui sait gérer sa bourse personnelle ! Quant aux 451 licenciés de Wolber, c'est à la solidarité nationale de les prendre en charge, et, qui plus est, cinq ans après !

Ces mesures ne visent pas non plus à imposer aux employeurs une véritable obligation de reclassement, puisque le tribunal ne peut que « recommander », et non ordonner, la réintégration des salariés. À l'évidence, les mesures édictées par l'organisation patronale ne tendent qu'à libérer les énergies du patronat - et celui-ci n'en manque pas - pour obtenir le droit de licencier sans entrave, sans obligation à l'égard des salariés et sans contrôle du juge, de l'administration ou du Gouvernement.

Nous ne serons pas les complices d'une telle entreprise. Nous voterons donc contre cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Dord, rapporteur. J'ai le sentiment que nous sommes en train de refaire le débat sur l'ensemble du texte. Pour ma part, je vais essayer de m'en tenir à l'article 37-1.

S'agissant de la définition du licenciement économique et de la notion de sauvegarde de la compétitivité des entreprises, je crois que la jurisprudence a trouvé aujourd'hui un point d'équilibre assez fin et que la loi n'a pas à rigidifier les choses. Mais nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 37-3.

Quant aux propos que je viens d'entendre, certains me sidèrent.

M. Jacques Desallangre. Moi aussi !

M. Dominique Dord, rapporteur. Vous qui nous reprochez de ne pas avoir été corrects avec les partenaires sociaux, monsieur Desallangre, rappelez-vous comment vous les avez traités lors de la loi de modernisation sociale ! À dire vrai, vous ne les avez pas traités du tout. Si l'on veut essayer de respecter ses interlocuteurs et de tenir un langage de vérité, il convient de juger l'action des autres à l'aune de ce que l'on a fait lorsqu'on était aux responsabilités. On ne donne pas des leçons sur ce qu'on n'a pas fait soi-même ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre. Je n'ai pas voté cette loi !

M. Dominique Dord, rapporteur. Sur l'article 37-1, notre différence d'appréciation est totale. Quand j'entends dire que nous avons remis en cause la loi de modernisation sociale, j'ai envie de rire.

Mme Hélène Mignon. Il n'y a pourtant pas de quoi !

M. Dominique Dord, rapporteur. Sur les 200 articles que compte cette loi, 11 seulement sont remis en cause. Sur ces 11, trouvez-m'en un seul qui touche à un droit ouvert aux salariés licenciés ! (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous avons déjà eu ce débat à deux reprises, lors de la suspension puis de la prolongation de la loi. M. Fillon avait été très attentif à ne suspendre que des mesures d'ordre dilatoire ou général, et n'apportant strictement aucun droit nouveau aux salariés licenciés. Ces dispositions que nous abrogeons, nous allons les égrener, puisque vous avez eu la délicatesse de les reprendre article par article.

En quoi un médiateur supplémentaire, un nouveau délai ou un nouvel expert changeront-ils quoi que ce soit au drame que vit le salarié licencié ? Arrêtons de nous payer de mots et essayons tout simplement de respecter les gens et les familles frappés par ce drame, au lieu de faire de la politique comme on en faisait il y a cinquante ans ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre. Ce n'est pas un drame pour M. Michelin !

M. Dominique Dord, rapporteur. S'il vous plaît, ne nous donnez pas de leçons sur ces questions-là.

Mme Hélène Mignon. Ne nous en donnez pas non plus, dans ce cas !

M. Dominique Dord, rapporteur. Nous remplaçons des articles qui n'apportent rien aux salariés par des dispositions qui leur apportent beaucoup.

M. Jacques Desallangre. Non !

M. Dominique Dord, rapporteur. Monsieur Desallangre, la gestion prévisionnelle des emplois est-ce négatif pour les salariés ? Les accords de méthode, est-ce négatif pour les salariés ? Le doublement du DIF, est-ce négatif pour les salariés ? La convention de reclassement personnalisé dans les petites entreprises, est-ce négatif pour les salariés ? La sécurisation juridique des dispositifs, est-ce négatif pour les salariés ? Et la revitalisation des bassins d'emploi, où nous faisons au moins aussi bien que la loi de modernisation sociale, et dans une rédaction plutôt meilleure, est-ce négatif pour les salariés ?

De grâce, essayons d'engager un dialogue raisonnable en pensant à l'intérêt réel des salariés licenciés : eux ne sont pas ici, à l'Assemblée nationale, en train d'échanger des discours, ils sont dans l'angoisse du lendemain pour eux-mêmes et pour leurs familles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux relations du travail. Le rapporteur a bien résumé l'état d'esprit du Gouvernement sur la question.

Mme Hélène Mignon. Hélas !

M. Jacques Desallangre. C'est l'état d'esprit de la droite tout entière !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Il importe que ce texte traite de la gestion des mutations économique, car c'est là un véritable enjeu de cohésion sociale. Si les mutations ne sont pas préparées par un effort de formation et une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, si elles ne sont pas accompagnées par des reclassements ou par des accords de méthode, alors la cohésion sociale est en danger. Ces mesures ont donc toute leur place dans ce texte. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Hélène Mignon. Personne n'est contre la gestion prévisionnelle !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Je signale aussi qu'aucun des partenaires sociaux ne m'a demandé de garder les onze articles en question. Aucun n'a considéré que l'un de ces articles avait pu empêcher le moindre licenciement. Au contraire, ils créent des conditions anxiogènes autour de la procédure et instaurent une formidable inégalité : selon que l'on est issu d'une entreprise de moins ou de plus de 1 000 salariés, la différence de traitement va de un à six. Dans les médias, on a surtout parlé de ceux qui recevaient les indemnités les plus élevées et bénéficiaient des actions de reclassement les plus fortes. Mais pouvons-nous nous satisfaire d'un système inégalitaire dont sont exclus 80 % des salariés ?

Mme Martine Billard. Raison de plus pour essayer qu'ils bénéficient des conditions les plus favorables !

M. Hervé Novelli. La loi Guigou était une loi qui n'avait rien d'anxiolytique !

M. le ministre délégué aux relations du travail. L'équité, que l'on a beaucoup invoquée dans ce débat, se situe d'abord à ce niveau, selon nous.

S'agissant de la méthode à suivre, M. Vercamer et M. Novelli ont souhaité l'abrogation. Mais je fais observer que notre choix a permis dix-huit mois de dialogue entre les partenaires sociaux. Bien que ceux-ci ne soient pas parvenus à un accord, nous avons pu relever les éléments de convergence et de divergence et engager des discussions bilatérales. Puis, comme nous l'avions annoncé ici même dès le mois de juin, nous avons présenté une proposition le 15 octobre, étant entendu que nous ne pouvions plus rester « en apesanteur ». Contrairement à ce qui se passe pour certains amendements déposés au dernier moment - ce qui n'est pas illégitime au Parlement, certes -, nous avons soumis cette proposition à la sous-commission de la négociation collective, dont nous avons, chose extraordinaire aux yeux de certains, pris en compte les avis.

Et nous pouvons constater que, sous l'impulsion de la loi de janvier 2003, les accords de méthode marchent. Aucun des partenaires, quelle que soit sa sensibilité, n'a rechigné à signer les 181 accords qui ont déjà été conclus. Ceux-ci permettent de mieux informer le comité d'entreprise en amont et de prévoir une gestion différente du plan de sauvegarde de l'emploi. Nous avons donc considéré qu'ils constituaient un apport positif de l'expérimentation conduite.

Derrière tout cela, il y a un formidable droit : le droit au reclassement. Jean-Louis Borloo et moi-même serons d'ailleurs amenés à réfléchir sur son au-delà.

