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Deuxième séance du mercredi 19 janvier 2005

118e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

    1

RÉGULATION DES ACTIVITÉS POSTALES

Suite de la discussion
d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la régulation des activités postales (nos 1384, 1988).

Cet après-midi, l'Assemblée a rejeté la motion de renvoi en commission du groupe socialiste.

La parole est à M. Jean Proriol, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Jean Proriol, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué à l'industrie, monsieur le président de la commission des affaires économiques, je souhaite, avant d'aborder l'article 1er et les dispositions relatives au fameux service universel postal et au domaine réservé, apporter quelques précisions sur certaines données, ce qui nous permettra peut-être d'avancer plus rapidement dans l'examen des amendements.

La directive européenne du 15 décembre 1997, que nous nous efforçons de transposer depuis plus de cinq ans, maintient la possibilité pour les États membres de conserver un domaine réservé, lequel, loin de constituer une obligation, relève d'un choix politique que, par exemple, la Suède ou la Finlande n'ont pas fait. Je mettrai la France en parallèle avec d'autres pays de l'Union européenne afin de mieux cerner la politique de notre pays en la matière.

Le champ du domaine réservé est aussi large que possible. Lorsque la directive a été votée, le domaine réservé portait sur le transport de correspondances de moins de 350 grammes, poids qui a été ramené, le 1er janvier 2003, à 100 grammes. La mesure a été appliquée en France sans être transposée.

Le publipostage, quant à lui, a été totalement libéré aux Pays-Bas et en Espagne tandis que les plis de plus de 50 grammes en Allemagne et les envois de plus de 4 000 plis en Grande-Bretagne sont toujours inclus dans le domaine réservé. En France, le publipostage continue d'en relever intégralement. Du fait, monsieur le ministre, que chaque pays est libre de pratiquer la politique postale de son choix, la France se distingue en incorporant dans le domaine réservé des secteurs que d'autres pays européens n'ont pas prévu d'y inclure.

Le troisième champ du domaine réservé à La Poste en France concerne les envois recommandés utilisés dans le cadre des procédures judiciaires et administratives, pour lesquelles l'article 8 de la directive européenne laisse aux États membres la liberté de choisir.

La France fait donc un usage maximal des possibilités offertes par le domaine réservé. Nous pourrions procéder à une plus grande libéralisation. Nous ne le faisons pas.

M. Daniel Paul. C'est déjà suffisant !

M. André Chassaigne. Qui, derrière, fait le travail ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Écoutez d'abord : vous pourrez ensuite comparer notre pratique avec celle des autres pays européens ! Je regrette que nous n'ayons pas procédé à cet examen lors de la discussion générale. Mais le temps nous est compté.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Il n'est peut-être pas trop tard !

M. André Chassaigne. Ces précisions techniques à ce stade du débat montrent bien que le renvoi en commission était justifié !

M. Jean Proriol, rapporteur. Le quatrième champ est celui du courrier interurbain, qui est totalement libéralisé en Espagne et qui est inclus dans le domaine réservé en France.

Enfin, les envois à valeur déclarée, qui sont totalement libres en Allemagne, continueront de relever en France du domaine réservé.

La France pratique donc en la matière une politique qui ne peut-être qualifiée ni de liberticide, ni de libérale, encore moins d'ultralibérale.

M. le ministre délégué à l'industrie. Cela ne nous serait pas venu à l'esprit !

M. Jean Proriol, rapporteur. De plus, le projet de loi consolide l'opérateur historique au travers de plusieurs dispositions sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir dans le cours de la discussion, notamment lors de l'examen de la gamme des services financiers, dans le cadre de la mise en place de la filiale. Je me contenterai de noter pour l'instant l'extension à La Poste du bénéfice de l'exonération des charges sociales patronales sur les bas salaires, que, mes chers collègues, vous n'aviez pas obtenue - je m'adresse évidemment à la gauche de l'hémicycle. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Hélène Mignon. Cessez de vous en prendre à nous !

M. Jean Proriol, rapporteur. J'ai entendu de nombreuses critiques cet après-midi, notamment de la part de notre collègue François Brottes, sur la mise en place de l'autorité de régulation prévue à l'article 2. Or celle-ci est entourée de nombreux garde-fous. Un amendement, que j'ai déposé, prévoit notamment que l'autorité de régulation ne puisse refuser d'octroyer une autorisation d'activité dans le secteur postal pour des motifs tenant à la sauvegarde de l'ordre public, des nécessités de la défense ou de la sécurité publique - motifs qui sortent totalement du champ économique - qu'après avoir recueilli un avis motivé du ministre chargé des postes.

Enfin, l'extension des compétences de l'Autorité de régulation des communications électroniques au secteur postal placera automatiquement le régulateur sous les divers contrôles parlementaires.

M. André Chassaigne. Et alors ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Le régulateur devra, à leur demande, rendre compte de son activité devant les commissions permanentes de l'Assemblée.

Je termine ce « chapeau » global sur le service universel postal en rappelant que celui-ci demeure la pierre angulaire de la politique postale française et communautaire.

M. François Brottes. Je demande la parole !

M. le président. Le mot « chapeau » n'étant pas prévu par le règlement de l'Assemblée nationale, nous allons en venir à la discussion des articles. (Sourires.)

Vous aurez alors tout loisir, monsieur Brottes, de répondre à M. le rapporteur.

Discussion des articles

M. le président. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Nous allons tout d'abord examiner les amendements portant articles additionnels avant l'article 1er.

Avant l'article 1er

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14687.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. Monsieur le rapporteur, en parlant de « chapeau », vous avez inventé un OLNI : un objet législatif non identifié.

Il n'en reste pas moins que les comparaisons que vous avez établies entre les choix respectifs de la Suède, de l'Allemagne, des Pays-Bas, de l'Espagne et de la France ne produisent qu'une impression très éloignée de la réalité. En effet, la libéralisation des services publics en Europe et dans le reste du monde s'est traduite à chaque fois par des suppressions massives d'emplois chez les opérateurs historiques, que les opérateurs privés ne compensent jamais, quoi que vous prétendiez, et par une précarité accrue du statut des personnels concernés. Telles sont - je le répète - les deux premières constantes partout observées.

M. le ministre délégué à l'industrie. Plus de 15 000 amendements ont été déposés et il n'en parle même pas !

M. Daniel Paul. Quant à l'augmentation des prix pour les usagers, citez-moi un seul pays, monsieur le rapporteur, où la libéralisation s'est traduite par la diminution ou par le simple maintien du prix du timbre !

Un autre élément constant est la liquidation des dispositifs de péréquation, qui aboutit souvent à mettre dans une situation financière difficile certaines entreprises, y compris celles qui ont été privatisées. Dans ce système pourtant libéralisé, l'État a fréquemment dû venir à la rescousse des opérateurs qui ne pouvaient faire face.

Nous sommes dans un schéma identique : les conséquences en termes de cohésion sociale, d'égalité de traitement entre les usagers, d'aménagement du territoire, seront évidemment négatives chez nous, par suite de l'étranglement de l'opérateur historique qui ne manquera pas de se produire. Nous vous demandons donc par cet amendement, comme nous l'avons fait tout au long de la discussion générale, qu'avant d'aller dans le mur - en klaxonnant, qui plus est, comme l'a dit M. Brottes cet après-midi -...

M. le ministre délégué à l'industrie. Le « mur », cela devrait éveiller chez vous quelques souvenirs, monsieur Paul !

M. Daniel Paul. Avant d'aller dans le mur, monsieur le ministre, faites donc un arrêt sur image : regardons tranquillement ce qui se passe autour de nous, demandons-nous si les décisions prises au début des années 1990 avec le traité de Maastricht - et le référendum à venir devrait nous y inciter - nous montrent vraiment la voie à suivre. Ne serait-il pas plus utile d'assigner une autre mission au service public et aux entreprises publiques ? Faites un bilan de la déréglementation qui est intervenue dans les différents secteurs postaux, et présentez-nous un rapport très rapidement afin que nous puissions en juger : si ce rapport est concluant pour les personnels, pour les usagers et pour l'aménagement du territoire, ce sera unanimement que nous appuierons une telle évolution. Mais le simple fait que vous ne vouliez pas présenter un tel document et que vous vous efforciez d'accélérer le mouvement montre bien que vous connaissez les dangers sous-jacents et que vous savez où vous conduisez le pays.

Quoi qu'il en soit, nous vous demandons qu'un rapport établissant le bilan de la déréglementation soit rendu rapidement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a examiné cet amendement et a émis un avis défavorable, car il est pratiquement satisfait : l'article 7 du projet de loi prévoit déjà la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement afin d'analyser le bien-fondé de la mise en place d'un fonds de compensation du service universel. Ce rapport abordera nécessairement les points soulevés par l'amendement, à savoir l'impact de l'ouverture du marché sur les conditions de fonctionnement du prestataire du service universel, car le resserrement des contraintes financières a forcément une incidence sur la politique de recrutement et l'effort de participation de l'opérateur universel à l'aménagement du territoire.

L'amendement étant donc satisfait, je propose à l'Assemblée de le rejeter.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 14687.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Je signale à M. Paul que la Commission européenne vient de publier deux études très complètes sur la mise en œuvre des directives postales dans les vingt-cinq États de l'Union, l'une portant sur les données fondamentales de l'économie postale et l'autre sur les pratiques des États membres en matière de régulation sectorielle. Cette seconde étude compare également les tarifs et les niveaux de qualité de service à travers l'Europe, et les met en relation avec les politiques nationales d'ouverture des marchés. Ces documents comportent en outre des données prospectives que la Commission prévoit de compléter au cours du premier semestre de 2005.

Sur le plan national, la Cour des comptes a mené un travail particulièrement approfondi. M. Brottes l'ayant cité, vous en connaissez forcément l'existence. Ce travail a largement inspiré le contrat de plan 2004-2007.

D'ici à la fin de l'année, donc, je ne crois pas qu'il y aura grand-chose de nouveau. Je peux comprendre que l'on ait besoin, à un moment donné, d'un rapport d'information, mais nous disposons déjà de toutes les données pour 2005.

L'amendement me paraît donc inutile et j'en demande le rejet.

M. le président. Comme promis, monsieur Brottes, je vous donne la parole.

M. François Brottes. Je craignais que vous ne le fassiez pas, monsieur le président...

M. le président. Si j'ai un peu tardé, c'est que je comptais le nombre de députés présents afin d'éviter toute contestation lors des votes.

M. Pierre Cohen. Nous avons bien compris que c'était votre souci ! (Sourires.)

M. François Brottes. Je comprends votre préoccupation, monsieur le président, tout comme je comprends que le rapporteur, qui n'a pas eu le loisir de répondre à ma motion de renvoi en commission, ait éprouvé le besoin de faire un « chapeau » pour apaiser une frustration certaine. (Sourires.) Je lui en veux d'autant moins qu'il a dit des choses fort importantes et intéressantes. Il a ainsi reconnu que le gouvernement Jospin avait mené une bonne négociation sur cette directive qui, en l'état actuel des choses, offre un certain nombre de garanties.

Mais ce n'est pas cela que nous contestons : c'est le fait que l'on facilite à l'excès la tâche aux opérateurs entrants, que le régulateur devient plutôt un dérégulateur et que ce texte ne nous permet nullement de garantir le prix unique du timbre. Qui plus est, on soumet davantage La Poste à la concurrence tout en lui imposant de nouvelles charges, comme le paiement de la taxe professionnelle.

En outre, bien que le président Ollier, répondant à ma motion avec la passion qu'on lui connaît, nous ait affirmé que c'était inutile, nous n'avons pas auditionné l'ART en commission. Il eût été pourtant profitable d'entendre le régulateur ! Nous n'avons pas non plus eu communication du résultat des études que vous venez d'évoquer, monsieur le ministre. Il nous aurait été utile de les connaître, et il est dommage que l'on apprenne seulement au début de la discussion l'existence, dans les tiroirs, d'éléments...

M. le ministre délégué à l'industrie. Ces études sont à la disposition de tous !

M. François Brottes. Ce n'est pas vous qui êtes en cause, monsieur le ministre : sans doute les conditions de notre travail à l'Assemblée ne nous ont-elles pas permis d'examiner ces documents.

Quoi qu'il en soit, même si des études existent, notre groupe soutient l'amendement présenté par le groupe communiste car il est important de mener une réflexion particulière sur le volet emploi. Puisque l'Europe s'engage à réaliser une étude d'impact avant de modifier la directive, ce sera l'une des contributions du Parlement français. Je pense qu'elle ne sera pas inutile.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14687.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14688.

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

M. André Chassaigne. Nous proposons par cet amendement d'acter un moratoire sur la fermeture des bureaux de poste et, plus largement, sur la restructuration du service public postal.

J'entends déjà les cris du rapporteur dénonçant une exigence conservatrice, axée sur la seule défense de la situation existante, frileuse et hostile à tout changement... Si l'on veut faire croire que notre projet politique repose sur une forme de glaciation de nos services publics, nous ne le contestons pas forcément : en effet, nous ne demandons pas un moratoire jusqu'à 2010 pour attendre seulement que le temps passe et gagner quelques années supplémentaires de sauvegarde de nos services publics, mais pour que l'on se donne le temps de construire, à partir des bureaux de postes comme de tous les autres services publics qui sont encore présents dans nos territoires, des projets territoriaux et des dynamiques de développement en concertation avec tous les acteurs politiques et économiques de nos régions.

Je suis l'élu d'une région rurale, mais je sais bien que la problématique y est très proche de celle que vivent les banlieues dites sensibles.

Actuellement, le principal problème que rencontre le monde rural tient aux difficultés de l'agriculture, liées à la transformation de la politique agricole commune. Ses industries de main-d'œuvre dites « à faible valeur ajoutée » sont frappées par les délocalisations. Cette situation économique conduit à la désertification.

Or nous ne pensons pas que l'on résoudra ces problèmes en comptant sur la seule initiative des entreprises privées - comme le fait, par exemple, la loi relative au développement des territoires ruraux. De la même façon, on parle beaucoup de l'amélioration de l'accès à l'Internet haut débit : cela est certes important, mais non suffisant.

Selon nous, les services publics peuvent constituer des leviers pour le développement des territoires pour peu qu'ils visent un objectif simple : satisfaire les besoins des hommes et non pas, comme tend à le faire le projet de loi, ceux des marchés financiers.

Dans ce contexte, un moratoire sur toute fermeture de bureau de poste prend tout son sens : La Poste aura alors pour mission de s'insérer dans le tissu économique local et d'y prendre sa place dans l'élaboration et la mise en œuvre de projets de territoire. Le monde rural a notamment besoin d'un outil de financement propre, intéressé par le financement d'une agriculture familiale et d'activités artisanales et industrielles nouvelles. C'est là un point essentiel pour qui aspire vraiment au développement durable de nos campagnes. Il nous faut donc un véritable pôle public de financement, en particulier pour l'agriculture et le secteur agroalimentaire. Un authentique service public bancaire permettrait de mieux répondre aux besoins de crédit des paysans, des artisans et des patrons de PME, exclus aujourd'hui du crédit bancaire.

La Poste peut assumer cette mission fondamentale pour l'aménagement de nos territoires : encore faut-il l'empêcher de les « déménager ». C'est pourquoi nous demandons que l'Assemblée se prononce en faveur de ce moratoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Elle a examiné cet amendement et a émis un avis défavorable.

Le gel du réseau de bureaux de poste existant que MM. Chassaigne et Daniel Paul nous proposent empêcherait la mise en place de formules de présence postale plus légères là où l'activité est plus faible. Comme l'a dit à plusieurs reprises M. le ministre, 3 700 bureaux de poste fonctionnent moins de deux heures par jour. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. André Chassaigne. Ce chiffrage n'a aucun sens !

M. le président. Laissez le rapporteur s'exprimer, monsieur Chassaigne !

M. Jean Proriol, rapporteur. Ce gel empêcherait donc une réallocation des moyens là où la population s'accroît, notamment dans les villes de plus de 15 000 habitants, où l'on compte en moyenne quatre bureaux de poste pour vingt-neuf boulangeries et dix-neuf pharmacies : autant dire que les files d'attente au guichet s'allongent ! Laissons à La Poste les moyens d'adapter ses modalités de service à la demande locale, même si une contrainte peut lui être imposée en ce qui concerne les points de contact : je renvoie les auteurs de l'amendement à mon propre amendement, n° 18 rectifié, qui règle ce problème et impose à La Poste des contraintes en matière de représentation et de maillage du territoire.

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis que la commission, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous nous abstiendrons sur cet amendement. Selon nous, il est trop risqué d'adopter une approche globale de la question : c'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons déposé des amendements concernant les territoires particuliers et les communes où se trouvent des bureaux de poste. Nous souhaitons une approche différenciée, de façon à mesurer, par exemple, ce qui est nécessaire en ce qui concerne les horaires d'ouverture ou l'évolution des services. Le risque que comporte cet amendement, c'est la généralisation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14688.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14696.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. Soucieux de ne pas perdre de temps, je n'ai pas redemandé la parole après l'intervention de M. Proriol. Malgré tout, je voudrais lui faire remarquer qu'il a cité l'article 7, qui prévoit un rapport sur les fonds de compensation nécessaires à la mise en place du service universel. Or, lorsque le groupe communiste demande qu'on fasse un arrêt sur image, il ne vise pas le service universel, mais le bien-fondé même de la déréglementation à laquelle vous procédez.

Venons-en à l'amendement n° 14696.

Vous prétendez, monsieur le ministre, vouloir concilier les engagements communautaires avec la nécessaire sauvegarde du service public. C'est pourquoi vous nous répétez qu'il faut transposer cette directive, ce qui aurait dû être fait avant le 1er janvier 2003, afin de faire tomber le recours pour défaut de transposition, enclenché par la Commission devant la Cour dite de justice des Communautés européennes en décembre 2003. Soit !

Imaginons que ces explications témoignent d'une réelle bonne foi. Rien n'empêcherait alors le Gouvernement de s'engager au nom de la défense du service public et de s'opposer, au sein des institutions européennes, à l'achèvement du marché intérieur postal. Rien ne l'empêcherait de s'engager, devant la représentation nationale, à défendre, au sein du Conseil des ministres, les principes fondamentaux d'égalité devant le service public et de péréquation tarifaire.

L'Europe ne peut indéfiniment se construire sur les ruines des acquis sociaux des peuples !

À travers notre amendement, nous souhaitons savoir si le Gouvernement est favorable à l'achèvement du marché intérieur du secteur postal, et donc à l'abandon définitif de tout service public en matière postale.

Nous voyons bien là toute la perversité du droit communautaire, qui repose sur une seule logique : l'achèvement d'un marché européen unique, c'est-à-dire la mise à disposition des grands groupes financiers de tous les biens et de toutes les entreprises, qui devraient rester la propriété de la collectivité et qui ont été souvent chèrement acquis par les peuples européens au lendemain de la guerre.

Voilà pourquoi nous proposons, par cet amendement, que la France s'oppose, au sein des institutions de l'Union européenne, à la poursuite de la déréglementation du secteur postal et à l'achèvement du marché intérieur en ce domaine ; et qu'elle s'engage à y défendre le service public postal, et notamment les principes d'égalité d'accès à ce service et de péréquation tarifaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a examiné cet amendement et l'a rejeté pour deux raisons.

La première est qu'il formule une injonction à l'égard du Gouvernement.

M. le ministre délégué à l'industrie. Très juste !

M. Jean Proriol, rapporteur. Or, selon l'article 20 de la Constitution, le « Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation... » Cet amendement est donc inconstitutionnel dans sa forme.

En l'an 2000, lorsque nous présidions la Commission européenne, le rapport Boulard recommandait au Gouvernement d'essayer de modifier la directive européenne. La France n'en n'avait pourtant pas pris l'initiative. Et nous avions alors un gouvernement que vous souteniez.

La seconde raison est relative à la deuxième phrase : la défense du service public postal n'est pas incompatible avec la poursuite de l'ouverture du marché postal, dès lors qu'on s'assure que le prestataire du service universel a les moyens de poursuivre ses missions d'intérêt général.

Le rapport évoqué à l'article 7 du projet de loi, auquel je tiens à faire référence, doit établir, en la démontrant le cas échéant, la nécessité d'un fonds de compensation du service universel. Celui-ci sera mis, le moment venu, à la charge des opérateurs entrants, dont on ne connaît ni le nom ni le nombre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous voterons cet amendement, qui est une proposition faite au Gouvernement. Certes, ce dernier semble ne pas y adhérer. Mais l'intention de nos collègues communistes n'était sans doute pas de formuler une injonction.

En tout état de cause, nous sommes favorables à ce que la France, au moment où se négociera la directive, s'oppose à la poursuite de la déréglementation du secteur postal.

Nous pensons cependant que l'on ne peut pas écrire qu'il faut s'opposer à l'achèvement du marché intérieur. Si je ne me trompe pas, l'idée est qu'il faut prendre acte de l'organisation actuelle du marché intérieur, mais ne pas aller au-delà. C'est un simple problème de sémantique, qui pourra être résolu d'ici à la lecture définitive du texte, si cet amendement est adopté.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14696.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14702.

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

M. André Chassaigne. Après avoir entendu les propos du rapporteur sur le « chapeau », je pense à la belle phrase d'Alain-Fournier : « L'approche est toujours plus belle que l'arrivée. » Car c'est bien ce qui risque de se passer : l'approche que vous avez de ce texte est beaucoup plus belle que ce qui en résultera.

L'amendement n° 14702 prévoit un bilan contradictoire sur les effets de la libéralisation de l'Organisation mondiale du commerce et le gel des négociations actuelles sur l'AGCS, l'accord général sur le commerce des services.

La nouvelle étape du processus de libéralisation qui est en cours impose en effet un bilan contradictoire sur les effets de ce processus.

Une telle demande ne me semble pas incompatible avec le principe de la démocratie que l'on invoque sans cesse. Les populations ont démontré leur attachement à leurs services publics et leur opposition au démantèlement mené dans le cadre des négociations de l'OMC. Nous ne pouvons plus poursuivre dans cette voie qui aboutit, en vertu de l'AGCS conclu en 1995, à obliger les pays membres de l'OMC à ouvrir à la concurrence le secteur des services.

Le caractère irréversible des engagements conduit, dans ce domaine, à une libéralisation totale et à une transformation radicale de notre société avec, à la clé, l'abandon de nos services publics ou leur réduction à des niveaux si bas qu'ils ne pourront plus jouer leur rôle de correcteurs des inégalités.

Il s'agit là d'un choix crucial de société, un choix politique qui nous engage sur le long terme et concerne les générations futures.

La question porte en effet sur le modèle de société de demain, puisqu'il s'agit de déréglementer les monopoles publics. Le secteur postal est bien évidemment concerné par ces négociations, qui se déroulent dans la plus grande opacité, sous l'égide de la Commission européenne et sans véritable concertation avec les parlements nationaux.

L'argument traditionnellement invoqué et selon lequel l'ouverture des échanges n'aurait aucun impact sur le caractère public de la propriété des entreprises de services n'est pas recevable. De fait, comme nous l'avons dit, Daniel Paul et moi, la mise en concurrence contraindra les entreprises à se soumettre à des exigences de rentabilité et de compétitivité telles qu'elles ne pourront plus assumer leurs missions de service public. Leur manque d'efficacité servira alors de prétexte à leur privatisation complète.

Voilà pourquoi nous souhaitons que le processus de libéralisation des services publics engagé dans le cadre de l'OMC soit gelé. D'ailleurs, dans le passé, la France avait su porter de telles exigences s'agissant de l'AMI, l'accord multilatéral sur les investissements.

M. Arnaud Montebourg. Exactement !

M. André Chassaigne. Aujourd'hui, il s'agit de permettre l'organisation d'un réel débat dans le respect de la démocratie et du droit des peuples à choisir le type de société dans lequel ils souhaitent vivre et faire vivre les générations futures.

Quelle est la vision du Gouvernement en ce domaine ? Quelles exigences saura-t-il faire valoir auprès de cette institution internationale ? Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

M. Daniel Paul. C'est de l'intégrisme !

M. André Chassaigne. C'est une capitulation, monsieur le rapporteur !

M. Jean Proriol, rapporteur. La première raison est encore une raison de forme.

M. le ministre délégué à l'industrie. Eh oui : l'amendement est inconstitutionnel !

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'une injonction faite au Gouvernement, qui est contraire à l'article 20 de la Constitution.

Sur le fond...

M. François Brottes. Enfin !

M. Jean Proriol, rapporteur. Cher collègue, nous avons eu la patience de vous écouter. Alors, faites de même...

M. Arnaud Montebourg. Vous y avez aussi pris du plaisir ! (Sourires.)

M. le ministre délégué à l'industrie. N'exagérons rien : nous ne sommes pas aussi vicieux ! (Rires.)

M. le président. Monsieur le rapporteur, veuillez poursuivre.

M. Jean Proriol, rapporteur. La seconde raison est donc de fond : les négociations au sein de l'OMC sur les échanges de services sont menées par l'Union européenne et ne sont pas menées directement par les pays membres.

M. André Chassaigne. C'est un peu facile !

M. Jean Proriol, rapporteur. C'est l'Union qui a pour mandat exprès de refuser toute négociation touchant au service public.

Selon l'agenda de développement de Doha, qui concerne notamment la négociation sur les échanges de services - 29 avril 2003 -, l'Union européenne mène cette négociation avec un triple objectif : premièrement, promouvoir nos intérêts offensifs en tant qu'Européens ; deuxièmement, défendre nos services publics ; troisièmement, aider les pays en développement à s'insérer dans l'économie mondiale tout en respectant leur modèle de développement.

J'irai un peu plus loin, pour rassurer complètement M. Paul et son collègue et ami, mon compatriote André Chassaigne,...

M. Daniel Paul. Son camarade !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...en rappelant que la référence à la « protection des services publics » exclut des négociations les services qui ne sont fournis ni sur une base commerciale, ni en concurrence avec un ou plusieurs fournisseurs. Celles-ci ne couvrent que les secteurs que les membres de l'OMC ont décidé - leur choix est souverain -...

M. André Chassaigne. Ce choix est évolutif !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...d'ouvrir éventuellement à des fournisseurs étrangers.

Les États gardent donc toute latitude pour imposer les règles qu'ils jugent appropriées et pour confier la gestion de certains services à des entreprises publiques ou privées. Les négociations à l'OMC n'ont rien à voir directement ou indirectement avec les décisions de privatisation prises par les gouvernements.

Je pourrais vous citer un autre texte, monsieur Chassaigne, mais je crois que je n'arriverai pas à vous convaincre.

M. André Chassaigne. Oh non !

M. Jean Proriol, rapporteur. En effet, je vous lis les documents officiels, et vous me répondez que ce que je dis est faux !

Je rends les armes...

M. Yves Fromion. À la mauvaise foi !

M. Jean Proriol, rapporteur. M. Chassaigne est effectivement un peu de mauvaise foi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Je partage les deux explications très pertinentes du rapporteur, monsieur le président.

M. André Chassaigne. Le Gouvernement ne s'engage pas !

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Monsieur le rapporteur, on peut citer tous les textes officiels pour prouver que rien ne nous oblige à ceci ou à cela. Mais j'ai cru comprendre que vous vous abritiez derrière une directive européenne ou des accords internationaux pour justifier votre texte. Je vous renvoie donc aux propos que j'ai tenus hier lorsque j'ai plaidé l'irrecevabilité.

Concernant cet amendement, on pourrait discuter beaucoup plus longuement de l'implication de chacun des États dans la discussion de l'AGCS. Un certain nombre de parlementaires de cette assemblée s'étaient d'ailleurs adressés au Gouvernement au début des négociations. François Huwart avait fait valoir à quel point il était judicieux de ne pas poursuivre en l'état les négociations. Et Christian Pierret, avec ses collègues, notamment suédois et finlandais, avait remis en question la façon dont elles s'étaient ouvertes.

Il me semble donc que le Gouvernement ne s'exposerait pas à suivre cette proposition ; il doit être extrêmement prudent. De toute façon, en revenant de telles négociations, il faut transposer les décisions qui ont pu y être prises.

Même si ce type d'accord international ne comporte pas d'obligation de privatiser les services, il pose des règles de concurrence qui peuvent avoir de graves inconvénients.

En effet, nous avons l'habitude en France de déléguer certaines missions de service public à des opérateurs privés. C'est en particulier le cas dans le domaine de la santé avec les cliniques. Cela nous pose un vrai problème et il ne faut pas minimiser cette implication, même si M. Proriol a raison sur le fond. Il faut pouvoir réguler une mission de service public qui est en partie déléguée. Je prône donc la prudence. Nous avons d'ailleurs été rejoints par certains pays européens et, à mon avis, d'autres suivront pour demander le gel des négociations, notamment dans les secteurs de l'éducation, de la culture et de la santé.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg. Nous sommes un peu surpris du silence ministériel sur un amendement de cette importance.

La réponse du rapporteur peut en effet être discutée et je suis surpris que M. le ministre, qui est un homme avisé à l'intelligence connue, laisse dire dans une enceinte comme la nôtre, chargée de contrôler la politique de la nation qui est la quatrième exportatrice au monde, que c'est la Commission européenne qui décide, dans la plénitude de ses compétences, de la politique commerciale de la France. Fort heureusement, notre pays a encore une politique commerciale dont il décide et qui peut à tout moment faire l'objet d'un contrôle de la part de la représentation nationale ! Et c'est heureux car nous ne pouvons pas encore compter sur la démocratie embryonnaire sur le plan européen pour contrôler M. Mendelson, l'actuel commissaire européen au commerce, qui a succédé à Pascal Lamy.

Nonobstant les délégations de compétences historiquement accordées à la Commission européenne, des débats ont bien eu lieu dans cette enceinte sur ces sujets. Souvenez-vous de celui sur l'exception culturelle ! La question n'avait pas été déléguée à un commissaire européen dont, à l'époque, nous ne connaissions même pas le nom, à savoir Sir Leon Brittan ou son successeur ! Sur des sujets d'une telle importance, nous n'avons pas l'habitude de procéder à des délégations. Nous pouvons donc être sérieusement interpellés par cet amendement qui soulève la question du rôle que la France entend jouer à l'OMC.

Le candidat démocrate à la dernière élection présidentielle américaine avait lui-même indiqué qu'il remettrait en cause le traité de l'OMC s'il était élu.

M. Yves Fromion. Il a été battu !

M. Arnaud Montebourg. Pourquoi ce qui serait possible dans cette grande démocratie, que nous nous plaisons parfois à railler, ne le serait-il pas chez nous ? Je prie donc M. le ministre en charge de ce dossier de ne pas prendre à la légère des questions aussi importantes.

La représentation nationale a besoin d'être informée et doit pouvoir exercer son contrôle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14702.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14703 rectifié.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. L'application d'une directive a pour résultat d'élargir le périmètre d'intervention du capital privé, de lui ouvrir de nouveaux champs de profits. En conséquence, les entreprises concernées se devront de rémunérer ce capital rapidement et, par les temps qui courent, le mieux possible.

L'ouverture à la concurrence et à la privatisation du secteur postal porte en germe l'abandon de ses missions de service public. En effet, la desserte de l'ensemble du territoire, notamment des zones peu peuplées, le maintien de bureaux de poste de plein exercice en nombre suffisant, l'emploi de personnels qualifiés, la promotion d'emplois stables et de qualité, tout cela a un coût qui est incompatible avec l'objectif central qui est de rémunérer le capital investi. Ce coût nuit à la rémunération des actionnaires, ainsi qu'aux sacro-saintes règles de rentabilité. L'opérateur public lui-même cherchera fatalement à alléger ses « coûts » dans un environnement concurrentiel où prime la course au moins-disant tarifaire et social. M. Devedjian n'a-t-il d'ailleurs pas clarifié cet enjeu en parlant, lors de son audition en commission, des « handicaps concurrentiels de La Poste » et de ses « charges sociales », que j'appelle, quant à moi, des cotisations sociales patronales ?

Le groupe communiste a toujours eu la même attitude d'hostilité à l'égard de cette entreprise de libéralisation du secteur public. C'est pourquoi nous demandons la renégociation de ces directives européennes, en particulier de celles relatives à la libéralisation du service postal, tout en soulignant que nous sommes convaincus qu'il y a des objectifs à partager au niveau européen. Garantir une collecte et une distribution sur l'ensemble des territoires, garantir une circulation du courrier rapide et sécurisée entre les pays, constituer un réseau commun aux vingt-cinq États membres, faire de la présence postale un facteur de cohésion sociale sur l'ensemble de ces territoires, voilà une politique commune des services postaux qui reposerait non pas sur l'idée de concurrence, mais tout simplement sur celle de coopération. C'est ce que nous vous proposons par cet amendement en demandant la renégociation des directives européennes impliquant l'ouverture à la concurrence du secteur postal.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Je voudrais d'abord rappeler à M. Paul que c'est le parti socialiste qui est à l'origine de la demande de renégociation des directives postales. En l'an 2000, le rapport Boulard de la Délégation de l'Assemblée nationale pour les Communautés européennes la proposait déjà et, lorsque la France assurait la présidence de l'Union, j'imagine qu'elle a dû tenter de mettre en œuvre cette proposition, mais sans succès ! Vous avez eu deux fois l'occasion de renégocier. Vous avez en effet eu l'occasion de renégocier la première directive du 15 décembre 1997. Puis, vous avez eu une seconde belle occasion avec la directive du 10 juin 2002,...

M. Hervé Novelli. Tout à fait !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...qui a été adoptée par les ministres européens des postes et télécommunications le 15 octobre 2001.

M. Yves Fromion. Eh oui !

M. Jean Proriol, rapporteur. Donc, vous avez déjà tenté cette opération et vous avez échoué.

M. Yves Fromion. Quand on est mauvais, on est mauvais !

M. Jean Proriol, rapporteur. Une nouvelle démarche isolée de notre pays au sein des Vingt-cinq serait vouée à l'échec et ridiculiserait la France !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Je suis doublement flatté ! Une première fois par le groupe communiste, qui imagine que le Gouvernement pourrait faire mieux en matière de renégociation que ses alliés socialistes, et la seconde fois par M. Montebourg, qui a bien voulu porter une appréciation extrêmement flatteuse sur mon esprit. Malheureusement, au risque de le décevoir, je ne parviens pas à trouver une réponse plus intelligente que celle qui lui a été faite par M. Proriol et que, par humilité intellectuelle, je suis contraint de partager n'ayant pu trouver mieux.

M. Arnaud Montebourg. Vous ne vous en tirerez pas aussi facilement !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le ministre, chaque fois que vous avez la possibilité de faire mieux, c'est la France qui y gagne. Il n'y a donc aucune raison pour que nous ne vous y encouragions pas !

Nous soutenons cet amendement, car la lecture que nous en faisons nous conduit à penser que le groupe communiste souhaite que la France, par votre intermédiaire compte tenu de votre passion, de votre motivation et de votre compétence sur ce dossier, puisse tenir au moins un engagement pris par M. Jospin. (Sourires.)

M. le ministre délégué à l'industrie. Je sais qu'il revient, mais tout de même !

M. François Brottes. Le sommet de Barcelone a valu une victoire au gouvernement français qui a obtenu que l'Europe s'engage à élaborer une directive sur les services économiques d'intérêt général. Nous interprétons la démarche du groupe communiste comme une demande adressée au ministre de faire en sorte que l'Europe entame rapidement l'élaboration de cette directive qui sera, comme nous l'espérons tous, à gauche en tout cas, protectrice du service universel et, surtout, du service public dans notre pays.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14703 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14704.

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

M. André Chassaigne. Dans la réponse de mon compatriote Jean Proriol, j'ai reconnu une intelligence que chacun peut apprécier, mais j'ai aussi senti qu'il était dubitatif. Je ne sais pas si c'est une qualité auvergnate, mais il m'a semblé un peu envieux, pensant que, peut-être, le gouvernement actuel pourrait faire mieux que le précédent pour la France. Il a ainsi repoussé notre amendement de renégociation avec hésitation.

Je vous propose donc un deuxième amendement, monsieur le rapporteur, pour vous laisser le temps de réfléchir à la suspension de la transposition des directives relatives à l'ouverture à la concurrence des services postaux de la Communauté.

Nous souhaitons, en effet, demander la suspension de la transposition de toutes les directives communautaires qui visent avant tout à accroître la déréglementation dans les secteurs de l'industrie et des services.

Vous l'avez compris, notre objectif, depuis le début de la soirée, n'est pas de placer la France dans l'illégalité au regard du droit communautaire, mais de faire un petit clin d'œil à l'actualité en proposant ce que l'on pourrait appeler une « grève des transpositions ». Elle consisterait simplement à pousser les instances communautaires à renégocier toutes les directives dont l'impact - nous le savons par expérience - est systématiquement néfaste aux Européens.

Toutes les réponses que nous avons reçues le confirment : jamais, en effet, nous ne parviendrons à réorienter la construction européenne ni à lui donner le contenu social qui lui fait cruellement défaut aujourd'hui si nous ne cherchons pas à créer, à un moment donné, un rapport de force politique plus favorable aux peuples d'Europe.

Il s'agit de pousser les instances communautaires à prendre en compte les intérêts des millions d'Européens broyés aujourd'hui par ce que l'on appelait, il y a quelques décennies, « la liberté du renard libre dans le poulailler libre », c'est-à-dire la liberté totale des marchands et des spéculateurs boursiers au sein du marché intérieur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Oh !

M. André Chassaigne. Nous proposons simplement par cet amendement que le Gouvernement manifeste un peu de courage politique, argument auquel vous ne serez sûrement pas insensible, monsieur le ministre.

Vous nous répondrez probablement - par la voix du rapporteur, puisque c'est lui qui fait les réponses à votre place -,...

M. le ministre délégué à l'industrie. Il faut dire qu'il les fait très bien !

M. André Chassaigne. ...que la parole de la France a été engagée auprès de nos partenaires européens.

M. Jean Proriol, rapporteur. Par M. Jospin !

M. André Chassaigne. C'est faux ! Toutes les directives en question, qui relèvent pourtant du domaine législatif, ont été avalisées à un moment ou un autre par le Gouvernement. Jamais le Parlement français, qui seul représente la nation et a le pouvoir de voter les lois, n'a pu se prononcer en amont sur le vote d'une directive. On ne lui laisse pour rôle que le soin d'avaliser, plusieurs années après - nous en avons encore la preuve aujourd'hui - des directives que des gouvernements successifs ont votées sans jamais en référer aux représentants du peuple, ce qui le dépossède, de fait, de sa souveraineté.

Pour toutes ces raisons, je pense que le vote de cet amendement ne devrait rencontrer aucune opposition.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Je vais être plus bref encore que sur les précédents amendements, en revoyant M. Chassaigne à la réponse que j'ai déjà faite à M. Paul.

M. le ministre délégué à l'industrie. Bien sûr, puisqu'il s'agit d'un amendement de repli !

M. Jean Proriol, rapporteur. Je signale tout de même que le vote de l'amendement en discussion, même s'il suspendait la transposition des directives, ne suspendrait pas les recours, injonctions et amendes imposées à la France.

M. le ministre délégué à l'industrie. Il ne suspendrait aucune poursuite !

M. André Chassaigne. Il nous laisserait au moins le temps de négocier !

M. Jean Proriol, rapporteur. À titre personnel, j'invite mon éminent compatriote André Chassaigne à relire les textes européens, notamment la future Constitution.

M. Daniel Paul. Nous y venons, justement !

M. Jean Proriol, rapporteur. Il y apprendra que toutes les mesures qu'il mentionne sont programmées.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14704.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14705.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. Mes chers collègues de la majorité, la conception que je me fais de la politique exige que, lorsqu'on se rend compte qu'on s'est trompé en prenant une décision - ce qui arrive, ce qui nous est arrivé,...

M. Yves Fromion. Cela vous est beaucoup arrivé depuis cinquante ans !

M. Daniel Paul. ...ce qui vous est arrivé aussi et ce qui vous arrive encore aujourd'hui -, on le reconnaisse et on se corrige.

M. Richard Mallié. Cela, en revanche, ne vous est pas arrivé souvent !

M. Daniel Paul. L'idée de la réversibilité de toute loi, et plus largement de tout texte juridique, devrait être une évidence pour les acteurs politiques.

Quand un élu, quel qu'il soit, décide de mettre en œuvre un projet et qu'il réalise, quelque temps après, que les objectifs qu'il visait n'ont pas été atteints ou qu'ils ont suscité des effets pervers inattendus, il doit pouvoir faire marche arrière.

Malheureusement, cette évidence n'en est pas une pour tout le monde. Pourtant, au vu de la situation économique et sociale en Europe, et au vu d'une croissance économique devenue atone sur le vieux continent depuis l'adoption du traité de Maastricht, il y aurait beaucoup à dire sur le contenu des politiques européennes qui ont été mises en œuvre.

Nous sommes d'autant plus inquiets que le projet de Constitution européenne, auquel M. le rapporteur vient de faire allusion et qui est en débat depuis quelques mois dans notre pays, ne vise à rien d'autre qu'à institutionnaliser des principes de politique économique et sociale qui, à l'évidence, mènent l'Europe à la faillite. En outre, et c'est peut-être encore plus lourd de conséquences, il en éloigne les citoyens en faisant d'eux non les acteurs d'une construction européenne, mais de simples spectateurs, de plus en plus dubitatifs et réfractaires.

Loin d'accepter de porter un regard critique sur leur action et donc d'être en mesure de concevoir qu'un acte politique soit réversible, les responsables communautaires ont choisi la fuite en avant, comme vous le faites, monsieur le ministre et mesdames, messieurs de la majorité.

Reconnaître la réversibilité des textes juridiques ne vous obligerait pourtant pas à affirmer la nécessité de défendre les services publics à la française.

Cet amendement est encore moins dicté par une volonté de voir tous les moyens de production et d'échange socialisés.

M. Yves Fromion. Merci ! On a déjà donné !

M. Daniel Paul. Il est seulement inspiré par un état d'esprit que vous prétendez souvent partager : le pragmatisme.

Être pragmatique, c'est accepter de reconnaître ses erreurs, ouvrir les yeux face à la réalité des faits, qui s'impose à nous, et donc accepter d'envisager la réversibilité des directives européennes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Les arguments apportés en défense des trois amendements précédents restent valables. Le parti communiste a tenté de nous proposer du gel,...

M. Yves Fromion. Oui ! Un froid sibérien !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...de la renégociation, puis de la suspension. Voilà qu'il nous offre à présent de la réversibilité. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Malheureusement, ces quatre propositions se heurtent au même rejet.

M. Yves Fromion. Ce n'est pas de la glasnost, c'est de la glaciation !

M. Daniel Paul. Vous êtes des intégristes !

M. Jean Proriol, rapporteur. Je signale tout de même à M. Paul que le texte de la directive prévoit un bilan dans quelques années pour savoir si l'on met un terme à l'ouverture du marché ou si on la pousse jusqu'au bout. Ce sera au Gouvernement, après 2007, à défendre les intérêts de la France à ce sujet.

En attendant, la commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis défavorable. Mais, pour rassurer M. Paul, je lui signale que tout acte juridique est réversible.

M. Daniel Paul. Eh oui !

M. le ministre délégué à l'industrie. À l'évidence, les conditions dans lesquelles il a été adopté peuvent, si elles sont réunies, donner lieu à son annulation en vertu de la règle du parallélisme des formes. Ainsi, dans ses principes, le droit vous donne d'ores et déjà satisfaction, monsieur Paul !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14705.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14706.

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

M. André Chassaigne. Je tiens à donner lecture de l'article que l'amendement prévoit d'insérer avant l'article 1er du projet de loi : « Le service public postal contribue à garantir la cohésion sociale, en assurant un égal accès de tous les citoyens aux services offerts par La Poste, en participant à la lutte contre les exclusions et au développement équilibré du territoire. »

Le rappel du rôle social du service public de La Poste modifierait toute la suite du projet de loi. En effet, de changement de statut en privatisation, d'alourdissement des contraintes financières en ouverture du secteur à la concurrence, l'objet social des services publics s'étiole peu à peu.

Nos services publics ont peu à peu été vidés de leur contenu. Parce que ce sont des monopoles publics, vous demandez, monsieur le ministre, de les briser au nom de l'ouverture à la concurrence. Mais votre politique anti-monopole est à géométrie variable. Vous ne montrez pas le même enthousiasme pour briser, par exemple, le monopole de la grande distribution.

Les services publics ont un objet social. Ils répondent à une exigence de notre société quant à la qualité de vie de nos concitoyens et concrétisent des valeurs fondamentales de notre République.

M. Claude Gatignol. Quel discours archaïque !

M. André Chassaigne. En vertu du principe d'égalité, on ne peut réserver aux uns et aux autres un traitement différencié. Des personnes qui habitent à la campagne, dans un quartier sensible ou dans un quartier bourgeois doivent pouvoir disposer du même accès au service. Il s'agit là de valeurs fondamentales non seulement du service public, mais même de notre République.

Cependant, cet état d'esprit a quitté les services publics. Loin de nous l'idée de leur conserver un attachement intemporel. Nous comprenons qu'ils puissent évoluer, mais dans le respect des principes républicains fondamentaux.

La démarche que l'on nous propose d'adopter aujourd'hui est celle d'une approche comptable de ces services et l'on oublie en définitive tout ce qu'ils peuvent apporter en termes de cohésion sociale.

Je précise que, à la campagne, ils ne fournissent pas seulement telle ou telle prestation. Par exemple, dans le monde rural, les facteurs ont un rôle de cohésion sociale important. Peu à peu, les coups qui sont portés à ces services le sont donc aussi à la cohésion sociale et à la qualité de la vie dans les campagnes.

M. Daniel Paul. Très juste !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. J'ai le plaisir de faire savoir à M. Chassaigne que sa proposition est déjà satisfaite.

M. le ministre délégué à l'industrie. Oui !

M. Jean Proriol, rapporteur. Je lui propose, de même que je l'invitais tout à l'heure à lire la Constitution européenne,...

M. André Chassaigne. De quelle Constitution parlez-vous ? Le texte serait-il déjà adopté ?

M. Jean Proriol, rapporteur. ...de se pencher sur le code des postes et télécommunications électroniques.

Son article 1er indique que « le service universel postal concourt à la cohésion sociale » - n'est-ce pas ce que vous nous avez dit ? - « et au développement équilibré du territoire » - n'est-ce pas que vous nous demandez ? Ce service « est assuré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. Il garantit à tous les usagers, de manière permanente et sur l'ensemble du territoire national, des services postaux répondant à des normes de qualité déterminées ».

Si cela ne suffisait pas, j'invite M. Chassaigne à lire le cahier des charges de La Poste. Il découvrira que les mêmes contraintes y sont mentionnées sous une forme et dans des phrases à peine différentes : « La Poste exerce ses missions de service public dans le respect du principe d'égalité de traitement des usagers [...]. La Poste assure [...] la neutralité [...] et l'adaptation constante de ses prestations. »

J'y relève encore cette phrase : « La Poste met en œuvre progressivement, pour la satisfaction des besoins de l'ensemble des usagers, les améliorations du service public rendues possibles par les progrès scientifiques et techniques. » Je pourrais continuer longtemps ainsi.

Il me semble donc que M. Chassaigne serait bien inspiré de retirer l'amendement n° 14706, qui est déjà satisfait par les textes en vigueur.

M. André Chassaigne. Ce serait considérer qu'un amendement est satisfait par une profession de foi !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis que la commission : l'amendement de M. Chassaigne est satisfait par l'article L. 1 du code des postes et télécommunications électroniques.

M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier.

M. Michel Vergnier. Le rapporteur et le ministre considèrent que l'amendement est satisfait ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Mais pas remboursé ! (Sourires.)

M. Michel Vergnier. La réalité existe, pourtant. Or j'ai l'impression, en les entendant, que la commission et le Gouvernement connaissent bien mal le monde rural.

M. Jean Proriol, rapporteur. Pardon ?

M. Yves Fromion. N'importe quoi !

M. le président. Monsieur Vergnier, ne provoquez pas vos collègues si vous ne voulez pas qu'ils vous interrompent !

M. Michel Vergnier. Je ne les provoque pas, mais il se trouve que je vis au milieu du monde rural.

Mme Bérengère Poletti. Démagogie !

M. Michel Vergnier. À ce titre, je connais les variables d'ajustement. Ce sont toujours les mêmes.

M. Yves Fromion. Mensonges !

M. Michel Vergnier. Inlassablement, nous devons répéter que l'on ne peut pas demander sans arrêt aux territoires ruraux d'être solidaires, sans leur proposer jamais de solidarité en retour. N'est-ce pas en effet de cela qu'il s'agit ?

