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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du lundi 10 octobre 2005

12e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Loi d’orientation agricole

Suite de la discussion,
après déclaration d’urgence,
d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi d’orientation agricole (nos 2341, 2547).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant aux amendements à l’article 6, précédemment réservé.

Article 6
(précédemment réservé)

(suite)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 680, visant à supprimer l’article 6.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir cet amendement.

M. André Chassaigne. L’amendement n° 680 a déjà été largement défendu.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement.

M. Antoine Herth, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. L’avis de la commission est défavorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre, de l’agriculture et de la pêche, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 680.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 101 n’est pas défendu.

Je suis saisi de deux amendements, nos 255 rectifié et 304, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, pour soutenir l’amendement n° 255 rectifié.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. M. le ministre a déjà mentionné cet amendement, en manifestant à son égard un esprit d’ouverture.

L’article 6 est un très bon article, un très bon produit.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Merci !

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Il va permettre des différés de paiement, qui sont utiles et intéressants.

Mettons-nous à la place du jeune agriculteur qui va voir son banquier : s’il doit financer l’intégralité de l’achat ou de la reprise de l’exploitation, il devra se soumettre à de multiples conditions et se verra peut-être refuser les prêts qu’il aura sollicités.

Grâce à cet article, il pourra ne payer immédiatement que la moitié, le cédant jouant le rôle du banquier. Le cédant pourra être un membre de la famille ou quelqu’un qui se soucie que son exploitation soit reprise et demeure au-delà de lui-même. Car il en existe ! Ne désespérons pas du monde agricole !

Nous disposons ainsi d’un produit intéressant, soutenu fiscalement. Mais il se trouve qu’à l’origine, le texte limitait cette disposition aux cédants qui cédaient à des jeunes répondant aux conditions de la DJA, et donc susceptibles de bénéficier des aides. La commission des finances a trouvé cela trop restrictif et jugé qu’il convenait de s’adresser à l’ensemble des jeunes agriculteurs.

Nous avons ainsi l’occasion de répondre aux interrogations des « non-aidés », qui, pour différentes raisons, ne bénéficient pas de la DJA. Nous leur offrons de nouvelles perspectives, sachant qu’il s’agit là, indirectement, d’une aide publique – par le biais d’un soutien fiscal – mais que celle-ci ne pourra intervenir que sur décision du cédant.

Je m’inscris en faux contre les propos de certains de mes collègues du gauche, qui étaient très critiques à l’égard de ces agriculteurs non aidés. C’est d’ailleurs assez contradictoire de leur part, car les syndicats dont ils sont proches, comme le MODEF et la Confédération paysanne, soutiennent fréquemment ces agriculteurs non aidés, dont les objectifs sont alternatifs ou s’inscrivent dans d’autres philosophies agricoles.

Reste que notre projet doit être ouvert à l’ensemble de l’agriculture française, dans sa variété. Voilà pourquoi cet amendement a été déposé.

Auparavant, j’ai consulté le CNJA, « gardien du temple » en matière d’installation. Son président, M. Layre, m’a dit tout son intérêt pour une telle ouverture et me l’a écrit dans une lettre en date du 26 septembre 2005.

Sur le plan national, de 20 à 25 % des jeunes agriculteurs s’installent sans aides, parce qu’ils ne répondent pas aux conditions requises. Nous n’avons pas de raison de les exclure de ces dispositions spécifiques.

Voilà pourquoi nous vous proposons, mes chers collègues, d’étendre le bénéfice de cet excellent article aux cédants qui font l’effort de faire bénéficier du différé de paiement des jeunes qui s’installent de manière non aidée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission a accepté l’amendement que vient de défendre M. Le Fur et retire son amendement n° 304, qui serait contradictoire.

M. Philippe Feneuil. Très bien !

M. le président. L’amendement n° 304 et retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement n° 255 rectifié ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Très favorable ! Et je lève le gage.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je suis favorable à cet amendement, sans pour autant me faire d’illusion sur le crédit transmission. Le fait que le dispositif soit élargi aux jeunes agriculteurs s’installant hors DJA est une bonne chose.

M. Jean Auclair. Tout à l’heure, vous avez dit le contraire !

M. André Chassaigne. Contrairement à ce qui a été dit, nous ne considérons pas que l’installation hors DJA soit catastrophique.

M. Jean Auclair. Eh bien alors ?

M. André Chassaigne. De nombreuses collectivités territoriales – je pense au conseil général du Puy-de-Dôme –, ont d’ailleurs institué des procédures d’accompagnement de ces jeunes agriculteurs, par des crédits ou des actions spécifiques.

Quoi qu’il en soit, je ne partage pas l’argumentation de M. Le Fur car le dispositif proposé ne règle pas les véritables problèmes de ceux qui s’installent hors DJA.

Le meilleur remède serait de modifier les conditions d’attribution de la DJA, en tenant compte de l’évolution de la production agricole dans notre pays, en adoptant des critères moins réducteurs que les critères actuels. Je ne vise pas ici la formation, qui est une bonne chose, mais certaines activités qui ne sont pas prises en compte pour l’éligibilité à la DJA.

Enfin, l’amendement n’aura que très peu de portée si on ne règle pas les autres problèmes : accès au foncier, accès aux droits à produire, accès aux financements.

Je ne dis pas que cet amendement est fait pour occulter les problèmes de fond, et je le voterai parce qu’il permet une extension appréciable, mais je ne me fais aucune illusion sur sa portée.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. « Il n’est pire sourd que celui qui ne veut entendre », disait quelqu’un il y a deux mille ans. J’ai l’impression que la majorité pourrait se voir appliquer cet adage !

La gauche n’a jamais dit qu’elle ne voulait pas que des jeunes s’installent hors DJA. Nous avons dit qu’il n’était pas normal, parfois, que des jeunes puissent ne pas être aidés.

Le refus d’aide est parfois justifié par des critères liés à la surface…

M. Jean Auclair. Vous faites très fort !

M. Jean Gaubert. Moi, je ne lis pas les dossiers de l’IFRAP. J’ai d’autres références dans la vie !

M. Jean Auclair. Vous changez d’avis !

M. Jean Gaubert. Mais pas du tout !

M. le président. Pas de discussions entre vous, mes chers collègues !

M. Jean Gaubert. Monsieur le président, voici trois jours qu’on nous dit que le débat doit avancer, mais dès que nous prenons la parole, quelqu’un de la majorité nous empêche de continuer !

M. Jean Auclair. Vous dites le contraire de ce que vous avez dit !

M. Jean Gaubert. Monsieur le ministre, soit vous calmez vos troupes (Sourires), soit le débat risque de durer encore longtemps.

Les vraies raisons qui font que la DJA et les prêts spéciaux, bonifiés, à moyen terme ne sont pas accordés sont liées à la surface et à l’apport de fonds – problème que l’excellent amendement de mon collègue Yves Simon devrait résoudre pour partie, notamment dans les GAEC.

D’autres ne sont pas toujours objectives et portent sur la viabilité du projet, notamment quand le jeune n’a pas de références, quand il veut faire de la vente à circuits courts.

Nous regrettons pour notre part que ces critères ne soient pas davantage élargis. Mais nous continuons de penser qu’il est de mauvaise politique de faire croire qu’on peut s’installer sans aucune formation ni expérience. C’est impossible en ce XXIe siècle !

M. Philippe Feneuil. C’est l’expérience professionnelle qui compte !

M. Jean Auclair. Ne leur répondez pas ! Il n’y a que les intellos qui les intéressent !

M. Jean Gaubert. Monsieur le ministre, vous avez annoncé deux mesures positives, dues à votre gouvernement : d’abord, le versement de la DJA en une seule fois, et je vous en donne acte ; ensuite, la baisse des taux bonifiés. Mais encore heureux que vous ayez baissé ces taux. Bientôt, ils allaient être plus élevés que ceux du marché ! Constatant que les taux du marché avaient baissé, vous avez baissé les taux bonifiés. Vous n’y avez aucun mérite.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Vous reconnaissez au moins que c’est une bonne nouvelle !

M. le président. Mes chers collègues, comme nous n’en sommes qu’au début de la discussion je vais encore donner la parole à M. Guillaume et à M. Sauvadet, qui me l’ont demandée. Je vous rappelle néanmoins que, sur chaque amendement, s’expriment traditionnellement, outre le rapporteur et le ministre, deux députés seulement.

C’est un problème de rythme. La semaine dernière, nous avons avancé au rythme de dix-huit amendements à l’heure. Cet après-midi, nous sommes passés à cinquante.

M. Jean Gaubert. C’est le maximum qu’on puisse atteindre en agglomération ! (Sourires.)

M. le président. Mais contrairement au code de la route, il n’y a pas de limitation de vitesse s’agissant de la discussion des amendements ! (Sourires.)

Si vous souhaitez éviter de siéger vendredi, voire samedi, je ne peux que vous inciter à accélérer la discussion. Mais il en va de votre responsabilité.

La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. Notre discussion démontre qu’il y a lieu d’approfondir la question. Nous ne pouvons pas voter dans le brouillard ! Tous nos collègues doivent être éclairés sur les conséquences concrètes des décisions qu’ils vont prendre. J’ai pour ma part soulevé quelques points auxquels le ministre lui-même n’avait pas pensé. Maintenant, si nous ne devons pas débattre, qu’on nous le dise et nous irons tous nous coucher ! La loi sera alors votée automatiquement…

M. le président. Monsieur Guillaume, le président est là pour applique le règlement.

M. François Guillaume. Tout à fait d’accord, mais on en tirera les conclusions qu’il faut.

Cela dit, je trouve assez démagogique de proposer un amendement qui permettra à ceux qui ne sont pas bénéficiaires de la DJA parce qu’ils n’ont pas la formation requise de pouvoir accéder à un certain nombre d’avantages.

Personne ici, pas un agriculteur digne de ce nom n’accepterait que son fils s’installe sans formation. Je suis à l’origine de la loi qui attribue la DJA à ceux qui ont obtenu, non un diplôme, qu’on peut toujours rater, mais une attestation selon laquelle ils ont suivi le parcours de formation.

Est-ce qu’on va éliminer les 40 heures, les formations d’adultes pour ceux qui n’avaient pas pu obtenir dans leur scolarité une formation technique convenable ? Va-t-on permettre aux personnes concernées de s’installer sans faire l’effort nécessaire ?

Je ne pense pas que cela rende un grand service aux intéressés, et je rejoins ce qui a été dit tout à l’heure par certains collègues.

Voilà pourquoi je suis en désaccord avec la proposition faite par le rapporteur pour avis de la commission des finances.

M. le président. La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Penser qu’à travers un tel amendement on voudrait remettre en cause la nécessaire formation serait nous faire un mauvais procès. Aucun corps de métier aujourd’hui ne peut se dispenser d’une réflexion sur la qualification, qui est bien l’un des moyens de parvenir à une agriculture de qualité prenant en compte l’environnement dans son ensemble. Et si, en plus, on veut qu’elle s’inscrive dans les marchés, cela rend le métier extrêmement complexe. Je veux donc affirmer que nous partageons tous l’attachement à la formation : ce n’est pas l’apanage d’un seul groupe.

Par ailleurs, monsieur Guillaume, il faut bien constater qu’aujourd’hui une majorité d’installations se fait en dehors des dispositifs d’aides parce que ceux-ci sont trop complexes à mettre en œuvre. Lors de leur installation, les agriculteurs sont souvent confrontés à des situations qui requièrent beaucoup de réactivité – succession, transmission, agrandissement, disposition de terres ou autres – et ils préfèrent se passer de ces aides. L’amendement de M. Le Fur prend en compte cette réalité. Je salue la volonté de M. le ministre depuis le début du débat de simplifier autant que faire se peut les procédures. La simplification arrive peut-être un peu tard pour les prêts, mais il n’empêche qu’il est positif d’aider les personnes qui s’installent dans cette démarche lourde et qui nécessite des capitaux. Finalement, les agriculteurs font vivre l’une des dernières grandes industries et ils méritent un tel accompagnement, sans lequel il leur serait très difficile d’exercer leur métier, notamment dans l’étape la plus décisive qu’est la transmission.

On ne peut pas, monsieur Gaubert, avoir un discours cohérent en disant, d’un côté, qu’il nous faut une agriculture présente et accompagnée sur le territoire et, de l’autre, admettre que certaines personnes puissent échapper au champ de l’accompagnement. Je ne peux pas non plus laisser dire que la formation ne saurait être un des critères de l’installation. À Mme la rapporteure pour avis de la commission des lois, qui prétendait que s’installer sans formation c’était prendre son risque, je dirai que le métier est suffisamment compliqué. J’étais de ceux qui avaient plaidé pour que l’enseignement soit aussi présent dans notre discussion. D’ailleurs, nous devrons avoir une réflexion sur la validation des acquis de l’expérience.

M. Jean Gaubert. C’est ce qu’a fait M. Guillaume !

M. François Sauvadet. Je le reconnais puisque je dis que c’est une dimension à prendre en compte. Mais, de grâce, ne laissons pas croire qu’on peut, à l’heure actuelle, exercer le métier d’exploitant agricole sans avoir ni formation ni qualification. Aucun entrepreneur aujourd’hui n’y échappe.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 255 rectifié, compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 256.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le soutenir.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. C’est un amendement quasi-rédactionnel. Il intègre au bénéfice de la réduction d’impôt prévue à l’article 6 la vente et la transaction sur le fonds agricole. Il convient de permettre au cédant de bénéficier de l’avantage fiscal quand il consent à l’acheteur un différé de paiement. Cet élément de cohérence n’est pas précisé explicitement dans le texte et il me semble nécessaire de le mentionner.

M. le président. C’est une rédaction quelque peu coûteuse puisque votre amendement comporte un gage !

Quel est l’avis de la commission saisie au fond ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. J’avoue ne pas comprendre l’utilité de l’amendement de M. Le Fur. Dès lors que le fonds agricole fait partie de l’actif, il ne me paraît pas nécessaire de préciser davantage. Dans l’esprit du législateur, cela va de soi.

Au bénéfice de cette explication, peut-être pourriez-vous, monsieur Le Fur, retirer l’amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Je m’étais interrogé à la lecture de l’article. La réponse du ministre étant on ne peut plus claire, je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 256 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 305.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Antoine Herth, rapporteur. Cet amendement est rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 305.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 102 rectifié.

La parole est à M. François Guillaume, pour le soutenir.

M. François Guillaume. Il s’agit d’un amendement de simplification.

L’énumération des différentes personnes susceptibles de bénéficier de la réduction d’impôt me paraît restrictive. C’est pourquoi je pense préférable de viser « les couples contribuables soumis à l’imposition commune ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Les pacsés ont le choix entre plusieurs rattachements fiscaux. Dès lors, je pense que la rédaction du Gouvernement est plus large que celle proposée par M. Guillaume. Je lui propose donc de retirer son amendement, qui me paraît superfétatoire.

M. le président. La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. Je pense, au contraire, que ma rédaction est plus large puisqu’elle ne fait pas un inventaire. Néanmoins, pour faire plaisir à M. le ministre, je retire mon amendement.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. C’est gentil !

M. le président. L’amendement n° 102 rectifié est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 306.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Antoine Herth, rapporteur. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 306.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 6, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Avant l’article 7

M. le président. Sur l’intitulé du chapitre II du titre Ier du projet de loi, je suis saisi d’un amendement n° 308.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

M. Antoine Herth, rapporteur. En cohérence avec les changements d’intitulés que nous avons opérés au début de l’examen du texte et avec les amendements que la commission a adoptés à la suite du rapport de M. Jacques Le Guen, nous proposons de faire référence à la promotion de l’emploi dans l’intitulé du chapitre II.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 308.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 500, portant article additionnel avant l’article 7.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir cet amendement.

M. Jean Gaubert. Il s’agit d’inciter le Gouvernement à réfléchir aux conditions parfois difficiles de l’exercice du contrôle de l’inspection du travail en agriculture. Je pense inutile de rappeler des événements très mal vécus par tous, et au premier chef par votre prédécesseur, monsieur le ministre. Outre ces drames, on a vu récemment des cas qui méritent que soit soulevée la question des difficiles conditions d’exercice de ce métier. Celles-ci ne sont d’ailleurs pas toujours liées au contrôle lui-même mais à l’exaspération, pour diverses causes, de l’agriculteur. Comme on dit, c’est le premier qui passe qui paie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu l’amendement de M. Gaubert, à qui je propose de le retirer au profit d’un amendement de même esprit, l’amendement n° 1119, que nous examinerons après l’article 30.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est naturellement très sensible au sujet évoqué par M. Gaubert. Je suis allé récemment, avec mon collègue Gérard Larcher en Dordogne, à l’occasion du premier anniversaire du décès de Sylvie Trémouille et de Daniel Buffière, pour rendre hommage à la fois aux agents de contrôle et aux familles. Nous avons accordé des moyens supplémentaires à l’ensemble de nos services pour réagir face à ce type de situation et surtout donné des instructions pour que la moindre incivilité de langage ou de comportement se traduise immédiatement par la saisine du procureur de la République.

Le souci légitime que vous avez tous d’assurer des conditions de travail sûres et normales aux agents du contrôle en agriculture est satisfait aujourd’hui, et je suis prêt à en rendre compte à la représentation nationale. Le Gouvernement sera néanmoins favorable à l’autre amendement auquel M. Herth a fait allusion.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. L’amendement n° 500 n’aurait pas dû être déposé parce que nous nous étions entendus en commission sur une rédaction commune. Je le retire donc.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Très bien !

M. François Sauvadet. Parfait !

M. le président. L’amendement n° 500 est retiré.

Article 7

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 7.

La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. N’ayant pas souhaité allonger le débat sur l’article 6, je voudrais vous faire part maintenant de ma conception de la qualification de l’agriculteur au moment de l’installation. Il est normal qu’une aide publique serve autant de soutien au jeune agriculteur que de levier pour élever le niveau global de la formation des agriculteurs de la « ferme France ». Dans son ensemble, le groupe UMP ne remet pas en cause cette logique, car, cela a été dit, la complexité du métier fait que l’on a intérêt à élever ce niveau.

M. François Sauvadet. Et cela a été dit par l’UDF !

M. Michel Raison. En revanche, il est évident que l’on ne doit pas laisser tomber ceux qui, par manque de qualification ou pour d’autres raisons, ne peuvent pas obtenir les aides. Pour revenir sur le stage de six mois, dans beaucoup de départements, c’est avec intelligence que les cas très particuliers sont traités avec les dérogations adaptées.

S’agissant de l’article 7, je me félicite des avancées sociales qu’il prévoit, telles que la révision – enfin ! – du statut d’aide familial, qui ne pourra désormais pas excéder cinq ans, contre jusqu’à trente ans autrefois.

Dans le même esprit, j’avais déposé un amendement, qui avait réuni de nombreux cosignataires et qui, je ne sais pourquoi, a été jugé irrecevable. Comme dans le secteur de l’artisanat ou du commerce, le conjoint du chef d’une entreprise agricole désireux de participer à l’activité de l’exploitation peut choisir entre plusieurs statuts : conjoint salarié, conjoint associé, conjoint collaborateur ou co-exploitant. Pourtant, dans un grand nombre de cas, aucun choix n’est effectué, le conjoint se retrouvant parfois en très mauvaise posture en cas d’évolution défavorable de la situation de l’entreprise, voire du lien matrimonial. Je ne sais pas si un amendement de même esprit a été jugé recevable. Si tel n’est pas le cas, je propose que le Gouvernement continue la discussion avec le Sénat pour trouver une formule ne laissant plus un conjoint – et le plus souvent il s’agit d’une conjointe – dans l’embarras parce qu’il n’aura pas choisi son statut pour faire des économies de cotisations. Si nous n’avions pas rendu la retraite obligatoire, les trois quarts des paysans ne cotiseraient pas, comme ils n’avaient pas voulu, à une époque, cotiser pour la retraite complémentaire. On a vu ce que cela donnait.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Eh oui !

M. Michel Raison. On est obligé, de temps en temps, d’être un peu plus qu’incitatif et de rendre le choix du statut obligatoire. Tel est le but de l’amendement que j’aurais souhaité voir discuté ici.

M. le président. La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. J’y renonce, monsieur le président, pour faire gagner du temps.

M. le président. Je vous remercie.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je salue le progrès que constituent les dispositions de l’article 7 en matière de protection sociale (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) et c’est avec plaisir que nous constatons la reconnaissance des personnes liées par un PACS et des concubins. Je rappelle que j’avais déposé plusieurs amendements en ce sens lors de l’examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, que l’un d’eux avait été retenu en commission mais qu’il avait finalement été rejeté en séance publique. C’est une bonne chose que cette demande, émanant de tous les bancs de cette assemblée, soit satisfaite dans le présent article.

Il s’agit certes d’un progrès notable, mais un progrès en appelle un autre. J’en profite donc pour signaler à nouveau le grave problème des retraites agricoles.

J’ai reçu, comme nombre d’entre vous, je suppose, un courrier du président de l’Association nationale des retraités agricoles de France, l’ANRAF, qui est un véritable appel de détresse. Je ne vais pas vous le lire en entier ; je vais simplement vous en citer quelques extraits. Il y est notamment écrit : « Nous sommes conscients que la rigueur budgétaire est incontournable mais nous sommes persuadés que des solutions peuvent et doivent être recherchées dans un souci d’équité sociale. » Et son auteur de poursuivre : « C’est bien le monde agricole qui, depuis la dernière guerre, a réussi à placer notre pays au premier rang mondial des exportateurs de produits agricoles, permettant ainsi que la balance du commerce extérieur de la nation soit toujours largement excédentaire. C’est pourquoi nous préconisons que, par un juste retour des choses, l’industrie agro-alimentaire participe au financement de ceux qui ont été les acteurs de cette réussite. »

Les conclusions du groupe de travail présidé par M. Garnier comportaient des avancées importantes, notamment avec l’abaissement des coefficients de minoration pour les polypensionnés, et de nombreuses propositions avec des hypothèses et un échéancier. Dans le compte rendu des travaux de ce groupe de travail, M. Garnier précisait d’ailleurs, parlant du projet de loi dont nous débattons, qu’il « comportera un volet social et que des groupes de travail seront également mis en place à l’occasion de son élaboration ».

Ce volet social, monsieur le ministre, est réduit à bien peu de chose. Vous avez oublié les agriculteurs retraités. Certes, ces derniers sont de moins en moins nombreux puisque 50 000 décèdent chaque année. Mais il aurait été de l’honneur de notre assemblée de faire sauter tous les verrous qui font que les retraites agricoles sont misérables dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je salue à mon tour les avancées contenues dans cet article. Quelques amendements que nous avons déposés et qui ont été adoptés par la commission des affaires économiques vont venir le compléter.

Il est grand temps, comme cela a déjà été dit, de mettre bon ordre dans le statut des aides familiaux. Celui-ci a trop souvent servi à fournir de la main-d’œuvre gratuite à des exploitations en grande difficulté et l’on connaît les conséquences dramatiques de cette situation : ils ne recevaient pas la juste rémunération du travail qu’ils avaient fourni au moment de leur retraite et, souvent, lors des successions, ne transmettaient que des dettes.

Il arrive souvent que les frères et sœurs qui quittent la ferme croient que c’est celui qui est resté aide familial sans rémunération qui a tiré le gros lot, ce qui n’est pas le cas. Dans le monde agricole, en effet, on ne parle pas de ses difficultés, pas même aux enfants, de sorte que je connais de nombreux cas où les enfants croyaient leurs parents riches alors qu’en réalité ils n’étaient riches que des dettes qu’ils avaient contractées et qu’ils transmettaient à celui qui était resté sur l’exploitation.

Le deuxième élément sur lequel je veux appeler votre attention et sur lequel nous défendrons des amendements après l’article 7 est la situation souvent dramatique des conjoints. Certes, des lois ont permis des avancées dans ce domaine mais elles ne sont qu’optionnelles. On peut être co-exploitant, conjoint, salarié, associé ou continuer à n’être rien, et nous savons qu’en cas de divorce ou de veuvage, certains conjoints ont été placés dans des situations inextricables. Il convient donc d’obliger, dans une exploitation agricole, le conjoint à avoir un statut, comme ce fut le cas dans la loi Dutreil pour les petites et moyennes entreprises, que nous avons adoptée au mois de juillet, afin qu’il puisse bénéficier d’un certain nombre d’avantages sociaux.

Que l’on n’oppose pas la question financière : le statut de co-exploitant permet déjà de partager les sommes disponibles, si faibles soient-elles. Personne n’est avantagé par rapport à l’autre. Le salariat est également possible et nous proposerons qu’il soit en quelque sorte la voiture-balai : à défaut du choix d’un autre statut, ce sera lui qui s’appliquera.

M. le président. La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair. J’ai cosigné avec plusieurs collègues un amendement dont j’ignore pourquoi il n’est pas distribué en séance. Celui-ci concerne le statut des aides familiaux.

Afin de mettre fin aux difficultés rencontrées par ces derniers lors de leur installation, il est proposé de supprimer le stage de six mois pour ceux qui le désirent et qui sont aides familiaux depuis trois ans. En effet, on constate que 50 % des installations se font hors DJA. Les jeunes concernés sont alors fortement pénalisés pour entrer dans la vie active. L’absence d’un jeune pendant six mois met l’exploitation en péril si ses parents sont malades ou fatigués.

Le Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles, le CNASEA, a formulé des propositions qui devraient vous faire tous réfléchir : il suggère d’ouvrir sous condition aux agriculteurs n’ayant pas bénéficié de la DJA les droits aux prêts bonifiés et les droits à produire. Il s’agit d’aider, parmi ceux qui ne reçoivent aucune aide, ceux qui sont les plus dynamiques, c’est-à-dire ceux qui « auront su montrer leurs compétences après quelques années ». Ils pourraient alors se voir attribuer une DJA spécifique et bénéficieraient du statut d’agriculteur aidé à condition de souscrire les mêmes engagements que les autres, qu’il s’agisse de la TVA ou de la comptabilité.

Dans une telle loi, nous ne pouvons pas les ignorer.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 104.

La parole est à M. François Guillaume, pour le soutenir.

M. François Guillaume. Il faut veiller à ce que le statut d’aide familial ne se pérennise pas pendant des décennies. Il convient donc d’y mettre une limite. Néanmoins, par pragmatisme, je crois qu’il faut éviter de trop raccourcir cette éventuelle possibilité – qui n’est d’ailleurs encore qu’une possibilité ! En effet, avec l’allongement de la durée des cotisations pour une retraite à taux plein, les exploitants agricoles cesseront leur activité plus tardivement, ce qui repoussera d’autant le transfert de l’entreprise à la génération suivante. Aussi convient-il d’offrir la possibilité à un aide familial envisageant la reprise de l’exploitation de ses parents, lesquels ont souvent la charge d’autres enfants à qui il faut assurer scolarisation et acquisition d’un métier, de bénéficier de ce statut d’attente pendant huit années. Sinon, le jeune agriculteur risque de chercher du travail ailleurs, ce qui remettra en cause le transfert de l’exploitation dans un cadre familial.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 104.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 309.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Antoine Herth, rapporteur. Cet amendement tend à rectifier une erreur matérielle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 309.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 310.

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. Antoine Herth, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 310.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 311.

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. Antoine Herth, rapporteur. Je laisse le soin à M. Simon de le défendre.

M. le président. La parole est à M. Yves Simon.

M. Yves Simon. Cet amendement tend à appliquer les acquis obtenus pour les conjoints d’artisan dans la loi Dutreil du mois de juillet aux conjoints d’exploitant agricole.

À la suite d’un divorce, il est fréquent de rencontrer des ex-épouses d’exploitants agricoles obligées d’assumer, faute d’accords conventionnels devant notaire, le remboursement de prêts ou de dettes contractées par le couple dans le cadre de leur précédente activité professionnelle. Il est donc proposé de leur appliquer les dispositions de l’article 1387-1 du code civil, comme la loi Dutreil le fait dans le cadre d’une PME.

Je propose en outre, à travers un sous-amendement, de supprimer les mots : « aux conjoints collaborateurs » à la fin de l’amendement, pour être pleinement conforme avec la loi sur les PME.

M. le président. J’accepte ce dernier sous-amendement, monsieur Simon, mais, après l’expérience de cet après-midi, j’indique à l’Assemblée que je n’accepterai plus de sous-amendement oral pendant cette séance, à moins qu’il ne s’agisse que de simples rectifications orthographiques.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission a adopté l’amendement n° 311.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je comprends les motivations de M. Simon mais cet amendement n’est pas nécessaire.

Les dispositions de l’article 1387-1 du code civil, qui a vocation à régler en cas de divorce le sort des dettes professionnelles conclues par des époux lorsqu’ils gèrent une entreprise, n’opèrent pas de distinction sur la capacité de l’un ou de l’autre des époux à engager l’entreprise. Elles peuvent donc s’appliquer au conjoint collaborateur en tant qu’époux du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole sans qu’il soit nécessaire d’en faire mention expresse à l’article du code rural que vous souhaitiez amender.

Le code civil vous donnant satisfaction, il ne me semble pas nécessaire de charger le code rural par une mention complémentaire.

Sous réserve de ces précisions, je vous propose de retirer l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Yves Simon.

M. Yves Simon. Sous le bénéfice de ces précisions, je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 311 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 105.

La parole est à M. François Guillaume, pour le soutenir.

M. François Guillaume. Il s’agit d’un amendement rédactionnel. Dans le dernier alinéa du b du II de l’article 7, il nous semble redondant de maintenir les mots « ou d’entreprise » après les mots « le chef d’exploitation ». S’il y a une différence, j’aimerais bien la connaître.

Dans ce même alinéa, il est précisé que cet article s’applique « aux personnes liées par un pacte civil de solidarité ou qui vivent en concubinage » alors que tout à l’heure, à l’article 6, lorsque j’ai proposé un terme générique pour couvrir ces formules nouvelles, M. le ministre a préféré en rester à une énumération, mais il a oublié le concubinage. Le concubinage est-il couvert par les dispositions de l’article 6 ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Avis défavorable.

Je me propose de reconsidérer la question, afin de répondre à la remarque très pertinente de M. Guillaume.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 105.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous passons aux amendements portant articles additionnels après l’article 7.

Après l’article 7

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 502.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour le soutenir.

M. Jean Gaubert. Nous avons déjà longuement évoqué, dans cet hémicycle, la situation des aides familiaux. Nous savons que cette situation d’attente n’est pas très réjouissante, d’autant qu’elle peut durer très longtemps. Il arrive même qu’elle ne se règle jamais et que l’aide familial ne reçoive jamais la rémunération correspondant aux périodes de travail qu’il a assumées.

Le premier alinéa de l’article L. 321-13 du code rural rappelle l’obligation de versement « sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d’une soulte à la charge des cohéritiers ». Cela signifie que, s’il n’y a plus d’argent, celui qui a travaillé n’est pas payé, alors qu’il a parfois travaillé pour aider ses frères et sœurs à faire des études. C’est anormal. Il se retrouve Gros-Jean comme devant, comme on dirait familièrement, car il a accepté de rester sur l’exploitation pendant que les autres étaient partis. La protection prévue pour ces derniers n’est pas toujours justifiée. On a même été jusqu’à considérer que la soulte ne pouvait pas être prise sur l’héritage des biens familiaux, c’est-à-dire sur les biens immobiliers, mais sur les avoirs financiers. Et quand il n’y a pas d’avoirs financiers, la soulte n’est pas payée au fils ou à la fille restés dans l’exploitation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Avis défavorable.

M. le président. La parole est M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il est dommage que la commission n’ait pas retenu cet amendement. Il s’agit d’une mesure de justice. Est-on capable dans cet hémicycle de considérer qu’un membre d’une famille pourrait travailler pour rien alors que les autres en tireraient un bénéfice ?

Je peux citer l’exemple d’un enfant ayant arrêté ses études à seize ans pour travailler sur l’exploitation, alors que ses frères et sœurs ont fait des études supérieures. Il n’a jamais perçu son salaire différé après être resté pendant de nombreuses années à la ferme, tandis que les autres ont demandé leur part.

Je trouve cela profondément anormal et je ne comprends pas que la commission n’ait pas pris en compte ce type de situation.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Antoine Herth, rapporteur. Vous souhaitez, monsieur Gaubert, que je motive davantage l’avis de la commission.

Il nous a semblé délicat d’aborder cette question dans le cadre d’une loi d’orientation agricole, étant donné que le sujet pourra être prochainement étudié de façon approfondie à l’occasion de l’examen d’un projet de loi portant réforme des successions. Il sera alors temps !

M. André Chassaigne. Oui, mais un tiens vaut mieux que deux tu l’auras !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 502.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 782, 781 et 784, pouvant faire l’objet d’une présentation commune.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour défendre ces amendements.

M. Jean Gaubert. Permettez-moi, monsieur le président, avant de soutenir ces amendements, de m’étonner que l’article 40 de la Constitution serve à couvrir beaucoup de choses.

Nous avions, en effet, déposé une série d’amendements relativement importants sur le statut des aides familiaux. Ils ont été jugés irrecevables au titre de l’article 40. Je ne comprends pas très bien pourquoi, car on ne règle ici que des problèmes de droit privé. Il n’y a pas là d’incidence sur les finances publiques. Comment peut-on étendre à ce niveau le « forfait » de l’article 40 ? Mais nous aurons l’occasion d’y revenir. Quoi qu’il en soit, il est regrettable que la commission des finances n’ait pas accepté d’examiner plus attentivement ces amendements, car les plus fragiles ne sont pas protégés.

Les amendements nos 782, 781 et 784 font l’objet d’une présentation commune – c’est tout à fait légitime – puisqu’ils traitent de la notion d’intégration en agriculture. On a légiféré sur ce thème à plusieurs reprises en 1964 et dans les années 1978-1980. Mais les choses ont beaucoup évolué en vingt-cinq ans. En matière d’intégration, l’imagination est, là aussi, au pouvoir et elle se situe plutôt du côté de ceux qui le détiennent que du côté de ceux qui le subissent. On constate que l’utilisation par les juristes des textes a permis de contourner l’esprit du législateur de l’époque, et nous voudrions justement y revenir.

Le législateur n’avait pas prévu l’évolution des pratiques intégratives dites « horizontales » : c’est-à-dire l’intégration d’un agriculteur par d’autres agriculteurs. C’est assez courant dans ma région. Sous couvert de l’aider, on propose à celui qui est en difficulté de créer une société. Celui qui va bien intègre celui qui est en difficulté, parfois dans la même profession, mais jamais entre voisins, toujours à quelques kilomètres de distance. Les arguments utilisés semblent être empreints de gentillesse et de bonne foi. La personne en difficulté est contactée par un tiers – les informations ont été données par la banque, la coopérative, l’industriel qui livre l’aliment ou qui achète les céréales – qui lui propose de créer une société dans laquelle le premier aura 5 ou 10 % des parts tandis que l’autre en aura 90 %.

M. François Sauvadet. Ce n’est pas faux !

M. Jean Gaubert. Celui qui recevra 10 % des parts gardera son honneur. Chacun sait combien l’honneur est important en milieu rural – je ne critique pas cela, bien au contraire, mais à certains moments, cela pèse lourd et coûte très cher.

Cet agriculteur conservera certes son honneur, mais deviendra taillable et corvéable à merci. Le droit du travail ne s’appliquera même pas à lui, puisqu’il sera associé. Sa participation aux résultats de l’exploitation sera de 5 ou 10 %, mais il ne percevra pas de salaires puisqu’il sera rémunéré au résultat. Vous pouvez imaginer dans quelle situation il se trouvera. En revanche, les voisins ne le sauront jamais, ce qui lui aura été présenté comme essentiel.

Nous voudrions « débusquer » ces cas et mettre fin à ces situations intolérables au début du XXIsiècle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 782, 781 et 784 ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission a examiné ces amendements, mais ne les a pas retenus car nous ne possédions pas les éléments nécessaires pour mesurer les conséquences de ces modifications législatives.

Monsieur Gaubert, je vous avais indiqué en commission qu’il s’agissait d’un vrai sujet. M. Sauvadet l’a confirmé tout à l’heure. J’ai parfaitement compris que M. Gaubert souhaitait saisir le Gouvernement de cette question, qui se pose tout particulièrement dans sa région. Mme Bousquet y a d’ailleurs longuement insisté lors de son intervention dans la discussion générale.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur Gaubert, la question que vous venez de poser est importante. Nous n’avons pas suffisamment travaillé pour l’intégrer à ce moment précis de notre discussion dans la loi d’orientation.

Je vous propose de retirer vos amendements. Je suis favorable à la poursuite de ce débat. Il sera peut-être possible de réenvisager ce point dans la suite de nos lectures et de voir avec vous ce qu’il est possible de faire.

M. le président. Monsieur Gaubert, maintenez-vous vos amendements ?

M. Jean Gaubert. Si le Gouvernement n’avait pas déclaré l’urgence sur ce texte, j’aurais sans doute retiré ces amendements, car nous aurions eu le temps d’y travailler, pendant quelques semaines, avant la deuxième lecture.

Mais, compte tenu de la procédure d’urgence, nous ne rediscuterons pas de ce texte en deuxième lecture. Dans ces conditions, je maintiens les amendements.

M. le président. Je vais mettre successivement aux voix les amendement n°s 782, 781 et 784.

(Ces amendements, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 684.

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

M. André Chassaigne. Cet amendement répond à un souci de justice sociale puisqu’il tend à supprimer le plafonnement de l’assiette des cotisations vieillesse, qui ne profite bien entendu qu’aux seuls exploitants dégageant un fort revenu.

La suppression de ce plafonnement serait une simple mesure de solidarité et de justice. Il n’est pas normal que les agriculteurs les plus aisés contribuent proportionnellement moins au régime de retraite que les agriculteurs dont le revenu n’atteint pas le plafond.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu cet amendement. Il y a un principe général de plafonnement des cotisations, puisque les pensions de base sont également plafonnées. De plus, l’amendement ouvrirait très largement le débat sur l’équilibre du fonds de financement des prestations sociales agricoles.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 684.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 1093 rectifié.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour le soutenir.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Nous ne devons pas nous interdire de progresser sur le dossier des retraites, comme nous l’avons fait antérieurement. Dans la loi de modernisation agricole de 1994, il y avait tout un pan concernant les retraites.

Nous sommes bien sûr responsables et nous savons que nous ne pouvons agir qu’à la marge. M. Garrigue a beaucoup travaillé sur cette question et sur cet amendement.

Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a financé la retraite complémentaire obligatoire. Il faut le répéter.

Un groupe de travail lancé par M. Hervé Gaymard a fait avancer certains dossiers en 2003 et 2004, notamment celui qui est traité dans cet amendement.

Il s’agit du cas des femmes qui relèvent du régime de retraite des non-salariés des professions agricoles et qui ont dû cesser leur activité pour élever leurs enfants. Durant cette période, elles ont, à ce titre, relevé du régime général et cotisé au régime d’assurance vieillesse du régime général. Pour bénéficier des retraites agricoles, un minimum de trente-deux ans d’activité agricole est nécessaire et on ne prend pas en compte le cumul de l’ensemble des retraites. De ce fait, elles ne répondent pas à la condition de durée d’activité et ne peuvent bénéficier de la retraite agricole. Nous nous trouvons dans une situation paradoxale et je pense que nous sommes unanimes à reconnaître que ce n’est pas satisfaisant.

Nous proposons donc de tenir compte pour ces femmes de la période spécifique de cotisation au régime d’assurance vieillesse du régime général comme s’il s’était agi de la même période de cotisation au régime agricole. C’est un principe simple. Cela ne nous semble pas une mesure très coûteuse en matière de retraite agricole, même si l’on considère que tout est coûteux en ce domaine.

Monsieur le ministre, si nous ne pouvons qu’agir à la marge, nous pensons que nous devons accomplir ensemble ce progrès. Cette mesure est attendue plus particulièrement des conjointes, dont on parle beaucoup.

M. le président. Quel est l’avis de la commission saisie au fond ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. Cependant, si M. Le Fur avait pris la peine de me le demander, je me serais bien volontiers joint à ses cosignataires !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est naturellement prêt à faire mouvement sur les retraites agricoles. Comme vous le savez, un groupe de travail a été mis en place à l’initiative d’Hervé Gaymard et le président Pierre Méhaignerie m’a fait savoir la semaine dernière qu’il souhaitait que deux députés de la commission des finances, M. Garrigue et M. Censi, puissent analyser les mesures proposées. En attendant, je vous propose, monsieur Le Fur, de retirer cet amendement, sachant que ces dispositions pourront se situer dans l’ensemble plus cohérent en faveur des retraites et des régimes que le Gouvernement prépare.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Dans quel délai ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je vais naturellement répondre positivement à la demande de M. le président de la commission des finances et nous serons en mesure de proposer ces mesures à la fin de cette année ou au début de 2006.

Vous savez bien qu’il nous faut régler parallèlement le problème d’alimentation du FIPSA. Ces dispositions font partie d’un ensemble plus général qui intègre également ce que nous pouvons inscrire en loi de finances et dans le PLFSS. Je vous demande donc un petit délai supplémentaire.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je m’associe à cet amendement qui va dans le bon sens. En l’adoptant, nous ferions un pas, si petit soit-il, dans le sens de l’abaissement des coefficients et des seuils de minoration qui ont été instaurés par le ministre Vasseur en 1997. Il s’agit d’une demande ancienne des agriculteurs retraités.

S’agissant de la réponse de M. le ministre, je regrette que les différentes hypothèses émises par le groupe de travail de Didier Garnier en 2004 et au début de 2005, et partant du 1er juillet 2005, ne se soient toujours pas concrétisées. Les agriculteurs retraités n’ont rien vu venir.

Par ailleurs, vous proposez, monsieur le ministre, que des collègues travaillent sur certaines propositions, mais vous n’avez pas répondu à mon interrogation sur le fond qui portait très précisément sur le contenu du rapport Garnier ? Envisagez-vous véritablement la mise en œuvre des propositions qu’il contient ?

L’attente est extrêmement forte chez les retraités agricoles.

M. le président. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Au nom du groupe UMP et en tant que cosignataire de cet amendement, je veux dire à M. le ministre que nous serons très attentifs à l’évolution du groupe de travail, car nous ne sommes pas naïfs. Nous sommes méfiants, car cela fait des années que le dossier des retraites n’avance qu’à tout petits pas. Cela dit, chaque fois que l’on peut faire un pas, même petit, c’est une bonne chose.

Cet amendement montre bien qu’il existe non seulement un problème de volume des retraites agricoles, mais aussi une série de petits dysfonctionnements touchant en grande partie les femmes d’agriculteur. Nous sommes parfois appelés à trouver nous-mêmes des solutions provisoires aux problèmes rencontrés par les veuves pour leur pension de réversion, car elles sont souvent dans une situation dramatique. Je compte donc beaucoup sur ce groupe de travail pour mettre un terme à tous ces petits dysfonctionnements qui, mis les uns à côté des autres, font plus qu’agacer, d’autant que les sommes versées sont bien souvent dérisoires. Nous serons donc très vigilants, monsieur le ministre.

M. le président. Monsieur Le Fur, cédez-vous à l’invitation du Gouvernement ?

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Je remercie M. le ministre de ses propos et j’espère qu’il sera porteur de nos exigences dans les instances interministérielles. Serait-il concevable que cet amendement puisse être présenté au Sénat au mois de novembre ?

M. François Sauvadet. Ce serait bien d’avancer sur ce point précis !

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Pour le moment, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 1093 rectifié est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 486 quatrième rectification.

La parole est à M. Patrick Ollier, pour le soutenir.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Cet amendement concerne la participation, belle et moderne idée gaulliste.

Le secteur agricole présente de fortes spécificités quant aux formes sociétaires et à la taille des entreprises. En commission, monsieur le ministre, vous vous êtes montré ouvert à des initiatives, qui me semblent nécessaires, concernant la participation.

Les entreprises agricoles sont, en règle générale, de petite taille. Or la participation financière est, hélas, optionnelle dans les structures de moins de cinquante salariés et soumise à la conclusion d’un accord d’entreprise.

La taille de la majorité des exploitations et entreprises agricoles ne permet pas d’envisager un tel accord, faute de représentation syndicale, alors même que la participation peut être un élément d’attractivité et de fidélisation des salariés dans un secteur qui connaît régulièrement des difficultés de recrutement – nous en avons encore parlé la semaine dernière.

Je vous propose donc d’organiser le recours à la participation dans les entreprises agricoles par une convention ou un accord de branche étendu – c’est-à-dire validé par vous-même –, élément de souplesse notamment en ce qu’il laisse aux partenaires sociaux la liberté de négocier le seuil d’effectif qui leur semble le mieux adapté à l’activité, voire à la structure de la branche. Par ailleurs, je propose également de permettre aux partenaires sociaux signataires de déroger aux modalités de calcul de la participation, souvent jugées trop complexes et mal adaptées aux petites entreprises, notamment dans le domaine agricole.

Tel est l’objet de cet amendement que vous avez vous-même un peu sollicité, monsieur le ministre, lors de votre audition en commission.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement, mais je me réjouis que M. Ollier ait fait sienne cette idée importante. Je ne puis en effet imaginer qu’un texte encadrant les vingt prochaines années pour le monde agricole fasse l’impasse sur la situation des salariés.

À titre personnel, je suis donc tout à fait favorable à la proposition de M. Ollier.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. J’ai en effet souhaité cet amendement et je remercie M. Ollier de l’avoir proposé. J’y suis très favorable et je lève le gage.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 486 quatrième rectification, compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 814.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour le défendre.

M. Henri Nayrou. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement qui prévoit que, dans un délai de dix-huit mois après la publication de la future loi, le Gouvernement réunira les organisations professionnelles et syndicales représentatives en vue de leur proposer les modifications réglementaires ou législatives permettant la réduction de la précarité et l’amélioration de la santé au travail en agriculture.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Mon expérience parlementaire me laisse penser que cet amendement fait partie de ces mesures souvent adoptées, de nature réglementaire d’ailleurs, et qui encombrent un projet de loi. La loi d’orientation agricole sera plus forte sans. Je ne veux pas être désagréable vis-à-vis de M. le rapporteur, mais je suis donc plutôt défavorable à une telle mesure. Cela dit, j’en comprends l’intérêt et je m’engage à provoquer cette réunion ; c’est finalement cela qui compte.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 814.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 783…

M. André Chassaigne. Et l’amendement n° 729, monsieur le président ?

M. le président. Monsieur Chassaigne, cet amendement a été rectifié et il doit venir en discussion après l’article 9. Néanmoins, si vous souhaitez le soutenir, vous pouvez le faire dès maintenant. Je considérerai ensuite qu’il aura été défendu.

Vous avez la parole, monsieur Chassaigne.

M. André Chassaigne. J’ai repris cet amendement suite à une proposition de la FNATH, l’Association des accidentés de la vie, qui m’a semblé particulièrement pertinente. Il est en effet nécessaire de parvenir à fusionner les 112 tableaux de maladies professionnelles du régime général et les 65 tableaux du régime agricole. C’est un sujet qui avait été abordé à l’Assemblée nationale et au Sénat en 2001, mais la proposition n’avait pas abouti.

Il convient, par ailleurs, de se mettre en cohérence avec le plan santé au travail 2005-2009, qui propose la fusion du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels avec la Commission nationale d’hygiène et de sécurité au travail en agriculture. Il s’agit tout simplement d’un amendement de cohérence avec des orientations qui ont déjà été prises.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 783.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour le soutenir.

M. Henri Nayrou. Par cet amendement, nous proposons que le Gouvernement soit tenu de remettre au Parlement, avant le 30 juin 2006, un rapport sur l’application des dispositions relatives à la représentation collective des agriculteurs intégrés par une même entreprise.

Il y a, d’une part, les agriculteurs déjà intégrés, notamment dans les filières avicoles où il y a d’ailleurs eu des problèmes, et, d’autre part, ceux qui deviendront, par suite de la philosophie de ce texte que nous réprouvons, des employés des entreprises agricoles.

Cet amendement va dans le sens des revendications des syndicats agricoles, qui souhaitent assurer aux employés agricoles la représentation collective dont bénéficient les employés de toute autre entreprise.

Bien que la jurisprudence autorise cette forme de représentativité, celle-ci n’existe pas en pratique. L’amendement satisferait la demande des salariés agricoles et permettrait que leurs droits soient défendus dans les mêmes conditions que ceux des salariés des entreprises.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 783.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 8

M. le président. La parole est à M. François Guillaume, inscrit sur l’article 8.

M. François Guillaume. J’aimerais que M. le ministre nous éclaire sur ses intentions à propos de l’ordonnance visée par cet article : quelles en seront les modalités et quel financement prévoit-il afin d’améliorer la protection sociale des non-salariés agricoles ?

Par ailleurs, je renouvelle ma demande auprès du rapporteur : pourrait-il nous expliquer la différence qu’il fait entre un chef d’exploitation agricole et un chef d’entreprise agricole ? Je lui ai déjà posé la question tout à l’heure sans pouvoir obtenir de réponse.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 511 et 925, tendant à supprimer l’article 8.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour soutenir l’amendement n° 511.

M. Henri Nayrou. Ce que M. Guillaume vient de dire de manière particulièrement élégante, nous le disons, nous, de manière plus réglementaire en proposant, par cet amendement, de supprimer l’article 8, derrière lequel se cache une ordonnance.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. En l’occurrence, cette ordonnance ne cache rien d’autre qu’une finalité sociale !

M. Henri Nayrou. Si le Gouvernement souhaite améliorer la protection sociale des personnes exploitant moins d’une demi-surface minimum d’installation, pourquoi se passerait-il des débats parlementaires ? Nous refusons la méthode qui consiste à abaisser constamment le rôle du Parlement.

M. le président. La parole est à M. François Sauvadet, pour soutenir l’amendement n° 925.

M. François Sauvadet. Il s’agit d’un amendement de principe. Nous avons d’ailleurs déposé un amendement de suppression sur chacun des articles qui mentionnent le recours à une ordonnance.

Vous nous avez compris, monsieur le ministre : nous souhaitons que soient clairement et précisément présentées au Parlement les mesures que le Gouvernement entend prendre tant pour améliorer la protection sociale des non-salariés agricole exploitants des terres d’une superficie inférieure à la moitié de la surface minimum d’installation que pour aménager les régimes d’assurance quant aux accidents du travail et aux maladies professionnelles des salariés et des non-salariés agricoles. Il est nécessaire que le Parlement puisse débattre de ces questions. Indiquez-nous donc clairement vos intentions.

En outre, il est un problème récurrent, en matière de protection sociale : l’alimentation du FIPSA, qui réclame aujourd’hui 3,2 milliards. Où allez-vous trouver cette somme ? Pouvez-vous nous donner quelques indications sur vos intentions à ce sujet ?

L’objectif de l’amendement est de rappeler que le Parlement doit pouvoir débattre de ces questions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements de suppression ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas adopté ces amendements et je suggère à leurs auteurs de les retirer au bénéfice de l’amendement de précision n° 313.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. En réponse aux interrogations formulées par M. Nayrou, M. Sauvadet et l’ensemble des députés sur l’enjeu et la nature de la mesure, je précise que 160 000 personnes exploitent aujourd’hui une superficie comprise entre la moitié et un huitième de la surface minimum d’installation. Parmi elles, on compte 60 000 retraités et 100 000 personnes actives. Elles ne disposent d’aucune protection à l’égard des accidents du travail et des maladies professionnelles.

La mesure que nous proposons consiste à leur ouvrir l’accès à une assurance dans ces deux domaines. Notre but est d’améliorer leur protection sociale et de développer la pluri-activité, souci partagé par les députés de tous les groupes. Je prends le même engagement que celui que j’avais pris et tenu concernant l’article 3, relatif au fermage. J’informerai pleinement la représentation nationale avant le vote final, ce qui sera aisé puisque l’ordonnance est quasiment terminée.

Par ailleurs, monsieur Sauvadet, nous sommes toujours en discussion, dans le cadre de la préparation de la loi de finances, avec mes collègues de l’économie, des finances et du budget pour inscrire les premières mesures de financement du FIPSA. Mais, avant le vote du PLFSS, nous aurons probablement avancé dans ce travail auquel la représentation nationale tient beaucoup, puisqu’il a trait à l’équilibre financier et à la résorption du déficit du FIPSA.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Ayant omis de m’inscrire sur l’article 8, je profiterai du débat sur ces deux amendements pour poser quelques questions au Gouvernement. Quelle est la durée de l’habilitation qu’il propose et quels sont ses délais de mise en œuvre ?

Vendredi dernier, nous avons adopté un amendement relatif à la situation de la moitié des cotisants solidaires, en offrant aux propriétaires ou associés non-exploitants un cadeau fiscal sous forme d’une baisse des cotisations. Il s’agit d’un choix sélectif en leur faveur.

L’autre moitié, dont la situation devrait être traitée dans l’ordonnance, est composée des exploitants hors cadre exploitant moins d’une demi-SMI. Souvent, la référence à la SMI comme à ses équivalences ne prend pas en compte la diversification de l’activité agricole ni surtout la valeur ajoutée qu’ils créent. On peut d’ailleurs s’interroger sur la référence à la SMI, souvent dépassée au regard de l’évolution de l’activité agricole. Ces exploitants subissent une véritable discrimination. Paysans de métier, ils acquittent leurs cotisations à la MSA sans avoir accès au statut de paysan, du seul fait que la SMI est la seule valeur de référence ouvrant droit à ce statut et à tous les droits qui y sont attachés, notamment le droit de vote aux élections et l’accès à la protection sociale.

Les dispositions de l’article 8 représentent un progrès puisqu’elles permettront aux cotisants solidaires de cotiser au titre, non seulement de la solidarité, mais de la vieillesse et des accidents du travail. Cependant, une question demeure : dans quelle mesure le Gouvernement est-il prêt à les faire accéder au plus tôt au statut auquel ils ont droit de par leur métier, c’est-à-dire celui d’exploitant agricole, qui leur permettrait d’exercer pleinement la citoyenneté qui leur revient ?

M. le président. La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Depuis le début de ce débat, vous faites montre d’un grand souci de transparence, notamment en ce qui concerne les ordonnances, et ce conformément au souhait du groupe UDF, dans ce débat comme dans tous les autres.

Je prends acte de votre engagement, comme de celui que vous avez pris sur le fermage et que vous avez honoré en nous transmettant le texte de l’ordonnance avant la fin de la séance. Devant une telle volonté de faire progresser le débat, je retire, au nom du groupe UDF, l’amendement n° 925. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Je salue votre décision de jouer la carte de la transparence. Notre groupe vous sait gré de votre attitude, puisque ce sont précisément des questions sur lesquelles il souhaitait pouvoir débattre.

M. le président. L’amendement n° 925 est retiré.

Monsieur Nayrou, maintenez-vous l’amendement n° 511 ?

M. Henri Nayrou. Oui, monsieur le président. Mais il est vrai que la discussion vaut mieux que l’obstruction. Nous aussi, monsieur le ministre, nous avons entendu votre appel à la sagesse. Peut-être allons-nous passer d’un rythme de cinquante à un rythme de soixante amendements à l’heure. (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 511.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 512.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour le soutenir.

M. Henri Nayrou. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 512.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 513.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour le soutenir.

M. Henri Nayrou. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 513.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 313.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Antoine Herth, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 313.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 8, modifié par l’amendement n° 313.

(L’article 8, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 8.

Après l’article 8

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 1068.

La parole est à M. Philippe Feneuil, pour le soutenir.

M. Philippe Feneuil. Pour différentes raisons, les exploitations agricoles ont aujourd’hui du mal à changer leurs machines. Ce n’est pas trop grave dans la mesure où, sur le plan de la seule motorisation, les tracteurs peuvent fonctionner encore longtemps. Mais il faut tenir compte du fait que les tracteurs plus modernes polluent moins et surtout qu’ils sont moins dangereux, puisqu’ils sont dotés d’un système anti-retournement.

L’amendement a pour but d’aider les exploitations à renouveler leurs tracteurs. Vous le savez, monsieur le ministre, des mesures ont déjà été prises en faveur d’autres systèmes de motorisation. Pensant aux « jupettes », je me demandais d’ailleurs si l’on ne pourrait pas dériver votre nom à l’aide du même suffixe. (Sourires.)

Quoi qu’il en soit, la mesure que nous proposons apporterait une sécurité supplémentaire en diminuant le nombre d’accidents du travail. Elle aurait également une incidence positive sur l’emploi. En outre, compte tenu de la TVA que l’État récupérerait sur les ventes de tracteurs supplémentaires, elle n’aurait qu’une incidence minime sur le budget de l’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement.

À titre personnel, j’y suis réticent pour deux raisons.

Tout d’abord, le Premier ministre a annoncé à Rennes un dispositif d’encouragement à l’investissement, réservé aux matériels à vocation environnementale. Or je crains que les deux dispositifs ne se téléscopent.

Ensuite, au nom d’un certain patriotisme économique, je crains que les producteurs de tracteurs étrangers ne fassent leurs choux gras d’un tel dispositif.

Avis défavorable donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1068.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 157, 162, 435 et 803.

L’amendement n° 157 n’est pas défendu, non plus que l’amendement n° 162.

La parole est à M. Philippe-Armand Martin pour soutenir l’amendement n° 435.

M. Philippe-Armand Martin. La loi de finances pour 2001, votée sous la précédente majorité, avait supprimé le plafonnement des cotisations sociales maladie versées par les non-salariés agricoles. Or cette mesure est inacceptable, car les exploitants agricoles sont désormais les seuls travailleurs indépendants à ne pas bénéficier d’un tel plafonnement. Cet amendement tend donc à rétablir ce plafonnement, dans un souci d’équité.

M. le président. La parole est à M. Philippe Feneuil, pour défendre l’amendement n° 803.

M. Philippe Feneuil. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements en discussion ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Feneuil.

M. Philippe Feneuil. Je rappelle que le plafond existait avant 2001. Le Sénat avait d’ailleurs remarqué qu’il était supérieur à celui des autres professions indépendantes. La représentation nationale a l’occasion, en votant ces amendements, de supprimer une iniquité flagrante. J’aimerais que M. le ministre ou M. le rapporteur nous donnent des explications complémentaires.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur Feneuil, le FIPSA présente un déficit d’un milliard d’euros par an que nous ne pouvons accroître dans l’état actuel des finances publiques de notre pays.

M. Philippe Feneuil. Ce sont donc les agriculteurs qui paient le déficit !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 435 et 803.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Article 9

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 9.

La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. L’intention de l’article 9 est bonne, puisqu’il s’agit d’accorder des congés à des exploitants agricoles qui n’en prennent pas souvent en raison des contraintes liées à la spécialisation qu’ils ont choisie, la production laitière. Sur le principe, tout le monde est d’accord, mais je me demande si les modalités retenues par le Gouvernement pour sa mise en œuvre sont les bonnes, d’autant que la formulation du projet de loi n’est pas claire.

En effet, l’article 9 dispose : « Le bénéfice du crédit d’impôt est subordonné à la condition que l’activité exercée requière la présence du contribuable sur l’exploitation chaque jour de l’année et que son remplacement ne fasse pas l’objet d’une prise en charge au titre d’une autre législation. » Il semble que la mesure vise les éleveurs, mais lesquels ? Les éleveurs laitiers ou ceux de troupeaux allaitants ? Ensuite, d’autres métiers de l’agriculture requièrent une présence permanente et devraient, à ce titre, pouvoir bénéficier de cette mesure. Je pense notamment au maraîchage. En effet, à certaines périodes, les maraîchers doivent partir à quatre heures du matin sur les marchés pour vendre leurs produits et, sitôt rentrés, la vente faite, retourner travailler sous leurs serres. Je souhaiterais donc que l’on me précise si la mesure couvre tous ces cas de figure.

Enfin, il existe, dans les départements, des services de remplacement qui fonctionnent, sont en partie financés par la profession elle-même, reçoivent des aides des conseils généraux et régionaux et s’adressent, de surcroît, essentiellement aux éleveurs, c’est-à-dire au public visé par le projet de loi. Dès lors, ne serait-il pas plus simple que l’État alloue au fonds spécial qui gère les cotisations que les agriculteurs versent pour le développement une enveloppe qui serait répartie entre les départements en fonction de l’importance des cheptels, notamment laitiers pour lesquels les contraintes sont encore plus importantes que pour les troupeaux allaitants ?

Je souhaite que le ministre et le rapporteur nous donnent des explications sur ce point. Je suis évidemment ouvert à toute solution qui ne compliquerait pas le dispositif.

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen.

M. Jacques Le Guen. Je souhaite profiter de la discussion de l’article 9 pour faire le point sur l’emploi saisonnier, sur lequel nous reviendrons lors de l’examen d’une série d’amendements portant articles additionnels après l’article 9.

J’ai eu l’honneur de me voir confier par le Premier ministre une mission auprès du ministre de l’agriculture pour mener une étude comparée des coûts sociaux dans l’agriculture et leur retentissement sur l’emploi à l’échelle européenne. J’ai ainsi été conduit à dresser un bilan de la situation européenne, qui a révélé que tous les pays ne jouaient pas dans la même cour, certains États utilisant des méthodes surprenantes pour diminuer ces coûts. Ainsi, un accord entre la Pologne et l’Allemagne permet à 270 000 Polonais de travailler en Allemagne pour un coût horaire de 4,50 euros, soit un coût deux fois moins élevé qu’en France. Cet accord, antérieur à la chute du mur de Berlin, a été renouvelé en 1992 et pose un sérieux problème. En effet, en 1992, la France produisait 165 000 tonnes de fraises, l’Allemagne n’en produisait pas ; en 2005, cette dernière en produit 165 000 tonnes, la France moins de 85 000 tonnes.

Cette situation nous a conduits à faire des propositions franco-françaises afin de faciliter le travail saisonnier – nous y reviendrons dans la série d’amendements que nous défendrons après l’article 9. Ces amendements ont trait notamment aux groupements d’employeurs, à la création d’un contrat à durée indéterminée intermittent incluant des périodes de formation – qui représente à mon sens une véritable avancée sociale – et d’un contrat-jeunes qui permettra aux moins de vingt-cinq ans de découvrir les métiers de l’agriculture. Au plan européen – et nous savons pouvoir compter sur vous, monsieur le ministre –, nous proposons la reprise de la directive 96/71 sur le détachement et l’application de la directive 83/2004 sur le paiement des charges sociales dans le pays d’origine. Il s’agit de problèmes importants sur lesquels il nous faudra travailler sérieusement.

Autre préoccupation : le travail illégal au sein de l’Union européenne. Il est assez surprenant que certaines sociétés puissent venir travailler en France en appliquant le principe de la prestation. C’est ainsi que des travailleurs colombiens et équatoriens viennent d’Espagne pour travailler dans le sud de la France.

Nous proposerons donc la création d’un observatoire des distorsions afin d’apprécier le retentissement de ces choix.

Ces différents problèmes révèlent que le coût du travail est particulièrement élevé dans notre pays, notamment dans le secteur des fruits et légumes. Ainsi, le coût de la main-d’œuvre employée pour la cueillette des fruits rouges représente environ 70 % du prix de revient. Dès lors, se pose le problème du financement de la protection sociale – je préfère l’expression « cotisations sociales » à « charges sociales », car les cotisations sont redistribuées. Je sais que certains de nos amis sont favorables à la TVA sociale. Je pense quant à moi qu’il s’agit d’une fausse bonne idée, mais il faudra que nous en débattions.

Enfin, il nous faudra réfléchir à la répartition des crédits de la politique agricole commune. Actuellement, sur les 9 milliards d’euros de crédits PAC, 5 milliards vont aux grandes cultures, 2 milliards à la viande bovine, 373 millions à la filière sucre et 267,1 millions à la filière fruits et légumes. Cette dernière est donc très peu financée, alors que l’on sait parfaitement que c’est dans ce secteur que la main-d’œuvre est la plus importante et que les coûts sont les plus lourds. Malheureusement, nous n’avons pas suffisamment pris en compte ce coût social au moment de l’élargissement aux dix nouveaux États. Il faudra donc y réfléchir dans le cadre de la modulation, afin de procéder à un rééquilibrage.

Nous aurons l’occasion de revenir sur tous ces points lors de l’examen des amendements que j’ai annoncés tout à l’heure.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je souhaite évoquer à mon tour votre rapport, monsieur Jacques Le Guen, car nous allons aborder un moment fort de la discussion du projet de loi d’orientation agricole.

Intitulé « Étude comparée au niveau européen de l'impact de la concurrence sur l'emploi dans le secteur agricole », ce rapport révèle une approche intéressante du problème. Dans un premier temps, l’ancien maître d’école que je suis a été tenté de vous décerner quelques bons points. Je ne peux, en effet, que me féliciter qu'un parlementaire de la majorité écrive que l'impôt sur les revenus est structurellement faible en France, bien plus qu'à l'étranger. Tout le discours sur la non-compétitivité de notre système fiscal, selon lequel les riches paieraient trop d'impôts en France, est ainsi ramené, grâce à vous, monsieur le Guen, à ce qu'il est réellement : un discours idéologique bâti pour la seule défense des plus riches.

De même, je ne peux que me féliciter que vous dénonciez la faiblesse de l'impôt sur les sociétés. Nous ne cessons de le répéter, en France, les profits sont sous-taxés. Là encore, vous nous donnez raison. Merci, cher collègue.

M. Jean Auclair. Oh ! la la !

M. André Chassaigne. Par ailleurs, lorsque vous dénoncez l'injustice profonde de la PAC, qui n'aide que les plus gros et abandonne notamment les cultivateurs de fruits et légumes, c'est Arlette Laguiller que je croirais entendre ! (Rires.) Enfin, lorsque vous écrivez qu'il faudrait développer les CDI intermittents pour les travailleurs saisonniers avec des congés-formation, j'applaudis, comme pourraient applaudir les intermittents du spectacle aux côtés desquels j’ai souvent lutté.

M. Jean Auclair. Vous êtes plutôt un permanent du spectacle !

M. André Chassaigne. Mais le soufflé finit toujours par se dégonfler, et vous retombez dans tous les travers de l'idéologie dominante.

M. Jean Auclair. Ultralibérale !

M. André Chassaigne. Tout d’abord, vous critiquez le niveau des cotisations sociales, termes que vous avez raison de préférer à celui de charges. Vous estimez ainsi que les allégements de cotisations sont coûteux et ne servent pas à grand-chose, tout en proposant de les généraliser. J’y vois une contradiction, à moins que cette proposition ne s’inscrive dans une certaine logique. Au fond, vous souhaitez accroître la CSG, donc la fiscalisation de la protection sociale. Vous êtes là, et c’est bien normal, dans la ligne du plan Juppé de 1995. Pourtant, cette fiscalisation s’est reportée, selon le principe des vases communicants, sur les ménages, avec la CSG et la CRDS, qui permettent de réduire les cotisations patronales censées peser sur l'emploi.

Les parlementaires communistes se sont toujours opposés à cette fiscalisation et nous rejetons sans réserve la CSG comme mode de financement de la sécurité sociale – cette position n’est d’ailleurs pas partagée sur l’ensemble des bancs de la gauche. En effet, ce mode de financement fait porter la quasi-totalité des ressources de la protection sociale sur les revenus du travail, ce qui est particulièrement injuste et contraire à l'esprit de 1945. Une telle fiscalisation vise à terme à étatiser la sécurité sociale, au lieu d'en réserver la gestion aux salariés, ce qui devrait être de droit.

Ma principale critique porte sur le fait que l'emploi agricole, dans votre rapport, n'est envisagé que sous la forme de l'emploi saisonnier. Je crains que votre objectif ne soit de faire de la saisonnalité la norme du travail dans l’agriculture, ce qui institutionnaliserait la précarité dans ce secteur professionnel.

M. Philippe Rouault. C’est un véritable procès d’intention !

M. André Chassaigne. Vous vous contentez de quelques belles paroles sur le CDI intermittent mais ne proposez rien de concret sur ce point, l'amendement congé formation ne concernant que les saisonniers, ce qui est très regrettable.

M. Jacques Le Guen. Vous ne m’avez pas bien lu !

M. André Chassaigne. Certes, les tâches agricoles sont très liées aux saisons, mais ce n’est pas une raison pour chercher à généraliser l’emploi saisonnier et, du même coup, la précarité qui le caractérise. Un grand nombre de salariés travaillent sous ce mode plus de huit mois par an. On devrait au contraire chercher à généraliser les CDI au bénéfice de tous. En conclusion, il me semble, mes chers collègues, que vos propositions restent très perfectibles.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Mon intervention portera sur deux points.

Premièrement, les fameux congés payés des agriculteurs, puisque c’est ainsi, monsieur le ministre, que vos déclarations lors du congrès de la FNSEA au Mans ont été interprétées par certains. Parmi eux, il y aura sans doute beaucoup de déçus, car votre texte est extrêmement restrictif. Le dispositif exige en effet que l'agriculteur apporte la preuve que sa présence dans l'exploitation est indispensable de manière continue et toute l'année, ce qui exclut de fait les professionnels travaillant sous le régime d'une société – où les remplacements entre associés sont d’usage – ou employant un salarié. Seul l'exploitant individuel est donc visé, à l'exception de tous les autres...

M. Marc Le Fur, rapporteur de la commission des finances. Pas du tout, ils disposent de droits au prorata !

M. Jean Gaubert. D’ailleurs, le choix de s’associer ou de prendre un salarié procède souvent du désir de pouvoir s’absenter de temps à autre. Dans ces conditions, comment faire la preuve qu’il est nécessaire que l’on soit présent toute l’année ? À mon sens, cette mesure extrêmement restrictive va faire plus de mécontents que de satisfaits.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. C’est une bonne définition du conservatisme : ne faisons rien puisqu’on ne peut pas tout faire !

M. Jean Gaubert. Je ne prône pas l’immobilisme, mais je mets en garde contre les effets d’annonce. D’un côté, certaines personnes vont protester contre ce qu’ils croiront être des privilèges accordés par l’État aux agriculteurs. De l’autre, certains n’obtiendront pas ce qu’on leur a laissé espérer. Cette mesure va donc desservir l’agriculture, en mécontentant plus de personnes qu’elle ne va en satisfaire. J’ai le sentiment que, plutôt qu’un problème de remplacement, c’est avant tout un problème de revenus, qu’il faut traiter pour permettre aux agriculteurs de vivre des revenus de leur exploitation.

Le rapport de Jacques Le Guen a le mérite de nous rappeler certaines vérités. La première, c’est que le travail saisonnier est une réalité. Sous la législature précédente, nous avons voté l’annualisation du temps de travail, contre l’avis des communistes. C’est un moyen efficace – malheureusement trop peu utilisé – de lutter contre les formes précaires d’emploi.

Deuxièmement, notre agriculture doit faire face à un problème de compétitivité…

M. Jacques Le Guen. Absolument !

M. Jean Gaubert. …et les règles sociales sont insuffisamment harmonisées dans l’Union européenne.

M. Jacques Le Guen. Tout à fait !

M. Jean Gaubert. Les différences entre les conditions sociales de chaque État se doublent des différences constatées dans leur application. Aujourd’hui, la différence entre les conditions sociales espagnoles et françaises est relativement faible…

M. Jacques Le Guen. 8 % !

M. Jean Gaubert. …mais le respect de la législation sociale en Espagne, en particulier en direction des travailleurs émigrés, laisse beaucoup à désirer. Il est scandaleux qu’on laisse l’Espagne recourir massivement à une main-d’œuvre provenant d’autres pays de l’Union européenne ou du Maghreb dans des conditions sociales très en deçà de la norme européenne.

M. Jacques Le Guen. Tout à fait d’accord !

M. Jean Gaubert. Si certains problèmes semblent échapper à notre emprise, d'autres relèvent directement de notre responsabilité. Ainsi, il est déplorable que l'on ait choisi d'appliquer l'accord de Luxembourg selon la règle : « Tu avais des aides, tu en auras encore ; tu n'en avais pas, tant pis pour toi ! » Cela revient à dire que dans quelques années, on sera aidé pour produire des légumes en Allemagne, mais on ne le sera pas en Bretagne ! Ce phénomène va déséquilibrer encore davantage le marché. Et là, ce n’est plus la faute de l’Europe ou celle des Espagnols, mais la conséquence du choix qui a été fait par le Gouvernement en matière d’application de l’accord de Luxembourg, qui équivaut à réinventer les montants compensatoires ! Ceux-ci pèseront très lourd, car ils organiseront la délocalisation d’un certain nombre de productions.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 315.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Antoine Herth, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen.

M. Jacques Le Guen. Je suis d’accord avec un certain nombre des positions exprimées par mes collègues Chassaigne et Gaubert.

Sur le problème de l’imposition sur les sociétés, je vais dire une chose qui peut paraître aberrante à certains, mais n’en est pas moins vraie : aujourd’hui, l’impôt sur les sociétés représente 2,4 % de PIB contre une moyenne européenne de 3,5 %, et jusqu’à 8,5 % dans certains pays européens. Mais le véritable problème, c’est qu’en France le poids des impôts indirects les rend tout à fait démotivants, en grevant le coût du travail. Je ne serais pas choqué de libérer en amont le coût du travail, ce qui procurerait de la compétitivité aux entreprises.

M. François Sauvadet. Très bien !

M. Jacques Le Guen. Quant aux abattements sur les bas salaires, ils ne datent pas d’hier. Mme Aubry, notamment, a utilisé cette méthode. Mais il est désormais établi qu’ils tendent à creuser à la longue une trappe à bas salaires car l’employeur, s’il a la possibilité de bénéficier d’une exonération maximale sur un SMIC, sera peu enclin à augmenter les salaires.

M. François Sauvadet. Il faut compter avec les effets de seuil !

M. Jacques Le Guen. Je rappelle que ces abattements représentent 17,6 milliards d’euros, auxquels il convient d’ajouter les abattements annexes s’élevant à 4,4 milliards d’euros supplémentaires, soit 22 milliards d’euros au total. Leur montant non négligeable justifie que l’on se pose la question de l’efficacité de ces mesures.

En ce qui concerne la CSG, la clé de son utilité sociale est dans sa progressivité, aujourd'hui insuffisante – comme l’est, en France, l’impôt en général.

M. Jean Gaubert. M. Le Guen est un dangereux gauchiste !

M. Jacques Le Guen. Si vous découpez la population française en dix déciles, pour le premier décile, le prélèvement est de 18,1 %, pour le cinquième décile de 21,3 % et pour le dixième décile de 23 %. Pour financer notre protection sociale dans les années à venir – vous savez comme moi que les besoins vont augmenter du fait du vieillissement de la population – il faudra mettre au point des méthodes de financement. La CSG progressive est-elle la solution ? Je n’irai pas jusqu’à l’affirmer. Certains de mes collègues préfèrent l’idée de la TVA sociale, en laquelle je ne crois guère personnellement. Peut-être convient-il de combiner les deux procédés ? La question mérite d’être approfondie.

Pour ce qui est du contrat à durée indéterminée intermittent, si vous avez bien lu ce que j’ai écrit, l’idée est de faire évoluer l’emploi vers un CDI en intercalant des périodes de formation entre les différentes périodes d’activité saisonnière, l’objectif poursuivi étant de transformer un saisonnier en salarié à temps complet dans l’entreprise. Quant au problème du sous-emploi en général, je suis convaincu qu'on ne le réglera qu'en allégeant le coût du travail, mesure dont il faudra, pour des raisons d’équilibre budgétaire, transférer la charge.

Pour ce qui est du coût horaire du travail, je vous rappelle qu’en Allemagne il n’y a pas de SMIC. Le salaire minimum est fixé au niveau de chaque Land au moyen d’accords conventionnels entre les différentes branches. Une mesure à l’échelle fédérale est actuellement à l’étude.

Il est indispensable qu’à un moment donné, on en vienne à appliquer les mêmes règles, notamment sanitaires et environnementales, dans toute l’Union européenne, dont les frontières devront être fixées.

M. François Sauvadet. Absolument ! Vous êtes prêt à intégrer l’UDF, cher collègue ! (Sourires.)

M. Jacques Le Guen. Cela peut conduire à dénoncer certains accords entre États membres et pays tiers. Songez que depuis son adhésion à l'Union en mai 2004, la Pologne a vu ses prix agricoles augmenter de 35 % et ses cotisations sociales de 48 %. C'est donc bien qu'il se passe quelque chose ! L'Allemagne ne manquera pas d'être pénalisée par cette mise à niveau sociale de la main-d'œuvre polonaise : dès l’année prochaine, elle devrait avoir des difficultés à recruter des travailleurs polonais. Veillons, dans ce contexte, à éviter l'effet dominos que créerait l'autorisation de recourir à des travailleurs biélorusses ou ouzbeks ! Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour défendre une position ferme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 315.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 316 rectifié et 263, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 316 rectifié.

M. Antoine Herth, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, pour soutenir l’amendement n° 263.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement de précision, monsieur le président. Je profite d’avoir la parole pour défendre le dispositif de remplacement créé par l’article 9, les critiques formulées à son encontre étant infondées. Très attendue au sein de la profession agricole, cette mesure prend la forme d'un crédit d'impôt – et non d'une déduction fiscale –, les ménages non imposables touchant un chèque de montant correspondant. En pratique, cela permettra aux familles de prendre quelques jours de liberté, alors que certaines n’ont pas pu quitter leur exploitation depuis plusieurs années. Cette mesure utile, et non démagogique comme certains voudraient le faire croire, permettra d’allouer jusqu’à 1 000 euros aux familles concernées.

Par ailleurs, je ne peux laisser M. Gaubert dire que les sociétés ne seront pas concernées, puisque l’alinéa 2 de cet article évoque précisément la question des sociétés et y répond très clairement. J’ai travaillé sur ce dispositif avec le service de remplacement du département des Côtes-d’Armor, et je peux vous assurer que celui-ci est extrêmement intéressé. La question qu’il se pose est de savoir comment faire face à l’afflux prévisible de demandes, en particulier dans la période qui suivra les moissons.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable et je lève le gage.

M. le président. Les deux amendements deviennent ainsi identiques car seul le gage les différenciait.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je ferai une mise au point et deux observations.

Je n’ai pas dit que cette disposition serait inutile. J’ai simplement fait observer qu’elle toucherait peu de monde.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. 70 000 personnes, ce n’est pas rien !

M. Jean Gaubert. Reprenons par ailleurs les termes du deuxième alinéa du texte proposé pour l’article 200 nonies du code général des impôts : « Le crédit d’impôt est accordé, sous les mêmes conditions et à proportion des droits qu’ils détiennent, aux associés personnes physiques non salariés de sociétés ou de groupements, au sein desquels ils exercent effectivement et régulièrement une activité agricole qui requiert leur présence sur l’exploitation chaque jour de l’année… »

Monsieur le ministre, n’importe quel contrôleur fiscal fera remarquer que, lorsqu’on est en association, et donc qu’on n’assure qu’un week-end sur deux, la présence sur l’exploitation n’est pas requise tous les jours.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Une instruction fiscale sera donnée !

M. Jean Gaubert. J’espère qu’il y en aura une et qu’elle sera appliquée ! Pour plus de sécurité, on aurait pu aussi supprimer les termes « qui requiert ».

En outre, monsieur le ministre, nous sommes dans le cadre d’une loi d’orientation censée prévoir le dispositif sur vingt ans. Or la mesure est prise pour trois ans.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je vous ai déjà expliqué pourquoi nous devions procéder ainsi.

M. Jean Gaubert. Je constate que les mesures fiscales sont prises sur deux, trois ou quatre ans.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Arrêtons d’enfiler des perles ! Les instructions fiscales, et cela répond à un souhait du Parlement – j’ai moi-même participé à cette réflexion lorsque je siégeais sur ces bancs –, sont prises pour cinq ans. C’est une marque de respect des Assemblées qui peuvent décider à tout moment de revenir sur une mesure fiscale. Il est légitime dans une démocratie de prévoir des dispositions fiscales à court terme, quitte à les reconduire dans un projet de loi de finances.

Certes, monsieur Gaubert, vous pouvez toujours jouer de la mandoline et considérer que la belle qui est à sa fenêtre n’est pas assez belle. Il n’en reste pas moins que 70 000 éleveurs et autres agriculteurs, au moins, seront concernés par cette mesure, qui coûtera 50 millions d’euros. Elle est en outre très attendue par la profession…

M. Louis Giscard d'Estaing. Tout à fait !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. … comme j’ai pu le constater avec M. Giscard d’Estaing et M. Simon au sommet de l’élevage qui se tenait à Clermont-Ferrand, la semaine dernière.

Monsieur Gaubert, reconnaissez donc, même si elle vient de ce gouvernement, que cette disposition est bonne et votez-la ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 316 rectifié et 263, qui, compte tenu de la suppression du gage, sont devenus identiques.

(Ces amendements, ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 106 rectifié.

La parole est à M. François Guillaume, pour le soutenir.

M. François Guillaume. Avec cet amendement, je propose une autre rédaction du texte proposé pour l’article 200 nonies du code général des impôts. Il s’agit de corriger l’imprécision que j’ai soulignée précédemment à propos de ceux qui sont concernés par la mesure.

Par ailleurs, la rédaction initiale du texte m’a conduit à me demander si la transparence dont bénéficient par exemple les GAEC sera applicable. Les GAEC seront-ils concernés par la mesure ? L’associé plus spécialisé dans la production laitière pourrait-il être exclu du bénéfice de la mesure ? S’il y a deux chefs d’exploitation dans le GAEC, le crédit d’impôt profitera-t-il à chacun ?

Je propose donc une rédaction beaucoup plus simple. Il vous appartiendra ensuite, monsieur le ministre, de prendre des décrets d’application pour préciser le texte.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement, qui me semble aller au-delà de l’esprit du projet. J’y suis donc plutôt défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis que le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 106 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 982.

La parole est à M. Jean-Claude Viollet, pour le soutenir.

M. Jean-Claude Viollet. Cet amendement tend à subordonner l’obtention du crédit d’impôt au fait que le remplacement soit assuré par un service de remplacement ayant passé convention avec la caisse de mutualité sociale agricole.

Il s’agit tout d’abord, dans un souci de cohérence, de s’aligner sur le régime de remplacement pour les congés de maternité ou de paternité.

Par ailleurs, ce dispositif protégerait l’exploitant, dans la mesure où le service de remplacement se chargera de gérer les éventuels contentieux administratifs, garantira la qualité du service, assurera le suivi de l’agent remplaçant et le lien avec l’exploitant. Alors qu’on parle beaucoup de simplification, on peut noter qu’il y en aura vraiment une pour l’employeur qui bénéficiera d’un service prestataire.

Il faut souligner ici que le remplacement est un métier, qui fait appel à des qualifications et à une formation. C’est si vrai d’ailleurs que la fédération nationale des services de remplacement distribue à ses agents une brochure intitulée « Mon métier : agent de remplacement en agriculture ». Les services de remplacement veillent précisément à tous ces aspects et mettent aussi l’accent sur la sécurité au travail. Que va-t-il se passer si les agriculteurs recrutent quasiment au pied levé un remplaçant ? Rappelons qu’il va s’agir, non pas de travailler au côté du chef d’exploitation, mais de le remplacer en tout et pour tout. Il y a donc une responsabilité à assumer en matière d’accident du travail et de sécurité sur l’exploitation.

Les services de remplacement constituent aussi une interface utile, étant gérés eux-mêmes par des exploitants bénévoles. Ils connaissent parfaitement les problématiques des différentes exploitations. Ils présentent l’agent de remplacement à l’exploitation et assurent son suivi.

Enfin, le remplaçant est sécurisé dans son contrat, garanti dans ses droits économiques et sociaux. Des droits collectifs se mettent ainsi en œuvre aujourd’hui, je pense à l’action sociale des services de remplacement. Des perspectives de qualification sont aussi ouvertes aux remplaçants et un véritable parcours professionnel peut être envisagé.

À cet égard, vous n’ignorez pas, monsieur le ministre, que des modules de formation sont créés en Poitou-Charentes, en lien avec les CFA des lycées professionnels agricoles pour les agents de remplacement.

Il faut souligner encore que la formule des services de remplacement va permettre de pérenniser l’emploi dans les territoires ruraux : 100 000 heures servies pour 800 adhérents en Poitou-Charentes, soit dix-sept jours par adhérent ; 300 adhérents, 29 000 heures de remplacement, 18 emplois à équivalent temps plein, 11 CDI en remplacement dans mon département de la Charente !

Notre rapporteur a souligné dans son rapport qu’au niveau national, 28 000 personnes avaient été remplacées par 2 400 salariés en équivalent temps plein. Il évoque même la perspective de 16 000 nouveaux salariés, soit 3 900 équivalent temps plein. Départementalement, régionalement ou nationalement, nous sommes en effet toujours dans ce rapport de un à quatre entre le nombre de salariés total et le nombre de salariés en équivalent temps plein.

Enfin, et M. Guillaume l’a dit, les conseils généraux et les conseils régionaux n’ont de cesse d’encourager les services de remplacement à structurer leur action et à assurer la formation des futurs agents, qui pourront, demain, devenir des repreneurs d’exploitation grâce à l’expérience dont ils auront bénéficié et à leur polyvalence.

Pour toutes ces raisons, nous ne comprenons pas que les services de remplacement ne soient pas au cœur du nouveau dispositif. Réfléchissez-y encore, monsieur le ministre. Les services de remplacement sont les seuls aujourd’hui à pouvoir relever ce véritable défi avec l’exigence de qualité que nous avons tous.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, cependant, je ne peux approuver un amendement qui donne lieu à une présentation de plus de sept minutes alors que son exposé des motifs tient en cinq lignes. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Geneviève Gaillard. Ridicule !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. J’ai été très sensible à votre argumentation, monsieur Viollet, d’autant que vous avez eu le bon goût de prendre la région Poitou-Charentes en exemple – cela n’a pas échappé non plus à Mme Gaillard. Cela étant, et même si je suis persuadé que les services de remplacement sont ceux qui assureront le plus de remplacements, il convient, dans le cadre d’une politique de retour à l’emploi dynamique, notamment pour ceux qui sont au RMA, de permettre à l’exploitant de choisir librement son remplaçant. Il faut éviter le monopole.

M. le président. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous corriger : M. Viollet a parlé pendant quatre minutes et cinquante secondes.

M. Antoine Herth, rapporteur. Cela m’a paru si long !

M. le président. Et le règlement a été respecté.

La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Je fais mien le plaidoyer en faveur des services de remplacement car ces organismes rendent en effet un excellent travail. Mais on ne peut obliger l’agriculteur qui veut simplement prendre ses quinze jours de vacances sans souhaiter bénéficier de l’ensemble des prestations offertes à adhérer au service de remplacement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 982.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 317.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Antoine Herth, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 317.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 788.

La parole est à M. Jean-Claude Viollet, pour le soutenir.

M. Jean-Claude Viollet. Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur. Je serai moins long cette fois-ci. Bien que n’étant pas agriculteur moi-même, j’ai acquis au contact de ces derniers une connaissance du terrain et je pensais qu’on pouvait parler ici de choses sérieuses. J’espère en tout cas que votre réponse à cet amendement sera plus longue et surtout plus argumentée !

Dans mon département, 54 % des agriculteurs au bénéfice réel auraient, selon la MSA, un revenu net inférieur au SMIC.

Que ces agriculteurs bénéficient d’un crédit d’impôt de 50 % pour profiter du dispositif de prise de congés semble insuffisant. La fédération nationale des services de remplacement pensait que, sans modifier le plafond, il serait possible d’augmenter le pourcentage pour permettre aux agriculteurs les plus démunis de profiter de ces congés, ne serait-ce que quelques jours.

L’amendement n° 788 pose le problème sous l’angle de la politique des revenus. Il vise à accorder le crédit d’impôt sous conditions de ressources afin d’avantager en priorité les plus défavorisés face aux réalités sociales actuelles, car c’est le but d’une mesure sociale. Malheureusement, nous sommes quelques-uns à l’avoir souligné, nombreux sont les agriculteurs qui se trouvent aujourd’hui défavorisés par rapport à la réalité sociale. Nous devons faire en sorte que cette mesure profite à ceux qui en ont vraiment besoin. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement.

Je ne sais pas, monsieur le président, si j’ai excédé le temps qui m’était imparti, mais je voulais me faire le porte-parole de ceux qui attendent beaucoup de cette mesure, comme vous l’avez dit justement, et qui voudraient bien en profiter.

M. le président. Monsieur Viollet, si vous aviez dépassé votre temps de parole, je vous aurais rappelé à l’ordre ! (Sourires.)

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 788 ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Je remercie tout d’abord M. Viollet pour sa contribution, car sur un texte qui concerne l’agriculture et représente des situations très diverses sur l’ensemble de notre territoire, nous avons besoin de la participation de tous les parlementaires présents. Chaque fois que cela lui est possible, la commission des affaires économiques essaie de tenir compte de vos interventions, quel que soit le banc d’où elles proviennent.

Cependant, la commission n’a pas retenu cet amendement de M. Viollet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je comprends que M. Viollet, qui n’a pas excédé son temps de parole, ait pu excéder le rapporteur ! (Sourires.) J’aurais aimé que le rapporteur, lui aussi, nous excède… Dire que l’amendement a été refusé, c’est bien, mais dire pourquoi, c’est mieux !

M. Jean-Claude Viollet. Les agriculteurs apprécieront !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 788.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 9, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 9, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous passons aux amendements portant articles additionnels après l’article 9.

Après l’article 9

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 610 rectifié et 858.

L’amendement n° 610 rectifié n’est pas défendu.

La parole est à M. Michel Raison, pour soutenir l’amendement n° 858.

M. Michel Raison. Cet amendement vise à créer une dotation pour paiement des cotisations sociales des non salariés agricoles. Comme vous le savez, les cotisations dues au titre d’une année sont assises sur la moyenne des revenus professionnels des trois années précédentes ou sur les revenus de l’année précédente, suivant le choix de l’exploitant.

Le fait générateur étant constitué par l’activité de l’entreprise au 1er janvier, un exploitant qui a eu de bons résultats les années précédentes pourra payer une cotisation élevée sur un exercice dont le résultat est faible.

Cet amendement a pour but de permettre aux exploitants qui sont en mesure d’évaluer avec suffisamment de précision les cotisations dues au titre de l’année suivante de provisionner celles-ci, notamment les années où ils réalisent un bon résultat et sont ainsi mieux à même de supporter la future charge. Par nature, cette provision sera systématiquement rapportée l’année suivante, ce qui est le cas de tout mécanisme de provision.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Je voudrais apporter mon soutien à ce très bon amendement car il pourrait résoudre un problème que nous connaissons bien dans mon département, notamment les années où surviennent d’importants aléas climatiques. Les agriculteurs doivent alors payer les cotisations sociales de l’année n – 1, alors même qu’ils n’ont pas de récolte.

M. le président. La parole est à M. Philippe Feneuil.

M. Philippe Feneuil. Je voudrais rappeler à mes collègues que le Gouvernement a jadis demandé que tous les agriculteurs soient assujettis au titre de l’année n, mais que la MSA, sous prétexte de simplification, a souhaité le retour à l’année n – 1, après un débat de plusieurs années.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 858.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 394 et 319 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 394.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Cet amendement vise à exonérer les cotisations patronales pour les salariés embauchés en CDD et dont l’emploi est transformé en CDI. C’est une mesure importante, qui a pour but de pérenniser l’emploi au sein des exploitations agricoles et qui répond parfaitement à l’objectif général qu’a tout à l’heure rappelé le rapporteur, à savoir favoriser l’emploi dans l’agriculture.

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen, pour soutenir l’amendement n° 319 rectifié.

M. Jacques Le Guen. Cet amendement a pour objet de clarifier un certain nombre de points. Les groupements d’employeurs sont un outil particulièrement important pour favoriser l’emploi permanent dans l’agriculture, car il est plus simple pour un salarié d’avoir un employeur unique.

Le recrutement en contrat à durée indéterminée est favorisé par une bonification de l’allégement des charges. Toutefois, cette bonification ne s’applique pas en polyculture élevage et maintient des taux d’allégement différenciés avec la viticulture et les autres cultures spécialisées. Pour favoriser le développement de l’emploi permanent, nous vous proposons de porter à 100 % la réduction de taux pour tous les secteurs pendant une durée de 119 jours, qui sera fixée par décret et pendant deux ans à compter de l’embauche. À l’issue de la période de 119 jours, la réduction générale des cotisations sera désormais appliquée.

Cette mesure est ouverte pour une période de trois ans à compter du 1er janvier 2006. Elle reprend l’une des propositions du rapport de M. Yves Trede en faveur des éleveurs laitiers, dans le cadre du plan stratégique de la filière laitière.

M. Philippe Rouault. C’est une excellente proposition !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement du Gouvernement, dont je vous indique que son adoption ferait tomber l’amendement n° 319 rectifié ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission a approuvé et fait sien l’amendement n° 319 rectifié de M. Jacques Le Guen. En revanche, elle n’a pas examiné l’amendement du Gouvernement, mais, à titre personnel, j’y suis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 319 rectifié ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je me rallie à l’amendement n° 319 rectifié, dont je lève le gage, et je retire l’amendement n° 394 puisqu’il semble que les deux soient incompatibles.

M. le président. L’amendement n° 394 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 319 rectifié, compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 264.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, pour le soutenir.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Cet amendement concerne les entreprises de travaux agricoles, forestiers et ruraux. Ces entreprises, selon les statistiques, emploient entre 40 000 et 50 000 salariés, c’est dire leur importance.

Or, aujourd’hui, elles sont confrontées au problème suivant : nous avons pris d’excellentes dispositions pour le travail occasionnel en agriculture, mais les entreprises de travaux agricoles ne bénéficient pas des mêmes possibilités et des mêmes déductions de charges. C’est une situation paradoxale. En effet, les agriculteurs qui sont soumis à une surcharge de travail peuvent faire appel chez eux à du travail occasionnel. Ils pourraient aussi bien solliciter ces entreprises, mais celles-ci ne bénéficient pas des mêmes facilités. Cet amendement propose de mettre fin à cette injustice et à cette incohérence en étendant aux entreprises de travaux agricoles la possibilité de recourir au travail occasionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission a accepté cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Il s’agit d’une mesure très coûteuse. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Je soutiens cet amendement. J’ajoute que les entreprises de travaux forestiers connaissent aujourd’hui des difficultés. Leur activité avait pris une certaine ampleur après la tempête de 1999 dans pratiquement tout notre pays. Ces entreprises ont donc investi, embauché et reçu des aides des collectivités. Ensuite, avec la crise forestière, ces entreprises qui employaient un grand nombre de salariés et assumaient des amortissements importants ont vu baisser la charge et la rémunération de leur travail. Je précise que les entreprises de travaux agricoles effectuent des travaux très difficiles et qu’elles sont soumises, comme les exploitants agricoles, à la MSA. Il s’agit donc d’une mesure coûteuse, certes, mais juste.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. J’informe l’Assemblée que cette mesure comporte un risque. S’agissant d’entreprises, méfions-nous des normes européennes de concurrence. Si nous ne les respectons pas, cette mesure risque d’être « retoquée » après avoir fait l’objet de plaintes de la part des CUMA ou des GAEC. Cette mesure pose problème, même si je comprends tout à fait les arguments de M. Raison. Je sais, comme lui, ce que nous devons aux entreprises de travaux agricoles et que les temps ne sont pas toujours faciles pour elles.

M. le président. Monsieur le ministre, levez-vous le gage de l’amendement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Non, monsieur le président !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 264.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 320.

La parole est à M. Jacques Le Guen, pour le soutenir.

M. Jacques Le Guen. Cet amendement vise à développer les groupements d’employeurs en autorisant leur diversification. C’est un sujet important, que nous avons déjà abordé.

Pour favoriser le développement des groupements d’employeurs multisectoriels, gage d’emploi permanent et qualifié, nous proposons que l’application des taux réduits pour l’emploi de travailleurs occasionnels, précédemment réservés aux seuls groupements d’employeurs agricoles, soit désormais accessible aux chefs d’exploitations agricoles membres d’un groupement d’employeurs multisectoriels.

Cette mesure répond à l’objectif général de favoriser l’emploi dans l’agriculture.

Il s’agit de permettre aux groupements d’employeurs éligibles aux taux réduits de cotisations de compter parmi leurs adhérents des personnes autres que des chefs d’exploitations ou d’entreprises agricoles, tout en réservant le bénéfice des taux réduits aux seuls adhérents qui y ont droit à titre individuel, c’est-à-dire les chefs d’exploitations ou d’entreprises agricoles.

Cette mesure est en cohérence avec celle figurant à l’article 55 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux.

C’est une mesure de transparence et de simplification pour les groupements d’employeurs par rapport aux différents régimes sociaux des membres du groupement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est favorable à l’amendement, et il lève le gage.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 320, compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 321.

La parole est à M. Jacques Le Guen, pour le soutenir.

M. Jacques Le Guen. L'emploi occasionnel constitue un enjeu majeur pour les exploitations agricoles, notamment dans les cultures spécialisées de fruits et légumes. Par ailleurs, cet emploi occasionnel est favorable à l'insertion professionnelle et peut conduire à des emplois permanents, d'autant plus que le salarié aura été employé longtemps.

C'est pourquoi, afin de permettre la poursuite du contrat de travail des travailleurs occasionnels, la durée d'emploi ne sera plus limitée dans le temps comme auparavant. Seule la durée d'application des allégements de charges sociales sera fixée dans le décret. Cette disposition simplifie la gestion de l'emploi occasionnel, l'existence de plusieurs seuils s'avérant complexe face à la variation des travaux saisonniers.

La durée d'allégement des charges sociales sera portée de 100 à 119 jours de travail par an, pour tenir compte des impératifs d'emploi des entreprises et exploitations agricoles.

Au-delà des 119 jours d'allégement, l'employeur déclarera à la caisse de mutualité sociale agricole s'il opte pour l'allégement prévu par l'article L. 741-16 du code rural pendant 119 jours ou pour celui prévu par l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale – la réduction dégressive de charges de la loi Fillon sur l'ensemble de la période de travail.

40 000 emplois occasionnels par an sont concernés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission est favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable.

M. le président. Vous levez le gage, monsieur le ministre ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Oui.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 321, compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 322 rectifié.

La parole est à M. Jacques Le Guen, pour le soutenir.

M. Jacques Le Guen. La mesure que nous allons créer aujourd’hui…

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Mesure très importante !

M. Jacques Le Guen. …répond de manière significative aux besoins de l’emploi occasionnel dans notre pays en matière d’agriculture. En effet, les producteurs ont parfois d’énormes difficultés à recruter et peuvent voir leurs champs de fruits non récoltés en raison du manque de main-d’œuvre.

Aussi, nous proposons la création d’un contrat jeune occasionnel pour les moins de vingt-six ans et ne donnant pas lieu à cotisations sociales. Dans la majorité des cas, en effet, ces jeunes bénéficient déjà d’une couverture sociale par leur statut d’étudiant, d’où l’inutilité de leur faire payer une deuxième fois une cotisation sociale.

L’idée est aussi de permettre à des jeunes urbains de découvrir le travail en milieu rural. Sur ce point, un véritable problème se pose car nous parlons depuis maintenant cinq jours de la problématique de l’emploi et du renouvellement des générations agricoles, mais il faut savoir qu’aujourd’hui, 130 métiers agricoles ne trouvent pas toujours preneurs. Il est de plus en plus difficile, malgré les rémunérations plus que correctes dans certains secteurs, de trouver des porchers ou des vachers, par exemple. Nous aurons certainement, là aussi, à nous poser la question de la formation et de la manière de la recadrer car peut-être un peu trop de gens ont-ils été orientés dans les filières environnementales ou équines et pas assez dans la production. C’est un véritable souci pour l’avenir.

Bien entendu, cet amendement ne doit pas créer un effet d’aubaine pour les employeurs. C’est pourquoi nous proposons un contrat de trente jours une fois par an, de façon à éviter un phénomène d’aubaine nuisible pour tous et surtout pour l’emploi permanent. L’esprit de ce contrat reprend l’idée, mais de manière un peu différente, de ce que font les Allemands par l’intermédiaire de leurs « mini-jobs » et les Hollandais par leurs contrats très courts. Ces pays européens ont trouvé des systèmes permettant l’allégement des charges, afin de regagner en compétitivité. Les Hollandais, eux, utilisent des techniques encore différentes puisque le SMIC ne peut être touché qu’à partir de vingt et un ans et qu’au-dessous de vingt ans, une amputation d’environ 15 % est opérée par année.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Malgré la longueur de l’explication, la commission est favorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est d’autant plus favorable que c’est une des mesures importantes du rapport que M. Le Guen nous a remis.

Le secteur des fruits et légumes connaissant des difficultés liées aux coûts par rapport à la concurrence européenne, il s’agit d’une bonne mesure, y compris pour les jeunes. Le Gouvernement est donc heureux de la saluer et de l’approuver.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous arrivons au bout des amendements proposés par notre collègue Jacques Le Guen, mandaté sur ce secteur des fruits et légumes et sur lequel nous avons personnellement beaucoup travaillé. Je ferai un commentaire d’ensemble.

Nous estimons que donner des avantages aux groupements d’employeurs constitue une bonne mesure. Elle a déjà été identifiée par les arboriculteurs et les maraîchers. L’ensemble de ces amendements nous convient, et nous les saluons.

En revanche, nous sommes plus sceptiques sur les contrats entre les jeunes urbains et les agriculteurs. Cela fait plusieurs années qu’on essaie de les développer au travers des associations, et cela ne marche pas aussi bien qu’on le voudrait car il y a un vrai problème de productivité et de choc de culture. De très nombreux arboriculteurs n’ont retrouvé la productivité que lorsqu’ils ont pu retrouver une vraie main-d’œuvre, habituée au travail, souvent étrangère : une main-d’œuvre venue des pays de l’Est ou des pays du Maghreb.

Ce problème de culture engendre des écarts de productivité qui ne se régleront pas si facilement, et nous devons en être conscients dans cette assemblée.

Nous appuierons volontiers les mesures du rapport Le Guen qui vont dans le bon sens, mais notre sentiment est que nous sommes encore très loin du compte et que des mesures beaucoup plus structurelles seront nécessaires, compte tenu de l’ampleur de la crise qui secoue le secteur des fruits et légumes. Jacques Le Guen a d’ailleurs ouvert le débat sur l’allégement massif des charges, et nous ne pourrons échapper pas à ce débat de fond.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Ces différents amendements qui ont été retenus s’appuient quasiment tous sur une seule formule, l’exonération de cotisations sociales, en excluant une réflexion de fond et des propositions pour régler le problème. À chaque fois, la solution est formulée en termes de réduction de cotisations et d’un avantage apporté à l’employeur, mais jamais la question de l’attractivité pour le salarié n’est abordée. Nous pourrons multiplier les exonérations et les réductions de cotisations, mais si n’abordons pas le problème de fond de l’attractivité, nous retomberons sur les questions soulevées en termes de fidélisation des salariés, même pour des saisonniers. Il faudra surtout réfléchir, comme l’a souligné M. Le Guen tout à l’heure, à la création d’emplois pérennes – mesure absente de ces amendements – : des emplois attractifs, permettant aux salariés d’assumer leurs tâches avec un salaire suffisant et des conditions de travail satisfaisantes.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Le sujet est difficile, ardu et je ne suis pas sûr que les solutions proposées vont régler tous les problèmes. Une forme de précarité va être installée. Pour ma part, je préfère d’autres mesures proposées par Jacques Le Guen, en particulier tout ce qui touche aux groupements d’employeurs car cela permettra à la fois de satisfaire la saisonnalité – elle existe et nous ne pouvons pas la nier – et d’apporter aux salariés un peu plus de sécurité. Mais nous jugerons.

Par contre, j’ai une question sur le dernier amendement. Il prévoit une exonération d’un mois par salarié et par patron. Que se passera-t-il alors pour le salarié qui fera un mois de piments d’Espelette, un mois de melons de Cavaillon, un mois de carottes dans le pays nantais et un mois de vendanges en Alsace ? Il aura eu quatre patrons ! La disposition se mesure-t-elle par rapport au salarié ou par rapport au patron, monsieur le ministre ? Si c’est par rapport au salarié, très bien. Si c’est par rapport au patron, cela signifie que des jeunes perdront des droits sociaux et des droits à la retraite. Or quand ils rechercheront les derniers trimestres nécessaires pour pouvoir comptabiliser les fameux 160 trimestres, ils seront très contents d’avoir fait quelques semaines de vendanges et d’avoir été déclarés !

M. le président. Monsieur le ministre, vous levez le gage sur l’amendement n° 322 rectifié ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Oui.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 322 rectifié, compte tenu de la suppression du gage.

M. Jean Gaubert. Je n’ai pas eu de réponse, monsieur le président !

M. le président. Le vote est commencé, monsieur Gaubert.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. Jean Gaubert. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. En vertu de quel article, monsieur Gaubert ?

M. Jean Gaubert. De l’article 58, alinéa 3, du règlement.

Rappel au règlement

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Gaubert, pour un rappel au règlement.

M. Jean Gaubert. Depuis un moment, nous ne posons pas beaucoup de questions au Gouvernement et sans doute pas assez car il a perdu l’habitude de nous répondre. Or j’aurais aimé obtenir une vraie réponse à la question que je viens de poser.

M. le président. Monsieur Gaubert, le Gouvernement est libre de vous répondre ou non. C’est la raison pour laquelle j’ai procédé au vote. Nous n’avons pas à attendre que le Gouvernement réponde s’il n’en a pas envie.

M. Jean Gaubert. Monsieur le président, je suis totalement d’accord avec vous. Mais si le Gouvernement est quelque peu en retard dans la préparation de ses arguments, je peux demander une suspension de séance…

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 729 rectifié et 786.

L’amendement n° 729 rectifié a été défendu tout à l’heure par M. Chassaigne.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir l’amendement n° 786.

M. Jean Gaubert. La lecture de l’amendement se suffit à elle-même. Il vise à fusionner les tableaux de maladies professionnelles du régime général et ceux du régime agricole.

Cela n’a pas été fait jusqu’ici à cause des réticences, mais les maladies professionnelles agricoles sont peu différentes des autres maladies professionnelles et, à terme, cette fusion aboutirait à une cohérence qui n’existe pas aujourd’hui.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 729 rectifié et 786 ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu ces deux amendements. Je signale au passage à M. Gaubert qu’en relisant l’amendement n° 322 rectifié dont il s’inquiétait précédemment, il aura la réponse à sa question puisqu’il y est précisé que la mesure s’applique dans la limite d’« un mois par an et par salarié ».

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. C’est ce que je m’apprêtais à répondre à M. Gaubert.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 729 rectifié et 786.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Avant d’aborder l’article 10, je demande à M. Gaubert s’il souhaite toujours une suspension de séance.

M. Jean Gaubert. J’y renonce, monsieur le président.

M. le président. Nous passons donc à l’article 10.

Article 10

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 514 et 689, tendant à supprimer l’article 10.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir l’amendement n° 514.

M. Jean Gaubert. Cet amendement vise à supprimer l’article 10, qui ouvre la possibilité, comme l’ont dit certains, de faire entrer les salariés agricoles dans le droit commun. Mais quel droit !

C’est d’autant plus gênant et dangereux que des accords d’entreprise ou des accords de branche sont souvent très déséquilibrés dans le monde agricole, en particulier les accords d’entreprise, puisqu’il n’y a souvent qu’un ou quelques salariés dans ces entreprises. Nous considérons qu’un certain nombre de libertés existent aujourd’hui dans le code du travail, en particulier l’annualisation du temps de travail, dont nous avons beaucoup parlé. Il s’agit là d’une excellente mesure dans des entreprises où la fluctuation du temps de travail est, il ne faut pas le nier, très grande. Pendant le temps des moissons, les entreprises sont davantage mobilisées que pendant le temps des traitements, surtout celles qui produisent du bio et ne font pas de traitement.

M. Michel Raison. Il y a le binage ! (Sourires.)

M. Jean Gaubert. Vous avez raison, mais le binage est un exercice physique qui ne coûte que de la sueur.

Mais redevenons sérieux : cet article ne se justifie pas. Ce ne sont pas les moyens qui manquent pour régler les problèmes de fluctuation du temps de travail en agriculture.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 689.

M. André Chassaigne. Cette remise en cause des 35 heures est le pendant de la proposition de loi que M. Ollier et M. Novelli avaient défendue au printemps dernier. Notre argumentation n’a pas varié depuis. Les objectifs de l’article 10 sont clairs : il s’agit tout d’abord de ne pas relâcher la pression sur les salaires et le coût du travail. En effet, comme notre collègue Le Guen le disait tout à l’heure, les accords découlant de la loi de 2000 ont entraîné un tassement des salaires, voire créé une trappe à bas salaire en raison des exonérations de cotisations sociales employeurs ciblées sur ces salaires modestes. Plutôt que de dégeler ces situations, d’inciter à la reprise de la négociation annuelle, vous poursuivez dans la voie des allégements du coût du travail et maintenez la pression sur les salaires en incitant à travailler plus pour rattraper la perte de pouvoir d’achat.

Pourtant, nous l’avons démontré, ce ne sont pas vos mesures qui le permettent : elles se traduisent en effet par une diminution de la rémunération des heures supplémentaires et par une modification du mode de calcul du SMIC.

Le deuxième objectif est de dynamiter les limites aux durées maximales de travail grâce à la notion de temps choisi. Ces propositions sur le temps choisi rappellent le système de l’opting out, autorisé par la directive européenne de 1993 sur le temps de travail. Cette disposition permet à l’employeur de décider, de concert avec un salarié, que celui-ci pourra dépasser la durée maximale de 48 heures hebdomadaires.

Enfin, dernier objectif, en renvoyant le temps choisi à l’accord employeur-salarié, vous individualisez les rapports sociaux au détriment des rapports collectifs. Il s’agit en fait de priver le salarié de toute représentation collective et de le laisser évoluer dans une négociation seul avec l’employeur, dans un contexte de pression que l’on peut imaginer.

Au-delà de cette argumentation générale, il est d’autant plus scandaleux de revenir sur les 35 heures dans le secteur agricole que les salariés concernés n’en ont pas encore bénéficié. Les accords nationaux avaient décidé une mise en œuvre très progressive des lois Aubry dans la profession, au point que le passage effectif théorique aux 35 heures pour les entreprises agricoles de moins de deux salariés ne date que de janvier 2005.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 514 et 689.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 10.

(L’article 10 est adopté.)

M. le président. Nous passons aux amendements portant articles additionnels après l’article 10.

Après l’article 10

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 1129 du Gouvernement.

Il s’agit en fait d’une rectification de l’amendement n° 394.

L’amendement n° 394 est en effet tombé parce qu’il était formellement incompatible avec l’amendement n° 319 rectifié de la commission des affaires économiques.

Une simple rectification de forme a permis de rendre ces deux amendements compatibles.

Il est donc maintenant possible d’examiner et d’adopter, cet amendement, qui devient l’amendement n° 1129.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. J’ai déjà présenté cet amendement tout à l’heure.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1129.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 815.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour le soutenir.

M. Jean Gaubert. Jusqu’à présent, on ne s’est guère soucié du sort des salariés et l’on a préféré tenter de résoudre le problème d’emploi qui se pose aux patrons. Le présent amendement prend en compte le problème du logement des salariés agricoles. Sauf exception, ceux-ci ne bénéficient pas de très hauts salaires. Dans certains cas, le courage remplaçant les moyens, ils essaient de construire eux-mêmes leur maison, de l’aménager, de se loger. Aussi avons-nous eu l’idée d’élargir le 1 % logement au secteur agricole. Il n’y a pas de raison que les salariés agricoles ne bénéficient pas des mêmes avantages que les autres.

On nous dira que c’est créer une charge supplémentaire. Mais il ne faut pas prendre les salariés pour des idiots. Ils choisissent aussi les secteurs dans lesquels ils travaillent en fonction des avantages qu’ils y trouvent. L’agriculture offre des avantages et des inconvénients. Parfois, le travail est plus dur. Il n’est pas scandaleux de prévoir que, au moins en termes de logement, ils puissent bénéficier de quelques avantages équivalents à ceux qu’ont leurs collègues qui vont travailler à l’usine d’à côté : j’en ai vu qui quittaient l’agriculture non pas parce que le salaire était moins élevé, mais parce qu’ils voulaient bénéficier de certains avantages. Il faut en tenir compte.

Sans doute, il ne s’agit pas d’une contribution extraordinaire, mais elle sera la bienvenue pour mettre tous les salariés sur un pied d’égalité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu cet amendement. Comme le soulignait M. Gaubert, il constituerait une charge supplémentaire pour les entreprises.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 815.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 443, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 1127.

La parole est à M. Yves Censi, pour soutenir l’amendement n° 443.

M. Yves Censi. Les personnels enseignants et de documentation mentionnés aux articles du code de l’éducation et du code rural ont bénéficié jusqu’au 1er septembre 2005 d’un régime de prévoyance complémentaire, financé par les cotisations versées par les établissements d’enseignement privés au titre des contrats de travail de droit qui les liait à ces personnels. En faisant disparaître ce lien, la loi du 5 janvier 2005 a clarifié les statuts des maîtres, qui devenaient des contractuels de droit public.

Afin de maintenir un régime de prévoyance complémentaire, les partenaires sociaux ont, le 26 septembre 2005, conclu un accord très attendu. Il propose à tous leurs personnels des prestations d’assurance complémentaire en cas d’incapacité, d’invalidité et de décès.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir le sous-amendement n° 1127 et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 443.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je comprends d’autant mieux la démarche de M. Censi que j’y avais souscrit dans un premier temps. Néanmoins, le ministère de la santé nous a rappelé la nécessité d’introduire un sous-amendement qui permette aux accords conclus en application de l’amendement de M. Censi d’être étendus dans les conditions prévues par le code de la sécurité sociale. Il convient donc d’appliquer la règle valable pour l’ensemble des accords de prévoyance complémentaire.

Je crois savoir que M. Censi n’est pas favorable à ce sous-amendement. S’il ne l’acceptait pas, le Gouvernement s’opposerait à son amendement ou s’en remettrait à la sagesse de l’Assemblée. Dans le cas contraire, le Gouvernement serait favorable à l’ensemble.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas examiné ces amendements. À titre personnel, j’attends que M. Censi et M. le ministre s’accordent sur ce point et je les encourage à aller au bout de leur initiative.

M. le président. Vous ne prenez pas de risques, monsieur le rapporteur. (Sourires.)

La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Quoi qu’il arrive, ce sous-amendement sera soumis à l’Assemblée et c’est elle qui, en dernier ressort, décidera. Je prends note de l’intervention du ministère de la santé. Vous avez expliqué, monsieur le ministre, que l’objectif était d’assurer la cohérence globale de la doctrine des pouvoirs publics en matière de prévoyance et de retraite, et vous avez indiqué par ailleurs que ces sous-amendements ne pourraient pas faire obstacle à la liberté des parties de négocier le taux et le niveau des prestations : cela me paraît d’autant plus contradictoire que, comme je l’avais indiqué dans mon amendement, la convention qui a été signée prévoyait une simple extension. Ce sous-amendement qu’on tire du chapeau au dernier moment risque de surprendre vivement les partenaires sociaux, car il ne tient pas compte de l’accord qu’ils ont conclu. C’est pourquoi j’émets personnellement quelques réserves.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1127.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Monsieur le ministre, levez-vous le gage de l’amendement n° 443 ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Oui.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 443, modifié par le sous-amendement n° 1227 et compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 73 rectifié et 953.

La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 73 rectifié.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Il s’agit de proposer la suppression de la contribution au « versement transport » pour l’ensemble des employeurs de salariés agricoles. Cette contribution permet de développer le transport collectif. Or nous savons bien que, en général, ce ne sont pas les salariés agricoles qui profitent des transports collectifs, puisque leurs lieux de travail sont rarement situés dans les agglomérations.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l’amendement n° 953.

M. Jean-Pierre Decool. En proposant cette suppression de la contribution au « versement transport », nous n’entendons faire aucun distinguo entre la région Île-de-France et les autres régions. L’amendement hors Île-de-France avait en effet été déclaré irrecevable au titre de l’article 40.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement n’est pas favorable à ces amendements. On peut certes s’interroger sur le bien-fondé du « versement transport » dans le cas des salariés agricoles. Mais, si nous réduisons un financement destiné aux collectivités territoriales, qui sont les autorités organisatrices du transport, elles risquent de demander une compensation à l’État. Dans le cadre actuel des finances, c’est un peu compliqué. Certaines collectivités n’aiment pas que l’État compense et préfèrent avoir une ressource propre. Je m’adresse donc en particulier à tous les élus locaux ici présents et qui savent que les autorités organisatrices ont besoin de ce type de versements, même si, en effet, les agriculteurs salariés n’en sont pas les principaux utilisateurs.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je voudrais ajouter un argument supplémentaire. En rédigeant cet amendement, les auteurs ont pensé, comme l’a dit M. Taugourdeau, aux salariés d’exploitations agricoles qui ont grandi et qui comptent quelques dizaines de salariés, mais ils ont oublié les grosses coopératives agricoles, souvent installées dans des agglomérations, et qui, elles aussi, embauchent des salariés agricoles. À Lamballe par exemple, les deux plus grosses entreprises, que M. Le Fur connaît bien, emploient environ 1 500 salariés. Ces salariés sont des salariés agricoles puisque employés par une coopérative agricole. Nous ne sommes plus dans le cadre d’une ferme mais dans celui d’une grosse entreprise, qui n’a pas de différence avec une entreprise industrielle. Cela pose un problème, le ministre l’a expliqué, notamment de distorsion de concurrence avec les entreprises industrielles proches.

M. François Sauvadet. C’est un bon argument !

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen.

M. Jacques Le Guen. Deux précisions. Le transport pose un véritable problème, surtout en milieu rural, en particulier pour les emplois salariés saisonniers pour lesquels le bassin de recrutement doit être suffisamment large. Une réflexion approfondie devra être menée sur ce sujet, monsieur le ministre, pour essayer de trouver une solution.

Certains départements, la Dordogne en particulier, ont pris des initiatives intéressantes, telles que le covoiturage ou le transport par bus, mais je connais également un département dans lequel la facture de transport pour cinq semaines de travail saisonnier s’élevait à 700 euros par salarié, soit un coût difficilement supportable pour la collectivité.

M. le président. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Il existe également des entreprises rurales dont les salariés n’utilisent pas le transport collectif. Ce débat dépasse l’agriculture. Il ne faudrait pas marginaliser, par ce biais, l’agriculture.

M. Jacques Le Guen. Vous avez raison.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 73 rectifié et 953.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 422.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Cet amendement est, lui aussi, inspiré des réflexions de M. Le Guen et d’autres parlementaires. Il vise à faciliter la reconversion professionnelle des agriculteurs dont l’exploitation est en difficulté et passible de redressement. Dans la viticulture par exemple, certains exploitants arrêtent leur activité mais sont suffisamment jeunes pour avoir encore envie et besoin de travailler. Leur réinsertion professionnelle peut nécessiter une formation. Le congé de formation que nous proposons d’instituer pourrait les aider dans cette démarche.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. la commission est favorable à l’amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 422.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 318.

La parole est à M.  Jacques Le Guen, pour le soutenir.

M. Jacques Le Guen. Cet amendement prolonge le débat que nous avons eu tout à l’heure sur la formation, élément essentiel du dispositif. Il propose de faire combiner des périodes de travail avec des périodes de formation, de manière à permettre aux intéressés d’évoluer vers un contrat à durée indéterminée.

Une personne qui entre par exemple chez un serriste comme cueilleur de tomates avec un contrat de trois ou quatre mois par exemple, peut fort bien, l’année suivante, revenir pour six mois, puis huit mois, et devenir, avec une formation complémentaire, chef de culture avec un CDI. L’idée est d’alterner des périodes de travail et des périodes de formation financées par le fonds de formation professionnelle continue agricole, pour acquérir une formation complémentaire. C’est un point très important.

Ce système pourrait également fonctionner dans le cadre d’un dispositif d’insertion. Des gens qui perçoivent les minima sociaux pourraient retrouver le chemin de l’emploi par le biais des métiers de l’agriculture. Les métiers de l’agriculture sont bien sûr des métiers à part entière mais ils peuvent constituer une porte d’entrée pour l’insertion. C’est une idée qui mérite d’être étudiée.

Enfin, je voudrais lancer une autre piste, même si je sors là du cadre de mon amendement, s’agissant du travail des seniors. Aujourd’hui, vous le savez, 37 % seulement des personnes de plus de cinquante-cinq ans sont actives. Cela signifie que 63 % sont inactives. Nous pourrions sans doute récupérer des personnes de plus de cinquante-cinq ans et leur faire jouer un rôle de tuteur au sein des entreprises agricoles vis-à-vis des personnes en insertion. Cette piste sur l’emploi partagé mérite d’être approfondie pour essayer d’à la fois régler le problème de l’insertion et permettre le retour à l’emploi des seniors.

Je reviens à mon amendement. Il propose un contrat à durée indéterminée intermittent avec mise en place de périodes de formation. J’espère, monsieur le rapporteur, que je n’ai pas été trop long.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Chaque fois que M. Le Guen parle, je suis favorable.

M. Jean Gaubert. Ah ! votre avis est lié à la personne de M. Le Guen ?

M. Antoine Herth, rapporteur. Non, c’est parce qu’il a rédigé un rapport.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Favorable, sur le fond et sur la forme.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je voudrais faire observer à notre collègue Le Guen, et donc au rapporteur, que cet amendement n’a rien de très révolutionnaire. En effet, le code du travail contient déjà des dispositions destinées à assurer un droit à la formation…

M. Jacques Le Guen. Pas en agriculture !

M. André Chassaigne. …à tous les saisonniers, agricoles compris. L’amendement ne fait que les transposer dans le code rural.

Il est vrai que les dispositions du code du travail sont plus formelles qu’autre chose. Quand la formation dure deux heures, cela ne résout pas vraiment le problème.

Par ailleurs, vous renvoyez à une négociation avec les partenaires sociaux. L’idée est a priori intéressante. Mais quand on sait le type de relations qui peuvent exister entre les partenaires sociaux dans ce domaine et le rapport des forces, il est légitime de penser que la discussion ne sera pas très favorable aux salariés.

M. Jacques Le Guen. Je n’en suis pas convaincu.

M. André Chassaigne. Vous semblez avoir découvert que le top du top, c’était encore et encore des exonérations de cotisations, comme on l’a vu dans les amendements précédents.

M. Jacques Le Guen. Non. Il n’y a pas d’exonérations de cotisations mais un financement par le FOPCA. Ce n’est pas la même chose !

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Finalement, au terme de cette heure et demie de discussion sur les salariés agricoles, je constate qu’il ne se passera pas grand-chose pour eux. Toute mesure qui leur aurait été un tant soit peu favorable a été repoussée. Le Gouvernement ne m’a pas du tout répondu sur le 1 % logement pour les salariés alors que c’est un vrai problème. Je serai obligé d’y revenir ultérieurement par d’autres moyens.

La mesure qui nous est proposée est, en soi, une bonne mesure. Reste à vérifier sa faisabilité et son financement. En effet, les organismes qui financeront la formation ne verront pas leurs crédits abondés.

M. Jacques Le Guen. Ils ont des sous !

M. Jean Gaubert. Un certain nombre d’entre eux sont déjà dans une situation tendue. S’ils satisfont à la demande de M. Le Guen, ce seront sans doute d’autres modules de formation qui seront abandonnés.

M. Jacques Le Guen. Il y a des crédits qui ne sont pas consommés !

M. Jean Gaubert. Chaque fois que nous nous adressons à ces organismes, ils nous répondent qu’ils n’ont plus de crédits.

M. Jacques Le Guen. Vous ne vous adressez pas à la bonne adresse.

M. Jean Gaubert. Il faudrait que le ministère veille à ce que ces crédits soient consommés.

Autre élément : l’articulation entre les périodes de travail et les périodes de formation. Votre amendement est excellemment rédigé, monsieur Le Guen, mais je doute que les choses se passent comme vous l’écrivez. Il faudra une sacrée force de persuasion aux partenaires employeurs et salariés pour convaincre les organismes de formation de n’organiser des formations que lorsque les salariés sont libres. Je connais assez bien le monde de l’agriculture : c’est parfois le dernier souci des organismes de formation. Ils agissent selon des plans de formation et si la saison des salades a dérapé de quinze jours, je ne suis pas certain que les semaines de formation puissent être déplacées d’autant. Je suis d’accord pour qu’on essaie, mais je ne suis pas sûr que ce soit aussi facile que sur le papier.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je lève le gage, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 318, compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La levée du gage est une très bonne nouvelle : elle nous permet d’échapper de nouveau, après les quatre ou cinq amendements précédents de M. Le Guen, à la création d’une taxe additionnelle à la taxe sur les conventions d’assurance. Celle-ci risquait de devenir de plus en plus lourde.

J’ajoute que lorsque cette taxe sur les conventions d’assurance sera transférée aux départements, il faudra, monsieur Le Guen, trouver un autre gage.

M. Jacques Le Guen. On prendra le tabac !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1128 et 642 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1128.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. M. Censi a déposé un amendement, n° 642 rectifié, pour essayer de débrouiller un problème très complexe, récurrent depuis près de vingt ans, pour les mutualités sociales agricoles françaises.

Du fait de la réorganisation de certains groupes agricoles, des salariés agricoles peuvent devenir salariés du régime général alors que l’entreprise n’a pas changé d’activité. Cela peut entraîner des pertes de droits pour les intéressés, des complications inutiles.

Dans le même esprit, le Gouvernement a déposé un amendement, n° 1128, qui devrait lui donner satisfaction et auquel je lui propose de se rallier.

M. le président. La parole est à M. Yves Censi, pour soutenir l’amendement n° 642 rectifié.

M. Yves Censi. L’amendement n° 642 rectifié propose d’affilier au régime agricole des salariés de filiales ou de sous-filiales créées et contrôlées par des coopératives, des organismes ou des groupements professionnels agricoles.

Il faut savoir qu’à ce jour, le code rural ne permet d’assujettir ni les groupements créés avant le 1er janvier 1989, ni les filiales de coopératives ou d’organismes professionnels agricoles du second degré. Il ne permet pas non plus de maintenir au régime agricole des salariés des organismes ou groupements agricoles qui font l’objet de modification ou de restructuration.

L’amendement du Gouvernement va globalement dans le même sens, mais j’aurais souhaité qu’on franchisse une étape supplémentaire, comme le proposait mon amendement. Quoi qu’il en soit, il n’y a pas de véritable contradiction entre les deux, juste une différence en termes d’ambition.

M. le président. Dois-je en conclure, monsieur Censi, que vous retirez l’amendement n° 642 rectifié ?

M. Yves Censi. En effet, monsieur le président. Et je remercie le Gouvernement.

M. le président. Je fais observer que l’amendement n° 1128 n’a été déposé que parce que vous aviez, au préalable, déposé le vôtre, monsieur Censi. Vous pouvez presque donc vous considérer comme co-auteur de l’amendement n° 1128. En tout cas, le Journal officiel fera foi.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Il en a la responsabilité morale et politique !

M. Yves Censi. L’objectif était de servir les affiliés.

M. le président. L’amendement n° 642 rectifié est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 1128 ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission avait adopté l’amendement n° 642 rectifié de M. Censi. Dans la mesure où M. Censi le retire au profit de l’amendement du Gouvernement, je pense que la commission peut suivre la position de M. Censi et accepter l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1128.

(L'amendement est adopté.)

Avant l’article 11

M. le président. Sur l’intitulé du titre II du projet de loi, je suis saisi d’un amendement n° 323.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

M. Antoine Herth, rapporteur. L’amendement n° 323 est rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 323.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 515, portant article additionnel avant l’article 11.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour soutenir cet amendement.

M. Jean Gaubert. Notre amendement soulève le problème de la collecte de lait dans les écarts. Dans notre société de compétition, chaque industriel collecteur de lait fait son rapport qualité-prix avec l’ensemble des producteurs avec lesquels ils travaillent. Les syndicats ont fort heureusement obtenu que le prix du lait demeure à peu près égal pour tous ; en tenant compte de la qualité du lait, les coopératives, mais surtout les industriels ne peuvent pas jouer sur ce prix pour discuter avec les acteurs les plus éloignés des circuits les plus rentables. Cette situation n’a pas lieu qu’en montagne : en Normandie – et les élus normands pourraient le confirmer –, dans la Manche, dans l’Orne, des producteurs sont abandonnés par les industriels pour la collecte de lait.

On leur a dit de se débrouiller, d’apporter eux-mêmes leur lait à la laiterie au motif qu’ils ne produisent pas assez pour justifier un déplacement. Tel est le discours qu’on leur a tenu.

La conséquence fut que certains de ces producteurs se sont constitués en GIE : ils n’ont pas d’autre solution que de faire des appels d’offre, et la grande distribution a bien compris le bénéfice qu’elle pouvait en retirer pour déséquilibrer la filière. Elle leur propose des prix plus bas que ceux pratiqués par les industriels, que les producteurs sont obligés, par la force des choses, d’accepter.

Il nous faut résoudre ce problème, monsieur le ministre. Si nous ne le faisons pas, des secteurs entiers seront, petit à petit, abandonnés : des zones de montagne, surtout là où il n’y pas d’atelier de transformation à proximité, comme des zones de plaine, la Normandie par exemple…

M. François Sauvadet. Des zones intermédiaires.

M. Jean Gaubert. En effet, mais aussi les grandes zones de culture.

Notre amendement vise à vous encourager, monsieur le ministre, à réfléchir à l’évolution du plan de développement rural national et à obtenir de la Commission européenne que la France puisse soutenir la collecte de lait, c’est très important. Nous sommes dans une société libérale : nous ne pouvons pas demander aux industriels de régler le problème par eux-mêmes. Les conditions de concurrence entre industriels étant différentes, la situation ne sera pas favorable à celui qui aura fait « du social ». Il en va de la responsabilité des pouvoirs publics : ils doivent se pencher sur le problème et trouver rapidement des solutions.

La question avait déjà été posée à votre prédécesseur, monsieur le ministre, lors de la loi sur les territoires ruraux. On nous avait alors renvoyés à la loi d’orientation agricole en nous promettant de nous soumettre des propositions. Manifestement, pour diverses raisons, cela a été oublié, mais peut-être n’a-t-on tout simplement pas trouvé de bonne solution ? Pourtant, il est urgent d’en trouver car on risque la mort des producteurs les plus fragiles et les plus isolés, ceux qui participent largement à l’aménagement du territoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Antoine Herth, rapporteur. La commission n’a pas retenu l’amendement de M. Gaubert, même si celui-ci ne vise qu’à interpeller le Gouvernement en vue d’obtenir la possibilité de financer la collecte laitière. M. Gaubert, dans son exposé sommaire, m’a fait l’honneur de se référer à l’avis que j’ai présenté sur la partie agricole du projet de loi de finances pour 2005. L’avis de la commission reste cependant défavorable…

M. Jean Gaubert. Vous écrivez parfois de bonnes choses !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement n’est pas favorable à l’amendement, même s’il est favorable à son esprit, je l’ai déjà dit, dernièrement encore à Clermont-Ferrand. Nous devons trouver une solution notamment dans les zones de montagne, mais, plus largement, pour assurer la collecte de lait, et nous y travaillons. C’est l’un des objets de nos discussions avec la Commission européenne, et je comprends l’appel politique que vous lancez.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Ayant déjà posé la question, nous nous inquiétons de ne rien voir venir, et, malheureusement, la situation s’est détériorée dans un certain nombre de régions. Nous ne pouvons donc plus nous satisfaire du fait que le Gouvernement travaille – ce dont je ne doute pas. Quelles réponses apporterez-vous à ce problème, et dans quels délais ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. J’attends la réponse de l’Europe !

M. Jean Gaubert. Le vote de cet amendement renforcerait certainement votre position dans ces discussions. Pensez-vous vraiment que l’Union européenne ne soit pas sensible à nos questions ? Mais c’est un autre débat, qui remonte au printemps dernier !

M. François Sauvadet. Ne réveillez pas le démon qui sommeille en vous, monsieur Gaubert !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je reste, pour ma part, convaincu que le vote d’un parlement peut encore peser sur les décisions de la Commission européenne. Sinon, je me demande à quoi nous servons !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 515.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à l’article 11.

Article 11

M. le président. Mes chers collègues, si chacun essaie de faire un effort de concision, nous pouvons, dans un délai tout à fait raisonnable, terminer l’examen de l’article 11. Si la concision n’est pas au rendez-vous, nous interromprons la discussion.

La parole est à M. François Guillaume, inscrit sur l’article.

M. François Guillaume. L’amendement que vous avez déposé à l’article 11, monsieur le ministre, limite les ordonnances prévues et précise vos intentions sur l’utilisation du bois dans l’équilibre entre absorption et émissions de gaz carbonique.

Vous souhaitez mettre en évidence l’intérêt de développer la production de bois et l’utilisation de cette filière dans le domaine de la construction – très bénéfique à cet équilibre – puisqu’il ne produit pas d’émissions de gaz carbonique. Les bois utilisés permettent la fixation du carbone. Lorsque le bois est utilisé comme moyen de chauffage, il y a en revanche émission de gaz carbonique.

Comment les propriétaires et les utilisateurs des forêts pourront-ils participer au marché de la revente des droits à polluer – leur taille ne le leur permettant pas – tel que l’a établi le protocole de Kyoto ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. Les articles 11 à 13 sont importants, mais leur rédaction manque d’ambition, et ce dès l’intitulé du chapitre Ier du titre II : « Améliorer les débouchés des produits agricoles et forestiers ». Le texte est insuffisant au regard de l’importance des problèmes à résoudre : dérapage climatique, réduction des gaz à effet de serre, amélioration de la situation énergétique.

Il serait souhaitable de commencer par mentionner les carburants d’origine agricole, qui regroupent plusieurs types de combustibles : huile pure ou esters d’huile végétale avec de l’alcool, utilisées dans les moteurs diesels ; alcool, et certaines voitures roulent déjà l’éthanol, au Brésil par exemple ou en Finlande. Il y a aussi des combustibles à base de ETBE ou de MTBE, qui sont des alcools associés à des produits pétroliers.

Enfin, François Guillaume vient d’en parler, il y a le bois, la filière ligno-cellulosique, dont il est peu question. Et l’on a omis pour l’instant de réfléchir à la façon dont celle-ci pourrait participer à la réduction des gaz à effet de serre.

Aujourd’hui, nous ne progressons pas assez vite : 5,75 % au 31 décembre 2008 – c’est la directive européenne – 7 % au 31 décembre 2010 ; 10 % au 31 décembre 2015 – ce sont les objectifs du Premier ministre. Et vous dites que nous allons plus vite que les impératifs fixés par l’Europe !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. L’Europe, c’était 2010. Nous sommes passés à 2008.

M. Jean-Yves Le Déaut. En effet, monsieur le ministre. La France est le pays de la géologie politique : on accumule des strates de loi, chaque strate faisant oublier la précédente. Je me suis donc reporté à l’article 13 de la loi d’orientation sur l’énergie, où je lis : « Le ministre chargé de l’énergie et le ministre chargé de l’agriculture mettent en place un plan Terre-énergie… » –– j’en étais du reste à l’origine, avec M. Birraux – « …qui mobilise les moyens nécessaires pour atteindre un objectif d’une économie d’importations d’au moins 10 millions de tonnes équivalent pétrole en 2010 grâce à l’apport de la biomasse pour la production de chaleur et de carburant.

« À cet effet, ce plan favorise la production, la promotion et la diffusion des biocarburants dans les transports. »

Vous vous félicitez d’aller plus vite que l’Europe, mais vous allez moins loin qu’une loi que nous avons déjà votée, il y a moins d’un an ! On utilise aujourd’hui environ 100 millions de tonnes de pétrole par an, dont 50 cinquante millions dans les transports. Il ne s’agit pas de substituer le carburant vert au carburant pétrolier, mais d’apporter une part significative de carburant d’origine agricole pour aider les agriculteurs tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Il nous faut donc, dans ce domaine, accélérer.

De la même manière, sachant que l’agriculture consomme environ 4 millions de tonnes équivalent pétrole, pourquoi ne pas faire rouler tous les tracteurs aux biocarburants, et pas seulement à titre expérimental, comme le préconise l’article 12 ?

Il faut consentir un effort de recherche important dans le domaine des filières ligno-cellulosiques, notamment sur les mécanismes enzymatiques, qui devraient permettre, à partir des longues chaînes de carbone du bois, d’élaborer des produits pétroliers. Pour la filière sèche et la gazéification comme pour la filière humide, la recherche en France est aujourd’hui très insuffisamment développée, même si les pôles de compétitivité devraient nous permettre d’être plus performants. Le Brésil, lui, a réussi : il produit cent fois plus de biocarburants que nous et si, dans quelques années, nous ne parvenons pas à organiser notre filière, il nous proposera ses produits.

Nous aurions pu penser que la loi de finances irait dans le même sens que les mesures évoquées. Or, dans le projet de loi de finances pour 2006, le montant de la réduction de taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers accordée aux unités de production de biocarburants est réduit de 33 euros à 25 euros l’hectolitre et de 38 euros à 33 euros l’hectolitre selon les types de carburants, « afin de tenir compte de l’augmentation du prix du pétrole ».

On ne peut pas dire tout et son contraire, se fixer des objectifs ambitieux et ne pas se donner les moyens de les atteindre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. « C’est pourquoi, j’ai décidé d’avancer le développement des biocarburants, en portant leur consommation de 5,75 % du total dès 2008. En 2010, nous devrons atteindre 7 % et en 2015, 10 %. Un appel d’offres de 1 800 000 tonnes de biocarburants sera lancé avant la fin de l’année. Pour sécuriser la filière, l’État s’engage sur des révisions de fiscalité. Ce sont de formidables perspectives qui s’ouvrent à l’agriculture française sur des terres aujourd’hui en friche. » Cet excellent discours, prononcé par M. de Villepin à Rennes, voilà moins d’un mois, donne un cadre à notre discussion. Il est d’ailleurs à l’origine du nouvel article 11. Mais, à présent, faisons une analyse critique et passons-le au révélateur.

Pour ce qui est de l’appel d’offres, monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire plus ? Quand sera-t-il effectif ?

Qu’en est-il des révisions de la fiscalité ? « Nous devons conserver un avantage incitatif à la filière biocarburants et garantir la continuité des investissements dans ce domaine » a dit M. le Premier ministre devant les agriculteurs. Sur ce point très important, j’aimerais savoir si nous donnerons une visibilité aux exonérations fiscales destinées à encourager les biocarburants.

S’agissant des friches, les agriculteurs seront-ils autorisés à les utiliser pour produire des biocarburants ?

Certes, nous pourrons nous en expliquer plus largement à l’article 12. Mais aujourd’hui, nous devons bien prendre la mesure des enjeux écologiques et économiques mais aussi politiques et symboliques liés aux biocarburants. Je vous ai apporté un numéro de La Dépêche dont la une est consacrée à la loi d’orientation agricole. Et sur quoi porte le titre ? Non pas sur la création du fonds agricole ou le bail cessible, mais sur les biocarburants : « Du tournesol à la pompe ». Dans un contexte difficile, ils représentent en effet un vrai signe d’espoir pour le monde agricole. Dès lors, il convient d’apporter des réponses très précises aux annonces faites par le Premier ministre le 13 septembre dernier. Nous aimerions en savoir plus, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Jusqu’à présent, nous avons débattu d’un texte s’apparentant davantage à diverses mesures d’ordre agricole…

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je ne peux vous laisser dire cela !

M. François Sauvadet. Mais s’il y a un domaine sur lequel nous devons marquer une véritable orientation pour les quinze ou vingt prochaines années, c’est bien les biocarburants. Nous entrons en effet dans une période de renchérissement durable du coût du pétrole, qui ne s’apparente pas à une simple crise. Il faudra trouver des solutions pérennes, respectueuses de l’environnement, conformément aux engagements internationaux que nous avons souscrits, notamment le protocole de Kyoto.

L’UDF est attachée depuis des années au développement des biocarburants. Et pour ma part, monsieur Le Déaut, je me suis réjoui que cette loi d’orientation fixe des objectifs clairs, précisément quantifiables. Monsieur le ministre, je me félicite ainsi que vous ayez repris, par un amendement à l’article 11, les objectifs annoncés par le Premier ministre en matière de part des biocarburants dans la consommation totale des carburants. Nous disposons de pourcentages mais aussi de quantités sur lesquels nous devons aboutir à des solutions.

Nous devrons multiplier par six nos capacités de production si nous voulons respecter le pourcentage d’incorporation annoncé. Cela suppose non seulement des procédures d’agrément mais aussi une continuité des investissements dans la filière. Aussi attendons-nous du Gouvernement, et pas seulement du ministre de l’agriculture, qu’il nous dise comment il compte accompagner financièrement la filière alors que le projet de loi de finances propose une réduction d’un tiers des aides fiscales destinées au développement des biocarburants. Car, ne nous le cachons pas, les investissements nécessaires seront extrêmement lourds : si le diester peut trouver les conditions de son équilibre, il faudra être attentif à l’éthanol.

Je souscris à l’engagement pris par Jean Dionis du Séjour et par d’autres à propos des huiles végétales : c’est à l’évidence un facteur d’économies pour les exploitants, mais aussi pour le monde rural, si elles constituent une possibilité offerte aux côtés des grandes filières de l’éthanol et du diester.

Monsieur le ministre, pour ce qui nous concerne, notre vote sera en partie déterminé par vos éclaircissements sur les moyens financiers que compte consacrer le Gouvernement à la réalisation de ses objectifs en matière de biocarburants. Cela passe non seulement par le maintien des aides fiscales mais aussi par la mise en place d’une TGAP visant à obliger les compagnies pétrolières à incorporer des biocarburants dans les carburants mis en vente. Or on envisage de supprimer ce dispositif, qui représente un avantage évident pour les filières de l’éthanol et du diester.

Monsieur le ministre, je vous le redis, nous serons à vos côtés pour ce qui est de l’objectif, mais nous veillerons résolument à ce que les moyens financiers dévolus à l’organisation de la filière soient maintenus.

Enfin, s’agissant de la forêt, nous devrons être beaucoup plus ambitieux afin de donner de nouvelles perspectives à cette filière. Mais cela renvoie à un débat ultérieur sur nos facultés à inciter particuliers et collectivités à utiliser davantage les sous-produits du bois, qui constituent une ressource sous-exploitée.

M. le président. La parole est à M. Michel Roumegoux.

M. Michel Roumegoux. S’agissant des biocarburants, je partage ce que vient de dire notre collègue, mais il faut aussi savoir comment ils seront utilisés. À l’heure actuelle, les agriculteurs n’ont pas beaucoup intérêt à utiliser les huiles végétales. Les producteurs pourront-ils les commercialiser pour les vendre aux agriculteurs non producteurs ? Il est important de savoir si toute la filière agricole pourra y avoir recours.

M. Marc Le Fur, rapporteur pour avis de la commission des finances. C’est en effet très important !

M. Michel Roumegoux. En effet, les agriculteurs veulent pouvoir vivre de leurs productions. Et si nous voulons faire diminuer leurs charges, nous devons leur permettre d’utiliser ces biocarburants. Pourquoi ne pas offrir cette possibilité également à certaines collectivités territoriales ? Produire un biocarburant est une chose, l’utiliser en est une autre.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je ne reviens pas au principe de l’article 11. S’agissant des biocarburants, je ne peux répondre à vos questions sur la fiscalité, car elles relèvent de la loi de finances. Je me rappelle d’ailleurs que l’année dernière, avec M. Sarkozy, alors que j’étais secrétaire d’État au budget, nous avions accepté deux amendements sur les biocarburants, dont l’un émanait du groupe UDF.

Pour répondre précisément à vos questions sur l’appel d’offres, je peux vous dire qu’il sera publié le 20 octobre, que les réponses seront demandées pour le 24 novembre et que les agréments seront délivrés fin décembre.

Pour ce qui est du problème de la jachère, nous aurons besoin de 2 millions d’hectares, soit beaucoup plus que les surfaces actuellement disponibles. Cela nécessitera de faire des transferts de cultures : nous exporterons moins de céréales, mais nous importerons aussi moins de pétrole. Il faudra que de véritables contrats soient signés entre les entreprises et les exploitants, afin que ces derniers puissent acheter à bon prix et qu’ils ne deviennent pas le Lumpenproletariat de l’industrie pétrolière.

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

Ordre du jour
deS prochaineS séanceS

M. le président. Aujourd’hui, mardi 11 octobre, à neuf heures trente, première séance publique :

Débat sur la politique de développement des infrastructures de transport et les conditions d’exploitation des autoroutes.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi, n° 2341, d’orientation agricole :

Rapport, n° 2547, de M. Antoine Herth, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire,

Avis, n° 2544, de Mme Brigitte Barèges, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République,

Avis, n° 2548, de M. Marc Le Fur, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mardi 11 octobre 2005, à une heure quinze.)