M. Jean Le Garrec. L'au-delà n'a rien à faire là-dedans, monsieur le ministre ! (Sourires.)

M. le ministre délégué aux relations du travail. Cet au-delà n'est pas la promesse du ciel, monsieur Le Garrec : il existe dans notre réalité terrestre ! Il s'agit d'évaluer dans quelles conditions nous pouvons, avec le droit au reclassement, mieux traiter une situation qui est toujours source d'anxiété. Il nous faut plus de souplesse et plus de sécurité.


Il faut également sécuriser les procédures. Pensez-vous, madame Billard, que le rêve soit de faire durer la situation jusqu'à ce qu'il n'y ait plus aucun emploi ? Ce n'est pas, me semble-t-il, une bonne gestion des restructurations.

Quant à la jurisprudence que vous avez évoquée, monsieur Novelli, monsieur Wauquiez, on peut en effet se demander pourquoi le Gouvernement s'est rendu finalement à l'idée que la jurisprudence de la Cour de cassation avait permis de clarifier, au fil des années, la portée de cette notion de licenciement économique. Selon cette jurisprudence, une entreprise peut avoir à recourir au régime du licenciement économique dans quatre hypothèses : lorsqu'elle rencontre des difficultés économiques ; lorsqu'elle est confrontée à une mutation technologique ; lorsqu'elle est conduite à cesser son activité - c'est l'arrêt Morvant contre Le Royal Printemps de janvier 2001 ; enfin, lorsqu'elle doit se réorganiser pour sauvegarder sa compétitivité, le premier arrêt sur cette question étant l'arrêt Videocolor de 1995. Ce sont des règles réalistes, équilibrées et, monsieur le Garrec, non figées.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. Des règles souples !

M. le ministre délégué aux relations du travail. Ce point d'équilibre trouvé par la Cour de cassation sur ces matières délicates nous paraît satisfaisant.

S'agissant de la revitalisation des bassins d'emploi, le Gouvernement a déposé un amendement qui donne la possibilité au préfet de commander une étude d'impact social et territorial, que nous voulons à la mesure des dispositions. En effet, l'article 118 de la loi de modernisation sociale s'était limité, pour exiger des mesures de revitalisation des bassins, qu'aux grandes entreprises. Nous, nous considérons que la fermeture d'une entreprise qui emploie entre 50 et 1 000 salariés peut avoir une incidence sur le bassin - vous en savez quelque chose, monsieur Vercamer.

La compétitivité est multifactorielle, mais je ne crois pas qu'elle puisse être renforcée par une dimension procédurale ou procédurière. Il peut être décourageant d'investir en France, de développer son activité, de prendre des risques, si on n'est pas sûr de pouvoir mener à bien, dans la durée et la clarté, les nécessaires adaptations. Pourtant, notre pays, qui occupe le deuxième rang pour les investissements, a des capacités formidables d'accueil des investissements étrangers.

Sur Wolber, monsieur Desallangre, je vous donne le chiffre qui nous vient de nos directions : vingt-huit salariés sont aujourd'hui en attente de solutions.

Je crois avoir répondu à l'ensemble des questions.

Le dispositif que nous proposons accroît la sécurité, met l'accent sur la gestion prévisionnelle et sur l'accord de méthode et, surtout, donne aux personnes qui travaillent dans les entreprises qui emploient entre 50 et 1 000 salariés un droit, une capacité de reclassement très supérieure à ce qui existait.

M. Jacques Desallangre. C'est beau comme l'antique !

M. le ministre délégué aux relations du travail. C'est donc un réel progrès social, en même temps qu'un progrès économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, après déclaration d'urgence, n° 1911, de programmation pour la cohésion sociale :

Rapport, n° 1930, de Mme Françoise de Panafieu et M. Dominique Dord, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 1920, de M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan,

Avis, n° 1928, de M. Georges Mothron, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot