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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 15 novembre 2005

61e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

ordre du jour de l’ASSEMBLÉE

M. le président. L’ordre du jour des séances que l’Assemblée nationale tiendra jusqu’au jeudi 1er décembre inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents. Ce document sera annexé au compte rendu.

La Conférence des présidents a par ailleurs décidé que le vote solennel sur le projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme aurait lieu le mardi 29 novembre, après les questions au Gouvernement.

Loi de finances pour 2006

DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (nos 2540, 2568).

Sécurité sanitaire

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs à la sécurité sanitaire.

Je rappelle que la discussion des crédits de cette mission a eu lieu, à titre principal, en commission des finances élargie. Le compte rendu de la réunion de la commission des finances élargie sera annexé à celui de la présente séance.

Cette mission va donc faire l’objet, en séance publique, d’un débat restreint auquel prendront part le Gouvernement, pour une brève intervention, et un orateur par groupe, pour une explication de vote de cinq minutes.

La parole est à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je tiens tout d'abord à remercier les rapporteurs et les députés présents en commission élargie pour l'éclairage qu'ils ont apporté à ce texte, pour leur participation aux débats, et pour l'intérêt qu'ils ont manifesté pour cet enjeu essentiel de notre politique de santé publique : le développement de la veille et de la sécurité sanitaires.

La nouvelle présentation du projet de loi de finances permet de mieux détailler nos actions et, ainsi, de montrer l'importance des moyens que nous consacrons à anticiper les différents risques.

Je suis particulièrement attaché au renforcement d'une véritable culture de la prévention, d'une culture de la veille et de la réponse aux menaces qui pèsent sur la santé de nos concitoyens.

Pour la mission « Sécurité sanitaire », nous pouvons nous appuyer sur des outils d'expertise, de surveillance et d'action renforcés.

Ce sont, d'abord, les agences, dont les moyens sont augmentés, mais qui sont aussi désormais mieux pilotées par l'État, afin d’améliorer leur capacité d'analyse et de réponse en coordination avec tous les acteurs du système de santé. Je sais, mesdames, messieurs les députés, l'importance que vous portez à leur financement. Vous l'avez manifesté par les aménagements que vous avez apportés à la taxe additionnelle sur les autorisations de recherche dévolue à l'AFSSAPS. Je suis sensible à cet intérêt – j'aurai l'occasion d'y revenir dans le débat.

Ce sont, ensuite, les différentes procédures et plans que nous mettons en œuvre pour affronter les risques sanitaires majeurs : la grippe aviaire, qui est, bien sûr, au cœur de nos préoccupations, mais aussi d'autres menaces, que nous n’oublions pas pour autant, comme le bioterrorisme.

En votant les crédits des programmes, la représentation nationale accomplira l'un de ses devoirs, celui de tout mettre en œuvre pour protéger nos concitoyens des risques, notamment sanitaires, qui peuvent les menacer. Elle pourra le faire dans la certitude que nous développons les outils aptes à répondre à ces situations d'urgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les crédits de la mission « Sécurité sanitaire » regroupent l'ensemble des moyens qui concourent à la sécurité sanitaire de la population. Cette nouvelle mission, issue de la mise en œuvre de la LOLF, devrait permettre, sous la tutelle conjointe des ministères de la santé et de l'agriculture, de donner à ces moyens une meilleure cohérence et davantage d'efficacité et de lisibilité.

Ce budget, qui apporte des éclaircissements utiles sur les enjeux en la matière, doit notamment s'examiner à la lumière de l'actualité de ces derniers mois : la prévention de la grippe aviaire.

Nous avons, lors de l’examen en commission, interrogé le Gouvernement sur les moyens d’État dégagés en faveur de cette mobilisation. En effet, si nous connaissions le niveau de participation de l'assurance maladie – 371 millions d’euros pour les années 2005-2006 – nous ignorions celui de la participation de l'État.

Vous nous avez répondu, monsieur le ministre de la santé, que la ligne budgétaire correspondait au plan Biotox, soit un montant de 177 millions d'euros en 2006. Cette réponse appelle deux remarques : outre que ces crédits seront donc partagés entre la prévention des actes terroristes et celle de la grippe aviaire, ils représentent moins de la moitié du montant pris en charge par l’assurance maladie. Cela nous semble anormal.

Par ailleurs, la prévention d'une épidémie de grippe aviaire éventuellement transmise à l'homme est, à cette étape, avant tout un problème de prévention animale.

M. Claude Gaillard. Absolument !

Mme Jacqueline Fraysse. La diminution de 4,2 % des crédits en faveur des soins des maladies animales et de la protection des animaux est donc préoccupante.

De même, nous nous interrogeons sur les moyens attribués à la prévention pour l'aviculture : sur quels fonds seraient prélevées les dépenses nécessaires à la fois à une éventuelle vaccination préventive des animaux et aux éleveurs en cas d’épidémie animale nécessitant un abattage systématique important ?

Le ministère de l'agriculture ne semble pas considérer ces questions comme principales en raison de l'absence actuelle de foyers contaminés. Cela ne nous paraît pas logique : la grippe aviaire, sous sa forme humaine, sera bien, en effet, une mutation de la grippe aviaire animale. C’est donc sur les animaux que doit d'abord porter la prévention.

D'autres points du texte sont plutôt positifs, qu’il s’agisse de la hausse sensible des crédits en faveur de la sécurité sanitaire à tous les stades de la chaîne agro-alimentaire, ou encore de la création de deux nouvelles agences, en particulier l'Agence française de sécurité sanitaire, de l'environnement et du travail – l’AFSSET. Nous avions demandé cette création à plusieurs reprises, et nous nous félicitons d'avoir été entendus.

En revanche, il nous paraît très regrettable et, pour le moins, anachronique que, dans le même temps, le Gouvernement décide de réduire, à partir de 2005, de 60 le nombre de places ouvertes à la formation des médecins du travail, qui était de 73 en 2004.

Comment expliquez-vous cette décision, monsieur le ministre de la santé, alors que la pénurie des médecins du travail – et de prévention – est estimée à plus de 1 500 équivalents temps plein et que le vieillissement de la profession va conduire près de 50 % de ce corps à la retraite d'ici à dix ans ?

En abaissant de 73 à 10 le nombre de places ouvertes chaque année à la formation des médecins du travail, vous provoquez l'arrêt pur et simple de la prévention sur le lieu de l'exercice professionnel, ce qui est préoccupant.

Dans ces conditions, que pourra faire l'AFSSET si aucune application de ses recommandations ou constats n'est possible sur le terrain faute de moyens ? Vous ne m'avez pas répondu sur ce point lors du débat en commission.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Si !

Mme Jacqueline Fraysse. De même, quels seront le rôle et la composition de l'agence dédiée à la santé et au travail ? Comment y seront représentés les personnels et le monde du travail ? Là encore, je n’ai reçu qu’une réponse très générale…

M. le ministre de la santé et des solidarités. Pas du tout !

Mme Jacqueline Fraysse. Je souhaiterais donc une réponse plus précise.

Vous le voyez, nombre de points nous préoccupent dans ce budget.

Nous retenons, cependant, que l'augmentation des crédits permettra aux agences de veille et de sécurité sanitaire de fonctionner, même si, dans l'ensemble, ils demeurent insuffisants.

Nous soutenons, par ailleurs, la création de l’AFSSET, qui nous paraît bien utile, à condition cependant, je le répète, que les moyens nécessaires à son fonctionnement et aux acteurs de terrain chargés de mettre en œuvre le plan Santé au travail, lui soient attribués.

Compte tenu de ces observations, nous nous abstiendrons sur ce budget.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe UMP.

M. Jean-Pierre Door. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'espèce humaine, comme l'espèce animale, est très vulnérable aux risques sanitaires qui se multiplient chaque jour, bien que tout un chacun ait accès aux soins les plus sophistiqués. Les exemples en sont fréquents avec les produits alimentaires, qu’il s’agisse du fromage, de la charcuterie ou, récemment encore, de la viande.

L'expérience montre, hélas, que nous ne sommes pas à l'abri de crises sanitaires de grande ampleur et dont les agents sont multiples : bactéries, virus, parasites ou même prions.

Nous ne sommes pas débarrassés, ni même en voie de l'être, des maladies infectieuses encore aujourd'hui à l’origine d’une mortalité considérable. Nous vivons toujours dans un environnement riche de germes pathogènes dynamiques qui font preuve d'une capacité d'adaptation permanente. Ils sont et resteront les compagnons de route de l'humanité.

Les risques sanitaires existeront toujours dans nos sociétés, car notre environnement, peuplé de micro-organismes, ne sera jamais stérile. Ce n'est ni possible, ni souhaitable.

Néanmoins, la sensibilité des populations sur ces questions est grande, et la moindre alerte, relayée par les médias, rencontre un écho planétaire. Chaque jour on peut lire, voir, entendre se manifester des fantasmes ou quelques grandes peurs, entraînant des comportements parfois inexplicables de l'opinion publique.

À titre d'exemple, rien ne justifie la baisse actuelle de la consommation de volailles dans notre pays, surtout à la veille des fêtes de Noël.

M. Jean-Louis Bernard. C’est vrai !

M. Jean-Pierre Door. Les réformes des années 90, avec la loi de 1998 sur la sécurité sanitaire, liées à une prise de conscience consécutive aux situations de crise que nous avons connues, sont à l'origine de la mise en place d’institutions dénommées agences, chargées de promouvoir la sécurité sanitaire. Ces agences, au nombre de six, ont chacune leur spécificité, leur organisation et leur budget.

De multiples acteurs interviennent en matière sanitaire, particulièrement sur le plan administratif : les ministères de la santé, de l'agriculture, de l'économie et des finances, de l'industrie et de l'environnement, chacun de ces ministères étant compétent à un titre ou à un autre pour traiter de questions qui mettent en jeu la sécurité sanitaire.

Cette complexité de structure, aussi bien horizontale que verticale, répond certes à la complexité de notre société, mais nécessiterait, comme le rappelle la Cour des comptes ou comme le signalait un récent rapport du Sénat, une coordination qui fait souvent défaut.

Monsieur le ministre de la santé, le renforcement des moyens accordés aux agences, notamment en termes d’emplois supplémentaires, est positif.

Nous devons rester en permanence vigilants face à l'apparition du sida, de l'hépatite C, du SRAS, du H5Nl, et aux risques inhérents au bioterrorisme. Des progrès considérables ont été réalisés pour identifier les risques, sous l'impulsion de l'Institut national de veille sanitaire, dont l’efficacité est reconnue par tous.

Le plan gouvernemental pour faire face à une éventuelle pandémie provoquée par le virus H5N1, que vous nous avez détaillé lors de votre dernière audition, nous a paru tout à fait à la hauteur de l’enjeu. Selon le directeur général de l’OMS, la transformation d’un virus de grippe aviaire en une souche hautement pathogène pour l'homme n’est qu’une question de temps. La conférence mondiale sur la grippe aviaire qui a eu lieu ces jours-ci à Genève a adopté un plan d'action d'urgence, visant à contrôler l'épidémie chez les oiseaux avant qu'elle n'engendre une pandémie humaine. J’ai cru comprendre que la France y participerait. Le Président de la République et le président de la Banque mondiale ont souligné la nécessité d’une stratégie mondiale contre la grippe aviaire.

Nous sommes satisfaits de la présence sur le territoire de quarante-sept centres nationaux de référence, qui permettent d'identifier l'origine d'un phénomène épidémique.

Nous sommes également satisfaits de la mise en œuvre de plans expérimentaux sur le terrain, que ce soit en matière de bioterrorisme ou contre l’apparition du virus H5N1 dans le milieu animal, comme en Bretagne.

L’un des rapporteurs pour avis a décrit de façon très exhaustive le plan national d'achat et de stockage des anti-viraux, Tamiflu et Relenza, et de masques, ainsi que les propositions en matière de développement et d'achat des vaccins.

Monsieur le ministre, il faudra aussi tenir compte de l’importance des outils régionaux, en renforçant les moyens des DDASS ainsi que la surveillance, qui doit reposer sur les professionnels de santé. Les GROG, groupements régionaux d’observation de la grippe, sont un parfait exemple.

Monsieur le ministre de l'agriculture, nous notons avec satisfaction l'accélération du principe de déstockage avec élimination des farines animales qui sont éparpillées dans nos campagnes.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Très bien !

M. Jean-Pierre Door. Les crédits devraient augmenter d’environ 46 %, les autorisations de programme passant de 86 à 406 millions d’euros. Je pense que les élus locaux des zones rurales apprécieront.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Tout à fait.

M. Jean-Pierre Door. La sécurité sanitaire est une priorité. Le passé est riche d'enseignements. Tournons-nous vers l'avenir ! M. Jean-Marie Le Guen concluait son rapport pour avis en estimant qu'une position défavorable n'aurait guère de sens dans un tel contexte d'urgence et de mobilisation. C'est bien entendu l’avis des députés UMP, qui voteront ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour le groupe socialiste.

Mme Geneviève Gaillard. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la sécurité sanitaire est devenue, au fil du temps, une préoccupation majeure pour nos concitoyens, qui éprouvent à l'égard de tous les actes de leur vie qu'ils ne maîtrisent pas personnellement, une angoisse justifiée, quelquefois maladive. En effet, les épisodes malheureux en matière de sécurité sanitaire que nous avons connus par le passé ont, à juste raison, laissé des traces indélébiles et généré une perte de confiance des populations envers les institutions et le pouvoir politique en général, qui doit être en capacité de gérer le risque sanitaire.

De nouvelles exigences se sont exprimées aussi bien dans le domaine de la sécurité alimentaire que dans le domaine de l'environnement, ou dans le domaine des produits de santé.

Des outils ont été créés, que je ne rappellerai pas pour économiser mon temps de parole. Je dirai simplement que tous ces établissements relèvent de la même logique, assurer à nos concitoyens un degré de protection important après avoir fait une expertise des risques, anticipé des crises et mis en place des moyens de lutte adaptés.

Par nature, la sécurité sanitaire est une mission transversale, et la présentation de ce budget, sous forme d'une mission interministérielle, est la bienvenue. Il convient néanmoins d'admettre que le risque zéro n'existe pas. Tout juste est-il essentiel de rappeler, monsieur le ministre de la santé, que la sécurité sanitaire est aussi une affaire de choix économiques qui peuvent être sous-tendus par l'action politique.

Le budget se divise en deux programmes : l’un de 104 millions d'euros, l’autre de 538 millions d'euros. Le premier programme baisse de 14 millions d'euros tandis que le second n'augmente que de 35 millions d'euros en crédits de paiement.

Je ne ferai pas l'analyse action par action des crédits de cette mission, me bornant à soulever quelques points.

D'abord, j'aimerais savoir où nous en sommes précisément en matière d'élimination des farines animales. Va-t-on enfin engager réellement leur élimination et, si oui, comment ? Il faut rappeler que les loyers que représente le stockage de ces farines s'élèvent à 39 millions d'euros par an. Le département des Deux-Sèvres ne sait pas encore comment ses farines animales stockées vont pouvoir être éliminées.

La sécurité sanitaire de l'alimentation fait appel aux compétences des services vétérinaires, de la DGCCRF, de la protection des animaux et de l'AFSSA.

Je parlerai d'abord de l'AFFSA, que je connais bien, et vous le savez, monsieur le ministre. Cette agence a une mission d'expertise et son rôle, nous en sommes tous convaincus, est primordial.

Mais je voudrais faire d’abord une remarque de forme. Je trouve que les avis émis par cette agence sont parfois incompréhensibles alors même qu’elle se mobilise de manière rapide et efficace. Je note toutefois que les frais de personnels sont très élevés : ils représentent quasiment 60 % des frais de structures. J'aimerais avoir des explications sur ce phénomène, car, parallèlement, nous savons tous qu'il faut encore augmenter les activités de l'Agence pour mener à bien les missions d'expertises à venir. N'y aurait-il pas de « petites économies » à faire sur certains postes ?

M. Jean-Charles Taugourdeau. Sûrement !

Mme Geneviève Gaillard. Vous le savez, le diable se loge souvent dans les détails !

Je voudrais donc savoir comment sont rémunérés les experts qui interviennent, s’il y a des engagements contractuels. Un comité de suivi a-t-il été mis en place, comme l’avaient demandé les audits menés dans l’Agence ? La coordination avec l'Agence européenne s’est-elle améliorée ? Selon sa directrice, il manque à l’AFFSA 400 000 euros pour assurer un fonctionnement correct, c'est-à-dire remplir les missions d’expertise qui lui sont commandées.

Le ministère de l'agriculture intervient également par le biais des services vétérinaires, qui contrôlent les produits animaux sur l'ensemble de la chaîne alimentaire. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que leurs missions sont particulièrement importantes et que, bien souvent, ils souffrent d'une diminution des personnels qui risque de mettre en péril certaines activités qui leur sont assignées. Mme Fraysse l’a rappelé tout à l’heure, les services vétérinaires sont particulièrement importants et la diminution de leurs crédits m’inquiète grandement.

M. Méhaignerie, président de la commission des finances, a tenu des propos préoccupants lors de la commission élargie. Il a indiqué notamment que les laboratoires publics départementaux avaient tendance à éliminer les laboratoires privés et que, dans certains cas, des structures se superposaient. J’aimerais savoir, monsieur le ministre, quelles perspectives vous envisagez pour les laboratoires départementaux des services vétérinaires, qui jouent un rôle particulièrement important dans le suivi et le diagnostic d’un certain nombre d’épizooties. Leur maintien est indispensable et je ne comprends pas ce procès qui leur est fait.

La DGCCRF conduit des actions très importantes en matière de sécurité sanitaire. Mais, je l’ai constaté maintes fois, elle manque de moyens. L’épisode l’année dernière de l’animal atteint de la rage importé du Maroc par des particuliers a mis en évidence que les contrôles aux frontières des animaux vivants et des animaux morts devaient être notoirement renforcés.

Un certain nombre de domaines restent à explorer, pour lesquels aucun crédit n’est prévu. J’aimerais que vous me donniez des précisions par exemple sur le contrôle de l'ionisation des aliments. Dans ce domaine, la France se distingue par ses dérogations qui étendent la libre exploitation de cette technique à quatorze produits, alors que l'Europe ne le permet que sur les aromates et les condiments. Qu'en est-il ? Qui est en charge de ces problèmes ? Je souhaiterais avoir une réponse claire.

Lors de la commission élargie sur la mission « Sécurité sanitaire », M. Michel Cadot, votre directeur de cabinet, monsieur le ministre de l’agriculture, a rappelé que la mission sanitaire devait aussi se préparer à l’arrivée de nouvelles techniques de production, dont, a-t-il ajouté, bien sûr « les OGM ».

Quand cesserez-vous de nous mener en bateau ?

La directive 2001-18 n'est pas encore transposée. Une mission d'information, dont je faisais partie, a émis des recommandations et depuis, c'est le calme plat. Pouvez-vous nous en dire plus ?

M. le président. Madame Gaillard, il vous faut conclure.

Mme Geneviève Gaillard., Je terminerai en vous parlant des vétérinaires, qui jouent un rôle fondamental dans l’épidémio-surveillance. Lors de leur congrès, aucune réponse ne leur a été apportée concernant la mise en place du Conseil supérieur d'orientation sanitaire, organisme de prospectives qui avait été promis par votre prédécesseur. J’aimerais être rassurée sur la mise en place de ce conseil supérieur, qui devrait s’étendre à tout notre pays.

Voilà, monsieur le ministre, quelques-uns des manques que je voulais relever et à propos desquels j’aimerais obtenir des réponses. Quoi qu’il en soit, le budget de cette mission ne nous satisfait pas et nous voterons contre.

Sécurité sanitaire

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Sécurité sanitaire » inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Les crédits de la mission « Sécurité sanitaire » inscrits à l’état B ne font l’objet d’aucun amendement.

Je les mets aux voix.

(Les crédits de la mission « Sécurité sanitaire » sont adoptés.)

M. le président. Je vais maintenant appeler les articles 86 et 87 du projet de loi de finances, relatifs à la sécurité sanitaire.

Article 86

M. le président. Sur l’article 86, je suis saisi d’un amendement n° 239.

La parole est à M. Richard Mallié, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, pour soutenir cet amendement.

M. Richard Mallié, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche, pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 239.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 239.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 331.

La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche, pour le soutenir.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Il s’agit de corriger une erreur matérielle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 331.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 332.

La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche, pour le soutenir.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Cet amendement instaure une participation des éleveurs au financement du service public de l’équarrissage, conformément à la législation communautaire. Il permet aux entreprises d’équarrissage de recouvrer directement les participations des éleveurs. (« Excellente mesure ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. La commission n’a pas examiné cet amendement, qui a été déposé aujourd’hui. Cet amendement résout le problème de la transition entre la fin de la gestion du CNASEA et la prise en charge par l’Office des viandes, qui n’est pas encore décidée. En outre, il donne un support législatif à la contribution de certains éleveurs au financement du service public d’équarrissage. C’est une très bonne chose. À titre personnel, j’y suis favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. J’aurais aimé que M. le ministre précise quels sont les « certains éleveurs » qui sont concernés parce que le texte est assez flou. Il serait intéressant en outre qu’on sache dans quelles conditions cette participation interviendra et à quoi elle se substituera.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. L’amendement est clair.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. Il s’agit des porcs et des volailles.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 332.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements n°s 329 de M. Mallié, 240 de la commission des finances, 330 de M. Mallié et 241de la commission des finances n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l'article 86, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 86, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 86

M. le président. Je suis saisi d’un amendement, n° 221 rectifié, portant article additionnel après l’article 86.

La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche, pour le soutenir.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Il s’agit d’une nouvelle taxe au profit de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’alimentation, au titre de l’activité d’autorisations de mise sur le marché et de contrôle du médicament vétérinaire. Nous avons besoin d’une augmentation de ressources pour que l’AFSSA accomplisse l’ensemble de ses missions en rendant un meilleur service.

Je signale à l’attention de Mme Gaillard, qui a évoqué tout à l’heure les syndicats vétérinaires, que cette proposition a fait l’objet d’une concertation avec le syndicat professionnel des vétérinaires et des industriels du médicament vétérinaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. La commission n’a pas examiné cet amendement, déposé après la réunion de la commission élargie. J’y suis favorable à titre personnel.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. L’Assemblée nationale ne peut pas travailler correctement si nous devons nous prononcer ce soir sur des amendements qui ont été déposés aujourd’hui et qui n’ont pas été examinés en commission. (« Ils sont clairs ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Heureusement que le président Debré est là pour rappeler que, dans la tradition républicaine, l’opposition a le droit de s’exprimer. Je vous le rappelle, messieurs, car dès que vous votez l’état d’urgence, vous croyez avoir les pleins pouvoirs. L’opposition, selon vous, devrait être muselée. Dans ce cas, nous pouvons quitter l’hémicycle et vous laisser tous seuls. Ce que vous faites est dangereux pour la démocratie ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Le président Debré a eu raison de se mettre en colère contre vous, mais vous n’en tenez pas compte.

Le rapporteur spécial a un avis personnel, et après ? La commission n’a pas fait son travail, et je vous demande, monsieur le président, de transmettre mes observations au président de l’Assemblée nationale, car ce n’est pas normal.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis. On n’est pas à une contradiction près dans cette maison, ce qui n’empêche pas d’être surpris, hormis le fait que cet amendement est un aveu du ministère de sa difficulté à financer l’AFSSA, de voir mise en place une nouvelle taxe, quand on n’a cessé d’entendre qu’il fallait faire la chasse aux taxes.

J’avais entendu parler la semaine dernière d’un amendement sur la question, mais le fait qu’il arrive aujourd’hui, au dernier moment, ne peut que nous intriguer. On aurait aimé, en effet, pouvoir évaluer les conditions dans lesquelles cette taxe allait être créée. Peut-être nos collègues de la majorité ont-ils eu la primeur de cet amendement, mais nous, nous venons seulement de le recevoir. C’est inacceptable, d’autant plus qu’il s’agit d’une ressource nouvelle ayant forcément une incidence – on ignore de quelle ampleur – sur le budget de l’AFSSA mais aussi sur le coût du médicament vétérinaire, puisque cette nouvelle taxe entraînera forcément une réaffectation des coûts.

J’en profite pour répondre au rapporteur spécial à propos des éleveurs de porcs et de volaille. Je lui fais remarquer que jusque-là ils payaient par le biais de leurs organisme mais pas directement. C’est donc une nouvelle taxe qui leur sera imposée, et je ne suis pas sûr qu’ils soient tous, notamment les plus petits d’entre eux, en mesure de la payer.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. Je précise qu’il s’agit des éleveurs de porcs et de volaille qui ne contribuaient pas au service public de l’équarrissage. C’est donc une manière de les y faire contribuer.

D’autre part, je voudrais rassurer M. Gremetz et M. Gaubert. Il est normal qu’ils n’aient pas étudié cet amendement puisque c’est la commission des finances qui était concernée, mais dont ils ne sont pas membres.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis. Mais vous avez dit vous-même que la commission ne l’avait pas étudié !

M. Richard Mallié. J’ai dit qu’au titre de la commission des finances nous ne l’avions pas étudié mais qu’en ce qui me concernait les choses étaient claires. Il se trouve que cet amendement devait être présenté en loi de finances rectificative mais qu’il a été décidé au dernier moment de l’introduire dans la loi de finances initiale. Nous l’avons accepté comme tel. Quant aux membres de la commission des affaires sociales ou de la commission des affaires économiques, ils ne sont pas concernés.

Mme Geneviève Gaillard. Mais si, nous sommes tous concernés !

M. Maxime Gremetz. Si on ne sert à rien, on n’a qu’à s’en aller !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Je souhaite répondre à M. Gaubert qui nous a montré, lors de la discussion sur la loi d’orientation agricole, qu’il connaissait bien le sujet.

Le fait que, jusqu’à présent, les éleveurs de porcs et de volaille ne payaient pas était contraire aux règles communautaires, selon lesquelles soit tout le monde paie, soit personne ne paie.

Nous cherchons par ailleurs depuis des mois – et vous savez, en tant qu’élu breton, que la chose n’est pas facile – à trouver une solution pour financer le service public de l’équarrissage. Il a fallu pour cela que certaines professions, notamment la profession porcine, acceptent de prendre en charge une partie du service. Il s’agit donc d’un acte de discipline collective visant à financer le service public de l’équarrissage. C’est une solution acceptée par tous, car elle est juste et témoigne d’un bon mode de gestion.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis. Je répète qu’il s’agit d’une taxe nouvelle et non, comme l’a dit le rapporteur spécial, de la simple possibilité de récupérer directement cet argent sur l’éleveur.

Je n’ai cessé d’entendre ici qu’il fallait lutter contre toutes les taxes,…

M. Philippe Rouault. Pas contre « toutes » les taxes, monsieur Gaubert !

M. Jean Gaubert. …et en deux minutes, sans consultation des commissions, on crée deux nouvelles taxes. C’est assez extraordinaire !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je ne trouve pas normal que nous découvrions en séance publique des amendements de cette importance, et je n’accepte pas la réponse du rapporteur spécial qui, sous prétexte que je suis membre de la commission des affaires sociales et non de la commission des finances, estime que je n’ai pas à être informée.

Nous avons, dans notre groupe, des députés membres de la commission des finances qui auraient pu examiner cet amendement et avec lesquels nous aurions conversé pour donner un avis autorisé. Je ne trouve pas normal que nous travaillions dans ces conditions et que nous soyons amenés à nous prononcer en quelques minutes sur un texte dont nous n’avons pu apprécier la portée, surtout s’agissant d’une taxe.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. Je ne voulais pas en parler, mais je suis obligé de répondre à Mme Fraysse qui m’a interpellé.

Je suis au regret de dire qu’il n’y avait aucun représentant ni du groupe socialiste, ni du groupe UDF, ni du groupe communiste à la commission des finances.

M. Maxime Gremetz. Ils n’auraient de toute façon pas pu examiner l’amendement.

Mme Jacqueline Fraysse. Évidemment puisqu’il n’a pas été présenté !

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. Il n’est pas question ici de la commission élargie où se réunissent les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis afin de discuter du texte. Seule la commission des finances est saisie sur le fond et se réunit pour étudier tous les amendements. Or, il n’y avait que des représentants de l’UMP à la commission des finances. Celle-ci n’a pas étudié l’amendement, mais elle m’a mandaté pour le faire.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Gaillard.

Mme Geneviève Gaillard. Nous savons tous combien l’AFSSA est un organisme important en matière de sécurité sanitaire. Sans vouloir alimenter la polémique, je suis cependant obligée de dire que je partage l’avis de mes collègues. Ce n’est pas la première fois que j’entends dire dans cet hémicycle, malgré tout le respect que je porte aux uns et aux autres, que, n’étant pas membres de telle ou telle commission, nous ne serions pas concernés. Nous sommes députés de la République française et, à ce titre, intéressés par tous les sujets. En commission élargie, malgré notre participation active, nous n’avons jamais vu cet amendement !

Je souhaite donc également que soit signalé à M. le président de l’Assemblée nationale ce dysfonctionnement que mes collègues ont souligné à juste titre. Les commissions élargies sont là pour étudier les budgets, et la totalité des amendements doit pouvoir être lue par l’ensemble des groupes, surtout lorsqu’il s’agit d’amendements aussi importants que celui-ci.

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Pour conclure, monsieur le président, je souhaiterais distinguer le problème de la forme et celui du fond.

Sur la forme, il faut cesser les querelles non fondées.

M. Maxime Gremetz. Ce ne sont pas des querelles !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je ne m’adresse pas à vous, monsieur Gremetz !

La commission élargie n’a pas à aborder les amendements : c’est du seul ressort de la commission des finances.

Mme Geneviève Gaillard. Elle ne l’a pas fait !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Sur le fond, je citerai les pages 31 et 32 de votre rapport : « L’Agence a désormais épuisé ses marges de manœuvre : elle ne peut plus redéployer de ressources […]. Sa directrice générale estime qu’il ne manque pas moins de 400 000 euros dans le projet de loi de finances. […] On ne peut pas en effet à la fois imposer à l’AFSSA des contraintes nouvelles, faire preuve d’exigence vis-à-vis de son travail et lui opposer le mot d’ordre de rigueur budgétaire à chacune de ses demandes légitimes de hausse de crédits ! »

Le Gouvernement vous a entendu, monsieur Gaubert, et cet amendement arrive à point pour donner à l’AFSSA les moyens de fonctionner. Arrêtons donc les querelles et faisons en sorte de voter l’amendement pour que l’AFSSA puisse fonctionner normalement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert, rapporteur pour avis. Concernant le rapport, je persiste et je signe. Reste qu’une chose est de soulever le problème du financement de l’AFSSA, de constater que depuis 2002 vous avez fait consommé les réserves de l’AFSSA qui aujourd’hui sont inexistantes, ce qui implique de trouver des solutions ; une autre est de demander à ce qu’il y ait un débat légitime sur la meilleure façon de conforter le budget de l’AFSSA. Or, lorsqu’on promet pendant dix jours un amendement qui ne surgit qu’au moment de la séance publique, il me semble que l’on manque de respect au Parlement.

D’autre part, je ne conteste pas le fait que c’est à la commission des finances qu’il revient d’examiner les amendements, mais le rapporteur spécial lui-même, dans un élan de transparence, a avoué que la commission des finances n’avait pas été saisie. C’est cela que nous contestons et non la solution proposée. Grâce à nous, la création de ces deux nouvelles taxes censée se décider en cinq minutes aura au moins duré un quart d’heure !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 221 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. Maxime Gremetz. Je m’en vais ! Je ne participe pas à cette mascarade !

Article 87

M. le président. Sur l’article 87, je suis saisi de trois amendements identiques, nos 242, 178 et 186.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement n° 242.

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. Le projet de loi de finances prévoit de plafonner la taxe additionnelle au profit de l’AFSSA à 8 000 euros. Nous proposons d’abaisser ce plafond à 6 000 euros.

En effet, la moyenne européenne se situe autour de 3 000 euros, le Royaume-Uni étant, avec 5 850 euros, le pays le plus « cher ».

Or nous avons un problème important : si la taxe est trop élevée en France, les entreprises demanderont un agrément dans d’autres pays de l’Union européenne. Pour éviter des délocalisations, cet amendement vise donc à ramener de 8 000 à 6 000 euros la limite du barème de la taxe et de la taxe additionnelle.

M. le président. Les amendements nos 178 et 186 sont également défendus.

Quel est l’avis du Gouvernement sur les trois amendements identiques ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Sagesse !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 242, 178 et 186.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 235.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour le soutenir.

M. Richard Mallié, rapporteur spécial. C’est un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 235.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 87, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 87, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à la sécurité sanitaire.

Nous poursuivons la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006.

Agriculture, pêche, forêt
et affaires rurales

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’agriculture, à la pêche, à la forêt et aux affaires rurales.

La parole est à M. Alain Marleix, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Alain Marleix, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’agriculture et de la pêche, mes chers collègues, je voudrais en préalable féliciter et remercier le ministère de l’agriculture. En effet, l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date limite pour l’envoi des réponses aux questionnaires budgétaires. Or, à cette date, 88 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial qui a pu travailler, in fine, avec 98 % des réponses demandées, chiffre jamais atteint auparavant. Le ministère de l’agriculture mérite donc d’être félicité pour la célérité et la qualité de ses réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Bravo !

M. Alain Marleix, rapporteur spécial. Je tenais à le dire, parce que cela n’a pas toujours été le cas.

M. Philippe Rouault. En effet, il était important de le souligner !

M. Alain Marleix, rapporteur spécial. Le projet de budget du ministère de l’agriculture et de la pêche pour 2006 s’élève à 5 milliards d’euros, contre 4,89 milliards en 2005, ce qui représente une hausse de 2,5 %, significativement supérieure à la hausse des prix. Je tiens à souligner l’effort ainsi consenti par le Gouvernement en faveur des agriculteurs, dans un contexte budgétaire pourtant très tendu. De plus, le soutien budgétaire en faveur du monde agricole va être renforcé au travers de la loi d’orientation agricole, qui doit être publiée d’ici à la fin de l’année. Cette loi prévoit en effet un certain nombre de dispositifs de crédits ou de réductions d’impôt, par exemple pour faciliter la transmission, pour pérenniser l’agriculture biologique ou pour lutter contre les aléas climatiques.

Avec le passage à la LOLF, la nomenclature budgétaire est complètement modifiée. Ainsi la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », que nous allons voter ce soir ou demain matin, ne représente-t-elle plus que 65 % des crédits du ministère. Des efforts significatifs sont réalisés par ailleurs en ce qui concerne l’enseignement technique agricole – plus 5 % –, avec le financement des protocoles passés avec l’enseignement privé, l’enseignement supérieur et la recherche agricoles – plus 10 % – et la sécurité alimentaire – plus 7 % –, avec notamment la réforme du financement de l’équarrissage.

Deux changements de périmètre importants concernent le budget cette année.

D’abord, le compte d’affectation spéciale « Fonds national des courses et de l’élevage » est supprimé, conformément aux demandes réitérées de la commission des finances et de la Cour des comptes. Les prélèvements transitant jusqu’à présent par le compte seront directement rattachés aux sociétés de courses de chevaux, à la fédération qui gère les opérations communes aux différentes sociétés de courses ou d’intérêt général, et, pour le solde, au budget de l’État.

Ensuite, l’Association de développement agricole et rural, l’ADAR, est supprimée. Elle est remplacée par un nouveau compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural », qui a été créé par l’article 37 du projet de loi de finances et dont nous allons aussi voter les crédits. Cette nouvelle formule budgétaire permet de réduire les coûts de gestion et de mettre 111 millions d’euros à la disposition directe du ministre de l’agriculture et de la pêche, avec l’objectif de favoriser les actions innovantes et les démarches partenariales, en associant comme aujourd’hui les principaux réseaux de développement agricole et rural, en particulier les chambres d’agriculture et les instituts techniques agricoles.

Au-delà du projet de loi de finances, je vous rappelle également l’importance du financement public en matière de protection sociale agricole : 11,2 milliards d’euros de recettes fiscales affectées, comme les droits sur le tabac, permettent de financer l’assurance maladie et l’assurance vieillesse des exploitants agricoles, en plus de cotisations professionnelles, qui représentent 20 % des recettes du Fonds de financement des prestations sociales agricoles. La situation financière de ce fonds, qui a succédé au BAPSA et relève aujourd’hui de la loi de financement de la sécurité sociale, est assez préoccupante avec un déficit courant de 1,8 milliard d’euros et une dette de 4,9 milliards d’euros. La MSA a proposé un certain nombre de pistes de financement qui méritent d’être prises en compte ; l’État doit notamment assumer sa responsabilité au titre des dettes passées du BAPSA. Je crois que le ministre du budget a laissé entrevoir des ouvertures en la matière, mais j’attends de vous des précisions à ce sujet, monsieur le ministre de l’agriculture. La protection sociale agricole ne saurait être la variable d’ajustement de la sécurité sociale.

Je constate par ailleurs que les dépenses agricoles de l’Union européenne bénéficiant à la France continuent d’augmenter, contrairement à l’idée généralement reçue : 10,1 milliards d’euros en 2004, 10,3 milliards d’euros en 2005, et la prévision pour 2006 est de 10,5 milliards d’euros. Il faut préserver l’acquis fondamental qu’est pour l’Europe la politique agricole commune. Il s’agit de la seule véritable politique publique intégrée au niveau communautaire : elle a permis à la fois de garantir l’autosuffisance alimentaire des nations européennes à partir des années 60 et de réaliser des gains de productivité formidables.

L’effort de la France en faveur de l’agriculture ne peut donc pas se mesurer réellement sans tenir compte des financements de l’Union européenne, lesquels sont garantis au moins jusqu’en 2013 en vertu de l’accord de Luxembourg de 2003. Le budget national contribue à ces financements au travers du prélèvement sur recettes au profit du budget communautaire. La plupart des mesures financées par le ministère de l’agriculture et de la pêche bénéficient de cofinancements communautaires qui accroissent d’autant l’effet de levier des aides nationales.

Il faut signaler à cet égard que la clef de financement des mesures agro-environnementales et forestières entre l’Union européenne et le budget de l’État sera modifiée en 2006 : alors que les cofinancements étaient à 50-50, l’Union européenne financera désormais 60 % des aides concernées et le budget de l’État 40 %, ce qui explique la réduction des montants inscrits en loi de finances. Pour les agriculteurs, il n’y aura aucune diminution des aides. La France bénéficiera d’un meilleur retour au titre des aides de la PAC, ce dont on peut se féliciter car tel n’a pas été toujours le cas, notamment sous la législature précédente. Je vous rappelle le paiement de l’amende en 2002 pour sous-consommation des crédits européens par notre pays.

Enfin, les collectivités territoriales, régions et départements, apportent aussi au monde agricole des aides financières qui s’élèvent à près d’un milliard d’euros. Les dépenses en faveur du secteur agricole représentent ainsi 20 % des dépenses d’intervention économique de ces collectivités.

Pour en revenir au budget stricto sensu, je vais maintenant vous présenter brièvement les principales mesures nouvelles pour 2006.

Le programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole – PMPOA – est doté de 90 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 40 millions d’euros en crédits de paiement, y compris les crédits inscrits au programme des « Interventions territoriales de l’État » et de la mission « Politique des territoires ». Ces crédits permettent de poursuivre la mise aux normes des élevages situés dans les régions les plus exposées au risque de pollution des eaux par les effluents d’élevage. On peut cependant s’interroger, avec certaines organisations professionnelles agricoles, sur la nécessité de garantir un tel niveau de protection, notamment contre les nitrates, alors que les risques ne sont pas toujours scientifiquement avérés. Des études complémentaires, notamment sur la santé humaine, devraient donc être menées à partir des travaux de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine.

Le plan en faveur des bâtiments d’élevage, très attendu par l’ensemble des éleveurs, qui doivent en permanence adapter leur outil de production, se poursuit en 2006 avec un signal très fort, à savoir une dotation de 55 millions d’euros pour des engagements nouveaux et 45 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 8,8 %. De plus, des dégels significatifs de crédits sont intervenus très récemment. Compte tenu des cofinancements communautaires et de la possibilité de débloquer 20 millions d’euros supplémentaires en 2005 pour 2006, les aides versées aux éleveurs passeront de 70 millions d’euros en 2005 à 110 millions d’euros en 2006, ce qui est une progression considérable.

La prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes –PMTVA – voit sa dotation progresser de 3 millions d’euros. Ce dispositif contribue au maintien de productions de qualité, pour l’exportation de jeunes animaux ou l’engraissement d’animaux de qualité, dans de vastes zones herbagères qui sont menacées de déprise agricole.

Par ailleurs, une mesure nouvelle de 3 millions d’euros est proposée aux agriculteurs qui souhaitent s’engager dans une démarche d’agriculture raisonnée. Elle vient compléter les dispositifs préexistants tels que les contrats d’agriculture durable, qui bénéficient d’une dotation de 64,8 millions d’euros pour des engagements nouveaux à hauteur de 6 000 contrats, afin notamment d’assurer un débouché aux anciens CTE herbagers et « bio ».

Les crédits destinés aux agriculteurs en difficulté sont très fortement majorés : la ligne AGRIDIFF, qui tendait vers zéro dans les budgets précédents, est dotée de 10 millions d’euros. Ces crédits seront mobilisés en faveur des exploitants les plus fragiles au fur et à mesure des crises sectorielles. Des prêts bonifiés de consolidation de dette et des prêts « calamité » sont prévus, pour un montant d’équivalent de subvention de 27 millions d’euros en autorisations d’engagement, ce qui correspond à 220 millions d’euros d’enveloppe de prêts. De même, le Fonds d’allégement des charges financières – FAC – est doublé : sa dotation passera à 5 millions d’euros en 2006. Il permettra de venir en aide aux agriculteurs endettés.

Il faut aussi rappeler, en matière d’allégement des charges pesant sur les agriculteurs, que l’article 9 de la première partie du projet de loi de finances pour 2006 diminue de 20 % la taxe foncière sur les propriétés non bâties payée par les exploitants agricoles, pour un coût de 140 millions d’euros, dans la perspective de la suppression totale de cette taxe. Cet engagement fort du Président de la République devra être tenu.

La réforme des mécanismes de protection contre les calamités agricoles, souhaitée par la profession, se poursuit. Le nouveau dispositif d’incitation à l’assurance récoltes, expérimenté avec succès en 2005, puisque plus de 55 000 contrats ont été souscrits, voit sa dotation budgétaire progresser de 100 %, avec une dotation de 20 millions d’euros en 2006. Le développement progressif de l’assurance récoltes est organisé en cohérence avec le dispositif traditionnel du Fonds national de garantie des calamités agricoles. Celui-ci est notamment mobilisé pour indemniser les conséquences de la sécheresse de 2005, en particulier en faveur des éleveurs qui ont subi une diminution de leurs ressources fourragères. Les deux dispositifs sont, à mon sens, complémentaires, car certains risques, par exemple pour les fourrages, ne sont pas assurables aujourd’hui. Peut-être le seront-ils demain, mais il faut continuer à faire cohabiter les deux dispositifs d’assurance.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Absolument !

M. Alain Marleix, rapporteur spécial. Enfin, des mesures innovantes sont prévues en faveur des industries agro-alimentaires, tout particulièrement des PME : 5,5 millions d’euros de crédits nouveaux sont consacrés à des aides aux entreprises, pour conforter leurs initiatives dans les domaines technologique et commercial, particulièrement à l’exportation. Par ailleurs, des aides à l’investissement sont budgétées à hauteur de 25 millions d’euros en autorisations d’engagement, et un nouvel instrument financier élaboré conjointement avec la banque de développement des PME doit être opérationnel en 2006 pour attribuer des financements de l’ordre de 13,8 millions d’euros, grâce à une dotation budgétaire de 1,8 million d’euros en crédits de paiement.

Ces moyens nouveaux ont pu être dégagés grâce à des efforts significatifs en matière de gestion. Ainsi le ministère de l’agriculture et de la pêche met-il justement à profit le nombre élevé de départs en retraite de fonctionnaires pour ne pas renouveler un certain nombre de postes. À ce titre, le ministère contribue à la réduction des effectifs de l’État à hauteur de 479 équivalents temps plein travaillés compris dans son plafond d’emplois, et de 676 en tenant compte des opérateurs de l’État.

De même, la réforme des offices agricoles constituera en 2006 un des chantiers prioritaires, conformément au projet de loi d’orientation agricole. Le regroupement des sièges nationaux des offices est programmé pour 2007 à Montreuil, et une réflexion est lancée sur les modifications de l’organisation régionale des établissements. L’objectif est de rationaliser l’organisation et de maîtriser les charges de structure. Ainsi, une baisse de 2 % de leurs dépenses de fonctionnement peut-elle être envisagée dès 2006, ce qui représente 3 millions d’euros. Mais il faut aller encore au-delà, car les frais de structure représentent parfois jusqu’à 50 % du budget de certains établissements. Ce n’est qu’en comprimant ces coûts par une réorganisation du réseau des offices que l’on pourra augmenter les crédits d’intervention en faveur des agriculteurs et des filières.

Je ne m’étendrai pas sur les crédits de la pêche, qui ne constituent plus qu’une action au sein d’un programme. Le soutien public à ce secteur, avec une dotation de 32 millions d’euros, en quasi-reconduction par rapport à 2005, permet de poursuivre la maîtrise quantitative de la flotte de pêche et son amélioration qualitative, avec des concours communautaires. L’objectif est d’améliorer l’état de la ressource halieutique par des réductions de capacité de pêche et des mesures de contrôle du respect des quotas et des réglementations.

Pour toutes ces raisons, la commission des finances vous demande, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » et du compte spécial « Développement agricole et rural » pour 2006. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis pour la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, j’ai le plaisir de vous présenter l’avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, qui a examiné, le 8 novembre dernier, les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », sous la présidence de l’excellent Patrick Ollier, qui a rondement mené les discussions et permis à l’ensemble des députés présents de se pencher sur cette question.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Merci !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. J’essaierai d’être bref pour laisser M. Kergueris nous présenter l’avis de notre commission sur les crédits affectés à la pêche. En outre, M. Marleix vient de s’exprimer et il est inutile d’être redondant.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Ce rapport est excellent !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. À l’heure où nous examinons le budget, l’économie agricole est face à d’importantes échéances. Nous le savons : les négociations de l’Organisation mondiale du commerce, qui doivent se poursuivre dans quelques semaines, définiront les règles du jeu d’une compétition internationale de plus en plus dure. D’autre part, la nécessité de fixer le cadre budgétaire pour 2007-2013 est au centre des réflexions de l’Union européenne. Enfin, la mise en place de la PAC réformée constitue un défi majeur pour 2006. D’ailleurs, je sais que non seulement les services du ministère, mais aussi les organisations professionnelles œuvrent beaucoup en ce moment en faveur d’une bonne compréhension par le monde agricole de la réforme des droits à paiement unique.

Il n’en demeure pas moins que 2006 constituera un test grandeur nature pour la validité des options que nous avons prises dans le cadre de cette réforme et que tous les moyens du ministère de l’agriculture et de la pêche devront être mobilisés en ce sens.

Le projet de loi d’orientation agricole adopté la semaine dernière par nos collègues du Sénat, après son examen à l’Assemblée, marque une première étape de la réponse française à ces enjeux et fixe un nouveau cap pour notre agriculture. Il nous appartient à présent de veiller à la cohérence des orientations budgétaires en conservant les mêmes objectifs.

J’aimerais d’abord resituer la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » dans son contexte budgétaire.

La totalité des concours publics à l’agriculture se monte à quelque 32 milliards d’euros provenant, pour 10,5 milliards, du premier et du deuxième pilier de la PAC, pour 15,6 milliards, de la protection sociale – c’est-à-dire du FFIPSA, dont M. Marleix vient de détailler le fonctionnement –, pour environ 0,9 milliard, des collectivités et, pour 5 milliards, des missions pilotées par le ministère de l’agriculture et de la pêche.

Celles-ci sont au nombre de quatre, comme nous venons de l’entendre. Il s’agit des trois missions interministérielles de la sécurité sanitaire – dont le budget pour 2006 vient d’être adopté –, de l’enseignement supérieur agricole et de l’enseignement technique agricole – dont le budget a été examiné par l’Assemblée hier soir.

À la suite de M. Marleix, il me revient de vous détailler la quatrième mission, nommée « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », qui elle-même se décompose en quatre programmes : « Gestion durable de l’agriculture, de la pêche et développement durable », « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », « Forêt » et « Soutien des politiques de l’agriculture ». Cette construction en poupées russes, j’ai tenu à la décomposer devant vous pour situer le débat de ce soir.

D’emblée, je souligne que les crédits de cette mission s’inscrivent en 2006 dans la continuité des efforts consentis pour l’agriculture, puisque, avec une dotation d’environ 2,95 milliards d’euros, ils se situent au même niveau que les crédits inscrits dans la loi de finances initiale pour 2005.

Cette mission connaît par ailleurs des évolutions internes importantes reflétant les priorités de l’action du Gouvernement. Ces évolutions se traduisent notamment par une forte hausse des moyens consacrés à la modernisation des exploitations et à la maîtrise des pollutions d’origine agricole ainsi qu’à la gestion des aléas.

Les moyens alloués à la mise en œuvre de ces politiques devraient en effet permettre, conformément à l’esprit du projet de loi d’orientation agricole, qui entend rapprocher les agriculteurs du marché et favoriser la démarche d’entreprise, de donner aux exploitants les moyens de moderniser leur outil de travail et de gérer les risques de leur activité afin de pouvoir faire face à la concurrence.

J’estime que, en préservant l’essentiel des crédits du budget de l’agriculture et en les affectant sur les actions prioritaires, le projet de loi de finances pour 2006 répond bien aux attentes des professionnels et des citoyens.

Ainsi, je rappelle tout d’abord que, au sein de la mission qui nous intéresse, le programme « Gestion durable de l’agriculture, de la pêche et développement rural » concentre à lui seul 50 % des crédits avec une dotation de près de 1,5 milliard d’euros en crédits de paiement pour 2006. C’est d’ailleurs au sein de ce programme que l’on retrouve les principales augmentations de crédits affectés aux chantiers prioritaires de l’action gouvernementale que sont le développement d’une agriculture durable et la modernisation de l’outil de travail des exploitants. En effet, 2006 devrait constituer également un test important pour la mise en œuvre des nouvelles règles de conditionnalité du paiement des aides de la PAC et ces crédits doivent contribuer à atteindre les objectifs qui nous sont désormais fixés en termes de bonnes pratiques agricoles, de respect de l’environnement et de sécurité alimentaire.

À l’approche de cette échéance, les crédits en faveur de l’action n° 04 du programme connaissent ainsi une hausse de plus de 95 % en crédits de paiement et de 162 % en autorisations d’engagement.

À cet égard, je note à mon tour que le programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole sera doté en 2006 de plus de 80 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 39 millions d’euros en crédits de paiement. Ce montant de crédits devrait permettre la couverture de l’ensemble des zones considérées comme vulnérables, qui doit être achevée avant la fin de 2006.

Quant au plan de modernisation des bâtiments d’élevage pour les filières bovine, ovine et caprine, qui a remplacé depuis le 1er janvier 2005 les anciens dispositifs de financement public de l’investissement en faveur des bâtiments d’élevage, il profitera d’une augmentation de ses crédits de l’ordre de 14 %, avec une dotation de 72 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 45 millions d’euros en crédits de paiement. S’inscrivant dans le cadre du plan de développement rural national, il bénéficie par ailleurs d’un cofinancement communautaire à hauteur de 50 %, qu’il faudra veiller à pérenniser dans le cadre du prochain programme européen de développement rural pour les années 2007-2013.

En ce qui concerne l’action n° 03 « Appui au renouvellement des exploitations agricoles », elle n’enregistre qu’une évolution limitée en crédits de paiements, de 1,62 %. De ce fait, je vous présenterai au nom de la commission des affaires économiques un amendement abondant les crédits du FICIA, le fonds d’intervention et de communication pour l’installation en agriculture, afin de les porter au niveau auquel l’État s’était engagé à les maintenir, c’est-à-dire 10 millions d’euros, et de marquer ainsi notre attachement à la poursuite d’une politique volontariste d’installation de jeunes agriculteurs.

Enfin, l’action n° 05 « Mesures agro-environnementales et territoriales » comporte l’ouverture d’une mesure en faveur de l’agriculture raisonnée que je veux saluer tout particulièrement.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Dans cette même action n° 05 figurent les crédits concernant les contrats d’agriculture durable. À ce sujet, la commission des affaires économique s’est interrogée sur la logique qui consiste à diminuer de 15 % les crédits nationaux, quand on sait par ailleurs que les cofinancements européens vont augmenter. Au final, l’affichage de cette baisse ne dissimule rien d’autre qu’une augmentation. Monsieur le ministre, il faudra que vous nous rappeliez la logique qui conduit à une telle évolution budgétaire et qui permet finalement de consolider la politique environnementale.

M. François Sauvadet. Ce sera intéressant ! (Sourires.)

Mme Geneviève Gaillard. En effet !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Pour ma part, je constate néanmoins un essoufflement du dispositif des contrats d’agriculture durable, avec un nombre prévisionnel de nouveaux contrats en baisse de 40 %. Dès lors, se pose la question de la future stratégie du Gouvernement en vue de renouveler le PDRN à l’horizon de 2007. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur le calendrier de travail que vous comptez mettre en place sur ce point particulier ?

S’agissant du programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », sa dotation pour 2006 à 741,4 millions d’euros en crédits de paiement est en hausse de 4,52 % par rapport à 2005. Elle devrait ainsi permettre la montée en charge progressive du dispositif d’incitation à l’assurance récoltes expérimenté en 2005. Ce dispositif doit en effet répondre aux fortes attentes du monde agricole, qui se sont matérialisées en 2005 par la signature de contrats d’assurance récoltes multirisques par 55 000 exploitants. Pour 2006, la dotation de ce poste budgétaire devrait donc doubler, avec un montant de crédits inscrits au titre du FNGCA, le Fonds national de gestion des calamités agricoles, de 20 millions d’euros.

Je souligne également, après M. Marleix, la majoration des crédits alloués pour 2006 au dispositif AGRIDIFF, qui permettront de financer les aides en faveur du redressement des exploitations en difficulté, ce dont nous nous félicitons.

Enfin, je vous fais part des regrets de la commission des affaires économiques concernant le programme « Forêt », dont la dotation baisse globalement de 5,5 %.

M. François Brottes. Quel courage de le signaler !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Bien qu’elle ne soit pas de nature à entraver la poursuite des actions entreprises par le ministère de l’agriculture et de la pêche pour valoriser la ressource forestière, cette baisse de crédits est un signal négatif en direction de la filière bois et forêt, largement sous-estimée et sous-exploitée en France.

M. François Brottes. Le rapporteur est très critique !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Ainsi, monsieur le ministre, vos propres indicateurs de performance révèlent que seulement 58 % de l’accroissement naturel du bois fait l’objet d’une récolte.

M. André Chassaigne. Absolument !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Comme l’ont mis en évidence les débats sur le projet de loi d’orientation agricole, la forêt recèle un potentiel de richesse et de diversification très important, puisqu’elle se situe en amont d’activités économiques axées sur le développement durable et la recherche de nouveaux débouchés pour l’agriculture, tels que le bois-énergie et la chimie verte.

M. François Brottes. En somme, il n’y a rien dans le budget !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Il conviendra de redonner toutes ses chances à l’économie forestière à travers une meilleure organisation des filières de valorisation, que les pouvoirs publics pourront utilement stimuler.

M. François Sauvadet. Très bien !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. En conclusion, compte tenu du bilan positif que je tire de l’examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » pour 2006, j’appelle la représentation nationale à les voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je tiens à préciser, afin que chacun puisse organiser son travail, que nous ne prendrons pas de questions au cours de cette séance.

La parole est à M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour la pêche.

M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour la pêche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la pêche pour 2006 s’inscrit dans un contexte particulièrement difficile : sur le plan national, tout d’abord, car il ne peut échapper à la rigueur budgétaire ; sur le plan sectoriel, ensuite, car la pêche est à un tournant de son histoire : elle traverse actuellement une crise sans précédent, à laquelle elle ne survivra que si elle parvient à répondre aux trois questions suivantes.

Comment assurer sa survie sans compromettre l’avenir de la ressource ? Comment faire face à une politique sans cesse croissante de sortie de flotte ? Comment assumer des charges sans commune mesure avec ses capacités financières ?

Ces trois interrogations pourraient se résumer ainsi : voulons-nous encore d’une pêche en Europe et en France ? La question peut paraître brutale, monsieur le ministre, et elle l’est sans doute plus encore pour la France que pour les autres pays européens.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Tout à fait.

M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis, pour la pêche. En effet, notre pays possède une façade maritime sans commune mesure avec celle de ses voisins. La pêche française représente plus de 20 000 emplois embarqués et plus de 50 000 emplois induits. Sa production est de 885 000 tonnes pour une consommation annuelle de 2 150 000 tonnes, ce qui laisse une large part aux importations. Compte tenu de son impact économique sur l’ensemble de notre territoire, de son profond enracinement et de la très forte identité culturelle qu’elle génère, une seule réponse est possible : la pêche française doit être soutenue et défendue.

Aussi, je me félicite, monsieur le ministre, de la préservation de l’essentiel de ses crédits dans le projet de loi de finances pour 2006. Malgré une légère baisse de 1,13 %, qui tient compte notamment d’une plus grande mobilisation des fonds communautaires dans le cadre de l’IFOP, ces crédits devraient permettre au Gouvernement de poursuivre son action dans le domaine de la modernisation du secteur et de la connaissance des marchés, voire de la renforcer en matière de gestion durable de la ressource.

Ce dernier poste de dépenses devrait en effet atteindre, en 2006, plus de 7 millions d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de 182 % par rapport à 2005. Cette augmentation permettra à l’État d’intensifier le suivi sanitaire des coquillages – ce qui est très important pour les conchyliculteurs – et d’œuvrer en faveur de l’ajustement de l’effort de pêche, d’une part, et de l’intensification des contrôles, d’autre part, en application des dispositions voulues par Bruxelles.

Je tiens également à saluer le lancement d’un plan d’avenir pour la pêche, qui vise à répondre à trois questions cruciales qui se posent aujourd’hui : comment mieux gérer la ressource ? Comment améliorer la rentabilité du secteur ? Comment rendre le métier plus attractif ? Ce plan d’avenir, que vous avez présenté à Nantes le 14 octobre dernier, lors d’une table ronde réunissant les représentants de la profession, lance des pistes intéressantes, monsieur le ministre. Je pense notamment à l’amélioration de la gestion nationale des quotas, pour mieux répartir la pêche sur l’année, à la création d’un fonds de financement de la recherche stratégique en matière de pêche, afin de déterminer quelles espèces devront être pêchées et quelles techniques de pêche devront être utilisées à l’avenir, ou encore au renforcement de la collecte des données et de la mise en œuvre des contrôles.

À cet égard, je rappelle que toute réforme dans le domaine de la préservation de la ressource halieutique et de la gestion des stocks devra faire l’objet d’une concertation préalable avec les professionnels et être menée en étroite collaboration avec eux.

Vous le savez, monsieur le ministre, évaluer avec certitude l’état de la ressource n’est pas chose aisée et suscite une grande contestation de la part des pêcheurs qui, face au principe de précaution des scientifiques, font valoir leur expérience et leur observation du milieu. Imposer à des pêcheurs des restrictions en raison d’études ou de statistiques qu’ils réfutent ne sert à rien, sinon à opposer scientifiques et professionnels dans des combats stériles. Il est donc impératif de renforcer la collaboration et la codécision, à la fois sur le diagnostic et sur les remèdes, car il ne peut être question de prendre une mesure d’interdiction de pêche sans en mesurer toutes les conséquences.

La récente étude du Conseil économique et social est à ce titre tout à fait explicite : « Une réduction de quotas brutale pouvant aller jusqu’à des interdictions totales peut avoir un effet définitif et condamner une flottille ou un port. Le retour du poisson associé à la perte des outils de production serait alors un paradoxe inacceptable. »

J’en viens à la mise en œuvre du plan de sortie de pêche prévu par le Plan d’avenir et qui devrait être doté de 30 millions d’euros, cofinancés au niveau européen. La nouvelle politique commune de la pêche nous impose désormais de faire correspondre la capacité de pêche aux possibilités de pêche et d’éliminer les aides au renouvellement et à la modernisation des navires de pêche, à l’exception tout de même de celles visant à améliorer la sécurité et les conditions de travail à bord. La France a donc l’obligation d’appliquer, pour un nombre croissant d’espèces, des mesures de limitation de l’accès aux pêcheries, ainsi que des réductions ciblées de l’effort de pêche dans le cadre notamment des plans de restauration.

Toutefois, il convient de s’interroger sur ce que doit être un plan de sortie de flotte et sur la manière dont il doit s’appliquer. Je rappelle que la France a déjà réduit la flotte métropolitaine de moitié au cours des vingt dernières années. Or le résultat de cette politique est en lui-même assez inquiétant. En effet, la flotte française est vieillissante, avec une moyenne d’âge de vingt-cinq ans, alors que celle d’une flotte saine est d’environ quinze ans. Outre les risques d’accidents qu’elle entraîne, cette politique ne répond pas aux exigences du marché, qui impose des outils de plus en plus perfectionnés pour concevoir à bord des bateaux des produits d’une qualité sans cesse améliorée.

Accepter le vieillissement inexorable de notre flotte, c’est accepter la mort à petit feu de la pêche française. Le rapport du Conseil économique et social que je citais il y a un instant a, du reste, très clairement posé la question : « Sans poissons, la pêche disparaîtra, sans pêcheurs ou navires, la filière s’écroulera. » À nous de rester vigilants pour que nos sorties de flotte ne soient pas un remède pire que le mal et ne compromettent pas l’avenir de la pêche française.

Lorsque, comme moi – et, j’en suis certain, comme vous, monsieur le ministre –, on est convaincu du rôle essentiel de la pêche en France, on ne peut, dans ce débat budgétaire, faire l’impasse sur un sujet essentiel pour l’avenir de ce secteur, celui de l’attractivité du métier.

Celle-ci soulève de grandes questions d’une actualité brûlante : le statut de l’entreprise de pêche et sa rentabilité. De ce point de vue, les propositions du Gouvernement visant à renforcer l’attractivité et la rentabilité du secteur vont dans le bon sens. Le revenu des pêcheurs est en effet, comme celui des agriculteurs, soumis à de nombreux aléas. À cet égard, je ne saurais trop insister sur l’importance de la reconduction du Fonds de prévention des aléas de la pêche après le 31 décembre 2005. S’il ne l’était pas, 75 % de la flotte seraient à quai dès le 1er janvier 2006. Il est donc impératif que la France fasse entendre sa voix pour défendre un système que toute l’Europe du Sud nous envie. J’espère que vous pourrez, au cours du débat, nous annoncer officiellement la reconduction du FPAP, gage de paix sociale dans nos ports.

Par ailleurs, l’attractivité dépend largement de la rentabilité de l’entreprise. Ce métier, aussi merveilleux qu’il est rude, ne peut s’embrasser sans perspective de rentabilité, comme toute activité économique digne de ce nom. Or le revenu des pêcheurs est soumis aux variations de la conjoncture, notamment des cours de l’énergie. L’État fait déjà beaucoup pour atténuer l’impact de ces variations en consentant une défiscalisation complète du carburant utilisé par les navires, dont le coût est estimé à 230 millions d’euros pour 2006. Le moment est sans doute venu de faire preuve d’imagination pour alléger les charges qui pèsent sur la gestion de nos bateaux. Je pense, par exemple, à l’économètre ou au biocarburant.

Enfin, autre élément important de l’attractivité : le statut même de l’entreprise. La société de pêche artisanale telle qu’elle est conçue, notamment après la disparition des Sofipêches pour cause d’euro-incompatibilité, pose un vrai problème. Il faut donc impérativement trouver un système euro-compatible permettant l’apport de capitaux neufs dans la société de pêche artisanale. La profession a fait des propositions : le capital pourrait ainsi être ouvert, en cas de copropriété avec un armement coopératif, à des personnes physiques sans lien de parenté avec les artisans pêcheurs ; l’investissement constitutif d’une activité professionnelle pourrait être limité dans le temps à trois ans ; le taux d’amortissement dégressif susceptible d’être pratiqué pour les navires de pêche pourrait être majoré d’au moins 30 %. Avec ce dispositif, l’arrivé de capitaux extérieurs permettrait de pallier la disparition des aides, subventions, prêts bonifiés, ainsi que des Sofipêches, et permettrait à l’artisan pêcheur d’accéder aux solutions classiques d’accompagnement financier en fonds propres. Je souhaite ardemment, monsieur le ministre, que la France fasse entendre à Bruxelles la voix des professionnels, qui se battent pour une seule chose : la survie de la pêche française.

Tels sont les grands dossiers qui nous attendent et sur lesquels la France devra se battre. Je sais pouvoir compter sur votre soutien indéfectible, monsieur le ministre. Aussi, compte tenu de la bonne tenue du budget de la pêche pour 2006 et des nouvelles perspectives ouvertes par le Plan d’avenir pour la pêche qui, pour certaines d’entre elles, trouveront une traduction dès l’année prochaine, j’invite la représentation nationale à apporter son soutien aux crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » que vous nous présentez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, premier orateur inscrit.

M. André Chassaigne. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, comparé aux précédents budgets du ministère de l’agriculture, celui de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » paraît quelque peu démembré, plusieurs programmes, notamment ceux de l’enseignement agricole, de la sécurité et la qualité sanitaire des aliments, ayant été discutés avec d’autres missions. Cette modification de périmètre, qui altère évidemment la visibilité de ce budget, est d’autant plus regrettable que nous ne débattions déjà que partiellement des interventions publiques à destination du secteur de l’agriculture. Alors que 10 milliards d’euros relèvent normalement de la politique agricole commune, nous ne discutons ce soir que d’un budget de 3 milliards d’euros.

M. Alain Marleix, rapporteur spécial. Non, de 5 milliards !

M. André Chassaigne. Cette absence de vision globale des interventions publiques en matière agricole est, encore une fois, tout à fait regrettable.

À périmètre constant, le budget de l’agriculture est en hausse de 2,5 % pour 2006. Si l’on prend en compte la seule mission examinée aujourd’hui, qui ne comprend que 60 % des crédits du budget de l’agriculture votée l’année dernière, il est en légère baisse, s’élevant à un peu moins de 3 milliards d’euros – je ne parle évidemment pas des crédits de paiement. L’ampleur de cette « crampe budgétaire » est bien plus douloureuse encore si l’on tient compte de l’inflation, prévue à 1,8 % l’an prochain. N’oublions pas non plus qu’en six ans, le budget de l’agriculture a baissé de 30 % en monnaie constante.

En ce qui concerne le renouvellement des exploitations agricoles, vous annoncez un relèvement du plafond des aides à l’installation, qui est fixé à 30 000 euros pour les jeunes agriculteurs acceptant un appui technique lors de leurs trois premières années d’exploitation. Fort bien, mais le gouvernement acceptera-t-il enfin de considérer que près d’une installation sur deux est réalisée sans aide à l’installation d’État, simplement parce que les critères d’octroi de la DJA ne prennent pas suffisamment en compte certaines évolutions du métier ? Je pense notamment aux efforts de valorisation des produits sur l’exploitation ou au développement de l’agrotourisme. À cette question fondamentale pour le maintien d’une activité agricole dans les territoires ruraux les moins favorisés, nous aimerions obtenir une réponse.

Le renouvellement des exploitations agricoles pose aussi, évidemment, la question du pouvoir d’achat des retraités. Après votre troublant mutisme sur ce sujet lors des débats sur la loi d’orientation agricole à l’Assemblée, monsieur le ministre, nous avons été agréablement surpris par les avancées votées au Sénat. J’y reviendrai.

Nous dénonçons vivement, dans ce projet de budget, l’abandon progressif des politiques agro-environnementales et territoriales : le nombre de nouvelles signatures de contrats d’agriculture durable – déjà de tristes ersatz des CTE – va encore diminuer, tombant à 6 000. C’est un nouveau coup porté aux évolutions agro-environnementales et à la modernisation de nos exploitations, et un choix qui ne pourra qu’aggraver la fragilité de notre agriculture.

En outre, dans le droit fil d’une loi d’orientation agricole destinée à favoriser les plus gros agriculteurs, le Gouvernement est revenu sur sa promesse de revaloriser, sur la législature, l’ICHN, indemnité compensatrice des handicaps naturels, versée au titre des 25 premiers hectares en vue d’aboutir à un différentiel de 50 % avec l’indemnité compensatrice des handicaps naturels versée au titre des 25 hectares suivants. En effet, comme en 2005, le taux de la majoration de l’ICHN versée au titre des 25 premiers hectares sera seulement de 30 %, puisque l’augmentation de 10 % promise pour cette année n’aura pas lieu. Cette décision politique privera incontestablement les plus petits agriculteurs de montagne d’un surcroît d’aides qui leur avait été annoncé et dont ils ont aujourd’hui grand besoin, C’est une nouvelle preuve, peut-être passagère, de votre inclination à laisser dépérir les petits paysans, qui font pourtant la vitalité et la richesse de nos montagnes. J’espère que notre assemblée saura sagement réparer ce que je considère comme une inconséquence.

Plus généralement, je tiens à rappeler la nécessité de trouver une solution aux problèmes de collecte de lait qui concernent de plus en plus d’éleveurs, notamment en montagne, du fait du désengagement de certains groupes industriels transformateurs. (« C’est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Déjà confrontés aux baisses brutales du prix du lait, beaucoup d’éleveurs se soucient à juste titre de leurs difficultés à écouler leurs productions. Si vous vous rendez dans les secteurs de montagne, vous y constaterez qu’il reste encore beaucoup à faire en ce domaine.

Mme Henriette Martinez. Tout à fait !

Mme Sylvia Bassot. Et pas seulement en montagne !

M. André Chassaigne. Des engagements avaient d’ailleurs été pris ici même par votre prédécesseur, M. Gaymard, qui avait promis de s’attaquer à cette question et d’y apporter des solutions.

M. François Rochebloine. Mais on l’a mis dehors !

M. André Chassaigne. Le programme « Valorisation des produits et régulation des marchés » bénéficie d’une augmentation de crédits. Je me félicite notamment de l’augmentation des crédits finançant la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes. En revanche, je suis au regret de constater qu’au sein de ce programme, la ventilation des crédits est tout sauf satisfaisante : ainsi, l’État n’accroît la dotation au Fonds national de garantie des calamités agricoles que pour favoriser le développement des assurances contre les aléas de production ! Il s’agit simplement d’accélérer l’abandon d’un système fondé sur la solidarité de tout le monde paysan. Certes, ce système fonctionnait mal. Mais ses dysfonctionnements étaient plus la conséquence de la faiblesse de ses dotations budgétaires que de son mode d’organisation, avec un double effet de seuil de 27 % et 14 %. Nous ne pouvons accepter que l’État ne se penche sur la question de la gestion des aléas de production que pour favoriser des assurances privées !

Vous n’ignorez pas, monsieur le ministre, que la nouvelle PAC n’est pas populaire dans nos campagnes. Au-delà du fait qu’elle encourage la baisse des prix agricoles, beaucoup de paysans lui reprochent d’être bureaucratique. Ils ne pourront qu’être confortés dans leur opinion en constatant la hausse des crédits destinés à la gestion des aides communautaires. C’est un aveu ! L’Union européenne a créé une magnifique usine à gaz dont elle confie les aspects rond-de-cuir aux États. N’est-ce pas l’augure d’une renationalisation des politiques agricoles en Europe ?

Nous avions eu, lors de nos débats sur la loi d’orientation agricole, d’intéressants échanges sur la réforme de l’Institut national des appellations d’origine. Beaucoup d’orateurs, notamment issus de votre majorité, avaient insisté sur les problèmes posés par la mise au régime sec de l’INAO : son budget ne lui permet pas de remplir sa mission comme il convient. Je crois me souvenir que vous aviez montré, monsieur le ministre, une certaine sollicitude – une sollicitude gourmande, pourrait-on dire –devant ce problème. Nous ne pouvons donc pas accepter que les crédits de l’Institut soient simplement stabilisés. Ce revirement, vous en conviendrez, manque pour le moins d’élégance – pour tout dire, il confine même à l’impolitesse.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Il y aura un amendement sur ce point, monsieur Chassaigne, et j’espère que vous le voterez !

M. André Chassaigne. Je me félicite de cet amendement qui devrait racheter l’impolitesse que je viens d’évoquer, monsieur le ministre. (Sourires.)

De la même façon, la question de la gestion des crises agricoles reste d’actualité. Les aides en faveur du redressement des exploitations en difficulté – les crédits AGRIDIFF – augmentent cette année, me direz-vous. Ce n’est pas bien difficile, puisqu’elles avaient été supprimées l’année dernière ! J’ai apprécié l’habileté de la présentation de mon collègue du Cantal, selon lequel le montant des aides était « proche de zéro » l’an dernier. Celles-ci, qui resteront l’année prochaine à un niveau extrêmement faible, ne permettront pas à l’État de soutenir comme il le faudrait les paysans victimes cet été de la sécheresse, et cet automne de la ridicule campagne de presse sur la grippe aviaire. La filière avicole était déjà confrontée à une grave crise économique due à son intégration totale à l’industrie agro-alimentaire, donc aux circuits économiques de la mondialisation capitaliste. Une nouvelle campagne médiatique, tout comme une épizootie véritable de grippe aviaire, pourrait la mettre à genoux. Et nous savons déjà qu’avec ce budget l’État ne disposera pas des fonds nécessaires pour aider la filière à sortir de la crise.

Ce budget n’aborde pas, de facto, la question du revenu paysan. Nous n’en sommes pas surpris. Mais que proposez-vous aux agriculteurs pour faire face à la hausse du prix du gazole ? Comment les agriculteurs pourront-ils résister à la baisse des aides de la PAC de 7 % en 2006 si aucune mesure n’est prise pour relever les prix agricoles ?

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. D’où sortez-vous cela ?

M. André Chassaigne. Je ne l’ai pas inventé ! Regardez les chiffres, et vous constaterez qu’une baisse de 7 % en moyenne par agriculteur est bel et bien prévue.

Rappelons aussi, au-delà de la question de l’occurrence des crises agricoles, combien les disparités de revenus entre les agriculteurs sont fortes, et combien s’impose une meilleure redistribution de ces revenus. Mes propos ne vous étonneront sans doute pas, monsieur le ministre.

La filière bois, quant à elle, n’avait pas besoin d’une baisse de 5,5 % de ses dotations budgétaires, ce qu’Antoine Herth a dit avant moi avec beaucoup d’élégance. Nous savons tous pourtant que la forêt est un remarquable vivier d’emplois ; certes, ce n’est pas comme les champignons, il ne suffit pas de se baisser pour les ramasser ! Mais, en ce domaine, la volonté politique est aussi déterminante que les conditions climatiques pour les champignons. En fait, votre gouvernement ne semble pas très disposé à appliquer les orientations de la loi forestière de 2001. Le décalage avec les besoins est énorme : je pense en particulier à la liste d’attente de plusieurs années pour le financement des pistes forestières – une vraie catastrophe dans nos départements, monsieur le ministre. De même, la fermeture généralisée de gares de fret est un coup très dur porté à la filière, auquel vous ne réagissez pas.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. C’est un coup de M. Gayssot !

M. le président. Il va falloir conclure, monsieur Chassaigne !

M. André Chassaigne. Je termine, monsieur le président.

Est-ce en réduisant le budget consacré à la forêt que l’on parviendra à faire sauter tous les goulets d’étranglement qui bloquent aujourd’hui le développement de la filière bois ?

Enfin, je souhaite évoquer le problème du FFIPSA, donc celui du financement de la sécurité sociale des agriculteurs. Nous avions dénoncé la disparition du budget annexe des prestations sociales agricoles.

M. François Sauvadet. Nous aussi !

M. le président. Je vous remercie de conclure, monsieur Chassaigne…

M. André Chassaigne. Je vais conclure, monsieur le président. Ne vous inquiétez pas, je ne me comporterai pas comme Maxime Gremetz !

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. On reconnaît bien là le penchant naturel du parti communiste pour l’autocritique ! (Sourires.)

M. André Chassaigne. Ce choix vous a permis de reléguer le débat loin des sphères politiques. En ne versant pas les subventions d’équilibre du BAPSA, l’État laisse, de fait, dépérir la protection sociale agricole. Il persiste aujourd’hui dans cette orientation, laissant le FFIPSA accumuler les dettes : celui-ci était déjà endetté à hauteur de 3 milliards d’euros à sa création en 2005, et connaît depuis lors un déficit annuel de près de 2 milliards d’euros.

L’attentisme du Gouvernement sur ce point donne la fâcheuse impression que celui-ci prépare le terrain en vue d’une réforme profonde de la mutualité sociale agricole, dont personne ne veut, qu’il s’agisse de sa fusion avec le régime général, qui reviendrait à supprimer le dernier régime où règne encore un minimum de démocratie sociale, ou de sa privatisation, qui serait dramatique pour tous les paysans. C’est pourquoi nous exigeons que l’État respecte enfin ses engagements à l’égard de la mutualité sociale agricole et qu’il abonde, en urgence, le FFIPSA.

Si j’avais disposé de plus de temps, j’aurais pu souligner à quel point ce budget est déconnecté de la loi d’orientation agricole votée la semaine dernière au Sénat. Rien d’étonnant à cela, puisque le credo du marché libre et non faussé doit progressivement devenir la ligne de conduite de notre agriculture.

Pour toutes ces raisons, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous aurez compris que les députés communistes et républicains émettront un vote négatif sur le budget de cette mission (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Quel dommage !

M. le président. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget dont nous débattons ce soir s’inscrit dans un contexte budgétaire difficile, comme l’est aussi la conjoncture économique au niveau européen et mondial, avec un prix du baril qui nous a valu un ralentissement du taux de croissance de presque un point.

Si l’on recolle tous les morceaux que constituent les différentes missions, monsieur le ministre, on peut constater que votre budget augmente de 2,5 %. Toutefois, loin de moi l’idée de penser que l’augmentation ou la diminution d’un budget puisse être considérée comme un critère de qualité. C’est donc en analysant les choix qui le caractérisent que je vais m’efforcer de démontrer les qualités du budget qui nous est présenté.

Les nouvelles négociations au sein de l’Organisation mondiale du commerce sont d’ores et déjà engagées, et l’avenir de l’agriculture dépend en grande partie de la qualité des négociations menées dans ce cadre. Certes, la fermeté des ministres français, en particulier du ministre de l’agriculture, aide nos négociateurs européens à être fermes eux aussi, mais cela ne suffit pas toujours. Il convient donc de les encourager à faire preuve d’encore plus de fermeté au niveau européen dans le cadre de ces importantes négociations.

La situation de l’agriculture française doit également s’apprécier au regard de la mise en œuvre en 2006 de la réforme de la politique agricole commune. Il ne sert plus à rien de critiquer la PAC désormais, et nous n’avons plus qu’à faire confiance à l’intelligence des agriculteurs et de nos administrations pour qu’ils en fassent une application aussi positive que possible – je pense en particulier aux fameux DPU.

La loi d’orientation agricole qui vient d’être adoptée au Sénat, après avoir été votée par notre assemblée, sera un outil précieux pour favoriser la démarche d’entreprise, tant sur le plan fiscal que sur le plan juridique, et sur des points aussi divers que l’assouplissement du contrôle des structures, le développement de nouveaux débouchés agricoles, ou encore les moyens de favoriser la mise en marché des produits et le développement de produits non alimentaires.

Bien que nous n’ayons vocation à débattre que de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », permettez-moi d’évoquer l’ensemble du budget agricole, comme nous avons l’habitude de le faire.

C’est un budget global de 5 milliards d’euros, auquel il convient d’ajouter les 10,5 milliards d’euros d’aides européennes et les 12,5 milliards d’euros de l’aide à la protection sociale. La mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » représente tout de même 60 % du budget global de l’agriculture, c’est-à-dire pratiquement 3 milliards d’euros – un chiffre comparable à celui de l’année 2005.

Les crédits de l’enseignement agricole figurent dans la mission interministérielle « Enseignement scolaire », dont ils constituent l’un des six programmes. Lors de son examen, les députés UMP ont été nombreux à estimer que l’enseignement privé était défavorisé par rapport au public, et un amendement, portant sur 15,5 millions d’euros, a été adopté hier soir, visant à rééquilibrer les crédits des deux secteurs.

M. François Rochebloine. C’est 8 millions d’euros, pas 15,5 !

M. Michel Raison. Il ne s’agit pas là d’idéologie mais d’une simple recherche d’efficacité. Chacun s’accorde en effet à reconnaître la qualité de l’enseignement privé agricole, pourtant insuffisamment doté. Nul doute que s’il existait dans les quartiers de nos villes des structures comparables aux maisons familiales rurales, nous ne connaîtrions sans doute pas les difficultés que nous sommes en train de vivre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Les crédits du programme « Enseignement supérieur et recherche agricoles » – l’un des treize programmes de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » – ont notablement augmenté cette année.

Les deux missions représentent 30 % du budget total du ministère de l’agriculture, ce qui montre que celui-ci ne concerne pas seulement les agriculteurs et le secteur agro-alimentaire, mais également les fils de ruraux ou même d’urbains qui souhaitent faire des études agricoles.

Quelques motifs de satisfaction, monsieur le ministre. Cela fait toujours du bien d’en avoir quand on est ministre, n’est-ce pas ? (Sourires.) Il y a d’abord la baisse de 20 % du foncier non bâti, soit 140 millions d’euros. Cela va réduire les charges des exploitants agricoles en 2006. Il y a aussi l’aménagement de la fiscalité des biocarburants pour permettre enfin un développement convenable de cette filière en France. Je pense à ce qui se passe par exemple au Brésil. Il y a encore la réforme de l’équarrissage, qui est l’aboutissement de deux ans de travail et sur laquelle je ne m’attarderai pas pour ne pas allonger mon propos. Je rappellerai simplement que nous avions trouvé ce dossier dans un état de décomposition avancée. (Sourires.) Il y a également la TIPP sur le fioul. L’orateur précédent, pour lequel j’ai du respect, voire de l’amitié,…

M. André Chassaigne. Merci !

M. Michel Raison. …a considéré qu’on n’avait pas fait grand-chose en la matière. Or les pêcheurs et les agriculteurs ont particulièrement bénéficié de l’attention du Gouvernement.

Toujours au titre des motifs de satisfaction, je veux souligner les différentes mesures prises dans le cadre de la loi d’orientation agricole : le plan « crédit transmission », le crédit d’impôt pour remplacement, la suppression de la cotisation de solidarité pour les associés non exploitants, ce qui permettra l’apport de capitaux extérieurs dans une agriculture qui en a bien besoin compte tenu de la rotation très lente et de la faible rentabilité des capitaux dans ce secteur. Il faut noter encore l’amélioration des différentes provisions, la déduction pour aléa ou pour investissement.

Autre grand motif de satisfaction, M. Kergueris l’a dit, nous avons enfin un véritable plan d’avenir pour la pêche, qui en avait bien besoin.

M. François Liberti. Mais non !

M. André Chassaigne. La mariée est trop belle !

M. Michel Raison. Monsieur le ministre, quelques priorités ont été dégagées. Et c’est au choix de ces dernières qu’on mesure la qualité d’un budget, et non pas au volume global des crédits, que ceux-ci augmentent ou baissent. Dans un contexte budgétaire difficile, il fallait que le ministère commence par donner l’exemple en matière d’économies de charge, avec une réduction des frais de fonctionnement. En l’occurrence, il faut noter une réduction d’environ 500 postes en équivalent temps plein travaillé grâce à une meilleure organisation. Il faut également relever une baisse de 2 % du coût de fonctionnement des offices. Une meilleure rationalisation nous permettra d’être aussi efficaces avec un coût inférieur.

Vous avez pu ainsi dégager un certain nombre de priorités. Au rang de celles-ci figure une augmentation importante de la PMTVA. Et Dieu sait si c’est important en matière d’aménagement du territoire et en matière environnementale !

M. François Sauvadet. Très juste !

M. Michel Raison. Et il n’y a pas que les charolaises en France, monsieur Sauvadet. Il y a aussi les limousines. Mais peut-être ne les connaissez-vous pas ?

M. François Sauvadet. Ne me cherchez pas, monsieur Raison ! (Sourires.)

M. Michel Raison. Je plaisantais.

S’agissant des agriculteurs en difficulté, il nous fallait rappeler chaque année que les crédits étaient insuffisants. Eh bien, 10 millions d’euros sont prévus dans ce budget et ils devraient nous permettre de faire face d’emblée !

Le FAC a également doublé – 5 millions d’euros contre 2,4.

Le plan bâtiment, qui a été mis en place l’année dernière et qui a connu un succès important, n’a peut-être pas bénéficié de crédits suffisants. C’est chose faite cette fois-ci. Avec 45 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 14 %, nous devrions arriver à faire face.

Le PMPOA est en hausse de 49 %, avec 40 millions d’euros en crédits de paiement. Certes, il reste à couvrir quelques autorisations de programme sur 2004 et 2005.

Par ailleurs, l’aide au bâtiment, conditionnée par un certain nombre de critères, constitue le bon levier pour une meilleure intégration paysagère. Toute aide doit en effet servir de levier, économique ou environnemental.

La sécurité sanitaire et qualitative de l’alimentation a été abordée en début de séance. Je rappellerai simplement que son budget augmente de 6%.

Notons encore que le projet prévoit 3 millions d’euros pour l’agriculture raisonnée, dont on ne parle pas beaucoup. Il est en revanche souvent question d’agriculture « bio », laquelle pourtant ne représente pas grand-chose et de toute façon pas l’avenir de l’agriculture.

M. André Chassaigne. Ah bon ?

M. Michel Raison. L’agriculture raisonnée doit donc être soutenue et devra l’être davantage encore à l’avenir.

Quelques mots sur le renouvellement des générations. La loi d’orientation agricole a mis en place quelques outils nouveaux précisément adaptés au nouveau contexte – certains collègues semblent avoir oublié que le contexte a changé. Il appartient à présent aux agriculteurs de savoir se servir de ces nouveaux outils. Quand on change de moissonneuse, il faut bien un an ou deux pour s’habituer à la nouvelle machine ! (Sourires.)

Les aides en faveur du renouvellement des générations bénéficient d’une augmentation de 2 %, et c’est une bonne chose.

Quelques commentaires sur les mesures agro-environnementales. On parle beaucoup de l’insuffisance de crédits affectés aux CAD. Je rappellerai ici que, lorsque nous sommes arrivés aux affaires en 2002, les fameux CTE, qui avaient servi à faire rêver les agriculteurs,…

M. François Brottes. Pas qu’à les faire rêver !

M. Germinal Peiro. Ces contrats étaient très utiles !

M. Kléber Mesquida. C’était une excellente mesure !

M. Michel Raison. …ne bénéficiaient que d’une dotation de 100 millions d’euros. Aujourd’hui, quand on additionne les aides françaises et européennes, on parvient à un total de 350 millions d’euros pour les CAD, si critiqués. Et dans le même temps, nous avons mis en place au niveau européen l’éco-conditionnalité. C’est là que réside l’efficacité en matière d’environnement et non pas dans des contrats qui ne servent que 10 % de ce qui devrait être fait dans ce domaine.

J’en viens au programme « Forêt », en quelques mots.

M. François Brottes. En effet, il n’y a pas grand-chose à dire !

M. André Chassaigne. Tout va très bien, madame la marquise !

M. Michel Raison. Les 303 millions qui lui sont attribués me semblent insuffisants, monsieur le ministre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Gaubert. Enfin de la lucidité !

M. Michel Raison. Certes, ils pourraient suffire pour la forêt publique. Mais la forêt privée, qui représente 75 % de la forêt sur notre territoire, a de gros besoins en matière de desserte, d’amélioration de gestion et d’organisation. Il faudra donc certainement réfléchir à une amélioration de la dotation.

S’agissant de l’ICHN, j’avais cru comprendre qu’une augmentation de 10 % sur les vingt-cinq premiers hectares devait intervenir dans le budget de 2006. Mes calculs ne sont peut-être pas exacts, mais il me semble qu’il manque quelques crédits pour atteindre l’objectif. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. André Chassaigne. Quelle délicatesse dans le propos !

M. François Brottes. Mais M. Raison fait preuve d’une belle lucidité !

M. Michel Raison. Je fais confiance au ministre pour trouver, dans l’année, des solutions qui permettront de parvenir à cette progression nécessaire pour les 105 000 paysans de montagne qui ont pu le rester grâce à ces fameuses compensations de handicaps, mises en place en France et en Europe depuis un certain nombre d’années maintenant.

M. François Brottes. Très bien !

M. Michel Raison. S’agissant de l’agro-alimentaire, plusieurs mesures innovantes ont été mises en place avec une augmentation de 14 millions d’euros des crédits, dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Quelques mots enfin sur le FFIPSA, qui nécessite d’importants besoins financiers. On peut se réjouir, à cet égard, des déclarations de Jean-François Copé qui a annoncé un geste du Gouvernement pour renflouer ce fonds à hauteur de 300 millions d’euros prélevés sur le produit des taxes sur les tabacs, et la prise en charge de 1,5 million d’euros d’emprunt.

Les articles de presse que j’ai pu lire sur ce sujet laissaient entendre que les autres secteurs sociaux seraient amenés à « renflouer » le secteur agricole. Or c’est totalement faux du fait même de la compensation démographique. Lorsqu’un agriculteur a 3,5 enfants par exemple…

M. François Brottes. Combien a-t-il d’enfants, votre agriculteur ? (Sourires.)

M. Michel Raison. Je parle de moyenne, mes chers collègues ! Si un agriculteur a donc 3,5 enfants et que 1,5 seulement s’installe, 2 partent dans le régime général et seront amenés à cotiser pour leurs parents. Si le régime agricole était fusionné dans le régime général, la compensation se ferait par conséquent automatiquement sans qu’on s’en aperçoive et sans que tel ou tel journaliste parle de « scandale ».

M. le président. Il vous faut conclure, monsieur Raison.

M. Michel Raison. Pour conclure, je dirai un mot sur un autre gros budget de l’agriculture dont il n’est pas souvent question ici, celui de la ferme France et de l’agro-alimentaire France qui représente une prise de risques énorme – c’est l’addition de prises de risques sur tout le territoire. Je fais confiance à tous ces preneurs de risques pour valoriser la politique que l’on est en train de mettre en place. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je note que les organisateurs de la discussion ont su introduire une sorte d’alternance politique dans l’ordre des interventions, ce qui évitera à certains de s’endormir à l’écoute de la répétition d’appréciations un peu trop laudatives à mon avis.

Nous sommes à la fin d’une année qui a été marquée par le vote de deux textes agricoles qui ont mobilisé notre assemblée : loi sur les territoires ruraux du 25 février 2005, loi d’orientation agricole, dont l’examen, certes, n’est pas tout à fait achevée, mais je ne doute pas que cela sera fait avant la fin du mois de décembre prochain. En tout état de cause, compte tenu des mesures qu’elle prévoit, il n’y a pas vraiment urgence.

Nous avons largement participé au débat sur ces textes et nous avons approuvé certaines mesures. Nous avons cependant dénoncé aussi un grand nombre de faiblesses et la dangerosité de plusieurs dispositions. Je pense en particulier au fameux fonds agricole dont je n’ai pas beaucoup entendu parler les élus de l’UMP. Ils ont dû, depuis, rentrer dans leur circonscription et ils ont sans doute compris que les choses n’étaient pas aussi merveilleuses qu’on l’avait laissé croire.

Je pense aussi aux déréglementations qui feront souffrir les SAFER, les CDOA et bien d’autres encore.

Pour autant, monsieur le ministre, ces lois contenaient un certain nombre de promesses et nous étions en droit d’attendre que celles-ci trouvent un début de concrétisation dans ce budget. Certes, c’est vrai pour quelques-unes. Mais je ne reprendrai pas ici le catalogue idyllique que vient de dresser Michel Raison, me bornant à pointer certaines contradictions entre vos engagements et la réalité.

Les contradictions apparaissent déjà dans le « bleu » budgétaire. Certes, les autorisations d’engagement – des tirages sur l’avenir – sont en augmentation. Mais les crédits de paiement sont en diminution. La baisse n’est que de 0,7 %, me direz-vous. C’est cependant un signe, d’autant que, si l’on prend en compte l’inflation, ils sont quasiment en baisse de 3 %. Or nous savons que certaines créances de l’État et du ministère de l’agriculture ne sont déjà pas assumées. Cela vient d’ailleurs d’être dit par M. Raison, qui a relevé que des factures de 2004 n’étaient toujours pas payées. Comment celles de 2005 pourraient-elles être payées en 2006 ?

Qu’il s’agisse de subventions ou de factures, ces retards sont préjudiciables aux producteurs, aux industriels et à l’agriculture française en général.

M. André Chassaigne. Vous voulez donc dire que la politique du Gouvernement n’est pas financée !

M. Jean Gaubert. Exactement !

Pourtant, nombre des actions que vous proposez, monsieur le ministre, nécessiteront un financement quasi total sur 2006, que vous ne pourrez pas assurer.

Premier exemple, le programme 154, dont les autorisations d’engagement augmentent de 150 millions, et on peut s’en réjouir, mais dont les crédits de paiement diminuent de 15 millions. Or il comporte des actions essentielles qui justifieront des paiements immédiats. Je pense à l’appui au renouvellement des exploitations. On ne peut pas demander à des jeunes agriculteurs d’attendre deux ou trois ans pour toucher leur DJA puisqu’ils en ont précisément besoin pour démarrer. Et comme vous avez fort justement décidé de la payer en totalité, vous devez être sûr de disposer des crédits nécessaires en 2006.

Je pense aussi aux crédits afférents aux cessations d’activité et à la réinsertion professionnelle, qui doivent pouvoir être versés dès que les intéressés en font la demande.

En ce qui concerne l’adaptation aux normes environnementales, si les autorisations d’engagement sont en hausse, ce n’est pas le cas des crédits de paiement. Bien que leur montant soit un peu supérieur à ce qu’il était l’année dernière, il ne permet pas d’accompagner la montée en puissance que vous souhaitez. Beaucoup d’agriculteurs attendront encore longtemps les subventions promises.

M. André Chassaigne. Ce n’est pas beau tout cela !

M. Jean Gaubert. C’est dans l’action n° 5, qui regroupe les mesures agro-environnementales, que l’on trouve les fameux CAD. Il est clair que nous enterrons les contrats territoriaux d’exploitation : nous devons l’assumer. Vous proposez une mesure destinée à consoler ceux qui les regrettent. On brûle quelques cierges aujourd’hui pour les CTE, mais on n’en parlera plus dans quelques années. Quoi qu’il en soit, les crédits consacrés aux contrats d’agriculture durable sont en baisse de 88 millions d’euros.

Si l’on y ajoute la stagnation de la politique du cheval, malgré les belles promesses de la loi sur les territoires ruraux, on voit bien que ce budget n’est pas à la hauteur des ambitions annoncées.

Mais il y a pire, et je m’étonne que le rapporteur pour la pêche ne l’ait pas souligné : la politique de la mer est abandonnée !

M. François Rochebloine. Un oubli…

M. Jean Gaubert. Si les crédits destinés à la politique du cheval sont passés de 50 millions d’euros l’année dernière à 48 millions d’euros, que dire des 32 millions d’euros pour la pêche ?

M. François Liberti. Il n’y a plus de politique de la pêche, c’est fini !

M. Jean Gaubert. Vous me répondrez que ce secteur bénéficie de crédits européens, mais cela ne suffit pas ! La pêche, qui est un secteur primordial pour notre territoire, connaît une crise dont elle n’est pas encore sortie car elle subit encore plus que d’autres l’augmentation du fioul. Comme je l’ai indiqué en commission, celle-ci représente pour certains patrons pêcheurs 30 à 40 % de leurs charges de fonctionnement ! Et vous savez bien, monsieur le ministre, que l’effort de l’État pour alléger les charges liées à l’augmentation du prix du fioul ne suffit pas.

M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis, pour la pêche. Il faudra faire encore plus d’efforts !

M. Jean Gaubert. Si nous voulons mener une politique de la pêche dynamique, que représentent 32 millions d’euros alors qu’il faut adapter les bateaux, réaliser des économies d’énergie et élaborer un plan de sortie de flotte ? Sur ce point, il nous faudra être très prudents car notre flotte n’est pas surdimensionnée. Sa réduction serait dramatique et aurait des conséquences pour les pêcheurs mais aussi pour nombre d’installations à terre, comme les criées et les ateliers de mareyage.

Je vais accélérer mon propos, monsieur le président, car mon temps de parole sera bientôt épuisé.

M. François Brottes. M. Raison a parlé cinq minutes de plus que prévu !

M. Jean Gaubert. J’en viens au programme 227, qui enregistre une baisse des crédits de paiement sur l’action « Promotion des produits à l’étranger ». Mais où est passée notre ambition ? Quand vous vous battez au sein de l’OMC, monsieur le ministre, vous vous prévalez toujours de votre ambition pour l’exportation de l’agriculture française ! Or, quand on regarde votre budget, on constate une diminution des crédits pour la promotion des produits agricoles à l’étranger. Je suis curieux d’entendre vos explications sur ces contradictions, qui ne sont pas apparentes.

En ce qui concerne la forêt, dont François Brottes parlera tout à l’heure, M. Raison est enfin revenu à la raison, si je puis dire, en notant que les crédits de la forêt n’étaient pas à la hauteur des ambitions affichées. Les crédits de la forêt sont en baisse. Pourtant, les besoins sont si importants ! La fin des programmes mis en place après la tempête de 1999 ne justifie pas une telle baisse, car bien d’autres besoins ne sont pas satisfaits.

Quant au FFIPSA, que mon collègue Germinal Peiro évoquera demain matin, malgré vos efforts, la situation de la Mutualité sociale agricole reste difficile. Et ces difficultés ne sont pas antérieures à 2002 ! Le Gouvernement, qui n’a pas voulu assumer la mensualisation, pourtant justifiée, a demandé à la MSA d’emprunter. Tout le monde aurait pu faire cela ! Aujourd’hui, il faut redresser la situation de la MSA, et les mesures que vous proposez n’y suffiront pas. Nous attendons toujours les mesures relatives à la retraite des conjoints et à l’amélioration de la retraite complémentaire obligatoire !

J’en viens à la formation agricole. Bravo pour l’augmentation des crédits des maisons familiales. Tout le monde ici reconnaît leur rôle dans l’amélioration de la situation sociale d’un certain nombre de jeunes en difficulté et leur insertion professionnelle. Mais on ne peut pas, monsieur le ministre, en matière d’éducation, continuer à déshabiller Pierre pour habiller Paul ! C’est ce que vous risquez de faire pour les banlieues : pour améliorer la situation des banlieues, vous allez créer des problèmes ailleurs, dans d’autres régions et d’autres secteurs économiques.

Bien d’autres choses pourraient être dites sur ce budget en trompe-l’œil : il manifeste des ambitions, tire des chèques sur l’avenir, mais ses moyens sont insuffisants. En revanche, il y a moins de deux heures, dans le budget de la sécurité sanitaire, vous venez de voter une nouvelle taxe qui frappera les agriculteurs. Nous n’en avons pas débattu, nous ne savons même pas à partir de quel niveau de production elle sera due et qui devra réellement la payer ! Vous n’auriez pas accepté cela lorsque vous étiez dans l’opposition, et peut-être auriez-vous protesté plus que nous contre cette nouvelle charge, très préjudiciable pour l’agriculture.

Pour approuver ce budget, il ne suffit pas d’avoir la foi, il faut verser dans la béatitude… Cette béatitude, nous ne la partageons pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Monsieur le ministre, comme cela a été rappelé par plusieurs orateurs, le contexte actuel est difficile pour l’agriculture. Vous le savez bien, étant en première ligne dans les discussions à l’OMC et au sein de l’Union européenne.

Certains de nos partenaires, souhaitant remettre en cause la politique agricole commune, qui est pourtant l’un des piliers de la construction européenne, ont fait récemment des déclarations fracassantes. Dans un tel contexte, nous devons réaffirmer le caractère primordial de la sécurité alimentaire et veiller aux conditions de l’approvisionnement alimentaire, comme l’exigent les risques récurrents de pandémie auxquels nous devons faire face. Nous devons reprendre le flambeau car l’Europe a été malmenée, y compris dans notre pays. Elle a peut-être été mal comprise par nos compatriotes, en tout cas perçue comme beaucoup trop technocratique et surtout dénuée d’une véritable ambition politique.

M. Jean Lassalle. C’est certain !

M. François Sauvadet. Monsieur le ministre, la France doit redonner un sens au débat au sein de l’Europe. L’examen du budget de l’agriculture ne peut s’exonérer de l’environnement dans lequel nous vivons aujourd’hui, même si je n’oublie pas les responsabilités qui sont les nôtres.

Le rapporteur a évoqué la révision à mi-parcours du cadre budgétaire européen en matière d’agriculture. Comment sortirons-nous de cette discussion dans le contexte de crise politique que traverse l’Europe ? Le cadre budgétaire est fixé, mais le restera-t-il ?

C’est une Europe malmenée qui aborde les négociations au sein de l’OMC. Ici non plus, monsieur le ministre, nous ne devons pas renoncer à peser sur l’ordre du monde. La France a une ambition européenne : elle doit pouvoir exiger l’entrée dans les discussions de l’OMC de thèmes majeurs comme la sécurité alimentaire, qui ne doit pas être présentée comme un risque de distorsion de concurrence.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. François Sauvadet. Après avoir imposé aux agriculteurs d’Europe des exigences élevées en matière de sécurité, de qualité et de diversité alimentaire et de protection de l’environnement, nous devons débattre à l’OMC des conditions de production afin d’offrir des garanties à nos compatriotes, faute de quoi cette ère d’incompréhension dans laquelle nous vivons depuis une quinzaine d’années va se poursuivre, au risque de voir se confirmer le manque d’ambition européenne qui a été la cause du vote de refus de nos concitoyens.

Dans un tel contexte, les choses ont évolué en matière budgétaire. Comme l’a indiqué le rapporteur, les crédits européens tiennent une place importante dans l’accompagnement des agriculteurs. Pour autant, nous conservons notre propre responsabilité, qui s’exprime notamment à travers ce budget, lequel s’élève à 5 milliards d’euros.

Ce budget regroupe plusieurs missions, dont les missions interministérielles. Aujourd’hui, il est bon de vanter les mérites de la LOLF, mais il me semble qu’une évaluation s’imposera dans quelque temps afin d’évaluer ses effets et de déterminer si nous y avons gagné en termes de lisibilité et d’approche des problèmes. Je souhaite que nous conservions cette culture de l’évaluation avec laquelle nous avons souhaité examiner ce budget et que nous puissions vérifier à l’avenir si les transferts ont bien été effectués, afin d’évaluer les chances et les opportunités de la LOLF, mais aussi les risques qu’elle fait courir.

L’actualité m’amène à revenir sur certains aspects de ce budget, comme la mission interministérielle « Sécurité et enseignement ». En matière de sécurité alimentaire, je voudrais insister brièvement sur trois points, en espérant que vous répondrez à mes préoccupations.

Tout d’abord, monsieur le ministre, je sais pour avoir présidé la commission d’enquête sur l’ESB qu’en matière de sécurité alimentaire, il faut un chef de file. Le caractère interministériel de la démarche, dans la mesure où il s’agit de la sécurité de la production, doit placer le ministre de l’agriculture au cœur du dispositif. J’ai constaté que, lorsque nous prenons des mesures, nous devons nous assurer de leur application, j’allais dire de leur applicabilité par ceux qui sont directement concernés. Ne pas le faire peut entraîner les drames que l’on peut imaginer.

Le rapport de la commission d’enquête, auquel avaient participé un certain nombre d’entre vous, mes chers collègues, tendait à démontrer que toute décision doit être suivie du contrôle de son application sur le terrain, faute de générer certaines incompréhensions. Nous devons donc replacer le ministère de l’agriculture au cœur de la problématique de la sécurité alimentaire.

Par ailleurs, nous devons mener une véritable politique de communication, comme l’ont indiqué plusieurs orateurs. Lorsqu’il y a un risque, il faut certes en préciser la nature, mais en évitant les emballements médiatiques auxquels on assiste périodiquement. Un effort de communication devra être fait, monsieur le ministre, j’insiste sur ce point, en matière de gestion des crises et de transparence.

Enfin, et c’est le troisième défi de la sécurité alimentaire, elle doit prendre place dans les débats de l’OMC. Nous ne pouvons admettre d’importer des produits de consommation sans vérifier comment ils ont été élaborés et dans quelles conditions ils sont parvenus jusqu’à nous. Faire en sorte que le souci de la sécurité alimentaire soit partagé par tous est un devoir de justice envers nos agriculteurs.

Quand on parle du budget agricole, il ne faut pas oublier la question des marges, que nous avons souvent abordée à l’Assemblée nationale. Je souhaite que nous soyons régulièrement informés des conditions dans lesquelles sont établies les marges agricoles pour mieux en débattre avec la grande distribution.

L’enseignement, lui aussi, fait l’objet d’une mission interministérielle. Comme je vous l’avais indiqué lors de la discussion du projet de loi d’orientation agricole, monsieur le ministre, l’enseignement est l’un de nos plus grands défis. Si l’on veut réussir les mutations devenues indispensables d’une société en mouvement, les jeunes doivent être formés, qu’il s’agisse de formation initiale ou de formation continue. De ce point de vue, le budget de l’enseignement progresse. Je ne reviens pas sur les maisons familiales rurales, que nous sommes nombreux à saluer sur les bancs de cette assemblée parce qu’elles sont une véritable réussite.

M. François Brottes. C’est juste !

M. François Sauvadet. Grâce à l’alternance qu’elles proposent, certains jeunes en situation d’échec scolaire ont trouvé un emploi durable et de proximité. Nous devons donc les aider. Un effort de 8 millions d’euros a été consenti.

M. François Rochebloine. Ce sont 15 millions qu’il faudrait, et c’est l’éducation nationale qui devrait les financer !

M. François Sauvadet. M. Rochebloine, qui a réuni l’ensemble des parlementaires dans le cadre de la mission qu’il préside, ne me démentira pas : 8 millions d’euros ont été trouvés, c’est bien, mais nous devons assurer la parité car nous en avons pris l’engagement auprès des maisons familiales et de l’enseignement privé.

Parmi les éléments de modernisation pour lesquels il faut accompagner les agriculteurs, il y a bien évidemment le plan bâtiment, qui doit être engagé vigoureusement, car voilà un des points sur lesquels on peut être utile et extrêmement actif. Celui-ci voit sa dotation augmenter de 13 %, mais cette dotation, d’après ce que j’entends sur le terrain, reste insuffisante par rapport aux besoins : il faut satisfaire les dossiers éligibles en 2005 en plus des demandes de 2006. À cet égard, j’aimerais avoir l’assurance – et je crois que cette préoccupation est partagée sur tous les bancs de cette assemblée – que les mois d’attente des dossiers n’entrent évidemment pas dans le délai d’instruction de dix-huit mois.

Sur le programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole, nous devons aussi être extrêmement engagés. Dites-le à vos collègues dans les ministères, monsieur le ministre, mais je ne doute pas que vous le fassiez : on ne peut pas laisser les agriculteurs seuls face à un défi qui relève d’un choix de société et de protection de l’environnement. Ce choix doit être partenarial. Je pense notamment aux ressources en eau, et vous vous souvenez tous de la polémique de cet été sur les conséquences de l’usage de l’eau. Il faut accompagner les producteurs, les agriculteurs à créer des ressources en eau et je souhaite que cet effort ne soit pas abandonné.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Absolument !

M. François Sauvadet. S’agissant d’environnement, un mot sur le problème énergétique. Je souhaite vraiment, monsieur le ministre, un engagement très fort sur les nouvelles énergies, et non pas de simples déclarations répondant à un effet de mode autour des biocarburants. Il s’agit d’un défi majeur, monsieur le ministre : ne renoncez pas à évoquer ce sujet en permanence, qui, je le sais, est une de vos préoccupations – vous avez d’ailleurs accepté un amendement fixant, dans la loi, l’objectif annoncé par le Premier ministre.

Et puisque nous parlons des nouvelles énergies, n’oublions pas la forêt, qui, elle aussi, est une chance économique. Peut-être n’est-elle pas suffisamment représentée dans nos assemblées en termes de lobbies, mais ne renoncez pas à accompagner le mouvement d’organisation de la production privée, qui est morcelée. La loi d’orientation forestière avait fait l’unanimité. Il faut poursuivre dans cette voie. Il serait bon, monsieur le ministre, d’avoir un débat en commission des affaires économiques pour faire le point sur l’accompagnement de la forêt, et plus généralement sur les bioénergies.

Par ailleurs, je souhaiterais beaucoup qu’on marque une pause sur les boîtes à outils. On est passé d’un CTE – boîte à outils extrêmement administrée, complexe, c’est vrai, monsieur Brottes – au CAD, contrat d’agriculture durable. Il faut laisser aux agriculteurs le temps de s’approprier ces outils. Il faut également que les financements soient au rendez-vous. L’engagement avait été pris de financer 10 000 CAD ; or 6 000 seulement ont été conclus, nous dit-on, soit 40 % en moins. Pourquoi ? Est-ce un problème de complexité ? Il nous faut avoir la culture de l’évaluation…

M. François Rochebloine. Très bien !

M. François Sauvadet. …et comprendre que certains outils mis en place n’ont pas le succès attendu auprès des agriculteurs. J’ai bien compris qu’une partie des financements allait aux primes herbagères agro-environnementales. Monsieur le ministre, je souhaite que vous ayez les moyens de faire en sorte que le budget qui était alloué permette de faire face à la fois aux CAD et au renouvellement des mesures « herbes », qui sont très attendues, notamment dans le secteur de la production bovine. Pas seulement le charolais, monsieur Raison ! Encore que j’aime bien le charolais, je vous le concède !

Mme Sylvia Bassot. Il y a aussi les normandes, monsieur Sauvadet !

M. François Sauvadet. Bien sûr ! (Sourires.)

D’une manière générale, l’agriculture a besoin d’engagements pluriannuels. Le yo-yo, non… Les choix agricoles ne se prennent pas dans les six mois, mais dans la durée.

J’en viens au FFIPSA. Vous vous en souvenez, j’avais expliqué à l’époque de sa création pourquoi je n’étais pas très chaud pour faire passer le financement des prestations dans un fonds ; nous étions d’ailleurs plusieurs à le dire. Mais, aujourd’hui, il nous faut faire face à cette réalité et être conscients que la situation devient extrêmement préoccupante, car il faudra trouver plusieurs milliards et l’ébauche de réponse ne répond pas au problème de fond. Il ne faudrait pas laisser croire que les agriculteurs ne cotisent pas à parité avec les assurés sociaux des autres régimes : un effort considérable a été accompli par les agriculteurs, comme vous l’avez souligné avec raison, monsieur le porte-parole de l’UMP – c’est un point de convergence entre nous !

Concernant la gestion des risques et des aléas de production, il faut lutter contre cette idée visant à dire que les agriculteurs peuvent se débrouiller avec leurs assureurs. Partout où cela a marché, les financements publics étaient impliqués. Monsieur le ministre, comment voyez-vous le système évoluer en matière de gestion des risques, notamment pour l’assurance récolte, qui ne pourra pas s’appliquer à tous les secteurs ?

S’agissant des contrôles, il faudra s’assurer qu’ils débusquent les fraudes, et nous serons à vos côtés, monsieur le ministre. Mais, dans le même temps, il faudra éviter ces situations dramatiques que l’on connaît,…

M. François Rochebloine. Exactement !

M. François Sauvadet. …car la suspension des aides pendant le contrôle place les agriculteurs dans des difficultés très importantes. Je souhaite que l’on progresse sur ce thème.

Monsieur le ministre, il faudra redonner confiance. Nous sommes face à un vrai défi pour l’agriculture, et c’est la raison pour laquelle j’aborde ce sujet avec beaucoup de résolution, mais aussi avec humilité .

M. le président. Merci de conclure, monsieur Sauvadet.

M. François Sauvadet. En conclusion, monsieur le ministre, vous pouvez aujourd’hui donner un premier signe très important en reprenant le combat de l’Europe ! Elle est notre destin collectif, elle doit être à notre écoute et prendre en compte les problèmes de société qui se posent au travers de l’agriculture.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. François Sauvadet. Nous n’attendons pas de l’Europe une simple vision « budgétariste » avec distribution de crédits, mais un réel engagement consistant à dire que là est notre destin pour peser dans l’ordre du monde ! Faute de quoi, on donnera les clés de l’agriculture et de l’agro-alimentaire aux grands lobbies américains… et ce n’est pas ce que nous souhaitons ! Nous espérons un souffle, un vent nouveau pour l’Europe. Je pense que c’est notre responsabilité collective…

M. François Rochebloine. Bravo !

M. François Sauvadet. …et je vous fais confiance, monsieur le ministre, pour le porter.

Pour terminer, nous aurions pu dire que votre budget est insuffisant.

M. le président. Il faut vraiment vous arrêter, monsieur le député !

M. Alain Marleix, rapporteur spécial. Il faut bien que l’UDF exprime ses positions, tout de même ! (Sourires.)

M. François Sauvadet. Si je n’avais pas été interrompu, j’aurais pu finir plus tôt ! (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

On aurait pu dire que votre budget est insuffisant, monsieur le ministre, mais nous ne le dirons pas car j’ai senti chez vous une vraie volonté de faire avancer les dossiers, une vraie volonté d’écouter le Parlement. Monsieur le ministre, je suis de ceux qui voteront le budget que vous avez présenté.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. François Sauvadet. Je souhaite simplement que vous apportiez des réponses précises à toutes les questions précises que nous vous avons posées, et voyez-y un encouragement à faire preuve de fermeté pour que l’agriculture ne soit pas, une fois encore, la grande perdante des négociations internationales. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Lassalle. Bravo ! C’est le Mozart de l’agriculture ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Louis Guédon.

M. Louis Guédon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais intervenir sur la partie pêche du budget.

L’examen du budget de la pêche, par sa stabilité – 32 millions d’euros pour 32 373 000 euros, soit moins 1,13 % –, amène trois réflexions.

Il nous rappelle, cela a été dit, que la pêche est en crise.

Il apporte des réponses aux difficultés actuelles.

Il interpelle sur la question que se posent tous les acteurs : la France veut-elle défendre et préserver l’activité pêche sur son littoral, en particulier face aux décisions de la Communauté européenne ?

L’orientation pour 2006 repose sur trois piliers : adaptation à la filière, orientation de la production des marchés – ces deux points sont en légère diminution –, suivi du milieu et gestion de la ressource halieutique, qui voient, eux, leurs crédits tripler.

L’adaptation à la filière consacre 10 500 000 euros au renouvellement de la flotte et aux infrastructures à terre. Si la modernisation et le renouvellement de la flotte de pêche artisanale voient leurs budgets maintenus à 2 millions d’euros dans le cadre des CPER, contrats de plan État-régions, nous regrettons les décisions imposées par l’Europe, qui ramènent, hors CPER, de 6,8 millions à 3,5 millions les fonds destinés à la modernisation et au renouvellement de notre flotte.

Nos ports, vous les savez, monsieur le ministre, sont endeuillés chaque année par des drames de la mer. La vie de nos marins, leur sécurité et l’engagement indispensable de nos jeunes dans ce beau métier nécessitent le renouvellement constant de nos navires – un navire âgé, même modernisé, ne sera jamais une réponse aux impératifs de sécurité qu’impose la mer, ni un encouragement aux vocations de la jeunesse.

Pour la construction et la modernisation des investissements à terre – ateliers de mareyage, criées, conditions de vente, infrastructures portuaires –, soulignons l’effort des CPER qui passent de 2 787 000 à 3 500 000 d’euros.

L’orientation de la production des marchés bénéficie d’un chiffre sensiblement identique – 13 360 000 euros – à l’an passé, qui traduit un soutien volontaire à son endroit.

L’apport aux caisses de chômage et intempéries, dont l’importance n’est, hélas ! pas à démontrer, reste inchangé. Son financement est assuré à parité avec les cotisants ; il vient compenser dans la limite de quarante jours les pertes d’exploitation.

La légère baisse de la subvention à l’OFIMER, l’Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l’aquaculture, à 7 794 800 euros, répond en fait à un ajustement aux besoins réels et à une plus forte mobilisation des fonds européens au profit des organisations de producteurs.

Nous partageons les objectifs poursuivis : amélioration de la connaissance et du fonctionnement des marchés, modernisation des outils de commercialisation et de production des produits de la mer, développement de la valorisation de la production halieutique et aquacole.

Le suivi du milieu et de la gestion durable des ressources halieutiques, qui constitue le troisième pilier de ce budget, marque votre volonté d’orienter la politique pêche dans l’avenir et de l’inscrire dans la durée en triplant les sommes affectées qui passent de 2 524 133 à 7 120 000 euros.

670 000 euros sont affectés au suivi statistique et scientifique, contre 543 000. Si cette augmentation semble répondre à une collecte de données supplémentaires demandée par l’Union européenne, nous ne pouvons malheureusement admettre que cette dernière puisse décider seule à Bruxelles, sans la transparence voulue, du sort des marins et des armements dans une répartition des quotas que tous remettent en cause.

Nous ne cessons de réclamer que collecte, saisie, validation et traitement des données, dont dépend le sort de l’économie du littoral français pour une part très importante, soient étudiés par un organisme rassemblant trois collèges, les scientifiques – dont nous reconnaissons la valeur, mais qui doivent nous faire appréhender les limites de leurs travaux –, les marins et les élus du littoral.

3 000 000 d’euros sont affectés à l’ajustement de l’effort de pêche, appellation qui cache pudiquement les sorties de flotte. Ces dernières, dans les années passées, ont permis de solutionner honorablement des situations d’armements en difficultés. De nos jours, certaines sorties de flotte touchent des navires qui ne sont pas toujours au terme de leur carrière.

Cette mesure européenne a pour conséquence de détruire l’outil de travail. D’autres mesures le préserveraient grâce à des périodes de repos biologiques et, tout en se conformant à une politique sociale du travail, offriraient les mêmes résultats.

Le contrôle des pêches connaît une très forte augmentation, passant de 520 000 à 1,45 million d’euros, et ses missions devraient donc se développer. Certes, ces contrôles sont bien fondés, mais ils ont déjà été au centre de graves problèmes, et rien n’empêche qu’ils s’y retrouvent. Il sera nécessaire de dissiper la suspicion qui pèse sur eux. On note que les contrôles sont inégaux selon les pays d’origine des flottilles européennes. Il semblerait que la France soit très rigoureuse à l’égard de ses ressortissants. Il apparaît nécessaire de garantir que les navires de tous les pays soumis aux mêmes textes connaissent le même traitement en la matière.

Nous tenons à saluer l’effort que, avec 1,41 million d’euros contre 980 000 euros, ce budget consent pour les ressources aquacoles. Il se traduit par la mise en œuvre d’un indispensable suivi sanitaire des zones de production conchylicole et d’un dispositif de surveillance des toxines algales imposé et contrôlé par l’Union européenne. Un laboratoire national de référence − en France, l’IFREMER − a été retenu pour coordonner toutes les investigations nécessaires.

Le suivi sanitaire des coquillages − grâce au REPHY, qui dispose de 1,16 million d’euros − est organisé, en application de la réglementation communautaire, tant dans les zones de production, qui font l’objet d’un classement de salubrité et d’une surveillance régulière, que par le contrôle sanitaire de l’expédition et de la mise en marché des coquillages. L’apparition de nouvelles biotoxines et l’évolution de la réglementation communautaire imposent ce suivi, sous la responsabilité de la Direction des pêches maritimes et avec le concours de l’IFREMER.

Cependant, les professionnels se demandent si la France souhaite conserver et défendre sur son littoral son activité de pêche. Au cours de l’examen de ce budget, nous avons évoqué le renouvellement et la conservation des navires, la disparité de certains contrôles. À défaut d’aborder la question récurrente de la détermination des quotas, je me dois d’évoquer à présent les deux crises qu’a connues 2005, celle du thon rouge et celle de l’anchois.

Il n’est pas acceptable que, par aveuglement, il ne soit pas tenu compte de la pêcherie de thon rouge en Atlantique. On refuse d’attribuer à la France les justes quotas dont elle devrait bénéficier face à son littoral, dans le Golfe de Gascogne, et les armements français sont dans l’obligation de négocier avec des armements étrangers des quotas d’autres pêcheries qui, bien que jamais pêchés, semblent toujours reconduits. Face à de telles situations, on ne peut que réclamer d’urgence des études scientifiques justes.

La pêche à l’anchois a connu bien des difficultés au cours de l’année 2005 : nous attendons un arbitrage équitable avec l’Espagne, la reconnaissance d’un « box » dans la zone de frai à l’embouchure de la Gironde pour protéger les juvéniles, et surtout une aide aux armements pour attendre, tout au long du premier semestre, l’ouverture de la pêche le 1er juillet.

Le choc pétrolier et l’augmentation du prix du pétrole ont entraîné la création du Fonds de prévention des aléas pêche, qui a montré ses limites avec l’envolée des cours. Fort heureusement, le Gouvernement vient à nouveau de l’abonder de 40 millions d’euros, mais il est nécessaire de trouver un équilibre acceptable pour la survie de la pêche et de limiter à 30 centimes d’euro environ le prix de revient du litre de gazole pour les armements.

Monsieur le ministre, à Nantes, répondant à la question « Quel avenir pour la pêche ? », vous avez donné un espoir avec les quatorze propositions pour un plan d’avenir de la pêche. Son budget vient s’ajouter à celui que nous discutons aujourd’hui. Il complétera tous les dossiers que nous venons d’évoquer et répondra en particulier aux inquiétudes que constitue, pour l’avenir, la formation des équipages.

Pour ces raisons, monsieur le ministre, le groupe UMP votera votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Merci !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi de finances pour 2006 voit la mise en œuvre d’une nouvelle présentation du budget de l’agriculture, qui est concerné par la mission spécifique dont nous débattons ce soir, « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », et par trois missions interministérielles également importantes : « Sécurité sanitaire », que nous avons examinée tout à l’heure, « Enseignement scolaire », qui prévoit un programme « Enseignement technique agricole » dont les crédits de paiement sont en augmentation de 5,8 %, et « Recherche et enseignement supérieur » dont les crédits augmentent également de 13 %. Ces missions traduisent la volonté de construire une agriculture résolument tournée vers l’optimisme.

La mission « Agriculture » progresse donc de 2 %, à 4,98 milliards d’euros, soit légèrement plus que la moyenne de 1,8 % des autres missions.

Mes chers collègues, ce budget − dont je m’attacherai à discuter quelques points − répond à l’impérative nécessité de développer l’agriculture en cohérence avec les attentes de notre société dans les domaines de l’environnement, de la qualité et de la traçabilité alimentaire et de l’aménagement du paysage.

Le plan de modernisation des bâtiments d’élevage poursuit son déploiement. La dotation de 37,1 millions d’euros pour l’an prochain devrait permettre de payer les engagements antérieurs à 2006, mais aussi une partie des engagements de cette année ; elle est suffisante, compte tenu du décalage parfois long entre l’autorisation d’engagement et le paiement des travaux. Je rappelle que, en 2005, seuls 6 millions d’euros auront été versés.

Le programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole revêt désormais un caractère très important, puisque la conditionnalité de la politique agricole commune, applicable depuis le 1er janvier 2005, intègre la mise aux normes dans les zones vulnérables. Celle-ci est un moyen de garder un potentiel de production laitier, secteur dans lequel le découplage est aujourd’hui total. Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit un crédit de paiement de 39 millions d’euros, alors que 30 millions avaient été payés en 2005 et seulement 4 en 2004. Autant dire que le niveau des inscriptions est suffisant.

À l’inverse − on est bien obligé, parfois, de mettre un bémol −, il serait bon de faire porter un effort supplémentaire sur le renouvellement des exploitations. Nous savons que les installations escomptées sont hélas en diminution, ce qui se traduit par une baisse des crédits consacrés à la DJA. Cependant, les autorisations d’engagement inscrites permettront, je l’espère, de retenir les 5 600 dossiers potentiels pour 2006.

Je constate que la dotation des SAFER poursuit sa baisse, à 5,5 millions d’euros, alors même que la concurrence ne cesse de croître pour l’accès au foncier et que la mobilisation de ces outils est plus que jamais nécessaire. Monsieur le ministre, les SAFER ont un rôle très important à jouer dans l’installation des jeunes. Ne peut-on pas envisager une pause dans la lente décrue de leurs crédits ?

Parmi les objectifs affichés et soutenus, je noterai un effort important pour l’assurance récoltes. La dotation a été doublée, passant à 20 millions d’euros. Cette politique est sans doute une des pistes de travail les plus fructueuses pour aider l’agriculture de demain, tout en restant compatible avec nos engagements vis-à-vis de l’OMC. Il convient de souligner cet effort et de l’accentuer dans les années à venir.

Depuis plusieurs années, les crédits d’orientation concernant l’adaptation des filières sont en recul et financent trop souvent des mesures qui ne relèvent pas forcément de leurs champs de compétence. Ces crédits doivent permettre des actions d’amélioration et de restructuration des différentes filières. Sans doute serait-il bon que nous revenions vers cette politique initiale, alors même que le découplage des aides déstructure complètement nos filières.

Je note en revanche un effort important quant au soutien aux agriculteurs en difficulté. Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes très attentif à leur situation. Chacun connaît les efforts que vous déployez pour obtenir les indispensables accords de la Commission européenne. Ce projet 2006 propose 10 millions d’euros en leur faveur. Cette dotation permettra sans aucun doute de réaliser les analyses, les suivis nécessaires ainsi que les plans de redressement.

Les mesures agri-environnementales nécessitent des éclaircissements. L’indemnité compensatrice de handicap naturel n’intègre pas, comme prévu, la réévaluation de 10 % sur les vingt-cinq premiers hectares. Certes, cette mesure coûte cher, entre 30 et 35 millions d’euros a priori. Pouvez-vous malgré tout, monsieur le ministre, nous confirmer que cette action n’est pas abandonnée, mais simplement différée dans le temps ?

Les mesures rotationnelles ne bénéficient qu’à neuf régions françaises, ce qui paraît bien injuste pour ceux de nos agriculteurs qui n’en bénéficient pas. Pouvons-nous envisager une extension à des régions non éligibles ? Je pense, vous l’aurez compris, aux zones intermédiaires, et surtout à la Franche-Comté ? (Sourires.)

Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit une baisse des contrats d’agriculture durable. Seuls 6 000 d’entre eux feront l’objet d’autorisations d’engagement − contre 10 000 pour 2004 − et 5,3 millions d’euros permettront de financer les nouveaux contrats. Cela suffira-t-il ? En 2005, certaines régions ont eu du mal à utiliser la totalité de leurs crédits, alors que d’autres ont refusé des dossiers. Il conviendrait de mutualiser ces fonds afin que les reliquats puissent être mieux valorisés par les régions françaises qui utilisent le plus les CAD.

Mes chers collègues, ce projet de budget s’inscrit dans l’obligation de maîtriser la dépense publique qui, seule, peut conduire à la réduction des prélèvements. Il engage cependant un développement harmonieux de l’agriculture française. C’est la raison pour laquelle je le voterai avec conviction. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Merci !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, François Sauvadet, porte-parole du groupe UDF, vous a fait part de l’avis général porté par notre famille politique sur votre budget. Il est positif : tout arrive, même si qui bene amat bene castigat, « qui aime bien châtie bien ». Permettez cependant à l’élu d’une des circonscriptions de France où l’agriculture est le premier secteur économique de vous interroger sur quatre politiques d’actualité et d’avenir et qui, à mon sens, ont besoin d’être activement soutenues par le budget de l’État : l’eau, les fruits et légumes, les retraites agricoles et…

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Les biocarburants ! (Sourires.)

M. Jean Dionis du Séjour. …les huiles végétales pures.

L’eau est un sujet capital pour les années à venir : l’agriculture moderne ne peut se passer d’irrigation ; or le réchauffement climatique va contribuer à raréfier la ressource. Pourtant, on doit déplorer que les dotations pour l’hydraulique ne traduisent pas les engagements du Gouvernement, ni les vôtres, monsieur le ministre, ni ceux d’Hervé Gaymard. Ainsi, les 20 millions d’euros annoncés pour financer les retenues de taille modeste ne sont pas totalement budgétés : seuls 14,6 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus. Le groupe UDF a donc décidé de vous aider, monsieur le ministre, en déposant un amendement qui vise à remplir l’objectif initialement annoncé. Son adoption marquerait l’importance que nous attachons tous à la question de l’eau.

Mais, plus fondamentalement, nous devons bouleverser notre politique de l’eau nationale pour relever le défi du réchauffement climatique et des sécheresses qui l’accompagnent. Il tombe chaque année en France 700 millimètres de pluie, ce qui représente 20 mètres cubes par habitant. La pluviométrie est donc abondante. Si elle était correctement gérée, elle permettrait de satisfaire tous les besoins. L’intelligence voudrait que l’on garde l’eau lorsqu’elle est surabondante en la stockant dans la perspective d’une multiplication de périodes sèches et caniculaires.

La loi sur l’eau va revenir sous peu en discussion à l’Assemblée et nous défendrons coûte que coûte une vraie politique de l’eau, ayant pour objectif de constituer, en hiver, des réserves, que ce soit en montagne ou au long de nos cours d’eau, et sans oublier les réserves de proximité.

Nous souhaitons, monsieur le ministre, que la France agisse à tous les niveaux, en commençant par l’échelon européen, en adaptant les directives qui pèsent sur notre politique de l’eau et qui commencent à dater sérieusement. Les sénateurs, qui ont déjà eu l’occasion de discuter du projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques, ont eu la sagesse de voter l’excellent amendement de notre collègue et ami Daniel Soulage pour la création de réserves d’eau.

Songeons aux années de sécheresse 2003 et 2005. Voyons la violence de celle-ci dans certaines régions − la vôtre, par exemple, monsieur le ministre, le Poitou-Charentes − qui n’étaient habituellement pas sujettes à ces calamités. Ces derniers sinistres imposent que nous modifiions considérablement nos comportements et notre législation en la matière. Commençons, dès ce soir, à marquer notre volonté en votant à la politique hydraulique des ressources budgétaires dignes de ce nom.

Je prendrai pour seul exemple le coût de production d’un kilogramme de pommes dans le Lot-et-Garonne, lequel s’élève à quelque 0,30 euro, alors que le prix proposé par les acheteurs est de 0,17 euro seulement ! La perte, de treize centimes au kilogramme, atteint 4 000 euros par hectare. Le plan de soutien de 15 millions d’euros que vous avez proposé, monsieur le ministre, n’est donc pas à la hauteur des besoins.

C’est pourquoi je vous demande de saisir l’occasion que constitue le rendez-vous de ce soir pour corriger votre budget, notamment en ce qui concerne la filière des pommes, qui connaît cette année une situation véritablement dramatique.

J’en viens à mon troisième point : les retraites agricoles. Nous devons, à leur sujet, nous poser une question simple : nous fixons-nous pour objectif national, par exemple à l’horizon 2015, d’aligner les retraites agricoles sur les minimums sociaux vieillesse du pays ?

À cette question, l’UDF répond par un oui raisonnable progressif, mais déterminé.

Ai-je besoin de rappeler que le rapport Garnier, commandé par votre prédécesseur, M. Hervé Gaymard, concluait que la chose était réalisable et raisonnable ?

M. Germinal Peiro. Faites-le au lieu de parler !

M. François Brottes. N’oublions pas non plus le rapport Germinal Peiro !

M. Jean Dionis du Séjour. Les prestations d’assurance vieillesse représentent le principal poste de dépenses avec 8,35 milliards d’euros.

Or, pour l’année 2006, la baisse des effectifs des bénéficiaires de prestations vieillesse du régime agricole engendre une diminution du montant de cette ligne budgétaire de 36 millions d’euros. Et cela ira en s’accentuant. Il existe donc une marge de manœuvre budgétaire que l’on peut mobiliser pour atteindre cet objectif, si nous en avons la volonté politique.

Enfin, en ce qui concerne les biocarburants, sujet extrêmement cher à l’UDF…

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Et à l’UMP !

M. Jean Dionis du Séjour. C’est vrai, monsieur le rapporteur.

…j’enquête avec obstination pour connaître l’inspirateur de la politique actuelle du Gouvernement – à savoir la seule légalisation à l’autoconsommation agricole.

Cela ne peut être vous, monsieur le ministre. J’en suis certain. En tant qu’élu de terrain, vous avez vu bouger la société : vous ne pouvez pas être l’autruche qui met la tête dans le sable.

J’ai pensé au lobby pétrolier : je suis allé voir M. Desmarest, le PDG de Total. Je l’ai interrogé. Il m’a répondu que tant que l’on produisait du diester – huiles végétales pures ou diester chimique – tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il s’opposait seulement à une production trop abondante de bioéthanol, puisqu’on en possédait déjà suffisamment.

J’ai demandé à François Loos s’il savait qui, à Bercy, torturait le ministre de l’agriculture : sa réponse ne m’a pas convaincu.

Bref, tout le monde est gêné et personne ne veut assumer cette politique intenable qui met les collectivités territoriales dans l’illégalité, tandis que, dans le Lot-et-Garonne et ailleurs, j’en suis certain, le nombre de particuliers qui dévalisent les rayons d’huiles végétales de nos hard discount pour s’en servir comme carburant, eux aussi en toute illégalité, augmente tous les jours !

Bref, il s’agit bien en l’occurrence d’une discrimination qui n’a pas lieu d’être : quand, monsieur le ministre, allez-vous autoriser aux particuliers l’utilisation des huiles végétales pures ? Cette courageuse décision démontrerait votre volontarisme en matière de biocarburants.

Telle est la contribution du Lot-et-Garonne à ce débat. Je vous remercie d’avance, monsieur le ministre, des réponses fortes et audacieuses que vous apporterez sur chacun des enjeux que j’ai évoqués. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Sauvadet. Une excellente intervention !

M. le président. La parole est à M. Philippe Feneuil.

M. Philippe Feneuil. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ces temps de remise en cause des règles internationales et européennes jusqu’ici en vigueur en matière d’agriculture, l’Assemblée nationale examine l’annexe au projet de loi de finances dédié à la mission « Agriculture » : 4,33 milliards seront répartis pour permettre à l’agriculture française de demeurer leader au plan international. J’ai bien noté les grandes priorités de ce budget.

Pour ma part, je défendrai un domaine indispensable au développement d’une agriculture à la fois compétitive et de qualité : la recherche agricole. Je n’évoquerai pas l’INAO - l’Institut national des appellations d’origine – : d’autres le feront, et vous avez d’ailleurs pris des engagements sur le sujet.

Le 24 octobre dernier, notre assemblée a adopté l’article 37 du projet de loi de finances, qui a supprimé l’ADAR – Agence de développement agricole et rural. Je soutiens cette démarche, compte tenu des difficultés de fonctionnement indéniables de l’Agence, qui lui interdisait d’assurer les actions de développement agricole de manière efficace et dont les frais de fonctionnement – 2 millions d’euros – décrédibilisaient l’action.

Le Gouvernement a donc prévu que « les missions et les moyens de l’ADAR sont repris par un compte d’affectation spéciale nouvellement créé. Les recettes du compte sont constituées par 85 % du produit de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitants agricoles », soit 95 millions d’euros sur un total de 112 millions réellement perçus.

Ces nouvelles dispositions appellent plusieurs remarques. Tout d’abord, monsieur le ministre, pouvez-vous d’ores et déjà nous indiquer les modalités de fonctionnement du compte d’affectation spéciale ? Ensuite, en ce qui concerne le mode de calcul de la taxe, le chiffre d’affaires me paraît une référence trompeuse, car il ne reflète en rien la santé d’une entreprise. En intégrant le coût des matières sèches, alors même que la recherche d’une plus grande qualité augmente le prix de revient du produit – pour le vigneron que je suis, ce prix inclut les bouteilles, les étiquettes, les capsules ou les bouchons, ainsi que les frais du stockage indispensable à bon vieillissement –, on pénalise les exploitants qui se donnent la peine de valoriser leurs produits.

Vient enfin la question du plafonnement. Si le Gouvernement a prévu de plafonner le montant de la taxe ADAR à 120 % du montant de la taxe ANDA acquittée en 2002, il a également inscrit dans la loi le principe d’un déplafonnement progressif. Or il me semble important qu’au travers de négociations nous puissions obtenir le maintien définitif de ce plafonnement, comme l’a recommandé la commission des finances du Sénat en 2004.

Le financement de l’Institut technique de la vigne et du vin, l’ITV, est un sujet qui me tient aussi particulièrement à cœur. Dès l’instauration de l’ADAR, il avait été prévu une baisse généralisée des dotations aux différents organismes de recherche. Auparavant financé à 75 % par l’ANDA, l’ITV s’est trouvé en 2004 dans une situation financière extrêmement difficile, avec un déficit budgétaire de 1,5 million. La dotation de l’ADAR, qui ne s’élève en effet qu’à 4,6 millions, enregistre une diminution de 23,5 %. De plus, le règlement des soldes ANDA 2002 et ADAR 2003 tarde à s’opérer. Avec volontarisme, des dispositions ont, il est vrai, été prises pour tenter de résoudre cette équation difficile. Premièrement, une dotation exceptionnelle de 800 000 euros a été allouée à l’ITV ; une partie des soldes 2002 et 2003 serait en outre débloquée, tandis que la filière mène une réflexion globale sur la réorganisation de la recherche dans le secteur viticole. Deuxièmement, face à un déséquilibre structurel en 2005, l’ITV a procédé à un plan de restructuration : suppression de huit équivalents temps plein travaillé et de trois unités régionales. La suppression de postes ne me semble pas de bonne méthode dans la recherche d’une plus grande qualité. Troisièmement, l’ITV opère un processus de rapprochement avec l’ENTAV – établissement national technique pour l’amélioration de la viticulture. Une enveloppe complémentaire de 500 000 euros est attribuée aux instituts pour mener à bien ce projet de fusion.

Mais d’autres problèmes surgissent. En 2006, la réforme de la gestion des fonds issus de l’ex ADAR amènera l’ACTA – Association de coordination technique agricole. Lorsqu’on est passé de l’ANDA à l’ADAR, j’avais déjà évoqué la suppression d’un « machin » en vue de créer un « truc » ! Je ne suis pas certain que l’ACTA ne soit pas un « bidule » ! (Sourires.) Une clef de répartition a été définie sur la base de trois critères : moyenne du chiffre d’affaires – encore ! – par filière des cinq dernières années, nombre d’ateliers agricoles par filière et niveau de formation des agents par institut technique. Or l’application de ces critères conduira à réduire de nouveau la dotation du pôle ITV-ENTAV de 25 %. Monsieur le ministre, une fois de plus, ces modalités sont défavorables au secteur viticole. N’y a-t-il pas lieu ou de revoir les critères de répartition ou de revenir au statu quo établi en 2005 ? En effet, alors que la viticulture représente 12 % de la valeur agricole, avec un chiffre d’affaires de 7,5 milliards en 2003 et qu’elle contribue pour 15 millions au financement de la recherche et du développement agricole, dont seulement 6 millions lui reviennent, n’est-elle pas en droit, tout en demeurant attachée à la solidarité agricole, de demander une plus juste répartition des fonds ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Antoine Herth, rapporteur pour avis. Effectivement, il ne faut pas pousser le bouchon trop loin !

M. le président. La parole est à Mme Sylvia Bassot.

Mme Sylvia Bassot. Je souhaite tout d’abord vous remercier, monsieur le ministre, de votre écoute attentive des différents acteurs du monde rural – elle est perceptible en dépit de l’austérité des chiffres du budget – et de l’attention que vous portez à nos territoires ruraux. Vous êtes un élu de terrain et vous connaissez bien le rôle essentiel que ces territoires jouent dans la préservation d’un équilibre dont notre pays a tant besoin – chacun peut s’en rendre compte à l’heure actuelle !

Alors que la mondialisation met notre agriculture en concurrence avec des pays qui n’ont pas les mêmes exigences sociales, environnementales et sanitaires que les nôtres, je me félicite des signaux forts que le Gouvernement envoie aujourd’hui à nos agriculteurs, que ce soit au travers d’une politique d’aménagement du territoire ambitieuse et innovante, avec notamment la mise en place des pôles d’excellence ruraux, ou par le biais de votre action, monsieur le ministre : je pense aux crédits alloués à nos campagnes en 2006 et à la loi d’orientation agricole débattue ici même il y a quelques semaines.

Ces deux grands dossiers que vous conduisez permettent de redéfinir une véritable ambition pour notre agriculture et de rendre plus lisible l’action de l’État dans ce domaine.

En ce qui concerne le budget, je me félicite de l’augmentation significative de la dotation du « plan bâtiment » et de celle du PMPOA. Il est en effet important d’optimiser les moyens qui visent à moderniser les exploitations dans des départements d’élevage, comme l’Orne et son bocage, où paissent les normandes, et non les charolaises, monsieur Sauvadet ! (Sourires.)

M. François Sauvadet. J’aime toutes les races, madame Bassot ! Dites-le plutôt à Michel Raison !

Mme Sylvia Bassot. Afin que notre agriculture soit compétitive, il lui faut se structurer sur ses coûts de production de façon à produire demain du lait et de la viande dans les conditions du marché de l’après OMC – c’est-à-dire avec de moins en moins de subventions.

La progression considérable, dans le budget, des crédits consacrés au soutien des agriculteurs fragilisés et à l’assurance récolte marque notre solidarité avec ceux qui souffrent des mutations de notre agriculture.

Permettez-moi toutefois de regretter à mon tour la dotation insuffisante du FFIPSA – Fonds de financement de protection sociale agricole. Le nombre de paysans retraités devient en effet supérieur au nombre des actifs, même si j’ai la chance d’être élue dans un territoire où la densité des exploitations est encore significative : les agriculteurs y représentent 8 % de la population active. L’État est fortement invité à dégager les moyens nécessaires afin que le budget du FFIPSA retrouve une situation d’équilibre.

Enfin, je forme le vœu que nous trouvions les moyens de simplifier les procédures administratives intolérables qui continuent de peser sur nos agriculteurs, en ce qui concerne notamment la conditionnalité de la PAC ou des DPU. Ces procédures, qui engendrent toujours plus de paperasserie et de contrôles, alourdissent encore les tâches des paysans dont – on l’oublie trop souvent – la mission première est de produire des biens qui alimentent l’une des principales activités exportatrices de notre pays, à savoir les produits issus de la filière agroalimentaire, laquelle représente plus de 5 000 emplois directs dans l’Orne.

Certes, nos campagnes bénéficient d’une image largement positive dans l’opinion. Il n’en demeure pas moins indispensable de conforter leur attractivité et de valoriser notre agriculture.

À côté des autres activités créatrices de richesses, il faut donner à nos paysans les moyens de demeurer, comme ils le souhaitent, le cœur battant de nos campagnes, et, pour ce faire, nous comptons sur vous, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Christian Kert.

M. Christian Kert. Monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je vais, dans un souci d’efficacité, concentrer mon propos sur la crise que vivent actuellement les producteurs de fruits et légumes. Je m’attacherai plus particulièrement au cas des producteurs du Sud de la France, ce qui changera d’ailleurs un peu nos collègues rapporteurs, qui ne figurent pas parmi les plus sudistes d’entre nous.

M. François Sauvadet. C’est très vrai !

M. Christian Kert. Une évaluation des professionnels, fondée sur la comparaison des prévisions de récoltes et des prix relevés cette année par rapport aux années précédentes, révèle une perte de chiffre d’affaire estimée, sur le plan national, à près de 150 millions d’euros, et cela dans un double contexte : celui d’une forte augmentation des charges fixes – tant de l’énergie que de la main-d’œuvre – et, d’autre part, celui d’une forte concurrence des productions des autres pays de l’Union européenne ou de pays tiers.

La production de tous les fruits de la saison estivale de cette année connaît une situation de marasme, qui persiste, et, comme quelques collègues, je prendrai l’exemple de la campagne « Pomme » qui se déroule à des prix dérisoires. Pour le seul département des Bouches-du-Rhône, la perte se chiffre à ce jour à plus de 65 millions d’euros.

Nous avons été nombreux à vous alerter, monsieur le ministre, et vous avez répondu à notre appel dès la fin du mois d’août, date à laquelle vous avez reçu les représentants de la profession, ainsi qu’un grand nombre d’élus qui sont, comme nous, particulièrement préoccupés par cette situation.

Le premier contact, quoique bon, fut un peu rapide et n’a pas encore donné les prolongements que nous souhaitions. C’est en effet un plan d’urgence que nous attendons, prévoyant des aides conséquentes et adaptées à la réalité de la situation financière des exploitations, plus que fragilisées par la succession de plusieurs années de crise.

Vous avez annoncé un soutien à cette filière à hauteur de 15 millions d’euros, assorti d’une enveloppe de 25 millions d’euros de prêts de consolidation. Nous considérons ces montants comme insuffisants car nous redoutons qu’ils ne permettent pas de mettre en œuvre suffisamment de mesures d’aides directes aux entreprises censées notamment leur donner la possibilité de remettre à flot leur trésorerie.

De même, peu de perspectives paraissent se dessiner à propos d’une baisse durable des charges sociales dans cette filière pourtant fortement pourvoyeuse d’emplois. Cette demande de baisse des charges concerne d’ailleurs de nombreuses autres filières comme la filière viticole.

À ces mesures conjoncturelles urgentes, doivent s’ajouter des mesures structurelles d’adaptation. Par exemple, le verger français est sûrement à restructurer et certaines zones vont subir des arrachages importants, entraînant pour les coopératives et les SICA des difficultés nouvelles, qu’il faudra assumer. Une adaptation des outils existants concernant le suivi des marchés aux niveaux national et communautaire, ainsi qu’une meilleure organisation avec les réseaux de l’exportation, doivent également être envisagés.

Certes, les mesures prévues par le budget 2006 et concernant les agriculteurs en difficulté seront applicables à cette filière. À cet égard, nous devons prendre acte, monsieur le ministre, que le fonds d’allégement des charges est en nette augmentation, ainsi que les aides en faveur du redressement des exploitations en difficulté. Ce sont là des points qu’il faut porter à votre crédit.

Cinq millions d’euros seront débloqués au profit des producteurs de fruits et légumes et les aides au départ et à la cessation anticipée d’activité perdurent. Mais si nous voulons préparer l’avenir de cette filière, il faut bien que des entreprises subsistent, et, pour cela, on doit leur envoyer des signes positifs forts. C’est pourquoi, avec un certain nombre de nos collègues, je suis favorable à la déduction pour aléas, prévue et améliorée par l’article 20 du projet de loi d’orientation agricole en cours d’examen par le Parlement. Il me paraît en effet nécessaire d’encourager les exploitants à se constituer une sorte d’épargne de trésorerie afin de faire face à tout aléa, qu’il soit économique ou climatique.

Un avantage fiscal lié à cet effort d’épargne devrait être envisagé, par exemple la suppression du caractère irrévocable de l’option pour la TVA trimestrielle en faveur des exploitants agricoles, relevant du régime simplifié agricole.

Ces mesures contribueraient à un assainissement financier, tout comme l’article 9 du projet de loi de finances qui consacre une diminution de 20 % de la taxe sur le foncier non bâti : cela représente un allégement de 140 millions d’euros, qui devra toutefois être compensé aux communes.

Toutes ces pistes mènent à un assainissement financier, comme le prévoit l’article 9 du projet de loi de finances, qui diminue de 20 %, dès 2006, la taxe sur le foncier non bâti acquittée par les agriculteurs. Il s’agit d’un allégement de charges de 140 millions d’euros qui devra toutefois être compensé par l’État au bénéfice des communes.

Monsieur le ministre, nous savons que les difficultés des finances publiques ne vous permettent pas une grande liberté dans les moyens mis à votre disposition, mais vous avez conscience, vous nous l’avez dit sur le terrain, que c’est l’existence même d’une filière agricole qui est en jeu, d’où l’importance des mesures que vous prenez et les mesures complémentaires que nous vous demandons.

En conclusion, je souhaite dire à notre collègue Dionis du Séjour, combien j’ai approuvé son propos sur la politique de l’eau et sur le projet de loi sur l’eau.

M. François Sauvadet. Très bien !

M. Christian Kert. Ce d’autant plus que, dans les régions méditerranéennes, se posent des questions singulières d’arrosage.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Absolument !

M. Christian Kert. Nous vous demanderons, monsieur le ministre,…

M. Jean Dionis du Séjour. Un effort sur les crédits, monsieur le ministre !

M. Christian Kert. …d’être particulièrement vigilant à propos du contenu de cette loi sur l’eau qui risquerait d’avoir des répercussions extrêmement importantes sur l’agriculture méditerranéenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis, pour la pêche. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Hélène Tanguy.

Mme Hélène Tanguy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis autour du débat budgétaire concernant l’agriculture et la pêche. Vous ne vous étonnerez pas que ce soit sur le deuxième volet que je souhaite ici intervenir.

Je ne reprendrai pas les termes de l’exposé complet du rapporteur, auxquels je souscris totalement. Je le remercie d’avoir été le fidèle porte-parole des attentes d’une profession à laquelle lui et moi sommes très attachés.

L’enveloppe financière que vous nous proposez, monsieur le ministre, demeure globalement stable, avec un transfert des aides à la construction de navires, désormais interdites par l’Europe, vers une aide à la sortie de flotte. Si ce .principe ne peut être contesté, je souhaite que cette nouvelle sortie de flotte ne prenne pas l’allure d’une simple, mais dramatique, casse de navires.

Je comprends qu’il faille accompagner dignement le départ de propriétaires de navires non rentables. J’ai toutefois du mal, comme mes collègues, à me résigner à un nouveau plan.

Si l’on n’y prend garde, nous allons voir partir hors de nos frontières des droits de pêche. Et comment, du reste, attirer et aider les jeunes à s’installer dans le métier quand on joue cette carte ?

Enfin, malgré l’indispensable préservation des ressources, comment accepter la restriction de notre force de capture, alors que les consommateurs augmentent leurs achats : 885 000 tonnes pêchées par nos navires, pour plus de 2 millions de tonnes de poissons consommées. À ce rythme, si les déséquilibres du marché et de ses réseaux de distribution devaient s’accroître, le risque deviendrait grand de ne manger, demain, que du poisson d’importation.

Au-delà de ce projet de budget, monsieur le ministre, la situation appelle d’autres réflexions. La pêche est en crise : crise conjoncturelle, mais aussi crise structurelle.

Avant de voir loin, tâchons d’abord de parer à l’urgence. L’urgence c’est aujourd’hui la question du coût du gasoil. La flambée des cours depuis un an, même si elle a fléchi ces derniers jours, nous concerne, nous, élus défenseurs de la pêche française.

Certes, l’État a depuis longtemps renoncé à taxer le gasoil des navires de pêche et son coût au litre demeure sans comparaison avec celui que connaît le reste de la population. Mais, rappelons-le, aucune autre profession n’est aussi dépendante du gasoil dans ses charges d’exploitations. On dit généralement qu’un kilogramme de poisson équivaut à un litre de gasoil. Aussi, tous les moyens, notamment ceux résultant de l’initiative des marins, doivent être mis en œuvre : diminution de la vitesse entre port et zones de pêche ; allégement de poids ; utilisation partielle de biocarburant.

Toutefois, quels que soient ces efforts, la pérennité immédiate de la pêche passe par un appui financier exceptionnel de l’État.

Je me fais l’interprète des marins-pêcheurs de notre littoral pour exprimer ma reconnaissance au Gouvernement d’avoir abondé le Fonds de prévention des aléas à la pêche. Les sommes dégagées cette année aux côtés de celles investies par les professionnels, ont joué pleinement leur rôle d’assurance. Qu’en sera-t-il au 1er janvier prochain ?

Monsieur le ministre, l’appel est lourd d’angoisses sur les quais. Si vous ne pouvez très vite, en liaison avec M. le ministre des finances, rassurer les marins, ce sera la révolte sur les quais. Aucun pêcheur ne peut imaginer sortir et risquer la vie de son équipage pour un salaire négatif !

Monsieur le ministre, je vous en supplie, le vrai problème du budget de la pêche en 2006 est là : comment traiter le dossier du gasoil ?

A côté de l’urgence conjoncturelle, la pêche connaît indéniablement une crise structurelle. La pêche ne peut plus dessiner son avenir, ni à long terme, ni même à moyen terme.

Cette impasse casse le dynamisme de la profession, écarte les jeunes et met en situation de grande fragilité des pans entiers de notre littoral.

La pêche ne représente pas que les 15 000 à 20 000 marins, même si ceux-ci méritent à eux seuls toute notre attention, mais la pêche représente aussi des dizaines d’emplois induits difficilement reconvertibles.

Il est nécessaire, avec les professionnels des différentes étapes de la filière halieutique, d’écrire nos ambitions et volontés pour les années à venir. Vous avez, monsieur le ministre, jeté les bases de ce travail il y a un mois. Le budget présenté aujourd’hui ne peut donc prévoir les moyens de ces actions, moyens qu’il faudra inventer. Ainsi, j’espère que la souplesse voulue dans le budget de la France permettra, dès 2006, de lancer quelques nouveaux programmes.

À leur propos, je soulignerai les priorités suivantes : réfléchir à une meilleure connaissance de la ressource à travers un instrument de mesure indépendant, associant les analyses des scientifiques et l’expérience des professionnels ; appréhender l’avenir par une gestion pluriannuelle des quotas et une meilleure répartition des droits de pêche par producteurs afin de donner une visibilité aux investisseurs, qu’ils soient artisans, armateurs ou financeurs ; retrouver une flotte adaptée et plus rentable – l’âge moyen de la nôtre est de vingt-trois ans, quand quinze ans serait un âge bien meilleur.

Pour construire, il faut créer un nouveau dispositif fiscal incitatif pour les investisseurs privés, conseiller la création d’entreprises de pêche, le tout avec une attention particulière pour les jeunes.

Il faut mieux gérer, enfin, le contrôle en adoptant une charte de qualité et renforçant l’harmonisation européenne. Sur les quais, dans mon port, trois contrôles inopinés ont eu lieu en quinze jours sur les quais du Guilvinec ! C’est un peu beaucoup.

Nous devons penser : marché, consommateur. Il est temps de réfléchir en termes de « filière », et non plus de « cueillette ». L’avenir des marins-pêcheurs est indissociable de la mise en marché et de la création de plus de valeur ajoutée sur les produits consommés comme sur les sous-produits. Là, beaucoup, beaucoup reste à faire, en commençant par modifier l’état d’esprit et en mettant en place des éléments d’observation statistique.

Le travail remarquable du Conseil économique et social, à travers le rapport de Gérard d’Aboville, le dit : « Nous sommes à l’heure des choix. »

Pour ma part, je vous fais confiance, monsieur le ministre, en souhaitant que Bercy, qui a un port sur la Seine, certes, mette un peu d’eau salée dans ses approches financières. (Sourires.)

M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis, pour la pêche. Bercy a non seulement un port, mais aussi deux bateaux !

M. Christian Kert. C’est toute une économie ancestrale, mais aussi incontournable sur nos côtes, qui est en jeu. Des milliers d’emplois en dépendent.

Au-delà du budget 2006, c’est au plan d’action que vous avez lancé que nous pensons tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez.

Mme Henriette Martinez. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget que vous nous présentez est clair, lisible et cohérent. Il est de surcroît en augmentation, ce qui n’est pas négligeable. Il est adapté aux réalités et aux difficultés de notre agriculture. Il doit être salué comme un bon budget.

Parmi les priorités de votre action, j’ai bien noté votre volonté de maintenir l’agriculture sur l’ensemble du territoire et de favoriser l’attractivité des territoires par une politique active de renouvellement des générations.

La députée de la montagne que je suis ne peut qu’approuver de tels objectifs. Cependant, vous le savez, l’agriculture de montagne est en crise.

M. Michel Bouvard. C’est vrai !

Mme Henriette Martinez. Je m’interroge sur deux aspects : son maintien et son avenir.

En ce qui concerne son maintien, je pourrais même dire sa survie, les aides apportées par votre budget prouvent, par leur augmentation, que la crise est profonde et ne concerne pas que la montagne. Les crédits « AGRIDIFF », le fonds d’allégement des charges financières, les prêts bonifiés de consolidation des dettes, les prêts calamité, la réforme du mécanisme de protection contre les calamités : toutes les mesures que vous proposez à la hausse sont importantes et représentent un engagement fort de l’État.

Par ailleurs, la capacité de réaction immédiate que vous venez de démontrer dans la crise de la filière fruits et légumes mérite d’être soulignée.

Cependant, je suis inquiète. Ces aides suffiront-elles à sauver, en montagne, des exploitations agricoles en grande difficulté et à redonner confiance en l’avenir à des agriculteurs découragés par les difficultés climatiques et naturelles – sécheresse pendant trois années consécutives, grêle, gel –, sans compter, dans mon département des Hautes-Alpes, la présence des loups, que mes collègue me reprocheraient de ne pas évoquer ?

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. Jean Dionis du Séjour. Eh oui !

Mme Henriette Martinez. Découragés, les agriculteurs le sont aussi par les difficultés économiques, les coûts de production trop élevés, les prix de vente anormalement bas, la concurrence excessive – que subissent notamment les arboriculteurs – engendrée par des quotas d’importation mal maîtrisés au niveau européen. Troisième motif de découragement, les difficultés administratives : paperasserie complexe, mais aussi caractère répétitif et parfois contradictoire – selon qu’ils émanent de l’administration française ou de l’Europe – des contrôles, stagnation du niveau des aides, dont le versement est de plus en plus tardif. Ainsi l’ICHN, qui était versé autrefois en avril, ne l’est plus maintenant que le 15 octobre. Le versement des aides au titre de la PAC ne se fait plus en juillet, mais le 15 décembre. Quant à la PCO, qui faisait l’objet de trois acomptes, elle est versée désormais en une seule fois. Tout cela grève la trésorerie des agriculteurs de façon parfois dramatique.

Pour couronner le tout, la présomption de culpabilité dont sont victimes les agriculteurs fait que les aides ne sont pas versées à la date prévue tant que les contrôles sont en cours, et il n’est pas rare que ceux-ci s’éternisent bien au-delà des dates limites. Sur ce point, je vous remercie, monsieur le ministre, de m’avoir répondu que 80 % des aides pourraient être versées pendant le contrôle. Les agriculteurs des Hautes-Alpes, à qui je l’ai annoncé, sont très satisfaits de cette mesure. Je me dois néanmoins de vous dire que la réactivité de l’administration est telle que nous n’en avons pas encore ressenti les effets bénéfiques sur le terrain. (Sourires.)

M. Jean Dionis du Séjour. Ça, il ne faut pas être pressé !

Mme Henriette Martinez. Les agriculteurs attendent également qu’au-delà des mesures conjoncturelles indispensables, mais toujours insuffisantes, des mesures structurelles leur permettent de retrouver des conditions de production et de commercialisation saines – là encore, c’est aux arboriculteurs que je pense en premier lieu –, une concurrence loyale en matière de coûts de production, un véritable contrôle des volumes importés et une équité de traitement dans l’application des normes sanitaires. Sur tous ces points, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé en présentant vos mesures à la filière fruits et légumes.

Enfin, l’avenir de l’agriculture, qui est un métier difficile mais un beau métier, passe par la formation des jeunes. Je m’étonne, à cet égard, que les établissements d’enseignement agricole publics et privés voient leurs moyens horaires diminuer de 3 % dans la région PACA, alors que leurs effectifs augmentent de près de 2 % et que les crédits globaux consacrés à cet enseignement sont eux aussi en hausse. J’ai été interpellée à ce sujet par les enseignants et les parents d’élèves du lycée des Émeyères et de la maison familiale rurale de Ventavon : pourquoi supprime-t-on les classes de quatrième de l’enseignement agricole alors qu’elles sont un vivier pour les classes agricoles de demain et contribuent à l’intégration scolaire et professionnelle de nombreux jeunes, qui trouvent dans cet enseignement une nouvelle motivation scolaire et un projet d’avenir ?

M. François Sauvadet. Tout à fait !

M. Jean Gaubert. Très juste !

Mme Henriette Martinez. Je voudrais pouvoir rassurer ces établissements sur leur dotation globale horaire, le nombre d’élèves financés, le montant de la subvention versée par élève, ainsi que sur le statut des enseignants de catégorie trois de l’enseignement privé en attente de reclassement.

Monsieur le ministre, un département comme le mien, les Hautes-Alpes, ne saurait vivre sans ses agriculteurs, ceux d’aujourd’hui et ceux de demain. Je compte sur votre écoute et sur vos réponses pour les rassurer et les encourager à poursuivre leur activité en dépit des difficultés. Ce budget et la loi d’orientation agricole sont pour eux, je n’en doute pas, des gages de votre détermination à les soutenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, parmi les priorités de ce projet de budget figure l’objectif de maîtriser les risques de l’activité agricole. Les inquiétudes sont vives chez les viticulteurs, en particuliers de ma région, le Beaujolais, dont le vin nouveau va être, dans vingt-quatre heures, goûté dans le monde entier.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Bernard Perrut. La viticulture doit faire face à de profondes remises en cause : les habitudes de consommation ont changé, les circuits de distribution ont évolué et de nouveau pays producteurs concurrencent nos produits. Dès le mois d’avril, monsieur le ministre, vous avez mis en place deux types de mesures destinées à soutenir les exploitants viticoles en difficulté financière : des mesures spécifiques, sous forme d’aides à la trésorerie, de prêts de consolidation des annuités de 2005, de prise en charge d’intérêts pour les exploitations les plus endettées, mais aussi des mesures d’ordre plus général, qui relèvent des procédures habituelles du ministère de l’agriculture. Je ne saurais trop insister, à ce propos, sur la nécessité de conserver des moyens pour la procédure « agriculteur en difficulté ».

Les viticulteurs font preuve de volonté et de responsabilité. Cependant, la démarche qualité, le débat sur la limitation des rendements, voire les projets d’arrachage, ne peuvent dissiper des inquiétudes qui vont parfois jusqu’au désespoir. De nombreuses questions restent posées. Comment accompagner la restructuration des exploitations ? Comment accompagner les viticulteurs contraints à abandonner leur activité et à en trouver une nouvelle ? Comment éviter une baisse des prix inacceptable ? Les cours sont en effet revenus au niveau de ceux de la fin des années 90 et ne couvrent même plus les coûts de revient : c’est ce qu’on appelle de la vente à perte !

M. François Rochebloine. Comme pour le lait !

M. Bernard Perrut. De telles évolutions portent préjudice à l’ensemble de la filière viticole, et plus largement aux régions rurales liées à cette production. Au regard de la qualité du millésime 2005 partout en France, la chute des cours est particulièrement injustifiée, mais comment ne pas dénoncer aussi le paradoxe qui veut que le verre de vin servi au café soit payé à un prix supérieur à celui d’un litre de vin vendu par le producteur ? Sans doute faudrait-il réfléchir à une meilleure répartition de la valeur ajoutée et aux actions à mener en direction des intermédiaires et des distributeurs, en particulier la grande distribution. La seule solution est probablement l’organisation de l’offre, pour laquelle les viticulteurs ont besoin de l’aide du ministère.

Comment soutenir une consommation de vin respectueuse de notre culture et de nos traditions ? Oui à la modération, non à la prohibition. À cet égard, nous comptons sur le Conseil de la modération que vous avez souhaité mettre en place, monsieur le ministre.

En matière d’exportations, vous avez certes développé les moyens financiers, mais comment booster davantage la présence de nos vins sur des marchés nouveaux tels que le Japon, la Chine ou l’Inde, tout en aidant individuellement nos viticulteurs à conquérir de nouveaux marchés ?

De plus, les viticulteurs souffrent sous le poids des charges. Il conviendrait d’alléger notamment les charges sociales et d’en revoir le mode de calcul. Dans ce contexte de crise, leur prise en charge partielle est indispensable. N’y a-t-il pas lieu, en outre, de réviser la procédure d’accès au RMI de sorte que tous les exploitants puissent en bénéficier, qu’ils soient au forfait ou au régime réel ?

Un mot sur les difficultés des maisons familiales rurales, que j’ai déjà évoquées en tant que porte-parole du groupe de l’UMP sur le projet de budget de l’éducation nationale. Le ministre de l’éducation nationale s’est engagé à hauteur de 8 millions d’euros, mais il s’est aussi engagé en votre nom et au nom du Gouvernement, assurant que les maisons familiales rurales seraient bien dotées des 15,5 millions d’euros que leur avait promis l’État. Je suppose que vous nous confirmerez cet engagement, monsieur le ministre.

J’évoquerai ensuite la question récurrente du financement de la protection sociale des agriculteurs. Votre collègue Jean-François Copé a pris l’engagement, au nom du Gouvernement, d’affecter 300 millions d’euros supplémentaires de droits sur les tabacs au FFIPSA, mais aussi de faire prendre en charge une fraction de sa dette par l’État. Nous souhaiterions que vous nous apportiez à votre tour un certain nombre d’engagements sur la pérennité du financement institutionnel des prestations sociales. La MSA procède d’une véritable démocratie sociale, comme en témoigne l’élection de 27 000 délégués et de 2 000 administrateurs.

Un dernier mot sur les retraités agricoles, qui attendent des évolutions. Je me réjouis de la mesure votée au Sénat en faveur des conjoints d’agriculteurs, essentiellement les femmes qui ont interrompu quelques années leur activité pour élever leurs enfants et qui ne pouvaient de ce fait bénéficier de la revalorisation de leur retraite : nous savons désormais que les pensions pourront être réexaminées dès le 1er janvier 2006. Mais il faut aller plus loin et mieux accompagner les retraités les plus modestes.

Bien évidemment, j’apporte tout mon soutien à ce projet de budget, connaissant, monsieur le ministre, l’attention que vous portez à l’agriculture dans sa diversité et au monde rural dans sa globalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Serge Roques.

M. Serge Roques. Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la vitalité et l’avenir de nos territoires sont largement conditionnés par la présence et l’activité de nos agriculteurs. L’agriculture est, aujourd’hui comme hier, une force vive, une force d’avenir indispensable aussi bien à l’identité qu’à la prospérité de notre pays, indissociable de l’industrie agroalimentaire, première industrie française, et du tourisme, la France étant le pays le plus visité au monde.

À l’évidence, l’agriculture française est une agriculture performante : la France est le premier exportateur mondial de produits agricoles transformés, le second de produits agricoles bruts, mais la concurrence de plus en plus vive rend nécessaire une évolution globale. La loi d’orientation agricole que nous venons d’examiner en première lecture va enfin apporter à nos agriculteurs les moyens d’une compétitivité renforcée, notamment en faisant évoluer l’exploitation familiale traditionnelle vers un modèle d’entreprise agricole.

Parallèlement, la mise en valeur du territoire, et en particulier le maintien de l’emploi sur les territoires ruraux, est une problématique sous-jacente à toute politique agricole. En donnant la primauté à la question du renouvellement des chefs d’exploitation et des conditions de transmission des entreprises agricoles, on contribue aussi à aménager de façon équilibrée l’espace national et à mettre en valeur le milieu rural. L’avenir d’une profession dépend largement de son pouvoir d’attraction sur les jeunes générations. Or la profession agricole, qui, malgré toutes les difficultés qui lui sont inhérentes, est l’une des plus nobles et des plus essentielles qui soient, n’attire pas suffisamment les jeunes.

Élu de l’Aveyron, département qui, depuis de nombreuses années, est l’un des trois qui accueillent le plus d’installations de jeunes agriculteurs, je sais combien les premières années sont difficiles pour eux, l’apprentissage de la maîtrise de l’outil de travail – et le parc technique est de plus en plus complexe et sophistiqué – se cumulant avec l’endettement. Ils sont bien loin des 35 heures de travail hebdomadaires et doivent faire montre d’un investissement personnel, voire familial, de chaque jour et de chaque instant. Mais je sais aussi que l’installation est possible et je puis mesurer combien le travail de la terre est passionnant. Les jeunes qui se lancent courageusement dans l’aventure ne le regrettent pas.

Élaboré dans un contexte transitoire, le budget de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans la continuité des efforts consentis et dégage, malgré les lourdes contraintes, des marges de manœuvres pour des actions prioritaires, telles que la modernisation des exploitations, l’action en faveur de la maîtrise des risques et des pollutions, le développement des débouchés, etc.

J’insisterai, pour ma part, sur l’action en faveur du renouvellement des générations dans l’agriculture, qui me semble tout à fait primordiale. Cet effort est concrétisé par la création, grâce à la nouvelle architecture budgétaire, d’une ligne spécifique correspondant à l’action n° 03, intitulée « Appui au renouvellement des exploitations agricoles », du premier programme. Avec plus de 236 millions d’euros, les fonds attribués progressent de 2 %, ce qui, dans le contexte budgétaire contraint qui caractérise le budget pour 2006, montre que vous considérez cette action comme une priorité.

Pour la mener, nous disposons de quelques grands outils. En premier lieu, la dotation jeune agriculteur, créée en 1973, joue un rôle de levier pour l’accès à d’autres aides et est désormais versée en une seule fois au moment de l’installation. Sa dotation, pour 2006, de plus de 62 millions d’euros en crédits de paiement et de près de 80 millions d’euros en autorisations d’engagement devrait permettre de financer 5 124 dossiers correspondant à des engagements antérieurs à 2005 et 5 600 nouveaux dossiers.

Les exonérations fiscales et de charges sociales, qui constituent le second volet des aides aux jeunes agriculteurs, sont très significatives : abattement de 50 % sur le montant des bénéfices imposables au titre des soixante premiers mois d’activité ; réduction de la taxe départementale de publicité foncière sur les acquisitions d’immeubles ruraux ; dégrèvement de 50 % sur la taxe sur le foncier non bâti pour une durée de cinq ans ; exonération partielle pendant cinq ans des cotisations sociales ; exclusion du montant de la DJA de l’assiette des cotisations.

Le dispositif du Fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture est pérennisé et reçoit une dotation pour 2006. Ce volet est très surveillé par les jeunes agriculteurs, car les crédits, tant d’intervention que d’animation, sont surconsommés. Ce dispositif remporte un grand succès et doit donc être consolidé. À titre d’exemple, dans le département de l’Aveyron, huit dossiers de crédit emploi formation installation sont bloqués pour l’année 2005, par manque de crédits. Les agriculteurs s’inquiètent du financement du stage préparatoire à l’installation et des modalités d’octroi de l’aide à l’étude prévisionnelle d’installation. Je sais, monsieur le ministre, que vous faites tout votre possible pour abonder ce fonds, puisque vous vous êtes prononcé favorablement sur l’amendement de la commission initié par M. Herth consolidant les crédits du FICIA. Je vous en remercie, car cet argent est indispensable à la réussite de nombreuses installations.

Enfin, le renouvellement des générations passe par la facilitation de la transmission. À cet égard, je me réjouis que le « plan crédit transmission », nouvel instrument fiscal créé par le projet de loi d’orientation agricole, puisse avoir une application rétroactive pour toutes les ventes réalisées à compter du 18 mai 2005. Il permettra aux jeunes agriculteurs d’étaler dans le temps la reprise d’une exploitation et au cédant domicilié fiscalement en France de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu.

Pour conclure, je ferai écho à la proposition du Conseil européen des jeunes agriculteurs. À l’heure où les jeunes agriculteurs européens ont de nombreux défis à relever, la mise en place d’un programme d’échange entre jeunes agriculteurs pourrait être un outil précieux, qui conférerait une valeur ajoutée au parcours de formation du jeune qui s’installe. Son marché ne s’étend-il pas désormais au moins à l’échelle européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, dernier orateur inscrit.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je consacrerai mon intervention aux maisons familiales rurales, dont plusieurs intervenants, et notamment mon ami François Sauvadet, ont souligné l’intérêt. À mon tour, je veux insister sur la qualité des résultats et des débouchés qu’elles assurent à l’issue des formations, qui devraient servir d’exemple en matière de formation par alternance. Il est de notre devoir d’aider ces MFR.

En juillet 2004, M. Nicolas Forissier, alors secrétaire d’État à l’agriculture, m’avait informé de la conclusion d’un protocole d’accord entre le ministère et les organisations représentatives de l’enseignement agricole privé par alternance, qui définissait des bases claires pour le calcul de la subvention d’État aux établissements pratiquant ces formations et prévoyait les modalités de versement échelonné de l’arriéré dû à ce titre. Or le projet de budget pour 2006 remet en cause les termes de cet accord qui, dans le strict respect de la loi, rétablissait l’équité dans la situation faite à ces établissements.

Avec 10 % des crédits alloués à l’ensemble de l’enseignement agricole, les MFR assurent, avec un succès reconnu, la formation de 30 % des élèves.

M. François Sauvadet. C’est vrai !

M. François Rochebloine. Pour simplement appliquer la loi et assurer un fonctionnement normal des maisons familiales rurales, il manquait entre 15 millions et 17 millions d’euros. Dans le cadre de la mission « Enseignement scolaire », la commission des finances avait accepté un amendement de 15,5 millions d’euros. Malheureusement, lors de la discussion de cette mission hier soir dans l’hémicycle, votre collègue Gilles de Robien a fait accepter un amendement de seulement 8 millions d’euros, indiquant avoir votre accord pour financer les 7,5 millions d’euros manquants.

M. François Sauvadet. Ah ?

M. François Rochebloine. À la faveur de ces explications, l’amendement de 15,5 millions d’euros a été retiré.

Connaissant votre attachement aux maisons familiales rurales, monsieur le ministre, je ne doute pas que vous confirmerez cet engagement. Je regrette toutefois, et vous me pardonnerez l’expression, ce marchandage de tapis entre ministères. Je considère que l’éducation nationale aurait dû prendre en charge la totalité de ces 15,5 millions d’euros.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. C’est clair !

M. François Rochebloine. Enfin, la conclusion entre l’État et le Centre pédagogique national des MFR d’un contrat prévoyant le nombre des personnes formées, la durée de la formation et son coût est l’application pure et simple de la loi Rocard de 1984. Après le renouvellement de ce cadre contractuel en novembre 2004, des formateurs avaient été recrutés, conformément aux engagements. Mais la réduction de 30 % de la subvention d’État, qui peut apparaître faible en valeur absolue – 140 000 euros –, place les associations dans l’incapacité de respecter l’obligation légale d’assurer en deux ans une formation qualifiante pour l’enseignement par alternance. Les MFR ne peuvent pas interrompre les formations déjà commencées – vous en avez d’ailleurs convenu en maintenant le montant de la subvention pour l’année 2004, malgré des versements quelque peu tardifs.

Compte tenu des fortes contraintes du budget de l’État, les maisons familiales rurales sont prêtes à accepter une subvention moindre à celle prévue dans le contrat : moins 10 % – 80 000 heures au lieu de 88 000 – pour 2005, moins 15 % pour 2006 et moins 20 % pour 2007. Elles se montrent ainsi tout à fait raisonnables et de bonne volonté. À ce jour, elles n’ont pas obtenu de réponse. Pourront-elles compter sur une réponse rassurante de votre part ? En leur nom et au nom de tous les élèves qui bénéficient de leur formation, je vous remercie d’avance. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Sauvadet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, malgré l’heure tardive, je souhaite répondre à tous les orateurs qui se sont exprimés. Je remercie en premier lieu les rapporteurs, notamment M. Herth, qui s’est déjà distingué par son travail remarquable sur la loi d’orientation agricole, à la discussion de laquelle nombre d’entre vous ici ont participé.

M. Jean Dionis du Séjour. Cumulard ! (Sourires.)

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. À cette occasion, nous avons défini le cadre de l’agriculture d’aujourd’hui : concurrence, attentes de la société en matière de sécurité sanitaire des aliments et de respect de l’environnement. Pour reprendre l’expression du Président de la République, nous voulons une « agriculture économiquement forte et écologiquement responsable ». C’est ce vers quoi tendent la loi d’orientation agricole, que le Parlement a amendée et qui reviendra prochainement en commission mixte paritaire, et le projet de budget.

À moins d’un mois de la réunion de Hong Kong, nous souhaitons un succès du cycle de Doha, à condition de parvenir à un accord équilibré et équitable. Cela signifie que l’agriculture ne doit pas être une variable d’ajustement mais un volet à part entière de l’accord, comme l’industrie et les services. L’accord doit également permettre d’atteindre un équilibre des concessions faites par les uns et les autres sur les soutiens internes, la concurrence à l’exportation ou l’accès au marché. Il doit aussi intégrer la dimension développement puisque – faut-il le rappeler ? – le cycle de Doha s’intitule « Cycle du développement ». Encore faut-il que les bénéfices de ce cycle ne soient pas accaparés par quelques grands pays émergents au détriment des plus pauvres, auxquels il ne resterait que des miettes. Enfin, nous voulons un accord digne de ce nom, dans le cadre de disciplines agricoles agréées en commun. Tel est le sens de notre action.

L’offre européenne doit rester équilibrée. Cela n’a pas toujours été le cas et nous avons parfois dû rappeler le négociateur à plus de mesure. Jusqu’au bout, nous serons extrêmement vigilants et resterons fermes sur nos positions, car, M. Sauvadet l’a rappelé, l’agriculture est un secteur stratégique pour notre pays. Un colloque très intéressant sur l’emploi était organisé aujourd’hui à Paris par la FNSEA. Le monde agricole et agro-alimentaire fournit 2,5 millions d’emplois en France et génère 8 milliards d’euros d’excédent commercial. Il assure notre indépendance alimentaire et nous garantit la maîtrise de la qualité de notre alimentation. L’accident malheureux qui s’est produit il y a quelques semaines sur des steaks hachés a été l’occasion de démontrer notre capacité à retrouver rapidement et le lieu de leur conditionnement et les clients qui les avaient consommés. Une telle traçabilité n’a pas de prix. L’agriculture offre également des réponses d’avenir, comme l’énergie verte, les bioénergies, la biomasse et la chimie verte.

Sans la PAC, l’agriculture française ne serait pas là où elle en est aujourd’hui. Sa réforme apporte la garantie de recevoir chaque année 8 milliards d’aides directes jusqu’en 2013. Cette année, la déconnexion des paiements par rapport à la production complique un peu les choses, mais le nouveau système d’aides est un facteur de sécurité de revenu pour les agriculteurs. Avec les DPU, l’aide est désormais fixe et indépendante des aléas économiques ou climatiques et leur laisse la possibilité de décider de productions en fonction des opportunités du marché. À cet égard, je rappelle que l’Europe représente un marché de 450 millions de consommateurs.

Les rapporteurs Alain Marleix et Antoine Herth ont évoqué le programme de développement rural, qui arrive à échéance à la fin de 2006. Pour autant, la continuité du soutien au développement rural reste assurée puisque le règlement communautaire qui définit les modes d’intervention du FEADER a fait l’objet d’un accord à l’unanimité au mois de juin dernier. Il est notable que nous en ayons été capables au lendemain même du fameux sommet des chefs d’État et de Gouvernement qui avait achoppé sur les finances européennes. Pour que les perspectives financières soient connues, nous avons engagé la concertation avec nos partenaires pour préparer la prochaine programmation et être prêts le 1er janvier 2007.

En somme, la politique agricole conduite articule les trois niveaux – international, communautaire et national – et le budget est établi pour lui en donner les moyens. Il participe d’une triple exigence : avoir une agriculture forte dans un environnement international compétitif, mettre en œuvre une politique agricole commune rénovée et répondre aux attentes de nos concitoyens.

Dans un contexte budgétaire contraint, qu’en tant qu’ancien responsable du budget je connais bien, l’effort en faveur de l’agriculture et de la pêche est significatif. D’ailleurs, vous avez été nombreux à souligner que les crédits de paiement, avec 5,011 milliards d’euros, connaissent une hausse de 2,5 %. Cette enveloppe, dans le cadre de la LOLF, regroupe les moyens attribués à quatre missions, dont trois sont interministérielles. Il est vrai que cette réforme des lois de finances a cassé nos habitudes, mais, dans un an ou deux, nous nous serons familiarisés avec les nouveaux programmes, les nouvelles missions et les indicateurs de performance, et nous aurons de nouveaux repères. Nous avons principalement débattu ce soir de la mission ministérielle, « Agriculture, pêche et affaires rurales », qui représente 2 951 millions d’euros, même s’il faut resituer le cadre budgétaire de mon action dans l’articulation de ces différentes missions.

M. Alain Marleix a souligné notre effort pour maximiser les retours communautaires. Dans un contexte de restriction – c’est particulièrement nécessaire. Pour les premier et deuxième piliers, les financements européens s’élèvent à 10 milliards d’euros chaque année. Quand on se bat pour le respect des accords de 2002 et 2003, cela a donc une signification politique très forte. Par ailleurs, la solidarité nationale s’exprime dans le financement de la protection sociale agricole avec 12,5 milliards d’euros de transfert entre régimes et d’affectation de ressources fiscales. Au total, avec les aides très nombreuses des collectivités locales, les concours publics à l’agriculture frisent la trentaine de milliards d’euros.

Ce budget, vous l’avez indiqué les uns et les autres, poursuit quatre orientations essentielles : sécuriser les revenus des exploitants, stimuler l’initiative et l’innovation – je pense notamment à l’enseignement et à la recherche –, développer l’agriculture en cohérence avec les attentes de la société – aménagement du territoire, respect de l’environnement, sécurité de l’alimentation –, et, enfin – cela a été noté par le rapporteur – adapter l’organisation de l’administration pour que le ministère accompagne ces mutations.

Le développement d’une agriculture forte – qui est notre première ambition – passe par la garantie du revenu des exploitants. M. Roques vient d’insister sur ce point.

L’agriculture est confrontée à des aléas spécifiques, climatiques et économiques. M. Kert en a parlé à propos des fruits et légumes. M. Dionis du Séjour a également rappelé cette spécificité. Nous essayons d’y répondre dans la mesure de nos possibilités.

La politique de maîtrise des risques inclut l’assurance-récolte – j’y reviendrai – et intervient en complément des accords négociés avec l’Union européenne. Nous avons, avec d’autres pays européens, déposé un Mémorandum. La présidence anglaise n’a pas fait beaucoup bouger les choses et nous espérons qu’il en sera autrement sous la présidence autrichienne à partir du 1er janvier 2006. En tout cas, nous avons besoin d’avoir rapidement des réponses très précises de l’Union européenne à nos demandes en matière de gestion des risques.

Pour répondre aux crises, évoquées en particulier par Mme Henriette Martinez, le budget 2006 prévoit, premièrement, une majoration des crédits destinés aux agriculteurs en difficulté – cela nous permet de disposer en loi de finances, ce qui n’était pas le cas auparavant, de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement – ; deuxièmement, des prêts bonifiés de consolidation de dette et des prêts « calamité », pour un montant correspondant à environ 220 millions d’euros de moyens d’intervention sous forme d’enveloppe de prêts, et, troisièmement, la poursuite de la réforme des mécanismes de protection contre les calamités agricoles. Il en a beaucoup été question lors de la discussion de la loi d’orientation agricole.

Nous avons encouragé l’assurance-récolte, et nous sommes quelque peu dépassés par son succès,…

M. François Sauvadet. C’est vrai !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. …si bien que nous augmentons sa dotation de 100 % puisqu’elle passe à 20 millions d’euros en 2006. Cette dotation inscrite en PLF pourra être abondée grâce aux fonds du FNGCA, le Fonds national de garantie des calamités agricoles.

Comme vous l’avez dit, l’assurance-récolte fonctionne bien. Les objectifs des grands assureurs ont été dépassés. Par ailleurs, comme la loi d’orientation agricole le précise, grâce notamment à l’amendement du sénateur Gérard César et de la commission des finances du Sénat, l’objectif du Gouvernement est de développer, en même temps que l’assurance-récolte, de nouveaux produits d’assurance dans tous les secteurs et toutes les exploitations pour que chacun puisse être couvert. En complément, l’épargne personnelle, dans le cadre de la déduction pour aléas – DPA –, dont nous améliorons le fonctionnement, est favorisée.

Vous avez été nombreux à parler des charges des agriculteurs, qu’il s’agisse de l’agriculture ou de la pêche. Il est vrai que la hausse du prix du fioul réduit les marges de manœuvre des exploitants.

Le Premier ministre a annoncé à Rennes des mesures importantes qui seront inscrites en loi de finances : un remboursement forfaitaire de la TIPP sur le fioul domestique et de la TICGN pour le gaz naturel. Des mesures spécifiques sur le fonds de prévention des aléas de la pêche existent parallèlement pour les pêcheurs. Ce fonds a été évoqué par MM. Louis Guédon et Jean Gaubert et par Mme Hélène Tanguy.

Les incidences de l’augmentation du prix du gaz naturel ne vont ont pas échappé. Je vais engager des démarches également auprès de Gaz de France, car, pour les serristes, cette hausse est très importante.

M. Jean Dionis du Séjour et M. François Sauvadet. Absolument !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Parallèlement, le Fonds d’allégement des charges financières est doublé, comme je vous l’ai dit tout à l’heure, pour venir en aide aux agriculteurs endettés et confrontés à des crises.

Par ailleurs, le nouveau cadre de la LOLF – je le dis à l’intention de MM. Kert et Perrut – renforce la flexibilité de la gestion du budget et nous permettra peut-être de dégager des dotations supplémentaires pour faire face aux crises conjoncturelles, à l’instar des aides apportées aux viticulteurs en 2005. C’est un problème que connaît bien M. Perrut dans le Beaujolais : en cas de crise, les collectivités demandent maintenant un soutien du Gouvernement pour arracher certaines parcelles.

La fongibilité des crédits pourra également être utilisée, monsieur Dionis du Séjour, pour l’hydraulique. J’y reviendrai à propos du programme pour l’eau.

M. Jean Dionis du Séjour. C’est une bonne nouvelle !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Le renforcement de la compétitivité de l’agriculture et du secteur agro-alimentaire passe par une politique ambitieuse de recherche, de développement et de formation. Celle-ci s’articule selon deux orientations : priorité est donnée aux investissements dans la recherche et l’enseignement supérieur et un soutien est apporté aux entreprises agro-alimentaires.

Le budget de la recherche du ministère de l’agriculture relève d’une mission interministérielle dont vous avez déjà débattu. J’en rappelle les traits principaux. Premièrement, nous augmentons la dotation du programme « Recherche et enseignement supérieur ». Deuxièmement, nous créons, dans un contexte budgétaire restreint, des postes d’enseignants-chercheurs et d’ingénieurs dans l’enseignement supérieur agricole.

M. Jean Dionis du Séjour. C’est très important !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Enfin, nous allons profondément réformer le dispositif du développement agricole et rural.

L’agence de développement agricole et rural disparaît le 1er janvier prochain.

M. Jean Dionis du Séjour. Mort subite !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Elle aura peu vécu. Elle comporte, vous le savez, un risque de prise illégale d’intérêts de la part des dirigeants agricoles qui participent à sa mise en œuvre.

Nous créons à la place un compte d’affectation spéciale, financé par une taxe affectée. Celui-ci permettra, en concertation avec l’ensemble des acteurs du développement agricole et rural, d’avoir une action plus proche du terrain et comportant moins de risques sur le plan juridique.

M. Feneuil m’a à nouveau parlé du financement de l’ITV, le centre technique interprofessionnel de la vigne et du vin, car il y est très attaché. J’en ai pris bonne note.

Des mesures innovantes sont également programmées en faveur des industries agro-alimentaires. Des crédits nouveaux sont consacrés à des aides aux entreprises pour conforter leurs initiatives dans le domaine technologique et commercial, particulièrement pour l’exportation. Des financements communautaires viendront s’ajouter à ces crédits. Nous disposons d’un nouvel outil, à la création duquel s’était attaché Nicolas Forissier, le PNDIAA – le partenariat national pour le développement de l’industrie agro-alimentaire –, ainsi que des pôles de compétitivité. L’agriculture en a beaucoup. Christian Estrosi et moi avons notamment l’intention de développer des pôles d’excellence ruraux. Ceux-ci participeront de la même démarche.

Pour faciliter l’installation des jeunes, évoquée par plusieurs orateurs et, notamment, par M. Sermier, il est prévu une adaptation des prêts bonifiés aux jeunes agriculteurs, qui devrait permettre, dès le 1er janvier prochain, de baisser les taux d’intérêt.

J’ai noté également un amendement intéressant de M. Antoine Herth sur le FICIA, que j’accueillerai favorablement. Il favorise, en effet, l’installation des jeunes, ce dont nous avons besoin.

Notre deuxième ambition est d’adapter l’agriculture pour qu’elle réponde mieux encore aux attentes de la société.

L’effort du ministère de l’agriculture en direction de l’environnement se traduit, notamment, par la volonté de moderniser les équipements des exploitants en soutenant l’investissement. Le plan « Bâtiment », évoqué par Mme Bassot, progresse de près de 15 % par rapport à 2005. Grâce au cofinancement communautaire, c’est en fait, comme me le faisait remarquer tout à l’heure M. Alain Marleix, le double qui est mobilisé à ce titre. Par ailleurs, je remercie les collectivités territoriales qui, quelle que soit la couleur politique de leurs exécutifs – départements et régions –, abonderont aussi ce dispositif. C’est déjà le cas, entre autres, de l’Auvergne, et ce le sera bientôt en Rhône-Alpes. Sans parler des conseils généraux qui, notamment en Bretagne, appuient ce type de programme.

Une action importante est également prévue pour favoriser la mise aux normes à travers le programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole : le PMPOA. Ce programme est doté de 90 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 40 millions d’euros en crédits de paiement. Les dotations budgétaires de cette mesure – je vous le fais remarquer – sont, pour la première fois, inscrites dans le budget initial pour en garantir le bon financement.

Le secteur de la pêche a été évoqué par nombre d’entre vous, notamment par M. Louis Guédon, M. Jean Gaubert, Mme Hélène Tanguy et, bien sûr, M. Aimé Kergueris, qui nous en a présenté la radiographie.

Nous faisons des efforts pour améliorer la sécurité des pêcheurs. M. Guédon connaît bien le problème puisque le port des Sables-d’Olonne a malheureusement connu beaucoup d’accidents de pêche ces dernières années.

Le secteur de la pêche est doté de 32 millions d’euros, dont 3 millions consacrés à la régulation quantitative de la flotte et 5,5 millions à son amélioration qualitative.

J’ai bien noté les mises en garde de Mme Hélène Tanguy. Elle aura l’occasion d’y travailler dans le cadre de la mise en œuvre du plan de sortie de flotte. J’ai compris que ce plan ne devait pas prendre trop d’importance.

Je considère que nous avons bien travaillé à Nantes, comme peuvent en témoigner les députés qui étaient présents.

Ce plan sera peut-être suivi d’une loi. Jean-François Copé et moi réfléchissons aux moyens de corriger les faiblesses du FPAP – le fonds de prévention des aléas de la pêche – face à la concurrence communautaire, dans le but de le pérenniser. Nous ferons des propositions prochainement à ce sujet.

J’ai bien noté les différentes remarques concernant la fermeture des quotas de pêche. C’est un problème difficile. Le conseil des ministres européen du mois de décembre s’annonce houleux. Nous y défendrons au mieux les intérêts de la France.

Toujours en matière d’environnement, le ministère s’engage pour le maintien d’une activité agricole et la préservation des territoires, sujet évoqué par M. Chassaigne.

La dotation de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes progresse de 3 millions d’euros. C’est important. Ce dispositif contribue au maintien de productions de jeunes animaux pour l’exportation ou l’engraissement d’animaux de qualité dans des zones herbagères.

Nous proposons également une nouvelle mesure aux agriculteurs qui s’engagent dans une démarche de développement durable. Celle-ci complète les dispositifs préexistants, notamment dans le domaine de l’agro-environnement, et bénéficie d’un cofinancement communautaire.

Nous avons évoqué tout à l’heure la qualité sanitaire des aliments. Je n’y reviens pas.

MM. Herth, Chassaigne et Raison sont intervenus sur la forêt. Comme dans le cas de l’agro-environnement, nous allons augmenter le cofinancement communautaire. Par ailleurs, 10 millions d’euros sont inscrits sur le programme des interventions territoriales de l’État du budget de l’intérieur. Cela signifie que, globalement, les moyens seront reconduits, pour répondre aux besoins et faire face aux difficultés, que M. Raison a rappelées, du secteur de la forêt.

Notre troisième ambition est de conforter le rôle de la protection sociale. Plusieurs d’entre vous se sont interrogés sur l’avenir du FFIPSA, le fonds de financement des prestations sociales agricoles.

J’insiste, tout d’abord, sur le fait que toutes les prestations sociales seront versées et que les engagements pris seront tenus par la collectivité nationale. La solidarité nationale continuera à s’exercer.

Il est exact que des difficultés portant sur l’équilibre comptable de ce régime sont apparues. Beaucoup de personnes ont travaillé sur cette question. On peut souligner à ce sujet les travaux de votre collègue Yves Censi, en tant que président du comité de surveillance du FFIPSA.

Les solutions doivent s’inscrire dans les grands équilibres des finances publiques et tenir compte du fait que plus de 80 % des recettes proviennent de l’État ou des autres régimes de sécurité sociale. M. Marleix a évoqué ce point. Comme Jean-François Copé a eu l’occasion de vous l’indiquer, nous travaillons sur des mesures de calibrage qui seront connues avant la fin de la discussion du projet de loi de finances. Philippe Bas a également évoqué ce sujet ce matin au Sénat dans la discussion sur le PLFSS.

Je rappelle pour mémoire que, dans la LOA, nous avons pris des mesures importantes de solidarité.

L’une est la suppression de la cotisation de solidarité, qui lève un handicap à l’investissement dans les exploitations agricoles. Le Premier ministre avait annoncé cette disposition à Rennes.

Une autre mesure, de 20 millions d’euros, a été adoptée à la suite d’un amendement de vos collègues du Sénat : la prise en compte des « polypensionnés », essentiellement des conjoints d’exploitants. Cette mesure de justice en faveur des petites retraites agricoles s’ajoute aux réformes déjà entreprises depuis 2002 : la retraite complémentaire obligatoire et la mensualisation des retraites agricoles. C’est déjà un beau bilan !

Quelques mots sur le ministère.

Nous prenons part à la réforme de l’État. Nous essayons de simplifier et de rendre plus efficace le ministère, tout en faisant en sorte que les agents soient heureux dans leur travail.

Nous contribuons à la réduction des effectifs de l’État en ne remplaçant pas des départs à la retraite. La maîtrise des effectifs doit se traduire par des gains de productivité et donner des marges supplémentaires pour améliorer la rémunération des agents en place. Nous devrons avoir également une gestion plus dynamique de nos ressources humaines.

Nous souhaitons également que toute notre gestion soit déconcentrée. Nous mettons en place des responsables de budgets opérationnels au niveau des directions tant régionales que départementales pour avoir une meilleure approche territoriale.

L’enveloppe de l’enseignement technique agricole est en hausse de 5 % et la ligne des bourses de 6 %.

MM. Accoyer et Rochebloine ont appelé notre attention sur les maisons familiales rurales. Ils ont rappelé l’amendement de 8 millions d’euros qui a été voté hier soir dans le cadre de l’examen du budget du ministère de l’éducation nationale. Je vous confirme qu’un autre amendement vous sera présenté, proposant un montant supplémentaire de 7,5 millions d’euros, prélevé sur les programmes de la mission « Agriculture et pêche ». 8 plus 7,5 égalent 15,5 ! C’est le montant auquel nous aboutirons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Les maisons familiales rurales, dont tout le monde apprécie le travail de qualité et qui seraient bien utiles dans d’autres domaines, disposeront ainsi des moyens qu’elles souhaitaient. Il nous restera à trouver le moyen de gager ces économies, de manière équilibrée, dans le cadre de l’article de récapitulation.

Le même souci d’efficacité et de rationalisation se traduit dans l’organisation des établissements publics. Des réformes sont en cours – je les évoque pour mémoire – dans les haras nationaux et à l’Office national des forêts, dans le cadre de la LOA.

Je sais, monsieur le président, que vous souhaitiez lever la séance à une heure trente. Je voudrais indiquer, pour conclure, que ce budget constitue une étape dans l’adaptation de notre agriculture. Il fait partie d’un ensemble important avec la loi d’orientation agricole.

Comme l’a indiqué M. le Premier ministre, c’est un budget d’ambition et de devoir. Il est marqué par l’ambition d’agir et le devoir d’apporter des réponses concrètes.

Je remercie les groupes de la majorité qui ont indiqué qu’ils le voteraient et j’assure ceux de l’opposition que nous serons toujours à leur écoute, dans le souci du respect de la démocratie et de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour
des prochaines séances

M. le président. Aujourd’hui, mercredi 16 novembre, à neuf heures trente, première séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006, n° 2540 :

Rapport, n° 2568, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ; article 74 ; Développement agricole et rural (suite) :

Rapport spécial, n° 2568, annexe 4, de M. Alain Marleix, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan,

Avis, n° 2570, tome 1, de MM. Antoine Herth et Aimé Kergueris, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006, n° 2540 :

Rapport, n° 2568, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

Articles non rattachés.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 16 novembre 2005, à une heure trente.)