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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 23 mars 2006

180e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

Prévention et répression des violences au sein du couple

Transmission et discussion du texte
de la commission mixte paritaire

Mme la présidente. M. le président de l’Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

En conséquence, l’ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire (n° 2927).

La parole est à M. le rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Guy Geoffroy, rapporteur de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mesdames, messieurs, nous voici donc au terme d’un travail parlementaire extrêmement approfondi : issu des travaux du Sénat et examiné à deux reprises dans cet hémicycle, ce texte, que je vous propose, mes chers collègues, d’adopter, a ainsi été présenté dans le consensus à la commission mixte paritaire au début de ce mois.

Les sujets restant en discussion après la navette n’étaient pas nombreux. Pour autant, ils n’étaient pas mineurs. Parmi eux, il en était un qui avait, lors de chaque lecture, fait apparaître sinon des divisions du moins des divergences entre nous et nos collègues sénateurs, celui de la reconnaissance ou non du viol entre époux comme circonstance aggravante de violences au sein du couple.

Nos collègues sénateurs, consacrant une jurisprudence déjà ancienne de la Cour de cassation, avaient introduit dans le texte la notion de viol entre époux afin de sécuriser notre droit en la matière. Souhaitant aller jusqu’au bout de cette logique, nous avions souhaité pour notre part que cette violence, peut-être la plus grave parce que perpétrée dans l’intimité du couple, ne soit pas traitée comme mineure par rapport à toutes les autres violences, et qu’elle soit considérée, elle aussi, comme une circonstance aggravante. Après que nos collègues sénateurs eurent repoussé une première fois cette disposition, nous l’avons réintroduite en seconde lecture.

Les débats très riches qui ont eu lieu à ce propos au sein de la commission mixte paritaire ont finalement permis d’aboutir à un texte de consensus, nos collègues sénateurs ayant donné acte à notre assemblée – qui, de toute façon, aurait eu le dernier mot – de sa volonté de cohérence, tout en apportant à l’article en question, qui deviendra donc article de loi de notre République, quelques clarifications d’ordre rédactionnel.

Au moment où nos travaux vont se clore, je voudrais rapidement rappeler tout ce que ce texte va désormais apporter en matière de prévention, mais également de répression, lorsque prévenir n’aura pas suffi, des violences au sein du couple et envers les enfants. Pour ces derniers, nous avions, dès la première lecture, souhaité compléter le dispositif existant tant nous savons que la lutte contre les sévices d’ordre sexuel doit être menée très tôt. C’est à ce niveau, tout autant qu’à celui de l’information de notre jeunesse, que s’engage, dans ce que nous espérons être un sursaut de notre société, la lutte fondatrice pour des relations harmonieuses au sein du couple.

Dans cette lutte, le premier élément non négligeable est celui de l’inversion de la règle concernant l’éloignement du conjoint violent. Nous ne le savons tous que trop, jusqu’à présent ce sont trop souvent les victimes qui sont obligées, quelquefois nuitamment, de quitter le domicile conjugal. Ce n’est que justice que l’auteur des violences – l’homme aussi bien que la femme – soit conduit à quitter le domicile, mesure à laquelle les autorités judiciaires pourront, avec notre texte, faire appel plus systématiquement, en requérant l’intervention du parquet.

La loi traite la question des violences au sein du couple dans l’ensemble de son spectre. À cet égard, les violences au sein des couples mariés sont tout autant visées que celles au sein des couples non mariés, qu’ils soient concubins ou qu’ils soient liés par un pacte civil de solidarité. Mais les deux assemblées ont également eu la volonté de prendre en compte les violences commises après la séparation du couple, signes d’un acharnement du conjoint violent dans sa volonté de domination de l’un sur l’autre. Voilà pourquoi le texte prévoit que les incriminations pourront également porter sur tous les actes commis une fois la séparation du couple scellée, car c’est une situation que nous rencontrons malheureusement beaucoup trop.

Nous avons par ailleurs voulu renforcer la répression en considérant les violences commises au sein du couple comme une circonstance aggravante. Nous espérons que cette mesure aura une vertu dissuasive et préventive. La notion d’intimité du couple a trop longtemps protégé les auteurs de violences. Elle doit devenir, au contraire, le signe aggravé de leur comportement déviant.

En conclusion, je tiens, au moment où se termine l’examen de ce texte, à saluer l’exemplarité de la démarche de nos deux assemblées. Élaboré à partir de deux propositions de loi déposées par nos collègues socialistes et communistes au Sénat, qui l’a approuvé à l’unanimité, repris ici même dans le cadre d’une niche parlementaire du groupe de l’UMP, que j’avais appelée de mes vœux, et voté également à l’unanimité à chacune des lectures, le présent texte a été adopté, toujours à l’unanimité, en commission mixte paritaire puis au Sénat. Je ne doute pas qu’il en sera de même ici aujourd’hui.

Pour autant, cette unanimité n’est pas synonyme de réduction de nos ambitions, voire de consensus mou. Avec ce texte, le peuple français, par l’intermédiaire de ses représentants, affirme avec force qu’il a décidé de ne plus accepter qu’une femme sur dix dans notre pays soit victime de violences au sein du couple et que, tous les quatre jours, une personne – une femme dans 90 % des cas – soit victime d’un enchaînement de violences, dont la permanence, signe d’une volonté de domination, peut conduire à l’irréparable, c’est-à-dire jusqu’au décès.

Je tiens également à remercier le Gouvernement, et plus particulièrement les deux ministres qui ont siégé à nos côtés au cours de l’examen de cette proposition de loi : M. le garde des sceaux, bien sûr, qui nous a accompagnés dans notre lutte contre les mariages forcés, ainsi que Catherine Vautrin, qui est venue ici témoigner de la volonté du Gouvernement de prendre en compte nos initiatives. Ainsi l’avons-nous entendue évoquer cette semaine, parmi toutes les questions qui lui tiennent à cœur et pour lesquelles le combat est engagé, celle concernant la prise en charge du conjoint violent. S’il faut en effet prévenir et s’il faut protéger la victime, il convient également de prendre en charge toutes les personnes qui commettent des violences au sein du couple – et au-delà –, car c’est un comportement injustifié et inexcusable dans une société moderne comme la nôtre.

Je voudrais enfin, mes chers collègues, vous remercier toutes et tous de votre contribution à ce travail collectif des représentants de la nation, et vous inviter, auprès du tissu associatif et du monde de l’école dans vos circonscriptions, à prôner très tôt la connaissance et le respect de l’autre.

À l’initiative du sénateur Robert Badinter, l’article 212 du code civil disposera désormais que « les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance. »

« Fidélité, secours, assistance », c’est ce que nous avions l’habitude, pour beaucoup d’entre nous qui sommes officiers d’état civil, de rappeler.

« Respect », c’est ce qui sera dorénavant le principe fondateur du mariage et, plus globalement, du couple. C’est en effet dans le respect que se construit le couple, c’est dans le respect qu’il vit de manière harmonieuse.

En faisant en sorte que chacun des membres du couple soit respecté, notre société sera demain plus équilibrée et plus porteuse d’harmonie et de bonheur pour nos enfants. C’est vers cet objectif, que cherche à atteindre la proposition de loi, qu’il nous faut continuer à travailler ici et sur le terrain local afin que régresse ce mal national de la violence au sein du couple. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, votre assemblée examine aujourd’hui la proposition de loi renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple et contre les mineurs. Le Sénat, quant à lui, a voté à l’unanimité, le jeudi 9 mars 2006, le texte qui lui était soumis par la commission mixte paritaire.

Nous avons tous encore en mémoire les statistiques dramatiques évoquées pendant les débats. Ce texte constitue une réponse efficace et indispensable à ces comportements intolérables.

Je me félicite que cette proposition de loi fasse l’objet d’un très large consensus, entre les deux assemblées et entre les différentes sensibilités politiques. Vous êtes parvenus à ce résultat, qui honore la représentation nationale, à l’issue de débats fort riches, au cours desquels chacune des chambres a apporté sa pierre à l’édifice.

Ce consensus a permis d’adopter plusieurs dispositions essentielles concernant le droit civil : je pense, bien sûr, au relèvement à dix-huit ans de l’âge du mariage des femmes, adopté à l’unanimité par chacune des assemblées, et dont j’ai déjà eu l’occasion de souligner qu’il s’agit d’une excellente mesure.

L’introduction de la notion de respect, que vous venez d’évoquer, monsieur le rapporteur, en tête des devoirs mutuels des conjoints énoncés à l’article 212 du code civil poursuit le même objectif d’égalité entre époux. Cette modification du code civil sera un symbole fort de notre conception de ce que doivent être les relations au sein du couple.

Suivant les recommandations de la mission parlementaire sur la famille et les droits de l’enfant, vous avez adopté plusieurs mesures qui renforcent le dispositif de lutte contre les mariages forcés. La réalité du consentement des futurs époux sera mieux contrôlée, notamment lorsque le mariage est célébré à l'étranger, et le parquet sera en mesure de poursuivre la nullité du mariage pour défaut de consentement.

En outre, le projet de loi relatif au contrôle de la validité des mariages, qui a été adopté hier en première lecture par votre assemblée, vient perfectionner notre dispositif législatif pour lutter plus efficacement contre les mariages forcés et les mariages blancs.

En ce qui concerne les dispositions pénales, la complémentarité et le travail des deux assemblées ont également été exemplaires.

S'agissant de la répression des violences conjugales, la circonstance aggravante liée à la qualité de la victime a été généralisée et étendue aux ex-conjoints et concubins, ainsi qu'aux pacsés.

Pour lutter contre la privation des pièces d'identité d'une personne par son conjoint ou son concubin, une exception à l'immunité familiale prohibant les poursuites en cas de vol entre époux a été décidée. Avec beaucoup de cohérence juridique, votre assemblée a adapté la rédaction initiale de cet article aux dispositions du code pénal actuel, en évitant ainsi de créer inutilement une nouvelle infraction.

Enfin, votre assemblée a complété cette proposition de loi par des dispositions permettant de mieux réprimer les mutilations sexuelles, la pédo-pornographie et le tourisme sexuel, infractions dont sont victimes les enfants.

Outre quelques différences d'ordre rédactionnel, un seul point de divergence restait entre les deux assemblées : la création d'une circonstance aggravante pour le viol entre époux. Le Sénat s'est finalement rallié à la position de l'Assemblée nationale pour adopter cette circonstance aggravante dans notre code pénal, ce dont je me réjouis.

En conclusion, je voudrais rappeler le caractère symbolique particulièrement fort de cette proposition de loi. La représentation nationale a su, une fois encore, dans l'intérêt des victimes comme celui de leurs enfants, doter notre droit d'un arsenal législatif plus cohérent et plus efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Liliane Vaginay.

Mme Liliane Vaginay. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme d'un dialogue constructif entre nos deux assemblées, corroboré par les travaux de la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 7 mars dernier.

La proposition de loi relative à la prévention et à la répression des violences au sein des couples ou commises contre les mineurs, issue d'une volonté partagée du Sénat et de l'Assemblée nationale, adoptée à l'unanimité de tous les groupes politiques, offre un dispositif cohérent, permettant de mieux prendre en compte toutes les formes de violence au sein du couple.

Ce processus législatif témoigne d'une meilleure prise de conscience de la gravité des actes de violence conjugale, et illustre la volonté du Gouvernement de conduire une double action de prévention et de répression à l'égard des auteurs d'actes délictueux commis à l'encontre de leur conjoint ou de leurs enfants.

Avec ce texte, nous lutterons plus efficacement contre ces comportements, restés très longtemps tabous mais qui affectent néanmoins la vie de trop nombreuses femmes et de leurs enfants. Nous redonnons espoir aux victimes de violences conjugales en leur rappelant qu'elles ont des droits. Nous prévenons le passage à l'acte des auteurs de ces violences en leur rappelant qu'ils encourent des peines d'emprisonnement.

Parmi les principales mesures que nous pouvons retenir de ce texte, citons, au plan civil, le relèvement à dix-huit ans de l'âge du mariage des femmes, conformément aux recommandations du Comité des droits des enfants des Nations unies pour l'application de la Convention internationale sur les droits des enfants.

L'introduction de la notion de respect dans les devoirs mutuels des conjoints poursuit un même objectif d'égalité entre époux. En effet, comme l'a rappelé notre rapporteur, les couples doivent se construire sur des bases saines, qui sont les meilleures garanties contre les dérives ultérieures. Cette modification du code civil sera un symbole fort de notre conception de ce que doivent être les relations au sein du couple.

Par ailleurs, suivant les recommandations de la mission parlementaire sur la famille et les droits des enfants, la proposition de loi renforce le dispositif destiné à lutter contre les mariages forcés, que le projet de loi relatif au contrôle de la validité des mariages, voté hier soir à l'Assemblée nationale, vient utilement compléter.

La réalité du consentement des futurs époux sera mieux contrôlée, notamment lorsque le mariage est célébré à l'étranger.

En outre, le délai permettant de demander la nullité du mariage pour vice du consentement, en cas de cohabitation des époux, a été prolongé, permettant ainsi de prendre en compte des faits souvent dénoncés au moment de la transcription du mariage à l'état civil français.

Enfin, par souci de pédagogie, le texte rappelle explicitement que l'exercice de pressions morales ou affectives de la part des parents constitue un cas de nullité du mariage. En effet, le mariage forcé est l'une des pires formes de violence faite aux femmes : la liberté d'aimer et de se marier est un droit fondamental qui doit être réaffirmé.

Au plan pénal, les dispositions permettant l'éloignement du conjoint violent ont été étendues aux ex-conjoints et ex-concubins, décision essentielle dans la mesure où la violence ne s'arrête malheureusement pas avec la fin de la vie de couple. Un tiers de décès surviennent en effet au moment de la rupture ou dans les mois qui suivent.

Par ailleurs, le texte prévoit un dispositif destiné à lutter contre la privation des pièces d'identité d'une personne par son conjoint ou son concubin, qui constitue, pour le conjoint violent, le moyen de priver celle-ci de la liberté d'aller et venir.

Concernant la répression des violences conjugales, le texte prévoit que la circonstance aggravante liée à la qualité de conjoint ou d'ex-conjoint de la victime s'appliquera notamment en cas de meurtre.

Nous avons débattu en CMP de la question de la qualification de circonstance aggravante en cas de viol ou d'agression sexuelle commis contre le conjoint. Nous avons notamment rappelé que ces violences s'inscrivaient dans un processus de destruction de la personne par un conjoint violent exerçant une forte domination sur sa victime, parce que le viol au sein du couple est une réalité. Nos discussions ont abouti à la création d'une circonstance aggravante pour le viol entre époux.

Enfin, les deux assemblées ont adopté plusieurs mesures destinées à renforcer la lutte contre les mutilations sexuelles, la pornographie et le tourisme sexuel, infractions dont sont souvent victimes des enfants.

En conclusion, mes chers collègues, je rappellerai juste ce chiffre terrible que nous avons tous en tête : une femme sur dix est aujourd'hui victime de violences conjugales dans notre pays.

Pour lutter contre ces souffrances insupportables, il nous faut entreprendre un véritable travail de formation et d'éducation avec tous les acteurs de terrain. Ce texte nous y invite et nous devrons poursuivre nos efforts.

Il nous faut aussi punir les auteurs de ces actes, parce que ce type de violence est répétitif dans le temps et qu'il met gravement en danger des femmes et des enfants insuffisamment protégés, fragilisés moralement et physiquement.

Monsieur le garde des sceaux, cette proposition de loi répond certes à une nécessité juridique mais elle constitue surtout un symbole fort pour les victimes et les associations qui les défendent, dans la lutte contre toutes les formes de violences commises au sein des familles. Voilà pourquoi, mes chers collègues, le groupe UMP votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le garde des sceaux. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Blisko.

M. Serge Blisko. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc arrivés au terme d'une discussion. En effet, malgré l’urgence qu’il y avait à délibérer, l’urgence, cette procédure qui ne permet pas le plus souvent de légiférer dans les meilleures conditions – nous en avons eu l’exemple récemment – n’a pas été déclarée et nous avons pu accomplir un travail parlementaire de qualité, avec de nombreuses navettes entre les deux assemblées, pour traiter et prévenir des situations qui sont considérées comme étant anormales. Plusieurs orateurs, dont M. le rapporteur, ont souligné à quel point ces situations devaient tous nous préoccuper, quel que soit le banc sur lequel nous siégeons.

L’unanimité qui s’est dégagée sur ce texte au sein de la CMP est de bon aloi. C’est un signe fort et positif vis-à-vis des femmes, des hommes, et des travailleurs sociaux bien entendu, de tous ceux qui aujourd’hui sont confrontés à ces terribles situations.

Pensons d’abord aux victimes. Nous avons raison de faire en sorte qu’elles soient toujours mieux protégées en cas de violences au sein du couple, en particulier quand ce sont les femmes et souvent, par voie de conséquence, les enfants mineurs.

Par ailleurs, des dispositions spécifiques concernent, vous l’avez tous dit, je n’y reviendrai pas, la pédo-pornographie, le tourisme sexuel, toutes formes intolérables d’atteinte à l’intégrité physique, morale, intellectuelle d’enfants mineurs. Ces actes sont d’autant plus dommageables quand les petites victimes y sont contraintes pour des raisons économiques.

Tel est l’état d’esprit qui a animé les sénateurs et les députés.

Le résultat des travaux de la commission mixte paritaire nous satisfait, même si sur certains points, vous le savez, mes chers collègues, le groupe socialiste avait non une réelle divergence mais une différence d’appréciation. Celle-ci ne doit toutefois pas faire oublier le but essentiel : la nécessité que la représentation nationale se rassemble et donne un signe fort d’unité autour de ces questions.

Le premier point extrêmement intéressant, c’est la nullité du mariage pour vice de consentement. Il a été décidé que la crainte révérencielle envers un ascendant constitue un cas de nullité de mariage. Notre assemblée l'avait souhaité. Ce sont des situations que nous pensions révolues depuis Molière et L’Ecole des femmes mais qui, malheureusement, sont aujourd’hui, en plein XXIe siècle, toujours présentes dans notre pays. Il convenait de combattre cette pression morale et psychologique insupportable. Nous nous félicitons donc de cette disposition.

Notre droit admet enfin que le mariage intéresse avant tout les époux et non la famille, au sens clanique du terme. Cette dernière n'a pas un droit particulier à faire pression sur le choix des futurs époux. C'est le terme d’une évolution sociologique très intéressante qui donne depuis deux cents ans davantage d’autonomie à la personne. C’est la fin d'une exception archaïque selon laquelle il fallait avoir le consentement des ascendants pour pouvoir se marier.

Le deuxième point, vous l’avez dit, ma chère collègue, concerne la reconnaissance du caractère aggravant du viol lorsqu'il est commis au sein du couple. Nous sommes moins satisfaits de cette disposition. La sénatrice socialiste Michèle André l’a dit au cours des travaux de la commission mixte paritaire, l'important était, à nos yeux, de combler une lacune du droit et de reconnaître le viol entre époux. Cette circonstance était certes bien dégagée depuis quelques années mais seulement grâce à la jurisprudence de la Cour de cassation. Il fallait l’inscrire dans la loi.

Cependant, les parlementaires socialistes considèrent qu’il n’était pas nécessaire de mettre le viol entre époux, déjà terrible en lui-même, au même niveau que le viol en bande organisée ou que le viol sous la menace d’une arme, circonstances aggravantes qui figurent déjà dans le code pénal. Mais cette divergence d’opinion ne doit pas nous faire oublier le caractère très positif de l’inscription dans la loi de la notion de viol entre époux.

Enfin, la CMP a adopté le principe de l’éloignement du conjoint violent du domicile commun, qui constituait pour nous une exigence fondamentale.

Nous avons tous, dans nos circonscriptions, des refuges qui accueillent, quelquefois dans des conditions d’extrême urgence et d’extrême précarité, des femmes victimes de violence. Or n’est-il pas aberrant que ce soit la victime qui doive quitter le domicile ? C’est le cas notamment quand il y a un contrat de location, voire un titre de propriété au nom de l’homme – je me place ici dans l’hypothèse, la plus courante, où c’est l’homme qui commet des violences contre la femme. Il n’était pas acceptable qu’une femme victime de violences conjugales soit de surcroît contrainte à la fuite, parfois en pleine nuit, et se retrouve ainsi privée de toit. Sur ce point, nous avons donc corrigé une aberration. Il faut que la personne victime de violences puisse rester au domicile et que ce soit le conjoint violent qui, s’il n’est pas sanctionné, soit au moins éloigné.

La philosophie du texte était marquée par l’exigence de lutter contre les violences dans le couple, de protéger la volonté des époux et, au-delà, des pacsés et des concubins – et je vous remercie collectivement d’avoir pensé à ces diverses formes d’union.

Cette démarche était honnête. La modification de l’article 63 du code civil était guidée par une volonté claire de lutter contre les mariages forcés, quels qu’ils soient. Mais M. le ministre semble introduire une confusion dommageable pour notre texte entre la notion de mariage forcé, quelle que soit la nationalité des époux, et les cas de mariages ne présentant pas toutes les garanties juridiques parce qu’ils sont contractés entre un conjoint français et un conjoint étranger. C’est commettre une erreur que d’altérer le sens du texte que nous discutons aujourd’hui par des considérations liées au projet adopté hier concernant le contrôle de la validité des mariages. Les révisions quasi quotidiennes de l’article 63 du code civil me paraissent témoigner d’un travail parlementaire peu rigoureux.

Je soulignerai également, car c’est une mesure utile, l’établissement d’une sanction pour privation des documents d’identité relatifs au titre de séjour et de résidence d’un étranger par son conjoint. Comme pour la question du domicile, il n’était pas normal d’ajouter aux violences physiques subies par les victimes une violence administrative.

Pour une femme et ses enfants – ne nous voilons pas la face, je le répète, devant le fait que les femmes sont les premières victimes des violences conjugales – se voir priver de ses papiers rend les choses extrêmement compliquées, y compris dans les cas de pacs ou de concubinage, voire lorsque la victime doit affronter son ex-compagnon : les liens administratifs demeurent en effet quelque temps encore après une séparation.

Cette privation des papiers replace par ailleurs la victime dans une situation de subordination et de dépendance intolérable par rapport au conjoint ou à l’ex-conjoint, l’empêchant, par peur de la violence, d’accomplir certaines démarches sans le soutien d’un travailleur social, voire de la police.

J’évoquais tout à l’heure L’École des femmes, je terminerai en mentionnant une disposition particulièrement symbolique à nos yeux, celle qui porte la majorité requise pour le mariage de 15 à 18 ans pour les femmes comme c’était déjà le cas pour les hommes.

Il s’agissait d’adapter notre droit pour mettre un terme à ces situations effrayantes, auxquelles nous avons tous été confrontés en tant qu’officiers d’état civil, et dans lesquelles de très jeunes filles, à peine nubiles, étaient contraintes au mariage. Que la contrainte – familiale le plus souvent – soit de nature physique ou psychologique n’est pas très différent, et chacun sait qu’à 15 ans on n’a pas les armes nécessaires pour se défendre. À 18 ans, même si on est encore jeune, on est mieux construit.

Nous sommes donc extrêmement satisfaits que soit inscrite dans la loi cette disposition qui aligne l’âge requis pour les femmes sur celui des hommes. Au-delà du souci légitime de parité, il était important en effet de rendre aux femmes leur liberté devant le mariage.

Voilà un certain nombre de raisons parmi celles déjà évoquées par mes collègues qui rendent le texte de la commission mixte paritaire très positif. Les députés socialistes le voteront donc avec confiance et résolution. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Comparini.

Mme Anne-Marie Comparini. Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, M. le rapporteur a eu raison de dire que toutes les familles politiques de notre assemblée comme celles du Sénat attendaient avec impatience un texte sur les violences conjugales.

Depuis longtemps, l’UDF souligne la nécessité d’agir contre la banalisation des violences conjugales. C’est pourquoi mon collègue Yvan Lachaud a déposé en novembre 2004, une proposition de loi dont certaines dispositions sont reprises dans le texte dont nous terminons la discussion aujourd’hui. Nous saluons donc les avancées de cette loi et les importants amendements votés, fruit d’un vrai travail en commission de nos deux assemblées.

En cette fin de navette, je noterai plus particulièrement la lutte contre les mariages forcés, le compromis satisfaisant auquel est parvenu la CMP sur l’annulation du mariage pour vice du consentement ou l’extension des mesures d’éloignement du conjoint violent aux violences commises par l’ancien conjoint, l’ancien concubin ou la personne liée ou ayant été liée par un pacs.

Nous avions en outre insisté en première lecture sur la nécessité de prévoir des circonstances aggravantes pour le viol commis au sein du couple, ce qui constitue, comme l’a rappelé notre rapporteur, une réelle avancée sociétale. La formulation équilibrée retenue permet de fixer dans le code pénal l’interprétation de la Cour de cassation, ce qui évitera toute remise en cause liée à un revirement toujours possible de la jurisprudence.

Bien plus, je pense à titre personnel qu’à partir du moment où l’application de circonstances aggravantes pour toutes les violences commises au sein du couple est admise, il aurait été illogique de ne pas la prévoir pour ce qui en constitue l’une des formes les plus graves, le viol.

Puisque ce texte de loi se veut un outil juridique le plus complet possible pour prévenir et réprimer les violences conjugales dont chacun connaît le nombre intolérable dans notre société, permettez-moi, monsieur le garde des sceaux, quelques observations.

La première concerne l’instauration de la médiation pénale. Je peux la comprendre mais la regrette néanmoins, dans la mesure où, l’esprit de la médiation étant de résoudre un différend d’opinion ou d’intérêt, il n’est pas envisageable de l’appliquer à des délits de violence. En effet, en mettant les deux parties sur le même plan, la médiation peut aboutir au rejet sur la victime de l’échec de la conciliation et par là même au dédouanement de son auteur.

J’attirerai ensuite votre attention sur plusieurs points qui resteront à approfondir après le vote de ce texte. En premier lieu, la sensibilisation des élèves au respect de l’égalité entre les hommes et les femmes. En écoutant M. le rapporteur, je ne pouvais m’empêcher de penser à ce que des éducateurs m’ont dit lors de ma visite au centre des mineurs de la prison de Liancourt. Ils ont insisté avec force sur le fait que la première formation qu'ils apportent aux jeunes mineurs incarcérés, c’est le respect et la connaissance de l’autre sexe, de la femme, de la mère.

En second lieu, une formation spécifique pour les personnels médicaux, les magistrats et les policiers est indispensable. Trop souvent en effet les femmes victimes de violence craignent d’avoir à affronter la suspicion des services instructeurs. Cela vaut pour les femmes mais aussi pour les jeunes enfants, victimes notamment de violences sexuelles.

En troisième lieu, j’insisterai sur l’obligation de soins pour les auteurs de violences. Le docteur Coutanceau a d’ailleurs remis à Mme Catherine Vautrin un excellent rapport qui préconise la prise en charge thérapeutique des hommes violents. Il est d’autant plus important d’y prêter attention que, très souvent, les hommes violents sont en situation de récidive et qu’ils ne sont que trois cents à se faire soigner sur quarante mille condamnés.

M. Serge Blisko et Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait.

Mme Anne-Marie Comparini. Il ne faut pas non plus oublier l’obligation d’accueil, d’hébergement et de soins pour les victimes de violences conjugales. Sur ce dernier sujet, l’UDF est convaincue qu’il faut soutenir les associations et les centres d’accueil qui, en prenant en charge les victimes et leurs enfants, répondent à leur premier besoin : se mettre à l’abri pour mieux se protéger, se soigner et repartir d’un pied neuf.

M. Serge Blisko. Vous avez raison.

Mme Anne-Marie Comparini. Fondamentalement, les violences conjugales appellent, au-delà des nécessaires réponses juridiques, un plan global d’actions et un changement des mentalités.

Les soutiens à ce projet ne manquent pas, qu’il s’agisse de celui du milieu associatif, qui a participé à nos travaux, ou de celui des partis. Rares sont les sujets où le Parlement peut ainsi dépasser les clivages politiques et adopter une position commune.

En votant avec confiance cette loi, je me permettrais de vous dire, monsieur le garde des sceaux, que nous ne devons pas décevoir toutes celles qui en attendent beaucoup pour leur liberté, leur autonomie et parfois leur envie de vivre. Ce projet de loi a un caractère symbolique fort, et il ne doit pas, faute de moyens, rester au stade des vœux pieux. La loi doit être appliquée ; elle doit avoir les moyens de son ambition. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les violences conjugales sont enfin reconnues et identifiées par les instances tant nationales qu’internationales comme un problème de santé publique dont l’État doit se saisir. Par violence conjugale, il faut entendre toute atteinte à l’intégrité physique, psychique ou sexuelle exercée par le partenaire dans le cadre d’une relation de couple. Je tenais à rappeler cette définition, car on ne peut combattre un fléau sans bien le définir au préalable.

Au terme de cette dernière étape, je souhaiterais vous faire part de ma satisfaction devant la richesse de débats qui devraient préfigurer une réflexion plus aboutie. Au cours de la navette, malheureusement un peu longue, ce texte s’est effectivement enrichi de nombreuses dispositions prenant en compte d’autres dimensions de la violence conjugale, notamment les mariages forcés, l’excision et le tourisme sexuel.

La CMP a adopté, dans la rédaction de l’Assemblée nationale, l’article 1er qui insère dans le code civil des dispositions faisant de l’exercice d’une contrainte au mariage, y compris la crainte révérencielle envers un ascendant, une cause de nullité.

L’article 5 relatif à l’éloignement du conjoint violent a également été adopté dans la version de l’Assemblée nationale. Ainsi, les mesures d’éloignement et d’incarcération de l’auteur des violences seront renforcées. Cela étant, je partage les propos de notre collègue sur les soins à prodiguer aux hommes violents, dont il serait bon que nous puissions débattre à l’avenir.

Le seul point de désaccord entre les deux assemblées a été de savoir si le viol au sein du couple constituait un facteur aggravant, comme le demandaient les associations. Le Sénat avait consacré la jurisprudence de la Cour de cassation en prévoyant l’incrimination explicite du viol au sein du couple, tandis que les députés voulaient aller plus loin pour faire de la qualité de conjoint une circonstance aggravante. La CMP a combiné les deux textes, tout en étendant la circonstance aggravante aux pacsés, aux anciens conjoints et anciens pacsés, auxquels les mesures d’éloignement du domicile de la victime seront également opposables. Nous nous félicitons bien évidemment de toutes ces conclusions consensuelles.

Cela étant, on ne saurait réduire la lutte contre ce fléau à une approche strictement répressive, la prévention et l’aide aux victimes devant occuper une large part de l’action politique dans ce domaine. Je partage les remarques émises par notre rapporteur sur la prévention concernant les enfants. Toutes les initiatives tendant à améliorer les comportements entre filles et garçons doivent donc être encouragées. C’est pourquoi je regrette le rejet des amendements que nous avions déposés, au motif qu’ils seraient de nature réglementaire ou que des dispositions similaires seraient déjà en vigueur.

Nos propositions relatives à la prévention, la sensibilisation et l’indemnisation des victimes ne sont que l’écho des revendications des associations féministes ou de défense des droits de l’homme. Je reste donc persuadée qu’elles doivent alimenter une prise de conscience collective de ce fléau qu’est la violence au sein du couple.

Pour ce faire, nous devons absolument prendre exemple sur la loi-cadre espagnole. Celle-ci s’appuie sur une définition claire de la violence de genre, qu’elle considère « non comme un problème qui concerne la sphère privée, mais comme le symbole le plus brutal de l’inégalité qui existe entre les hommes et les femmes ». Une violence qui s’exerce contre les femmes « du fait même qu’elles sont femmes et qu’elles sont considérées par leurs agresseurs comme n’ayant pas les droits normaux de liberté, de respect et de capacité de décision ».

Avec une telle définition, on peut justifier la mise en place d’une loi qui allie répression des actes de violence, aide aux victimes, et mesures de sensibilisation et de prévention. C’est bien cette approche globale que nous demandons.

Nous ne le répéterons jamais assez : toutes les femmes sont victimes de violences masculines, sexuelles ou sexistes à un moment de leur vie – insultes, publicités, pornographie, prostitution, coups et blessures volontaires, agressions sexuelles, harcèlement sexuel, viol, mutilations génitales et humiliations.

Cette effrayante réalité a été partiellement traitée dans cette proposition de loi, car les violences ont été présentées comme des actes individuels et non comme le mécanisme essentiel au fonctionnement d’une société qui demeure, à certains égards, machiste et patriarcale. Derrière le rapport de force exacerbé qu’est la violence, se cache en effet une volonté de maintenir en place le pouvoir des hommes et de contrôler le corps des femmes, leur sexualité, leur liberté de vivre, bref leur existence.

Nos débats ont montré que des mesures existaient déjà dans notre arsenal législatif. Nous sommes donc sur le bon chemin, mais regrouper ces mesures, les renforcer et les compléter au sein d’une même loi serait un acte politique qui lancerait un message symbolique extrêmement fort aux institutions comme aux hommes et aux femmes du pays. Il est aujourd’hui temps d’ouvrir un grand débat de société sur toutes les formes de sexisme, de violence ou de discrimination dont sont victimes les femmes.

Cette loi globale devrait partir de la réalité des violences dénoncées par les femmes qualitativement et quantitativement dans toute la France. Elle devrait notamment comporter :

L’identification de tous les processus par lesquels les violences ne sont pas reconnues comme des crimes et des délits ;

La modification de toutes les lois induisant une vision stéréotypée des femmes et des violences dont elles sont victimes ;

Les moyens politiques, juridiques, humains, financiers, indispensables à l’éradication des violences dans les sphères publique ou privée et non seulement dans tous les secteurs, notamment judiciaire, éducatif, professionnel, médiatique, mais aussi dans les institutions publiques, privées, religieuses ou militaires.

Une commission interministérielle a dû se dérouler le 31 janvier dernier. Pouvez-vous, monsieur le garde des sceaux, nous rendre compte de ses travaux ? Enfin, pour que cette loi puisse être appliquée, il faut qu’elle soit accompagnée de moyens matériels et financiers importants, notamment pour la création de centres d’accueil.

En espérant un engagement clair sur ces questions, nous voterons naturellement ce texte. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Personne ne demande la parole dans les explications de vote ?...

Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

(L’ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Ordre du jour des prochaines séances

Mme la présidente. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 2611 rectifié, relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs :

Rapport, n° 2966, de M. Dominique Juillot, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;

Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programme pour la recherche :

Rapport, n° 2945, de M. Jean-Michel Dubernard.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix heures cinquante-cinq.)