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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mardi 28 mars 2006

182e séance de la session ordinaire 2005-2006

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Questions orales sans débat

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

Le texte de ces questions a été publié au Journal officiel (Débats parlementaires, questions, du 28 mars 2006).

difficultés des viticulteurs de Provence

M. le président. La parole est à Mme Josette Pons, pour exposer sa question, n° 1535.

Mme Josette Pons. Monsieur le ministre de l’agriculture, je vous remercie d’ores et déjà pour la réponse que vous m’avez fait parvenir par écrit.

Dès que la profession viticole de Provence-Alpes-Côte d’Azur et notamment du Var a pris connaissance du projet de création de dix bassins viticoles en France, l’idée première fut d’abord de s’en féliciter et d’en reconnaître tous les avantages, en particulier le recentrage logique des moyens d’action et de promotion par zones géographiques ou l’accent mis sur la typicité des vins et l’identité d’un territoire.

Hélas pour les viticulteurs de Provence, la déception fut à la hauteur des espoirs. Que faire, en effet, de ce bassin Vallée du Rhône-Provence qui semble vouloir être imposé contre toute logique, en tout cas contre toute la logique provençale ?

La Provence, même si son contour peut paraître un peu flou, reste une véritable région viticole, un bassin de production, avec une identité forte et un produit phare, le vin rosé, dont nous sommes les leaders mondiaux, un centre de recherches sur le rosé, unique en France, un vignoble de 50 000 hectares, c’est-à-dire bien plus grand que ceux de l’Alsace ou de la Bourgogne, et une production totale atteignant les 2 500 000 hectolitres.

Si les viticulteurs de Provence estiment logique la création d’un bassin du même nom, ils croient bien sûr également à l’union des forces et des moyens pour lutter contre la crise viticole, qui s’installe, hélas, et provoque en fait une mutation de la viticulture française. Dans ce cadre exemplaire, le bassin Provence pourrait être associé au bassin de la vallée du Rhône pour conjuguer les moyens de promotion.

Monsieur le ministre, je vous demande de prendre en compte ces inquiétudes afin de rassurer les viticulteurs de Provence.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Madame la députée, nous avons déjà travaillé ensemble sur ce dossier. J’ai eu le plaisir de venir chez vous dans le Var rencontrer les responsables de ce superbe vignoble, qui a réussi une reconversion technique et qualitative remarquable et qui se porte bien.

Le Gouvernement annoncera demain un certain nombre de dispositions nouvelles en matière viticole ; le Premier ministre s’y était engagé et il en a déjà dessiné les contours à Metz la semaine dernière.

Nous avons à réorganiser l’offre française de vin. Chacun comprend bien que c’est une nécessité, car nous avons des difficultés, que nous devons traiter.

Le Gouvernement a souhaité donner un nouvel élan aux premières décisions prises en juillet 2004, en particulier le principe d’une gestion globale par grand bassin de production afin de faciliter l’adéquation entre l’offre viticole et sa commercialisation.

Ainsi, depuis le début de l’année, les comités de bassin travaillent avec les préfets et les élus régionaux à la mise au point de mesures de gestion de l’offre, de restructuration du vignoble et de meilleure adaptation aux exigences commerciales et à l’exportation.

En ce qui concerne la Vallée du Rhône et la Provence, nous avons en effet souhaité rassembler ces deux ensembles dans un même bassin. Les représentants professionnels de la Provence ont fait valoir lors de la concertation les particularismes de leur production, la prédominance des vins rosés et la faiblesse des rendements compte tenu des caractéristiques agronomiques des sols. La Provence possède de plus une interprofession spécifique, qui effectue des actions de promotion et de mise en valeur pour les vins de Provence.

Cela étant, comme vous le soulignez, il est important que ces deux grands ensembles abordent ensemble certains sujets comme la situation économique de la filière viticole ou des actions de promotion spécifiques et de plus grande ampleur pour les deux régions. Je pense donc que nous pourrions trouver une solution de bon sens en créant un seul bassin mais en préservant l’identité propre de l’interprofession de Provence, afin qu’elle puisse continuer à agir comme elle le souhaite dans ce cadre plus général.

Je reverrai la question demain, puisque je reçois les représentants des bassins pour examiner avec eux le rapport de M. Pomel et leur présenter les mesures conjoncturelles ainsi que les réformes que nous envisageons.

Je crois que ces conseils de bassin sont utiles, mais je suis prêt à adapter leur fonctionnement à la diversité des situations locales. Il n’est pas souhaitable d’imposer un modèle unique. Nous pourrions donc aller ensemble vers un grand bassin avec une très grande autonomie pour la Provence, mais nous verrons ensemble les modalités précises dans les meilleurs délais.

Mme Josette Pons. Je vous remercie, monsieur le ministre.

financement
des contrats d’agriculture durable

M. le président. La parole est à M. Gilbert Meyer, pour exposer sa question, n° 1533.

M. Gilbert Meyer. Monsieur le ministre de l’agriculture, je souhaite vous interroger sur la suspension des crédits alloués en 2006 à la promotion des contrats d’agriculture durable, les CAD. Cette suspension risque d’avoir des conséquences importantes, en particulier dans le Haut-Rhin, pour le maintien et le développement d’une agriculture de qualité qui contribue de façon remarquable à la préservation de l’environnement et à l’aménagement du territoire. Les répercussions pourraient notamment être visibles dans les vallées vosgiennes, déjà confrontées aux problèmes des mutations économiques et des délocalisations, dans la mesure où 30 % seulement des contrats pourraient être reconduits. La plupart des agriculteurs ont en effet passé des contrats territoriaux d’exploitation que la DDAF avait orientés vers les mesures du plan de développement rural national, abrogées depuis, alors même que le contenu des cahiers des charges est identique à celui des mesures retenues.

Les collectivités territoriales, tel le conseil général du Haut-Rhin, ont le souci de participer à la volonté affichée par le Gouvernement de faire de l’agriculture l’un des secteurs les plus compétitifs et les plus dynamiques de l’économie française et, par-delà, un acteur majeur de la gestion de l’espace. Le GERPLAN constitue à cet égard l’un des outils privilégiés des collectivités. Ces plans de gestion de l’espace rural et périurbain visent en effet à créer des zonages opérationnels partagés par tous dans des secteurs d’intérêt collectif. Ils permettent d’éviter la multiplication des contrats d’opportunité et de favoriser ceux qui répondent, de manière collective et cohérente, à la demande sociale d’un environnement préservé et d’une agriculture durable. La dérive financière si souvent dénoncée au temps des CTE est évitée dans la mesure où la collectivité participe, aux côtés de l’État, au financement de ces nouveaux contrats, ce qui permet la mobilisation de crédits européens supplémentaires. En outre, les GERPLAN servent de cadre de mise en œuvre de la nouvelle loi relative au développement des territoires ruraux. Enfin, ils permettent de résoudre les problèmes posés par une cohabitation difficile dans les zones périurbaines de notre espace densément peuplé.

Ce type d’action s’inscrit totalement dans l’esprit du deuxième pilier de la PAC, qui vise à intégrer de façon durable les exploitations agricoles dans leur territoire. Il serait donc tout à fait indiqué de maintenir les crédits de l’État pour notre agriculture de montagne et en vue de poursuivre la politique des CAD, dans le cadre de la contractualisation orchestrée par les GERPLAN. Leur minoration porterait un coup sévère à la promotion d’une agriculture axée vers la préservation de l’environnement.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, m’indiquer les mesures que vous prévoyez de prendre afin que les collectivités concernées puissent mener à bien la reconduction des aides consacrées par l’État à la promotion des CAD en lien avec les GERPLAN ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur le député, dans un contexte de maîtrise de la dépense publique à laquelle n’échappe pas le ministère de l’agriculture, j’ai souhaité définir des priorités et j’ai dégagé des moyens significatifs en faveur des mesures agro-environnementales. Ce sont ainsi un peu plus de 100 millions d’euros de nouveaux engagements qui seront consacrés au cours de l’année 2006 à cette politique.

On ne peut naturellement pas distribuer des contrats agro-environnementaux à guichet ouvert, sans but environnemental, ce qui a été reproché à juste titre aux contrats territoriaux d’exploitation, les CTE. Cette dérive financière a été contre-productive et nous gêne maintenant pour promouvoir des contrats de qualité.

À l’intérieur de cette enveloppe de 100 millions, j’ai décidé de priorités claires en garantissant tout d’abord le maintien des pâturages extensifs, fondamentaux pour la biodiversité et utiles pour la qualité de l’eau.

La prime herbagère agro-environnementale, la PHAE, a été créée en 2003 par Hervé Gaymard, et le Gouvernement a décidé d’assurer un égal accès à ce dispositif. Les agriculteurs engagés depuis 1998, voire pour un grand nombre d’entre eux depuis 1993, dans des contrats de gestion extensive de système herbager, prime à l’herbe puis CTE, pourront donc souscrire une PHAE à l’issue de leur CTE. Cette possibilité est également offerte aux éleveurs ovins qui s’étaient engagés dans un CTE de gestion extensive de prairies et dont le contrat vient à échéance, car, pour eux, l’ancienne prime à l’herbe n’était pas toujours adaptée.

Chaque région a ainsi reçu une enveloppe d’autorisation d’engagement permettant de répondre aux besoins des agriculteurs concernés. Pour l’Alsace, les CTE contenant des mesures d’ouverture de milieux fortement embroussaillés, abandonnés depuis longtemps, ne font pas partie de cette priorité. En effet, par définition, les pâturages concernés devaient être rouverts en CTE et ne pouvaient donc toucher la prime à l’herbe. Pour autant, et j’y reviendrai, ces surfaces gagnées sur les friches peuvent avoir un grand intérêt environnemental et méritent alors que la puissance publique leur apporte son concours.

Le Gouvernement a également souhaité accompagner la conversion à l’agriculture biologique. C’est une filière qui correspond aux attentes de nos concitoyens. Un plan de relance a été mis en place et la loi d’orientation agricole prévoit un crédit d’impôt. Une enveloppe de 20 millions d’euros de nouveaux engagements a été réservée pour des contrats d’agriculture durable de conversion à l’agriculture biologique.

Cela ne signifie pas, une fois ces priorités traitées, que nous n’ayons pas d’autres besoins pour des mesures agro-environnementales de qualité. La démarche GERPLAN – plan de gestion de l’espace rural et périurbain – que vous avez présentée est particulièrement intéressante. Le ciblage d’actions, peu nombreuses et efficaces, sur des zones d’intérêt collectif reconnues par tous, correspond à la méthode que nous souhaitons promouvoir pour les mesures agro-environnementales, lorsqu’elles doivent répondre aux enjeux particuliers des territoires. L’implication financière des collectivités est alors une garantie de la pertinence de ces mesures. La démarche GERPLAN peut donc servir de modèle aux autres collectivités territoriales et s’inscrire utilement dans le cadre de la prochaine programmation de développement rural pour 2007-2013.

Par ailleurs, nous avons décidé, sous l’autorité du Premier ministre, lors du dernier comité interministériel d’aménagement et de compétitivité des territoires, qui succède au CIADT, que les crédits destinés aux mesures agro-environnementales feraient pour moitié l’objet d’une programmation nationale et pour l’autre moitié seraient déconcentrés, afin de permettre aux préfets de région de contractualiser avec les collectivités territoriales – régions, départements, intercommunalités…

Dans le cas précis de l’Alsace, pour répondre aux souhaits du président Zeller, nous irons encore plus loin dans la déconcentration des crédits. J’envisage, comme c’était déjà le cas pour votre gestion du FEDER, que des politiques soient plus spécifiquement gérées par la région. C’est dans ce cadre que je vous propose d’aborder cette démarche GERPLAN qui vous est chère et que je trouve d’un grand intérêt.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Meyer.

M. Gilbert Meyer. Monsieur le ministre, je constate que vous avez pris beaucoup de précautions pour me répondre. Vous avez bien voulu reconnaître l’intérêt du GERPLAN, sans pour autant prendre d’engagement sur les crédits. Dès lors que vous reconnaissez l’utilité de cette programmation, je souhaite que vous apportiez les crédits nécessaires à sa mise en œuvre en collaboration avec les collectivités concernées.

aides à la filière avicole

M. le président. La parole est à Mme Josette Pons, pour exposer la question, n° 1530, de Mme Claude Greff.

Mme Josette Pons. Mme Claude Greff m’a prié de présenter en son nom la question qu’elle adresse à M. le ministre de l’agriculture.

Le 23 février dernier, M. le Premier ministre a annoncé une enveloppe complémentaire de 52 millions d’euros pour aider la filière avicole à affronter la crise qu’elle rencontre aujourd’hui.

Une enveloppe de 20 millions d’euros, à laquelle s’ajoutent les 5 millions d’euros annoncés en janvier 2006, a ainsi été mobilisée immédiatement pour les éleveurs, lesquels bénéficient de diverses mesures pour faire face aux difficultés conjoncturelles : indemnisations pour le manque à gagner résultant d’une réduction volontaire de production, allégement de charges d’emprunt pour les éleveurs qui ont investi récemment et pour les jeunes agriculteurs, ou encore prise en charge des cotisations MSA des producteurs en difficulté.

Ces mesures de soutien aux éleveurs sont nécessaires et il faut souligner la rapidité avec laquelle le Gouvernement les a prises. Toutefois, d’autres acteurs de la filière avicole ne bénéficient pas de ces mesures et se trouvent désormais dans une situation financière particulièrement délicate. Tel est le cas pour de grands accouveurs et de petits abattoirs de la circonscription de Mme Greff. Elle souhaiterait donc savoir comment le Gouvernement entend soutenir ces acteurs économiques également essentiels de la filière avicole, et notamment si des aides spécifiques leur seront accordées : indemnisation de pertes d’exploitation, allégement voire exonération de charges. Si oui, quand et comment ces aides seront-elles calculées et réparties ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Madame Pons, je suis heureux de pouvoir, par votre intermédiaire, répondre à Mme Greff.

Depuis plus de cinq mois, la filière avicole est confrontée à de très graves difficultés, comme je l’ai à nouveau constaté hier en Bretagne, première région française de production de volaille. La consommation de viande de volaille a en effet chuté en France et une partie de nos marchés extérieurs est fermée à l’exportation. Fort heureusement, la baisse de la consommation s’atténue puisqu’elle est passée de 30-40 % à 10 % environ aujourd’hui, preuve du comportement très civique de nos concitoyens, puisqu’en Grèce ou en Italie la baisse de la consommation atteint 60 % à 70 %. Néanmoins, les conséquences économiques sont importantes sur l’ensemble de la filière.

Ainsi que vous le rappelez, des mesures de soutien ont été prises dès le mois de novembre. Pour les entreprises, une enveloppe de 30 millions d’euros a été dégagée et nous avons obtenu de la Commission européenne la possibilité d’aller au-delà de la règle habituelle des aides de minimis puisque nous pourrons aller jusqu’à un plafond de 150 000 euros, ce qui nous donne une grande capacité de réaction. Nous avons également pris des mesures fiscales de soutien aux entreprises de la filière, sur lesquelles j’ai fait le point avec les trésoriers payeurs généraux. Par ailleurs, pour les grands exportateurs, qui vont sur les marchés d’Afrique, du Moyen-Orient ou du Maghreb, nous avons mis en place un dispositif particulier d’un montant de 10 millions d’euros.

Naturellement, ces mesures d’urgence ne constituent qu’une première étape : le Premier ministre a prévu que nous puissions à tout moment adapter le dispositif. Il a ainsi annoncé, au congrès de la FNSEA qui s’est tenu à Metz la semaine passée, qu’une enveloppe complémentaire de 20 millions d’euros permettrait d’aider les entreprises confrontées à des nécessités de restructuration. Il a également rappelé que l’ensemble des moyens financiers seraient réévalués en fonction des besoins.

S’agissant de l’exportation, nous travaillons beaucoup. Des missions d’experts vétérinaires sont envoyées dans tous les pays, au Maroc et en Algérie d’abord, au Pakistan, au Bangladesh, à Singapour et en Thaïlande prochainement. Nos ambassadeurs sont mobilisés, de même que Nicolas Forissier, délégué interministériel aux industries agroalimentaires, et ma collègue Christine Lagarde qui fait actuellement une tournée des pays du Proche-Orient en particulier. Que voulons-nous obtenir ? La réouverture des marchés, car ces mesures de fermeture des frontières ne sont pas adaptées, ou au moins une régionalisation de l’embargo. On pourrait concevoir que, pendant une certaine période, des pays ferment leurs frontières aux volailles en provenance de l’Ain, puisque c’est le seul département où un élevage ait été infecté et que le reste du territoire national a été épargné.

J’ajoute que des mesures d’indemnisation totale des coûts du chômage partiel ont été mises en point.

La priorité est de faire repartir la consommation. Je vous le disais, nous avons de bons résultats en ce domaine. Nous avons réalisé une campagne télévisée sur TF1, France 2 et France 3, avec des spots présentant les témoignages d’un restaurateur, d’un vétérinaire, d’un scientifique et d’un éleveur. Les résultats étant probants selon les tests effectués, cette campagne d’information sera complétée par une campagne promotionnelle au mois d’avril, pour un coût total, dans un premier temps, de 2,5 millions d’euros.

Mais il faut enfin que l’Europe se réveille car elle a mis du temps à intervenir ! Lors du dernier Conseil des ministres de l’agriculture, qui s’est tenu la semaine dernière à Bruxelles, j’ai présenté un mémorandum français, qui a reçu le soutien de nombreux États. Nous demandons des aides au stockage privé, une indemnisation des baisses de mise en place, des aides à l’achat-destruction, mais aussi un assouplissement des règles de financement des aides d’État. La Commission européenne en a pris note. Après les réponses de février qui n’étaient pas à la hauteur de nos espoirs, la situation a évolué et j’espère des mesures concrètes pour le Conseil des ministres de l’agriculture d’avril, certaines pouvant même être d’application rétroactive.

Cette filière connaît de graves difficultés, dont elle n’est nullement responsable et qui lui tombent du ciel ! Nous avons donc un véritable devoir de solidarité envers tous ses acteurs, aussi bien l’agriculteur qui n’élève que quelques poules pour améliorer ses revenus que l’éleveur professionnel, les entreprises d’abattage et de découpe, les accouveurs, les fournisseurs de poussins et les producteurs d’œufs, ou encore envers la génétique animale, si importante dans notre pays. Cela représente entre 65 000 et 100 000 personnes, ce qui est considérable. Il faut que la solidarité nationale joue pleinement à l’égard de toute la filière.

difficultés de la filière avicole

M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour exposer sa question, n° 1521.

M. Arnaud Montebourg. Monsieur le ministre de l’agriculture, prolongeant la question de Mme Greff, je veux vous interroger à mon tour sur la manière dont nous pouvons protéger l’outil de travail de la filière avicole, aujourd’hui menacée de disparition.

Le traitement médiatique, dès le mois d’octobre, de l’expansion de la grippe aviaire chez les oiseaux sauvages, combiné aux mesures de confinement prises alors par le Gouvernement, en l’absence de recommandations de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, a mis à genoux l’ensemble de la filière, au moment où elle devait affronter la véritable crise : le premier cas de H5N1 sur le territoire national. Les retombées économiques sont considérables. C’est maintenant qu’il faut lutter, et avec une absence de ressources, la filière ne peut pas résister.

Poulets entiers, labels et certifiés ont été les premiers produits boudés par le consommateur, suivis par la volaille de Bresse, en ce début d’année. Ainsi, la filière avicole bourguignonne annonçait déjà à la fin du mois de novembre, des baisses des ventes de 5 % à 20 % pour les volailles standard et de 15 % à 40 % pour le label rouge. Ces baisses se sont accentuées dans les deux semaines qui ont suivi, la filière avicole française affrontant des replis importants du marché dès la mi-janvier et pour une durée indéterminée. Les pertes sont colossales et les congélateurs sont pleins. Qu’il s’agisse des accouveurs, des éleveurs, des abatteurs ou des transformateurs, tous les maillons de la filière sont frappés.

Vous débloquez 63 millions d’euros pour la filière, alors qu’elle enregistre des pertes de l’ordre de 40 millions d’euros par mois. Vous annoncez une avance de 1 000 euros par exploitation. Or, dans le département de Saône-et-Loire, où sont recensés 513 éleveurs, l’enveloppe départementale est de 148 017 euros, soit en moyenne 288 euros par exploitant ! J’ajoute que les conditions d’accès à ces aides sont vivement critiquées par la profession. Les éleveurs qui ont subi la sécheresse de 2003 en sont ainsi partiellement écartés. Quant à ceux qui ont choisi la diversification de leurs productions, mais pour qui l’atelier volaille représente une grosse partie du revenu de l’exploitation, ils se trouvent également exclus du dispositif. Il en va de même pour les producteurs de volailles de Bresse, seule AOC mondiale, pour qui les pertes ne sont pas liées à l’allongement des vides sanitaires mais directement au confinement de leurs volailles, mesure décidée à juste titre sur le plan sanitaire en raison de l’apparition, dans le département de l’Ain, du virus H5N1.

Enfin, depuis le mois de novembre 2005, la profession alerte les pouvoirs publics et vous demande la mise en œuvre de mesures de gestion de marché.

Il faut que l’Europe se réveille, disiez-vous. La question que nous vous posons est de savoir si vous allez réussir à la réveiller ! Vous avez déposé un mémorandum, heureusement ! Le Conseil européen de l’agriculture a pris le 20 mars dernier une décision : surtout ne rien décider, pas de mesures de dégagement de marché, repoussant une nouvelle fois dans le calendrier la possibilité de sauvegarder la filière. Cette dernière entame désormais une crise très grave, dont nous savons qu’elle sera durable et qu’elle aura des conséquences dramatiques.

La profession, dès le mois de novembre, a réduit ses mises en place de 20 % à 50 %. Les baisses de consommation sont toujours de l’ordre de 20 % à 30 %, malgré une légère embellie.

Monsieur le ministre, comment vous allez permettre à la filière d’affronter les difficultés ? Mesurez-vous à quel point les mesures de solidarité nationale qui ont été prises sont dérisoires face aux dégâts causés par la crise aviaire ?

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Sans répéter, monsieur le député, ce que je viens de répondre à la question posée par Mme Pons au nom de Mme Greff, je voudrais d’abord formuler quelques remarques sur le traitement médiatique de cette question.

Dans cette affaire, le Gouvernement a fait le choix, qui me semble légitime, de la transparence totale, instruit qu’il était du précédent constitué par l’ESB et la gestion de cette crise par les gouvernements successifs : face à une crise d’une telle ampleur, il faut informer les citoyens. On peut certes déplorer le traumatisme que cela peut créer dans un premier temps, quand le cadavre d’un oiseau atteint du virus H5N1 suffit pour attirer une forêt de caméras au bord des étangs de la Dombes, pas très loin de chez vous. Je reste cependant persuadé que le choix immédiat de la transparence totale est pour beaucoup dans la reprise de la consommation avicole. C’est grâce à ce choix en effet, à quoi s’ajoute l’engagement de tous les acteurs de la filière et des autorités sanitaires, que nous sommes parvenus à juguler la crise. Les quelques cas de H5N1 que l’on découvre toujours sont beaucoup moins médiatisés. Ils sont certes occultés par d’autres événements, nous le savons bien. Il est cependant incontestable que les consommateurs ont compris que toutes les précautions avaient été prises, et cela a favorisé la reprise de la consommation.

Les mesures de confinement font débat. Il est vrai que nous sommes d’abord allés au-delà des recommandations de l’AFSSA en la matière, mais je crois que nous avons bien fait : nous avons pu ainsi tester le dispositif dans deux séries successives de départements avant la montée en puissance de la crise à partir du mois de janvier, et le généraliser à l’ensemble des départements lorsqu’un premier cas est apparu. Les enseignements tirés des premières mesures de confinement nous ont permis d’adapter à chaque fois le dispositif. Ils nous ont notamment permis de prendre des mesures équivalentes dans les cas où le confinement ne pouvait pas s’appliquer.

Sans revenir à l’analyse de la baisse de la consommation, je voudrais simplement vous indiquer que 20 millions d’euros supplémentaires ont été débloqués, qui viennent s’ajouter aux 63 millions d’euros que vous avez rappelés. C’est ce qu’a annoncé le Premier ministre lors du congrès annuel de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, qui s'est tenu la semaine dernière.

L’indemnisation de l’espacement des périodes d'élevage bénéficiera à tous les éleveurs spécialisés, c’est-à-dire ceux dont le chiffre d'affaires en volailles est supérieur ou égal à 25 % : un tel seuil donne à cette mesure une extension notable, même si elle ne concerne pas ceux qui tirent de leur exploitation avicole un revenu accessoire.

Ce dispositif prévoit une indemnisation des pertes des éleveurs calculée sur la baisse de production constatée entre le 1er novembre 2005 et le 30 avril 2006. Des avances de 1 000 à 2 000 euros ont été versées sans attendre aux éleveurs sur la base d'une déclaration sur l'honneur, et les trésoriers payeurs généraux disposent d’une enveloppe de crédits qui permettra une indemnisation à hauteur de 3 000 euros, dans le respect de la règle européenne du de minimis.

M. Arnaud Montebourg. On est loin du compte !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Vous avez raison de souligner, monsieur Montebourg, que cela est encore insuffisant. C’est pourquoi la France a, comme de nombreux pays, demandé à l’Union européenne la levée du de minimis dans certains cas, afin de pouvoir verser des sommes à la hauteur de ces situations.

Une mesure de soutien spécifique aux éleveurs de volailles en plein air engagés dans des filières de qualité – je pense naturellement à cette belle AOC de la Bresse – a été notifiée à la Commission européenne, et nous attendons les résultats de notre démarche.

Ces mesures sont complétées par un dispositif de fonds d'allégement des charges d'emprunts pour les éleveurs récents investisseurs et les jeunes agriculteurs, et par une prise en charge des cotisations de la Mutualité sociale agricole des producteurs en difficulté.

Enfin, une mesure spécifique a été prise au bénéfice des éleveurs de volailles situés dans le périmètre de protection défini autour du foyer découvert dans le département de l'Ain, qui ont été contraints d’abattre leurs volailles faute de pouvoir les vendre. Ces éleveurs seront indemnisés totalement : ce sera notamment le cas de M. et Mme Clerc, dont l’élevage de Versailleux a été le premier, et jusqu’ici le seul, frappé par le virus. Nous sommes également parvenus à dégager des quotas laitiers pour les aider à se reconvertir, s’ils le souhaitent, dans une autre activité agricole.

Je ne reviens pas sur les mesures en faveur des entreprises, non plus que sur nos efforts pour obtenir la levée des mesures d’embargo qui affectent nos exportations dans de nombreux pays. J’ai déjà évoqué également la campagne de promotion lancée par le Gouvernement en faveur de la consommation de viande de volaille.

Je dois préciser, pour être tout à fait honnête, que les collectivités – régions et départements – prennent leur part de ces mesures. J’ai ainsi pu constater en Bretagne, où je me trouvais hier, l’engagement de la région et des départements auprès des éleveurs, afin de compléter les mesures prises au niveau national.

Reste le problème européen. Il est vrai que l’Europe n’a pris qu’avec retard la mesure de la crise. Dès janvier, nous avions évoqué ce sujet en Conseil des ministres, et je pensais qu’après avoir « agité le grelot » en février, nous pouvions compter que des mesures seraient prises en mars. Mais la Commission a mis trop de temps à réagir, et des mesures ne devraient pas être prises avant le mois d’avril. Nous comptons naturellement, monsieur Montebourg, qu’elles auront une portée rétroactive, afin que nous puissions les appliquer à la période écoulée avant que ces décisions aient été prises.

J’ajoute que tous ces dispositifs seront susceptibles d’adaptations en fonction de l’évolution de la situation. Nous sommes, tout autant que vous, conscients de notre devoir de solidarité avec une filière plongée dans des difficultés extrêmes dont elle n’est en rien responsable, d’autant que les professionnels jouent parfaitement le jeu et appliquent scrupuleusement les mesures de précaution.

Si ces décisions s’avéraient insuffisantes, notamment dans votre département, qui est au cœur du dispositif, nous les compléterions naturellement par des mesures supplémentaires, dont je vous tiendrais personnellement informé.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces paroles apaisantes. Je veux juste vous rappeler le niveau des crédits qui avaient été consacrés à la gestion de la précédente crise sanitaire, la crise bovine : ce sont des chiffres tirés des observations de la Cour des comptes sur l’exécution de la loi de finances. Pour la seule année 2001, alors que M. Glavany était en charge de l’agriculture, 311 millions d'euros ont été débloqués au profit des éleveurs de bovins, auxquels se sont ajoutés 938 millions accordés par l'Union européenne au titre des mesures d'intervention et de gestion de marché. La « gestion Glavany », c’est donc 311 millions d’euros pour 1,8 million de tonnes de viande bovine, soit une solidarité nationale de 172 euros par tonne. La « gestion Bussereau », c’est 25 millions d’euros pour 1,99 million de tonne de viande de volaille, soit une solidarité nationale de 12 euros par tonne. Notre pays est encore loin d’être au niveau des difficultés qu’il rencontre ! Et je me souviens qu’en dépit des efforts consentis alors par la France et l’Union européenne, la filière bovine se sentait abandonnée par les pouvoirs publics.

Vous invoquez les efforts des régions, monsieur le ministre : ce n’est pas à elles d’assumer la solidarité nationale.

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Pourquoi ?

M. Arnaud Montebourg. Elles font déjà ce qu’elles peuvent, en dépit de la faiblesse des crédits dont elles disposent ; en dépit surtout des difficultés que leur suscitent des commissions d’enquête qui viennent surveiller leur fiscalité. Les régions ne peuvent pas se substituer à la solidarité nationale pour résoudre tous les dossiers où elle est actuellement en défaut.

C’est pourquoi au-delà de vos paroles apaisantes, dont nous vous remercions, nous attendons des actes et des décisions. Pour l’instant, cette enveloppe de 25 millions d'euros à destination des seuls éleveurs de volailles est sans commune mesure avec les pertes qu'ils enregistrent actuellement.

M. Yves Bur. Vous souhaitez répondre, monsieur le ministre ?

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Brièvement, monsieur le président. Je tiens simplement à préciser deux points à l’intention de M. Montebourg.

Premièrement, ces mesures sont prises en concertation avec la profession, qui souhaite elle-même qu’elles soient progressives, afin de tenir compte des pertes réelles, qui doivent être chiffrées. Il ne servirait à rien de débloquer immédiatement des millions d’euros supplémentaires, et nous préférons nous adapter à l’évolution de la situation.

Deuxièmement, j’ai bien noté que la comparaison que vous avez faite avec la gestion de Jean Glavany n’était pas à mon avantage !

M. Arnaud Montebourg. On verra à la fin de l’année !

M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Exactement ! Nous savons bien, puisque nous étions alors tous deux parlementaires, vous de la majorité, moi de l’opposition, que M. Glavany n’a pas décidé de ces mesures en un seul jour ! Elles ont été mises en place au fur et à mesure de l’évolution des besoins. Il a même fallu beaucoup de temps et d’insistance de la part de la majorité à laquelle vous apparteniez.

Il faudra donc attendre que nous ayons pris toutes les mesures qu’imposera la situation pour tirer le bilan de notre action.

M. Arnaud Montebourg. J’en conviens, monsieur le ministre.

don d'organes

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec, pour exposer sa question, n° 1528.

M. Yannick Favennec. Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, je souhaite vous interroger sur le don d’organes, notamment sur le consentement ou non au prélèvement d’organes sur des personnes décédées.

Comme vous le savez, cette matière est régie dans notre pays par le principe de la présomption de consentement, instauré par la loi Caillavet de 1976, qui fut suivie par la mise en place d’une procédure d’inscription sur un registre national de refus du don d’organes. En pratique, c’est l’accord de la famille qui prime sur cette présomption, et le principe n’est jamais appliqué à la lettre.

Les chiffres parlent : en 2004, seulement 4 000 personnes ont pu bénéficier d’un greffon, sur les 11 000 en attente d’une greffe d’organe. On estime que deux cents patients décèdent chaque année faute d’avoir pu bénéficier d’une greffe.

Des sondages ont montré que, toujours en 2004, si 74 % des Français étaient favorables au don de leurs propres organes, seuls 40 % ont fait part de leur choix à leurs proches.

Afin d’éviter que les familles s’opposent au choix du défunt, il m’est apparu nécessaire que le registre national automatisé de la carte Vitale 2 mentionne le consentement ou l’opposition de son titulaire au prélèvement d’organes. En effet, cette carte est appelée dans les mois qui viennent à devenir une véritable carte d’identité médicale.

La proposition de loi que j’ai déposée dans ce sens a rencontré un vif succès, notamment auprès d’associations telles que France ADOT, Association pour le don d’organes et de tissus humains. J’ai pu le constater hier, alors que je participais à Laval, dans ma circonscription, à une réunion nombreuse, au cours de laquelle la présidente de France ADOT a exprimé son soutien à ma proposition de loi.

Cette réunion m’a également permis de mesurer la nécessité d’organiser régulièrement des campagnes nationales d’information, afin de sensibiliser nos concitoyens à ce geste généreux qu’est le don d’organes.

J’aimerais connaître, monsieur le ministre, votre position en ce qui concerne l’inscription sur le registre automatisé de la carte Vitale 2 du consentement ou de l’absence de consentement au don d’organe. J’aimerais savoir également quels sont les projets du Gouvernement en matière de campagnes de sensibilisation de nos concitoyens à cette question.

Je profite enfin de cette occasion pour vous faire part du souhait de France ADOT de bénéficier d’un siège au sein de l’Agence de biomédecine.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, votre question me donne l’occasion de rappeler, au nom de M. le ministre de la santé et des solidarités, le régime juridique du don d’organes, que vous connaissez d’ailleurs parfaitement.

La première loi de bioéthique, adoptée en 1994, a confirmé le principe du consentement présumé en matière de dons d’organes. Cela signifie que seul un refus du don d’organes expressément formulé de son vivant peut s’opposer au prélèvement d’organes sur une personne décédée. L’absence de consentement doit être mentionnée au registre national des refus du don d’organes, auquel chacun peut s’inscrire, ou bien tout simplement exprimée à l’entourage familial ou amical. Cette règle de présomption du consentement a été réaffirmée en 2004 par le législateur, à l’occasion du réexamen des lois de bioéthique.

C’est la raison pour laquelle nous n’envisageons pas à l’heure actuelle, tout en partageant vos objectifs, l’inscription sur la carte Vitale du consentement exprès au don d'organe. En effet, le principe du consentement présumé signifie que seul le refus doit être expressément formulé.

Il est cependant tout à fait possible de prévoir la mention à titre facultatif – chacun fera ce qu’il voudra – que le titulaire de la carte a bien été informé de la réglementation en vigueur en matière de don d’organes. Cette formulation remporte l'assentiment de plusieurs associations de patients et de l'ensemble de la communauté scientifique. Sans remettre en cause le consentement présumé qui est de principe en France, elle permettrait d’emblée le prélèvement, le titulaire de la carte ayant fait préciser qu'il était informé du régime du don d'organes et n’étant pas inscrit sur le registre du refus. Le principe du consentement présumé s’appliquant, l'équipe médicale serait alors dispensée de demander l'avis de la famille.

Vous souhaitez aussi, monsieur le député, connaître la position du ministre de la santé et des solidarités sur la nécessité de campagnes d’information régulières en matière de don d’organes. Nous partageons naturellement ce sentiment, et le Gouvernement envisage de continuer dans cette voie.

Vous me demandez également si l’Association pour le don d’organes et de tissus humains peut être représentée au sein de l’Agence de la biomédecine. Cette association a fait partie du conseil d’administration de l’Établissement français des greffes, mais la création de l’Agence de la biomédecine a modifié la situation. Le nouveau dispositif juridique ne prévoit plus de représentation des associations au conseil d’administration. Il comporte, en revanche, un conseil d’orientation au sein duquel les associations sont représentées, dans la limite de six représentants d’associations de personnes malades et d’usagers du système de santé, de personnes handicapées et d’associations familiales. Il est vrai que, comme vous l’avez rappelé, France ADOT n’a pas été inscrite au nombre de ces associations, parce qu’elle n’a pas ce statut.

Je tiens cependant à préciser que l’Agence de la biomédecine collabore déjà très étroitement avec France ADOT et d’autres associations, et entend bien poursuivre cette collaboration.

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Merci, monsieur le ministre, de ces explications et de ces informations. Il me semble cependant dommage de ne pas franchir le pas qui consisterait à inscrire sur la carte Vitale, au-delà du fait que le patient est informé, son consentement ou non-consentement au don d’organes.

formation universitaire des orthophonistes

M. le président. La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour exposer sa question, n° 1517.

M. Francis Hillmeyer. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Le 15 novembre dernier, les orthophonistes étaient en grève. Ils n’avaient pas de revendications sur les salaires ou les horaires mais voulaient simplement défendre leur profession en termes de formation.

Il semble que le ministère de la santé souhaite uniformiser l’ensemble des cursus des professions paramédicales. Un groupe de travail composé d’orthophonistes confirmés, d’enseignants, d’étudiants, de chercheurs en orthophonie et de directeurs d’établissement étudie un projet de réforme de cette profession. Le premier constat qui l’inspire est la particularité du métier et la nécessité d’évoluer vers un master d’orthophonie délivrant un diplôme d’exercice professionnel et permettant une évolution de carrière. À cette fin, 300 ECTS sont nécessaires : avec aujourd’hui un chiffre de 260, on n’est pas loin d’atteindre ce niveau. Cinq facultés sont prêtes à soumettre au circuit d’habilitation ce master spécialité orthophonie.

Pour l’instant, la crainte des professionnels est l’harmonisation de toutes les professions de santé avec une formation initiale en trois ans, qui mêlerait kinésithérapeutes, infirmières, orthophonistes et bien d’autres, et serait dispensée dans les écoles actuelles. En parallèle, une licence et un master non diplômants permettraient de changer de profession assez facilement. Tel n’est pourtant pas le but à atteindre, comme le prouvent, statistiques à l’appui, la majorité des orthophonistes, dont 1 % seulement ont suivi antérieurement une année de médecine et dont la vocation a toujours été de pratiquer ce métier.

Les professions de santé évoquées sont si différentes entre elles qu’elles doivent être examinées dans leur spécificité.

Actuellement, leur formation reconnue au niveau du DEUG permet aux orthophonistes qui le souhaitent de s’inscrire en licence de sciences du langage ou de psychologie. Il faut leur ouvrir l’accès à la recherche et faciliter l’inscription dans un troisième cycle de formation universitaire, en vue d’un doctorat.

Les orthophonistes perçoivent le projet du ministère comme un recul, alors que la recherche spécifique en orthophonie devient indispensable, et ils craignent une dévalorisation de leur exercice professionnel. Quel est l’état d’avancement de ce projet ? Prendra-t-il en compte les réflexions menées depuis quatre ans par ces professionnels ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Hillmeyer, l’orthophonie est une profession avec laquelle le ministère de la santé et des solidarités entretient des rapports étroits.

Conformément au processus de Bologne, les États membres de l’Union européenne ont pris l’engagement de mettre en place, d’ici à 2010, une architecture commune des formations d’enseignement supérieur, afin de faire converger les systèmes nationaux vers un système commun reposant sur trois niveaux de formation : la licence, le master et le doctorat – ou LMD.

Le Gouvernement souhaite valoriser comme il convient l’exercice professionnel de l’orthophonie, ce qui implique non seulement de ne pas diminuer la durée des études des orthophonistes, mais bien au contraire d’ouvrir à ceux-ci des grades universitaires qui ne leur sont pas accessibles aujourd’hui. Il s’agit donc de mettre en cohérence une formation professionnalisante liée au cœur du métier et une validation universitaire dans le nouveau cadre du LMD.

Une réflexion autour de groupes de travail est en cours, menée conjointement par le ministère de la santé et de la solidarité et par le ministère de l’éducation nationale. En ce qui concerne les orthophonistes, deux réunions ont déjà eu lieu, en novembre 2005 et en février 2006. Le ministère de la santé, responsable de la qualité des soins et de la compétence des professionnels de santé définira avec les orthophonistes, à l’issue de cette concertation, le contenu exact du cahier des charges de la formation permettant l’exercice de l’orthophonie.

Il appartient aux universités et à leurs instances, selon leurs règles propres, d’évaluer les projets de masters professionnels que vous évoquez. Soyez assuré, monsieur le député, de toute l’attention qui sera portée à cette profession dans le cadre de cette réforme.

M. le président. La parole est à M. Francis Hillmeyer.

M. Francis Hillmeyer. Merci, monsieur le ministre, de ces précisions. Les orthophonistes et leur fédération souhaitaient, en effet, un dialogue constructif avec le ministère. Je souhaite donc que perdure l’état d’esprit positif dont vous témoignez aujourd’hui.

situation financière du centre hospitalier d’Issoire dans le Puy-de-Dôme

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour exposer sa question, n° 1522.

M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le ministre, le centre hospitalier d’Issoire est malade, et même très malade, car sa situation financière a été jugée catastrophique, avec un déficit cumulé de 1 982 137 euros à la fin de l’exercice 2004. L’équilibre financier de l’hôpital est préoccupant depuis des années, avec une dégradation du fonds de roulement net et un poids de la dette élevé, qui classe l’établissement parmi les hôpitaux présentant une dépendance financière forte.

Un audit commun mené par la trésorerie générale de la région Auvergne et du département du Puy de Dôme et par l’agence de l’hospitalisation de la région Auvergne révèle l’accumulation d’un important déficit depuis 2003, aggravé en 2004 par le cumul d’un résultat négatif de 727 000 euros et d’un report à nouveau déficitaire de 633 000 euros, ce qui situe l’établissement dans l’échantillon des centres hospitaliers présentant le ratio le plus dégradé.

De plus, la dette de l’hôpital se situe à un niveau élevé, avec une croissance très importante des charges d’exploitation. On note l’absence de tableau des effectifs et de contrat d’objectifs et de moyens, et l’on découvre avec surprise un différentiel de 19,71 emplois à temps plein entre l’estimation de la direction et celle de l’audit. Ce dernier dénonce l’insuffisance – voire l’inexistence – du suivi des dépenses et des recettes autorisées, et en particulier l’inefficacité totale des moyens financiers supplémentaires apportés à la dotation de l’établissement, malgré une dotation correspondant globalement à l’activité produite.

Le directeur de l’hôpital est parti prématurément en retraite en juin 2003 ; son successeur, malade, a été remplacé par un directeur intérimaire, qui vient lui-même d’être remplacé. Le directeur des ressources humaines est parti en juillet 2004. Le cadre infirmier faisant fonction de directeur des soins a été mis en retraite pour invalidité en juin 2005 – il était d’ailleurs souvent absent pour cause de maladie ou de missions à l’extérieur de l’établissement, ce qui laisse supposer un certain laxisme dans l’activité globale de l’hôpital.

Aujourd’hui, le président du conseil d’administration a proposé des mesures de redressement, sur les préconisations du directeur intérimaire :

Premièrement, une limitation drastique de l’investissement prévu, au risque de prendre du retard, voire de condamner l’existant à la vétusté ;

Deuxièmement, l’externalisation ou l’automatisation d’un certain nombre de services, comme la stérilisation ;

Troisièmement, la suppression de postes, globalement ou les week-ends et jours fériés ;

Quatrièmement, la modification des plannings de travail ;

Cinquièmement, le gel de la formation continue afin d’éviter d’avoir à remplacer le personnel en formation ;

Sixièmement, la limitation des promotions professionnelles ;

Septièmement, la fermeture des lits en période estivale, mesure dont on a déjà mesuré les effets délétères dès 2005 avec, en soins de suite et de réadaptation, dix lits sur trente fermés du 23 juillet au 31 décembre ;

Huitièmement, enfin, le rapprochement entre l’hôpital public et la clinique privée locale pour l’activité chirurgicale, dont la pérennité n’est ainsi plus assurée dans le service public.

L’établissement étant trop endetté, il ne sera pas possible de recourir à l’emprunt pour renouveler les équipements, au risque de ne pouvoir assurer correctement un certain nombre d’actes. De même, l’importance des suppressions d’emplois se traduira inévitablement par une baisse de la qualité des soins et des services aux patients. Les critères de qualité des soins et des services n’ont d’ailleurs jamais été évoqués dans les mesures préconisées et les seuls éléments pris en considération sont des éléments purement comptables.

Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, je vous poserai trois questions. D’abord, l’hôpital public gardera-t-il encore un service de chirurgie, ou ce dernier sera-t-il entièrement transféré au privé, alors que partout en France on constate une dérive des dépassements d’honoraires du secteur privé, et donc une diminution de l’accès aux soins pour tous ?

Ensuite, comme nous ne pouvons imaginer que les embauches à l’hôpital d’Issoire aient reposé sur d’autres critères que la nécessité médicale, quelles seront les conséquences des suppressions d’emplois sur la qualité des soins et du service hospitalier ?

Enfin, envisagez-vous un financement supplémentaire pour cet hôpital en grande difficulté ?

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, la situation du centre hospitalier d’Issoire – belle ville brillamment illustrée par Jules Romains – tient particulièrement à cœur à l’agence régionale de l’hospitalisation.

Une analyse conduite en 2005 a fait apparaître une situation financière dégradée. Pour y remédier, cette analyse a dégagé des pistes de redressement et de réorganisation. Elle envisage notamment le rapprochement avec la clinique de la ville, la coopération avec les établissements brivadois ou encore des mesures de gestion et de réorganisation interne.

Ces perspectives de redressement sont fondées sur la reconnaissance du rôle pivot de l’établissement au sein du territoire de santé Issoire-Brioude, notamment dans le domaine de la gynécologie-obstétrique.

Le maintien d’une activité de chirurgie passe par la coopération entre les deux établissements de santé, dont les modalités de rapprochement seront déterminées en fonction de l’activité réelle de chacun des partenaires.

Les deux postes de cadres de direction vacants sont aujourd’hui pourvus : celui de directeur adjoint depuis le 1er janvier et celui de directeur depuis le 1er février.

Les mesures de réorganisation interne, qui sont un gage de maintien de la qualité des soins, participeront également, selon un calendrier pluriannuel, au rétablissement des équilibres financiers. Les engagements pris par l’établissement seront tenus. C’est à cette condition que le centre hospitalier peut jouer son rôle de pivot pour le territoire d’Issoire-Brioude.

Enfin, le suivi du plan de retour à l’équilibre permettra de déterminer si des accompagnements financiers complémentaires sont justifiés, comme cela a déjà été fait en 2005.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec la plus grande attention, car le sujet mérite toute notre sollicitude. Malheureusement, je ne peux pas vous prendre au sérieux. Soit vous n’êtes pas sincère, ce que je ne saurais imaginer ; soit vous ne connaissez pas le dossier, ce que je ne peux croire ; soit vous argumentez à partir des éléments que vous a fournis le directeur de l’ARH, ce dont je suis convaincu car j’ai reconnu dans votre réponse les mots mêmes qu’il a employés. Si tel est le cas, c’est une escroquerie intellectuelle, car cela ne correspond pas à la vérité.

Il faudra un jour, monsieur le ministre, regarder la vérité en face. Il y a certes eu des erreurs, ici comme ailleurs. Ainsi, dès l’origine, on savait qu’un service de chirurgie de vingt lits implanté à Issoire serait déficitaire, car le seuil de rentabilité ne serait pas atteint. De même, on refuse un scanner à Issoire mais, pour des raisons purement électoralistes, on en implante un à Saint-Flour, ville distante de plusieurs dizaines de kilomètres et dont l’hôpital n’emploie pas de radiologue.

La gestion de l’hôpital d’Issoire témoigne d’une incompétence inacceptable. On n’y trouve pas de tableau d’effectifs. Quant au déficit, certes grave, il existait déjà en 1999, en 2000 et en 2001, et il figure dans le rapport d’audit – que l’ARH ne vous a peut-être pas transmis… Lors de la mise en place des 35 heures – ô combien dénoncée ! –, pour quinze postes et demi autorisés, on a procédé à trente-quatre embauches. Ne pouvant croire qu’on ait embauché des gens pour le simple plaisir de le faire ou pour des raisons purement électoralistes, je suis contraint de penser que la qualité des soins pâtira de la suppression de ces postes. En outre, des dispositions non réglementaires relatives au travail ont été négociées.

Je regrette que vous n’évoquiez pas la responsabilité, dans cette gestion, de la direction de l’hôpital, de la direction des ressources humaines et du président du conseil d’administration.

Je me souviens avoir obtenu naguère, à la demande du directeur de l’hôpital, une aide exceptionnelle de 6 millions de francs pour réaliser des travaux indispensables à la mise en sécurité.

Non, monsieur le ministre, la raison de la réorganisation ne tient pas seulement au déficit : c’est un argument trop facile ! J’ai ici des documents sur le projet du pôle de santé public-privé et le texte de la conférence de presse, que le directeur de l’ARH aurait dû vous donner !

M. le président. Monsieur Bacquet, il faut conclure.

M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le président, je vous ai entendu et vous savez combien je vous respecte, mais je ne peux pas accepter que de telles contrevérités aient été dites, ni qu’un fonctionnaire de l’État induise un ministre en erreur ! Je sais, monsieur le ministre, que vous ne manquerez pas de vérifier ce que je viens de dire, et de faire en sorte que le directeur de l’ARH arrête de dire n’importe quoi et de vous induire en erreur. Depuis dix ans – ce n’est donc pas la conséquence du déficit actuel –, on réfléchit à propos du pôle public-privé ; les études qui ont été menées par deux bureaux d’études ont été intégralement payées par le public alors qu’elles servent le privé ! Cela, le directeur l’ARH ne l’écrit pas, bien sûr. Par contre, il est dit dans l’analyse que l’état de santé de la population locale se dégrade. Or la seule solution que l’on applique, c’est de diminuer l’accès aux soins. On parle de mutualisation des structures, en précisant « libre choix des patients », mais il n’y a pas de libre choix lorsque l’exercice se fait en secteur II, à honoraires libres, et que, dans ces conditions, les patients du bassin d’Issoire, « pôle pivot » comme vous l’avez dit, n’ont d’autre solution que de partir à Clermont-Ferrand parce qu’ils n’ont pas accès au secteur II. C’est inacceptable !

Certes, vous avez dit que le pôle gynécologique-obstétrique aurait un intérêt. Mais la chirurgie publique va disparaître.

Quant à l’accès aux soins, c’est le point fondamental. Que l’on parle de qualité des soins, d’accord, et en tant que médecin je sais ce que cela veut dire ; mais la qualité des soins n’empêche pas que la mission première de l’hôpital est d’être accessible à tous. Or lorsque l’on privatise une partie de l’hôpital, l’accès aux soins n’est plus égal pour tous les citoyens.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je ne peux pas laisser mettre en cause dans cet hémicycle de hauts fonctionnaires de la République comme le directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation.

M. Jean-Paul Bacquet. Pourtant je le fais ! Et sans arrière-pensées !

M. Jean-Pierre Brard. Je pourrais en citer d’autres !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les agences régionales de l’hospitalisation n’ont en vue que l’intérêt général : celui de la santé publique.

M. Jean-Pierre Brard. Tu parles !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le travail qui a déjà été accompli en faveur du centre hospitalier d’Issoire pour mener à bien son redressement en témoigne. Ce travail va se poursuivre, monsieur le député, et j’entends bien que les hauts fonctionnaires de la République ne soient pas mis en cause dans les fonctions très difficiles qu’ils remplissent.

M. Jean-Paul Bacquet. Votre interprétation de mes propos est inacceptable ! Ce n’est pas les fonctionnaires que je remets en cause, c’est l’incompétence !

M. le président. Monsieur Bacquet, vous n’avez plus la parole !

perspectives de l’hôpital de Pont-Audemer dans l’Eure

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, pour exposer sa question, n° 1516.

M. Hervé Morin. Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, l’offre de soins dans le nord-ouest du département de l’Eure dépend pour l’essentiel de l’hôpital de Pont-Audemer, encore appelé centre hospitalier de la Risle. Cet hôpital a fait l’objet de restructurations importantes et d’efforts considérables pour développer une médecine de qualité. Cependant, son avenir et sa pérennisation dépendent pour l’essentiel de deux décisions qui doivent être prises dans le cadre du nouveau schéma régional d’organisation sanitaire, deux décisions capitales si l’on veut maintenir une offre de soins satisfaisante dans cette partie du département. Il s’agit, d’une part, de la création d’un service d’urgence, un SMUR ; d’autre part, du maintien d’un service de chirurgie.

J’avais déjà eu l’occasion d’alerter M. Xavier Bertrand sur cette question. Le ministre de la santé m’avait répondu que tout serait fait par le Gouvernement pour que nous ayons à la fois ce service d’urgence et le maintien du service de chirurgie. J’aimerais savoir, à l’aube de ce nouveau schéma régional, ce que le Gouvernement entend faire.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Morin, je vais avoir le plaisir de confirmer la réponse positive que vous aviez déjà reçue de Xavier Bertrand sur ces deux points.

Les travaux réalisés par les groupes thématiques qui ont contribué à l’élaboration du nouveau schéma régional d’organisation sanitaire – il sera adopté officiellement le 30 mars, c’est-à-dire après-demain – ont mis en évidence des fragilités au centre hospitalier de Pont-Audemer, notamment au regard de la démographie médicale et des volumes d’activité. Des travaux complémentaires ont ensuite permis de préciser les évolutions nécessaires au maintien des activités pour assurer la prise en charge des populations du bassin dans les meilleures conditions de sécurité sanitaire.

Le schéma régional prévoit tout d’abord de transformer la maison périnatale, mise en place à titre expérimental en octobre 2003, en centre périnatal de proximité, et cela pour assurer le suivi prénatal et postnatal des femmes enceintes en médecine ambulatoire.

Deuxièmement, une hospitalisation complète chirurgicale de proximité sera maintenue dans le cadre d’une coopération structurée avec le groupe hospitalier du Havre, établissement public de référence du territoire de santé dont Pont-Audemer relève. Son mode de fonctionnement favorisera la programmation des actes. Le bloc opératoire sera fermé la nuit. Il pourra être ouvert pour prendre en charge les situations exceptionnelles et la chirurgie ambulatoire. J’ajoute que l’offre de spécialités – ORL, traumatologie, urologie – devra être diversifiée, sous réserve bien sûr du respect des équilibres financiers. Un bilan de ces évolutions sera fait en 2009.

Enfin, la création d’un service mobile d’urgence et de réanimation, ou d’une antenne de service mobile d’urgence et de réanimation, permettra d’assurer une meilleure couverture territoriale et ainsi d’améliorer les délais de prise en charge des populations du bassin.

Ces deux derniers axes sont conformes aux engagements que le ministre de la santé et des solidarités avait pris en septembre 2005. Dès le 30 mars prochain il appartiendra aux équipes de l’établissement de Pont-Audemer d’élaborer, en application du schéma régional, un projet médical en partenariat avec le groupe hospitalier du Havre. La démarche de contractualisation avec l’agence régionale de l’hospitalisation pourra alors être engagée.

carte sanitaire dans les pyrénées-orientales

M. le président. La parole est à M. Henri Sicre, pour exposer sa question, n° 1519.

M. Henri Sicre. Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, lorsque je suis au Palais-Bourbon, que je rencontre des députés de zones rurales et que nous évoquons ensemble les problèmes de leur circonscription, beaucoup d’entre eux expriment leur désarroi et leur lassitude devant des stratégies qui amènent les entreprises à concentrer leurs activités sur un seul site urbain pour plus de rentabilité. C’est souvent le problème dans les zones rurales, qui se trouvent ainsi privées d’emplois. Malgré les interventions des parlementaires, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition, le Gouvernement finit par dire qu’il n’a pas de prise sur ces stratégies privées. Parfois, il apporte aux élus un peu de baume au cœur en disant qu’il veillera à ce que toutes les mesures soient mises en œuvre pour le maintien d’une activité dans les zones ainsi affaiblies.

Après cet aperçu général, j’en viens à un domaine où L’État a lui seul la maîtrise d’œuvre des opérations, au travers des agences régionales d’hospitalisation. Celles-ci, sans concertation, souvent même avec l’aide des préfets, organisent une carte sanitaire prélevant des lits de cure et de post-cure dans des zones où ils sont implantés depuis toujours pour les concentrer dans l’agglomération urbaine du chef-lieu, procédant ainsi à une véritable désertification d’une grande partie de l’espace départemental. D’après les informations que j’ai obtenues auprès de mes collègues, c’est un système généralisé à l’ensemble des départements qui possèdent de longue date ce type d’établissements.

Dans mon département, les Pyrénées-orientales, il en a été ainsi dans un passé récent, pour les secteurs de la Cerdagne, du Capcir, de la Côte Vermeille et du Vallespir. Et la détérioration se poursuit, monsieur le ministre ! Parmi les projets en cours, je citerai le centre héliomarin de Banyuls-sur-Mer, comptant 111 lits dont 51 en rééducation fonctionnelle et qui, malgré les propositions de reconstruction sur place de son maire, sera éclaté et recentré au plus près de l’agglomération chef-lieu ; le centre thermal de réadaptation fonctionnelle de Tuès-les-Bains, doté de 80 lits, dont le déménagement est en cours ; le centre de Supervaltech, à Amélie-les-Bains, avec 90 lits, qui devrait être prochainement transféré ; enfin, le Château Bleu, à Arles-sur-Tech, dont les 65 lits sont eux aussi menacés d’un transfert au chef-lieu.

Sachant qu’on estime qu’un lit génère un emploi, voici des exemples de déménagement du territoire et de régression économique et démographique imposés par les services de l’État. Car il ne s’agit pas là de profit ni d’intérêts stratégiques d’entreprises puisque, sur les quatre sites que je viens de mentionner, un seul est privé – le centre de Supervaltech – tandis que les autres sont des établissements à but non lucratif.

Monsieur le ministre, je vous demande si vous pouvez annoncer l’arrêt de ces procédés et si des mesures de réparation, déjà envisagées par l’État, seront mises en place pour compenser les mutilations dont ont été victimes tant l’économie que le développement de ces territoires.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Sicre, je tiens à vous dire qu’il est rare qu’une concertation soit aussi intense, fournie et approfondie que celle qui a donné lieu à la présentation, il y a quelques jours, du nouveau schéma régional d’organisation sanitaire de votre région. Plusieurs dizaines de réunions avec les professionnels se sont tenues dès le mois de janvier 2005. En avril, l’agence régionale a réuni l’ensemble des établissements de la région pour leur présenter les premières orientations du schéma. Enfin, en octobre, les conférences sanitaires de territoire – qui comprennent de nombreux élus – ont été mises en place. Elles ont été invitées à réfléchir sur leur projet de territoire. Une réunion spécifique pour la formation et l’information des élus membres de ces conférences a été organisée en janvier 2006. Tous leurs présidents, élus locaux ou députés, ont été rencontrés, avec le bureau des conférences, parfois à plusieurs reprises. Par ailleurs, afin d’amorcer l’articulation avec le secteur personnes âgées et handicapées, la directrice de l’ARH, Mme Dardé, a été reçue à sa demande par chacun des présidents de conseil général. Au mois de février, le projet de schéma a été adressé aux cinq préfets de la région. Ils ont fait connaître par écrit leurs observations sur ce document, et la directrice de l’ARH a présenté le projet de SROS devant le comité administratif régional le 23 mars. Le comité régional de l’organisation sanitaire et le comité régional de l’offre de soins médico-sociale viennent de donner un avis favorable au projet de schéma régional de la région Languedoc-Roussillon. Vous voyez que la concertation a été particulièrement intense et particulièrement longue pour l’élaboration de ce SROS.

S’agissant de la répartition de l’offre sanitaire, il n’y a pas de privilège en faveur de l’agglomération chef-lieu. Il n’a pas été demandé au centre de Thuès de se délocaliser. Bien au contraire, le projet de schéma régional cherche à lui donner les moyens de se maintenir sur place en s’appuyant sur un établissement de la plaine du Roussillon en cas de problème de permanence médicale. Pour leur part, les responsables du centre insistent pour regrouper leur activité avec celle d’un autre établissement qu’ils possèdent sur la côte, et ce pour des raisons économiques. Mais je vous précise que l’agence régionale n’a pas retenu cette dernière option dans le SROS et qu’elle propose le maintien à Thuès.

Par ailleurs, les opérations retenues dans le SROS qui participent à une amélioration de l’offre de soins ont toutes été proposées par les responsables des établissements concernés, avant même la publication du projet de schéma régional. Il est donc normal que celui-ci les reprenne.

Il s’agit tout d’abord du centre Supervaltech implanté actuellement à Montbolo. Les promoteurs avaient présenté leur projet à l’ARH il y a de nombreux mois. Il leur avait été alors conseillé de se rapprocher des élus locaux, ce qu’ils ont fait.

Il s’agit aussi du Château Bleu à Arles-sur-Tech et du Centre héliomarin de Banyuls-sur-Mer, qui sont gérés par la même association. Celle-ci maintient une partie de son secteur médico-social – une maison d’accueil spécialisée – à Banyuls-sur-Mer et relocalise son IME à Perpignan, à la demande du préfet et suite à une enquête administrative.

S’agissant de ses lits sanitaires, l’association a délibéré il y a quelques mois en faveur de la localisation de l’ensemble de l’offre sanitaire de Banyuls-sur-Mer et d’Arles-sur-Tech sur un nouveau site au sein de l’agglomération perpignanaise. Dans ce cas également, le schéma régional ne fait que reprendre les propositions des gestionnaires, qui sont justifiées puisqu’elles rapprochent les unités de soins des zones les plus peuplées du département, conformément à un impératif de qualité, et qu’elles permettent un regroupement de l’offre sanitaire, dans un souci d’efficience.

M. le président. La parole est à M. Henri Sicre.

M. Henri Sicre. Nous n’étions pas sans savoir, monsieur le ministre, qu’une réflexion était engagée depuis de nombreux mois. Cependant, je le répète, la partition était déjà écrite, puisque les ARH exerçaient la maîtrise d’œuvre.

Vous avez évoqué la nécessité de regrouper l’offre sanitaire dans l’agglomération perpignanaise, zone de population la plus dense du département. Or c’est bien là que le bât blesse : l’État concentre résolument ses services dans une zone déjà dynamique sur le plan démographique et, par là même, accélère l’exode dans une partie du département ainsi privée de toute source d’activité économique. Environ soixante-dix emplois vont en effet quitter Montbolo pour l’agglomération perpignanaise, c’est-à-dire aussi soixante-dix familles dont les conjoints sont en âge d’activité : vous affaiblissez les zones rurales !

Si vous ne voulez pas nous entendre, il faudra bien envisager d’autres formes de protestation. Je ne vois pas pourquoi les maires accepteraient de bon cœur d’accueillir des établissements dont le transfert paupérise d’autres zones. Je ne vois pas non plus pourquoi le conseil général ne refuserait pas lui aussi une telle démarche.

Ce n’est certes pas dans cet hémicycle que nous aurons à régler la question mais il s’en faut, monsieur le ministre, que vous ayez répondu à mes préoccupations sur l’arrêt de ces transferts et sur la mise en œuvre de mesures de réparation, afin que les zones rurales puissent retrouver, sous une autre forme, tous les emplois qu’elles perdent. Votre silence confirme que les mesures mises en œuvre accélèrent la mutilation de ces zones.

répartition des crédits de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie dans l’Indre

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet, pour exposer sa question, n° 1518.

M. Jean-Paul Chanteguet. Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, ma question concerne l’activité de la CNSA, Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Cette dernière est en partie financée par la journée de solidarité, à hauteur de 2 milliards d’euros, et par la CSG, pour environ 1 milliard.

Sur ces 3 milliards d’euros, 2 sont ensuite reversés aux conseils généraux pour financer l’APA, allocation personnalisée d’autonomie, et la PCH, prestation de compensation du handicap.

Pour ce qui concerne les structures qui accueillent des personnes âgées, je souhaiterais que vous me précisiez le montant et la répartition des crédits attribués en 2005 par la CNSA aux établissements du département de l’Indre, où vous avez participé la semaine dernière à cinq inaugurations de structures pour personnes âgées ou handicapées. Au cours de ce déplacement, vous avez annoncé la création de 12 emplois pour un établissement de 25 lits hébergeant des personnes âgées dépendantes dans le secteur de La Châtre.

Cette décision évidemment nécessaire ne saurait faire oublier les importants besoins qui existent dans l’Indre. Aussi souhaiterais-je, monsieur le ministre, que vous m’indiquiez si les crédits dont bénéficie la CNSA ont permis – ou vont permettre – de doter de moyens humains supplémentaires les établissements pour personnes âgées de ce département dont les difficultés ne sont plus à démontrer.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Chanteguet, j’étais en effet dans votre département jeudi dernier, à l’invitation de M. Nicolas Forissier. J’ai ainsi pu m’aviser des besoins de l’Indre et soutenir des projets que je crois très utiles à ses habitants.

Vous m’avez interrogé sur la répartition des crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Comme vous le savez, ceux-ci proviennent, à hauteur de 2 milliards d’euros, des fonds collectés à l’occasion de la journée de solidarité. En créant cette journée, nous avons voulu améliorer notre capacité à répondre aux besoins de la population, qu’il s’agisse des personnes âgées dépendantes ou des personnes handicapées.

Jusqu’alors, cette nouvelle prestation qu’est l’allocation personnalisée d’autonomie ne disposait pas des financements nécessaires à son application correcte. La journée de solidarité est une journée de travail, donc de production supplémentaire, qui permet à la fois l’expression et le financement de la solidarité par l’enrichissement de notre pays plutôt que par son appauvrissement, comme cela eût été le cas avec la création d’impôts nouveaux : on l’a constaté à d’autres périodes de notre histoire !

M. Jean-Pierre Brard. On rêve ! C’est Alice au pays des merveilles ! Et taxer les riches, ça ne vous viendrait pas à l’esprit ? (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Brard, je vous en prie !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cette journée de solidarité permet non seulement de financer enfin l’allocation personnalisée d’autonomie, mais aussi de médicaliser davantage nos établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes et de créer de nouvelles places pour accueillir les personnes handicapées. Chacun sait que la France avait un lourd retard en ce domaine.

Comme vous le savez, grâce à la réforme de l’assurance-maladie et à la journée de solidarité, les crédits médico-sociaux destinés aux établissements qui accueillent des personnes âgées dépendantes augmentent de 13,5 % en 2006 !

M. Gabriel Biancheri. En effet !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cela représente un effort sans précédent.

Nous avions décidé de créer, en quatre ans, 10 000 nouvelles places pour personnes âgées dépendantes : nous en aurons financé 20 000 en 2007, soit deux fois plus !

Nous avons aussi mis en œuvre un plan très ambitieux de rénovation et d’humanisation de nos établissements pour personnes âgées, qui mobilise 500 millions d’euros de la Caisse nationale de solidarité.

Pour les personnes handicapées, l’augmentation des crédits médico-sociaux sera quant à elle de 6 % : c’est là aussi une hausse sans précédent.

Ces moyens nouveaux, 800 millions d’euros au total, sont d’une ampleur inédite. L’Indre a en effet de nombreux besoins de proximité. Les crédits affectés à ce département s’élèvent à près de 28 millions d’euros en 2006, contre 25,7 millions en 2005, soit une augmentation de 7,71 %.

Si l’indice de vieillissement est bien supérieur à la moyenne nationale – 108,5 contre 65 –, ce département est correctement doté en places de services de soins infirmiers à domicile, puisque le taux est de 17,57 %, contre 15,22 % pour la région Centre.

Plus d’un million d’euros supplémentaires permettront d’améliorer la médicalisation des établissements. Vous savez comme moi que l’Indre en a effectivement besoin.

Quant à la création de places, plus de 200 000 euros y seront consacrés, ce qui représente trente places supplémentaires pour les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes dans le département.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.

M. Jean-Paul Chanteguet. J’ai bien noté les chiffres des crédits affectés aux établissements pour personnes âgées dépendantes dans le département de l’Indre que vous nous avez donnés, monsieur le ministre.

Cependant, les responsables locaux souhaiteraient que ces crédits se transforment en créations de postes. Or nous attendons toujours la signature des conventions tripartites, qui concernent d’ailleurs d’autres départements. Nous sommes en effet confrontés à des situations de blocage. Les personnels, comme les élus locaux, sont particulièrement attentifs et inquiets car de nombreux établissements ne disposent plus aujourd’hui des moyens humains nécessaires à leur fonctionnement.

On constate en outre que des emplois permanents sont remplacés par des recrutements dans le cadre de CAE – contrats d’accompagnement vers l’emploi –, comme le président du conseil général y engage les directeurs d’établissement. J’ignore si cette inquiétante politique est spécifique au département de l’Indre, mais je ne peux que la dénoncer et vous répéter, monsieur le ministre, que nous attendons des moyens humains.

conséquences de la déconcentration
de l’URSSAF de Paris-Région parisienne

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour exposer sa question, n° 1525.

M. Jean-Pierre Brard. Je suis persuadé, monsieur le président, que cette question va vous intéresser, vous qui jouissez d’un statut spécial dans votre région…

Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, j’ai reçu récemment à Montreuil une délégation de salariés qui m’ont exposé leurs vives préoccupations devant les problèmes rencontrés par l’URSSAF de Paris-Région parisienne à l’occasion de sa déconcentration.

Comme cela était prévisible, la multiplicité des sites, aujourd’hui en location, engendre un surcoût important pour le budget de la sécurité sociale. La situation de l’URSSAF est inquiétante, car selon les instructions de l’ACOSS, elle devrait fonctionner durant le premier semestre 2006 avec un budget initial équivalent à la moitié de celui de 2005, qui était déjà insuffisant.

En outre, alors que le manque d’effectifs est estimé par les organisations syndicales à 250 postes, aucune embauche ne serait possible sans l’accord de la tutelle, et les départs en retraite ne seraient plus remplacés.

La nouvelle convention d’objectifs de gestion, quant à elle, prévoit une mutualisation des moyens des URSSAF, leur segmentation et – tenez-vous bien, monsieur le ministre – la suppression de 670 postes, dont le quart pour la seule URSSAF de Paris-Région parisienne. Pourtant, le redressement des comptes de la sécurité sociale passe par la pérennité et l’amélioration de ses recettes. La lutte contre le travail clandestin et l’ensemble des fraudes doit aussi être une préoccupation centrale mais elle requiert, pour être efficace, des moyens humains.

Je m’interroge à ce sujet : le Gouvernement ne fait rien contre l’implantation de la mafia russe dans le Sud-Est de la France ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Je comprends, chers collègues de l’opposition, pourquoi vous acquiescez !

Mme Arlette Franco. Mais non !

M. Jean-Pierre Brard. En revanche, dans les manifestations contre le CPE, vous laissez des jeunes se faire massacrer par des voyous ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) La police n’intervient pas ! Elle ne fait rien !

M. Philippe-Armand Martin. Vos propos sont scandaleux !

M. Gabriel Biancheri. Pyromane !

M. Jean-Pierre Brard. En n’augmentant pas les moyens accordés aux salariés pour combattre la fraude à l’URSSAF, vous dispensez de fait de leur devoir des patrons qui sont déjà en délicatesse avec l’administration quant au paiement de leurs cotisations.

Dans ce contexte, l’inquiétude des salariés est grande. Ils veulent savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour garantir les effectifs nécessaires à l’accomplissement des missions essentielles de l’organisme, les services de comptes, de contentieux et de contrôle, qui permettent d'assurer les ressources de la sécurité sociale.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Brard, vous m'interrogez sur les moyens accordés à l'URSSAF de Paris à l'occasion de sa déconcentration.

M. Jean-Pierre Brard. Vous avez bien compris !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il me semblait bien, en effet, que c’était tout le sens de votre question !

La fixation de ces moyens relève de la convention d'objectifs et de gestion entre l’État et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale pour la période 2006-2009, qui est actuellement en cours de finalisation. Elle déterminera, pour l'ensemble des unions régionales, et dans une perspective pluriannuelle, leurs moyens, mais aussi les objectifs de qualité de service et de gestion qu'elles devront atteindre.

Une fois la convention signée, l'agence centrale répartira les moyens alloués entre les différentes URSSAF, dont celle de Paris, dans le cadre des contrats pluriannuels de gestion.

Afin de permettre dans de bonnes conditions l’achèvement des discussions qui donneront naissance à cette convention, l’ensemble des organismes locaux, dont l'URSSAF de Paris, fonctionne avec un budget provisoire pendant les premiers mois de cette année. Le montant retenu pour ce budget correspond à 50 % du budget annuel de 2005 et permet aux organismes de fonctionner normalement dans l'attente de l'attribution prochaine de leur budget définitif.

En ce qui concerne plus particulièrement l'URSSAF de Paris, je tiens à vous assurer que les discussions entre l'État et l'ACOSS prennent en compte, dès à présent, l'impact de la déconcentration, s'agissant notamment du poids des charges locatives. L'amélioration du taux de recouvrement a en effet déjà montré la pertinence de cette nouvelle organisation.

Par ailleurs, au cours de la période 2002-2005, l'URSSAF de Paris a bénéficié d'importants recrutements grâce à la mise en place d'un plan de départs anticipés à la retraite. En outre, un des axes forts de la convention 2006-2009 sera le redéploiement des personnels vers les fonctions en relation directe avec les affiliés. Il s'ensuivra une meilleure qualité de service mais aussi un développement des contrôles.

À ce titre, plusieurs centaines de postes seront créées dans les quatre prochaines années, au niveau de la branche du recouvrement des cotisations de sécurité sociale, sur les fonctions de contrôle, qui seront ainsi renforcées. Ce renforcement traduit, pour les organismes de recouvrement, la priorité que nous donnons à la lutte contre la fraude. Nous voulons à la fois assurer une concurrence juste et égale entre les professionnels et renforcer le financement de nos régimes de protection sociale.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, si dans un prochain gouvernement – si tant est qu’il y en ait encore un de droite – il y avait un ministère des farces et attrapes, vous auriez quelque chance d’en être membre !

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. C’est un peu limite !

M. Philippe-Armand Martin. De la part d’un guignol !

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Goulard, c’est à votre collègue que je m’adresse !

Monsieur Bas, vous savez bien que la convention d’objectifs et de gestion n’est pas discutée avec les salariés : elle est négociée entre l’ACOSS et les URSSAF. Et les agents du service public, qui ont le sens de l’intérêt général – personne ne le conteste, ni vous non plus, d’ailleurs –, n’ont pas, eux, leur mot à dire quant aux modalités à mettre en œuvre.

Vous nous avez confirmé qu’il n’a été attribué que 50 % du budget de 2005, qui était déjà insuffisant. Mais cela vous convient ! Vous prétendez même que les organismes auront les moyens de fonctionner normalement, alors que ce n’est pas vrai ! D’ailleurs, il y a quelques semaines, s’est produite, à l’URSSAF d’Ile-de-France, la grève la plus suivie depuis longtemps – 70 % de taux de participation –, parce que vous mettez en cause la viabilité de l’organisme.

La déconcentration n’est pas, en soi, une mauvaise chose, dans la mesure où elle rapproche le service public des bénéficiaires, mais il ne faut pas que cela soit un prétexte pour tordre le cou aux institutions.

Vous nous dites que vous allez développer les contrôles. Expliquez-moi donc, alors, pourquoi il y a de plus en plus de dossiers classés sans suite !

En réalité, la lutte contre la fraude n’est qu’un discours destiné à endormir la vigilance. Vous n’avez pas la volonté politique, pas plus dans ce cas que dans les autres que j’ai cités.

S’agissant de l’URSSAF, vous êtes cohérents : après avoir fait voter la loi sur la sécurité sociale, vous n’avez nullement l’intention d’en boucher le trou, car votre ambition est de livrer les assurés sociaux aux assurances privées, et non pas de faire de la peine à ceux qui fraudent, et ils sont nombreux dans les grandes entreprises pour lesquelles vous avez les yeux de Chimène !

financement du pôle universitaire
de Valence

M. le président. La parole est à M. Gabriel Biancheri, pour exposer sa question, n° 1538.

M. Gabriel Biancheri. S’associent à ma question à M. le ministre de l’éducation nationale mes deux collègues valentinois et de l’arrière-pays drômois, Hervé Mariton et Patrick Labaune.

Nous avons la chance, à Valence, de disposer d’un pôle universitaire constitué de quatre antennes délocalisées des universités grenobloises. C’est le résultat d’une volonté et d’un engagement financier partagés par l’État, par les deux conseils généraux de l’Ardèche et de la Drôme et par la ville de Valence.

Les résultats de ce pôle universitaire sont excellents. Deux chiffres démontrent la justesse de cette réalisation : 40 % des étudiants interrogés disent clairement qu’ils n’auraient pas envisagé d’études supérieures s’ils avaient dû se rendre à Montpellier, Lyon ou Grenoble ; par ailleurs, ce pôle compte deux fois plus d’étudiants boursiers que le site grenoblois.

Aujourd’hui, l’émotion est vive car des difficultés dans le financement du fonctionnement de deux antennes délocalisées, la faculté de droit et celle d’économie, mettent en jeu leur existence même.

Plusieurs raisons sont évoquées, parmi lesquelles la disparition depuis 2000 des dotations fléchées. Il semble que les universités sièges, ou universités mères, sur les enveloppes qu’elles reçoivent, assurent d’abord leur propre fonctionnement, et ce n’est qu’après qu’elles se tournent vers leurs antennes délocalisées. L’éloignement des centres de décision ne serait donc pas étranger à notre situation, même s’il existe certainement d’autres raisons, que nous avons, pour l’instant, beaucoup de mal à cerner.

Les collectivités – la ville et les deux conseils généraux – ont été sollicités pour boucher le déficit qu’accusent les deux antennes déjà citées. Elles ont largement participé aux investissements mais elles n’entendent pas faire de même pour les dépenses de fonctionnement.

Ma question ne fait que relayer l’angoisse des étudiants, des enseignants, mais aussi des collectivités quant au devenir de ces deux antennes délocalisées. Nous aimerions être rassurés.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur Biancheri, vous avez tout à fait raison de poser la question de l’avenir du site universitaire de Valence, et je profite de l’occasion que vous me donnez pour dire à quel point ces pôles décentralisés dispensent une formation universitaire de grande qualité et représentent, sous l’angle de l’égal accès de tous à l’enseignement supérieur, et donc de l’égalité des chances, un atout fort appréciable pour les jeunes de notre pays.

Il est de bon ton, parfois, d’affirmer que seules les très grandes universités ont un avenir. Ce n’est pas vrai ! De petites universités fonctionnent parfaitement et beaucoup de pôles universitaires décentralisés sont remarquables ; c’est le cas de celui de Valence.

Vous l’avez rappelé, monsieur le député, les quatre universités grenobloises sont concernées, ainsi que ce groupement d’intérêt public dénommé Agence de développement universitaire Drôme-Ardèche. Aux termes d’un contrat quadriennal, celui-ci est doté de 420 000 euros pour la période 2003 à 2006. Sont impliquées les collectivités territoriales que sont la ville de Valence et les deux départements de la Drôme et de l’Ardèche.

Il est exclu, monsieur Biancheri, que l’État se désengage du financement de ce site universitaire, tout comme d’ailleurs les universités concernées. De la part de ces dernières, ce ne serait pas admissible, car leurs contrats quadriennaux ont été établis en tenant compte du site universitaire de Valence. Leurs dotations globales de fonctionnement sont calculées, chaque année, en tenant compte du nombre d’étudiants – quelque 3 000 à Valence – et des surfaces. Je le répète, il serait inadmissible que les universités se désengagent, mais je sais qu’elles n’en ont pas l’intention.

J’ajoute que, dans les prochains contrats quadriennaux, l’existence des sites universitaires sera encore mieux identifiée, de telle sorte que leur pérennité ne soulève plus des inquiétudes comme celles dont vous vous faites l’écho.

Je le répète, ces inquiétudes, que je comprends, ne sont pas fondées : l’État et les universités, chacun pour ce qui le concerne, assumeront leurs responsabilités à l’égard du pôle universitaire de Valence.

M. le président. La parole est à M. Gabriel Biancheri.

M. Gabriel Biancheri. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse. Pour ma part, j’aimerais que l’État adresse un message à ces antennes délocalisées, en même temps qu’à nous, élus car, vous le savez, il ne se passe guère de jour sans que la presse publie des articles d’étudiants, d’enseignants, de responsables ou des collectivités elles-mêmes.

fermeture de classes dans la Marne

M. le président. La parole est à M. Philippe-Armand Martin, pour exposer sa question, n° 1532.

M. Philippe Armand Martin. Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche sur les fermetures de classes auxquelles plusieurs communes de ma circonscription, notamment, ont été confrontées. Je tiens, à ce sujet, à faire part de mon regret de n’avoir pas été informé par les services compétents de l’inspection académique. En effet, j’ai eu connaissance de ces décisions à la suite de leur parution dans la presse ou par des maires qui, eux, ont été prévenus !

Dans ma circonscription, ce ne sont pas moins de trois communes rurales, Bisseuil, Champillon, Moussy, ainsi que la ville d’Epernay, qui sont victimes de la suppression d’une ou de plusieurs classes. J’ai, bien sûr, conscience des impératifs de rationalisation des moyens humains et financiers qui peuvent conduire à la décision de fermeture d’une classe, d’autant que le département de la Marne, comme d’autres, est confronté à une baisse de la démographie, et donc du nombre d’élèves.

Toutefois, ces décisions m’apparaissent plus arbitraires lorsqu’elles reposent sur des effectifs annoncés à la baisse par les services alors que l’on constate le contraire. Ainsi, pour ne citer que les communes de Champillon et de Moussy, les effectifs scolaires n’étaient pas en baisse : au pire, ils stagnaient et, au mieux, ils progressaient. Comme vous le savez, monsieur le ministre, le maintien des écoles en milieu rural constitue un élément essentiel à l’animation de nombreuses communes et permet de maintenir les habitants dans leur village. À ce propos, il convient de noter les louables efforts consentis par les maires pour éviter les fermetures de classes et développer des structures annexes, telles que la création de haltes-garderies, l’ouverture de cantines scolaires, la réfection de classes ou encore l’équipement informatique. Par toutes ces actions, les élus locaux se sont engagés dans un véritable processus d’accompagnement de l’école afin d’en assurer la pérennité.

Outre les moyens investis par les collectivités et l’attachement des habitants à leur école, ces décisions de fermeture apparaissent d’autant plus illégitimes qu’elles ont été prises en l’absence de toute concertation.

Ne serait-il pas souhaitable à l’avenir d’instaurer une procédure de concertation associant les élus locaux avant de décider des fermetures de classes ? Par ailleurs, l’inspection d’académie est-elle prête à revoir ses décisions concernant les communes dont j’ai parlé si les chiffres devaient être revus ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le député, je vous prie d’excuser Gilles de Robien qui n’a pu être présent ce matin. Je vais vous communiquer les éléments de réponse qu’il souhaitait vous apporter.

Tout d’abord, il est regrettable qu’en tant qu’élu, vous n’ayez pas été informé de ces projets. Le département de la Marne, comme beaucoup d’autres, a connu depuis dix ans une baisse de la démographie et a perdu 7 515 élèves. Cette année, la diminution des effectifs a conduit à la suppression de trente-trois postes sur quelque 3 000 postes d’enseignants dans le département. Il convient de ramener cette diminution du nombre de postes à une juste proportion.

Vous évoquez plus particulièrement les écoles des communes de Champillon, Bisseuil et Moussy.

S’agissant de l’école élémentaire de Champillon, il est envisagé de supprimer un poste à la rentrée de 2006 et, avec quatre élèves de grande section de maternelle venant de Dizy, cette école accueillera au total vingt-quatre élèves de la grande section de maternelle à la première année de cours moyen. Les élèves des petite et moyenne sections de maternelle de la commune de Champillon sont accueillis à l’école de Dizy, distante d’un peu plus de trois kilomètres.

À l’école élémentaire de la commune de Bisseuil, vingt-quatre élèves sont attendus à la rentrée de 2006, soit quatre élèves de moins qu’en 2005. Les cinq élèves de grande section seront scolarisés dans une seule classe. Les élèves des petite et moyenne sections de la commune sont déjà scolarisés à la maternelle de Tours-sur-Marne, village proche de Bisseuil, dans laquelle une ouverture de classe est prévue. Il est envisagé que les élèves de grande section de l’école de Bisseuil soient accueillis à Tours-sur-Marne où il y aurait alors soixante-six élèves pour trois classes, soit une moyenne de vingt-deux élèves par classe, tandis que la classe de Bisseuil n’accueillerait que dix-neuf élèves.

En ce qui concerne Moussy, les prévisions, au moment de la préparation de la prochaine rentrée et de leur présentation au conseil départemental de l’éducation nationale en février 2006, font état de dix-huit élèves en maternelle, en ne prenant pas en compte les élèves âgés de deux ans, et de cinquante-deux élèves en école élémentaire, soit trois élèves de moins qu’en 2005. La fermeture envisagée d’une classe dans cette structure ne remet pas en cause les conditions d’enseignement puisque l’on comptera en moyenne vingt-trois élèves par classe. Un nombre non négligeable d’enfants de cette commune sont actuellement scolarisés à Pierry et à Épernay.

Les mesures de carte scolaire ne sont pas prises de façon arbitraire : elles résultent de travaux menés aux niveaux académique et départemental. Mais ces effectifs prévus sont revus régulièrement et les moyens pourront être ajustés en fonction des évolutions constatées à la rentrée. Nous parlons de chiffres relativement modestes et les variations peuvent différer de celles prévues aujourd’hui. Les services de l’académie restent donc ouverts aux demandes qui leur sont présentées.

M. le président. La parole est à M. Philippe-Armand Martin.

M. Philippe-Armand Martin. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.

Il y a trois jours, j’ai rencontré le maire de la commune de Moussy, et nous avons constaté que les effectifs étaient en hausse par rapport aux prévisions faites en novembre et en février. Nous souhaitons donc que ces prévisions soient revues et qu’il n’y ait pas de fermeture de classe dans cette commune.

effectifs scolaires dans le Nord

M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste, pour exposer sa question, n° 1537.

M. Christian Vanneste. Mon intervention concerne les effectifs dans l’enseignement public et particulièrement dans les collèges. Tout d’abord, je souhaite associer à ma question tous les parlementaires de la majorité et du Nord-Pas-de-Calais, et particulièrement mon collègue Patrick Delnatte.

Voici quelques semaines, nous avons appris que l’académie de Lille allait subir à la rentrée prochaine une diminution significative de 636 postes d’enseignants dans le secondaire, alors qu’elle en a déjà perdu 900 l’année dernière. Les collèges, en particulier, compteront 376 postes de moins. Ainsi, dans le Nord, il s’agit de supprimer 231 postes d’enseignants de collège et 145 dans le Pas-de-Calais, les lycées semblant favorisés au détriment des collèges.

À première vue, certains paramètres semblent justifier ces décisions : baisse du nombre d’élèves, départ à la retraite d’enseignants, compensation nécessaire au profit des vingt-huit collèges « ambition réussite » dans le Nord, pour lesquels il a fallu trouver des moyens nouveaux, malheureusement pris sur l’existant.

Le Nord – Pas-de-Calais, il est vrai, bénéficie également de moyens légèrement supérieurs en matière d’éducation à la moyenne nationale. Toutefois, je le rappelle solennellement, cette région a beaucoup donné à la France. Depuis la crise industrielle, minière, textile et sidérurgique, elle souffre d’un déficit social et culturel considérable. Aussi, c’est avec force et conviction que je demande de prendre en compte cet état de crise sociale. Le Nord-Pas-de-Calais est en proie au chômage de masse, à l’illettrisme, au difficile défi de l’intégration d’une immigration très importante. À situation exceptionnelle, nous demandons donc des moyens exceptionnels. Il y va de l’avenir même du pacte républicain et du principe d’équité.

Dans ma circonscription de Tourcoing, nombreux sont les habitants – parents d’élèves, professeurs et élus – qui s’inquiètent des mesures prévues pour l’année prochaine. Ainsi, à Tourcoing, le collège Branly perdrait quatre postes à la rentrée, soit environ quatre-vingts heures, ce qui se traduirait par le passage de quatorze à douze classes. Quant aux collèges Mendès France et Marie-Curie, ils se verraient supprimer cinq postes à la rentrée prochaine.

Nous ne comprenons pas non plus la disparition, par le jeu des suppressions de postes, d’une classe de troisième et d’une classe de sixième au collège Jules-Verne à Neuville-en-Ferrain, où il y aura désormais plus de vingt-neuf élèves par classe en troisième. Or on sait, quand on a été, comme moi, enseignant, que c’est justement à ce niveau que l’encadrement est le plus nécessaire, parce que c’est là que les élèves sont les plus difficiles.

De même, cinquante-sept heures seront retirées au collège Henri-Matisse de Linselles, où deux classes seront supprimées, l’une en cinquième et l’autre en quatrième. En outre, les itinéraires de découverte, travaux qui associent deux disciplines pour un nombre réduit d’élèves, disparaîtraient, alors qu’il s’agit d’une innovation pédagogique extrêmement pertinente.

Outre les difficultés sociales de notre région, ces suppressions de postes apparaissent bien peu justifiées. Les deux villes que je viens de citer – Neuville-en-Ferrain et Linselles – sont en pleine expansion démographique et nombreux sont les nouveaux lotissements qui, demain, feront venir de nouvelles familles, donc de nouveaux élèves.

Le Gouvernement pourrait-il préciser les choix qui ont inspiré ses décisions s’agissant du Nord-Pas-de-Calais ? En outre, pourrait-il reconsidérer celles arrêtées pour les collèges situés dans la circonscription de Tourcoing ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le député, je vais vous répondre à la place de Gilles de Robien, qui n’a pu être présent ce matin. Le ministre comprend parfaitement les difficultés spécifiques de votre département. Cela étant, nous sommes contraints d’adapter les effectifs des maîtres à ceux des élèves, afin de ne pas créer des disparités injustifiables entre les territoires.

Dans le département du Nord, les collèges publics ont connu depuis dix ans une baisse de 18 249 élèves, ce qui est considérable. À la rentrée 2006, ils en perdront 2 942. En ce qui concerne les trois collèges situés dans votre circonscription, il est prévu une baisse de quinze élèves au collège Henri-Matisse de Linselles, de quarante-six élèves au collège Jules-Verne de Neuville-en-Ferrain, et de quarante-huit élèves au collège Branly de Tourcoing. Ces prévisions pourront être ajustées au fil des mois.

Au collège Henri-Matisse, la baisse du nombre des élèves s’accompagne d’une baisse du nombre de divisions – quatorze au lieu de seize – et deux mesures de carte scolaire sont prévues, mais elles porteront sur des postes vacants, ce qui ne devrait avoir aucune conséquence sur l’encadrement. La réponse de Gilles de Robien me semble donc de nature à vous rassurer.

Au collège Jules-Verne de Neuville-en-Ferrain, la baisse d’effectifs se traduit par une diminution du nombre de divisions, qui passent de seize à treize, ce qui correspond à trois mesures de carte scolaire.

Quant au collège Branly de Tourcoing, il accueillera à la rentrée douze classes au lieu de treize, ce qui correspond à une mesure de carte scolaire. Mais, comme vous l’avez souligné, monsieur le député, ce collège fait partie d’un réseau « ambition réussite » et bénéficiera à ce titre de moyens complémentaires à la rentrée de 2006. Au total, le nombre moyen d’élèves par classe passe de vingt et un en 2005 à dix-neuf en 2006. Il s’agit d’un effectif parfaitement raisonnable qui permet un enseignement adapté dans des conditions que nous savons difficiles.

Monsieur le député, le Gouvernement est attentif à la situation du département du Nord et prêt à évaluer avec vous dans le détail l’opportunité des mesures prévues.

M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.

M. Christian Vanneste. Monsieur le ministre, cette réponse ne m’a ni satisfait ni rassuré !

Vous affirmez qu’il faut adapter les effectifs des maîtres à ceux des élèves. Mais le principe doit fonctionner dans les deux sens. Or s’il est vrai que les élèves sont moins nombreux dans le secondaire, je note que l’augmentation de 527 élèves dans le primaire ne s’est traduite que par quatre créations de poste.

Par ailleurs, des moyens supplémentaires sont certes apportés aux collèges « ambition réussite », mais ils sont prélevés sur les autres collèges et ne peuvent donc être considérés comme une réponse suffisante.

Enfin, de par ma profession, je connais bien le monde de l’éducation, et j’ai eu plus d’une fois recours au coefficient H/E. Mais c’est selon moi une grande erreur de calculer les besoins en enseignants en fonction du seul nombre d’élèves. La dimension qualitative de l’éducation est essentielle, en particulier dans des régions difficiles, qui accueillent de nombreux primo-arrivants et où le milieu social de certains élèves n’est pas porteur pour l’école. Il est dès lors tout à fait logique que ces régions soient davantage aidées.

réforme de la taxe
sur les véhicules de société

M. le président. La parole est à Mme Arlette Franco, pour exposer sa question, n° 1529.

Mme Arlette Franco. La loi de finances pour 2006 a modifié et rendu plus compliqué le calcul de la taxe sur les véhicules de tourisme des sociétés. En augmentant les tarifs applicables et en allant jusqu’à taxer les véhicules personnels des salariés qui effectuent des déplacements professionnels, elle en a accru le poids financier de façon inacceptable.

Cette disposition est très mal perçue par les chefs d’entreprises : alors que la suppression de la vignette automobile, qui représentait 14 millions d’euros, devait permettre d’alléger leurs charges, l’augmentation de la TVTS, qui avoisine 40 millions d’euros, pèse encore plus lourdement sur leur budget. En outre, le nouveau mode de calcul augmente la complexité des obligations qui pèsent sur nos entreprises, et donne lieu à une double taxation – en fonction du nombre de kilomètres effectués et de la pollution générée –, sans possibilité de déduction. Pour une société employant cinq commerciaux, l’augmentation des charges pourrait ainsi être supérieure à 7 000 euros.

À un moment où le Gouvernement souhaite justement rendre nos entreprises plus compétitives, il importe de ne pas aggraver les charges qui pèsent sur elles, si l’on ne veut pas risquer de réduire l’impact de la loi en faveur des PME, très appréciée par les chefs d’entreprises.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. Thierry Breton vous prie de bien vouloir excuser son absence et m’a chargé de vous communiquer sa réponse.

Comme vous le savez, la taxe sur les véhicules de société a été réformée par les articles 14 à 16 de la loi de finances pour 2006. Quelles sont les conséquences pour les petites et moyennes entreprises de ces dispositions ?

La réforme a profondément modifié le régime de la taxe, dans le but de la rendre plus équitable et d’encourager la détention de véhicules moins polluants. La vignette a été supprimée et intégrée dans la TVS, dont le barème a été modifié pour favoriser l’acquisition de véhicules faiblement polluants : le tarif est abaissé pour les véhicules les plus propres et fortement augmenté pour les plus polluants. De même, l’exonération des véhicules de plus de dix ans – souvent les plus polluants – a été supprimée.

L’assujettissement à la taxe sur les véhicules de société de véhicules appartenant aux collaborateurs d’une société n’est pas un fait totalement nouveau. La législation antérieure le prévoyait dès lors que la société entretenait le véhicule. Quant à la jurisprudence, elle estimait cet entretien effectif lorsque l’entreprise remboursait 85 % des coûts engagés par le collaborateur de l’entreprise. Cette règle assez peu précise a entraîné des redressements et de nombreux contentieux, ce qui est toujours fâcheux, d’autant que la prescription était de dix ans.

Le nouveau texte a donc introduit une règle paraissant plus simple, assortie d’un barème clair : la TVS est acquittée par l’entreprise en fonction des kilomètres parcourus par le collaborateur et remboursés par sa société. Le taux varie entre zéro, pour moins de 5 000 kilomètres remboursés, et 100 %, au-delà de 20 000 kilomètres. Ce barème ne prend en compte que les seuls kilomètres réalisés à titre professionnel, en excluant les trajets entre le domicile et le lieu de travail.

Le régime des pénalités a été fortement assoupli : la prescription a été ramenée à trois ans, et la pénalité de 80 % remplacée par une pénalité de 5 ou 10 %, majorée de l’intérêt de retard, qui a été aligné sur le droit commun.

Ces règles simples devaient dissuader les entreprises de s’exonérer du paiement de la TVS en externalisant vers les employés la gestion de leur flotte, dans un but d’optimisation fiscale.

Néanmoins, l’ampleur des critiques et les enjeux économiques invoqués par les PME militent pour un réexamen des modalités d’application de cette mesure, qui paraissent trop strictes au regard de l’objectif visé. C’est pourquoi le Gouvernement a consulté le président de la CGPME, M. Jean-François Roubaud, afin d’aborder ce problème. Jean-François Copé mène actuellement des consultations avec les représentants des PME, en liaison avec la commission des finances de l’Assemblée et avec celle du Sénat, afin d’aboutir très rapidement à une solution plus équitable.

M. le président. La parole est à Mme Arlette Franco.

Mme Arlette Franco. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces précisions. Je peux comprendre la nécessité de trouver un équilibre budgétaire : elle s’impose à tout gestionnaire. Mais, quelles que soient les pratiques de certaines entreprises, le fait d’instaurer une taxe d’un montant supérieur à celle qui vient d’être supprimée me paraît poser un problème à l’heure actuelle. Il faut éviter d’exacerber les difficultés rencontrées par les entreprises à un moment où le pays a besoin qu’elles retrouvent une dynamique.

mise en place d’une police ferroviaire

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour exposer sa question, n° 1534.

Mme Bérengère Poletti. Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, sur des faits qui se sont déroulés le 15 janvier à la gare SNCF de Charleville-Mézières. Toute la matinée, des jeunes gens originaires pour la majorité de la région parisienne ont envahi la gare et ont tenté de prendre place dans les trains sans titre de transport, sans argent et, semble-t-il, selon certains témoignages, sous l’emprise de produits stupéfiants. L’intervention des cheminots et des contrôleurs a permis la maîtrise de la situation. La police, quant à elle, est intervenue vers onze heures cinquante. Les contrôleurs ont dressé plus de trente procès-verbaux pour l’exemple.

La situation n’a pas donné lieu à une catastrophe grâce au professionnalisme du personnel SNCF. Toutefois, celui-ci regrette que les autorités parisiennes n’aient pas pris de dispositions pour éviter les débordements de la part de ces jeunes, qui se rendaient à un rassemblement de type rave party.

Le 10 janvier, le ministre a confirmé la création d’une police ferroviaire regroupant 2 500 policiers et gendarmes. Cette nouvelle entité coordonnera l’action des structures déjà existantes, auxquelles viendront s’ajouter 400 policiers et 300 gendarmes. Ces effectifs devraient être renforcés dans les périodes de forte affluence par des unités mobiles.

Je souhaite connaître le nombre de personnes qui seront affectées à la police ferroviaire des Ardennes ainsi que le mode de fonctionnement et les prérogatives de cette police.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. Madame la députée, vous exprimez vos préoccupations à la suite d’incidents qui se sont produits le 15 janvier 2006 à la gare de Charleville-Mézières et vous souhaitez être informée du calendrier de mise en place de la police ferroviaire, dont la création a été confirmée, le 10 janvier, par le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

Pour ce qui concerne les faits eux-mêmes, je puis vous préciser que le 15 janvier 2006 à 11 heures 45, à la suite d’un appel à police-secours émanant du chef d’escale SNCF de Charleville-Mézières et signalant la présence de perturbateurs, un équipage de la circonscription de sécurité publique locale s’est rendu place de la gare.

Sur les lieux, les fonctionnaires ont constaté que six personnes étaient montées sans billet ni moyen de règlement dans un train à destination de Paris.

Ces personnes parvenaient à s’enfuir avant que ne soient relevées leurs identités et elles n’ont pu être retrouvées malgré les patrouilles réalisées dans le secteur.

Cet incident est venu conforter tout naturellement la décision qui venait d’être prise, le 10 janvier 2006, de créer le SNPF, le Service national de la police ferroviaire, dirigé par un haut fonctionnaire de la police nationale.

Cette structure, qui sera pleinement opérationnelle au mois de juin prochain, est d’ores et déjà chargée de coordonner sur l’ensemble du territoire l’action du service régional de la police des transports, qui assure la sécurisation des transports en commun en région parisienne, des services interdépartementaux de sécurisation des transports en commun implantés à Lille, Lyon et Marseille, et de ses propres brigades des chemins de fer.

Ces unités recevront le renfort de 400 policiers et bénéficieront du concours de 300 gendarmes, ce qui portera à plus de 2 500 hommes et femmes les effectifs de la police nationale ferroviaire. Dans les périodes de forte affluence, des unités mobiles seront également employées.

La création de cette police ferroviaire s’inscrit dans une stratégie globale de lutte contre la violence dans les transports associant également les services de la SNCF et de la RATP. La mise en place complète du dispositif sera effectuée au 1er juin, après le recrutement des policiers volontaires qui est en cours.

En attendant cette date, le service national de la police ferroviaire a déjà organisé des opérations de sécurisation zonales avec le renfort d’un escadron de la gendarmerie et d’une compagnie républicaine de sécurité épaulant les effectifs locaux.

La coordination est réalisée au niveau central par un poste de coordination assurant vingt-quatre heures sur vingt-quatre la remontée immédiate des événements au plan national et d’un pôle d’analyse et de gestion opérationnelle – le PAGO – chargé de l’analyse de la délinquance sur les réseaux ferrés. Elle sera effectuée au niveau de chaque zone de défense, sous l’autorité du préfet de zone, par le directeur zonal de la police aux frontières, qui disposera d’un poste de coordination et d’un pôle d’analyse et de gestion opérationnelle zonale.

Des actions ont déjà été menées dans plusieurs zones, dont la zone Est, qui vous concerne plus particulièrement, entre le 14 et le 21 mars, notamment sur les lignes desservant les villes de la région Champagne-Ardenne. Cette dernière opération a vu la participation moyenne journalière de 244 fonctionnaires relevant de la police aux frontières, de la sécurité publique, des CRS et des militaires de la gendarmerie nationale.

Il a ainsi été possible de constituer une moyenne de 101 patrouilles par jour. Il convient d'ajouter à ce dispositif la participation du service de surveillance générale – le SUGE – de la SNCF, à hauteur de 407 fonctionnaires, constituant 208 patrouilles.

Au total, 1024 patrouilles ont été constituées sur l'ensemble du territoire national. Elles ont procédé à la sécurisation de 1 457 trains et de 1 970 gares, permettant l'interpellation de soixante-deux individus.

Je sais, madame Poletti, combien vous êtes sensible à ces problèmes de sécurité publique, et que vous avez participé activement aux débats sur la loi d’orientation et de programmation de sécurité intérieure en 2002, et sur la loi de sécurité intérieure en janvier 2003, laquelle programmait déjà sur cinq ans la création d’un certain nombre d’effectifs. Il aura fallu les événements de la Saint-Sylvestre sur la ligne Nice-Lyon, lors de la traversée du département du Var, pour que le ministre de l’intérieur prenne la décision, le 10 janvier dernier, de mettre en place ce service de police ferroviaire. Et je précise, pour ceux qui considèrent que les moyens ne seront pas au rendez-vous, qu’ils ont, pour beaucoup, été programmés dans la loi de finances de 2006.

Le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire a donné des instructions très fermes aux services de police ferroviaire, en Champagne-Ardenne comme dans toutes les autres régions, pour qu’ils soient intraitables envers celles et ceux qui perturberaient la quiétude de l’ensemble des usagers des transports ferroviaires. Il est inacceptable que, dans des services publics où doivent être assurées les meilleures prestations, certains ne respectent pas la loi et la tranquillité d’autrui. En quelques semaines, soixante-deux interpellations ont déjà eu lieu, je le répète. Nous poursuivrons en la renforçant notre action en espérant que, parallèlement, la chaîne pénale infligera les sanctions qui s’imposeront, parce que c’est de là aussi que viendra la dissuasion. Vous pouvez donc compter sur le Gouvernement en ce domaine.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Je remercie M. le ministre de sa détermination et de sa volonté. Beaucoup a été fait pour renforcer la sécurité, comme les Français ont déjà pu le constater, mais il reste encore des améliorations à obtenir. Je les attends avec impatience, tout comme les usagers, qui les percevront effectivement lorsqu’ils se sentiront entourés et encadrés.

délivrance des cartes professionnelles d'agent immobilier

M. le président. La parole est à M. Marc Reymann, pour exposer sa question, n° 1536.

M. Marc Reymann. La réglementation des activités de transaction et gestion immobilières – agences immobilières, administrateurs de biens, syndics de copropriété – est modifiée à compter du 1er janvier 2006. Les nouveaux textes ont principalement mis à jour les capacités d'exercice pour les professionnels concernés et renforcé les sanctions pénales.

Depuis le 1er janvier 2006, la carte est délivrée ou renouvelée pour une durée de dix ans, et non plus d’un an, par la préfecture compétente. L'obtention de la carte professionnelle conditionne l'autorisation d'exercer, sous peine de sanctions pénales. Or, en l'absence de parution des décrets d'application de ces textes, notamment de celui fixant les nouveaux modèles de cartes professionnelles, les préfectures sont depuis plus de deux mois dans l'impossibilité de délivrer ou de renouveler les cartes. Cette situation interdit aux nouvelles entreprises de démarrer leur activité et à celles plus anciennes de la poursuivre, alors qu’elles continuent de payer tous les mois leurs charges d'agence sans avoir aucune rentrée de fonds, à moins de se mettre hors la loi. Il en va de même pour l’ensemble des collaborateurs, salariés ou non, qui démarchent la clientèle de ces agences et doivent obtenir l'attestation d'habilitation, dite carte grise, délivrée et visée par la préfecture compétente et indispensable avant toute embauche. Cette situation de blocage interdit donc toute nouvelle embauche. À l'heure actuelle, des centaines de futurs collaborateurs attendent un emploi qui risque de ne pas se concrétiser si la situation perdure encore quelques semaines.
Quand cette situation sera-t-elle réglée, afin que soient au plus vite régularisées les embauches en cours, bloquées depuis le 1er janvier 2006 ? Quand donnera-t-on les instructions aux préfectures leur permettant de prendre rapidement les dispositions nécessaires à la délivrance des cartes professionnelles, afin de ne pas asphyxier la profession ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. Monsieur le député, comme vous l'avez rappelé, l'arrêté du 15 septembre 1972, qui établissait le modèle des cartes professionnelles d'agent immobilier, de la déclaration d'activité pour les succursales d'agences et de l'attestation pour les négociateurs, n'est plus en vigueur depuis le 1er janvier 2006.

Je suis heureusement en mesure aujourd'hui de vous informer que l'arrêté créant les nouveaux modèles de cartes a été publié au Journal officiel du 22 mars 2006. Entre-temps, les entreprises existantes ont pu poursuivre leur activité sans aucune restriction, dès lors que les professionnels concernés ont présenté à la préfecture l'attestation de garantie financière et celle relative à l'assurance responsabilité civile. Les préfectures ont délivré aux nouvelles entreprises des accusés de réception indiquant expressément le numéro d'enregistrement qui sera mentionné sur la carte professionnelle. L'attestation d'emploi pour les négociateurs – dite carte grise – a donné lieu à un accusé de réception par les préfectures, après vérification du contrat les liant à l'agent immobilier. La durée de ce contrat est portée sur cette attestation.

Entre le 1er janvier 2006 et la date de mise en service des nouveaux modèles, il n'y a donc pas eu d'entrave importante au fonctionnement de ce secteur professionnel. Vous avez toutefois raison, monsieur le député, et l’arrêté étant publié au Journal officiel, vous pouvez compter sur la détermination du Gouvernement pour accélérer le processus de délivrance des nouveaux modèles afin que cette situation ne dure pas plusieurs semaines.

M. Marc Reymann. Je vous remercie, monsieur le ministre.

maintien des programmes régionaux
de France 3

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour exposer la question n° 1523 de Mme Geneviève Gaillard.

M. Bruno Le Roux. Monsieur le président, monsieur le ministre de la culture et de la communication, député de la région Île-de-France, je me fais un plaisir de suppléer Mme Geneviève Gaillard, qui participe aujourd’hui dans sa circonscription à la mobilisation anti-CPE.

Elle souhaite attirer l’attention sur les inquiétudes exprimées par les journalistes de France 3 Ouest relatives aux programmes régionaux et à l'avenir de la filière production.

Depuis le 10 février, l'édition d'informations régionales de douze heures cinquante-cinq a été supprimée dans toutes les régions. Elle est remplacée depuis le 27 février par un programme national de divertissement populaire « Drôles de couples ». Ainsi, vingt-cinq minutes d'informations régionales par jour, soit deux heures cinq par semaine, ont été supprimées.

Une menace forte de voir supprimer les programmes en breton a plané pendant plusieurs semaines. Heureusement, le mouvement des journalistes a pu faire renoncer la direction de France 3. Mais ils restent vigilants, car la menace peut réapparaître à tout moment.

Ces nouvelles orientations sont contraires aux missions de France 3 telles qu'elles sont exprimées à l’article 44 de la loi sur l'audiovisuel de 1986. À cet égard, l'article 24 du cahier des missions et des charges, précis et volontariste, qui en découle prévoit : « La société s'attache à développer l'information régionale et locale et à accroître le nombre d'éditions de proximité. Elle s'efforce d'augmenter les prises d'antenne par les directions régionales et d'utiliser une part croissante des programmes régionaux dans le programme national. » En s'attaquant ainsi à la raison d'être de France 3 – sa vocation régionale –, on la fragilise et on lui retire sa légitimité face aux autres chaînes généralistes publiques.

Enfin, une autre inquiétude se profile concernant l'avenir de la filière production. En effet, le président de France Télévisions a déclaré que désormais la production de France 3 travaillerait pour l'ensemble du groupe. L'audit, venu à point nommé pour légitimer ses déclarations, précise ainsi : « En ce qui concerne la vidéo mobile, 50 % du marché est en région parisienne et les six cars sont disponibles en province». France 3 possède cinq unités régionales de production : Lille, Lyon, Marseille, Bordeaux, Rennes. Elles fabriquent des téléfilms, des documentaires, des émissions de qualité comme Des racines et des ailes. Elles jouent un incontestable rôle d'aménagement du territoire, font travailler tout un tissu de sociétés de production, de réalisateurs et de professionnels qui exercent en province. Le risque de suppression de ces unités régionales de production est aggravé par l'investissement lourd qui s'impose à la filière de France 3, pour moderniser les cars et les rendre compatibles avec la télévision haute définition en vue de rester présente sur le marché. On peut facilement penser que la direction profite de cette occasion pour recentraliser l'ensemble à Paris.

Entendez-vous, monsieur le ministre, sauvegarder la vocation régionale de France 3 en maintenant ou même en développant les programmes régionaux, et lever l'inquiétude quant à une recentralisation de la chaîne au mépris de ses missions de service public ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Comme vous le savez, le travail de réorganisation des grilles de programmation des chaînes de service public relève de la responsabilité de leurs dirigeants, même si l’État intervient par la voie d’un contrat d’objectifs et de moyens, donc par une discussion contractuelle.

Aussi les modifications mises en œuvre concernant les tranches d'information régionale diffusées par France 3 Ouest relèvent-elles de la direction générale de l'entreprise.

Alors que le besoin de proximité et le sentiment d'appartenance territoriale sont plus que jamais importants, le rôle régional et local de France 3 est fondamental. Le Gouvernement est attaché à la défense du service public de l'audiovisuel et à l'offre de proximité de France 3. Donc, il n’y a pas de procès d’intention à faire aux dirigeants de France Télévisions ou au Gouvernement sur ce sujet. Je vous confirme l’importance que nous attachons à l’information de proximité diffusée par France 3 et par un certain nombre de chaînes locales. Le Gouvernement soutient également l'engagement de la présidence et de la direction générale de la chaîne.

Le changement de la grille des programmes de France 3 relève de la responsabilité des dirigeants de la chaîne. France 3 évolue, car son environnement connaît de profondes transformations : le paysage audiovisuel sera de plus en plus concurrentiel du fait du développement de chaînes locales privées et du passage de l'analogique au numérique terrestre. D’ailleurs, nous avons veillé à prendre, lorsque c’était nécessaire et urgent, les mesures techniques afin que la TNT soit une réalité pour l’ensemble de nos concitoyens.

Dans cet avenir où l'offre gratuite de chaînes sera beaucoup plus importante qu'aujourd'hui, France 3 a besoin d'être une chaîne forte, fédératrice et présente à l'échelle régionale et locale. Néanmoins, la réorganisation engagée répond à la volonté de mieux favoriser la complémentarité avec les autres chaînes du groupe et ne remet pas en cause l'attachement que porte le service public à l'information de proximité. L’objectif de lisibilité des programmes et des tranches horaires est essentiel.

De façon plus générale, je tiens à vous confirmer mon attachement à la spécificité des antennes du service public, dont France 3, chaîne de la proximité, est un maillon essentiel. L’emploi doit y être garanti. Sur ce point, je serai très clair : il n'est en aucun cas question d'un plan de réduction des effectifs à France Télévisions.

Le travail de négociation du deuxième contrat d'objectifs et de moyens qui liera France Télévisions et l'État permettra d’ailleurs de conforter l'identité des chaînes publiques et, tout particulièrement, de rappeler le rôle spécifique de France 3.

Je crois donc pouvoir dissiper vos inquiétudes. France Télévisions est un très grand groupe. Chacun y a une vocation spécifique : France 3, chaîne de la proximité, mais aussi France 5, France O et France 2.

application des normes environnementales du projet de rénovation de Lille

M. le président. La parole est à M. Christian Decocq, pour exposer sa question, n° 1526.

M. Christian Decocq. Avant de poser ma question, permettez-moi de mettre plusieurs éléments d’information en perspective.

Premièrement, par la loi du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, le Gouvernement a décidé de consentir des efforts financiers considérables pour le réaménagement des espaces publics, des voiries, des équipements publics et, bien sûr, pour la construction d’un habitat de qualité ou la réhabilitation de logements. C’est ainsi que le projet de rénovation urbaine de Lille concernera plus de 10 000 logements sur dix ans, pour un montant de 410 millions d’euros. Il s’agit par conséquent d’un projet considérable.

Deuxièmement, depuis une année maintenant, la Charte de l’environnement, qui inscrit désormais le respect de l’environnement au sein de notre bloc de constitutionnalité, le place en même temps au cœur de notre action politique et publique.

Troisièmement, en tant que membre de la mission d’information sur l’effet de serre, je sais à quel point une vraie politique de développement durable de réduction des émissions de gaz à effet de serre passe avant tout par la politique du logement. En France, le bâtiment est en effet le deuxième secteur après les transports en termes de responsabilité d’émissions de gaz à effet de serre. Il représente, en intégrant les émissions directes et indirectes pour le chauffage urbain et l’électricité, 24 % des émissions de CO2.

La réduction de ces émissions est un des axes du plan climat que le Gouvernement a mis en place afin de permettre à la France d’atteindre, voire de dépasser les engagements qu’elle a pris dans le cadre du protocole de Kyoto.

Les projets de renouvellement urbain sont autant des chances à saisir pour respecter les mesures HQE et HPE.

Le projet lillois, qui prévoit au total la construction de 3 600 logements neufs ainsi que la requalification et la restructuration de milliers d’autres logements, intégrera ces enjeux de développement durable. Il est prévu de diviser par trois la dépense énergétique des ménages. EDF et GDF ont d’ailleurs décidé d’accompagner la réalisation du projet afin de faire de ce quartier un modèle sur ce plan.

Ces nouvelles normes environnementales représentent bien sûr un surcoût. Leur respect est pourtant essentiel pour lutter contre le changement climatique. L’intérêt d’investir dans ce projet est considérable, voire capital.

Je souhaiterais savoir, d’une part, si la convention d’engagement a été signée, ou quand elle le sera et, d’autre part, comment le ministère envisage de financer les surcoûts liés aux projets de rénovation urbaine et quels sont, le cas échéant, les moyens financiers dégagés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Monsieur le député, le Gouvernement est particulièrement attentif à la meilleure prise en compte de l’environnement dans l’ensemble de la construction, en particulier dans les projets de rénovation urbaine. Qu’il s’agisse des performances énergétiques ou plus largement de la qualité de l’environnement, les exigences imposées aux constructeurs doivent être aussi élevées que possible au regard de l’état des techniques et des capacités financières des ménages à se loger, conformément aux principes énoncés dans la Charte de l’environnement. En effet, le secteur du bâtiment représente près de 20 % des émissions de CO2. Or 410 000 logements neufs ont été mis en chantier en 2005, ce qui représente un record depuis vingt-cinq ans. C’est dire l’enjeu des économies d’énergie dans ce domaine.

Le programme de rénovation urbaine, qui prévoit la démolition de 250 000 logements et leur remplacement par des logements neufs, ainsi que la réhabilitation de nombreux logements, constitue une bonne occasion d’accélérer de façon significative le renouvellement du parc existant. Aujourd’hui, 163 dossiers ont déjà été validés par l’ANRU, l’Agence nationale de rénovation urbaine. Ils concernent 288 quartiers et prévoient la construction de 70 000 logements locatifs, la démolition de 73 000 logements, la réhabilitation de 147 000 et la résidentialisation de 148 000.

Le projet de rénovation urbaine de Lille, que vous venez d’évoquer, a été validé le 22 février par le conseil d’administration de l’ANRU. Il fait preuve d’importantes ambitions en matière de développement durable. Tous les équipements et aménagements publics ont intégré des dépenses nécessaires à la qualité environnementale souhaitée par les maîtres d’ouvrage. Des opérations importantes sont prévues, comme la réalisation d’un corridor biologique et la démolition puis la reconstruction de la chaufferie de Lille sud. L’ensemble de ces investissements durables est cofinancé par l’ANRU, dont il faut rappeler qu’elle prend en charge plus de 99 des 358 millions d’euros de travaux prévus.

L’Agence nationale de rénovation urbaine veille à la prise en compte des préoccupations de développement durable tout au long de l’élaboration des projets, notamment à la gestion propre des chantiers, à la gestion de l’eau et à la construction de logements économes en énergie.

Si les logements démolis, d’une conception ancienne, sont fortement consommateurs d’énergie, les logements neufs respecteront à partir du 1er septembre 2006 la nouvelle réglementation thermique dite RT 2005, qui permettra une économie de 15 % sur la consommation d’énergie, soit un niveau de performance équivalent à l’actuel label Très haute performance énergétique.

Pour limiter au maximum les dépenses de chauffage des ménages aux revenus les plus modestes, les règles de subvention pour la construction de logements sociaux sont majorées dès lors que le logement dispose du label Haute performance énergétique. Ces dispositions, qui seront actualisées avec la RT 2005, permettront de mettre en œuvre l’ambition d’éco-construction affichée par les maîtres d’ouvrage dans le projet de rénovation urbaine de Lille.

Pour les logements qui doivent être réhabilités, le conseil d’administration de l’ANRU vient d’adopter une modification de son règlement général visant à imposer désormais un diagnostic thermique pour toute réhabilitation supérieure à 13 000 euros par logement.

Vous le voyez, monsieur le député, l’ANRU prend en compte de manière extrêmement importante la nécessité de respecter l’environnement.

M. le président. La parole est à M. Christian Decocq.

M. Christian Decocq. Cette réponse appelle un double commentaire, madame la ministre.

Il est positif que le Gouvernement et l’ANRU aient très précisément pris en compte le problème du réchauffement climatique et la part que peut jouer le logement dans l’émission des gaz à effet de serre.

Mais, pour passer d’une consommation d’environ 120 kilowattheures par mètre carré dans les logements anciens aux 40 ou 50 kilowattheures souhaitables dans les nouveaux logements, il faut acquitter un surcoût. Je prends acte du financement des équipements publics et des obligations imposées par les nouvelles normes. Je pense sincèrement que de telles mesures sont satisfaisantes. Mais je m’interroge toujours sur le financement du surcoût : il ne faudrait pas que, à terme, les occupants soient mis à contribution.

situation juridique
des salariés manutentionnaires
des entreprises du spectacle

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour exposer sa question, n° 1520.

M. Bruno Le Roux. J’appelle l’attention sur un problème spécifique et complexe : l’activité des sociétés dite de roading ou de manutention, qui ont pour objet de mettre des salariés manutentionnaires à la disposition d’entreprises du spectacle vivant, par le biais de contrats de prestation de service, afin de procéder non seulement au chargement et au déchargement de camions transportant le matériel nécessaire à la représentation d’un spectacle, mais aussi et surtout à la mise en place de ce matériel sur le lieu du spectacle.

Aux termes de l’article L. 125-3 du code du travail, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre est interdite sous peine de sanctions pénales, si elle ne s’effectue pas dans le cadre du travail temporaire.

Or, bien qu’elle consiste à mettre du personnel à la disposition d’une entreprise, l’activité des entreprises de roading ne semble pourtant pas constituer du prêt de main-d’œuvre illicite, le contrat souscrit par l’entreprise utilisatrice devant avoir pour objet l’exécution d’une tâche nettement définie qu’elle ne peut accomplir elle-même pour des raisons d’opportunité économique ou de spécialité technique.

Les techniciens de plateau ne sont pas des manutentionnaires sans qualification et interchangeables que l’entreprise utilisatrice pourrait recruter elle-même. Il faut savoir en effet que l’activité des entreprises de spectacle vivant est marquée par la nécessité de travailler dans l’urgence et l’éphémère, le spectacle n’étant bien souvent représenté dans un même lieu qu’une seule soirée.

Le Stade de France se trouvant dans ma circonscription, je connais bien les moyens que nécessite l’organisation d’un spectacle, fût-ce pour un ou deux jours. Une simple défaillance dans le montage peut avoir des conséquences irrémédiables, comme l’annulation d’un spectacle. De plus, le matériel du spectacle, qui est devenu très spécifique, ne peut être manipulé que par des professionnels qui en connaissent la fragilité et le maniement, ainsi que le vocabulaire spécifique.

En conséquence, il est indispensable que les manutentionnaires aient une réelle qualification pour accomplir ce type de tâche. Leur situation correspond donc bien au critère de spécificité technique dégagé par les juges.

Par ailleurs, l’entreprise de spectacle ne peut embaucher de tels salariés, dans la mesure où la nécessité d’éviter toute défaillance le jour du montage du spectacle interdit la mise à l’essai préalable des salariés ou leur remplacement. Chacun doit accomplir sa mission à la perfection et dans les délais requis, afin que le montage et le démontage soient accomplis en quelques heures. De plus, les entreprises du spectacle, tout comme les entreprises de travail temporaire, n’ont aucune aptitude pour rechercher et recruter temporairement ces salariés dans les différents points de France où sont organisés les spectacles. En définitive, seuls les prestataires de service spécialisés localement dans la fourniture de cette main-d’œuvre particulière sont en mesure de recruter les personnes qualifiées et d’en garantir le savoir-faire spécifique.

Il résulte d’une réponse déjà apportée par le Gouvernement que « la frontière entre le contrat de prestation de services et le prêt illicite de main-d’œuvre, qui découle pour l’essentiel de la jurisprudence, n’est pas sans ambiguïté, ce qui place fréquemment les sociétés de services dans une situation d’insécurité juridique. »

Dès lors, j’aimerais savoir si le Gouvernement envisage de mieux définir les limites du prêt de main-d’œuvre illicite, au regard notamment de la situation d’insécurité que connaissent aujourd’hui de nombreux organisateurs de spectacles quand ils font appel aux sociétés particulières de roading.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Monsieur le député, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la situation des entreprises de manutention dont l’activité consiste à mettre à la disposition d’entreprises du spectacle vivant, dans le cadre de contrats de prestations de services, des salariés qui procèdent au chargement et déchargement des camions transportant le matériel nécessaire au spectacle, mais aussi à sa mise en place sur le lieu du spectacle.

Vous vous êtes interrogé sur la situation de ces entreprises au regard de l’interdiction du prêt de main-d’œuvre, en rappelant les termes que mon collègue Gérard Larcher a utilisés devant vous pour déterminer la frontière entre le contrat de prestation de service et le prêt illicite de main-d’œuvre.

Si la frontière entre l’un et l’autre n’est pas sans ambiguïté, il n’en demeure pas moins que, sur la définition du prêt illicite de main-d’œuvre, la jurisprudence est, elle, particulièrement stable. Les critères permettant d’établir l’existence d’une prestation de service sont précisés depuis longtemps. Pour reconnaître la licéité de l’opération, le juge recherche si le prêt de main-d’oeuvre est la conséquence nécessaire de la réalisation de la prestation convenue entre les deux entreprises. Pour cela, il va utiliser la technique du faisceau d’indices et examiner divers éléments. Ce n’est qu’après leur examen qu’il conclura à l’existence soit d’une prestation de service soit d’un prêt de main-d’œuvre illicite.

Toutefois, en dépit du caractère stable et précis de la jurisprudence, le rôle décisif du juge face à certaines situations me paraît justifier l’engagement d’une réflexion sur la définition par la loi des critères du prêt de main-d’œuvre licite. Une telle définition serait en effet de nature à sécuriser la relation entre les entreprises, notamment pour les plus petites d’entre elles, qui n’ont pas toujours les moyens de connaître une jurisprudence, reconnaissons-le, particulièrement technique.

Une telle réflexion, déjà engagée par les services du ministère, qui porte sur l’une des dispositions les plus anciennes du code du travail, ne peut cependant être menée qu’en concertation étroite avec les partenaires sociaux, la prohibition du prêt de main-d’œuvre à but lucratif constituant une disposition essentielle à la protection accordée au salarié par le code du travail.

Il me semble en outre qu’une telle réflexion doit intégrer le nécessaire examen des moyens d’assurer aux salariés des parcours professionnels sécurisés. La mise à disposition d’un salarié auprès d’une autre entreprise à titre provisoire peut en effet être un moyen de faire face à certaines difficultés économiques sans rompre le contrat de travail ou en assurant une transition entre les deux entreprises.

S’agissant des entreprises de roading, dont vous évoquez la situation particulière, il me semble que, en l’état actuel de la jurisprudence, leur activité consistant à mettre des salariés à la disposition d’entreprises de spectacle, le prêt de personnel pourrait être considéré comme étant l’objet exclusif de leurs contrats, ce qui conduirait à caractériser une opération de prêt de main-d’œuvre illicite. Mais la sécurisation de leur activité paraît pouvoir passer par le développement d’une technicité propre liée à l’activité des entreprises de spectacles qui bénéficient de leurs prestations.

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre. Elle s’ajoute à l’abondante jurisprudence qui porte sur la question.

Il va de soi que la spécificité de ce problème, le caractère technique des besoins des industriels du spectacle et la situation particulière des salariés mis à leur disposition n’engagent nullement à revenir sur une disposition qui, aujourd’hui, protège les salariés. Il s’agit seulement de la reconsidérer dans le cadre spécifique de l’organisation d’événements particuliers.

Quoi qu’il en soit, je prends note de la décision d’ouvrir une réflexion à ce sujet et j’en suivrai l’avancée avec attention.

perspectives de la politique de la ville
pour Sevran en Seine-Saint-Denis

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour exposer sa question, n° 1524.

M. François Asensi. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Avec 50 000 habitants, Sevran est l'une des dix plus grandes villes du département de la Seine-Saint-Denis mais, dépourvue de ressources fiscales depuis le départ de Kodak en 1995, elle est confrontée à de sérieuses difficultés sociales et budgétaires qu'elle tente de surmonter avec dynamisme.

Ses indicateurs sociaux témoignent des défis qu'elle doit relever. La commune, qui enregistre 1 300 demandes de logement insatisfaites, compte 1 500 allocataires du RMI et 4 500 chômeurs, soit 17 % de sa population active. Son taux de chômage se situe donc à un niveau bien plus élevé que la moyenne nationale et peut atteindre jusqu'à 40 % dans les quartiers populaires.

À l’instar d'autres collectivités et malgré la forte implication de ses élus – notamment de son maire, Stéphane Gatignon –, Sevran a subi de plein fouet les violences de novembre dernier. L'ensemble des dégâts se chiffrent pour la commune à 2,5 millions d'euros. À ce jour, 600 000 euros de dépenses de reconstruction restent non financées et, en cas de nouveaux incidents, le niveau des franchises deviendra prohibitif. En outre, les dépenses de surveillance des équipements publics – 400 000 euros en 2005 – deviennent de plus en plus importantes.

Par ailleurs, Sevran éprouve des difficultés à recruter des cadres territoriaux en raison de la libéralisation du régime indemnitaire. En effet, un cadre territorial y gagne mensuellement environ 500 euros de moins que dans une ville de même dimension. Pour éviter de perdre ses compétences et pouvoir en attirer d'autres, la municipalité doit donc revaloriser son système de primes. Une telle revalorisation pèsera sur ses finances, mais la ville peut-elle renoncer à la qualité de l'administration municipale ? Le budget de fonctionnement, qui intègre le système de primes ainsi que le glissement vieillesse technicité, le GVT, augmente de 5,12 %, soit nettement plus que les dotations de fonctionnement.

Après Clichy-sous-Bois, Sevran dispose, avec 391 euros par habitant, du plus faible potentiel fiscal du département et il lui manque 3 millions d'euros pour équilibrer son budget. Or elle ne peut augmenter la pression fiscale sur une population en grande partie fragilisée : la ville compte déjà 71 % de foyers fiscaux totalement ou partiellement exonérés de la taxe d'habitation, et recourir à la fiscalité pour équilibrer le budget communal conduirait à augmenter de près de 13 % l'impôt local des Sevranais. Est-il raisonnable d'augmenter encore la taxe d'habitation la plus élevée du département ?

Néanmoins, la municipalité ne peut abandonner un programme d'investissement ambitieux. Preuve du travail de son équipe municipale, les subventions, qui étaient de 15 % en 2005, atteignent 33 % en moyenne en 2006. Ainsi, le renouvellement urbain du quartier Rougemont est financé à hauteur de 5 millions d'euros par les finances communales sur un coût estimé à 100 millions. Au-delà, la réhabilitation urbaine de trois quartiers sensibles, représentant au total la moitié de la population, a été lancée. Par ailleurs, la ville a négocié au mieux pour ses finances et l'équilibre naturel du secteur l'aménagement de la friche Kodak. Devait-elle laisser ces terrains à l'abandon ? J’ajoute que l'ensemble des marchés publics ont été rigoureusement épluchés.

Dès lors, la municipalité doit-elle sabrer dans la culture, alors que la fréquentation de son cinéma municipal a doublé en trois ans ? Doit-on ajouter la relégation culturelle à la crise sociale ? Vous admettrez que ce serait inadmissible.

Les dotations de l'État pour 2006, calculées sur le recensement de 2000 et limitées aux quartiers d'habitat social, n'augmentent que de 0,56 % par rapport au budget primitif de 2005. Or le dernier recensement révèle que la population de Sevran a augmenté de 5 % et que la commune compte aujourd'hui 50 000 habitants. Combinée à l'extension à toute la ville du classement ZUS et ZFU, la prise en compte de cette augmentation permettrait à la commune de bénéficier des 3 millions d'euros supplémentaires qui lui font actuellement défaut pour équilibrer son budget.

Compte tenu de la faiblesse de ses ressources par rapport au potentiel fiscal moyen des villes de sa strate démographique, Sevran subit un manque à gagner de 360 euros par habitant, soit plus de 16 millions d'euros pour l'ensemble de la commune. Dès lors, une demande de 3 millions d'euros semble tout à fait raisonnable et modeste et témoigne des efforts consentis par la municipalité au regard des besoins d'une ville de sa taille.

Sevran, qui refuse de rentrer dans un cycle de renoncements croissants et veut conserver sa capacité de se projeter dans l'avenir, en appelle donc à la solidarité nationale. Des milliers de Sevranais soutiennent cette démarche par voie de pétition. Pour empêcher que ne se creuse la fracture territoriale qui bafoue l'égalité républicaine, le Gouvernement est-il disposé à réexaminer les bases de calcul de la dotation de l’État à Sevran, conformément aux propositions de la municipalité ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Monsieur le député, le constat que vous faites à propos de Sevran rejoint celui qui a conduit Jean-Louis Borloo et le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin à mettre en œuvre la rénovation urbaine et à réformer la dotation de solidarité urbaine dans le cadre du plan de cohésion sociale. Cette réforme vise en effet précisément à aider les communes telles que Sevran, dont les charges socio-urbaines sont si importantes et les ressources si insuffisantes qu’elles commencent l’année dans une situation financière extrêmement difficile. C’est notamment le cas de Sevran à laquelle, ainsi que vous l’avez souligné, il manque 3 millions d’euros.

La réforme de la dotation de solidarité urbaine permettra de doubler son volume en cinq ans. À l'échelle du département de Seine Saint-Denis, elle concerne 34 communes, qui ont vu ainsi leur dotation augmenter en 2005. Cela représente 9,76 millions d’euros supplémentaires. En ce qui concerne Sevran, qui – et ce n’est pas surprenant – sera l’une des principales villes bénéficiaires de cette réforme, la DSU 2005 représente 3,38 millions d’euros, soit une progression de 25 % par rapport à 2004. Elle devrait gagner environ 4 millions d’euros supplémentaires d'ici à 2008. Suivant une progression estimée à 150 % entre 2004 et 2009, Sevran bénéficierait ainsi d'environ 6,8 millions d’euros en 2009 contre 2,7 millions d’euros en 2004. L’effort est donc important.

D'autres dispositifs prennent en compte la situation particulière de la commune de Sevran. La création, en 2004, d'une zone franche urbaine a ainsi pour objectif de favoriser l'installation d'activités économiques indispensables dans une ville dont les bases fiscales sont particulièrement faibles. Au reste, 155 entreprises y sont déjà installées.

Ce développement économique ne peut qu'être conforté par la rénovation urbaine en cours dans les quartiers Beaudottes et Rougemont, qui fait l'objet d'un dossier auprès de l'Agence nationale de rénovation urbaine. Sur un montant total de 76,6 millions d’euros, la participation de l'Agence est évaluée à 37 %, alors que la ville n'est sollicitée qu'à hauteur de 4,3 millions d’euros, soit 6 %. L'ANRU prend en effet en compte la capacité financière des communes, au vu d'une analyse précise de leur situation, pour déterminer son niveau d'intervention pour les opérations relevant de leur maîtrise d'ouvrage.

Enfin, l'augmentation très sensible, cette année, du Fonds d'intervention pour la ville, avec une priorité accordée au département de Seine Saint-Denis, ainsi que le doublement du nombre des postes d'adultes-relais, doivent permettre de mieux aider les associations, mais aussi les communes, à conduire leurs actions de proximité en faveur des populations en difficulté. À cet égard, je suis bien évidemment d’accord avec vous sur la nécessité d’un accompagnement social et culturel de la population de ces quartiers.

Par ailleurs, j'ai proposé au comité interministériel des villes, qui s’est réuni le 9 mars dernier, que dans l'attribution de ces moyens, l'État prenne mieux en compte la diversité des situations locales et cible davantage son accompagnement sur les communes qui, comme Sevran, sont confrontées à de lourdes difficultés socio-urbaines. Il est en effet impératif que, vis-à-vis de ces communes, l'État fasse pleinement jouer la solidarité nationale. C'est ainsi que nous agissons concrètement pour les quartiers en difficulté, afin que l’égalité des chances puisse y devenir une réalité.

M. le président. La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. Merci pour votre réponse, madame la ministre. Permettez-moi d’ajouter un commentaire général.

Je ne nie pas les efforts consentis par le Gouvernement, notamment par M. Borloo, en faveur des quartiers en difficulté, mais ils ne sont pas à la hauteur des besoins. Je suis choqué depuis de très nombreuses années par la cécité des pouvoirs publics à ce sujet. C’est pourtant dans ces quartiers, en particulier en Seine-Saint-Denis, que se joue l’avenir de la société française, non seulement parce que la violence sociale y reste latente après les événements de novembre dernier, mais aussi parce que ces territoires recèlent une richesse et une diversité humaines incroyables. Or leur créativité est aujourd’hui stérilisée. Ces villes préfigurent la société française de demain, diverse, multiethnique, fraternelle.

Je veux saisir l’occasion qui m’est offerte pour saluer le maire de Saint-Denis et son conseil municipal, qui ont donné la parole aux habitants, pour que ceux-ci se prononcent en faveur du vote des étrangers aux élections locales. Aujourd’hui est une journée de manifestations mais, au-delà du retrait du CPE, la jeunesse souhaite que la société repose sur d’autres bases que le libéralisme et que des changements très importants aient lieu.

Pour revenir aux quartiers en difficulté, les gouvernements, quels qu’ils soient, ne prennent pas la mesure de ce qu’ils représentent. Les solutions qui doivent leur être apportées seront bénéfiques pour l’ensemble de la société française.

M. le président. Nous avons terminé les questions orales sans débat.

ordre du jour des prochaines séances

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement.

Discussion du projet de loi, n° 2943, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire :

Rapport, n° 2976, de M. Alain Venot, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures vingt-cinq.)