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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Troisième séance du jeudi 2 février 2006

135e séance de la session ordinaire 2005-2006

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Égalité des chances

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi pour l’égalité des chances (nos 2787, 2825).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 225, portant article additionnel avant l’article 1er.

Avant l’article 1er (suite)

Section 1

M. le président. Nous en venons à deux amendements tendant à modifier l’intitulé de la section 1 du titre Ier.

Nous commençons par l’amendement n° 225.

La parole est à M. Yves Durand, pour le soutenir.

M. Yves Durand. Cet amendement ne tend à rien d’autre qu’à mettre en application les propos que M. le ministre de l’éducation nationale a tenus cet après-midi. Selon lui, l’article 1er de ce projet de loi organise un parcours d’initiation aux métiers qui reste sous statut scolaire. Il ne s’agit nullement, dit-il, de faire sortir les jeunes de moins de seize ans du système éducatif.

En ce début de séance vespérale, je souhaite soutenir son effort pédagogique. Le terme « apprenti junior », en dépit de ses vertus médiatiques évidentes, peut être porteur d’une certaine ambiguïté, laissant entendre que le jeune, dès quatorze ans et en tout cas à quinze ans, se trouve sous contrat d’apprentissage. Cela signifierait qu’il quitte le statut scolaire, et ce qui est aujourd’hui une dérogation deviendrait la règle générale.

Pour aider le ministre de l’éducation nationale à dissiper cette confusion, nous l’invitons à préciser sa pensée et à inscrire dans le texte les intentions qu’il a exprimées tout à l’heure. Notre amendement tend à remplacer, dans l’intitulé de la section 1 du titre Ier, les mots : « Formation d’apprenti junior », qui sont source d’ambiguïté dans l’esprit de nos concitoyens, et notamment des jeunes, en laissant accroire qu’il peut s’agir d’une véritable sortie du système scolaire, par les mots : « Parcours d’initiation aux métiers », notion qui recueille notre plein assentiment. Il est en effet nécessaire qu’un tel parcours soit ouvert à tous au sein du système éducatif.

Il s’agit, pour ainsi dire, d’un amendement de précision de la pensée du ministre. Je ne doute pas qu’il emportera l’avis favorable tant de la commission que du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Elle a rejeté cet amendement. Les termes proposés ne recouvrent que la première étape de la formation d’apprenti junior. Nous avons préféré nous en tenir à la terminologie choisie dans le projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ? Êtes-vous sensible au soutien que souhaite vous apporter le groupe socialiste, monsieur le ministre ? (Sourires.)

M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Franchement, cacher ainsi le terme d’apprenti, ce n’est pas bien ! Nous voulons faire de l’apprentissage une voie d’excellence, et nous devrions commencer par appeler les plus jeunes à s’engager dans cette filière des « PIM » ?

M. Pierre Cardo. Et non pas des « FAJ » !

M. Yves Durand. Pourquoi des « PIM » ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ce sont les trois premières lettres de la dénomination que vous proposez, monsieur Durand !

Pour ma part, je crois qu’il faut au contraire maintenir et valoriser le beau terme d’apprenti, qui renvoie au verbe apprendre et que personne n’aura l’idée de récuser. S’il est parfois pris dans une acception péjorative, il nous revient d’y remédier par nos débats et par la mise en valeur des parcours d’excellence dans ces filières.

Bref, je suis hostile à cet amendement car je souhaite garder le terme d’apprenti.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 225.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. J’appelle maintenant l’amendement n° 86 rectifié.

La parole est à Mme Valérie Pecresse, pour le soutenir.

Mme Valérie Pecresse. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 86 rectifié est retiré.

Article 1er

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.

La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, monsieur le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, mes chers collègues, après plusieurs heures de débat, il nous apparaît que les conséquences que le Gouvernement a tirées de la crise des banlieues ne correspondent pas notre vision de l’égalité, de la citoyenneté et du droit à l'éducation. Elles ne correspondent pas non plus à la réalité du monde du travail, ni même à une demande des employeurs. Je vous renvoie aux développements que Mme Lebranchu a consacrés cet après-midi à la question des artisans.

Ce projet n’est pas une « valorisation » de l’apprentissage, car il ne fait que tracer la voie que l’on veut faire emprunter aux élèves en échec scolaire ou qui rencontrent les plus grandes difficultés. Je connais bien le monde de l’entreprise et considère que ce n’est pas le lieu où l’on peut résoudre les problèmes de l’enfant que l’on est encore à quatorze ou quinze ans, et encore moins le lieu de la prévention de la délinquance.

Le préapprentissage dès quatorze ans conduit à une orientation trop précoce, qui ne repose pas sur une vraie volonté de l’élève mais constitue au contraire un pis-aller. Sa réversibilité est toute théorique : on sait bien que le retour vers l’enseignement général et le socle commun de connaissances sera quasi impossible.

Plus généralement, cet article limite l’accès aux études pour les jeunes des milieux populaires. Le texte est intitulé « projet de loi pour l’égalité des chances », mais en l’occurrence ce sera tout le contraire pour ceux qui n’auront pas d’autre choix que de sortir trop précocement du système scolaire.

Les émeutes de l’automne ont été un drame pour beaucoup de Français, qui ont vu leur bien ou celui de leur commune partir en fumée. Nous avons condamné ces violences, mais nous devons nous poser aussi la question de leur origine, où il entre plus ou moins confusément une revendication de reconnaissance et de citoyenneté. Ce n’est pas favoriser cette revendication positive que d’empêcher l’accès à la citoyenneté de toute une partie de la jeunesse.

Ce que le Gouvernement appelle « formation d’apprenti junior », je le qualifierais plutôt de « sortie de l’école express ». L’enseignement obligatoire pour tous jusqu’à seize ans est un fondement de notre société. Il marquait un vrai progrès lorsqu’il a été mis en œuvre par l’ordonnance du 6 janvier 1959, alors que la loi de 1882 sur l’enseignement obligatoire ne concernait les enfants que jusqu’à l’âge de treize ans. Revenir sur cette ordonnance, c’est d’une certaine manière offenser le général de Gaulle et les équipes qui, sous son autorité, avaient beaucoup travaillé sur ce texte. Au regard des valeurs de la République dont nous parlons tant, c’est un vrai recul. Face à l’échec scolaire, c’est une véritable démission.

Vous nous avez interpellés sur nos propositions, monsieur le ministre. Or, si ma mémoire est bonne, le précédent gouvernement avait commandé un rapport à une personnalité que nous estimons tous, M. Martin Hirsch. La résolution n° 11 de ce rapport était intitulée : « Gommer les discriminations négatives dans l’éducation ». À partir du même constat sur les inégalités sociales, l’échec scolaire et les difficultés d’une grande partie des jeunes à accéder à l’emploi, le rapport faisait des propositions ambitieuses et innovantes. Nous les avons rappelées tout au long de l’après-midi.

Il faut d’abord renforcer les ZEP et les recentrer sur les quartiers les plus difficiles. Aujourd'hui, les moyens qui leur sont affectés ne représentent que 7 % de plus que ceux qui sont affectés aux autres écoles. Dans des systèmes comparables, aux Pays-Bas par exemple, la différence est de près de 100 %. Et je conviens que nous partageons la responsabilité de cette situation. Tant que nous continuerons à envoyer en ZEP des professeurs non qualifiés ou débutants, nous connaîtrons les mêmes problèmes !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Vous avez raison !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Merci pour cette analyse, madame !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. C’est une question de moyens, monsieur le ministre. Plutôt que de sortir des gamins de l’école à quinze ans, il faut renforcer les moyens des ZEP, car c’est dans les quartiers difficiles que les drames ont lieu !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Tout à fait !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Une autre proposition du rapport Hirsch, en contradiction avec le contrat d’apprenti junior, consisterait à aider financièrement les familles modestes à faire poursuivre les études de leurs enfants après seize ans.

Enfin, nous aurions pu trouver un semblant d’unanimité cet après-midi – mais vous n’avez pas répondu, monsieur le ministre – sur un nouvel espace public de la petite enfance, idée reprise par nos collègues de l’UMP. Pour ma part, je parlerais plutôt d’un service public de la petite enfance. Je crois vraiment que les inégalités apparaissent dès la naissance de l’enfant,…

M. Xavier de Roux. Avant la naissance, même !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. …non seulement pour les modes de garde, mais pour tout ce qui touche aux apprentissages cognitifs. On le voit bien dans les ZUS en l’absence de services de médecine scolaire et de solidarité sous la responsabilité de l’État. Voilà encore quelques propositions que nous vous soumettons, en vous invitant à vous replonger dans le rapport Hirsch, qui en contient encore d’autres très intéressantes.

M. Yves Jego. Heureusement qu’il y a M. Hirsch pour inspirer le parti socialiste !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. J’associe Mme Martine David à mon propos. L’article 1er institue le « contrat de précarisation extrême », qui revient à tuer le CDI – ce dont tout le monde convient maintenant (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) – et à démanteler encore un peu plus le code du travail. Cela n’est pas pour vous déplaire. Je sais combien vous êtes heureux de le détricoter progressivement et sûrement, sereinement même. Mais nous sommes là pour troubler cette sérénité et crier au scandale.

Sous prétexte de vous attaquer aux problèmes d’emploi et aux difficultés scolaires, que vous avez aggravés depuis 2002, vous privez une génération entière de tout droit à l’avenir, de toute possibilité de se construire. L’avenir ne se bâtit pas sur des sables mouvants, mais sur des bases solides. Ce ne sont pas les contrats que vous proposez, y compris l’apprentissage junior, qui offriront aux jeunes des perspectives dignes de l’avenir qu’ils souhaitent. Vous avez supprimé les emplois-jeunes, qui avaient pourtant fait la preuve de leur efficacité.

M. Xavier de Roux. Vous pouvez parler de précarité ! Les emplois-jeunes étaient tout de même assez précaires !

M. François Brottes. Justement non. Parce que vous ne les avez pas utilisés, vous ne les connaissez pas ! Les emplois-jeunes offraient la garantie d’un contrat de cinq ans, avec un engagement de pérennisation de l’emploi.

M. Yves Jego. Dans la fonction publique et nulle part ailleurs !

M. François Brottes. Ainsi, dans ma commune, douze emplois-jeunes sont devenus douze emplois permanents.

M. Christian Paul. Très bien !

M. François Brottes. Ces jeunes avaient la possibilité d’effectuer des périodes d’essai, y compris dans les entreprises privées, pour éventuellement changer d’orientation professionnelle. Si les périodes d’essai ne donnaient pas de résultat, ils avaient la possibilité de réintégrer le contrat. Cette capacité de mettre le pied à l’étrier, que vous avez sabordée par idéologie, parce que vous en aviez pris l’engagement, vous en éprouvez une telle culpabilité aujourd’hui que vous inventez un dispositif de précarisation absolue. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Mes chers collègues, laissez parler l’orateur.

M. François Brottes. Je vous remercie, monsieur le président, car M. de Roux, qui est un perturbateur patenté,…

M. Henri Emmanuelli. Et incompétent !

M. François Brottes. …me rend la tâche un peu pénible.

M. Xavier de Roux. Oh !

M. François Brottes. Alors que, entre 1997 et 2002, le gouvernement de Lionel Jospin avait – ne vous en déplaise – ramené le taux de chômage des jeunes de quinze à vingt-quatre ans à 17,8 %, vous avez délibérément cassé tous les dispositifs en leur faveur : leur taux de chômage a ainsi atteint près de 23 % en décembre 2005. J’en conviens objectivement, le modèle de la précédente législature n’était certes pas une fin en soi. Mais la banalisation de la précarité, que vous présentez aujourd’hui comme un passage obligé, n’est en aucun cas une solution.

Votre projet d’apprentis juniors – d’ailleurs, y a-t-il des apprentis seniors ? – et l’abaissement de l’âge de départ en apprentissage ont de quoi choquer. Ces mesures mettent un terme net à la scolarisation obligatoire jusqu’à seize ans, qui représentait pourtant un progrès indéniable par rapport au XIXe siècle. C’est donc une formidable régression que vous proposez, que nous dénonçons comme parfaitement inacceptable. Vous programmez ainsi, non pas le pied à l’étrier, mais la sortie du parcours scolaire qui doit, selon la loi que vous avez votée, assurer aux jeunes un socle commun de connaissances. Comment, en sortant de l’école, ces adolescents vont-ils atteindre les objectifs linguistiques, culturels, technologiques ou de pratique physique et sportive, tous objectifs définis par la loi et auxquels en tant qu’apprentis ils n’auront plus le droit de prétendre ?

Plutôt que de leur accorder une aide supplémentaire et de mobiliser les moyens adéquats pour leur offrir une chance de se former, vous mettez ces jeunes à l’écart, en les faisant scandaleusement sortir de l’école de façon anticipée. Finalement, vous demandez aux entreprises de payer une forme d’enseignement que vous refusez de donner en attribuant des postes qualifiés.

M. Christian Paul. Tout à fait !

M. François Brottes. Vous leur demandez de faire un métier qui n’est pas le leur. D’ailleurs, la plupart d’entre elles ne s’y trompent pas et refusent d’entrer dans cette logique.

On ne peut pas extraire les jeunes en difficulté scolaire des statistiques – car c’est votre but – en mettant fin à l’obligation de scolarisation jusqu’à seize ans, en renonçant au collège unique et en dévalorisant l’image même de l’apprentissage. De fait, celui-ci deviendrait la seule destination possible des élèves fragilisés. L’apprentissage mérite beaucoup mieux que cela. C’est ce que nous nous emploierons à démontrer avec les propositions que nous ferons dans le cadre de l’article 1er. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. L’article 1er créant l’apprentissage junior est à la fois dangereux et difficilement applicable. Il constitue, avec le contrat de première embauche, une des mesures les plus idéologiques de votre projet de loi sous couvert de pragmatisme. Ce n’est qu’une réponse indécente aux violences des banlieues de l’automne dernier, dont vous ne semblez pas avoir saisi toutes les réalités. Il s’agit d’une mesure populiste de pseudo-revalorisation du travail, alors même que vous vous acharnez à le précariser toujours plus.

Avec ce projet de loi, et cette mesure en particulier, vous allez encore plus loin dans la destruction de notre système éducatif, nous l’avons démontré cet après-midi. Vous faites ce que vous n’aviez pas osé accomplir avec la loi Fillon d’orientation pour l’avenir de l’école. En réalité, derrière les bonnes intentions de façade que vous vous plaisez à afficher se cache la remise en cause de la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans, instaurée en 1959. Preuve du danger de cette mesure, le Conseil supérieur de l’éducation a massivement rejeté le projet d’institution de l’apprentissage junior, par 39 voix contre et seulement 12 voix pour. Mais vous n’en avez pas tenu compte.

Bien sûr, il ne suffit pas de prolonger la scolarisation pour résoudre le problème de la réussite et de l’emploi des jeunes. Mais la lutte contre l’échec scolaire et la promotion d’une orientation choisie, et non contrainte, ne passent surtout pas par la remise en question des acquis positifs des dernières décennies, qui ont permis la généralisation de l’accès à l’enseignement secondaire. Nous l’avons également démontré cet après-midi.

Vous remettez en question le collège unique instauré en 1975 au profit d’une nouvelle orientation par le bas, une orientation négative, qui consiste à sortir du système scolaire ceux qui ont des difficultés et à exclure de surcroît toute réorientation ultérieure. Car la voie prise, vous le savez, sera sans retour en arrière possible. Il y a une fausse réversibilité du dispositif sur ce point.

L’école ne doit pas être réduite à un outil de production de main-d’oeuvre malléable et corvéable dès le plus jeune âge. Car c’est bien d’une telle vision que relève l’apprentissage junior. De fait, la droite est cohérente avec elle-même en précarisant, d’un côté, le travail avec le contrat première embauche, et de l’autre, le système éducatif avec l’apprentissage junior. Il y a, sur les questions d’éducation et de travail, un clivage fondamental entre la gauche et la droite, qui n’est d’ailleurs pas récent.

Outre qu’il est dangereux, votre projet me paraît difficilement applicable. Des formules similaires existent déjà, qui ont échoué. Ainsi, le Centre de formation des apprentis permet aux jeunes de quatorze à quinze ans de mettre à niveau leurs connaissances pour mieux préparer leur apprentissage en intégrant une classe préparatoire à l’apprentissage sous statut scolaire, sans rémunération. Pendant cette année de préapprentissage, le jeune effectue deux semaines de stage par mois en entreprise. Mais pas plus que les CLIPA, classes d’initiation préprofessionnelles par l’alternance, les CPA ne fonctionnent : 10 000 élèves seulement ont intégré ces dispositifs, bien moins qu’au moment de leur création dans les années 70. Votre nouveau dispositif n’est que la suppression de ces deux-là. Le rapporteur signale déjà un taux de rupture des contrats d’apprentissage de l’ordre de 25 %. Pourquoi orienter les jeunes élèves en difficulté vers l’apprentissage contre leur volonté ? Une orientation aussi contrainte ne pourra pas fonctionner.

Votre proposition n’est évidemment pas le meilleur moyen de revaloriser l’enseignement manuel. Nous avons rappelé cet après-midi qu’il faut une véritable culture technologique permettant une orientation en connaissance de cause après seize ans, ce qui exige un grand plan pour l’enseignement professionnel permettant la formation en alternance. Tant la Confédération artisanale des petites entreprises du bâtiment que les responsables des chambres de métiers et de l’artisanat se montrent circonspects devant vos mesures. Par exemple, le président de la CAPEB du Tarn et Garonne et responsable du CFA de Montauban, interrogé dans La Dépêche du Midi du 22 novembre 2005, souhaitait que les jeunes « viennent vers les métiers par choix et non par défaut ». L’Union professionnelle artisanale déplore l’association entre échec scolaire et apprentissage. Pour elle, l’orientation des jeunes vers les métiers de l’artisanat ne doit pas être un choix par défaut.

Ce n’est pas ainsi que l’on parviendra à la nécessaire revalorisation des métiers manuels. L’école n’est pas la seule responsable des difficultés d’insertion des jeunes. Il faut rendre le travail plus attractif. Si les jeunes délaissent ces métiers, c’est parce qu’ils sont précaires et offrent des conditions de travail difficiles pour des salaires trop bas. C’est de ce côté-là qu’il faut agir. On ne peut pas décréter la revalorisation des métiers manuels et défendre dans le même temps des politiques de baisse du coût salarial des jeunes. C’est pourtant ce que vous vous acharnez à faire depuis quatre ans et avec conviction !

Vous mettez en avant l’argument fallacieux de la rémunération des jeunes apprentis. Or les jeunes en alternance ont déjà des difficultés à trouver des entreprises qui les rémunèrent. Le crédit d’impôt ne sera pas suffisant pour les y inciter sans rechigner !

M. le président. Votre temps de parole est largement dépassé, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Blazy. Je termine par un dernier point d’interrogation. L’apprentissage junior tel qu’il est prévu prétend réserver une grande place à l’accompagnement des jeunes. Où allez-vous trouver les tuteurs, comment seront-ils désignés et qui seront-ils ? Ce flou est d’autant plus inquiétant dans un contexte de réduction des postes dans l’éducation nationale. On voit bien que votre projet est bricolé.

Nous considérons l’apprentissage junior comme un recul social et culturel. Il accentuera les effets néfastes d’une sélection trop précoce et renforcera les inégalités sociales, contre lesquelles vous prétendez lutter dans un projet indûment intitulé d’ « égalité des chances ».

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Monsieur le président, vous faisiez partie comme moi de la délégation du Bureau de l’Assemblée nationale conduite par Jean-Louis Debré qui est allée le 3 janvier à l’Élysée présenter ses vœux au Président de la République. À cette occasion, le président de l’Assemblée a présenté une intervention, dont nous avons tous reçu une copie, dans laquelle il faisait part de ses préoccupations. Je vais en donner quelques citations.

Il a d’abord déploré l’inflation préoccupante du nombre des amendements. Et de préciser que ces derniers « démontrent que les projets de loi présentés par le Gouvernement sont – en tout cas certains d’entre eux – précipitamment rédigés. » Et d’ajouter : « Ainsi, il n’est pas rare qu’en plein milieu de la discussion du projet de loi, le Gouvernement amende lui-même son propre projet, se rendant compte qu’il est mal rédigé. À titre d’exemple, j’évoquerai le projet de loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées ou bien encore celui relatif aux droits d’auteur. Au cours du débat sur ce dernier texte, le Gouvernement a présenté deux amendements de quatre pages. Cela tend à démontrer, hélas, une certaine impréparation des textes gouvernementaux. Le travail de concertation avec les parlementaires en amont du débat en commission ou dans l’hémicycle est de moins en moins bien réalisé. »

Je rappelle que ces propos sont de Jean-Louis Debré.

Or, alors que nous entamons la discussion de l’article 1er du présent texte, nous savons que, sur l’article 3, le Gouvernement a déposé un amendement tendant à instituer le contrat première embauche, qui n’a absolument rien à voir avec le texte que nous étudions et qui constitue en fait un projet de loi distinct.

J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur les dérives qu’un tel procédé représente.

Premièrement, il est inconstitutionnel. En effet, aux termes de l’article 39 de la Constitution, « les projets de loi sont délibérés en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État. » En procédant par voie d’amendement, il n’y a plus de consultation de ce dernier.

Plus grave encore : sur un texte présenté sous forme d’amendement, que devient le pouvoir d’amendement des parlementaires que nous sommes ?

M. Jean-Pierre Blazy. Eh oui !

M. Jacques Brunhes. Nous ne pouvons plus l’exercer. Nous ne pouvons que sous-amender.

C’est un problème particulièrement grave car les sénateurs, de leur côté, seront saisis du texte adopté par l’Assemblée nationale et pourront donc amender l’article où sera inséré l’amendement du Gouvernement sur le CPE.

Il ne s’agit pas d’un simple cavalier législatif. Outre le fait qu’il constitue une entorse au droit d’amendement des députés, le procédé présente un effet pervers, qui est de subordonner l’Assemblée nationale au Sénat.

En effet, du fait de l’urgence, il revient, dès la fin de la première lecture, conformément à l’article 45 de la Constitution, à une commission mixte paritaire de trancher et éventuellement de proposer un compromis qui ne peut être amendé par la suite. La discussion est donc terminée pour nous, députés.

J’attire l’attention de tous les députés que nous sommes, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, sur le fait que cela revient à effacer un droit de la représentation nationale.

Après la constitutionnalisation des pouvoirs élargis du Sénat par le biais de la loi de décentralisation, après le chantage exercé sur l’Assemblée au moment du changement du calendrier électoral, cette pratique d’urgence est en passe de faire de celle-ci « une chambre d’enregistrement des dérives du Sénat », pour citer notre collègue Jean-Luc Warsmann.

Ce nouveau déséquilibre résultant des pratiques utilisées par le Gouvernement est particulièrement grave pour l’Assemblée nationale. Sous Bonaparte, le Tribunat discutait sans voter et le Corps législatif votait sans discuter. Aujourd’hui, l’Assemblée n’est plus là, pour reprendre la formule d’un chroniqueur célèbre, que pour regarder passer les trains.

Or, veiller au respect des pouvoirs de l’Assemblée, c’est notre affaire, quels que soient, je le répète, les bancs sur lesquels nous siégeons car, un jour ou l’autre, ceux qui sont dans la majorité se retrouvent dans l’opposition.

M. Christian Paul et M. Jean-Pierre Blazy. C’est vrai !

M. Jean Leonetti. Vous en savez quelque chose, messieurs de la gauche !

M. Jean-Pierre Blazy. C’est ce qu’on appelle l’alternance !

M. Jacques Brunhes. Aucun d’entre nous ne peut supporter que les pouvoirs de l’Assemblée nationale soient rognés de quelque façon que ce soit.

M. le président. Merci pour cette mini-motion d’irrecevabilité, monsieur Brunhes.

La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Puisque nous avons la chance d’avoir parmi nous le ministre de l’éducation nationale et que nous abordons enfin l’examen de l’article 1er qui constitue l’un des piliers du projet de loi que le Gouvernement nous soumet, je souhaiterais que nous abordions enfin le débat de fond. Si M. de Robien est fin escrimeur et a réussi, depuis le début de la journée, à esquiver le débat et à détourner tous les arguments de l’opposition en évoquant différents textes existants, il va bien falloir qu’il assume ses positions sur cet article.

Le Premier ministre, lors de la crise des banlieues, a eu une illumination : la réponse aux violences urbaines et à la déscolarisation d’une partie de la jeunesse de ces quartiers était l’apprentissage à quatorze ans. C’était la seule voie, la seule stratégie possible.

Il vous revient aujourd’hui, monsieur le ministre, d’expliquer au Parlement les raisons de ce choix et de montrer pourquoi il est juste et pourquoi il est le seul possible, et nous attendons avec impatience vos explications à ce sujet.

Si j’interviens sur l’article, c’est parce que je veux que soient gravées dans le marbre du compte rendu les réactions que nous inspire cette proposition d’apprentissage à quatorze ans.

D’abord, elle marque la fin de l’obligation scolaire jusqu’à seize ans.

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Non !

M. Christian Paul. C’est ce que nous allons essayer de démontrer.

Vous créez une période de préapprentissage sous statut scolaire dès l’âge de quatorze ans et rendez ainsi possible l’accès à l’apprentissage à partir de quinze ans au lieu de seize ans.

Les possibilités dérogatoires qui existaient jusqu’à présent étaient en nombre limité et pour des objectifs très précis. Vous ouvrez aujourd’hui une voie d’orientation massive vers l’apprentissage dès quatorze ans. Vous rompez dès lors – et il vous faut assumer cette rupture non seulement devant le Parlement mais aussi devant le pays – avec une règle qui a permis, depuis près d’un siècle, d’élever le niveau d’éducation, de formation et de qualification des jeunes Français.

Vous allez même plus loin – et c’est peut-être cela que nous vous reprochons le plus –, vous sous-traitez l’échec scolaire : vous en transférez massivement la prise en charge vers les entreprises et vers les régions. Vous vous en défaussez, puisque ce sont les conseils régionaux et les branches professionnelles qui devront réunir l’essentiel des moyens que vous ne donnez plus à l’éducation nationale. Comme nous le disons depuis hier, au fond, avant même que la loi ne soit votée, la réduction des budgets des filières de l’enseignement technique professionnel opère une purge massive dans de nombreux lycées, où sont supprimés des BEP, des bacs professionnels, des BTS, des classes d’IUT, c’est-à-dire tout un continuum de filières qui permettaient à des jeunes souvent issus de milieux modestes de trouver véritablement des voies d’excellence. Vous y mettez fin à la hache et je pourrais en donner mille témoignages. D’ailleurs, si, dans beaucoup de villes de notre pays, les lycéens descendent aujourd’hui dans la rue, c’est contre le contrat première embauche, bien sûr, mais aussi contre cette carte scolaire qui vient broyer des filières qui avaient réussi et qui ouvraient bien souvent sur un emploi.

La seconde tare de votre projet, qui fait que l’ouverture de l’apprentissage dès l’âge de quatorze ans est un véritable leurre, est qu’il va renforcer la discrimination scolaire. Elle suscite de très nombreuses réactions, que vous n’entendez pas, monsieur le ministre, de la part non seulement des régions, qui se sont insurgées contre votre projet, toutes appartenances politiques confondues, mais aussi des parents d’élèves, qui voient bien le piège qui est en train de se refermer sur toute une génération : en dévalorisant l’apprentissage, on ne règle pas la question de l’échec scolaire et on ne traite pas non plus l’avenir de ceux qui s’étaient déjà engagés dans ces filières dont la réputation va forcément souffrir des choix que vous faites.

Les entreprises contestent également l’apprentissage à quatorze ans. Je ne citerai que l’UPA et la CAPEB. Jean-Pierre Blazy en a cité d’autres à l’instant.

Les entreprises artisanales, qui sont celles qui accueillent les apprentis, vous disent depuis des mois – mais vous ne les entendez pas – qu’elles ont besoin de former des personnels à une qualification de plus en plus haute et qu’elles préfèrent accueillir en apprentissage des jeunes ayant véritablement acquis les savoirs de base. Ce ne sera pas le cas des jeunes qui partiront en apprentissage : à quatorze ans, ce sont encore des enfants !

La CAPEB a déclaré que les entreprises ont besoin de jeunes ayant « une bonne connaissance scolaire et une solide formation » et considère qu’à quatorze ans, les apprentis juniors que vous allez extraire du système scolaire sont des enfants.

M. le président. Je vous demande, monsieur Paul, de vous acheminer vers votre conclusion.

M. Christian Paul. Je voudrais aller jusqu’au bout de mon argumentation, monsieur le président.

Cette mesure de régression éducative sans précédent que propose le Gouvernement n’est accompagnée d’aucune garantie de succès. Le taux d’abandon sera sans doute encore plus élevé qu’aujourd’hui. Dans certaines filières, un contrat sur quatre est déjà rompu avant son terme. Que deviendront les élèves ? Après l’échec de ce préapprentissage, pensez-vous vraiment qu’ils reviendront vers le collège ? Personnellement, nous ne le croyons pas. Nous pensons que ce sera un aller simple et que vous cultivez le mythe du retour au collège sans avoir véritablement les moyens de l’assurer.

Qui seront les tuteurs de ces jeunes ? Où sont les milliers de postes d’enseignants nécessaires pour atteindre progressivement l’objectif affiché de 500 000 apprentis par an à partir de 2009 ? Où sont les postes supplémentaires ? Où sont les moyens nécessaires ?

Vous allez nous renvoyer cette fois non plus au code de l’éducation nationale, mais à la loi de finances. Dites-nous avec quels moyens humains vous allez assurer le tutorat de ces jeunes. Qui ira, au nom des établissements d’enseignement, vérifier dans les entreprises les conditions de sécurité auxquels les jeunes doivent pouvoir prétendre comme les autres ?

M. le président. Il faut maintenant conclure, monsieur Paul.

M. Christian Paul. Qu’en sera-t-il du travail de nuit – que vous avez ouvert par un décret du mois de janvier 2006 – pour les apprentis juniors, les apprentis de quinze ans ?

Je voudrais que vous preniez la mesure de la décision que vous allez voter dans quelques heures ou la semaine prochaine. C’est la fin de l’obligation scolaire. C’est un leurre sur le plan éducatif. Ce sera aussi, pour beaucoup d’enfants de notre pays, le retour au travail de nuit. Nous allons nous efforcer, tout au long de cette soirée, de vous faire prendre conscience de vos responsabilités. Mais, de grâce, prenez la mesure des choix que vous proposez au pays.

M. le président. Mes chers collègues, comme c’était le début de la discussion, j’ai laissé les orateurs dépasser leur temps de parole.

M. Alain Joyandet. Largement !

M. le président. Mais il y a suffisamment d’amendements, et donc de possibilités de prendre la parole, pour que, dans les cinq minutes réglementaires, vous puissiez développer vos arguments.

Je souhaite que vous vous en teniez à cette limite, qui constitue, je vous le rappelle, un maximum.

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je ne voudrais pas que les orateurs soient privés des réponses que leurs questions méritent.

Madame Hoffmann-Rispal, je partage tout à fait vos préoccupations. Mais ce n’est pas ou l’apprentissage, ou les ZEP, c’est l’apprentissage et la relance des zones d’éducation prioritaire.

Depuis vingt-cinq ans, cette belle idée des zones d’éducation prioritaire n’a pas failli. Elle s’est simplement affadie, affaiblie. Nous avons donc besoin, comme vous l’avez très justement fait remarquer, de renforcer certains établissements dans les zones d’éducation prioritaire – ceux qui ont le plus de difficultés ou dont l’environnement social est le plus difficile – par des enseignants, plus expérimentés, venant épauler les jeunes qui sortent des IUFM, empreints de spontanéité, de générosité, pleins d’allant, mais – ils le reconnaissent eux-mêmes – pas toujours formés à enseigner en ZEP. Ils ont besoin de recevoir des conseils d’enseignants qui ont travaillé cinq ou dix ans en ZEP, puis qui sont allés ailleurs et qui pourraient revenir.

Nous avons donc bâti un système d’incitation extrêmement fort pour que 1 000 enseignants reviennent dans 200 à 250 collèges baptisés « ambition réussite ». Ces collèges seront d’abord sélectionnés sur des critères nationaux d’environnement social, d’échec à l’entrée en sixième et d’autres critères comme le pourcentage de jeunes issus d’ethnies différentes apprenant ou ne sachant pas le français, etc.

Ces 200 à 250 collèges recevront donc 1 000 enseignants supplémentaires. Il ne s’agit pas de déshabiller Paul pour habiller Jacques.

M. Jean-Pierre Blazy. On verra !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Effectivement, vous le verrez.

M. Jean-Pierre Blazy. Vous diminuez le nombre de postes offerts aux concours.

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Vous affichez un certain scepticisme. Je vous emmènerai, si vous le voulez, voir certains de ces professeurs.

M. Jean-Pierre Blazy. Oui !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Nous ne nous arrêterons pas là. Nous affecterons 3 000 assistants pédagogiques dans ces 200 à 250 collèges et écoles, afin de former des réseaux « ambition réussite ».

M. Jean-Pierre Blazy. Pourquoi avoir supprimé les emplois-jeunes ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ils serviront à assurer des études obligatoires quatre fois par semaine, je l’ai déjà indiqué au début de l’après-midi. En effet, tous ces jeunes ne peuvent pas toujours apprendre leurs leçons chez eux dans de bonnes conditions.

Les 1 000 professeurs et les 3 000 assistants pédagogiques ne recevront pas une feuille de route précise. Mais, à travers un travail réalisé par trois, quatre, cinq, six écoles correspondant à un collège, se constituera un réseau « ambition réussite », dont le comité directeur sera composé des chefs d’établissement, des directeurs et directrices d’école. Un projet pourra alors être bâti, validé bien sûr par l’inspecteur d’académie. Les professeurs et les assistants pédagogiques pourront donc être utilisés – je ne sais pas si le terme est adéquat – selon les objectifs fixés.

Des besoins existent également en termes médicaux. Chacun de ces collèges « ambition réussite » recevra au moins un infirmier ou une infirmière,…

M. Jean-Pierre Blazy. Il en manque !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. …ce qui nous semble indispensable.

M. Jean-Pierre Blazy. Oui !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. C’est tout cela, le plan de relance.

Nous avons prévu quinze ou seize autres mesures, dont de nouvelles relations entre la communauté pédagogique et les parents. Nous demandons par exemple qu’à l’intérieur de chaque établissement une salle soit réservée aux parents, afin de créer un minimum d’échanges entre eux et les enseignants.

Nous voudrions qu’une fois par trimestre le responsable de l’établissement ou les enseignants rencontrent les parents. Ce sera peut-être l’occasion de discuter de la note de vie scolaire, lorsqu’elle sera mise en place.

Nous voulons que cette pièce permette aux parents de discuter entre eux des difficultés rencontrées ou de recevoir, le cas échéant, des associations susceptibles de faire de l’aide parentale. Certains n’aiment pas les mots « école des parents ». Pour ma part, loin de récuser ce termes, je le trouve très beau, car on a le droit d’aller à l’école à tous les âges. L’« école des parents » est assez interactive.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Subventionnée !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Tout à fait !

Cela existe déjà dans de nombreuses villes. Ce sont souvent des mouvements associatifs.

Madame Hoffman-Rispal, il sera fait appel à des traducteurs chaque fois que cela sera nécessaire, dans les collèges « ambition réussite ». Les enseignants recevront une formation spécifique, qu’ils sont unanimes à souhaiter, dans les établissements les plus délicats. Ils seront prioritaires pour recevoir un tutorat étudiant. De plus, il y aura l’effet réseau dont je vous ai déjà parlé.

M. Jean-Pierre Blazy. Combien d’élèves représentent 250 collèges ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Pourquoi y aura-t-il en septembre 2006 plus d’établissements en ZEP qu’à la rentrée 2005 ? Nous savons tous que certains établissements, certains collèges ne sont pas en zone prioritaire, alors même qu’ils le mériteraient. Nous allons donc les ajouter.

M. Jean-Pierre Blazy. Avec quels moyens ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il est facile d’essayer de m’interrompre, mais je ne me laisserai pas démonter !

Je dispose des moyens nécessaires. La création des 3 000 postes d’assistants pédagogiques figure dans le budget pour 2006. Les 1 000 professeurs seront pris sur le temps non affecté, mais on ne prendra que 50 % de l’heure non affectée.

Monsieur Blazy, la baisse démographique aurait dû conduire, mathématiquement, à retirer 2 585 postes dans le secondaire. Nous n’en retirons que 1 300. Cela nous donne un bonus de 1 200, qui viendra augmenter l’encadrement dans les collèges prioritaires, et ainsi de suite.

M. Jean-Pierre Blazy. La baisse démographique ne durera pas très longtemps !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Dans le premier degré, 1 000 professeurs seront recrutés. Nous assisterons, là aussi, à une augmentation du taux d’encadrement. Je sais que ça vous ennuie que je fasse cette démonstration.

M. Jean-Pierre Blazy. Non ! Mais nous n’y croyons pas !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Que vous y croyiez ou non, je sais, moi, que ce sera la réalité.

M. Jean-Pierre Blazy. Vous supprimez des postes, vous fermez des classes !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Vous pourrez venir observer cette réalité sur place.

Mme Catherine Génisson. Dans la région Nord–Pas-de-Calais, par exemple !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Peut-être ne souhaitez-vous pas que cela se réalise. Mais cela se fera dans tous les cas.

M. Jean-Pierre Blazy. Les enseignants n’y croient pas !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Si Mme Hoffmann-Rispal a fait montre de scepticisme, elle souhaite que tout cela soit mis en place.

Il y aura donc en septembre 2006 plus d’établissements placés en zone d’éducation prioritaire qu’en septembre 2005.

M. Jean-Pierre Blazy. Vous n’aurez pas le temps !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Rien n’a changé entre mes propos de décembre 2005 et ceux que j’ai tenus hier et avant-hier.

M. Henri Emmanuelli. Ainsi, vous avez moins de profs et plus de moyens !

M. Alain Vidalies. C’est lumineux !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. J’ai annoncé le 13 décembre la création de ces 200 à 250 collèges, selon des critères nationaux. Ceux-ci ont déjà permis de présenter 164 propositions aux recteurs et aux inspecteurs d’académie – ce nombre m’a d’ailleurs été immédiatement reproché – et il leur a été demandé de compléter ces listes.

M. Jean-Pierre Blazy. Pourriez-vous nous indiquer combien d’élèves représentent ces 250 collèges ? Pas beaucoup !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Voilà le travail concret réalisé au niveau du terrain.

Des établissements pourraient sortir de l’éducation prioritaire d’ici à trois ans, dans la mesure où ils atteindraient des résultats suffisants et où l’environnement social serait favorable. Cela consacrerait alors simplement la réussite du système. Ce serait un véritable succès, une récompense pour tout le monde.

Monsieur Blazy, vous m’avez demandé si les entreprises allaient prendre les apprentis juniors. J’en suis convaincu, et pas seulement parce qu’elles bénéficieront d’avantages fiscaux, mais surtout parce que les apprentis juniors seront bien mieux formés que les autres

M. Henri Emmanuelli. Cela signifie-t-il que les autres seront mal formés ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Si, aujourd’hui, certaines entreprises éprouvent des réticences, c’est parce qu’elles craignent, parfois à juste titre, que la formation ne soit pas suffisante.

Les apprentis juniors seront d’autant plus motivés qu’ils auront choisi cette voie-là.

Mme Catherine Génisson. Mais non ! Ce n’est pas eux qui choisissent, mais les conseils !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les entreprises seront donc demain moins réticentes qu’elles ne le sont aujourd’hui.

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n’est pas ce que disent les chambres de métiers !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il ne s’agit nullement d’une remise en cause du collège unique, comme vous l’affirmez, monsieur Blazy. Je veux faire du collège unique un collège pour tous, qui respecte les talents, les besoins de chacun, qui aide chacun, personnellement, à réussir.

Vous avez vu ce que je mets en place avec les programmes personnalisés de réussite éducative. C’est, ici la même chose.

Vous m’avez posé, ainsi que d’autres intervenants, une très intéressante question sur les classes préparatoires à l’apprentissage et les classes d’initiation préprofessionnelle en alternance. Les CLIPPA, ce n’est pas mal, mais ce n’est pas suffisant. L’apprentissage junior, ce sera mieux. On prend en effet ce qu’il y a de mieux dans les CLIPPA et on met une certaine valeur ajoutée. Pour l’apprentissage junior, on va plus loin : il y a une garantie du socle. Mais nous y reviendrons. Les jeunes seront mieux suivis avec le tutorat. Nous reviendrons également sur ce point. Chacun garde un rattachement à son collège d’origine. Nous y reviendrons aussi. Monsieur Blazy, je crois vous avoir fourni quelques éléments de réponse.

Monsieur Christian Paul, vous dites que l’apprentissage à quatorze ans marque la fin de la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans. Non ! C’est une autre voie de formation et de réussite dans le cadre de l’instruction obligatoire. Regardez les textes !

M. Christian Paul. Et le contrat de travail ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ceux qui prétendent le contraire n’ont pas regardé les textes.

N’oubliez pas que le parcours d’initiation aux métiers est effectué sous statut scolaire.

M. Henri Emmanuelli. Avec ça, ils sont bien avancés !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le contrat d’apprentissage peut être rompu jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire. Le jeune peut reprendre sa scolarité dans un collège. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

De plus, l’article L. 115-1 du code du travail affirme que l’apprentissage concourt aux objectifs éducatifs de la nation. Ce n’est pas une sortie du système scolaire.

M. Jean-Pierre Blazy. Ce sera irréversible !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je vous demande de considérer le texte du projet de loi. À l’alinéa 4 de l’article 1er, on lit en substance que l’apprenti junior peut, jusqu’à seize ans, revenir étudier au collège.

M. François Brottes. Dans quelles conditions ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cela vaut mieux qu’un long discours, qu’une diatribe qui laisserait croire que c’est la sortie du système scolaire. Vous allez, ou non, voter ce texte, mais je pense qu’une grande partie des députés présents dans cet hémicycle voteront un texte…

M. Jean-Pierre Blazy. Ils sont là pour cela !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. …qui permettra effectivement de rester au collège et dans le système scolaire.

L’apprenti junior restera inscrit dans les registres du collège, Il sera suivi par un professeur référent de son collège. Cela figurera dans le texte d’application. Il acquerra, par la formation en apprentissage, le socle commun de connaissances – alinéa 7 de l’article 1er.

Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les réponses que je voulais formuler, de façon non à déblayer le terrain – car nous y reviendrons – mais à vous apporter un certain nombre d’éléments.

M. Jean-Pierre Blazy. Il reste beaucoup de zones d’ombre !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je resterai bien sûr à votre disposition dans la suite du débat pour vous apporter d’autres réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. M. Brunhes a évoqué la question du droit d’amendement, ne visant sans doute pas l’article 1er, mais plutôt les trois articles additionnels.

Je voudrais lui rappeler la jurisprudence du Conseil constitutionnel, aujourd’hui stabilisée – la décision du 19 janvier dernier le confirme –, selon laquelle est autorisé tout amendement non dénué de lien avec l’objet du texte déposé par le Gouvernement. Tel est bien le cas pour les mesures en faveur de l’éducation, de l’emploi, du développement économique, et notamment de l’emploi de jeunes.

Nous avons d’ailleurs déposé ces trois articles additionnels devant la commission. Dois-je rappeler que, sur le texte de modernisation sociale, le gouvernement de l’époque avait introduit 61 articles additionnels par voie d’amendements et que nombre d’entre eux n’avaient pu être examinés par la commission.

M. Henri Emmanuelli. D’où sortez-vous cela ? Produisez la preuve !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Brunhes, je voudrais vous rappeler que l’urgence avait également été déclarée sur le projet de loi du 25 mars 1998 relatif à la lutte contre les exclusions.

Enfin, selon l’assemblée permanente des chambres de métiers – je me réfère au texte de l’APCM qui a été voté à l’unanimité moins le président – la limitation de l’âge de l’accès à l’apprentissage était depuis longtemps considérée comme « un frein à l’apprentissage de certains métiers. Cette annonce est donc une réponse sur le long terme pour une filière qui marche avec plus de 80 % de taux d’insertion à l’issue de la formation et qui a fait ses preuves en matière d’intégration et de resocialisation de publics en difficulté. »

M. Alain Vidalies et M. Henri Emmanuelli. Donnez-nous lecture de la position de l’UPA !

M. le président. Je suis saisi de douze amendements de suppression de l’article 1er, nos 38 et 241 à 251.

La parole est à M. Jacques Brunhes, pour soutenir l’amendement n° 38.

M. Jacques Brunhes. Je souhaite répondre à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes sur les problèmes constitutionnels. Il me semble, monsieur Larcher, que vous n’ayez pas bien entendu le président Debré lorsqu’il fustigeait ceux qui déposent à la dernière minute des amendements de quatre pages. En effet, le Gouvernement dépose sur ce texte un amendement de cinq pages – tout un corpus – qui constitue bel et bien un cavalier puisqu’il pourrait et devrait faire à lui seul l’objet d’un projet de loi ! Comme il s’agit d’un amendement, le Conseil d’État n’en a pas été saisi. De plus, nous ne pourrons que sous-amender le texte sur le CPE. Il s’agit donc d’une remise en cause du droit d’amendement de l’Assemblée nationale. Votre démonstration est donc loin d’être convaincante.

Monsieur le ministre de l’éducation nationale, je vous trouve très optimiste …

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. C’est ma nature !

M. Jean Leonetti. Et vous, vous êtes pessimiste !

M. Jacques Brunhes. L’optimisme est une qualité mais, en l’occurrence, vous en faites preuve à contretemps !

M. Alain Vidalies. C’est ce que dit Bayrou !

M. Jacques Brunhes. Vous êtes bien le seul à dire qu’il n’y a pas de remise en cause de la scolarité obligatoire. Toutes les organisations syndicales dénoncent « une remise en cause de la scolarité obligatoire » et affirment que l’apprentissage junior « constitue un recul historique inacceptable » ; elles y voient « l’éviction précoce des élèves en difficulté ».

Du côté des artisans et petites entreprises, l'avis est le même. Ils ne voient rien de bon à verser dans « l'apprentissage forcé » des jeunes de quatorze ans, qui plus est en échec scolaire.

La Fédération nationale de la coiffure le reconnaît. Son président souligne qu’« avant seize ans, les jeunes manquent encore souvent de maturité, de discipline, d'éducation ; alors , ils sont de plus en plus en échec scolaire ».

Nous ne pouvons pas accepter le renoncement de l'État à réformer notre système scolaire en lui refusant les moyens de fonctionner.

J'en veux pour preuve l'illustration de votre politique budgétaire. Un programme d'actions de grande envergure, doté de 6,2 milliards d'euros cumulés sur les années 2006 et 2007, aurait pu être rapidement élaboré en révisant la dernière loi de finances.

À cette fin, nous avions proposé de modifier quelques dispositions fiscales destinées à améliorer les profits des entreprises, les gains des actionnaires ou le train de vie de la couche la plus favorisée de la société, pour affecter des moyens à la lutte contre l'exclusion qui frappe des millions de familles et un pan entier de notre jeunesse, notamment en matière scolaire.

À titre d'exemple, l'annulation du plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée dégagerait, selon l'évaluation du coût pour l'État par le rapporteur général, 1,5 milliard d'euros par an. Cette somme permettrait de tripler les crédits spécifiques consacrés aux zones d'éducation prioritaire, effort estimé par la Cour des comptes à 516 millions d'euros par an.

D'autre part, quand le Président de la République dénonce « les discriminations qui sapent les fondements mêmes de notre République », le Gouvernement et sa majorité ont été bien mal inspirés d'offrir, par le biais de la loi de finances de 2006, 1,2 milliard d'euros d'allégements fiscaux à une minorité de riches privilégiés.

La réduction de la progressivité de l'impôt sur le revenu avec intégration de l'abattement de 20 % rapportera en effet, en 2007, 885 millions d'euros aux quelque 100 000 foyers les plus aisés. À ce cadeau s'ajoutent 250 millions d'euros attribués à 14 000 ménages fortunés en application du bouclier fiscal ainsi que 68 millions d'euros accordés, dès 2006, à 12 000 hauts cadres et PDG actionnaires de leur entreprise, qui pourront profiter d'un abattement d'impôt sur la fortune porté à 75 % de la valeur des titres détenus. Face à cela – il est bon de faire le parallèle –, le président d’Emmaüs s’alarme que la misère en France progresse considérablement.

Les recettes perdues représentent le double des moyens d'engagement alloués aux programmes de rénovation urbaine et d'équité sociale et territoriale.

La majorité a fait des choix budgétaires. Il aurait été préférable d’en faire d’autres pour faire de l'école la structure de la réussite pour tous.

Faire sortir un élève du système scolaire à quatorze ans, c'est en fait sceller sont sort avant même qu'il ait atteint cet âge, l'institution scolaire ayant depuis longtemps développé la capacité d'anticiper l'orientation, surtout lorsqu'elle se fonde sur l'échec.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Faire sortir de l'école des jeunes dès quatorze ans, moment où l'on maîtrise rarement toutes les conséquences d'une orientation, ce n’est pas les préparer convenablement à une vie citoyenne. C'est aussi renforcer l'image d'un enseignement professionnel dont le principal rôle serait, selon vous, de remédier à l'échec scolaire.

Nous n'acceptons pas cette vision et nous nous opposerons à la création de l'apprentissage junior.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour un rappel au règlement.

M. Alain Joyandet. Certains de nos collègues viennent de nous rejoindre dans ce débat. Mais pour ceux d’entre nous qui assistent aux débats depuis le début de l’examen de ce texte, c’est-à-dire depuis trois jours, il est quelque peu désagréable d’entendre les mêmes propos.

J’en appelle à votre arbitrage, monsieur le président. Nous étions convenus d’examiner les deux premiers articles avant une heure du matin. À ce rythme, ce ne sera pas possible. Les quatre orateurs de l’opposition qui se sont exprimés sur l’article 1er ont tous dépassé leur temps de parole. La majorité, conformément aux accords qu’elle a passé, renonce à intervenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Exprimez-vous !

M. Alain Joyandet. Je vous demande, monsieur le président, de faire respecter le règlement et de faire régner une certaine équité, sinon nous perturberons, nous aussi, le cours de la séance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Jusqu’à vingt heures, nous avons examiné les amendements portant articles additionnels avant l’article 1er, qui ont permis d’engager un débat sur le fond pendant lequel le Gouvernement s’est largement exprimé. Depuis la reprise de la séance de ce soir, nous entendons les mêmes arguments !

M. Alain Vidalies. Et on est là pour trois semaines !

M. Alain Joyandet. Votre prédécesseur à la tribune cet après-midi, monsieur le président, a, je vous l’assure, déjà entendu tout cela. Essayons de respecter le règlement en termes de temps de parole et restons-en à nos accords. Sinon, nous serons obligés, à notre tour, de demander une suspension de séance pour voir comment nous organiser.

M. le président. Monsieur Joyandet, la présidence n’a pas à se prononcer sur le contenu des débats.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Mais sur la durée, si !

M. le président. Son devoir est de faire respecter les temps de parole, et je le fais.

Reprise de la discussion

M. le président. Monsieur Gorce, le groupe socialiste a déposé douze amendements de suppression de l’article 1er. Peut-on considérer qu’en présenter deux ou trois suffira ?

M. Gaëtan Gorce. Soit, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Christian Paul pour soutenir l’amendement n° 241.

M. Christian Paul. La mise en place de l’apprentissage à quatorze ans ne peut susciter de notre part qu’une opposition totale, car cette mesure ne sert pas l’apprentissage.

M. Gérard Voisin. Pourquoi ?

M. Christian Paul. Vous en ferez une destination obligatoire au terme d’une orientation forcée, en tout cas subie, pour des dizaines de milliers de jeunes Français en situation d’échec scolaire. Ce n’est pas ainsi que vous servirez l’apprentissage.

Depuis quinze ans, voire vingt ans, les gouvernements successifs, y compris les vôtres, se sont battus pour faire en sorte que l’apprentissage soit reconnu comme une voie de réussite scolaire comparable aux autres. En imaginant que vous teniez là une réponse magique à la crise des banlieues – l’illumination de M. de Villepin dont je parlais tout à l’heure –, vous ne ferez croire à personne dans ce pays que vous servez l’apprentissage, voie non seulement de réussite, mais d’excellence.

Vous n’apportez pas non plus de réponse aux situations d’échec scolaire graves ou de déscolarisation. Vous n’avez convaincu personne, monsieur le ministre, en essayant de démontrer que cela ne remettait pas en question la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans. Si l’on suit votre raisonnement, il s’agit de jeunes qui ont échoué au collège, certains y sont à peine entrés. Pour certains d’entre eux, l’apprentissage précoce à quatorze ans s’adressera à des jeunes qui auront à peine quitté le cours moyen deuxième année !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Non !

M. Christian Paul. Ils auront à peine atteint le collège qu’ils seront orientés vers l’apprentissage junior. Cette orientation subie sera sans retour. Ils auront échoué au collège. Ne disposant pas de bases suffisantes, ils échoueront dans l’apprentissage. Et vous imaginez qu’ils retourneront au collège dans des conditions convenables ? C’est un aller sans retour que vous leur proposez !

M. Henri Emmanuelli. C’est une histoire à dormir debout !

M. Christian Paul. Si le maintien de l’obligation scolaire à seize ans repose exclusivement sur cette démonstration, vous aurez beaucoup de mal à convaincre le pays, les enseignants, les parents d’élèves et les jeunes. C’est un maintien fictif de l’obligation scolaire à seize ans que vous affirmez.

Je voudrais revenir sur les éléments de réponse que vous avez apportés à notre collègue Danièle Hoffman-Rispal concernant l’enseignement prioritaire. Nous savons ce qui reste des crédits pédagogiques dans les ZEP et aimerions d’ailleurs des précisions à ce sujet. Mais nous savons surtout ce qui est en train de se passer, et c’est ce que voient les Français, qui ne croient plus à vos annonces. Vous avez eu quatre ans et la réalité n’a pas changé dans les collèges et les lycées.

La mise en place de la carte scolaire pour la rentrée prochaine sera un désastre sans précédent. Vous nous promettez 1 000 postes nouveaux dans les ZEP : la belle affaire ! Dans ma région, la Bourgogne, vous avez, en deux ans, supprimé 500 postes dans l’enseignement secondaire, qui ont été transférés vers d’autres régions.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Les cinq minutes sont écoulées !

M. Christian Paul. Vous avez brisé des filières d’excellence avec des BEP ou des bacs professionnels ouvrant vers de vrais emplois, alors même que les enseignants ont parfois mis dix à quinze ans pour les mettre en place et bâtir leur notoriété par un travail acharné. Je tiens la liste à votre disposition.

Et que dit-on aujourd’hui dans les rectorats aux délégations d’enseignants et de parents ? Que l’on va désormais envoyer les jeunes en apprentissage. On casse des filières qui réussissaient pour anticiper la loi que vous allez voter. On programme la migration de la génération à venir vers l’apprentissage.

Interrogez les proviseurs de lycées professionnels : ils vous diront que le ministre met en place une carte scolaire dont les ravages seront sans précédent.

M. le président. Il est temps de conclure, monsieur Paul !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Largement temps !

M. Christian Paul. Vous pouvez toujours afficher une totale sérénité et vous retrancher derrière votre bonne conscience : les Français sont en train de vous juger.

M. le président. Mes chers collègues, je précise qu’un peu avant la fin de son temps de parole, j’avertis l’orateur qu’il lui faut conclure. Je n’interviens verbalement que lorsque le temps qui lui est imparti est épuisé.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l’amendement n° 242.

M. Alain Vidalies. Monsieur le ministre, l’objectif de faire de l’apprentissage une filière d’excellence est sérieusement mis à mal par votre initiative. À quoi sert d’avoir pendant des années affirmé qu’il avait sa place parmi les autres filières de formation et qu’il ne devait pas être réservé aux élèves en échec scolaire ? Il risque de voir perdurer son image dévalorisante, dont les chefs d’entreprise se plaignent avec raison.

À cet égard, il faudrait mener un débat de fond sur la façon d’apprécier les capacités des enfants. Une idéologie passéiste voudrait distinguer l’intelligence conceptuelle de l’intelligence manuelle : ceux qui ne se seraient pas dotés de la première ne pourraient s’orienter vers des études et auraient vocation à exploiter la seconde en se consacrant à l’artisanat. Voilà un discours digne du XIXè siècle ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Voisin. N’importe quoi !

M. Alain Vidalies. Mes chers collègues, pourquoi protestez-vous ? C’est tout de même extraordinaire. Presque plus personne en France ne parle de l’artisanat de la sorte, depuis les années trente. Aucun chef d’entreprise ne raisonne ainsi.

M. Jean-Pierre Blazy. Il y a à l’UMP de vrais réactionnaires !

M. Alain Vidalies. Mais cela n’empêche pas d’entendre ici ou là un discours poujadiste.

La position du Gouvernement a de quoi surprendre, si l’on prend en compte les études issues des centres de recherche qui dépendent des ministères.

Je me référerai à l’étude du Centre d’études et de recherches sur les qualifications relative à l’apprentissage qu’a relatée un article du 21 décembre 2005 de La Tribune, journal qui n’a rien de suspect. S’agissant des perspectives d’emploi, il faut savoir qu’un tiers seulement des entreprises embauchent leurs apprentis comme salariés.

M. Alain Joyandet. C’est bien la preuve que des passerelles existent !

M. Alain Vidalies. Ajoutons qu’il existe des différences considérables selon les métiers. Dans le secteur de la coiffure, seulement 15 % des apprentis sont recrutés dans l’entreprise où ils ont été formés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Geoffroy. Cela veut dire qu’ils ont été embauchés ailleurs !

M. Henri Emmanuelli. Dites cela aux chômeurs !

M. Alain Vidalies. La conclusion de cette étude menée par un organisme officiel est que « la poursuite des études par la voie scolaire protège toujours mieux du chômage qu’une orientation précoce vers un centre de formation des apprentis ».

M. Christian Paul. Tout est dit !

M. Alain Vidalies. L’ analyse des parcours de 700 000 jeunes, trois ans après la fin de leur apprentissage, montre que cela constitue une erreur et qu’il vaut mieux continuer dans l’enseignement général. Mais, par pure idéologie, monsieur le ministre, vous vous engagez dans cette voie.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Fini, le temps de parole !

M. Alain Vidalies. Par ailleurs, vous devez répondre à la question qui vous a été posée : êtes-vous d’accord pour que des enfants de quatorze ans travaillent la nuit ?

M. le président. Il vous faut conclure, monsieur Vidalies.

M. Alain Vidalies. Mais enfin, il faut que le ministre réponde à ces questions-là. Les Français ont besoin de savoir alors que, par un décret de janvier 2006, vous venez d’autoriser le travail des apprentis la nuit ainsi que le dimanche et les jours fériés dans une vingtaine de secteurs. Quel progrès social !

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Gérard Voisin, pour un rappel au règlement.

M. Gérard Voisin. Quitte à allonger le débat, je tiens à dire qu’il y a des choses que l’on ne peut pas entendre sans réagir, monsieur Paul, monsieur Vidalies !

M. Christian Paul. Allez dans les lycées de Mâcon, vous verrez !

M. Gérard Voisin. S’il y a quelqu’un qui peut dire des choses à ce sujet, c’est bien moi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Oui, monsieur Emmanuelli : bac moins deux ! Ni heureux, ni fier de cela…

M. le président. Monsieur Voisin, je vous ai donné la parole pour un rappel au règlement. Si vous souhaitez intervenir contre les amendements de suppression, vous aurez la parole tout à l’heure.

M. Gérard Voisin. Eh bien, je la demanderai tout à l’heure !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. C’est tout de même extraordinaire : on n’a pas le droit de s’exprimer !

M. Alain Joyandet. Je demande la parole pour un rappel au règlement !

M. le président. Fondé sur quel article ?

M. Alain Joyandet. L’article 58.

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Joyandet.

M. Alain Joyandet. Monsieur le président, quatre orateurs de l’opposition se sont exprimés tout à l’heure et ont dépassé leur temps de parole, et vous n’avez rien dit. Un membre de notre majorité veut prendre la parole et vous lui demandez d’intervenir plus tard !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. C’est de la complicité !

M. Alain Joyandet. Sous une autre présidence, les orateurs de la gauche ont été incités tout à l’heure à prendre la parole dans le cadre d’un rappel au règlement. Pourquoi notre collègue ne pourrait-il pas le faire aussi ?

Il faut remettre de l’ordre dans nos travaux !

M. le président. Monsieur Joyandet, je dois vous préciser que, pour ce qui est de la défense des amendements, les orateurs n’ont pas dépassé leur temps de parole, compte tenu de la procédure que j’ai utilisée.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Bien sûr que si !

M. le président. Je vous rappelle également que chaque amendement identique peut être défendu par un orateur. Si vous voulez parler contre un amendement, …

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Nous n’avons pas le droit de parler !

M. le président. Bien sûr que si, mais après que tous les amendements identiques auront été présentés. C’est l’application du règlement. Si je donne la parole pour parler contre chaque amendement, le débat n’aura plus aucun sens.

Vous pouvez toujours faire un rappel un règlement, comme vient de le faire M. Joyandet, mais il faut ce soit véritablement un rappel au règlement. Il y a suffisamment d’amendements pour que chacun trouve l’occasion de s’exprimer.

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour un rappel au règlement.

M. Gaëtan Gorce. Cela m’évitera d’intervenir directement sur l’amendement que je voulais défendre, monsieur le président.

Permettez-moi de rappeler à l’ensemble de nos collègues que nous sommes engagés dans un débat de qualité, qui porte sur des questions de fond.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Ah ! Ah !

M. Gaëtan Gorce. Il serait dommage de se laisser enfermer dans des questions de procédure. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Je souhaiterais que nos collègues comme le Gouvernement aient le souci de répondre aux questions très précises posées par mes collègues. Je n’en reprendrai que deux. Alain Vidalies a montré que les rapports publiés par le CEREQ et… (Vives protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Ça y est, on est reparti pour cinq minutes encore !

M. Alain Joyandet. Qu’est-ce que c’est que cette présidence !

M. le président. Monsieur Gorce, ce n’est pas un rappel au règlement !

La parole à M. Jacques Brunhes, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Vous refusez de me donner la parole, c’est inacceptable, monsieur le président ! Cela fait dix minutes que je lève la main. N’oubliez pas que je suis président de la commission !

M. Jacques Brunhes. Chacun son tour !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. J’ai demandé la parole bien avant vous !

M. le président. Monsieur le président de la commission, vous allez avoir la parole juste après M. Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Je vous remercie, monsieur le président.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Et voilà, c’est reparti !

M. Jacques Brunhes. Tout à l’heure, j’ai été mis en cause directement par M. Joyandet. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. S’il s’agit d’un fait personnel, vous devez intervenir en fin de séance.

M. Jacques Brunhes. Je dis simplement que M. Joyandet a noté que certains collègues, dont moi, étaient absents lors des séances précédentes.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. C’est vrai !

M. Jacques Brunhes. Permettez-moi de lui répondre, comme je l’ai vérifié, qu’il n’y a que 22 présents sur les 354 membres que compte le groupe UMP. Il y a donc en quelque sorte 332 absents sur vos bancs ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Valérie Pecresse. Il n’y a qu’un seul communiste !

M. Jacques Brunhes. Alors, monsieur Joyandet, je vous prie de ne pas utiliser ce type d’argument !

Je demande une suspension de séance d’une demi-heure !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Non, c’est moi qui la demande, et pour une heure !

M. le président. Dix minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Reprise de la discussion

M. le président. Nous poursuivons l’examen des amendements de suppression de l’article 1er.

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour soutenir l’amendement n° 246.

M. Gaëtan Gorce. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Michel Charzat, pour soutenir l’amendement n° 247.

M. Michel Charzat. Je veux apporter quelques éléments complémentaires qui militent en faveur de la suppression de l’article 1er, article qui porte atteinte au principe de la scolarité obligatoire jusqu’à l’âge de seize ans et qui aura pour conséquence de multiplier les stages en milieu professionnel.

La situation des jeunes engagés dans un stage est inacceptable. En septembre 2005, un appel à la grève spontanée a été diffusé sur internet, suivi par la première manifestation des stagiaires le 4 octobre 2005. Des jeunes, aux visages couverts de masques blancs afin de préserver leur anonymat, mais surtout soucieux de dénoncer leur condition dans l’entreprise, celle de mannequin jetable et interchangeable, sont venus crier leur colère et porter à la connaissance du grand public les conditions intolérables qu’ils subissent.

Cette armée de réserve de l’entreprise, toujours disponible, sans cesse renouvelée, sans aucun droit, pas même celui d’avoir un salaire, ce véritable sous-salariat composé de milliers de jeunes travailleurs précaires, diplômés dans tous les domaines et présents dans tous les secteurs d’activité, sert de variable d’ajustement peu onéreuse à des entreprises parfois peu scrupuleuses. Certaines d’entre elles fonctionnent quelquefois essentiellement avec des stagiaires dont le nombre dépasse celui des salariés. Les jeunes stagiaires effectuent souvent sur une longue période des tâches qui relèveraient d’un emploi salarié, sans être payés en proportion et parfois même sans être payés du tout.

Cette forme d’exploitation moderne est à l’origine d’un cercle vicieux auquel seule la législation pourrait mettre fin. En effet, pourquoi embaucher des salariés avec des rémunérations dignes de ce nom, alors que la main-d’œuvre est accessible gratuitement ou à moindre coût par le biais des stages ?

Face à ce constat, il convient de rappeler quelle devrait être la vocation du stage. Souvent effectué au cours de la formation, il est censé, grâce à l’encadrement pédagogique assuré par la structure d’accueil, permettre aux jeunes de s’insérer professionnellement. Il devrait, en quelque sorte, servir de tremplin en vue de leur entrée sur le marché du travail. C’est cette mission première du stage que nous voulons restaurer à travers les amendements que nous avons déposés sur ce projet de loi intitulé trompeusement « pour l’égalité des chances ».

Le Gouvernement semble avoir entendu très partiellement les revendications des jeunes précaires. Ainsi, l’alinéa 6 de l’article 1er prévoit que les entreprises devront verser une gratification au stagiaire apprenti. Plus généralement, un amendement gouvernemental introduit une indemnisation pour les stages de plus de trois mois. Ces concessions minimales marquent un premier pas, mais il reste encore de nombreux kilomètres à parcourir avant de parvenir à un véritable statut du stagiaire dans l’entreprise tel que nous le voulons.

Nous ne pouvons pas nous contenter d’une si faible avancée. C’est pourquoi nous proposerons l’adoption de dispositions relatives à l’encadrement pédagogique et juridique du stage telles que l’obligation d’établir une convention de stage et d’expliciter les capacités d’encadrement de la structure d’accueil.

Afin de s’assurer que le stage concourt réellement à la formation et participe pleinement au projet d’insertion professionnelle du jeune, nous proposerons que l’accompagnement du stagiaire soit personnalisé et individualisé sur la base d’un système de tutorat.

Ensuite, afin de limiter les abus et l’enlisement des jeunes dans une situation précaire, nous demanderons que le stage ait une durée déterminée, fixée par la convention, et qu’il soit pris en compte, en cas d’embauche, comme période d’essai, ainsi que dans le calcul de l’ancienneté.

Enfin, afin de valoriser le jeune et d’éviter qu’il ait à supporter les coûts, parfois très élevés relatifs à l’accès au stage, nous exigerons que le stagiaire soit rémunéré et que ses frais d’hébergement, de transport et de restauration lui soient remboursés.

Mes chers collègues, l’enjeu est bien de redonner aux jeunes la possibilité de se former par des stages et de trouver ensuite de véritables emplois, c'est-à-dire une vraie place dans l’entreprise et, par extension, dans la société.

Tel est l’objet des amendements que nous soutiendrons dans quelques instants, puisque vous n’avez pas eu la sagesse de renoncer à ce funeste article 1er.

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli, pour soutenir l’amendement n° 251.

M. Henri Emmanuelli. Je rappelle à ceux qui pourraient penser que nous en rajoutons que, si ces amendements avaient été discutés un par un, la mécanique des avis successifs et des réponses aurait eu pour effet d’allonger notablement la discussion.

Le président de la commission des affaires sociales a dit avoir entendu beaucoup de redites, mais nous vous avons entendu répéter trois fois en deux jours, monsieur le ministre délégué à l’emploi, que l’assemblée permanente des chambres de métiers avait donné son accord. Vous êtes moins disert sur la position de l’Union professionnelle artisanale, deuxième organisation patronale française qui regroupe 800 000 entreprises, pour la plupart artisanales. L’UPA n’est pas favorable à votre système parce qu’elle connaît l’étude du CEREQ qui montre que, contrairement à ce que l’on pourrait penser, sortir prématurément les enfants du cycle scolaire n’en fait pas nécessairement de bons apprentis.

Je me contenterai d’appeler votre attention, messieurs les ministres, sur le fait que ce n’est pas en se focalisant sur les enfants en échec scolaire que l’on revalorisera le travail manuel, que l’on réhabilitera l’apprentissage. C’est là toute la faiblesse de votre système. Vous faites croire à l’opinion publique et à la jeunesse que ceux qui sont en échec scolaire à l’âge de quatorze ans feront de bons apprentis.

M. Maurice Giro. On n’a jamais dit ça !

M. Henri Emmanuelli. Eh bien non ! Ce n’est pas ainsi que vous revaloriserez le travail manuel. M. Vidalies a tenté de vous l’expliquer, mais vous ne voulez pas comprendre. La réalité vous rattrapera. Que vous le vouliez ou non, vous êtes en train de créer une sous-catégorie recrutée sur la base de l’échec scolaire.

Quant à affirmer, monsieur le ministre de l’éducation nationale, que ces apprentis ne sortent pas du système scolaire, c’est un conte de fées que vous nous racontez ! Une histoire à dormir debout ! Un enfant mis en apprentissage parce qu’il était en échec scolaire pourrait retourner d’où il vient ! Ça ne tient pas debout et c’est la raison pour laquelle nous vous demandons de renoncer à l’article 1er.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements de suppression de l’article 1er ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Quelques mots d’abord de l’étude du CEREQ,évoquée par M. Vidalies. Notre système éducatif laisse une faible part à l’alternance et, au-delà de nos sensibilités politiques, nous nous sommes efforcés de lui accorder une meilleure place. (« À l’alternance ! Pas à la formule que vous nous proposez ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Aujourd’hui, dans l’enseignement général, 80 % d’une tranche d’âge prépare des diplômes niveau baccalauréat et plus, contre 40 % seulement dans la filière d’apprentissage, soit deux fois moins. Du fait de la coupure entre les deux, la filière d’apprentissage mène aujourd’hui moins loin sur la voie de la qualification que la filière générale. Or, dans toutes les économies développées, la qualification est la meilleure protection contre le chômage. Le CEREQ ne peut qu’en conclure que les apprentis sont moins bien protégés.

À ce constat, il y a deux réactions possibles : soit maintenir la cloison, soit tenter de l’abattre. L’apprentissage junior prolonge seulement une série de réformes qui visent à développer l’apprentissage à tous les niveaux de diplôme, conformément à l’objectif du plan de cohésion sociale. Celui-ci se concrétise dans les conventions pour le développement de l’apprentissage passées en 2005 avec chaque région pour le développement de l’apprentissage. L’État a consacré 250 millions d’euros venant du Fonds national de modernisation et de développement pour développer les formations en apprentissage de niveau 4, 3, 2, 1, c’est-à-dire bac, bac + 1, bac + 2, bac + 3 et bac + 5. Mais cet effort ne suffira pas.

Il faudra aussi prévenir la rupture des contrats d’apprentissage et mettre ainsi fin à une autre particularité française. Le taux de rupture est beaucoup plus élevé que dans les autres pays européens qui ont une tradition d’alternance, à commencer par l’Allemagne où il est de 7 à 8 %, contre 20 à 25 % chez nous. La seule solution consiste à faire découvrir les métiers et à préparer l’entrée en apprentissage le plus tôt possible, quand l’orientation vers la voie professionnelle se profile. C’est l’intérêt du système d’apprentissage junior, qui propose, en amont de la signature du contrat, une phase de découverte des métiers et qui permet ensuite à l’équipe pédagogique de continuer à suivre l’apprenti au cours de la première année. Plus des deux tiers des régions – on ne les y a pas forcées – ont d’ailleurs souhaité réserver une partie des fonds d’État au développement d’initiatives de préparation à l’apprentissage et de préapprentissage.

L’essentiel est d’abord de favoriser le suivi pédagogique le plus long possible. À cet égard, l’apprentissage junior apporte une réelle amélioration. Aujourd’hui, la classe préparatoire à l’apprentissage – CPA – ou la classe d’initiation préprofessionnelle par apprentissage – CLIPPA – s’arrêtent à la conclusion du contrat d’apprentissage, nous le savons tous. L’apprentissage junior permettra un suivi par l’équipe pédagogique au moins la première année. Le tutorat doit ensuite pouvoir prendre le relais. C’est ce que la commission proposera dans un amendement.

Autre aspect fondamental de la question : nous continuons à centrer l’apprentissage sur les diplômes – c’est le cas aujourd’hui de 90 % des titres délivrés dans ce cadre – de façon à permettre des allées et venues avec la voie générale.

Tels sont les principaux enseignements de l’étude du CEREQ, que j’ai lue, moi aussi, avec attention et qui m’a fait beaucoup réfléchir. Comme de nombreux présidents de région,...

M. Henri Emmanuelli. Ne parlez pas à leur place !

M. Laurent Hénart, rapporteur. ...j’en ai conclu que l’apprentissage devait non seulement être étendu à des métiers qui n’y recourent pas et sanctionné par des diplômes bac et plus, mais aussi faire l’objet d’une préparation construite avec des moyens appropriés.

M. Henri Emmanuelli. Ce n’est pas le sujet !

M. Laurent Hénart, rapporteur. C’est la raison pour laquelle la commission a adopté, moyennant quelques amendements, le dispositif de l’article 1er et repoussé les amendements de suppression.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je voudrais rassurer les orateurs, en particulier M. Emmanuelli. S’il a des doutes sur la réversibilité et sur l’acquisition du socle commun de connaissances,...

M. Henri Emmanuelli. Mon intervention était claire !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. ...il ne doit pas en avoir sur la loi républicaine. Qu’il lui suffise de relire le texte, qui prévoit noir sur blanc que le contrat d’apprentissage peut être rompu jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire et que le jeune peut reprendre sa scolarité au collège ! Je vous renvoie à l’alinéa 4 de l’article 1er.

M. Christian Paul. C’est une fiction !

M. Henri Emmanuelli. Une pure fiction !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Peut-être n’y croyez-vous pas, mais ce sera la loi républicaine.

Quant au socle commun de connaissances, il fait l’objet des alinéas 5 et 7, qui disposent respectivement que l’ensemble des activités de l’apprenti junior « concourt à l’acquisition du socle commun de connaissances et de compétences mentionné à l’article L. 122-1-1 » et que l’apprenti junior « peut signer un contrat d’apprentissage à la condition qu’il soit jugé apte à poursuivre l’acquisition, par la voie de l’apprentissage, du socle commun de connaissances et de compétences mentionné » au même article.

Je ne peux pas vous donner meilleure garantie qu’un texte de loi.

M. Henri Emmanuelli. La loi n’a pas le pouvoir de transformer la fiction en réalité !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Avis défavorable aux amendements.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. À plusieurs reprises a été évoqué le décret du 13 janvier qui encadre les dérogations à l’interdiction du travail de nuit des apprentis. Pendant trente ans, elles ont fait l’objet de circulaires que la Cour de cassation a jugées illégales en janvier dernier. Les dérogations prévues sont claires, restrictives, et conformes à nos engagements.

Ainsi, dans l’hôtellerie et la restauration, le travail de nuit était autorisé sans être soumis à aucune contrainte horaire. Désormais, la limite est vingt-trois heures trente et la présence effective du maître d’apprentissage est requise. (« Heureusement ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Henri Emmanuelli. Encore heureux qu’on ne laisse pas le gamin tout seul !

M. Christian Paul. Quelle grande conquête sociale, vraiment !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Par ailleurs, à quinze ans, lorsqu’il a achevé le premier cycle de l’enseignement secondaire, le jeune peut signer un contrat d’apprentissage. Mais, en tant que mineur, il n’est pas un salarié comme les autres. Aux termes du code du travail, il bénéficie de protections renforcées, ce qui est normal : interdiction de manipuler des machines dangereuses, d’effectuer des tâches pénibles. D’ailleurs, dans le cadre du comité de pilotage conjoint entre les deux ministères, un groupe de travail continuera à travailler sur la pénibilité, les horaires, le contrôle par l’inspection de l’apprentissage, afin de clarifier encore les conditions de travail.

Enfin, au moment de l’initiation à la découverte des métiers, l’apprenti junior de quatorze ou quinze ans sera soumis à l’article L. 211-1 du code du travail. Il ne faut pas laisser croire que rien ne serait fait pour protéger les jeunes de quatorze ans !

Mme Valérie Pecresse. Bravo !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Les mesures de protection prévues au livre II en faveur des moins de seize ans qui font des parcours professionnels tout en suivant une filière d’enseignement général seront applicables.

Le ministère de l’éducation nationale et le ministère du travail se préoccupent donc bien de la protection des jeunes et de leur accompagnement par le maître de stage. Sa présence effective est requise et il assure un véritable tutorat. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Voisin.

M. Gérard Voisin. Au moment des rappels au règlement, vous m’avez coupé la parole, monsieur le président, et je l’ai admis, mais je voudrais maintenant m’exprimer contre les amendements.

Tout à l’heure, l’ambiance était plus chaude. Les ministres et le rapporteur ont calmé les esprits avec beaucoup d’intelligence.

M. Christian Paul. Mais sans convaincre !

M. Gérard Voisin. S’il n’y en a qu’un, je serai celui-là, disais-je. Je pense en effet que les socialistes et les communistes ont un discours de nantis intellectuels. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Moi qui suis bac-2 ou bac-3, je n’en suis ni fier ni heureux. Je n’en suis pas malheureux non plus. J’ai été garagiste, j’ai monté des pneus et lavé des voitures... Je suis un des rares ici à pouvoir faire du Zola. Il n’empêche ! J’ai été conseiller général pendant vingt et un ans, maire aussi longtemps ; aujourd’hui, je suis député. Je suis un père, un grand-père heureux.

M. Henri Emmanuelli. Quel homme !

M. Jean-Claude Mignon. Un peu de respect !

M. Guy Geoffroy. Et de décence !

M. Gérard Voisin. M. Emmanuelli ne respecte pas grand monde.

M. le président. Monsieur Voisin, poursuivez. Vous avez seul la parole.

M. Gérard Voisin. Vous faites bien peu de cas, monsieur Emmanuelli, de l’intelligence naturelle, ordinaire,...

M. Henri Emmanuelli. Qu’est-ce que c’est, l’intelligence « naturelle » ?

M. Jean Leonetti. C’est celle qui ne s’apprend pas dans les livres !

M. Gérard Voisin. ...et de ce que peut offrir l’apprentissage.

Ce matin, j’entendais l’un de vous – je crois bien que c’était vous, monsieur Emmanuelli – demander lequel d’entre nous souhaiterait que son enfant soit en apprentissage.

M. Guy Geoffroy. Ma fille a fait de l’apprentissage !

M. Gérard Voisin. Eh bien, moi ! Mon fils m’a succédé et il en est heureux.

M. Henri Emmanuelli. Évidemment, c’est le fils du patron !

M. Gérard Voisin. Vous fabriquez des malheureux pour satisfaire votre ego de gens instruits.

M. Jean-Pierre Blazy. Heureusement que les débats étaient « apaisés » !

M. Henri Emmanuelli. Attention ! Ça va déraper à nouveau !

M. Gérard Voisin. Vous devriez libérer vos esprits pour nous laisser libérer l’apprentissage. Oui, nous pouvons vous présenter des apprentis heureux ! Et des cols bleus qui valent bien vos cols blancs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marie Geveaux. Le bonheur est dans l’apprentissage !

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Anciaux.

M. Jean-Paul Anciaux. Il y a une évidence qui échappe à nos collègues socialistes qui sont nombreux à critiquer l’apprentissage.

M. Christian Paul. Supprimons les lycées en Bourgogne !

M. Jean-Paul Anciaux. Si, aujourd’hui, nous voulons faire avancer ce dossier, c’est que la filière de formation professionnelle par alternance, qui aurait dû mêler enseignement scolaire et apprentissage, n’a pas pu, depuis quinze ou vingt ans, être mise en œuvre.

Vous, les socialistes, avez une part non négligeable de responsabilité en la matière. La solution, c’était cette filière de formation en alternance, prenant en compte à la fois la formation par l’apprentissage et celle donnée par les lycées professionnels. Qu’observe-t-on aujourd’hui concrètement ? Les élèves sont orientés vers les filières techniques et technologiques, qui restent les filières de l’échec aux yeux d’un grand nombre de professionnels de l’orientation. De plus, en province, c’est une concurrence exacerbée que livre l’éducation nationale aux CFA pour maintenir quelques postes dans quelques lycées offrant des demi-filières. Enfin, les conseils régionaux, que vous dirigez, commencent à prendre conscience qu’il leur faut souvent payer deux fois : une demi-filière de formation professionnelle dans un lycée et un quart de filière dans un CFA voisin. Oui, vous portez la responsabilité de tout cela !

Aujourd’hui, une avancée est proposée : elle consiste à faire émerger une vraie filière de l’alternance, si deux conditions sont remplies en amont. Il sera tout d’abord nécessaire de l’évaluer, parce qu’il ne s’agit pas de faire n’importe quoi n’importe comment. Ne faisons pas passer ce message aux jeunes, aux enseignants et à nos concitoyens ! Ensuite, il faudra la considérer comme une orientation à part entière pour les jeunes. Le ministre l’a affirmé : le retour est possible.

M. Jean-Pierre Blazy. C’est un leurre !

M. François Brottes. Ou une fiction !

M. Jean-Paul Anciaux. Jamais vous n’avez imaginé ce retour dans l’éducation nationale comme possible. Vous dites ne pas y croire : mais pourquoi ? Parce que vous refusez de faire, auprès des enseignants, des familles et des jeunes, la promotion de la possibilité de réintégrer l’éducation nationale. Cela vous ennuie, cela vous amuse, cela vous fait rire !

M. Christian Paul. Non, cela nous fait pleurer !

M. Jean-Paul Anciaux. Un jeune a le droit de « s’essayer » sur une filière professionnelle par l’apprentissage, puis de réintégrer l’éducation nationale.

Telle est la réalité de ce projet : sur la question de l’apprentissage, il ne représente ni la panacée, ni le remède miracle, ni la solution unique. Ce qu’il propose, c’est une solution courageuse. Vous n’avez pas su prendre les dispositions nécessaires. Nous les prenons aujourd’hui. Vous essayez de mettre les jeunes dans la rue : croyez-moi, il suffit de leur parler pour se rendre compte qu’ils font plus confiance à ce que nous leur expliquons qu’à ce que vous leur racontez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Le groupe UDF n’est pas opposé à l’apprentissage junior dès l’âge de quatorze ans. Il votera évidemment contre l’ensemble des amendements présentés par le groupe socialiste et le groupe communiste, visant à supprimer cet article.

Néanmoins, il met comme condition de son accord le respect d’un certain nombre de garanties au profit des jeunes qui auront choisi la filière par alternance : un vrai stage d’apprentissage en entreprise avec un tutorat et la possibilité d’un retour au sein de l’éducation nationale, afin de permettre qu’en cas d’échec ou de simple changement d’avis, le jeune puisse retrouver une scolarité classique.

Mais il faut, tout d’abord, non pas tant revaloriser l’apprentissage que ne pas le dévaloriser !

M. Henri Emmanuelli. Cela va être dur !

M. Francis Vercamer. Depuis tout à l’heure, nos débats peuvent en effet donner l’impression du contraire, car ils évoquent l’apprentissage comme une filière dévalorisante.

Telle est la raison pour laquelle je regrette que l’apprentissage junior apparaisse dans le texte sur l’égalité des chances. Je n’ai rien contre l’égalité des chances : comme je l’ai rappelé dès le début de l’examen du projet de loi, c’est un rêve ou une ambition de la République qu’il faut saluer ! Mais ce texte a été présenté comme une réponse aux violences urbaines, ce qui est stigmatisant pour lui, et donc pour les dispositifs qu’il prévoit, comme l’apprentissage à quatorze ans.

M. Christian Paul. Erreur funeste !

M. Francis Vercamer. Je le regrette. Néanmoins, je le répète, le groupe UDF votera tout naturellement contre les amendements de suppression.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote l’ensemble des amendements de suppression.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 226.

La parole est à M. François Brottes, pour le soutenir.

M. François Brottes. Le débat, et cet amendement le montre bien, ce n’est pas : est-on pour ou contre l’apprentissage, mais : est-on pour ou contre la fin de la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans.

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n’est pas pareil !

M. François Brottes. C’est bien de cela qu’il s’agit.

Puisque vous n’avez pas souhaité supprimer l’article – ce que nous pouvons comprendre au demeurant –, cet amendement vise, en substituant au nombre : « quatorze », le nombre : « seize », à vous convaincre de ne pas renoncer à la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans.

Il ne faut pas stigmatiser les jeunes, quels qu’ils soient, en les sortant prématurément du système scolaire, ni non plus l’entreprise, en laissant croire qu’elle peut se satisfaire de jeunes qui ne sont pas encore formés. Ne donnons pas davantage aux jeunes l’illusion d’une liberté de sortie de l’école et n’exonérons pas le service public de l’éducation nationale de ses missions d’éducation de chacun. L’école publique doit rester l’école de l’égalité des chances jusqu’à seize au moins.

Je souhaite, à propos de l’apprenti junior, évoquer devant vous un scénario qui n’est pas encore écrit : Junior, le Retour.

Vous affirmez, messieurs les ministres, que le texte rend possible ce retour. Soit ! Mais comment rattraper le retard scolaire ?

M. Christian Paul. Grand silence !

M. Henri Emmanuelli. C’est le miracle de Robien !

M. François Brottes. Comment analyser l’échec de l’apprenti avec l’entreprise et les enseignants ?

M. Christian Paul. Grand silence !

M. François Brottes. Quel sera le suivi de ce jeune, de retour au collège, montré du doigt par ses camarades en raison de sa fausse sortie du système scolaire ?

M. Christian Paul. Grand silence !

M. François Brottes. Comment le jeune se remettra-t-il de cette expérience ?

Mme Catherine Génisson. Le projet de loi ne le dit pas !

M. François Brottes. Comment cet échec ne porterait-il pas aussi préjudice à la réputation des entreprises et des entrepreneurs qui n’auront pas su, compte tenu de la situation dans laquelle vous les aurez mis,…

M. Jean-Pierre Blazy. Ou pas pu !

M. François Brottes. …ou pas pu, en effet, permettre au jeune d’accomplir son rêve d’apprentissage ?

Ce sont là de véritables questions auxquelles, malheureusement, monsieur le rapporteur, vous n’avez pas répondu. Vous avez évoqué le rapport du CEREQ. Je n’en citerai qu’une phrase, car elle résume à elle seule les réponses que j’attends de vous, mais peut-être m’en donnerez-vous d’autres : « La poursuite des études par la voie scolaire protège toujours mieux du chômage qu’une orientation précoce vers un centre de formation d’apprentis. » Beaucoup ont réfléchi à la question ; votre approche est strictement idéologique. Je crains que Junior, le Retour ne soit un scénario catastrophe !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Par cohérence, la commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Même avis pour la même raison.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 226.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 429.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

M. Francis Vercamer. Le texte de cet amendement se justifie par lui-même : il vise en effet à préciser qu’il faut avoir quatorze ans révolus à la rentrée scolaire pour pouvoir bénéficier d’un apprentissage junior, afin d’éviter l’entrée dans cette filière avant quatorze ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Défavorable. Il s’agit d’une mesure touchant à l’organisation scolaire ; elle est donc de nature réglementaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je demande à M. Vercamer de bien vouloir retirer son amendement pour la raison donnée par la commission.

De plus, si l’intention de cet amendement est tout à fait louable, il faut préserver une certaine souplesse.

M. François Brottes. Bientôt l’apprentissage à treize ans et demi ?

M. Francis Vercamer. Je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 429 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 227.

M. Christian Paul. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 227.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 4.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Laurent Hénart, rapporteur. Cet amendement, qui récrit l’alinéa 3 de l’article 1er précise qu’une fois l’admission effectuée, un projet pédagogique personnalisé est établi et que l’équipe pédagogique peut désigner en son sein un tuteur chargé du suivi de l’élève. Ce tuteur n’a rien à voir avec le maître de stage ou, dans un second temps, le maître d’apprentissage : il s’agit bien d’une personne appartenant à l’équipe pédagogique et chargée d’un suivi personnalisé sur les plans pédagogique, familial et social.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je suis d’autant plus favorable à l’amendement que ce tuteur, qui n’est pas le tuteur professionnel, pourra également s’assurer de la bonne transmission du socle commun de connaissances.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Je vous avais interpellé à ce sujet sans obtenir de réponse. Je souhaiterais sous-amender cette disposition en précisant que l’équipe pédagogique « désigne », et non pas « peut désigner », un tuteur. Un retour au système scolaire ne sera en effet possible – du moins le prétendez-vous – que grâce à un tutorat réel et donc obligatoire. La simple possibilité, et non l’obligation, du tutorat rendrait encore plus aléatoire le retour du pseudo-apprenti junior, lequel se verrait condamné à une orientation négative, à une sortie précoce du système scolaire et à la confirmation de son échec.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Hénart, rapporteur. La remarque de M. Blazy me paraît fondée : le caractère systématique du tutorat permettra en effet de garantir la transmission du socle de connaissances et le respect des règles pédagogiques du code de l’éducation que nous avons préalablement étudiées. Je suis donc favorable à cette proposition, qui vise à remplacer, dans l’amendement, les mots : « peut désigner » par les mots : « désigne ».

M. le président. La proposition de M. Blazy devient donc le sous-amendement n° 576.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Je souhaite aussi que M. le ministre nous précise comment ce tutorat pourra s’exercer, c’est-à-dire, en termes concrets, qui sera désigné au sein de l’équipe pédagogique. Est-ce que ce sera nécessairement un enseignant ?

Un député du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Une circulaire le précisera !

M. Henri Emmanuelli. Quelle circulaire ?

M. Jean-Pierre Blazy. Telle est l’inquiétude que j’exprimais dans ma précédente intervention. Puisque nous restons dans le cadre de l’obligation scolaire, il ne peut en effet s’agir que d’un enseignant. C’est une question importante, qui conditionne la possibilité d’un retour effectif au système scolaire, que vous ne cessez d’évoquer et sur lequel, quant à nous, nous émettons des doutes sérieux.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Hénart, rapporteur. Je tiens à préciser l’esprit dans lequel j’ai présenté l’amendement n° 4. J’ai souhaité m’inspirer des différentes initiatives de préapprentissage, qui concernent aussi bien l’éducation nationale que des centres de formation d’apprentis – mais ces derniers sont, de toute façon, habilités et évalués par elle. Dans les cas dont j’ai pu avoir connaissance, pour la formation théorique, l’équipe de formateurs désigne en son sein un tuteur : il sera, dans mon esprit, pour les deux années que durera le parcours de l’apprentissage junior, le référent pédagogique chargé de la mise en œuvre et du suivi du projet. C’est ce qui se pratique déjà au sein de l’équipe pédagogique, lorsqu’elle désigne un professeur plus particulièrement chargé du suivi d’un élève. Il s’agit donc bien d’une personne issue de l’équipe de formation, prise parmi celles qui professent des enseignements à l’apprenti junior, et, dans un deuxième temps, à l’apprenti éventuel.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je propose de préciser dans le texte réglementaire non seulement que le tuteur sera issu de l’équipe pédagogique, mais qu’il aura en outre des missions de coordination de la formation. Il assurera le suivi de l’apprenti junior par le biais d’entretiens réguliers. Il sera chargé de la gestion des relations entre le collège de référence et les entreprises d’accueil. Il lui reviendra aussi de détecter les problèmes, pédagogiques ou sociaux, que peut rencontrer l’apprenti junior, en vue de les résoudre lui-même ou avec l’ensemble de l’équipe pédagogique.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 576, lequel vise, je le rappelle, à substituer le mot : « désigne », aux mots : « peut désigner ».

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4, modifié par le sous-amendement n° 576.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 407 tombe.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 228.

M. Christian Paul. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 72 et 180.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n° 180.

M. Francis Vercamer. Cet amendement propose que le retour dans le circuit scolaire classique soit possible « à l’issue de chaque période de formation prévue dans le projet pédagogique ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 72 et 180.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 5 et 430.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Hénart, rapporteur. Je laisse le soin à M. Vercamer de défendre l’amendement n° 5, que la commission a adopté à son initiative.

M. le président. Je vous en prie, monsieur Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement paraît anodin puisqu’il tend simplement à insèrer, après le mot : « collège », les mots : « , y compris leur collège d’origine, ».

Dans le texte initial, on peut seulement lire : « un collège » ; je pense que cela peut rebuter un jeune, qui risquerait alors de renoncer à la filière d’alternance par crainte de ne pouvoir revenir dans son collège d’origine et de perdre alors tous ses repères.

Il me paraît donc important de préciser que ce retour peut se réaliser dans le collège d’origine. De plus, cette disposition permettra d’éviter que l’alternance ne soit une filière d’échec puisqu’on ne pourra pas engager le jeune dans cette voie avec l’intention de l’écarter définitivement de son collège.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le Gouvernement, très ouvert à cette proposition, se prononce favorablement.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 5 et 430.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 405.

La parole est à M. Christian Paul, pour le soutenir.

M. Christian Paul. La question du tutorat vient d’être très partiellement abordée par M. de Robien. Nous déplorons, une fois encore, la probable adoption de l’article 1er par la majorité, mais n’en souhaitons pas moins poser de très sérieux garde-fous.

Nous demandons qu’on précise bien que ce tutorat n’a pas seulement une fonction d’intermédiaire entre le jeune parti en entreprise et son établissement d’origine. À nos yeux – et c’est le sens de cet amendement –, le tutorat doit consister en un accompagnement personnalisé et individualisé, garantissant notamment la continuité de l’acquisition réelle des connaissances de base.

Nous attendons donc, monsieur le ministre, non des réponses précises, mais simplement des indications sur les moyens que vous entendez affecter à ces tutorats dès la première année d’application de la loi. Autrement dit, quels sont les moyens dont les collèges bénéficieront, notamment en personnel ? Ces moyens ont-ils été évalués, même grossièrement, et quelle suite donnerez-vous dans les débats budgétaires au vote de cette loi ?

Cette question – j’y insiste – me paraît totalement légitime et aurait d’ailleurs dû être soulevée par M. le rapporteur ou par la majorité qui va voter, contrairement à nous, cet article 1er. Nous posons donc la question des moyens que vous entendez engager, puisque vous ne faites pas vous-même.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Il me semble que l’amendement n° 4 de la commission, sous-amendé par M. Blazy, répond aux préoccupations exprimées par l’amendement de M. Paul. La commission l’a donc repoussé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Avis défavorable, à moins que l’amendement ne soit retiré.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 405.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 409.

M. Alain Vidalies. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Elle a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 409.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 410.

M. Gaëtan Gorce. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 410.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 411.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Par souci de concision, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 412 et 413, ainsi que l’amendement n° 404, qui sera appelé ensuite.

On sait que les stages participent à l’insertion professionnelle des jeunes. Ils doivent donc être pris en compte dans l’ancienneté professionnelle. De même, la période d’essai doit incorporer la durée du stage lorsque le jeune, après l’âge de seize ans, intègre l’entreprise. Tel est l’objet de ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 411, 412 et 413 ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Nous souhaitons que la mission mise en place par le Premier ministre pour que les partenaires sociaux définissent une position sur l’ensemble de ces questions – ancienneté, bonnes pratiques – ait le temps d’aboutir. La commission émet donc, en attendant, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Avis identique.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 411.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux vois l’amendement n° 412.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 413.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 408.

M. Gaëtan Gorce. Défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Rejet !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 408.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 230.

M. Christian Paul. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Quand cet amendement a été présenté en commission, comme nous n’avions pas eu le temps d’en vérifier l’impact fiscal et social, il a été rejeté. Je m’étais toutefois engagé à l’étudier plus avant, ce qui a été fait avec le concours des services de la commission.

Il apparaît ainsi que cet amendement ne présente aucune difficulté. Bien au contraire, il améliore la situation du stagiaire. À titre personnel, je vous fais donc part de mon penchant extrêmement favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 404 a été défendu.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je le mets aux voix.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 428.

La parole est à M. Christian Paul, pour le soutenir.

M. Christian Paul. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, la situation à laquelle tend à remédier cet amendement revêt à nos yeux un caractère très grave, gravité qu’accentue votre absence d’informations sur la réalité des moyens que vous entendez attribuer au tutorat.

De quoi s’agit-il ? Aujourd’hui, des chefs d’établissement et des enseignants sont pénalement condamnés à la suite d’accidents dont sont victimes les jeunes effectuant des stages en entreprise. Ces enseignants, monsieur de Robien, sont, au fond, les tuteurs dont vous parlez. Comment, dès lors, ces tuteurs vont-ils pouvoir visiter les entreprises, effectuer les contrôles de sécurité, s’ils ne disposent pas des moyens nécessaires, c’est-à-dire de moyens massifs ?

Comme vous ne nous donnez aucune assurance en la matière et comme nous sommes confrontés, dans l’enseignement agricole aussi bien que dans l’enseignement général, à des cas concrets – plusieurs condamnations ont déjà été prononcées, je tiens la jurisprudence à votre disposition –, nous proposons, par cet amendement, de préciser l’obligation qui incombe au chef d’établissement et aux enseignants. Nous souhaitons que l’obligation particulière de prudence et de sécurité qui incombe au chef de l’établissement de formation et à l’enseignant tuteur, soit « appréciée dans la mesure des moyens qui lui sont affectés ».

Cette disposition permettrait de résoudre un problème très grave que serait loin de régler le vote de la loi sur l’apprentissage à quatorze ans. En effet, si des enfants de quatorze ou quinze ans vont en préapprentissage et en apprentissage dans des entreprises où les conditions de sécurité ne sont pas réunies, les chefs d’établissement et tuteurs ne pourront pas réellement vérifier les conditions de travail de ces jeunes. Il y aura donc des accidents, malgré les contrôles de l’inspection du travail. C’est pourquoi nous voulons alléger la responsabilité de fonctionnaires qui dépendent de vous mais auxquels nous craignons que vous ne donniez pas les moyens nécessaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Rejet !

M. Christian Paul. C’est un peu court, monsieur le rapporteur !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je serai presque aussi bref : on ne peut pas modifier le régime de responsabilité au détour d’un amendement ; ce n’est vraiment pas possible.

M. Christian Paul. Pourquoi ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Quant à préciser dans la loi que la responsabilité est appréciée en fonction des moyens fournis, laissons tout de même les tribunaux apprécier...

M. Christian Paul. Mais des condamnations ont été prononcées !

M. le président. La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Monsieur le ministre, il ne s’agit pas d’un sujet léger ou platonique qu’on peut évacuer d’un revers de main, comme vient de le faire M. le rapporteur. Il s’agit, j’y insiste, d’une question très grave. Des fonctionnaires qui relèvent de l’autorité de l’État ont été condamnés par les tribunaux parce qu’ils n’avaient pas les moyens d’assurer la sécurité de jeunes stagiaires en entreprise. Cela peut vous laisser totalement indifférent…

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ne soyez pas méchant !

M. Christian Paul. …mais ne peut nous laisser, nous, silencieux. Vous auriez dit à l’instant que, dans un délai bref, vous créeriez par tous les moyens à votre disposition, par une circulaire ou par la loi, aux juristes de décider, les conditions juridiques permettant d’alléger la responsabilité des chefs d’établissement et des tuteurs, je retirerais cet amendement. Mais comme vous ne le faites pas, je le maintiens.

M. Jean Leonetti. Quelle fougue !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Maintenez-le si vous voulez, c’est votre droit. Seulement, ne dites pas que la question me laisse indifférent, car ce n’est pas le cas !

M. Jean Leonetti. Très bien !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Je suis responsable de l’éducation nationale et, croyez-moi, chacun doit assumer ses responsabilités. J’assume les miennes. Je prends donc très mal votre remarque.

Il reste que vous avez probablement raison…

M. Christian Paul. Mais quelle réponse apportez-vous concrètement ?

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Laissez-moi terminer. Si la question mérite une étude, nous allons la lancer. Je ne peux pas vous en dire davantage aujourd’hui.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Nous connaissons tous la situation et vos services s’en sont saisis. On compte aujourd’hui, je crois, trois condamnations pénales de proviseurs, notamment de lycées d’enseignement agricole, qui avaient signé des conventions de stage pour des jeunes devant travailler dans des fermes et qui, utilisant du matériel agricole, se sont blessés. Ces proviseurs, n’étant ni techniciens ni inspecteurs du travail, ont argué ne pas être en mesure de savoir si, par exemple, le tracteur de l’agriculteur présente toutes les conditions de sécurité. Mais les tribunaux ont fait valoir qu’ils n’étaient pas compétents pour changer la loi et ont renvoyé au législateur, tout en constatant que les textes en vigueur ne pouvaient les conduire qu’à prononcer des condamnations.

Le résultat est que les chefs d’établissement ne veulent plus signer de conventions de stage, ce qui compromet votre projet. Vous êtes aujourd’hui saisi de ce dossier, monsieur le ministre. Plusieurs questions écrites vous ont même été adressées à ce sujet. J’ai moi-même un problème de cette nature dans mon département. Cet amendement vous donnait l’occasion de préciser votre position sur ce problème, qui concerne toute la représentation nationale.

M. Christian Paul. C’est une question d’intérêt général !

M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. J’ai déjà répondu à M. Paul.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 428.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 39.

La parole est à M. Patrick Braouezec, pour le soutenir.

M. Patrick Braouezec. Je m’exprime dans le même état d’esprit puisque cet amendement vise à apporter quelques garanties pour la protection des apprentis juniors, autrement dit à rendre moins mauvais ce dispositif, qui demeure inacceptable.

À l’instar de ce qui existe dans la maigre réglementation des stages pour les élèves du secondaire, nous proposons une déclaration préalable à l’inspection du travail sur les conditions de déroulement de l’apprentissage junior. Nous souhaitons en effet que l’employeur communique un certain nombre d’informations à l’inspection du travail.

L’employeur serait donc tenu d’adresser une déclaration préalable d’engagement d’un apprenti junior à l’inspection du travail, laquelle disposerait de huit jours pour s’y opposer. Cette déclaration comporterait des informations relatives à la durée du travail et de la formation, aux conditions de travail et aux objets devant être manipulés au cours de la formation. Elle comporterait également le nom et la qualification du tuteur, et enfin des documents attestant que l’employeur est à jour du versement de ses cotisations et contributions sociales.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Le dispositif proposé est moins protecteur que celui prévu par l’article L. 117-5 du code du travail actuellement en vigueur. Dans un souci de protection de l’apprenti, la commission a donc repoussé l’amendement.

M. Maurice Giro. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. J’ai déjà évoqué les protections existantes à propos des stages, L’application des dispositions de l’article L. 117-5 du code du travail, que le rapporteur vient de rappeler, assure que l’équipement de l’entreprise, les techniques utilisées, les conditions de travail, d’hygiène et de sécurité sont de nature à permettre la formation d’apprentis dans des conditions satisfaisantes. À ces protections s’ajoutent les dispositions de l’article L. 212-13 du code du travail et le repos quotidien prévu par l’article L. 213-9. J’ai déjà évoqué les garanties concernant le travail de nuit et d’autres garanties concernant notamment l’utilisation des machines et matériels de production font l’objet des articles L. 234-1, L. 234-2 et L. 234-3.

Le code du travail prévoit donc toutes les protections nécessaires. C’est pourquoi le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 147.

M. Gaëtan Gorce. Cet amendement est défendu, ainsi que les suivants, jusqu’à l’amendement n° 220.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. La commission les a repoussés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Même avis.

M. le président. Je mets d’abord aux voix l'amendement n° 147.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Les amendements nos 148 à 153, 406, 229, 218, 200 et 220 sont également défendus et font l’objet d’avis défavorables de la commission et du Gouvernement.

Je vais les mettre aux voix successivement.

(Ces amendements, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 71, 179 et 221.

La parole est à M. Alain Joyandet, pour soutenir l’amendement n° 71.

M. Alain Joyandet. C’est à la demande de ses auteurs que je défendrai cet amendement n° 71, qui vise, à propos de la période initiale de l’apprentissage junior, à permettre aux jeunes d’accéder dans de meilleures conditions au dispositif de formation par l’apprentissage, pour y acquérir une qualification sanctionnée par un titre ou un diplôme.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Je suggère à M. Joyandet de retirer cet amendement, satisfait par le deuxième alinéa de l’article 1er, qui a le même objet.

M. Alain Joyandet. Je le retire.

M. le président. L’amendement n° 71 est retiré, de même que l’amendement n° 179.

L’amendement n° 221 est-il maintenu ?

M. Christian Paul. Il est également retiré.

M. le président. L’amendement n° 221 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 435.

M. Christian Paul. Il est défendu, de même que les amendements nos 436, 437 et 438.

M. le président. Les amendements nos 435, 436, 437 et 438 reçoivent un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

Je vais les mettre aux voix successivement.

(Ces amendements, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 439.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Est-il raisonnable en 2006, monsieur le ministre du travail, de modifier la législation pour permettre, dans certaines professions, le travail de nuit des jeunes de moins de seize ans ? Vous l’avez autorisé par dérogation pour les moins de dix-huit ans. La question est donc de savoir quelles dispositions vont s’appliquer aux jeunes de quinze à seize ans, qui pourront désormais signer des contrats d’apprentissage. Les textes étant muets à cet égard, il devrait au moins être clair qu’il est inacceptable de faire travailler de nuit, dans les conditions du décret que vous venez de prendre, les apprentis de quinze à seize ans. Une telle dérogation, qui ne répond à aucune exigence économique, serait en effet une régression et poserait en outre un problème de sécurité.

Il convient de combler cette grave lacune du texte. C’est l’objet de notre amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. La commission a estimé que le droit du travail des mineurs s’appliquait, y compris dans la période de quinze à seize ans, et qu’il était suffisamment protecteur, compte tenu par ailleurs du fait que le contrat d’apprentissage a pour objet une certaine immersion professionnelle. Elle a donc repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Vidalies le sait mieux que moi, jusqu’en janvier 2005, ce sont les articles 117 bis-1 et suivants du chapitre VII bis du code du travail qui s’appliquaient. Les dispositifs qui ont été mis en place depuis par décret sont plus protecteurs. Je suis d’ailleurs étonné que, durant tant d’années, vous ne vous soyez pas préoccupés de ce sujet. (Approbations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Henri Emmanuelli et M. Alain Vidalies. Ce n’est pas vrai !

M. le président. La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Monsieur le ministre et monsieur le rapporteur, vos voix s’unissent pour affirmer que le droit d’aujourd’hui est assez protecteur. Le décret du 13 janvier 2006, signé par MM. de Villepin, Borloo, Bussereau et par vous-même, décret qui figure aujourd’hui dans le droit positif, supprime l’interdiction de travail de nuit des jeunes travailleurs et des apprentis de moins de dix-huit ans. On peut donc aujourd’hui travailler la nuit à moins de dix-huit ans dans de nombreux secteurs, comme, parmi beaucoup d’autres, celui des courses hippiques, dont on mesure bien l’importance.

M. Alain Vidalies. On se demande d’où ça vient ! (Sourires.)

M. Christian Paul. Vous réintroduisez le travail de nuit pour des enfants de quinze ans : ce sera l’un des principaux bénéfices de cette loi pour les jeunes Français !

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Il faut que les choses soient claires. Je peux me tromper et, à vrai dire, je préférerais me tromper. J’interroge de nouveau M. le ministre, qui nous citait tout à l’heure un article – lequel d’ailleurs ne me semblait pas pertinent – et nous renvoie maintenant aux dispositions générales. Mais sans doute le ministre et ses services sont-ils plus compétents que nous dans ce domaine…

La question est simple : les dérogations que vous avez accordées pour les moins de dix-huit ans s’appliqueront-elles entre quinze et seize ans ?

Le rapporteur a refusé notre amendement et nous a fait savoir qu’il acceptait le travail de nuit des apprentis de quinze à seize ans dans le cadre de ces dérogations. Nous nous opposons de front à cette position. Que le Gouvernement prenne position à son tour, sans nous renvoyer à des articles qui n’ont aucun rapport avec la question.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je tiens à rappeler que l’apprentissage à quinze ans par voie de dérogation existait déjà, que les dispositifs prévus par le code du travail s’appliquaient à ces jeunes de quinze à seize ans et que le décret n’a introduit aucune profession nouvelle – à l’exception, je le reconnais volontiers, des courses hippiques, où les nocturnes sont une réalité bien connue. Le décret s’est limité à mieux encadrer, et donc à mieux protéger.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Vous ne répondez pas à la question !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Hénart, rapporteur. Avant que le Parlement ne légifère sur cette question en 2005, le travail était possible à partir de quinze ans conformément à la Convention européenne des droits de l’homme et, pour l’apprentissage, le travail des dimanches et jours fériés ou de nuit existait déjà depuis longtemps, par dérogation, sur la seule base de circulaires, au bénéfice du flou et des vides de la loi.

Pour ceux qui ignorent la genèse de ce débat, je rappelle qu’à l’été 2005, afin de mettre un terme à une situation où un sujet sensible était traité de manière plutôt aléatoire, il a été proposé de légiférer en prévoyant qu’un décret viendrait ensuite permettre l’application de la loi. Un système réglementaire présentant un certain flou a donc été remplacé par un cadre législatif ferme complété par un décret, ce qui est conforme au droit du travail.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 439, je suis saisi par le groupe socialiste d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli. Monsieur le ministre et monsieur le rapporteur, je serai bref, car la question qui vous est posée pour la troisième fois est simple : oui ou non, le travail de nuit des jeunes de quinze ans sera-t-il possible ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. J’ai répondu.

M. Henri Emmanuelli. Vous n’avez répondu ni par oui, ni par non : vous renvoyez à des codes et, sur un sujet aussi grave, vous faites des effets de manches tout à fait inappropriés.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Hénart, rapporteur. Nous avons déjà répondu, mais nous pouvons le faire encore une fois. Monsieur Emmanuelli, la première partie de ma réponse tient en trois lettres : oui. Je vous rappelle ensuite que, pendant des décennies, nombreux sont ceux qui, sur les bancs de cet hémicycle ou dans les ministères des affaires sociales et du travail dont ils avaient la charge, ont laissé des apprentis travailler de nuit et les dimanches et jours fériés sur la base d’un simple texte réglementaire. Pendant des décennies, pas un ministre du travail n’a su ni voulu régler ce problème devant la représentation nationale. Cela a été fait à l’été 2005 et le recours à la loi me semble nettement préférable.

M. Henri Emmanuelli et M. Alain Vidalies. Ce n’était pas possible entre quinze et seize ans !

M. Laurent Hénart, rapporteur. Bien sûr que si !

M. Alain Vidalies. Vous êtes en train de voter le travail de nuit à quinze ans !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin, précédemment annoncé, sur l'amendement n° 439.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est ouvert.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 1er

M. le président. Après l’article 1er, je suis saisi d'un amendement n° 441.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. L’amendement n° 441 est défendu, ainsi que le n° 442.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Elle les a repoussés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 441.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 442.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 457.

M. Francis Vercamer. Je le retire.

M. le président. L’amendement n° 457 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 415.

M. Alain Vidalies. Il est défendu.

M. le président. Avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

Je mets aux voix l’amendement n° 415.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2

M. le président. Je suis saisi de douze amendements identiques, nos 252 à 263, visant à supprimer l’article 2.

Sont-ils défendus ?

M. Christian Paul. L’amendement n° 253 est défendu.

M. Alain Vidalies. L’amendement n° 254 également.

M. Gaëtan Gorce. De même que l’amendement n° 258.

M. Henri Emmanuelli. Et que l’amendement n° 263.

M. le président. Les autres amendements de suppression de l’article 2 sont également défendus.

Avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 252 à 263.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 6.

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. Laurent Hénart, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 177.

M. Francis Vercamer. Défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Repoussé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 177.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 70 et 181.

M. Alain Joyandet. L’amendement n° 70 est défendu.

M. Francis Vercamer. De même que l’amendement n° 181.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Laurent Hénart, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 70 et 181.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

ordre du jour des prochaines séances

M. le président. Mardi 7 février 2006, à neuf heures trente, première séance publique :

Questions orales sans débat.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement.

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi, n° 2787, pour l’égalité des chances :

Rapport, n° 2825, de M. Laurent Hénart, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le vendredi 3 février 2006, à zéro heure quinze.)