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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 14 septembre 2006

15e séance de la session extraordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

énergie

Suite de la discussion,
après déclaration d’urgence,
d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi relatif au secteur de l’énergie (nos 3201, 3278).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Ce matin, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant aux amendements nos 137623, 137624 et 137621 de M. Yves Cochet portant articles additionnels avant l’article 1er.

M. Daniel Paul. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour un rappel au règlement.

M. Daniel Paul. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 1, de notre règlement.

Cela fait plusieurs jours maintenant que nous discutons de la politique énergétique de notre pays et plus particulièrement du gaz. Mais l’électricité n’est pas étrangère à ce dossier. Et, à la lecture d’une dépêche de l’AFP, il me semble nécessaire de rappeler un certain nombre de choses.

Voici ce qu’a déclaré M. Pierre Gadonneix, PDG d’EDF dans un entretien publié jeudi dans le supplément économie du journal Le Figaro : « Le tarif réglementé transitoire de l’électricité ne doit pas “pénaliser” l’investissement dans les capacités de production. Ce tarif ne doit pas se situer en dessous du prix de revient prévu dans le cadre des nouvelles installations. » Le PDG d’EDF a apporté en outre la précision suivante : « La référence du futur EPR à Flamanville s’élève à 46 euros par mégawatt-heure. Pour les moyens autres que le nucléaire, la fourchette s’établit entre 45 et 55 euros le mégawatt-heure, hors incidence des permis d’émission de CO2. »

Or, la commission des affaires économiques de l’Assemblée a adopté le 30 août dernier un amendement prévoyant un mécanisme permettant aux entreprises ayant choisi les prix du marché libre de l’électricité de revenir pendant deux ans à une forme de tarif réglementé.

Je veux redire ici que ce n’est pas sur la base de tarifs déréglementés, qui seront ni plus ni moins que les prix du marché, que doivent s’établir les capacités de renouvellement de l’entreprise EDF, de son parc de centrales et de ses installations de production. Il faut faire en sorte de revenir à ce qui a toujours été la politique d’EDF, à savoir que les infrastructures, les réseaux et tout ce qui constitue les moyens périphériques permettant l’acheminement du courant, soient intégrés dans ce qu’on appelle le tarif. Celui-ci représente le coût de la production, du transport, de la distribution et de renouvellement des infrastructures. Il n’y a pas d’autres solutions pour assurer le devenir d’une réelle politique énergétique. Sauf à engager fermement notre pays dans une logique qui n’est pas celle que l’on doit privilégier.

Je tenais à faire cette mise au point en début de séance car j’ai le sentiment que le PDG d’EDF se situe dans une orientation qui semble dangereuse pour l’avenir de la politique énergétique de notre pays et pour EDF.

M. le président. Il s’agissait davantage d’une mise au point que d’un rappel au règlement.

La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. Mon rappel au règlement porte sur le déroulement de nos travaux, et notamment sur ce qui s’est passé hier soir. Il y a effectivement des inquiétudes s’agissant d’EDF. Quel impact aura la privatisation de GDF sur cette entreprise et sur les tarifs de l’électricité ? Le débat que nous avons eu hier sur la mise en œuvre éventuelle de ce que nous appelons Énergie de France, sorte d’accord entre Gaz de France et EDF, était fort intéressant. On nous a dit que c’était impossible alors pourtant que, sur tous les bancs de cette assemblée, M. Soisson pour l’UMP, M. Dionis du Séjour pour l’UDF, M. Daniel Paul pour le groupe communiste, moi-même et quelques autres, nous avons montré qu’il serait possible de trouver une solution compatible avec les exigences du marché européen si l’on en avait réellement la volonté.

Il importe donc de ne pas faire fi de cette hypothèse dans nos débats. Nous devons malheureusement déplorer que le Gouvernement refuse catégoriquement de s’inscrire dans une réflexion de cette nature. Il est vraiment dommage qu’il refuse de nous répondre.

Enfin, la presse en faisant état, je reviendrai sur un point que j’ai déjà évoqué. Voilà environ vingt-quatre heures, j’ai demandé au président de la commission des affaires économiques, M. Ollier, d’organiser une rencontre avec une délégation de parlementaires belges compte tenu de la forte inquiétude exprimée par le Gouvernement belge, qui vit comme une opération très inamicale le projet de fusion entre Suez et Gaz de France. Comme Européens, nous ne pouvons évidemment pas faire fi de cette inquiétude. Mais je n’ai toujours pas eu de réponse du président de la commission des affaires économiques. Je conclurai donc ce rappel, pas forcément au règlement, par un rappel au président. (Sourires.)

M. le président. Il s’agissait donc d’un rappel au président de la commission (Sourires.)

Avant l’article 1er (suite)

M. le président. Nous en arrivons aux amendements nos 137623, 137624 et 137621.

Ces amendements ont déjà été présentés ce matin par M. Yves Cochet.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour donner l’avis de la commission sur ces trois amendements.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Si vous le permettez, monsieur le président, je commencerai également par faire une mise au point.

Mes chers collègues, nous sommes le jeudi 14 septembre 2006. Voilà exactement sept jours, le 7 septembre 2006, à quinze heures, la première séance de la session extraordinaire s’ouvrait avec l’appel en discussion du projet de loi portant sur le secteur de l’énergie, projet sur lequel nous sommes nombreux à travailler depuis des mois, projet auquel la commission a consacré de nombreuses heures de réunion et sur lequel la commission des finances, saisie pour avis, a également passé beaucoup de temps. Or que faut-il constater en ce 14 septembre ? Que nous n’avons pas encore commencé l’examen de l’article 1er du texte ! (« Incroyable ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Daniel Paul. Pas d’impatience, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Sur les quelque 137 000 amendements déposés, nous en avons examiné 2 641. Dans des circonstances normales, nous serions ravis d’avoir procédé à la discussion générale et examiné puis voté – en l’occurrence, ils ont tous été rejetés – 2 641 amendements. Mais en l’espèce, 2 641 sur 137 000, c’est fort peu !

M. Jean Launay. Vous caricaturez !

M. Christian Bataille. Vous préparez l’application du 49-3 !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. La confusion créée par les manœuvres de l’opposition est telle que, lorsqu’on appelle un amendement par le numéro qui lui est affecté, on se demande si l’on ne parle pas en anciens francs ! (Sourires.)

Au nom de la majorité, de la commission et de son président, je veux donc protester avec véhémence contre les manœuvres de l’opposition.

M. Jean Gaubert. Quelles manœuvres ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Je rappelle à ceux qui n’étaient pas présents hier matin que l’un de ses membres, une députée du Finistère qui appartient au groupe socialiste, a été jusqu’à dire que le but de la majorité était d’empêcher le vote de ce projet de loi, ce qui constitue un déni de démocratie.

M. Pierre Hellier. Tout à fait !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Dans le même temps – et je réponds là par avance aux arguments que certains ne manqueront pas de développer – l’opposition se plaint du traitement qui lui est fait. Si nous avons en effet examiné 2 641 amendements c’est qu’une bonne partie de ceux-ci ont été soutenus, défendus et argumentés par de nombreux membres de l’opposition.

M. Jean Launay. Vous faites durer le plaisir, monsieur le rapporteur !

M. Christian Bataille. Provocation !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Mais aujourd’hui, ceux-ci nous reprochent d’avoir répondu trop brièvement sur ces amendements.

J’appelle l’attention de l’opposition sur le fait qu’on ne peut pas tenir deux discours et donc multiplier les amendements pour retarder le débat tout en accusant la majorité et le rapporteur de la commission de ne pas répondre suffisamment sur lesdits amendements. Ce dernier argument n’est pas recevable et je tenais à l’exprimer ici officiellement.

M. le président. Mes chers collègues, les débats durent depuis 44 heures 54 minutes, sur lesquelles 9 heures 45 minutes ont été passés en 18 suspensions de séance, 92 rappels au règlement et 3 demandes de vérification de quorum. Cela revient à dire que quasiment le quart du temps des débats a été utilisé en moyens de procédure.

M. Michel Piron. Il fallait le dire !

M. Christian Bataille. Je vois que tout le monde a bien appris sa leçon !

M. François Brottes. Ce commentaire n’est pas très neutre, monsieur le président. On pourrait même dire qu’il est partisan!

M. le président. Vous pouvez poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Je vous remercie, monsieur le président, de confirmer ce que je viens de dire au nom de la majorité et de la commission.

M. Daniel Paul veut que nous débattions d’un amendement qui a été adopté en commission à mon initiative et qui concerne le tarif transitoire qui sera mis à la disposition des entreprises aujourd’hui pénalisées par la hausse des prix. J’invite l’opposition à tenir compte de l’ordre logique, et donc chronologique, des débats. En multipliant les sujets, il est clair qu’ils veulent embrouiller les esprits…

M. Christian Bataille. Monsieur le rapporteur, c’est de la provocation !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. …pour dire ensuite que les réponses que nous leur faisons ne sont pas assez claires.

M. François Brottes. Nous ne répondrons pas à la provocation du rapporteur !

M. Christian Bataille. Ni à celle du président !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie, pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements de M. Yves Cochet.

M. François Loos, ministre délégué à l’industrie. Monsieur le président, si vous le permettez, je commencerai par répondre au rappel au règlement de M. Daniel Paul.

Puisque M. Paul nous a cité un article du Figaro de ce matin, je rappelle comment, dans le système national, les tarifs et les prix sont élaborés. Les tarifs, comme vous le savez, sont censés couvrir les prix de revient actuels, et les résultats attestent que c’est probablement le cas. Quoi qu’il en soit, la CRE est en mesure de le vérifier.

Quant aux prix du marché, ils bénéficient d’une situation extraordinaire depuis un an, depuis qu’ont été institués en Europe les permis d’émission de gaz à effet de serre, c’est-à-dire de CO2. Ces prix ont beaucoup augmenté en quelques semaines car les producteurs ont pensé que, pour satisfaire les consommateurs, ils devaient produire plus, et donc acheter des droits d’émission dont ils ont répercuté le prix sur les consommateurs. En réalité, aucun opérateur français n’a eu à acheter des quotas d’émission car ceux qui leur étaient alloués étaient suffisants. Ils ont donc bénéficié d’un effet d’aubaine, au détriment des entreprises qui avaient choisi de passer au prix du marché.

D’autre part, les investissements peuvent jouer sur le prix de revient du kilowatt-heure. Nous estimons que ces investissements sont nécessaires dans les domaines de la production et du transport d’électricité. C’est la raison pour laquelle EDF, à notre demande, s’est engagée à investir 40 milliards d’euros à un rythme soutenu au cours des cinq prochaines années, notamment pour la construction de l’EPR prévu dans la loi d’orientation de 2005 et la construction de nouvelles centrales. Même si l’EPR ne devait être mis en service qu’en 2012, EDF réfléchit à un prix de revient prévisionnel qui en tient compte.

Entre la situation actuelle et la couverture totale en 2012, la marge est importante. M. Gadonneix étudie actuellement ce que sera le prix de revient du kilowatt-heure le jour où le parc d’EDF comprendra un EPR.

Il faut donc distinguer les prix du marché, en quelque sorte survalorisés du fait de l’effet des quotas de CO2, les tarifs, et les prix de revient, évalués en fonction de la production d’électricité en 2012.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Ce matin, sur les quatre amendements qu’a défendus M. Cochet, je n’ai répondu qu’au premier, réservant ma réponse sur les trois autres, qui concernent le biogaz. Je vais répondre maintenant à M. Cochet.

M. Jacques Brunhes. Monsieur le président, il y a une demande de rappel au règlement. Elle est prioritaire et la réponse aux amendements doit être reportée !

M. le président. Poursuivez, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Chacun sait que M. Cochet s’intéresse à cette question depuis longtemps. En 2000, à la demande du gouvernement de l’époque, il a rédigé un rapport, qui fut largement diffusé, sur les énergies renouvelables.

Le méthane est un gaz beaucoup plus dangereux que le CO2 puisque sa nocivité est vingt et une fois plus importante. Il convient donc d’essayer de trouver des solutions pour le valoriser. Comme vous le savez, le méthane est produit par la décomposition des matières organiques. On en trouve par exemple au-dessus des centres d’enfouissement technique. L’élimination du méthane produit par l’accumulation d’ordures ménagères est un problème important qui a été souvent évoqué dans les colloques consacrés au traitement des déchets ménagers.

M. Christian Bataille. C’est en effet très important !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Sa valorisation pose d’importants problèmes techniques et financiers. Pour ce qui est des questions techniques, il faut souligner que la France est très en retard par rapport à ses voisins de l’Union européenne. Des déclarations ont été faites sur cette question sous la précédente majorité, suite aux travaux menés par M. Cochet.

Dans l’Union européenne, la production de biogaz s’élevait en 2004 à 4,3 millions de tonnes d’équivalent pétrole. La répartition entre les principaux pays producteurs est la suivante : la Grande-Bretagne, leader en la matière, produit 1,470 million de tonnes d’équivalent pétrole, suivie par l’Allemagne, qui en produit 1,290 million. La France se situe très loin derrière, avec seulement 390 000 tonnes.

Le Gouvernement a demandé à l’ADEME de mener une politique active dans ce domaine, mais on peut penser que les résultats se feront attendre.

Toujours sur le plan technique, il faut souligner que l’intérêt est de transformer le biogaz en électricité : ce combustible permet de faire fonctionner des turbines qui produisent de l’électricité.

M. François Brottes. Allez-vous tenir cinq heures comme sur le PACS ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Voilà une bonne raison de valoriser le gaz méthane. J’ajoute que la valorisation du biogaz, assortie d’une obligation d’achat, a récemment fait l’objet d’un décret.

M. François Brottes. Voulez-vous un annuaire, monsieur le rapporteur ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Nous sommes donc parfaitement résolus à le valoriser. Je réponds de façon complète à l’auteur de l’amendement, qui me prête une évidente attention. (Sourires.)

Nous menons donc une politique volontariste en matière de transformation du biogaz en énergie. Pour autant, la commission a émis un avis défavorable à l’amendement de M. Cochet…

M. Yves Cochet. Je ne comprends pas !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. …mais peut-être comprenons-nous mal ses véritables objectifs. Il parle de 15 % de notre production nationale de biogaz. Entend-il par là que les 85 % restants doivent venir de l’extérieur ? Ces 15 % représentent-ils la part de biogaz que nous devons transformer ? L’idée d’une préférence nationale est-elle liée à notre production de biogaz ? Si ces 15 % correspondent à notre consommation, j’appelle l’attention de notre collègue sur la quantité de biogaz qu’il faudrait exploiter. Notre consommation totale étant de l’ordre de 275 millions de tonnes d’équivalent pétrole, ces 15 % équivaudraient à 4 millions de tonnes, alors que le Royaume-Uni, en tête de la production européenne, n’en produit que 1,5 million.

Dans le même esprit, M. Bataille, dans un rapport rédigé pour l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, s’est fait l’apôtre du GPP, le gaz de lisier de porc. Dans une intervention qu’il a faite ici même et qui a fait beaucoup de bruit (Sourires), il a démontré tout l’intérêt de cette ressource.

Il y a là matière à réflexion. Quelques pistes sont ouvertes, comme l’utilisation du lisier de porc, mais il n’est pas envisageable de couvrir notre pays d’élevages porcins… J’espère que nos collègues, par réalisme, préféreront minimiser l’effort à consentir en faveur du biogaz et du GPP.

M. Daniel Paul. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour un rappel au règlement.

M. Daniel Paul. Monsieur le président, je vous donne lecture de l’article 58, alinéa 1, de notre règlement : « Les rappels au règlement et les demandes touchant au déroulement de la séance ont toujours priorité sur la question principale ; ils en suspendent la discussion. »

Monsieur le président, il n’est pas d’usage de mettre le président en cause dans cette assemblée, mais la façon dont vous avez conforté le rapporteur s’agissant de la durée de notre discussion m’amène à penser que nous sommes entrés dans une autre forme de débat.

M. Michel Piron. Non, c’était une information !

M. Daniel Paul. On nous accuse de faire durer le débat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Mais qui demande depuis le premier jour du débat que la lettre de griefs nous soit communiquée intégralement, sans jamais recevoir de réponse satisfaisante à cette question ?

Pour tenir compte des indications des ministres, du président de la commission et du rapporteur, nous avons proposé que cette lettre de griefs soit adressée à chaque président de groupe – au lieu de garder une ou deux lettres sur le bureau du président de la commission, cela en aurait fait quatre – et que, sous leur responsabilité, elle soit communiquée aux membres des groupes, en particulier à ceux qui suivent ce débat.

Nous avons demandé avec insistance pouvoir lire cette lettre non expurgée. Or elle a été considérablement noircie, en particulier d’éléments qui, à l’évidence, n’ont rien à voir avec le secret commercial que vous mettez en permanence en avant, ce qui rend sa compréhension totalement impossible. Vous refusez de nous donner satisfaction sur cette question.

Hier, le Gouvernement belge a fait part de son inquiétude devant l’évolution de ce dossier, et nous vous en avons fait part à de multiples reprises. Or vous n’entendez rien ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Vous poursuivez obstinément sur le même chemin. Souffrez quand même que nous soyons fondés à nous plaindre de la façon dont se déroule ce débat.

Depuis hier, le groupe socialiste comme le groupe communiste ont fait quelques efforts de compréhension,…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Nous aussi !

M. Daniel Paul. …en acceptant, compte tenu de l’importance de ce débat, de ne pas multiplier les défenses d’amendements. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’économie, monsieur le ministre délégué à l’industrie, monsieur le rapporteur, vous avez bien voulu le reconnaître. Mais si, maintenant, vous voulez nous voir revenir à la méthode de travail que nous avons connue au début de nos travaux sur ce texte, nous pouvons le faire ! Peut-être le souhaitez-vous …

M. Michel Piron. Incroyable !

M. Daniel Paul. …pour pouvoir vous sortir de la difficulté dans laquelle vous êtes ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Brottes. Vous êtes démasqués !

M. Daniel Paul. En effet, le vote du texte risque de faire apparaître les divisions internes dans votre camp, messieurs les députés UMP (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Le vote vous obligera à lever la main ou à appuyer sur le bouton « pour » et fera connaître nominativement, dans quelques jours, ceux qui auront privatisé GDF. Le recours au 49-3, lui, lève cette difficulté : plus personne n’aura voté, plus personne n’aura refusé de voter,…

M. Xavier de Roux. Vous rêvez !

M. Daniel Paul. …GDF aura été privatisée par la vertu du Saint-Esprit ! Nous n’acceptons pas cette façon de procéder.

Nous sommes prêts, de notre côté, à faire en sorte que le débat se déroule normalement, à aller au fond des choses. Nous avons passé de nombreuses heures sur les amendements portant articles additionnels avant l’article 1er, c’est vrai, mais je pense que nous allons arriver à l’article 1er dans les toutes prochaines heures. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) J’ai le sentiment que, de votre côté, la façon dont vous avez abordé la discussion cet après-midi a pour objectif, au contraire, de ne pas arriver trop vite à l’article 1er (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) par crainte de ce que je viens d’évoquer.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. C’est extraordinaire !

M. Xavier de Roux. Nous ne craignons rien du tout, monsieur Paul !

M. Christian Bataille. 49-3 !

M. Daniel Paul. Étant donné la façon dont vous procédez, nous demandons une suspension de séance, monsieur le président. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Voilà qui est original !

M. Michel Piron. Méthode d’accélération !

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes, pour un rappel au règlement.

M. Jacques Brunhes. Monsieur le président, merci de me donner la parole avant de suspendre la séance.

Monsieur le président, tout à l’heure, vous avez commis un pas de clerc et une erreur de présidence. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) En effet, l’article 58 du règlement de l’Assemblée énonce : « La parole est accordée à tout député qui la demande à cet effet, soit sur-le-champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention. » Or vous avez redonné la parole au rapporteur, alors que nous avions demandé des rappels au règlement. En outre, vous avez cité un certain nombre de chiffres qui n’avaient pas lieu de l’être à la place que vous occupez. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La présidence a raison : le rapporteur n’avait pas terminé de parler !

M. Jacques Brunhes. Cependant, ce n’est pas trop grave : ce sont de simples accidents de parcours ne remettant pas en cause la qualité de votre présidence, mais il faut respecter notre règlement.

Pourquoi un rappel au règlement ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Pour faire traîner les débats !

M. Jacques Brunhes. Mon rappel au règlement touche au déroulement de la séance.

Dès son entrée en séance, M. Lenoir, notre rapporteur, stigmatise l’opposition en lui reprochant ses amendements. Pourtant, tout le monde ici a pu constater que tous ces amendements sont défendus et argumentés. Il y a même eu, je dois le dire, une discussion tout à fait passionnante sur les amendements de M. Cochet, avec une réponse intéressante du rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Les socialistes me le reprochent !

M. Jacques Brunhes. Il y a donc bien un vrai débat. Alors pourquoi ce reproche sur le nombre d’amendements ?

Hier, j’ai cité de mémoire Socrate. Aujourd’hui, je vais vous le citer intégralement : « Dès lors que tu dois gérer les affaires de la République comme il faut, ce qu’il est nécessaire que tu donnes à nos concitoyens, c’est la vertu. »

M. Xavier de Roux. Où est la vertu ?

M. Jacques Brunhes. Qu’est-ce que la vertu en politique ?

M. Michel Piron. Et allons-y !

M. Jacques Brunhes. Et la vertu, c’est d’abord de tenir les engagements pris devant les mandants et les citoyens ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Or, en janvier dernier, le ministre d’État, ministre de l’économie et des finances de l’époque, est venu, dans cet hémicycle, annoncer que la part de l’État dans le capital de Gaz de France ne descendrait pas en dessous de 70 % ! Les engagements pris solennellement devant la représentation nationale ne sont donc pas tenus !

La vertu en politique, c’est aussi de donner tous les éléments qui permettent d’aller au bout d’un raisonnement. Or hier, dans le bureau du président Ollier, le président Bocquet n’a pu lire qu’une caricature de lettre de griefs de la Commission, raturée sur 133 pages ! Cette situation nous empêche d’aller jusqu’au bout de notre raisonnement et, surtout mes chers collègues, nous conduit les uns et les autres à devoir décider à l’aveugle, ce qui est inacceptable ! Et vous, la majorité, vous acceptez cette forme de fausse démocratie, en disant approuver un texte, alors que vous n’en connaissez pas toutes les données !

Monsieur le rapporteur, votre posture est parfaitement connue : tous les spécialistes appellent cela l’inversion de culpabilité. C’est vous qui êtes responsable (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) d’un texte tronqué ! C’est vous qui êtes responsable d’un débat où nous n’avons pas toutes les données ! Et c’est vous qui essayez de renverser les responsabilités en accusant l’opposition de faire de l’obstruction !

Non, monsieur le rapporteur, non, mes chers collègues, nous ne faisons pas de l’obstruction, nous faisons de la résistance (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) pour défendre la démocratie parlementaire !

M. Jean-Claude Sandrier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec, pour un rappel au règlement.

M. Xavier de Roux. C’est reparti pour un tour !

M. Jean Le Garrec. Pas du tout, cher collègue, mon rappel au règlement porte sur l’organisation de nos débats, car j’ai, hélas ! une longue expérience des débats difficiles.

Incontestablement, ce débat est difficile. L’enjeu est considérable, chacun le mesure. Chacun d’entre vous sait aussi que le montage qui nous est proposé est dangereux, léger et incertain : ouverture du capital de GDF, contrairement aux engagements pris, valse-hésitation des actionnaires de Suez, menée par l’actionnaire principal, M. Frère, lettre de la Commission européenne tronquée. Nous voyons bien le saut dans l’inconnu qu’est en train de faire le Gouvernement. Il était donc tout à fait normal et indispensable que, à l’ouverture du débat, le groupe socialiste, comme le groupe communiste, exprime ses inquiétudes et que le débat s’engage. Le débat s’est engagé avec compétence et talent par le groupe socialiste, sous l’autorité de M. Brottes.

M. Michel Piron. C’est de l’auto-glorification !

M. Jean Le Garrec. Ce faisant, nous avons décidé très clairement de ne pas ralentir le débat. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est bien ce que nous avons fait, en présentant nos amendements avec une seule défense. Nous sommes déterminés à poursuivre dans cette voie, mais à une condition : que le Gouvernement, le président de la commission et le rapporteur ne ralentissent pas le débat. (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Or je connais suffisamment le talent du rapporteur pour savoir que sur l’industrie charbonnière, par exemple, il est capable de nous faire un cours, assurément intéressant,…

M. Michel Piron. C’est de la provocation !

M. Jean Le Garrec. …fort long, très argumenté, avec, au passage, quelques provocations pour que la parole soit demandée pour répondre, et nous savons comment les choses s’engrangent…

Cet engagement que nous demandons a une contrepartie. Nous subodorons que si notre attitude vous empêche d’utiliser le 49-3, vous êtes coincés ! Et que c’est donc à vous de provoquer suffisamment de débats, de provocations, de ralentissements pour justifier l’utilisation du 49-3. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Nous ne marchons pas dans la manœuvre et la condamnons !

M. Jean-Claude Sandrier. Quel talent !

M. Jean Le Garrec. Si ce ralentissement est provoqué par le rapporteur…

M. Didier Migaud. C’est vrai !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Incroyable !

M. Jean Le Garrec. …et le Gouvernement, mal à l’aise dans ce texte qui divise la majorité, nous dénoncerons cette attitude.

M. Didier Migaud. Trouvez la parade, messieurs !

M. Jean Le Garrec. Le groupe socialiste, quant à lui, poursuivra dans la voie qu’il a choisie, en continuant à mener un débat politique sur le fond.

M. Christian Bataille. Nous voulons aller au cœur du texte !

M. Jean Le Garrec. Les choses sont claires, je me suis exprimé simplement : chacun doit comprendre que nous ne sommes pas dupes de ce qui est en train de se passer.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Retirez les amendements !

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Jacques Brunhes. Suspension !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques de l’environnement et du territoire. Cher collègue, acceptez que nous puissions vous répondre avant la suspension, car je souhaite amener un peu de sérénité au débat, qui en a bien besoin.

D’abord, je ne pense pas que perdre vingt minutes pour expliquer qu’on veut gagner du temps soit utile au débat. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Bataille. C’est ce que vous êtes en train de faire !

M. Didier Migaud. C’est pour cela que vous vous livrez au même exercice !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Migaud, nous avons fait la preuve du contraire.

Mes chers collègues, ce qui est certain, c’est que nous avons suffisamment de respect les uns envers les autres – pour moi, le respect est important et je vous regarde droit dans les yeux.

M. Daniel Paul. Droit dans les yeux !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. En tant que président de la commission, je vous le dis solennellement : le rapporteur ne mérite pas ce que vous lui reprochez.

M. Didier Migaud. Essayez de ne pas sourire !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Que s’est-il passé ? Dans sa démonstration, que je vais refaire puisqu’elle n’a pas été entendue, le rapporteur n’a pas abordé le fond des amendements et n’a pas dit qu’il était contre. Il a simplement demandé au président de séance de reprendre la parole pour pouvoir le dire. Il était normal, monsieur Brunhes,…

M. Jacques Brunhes. Mais non, ce n’est pas normal dans la forme !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. …que le rapporteur achève sa démonstration ; n’y voyez aucune malice. Je n’accepte donc pas qu’il soit mis en cause, car la démonstration – et M. Cochet en est témoin – que nous avons faite ce matin n’était pas négligeable. Encore fallait-il que tous soient présents pour l’entendre !

Vous l’avez dit à plusieurs reprises, chers collègues, les problèmes soulevés, les questions posées sont tels qu’on ne peut rester sourd. Les lecteurs du compte rendu doivent pouvoir comprendre que, sur la question des gaz à effet de serre ou des réserves fossiles, la majorité a aussi une position…

M. Didier Migaud. Elle est très silencieuse, cette majorité !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. …et qu’elle répond aux interrogations.

Pour en revenir à notre discussion et à la position du rapporteur, je ne voudrais pas que l’arbre cache la forêt et je me suis fait communiquer les documents. Certes, une certaine sérénité est intervenue dans les débats, une majorité fidèle est présente dans l’hémicycle − je ne l’en remercierai jamais assez –,…

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Tout à fait !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. …elle s’exprime et montre qu’elle soutient le Gouvernement. Néanmoins, aujourd’hui, cela fait très exactement une semaine que nous avons débuté nos travaux, qui, jusqu’à présent, ont duré près de 45 heures.

M. Didier Migaud. Le président de séance a déjà dit tout cela !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Certes, mais je le répète, car c’est important. En une semaine, nous avons examiné 2 641 amendements.

M. Didier Migaud. Pas mal !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Il en reste 107 000.

M. Jean Le Garrec. Mais attendez…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est moi qui attends, monsieur Le Garrec : je comprends votre réaction, mais je ne veux pas que vous laissiez penser, sous prétexte d’un retour à la sérénité, que nous n’acceptons pas le débat. Nous pourrions le refuser, c’est vrai, et le Gouvernement le pourrait également, mais nous acceptons au contraire de débattre, car les idées intéressantes appellent des réponses qui le sont tout autant. Il faut que les Français sachent que la majorité accepte le débat. Mais ils doivent également savoir qu’il reste 107 000 amendements et que, si je ne me trompe pas, la fin de la session extraordinaire est prévue pour le 22 septembre. Monsieur Le Garrec, vous assistiez à la conférence des présidents lorsque cela a été décidé.

M. Jean Le Garrec. Attendez !

M. Christian Bataille. C’est vous qui en avez décidé !

M. Jean-Claude Sandrier. C’est le Gouvernement qui a fixé l’ordre du jour !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Une simple opération arithmétique montre que, quelle que soit la rapidité avec laquelle vous essayez aujourd’hui de procéder, pour examiner les 107 000 amendements restants, il faudrait encore 1 245 heures de débat, soit la totalité de toute une session ordinaire.

S’il faut donner le signal d’une sérénité retrouvée et d’un débat qui reprend, nous le ferons, chers collègues de l’opposition, mais il faudra que le geste suive la parole. Ce n’est pas en maintenant ces 107 000 amendements que l’on fera comprendre aux Français que nous sommes d’accord pour que se déroule un débat simple et démocratique.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous ne voulons pas nous opposer au débat, mais ce n’est pas nous qui avons déposé ces amendements. La responsabilité vous en incombe.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Assumez !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. À vous de décider ce que vous avez à faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet. Sur les quatre amendements que j’ai soutenus à la fin de la séance de ce matin, un a été rejeté par l’Assemblée − à mon grand regret − et trois vont bientôt être soumis au vote. Sans m’étendre sur un sujet qu’ont déjà traité mes amis de l’opposition, je voudrais dire en préambule que je m’associe à leur remarque concernant le déroulement de l’examen du projet de loi. Mais je voudrais répondre plus longuement aux remarques qui ont été faites sur mes quatre amendements. Soucieux d’être cohérent dans ma présentation et du bon rythme des débats, j’ai tenu à présenter ces amendements globalement : il m’a donc été fait une réponse globale − un peu plus détaillée de la part de M. le rapporteur −, et je vais à mon tour répondre à la fois au rapporteur, au ministre et au président de la commission, M. Ollier.

Au rapporteur, je veux simplement préciser − la formulation de mon amendement pouvant être ambiguë − que, dans mon esprit, les 15 % de biogaz se rapportent à l’ensemble de la consommation de gaz naturel actuelle de la France. Aujourd’hui, pratiquement 100 % du gaz naturel consommé en France est importé. Je souhaiterais qu’on en importe moins et qu’on en produise davantage − à hauteur de 15 % en 2010 − sous forme de biogaz, que ce soit du gaz de décharge ou de la méthanisation de déchets agricoles, voire urbains.

M. le ministre évoquait les investissements, toujours avec la même logique gouvernementale, voire la même mentalité, qui veut qu’une politique de l’offre soit censée répondre à une demande axiomatiquement croissante : comme la demande va croître – c’est l’axiome de départ –, il faut que l’offre, donc les moyens de production, par exemple dans le secteur de l’électricité dont vous avez parlé, monsieur le ministre, soit elle-même croissante. Non !

Permettez-moi, dans le domaine de l’électricité, de citer à nouveau l’exemple du « scénario mégawatt », économiquement, financièrement et techniquement valable. D’un montant bien inférieur à celui de 40 milliards d’euros que vous voulez qu’EDF mobilise en faveur des moyens de production, de petits investissements dans les économies d’énergie et de lutte contre le gaspillage, c’est-à-dire dans le cadre d’une politique de sobriété, permettraient en effet de réduire la consommation annuelle d’électricité en France de plus de 50 % !

Il s’agit là de deux politiques bien différentes : l’une repose sur le fait que, par définition, la demande d’électricité va augmenter et qu’il faut, pour y répondre, lancer des investissements productifs, que M. le ministre a évalués à 40 milliards d’euros dans les années qui viennent ; l’autre, que je propose, est beaucoup plus satisfaisante pour les ménages, pour les entreprises, pour l’économie de notre pays, pour les devises et – j’insiste sur ce dernier point – pour la paix : c’est une politique de sobriété, qui exige moins d’investissements. Certes, on peut ne pas vouloir la suivre, mais cela ne peut alors mener que dans le mur.

M. Ollier, enfin, a dit ce matin que le panorama que j’esquissais très rapidement – trop rapidement sans doute – relevait de l’utopie. Nous avons tous nos utopies, et heureusement d’ailleurs que nous gardons un peu de vision à long terme pour sauvegarder l’intérêt général ! Malheureusement, il existe des utopistes au mauvais sens du terme, qui rêvent, qui croient que la croissance de la consommation électrique, pétrolière, gazière et autre va continuer pour un certain temps encore, voire pour toujours. C’est cela qui est irréaliste !

J’ai essayé très brièvement, mais, je l’espère, de manière convaincante, d’expliquer ce matin que des raisons d’ordre matériel, géologique, économique et géopolitique s’opposent à cette utopie. Par exemple, ce que j’appelle le peak oil est déjà passé pour le pétrole conventionnel. Regardez, en effet, les chiffres de l’Agence internationale de l’énergie, de l’administration américaine, de BP, qui tient un site web mensuel : la production de pétrole conventionnel n’a pas augmenté depuis mai 2005. Il y a bien eu une petite augmentation des liquides hydrocarbonés, mais pas du pétrole conventionnel.

Il ne faut pas croire que, parce qu’on en a décidé ainsi dans la loi, la production de pétrole, de gaz et d’électricité va augmenter. D’un côté, il y a la loi, acte purement immatériel qui résulte d’un accord entre les humains, et, de l’autre, il y a les réalités géologiques, économiques et géopolitiques. Que vous le vouliez ou non, celles-ci l’emporteront sur le volontarisme utopique.

Pour en revenir aux investissements, il me semble donc beaucoup plus profitable, notamment pour garantir dans notre pays la sécurité en matière de fourniture d’énergie et le bien-être, d’investir dans l’isolation des bâtiments anciens, par exemple, que d’aller, en croyant que l’on disposera ainsi de plus de gaz ou de pétrole, signer des contrats en Russie, en Algérie ou en Norvège. La raison, ainsi que je l’ai dite, en est simple : la source commence à se tarir et l’approvisionnement sera de plus en plus cher.

Je reviendrai, pour terminer, sur la subtile différence, que tout le monde ici a bien entendu comprise, entre les prix et les tarifs.

On ne peut espérer de solution providentielle du côté de l’offre du fait d’une production supérieure de pétrole, de gaz, voire d’électricité. La seule solution raisonnable – et non pas utopique, contrairement à la vôtre qui consiste à espérer une offre supérieure de gaz russe ou algérien –c’est une maîtrise de la demande, voire, comme je le propose, une baisse de la consommation, de l’ordre de 2 % par an pour l’ensemble de l’énergie et de 3 % pour les énergies fossiles. Une telle solution est parfaitement cohérente avec les engagements internationaux que nous avons pris sur la diminution drastique des émissions de gaz à effet de serre. On peut ne pas être sérieux, mais on peut aussi prendre des mesures dès maintenant pour atteindre cet objectif en 2050 !

Tout est dans la maîtrise de la demande, donc dans les prix. La loi, dites-vous, prévoit des tarifs réglementés, administrés qui permettront de maintenir au moins provisoirement, pendant quelques années, les prix pour le consommateur, et qui empêcheront celui-ci de se rendre compte qu’il y a une crise de l’énergie. Je le dis au Gouvernement : c’est une mauvaise politique, à un double titre.

C’est, d’abord, un très mauvais signal pour les consommateurs, qu’ils soient industriels, commerçants ou domestiques, car, en leur faisant croire que, pendant encore plusieurs années, le coût de l’énergie ne sera pas trop élevé, ils ne seront pas incités à faire des économies d’énergie. Dès lors que EDF ou Gaz de France pratiqueront des tarifs inférieurs à ceux du marché, qui, finalement, paiera à sa véritable valeur l’achat de gaz, de pétrole ou d’électricité, dont le coût ne cessera d’augmenter, sinon le contribuable ?

C’est, ensuite, un très mauvais signal pour les producteurs, car, quel que soit le prix du baril de pétrole ou du mètre cube de gaz, ils sauront que, de toute façon, le contribuable français sera appelé à effacer la différence entre les tarifs réservés et les prix réels.

Il faut la vérité des prix en matière d’énergie. Celle-ci va, tendanciellement, devenir de plus en plus chère. Il faut le dire à nos concitoyens. La France ne peut rester une sorte d’îlot protégé, de petit village gaulois à la Astérix, où l’énergie serait beaucoup moins chère qu’en Europe et dans le monde. Il s’agit là d’une illusion.

C'est pourquoi je vous propose d’adopter mes trois amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137623.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137624.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137621.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je souhaite simplement intervenir en quelques mots à ce stade de la discussion.

Monsieur Cochet, le Gouvernement partage bien sûr votre volonté d’informer les consommateurs français sur les prix de l’énergie et de promouvoir les énergies renouvelables. Je tiens cependant, mesdames et messieurs les députés, à vous rappeler l’importance qu’il y a à arriver à l’article 1er et à aborder enfin le fond du débat.

Avec ce texte, il s’agit en effet, d’une part, de permettre à nos compatriotes de bénéficier des tarifs régulés à partir du 1er juillet – or, si nous n’appliquons pas la directive, nous risquons de mettre à mal sur le plan juridique les tarifs auxquels nous sommes attachés en matière d’électricité et de gaz – et, d’autre part, de donner à Gaz de France la possibilité de nouer des alliances.

Le Gouvernement respecte bien entendu pleinement le débat – il vous l’a montré –, et il entend les arguments de l’opposition, qui est très présente. Toutefois, dans l’intérêt des Français, plus tôt nous entrerons dans le débat, mieux ce sera, même si cela signifie que nous aurons encore plus de 100 000 amendements...

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. 107 000 !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. ...– 107 000, me dit le président de la commission – à examiner.

De grâce, entrons dans le débat ! Les Français nous attendent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je suis saisi de six séries d’amendements, nos 34180 à 34311.

Les amendements nos 34180 à 34201 sont identiques, de même que les amendements nos 34202 à 34223, nos 34224 à 34245, nos 34246 à 34267, nos 34268 à 34289 et nos 34290 à 34311.

La parole est à M. Michel Vaxès, pour défendre ces amendements.

M. Michel Vaxès. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps le « paquet » suivant, à savoir les amendements nos 34312 à 34333, ce qui représentera au total 153 amendements défendus en une seule fois, sachant, en outre, que j’essaierai d’être bref.

M. le président. Je suis également saisi, en effet, d’une autre série d’amendements, nos 34312 à 34333.

Vous avez la parole, monsieur Vaxès.

M. Michel Vaxès. Cette bonne volonté me permet de rappeler que nous sommes convenus ce matin de défendre de façon groupée 200 amendements, ce qui fut fait en une heure.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous ne sommes toujours pas à l’article 1er !

M. Michel Vaxès. Lors d’un échange courtois, le président de la commission et le rapporteur sont convenus avec nous qu’il s’agissait là d’une bonne méthode de travail, permettant d’aller au bout d’un débat intéressant.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Entrons-y, justement !

M. Michel Vaxès. Or je note avec un peu de stupeur qu’en début de séance, cet après-midi, le ton a changé. (Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Certes, nous n’étions pas à l’article 1er ce matin. Toutefois, nous sommes convenus ensemble – les comptes rendus de la séance de ce matin en témoigneront lorsqu’ils seront publiés – de ne pas perdre de temps, d’aller à l’essentiel, tout en laissant la place au débat.

Monsieur le président de la commission, vous vous en êtes réjoui.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est exact.

M. Michel Vaxès. Je vous en ai félicité.

Continuons donc de la même façon cet après-midi. Tel sera le cas, en tout état de cause, pour ce qui nous concerne, ce qui montre que nous n’avons aucune volonté d’obstruction : nous entendons simplement poursuivre le débat jusqu’au bout et de façon approfondie.

Ce changement de ton, en tout cas, m’inquiète, parce que je me demande ce qu’il cache. Ne serait-ce pas, comme l’a indiqué notre collègue, pour faire supporter par l’opposition la responsabilité du 49-3 ? Ce choix du 49-3, ce n’est pas celui que nous faisons. Nous, nous voulons débattre. C’est la raison pour laquelle j’en viens, rapidement, à la défense de ce paquet de 153 amendements.

M. Frédéric Dutoit. Bel effort de notre part !

M. Michel Vaxès. La lettre de M. Cirelli présentant l’introduction en bourse d’actions de GDF, prévoyait le doublement des bénéfices entre 2005 et 2007 : c’est un aveu ! De fait, pour l'année 2005, les dividendes versés aux actionnaires ont connu une hausse de 60 %, tandis que les marges augmentaient de 6 % – une évolution des salaires dans de telles proportions intéresserait certainement les citoyennes et les citoyens de ce pays ! –, alors même que les tarifs ont augmenté de 30 % depuis un an et demi pour les particuliers !

Gaz de France vient d'annoncer ses résultats à fin juin 2006. Ils s'envolent par rapport à fin juin 2005, avec une augmentation de 34 %, soit plus 650 millions d'euros, pour le résultat d'exploitation du groupe, et de 35 %, soit plus 450 millions d'euros, pour le résultat d'exploitation de Gaz de France SA concernant son activité en France. Quant au résultat net du groupe, il progresse de plus de 40 %, passant de 1,2 milliard d'euros à fin juin 2005 à 1,7 milliard d'euros à fin juin 2006. Le bénéfice net est également en forte progression : plus 1 612 millions d'euros, soit plus 56 %.

L'essentiel de la progression du résultat de l'activité France de GDF SA est dû à la progression de la marge gaz, qui consiste en la différence entre le prix de vente et le prix d'achat du gaz. Cette marge progresse de près de 400 millions d’euros sur le premier semestre, soit plus 13 %, progression qui fait suite à la croissance de la marge de 6 % en 2005. Elle est due à la hausse des tarifs du gaz de près de 26 % en un an.

Selon la direction de Gaz de France, ces hausses étaient insuffisantes pour compenser celle des coûts d'achat du gaz. Comme à fin 2005, les comptes montrent qu’il n’en est rien. On est loin des affirmations du président de Gaz de France selon lesquelles l’entreprise vendait à perte et de l’objectif de fournir le gaz le moins cher possible.

Ces résultats confirment que l'objectif de la direction de Gaz de France est d'augmenter la rentabilité financière pour les actionnaires. À ceux qui pensent que la privatisation ne change rien aux tarifs, voilà une nouvelle démonstration du contraire, d'autant que les actionnaires demandent déjà un triplement des dividendes !

Les usagers font donc les frais de la déréglementation du secteur énergétique. On leur fait croire qu'ils paient la hausse des prix des matières premières, comme lorsque l’entreprise était entièrement publique, alors que tout porte à croire qu'ils paient aussi largement les dividendes des actionnaires, qui en exigent le triplement. La transparence doit être faite à ce sujet !

C'est pourquoi nous invitons l’Assemblée à adopter notre amendement qui demande au Gouvernement d'adresser au Parlement un rapport sur le bilan de l'ouverture à la concurrence dans le secteur énergétique. Ce rapport examinera l'impact, notamment en termes de coût de l'énergie, de la transposition des directives européennes.

Tel est, pour m’en tenir à l’essentiel, le sens de nos amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les sept séries d’amendements qui viennent d’être défendues ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Défavorable à l’ensemble de ces amendements.

M. Michel Vaxès. Sans aucune explication ?

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34180 à 34201.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. Michel Vaxès. On parle de l’explosion des dividendes, et il n’y a pas de réponse ?

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34202 à 34223.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34224 à 34245.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34246 à 34267.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34268 à 34289.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34290 à 34311.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 34312 à 34333.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. Michel Vaxès. Cent cinquante-trois amendements exécutés en moins de trente secondes !

M. Daniel Paul. Sans réponse du Gouvernement !

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 298 à 330.

La parole est à M. Didier Migaud.

M. Didier Migaud. Je défendrai en même temps, si vous me le permettez, monsieur le président, les quatre séries d’amendements suivantes.

M. le président. Je suis en effet saisi de quatre autres séries d’amendements identiques entre eux, nos 365 à 397, nos 530 à 562, nos 331 à 363 et nos 431 à 463.

Vous avez la parole, monsieur Migaud, pour défendre ces cinq séries d’amendements identiques.

M. Didier Migaud. Je vais m’efforcer de présenter très rapidement ces cent soixante amendements, traduisant ainsi la volonté du groupe socialiste d’entrer dans le vif du débat et de dénoncer par là même la stratégie de l’UMP, qui, depuis ce matin, cherche à retarder la discussion. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Maintenant, on nous reproche de parler !

M. Didier Migaud. Mais, d’une certaine façon, je suis très heureux que nos collègues de l’UMP aient retrouvé la parole. Depuis le début, à part le rapporteur, le président de la commission, le ministre, aucun député UMP ne s’exprimait.

M. Serge Poignant. Ce n’est pas vrai !

M. Didier Migaud. Manifestement, de nouvelles instructions ont été données par le président Accoyer, ou bien peut-être par le ministre d’État, ministre de l’intérieur ; serait-ce le signe d’un affrontement entre sarkozistes et villepinistes ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre-Louis Fagniez. Qu’est-ce que c’est que cette histoire !

M. Didier Migaud. Mais cela nous écarte un peu du sujet et je préfère ne pas me mêler de ce type de débat.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Vraiment, vous n’avez rien à dire !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Et vous, vous êtes royaliste ou fabiusien, monsieur Migaud ?

M. Didier Migaud. À travers les amendements que nous présentons, nous souhaitons revenir sur la question du pouvoir d’achat et sur la question du prix de l’essence et du gasoil.

L’année dernière, à la même période, M. Breton avait fait en sorte, au cours d’une réunion qu’il avait organisée avec les compagnies pétrolières, que des engagements solennels soient pris. À grand renfort de publicité, le groupe Total prenait l’engagement de répercuter à la baisse dans les trois jours, c'est-à-dire avec une certaine réactivité, pour ne pas dire une réactivité certaine, toute baisse du prix du baril du pétrole. Dans le même temps, le ministre prenait lui-même l’engagement d’assurer une transparence totale sur les prix de l’essence et du gasoil.

Un an après, où en sommes-nous ? Depuis un mois, le prix du baril du pétrole a diminué de quelque 15 %, mais, à la pompe, la baisse n’est pas proportionnelle.

M. Jacques Le Guen. Le prix a commencé à baisser !

M. Didier Migaud. D’un côté, 15 % de baisse, de l’autre, de l’ordre de 8 % pour le sans-plomb et moins de 3 % pour le gasoil. Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, l’engagement pris devant vous solennellement par les pétroliers n’est pas tenu.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce n’est pas vrai.

M. Didier Migaud. Quant à l’observatoire des prix, qui devait permettre à l’opinion publique et à la représentation parlementaire de vérifier la façon dont les prix se forment, il a bien été installé, mais on ne peut rien y apprendre puisqu’une seule compagnie pétrolière communique ses chiffres. L’observatoire des prix ne nous permet donc pas d’observer quoi que ce soit. Encore un engagement non tenu !

Monsieur le ministre, nous sommes heureux de vous entendre parler. Nous serions plus heureux encore si vous agissiez. Ainsi, nous aimerions que vous nous précisiez quelles initiatives vous comptez prendre face à cette situation ?

Nous proposons quant à nous, à travers ces amendements, le retour à la TIPP flottante. Nous estimons en effet que l’État n’a pas à profiter de l’augmentation des prix du baril de pétrole pour augmenter ses recettes au détriment de la défense du pouvoir d’achat d’une grande majorité de nos concitoyens.

Nous proposons par ailleurs, en raison de l’énormité des bénéfices réalisés par les compagnies pétrolières, qu’une taxation exceptionnelle sur les résultats des compagnies pétrolières puisse être instaurée, comme nous l’avions fait nous-mêmes, ne serait-ce que pour nous aider à mieux lutter contre l’effet de serre.

Nous demandons également la suppression, même progressive, de l’exonération de TIPP sur les carburéacteurs, qui représente une dépense fiscale de l’ordre de 1,3 milliard d’euros. Une telle exonération n’existe pas dans nombre de pays : l’Irlande, la Norvège, les États-Unis, le Canada. Nous estimons, compte tenu de l’influence des carburéacteurs sur l’effet de serre, que cette exonération constitue une incitation au vice. Il n’est pas normal que cette exonération complique le combat de chacun d’entre nous contre les effets de serre.

Nous souhaitons en outre la création de véritables titres de transport, pas de titres facultatifs comme le propose le Gouvernement.

Nous proposons enfin une taxation additionnelle à la taxe sur les cartes grises pour les véhicules les plus polluants beaucoup plus significative que celle que suggère le Gouvernement, pour pouvoir mieux lutter, sans ponctionner le pouvoir d’achat des Français, contre la pollution.

Cet ensemble de mesures prend en compte à la fois la nécessité de mieux lutter contre l’effet de serre et ses conséquences et la défense du pouvoir d’achat de nos concitoyens, qui a été ponctionné. Quand nous ferons le bilan de cette législature, nous constaterons en effet que le pouvoir d’achat des Français a peu évolué sur les cinq années.

M. Guy Geoffroy. C’est faux ! Il a augmenté !

M. Didier Migaud. Non.

M. Jacques Le Guen. Si !

M. Didier Migaud. Mais nous aurons l’occasion de reprendre les chiffres lors de la prochaine discussion budgétaire. Nous pourrons aussi constater que pratiquement aucun des indicateurs socio-économiques n’est plus favorable aujourd’hui qu’hier. Il existe un réel problème à la fois de dégradation de la situation de nos finances publiques ces dernières années, mais également de dégradation de la situation de beaucoup de nos concitoyens en raison de la politique qui a été conduite.

M. Guy Geoffroy. Affirmation gratuite !

M. Didier Migaud. S’agissant du pouvoir d’achat, comme de la défense de notre environnement, nous souhaitons que le Gouvernement aille au-delà des mots.

Un certain nombre d’idées généreuses sont exprimées par le Gouvernement, et le ministre de l’économie et des finances, parfois, contribue à ce débat, mais nous n’en voyons pas bien la concrétisation. Au contraire, ce que nous voyons, c’est que les Français pâtissent de la situation et que les compagnies pétrolières continuent de ne pas jouer le « jeu ».

En tout cas, nous souhaitons que le ministre s’exprime à nouveau sur les initiatives qu’il compte prendre pour faire en sorte que ses propres engagements ainsi que ceux des compagnies pétrolières soient bien tenus.

M. Christian Bataille. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les cinq séries d’amendements qui viennent d’être défendues ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Le débat sur la TIPP flottante a déjà eu lieu ici à plusieurs reprises, il a été plus nourri encore à la commission des finances, et l’Assemblée a rejeté les propositions qui sont faites depuis quelques années par M. Migaud. Je n’y reviens pas.

Je voudrais simplement intervenir sur deux points.

D’abord, en ce qui concerne les amendements nos 365 à 397 à propos de la fiscalité sur l’aviation internationale, je rappelle que l’article 24 de la convention de Chicago sur l’aviation civile internationale interdit d’adopter la disposition qui nous est proposée ici. Nous serions en contravention avec un règlement international auquel nous avons souscrit.

Ensuite, en ce qui concerne la question du chèque transport – le débat a été soulevé dès lors que le Gouvernement a pris l’initiative que nous connaissons – je voudrais vous livrer mon opinion. Je représente, comme beaucoup, une circonscription rurale dans laquelle il n’y a pas de transport aidé, subventionné, pour les personnes qui se rendent sur leur lieu de travail. J’accueille donc avec beaucoup de satisfaction la disposition qui est proposée parce qu’au moins, cette fois-ci, une aide publique va pouvoir être accordée à une personne qui ne dispose pas d’un réseau de transport public.

M. Jacques Le Guen. Très bien !

M. Didier Migaud. Mais elle est facultative !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. C’est la raison pour laquelle j’apporte, à titre personnel, mon entière adhésion à cette initiative.

La commission a repoussé l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur Migaud, alors que nous cherchons à tout prix à entamer la discussion d’un texte qui concerne à la fois la transposition de la directive énergie et Gaz de France, vous nous livrez là une série d’amendements qui, à mon avis, devraient plutôt être discutés dans le projet de loi de finances – je pense en particulier à la TIPP. Il faut arrêter de raconter des histoires aux Français : nous voulons rentrer dans le texte et vous en êtes encore à discuter de choses qui n’ont pas vraiment leur place ici.

M. Christian Bataille. Répondez au fond !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Vous m’interpellez, je vais répondre, mais, je le répète, cela ne concerne nullement le texte qui nous réunit aujourd’hui.

Vous me demandez ce qui s’est passé avec les pétroliers. Je l’ai déjà dit vingt-cinq fois, je le répéterai pour la vingt-sixième fois, en priant les députés de la majorité de m’en excuser.

Nous avons réuni les pétroliers, le 5 septembre, à Bercy. Nous avons constaté que les engagements qui avaient été pris, qui, je vous le rappelle, concernent les mobilisations, les investissements en amont – comme ce que nous voulons faire d’ailleurs pour Gaz de France mais en ce qui concerne, là, les profits des pétroliers et notamment de la première entreprise pétrolière française – pour que soient réinvestis notamment dans les capacités de raffinage plus de 3 milliards d’euros avant la fin de la décennie sur le territoire national, ces engagements ont été tenus, en particulier l’échéancier.

Par ailleurs, nous avons constaté, car, avec les services de la DGCCRF, nous mesurons désormais deux fois par semaine l’évolution des prix et la répercussion quand le prix du pétrole baisse sur le prix du gasoil et le prix de l’essence, que la baisse avait commencé à intervenir dès le 15 août parallèlement et proportionnellement à ce que nous constatons sur les prix du baril de pétrole.

M. Didier Migaud. Non, ce n’est pas vrai.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je vous le dis. Nous tenons ces informations à votre disposition. Vous pouvez d’ailleurs les consulter sur le site Internet.

Évidemment, le Gouvernement suit l’avis de la commission et est défavorable à ces séries d’amendements.

Je vous le demande une nouvelle fois, arrêtons l’obstruction, entrons dans le vif du débat. Ces amendements, on le voit bien, n’ont rien à voir avec le texte.

M. Jean Le Garrec. Arrêtez, monsieur le ministre.

M. Christian Bataille. Ce n’est pas correct.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. De grâce, rentrons le plus vite possible dans le cœur du sujet parce que, derrière, nous avons encore 107 000 amendements qui nous attendent pour parler de ce pour quoi nous sommes réunis aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet. Je voterai les séries d’amendements présentées par M. Migaud, sauf la première, qui porte les numéros 298 à 330. Il s’agit de ce que l’on a appelé à l’époque le « stabilisateur Migaud », ou ce que l’on appelle maintenant la TIPP flottante, et c’est une fausse bonne idée. En effet, cela donne aux consommateurs l’illusion qu’ils pourront avoir des prix raisonnables à la pompe quelle que soit la hausse tendancielle du cours du pétrole. Or, cela n’est pas vrai, même s’il y a une grosse différence entre le coût d’extraction d’un baril au pied du puits et le prix à la pompe, notamment parce que les intermédiaires prélèvent une rente considérable. C’est d’ailleurs pourquoi je suis favorable au prélèvement exceptionnel sur les profits des compagnies pétrolières, notamment de Total qui a réalisé, l’an dernier, près de 13 milliards d’euros de profits. J’avais ainsi proposé, l’année dernière, lors de la discussion de la loi d’orientation sur l’énergie, de prélever 5 milliards d’euros pour investir dans les économies d’énergie et les énergies renouvelables, mais je n’ai pas été suivi. Cela dit, rétablir la TIPP flottante serait donner un signal négatif non seulement aux consommateurs, qui croiront que les prix resteront raisonnables alors qu’ils ne cesseront pas de monter, mais aussi aux producteurs de pétrole et aux pétroliers.

Par ailleurs, je veux souligner que la hausse des cours du pétrole et de l’essence pèse sur le budget de la France. Mes amis de l’opposition vont me dire que mon argumentaire est progouvernemental. Pas du tout ! M. Breton a proposé que la transparence soit faite sur les prix du pétrole et il s’y est employé depuis un an et demi, ce qui est bien. Certains sénateurs socialistes et moi-même avons participé à l’élaboration d’un rapport de M. Bruno Durieux,…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Très bon rapport !

M. Yves Cochet. …qui a d’ailleurs été ministre du gouvernement Rocard il y a une quinzaine d’années. Et M. Durieux, qui s’y connaît un peu en matière financière, nous réunit de temps en temps pour étudier l’impact de la hausse des prix de l’énergie, pétrolière notamment, de l’essence, des carburants, du fioul, sur le budget de la France. Eh bien, contrairement à ce qui se dit parfois au café du commerce, l’État ne s’en met pas plein les poches.

M. François Brottes. Mais si !

M. Yves Cochet. C’est le contraire, monsieur Brottes, je suis désolé !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Voilà ! Écoutez un expert !

M. Yves Cochet. Les pétroliers, eux, s’en mettent plein les poches, nous sommes d’accord, mais je parle de l’incidence de la hausse des cours du baril et des prix à la pompe sur le budget de l’État.

M. François Brottes. Mécaniquement, la TVA augmente !

M. Yves Cochet. Techniquement, bien entendu, plus le prix augmente, plus la TVA augmente.

M. François Brottes. Merci de le reconnaître !

M. Yves Cochet. Il y a donc des rentrées de TVA supplémentaires. Mais, monsieur Brottes, vous connaissez peut-être ce que l’on appelle l’élasticité de la consommation par rapport au prix. Il se trouve que, quand les prix augmentent, l’élasticité en matière pétrolière n’est pas très forte parce qu’il s’agit d’un marché captif – les gens ne peuvent pas se passer de leur voiture et les transporteurs ne peuvent se passer de leur camion –, mais elle existe tout de même. Bien sûr que la TVA rentre plus quand les prix augmentent, puisqu’elle est proportionnelle au prix, mais les rentrées de TIPP sont proportionnelles au volume de la consommation – M. Migaud le sait parfaitement –, et non au prix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est dommage, mais c’est comme ça ! Et quand les prix augmentent, le volume consommé diminue un tout petit peu, moins que les prix bien sûr, mais cela suffit pour faire baisser les rentrées fiscales potentielles de TIPP qui étaient prévues dans le budget de l’année précédente. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Merci, chers collègues, mais n’en faites pas trop quand même ! (Sourires.) En 2005, nous avons ainsi perdu 500 millions d’euros. De plus, outre le fait que la diminution des rentrées de TIPP n’a pas été compensée par le supplément de TVA, il ne faut pas oublier que l’État est lui-même consommateur de carburant. Et qui consomme le carburant en France du côté de l’État ? C’est Michèle Alliot-Marie !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Elle n’est pas toute seule !

M. Yves Cochet. Les trois quarts du carburant de l’État sont utilisés par les militaires. On a même vu une restriction des manœuvres opérationnelles de l’armée simplement parce qu’il n’y avait plus de sous pour payer l’essence des camions. En tout cas, sur les sept premiers mois de l’année 2006, nous avons perdu 286 millions d’euros de rentrées fiscales, simplement parce qu’il y a eu une modération des consommateurs, qui ont un peu levé le pied, et que la TIPP est moins rentrée.

Ne croyez pas, chers camarades de l’opposition, que mon discours soit pro-gouvernemental. Je ne voterai pas cette loi, mais il faut dire les choses telles qu’elles sont.

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.

M. Didier Migaud. Je comprends la passion qui anime Yves Cochet.

M. Pierre-Louis Fagniez. Qu’en pense Mme Royal ?

M. Didier Migaud. Je peux d’ailleurs entendre une partie de son raisonnement. Je crois, en effet, que le prix du pétrole n’a pas vocation à baisser. Cela dit, M. Cochet fait l’impasse sur une question fondamentale qui est celle du pouvoir d’achat des pauvres gens qui n’ont pas d’autre solution que de consommer. Sa démonstration est brillante, mais elle se heurte à une réalité que subissent nombre de nos concitoyens.

M. Cochet n’a pas complètement raison non plus quand il parle de la TIPP et de son produit. En effet, il y a la question de l’élasticité par rapport au prix, mais pas seulement ! Le problème de la modération du produit de la TIPP ne date pas de l’explosion du prix du baril de pétrole brut. Il est également lié au fait que l’on roule moins vite,…

M. Guy Geoffroy. Tant mieux !

M. Didier Migaud. …que les moteurs consomment moins.

M. Guy Geoffroy. Si on roule moins vite, c’est grâce à la politique du Gouvernement !

M. Didier Migaud. L’argumentation de M. Cochet est donc loin d’être infaillible.

Par ailleurs, je regrette la réaction très politicienne de M. le ministre. Il ne nous a pas habitués à cela. Il a donné, avec beaucoup de vigueur, des réponses qui ne pourraient pas être faites de façon sérieuse en dehors de cette enceinte. Mais peut-être est-ce pour des raisons d’emploi du temps, ce que je comprendrais d’ailleurs parfaitement. Sa présence, ou plutôt son intermittence dans le débat, l’a peut-être empêché de remarquer que le groupe socialiste souhaitait le débat.

Je ne peux pas être d’accord avec vous, monsieur le ministre, lorsque vous dites que les engagements pris ont été tenus, parce que cela ne correspond pas à la réalité, et je ne suis d’ailleurs par le seul à le dire. On ne peut pas dire que la baisse du prix à la pompe est proportionnelle à celle du prix du baril de pétrole brut. Ce n’est pas vrai ! Les chiffres sont incontestables et je souhaite que vous nous les donniez.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je le ferai au moment de l’examen de la loi de finances !

M. Didier Migaud. Nous en parlerons en effet à cette occasion. Je suis tout à fait d’accord et je veux exprimer ma bonne volonté en la matière. Quant à l’observatoire des prix que vous avez souhaité mettre en place, je constate que la transparence n’est pas au rendez-vous.

Telle est la réponse que je souhaitais faire. Je ne veux pas prolonger ce débat. Nous aurons d’autres occasions. Je dis simplement qu’il y a un lien entre ces questions et notre texte, parce que cela touche à l’énergie et que l’incapacité dont fait preuve l’État pour maîtriser les choses en la matière est significative de ce que sera son incapacité, demain, en matière de fixation des prix du gaz et de l’électricité. Nous sommes là au cœur du sujet. Nous avons eu un débat intéressant, hier, avec M. Soisson sur le principe de réalité et le principe de volonté. Nous regrettons que le Gouvernement démissionne sur certains sujets.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est un amalgame !

M. Didier Migaud. Non, cela n’est pas un amalgame !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Les prix de l’essence ne sont pas régulés ! Ceux du gaz le sont !

M. Didier Migaud. Raison de plus ! Vous savez parfaitement – nous pouvons reprendre certaines de vos déclarations ou celles des présidents de Gaz de France et d’EDF – que, malheureusement, les prix régulés n’ont pas vocation à durer.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Alors, votez le projet !

M. Didier Migaud. Nous ne sommes pas hors sujet lorsque nous posons le problème de la capacité de l’État à intervenir, même si cela concerne une autre forme d’énergie.

M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.

M. Bernard Accoyer. Nous sommes scandalisés par les propos qui ont été tenus tout à l’heure par Jean Le Garrec, puis par Didier Migaud,…

M. Didier Migaud. Ne souriez pas trop en vous exprimant !

M. Bernard Accoyer. …qui ont laissé entendre que la majorité et le Gouvernement feraient de l’obstruction. Il y a des limites à l’hypocrisie, mes chers collègues ! Il y a des limites à l’honnêteté !

M. Didier Migaud. Arrêtez-vous !

M. Bernard Accoyer. Que s’est-il passé depuis le début de l’examen de ce texte ?

M. François Brottes. Vous préparez le 49-3 !

M. Bernard Accoyer. Il est important de rappeler ce que vous avez fait, mes chers collègues.

M. Christian Bataille. Sarkozy amène le 49-3 !

M. Bernard Accoyer. Nous vous écoutons depuis un moment parler de sujets qui n’ont rien à voir avec le texte sur l’énergie. Ceux qui bloquent les débats, c’est vous ! D’abord, les députés du groupe socialiste, qui se sont livrés à une course à l’échalote entre les différentes tendances pour déposer des dizaines de milliers d’amendements ; ensuite, ceux du groupe communiste, qui ont voulu en déposer davantage encore. Vous étiez arrivés à 137 000 amendements. Finalement, 17 000 n’étaient pas recevables et le PC a renoncé à en déposer 10 000. Et où en sommes-nous aujourd’hui ? Nous en avons examiné 3 000 et il en reste 107 000, ce qui représente plus de mille heures de débat. Et parce que M. le rapporteur, dont je veux une nouvelle fois saluer la compétence, le dévouement et le courage (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), a pris la parole, parce que les ministres, qui sont dans leur rôle, ont pris la parole, vous accusez la majorité de faire de l’obstruction ! Il y a des limites qu’il ne faut pas franchir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Depuis le début de notre débat, quarante-deux députés du groupe socialiste et dix du groupe communiste ont pris la parole, contre seulement six de notre côté.

M. Didier Migaud. Vous avez pour instruction de ne pas parler !

M. Christian Bataille. Cela prouve que l’opposition est mobilisée !

M. Bernard Accoyer. Nous n’admettons pas ces méthodes, qui sont d’un autre temps. En réalité, si vous adoptez cette attitude, c’est que vous n’êtes, entre vous, d’accord sur rien…

M. Christian Bataille. Balayez devant votre porte !

M. Bernard Accoyer. …et qu’il n’y a aucune proposition concrète que vous ayez le courage d’affirmer dans cet hémicycle,…

M. Didier Migaud. Nous avons proposé « Énergie de France ».

M. Bernard Accoyer. …après avoir déclenché l’ouverture des marchés de fait de l’accord du gouvernement Jospin, auquel vous avez, monsieur Migaud, apporté tout votre soutien, en tant que fabiusien.

Dans ces conditions, nous dénonçons votre attitude inqualifiable, qui consiste à bloquer l’institution parlementaire à un niveau jamais vu au cours de son histoire…

M. François Brottes. Vous êtes pourtant expert en la matière !

M. Bernard Accoyer. …et à prétendre ensuite que ce sont le Gouvernement et sa majorité qui freinent le débat.

M. Didier Migaud. Quel comédien !

M. Christian Bataille. Nous résistons parce que vous bradez le patrimoine public à l’encan !

M. Bernard Accoyer. Notre majorité soutient le Gouvernement et, même si certains d’entre nous usent de leur liberté de parole, comme ils conserveront leur liberté de choix au moment du vote, je réaffirme solennellement que nous soutenons ce texte et que nous apporterons, le moment venu, les voix nécessaires à son adoption, comme nous continuerons à repousser vos amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Christian Bataille. Donc, il n’y aura pas de 49-3 !

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec, pour un rappel au règlement.

M. Jean Le Garrec. Monsieur le président, je veux répondre au président Accoyer, car je suis bien placé pour lui faire remarquer qu’il n’a aucune leçon à donner. J’ai participé à suffisamment de débats, à l’époque où il était dans l’opposition, pour savoir qu’il avait un art consommé de bloquer la discussion. C’est un orfèvre en la matière, un expert !

M. Didier Migaud. Exactement !

M. François Brottes. Rendons-lui cette justice !

M. Jean Le Garrec. C’est pourquoi son intervention est fort mal venue. Le groupe communiste a défendu en bloc quelque cent soixante amendements.

M. Daniel Paul. Nous le rappellerons nous-mêmes.

M. Jean Le Garrec. Bien entendu ! M. Migaud en a soutenu autant en une seule intervention, apportant la preuve de notre incontestable volonté de nous appuyer sur des amendements princeps et d’éviter les redondances. Et voilà que vous arrivez, monsieur Accoyer, pour faire de la provocation…

M. Guy Geoffroy. Quel culot !

M. Jean Le Garrec. …en utilisant des jugements de valeur totalement déplacés dans la bouche d’un président de groupe.

Jamais je ne me serais permis des propos comme les vôtres, alors même que vous m’en avez fait voir de toutes les couleurs. Votre intervention est inacceptable. Elle ne fait que justifier notre accusation : vous faites de la provocation. (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Geoffroy. Oh !

M. Frédéric Dutoit. Voilà l’arroseur arrosé !

M. Jean Le Garrec. Il nous faut beaucoup de vertu républicaine pour résister à une telle provocation. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Accoyer. Il est vrai que vous ne manquez pas de culot !

M. Jean Le Garrec. J’aurais parlé comme vous venez de le faire en d’autres lieux et dans d’autres débats, vous auriez fait un véritable scandale. Mais, pour notre part, nous nous en garderons bien.

M. François Brottes. Bien sûr, car c’est exactement ce que voudrait la majorité.

M. Jean Le Garrec. Vous apportez de l’eau à notre moulin et nous allons continuer notre travail. Vous auriez mieux fait de vous féliciter de l’attitude du groupe socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Brottes. Exactement !

M. Christian Bataille. La vertu, c’est nous ! (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre-Louis Fagniez. C’est une toute petite vertu, alors !

M. Jean Proriol. Quelle hypocrisie !

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour un rappel au règlement.

M. Daniel Paul. À l’évidence, ceux qui veulent bloquer ou perturber le déroulement de la discussion sont à droite et non à gauche de l’hémicycle ! Venant après celles des orateurs qui se sont exprimés en début de séance, votre intervention, monsieur le président Accoyer, confirme nos soupçons. Vous voulez retarder notre débat.

M. Bernard Accoyer. Avec 90 000 amendements ?

M. Daniel Paul. Nous allons nous expliquer à ce sujet. Vous faites un amalgame entre deux choses.

S’agissant des amendements, vous vous trompez. En deux interventions seulement, notre collègue Michel Vaxès en a défendu 350 !

M. Bernard Accoyer. C’est ridicule !

M. Bernard Debré. C’est donc qu’ils n’avaient aucun intérêt !

M. Daniel Paul. Jean-Claude Sandrier, qui interviendra dans quelques minutes, si vous lui en laissez l’occasion, en soutiendra 153 en même temps.

M. Bernard Accoyer. C’est une argumentation indigne !

M. Daniel Paul. Vous devriez savoir mieux que moi, parce que vous siégez dans cet hémicycle depuis plus longtemps, que le seul moyen dont disposent les membres de notre groupe pour s’exprimer sur ces amendements identiques est d’en être signataires. Et, sur certains d’entre eux, qui seront appelés ultérieurement, nous serons plus nombreux à parler que nous ne le sommes aujourd’hui.

Voulez-vous un exemple ? Les tarifs de l’énergie ont augmenté pour beaucoup d’entreprises qui ont fait l’erreur de choisir le prix du marché plutôt que de rester au tarif dérégulé. Le problème, évoqué lors de la réunion de la commission des finances, se pose dans toutes les circonscriptions. Mais nous réservons la liste exhaustive de ces exemples pour la suite du débat. Vous avez constaté que nous ne les avons pas cités depuis le commencement de notre discussion.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Venons-en donc au débat !

M. Daniel Paul. J’ajoute que vous nous présentez un texte lourd. En dix-sept articles – dont deux, il est vrai, ont une importance moindre –, vous ouvrez le marché de l’énergie à la concurrence pour les particuliers et pour l’ensemble des entreprises, vous privatisez une entreprise publique dans le domaine énergétique – excusez du peu ! – et vous abordez non seulement le problème des réseaux mais même celui de la CRE. Le président de la commission des affaires économiques avait pourtant demandé, lors de l’examen en commission, que cette question soit reportée, tant elle posait problème au sein de votre majorité et a fortiori dans l’hémicycle !

Face à un tel bilan, reconnaissez tout de même à l’opposition le droit de s’interroger, de vous demander des comptes et d’alerter l’opinion sur les conséquences des mesures que vous vous apprêtez à prendre.

Nous avons montré depuis le début de ce débat que nous n’avions pas l’intention de le bloquer. (« Faux ! sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Nous aurions pu aller beaucoup plus loin que nous ne l’avons fait.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Oh !la la !

M. Daniel Paul. La lettre de griefs, par exemple, constitue un véritable scandale.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Encore !

M. Daniel Paul. Ce document important pour le déroulement de notre discussion et la bonne compréhension de ses enjeux a été censuré. On le prétend d’accès facile, mais il faut tout de même que les députés, c’est-à-dire les législateurs, se rendent pour le consulter dans le bureau du président de la commission. Pourquoi n’y auraient-ils pas accès directement, comme à tous les autres documents ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Pas vous, monsieur Paul !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous nous en sommes expliqués.

M. Daniel Paul. Nous avons fait à ce sujet les rappels au règlement qui s’imposaient.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Pourquoi en reparler, alors ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous vous avons répondu !

M. Daniel Paul. Oui, mais sans rien changer à la situation.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Parce que c’est impossible !

M. Daniel Paul. Nous ne sommes plus sous le coup du code pénal ; c’est à peu près tout ce que nous avons gagné. Le président Jean-Louis Debré nous a promis que, s’il était saisi, le Bureau de l’Assemblée nous protégerait. Encore heureux ! C’est dire où nous en étions il y a quelques jours.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Vous n’allez pas recommencer !

M. Daniel Paul. Souffrez donc que nous n’acceptions pas aujourd’hui la façon dont plusieurs d’entre vous en usent envers nous.

Nous continuerons ce débat comme nous l’avons commencé. M. Sandrier interviendra en une fois pour soutenir 153 amendements.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. « Il peut le faire » !

M. Daniel Paul. C’est ainsi que nous avons procédé jusqu’à présent. Alors, ne venez pas accuser le groupe communiste de recourir à des procédures de blocage ou d’obstruction. Ce n’est pas le cas.

Aujourd’hui, c’est vous, parce que vous craignez d’avoir, dans quelques jours, à vous exprimer individuellement sur ce texte, qui faites tout pour que le Premier ministre recoure au 49-3, ce qui vous évitera de prendre un risque dont vous ne voulez pas.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Retirez vos amendements, alors !

M. Michel Vaxès. Retirez votre projet de loi !

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, pour un rappel au règlement.

M. Yves Cochet. Monsieur le président, je m’associe aux protestations de mes amis des groupes socialiste et communiste. J’en profiterai pour rappeler un précédent en matière d’obstruction parlementaire et tirer une conclusion sur ce projet de loi.

Si l’on parle de blocage – et je regrette que M. Accoyer ait quitté l’hémicycle –, je me souviens fort bien des deux grandes lois sur les 35 heures que nous avions présentées entre 1997 et 2002. Certains d’entre vous étaient déjà députés à l’époque. Martine Aubry, qui siégeait au banc du Gouvernement, s’est vu opposer ce que M. Pezant, ancien secrétaire général de l’Assemblée nationale, appelait des « amendements cocotiers », qui étaient pitoyables, voire ridicules.

Regardez, par comparaison, ceux qui ont été déposés sur ce texte soit par moi-même, en faible nombre, soit par les députés des groupes socialiste et communiste. Ce sont des amendements de fond.

M. Guy Geoffroy. Le fond du fond ! À force de creuser, vous allez trouver du pétrole !

M. Yves Cochet. Ils traitent de manière substantielle du thème dont nous débattons : l’énergie.

Rappelez-vous ces amendements cocotiers, déposés par l’opposition UMP de l’époque. L’article 1er du projet de loi sur les 35 heures était d’une pureté juridique et littéraire absolue : « La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine. » Nous en avons longuement débattu. Les amendements – je parle de plusieurs centaines d’entre eux ! – proposaient d’ajouter des précisions du type « sauf pour les boulangers », « sauf pour les garagistes », « sauf pour les bouchers »…

M. Jacques Le Guen. C’étaient des amendements de fond !

M. Yves Cochet. Était-ce vraiment le fond du débat sur les 35 heures ? Nous avons dû faire face à une obstruction parlementaire dont M. Accoyer était, à l’époque, expert. Qu’il ne vienne donc pas donner de leçons à l’opposition ! Ce n’est pas le cas, puisque nous abordons dans nos amendements des problèmes de fond centrés sur la question de l’énergie.

Deuxièmement, vous êtes divisés, c’est vrai, et vous avez peur du vote. Disons, pour résumer, qu’on trouve à l’UMP une tendance libérale et une tendance plus gaullienne, régulationniste et étatiste. Mais ce projet de loi, dans sa substance – certains camarades de l’opposition en conviendront –, est un cadeau visant à permettre à M. Mestrallet de vendre le fichier des abonnés à Gaz de France et les tuyaux – le service de distribution – à un groupe privé. Voilà le cœur de la loi.

Chez vous, cela fait un peu débat, non seulement pour des raisons électorales, parce que, dans vos circonscriptions, les gens ne sont pas d’accord avec cette mesure, mais aussi parce qu’il demeure à l’UMP une tradition gaullienne en désaccord avec la tendance libérale que M. Sarkozy essaie actuellement de promouvoir.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Venons-en au débat !

M. Yves Cochet. Voilà pourquoi vous voulez éviter le vote, en espérant que l’article 49-3 sera utilisé. C’est un piège dont nous ne sommes pas dupes et dans lequel nous ne tomberons pas.

Reprise de la discussion

M. le président. Nous allons passer au vote sur les séries d’amendements identiques qui viennent d’être défendues.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 298 à 330.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 365 à 397.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 530 à 562.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 331 à 363.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 431 à 463.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de sept séries d’amendements, nos 31980 à 32133.

Les amendements nos 31980 à 32001 sont identiques, de mêmes que les amendements nos 32002 à 32023, nos 32024 à 32045, nos 32046 à 32067, nos 32068 à 32 089, nos 32090 à 32111 et nos 32112 à 32133.

Je vous suggère, monsieur Sandrier, de défendre également la série d’amendements identiques nos 32134 à 32155.

M. Jean-Claude Sandrier. Je vous remercie, monsieur le président, de nous permettre de faire avancer le débat car nous venons de perdre encore vingt minutes.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Adressez-vous à M. Cochet ! (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Sandrier, pour défendre ces huit séries d’amendements identiques.

M. Jean-Claude Sandrier. Cette perte de temps est d’autant plus malheureuse que l’on a voulu nous donner des leçons pour le moins déplacées, en évoquant un « déni de démocratie » et des « méthodes indignes ». Quand on refuse de consulter le peuple par référendum, comme nous le demandons, qu’on refuse de montrer à ses représentants l’intégralité de la lettre de griefs de la Commission de Bruxelles,…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Vous n’êtes pas venu la lire, monsieur Sandrier !

M. Jean-Claude Sandrier. … que 73 % des Français se déclarent inquiets quant à l’évolution des prix de l’énergie, en particulier du gaz, que 9 % seulement d’entre eux sont favorables à la privatisation et que les salariés des entreprises concernés votent à 94 % contre le projet, il faudrait faire profil bas.

Je vais maintenant défendre 153 amendements qui visent à renforcer l’article 2 de la loi de 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, en précisant la mission de développement et d’exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité et en y ajoutant celle de garantie de la sécurité de fonctionnement des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité.

Dans La Tribune de la semaine passée, on peut lire un article fort intéressant consacré à la canicule de juillet 2006 et aux performances de notre entreprise électrique nationale. Après avoir frôlé la défaillance lors de l’été 2003 et affronté un hiver 2006 difficile, EDF a franchi « sans encombre la vague de chaleur qui s’est abattue sur la France cet été ». La direction du développement durable d’EDF annonce même que l’entreprise a profité des leçons de 2003.

Quelle a été la stratégie déployée durant cette période ? Pour comprendre les conséquences de l’ouverture à la concurrence du secteur énergétique et les logiques de gestion qui sont mises en œuvre à EDF et qui le seront demain dans l’entreprise résultant de la fusion entre GDF et Suez, il convient de revenir quelque temps en arrière. Auparavant, l'entreprise électrique réservait 10 % de sa production de façon à pouvoir faire face aux imprévus, ce surplus étant rendu possible par le faible coût de la production d'électricité par voie nucléaire. En outre, les interconnexions entre pays permettaient de mettre en place une entente afin d’optimiser les ressources des différents pays européens. C’est ainsi que, en hiver, la France importait de l'énergie hydraulique suisse.

Aujourd'hui, dans le cadre de l'ouverture à la concurrence, les logiques d'action ont changé et EDF a tendance à rogner sur les dépenses de prévoyance, considérées comme inutiles. Pour faire face aux pics de consommation qui interviennent en période de canicule, elle achète ses mégawatt-heures à l'étranger, par le biais de sa filiale trading basée à Londres. L'ouverture à la concurrence incite en effet les entreprises productrices à tenter de faire des bénéfices sur ce marché volatile. Ces transactions sont effectuées au prix fort – cela va sans dire – c’est-à-dire entre 100 et 160 euros le mégawatt-heure, alors que le mégawatt-heure d'origine nucléaire revient à 30 euros. En période de crise, ces prix ont même atteint, quelques heures durant, 1 000 euros le mégawatt-heure. En effet, les prix sont fixés en fonction non pas des coûts de production, mais des variations de l'offre et de la demande.

Qui paie cette gestion coûteuse des imprévus ? Les usagers. Une gestion à long terme, à l'abri des aléas du marché, serait plus sûre pour l'usager. Nous tenons à dénoncer ces dérives incompatibles avec les missions de service public, qui consistent notamment à garantir un prix de l’électricité le plus proche possible de son coût de production, car, demain, il en sera de même pour le gaz. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Voici un exemple des « amendements cocotiers » qu’évoquait à l’instant Yves Cochet, et beaucoup d’autres du même type sont annexés à mon rapport. Ils sont tout à fait représentatifs de la méthode qu’a choisi d’employer l’opposition en déposant ces milliers d’amendements. La commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. M. Paul nous avait pré-vendu la prestation, remarquable du reste, de M. Sandrier, en annonçant que celui-ci allait défendre 153 amendements à la fois. « Il peut le faire » ! Il l’a fait ! Il convient néanmoins de relativiser cet exploit, car les dispositions proposées figurent d’ores et déjà explicitement dans l’article 1er de la loi du 10 février 2000. Le Gouvernement est évidemment défavorable à ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 31980 à 32001.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32002 à 32023.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32024 à 32045.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32046 à 32067.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32068 à 32089.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32090 à 32111.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32112 à 32133.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32134 à 32155.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux séries d’amendements identiques, nos 1464 à 1613 et nos 1647 à 1796.

La parole est à M. François Brottes, pour soutenir ces deux séries d’amendements.

M. François Brottes. Plutôt que de répondre aux provocations indécentes de M. Accoyer, je vais à mon tour défendre 298 amendements en une seule fois. Je ne doute pas, monsieur le président, que vous saurez vous montrer compréhensif en m’accordant un temps de parole sensiblement supérieur aux cinq minutes réglementaires.

Ces amendements visent à préciser les termes de la loi d’orientation sur l’énergie du 13 juillet 2005, qu’on pourrait d’ailleurs appeler « loi Devedjian », puisqu’il était à l’époque ministre délégué à l’industrie. Cette loi a le mérite de définir les ambitions de la France et d’identifier les enjeux dans les domaines de l’énergie et de l’environnement. Au reste, je dois dire que, sur le diagnostic et les objectifs, notre analyse n’était pas très éloignée de celle du Gouvernement, d’autant que l’article 1er de cette loi – promulguée, il est bon de le rappeler, le 14 juillet 2005, soit six mois avant l’annonce par M. de Villepin, sur le perron de Matignon, de la privatisation de Gaz de France – dispose : « La politique énergétique repose sur un service public de l’énergie qui garantit l’indépendance stratégique de la nation et favorise sa compétitivité économique. Sa conduite nécessite le maintien et le développement d’entreprises publiques nationales et locales dans le secteur énergétique. » Sont ensuite déclinés l’ensemble des éléments constitutifs du service public de l’énergie.

Il n’existe que deux entreprises publiques nationales chargées d’accomplir des missions de service public dans le secteur énergétique : Électricité de France et Gaz de France. Le rapporteur a bien tenté de nous faire croire, dans un moment d’égarement, qu’Areva était chargée d’une mission de service public, mais j’attends toujours qu’il me montre le contrat de service public qui lie cette entreprise à l’État – et pour cause : ce contrat n’existe pas. Nous souhaitons donc que soit précisé, dans l’article 1er de la loi de 2005, que les entreprises visées sont bien Gaz de France et Électricité de France. Si vous ne l’acceptez pas, il faudra que vous modifiiez la loi de 2005 pour parler d’entreprise publique nationale de l’énergie au singulier, puisque l’une d’entre elles aura été démantelée, bradée à vil prix par un très mauvais accord.

Cette précision fait écho à la vertu dont avait fait preuve M. Sarkozy lorsqu’il nous a expliqué ici – j’ai enregistré ses propos, que j’écoute de temps à autre pour me nourrir de la passion qui l’animait alors – que jamais, au grand jamais, EDF et GDF ne seraient privatisés. M. Sarkozy, qui se trouvait outre-Atlantique ces derniers jours, n’a pas pu entendre ses propos résonner dans l’hémicycle. Maintenant qu’il est de retour sur le territoire national, je veux rappeler les mots qu’il a prononcés très solennellement à la tribune de cet hémicycle, et non dans un meeting ou lors d’une conférence de presse – je cite le compte rendu intégral de la deuxième séance du mardi 15 juin 2004 : « Le projet que je vous présente au nom du Gouvernement change l'accessoire, c'est-à-dire la forme juridique d'EDF et de Gaz de France, pour préserver l'essentiel, c'est-à-dire la bonne santé de nos entreprises, leur caractère intégré, les valeurs du service public, » – écoutez bien – « le régime spécial de retraites, le statut des agents. EDF et Gaz de France doivent désormais pouvoir lutter à armes égales avec leurs concurrents », et non lutter l’une contre l’autre pour se détruire mutuellement, ce vers quoi nous allons. Il ajoutait : « Cette transformation [du statut] est la seule chose prévue par cette loi. Elle signifie concrètement, et je pèse mes mots, disait-il, qu'au lendemain de l'adoption du statut que je vous propose, EDF et Gaz de France seront des sociétés, mais des sociétés détenues à 100 % par l'État. » La loi dite « Devedjian » de 2005 est conforme à cet engagement, puisqu’elle indique clairement que seules des entreprises publiques nationales peuvent accomplir les missions du service public de l’énergie – ces entreprises dont M. Sarkozy nous disait qu’elles resteraient détenues à 100 % par l’État.

Je comprends que certains souhaitent se débarrasser rapidement de ce texte, car ces souvenirs sont assez récents. Ni le Président Jacques Chirac, au cours de sa campagne, ni les deux premiers ministres qui se sont succédé durant son mandat n’ont pris l’engagement public de privatiser Gaz de France. Le faire au détour d’une session extraordinaire parce qu’il y a le feu à la maison Suez, c’est indigne, c’est grave et c’est mettre en danger un secteur stratégique pour notre pays, ainsi que le service public. Et nous pouvons être certains que les consommateurs le paieront très cher.

M. Éric Besson. C’est vrai !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Nous avons consacré hier soir de longues heures à examiner des amendements qui étaient la copie de ceux-ci. M. Brottes, comme Christian Bataille tout à l’heure, a utilisé le mot « vertu » pour se l’attribuer. Je me permets de vous rappeler que ce mot vient du latin virtus, qui signifie « courage ». J’aimerais, mes chers collègues, que vous en fassiez bon usage lorsque vous vous drapez dans les voiles d’une dame dont on devine la fine silhouette.

La commission a émis un avis défavorable à ces amendements. J’ajouterai à l’attention de M. Brottes que l’article auquel il se réfère n’est pas celui qu’il a lu. La loi dit bien que « la politique énergétique repose sur un service public de l’énergie », mais ne parle pas du tout d’entreprises publiques ayant un contrat de service public. Enfin, à partir du moment où GDF est privatisé, il reste comme entreprises publiques, dans le secteur de l’énergie, non seulement EDF et Areva, mais encore RTE, que j’avais oubliée hier.

M. Jean Gaubert. Ah non !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur Brottes, vous avez déjà tenu ces propos à maintes reprises. Vous avez même eu l’occasion de nous démontrer que vous ne maîtrisiez pas très bien les technologies nouvelles, mais cela ne vous a pas découragé pour autant. Les nombreux orateurs qui vous ont précédé ont tous dit la même chose que vous. Et vous prétendez ensuite qu’il n’y a pas d’obstruction ! Je vous le demande : entrons dans le vif du sujet ! (« Mais oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Vous nous parlez du statut d’EDF, qui n’a rien à voir avec les articles du texte de loi dont nous allons, je l’espère, finir par débattre. Je le répète : il s’agit uniquement de discuter des moyens par lesquels nous pourrons permettre à la directive de s’appliquer, conformément aux intérêts de nos compatriotes, ainsi que de la liberté donnée à Gaz de France d’aller de l’avant !

Enfin, puisque vous faites référence à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, je vous le dis au nom du Gouvernement : oui, Nicolas Sarkozy est un homme d’État.

M. Christian Bataille. Vous assurez votre avenir !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Nous avons longuement parlé entre nous, et nous avons tous constaté – en particulier les membres de la majorité ici présents – que c’était l’intérêt de la France et des Français que de débattre du sujet qui nous occupe aujourd’hui et qu’il y avait une urgence à le faire. Il ne faut surtout pas attendre un an ou deux comme vous y seriez enclins, vous les spécialistes du « on verra plus tard » – une formule que vous avez largement appliquée en matière de gestion de la dette publique. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons une autre conception des responsabilités. Les enjeux ont changé, les défis énergétiques sont différents, il faut en tirer les conséquences. C’est ce que nous faisons, mais, pour cela, de grâce, laissez-nous entrer dans le débat ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Claude Sandrier. Relisez le rapport de la Cour des comptes ! La dette, c’est vous !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Pour ce qui est de la dette, monsieur le ministre, si vous aviez le même bilan de gestion que le nôtre, je pense que nous serions moins inquiets pour l’avenir.

Quand j’avais cité M. Sarkozy à la tribune, je n’avais pas en mémoire qu’il s’était engagé sur un « 100 % public » – engagement sur lequel il est revenu assez rapidement – ni sur le maintien des régimes de retraite spéciaux. Au fur et à mesure que le débat progresse, nous parvenons à démasquer, lentement mais sûrement, des incohérences et des mensonges qui nous paraissent dangereux. Sans doute est-ce pour cette raison que vous souhaitez qu’il soit fait application, le plus rapidement possible, de l’article 49-3. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Quant à RTE, monsieur le rapporteur, il me semble qu’il fait partie intégrante du groupe EDF…

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. C’est une société !

M. François Brottes. …et que, s’agissant d’une filiale, il n’a pas à être considéré comme une entreprise à part entière.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. J’étais le rapporteur de la loi de 2004, et je n’accepte pas ce que vous venez d’affirmer, monsieur Brottes. Les limites de la mauvaise foi sont dépassées, et vous allez si loin que j’ai du mal à vous rattraper !

M. François Brottes. Vous aviez pourtant beaucoup d’avance !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Nous avons, à l’époque, voté une loi qui permettait l’ouverture du capital d’EDF. Le ministre d’État alors en charge du dossier a fait savoir que cette ouverture ne se ferait qu’après que la commission Roulet aurait rendu son rapport. Il a indiqué que, entre-temps, l’entreprise resterait publique à 100 %. L’interprétation que vous faites de ses propos est indigne de vous, monsieur Brottes.

M. François Brottes. Lisez vous-même ! Voici les propos en question in extenso ! (M. Brottes se lève et apporte un feuillet à M. le rapporteur.)

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Ça va ! Je les connais parfaitement ! La mauvaise foi a ses limites !

M. le président. La parole est à M. Éric Besson.

M. Éric Besson. Je partage l’indignation de notre collègue François Brottes par rapport à ce que vient de dire le rapporteur. Nul ne pouvait imaginer qu’il essaierait de nier ce qui ne peut être nié. J’ai sous les yeux une dépêche AFP rendant compte du conseil des ministres du 19 mai 2004. Jean-François Copé, porte-parole du Gouvernement, rapporte les propos du Président de la République comme suit : « EDF et Gaz de France y tiendront un rôle majeur. Ces entreprises sont de grands services publics, elles le resteront, ce qui signifie qu’elles ne seront pas privatisées. » Il ajoute que « le statut des agents, leur régime social et notamment le financement des retraites, seront garantis ». C’est la crédibilité de la parole publique qui se joue dans cette discussion, pas moins. Lorsque le numéro deux du Gouvernement, par ailleurs président du parti majoritaire, prend un engagement solennel à l’Assemblée nationale, en précisant qu’il s’appuie sur les propos « solennels » du Président de la République et que, deux ans plus tard, tout est chamboulé, comment prêter foi ensuite à la parole publique ?

Dans le cas de GDF, lorsque vous avez fait voter cette première loi, combien de cadres de GDF ont expliqué à leurs salariés qu’il n’y avait rien à craindre puisqu’un engagement solennel avait été pris ? Imaginez la situation dans laquelle ils se trouvent aujourd’hui !

J’imagine, monsieur le ministre, que l’hommage appuyé rendu à Nicolas Sarkozy, en qui vous dites voir un « homme d’État » était destiné à pouvoir être montré à l’intéressé dans le Journal officiel le moment venu. Nous considérons pour notre part qu’un homme d’État est avant tout quelqu’un qui respecte la parole donnée, surtout quand elle l’a été de manière si explicite.

Enfin, monsieur le ministre – ce n’est pas la première fois que vous le faites, mais cela devient un peu plus indécent à chaque fois – je vous en prie, cessez de donner des leçons en matière de dette publique ! Lorsque l’UMP est arrivée au pouvoir, la dette publique représentait 58 % de la richesse nationale brute. C’était sans doute déjà beaucoup trop, mais nous en sommes aujourd’hui à 66,8 % ! Et vous-même avez augmenté cette dette de 115 milliards d'euros depuis que vous êtes ministre de l’économie et des finances. Vous n’êtes donc nullement fondé à donner des leçons dans ce domaine.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Allons, monsieur Besson !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote la première série d’amendements identiques nos 1464 à 1613.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote la deuxième série d’amendements identiques nos 1647 à 1796.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux autres séries d’amendements identiques, nos 2061 à 2210 et nos 2376 à 2525.

La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir ces deux série d’amendements.

M. Christian Bataille. Je crois que M. le rapporteur a du mot « vertu » une lecture religieuse, voire jésuitique. J’ai tout à l’heure employé le mot « vertu » au sens où l’entend Montesquieu, c’est-à-dire celui d’une qualité éminemment républicaine. Montesquieu dit en effet que le ressort de l’aristocratie est l’honneur, et le ressort de la République, la vertu. Il ne faut donc pas charger ce mot d’une quelconque signification moralisatrice, comme semblait vouloir le faire M. Lenoir.

Je vais défendre deux séries d’amendements qui portent sur le maintien et le développement d’entreprises publiques nationales et locales dans le secteur énergétique. Cela est nécessaire par rapport à votre projet de fusion, une fusion qui « n’obéit qu’à des copinages de milieux d’affaires ». C’est au député UMP Nicolas Dupont-Aignan que nous devons cette formule prononcée avant-hier – et nous avons le sentiment qu’il a dit tout haut ce que beaucoup d’entre vous pensent tout bas.

Nous avons déposé ces amendements parce que les entreprises publiques de l’énergie sont à la base de la compétitivité industrielle et du niveau de vie. L’électricité et le gaz, nous l’avons déjà dit, ne sont pas des produits marchands comme les autres. L’énergie est, plus que jamais, une variable stratégique, et les économies d’énergie, dont Yves Cochet soulignait tout à l’heure l’importance, ne dispenseront pas de réaliser des investissements énergétiques colossaux dans les années à venir. Selon l’Agence internationale de l’énergie, les investissements à réaliser dans le secteur de l’énergie d’ici à 2030 s’élèvent à 13 500 milliards d'euros, dont près de 8 000 dans le secteur électrique et 2 500 dans le secteur du gaz naturel. Dans les pays développés comme le nôtre, il s’agira de renouveler les installations, c’est-à-dire les réseaux de transports et de distribution, et de poursuivre le programme de renouvellement des fontes grises – un programme pour lequel une entreprise privatisée aura sans doute moins d’intérêt que n’en a l’entreprise publique Gaz de France. Les centrales électriques seront également à renouveler, comme vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre de l’industrie, ce qui représente des investissements gigantesques. Enfin, il conviendra d’accroître la part du gaz naturel et des énergies sans carbone.

S’en remettre au secteur privé, comme vous voulez le faire, revient à faire reposer l’investissement sur des augmentations de prix.

Les augmentations de prix décidées pour financer les investissements et rémunérer les actionnaires s’ajouteront au mouvement naturel d’augmentation des prix des matières premières, constaté au plan mondial et amplifié par la spéculation. Vous avez tout à fait raison, monsieur Breton, de souligner l’existence d’une variable incompressible – le cours des matières premières au plan mondial –, mais il existe une autre variable, que les entreprises publiques n’intègrent pas : la nécessité pour les entreprises privées de rémunérer l’actionnaire. Plus exactement, l’État actionnaire sait faire preuve de sagesse et, généralement, réinvestit les profits réalisés.

Enfin, je tiens à faire écho aux propos de François Brottes. Notre république étant animée d’une vertu qui la conduit à commémorer les dates célèbres, je suggère, afin de marquer d’une pierre blanche celle du 15 juin 2004, date à laquelle M. Sarkozy a prononcé des paroles mémorables, de l’ériger en date commémorative des reniements ministériels : en effet, M. Sarkozy a battu tous les records en la matière en affirmant solennellement qu’EDF et GDF ne seraient pas privatisés – déclaration que personne ne conteste. Or, à peine deux ans plus tard, nous faisons exactement le contraire. Rarement reniement aura été aussi spectaculaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 2061 à 2210 et nos 2376 à 2525 ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Défavorable.

Pour revenir à la notion de vertu,…

M. Christian Bataille. Je n’ai pas cherché à vous donner une leçon, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. …je rappellerai le mot de La Rochefoucauld : « La vertu n’irait pas loin si la vanité ne lui tenait compagnie. »

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 2061 à 2210.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 2376 à 2525.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. J’appelle maintenant les amendements identiques nos 2526 à 2675 et nos 2709 à 2858.

Ces amendements peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. J’ignore si le débat sur la vertu nous occupera longtemps. J’ai en revanche le sentiment que le débat sur la mauvaise foi pourrait poindre !

M. François Brottes. Ils en sont les champions du monde !

M. Jean Gaubert. En effet, depuis le début de nos travaux, vous n’avez pas cessé d’en faire preuve, nous faisant perdre un temps précieux !

Il vous a ainsi fallu des jours et des jours pour reconnaître enfin, ce matin, du bout des lèvres, non seulement la teneur du compromis de Barcelone, mais également que celui-ci avait été cautionné par le Président de la République et le Premier ministre de l’époque, et que le premier avait choisi de ne pas l’appliquer, après avoir changé de chef du Gouvernement.

Il en est de même des déclarations de M. Sarkozy, que François Brottes vient d’évoquer et qu’il convient de lire in extenso : vous tentez de les dissimuler, alors que M. Sarkozy a bien prononcé les paroles que nous lui prêtons et qu’il a bien pris les engagements que nous rappelons ! Il les a même confirmés par écrit aux syndicats ! Là encore, si vous cessiez de le nier, nous gagnerions un temps précieux !

Enfin, il est vrai que le projet de loi maintient le tarif dit « administré », mais comme, dans vos rangs, vous êtes tous favorables à le hisser au prix de marché, en clair cela signifie à terme sa disparition ! Là encore, si vous l’aviez reconnu, nous aurions gagné du temps et nous serions entrés plus tôt dans l’examen des articles du projet de loi. Comment être efficaces, si nous n’avons pas la volonté de nous écouter ? Or, je ne suis pas certain qu’une telle volonté soit partagée sur l’ensemble de ces bancs.

Sur le fond, je serai bref : Christian Bataille, dans son intervention précédente sur les deux séries d’amendements identiques qu’il défendait a, de façon tout à fait légitime, largement débordé sur les deux présentes séries.

La première des deux – il s’agit des amendements nos 2526 à 2675 – concerne la recherche. Chacun sait bien que les entreprises privées n’aiment pas investir sur le long terme dans une recherche fondamentale dont les résultats sont toujours incertains. Seule la puissance publique, ou presque, vous le savez, peut s’y intéresser, d’où la nécessité de conserver des entreprises publiques pour soutenir une telle recherche. Du reste, et vous le savez aussi bien que nous, c’est parce que nous avions des entreprises publiques fortes que nous avons pu développer des programmes, principalement dans le domaine électronucléaire. Assurément, d’autres choix auraient pu être faits, notamment en direction des énergies renouvelables. Tel n’a pas été le cas. Il n’en reste pas moins que les programmes développés ont pu l’être pour deux raisons : le Gouvernement en avait la volonté et il disposait pour le faire d’un bras séculier lui permettant de mettre en œuvre ses choix.

Les amendements identiques nos 2709 à 2858 posent, quant à eux, la question des réseaux, qui est liée à celle du stockage. En cas de transfert des réseaux au secteur privé, c’est tout un pan de l’indépendance nationale qui s’effondrera. Par ailleurs, quel pays accepterait de se dessaisir de ses réserves stratégiques au profit d’une entreprise privée ? Seule la France est prête à le faire ! Même les États-Unis, monsieur le rapporteur, ont élaboré des systèmes permettant à l’État de contrôler les stockages stratégiques ! Si vous le souhaitez, nous pourrons revenir sur cette question.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Non seulement ce n’est pas comparable, mais vous entendre dire que le système américain est meilleur que le nôtre, ce n’est pas mal !

M. Jean Gaubert. C’est qu’avec le projet de loi, vous lâchez tout ! Vous donnez au privé les stockages stratégiques de gaz ! Vous êtes encore plus libéraux que les Américains, et c’est dramatique, parce que les Américains, au moins, essaient de tirer les conséquences de leurs erreurs.

Nous pourrons, je le répète, quand vous le souhaiterez, revenir sur les problèmes du réseau électrique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Le Gouvernement partage-t-il cet avis ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 2526 à 2675.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 2709 à 2858.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. François Brottes. Je demande la parole pour un rappel au règlement, fondé sur l’article 58, alinéa 3.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. Chacun peut s’en rendre compte : plus le débat progresse, plus les incohérences et les dangers du texte apparaissent et plus les divergences à son sujet au sein de la majorité éclatent, ce qui explique le malaise du président Accoyer, qui souhaite, avec la complicité obligatoire du Gouvernement, en finir au plus vite par le recours au 49-3.

Nous le répétons : nous souhaitons, pour notre part, que le débat ait lieu et qu’il dure le temps qu’il faudra pour que chacun puisse obtenir les éclaircissements nécessaires. Du reste, nous avons fait montre de bonne volonté, en acceptant d’accélérer la présentation de nos amendements, si bien que nous arrivons maintenant, si je ne me trompe, monsieur le président, à l’article 1er du projet de loi.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Huit jours après le début de la discussion !

M. François Brottes. Dans la mesure où il s’agit d’une étape importante de nos débats, je vous demanderai, monsieur le président, une courte suspension de séance, en vue de déterminer la façon dont nous allons désormais organiser nos travaux. Nous commencerons évidemment à examiner l’article 1er avant la levée de la séance.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur Brottes, je tiens solennellement à noter que c’est une première, dans nos institutions républicaines, que d’avoir dû attendre une semaine – je dis bien une semaine, mesdames et messieurs les députés – avant de pouvoir entrer dans le vif du sujet.

M. Jacques Brunhes. Vous vous trompez, monsieur le ministre : c’est loin d’être une première !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Une semaine ! Une semaine…

M. François Brottes. Non, trois jours : lundi, mardi et mercredi !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …à débattre d’articles additionnels avant l’article 1er, qui n’avaient qu’un rapport très lointain avec le texte ! Vous vous en êtes finalement rendu compte, puisque vous avez enfin accepté d’« accélérer », comme vous dites, la présentation de vos amendements, c'est-à-dire accepté de ne plus défendre des amendements indéfendables et de les traiter par blocs.

Mesdames et messieurs les députés, les Français doivent le savoir : une semaine…

M. François Brottes. Non, trois jours !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …pour commencer à débattre du sujet qui les préoccupe, c’est inadmissible ! Ce qui les intéresse en effet, c’est, tout d’abord, de savoir comment et à quelles conditions nous pourrons, à partir du 1er juillet 2007, maintenir les tarifs réglementés dans les secteurs de l’électricité et du gaz. Ce qu’ils veulent également savoir, c’est comment nous pourrons permettre à Gaz de France d’aller de l’avant et de nouer des alliances afin de mieux protéger l’intérêt des consommateurs français.

M. François Brottes. Pourtant, ils ne soutiennent pas votre projet de loi.

M. Didier Migaud. Et si vous les interrogiez, monsieur le ministre, vous sauriez pourquoi !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Une semaine, il faut le reconnaître, c’est un exploit. Je conçois alors volontiers, monsieur Brottes, que, face à un tel exploit, vous ayez besoin d’une courte suspension de séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes, pour un rappel au règlement.

M. Jacques Brunhes. Monsieur le ministre, vous n’avez pas la longue expérience que certains d’entre nous ont de cette maison – pour ma part, vingt-neuf ans. C’est la raison pour laquelle je puis vous affirmer que ce à quoi nous assistons n’est en rien une première !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’était à quelle occasion ? Dites-le nous !

M. Henri Emmanuelli. Vous n’étiez pas là, monsieur Breton !

M. Jacques Brunhes. Lorsqu’elle était dans l’opposition, l’actuelle majorité a su prolonger davantage encore les débats !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Pas une semaine entière !

M. Christian Bataille. Et le débat portant sur les nationalisations, par exemple ?

M. Jacques Brunhes. M. Toubon, en 1981, avait déposé une série d’amendements, appelés « amendements cocotiers » par lesquels ce député RPR déclinait en secondes le temps nécessaire pour monter à un cocotier – 29 secondes, puis 28, puis 27, etc.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Jamais il n’a fallu huit jours avant d’aborder l’article 1er d’un projet de loi !

M. Jacques Brunhes. Et un autre député, Robert-André Vivien, célèbre dans cet hémicycle pour sa connaissance de la procédure, a déposé à lui tout seul 400 amendements d’un coup !

M. Jacques Le Guen. Là, il en reste 90 000 !

M. Jacques Brunhes. Leur examen a duré des semaines. Il appelait cela « résister » !

Eh bien, nous aussi nous résistons, monsieur le ministre, car ce que nous faisons, ce n’est pas de l’obstruction, mais bien de la résistance !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous allons maintenant aborder l’article 1er du projet de loi.

Article 1er

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Pardon de m’être fait attendre quelques instants mais le jeu en valait la chandelle, si je puis dire. Je ne parle pas de l’intérêt de mon propos – j’imagine d’ailleurs que certains y trouveront à redire, comme M. le rapporteur qui va jusqu’à remettre en cause la qualité, l’exactitude du compte rendu intégral de la séance ! Je serai le seul de mon groupe à intervenir sur l’article 1er.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Ah ! (Sourires.)

M. François Brottes. Je n’ai jamais été autant apprécié !

M. le président. Ne vous laissez pas détourner de votre intervention, monsieur Brottes.

M. François Brottes. Le sourire de satisfaction de MM. les ministres m’inquiète beaucoup car ils vont finir par être d’accord avec moi,…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Pour l’instant, ils le sont. (Sourires.)

M. François Brottes. …ce qui m’intrigue beaucoup.

Dans la discussion des articles, nous avons décidé d’insister sur les arguments développés jusqu’à présent et que vous n’avez voulu ni entendre ni comprendre. En effet, à développer trop d’arguments sur un même sujet, on obtient des réponses dilatoires…

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Il faudrait savoir !

M. François Brottes. …et, de ce point de vue, M. le rapporteur est pourvu d’un talent incomparable.

Le point important de cet article 1er est qu’il consacre la possibilité pour chaque ménage français de choisir son fournisseur d’électricité. Certains pensent qu’il s’agit d’une bonne disposition, comme Mme Fontaine, l’un de vos prédécesseurs au ministère de l’industrie, monsieur Loos, lorsque M. Raffarin était Premier ministre. En effet, revenant d’un sommet européen en date, je crois, du 25 novembre 2002, soit quelque temps après l’élection de cette majorité, elle s’était félicitée, comme M. Gonnot nous l’a confirmé, de ce que la France sortait enfin de l’archaïsme dans lequel elle était restée plongée du temps de la gauche de M. Jospin, puisque son action auprès des instances communautaires permettrait enfin aux ménages de profiter de l’ouverture du marché de l’énergie !

Je me permets de rappeler à nos collègues qui prennent le débat en cours de route, les propos tenus par le président Jacques Chirac lors de sa conférence de presse du 16 mars 2002 à Barcelone – je tiens à votre disposition l’intégralité du texte. M. Jospin, en tant que Premier ministre s’était bien sûr associé aux mots prononcés par le chef de l’État : « Il n’était pas de notre point de vue admissible, acceptable d’aller plus loin [que l’ouverture du marché de l’électricité aux entreprises]. »

Il était en effet hors de question, pour lui, car trop dangereux, que les ménages soient concernés. Voilà en substance ce que signifiait le Président de la République. Puis, prenant acte de la volonté de M. Jospin de mieux encadrer cette ouverture à la concurrence, Jacques Chirac ajoutait avoir obtenu de la Commission européenne, avec le concours de son premier ministre d’alors, qu’elle « propose une directive-cadre sur le sujet des principes des services publics, directive cadre qui devrait normalement être faite avant la fin de l’année ».

C’était, je le rappelle, en 2002. À la fin de cette même année, alors qu’il aurait dû exiger d’avoir des nouvelles de la directive-cadre, que le gouvernement de M. Raffarin ? Il s’empresse de succomber à la tentation d’ouvrir à la concurrence le marché de l’énergie pour les ménages. La gauche s’y était fermement opposée, avec, il faut le dire, l’accord du Président de la République ; la droite, après avoir gagné les élections, n’y pense même plus : elle répond diligemment à la demande d’autres pays européens et de certains opérateurs.

L’article 1er transpose dans notre droit la directive-cadre, non pas en matière de services d’intérêt économique général, mais par cette extension de l’ouverture du marché à la concurrence. Dans le même temps – et avec l’aide des quelques amendements du rapporteur –, on essaie de faire croire aux ménages que l’on va limiter la casse. On a laissé entendre tout à l’heure que les augmentations des tarifs réglementés seraient payées par les impôts. Or ce sont les ménages qui paieront. Le danger est en effet réel d’assister à une forte inflation des tarifs pour les particuliers. C’est une absurdité que d’ouvrir ce secteur à la concurrence. Non seulement les ménages subiront les hausses de prix, mais, pis encore, ils seront amenés à supporter le coût des réductions de prix consenties aux industriels ! Nous en ferons la démonstration lors de la présentation de nos amendements à l’article 1er.

Nous sommes donc farouchement contre les dispositions permettant l’ouverture à la concurrence pour les ménages.

S’il faut en effet légiférer pour transposer la directive, nous souhaitons en revanche le retrait de l’article 10, qui privatise Gaz de France et n’a, en définitive, aucun lien direct avec la transposition. Quant à l’article 1er, il est nécessaire d’en débattre afin de prendre la mesure des conséquences néfastes qu’il aura pour l’ensemble de la population de notre pays.

S’agissant des tarifs, je sais que vous avez déployé des trésors d’imagination et multiplié les propositions, monsieur le rapporteur, et je vous en sais gré. Pour autant, nous nous rendrons vite compte, je le crains, des conséquences sur l’évolution des prix.

Certes, l’échéance est fixée au 1er juillet 2007, c’est-à-dire après les élections, selon le fameux principe de la « patate chaude » : on imagine que ce sera indolore pour la période électorale. Mais nous sommes là pour accomplir un travail de transparence, pour éclairer chacun et pour donner l’alerte : attention, on est en train de fomenter un mauvais coup ! Les effets s’en feront sentir après les échéances électorales, mais ceux qui sont aux manettes aujourd’hui devront en porter la responsabilité.

Hier soir, M. Breton nous invitait à ne pas oublier que l’essentiel de ce texte était la transposition de la directive et que nous étions là pour cela. C’est en effet un aspect important : nous devons transposer. Mais que ne l’avez-vous fait en 2004, lorsque vous avez changé le statut d’EDF et de GDF ! Pourquoi n’avoir pas annoncé, au moment où vous avez fait part de votre intention de privatiser Gaz de France par un texte législatif, que vous transposeriez en même temps la directive ? En réalité, vous ne le faites que parce que le Conseil d’État vous a rappelé à l’ordre sur ce sujet. Vous avez saisi l’occasion, pensant que l’on pourrait noyer quelque peu le poisson de la privatisation de GDF en parlant de tarifs sociaux. Pour vous, c’était une aubaine.

Nous continuerons néanmoins à faire tomber les masques. Il faut transposer la directive, c’est vrai,…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oui !

M. François Brottes. …il faut encadrer les tarifs, c’est vrai,…

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oui !

M. François Brottes. …mais vous nous proposez une manière de le faire qui risque d’être extrêmement préjudiciable pour l’ensemble des ménages français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. L’objet de l’article 1er, monsieur le ministre, est l’ouverture complète du marché de l’électricité, en étendant le champ de l’éligibilité, c’est-à-dire du « droit », dites-vous, de choisir « librement » son fournisseur, à compter du 1er juillet 2007.

Présenter, comme vous le faites, l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité comme l’ouverture d’un droit nouveau pour nos concitoyens ne manque pas de sel, ni de cynisme. Souligner à demi-mot que l’ouverture à la concurrence serait un gage contre le monopole d’entreprises publiques n’est pas crédible. C’est une supercherie contredite par la réalité de la concentration du secteur de l’énergie.

Même les plus fervents défenseurs du libéralisme et de la concurrence généralisée ne peuvent nier que l’ouverture à la concurrence est le plus souvent synonyme d’ententes et de nouvelles concentrations à court et moyen terme. Cela vaut particulièrement dans le domaine qui nous occupe, l’énergie, où il serait mensonger de prétendre que nous verrons émerger demain une multitude d’acteurs.

Vous ne pouvez donc prétendre que les consommateurs auront demain le choix et pourront faire jouer la concurrence : en réalité, ils seront les clients captifs de quelques oligopoles. Déjà, dans ma circonscription du Havre, les habitants subissent directement les hausses de prix – alors que GDF annonce 1,7 milliard d’euros de bénéfices – et on leur coupe l’électricité ou le gaz lorsqu’ils ne peuvent tout simplement plus honorer leurs factures.

Vraiment, nous n’arrivons pas à comprendre à quelle logique aberrante peut bien répondre votre défense du principe de l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité comme de celui du gaz. Vous ne pouvez vous retrancher derrière l’argument technocratique de la nécessité de transposer coûte que coûte des directives : il s’agit bien de décisions de nature politique. Vous pourriez, par exemple, demander à nos partenaires européens un moratoire sur la mise en œuvre des directives ou, à tout le moins, proposer qu’un bilan soit établi des conséquences de l’ouverture partielle du marché de l’énergie sur notre tissu économique et sur nos entreprises. Vous n’avez pris aucune de ces initiatives, malgré les questions évidentes que soulevait la mise en œuvre des directives : on évoque des chiffres effrayants à propos de l’augmentation des factures d’énergie pour les clients industriels qui ont exercé leur éligibilité : 70 % pour les uns, 80 % pour les autres. Personne ne dément ces chiffres et le MEDEF lui-même a fait part de ses inquiétudes.

Quel est donc le motif de votre obstination à ouvrir complètement le marché en dépit des démentis que vous oppose la réalité ? Un tel aveuglement est incompréhensible. Sur la question précise de la pertinence de l’ouverture du marché de l’électricité à tous les consommateurs, nous attendons que vous nous répondiez clairement, sans vous réfugier une nouvelle fois derrière des arguties technocratiques.

Nous sommes rigoureusement opposés tant à la privatisation de Gaz de France qu’à cette ouverture à la concurrence au 1er juillet 2007. Nous ferons tout pour défendre les intérêts des usagers. Nous en appellerons rapidement à l’ensemble des consommateurs, les particuliers comme les PME-PMI, pour qu’ils en restent aux tarifs régulés, seul moyen d’éviter la hausse qui, inévitablement, se produira.

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. L’objet de cet article étant de déréguler un peu plus le marché de fourniture d’énergie, je souhaite rappeler quelques principes fondamentaux relatifs à la fixation des prix sur le marché de l’électricité.

Le système que vous instaurez en faisant une place encore plus grande au marché, monsieur le ministre, c’est celui de la désoptimisation industrielle et de la séparation des activités de fourniture et d’acheminement. Or l’électricité a ceci de spécifique qu’elle ne se stocke pas : à tout moment, la production doit être exactement égale à la consommation. Il s’ensuit que les activités doivent être totalement intégrées pour atteindre l’optimum économique et respecter la sécurité du système électrique.

La séparation entre les activités de transport et de distribution et les activités de production entraîne des surcoûts très importants, essentiellement du fait que l’optimisation industrielle du système électrique est remplacée par des mécanismes de marché, à savoir le marché d’ajustement et les enchères d’interconnexion. Ainsi, chaque opérateur revendique sa propre marge de rentabilité, indépendamment de tout objectif lié à l’intérêt général et à la sécurité du système.

Dans le mécanisme que vous mettez en place, les prix sont fixés en fonction du marché et non en fonction des coûts. À la création de l’entreprise EDF-GDF en 1946, on a adopté un système de tarification publique reposant sur la structure des coûts de production et d’acheminement de l’électricité. Les tarifs devaient être fonction pour partie du coût de revient des installations existantes – avec maintenant un parc nucléaire partiellement amorti – et pour partie du coût des investissements futurs. Ce système n’est pas périmé. La campagne menée par les opérateurs pour faire croire que le « juste prix » de l’électricité serait révélé par le prix du marché n’a aucun sens. Elle est même mensongère, car les prix de marché sont tirés vers le haut par une production dominée, à l’échelle européenne, par le charbon et les hydrocarbures, et parce qu’ils sont largement influencés par les phénomènes spéculatifs liés à la pénurie en période de pointe. Ce que les prix de marché anticipent surtout, c’est l’actualisation des dividendes futurs à distribuer aux actionnaires.

Par ailleurs, les contraintes imposées par la CRE à EDF pour permettre l’installation d’opérateurs alternatifs sur le marché ont pour conséquence objective de faire monter les coûts de revient de l’électricité. Alors que les moyens de production d’EDF permettent de couvrir à 100 % la demande intérieure, la compagnie nationale est obligée de passer par le marché pour acheter l’énergie correspondant aux pertes réseau et pour mettre aux enchères 10 % de sa production nucléaire. C’est donc le prix de 20 % de la production qui est recyclé par le marché au lieu d’être basé sur les coûts.

Si la hausse des prix des hydrocarbures est indéniable, on occulte l’existence de contrats de long terme amortissant ces hausses. Or l’écart entre les prix de ces contrats et ceux du marché est du simple au double.

En vérité, le système que vous instituez vise à la satisfaction des exigences des actionnaires. Parmi les arguments qui ont été avancés pour évaluer le juste prix de l’électricité et du gaz, il est une donnée qui est soigneusement passée sous silence : le niveau de rentabilité imposé par les actionnaires et les marchés financiers à la suite de l’ouverture du capital d’EDF et de GDF, dans un secteur industriel fortement capitalistique, celui de l’énergie. Le coût du capital a une importance primordiale dans la formation des prix. Il est, à long terme, de 5 %, alors que la rentabilité exigée par les actionnaires et les marchés financiers est de 11 %. Voilà qui explique le niveau des dividendes versés par EDF et par GDF pour 2005 : respectivement 1,4 milliard et 700 millions d’euros, soit une augmentation de 250 % pour l’un, de 60 % pour l’autre.

Pour toutes ces raisons, nous sommes fermement opposés à l’article 1er, en dépit de certaines dispositions qui visent à donner un vernis social au projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. L’article 1er pose le principe de la concurrence pour la fourniture d’électricité à tous les consommateurs, y compris les consommateurs domestiques. Nous connaissons votre discours, monsieur le ministre : transposition obligeant, vous ne feriez que vous conformer aux exigences de l’Union européenne en proposant une version « soft » de l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité pour l’ensemble des consommateurs. Vous masquez ainsi votre projet de loi derrière un léger paravent social en réaffirmant dans cet article le mécanisme de la tarification spéciale. Outre que celui-ci fonctionne a minima – nous y reviendrons lors de la discussion des amendements –, il ne suffit pas à garantir une électricité à prix modérée, caractéristique essentielle du service public de l’énergie.

L’article 1er prévoit certes de maintenir des tarifs réglementés, mais plusieurs éléments laissent craindre que les usagers ne soient pas pour autant protégés des intérêts prédateurs du marché. Ainsi, aucun dispositif n’est prévu pour assurer la transparence de ces tarifs et pour vérifier qu’ils sont fondés sur les coûts constatés. Les hausses de prix successives du gaz, concomitantes de hausses de dividendes considérables pour les actionnaires de GDF, ont montré que le maintien des tarifs réglementés n’est pas une condition suffisante pour garantir la modération tarifaire. L’ouverture du capital des entreprises a introduit une logique de recherche du profit qui n’est guère compatible avec les intérêts des consommateurs.

Un tarif administré n’apporte donc pas de garantie en soi s'il n'est pas transparent et explicitement basé sur les coûts : il serait facile, dans un système opaque, de faire converger rapidement les tarifs administrés vers les prix de marché. C'était, d’ailleurs, plus ou moins clairement prévu dans le contrat de Gaz de France, et c’est aussi ce que voudrait faire la CRE si elle en avait le pouvoir, sans parler des encouragements de Bruxelles. La Commission ne considère-t-elle pas « que les prix réglementés en vigueur se caractérisent par un niveau inférieur au prix du marché et qu’ils empêchent de ce fait l’entrée des concurrents sur le marché » ?

Le cœur du problème, c'est que les conditions qui ont permis à EDF d'assurer à ses usagers une tarification modérée ne sont plus réunies. Vous refusez cependant de l'admettre et, à la place, vous créez un système bancal, qui ouvre à la concurrence tout en maintenant les tarifs réglementés, sans donner aucune garantie ni de sa viabilité ni de sa durée de vie.

Jusqu'à l'ouverture du marché de l'électricité et son démantèlement, l'entreprise verticalement intégrée qu’était EDF prenait en charge l'intégralité de la chaîne de production, du travail sur l'atome jusqu'à la fourniture, et les services commerciaux, s’assurant ainsi des économies d'échelle et une gestion optimisée des coûts. Grâce à sa situation de monopole, elle a pu en outre réaliser d’importants investissements dans la construction d'un parc nucléaire, le retour sur investissement sur le long terme l’autorisant à produire de l'électricité à bas coût. C’est ainsi que nous étions le deuxième pays le moins cher d'Europe. Aujourd'hui, sur le marché des clients professionnels où la concurrence est de rigueur, la France est championne des hausses de prix : 48 % d’augmentation !

En accréditant les injonctions des directives communautaires, c'est tout un système qui a fait ses preuves que vous remettez en cause. Dans le cadre concurrentiel que vous créez, EDF est en quelque sorte anticoncurrentielle, car elle produit de l'électricité à trop bas coût. Pour les libéraux, c'est inacceptable, n'en déplaise aux usagers ! Qui plus est, le démantèlement de l'entreprise met à mal la gestion optimisée des coûts de production, de transport, de distribution et de fourniture, en empêchant toute péréquation entre les activités. Par ailleurs, l'ouverture du capital porte en elle l'exigence de servir des dividendes aux actionnaires. Dans ces conditions, comment être sûr que les hausses des prix n’obéiront pas aux augmentations des marges bénéficiaires ? D'ailleurs, qui contrôle aujourd'hui la fixation des prix sur le marché des professionnels ? L'Observatoire international des coûts énergétiques impute essentiellement la hausse des prix de l'électricité à la hausse des cours mondiaux du pétrole et du gaz, auxquels les marchés libres de l'électricité sont très sensibles. Mais quand on sait que 80 % de l'électricité produite en France sont d'origine nucléaire, il y a de quoi s'interroger sur la pertinence de cette analyse !

Nous refusons une telle dépossession de la maîtrise de ce bien public qu'est l'énergie ! La modération tarifaire est absolument incontournable. Le marché a prouvé son incapacité à garantir des prix stables et modérés. Selon Joseph Stiglitz, il « a montré depuis longtemps son incapacité à s’autoréguler ». Rien d’étonnant, c’est sa nature ! Pourtant, votre article 1er fait un pas de plus vers la marchandisation du secteur, qui se caractérise par la volatilité des prix, ceux-ci étant fixés sur le marché spot, non pas en fonction de la recherche du coût minimal, mais selon le jeu des traders boursicoteurs. C'est le risque de flambée des prix en cas de raréfaction de l'offre, et le zeste d'intervention de l'État que vous introduisez ne suffira pas à contrer fondamentalement la fragilisation du secteur.

Les dispositions initiales de ce projet de loi mettent en jeu la protection des consommateurs, et la piètre tarification spéciale, dont vous n'essayez même pas d'améliorer le dispositif, n'est que l'arbre qui cache la forêt – que dis-je ?, la jungle libérale énergétique !

M. Lucien Degauchy. Il en faut des forêts pour les tonnes d’amendements que vous avez déposés !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. L’intérêt pour nous d’intervenir après nos collègues communistes, c’est que nous pouvons marquer notre différence ! L’UDF est favorable à ce projet jusqu’à son article 9.

M. Daniel Paul. C’est normal, vous êtes de droite !

M. Jean Dionis du Séjour. En tout cas, nous sommes européens.

M. Jean-Claude Sandrier. Nous aussi !

M. Jean Dionis du Séjour. Pour nous, ce n’est pas un petit objectif politique que de construire un espace juridique régi par des normes et des lois communes. Nous l’avons d’ailleurs tous dit au cours de différentes campagnes. Eh bien, nous y sommes ! Ce n’est pas non plus un petit objectif que d’essayer de construire un marché intérieur où s’exercera une concurrence de plus en plus loyale. Sans être béats devant la réalité économique, nous considérons que ces deux objectifs méritent d’honorer la parole de la France. Car les directives européennes, les gouvernements de la France les ont signées, nos députés européens les ont validées. Il faut les transposer. Cessons donc de faire de l’Europe un bouc émissaire !

Mes chers collègues, je vous invite – mais sans doute l’avez-vous déjà fait – à lire la directive en question, que je trouve très bien rédigée. Nullement centrée uniquement sur les problèmes de concurrence – l’article 3 est intitulé « Obligations de service public et protection des consommateurs » –, elle plaide pour une planification à long terme des infrastructures et reprend des thèmes que nous avons vus ensemble. D’ailleurs, il est question, dans le troisième alinéa de cet article de service universel, notion très importante pour nos PME : « Les États membres veillent à ce que au moins tous les clients résidentiels et, lorsqu'ils le jugent approprié, les petites entreprises (à savoir les petites entreprises sont définies comme des entreprises employant moins de 50 personnes et dont le chiffre d'affaire annuel n'excède pas 10 millions d'euros) aient le droit de bénéficier du service universel, c'est-à-dire du droit d'être approvisionnés, sur leur territoire, » – dans les zones rurales de Lot-et-Garonne, cela nous parle – « en électricité d'une qualité bien définie, et ce à des prix raisonnables, aisément et clairement comparables et transparents. »

Le contrat de service public, nous dit-on, fait plus pour la protection des consommateurs et des PME. Comparons-le avec la directive européenne ! Et si certains points de la directive vont plus loin, l’UDF vous propose d’aller dans le même sens. D’ailleurs, le contrat de service public, M. Brottes le dit souvent, n’est pas dans la loi et n’est pas vraiment effectif. EDF et GDF n’encourent aucune sanction si elles ne le respectent pas. Appliquer la directive, c’est quand même autre chose du point de vue légal !

Le problème de la légitimité des tarifs est complexe. Le projet de loi, suivant en cela le modèle européen, sépare nettement les activités libres – production et vente – et les activités régulées – transport et distribution. La question des tarifs réglementés ne relève pas du législateur européen mais est de la seule compétence du législateur national. Je n’écarte pas, à terme, la possibilité d’un conflit avec la Commission, qui trouvera le prix de notre électricité nucléaire trop bas, donc susceptible de bloquer les nouveaux entrants. Mais, pour l’heure, nous devons retenir ce droit que nous avons, qui est important au regard de notre production d’électricité très spécifique : 80 % de nucléaire, 35 euros tout compris le mégawattheure contre 50 euros sur le marché libre. La question politique est : que faisons-nous de cette rente nucléaire ? Pour l’UDF, il convient, tout en sauvegardant les capacités d’Électricité de France d’investir, de moderniser et de remplacer les centrales en fin de vie, d’orienter une partie de cette rente vers les clients, résidentiels ou PME, du marché national. Nous défendrons à ce sujet des amendements extrêmement importants permettant le retour au tarif pour des entreprises qui auraient exercé leur éligibilité. À cet égard, notre collègue Charles de Courson a fait une proposition très intéressante à la commission des finances, qui l’a reprise à son compte.

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements, nos 32156 à 32177, tendant à supprimer l’article 1er.

Puis-je considérer qu’ils ont été défendus ?

M. Daniel Paul. Non !

M. Jean-Claude Sandrier. Je vais les défendre, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. L’article 1er ne vise pas spécifiquement la question des tarifs. Néanmoins, celle-ci est sous-jacente puisqu’on ne peut passer sous silence les conséquences tarifaires de l'ouverture complète du marché de l'énergie, qui intéresse au premier chef nos concitoyens et nos entreprises. Je voudrais donc d'abord rappeler quelques éléments du bilan de l'ouverture partielle à la concurrence, à partir des quelques éléments inquiétants dont nous disposons.

Cette ouverture partielle s'est traduite, pour les professionnels, par une augmentation de leur facture de plus de 75 % sur les cinq dernières années, et de 48 % en un an, entre 2005 et 2006. Quant à l'écart entre tarifs régulés et tarifs libres pour l'électricité, il atteint 66 % depuis 2002. Ces données ne nous sont pas fournies par quelque agence obscure, mais par le cabinet d'étude NUS Consulting, et d’autres, pires encore, circulent ! Si vous acceptiez de réaliser un réel bilan des conséquences de la libéralisation des services, menée tambour battant depuis dix ans, nous serions fixés. Les chiffres que nous venons de citer en soulignent clairement l'urgence, comme celle de surseoir à la transposition des directives en cause. D’autant que le même phénomène d'augmentation des prix s'observe chez nos partenaires européens : plus 91,5 % au Danemark, plus 80,7 % en Grande-Bretagne.

Vous comprendrez que nous proposions de supprimer votre article 1er. Poursuivre plus longtemps cette fuite en avant nous semble témoigner d'un dangereux aveuglement. Il est urgent aujourd'hui d’obtenir un moratoire et une renégociation pour sauver nos entreprises, et non de soumettre désormais tous les consommateurs à ces contraintes tarifaires insupportables.

Nous souhaitons être entendus et que le bon sens finisse par l'emporter.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Tout le monde reconnaît la hausse des prix, elle est patente. Tout le monde reconnaît aussi que, dans le secteur énergétique, la demande continue de croître alors que les réserves fossiles s'épuisent, même si l’échéance de l’épuisement total reste un sujet de discussion. En dépit de cette situation, les grandes compagnies pétrolières n'ont pas réalisé les investissements nécessaires dans des puits de forages performants et dans des équipements nouveaux de raffinage, préférant, comme les actionnaires de Total en particulier, utiliser les profits pour racheter des actions de leur propre entreprise afin de doper les cours et récupérer la mise. En six ans, nous sommes passés d'une situation de quasi-suréquipement à une situation de quasi-pénurie. Le marché n'a pas été en capacité d'allumer le signal d'investissement au bon moment. La tension ainsi engendrée alimente la tendance haussière : tout ce qui est rare est cher.

Depuis 2000, les tarifs, autrefois formés à partir d'un parc national composé essentiellement de nucléaire et d'hydraulique, sont soumis aux mécanismes de l'offre et de la demande sur la base d'un parc européen composé essentiellement de thermique classique et d'énergies renouvelables, moyens de production beaucoup plus chers. N'oublions pas la rémunération des actionnaires, qui pèse également très lourd. Ainsi, ce qu’a versé EDF aux actionnaires en 2005 aurait permis de créer l'équivalent de 40 000 emplois statutaires ou d’augmenter le salaire de l'ensemble du personnel de 25 %, cotisations patronales incluses. Ce n’est pas négligeable, dans le contexte de chômage que nous connaissons !

Dans un secteur industriel aussi capitalistique que celui de l'énergie, le coût du capital a une importance primordiale dans la formation des prix. Alors que le coût à long terme du capital est de 5 %, la rentabilité exigée par les actionnaires et les marchés financiers est évaluée à 11 %. En 2003, le coût du mégawattheure finlandais, issu de l’EPR, était de 29 euros, contre 43 euros pour le français. La comparaison est édifiante ! La différence est liée au coût de rémunération du capital : 2 % en Finlande, où l'entreprise a recours à l'emprunt, 11 % en France. D’où notre proposition de créer un pôle public bancaire, qui accorderait un nouveau type de crédit, dont le coût serait d'autant plus allégé que les investissements financés s’accompagneraient de créations d'emplois, d’actions de formation et d’efforts de recherche.

Enfin, la nouvelle organisation des entreprises se traduisant par la séparation juridique des réseaux de transport et de distribution, d’une part, et par le « démixage » des activités entre le gaz et l’électricité, d’autre part, elle coûte beaucoup plus cher qu’une organisation de type intégré où les gains d’échelle liés à la mutualisation sont substantiels.

Le maintien des tarifs régulés est loin d’être une garantie suffisante pour lutter contre la hausse des prix. C’est tout le processus d’ouverture à la concurrence et de privatisation du secteur énergétique et la captation des richesses énergétiques par une minorité qu’il faut combattre.

C’est pourquoi nous souhaitons supprimer l’article 1er.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements de suppression ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Avec votre permission, monsieur le président, je vais retenir l’attention de l’Assemblée quelques minutes pour rappeler quel est le contenu de l’article 1er. Certaines des explications que je vais être amené à donner devraient me permettre d’éviter une reprise de parole par la suite.

Les amendements défendus par le groupe communiste visant à supprimer l’article 1er, il est important de préciser l’objet de cet article. En fait, il rappelle le monopole d’EDF et il organise l’éligibilité de l’ensemble des consommateurs d’électricité, c’est-à-dire la faculté qui est donnée à ces derniers, notamment domestiques, de choisir ou un autre fournisseur ou un autre contrat que celui avec le fournisseur historique. C’est l’application de la directive de 2003.

Je ferai un bref retour en arrière et citerai quelques dates à retenir.

En 1996, le gouvernement de l’époque donne son accord pour une directive qui ouvre les marchés de l’électricité et du gaz aux gros consommateurs, c’est-à-dire aux grosses entreprises, qui représentent à peu près 20 % de la consommation. La directive est transposée dans la loi du 10 février 2000, dont Christian Bataille a été le rapporteur.

C’est une loi importante – je le dis sans arrière-pensée – puisqu’elle marque le début du processus d’ouverture des marchés, dont le principe était acquis dès les années 90.

Une autre directive traitant du marché du gaz et prévoyant une ouverture plus large du marché de l’électricité est prise en 1998. Elle a été transposée dans la loi de 2003.

S’est tenu ensuite le fameux sommet de Barcelone, à l’occasion duquel le Conseil européen a engagé « la Commission et le Parlement européen à adopter, dès que possible en 2002, les propositions en instance concernant la phase finale de l’ouverture des marchés de l’électricité et du gaz. » C’est la phrase littérale qui a été adoptée par les chefs d’État et de Gouvernement au sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002.

J’appelle votre attention sur le contenu de cette phrase, qui est essentielle. Le Conseil européen demande qu’on adopte « les propositions en instance ». Cela signifie qu’on ne les a pas découvertes la veille mais qu’elles étaient en discussion. L’expression « en instance » suppose qu’il y avait déjà eu des échanges entre les États de l’Union européenne, qu’un travail avait été fait, qu’il devait même être déjà très élaboré, et qu’il y avait déjà dans les cartons un certain nombre de propositions concrètes qui attendaient d’être discutées par le Parlement européen et par la Commission avant d’être traduites sous forme de directive.

Comme j’ai eu l’occasion de le dire dans la discussion générale, c’était une feuille de route fixée par le Conseil européen, une feuille de route sur la « phase finale ». Cela signifiait – c’est le sens littéral, personne ne peut le conteste – l’élargissement à l’ensemble des consommateurs du marché de l’électricité et de celui du gaz.

M. François Brottes. Pas du tout !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Cette feuille de route a donné lieu à deux directives, adoptées en 2003 : l’une relative à l’électricité et l’autre au gaz.

Dans la loi du 9 août 2004, nous avons transposé la première et ouvert le marché de l’électricité pour 70 % des consommateurs, c’est-à-dire, au-delà des grosses entreprises, aux moyennes et aux petites entreprises, aux professionnels et aux établissements publics et aux collectivités locales.

Restaient 30 % du marché correspondant à la consommation des clients particuliers, également appelés clients domestiques. L’ouverture des marchés pour eux figurait déjà dans la directive de 2003, mais le Gouvernement, avec beaucoup de sagesse, avait souhaité une mise en place progressive de celle-ci pour pouvoir en mesurer les effets et ne pas perturber trop brutalement le comportement des consommateurs. D’où la décision de ne transposer dans un premier temps que pour les consommateurs non domestiques. Nous arrivons aujourd’hui à la transposition pour l’ensemble des consommateurs. Nous ne faisons qu’ajouter au dispositif – et cela figure dans le texte de loi – les consommateurs particuliers ou consommateurs domestiques. Je précise que les organisations de consommateurs préférant que l’on parle de clients particuliers plutôt que de clients domestiques, je m’attacherai à retenir cette expression.

Nous discutons donc aujourd’hui de la mise en œuvre de la dernière phase d’une ouverture qui a été engagée il y a maintenant dix ans et qui ne pouvait que conduire à la proposition qui nous est faite aujourd’hui par le Gouvernement, dans le respect des engagements pris.

Je me permets d’appeler l’attention sur un point, qui sera, à n’en pas douter, évoqué par plusieurs intervenants. Je le dis avec beaucoup de force et de conviction et sans arrière-pensée : à partir du moment où l’on a commencé à ouvrir les marchés, cela voulait dire qu’on s’engageait dans un processus. Il serait de mauvaise manière de prétendre qu’on voulait s’arrêter aux deux tiers du chemin. Il est évident que, à terme, c’est l’ensemble du marché qui allait être concerné par cette mesure.

Par ailleurs, que s’est-il passé pour les consommateurs représentant les 70 % du marché ? Il est intéressant de savoir finalement qui a changé de fournisseur. La commission de régulation de l’énergie indique qu’il y a eu 15 % de changements au titre de l’électricité et 10 % au titre du gaz. C’est important, mais cela n’a pas bouleversé l’économie générale. Cela a cependant fait perdre suffisamment de clients à EDF et à Gaz de France pour justifier – mais nous en reparlerons tout à l’heure – l’élargissement de leur champ d’activité de manière qu’elles gardent un chiffre d’affaires convenable, qu’elles confortent leur situation aussi bien sur le plan national que sur le plan international et qu’elles consolident les effectifs qu’elles emploient depuis longtemps.

Après ces explications, qui n’étaient pas une digression mais le rappel de la toile de fond, je reviens aux amendements défendus par le groupe communiste.

Que se passerait-il s’ils étaient adoptés, c’est-à-dire si l’on refusait d’adopter la disposition qui met en œuvre la directive ouvrant les marchés de l’électricité et du gaz à l’ensemble des consommateurs particuliers ? La directive s’appliquerait de toute façon le 1er juillet 2007 ! Donc, ne racontons pas d’histoires ! Ce n’est pas parce que les amendements qui nous sont soumis seraient adoptés que la directive ne s’appliquerait pas. Mais, comme l’a souligné le ministre à plusieurs reprises, elle s’appliquerait brutalement, sans prendre en compte les précautions figurant dans le texte…

M. Henri Emmanuelli. Vous jouez sur la peur !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. …ni la spécificité des marchés français de l’électricité et du gaz. Il est donc essentiel d’adopter l’article 1er du projet de loi.

M. Henri Emmanuelli. Nous avons très peur !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Beaucoup de consommateurs particuliers auraient des raisons d’en vouloir à la représentation nationale de ne pas le faire car nous subirions les effets d’une disposition que nous voulons par ailleurs amender.

C’est la raison pour laquelle la commission des affaires économiques a repoussé les amendements qui viennent d’être défendus.

M. Henri Emmanuelli. C’est un bien médiocre chantage, monsieur Lenoir !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’industrie. M. le rapporteur a parfaitement souligné l’importance de l’article 1er et la nécessité de l’adopter. Je reviendrai simplement sur deux arguments qui me paraissent fondamentaux.

L’existence et le maintien du tarif social, quel que soit l’usage que l’on a fait de l’éligibilité, sont quelque chose de fondamental. Une personne dont la situation répond aux critères d’obtention de ce tarif doit pouvoir, qu’elle soit affiliée à EDF ou aux DNN, le percevoir. Dans tous les cas de figure, elle y a droit.

Deuxièmement, les consommateurs peuvent continuer à bénéficier du tarif réglementé, qui est un tarif historique en France. Si nous ne l’écrivions pas dans un article, cette possibilité disparaîtrait du fait de l’application directe de la directive européenne.

Le maintien de l’article 1er est donc indispensable et, par conséquent, je suis opposé aux amendements défendus.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le rapporteur, vous avez du mal à perdre vos mauvaises habitudes. Après avoir mis le feu, avec Mme Fontaine – le nom n’était pas prédestiné ! – et M. Raffarin, vous envoyez maintenant les pompiers. Je ne suis pas sûr qu’ils aient un matériel suffisant pour éteindre l’incendie.

Je m’explique.

Vous avez toujours, monsieur le rapporteur, une manière très professorale de nous expliquer les choses, mais permettez-moi de vous dire que ce n’est pas bien de trahir Jacques Chirac.

Lorsqu’il présidait la délégation de Barcelone, accompagné par Lionel Jospin, M. Jacques Chirac – je l’ai dit tout à l’heure – a clairement indiqué qu’il n’était pas pour lui acceptable d’aller plus loin qu’une ouverture à la concurrence pour les entreprises. C’était la solution qu’il souhaitait et c’est celle qui figurait dans les conclusions du sommet de Barcelone. Il avait même indiqué que la France avait obtenu que la Commission propose d’ici à la fin de l’année 2002 – ce que vous n’avez plus revendiqué – une directive-cadre sur la notion de service public.

Après avoir cité M. Jacques Chirac, autorisez-moi à citer M. Lionel Jospin.

Lors de la conférence de presse qui a eu lieu à l’issue du sommet de Barcelone, un journaliste a posé la question suivante au Premier ministre de l’époque : « Je voudrais comprendre la logique, monsieur le Premier ministre, qui vous anime lorsque vous acceptez la concurrence pour les entreprises dans le domaine de l’énergie, et donc les baisses de prix qui vont en découler, » – ce journaliste était sûrement bien informé mais il n’avait visiblement pas fait beaucoup de prospective ! – « et que vous refusez cette même concurrence et donc les possibles baisses de prix pour les consommateurs. »

M. Henri Emmanuelli. Écoutez, monsieur Lenoir !

M. François Brottes. Monsieur Lenoir, cela fait au moins cinquante fois que vous répétez une contre-vérité, à savoir que c’est le sommet de Barcelone qui a ouvert les marchés d’électricité et de gaz pour les consommateurs. C’est inacceptable. Je vous le dis avec fermeté : si vous persistez à le dire, je continuerai à prendre la parole pour le démentir.

Le Premier ministre a répondu au journaliste que les problèmes ne se posaient pas, à son sens, dans les mêmes termes. Il a d’abord fait valoir que les expériences de libéralisation qui avaient été conduites dans certains pays ne conduisaient pas à penser qu’une ouverture à la concurrence sur le marché en direction des consommateurs entraînait automatiquement une baisse des prix, …

M. Henri Emmanuelli. Là, il ne s’est pas trompé !

M. François Brottes. …ce qui était, a-t-il ajouté, l’argument essentiel. Puis il a développé son propos en donnant deux exemples, la Grande-Bretagne et la Suède, dont je vous fais grâce.

Soyons donc honnêtes dans les arguments que nous développons.

Oui, le sommet de Barcelone a confirmé ce qui était dans les gènes, si je puis m’exprimer ainsi, de la directive de 1996, à savoir l’ouverture à la concurrence pour les entreprises. Mais la délégation française composée de Jacques Chirac et de Lionel Jospin s’est fermement opposée à l’ouverture à la concurrence pour les ménages, parce qu’il y avait risque.

Or, qu’a fait le gouvernement de M. Raffarin tout de suite après son élection, le 25 novembre 2002 ? Il a complètement oublié cet engagement et s’est empressé d’accepter l’ouverture à la concurrence pour les ménages.

Et c’est cela que nous sommes en train d’essayer de corriger aujourd’hui.

Le mal est fait. Je ne dis pas qu’il ne faut pas prendre des mesures pour essayer d’éviter la casse. Mais je ne veux plus entendre, monsieur le rapporteur – je vous le dis avec beaucoup de fermeté parce que, à la longue, cela devient agaçant – que c’est à Barcelone qu’aurait été décidée l’ouverture des marchés à la concurrence pour les ménages. C’est totalement faux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Henri Emmanuelli. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements de suppression nos 32156 à 32177.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)


M. le président.
Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 137302 à 137450.

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille. Je souhaite revenir sur le sujet précédemment évoqué avec véhémence par M. Brottes – on peut le comprendre !

Je vais essayer, monsieur le ministre, de vous exposer calmement un amendement de précision visant à insérer au début du premier alinéa de l’article 1er les mots : « Conformément à l’accord obtenu le 26 novembre 2002 au Conseil des ministres européens de l’énergie, ». Monsieur le rapporteur, cela contredit vos assertions.

Notre amendement tend à préciser que l’ouverture des marchés de l’électricité et du gaz est le fait de Mme Nicole Fontaine, membre du gouvernement Raffarin, lors du Conseil des ministres européens de l’énergie. Dans l’exposé des motifs de cet amendement, vous pouvez lire la question posée en séance le 28 novembre 2002 par notre collègue UMP François-Michel Gonnot. Il avait en quelque sorte « servi la soupe » à Mme Fontaine, comme cela se fait parfois dans les questions de complaisance.

M. François Brottes. On dit alors : « Allô ? allô ? »

M. Christian Bataille. Le Gouvernement a agi avec l’appui de sa majorité, contrairement à ce que vous voulez faire accroire. En effet, M. François-Michel Gonnot précise : « Le groupe UMP, » – donc tout le groupe UMP – « madame la ministre, tient à vous rendre hommage et à vous féliciter pour la façon dont ce compromis a été conclu. » Mme Fontaine, alors membre du Gouvernement, a donc été unanimement soutenue par tout le groupe UMP.

Dans sa réponse, Mme Fontaine s’est à son tour félicitée de cet accord. On ne peut pas dire que sa plume ait glissé et qu’elle ait donné sa signature au hasard.

M. François Brottes. Elle, elle assume ses engagements, monsieur le rapporteur ! Elle est honnête !

M. Christian Bataille. Elle s’en réjouit et évoque « des perspectives très positives ».

Résultat : à partir du 1er juillet 2007, date d’ouverture à la concurrence, cela fera mal au porte-monnaie de la ménagère. Pour les entreprises, c’est chose faite. Nous n’avons cessé de vous démontrer que l’ouverture à la concurrence pour les ménages, contrairement aux propos dont M. Gonnot et M. Goulard nous ont bassinés depuis des années, ne correspondrait pas à des progrès formidables et à une baisse des tarifs, mais au contraire à une hausse des prix, des tarifs.

Vous allez donc privatiser Gaz de France, et cela correspondra à l’ouverture à la concurrence. Les consommateurs s’en souviendront en réglant leur facture de gaz.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Pour clore un débat que certains voudraient alimenter, je vous renvoie à mon rapport écrit, où je cite les phrases élaborées et approuvées par les chefs d’État et de Gouvernement à Barcelone.

J’ai été surpris des paroles de M. Christian Bataille. Il parle des méfaits de l’ouverture du marché de l’électricité et du gaz. Nous avons entendu, durant des heures, nos collègues de l’opposition évoquer les hausses très fortes de prix que certaines entreprises ont subies. Mais ces hausses affectent également des consommateurs qui ont fait jouer la loi de 2000. Je vous demande donc de garder un peu de modération dans vos affirmations. Vous faites du masochisme en direct, vous vous flagellez.

Vous avez fait voter une loi et vous vous rendez compte aujourd’hui que vous n’aviez pas pris les précautions nécessaires pour éviter les débordements auxquels on a assisté.

M. Christian Bataille. C’est l’accord Borotra de 1996 !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Nous en reparlerons ultérieurement. Nous inscrivons dans la loi un certain nombre de garde-fous, afin d’éviter les problèmes que nous avons connus.

Je vous en prie, mes chers collègues, regardez les choses de façon pragmatique. Nous sommes des gens pragmatiques et nous n’allons pas ouvrir, comme vous l’avez fait de manière inconsidérée, le marché du gaz aux particuliers.

M. François Brottes. C’est l’attitude de Mme Fontaine qui a été « inconsidérée » !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Nous allons – cerise sur le gâteau – apporter des correctifs afin que les entreprises victimes de la loi que vous avez votée obtiennent des compensations.

M. Christian Bataille. C’est quand même Mme Fontaine qui a signé !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Je comprends que vous meniez une bataille politique. J’y assiste et j’y participe depuis pratiquement huit jours. Ce qui compte, ce n’est pas tant ce qu’a dit Mme Fontaine en 2002, mais ce que prévoit aujourd’hui l’article 1er du projet de loi : « Tout consommateur final d’électricité peut [librement choisir]… Toutefois, les consommateurs qui n’exercent pas ce droit continuent de bénéficier des tarifs réglementés de vente […] . »

Je voudrais que vous appréciiez ce que nous faisons et que vous cessiez d’argumenter sur un passé qui est ce qu’il est. Ce qui compte, c’est ce que nous vous proposons aujourd’hui.

M. Christian Bataille. À tout pécheur miséricorde !

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur le ministre, je prends acte de votre réponse, qui me paraît plus « appropriée ». Mais il n’est pas indifférent de savoir ce qui s’est passé pour tenter de savoir ce qu’il adviendra.

Monsieur le rapporteur, il faut, ainsi que vous l’a demandé M. Brottes, arrêter cette partie de mauvaise foi. Vous nous renvoyez à votre rapport. Mais depuis quand le rapport d’un rapporteur est-il la vérité ? Vous avez dicté votre rapport. Vous pouvez comprendre que l’opposition, qui ne l’a pas voté, ne se fie pas à lui. Vous avez choisi ce que vous vouliez, ou non, y voir mentionné. Les documents qu’a cités M. Brottes n’y figurent pas.

M. le ministre déclare : « Peu importe ce qu’a dit Mme Fontaine ! » Peut-être, mais elle était quand même ministre de la République. Ce n’est pas rien !

Si nous faisons une exégèse à n’en plus finir, c’est parce que M. Lenoir s’acharne, depuis huit jours, à dire le contraire. S’il voulait bien admettre une fois pour toutes la réalité, nous ne serions pas obligés de revenir sans arrêt en arrière.

La mauvaise foi est partout. M. Breton, hier, indiquait qu’en 2000 la hausse du gaz avait été de 30 %. Il a simplement oublié de dire qu’à l’époque le Gouvernement et les entreprises publiques s’étaient livrés à un gigantesque bras de fer qui avait conduit à une baisse de l’électricité. De la part de M. Breton, qui a pour habitude de dire un peu n’importe quoi, ce n’est pas trop grave, nous commençons à nous y faire. Mais il n’est plus supportable que le rapporteur nous assène des contrevérités à longueur de journée. Je m’associe donc à M. Brottes pour demander à M. Lenoir de renoncer à ce procédé. Sinon, nous serons obligés, avec les moyens qui sont les nôtres, de remettre les choses au point.

Vous dites, monsieur Lenoir, que c’est à cause de ce qui a été décidé en 2000 que les entreprises qui ont quitté le tarif public subissent des hausses allant jusqu’à 80 %. J’exprimerai les choses différemment. En 2000, des possibilités ont été ouvertes. Les chefs d’entreprise – on ne s’est d’ailleurs pas privé de le leur dire le jour où ils ont été entendus en commission – qui ont eu la naïveté de croire au dogme libéral selon lequel le recours au marché leur serait bénéfique en ont pris plein la figure. Ils s’attendaient à des baisses, comme cela leur avait été promis, comme la presse s’en faisait l’écho et comme le prétendait le Gouvernement de l’époque. Ils y ont cru, et ils ont eu tort.

Ne venez pas maintenant nous rendre responsables de la naïveté ou de l’imprévoyance de celles et de ceux qui ont cru intelligent de se fier au marché, alors qu’il valait mieux rester dans le giron d’EDF.

Pour les particuliers, les dispositions de l’article 1er sont transitoires. Vous ne nous avez pas expliqué pourquoi, dans un contexte de crise de l’énergie, vous aviez décidé de faire passer GDF sous le contrôle d’une société privée. On a entendu de nombreuses explications. D’abord, il fallait sauver Suez. Puis d’autres explications ont été avancées.

Vous prétendez savoir où vous allez. Je ne le crois pas. Je ne reprendrai pas les propos de M. Dupont-Aignan, dont je m’étonne d’ailleurs qu’ils soient passés inaperçus. Je m’adresse avec gravité aux consommateurs, aux ménages français : la privatisation de Gaz de France, sa mise sous tutelle, sa dissolution dans un ensemble dirigé par des actionnaires privés leur coûtera très cher. Nous prenons rendez-vous non avec le passé, mais avec l’avenir.

Quand nous lisons les déclarations de M. Cirelli et que nous écoutons M. Gadonneix nous dire en commission des finances, à six mois d’intervalle, que le prix du mégawattheure a pris près de 15 euros – on est en effet passé de 30 à 45 euros – sans pouvoir nous en expliquer les raisons, nous nous interrogeons sur la fiabilité de leurs propos. Sans doute avait-il pensé que nous n’avions pas noté le premier chiffre. Mais les administrateurs font bien leur travail et avaient pris des notes.

Les consommateurs paieront et les entreprises françaises perdront des avantages en termes de compétitivité que leur offre aujourd’hui le système si nous ne parvenons pas à réparer les dégâts.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Il convient de passer à autre chose – je suis d’accord.

Je prends acte de la réponse de M. le ministre, qui n’a apporté aucun démenti aux informations précises que j’ai données.

Je tiens à votre disposition les conclusions du sommet de Barcelone et celles du 25 novembre. Monsieur le rapporteur, il ne faut pas réécrire l’histoire. Il est bon que vous en ayez pris conscience.

Je vous adresserai un seul reproche, monsieur le rapporteur. L’article 86, alinéa 6, de notre règlement exige que soient annexées au rapport les dispositions européennes en vigueur quand elles sont concernées. Or vous ne l’avez pas fait. Vous aviez donc bien la volonté de troubler le jeu.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 137302 à 137450.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, n°s 6744 à 6776.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. On ne peut pas avancer tout seul, c’est une évidence, et François Brottes a donc eu raison de poser à nouveau les questions.

Pour ma part, je veux revenir sur quelques éléments de chronologie. Certes, nous avons voté la loi de 2000, mais il s’agissait de la transposition d’une directive de 1996 approuvée par M. Juppé, Premier ministre, et M. Borotra, ministre de l’industrie.

Vous nous reprochiez à l’époque de tarder à faire la transposition, puis de la faire a minima et, aujourd’hui, d’en avoir trop fait !

Tout le monde doit assumer ses responsabilités et, pour ce qui nous concerne, nous prenons notre part, mais nous n’assumerons pas les déclarations tronquées et ce qui relève de la responsabilité de nos prédécesseurs et de nos successeurs.

Avec les amendements nos 6744 à 6776, nous réaffirmons notre attachement au maintien d’entreprises publiques. On entend dire ici ou là que les entreprises publiques ne seraient pas compatibles avec la réglementation européenne. Sur ce point aussi, permettez-moi d’en douter : les commissaires européens ont en effet rappelé que c’est l’ouverture des marchés qui les intéressait et non le statut des entreprises. Et selon eux, les entreprises publiques pouvaient même garder leur statut, qu’ils n’y voyaient aucun inconvénient à condition qu’elles ne bénéficient pas de dotation extraordinaire de l’État, par exemple.

Avec des entreprises publiques, nous gardons la main sur les prix qu’elles pratiquent, le conseil d’administration définissant la politique commerciale de l’entreprise. C’est là où réside la grande différence avec ce qui va se passer : le tarif réglementé suivra le marché plutôt que le prix de revient, nous l’avons répété à maintes reprises, mais nous sommes prêts à le redire.

Avec une entreprise publique, c’est le conseil d’administration qui définit la politique commerciale. Quand l’entreprise ne sera plus publique, le conseil d’administration définira toujours la politique commerciale, …

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Non !

M. Jean Gaubert. Bien sûr que si, monsieur le rapporteur : c’est la direction qui fait des propositions au conseil d’administration. Si vous commencez à nier ce genre de chose, nous n’arriverons jamais à nous entendre et les débats risquent de durer ! Vous voulez accréditer l’idée selon laquelle nous n’aurions aucune connaissance du fonctionnement de la gestion des entreprises. Or j’ai pour ma part géré des entreprises comme d’autres parmi nous…

M. François Brottes. Moi, par exemple !

M. Jean Gaubert. …et j’ai participé à la gestion d’entreprise. Nous savons donc comment se définit une politique commerciale dans une entreprise.

Bref, lorsque l’entreprise ne sera plus publique, le conseil d’administration définira toujours la politique commerciale et donc les prix, mais il sera influencé par les actionnaires, et la politique commerciale sera le reflet du marché et non des prix de revient.

M. le président. La commission et le Gouvernement sont sans doute défavorables à cette série d’amendements...

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. En effet !

M. le ministre délégué à l’industrie. Assurément !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 6744 à 6776.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 32178 à 32199.

La parole est à M.  Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. Ces amendements visent à supprimer les alinéas 2 et 3 de l’article 1er.

M. le rapporteur ne veut pas entendre les arguments qui ont été développés par mes collègues. Aussi vais-je vous en présenter d’autres qui militent, eux aussi, contre l’ouverture du marché de l’électricité et l’ouverture à la concurrence pour les services publics.

Rappelons-nous qu’il y a un peu plus d’un an, 263 élus de la Creuse démissionnaient pour attirer l’attention sur la diversification des territoires, mais aussi sur le démantèlement des services publics et leur privatisation. Cette mobilisation d’élus soulignait combien la question des services publics était au cœur de la fracture entre votre majorité et la population, entre votre majorité et les élus de terrain. La raison en est simple : votre politique de libéralisation des services publics ignore sciemment la réalité des besoins et les aspirations de nos concitoyens.

Vous préférez suivre des dogmes plutôt que de vous mettre à l’écoute de nos concitoyens. Vous n’avez de cesse de nous expliquer que les Français attendent de vous la politique que vous mettez en œuvre. Ces mêmes Français ont pourtant, à plusieurs reprises, désavoué votre politique dans les urnes. Vous présentez les directives européennes comme des lois d’un ordre supérieur indiscutable alors que les Français ont rejeté le projet de Constitution européenne. Il fut beaucoup question de démocratie tout à l’heure : c’est le moment d’entendre la voix de la démocratie, qui témoigne de la méfiance à l’égard de Bruxelles et de l’Europe libérale que vous appelez de vos vœux.

Du reste, la possibilité pour les entreprises – l’expérience a été faite – d’accéder au marché de l’électricité est de ce point de vue éloquente. Celles qui l’ont fait en sortant des prêts régulés s’en sont mordu les doigts. Mais vous continuez pourtant de foncer, tête baissée, dans le mur sans jamais tenir le moindre compte de ces réalités. Je le dis, la méthode Coué ne fait pas une bonne politique. Nous regrettons, pour l’ensemble de nos concitoyens, que vous ne sachiez pas faire davantage preuve de lucidité, comme en témoigne la décision aberrante d’ouvrir complètement le marché de l’électricité en dépit de signaux alarmants.

Je veux, monsieur le rapporteur, vous poser une question qui a trait à votre réponse concernant l’obligation qui nous est faite de transposer la directive. En effet, si nous en décidions autrement, la directive s’imposerait néanmoins, avez-vous dit. C’est à se demander pourquoi nous discutons dans cette enceinte si les décisions que nous allons prendre n’ont aucune portée concrète, car elles seront de toute façon imposées par Bruxelles. Alors que nous reste-t-il ?

Je veux vous soumettre une hypothèse qui n’est pas à exclure : que se passerait-il si l’ensemble des usagers de l’électricité décidait de rester dans le dispositif des prix régulés de l’opérateur historique, forts de l’expérience de la sortie des prix régulés et de l’impossibilité d’y revenir. On peut même imaginer que cela fasse l’objet d’une campagne d’incitation à rester dans les prix régulés, à surtout ne pas aller ailleurs ! Que se passerait-il alors ?

À moins que, deuxième hypothèse, tout le monde ne quitte les prix régulés, suive les initiatives commerciales dont la finalité est d’attirer les usagers vers des prix artificiellement tirés vers le bas et fasse le choix de la concurrence. Que se passerait-t-il à ce moment-là ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. Le moins que l’on puisse dire est que le débat autour de l’augmentation des prix de l’énergie s’intensifie. À plusieurs reprises, le ministre de l’industrie a indiqué que l’augmentation des prix était lié à l’augmentation du prix de la tonne de carbone. Il étaye sa thèse en faisant remarquer que, récemment, le cours de la tonne de carbone s’est effondré et que cela a entraîné dans son sillage le prix de l’électricité. Le raccourci politique est facile : les 48 % d’augmentation des prix de l’électricité en un an ne sont pas liés à la concurrence, mais à l’inflation du prix de la tonne carbone.

De 2002 à 2004, la hausse des prix de gros de l’électricité a été très importante après la baisse de 2000-2002, alors qu’à cette époque le marché de quotas de carbone n’existait pas. Par ailleurs, il est scandaleux, pour ne pas dire plus, que les opérateurs aient répercuté par anticipation le prix de la tonne de carbone dans les prix de vente de l’électricité alors qu’il n’y a pas eu de surcoût car les achats de quotas ont été nuls.

Si cette tendance haussière n’est pas uniquement liée aux quotas de carbone, à quoi pouvons-nous l’attribuer ? Nous estimons qu’elle est surtout liée au processus d’ouverture à la concurrence et de privatisation du secteur. Nous devons bien sûr le démontrer ; mais nombreux sont ceux qui ont compris que la concurrence ne faisait pas baisser les prix. Dans ce domaine, nous devons mettre en évidence le caractère atypique d’un secteur en réseau, distribuant un produit vital, non stockable et non substituable.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Je ferai observer que ces amendements touchent une disposition qui définit le périmètre du monopole d’EDF. Il est donc pour le moins surprenant que nos collègues demandent sa suppression d’autant que l’alinéa comporte également un dispositif concernant la tarification spéciale pour les produits électriques de première nécessité. Ils proposent donc de mettre en pièces une disposition à caractère social !

J’invite l’Assemblée à repousser leurs amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32178 à 32199.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques, nos 32200 à 32221.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Vous n’avez de cesse, monsieur le ministre, d’affirmer que la France a besoin d’un champion industriel dans le domaine du gaz. Dont acte ! À aucun moment, cependant, vous ne nous avez expliqué en quoi un rapprochement avec Suez répondrait à cet objectif ou du moins n’avons-nous pas été convaincus par les éléments de réponse que vous avez apportés.

Je suppose que vous pourriez également affirmer que la France et les Français ont besoin de l’ouverture complète du marché de l’électricité. Je crains cependant que vous n’ayez quelques difficultés à convaincre sur ce point, car tous les analystes, à l’exception de quelques experts sans doute accrédités, souvent proches de la direction des entreprises énergétiques, s’accordent sur la future augmentation des prix de l’électricité et du gaz à la faveur de l’ouverture complète du marché proposée dans le projet de loi.

Nos collègues Jean-Claude Sandrier et Michel Vaxès ont eu l’occasion de nous lire un certain nombre de passages du livre de Joseph Stiglitz qui, expérience américaine à l’appui, a montré combien la fin du secteur public de l’énergie était synonyme de danger pour les consommateurs, particuliers ou industriels.

Qu’importe, direz-vous, puisque les tarifs sont administrés sous la double vigilance du Gouvernement et de la CRE. Certes, mais il se trouve que les services administrés ont été maintenus assez bas – malgré une hausse de 30 % en dix-huit mois – pour des raisons électorales. Or, autant l’État actionnaire peut s’asseoir sur la rentabilité financière de ses entreprises pour mettre en œuvre sa politique énergétique, autant une entreprise qui sera détenue à 66 % par des investisseurs financiers saura exiger des tarifs en ligne avec l’évolution des prix mondiaux du gaz, soumise elle-même de plus en plus à la logique spéculative.

On a vu, dans le secteur des autoroutes comme dans celui de l’eau, que la puissance publique était beaucoup moins forte face à un opérateur privé que face à un opérateur public : l’opérateur privé aura d’autant plus d’arguments à faire valoir pour obtenir une hausse des tarifs qu’il pourra être poursuivi pour dumping par l’un de ses concurrents s’il maintient une clientèle captive grâce à des tarifs trop bas. Je vous renvoie à ce qu’a écrit à ce sujet la Commission européenne s’agissant des barrières à l’entrée à la concurrence. La Commission européenne considère en effet que le maintien de bas tarifs énergétiques dans notre pays est une barrière à l’entrée du marché !

Aussi, il y a fort à parier que, une fois les élections passées, le Gouvernement ne pourra plus être sourd à l’évolution des prix des marchés mondiaux. Je ne vous apprends rien d’ailleurs. En décidant d’ouvrir complètement à la concurrence le marché de l’électricité, vous ouvrez sciemment la boîte de Pandore. Il est donc parfaitement scandaleux de prétendre, pour des raisons électoralistes, que vous entendez protéger les consommateurs contre les effets pervers de la dérégulation.

M. le président. La commission et le Gouvernement sont sans doute défavorables à l’ensemble de ces amendements.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Bien sûr !

M. le ministre délégué à l’industrie. En effet !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 32200 à 32221.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 88527 troisième rectification.

La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol. Cet amendement est porté par Pierre Micaux et moi-même, mais il a été approuvé, à l’unanimité, par la commission.

Il s’agit d’un amendement de précision. En conformité avec l'obligation de séparation juridique imposée à EDF, entre le transport et la distribution, il convient de préciser que c'est la filiale de cette entreprise compétente pour la gestion du réseau de distribution qui est chargée d'accomplir, dans le cadre des dispositions fixées par la loi et les cahiers des charges des concessions mentionnés à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, la mission visée au II de l'article 2 de la loi du 10 février 2000.

Il est également nécessaire d'indiquer clairement que la mission de fourniture d'électricité visée au III de l'article 2, exercée conformément aux dispositions fixées dans les cahiers des charges des concessions, ne concerne que les clients raccordés au réseau de distribution qui ont décidé de ne pas exercer leurs droits à l'éligibilité.

M. le président. La commission est évidemment favorable à cet amendement…

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. D’autant qu’elle l’a adoptée, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Cet amendement mérite bien un coup de chapeau et il sera le premier à recueillir un avis favorable du Gouvernement. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Il était nécessaire car les collectivités locales ont besoin d’être rassurées sur le rôle très important qu’elles jouent et qu’elles continueront de jouer.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. C’est vrai !

M. le ministre délégué à l’industrie. Je remercie M. Proriol d’avoir attendu si longtemps pour le soutenir (Sourires) et d’avoir emporté l’unanimité de la commission.

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je ne doute pas de la nécessité qu’il y a à préciser certaines choses. Simplement, monsieur le président, il faut tout de même que nous comprenions ce que nous faisons. Or j’ai beau avoir écouté attentivement l’explication de M. Proriol, je ne l’ai pas comprise. Je le dis en toute humilité car je n’ai pas la même capacité d’intégration des données que M. le rapporteur ou M. le ministre.

J’ai cru comprendre que les dispositions proposées concernaient l’ensemble des distributeurs des collectivités de plus de 100 000 abonnés…

M. Jean Proriol. Non, il s’agit de l’ensemble des concessions !

M. François Brottes. Le seuil des 100 000 abonnés est quand même sous-jacent.

La mission de fourniture d’électricité ne concernerait que les clients raccordés au réseau de distribution qui ont décidé de ne pas exercer leurs droits à l’éligibilité. Est-ce que cela change quelque chose en termes de taxes et de rémunérations ?

Monsieur le président, j’aimerais simplement avoir une explication plus fournie. Il ne s’agit pas pour moi d’embêter le monde, mais de mieux comprendre le texte.

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol. Je suis un peu étonné que notre ami François Brottes n’ait pas saisi du premier coup le sens de cet amendement, d’autant que celui-ci aurait pu être soutenu par son collègue Jean Gaubert, qui était tenté de déposer le même.

Comme nous avons demandé à EDF de créer une filiale, il convient de préciser que c’est la filiale qui traitera dorénavant avec les autorités concédantes, affiliées à une fédération. Ces dernières ont pensé qu’il était nécessaire de mettre à jour nos codes, en particulier le code des collectivités territoriales, afin d’indiquer que ce n’est plus à EDF, grande société organisatrice, fournisseur et transporteur, mais à sa filiale qu’elles auront affaire.

Voilà le sens exact de cet amendement. Ai-je été suffisamment clair, monsieur Brottes ?

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je remercie Jean Proriol pour cette explication mais je suis vraiment de bonne foi quand je pose ce genre de question.

M. Jean Proriol. Vous êtes peut-être un peu fatigué !

M. François Brottes. Qu’en est-il des relations des fournisseurs avec les clients qui ont fait valoir leurs droits à l’éligibilité ?

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol. Ceux qui ont choisi l’éligibilité ne relèvent pas du contrat de concession. Ils obéissent aux règles commerciales avec le fournisseur qu’ils ont choisi.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je précise à M. Proriol que, si j’ai choisi de ne pas déposer d’amendement identique à celui-ci, c’est que je n’ai toujours pas compris le I ter. J’ai demandé à certains de me l’expliquer, mais je n’ai pas été convaincu. J’aimerais avoir des précisions supplémentaires.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. le ministre délégué à l’industrie. Cet amendement comporte deux parties : la première constitue une amélioration,…

M. Jean Gaubert. Là-dessus, il n’y a pas de problème !

M. le ministre délégué à l’industrie. …la seconde est une confirmation du rôle des collectivités en matière de concessions. Cette confirmation était nécessaire car, à l’annonce de ce projet, beaucoup d’entre elles se sont inquiétées, redoutant de voir leur rôle évoluer. Il s’agit simplement de rappeler que les réseaux de distribution restent la propriété des communes et qu’il n’y a pas de modification de la situation. C’est une confirmation de l’existant.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88257 troisième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Je suis saisi d’un amendement no 137540.

M. Jean Proriol. Cet amendement est défendu.

M. le président. Les amendements nos 31677 rectifié, 31697 rectifié, 137508 rectifié et 137507 ne sont pas défendus.

Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 137540 ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Favorable, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Je propose un sous-amendement tendant à remplacer, au début de l’avant-dernier alinéa de l’amendement, les mots : « Les fournisseurs » par les mots : « Le ou les fournisseurs ». Il ne faut pas forcément qu’il y en ait plusieurs, il peut arriver dans certains cas qu’il n’y en ait qu’un.

M. François Brottes. On ne peut pas travailler comme cela, monsieur le président !

M. le ministre délégué à l’industrie. Si les auteurs de l’amendement acceptaient cette modification, cela nous simplifierait la vie.

M. le président. Je suis saisi par le Gouvernement d’un sous-amendement n°137645, tendant à ajouter, dans l’avant-dernier alinéa de l’amendement n° 137540, les mots : « Le ou » avant les mots : « les fournisseurs ».

Comme aucun des auteurs de l’amendement n’est présent ce soir, je laisse le soin à M. Proriol de donner un avis sur le sous-amendement.

M. Jean Proriol. À titre personnel, sans avoir consulté les signataires de l’amendement – mais je les ai entendus en commission –, je comprends la précision du Gouvernement, d’autant que cet alinéa concerne le décret qu’il doit préparer. Il peut y avoir plusieurs fournisseurs de secours désignés par le ministre, mais il peut aussi y avoir un fournisseur plus diligent que les autres, une sorte de fournisseur de référence, qui serait l’opérateur historique, c’est-à-dire EDF.

M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille. Nous voilà face à un amendement particulièrement copieux et ceux qui n’ont pas été défendus procèdent de la même inspiration, au mot près, ce qui est assez courant dans ce genre de texte. Je m’interroge sur le lobby qu’il y a derrière. J’entends murmurer que ce serait l’association nationale des régies de services publics et des organismes constitués par les collectivités locales, l’ANROC. Je ne sais si je me trompe mais, en tout cas, je trouve gênant qu’aucun des auteurs ne soit présent parmi nous ce soir pour nous donner des explications.

Je rends hommage à notre collègue Jean Proriol pour s’être efforcé de rapporter ce qu’il avait entendu en commission, mais j’estime que ce long amendement mérite davantage que les commentaires succincts que nous avons eus jusqu’alors.

M. le président. Nous mettrons simplement au crédit de nos collègues qu’il était assez difficile de prévoir le jour et l’heure auxquels leurs amendements seraient appelés.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Manifestement, nous les avons surpris par la rapidité de nos débats. (Sourires.) Ils se sont sans doute dit que ce ne serait que demain ou lundi. Vous auriez dû leur faire part de la pression que vous comptiez mettre sur nous afin de gagner du temps.

Quoi qu’il en soit, l’amendement n° 137540 n’est pas anodin. J’ai le sentiment en le lisant qu’il correspond sans doute à de vrais problèmes rencontrés par des régies ou des sociétés d’économie mixte sur des territoires précis puisque les signataires sont tous élus d’Alsace, de Moselle ou de Savoie.

Nous aimerions savoir si les réponses fournies sont appropriées. Si nos collègues avaient été là, ils auraient pu nous les expliquer. Nous sommes capables de comprendre et d’adhérer. Pour l’heure, nous pressentons seulement qu’il se passe quelque chose de particulier sur leurs terres d’élection, mais personne n’est en mesure de nous le dire.

Je ne connais pas assez bien la procédure parlementaire, mais peut-être aurait-on pu réserver un amendement comme celui-là.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Nous débattons sur le fond, comme nous le faisons depuis le début du débat. Mais cet amendement, de deux pages, est extrêmement technique. Nous sommes sur le point d’ajouter ces deux pages à la législation actuelle et personne n’aura été là pour nous en expliquer les conséquences.

M. Christian Bataille. Quels sont les problèmes concrets ? Voilà la question.

M. François Brottes. M. le rapporteur ne s’est pas exprimé. M. Proriol, comme c’est son droit, a repris l’amendement de ses collègues. Le ministre a fait une synthèse pour donner son avis.

Je demande une suspension de séance, monsieur le président, car nous ne pouvons pas légiférer à la va-vite sur deux pages de texte de loi. Nous avons besoin de comprendre. Je n’entends pas faire de l’obstruction, mais cela me paraît être une façon normale de discuter de sujets lourds de conséquences.

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol. Cet amendement complète une loi que vous connaissez bien, la loi du 10 février 2000, qui a prévu, dans le cadre de l’ouverture à certaines grandes entreprises, le cas de défaillance d’un responsable d’équilibre. Elle a mis en place dans cette éventualité une formule transitoire impliquant le gestionnaire du réseau et le gestionnaire du réseau de distribution, soit l’opérateur historique.

Il convient de simplifier cette procédure, notamment lorsqu’elle s’applique non pas à une grande entreprise, à une PME ou à une collectivité, mais à un particulier.

Le but de cet amendement est de préciser dans quelles conditions le ministre chargé de l’énergie peut interdire à un fournisseur d’exercer son activité ou au contraire lui demander de la poursuivre. Si ce dernier est défaillant, il désigne des fournisseurs de secours, à l’issue d’un ou plusieurs appels d’offres, afin d’éviter la rupture de l’approvisionnement et de garantir la continuité du service. Les conditions de cette procédure sont définies dans un décret. Dans cette perspective, le sous-amendement proposé par le ministre nous paraît tout à fait judicieux. Nous avons en effet déjà prévu de tels cas de défaillance dans le cadre de la non-distribution du courrier.

M. François Brottes. On en revient toujours à La Poste !

M. Jean Proriol. Plusieurs solutions ont été prévues. Il pourra être fait appel à un seul fournisseur de secours, le mieux placé pour assurer la continuité du service.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. le ministre délégué à l’industrie. Cet amendement est utile, et je remercie M. Proriol de l’avoir défendu en l’absence de ses auteurs et d’avoir accepté le sous-amendement que je proposais. Je vous invite donc, mesdames, messieurs les députés, à le voter. Mais je comprendrais très bien que l’on attende la discussion au Sénat pour trancher.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Soyons clairs, nous ne cherchons pas à faire de l’obstruction. M. le président nous a rappelé qu’il nous arrivait, à nous aussi, de reprendre des amendements. Rien n’empêchait M. Proriol de reprendre cet amendement. Le problème, c’est que celui-ci est long, qu’il paraît compliqué et que nous n’avons pas le sentiment qu’il correspond à quelque chose.

M. Christian Bataille. Nous n’avons pas toutes les clés nécessaires pour le comprendre !

M. Jean Gaubert. D’ailleurs, les explications que Jean Proriol a données portent sur la partie de l’amendement qui traite du fournisseur de secours, mais pas sur les sanctions aux fournisseurs qui auraient vendu de l’électricité sans la mettre sur le réseau. J’imagine que cela a déjà dû être le cas.

Quoi qu’il en soit, je me demande si la disposition proposée est bien adaptée.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Je partage les opinions qui ont été exprimées ici ou là.

Jean Proriol a repris cet amendement, avec la gentillesse qui le caractérise. Compte tenu des explications qui ont été données, je propose qu’il le retire dans l’attente de la discussion au Sénat.

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol. Monsieur le président, je ne me sens pas disposer de l’autorité suffisante pour retirer cet amendement.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Mais vous l’avez repris !

M. Jean Proriol. Ce qui chagrine M. Gaubert, c’est le cas où le ministre qui a agréé un fournisseur se voit contraint, pour différentes raisons, de lui supprimer son agrément. L’amendement prévoit que « dans le cas où le ministre chargé de l’énergie interdit à un fournisseur d’exercer l’activité d’achat pour revente, les contrats conclus par ce fournisseur avec des consommateurs et avec des responsables d’équilibre et avec des gestionnaires de réseaux sont résiliés de plein droit à la date d’effet de l’interdiction ». Cela ne me paraît pas dépasser les limites de la compréhension de cette fin d’après-midi, même si les jours précédents ont été chargés.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Il nous manque une pièce du puzzle puisque nous ne savons pas ce qui a justifié une telle proposition.

M. Christian Bataille. Voilà !

M. Jean Dionis du Séjour. Nous savons seulement qu’il y a sans doute eu des problèmes contractuels entre les gestionnaires des réseaux de distribution et les producteurs d’électricité, en particulier en Alsace, en Moselle et en Savoie. Que s’est-il passé ? L’amendement permet-il de corriger l’anomalie ? En termes de méthode, il me semble préférable d’examiner cette proposition au Sénat.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. le ministre délégué à l’industrie. Jean Proriol ayant expliqué les choses en détail, je vous demanderai de voter cet amendement.

La situation actuelle est issue de la loi de 2000, qui prévoit un fournisseur de secours, mais elle ne permet pas de régler le cas de la défaillance dudit fournisseur de secours, ce qui s’est déjà produit. Cet amendement prévoit donc de régler le problème.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Le principe de la sanction me semble une bonne mesure et il n’est pas idiot de confier cette mission au ministre.

Toutefois, je souhaite poser plusieurs questions s’agissant des missions que cet amendement propose de confier au ministre.

Est-il possible, y compris grâce à la loi de 2000, que les opérateurs qui entrent sur ce marché soient capables de ne pas « planter » ceux qu’ils fournissent ? Autrement dit, existe-t-il des éléments, outre un cahier des charges théorique, qui permettent de vérifier que ceux qui remplissent cette obligation ne sont pas des margoulins ?

L’ouverture à la concurrence risque de susciter des vocations chez des gens qui, appâtés seulement par le gain, ne regarderont pas s’ils ont ou non les compétences nécessaires. Ainsi, ils peuvent mettre en péril leurs clients. Quels moyens avons-nous de vérifier, en amont, la qualité des fournisseurs ?

Si cet amendement est adopté, le ministre pourra décider d’interrompre l’activité d’un fournisseur défaillant. Cette interruption est-elle définitive ou provisoire ?

Par ailleurs, j’ai bien compris que les contrats en vigueur sont résiliés de plein droit à la date d’effet de l’interdiction. Quels moyens ont les clients de récupérer le préjudice subi entre le moment où ils sont victimes de la défaillance et le moment où le ministre prend sa décision ?

M. Daniel Paul. On s’éclaire à la bougie ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. En fait, c’est le paragraphe V de l’amendement n° 137540 qui pose problème. Dans le cadre de la loi de 2000, nous avons inventé un système, sous l’autorité du rapporteur de l’époque, Christian Bataille. Il est tout à fait possible que des imperfections se soient révélées au fil du temps.

M. Christian Bataille. Bien sûr !

M. Jean Gaubert. Le problème posé est celui d’une entreprise qui a vendu du courant, mais qui ne l’a pas mis sur le réseau. Je ne suis pas sûr que l’on réponde vraiment à cette question.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 137645.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137540, modifié par le sous-amendement n° 137645.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le président, j’ai bien compris que le Gouvernement n’avait pas réponse à tout, surtout lorsque les auteurs d’un amendement ne sont pas présents pour le défendre. En tout état de cause, j’ai posé des questions précises sans obtenir de réponse. Voilà pourquoi je demande une suspension de séance.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. le ministre délégué à l’industrie. J’apporterai toutes les réponses à M. Brottes au début de la prochaine séance. Ainsi, il sera rassuré.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. J’en prends acte. Je renonce donc à ma demande de suspension de séance.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 137617 et 137619.

Ces amendements sont-ils défendus ?

M. Jean Proriol. Oui, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 137617 et 137619.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de onze séries d’amendements pouvant faire l’objet d’une présentation commune.

Les amendements nos 18822 à 18971 sont identiques, de même que les amendements nos 18972 à 19004, les amendements nos 19005 à 19037, les amendements nos 19038 à 19070, les amendements nos 19071 à 19103, les amendements nos 19104 à 19136, les amendements nos 19137 à 19169, les amendements nos 19170 à 19202, les amendements nos 19203 à 19235, les amendements nos 19236 à 19268 et les amendements nos 19269 à 19301.

Ces onze séries d’amendements – soit 469 amendements au total – seront successivement mises aux voix dans l’ordre de présentation de la liasse.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir les amendements identiques nos 18822 à 18971.

M. Jean Gaubert. La tarification spéciale « produit de première nécessité » pour l’électricité mise en œuvre par la loi de 2000 doit être modifiée pour tenir compte d’une éventuelle privatisation d’EDF.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements.

En commission, j’ai déjà eu l’occasion de souligner que ce dispositif avait été mis en application par un décret publié par le Premier ministre, M. Raffarin, alors que, pendant plusieurs années, la publication de la loi de 2000 n’avait pu être effective faute de décret.

Il est curieux aujourd’hui de voir tant d’amendements se précipiter sur ce dispositif pour le modifier.

Je rappelle que nous parlerons plus loin de l’amélioration du dispositif « tarification sociale », que nous avons demandée et sur laquelle nous sommes en train de travailler avec le Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. L’explication que vient de nous donner le rapporteur est un peu courte. Nous savons que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Pour notre part, nous avions écouté attentivement les promesses du ministre en 2004. Or, nous constatons qu’elles ne valent plus en 2006. C’est pourquoi il nous paraît nécessaire de préciser que la tarification « produit de première nécessité » vaut pour la totalité de la consommation d’énergie, et pas seulement pour un quota de consommation, comme le prévoit le décret évoqué par M. le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Nous proposerons ultérieurement un dispositif. Voilà pourquoi je vous demande de retirer ces amendements.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je comprends que le rapporteur ne souhaite pas engager le débat maintenant, d’autant que ses collègues de la majorité ont refusé, en 2000, de voter en faveur de la tarification sociale, à l’exception de lui-même. Voilà un exemple…

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. De vertu !

M. François Brottes. …que nous saluons. Plutôt que de la vertu, c’était peut-être un moment d’inattention ! (Sourires.)

En tout cas, vous ne pouvez supporter seul le choix qu’ont fait vos collègues à l’époque.

Dans la mesure où le contexte évolue, il est important de protéger les consommateurs. Voilà pourquoi nous proposons que la totalité de leur consommation d’énergie soit protégée par le dispositif. Vous pourrez me répondre qu’il est exagéré de vouloir protéger la totalité de la consommation. Nous sommes prêts à discuter de ces modalités avec vous, en proposant des pourcentages sensiblement inférieurs à 100 %.

Nous prenons acte que, pour l’instant, vous ne proposez aucune ouverture sur ce dossier, ce qui est gênant. Dans la suite du débat, accepterez-vous une ouverture s’agissant du volume de consommation pris en considération ? Encore une fois, il n’est question que de protéger ceux qui sont en difficulté et qui ont besoin de l’énergie électrique.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Vous exagérez un petit peu, monsieur Brottes ! Vous avez voté en l’an 2000 une disposition qui ne s’est pas appliquée, faute de décret. C’est le gouvernement suivant, que nous soutenons, qui a été conduit à prendre ce décret. Et, aujourd’hui, vous trépignez d’impatience ! J’ai pourtant annoncé que le Gouvernement avait accepté un élargissement du champ d’application de cette disposition. Je préfère la générosité effective et le principe de réalité à celui du rêve !

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Monsieur le rapporteur, vous savez bien que la donne a changé et vous faites d’ailleurs en sorte qu’elle change encore plus. Certes, nous aurions dû publier les décrets plus tôt, je vous l’accorde. Mais le tarif devait être en dessous du tarif habituel de l’opérateur, qui était lui-même fixé par le Gouvernement en fonction des prix de revient de cet opérateur.

Demain, nous ne serons plus dans cette situation puisque, si l’on s’en tient à la position dominante dans la majorité et à l’avis de la CRE et de la Commission européenne, ce tarif sera amené à s’éteindre progressivement pour se rapprocher du prix de marché, dont chacun sait qu’il a beaucoup augmenté et qu’il n’ira pas en diminuant. Or c’est à ce tarif que seront soumis tous ceux qui n’auront pas choisi l’éligibilité. Les consommateurs auront donc le choix entre le pire et le moins pire. Dès lors que la situation sera celle-la, nous considérons que le tarif « produit de première nécessité » devra s’appliquer aux consommateurs domestiques les plus vulnérables. Et dans cette catégorie, on ne trouve pas seulement les allocataires de minima sociaux – nous aurons l’occasion de revenir sur ce point. Nous connaissons tous en effet dans nos circonscriptions des gens qui gagnent 1 000 euros par mois et qui vont travailler à 20 kilomètres de chez eux.

M. Jean Dionis du Séjour. C’est vrai !

M. Jean Gaubert. Ces gens-là sont-ils riches ? En tout état de cause, au 1er juillet 2007 – j’allais même dire juste après juin 2007 –, ils subiront les prochaines augmentations très fortes du prix de l’énergie, même s’ils restent au tarif réglementé. Comment ces familles pourront-elles le supporter ? Voilà le débat que nous devons avoir ! Comment gérer la situation de nos concitoyens qui ne bénéficient pas des minima sociaux, et donc des dispositions prises dans ce cadre, mais qui ne sont pas riches et qui ne peuvent pas opérer un arbitrage dans leurs revenus pour affecter plus de moyens à leur « budget énergie » ? Ces personnes-là sont très nombreuses sur notre territoire et c’est à elles qu’il faut s’intéresser. Ce sont elles, en effet, qui vont payer très cher ce que vous êtes en train de préparer.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. J’ai noté que M. le rapporteur remettait à plus tard la discussion sur ce point. S’il considère qu’il faudrait simplement réintroduire ces dispositions un peu plus loin dans le texte, je prends acte de sa proposition et je suis tout prêt à examiner avec lui comment procéder à la nouvelle rédaction. Nous aurons ainsi la certitude que ces amendements ne passeront pas par pertes et profits. Mais ce n’est pas forcément comme cela qu’il formulera sa position définitive…

Je souhaite donc savoir quelle est exactement son intention au regard de la mise en œuvre du tarif « produit de première nécessité ». Nous saurons ainsi dans quelle mesure les populations auxquelles nous faisons allusion seront protégées, notamment dans le futur contexte. En 2000, en effet, il n’y avait aucune velléité de privatiser les entreprises publiques de l’énergie. Aujourd’hui, il faut accroître les protections.

Monsieur le rapporteur, il faut sortir des réponses dilatoires ou un peu – je dis : un peu – cyniques. Dites-nous vraiment comment vous voyez les choses. Peut-être pourrons-nous retirer nos amendements si vos propositions nous donnent satisfaction.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Monsieur le président, j’invite François Brottes à changer de vocabulaire. Il ne cesse de glisser des mots blessants dans ses interventions pour une raison que j’ignore. J’espère qu’il n’y a pas là une volonté de donner à ce débat une tournure agressive. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Henri Emmanuelli. Et ça recommence !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Franchement, le mot « cynisme » ne convient pas. Il convient en revanche à ceux qui en, 2000, ont fait croire à des démunis qu’ils avaient pensé à eux en instaurant dans la loi un tarif social qu’ils n’ont jamais appliqué. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. François Brottes. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Ça, c’est du cynisme ! Il suffit de vérifier, monsieur Brottes !

M. François Brottes. La loi sur les exclusions encadrait les choses !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Il n’y a jamais rien eu !

M. François Brottes. Mensonge !

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Monsieur le président, M. Brottes est sans doute un peu fatigué. Il reste qu’il est facile de vérifier que le décret n’a jamais été pris et donc que la disposition ne s’est jamais appliquée.

Je répète sur un ton très calme que nous reparlerons plus tard du tarif social, qui a sa place à l’article 3. Je comprends le malaise de nos collègues, mais nous n’allons pas répondre à leurs exigences maintenant. Il faut respecter l’ordre prévu par le texte. Comme je l’ai indiqué devant la commission, nous discutons en ce moment de cette question avec le Gouvernement, qui a d’ailleurs confirmé son engagement en la matière dès la discussion générale. Nous devons en reparler dans les jours prochains avec le président Ollier, sans doute avant la fin de cette semaine ou au début de la semaine prochaine. Pour l’heure, j’invite M. Brottes à reprendre son calme.

M. Henri Emmanuelli. Je demande la parole pour un rappel au Règlement.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli, pour un rappel au règlement.

M. Henri Emmanuelli. Tout cela est surréaliste : après un quart d’heure d’absence, je retrouve, à mon retour dans l’hémicycle, le rapporteur en train de proférer des contrevérités sur ce qui s’est passé en 2000.

Monsieur le rapporteur, le mot « cynisme » figure dans le dictionnaire et ne constitue pas forcément une injure, que je sache. Si vous estimez que ce sont là de mauvaises manières ou que ce mot ne répond pas aux convenances, je vous rappellerai simplement que nous sommes dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale et non dans une réunion du Rotary Club. Je n’ai pas le sentiment que M. Brottes ait dévoyé quoi que ce soit.

Vous, en revanche, vous continuez sur la même voie. Je le dis à la majorité, sur un débat aussi difficile que celui-là, peut-être aurait-elle pu trouver dans ses rangs, qui sont nombreux, un rapporteur qui gère différemment les choses.

Monsieur Lenoir, vous venez à nouveau de proférer une contrevérité – encore un mensonge ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Vous dites que le tarif social n’a jamais été appliqué. Si, la loi sur les exclusions cadrait parfaitement la mise en œuvre du tarif social.

Par contre, vous n’avez pas dit ce qui s’est passé l’été dernier, en plein mois d’août. Président d’un conseil général, je gérais ce tarif avec EDF, d’un commun accord à partir de fonds départementaux et de fonds de l’entreprise. Mais, au mois d’août de l’année dernière, et avec un cynisme total, le Gouvernement a pris un décret prévoyant qu’à l’avenir les conseils généraux géreraient tout seuls cette mesure. Comment pouvez-vous avoir l’audace de nous dire ce soir que nous n’avons jamais mis en œuvre le tarif social ? Vous mentez et vous oblitérez le fait que le Gouvernement a pris l’initiative unilatérale, sans la moindre consultation, de mettre désormais sur le dos des conseils généraux le coût de ce tarif social pour en exonérer EDF. Il faut en effet que l’action EDF se porte le mieux possible, et donc que l’entreprise fasse le moins de social possible. Tout cela est très logique.

Alors, de grâce, ne dites pas n’importe quoi ! Ce n’est pas en adoptant cette attitude qui consiste, après quatre ans de présence au Gouvernement, à expliquer que tout ce qui ne va pas aujourd’hui, c’est la faute des autres que vous ferez progresser les choses.

Monsieur le rapporteur, rapporter comporte quelques exigences, et au moins celle de respecter l’opposition, ce que vous ne faites pas en accumulant les mensonges comme vous le faites depuis le début de la discussion.

Reprise de la discussion

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.

M. le ministre délégué à l’industrie. Les amendements en discussion partent d’une excellente intention. Tout d’abord, cependant, et vous le savez bien, nous n’avons nullement l’intention de privatiser EDF. La référence à la privatisation d’Électricité de France ne me plaît donc pas du tout. Par ailleurs, ils prévoient d’accorder une tarification spéciale aux personnes en difficulté sur la totalité de leur consommation d’énergie. Avouez que cela est très compliqué puisqu’il est question à la fois d’essence, de gaz et d’électricité. Le moins qu’on puisse dire est que nous ne sommes pas en mesure de faire un tel pas aujourd’hui ! Enfin, accordez-nous le crédit qu’il est prévu dans ce texte, à l’article 3, la tarification sociale du gaz.

Voilà toutes les raisons pour lesquelles je vous invite à retirer vos amendements.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Ayant entendu quelques gros mots, je me dois de reprendre la parole.

M. Emmanuelli fait une confusion. Le tarif social est celui qui est proposé à des personnes remplissant un certain nombre de conditions. Mais il a fait allusion à des dispositions à caractère social relevant de la loi sur les inégalités et qui visent à accorder des remises de dettes pour impayés, éventuellement avec le concours d’EDF. C’est l’ensemble de ce dispositif, d’ailleurs évoqué dans la discussion de certains des amendements portant articles additionnels avant l’article 1er, qui s’applique aujourd’hui.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je confirme que, dans ma bouche, le mot « cynisme » n’est pas un gros mot.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Ce n’est pas à celui-là que je faisais allusion !

M. François Brottes. En tout état de cause, lorsque j’ai crié un peu fort « mensonge », monsieur le rapporteur, c’est que vous avez laissé entendre – et on retrouvera vos propos dans le compte rendu intégral – qu’il n’y avait aucun dispositif pour les plus démunis avant 2000 et jusqu’à la parution des décrets de 2000. Or c’est un mensonge. Il est vrai que le tarif social tel que prévu par la loi mais non voté par la droite à l’époque ne pouvait pas être mis en œuvre tant que le décret n’était pas sorti. Mais la loi du 29 juillet 1992 portant adaptation du revenu minimum d’insertion a créé un fonds d’aide au règlement de facture alimenté par les opérateurs historiques. En outre, ce dispositif a été complété par la loi relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998.

Dans ces conditions, laissez entendre qu’en l’absence du fameux décret, qui, certes, est paru un peu tard, il n’existait aucun dispositif social en matière d’énergie, est bel et bien un mensonge. Je le répète franchement et calmement.

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur le rapporteur, au lieu de parler de mes « confusions » – M. Brottes vient de vous apporter la réponse –, vous auriez mieux fait de vous expliquer sur le fond.

S’agissant des impayés, pour reprendre votre terme, un décret visant à mettre à la charge totale des départements ce qui était auparavant partagé avec EDF a-t-il, oui ou non, était pris au mois d’août de l’été dernier ? J’ai écrit à M. Breton deux lettres à ce sujet qui sont restées sans réponse. J’ai écrit également à M. le ministre de l’industrie avec le même résultat. Il en a été de même pour le président de l’Assemblée des départements de France qui s’est adressé à plusieurs reprises au Gouvernement.

Je comprends que tout cela vous gêne, monsieur Lenoir. L’assemblée générale des présidents de conseils généraux de France se déroule en ce moment. Reprenez les comptes rendus de la journée, vous pourrez constater que ce que je viens de vous dire y figure largement. Sachez que tous les présidents de conseils généraux, y compris ceux appartenant à votre majorité, se sont indignés de ces méthodes. Vous feriez donc mieux de vous inquiéter de cette réalité au lieu de vous enferrer dans ce discours où vous apparaissez comme le chevalier blanc,…

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur. Lenoir dans le rôle du chevalier blanc ?

M. Henri Emmanuelli. …chargé de laver ce que les gouvernements précédents ont laissé sur le parquet. Vous n’avez ni la voix qu’il faut ni les vérités nécessaires pour crier juste dans la colère des prophètes, monsieur Lenoir.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 18822 à 18971.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 18972 à 19004.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19005 à 19037.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19038 à 19070.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19071 à 19103.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19104 à 19136.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19137 à 19169.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19170 à 19202.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19203 à 19235.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19236 à 19268.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 19269 à 19301.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi, n° 3201, relatif au secteur de l’énergie :

Rapport, n° 3278, de M. Jean-Claude Lenoir, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire,

Avis, n° 3277, de M. Hervé Novelli, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)