La méthode est toujours la même. D'abord, on installe, on promet, on s'engage - jamais sur le long terme -, puis l'on prouve que cela ne marche pas. Et ce sont les gens qui vivent dans les territoires ruraux qui en subissent les conséquences. Si concurrence il doit y avoir, donnez à La Poste le pouvoir d'y résister !

M. Yves Fromion. C'est ce que l'on va faire !

M. Michel Vergnier. Sinon, qui viendra dans ces territoires pour permettre aux gens qui y vivent de bénéficier des mêmes droits que les autres ? La concurrence refusera d'y aller parce qu'elle estimera que ce n'est pas rentable.

Comptez sur nous pour vous rappeler inlassablement qu'en agissant de la sorte non seulement dans le secteur postal, mais aussi dans celui de la santé et de l'éducation, ce sont des pans entiers du territoire que vous condamnez.

M. le ministre délégué à l'industrie. Pour qui vous prenez-vous ?

M. Michel Vergnier. Ce n'est pas avec des incantations que vous nous convaincrez. C'est pourquoi je soutiens l'amendement n° 14706.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14706.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er

M. le président. Sur l'article 1er, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour transposer la directive européenne de 2002, l'option libérale et financière a été retenue envers et contre tous : contre les usagers, les salariés, les élus. Les conséquences d'un tel choix sont pourtant connues et analysées, en France comme à l'étranger, et dans bien des domaines. L'actualité de ces dernières années est éloquente à cet égard.

À brève échéance, les missions du service public postal risquent d'être, à leur tour, profondément bouleversées. Se pose ainsi la question de la durée de vie de la péréquation tarifaire, qui permet d'appliquer un tarif uniforme sur l'ensemble du territoire, notamment pour les régions d'outre-mer. Pour l'instant, celles-ci font partie du domaine réservé, mais qu'en sera-t-il d'ici à 2009 ? Doit-on s'attendre à une augmentation des tarifs de la correspondance entre les DOM et la France métropolitaine ? La continuité territoriale devra-t-elle subir de nouvelles entorses ?

Naturellement, l'ouverture totale à la concurrence du marché des services postaux nous est présentée comme la source de tous les bienfaits, mais ceux-ci seront pour les grandes entreprises, celles qui intéresseront la concurrence.

M. Arnaud Montebourg. Exact !

Mme Huguette Bello. Dans mon département, où 95 % des entreprises comptent moins de dix salariés, cette évolution sera surtout synonyme de difficultés supplémentaires.

On a également des raisons d'être inquiet pour ce qui concerne les conditions d'accès au réseau postal. Il y va, bien sûr, de l'égalité des citoyens, quels que soient leurs revenus et leur localisation, mais aussi du développement équilibré des territoires. Tout le monde sait que la présence d'un point contact chargé des services postaux peut conditionner la vitalité d'un quartier ou le sauver d'une lente agonie. À la Réunion, les guichets de La Poste accueillent chaque année l'équivalent de 6 millions d'usagers, soit 19 000 personnes par jour. Dans un tel cas de figure, appliquer le critère de la seule rentabilité financière entraînerait immanquablement la fermeture des bureaux de poste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Par ailleurs, il faudrait être bien naïf pour penser que la concurrence se préoccupera de la couverture de l'ensemble du territoire. Pour l'instant, le projet de loi ne lui en fait aucune obligation. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Une telle perspective est d'ailleurs taxée, dans les hautes sphères, de « protectionnisme ».

Quant à la création d'un établissement de crédit postal, il est plus que probable, compte tenu de sa structure juridique et du climat ambiant, qu'il deviendra rapidement autonome par rapport à La Poste et qu'il adoptera les critères de sélection en usage dans les banques. Toute une partie de la clientèle traditionnelle de La Poste, celle dont les revenus sont les plus modestes, en fera les frais. Ainsi, à la Réunion, où une grande partie de la population vit grâce aux minima sociaux, l'accès aux services financiers de base se trouve fragilisé. La solution retenue n'était pourtant pas inéluctable. En tout état de cause, beaucoup d'usagers se demandent désormais combien de temps La Poste restera le seul établissement à ne pouvoir refuser l'ouverture d'un compte.

À vrai dire, au lieu de consolider le service public postal, ce texte, qui prétend le moderniser, est en train de programmer, et de façon méthodique, l'inégalité entre usagers et entre territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Enfin, dois-je ajouter que, loin d'enrayer le processus de précarisation des personnels, le projet de loi risque au contraire de l'amplifier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, avec l'article 1er, vous nous proposez de franchir un pas supplémentaire dans l'ouverture à la concurrence des activités de courrier de La Poste.

Après avoir avalisé les directives européennes au sein des institutions communautaires, vous invitez les nouveaux entrants à capter les segments les plus rentables du marché postal, tels que les envois intra-urbains, dont le coût unitaire est le plus faible, laissant à l'opérateur historique la charge de remplir l'ensemble des missions de service public, tout en le dépouillant d'une grande partie des moyens qui lui permettraient de le faire. Pour assurer sa survie dans cet environnement concurrentiel, celui-ci est d'ores et déjà conduit à se positionner sur les segments les plus rentables de ses activités et à faire de la hausse de la productivité et des suppressions d'emploi un de ses moyens d'action.

Une fois de plus, vous imposez une logique libérale fondée sur l'ouverture à la concurrence, la privatisation des profits et la socialisation des pertes.

À l'instar de ce qui s'est passé dans le secteur des télécommunications, vous instituez un service public résiduel, que l'opérateur historique sera contraint d'assurer a minima, tout en s'alignant sur la gestion des opérateurs privés pour soutenir la concurrence.

Cet étranglement organisé de l'opérateur historique ne sera pas sans conséquences sur le réseau postal qui structure l'ensemble du territoire national. Ce que vous appelez l' « adaptation » du réseau postal restreint considérablement la présence sûre, complète et pérenne de La Poste sur le territoire et ronge à terme l'emploi public, dans un contexte où la lutte contre le chômage devrait pourtant être une priorité politique.

Chercher à réduire les dépenses de La Poste signifie tout simplement l'augmentation des coûts pour la société. Quand donc accepterez-vous de débattre ouvertement des coûts externes engendrés par cette vaste entreprise de démantèlement de tous les services publics ?

Les expériences d'ouverture à la concurrence du secteur postal chez nos voisins européens devraient pourtant vous inciter à la prudence, avant d'engager un processus dont les bénéfices pour la collectivité restent plus que douteux. Même la presse qui n'est pas réputée pour partager mes opinions - je pense à La Tribune ou au Figaro - a fait état de la déliquescence du secteur postal dans ces pays.

On sait le peu de prix que vous attachez aux arguments relatifs au bien-être social des salariés et des usagers, mais votre raisonnement est également faillible sur le terrain économique. Pour justifier votre projet de marchandisation d'un nouveau secteur public, vous n'avez de cesse de prétendre que l'entreprise publique est inefficace. Or l'examen de son bilan autorise que l'on en débatte.

Faut-il rappeler que La Poste est le deuxième groupe postal d'Europe et le quatrième au niveau mondial, que son chiffre d'affaires atteint plus de 18 milliards d'euros en 2003, la plaçant ainsi au vingtième rang français ? Comment ne pas souligner également son autofinancement, hors des recettes fiscales de l'État, grâce au timbre-poste et malgré vos efforts pour laisser à sa charge des missions qui devraient incomber directement à l'État ? Dès lors, on comprend mal l'obsession qu'ont certains de vouloir s'attaquer à un service public dont on ne voit pas en quoi il serait totalement dépassé.

Parmi les réussites de La Poste, nous comptons aussi, que cela vous plaise ou non, l'existence d'un réseau qui est le plus dense des réseaux publics - avec une couverture territoriale qui, même si elle est perfectible et doit prendre en compte les évolutions des territoires urbains et ruraux, garantit un égal accès aux services pour l'ensemble de la population -, un contact personnalisé avec le public et une utilisation des fonds financiers mise au service de la collectivité.

Dès lors, pourquoi s'acharner à ouvrir à la concurrence un secteur économique qui a fait les preuves de son efficacité et de son utilité, sinon pour offrir de nouveaux territoires aux financiers avides de profits supplémentaires ?

Notre pays devrait prendre en compte la richesse que représente, pour son territoire comme pour les territoires européens, l'existence d'un service public comme celui de La Poste.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur le ministre, le projet de loi en discussion vise à faire franchir à la France un pas de géant supplémentaire dans la déréglementation du secteur postal.

Le dogme libéral est formel : la concurrence est la mère de la prospérité, de la baisse des prix et de la liberté. Les commissaires européens, c'est-à-dire les gardiens du temple - je dirai même les gardiens des marchands du temple -, se chargent de diffuser avec ferveur ces beaux préceptes. Et vous, en bon soldat du néolibéralisme, vous appliquez aveuglément les textes communautaires, comme vous venez de le montrer en refusant nos amendements.

J'aimerais essayer de vous ouvrir les yeux, pour que vous voyiez le monde dans lequel nous vivons. Ainsi vous pourriez mesurer l'écart béant qui sépare les belles promesses des modèles mathématiques des apôtres du néolibéralisme de la réalité physique des conséquences de la déréglementation du secteur postal.

Prenons l'exemple du secteur postal en Suède. En 1993, ce pays fut l'un des premiers à privatiser la poste. Nous disposons donc aujourd'hui du recul nécessaire pour évaluer les bénéfices de cette déréglementation. Cet exemple est d'autant plus éclairant que la Suède est, comme la France, un pays assez peu densément peuplé, où des régions très urbanisées côtoient des zones rurales beaucoup plus isolées. N'étant jamais allé en Suède, je ferai le bilan de la privatisation de la poste de ce beau pays en me référant à un article de presse, paru il y a plusieurs mois dans un journal qui n'est pas L'Humanité, monsieur Proriol, mais Le Figaro, connu pour diffuser, selon les mots de son actionnaire principal, des « idées saines ». Permettez-moi de vous en citer quelques extraits :

« Dix ans après, le bilan est sans appel : le prix du timbre a doublé, 30 000 emplois parmi les 70 000 que comptait l'opérateur historique ont été supprimés et le nombre de bureaux de poste traditionnels a été divisé par cinq, et ils sont dévolus désormais aux entreprises.

« Pire, la Poste suédoise qui générait des profits est en déficit chronique depuis des années. Elle a perdu plus de 87 millions d'euros en 2002, un déficit qu'elle s'attend encore à creuser en 2003. La plupart des actifs ont été vendus, du système de paiement postal, très répandu en Suède, jusqu'aux bâtiments en passant par le siège social.

« Aujourd'hui, les particuliers suédois affranchissent les lettres et reçoivent leurs paquets dans quelque 3 000 points poste installés dans des supérettes, des tabacs ou des stations-service. »

La conclusion de cet article est sans appel :

« Les politiciens ont commis la première erreur en libéralisant le monopole en 1993, mais surtout par la suite l'État propriétaire n'a pas su justifier, défendre le service public. »

Chers collègues, ce tableau n'est-il pas magnifique ? Comment ne pas frémir à l'idée que vous cherchez, avec ce projet de loi que je qualifierai désormais de scélérat, à étendre à la France une réforme qui a échoué sur tous les plans là où vos missionnaires l'ont déjà mise en œuvre ?

La concurrence, dites-vous, est censée faire baisser les prix. Or ceux-ci ont doublé en Suède. Probablement parce que cette industrie de réseau constitue un monopole naturel.

La concurrence, dites-vous, est censée pousser les opérateurs à améliorer leurs prestations de service. Or ceux-ci se sont dégradés en Suède. Le service public n'y est plus qu'un lointain souvenir.

La concurrence, dites-vous, n'est pas censée améliorer les conditions de travail des employés ou l'emploi dans les entreprises. C'est bien la seule promesse que la libéralisation de la poste en Suède a effectivement respectée. Mais nous ne nous en réjouissons pas.

Aussi, avant de suivre aveuglément les pas de nos amis suédois, vous auriez pu répondre par l'affirmative à la proposition de Daniel Paul consistant à ce que soit établi un rapport chargé d'examiner les conséquences économiques, sociales et d'aménagement du territoire de la réforme que vous cherchez à nous imposer.

Comme vous le voyez, la présentation sommaire faite tout à l'heure par le ministre ne correspond pas vraiment à la réalité du terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. L'un de nos collègues m'ayant fait remarquer que deux orateurs du même groupe s'étaient exprimés sur l'article 1er, je rappelle que chaque député peut s'inscrire sur un article.

M. André Chassaigne. On veut nous empêcher de parler ! (Sourires.)

M. le président. Nous en venons aux amendements à l'article 1er.

Je suis saisi d'un amendement, n° 14654, tendant à supprimer l'article 1er.

La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre cet amendement.

M. Daniel Paul. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14654.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 9.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Quoique rédactionnel, cet amendement me semble poser un problème de sémantique. On transforme le « code des postes et télécommunications » en « code des postes et communications électroniques ».

Premièrement, je n'en vois pas tellement l'intérêt, puisque le terme « télécommunications » signifie « communications à distance ».

Deuxièmement, je rappelle que la gestion des communications va, dans un proche avenir, se faire notamment par voie hertzienne

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Exactement !

Mme Marylise Lebranchu. Or, à ma connaissance, les communications hertziennes ne sont pas des communications électroniques.

L'amendement ne me paraît donc pas justifié.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Je répète qu'il s'agit d'un amendement rédactionnel, justifié par le fait que l'article 1er de la loi du 9 juillet 2004 créant le paquet France Télécom, comporte cette expression. Par ailleurs, l'appellation « communications électroniques » a été retenue au niveau européen parce qu'elle couvre un champ plus large que le terme « télécommunications ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14750.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Nous allons débattre d'une série d'amendements dont l'adoption ne devrait poser aucune difficulté (Sourires.)

L'amendement n° 14750 vise à préciser ce que l'on entend par « distribution », puisque l'article 1er ne le fait pas. Pour nous, le processus de distribution va du tri effectué au centre de distribution jusqu'à la remise des envois postaux aux destinataires.

M. le rapporteur va certainement me répondre que la notion de distribution est déjà définie par l'article, qui indique que « constitue un envoi postal tout objet destiné à être remis à l'adresse indiquée ». Mais cette définition omet d'indiquer qu'il y a obligation de remettre l'envoi postal à l'adresse indiquée, précision qui nous paraît très importante.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission.

Je rappelle que l'article 1er dispose que, « pour l'application du présent code, les services postaux sont la levée, le tri, l'acheminement et la distribution des envois postaux ». Va-t-on définir, dans un autre article, ce que sont la levée, le tri, l'acheminement et la distribution des envois postaux ?

Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Cela pourrait être intéressant !

M. Jean Proriol, rapporteur. Il nous paraît que la définition des services postaux de l'article 1er se suffit à elle-même et ne nécessite pas de définitions supplémentaires.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Non, justement !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. J'ai le même avis. La notion de distribution ne souffre d'aucune ambiguïté dans le droit postal dans la mesure où elle est déjà précisée par l'Union postale universelle ainsi qu'à l'article 2, paragraphe 5, de la directive du 15 décembre 1997, qui définit la distribution comme le « processus allant du tri au centre de distribution jusqu'à la remise des envois postaux aux destinataires ».

Cet amendement est donc inutile.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Si les arguments de M. le ministre sont pertinents, je ne peux cependant approuver sa conclusion.

Si l'on suit son raisonnement, de nombreuses dispositions du projet de loi seraient inutiles, puisqu'elles reprennent les termes de la directive. La transposition qui nous est proposée serait alors soit incomplète, soit dangereuse.

En l'occurrence, la précision que nous souhaitons apporter n'est pas sans importance. Si, demain, La Poste n'a plus les moyens de distribuer le courrier à chaque destinataire et se contente de le mettre à disposition à la mairie ou au chef-lieu de canton, on s'étonnera que la définition complète de la distribution n'ait pas été inscrite dans la loi. Il n'y a donc aucune raison de s'opposer à notre amendement, qui est utile et non pas contraire à la directive.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14750.

M. Michel Vergnier. Un peu de courage, chers collègues !

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il faut recompter !

M. le président. Compte tenu des forces en présence, cela ne paraît vraiment pas nécessaire. Je confirme que l'amendement a été repoussé.

Je suis saisi de deux amendements, nos 14695 et 14738, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 14695.

M. André Chassaigne. Cet amendement vise à garantir l'égalité des prix sur l'ensemble du territoire.

Un des arguments inévitablement déployés par les apôtres de la libéralisation est que celle-ci ferait baisser les prix et que l'émulation entre les opérateurs conduirait nécessairement à une meilleure qualité pour les « clients ».

J'ai parlé tout à l'heure de la Suède. Je vous invite, chers collègues, à vous pencher sur les expériences offertes par nos autres voisins européens, ainsi que sur les nouvelles pratiques de La Poste française, pour soumettre à l'examen critique la validité d'un tel propos.

La segmentation des clients et des tarifs se développe un peu partout, et l'égalité de traitement entre les usagers est largement mise à mal.

En France, la priorité aux grands comptes dans les flux, avec la création de Tem'Poste, accompagnée de pénalités en cas de non-respect des délais, se met en place.

En Grande-Bretagne, Royal Mail teste un service payant pour ceux qui reçoivent moins de vingt lettres par jour et qui souhaitent recevoir le courrier avant neuf heures le matin.

En Belgique, la nouvelle direction, après avoir abandonné un projet similaire à celui de la Grande-Bretagne, institue un courrier « Prior » à J+1, facturé 7 centimes d'euro supplémentaires, et un courrier « non Prior » à J+3, pour un prix quasi équivalent au J+2, c'est-à-dire 41 centimes d'euros au lieu de 42.

M. Daniel Paul. C'est vers cela que l'on s'achemine !

M. André Chassaigne. En Allemagne, certains services qui étaient gratuits, comme le suivi du courrier après changement d'adresse, sont maintenant facturés aux usagers.

Au risque de me répéter, je rappelle que le prix du timbre suédois a doublé en dix ans.

Le paragraphe IV de l'article 1er du projet de loi, relatif aux contrats dérogeant aux conditions générales de l'offre de service universel et incluant des tarifs spéciaux pour des services aux entreprises, montre s'il en était besoin que La Poste s'inscrit elle aussi dans cette logique de mise à mal de la péréquation tarifaire et que la poursuite de la libéralisation ne se fera pas au bénéfice de la majorité des usagers.

Cela nous inspire deux questions : premièrement, de quelles garanties de service public bénéficieront les usagers quand l'ouverture à la concurrence sera généralisée ? Deuxièmement, les « petits consommateurs » ne seront-ils pas pénalisés par la hausse des tarifs ?

M. Arnaud Montebourg. Évidemment !

M. Jérôme Lambert. Ce sont toujours les mêmes qui trinquent !

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 14738, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 14738.

M. François Brottes. Nous voterons l'amendement de nos collègues communistes, mais nous lui préférons tout de même notre amendement n° 14738. Celui-ci constitue un moment de vérité où chacun doit décider en conscience - c'est pourquoi nous avons demandé un scrutin public - s'il souhaite qu'un tarif unique du timbre continue à être garanti sur l'ensemble du territoire. Cela ne signifie pas le même tarif pour l'éternité. Ce qui est important, c'est que, quel que soit leur lieu de résidence, l'ensemble de nos concitoyens puissent bénéficier d'un égal accès au service public de La Poste, comme en matière de prix du kilowattheure ou du raccordement du téléphone fixe ou de l'électricité.

Bref, et comme nous nous en sommes déjà expliqués, nous considérons que la notion fondamentale du service public à la française n'est pas suffisamment garantie par le service universel. C'est pourquoi il nous semble indispensable de préciser que le timbre doit être proposé au même tarif sur l'ensemble du territoire national.

M. le président de la commission m'a indiqué, tout à l'heure, que nous avions déjà voté cet amendement...

M. Patrick Ollier, président de la commission. Absolument !

M. François Brottes. ...et que l'on faisait là un mauvais procès à la majorité. Effectivement, l'amendement a été voté en ces termes dans un premier temps. Mais le Sénat l'a ensuite rejeté. Puis, l'Assemblée, sous l'impulsion du président de notre commission et du rapporteur Coussain, ...

M. Patrick Ollier, président de la commission. Et la vôtre aussi !

M. François Brottes. ...a proposé, dans le cadre de l'examen du texte relatif aux territoires ruraux, de réintroduire cette notion de tarif unique. Mais, et c'est cela qui nous gêne, la rédaction retenue dans ce dernier texte lie le maintien du prix unique de la prestation de base à la survie d'un secteur réservé.

Si nous avions la garantie que le Gouvernement se battra pour maintenir un secteur réservé, nous n'aurions pas besoin de soutenir l'amendement n° 14738. Cette garantie n'étant pas acquise - loin de là ! - nous souhaitons donc que soit inscrit dans le marbre de la loi que les services seront garantis au même tarif sur l'ensemble du territoire national. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a rejeté ces deux amendements pour les motifs suivants.

M. Pierre Cohen. Les masques tombent !

M. Jean Proriol, rapporteur. Les tarifs ne peuvent être identiques sur tout le territoire que pour les prestations de base égrenées, c'est-à-dire hors envoi en nombre, et que si le monopole est maintenu. (« Et voilà ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. André Chassaigne. Le loup sort du bois !

M. le président. Chers collègues, laissez répondre le rapporteur !

M. Jean Proriol, rapporteur. Je ne comprends pas vos clameurs : vous avez accepté hier que le Gouvernement que vous souteniez ouvre le marché, mais vous refusez aujourd'hui les conséquences de cette décision. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre Cohen. Vous avouez !

M. Jean Proriol, rapporteur. Le manque de logique est chez vous, et non chez nous !

M. Yves Fromion. Ils n'ont pas non plus le monopole du cœur !

M. André Chassaigne. Vous, vous avez le monopole du fric !

M. Jean Proriol, rapporteur. L'article 12 de la directive permet d'appliquer un tarif unique sur l'ensemble du territoire. C'est ce que fait et continuera de faire La Poste.

M. Arnaud Montebourg. Alors, écrivez-le dans la loi !

M. Jean Proriol, rapporteur. En revanche, il est difficile d'appliquer un tarif unique dans la partie concurrentielle du service universel, sauf à encourager des pratiques d'écrémage des concurrents qui focaliseraient leur offre là où ils sont moins chers que le titulaire, La Poste. Vous donneriez alors une prime à celui qui vient faire l'écrémage parce qu'il le fera au tarif unique, qui pourra être supérieur à celui qu'il aurait pu proposer. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jérôme Lambert. C'est aussi compliqué que la sécu !

M. Jean Proriol, rapporteur. Enfin, et les élus ruraux le savent, lors de l'examen des dispositions relatives aux territoires ruraux - texte actuellement soumis au Sénat -, nous avons voté un amendement prévoyant les dispositions suivantes : « Hormis les envois de correspondance en nombre, les services postaux constituant le secteur réservé sont proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire national. » Dès lors, il ne me semble pas utile de voter à nouveau cet amendement aujourd'hui, même par scrutin public.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement souscrit à l'analyse lumineuse du rapporteur. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Brottes. Monsieur le président, je demande la parole.

M. le président. Je vais vous donner la parole pour une courte intervention, le scrutin ayant d'ores et déjà été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

M. François Brottes. Monsieur le président, vous le savez bien, nous n'avons pas pour intention de demander systématiquement des scrutins publics pour pouvoir intervenir. Vous avez bien compris que ce n'est pas comme cela que nous souhaitons travailler.

M. le président. Monsieur Brottes, vous êtes déjà intervenu pour défendre votre amendement.

M. François Brottes. Monsieur le président, je n'ai pas totalement intégré tout ce qu'a égrené M. le rapporteur... (Sourires.)

M. Yves Fromion. C'est trop compliqué pour vous !

M. François Brottes. Peut-être. Nous ne sommes pas tous dotés de votre grande intelligence, cher collègue !

M. Bernard Accoyer. C'est vrai !

M. François Brottes. Il est dommage, cependant, que vous ne fassiez pas profiter davantage l'hémicycle de cette qualité. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

Monsieur le rapporteur, ne noyez pas le poisson ! Nous ne parlons pas ici des services d'ores et déjà sous concurrence. C'est sur le secteur réservé et les missions de service public que nous voulons un engagement de tarif unique sur l'ensemble du territoire.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Il est pris !

M. François Brottes. Non parce que nous n'avons pas la garantie que le secteur réservé sera maintenu ! Si cet engagement est pris en dehors de toute autre considération, il vaudra pour toute la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Daniel Paul. Monsieur le président, je demande la parole.

M. le président. Ce n'est pas possible, monsieur Paul.

M. Daniel Paul. Pourquoi ?

M. le président. J'ai donné la parole à M. Brottes parce que j'ai considéré qu'il voulait éclairer l'Assemblée sur sa demande de scrutin public.

M. Jean Launay. Mais M. Paul avait demandé la parole avant M. Brottes !

M. le président. Ce n'est pas le problème. J'applique le règlement : le scrutin a été annoncé depuis plus de cinq minutes.

Monsieur Paul, vous êtes très largement intervenu depuis le début de cette séance. Il faut à présent passer au vote.

Je mets aux voix l'amendement n° 14695.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 14738.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 114

                    Nombre de suffrages exprimés 112

                    Majorité absolue 57

        Pour l'adoption 49

        Contre 63

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien !

Rappel au règlement

M. Daniel Paul. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour un rappel au règlement.

M. Daniel Paul. J'avais demandé la parole...

M. le président. Le scrutin avait été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale, monsieur Paul.

M. Didier Migaud. Et alors ?

M. Daniel Paul. Je voulais donner notre appréciation après l'intervention du rapporteur.

M. le président. Il n'y a pas d'explications de vote sur les amendements. Je vous ai donné la parole lorsque vous étiez inscrit sur un article ou pour soutenir un amendement. M. Chassaigne et vous-même avez eu l'occasion de vous exprimer à de très nombreuses reprises depuis le début de cette discussion.

M. Daniel Paul. Je demandais la parole pour répondre au rapporteur à propos de deux amendements qui sont au cœur du débat. Vous avez refusé de me la donner. Je demande maintenant une suspension de séance.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Très bien !

M. le président. Je vais suspendre la séance pour cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt-cinq, est reprise à vingt-trois heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. François Brottes. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. Monsieur le président, nous voulons vous faire part de notre incompréhension sur la manière dont est appliqué le règlement de notre assemblée, et appeler votre attention sur le fait que les députés peuvent répondre à la fois au ministre et au rapporteur - ce qui n'est pas incompatible avec la règle des cinq minutes.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Répondre deux fois n'est pas une obligation !

M. François Brottes. Pour que le débat puisse se poursuivre dans la sérénité, nous souhaiterions rencontrer la présidence pendant une courte suspension de séance, de façon à lever toute ambiguïté. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous ne remettons nullement en cause la présidence, mais nous voulons comprendre.

M. le président. Monsieur Brottes, donner la parole sur chaque amendement à un orateur pour et à un orateur contre est une faculté, et non une obligation - vous le savez très bien.

M. Bernard Accoyer. Tout à fait ! Rappelons-nous comment présidait M. Glavany : nous n'avions pas le droit de bouger, ni celui de parler ! (Sourires.)

M. le président. Je n'étais pas là, monsieur Accoyer !

Monsieur Brottes, vous avez déposé une demande de scrutin public. Or, à partir du moment où le scrutin avait été annoncé dans le Palais, il a paru qu'il n'y avait pas à poursuivre le débat sur l'amendement, d'autant que la présidence avait le sentiment que chacun avait pu s'exprimer longuement depuis le début de la séance.

M. Paul, notamment, s'est exprimé sur un grand nombre d'amendements.

Depuis le début de cette séance, monsieur Brottes, un climat de cordialité a prévalu, et vous y avez fortement contribué.

Ce climat conduit à considérer - d'autant qu'il s'agissait davantage, dans votre cas, d'une présentation de l'avis du groupe socialiste et d'une réponse à M. Paul plutôt qu'au ministre ou au rapporteur - qu'il n'y a pas lieu de rompre le rythme de notre débat.

M. François Brottes. J'ai bien noté, monsieur le président, que vous ne donniez pas suite à la suggestion que fait M. Accoyer de durcir la présidence...

Et, effectivement, vous avez été d'une grande courtoisie et d'une grande cordialité.

Je maintiens toutefois ma demande de suspension pour réunir mon groupe.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures trente-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

Je suis saisi d'un amendement n° 14735.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Cet amendement important est en quelque sorte un amendement de rattrapage. Tout à l'heure, notre assemblée, dans sa majorité, a rejeté la précision qui consistait à définir la distribution, notamment l'indication du destinataire du courrier.

Dans cet article sur le service universel postal, je vous indique, mes chers collègues, que nous sommes très favorables à la proposition du Gouvernement de préciser que la distribution doit être assurée tous les jours ouvrables. En revanche, puisqu'on parle de distribution et de service universel postal, nous souhaitons préciser que cette distribution a lieu « au domicile de chaque personne physique ou morale ou dans des installations appropriées à la demande du destinataire ». Ce sont notamment les boîtes postales.

Cette précision est importante, parce que, demain, pour des raisons économiques, on envisagera peut-être de réduire la distribution à domicile, sous prétexte que les destinataires situés à trois kilomètres ou cinq kilomètres du centre de tri sont trop éloignés. On demandera alors aux personnes de venir chercher leur courrier, et peut-être enverra-t-on le garde champêtre chercher le courrier des habitants de la commune ! Cela posera certainement des problèmes.

Personne ici n'ayant d'autre intention que de laisser les facteurs se rendre au domicile de chaque personne, physique ou morale, il est important de le préciser dans la loi.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. L'amendement de M. Brottes est le jumeau de l'un de ses amendements précédents, puisqu'il consiste à reprendre une phrase de la directive pour l'introduire dans le dispositif législatif français.

Nous approuvons cette directive, l'ayant très largement inspirée. Je vous rappelle que tous nos gouvernements se sont battus pour que le service universel postal communautaire soit le plus proche de ce qui se pratique en France. La distribution au domicile est une tradition française, même si elle n'est pas écrite. Nous ne jugeons donc pas utile d'introduire cette phrase, d'autant que le chapitre 2, article 3 de la directive indique que la distribution s'effectue au domicile de chaque personne physique ou morale.

Par ailleurs, la loi que veut modifier M. Brottes a été votée le 29 juin 1999. Il aurait été bien inspiré alors d'introduire la notion de domicile, à laquelle il paraît aujourd'hui beaucoup tenir. J'ajoute que, sur un plan pratique, l'introduction de ce membre de phrase n'est pas idéale.

Sur le fond, je vous le confirme, il n'y a pas lieu d'introduire cette précision, puisque nous appliquons le service universel tel que la directive le prévoit et sous toutes ses formes.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis que le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le président, je voudrais juste donner un peu de temps aux députés de la majorité pour rejoindre l'hémicycle avant le vote de mon amendement ! (Sourires.)

M. le président. C'est déjà fait, monsieur Brottes !

M. François Brottes. C'était pour vous être agréable, monsieur le président !

M. le président. La présidence est neutre, vous le savez bien !

M. François Brottes. Je l'ai constaté, monsieur le président ! Mais peu importe que nos collègues de la majorité ou de la minorité ne soient pas à leur place, car je ne doute pas que cet amendement sera adopté à l'unanimité !

Monsieur le rapporteur, votre raisonnement consiste, à chaque fois, à réécrire l'histoire. C'est dommage ! Certes, cette précision ne figurait pas jusqu'à présent dans la loi, mais elle n'était pas nécessaire car la taille du secteur réservé, sous monopole, de La Poste lui garantissait des revenus suffisants pour accomplir ses missions de service public jusqu'au domicile des destinataires. Aujourd'hui, le secteur réservé diminue comme peau de chagrin. Les moyens ne seront donc plus au rendez-vous et il nous faudra faire des arbitrages budgétaires. D'ailleurs, c'est déjà le cas !

Parmi les menaces que nous dénonçons, comme sur le maintien du tarif unique - et l'on a raison d'être inquiet puisque vous avez rejeté cette proposition tout à l'heure -, il y a aussi la menace que la distribution ne s'effectue plus avec un maillage aussi fin et au plus près de l'ensemble de nos concitoyens destinataires de courriers. Il est donc aujourd'hui nécessaire, alors que ça ne l'était pas hier, d'indiquer que cette distribution s'effectue au domicile de chaque personne physique ou morale.

Je le dis à mes collègues qui, de retour dans leur circonscription, devront expliquer qu'ils n'ont pas souhaité voter une disposition maintenant la distribution du courrier au domicile de chacun : nos concitoyens seront très inquiets.

J'invite donc toute l'Assemblée, majorité comme minorité, à voter cet amendement. Nous essayons, en quelque sorte, d'aider cette majorité (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) à avoir une approche de la cohésion sociale beaucoup plus forte et à faire en sorte qu'elle puisse tenir dans la sérénité jusqu'à la fin de son mandat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14735.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14762.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Un scrutin public sur ces amendements permettrait de faire une analyse ultérieure. Mais peu importe : je vais défendre cet amendement.

Nous souhaitons que la loi précise ce qu'on entend par « réseau postal public ». La directive nous y invite, comme le rappellera le rapporteur, qui la connaît bien mieux que moi.

Dans ce réseau postal public, il ne doit pas y avoir tout et n'importe quoi. Nous souhaitons qu'il y ait bien une forme de labellisation des entités qui sont dans ce réseau postal public et que ces entités exécutent tout ou partie des missions du service universel et du service public postal.

Notre crainte est d'avoir un réseau composite avec des entités qui n'ont plus grand-chose à voir avec l'éthique du service postal - la confidentialité, le professionnalisme, bref la rigueur. D'où la nécessité de définir dans la loi la notion de réseau postal public afin que n'y soient pas assimilées des entités qui n'ont rien à voir avec les missions du service public postal.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission.

Il est vrai que l'amendement n° 18 de la commission introduit lui-même la notion de réseau de La Poste, mais dans la loi du 2 juillet 1990 de l'ancien ministre Quilès, pas dans celle-ci.

Le code des postes et télécommunications ne considère La Poste que comme prestataire, pas comme un exploitant public chargé d'une mission de participation. Nous sommes défavorables à l'amendement car il faudrait alors déplacer cette définition dans la loi de 1990.

Par ailleurs, je fais remarquer à M. Brottes que le groupe socialiste - et parfois, mais un peu moins, le groupe communiste - dit pis que pendre de cette directive et, subrepticement, au gré de nombreux amendements successifs, nous propose d'introduire dans le texte de la loi des phrases entières dûment sélectionnées de ladite directive. C'est pour le moins paradoxal, contradictoire...

M. Daniel Paul. Ça, ce n'est pas nous !

M. Jean Proriol, rapporteur. Certes, mais vous votez quand même ce que propose le groupe socialiste !

M. Daniel Paul. Non, pas obligatoirement !

M. Jean Proriol, rapporteur. Je vous prends en flagrant délit, monsieur Paul, et cela m'étonne de votre part !

Dernier point, la phrase que vous nous proposez d'introduire n'est pas tout à fait celle de la directive. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Augustin Bonrepaux. Vous êtes en pleine contradiction !

M. Jean Proriol, rapporteur. Nous nous en tenons à la directive, toute la directive et rien que la directive, sauf quand nous la modifions et l'améliorons. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Quant à vous, nous ne vous suivons pas sur ce terrain !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le rapporteur, économisez les procès d'intention : ils n'ont rien à voir avec les prises de position qui sont les nôtres.

Nous ne disons pas pis que pendre de la directive, mais de la manière qui est la vôtre de la transposer, ce qui n'est pas la même chose ! À chaque fois que nous pouvons vous faire un rappel à la directive - car elle est porteuse d'un certain nombre de dispositions intéressantes et utiles dans le cadre du service public postal -, nous le faisons.

En effet, ce qui nous inquiète, c'est votre interprétation partielle, pour ne pas dire partiale, de la directive. C'est pourquoi il est important, chaque fois que c'est nécessaire, et nous le faisons dans plusieurs amendements, d'inscrire dans la loi française le maximum de garanties que la directive nous autorise à inscrire. Or nous sommes inquiets lorsque vous opposez votre refus car il montre bien que votre interprétation de la directive est ultralibérale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14762.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14763.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Il y a également un terme générique dans la directive : « points de contact ». Il est nécessaire de préciser cette notion car, pour nous, le point de contact n'est pas forcément la délégation de service public à tel ou tel acteur économique qui n'a pas grand-chose à voir avec l'éthique du service public postal.

Cet amendement précise que ces points de contact de La Poste concourent à l'exécution du service universel, en en précisant les contours, les missions, et, surtout, que les personnes en charge de ce service sont astreintes à un devoir de réserve et de neutralité.

Ce faisant, nous sommes au cœur de l'éthique républicaine, de celle des fonctionnaires de La Poste notamment et des fonctionnaires territoriaux, et nous apportons des garanties très importantes, qui comptent pour les usagers de La Poste.

Voilà pourquoi l'amendement ainsi rédigé affirme cette sécurité pour l'ensemble de nos concitoyens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.

Monsieur Brottes, la notion de présence postale relève de la loi du 2 juillet 1990. Les principes que vous évoquez sont redondants avec ceux mentionnés à l'article 2 de cette loi qui fait l'objet d'une rédaction que nous avons améliorée à l'article 8 du présent projet de loi.

M. François Brottes. Peut mieux faire !

M. Jean Proriol, rapporteur. Chaque activité est régie par les textes la concernant, ce qui renvoie à l'article L.1 du code des postes et télécommunications pour les services postaux et à l'article L.518-25 du code monétaire et financier pour les services financiers.

S'agissant de la deuxième partie de l'amendement et qui porte sur la confidentialité, une note de La Poste, envoyée à tous les maires le 18 janvier, donc hier, traite de cette question.

M. François Brottes. Ce n'est pas La Poste qui fait la loi, c'est le Parlement !

M. Jean Proriol, rapporteur. J'en donne la teneur à l'Assemblée car, effectivement, certaines questions peuvent se poser dans les chaumières auvergnates - ou d'ailleurs !

Je cite :

« La confidentialité est bien assurée dans un point Poste. Lorsqu'un point Poste se met en place, La Poste et le commerçant signent un contrat qui engage ce dernier sur le respect de la confidentialité des opérations et le respect des règles postales.

« En 2005, La Poste va mettre en place une charte de déontologie qui sera signée par le commerçant afin d'officialiser le respect des valeurs de La Poste.

« Par ailleurs, le commerçant n'a absolument pas accès aux comptes financiers de ses clients. »

J'espère ainsi avoir rassuré ceux qui s'interrogeaient sur la notion et le respect de la confidentialité des transactions postales.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je n'ai pas bien compris la fin du propos de M. le rapporteur : le commerçant n'a pas accès aux comptes financiers du client, a-t-il indiqué.

J'ai une question très précise. S'il s'agit de points Poste qui proposent un service du type vente de timbres ou de colis prétimbrés, étant donné que cela existe déjà, il n'y a rien de très innovant et, comme on dit chez moi de façon parfois un peu vulgaire, il n'y a « rien de grave » ! Mais que se passera-t-il s'il s'agit des services financiers ? En effet, si une personne demande de l'argent à ce point contact et que, par un concours de circonstances, son compte n'est pas approvisionné parce que son salaire a été versé un peu tard, le commerçant répondra à la personne : j'ai des instructions pour ne rien vous donner !

Par conséquent, je ne peux pas vous laisser dire qu'en aucun cas le commerçant n'aura pas connaissance des comptes financiers de l'usager !

Sur cette question particulièrement importante - nous touchons à l'intime, au privé, à la confidentialité -, il faut apporter des réponses beaucoup plus claires, monsieur le rapporteur.

M. le président. Je vais donner la parole à M. Arnaud Montebourg pour quelques instants, puis à M. Daniel Paul.

J'espère qu'on ne considérera pas après cela que la présidence n'est pas indulgente ! (Sourires.)

M. Arnaud Montebourg. Elle est clémente, monsieur le président, et nous vous remercions.

M. le président. Merci, monsieur Montebourg !

M. Jean Leonetti. Excessivement !

M. le président. Vous le voyez : « excessivement » clémente !

Vous avez la parole, monsieur Montebourg.

M. Arnaud Montebourg. C'est un débat fondamental, et nul ne nous reprochera d'avoir pris quelques secondes supplémentaires pour l'aborder.

Cette affaire de confidentialité est évoquée par M. le rapporteur Proriol sous la forme d'une charte de déontologie - hypothétique - qui viserait à remplacer l'expression de notre volonté collective.

Nous constatons la manière dont le service public se retrouve aujourd'hui dégradé : avec ce texte de loi, il se transforme et prend une forme un peu privatisée puisque ce sont des commerçants qui vont effectuer les opérations postales et financières.

Vous me permettrez de poser la question de la confidentialité dans des conditions pareilles !

Pour l'usager du service public, l'épicier ou le boulanger n'est pas le postier ! Or ce texte de loi implique que l'usager accepte de révéler une partie de sa vie personnelle à l'épicier de son village !

Vous nous répondez qu'il y aura une charte.

D'abord, nous apprenons qu'il y en aura une ! Ensuite, nous ne connaissons pas la teneur de cette charte, nous n'évaluons pas la quantité de sanctions qui y sera annexée et nous ne savons pas quelle est l'autorité qui sanctionnera ! En cas de sanction, quelle sera-t-elle ? La fermeture ? Ah bon !

M. Jérôme Lambert. Il n'y a plus de « points Poste » alors !

M. Arnaud Montebourg. Vous le constatez : ces questions sont improvisées, elles ne sont pas résolues.

Monsieur le président, permettez-moi de réveiller un peu le ministre, car il faudrait que, là, pour le coup, il s'exprime pour nous donner des assurances et nous préciser ce qu'est cette charte de déontologie qui sort de la poche révolver du rapporteur Proriol...

M. Jérôme Lambert. On remplace le « point Poste » par quoi ?

M. Arnaud Montebourg. ...et qu'il nous explique comment elle fonctionne !

Dans ma jeunesse - passée - j'ai été, comme le ministre, avocat. La profession d'avocat est régie par des clauses de confidentialité, avec une déontologie, un bâtonnier, qui renvoie au mot « bâton ». Nous savons ce que veut dire le mot, à l'instar des médecins ou d'autres professionnels astreints au secret professionnel.

Je sais ce qu'est un secret professionnel : l'article 378 du code pénal nous envoyait aux fers et dans les geôles de la République si nous le violions !

Je ne sais pas ce que c'est qu'une charte de déontologie, monsieur le rapporteur, qui sent un peu la guimauve ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour une intervention tout aussi brève que celle de M. Montebourg.

M. Daniel Paul. J'ai sous les yeux un extrait d'un journal, Jourposte 76, qui décrit la façon dont un point Poste s'est substitué à une agence postale qui fonctionnait à plein temps dans un quartier du Havre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Mais non !

M. Daniel Paul. Je connais cette agence, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à l'industrie. Moi aussi !

M. Daniel Paul. Si quelqu'un veut retirer 150 euros tous les sept jours, il faudra bien que le responsable du point Poste vérifie si son compte est approvisionné. Il aura donc connaissance de sa situation.

M. André Chassaigne. M. Proriol a menti !

M. Daniel Paul. Ce n'est pas bien, monsieur Proriol. Il y a délit de mensonge. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à l'industrie. Un minimum de courtoisie s'impose ! Il n'est pas convenable de traiter ainsi quelqu'un de menteur !

M. Daniel Paul. Pardonnez-moi, monsieur le ministre.

Imaginons que j'aie une ardoise chez un commerçant qui tient le point Poste et que, ayant eu une rentrée, j'aille retirer de l'argent, non pas pour rembourser ce que je lui dois, mais pour payer EDF.

M. Richard Mallié. C'est scandaleux !

M. Daniel Paul. Cela n'a rien de scandaleux si c'est pour payer une facture d'électricité...

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est votre droit !

M. Daniel Paul. ...dont j'estime qu'elle est prioritaire.

M. Richard Mallié. Et vous vivez à crédit sur le dos des commerçants !

M. le président. Monsieur Mallié !

M. André Chassaigne. Monsieur Mallié, avez-vous entendu parler de la pauvreté ?

M. Pierre Cohen. Ça, c'est de la vraie droite !

M. Daniel Paul. Redescendez sur terre, cher collègue !

M. Richard Mallié. Je sais ce que c'est : je suis fils de commerçant !

M. Daniel Paul. Vous croyez vraiment que, avec la charte, le commerçant oubliera, au moment où je retirerai de l'argent au point Poste, que je lui en dois dans la pièce voisine ? Est-ce vraiment votre conception de la confidentialité ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg. Le ministre se lève. C'est la première fois. Il nous parle. Quelle chance ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Drut. Arrête un peu, péteux !

M. le ministre délégué à l'industrie. Oui, monsieur Montebourg, je réponds quand on me pose de bonnes questions, qu'elles ne sont pas répétitives et qu'elles ne sont pas inspirées par une volonté d'obstruction pure et simple.

Monsieur Paul, je ne voudrais pas employer le même langage que vous. Mais, quand vous nous avez raconté l'histoire du point Poste du Havre, vous vous êtes trompé.

M. Daniel Paul. Mais non !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous pensez bien que j'ai vérifié.

M. Augustin Bonrepaux. Vous êtes allé au Havre ?

M. le ministre délégué à l'industrie. L'agence postale du Havre a été fermée à la demande du maire et des élus : vous n'allez pas leur dénier ce droit.

M. Daniel Paul. Bien sûr que non !

M. le ministre délégué à l'industrie. D'autre part, elle n'avait qu'une heure d'activité effective par jour.

M. André Chassaigne. Qu'est-ce que ça veut dire, une heure ? C'est ridicule !

M. le ministre délégué à l'industrie. Cela ne correspond donc pas à ce que vous nous avez dit cet après-midi. Je n'emploierai pas le mot désagréable que vous avez prononcé à propos de M. Proriol. Je dis simplement que, en nous racontant cette histoire, vous vous êtes trompé et que vous nous avez trompés. Chaque fois que vous affirmerez quelque chose de ce genre, je le ferai vérifier.

M. Montebourg a posé une question intéressante...

Mme Marylise Lebranchu. Cruciale !

M. le ministre délégué à l'industrie. ...et je reconnais bien la marque de sa formation professionnelle dans l'exigence qu'il exprime.

Quand La Poste s'engage avec un commerçant, elle lui fait signer une convention-type, dont l'article 12, intitulé « Confidentialité », est ainsi formulé : « Tant pendant le cours de la présente convention que pendant une durée de cinq ans après son expiration pour quelque cause que ce soit, les parties doivent garder strictement confidentiels les renseignements techniques et commerciaux échangés dans le cadre de la mise en œuvre de la présente convention. Les parties sont responsables du respect par leur personnel de la même obligation de confidentialité. »

M. André Chassaigne et M. Arnaud Montebourg. Quelles sanctions ?

M. le ministre délégué à l'industrie. La sanction, c'est la résolution du contrat.

M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas sérieux !

M. le ministre délégué à l'industrie. En outre, comme il a engagé sa responsabilité, celui qui a contrevenu à cet engagement contractuel sera poursuivi devant les tribunaux.

M. Didier Migaud. Mais, après cela, il n'y aura plus du tout de bureau de poste !

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 14763, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Chacun l'a compris, ce sujet est aussi grave que celui du tarif unique. Je rappelle que les postiers prêtent serment, même ceux qui sont employés en contrat à durée déterminée. Lorsqu'une erreur est commise, il y a sanction. On change de postier.

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est la même chose !

M. François Brottes. Lorsque, dans le cadre d'une relation commerciale avec La Poste, un commerçant commettra une erreur − pas forcément dans l'intention de nuire, mais peut-être par manque de professionnalisme postier et de formation −, la charte s'appliquera. Mais qui jugera que le niveau de gravité de la faute justifie que le contrat commercial soit rompu ? Quelle instance prendra la mesure en faisant en sorte qu'elle ne soit pas contestable par le commerçant ? L'ART ? Le contrat précisera-t-il les conditions dans lesquelles il peut être rompu et les conditions d'appel ou de recours ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Oui !

M. François Brottes. Ces précisions sont indispensables, et c'est pourquoi nous vous demandons de voter notre amendement, qui propose d'inscrire ces garanties dans la loi : nous disposerions ainsi d'un support solide auquel accrocher tous les futurs contrats. Pour l'heure, ce que nous propose le projet de loi ne relève que de la poésie ou du folklore.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert. En cas de faute et de sanction, qui paiera les pots cassés ? Les usagers. Quand un postier commet une faute, il est remplacé.

M. le ministre délégué à l'industrie. Là aussi !

M. Jérôme Lambert. Mais, quand un commerçant commet une faute, le point Poste ferme. Dans un village de ma circonscription − Hiesse, en Charente −, il n'y a qu'un seul commerçant. Il a beau être fort bon, s'il était amené à ne plus tenir le point Poste, il n'y en aurait plus à Hiesse. La question ne se poserait pas dans le cas d'une agence postale tenue par des employés de La Poste.

M. André Chassaigne. Très bien !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 14763.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 109

                    Nombre de suffrages exprimés 109

                    Majorité absolue 55

        Pour l'adoption 52

        Contre 57

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. Jérôme Lambert. On y est presque ! Continuons !

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14655.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. Nous proposons de supprimer le III de l'article 1er.

La directive de l'Union européenne du 15 décembre 1997 comporte, dans son chapitre 2, des consignes relatives au service universel en matière d'activités postales. Les articles 3 à 6 de la directive énumèrent une série d'obligations pour les États, qui incombent de fait à l'opérateur historique. Les ambitions affichées dans les textes de loi sont cependant relativement minimalistes si l'on considère l'ensemble des missions que peuvent remplir les entreprises publiques. Cohésion sociale, aménagement du territoire, égalité de traitement entre les usagers, respect de l'environnement, développement de la recherche sont autant de domaines qui déterminent en grande partie le bien-être des sociétés, et auxquels les opérateurs publics ont eu pour habitude de concourir.

La course à la rentabilité, dans laquelle la décision des ministres et chefs d'État européens plonge les opérateurs historiques, menace toutefois ces missions.

Prenons l'exemple des activités de recherche à La Poste. Depuis les années 1980, La Poste dispose d'un service de recherche à Nantes, dénommé SRTP. Il déploie ses activités dans des domaines aussi divers que la cryptographie pour la sécurisation des échanges, les laboratoires encre-papier, la reconnaissance automatique des caractères ou l'ergonomie. Les perspectives d'avenir du secteur recherche à La Poste semblent pourtant peu souriantes. Le SRTP est maintenant rattaché à la direction Courrier, alors que les efforts étaient jusqu'alors déployés dans des secteurs variés. Les crédits alloués aux projets d'étude innovants sont en diminution, et 50 personnes sur 230 doivent quitter le service.

En concentrant son activité sur le court terme, La Poste est donc amenée à laisser de côté un secteur pourtant reconnu d'utilité publique. La recherche devrait, à l'inverse, être une priorité, y compris dans ce domaine.

La question des recommandés se pose également : ils sont utilisés dans des procédures judiciaires et administratives et sont un témoignage du lien indissoluble entre La Poste et les prérogatives de la souveraineté. L'envoi d'un recommandé est d'ailleurs prescrit par de nombreux textes légaux. Pourtant, cela ne relèvera plus du service universel. C'est un vrai problème eu égard aux obligations de justice.

La course au profit dans laquelle vous nous entraînez avec ce texte est pour le moins paradoxale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis.

M. Didier Migaud et M. Arnaud Montebourg. On ne saura pas pourquoi !

M. le ministre délégué à l'industrie. Je ne peux pas être favorable à un amendement de suppression !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14655.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14699 rectifié.

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

M. André Chassaigne. Avec cet amendement, nous souhaitons revenir sur une question fondamentale, qui a d'ailleurs été soulevée hier par notre collègue Mme Lebranchu dans sa défense de l'exception d'irrecevabilité.

Le projet de loi renvoie à un décret la définition de ce que vous appelez le service universel. Nous n'acceptons pas cette proposition. En effet, c'est au Parlement, et à lui seul, qu'il revient de déterminer ces caractéristiques. La représentation nationale est déjà privée de ses pouvoirs législatifs quand sont négociées les directives communautaires. Avec ce projet, vous souhaitez encore la déposséder du contrôle de l'application et de la mise en œuvre de ces directives. Nous ne pouvons accepter de telles dérives, qui ne visent qu'à vider la démocratie de toute substance.

En outre, nous ne vous faisons aucune confiance pour déterminer en catimini les principes du service universel. Si vous ne souhaitez pas en débattre au Parlement, c'est parce que vous savez que ce projet ferait grincer bien des dents.

Aussi, cet amendement propose de laisser le Parlement statuer seul sur cette question, et donc définir les principes fondamentaux devant guider le fonctionnement de ces services : la péréquation tarifaire, l'égalité devant le service public, la sauvegarde et la promotion d'emplois de qualité, la protection de l'environnement, la sécurité et la rapidité de l'acheminement du courrier.

Nous avons déjà pu intervenir à de nombreuses reprises sur les principes de péréquation et d'égalité, inconciliables avec l'ouverture de ce marché à la concurrence. Je ne reviendrai donc pas sur la question.

Permettez-moi cependant d'insister sur celle de la protection de l'environnement. Cette référence peut paraître curieuse ; elle ne l'est pas.

Aujourd'hui, en effet, La Poste ne transporte plus son courrier que par la route, les trains postaux ayant été abandonnés. Cette stratégie de court terme ne peut qu'aggraver la pollution atmosphérique, amplifier la surconsommation de produits pétroliers, et donc porter atteinte à l'environnement. L'abandon du fret ferroviaire est peut-être justifié par le faible coût du transport routier. Il est cependant suicidaire à moyen terme.

En outre, la réorganisation des centres de tri va parfois jusqu'à l'absurde. Pourquoi une lettre postée au Havre et adressée à un Havrais est-elle triée à Rouen avant d'être renvoyée au Havre pour y être distribuée ? Cette organisation est aussi ridicule économiquement que nuisible écologiquement.

S'agissant de la sécurité et de la rapidité de l'acheminement du courrier, j'ai entendu dire hier que les performances de La Poste étaient bonnes, 80 % du courrier étant distribués en « J + l » contre 65 % il y a quelques années. Cependant, par rapport à ce qu'elle était il y a trente ans, la distribution du courrier a vu son efficacité reculer. Ce taux de 65 % était malheureusement un plancher, du fait probablement de la réduction drastique des emplois intervenue au début des années quatre-vingt-dix.

C'est pourquoi il convient d'insister sur la nécessité de garantir la rapidité d'acheminement du courrier, afin de pas subir, dans quelques années, de nouvelles baisses dans la qualité de la distribution.

Tel est le sens de cet amendement que j'invite l'Assemblée à adopter.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également : l'article 1er du code des postes et télécommunications - Jean Proriol l'a déjà indiqué - définit le service public dans des termes qui devraient d'autant plus convenir aux auteurs de l'amendement qu'ils résultent de la loi du 25 juin 1999. Évitons, une fois de plus, le psittacisme juridique.

M. Daniel Paul. Encore un nouvel argument !

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Je ne peux être d'accord avec votre réponse, monsieur le ministre.

Je l'ai déjà souligné hier - peut-être beaucoup trop longuement, me direz-vous : autant il est compréhensible de renvoyer certains aspects d'une loi au décret, autant il est indispensable que d'autres figurent dans la loi, par exemple quand il s'agit de transférer une partie du service.

M. Chassaigne vient très justement d'appeler notre attention sur la protection de l'environnement et sur la sauvegarde et la promotion d'emplois de qualité. Ces notions, auxquelles je n'avais personnellement pas pensé en l'occurrence, relèvent de la responsabilité du Parlement. On l'a bien vu avec l'amendement précédent quand, au détour d'une convention entre un commerçant et La Poste, on s'est rendu compte que sans l'intervention du Parlement, la mesure n'aurait aucune valeur juridique, l'emploi pour lequel la personne serait rémunérée ne correspondant à aucun des articles du code du travail ni à aucun autre type de convention.

À force de renvoyer au décret, le Parlement perd une partie de son rôle, ce qui est dommage, et c'est pourquoi l'on finit par arriver à de telles étrangetés juridiques.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14699 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 10.

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. Jean Proriol, rapporteur. L'amendement vise à garantir une participation de La Poste à l'élaboration du décret en Conseil d'État précisant les caractéristiques de l'offre de service universel postal, en particulier pour prendre en compte la dimension commerciale de cette offre.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Excellent amendement !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Cet amendement ne mérite a priori ni débat ni commentaire...

M. Yves Fromion. Pourquoi intervenir alors ?

M. François Brottes. ...car il est évident que le prestataire du service universel doit être consulté. En revanche, l'argument que vous venez de développer, monsieur le rapporteur, me gêne quelque peu.

Selon vous, le prestataire du service universel doit être consulté pour faire valoir la dimension commerciale de l'offre. Si celui-ci estime que le décret en question lui poserait problème à périmètre constant, faute de disposer en l'état des moyens d'assumer une telle charge, pourra-t-il demander à réduire les obligations du service universel ? Dans un tel dialogue entre le Gouvernement et le prestataire, n'oubliera-t-on pas un peu les besoins de l'usager ?

L'une des solutions pour accomplir un service universel large, c'est qu'il y ait une péréquation au niveau de l'État. Or, si votre argument est retenu, le prestataire du service universel sera consulté : autrement dit, seule la réalité commerciale sera prise en compte, et non pas les besoins des usagers, ce qui pose problème.

Pour autant, nous voterons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Je tiens à rassurer M. Brottes : le prestataire ne sera pas le seul consulté. Le projet prévoit également la consultation de l'Autorité de régulation, qui doit veiller au service universel, et de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi d'un amendement n° 11 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. Arnaud Montebourg. Avec quoi ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14679.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le défendre.

M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, quelqu'un a déclaré : « Un modèle de service public en réseau s'est progressivement imposé en France. Son principe fondateur est l'égalité de traitement et d'accessibilité à l'ensemble des citoyens. Le maillage postal de l'ensemble du territoire, puis sa desserte ferroviaire l'ont incarné. Ce modèle appliquait une péréquation financière au sein de chaque réseau afin qu'il puisse être présent sur chaque partie du territoire. Ce maillage comprenait les régions dont l'isolement ou l'enclavement géographique ne permettait pas une couverture suffisante des coûts.

« Cette péréquation financière a pris une forme essentiellement tarifaire. Il s'agissait de garantir le même prix pour le même service en tout point du territoire, quels que soient les coûts de production. La péréquation tarifaire des services en réseau est un corollaire de la notion d'égalité devant le service public. Il existe donc un lien très fort non seulement entre les notions de péréquation et d'aménagement du territoire, mais aussi avec celle de citoyenneté.

« Ce modèle est à l'origine du prix unique du timbre en France ou de la tarification de la SNCF, de l'abonnement à la téléphonie fixe, ou du barème de la facture électrique et gazière. Expression de la solidarité et de la cohésion à l'échelle nationale, la péréquation implique des transferts de charges géographiques. Par exemple, les recettes de lignes à grand trafic permettent de doter des lignes déficitaires. »

Qui a donc prononcé ces phrases, notamment celles-ci que je répète pour les partager pleinement : « La péréquation tarifaire des services en réseau est un corollaire de la notion d'égalité devant le service public » ou : « Il existe donc un lien très fort non seulement entre les notions de péréquation et d'aménagement du territoire, mais aussi avec celle de citoyenneté » ? Nul autre que M. Gérard Larcher, en 2003, alors qu'il était sénateur. Il est aujourd'hui ministre délégué aux relations du travail auprès du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

Voilà un an, M. Larcher soulignait l'importance du principe de la péréquation tarifaire au titre de la cohésion nationale. Aujourd'hui, il est membre d'un gouvernement qui propose un projet de loi mettant fin à ce principe.

Nous ne pouvons accepter sans rien dire ce qu'il faut bien appeler la mise à mort de la péréquation tarifaire, qui est pourtant un ferment, comme le soulignait M. Larcher, de la cohésion économique, sociale et géographique de notre pays.

C'est pourquoi notre amendement tend à réaffirmer le principe de la péréquation tarifaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Il faut que chacun comprenne bien qu'il s'agit avec cet amendement d'une sorte de session de rattrapage.

La majorité refuse la péréquation tarifaire comme elle a refusé le tarif unique et la prise en compte du lieu de résidence comme adresse de destination du courrier. À défaut d'affirmer la péréquation tarifaire dans la loi, nos collègues communistes proposent de le faire dans le décret. L'amendement devrait être adopté.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14679.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14727.

La parole est à M. Alain Gouriou, pour le défendre.

M. Alain Gouriou. L'amendement pose le principe de l'existence permanente d'un secteur réservé à La Poste, sujet qui a été largement abordé au cours de la présentation des différentes motions de procédure et de la discussion générale.

À partir du 1er janvier 2006, ce secteur ne comprendra plus que les envois postaux inférieurs à 50 grammes. Or, la directive prévoit également que, à partir de 2009, cette réserve pourra être remise en cause. Mais ce n'est qu'une possibilité, et la France n'aura donc pas l'obligation de supprimer ce service réservé. Au contraire, elle pourra, comme nous le proposons, le prolonger car il constitue pour La Poste la garantie de poursuivre son activité sur l'ensemble du territoire.

Au cours de son audition devant notre commission des affaires économiques, il nous a semblé que M. le ministre annonçait que le Gouvernement envisageait d'ores et déjà l'abandon de tout monopole à partir de 2009, y compris pour les envois inférieurs à 50 grammes. Nous souhaiterions par conséquent obtenir des précisions sur ce point.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

Nous verrons en 2009, mais, étant donné l'état d'esprit de la commission, je suis pessimiste.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le ministre, ce n'est pas de pessimisme que l'on a besoin, mais de volontarisme pour faire en sorte que les autres membres de l'Union européenne rejoignent la position française.

M. le ministre délégué à l'industrie. Comme vous l'avez si bien réussi !

M. François Brottes. Christian Pierret, l'un de vos prédécesseurs, s'était battu contre l'avis de ses collègues de la Communauté européenne pour maintenir le secteur réservé, et il avait réussi. Cette victoire, qu'il n'est pas question de s'approprier, a été celle de la France, et il n'y a aucune raison, monsieur le ministre, pour que vous n'en remportiez pas une autre à votre tour.

M. le ministre délégué à l'industrie. Avec votre soutien, je suis sûr d'y parvenir !

M. François Brottes. Mais, pour cela, il faut partir gagnant.

Nous souhaitons vous entendre dire que le Gouvernement fera tout pour préserver ce secteur réservé. Au-delà de nos encouragements, vous auriez alors notre soutien.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14727.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n°14728.

La parole est à M. Alain Gouriou, pour le soutenir.

M. Alain Gouriou. Nous proposons, dans la première phrase du troisième alinéa du III de l'article 1er, d'ajouter, après les mots « par courrier accéléré, », les mots « ainsi que le publipostage ». En effet, la rédaction retenue pour définir le périmètre des services réservés ne mentionne pas expressément le publipostage. Or, vous le savez, le publipostage représente une part considérable du courrier traité par La Poste.

Il a été indiqué par le rapporteur et par M. le ministre que les ressources importantes devaient permettre à La Poste de financer son propre fonctionnement à partir de son activité. Il nous semble nécessaire de conserver dans le domaine réservé cette activité de publipostage qui est essentielle pour elle et de le préciser dans la loi.

Mme Marylise Lebranchu. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. Jérôme Lambert. Oh !

M. Jean Proriol, rapporteur. L'article 1er est explicite : le publipostage fait partie des envois de correspondance.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Les mots « y compris le publipostage » figurent expressément dans l'article L. 2 du code de La Poste. Même avis que le rapporteur.

M. Jérôme Lambert. L'amendement est satisfait alors ?

M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou.

M. Alain Gouriou. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas rajouter ces mots.

M. le ministre délégué à l'industrie. Parce que c'est déjà écrit dans le code des postes !

M. Alain Gouriou. Non, cela ne figure pas dans cet alinéa.

M. Jérôme Lambert. Il peut changer comment, le code des postes ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Par la loi !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le ministre, si vous nous confirmez explicitement qu'en aucun cas, le texte que nous sommes en train de voter ne modifie sur ce point l'article du code auquel vous faites allusion, et que le publipostage est bien intégré dans les services réservés, nous pourrions retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Je vous confirme que cette disposition figure bien à l'article L. 2 du code des postes - vous pouvez le vérifier vous-même -et qu'il n'est pas question dans le présent texte de la retirer.

M. le président. L'amendement est-il retiré ?

M. François Brottes. Oui, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 14728 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 12.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14754.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Nous avons évoqué cette question à plusieurs reprises, et notre collègue Gouriou vient encore d'en faire état. Nous souhaitons que le Gouvernement remette un rapport au Parlement avant la fin 2007 sur lequel la commission des affaires économiques pourrait s'appuyer pour proposer au Parlement français une résolution pour faire en sorte que la révision de la directive telle qu'elle est prévue soit un rendez-vous qui ne pénalise pas le service public postal français.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis défavorable parce que cette demande est déjà satisfaite par notre amendement n° 46, qui prévoit que le Gouvernement doit remettre au Parlement, dans les deux ans suivant la promulgation de la loi, un rapport sur la pertinence de créer un fonds de compensation du service universel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14754.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14730.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Il s'agit d'un amendement très important pour nous. Nous n'avons pas compris quel pouvait être l'impact exact de l'avant-dernier aliéna du III de l'article 1er.

Après l'écrémage que ce texte autorise, qui permettra aux concurrents de La Poste de ne s'intéresser qu'aux secteurs les plus rentables puisqu'ils n'auront pas de contrainte par exemple de desserte territoriale, nous craignons que cet alinéa n'organise une dérogation au régime général des services réservés en autorisant une personne, morale ou physique, à l'origine des envois de correspondance ou agissant exclusivement en son nom, à assurer le service de ses propres envois.

En clair, nous craignons que certains clients de La Poste, parmi les plus gros, comme ceux qui assurent la vente par correspondance, ne constituent des clubs de clients regroupant les destinataires des produits qu'ils vendent, qui deviendraient ainsi membres de la « famille », et considèrent leurs envois comme du courrier interne. Bref, on peut imaginer que l'application de cet article pourrait conduire à permettre à ces opérateurs, aujourd'hui clients, de devenir eux-mêmes opérateurs postaux.

On voit bien le danger : si, d'une part, les secteurs rentables sont enlevés à La Poste, et que, d'autre part, les gros clients de La Poste deviennent eux-mêmes postiers, que restera-t-il à l'opérateur historique ?

Peut-être notre interprétation de l'article n'est-elle pas bonne, auquel cas j'imagine, monsieur le ministre, que vous saurez - c'est votre rôle et votre compétence - nous montrer que nous nous trompons. Si tel n'était pas le cas, nous appellerions notre assemblée à supprimer purement et simplement cet alinéa.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

La dérogation évoquée par M. Brottes vise plusieurs cas de figure : le courrier interne des entreprises ou des administrations, communications internes à l'une ou à l'autre ; les échanges de documents, c'est-à-dire les transmissions de messages via un clavier par exemple, comme celui attenant à la salle des séances où nous allons interroger tel ou tel organisme qui nous fournit des informations ; la transmission d'un courrier à l'occasion d'un portage à domicile comme dans le cas d'une lettre de proposition de renouvellement d'un abonnement qui accompagne la distribution d'une revue ou d'un journal. Nous n'avons pas été convaincus en commission par les arguments de M. Brottes pour supprimer cette disposition. D'autant plus que nous nous appuyons sur la directive, là aussi, qui prévoit que l'autoprestation est incluse dans la catégorie des services concernés.

M. François Brottes. Elle n'est pas obligatoire !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement a le même avis que le rapporteur. Je précise que cette possibilité est ouverte par la directive et que la Cour de justice a condamné l'Espagne, qui y avait apporté une limitation. Nous ne pouvons guère concevoir d'interdire aux particuliers ou aux entreprises le droit de porter eux-mêmes leurs envois aux destinataires. En pratique, cette possibilité concerne essentiellement les journaux régionaux, qui demandent à leur réseau de portage à domicile d'acheminer aussi les relances d'abonnement et les factures correspondantes. Donc, comme la commission, avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Chacun a bien compris que nous ne visions pas le portage des journaux.

M. Jean Proriol, rapporteur. Ah !

M. François Brottes. Nous aimerions simplement savoir, monsieur le ministre, si une entreprise de vente par correspondance qui constitue un club de ses clients pourrait bénéficier de cet article et devenir son propre opérateur postal. Si vous nous répondez qu'en aucun cas, cette disposition ne peut leur être appliquée, nous accepterions de retirer notre amendement. Si votre réponse restait évasive, nous maintiendrions l'amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. La directive est assez claire, je pense. Il n'y a pas de raison de réserver l'autoprestation au prestataire du service universel, elle concerne aussi bien la personne physique ou morale qui est à l'origine des envois ou collectes qu'aux acheminements de ces envois par un tiers agissant seulement au nom de cette personne.

Mme Marylise Lebranchu. Non !

M. Jérôme Lambert. C'est dangereux !

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est la directive !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Mais la directive peut être dangereuse !

M. le président. Monsieur Brottes, vous retirez l'amendement ?

M. François Brottes. Non, parce que la réponse de M. le ministre confirme nos inquiétudes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14730.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14736.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. L'amendement n° 14736 vise à limiter la dérogation prévue par l'avant-dernier alinéa du III de l'article 1er, en ne l'appliquant qu'aux personnes physiques.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14736.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14737.

La parole est à M. Alain Gouriou, pour le soutenir.

M. Alain Gouriou. Une sorte d'opérateur se créant de fait, l'autoprestation ne doit être possible que sous réserve de ne pas porter atteinte aux droits exclusifs octroyés à La Poste au titre du secteur réservé tel qu'il vient d'être défini à l'instant. Un réel problème se pose, qu'il ne faut pas sous-estimer.

Vous connaissez aujourd'hui l'importance des services de portage de la presse quotidienne régionale. Ceux-ci sont extrêmement efficaces et très appréciés. Ils permettent de recevoir la presse quotidienne régionale de très bonne heure. Rien n'empêcherait ces services de distribution d'apporter d'autres courriers au fur et à mesure que ce portage se ferait. Il y a là un risque réel de voir le service réservé de La Poste débordé dans ce domaine.

M. Yves Fromion. C'est une vue de l'esprit ! Vous n'y connaissez rien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14737.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 14641 et 14649.

La parole est à M. Richard Mallié, pour soutenir ces deux amendements.

M. Richard Mallié. J'avais pour mission de défendre l'amendement n° 14649 de M. Bénisti mais je veux bien défendre les deux.

Ces deux amendements proposent une nouvelle rédaction du dernier aliéna du III de l'article 1er, qui concerne les envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives ou juridictionnelles qui sont susceptibles d'être confiés à des prestataires de services postaux.

L'article 7 de la directive 97/67/CE tel que modifié par la directive 2002/39/CE, qui définit le périmètre des services susceptibles d'être réservés au prestataire du service universel, ne mentionne pas les envois recommandés, qui ne peuvent donc être réservés par la France.

Certes, l'article 8 introduit une possibilité et le considérant 20 de la directive 97/67/CE indique que, pour des raisons d'ordre public et de sécurité publique, les États membres peuvent « désigner la ou les entités » qui sont « chargées de la prestation du service du courrier recommandé utilisé au cours de procédures judiciaires ou administratives conformément à leur législation nationale ».

Tel qu'il est prévu, ce service ne serait pas a priori réservé à un seul opérateur mais aux opérateurs titulaires d'une autorisation, et ce conformément à un cahier des charges précis et rigoureux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Dans un premier temps, la commission a rejeté ces deux amendements, mais elle aimerait, le rapporteur du moins, entendre l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement est favorable à ces deux amendements identiques de M. Estrosi et de M. Bénisti parce que, depuis la directive du 15 décembre 1997, les recommandés sont dans le domaine concurrentiel.

M. Paul Giacobbi. Ce n'est pas la même chose !

M. le ministre délégué à l'industrie. L'objectif que nous poursuivons, c'est de garantir un traitement précis et rigoureux de ces envois pour assurer un service bien adapté - c'est indispensable- aux besoins de la vie judiciaire. Cela peut être réalisé par un cahier des charges particulier, sur lequel veillera l'Autorité de régulation. Il s'agit d'ailleurs d'une innovation. Jusqu'à présent en effet, c'était la procédure judiciaire et administrative qui s'adaptait aux caractéristiques du service de La Poste. Dorénavant, ce sera le service postal qui respectera les prescriptions prévues par le décret en Conseil d'État pour répondre aux besoins des procédures administratives et judiciaires. Il est quand même plus raisonnable que les choses se fassent dans ce sens-là. C'est toute la chaîne de la preuve qui est en cause.

M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou.

M. Alain Gouriou. Il nous semblait pratiquement de droit que La Poste, opérateur historique, garde le monopole des lettres recommandées, et, à défaut de l'ensemble, au moins de celles envoyées dans le cadre de procédures administratives ou juridictionnelles.

Si nous avons entendu avec plaisir M. le rapporteur annoncer que ces deux amendements avaient été rejetés par la commission, nous regrettons que M. le ministre leur ait accordé un sort différent. Pour notre part, nous ne les voterons pas.

M. le président. Sur le vote des amendements identiques nos 14641 et 14649, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Dans ma précédente intervention, j'ai déjà évoqué l'incertitude qui pèse sur l'avenir de la transmission du courrier juridictionnel, judiciaire et administratif. Vous venez, monsieur le ministre, de confirmer nos craintes de voir ce secteur régalien échapper à l'opérateur historique. C'est ce qui motive notre demande de scrutin public, afin que nul n'en ignore.

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié.

M. Richard Mallié. Je me félicite des propos de M. le ministre. Hier soir, dans la discussion générale, j'ai dit que La Poste avait pour habitude de faire passer ses clients sous ses fourches caudines : c'était à eux de s'adapter à La Poste, non pas à elle de s'adapter à ses clients.

M. François Brottes. Ce n'est pas acceptable !

M. Richard Mallié. Je me réjouis qu'un cahier des charges précis...

M. le ministre délégué à l'industrie. Et rigoureux !

M. Richard Mallié. ...et rigoureux soit mis au point, que La Poste devra respecter sous peine de voir confier cette mission à un autre opérateur. Elle doit comprendre qu'elle n'est pas le roi du pétrole ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi.

M. Paul Giacobbi. Je me demande si vous réalisez ce que vous êtes en train de faire ! Cela a l'air anodin,...

M. le ministre délégué à l'industrie. Non, ce n'est pas anodin !

M. Paul Giacobbi. ...mais vous prenez en fait le risque considérable de causer un désordre immense et durable dans les échanges juridiques en France.

M. le ministre délégué à l'industrie. Cela fonctionne si bien aujourd'hui ?

M. Paul Giacobbi. Monsieur le ministre, pour avoir été avocat, vous savez ce que signifie un recommandé dans le cadre d'une procédure administrative et judiciaire. La directive européenne, qui n'est pourtant pas inspirée par l'esprit de monopole, énonce : « pour des raisons d'ordre public et de sécurité publique ».

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est le cas !

M. Paul Giacobbi. Vous ne pourrez pas assurer de telles conditions dès lors qu'il y aura cinquante opérateurs différents pour ce type de courrier.

M. le ministre délégué à l'industrie. Il n'y en aura pas cinquante !

M. Paul Giacobbi. Vous prenez un risque inutile pour un enjeu économique extrêmement faible. Je demande aux uns et aux autres de réfléchir. La commission, une fois n'est pas coutume, avait eu un bon mouvement. Que le Gouvernement le suive et n'en soit pas détourné par l'identité des auteurs de cet amendement qui n'est pas conforme à l'intérêt public.

M. Jean Launay. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous avez fait allusion à ma profession d'origine. Je peux vous dire que j'ai très souvent vu des procédures viciées, voire annulées, par manque de rigueur des envois postaux.

M. Pierre Cohen. Ce sera pire !

M. Paul Giacobbi. Vous en verrez tout le temps !

M. le ministre délégué à l'industrie. La procédure judiciaire était obligée de se caler sur ce que décidait La Poste, nous inversons la tendance : la Chancellerie établira un cahier des charges auquel devront se soumettre ceux qui se livreront à cette activité.

M. Yves Fromion. Tout simplement !

M. le ministre délégué à l'industrie. Cela apportera aux procédures une plus grande sécurité qu'il n'en existe aujourd'hui.

M. Arnaud Montebourg. Vous le regretterez un jour !

M. Richard Mallié. Regrettez plutôt les 35 heures !

M. le ministre délégué à l'industrie. Le nombre de personnes relaxées simplement parce qu'il manque une signature au bas d'un recommandé est considérable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. J'ai rendu compte exactement des décisions de la commission. Depuis ce vote, nous avons été en contact avec la Chancellerie. En matière de recommandé, il y a eu des évolutions puisque le passage par La Poste n'est pas toujours obligatoire. S'agissant des recommandés administratifs ou juridictionnels, le ministre nous ayant donné quelques assurances,...

M. Paul Giacobbi. Quelques assurances !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...à titre personnel, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. François Brottes. Vous n'avez pas le droit, vous trahissez la commission !

M. Patrick Ollier, président de la commission, et M. Bernard Accoyer. Il a le droit de s'exprimer à titre personnel !

M. Jean Proriol, rapporteur. Je ne suis pas un traître ! (« Si ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Je l'ai dit deux fois, je le répète : la commission a émis un avis défavorable. Cessez donc de me traiter de Judas ! Mais, dans le nouveau contexte, avec les éléments que vient de nous apporter le ministre, je dis que, personnellement - et j'ai le droit de le faire, monsieur Brottes -, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Accoyer. Oui, il a le droit de le faire ! Vous voulez l'empêcher de parler, totalitaires !

M. Jean Leonetti. Marxistes !

M. le président. Pour que les choses soient claires, M. le rapporteur a d'abord indiqué quel avait été le vote de la commission puis a précisé son choix personnel de s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.

M. François Brottes. Dont acte !

M. le président. Le ministre, pour sa part, a précisé qu'il était favorable aux amendements.

Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix les amendements identiques nos 14641 et 14649.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 106

                    Nombre de suffrages exprimés 106

                    Majorité absolue 54

        Pour l'adoption 65

        Contre 41

L'Assemblée nationale a adopté.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Dans la précipitation, Mme Lebranchu s'est trompée de vote et en demande la rectification.

Par ailleurs, je tiens à dire au micro que je prends acte de la position personnelle de M. Proriol, qu'en aucun je ne remets en cause. Je l'avais interpellé sur sa position de rapporteur. Il a clarifié ce point. Dont acte.

M. Jean Proriol, rapporteur. Merci !

M. Patrick Ollier, président de la commission. M. Proriol a été très correct. Vous n'aviez pas à le mettre en cause !

Rappels au règlement

M. Bernard Accoyer. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.

M. Bernard Accoyer. Une nouvelle fois, l'opposition nous donne des leçons de morale.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous ne l'avez jamais fait, vous !

M. Bernard Accoyer. Or nous avons été nombreux à observer que plusieurs de ses députés ont voté plus d'une fois, ce qui aboutit à des votes plus nombreux que nous ne sommes de députés présents dans l'hémicycle, même en considérant que nous avons chacun une délégation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean Leonetti. Voleurs !

M. Bernard Accoyer. Une telle attitude est scandaleuse de la part de donneurs de leçons, qui auraient mieux fait de réformer nos institutions et nos grandes entreprises nationales lorsqu'ils étaient au pouvoir ! (« Tricheurs ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. François Brottes. Si vous le souhaitez, nous pouvons procéder à un nouveau vote !

M. le président. Chers collègues, j'ai noté la remarque du président Accoyer. Il y aura une vérification. (M. Arnaud Montebourg converse vivement avec M. Accoyer.)

Monsieur Montebourg, veuillez regagner votre place, il n'y a plus de journalistes !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Il ne faut pas passer par la buvette avant d'entrer dans l'hémicycle !

M. le président. Il est souhaitable que cette pratique de tourner plusieurs clés soit proscrite dans cet hémicycle, d'un côté comme de l'autre.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Il faudrait vérifier tous les votes exprimés au cours de cette soirée ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je demande une suspension de séance parce que la provocation de M. Accoyer est inacceptable. Notre groupe a besoin de se réunir.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Je souhaite que nous retrouvions notre calme. Je dois dire que je suis choqué par la mise en cause du rapporteur de la commission, qui a parfaitement respecté le règlement et a bien précisé qu'il émettait un avis personnel.

M. François Brottes. Je l'ai reconnu !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Je préfère le préciser.

Si M. Accoyer n'a pas donné de chiffres exacts, je vais le faire : j'aimerais savoir comment, avec dix-sept députés présents, on obtient quarante et une voix contre. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Robert Lamy et M. Richard Mallié. C'est la multiplication des voix !

M. le président. Mes chers collègues, compte tenu de l'heure et du contexte, je pense préférable que nous arrêtions là nos travaux ce soir.

La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SĖANCES

M. le président. Aujourd'hui, jeudi 20 janvier, à neuf heures trente, première séance publique :

Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, n° 1683, tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur :

Rapport, n° 1770, de M. Luc-Marie Chatel, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1384, relatif à la régulation des activités postales :

Rapport, n° 1988, de M. Jean Proriol au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 20 janvier 2005, à une heure.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot