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Deuxième séance du jeudi 20 janvier 2005

120e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président. M. le ministre délégué à l'industrie m'a fait savoir qu'il aurait quelques minutes de retard car il reçoit actuellement son homologue albanais. Je suis conscient que nos travaux en seront retardés d'autant, mais vous comprendrez que le dossier des télécommunications albanaises tienne particulièrement à cœur à M. Patrick Devedjian.

Je vais donc suspendre la séance pendant quelques minutes en vous remerciant, au nom du ministre, de votre compréhension.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue, est reprise à quinze heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

    1

RÉGULATION DES ACTIVITÉS POSTALES

Suite de la discussion d'un projet de loi
adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la régulation des activités postales (nos 1384, 1988).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 14707 portant article additionnel après l'article 1er.

Après l'article 1er

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir cet amendement n° 14707.

M. Daniel Paul. Notre amendement tend à préciser que « les activités courrier, colis et finance contribuent à assurer une présence équilibrée sur le territoire de la Poste. Elles facilitent l'accès des citoyens au service postal public. Ces activités ne sont pas exclusives ou séparables les unes des autres. »

Ce qui fait, en effet, la spécificité de La Poste, c'est la coexistence au sein de cette entreprise de plusieurs réseaux : réseaux de collecte, de tri, de distribution de courrier et de colis couvrant l'ensemble du territoire à côté d'un réseau de guichets distribuant des produits financiers et postaux.

Ces réseaux sont complémentaires : le réseau de distribution bénéficie de la disponibilité des bureaux de poste pour assurer le retrait des courriers non remis lors des tournées de distribution ainsi qu'une partie de la collecte du courrier, en particulier des colis, et l'activité financière menée dans les bureaux de poste permet une mutualisation des coûts d'accueil du public.

L'existence de réseaux de courrier et de bureaux de poste constitue donc un des piliers de l'aménagement du territoire d'autant que La Poste, comme nous l'avons déjà rappelé à maintes reprises depuis mardi, est l'un des derniers services publics présents dans les communes rurales.

Si l'on bouscule cet équilibre savant, si l'on fait disparaître des bureaux de poste de plein exercice, comme nous les appelons, c'est-à-dire où les usagers, que vous appelez maintenant des clients,...

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Le terme n'a rien d'infamant !

M. Daniel Paul. ...peuvent faire toutes les opérations qu'ils souhaitent, si l'on diminue les horaires d'ouverture de certains guichets et si l'on abaisse la qualité du service, c'est l'ensemble des bureaux de poste que l'on fragilise.

L'utilité d'un réseau dépend du nombre et de l'activité cohérente et globale de l'ensemble de ce que vous appelez les points de contact, et de ce que, moi, j'appellerai les « bureaux de poste ».

La libéralisation des services postaux, en exacerbant la concurrence sur les niches les plus rentables - je vous renvoie à la fin de notre discussion de ce matin -, ne peut que fragiliser ces points de contacts, ceux, justement, qui sont les moins rentables, et remettre en cause leur existence.

Pour toutes ces raisons, nous avons proposé cet amendement, qui réaffirme la nécessité impérieuse de l'unité du réseau postal.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 14707.

M. Jean Proriol, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, pour plusieurs raisons.

Le caractère non séparable des trois activités de La Poste - courrier, colis et finances - est déjà mentionné à l'article 2 de la loi du 2 juillet 1990,...

M. le ministre délégué à l'industrie. Eh oui !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...que nous n'avons pas changé et que nous n'avons pas l'intention de changer.

Je vais lire, mais sans doute le connaissez-vous, le début de l'article 8 - ce qui devrait rassurer définitivement Daniel Paul - dont la rédaction souligne la dimension d'intérêt général des trois activités de La Poste : « La Poste et ses filiales... » - toutes ses filiales, et il y en a près de 200, certaines ont même été créées sous le ministère de M. Mexandeau - « ...constituent un groupe public qui remplit, dans les conditions définies par les textes qui régissent chacun de ses domaines d'activité, des missions d'intérêt général et exerce des activités concurrentielles. »

L'amendement n° 14707 de Daniel Paul est donc satisfait.

M. Daniel Paul. Je ne le pense pas !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 14707.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Comme l'a excellemment rappelé le rapporteur, l'article 2 de la loi de 1990 précise l'objet de l'établissement et lui assigne la triple activité énoncée dans cet amendement.

La loi de 1990, dans sa sagesse, avait laissé au groupe La Poste la possibilité de s'organiser au mieux pour remplir ses missions. Tout l'intérêt de ce texte résidait dans le fait de donner à l'entreprise son autonomie de gestion. Il serait donc paradoxal que ceux qui prétendent soutenir et aider La Poste veuillent lui retirer, ou en tout cas limiter, cette autonomie.

Je vous rappelle les termes de cet article 2 :

« La Poste a pour objet, selon les règles propres à chacun de ses domaines d'activité, contenues notamment dans le code des postes et télécommunications :

« D'assurer, dans les relations intérieures et internationales, le service public des envois postaux, qui comprend le service universel postal et, dans ce cadre, le service public du transport et de la distribution de la presse bénéficiant du régime spécifique prévu par le code des postes et télécommunications ;

« D'assurer, dans le respect des règles de la concurrence, tout autre service de collecte, de transport et de distribution d'envois postaux, d'objets et de marchandises ;

« D'offrir, dans le respect des règles de la concurrence, des prestations relatives aux moyens de paiement et de transfert de fonds, aux produits de placement et d'épargne, à la gestion des patrimoines, à des prêts d'épargne-logement et à tous produits d'assurance. La Poste gère le service des chèques postaux... »

Cette loi votée en 1990 devrait donc bénéficier de votre indulgence, mesdames, messieurs de l'opposition.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je crois que l'on fait un procès d'intention à nos collègues député-e-s communistes et républicains.

M. Daniel Paul. Comme toujours !

M. François Brottes. Je voudrais donc le dénoncer.

Nous sommes, comme nos collègues communistes, je l'imagine, attachés à l'unité de La Poste.

M. Daniel Paul. Bien sûr !

M. François Brottes. Aujourd'hui, ce qui fait la puissance d'intervention de La Poste, la lisibilité de son activité et la satisfaction de ses clients, c'est que ces derniers savent pouvoir y trouver une écoute de qualité pour l'accomplissement de missions dans le domaine du transport du courrier, des colis et des prestations en matière financière. Dans un bureau de poste, tout cela peut, en effet, être proposé.

C'est ce qui fait la force du réseau. C'est le « quatrième métier », comme l'a indiqué le président actuel de La Poste.

Ce n'est pas parce que l'on évoque la notion d'activités qui ne sont pas exclusives ou séparables que cela interdit pour autant une séparation comptable, actuellement en vigueur, et comme l'impose la directive.

Une chose est de dire : « Il ne faut pas séparer ces activités les unes des autres, parce que c'est l'unité qui fait leur force... »

M. Daniel Paul. Comme toujours !

M. François Brottes. « ...et leur pertinence auprès du public. » Autre chose est de considérer que l'on doit pouvoir identifier ces activités sur le plan comptable. Nous ne devons pas répondre à côté de la question posée. Aussi, nous rallierons-nous à cet amendement.

Monsieur le président, vous avez eu la bonté de me donner la parole. Je note d'ailleurs que les choses se déroulent très bien en ce début d'après-midi.

M. le ministre délégué à l'industrie. Pourquoi cela ne continuerait-il pas ?

M. François Brottes. J'espère que M. le ministre, lors de sa rencontre avec le Premier ministre albanais, a pu nouer des relations intéressantes. Peut-être pourrait-il nous en dire quelques mots. Nos débats sont retardés pour de nombreuses raisons qui viennent rarement de l'opposition - je tiens à le noter -, alors qu'on nous a fait remarquer qu'il y a urgence. Mais je ferme la parenthèse.

Je veux rapidement rappeler quelques notions, pour dissiper tout malentendu.

Le service universel concerne - je dis cela pour M. Dionis du Séjour avec qui j'ai eu tout à l'heure une divergence d'appréciation alors même qu'il est un homme de bonne volonté qui comprend parfaitement les choses - le courrier et les colis jusqu'à 20 kilos. C'est du moins le cas aujourd'hui et je pense - je parle sous votre contrôle, monsieur le ministre - que La Poste continuera d'en rester chargée.

Celle-ci doit faire en sorte, au nom des garanties offertes au citoyen européen - c'est vrai dans tous les pays -, que chacun puisse envoyer ou recevoir des plis ou des colis jusqu'à 20 kilos. Le service universel comporte en France - ce n'est pas le cas dans tous les pays - une partie sous monopole : le secteur réservé. C'est aujourd'hui tout ce qui est en dessous de 100 grammes. Demain, ce sera tout ce qui se situe en dessous de 50 grammes. Ce que ne nous dit pas M. le ministre, c'est qu'en fait, il n'y aura plus de secteur réservé du tout. C'est là un danger que nous dénonçons.

La concurrence s'exercera entre 100 grammes et 20 kilos, et sur tout le reste. Dans la mesure où l'on prend aujourd'hui des dispositions visant à l'écrémage - bon nombre d'exemples montrent que ce gouvernement a réellement l'intention de favoriser les concurrents de La Poste pour qu'ils aillent chercher dans le service universel, puisqu'ils en ont le droit, tout ce qui est « juteux » -, nous sommes inquiets quant aux garanties données à nos concitoyens pour l'accomplissement du service public universel.

Le service universel, ce n'est pas le service public à la française. On ne garantit pas le même prix sur l'ensemble du territoire. Nos concitoyens pourront envoyer et recevoir des colis de 5 ou 10 kilos, mais le prix de l'envoi sera très élevé. S'il n'y a pas de concurrence sur un certain nombre de territoires - voyez le peu de libéralisme des libéraux ! - le prix sera, je le répète, très élevé. Les missions de service universel situées en dehors du secteur réservé, que l'on doit garantir à tous les Français, comme à tous les Européens, seront ainsi quasiment inaccessibles compte tenu de leur coût pour bon nombre de nos concitoyens.

Au-delà de cette considération relative au courrier, il nous semble nécessaire de maintenir l'unité de La Poste. Nous nous rallions donc à la position de nos collègues communistes.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Monsieur Brottes, je suis arrivé en retard à la séance de cet après-midi. Je prie l'Assemblée de bien vouloir m'en excuser. Je devais recevoir à déjeuner M. Nano, Premier ministre d'Albanie, accompagné de M. Ismaël Kadaré - que vous devez connaître si vous ne connaissez pas M. Nano, qui est pourtant un de vos amis politiques. J'ai pensé que l'Assemblée me pardonnerait ce contretemps - j'espère ne pas m'être trompé - dû à des exigences de protocole.

M. François Brottes. Absolument !

M. Jean Dionis du Séjour. Bien sûr !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. J'aimerais tenter de convaincre - même si mes chances de succès sont médiocres - M. Brottes et ses amis.

Il faut mettre les bons articles au bon endroit. M. le ministre vous a lu le contenu de l'article 2 de la loi de 1990, qui répond à votre objectif. Cette loi, je le répète, est très claire. Écoutez-moi, monsieur Brottes. Sinon, vous prétendrez ne pas m'avoir entendu. J'essaie de faire en sorte que mon message vous parvienne.

M. François Brottes. Je vous ai mal entendu, je le reconnais.

M. Jean Proriol, rapporteur. Je suis content que vous reconnaissiez que vous m'avez un peu maltraité.

Je vais reprendre une expression que j'ai déjà utilisée lors de la discussion générale. J'avais indiqué que l'activité bancaire était consubstantielle à La Poste. Je dirai que l'unité de ses trois activités est consubstantielle au groupe La Poste. Si je devais vous en administrer une preuve supplémentaire, je lirais, à mon tour, comme M. le ministre, quelques articles, par exemple sur le service universel postal : « La Poste assure, dans les relations intérieures et internationales, le service public des envois postaux... » Mais elle a aussi une activité concurrentielle. Nous n'avons pas attenté à l'unité du groupe La Poste,...

M. François Brottes. Pas encore !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...et nous ne donnons pas les moyens d'y attenter.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Jamais !

M. Jean Proriol, rapporteur. Monsieur Brottes, c'est vous qui dites : « Pas encore ! » Je réfute ces termes.

Pour qu'on attente à l'unité de La Poste, il faudrait un article bien distinct. Nous aurons l'occasion de débattre de tout cela lors de l'examen de l'article 8.

La banque postale ne pourrait pas fonctionner sans les points Poste, sans les bureaux de poste, sans les agences postales. Réciproquement, ces dernières ne pourraient pas fonctionner s'il n'y avait pas l'activité financière.

Soyez donc rassuré, monsieur Brottes.

M. François Brottes. Je ne le suis pas !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14707.

(L'amendement n'est pas adopté.)


M. le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 14708.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. De la même veine que le précédent, notre amendement tend à affirmer que toute entreprise de service postal sur le territoire français doit assumer des obligations de service public, notamment l'égalité de traitement des usagers que vous mettez en cause puisque vous avez laissé entendre que le prix du timbre serait, pour des services identiques, à géométrie variable.

M. Jean Proriol, rapporteur. Nous n'avons jamais dit cela !

M. Patrick Ollier, président de la commission. En effet !

M. Daniel Paul. Autres obligations de service public, la sécurité de l'acheminement de courrier, en promouvant des emplois de qualité, la protection de l'environnement et le développement équilibré du territoire.

Si une entreprise privée parvenait à concilier l'ensemble des obligations de service public avec la recherche de rentabilité et de profit pour ses actionnaires, nous pourrions être rassurés, mais compte tenu de l'expérience de plusieurs pays étrangers dans ce domaine, tel n'est, hélas, pas le cas.

C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que ces obligations soient inscrites dans la loi, afin d'éviter que des rapaces ou des requins, peu importe comment on les nomme, viennent piétiner les valeurs de service public, profondément ancrées dans notre pays. Que celles-ci soient menacées inquiètent non seulement les salariés, mais aussi les usagers de La Poste, notamment par la désorganisation que cela entraînerait dans les territoires les plus fragilisés, zones rurales ou zones urbaines en difficulté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. L'avis du Gouvernement est également défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Je comprends l'esprit de cet amendement et j'ai soutenu hier la démarche de Daniel Paul qui consistait à déterminer les critères d'éligibilité à la concurrence, car je pense qu'il revenait au Parlement de le faire. Malheureusement, nous n'avons pas été suivis.

Daniel Paul, avec son collègue Chassaigne, propose d'étendre les missions de service public à des entreprises privées. Je pense que c'est dangereux. À diluer la notion de service public, on risque d'obtenir le contraire du but recherché. Cette proposition va à l'encontre du maintien et de la protection du service public. C'est pourquoi nous nous abstiendrons sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14708.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 14652 et 18 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

Je tiens à informer l'Assemblée que je viens d'être saisi de plusieurs milliers de sous-amendements présentant quelques points communs avec les amendements que le président Jean-Louis Debré avait hier réservés.

C'est la raison pour laquelle la discussion des amendements nos 14652, 18 rectifié et des sous-amendements à l'amendement n° 18 rectifié est également reportée à la fin de l'examen du texte. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Gouriou. On nous empêche de travailler !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je ne sais pas quel groupe a pu déposer plusieurs milliers de sous-amendements.

M. Jean Proriol, rapporteur. Oh !

M. François Brottes. Pour notre part, nous en avons déposé une centaine, ce qui n'a pas grand-chose à voir avec plusieurs milliers !

Je vous demande donc une suspension de séance pour réunir mon groupe.

M. le président. Je maintiens, monsieur Brottes, qu'il s'agit bien de plusieurs milliers de sous-amendements. Mais si vous avez besoin d'une suspension de séance pour vérifier, soit.

La séance est suspendue.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. La suspension nous a permis de vérifier que ce n'est qu'une centaine et non pas des milliers de sous-amendements que le groupe socialiste a déposés, monsieur le président, à l'amendement du rapporteur. Puisque la discussion de nos 14 500 amendements est repoussée à une échéance encore inconnue, nous souhaitons pouvoir consacrer au moins cinq minutes à l'avenir du service public postal dans chaque département français. Cela nous semble un minimum que d'avoir une vision territorialisée de questions aussi essentielles. Certes, nous n'avons pas reçu de mandat impératif de nos électeurs, nous sommes députés de la République française, mais dès l'instant où l'aménagement du territoire est en jeu et où tous les territoires sont concernés, nous estimons qu'une telle façon de procéder se justifie.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Chers collègues, je veux exprimer mon ras-le-bol : je commence à craquer pour dire, en toute sincérité, ce que j'ai sur le cœur. Le groupe socialiste a une stratégie d'obstruction. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Paul Giacobbi. Non, une stratégie d'expression !

M. Jean Dionis du Séjour. Arrêtez de nous faire pleurer sur les départements : c'est bien de l'obstruction que vous faites.

Le ministre, quant à lui, répond avec ses armes pour reporter la discussion des amendements et sous-amendements en fin de débat.

Résultat : on parlera du fonds postal de péréquation territoriale dans la nuit, n'importe comment, à je ne sais quelle heure et devant je ne sais combien d'entre nous. C'est scandaleux car il s'agit d'un vrai débat démocratique que nous devons mener dès à présent. Vous qui avez pris la responsabilité de le dénaturer, chers collègues de l'opposition, j'en appelle à votre sens de la démocratie et je vous demande de vous ressaisir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. En tant que président de la commission saisie au fond, je m'étonne de ce qui arrive. M. Dionis du Séjour vient de le souligner très justement, il s'agit d'un vrai débat de fond. Les Français attendent que nous ayons des positions concrètes, argumentées et solides sur l'avenir de La Poste et du service postal.

M. Paul Giacobbi. Absolument !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Je comprends très bien qu'une partie de l'hémicycle soit en désaccord avec l'autre, mais qu'au nom de ces différences, le groupe socialiste utilise des artifices de procédure à portée médiatique pour occulter le débat de fond est inacceptable.

Vous avez déposé, chers collègues, 14 500 amendements, ne me dites pas qu'ils avaient tous pour but de débattre. Ils sont d'ordre réglementaire et n'ont aucun rapport avec la loi. Nous n'avons pas voulu les écarter : la réserve permettra de les examiner plus tard. Aujourd'hui, vous déposez une centaine de sous-amendements qui reposent sur le même principe que les amendements, en regroupant simplement les communes par département. Or si je compte bien, cinq minutes multipliées par cent, cela fait cinq cents minutes, alors que nous devons terminer le débat dans la nuit - vous connaissez notre ordre du jour. Vous nous demandez d'en discuter pendant huit heures alors qu'ils n'ont même pas été examinés par la commission.

Je demande donc à la présidence de faire en sorte que nous puissions avancer dans nos travaux et d'écarter les artifices de procédure au profit du débat de fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je dois en convenir, monsieur Brottes, nous sommes bien en présence d'une centaine de sous-amendements. Reste que nous en avons été saisis très tardivement et que leurs exposés sommaires reprennent ceux des 14 500 amendements, par simple regroupement des milliers de points de contact évoqués. Ils procèdent de la même inspiration. Je maintiens donc ma décision de réserver leur discussion, tout comme Jean-Louis Debré a réservé celle des amendements.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous avons un débat très important où l'on nous explique, par exemple, que, dans chaque département, un dixième de la population ne bénéficiera pas de présence postale dans un rayon de cinq kilomètres et que des centaines de bureaux de poste ne seront plus de plein exercice. Quand nous évoquons ces questions globalement, on nous répond globalement en disant qu'il n'y a pas forcément matière à débattre. Or, notre proposition d'en débattre par département et non plus par commune vise à vous permettre de répondre plus précisément sur ce qu'il en sera, dans chaque département, du service postal universel, de la présence postale, de la qualité du service rendu et du degré d'intégration des populations dans le nouveau dispositif. Il s'agit pour nous de vous fournir une échelle adaptée pour mesurer l'impact du projet de loi d'un point de vue territorial. Nous ne sommes donc pas hors sujet, monsieur Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Si, et c'est scandaleux !

M. François Brottes. L'obstruction, ce sont les demandes de quorum, les scrutins publics sur chaque vote. Nous ne l'avons pas fait et nous n'avons pas l'intention de le faire...

M. Jean Dionis du Séjour. Allez-y pendant que vous y êtes !

M. François Brottes. ...parce que c'est un débat auquel nous tenons.

Il faudrait que M. Dionis du Séjour garde son calme et apprenne ce qu'est véritablement l'obstruction.

Pour autant, je regrette, monsieur le président, alors que de 14 500 amendements, nous passons à 100 sous-amendements,...

M. Richard Mallié. Ils restent toujours du domaine réglementaire !

M. François Brottes. ...que vous nous empêchiez de débattre de l'aspect territorial. J'en prends acte, au nom de mon groupe, et je demande une nouvelle suspension de séance.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Monsieur le président, nous sommes dans le cas d'appliquer l'article 44-2 de la Constitution puisque ces sous-amendements n'ont pas été examinés par la commission et que le Conseil constitutionnel applique le même régime aux amendements et aux sous-amendements. J'accepterais éventuellement, à la diligence de la présidence et dans le climat de tolérance propre à ces lieux, que leur discussion soit réservée jusqu'à la fin du débat. Cela donnerait à l'opposition le temps de réfléchir au mal qu'elle fait par cette technique d'obstruction (Protestations sur les bancs du groupe socialiste),...

M. François Brottes. Ah non, pas vous, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à l'industrie. ...qui favorise l'absentéisme et dissuade le Parlement de se pencher sur les vrais problèmes...

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Les vrais problèmes, ce sont à l'échelle des territoires qu'ils se posent !

M. Jérôme Lambert. Si vous me laissez parler de mon département, vous les verrez les vrais problèmes !

M. le ministre délégué à l'industrie. ...en lui faisant perdre du temps avec des problèmes qui ne relèvent même pas de sa compétence, puisqu'ils sont d'ordre réglementaire.

Mais si l'opposition refuse de comprendre cela et de mettre à profit ce temps de réflexion que je suis prêt à lui voir concéder par la présidence, alors j'invoquerai l'irrecevabilité pure et simple au titre de l'article 44-2.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je ne suis pas de ceux qui ont déposé 14 500 amendements. Cela dit, le vrai problème auquel nous sommes confrontés avec ce texte, c'est bien celui que soulèvent les habitants et les élus locaux.

M. Jérôme Lambert. De tous bords !

M. Daniel Paul. Exactement : l'Association des maires de France, que la majorité ne peut pas soupçonner de parti pris, a fait part de sa grande inquiétude et de sa vive émotion à cet égard. Ils n'attendent sans doute pas que nous leur disions si tel bureau dans telle commune va fermer ou pas. Mais ils attendent tout de même, s'agissant de l'organisation territoriale de La Poste, qui compte parmi les premiers services publics de notre pays, que leur soient précisées les règles du jeu. Or aujourd'hui, vous êtes incapables de le faire et vous ne dites rien non plus de leur financement.

Avouez qu'il y a de quoi être inquiet. Et si, nous, nous sommes inquiets, que dire de nos mandants et de nos collègues, élus d'autres assemblées, en particulier communales, qui savent très bien que c'est à eux que va échoir en partie la responsabilité de payer pour que la présence postale soit assurée dans les meilleures conditions ?

Nos collègues socialistes n'ont pas choisi de fermer les yeux et de vous laisser mettre en place votre nouveau dispositif. On a déjà vu, dans deux ou trois domaines, ce que cela donnait quand vous utilisiez votre majorité pour mettre en place de nouveaux dispositifs et que vous vous « lâchiez » !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous n'allez tout de même reprocher à la majorité d'être la majorité !

M. Daniel Paul. Mais là, vous allez au-delà de la directive et même de ce que la majorité avait envisagé en commission. Il y a donc de quoi être inquiet.

Il y a également de quoi être inquiet quand on sait que beaucoup de décisions sont prises par des décrets qui, par nature, ne reviendront pas ici.

On pourrait tout de même apprécier un certain nombre de choses, département par département. Ce serait d'ailleurs une marque de respect à l'égard de la représentation nationale que de lui permettre d'aborder la question des demandes des citoyens et de l'organisation de la présence postale dans les territoires, parce que ce n'est pas simple. Et je prendrai un exemple.

Il se trouve que la plupart des ponts de mon département qui traversent la Seine sont payants. Si l'on retient la règle des cinq kilomètres et que le bureau de poste de plein exercice le plus proche se trouve de l'autre côté du fleuve, faudra-t-il payer le péage du pont de Normandie ou de celui de Tancarville pour effectuer une simple opération postale ?

M. Alfred Trassy-Paillogues. Il ne faut pas exagérer !

M. Daniel Paul. Cher collègue normand, ce genre de question mérite d'être posé.

M. Alfred Trassy-Paillogues. Quelle imagination !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous ramez !

M. Daniel Paul. Non, je ne rame pas !

M. Jérôme Lambert. M. Paul est proche de ses concitoyens !

M. Daniel Paul. Ce problème ne se pose peut-être pas dans votre département, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à l'industrie. La Seine passe aussi dans les Hauts-de-Seine !

M. Daniel Paul. Mais les ponts n'y sont pas payants !

M. le président. Monsieur Paul, je vous rappelle qu'il s'agit d'un rappel au règlement !

M. Daniel Paul. Ce genre de situation mérite au moins d'être examiné.

M. le président. Mes chers collègues, M. Brottes a demandé une suspension de séance afin que son groupe puisse se réunir. Je lui accorde cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

M. François Brottes. La censure est reprise !

M. le ministre délégué à l'industrie. Qui peut le croire ?

APPLICATION DE L'ARTICLE 44, ALINÉA 2,
DE LA CONSTITUTION

M. le président. Le Gouvernement oppose les dispositions de l'article 44, alinéa 2, de la Constitution, aux sous-amendements nos 14787 à 14887 de M. Brottes à l'amendement n° 18 rectifié, qui viennent d'être déposés.

Monsieur le président de la commission, ces sous-amendements ont-ils été soumis à la commission ?

M. Patrick Ollier, président de la commission. La commission ne peut que confirmer que ces sous-amendements ne lui ont pas été soumis.

M. le président. Les sous-amendements nos 14787 à 14887 n'ayant pas été soumis à la commission, la présidence, conformément à l'article 100, alinéa 3, du règlement, constate qu'il n'y a pas lieu d'en délibérer.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le président, nous prenons acte de cette décision qui est conforme à notre règlement. Il n'y a donc pas de contestation de notre part quant à la forme.

Sur le fond, nous savions que nos amendements auraient connu le même sort ou un sort quasiment identique. Cela nous permet de constater qu'il n'y a pas de la part de cette majorité ni de ce gouvernement la volonté d'évoquer concrètement l'impact territorial des dispositions contenues dans le projet de loi.

Pour notre part, nous n'avons pas la volonté de ralentir les débats. Je rappelle que nous avons attendu, à plusieurs reprises, nos collègues de la majorité et que les horaires des séances ont été décalés, et ce n'était pas du fait de l'opposition. Il n'y a donc pas de notre part d'antijeu, comme certains ont voulu le faire croire.

Nous déplorons de ne pas pouvoir parler des territoires parce qu'ils sont directement concernés. Par conséquent, nous le ferons au fur et à mesure de l'examen des articles et amendements, si la présidence nous le permet.

M. le président. Je lève la réserve sur les amendements nos 14562 et 18 rectifié.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 14652 ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 18 rectifié et 14652 ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Ces deux amendements sont très proches l'un de l'autre, mais le Gouvernement considère que l'amendement de la commission est plus pertinent et de meilleure qualité. Aussi souhaite-t-il l'adoption de l'amendement n° 18 rectifié.

M. le président. Nous en venons aux sous-amendements à l'amendement n° 18 rectifié.

La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre le sous-amendement n° 14 768.

M. Daniel Paul. Nous avons déjà eu l'occasion de le dire, pour nous, seuls les bureaux de poste de plein exercice constituent des éléments structurants du territoire et sont susceptibles d'offrir à l'ensemble de la population tous les services qu'elle est en droit de trouver dans un bureau de poste.

On nous fait parfois valoir que les points Poste permettent une plus grande souplesse dans les horaires. C'est sans doute vrai dans certains cas, mais pas dans tous. Souvent, c'est La Poste elle-même qui réduit de plus en plus les plages d'ouverture des bureaux de proximité qui, dans les zones qu'elle a jugées trop peu rentables, ont succédé aux bureaux de poste qui fonctionnaient avec tous leurs « attributs », c'est-à-dire qu'ils assuraient tous les services possibles. Ne sont plus fournis que des services restreints et, qui plus est, sur des périodes restreintes.

Nous proposons de substituer au deuxième alinéa de l'amendement n° 18 les mots : « bureaux de poste de plein exercice » aux mots : « points de contact et en complément de ces prestations de service universel ».

M. le président. Afin d'accélérer les débats, je vous serais reconnaissant, monsieur Dionis du Séjour, de défendre en même temps les sous-amendements nos 14779, 14780, 14781 et 14782, à l'amendement n° 18 rectifié.

Vous avez la parole.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous arrivons à une étape importante du débat.

À l'origine, l'État et La Poste ont signé un contrat de convergence le 13 janvier 2004 qui précise, au paragraphe 3, que l'effort dont sont convenus l'État et La Poste pourra « améliorer le service, notamment en milieu rural ». En première lecture, les sénateurs ont fait allusion à ce contrat ainsi qu'à la création d'un fonds de péréquation. Mais il n'a été question que d'un avenant au contrat. Je considère que c'est à la représentation nationale de définir les règles de fonctionnement, y compris les objectifs politiques qui sont assignés à ce fonds.

Prenant acte, au nom du principe de réalité, que, sur les 17 000 points de contact de La Poste, 14 000 seulement sont des bureaux de poste, le sous-amendement n° 14779 vise à inscrire dans la loi l'existence des agences postales communales et des points Poste. Ainsi serait résolue quantité de petits problèmes juridiques, je pense notamment à la rémunération du personnel communal lorsqu'il assume la fonction de régisseur dans les agences postales communales.

Le sous-amendement n° 14780, quant à lui, propose que la représentation nationale introduise, parmi les critères prioritaires que retiendrait le fonds de péréquation, une référence explicite aux zones de revitalisation rurale et aux zones urbaines sensibles. Une telle mention aurait le mérite d'éviter de tomber, comme le dit le président Debré, dans la logorrhée législative.

Le sous-amendement n° 14782, s'inspire des travaux du Sénat puisqu'il précise que ce fonds doit être contrôlé à la fois par La Poste, l'État et les grandes associations des collectivités territoriales. Il faut inscrire dans la loi que les ressources du fonds - à cet égard, les annonces portant sur 150 millions d'euros sont un symbole fort - proviennent de l'allégement de la fiscalité locale dont La Poste bénéficie du fait du présent projet de loi. Les collectivités territoriales attendent ce signe. Par ailleurs, l'amendement prévoit qu'une prime sera attribuée aux communes situées en ZRR ou en ZUS, et à celles qui auront fait l'effort de présenter un schéma directeur postal au niveau intercommunal. Alain Gouriou a déploré à juste titre l'absence de dimension intercommunale du texte et j'abonde dans son sens.

Le sous-amendement n° 14781 de M. Lassalle est également défendu.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre, s'il le veut bien, les sous-amendements nos 14771, 14769 et 14770.

M. Daniel Paul. Le sous-amendement n° 14771 vise à préciser la notion de service postal. Le réseau doit, à notre avis, être constitué d'un maximum de bureaux de poste de plein exercice, et non de succédanés ou de modèles réduits. Le service postal ne peut se limiter à l'envoi de lettres ou à la vente de timbres, il comprend tout ce qui a trait au service postal.

Le projet de loi a donné lieu à de nombreuses mobilisations de la part des élus locaux et à des pétitions des usagers. Ainsi, j'ai reçu un document revêtu de la signature de plus de 7 800 personnes du 15e arrondissement de Paris.

M. le ministre délégué à l'industrie. J'espère que cette information est plus fiable que celle d'hier !

M. Daniel Paul. Je n'ai pas vérifié, je fais confiance à mes amis.

Ce sont autant de preuves de l'attachement de la majeure partie de la population au service public postal. Il constitue en effet un réseau de proximité et de qualité au service de tous.

Mais vous n'êtes pas restés insensibles aux protestations qui venaient de partout, y compris de vos propres rangs. Certains d'entre nous ont rappelé ici que ce que d'aucuns tenaient pour la vérité pouvait être erreur ailleurs.

L'affirmation de M. Bailly et du Gouvernement, selon laquelle la présence postale serait maintenue sur l'ensemble du territoire, n'est pas acceptable. Vous avez tu, vous taisez et ils taisent que, contrairement aux agences postales communales et aux points Poste, les bureaux de plein exercice sont tenus par des postiers, ce qui permet aux usagers de bénéficier de leurs conseils, qu'il s'agisse de produits financiers ou de courrier. Vous avez tu, vous taisez et ils taisent que la transformation des bureaux de plein exercice en bureaux de proximité s'accompagne presque inévitablement d'une réduction des horaires d'ouverture. Il n'est pas inutile de faire savoir aux usagers qu'en Loire-Atlantique, département pilote de cette réorganisation, la transformation des quinze premiers bureaux de plein exercice en bureaux de proximité s'est traduite par une réduction des horaires d'ouverture de plus de 100 heures par semaine. Vous avez passé sous silence que la plupart des opérations financières ne seront pas assurées dans les points Poste : les versements sur les comptes, l'envoi de mandats internationaux, les retraits par chèque à l'ordre d'un tiers ou les opérations de gestion de compte comme le changement d'adresse. Autrement dit, vous proposez à certaines tranches de la population des services postaux au rabais. Mon premier sous-amendement demande donc le maintien effectif d'un service postal.

Venons-en aux moyens. Dès lors qu'on a dépouillé La Poste des moyens d'une péréquation et qu'elle est mise en concurrence avec des requins, ou des vautours, il faut bien trouver des moyens !

M. le ministre délégué à l'industrie. Nous sommes en plein feuilleton !

M. Daniel Paul. Vous proposez de ponctionner 150 millions d'euros sur ce que La Poste devrait payer au titre de la taxe professionnelle. Si, depuis plusieurs années, personne n'a réclamé que La Poste paie la taxe professionnelle, c'était parce qu'elle menait cet effort d'organisation et d'aménagement du territoire. Et, au moment où La Poste a des problèmes de rentabilité, vous lui demandez de payer 150 millions d'euros supplémentaires ! Je me mets à la place des maires ou des collectivités locales qui revendiquaient que La Poste soit soumise au régime droit commun mais qui vont voir les 150 millions d'euros passer sous leurs fenêtres.

Comme, de l'avis de tous, les 150 millions d'euros ne suffiront pas, j'ai une proposition à faire, que vous avez déjà entendue dans la bouche de ceux qui siègent de ce côté de l'hémicycle. Il y a dans notre pays des sources de financement qui ne sont pas mises à contribution. Certaines entreprises, les grandes, bref les « gros », reposent sur un matelas car, à force de pressurer leurs salariés et leurs sous-traitants, elles amassent des sommes telles que la presse en arrive à dire que les grands groupes du CAC 40 ne savent plus quoi faire des profits qu'ils ont accumulés.

M. le ministre délégué à l'industrie. Ils les placent dans L'Humanité ! (Rires.)

M. Daniel Paul. Le sujet est trop grave pour en rire !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous êtes bien financés par le groupe Lagardère !

M. Daniel Paul. Nous proposons simplement que le fonds national de péréquation soit financé par une taxe assise sur les actifs financiers de ces entreprises. Ainsi, au lieu de déménager l'emploi à travers les territoires, voire les continents, elles contribueraient à améliorer l'aménagement du territoire sur le plan postal. Croyez-moi, sans les mettre en difficulté, ce n'est pas 150 millions d'euros qu'on trouverait ! Certains groupes distribuent aujourd'hui plus de dividendes à leurs actionnaires que de salaires à leurs salariés ! Bien souvent, la rentabilité « à deux chiffres » dépasse de loin les 10 %.

Mettre à contribution ces groupes serait non seulement moral - ce qui n'est déjà pas si mal, à l'heure actuelle - mais également utile.

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. Oui, fondé sur l'article 58, alinéa 1. Tout à l'heure, l'un de nos collègues nous a fait part de son indignation : la morale ne serait pas au rendez-vous du déroulement de nos débats. Or les sous-amendements présentés par le groupe socialiste ont été victimes d'une censure, je le reconnais, réglementaire, au prétexte, avancé par le président de la commission, que celle-ci n'avait pu les examiner. C'est la raison pour laquelle je souhaiterais savoir si les sous-amendements de M. Dionis du Séjour ont été, quant à eux, examinés en commission. Dans le cas contraire, je serais dans l'obligation de constater que ce sont précisément ceux qui nous donnent des leçons de morale qui appliquent deux poids deux mesures, ce qui serait inadmissible !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Je comprends votre question, monsieur Brottes. Je vais y répondre.

Les sous-amendements de M. Dionis du Séjour - je l'ai vérifié auprès du président de la commission -...

M. Jean Proriol, rapporteur. Et ceux de M. Daniel Paul.

M. le ministre délégué à l'industrie. ...et ceux de M. Daniel Paul n'ont pas été examinés, c'est vrai, par la commission. Mais la raison pour laquelle je n'ai pas soulevé l'irrecevabilité, c'est qu'ils ont déposé des sous-amendements peu nombreux qui, loin d'être répétitifs, abordent manifestement des questions de fond.

M. Daniel Paul. Vous reconnaissez donc que nous travaillons sérieusement, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à l'industrie. Monsieur Brottes, mon attitude à l'égard de M. Dionis du Séjour ou de M. Daniel Paul est également valable dans votre cas : si le groupe socialiste avait déposé quatre ou cinq sous-amendements sur des questions de fond, je n'aurais pas usé à leur endroit de l'article 44, alinéa 2 de la Constitution. C'est encore vrai pour la suite du débat. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Paul Giacobbi. Vous prétendez que les socialistes ne posent pas des questions de fond ! C'est inadmissible !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous avez déposé cent amendements répétitifs.

M. François Brottes. La Corse et l'Île-de-France, ce n'est pas la même chose !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vos amendements traitent tous exactement du même problème. Leur examen aurait nécessité plus de huit heures de débat ! Je fais une différence entre vos préoccupations et celles de M. Daniel Paul ou de M. Dionis du Séjour, lesquelles portent sur de vrais sujets, ce qui ne signifie pas pour autant que je sois d'accord avec tous les sous-amendements de M. Dionis du Séjour ou avec aucun de ceux de M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je m'en doutais.

M. Richard Mallié. Très bien !

M. le ministre délégué à l'industrie. Mais, comme Voltaire, « je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je défendrai jusqu'à la mort le droit que vous avez de le dire ».

M. François Brottes. Sauf lorsqu'il s'agit du groupe socialiste !

M. le président. En réponse à M. Brottes, je tiens à rappeler que si l'article 44, alinéa 1, de la Constitution prévoit que « les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d'amendement », l'alinéa 2 précise : « Après l'ouverture du débat, le Gouvernement peut s'opposer à l'examen de tout amendement qui n'a pas été antérieurement soumis à la commission ». Les mots « peut s'opposer » montrent bien qu'il s'agit d'une faculté laissée à la discrétion du Gouvernement.

M. François Brottes. Vous confirmez donc bien, monsieur le président, que le Gouvernement use de cette faculté à géométrie variable.

M. le président. Non, monsieur Brottes.

Avant que nous ne poursuivions, j'indique que, sur le vote du sous-amendement n° 14768 et de l'amendement n° 18 rectifié, je suis saisi par le groupe socialiste de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 14768 ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Je ne peux vous donner l'avis de la commission puisqu'elle ne l'a pas examiné.

À titre personnel, j'y suis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert. Je souhaiterais illustrer mon avis sur l'amendement en discussion à partir d'exemples précis tirés de la situation dans laquelle se trouve mon propre département, la Charente.

M. le président. Je vous ai donné la parole pour répondre à la commission et au Gouvernement sur le sous-amendement n° 14768.

M. Jérôme Lambert. Je leur répondrai, monsieur le président, en leur rappelant la réalité vécue sur le terrain, une réalité, mes chers collègues, que vous connaissez tous - je n'en doute pas.

La Charente - vous l'ignorez peut-être - est l'un des quatre départements pilotes choisis il y a un an et demi environ par le Gouvernement pour évaluer l'organisation des services publics.

Bien qu'elle ait été déclarée département pilote, la présence postale y est gravement menacée, alors même que depuis plusieurs années d'importantes évolutions se sont déjà produites.

Sur les 122 bureaux de poste de plein exercice que comptait notre département il y a encore sept ans, cinquante-trois bureaux ont déjà été transformés en guichets de proximité et neuf en point Poste. Aujourd'hui, vingt-neuf bureaux de plein exercice sur les soixante et onze restants sont menacés à court terme si le projet que nous examinons est adopté en l'état. Il ne resterait finalement que trente-deux à trente-cinq bureaux de plein exercice, alors que, je vous le rappelle, nous en comptions encore 122 il y a sept ans !

Voici la liste précise des bureaux menacés de transformation : Angoulême-Ma-Campagne, Amberac, Ars-Aubeterre, Aunac, Brillac, Chazelles, Coulgens, Ecuras, Garât, Genac, Genouillac-Nieuil, Lignères Sonneville, L'Houmeau, Luxé, Magnac-sur-Touvre, Massignac, Mérignac, Montignac, Mouthiers, Reparsac, Saint-Genis-d'Hiersac, Sainte-Sévère, Sigogne, Sireuil, Tourriers, Tusson, Valence, Vars et Xambes, soit vingt-neuf bureaux de plein exercice sur les soixante et onze que compte le département.

À plus long terme, à l'instar de Saint-Michel, les bureaux suivants risquent d'être transformés en guichet de proximité : Brie, Brigueuil, Cherves-Richemont, Dignac, Louvel, Roullet, Saint-Même-les-Carrières, Villefagnan, Champagne-Mouton et Brossac.

