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Deuxième séance du mardi 14 juin 2005

224e séance de la session ordinaire 2004-2005


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

LIBÉRATION DE FLORENCE AUBENAS
ET HUSSEIN HANOUN

M. le président. Mes chers collègues, dès le premier jour de l'enlèvement de Florence Aubenas et de son guide Hussein Hanoun, nous avons manifesté collectivement notre préoccupation, notre soutien et notre solidarité.

Leur libération, dimanche dernier, a suscité chez chacun et chacune d'entre nous joie et soulagement. Je veux, en votre nom à tous, rendre hommage au courage de Florence, à la dignité de sa famille et de ses confrères, et vous demander, monsieur le Premier ministre, de transmettre nos plus vives félicitations aux agents de l'État qui, sous l'autorité du président de la République et du Gouvernement, ont œuvré à cette libération. (Applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, dans cette assemblée qui représente le peuple français, je veux comme vous que ma première pensée soit pour Florence Aubenas et Hussein Hanoun.

Florence nous a donné l'exemple d'une femme de liberté qui, tout au long de 157 jours de détention, n'a jamais cédé aux injonctions de ses ravisseurs. D'une femme de courage qui n'a jamais perdu l'espoir. D'une femme de tempérament et de sourire qui, au moment où elle retrouvait le sol français sur le tarmac de Villacoublay, a fait preuve d'humour, de confiance et d'un espoir dans l'avenir qu'elle a su nous faire partager.

Tout au long de cette épreuve, le sang-froid et le sens des responsabilités ont été au rendez-vous, plutôt que l'émotion et l'inquiétude, et je tiens à en remercier tous nos compatriotes. Je tiens aussi à saluer le courage de la famille de Florence. Je salue également tous ses confrères et consœurs, en particulier le directeur et la rédaction du journal Libération, qui ont fait preuve de tant d'esprit de responsabilité. Je salue comme vous, monsieur le président, le courage et l'action des services de l'État - qu'il s'agisse du ministère de la défense ou du ministère des affaires étrangères - qui, dans des conditions extraordinairement périlleuses, ont fait la preuve de la continuité de leur engagement. Ce sont bien eux, et eux seuls, qui jour après jour ont mené le combat.

Je tiens également à saluer, sur l'ensemble de ces bancs, tous les groupes politiques, quelle que soit leur sensibilité, qui jour après jour ont su se mobiliser sans céder à aucun moment à la polémique ou à la division. Je veux aussi remercier tout particulièrement les représentants du Conseil français du culte musulman, qui ont multiplié les appels en vue de cette libération et, bien sûr, tous nos compatriotes qui, quotidiennement, ont multiplié les gestes et les actes manifestant leur engagement en faveur de cette libération. Je salue enfin l'engagement de la communauté internationale, et tout particulièrement celui de la Roumanie et de ses autorités, en la personne du président Basescu.

À l'heure où nous saluons et fêtons cette libération, je veux penser à l'avenir et à notre responsabilité. Dans les prochains jours, je recevrai les représentants de l'ensemble de la presse française pour que nous puissions, face à des situations aussi difficiles que celle que nous rencontrons aujourd'hui en Irak, témoigner à la fois notre volonté de défendre la liberté d'informer et notre souci d'être responsables vis-à-vis de la nation et de nos compatriotes. Il est important de conjuguer cette responsabilité et la défense du droit d'expression plein et entier de la presse. (Applaudissements sur tous les bancs.)

    2

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION ÉTRANGÈRE

M. le président. Mes chers collègues, permettez-moi de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de la Chambre des représentants de la République des Philippines, conduite par son président, M. Jose de Venecia. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

    3

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

DÉBAT PARLEMENTAIRE SUR LE CONSEIL EUROPÉEN

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le 29 mai (Exclamations sur les bancs du groupe des
député-e-s communistes et républicains),
les Français n'ont pas souhaité ratifier le traité constitutionnel européen. Nous regrettons cette décision,...

M. Maxime Gremetz. Pas nous !

M. Jean-Claude Lefort. Il faut en prendre acte !

M. Bernard Accoyer. ...mais elle s'impose.

Pour autant, les Français n'ont pas rejeté l'Europe. Ils veulent une Europe plus lisible, plus proche d'eux, répondant à leurs préoccupations quotidiennes et les rassurant quant à leur avenir dans ce monde confronté à la globalisation.

Dans ce contexte, monsieur le Premier ministre, vous avez décidé que notre assemblée débattrait, à la veille d'un sommet européen capital, de l'avenir de l'Union. Je vous remercie de ce choix, qui est particulièrement nécessaire car nos compatriotes, au-delà de la réponse qu'ils ont exprimée, ont clairement demandé, au cours de la campagne et par leur vote, d'être à l'avenir davantage associés à la préparation des décisions et à l'élaboration des textes européens, afin de pouvoir eux-mêmes connaître leur avenir et influer sur celui-ci.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous rassurer la représentation nationale et l'informer sur les moyens que vous entendez mettre en oeuvre pour que cette attente des Français soit satisfaite ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Accoyer, le 29 mai a ouvert une période d'interrogations.

Interrogations en France, d'abord, où nombre de nos compatriotes s'interrogent sur la direction à donner à la construction européenne et sur le rôle qui doit être conféré à l'Union européenne. Interrogations également en Europe, où est posée la question du processus de ratification et où le Conseil européen qui se tiendra à la fin de cette semaine revêt désormais une importance particulière.

L'Europe, nous le savons, a connu tout au long de son histoire d'autres crises - crises d'identité, avec l'échec de la Communauté européenne de défense en 1954 ou la politique de la chaise vide en 1965 ; crises de fonctionnement, à propos de questions sectorielles comme l'agriculture ou la pêche, ou à propos des montants compensatoires. Toujours, l'Europe a été capable de faire preuve de volonté politique pour surmonter ces crises. À cette heure, nous devons y ajouter une fidélité à l'exigence démocratique.

C'est pourquoi j'ai voulu que la France puisse connaître demain un véritable débat au Parlement, où chacun, chaque groupe, puisse s'exprimer, poser les questions, prendre date. Il est essentiel que ce débat ait lieu.

Nous connaissons les questions majeures auxquelles nous sommes confrontés. Que faire à propos de la Constitution européenne ? Faut-il poursuivre ou arrêter le processus, à l'heure où d'autres pays sont venus ajouter leur voix au vote de la France ? Comment faut-il désormais gérer la question institutionnelle, alors même que le projet de Constitution avait pour but de nous doter des institutions nécessaires pour faire vivre l'élargissement et nous permettre de regarder l'avenir ? Comment avoir les outils efficaces indispensables pour construire véritablement une Europe au service de nos concitoyens ? Enfin, la question des élargissements futurs et des frontières de l'Europe est posée, et il nous faut trouver les réponses adaptées.

Tous ces sujets pourront être abordés demain. Mais je tiens à vous dire clairement dès aujourd'hui que la France soutiendra, au cours des prochains jours et des prochains mois, une position exigeante : défendre les intérêts de notre pays (« Ah ! » sur les bancs des député-e-s communistes et républicains), prendre en compte les inquiétudes et les aspirations exprimées par les Françaises et les Français (« Ah ! » sur les mêmes bancs) et, en même temps, travailler à l'unité et au rassemblement des Européens pour nous permettre de regarder et d'affronter l'avenir ensemble. Nous savons tous à quel point les Françaises et les Français sont attachés à la construction européenne et s'y engagent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous aurons en effet demain, après une déclaration du Gouvernement, un débat organisé par la conférence des présidents conformément à l'article 132 du règlement.

LIBÉRATION DE FLORENCE AUBENAS
ET HUSSEIN HANOUN

M. le président. La parole est à M. Paul Quilès, pour le groupe socialiste.

M. Paul Quilès. Monsieur le Premier ministre, je tiens tout d'abord à dire notre satisfaction, qui est celle de la représentation nationale tout entière, de voir nos otages libérés. Je voudrais aussi, au nom du groupe socialiste, féliciter toutes celles et tous ceux qui ont permis de mettre un terme heureux à cet acte barbare et inhumain.

Au cours des 157 jours de détention de Florence Aubenas et Hussein Hanoun, comme lors de la captivité de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, il va de soi que la discrétion devait être la règle pour tous les responsables politiques - et elle l'a, en général, été. Aujourd'hui, en revanche, il nous semble souhaitable, et même indispensable, d'y voir plus clair.

Il s'agit, d'abord, d'y voir plus clair dans le rôle de certains intermédiaires. Ils sont, je le sais, inévitables, et on n'y peut rien, mais certaines attitudes, certaines prises de position, certaines déclarations publiques et certaines actions ont été autant de dérives qui ont pu mettre en danger la vie même des otages et porter atteinte au crédit de la France.

Il s'agit aussi d'y voir clair sur les motivations de cette prise d'otage, pour laquelle on a évoqué des raisons crapuleuses ou mafieuses, mais aussi des raisons politiques. Il est important, monsieur le Premier ministre, de savoir s'il y a eu des interférences avec la politique internationale de la France et, si c'est le cas, de les connaître.

Voilà pourquoi je propose, avec François Loncle et l'ensemble du groupe socialiste, qu'une commission d'enquête parlementaire soit constituée pour mener cette investigation (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), de façon responsable et avec le seul objectif de comprendre et d'aider à ce que certaines dérives ne se reproduisent plus. (Même mouvement.)

M. Jean-Marc Nudant. Parlez-nous du Rainbow Warrior !

M. Paul Quilès. Bien que la création de cette commission relève de la responsabilité de notre assemblée, j'aimerais savoir, monsieur le Premier ministre, ce que vous pensez de cette initiative. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Sylvia Bassot. C'est petit !

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Permettez-moi, monsieur le député, après M. le Premier ministre et M. le président de l'Assemblée nationale, de me réjouir à mon tour de la libération de Florence Aubenas et Hussein Hanoun. Permettez-moi aussi de saluer la diplomatie française et les services du ministère de la défense, qui, dans le respect de la continuité de l'État ont fait preuve d'une très grande efficacité.

M. Albert Facon. Il faut remercier Barnier !

M. le ministre des affaires étrangères. Permettez-moi enfin de saluer l'esprit de responsabilité de tous les groupes politiques de la représentation nationale, majorité comme opposition. Je souhaite, monsieur le député, que cet esprit de responsabilité perdure, et qu'on n'entre pas dans des polémiques que les Français ne comprendraient pas.

En réponse à votre première question, je rappellerai qu'une prise d'otage est une affaire délicate, a fortiori quand elle a lieu dans un pays étranger. La discrétion, le sens des responsabilités, le sérieux doivent prévaloir, et donc souvent le silence, avant, pendant et après toute prise d'otage. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Loncle. Obscurantisme !

M. le ministre des affaires étrangères. En ce qui me concerne, monsieur le député, je me tiendrai à la discrétion. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Kucheida. Où est Barnier ?

Plusieurs députés du groupe socialiste. Barnier, reviens !

M. le ministre des affaires étrangères. Votre deuxième question a trait aux ravisseurs. À ce sujet, nous avons recueilli ces derniers jours des indications très diverses et souvent contradictoires. Vous comprendrez qu'il est nécessaire d'étudier ces informations avant d'aller plus loin.

M. Albert Facon. Rendez-nous Barnier !

M. le ministre des affaires étrangères. Vous avez évoqué enfin - et ce dernier point me paraît peut-être le plus important - des prises de position qui se sont manifestées ici ou là.

M. Albert Facon. C'est lamentable !

M. le président. Monsieur Facon !

M. le ministre des affaires étrangères. S'il n'y avait qu'une seule leçon à tirer de la libération de Georges Malbrunot, de Christian Chesnot, de Florence Aubenas et de Hussein Hanoun, c'est que la diplomatie française est une, et qu'il n'y a pas de diplomatie parallèle. C'est la force de la diplomatie française et c'est la dignité de l'État français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

TRANSPORTS ROUTIERS

M. le président. La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Francis Hillmeyer. Monsieur le ministre des transports, à l'arrière de milliers de camions circulant dans toute la France, on peut voir affichés ces mots : « Mon entreprise ne veut pas mourir ! »

Les entreprises de transport routier sont pour la plupart à l'agonie. Les raisons en sont connues.

Elles souffrent d'abord d'un cabotage de plus en plus sauvage : des entreprises d'autres pays, sur lesquelles ne pèsent pas les mêmes devoirs et les mêmes obligations salariales, viennent casser les prix en France. Les contrôles, trop rares, ne suffisent pas à endiguer cette pratique, qui échappe de plus à la TVA.

Elles souffrent aussi de la location transfrontalière, qui a les mêmes conséquences que le cabotage.

Enfin, la France est le quatrième pays le plus cher en ce qui concerne la taxation du gazole : 2,4 milliards d'euros de TIPP ont été versés à ce titre en 2004. Nos transporteurs attendent la définition d'un taux de taxation européen du gazole professionnel, afin de mettre fin aux distorsions de concurrence. Où en sont les négociations à ce sujet ?

Le passage de 40 à 44 tonnes du poids total roulant maximal autorisé est également une demande récurrente, d'autant que l'équipement de la majorité des véhicules les rend d'ores et déjà propres à transporter cette charge. Ces quatre tonnes représentent deux à quatre points de parts de marché supplémentaires.

Le rapport que j'avais remis en 2004 faisait le tour de ces questions. Quelques mesures, certaines franco-françaises et d'autres à vocation européenne : c'est le défi que nous lancent les transporteurs, sans bloquer les routes, sans perturber nos concitoyens. Si nous ne voulons pas la chute du pavillon français, vous devez, monsieur le ministre, entendre ces 42 000 entreprises, qui emploient 330 000 salariés.

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. J'ai conscience comme vous, monsieur le député, des difficultés que traverse aujourd'hui le secteur du transport routier. C'est la raison pour laquelle mes collaborateurs ont reçu en urgence l'ensemble des fédérations, et je recevrai chacune d'elles la semaine prochaine, pour que nous fassions le point sur l'ensemble de ces sujets. Vous avez vous-même, dans le cadre de la mission qui vous a été confiée, fait des propositions, dont nous aurons l'occasion de débattre ensemble.

Mais je souhaite d'ores et déjà vous apporter des éléments de réponse au sujet des trois points que vous avez évoqués.

Vous savez que le Conseil d'État a récemment suspendu l'application d'un décret concernant le cabotage. Pour débloquer la situation, il me paraît indispensable que la réglementation de cette pratique soit inscrite dans le projet de loi regroupant l'ensemble des règles relatives à ce secteur, qui vous sera soumis très prochainement. Cela nous permettra de garantir la pérennité de cette réglementation.

S'agissant de la location transfrontalière, je puis vous dire que l'arrêté la réglementant est d'ores et déjà signé, et qu'il sera publié au Journal officiel dans les tout prochains jours.

En ce qui concerne la fiscalité du gazole professionnel, nous avons bien l'intention, avec le ministre de l'économie et des finances, de reprendre les discussions avec la Commission européenne et l'ensemble des membres du Conseil en vue d'une harmonisation des taux pratiqués par les États membres afin d'éviter la concurrence déloyale résultant des différences de taxation.

Sachez enfin, monsieur le député, que les discussions que je vais ouvrir très prochainement avec la profession nous permettront de régler les problèmes les uns après les autres, dans l'esprit de responsabilité que vous avez évoqué. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

INTERPELLATION D'ANCIENS SALARIÉS
DES ATELIERS KNAC À CHAUNY

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Jacques Desallangre. Le groupe des élus communistes et républicains partage totalement la joie de tous après la libération de Florence Aubenas et de son guide.

Monsieur le garde des sceaux, lundi 30 mai, à six heures du matin, une véritable rafle policière a eu lieu à Chauny. Six membres de l'ancien atelier de confection Knac, liquidé judiciairement il y a deux ans, ont été interpellés à leur domicile et emmenés manu militari par des gendarmes mobilisés dans différentes brigades de la région par un juge d'instruction de Laon. (« Incroyable ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

Sous les yeux de leurs enfants, ces hommes et ces femmes ont été traités comme des malfaiteurs. (« Scandaleux ! » sur les mêmes bancs.)

Deux femmes ont été menottées. Le mari d'une employée, étranger à l'affaire, a été embarqué. L'épouse d'un délégué syndical CGT, qui était dans le coma à l'hôpital de Reims, a été interpellée devant ces deux jeunes enfants, et placée en garde à vue elle aussi. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

À la brigade de gendarmerie de Chauny, le délégué syndical CGT a été appelé par dérision « camarade » et tutoyé comme un voyou. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Toutes et tous ont subi l'épreuve de la photographie anthropométrique et de la prise d'empreintes digitales. (« Oh ! » sur les mêmes bancs.)

M. Maxime Gremetz. Nous, ça ne nous fait pas rigoler !

M. Jacques Desallangre. Mais le pire a été réservé à deux femmes, âgées de quarante-cinq et cinquante-quatre ans, contraintes de se dénuder entièrement pour une fouille à corps dégradante ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Brunhes. Ça se passe comme ça, au Danemark ?

M. Jacques Desallangre. Après cette humiliation, ces femmes sont sous traitement médical.

Quel était leur crime ? Après six mois d'une occupation pacifique, qui a protégé l'entreprise du vol, du vandalisme et de la vente des machines, ils ont eu le tort de laisser éclater leur colère quand le tribunal de commerce a choisi une solution de reprise qui ne prévoyait que quinze réembauches, contre trente-cinq dans le projet de relance écarté. Ils ont brûlé des pneus dans la cour, et la fumée a sali des locaux dans lesquels ils avaient jeté des confettis. Quel forfait !

Plusieurs députés du groupe UMP. Ce n'est pas rien !

M. Jacques Desallangre. Le repreneur, dont la plainte avait été classée sans suite par le procureur, est revenu à la charge.

M. Christian Bataille. C'est la délinquance zéro !

M. Jacques Desallangre. Monsieur le garde des sceaux, les députés du groupe communiste et républicain vous pose la question : qui a initié cette opération de criminalisation de la lutte syndicale pour la défense de l'emploi, s'inspirant de méthodes dignes d'États autoritaires ?

M. Jean Auclair. La CGT !

M. Lucien Degauchy. Le Politburo !

M. Jacques Desallangre. Qui présentera des excuses à ces hommes et à ces femmes qu'on a humiliés parce qu'ils avaient lutté pour leur emploi ? Qui réparera les atteintes à l'honneur des licenciés de Knac ? (Applaudissements sur les bancs du groupes des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.

Plusieurs députés du groupe communiste et républicain. C'est au garde des sceaux de répondre !

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, vous appelez l'attention du Gouvernement sur les conditions de la garde à vue, le 30 mai 2005, d'anciens salariés de l'entreprise Knac à Chauny.

Cette entreprise, spécialisée dans la confection haut de gamme et qui employait trente-cinq salariés, a fait l'objet d'une liquidation judiciaire au milieu de l'année 2003. Deux sociétés ont alors proposé un plan de reprise à la barre du tribunal de commerce, et le projet retenu a été celui de la société Alshain, qui proposait de reprendre moins de salariés que l'autre. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Bernard Roman. Répondez à la question !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Cette décision, prononcée en octobre 2003, avait alors suscité la colère d'anciens salariés, qui ont brûlé des pneus dans la cour de l'usine en signe de protestation.

Plusieurs députés du groupe communiste et républicain. Vous ne répondez pas à la question !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Le nouveau repreneur...

M. Albert Facon. Fossoyeur !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. ...avait déposé plainte, avec constitution de partie civile. Le juge d'instruction a ouvert une instruction judiciaire et demandé aux gendarmes d'entendre les personnes susceptibles d'avoir participé à cette action.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Où est le garde des sceaux ?

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Des placements en garde à vue sont intervenus le 30 mai 2005, dès six heures du matin.

M. Albert Facon. Répondez à la question !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Compte tenu de la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains),...

M. le président. Calmez-vous !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. ...le Gouvernement ne peut se prononcer sur une instruction en cours.

M. Alain Bocquet. C'est un scandale !

M. Jacques Brunhes. Une honte !

M. le président. Monsieur Bocquet et Monsieur Brunhes, je vous en prie !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. À son issue, il tirera les leçons de ce qui s'est passé. Mais je veux vous dire que je comprends l'émoi des anciens salariés de Knac, de leurs familles et des élus locaux.

Il faut toutefois dissocier cette procédure judiciaire, engagée en 2003, et les conditions de son exécution le 30 mai 2005, du fonctionnement actuel de l'entreprise qui, fort heureusement, a regagné des parts de marché et a des perspectives. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Albert Facon. Quelle indécence !

M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Mais, en tant que ministre chargé des relations du travail, je confirme qu'une fois achevée l'instruction, nous reviendrons sur ces conditions d'exécution, et je souligne à nouveau que je partage l'émoi dont on m'a fait part. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

ASSASSINAT DE NELLY CRÉMEL

M. le président. La parole est à M. Ghislain Bray, pour le groupe UMP.

M. Ghislain Bray. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, tous nos concitoyens ont été profondément choqués par l'assassinat de Mme Nelly Crémel dans une forêt proche de La Ferté-sous-Jouarre. Permettez-moi, en tant que député de Seine-et-Marne, et plus encore en tant que citoyen, d'assurer la famille de la victime de toute ma sympathie.

Cette jeune mère de famille, connue et estimée dans sa commune de Reuil-en-Brie, a été enlevée et sauvagement assassinée en plein jour, alors qu'elle faisait son footing à proximité de chez elle. Selon les éléments portés à notre connaissance, les deux auteurs de ce crime odieux auraient dissimulé son cadavre après lui avoir dérobé quelques euros. L'un d'eux serait déjà connu de la justice ; il aurait été condamné à perpétuité en 1990 pour des faits quasiment similaires et se trouvait en liberté conditionnelle.

Monsieur le ministre, lorsque vous exerciez les mêmes fonctions, vous avez accordé aux victimes une attention particulière et avez œuvré pour que leurs droits soient mieux reconnus. Dans le même temps, vous avez, sans ambiguïté aucune, souhaité qu'un débat de fond soit engagé sur les moyens de lutter dans notre pays contre la récidive, en particulier lorsqu'il s'agit de dangereux criminels. Quelles initiatives entendez-vous prendre pour éviter que de tels drames ne se reproduisent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, j'ai reçu ce matin M. Crémel et je pense que personne ne peut sourire à l'évocation de ce drame. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Albert Facon. Personne n'a souri !

M. Jérôme Lambert. Mais personne ne devrait l'exploiter non plus !

M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Il a vu sa femme, la mère de sa fillette de douze ans, partir pour son jogging : elle n'est jamais revenue.

Elle n'est jamais revenue parce que deux individus ont voulu la dépouiller. On peut, pour vingt euros, assassiner une femme seule.

Cette affaire est effectivement bouleversante, monsieur le député, et à plus d'un titre.

Elle est bouleversante parce qu'elle laisse une famille interdite depuis que le ciel lui est tombé sur la tête, parce qu'on ne peut pas imaginer des comportements d'une telle nature dans un pays civilisé.

Mais elle est bouleversante pour une autre raison : l'un des deux auteurs présumés, sur lesquels pèsent des charges très lourdes, a d'ores et déjà été condamné à douze reprises pour des agressions avec violences physiques.

M. Richard Mallié. Scandaleux !

M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Pire, il a été condamné à perpétuité pour un homicide en 1990, et relâché en 2003.

Je ne peux imaginer que, sur aucun banc de cette assemblée, cette situation ne pose pas question. Tous, qui que nous ne soyons, à gauche ou à droite, nous sommes fondés à dire que les droits de la défense ne doivent pas bafouer ceux de la victime. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Lorsque M. Crémel me demande comment l'État peut relâcher un monstre, que dois-je répondre ?

Monsieur le député, la multirécidive ne concerne pas seulement les affaires de meurtre. Nos tribunaux correctionnels sont encombrés par des gens qui reviennent devant eux pour les mêmes délits ; ils ne veulent pas comprendre que la société doit se défendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) La multirécidive doit être punie de manière différente, plus sévère, que la récidive.

M. le Premier ministre nous a demandé, au garde des sceaux comme à moi-même, de faire des propositions. Nous les ferons avant le 14 juillet car cette situation ne peut plus durer : elle est inacceptable ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Où est la chancellerie ?

PLAN DE DÉVELOPPEMENT
DES SERVICES À LA PERSONNE

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour le groupe UMP.

Mme Bérengère Poletti. Ma question s'adresse au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Il y a quelques mois, monsieur le ministre, vous avez présenté au conseil des ministres un plan de développement des services à la personne, à la suite d'une mission interministérielle à laquelle ont été associés à la fois votre ministère et ceux de la santé et de l'économie.

La France, en effet, compte seulement 1,3 million de salariés exerçant dans le secteur des services à domicile. Cette activité pèse trop peu dans notre économie. Or les changements de la société, notamment le travail des femmes et la longévité accrue, ainsi que l'exemple des pays voisins laissent à penser que ce secteur est largement sous-développé et pourrait être porteur de nombreux nouveaux emplois.

Voilà pourquoi vous avez élaboré un plan comprenant une vingtaine de mesures, assorti d'un budget de 400 millions d'euros par an sur trois ans, destiné à développer les emplois de services à la personne.

Quelles sont les mesures phares de ce projet ? Combien de créations d'emplois pouvons-nous en attendre et dans quel délai ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Allô ! Allô ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame Poletti, les services à la personne, c'est un secteur économique regroupant quelque 6 000 associations, 600 entreprises, 1 300 000 salariés qui portent les métiers de l'humain, ceux qui font le lien social et peuvent faciliter, en toutes circonstances, l'exercice du travail des femmes et des responsabilités familiales ou aider les personnes les plus fragiles de notre société.

Les représentants de ce secteur sont venus nous voir et nous ont affirmé qu'il pourrait multiplier par deux ou trois ses activités, n'étaient le coût d'entrée sur le marché et le coût du travail - problèmes que nous réglerons au moyen du texte que nous présenterons tout à l'heure. Ce dernier procédera également à une simplification administrative : 120 autorisations diverses simplifiées en une fois ! Il s'agissait aussi d'assurer des droits sociaux à ceux qui travaillent dans ce secteur et un temps d'activité suffisant. Enfin, il fallait un mode de paiement simplifié : c'est l'objet du chèque service universel qui sera mis en place le 1er janvier prochain, mais décidé avant la fin de la présente session parlementaire.

Madame la députée, les professionnels croient possible un doublement voire un triplement de l'activité du secteur. Le Conseil d'analyse économique avait affirmé que 3 millions d'emplois pouvaient être créés. On verra ! En tout cas, nous attendons plus de 500 000 emplois dans les trois ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

EMPLOI ET CROISSANCE

M. le président. La parole est à M. Éric Besson, pour le groupe socialiste.

M. Éric Besson. Je veux d'abord dire à M. Larcher que sa réponse à M. Desallangre nous a profondément choqués (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : s'il a partagé l'émoi, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'a pas trouvé les mots pour le dire et qu'il a eu l'indignation plutôt mesurée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré dans cet hémicycle, la semaine dernière, vouloir livrer la bataille de l'emploi et vous avez eu deux mérites.

Le premier a été de ne pas nier l'échec de votre prédécesseur, même si c'est aussi celui d'un gouvernement auquel vous apparteniez. Cet échec, prévisible du fait de la politique conduite, est lourd : en trois ans, la droite, qui prétendait réhabiliter le travail, aura surtout détruit des dizaines de milliers d'emplois. Permettez-moi une comparaison : le gouvernement Jospin, au bout de trente-six mois, c'était 720 000 chômeurs de moins, alors que depuis que vous êtes aux affaires, au bout de trente-six mois, nous en sommes à 230 000 chômeurs de plus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Et les 35 heures ?

M. Éric Besson. Votre deuxième mérite aura été de mettre fin à une aberration : poursuivre, coûte que coûte, la baisse de l'impôt sur le revenu dans le contexte de croissance molle que nous connaissons était non seulement injuste socialement mais inefficace économiquement, et nous n'avons cessé de le dire depuis trois ans. Vous le reconnaissez enfin, nous nous en réjouissons.

Mais il faut aller plus loin dans la remise en cause de la politique de votre prédécesseur. Et d'abord, dire la vérité sur les chiffres : la croissance française est faible, très faible, bien plus faible que dans la zone euro, bien plus faible qu'en Europe et a fortiori dans le monde.

Plusieurs députés du groupe UMP. C'est votre faute !

M. Lucien Degauchy. C'est la politique de Jospin qui a enrayé la machine !

M. Éric Besson. Tirez-en la conclusion qui s'impose en pratiquant une relance tant par l'investissement que par la consommation et le pouvoir d'achat, et modifiez vite votre budget car les comptes ne sont plus sincères.

Cessez enfin, monsieur le Premier ministre, de penser que seule la précarité va permettre de résoudre tous nos maux. Je veux prendre l'exemple que vous avez choisi vous-même la semaine dernière du contrat dit « nouvelle embauche ». Les jeunes Français sont lassés du recours excessif aux CDD, à l'intérim, aux stages sans avenir. (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Besson, posez votre question, s'il vous plaît.

M. Éric Besson. J'y arrive, monsieur le président.

La semaine dernière, monsieur le Premier ministre, vous avez répondu à ces jeunes par un contrat comportant une période d'essai de deux ans ! Et vous leur avez dit qu'ils ne seraient même plus considérés, pendant cette période, comme des salariés à part entière pour le déclenchement des seuils sociaux. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Posez votre question !

M. Éric Besson. Elle était implicite mais, grâce à vous, monsieur le président, elle va être explicite : monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin rompre avec une stratégie qui a conduit la France dans l'impasse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, revenons au sujet de la croissance. Implicitement, c'est exact : la croissance, c'est l'activité et l'activité, c'est l'emploi. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il est exact que la croissance, au premier trimestre, n'a pas été exactement celle que nous attendions, mais nous en connaissons les causes : un euro beaucoup trop élevé par rapport au dollar - ce n'est plus le cas aujourd'hui puisqu'il est retombé à 1,21 - et le baril de pétrole, que nous attendions à 35 dollars et qui s'est plutôt établi entre 50 et 55.

Cependant, quand vous dites que la croissance en France est la plus basse d'Europe, plus basse que celle des pays de la zone euro, c'est faux. En revanche, dire qu'elle n'est pas assez élevée, c'est exact.

Nous sommes, aujourd'hui, dans une économie « tertiarisée » puisque 75 à 80 % des actifs français travaillent dans le secteur tertiaire et 20 % seulement dans le secteur industriel. Le Premier ministre a déclaré, précisément, l'état d'urgence pour l'emploi car chaque personne qui retrouve un emploi, c'est de l'activité et c'est de la croissance.

Lorsque l'on consacre 4,5 milliards d'euros à remobiliser l'emploi, c'est la croissance que l'on tire. Par ailleurs, lorsque l'on attribue 2 milliards d'euros à l'Agence industrielle pour l'innovation, on encourage les grands projets. Lorsque l'on finance, comme le Premier ministre l'a annoncé, l'Agence pour les infrastructures de transport et l'Agence nationale pour la recherche, c'est autant de moyens pour relancer les grands programmes.

Alors oui, plus il y aura d'actifs au travail, plus le plan de cohésion sociale portera ses fruits et plus la croissance sera au rendez-vous. C'est la raison pour laquelle accompagner l'emploi, ne laisser personne au bord de la route, permettre que les 500 000 emplois vacants trouvent preneurs, c'est autant de croissance que nous préparons pour l'avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

VIOLENCES À PERPIGNAN

M. le président. La parole est à M. François Calvet, pour le groupe UMP.

M. François Calvet. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, la ville de Perpignan vient de connaître de dramatiques événements, d'une intensité exceptionnelle, qui traduisent un contexte sans précédent d'agressivité entre communautés. Deux meurtres sont à déplorer.

Dépassant le cadre géographique où ces drames sont survenus, ce contexte s'est déporté vers le cœur commercial de la ville, victime d'actes de saccage et de pillage, sans compter les détériorations de la voirie, des équipements publics et du mobilier urbain, et la cinquantaine de véhicules incendiés.

Plus d'une centaine de commerçants se trouvent dépossédés de leur outil de travail et complètement démunis devant les événements qui viennent de les frapper.

Dans le souci de répondre rapidement au désarroi qui s'exprime aujourd'hui, je souhaiterais que soit envisagée dès à présent la reconnaissance par l'État de sa responsabilité, comme le prévoit l'article 2216-3 du code général des collectivités territoriales. Et je vous demande, monsieur le ministre d'État, s'il serait possible de mettre en œuvre au plus vite ce dispositif.

Parallèlement, alors que se prépare la saison touristique, dans cette véritable commune d'accueil qu'est Perpignan, il conviendrait d'activer les mécanismes adéquats pour assurer une sécurité optimale de nos concitoyens et, parmi eux, de la population commerçante et de l'ensemble des victimes des actes de vandalisme, population qui a d'ailleurs pu constater, lors de ces troubles d'une extrême gravité, combien la présence forte des autorités de justice, préfectorales et policières était rassurante.

Pouvez-vous, monsieur le ministre d'État, m'indiquer si les mesures urgentes que vous avez prises seront pérennisées et étendues à d'autres villes où le risque existe ? En outre, j'aimerais connaître vos intentions quant à la perspective d'une augmentation sensible et rapide des effectifs du commissariat de police de Perpignan, renforcement que nous sommes très nombreux à appeler de nos vœux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, les événements de Perpignan sont inadmissibles !

Premièrement, les affrontements communautaires sur le territoire de la République doivent être combattus avec la dernière énergie et les comportements de voyou et de sauvage constatés dans les rues de votre ville doivent être sanctionnés. Aucune indulgence : la politique du Gouvernement en la matière, c'est la tolérance zéro ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Zorro ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Deuxièmement, nous avons décidé d'affecter à Perpignan trente fonctionnaires de police supplémentaires.

Troisièmement, s'agissant de l'indemnisation, puisque la responsabilité de l'État est engagée, les commerçants pourront se voir rembourser - j'ai demandé au préfet d'y veiller - les franchises que les compagnies d'assurance laisseraient à leur charge ainsi que la valeur vénale des biens détruits par les émeutiers.

Quatrièmement, j'ai rencontré les représentants des communautés pour les prévenir qu'en accord avec la justice,...

M. Maxime Gremetz. Elle existe encore ?

M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. ...il serait procédé à des perquisitions systématiques et qu'ils devaient rendre les armes.

Enfin, j'ai refusé d'aller dans les quartiers car je n'ai pas l'intention de négocier pour rétablir l'ordre. On rétablit l'ordre à Perpignan, et ensuite on dialogue ! Une fois l'ordre rétabli, je retournerai sur place, probablement en septembre, pour renouer le dialogue. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La République ne dialogue pas avec les émeutiers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

LIAISONS TRANSALPINES

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour le groupe UMP.

M. Michel Bouvard. Samedi 4 juin, le professionnalisme et le courage des services de sécurité du tunnel du Fréjus, des corps de sapeurs-pompiers de Maurienne et de la vallée de Suze, le travail en commun entre la France et l'Italie voulu dès l'origine par le président fondateur, Pierre Dumas, et les 55 millions d'investissements réalisés dans le tunnel ont évité un nouveau drame dans les Alpes et limité à deux le nombre des victimes.

Monsieur le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, nous avons été sensibles à votre venue sur place, dès le dimanche 5, mais l'indisponibilité du principal tunnel entre la France et l'Italie démontre à nouveau l'extrême fragilité des échanges transalpins, qui reposent sur trois ouvrages seulement : outre celui du Fréjus, un tunnel ferroviaire au Mont-Cenis, conçu en 1850, et le tunnel du Mont-Blanc ouvert en 1965. Cette fragilité tient aux accidents - qui peuvent se reproduire, qui se reproduiront - mais aussi à la géologie des voies d'accès.

Il n'est plus temps d'attendre, comme le disait dès 1998 le rapport Brossier. Nous devons maintenant prendre des décisions et travailler à un nouvel ouvrage, la liaison ferroviaire Lyon-Turin, pour laquelle 466 millions d'euros de travaux ont d'ores et déjà été engagés pour les galeries de reconnaissance et les descenderies. Mais il nous faut maintenant confirmer le calendrier du traité de Turin. Cette question est celle de tous les députés du massif alpin : Martial Saddier au Mont-Blanc, Joël Giraud à Montgenèvre , Henriette Martinez, Daniel Spagnou au col de l'Arche. Elle est aussi celle de députés des Alpes-Maritimes, y compris Christian Estrosi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Monsieur le ministre, c'est l'ensemble de notre population qui subit l'excès de poids lourds. Aujourd'hui, le Gouvernement peut-il s'engager à prendre les déclarations d'utilité publique pour 2007, rendez-vous du traité de Turin ? Peut-il s'engager à notifier dès la fin du mois, comme l'attend Jacques Barrot, les réservations de crédits pour le programme des nouvelles liaisons ferroviaires européennes pour la période 2007-2013 ? Entend-il négocier un avenant au traité de Turin pour approuver le mémorandum franco-italien répartissant les crédits entre les deux pays ?

Enfin - et ce n'est pas une question mineure -, comment le Gouvernement compte-t-il financer la part publique des investissements, compte tenu de la décision, annoncée la semaine dernière, de réaliser les actifs des sociétés d'autoroutes dont les dividendes devaient assurer le financement de l'Agence française des infrastructures de transports ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. Henri Emmanuelli. M. Bouvard a raison !

M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, vous avez à juste titre rappelé les conditions dans lesquelles les sapeurs-pompiers français et italiens ont évité le pire lors de l'incendie du tunnel du Fréjus, grâce à leur courage, grâce aussi aux travaux réalisés depuis le drame du Mont-Blanc. Malgré les deux victimes que nous déplorons, il faut reconnaître les efforts d'organisation qui ont été déployés à hauteur de 55 millions d'euros.

La situation créée par la rupture de la communication dans le principal tunnel de franchissement des Alpes impose de rechercher des solutions à court et à moyen terme.

À court terme, il importe de savoir quelle sera la durée de la fermeture du tunnel. Des analyses ont été faites cette semaine, qui vont nous permettre dans les tout prochains jours de connaître l'importance des travaux de réparation. Selon que ce sera une affaire de quelques semaines ou de quelques mois, les répercussions sur la vie quotidienne seront très différentes, en particulier dans les départements alpins.

Je confirme en outre à la représentation nationale ce que je vous ai dit, monsieur le député, ainsi qu'à M. Saddier, à savoir que je maintiens strictement les règles de sécurité qui sont aujourd'hui imposées dans le tunnel du Mont-Blanc : interdiction des matières dangereuses, limitations de vitesse et distances minimales entre les véhicules. Vous pouvez donc rassurer les populations de la vallée de Chamonix, légitimement inquiètes des éventuelles conséquences sur le trafic dans le tunnel.

Enfin, il s'agit de préparer des alternatives en termes de circulation. Je me suis rendu de nouveau sur place au cours de la semaine passée pour étudier la possibilité d'augmenter le trafic sur l'autoroute ferroviaire de la Maurienne et faire en sorte que davantage de poids lourds soient chargés sur les trains. J'ai obtenu, en accord avec mon collègue italien, que l'on augmente d'une fréquence par jour la circulation de ce très long train et que deux liaisons soient assurées le samedi. Mais cela ne suffira pas à réguler l'ensemble du trafic de manière satisfaisante. Il faut donc rouvrir très vite le tunnel du Fréjus.

Pour ce qui concerne le moyen terme, vous avez évoqué à juste titre le projet Lyon-Turin. Je rappelle les décisions qui ont été annoncées depuis plusieurs années par le Gouvernement : le cadre de référence, c'est le mémorandum franco-italien de 2004, avec l'engagement rapide de 535 millions d'euros pour les études et préparatifs. L'enquête publique sera lancée au milieu de l'année 2006. J'ai rencontré mon homologue italien hier soir à Paris et nous sommes convenus d'adresser à Jacques Barrot une lettre commune avant la fin du mois pour répondre à la question - que vous avez reprise - posée par la Commission. Enfin, en liaison avec le ministre de l'économie et des finances, les financements des grands travaux d'infrastructure interviendront dans le cadre des décisions annoncées par le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

RETOUR DE M. SARKOZY
AU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR

M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Arnaud Montebourg. Ma question s'adresse à M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Et président de l'UMP !

M. Arnaud Montebourg. Monsieur le ministre d'État, pour justifier votre retour au ministère de l'intérieur, que vous avez quitté il y a treize mois, vous avez déclaré le 2 juin dernier, dans un journal qui compte plusieurs millions de lecteurs : « Depuis que je ne suis plus ministre, les attaques se sont succédé contre moi. Je serai mieux protégé par le ministère de l'intérieur : c'est plus efficace que les 150 permanents de l'UMP. » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez ajouté le même jour que votre retour au ministère de l'intérieur vous permettrait d'éviter « les coups tordus montés contre vous » ! Pourriez-vous indiquer à la représentation nationale qui, parmi vos propres collègues, membres de ce gouvernement, parmi vos amis, entendrait vous faire tant de mal ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Richard Mallié. Où vous croyez-vous ?

M. Arnaud Montebourg. À moins que ce ne soit le révélateur d'une psychologie fragile obsédée par le complot (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) ...

M. Jean Auclair. C'est vous qui êtes un psychopathe !

M. Arnaud Montebourg. ...et, pour tout dire, préoccupante chez un homme qui entend faire des institutions l'instrument de son aventure personnelle !

M. Jean Auclair. Allez voir un psychiatre !

M. le président. Monsieur Auclair !

M. Arnaud Montebourg. Êtes-vous devenu ministre pour affronter et traiter les problèmes collectifs des Français ou pour régler vos menus problèmes personnels ? (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En clair, gouvernez-vous pour la France ou pour vous seul ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Nous sommes nombreux à penser, sur divers bancs de cette assemblée, y compris au sein du parti socialiste, que quand il y a des leçons de comportement politique à prendre, mieux vaut choisir une autre adresse que la vôtre, monsieur Montebourg ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Je suis président de l'UMP et ministre de l'intérieur.

M. Albert Facon. Et présidentiable !

M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Si vous connaissiez l'histoire de notre pays, vous sauriez que les partis politiques concourent à l'expression du suffrage universel et que lorsque les responsables politiques ne sont pas au gouvernement, c'est toujours un grave problème pour la démocratie parlementaire. Je n'ai donc aucune leçon à recevoir ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Enfin, écoutez bien ceci : il y a une grande différence entre l'UMP et le parti socialiste. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Au parti socialiste, quand on n'est pas d'accord avec M. Fabius, on l'exclut, on lui jette l'anathème, on l'insulte (Protestations sur les mêmes bancs) : on n'est pas capable de diriger ensemble. À l'UMP, quand la situation exige le rassemblement, nous le faisons, et c'est ce que nous avons fait avec Dominique de Villepin. C'est notre honneur, notre fierté, et c'est la force de la majorité parlementaire. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

OUVERTURE DU CAPITAL DE GAZ DE FRANCE

M. le président. La parole est à M. Hervé Novelli, pour le groupe UMP.

M. Hervé Novelli. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Il y a quelques jours, dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a indiqué que « nos grandes entreprises de service public ont toute leur place dans [la] relance de l'investissement. Elles bénéficient d'un savoir-faire inégalé : EDF, GDF sont l'honneur de notre pays. Je veux leur donner les moyens de poursuivre leur développement dans les meilleures conditions et au bénéfice de l'emploi. Cela suppose pour Gaz de France d'ouvrir le capital de l'entreprise, afin qu'elle puisse lever des fonds au plus vite. »

Le jour même, monsieur le ministre, vous avez annoncé le lancement de l'ouverture du capital de Gaz de France, qui démarrera le 23 juin pour une première cotation en bourse au début du mois de juillet. Il n'était que temps de le faire, car Gaz de France se prépare à cette échéance essentielle pour financer son développement international depuis plus de quatre ans. Or, à chaque fois, une bonne raison était venue différer cette opération indispensable. Il est essentiel que Gaz de France poursuive son développement en Europe pour compenser les éventuelles pertes de clientèle sur le marché national, liées à l'ouverture à la concurrence qui sera totale en 2007. En outre, GDF devra disposer de réserves de gaz plus importantes afin de diminuer ses coûts d'approvisionnement. Enfin, Gaz de France doit structurer une offre « multi-énergie », notamment dans les domaines de l'électricité et du gaz naturel liquéfié.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous fournir quelques détails concernant l'ouverture du capital de Gaz de France et son augmentation ? Pouvez-vous nous donner des précisions sur la part de l'actionnariat réservé aux salariés de l'entreprise ? Enfin, pouvez-vous fixer devant la représentation nationale le montant des cessions que l'État entend faire pour diminuer enfin son endettement et favoriser les investissements porteurs d'avenir ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre a en effet annoncé qu'un certain nombre d'entreprises devaient évoluer rapidement, conformément à la loi qui, s'agissant d'EDF et GDF, a été votée au cours de l'été 2004. La volonté du Premier ministre est que cette évolution se fasse sans attendre. Et, puisque tous les facteurs étaient effectivement réunis, nous avons décidé, avec le Premier ministre, de lancer le soir même l'ouverture du capital de Gaz de France.

Environ 20 % de l'actif sera proposé au marché et 40 % de ce montant sera réservé à l'entreprise par le biais d'une augmentation de capital, le reste étant proposé aux particuliers de façon que chaque Français puisse devenir actionnaire de cette grande entreprise.

Vous avez indiqué également que, conformément au souhait du Premier ministre, les salariés seraient associés : 15 % de ces actions seront donc proposées à titre préférentiel aux salariés de l'entreprise.

Enfin, nous avons souhaité intervenir avant l'été afin de libérer la place pour EDF, autre grande entreprise française qui a besoin d'augmenter ses fonds propres. Si les conditions du marché le permettent, nous réserverons à l'automne le même sort à EDF, soit une augmentation de capital significative pour permettre à cette entreprise de se développer.

Au total, entre 15 et 20 milliards d'euros seront sollicités sur les marchés pour redoter nos entreprises et développer nos agences. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

POLITIQUE DE L'EMPLOI

M. le président. La parole est à M. Maurice Giro, pour le groupe UMP.

M. Maurice Giro. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Mercredi dernier, lors de son discours de politique générale, M. le Premier ministre a affirmé sa volonté de dynamiser l'économie de notre pays par une politique volontariste, centrée notamment sur un plan d'urgence de 4,5 milliards d'euros pour gagner la bataille de l'emploi et répondre aux attentes de nos compatriotes.

Face au chômage, il faut aller chercher les emplois là où ils se trouvent et s'en donner les moyens. En ce sens, M. le Premier ministre a annoncé une mobilisation accrue de tous les services publics de l'emploi pour favoriser le reclassement des chômeurs et notamment des jeunes. Il a par ailleurs annoncé sa détermination de donner aux entreprises les moyens d'embaucher. À cet égard, il nous a fait part de deux mesures à destination des TPE, qui me semblent particulièrement adaptées à ce type d'entreprise : la création du chèque emploi pour simplifier l'embauche et la mise en place du contrat « nouvelle embauche ».

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire davantage sur ces deux mesures en termes d'objectifs, de modalités et de calendrier ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, permettez-moi tout d'abord de vous remercier - ainsi que M. le président de la commission des affaires sociales - pour la qualité du travail que vous avez effectué en tant que rapporteur du texte relatif au développement des services à la personne que nous allons examiner tout à l'heure. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Les artisans travaillant seuls se heurtaient jusqu'à présent à des difficultés lorsqu'ils souhaitaient embaucher un premier compagnon. C'est difficile, c'est compliqué, c'est risqué ! C'est pourquoi le Premier ministre a voulu que, pour eux ou pour ceux qui ont déjà un ou deux compagnons, l'embauche puisse se faire très simplement et sans sujets d'inquiétude. Dans le même temps, nous allons assortir ce nouveau parcours de meilleures garanties de reclassement et d'un plus grand soutien de l'État. Comme l'a souhaité le Premier ministre, ces questions seront évoquées avec les partenaires sociaux et feront, dans quelques jours, l'objet d'une loi d'habilitation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Éric Raoult.)

PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

    2

LOIS DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi organique

M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, à qui je souhaite la bienvenue pour cette première intervention devant l'Assemblée.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, monsieur le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, mesdames et messieurs les députés, par ce vote solennel, vous achèverez aujourd'hui la mise en place des trois réformes de la sécurité sociale sur lesquelles le Parlement et le Gouvernement travaillent ensemble depuis 2002. La réforme des retraites, en 2003, et celle de l'assurance maladie, votée en 2004, ont modifié en profondeur les règles de gestion de ces deux branches de la sécurité sociale ; la présente loi organique parachève notre démarche. Au moment où nous célébrons le soixantième anniversaire de la sécurité sociale, elle renforcera l'information dont dispose le Parlement pour fixer les objectifs des politiques de sécurité sociale.

Je tiens à vous remercier pour la qualité de vos travaux. Le Parlement a été à l'origine de notre réflexion sur le contenu et la portée des lois de financement de la sécurité sociale ; le projet du Gouvernement a largement bénéficié de son travail et de ses analyses. En outre, tout au long du débat, vous avez beaucoup enrichi ce texte : sur près de 320 amendements, plus de cent ont été adoptés. Je salue tout particulièrement le travail remarquable accompli par le rapporteur de la commission saisie au fond, Jean-Luc Warsmann, ainsi que par les rapporteurs pour avis, Jean Bardet pour la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, et Yves Bur pour la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

L'enjeu du texte est simple : 350 milliards d'euros, soit plus d'un cinquième de la richesse nationale, transitent chaque année par les comptes de la sécurité sociale. Il est donc essentiel pour le Parlement d'avoir une vision claire de ces sommes, afin de fixer les priorités de façon qu'elles soient employées le plus efficacement possible. Dix ans après la réforme de 1996, il fallait, pour cela, renforcer la portée des lois de financement de la sécurité sociale. Vos délibérations, comme les amendements que vous avez proposés, ont contribué à la réalisation de cet objectif.

Grâce aux modifications que vous avez apportées au projet, les lois de financement, désormais structurées en quatre parties, offriront une vision d'ensemble de l'exercice clos, de l'année en cours et des recettes et des dépenses de l'année à venir. Elles permettront en outre un contrôle plus étroit de la dette et des excédents et favoriseront le contrôle du Parlement sur l'amortissement de la dette et sur les sommes mises en réserve. De même, un vote annuel sera l'occasion d'étudier en détail les composantes de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Vos amendements permettront aussi d'inclure les organismes concourant au financement des régimes de sécurité sociale dans le cadrage pluriannuel et d'approuver chaque année le montant de compensation présenté en annexe. Enfin, aspect qui relève de l'appréciation souveraine de l'Assemblée, le texte renforce les pouvoirs de vos commissions.

Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, ce texte important sort grandement amélioré de vos travaux. Le Gouvernement souhaite d'ailleurs que la deuxième lecture intervienne très rapidement, ...

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Très bien !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. ...afin que les principes définis dans cette loi organique puissent s'appliquer dès le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Excellente intention !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Parlement aura ainsi les moyens de porter un regard plus attentif sur l'évolution de la sécurité sociale, pour assurer sa pérennité au service de notre pacte républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc au terme de la discussion du projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale. Après avoir remercié très sincèrement mes deux collègues rapporteurs pour avis, Yves Bur et Jean Bardet, avec lesquels mes relations furent marquées par la confiance et la cohésion, je voudrais rappeler rapidement les principaux points sur lesquels s'est concentré le travail de l'Assemblée.

Tout d'abord, nous vous proposons de redéfinir la structure des lois de financement de la sécurité sociale, désormais construites en quatre parties. La première vaudra loi de règlement de l'année dont les comptes sont clos. M. le ministre ayant indiqué son souhait de voir la loi organique applicable dès le vote de la loi de financement pour 2006, nous commencerons donc l'examen de celle-ci avec des dispositions valant loi de règlement pour l'année 2004. Nous avons en outre voté un amendement imposant au Gouvernement de préciser quel sera le sort réservé au solde des comptes du dernier exercice clos : soit l'affectation d'un éventuel excédent, soit, évidemment, le financement d'un éventuel déficit, sur lequel le Parlement sera amené à se prononcer.

La deuxième partie contiendra des dispositions valant loi de financement rectificative pour l'année en cours, de manière à vérifier que les objectifs de dépenses que nous avons votés sont bien réalisés, et s'ils ne le sont pas, à les adapter à la réalité constatée.

Enfin, la troisième partie vaudra prévision de recettes et solde de l'exercice futur, et la quatrième, prévision de dépenses. Nous respectons en cela l'architecture des lois de finances de l'État.

Un autre élément très important est le champ des lois de financement, que nous avons tenu à étendre, en y incluant en particulier la situation de la Caisse d'amortissement de la dette sociale - la CADES - et du Fonds de réserve pour les retraites. Nous avons également généralisé le principe de sincérité en matière de construction des lois de financement de la sécurité sociale.

Troisième point : nous avons notablement renforcé les pouvoirs de contrôle de l'Assemblée. Le Gouvernement a ainsi accepté un amendement imposant que la commission des affaires sociales soit informée de toute disposition de nature réglementaire ou conventionnelle susceptible d'avoir un impact sur l'équilibre de la loi de financement de la sécurité sociale.

Dernier point enfin, et non le moindre : nous avons adopté un amendement posant le principe selon lequel tout transfert de dette à la CADES devra désormais être obligatoirement accompagné des recettes correspondantes, de manière à ne pas aggraver son endettement. Je rappelle en effet que la CADES exigera de se voir affecter le produit de la CRDS jusqu'en 2021 ou 2022.

M. Gérard Bapt. Vous êtes modeste ! Êtes-vous sûr que vous ne vous trompez pas de siècle ?

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Il aurait donc été peu responsable de ne pas mettre en place un garde-fou. Certes, l'équilibre de la sécurité sociale représente un objectif légitime à l'échelle d'un cycle économique, mais nous ne pouvons accepter pour cela des transferts de dettes intergénérationnels.

Tels sont, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les principaux amendements qui ont été retenus. La commission saisie au fond vous appelle évidemment à adopter le projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marie Le Guen. Bienvenue, monsieur le ministre !

Nous voici convoqués, après plusieurs semaines d'interruption, pour adopter un texte somme toute assez mal fichu. Sa discussion, il est vrai, a eu lieu dans la précipitation, voire la confusion, avec un ministre absent, déjà étranger aux affaires de son ministère. (Sourires.)

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. Jean-Marie Le Guen. Cette loi organique, nous disait-on, devait représenter pour la sécurité sociale ce qu'avait été, en son temps, la LOLF pour le budget de l'État. Or il s'agit plutôt d'une pâle copie - d'une copie très délavée, même. Ce texte souffre, en particulier, d'être d'initiative gouvernementale. Certes, cela ne constitue pas un défaut en soi, mais on ne saurait comparer son élaboration à l'important et riche travail parlementaire réalisé autour de la LOLF, à un moment où la majorité et l'opposition étaient unanimes à réclamer un meilleur contrôle et une plus grande transparence des finances de l'État. Empêtré dans ses contradictions, le Gouvernement a présenté un projet bien peu fonctionnel, ce qui traduit un déficit de gouvernance dont on ne s'étonnera pas.

L'adoption de ce projet de loi organique ne nous permettra pas de maîtriser les dépenses de la sécurité sociale - ou en tout cas pas plus qu'avant, c'est-à-dire bien peu. Nous n'assisterons pas à la construction d'un ONDAM véritablement médicalisé : en dépit des multiples déclarations, c'est un domaine dans lequel nous n'avons quasiment pas progressé. Quant à la transparence des comptes, elle reste insuffisante, de même que restent défaillants, en dépit des velléités manifestées au cours du débat, les pouvoirs de contrôle détenus par le Parlement.

La question des comptes de l'assurance maladie représente décidément, pour ce gouvernement, un problème de taille. Quant au remboursement des exonérations, c'est un sujet dont il préfère ne pas parler : l'État et la sécurité sociale se renvoient mutuellement la responsabilité de ce véritable mistigri budgétaire. En dépit des déclarations d'intention,...

M. Gérard Bapt. Et des promesses répétées !

M. Jean-Marie Le Guen. ...le premier persiste à ne pas s'engager à ce remboursement, situation dont nos finances sociales seront une fois de plus les victimes.

M. Jacques Brunhes. Le ministre n'écoute même pas !

M. le président. Monsieur Brunhes... 

M. Maxime Gremetz. Le ministre bavarde !

M. le président. Ne vous y mettez pas aussi, monsieur Gremetz ! Seul M. Le Guen a la parole ; je rappelle qu'il ne dispose que de cinq minutes !

M. Jean-Marie Le Guen. Heureusement, selon les nouvelles règles, les arrêts de jeu sont décomptés !

Ce texte relève donc du bricolage, alors que la situation financière est en plein dérapage depuis 2002. Malgré vos annonces répétitives - chacun le constate, la presse en premier -, la réforme de l'assurance maladie s'effiloche : les décrets sont en retard, les parcours de soins ne sont pas mis en place, les contrats responsables sont absents. Ce n'est pas surprenant, alors que ce gouvernement n'a plus l'impulsion politique de ses débuts - pour employer un euphémisme on ne peut polémique ! - et que nos finances sociales sont aujourd'hui, et le seront plus encore demain, exsangues.

Au lieu d'un texte stimulant, certes pour l'opposition, mais plus encore pour la majorité, permettant une meilleure maîtrise des comptes sociaux, on nous propose, en fait un document opaque et une absence véritable de pilotage de la part du Gouvernement. Nous allons dans le mur et les clignotants qui s'allumeront ici ou là ne suffiront pas à éviter la catastrophe des finances sociales que vous avez organisée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Pour le groupe Union pour la démocratie française, la parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui, 14 juin, nous en arrivons enfin au vote alors que les débats se sont terminés le 9 mai.

Jusqu'en 1995, le Parlement ne pouvait se prononcer sur les dépenses sociales du pays, pourtant supérieures au budget de l'État, alors que leur impact social et économique est majeur puisqu'elles concernent la politique familiale, la santé et les retraites, et que les cotisations pèsent lourdement sur la vie économique.

La réforme de 1995 et la loi organique de 1996 ont constitué un changement important, mais ont vite montré leurs limites en raison du contexte et de la pratique. Ainsi, jamais n'a été clairement défini le rôle des partenaires sociaux et de l'État, ni celui du Gouvernement, ni la place et la capacité d'initiative du Parlement. Il est vrai que le Parlement se bride lui-même. Certes, l'article 40, qui fixe le champ institutionnel de la loi et du règlement, encadre fortement l'initiative parlementaire, mais la pratique majoritaire joue un rôle majeur : les majorités successives soutiennent les gouvernements quoi qu'elles pensent. Cette autocastration est fort regrettable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Que c'est bien dit !

M. Jean-Luc Préel. Il est donc nécessaire de modifier la loi organique.

Ce texte constitue un progrès. En effet, il prévoit que nous nous prononcerons sur tous les régimes obligatoires de base et non plus sur les seuls régimes supérieurs à 20 000 adhérents, sur le solde des régimes, sur les sous-objectifs. Il permet d'intégrer les fonds sociaux, il donne une dimension pluriannuelle, il réalise ou prévoit la certification des comptes par la Cour des comptes.

Lors de la discussion, le texte a été amélioré avec l'intégration de la CADES, du Fonds de réserve pour les retraites et de la Caisse autonomie ; par la pratique du vote en quatre parties : règlement de l'année passée, rectification de l'année en cours, recettes et dépenses de l'année à venir. Un « amendement remords » a été voté sur le financement des futurs déficits transférés à la CADES, pour ne pas pénaliser nos enfants et petits-enfants, comme ce fut hélas le cas lors de la réforme de 2004.

Mais cette loi organique demeure très imparfaite. L'UDF a déposé des amendements qui ont hélas été tous rejetés. Il nous paraissait nécessaire de profiter de ce texte pour relancer le dialogue social, considérer les représentants des salariés et des entreprises comme de vrais partenaires et, par conséquent, leur permettre de prendre leurs responsabilités dans leur domaine de compétence, celui du travail et du financement de prestations par des cotisations salariales et patronales. C'est pourquoi l'UDF propose que les partenaires sociaux disposent d'une réelle autonomie pour gérer le régime de retraite de base, comme ils le font pour les retraites complémentaires et le chômage, et qu'ils puissent librement décider des prestations et des cotisations en évoluant vers un régime par points.

De même, l'UDF demande l'autonomie pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui devrait être gérée paritairement. Ne pas profiter de cette loi organique pour progresser dans le sens d'une réelle responsabilisation des partenaires sociaux est regrettable.

Concernant la branche maladie, nous avions deux problèmes majeurs à résoudre : la non-médicalisation de l'ONDAM et son respect ; la non-fongibilité des enveloppes entre la ville et l'hôpital, le sanitaire et le médico-social.

Prévoir, comme le propose le projet de loi, le vote de sous-objectifs présente le risque majeur d'aggraver la non-fongibilité en figeant les enveloppes, ce que tout le monde dénonce aujourd'hui.

M. Maxime Gremetz. Très juste !

M. Jean-Luc Préel. Pourquoi, monsieur le ministre, cela n'a-t-il pas été compris ?

Pour nous, respecter l'ONDAM nécessite qu'il soit défini sur des bases médicales et que tous les acteurs soient responsabilisés en les associant en amont aux décisions et en aval à la gestion par une régionalisation de la santé avec des conseils régionaux de santé. C'est pourquoi nous avons proposé le vote, au printemps, d'une loi d'orientation de santé définissant les besoins et les priorités de santé à financer à l'automne.

Enfin, nous avons souhaité un dispositif proche de la LOLF prévoyant, à partir des missions, de définir des programmes et des indicateurs de performance concernant, par exemple, le cancer du sein et l'hypertension artérielle. Vous ne l'avez pas souhaité, nous le déplorons.

Pour conclure, il était indispensable de modifier la loi organique. Le texte contient quelques progrès fort timides. Il ne résout pas des défauts pourtant clairement identifiés. Nous devrons donc nous y atteler à nouveau prochainement. Les navettes, le nouveau gouvernement et le nouveau ministre permettront sans doute de l'améliorer. C'est pourquoi, malgré ses insuffisances et ses imperfections, l'UDF votera ce projet de loi organique. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Avant de donner la parole à l'orateur suivant, je fais, d'ores et déjà, annoncer le scrutin dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Pour le groupe des député-e-s communistes et républicains, la parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Après un débat chaotique sur ce texte, vous avez décidé, monsieur le ministre, de maintenir le vote comme si rien ne s'était passé le 29 mai dernier. Pourtant, à travers le rejet du traité constitutionnel européen, s'est exprimé celui des politiques libérales que vous avez conduites pendant trois ans et dont ce projet de loi est la parfaite illustration.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Vous allez être servie !

Mme Janine Jambu. Les citoyens, dans leur majorité, ont exigé une rupture indispensable avec des choix désastreux pour notre pays, son économie, sa cohésion sociale, des choix producteurs d'injustices et d'inégalités accrues. Vous ne pouvez donc pas ignorer avec indécence la formidable mobilisation populaire pour réclamer le changement, appeler à plus de justice sociale et de solidarité, et condamner le démantèlement du modèle français de sécurité sociale au profit de l'individualisme en matière de santé et de protection sociale.

Avec ce texte, c'est la continuité dans la régression sociale, totalement à contre-courant des aspirations de notre peuple. Pourtant, les neuf ans qui se sont écoulés depuis les ordonnances Juppé nous donnaient le recul nécessaire pour constater que les lois de financement de la sécurité sociale, compte tenu de l'esprit dans lequel elles avaient été mises en places, étaient inefficaces.

Le dépassement systématique et croissant de l'ONDAM depuis 1998 a mis en évidence une défaillance des instruments et procédures de régulation, ainsi que des actions structurelles sur les comportements des professionnels et des patients, et sur l'organisation des soins. Mais vous n'en avez tiré aucun enseignement, préférant simplement toiletter ce qui existait déjà. En effet, après quelques années de répit dues à la relance de l'activité économique entre 1997 et 2001, la protection sociale se trouve de nouveau dans une situation financière préoccupante puisque le déficit s'est généralisé. Depuis 2002, celui du régime général est passé de 3,4 milliards d'euros à 14 milliards et celui de la branche maladie de 6,1 à 13,2 milliards. En d'autres termes, depuis que s'est installée la nouvelle majorité, le déficit du régime général a quadruplé et celui de la branche maladie doublé.

L'échec cuisant des lois de financement de la sécurité sociale nous donnait l'expérience suffisante pour opérer une véritable rupture. Il n'en a rien été ; c'est donc la continuité sans changement. Ainsi, vous continuez à avoir une vision comptable, donc restrictive, des dépenses de santé, qui organise des déremboursements, contraint les professionnels, sanctionne les assurés sociaux, asphyxie budgétairement les établissements sanitaires et sociaux, et hypothèque tout espoir de revalorisation du niveau de protection. Le décrochage va donc continuer, les pensions resteront plafonnées, les prises en charge réduites et les nouvelles maladies professionnelles toujours pas reconnues faute de moyens.

M. le président. Mes chers collègues, je vous demande de ne pas parler entre vous,...

M. Maxime Gremetz. Le ministre donne le mauvais exemple !

M. le président. ...d'écouter Mme Jambu avec le respect qui lui est dû et de la laisser terminer son intervention.

Mme Janine Jambu. Le déficit n'est pas seulement comptable, il est aussi démocratique avec l'absence de contre-pouvoir des représentants des assurés sociaux sur les choix qui sont faits, tandis que les pouvoirs sont concentrés entre les mains d'un seul, le directeur de l'UNCAM, véritable roitelet au royaume de l'assurance maladie.

Vous continuez ainsi d'éviter le débat fondamental : celui du financement. Vous refusez encore et toujours de vous pencher sur le véritable problème de notre système. Plutôt que de chercher à réduire le périmètre d'intervention de la sécurité sociale, de circonscrire les dépenses, pourtant utiles, de rogner les moyens de fonctionnement des structures, il faut oser réfléchir à un nouveau mode de financement qui permette d'apporter des ressources plus importantes et pérennes.

M. le président. Veuillez conclure, madame Jambu.

Mme Janine Jambu. Le brouhaha m'a fait perdre du temps.

M. le président. Oui, mais vous avez dépassé vos cinq minutes.

Mme Janine Jambu. Naturellement, la réforme du financement doit s'accompagner d'une autre démarche, celle qui consiste d'abord à déterminer les besoins, ensuite à mobiliser les moyens suffisants, et non l'inverse.

Mais vous n'avez pas voulu entendre parler de ces changements nécessaires et vous avez rejeté tous nos amendements. C'est désolant car, dès maintenant et plus encore demain, en raison de l'inertie du Gouvernement face aux vrais problèmes et de son incapacité à faire d'autres choix que ceux qui privilégient les intérêts privés, notre système est menacé. La logique assurancielle va prendre le pas sur la logique solidaire qui présidait à la création de notre sécurité sociale, il y a maintenant soixante ans.

M. Francis Delattre. Ah !

Mme Janine Jambu. C'est un bien triste anniversaire qui s'annonce avec ce projet de loi organique. Pour ces raisons, nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Chers collègues de la majorité, je vous indique que M. Jean-Pierre Door va intervenir au titre de l'UMP. Je vous demande donc d'être le plus silencieux possible !

Vous avez la parole, monsieur Door.

M. Jean-Pierre Door. Bienvenue dans cet hémicycle, monsieur le ministre !

Après plusieurs semaines d'interruption de nos travaux, ce texte arrive enfin devant nous pour être voté. Il définit de nouvelles règles en matière d'architecture et de champ d'application des lois de financement de la sécurité sociale.

La loi organique de 1996, dite loi Juppé (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains),...

M. Maxime Gremetz. Oh là là !

M. Jean-Pierre Door. ...a permis de prendre conscience de l'importance des finances sociales dans les finances publiques, mais elle a montré ses limites. Le Gouvernement peut donc se réjouir de moderniser notre système social.

La loi organique dont nous débattons est ambitieuse : elle a pour principaux piliers transparence, sincérité, et rigueur, tout en confortant la maîtrise médicalisée des dépenses.

M. Maxime Gremetz. Oh là là !

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. Jean-Pierre Door. Les débats ont mis en évidence la nécessité de mieux clarifier les flux financiers entre l'État et la sécurité sociale.

Je voudrais rappeler les six points essentiels définis par nos rapporteurs.

Premier point, une plus grande sincérité...

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. le président. La séance n'est pas filmée, monsieur Gremetz. Il y a un autre texte en discussion après, ne vous épuisez pas sur ces explications de vote.

Poursuivez, monsieur Door, vous êtes le seul à avoir la parole.

M. Jean-Pierre Door. Premièrement, disais-je, une plus grande sincérité dans l'élaboration des lois de financement, avec une décomposition en quatre parties...

M. Jérôme Lambert. C'est la décomposition de la majorité !

M. Jean-Pierre Door. ...qui ont été rappelées par M. Warsmann. Deuxièmement, l'introduction d'une dimension pluriannuelle, avec une déclinaison des recettes et des objectifs de dépenses par branche, notamment pour l'ONDAM. Troisièmement, une plus grande transparence sur le vote de l'ONDAM, accrue par la décomposition...

M. Jean Glavany. De la majorité !

M. Jean-Pierre Door. ...en plusieurs sous-objectifs. Quatrièmement, une mission de clarification des comptes, confiée à la Cour des comptes. Cinquièmement, l'amélioration de l'information transmise au Parlement par la révision de la liste des annexes. Enfin, amendement très important qui renforce la crédibilité des finances sociales, l'impossibilité d'accroître la dette sociale sans augmenter les recettes.

En conclusion, si ce texte paraît technique, il est très important. L'opposition - M. Le Guen est toujours aussi caricatural - n'a pu peser sur le débat qu'en critiquant la méthode parlementaire choisie, en évoquant à tort l'anticonstitutionnalité de la méthode et en réfutant les résultats pourtant déjà très positifs de la mise en application de la loi d'août 2004.

Le débat a eu lieu.

M. Maxime Gremetz. Pas dans le pays !

M. Jean-Pierre Door. Certains amendements importants ont été acceptés par le Gouvernement et nous pouvons remercier nos rapporteurs.

Le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin, précédemment annoncé, sur l'ensemble du projet de loi organique.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 488

                    Nombre de suffrages exprimés 488

                    Majorité absolue 245

        Pour l'adoption 348

        Contre 140

L'Assemblée nationale a adopté.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

    5

DÉVELOPPEMENT DES SERVICES
À LA PERSONNE ET COHÉSION SOCIALE

Discussion, après déclaration d'urgence,d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (nos 2348, 2357).

La parole est à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, j'ai le plaisir de vous présenter, au nom du Gouvernement, ce projet de loi qui est le fruit d'une intense concertation avec le secteur des services à la personne. Lors de la présentation du plan général de cohésion sociale, nous avions pris l'engagement d'examiner les moyens de développer ce secteur dont les acteurs sont nombreux et particulièrement engagés.

Ce travail, qui nous a permis d'élaborer le plan de développement des services à la personne, présenté le 16 février dernier et dont ce projet de loi est l'expression législative, a démontré que le secteur, tel qu'il existe aujourd'hui, est riche d'hommes et de femmes compétents, motivés, toujours passionnés mais dont l'énergie se heurte à de nombreux obstacles. Il regroupe des particuliers employeurs, des acteurs de l'économie sociale et, depuis peu, des entrepreneurs de taille souvent modeste - 6 000 organismes liés à l'économie sociale et 600 acteurs privés, de petites ou très petites entreprises, regroupés dans quelques grandes fédérations.

Notre ambition aujourd'hui est de permettre à chacun, dans le respect de son identité propre, de se développer. Notre conviction profonde, la mienne, celle de Catherine Vautrin, celle de la commission, est que nous sommes à la veille d'une véritable révolution. La France peut, dans ce domaine où elle a un retard important - non pas dans le secteur sanitaire ou médical, mais dans le champ des services à la personne - devenir une référence mondiale. Voilà quelques années, un rapport du Conseil d'analyse économique chiffrait à 2 millions d'emplois le retard de la France dans ce secteur.

Avant de présenter succinctement les principales mesures contenues dans le projet de loi, je crois utile de rappeler pourquoi le développement des services à la personne constitue un enjeu essentiel pour notre société. Ce projet concerne chacun d'entre nous dans sa vie quotidienne : l'aspiration croissante des salariés à trouver un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie familiale, la question de la dépendance, la question de l'isolement quel que soit l'âge, la question du lien social imposent de trouver des réponses concrètes et rapides. C'est en ce sens qu'il faut comprendre l'important potentiel de développement des services à la personne.

Ce secteur a connu depuis dix ans une croissance très forte, alors même qu'il ne s'est développé que dans la partie médicale solvabilisée.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Et dans le médico-social !

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. La frontière est souvent ténue.

Cette croissance a atteint plus 5,5 % par an, soit près de 70 000 nouveaux emplois chaque année. Si nous permettions aux opérateurs de se libérer d'un certain nombre de contraintes, de réduire le coût d'entrée dans le secteur et de disposer de personnels ayant de meilleures formations professionnelles, ils seraient probablement capables au moins de doubler le nombre d'emplois et donc de changer la donne de notre modèle économique. Nous vivons dans une société de consommation de biens matériels, qui acquiert assez peu de ces services personnels qui améliorent les conditions de vie. Vaut-il mieux acheter la sixième ou la septième paire de chaussures ou accéder à des services financés dans des conditions plus attrayantes ?

La démarche pragmatique que nous avons adoptée a permis d'identifier les trois principaux obstacles qui freinent ce développement.

Il s'agit d'abord, pour les personnes utilisatrices, du coût de ces services, de la complexité des procédures et des problèmes de qualité. Pour ces métiers de proximité, ces métiers de l'humain, où l'on confie ce que l'on a de plus essentiel, la notion de formation et de contrôle qualité est décisive.

Il s'agit ensuite des difficultés que rencontrent les salariés du secteur : ...

M. Daniel Paul. Oh oui !

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. ...droits sociaux au rabais, temps partiel imposé, bas niveau de rémunération, processus de formation quasi inexistant.

Enfin, les employeurs, qu'ils soient particuliers, entreprises ou associations, se heurtent à la complexité des procédures d'agrément et au poids des charges sociales.

La démarche qui vous est aujourd'hui proposée, avec ce projet de loi, est de s'attaquer simultanément et massivement à l'ensemble de ces freins.

C'est donc un plan global qui s'inscrit dans la durée et qui repose sur une dynamique d'accords mutuellement gagnants entre les différentes catégories d'acteurs.

Il s'agit d'un projet de loi pragmatique dont la mise en œuvre rapide permettra au plus grand nombre de nos concitoyens un accès simple et sûr à des services de qualité, générateurs d'emplois durables. Pour résumer, notre ambition est de créer des emplois qui rendent service.

Le projet de loi relatif au développement des services à la personne poursuit deux objectifs principaux.

D'abord, rendre l'accès aux services plus simples et moins coûteux pour nos concitoyens, grâce à l'institution du chèque emploi service universel, conçu à la fois comme un outil de simplification et de solvabilisation. Déjà le chèque emploi service a été une réussite et nous a simplifié la vie ; le titre emploi service a connu un essor plus limité. À compter du 1er janvier 2006, les entreprises pourront cofinancer ce chèque au profit de leurs salariés, dans le cadre de leur politique de ressources humaines ; elles bénéficieront alors d'un crédit d'impôt de 25 %.

Le salarié bénéficiaire de ce chèque pourra continuer de déduire de ses impôts sur le revenu 50 % de ses dépenses de services. Les collectivités locales, les départements en particulier, pourront verser leurs prestations sociales - l'APA par exemple - grâce à ce chèque, ce qui va leur simplifier la vie. Tout le monde connaît la grande complexité du traitement en liquide et de la récupération des indus, et la difficulté à les contrôler.

Ce nouveau chèque présentera donc un intérêt partagé pour les particuliers, à qui cela va simplifier la vie, pour les entreprises qui se verront inciter à l'utiliser pour mieux structurer leur politique de ressources humaines, pour les collectivités, enfin, qui pourront, grâce à ce chèque, s'assurer de l'effectivité de leur action et d'une meilleure maîtrise de leur politique publique.

Ce projet de loi va réduire le coût de ces services en rendant les services prestataires plus attractifs. Il s'agit là d'une exonération totale de charges patronales de sécurité sociale étendue à une liste d'activités prestataires agréées pour lesquelles il existe aujourd'hui une demande non solvabilisée. Le coût de cette mesure, négligeable la première année, puisqu'il n'y aura pas d'effet d'aubaine, sera intégralement compensé par le budget de l'État.

Enfin, il fallait combattre le fléau du travail clandestin en rendant le travail déclaré moins onéreux que le travail au noir. C'est l'objet de la mesure d'exonération de quinze points réservée aux particuliers employeurs, dès lors qu'ils cotisent sur une base effective de rémunération, permettant ainsi à leurs salariés de bénéficier d'une couverture sociale à part entière. Cette mesure, dont le coût pour la première année a été estimé à 270 millions d'euros, sera elle aussi intégralement compensée par le budget de l'État.

Le deuxième objectif du projet est de promouvoir l'offre et d'améliorer les conditions d'exercice des métiers de service à la personne.

Le texte qui vous est proposé permet de clarifier et d'élargir la liste des activités agréées de services à la personne à domicile ou dans l'environnement immédiat du domicile.

Parce que ces emplois de service seront clairement définis, les risques de distorsion de concurrence seront supprimés. Il est même probable que la dynamique nouvelle ainsi créée sera saisie par les autres activités de service - je pense en particulier aux artisans - pour accélérer leur propre développement. La promotion de l'offre passe par la nécessaire clarification et simplification des procédures d'agrément. Ce texte, en proposant un droit d'option, garantira la qualité du service, en particulier auprès des personnes fragiles, tout en permettant à l'offre de services de se développer.

Ce projet de loi intègre une dimension essentielle à la réussite de notre ambition commune : la nécessaire revalorisation des conditions d'exercice de ces métiers.

Parce que l'emploi à domicile exige technicité et surtout aptitude relationnelle, la qualité du service est étroitement liée à la qualité des emplois. Ce projet, en permettant de lutter contre le travail au noir, améliorera de façon significative les conditions générales d'exercice des métiers à la personne : revalorisation des salaires, lutte contre le temps partiel subi, accélération du processus de couverture et d'unification du champ de la négociation collective, mise en place de véritables filières de formation. Vous le voyez donc, tout le contraire des « petits boulots » que d'aucuns se plaisent à dénoncer.

Enfin, pour piloter la mise en œuvre de cet ambitieux projet, il est nécessaire de disposer d'une structure de professionnels qui soit mobilisée en permanence pour la promotion et le développement de ce nouveau pôle d'excellence français, par ailleurs gisement d'emplois. C'est la raison pour laquelle il est prévu de créer une Agence nationale des services à la personne dont le conseil d'administration sera largement ouvert à l'ensemble des acteurs du secteur, comme nous l'avons fait pour l'Agence nationale de la rénovation urbaine.

Par ailleurs, le projet de loi propose quelques ajustements à la loi de programmation pour la cohésion sociale, afin de tenir compte des évaluations mensuelles demandées aux services déconcentrés de l'État et des observations faites par les parlementaires, les maires, les différentes acteurs. Nous avons ainsi la chance de pouvoir ajuster le dispositif quelques mois après son adoption.

Les contrats d'avenir pourront désormais être d'une durée réduite, de façon notamment à ce qu'ils puissent s'adapter à la durée des chantiers d'insertion par l'économie. C'était une demande de l'ensemble des parlementaires et des associations qui oeuvrent dans ce secteur important.

La convention de reclassement personnalisée, qui est le fruit de la loi du 18 janvier 2005 et qui a fait l'objet d'un accord avec les partenaires sociaux, part de l'idée simple consistant à éviter l'isolement de l'allocation chômage pour retrouver un parcours d'accompagnement dans des conditions de suivi et de rémunération qui s'approchent des meilleurs modèles scandinaves, pour les salariés licenciés des entreprises de moins de mille personnes, c'est-à-dire la plus grande partie des licenciements économiques en France. Cette avancée sociale nécessitait quelques ajustements pratiques qui nous ont été demandés par les partenaires sociaux et que nous vous proposons.

Enfin, plusieurs articles concernant l'apprentissage et le logement viennent préciser certaines dispositions votées par le Parlement le 18 janvier dernier.

Avec l'emploi et l'égalité des chances, le logement constitue le troisième pilier de la cohésion sociale. Il y a quelque temps, notre pays connaissait une crise du logement dramatique, tant dans le parc privé que dans le parc public ou parapublic. Il y a cinq ou six ans, le nombre des mises en chantier était inférieur à 300 000 - 290 000 exactement - et la production de logements sociaux avait atteint le « record historique » de 38 000, ce qui était inacceptable.

Le plan de cohésion sociale que vous avez voté a prévu de desserrer la crise du logement. Il s'est fixé comme objectif d'atteindre 400 000 mises en chantier par an et de tripler le nombre de logements conventionnés : 500 000 sur cinq ans. A l'heure où je vous parle, nous en sommes à 370 000 mises en chantier et nous atteindrons l'objectif de 400 000 dès la fin de l'année. Nous avons doublé la production de logements conventionnés, pour laquelle nous atteindrons probablement le cap des 80 000 à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine.

Le Premier ministre a souhaité qu'un coup de rein supplémentaire soit donné. Trois mesures vous seront donc proposées. La première consiste à exonérer de l'impôt sur les plus-values les cessions de terrains par les particuliers aux organismes HLM et aux autres bailleurs sociaux. La deuxième crée un nouvel indice de référence pour l'indexation des loyers, de façon à éviter des sauts de 4 à 5 % d'une année sur l'autre. Alors que l'indice actuel repose essentiellement sur le coût de la construction, nous vous proposons qu'il tienne compte maintenant à la fois de l'INSEE et des entretiens et réparations. Cet indice plus atténué donnera les mêmes résultats sur une période de vingt ans, mais évitera ces sauts-de-mouton qui rendent la situation extrêmement difficile. La troisième mesure instaure un mécanisme de garantie des impayés pour les propriétaires privés qui loueront leur bien à des ménages aux revenus modestes ou intermédiaires. On peut en espérer 40 000 nouvelles mises à disposition. Tout cela nous permettra d'achever de sortir de la crise du logement, même s'il faudra encore une ou deux années pour que nos concitoyens ressentent l'impact de ces mesures, car la congestion objective était dramatique.

Par ailleurs, nous nous étions engagés ici même à augmenter l'acquisition populaire et sociale à la propriété. Vous avez voté, dans le dernier texte, une modification des conditions d'accès au prêt à taux zéro. J'ai le plaisir de vous informer que nous sommes passés de 6 000 prêts à taux zéro par mois, il y a deux ans, à un rythme de 20 000 par mois, soit plus qu'un triplement de l'accession populaire à la propriété.

M. Guy Geoffroy. Très bien !

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Pour conclure, je veux ici rappeler que ce sont les professionnels du secteur des services à la personne qui ont bâti ce plan et qui estiment pouvoir ainsi doubler leur activité, ce qui pourrait à terme représenter 2,6 millions de salariés. J'en accepte l'augure. Ils nous indiquent que 500 000 emplois seront créés au cours des trois prochaines années. Acceptons-en également l'augure ! En tout cas, je veux leur rendre hommage. Nous nous sommes rencontrés vers le 15 septembre de l'année dernière et nous avons signé une convention le 22 novembre avec les cinquante acteurs principaux. Nous arrivons ainsi à un texte de loi coproduit avec eux. Le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin m'avait confié une mission interministérielle, parce que vingt-trois administrations étaient concernées ; c'est cela aussi, la réforme de l'État !

Quel meilleur encouragement pour nous tous que de savoir que les grands réseaux français, les mutuelles, les coopératives - caisses d'épargne, Crédit mutuel, Banque populaire, AG2R, MAIF-MACIF -, vont constituer de grandes enseignes nationales pour garantir la qualité des prestations ! Ces enseignes seront annoncées entre l'été et la rentrée. Il y a peut-être de la suspicion sur quelques bancs, mais je peux vous dire qu'il y a beaucoup d'énergie mobilisée pour la révolution des services ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Maurice Giro, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Avant de présenter le projet de loi pour le développement des services à la personne, je voudrais remercier M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ainsi que mes collègues de la commission, qui m'ont permis d'être le rapporteur de ce texte que je qualifierai de réaliste, car fondé sur un constat. Quel est ce constat ?

En France, 1,3 million de personnes travaillent dans le domaine des services.

Plus de 70 000 nouveaux emplois se créent dans les services chaque année, soit une progression de 5,5 % par an.

Les entreprises représentent 6 % du secteur, mais elles sont en forte croissance.

Les employeurs dans le secteur des services d'aide à la personne sont multiples : 6 000 associations, 2,2 millions de particuliers, 500 entreprises privées.

Par ailleurs, 30 % des foyers français sont divorcés et 20 % des enfants sont élevés dans des familles monoparentales dont le nombre est de 2,7 millions.

La France enregistre environ 750 000 naissances annuelles.

Seulement 9 % des enfants trouvent une place en crèche, alors que plus de 50 % des enfants en bas âge ont leurs deux parents actifs.

En France, il y a environ 200 000 places de crèches pour 2,3 millions d'enfants de moins de trois ans.

Pour 81 % d'entre elles, les femmes entre vingt-cinq et quarante-neuf ans ont une activité professionnelle, soit un taux d'accroissement de 23 % sur les trente dernières années.

Chaque année, notre pays enregistre plus de 2 millions de déménagements.

7,4 millions de personnes vivaient seules en France en 1999, soit un habitant sur huit. En 2030, cette proportion devrait passer à un habitant sur six. Aujourd'hui plus de 3 millions de personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans vivent seules.

L'augmentation de l'espérance de vie à la naissance se poursuit. Elle est passée de soixante-quatorze ans en 1980 à soixante-dix-neuf ans en 2004 et devrait atteindre quatre-vingt-quatre ans en 2050. Il faut actuellement seize heures de recherche en moyenne pour trouver une garde à domicile pour un parent isolé.

Le stress est cité par 38 % des personnes interrogées comme le risque le plus important au travail et 61 % des Français considèrent qu'il est indispensable que l'employeur soit attentif au bien-être personnel de ses salariés.

53 % des Français possèdent un ordinateur personnel à domicile.

Le nombre de jardins a doublé en France depuis trente ans. Aujourd'hui, 16 millions de ménages en entretiennent un.

Enfin, 31 % de la population active aux États-Unis a accès à un service de conciergerie, contre 0,75 % en France.

Tel est le constat que nous pouvons dresser. La situation est si parlante qu'une question vient spontanément à l'esprit : que faut-il faire pour répondre à la demande, pour permettre la création d'emplois et pour les pérenniser ?

Sans doute faut-il commencer par dresser un état des multiples métiers inexplorés. Parmi les services à la famille, on peut citer la garde d'enfant, le soutien et l'accompagnement scolaires, l'éveil et les loisirs des enfants, ainsi que les aides à domicile des personnes dépendantes. Les services relatifs à la santé comprennent les soins à domicile, le soutien psychologique pour les personnes isolées et, pour tous, l'information et la prévention. Enfin, les services divers à la vie quotidienne recouvrent l'assistance informatique, la livraison de repas, les courses, la coiffure à domicile, l'entretien et le dépannage, l'aide aux demandes administratives, le conseil juridique, le jardinage, le gardiennage, l'aide à l'aménagement et au déménagement ainsi qu'aux recherches diverses.

Pour permettre à chacun de recourir aux nouveaux services sur les lieux de vie à un prix plus raisonnable, ce projet de loi propose un allégement des charges qui pesaient sur le particulier employeur et une suppression des charges patronales de sécurité sociale pour les prestataires de services agréés.

Trouver un cadre légal attractif suppose tant l'actualisation de la liste des activités ouvrant droit à la réduction d'impôt pour les emplois à domicile que la simplification des conditions d'accès aux allégements de charges pour les particuliers employeurs, l'élaboration d'un livret d'emploi de service à la personne pour les particuliers employeurs, le maintien d'un taux de TVA réduit pour les services à la personne, la définition d'un droit de la consommation modernisé pour certains services à la personne et le développement de la qualité.

Pour favoriser l'ouverture de l'offre de services, le texte propose la mise à disposition d'un soutien aux enseignes nationales en voie de constitution ou de développement. Il vise aussi à soutenir l'organisation d'une large distribution dans le secteur des services, à favoriser l'engagement des grandes entreprises, à lancer une grande campagne de communication - mettre en place une loi, c'est aussi la faire reconnaître -, à remobiliser les contrats aidés marchands dans ce secteur et à installer une commission permanente de concertation avec les pouvoirs publics.

Le texte propose aussi une procédure d'agrément national plus simple et plus claire pour les opérateurs, à travers un agrément simple à validité nationale - l'agrément donné dans un département par un préfet sera valable pour l'ensemble du territoire national -, un agrément de qualité par réseau de prestataires, une autorité unique pour délivrer les agréments et une incitation des opérateurs à solliciter une certification de qualité par un organisme agréé.

Répondant à la nécessité de simplifier l'accès aux nouveaux services, la création du CESU, le chèque-emploi-service universel est, comme l'a dit le ministre, une clé des services à la personne. Ce chèque-emploi-service universel intègre les fonctionnalités non seulement du chèque-emploi-service mais aussi du titre-emploi-service. Il élargit leurs possibilités d'utilisation car il s'agit d'un instrument de paiement non seulement de la prestation, mais aussi des charges sociales.

Ce chèque-emploi-service universel devient également l'élément d'une politique sociale pour l'entreprise, qui peut l'abonder en exonération de charges tout en bénéficiant d'un crédit d'impôt de 25 %. Il est adossé à l'actuelle centrale de règlement des titres-emploi-service.

Signalons encore la création de l'Agence nationale des services à la personne, qui substituera un interlocuteur unique aux vingt-deux services ministériels actuellement en charge de ce domaine. Elle coordonnera le développement du secteur des services à la personne et sera chargée du suivi de la mise en œuvre des mesures du plan, de la promotion du secteur économique, de l'information des particuliers et de la promotion du chèque-emploi-service universel.

Ces mesures visent bien entendu à l'amélioration et à la valorisation des conditions de travail des salariés. À cet égard, il est prévu d'améliorer leurs droits sociaux par l'extension de l'accord du 29 mars 2002 sur la revalorisation des grilles de rémunération, d'inciter les particuliers employeurs à renoncer au mécanisme de cotisation sur une base forfaitaire de rémunération égale au salaire minimum - cette incitation prend la forme d'un allégement de charges à hauteur de quinze points de cotisations, soit près de la moitié des cotisations de charges patronales de sécurité sociale - et d'inciter les partenaires sociaux à ouvrir des négociations relatives au temps partiel subi.

Il faudra bien entendu faire le point sur ces mesures. Les résultats seront soumis à une évaluation annuelle qui paraît indispensable.

Cette loi est ambitieuse. Le ministre l'a dit : il compte sur 500 000 emplois nouveaux dans ce secteur en 2008, en collaboration avec l'ensemble des acteurs. Il entend en effet encourager des expérimentations de grandes entreprises nationales de services.

Pour ce qui est du titre II, ce débat a trouvé sa forme législative avec l'adoption de la loi du 18 janvier 2005. Quatre mois après sa promulgation, il n'est pas opportun de reprendre l'ensemble de cette discussion et des enjeux qui la sous-tendaient. Je pense notamment au premier volet de la loi, consacré à l'emploi, qui met en œuvre la rénovation du service public de l'emploi. Mais il faudra certainement procéder à des ajustements, comme l'a dit le ministre.

La commission proposera plusieurs amendements visant à répondre aux remarques qui ont été transmises à votre rapporteur.

Mais, si une vingtaine d'amendements rédactionnels sont proposés, je tiens à féliciter M. le ministre, ses collaborateurs et ses services pour la clarté du projet de loi qui nous a été transmis. Il est rare de disposer d'un texte aussi lisible alors même qu'il traite du code du travail, du code de la sécurité sociale et du code général des impôts.

Des amendements de la commission visent à apaiser la crainte de nombreuses entreprises artisanales face au développement d'une nouvelle source de concurrence. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

À mon sens, les artisans devraient au contraire saisir l'opportunité de ce projet de loi pour se lancer davantage dans les services à la personne. Ils peuvent créer des filiales ou des entreprises dédiées à ces services pour bénéficier d'avantages fiscaux et d'exonérations de cotisations sociales, tout en continuant à faire vivre leur entreprise de droit commun. Ils peuvent se regrouper pour répondre mieux aux demandes dispersées des particuliers. Bref, le projet de loi génère de nombreuses opportunités pour les petites entreprises qui sauront s'organiser.

Celles-ci ne doivent pas avoir peur de la concurrence, qui crée de l'activité et dont les particuliers voient les avantages directs. Toutefois, il appartient au législateur de veiller à ce que cette concurrence ne soit pas déloyale.

Plusieurs députés du groupe UMP. Absolument !

M. Maurice Giro, rapporteur. C'est pourquoi la commission vous proposera de limiter en valeur ou en temps de travail les interventions concernées par les activités de service à la personne. En effet, ces interventions sont très demandées dans le secteur marchand et, souvent, les entreprises ne peuvent pas répondre aux demandes. Mais ces services à domicile doivent se limiter au dépannage, au secours, à des interventions ponctuelles. Sinon, on risque d'assister à des détournements de la loi qui viseraient à créer des activités économiques à seule fin de bénéficier d'avantages fiscaux ou d'allégement de cotisations sociales des services à la personne, et concurrençant frontalement les entreprises ordinaires.

La commission a également souhaité renforcer la sécurité financière du circuit de traitement du chèque-emploi-service universel et rendre possible l'utilisation de tous les moyens de paiement modernes. Le volet social peut être aujourd'hui dématérialisé. Il faut laisser ouverte la possibilité d'utiliser un chèque ou un titre de paiement dématérialisé dans les conditions de sécurité du code monétaire et financier.

Il est important que les banques s'investissent dans le nouveau CESU. On doit donc veiller à ne pas fermer le dispositif sur des techniques incompatibles avec les impératifs de sécurité bancaire.

Enfin, la commission a souhaité renforcer certains des droits des particuliers et des salariés.

Pour toutes ces raisons, elle vous demande d'adopter le projet de loi relatif au développement des services à la personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quinze jours, la hantise du chômage s'est glissée dans les urnes.

M. Daniel Paul. Voilà une sage parole !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Ce projet de loi vient donc à point nommé, alors que la situation de l'emploi n'est toujours pas au beau fixe et que les délocalisations inquiètent les Français.

Il est de bon augure que, pour la reprise de nos travaux, nous nous penchions sur le secteur de l'économie qui a connu la plus forte croissance de ses effectifs durant ces dernières années.

Ce texte apporte en outre quelques précisions en ce qui concerne le plan de cohésion sociale que nous avons adopté récemment. Ces mesures complémentaires ou rectificatives ont trait à l'emploi, à l'apprentissage et au logement. Elles permettront en particulier la prise en compte de certaines avancées de la négociation collective.

La production de services est indiscutablement source de création d'activités et la France possède certainement dans ce domaine, comme l'a répété M. le ministre, un important gisement à exploiter. Dans la consommation des ménages comme dans la consommation finale des entreprises, les activités de services n'ont cessé de croître.

Certains experts font valoir que, si notre pays bénéficiait d'un taux d'emploi dans le secteur tertiaire équivalent à celui des États-Unis, il ne connaîtrait plus de chômage. La comparaison est bien sûr discutable, mais elle doit nous convaincre de l'existence d'un réel potentiel de développement des emplois de services.

Dans ce gisement, la part des services aux particuliers est loin d'être négligeable, qu'il s'agisse de la garde d'enfants, du soutien scolaire, du maintien à domicile des personnes dépendantes, de l'assistance informatique, du portage de repas, des petites réparations, du gardiennage, du jardinage ou encore de l'assistance aux démarches administratives. La société a changé et ses besoins aussi.

Les facteurs influents - on l'a dit - sont, bien sûr, la démographie, le vieillissement de la population, le taux d'activité des femmes, la multiplication des familles monoparentales, les changements de résidence, la croissance de la mobilité individuelle ou l'accroissement du temps libre. Le rapporteur les a très bien décrits. Dans ce domaine, nous ne faisons que suivre les grandes économies développées.

Face à des besoins grandissants, notre pays s'est malheureusement contenté jusqu'à présent d'une offre parcellaire et artisanale, proposée par une myriade d'associations offrant des conditions de travail pas toujours enviables. Il ne s'est jamais donné les moyens d'exploiter convenablement cette source d'emplois.

On s'en souvient, Philippe Séguin avait songé, dans les années quatre-vingt, à utiliser ce levier pour faire baisser un chômage endémique. Ses projets avaient plus ou moins échoué pour cause de réticences syndicales.

Mes chers collègues, la France paie des décennies d'hésitation face aux évolutions de notre société. Si nous avions le même taux d'emploi dans le secteur des services à la personne que l'Allemagne, 1,7 million d'emplois supplémentaires verraient le jour. Nous devons donc agir prioritairement dans cette voie.

Ce secteur occupe d'ores et déjà 1,3 million de personnes. Sans rien faire, à législation constante, il croît de 5 % par an. Il est donc en très forte expansion, malgré plusieurs freins importants dont quatre sont clairement identifiés : une trop grande complexité des dispositifs réglementaires d'incitation, une demande peu solvable, des distorsions de concurrence aux dépens des entreprises et une offre insuffisamment professionnalisée.

Le projet de loi en discussion propose une solution opérationnelle pour lever ces différents freins. Sa finalité est bien de combler le retard français et d'en profiter pour étendre et renforcer un secteur qui répond à des besoins sociaux. Il va ainsi libérer l'offre de services, solvabiliser la demande, faciliter l'accès du plus grand nombre à un service personnalisé.

Le texte permettra de réduire le coût des services à domicile, de simplifier les démarches administratives et de rationaliser les procédures d'agrément. Il prévoit notamment la création du chèque emploi-service universel en remplacement du titre emploi-service et du chèque emploi-service formation, le développement de programmes de formation et d'enseignes de référence ainsi que des procédures d'agrément nationales. Pour la première fois, les pouvoirs publics décident d'avoir une approche globale de la question en proposant une refonte complète des dispositifs de soutien.

Madame la ministre déléguée, monsieur le ministre, le pari du Gouvernement consiste à favoriser l'émergence d'une véritable industrie de services de proximité, structurée, accessible, professionnellement et socialement valorisée. Les opportunités de créer des activités et des emplois, qui plus est non délocalisables, sont - il faut s'en convaincre - très nombreuses. Le défi que nous devons relever est essentiellement culturel. Il consiste à changer l'image de ce secteur, à en faire un secteur économique à part entière et à convaincre les Français de sortir, en la matière, du bricolage et du système D.

Il n'y a aucune impossibilité de principe : ce qui a fonctionné chez nos voisins doit pouvoir fonctionner chez nous. Dans ce domaine comme dans bien d'autres, la France a la capacité de relever tous les défis, pour peu qu'elle cesse de se complaire dans un sentiment hexagonal un peu dépressif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Exception d'irrecevabilité

M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Madame la ministre, monsieur le ministre, parce qu'il pose la question des services aux publics les plus fragiles, parce qu'il concerne des travailleurs souvent pauvres et en situation de précarité - notamment des femmes, qui sont les plus nombreuses dans le secteur des services à domicile -, parce qu'il est lié à l'évolution de la société et à la manière dont celle-ci envisage et organise le travail, le texte que vous nous présentez est au cœur de la cohésion sociale.

Pour avoir lu avec beaucoup d'intérêt l'ensemble de votre plan, monsieur le ministre, je sais que vous avez conscience de ces enjeux. Mais alors, pourquoi avoir déclaré l'urgence sur ce texte ? Soit cela devient une manie du Gouvernement, soit vous avez pensé que, en l'occurrence, le travail parlementaire était inutile. Pourtant, et l'ensemble des gouvernements successifs qui ont abordé la question le savent, l'organisation des emplois de services est beaucoup plus complexe en France que dans d'autres pays. C'est pourquoi nous aurions dû prendre le temps de débattre de ces sujets.

Il est vrai que le Gouvernement a choisi, par ailleurs, de légiférer par ordonnances durant cet été. Je le regrette, et je rappelle que le président de l'Assemblée nationale lui-même a souligné à de nombreuses reprises combien les débats parlementaires étaient nécessaires au fonctionnement de notre démocratie.

M. Guy Geoffroy. Il n'y a pas de temps à perdre !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Qu'il y ait urgence en matière d'emploi, c'est évident,...

M. Guy Geoffroy. Ah !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ...d'autant que je connais le nombre d'emplois qui ont été créés lorsque nous étions au gouvernement,...

M. Guy Geoffroy. De faux emplois ne sont pas des emplois !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ...et le nombre de ceux qui ont été détruits depuis que vous y êtes. S'il y a urgence, c'est donc parce que vous n'avez pas su mener des politiques en faveur de l'emploi. D'ailleurs, je suis certaine que, en son for intérieur, M. le ministre de la solidarité et de la cohésion sociale est d'accord avec moi.

Mais revenons au texte. Votre intention d'exploiter ce gisement d'emplois est louable, mais les 500 000 emplois que vous évoquez sont-ils à temps plein ou à temps partiel ? Dans un secteur que je connais bien, l'allocation personnalisée d'autonomie a permis de créer entre 100 000 et 120 000 emplois équivalents temps plein.

Par ailleurs - et vous avez évoqué cette question, monsieur le ministre -, de quel type d'emplois parlons-nous ? Les difficultés que nous rencontrons dans l'organisation de ce secteur consistent, nous le savons, à établir un lien entre les emplois de services destinés aux publics fragiles - personnes âgées, personnes handicapées et petite enfance - et ceux qui sont liés à l'évolution de la société et réservés aux personnes qui n'ont pas de difficultés. Or je crains que vous ne développiez les seconds en fragilisant les premiers.

Face à des personnes qui souhaitent de plus en plus vivre à domicile de manière autonome, dans le respect de leur dignité et de leurs droits, les différents types de services connaissent une évolution profonde. Nous sommes très loin des aides à domicile qui étaient proposées à l'origine aux personnes handicapées et aux personnes âgées. La prise en charge des personnes fragiles est désormais plus complexe, car il faut non seulement permettre à celles-ci de vivre le mieux possible leur handicap, mais aussi soutenir leur entourage. Aussi, je me suis personnellement battue pour que la loi du 2 janvier 2002 intègre les services de soutien à domicile - formule que je préfère à celle de maintien à domicile -, car nous savons combien il est difficile à la fois d'accompagner un enfant handicapé ou une personne âgée atteinte de démence sénile ou de la maladie d'Alzheimer et de soutenir la famille de cette personne.

Nous sommes bien là dans le champ du travail médico-social, que vous avez appelé tout à l'heure, monsieur le ministre - et vous n'aviez pas tout à fait tort -, le champ de la santé. Hélas, je ne trouve dans vos propositions aucune référence à ces préoccupations qui ont été très présentes dans les débats que nous avons eus en commission.

La structuration de l'ensemble du secteur des services aux personnes - qu'il s'agisse des publics fragiles ou des personnes en difficulté - est soumise à trois obligations : premièrement, l'organisation de l'offre de services, deuxièmement, la solvabilisation de la demande et, troisièmement, la professionnalisation du secteur et la lutte contre la précarité.

Cette dernière question est essentielle. Jeudi dernier, j'étais, à Mulhouse, devant 200 stagiaires - exclusivement des femmes - qui suivent, dans le cadre de la FEPEM et de l'AFPA, une formation en vue d'obtenir le diplôme d'auxiliaire de vie sociale. Or l'une de ces femmes, qui se disait ravie d'apprendre ce métier, voulait absolument avoir l'assurance que son emploi ne serait pas précaire et que ses conditions de travail lui permettraient de sortir de la pauvreté. La principale question que nous avons à nous poser aujourd'hui est bien celle-ci : ce projet de loi permettra-t-il à ces travailleurs pauvres, qui sont principalement des femmes, de sortir de la logique de précarisation dans laquelle ils se trouvent actuellement ?

C'est en tout cas sous cet angle que j'ai abordé l'examen de ce projet de loi. Lorsque j'ai été nommée secrétaire d'État aux personnes âgées, je m'étais promis de consacrer ma première intervention publique au statut des aides à domicile car elles travaillaient, notamment dans le secteur privé à but non lucratif, dans des conditions que je jugeais, comme certains responsables syndicaux, inacceptables. Ainsi, leurs temps de trajet n'étaient pas pris en compte et elles devaient payer elles-mêmes leurs déplacements. Or elles se trouvent souvent dans une grande solitude. J'avais donc lancé, avec un certain nombre de syndicats, une négociation afin de progresser en ce qui concerne la convention collective.

Dans votre texte, vous renvoyez encore à la négociation collective. Or ne devrions-nous pas lier les exonérations de charges et les réductions d'impôt dont bénéficient les employeurs à la création d'un véritable statut pour les salariés ? J'ai le sentiment que vous ne répondez pas à cette préoccupation.

M. Maurice Giro, rapporteur. Mais si !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Non, monsieur le rapporteur, vous renvoyez à la convention collective, mais vous ne définissez aucune obligation concrète.

Dans ma région, la Franche-Comté, le conseil régional fait un travail très important pour développer l'ensemble de ses services, mais il conditionne son aide par la signature entre les conseils généraux et les structures d'aide à domicile d'une convention qui réponde aux enjeux liés au statut, au niveau de rémunération, à la professionnalisation et à la formation des salariés. C'est là, me semble-t-il, l'une des conditions de la réussite dans ce domaine.

Pour dynamiser le secteur des services à la personne, nous devons organiser l'offre de services, en veillant par exemple à ce qu'il y ait des offres de jour, de nuit, et des offres de travail temporaire dans tous les secteurs. Nous devons également, et c'est l'un des points les plus importants de mon intervention, solvabiliser la demande. L'enjeu est de lutter contre l'emploi précaire, donc de professionnaliser le secteur. Membre de la commission Hirsch sur la pauvreté, j'ai acquis la conviction en étudiant votre projet de loi, monsieur le ministre, que cet enjeu était au cœur de la problématique de la cohésion sociale. Or je crains que votre texte ne suffise pas - je m'exprime avec autant de prudence que possible - à sortir les emplois à la personne de la précarité et à assurer la cohésion sociale.

Je ne peux m'empêcher de penser que l'une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas suffisamment réfléchi au problème des conditions de travail de ces emplois réside dans le fait qu'ils sont majoritairement occupés par des femmes. Comme si, en fin de compte, on associait traditionnellement les femmes à la fonction de bonne sœur ou de femme de ménage...

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Vous pouvez difficilement me faire ce reproche !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ...et comme si on ne voyait dans ces emplois de services à la personne que des petits boulots bien suffisants pour des femmes, alors qu'il s'agit en réalité de vrais métiers.

À cet égard, il est révélateur de constater qu'il a fallu très longtemps avant de voir ce domaine d'activité investir le champ de la négociation, notamment au sein des syndicats professionnels et d'employeurs. Je parle en connaissance de cause, dans la mesure où j'ai ouvert les négociations avec ces syndicats lorsque j'étais au Gouvernement.

Finalement, c'est l'ensemble de la société qui n'a pas cru à ces emplois, puisqu'elle n'a jamais voulu leur donner un statut, les professionnaliser. Nous en portons tous la responsabilité et c'est ce qui me fait dire aujourd'hui que le dispositif proposé ne va pas assez loin.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Il faut bien démarrer un jour !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Que nous proposez-vous en matière d'organisation des services à la personne ? Une seule réponse, la mise en place d'enseignes nationales. Je ne suis pas sûre que cela soit suffisant. À ce sujet, permettez-moi de vous rappeler un épisode qui me reste sur le cœur.

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Allez-y !

M. Pierre-Louis Fagniez. Oui, libérez-vous de ce fardeau !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Lorsque nous avons créé l'allocation personnalisée d'autonomie, afin de soutenir le secteur de l'aide à domicile qui se trouvait en grande difficulté, nous avons mis en place un dispositif dont vous avez d'ailleurs reconnu l'utilité, puisque vous l'avez repris, celui du Fonds de modernisation de l'aide à domicile. Son rôle était d'accompagner les services de maintien à domicile - publics ou privés, à but lucratif ou non - dans l'offre de services nouveaux, les assister dans certains domaines, en particulier dans la gestion des ressources humaines, et de faire en sorte que les femmes travaillant dans ce secteur puissent avoir accès à des formations, ce qui comprend leur remplacement et le maintien de leur rémunération lors des périodes de formation. Or une grande partie des 50 millions dont ce fonds avait été doté la première année a été utilisée par vos prédécesseurs pour financer tout autre chose, à savoir les structures d'hébergement des personnes âgées !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Tout simplement parce que les fonds n'avaient pas été consommés !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Vous avez ensuite repris ce dispositif dans le cadre de votre plan en faveur des handicapés et des personnes âgées.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Tout à fait !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je suis persuadée, madame la ministre, que votre gouvernement aurait pu tirer un meilleur profit de cet outil, au lieu d'entretenir une polémique agressive sur le coût de l'APA.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Allons !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Quoi qu'il en soit, les contrats signés par certains départements dans le cadre du fonds de modernisation de maintien à domicile ont joué un grand rôle. L'enjeu de la structuration des services est considérable, et je sais que vous en êtes vous-même convaincue, puisque vous avez repris le principe du Fonds de modernisation et en avez même augmenté la dotation. Comment une petite association de maintien ou de soutien à domicile pourrait-elle, par exemple, offrir sans soutien extérieur un service d'aides-soignantes de nuit ? Comme on le voit, le Fonds de modernisation est indispensable pour assurer l'organisation et la professionnalisation des nouveaux services. Je ne remets pas en cause le dispositif des grandes enseignes, mais force est de constater qu'il ne saurait suffire.

Par ailleurs, je m'étais battue pour que le champ de la loi du 2 janvier 2002 couvre l'ensemble des services de maintien à domicile. Vous avez mis en place, dans le cadre de la loi de décentralisation, un dispositif très important qui permet aux conseils généraux d'organiser des missions publiques à destination des publics fragiles que sont la petite enfance, les personnes âgées ou handicapées. Or vous ne prévoyez nulle part que ces services soient liés aux schémas départementaux de la petite enfance, des personnes âgées ou handicapées. Pourquoi l'agrément ne serait-il pas soumis au niveau départemental ? Je suis très inquiète sur ce point.

La qualité du service rendu, toujours importante, devient essentielle lorsqu'il s'agit de services à la personne, puisque l'enjeu est alors humain. Un agrément national, sans aucune référence au champ des schémas départementaux, me semble donc dangereux. Et je ne vois rien dans votre loi, monsieur Borloo, qui permette de dire que cette référence est prévue.

M. Maurice Giro, rapporteur. Mais si ! C'est le préfet qui donne l'agrément !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Nous aurons l'occasion d'y revenir lors de l'examen des articles.

D'autre part, vous créez une Agence nationale des services à la personne, mais pouvez-vous nous préciser à quoi elle va servir ? Simplement à dynamiser et à animer le secteur ? Il faut reconnaître que ce ne serait déjà pas si mal si l'on faisait en sorte, par exemple, que le ministère du travail travaille en liaison avec le ministère de l'action sociale. Toutefois, le rôle de cette agence me semble encore à définir, y compris dans ses relations avec les conseils généraux. Les conseils généraux sont devenus, vous en conviendrez, les acteurs principaux de l'organisation de ce secteur, en tout cas pour les publics fragiles, et il est évident que leur rôle en ce domaine devrait être consacré.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C'est prévu !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. En tout cas, vous n'en avez pas parlé. La FNATH réclame une meilleure définition des missions de l'Agence nationale des services à la personne, qui devrait être notamment chargée d'assurer la qualité du service rendu. On en revient à la question de l'agrément. Peut-on, monsieur le ministre, connaître vos engagements sur ce point, le montant des crédits qui seront alloués à l'agence, et quel sera son champ de responsabilité ?

La technique des enseignes fait appel à celle de la franchise, comme Âge d'Or Services ou ADHAP Services. Je connais les difficultés auxquelles celles-ci sont parfois confrontées pour obtenir leur agrément. Cela étant, l'agrément départemental est un gage de qualité et Mme Hoffmann-Rispal reviendra sur ce point. Ce qui est sûr, c'est qu'il est beaucoup plus difficile de mettre en place un dispositif de franchise en matière d'aide à la personne qu'en matière de salons de coiffure ou de concessionnaires automobiles.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Ce n'est pas tout à fait la même chose !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Si vous m'apportez des réponses sur les points que j'ai évoqués, notamment sur le lien entre la loi du 2 janvier 2002 et votre proposition de loi, je peux vous assurer...

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. ...que vous voterez le texte ? (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ...en tout cas, qu'un grand nombre de personnes en seront soulagées. Je ne pense pas que nous irons jusqu'à voter ce texte, et je vous expliquerai pourquoi tout à l'heure.

M. Pierre-Louis Fagniez. Vous évoluez bien !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je m'efforce avant tout de signaler certains dangers. J'ai clairement situé mon intervention : l'enjeu, pour moi, réside essentiellement dans la qualité des services et la lutte contre la précarité.

M. Guy Geoffroy. Nous sommes tous d'accord !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je ne suis pas sûre que le dispositif proposé réponde à cette exigence. Je m'inquiète surtout de l'ordonnance en cours de discussion, visant à permettre à l'ensemble des services de soutien à domicile de choisir entre l'agrément de qualité ou l'inscription dans la loi du 2 janvier 2002, ce qui me paraît profondément dangereux.

Si vous apportez des réponses à ces questions, nombre de structures - l'UNIOPSS, notamment - seront rassurées. Denis Jacquat, qui n'est pas là cet après midi, a fait les mêmes observations en commission. Il était bel est bien question du droit à la personne, de la place de l'usager, des familles, de l'obligation de mettre en place un projet pour l'ensemble des services de soutien à domicile, que ce soit pour les personnes handicapées ou les personnes âgées. Or l'ordonnance risque de faire exploser la structuration du service.

Monsieur le ministre, il n'a pas été simple de faire entrer les services de soutien à domicile dans la loi du 2 janvier 2002 car les associations ont l'obligation de mettre en place un conseil de la vie sociale, donc de faire en sorte que les usagers pour lesquels elles travaillent soient présents et puissent exprimer leur point de vue sur le service offert et l'organisation proposée. Or la possibilité de choisir prévue par l'ordonnance risque de mettre à mal l'ensemble des progrès accomplis grâce à la loi du 2 janvier 2002. Nous avons déposé des amendements sur ce point. La position que vous adopterez lorsque nous les examinerons nous permettra de vérifier si vous avez entendu les questions que nous posons.

En fait, c'est toute la problématique de l'agrément qui est en jeu. Monsieur le ministre, les choses sont différentes selon qu'on a affaire à un public fragile ou non. Permettre de sortir du champ de la loi de 2002 posera de vraies difficultés, comme le démontrera Mme Hoffman-Rispal. Elle expliquera, à partir de son expérience, que le dispositif des schémas départementaux et l'obligation de l'agrément et de la tarification par les départements assurent, concrètement, l'évolution des conditions de travail, de la professionnalisation et de l'offre de services du secteur. Comme vous ne faites pas allusion à ces points dans le cadre de votre loi, une grande partie des départements pensent que vous remettez en cause la responsabilité et la mission publique qui leur sont confiées pour l'organisation des services à domicile en direction des publics fragiles.

Le livre noir de la PSD avait bien montré l'absence de professionnalisation générée par l'unique distribution d'une prestation. Avec l'APA, nous avions veillé à mettre en place le fonds de modernisation et à prévoir une responsabilité complète pour les départements dans le cadre des schémas départementaux. On le sait, dans ces domaines, il ne suffit pas de créer une prestation, il faut aussi donner des moyens. Vous avez fait le choix de confier cette responsabilité aux conseils généraux. Reconnaissez-leur aujourd'hui, dans le cadre de cette loi, une place dans l'organisation des services publics, en tout cas pour les publics fragiles.

En fait, votre projet de loi, qui prétend rendre service à chacun et à favoriser l'emploi, vise plus à rechercher les emplois qu'à structurer l'offre de services.

Troisième grande question : l'exonération des charges sociales patronales. À mon avis, celle-ci ne doit pas être étendue à l'emploi direct. Je ne suis pas de ceux qui considèrent que le gré à gré devrait être interdit. La qualité de la prise en charge de la personne âgée ou handicapée ou du petit enfant passe parfois, en effet, par la relation directe. On sait d'ailleurs que la FEPEM a tenté de structurer le secteur et je lui en sais gré. Il n'en reste pas moins que, si l'on veut créer des emplois qui ne soient pas précaires et qui permettent de sortir les femmes de la pauvreté, il faut agir dans le cadre de dispositifs collectifs. J'en suis intimement persuadée.

Certes, les conventions collectives et les diplômes mis en place grâce à la FEPEM et au secteur assureront des avancées. Mais une entreprise collective pourra toujours mieux organiser les services. Ainsi, elle répondra mieux à la demande et garantira de meilleures conditions de travail. En outre, une structure collective permet de mettre en place des conventions collectives de branches et d'engager des négociations.

J'ai donc vraiment la conviction qu'il nous faut tout faire pour privilégier l'offre de services collectifs.

M. Maurice Giro, rapporteur. C'est ce qu'on a fait !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je n'en suis pas sûre, monsieur le rapporteur, puisque vous offrez la possibilité de réduire de 15 points les exonérations de charges sociales dans le cadre d'une procédure de gré à gré.

M. Maurice Giro, rapporteur. Avez-vous été employeur, madame la députée ?

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je sais que vous avez rencontré des représentants de la FEPEM et je suis persuadée qu'ils vous demandent un soutien pour l'organisation, y compris pour faire évoluer le droit des salariés à domicile. Mais je suis convaincue qu'il faut grandement privilégier les dispositifs collectifs.

Pourquoi faut-il aller plus loin dans l'organisation de la mission publique pour ces secteurs ? Je veux revenir sur mes craintes devant les prémices de l'organisation publique en matière de responsabilité des conseils généraux. Alors que j'inaugurais, samedi dernier, un RAM, un réseau d'assistants maternels, le président de la CAF, qui est maire dans ma circonscription et qui, je le précise, n'est pas de la même tendance politique que moi, a très clairement fait part de ses inquiétudes. Il nous a dit être très préoccupé par les négociations en cours sur la convention d'objectifs et de moyens de la CNAF. Il craint que la réduction de moyens prévue ne mette à mal l'ensemble de l'organisation publique qui se met en place sous la responsabilité de la CNAF, des départements ou des collectivités locales, intercommunalité ou communes.

Monsieur le ministre, tous les plans de soutien à la petite enfance, toutes les crèches, tous les RAM sont concernés. Une insuffisance de moyens risque de déstabiliser l'ensemble du dispositif et de porter atteinte aux 500 000 emplois que vous prévoyez. J'appelle votre attention sur ce point car c'est vous qui avez la responsabilité de la négociation avec la CNAF. Je l'ai déjà dit pour les schémas départementaux, à propos de la petite enfance et des personnes âgées ou handicapées : il y a là un enjeu énorme.

Nous avons là une grande responsabilité parce que c'est un élément de cohésion sociale. C'est vrai pour les familles au niveau de l'offre proposée mais aussi pour les femmes concernées par ces emplois.

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Vous voterez donc la loi !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Non car, pour l'instant, je n'ai eu aucune réponse à toutes les questions que j'ai posées. Et je ne suis pas sûre que ce que vous proposez sera suffisant. Monsieur le ministre, vous me connaissez peut-être mal, j'ai l'habitude de reprendre avec franchise et réalisme ce que je constate sur le terrain.

Quant à la solvabilisation de la demande, vous annoncez 500 000 emplois. S'agit-il d'emplois équivalents temps plein ? J'ai dit ce qu'il en avait été pour l'APA. Vous avez d'ailleurs reconnu que celle-ci a constitué un important élément de solvabilisation. En outre, tout le monde a droit à cette allocation, les plus pauvres comme les plus aisés. On est simplement aidé en fonction de ses besoins.

La solvabilisation repose sur quatre éléments. Il y a bien sûr les revenus des personnes. On le sait, certains de nos concitoyens ne peuvent pas payer. Ainsi, les femmes qui sont en situation de fragilité extrême ont des difficultés d'accès à ces services alors pourtant qu'elles ont énormément besoin d'aide, que ce soit pour leurs enfants ou leurs parents. La solvabilisation passe donc aussi par l'organisation de la prestation. Elle passe également par la réduction d'impôt. Celle-ci représente quelque 1,8 milliard d'euros et nous verrons dans un instant à qui elle profite. Elle passe enfin par l'exonération de charges sociales. Certaines déclarations laissent entendre que ces dernières seront remboursées par l'État. Mais il n'y a rien sur ce point dans le texte. Il serait bon pour les comptes de l'assurance maladie et de la sécurité sociale que cela soit précisé.

Monsieur le ministre, je veux insister ici sur la logique totalement inégalitaire de la réduction d'impôt. Je me demande d'ailleurs comment réagiraient les gens s'ils en prenaient conscience. Rappelons-le, 10 % de ceux qui ont accès à cette réduction d'impôt sont parmi les plus aisés. Ils auraient donc les moyens de payer ces services. C'est là une question de choix politique.

En effet, les contribuables qui emploient directement par l'intermédiaire d'une association agréée des salariés à leur domicile bénéficient d'une réduction égale à 50 % du montant de leurs dépenses retenues dans la limite de 12 000 euros majorés de 1 500 euros par enfant, jusqu'à 15 000 euros lorsque le foyer fiscal comprend une personne âgée de plus de soixante-cinq ans. Cette mesure représente une dépense fiscale de 1,780 milliard d'euros en 2005 si l'on s'en tient à l'annexe du projet de loi de finances pour 2005. Elle est en hausse de 32 % depuis 2001 puisqu'elle s'élevait à 1,350 milliard d'euros en 2002. Or, monsieur le ministre, il est clair que cela relève d'un choix politique.

Après ces hausses successives, le montant du plafond atteint un niveau supérieur à celui atteint par un contribuable employant à mi-temps une personne à domicile, payée au SMIC. L'État prend ainsi en charge directement la moitié de cet emploi, prise en charge à laquelle s'ajoutent d'autres aides fiscales et sociales que vous connaissez.

La majorité actuelle, quand elle est au pouvoir, n'a de cesse de revaloriser le plafond. Initialement fixé à 3 811 euros, il a ainsi été relevé à 3 964 euros par la loi de finances pour 1994, puis à 13 720 euros dans le budget de 1995. Par voie d'amendements au projet de loi de finances pour 1998, les députés ont largement réduit ce dispositif, le ramenant à 6 860 euros. Lorsque vous êtes revenus au gouvernement, la première chose que vous avez faite a été d'augmenter le plafond des dépenses, qui a ainsi été majoré de 118 %, passant successivement de 7 400 euros en 2002 à 10 000 euros en 2003, pour atteindre 15 000 euros en 2004.

Or qui est concerné par ce dispositif ? Je ne peux m'empêcher de comparer ces chiffres au coût de la prestation moyenne de l'APA, qui concerne principalement des gens modestes. Vous connaissez bien, madame la ministre, la grille des montants nécessaires pour avoir droit à l'APA. En moyenne, l'allocation personnalisée d'autonomie représente 5 160 euros par an, par rapport aux 10 000 euros que les gens les plus aisés peuvent se voir accorder par le biais de la réduction d'impôt.

Nous ne pouvons qu'être très inquiets, monsieur le ministre, lorsque nous constatons que vous ne nous proposez pas le même niveau d'aide. Comme le suggèrent un certain nombre de rapports, pourquoi ne pas utiliser cette somme de 1,8 milliard d'euros pour structurer l'ensemble du secteur du maintien à domicile, au lieu de réduire les impôts des gens les plus aisés ? Il faut savoir que chaque fois que l'on augmente le plafond, on diminue le nombre des personnes qui bénéficient de la réduction d'impôt, celles-ci étant encore plus aisées : ainsi le nombre des bénéficiaires est-il passé de 70 000 personnes lors de la première augmentation à 40 000 personnes aujourd'hui. C'est une véritable question politique.

Je crois profondément qu'il s'agit d'une mesure injuste, parce que ceux qui en profitent ne sont pas ceux qui en ont le plus besoin.

M. Maurice Giro, rapporteur. Mais cela permet de lutter contre le travail au noir !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Mais non ! Si cet argent était utilisé pour organiser les services, il n'y aurait pas de travail au noir. Si les employeurs et les employés de ces structures d'aide à la personne réussissent à offrir des services de qualité - mais pour cela il faut les aider -, je peux vous assurer qu'ils ne choisiront pas le travail au noir. Demandez à ceux qui ont en charge une personne handicapée !

M. Maurice Giro, rapporteur. Mais il ne s'agit pas d'eux !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Ne faisons pas d'amalgame !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'est la même chose, je peux vous l'assurer ! Ne trouvez-vous pas injuste que des personnes bénéficient de 7 500 euros de réduction d'impôt pour faire face au stress du travail, tandis qu'une femme qui travaille dans des conditions très difficiles n'y a pas droit, ne payant pas d'impôt sur le revenu ? C'est une vraie question qui est posée aux Français. Je crois que la politique sortirait anoblie si vous faisiez un autre choix, qui irait au-delà de toute idéologie. Mais ce choix-là, vous ne l'avez pas fait, vous ne l'avez même pas envisagé. Je le regrette profondément.

Nous vous proposerons au cours de ce débat un certain nombre d'amendements que nous avions déjà déposés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2005. Nous verrons bien si vous y êtes sensibles ou non.

J'en viens au point le plus important de votre projet de loi : la création du CESU, le chèque-emploi-service universel. Je voudrais comprendre, sur le fond, quel est le changement par rapport aux précédents dispositifs. Vous conservez le principe du titre emploi service, puisqu'il s'agit toujours d'un prestataire. Vous élargissez son utilisation aux entreprises. Ce point soulève quelques questions, mais vous souhaitez que les entreprises utilisent largement ce financement. Si le titre emploi service était très intéressant, c'est qu'il privilégiait le dispositif prestataire. Pourtant vous ouvrez le CESU au contrat de gré à gré, ce qui existe déjà avec le dispositif bancaire du chèque-emploi-service. Mais vous l'ouvrez aussi par le biais du titre emploi service. Il y a là, me semble-t-il, un vrai danger. Le titre emploi service était intéressant...

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Tellement intéressant qu'il était rarement utilisé !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il était intéressant, monsieur le ministre, en ce qu'il permettait d'améliorer la qualité des services, parce que personne ne s'était encore donné les moyens d'organiser les services. Le plan de modernisation qu'ont défini un certain nombre de départements correspondait à cette logique.

Je pense sincèrement que l'ouverture du CESU au contrat de gré à gré, dans la logique du titre emploi service, va engendrer des difficultés.

Plutôt que de mener une politique ambitieuse d'organisation publique visant à satisfaire les besoins de la population en respectant les droits fondamentaux des publics visés et en garantissant des conditions de travail et de salaire dignes pour les intervenants de ces secteurs, vous préférez considérer que tout Français est un employeur potentiel. C'est exactement ce que vous faites dans le cadre de ce projet de loi, quitte à accepter qu'un employé travaille en moyenne, ce qui est le cas aujourd'hui dans le gré à gré, pour huit employeurs, 24 heures par semaine, pour un salaire moyen à peine plus élevé que le SMIC. Est-ce cela la cohésion sociale et la lutte contre la précarité ?

Plutôt que mener une politique vertueuse et financer la structuration de l'offre de services, vous préférez, comme pour la réduction d'impôt et pour répondre à la demande, faire dépenser les Français et accorder à certains d'entre eux des avantages fiscaux, exonérations de charges sociales et réductions d'impôt.

C'est notamment le cas en matière de politique de la petite enfance. C'est un sujet délicat, même dans mon propre groupe. On sait bien que l'extension de l'allocation parentale d'éducation pénalise le travail des femmes, et que la revalorisation de la prestation d'accueil du jeune enfant, autrefois appelée allocation de garde d'enfant à domicile, profite aux familles les plus aisées. La perversion de la dépense publique est totale quand certaines communes riches complètent cette aide par une aide municipale !

L'organisation de la solvabilisation de la demande pour accompagner une organisation publique, quel que soit le secteur concerné, est un enjeu essentiel. Je ne reviens pas sur la question des réductions d'impôt. J'ai évoqué le rôle des conseils généraux dans ces secteurs. Nous savons qu'une des conditions du développement des emplois à la personne est l'organisation des services d'aide à la petite enfance, aux personnes handicapées et aux personnes âgées. Ce n'est pas le choix que vous faites et nous ne pouvons que le regretter.

Je voudrais revenir sur un point que j'ai développé tout à l'heure. Vous ne prenez pas en compte le droit des personnes et le besoin de qualité des services d'aide à la personne. Je ne suis pas convaincue par le dispositif d'agrément que vous proposez. Comment allez-vous articuler cet agrément national et la loi de janvier 2002 ? Alors que les conseils généraux sont en train d'organiser des missions publiques, allez-vous cumuler l'agrément national et un agrément départemental ?

M. Maurice Giro, rapporteur. Mais qui donnera l'agrément aux conseils généraux ?

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Comment allez-vous organiser la tarification, qui dépend des conseils généraux ? L'heure d'aide à domicile prise en charge par la CNAF, qui s'amenuise d'ailleurs de plus en plus, est de 2 euros en dessous du prix moyen de l'aide à domicile, ce qui crée de nombreuses difficultés aux services d'aide à domicile pour organiser la professionnalisation de ce secteur. Je vous assure qu'il existe un lien direct entre la reconnaissance du droit de la personne, la professionnalisation et l'organisation d'une mission publique pour les services d'aide à la personne. Et nous n'avons pas du tout le sentiment que votre texte répond à ces questions.

J'en viens à la lutte contre la précarité des emplois. La professionnalisation du secteur des services à la personne sera utile aux personnes bénéficiant de ces services, leur assurant un service de qualité, comme aux employés de ces secteurs, leur assurant de bonnes conditions de travail. Ces secteurs doivent disposer d'un encadrement de qualité. Ces deux aspects sont essentiels.

C'est particulièrement vrai pour l'aide aux personnes âgées. Ce secteur se caractérise par un rythme du travail très soutenu, associé à une grande parcellisation du temps de travail. Tous ici, surtout ceux qui sont élus d'une circonscription rurale, connaissent la durée du travail des personnes qui travaillent dans ces secteurs. Originaire d'une région où il neige abondamment, je peux vous assurer qu'il est très difficile de travailler en tant qu'aide à domicile quand la neige est tombée et qu'il fait très froid. Gaëtan Gorce, élu de la Nièvre, le sait bien aussi. Cela montre à quel point l'organisation de la prise en charge du temps de travail, dont celui du transport, est essentielle pour les salariés comme pour les personnes âgées.

Pour satisfaire l'exigence de qualité des services à domicile et la sécurité des familles, plusieurs moyens doivent être mis en œuvre : la délivrance d'un agrément aux intervenants et aux associations, en particulier dans le cas d'un emploi direct, et l'exercice d'un contrôle. J'ai eu l'occasion, il y a quelque temps, de discuter avec la directrice d'une importante association de maintien à domicile de ma circonscription. Pour elle, le contrôle qu'exerce actuellement la direction de la consommation sur l'ensemble des secteurs du maintien à domicile est très satisfaisant, car le contrôle est nécessaire pour être reconnu par tous les publics concernés. Ce n'est pas un danger pour ces services, mais un moyen de reconnaissance, donc de développement.

Or quel personnel correspond actuellement à cette évaluation ? Dans les administrations, dans les dispositifs successivement mis en place, avons-nous prévu de telles structures ? L'agence nationale des services à la personne ne sera-t-elle qu'un cadre définissant la qualité ou disposera-t-elle de moyens pour développer le contrôle et l'évaluation de ces secteurs ?

J'en viens à la professionnalisation, que j'ai déjà abordée en évoquant le fonds de modernisation. Très souvent, quand on parle de professionnalisation, on pense à la formation des salariés. Mais la professionnalisation ne s'arrête pas à cela, elle porte aussi sur les moyens des associations, qu'elles soient privées, à but lucratif, qu'elles s'occupent d'encadrement ou de soutien aux familles. Je vous parlais tout à l'heure des directeurs des ressources humaines. L'organisation des services est d'une telle complexité que tant que l'on n'acceptera pas de dépenser pour des dispositifs d'offre de services, cela ne fonctionnera pas. J'espère, madame la ministre, que dans le cadre du fonds de modernisation du maintien à domicile, que vous avez repris, vous ferez en sorte que l'obligation...

Dois-je conclure, monsieur le président ?

M. le président. Non, mais si vous souhaitez être solidaire de votre collègue Daniel Paul...

M. Daniel Paul. J'écoute avec attention !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il ne me demande rien, monsieur le président !

M. Pierre-Louis Fagniez. Il trépigne au contraire !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. La professionnalisation est un élément important, car elle assurera la structure et la solidité des services. Elle comprend également un important plan de formation. Les métiers liés à l'aide à la personne attireront les gens à partir du moment où ils proposeront des filières solides. Où en est, par exemple, le baccalauréat professionnel médico-social ? Il avait été envisagé parce qu'il n'existait pas de filière après le BEP sanitaire et social. Peut-être ce baccalauréat a-t-il été mis en place ? J'insiste sur ce point parce que, si l'on veut que ces métiers attirent, ils doivent offrir de bonnes conditions de travail aux employés mais également l'espérance de voir leur carrière évoluer, qu'ils soient aides-soignants ou aides médico-psychologiques. C'est un point essentiel.

J'ai bien vu que le référentiel des métiers est au cœur de votre dispositif. L'agence aura-t-elle un poids sur ce point, ou n'en aura-t-elle pas ? C'est essentiel.

M. Maurice Giro, rapporteur. Cela dépend des employeurs !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Non, c'est aussi une responsabilité publique, et je vais vous expliquer pourquoi.

Il est également essentiel de régler, car nous y sommes déjà confrontés s'agissant des emplois médico-sociaux à domicile, la problématique de l'empiétement ou pas sur le secteur de la santé. Je ne sais pas si vous avez été sollicité par les infirmières à domicile, qui voient avec une grande inquiétude le secteur du travail à domicile s'installer et, peut-être, prendre une partie de leur place. Je ne suis pas de celles qui ont peur car je pense que nous devons bouger, mais je peux vous assurer que si, dans la logique de la réflexion sur les filières, les pouvoirs publics ne sont pas suffisamment vigilants pour faire un vrai travail d'évolution,...

M. Maurice Giro, rapporteur. Ça ne relève pas du projet de loi !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Ce n'est pas dans le projet de loi, c'est dans le plan, dans le cadre des filières. Sur ces questions essentielles, nous n'avons pas de réponse. Il nous faudrait pourtant avoir des réponses d'une grande solidité.

Comme nous, madame Vautrin, vous avez constaté combien il était compliqué, lorsque nous avons commencé à parler de la prestation de compensation avec votre collègue de l'époque, de savoir si la prestation devait payer des aides soignantes pour la toilette, des infirmières, etc. C'est la même problématique qui est posée ici dans le développement des filières. Est-ce que ce sont des métiers un peu différents qui vont être créés ? Empiéteront-ils sur le secteur paramédical et sanitaire ou pas ? Ce sont des questions réelles. Je le souligne d'autant plus volontiers que tous les pays européens y sont confrontés, et pour être voisine de la Suisse et travailler avec beaucoup de responsables suisses de collectivités locales, je sais que c'est exactement la question qui leur est posée. Comment organiser les nouveaux métiers de prise en charge ? Uniquement comme des emplois de services marchands ? Est-ce que ce sont des domaines d'emplois de services plus organisés, pas forcément publics, en tout cas sous la responsabilité de missions publiques relevant du champ de la santé et du médico-social ? Ces questions sont devant nous. Ce projet de loi, je dirai même le plan, monsieur Borloo, n'aborde pas du tout ces points. Or je suis persuadée que ce secteur sera un des plus importants.

De la même façon, et vous en avez aussi parlé dans vos interventions, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, il n'est pas du tout simple de trouver le bon équilibre avec les artisans. Parce que, vous l'avez dit, s'il n'y a pas égalité dans le traitement, il risque d'y avoir une grande inquiétude. Vous le constatez : ça coince, car je ne suis pas sûre que ce que vous avez proposé soit suffisant.

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Alors, ne faisons rien !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Non, vous nous connaissez vraiment mal ! De vraies questions nous sont posées : de quoi parle-t-on à propos du champ des emplois de services ? Quelle est la part du champ de la santé ? Quelle est la part du médico-social ? Quel est l'emploi de service nouveau à créer ? Nous qui avons participé à la mise en place des emplois jeunes, nous avons bien vu l'ampleur des emplois nouveaux, des services nouveaux, à laquelle nous avons répondu, et combien il aurait été intéressant de les maintenir pour permettre une meilleure organisation des secteurs. Vous n'en avez pas fait le choix pour des raisons partisanes et idéologiques, et je le regrette profondément.

M. Maurice Giro, rapporteur. Ne mélangez pas tout !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Mais c'est la réalité ! Il y a une grande différence entre vous et nous dans la mesure où nous, nous avons fait confiance aux jeunes en leur disant très simplement : « On vous fait confiance sur une durée de cinq ans pour répondre à des demandes nouvelles » !

M. Guy Geoffroy. Mais vous n'avez rien prévu pour la suite !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Il n'y avait pas de sortie ! (« Si ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'était bien prévu, mais vous n'avez pas voulu en tenir compte ! Vous, sur le fond, vous ne vous engagez pas dans la mise en place d'une structuration d'offres de services qui permettrait vraiment de créer de bons emplois. Que ce soit compliqué, monsieur le ministre, je le sais, car je connais bien le dossier. Mais un des moyens pour y arriver est la mise en place d'un dispositif correct d'offre de services, de professionnalisation et de solvabilisation. À partir du moment où vous ne touchez pas à la réduction d'impôt telle qu'elle est, vous mettez en place un dispositif totalement inégalitaire. L'enjeu, c'est la structuration des services.

Je ne veux pas aller plus loin car l'obligation...

M. le président. Ce n'est pas une obligation, c'est le règlement !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Elle a droit à une heure et demie !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Oui, le président me l'a signalé, mais j'utilise mon temps de parole comme je l'entends. Merci de me défendre, madame Hoffman-Rispal !

J'en viens, pour conclure, aux motifs d'inconstitutionnalité (« Enfin ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Premièrement, l'accès à un logement décent - je n'en avais pas parlé, comme je n'ai pas parlé du contrat d'avenir, mais je sais que mes collègues y reviendront tout à l'heure - est un objectif de valeur constitutionnelle. La loi qui a posé à plusieurs reprises l'exigence d'un logement décent nous impose de ne pas revenir sur cet impératif, conformément à la jurisprudence constitutionnelle dite du « cliquet anti-retour ».

Il y a inconstitutionnalité pour un double motif.

Premier motif : en louant des logements de moins de 9 mètres carrés, vous contrevenez à la définition du logement décent, posée en application de la loi, qui dispose qu'un « logement décent » est celui « ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation ». Or il y a bien un risque pour la sécurité ou pour la santé à vivre dans moins de 9 mètres carrés.

Denis Jacquat disait récemment, lors d'une réunion de la commission des affaires sociales, qu'on est en train de casser toutes les chambres de personnes âgées dans les structures d'hébergement parce que celles qui font 9 mètres carrés ne répondent pas aux normes. On met ainsi en place des dispositifs beaucoup plus importants et on ouvre le champ des locations de moins de 9 mètres carrés.

Deuxième motif : comme l'a dit le Conseil constitutionnel, « il appartient au législateur de mettre en œuvre l'objectif de valeur constitutionnelle que constitue la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent ». Il n'appartient pas au législateur de se dessaisir de son pouvoir, encore moins de vider de tout contenu le droit au logement. Or vous vous abritez derrière le décret pour abaisser les exigences en matière de logement décent, et vous amputez le législateur de sa compétence en matière de définition et de garantie du droit à un logement décent.

Subsidiairement, on peut s'interroger sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à traiter dans ce projet de loi cette question alors qu'un projet de loi relatif à l'habitat pour tous est dans les cartons.

Pour conclure, c'est finalement l'absence de réflexion globale sur ce qu'est un service à la personne qu'il faut dénoncer.

Le débat sur la place qu'il faut accorder aux différents types de services à la personne n'a pas été mené, me semble-t-il, et ce que j'ai dit tout à l'heure le prouve : doit-on mettre dans un même dispositif l'accueil de jeunes enfants et l'assistance aux personnes âgées d'une part, les activités de ménage ou de jardinage d'autre part ?

Votre empressement à créer à tout prix de l'emploi - mais il est légitime qu'on fasse tout pour créer le plus rapidement possible de l'emploi - vous a conduits à faire achopper le débat fondamental sur la définition de l'activité de service à la personne.

J'aurais bien aimé que la façon dont est abordée cette définition dans tous les pays soit reprise ici. Elle ne l'a pas été. Nous aurions pu le faire dans le cadre de la commission, monsieur le rapporteur, mais cela n'a pas été le cas.

Alors qu'il aurait fallu décortiquer le concept même de service à la personne, vous avez préféré constituer un fourre-tout... Parce que ce secteur est émietté par la multiplicité des services qu'il recouvre, des modes d'organisation et de fonctionnement, des types d'intervenants, vous avez opté pour un mode de compréhension globale, alors qu'il aurait justement fallu réfléchir à cela.

Madame Vautrin, je peux vous assurer qu'une des conditions pour bien poser les choses, c'est la référence à la loi du 2 janvier 2002. À partir du moment où cette référence est posée, vous vous sortez en partie de cette difficulté.

Il y a bien une différence de fond entre le service apporté à l'individu en tant qu'être humain, et le service apporté à l'individu en tant que consommateur. Il y a une différence entre ce qui touche à la dignité même de l'être humain - et c'est bien l'enjeu de la loi du 2 janvier 2002 - et ce qui concerne des aspects plus quotidiens, voire superficiels, de la vie humaine.

Il y a donc une différence de fond entre le service à domicile et le service à la personne : apporter des soins à une personne dépendante ou tondre le jardin de cette même personne dépendante, ce n'est pas la même chose.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Pas d'amalgame !

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Cette absence d'analyse de fond vous conduit à ne pas voir les droits essentiels de certaines personnes : droit à l'autonomie de la personne âgée ou handicapée, droit au développement et à l'épanouissement du jeune enfant. Dès lors, les dispositifs choisis sont insuffisants, voire inadaptés.

Nous ne pouvons donc que conclure à l'irrecevabilité du projet de loi sur les services à la personne et la cohésion sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Merci, madame Guinchard-Kunstler de ne pas avoir utilisé tout votre temps de parole.

La parole est à la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Madame Guinchard-Kunstler, il est plusieurs domaines sur lesquels il est indispensable de revenir tout de suite afin de dissiper de fausses inquiétudes.

Vous parliez il y a un instant de la notion de particulier employeur. De grâce, nous ne changeons rien à ce sujet ! La seule chose que nous faisons, et je ne comprends pas que vous n'en reconnaissiez pas le bien-fondé, c'est d'essayer d'apporter plus de droits sociaux aux salariés. D'où la nécessité d'une déclaration au réel parce que, on le sait, aujourd'hui, la tendance pour le particulier employeur est une déclaration forfaitaire qui donne moins de garanties aux salariés. Voilà un premier axe sur lequel il me paraît tout à fait surprenant que nous ne puissions nous retrouver.

Ensuite, parler de « confiance aux jeunes » à propos des emplois jeunes est un peu facile. On connaît tous aujourd'hui le coût des emplois jeunes : vingt milliards d'euros depuis 1997. Pour cette année 2005, ce sont encore 785 millions d'euros.

Madame Guinchard-Kunstler, vous faisiez allusion à ce que vous avez réglé. Quant à moi, je peux vous parler de la façon dont, cette année, notre gouvernement a été conduit à accompagner la FEHAP parce qu'aucune sortie n'était prévue pour tous ces emplois dans une association dont chacun s'accorde à souligner le rôle dans le domaine médico-social. Voilà un exemple concret d'un dispositif généreux, reconnaissons-le, mais qui avait simplement oublié la sortie. Pour les jeunes concernés, c'était tout de même un peu difficile !

S'agissant des dispositions de la loi de 2002, là encore, il faut que les choses soient claires : ce projet n'abroge aucune disposition de la loi de 2002 relative à l'agrément des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Incontestablement, ce texte nous permet une approche positive, puisque l'objectif est de certifier les autres activités. Moi, je ne prendrai pas l'exemple de la personne dépendante et de la tonte de la pelouse. Mais lorsqu'on tond la pelouse, on entre au domicile d'une personne, on est donc dans un lieu où il y a nécessité de confiance. En ouvrant sa porte à quelqu'un, si l'on est une femme seule, on aime autant être rassurée sur la qualité de la personne qui vient chez vous ! C'est cela, cette idée d'accompagnement. Cela ne remet aucunement en cause ce qui avait été prévu dans le secteur social et médico-social.

Troisième mauvaise idée sur la notion du chèque emploi service universel : vous faites un amalgame en reprenant un discours que l'on connaît bien, madame Guinchard-Kunstler, sur les réductions d'impôt qui ne bénéficieraient qu'aux riches ! Vous connaissez suffisamment ces sujets pour savoir que ce que nous avons cherché, en donnant à l'entreprise les moyens d'aider ses salariés, c'est précisément de donner à celui qui jusqu'à aujourd'hui n'avait même pas imaginé avoir quelqu'un qui vienne faire deux heures de ménage chez lui d'y avoir droit, ce qui lui facilitera la vie. C'est bien une avancée sociale. Alors, de grâce : ne faites pas croire qu'il s'agit du contraire !

Voilà trois idées clés, trois exemples que je choisis parce qu'ils montrent bien la philosophie qui est la nôtre : aller plus loin et essayer d'apporter plus de services dans une société qui, comme le disait Jean-Louis Borloo, n'a pas aujourd'hui ce réflexe, ne sait pas consommer du service.

Vous demandez s'il était vraiment nécessaire de déclarer l'urgence pour une telle question. Mais, quand il s'agit de créer de l'emploi, nous n'avons pas de temps à perdre. Le Premier ministre le rappelait il y a une semaine : nous avons le devoir de tout tenter pour permettre à nos concitoyens de retrouver le chemin de l'emploi.

On le sait, le secteur des services à la personne a ceci de particulier qu'il peut permettre à des gens sans emploi et sans formation de trouver l'un et l'autre. En outre, les emplois en question ne sont pas délocalisables. Nous comptons ainsi créer 500 000 emplois à temps plein ou équivalents temps plein.

M. Daniel Paul. Ce n'est pas vrai !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. On sait le travail qu'effectuent les associations, notamment la FEPEM, et l'on sait que les prestataires aideront les salariés à travailler dans plusieurs endroits, car c'est leur multiplication qui permettra de constituer un temps plein. Il ne s'agit donc pas de temps partiel subi, mais, au contraire, d'un emploi qui permettra d'aller plus loin avec, en parallèle, un agrément qualité.

Comme vous, nous nous intéressons aux personnes âgées et aux personnes handicapées et sommes convaincus qu'il est nécessaire de leur proposer davantage de services. Une personne dépendante a besoin non seulement de l'approche médico-sociale, mais également d'une aide domestique. Nos concitoyens expriment aujourd'hui la volonté de rester à leur domicile le plus longtemps possible. Au-delà du travail remarquable qui est fait par les équipes médico-sociales, nous savons qu'il faut également favoriser le maintien à domicile et aider les aidants. Il y a là aussi des sources d'emplois nouveaux pour répondre aux attentes de nos concitoyens.

Vous parliez également de la nécessité d'aider nos concitoyens, notamment les salariés du service à domicile, à sortir de la précarité. C'est bien la raison pour laquelle, à l'initiative de Jean-Louis Borloo, nous avons prévu, dans la loi de cohésion sociale, que tous les diplômes sociaux seront accessibles à la validation des acquis de l'expérience avant le 31 décembre 2005. C'est là un moyen de reconnaissance et d'évolution tout à fait important.

Dans un autre domaine, mais dans le même souci de permettre de sortir de la précarité, nous avons, avec Philippe Douste-Blazy, travaillé sur le statut des assistants maternels et des assistants familiaux.

Vous parliez tout à l'heure de l'APA pour les personnes âgées. Là aussi, ce texte de loi prévoit que, avec l'accord explicite et préalable de la personne âgée et de sa famille, l'APA pourra être directement versée au prestataire. C'est encore un moyen de simplifier les procédures.

Je partage votre constat sur la nécessité de mobiliser la branche famille et la branche vieillesse, par le biais du fonds d'action sociale de la CNAV et de la CNAF. Mon collègue Xavier Bertrand conduit la négociation avec ces organismes, puisqu'il convient de travailler sur leur convention d'objectifs et de gestion. Là aussi, il faut que nous puissions continuer à avancer.

Vous avez beaucoup parlé du FMAD. Il était plus que nécessaire que nous soyons à même de rendre ce fonds plus opérationnel, tant il était sous-consommé, probablement par manque de connaissance. Là aussi, dans le texte que nous avons mis en place avec Marie-Anne Montchamp, nous avons permis d'avancer sur ce sujet.

Vous demandiez tout à l'heure à quoi allait servir l'agence. Elle a pour objectif de permettre un processus de certification qui garantira une meilleure qualité et un meilleur suivi. Si nous voulons développer ces services, il faut aussi que tous ceux qui les utilisent puissent être certains du maintien de la qualité dans le temps.

Il est d'autre part important de rappeler que non seulement le chèque emploi service universel permet de fusionner en un seul titre le CES et le titre emploi service, mais qu'il assure en outre un préfinancement qui n'existait pas jusqu'à ce jour et qui offre de nouvelles possibilités.

L'une et l'autre, nous avons eu l'occasion de travailler pour les personnes âgées et nous savons combien ces emplois sont importants pour elles : c'est pourquoi notre société doit s'engager. C'est ce qu'entend faire ce texte, qui est équilibré, qui tend à créer de nombreux emplois et qui, en même temps, met en place des dispositifs qui permettront d'accompagner de façon plus déterminée le plan de cohésion sociale. Il importait donc que tout cela soit fait rapidement, pour répondre au défi de l'emploi.

Vous avez invoqué divers motifs d'inconstitutionnalité, considérant que des dispositions relatives au logement n'ont pas leur place dans un tel texte et rappelant que l'accès à un logement décent est un principe constitutionnel : mais le présent projet de loi n'y contrevient aucunement. Il comporte diverses propositions relatives à la cohésion sociale et, comme la loi du 18 janvier, des mesures en faveur du logement, pilier de la cohésion. Ces articles ont donc bien toute leur place dans le texte qui vous est proposé aujourd'hui. Notre discussion permettra d'avoir très rapidement un texte novateur, résolument engagé en faveur de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Nous en venons aux explications de vote sur l'exception d'irrecevabilité.

La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal, pour le groupe socialiste.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Si, en raison de mes fonctions au sein du conseil général de Paris, je ne connaissais pas un peu le secteur médico-social et si je m'étais contentée, monsieur le ministre, de vous écouter les yeux fermés, j'aurais pu me dire qu'on allait créer 500 000 emplois, que c'était superbe, que tout allait bien, qu'il ne fallait plus s'inquiéter. Mme Vautrin ne vient-elle pas encore de rappeler ce chiffre de 500 000 ? Mais quand on examine le texte, on s'aperçoit qu'il ne s'agit que de 165 000 équivalents temps plein, ce qui correspond en effet à 500 000 emplois à temps partiel. En ce qui concerne vos objectifs, je ne suis donc pas convaincue de la clarté du message.

MM. Couanau, Perrut ou Jacquat ne me démentiront pas : nous avons tous dit en commission qu'il faudrait développer les emplois de service et d'accompagnement au-delà du médico-social. Le bricolage, le repassage, le jardinage, ce n'est pas du médico-social.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C'est bien ce que nous disons !

M. Maurice Giro, rapporteur. On n'a jamais dit le contraire !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. J'aurai l'occasion d'en reparler tout à l'heure dans la discussion générale, mais, dans le cadre de la mise en place de la PSD, de l'APA, du Fonds de modernisation de l'aide à domicile, qui vient d'être évoqué, des lois de décentralisation du 13 août 2004 ou du décret de tarification des services prestataires, les départements ont essayé de motiver leurs services, les associations, les prestataires d'aide à domicile, de favoriser la polyvalence des secteurs, en développant des services de soins à domicile ou en collaborant avec d'autres services, de manière à garantir une qualité des services au domicile des personnes âgée, en situation de handicap ou fragilisées.

Souvent, je suis contactée au téléphone par des entreprises qui veulent créer de l'emploi de service et je peux témoigner que, quand je leur demande si elles travaillent avec un SSIAD, elles ne savent même pas ce que c'est.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Elles ne savent pas non plus ce qu'est un CLIC !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. En tout cas, cette inquiétude était partagée, la semaine dernière, sur tous les bancs de la commission. Nous devons poursuivre tout ce que nous avons mis en place. Le jardinage, ce n'est pas une aide à la vie quotidienne, car cela ne fait pas partie des tâches essentielles pour une personne âgée. Une aide à domicile est censée aider la personne âgée à accomplir des tâches de la vie quotidienne, mais on n'attend pas non plus qu'elle les fasse à sa place. Il s'agit, comme vous l'avez dit, monsieur Borloo, d'apporter de la qualité, de tisser un lien social et convivial : cet aspect humain, relationnel, demande une véritable formation de personnels qualifiés.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Nous sommes d'accord !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Sans doute, vous êtes d'accord. Vous parlez de l'agrément national : les départements eux-mêmes ont travaillé à l'élaboration d'un cahier des charges, par exemple en matière de schémas gérontologiques, avant d'essayer de mettre en place une politique. Cela n'a pas été simple car ils n'étaient pas habitués à avoir la PSD.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. On ne touche pas à ça !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Tous, tant bien que mal, nous avons essayé de créer de l'emploi, mais il ne serait pas souhaitable que cela se fasse au détriment de la qualité.

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Bernard Perrut. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, si nous avons écouté attentivement Mme Guinchard-Kunstler, nous n'avons pas trouvé ses arguments très probants pour ce qui est de la prétendue inconstitutionnalité du projet de loi.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Le contraire m'aurait surprise !

M. Bernard Perrut. Pourtant, vos réflexions, madame, ne sont pas dénuées d'intérêt, car, tous, nous souhaitons répondre aux attentes sur le terrain et développer des services de qualité.

Vous avez décelé, dans les propos de M. le ministre et de Mme la ministre, un certain empressement à créer de l'emploi. C'est bien ce qui nous réunit. Ce texte est un pan important de la loi de cohésion sociale, dont le but est précisément de créer de l'emploi. Il est animé par un souffle, par un esprit nouveau, qui peut surprendre, mais qui entend répondre, de manière très pragmatique, aux difficultés rencontrées sur le terrain.

En effet, des besoins nouveaux s'expriment, notamment en raison de la révolution de la longévité. Dans le cadre de ses fonctions, Mme Vautrin a beaucoup travaillé sur ce sujet, et je crois que nous pouvons lui faire confiance, aujourd'hui, lorsqu'elle nous apporte certaines garanties.

Il faut mettre fin aux blocages qui freinent la croissance dans ce secteur. Toutefois − et c'est là que je rejoins Mme Guinchard-Kunstler −, nous devons obtenir le maximum de garanties sur le maintien de la qualité des services. Il faut, pour cela, éviter qu'apparaissent sur notre territoire deux sortes d'associations : celles qui relèveraient de la loi de 2002 et du secteur médico-social, et d'autres qui pourraient s'affranchir totalement de ces règles. Mais je crois que Mme la ministre aura l'occasion de nous préciser qu'on ne remet pas en cause les règles existantes...

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Absolument pas !

M. Bernard Perrut. ...et que les conseils généraux continueront de délivrer un agrément dans le cadre des plans qu'ils ont définis. D'autres structures pourront exister et demander cet agrément de qualité par le biais de la direction du travail et de l'emploi. Sans doute faudra-t-il que vous nous précisiez que cet agrément répond lui aussi à des critères clairement définis, car même si ces structures obtiennent des agréments quelque peu différents, elles ne devront pas moins être proches les unes des autres. Il faudra surtout que, dans l'opinion publique, chacun sache distinguer qui fait quoi. Cette loi de promotion de tout ce qui concerne l'aide à la personne prévoit cependant des activités totalement différentes. C'est certainement aussi ce qui fait sa richesse.

Dans son principe, le texte nous semble bon, sachant que la discussion nous permettra de le faire évoluer de façon que nous soient apportées, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, toutes les garanties nécessaires.

Bien évidemment, madame Guinchard-Kunstler, le groupe UMP rejette la motion de procédure que vous nous avez présentée. Aucun de vos arguments...

M. Pierre-Louis Fagniez. Auxquels elle ne croyait pas beaucoup elle-même !

M. Bernard Perrut. ...ne permettrait en effet de l'adopter, d'autant plus que les principales associations prestataires de services et d'aide aux personnes âgées,...

M. Jean-Louis Dumont. Et à la famille !

M. Bernard Perrut. ...ont, ces derniers jours, porté un jugement positif à l'égard de ce texte. Je ne vois donc pas comment les parlementaires que nous sommes pourrions, dans ces conditions, porter un jugement négatif sur des mesures qui permettront de développer sur le terrain l'offre de services à la personne et d'y faire apparaître de nouveaux acteurs, et qui verront leur attractivité renforcée tant auprès des personnes directement concernées que de celles qui travailleront dans ce domaine.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP demande donc à l'Assemblée de repousser cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Daniel Paul. Monsieur, madame les ministres, Mme Guinchard-Kunstler a parfaitement posé les différentes problématiques que soulève ce texte, à cette nuance près que, selon moi, ce dernier s'inscrit dans la logique qui est la vôtre depuis 2002.

Dans un secteur - je reviendrai sur les chiffres - fortement porteur d'emplois attendus tant par les employeurs que par les employés - encore que l'approche du problème ne soit pas toujours la même -, vous vous appuyez en effet sur cette attente pour persévérer dans la voie de la réforme, pour reprendre vos termes, ou plutôt, selon les nôtres, dans celle de la déréglementation du droit du travail, sans tenir compte du message qui nous a été adressé à tous voilà une quinzaine de jours par la population.

Nul ici ne remet en cause l'importance des services à la personne, en particulier pour les publics les plus fragilisés. Mais si l'urgence commande, la situation ne justifie pas pour autant que l'on impose une logique de déréglementation...

M. Guy Geoffroy. Qu'est-ce que cela vient faire ici ?

M. Daniel Paul. ...ou que l'on fasse n'importe quoi : les ordonnances que le Gouvernement compte prendre ne vont-elles pas, en effet, bousculer un tant soit peu nombre de dispositifs actuels ?

Mme Guinchard-Kunstler a posé quatre questions que j'évoquerai à mon tour rapidement.

Notre collègue s'est d'abord interrogée sur la nature des emplois ainsi créés. J'aborderai pour ma part cette question sous l'angle de leur nombre. Vous parlez, monsieur le ministre, de 500 000 emplois créés. Cet après-midi, un débat était organisé sur votre texte par une chaîne de télévision nationale. Selon tous les spécialistes qui y participaient, dont certains étaient des responsables d'organismes qui ont été cités ici, les activités de services à la personne représentent, selon une moyenne européenne, une durée de travail de huit heures par semaine. Si l'on prend comme base 40 heures hebdomadaires (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. le président. M. Daniel Paul a certainement fait une erreur !

M. Daniel Paul. Pas du tout, monsieur le président : j'arrondis à 40 heures pour faciliter la compréhension, non pour faire un sort à la semaine de 35 heures !

Sur cette base de 40 heures, on ne parvient donc, monsieur le ministre, qu'à 100 000 emplois équivalents temps plein et non à 500 000. Mais nous aurons l'occasion de revenir sur ce sujet au cours de la discussion.

Mme Guinchard-Kunstler s'est ensuite demandé comment l'on organisait l'offre de services, c'est-à-dire comment on la solvabilisait. Sur ce point, permettez-moi de vous dire que vous faites fort ! Sans vouloir reprendre les arguments développés par notre collègue, il n'en reste pas moins que, là aussi, vous vous appuyez sur une attente très forte en matière d'emplois pour, finalement, favoriser une nouvelle fois les plus aisés, pour ne pas dire les plus nantis ! Ce sont eux qui seront en effet les plus grands bénéficiaires du dispositif que vous proposez.

Selon M. le rapporteur, il s'agirait en l'occurrence de lutter contre le travail au noir. N'existerait-il pas d'autre moyen pour le faire...

M. Maurice Giro, rapporteur. Je n'en ai pas trouvé !

M. Daniel Paul. ...que de multiplier les aides fiscales en faveur de personnes qui n'en ont que peu besoin ?

Quant aux aides aux entreprises, on nous dit qu'elles vont permettre des avancées sociales.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Tout à fait !

M. Daniel Paul. À bon compte, alors ! Car les aides qui ont été octroyées au moyen de la plupart des dispositifs qui ont été mis en place n'ont finalement créé que peu d'emplois.

Quant à la question de la professionnalisation, qui a également été posée par notre collègue, elle fait apparaître une crainte majeure chez les personnes ayant vocation à entrer dans le dispositif : celle de la précarité du fait, tout simplement, de la concurrence qui sera organisée dans le secteur et qui, on le sait, ne pourra que les tirer vers le bas.

Enfin, notre collègue a abordé la question du travail féminin. Permettez à cet égard à un « non-féminin »...

M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Disons « un homme » !

M. Daniel Paul. ...de l'évoquer à son tour.

Le travail féminin est quasiment synonyme dans notre société de petit boulot et de salaire d'appoint. Le meilleur, voire le seul, moyen de surmonter cette difficulté, que l'on ne peut balayer d'une simple pichenette, aurait été d'afficher une véritable volonté de promotion. Or, lors de la discussion en commission, monsieur le rapporteur, l'amendement que j'avais présenté et tendant à mettre au cœur du dispositif la promotion professionnelle, a été refusé par votre majorité. Permettez donc que je fasse part de mon inquiétude dans ce domaine.

Une véritable volonté de promotion ne peut passer que par l'organisation collective des services, de façon à mettre en place une véritable protection des salariés.

M. le président. Je vous demande de bien vouloir conclure, mon cher collègue.

M. Daniel Paul. Pour toutes ces raisons, je voterai l'exception d'irrecevabilité présentée par Mme Guinchard-Kunstler, en rappelant de surcroît que les ordonnances que l'on nous annonce risquent de remettre en cause des dispositifs de qualité. Or ces derniers offraient, au bénéfice de toutes les personnes concernées, des moyens d'améliorer le texte qui nous est proposé. Je crains donc fort que l'on n'aboutisse à certains déboires.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Francis Vercamer. J'ai écouté attentivement Mme Guinchard-Kunstler et je tiens à la féliciter pour le ton qu'elle a employé. C'était en effet un ton non agressif,...

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C'est vrai !

M. Francis Vercamer. ...que l'on a rarement le plaisir d'entendre à la tribune lorsque des motions de procédure sont défendues. J'espère que les auteurs des motions suivantes feront de même car, outre que ce ton est agréable à écouter, il permet d'exposer clairement les problèmes.

Au reste, nombre de préoccupations que vous avez évoquées, madame Guinchard-Kunstler, sont largement partagées sur tous nos bancs, qu'il s'agisse de la formation des salariés, de leur qualification ou du risque de concurrence déloyale. L'égalité de traitement entre les entreprises artisanales, entre les employés ou entre les employeurs particuliers est au cœur de notre débat. Aussi celui-ci devrait-il aider à éclairer tous ceux qui, craignant que les 500 000 emplois escomptés soient créés par transfert d'emplois existants au sein de l'artisanat vers d'autres types d'emplois, se posent la question de savoir s'il y aura vraiment des créations d'emplois.

Je fais, cette semaine au moins - à la différence de la précédente -, confiance au Gouvernement (Sourires)...

M. Jean-Louis Dumont. Tout arrive !

M. Francis Vercamer. ...pour répondre à cette question comme à celles que nous soulèverons dans la discussion générale et tout au long de l'examen des amendements que nous avons déposés.

Ce projet de loi est peut-être le dernier texte sur l'emploi dont nous aurons à débattre au cours de la législature. Les nombreuses questions qu'il soulève, telles celles qu'ont évoquées M. Perrut, M. Daniel Paul ou Mme Guinchard-Kunstler, montrent qu'il est typique de ces textes où le diable se cache dans les détails.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Tout à fait !

M. Francis Vercamer. Aussi convient-il qu'il soit répondu à toutes les questions car il ne faudrait pas que le présent projet de loi, qui devrait recueillir l'avis favorable de tous tant il présente un intérêt pour l'emploi, soit finalement néfaste à celui-ci.

Vous l'aurez compris, le groupe UDF ne votera pas cette exception d'irrecevabilité afin de pouvoir discuter du texte qui nous est soumis, et de l'améliorer.

M. le président. Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité.

(L'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.)

M. le président. Mes chers collègues, compte tenu de l'heure et en accord avec le Gouvernement, je propose que la question préalable déposée par le groupe des député-e-s communistes et républicains ne soit opposée qu'au début de la prochaine séance.

Dans ces conditions, la suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    6

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, n° 2348, relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale :

Rapport, n° 2357, de M. Maurice Giro, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot