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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 17 janvier 2006

114e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président. Je vous présente à toutes et à tous, mes chers collègues, ainsi qu’au Gouvernement, mes meilleurs vœux.

souhaits de bienvenue
à une délégation étrangère

M. le président. Je suis heureux de souhaiter la bienvenue à une délégation de la Chambre des représentants de la Diète du Japon, conduite par le président du groupe d’amitié. (Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

questions au gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

contrat première embauche

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. André Chassaigne. Je vous souhaite une bonne année à tous…

M. le président. Merci, monsieur Chassaigne !

M. André Chassaigne. …et surtout au peuple de France ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Et à la République !

M. André Chassaigne. Ma question s’adresse au Premier ministre.

Un député du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Camarade !

M. André Chassaigne. En guise de vœux d’avenir, monsieur le Premier ministre, vous n’avez pas annoncé à notre jeunesse des lendemains qui chantent. En réponse aux très nombreuses difficultés rencontrées par nos enfants pour trouver du travail, vous leur annoncez que les grandes entreprises, celles dont les profits explosent chaque année, pourront désormais totalement précariser l’emploi des jeunes salariés, car elles auront la possibilité de les licencier sans explication et sans aucune protection.

Six mois après la création du contrat nouvelles embauches, ce nouveau contrat première embauche est un pas supplémentaire – mais quel pas – vers l’extinction du contrat à durée indéterminée, c’est-à-dire vers la fin du minimum de sécurité professionnelle à laquelle chacun aspire.

Alors que le départ à la retraite des salariés de la génération du baby boom provoquera un formidable renouvellement de la population active, vous proposez que celui-ci s’effectue sous les fourches caudines de la précarité (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), de l’angoisse du lendemain et, évidemment, de la faiblesse du pouvoir d’achat. Avec ce projet, vous ne cherchez pas à développer l’emploi : vous remplacez les chômeurs pauvres par les travailleurs pauvres (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) et vous accédez aux sommations du patronat le plus rétrograde, qui fait de la peur un mode de gestion du personnel en isolant les salariés les uns des autres, ce qui permet de contenir la pression syndicale.

Monsieur le Premier ministre, quels projets peut avoir un jeune qui sait qu’il peut perdre son travail du jour au lendemain, sans aucune explication ?

M. le président. Monsieur Chassaigne, veuillez poser votre question !

M. André Chassaigne. Monsieur le Premier ministre, comment voulez-vous que la jeunesse de notre pays ait confiance en l’avenir si vous décidez de l’enfoncer dans la précarité et la pauvreté, alimentant ainsi son sentiment d’injustice et son rejet de la société. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Chassaigne, votre question est-elle posée ?

M. André Chassaigne. J’y viens, monsieur le président !

M. le président. Votre temps de parole est épuisé, monsieur Chassaigne ! Posez votre question !

M. André Chassaigne. Monsieur le Premier ministre, l’avenir d’un pays ne se construit pas sur la désespérance de sa jeunesse. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Ma question est simple : allez-vous renoncer à ce nouveau pas vers le démantèlement du code du travail ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, quelle est la réalité que nous connaissons dans notre pays depuis plus de vingt-cinq ans ?

M. Jean Le Garrec. C’est trop facile !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Un taux de chômage des jeunes deux fois supérieur à la moyenne, et cela même lorsque la croissance est de quatre points et que les gouvernements créent massivement des emplois-jeunes. (« Ah ? » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. C’est une honte !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Sept jeunes sur dix entrent dans le monde du travail par le biais d’un CDD ou de l’intérim.

M. Maxime Gremetz. Il faut déclarer la guerre au chômage !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Et ce sont eux qui les premiers voient leur contrat de travail interrompu. Quelle galère pour les jeunes, qui ont des difficultés pour accéder au logement, au crédit et aux loisirs. C’est cette réalité, que nul n’a su changer depuis vingt-cinq ans (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) que le Premier ministre a voulu briser en regardant la réalité en face !

Nous avons ainsi constaté que la formation en alternance permet aux jeunes d’accéder à un emploi, de même que les stages pédagogiques, à condition de clarifier leurs règles de fonctionnement. Il nous faut répondre immédiatement aux 240 000 jeunes qui sont au chômage depuis plus de six mois. C’est pourquoi nous avons accordé une exonération totale de charges aux entreprises qui embaucheront des jeunes se trouvant, à la date du 16 janvier, au chômage depuis plus de six mois. En outre, le contrat première embauche prévoit le doublement des indemnités en cas de rupture : je vous rappelle que la majorité des jeunes n’ont pas accès à l’indemnisation du chômage. Par ailleurs, le droit individuel à la formation sera reconnu dès le premier mois. Enfin, en matière de logement, le « loca-pass » sera proposé à chaque contrat.

Voilà les réalités. C’est le contraire de la désespérance ! C’est une nouvelle espérance pour les jeunes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

action contre le chômage des jeunes

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Marc Laffineur. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Depuis avril 2005, on assiste à une baisse continue du chômage. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Celui-ci est passé en huit mois de 10,2 % à 9,6 % de la population active, ce qui représente une diminution de 130 000 demandeurs d’emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Desallangre. Vous ne parlez pas de l’augmentation du nombre de RMIstes !

M. Marc Laffineur. Vous avez, monsieur le Premier ministre, fait de l’emploi votre priorité. En juin dernier, vous avez annoncé la création du contrat nouvelles embauches, qui connaît un grand succès.

M. Jacques Desallangre. Tu parles !

M. Marc Laffineur. À ce jour, 280 000 contrats ont été conclus, un tiers des embauches n’auraient pas eu lieu sans ce dispositif, et plus de 50 % des contrats concernent des chômeurs ou des RMIstes.

Hier, vous avez annoncé la deuxième étape de votre plan pour l’emploi, qui concerne plus spécifiquement les jeunes, particulièrement touchés par le chômage. Le taux de chômage des jeunes est 2,5 fois plus élevé que celui de la population active dans son ensemble. Trop souvent, les jeunes mettent une dizaine d’années pour trouver un emploi stable – deux fois plus que dans le reste de l’Europe ! En majorité, ils sont embauchés dans le cadre de CDD, de contrats d’intérim ou de stages non indemnisés. Enfin, leur diplôme n’est plus une protection.

Cette situation précaire engendre des difficultés pour se loger et réduit l’autonomie des jeunes dans notre société.

Pouvez-vous expliciter les nouvelles mesures que vous avez annoncées, monsieur le Premier ministre, pour faire baisser le taux de chômage des jeunes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi de commencer cette année en souhaitant à chacune et à chacun plein de bonnes choses…

M. Jacques Desallangre. Cela commence mal !

M. le Premier ministre. Je vous présente, ainsi qu’à tous les Français, mes meilleurs vœux pour vous-mêmes et vos familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Marc Laffineur a abordé le sujet qui est au cœur de nos responsabilités : l’emploi. Il est vrai, monsieur le député, que nous avons engagé la première étape de la bataille pour l’emploi avec quelque résultat, mais il faut aller plus loin car la situation faite aux jeunes sur le marché du travail est inacceptable : 23 % d’entre eux sont au chômage et il leur faut près de dix ans, parfois plus, pour entrer durablement dans le monde du travail. Cette situation ne peut pas durer.

M. Jacques Desallangre. Jésuite !

M. le Premier ministre. Les jeunes connaissent une trop longue période de précarité, durant laquelle ils enchaînent stages, CDD et périodes de chômage. Nous devons rompre ce cycle infernal.

Face à une telle situation, l’immobilisme et la querelle ne sont pas acceptables. Seule l’action est à la hauteur des enjeux. Afin d’apporter des solutions concrètes aux problèmes des jeunes de France, nous allons leur proposer de véritables parcours d’embauche, d’abord fondés sur l’alternance, dont l’efficacité n’est plus à démontrer : 80 % des jeunes titulaires d’un contrat de professionnalisation trouvent un emploi dans les jours qui suivent la fin de leur formation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Arrêtez !

M. Jacques Desallangre. Vous n’y croyez pas vous-même !

M. le Premier ministre. Si, comme nous avons pu le constater, les petites et moyennes entreprises font déjà toute leur place aux apprentis, il n’en est pas de même des grandes entreprises. Nous avons donc demandé aux entreprises de plus de 250 salariés d’ouvrir davantage leurs portes aux apprentis, avec l’objectif d’accueillir 1 % d’apprentis en 2007, 2 % en 2008 et 3 % en 2009.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Heureusement, vous ne serez plus là !

M. le Premier ministre. La deuxième étape de la bataille pour l’emploi sera de favoriser les stages. Aujourd’hui, les stages donnent trop souvent lieu à des abus et les jeunes nous ont demandé de mieux les encadrer. Nous y veillerons, en généralisant une charte de bonnes pratiques et en exigeant que les stages de plus de trois mois soient systématiquement indemnisés. Désormais, toutes les expériences professionnelles accumulées par les jeunes seront intégrées dans un véritable cursus universitaire et professionnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, le Gouvernement souhaite faciliter l’accès des jeunes aux contrats à durée indéterminée, car l’ennemi, c’est la précarité ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est ainsi que les entreprises qui proposeront un CDI à des jeunes au chômage depuis plus de six mois bénéficieront d’une exonération totale des charges sociales.

M. Alain Néri. Pour combien de temps ?

M. le Premier ministre. Nous créons par ailleurs un nouveau contrat à durée indéterminée : le contrat première embauche, qui offre des garanties fortes et des garanties nouvelles. Des garanties fortes, car les stages, les contrats de professionnalisation et les CDD seront désormais pris en compte au titre de la période de consolidation de l’emploi, d’une durée de deux ans, qui permettra d’accéder au contrat première embauche. Des garanties nouvelles, car nous ouvrons aux jeunes des droits nouveaux (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains)…

M. Jacques Desallangre. Ils seront licenciés au bout de deux ans !

M. le Premier ministre. …avec l’indemnisation au titre du chômage – ce à quoi nos prédécesseurs n’avaient pas pensé – après quatre mois d’emploi en CDI et pour une période de deux mois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Nos prédécesseurs n’avaient pas non plus pensé au droit à la formation permanente ! Nous, nous ouvrons ce droit pour tous les jeunes dès le premier mois d’emploi en contrat première embauche.

Enfin, parce que nous sommes aussi soucieux de la vie quotidienne des jeunes actifs, nous entendons leur faciliter l’accès au logement et au crédit. (« Ah ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Nous avons mis en place le « loca-pass », et, grâce aux discussions que nous avons menées avec les banques, les contrats nouvelles embauches seront reconnus par les banques comme de véritables CDI, ce qu’ils sont réellement ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il en ira de même pour les contrats première embauche. C’est une avancée sur le marché de l’emploi, en faveur des jeunes et contre la précarité.

M. Albert Facon. Ne mentez pas !

Mme Martine Billard. Vous êtes le seul à le croire !

M. le Premier ministre. L’objectif est de donner aux jeunes de nouvelles garanties, de nouvelles opportunités, de leur permettre d’accéder à un emploi stable, hors des querelles et des esprits partisans. Notre seul souci doit être d’obtenir les résultats que les Français attendent de nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

PRÉCARITÉ

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, je vous ai écouté attentivement, mais comment vous croire ? (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Le contrat à durée indéterminée est mort : vous l’avez tué !

Après le contrat nouvelles embauches, le contrat première embauche pour les jeunes et le contrat de dix-huit mois pour les seniors institutionnalisent, pour une majorité de salariés, l’insécurité généralisée. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Plus de droit du travail, plus de garantie contre les licenciements. Désormais, les salariés sont à l’essai permanent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. – Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Quel incroyable bond en arrière !

Vous qui vous présentez comme le troubadour du modèle social français (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), vous êtes en train de le jeter aux orties. Le parcours d’embauches que vous dites vouloir impulser n’est en réalité qu’un chemin de croix pour toutes celles et tous ceux qui vont être obligés de l’emprunter.

Où est le dialogue social ? Où est la négociation ? Les organisations syndicales sont, une nouvelle fois, placées devant le fait du prince. Vous imposez dans l’improvisation et unilatéralement une nouvelle mesure empruntée au bréviaire libéral.

Que cesse cette hypocrisie du double langage que vous ne cessez de pratiquer, comme nous l’avons entendu pendant une semaine avec le Président de la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Vos mots, vos discours flamboyants ne sont que le paravent d’un démantèlement du code du travail, d’un alignement sur le modèle anglo-saxon…

M. Yves Bur et M. Pierre Lellouche. Et alors ?

M. Jean-Marc Ayrault. …le plus rétrograde. Votre modernité, monsieur le Premier ministre, a tout simplement le goût de la Restauration. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le Premier ministre, croyez-vous que votre période d’essai de deux ans à Matignon soit transposable à tous les salariés français ? Jusqu’où allez-vous conduire le pays dans l’insécurité sociale ? N’avez-vous pas encore tiré les leçons de ce qui s’est passé en novembre dernier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, tout à l’heure, répondant à une question de la majorité, j’ai parlé de la première étape de la bataille pour l’emploi. Et j’ai aussi parlé de quelques résultats. Parce que je n’aime pas l’autosatisfaction en politique ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Marc Ayrault. Ce n’est pas très gentil pour M. Raffarin !

M. le Premier ministre. 280 000 contrats nouvelles embauches signés d’ici à la fin de l’année.

Plusieurs députés du groupe socialiste. À la place de quoi ?

M. le Premier ministre. Nous sommes passés de 10,2 % de chômeurs dans notre pays à 9,6 % (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Truqueur !

M. François Liberti. Et les radiés ?

M. le Premier ministre. Ces résultats parlent d’eux-mêmes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Et je ne m’en satisfais pas, monsieur Ayrault !

Monsieur le président Ayrault, je crois que nous devons éviter, dans notre démocratie, les critiques injustes et stériles. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Je souhaite qu’ensemble – je dis bien ensemble –, nous nous posions deux questions.

Oui ou non, y a-t-il un problème spécifique du chômage des jeunes dans notre pays ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) La réponse est : oui ! (« Non ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Seconde question : face à un tel problème, pouvons-nous ne rien faire ? (« Non ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Nous sommes tous d’accord : non ! Progressons pas à pas, c’est important, et je suis sûr que nous arriverons à la même conclusion. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Un député du groupe socialiste. Autant dire que, quand il pleut, ça mouille !

M. le Premier ministre. Troisième étape du raisonnement : partons maintenant du constat.

Nous avons donné les chiffres : 23 % de jeunes chômeurs dans notre pays, mais 40 % de jeunes chômeurs dès lors qu’on parle de jeunes sans qualification ; entre huit et onze ans pour obtenir un emploi stable. C’est ça la précarité, monsieur le président Ayrault, et cela fait vingt-cinq ans que ça dure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

L’honneur du Gouvernement est de relever le défi et d’agir ! Alors, que faire ?

M. François Liberti. Empêcher les délocalisations ! Empêcher les licenciements préventifs !

M. le Premier ministre. On peut choisir l’idéologie, l’ironie, la dérision, la comparaison historique par défaut. On peut, au contraire, choisir l’action. L’action s’impose à nous parce que les Français nous le demandent.

M. Maxime Gremetz. Il ne faut pas faire n’importe quoi !

M. le Premier ministre. Et c’est ce que nous entendons faire avec le soutien des Français et des Françaises.

M. Maxime Gremetz. Sans les syndicats !

M. le Premier ministre. La réponse du Gouvernement est d’offrir un véritable parcours d’embauche : les formations en alternance, les stages encadrés et un véritable contrat à durée indéterminée. Monsieur Ayrault, une fois de plus, cela n’existait pas. J’ai parlé de huit à onze ans pour entrer sur le marché de l’emploi. Pour ceux qui seraient soumis à l’enchaînement des CDD, des stages et du chômage, nous consolidons cette période sur deux ans et déduisons les stages, les CDD, les périodes d’alternance sur cette période de deux ans.

M. Alain Néri. Et vous augmentez le nombre de RMIstes !

M. le Premier ministre. Monsieur Ayrault, pouvez-vous me dire en me regardant dans les yeux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) que cela ne constitue pas un progrès ? Vos yeux n’arrivent pas à dire ce que dit votre bouche ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Par ailleurs, monsieur Ayrault, des garanties importantes sont apportées dans ce contrat.

Première garantie pour les jeunes : nous leur offrons un droit à l’indemnisation du chômage – cela n’avait jamais été prévu – : deux mois au bout de quatre mois. Il faut le dire aux jeunes car ils vous le rappelleront dans un an et demi et ne vous pardonneront pas de leur avoir menti ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Deuxième garantie : un droit à la formation au bout d’un mois. Il faut le dire aux jeunes car ils ne nous pardonneront pas de ne pas leur avoir dit !

M. François Lamy. Ils vont vous le dire !

M. le Premier ministre. En outre, nous leur offrons un accès au crédit et au logement auxquels ils n’ont pas accès aujourd’hui. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Là encore, c’est une ouverture, un changement, c’est véritablement une dynamique nouvelle pour les jeunes.

M. Henri Emmanuelli. C’est le XIXe siècle !

M. le Premier ministre. Par ailleurs, parce que nous souhaitons une impulsion forte, nous voulons exonérer de toutes charges les contrats à durée indéterminée signés au profit de jeunes au chômage depuis plus de six mois. Là encore, c’est un immense changement, dans le respect des engagements que nous avons pris, pour un coût de 50 millions, en utilisant les dispositifs existants et en maximisant leur portée. C’est aussi à cela qu’il nous faut recourir.

Il faut de l’imagination pour répondre aux problèmes des Français : entraînons-nous car nous en aurons besoin dans les prochaines années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

désamiantage et démantèlement
du Clemenceau

M. le président. La parole est à M. Rudy Salles, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Rudy Salles. Madame la ministre de la défense, depuis quelques jours, nous assistons avec tristesse et même avec un certain étonnement à la lente agonie d’un des fleurons de la marine française : le porte-avions Clemenceau.

Parti de Toulon le 31 décembre dernier et censé atteindre son but final, Alang, deux mois plus tard, il reste encore à ce jour bloqué à l’entrée du canal de Suez.

Une somme de 1 300 000 dollars a été versée à l’Égypte au titre d’un droit de transit. Ce premier obstacle franchi, c’est maintenant l’Inde qui refuse au Clemenceau l’entrée dans ses eaux territoriales, et ce jusqu’à une décision de la Cour suprême indienne, au plus tard le 13 février.

Le motif invoqué tient au caractère toxique de l’amiante qu’il contient. C’est un débat, y compris en France, quant à la quantité d’amiante déjà retirée du porte-avions. La question est donc de savoir ce qu’il en est réellement : qu’est-ce qui a été fait ici, en France, et qu’est-ce qui restera à faire en Inde ?

Il s’ensuit une question corollaire : est-il bien légitime de laisser une telle tâche à des pays qui semblent mal préparés et s’exposent donc à de vrais risques sanitaires ? Ces travaux ne pouvaient-ils pas être réalisés en France ?

Par ailleurs, une telle affaire est négative quant à l’image et à l’influence de la France au niveau international. C’est également un déchirement pour beaucoup de nos concitoyens de voir ce « bateau ivre », hier l’une des plus grandes fiertés de la France en matière de défense.

C’est pourquoi je vous demande, madame le ministre, de bien vouloir nous donner toutes les informations concernant cette affaire qui émeut beaucoup de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Le Clemenceau a été retiré du service en 1998. Il a fallu attendre décembre 2002 pour qu’il soit remis aux Domaines. Les Domaines ont passé un premier contrat avec une société espagnole pour procéder, en Europe, à son désamiantage et à son démantèlement. À la suite de soupçons que nous avons eus sur le comportement de cette société, le contrat a été annulé et un nouveau contrat a été passé avec une décision, que nous avons prise, de procéder à un désamiantage préalable. Je tiens à insister sur ce fait : la marine est en effet le premier armateur au monde qui a décidé de procéder à un désamiantage préalable en France et dans des conditions irréprochables.

M. Jean Le Garrec. C’est la moindre des choses, enfin !

Mme la ministre de la défense. Deuxièmement, c’est aussi le premier armateur qui a veillé à choisir un chantier de qualité pour procéder au démantèlement et en le faisant accompagner par la société française qui avait suivi les travaux faits à Toulon.

Au total, sur le fond, en 2002, grâce aux plans du navire, la marine a pu estimer que la quantité restante d’amiante était de 220 tonnes.

M. Yves Cochet. Non, c’est le double !

Mme la ministre de la défense. Après une étude préalable et plus précise, il est apparu que la cheminée contenait, en fait, non pas de l’amiante, mais des plaques de fibre de verre, ce qui veut dire qu’il restait 160 tonnes. 115 tonnes ont été retirées à Toulon, comme cela est prouvé par les procès-verbaux d’enfouissement. Restent donc 45 tonnes.

Malgré tout cela, certains, et notamment quelques associations, ont contesté les différentes décisions et procédures à différents niveaux. Tous les recours qui ont été intentés ont été systématiquement rejetés par la justice !

M. Arnaud Montebourg. Et alors ?

Mme la ministre de la défense. Néanmoins, il est vrai que toute cette agitation a pu inquiéter certains de nos partenaires. Les Égyptiens nous ont demandé des renseignements, que nous leur avons fournis, et, aujourd’hui, le Clemenceau est en train de naviguer dans le canal de Suez. De la même façon et pour les mêmes raisons, la Cour suprême indienne nous a demandé des renseignements que nous allons lui transmettre. Nous lui transmettrons l’ensemble des informations dont nous disposons et qui ont basé notre action. Et ils ne devraient pas manquer de convaincre la Cour suprême.

Nous attendons, à la fois sereinement et avec confiance, le jugement de la Cour suprême indienne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

insécurité dans les transports en commun

M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca, pour le groupe UMP.

M. Lionnel Luca. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

Le 31 décembre, et surtout le 1er janvier derniers, plusieurs bandes de délinquants ont opéré dans le train Nice-Lyon, en particulier sur le secteur compris entre Nice et Marseille. Durant plusieurs heures, ils ont fait régner la terreur, prenant en otages quelque 600 voyageurs, les menaçant, les détroussant, voire les violentant, en particulier une jeune étudiante, sans compter les dégradations matérielles systématiques.

Monsieur le ministre d’État, vous avez immédiatement diligenté une enquête de l’Inspection générale de la police nationale pour reconstituer les faits et établir les responsabilités.

On ne peut d’ailleurs que regretter, dans ces circonstances, que trop peu de plaintes aient été déposées et que les rares suspects interpellés aient tous été relâchés.

Si, en raison de leur ampleur exceptionnelle, ces événements restent rares, il n’en demeure pas moins que, trop souvent, les passagers ou les agents de la SNCF subissent des agressions verbales et physiques, et qu’il n’y a pas d’intervention efficace pour les réduire.

Monsieur le ministre, vous étiez hier en gare de Toulon, pour prendre ce même train de Marseille à sept heures cinquante et une…

M. Jean Glavany. C’est un peu tard !

M. Lionnel Luca. …et dialoguer avec les passagers et le personnel. Vous avez annoncé diverses mesures importantes pour améliorer la sécurité, et je souhaiterais que vous nous en fassiez part. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Monsieur le député, les faits que vous venez d’évoquer sont inacceptables et je n’ai pas voulu les minimiser. Il faut en finir, désormais, avec le compassionnel systématique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marc Ayrault. Que faisait le ministre de l’intérieur ?

M. Christian Paul. Qui est ministre de l’intérieur ?

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. J’ai reçu les victimes. L’une d’entre elles m’a expliqué que, pendant un quart d’heure, elle s’était sentie comme un objet dans les mains de voyous. Je le dis comme je le pense : quand on se comporte comme ça, ce n’est la faute ni au chômage, ni aux discriminations, ni aux injustices ; c’est la faute à un sentiment d’impunité qui fait que, dans notre pays, un certain nombre d’individus se croient tout permis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Bataille. C’est la faute à la gauche !

M. Henri Emmanuelli. Monsieur Sarkozy, vous avez eu quatre ans !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Qu’avons-nous décidé ? En 2002, j’avais été impressionné par les résultats de l’enquête sur les statistiques des infractions dans les transports en commun (« Quatre ans ! » sur les bancs du groupe socialiste) : 2000-2001, 30 % d’augmentation de la délinquance dans les transports en commun. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons créé le service régional de police ferroviaire, grâce auquel la délinquance dans les transports en commun a reculé de 34 % entre 2004 et 2005. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − « Quatre ans ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous pouvez brailler ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Claude Lefort. Les députés ne « braillent » pas !

M. Christian Paul. Monsieur le président, entendez-vous comme on nous parle ?

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Votre bilan est consternant. (Exclamations continues sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous avons décidé la création d’une police ferroviaire dotée de 2 540 personnels, dont 700 créations d’emploi, qui effectueront plus de 250 patrouilles quotidiennes dans les transports en commun. Nous serons jugés sur les résultats. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) À gauche, 30 % d’augmentation de la délinquance ; sur les bancs de la majorité, 34 % de réduction. Ce n’est qu’un début. D’autres résultats viendront sans tarder. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Henri Emmanuelli. Quatre ans d’inefficacité et de cinéma !

Politique nucléaire de l’Iran

M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux, pour le groupe UMP.

M. Xavier de Roux. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, l’inquiétude grandit au Proche-Orient. Tandis que la paix tarde à s’établir entre Israéliens et Palestiniens, que la situation se tend entre le Liban et la Syrie, que la violence paraît établie en Irak, l’Iran, pour la première fois depuis très longtemps, fédère les forces chiites de la région, du Hezbollah libanais au parti majoritaire irakien.

Dans ce contexte, la politique nucléaire de l’Iran, que ce pays vient de proclamer irréversible, apparaît comme une menace, même si, parfois, c’est lui qui s’estime menacé. Les négociations entre la troïka européenne et l’Iran ont échoué. La Russie et la Chine sont hésitantes. Quelle va être désormais la politique de la France vis-à-vis de cette grande puissance régionale, dont le gouvernement inspire de l’inquiétude ?

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, vous le savez, la communauté internationale a découvert en 2002 le programme nucléaire que l’Iran avait caché à l’Agence internationale de l’énergie atomique. En 2003, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont décidé, non pas de saisir le Conseil de sécurité des Nations unies, mais d’ouvrir une négociation diplomatique qui a abouti à l’accord de Paris, par lequel l’Iran s’engageait à suspendre toute activité nucléaire sensible. Or les Iraniens ont décidé de revenir sur cet accord de manière unilatérale et ont repris des activités nucléaires dangereuses. Au début d’août 2005, des activités de conversion se sont déroulées à l’usine d’Ispahan. Il y a quelques jours, des activités d’enrichissement ont commencé à l’usine de Natanz.

Devant cette reprise des activités nucléaires dangereuses en Iran, je ferai deux constats. En premier lieu, aucun programme nucléaire civil ne justifie de telles activités nucléaires dangereuses.

M. Pierre Lellouche. Très bien !

M. le ministre des affaires étrangères. En second lieu, pour la huitième fois, M. ElBaradei, directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique, a souligné que l’Iran violait ses obligations internationales.

Hier, à Londres, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont demandé une réunion extraordinaire du conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique, et à M. ElBaradei de faire rapport au Conseil de sécurité des Nations unies. La France déploiera tous ses efforts pour que la communauté internationale soit unie. Il en va de la crédibilité de l’Agence, de celle du système multilatéral de non-prolifération. Il en va surtout de la stabilité régionale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

nouveaux contrats de travail

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste.

M. Alain Vidalies. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, devant cette assemblée, le 28 juin 2005, à propos du contrat nouvelles embauches, vous avez déclaré : « Ce nouveau contrat permettra de dynamiser le marché de l’emploi. Il devra être évalué au fur et à mesure de sa mise en œuvre, en liaison avec les partenaires sociaux. » Or, non seulement vous n’avez tenu aucun compte de cet engagement, non seulement il n’y a eu aucune négociation, mais, aujourd’hui, vous imposez cette extension à toutes les entreprises.

Vous comprendrez aisément, monsieur le Premier ministre, que, les yeux dans les yeux, nous vous disions que nous n’accordons aucun crédit à vos engagements d’aujourd’hui, quand nous songeons à ceux d’hier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

L’extension du contrat nouvelles embauches à toutes les entreprises marque un tournant pour notre droit social. À compter de ce lundi noir du droit du travail, tous les jeunes Français ne connaîtront de l’entrée dans la vie active qu’une période de précarité de deux ans, pendant laquelle ils pourront être licenciés à tout moment et sans motif.

Le pire, c’est que vous avez déjà annoncé votre intention de proposer prochainement un contrat de travail unique inspiré de ce dispositif, qui généraliserait ainsi cette précarité de deux ans à tous les salariés. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous avez même annoncé votre intention de rendre les heures supplémentaires moins chères pour les entreprises.

M. Lucien Degauchy. Très bien !

M. Alain Vidalies. Les Français, et au premier chef les demandeurs d’emploi, apprécieront : vous privilégiez le recours aux heures supplémentaires plutôt que la création d’emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Plus extraordinaire, votre proposition − passée sous silence mais qui figurait dans le dossier de presse diffusé hier − d’élargir le champ de l’intérim à ceux qui ont déjà un emploi mais souhaitent un complément de pouvoir d’achat. Ainsi, une entreprise pourra recourir à des salariés intérimaires qui ont déjà un emploi, y compris à plein temps. C’est la porte ouverte à tous les abus et à tous les détournements.

Monsieur le Premier ministre, vous êtes engagé dans une compétition préélectorale avec votre ministre de l’intérieur, président de l’UMP.

M. Georges Tron. Ça vous va bien, de dire ça !

M. Alain Vidalies. Ce n’est pas parce que M. Sarkozy ajoute chaque semaine une page au code pénal que vous devez, chaque semaine, déchirer une page du code du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Monsieur Vidalies, posez votre question !

M. Alain Vidalies. Dans les deux cas, les victimes sont toujours les mêmes : les Français qui aspirent à une société fondée sur la responsabilité et la justice sociale. Ne pensez-vous pas qu’il serait temps de mettre fin à cette course folle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. − Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Bernard Roman. Pas facile de répondre à ça, hein, monsieur Borloo !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, il y aurait donc, dans cette assemblée, d’un côté, les généreux, et, de l’autre, les tenants…

M. Henri Emmanuelli. De l’argent !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. …d’une simple dynamique économique positive. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Permettez-moi donc de dire deux mots aux généreux. Qui a rétabli l’aide personnalisée aux logements pour les familles en difficulté ? C’est nous !

Plusieurs députés du groupe socialiste. C’est faux !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Qui multiplie le nombre de logements sociaux ? C’est nous ! (« C’est nous ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Qui s’occupe des licenciés économiques, refusant de les abandonner chez eux et leur proposant des conventions de reclassement personnalisé ? C’est nous ! (Mêmes mouvements.)

M. Augustin Bonrepaux. C’est faux !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Qui fait en sorte que les demandeurs d’emploi soient suivis, au plan administratif, par la même personne, qu’ils voient tous les mois ce référent qui s’occupe de leur bilan de compétences, de l’aide à la formation et de l’intéressement ? (« C’est nous ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Oui, c’est nous. Je tenais à le dire pour la morale sociale.

Mais je voudrais aussi en profiter pour répondre au président Ayrault. (« Répondez à la question de M. Vidalies ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Monsieur le président Ayrault, vous n’avez jamais abordé le problème spécifique des seniors, qui est pourtant grave : or nous tentons précisément de le résoudre avec les partenaires sociaux.

Enfin, monsieur Vidalies, un tiers des 280 000 personnes bénéficiant de contrats nouvelles embauches n’auraient jamais été recrutées sans cela et elles nous remercient.

D’autre part, vous savez que le problème de la première embauche est très particulier. J’en ai marre (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) qu’on dise aux jeunes Français : « Accepte un stage, fais de l’intérim, prends un CDD, tu n’as pas d’expérience, tu n’as pas le droit de travailler. » Nous voulons les doter d’une expérience professionnelle. Le CDI reste notre objectif, c’est vers lui que nous nous dirigeons et c’est pour étudier dans quelles conditions nous pouvons le faire, vers le mois de juin, que nous lançons une concertation avec les partenaires sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Claude Lefort. Il faudrait lui faire une prise de sang !

M. le président. Au moins, il y a de l’ambiance ! (Sourires.)

enDettement public

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, pour le groupe UMP.

M. Gilles Carrez. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Depuis 1981, l’État dépense chaque année entre 15 et 20 % de plus que ce qu’il perçoit. Tous ces déficits cumulés conduisent à un endettement public de 1 100 milliards d’euros, soit 17 000 euros par Français. Le ministre de l’économie et des finances l’a dit, la France vit au-dessus de ses moyens. Nous ne pouvons donc plus retarder le redressement de nos comptes publics et il nous faut absolument réduire notre endettement.

Monsieur le Premier ministre, vous avez pris la très heureuse initiative d’organiser, la semaine dernière, la première conférence nationale des finances publiques. Elle a permis de rassembler tous les acteurs, tous les décideurs de la dépense publique − l’État, les caisses de sécurité sociale, les collectivités locales.

M. Henri Emmanuelli. Non, pas les collectivités locales !

M. Gilles Carrez. Au cours de cette réunion de très haute tenue, chacun a partagé en conscience le diagnostic : il faut stopper la progression de l’endettement de la France.

M. Jean Glavany. En 2007 ?

M. Gilles Carrez. C’est un devoir vis-à-vis de nos enfants et de nos petits-enfants.

Plusieurs propositions ont été avancées. Toutes supposent une démarche de plusieurs années et une volonté politique de tous les instants. Pouvez-vous, monsieur le ministre de l’économie et des finances, nous dire quels sont les objectifs, quelle est la stratégie à suivre dans l’immédiat et à moyen terme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député, pour la première fois en effet dans l’histoire de notre République  Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste),...

M. le président. Écoutez la réponse, mes chers collègues !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. ...le Premier ministre a décidé de convoquer une conférence nationale des finances publiques de façon à réunir les grands acteurs de la dépense publique (« Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste),...

M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues, veuillez cesser ce bruit de fond !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. ...à savoir l’État, les organismes de sécurité sociale et les collectivités locales, mais aussi les partenaires sociaux, qui sont partie prenante.

Lors de cette réunion, qui a été d’une très haute tenue, nous avons tenu compte, ainsi que vous l’avez rappelé, monsieur Carrez, des conclusions du rapport de Michel Pébereau (« Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste).

M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce rapport, auquel ont, du reste, contribué des députés de gauche, du centre et de droite, proposait notamment d’adopter un plan quinquennal (« Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste), ce que, monsieur Didier Migaud, nous avons retenu, décision qui a été partagée par l’ensemble des grands acteurs de la dépense publique.

Le Premier ministre a décidé d’appliquer un tel plan. (« Bla-bla-bla ! » sur les mêmes bancs.)

M. le président. Taisez-vous donc, mes chers collègues !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. De façon à fixer ce cap pour la France pour les cinq ans qui viennent, il nous a demandé de nous mettre tout de suite au travail, soit trois semaines seulement après la remise de ce rapport (« Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste. – Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire),…

M. le président. Mes chers collègues, qu’avez-vous donc ? Taisez-vous ! (« Les perturbateurs, ce sont eux ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. ...afin que, début juin, à l’occasion notamment du débat d’orientation budgétaire, nous puissions présenter devant l’Assemblée et devant le Sénat (« Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste. – Vives exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) les grandes orientations qui nous conduiront au zéro valeur pour la dépense publique de l’État, au zéro volume pour celle des collectivités locales et au 1 % en plus du zéro volume pour les dépenses de santé. (« Bla-bla-bla ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Arrêtez ! On ne s’entend plus !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Oui, mesdames et messieurs de la gauche, vous avez raison de ne pas être à l’aise : pour la première fois, nous corrigeons enfin – et c’est l’honneur du gouvernement de Dominique de Villepin – les grandes erreurs économiques des vingt dernières années auxquelles vous avez tant contribué ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

violences en milieu scolaire

M. le président. La parole est à M. Franck Marlin, pour le groupe UMP.

M. Franck Marlin. J’espère, monsieur le président, que ma question intéressera l’opposition parlementaire car nos débats méritent mieux que son comportement indigne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Monsieur le ministre, le drame qui s’est déroulé au lycée professionnel Louis-Blériot, à Étampes, a fait ressortir le problème de ces jeunes – je devrais dire de ces voyous – qui ont le statut de lycéen mais qui viennent dans un établissement scolaire non pas pour apprendre mais pour perturber les cours, voire pour agresser les autres. Il s’agit fort heureusement d’une minorité, mais trop souvent concentrée dans une même structure scolaire, que certains appellent pudiquement « publics particuliers » et que la communauté éducative qualifie même d’asociaux ou d’ascolaires.

Il est impératif de veiller à ce que celles et ceux qui souhaitent apprendre puissent le faire normalement et à ce que celles et ceux qui enseignent dans des conditions difficiles puissent travailler dans la sérénité.

Il est du devoir de l’éducation nationale d’apporter des réponses concrètes à celles et ceux qui n’ont plus rien à faire dans le circuit scolaire traditionnel, en faisant en sorte qu’ils soient pris en charge dans des structures spécifiques, de type internats, pour réapprendre que la vie en société impose le respect de certaines règles et de certains devoirs.

Quelles réponses entendez-vous, monsieur le ministre, apporter à ce problème majeur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Marcel Dehoux. Des suppressions de postes !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Marlin, j’ai rencontré hier une enseignante très courageuse, malgré l’épreuve physique et morale qu’elle a subie. J’ai bien entendu assuré Mme Montet-Toutain de la solidarité nationale, tout en envisageant avec elle son avenir, sachant qu’elle a toujours la passion d’enseigner. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Elle le mérite !

J’ai reçu ce matin le rapport des inspecteurs généraux. Leurs conclusions font état de deux constatations : il n’y a pas eu de faute caractérisée ni des services académiques ni de l’établissement.

M. Yves Bur. Il n’y a jamais de faute !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Mais il y a, en revanche, dans cet établissement des incivilités, des absentéismes, voire des menaces. C’est pourquoi j’y ai nommé, dès le 3 janvier, un proviseur adjoint et plusieurs assistants pédagogiques.

M. Maxime Gremetz. Responsable mais pas coupable !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Par ailleurs, il conviendra d’améliorer l’offre de formation de cet établissement.

M. Maxime Gremetz. Il n’y a jamais de responsable !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Mais nous ne pourrons obtenir de réels résultats que si nous changeons notre façon de gérer les établissements scolaires.

M. Yves Bur. Ce n’est pas demain la veille !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Par exemple, il ne faut pas laisser ce lycée dans l’incertitude quant à sa reconstruction. Plus généralement, il convient de mieux expliquer le règlement intérieur en début et tout au long de l’année, de le faire respecter et de sanctionner ceux qui ne le respectent pas. De même, il faut faire mieux travailler ensemble les services de l’État – la police, la gendarmerie, la justice, l’éducation nationale.

C’est dans cet esprit, monsieur Marlin, que la circulaire de 1998 sur la violence en milieu scolaire va être réécrite, afin de constituer un vrai guide pratique à l’intention des enseignants.

Mesdames et messieurs les députés, les jeunes ont besoin de repères...

M. Gérard Bapt. Avec vous, ils sont servis !

M. Henri Emmanuelli. Ils ont le CNE maintenant !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. ...donc à la fois de récompenses et de sanctions. Les enseignants ont, eux, besoin d’encouragements et de soutien, et les chefs d’établissement de notre confiance. Ma responsabilité est de satisfaire ces attentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

mesures pour l’emploi

M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste.

M. Gaëtan Gorce. Monsieur le Premier ministre, nous ne pouvons nous satisfaire, parce que les Français ne peuvent s’en satisfaire, des réponses qui ont été apportées...

M. Robert Lamy. Les Français socialistes !

M. Gaëtan Gorce. ...aux questions posées sur les mesures pour l’emploi. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Il est une règle de base en droit comme en politique : nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Robert Lamy. Vous êtes un expert !

M. Gaëtan Gorce. Les chiffres du chômage que vous citez sont ceux des gouvernements de droite qui se sont succédé et donc du vôtre, monsieur le Premier ministre. Or qui a laissé croître le chômage des jeunes de près de 5 % ? (« C’est vous ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C'est vous ! Qui a supprimé les emplois-jeunes entre 2002 et aujourd’hui ? C'est vous ! Qui a remis en question la durée du travail ? (Mêmes mouvements.) C'est vous ! Qui a réduit les crédits du budget pour l’emploi ? (Mêmes mouvements.) C'est vous !

S’il y a un problème d’emploi, monsieur le Premier ministre, c’est donc à cause de vous et de votre gouvernement, qui n’apportez pas de solutions adéquates. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Michel Ferrand. Le chômage baisse !

M. Gaëtan Gorce. Le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement a perdu son sang-froid : c’est du chômage qu’il devrait avoir assez ! C’est contre la situation qu’il laisse que ce gouvernement devrait s’exalter et mobiliser son énergie et ses ambitions !

M. Robert Lamy. Amnésique !

M. Gaëtan Gorce. À quoi, malheureusement, assistons-nous en effet de la part de ce gouvernement – et c’est le regret que je veux exprimer ici au nom du groupe socialiste ? Vous prenez prétexte du chômage et de la situation dramatique dans laquelle vous avez conduit ce pays pour vous attaquer aux droits sociaux et aux protections des salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Michel Ferrand. La question !

M. Gaëtan Gorce. Il y a dans ce domaine deux manières d’agir : l’une, franche, brutale, la rupture proposée par votre ministre de l’intérieur ; l’autre, plus sournoise,...

M. Jean-Michel Ferrand. La vôtre !

M. Gaëtan Gorce. ...mais peut-être plus efficace, qui consiste à détricoter maille par maille notre contrat social : c’est ce à quoi vous vous employez, mesure après mesure, depuis que votre gouvernement est en place. (Interruptions sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Vous nous dites que vous ne voulez pas d’un partage du travail, comme l’auraient proposé les socialistes.

M. Jean-Michel Ferrand. La question !

M. Gaëtan Gorce. Mais c’est pour mieux partager la précarité, ce qui est inacceptable ! Comment faire croire à nos jeunes que vous allez favoriser leur entrée dans l’entreprise en organisant les conditions de leur expulsion de la façon la plus brutale, sans garanties et sans protections ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous dirigez en fait un « Pepsi-gouvernement » : ce que vous nous proposez a un peu la couleur du social, cela n’a certainement pas l’odeur du social, et ce n’est pas du social ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste. – Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

L’attitude que vous adoptez, monsieur le Premier ministre, est celle du double langage.

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Gorce.

M. Gaëtan Gorce. Je conclus, en vous demandant, monsieur le Premier ministre, de méditer ce proverbe bien connu : on peut tromper tout le monde quelque temps, on peut tromper un certain nombre tout le temps, mais on ne peut pas tromper tout le monde tout le temps. Votre gouvernement ne fait pas du social. Il fait progresser la précarité, chacun s’en apercevra ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Desallangre. Merlin l’Enchanteur !

M. le président. Nous avons écouté M. Gorce : écoutez M. le ministre !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, je vais essayer de ne pas faire « pschitt », pour reprendre votre exemple. (Sourires.)

Vous auriez pu dire aussi bien que l’on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment, voire citer tout le dictionnaire des citations, mais on ne fait pas une politique à coup de citations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Vous parlez de social : qui a conduit, par le partage du travail, à la modération des salaires ? C’est vous ! Qui a augmenté le SMIC de 17 % ? C’est nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Augustin Bonrepaux. Vous ne répondez pas sérieusement !

M. Albert Facon. Borloo Pinocchio !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je vous remercie d’ailleurs de m’avoir interrogé, monsieur Gorce, car j’avais oublié de vous donner une bonne nouvelle : depuis que l’Agence nationale pour l’emploi existe, le mois où il y a eu le plus d’offres d’emplois en France est décembre 2005, avec plus de 320 000 emplois offerts ! C’est un record historique, tout comme celui de l’année 2005 dans son ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Martine David. Parlez-nous des radiations !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je vois bien que tout cela vous ennuie : le nouveau dynamisme économique, le traitement pragmatique des problèmes, notre fibre humaine et sociale. J’en suis bien désolé pour vous, mais tant pis si cela vous déplaît ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

naufrage du klein familie

M. le président. La parole est à M. Jean Lemière, pour le groupe UMP.

M. Jean Lemière. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

Le jeudi 5 janvier, vers 6 heures, près du rail des Casquets, le cordier Klein Familie disparaissait au large de Cherbourg avec six personnes à bord. Un seul survivant, hélas, allait être récupéré : Jean-Michel Gueno, âgé de dix-huit ans. On déplore la disparition du patron, Thierry Goueslain, trente-six ans, père de trois enfants, de Franck Hérauville, quarante-cinq ans, père de trois enfants, de son frère, Ludovic Hérauville, trente-quatre ans, père de deux enfants, d’Olivier Brusa, trente-quatre ans, père de quatre enfants, et de Frédéric Terpereau, dix-neuf ans.

Ce drame, qui endeuille encore une fois le monde de la pêche, s’est produit dans des conditions de mer normales pour la zone concernée, alors que le cordier était manœuvrant et non pas en activité de pêche.

Très rapidement, l'hypothèse d’une collision avec un navire de commerce a été évoquée, soulevant à nouveau la question de la sécurité des navires de pêche dans les zones de fort trafic commercial.

Monsieur le ministre, la population et les élus du Cotentin et de la Manche ont été très sensibles à votre présence, dès le lendemain du drame, auprès des familles des disparus pour leur apporter les messages de soutien du Président de la République et du Premier ministre, et pour manifester à nos côtés votre compassion.

Pourriez-vous communiquer à la représentation nationale les derniers éléments d'information sur ce drame et, surtout, nous faire part de vos réflexions et propositions concernant l’amélioration de la sécurité des marins pêcheurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur Lemière, vous avez été à mes côtés, comme de nombreux collègues de votre département, toutes sensibilités politiques confondues, lorsque je suis venu, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, apporter un message de solidarité aux cinq épouses et aux treize enfants dont les maris et pères ont disparu.

C’est un drame épouvantable, qui survient après ceux du Cistude et du Bugaled-Breizh. Après chaque collision, nous avons généralement du mal à obtenir des explications. Cette fois, les choses ont été différentes, car nous étions, ainsi que vous l’avez rappelé, dans le rail des Casquets, une zone surveillée en permanence par le CROSS de Jobourg. Vous avez pu constater comme moi les traces en baïonnette d’un navire maltais, reprenant sa route après avoir, pendant un intervalle de quelques minutes, viré sur le côté, qui prouvent l’existence d’un choc ou d’une manœuvre, en tout cas de quelque chose d’exceptionnel. Cela a permis, grâce à la mobilisation de nos moyens maritimes immédiatement déployés, de retrouver rapidement l’épave dans le trait central de la baïonnette, de stopper ce navire maltais et de le conduire au port de Dunkerque, où il se trouve toujours.

S’agissant d’eaux internationales, l’État maltais a la responsabilité de l’enquête judiciaire, qu’il mène avec correction et en solidarité avec notre pays. Celle-ci aboutira : tous les moyens nécessaires ont été engagés et nous détenons, malheureusement, des éléments très probants.

Reste l’enquête administrative, que Dominique Perben a confiée au BEAmer – le bureau d’enquêtes sur les événements de mer – afin de connaître les circonstances de cet accident. Le chalutier pêchait-il ? Nous ne le croyons pas. Y a-t-il eu défaut de veille uniquement sur le bateau maltais ou sur les deux navires ? Nous le vérifierons car nous devons la vérité aux familles.

En tout état de cause, cela ne doit plus se reproduire. Trop d’accidents du travail surviennent en mer et trop de marins meurent. Notre pays, depuis quelques années, a payé un tribut épouvantable. Nous devrons prendre des mesures nouvelles relatives notamment au port de vêtements de sécurité et aux équipements embarqués, en particulier les équipements anti-collision. Le Premier ministre m’a demandé d’intégrer ces éléments dans un plan de sécurité pour les pêcheurs qui sera inclus dans le plan d’avenir pour la pêche.

Nous devons ensemble nous recueillir, penser à ces hommes, à celui qui a courageusement survécu à cette terrible épreuve après avoir tenté de sauver ses camarades, et faire en sorte d’éviter que de tels événements ne se reproduisent dans nos mers. (Applaudissements.)

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre.

Votre intervention aura calmé l’ambiance de cette séance, due certainement à la joie de se retrouver ici.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. René Dosière.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Volontariat associatif
et engagement éducatif

Discussion d’un projet de loi
adopté par le Sénat

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif au volontariat associatif et à l’engagement éducatif (nos 2332 rectifié, 2759).

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour un rappel au règlement.

M. Pierre-Christophe Baguet. Mon rappel au règlement concerne l’organisation de nos travaux.

J’ai bien entendu le discours des vœux du président de l’Assemblée nationale, qui cherche à améliorer les conditions de travail des députés.

M. Patrice Martin-Lalande. Vaste programme !

M. Pierre-Christophe Baguet. J’ai également entendu les déclarations de M. Denoix de Saint-Marc et de M. Mazeaud, le président du Conseil constitutionnel.

Or la réunion qui s’est tenue tout à l’heure en vertu de l’article 88 de notre règlement avait un ordre du jour particulièrement chargé : elle a ainsi dû examiner quarante amendements, dont dix du Gouvernement, en six minutes !

De telles conditions de travail ne sont pas acceptables, et je tenais à le signaler ici.

M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, monsieur Baguet.

La parole est à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif vise un double objectif : d'une part, donner un statut au volontariat, afin de développer cette nouvelle forme d'engagement dans les associations…

M. Patrice Martin-Lalande. Elle en a besoin !

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. …et, d'autre part, mettre fin à l'insécurité juridique qui pèse sur les conditions d'emploi des personnels pédagogiques occasionnels des centres de vacances et de loisirs, ceux que l’on appelle communément les moniteurs de colonies de vacances.

Qu'est-ce qu'un volontaire ? C'est une personne qui, pour un temps de sa vie, se consacre exclusivement et de façon désintéressée à un projet associatif d'intérêt général. Le volontaire n'est ni un bénévole, ni un permanent salarié.

Ce n'est pas un bénévole, car son engagement est à la fois formalisé par un contrat vis-à-vis de l'association et exclusif de toute activité rémunérée.

Ce n'est pas non plus un permanent salarié, car son engagement n'a pas de caractère professionnel et qu'à ce titre le volontaire ne perçoit pas de rémunération.

Même s'il peut être accompli à tout âge de la vie, par exemple à l'occasion d'une année sabbatique, le volontariat concerne avant tout les jeunes. Nous le savons tous dans cet hémicycle, l'engagement au service de la collectivité est plus que jamais nécessaire à la cohésion de notre société. Les associations sont au cœur de cette problématique et elles ont la capacité d'accueillir des volontaires qui s'engagent pour un temps sur des missions d'intérêt général.

C'est pourquoi le volontariat associatif sera un des piliers du service civil volontaire annoncé par le Président de la République, aux côtés des autres formules que sont le dispositif défense deuxième chance, le programme des Cadets de la République et les contrats d'accompagnement dans l'emploi dans les champs de l'environnement, de la santé ou de la culture. Le service civil volontaire concernera ainsi 50 000 jeunes en 2007, dont 10 000 volontaires associatifs.

Il s'agit là d'un grand projet et, pour ne pas le dénaturer, il importe d'insister sur la notion d'engagement volontaire. Vous en conviendrez, un service obligatoire imposé à 800 000 jeunes chaque année deviendrait vite une contrainte, dont les jeunes et leurs familles chercheraient par tous les moyens à s'exonérer, recréant les inégalités de fait qui existaient du temps de la conscription.

Pour ma part, je crois à la valeur d'un échange donnant-donnant entre les jeunes et la société : le jeune donne de son temps et apporte sa volonté d'être utile à la collectivité, il reçoit en retour une reconnaissance sociale et un accompagnement vers la formation et l'emploi. Tel est le sens du service volontaire qui sera développé par l'Agence de la cohésion sociale et de l'égalité des chances, dont vous aurez bientôt à connaître dans le projet de loi porté par mon collègue Jean-Louis Borloo.

Je suis persuadé de l’urgence qu’il y a à développer le volontariat dans notre pays, comme il l’est dans de nombreux autres pays comparables. Or le statut de volontaire civil de cohésion sociale et de solidarité, inséré en 2000 dans le code du service national, ne répond pas aux attentes des associations et des volontaires. C’est pourquoi, malgré le dynamisme de certaines associations telles qu’Unis-Cité, on ne compte aujourd’hui que 400 volontaires en France. Pourtant, lorsqu’on pose la question lors des Journées d’appel et de préparation à la Défense, ce sont plus de 40 000 jeunes qui se déclarent potentiellement intéressés par un engagement volontaire.

Au vu de ces éléments, le Gouvernement a décidé de créer un dispositif plus large et plus souple : le volontariat associatif. Le contrat de volontariat, qui ne relève pas des règles du code du travail, est conclu par écrit entre, d’une part, une association ou fondation reconnue d’utilité publique, poursuivant un but d’intérêt général et agréée par l’État et, d’autre part, une personne de plus de seize ans de nationalité française ou européenne, ou résidant régulièrement en France depuis plus d’un an. Une mission de volontariat durera au maximum deux ans, et une même personne ne pourra accomplir plus de trois ans de volontariat au cours de sa vie.

Il est important de souligner que le volontariat s’inscrit dans une perspective européenne, qu’il permet d’accueillir des Européens en France ou d’envoyer partout en Europe des résidents français. Il sera donc très utile pour encourager la mobilité des jeunes, dans le cadre du service volontaire européen mis en place par la Commission.

Le volontaire ne peut exercer d’activité rémunérée. Cependant il peut recevoir une indemnité, en argent ou en nature, et bénéficie de tous les droits sociaux, y compris le droit à pension de retraite. L’indemnité est, pour le volontaire, exonérée d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux.

Le volontaire reçoit de la part de l’association une préparation adaptée à sa mission et peut faire reconnaître ses compétences dans le cadre de la validation des acquis de l’expérience. À l’issue de cette mission, il retrouvera, le cas échéant, ses droits à indemnisation du chômage.

Afin d’éviter que les nouvelles dispositions législatives ne soient détournées de leur objet, il sera interdit aux associations de substituer des volontaires à leurs salariés.

La procédure d’agrément des associations et fondations par l’État est un élément très important du dispositif. Cet agrément sera donné par le ministère chargé de la vie associative pour un temps limité, au vu des motifs du recours au volontariat, de la nature des missions confiées au volontaire et de la capacité de l’organisme d’accueil. En cas de dérive constatée, cet agrément sera retiré.

Le montant maximum de l’indemnité versée au volontaire sera fixé par décret ; la protection sociale au titre du régime général sera, quant à elle, assurée en contrepartie de cotisations forfaitaires à la charge de l’organisme d’accueil. Si la mission a une durée continue supérieure à trois mois, le Fonds de solidarité vieillesse interviendra pour assurer la validation de la période de volontariat au titre de la retraite. Au total, le coût pour l’organisme d’accueil sera de l’ordre de 5 000 euros pour une mission de six mois, en intégrant les dépenses d’encadrement et d’accompagnement des volontaires.

Cette somme pourra être financée, soit par les ressources propres de l’association, soit par des subventions publiques, soit – et j’insiste sur ce point – par le mécénat d’entreprise. J’ai proposé à l’ensemble de mes collègues de soutenir le développement du volontariat dans leur secteur de compétences : cohésion sociale, culture, environnement, aide aux personnes âgées ou handicapées, sport. De nombreux champs d’activité seront ainsi accessibles aux volontaires. Lorsque les missions de volontariat seront labellisées par la future agence de la cohésion sociale et de l’égalité des chances, elles pourront également recevoir des financements de sa part.

Dans le budget 2006 de mon ministère, 2,5 millions d’euros seront consacrés au développement du volontariat, pour atteindre à la fin de l’année le nombre de 2 500 volontaires dans les champs de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport. En 2007, cette action sera amplifiée pour parvenir à 5 000 volontaires associatifs dans mon champ de compétence ministérielle.

Pour atteindre cet objectif, nous allons réaliser une campagne de promotion au travers du Réseau Information Jeunesse, qui compte chaque année cinq millions de visites. Cette information sera aussi délivrée lors des JAPD ainsi qu’aux étudiants en fin d’année universitaire.

Les grandes associations seront également mobilisées sur ce thème, notamment au travers de la discussion de leurs conventions d’objectif.

Je voudrais conclure cette partie consacrée au volontariat en formulant deux remarques. Tout d’abord, le volontariat n’est pas seulement un acte individuel ; il s’inscrit forcément dans une dimension collective, puisqu’il intègre le volontaire à une équipe regroupant des jeunes issus d’horizons sociaux, culturels et scolaires très différents, unis autour d’un projet commun. Il comporte donc une dimension de brassage social qui m’a toujours frappé lorsque j’ai été amené à rencontrer sur le terrain des équipes de volontaires.

D’autre part, je suis convaincu que le volontariat constituera une porte d’entrée vers le bénévolat de responsabilité, contribuant ainsi au renouvellement et au rajeunissement du vivier des responsables associatifs, renouvellement nécessaire pour entretenir la vitalité de nos associations.

J’en viens au titre II de la loi, qui permettra de stabiliser enfin le statut de l’engagement éducatif.

Ce texte concerne les 250 000 jeunes et adultes – souvent des étudiants ou des enseignants –, titulaires du brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur ou de directeur, les fameux BAFA ou BAFD. Ces titulaires encadrent et dirigent durant leur temps libre les centres de vacances et de loisirs. Par leur engagement, ils permettent à 4,5 millions d’enfants, souvent issus de milieux modestes, de partir en vacances ou de bénéficier durant l’année de loisirs éducatifs de qualité.

Les dispositions introduites en 2000 dans le code du travail par la loi relative à la réduction du temps de travail ont créé une insécurité juridique de nature à compromettre gravement l’équilibre économique du secteur de l’animation. En effet, l’annexe II à la convention collective de l’animation est considérée comme illégale par l’inspection du travail.

À la demande pressante des partenaires sociaux du secteur de l’animation, le Gouvernement propose donc de traiter cette question par la loi. Il sera institué pour ces personnes un régime dérogatoire à certains chapitres du code du travail, qui permettra de les rémunérer par un forfait journalier, dont le montant minimum sera fixé par décret.

La durée du travail de ces personnes sera fixée par une convention ou un accord de branche étendu, sans pouvoir excéder quatre-vingts jours dans l’année. Elles devront, bien sûr, bénéficier d’un repos hebdomadaire.

Cet aménagement de la législation du travail est justifié par l’intérêt social qui s’attache à la préservation de ce secteur d’activité, et une telle évolution législative est faite pour stabiliser la situation des animateurs et directeurs occasionnels, qui s’inscrivent dans une logique d’engagement éducatif pour un temps limité, et non de collaboration permanente avec les organisateurs de centres.

Comme l’ont fait votre rapporteur, Mme Claude Greff, et votre commission des affaires culturelles, je vous proposerai également d’élargir le champ d’application de ce texte à l’encadrement occasionnel des séjours de vacances des personnes handicapées adultes.

Enfin, comme je l’avais annoncé à la tribune du Sénat, j’ai conduit une concertation approfondie avec les organisations professionnelles représentatives, qui avaient manifesté leur inquiétude sur les conditions d’application de ce texte. C’est pourquoi je vous proposerai, par un amendement gouvernemental, de déterminer le champ d’application de l’engagement éducatif en fonction de la nature des activités proposées aux mineurs, et non en fonction de la nature juridique de leur organisateur.

Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Mme Claude Greff, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Claude Greff, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Je suis particulièrement heureuse d’être aujourd’hui rapporteur du projet de loi relatif au volontariat associatif et à l’engagement éducatif, que vous avez présenté, monsieur le ministre, le 2 mars 2005 et qui a été adopté au Sénat le 12 mai dernier.

Il est important pour moi de rappeler ici qu’avant vous il n’y a jamais eu de ministre chargé de la vie associative, et que seul Jacques Chirac, Président de la République, a pris cette initiative. Par la création de ce ministère dont vous avez la charge aujourd’hui, il y a désormais une reconnaissance officielle du fait associatif.

Ce projet de loi est le fruit d’une belle rencontre entre le monde associatif et le monde politique. Vous avez, monsieur le ministre, par une écoute et un dialogue permanents, apporté des solutions concrètes à des questions restées trop longtemps sans réponse. Vous nous proposez aujourd’hui ce projet de loi ô combien attendu par les personnes désireuses de vivre une autre forme d’engagement.

Plus que jamais, le monde associatif est devenu incontournable dans l’exercice de la démocratie et du développement du lien social. Les associations sont le moyen privilégié de l’expression de la volonté d’engagement de nos concitoyens. Plus d’un million d’entre elles sont en activité dans notre pays et témoignent de la vitalité du secteur.

Des hommes et des femmes choisissent spontanément au cours de leur vie la voie de l’engagement. C’est le bénévolat et il faut l’encourager. Il est au cœur de la vie associative et indispensable à la réalisation de nombreux projets. On estime ainsi à 13 millions de personnes le nombre de ceux qui donnent gratuitement de leur temps.

Mais le mouvement associatif s’est aussi largement professionnalisé. 1,5 million de personnes sont aujourd’hui employées par le secteur associatif. Avec le volontariat, nous avons créé un espace nouveau entre le bénévolat et le salariat, une nouvelle forme d’engagement dans le monde associatif.

II existe ainsi une vraie complémentarité entre le volontariat et le bénévolat. Le volontariat va permettre à une jeunesse pleine d’énergie de s’engager et d’agir dans les associations pour l’intérêt général, en accomplissant un engagement citoyen ou un temps citoyen, en France ou en Europe.

Le volontariat est une opportunité d’engagement libre et désintéressé au service de la collectivité. C’est un moment de rencontre entre une personne et un projet d’intérêt général et collectif, porté par une association. C’est une occasion formidable pour ceux qui font ce choix de construire une citoyenneté active et de s’engager dans un autre milieu que le leur, de découvrir des gens différents, dotés de bagages scolaires variés, dans un environnement où chacun s’enrichit ainsi de la différence de l’autre et de son expérience.

Le volontariat s’adresse autant aux jeunes filles qu’aux jeunes hommes. Il n’est pas réservé aux jeunes ni même aux jeunes en difficulté. Il peut cependant permettre à ces derniers de compléter leur éducation par l’acquisition d’un « savoir être » fondé sur des compétences nouvelles, utiles et valorisables pour leur entrée dans la vie active.

Des associations telles que Unis-Cité, que je connais bien, ou Cotravaux, et bien d’autres encore, qui, toutes, effectuent un travail remarquable, sont concernées par ce contrat de volontariat associatif.

Le dispositif légal actuel ne permet pas de répondre à toutes les aspirations des associations et des personnes candidates au volontariat. Il est donc nécessaire de le compléter en offrant un cadre et un statut qui puissent s’adapter aux multiples situations dans lesquelles évoluent les associations.

Tel est l’objet du présent projet de loi qui se propose également, dans le titre II, de clarifier la situation des personnels pédagogiques occasionnels des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement, au regard du droit du travail.

Ce texte contient deux volets.

D’une part, la création très attendue d’un véritable statut du volontariat associatif – nous donnerons une définition précise du volontariat associatif, qui aura toute sa place aux côtés du salariat et du bénévolat. C’est une avancée considérable !

D’autre part, la sécurisation du statut juridique des personnels pédagogiques occasionnels des centres de vacances – CV – et des centres de loisir sans hébergement – CLSH. Il est nécessaire de maintenir un équilibre économique qui permet à 4 500 000 mineurs d’accéder à prix modéré à des loisirs éducatifs de qualité durant les congés scolaires et en dehors des heures de classe.

En ce qui concerne la création du contrat de volontariat associatif, il existe à l’heure actuelle plusieurs formes de volontariat reconnues par la loi : les trois formes de volontariats civils créés par la loi du 24 mars 2000 ; le service volontaire européen ; le volontariat de solidarité internationale.

Il faut souligner que le volontariat associatif a vocation à devenir un statut de droit commun. Il recèle en effet le potentiel de développement le plus important pour permettre aux personnes qui le souhaitent de s’engager en faveur de l’intérêt général. Ce nouveau statut est d’ailleurs l’une des trois composantes du label national appelé « service civil volontaire » et annoncé par le Président de la République.

Sans trop entrer dans le détail, voici quelques caractéristiques du volontariat associatif.

Il s’agit d’un contrat entre l’organisme agréé et la personne volontaire.

Il ouvre droit à une indemnité non soumise à l’impôt d’un montant maximal de 400 euros par mois.

Avec le volontariat, des jeunes gens pourront vivre des engagements à plein temps et dans la durée – de trois mois à vingt-quatre mois – en France et dans les pays européens. Il s’agit d’un engagement exclusif de toute autre activité et désintéressé.

Le Sénat a posé le principe du titre-repas du volontaire. Je propose d’en améliorer la rédaction afin de le rendre davantage opérationnel. Dans le même esprit et afin de ne pas privilégier un statut plutôt qu’un autre, je propose de créer un chèque repas du bénévole. Cette initiative fait suite à l’une des propositions émises par le groupe de travail « Mieux accompagner et reconnaître l’activité bénévole », dont j’assurais la présidence. Je tiens également à saluer ici le très grand travail accompli par mon collègue Patrick Beaudouin sur le monde associatif.

Le volontaire bénéficie d’un contrat de droit privé et d’une couverture sociale complète et obligatoire. Ce point est très important, car les trimestres de volontariat lui seront de ce fait validés pour la retraite.

Pour mettre fin à son engagement, le volontaire doit en informer l’association et respecter un préavis d’un mois au minimum, contrairement au bénévole, qui, lui, peut mettre fin à sa participation comme il veut. Après son engagement, le volontaire peut retrouver, le cas échéant, ses droits à l’indemnisation du chômage.

Le développement du volontariat pourra se réaliser dans de nombreux domaines comme, par exemple, la culture, l’environnement, le secteur social, auprès des personnes âgées, des enfants ou des personnes handicapées. Cette expérience peut faire l’objet d’une validation des acquis. Ce nouveau statut permet donc de concilier le caractère désintéressé de l’engagement et la protection nécessaire à l’attractivité du dispositif.

Les formes obligatoires de service ne sont plus adaptées à notre époque. C’est pourquoi je veux insister ici pour vous dire combien il est important de faire confiance à la volonté d’engagement des Français en faveur de causes qui les touchent. Le volontariat associatif doit être et sera cet outil.

Le second volet de ce projet concerne l’engagement éducatif. Les centres de vacances et les centres de loisirs sans hébergement remplissent un rôle irremplaçable pour l’éducation et les loisirs des enfants et des adolescents.

Ce secteur d’activité présente un caractère saisonnier lié aux vacances scolaires, et beaucoup d’animateurs titulaires du BAFA – brevet d’aptitude à la formation d’animateur – ou du BAFD – brevet d’aptitude à la formation de directeur – exercent cette activité pendant les congés scolaires. L’économie de ce secteur est fragile et le renchérissement du coût du séjour aurait une conséquence grave pour les familles.

À l’heure actuelle, ces personnels, dénommés « personnels pédagogiques occasionnels des centres de vacances et de loisirs », relèvent de l’annexe II à la convention collective de l’animation socioculturelle qui met en place un système d’équivalence d’heures. Le travail effectué pour le calcul de la rémunération correspond à un forfait qui ne peut être inférieur à deux heures pour une journée de présence effective.

Ce mécanisme n’est compatible ni avec la définition légale du temps de travail figurant à l’article L. 212-4 du code du travail ni avec le droit communautaire. Le projet de loi crée un régime dérogatoire en retenant le critère d’au plus quatre-vingts jours travaillés par an.

Le projet de loi sur l’engagement éducatif a vocation à sécuriser et à améliorer le dispositif existant qui a été mis à mal par certaines décisions jurisprudentielles et par la législation relative à la réduction du temps de travail.

Il crée, au sein du code du travail, un régime dérogatoire qui s’inspire de celui des éducateurs familiaux employés par les associations gestionnaires des villages d’enfants et qui vise à pérenniser cette offre de prise en charge des loisirs des enfants très importante pour la société.

À l’occasion du débat au Sénat, la question a été posée de savoir si l’engagement éducatif peut concerner les animateurs et directeurs intervenant lors de séjours destinés aux adultes handicapés. Je propose de poursuivre l’initiative prise au Sénat, qui a, depuis, fait l’objet d’une concertation avec les différents ministères concernés.

Voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce que je souhaitais vous dire au sujet de ce texte très important pour le monde associatif et pour l’avenir de notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, chers collègues, il y a de quoi être fier de la vitalité et de la richesse de la vie associative dans notre pays. On estime en effet à près de 900 000 le nombre des associations, avec un rythme de créations qui va croissant.

Les Françaises et les Français membres d’une ou plusieurs associations contribuent à ce formidable élan citoyen : parmi les personnes âgées de plus de quatorze ans, ils sont près de 20 millions, avec ces dernières années une augmentation significative de la part des plus jeunes – les moins de vingt-cinq ans – et des plus de quarante-neuf ans. Dans ces tranches d’âge, près d’un Français sur deux est membre d’au moins une association.

Le mouvement associatif est bien un lieu privilégié de l’innovation en matière d’action collective, qu’il s’agisse des associations sportives, culturelles, éducatives, ou d’aides à la personne. Il arrive même fréquemment qu’il s’approprie de nouveaux champs de réflexion et mette en place de nouveaux modes d’action avant même que les pouvoirs publics ne s’en saisissent.

Pourtant, de nombreuses associations nous font part sans relâche de leur préoccupation face aux baisses de crédits constatées ces dernières années. Ces baisses ou gels de crédits ont entraîné, pour un bon nombre d’entre eux, des licenciements massifs de personnels pourtant en emplois stables depuis de nombreuses années.

Ces associations craignent, à juste titre, que la baisse des aides publiques ne remette en question leurs activités alors même que ces structures sont reconnues d’intérêt général, voire qu’elles assurent des missions de service public : centres de loisirs et centres de loisirs associés à l’école, séjours de vacances, accompagnement à la scolarité, maisons des jeunes et de la culture, foyers de jeunes travailleurs, actions de soutien à l’intégration, animations, formations, actions culturelles et sportives dans les quartiers, etc.

Nous profitons de ce texte pour demander à l’État de revenir sur ces restrictions budgétaires et d’accorder aux associations les moyens financiers nécessaires à leurs activités.

En toute logique, ce projet de loi est donc destiné à compléter le statut de volontaire civil, instauré en 2000 dans le code du service national, et celui de volontaire de solidarité internationale créé par la loi du 23 février 2005 dont les succès ont été limités par rapport aux attentes du législateur. Il devrait permettre de susciter, d’ici à 2007, entre 4 000 et 5 000 vocations.

Ce texte s’inscrit – il ne faut pas l’oublier – dans ce contexte particulier de désengagement de l’État. Il prétend instituer un contrat de volontariat ne relevant pas du code du travail, mais rédigé par écrit pour une durée maximale de deux ans.

Comment définir le volontariat ? Il s’agit d’un engagement réciproque et formalisé, limité dans la durée et permanent pendant cette durée, impliquant généralement un déplacement dans un nouvel environnement au service du collectif.

Ce contrat est restrictif puisque conclu entre une association ou une fondation reconnue d’utilité publique poursuivant un but d’intérêt général et une personne majeure de nationalité française ou européenne ou résidant en France régulièrement depuis plus d’un an.

Le volontaire reçoit une formation adaptée aux missions qui lui sont confiées et une indemnité dont le montant est prévu par le contrat. Cette indemnité est versée par l’organisme agréé dans la limite d’un maximum fixé par décret.

Le volontaire est obligatoirement affilié aux assurances sociales du régime général. La couverture du risque vieillesse est assurée moyennant le versement, par l’association ou la fondation reconnue d’utilité publique, d’une cotisation minimale fixée par décret.

Le Sénat a très largement modifié ces dispositions initiales et nous tenons à saluer certaines avancées.

Ainsi, grâce à un amendement du groupe communiste, républicain et citoyen, toutes les associations à vocation sociale et humaine pourront recourir à ce contrat. Celles assurant la défense des droits sont spécifiquement visées.

Nous approuvons de même les droits à indemnisation chômage ouverts à la fin de la mission d’un volontaire si celui-ci avait préalablement démissionné de son emploi, et la possibilité de rompre le contrat avant son terme et sans application du préavis si cette rupture permet au volontaire d’être embauché pour un contrat à durée déterminée d’au moins six mois ou pour un contrat à durée indéterminée.

La validation des acquis permettant une prise en compte de toutes les compétences acquises et le bénéfice de deux jours de congés vont également dans le sens d’une amélioration sensible du projet de loi

Nous nous félicitons aussi que la commission des affaires sociales de l’Assemblée ait supprimé l’article 13 relatif à la transparence du financement des associations et obligeant celles ayant reçu des subventions de la part de l’État ou de toute collectivité locale ou territoriale à publier des informations sur ces subventions.

Nous approuvons la décision unanime permettant de recourir à des animateurs qui relèvent de l’engagement éducatif pour l’encadrement occasionnel de personnes handicapées dans les centres de loisirs et de vacances en application de l’article 48 de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

En revanche, nous demandons que les titulaires d’un contrat de volontariat puissent, malgré l’opposition de la commission, bénéficier de l’aide juridictionnelle sans condition de ressources dans le cadre des litiges les opposant à l’organisme avec lequel ils ont signé leur contrat de volontariat.

Certes, la possibilité pour le volontaire de recevoir des prestations nécessaires à sa subsistance, à son équipement ou à son logement, la création d’un titre-repas du volontariat attribué au volontaire par l’association ou la fondation en franchise de cotisations et contributions sociales sont absolument nécessaires. Mais notre principale crainte est que le volontariat n’ouvre sur des « petits boulots » peu rémunérateurs, d’autant que la situation financière de la plupart des associations est difficile en raison des restrictions financières qu’elles ont subies en 2004 et 2005.

À cela s’ajoute la situation sociale de notre pays, qui a un double effet : d’une part, du fait notamment du désengagement de la puissance publique de bon nombre de secteurs, elle crée de forts besoins d’intervention pouvant relever de l’activité associative ; d’autre part, elle contraint bon nombre de jeunes à rechercher des moyens de subsistance, même modiques.

Des questions légitimes se posent donc : ce contrat n’est-il pas une porte de sortie pour les emplois jeunes ? ne va-t-on pas assister à une évolution du bénévolat vers le volontariat ?

Malgré un discours insistant sur la souplesse, la diversité et la relation contractuelle, votre positionnement profondément libéral refuse aux volontaires toute garantie légale, renvoyant leur mise en œuvre à la seule responsabilité individuelle des parties en présence. C’est là le nœud même du projet de loi.

Quant au titre II, les débats du Sénat n’ont pas permis d’avancer sur la voie d’une véritable refonte des financements et de l’organisation des centres de vacances et de loisirs, ce qui constitue pourtant, comme vous le savez, le cœur du problème. De ce fait, la solution proposée, qui consiste à inscrire l’engagement éducatif dans le code du travail mais en l’assortissant d’une dérogation quasi générale aux fondements essentiels de ce même code, reste inacceptable.

De même, nous nous opposons avec véhémence à toute velléité d’étendre les dispositions de l’article 11 au secteur lucratif, comme cela a été proposé au Sénat.

Monsieur le ministre, la démarche d’engagement volontaire doit être ouverte à tous. Les projets et les contrats de volontariat doivent être adaptés à des personnes ayant des parcours différents, avec des modalités d’information et d’accompagnement permettant à chacun de s’engager dans une action d’intérêt collectif, d’exprimer concrètement sa solidarité, de vivre sa citoyenneté, de se découvrir enfin et de se révéler dans un travail volontaire. Ce projet de loi ne répond pas tout à fait à cet objectif. Pour y remédier, je vous demande évidemment d’être attentif à nos amendements. En outre, j’ai formulé une série d’observations sur lesquelles je souhaite que vous apportiez des éclaircissements.

M. le président. La parole est à M. Patrick Beaudouin.

M. Patrick Beaudouin. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui est un texte essentiel pour le développement de la vie associative de notre pays et l’essor du volontariat associatif. Il s’inscrit dans la suite de la loi relative au contrat de volontariat de solidarité internationale, que nous avons votée en février dernier et qui est venue conforter le cadre juridique du volontariat international.

La France peut se targuer d’être le pays où, notamment grâce aux dispositions souples et toujours pertinentes de la loi 1901, le nombre d’associations est le plus élevé d’Europe, puisqu’il s’élève à environ un million. Celles-ci regroupent plus de 21 millions d’adhérents, dont 11 millions de personnes qui donnent gratuitement de leur temps dans les associations sans salariés.

Mais ce dynamisme de la société civile doit être nuancé. Certes, nous connaissons le succès rencontré par les contrats de volontariat international en entreprise et de volontariat international en administration, tous deux créés par la loi du 14 mars 2000. Néanmoins, le troisième volet de la loi du 14 mars 2000, consacré au volontariat de cohésion sociale et de solidarité, n’a pas suscité l’enthousiasme escompté. En effet, avec seulement 400 volontaires ayant souscrit ce contrat, la France connaît un immense retard par rapport à ses homologues européens en termes de volontariat sur son propre territoire. Mme la rapporteure a très bien souligné les raisons de cette désaffection : la lourdeur des formalités administratives et le montant dissuasif de l’indemnité versée au volontaire.

Aujourd’hui, monsieur le ministre, plusieurs enquêtes, dont celle menée conjointement par l’INSEE et votre ministère, montrent que 80 % des Français qui ont eu une activité bénévole en 2002 partagent « l’envie de se sentir utiles à la société et de faire quelque chose pour les autres » et que deux tiers des personnes interrogées ne s’engagent que de manière occasionnelle. D’autre part, les données recueillies par le ministère de là défense au cours des JAPD, les journées d’appel de préparation à la défense, montrent que, sur près 850 000 jeunes, garçons ou filles, de moins de vingt-huit ans accueillis chaque année, environ 45 000 manifestent un intérêt pour le volontariat civil. Enfin, 96 % des personnes interrogées pensent que c’est le mot « bénévole » qui correspond le mieux à la vie associative, même si l’on compte 1,5 million de salariés au sein des associations.

C’est donc qu’il y a la place, entre le salariat et le bénévolat, pour un véritable statut du volontariat, capable de résoudre le manque d’intérêt exprimé à l’égard du volontariat de cohésion sociale et de solidarité, dont l’échec a entraîné un véritable vide juridique.

Plusieurs réflexions ont été menées à l’Assemblée, notamment au sein du groupe d’études sur le temps citoyen, présidé par Claude Greff, dont je salue l’excellent rapport, avec pour objectif d’étudier et de faire avancer l’engagement citoyen aujourd’hui en France. Il est apparu aux membres de ce groupe d’études que bénévolat et volontariat traduisaient, avant toute chose, le désir d’un engagement entier de l’individu en faveur d’une cause et d’une participation à la cité. Néanmoins, nous avions identifié des freins et des résistances qui subsistent : inorganisation persistante, manque de reconnaissance et absence de cadre légal pertinent.

Il faut donc permettre aux énergies de se rencontrer dans un cadre clair et reconnu, dans un cadre ayant une « légitimité et un appui légal », pour reprendre les termes de Mme Julie Lastmann, présidente d’Unis-Cité. C’est ce que propose votre texte, monsieur le ministre.

Par votre action, vous avez déjà contribué à répondre au désir d’engagement qu’exprime notre jeunesse. Depuis 2003, dans le cadre de sa politique en faveur de l’engagement et de l’initiative des jeunes, le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative a regroupé tous ses dispositifs d’aide aux jeunes de onze à trente ans, au sein d’un programme unique intitulé « Envie d’agir ».

Avec ses quatre volets – engagement, défi, entrepreneuriat et volontariat –, ce programme répond aux désirs d’engagement et de prise d’initiatives des jeunes selon la nature, la maturité et l’envergure de leur projet. Pour soutenir les jeunes, le ministère met à leur disposition différents outils : un accompagnement pédagogique, une aide méthodologique, des financements adaptés, un site d’information dédié et des points d’appui « Envie d’agir » partout en France. Le 24 novembre dernier, M. le Premier ministre et vous-même avez remis les prix nationaux « Envie d’agir » à trois lauréats volontaires internationaux. Le sérieux de leurs projets mérite d’être salué.

Je souhaite que le texte que nous étudions aujourd’hui puisse répercuter dans notre pays le dynamisme qu’a déjà insufflé le programme « Envie d’agir » dans le monde du volontariat, car la principale vocation de celui-ci est de développer la participation citoyenne et l’engagement solidaire, en menant au sein d’associations ou de fondations d’utilité publique, de façon désintéressée, un projet d’intérêt général.

J’insiste sur la notion de désintéressement, fondamentale à mes yeux. Comme vous me l’avez écrit dans un courrier daté du mois d’août dernier, en réponse à plusieurs questions d’associations de ma circonscription, et comme vous l’avez rappelé à l’instant, ce terme juridique signifie que la relation entre le volontaire et l’association ne se fait pas contre rémunération et n’est donc pas assimilable à un contrat de travail. Cette notion est certes juridique, mais il ne faut pas non plus laisser de côté la profondeur qu’elle apporte à l’engagement. Comme l’a écrit Victor Hugo, « le vrai nom du dévouement, c’est désintéressement ».

Les associations, par leur connaissance du terrain, sont, plus que tout autre organisme, à même de répondre aux attentes de la société et de prendre en charge des missions de proximité que ne peut assumer l’État. En effet, une telle démarche permet aux citoyens, notamment aux jeunes, de prendre conscience du fait qu’ils vivent dans une société solidaire où l’intérêt général garde tout son sens et n’est pas un vain mot. C’est en fait l’apprentissage de l’autre, l’apprentissage de la vie en communauté.

Ce texte répond aux attentes légitimes d’un grand nombre d’associations qui, aujourd’hui, rencontrent des difficultés pour se développer, en raison du manque de clarté du droit français.

Il ne s’agit donc nullement d’un « sous-contrat » de travail. La démarche des volontaires ne vise d’ailleurs ni à la professionnalisation ni à la formation professionnelle, même si, j’y reviendrai, elle est éligible à la validation des acquis de l’expérience. Il s’agit bien d’une action désintéressée, où seuls priment le souci de l’intérêt général et la volonté de se mettre au service de la collectivité.

Ce projet de loi représente donc une grande avancée pour les associations. Il mérite cependant quelques éclaircissements. Je vais d’ailleurs aborder quelques points que je voudrais voir développés dans la discussion.

Tout d’abord, j’ai pu constater que la question du chômage en fin de volontariat a suscité des craintes. Il faut rappeler que les droits à chômage ne seront ouverts à la fin de la mission de volontariat que pour les salariés ayant démissionné pour accomplir une mission de volontariat d’une durée minimale d’un an. Il s’agit de conjuguer l’aspect désintéressé du volontariat avec l’exigence de ne pas en faire un sas confortable vers les allocations de chômage. C’est là une mesure de bon sens. C’est pourquoi le volontariat doit aussi être incompatible avec le maintien de minima sociaux, ce qui serait susceptible de le détourner de sa finalité même.

En second lieu, il faut saluer l’extension aux volontaires du régime de VAE, la validation des acquis de l’expérience, mis en place par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002. Cette opportunité offerte dans les conditions prévues aux articles L. 335-5 et L. 335-6 du code de l’éducation va dans le sens de la modernisation de notre perception des compétences que permet la VAE. Cette possibilité d’éligibilité à la validation des acquis de l’expérience vise, non à inscrire le volontariat dans une démarche rationalisée de professionnalisation, mais simplement à donner la possibilité de reconnaître le volontariat comme une expérience, certes désintéressée, mais enrichissante pour celui qui l’accomplit. Elle permet en outre de rendre attractif ce contrat, au même titre que l’indemnisation, la dotation d’une couverture sociale, le décalage de l’âge limite pour se présenter aux concours de la fonction publique ou la création d’un titre-repas.

En troisième lieu, comme vous l’avez fait remarquer à plusieurs reprises, monsieur le ministre, le volontariat associatif reste trop méconnu du grand public, notamment des jeunes. L’échec du volontariat de cohésion sociale et de solidarité en est une preuve. C’est pourquoi je souscris à l’idée, exprimée d’ailleurs lors du débat au Sénat, de présenter une fois par an le volontariat à l’ensemble des collégiens et des lycéens, afin que ces derniers puissent, le moment venu, appréhender, puis faire le choix de l’engagement solidaire pour la période qu’ils souhaiteront, c’est-à-dire entre trois mois et deux ans. Cela leur permettra d’obtenir le maximum d’informations sur le sujet. De même, les journées d’appel de préparation à la défense, qui ont lieu tous les ans, sont un cadre de présentation à prendre en considération. De telles journées permettent en effet de toucher tous les jeunes, quels que soient leur formation et leur milieu social.

Par ailleurs, l’an dernier, j’ai organisé, dans ma circonscription, une large consultation du tissu associatif local sur votre projet de loi. La plupart des associations ont exprimé un vif intérêt à l’égard de ce nouveau dispositif.

Je souhaite cependant vous faire part de quelques inquiétudes. Mme la rapporteure a répondu sur certains points, mais j’aimerais également vous entendre, monsieur le ministre.

Ces inquiétudes portent sur la manière dont sera géré au niveau local l’agrément prévu à l’article 10 sur le rôle des étudiants, notamment dans l’encadrement des clubs sportifs, où leur présence est primordiale. Pourront-ils aisément s’engager dans la voie du volontariat pour ce type d’encadrement ? Par ailleurs, les étudiants qui ont souscrit au régime étudiant de sécurité sociale ne devraient-ils pas être soumis à l’obligation d’affiliation au régime général ? Mes inquiétudes portent également sur les futurs litiges relatifs au volontariat associatif : de quelles instances relèveront-ils, puisque nous sommes ici en dehors du droit du travail ? Nous avons évoqué l’aide juridictionnelle. Elles portent enfin sur les garanties apportées aux quelques associations qui reposent exclusivement sur le bénévolat. Je pense en particulier aux mouvements de scoutisme, dont le rôle d’éducation et de responsabilisation des jeunes autour de valeurs fortes n’est plus à démontrer, mais qui craignent de pâtir – sans doute à tort, mais il faut les rassurer – de la promotion du volontariat. Pourriez-vous rassurer le milieu associatif en répondant, devant la représentation nationale, à ces quelques questions ?

J’insiste par ailleurs sur la nécessité de publier le décret relatif à l’indemnisation du volontariat, qui sera sans doute de 400 euros, dans les six mois qui suivront le vote définitif de ce texte. Cette exigence en termes de « service après vote » permettra d’éviter qu’une incertitude ne pèse, dans le milieu associatif, sur le montant de l’indemnisation qui pourra être proposée aux volontaires afin de préparer leur année.

Pour conclure sur le volet du volontariat, je profite de mon temps de parole pour attirer votre attention sur le service volontaire européen, que Mme Greff a évoqué dans son rapport. Un tel volontariat devrait pouvoir s’exprimer sur un véritable tissu associatif européen. Or, vous le savez, depuis 1991, les institutions européennes étudient la proposition de créer un statut d’association européenne. Celui-ci autoriserait la création d’associations sans but lucratif pouvant agir et être reconnues sur l’ensemble du territoire européen, ce qui permettrait de développer une véritable société civile européenne et de contourner les obstacles à la liberté d’association qui existent encore dans certains États membres. Or, le 27 septembre 2005, la Commission européenne a inclus cette proposition dans une liste noire de soixante-huit propositions qualifiées de « largement obsolètes » et, à ce titre, destinées à la corbeille. Le projet a ainsi été récemment et définitivement retiré.

Par votre action et celle du Premier ministre, vous vous êtes élevé contre un tel retrait. Au moment où l’Europe traverse une crise démocratique majeure, l’initiative de la Commission aurait pu sembler paradoxale. Je me félicite donc que notre gouvernement ait eu l’initiative d’une nouvelle proposition pour faire aboutir le statut d’association européenne.

Concernant le titre II de ce projet de loi, qui porte sur l’engagement éducatif, l’article 11 permet de clarifier la situation au regard du droit du travail des personnels pédagogiques occasionnels des centres de vacances et des centres de loisirs sans hébergement, qui accomplissent un travail remarquable. Des animateurs titulaires du BAFA aux directeurs, en passant par les formateurs, ils sont près de 300 000 à intervenir auprès de la jeunesse dans le cadre d’un véritable engagement éducatif. Depuis 2000 et le passage aux 35 heures, ces personnels, dont le temps de travail effectif est difficile à déterminer, sont nombreux à avoir fait l’objet de procès-verbaux des inspecteurs du travail. En tant que maire, je peux en témoigner. Je vous ai d’ailleurs saisi de ce dossier à la suite des observations de la direction départementale de la jeunesse et des sports de mon département du Val-de-Marne. Cette insécurité juridique n’est pas acceptable et risque de compromettre l’équilibre économique et social du secteur de l’animation à but non lucratif. Le nouveau statut proposé prévoit la notion d’engagement éducatif dans le code du travail. Votre projet crée ainsi un régime dérogatoire adapté à ces personnels pédagogiques occasionnels. Il apporte donc une réponse à une insécurité juridique sans remettre en cause le salariat. C’est une reconnaissance sans ambiguïté du travail exemplaire mené au sein des centres de vacances ou des centres de loisirs sans hébergement.

Je tiens tout particulièrement à souligner la pertinence et l’actualité de l’amendement n° 11 de notre rapporteure. En effet, la loi du 11 février 2005 est une étape majeure de la prise en charge sociétale du handicap. Mais elle ne s’arrête pas là. C’est à un véritable « réflexe handicap » que nous sommes invités. Cet amendement, qui qualifie d’« engagement éducatif » la participation occasionnelle d’une personne physique à l’encadrement des activités définies à l’article 48 de la loi du 11 février 2005 et destinées aux groupes constitués de personnes handicapées majeures, traduit ce nouveau réflexe, et je m’en réjouis.

Mon vœu est que la mise en œuvre de cette nouvelle forme de volontariat et l’engouement qu’elle ne manquera pas de susciter puissent aussi contribuer à rouvrir la réflexion sur une autre grande question que les récentes violences urbaines ont remise au goût du jour et sur laquelle nous n’avons peut-être pas le même regard : le service national.

Cette question suscite la réflexion de plusieurs membres du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Je pense par exemple à notre collègue Édouard Courtial ou à Mme Joissains-Masini. En outre, cette réflexion s’est manifestée sur tous les bancs de notre assemblée. Plusieurs de nos collègues ont déposé des propositions de loi tentant de répondre à cette demande d’engagement civique et associatif. Je citerai la proposition de loi de Mme la rapporteure Claude Greff visant à créer un temps citoyen, engagement civique au service de la collectivité pour tous les jeunes atteignant l’âge de la majorité, ou ma propre proposition tendant à la création d’un service national de solidarité civique, ou encore celle de Mme Joissains-Masini relative au service civil obligatoire et mixte pour les jeunes gens de dix-huit à vingt-cinq ans. Je sais que d’autres propositions ont été faites sur d’autres bancs de l’Assemblée. J’en omets certainement.

Toutes ces initiatives parlementaires expriment une seule et même problématique : les énergies volontaires doivent pouvoir s'épanouir, mais n’est-il pas temps également de canaliser les énergies en sommeil, qui n'osent s'exprimer ou qui sont laissées pour compte ? Ne faut-il pas prendre par la main ceux qui ne seront pas naturellement volontaires ? La conscription, à travers le service national, avait pour rôle de les identifier et de les mobiliser. Aujourd'hui, l'élaboration d'un nouveau service national adapté aux réalités et aux besoins de notre jeunesse permettrait de donner à celle-ci le sens de la communauté, du civisme et de la citoyenneté et d'assurer les conditions du véritable amalgame républicain nécessaire à la cohésion nationale. Le Président de la République a proposé un service civil volontaire. C'est un premier pas, car une action plus large devra être menée au-delà du volontariat afin de mobiliser le désir d'engagement et l'immense générosité qui existent chez nos jeunes concitoyens.

Au nom du groupe UMP, je vous félicite, monsieur le ministre, de votre disponibilité et du travail de concertation que vous avez mené avec les différentes associations et avec notre assemblée. Ce texte répond pleinement aux attentes du monde associatif, qui avait un besoin urgent d’un tel travail de clarification. De nombreux amendements ont été déposés, que nous allons étudier. Je vous renouvelle tout mon soutien et celui du groupe UMP pour ce projet de loi essentiel qui permettra à la France de combler son retard en matière de volontariat associatif et d'encadrement de l'engagement éducatif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vecteur essentiel du lien social, la vie associative participe étroitement de l’exercice d’une citoyenneté active dans notre pays et contribue de manière décisive à l’émergence d’un secteur économique qui a une vocation sociale et solidaire, hors de la logique du profit.

Avec ce projet de loi relatif au volontariat associatif et à l’engagement éducatif, dont l’examen par notre assemblée a été repoussé à plusieurs reprises, vous prétendez répondre, monsieur le ministre, aux attentes des associations. Pourtant, comme les années précédentes, nous avons constaté, lors de l’examen du budget pour 2006, que le secteur associatif était loin d’être une priorité du Gouvernement.

Sa situation est d’ailleurs extrêmement préoccupante, tant il est économiquement fragilisé par le désengagement de l’État. Après la crise des banlieues de novembre dernier, le Gouvernement a semblé redécouvrir l’importance des associations pour la cohésion sociale et le rôle qu’elles jouent en matière d’insertion, de soutien scolaire, d’accueil des populations étrangères, d’accès à la culture ou au sport. Cette soudaine prise de conscience l’a incité à annoncer le déblocage de 100 millions d’euros en 2006. Mais tout le monde s’interroge sur la réalité de ces crédits. Ne s’agirait-il pas en fait de crédits déjà existants qui seraient tout simplement recyclés ?

Par ailleurs, les associations ne peuvent pas être considérées comme des pompiers du social auxquels on ferait appel quand ça brûle. Elles souhaitent être partie prenante de la construction des politiques publiques et ont élaboré des propositions en ce sens. Mme la rapporteure a évoqué le groupe de travail sur le bénévolat qu’elle préside, mais d’autres propositions portent sur les relations contractuelles ou sur le service civil. Souhaitons que le Gouvernement sache les entendre et leur répondre le 23 janvier prochain, lors de la conférence de la vie associative.

La reconnaissance du volontariat est une demande du secteur associatif. En effet, depuis quelques années, émerge entre le salariat et le bénévolat un espace qui est celui d’un engagement ponctuel, limité dans le temps, mais dense et global. Un engagement civique, social, qui s’apparente à une expérience sociale durant laquelle la ou le volontaire participe à la conception, à la réalisation et à l’évaluation d’une action. Le texte que vous nous proposez répond-t-il à cette demande et à cette ambition ? Je ne le pense pas. En effet, plutôt que la définition d’un cadre, une vision d’ensemble, un projet de société – car c’est bien de cela qu’il s’agit –, vous nous proposez un contrat et un énième dispositif.

Oui, une loi-cadre qui donnerait du sens et du souffle à l’engagement serait nécessaire. Au lieu de cela, je crains que nous n’assistions à un empilement de dispositifs, celui que vous nous proposez s’ajoutant aux précédents, sans que ces derniers aient pour autant été évalués. Il existe déjà le volontariat international en administration ou en entreprise, le volontariat européen et le volontariat de cohésion sociale, sans compter le dernier-né, le volontariat de solidarité internationale, ni celui en devenir, le service civil volontaire annoncé par le Président de la République. Quelle confusion ! Comme tout cela est illisible ! Pour ajouter encore à cette complexité, vous proposez, dans le titre II de votre projet de loi, de créer un engagement éducatif spécifique pour l’encadrement des centres de vacances et des centres de loisirs, alors que cet encadrement pourrait être l’un des volets du volontariat associatif – mais nous y reviendrons. Parce qu’il n’est pas porté par une vision d’ensemble, ce texte ne peut répondre à la véritable demande sociale qui existe en la matière.

En outre, vous excluez du nouveau statut les moins de dix-huit ans, les retraités,…

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Mais non !

Mme Martine Lignières-Cassou. …les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires du RMI. Vous avez même tenté d’en écarter l’ensemble des bénéficiaires des minima sociaux. Certes, le volontariat n’est pas une démarche d’insertion, mais pourquoi en exclure a priori les personnes qui sont en phase d’insertion ? Le volontariat ne participe-t-il pas de la valorisation sociale et personnelle d’un individu, quels que soient son statut social et son âge ?

Votre texte comporte trop de part d’ombre et d’ambiguïtés. De ce fait, le nouveau volontariat risque d’être un simple outil d’insertion professionnelle, mais situé hors du droit du travail, échappant ainsi à tout contrôle administratif. En cette période de déréglementation du droit du travail et de réduction des crédits alloués aux associations, le risque que les contrats de volontariat ne se substituent à des emplois salariés est bien réel.

Vous l’avez compris, monsieur le ministre, nous serons très vigilants sur les conditions d’accès au volontariat associatif et sur les modalités de son exercice. Nous défendrons d’ailleurs des amendements sur ces sujets extrêmement importants, car nous entendons être à la fois vigilants et constructifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je regrette que seulement dix députés soient actuellement présents dans l’Hémicycle et que nos collègues et, surtout, les médias s’intéressent davantage à la jeunesse dont on dit parfois un peu rapidement qu’elle se révolte qu’à celle qui s’engage.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Très juste !

M. Pierre-Christophe Baguet. Vous avez du mérite, monsieur le ministre, et je suis heureux de pouvoir enfin débattre avec mes collègues ici présents de ce projet de loi d’avenir qui a pour objet de reconnaître certaines formes d'engagement associatif et d’encourager l'investissement citoyen des jeunes. Voilà un objectif enthousiasmant, que nous approuvons avec conviction, car il correspond bien à la vision que nous avons, à l'UDF, de la société et de la solidarité qui doit exister entre ses membres.

Les associations sont, pour nos concitoyens, un moyen privilégié d'exprimer leur volonté de s’engager au service d'une cause d'intérêt général à travers la construction d'un projet commun. L'existence de plus d'un million d'associations en activité dans notre pays témoigne de la vitalité de ce secteur dans des domaines aussi différents que le sport, la culture et l'environnement, en passant par l’humanitaire et l'entraide. Si l'on entend parfois des lamentations sur le manque de bénévoles, il faut cependant souligner que les Français continuent à s'engager massivement. Malheureusement, les causes ne sont plus tout à fait les mêmes, la défense des intérêts particuliers mobilisant davantage que les formes d'engagement plus traditionnelles. Manifestement, les Français s'engagent beaucoup plus facilement sur des sujets qui concernent leur vie quotidienne ou leur environnement. C'est une dérive regrettable vers une société égoïste, individualiste.

Heureusement, les Français se montrent très généreux à l’occasion d’événements tels que le tsunami, qui a mis en évidence, l'année dernière, la nouvelle dimension internationale de la générosité. Par ailleurs, j'ai pu constater sur le terrain, dans ma ville de Boulogne-Billancourt, que, aux côtés du SAMU social, des associations comme l'Ordre de Malte ou le Secours catholique réussissaient à mobiliser pas moins d’une centaine de citoyens solidaires qui aident concrètement notamment les personnes sans domicile fixe.

L'engagement bénévole est au cœur de la vie associative. Il est indispensable à la création et à l'organisation des associations, ainsi qu’à la réalisation collective de nombreux projets librement élaborés. Mais le mouvement associatif s'est aussi peu à peu professionnalisé pour pérenniser certaines de ses actions et répondre à la demande de services exprimée par la société. Entre le bénévolat et le salariat, il est aujourd'hui nécessaire de reconnaître l'existence et de permettre le développement du volontariat associatif. La personne volontaire s'engage pour une durée déterminée à se consacrer de façon désintéressée à un projet d'intérêt général. Ainsi, elle peut s'investir pleinement, pour un temps de sa vie, dans un projet associatif. Aux côtés des autres formes d'engagement et sans se substituer à l'emploi, le volontariat doit devenir le troisième pilier des ressources humaines des associations et constituer un levier important pour le développement du mouvement associatif.

Ce texte va dans le bon sens, mais il faut aller plus loin. Ainsi, nous ne pouvons évacuer la dimension économique que représentent les activités de jeunesse, notamment en termes d’emploi. Dans cet esprit, je propose de supprimer la disposition prévoyant que les employeurs de personnel d'animation ne puissent avoir d'autre forme juridique que celle d'association à but non lucratif. L’amendement que vous proposez pour correction, monsieur le ministre, devra être très précis. Couvrira-t-il bien les classes transplantées en France comme à l’étranger et les séjours linguistiques ? Par ailleurs, j’ai déposé un amendement qui a pour objet de favoriser la mise à disposition à titre gratuit de locaux et de terrains aux associations, en permettant de l'assimiler à un don et de faire bénéficier le propriétaire d'une réduction d'impôt. Il s’agit notamment de venir en aide aux mouvements scouts qui rencontrent des difficultés pour trouver des terrains susceptibles d’accueillir leurs camps.

Je tiens d’ailleurs à rendre hommage au mouvement des colonies de vacances. L'accueil collectif d'enfants souvent issus de milieux défavorisés pour de courts séjours s'inscrit dans l'histoire sociale de notre pays, en particulier dans celle de l'éducation populaire. L'enjeu est important, puisque ce mouvement permet à 4,5 millions de jeunes d'accéder, pour un prix modéré, à des loisirs éducatifs durant les congés scolaires et en dehors des heures de classe. Ces colonies de vacances assument des missions sociales d’intégration et d’éducation qui demeurent indispensables, ainsi qu’en témoigne la récente crise des banlieues.

Mais l’évolution de la société va à l’encontre de ces structures, qu’il s’agisse des colonies de vacances, des centres de loisirs ou des camps scouts. Notre société s’inquiète trop, elle se protège trop. Les responsabilités ont été étendues à tort et à travers, la réglementation des centres de vacances et des camps scouts a été trop durcie, mettant en péril la pérennité de ces structures et surtout l’esprit pédagogique qui les porte. On constate de ce fait une baisse de la fréquentation de 10 % depuis 1995 et une diminution de la durée moyenne des séjours, de 16 jours aujourd’hui. Or, n’oublions pas que, dans les grandes villes, il y a des enfants qui passent cent jours par an dans les centres de loisirs pendant les mercredis, les petites et les grandes vacances – ce qui pose d’ailleurs un problème avec le plafond des quatre-vingts jours que vous avez évoqué, monsieur le ministre. Il faut leur donner la possibilité de changer d’air, de sortir d’un environnement exclusivement urbain et minéral.

Nous devons donc trouver le bon équilibre entre les nécessaires mesures de sécurité et de protection, et ce qui fait le cœur même et l’intérêt de ces séjours : l’indépendance, l’apprentissage du risque, la découverte de la vie et de la vie à plusieurs. Il en va de même d’ailleurs pour les classes transplantées, dont on constate une nette diminution du fait qu’elles représentent désormais une responsabilité trop lourde pour les enseignants.

Je voudrais évoquer une proposition qui me tient à cœur, concernant le scoutisme : il faudrait permettre aux jeunes de faire reconnaître comme un stage, au même titre qu’un stage en entreprise, la période où ils encadrent un camp scout. En effet, être chef de camp pendant deux mois constitue une expérience utile et enrichissante, au moins aussi intéressante que deux mois passés dans une entreprise à accomplir des tâches sans intérêt – photocopies, distribution du café ou du courrier. Dans ces situations où ils se trouvent investis d’une forte responsabilité, les jeunes apprennent le sens de l’organisation, le contact humain, la débrouillardise. Les entreprises et la France ont besoin de cette jeunesse équilibrée et responsable.

Ce texte créant un contrat de volontariat est un projet intéressant, quoique trop limité. Il doit être une première étape vers la création d’un service civil, d’un engagement citoyen destiné à tous les jeunes. Je voudrais rappeler que c’est François Bayrou qui, dès la campagne présidentielle de 2002, a lancé l’idée d’un service civil et humanitaire obligatoire de six mois pour tous les jeunes : un service civil universel qui mobiliserait, pendant six mois, les générations successives de jeunes Français, filles et garçons, pour remplir des tâches d’intérêt général, dans les secteurs social, environnemental, éducatif, la protection civile, les affaires étrangères, ou bien encore des tâches d’urgence accomplis dans le cadre d’événements exceptionnels telle la canicule que nous avons connue en 2003. Ce processus est pour nous une conséquence logique de la suppression du service militaire ; le problème de la réserve reste un échec après l’abandon de la conscription, et cet aspect a été sous-estimé après la professionnalisation de nos armées.

La mise en place d’un service civil et solidaire obligatoire est actuellement un problème franco-français. En effet, si nous en sommes encore à nous demander comment mettre en valeur cette forme d’engagement, les autres pays européens l’appliquent depuis très longtemps. En tout cas, nous sommes convaincus à l’UDF qu’il faut retrouver le brassage social qui s’est perdu depuis l’arrêt du service militaire, en permettant aux jeunes de mettre sur pied des projets en équipe, pour réapprendre le « vivre ensemble ». Il faut mettre les jeunes en contact avec des personnes âgées, ou avec celles accueillies par Emmaüs ou les Petits Frères des Pauvres, par exemple. Cela permettra également aux jeunes de redécouvrir les valeurs humanistes.

L’engagement dans une association, que ce soit comme bénévole ou comme volontaire, le don de soi, représente pour notre société une importance cruciale. C’est l’assurance d’un lien social fort qui permet de construire une société moins matérialiste, moins égoïste, bref, plus humaine. C’est notre rôle de parlementaires que d’encourager toutes les formes de générosité et de solidarité.

Même si l’on peut regretter que ce texte soit un peu limité – il manque un grand texte fédérateur pour la jeunesse –, pour toutes les raisons évoquées précédemment, le groupe UDF, attaché aux valeurs humanistes, votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le ministre, ce projet de loi sur le volontariat associatif nous permet de nous exprimer sur le monde associatif dont j’ai pu apprécier la vitalité à travers la mission que vous m’aviez confiée en novembre 2004. Au cours des six mois de cette mission particulièrement exaltante, j’ai pu auditionner plus de trois cents responsables associatifs. De la petite association locale et de proximité à la grande structure fédérative associative, le constat est simple : la vie associative assure une cohésion sociale et territoriale, elle touche toutes les catégories socioprofessionnelles, toutes les tranches d’âge de la population et l’ensemble du territoire.

La vie associative est, avant tout, un engagement humain ; mais cet engagement constitue également l’un des premiers actes du citoyen, acteur de la cité, lorsqu’il accepte de s’organiser collectivement afin de mener une action commune. L’association participe à la vie de la cité. Elle est un véritable creuset de la démocratie, faisant souvent l’interface entre le citoyen et le politique.

Cet engagement dans le monde associatif prend désormais trois formes : le salariat, le bénévolat et le volontariat. Pour reprendre les termes et les chiffres de ma lettre de mission émanant du Premier ministre, « le secteur associatif est aujourd’hui constitué d’un million d’associations, qui regroupent vingt et un millions d’adhérents, font appel à douze millions de bénévoles et emploient plus d’un million et demi de salariés. Il apporte une contribution irremplaçable à la richesse sociale de notre pays. »

Richesse économique et richesse sociale, le secteur associatif doit être encouragé et reconnu. Face au nombre toujours croissant de créations d’associations, de nombreuses interrogations se posent : relations avec les pouvoirs publics – je pense à la reconnaissance d’utilité publique, aux agréments –, interférences dans le secteur commercial, positionnement communautaire, financements publics et ressources privées, dérives, maintien du bénévolat.

Ce projet de loi permet, certes, de sécuriser juridiquement les volontaires qui, sans but intéressé, interviennent ponctuellement sur une mission d’association, mais nous permet également, dans cette discussion générale, d’évaluer les droits et des devoirs des associations.

Concrètement, l’association souhaitant conclure un contrat de volontariat doit être agréée. Deux points se doivent d’être éclairés.

Premièrement, qu’entend-on par mission d’intérêt général ? Dans mon rapport, je fais un constat sur la notion d’intérêt général. En perpétuelle évolution, la notion ne connaît aucune définition précise. Certes, dans le domaine associatif, l’administration fiscale, en application de l’article 200 du code général des impôts, a élaboré des critères de définition. Ces critères s’inscrivent pleinement dans la conception volontariste de l’intérêt général. Pour être considérée d’intérêt général, l’association ne doit pas agir pour, ni en fonction des intérêts propres de ses membres – c’est la gestion désintéressée – et elle ne doit pas fonctionner au profit d’un nombre restreint de personnes, ce qui exclut les associations fermées. Ces critères restent très restrictifs et sont appliqués de manière restrictive. En outre, il est anormal que ce soit l’administration fiscale qui reconnaisse l’intérêt général de telle ou telle association.

Partant de ces observations, j’ai proposé une nouvelle notion pour donner à la vie associative un nouveau souffle, une nouvelle dimension permettant de placer le citoyen, l’usager, l’être humain au centre des préoccupations de la société : l’intérêt sociétal. Je proposerai un amendement en ce sens.

Deuxièmement, l’association doit être agréée. Je souhaite obtenir des précisions quant à la procédure d’agrément et aux critères d’obtention. J’attache en particulier une très grande importance au projet associatif. À la différence de l’objet de l’association, spécifié dans les statuts, le projet associatif correspond à la mise en pratique de son objet et peut être différent selon les périodes et les actions concrètes choisies par l’association. Le contrat de volontariat se fait sur une mission particulière. Il est donc nécessaire de vérifier que cette mission entre bien dans son projet. En outre, une évaluation régulière de l’association agréée doit être instaurée afin de responsabiliser l’association et d’éviter qu’elle ne s’écarte de sa mission d’intérêt sociétal.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Très bien !

M. Jean-Pierre Decool. Cette responsabilisation serait une première avancée vers une charte des droits et devoirs des associations.

La vie associative doit être stimulée. J’ai rencontré des jeunes dont l’investissement personnel dans la construction de leur projet associatif est remarquable. Que ce soit dans les zones rurales, en ville ou dans les quartiers sensibles, le monde associatif est un gisement de volontés et d’activités qu’il faut encourager. Beaucoup de choses restent à faire de la part de l’État et des grandes structures associatives. J’ose croire, monsieur le ministre, qu’après le chèque emploi associatif, la réforme sur les dons et legs aux associations et, aujourd’hui, le volontariat associatif, une véritable réforme des associations intervenant pour l’intérêt sociétal sera impulsée par votre gouvernement.

Bien entendu, saluant vos convictions fortes à l’endroit des associations, ainsi que l’excellent travail de notre rapporteure Claude Greff, j’apporterai mon entier soutien à ce premier pas vers une sécurisation juridique des nombreux volontaires intervenant ponctuellement sur des missions associatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne découvre pas ce soir le volontariat, qui a existé bien avant les textes législatifs du 24 mars 2000 et du 23 février 2005, bien avant le spectre du chômage et l’embrasement des banlieues d’octobre et de novembre dernier – chômage et violence à propos desquels ce gouvernement a d’ailleurs découvert, mais un peu tard, les vertus du traitement social.

Le volontariat a été de tout temps une rencontre entre une volonté individuelle et un projet d’intérêt général et collectif, mais aussi un engagement clairement consenti pour découvrir une vie collective intense dans un nouveau milieu, dans un nouvel environnement, dans une perspective de découverte réciproque.

Fallait-il donner à cet acte volontariste un cadre législatif ? Comme beaucoup l’ont souligné, le mouvement associatif français dans son ensemble a appelé de ses vœux la reconnaissance de cette forme d’engagement et l’on regrette d’autant plus que le texte proposé ne soit pas la loi-cadre attendue.

Avec ses deux titres distincts portant sur le cadre du volontariat associatif et sur celui de l’engagement éducatif, l’ambition de ce projet de loi aurait dû être de tracer une voie nouvelle entre bénévolat et salariat, entre don de soi, action désintéressée, contrat de travail et prestation de service, entre volontariat voulu ou subi, en évitant les écueils entre le bénévolat indemnisé et le salariat déguisé.

Si l’action législative sur le volontariat était nécessaire, l’exercice s’est avéré malaisé. Je dirais à votre décharge, monsieur le ministre, que la moindre activité personnelle, collective ou passionnelle exige désormais un cadre légal, au point qu’il est à craindre que l’espace de liberté dont dispose chaque citoyen ne soit un jour altéré par un quelconque « statut du statut ».

Pour autant, vous me permettrez de porter un jugement plus critique que celui de la majorité sur ce texte dont le principal défaut est de créer un énième statut de volontaire sans véritablement répondre de manière globale aux questions de fond sur ces nouvelles pratiques afin de dégager une véritable politique publique dans ce domaine. En effet, sous le vocable de « volontariat », on a institué par touches successives et au gré de différentes réformes, des définitions, des pratiques, des règles non convergentes.

L’avis du CNVA avait pourtant insisté sur la nécessité de créer un volontariat à statut unique au sein d’une loi-cadre, définissant les différents types de volontariat, précisant le caractère des missions, leur durée, l’agrément des organismes d’accueil, la couverture sociale des personnes considérées, les obligations respectives des volontaires et des organismes. Qu’en est-il ?

Au-delà du texte, il y a le contexte. Celui-ci s’inscrit malheureusement dans un environnement extrêmement dégradé pour le secteur associatif, du fait des gels budgétaires et de la baisse continue des subventions, ou encore de la suppression des emplois jeunes, remplacés depuis peu par des emplois aidés – vous en savez quelque chose, monsieur le ministre.

Dans un contexte où le Gouvernement redécouvre le poids du chômage et la crise dans les banlieues, on pourrait craindre que 1e présent projet n’amalgame volontariat et insertion professionnelle, et ce d’autant plus que le volontariat associatif est présenté, monsieur le ministre, comme « un des piliers du service civil volontaire ».

En l’état, il s’agit d’un statut hybride à mi-chemin entre le salariat et le bénévolat, rempli de zones d’ombre et d’ambiguïtés. La coexistence au sein des associations d’un troisième statut, plus enviable que le bénévolat mais clairement moins protecteur et par définition plus précaire que le salariat associatif, ne risque-t-elle pas d’inciter certaines associations, particulièrement fragiles financièrement, à se délester de leurs salariés permanents pour les remplacer par des volontaires beaucoup moins onéreux pour elles ?

C’est la raison pour laquelle des garde-fous efficaces doivent être mis en place. La frontière entre bénévoles, volontaires et salariés des associations est en effet plus ténue qu’il n’y paraît. On peut même craindre que des dérives n’apparaissent assez rapidement, ce que je ne souhaite pas.

Sachez que nous serons particulièrement vigilants sur la clarification des conditions d’accès au volontariat, la durée du contrat et sa sortie, la protection sociale du volontaire pendant et après sa mission, ainsi que sur les conditions d’obtention de l’agrément par les employeurs.

C’est dans cet esprit que le groupe socialiste avait déposé des amendements en commission. Ils ont cependant été dédaignés malgré le travail constructif opéré avec différentes associations. Heureusement que le groupe socialiste du Palais du Luxembourg a été mieux entendu que celui du Palais Bourbon.

Je conclurai en formulant le vœu que le Gouvernement, Mme la rapporteure et la majorité UMP aient la volonté de nous entendre, de nous comprendre et de nous donner satisfaction pour le bien des volontaires et du volontariat, de cette démarche noble, et donc de notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider. Je tiens tout d’abord à vous remercier, monsieur le ministre, de nous présenter ce texte qui nous donne l’occasion de parler d’un sujet capital pour la vie sociétale dans notre pays et qui nous tient tous à cœur : je veux parler de la vie associative, véritable socle de la vie sociale.

Quelle pourrait être la devise de celui qui s’engage dans la vie associative ? Dans les lycées où je fais parfois des exposés, je me plais à dire, quant à moi, qu’il n’y a rien de plus beau que de faire quelque chose avec et pour les autres, et ce de façon totalement désintéressée.

Le dynamisme du bénévolat associatif n’est plus à démontrer. Il existe ainsi en France près d’un million d’associations, et des dizaines de milliers sont créées chaque année. Toutes sont animées par des bénévoles qui jouent un rôle irremplaçable dans la vie de nos villes, de nos quartiers et de nos villages.

Ces dernières années, cependant, le mouvement associatif s’est considérablement professionnalisé, notamment dans le domaine social. Les associations doivent en effet pérenniser leurs actions afin d’assurer la demande grandissante de services exprimée par notre société. Après le bénévolat au sens strict du terme, il est, au fil du temps, devenu indispensable de créer l’emploi associatif. Comme l’a souligné dans son excellent rapport Mme Greff, le mouvement associatif est d’ailleurs devenu l’un des premiers employeurs de France.

Aujourd’hui, il nous faut aller plus loin. Aussi, entre le bénévolat et le salariat, il est devenu nécessaire de créer une troisième voie. C’est celle que prévoit votre projet de loi, monsieur le ministre, et qui consiste à instaurer un volontariat associatif. Ce texte vise essentiellement deux objectifs : d’une part, donner un statut au volontariat afin de consolider cet engagement au sein des associations, et, d’autre part, mettre fin à l’insécurité juridique qui pèse sur les conditions d’emploi de ces personnels à vocation pédagogique. Permettez au directeur de colonies de vacances que j’ai été dans une autre vie de dire que ce dernier point est capital.

Mais de quoi s’agit-il ? Qu’est ce que le volontariat associatif ? Il ne s’agit ni de bénévolat associatif ni d’emploi associatif au sens strict. C’est un contrat de droit privé pour une mission d’intérêt général et désintéressée – il faut insister sur cet aspect – dans des domaines très divers : secteur éducatif, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou contribuant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.

Il est important de noter que le volontaire se consacrant à cette mission ne dispose, en principe, d’aucune autre source de revenu à part celles qui sont tolérées, telles les productions artistiques. Le volontariat associatif n’ayant aucune finalité professionnelle, le contrat qui le régit ne relève pas des règles du code du travail et devra donc être entouré de garde-fous et donc d’un certain nombre de garanties, tout à la fois pour protéger le volontaire, car il faut saluer son engagement, et pour éviter de substituer cet engagement au salariat.

J’insiste à mon tour sur le fait que le volontaire peut percevoir une indemnité, mais qu’il ne s’agit en aucun cas d’une rémunération. En outre, son contrat est obligatoirement limité dans le temps. Le volontaire bénéficie toutefois d’une valorisation des acquis et d’une couverture sociale.

Monsieur le ministre, je tiens à saluer votre engagement personnel sur ces questions dont nous nous sommes déjà entretenus, ici et ailleurs. Vous êtes le premier à avoir ce beau et noble dossier en charge. Au-delà de l’utilité avérée du volontariat associatif, je voudrais souligner, en ma qualité de président du Mouvement de défense du bénévolat pour le Bas-Rhin et la Moselle, qui fédère plus de 1 200 associations, que le cœur de toutes nos associations reste avant tout les quelque dix millions de bénévoles, qui, à des degrés divers, donnent une partie de leur temps pour les autres. Ce sont eux qui font « tourner » la vie culturelle et sportive dans nos villes et nos villages.

Le bénévolat a d’ailleurs souvent joué un rôle pionnier dans l’innovation socio-économique – je pense, par exemple, aux pompiers volontaires – et touche toutes les générations. Pour les jeunes, cela représente bien souvent une étape essentielle pour la vie professionnelle future. C’est en quelque sorte une mise à l’étrier. Les salariés trouvent là une occasion d’enrichir leur propre expérience. Les retraités, enfin, peuvent transmettre leur savoir-faire.

Ce sont tous des acteurs de la vie citoyenne de notre pays. Oui, le bénévolat constitue un lien de cohésion sociale exemplaire. Il est essentiel de faire fructifier cette richesse. Le contrat de volontariat que vous nous proposez, monsieur le ministre, est d’ailleurs la forme la plus aboutie du volontariat civil institué par la loi du 14 mars 2000, sous l’impulsion du Président de la République. Elle avait pour objectif d’englober toutes les formes de volontariat.

Malheureusement, du fait des lourdeurs et de la complexité des procédures administratives, cette loi n’a pas recueilli le succès escompté. Après en avoir tiré les conséquences, la loi du 23 février 2005 a donc institué un contrat de volontariat de solidarité internationale, sur lequel je ne reviendrai pas ici.

Aujourd’hui grâce à vous, monsieur le ministre, nous sommes là pour aller plus loin. Ce texte va nous permettre de répondre aux attentes de milliers d’associations et surtout à l’envie de nombreux jeunes de s’engager dans la vie associative de notre pays.

En conclusion, j’insisterai avec force pour qu’à l’avenir nous tenions les engagements que nous avons pris en faveur du bénévolat. Je sais l’intérêt que vous lui portez, vous aussi. Le volontariat devrait être l’école qui conduit ensuite au bénévolat au sens strict du terme.

Aussi, je formule le vœu que, dans une étape future, nous fassions un pas supplémentaire en direction de ces vrais bénévoles. Je sais, car j’en reçois tous les jours, ce qu’ils demandent. Ils souhaitent une reconnaissance et qu’on crée, par exemple, un ordre attribuant des distinctions. Il me semble que c’est à notre portée.

M. Charles Cova. La médaille de la jeunesse et des sports est faite pour cela !

M. André Schneider. Ils souhaitent également qu’on valide les acquis de l’expérience, en accordant notamment des points de retraite. On pourrait aussi prévoir des allégements fiscaux. Ainsi, notre démarche commune ne pourrait que consolider un des secteurs essentiels de la vie de notre pays.

Pour conclure, je citerai Saint-Exupéry : « Si tu veux réunir les hommes, apprends-leur à bâtir ensemble », ainsi que Mark Twain : « Ils ne savaient pas que c’était impossible, …alors ils l’ont fait ». Quelle belle leçon d’espérance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Mme Claude Greff, rapporteure. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes rassemblés en ce début d’année – pas assez nombreux, certes – pour discuter d’un projet qui concerne un million d’associations et quelque 1,6 million de personnes engagées dans le secteur associatif, bénévoles ou salariées.

Ce texte était attendu. Après avoir été ajourné en juin dernier, il revient en ce mois de janvier, à la suite probablement des événements de violence urbaine qui ont récemment marqué notre pays. Ce texte est censé répondre à l’ensemble des aspirations des associations, qui ont exprimé leurs craintes.

Depuis 2002, nous avons assisté, en effet, à un repli du soutien de l’État au secteur associatif : diminution des subventions, suppression des postes de personnels mis à disposition dans les fédérations d’éducation populaire, abandon de la politique de la ville, appauvrissement des contrats éducatifs locaux.

La crise que nous avons connue ces derniers mois a cependant contraint le Gouvernement à réagir. Il a ainsi promis 100 millions d’euros pour le secteur associatif œuvrant dans les quartiers. C’est une étape. Mais les associations se posent encore un certain nombre de questions que nous devons reprendre ici. Qu’en sera-t-il dans les années futures ? Vous nous avez apporté quelques éléments de réponse, monsieur le ministre.

Pour des raisons budgétaires, nous craignons que le désengagement de l’État ne se poursuive, malheureusement. Dans ces conditions, comment les associations pourraient-elles envisager sereinement l’indispensable travail de fond ?

Pour mener à bien les missions qui sont souvent confiées par l’État et les collectivités locales, ces associations ont besoin de professionnels qui s’engagent sur la durée. Je l’ai dit, le secteur associatif emploie, à ce jour, plus de 1,6 million de personnes, dont 36 000 directeurs et 200 000 animateurs, qui œuvrent eux-mêmes dans le domaine des loisirs pour les enfants et les jeunes.

Aujourd’hui, du fait des restrictions de crédits, beaucoup de ces salariés sont dans l’incertitude. Monsieur le ministre, la notion même de volontariat associatif est une avancée réelle à condition que cela ne constitue pas une possibilité de remplacer à très bon marché l’emploi associatif existant ou à créer. Nombre d’associations se sont en effet engagées dans la professionnalisation, au fil des années. D’autres ont besoin des contrats que vous proposez dans ce texte. Il nous appartient de veiller à ce que ces nouveaux contrats présentent toutes les garanties nécessaires.

Nous serons d’autant plus vigilants dans l’examen de ce texte que celui-ci s’inscrit, je le répète, dans un contexte de fort repli du soutien de l’État au secteur associatif. Pour les avoir comme nous entendues, vous savez que les associations sont inquiètes.

Je souhaiterais en outre que vous apportiez des réponses sur la valorisation de ce secteur et sur la formation des bénévoles : ceux-ci, on l’a dit, attendent que nous les reconnaissions. Le bénévolat suppose que l’on franchisse un pas et les bénévoles doivent pouvoir se former.

Vous n’abordez pas non plus l’amélioration de la prise en compte du mouvement associatif dans la définition des politiques publiques, ni le versement dans des délais raisonnables des subventions d’État, ni même l’instauration de conventions pluriannuelles d’objectifs plus longues, permettant un vrai travail de fond.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré que votre projet devait apporter des solutions concrètes à des questions restées trop longtemps sans réponse. Assurément, la vie associative est un formidable levier pour la solidarité et la cohésion sociale. Ce secteur non lucratif fait partie de l’histoire de notre pays et y tient une place inestimable. Or ce texte n’apporte pas toutes les réponses escomptées aux problèmes qui se posent. Les propositions qu’il contient doivent être enrichies dans la suite de notre débat. Je vous invite donc à prendre en considération l'ensemble des amendements déposés par mon groupe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec, dernier orateur inscrit.

M. Yannick Favennec. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, une association repose avant tout sur un engagement humain, symbole de valeurs citoyennes et de philanthropie. Nombreux sont les Français qui mettent au service des autres leur énergie et leurs compétences, soit en leur consacrant leur temps libre – c’est le cas des bénévoles –, soit en consacrant un temps donné de leur vie à un projet associatif d’intérêt général : c’est le cas des volontaires. Ces acteurs de la cité qui s’organisent collectivement pour mener une action commune dans le cadre de plus d’un million d’associations actives font de la France la championne d’Europe de la vie associative.

Cependant, force est de constater aujourd'hui que le nombre de bénévoles n’augmente plus. Le poids des responsabilités qu’ils ont à assumer et leur sentiment de ne pas être suffisamment entendus par les pouvoirs publics figurent certainement parmi les causes de cette stagnation, de cette atonie de l’engagement associatif et, si je puis dire, de la fatigue de nos bénévoles. Il est de notre responsabilité de défendre la spécificité associative : ni entreprise, ni service public, l’association contribue pourtant largement à la vitalité de nos territoires. Il nous faut conforter ces structures dans le fonctionnement de notre démocratie et de notre société.

Votre projet de loi, monsieur le ministre, propose la création d’un contrat de volontariat associatif et je m’en réjouis, car c’est une réponse aux attentes légitimes d’un grand nombre d’associations qui aujourd’hui rencontrent des difficultés pour exister. Étant l’élu d’un territoire rural, je sais ce que nous devons aux associations – et tout particulièrement aux petites associations –, mais aussi et surtout aux bénévoles sans qui elles ne pourraient fonctionner. Ce sont eux qui contribuent au renforcement du lien social et qui participent à l’animation de nos villes et de nos villages. Ils sont des acteurs indispensables à l’attractivité de nos campagnes. Leur engagement est le ciment qui assure la cohésion des sociétés contemporaines. Nous pouvons être fiers de ce qu’ils font et de ce qu’ils sont !

Pourtant, leur rôle devient de plus en plus compliqué à assumer. Ils doivent faire face à de nombreuses difficultés qui peuvent, parfois, les décourager. Si, depuis 2002, le Gouvernement s’attache à reconnaître et à soutenir les bénévoles et la vie associative dans notre pays, avec notamment la création, en 2004, d’un ministère de la vie associative dont vous avez la charge, monsieur le ministre, le monde associatif semble connaître une crise du bénévolat. Je sais néanmoins que vous prenez toute la mesure des inquiétudes et des attentes des bénévoles et des volontaires : vous l’avez encore démontré en septembre dernier lors de votre venue dans ma circonscription, à Carelles, petite commune du nord de la Mayenne où vous avez discuté avec trois cents responsables associatifs du département. Pour répondre à leurs inquiétudes et à celles de l’ensemble du monde associatif, vous avez élaboré un projet de loi qui permettra, entre autres, de combler un vide juridique en créant un statut situé à mi-chemin entre le bénévolat et le salariat.

Mais il est également indispensable de répondre aux attentes des bénévoles qui souhaitent qu’un véritable statut du bénévolat voie le jour et veulent mieux concilier leur vie professionnelle et leur engagement associatif. Les bénévoles souhaitent aussi que nous préparions l’avenir en favorisant le désir d’engagement des jeunes. À cet effet, ne pourrait-on imaginer l’instauration d’une journée annuelle que les collégiens et les lycéens passeraient dans une association ? Ils découvriraient ainsi de l’intérieur, dans leur cursus scolaire, ce qu’est l’engagement associatif et cette immersion serait pour eux un premier pas citoyen, indispensable pour qui veut dessiner le secteur associatif de demain : tel est le sens de l’amendement que je proposerai.

Le volontariat associatif, véritable porte d’entrée vers le bénévolat de responsabilité dans les associations, contribuera certes au renouvellement et au rajeunissement du vivier des responsables associatifs, mais il est peu connu du grand public. Il serait donc très utile de présenter ce nouveau statut aux jeunes afin de les sensibiliser plus encore à l’engagement associatif et à son rôle essentiel dans l’exercice de la démocratie et dans le développement des solidarités.

Il y a tout juste un an, monsieur le ministre, vous avez organisé la première conférence nationale de la vie associative – la seconde se tiendra d’ailleurs dans quelques jours, le 23 janvier. Un des groupes de travail avait pour thème : « Mieux accompagner et reconnaître l’activité bénévole ». Cette activité mérite en effet que l’on s’y attarde, car elle représente plus d’un million d’associations en activité, regroupant plus de 21 millions d’adhérents et mobilisant près de 11 millions de bénévoles pour celles qui n’ont pas de salarié et 3,5 millions pour celles qui en ont au moins un. Les conclusions de ce groupe de travail ont débouché sur trente-deux propositions concrètes visant à améliorer la situation des bénévoles au sein des associations. Je souhaite donc, monsieur le ministre, que vous rassuriez ceux-ci en leur donnant les moyens de continuer de se consacrer à leur engagement, afin que le réseau associatif irrigue avec toujours plus d’enthousiasme et de dynamisme, mais aussi avec davantage de sérénité, la vie quotidienne de nos territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Certes, comme l’a relevé M. Baguet, nous ne sommes pas très nombreux, mais vous êtes tous, mesdames, messieurs, de fins connaisseurs de la vie associative et c’est là un encouragement à poursuivre notre démarche pour améliorer la qualité d’accompagnement et de développement de la vie associative sous toutes ses formes, y compris celle du volontariat.

M. Liberti, et à sa suite Mme Lignières-Cassou, a évoqué l’âge limite d’engagement dans la vie associative. Je rappelle que celui-ci n’est pas de dix-huit ans, mais de seize ans.

Mme Martine Lignières-Cassou. Grâce au Sénat !

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. C’est une avancée…

M. Pierre-Christophe Baguet. Mais il faut une autorisation parentale.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Certes, et c’est tout à fait normal.

Je précise également que le volontariat ne s’inscrit pas dans une logique d’insertion professionnelle : il s’agit bien d’un engagement désintéressé au service de la société, notamment de la part des jeunes. En ce qui concerne l’insertion, les gouvernements de Jean-Pierre Raffarin et de Dominique de Villepin ont mis en place des dispositifs comme le contrat d’avenir, le contrat d’accompagnement dans l’emploi, et maintenant le contrat de première embauche, lesquels offrent aux jeunes toute assistance et tout accompagnement pour trouver un emploi stable : ce n’était pas le cas des emplois-jeunes, dont la durée, comme vous l’avez rappelé, monsieur Liberti, n’était que de cinq ans et dont vous n’aviez pas prévu la sortie.

S’agissant du titre II, relatif à l’engagement éducatif, comment pouvez-vous vous étonner que nous essayions de trouver une solution pour les 250 000 jeunes qui encadrent 4,5 millions d’enfants issus dans leur grande majorité de familles modestes ? Certes, les centres de loisirs et de vacances ne sont peut-être plus « tendance », comme on dit aujourd'hui, mais c’est avant tout l’application rigide de la loi sur les 35 heures qui les a mis en difficulté ! Nous, de façon pragmatique mais à mon sens efficace, nous trouvons une solution pour résoudre le problème de l’encadrement de ces jeunes par l’engagement éducatif, ce qui permettra aux organisateurs, l’été prochain – et vous pourrez le constater vous-mêmes dans vos communes –, de ne plus être ennuyés par les inspecteurs du travail qui venaient auparavant requalifier cette activité d’engagement éducatif au regard de l’application des 35 heures. C’est une solution de bon sens !

M. Beaudouin a pour sa part évoqué la nécessaire promotion de ce nouveau dispositif. Nous accomplirons, grâce au réseau information jeunesse mais aussi en nous appuyant sur une promotion forte dans les collèges, les lycées, les universités, ainsi qu’au cours des JAPD, un travail d’information et de pédagogie pour faire connaître le nouvel outil que constitue le volontariat associatif et pour inciter les jeunes à s’y engager dès lors qu’ils s’y sentent prêts.

L’agrément local, également évoqué par M. Beaudouin, ne sera pas examiné par une commission : un dossier sera remis au préfet par le délégué départemental à la vie associative. Les étudiants qui souhaitent s’engager volontairement, par exemple dans les clubs sportifs, pourront le faire à condition, bien sûr, de ne pas remplacer les éducateurs sportifs : ce sera donc en dehors de leurs périodes d’études et dans des tâches n’empiétant pas sur les fonctions pour lesquelles ces derniers sont rémunérés.

M. Beaudouin a soulevé en outre la question de l’affiliation au régime général : un amendement gouvernemental en rétablira l’obligation. S’agissant des litiges relatifs aux contrats, les tribunaux d’instance ou de grande instance – selon le montant du litige – seront compétents.

En matière d’encadrement du scoutisme, je précise à Pierre-Christophe Baguet qu’il reste possible de recourir à des volontaires sans plancher d’indemnisation : je sais que c’était là un souci majeur de ce mouvement. Un plafond sera déterminé par décret mais il n’y aura pas de plancher, si bien que le scoutisme pourra continuer à vivre son engagement sous la forme qui lui est propre, c'est-à-dire sans indemnisation.

Quant au décret fixant le plafond d’indemnisation des volontaires, monsieur le député, il sera publié avant six mois, conformément à la règle instituée par M. Dominique de Villepin, qui veut que nous allions très vite dans l’élaboration des décrets nécessaires à l’application de la loi. Notre souhait est donc d’agir le plus rapidement possible.

Madame Lignères-Cassou, vous avez évoqué la baisse des crédits dédiés aux associations mais vous avez rappelé, également, que 100 millions d’euros avaient été débloqués en leur faveur non par redéploiement, mais au titre de mesures nouvelles votées par amendement lors de la discussion du projet de loi de finances.

Ainsi, sur ce montant, mon ministère dispose de 15 millions d’euros supplémentaires qui seront consacrés à des actions culturelles ou sportives de proximité, menées par des associations de quartier, mais pas sans conditions, madame la députée. Nous avons jusqu’à présent, en effet, collectivement beaucoup dépensé dans le cadre de la politique de la ville et ce, sans évaluation. C’est là que le bât blesse. Nous vérifierons désormais que l’argent injecté dans ce réseau associatif, qu’il soit national ou local, porte bien ses fruits. J’ai donc décidé que ces 15 millions d’euros seraient dépensés en relation étroite avec les maires des communes concernées, en particulier ceux des quartiers sensibles, un choix précis des associations, des éducateurs, des projets associatifs et pédagogiques devant être réalisé.

Il est de notre responsabilité de faire en sorte que cet argent public soit dépensé avec pertinence, en fonction d’une évaluation rigoureuse. Il est en effet important, quand un projet ne fonctionne pas, d’avoir le courage de dire aux associations et aux élus que tel programme ne marche pas, qu’on doit donc le changer ou cesser de le financer. Nous proposons donc une nouvelle donne et nous ne laisserons plus en place, par une sorte de fatalisme, des dispositifs qui ne fonctionnent pas. Aussi, je serai très vigilant quant à l’emploi de ces 15 millions d’euros en faveur du plan d’action dans les quartiers difficiles lancé par M. le Premier ministre.

En outre, madame la députée, votre approche du volontariat m’a paru paradoxale. Vous nous avez reproché de vouloir écarter les personnes bénéficiant de minima sociaux du champ du volontariat tandis que, dans le même temps, vous m’avez dit craindre que ce volontariat ne devienne un outil d’insertion comme un autre. Or, je vous l’affirme : il ne s’agit pas d’un outil d’insertion, mais bien d’un outil d’engagement.

Si l’on retrouve dans le volontariat des notions comme celle de partage, de brassage, d’accompagnement du jeune qu’il soit plus ou moins bien formé, la clef du dispositif n’est pas l’insertion, mais bien l’engagement désintéressé au service des autres. Et je tiens à maintenir cet outil sous cette forme sans en faire, en tout cas, un dispositif d’insertion, comme je l’ai dit dans ma réponse à M. Liberti. Il ne s’agit pas de remplacer ce que le Gouvernement de M. Dominique de Villepin a mis en place, mais d’accompagner les jeunes quand ils souhaitent s’engager dans un projet d’intérêt général.

Monsieur Pierre-Christophe Baguet, vous avez, pour votre part, évoqué la possibilité qu’auraient les structures privées de bénéficier du deuxième volet du projet de loi, celui relatif à l’engagement éducatif. À cet égard, l’amendement que j’appellerais « UNOSSEL », l’Union nationale des organisations de séjours linguistiques, alors évoquée à ce sujet, a été rédigé en concertation avec les organisations professionnelles concernées. Or il ne traite pas des classes transplantées puisqu’elles ne relèvent pas de l’article L. 227-4 du code de l’action sociale et des familles mais du code de l’éducation, relevant du domaine de compétence de mon collègue M. Gilles de Robien.

En ce qui concerne les scouts – je l’ai déjà dit –, nous les reconnaissons dans la nouvelle réglementation jeunesse. Nous avons pris en compte l’encadrement des camps qui ne peut relever que du bénévolat et ne dépendre que des parcours académiques des animateurs, que le Gouvernement s’emploie à définir, et non de la validation des stages qui revêtent un caractère professionnel. Nous sommes donc en présence de deux interprétations différentes, mais nous reconnaissons néanmoins cet engagement à travers les différents dispositifs auxquels nous réfléchissons.

Je reviens maintenant sur la notion de service obligatoire, abordée par MM. Patrick Beaudouin et Pierre-Christophe Baguet, au cours d’un très bon débat. Je vous ai alors donné ma définition de l’engagement volontaire, à la fois désintéressé et caractérisé par la volonté d’aller vers l’autre qu’exprime très bien notre jeunesse, d’ailleurs, au moment des journées d’appel à la défense. Ils sont près de 50 000 jeunes à répondre à ce double mouvement de volonté et de désintéressement.

À ce titre, il est vrai qu’on peut évoquer fort logiquement l’idée d’un service civil obligatoire qui appelle de ma part plusieurs remarques. Je crains en effet que, dans l’hypothèse d’un service civil obligatoire, nous ne réservions à 800 000 jeunes, toute une classe d’âge, que les tâches subalternes. J’imagine difficilement un jeune se retrouver pendant six mois devant une photocopieuse au prétexte qu’il doit faire son service national civil. C’est une idée que je ne sens pas.

Ensuite, il faut savoir que six mois de volontariat coûtent 5 000 euros par individu. Une rapide multiplication révèle que l’on arrive ainsi à un coût de 10 milliards d’euros par an. Que va-t-il dès lors se passer ? Très vite, parce que nous avons collectivement la responsabilité de la dépense publique, nous allons trouver les meilleures raisons du monde pour exempter un grand nombre de jeunes de ce service obligatoire, qu’il s’agisse de ne pas perdre un emploi, de subvenir aux besoins de sa famille ou de poursuivre ses études.

De plus, ce serait toujours aux mêmes, donc, de se retrouver dans l’obligation d’effectuer leur service. Dès lors, l’idée du brassage développée par M. Beaudouin, disparaîtra puisque ne réaliseront leur service national que ceux qui, pour de multiples raisons, n’ont pas les moyens d’étudier, ne peuvent pas travailler et, du coup, ne peuvent avoir d’autre activité que celle du service national.

Il s’agit là d’un vrai débat, très intéressant, passionnant même, mais il faut se garder de revenir en arrière et de remettre en cause ce geste généreux qu’est le volontariat au profit de l’obligation, ce qui nous amènerait à gérer une usine à gaz alors que nous sommes engagés, d’une part, dans la maîtrise des dépenses publiques, et, d’autre part, dans une politique coordonnée de visibilité et de lisibilité de l’action de l’État en direction des jeunes et des moins jeunes.

Mon approche, qui peut être débattue, défendrait non la notion de réserve, mais celle d’une astreinte. Les jeunes s’engageant de différentes manières en fonction de leurs compétences, sur la base du volontariat, devraient être inscrits sur un répertoire national, pour être appelés en cas de « coup dur » pour la nation. Cette démarche serait profitable pour la France et répondrait à la fois à cette volonté d’engagement des jeunes et des moins jeunes pour leur pays, mais aussi à la nécessité de les laisser vivre leur vie, de réaliser leur parcours comme ils l’entendent. Cette idée de volontariat rencontre des limites, en particulier financières, mais mérite d’être discutée, tant il est vrai qu’on peut l’améliorer.

Il n’y a pas en France de crise du bénévolat. On compte un million d’associations actives, et de 2,5 millions à 3 millions de bénévoles qui exercent des responsabilités au sein de leurs associations : présidents, secrétaires généraux, bénévoles actifs. La crise du bénévolat se situe ailleurs : on dénombre 70 000 associations de plus par an alors que le nombre de bénévoles actifs reste à peu près stable.

Aussi, puisque le nombre de bénévoles évolue moins vite que le nombre d’associations, nous devons trouver des ressources humaines supplémentaires, une sorte de ballon d’oxygène pour les associations. Je suis donc convaincu que le volontariat, à travers ces programmes nationaux, à travers l’aide des entreprises privées, va permettre de développer une nouvelle forme d’engagement et déboucher sur un renouvellement du monde bénévole dans des conditions qui permettront à la fois de répondre au besoin d’engagement des jeunes et de stabiliser, voire de développer l’activité associative.

Je terminerai en répondant à M. Decool, fin connaisseur du fait associatif, à propos de la notion d’intérêt sociétal.

Monsieur le député, j’en conviens, l’idée d’intérêt général ne se trouve que dans le code général des impôts, ce qui est un peu court, certes, quand on parle de vie associative. Néanmoins, la jurisprudence a permis d’enrichir la notion d’intérêt général.

Reste que j’ai un impératif : aller vite dans l’accompagnement de la montée en puissance du volontariat. Aussi, je crains que réfléchir aujourd’hui sur la notion d’un intérêt sociétal qui reste à définir, à encadrer, à rendre lisible ne retarde cette montée en puissance du volontariat. Or, notre pays a besoin du volontariat, besoin d’un service civil tel que l’a prôné le Président de la République. Il nous faut par conséquent aller vite.

Je suis donc tout à fait d’accord pour évoquer cette notion d’intérêt sociétal, pour y travailler, mais je crois que, pour le moment, nous devons nous en tenir à l’idée d’intérêt général, bien établie quant à elle. Laissons-la coexister avec le volontariat, même si l’intérêt sociétal est un concept certainement beaucoup plus pertinent que l’intérêt général tel que défini par le code général des impôts. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

(Mme Hélène Mignon remplace M. René Dosière au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

Discussion des articles

Mme la présidente. J’appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er

Mme la présidente. Sur l’article 1er, je suis saisie d’un amendement n° 18.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour soutenir cet amendement.

M. Henri Nayrou. Compte tenu des ambiguïtés mises en évidence par la discussion générale entre bénévolat et salariat, nous voulons prévenir la tentation pour une association en difficulté de faire basculer dans le secteur marchand un volontaire qui serait désormais, de par cette loi, nanti de droits nouveaux mais aurait aussi des devoirs.

Cet amendement vise donc à éviter que les associations ne se détournent de leur but original. En effet, le volontariat, compte tenu de l’absence de rémunération des personnes volontaires, ne peut concerner que des organismes à but non lucratif. Cela va sans dire mais cela va mieux en le disant.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Aux termes de la loi de 1901, il est évident que les associations sont dépourvues de but lucratif. Il n’y a donc aucune ambiguïté et, à ce titre, je suis défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Notre analyse est la même. La loi de 1901, monsieur le député, précise bien le but non lucratif de l’association. Il n’est donc pas nécessaire de le rappeler.

Du reste, dans ma réponse à M. Jean-Pierre Decool, j’ai indiqué que l’agrément serait accordé en fonction de la notion d’intérêt général qui spécifie bien cette idée de don, d’ouverture à l’autre, plus encore que la notion d’association qui, vous le savez, couvre un large spectre et comprend notamment les associations à but lucratif.

Ainsi devons-nous écarter les associations qui n’ont pour but que de protéger des intérêts privés, pour privilégier au contraire celles qui servent l’intérêt général, seul critère de l’agrément. Par conséquent, je pense qu’il n’est pas nécessaire de rappeler l’expression « à but non lucratif » puisque, de fait, la loi de 1901 le précise explicitement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 79.

La parole est à M. François Liberti, pour le soutenir.

M. François Liberti. Je souhaite d’abord revenir sur l’allusion de M. le ministre au financement des mesures nouvelles liées à la crise des banlieues du mois de novembre dernier. Les associations d’éducation populaire et celles qui œuvrent dans les quartiers ont subi d’importantes coupes sombres dans leurs crédits en 2004 et 2005. Je ne sais pas ce qu’il entend par mesures nouvelles, car les 100 millions d’euros promis ont été obtenus par un tour de passe-passe dans le projet de loi de finances, qui a consisté non pas à donner des enveloppes financières supplémentaires, mais à ponctionner des crédits, en particulier ceux des collèges, à hauteur de 40 millions d’euros. Il y a dans cette affaire une tartuferie qu’il n’est pas inutile de rappeler.

L’amendement n° 79 tend à apporter une précision. Il existe dans notre pays 471 fondations reconnues d’utilité publique, 67 fondations d’entreprise, 571 fondations et fonds créés sous l’égide d’autres fondations reconnues d’utilité publique et environ 1 000 sous l’égide de l’Institut de France. Grâce au patrimoine qu’elles sont chargées de gérer, les fondations peuvent organiser des services dans des secteurs divers – hôpitaux, maisons de retraite, centres de recherche, musées, accueil à caractère social – ou financer des projets associatifs, des prix, des bourses. Comme les associations, les fondations sont des personnes morales à but non lucratif, mais elles résultent de l’affectation irrévocable de biens. Elles n’ont pas de membres et ne perçoivent pas de cotisations. Leur reconnaissance d’utilité publique fait l’objet d’un décret pris après avis du Conseil d’État.

Dans le cas présent, au-delà de la question juridique, nous souhaitons souligner que cette loi ne s’appliquera qu’aux seules fondations à vocation sociale, telles Emmaüs ou la Fondation de France, aux coopératives et aux mutuelles en vue de la réalisation d’un objet social. Cette précision pourrait sembler inutile si nous ne connaissions les dérives possibles. Le texte ne saurait concerner, par exemple, les fondations d’entreprise ou les fondations d’art créées par des sociétés civiles ou commerciales, des établissements publics à caractère industriel et commercial. Tel est le sens de notre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Après la notion de but non lucratif, on nous propose maintenant de revoir celle de reconnaissance d’utilité publique, autre terme essentiel du vocabulaire attaché au monde associatif. Les fondations reconnues d’utilité publique n’ont pas d’autre appellation. Il n’y a pas d’ambiguïté juridique sur ce point. La commission est donc défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Même avis. Les fondations d’entreprise ne sont pas reconnues d’utilité publique, ce qui rend infondée votre crainte de les voir bénéficier du volontariat, monsieur Liberti. Nous restons donc dans le champ des associations à but non lucratif régies par la loi de 1901 et de la notion d’intérêt général, qui prime sur tout.

Mme la présidente. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Si la référence à la notion d’intérêt général vous paraît suffisante, il nous semblait essentiel de lever toute ambiguïté sur le statut du volontariat. Notre amendement, en introduisant les mots « et à vocation sociale », y contribuerait.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Les fondations d’entreprise n’étant pas reconnues d’utilité publique, je ne comprends vraiment pas pourquoi vous souhaitez faire cet ajout. L’agrément permet d’écarter définitivement toute structure associative ou fondation ne préservant que des intérêts privés de la notion de volontariat et d’engagement désintéressé. Ce champ étant vraiment préservé, votre amendement ne me paraît pas utile.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 19.

La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le soutenir.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Cet amendement tend à supprimer le mot « désintéressée ». L’emploi de ce terme pour qualifier la collaboration du volontaire est inapproprié puisqu’il est prévu par ailleurs que celui-ci doit bénéficier d’une indemnité. De plus, cette définition pourrait conduire certains organismes à considérer que l’indemnité peut être réduite à une simple indemnisation partielle de frais engagés par le volontaire pour accomplir correctement sa mission. Il convient donc d’éviter que la bonne foi et le dévouement des volontaires ne soient abusés.

Si nous avons bien défini la notion de désintéressement dans le cadre de l’engagement, nous devons nous montrer attentifs à ce qu’elle pourrait entraîner dans le cadre de l’indemnisation de la personne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. La commission pense au contraire que l’expression « collaboration désintéressée » est porteuse d’adhésion, de partage et de confiance entre le monde associatif et le volontaire. À ce titre, le mot « désintéressée » me semble tout à fait approprié. Par ailleurs, une indemnité n’est pas une rémunération. C’est même ce qui distingue le volontariat du salariat. La collaboration est bien désintéressée. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Même avis. L’absence de salaire est bien ce qui différencie le volontariat du salariat. Et, pour répondre à M. Schneider qui s’en est inquiété, si la notion de désintéressement implique l’absence de salaire, elle ne signifie pas forcément le manque de reconnaissance. Je comptais l’annoncer lundi prochain lors de la conférence nationale de la vie associative, le champ de la médaille Jeunesse et sports sera étendu à la vie associative afin de mieux reconnaître l’engagement désintéressé des bénévoles et des volontaires. Il ne s’agit pas de définir un statut du bénévole, qui est bien trop rigide, mais de reconnaître sur le long terme cet engagement indispensable à notre société.

M. André Schneider. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 80.

La parole est à M. François Liberti, pour le soutenir.

M. François Liberti. Pour défendre cet amendement, je souhaite rappeler quelques éléments de l’évolution du milieu associatif dans notre pays.

Si 80 % des associations fonctionnent exclusivement avec des bénévoles, on compte aujourd’hui 168 600 associations employeurs, contre 125 000 en 1995, soit une très forte croissance de 35 % en un peu moins d’une décennie. Plus de 54 % des associations employeurs ne comptent qu’un salarié ou deux mais, au total, les associations représentent 1,6 million d’emplois, soit 8 % des salariés en France et près de 5 % de l’emploi. Cette tendance à la professionnalisation s’inscrit dans un contexte de chômage massif des jeunes et de désengagement de l’État vis-à-vis des associations. Il serait donc logique que le contrat de volontariat soit régi par le code du travail, pour offrir une garantie contre les effets pervers du projet de loi, que j’ai exposés dans mon intervention générale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Il est important de se recentrer sur la notion de volontariat, car, en faisant référence au code du travail, vous introduisez vous-même une ambiguïté. Le volontariat correspond à un désir de consacrer un moment de sa vie au service de la collectivité, dans des conditions légales et un cadre adapté à cette forme particulière d’engagement. Nous sommes réunis aujourd’hui pour en créer le statut. En faisant tomber le volontariat dans le droit du travail, vous en niez la spécificité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Même avis. Rapprocher le volontariat du code du travail, c’est remettre en question la philosophie de l’engagement désintéressé et volontaire des jeunes pour notre pays et pour des missions d’intérêt général. Ce serait dangereux pour l’esprit même du volontariat. Avis défavorable donc.

Mme la présidente. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Je ne suis pas convaincu par les explications de Mme la rapporteure et de M. le ministre, qui semblent sous-estimer les risques de dérapage de ce contrat de volontariat vers les petits boulots. La vie associative a manifesté son inquiétude à ce sujet. Notre amendement ne dénature en rien la conception du volontariat, mais je comprends qu’il ne s’inscrive pas dans votre philosophie !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 80.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 20 et 47, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou, pour soutenir l’amendement n° 20.

Mme Martine Lignières-Cassou. La durée limitée du volontariat en fait un engagement intense et total. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’ajouter qu’il constitue l’activité principale de la personne pendant cette période.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Je crains qu’une telle spécification ne contribue à semer le doute. Faire référence à une activité principale sous-entend qu’il pourrait y en avoir d’autres, ce qui va véritablement à l’encontre du volontariat. Vous-même venez de rappeler qu’il est une invitation à s’investir pleinement dans un projet ne laissant de place à rien d’autre.

Ces considérations n’ayant, en outre, pas de portée juridique, la commission est défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Même avis. Si je comprends les raisons invoquées, l’amendement me paraît superfétatoire. L’article 3 prévoit déjà que le contrat de volontariat est incompatible avec toute activité rémunérée. Par ailleurs, en précisant que le volontariat doit être l’activité principale, je crains que nous n’introduisions un risque de confusion juridique et surtout une difficulté d’application. Par exemple, un étudiant qui, au cours de son cursus, s’engagerait dans le volontariat en dehors de sa période universitaire se trouverait confronté à cette difficulté, qui pourrait remettre en cause son engagement. J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l’amendement n° 47.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement est retiré.

Mme la présidente. L’amendement n° 47 est retiré.

La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. Il est important de bien distinguer le volontariat du bénévolat afin d’éviter tout risque de confusion entre les deux ou de substitution de l’un par l’autre. Le volontariat est un engagement total de la personne.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 20.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 104.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Decool. J’ai bien entendu l’argumentaire que vous avez développé, monsieur le ministre, lorsque vous avez répondu aux orateurs qui se sont exprimés dans la discussion générale. C’est pourquoi je vais retirer cet amendement. Mais j’aimerais vous donner rendez-vous lors de l’examen de la loi de finances pour débattre de nouveau de cette question qui, pour moi, est très significative. Je ne voudrais pas être un frein pour ce splendide projet de volontariat associatif, mais force est de constater que la notion d’intérêt général est difficile à traduire dans d’autres langues. Il me paraîtrait dès lors judicieux de lui substituer celle d’intérêt sociétal.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Je m’engage à évoquer ce sujet dès la fin de l’examen de ce texte et je vous donne volontiers rendez-vous lors de la prochaine discussion budgétaire pour voir si nous pouvons faire évoluer la notion d’intérêt général vers celle d’intérêt sociétal.

Mme la présidente. L’amendement n° 104 est retiré.

Je suis saisie d’un amendement n° 99.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Claude Greff, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision. Mieux vaut en effet parler d’activité contribuant « à la diffusion de la culture, de la langue française et des connaissances scientifiques » que d’activité contribuant « à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ».

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. J’entends bien que les connaissances scientifiques sont universelles. Mais je crains que, en plaçant l’adjectif « française » après le mot « langue », on n’exclue les associations culturelles qui diffusent la culture et les langues régionales ou minoritaires. Je pense à toute une série d’associations béarnaises de ma circonscription, et – je vois également des collègues de culture basque – cela vaut aussi pour le catalan. Cela me paraît dangereux. Nous avons déjà joué avec cela puisqu’un certain article introduit dans la Constitution lors de la révision de celle-ci entrave l’enseignement de ces langues à l’école.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Les notions d’éducation et de culture présentes dans le texte englobent toutes deux cette soif d’apprentissage des langues régionales auxquelles je suis tout autant attaché que vous, madame Lignières-Cassou. Il n’y a donc pas de souci à se faire : la rédaction proposée dans l’amendement n’introduit pas une restriction du champ d’intervention. Les notions de culture et d’éducation sont évoquées d’un point de vue universel et recouvrent donc toutes les formes d’apprentissage et de découverte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. Je fais remarquer que, dans l’alinéa 3 de l’article 1er, il est fait deux fois référence à la culture. Ou c’est redondant, ou cela a un sens. On nous a déjà fait le coup, dans le cadre de la révision constitutionnelle, pour l’apprentissage des langues régionales. L’amendement pourrait avoir un objet très restrictif.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 99.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er, modifié par l’amendement n° 99.

(L’article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Article 1er bis

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 1, tendant à supprimer l’article 1er bis.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir cet amendement.

Mme Claude Greff, rapporteure. La commission des affaires culturelles souhaite supprimer l’article 1er bis.

Les bénéficiaires d’un contrat de volontariat bénéficieront d’office de l’aide juridictionnelle si l’indemnité de volontariat, qui est faible, constitue leur seule ressource. Il n’est donc pas nécessaire de prévoir à leur égard une exception à la condition de ressources posée pour pouvoir bénéficier de ladite aide.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. Je trouve que cela va mieux en le disant, comme le propose le Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 1er bis est supprimé.

Article 2

Mme la présidente. Sur l’article 2, je suis saisie d’un amendement n° 22.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour soutenir cet amendement.

M. Henri Nayrou. Il s’agit d’un amendement de précaution. Nous voulons éviter que le caractère noble de l’engagement personnel du volontaire, d’un côté, et de l’accueil de celui-ci par l’association, de l’autre, ne soit terni par quelques tentations moins nobles, en d’autres termes que des salariés de l’association soient licenciés et remplacés par des volontaires. La précision relative à la localisation ne modifie en rien la portée de l’article. Elle permet simplement de faire, en quelque sorte, le guet, et nous pensons que cela ne sera pas superflu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. La commission a considéré que cette précision, qui a pour but de protéger les volontaires, est inutile parce qu’elle aboutirait à restreindre les garanties apportées aux salariés. À vouloir trop bien faire, on finit par obtenir l’effet inverse de celui escompté.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Même avis que la commission.

Lors de votre intervention dans la discussion générale, monsieur le député, vous souhaitiez que la loi protège le volontaire. Or, par cet amendement, vous demandez un assouplissement du dispositif de protection puisque, en vous référant au cadre départemental, vous permettez – je caricature à dessein – de licencier en Ardèche pour recruter en Ariège. Il faut au contraire veiller à ce que les volontaires soient protégés de la même manière sur l’ensemble du territoire, en particulier pour les grands réseaux nationaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Dans le cadre départemental, les contrôles sont plus faciles. Je constate que vous ne voulez pas introduire cette précaution supplémentaire. Je ne battrai pas à ce sujet.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 22.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 2 rectifié, 23 et 81.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 2 rectifié.

Mme Claude Greff, rapporteure. Cet amendement, qui a fait l’objet d’un consensus en commission, tend à supprimer l’alinéa 2 de l’article 2. En effet, la possibilité de dérogation prévue dans cet alinéa, à la rédaction quelque peu alambiquée, n’est pas nécessaire dans la mesure où il est loisible à l’organisme agréé d’avoir recours à un contrat de volontariat pour des missions autres que celles exercées dans les six mois précédents par la personne dont le contrat de travail a été rompu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour soutenir l’amendement n° 23.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Le premier alinéa de l’article 2 vise à protéger l’emploi associatif en instaurant une garantie quant aux missions confiées aux volontaires, celles-ci ne pouvant avoir été précédemment confiées à un salarié dont le contrat de travail aurait été rompu dans les six mois précédant la signature du contrat de volontariat.

La dérogation introduite par le deuxième alinéa vient contredire l’alinéa précédent puisqu’il autorise la suppression pure et simple de la précaution posée par le premier alinéa pour protéger l’emploi dans le secteur associatif. Tel que rédigé, ce deuxième alinéa autorise la signature d’un contrat de volontariat sur les missions d’un salarié récemment licencié ou démissionnaire et doit donc être supprimé car il risque d’avoir des conséquences catastrophiques pour le salariat dans le secteur associatif.

Mme la présidente. La parole est à M. François Liberti, pour soutenir l’amendement n° 81.

M. François Liberti. La possibilité de dérogation prévue par l’alinéa 2 de l’article 2 est inutile car il est possible à l’organisme agréé d’avoir recours à un contrat de volontariat pour des missions autres que celles exercées dans les six mois précédents par la personne dont le contrat de travail a été rompu.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les trois amendements identiques ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2 rectifié, 23 et 81.

(Ces amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 82.

La parole est à M. François Liberti, pour le soutenir.

M. François Liberti. L’article 2 a pour objet d’éviter le dévoiement du contrat de volontariat associatif qui résulterait de la substitution par l’organisme agréé d’un volontaire à des salariés en poste, au détriment de l’emploi associatif. Il serait en effet inacceptable de voir se développer une nouvelle catégorie de sous-emplois précaires et sous-rémunérés.

Le risque est grand, avec le présent projet de loi, de voir certaines associations se servir de ce dispositif pour remédier aux difficultés qu’elles rencontrent pour financer leurs activités. Elles pourraient ainsi utiliser ce type de contrat pour couvrir des activités relevant normalement d’emplois salariés à temps plein ou à temps partiel.

Nous considérons que ce risque demeure parce qu’il est intrinsèquement contenu dans le projet de loi. Du fait de la situation financière actuelle des associations, le fait même de développer des activités de volontariat aura pour conséquence directe de créer des besoins en postes supplémentaires pour gérer les missions de ces volontaires.

Les associations ne disposant pas des moyens de recruter ces personnels seront donc dans l’obligation d’intégrer aux missions du volontaire des actes de gestion et d’organisation inhérents à sa propre activité.

Cet amendement a pour but d’éviter de telles dérives.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Je comprends votre souhait, monsieur Liberti.

Je vous remercie de vouloir faire en sorte qu’il n’y ait pas de dérive possible quant à la place du volontaire. Mais à vouloir trop préciser, on finirait, je le répète, par ne plus rien comprendre.

Votre objectif, comme le nôtre, est de faire en sorte que la loi soit simple, compréhensible par tous, afin que le volontariat puisse se concrétiser dans notre société.

La première partie de l’article 2 précise très clairement ce que vous souhaitez ajouter à la fin de cet article. C’est la raison pour laquelle la commission est défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Liberti, nous partageons votre souci d’empêcher les associations qui souhaitent bénéficier d’un volontariat de substituer un volontaire à un salarié. Nous serons particulièrement vigilants sur ce point.

L’article 2 permet de bien encadrer les choix et les actions des associations. L’agrément ne sera donné qu’à la seule condition que l’association respecte cette règle. Si elle se permettait de jouer un jeu dangereux, tant pour le volontaire que pour le salarié dans le cadre de son activité associative, cet agrément ne serait jamais plus renouvelé.

L’article 2 nous permet de protéger le volontariat, comme le rappelait tout à l’heure Mme la rapporteure, et de donner une réelle lisibilité au texte, tout en empêchant certaines associations de se livrer à un jeu dangereux pour le volontariat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 82.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Article 3

Mme la présidente. La parole est à M. François Liberti, inscrit sur l’article 3.

M. François Liberti. Je souhaiterais intervenir sur deux points, dans la mesure où la commission a jugé irrecevable deux des amendements déposés par le groupe des député-e-s communistes et républicains à l’article 3.

Je m’exprimerai d’abord sur la disposition contraignante consistant à devoir résider depuis plus d’un an en France et ne pas avoir quitté le territoire durant cette période. Un étranger installé sur notre territoire ne pourra donc pas devenir volontaire s’il part en vacances, par exemple, rompant ainsi la continuité d’un an imposée par le texte.

Pourquoi cette durée d’un an a-t-elle été choisie, et non pas trois mois, six mois ou deux ans ? Aucune justification ne nous est donnée. Et, si nous n’y prenons garde, cette exigence peut devenir une discrimination injustifiable. Il faut donc supprimer cette exigence discriminante pour les étrangers vivant sur notre sol.

Ensuite, nous avons pour volonté de lever toutes les restrictions que vous apportez à l’accès au volontariat de nos concitoyens en situation de fragilité sociale ou appartenant aux couches les plus appauvries de notre société, comme à celui des étrangers originaires des autres continents.

Le présent texte doit encourager le volontariat et, dans cette logique, empêcher toute discrimination ou exclusion éventuelle de l’initiative individuelle. C’est parce que nous jugeons restrictif le fait d’ouvrir la possibilité de tels contrats aux seuls ressortissants de l’espace économique européen, outre les nationaux, les résidents et les ressortissants de l’Union européenne, que nous vous proposons d’en ouvrir l’accès à tous les citoyens des nations avec lesquelles notre pays entretient des relations de coopération.

Si vous avez l’ambition de faire de ce texte un instrument de développement des relations entre les peuples, monsieur le ministre, nous vous proposons de ne pas en limiter l’objectif aux ressortissants des États membres d’un espace économique.

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 59.

La parole est à M. le ministre, pour le défendre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Le contrat d’accueil et d’intégration n’a pas vocation à permettre au bénéficiaire de réaliser une mission de volontariat. Il est donc nécessaire de revenir à la rédaction initiale de l’article, qui permet aux étrangers justifiant d’une résidence régulière et stable en France de s’investir dans une mission de volontariat.

En effet, le contrat de volontariat étant un engagement susceptible de se prolonger sur plusieurs années, il ne peut s’adresser qu’à des personnes dont la résidence en France est stabilisée et permet un séjour de long terme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Monsieur le ministre, nous sommes d’accord : le contrat d’accueil et d’intégration n’a pas vocation à permettre aux bénéficiaires de réaliser une mission de volontariat.

Il n’en demeure pas moins que l’engagement dans un volontariat est le signe fort d’une réelle volonté d’intégration, et que les personnes qui font cette démarche méritent d’être soutenues. C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, la commission n’est pas favorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. J’ai entendu Mme la rapporteure et je retire l’amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. L’amendement n° 59 est retiré.

La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. Je me félicite de la décision de M. le ministre.

M. Pierre-Christophe Baguet. C’est le ministre qu’il faut féliciter !

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 98.

La parole est à Mme Claude Greff, pour le soutenir.

Mme Claude Greff, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 98.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 14 deuxième rectification.

La parole est à M. Étienne Pinte, pour le défendre.

M. Étienne Pinte. Cet amendement a pour objet de permettre à des volontaires qui n’appartiennent pas à la Communauté européenne et qui possèdent donc une autre nationalité que celles des personnes mentionnées à l’alinéa précédent de remplir une mission de volontariat en France, en travaillant auprès d’une fondation, d’une association reconnue d’utilité publique, bien sûr, ou d’une association adhérente à une fédération elle-même reconnue d’utilité publique, à condition d’abord que la mission revête un caractère social ou humanitaire et que le contrat de volontariat ait été conclu préalablement à l’entrée en France, ensuite que l’intéressé ait pris par écrit l’engagement de quitter le territoire à l’issue de sa mission, enfin que l’association, la fondation ou la fédération ait conclu éventuellement avec l’État une convention déterminant le nombre annuel maximum de personnes ainsi admises.

Cet amendement peut certes susciter des observations. Un certain nombre d’associations font aujourd’hui de la formation, en particulier dans des pays en voie de développement, que ce soit sur le plan social, sur le plan humanitaire ou sur le plan du handicap. Cependant, ces associations ont aussi besoin que les personnes ainsi formées à l’étranger puissent venir en France pour parfaire leur formation.

Dans le cadre de la coopération décentralisée de notre ville, nous finançons depuis dix ans la construction de bibliothèques pour enfants au Cambodge. Nous assurons également la formation sur place des bibliothécaires cambodgiens khmers grâce au personnel de nos bibliothèques envoyés dans ce pays. Nous demandons de temps en temps aux personnes ainsi formées de venir en France, afin de voir comment fonctionne une bibliothèque : il s’agit en quelque sorte de parfaire leur formation. Ces programmes sont souvent cofinancés par la Communauté européenne.

Compte tenu des conditions posées dans cet amendement, je souhaiterais que le Gouvernement laisse la possibilité aux fondations et aux associations reconnues d’utilité publique, dans un cadre très précis, de faire venir sur le territoire national les personnes que nous formons, afin qu’elles puissent parfaire leur formation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Monsieur Pinte, j’ai bien entendu vos arguments. Je constate la réussite de ce que vous avez entrepris jusqu’à présent.

Mais, aujourd’hui, nous avons le devoir de bien installer le volontariat. Il faut le laisser vivre et grandir. C’est pour ces raisons que nous avons essayé de bien l’encadrer. Votre proposition me paraît presque dangereuse. Il me semble qu’il faut laisser le temps au temps. Il convient de valoriser ce qui est d’ores et déjà proposé : la condition de résidence à l’ensemble des associations et des volontaires.

Plus tard, si les choses avancent, nous pourrons peut-être envisager une telle ouverture.

La commission a émis un avis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Pinte, je comprends votre logique, qui correspond à une action particulière réalisée par une association à l’étranger.

Le volontariat est un engagement susceptible de se prolonger sur plusieurs années. Il ne peut donc s’adresser qu’à des personnes dont la résidence en France est stabilisée et permet un séjour à long terme.

Votre amendement s’adresse à toutes les associations et fondations reconnues d’utilité publique, soit quelque 2 000 associations, 470 fondations et plus encore si l’on prend en compte les associations affiliées à une fédération reconnue d’utilité publique. Une telle extension multiplierait les risques de voir se développer – je n’évoque pas l’association à laquelle vous faisiez référence – des filières d’immigration illégale. Et l’on mettrait alors en danger le principe même du volontariat.

En retirant l’amendement n° 59, le Gouvernement est allé aussi loin qu’il le pouvait. Mme la rapporteure a évoqué la position de la commission sur le contrat d’accueil et d’intégration, qui correspond bien à la volonté de rester dans la durée sur le territoire. Il est prématuré d’évoquer cette ouverture du volontariat à ce type de partenariat et d’échanges engagés par une association qui est reconnue comme particulièrement transparente dans sa démarche.

Nous souhaitons que le volontariat monte en puissance et cela pourrait mettre en danger ce principe.

Mme la présidente. La parole est à M. Étienne Pinte.

M. Étienne Pinte. Le volontariat extraterritorial existe déjà.

Aujourd’hui, nous essayons de légiférer pour améliorer le système. Mais il est fort dommage que le cadre de la loi ne permette plus à des ONG travaillant dans des pays en voie de développement de faire venir sur notre territoire des personnels déjà formés, afin de compléter leur formation. Il est dommage que ce qui est possible de fait aujourd’hui ne puisse plus l’être demain en droit. C’est regrettable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. La proposition de M. Pinte me paraît extrêmement intéressante, d’autant qu’elle est encadrée.

Vous estimez, monsieur le ministre, que la proposition de M. Pinte est insuffisamment encadrée et la définition des fondations et des associations reconnues d’utilité publique vous paraît trop large. J’entends bien, mais il serait dommage d’arrêter un mouvement qui existe déjà et qui permet de former des cadres pour les pays du Sud.

Bref, je trouve pour ma part cet amendement extrêmement intéressant.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Cet amendement révèle l’ouverture d’esprit et l’humanisme de notre collègue Étienne Pinte. Je trouve moi aussi que son amendement est très intéressant du point de vue de l’échange des connaissances dans le cadre de la vie associative. Ces échanges avec des pays en voie de développement sont très positifs.

N’oublions pas le rôle fondateur des ONG françaises à vocation exclusivement humanitaires qui font notre honneur alors que l’on voit se développer des ONG qui ressemblent plus à des multinationales économiques. À ce titre, cet amendement devrait être soutenu même si, monsieur le ministre, il peut poser quelques difficultés. Un bon décret d’application pris en liaison avec le ministère de l’intérieur permettrait de pallier le risque de voir se développer des filières d’immigration clandestine comme vous semblez le craindre. Du reste, notre collègue fixe des limites. Nous devons, comme il le propose, conserver cette dimension sociale et d’échange. Son amendement correspond parfaitement à l’esprit du texte et mériterait d’être adopté.

Mme la présidente. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. L’exposé des motifs de l’amendement de M. Pinte indique clairement le cadre fixé par celui-ci. Il introduit trois limites : limitation aux domaines de l’action sociale et de l’action humanitaire, exigence d’un contrat de volontariat établi avant l’entrée sur le territoire, engagement de quitter celui-ci dès la fin de la mission.

J’insiste moi aussi sur l’aspect positif de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14 deuxième rectification.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 48 rectifié.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Decool. Il s’agit de compléter l’alinéa 4 de l’article 3 par les mots : « , de la participation aux activités juridictionnelles ou assimilées, des consultations données occasionnellement, de la participation à des jurys de concours publics ou à des instances consultatives ou délibératives réunies d’un texte législatif ou réglementaire. »

Il convient d’étendre les dérogations en s’inspirant des dispositions prévues dans le cadre de l’interdiction du cumul emploi-retraite, prévue par l’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Monsieur Decool, votre argument peut se concevoir. Cela étant, nous souhaitons que la loi soit simple ; il ne faut donc pas multiplier les exceptions qui viendrait brouiller sa lecture. En conséquence, avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur Decool, permettez-moi d’exprimer quelques réserves quant à la rédaction de votre amendement. En effet, la notion de « consultations données occasionnellement » nous rapproche dangereusement de celle d’honoraires. Or c’est bien ce que nous voulons éviter dans le volontariat. Restons-en à la liste initiale qui nous permet d’envisager le volontariat dans ses différentes composantes.

Avis défavorable, donc.

Mme la présidente. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Decool ?

M. Jean-Pierre Decool. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 48 rectifié est retiré.

Je suis saisie d’un amendement n° 60.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 6 de l’article 3. Il convient de lever le gage financier du rétablissement par le Sénat de la possibilité de cumuler une indemnité de volontariat et l’allocation de parent isolé.

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Avis tout à fait favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 60.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Article 4

Mme la présidente. Sur l’article 4, je suis saisie d’un amendement n° 49.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir cet amendement.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement vise à compléter l’article 4 par les mots : « du fait de l’association ou en cas de force majeure. »

S’il semble évidemment important qu’un salarié puisse faire une pause dans sa carrière pour s’engager comme volontaire pendant une durée donnée, et que cet engagement ne doive pas lui porter préjudice à l’issue de sa mission, il est également important d’éviter que l’engagement volontaire ne soit utilisé comme un moyen pour une personne souhaitant démissionner de pouvoir le faire en se garantissant le droit à une indemnisation chômage.

Ainsi, si une personne volontaire rompt elle-même son contrat de volontariat sans cause réelle et sérieuse, ses droits à indemnisation chômage ne devraient pas pouvoir être ouverts.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. La commission a accepté l’amendement de notre collègue. À titre personnel, je lui suggère néanmoins de le rectifier car le mot « association » est trop restrictif car il exclut les fondations.

Je propose de remplacer le mot « association » par les mots « organisme agréé ». Le terme « organisme » couvre à la fois les associations et les fondations.

Mme la présidente. En êtes-vous d’accord, monsieur Decool ?

M. Jean-Pierre Decool. Tout à fait, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 49 est ainsi rectifié.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Je souscris à la rectification de l’amendement de M. Decool, car la nouvelle rédaction permet de protéger le volontariat en cas de difficulté rencontrée par la fondation ou l’association.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 49 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 26.

La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le soutenir.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Cet amendement tend à compléter l’article 4 par les trois alinéas suivants :

« Le salarié candidat au volontariat a le droit de bénéficier d’un congé de volontariat, qui ne peut excéder une durée de deux ans. Il doit informer son employeur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, du point de départ et de la durée de la période pendant laquelle il entend bénéficier de ce congé.

« En cas de diminution importante des ressources du ménage, le salarié a le droit de reprendre son activité professionnelle. Il doit adresser une demande motivée à l’employeur, par lettre recommandée avec avis d’accusé de réception, un mois au moins avant la date à laquelle il demande à reprendre son emploi.

« À l’issue du congé de volontariat, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération équivalente. Il bénéficie, notamment en cas de changement de techniques ou de méthodes de travail, d’une action de formation professionnelle. »

Afin de ne pas décourager les personnes qui souhaitent s’engager dans une démarche de volontariat, il est proposé de créer un congé de volontariat, à l’image du congé parental d’éducation ou du congé sabbatique, en l’assortissant des mêmes dispositions.

Il est très important de leur permettre de retrouver leur emploi à l’issue de ce congé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Votre idée, madame Carrillon-Couvreur, est intéressante. Mais peut-être est-elle prématurée, comme l’était la proposition de M. Pinte. Nous devons prendre notre temps.

Par ailleurs, l’accumulation de divers congés pourrait poser problème et perturber l’entreprise. Mais je retiens votre idée qui pourrait, si vous en êtes d’accord, monsieur le ministre, être abordée dans le cadre de la prochaine conférence nationale de la vie associative. En attendant, l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Même avis que la commission.

Il existe, madame la députée, vous l’avez rappelé, plusieurs formes de congés : sabbatique, sans solde, solidaire, de solidarité internationale.

S’agissant des deux premiers, il permet déjà à un volontaire de se mettre à disposition d’associations, sans alourdir pour autant les obligations des entreprises.

Je ferai par ailleurs remarquer que votre amendement a l’inconvénient de ne prévoir aucune condition quant à la durée préalable de présence dans l’entreprise avant que l’intéressé ne puisse bénéficier du congé de volontariat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou. Ce projet de loi manque cruellement d’ambition, et le rejet d’un tel amendement en témoigne. Si l’on voulait véritablement reconnaître et favoriser l’engagement volontaire, il faudrait ouvrir un droit à congé, quels que soient le statut social ou l’âge. Il faut permettre aux personnes désireuses de s’engager de le faire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4, modifié par l’amendement n° 49 rectifié.

(L’article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 4

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 27 et 53, portant article additionnel après l’article 4.

La parole est à M. Henri Nayrou, pour soutenir l’amendement n° 27.

M. Henri Nayrou. Avec cet article additionnel, nous voulons mettre l’accent sur la possibilité pour le demandeur d’emploi de s’engager dans le volontariat en renonçant à son indemnité chômage mais en la retrouvant à l’issue de sa mission. Il y aura sans doute unanimité sur ces bancs pour adopter notre proposition.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l’amendement n° 53.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements identiques ?

Mme Claude Greff, rapporteure. Le moins que l’on puisse dire est que votre dispositif risque de complexifier la tâche de l’UNEDIC.

Par ailleurs, pour une personne au chômage, il y a deux solutions : soit elle recherche un emploi, et auquel cas, elle doit s’atteler véritablement à cette tâche et y consacrer tout son temps ; soit elle considère que sa vie va évoluer différemment et elle peut s’engager au travers du bénévolat.

Je ne pense pas que votre proposition soit de nature à favoriser le volontariat.

Avis défavorable, donc.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Cette décision relève des partenaires sociaux, dans le cadre de la convention UNEDIC et du dialogue permanent qui les lie. Avis défavorable également.

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Je suis surpris par ce refus : pour une fois que l’opposition proposait à la majorité et au Gouvernement de rayer, en toute légalité et en toute transparence, des demandeurs d’emploi des statistiques du chômage ! C’est vraiment le monde à l’envers. (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Il est vraiment dommage que nous ne prenions pas la mesure de cette proposition. Vous dites, madame la rapporteure, qu’une personne au chômage doit se consacrer pleinement à la recherche d’un emploi. Nous connaissons tous des personnes au chômage. Parmi celles que j’ai pu rencontrer, beaucoup ont eu l’occasion de trouver une activité dans une association et de s’y investir, ce qui leur a permis de reprendre pied et de redonner du sens à leur vie. S’engager pour une période limitée dans ce genre d’action, c’est aussi une façon de retourner vers l’emploi. Notre proposition n’est pas incompatible avec la recherche d’un emploi.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 27 et 53.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Article 5

Mme la présidente. Sur l’article 5, je suis saisie d’un amendement n° 3.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir cet amendement.

Mme Claude Greff, rapporteure. Cet amendement est rédactionnel. Il s’agit de substituer aux mots « de contrats », au pluriel, les mots « d’un contrat », au singulier, car le volontaire, même s’il peut réaliser plusieurs missions, s’engage pour un seul contrat. En conséquence, il convient aussi de mettre au singulier la dernière phrase de l’article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5, modifié par l’amendement n° 3.

(L’article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5 bis

Mme la présidente. L’article 5 bis ne fait d’aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L’article 5 bis est adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 2332 rectifié, relatif au volontariat associatif et à l’engagement éducatif :

Rapport, n° 2759, de Mme Claude Greff, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)