Ces bureaux prochainement transformés en guichets de proximité subiront une réduction de leurs horaires d'ouverture, comme ce fut partout le cas lors des restructurations déjà engagées. Des bureaux de plein exercice seront transformés en agence postale communale, dont le financement incombe à la commune, à moins que des points Poste, chez des commerçants volontaires, ne soient ouverts. En Charente, La Poste envisage de créer trente-cinq points Poste, alors que nous en connaissons actuellement neuf.

Je tiens à rappeler ici la liste précise des opérations impossibles à réaliser dans un point Poste par rapport à un bureau de plein exercice. En ce qui concerne les opérations concernant le courrier, ce sont l'affranchissement, l'envoi de paquets pour l'étranger, l'envoi de Chronopost, les renseignements sur les envois spéciaux - Postimpact et Postcontact -, l'envoi de recommandés, le changement d'adresse, l'achat de timbres et de prêts à poster en gros, la philatélie, les renseignements téléphoniques sur les opérations postales de toute nature, la boîte postale, l'ouverture de dossiers de sociétés, les dépôts de procurations postales et la gestion de machines à affranchir des entreprises.

En ce qui concerne les opérations financières, il est impossible de faire dans un point Poste les retraits supérieurs à 150 euros, les retraits hors bureau de compte local, le retrait par chèque à l'ordre d'un tiers, le versement sur un compte CCP-CNE, les dépôts-annulations de procurations sur compte, les opérations de gestion sur compte - changement d'adresse, changement de situation civile ou changement de bureaux de gestion -, les placements financiers, les conseils financiers,...

M. Marc Laffineur. Les cinq minutes sont passées !

M. Jérôme Lambert. ...l'ouverture de comptes CNE-CCP et les opérations de bourse.

M. le président. Monsieur Lambert, les amendements sont réservés. Vous faites une intervention de discussion générale.

M. Jérôme Lambert. Monsieur le président, vous m'avez donné la parole pour répondre à la commission et au Gouvernement sur un sous-amendement : c'est ce que je fais.

M. le président. Dans ces conditions, il vous faut respecter votre temps de parole, lequel est de cinq minutes.

M. Jérôme Lambert. J'aurais déjà fini, monsieur le président, si vous ne m'aviez pas interrompu.

Il me faut encore citer les opérations sur comptes-titres, l'envoi de mandats-cash, le paiement de mandats-cash, le paiement de factures par mandat optique, l'envoi de mandats internationaux, le paiement de mandats internationaux et le paiement de lettres-chèque.

Qui plus est, La Poste envisage également de restructurer son réseau de facteurs, en transférant un certain nombre de ceux-ci d'un bureau à un autre. Or ce transfert se fera toujours dans le sens d'une concentration vers les bureaux les plus importants, au détriment des territoires ruraux.

M. le ministre délégué à l'industrie. Les cinq minutes sont passées !

M. Jérôme Lambert. En Charente, sont concernés les bureaux de Brossac, Villebois-Lavalette, Dignac, Cherves-Richemont et Villefagnan.

C'est pourquoi les Charentais, et tous leurs élus, de tous bords, se sont déjà mobilisés, et le resteront pour défendre les territoires ruraux et ceux qui veulent encore y vivre.

M. Richard Mallié. Cela suffit !

M. Jérôme Lambert. Récemment, avec le soutien de l'AMF, présidée dans le département par une élue appartenant à l'UMP, une manifestation pour la défense et le maintien des services publics a eu lieu devant la préfecture. Elle a réuni des centaines de Charentais, dont de très nombreux élus de tous bords, représentant les collectivités de la Charente.

M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur Lambert.

M. Jérôme Lambert. Comptez sur la poursuite de la mobilisation unitaire, monsieur le ministre, qui vise non seulement au maintien du service public dans nos territoires, mais également à son développement, afin qu'il puisse répondre aux attentes de développement économique.

Depuis trop longtemps nous avons subi, le temps est venu de résister !

M. Jean Proriol, rapporteur. Depuis sept ans !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix le sous-amendement n° 14768.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 49

                    Nombre de suffrages exprimés 49

                    Majorité absolue 25

        Pour l'adoption 19

        Contre 30

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. Dionis du Séjour a déjà défendu son sous-amendement n° 14779.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. M. Dionis du Séjour a déposé quatre sous-amendements qui tendent à compléter nos propres propositions. Le sous-amendement n° 14779 vise soit à proposer à des communes ou à des communautés de communes de constituer une agence postale communale ou intercommunale, soit à proposer à des commerçants de créer un point Poste.

Ce sous-amendement est sympathique. Mais à titre personnel - la commission ne l'a pas examiné - j'aurais préféré que toutes les dispositions relatives à l'intercommunalité soient rassemblées en un seul amendement, focalisé sur le rôle que doivent dorénavant jouer les intercommunalités. Je suis donc plutôt réservé.

Il n'en reste pas moins que le sous-amendement traite un aspect de la question que nous n'avions pas abordé et qui rejoint l'idée du président de La Poste, M. Bailly, de tenir compte des intercommunalités pour globaliser la présence postale et la rendre plus significative.

Telle est la raison pour laquelle je vous propose, monsieur Dionis du Séjour, de renvoyer cette question à la deuxième lecture.

M. le président. Avant de demander l'avis du Gouvernement, j'indique que, sur le vote du sous-amendement n° 14780, je suis saisi par le groupe Union pour la démocratie française d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 14779 ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable, bien que le Gouvernement comprenne l'objectif visé.

En revanche, le Gouvernement est favorable au sous-amendement n° 14780.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous ne voterons pas le sous-amendement présenté par M. Dionis du Séjour parce que conjuguer, point Poste par point Poste, accessibilité et rentabilité se révèlera impossible, dans la mesure où si l'accessibilité est une notion qui relève de la proximité, la rentabilité est une notion qui ne peut être prise en compte que de façon globale.

Deuxièmement, compte tenu du débat que nous avons eu précédemment sur l'impossibilité de la part du Gouvernement de donner des garanties en matière de confidentialité et de sécurité des opérations financières dans les points Poste privés, l'amalgame que fait le sous-amendement entre un partenariat public et un partenariat privé ne nous convient pas.

En troisième lieu, M. Dionis du Séjour évoque l'insuffisance de l'activité des bureaux de poste dans les territoires. Or nous répétons depuis le début de la discussion que nous souhaitons, avant de mesurer cette activité, ouvrir le champ des services rendus à la population, notamment ne matière de services financiers. Une fois que les bureaux de poste répondront à des besoins plus larges, nous pourrons mesurer le volume de leur activité. Et c'est faire preuve de conscience républicaine, et non pas d'irresponsabilité, que de dire que cette estimation se fait département par département !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. J'entends bien le message du rapporteur et conviens que nous devons retravailler ensemble l'importante question de l'intercommunalité, qui a été oubliée dans ce texte. Je retire donc le sous-amendement n° 14779, qui a été rédigé trop rapidement.

Toutefois, j'insiste tout particulièrement auprès de mes collègues sur la priorité claire qu'il faut accorder aux ZRR et aux ZUS, c'est-à-dire aux quartiers en difficulté et aux zones les plus fragiles du monde rural.

M. le président. Le sous-amendement n° 14779 est retiré.

Le sous-amendement n° 14771 a été défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission n'a pas examiné ce sous-amendement. À titre personnel, j'indique à M. Paul que je ne puis le soutenir.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 14771.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n° 14780 a déjà été défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Elle ne s'est pas prononcée sur ce sous-amendement. À titre personnel, j'émets un avis favorable. Il me semble en effet que la focalisation sur les zones de revitalisation rurale et les zones urbaines sensibles mérite une attention particulière au titre de l'aménagement du territoire. Mais cet avis favorable n'engage que son auteur...

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Si M. Dionis du Séjour fait des propositions, monsieur le ministre, c'est qu'il a le sentiment que cela servira à quelque chose...

M. le ministre délégué à l'industrie. Figurez-vous que nous aussi ! (Sourires.)

M. François Brottes. Je souhaiterais donc que vous précisiez jusqu'à quelle échéance cet engagement est valable. En effet, les zones de revitalisation rurale et les zones urbaines sensibles, dont nous avons débattu notamment à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, sont accrochées à des dispositifs européens dont certains s'éteignent en 2006, et je crois savoir qu'à cette date ce zonage aura en grande partie disparu. La souplesse et l'écoute du Gouvernement peuvent donc se comprendre, tout comme la facilité avec laquelle il accorde à M. Dionis du Séjour, avant que celui-ci ne nous quitte, son aval sur une disposition qui ne l'engage pas à grand-chose... Cela revient à dire oui à une mesure qui n'aura plus de raison d'être une fois la loi promulguée !

J'imagine que cette information intéressera M. Dionis du Séjour, car sa proposition vise à sécuriser les territoires en leur donnant confirmation d'un engagement fort.

M. Jean Dionis du Séjour. Merci !

M. François Brottes. Je souhaite donc que M. le ministre ou M. le rapporteur précise quelle est la durée de cet engagement.

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Le sous-amendement de M. Dionis du Séjour traite des conséquences et non des causes. Puisque vous avez souhaité voir abordés les problèmes de fond, monsieur le ministre, permettez-moi deux rappels.

Le 13 avril 2002, le Président de la République affirmait à Ussel que « notre espace rural mérite une véritable ambition. On ignore souvent ses besoins en infrastructures et en services publics. Le monde rural est aujourd'hui victime de la politique d'aménagement du territoire de ces dernières années, une politique qui ignore la ruralité faute d'en comprendre la réalité. »

Cette déclaration est à mettre en parallèle avec les propos de M. Devedjian, ministre délégué à l'industrie ici présent, rapportés dans les colonnes du Monde le 17 janvier dernier : « Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 17 % des bureaux de poste desservent actuellement 50 % de la population et 60 % d'entre eux 18 % de la population. » Voilà qui a le mérite de la clarté ! « En clair, poursuiviez-vous, La Poste est surreprésentée en milieu rural et pas assez en milieu urbain. Il n'y a que les pires conservateurs pour s'imaginer qu'il ne faut pas répondre aux besoins des usagers. En 2007, il y aura toujours 17 000 points de contact. »

Quelle est donc la volonté de la majorité UMP et du Gouvernement ? Que veulent-ils faire des zones rurales ? Si elles sont destinées à devenir des sanctuaires et non des territoires de développement, le seul critère valable sera en effet celui de la rentabilité et vous serez fondés à inscrire dans le marbre de la loi le théorème de M. Devedjian ! Une telle duplicité est préjudiciable aux zones rurales, et nous aurons d'ailleurs l'occasion d'y revenir au cours de ce débat.

Quant à l'argument de M. Dionis du Séjour, qui veut que les ZRR entrent en ligne de compte, il ne tient absolument pas. Nous nous opposons à cette logique qui ne sert pas l'avenir des zones rurales.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

M. François Brottes. Le ministre n'a pas répondu, monsieur le président !

M. le président. Vous êtes déjà intervenu, monsieur Brottes !

Je vais donc mettre aux voix le sous-amendement n° 14780.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

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M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 46

                    Nombre de suffrages exprimés 30

                    Majorité absolue 16

        Pour l'adoption 30

        Contre 0

L'Assemblée nationale a adopté.

Le sous-amendement n° 14769 a été défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. À titre personnel, défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je tiens à préciser que, n'ayant pas obtenu de réponse du Gouvernement sur l'échéance à laquelle sont soumises les ZRR, nous nous sommes abstenus lors du vote du sous-amendement n° 14780.

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous avez bien fait !

M. le président. C'était donc une explication de vote relative à un sous-amendement déjà voté. Voulez-vous apporter d'autres précisions sur des amendements discutés en début de séance, monsieur Brottes ? (Sourires.)

Je mets aux voix le sous-amendement n° 14769.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n° 14781 a été défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Toujours à titre personnel, je trouve ce sous-amendement très réducteur par rapport à notre amendement. La commission a fait mieux. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. M. Lassalle a déposé un bon sous-amendement, visant à éviter que 10 % de la population soient exclus du dispositif de présence postale de proximité. Quoi qu'il en dise, le rapporteur ne fait pas mieux : bien au contraire, il risque d'exclure 10 % de la population. Le but recherché par Jean Lassalle est l'égalité républicaine sur tout le territoire et pour 100 % de nos concitoyens - je parle bien entendu sous votre contrôle, monsieur du Séjour...

Mon groupe soutiendra donc ce sous-amendement, car il est important de veiller à n'exclure personne d'un dispositif déjà trop léger en termes de service rendu aux populations.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 14781.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un sous-amendement n° 14782.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le soutenir.

M. Jean Dionis du Séjour. Ce sous-amendement a trois objets : la gouvernance du fonds de péréquation, son financement et les priorités pour son utilisation en faveur des zones urbaines et rurales les plus fragiles et des zones intercommunales ayant élaboré leur propre projet de schéma directeur postal.

En ce qui concerne la gouvernance, je reprends à peu près l'équilibre suggéré par le Sénat, à savoir une répartition entre La Poste, l'État et les grandes associations représentatives des collectivités territoriales - AMF, ARF, ADF, mais aussi, je suppose, l'association des communautés de districts. Un décret viendra préciser les modalités, mais il importe de poser le principe d'une gouvernance à trois.

Ensuite, l'Assemblée se doit de parler clairement sur le financement : c'est là un sujet sur lequel nous sommes attendus. Ce que le contrat de gouvernance énonce au conditionnel, mon sous-amendement le dit de façon claire : « Les ressources du fonds proviennent de l'allègement de la fiscalité locale dont La Poste bénéficie en application de la présente loi. » Les 150 millions d'euros dont on parle doivent être affectés non pas à la modernisation du cœur du réseau de La Poste - une telle tâche incombe à l'entreprise La Poste -, mais à sa présence en milieu rural, c'est-à-dire au financement des agents postaux communaux ou des points Poste.

Enfin, il convient de définir les priorités. Nous l'avons fait tout à l'heure : ce sont les zones rurales et urbaines les plus fragiles. Le financement doit s'y conformer. La commission Hérisson, qui travaillera à la question du fonctionnement de ce fonds, doit avoir des lignes directrices politiques. Permettez-moi d'en suggérer deux.

Je représente ici une circonscription rurale. Dans un périmètre de 30 kilomètres autour d'Agen, on est encore dans le « rurbain ». Ce n'est pas une zone rurale qui souffre. Mais dès qu'on s'éloigne de 50 à 70 kilomètres, on atteint une zone rurale profonde où tous les clignotants sont au rouge. Là se trouvent les ZRR auxquelles, par ce sous-amendement, je propose de donner une priorité tout comme aux ZUS. Par ailleurs, posons le principe d'une prime accordée aux projets pensés et proposés à La Poste par les élus d'une intercommunalité qui auront pris l'initiative d'un véritable schéma directeur de service postal.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Elle n'a pas examiné ce sous-amendement, sur lequel je m'exprime à titre personnel.

J'invite tout d'abord M. Dionis du Séjour à retirer le deuxième paragraphe, qui limite les ressources du fonds et les faisant provenir uniquement de « l'allègement de la fiscalité locale dont La Poste bénéficie en application de la présente loi ». En effet, on s'accorde à dire que les 150 millions annoncés - provenant, je n'y reviens pas, d'un abattement sur la base des taxes locales - seront les premières ressources qui permettront à La Poste d'aider les collectivités locales et de s'aider elle-même à maintenir des implantations et, le cas échéant, à en créer. Mais il ne faudrait pas s'y limiter : nous ne désespérons pas d'obtenir un jour la participation d'autres partenaires, voire - qui sait, monsieur le ministre ? - de l'État, lorsque cette somme initiale aura été consommée.

Je voudrais apporter une précision concernant les règles de distribution du fonds : ce n'est pas un décret - comme tout le monde semble le croire - mais un avenant au contrat de performance et de convergence signé avec La Poste le 13 janvier 2004, qui détermine, après avis de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, les ressources et les modalités d'emploi du fonds postal national de péréquation territoriale. J'appartiens, comme M. Gouriou, à cette commission. Je peux vous dire que nous travaillons en ce sens.

Trois partenaires sont autour de la table : l'État, La Poste et les élus. Et nous ne sommes pas toujours d'accord entre nous sur les modalités de gestion de ce fonds.

Nous admettons qu'il vaut mieux que la gestion monétaire du fonds soit assumée par La Poste, qui a plus de moyens que nous, plutôt que de créer une régie, une SEM ou de déléguer la gestion de ce fonds à une commission présidée par un préfet, comme l'avait imaginé à un moment M. Dionis du Séjour. Reste que nous entendons bien que les orientations que nous donnerons soient observées par La Poste.

Nous y veillons. Et je prends à témoin mes collègues qui siègent à cette commission : lors de la dernière séance, nous avons eu une petite discussion à ce sujet.

Faut-il, monsieur Dionis du Séjour, accepter aujourd'hui votre sous-amendement ? J'aurais préféré, comme pour l'amendement que vous avez retiré, que nous travaillions encore dessus pour l'améliorer et prendre en compte votre préoccupation relative à la coopération intercommunale à fiscalité propre.

Voilà pourquoi je m'en remettrai personnellement à la sagesse de l'Assemblée. À moins que, faisant preuve vous-même d'une « super-sagesse », vous retiriez votre sous-amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Tout le monde a compris l'importance de ce sous-amendement. Et j'aimerais, monsieur le ministre, que vous répondiez aux questions que nous allons vous poser.

Inutile de nous dire que nous déposons trop d'amendements, que c'est du verbiage sans intérêt et que nous perdons du temps ! Même lorsque d'autres collègues posent des questions au Gouvernement dans le cadre du débat d'amendements, on n'obtient pas de réponse !

M. le ministre délégué à l'industrie. Je réponds généralement !

M. François Brottes. Vous êtes favorable à ce sous-amendement. Dont acte. Je vous poserai donc plusieurs questions.

Premièrement, nous avons conscience que le montant prévu de 150 millions d'euros n'est pas à la hauteur du problème. Le rapporteur nous a dit qu'il faudrait peut-être d'autres ressources, et j'y reviendrai.

Quoi qu'il en soit, il s'agit d'une nouvelle charge pour La Poste, comme chacun l'a compris. Quels allègements viendront compenser cette nouvelle charge ?

Par exemple, l'aide au soutien à la diffusion de la presse, qui s'élève à 480 millions d'euros, pourrait être assurée par le budget de l'État et non plus par La Poste.

Deuxièmement, quelle est la pérennité de cette ressource d'allègement de taxe fiscale, c'est-à-dire de taxe professionnelle, dans la mesure où cette dernière est en pleine révision ? Combien de temps pourra tenir un tel dispositif ? C'est une question à laquelle vous n'avez pas répondu.

Troisièmement, que va financer ce fonds ? La logistique, c'est-à-dire les bureaux ou le personnel ? Servira-t-il à financer, ou du moins à limiter le surcoût des tarifs de distribution, lié au service de proximité ?

Quatrièmement, quelle contribution sera sollicitée auprès des concurrents de La Poste pour abonder, le cas échéant, ce fonds de péréquation ? Ces concurrents auront le droit d'aller sur tous les autres marchés que le secteur réservé. Il serait logique, comme cela se passe ailleurs, dans les domaines de l'énergie ou des télécommunications, que l'on collecte des financements auprès de l'ensemble des concurrents, au titre de la compensation des charges de service public.

Dernière question : en quoi un avenant au contrat de plan sécuriserait le dispositif ? En effet, le contrat de plan, dont vous êtes, monsieur le ministre, le maître et le responsable, peut être modifié à tout moment, sans même qu'on ait besoin du vote du législateur.

Ces questions sont très précises. Je ne pense pas abuser de votre temps en vous demandant d'y répondre. D'autant que vous venez de dire que vous étiez favorable à ce sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Ce sont cinq questions techniques. On peut jouer longtemps à ce petit jeu. Certes, ce sont de bonnes questions. Reste qu'elles n'ont pas tout à fait leur place à ce moment du débat. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Paul Giacobbi. Nous n'avons pas pu nous exprimer en temps voulu et défendre nos amendements avant l'article 1er !

M. le ministre délégué à l'industrie. Allons, ils ne traitaient pas de ce sujet !

Mme Marylise Lebranchu et M. François Brottes. Mais si !

M. le ministre délégué à l'industrie. Nous allons aborder ces problèmes. Mais attendons, par exemple, les propositions de la commission Hérisson. Permettez-moi de ne pas anticiper. D'ici la deuxième lecture au Sénat, nous aurons sans doute des éléments plus précis. Autrement, vous me reprocherez d'avoir réuni une commission pour rien...

Un mot sur les zones de revitalisation rurale, constituées en 1996. Elles bénéficient de mesures fiscales favorables qui ont été prorogées par les lois de finances successives. Nous avons bien l'intention de continuer à les faire vivre.

Jouant les Cassandre, vous dites que cela ne durera pas.

M. François Brottes. Jusqu'en 2006 : c'est la loi !

M. le ministre délégué à l'industrie. Encore une fois, elles ont été prorogées...

Mme Marylise Lebranchu. Non !

M. le ministre délégué à l'industrie. ...par les lois de finances successives et nous souhaitons prolonger ce dispositif, qui fera également l'objet de mesures réglementaires.

M. François Brottes. Encore une fois, nous n'avons pas obtenu de réponse !

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Comme François Brottes et sans doute beaucoup d'autres dans cette assemblée, je serais assez favorable à ce type d'engagement.

Il s'agit bien du financement des agences postales. Je prends l'exemple de Guimaëc, typique des ZRR dont parle M. Dionis du Séjour. L'investissement supporté par la commune pour installer une agence postale a été en 1991 de 200 000 francs. La commune estime maintenant que le bâtiment, amorti, fait partie de son patrimoine. En revanche, le salaire de l'agent administratif, sans le supplément familial, est de 11406 euros par an, La Poste en versant 8 402 euros par an.

L'ouverture de cette agence a été réduite à trois heures par jour. Il est intéressant de noter qu'elle est ouverte le samedi matin de neuf heures trente à douze heures, mais la commune s'est engagée pour 8 400 euros par an.

En outre, et c'est important pour des raisons de sécurité et de continuité du service, il a été signifié à cette dernière qu'il lui fallait recruter un agent administratif pour assurer les remplacements - pour congés de maladie, de maternité ou autres congés légaux. Cela lui coûte 4 000 euros par an et elle doit créer un temps partiel, ce qui est statutairement délicat pour les collectivités territoriales.

Ma circonscription est petite et ne compte que 54 communes. Mais le cas se présente quarante fois ! Vous vous représentez la dépense qui sera générée si, comme la commission départementale semble le dire, que ce soit au Ponthou, à Botsorhel, à Roscoff, à Sibiril, Trézidé, à Plouvorn et j'en passe, les bureaux ou les agences actuels doivent être portés par des financements de ce type ! C'est bien un sujet important d'aménagement du territoire.

Pour répondre à notre collègue, je préciserai que nous avons fait un schéma de services au niveau d'une communauté d'agglomération. C'est une communauté d'agglomération particulière, dans la mesure où la ville centre n'a que 15 000 habitants et que l'ensemble des autres communes sont des communes rurales. Les communes rurales disent être d'accord, mais remarquent qu'elles n'ont pas de certitude sur la pérennité du financement de La Poste. De fait, dans les conventions, il n'y a pas d'engagement au-delà de cinq ans. Que se passera-t-il alors ?

Par ailleurs, nous n'avons pas l'assurance que le « delta restant » par agence postale sera pris en charge - comme le souhaite M. Dionis du Séjour dans son sous-amendement - après le vote cette loi, différemment de ce qu'il a été jusqu'à présent. Déjà, les 150 millions d'euros prévus ne sauraient couvrir ces frais de fonctionnement sur l'ensemble du territoire français.

Autre point : on pourrait faire plus pour les ZRR, comme Guimaëc, Botsorhel, Lanneanou, Botmeur, La Feuillée, Scrignac, etc. Or monsieur le ministre, même si vous prenez des engagements budgétaires tous les ans avec des dispositions spécifiques, ils ne seront plus de droit au 31 décembre 2006.

Il va bien falloir que vous nous disiez, à ce point du débat, si vous vous engagez, et vous en avez le droit, à ce que les zonages ZRR et ZUS tels qu'ils sont et tels qu'ils évolueront, soient maintenus - disons, pendant dix ans - et à ce qu'on leur applique la loi actuelle. Sinon, au 31 décembre 2006, au moment de la préparation du budget 2007, vous n'aurez plus de base juridique pour appliquer un sous-amendement qui aura pourtant été adopté avec le soutien du Gouvernement.

M. le ministre délégué à l'industrie. Me permettez-vous de répondre ?

Mme Marylise Lebranchu. Il me reste un point à aborder, à savoir la compensation de la taxe professionnelle. Vous pourrez me répondre en même temps.

M. le ministre délégué à l'industrie. Mais posez vos questions une par une !

Mme Marylise Lebranchu. Je n'en ai pas le droit. C'est le règlement ! Demandez donc au président.

M. le président. Sans compter, madame Lebranchu, que vous avez épuisé votre temps de parole de cinq minutes !

Mme Marylise Lebranchu. Dans le sous-amendement, il est question d'un décret. Le rapporteur vient de préciser qu'il s'agit en fait d'un avenant. Est-ce que vous pensez qu'il s'agit d'un décret ? Est-ce que la procédure de l'avenant tombera à compter du vote de ce sous-amendement ?

Enfin, on nous a annoncé une réforme de la taxe professionnelle. Qu'en sera-t-il, sur le fond, lorsque cette réforme sera passée ?

Je vous rappelle, en toute amitié et solidarité républicaines, que vous êtes en train de dire aujourd'hui que le fonds que vous créez sur l'assiette de la TP actuelle sera maintenu après la disparition de l'assiette de la TP. Vous devez nous le répéter, pour que cela figure au Journal officiel. Sinon, en effet, ce sous-amendement ne tient pas.

M. le président. La parole est à M. le ministre.


M. le ministre délégué à l'industrie.
On ne peut pas discuter comme cela de douze questions alors que chacune mériterait un vrai débat. Ce que je vous ai dit tout à l'heure et que je vous répète, madame Lebranchu, c'est que ce dispositif sera maintenu par des mesures réglementaires.

J'ai, moi aussi, une question à laquelle vous n'avez pas répondu : allez-vous voter le sous-amendement ?

M. François Brottes. Nous allons vous le dire !

M. le président. La parole est à M. Alfred Trassy-Paillogues.

M. Alfred Trassy-Paillogues. Je propose une rectification mineure, qui répondrait à l'objection de notre rapporteur et qui a l'accord de Jean Dionis du Séjour. Elle consisterait à écrire : « Les ressources du fonds proviennent " notamment " de l'allégement de la fiscalité locale », ce qui permettrait d'ouvrir ce fonds à d'autres financements.

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. S'il y avait eu cent sous-amendements, monsieur le ministre, il y aurait eu une question par sous-amendement. Vous auriez ainsi pu répondre tranquillement à une centaine de questions.

Compte tenu des réponses que nous n'avons pas obtenues, nous nous abstiendrons sur le sous-amendement. Le financement n'est pas stabilisé, non plus que son périmètre. Nous n'avons pas plus de précisions sur les modalités de gouvernance et notamment sur ce que financera le fonds. Mais nous concevons parfaitement que, à ce stade de la discussion, toutes les questions n'aient pas trouvé de réponse et que la seconde lecture y contribuera.

M. le ministre délégué à l'industrie. Tout de même !

M. François Brottes. Par notre abstention, nous prenons acte de cette proposition et de votre accord. Ce n'est pas un vote contre. Mais compte tenu du flou qui demeure, nous ne pouvons, pour l'instant, pas aller au-delà.

Une question tout de même :...

M. le ministre délégué à l'industrie. Allez-y doucement, j'ai un petit cerveau ! (Sourires.)

M. François Brottes. ... s'agit-il bien pour La Poste d'une nouvelle charge qui ne sera pas compensée ?

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. J'indique que je suis d'accord avec la rectification proposée par M. Trassy-Paillogues et que je maintiens le sous-amendement. Je remercie, d'ailleurs, M. le ministre de son soutien. Il pourrait certainement être amélioré en seconde lecture, pour laquelle il donne déjà des axes de travail, ainsi qu'à la commission Hérisson : gouvernance mixte entre l'État, La Poste et les collectivités locales, financement par allégement de taxe professionnelle et priorité donnée aux zones les plus fragiles de la nation.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement est d'accord avec la proposition de M. Trassy-Paillogues d'ajouter « notamment ».

Madame Lebranchu, toutes ces questions sont... comment dire ?

Mme Marylise Lebranchu. Vous avez déjà été très dur avec moi, ne vous gênez pas !

M. le ministre délégué à l'industrie. Je vous ai fait des compliments sur votre motion !

M. Jean Le Garrec. J'en témoigne !

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous ne vous souvenez que de ce qui vous déplaît. Je reconnais bien là l'ingratitude de l'opposition ! (Sourires.)

M. François Brottes. Vous étiez un maître, monsieur le ministre ! (Sourires.)

M. le ministre délégué à l'industrie. Combien de temps cela va durer ? La réponse est dans la convention relative aux agences postales, à l'article 7 : de trois à neuf ans, avec reconduction tacite par périodes de trois ans. Tout cela vous le savez. Pourquoi reposer la question ?

Mme Marylise Lebranchu. Ce n'est pas ce que j'avais demandé !

M. le ministre délégué à l'industrie. Si, notamment pour l'agence de Guimaëc. La réponse est dans la convention.

Monsieur Brottes, je réponds à trois questions d'un coup, je suis surmené ! (Sourires.) Du reste, vous faites ce qu'il faut pour nous épuiser.

M. François Brottes. Reprenez-vous, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à l'industrie. Le fonds de péréquation n'est pas une charge nouvelle pour La Poste. L'allégement de taxe dont elle bénéficiait, c'était de l'argent qu'elle conservait et dont elle faisait ce qu'elle voulait. Désormais, elle l'affectera au fonds de péréquation dans le cadre de son activité.

M. Jean Proriol, rapporteur. Tout à fait !

M. le ministre délégué à l'industrie. Ce n'est donc pas un alourdissement de ses charges mais une affectation précisée par la loi de dépenses dont, de toute façon, elle a la charge.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je veux remercier le ministre de la clarté de sa réponse. Une fois n'est pas coutume !

M. le ministre délégué à l'industrie. Ne m'encouragez pas !

M. François Brottes. L'argument de l'allégement de taxes locales pour La Poste est assez malin. Il laisse croire qu'il y avait un matelas, un trésor caché qui va enfin servir à la cohésion sociale. Si vous croisez Gérard Larcher à l'occasion d'un conseil des ministres, interrogez-le sur les excellents rapports qu'il a produits, s'agissant des coûts que représente pour La Poste la couverture territoriale. Ce n'est personne d'autre que La Poste qui les finance déjà aujourd'hui. Les 150 millions d'euros vont s'ajouter au déficit actuel. Il s'agit donc bien d'une charge totalement nouvelle, chacun l'aura compris. Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous avoir éclairés.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Le débat a porté sur les ZUS et les ZRR. Mais le texte de loi ne prévoit pas de date couperet. Sur le plan de la fiscalité, l'Europe pourrait peut-être intervenir, mais elles existeront quand même tant que nous n'aurons pas modifié la loi, qui devrait vous être chère, du 25 juin 1999, que nous avons enrichie par la loi du 2 août 2003.

M. François Brottes. Elle nous est très chère, en effet !

M. Jean Proriol, rapporteur. À travers les ZRR et ZUS, il s'agit de définir des régions qui ont des caractéristiques géographiques, économiques et sociales porteuses de handicaps. C'est une loi française, pas européenne.

M. le président. Je rappelle que le sous-amendement n° 14782 a été rectifié et qu'il convient maintenant de lire : « Les ressources du fonds proviennent notamment de l'allégement de fiscalité locale... ».

M. Jean Proriol, rapporteur. La rectification apportée me conduit, à titre personnel, à être favorable au sous-amendement.

M. Jean Dionis du Séjour. Merci, monsieur le rapporteur !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 14782, tel qu'il vient d'être rectifié.

(Le sous-amendement, ainsi rectifié, est adopté.)

M. le président. Le sous-amendement n° 14770 a déjà été défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Non examiné par la commission. À titre personnel, j'y suis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Également !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 14770.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14652, sur lequel, je le rappelle, la commission et le Gouvernement avaient exprimé un avis défavorable.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 18 rectifié et modifié.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 38

                    Nombre de suffrages exprimés 36

                    Majorité absolue 19

        Pour l'adoption 36

        Contre 0

L'Assemblée nationale a adopté.

M. Jean Proriol, rapporteur. Tout arrive !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 14653 et 19, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 19 fait l'objet d'un sous-amendement n° 14783.

L'amendement n° 14653 est-il défendu ?

M. Alfred Trassy-Paillogues. Il est défendu !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 19 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 14653.

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis défavorable sur l'amendement n° 14653. Quant à l'amendement n° 19, il tend à consacrer dans le texte de loi la commission départementale de présence postale territoriale, qui est composée d'élus. Cette commission est appelée à devenir un pivot du dispositif de gestion de cette présence postale territoriale, notamment s'agissant de l'utilisation du fonds national postal de péréquation territoriale.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir le sous-amendement n° 14783.

M. Jean Dionis du Séjour. Je vais plutôt le retirer car, après avoir travaillé avec plusieurs associations d'usagers de La Poste, je me suis rendu compte qu'en l'occurrence la notion d'usager n'est pas évidente à cerner.

M. le président. Le sous-amendement n° 14783 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 14653 et 19 ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement considère que l'amendement de la commission est meilleur. Il est donc favorable au n° 19 et défavorable au n° 14653.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14653.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Étant à l'origine, avec certains de mes collègues, de la création des commissions départementales de présence postale territoriale, je me félicite qu'elles soient aujourd'hui intégrées dans un texte de loi, car, jusqu'à présent, elles ne figuraient que dans le contrat de plan entre l'État et La Poste. Il est bon de les asseoir dans un cadre juridique solide et normatif.

Je peux comprendre qu'elles n'aient qu'un rôle consultatif, sans avis conforme, compte tenu des exigences que requiert le management de l'entreprise publique La Poste. Cela étant, il faudra définir des règles du jeu afin que ces commissions ne soient pas de simples chambres d'enregistrement. Le décret permettra, je l'espère, de leur donner un peu de corps, d'âme et d'esprit, faute de quoi les élus estimeront qu'il est inutile d'y siéger.

Par ailleurs, se pose la question du rapport de ces commissions au régulateur. Il ne faudra pas expliquer aux élus qui y siègent que tel ou tel sujet ne les concernent pas parce qu'il tombe dans le champ de la concurrence et que, en tout état de cause, le régulateur en a décidé autrement.

Je ne veux pas poser de questions auxquelles vous ne pouvez pas répondre aujourd'hui, monsieur le ministre, mais il faudra, peut-être en deuxième lecture, définir précisément le champ d'intervention de la commission. Aujourd'hui, il est assez large et l'on peut s'en réjouir, mais nous devons veiller à ce qu'une jurisprudence ultérieure ne réduise pas à la portion congrue la qualité, le niveau et le volume des débats de ces commissions.

Cela étant, nous voterons l'amendement n° 19.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 14716.

M. Daniel Paul. Par le biais de cet amendement, nous souhaitons vous faire part de nos doutes sur la pertinence de la restructuration des centres de tri dans laquelle La Poste est engagée.

À ce jour, cette restructuration est synonyme tant de concentration du réseau que de modernisation. Pour ne citer que quelques cas, rappelons qu'il n'existe plus de centre de tri dans la moitié nord de Paris intra muros, et que le centre de Gonesse, qui centralise le courrier destiné aux Parisiens, se situe à vingt-cinq kilomètres de la capitale. À terme, Paris sud sera également desservi par un centre de tri situé à plusieurs kilomètres.

M. le ministre délégué à l'industrie. À Wissous.

M. Daniel Paul. Autre mouvement de concentration, dans l'est de la France, cette fois, les centres de Metz, de Nancy et d'Épinal seront clos pour créer un gros pôle de tri en rase campagne.

Ces concentrations répondent prioritairement à un objectif de rentabilité. Ces restructurations, comme vous vous plaisez à les appeler, s'inscrivent avant tout dans une logique de réduction massive de l'emploi. Ainsi, dans les Hauts-de-Seine, plus de 400 emplois pourraient disparaître dans le cadre de la concentration des trois centres de tri. Dans le département du Loir-et-Cher, on estime à soixante-dix le nombre d'emplois en moins, suite à la restructuration des centres de tri.

Preuve supplémentaire, s'il en faut, de ce souci de réduction de la masse salariale qui anime, comme vous, la direction de La Poste : en Pologne, où La Poste est implantée par le biais de sa filiale Masterlink, la direction n'a pas jugé utile d'engager une dynamique innovante. À quoi bon être moderne quand la main-d'œuvre est si bon marché ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Ce sont vos amis qui ont formé cette main-d'œuvre pauvre !

M. Daniel Paul. Je n'y suis pour rien !

M. le ministre délégué à l'industrie. Aujourd'hui, ils pleurent sur la Pologne ! On aura tout vu !

M. Daniel Paul. La Poste innove partout où elle peut grignoter l'emploi.

Pour notre part, nous défendons des centres de tri proches de la population afin d'assurer une distribution dans les meilleurs délais. En effet il est clair qu'une distance plus grande et la concentration font peser des risques supplémentaires sur la distribution du courrier.

Nous défendons également des centres de tri pluridisciplinaires où les salariés peuvent effectuer des missions aussi diverses que l'expédition, la mise sous pli, voire certaines activités d'impression.

Cet objectif audacieux ne pourra, bien sûr, être rempli sans la relance d'un grand projet industriel pour La Poste. Or le projet Cap qualité courrier ne se distingue malheureusement pas par ses idées en matière de prospective industrielle !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Très défavorable.

Le centre de tri de Gonesse est le plus moderne d'Europe et il permettra à La Poste française de tailler des croupières à ses concurrents qui veulent lui prendre ses parts de marché !

M. le président. Y compris les Polonais ! (Sourires.)

Je mets aux voix l'amendement n° 14716.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour défendre l'amendement n° 14753.

M. François Brottes. Puisque le Gouvernement s'autorise à élaborer des rapports, nous proposons qu'il en présente un au Parlement avant le 1er janvier 2006. Cela nous laisse presque un an de fonctionnement et, chacun étant déjà dans les starting-blocks, nul doute que nous aurons pu constater les effets de la dérégulation sur le terrain. Ce rapport aura pour objectif d'analyser la façon dont les concurrents de La Poste auront su d'ici là se saisir d'un certain nombre de niches de marchés spécifiques, comme, par exemple, celui du courrier recommandé, et quel sera l'impact de ces comportements sur le marché global du courrier.

En son temps, j'avais demandé au président de la commission, avant le changement de statut d'EDF et de GDF, de pouvoir auditionner le président de la CRE, la commission de régulation de l'énergie. On m'a expliqué que ce n'était pas opportun. Puis, nous avons découvert en séance que des éléments provenant d'autres pays ou de l'évolution du marché nous imposaient de prendre certaines dispositions.

Je souhaite donc que le président de la commission appuie ma demande d'un rapport qui nous permettra, dans quelques mois, d'analyser un impact que nous ne pouvons mesurer aujourd'hui. Il s'agit de prévoir l'évolution de notre législation face à une situation nouvelle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

Le rapport prévu à l'article 7 devra nécessairement faire le point sur ces processus.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

Je rappelle que l'Assemblée a rejeté des amendements qui prévoyaient un rapport avant le 31 décembre 2005. Ici, on nous le demande avant le 1er janvier 2006, ce qui change tout...

M. François Brottes. Ce n'était pas le même rapport !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14753.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. J'en viens à l'amendement n° 14759.

La parole est à M. François Brottes, pour le présenter.

M. François Brottes. Monsieur le président, je souhaite rectifier cet amendement. Pourriez-vous m'accorder une suspension de séance pour le rédiger, à moins que vous n'acceptiez que je le formule oralement ?

M. le président. Pour gagner du temps, monsieur Brottes, vous pouvez le rectifier en séance.

M. François Brottes. Notre assemblée a voté tout à l'heure la mise en place d'un fonds postal national de péréquation territoriale. Il convient donc d'abord de supprimer la première phrase de l'amendement qui a le même objet.

Ensuite la deuxième phrase serait ainsi rédigée : « Tout opérateur autorisé devra verser une contribution au fonds postal national de péréquation. », le reste de l'amendement demeurant inchangé.

Cette modification est simple et je pense l'avoir clairement explicitée.

Par cet amendement, il s'agit de prendre acte de la création du fonds postal national de péréquation, ainsi que de l'adoption du sous-amendement de M. Trassy-Paillogues qui a introduit le mot « notamment » à propos des ressources de financement de ce fonds et donc de prévoir que les opérateurs agréés, les concurrents de La Poste, viendront aussi l'abonder.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. L'amendement tel qu'il a été présenté initialement avec son premier paragraphe a été rejeté par la commission. Mais, même rectifié, il me semble qu'il comporte une confusion entre les deux fonds : alors que le fonds de service universel, prévu à l'article 3 de la directive de 1997, doit permettre la sauvegarde du service universel, le fonds postal national de péréquation territoriale est un instrument d'aménagement du territoire, qui relève du choix de la France d'aller au-delà des exigences européennes en matière de service universel.

Si nous faisions financer le fonds postal national de péréquation territoriale par un prélèvement autorisé sur les opérateurs, ce qui est le mode de financement prévu pour le fonds de service universel, nous serions en contradiction avec le droit européen. Seule la France doit financer le fonds postal national de péréquation territoriale.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. L'explication de M. Proriol est très claire et pertinente. Le Gouvernement la partage et émet donc un avis défavorable à l'amendement n° 14759.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Malheureusement, la clarté que vous soulignez, monsieur le ministre, ne me semble pas être au rendez-vous, et j'essaie de décrypter les propos de M. Proriol.

Le rapporteur vient de nous dire que le fonds postal national de péréquation ne financera pas du tout le service universel. À quoi va donc servir ce fonds, puisqu'il ne financera pas les services rendus aux populations ? Ce premier élément de réponse justifie à lui seul que nous nous soyons abstenus sur ce sujet

Par ailleurs, je relis le considérant 26 de la directive : il indique que la possibilité d'octroyer des licences à des opérateurs concurrents à l'intérieur du domaine du service universel peut être combinée avec des exigences imposant à ces détenteurs de licences de contribuer à la prestation du service universel, y compris au titre de l'aménagement du territoire. Ce n'est donc pas la directive qui s'y oppose ; c'est la France qui décide que les concurrents de La Poste ne devront pas contribuer à l'aménagement du territoire. Donc acte.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14759 tel qu'il a été rectifié.

(L'amendement, ainsi rectifié, n'est pas adopté.)

Article 2

M. le président. De nombreux orateurs sont inscrits sur l'article  2.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer ce que nous appelons le dessaisissement des pouvoirs publics en matière postale. La mise en place d'une agence dite indépendante en est une nouvelle illustration.

Vous mettez ainsi le sort d'un bien public, La Poste, constitué au fil des décennies grâce à des fonds publics, entre les mains de personnes dépourvues de représentativité : elles ne portent pas la voix des usagers ni des salariés, elles ne relèvent pas du Parlement ou du Gouvernement, mais elles auront pourtant des pouvoirs appartenant jusqu'alors à l'État. Vous pestez contre les dérives du secteur public, qui serait entre les mains de « nantis », selon vous, mais comment ne pas craindre, au sein de l'autorité de régulation, une dérive vers la défense d'intérêts particuliers ?

C'est également en raison de l'inspiration largement idéologique de cet organisme autonome, prétendument neutre, que nous protestons contre la confiscation à son profit d'un pouvoir relevant du politique. L'exemple de la gestion du secteur des télécommunications par l'ART laisse en effet mal augurer de son rôle « régulateur » dans le domaine postal. Son action s'est en effet limitée à favoriser l'entrée de concurrents directs sur le marché des télécommunications, laissant de côté toute réflexion et toute tentative de régulation en ce qui concerne le rôle non financier des activités de télécommunication.

En outre, elle a obligé et oblige encore France Télécom à sous-traiter à des concurrents l'exploitation de son réseau pour un prix inférieur à son coût réel. Ce qui risque d'arriver à La Poste est prévisible : elle sera tenue de distribuer, à un tarif fixé par l'autorité de régulation, les plis des autres opérateurs dans des zones géographiques non rentables, ce qui ne manquera pas de faire augmenter le prix du timbre pour les ménages, puisque La Poste ne veut pas élever les tarifs du courrier industriel et de gestion, et qu'il faudra bien équilibrer les comptes. Ce scénario a déjà été réalisé dans le secteur des télécommunications, où le prix de l'abonnement pour les particuliers a considérablement augmenté ces dernières années. Cette autorité indépendante ne semble donc pas particulièrement soucieuse de l'intérêt des usagers. L'aval qu'elle a donné à une nouvelle augmentation des prix de l'abonnement en est d'ailleurs une preuve supplémentaire.

Rappelons enfin qu'en instituant une autorité unique regroupant les postes et les télécommunications, vous passez outre l'avis défavorable de certains syndicats, qui soulignent les incohérences pratiques d'une telle solution. Ainsi les réalités techniques et économiques des télécommunications n'ont plus rien à voir avec celles des postes. D'un côté, on trouve des réseaux immatériels continus, dont les coûts de fonctionnement sont faibles et qui produisent des marges importantes. De l'autre, il n'y a de réseau que le nom, car l'activité postale est faite de séquences mises bout à bout - collecte, tri, transport, distribution - qui font intervenir de multiples acteurs. L'Espagne, le Royaume-Uni, le Danemark et l'Italie ne s'y sont pas trompés.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à une nouvelle confiscation du pouvoir de contrôle sur l'organisation et la gestion des services publics, après celle que vous avez déjà opérée dans des secteurs tels que les communications ou l'électricité, et qui n'est qu'un prétexte pour ôter à l'autorité politique et administrative les leviers de l'économie.

Il serait souhaitable, nous ne le contestons pas, que l'État ne soit pas le seul habilité à exercer le contrôle du secteur postal. En tant que domaine fondamental de l'activité humaine, les services publics ont vocation, pour se moderniser, à étendre leur champ de direction et de contrôle, ce qui implique une diversification du conseil d'administration et son ouverture aux représentants des usagers et aux élus. C'est d'ailleurs à tous les niveaux de décision qu'il faudrait renforcer leur place et leur rôle. Ce n'est malheureusement pas le sens de votre démarche, et c'est une des raisons de notre opposition à ce texte.

M. le président. La parole est à M. Alfred Trassy-Paillogues.

M. Alfred Trassy-Paillogues. L'article 2 organise la régulation postale, détaillant notamment la façon dont le régulateur surveille les prestations de l'opérateur chargé du service universel, contrôle les tarifs appliqués aux particuliers, accorde les autorisations aux opérateurs alternatifs et règle les litiges avec La Poste, qu'ils concernent les clients ou les opérateurs alternatifs. Le régulateur se voit également affirmer un rôle d'enquête et peut prononcer des sanctions aux infractions administratives ou pénales. Enfin, il a un rôle consultatif auprès du Gouvernement.

Nous approuvons le texte proposé, qui nous conviendra parfaitement après l'adoption de nos amendements.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. La régulation est une question extrêmement importante. Le régulateur est en effet chargé de faire respecter la règle du jeu une fois celle-ci établie, mais, dans ce cas précis, sa tâche devrait se révéler très simple puisque le Gouvernement a décidé de ne pas fixer de règle du jeu.

En effet, tout est permis sur le nouveau marché concurrentiel, de la part des concurrents de La Poste : il n'existe pas de contrainte territoriale ou en matière de service, sans parler de la qualité de celui-ci ; il est possible de se limiter à un marché de niches - comme les lettres recommandées, par exemple - ou à certains territoires, les plus rentables, bien entendu. Dans ces conditions, je le répète, le travail du régulateur sera extrêmement simple, et je comprends pourquoi ce gouvernement n'a pas fait le choix d'un régulateur dédié, préférant constituer au sein de l'ART un appendice, une excroissance, une petite mission supplémentaire, d'autant plus petite que tout est permis.

Ceux qui, sous la précédente majorité, ont organisé la régulation du secteur des télécommunications avaient, eux, fixé une règle du jeu : obligation de couverture territoriale, cahier des charges relatif au service universel, etc. À ce propos, monsieur le ministre, nous attendons toujours de savoir qui sera désigné pour assurer ce service.

M. le ministre délégué à l'industrie. Nous avons moins de retard en ce domaine que pour la transposition de la directive sur les télécommunications !

M. François Brottes. Je suppose que vous nous rassurerez à ce sujet avant la fin du débat. De toute façon, le choix n'est pas très étendu, ce qui simplifie les choses, notamment pour France Télécom.

Aucune règle du jeu ne vient donc organiser ce marché qui, en dehors de quelques niches, est plutôt en décroissance. En outre, le régulateur choisi a eu pour réflexe, dans le secteur des télécommunications, de brider l'opérateur historique au prétexte que sa situation de monopole lui aurait accordé des avantages exorbitants. Or, dans le cas de La Poste, cela signifie financer l'aménagement du territoire ou offrir des services financiers aux plus démunis : bref, il s'agit plus de lourdes charges que d'avantages et je ne parle même pas du soutien à la presse, qui semble être dans cette enceinte un sujet tabou !

M. Jean Proriol, rapporteur. Absolument pas !

M. François Brottes. Ne demande-t-on pas à l'établissement public de financer, à hauteur de 480 millions d'euros, une politique qui incombe à l'État ? Encore faut-il y ajouter une charge liée à l'aménagement du territoire, domaine dans lequel La Poste joue pourtant déjà un rôle important. Voilà qui s'appelle « charger la mule », si vous me passez l'expression !

Décidément, le rôle du régulateur ne sera pas difficile : il ne pourra que constater, dans quelques mois ou dans quelques années, la faiblesse de l'opérateur postal historique, rendu exsangue par toutes ces charges nouvelles, et auquel tous les marchés rentables auront échappé. On se posera alors la question : comment accomplir les missions de service public de proximité ? Qui le fera, et à quel prix ? C'est là qu'intervient le « notamment » de M. Trassy-Paillogues : on se tournera « notamment » vers les collectivités territoriales ; on leur demandera « notamment » - comme on l'a fait pour les télécommunications, les médecins de campagne, les vétérinaires - de contribuer à cette charge. Il n'y aura en effet pas d'autre solution, compte tenu de la manière dont le marché sera désormais organisé.

On dira alors aux élus : « Soyez de votre temps ! Ne vous montrez pas archaïques comme ces socialistes et ces communistes ! Soyez partisans de la modernité, c'est-à-dire de la concurrence, qui fait augmenter les tarifs et supprime les emplois ! Et, puisque vous réclamez un service postal de proximité, mettez la main à la poche. Vous avez de la chance : il existe, en guise de compensation, un fonds de péréquation. Il est alimenté par une taxe professionnelle qui, certes, a disparu, mais le fonds, lui, existe ! »

Dans un tel contexte, le régulateur ne pourra que constater l'agonie d'un opérateur postal auquel on demande aujourd'hui beaucoup plus que ce qu'il peut fournir.

Je regrette que l'on n'ait pas choisi un régulateur dédié, capable de produire une analyse fine de la manière dont va évoluer le marché du courrier, un marché qui dépasse les frontières de notre pays, qui réclame des innovations technologiques, notamment en matière de traçabilité des lettres et des colis, pour lesquels il convient d'offrir plus de garanties aux clients et usagers ; un marché qui, dans le domaine de la logistique, risque de souffrir de contraintes environnementales devenues fortes : suppression des vols ou des trains de nuit, difficulté de l'amorçage du fret... Bref, nous avons besoin d'un régulateur capable de comprendre ce qui se passe, quelles sont les contraintes, un régulateur susceptible d'être à l'écoute et de garantir aux usagers - entreprises ou particuliers - un bon service postal.

Le choix du type de régulation opéré avec l'article 2 confirme nos pires craintes.

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Vous ne serez pas étonné, monsieur le président, de m'entendre continuer sur la ligne définie par M. Brottes. J'ai déjà souligné, en défendant l'exception d'irrecevabilité, à quel point le choix d'une autorité de régulation dédiée me paraissait plus pertinent. En outre, il me semble que le Parlement devrait définir un certain nombre de critères que l'autorité devrait prendre en compte pour arrêter ses décisions.

L'autorisation d'exercer une activité de prestataire de services postaux sera délivrée pour dix ans. Or l'évolution des moyens de communication et du commerce électronique est rapide ; de plus en plus de nos concitoyens, éloignés des centres commerciaux, ont ainsi recours à la livraison. Dans ce domaine, le projet de loi manque de précision : une personne morale bien constituée, juridiquement solide, et exerçant dans ce secteur, pourrait considérer que ses clients sont rassemblés en club - à l'image de ces clubs d'achat dont on connaît de nombreux exemples - pour constituer un nouvel opérateur.

Tout cela pose question. Or l'autorité ne disposera pas de critères clairs et bien définis pour juger du sérieux d'un candidat à ce marché ou en ce qui concerne l'utilisation du réseau postal. À cet égard, plusieurs questions soulevées par les uns et les autres à l'occasion de l'examen de l'article 1er n'ont pas trouvé de réponse. Nous ne savons toujours pas, par exemple, s'il sera possible d'utiliser sans rémunération une part du réseau postal totalement amortie. À cet égard, je vous renvoie à deux arrêts rendus en matière de droit de la concurrence, selon lesquels, quand on a totalement amorti un outil, il est extrêmement difficile de définir un tarif d'utilisation.

De tels points de droit, de telles questions techniques sont pour nous autant de problèmes politiques pour lesquels nous n'avons pas obtenu de réponse. L'autorité de régulation devra donc faire le travail à notre place, ce qui nous semble dangereux.

Quant aux agences postales, je ne vois pas très bien comment l'autorité de régulation pourra prendre en charge la vie de La Poste - son équilibre, sa place exacte dans un marché ouvert - et l'obligation d'aménagement du territoire. Pour une simple agence postale, nous pouvons estimer à environ 10 000 euros le soutien réclamé à La Poste. Nous reviendrons, bien sûr, sur ce point lors de la discussion des amendements.

C'est donc avec un certain pessimisme que nous abordons l'examen de cet article.

L'article 1er vient d'être voté et nous avons le sentiment que la régulation n'aura pas autant d'importance que nous aurions pu l'espérer.

Voilà pourquoi, monsieur le président, j'ai tenu à m'inscrire comme orateur sur cet article, même si cela semble vous poser un problème. Je conclus donc mon propos en vous remerciant de m'avoir permis de m'exprimer dans un contexte difficile.

M. le président. Madame Lebranchu, cela ne posait pas un problème. J'ai simplement été saisi par l'un de nos collègues, qui a la délégation du président de son groupe, d'une demande de suspension de séance.

Peut-on considérer que les différents groupes se sont exprimés sur cet article ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) En effet, MM. Paul, Trassy-Paillogues, Brottes et Mme Lebranchu se sont exprimés. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.) Je veux bien donner la parole à tous les orateurs inscrits sur l'article, mais la jurisprudence de la loi sur les retraites montre que cette dérive peut mener loin.

M. Paul Giacobbi. Nous avons beau être au Parlement, nous n'avons pas le droit de nous exprimer !

M. le président. Vous avez le droit de parler. Je vous rappelle néanmoins, monsieur Giacobbi, que l'Assemblée a suivi une autre règle pour les inscrits sur l'article 1er. Il me semble que nous devrions nous y tenir, car il serait préférable de ne pas modifier notre attitude à chaque article.

Je vous laisse donc intervenir sur l'article, mais je considérerai ensuite que chacun aura pu s'exprimer au nom du groupe socialiste. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Paul Giacobbi. Je vous remercie de me donner la parole. Mes collègues seront donc obligés de s'exprimer sur d'autres articles et l'on ne gagnera pas de temps.

Nous sommes au cœur du sujet de la régulation. Qu'est donc la régulation en l'occurrence ? Ce projet de loi tend à appliquer la directive européenne. Nous faisons de la régulation sans règle, sans données objectives et, parfois, sans réflexion.

J'ai entendu des exposés tout à fait intéressants qui évoquaient la notion de densité. On nous a, par exemple, expliqué qu'en France la densité des bureaux de poste était à peu près deux fois plus importante que dans les autres pays européens. Vous auriez pu relever, monsieur le ministre, que la densité s'apprécie normalement non pas par rapport à une population, mais par rapport à un territoire. Si la densité des bureaux de poste en France, c'est-à-dire le nombre d'habitants par rapport aux bureaux de poste, est plus forte qu'ailleurs, c'est tout simplement parce que la densité de la population est deux fois moindre en France que dans la plupart des pays d'Europe pour ne pas dire la totalité. Nous touchons ainsi au problème fondamental des réseaux de services publics en zones rurales. Nous avons d'immenses zones rurales dans lesquelles se posent des problèmes spécifiques dont la transposition de la directive doit tenir compte pour ne pas être erronée. Vous ne devez pas faire une application pure et dure d'une directive qui ne doit d'ailleurs pas être appliquée intégralement immédiatement.

Pour bien juger des directives et de la régulation, il convient de revenir aux réalités. Dans ce débat, nous avons le sentiment que toute évocation du territoire ou des mécanismes concrets vous met mal à l'aise. Je peux le comprendre, mais, plutôt que de discourir en termes abstraits et d'ailleurs bien souvent faussement économiques, c'est aux réalités que nous voulons en venir.

Je vous parlerai très brièvement de la Corse.

Cette région compte trente habitants au kilomètre carré, soit environ le tiers de la densité nationale qui est elle-même déjà la moitié de la moyenne européenne. Quel est l'avenir des bureaux de poste du département de Haute-Corse que je représente ici ? Quelles seront les conséquences de la politique que vous allez conduire ?

Sur une centaine de bureaux, une vingtaine environ seront transformés en agences postales communales, entités indéterminées dont l'avenir n'est pas assuré. Pour onze autres bureaux, aucun sort particulier n'est fixé. On ne nous précise même pas s'ils seront transformés en points Poste ou en agences postales communales, ce qui signifie qu'ils mourront de leur belle mort. D'autres encore font l'objet d'un traitement différé et progressif, ce qui est tout de même plus intelligent et plus subtil. On restructure la distribution, on ne remplace pas le chef d'établissement, si ce n'est que par un contractuel, ce qui laisse évidemment présager leur disparition. Seule une soixantaine de bureaux sera maintenue.

J'ai envie de vous citer tous les bureaux peu ou prou voués à la disparition : Aghione, Albertacce, Algajola, Antisanti, Aregno, Asco, Barrettali, Campitello, Castellare-di-Casinca, Castifao, Cateri, Ersa, Lama, Lumio, Morsiglia, Muro, Olmeta-di-Tuda, Poggio-di-Nazza, Poggio-di-Venaco, Prunelli-di-Casacconi, Prunelli-di-Fiumorbo, Rutali, Sermano, Silvareccio, Sisco, Solaro, Speloncato, Sant'Andrea-di-Cotone, Tallone, Tox, Venzolasca, Ville-di-Paraso, Vivario et San-Gavino-di-Fiumorbo.

M. le président. Cher collègue, veuillez conclure.

M. Paul Giacobbi. Cela en fait certes beaucoup.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Il est inadmissible que l'on se serve de cela !

M. le président. Je vous rappelle que l'examen de ces amendements a été reporté.

M. Paul Giacobbi. Je vais conclure, monsieur le président. Je sais que cela embête que l'on cite les bureaux qui vont disparaître.

M. le président. Cela n'embête personne.

M. Paul Giacobbi. J'ai cité ces bureaux, monsieur le président, ne m'empêchez pas de terminer mon propos rapidement.

Chaque fois qu'un de ces bureaux disparaîtra, monsieur le ministre, vos amis vous écriront et vous leur expliquerez qu'ils seront remplacés. Ils s'apercevront eux-mêmes qu'il n'en sera rien !

M. le président. Monsieur Giacobbi !

M. Paul Giacobbi. Je conclus.

M. le président. Oui, concluez, parce que vous avez dépassé votre temps de parole.

M. Paul Giacobbi. Je n'en ai pas abusé jusqu'à présent !

En 1980, lorsque j'étais stagiaire de l'ENA dans le Cantal, on tenait le même discours aux maires et aux usagers. L'évolution a été lente. Nous en arrivons à ce que les biologistes appellent un grand moment dans la disparition d'une espèce : celle du bureau de poste en zone rurale. Nous n'avons pas eu le temps de le saluer ce soir, mais nous en entendrons certainement parler, car cette mort ne sera pas silencieuse !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Avant la suspension de séance, je souhaite faire un bref rappel.

Nous entendons depuis deux jours des accusations émanant de la gauche plurielle...

M. Daniel Paul. Vous êtes nostalgique !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...selon lesquelles le Gouvernement et sa majorité seraient responsables d'un certain nombre de fermetures de bureaux de poste.

Je remercie notre collègue de Corse d'avoir rappelé que les fermetures des bureaux de poste ou la réduction de leurs heures d'ouverture ne sont pas un phénomène nouveau. Vous avez parlé de vingt-cinq ans, monsieur Giacobbi, je suis un peu plus ancien que vous, je dirai donc, pour ma part, que cela date des années soixante.

M. Paul Giacobbi. Cela s'est accéléré !

M. Jean Proriol, rapporteur. Maire depuis quarante-deux ans, j'ai connu bien des directeurs qui avaient pour missions impératives d'obtenir de La Poste un meilleur fonctionnement, une diminution des heures d'ouverture des bureaux peu fréquentés, ou de proposer au maire la mise en place d'une agence postale.

Le procès récurrent intenté au Gouvernement et à sa majorité est un faux procès. Qui a accepté que les directives soient finalement édictées par l'Union européenne ? C'est un gouvernement de gauche ! Chacun doit tout de même prendre ses responsabilités. Si vous pensez que nous transposons mal les directives...

Plusieurs députés du groupe socialiste. Oui !

M. le ministre délégué à l'industrie. Il fallait le faire vous-mêmes !

M. Jean Proriol, rapporteur. ...parce que de façon trop libérale, en dépit de tous les verrous que nous prévoyons, que ne l'avez-vous fait vous-mêmes ? Vous avez eu trois ans pour cela !

M. François Brottes. Il fallait nous laisser plus de temps !

M. Jean Proriol, rapporteur. Cela vous gêne qu'on vous le rappelle !

Vous avez, encore une fois, tenté de mettre quelques paravents. Vous avez demandé un rapport, puis proposé à Bruxelles un médiateur du service universel.

M. François Brottes. On l'a créé !

M. Jean Proriol, rapporteur. Malheureusement, les directives précisent, et c'est vous qui l'avez accepté, que le droit européen du secteur postal doit être ouvert, qu'un arbitre, le régulateur, doit être créé par chaque pays et qu'il lui appartient de délivrer des autorisations. Nous essayons, quant à nous, de canaliser ce régime d'autorisations en nous en remettant à l'ART.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Mais non !

M. Jean Proriol, rapporteur. Le gouvernement de la gauche plurielle a esquivé le débat et nous héritons, aujourd'hui, des conséquences de sa carence. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je suis fatigué d'entendre dire que tout est de la faute du gouvernement en place, alors que nous subissons ce que vous avez accepté.

Ce procès récurrent que vous nous faites est, en fait, le vôtre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Dans la liste des orateurs inscrits sur l'article, ne figurent plus que deux collègues du groupe socialiste, M. Gouriou et Mme Robin-Rodrigo. Je vais donc leur donner la parole, mais je leur demande d'être très brefs, ce qui nous permettra, après la suspension, d'en venir à l'examen des amendements et de reprendre un rythme normal.

M. le ministre délégué à l'industrie. Six amendements à l'heure !

M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou.

M. Alain Gouriou. Monsieur le président, je m'en tiendrai au problème de l'autorité de régulation.

Je ferai tout de même remarquer à M. le rapporteur que ses accusations récurrentes concernant la responsabilité du gouvernement de gauche commencent à devenir pesantes.

M. Jean Proriol, rapporteur. Les vôtres aussi !

M. le ministre délégué à l'industrie. Il n'y a pas que cela !

M. Alain Gouriou. Vous avez tout de même eu déjà deux ans et demi pour agir.

L'article 2, tel que vous l'avez rédigé, soulève deux problèmes essentiels.

Le premier concerne le dessaisissement du Gouvernement quant à la régulation postale. Il est vrai, j'en conviens, monsieur le rapporteur, que la directive impose une autorité de régulation. Toutefois, tous les pays européens n'ont pas emprunté la même voie et la même forme. Certains ont choisi une autorité de régulation indépendante ; d'autres ont confié cette charge à une autorité de régulation de télécommunications déjà existante. Pour notre part, nous aurions souhaité que le ministre de tutelle de La Poste et des télécommunications conserve tout de même des responsabilités importantes dans ce domaine. Or nous notons un transfert quasiment absolu de toutes les responsabilités régaliennes en la matière à cette autorité de régulation. Le président m'ayant demandé d'être bref, je ne dresserai pas l'inventaire impressionnant de tout ce qui lui est accordé, mais que reste-t-il désormais comme responsabilité au Gouvernement ?

Cette autorité spécifique nous paraissait évidente en raison des métiers qu'elle aura à réguler. Dans le domaine des télécoms, cela est totalement différent : les opérateurs sont d'envergure capitalistique importante. Ici, les opérateurs vont de la PME à la grande entreprise.

Par ailleurs, le courrier, les colis et les services financiers sont des services qu'on ne retrouve absolument pas au niveau de l'ART.

M. le président. Veuillez conclure.

M. Alain Gouriou. Je ne sais pas à quel résultat on va arriver, mais, pour le moment, tout ce que l'on accorde à la future autorité, c'est un siège supplémentaire. Avouez que, pour réguler l'ensemble des fonctions postales, ce n'est pas beaucoup !

M. le président. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. L'opportunité de créer un fonds de compensation pour financer le service universel est appréciée par l'autorité de régulation. Le politique est donc sous contrôle, ce qui nous semble inadmissible. Nous ne cessons, depuis deux jours, de vous expliquer combien nous sommes attachés au service public de la poste, afin qu'il irrigue le plus profond de nos territoires et, bien évidemment, l'ensemble de nos populations.

J'appartiens à un territoire de montagne. Je tiens à votre disposition deux documents qui montrent, l'un, la présence de La Poste au 1er octobre 2004 et, l'autre, celle qu'on nous propose pour demain dans mon département. Des cantons entiers n'auront plus de bureau de poste à part entière, monsieur le rapporteur. Voilà la loi que vous voulez nous faire voter !

Le Gouvernement veut introduire quinze ours dans mes belles Pyrénées, en dépit du mécontentement de la population. Nous ne demandons rien de tel. Nous voulons conserver nos services publics et conserver les vingt-cinq bureaux de poste à part entière qui existent actuellement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. À la demande de M. Paul, présentée au nom du groupe communiste, je vais suspendre la séance cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous abordons l'examen des amendements à l'article 2.

L'amendement n° 14659 n'est pas défendu.

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 14777.

M. Jean Proriol, rapporteur. C'est un amendement de cohérence rédactionnelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14777.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 14761.

M. François Brottes. Vous ne nous avez pas expliqué, monsieur le ministre, ce qu'allait devenir la charge de 480 millions d'euros que La Poste assume aujourd'hui pour soutenir la presse. Je connais moins bien la directive que le rapporteur, mais je ne pense pas que la France doive obliger son opérateur historique à assumer une telle charge. Nous sommes pour une aide à la diffusion de la presse, parce que c'est une façon de garantir le pluralisme dans notre démocratie. Pour autant, compte tenu de la concurrence exacerbée dont sera victime La Poste, il faudrait qu'elle n'assume plus cette charge sur son budget propre.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a pris l'initiative de mettre autour de la table l'ensemble des partenaires, comme cela avait été fait pour les accords Galmot. Le gouvernement d'alors devait d'ailleurs être issu également de votre majorité. Peu importe, il ne me paraît pas anormal qu'il y ait des rendez-vous périodiques sur cette question importante, surtout que, nous le savons bien, les Français ont parfois tendance à délaisser la presse écrite. C'est une préoccupation que nous partageons tous, et nous devons être vigilants. En l'occurrence cependant, il s'agit non pas de la presse, mais de La Poste.

Que changera pour La Poste le dispositif de M. Henri Paul ? Quelles charges cette dernière pourra-t-elle ne plus assumer ? Comment intégrer le fait que cette disposition va peser beaucoup plus lourd que par le passé, même si le chiffre diminue un petit peu, compte tenu des charges que La Poste assume par ailleurs ? Notre amendement vise à poser la question pour que nous ayons une réponse très claire.

La charge de la diffusion de la presse sera-t-elle répartie entre tous les opérateurs postaux ? Est-ce le budget de l'État qui va désormais l'assumer ? Bref, quel est l'avenir de cette somme qui, je le répète, n'est pas mince puisqu'il s'agit de 480 millions cette année, à comparer avec les 150 millions d'euros qu'on devrait consacrer au fonds postal national de péréquation territoriale ?

C'est un amendement de suppression mais nous voulons surtout vous interroger à ce sujet. Notre interrogation est simple. J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez nous apporter une réponse. À chaque amendement suffit sa question ; à chaque question suffira sa réponse.

M. le ministre délégué à l'industrie. D'accord ! Une question par amendement, c'est bien ! Ça vous laisse de la marge !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Le financement de la presse constitue certes un vrai problème, mais le Gouvernement s'y est attaqué puisqu'il a obtenu, sur le dispositif Paul, un accord tripartite qui partage la charge du financement qui incombait à La Poste entre l'État, la presse qui a finalement accepté d'augmenter sa contribution, et La Poste.

La presse augmentera sa participation de 80 millions d'euros à l'horizon 2008. La Poste va diminuer sa charge globale de 180 millions d'euros par des efforts de rationalisation et par une adaptation de sa méthode de traitement de la presse.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement émet un avis défavorable à l'amendement de M. Brottes. Pour répondre à sa question, je lui rappelle que les accords passés cet été entre la presse, l'État et La Poste, dont j'ai été moi-même cosignataire, ont été conclus pour une durée de quatre ans.

La question se posera à l'issue de cet accord. Nous avons jusque-là pour y réfléchir. Toutefois c'est une vraie question, j'en conviens volontiers, et elle se pose d'ailleurs avec d'autant plus d'acuité que de grands groupes capitalistes s'investissent dans la presse comme le groupe Lagardère qui finance L'Humanité (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) ou comme le groupe Dassault, envers lesquels vous ne vous montrez pas très reconnaissants. Enfin, ils paient quand même ! La question est posée : faut-il les subventionner ?

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Il semble que la remarque de M. le ministre ne soit pas une galéjade mais une vraie réflexion puisqu'il nous avait donné la même réponse en commission.

M. le ministre délégué à l'industrie. En effet, c'est une vraie réflexion !

M. François Brottes. Les maires qui s'inquiètent de l'aménagement du territoire peuvent en effet s'interroger : d'un côté 480 millions d'euros pour le soutien à la presse, de l'autre seulement 150 millions d'euro pour le maintien de la présence postale.

Votre réponse, monsieur le ministre, a été extrêmement claire : dans les quatre ans à venir La Poste continuera à assumer une part significative de cette charge sur son budget propre. Malgré l'ouverture du marché, malgré une concurrence qui sera féroce, elle aura ce boulet aux pieds et nous devrons certainement panser quelques plaies assez rapidement.

Je note que M. le rapporteur reconnaît que c'est un problème auquel nous n'avons pas encore trouvé de solution, mais qu'il n'est pas favorable à notre amendement. Nous essayons de le convaincre, mais nous y arrivons difficilement. Pourtant, ce n'est pas une invention des socialistes, monsieur le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Les socialistes avaient laissé le problème en l'état !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Et vous ne le réglez pas !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14761.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 20.

M. Jean Proriol, rapporteur. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous en venons à plusieurs amendements de M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le président, permettez-moi, auparavant, de répondre M. le ministre et à M. le rapporteur.

M. le président. Vous pourrez le faire en défendant, en même temps, vos amendements n°s 14690, 14701 et 14660.

M. Daniel Paul. Volontiers, monsieur le président.

M. le président. Vous êtes un collègue courtois, monsieur Paul.

M. Daniel Paul. J'ai écouté avec attention les propos M. le rapporteur et M. le ministre sur l'article 2 qui est extrêmement important.

La presse en France ne va pas bien, nous le savons. Régulièrement, des études et des analyses sont réalisées sur les difficultés de la presse écrite et soulignent son prix trop élevé. Certes le pouvoir d'achat n'évolue pas favorablement, mais il est également vrai - et je sais que vous qui êtes friands de comparaisons tarifaires entre les différents pays européens - que la France est l'un des pays d'Europe où la presse quotidienne est la plus chère. Cela tient sans doute aussi, pour partie, aux charges que vous lui imposez et qui n'existent peut-être pas dans d'autres pays européens.

Notre vieille Europe a une conception protectrice de sa presse, et c'est bien. Quand une presse quotidienne va mal, c'est la démocratie qui va mal et quand la presse quotidienne est menacée, en particulier la presse d'opinion, la démocratie est davantage encore menacée.

J'ai relevé que vous vouliez réfléchir pendant quatre ans et laisser des centaines de millions d'euros à la charge de la presse. Certes il y a de tout dans la presse.

Depuis quarante-deux ans, je suis lecteur d'un quotidien.

M. le ministre délégué à l'industrie. On se demande lequel !

M. Jean Proriol, rapporteur. L'Humanité !

M. Daniel Paul. Pas d'un seul !

Je suis donc lecteur d'un journal d'opinion depuis quarante-deux ans.

M. Jean Proriol, rapporteur. De la même opinion ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Il s'est passé pas mal de chose en quarante-deux ans dans ce journal !

M. Daniel Paul. Je suis lecteur de L'Humanité (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) depuis quarante-deux ans, mais je ne me réjouis jamais de la disparition d'autres journaux, même quand je combats leurs idées. En effet quand un journal disparaît ou est en difficulté, c'est un peu de démocratie qui s'en va.

M. Alain Gouriou. C'est vrai !

M. Daniel Paul. Moi, je ne me moque pas. Lorsque votre journal gaulliste - parce que je pense que vous avez été gaullistes -...

M. le ministre délégué à l'industrie et M. Patrick Ollier, président de la commission. Nous le sommes toujours !

M. Daniel Paul. ... a disparu il y a quelques années, je ne m'en suis pas réjoui. À cette époque, les débats entre les responsables des journaux d'opinion, passez-moi l'expression, avaient de la gueule !

M. le ministre délégué à l'industrie. Que ne le disiez-vous à l'époque !

M. Daniel Paul. Nous le disions !

Aujourd'hui, alors que d'autres titres sont en difficulté et que je vois le paysage de la presse quotidienne envahi par des journaux gratuits qui n'ont en fait rien de gratuit, je me dis que nous avons du souci à nous faire.

En lançant un appel pour que la presse d'opinion, et la presse quotidienne d'une manière générale, soient protégées, et aidées plus qu'elles ne le sont, nous ne défendions pas uniquement notre journal, mais tous les journaux.

Vous avez dit qu'une partie des charges laissées à La Poste sera compensée par des efforts de rationalisation et des gains de productivité. Autrement dit, vous allez faire supporter par les salariés et par les usagers de La Poste ce que vous refusez de prendre en compte, c'est-à-dire une aide supplémentaire au transport des journaux.

De la même façon, lorsque vous parlez d'améliorer la gestion, cela signifie que vous allez également lui faire supporter un effort que vous refusez de consentir. Pendant quatre ans, comme vous l'avez dit tout à l'heure, vous allez faire supporter à La Poste environ 400 millions d'euros par an. Fichtre ! Voilà des centaines de millions d'euros dont La Poste aurait sans doute bien besoin, ne serait-ce que pour assurer sa présence territoriale.

J'en viens aux amendements.

Parce que l'aide à la presse et l'aide à La Poste vont de pair, nous proposons, par l'amendement n° 14690 de substituer aux mots « doit favoriser », le mot « favorise » qui est plus direct.

Pour des gens qui sont soucieux du devenir de la presse dans notre pays, cet amendement ne devrait pas poser de problème.

Les amendements n°s 14701 et 14660 sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a repoussé les amendements n°s 14690 et 14660, mais elle n'a pas pu examiner l'amendement n° 14701. À titre personnel, et au risque de décevoir M. Paul, je ne peux pas émettre un avis favorable à cet amendement relatif au patrimoine immobilier de La Poste.

M. Daniel Paul. Quand votre journal sera menacé, j'irai le défendre !

M. Jean Proriol, rapporteur. Sachez que je lis L'Humanité qui a envoyé deux journalistes et un photographe pour m'interviewer. J'ai eu l'honneur d'une double page et d'une photo.

M. le président. Vous allez faire des jaloux, monsieur Proriol !

M. Daniel Paul. Et depuis il le vend tous les matins sur le marché ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable aux trois amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14690.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14701.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14660.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. J'en viens à l'amendement n° 14778.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14778.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou, pour défendre l'amendement n° 14751.

M. Alain Gouriou. Après le premier alinéa de l'article L. 5-1 du code des postes et télécommunications, nous proposons d'insérer les trois alinéas suivants :

« L'autorisation est subordonnée à la constitution de garanties financières propres à assurer la continuité du service. Les garanties financières à constituer doivent être décrites dans le dossier de demande d'autorisation, lors de son dépôt. Lorsqu'elle constate que les garanties exigées ne sont plus constituées, l'autorité de. régulation met en demeure l'exploitant de les reconstituer. Tout manquement constaté un mois après la mise en demeure peut donner lieu au prononcé d'une amende administrative par le ministre de l'industrie. Le montant de l'amende est égal à trois fois la valeur de la différence entre le montant des garanties exigées et celui des garanties réellement constituées.

« Le recouvrement est effectué au profit du Trésor public. Le produit de l'amende est affecté au fonds postal national de péréquation territoriale.

« Un décret en Conseil d'État détermine la nature des garanties et les règles de fixation de leur montant. »

Cet amendement a pour objet d'obliger les prestataires de service universel, candidats à une autorisation, à présenter des garanties financières afin de s'assurer de la bonne exécution du service.

En effet, en matière de télécommunication, par exemple, les opérateurs sont des groupes importants qui bénéficiaient à la fois de garanties et de couvertures financières incontestables ou prétendues telles. Ici il s'agira incontestablement d'opérateurs de bien moins grande envergure. Je sais que l'autorité de régulation, malgré son peu de moyens, sélectionnera sérieusement les candidats afin d'accorder les autorisations. Pour autant, il nous semble important, pour assurer la bonne marche de ce service et donner confiance aux consommateurs et aux usagers, que ces opérateurs nouveaux présentent toutes les garanties de sérieux et de solidité financière.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Une telle question ne peut se satisfaire d'une réponse lapidaire. Il ne s'agit pas, en effet, d'un amendement dilatoire.

M. le ministre délégué à l'industrie. Cela mérite, en effet, une vraie réponse.

M. François Brottes. Merci, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.

M. le ministre délégué à l'industrie. On ne peut que souscrire à l'objectif de cet amendement. L'article 4 du projet de loi prévoit d'ailleurs que les envois qui n'auront pas été distribués à la suite d'une saisie judiciaire chez un opérateur seront remis au prestataire du service universel, qui en assurera la distribution.

En cas de défaillance définitive d'un opérateur de service postal, la même approche devra être adoptée. Il reviendra donc, logiquement, à l'opérateur du service universel, au nom même de ce service universel, de distribuer les envois en souffrance. Ces points seront précisés dans le décret relatif aux caractéristiques du service universel.

Au bénéfice de cette assurance - et je crois que le rapporteur partage cet avis -, il n'y a pas lieu de donner suite à cet amendement, qui créerait un véritable obstacle à l'entrée sur le marché et poserait un réel problème au regard de la directive européenne. Ce n'est pas pour autant, bien sûr, à La Poste de supporter cette charge, mais au service universel.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Merci, monsieur le ministre, d'avoir compris que cette question était importante.

Nous notons que, une fois encore, vous ne souhaitez imposer aucune contrainte à ceux qui entrent sur ce marché, tandis que La Poste va continuer d'en supporter. Rien ne vous interdit, bien sûr, d'assumer et de mettre en œuvre votre choix, même si nous le déplorons. Cependant lors de la création d'un nouveau fonds de compensation - qui n'est encore qu'hypothétique et qui, comme me l'a expliqué avec véhémence le rapporteur, n'aura rien à voir avec le fonds postal national de péréquation territoriale - et lorsqu'on décidera de la manière dont ce fonds sera abondé, il faudra bien tenir compte des carences possibles des opérateurs privés, car La Poste devra, avec un délai de réactivité assez bref, faire ce que les autres n'auront pas pu faire.

Il sera donc judicieux d'abonder en amont une réserve qui permettra de faire face à ces charges. Il serait, en effet, scandaleux que La Poste doive présenter en fin d'année la facture de ce que lui ont coûté les défaillances des différents opérateurs et qu'il lui faille faire l'avance, sur sa propre trésorerie, des inévitables carences d'autres opérateurs.

Puisque vous ouvrez très largement le marché, les opérateurs se compteront par dizaines. Si, comme on l'a vu dans les télécommunications et dans d'autres domaines, certains se lancent dans de telles opérations sans avoir pleinement mesuré l'engagement qu'ils prenaient et si, comme l'impose la garantie de service universel aux termes de la loi et de la directive européenne, le client doit être servi, ce service incombera à l'opérateur qu'est La Poste et il aura un coût, qu'il faudra couvrir rapidement.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.

M. le ministre délégué à l'industrie. Il faut préciser qu'avant de délivrer une autorisation, le régulateur doit s'assurer que le candidat dispose de la capacité financière et des moyens techniques qui lui permettent d'honorer l'engagement qu'il prend. Il y aura donc, certes, des sinistres, mais ils seront peut-être moins nombreux que vous ne le craignez.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14751.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 21 et 14689, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 21 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 14869.

M. Jean Proriol, rapporteur. L'amendement n° 21 propose une nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 5-1 du code des postes et télécommunications. En effet, nous ne pouvons pas laisser écrire que l'autorité de régulation ne peut refuser l'autorisation que pour des motifs liés à la sauvegarde de l'ordre public. En matière de sécurité publique, où l'on ne peut que s'appuyer sur les informations fournies par le Gouvernement, par le canal du ministre chargé des postes, il convient précisément de limiter la compétence de l'autorité de régulation.

Voilà donc, pour ceux qui nous accusent parfois de ne pas la limiter, un exemple concret du contraire.

Quant à l'amendement n° 14689, je regrette de devoir dire à M. Paul qu'il a été rejeté par la commission.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 14689.

M. Daniel Paul. L'amendement est défendu.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 21 et, sans méconnaître l'intérêt de l'amendement n° 14689, il lui préfère l'amendement n° 21.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. En réponse à la commission, je tiens à saluer le moment de lucidité du rapporteur dont témoigne cet amendement n° 21, que nous voterons.

M. Jean Proriol, rapporteur. Je remercie M. Brottes de constater que ma lucidité n'a pas faibli ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Par conséquent, l'amendement n° 14689 tombe, ainsi que l'amendement n° 14734 de M. Brottes.

J'appelle donc l'amendement n° 14684.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.

M. Daniel Paul. Cet amendement, qui reprend une question que nous avons déjà évoquée, vise à faire en sorte que toute entreprise autorisée à intervenir sur le marché postal soit en mesure de desservir l'ensemble du territoire national.

Tout en parlant beaucoup de concurrence, on accepte une distorsion de concurrence en autorisant les concurrents de La Poste à ne desservir que les parties du territoire national qui leur conviennent et en obligeant La Poste - ce qui est certes la moindre des choses - à desservir de façon équitable l'ensemble du territoire.

Cette distorsion de concurrence est évidemment inacceptable. Elle ne pourra qu'affaiblir La Poste et, de ce fait, les missions de service public qu'elle continuera péniblement à assumer. Elle ne pourra de toute évidence qu'aiguiser les appétits de concurrents - on cite volontiers, à cet égard, la Deutsche Post -, favoriser les dérives spéculatives et boursières et déstabiliser ainsi le secteur postal, comme cela a déjà été le cas pour le secteur des télécommunications.

Il y a une quinzaine d'années, chaque pays européen connaissait un monopole national qui assumait de véritables missions de service public. Souvenons-nous que, dans les années 70, c'est grâce à France Télécom qu'un grand effort national a permis à notre pays de rattraper les années de retard qu'il avait accumulées, pour diverses raisons, en matière d'équipement téléphonique.

Aujourd'hui, on a fait table rase. Le secteur des télécommunications a été démantelé, la concurrence devant favoriser une meilleure allocation des ressources. On trouve désormais, au niveau européen, une structure de marché nouvelle, avec des entreprises surendettées, des conditions de travail difficiles, des statuts dont il vaut mieux ne pas parler, des conventions collectives branlantes pour les salariés et des tarifs en hausse au regard de ce que les progrès techniques de ce secteur auraient permis, comme le laisse entrevoir l'augmentation scandaleuse de l'abonnement à France Télécom, dont on nous dit que l'un des objectifs est de permettre à l'opérateur d'avoir du « cash » pour satisfaire ses actionnaires, dont l'État, comme on oublie parfois de le rappeler.

M. le ministre délégué à l'industrie. Ce sont vos amis qui ont failli ruiner France Télécom !

M. Daniel Paul. L'État tergiverse pour augmenter le tarif de l'abonnement, mais il s'apprête à tendre la main pour faire fonctionner la machine à sous.

M. le ministre délégué à l'industrie. France Télécom est l'entreprise la plus endettée au monde dans le secteur !

M. Daniel Paul. Encore la dette !

M. le ministre délégué à l'industrie. Oui : 70 milliards d'euros !

M. Daniel Paul. Nous ne voulons pas d'une telle évolution pour La Poste. C'est pourquoi nous vous appelons à voter cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14684.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 22 rectifié.

M. François Brottes. Comme d'habitude, ça ne veut pas dire qu'il ira jusqu'au bout ! (Sourires.)

M. Jean Proriol, rapporteur. Je n'ai pas mandat pour retirer cet amendement de la commission. Vous permettrez donc au rapporteur, monsieur Brottes, de donner une explication à titre personnel.

M. le ministre délégué à l'industrie. Vous avez été stressé par M. Brottes, qui vous martyrise ! (Sourires.)

M. Jean Proriol, rapporteur. Non, monsieur le ministre : même si M. Brottes est un peu harcelant, il ne m'a pas martyrisé. (Sourires.)

M. François Brottes. C'est un fait personnel ? (Sourires.)

M. Jean Proriol, rapporteur. En proposant cet amendement, j'avais imaginé le versement d'une caution à un fonds créé à cet effet, alimenté par les nouveaux entrants et géré par la Caisse des dépôts et consignations, pour pallier un échec éventuel, des défaillances d'entreprises, voire une cessation anticipée et inopinée d'activité qui laisserait en déshérence des colis confiés aux nouveaux entrants.

On m'a fait remarquer que c'était une bonne idée. C'est votre cas, monsieur Brottes, puisque vous avez finalement voté cet amendement.

M. François Brottes. C'est exact.

M. Jean Proriol, rapporteur. Je souhaiterais cependant entendre le ministre à ce sujet, car il semble que les contacts qu'il a pris aient fait apparaître certaines complications au niveau européen.

M. Alain Gouriou. En fait, vous êtes assez souvent en désaccord !

M. Jean Proriol, rapporteur. Il faudrait savoir ! En général, vous me reprochez plutôt d'être trop conciliant avec le ministre !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Une fois encore, ces dispositions ne sont pas conformes à la directive européenne. L'idée n'est pas mauvaise et le problème soulevé mérite examen, mais nous avons constaté, en nous rapprochant des autorités de Bruxelles, l'incompatibilité des dispositions proposées avec la directive. Je ne peux donc qu'émettre un avis défavorable.

Si la déontologie de la commission devait interdire à M. Proriol de retirer l'amendement, je demanderais à l'Assemblée de ne pas se mettre en contravention avec la directive et de le rejeter.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le ministre, quels que soient vos conseils et vos avis éclairés, ce sont les députés qui voteront. Il aurait toutefois été judicieux - j'emploie le conditionnel passé, car je sais que le rapporteur, comme nous l'avons observé depuis le début de ce débat, ne saura résister à votre pression - de voter cet amendement avant d'interroger la Commission européenne pour s'assurer de l'incompatibilité. Le considérant 26, que je ne reprendrai pas pour ne pas être accusé de rabâcher, autorise les États à imposer des exigences aux détenteurs de licences, c'est-à-dire aux opérateurs de courrier.

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est une restriction à l'entrée sur le marché !

M. François Brottes. Non, c'est une sécurité qui vise à mieux garantir le service qu'ils devront assurer auprès de leurs clients. Il faut, bien sûr, que la règle soit la même pour tout le monde, et non édictée à la tête du client, afin de ne pas porter atteinte aux règles de la concurrence. C'est ce que propose le rapporteur, avec beaucoup de bon sens, et je ne vois pas en quoi les autorités de Bruxelles pourraient contredire cette disposition.

Je pense donc qu'il vaut la peine d'aller au bout de la démarche et de voter cet amendement, puis d'interroger la Commission européenne, puisque nos deux lectures diffèrent. Cela permettrait en outre au Gouvernement de donner satisfaction à la commission, une fois n'est pas coutume !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Je ne peux pas vous laisser dire, monsieur Brottes, que la commission obtient rarement satisfaction, puisque nous n'avons relevé depuis hier matin que deux points de divergence avec le Gouvernement.

Je ne retire pas l'amendement, puisqu'il a été voté par la commission, mais, à titre personnel, j'exprime une grande réserve à son endroit, car j'ai été convaincu par les arguments de M. le ministre, et je vous demande, mes chers amis, de faire preuve du même esprit, qui n'est pas d'obéissance, ce qui vous choquerait.

M. Daniel Paul. D'allégeance !

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit simplement de reconnaître la pertinence des arguments avancés par le ministre. Bien entendu chacun votera selon sa conscience, mais je crains, monsieur Brottes, que cet amendement connaisse le même sort que le vôtre.

M. le président. Si je vous ai bien compris, monsieur le rapporteur, vous vous en remettez à la sagesse du ministre ? (Rires.)

Je mets aux voix l'amendement n° 22 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Didier Migaud. Au concours des godillots vous êtes vraiment des premiers prix !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement n° 14647.

M. Jean Dionis du Séjour. Il s'agit d'un amendement assez technique, puisqu'il précise les modalités du dialogue instauré par le texte entre le prestataire de service universel et l'autorité de régulation en matière tarifaire. L'expérience d'autres secteurs, notamment les télécommunications, nous a appris que la procédure d'approbation des tarifs, prévue produit par produit, risque d'être extrêmement longue et de ressembler à de l'épicerie de détail.

C'est pourquoi cet amendement vise à rendre une certaine souplesse au prestataire du service universel en matière de fixation des tarifs applicables aux envois postaux, dans la limite de l'évolution générale des tarifs moyens. Cela signifie que l'on fixera un taux d'évolution applicable à une famille de produits, en laissant au prestataire du service universel une certaine latitude pour faire évoluer les tarifs de chaque produit, de manière à ce qu'il puisse se montrer réactif par rapport à la concurrence.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Votre amendement, monsieur Dionis du Séjour, rejoint notre amendement n° 23, deuxième rectification, que nous présenterons bientôt, et pour lequel nous avons une légère préférence. La commission a donc rejeté l'amendement n° 14647.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement préfère lui aussi la formulation de l'amendement n° 23, deuxième rectification, du rapporteur, qui satisfait, non seulement l'amendement n° 14647, mais aussi l'amendement n° 14645 également de M. Dionis du Séjour.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 14647 est retiré.

La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre l'amendement n° 14661.

M. Daniel Paul. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14661.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou, pour présenter l'amendement n° 14744.

M. Alain Gouriou. Cet amendement traite des prérogatives accordées à l'autorité de régulation en ce qui concerne l'accès des opérateurs autorisés aux installations de l'opérateur historique, à savoir La Poste.

Nous proposons de supprimer le 1° bis de l'article, qui a été introduit par le Sénat. Il nous semble en effet que les conditions techniques d'accès à ces installations doivent être le fruit de négociations entre La Poste et les opérateurs autorisés, et que l'intervention de l'ARCEP ne s'impose pas en la matière. Elle ne se justifierait qu'en cas de différend entre l'opérateur historique et les opérateurs autorisés concernant l'accès à ces installations. Cette suppression permettrait d'alléger les procédures.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. J'ai la joie, le plaisir et l'honneur d'accepter, au nom de la commission, l'amendement présenté par M. Gouriou. L'article L. 5-5 du code des postes et télécommunications définit en effet très précisément la compétence du régulateur, notamment en matière de litiges à propos des conventions d'accès, et il reviendra au juge de préciser les modalités de cette intervention. Voilà pourquoi nous sommes partisans de supprimer la précision proposée par le Sénat.

M. le président. Le Gouvernement partage-t-il la joie, le plaisir et l'honneur du rapporteur, monsieur le ministre ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement accepte en effet l'amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14744.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité et j'en viens à l'amendement n° 14784 rectifié.

La parole est à M. Jean Proriol, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. C'est un amendement de rédaction.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. D'accord.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14784 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de l'amendement n° 14645.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le soutenir.

M. Jean Dionis du Séjour. Je le retire.

M. le président. L'amendement n° 14645 est retiré.

J'en viens donc à l'amendement n° 23, deuxième rectification.

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit de l'amendement en faveur duquel nous avons proposé à M. Dionis du Séjour de retirer son propre amendement, parce que la rédaction nous en a semblé meilleure. Il vise en effet à mettre en place un système de supervision à deux niveaux en matière tarifaire : il prévoit d'une part un encadrement pluriannuel pour l'ensemble des prestations du service universel, pouvant le cas échéant se scinder en un encadrement pluriannuel pour les envois en nombre et un encadrement pluriannuel pour les envois égrenés ; d'autre part un examen au cas par cas de chaque proposition tarifaire de La Poste, donnant lieu, soit à une homologation dans le cas des prestations du domaine réservé, soit à un simple avis dans le cas des autres prestations du service universel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Le sujet n'est pas anodin.

Nous avons dû revenir à de nombreuses reprises sur cette question de l'homologation des services en matière de télécommunications, comme chacun ici le sait, faute d'avoir été capables, les uns pas plus que les autres, j'en conviens, de trouver le bon système, celui qui éviterait à l'opérateur historique de devenir l'otage du régulateur. Celui-ci peut en effet entraver la réactivité de l'opérateur historique, soit en s'abstenant de répondre, soit en exigeant sans cesse des informations complémentaires.

Nous avons tous conscience qu'il est impératif de définir une procédure beaucoup moins lourde pour le courrier. Il faudrait peut-être même envisager que le Gouvernement ait la faculté de trancher au cas où le régulateur tarderait trop à répondre aux demandes de l'opérateur historique, voire ferait preuve de mauvaise volonté. Je veux bien, monsieur le ministre, qu'on m'accuse de faire des procès d'intention ; mais qu'on me donne alors une explication, voire un simple exemple, qui nous montre bien qui devra faire quoi afin que l'on ne se retrouve pas dans une situation sans autre issue qu'un retour au Parlement.

Je ne formule pas cette remarque pour vous embêter, monsieur le ministre, mais il s'agit de ne pas répéter le précédent des télécommunications, où notre incapacité à élaborer d'emblée une solution satisfaisante nous a coûté beaucoup de temps, aux uns et aux autres.

Cet amendement très technique peut avoir des conséquences économiques importantes pour l'opérateur historique. Il est donc essentiel d'exposer clairement au Journal officiel la manière dont le régulateur doit appliquer ce dispositif.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Votre question est légitime, monsieur Brottes, mais je pense que l'amendement est suffisamment explicite et encadre très solidement la compétence du régulateur. Il précise en effet que « le silence gardé par l'autorité pendant plus d'un mois à compter de la réception de la demande complète vaut approbation ; l'autorité formule son opposition par une décision motivée explicitant les analyses, notamment économiques, qui la sous-tendent. » Il me semble que cette disposition répond au souci que vous avez exprimé et prouve qu'on a tiré la leçon des difficultés que les uns et les autres ont pu rencontrer.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Cette précision ne m'avait pas échappé, monsieur le ministre. mais le régulateur peut sortir de l'alternative entre le silence et l'approbation en demandant des informations complémentaires à l'opérateur historique. On peut ainsi imaginer que le régulateur multiplie les demandes d'informations complémentaires qui font traîner les débats et retardent d'autant la décision. Si je me permets d'envisager ce cas de figure, c'est parce qu'on a pu l'observer en matière de télécommunications. Voilà pourquoi, me semble-t-il, le ministre en charge de ces questions devrait pouvoir, à un moment donné, taper du poing sur la table et imposer une décision.

Cette question n'est pas sans rappeler les problèmes de délivrance des permis de construire, dont nous avons eu à débattre ici. Certains maires peuvent détourner cette procédure en multipliant les demandes d'éléments complémentaires qui ont pour effet de reporter sans cesse les échéances, afin d'éviter des constructions indésirables. On a assisté à des attitudes similaires en matière de télécommunications, qui ont été très préjudiciables à l'opérateur historique. L'amendement ne peut évidemment pas faire état de comportements aussi peu vertueux, mais nous souhaiterions que le ministre puisse arbitrer dès l'instant où le délai est dépassé sous le prétexte de demandes d'information qu'on ne peut cependant pas assimiler au silence.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Je ne vois pas où est la difficulté, dès lors qu'il s'agit d'une situation de monopole. S'agissant par exemple du prix du timbre, il est légitime que le régulateur puisse exiger l'information la plus complète. L'amendement ne prévoit d'ailleurs pas qu'on puisse proroger ce délai par une demande d'information complémentaire.

M. le président. La parole est à M. François Brottes, et nous passerons ensuite au vote, si vous le voulez bien.

M. François Brottes. Si je vous ai bien compris, monsieur le ministre, et pour la clarté de nos débats et des décisions futures, vous nous dites que, de toute façon, le délai est d'un mois et que, au-delà la proposition de l'opérateur postal s'applique.

M. le ministre délégué à l'industrie. En cas de silence gardé par le régulateur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 14745 de M. Brottes, 14646 de M. Dionis du Séjour et 14700 de M. Daniel Paul tombent.

J'appelle donc l'amendement n° 24 de la commission.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. Nous proposons, par cet amendement, une nouvelle rédaction du 4° de l'article L. 5-2 du code des postes et télécommunications. Il nous paraît en effet préférable, s'agissant des critères de qualité, de se référer à un décret plutôt qu'aux dispositions du contrat de plan, qui est soumis aux aléas de la négociation, comme on a pu le constater en 2002 et 2003, et qui, au demeurant, couvre un champ beaucoup plus large que le service universel postal.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 14747 et 25, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 14747.

M. François Brottes. Cet amendement de précision est très technique ; disons seulement qu'il vise à assurer une transparence complète des coûts.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement n° 25 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 14747.

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à l'amendement de M. Brottes et de ses amis du groupe socialiste, mais elle en partage l'idée. Elle a une préférence pour son propre amendement, parce qu'il lui paraît plus ramassé : l'ARCEP précise les règles de comptabilisation des coûts et veille à ce que le prestataire du service universel respecte des obligations relatives à la comptabilité analytique fixées dans son cahier des charges.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous retirons l'amendement n° 14747.

M. le président. L'amendement n° 14747 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 25 ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 26.

M. Jean Proriol, rapporteur. La commission a à nouveau voulu donner quelques directives à l'autorité de régulation, ce qui devrait faire l'unanimité, ou presque.

M. François Brottes. Ça va venir ! (Sourires.)

M. Jean Proriol, rapporteur. Nous proposons, dans cet amendement, d'imposer à l'autorité de régulation une obligation permanente de mesurer l'impact de ses prises de position sur la pérennité du service universel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul pour présenter l'amendement n° 14662.

M. Daniel Paul. Défendu !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14662.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 27.

M. Jean Proriol, rapporteur. Défendu !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Pour certains des amendements qui vont venir en discussion, nous sommes cosignataires avec le rapporteur ; tout arrive ! L'Assemblée nationale fait œuvre utile en augmentant les sanctions en cas de non respect de la règle du jeu, qui est la règle commune.

M. le ministre délégué à l'industrie. Tout à fait !

M. François Brottes. Sinon, ce ne serait pas la peine d'instaurer une règle, déjà un peu faible à nos yeux. Augmenter les sanctions est une avancée que nous soulignons et que nous apprécions.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. J'en viens à l'amendement n° 28 de la commission.

M. Jean Proriol, rapporteur. Même objet !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Même avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Paul pour soutenir l'amendement n° 14663.

M. Daniel Paul. Défendu !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14663.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14664.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le défendre.

M. Daniel Paul. Le bilan de la déréglementation dans les télécoms nous incite à beaucoup de précaution car le bilan du contrôle de l'ART nous paraît peu satisfaisant. Ainsi, le prix des communications à longue distance ont essentiellement baissé sur les axes de trafic fortement utilisés. En revanche, le rééquilibrage tarifaire s'est fait au détriment de la grande masse des usagers. En France, l'abonnement a considérablement augmenté au cours de la dernière période. La présence, dans notre pays, de trois grands opérateurs de téléphonie mobile, n'a pas permis la couverture de l'ensemble du réseau national.

Je pense que mon collègue de Seine-Maritime ne me démentira pas sur l'exemple que je vais donner

Le Havre est à 200 kilomètres de Paris.

M. Patrick Ollier, président de la commission, et M. le ministre délégué à l'industrie. Jusque-là, nous sommes d'accord !

M. Daniel Paul. Nous n'avons pas de TGV. Notre ligne SNCF est pourtant l'une des premières de France. Au long des 200 kilomètres de ligne, le téléphone portable est inutilisable durant une centaine de kilomètres, non seulement dans le train, mais même à l'extérieur.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Il n'y a pas que là !

M. Daniel Paul. Dans cette zone, alors que nous ne sommes pas dans des territoires désertifiés mais à quelques dizaines de kilomètres de la capitale et de deux grands ports, Le Havre et Rouen, le téléphone portable ne fonctionne pas.

M. le ministre délégué à l'industrie. Me permettez-vous de vous interrompre ?

M. Daniel Paul. Volontiers.

M. le président. La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.

M. le ministre délégué à l'industrie. Monsieur Paul, je vous apporte une information : dans le cadre de la troisième licence de téléphonie mobile, nous avons demandé à ce que les voies de chemin de fer soient couvertes.

M. Daniel Paul. Et à l'extérieur du train aussi ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Il y aura, en priorité, des relais installés sur les trains.

M. Daniel Paul. C'est une bonne nouvelle.

M. le ministre délégué à l'industrie. N'est-ce pas ?

M. le président. Poursuivez la présentation de votre amendement, monsieur Paul.

M. Daniel Paul. Malgré tout, monsieur le ministre, même si vous venez de nous annoncer un projet intéressant et auquel seront sensibles les usagers de cette zone, le Gouvernement persiste dans sa logique : il entérine une nouvelle hausse de l'abonnement téléphonique et, s'agissant du secteur postal, va mettre fin au principe de la péréquation tarifaire en créant des tarifs préférentiels pour les gros clients, alors même qu'a été annoncée, le trimestre dernier, une nouvelle hausse du prix du timbre pour les simples usagers. Là encore, nous avons des craintes quant à la qualité du service rendu. Nous proposons donc la suppression du texte proposé pour l'article L. 5-5 du code des postes et télécommunications.

Cela étant, j'ai bien pris note de votre promesse, monsieur le ministre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14664.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour présenter l'amendement n° 14685.

M. Daniel Paul. Cet amendement vise à indiquer que l'ARCEP contrôle autant les entorses à la concurrence que les pratiques affectant la bonne réalisation des missions de service public de La Poste. Nous craignons en effet que cet organisme ne prenne pas suffisamment en compte les atteintes au service public, qu'elle ait l'œil vissé sur le contrôle du respect des règles de concurrence et sur la lutte contre les pratiques discriminatoires. Or l'atteinte aux principes du service public, la concurrence déloyale contre l'opérateur chargé de la défense de ce service public, ne sont pas toujours considérées dans le projet de loi comme répréhensibles. De ce fait, l'ARCEP, comme cela se passe pour d'autres autorités de régulation, sera amenée à être plus sévère à l'encontre de La Poste que de ses concurrents, et donc à fragiliser davantage l'opérateur historique.

C'est pourquoi cet amendement vise à bien préciser le devoir de l'ARCEP d'éviter que soit affectée la bonne réalisation des missions de service public du prestataire du service universel.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14685.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Daniel Paul, l'amendement n° 14665 est-il défendu ?

M. Daniel Paul. Oui, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Rejet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Rejet.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14665.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu, pour présenter l'amendement n° 14746,.

Mme Marylise Lebranchu. Une lecture en droit montre que le texte proposé pour l'article L. 5-7 du code des postes et télécommunications est relatif à la demande de conciliation. Or en droit, dans une conciliation, contrairement à une procédure, il ne peut y avoir que des interlocuteurs volontaires. Il n'y a donc pas lieu de conserver cet article. Si deux prestataires, quelle que soit leur nature, estiment qu'ils ont une question à poser à l'autorité de régulation, ils pourront le faire. Nous ne voyons pas l'intérêt de cet article, dont nous demandons la suppression.

Un dispositif similaire a d'ailleurs été supprimé, pour les mêmes raisons, lors de l'examen de la récente loi relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Également défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Sans faire de polémique, je demande au rapporteur et au ministre de nous donner au moins une courte phrase d'explication.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. Madame Lebranchu, je vais vous donner l'explication de l'avis défavorable.

La suppression de la conciliation en matière de télécommunications électroniques est le résultat de l'expérience. Il n'est pas dit que les choses évolueront de la même manière en matière postale. Il ne faut donc pas raisonner par analogie entre les télécoms et la poste.

En contrepoint à l'ART, tentons l'opération, laissons une possibilité à la conciliation et puis nous verrons bien par la suite.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Madame Lebranchu, je suis sûr que l'ancien garde des sceaux que vous êtes n'est pas hostile au principe même de la conciliation. Quand elle alourdit inutilement la procédure, il faut effectivement en prendre acte, mais l'expérience n'a pas encore été faite en ce domaine.

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Si votre volonté est de donner à la conciliation un aspect formel, même si en droit elle restera tout à fait volontaire, il suffit de prévoir que l'autorité de régulation, ayant connaissance d'un litige ou d'une interrogation, pourra proposer une procédure de conciliation, en laissant la possibilité à l'ARCEP, si cette conciliation échoue, de saisir le conseil de la concurrence. Sinon, je ne vois pas l'intérêt de cet article dans sa rédaction actuelle. Il y a une conciliation : elle échoue ou elle réussit. Un point c'est tout.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14746.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 14666.

M. Daniel Paul. Pourquoi avoir fait de la cour d'appel de Paris plutôt que de la cour administrative d'appel de Paris le juge compétent pour les litiges engendrés par les décisions de l'ARCEP ? Nous savons tous que la première risque de fonder ses décisions sur le seul droit de la concurrence, tandis que la seconde se référerait aussi au droit public et donc tiendrait compte des exigences du service public.

Ainsi loin d'être potentiellement protecteur de La Poste comme prestataire du service public, le droit qui régira le marché postal sera largement inspiré par les valeurs du privé. Cela traduit bien, à nos yeux, la volonté de faire disparaître un service public qui n'a pas démérité, qui a rempli ses objectifs et qui a satisfait les Français.

Voilà pourquoi nous demandons la suppression du texte proposé pour l'article L. 5-8 du code des postes et télécommunications.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis défavorable.

M. Daniel Paul. Pourquoi ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Je vais vous dire pourquoi, monsieur Paul : parce que c'est la compétence ratione materiae de la cour d'appel. Il s'agit de l'abus de position dominante, ce qui est, dans l'état actuel du droit français, de la compétence de ladite cour.

M. Daniel Paul. Décidément, le service public a du souci à se faire !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14666.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 14686 est-il défendu, monsieur Paul ?

M. Daniel Paul. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14686.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 29 rectifié.

M. Jean Proriol, rapporteur. Cet amendement vise à permettre une utilisation plus souple des pouvoirs d'enquête, en reprenant la formulation retenue pour le secteur des télécommunications dans le projet de loi sur les communications électroniques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 30.

M. Jean Proriol, rapporteur. Cet amendement très court vise à aligner la situation des experts ad hoc, du point de vue du secret professionnel, sur celle des fonctionnaires et agents habilités à conduire des enquêtes.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 31 et 14739.

La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement n° 31.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'élargir le créneau horaire pendant lequel la visite des locaux professionnels est possible, car nous avons trouvé que « entre huit heures et vingt heures », c'était insuffisant pour tenir compte du travail de nuit des opérateurs postaux. Mieux vaut prévoir « entre six heures et vingt et une heures ».

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 14739.

M. François Brottes. Chacun aura noté que je suis aussi cosignataire de l'amendement n° 31 avec le rapporteur. Nous faisons en l'occurrence cause commune : lui avait pensé modifier l'heure du matin, nous voulions quant à nous changer celle du soir ! (Sourires.)

Nous nous sommes donc rejoints pour ménager une capacité à enquêter suffisante, considérant que celle offerte par l'article 2 laissait à ceux qui voulaient truander le dispositif la possibilité de le faire. Nous faisons œuvre utile en alignant le dispositif sur celui qui a cours dans d'autres domaines. Notre assemblée aura raison de fournir les moyens de démasquer les tricheurs, qui ne manqueront pas de se manifester.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis favorable !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 31 et 14739.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 32.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit de préciser que les informations recueillies dans le cadre des enquêtes doivent bénéficier, si besoin est, de la protection du secret, à l'instar de ce que prévoit le code des postes et télécommunications pour les télécommunications.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous en venons à deux amendements identiques, nos 14650 et 14766

La parole est à M. Alfred Trassy-Paillogues, pour soutenir l'amendement n° 14650.

M. Alfred Trassy-Paillogues. Il s'agit de permettre au prestataire du service universel et aux titulaires d'une autorisation postale d'accéder, pour les besoins de leurs prestations et dans des conditions encadrées, bien sûr, aux boîtes aux lettres des destinataires d'envois postaux.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour défendre l'amendement n° 14766.

M. Jean Dionis du Séjour. Je n'ai rien à ajouter, mon amendement est identique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement est naturellement favorable à ces deux amendements. Si l'Assemblée les adopte, je demanderai au conseil général des technologies de l'information d'étudier - parce que cette mesure pose de petits problèmes techniques, mais il faut atteindre le but qu'elle poursuit - les modalités de mise en œuvre du dispositif.

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Je comprends bien le sens de l'amendement mais je vous rappelle que, à la suite de l'interdiction - que la majorité a votée alors que nous nous y opposions - des rassemblements dans les cages d'escalier, une sorte de « privatisation » des lieux s'est instaurée, qui a entraîné l'achat par certains copropriétaires de systèmes dont ne disposaient que les autorités dont l'État était garant.

C'est un vrai sujet de droit.

M. Jean Dionis du Séjour. C'est vrai !

Mme Marylise Lebranchu. Pour ce fameux « accès aux clés », dont je vous rappelle que la police les détient, la presse régionale a rencontré quelques difficultés du fait de ces nouvelles dispositions, mais elles ont été réglées par la majorité des syndics de copropriété ou les organismes d'habitats sociaux.

De nouveaux problèmes sont apparus s'agissant de la distribution des publicités, dont on sait qu'elle est parfois réalisée par des personnes en contrat à durée déterminée sur des horaires très faibles. En effet ces « petits boulots » sont parfois considérés - je le dis avec beaucoup de respect pour ceux qui ont tenu ces propos même s'ils peuvent donner lieu à débat - comme indésirables dans les immeubles. De ce fait, les distributeurs de publicité n'ont pas obtenu l'accès aux clés.

Du coup, se sont posés, en série, un certain nombre de problèmes techniques et juridiques.

Il faudrait savoir si tout opérateur détenant une autorisation, sous contrôle de l'autorité de régulation, pourra disposer de clés aujourd'hui réservées à La Poste, à la police et à toute personne dépendant de l'administration d'une mission régalienne de l'État.

Voilà une vraie question, que vous avez soulevée certainement sans le savoir.

M. le ministre délégué à l'industrie. Mais non ! La preuve, c'est que je vais saisir le CGTI !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Le problème est réel puisqu'on assiste à une privatisation croissante des halls d'immeubles, où se trouvent les boîtes aux lettres. La situation est des plus confuses. Peut-être les lois récentes ont-elles accentué cette confusion. Toujours est-il qu'on nage dans la plus grande illégalité. Les clés circulent entre de nombreuses mains. Il faut régler ce problème, j'en suis d'accord avec Mme Lebranchu, au niveau du droit. Je pense que c'est le but de la saisine du conseil général des technologies de l'information.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 14650 et 14766.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 2

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements de la commission portant article additionnel après l'article 2.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 33.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 34.

M. Jean Proriol, rapporteur. C'est un amendement de mise en cohérence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Egalement favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 35 deuxième rectification.

M. Jean Proriol, rapporteur. Par cet amendement, nous proposons de mettre un peu d'ordre dans les institutions qui représentent le personnel. La Poste compte 200 000 agents qui relèvent du statut de la fonction publique postale et 100 000 qui sont des contractuels.

Nous proposons donc, par cet amendement, de clarifier les choses, en nous inspirant, bien sûr, de ce que La Poste a déjà négocié ou est en train de négocier avec les organisations syndicales.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Cet amendement, assez lourd, concerne l'ensemble des personnels de La Poste. Je souhaite que le rapporteur ou le ministre nous fasse part du résultat des discussions avec les organisations syndicales dont je crois que certaines ont approuvé les dispositions du projet mais pas toutes. Il est utile, quand on légifère et qu'il s'agit d'entériner, le cas échéant par la loi, un dispositif résultant du dialogue social, de connaître les critiques ou approbations des organisations syndicales. Quelles sont donc les positions des unes et des autres ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Proriol, rapporteur. J'indique à M. Brottes - mais cela ne lui avait certainement pas échappé - que nous avons joint au rapport de la commission l'accord sur les principes et méthodes du dialogue social à La Poste. Il a été signé par M. Bailly et par quatre organisations syndicales sur six : Force Ouvrière, bien sûr (Rires sur les bancs du groupe socialiste), la CFDT, (« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe socialiste), la CFTC et la CFE-CGC. Par contre, la CGT et SUD ne l'ont pas signé.

M. Daniel Paul. Et ce sont les organisations majoritaires !

M. François Brottes. Pour quelles raisons n'ont-elles pas signé ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35 deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

Article 2 bis

M. le président. De nombreux orateurs étant inscrits sur l'article, dont beaucoup ne sont plus présents dans l'hémicycle, je propose de donner la parole à un orateur par groupe.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je renonce à la parole, monsieur le président.

M. le président. Faites-vous de même, monsieur Brottes ?

M. François Brottes. Monsieur le président, à quelques secondes de la levée de séance, il n'est pas sérieux d'aborder des discussions de fond.

M. le président. Nous ne sommes pas à quelques secondes de la levée de séance. Nous l'avons prévue à vingt heures !

M. François Brottes. Dans la mesure où nous répondons à votre demande de ne pas intervenir sur l'article, j'ose espérer que vous nous donnerez la parole plus longuement que vous ne le faites parfois lors de l'examen des amendements.

M. le président. Certes.

Nous abordons donc l'examen des amendements à l'article 2 bis en commençant par l'amendement n° 36 de la commission.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 37.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit, également, d'un amendement rédactionnel, symétrique à une disposition similaire visant le personnel de France Télécom.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Article 3

M. le président. Les orateurs inscrits sur cet article renoncent-ils également à la parole ?

Je constate que ce n'est pas le cas.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Cet article poursuit la libéralisation du secteur postal, dont vous ne cessez de dénoncer le retard. Devez-vous pour autant accélérer le processus et tirer gloire de la façon dont vous le faites ? Quel mérite avez-vous à franchir un pas supplémentaire dans cette marchandisation forcée des services publics, à mettre en œuvre une politique qui ne parle que de concurrence, considère les externalités des services publics comme des coûts, remet en cause les statuts des personnels, restreint la qualité de l'offre aux usagers et va faire payer les collectivités locales et souffrir - c'est le moins que l'on puisse dire - les notions d'aménagement du territoire et d'égalité de traitement entre les usagers, au nom du sacro saint marché ?

Vous ne cessez de protester contre le secteur public : vous dénoncez son coût, qui pèserait sur les finances publiques, ses salariés privilégiés, son inefficacité économique et j'en passe sans doute. Mais vous oubliez de rappeler que la mise en place du réseau postal a été intégralement prise en charge par l'opérateur public. À l'heure actuelle, aucun concurrent potentiel ne serait en mesure de s'occuper d'un réseau couvrant l'intégralité du territoire. Stratégie un peu simpliste que de crier à la faible rentabilité des secteurs publics après les avoir laissés supporter les coûts d'installation de leurs réseaux !

Qu'ils soient énergétiques, ferroviaires ou postaux, les services publics concourent au développement économique des territoires. Créateurs d'activités économiques déconcentrées, ils permettent des investissements de long terme que la volatilité du marché interdit aux opérateurs concurrentiels. L'exemple le plus connu est évidemment celui du réseau ferroviaire britannique.

L'idée avancée par plusieurs organisations syndicales de moderniser le service postal en équipant tous les bureaux de poste d'un accès fax et internet illimité a peu de chances d'être prise en considération par des investisseurs privés, puisqu'ils n'ont pas l'assurance d'une rentabilité rapide et forte sur investissement.

Pour toutes ces raisons, - parmi d'autres - nous proposons de supprimer l'article 3.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Cet article soulève quelques questions. Nous avons constaté, il y a quelques mois, que les familles ou les individus qui signalaient un changement d'adresse postal recevaient dans les jours qui suivaient une lettre du ministre de l'intérieur - de M. Sarkozy, pour ne pas le citer - les invitant à s'inscrire sur les listes électorales. Pourquoi pas ? C'est un devoir citoyen ! D'aucuns se sont quand même étonnés d'être ainsi suivis à la trace par le ministère de l'intérieur.

Ce n'était jamais arrivé jusqu'à présent. Peut-être cette pratique est-elle nécessaire pour inciter nos concitoyens à être plus nombreux à participer au suffrage universel, mais elle n'est pas mentionnée dans l'article 3. J'imagine donc qu'elle ne sera pas poursuivie.

Si je soulève cette question, c'est parce que ce n'est pas un cas isolé. Il n'y a pas eu un seul courrier d'envoyé. En tant que députés, nous en avons reçu plusieurs. Le procédé était assez systématique. Il part d'un bon sentiment mais il n'a pas toujours été bien perçu par ceux qui ont reçu le courrier. Il a un petit côté « Big Brother » assez déplaisant.

M. le ministre délégué à l'industrie. Je dirais plutôt « Little Brother » !

M. le président. Nous en venons aux amendements.

La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 14667 qui tend à la suppression de l'article.

M. Daniel Paul. La gestion publique des entreprises est, nous dit-on, néfaste pour la croissance.

M. le ministre délégué à l'industrie. Pas toujours !

M. Daniel Paul. Je vous remercie de le reconnaître, monsieur le ministre, car certains de vos amis font facilement ce reproche.

Il est bon de rappeler que La Poste, maison mère, comme on l'appelle, continue d'assurer 15,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires à l'entreprise, sur un total de 19 milliards d'euros.

Il n'est pas inintéressant non plus d'avoir en tête que les filiales de l'activité colis, regroupées dans la holding Géoposte, poursuivent une politique d'expansion coûteuse à bien des égards.

M. le ministre délégué à l'industrie. Hélas !

M. Daniel Paul. Depuis 1998, Géoposte a ainsi acquis 85 % de l'opérateur allemand DPD, racheté Interlink et Parceline au Royaume-Uni. Cette politique d'expansion se poursuit aujourd'hui en Espagne, chez TatExpress et Correos.

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est exact !

M. Daniel Paul. Les « besoins » en développement - dont on connaît le coût dans d'autres entreprises publiques et il est regrettable que le politique n'y ait pas rapidement mis le holà ! - sont particulièrement coûteux pour La Poste et l'amènent à accroître ses emprunts obligataires. Tout se paye ! Or, ici, il s'agit non pas de créer de la richesse, mais d'acheter ce qui existe déjà. On se partage des parts de marché. Voilà la croissance dont on nous parle.

La croissance externe de la filiale colis amène en quelque sorte la maison mère à se vider de sa substance...

M. le ministre délégué à l'industrie. Au contraire !

M. Daniel Paul. ...pour nourrir une filiale au développement hasardeux, peu soucieuse de sa responsabilité sociale à l'égard tant de ses usagers que de ses agents. Elle était annoncée comme déficitaire pour 2004, mais ce qui plombe ses comptes, c'est le financement des filiales déficitaires et les charges externes telles que les amortissements d'investissements.

Cette gestion hasardeuse de l'entreprise publique s'avère moins performante que celle qui a été développée au fil des ans dans le cadre du contrôle monopolistique public du marché : La Poste y a toujours alors atteint l'équilibre, grâce notamment à la péréquation entre ses activités.

C'est la raison pour laquelle je demande la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Proriol, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Défavorable également. Il faut être cohérent, monsieur Paul : la directive ouvre le marché français à la concurrence.

M. Daniel Paul. Ce n'est pas ma bible !

M. le ministre délégué à l'industrie. Pourquoi voulez-vous que La Poste française s'interdise d'aller sur les marchés étrangers ? Vous lui voulez du mal !

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je vous entends bien, monsieur le ministre, mais vous avez reproché à EDF et à France Télécom d'être allées sur les marchés étrangers.

M. le ministre délégué à l'industrie. Non, d'y être mal allées !

M. Daniel Paul. Pour les mêmes raisons, vous avez reproché à ces deux entreprises d'y avoir consacré des fonds importants...

M. Jean Proriol, rapporteur. Et perdu !

M. Daniel Paul. ...qu'elles auraient dû investir - et vous avez sans doute raison - en France et en Europe, ...

M. le ministre délégué à l'industrie. La Poste est en Europe !

M. Daniel Paul. ...puisque je suis de ceux qui pensent également que l'Europe est un des terrains importants pour le développement d'un certain nombre de services publics.

M. Marc Laffineur. Alors, il faut les laisser agir !

M. Daniel Paul. Encore faut-il que cela corresponde à de la création de richesses supplémentaires. Il ne s'agit pas de négocier, comme on le fait actuellement pour un certain nombre d'entreprises publiques, des pans d'activité. Les tractations reposent actuellement sur la base suivante « donne-moi un morceau de ton territoire et de ton activité et je t'autorise à venir chez moi prendre une partie de mon activité. »

C'est cela qui se passe : on gaspille des sommes énormes sans que cela crée une richesse quelconque.

M. le ministre délégué à l'industrie. Ce n'est pas vrai !

M. Daniel Paul. Bien sûr que si, et vous le savez bien !

C'est cela que nous vous reprochons et c'est la raison pour laquelle nous vous demandons de retirer cet article.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14667.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol, pour défendre l'amendement n° 14719.

M. Jean Proriol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'industrie. Avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.

Mme Marylise Lebranchu. Je voudrais vous suggérer deux corrections rédactionnelles dans le texte proposé pour l'article L. 6 du code des postes et télécommunications.

D'abord il mentionne le « régisseur du service de la redevance audiovisuelle ». Or il me semble qu'il n'y a plus lieu de le citer dans un article, car la réforme a été faite. Si, donc, il n'y a plus de régisseur de la redevance audiovisuelle et si c'est le seul service de l'impôt qui doit assurer cette tâche, on pourrait se mettre d'accord pour supprimer ce membre de phrase qui, même si d'aucuns le regrettent, apparaît comme obsolète.

Ensuite M. Proriol avait indiqué dans son rapport que le Gouvernement procéderait « à l'ajustement rédactionnel nécessaire ». Or un tel amendement ne nous est pas parvenu.

Compte tenu de la remarque formulée tout à l'heure par M. François Brottes et étant donné que, en droit français, les autorités judiciaires comprennent  les autorités policières, y compris dans le cadre des enquêtes préliminaires, je souhaiterais que nous puissions écrire : « ...communiquent aux autorités judiciaires qui en font la demande en matière pénale et au service des impôts » - et seulement à ces deux entités - « les changements de domicile dont ils ont connaissance. » Cela éviterait une utilisation anormale.

Je vous rappelle d'ailleurs que les maires des communes sont obligés, pour établir l'assiette de l'imposition locale, de tenir à jour le registre des personnes domiciliées sur leur territoire. Vous ne pouvez pas payer de taxe d'habitation et, a fortiori, de taxe sur le foncier bâti si vous n'existez pas. Les services fiscaux connaissent les cohabitants du fait des déclarations fiscales. Une personne ne peut donc pas dissimuler son domicile. Je ne pense pas que les services postaux aient une mission de ce type.

Telles sont les rectifications mineures que le Gouvernement pourrait s'engager à apporter lors de la deuxième lecture.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'industrie. Vos remarques sont judicieuses, madame Lebranchu, et vous avez raison. Nous procéderons à ces rectifications lors de la deuxième lecture.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14719.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié par l'amendement n° 14719.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1384, relatif à la régulation des activités postales :

Rapport, n° 1988, de M. Jean Proriol, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot