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M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe socialiste.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, enfin, vous avez consenti à dénouer la crise dans laquelle vous aviez enfermé le pays. Enfin, vous avez daigné retirer le CPE.
M. François Hollande. Bravo !
M. Alain Néri. Ce n’est pas trop tôt !
M. Jean-Marc Ayrault. C’est un beau succès pour le mouvement syndical et pour celui de la jeunesse, des étudiants et des lycéens, pour ce mouvement puissant et unitaire qui, tout au long de l’épreuve, a fait prévaloir le sens des responsabilités. C’est aussi une satisfaction pour les députés socialistes (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) qui, dès le 17 janvier, vous avaient mis en garde contre l’erreur que constituait cette mesure. Pourquoi a-t-il fallu trois mois de conflit pour que vous et vos amis compreniez que la France ne veut pas d’une précarité institutionnalisée ?
Mme Arlette Franco. Et les emplois-jeunes ?
M. Jean-Marc Ayrault. Vous êtes tous responsables, M. Sarkozy, président de l’UMP, comme vous-même, l’UMP comme le Gouvernement. Le CPE est une coproduction de la majorité. C’est donc ensemble que vous devez rendre compte de votre erreur devant le pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Et c’est ensemble que vous devez expliquer le délitement qui a régné au sommet de l’État. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Votre gouvernement n’a plus ni force, ni assise, ni confiance, et je crains que les douze mois qui lui restent soient sans utilité pour nos compatriotes.
Le CPE trépasse, la crise de régime demeure. La proposition de loi que vous allez présenter est un nécessaire compromis, mais elle ne peut faire oublier la crise sociale qui sévit depuis quatre ans (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) ; elle ne peut faire oublier l’ensemble de votre politique, qui a mené à l’érosion du droit du travail, à l’extension de la précarité, au creusement des inégalités ; elle ne peut faire oublier la façon dont vous avez piétiné la négociation sociale. Toute la démocratie sociale est à réinventer.
Ce qui vient de se passer, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mesdames et messieurs les membres de l’UMP, est le prélude du grand rendez-vous démocratique de 2007. D’ici là, monsieur le Premier ministre, quels services, vous et votre gouvernement, pouvez-vous encore rendre au pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, vos affirmations font partie des figures imposées de la politique, je dirai même des figures convenues. J’attendais mieux de vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Glavany. Ça recommence !
M. le Premier ministre. Il fallait sortir de la crise. Il y avait un risque pour la sécurité des jeunes. Il y avait une menace pour la tenue des examens de fin d’année.
M. Alain Néri. Vous avez mis du temps pour vous en apercevoir !
M. le Premier ministre. Face au blocage, il nous appartenait de trouver la solution.
Ensemble, avec le Président de la République, avec toute la majorité, avec l’aide de Bernard Accoyer – que je salue (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) – et de Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires sociales, et avec Laurent Hénart, nous avons défini une solution. Elle permet de ramener le calme dans notre pays. Elle apporte une réponse aux jeunes qui sont le plus en difficulté, ceux qui n’ont pas de diplôme, ceux auxquels – faut-il vous le rappeler, à vous qui, tout au long de cette crise, n’avez jamais rien proposé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste) – on ne propose rien.
Mme Martine David. Arrêtez de mentir !
M. le Premier ministre. La mesure que nous proposons sera financée par redéploiement des crédits du ministère de l’emploi. La seule question qui compte à cette heure est la suivante : que fait-on pour lutter contre le chômage des jeunes dans notre pays ? Bien sûr, l’État continuera à jouer tout son rôle. Il faut des contrats aidés simplifiés et allégés pour les jeunes confrontés à la difficulté. C’est ce que nous faisons. Il faut améliorer le service public de l’emploi. C’est ce que nous faisons. Plus les jeunes seront accompagnés dans leur recherche d’emploi, plus vite ils pourront retrouver un travail. Il faut développer la formation. C’est ce que nous faisons, avec le droit universel à la formation, dont bénéficieront dès la rentrée prochaine les jeunes apprentis.
Mais nous avons également besoin que les entreprises embauchent, et c’est là que nous avons une différence de taille. Vous, vous voulez partager le travail, le diviser comme autant de petites parts d’un petit gâteau. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous, nous voulons créer plus d’emploi, plus d’activité, plus de croissance. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Vous proposez de supprimer le contrat « nouvelles embauches ». Est-ce là votre solution contre le chômage ? Supprimer un contrat qui a déjà été signé par 400 000 personnes dans notre pays ? (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Supprimer un contrat qui a créé plus d’un tiers d’emplois nouveaux et qui répond aux besoins des très petites entreprises ?
Le débat sur l’équilibre entre flexibilité et sécurité est un débat nécessaire dans notre pays. Il a été ouvert, nous ne le refermerons pas. Regardez ce qui se passe autour de nous (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),…
M. Jean Glavany. Regardez ce qui se passe en France !
M. le Premier ministre. …en Allemagne, en Espagne, en Italie, partout en Europe, et vous verrez que nous avons encore du chemin à faire.
Bien sûr, avec le Gouvernement et la majorité, nous voulons tirer les leçons de la crise.
M. Patrick Lemasle. Quel orgueil !
M. le Premier ministre. C’est pourquoi nous voulons répondre à l’anxiété sociale des Français, à leur inquiétude concernant l’avenir. Nous voulons y répondre patiemment, avec conviction et courage.
Nous voulons y répondre pour tout ce qui touche à l’emploi. Nous travaillerons avec les partenaires sociaux…
M. Alain Néri. Il serait temps !
M. le Premier ministre. …sur la sécurisation des parcours professionnels et l’insertion professionnelle des jeunes.
Nous voulons y répondre pour tout ce qui touche à la solidarité, à la lutte contre la précarité.
Nous voulons y répondre pour tout ce qui touche à la sécurité, et nous examinerons prochainement le projet de loi sur la prévention de la délinquance et le projet de loi visant à lutter contre l’immigration.
M. Alain Néri. Quel est le rapport ?
M. le Premier ministre. Nous voulons y répondre pour tout ce qui touche à la préparation de l’avenir.
Nous ouvrirons dans les prochains jours un débat sur le renforcement des liens entre l’université et l’emploi et nous travaillerons sur les conditions de la vie étudiante, ainsi que sur les conditions de travail à l’université. Nous voulons également défendre la place de la France dans l’Europe et dans le monde.
M. Maxime Gremetz. Mais c’est un discours de politique générale !
M. le Premier ministre. Monsieur Ayrault, vous revendiquez cet après-midi la victoire pour votre camp.
M. Maxime Gremetz. Non, la victoire de la France !
M. le Premier ministre. Nous revendiquons le service de tous les Français. Nous revendiquons la lucidité et la détermination pour adapter notre pays, pour adapter notre modèle social et pour moderniser la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Applaudissez donc debout !
M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe Union pour la démocratie française.
M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, les chiffres et la courbe du chômage sont suivis chaque mois avec le plus grand intérêt. Pourtant, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour critiquer la réalité de la baisse du chômage : catégories incompréhensibles, de ceux qui recherchent un CDI à temps plein à ceux qui veulent un temps partiel, radiations dont les justifications ne sont comprises ni par la population ni par les hommes politiques, désinscriptions aux motifs flous, RMIstes qui ne sont pas comptés comme demandeurs d’emploi parce qu’ils n’ont pas l’obligation de se déclarer à l’ANPE. Les statistiques sont évidemment trompeuses et le chômage réel est, hélas ! bien supérieur aux chiffres que les services veulent bien nous donner.
Cet habillage n’est pas l’apanage de ce gouvernement : tous l’ont pratiqué. Mais, au groupe UDF, nous pensons que le pays gagnerait à savoir la vérité. On ne soigne bien que la maladie que l’on connaît bien. Comment conduire des politiques publiques sans information objective ? Tout se passe comme si le débat sur les chiffres finissait par remplacer celui sur les causes et les remèdes.
Monsieur le ministre, nous pourrions avancer tous ensemble sur le sujet. Pouvez-vous nous dire précisément – sinon aujourd’hui, du moins dans les mois qui viennent – quel est le chiffre réel des demandeurs d’emploi dans notre pays ? Comptez-vous simplifier, rendre plus lisibles et objectives les statistiques de l’emploi, afin que nos débats s’appuient sur des chiffres réels, sans effets de maquillage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Lagarde, pour mesurer les chiffres du chômage, nous disposons de deux outils différents et parfaitement indépendants l’un de l’autre.
Les chiffres de l’ANPE sont établis – et je vous remercie de me permettre de le dire – à partir des déclarations des demandeurs d’emploi. Il s’agit donc d’un système déclaratif mensuel. Lorsque, à la fin du mois, la personne qui a retrouvé un emploi, a fait valoir ses droits à la retraite ou est partie à l’étranger ne renvoie pas sa déclaration – laquelle se fait désormais plutôt par téléphone ou sur Internet –, l’ASSEDIC la relance quelques jours plus tard pour vérifier qu’il s’agit bien d’un de ces cas, et non d’un oubli. C’est ainsi que fonctionne pour 450 000 cas par an ce que l’on appelle, improprement d’ailleurs, le dispositif de « l’absence à contrôle », qui correspond en fait à ce simple constat que la personne ne se déclare plus demandeuse d’emploi. En cas d’oubli, de déménagement ou de départ en vacances, la personne est réinscrite rétroactivement. On peut éventuellement faire évoluer cette méthode, mais elle n’a pas changé depuis quinze ans.
L’autre dispositif statistique dont nous disposons est celui de l’INSEE, qui, en accord avec les chiffres du BIT, fournit des données mensuelles. Actuellement, les deux sources concordent. Au cours des onze derniers mois, le nombre des demandeurs d’emploi a diminué de 151 000 selon l’une, de 149 000 selon l’autre.
Enfin, nous disposons du nombre des créations d’emploi, qui relèvent du régime général de la sécurité sociale : ce que l’on appelle « le chiffre ACOSS ». Au cours des douze derniers mois, on a recensé 143 000 créations d’emplois nouveaux relevant du régime général. C’est un point historique.
Néanmoins, on peut, sans changer ces méthodes, imaginer une présentation plus simplifiée. Je vous ferai des propositions dans ce sens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
M. Alain Bocquet. Monsieur le Premier ministre, après avoir, douze semaines durant, repoussé obstinément nos observations sur les dangers de votre fameux CPE, vous n’avez finalement pas eu raison de la forte mobilisation populaire du monde du travail et de la jeunesse, qui, unis dans l’action, viennent de remporter un grand succès. Vous avez dû vous incliner. Votre pouvoir UMP-MEDEF porte, à l’évidence, toute la responsabilité de cette crise. On ne gouverne pas sans l’assentiment du peuple, encore moins contre le peuple.
L’an dernier, déjà, le 29 mai, alors que tous les groupes parlementaires, sauf le nôtre, appelaient à voter oui, le peuple de France votait majoritairement non au projet de constitution européenne ultralibérale. Aujourd’hui, c’est une autre expression de ce libéralisme débridé qui vient d’être rejetée par les luttes. Vous proposez maintenant de remplacer le CPE par des mesurettes s’inspirant de la même logique : précarité, bas salaires, dévalorisation du travail, cadeaux supplémentaires au patronat – 300 millions de fonds publics en année pleine.
Quid des profits records du CAC 40 ? Allez-vous revenir sur l’apprentissage à quatorze ans ? Sur le travail de nuit à quinze ans et sur le CNE, frère aîné dans la précarité du défunt CPE ?
M. Guy Teissier. C’est Germinal !
M. Alain Bocquet. Il faut mettre la richesse que produit le travail au service de la création d’emplois et de la formation. Le groupe des député-e-s communistes et républicains vient de déposer trois propositions de loi : l’une pour assurer le remplacement par la négociation des 500 000 départs en retraite prévus chaque année d’ici 2015 ; une autre pour résorber l’emploi précaire ; une troisième, enfin, pour requalifier en contrats de travail les stages abusifs qui ne sont que des embauches au rabais. Ce ne sont évidemment pas des propositions à prendre ou à laisser.
M. Richard Mallié. La question !
M. Alain Bocquet. Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à ouvrir le débat sur ces propositions novatrices et progressistes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Patrick Roy. Le Gouvernement est en vacances !
M. le président. Allons, monsieur Roy !
La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Bocquet, lors du processus de discussion et de consultation qui a duré trois jours la semaine dernière, nous avons rencontré l’ensemble des partenaires sociaux ainsi que les organisations étudiantes et lycéennes. Parmi eux, personne n’a contesté le fait que le Premier ministre avait eu raison (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) de vouloir s’attaquer au problème du chômage des jeunes. Il y avait peut-être débat sur la méthode, mais pas sur l’objectif.
Quelle solution avons-nous trouvée ? En premier lieu, je souhaite rendre hommage au président Accoyer, au président de Rohan, à Laurent Hénart et à Alain Gournac. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Nous avons avant tout essayé d’aller à l’essentiel en proposant des mesures d’urgence souhaitées par tous. Nous avons décidé d’aider rapidement les contrats de professionnalisation – mis en place, je vous le rappelle, avec l’accord des partenaires sociaux – qui consistent en une alternance de la théorie et de la pratique. L’alternance nous paraît en effet constituer une voie moderne qu’il convient pour cette raison de privilégier.
Pour le reste, il a été demandé à l’ensemble des partenaires sociaux – qui l’ont accepté – d’engager le débat sur l’insertion professionnelle des jeunes. À l’issue des concertations qui auront lieu, le Gouvernement est prêt à prendre ses responsabilités. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. François Vannson, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. François Vannson. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre de la défense.
Madame la ministre, le 4 avril dernier, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi modifiant la loi du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense.
M. Guy Teissier. Très bien !
M. François Vannson. L’adoption de ce texte était nécessaire, car celui-ci tient compte des évolutions survenues dans l’environnement international depuis le 11 septembre 2001.
La réforme a pour objectif de rationaliser l’organisation et d’améliorer la réactivité et la disponibilité de l’ensemble des réservistes, en période de crise comme de pré-crise. Elle vise également à renforcer le partenariat établi entre le ministère de la défense, les employeurs et les réservistes.
En effet, les nouvelles dispositions concernant la réserve militaire prévoient, entre autres, d’accentuer la distinction entre la réserve opérationnelle et la réserve citoyenne, de créer une clause dite « de réactivité » permettant d’employer des réservistes avec un préavis plus court que dans le droit commun, de faire passer la durée possible d’activité de 120 jours par an à 150 jours, voire 210 dans certains cas, d’abaisser l’âge d’accès à la réserve opérationnelle, ou encore d’augmenter la limite d’âge des militaires du rang.
Ces mesures inédites seront mises en place dès la publication des décrets d’application, qui existent déjà à l’état de projet, comme vous l’avez indiqué jeudi dernier. Madame la ministre, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur le dispositif de réforme de la réserve et le calendrier de sa mise en œuvre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur Vannson, la réserve militaire et la réserve citoyenne permettent aux Français qui le souhaitent, qui sont volontaires, d’agir en mettant leurs compétences au bénéfice des armées ou au bénéfice du lien entre la défense et la nation, un lien effectivement plus que jamais nécessaire dans la situation actuelle.
Je me réjouis profondément que ce texte ait été voté par les deux assemblées dans un consensus total, et j’en remercie la représentation nationale. Il nous revient de le mettre en œuvre le plus rapidement possible. La plupart des dispositions de la loi entreront en vigueur dès sa publication, c’est-à-dire très prochainement. Dès le mois de mai, la réforme du conseil supérieur de la réserve militaire verra son décret soumis aux parties prenantes – notamment les associations –, puis à la concertation interministérielle, avant d’être publié cet été.
Le décret portant sur les différentes mesures telles que le recul des limites d’âge ou l’accès des légionnaires à la réserve sera soumis au Conseil supérieur de la fonction militaire le 15 juin, puis aux différents ministères, et devrait également être publié très rapidement. Enfin, dès la publication de la loi, quatre autres décrets clarifiant les statuts des réservistes agents de la fonction publique d’État et des fonctions publiques locales seront soumis aux ministères de tutelle ; ils seront, je l’espère, publiés avant la fin de l’année. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour le groupe UMP.
M. Jean-Luc Warsmann. Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, c’est le rôle de chaque député de faire remonter au Gouvernement les dysfonctionnements observés sur le terrain. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean Glavany. Il y a du pain sur la planche !
M. Jean-Luc Warsmann. C’est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur les abus constatés en matière de tarifs bancaires appliqués à nos concitoyens.
J’ai ainsi rencontré, samedi dernier, une famille dans laquelle le mari vient d’être mis au chômage et qui, comme cela arrive souvent, n’a pas pu suspendre les prélèvements automatiques effectués chaque mois sur son compte bancaire : l’électricité, le gaz, le logement, le téléphone. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jacques Desallangre. Mais ils sont des millions dans cette situation !
M. Jean-Luc Warsmann. Pour le mois d’avril, cette famille doit se débrouiller pour vivre avec les 811 euros versés par les ASSEDIC. Or – et j’ai ici la copie du relevé de compte qui en atteste – la banque a prélevé à huit reprises des frais de refus de prélèvement et à deux reprises des frais d’envoi de lettre d’information. Cela représente au total 200 euros de frais bancaires prélevés en un mois, soit le quart des revenus de cette famille.
M. Jacques Desallangre. Et vous découvrez ça aujourd’hui ?
M. Jean-Luc Warsmann. La banque ayant en outre suspendu l’autorisation de découvert bancaire, cette famille se retrouve sans rien pour vivre. C’est comme cela que des personnes se trouvent précipitées dans les difficultés et l’exclusion.
Nombre de députés, sur tous les bancs de cet hémicycle, pensent que les abus en matière de tarification bancaire deviennent trop fréquents dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le ministre, je veux vous dire notre exaspération devant cette situation. Je vous fais confiance pour agir (« Vous ne devriez pas ! » sur les bancs du groupe socialiste) et pour assurer une plus grande équité dans ce domaine.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.
M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur Warsmann, je vous remercie de votre confiance. Les tarifs bancaires préoccupent, à juste titre, nombre de nos compatriotes.
Cependant, grâce à la concurrence qui joue dans les réseaux bancaires, les tarifs bancaires ont augmenté moins vite que l’inflation au cours des huit dernières années – 9,7 % de hausse pour les tarifs bancaires contre 13,4 % pour l’inflation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jérôme Lambert. Vous ne connaissez vraiment rien aux problèmes des Français !
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cela étant, plusieurs mesures ont été prises en matière de tarification bancaire. Les premières de ces mesures sont relatives à l’information des clients. Le décret que j’ai pris le 4 avril 2005 rend obligatoire l’affichage des tarifs dans l’ensemble des agences bancaires. J’ai également pris un décret pour que les tarifs figurent très précisément sur les relevés bancaires.
J’ai demandé à la DGCCRF de procéder à des contrôles et j’invite chacun à lui signaler tout problème ou abus constaté. L’année dernière, plus de 600 contrôles en agence ont été effectués dans 57 départements. J’ai décidé d’augmenter encore les contrôles cette année, afin de vérifier si les engagements pris sont tenus ou s’il y a des abus.
M. Albert Facon. Pour les contrôles, il faut appeler Sarko !
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Un autre problème est étroitement lié à celui que vous venez d’évoquer : celui du droit au compte, dont il a été largement discuté à la demande du Premier ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Désormais, tous nos compatriotes ont le droit d’avoir un compte bancaire ; l’ensemble des réseaux bancaires et des agences ont l’obligation d’ouvrir un compte dans un délai inférieur à deux jours et de fournir sur ce compte un service de base gratuit (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste) comprenant notamment la délivrance d’une carte de paiement ou de retrait.
Enfin, j’ai décidé de lancer une vaste campagne destinée à informer nos compatriotes sur ce dispositif, afin de permettre sa mise en œuvre dans les meilleurs délais.
M. Albert Facon. Cela existe depuis cinq ans !
M. le président. La parole est à M. Jean Bardet, pour le groupe UMP.
M. Jean Bardet. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, pendant plusieurs semaines, de nombreux lycées et universités ont été bloqués ou fortement perturbés (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),…
Plusieurs députés du groupe socialiste. Par votre faute !
M. Jean Bardet. …souvent, d’ailleurs, par une minorité d’étudiants ou de lycéens. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Maxime Gremetz. Non ! C’est scandaleux de dire ça !
M. Jean Bardet. Une dépêche de l’Agence France Presse de la semaine dernière indique qu’à Paris, ce sont 400 personnes qui ont bloqué 80 000 étudiants. (Mêmes mouvements.)
Si, aujourd’hui, l’heure est à l’apaisement, il faut répondre aux inquiétudes que les blocages ont suscitées en empêchant la majorité des étudiants et des lycéens de suivre normalement leurs cours.
M. François Liberti. À cause de vous !
M. Jean Bardet. Cette majorité silencieuse et travailleuse est particulièrement inquiète.
M. Albert Facon. Merci pour les autres !
M. Jean Bardet. En effet, la période des examens est proche et les semaines perdues pèsent fortement sur l’état de leur préparation, donc sur leur avenir.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire ?
Plusieurs députés du groupe socialiste. Rien !
M. Jean Bardet. Que pouvez-vous dire,…
Plusieurs députés du groupe socialiste. Rien !
M. Jean Bardet. …notamment aux étudiants les plus modestes, qui ont le plus souffert de cette période, afin de les rassurer ?
Pouvez-vous nous garantir…
Plusieurs députés du groupe socialiste. Non !
M. Jean Bardet. …que ces étudiants, qui ont travaillé toute l’année, pourront passer leurs examens normalement,…
Plusieurs députés du groupe socialiste. Oui !
M. Jean Bardet. …quitte à repousser les dates d’examen afin de leur permettre de terminer leur programme dans un esprit serein ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, je peux vous rassurer : tout rentre dans l’ordre à peu près partout. Comme vous, nous sommes préoccupés par la qualité des examens et des diplômes qui pourront être délivrés. Les jours et les semaines à venir seront donc cruciaux pour les jeunes, qu’ils soient étudiants ou qu’ils passent le baccalauréat au mois de juin.
Pour l’université, avec François Goulard, nous avons demandé aux présidents d’université de nous faire part des dispositions qu’ils comptent prendre pour que les diplômes délivrés soient de vrais diplômes portant sur la totalité des programmes. Dès demain, nous recevrons le bureau de la Conférence des présidents d’université.
Pour le baccalauréat, je fais confiance aux chefs d’établissement et aux enseignants, qui feront le nécessaire avec le même esprit de responsabilité qu’ils ont manifesté tout au long des événements. Ils réuniront les conditions pour que l’ensemble des programmes soit enseigné. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste.
M. Yves Durand. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, c’est bien par son obstination que le Gouvernement a déclenché un puissant mouvement de protestation dans les universités et dans de nombreux lycées, provoquant ainsi des grèves et des blocages. Et ce mouvement n’est ni minoritaire ni manipulé, contrairement à ce que certains ont tenté de faire croire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. – Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est bien votre volonté de passer en force pour imposer la précarité aux jeunes qui est en effet à l’origine de leur révolte. Il faut saluer la détermination et l’esprit de responsabilité des organisations de jeunesse, lycéennes et étudiantes, qui ont ainsi permis, en liaison avec les organisations syndicales, de mettre fin au CPE.
Certes, bien des dispositions funestes de votre loi dite d’égalité des chances demeurent, comme l’apprentissage à quatorze ans…
M. Lucien Degauchy. Très bonne mesure !
M. Yves Durand. …ou le travail de nuit dès quinze ans. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Néanmoins, la mort du CPE est d’ores et déjà une grande victoire collective, non pas de notre camp, monsieur le Premier ministre, mais de l’ensemble de la jeunesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
À cette victoire collective, il faut maintenant ajouter la réussite individuelle de chaque étudiant et de chaque lycéen. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, vous leur devez bien cela ! Il est désormais de votre responsabilité de réunir, non pas quelques-uns ou quelques organisations, mais les conditions d’un retour à la sérénité dans les universités et dans tous les lycées, cette sérénité que vous avez brisée avec votre passage en force.
Un député du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. La question !
M. Yves Durand. Vous n’y parviendrez pas à coup de circulaires ou de déclarations aussi provocatrices qu’inapplicables. Il vous appartient d’instaurer dès maintenant une véritable concertation – enfin ! – avec les présidents d’université et toutes les organisations d’enseignants, de chefs d’établissement, d’étudiants, de lycéens, afin d’assurer la bonne tenue des examens et la qualité de leur préparation pour chaque étudiant et chaque lycéen. Il vous appartient de leur offrir les mêmes chances de réussir leur examen, dont la valeur ne pourra être contestée. C’est aussi ce message-là que les jeunes vous adressent. Allez-vous enfin l’entendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Durand, un principe nous guide tous : faire en sorte que les examens se déroulent dans des conditions optimales et que la qualité des diplômes soit celle qu’on peut attendre de diplômes nationaux délivrés par l’État. Il est donc très important que les programmes soient enseignés dans leur totalité sans faire d’impasse. Pour le baccalauréat, les épreuves sont arrêtées depuis le mois de février et les dates ne sont pas modifiables.
M. Christian Bataille. Pourquoi ?
M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. C’est le 13 juin pour les terminales et le 12 juin pour les épreuves de français en classe de première. Mais d’ici là, il est possible de terminer les programmes. Je sais que les proviseurs et les enseignants y travaillent déjà depuis plusieurs jours et qu’ils réussiront. Comme le baccalauréat n’est pas le résultat d’un contrôle continu – il y a un an et demi, vous aviez d’ailleurs encouragé les lycéens à refuser cette option –, les épreuves doivent absolument avoir lieu à la date prévue. J’ai donc le devoir de faire en sorte que la totalité des programmes soit enseignée. J’en prends l’engagement car je sais que je peux m’appuyer sur l’ensemble des chefs d’établissement et des enseignants, qui sont attachés à cet objectif et qui se mobilisent à cet effet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen, pour le groupe UMP.
M. Jacques Le Guen. Monsieur le ministre de l’agriculture, tout au long de son histoire, la politique agricole commune a dû évoluer pour faire face aux nouveaux défis auxquels elle a été progressivement confrontée. Si, dans un premier temps, elle avait pour objet d’améliorer la productivité, d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole et de garantir la sécurité des approvisionnements à des prix raisonnables, elle a, par la suite, été confrontée à la maîtrise des déséquilibres quantitatifs et à la nécessité de satisfaire de nouveaux objectifs et de répondre à de nouvelles attentes de la part de nos concitoyens, notamment en matière environnementale. L’évolution du marché mondial agricole implique également une adaptation constante. L’élargissement de l’Union européenne a renforcé encore cette nécessaire capacité de mutation.
En juin 2003, la réforme de la PAC a notamment modifié les bases des aides directes à la production octroyées aux agriculteurs en les découplant partiellement ou totalement de la production. Cette réforme d’ampleur a introduit un nouveau critère d’éco-conditionnalité des aides qui reposent désormais sur des droits à paiement unique. Les agriculteurs vont donc devoir s’adapter une fois de plus à ce nouveau système. Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que le dispositif entré en vigueur le 1er janvier 2005 permet de préserver les revenus des producteurs ? Comment les agriculteurs perçoivent-ils ces nouvelles modalités ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.
M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Monsieur le député, il est important tout d’abord de rappeler aux agriculteurs que la PAC fonctionne jusqu’en 2013 : c’est l’accord signé par le Président de la République à Bruxelles. Certes, il y aura un bilan en 2009. Mais les paiements sont assurés selon le système actuel jusqu’en 2013.
La réforme de 2002-2003 a prévu la mise en œuvre des droits à paiement unique. À cet égard, je tiens à remercier les fonctionnaires du ministère de l’agriculture et l’ensemble des agriculteurs car 95 % des dossiers ont été déposés et 170 000 clauses ont d’ores et déjà été signées. Cela montre que la profession agricole joue le jeu de la réforme.
M. André Chassaigne. Elle n’a pas le choix !
M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. Une partie de ces droits ne sera pas versée directement et sera affectée à la réserve nationale destinée aux jeunes agriculteurs et à certaines productions – agriculture biologique, entre autres. Mais, dans chaque département, il y aura aussi des programmes spécifiques qui permettront d’adapter les DPU aux réalités de l’agriculture de chacune de nos régions.
M. André Chassaigne. Ce n’est pas tout à fait cela !
M. le ministre de l’agriculture et de la pêche. C’est un outil de consolidation et de solidarité à l’égard de nos agriculteurs.
L’autre aspect important de la réforme est la conditionnalité, sur laquelle vous avez d’ailleurs remis un rapport au Premier ministre, monsieur Le Guen. Cela posait beaucoup de problèmes. Un livret avait été envoyé à tout le monde, mais le système était compliqué. Nous avons donc cherché à simplifier les contrôles pour la conditionnalité 2005 et 2006. Là encore, tout le monde joue le jeu. Il y a une charte du droit des contrôleurs et une charte du droit des contrôlés, et nous avons fait en sorte que ces contrôles se déroulent dans un esprit de dialogue et de concertation.
Pour conclure, je ferai observer que nos agriculteurs paient un impôt injuste : l’impôt « paperasse », lié à la superposition des procédures européennes et nationales – en France, nous en avons même parfois rajouté… J’ai donc lancé une très grande opération de simplification des procédures. Des dizaines de milliers d’agriculteurs nous ont déjà fait parvenir leurs propositions. Nous allons progressivement supprimer cette charge indue qui pèse sur l’agriculture de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à Mme Chantal Bourragué, pour le groupe UMP.
Mme Chantal Bourragué. Monsieur le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, la lutte contre le chômage des jeunes reste une priorité du Gouvernement. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Vous le savez, un étudiant sur deux effectue au moins un stage au cours de sa scolarité. La pratique du stage s’est en effet considérablement développée ces dernières années. Le stage est un outil fondamental pour l’étudiant et souvent une étape obligatoire des formations délivrées aussi bien dans les universités que dans les grandes écoles de commerce ou d’ingénieurs.
Le développement de la pratique du stage est une bonne chose. L’entreprise et l’université sont trop souvent éloignées l’une de l’autre. Le stage crée un lien entre ces deux mondes. C’est un véritable marchepied vers la vie active. Il permet à l’étudiant d’avoir une approche plus concrète de l’entreprise et de trouver plus rapidement un emploi.
Cependant, le stagiaire n’a pas vocation à se substituer à un salarié. Le stage ne doit donc pas être un emploi déguisé. Or certaines entreprises, voire certaines administrations, en abusent. Certaines universités participent à ces dérives en délivrant sans contrôle suffisant des conventions de stage.
Conscient de ces difficultés, vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, à avancer rapidement sur cette question avec l’ensemble des acteurs concernés. Vous avez ainsi annoncé la mise en place prochaine d’une charte des stages. De plus, la loi relative à l’égalité des chances prévoit une meilleure protection des stagiaires et leur rémunération. Pouvez-vous faire le point sur les avancées de ce dossier, particulièrement important pour les jeunes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Madame Bourragué, les stages constituent un outil d’orientation, de formation, mais aussi de professionnalisation, dont nous mesurons toute l’importance. Dans ce cadre-là, ils sont fort utiles, et nous en recensons chaque année 160 000, prévus par les grandes écoles ou les universités. Le Conseil économique et social a d’ailleurs reconnu, il y a quelques mois, l’importance du stage dans le cursus de formation et dans la professionnalisation. Voilà pourquoi il convient de valoriser cet outil.
Cela étant, un certain nombre d’abus ont été constatés : détournement des modalités de pré-embauche, dissimulation de contrats de travail, stages occupationnels organisés par les écoles ou les universités pour des filières n’ayant guère de débouchés.
Il convenait donc de prendre des mesures. Valoriser et encadrer les stages : tel est l’objectif de la loi sur l’égalité des chances, qui a notamment énoncé le principe d’une convention du stage, fixé une durée maximale de six mois, hors cursus pédagogique, et prévu une indemnisation à partir de la fin du troisième mois.
Parallèlement, dans le cadre d’un travail engagé avec François Goulard, nous préparons depuis cinq mois le principe d’une charte des stages en collaboration avec l’ensemble des partenaires sociaux, les présidents d’université et les présidents de l’Association des grandes écoles, et les associations étudiantes. Cette charte prévoira le contenu pédagogique mais aussi la désignation du référent, tant à l’école que dans l’entreprise, ainsi que l’évaluation et les modalités du suivi. Elle fera l’objet d’un décret d’application de force réglementaire. Nous aurons ainsi concrètement valorisé et encadré les stages. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste.
M. François Brottes. Monsieur le Premier ministre, il y a désormais deux types de loi qui ne s’appliquent pas : celles qui sont adoptées en force – comme le CPE – auxquelles vous renoncez après une valse hésitation qui a coûté cher à la France et qui a mobilisé l’ensemble des syndicats et la jeunesse de notre pays, et celles que M. Sarkozy fait voter, la main sur le cœur, en s’engageant à ne pas privatiser EDF et GDF (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste) et que vous vous apprêtez à abroger par petits bouts.
Crise d’autorité ou trahison de la parole donnée, votre majorité montre la même motivation : franchir la ligne jaune pour aboutir à l’irréversible ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Un jour, c’est le code du travail que vous anéantissez ; le lendemain, c’est la propriété publique que vous liquidez !
Alors que vous privatisez Gaz de France, que gagnent les Français à votre petit jeu de Monopoly idéologique ? Une baisse des tarifs ? Certainement pas : ils auront bientôt fait la culbute sous votre gouvernement. Peut-être une augmentation en conséquence du salaire du président de GDF ? Je m’abstiendrai de tout commentaire sur le cynisme de cette initiative… Des créations d’emplois ? Bien au contraire, puisqu’il faut satisfaire la Bourse au détriment de la sécurité. L’amélioration du service ? Personne n’y croit, puisque la privatisation rend caduc le contrat de service public avec l’État. Une offre améliorée, des économies d’énergie ? C’est un leurre, puisque chacun recevra désormais deux factures au lieu d’une : les services clientèle d’EDF et GDF vont se dédoubler pour mieux se déstabiliser mutuellement !
Non, monsieur le Premier ministre, vous ne parviendrez pas à nous vendre cette opération au prétexte qu’il faut sauver le soldat Suez : les tractations entre les deux entreprises sont anciennes, antérieures même au vote de la loi de 2004 qui était censée garantir la propriété publique d’EDF et GDF. À l’époque déjà, nous n’étions pas dupes !
Monsieur le Premier ministre, quel est votre projet pour Gaz de France ? Allez-vous trahir l’engagement de M. Sarkozy de ne pas privatiser GDF, ou décider, avec son soutien, de faire progresser votre rouleau compresseur idéologique en espérant que les Français ne s’en rendront pas compte ? Vous avez, il est vrai, un certain talent pour aiguiser leur vigilance et susciter leur exaspération... Mais quoi que vous fassiez, vous pouvez compter sur les socialistes pour dénoncer chacune de vos manœuvres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Noël Mamère. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.
M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur Brottes, souvenez-vous : en 2000, alors que vos amis étaient au pouvoir, les tarifs du gaz ont augmenté en moins de douze mois de plus de 30 % ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) C’est la réalité !
Il s’agit ici de deux opérateurs de taille moyenne qui souhaitent se rapprocher depuis plusieurs mois autour d’un véritable projet industriel, dans le but de consolider le marché de l’énergie.
Plusieurs députés du groupe socialiste. De faire des profits !
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Aujourd’hui, pour pouvoir garantir tant la sécurité des approvisionnements que les prix, une entreprise doit atteindre une taille lui permettant de peser sur ses fournisseurs, puisque sa seule appartenance à l’État ne peut le faire.
Mme Martine David. C’est faux !
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Deux entreprises ont donc souhaité se rapprocher. Le gouvernement de Dominique de Villepin soutient ce projet industriel. Une large concertation a déjà été engagée : plus de quinze réunions ont été tenues avec les organisations syndicales, dont certaines à Bercy, au cours desquelles chacun a pu poser les questions qui lui paraissent importantes.
M. Maxime Gremetz. Souvenez-vous d’Alcan et Péchiney !
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Nous nous sommes engagés à répondre à chacune des 71 questions qui nous ont été posées, et que nous avons regroupées en huit chapitres. Nous le ferons au cours de discussions qui dureront encore plusieurs semaines.
Il ne s’agira pas ensuite, je vous rassure, de passer en force. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Le Parlement sera saisi d’un projet de loi,…
Mme Martine David. Bien sûr !
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. …de façon que vous puissiez décider en votre âme et conscience si ce projet de fusion, voulu par les deux entreprises, vaut la peine d’être soutenu dans l’intérêt des salariés, des clients, de la France et de l’Europe ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Brochand, pour le groupe UMP.
M. Bernard Brochand. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre délégué à l’industrie.
Monsieur le ministre, la contrefaçon et la piraterie constituent aujourd’hui un défi majeur pour notre économie, nos emplois, nos industries, nos valeurs culturelles et notre art de vivre.
Du fait de la notoriété de ses marques et de sa créativité artistique, la France est particulièrement exposée. La contrefaçon s’est considérablement développée au cours des cinq dernières années : le commerce des produits contrefaits, qui représentait 5 % du commerce mondial en 2000, en représente aujourd’hui 10 %. Le nombre des saisies en France a augmenté de 60 % entre 2004 et 2005, passant de 3,5 à 5,6 millions d’articles saisis. Je salue d’ailleurs en notre nom à tous le remarquable travail des forces engagées sur le terrain dans la lutte contre ce fléau, en particulier les douanes.
La contrefaçon ne concerne plus seulement les produits de luxe. Elle s’étend désormais à tous les secteurs de la vie économique : textile, habillement, jouets, médicaments, produits culturels, pièces détachées pour l’industrie automobile et aéronautique.
M. Richard Mallié. Et cigarettes !
M. Bernard Brochand. La contrefaçon est aujourd’hui l’œuvre de filières criminelles, voire terroristes, de plus en plus sophistiquées, qui ont compris l’intérêt qu’elles pouvaient en tirer.
Outre les dangers physiques qu’ils présentent pour les consommateurs et les conditions inhumaines dans lesquelles ils sont produits, les produits contrefaits constituent aussi un préjudice économique : on estime à 30 000 le nombre d’emplois détruits par an en France, et près de 200 000 en Europe.
Face à cette situation alarmante, les ministres des finances, du budget et de l’industrie, l’Institut national de la propriété industrielle et le Comité national anti-contrefaçon ont lancé une campagne de mobilisation nationale d’une ampleur inégalée. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus sur cette mobilisation nécessaire et attendue et sur les mesures que le Gouvernement compte prendre pour lutter contre ce fléau ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie.
M. François Loos, ministre délégué à l’industrie. Je confirme, monsieur Brochand, les chiffres que vous avez cités. Les produits contrefaits représentent actuellement 10 % du commerce international. C’est considérable ! La contrefaçon est responsable de la disparition de 30 000 emplois par an en France, et le phénomène ne fait que s’aggraver. De plus, en achetant des produits contrefaits, nos concitoyens subventionnent sans le savoir des réseaux criminels – le lien est avéré.
Notre action se déploie suivant trois axes.
Le premier est l’interception des produits contrefaits par les douanes. Les interceptions ont été multipliées par dix en dix ans. Les produits contrefaits sont de plus en plus nombreux, mais les services des douanes ont très bien travaillé, et je vous remercie de leur avoir adressé des félicitations.
Ensuite, nous menons une campagne de mobilisation qui s’adresse à l’ensemble des consommateurs, sous forme de spots télévisés très concrets. Ces spots, qui seront diffusés sur l’ensemble des chaînes de télévision, s’accompagnent du slogan : « Non merci à la contrefaçon ! » Un site Internet dédié la contrefaçon existe également.
Enfin, nous travaillons à une meilleure réparation du préjudice causé. Avec Jean-François Copé, nous préparons un projet de loi tendant à améliorer la réparation du préjudice et à sanctionner ceux qui le causent. Ce texte renforcera également les moyens d’action des services de l’État qui interviennent dans ces situations. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Deflesselles, pour le groupe UMP.
M. Bernard Deflesselles. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, depuis vingt ans, la route ne cesse de gagner des parts de marché dans le transport terrestre de marchandises en France. En 2004, elle représentait plus de 80 % du trafic en tonnes transportées par kilomètre. A contrario, sur la même période, le fer a perdu près de 14 points, pour ne plus représenter que 12 % des transports terrestres. Quant au transport fluvial, il demeure très modeste, avec seulement 2 % du trafic global.
Les conséquences sont claires : augmentation de la pollution atmosphérique, avec son lot de problèmes sanitaires, engorgement – frisant parfois la saturation – de la majeure partie de notre réseau routier, ce qui renchérit de fait le coût d’acheminement de nos marchandises, accroissement des risques humains et matériels lors du transport de matières dangereuses.
Afin d’y remédier en partie et de répondre aux attentes de nos concitoyens, le Gouvernement, par votre intermédiaire, monsieur le ministre, vient de tirer toutes les conséquences de cette situation : fin mars, il a présenté un plan en faveur de l’offre de transports complémentaires au transport routier de marchandises.
À l’heure où les préfets de région entament des négociations sur les contrats de projets 2007-2013, quelles ambitions allez-vous poursuivre en matière de transports alternatifs, au plan national et dans un département qui nous est cher, les Bouches-du-Rhône ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.
M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. Vous avez raison, monsieur Deflesselles, (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), depuis quinze ans, la route ne cesse de gagner des parts de marché sur la voie fluviale, le rail et le transport maritime. C’est inacceptable !
M. Jacques Desallangre. Pourtant, on l’accepte !
M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Face à cette situation, nous envisageons, avec Dominique Perben, un report du transport de marchandises sur des modes alternatifs. Nous ne pouvons donc que nous réjouir que Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy,…
M. André Chassaigne. Quel tandem !
M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. …lors du dernier CIACT (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), dans le cadre du futur contrat de projet 2007-2013, aient décidé de consacrer un volet important à l’intermodalité, au ferroviaire et à tous les modes de transport alternatifs. Cela nous permettra de relever des défis importants pour l’attractivité de notre territoire et la protection de l’environnement.
Premier défi : le transport fluvial. Des projets de liaison existent entre Seine et Nord, et entre la mer du Nord et la mer Méditerranée, avec deux études en cours : l’une entre la Saône et la Moselle, l’autre entre la Saône et le Rhin. Certains avaient abandonné ce projet ; nous le reprenons aujourd’hui sans tabou.
Le deuxième défi est celui du rail. Une autoroute ferroviaire va ouvrir entre Perpignan et Bettembourg, au Luxembourg. Nous en envisageons une deuxième entre Fos-sur-Mer et Turin, par le col du Mont-Cenis.
Le troisième défi est celui des voies maritimes. Le Premier ministre a signé avec son homologue espagnol un accord sur l’ouverture d’une autoroute maritime entre Bilbao et l’Atlantique, voire la Manche et la Mer du Nord. Nous en envisageons d’autres entre Fos-Marseille, Tanger, Barcelone, Rome et Gênes.
Ainsi, monsieur le député, le département des Bouches-du-Rhône sera une véritable ouverture sur la Méditerranée. Pour prolonger notre action, nous allons mettre en place des pôles de compétitivité, sous la forme d’une plate-forme logistique, au Havre 2000 et sur le port de Fos-Marseille. Nous voulons agir, et ne plus subir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean-Luc Warsmann.)
M. le président. La séance est reprise.
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi de programme relatif à la gestion des matières et des déchets radioactifs (nos 2977, 3003).
Je vous rappelle que, jeudi dernier, l’Assemblée s’est arrêtée après le rejet de la motion de renvoi en commission.
M. le président. Nous abordons à présent la discussion des articles.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 rectifié et 77 rectifié, portant article additionnel avant l’article 1er.
La parole est à M. Claude Birraux, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour soutenir l’amendement n° 3 rectifié.
M. Claude Birraux, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Je laisse à M. Bataille le soin de le défendre, puisque cet amendement est identique au sein.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué à l’industrie, cet amendement vise, au début du texte de loi, la périphérie de la loi elle-même, en indiquant ce qu’est un déchet nucléaire, en imposant des devoirs pour une protection maximale des populations et en prenant en compte les intérêts des habitants et des collectivités concernés. Surtout, cet amendement affirme – et nous y reviendrons sans doute à plusieurs reprises tout au long de cet après-midi – la nécessité de prendre nos responsabilités maintenant. En effet, l’argument de l’avenir ne saurait nous conduire à rejeter la décision de la gestion des déchets sur les générations futures ; il est important d’apporter cette précision à cet endroit du texte.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’industrie, pour donner l’avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques.
M. François Loos, ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Espérons que le Conseil constitutionnel trouvera ces dispositions suffisamment normatives, en particulier le second alinéa.
Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3 rectifié et 77 rectifié.
(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.
La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. L’article 1er est important dans la mesure où il est le trait d’union entre le texte dont nous débattons aujourd’hui et la loi du 30 décembre 1991, essentiellement centrée sur les recherches. Cet article réaffirme l’intérêt de continuer les recherches, et le groupe socialiste est tout à fait d’avis d’y mettre l’accent. En effet, il ne saurait être question, dans une loi comme celle-ci, de parler de gestion, d’industrie sans affirmer – comme le fait le texte à cet endroit – la nécessité de continuer les recherches ; nous y reviendrons.
Cela étant dit, nous tenons particulièrement à ce qu’il y ait un équilibre des recherches dans les trois directions, les trois axes de la loi de 1991 : l’entreposage, le stockage souterrain profond, …
M. Jean-Louis Dumont. Réversible !
M. Christian Bataille. …et la séparation- transmutation du retraitement poussé.
Les recherches ne peuvent être concentrées uniquement sur le stockage souterrain, comme on a eu parfois tendance à le dire. Le respect d’un équilibre dans l’avenir est indispensable. La rédaction de l'article 1er est tout à fait intéressante et va dans le bon sens, même si nous aurons à la préciser ensuite par d’autres amendements.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, nous commençons la discussion importante des articles de ce texte de loi et il n’est pas inutile de rappeler certaines données fondamentales.
L'énergie nucléaire n'émet pas de gaz à effet de serre et c'est une des raisons majeures pour lesquelles notre pays a eu raison, sans doute, de faire le choix du nucléaire.
M. Yves Cochet. Mais non !
M. Daniel Paul. Mais elle n'en produit pas moins des déchets dangereux. Et si 85 % du volume total des déchets ne sont pas des substances très nuisibles sur une longue durée, les 15 % restants ont une durée de vie très longue et ont souvent une très haute toxicité.
De fait, la question nucléaire est également perçue par l'opinion publique à travers la question des déchets. L'accumulation de déchets est considérée comme une menace par beaucoup de nos concitoyens.
Pourtant, les débats menés ces derniers mois par la Commission nationale du débat public ont montré qu'il n'y avait pas pour autant rejet de la filière.
Il est vrai que plusieurs éléments politiques et géostratégiques jouent en faveur de l'énergie nucléaire : la hausse du prix du baril de pétrole, l'instabilité de nombreuses zones de production pétrolière, la crise d'approvisionnement en gaz russe dans les pays voisins ont mis en lumière les dangers de la dépendance énergétique et, bien sûr, les contraintes imposées par le protocole de Kyoto.
En France, l'énergie nucléaire produit 80 % de l’électricité de l'Hexagone, garantissant à la fois une indépendance énergétique…
M. Yves Cochet. Non !
M. Daniel Paul. …et une pollution à l'ozone réduite par rapport aux pays n'ayant pas fait ce choix.
Ce choix, que nous assumons, implique un choix par rapport aux déchets radioactifs produits. L'éthique exige que nous prenions nos responsabilités ici et maintenant et que nous puissions assumer totalement vis-à-vis des générations futures des décisions qui les concernent également.
Nous avons à la fois à répondre aux besoins énergétiques – et cela implique que nous maintenions pour l'instant la filière nucléaire – et besoin de trouver des solutions pérennes et fiables pour traiter et stocker les déchets produits par l'énergie nucléaire.
La loi Bataille a eu ceci de positif qu’elle faisait de la recherche une action pérenne dans une filière industrielle qui a à peine cinquante ans d’existence.
Nous approuvons le processus qui a été mis en place en 1991, car, en raison de sa complexité et de son importance, ce sujet nécessite des décisions mesurées, prises en connaissance de cause. Il a en effet permis de développer plusieurs axes de recherche publique, sans fermer aucune porte, alors que la plupart de nos voisins semblent avoir opté pour la solution du stockage. La question des déchets radioactifs nécessite que la science soit forte et plurielle, pour garantir des expertises aussi objectives que possible.
Je rappellerai qu’il est encore trop tôt pour décider de la ou des voies à suivre. S’il ne s’agit pas de se démettre de nos responsabilités, il paraît hasardeux et prématuré de trancher en faveur d’une solution. En effet, la faisabilité du stockage en couche géologique profonde n’est pas entièrement acquise − nous reviendrons sur ce sujet au cours du débat − et les recherches sur la séparation-transmutation ne sont pas suffisamment abouties. Nous approuvons donc les principes posés par l’article 1er, qui maintient les trois axes de recherche.
Toutefois, en matière de déchets, d’autres éléments doivent être pris en considération. C’est en effet l’intégralité de la filière qui est en jeu avec cette question. Il faut donc réfléchir aux liens entre politique énergétique et production de déchets. Ainsi, miser sur la fabrication de réacteurs de quatrième génération permettrait de réduire considérablement leur volume. Investir dans des réacteurs nouveaux, plus performants, permettrait d’optimiser la gestion des déchets.
Jusqu’alors, la filière relevait de la maîtrise publique. Les grandes entreprises publiques nationales intégrées, comme EDF, ont pu évoluer dans un environnement économique stable, sans se préoccuper de gains permanents de productivité ou de préserver leurs parts de marché. Que deviendra cette filière intégrée quand le marché de l’énergie nucléaire sera lui aussi ouvert à la concurrence ? Est-ce bien raisonnable ? Les logiques économiques et industrielles des entreprises ne risquent-elles pas de changer ?
Chacun sait ici que, dans un environnement hautement concurrentiel et capitalistique, les entreprises de l’énergie consacrent des sommes considérables aux fusions-acquisitions, à la publicité, aux stratégies commerciales. Depuis le début de 2000, elles ont ainsi consacré plus de 200 milliards d’euros à ce vaste Monopoly. Cela est-il compatible avec le maintien d’une filière nucléaire stable, qui investit dans la recherche, dans la gestion sécurisée des déchets, et avec un démantèlement sûr des centrales en fin de vie ?
Telles sont les questions que nous souhaitions rappeler au début de ce débat et que nous rappellerons tout au long de la discussion.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons abordé le présent débat dans un état d’esprit très positif : à la demande du président Ollier, M. le ministre avait levé l’urgence, et nous avions échangé, avec responsabilité, des propos de qualité. Comme nombre de mes collègues, je suis donc reparti plein d’optimisme sur les terres républicaines que je représente : l’examen du deuxième volet de la loi sur la sûreté nucléaire et la gestion des déchets radioactifs devait s’accompagner d’une réflexion sur l’avenir, démontrer la capacité du Parlement à décider, celle du ministère à prendre en compte diverses données, et réaffirmer l’importance des trois axes de recherche. Il me semblait que nous aurions l’occasion d’écouter nos populations, de dialoguer avec elles, de les convaincre de l’intérêt qu’il y a à aller de l’avant.
Mais il est un autre axe important pour la Meuse et qui mérite de retenir quelques minutes notre attention : c’est celui du développement économique. Nous avons d’abord cru que la discussion se déroulerait selon le programme de travail fixé par la conférence des présidents de la semaine dernière, mais nous savons, depuis ce matin, que l’ordre du jour a été modifié. Nous comprenons fort bien l’urgence devant laquelle se trouve le Gouvernement, qui est dans la nécessité d’apporter une réponse à notre jeunesse, à ceux qui étaient dans la rue il y a encore quelques heures. Toutefois, nous avons pu, de notre côté, prendre divers engagements et certains d’entre nous pourraient avoir quelques difficultés à être présents dans l’hémicycle jeudi prochain. C’est pourquoi, monsieur le ministre, je voudrais d’ores et déjà attirer votre attention sur les engagements qui ont été pris et sur les questions qui vous ont été posées à propos de l’obligation de résultat faite à trois grandes entreprises − l’ANDRA, EDF et AREVA −, dont certaines sont encore publiques, à qui l’on avait confié des missions de soutien du développement économique de la Meuse, à qui elles devaient apporter leurs compétences, leur expertise des dossiers. Mercredi matin, le Conseil des ministres a défini des orientations très fortes en matière de valorisation de la biomasse. Si cela ne se décline pas dans le département de la Meuse, notamment dans le secteur de Bure, c’est à désespérer des entreprises publiques.
Je me suis interrogé, ce week-end, sur la question de la propriété des déchets, qu’ont abordée certains de nos collègues, et j’ai eu plusieurs entretiens à ce sujet. Je me suis rendu compte que, si on laissait aux entreprises, que ce soit EDF ou les filiales d’AREVA − nouvellement dénommées, ce qui, dans ce domaine, n’est pas insignifiant −, la responsabilité de la gestion de leurs déchets, tout au long de la vie de ceux-ci, le risque que cela comporte pourrait représenter, pour certains, une contrainte, une barrière infranchissable, et écarter d’éventuelles tentatives de privatisation. Ce n’est donc pas inintéressant. Ainsi, l’une des questions que je vous posais dans la discussion générale, monsieur le ministre, trouve ici sa réponse : EDF doit conserver la propriété des déchets, rester une entreprise publique chargée de certaines missions et, par conséquent, le Gouvernement doit avoir un certain pouvoir d’incitation et la possibilité de donner des ordres.
Le président du conseil général de la Meuse déclarait qu’il faudrait envisager la création d’un pôle d’excellence sur l’ensemble du territoire, pour développer les économies d’énergie, la maîtrise de l’énergie, les énergies nouvelles. Je connais un patrimoine, géré par les bailleurs sociaux, qui pourrait servir de champ d’expérimentation et d’investigation. Comme toutes les grandes opérations, celle-ci pourrait représenter, par la suite, un outil pédagogique incitatif.
Enfin, monsieur le ministre, j’attendais de voir la traduction dans la réalité des engagements pris par M. le Premier ministre, et donc par le Gouvernement de la France, en matière de biocarburants et de diester. La question de l’estérification et une entreprise comme INEOS m’intéressaient particulièrement. J’ai eu, il y a quelques minutes, un échange qui m’a un peu rassuré, car j’ai appris que les textes allaient sortir. On voit bien, cependant, toutes les démarches qu’il reste à accomplir. De ce point de vue, il faudrait éviter qu’AREVA ou EDF ne se lancent dans nos campagnes comme si ce n’était qu’un vaste champ d’investigation et comme si tous les gogos de la terre étaient réunis sur le territoire meusien.
Je voudrais cependant insister pour que, avant la fin de nos discussions et avant le début de la navette entre l’Assemblée nationale et le Sénat, des engagements très clairs et très précis soient pris en ce qui concerne le développement économique créateur d’emplois dans le secteur de Bure, comme l’a déjà demandé notre collègue François Dosé. Il me semble que nous devons être entendus, sans quoi nous nous ferions entendre.
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 4 rectifié.
Cet amendement fait l’objet de quatre sous-amendements, nos 82, 79 rectifié, 80 et 145.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 4 rectifié.
M. Claude Birraux, rapporteur. Cet amendement vous propose une rédaction globale de l’article 1er. Il s’articule avec un second amendement que nous examinerons tout à l’heure. Avec ces deux amendements, la commission a eu le souci, d’une part, de préserver la continuité avec la loi Bataille et, d’autre part, de hiérarchiser les priorités. Si j’ai bien compris, nous allons au-devant des préoccupations exprimées à l’instant par M. Bataille et M. Paul.
Le présent amendement propose de consacrer un article spécifique aux recherches sur les déchets de haute ou moyenne activité à vie longue − qui, je vous le rappelle, représentent 99 % de la radioactivité totale des déchets radioactifs, concentrée dans 4,6 % des volumes conditionnés −, de maintenir pour ces recherches la notion d’axe figurant dans la loi Bataille, ainsi que l’ordre de ces axes, tel qu’il a été adopté en 1991, et de souligner le caractère complémentaire de ces trois axes.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir les sous-amendements nos 82, 79 rectifié et 80.
M. Christian Bataille. L’amendement que vient de présenter le rapporteur me paraît reprendre les choses d’une manière complète : cette bonne synthèse sera utile pour la suite. Cet amendement s’est utilement inspiré des débats que nous avons eus en commission, des amendements qui ont été défendus et d’une démarche particulière du groupe socialiste, qui avait déposé une proposition de loi. Je ne peux que me satisfaire de voir repris les principes que nous y avions affirmés. Cet amendement a, sur le projet de loi du Gouvernement, l’avantage de préciser les choses en début de texte, de tirer la substantifique moelle de la loi de 1991 et de tracer des perspectives en matière de calendrier.
Le sous-amendement n° 82 nous semble plus normatif que le texte qui nous est proposé.
Le sous-amendement n° 79 rectifié propose d’insérer, dans l’amendement n° 4 rectifié, les mots « , au vu des résultats des études conduites ».
Quant au sous-amendement n° 80, il est beaucoup plus important, puisqu’il propose d’introduire une condition qui nous paraît essentielle en précisant, à l’alinéa 4 de l’amendement, que, après consultation du conseil général du territoire concerné par une installation, le Gouvernement soumet un rapport au Parlement et organise un débat suivi d’un vote.
Ces deux volets essentiels figuraient bien dans la loi de 1991, qui mettait l’accent sur les rôles respectifs des collectivités territoriales, que l’on devait consulter, et du Parlement. En matière nucléaire, les années quatre-vingt dix − et plus particulièrement 1991 − ont marqué une avancée essentielle : alors que, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, le pouvoir exécutif décidait seul − c’est-à-dire qu’il laissait ses conseillers techniques décider pour lui de la politique nucléaire −, c’est désormais le Parlement qui est au cœur du débat. Nous entendons bien qu’il y reste. À chaque étape, il doit avoir son mot à dire : aujourd’hui, il dit bien plus qu’un mot, puisqu’il examine un projet de loi ; il ne faudrait pas, ensuite, qu’il n’y ait qu’un tunnel conduisant tout droit à des décisions d’installation importantes sans que le Parlement soit consulté. C’est pourquoi le sous-amendement n° 80 propose qu’un nouveau rendez-vous parlementaire ait lieu dans dix ans.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir le sous-amendement n° 145.
M. Yves Cochet. Dans la nouvelle rédaction de l’article 1er, certaines des solutions qui avaient été proposées initialement ont disparu. Il faut d’abord distinguer – ce qui n’est pas toujours le cas, dans le texte, hélas – les déchets de l’ensemble des matières radioactives.
Avec ce nouvel article 1er, comme avec l’ensemble des articles du projet, même ceux réécrits par la commission, le choix du stockage géologique, associé dans la loi au retraitement, engage manifestement les générations futures en ce qu’il implique le maintien à long terme de l’option nucléaire et, sans doute, l’emploi de réacteurs de la quatrième génération.
Il faut d’ailleurs s’entendre sur le volume des déchets. Le rapporteur a avancé le pourcentage de 85 %. Si l’on considère les matières problématiques comme étant non pas uniquement les déchets ultimes, c’est-à-dire les matrices en verre contenant les produits de fission et les actinides mineurs, mais l’ensemble des combustibles usés et non retraités, tels que le MOX et les oxydes d’uranium irradiés, c’est 100 % du problème qui, dans ce cas, ne serait pas résolu.
C’est pourquoi nous proposons, par le sous-amendement n° 145, de réintroduire ce qui figurait dans le projet initial afin de ne pas obérer l’avenir en conservant la possibilité de changer de politique énergétique, par exemple l’an prochain, et de pouvoir ainsi envisager de sortir du nucléaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les quatre sous-amendements ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Le sous-amendement n° 82 de M. Bataille apporte une précision utile, et la commission l’a adopté.
Le sous-amendement n° 79 rectifié ne pose pour sa part pas de problème, et j’y suis donc favorable, même si la commission l’a repoussé – mais avant qu’il ne soit rectifié.
Le sous-amendement n° 80, toujours du groupe socialiste, anticipe sur un débat que nous aurons à l’article 8. Il est en effet satisfait par un amendement que je proposerai alors, et la commission l’a donc repoussé.
Enfin, le sous-amendement n° 145 de M. Cochet n’a pas été examiné par la commission faute d’avoir été défendu. Je ne surprendrai personne en disant que nous ne sommes pas favorables à la sortie du nucléaire qui est évoquée dans l’exposé sommaire. Il est vrai que l’alinéa que notre collègue propose d’introduire figurait dans le projet de loi, mais le ministre nous confirmera certainement qu’une telle sortie n’était pas dans l’intention du Gouvernement...
Si nous avons néanmoins supprimé l’alinéa initial, c’est parce que nous avons estimé que sa rédaction était beaucoup trop floue – le sens que lui donne M. Cochet le met d’ailleurs en évidence – et que la question relevait en tout état de cause non pas du présent article mais du plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement et les sous-amendements ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Le Gouvernement est favorable à l’amendement de la commission, et partage l’avis du rapporteur s’agissant des deux premiers sous-amendements. Quant au sous-amendement n° 80, il traite d’un sujet qui sera abordé dans le cadre de l’article 8 ; il serait donc préférable que nous en discutions à ce moment-là avec les nombreux autres amendements.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 145, si l’alinéa en question figurait en effet dans le texte initial, je ne peux partager la conclusion qui en est tirée dans l’exposé des motifs. Cependant, je souhaite que l’ANDRA étudie l’ensemble des hypothèses. Aussi, la préoccupation de M. Cochet sera satisfaite, sans qu’il soit nécessaire d’inscrire cette étude dans la loi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Je souhaiterais évoquer brièvement mon amendement n° 185, car, si je comprends bien, l’adoption de celui de la commission le ferait tomber.
M. le président. Il est de fait que l’adoption de l’amendement n° 4 rectifié ferait tomber tous les autres amendements déposés à l’article 1er.
M. Daniel Paul. Comme quoi quelques années d’ancienneté permettent de déjouer les petits pièges ! (Sourires.)
Nous avons déposé un amendement consistant à supprimer la référence à la mise en exploitation d’un centre de stockage en 2025. Je pensais d’ailleurs que nous étions tous d’accord pour poursuivre les trois axes de recherches envisagés depuis 1991, et dont le premier article du projet de loi a prévu le maintien, à savoir l’étude de la transmutation, de l’entreposage et du stockage.
Que l’on prenne des dispositions, ainsi que le propose notre collègue Christian Bataille, sur l’entreposage avant 2020, peut se comprendre. En revanche, décider dès aujourd’hui la création, en tout état de cause, d’un centre de stockage en couche géologique profonde en 2025, c’est aller vite en besogne. Je préférerais donc que l’on en reste au rendez-vous envisagé en 2015, date à laquelle les questions soulevées encore aujourd’hui par ce texte auront été étudiées. D’ailleurs, inscrire cette échéance de 2025 dans la loi reviendrait, à la limite, à poser la question de l’utilité de cette étape en 2015.
Je demande donc, comme le propose l’amendement que je défends ainsi au nom de mon groupe, que l’on retire du troisième alinéa de l’amendement proposé par le rapporteur la référence à une mise en exploitation du centre de stockage en 2025.
M. le président. La parole est à M. François Dosé.
M. François Dosé. Je voudrais conforter l’intervention qui vient d’être faite.
Je ne comprends pas comment on peut parler de recherche ouverte si, dès le début, on fixe une date – pourquoi pas le jour tant que l’on y est ? – pour l’achèvement de ce qui doit faire l’objet de cette recherche. On nous dit d’ailleurs qu’il faut faire des études pour vérifier les différentes hypothèses. Mais qu’est-ce que des études sinon des vérifications ?
En outre, la recherche devrait être comparative. Or il n’y a pas deux laboratoires, mais un seul. Après tout, la recherche ne devrait-elle pas porter sur la création d’un deuxième laboratoire ? (Sourires.) Comme je le disais en plaisantant, que tous ceux qui votent ce texte soient candidats pour l’installation d’un deuxième laboratoire dans leur circonscription !
En tout cas, si une recherche est lancée, il n’est pas possible de prévoir aujourd’hui son terme.
Par ailleurs – on y reviendra au cours du débat –, il faut que le Parlement soit au cœur de la décision, comme le soulignait M. Bataille, et non qu’il donne un avis. Certes, on peut toujours finasser et trouver que, le Parlement étant parti de rien, le fait qu’il intervienne est mieux que rien. Mais donner un rendez-vous avec le Parlement, c’est donner aux élus du peuple la possibilité de décider si l’on met en œuvre cette solution, et non de donner un avis sur la base duquel, dans dix ou quinze ans, le Gouvernement, dont je ne sais de quelle famille politique il sera issu, pourra prendre un décret.
M. le président. La parole est à M. François Cornut-Gentille.
M. François Cornut-Gentille. Avant d’intervenir à mon tour pour défendre un amendement qui risque de tomber, je tiens à revenir sur les propos de M. Dumont en introduction de cet article. Je les ai en effet trouvés excellents s’agissant du développement économique, sauf peut-être qu’il a beaucoup parlé à cet égard de la Meuse et un peu moins de la Haute-Marne, alors que cela doit valoir pour les deux. (Sourires.)
M. Jean-Louis Dumont. Faisons cause commune ! (Sourires.)
M. François Cornut-Gentille. Par mon amendement n° 113, je voulais insister sur la notion de faible profondeur. Le débat public, qui a montré les attentes de la population, a porté sur les différentes pistes – stockage, entreposage... Un consensus s’est dégagé parmi tous ces gens, aux opinions assez variées à l’égard du nucléaire, sur celle de l’entreposage en subsurface – ou faible profondeur.
Je ne sais pas si c’est « la solution », mais se priver de cette piste de recherche jetterait un doute sur la méthode, même si c’est pour conclure que cette piste n’apporte pas grand-chose et que le stockage vaut mieux.
Voilà pourquoi je propose que les études portent également sur l’entreposage en faible profondeur, recherche qui, je crois, est très attendue par la population.
M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.
M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. J’interviens dans ce débat, qui me semble d’ailleurs un peu long, pour rassurer tous ceux qui ont pu faire état de certaines inquiétudes. Les membres de la commission – dont M. Cornut-Gentille, par exemple, ne fait pas partie et qui n’a donc pu assister à nos débats – savent parfaitement ce que nous allons voter.
D’abord, tous les amendements de forme qui vont tomber ont été déposés après que la commission eut voté l’amendement n° 4 rectifié que vient de présenter M. Birraux.
M. Luc-Marie Chatel. Tout à fait !
M. Patrick Ollier, président de la commission. Ensuite, nous avons eu une réflexion globale, ce qui explique que nous ayons fait droit un peu plus avant dans le texte à la demande de M. Dosé s’agissant du rendez-vous parlementaire. C’est ainsi qu’à l’article 8, nous aurons à voter un amendement que M. Birraux présentera et qui répondra, monsieur Cornut-Gentille, à la légitime préoccupation de voir le Parlement se prononcer avant la mise en exploitation d’un centre de stockage.
M. François Cornut-Gentille. C’est indispensable.
M. Patrick Ollier, président de la commission. Sachez d’ores et déjà que ce rendez-vous est fixé, sous des formes que l’on étudiera, et il n’est donc pas besoin que l’on ait ce débat maintenant. Nous avons en effet décidé de faire droit à cette demande à l’article 8 de telle sorte que l’opinion publique n’ait pas de suspicion et que tout le monde soit rassuré.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Le problème est qu’il y a un hiatus dans ce que l’on nous demande de voter puisque le complément naturel de l’amendement présenté par le rapporteur figure à l’article 8. Pour éclairer notre vote, il faut donc que l’on nous en expose le contenu, ce qui lèverait toute difficulté pour voter dès maintenant cet amendement n° 4 rectifié de la commission.
En ce qui me concerne, je trouve, sous réserve de la précision que le président de la commission vient d’apporter, la rédaction en parfaite cohérence avec la proposition de loi que j’évoquais tout à l’heure. En effet, cette proposition de loi, signée par tous les membres du groupe socialiste, proposait qu’ « Au vu des résultats des études de faisabilité conduites en laboratoire souterrain dans une couche géologique profonde, la construction d’un centre de stockage réversible peut être envisagée de façon que sa mise en service opérationnelle intervienne au plus tard le 1er janvier 2025. Après consultation du conseil général du territoire concerné, le Gouvernement présente un rapport global qui précédera la décision par le Parlement de la construction et de la mise en service industriel de l’installation. Un débat suivi d’un vote est prévu à cet effet. »
La seule différence, c’est que vous nous proposez une rédaction en deux morceaux et que vous nous demandez de voter maintenant une seule partie d’une proposition qui, pour nous, a une certaine cohérence et devrait être examinée en bloc.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. J’ai l’impression de me retrouver dans le débat d’il y a quelques jours sur le sens du mot « réversibilité », lorsque nous considérions que le texte disait une chose et son contraire.
L’amendement n° 4 rectifié indique dans son 2° : « le stockage réversible en couche géologique profonde ; les études et recherches correspondantes étant conduites en vue de choisir un site et de concevoir un centre de stockage de sorte que la demande de son autorisation prévue à l’article L. 542-10-1 du code de l’environnement puisse être instruite en 2015 et le centre mis en exploitation en 2025 ; ».
Le texte est impératif, monsieur le président de la commission. Il suffirait d’ajouter le mot « éventuellement » dans le dernier membre de phrase pour que la rédaction soit cohérente avec ce que vous nous proposerez quelques articles plus loin. En effet, tel qu’il est rédigé, l’amendement signifie que le centre devra être mis en exploitation en 2025 alors que, tout à l’heure, vous direz que le centre sera peut-être lancé en 2015 mais que le projet sera d’abord soumis à l’avis d’un certain nombre d’organismes. Dès lors, la construction du centre devient éventuelle.
Vous savez très bien que c’est ce genre de textes qui fait référence et qui pose des problèmes, notamment aux populations, que ce soit dans la région de Bure ou ailleurs.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Je voudrais ajouter un ou deux arguments à ce que vient de dire M. Paul et d’autres collègues. Vous voyez, monsieur Paul, pour une fois, je suis d’accord avec vous.
Il me semble que le calendrier prévu, notamment pour la réalisation du centre d’enfouissement, est très optimiste, pour ne pas dire irréaliste et même un peu contradictoire avec ce qu’on dit par ailleurs dans la loi.
La Commission nationale d’évaluation a essayé, dans son rapport de janvier 2006, il y a donc seulement quelques semaines, de dresser une liste des recherches encore à effectuer et même d’évaluer leur durée. Par exemple, le suivi de la zone endommagée par le creusement, les méthodes de construction des bouchons, qui demandent plus de dix ans d’études – je ne parle pas de construction –, les perturbations géochimiques apportées par le béton et les composantes métalliques qui demandent, selon les termes mêmes de la Commission nationale d’évaluation, « des observations sur le temps long ».
Par ailleurs, M. Ghislain de Marsily, professeur de géologie et membre de la CNE, a déclaré que la faisabilité de l’enfouissement était loin d’être acquise et nécessitait encore plusieurs décennies de recherche. Je veux bien admettre que 2025, c’est dans plusieurs décennies, mais, tout de même, c’est très court.
Enfin, un panel d’experts internationaux réuni dans l’IEER, l’Institute for Energy and Environmental Research, a déclaré, le 27 décembre 2004, que « la faisabilité de la construction d’un centre de stockage géologique à Bure est très prématurée ». Cette observation se trouve d’ailleurs dans l’examen critique du programme de recherche de l’ANDRA.
Ces différents avis concluent tous que décider aujourd’hui que le site sera construit en 2025 est très prématuré, voire irréaliste. Je me joins donc aux critiques formulées par mes autres collègues.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. N’appartenant pas à la commission, j’ai déposé plusieurs amendements, qui vont tomber.
Ainsi, je voulais m’opposer au fait que, dans le texte final qui deviendra la loi de la République, le terme « stockage » puisse apparaître, ne serait-ce qu’une seule fois, sans être suivi du mot « réversible ». En effet, si cela était le cas, c’est cette phrase qui deviendrait pour certains la « Bible ». Dans la loi Bataille, l’irréversibilité était notée mais comme un élément parmi beaucoup d’autres. Or ce mot était devenu le leitmotiv d’une opposition systématique qui pouvait cacher les débats de fond.
L’amendement n° 4 rectifié sous-amendé est susceptible de me convenir et je comprends les évolutions du texte, mais je sais que l’équilibre est toujours fragile. Des engagements doivent être pris par écrit de telle sorte qu’ils ne puissent en aucune manière être contestés. Il y va de notre crédibilité. Tel était le but des amendements que j’ai signés avec mes collègues socialistes, ne sachant pas qu’ils tomberaient.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Patrick Ollier, président de la commission. Monsieur le président, après avoir entendu les propos des différents orateurs, je crois pouvoir dire que le rapporteur, le ministre, M. Cornut-Gentille et moi-même, sommes tout à fait dans le même état d’esprit. Je propose donc un sous-amendement de séance qui pourrait peut-être apaiser toutes les inquiétudes.
Il s’agirait d’insérer, dans la seconde phrase du 2° de l’amendement n° 4 rectifié, après les mots : « Les études et recherches correspondantes sont conduites en vue de choisir un site et de concevoir un centre de stockage de sorte que la demande de son autorisation prévue à l’article L. 542-10-1 du code de l’environnement puisse être instruite en 2015 et » les mots : « , sous réserve de cette autorisation, ». Ainsi, serait assurée la relation entre les études et l’éventuelle autorisation et donc la mise en exploitation du centre.
M. Luc-Marie Chatel. Bien !
M. Patrick Ollier, président de la commission. Un tel sous-amendement serait-il de nature à rassurer tout le monde ?
M. Jean-Louis Dumont. Oui.
M. Patrick Ollier, président de la commission. Sous réserve, bien sûr, que le ministre soit d’accord.
M. le président. Je suis donc saisi par M. Ollier d’un sous-amendement, qui portera le numéro 238 ?
Quel est l’avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Je suis favorable à ce sous-amendement, qui permet de rassurer tout le monde, parce qu’il correspond exactement à l’esprit du texte.
M. François Cornut-Gentille. Très bien !
M. le ministre délégué à l’industrie. Si cela va mieux en le disant, disons-le.
M. Jean-Louis Dumont. Oui !
M. le ministre délégué à l’industrie. Je voudrais toutefois rappeler que nous discutons là d’un article qui donne des objectifs à la recherche et il faut bien donner des objectifs. Or un quantum de recherches, cela se détermine en fonction d’un délai. On sait qu’il y a un certain nombre de recherches à faire ; il faut bien les étaler sur une certaine durée. Si l’on ne fixe pas de durée, la recherche a du mal à se définir. En outre, les niveaux de financement annuels dépendent de la durée du programme. Il est donc normal qu’il y ait des délais. Ne soyez pas choqués par ça.
Je voudrais répondre à M. Cochet qui tout à l’heure faisait remarquer qu’un membre de la CNE avait estimé qu’un très long délai était encore nécessaire. M. Cochet a raison, mais ce n’est pas l’avis de la CNE.
M. Yves Cochet. Je suis d’accord.
M. le ministre délégué à l’industrie. La CNE, dans son ensemble, a considéré que c’était jouable dans les délais prévus.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 82.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 79 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 238.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 80.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 145.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié, modifié par les sous-amendements adoptés.
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’article 1er est ainsi rédigé.
Tous les autres amendements à l’article 1er tombent.
Nous en arrivons aux amendements portant articles additionnels après l’article 1er.
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 83.
La parole est à M. Christian Bataille, pour le soutenir.
M. Christian Bataille. Cet amendement s’explique par son texte même. Nous proposons que tout projet d’installation, qu’il s’agisse d’un centre de stockage, d’un centre d’entreposage de longue durée en surface ou en sub-surface ou d’un réacteur expérimental, toutes choses qui ont déjà été ou qui vont être évoquées, donne lieu à une concertation avec les élus et la population des sites concernés, dans des conditions fixées par décret. Le dialogue avec les populations concernées par des installations scientifiques importantes est en effet fondamental.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission partage le souci des auteurs de cet amendement d’avoir la concertation la plus large. Mais cet amendement me paraît déjà satisfait puisque les procédures de consultation du public, enquêtes publiques, débats publics, sont déjà prévues par le code de l’environnement. S’agissant du centre, la procédure de l’article 8 garantit, elle aussi, la concertation la plus large. Donc, avis défavorable de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis que la commission. Nous partageons les préoccupations exprimées par l’amendement, mais nous considérons que trois articles satisfont déjà à cette demande. Par conséquent, dans un souci de clarté, je préférerais que cet amendement ne soit pas adopté.
M. le président. La parole est à M. François Dosé.
M. François Dosé. Je veux simplement rappeler aux uns et aux autres que le problème n’est pas seulement celui de la concertation mais plutôt celui de la contribution.
Je ne partage pas l’avis selon lequel la somme des intérêts territoriaux ferait l’intérêt général. Donc, je n’imagine pas qu’un territoire puisse bloquer une institution qui dépasserait l’intérêt du territoire. Mais, d’un autre côté, on ne peut pas imaginer que le seul « dialogue » avec les élus suffise. Je sais très bien que cette demande ne peut pas prendre un caractère législatif. Toutefois, je ne peux pas, pour vivre cette situation depuis quinze ans, faire l’impasse là-dessus. On ne peut pas continuer à laisser les gens avoir l’impression qu’en même temps qu’on organise le dialogue, on leur dit « cause toujours », comme je l’ai dit de manière un peu cruelle et un peu amusée la dernière fois. Il faudra peut-être qu’un jour on fasse autrement. Ce sera peut-être une autre génération qui y parviendra. En tout cas, on ne peut pas se satisfaire de mots.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Je l’ai dit dans mon intervention dans la discussion générale la semaine dernière, je suis pour le développement et la poursuite de la filière nucléaire. Et c’est précisément pour cette raison que je souhaite que l’on rompe avec certaines pratiques, même si celles-ci ont moins cours actuellement.
Le problème des déchets est nouveau. Il faut le prendre à bras-le-corps, différemment que ce que l’on a fait pour l’implantation des centrales. Il faut trouver les formules pour aller au-delà de ce que permettent le code de l’environnement et la loi Barnier.
Dire aujourd’hui qu’il y a la Commission nationale du débat public, qu’on rencontre le conseil général, qu’on réunit les élus, c’est bien, mais c’est tout de même le minimum que l’on peut faire. Chacun sent bien qu’il faut aller au-delà, trouver le moyen d’instituer une concertation avec les élus et la population des sites concernés. Il ne s’agit pas, comme le disait François Dosé lui-même, de dire qu’il faut que ce soient les habitants du secteur qui décident pour le reste de la population de notre pays, il s’agit de faire en sorte que l’avis de la population soit mentionné dans le dossier remis aux autorités compétentes, le Parlement, le Gouvernement, etc., avant que celles-ci ne prennent leur décision.
L’enseignant que je suis sait que la meilleure décision est celle qui est prise en commun, et non celle qui est imposée, surtout quand on cherche à donner le sentiment aux gens qu’on les a écoutés alors que cela n’a pas toujours été le cas.
Dans la phase nouvelle que nous abordons en ce qui concerne le nucléaire et parce que j’ai confiance dans le fait que nos concitoyens peuvent, par leurs contributions, nous aider à mieux gérer cette question, cet amendement nous permet d’aller en ce sens au-delà des pratiques actuelles. Il serait donc dommage de le refuser.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 5.
Cet amendement fait l’objet de deux sous-amendements, nos 233 et 75.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 5.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit de compléter la rédaction nouvelle de l’article 1er. Dans un souci de hiérarchisation, celui-ci est consacré aux axes de recherche sur les déchets de haute et moyenne activité à vie longue.
Dans sa rédaction originelle, l’article 1er du projet de loi comprenait des orientations de recherche concernant d’autres déchets. Nous les reprenons dans ce qui a vocation à être un article 1er bis. Ces orientations sont également hiérarchisées. Nous vous proposons en outre de les compléter sur deux points, afin, d’une part, de prévoir la définition de solutions de stockage pour les déchets graphites et radifères et d’organiser, d’autre part, la surveillance radiologique des centres de stockage de résidus miniers.
M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol, pour soutenir les sous-amendements nos 233 et 75.
M. Claude Gatignol. Il s’agit juste de préciser la rédaction de l’amendement du rapporteur en ce qui concerne les déchets graphites et radifères. Il me semble préférable de proposer une date plus précise – 2013 – pour la mise en service d’un centre de stockage. Le sous-amendement n° 233 propose donc, après les mots : « de sorte que », de rédiger ainsi la fin de l’alinéa 2 de l’amendement n° 5 : « le centre de stockage correspondant puisse être mis en service en 2013 ; ».
Dans le même esprit de cohérence, le sous-amendement n° 75 propose, dans l’alinéa 6 de l’amendement, de remplacer le mot « centres » par le mot « sites », utilisé habituellement en code minier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux sous-amendements ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Favorable
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement et les deux sous-amendements ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable à l’amendement et aux deux sous-amendements.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 233.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 75.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5, modifié par les sous-amendements adoptés.
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. L'article 2 ne fait l’objet d’aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 2 est adopté.)
M. le président. Deux orateurs sont inscrits sur l’article 3.
La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. L’article 3 est un article complexe et normatif qui propose un certain nombre de définitions quasiment scientifiques. Il fait notamment l’objet de plusieurs amendements visant à rectifier la rédaction un peu provocatrice de l’alinéa 9.
S’il s’agit de définir ce que sont les déchets radioactifs, on fait à mon sens une distinction byzantine en évoquant les déchets radioactifs ultimes. L’examen des amendements doit nous permettre de parvenir à quelques simplifications dans la rédaction, de manière que, malgré sa technicité, ce texte de loi soit le plus intelligible possible pour le public.
M. le président. La parole est à M. François Dosé.
M. François Dosé. L’alinéa 9 est certes une provocation. Si, vraiment, le stockage était l’opération consistant à placer des substances que l’on n’a pas l’intention de récupérer, notre contribution et notre participation s’arrêteraient là. Cela étant, je pense que le travail en commission est de nature à nous avoir plus ou moins rassurés.
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 148.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 129 et 84, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l’amendement n° 129.
M. Yves Cochet. Il s’agit de préciser certains termes utilisés pour distinguer les matières dont nous parlons.
En ce qui concerne l’alinéa 6 de l’article, nous proposons une nouvelle rédaction, car la définition de déchet nucléaire donnée par le texte nous semble contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation en son arrêt du 7 décembre 2005 et à celle de la Cour de justice des Communautés européennes. Le projet de loi oublie en effet que la question de l'utilisation future – éventuelle ! – n'est qu'un indice, utilisé quand il y a doute éventuel sur la qualité des matières. Le critère principal dans la définition du déchet, c’est la notion de résidu d’un processus industriel. Si c’est le cas, le débat sur le fait de savoir ce que l'on en fait n'a aucune incidence hormis le fait de savoir si l'on est en présence d'un déchet ou de ce que le droit français qualifie de déchet ultime.
La définition proposée dans le projet de loi a pour conséquence de laisser à l'industrie, en fonction de ses propres souhaits et prévisions, le choix de déterminer ce qui est un déchet ou non, et donc de répondre ou non aux obligations légales que cela implique. Elle exclut par ailleurs un ensemble de matières qui, pourtant, nécessiteraient un suivi et des voies de gestion à la fois sûres et pérennes. D’où notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir l’amendement n° 84.
M. Christian Bataille. Il s’agit d’une simplification rédactionnelle, consistant à supprimer la distinction opérée par les alinéas 6 et 7 entre déchets radioactifs et déchets radioactifs ultimes. C’est une distinction byzantine et sans objet, et notre rédaction a pour objet d’éviter toute confusion entre ces deux notions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Claude Birraux, rapporteur. L’avis de la commission sur l’amendement de M. Cochet est défavorable, car il propose une définition dérogatoire au droit commun des déchets. Je rappelle qu’un déchet, au sens du code de l’environnement, est une substance destinée à abandon. Le projet de loi reprend cette logique pour les déchets radioactifs en définissant le déchet radioactif comme la substance dont aucune utilisation n’est prévue ou envisagée.
Il me paraît préférable d’en rester là plutôt que d’adopter la définition proposée par M. Cochet, puisque cette définition conduirait, en définissant le combustible irradié et le plutonium comme déchets, à empêcher leur traitement. Cela revient à interdire en matière nucléaire le tri et le recyclage que M. Cochet réclame par ailleurs dans tout le reste de l’économie.
M Yves Cochet. Mais pas pour le nucléaire !
M. Claude Birraux, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement de M. Bataille, il comporte une contradiction, puisque ce qu’il propose serait dérogatoire par rapport au droit général des déchets et que cela risquerait en outre de favoriser le stockage en France de déchets étrangers. Il suffirait en effet à un étranger de laisser entrer en France des matières dont le traitement est possible et ne qui rentreraient donc pas dans sa définition des déchets.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Je reprends à mon compte l’explication du rapporteur sur l’amendement n° 84 et j’émets également un avis défavorable.
Sur l’amendement n° 129, j’émettrai également un avis défavorable en ajoutant à cet avis un motif supplémentaire.
En effet, les définitions que nous proposons dans ce projet de loi sont tirées de la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs, adoptée à Vienne le 5 septembre 1997 et ratifiée par la France le 2 mars 2000.
Selon celle-ci, « déchet radioactif s’entend des matières radioactives sous forme gazeuse, liquide ou solide pour lesquelles aucune utilisation ultérieure n’est prévue par la partie contractante ou par une personne physique ou morale dont la décision est acceptée par la partie contractante » – partie contractante désignant ici les États signataires de cette convention.
Vous nous soupçonnez peut-être de vouloir restreindre la notion de déchet radioactif pour en exclure des substances qui nécessiteraient des voies de gestion pérennes, mais vous oubliez que le projet de loi couvre toutes les substances radioactives, déchets et matières. C’est pour cette raison que nous avons retenu ces définitions-là, qui permettront à la Cour de cassation de fonder sa jurisprudence sur un texte.
M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 129
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 193.
La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour le soutenir.
M. Jean-Louis Dumont. À l’aune des connaissances scientifiques actuelles, certaines substances sont considérées comme des déchets, voire comme des déchets ultimes. Or on sait bien que, demain ou après-demain, dans cinquante ou cent ans, deux siècles peut-être, ces déchets d’aujourd’hui seront les sources d’énergie de demain. La séparation a fait, au cours de ces dix dernières années, des progrès assez importants. Les connaissances se sont améliorées au gré des avancées scientifiques.
Il est vrai, monsieur le ministre, qu’il faut pour cela des moyens. C’est l’objet de l’article 1er du projet, qui rappelle les trois axes du programme de recherches. J’avais d’ailleurs déposé un amendement spécifiant que devaient être amplifiés les moyens financiers et humains mis à disposition de la recherche sur la séparation.
L’amendement que je défends doit donc permettre d’indiquer que la notion de déchets est fonction de l’état des connaissances en 2006 et qu’elle est susceptible d’être reconsidérée dans les années qui viennent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Avis défavorable. La commission est satisfaite par la définition du texte. Comment pourrait-on en effet envisager une utilisation impossible en l’état actuel des connaissances ?
M. Jean-Louis Dumont. Je souhaitais simplement dire que la réversibilité aura son utilité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. L’amendement de notre collègue Jean-Louis Dumont fait référence à la science. Mais, en marge des connaissances scientifique, il faut également mentionner les considérations politiques.
Dans mon propre amendement qui vient d’être rejeté, j’évoquais le plutonium. Or, dans les années soixante-dix, le plutonium, aux yeux des soviétiques, n’était pas du tout un déchet mais au contraire une matière extrêmement valorisable, notamment dans le domaine militaire.
À l’inverse, les États-Unis défendaient l’idée qu’il s’agissait d’un déchet. Le président Jimmy Carter, qui n’était pas simplement marchand de cacahuètes mais également ingénieur nucléaire, connaissait fort bien le problème et disait qu’il considérait politiquement le plutonium comme un déchet, par peur de la prolifération.
On a parfois intérêt en effet à justifier politiquement la non-utilisation, pour des raisons de dangerosité, notamment à cause de la prolifération. Rappelons que c’était l’époque des débats sur le traité de non-prolifération, que la France d’ailleurs n’avait pas encore ratifié. Si elle l’a fait par la suite, ce n’est pas le cas d'autres pays, comme l’Inde, à qui l’on cherche à vendre des centrales nucléaires. C’est un peu curieux, mais sans doute est-ce de la politique, tandis qu’ici nous parlons de science.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 193.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 130.
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
M. Yves Cochet. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 8 et 9 de l’article 3.
On invente des définitions du stockage et de l’entreposage pour introduire la notion d’« intention », ou non, de récupérer des déchets. Or, dans le cadre de l’entreposage de longue durée, l’intention est non pas de récupérer des déchets, mais éventuellement de les reconditionner. C’est ce même souci qui nous a poussés à introduire, dans la loi Bataille de 1991, la notion de réversibilité. Nous nous étions alors demandé pourquoi il faudrait stocker les déchets aussi profondément – à 500, 600 ou 700 mètres – et pourquoi l’on ne pourrait pas rester en sub-surface ou en surface.
Dans le cas de stockage géologique, si l’intention de récupérer les déchets n’existe pas, il faut cependant pouvoir les récupérer dans le cadre de la réversibilité. La distinction entre entreposage et stockage n’a pas lieu d’être, sauf pour distinguer une option réversible et l’autre qui ne l’est pas. Cela n’est pas acceptable. Une seule définition suffirait donc : le stockage. Celui-ci doit être réversible quelle qu’en soit la profondeur, et nous devons conserver cet acquis. D’ailleurs, nous souhaitons non pas stocker définitivement, mais plutôt surveiller. C’est pourquoi la profondeur géologique ne se justifie pas. L’amendement n° 6 rectifié adopté par la commission peut très bien s’appliquer à un entreposage de longue durée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Défavorable. Le stockage et l’entreposage sont deux choses différentes. Il est très important de le rappeler. L’entreposage a, par nature, vocation à être temporaire, alors que le stockage est envisagé pour une très longue durée. Quant à la réversibilité, que concerne l’article 8, nous y sommes très attachés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable. Je peux comprendre que l’on soit hostile au principe du stockage – c’est le droit de M. Cochet –, mais ce n’est pas en en supprimant la définition que l’on fait disparaître un objet.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 130.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 149.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. C’est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 149.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 85.
Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement n° 230.
La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir l’amendement n° 85.
M. Christian Bataille. Cet amendement vise à introduire une précision importante puisqu’il s’agit de revenir à la notion de surface ou de sub-surface. Contrairement à M. Cochet, je ne considère pas que l’entreposage exclue la possibilité de stockage, mais il faut le préciser dans l’alinéa 8. En effet, même si le stockage est réversible, une confusion avec les centres souterrains doit absolument être évitée.
M. le président. La parole est à M. François Cornut-Gentille, pour soutenir le sous-amendement n° 230.
M. François Cornut-Gentille. Ce sous-amendement rédactionnel vise à substituer au mot : « sub-surface » les mots : « faible profondeur », expression plus précise et plus française !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Favorable à l’amendement n° 85 sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 230. En effet, le mot « sub-surface » est la francisation d’un terme britannique. De même, on trouve dans certains rapports le mot « implémenter », qui est aussi la traduction d’un verbe britannique. Écrivons donc en français !
M. Patrick Ollier, président de la commission. Parlons enfin français dans cet hémicycle !
M. Christian Bataille. « Sub » vient du latin, pas de l’anglais !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis que la commission.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 230.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 85, modifié par le sous-amendement n° 230.
(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.
Je suis saisi d’un amendement n° 150.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. C’est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable.
Les mots ont leur importance. L’expression « sans intention de les récupérer », qui figure dans le projet de loi, a suscité beaucoup de questions. Elle est pourtant déjà inscrite dans la convention internationale sur la gestion des déchets radioactifs signée à Vienne en 1997 et ratifiée depuis.
Nous devons être transparents à l’égard de nos concitoyens, cela a été dit sur tous les bancs. Un stockage géologique réversible est différent d’un entreposage. Ce qui les distingue, ce ne sont pas seulement les performances respectives des bétons qui ne peuvent durer plus de trois cents ans et de la géologie, c’est aussi l’intention dans laquelle ces installations sont conçues. Alors que l’entreposage est temporaire et oblige à récupérer les déchets, le stockage réversible offre, lui, aux générations suivantes le choix entre deux possibilités : soit ne pas récupérer les déchets et fermer le stockage, soit les récupérer pendant une certaine durée si des révolutions scientifiques leur permettent d’imaginer de nouvelles solutions.
Cependant, il ne serait pas responsable de tout miser sur les évolutions de la science. Et quand je dis « évolutions », je ne parle pas de l’axe 1, qui ne prétend ni traiter les déchets déjà produits ni réduire à zéro la nocivité des déchets qui seront transmutés. Il serait paradoxal de ne rien faire au motif que les suivants sauront peut-être faire mieux. Pour prendre une image, le stockage réversible, c’est un peu comme le mariage : on se marie sans intention de divorcer, mais avec la possibilité de le faire. (Sourires.) Avec un stockage réversible, on stocke les déchets sans intention de les récupérer, mais avec la possibilité de le faire. La comparaison n’est pas romantique, je le concède, mais elle illustre la raison pour laquelle le Gouvernement préfère sa formulation, plus précise, à celle de la commission.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Birraux, rapporteur. La définition du mariage donnée par M. le ministre n’est pas très romantique ! Cela dit, n’étant pas un spécialiste des questions matrimoniales, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements, nos 192, 86, 6 rectifié, 206 et 191, pouvant être soumis à une discussion commune malgré la place du dernier.
L’amendement n° 6 rectifié fait l’objet d’un sous-amendement n° 231.
La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement n° 192.
M. Jean-Louis Dumont. La loi doit préciser la mission de l’ANDRA en matière de stockage réversible en couche profonde, dans le respect des principes que nous venons d’adopter à l’unanimité. Il ne faudrait pas qu’il y ait des dérives ici ou là. Nous pouvons faire confiance à notre collègue qui préside le conseil d’administration de l’ANDRA, et même apprécier l’évolution de la direction de l’Agence. Je me plais d’autant plus à le dire que j’ai beaucoup critiqué l’ANDRA au cours des dix dernières années. Cependant, nos missions étant évolutives et la vie politique étant aléatoire, la loi doit servir de référence. Certes, une loi adoptée peut ne pas être appliquée…
M. le président. Restons-en là, monsieur Dumont !
M. Jean-Louis Dumont. Je ne sais pas comment l’on peut garantir que la loi votée sera non seulement promulguée, mais aussi appliquée. C’est une interrogation à laquelle je n’ai pas encore de réponse, mais peut-être allez-vous nous en donner une, monsieur le ministre !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Défavorable.
M. Jean-Louis Dumont. Nous travaillons à l’aveugle !
M. Claude Birraux, rapporteur. Contre l’avis du Gouvernement, nous venons d’adopter une définition du stockage. Si nous votions cet amendement, nous en aurions deux. Pour revenir à l’exemple matrimonial donné par M. le ministre, cela reviendrait à légaliser la bigamie, voire la polygamie !
M. Jean-Louis Dumont. Nous officialiserions certaines situations qui sont manifestement connues !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. François Dosé, pour soutenir l’amendement n° 86.
M. François Dosé. Nous proposons une autre rédaction de l’alinéa 9. Il y a quelques semaines seulement, il se trouvait en effet des gens pour écrire que « le stockage de déchets radioactifs est l’opération consistant à placer des substances, que l’on n’a pas l’intention de récupérer, dans une installation spécialement aménagée à cet effet et sans préjudice d’une réversibilité éventuelle de cette opération. » Ce serait un bon sujet de bac philo ! Dire de telles choses entre nous en commission ou dans un salon littéraire, c’est ubuesque, mais devant 40 000 personnes qui ont des craintes et qui sont prêtes à nous écouter pour respecter l’intérêt général, c’est inadmissible !
M. Jean-Louis Dumont. Les auteurs de ces lignes sont toujours en poste !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Je souhaite le retrait de cet amendement au bénéfice de l’amendement suivant, n° 6 rectifié, déposé par les commissaires socialistes et que la commission a accepté.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Nous retirons l’amendement no 86.
M. le président. L’amendement no 86 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 6 rectifié.
M. Claude Birraux, rapporteur. Cet amendement a été défendu par M. Bataille.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir le sous-amendement n° 231.
M. le ministre délégué à l’industrie. Ce sous-amendement vise à substituer, dans le deuxième alinéa de l’amendement n° 6 rectifié, aux mots : « dans le respect du principe de réversibilité » les mots : « permettant, en application du principe de réversibilité, pendant une durée fixée, au moins égale à cent ans, de récupérer les déchets ».
Il faut être clair : à mon sens, la réversibilité est une possibilité qu’on donne, mais ce n’est pas la seule option possible. C’est pourquoi je rappelle, dans un souci de clarté, que nous proposons une réversibilité pour une durée d’au moins cent ans.
M. le président. La commission est-elle favorable à ce sous-amendement ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission ne l’a pas examinée, mais j’y suis plutôt favorable à titre personnel.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre l’amendement n° 206.
M. Daniel Paul. J’aimerais présenter en même temps l’amendement n° 63, qui porte également sur l’alinéa 9 de l’article 3.
M. le président. Je n’y suis pas favorable, monsieur Paul. L’amendement n° 63 n’est pas en discussion commune avec ceux qui viennent d’être appelés. En outre, l’adoption par l’Assemblée de l’amendement n° 6 rectifié, qui vient d’être défendu, ferait tomber les deux amendements nos 63 et 73.
M. Daniel Paul. Je remarque que vous utilisez le conditionnel, monsieur le président. Il y a donc un espoir que l’amendement n° 63 ne tombe point.
M. le président. Je ne peux pas présumer du vote de l’Assemblée.
M. Daniel Paul. Tous les orateurs y vont à tour de rôle de leur définition du stockage en couche géologique profonde.
Pour notre part, nous proposons de maintenir purement et simplement les mots « dans le respect du principe de réversibilité de cette opération » sans limitation de date ou de durée pour le moment. Nous verrons tout cela en son temps.
Nous avons adopté tout à l’heure un amendement prévoyant que l’année 2015 serait une date importante pour la mise en place d’un tel stockage. Pourquoi imposer aujourd’hui une durée limitée ?
J’ai apprécié vos propos poétiques sur le mariage, monsieur le ministre. Dans notre monde de brutes, le nucléaire offre malheureusement peu de prise au romantisme.
M. le ministre délégué à l’industrie. Je ne recommencerai pas sur chaque article ! (Sourires.)
M. Daniel Paul. Mais n’en faisons pas trop sur ce texte. Allons plus loin que la loi de 1991 ou, du moins, confirmons-la sans anticiper sur les décisions à prendre en 2015, sans quoi, comme on l’a dit tout à l’heure, le texte en discussion comportera tout et son contraire.
Je voudrais citer une publication très officielle, puisqu’il s’agit du Journal du CNRS d’avril 2006, qui consacre un bon article aux déchets nucléaires sous haute surveillance : « Une fois confinés dans des matrices, les déchets sont coulés dans des conteneurs en acier, qui constituent une première barrière contre la dispersion. Dans un site de stockage en couches géologiques profondes, ils seraient disposés dans des galeries scellées par de la bentonite et du ciment, constituant la barrière dite “ouvragée”. La couche géologique dans laquelle seraient creusées ces galeries formerait une dernière barrière. »
Je souhaite que la loi ne comporte aucune mention qui risquerait d’être mal perçue par la population à laquelle on doit dire jusqu’en 2015 – et, j’espère, au-delà de cette date – qu’il ne s’agit pas d’enfouir les déchets. Or, cette étude, monsieur le rapporteur, ne traite que d’enfouissement. C’est pour cela que, la semaine dernière, en intervenant dans la discussion générale, j’ai prononcé plusieurs fois ce terme à dessein, tant il y a de confusion sur ce point dans des publications qui présentent pourtant un caractère scientifique indéniable.
Je souhaite donc que, dans l’article 3, on n’en dise pas plus qu’il ne faut et que le législateur réserve sa décision pour 2015, en espérant pouvoir adapter les solutions à l’évolution de la recherche. Je fais confiance à celle-ci, ainsi qu’aux spécialistes du nucléaire. Mais n’anticipons pas, sans quoi ce texte sera plein de contradictions et passible d’être retoqué par la population, qui aurait bien raison.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 206 ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La réflexion de M. Paul est intéressante. Avant d’aborder l’article 8, nous aurons l’occasion d’évoquer le rendez-vous avec les parlementaires et la définition de la réversibilité.
Le Gouvernement a raison d’annoncer d’ores et déjà qu’il songe à un délai supérieur à cent ans. Mais faut-il déjà préciser ce délai aujourd’hui, puisqu’un rendez-vous a été fixé avec le Parlement aux environs de 2015 et que la loi aura pour tâche de définir les conditions de la réversibilité, auxquelles contribuera le résultat des recherches et des études ? Il me semble que la réflexion pourrait s’en tenir là pour l’instant.
M. Christian Bataille. C’est juste.
M. Claude Birraux, rapporteur. Tel est du moins mon avis personnel, qui n’a pas été soumis à la commission. N’anticipons pas sur un rendez-vous que nous sommes tous décidés à prendre !
M. Daniel Paul. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Je suis favorable à l’amendement n° 206, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 231, qui, je l’ai dit, vise à substituer aux mots : « dans le respect du principe de réversibilité » les mots : « permettant, en application du principe de réversibilité, pendant une durée fixée, au moins égale à cent ans, de récupérer les déchets. »
M. le président. Monsieur le ministre, les amendements nos 6 rectifié et 206 étant en discussion commune, et par conséquent alternatifs, j’imagine que, le Gouvernement, ayant émis un avis favorable au premier, est de ce fait défavorable au second !
M. le ministre délégué à l’industrie. J’ai émis un avis favorable à l’amendement n° 6 rectifié, que j’ai proposé de sous-amender. Si cet amendement est voté, l’amendement n° 206 tombera. C’est à vous de choisir, monsieur le président…
M. le président. Disons que ce sera à l’Assemblée de choisir et que, en attendant, c’est au Gouvernement de donner son avis.
M. Patrick Ollier, président de la commission. La commission est favorable à l’amendement n° 6 rectifié !
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement n° 191.
M. Jean-Louis Dumont. Première observation : l’auteur de l’alinéa 9 de l’article 3 doit bien exister quelque part – à moins qu’il n’y en ait plusieurs. Peut-être s’est-il laissé aller parce qu’il regardait par la fenêtre et que, voyant les bourgeons d’un forsythia annoncer les fleurs, il ne s’est pas rendu compte de ce qu’il écrivait. Ce serait d’ailleurs la meilleure hypothèse, car il faut définitivement oublier sa rédaction.
En réponse à l’alinéa du Gouvernement, nous proposons, les uns et les autres, de nouveaux alinéas dont il nous objecte qu’ils sont redondants parce que, une fois pour toutes, il a décidé que le stockage supposait la réversibilité. Mais, pour ma part, je considère qu’écrire « stockage réversible » à chaque ligne vaut mieux pour les lectures à venir et les manifestants qui continueront, sans cela, à se réunir sur le site de Bure.
Deuxièmement, si réversibilité il y a, il faut bien dire que les colis pourront être retirés et que, éventuellement, en 2050, une fois enfouis, ils constitueront des déchets ultimes, qui, d’ailleurs, le seront peut-être moins quelques dizaines ou quelques centaines d’années plus tard. Dans l’imaginaire de chacun, il semble nécessaire d’ouvrir des perspectives au lieu de fermer le trou ! (M. Yves Cochet s’esclaffe.)
Mais oui, mon cher collègue. N’est-ce pas ce qu’a indiqué M. Daniel Paul quand il nous a expliqué que le béton, dont François Dosé vient de rappeler la durée de vie, peut être « réactivé » ? En conséquence, l’amendement n° 191 reprend des termes devenus aujourd’hui incontournables. Nous sommes au-delà de l’idéologie et au-delà même de la Bible ! Il s’agit en effet de la loi de la République qui doit être lue et comprise par tous, y compris par celles et ceux qui vivront et travailleront autour du laboratoire de Bure, en Meuse et en Haute-Marne, deux départements qui font ici cause commune. Lorsque la transmutation sera devenue une science permettant de retravailler ces colis, une nouvelle industrie se développera tranquillement et, si le Parlement décidait alors de revenir sur cette réversibilité, nul ne pourrait l’en empêcher.
Mais indiquons du moins que, en l’an 2006, le Parlement souhaitait avec force que la réversibilité soit au cœur de la recherche, de l’action et des objectifs du laboratoire travaillant sur le stockage réversible en couche profonde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 191 ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Monsieur le président, peut-être est-il temps de faire le point.
La commission a adopté l’amendement dont M. Bataille et les commissaires du groupe socialiste ont eu l’initiative, et qui est devenu l’amendement n° 6 rectifié. Nous tenons à ce qu’il soit adopté. C’est pourquoi nous émettons un avis défavorable aux autres amendements qui font l’objet d’une discussion commune. Ils reprennent en effet les mêmes termes que lui dans un ordre différent et seraient satisfaits par son adoption.
M. Luc-Marie Chatel. Absolument !
M. François-Michel Gonnot. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 191 ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Pour clarifier la situation, je retire le sous-amendement n° 231.
M. le président. Le sous-amendement n° 231 est retiré.
M. le ministre délégué à l’industrie. Cela dit, je rappelle à l’opposition que le texte qu’elle amende émane très exactement de la convention de Vienne signée en 1997 et ratifiée en 2000 par le gouvernement de l’époque.
M. Daniel Paul. C’est exact.
M. Jean-Louis Dumont. Mais c’était une autre époque !
M. le ministre délégué à l’industrie. L’alinéa 9, qui ne fait rien d’autre que de proposer une définition, reprend celle, communément admise aujourd’hui, des textes de la convention internationale.
Toutefois, pour faire bonne mesure, je soutiens l’amendement n° 6 rectifié de la commission.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Je ne sais pas si M. Dumont va retirer son amendement n° 191. Peut-être faut-il qu’il en discute avec son groupe. Cela dit, cet amendement ne me paraît pas acceptable dans sa rédaction actuelle, malgré la présentation très « républicaine » qui en a été faite. Je rappelle que l’amendement se termine par les mots : « lorsque la science permettra la transmutation ou la séparation ». Bel exemple de credo scientiste ! Or on sait déjà procéder à ces opérations sur le plan conceptuel. Le problème est de les réaliser sur le plan industriel. C’est pourquoi l’utilisation du futur ne me semble pas justifiée.
M. Jean-Louis Dumont. En effet !
M. Yves Cochet. Pour réaliser la séparation, il faut un émetteur de neutrons. On doit donc disposer soit d’un émetteur spécial soit d’un autre réacteur, ce qui risque de générer plus de déchets qu’on ne pourra en transmuter. Industriellement, à mon sens, l’opération ne marchera donc jamais, même si cet adverbe peut paraître trop définitif.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il est même « ultime ». (Sourires.)
M. Patrick Ollier, président de la commission. Et surtout, il ne fait pas partie du vocabulaire législatif.
M. le président. Laissons M. Cochet conclure.
M. Yves Cochet. Je conclus que je suis défavorable à l’amendement n° 191 de M. Dumont.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Monsieur le président, je ronge mon frein depuis tout à l’heure ! Monsieur le ministre, vous travaillez sur ce texte avec vos collaborateurs depuis des mois, la commission s’est réunie à maintes reprises et vous attendez la dernière minute pour déposer un sous-amendement, contre lequel je m’élève vigoureusement. En effet, vous écrivez que la durée sera « au moins égale à cent ans », mais moi je comprends : « au plus égale à cent ans ».
Les avis des techniciens qui vous entourent ont décidément la vie dure ! Déjà, au moment de la discussion de la loi du 30 décembre 1991, certains techniciens obstinés voulaient absolument réintroduire le principe d’irréversibilité. Avec Dominique Strauss-Kahn, nous avions coupé la poire en deux en ouvrant la possibilité de la réversibilité ou de l’irréversibilité. Je me félicite du retrait de votre sous-amendement, qui, en réintroduisant d’une façon tout à fait hypocrite le principe d’irréversibilité, aurait complètement changé l’appréciation que nous portons sur cette loi.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 192.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.
M. Yves Cochet. Non !
M. le président. Les amendements nos 206, 191, 63 et 73 tombent.
Je mets aux voix l'article 3, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille, premier orateur inscrit sur l’article 4.
M. Christian Bataille. L’article 4 est important, car il définit le plan national de gestion des déchets. Cela suppose que l’État joue effectivement son rôle, que les pouvoirs publics aient une vision d’un univers où vont intervenir de plus en plus de partenaires, privés ou privatisés. Il est donc essentiel que le Gouvernement et le Parlement définissent leur vision des choses.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. L’article 4 définit des orientations stratégiques en matière de recherche et d’études et pose des principes généraux justes, et même généreux. Toutefois, les modalités concrètes de ce plan national de gestion des matières et déchets radioactifs présentent des manques fâcheux.
S’agissant du stockage, différents pays, comme les États-Unis, l’Allemagne ou la Finlande, semblent s’être engagés dans cette voie, même s’il n’existe encore aucun site exploité. Depuis les années 70, de nombreuses études ont été menées dans les formations granitiques en Scandinavie et au Canada, qui ont permis de sélectionner plusieurs sites. Ces pays offrent donc des laboratoires d’observation qu’il convient de suivre de près. Par conséquent, le texte devrait prévoir l’optimisation des recherches conduites à l’échelle internationale par le biais de coopérations avec ces pays.
Autre manque : les orientations relatives à la séparation-transmutation. Peut-être pourrez-vous nous rassurer sur ce point, monsieur le ministre. On sait que c’est la filière électronucléaire qui utilise le plus de matières hautement radioactives et que les déchets radioactifs à haute activité et à vie longue sont composés des différents produits de fission provenant des combustibles usés. Il convient d’accorder la priorité aux réacteurs du futur, car la gestion des déchets est conditionnée par leur nature et leur volume.
Les réacteurs nucléaires de troisième génération, dits EPR, permettent déjà de diminuer de 15 % la production de déchets. Il faut poursuivre dans cette voie et promouvoir activement des réacteurs de quatrième génération. En outre, la transmutation a été démontrée sur des échantillons placés dans le cœur du réacteur à neutrons rapides Phénix. Nous aurions aimé que l’article 4, qui est central dans ce texte, mentionne clairement le développement de ces réacteurs du futur, d’autant que la décision d’arrêter la centrale Phénix a été prise sans que des solutions réelles de remplacement aient été prévues. Si le rapport de la commission des affaires économiques fait référence à la mise en exploitation d’un prototype d’un tel réacteur en 2020, le contenu de l’article 4 est en deçà des attentes légitimes en matière de recherche et de débouchés industriels.
La poursuite de la recherche fondamentale sur la séparation-transmutation devrait également être clairement envisagée dans le plan national de gestion des déchets, puisque des avancées importantes ont déjà été réalisées. Certains déchets, comme le neptunium, produits en petites quantités mais extrêmement nocifs et à durée de vie très longue, peuvent déjà être séparés avec succès de l’uranium et du plutonium, qui sont recyclables. Ainsi, un procédé développé par le CEA permet de récupérer 99 % du neptunium sur dix kilos de combustible usé provenant d’une centrale EDF. Certes, ce genre d’opération a un coût très élevé et il faudra poursuivre les recherches pendant plusieurs décennies pour passer du stade expérimental au stade industriel, mais le jeu en vaut la chandelle !
Je reconnais que des améliorations ont été apportées par les amendements adoptés en commission, notamment s’agissant du principe de responsabilité des combustibles usés et des déchets radioactifs. Dans son rapport, M. le rapporteur souhaite un plan national aussi complet que possible. Puissiez-vous avoir été sensibles à mes arguments et l’être également à l’amendement que nous présentons pour compléter ce plan !
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 60.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Je laisse à M. Bataille le soin de soutenir cet amendement.
M. le président. Vous avez la parole, monsieur Bataille.
M. Christian Bataille. Je remercie M. le rapporteur de me laisser rendre compte des accords auxquels nous sommes parvenus en commission.
Le présent amendement tend à supprimer l’alinéa 2 de l’article 4, qui, dans une nouvelle rédaction de l’article L. 542-1-1, énonce une déclaration de principe qui serait plus à sa place en amont du texte, parmi les considérations générales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. L’adoption de cet amendement ne manquera pas de faire tomber certains des suivants. Dans ces conditions, je souhaite tout de même expliquer pourquoi mon amendement n° 212 précisait que les charges ne pouvaient être, à cet instant précis, que financières. Ce ne sont quand même pas les charges du baudet de service !
Il existe dans ce texte des flous qui pourraient prêter à des interprétations dangereuses. La grande sagesse dont font preuve Christian Bataille et Claude Birraux, ainsi que les membres de la commission, augure bien des actions qui pourraient suivre l’adoption du texte. J’espère qu’elle se manifestera tout autant lorsque nous aborderons le développement économique, et qu’ils seront déterminés à faire jouer la solidarité nationale avec un département qui se montre responsable et solidaire.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Dans le droit fil de la métaphore matrimoniale utilisée par M. le ministre tout à l’heure, si l’alinéa 2 avait été maintenu, j’aurais souhaité qu’y soit changée une copule. Notre responsabilité envers les générations futures nous impose en effet de prévenir « et » de limiter le plus possible les charges qui leur seront transmises. Et la première chose à faire, c’est de réduire la production de déchets nucléaires à la source. Pour cela, monsieur Paul, il faut bien entendu sortir du nucléaire. Plus vous ferez du nucléaire, plus vous aurez de déchets !
M. Daniel Paul. Et vous vous éclairerez à la bougie !
M. Yves Cochet. Vous faites dans la caricature !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre délégué à l’industrie. La remarque de M. Cochet est intéressante et on pourrait même dire qu’il a raison. Nous avons repris mot pour mot le texte de la Charte de l’environnement : « en prévenant ou en limitant ». Cela dit, à l’évidence, il faut et limiter et prévenir les charges.
Quant aux charges dont parlait M. Dumont, l’Assemblée a adopté, avant l’article 1er, un amendement qui mentionne « un fardeau indu ». Dès lors, il ne me semble pas utile de préciser que les charges sont financières.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 131 et 212 tombent.
Je suis saisi d'un amendement n° 7 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit là d’un point fondamental, qui touche à notre conception de la responsabilité, dont doivent s’imprégner le texte, les élus et l’ensemble des acteurs.
Cet amendement rappelle que la responsabilité des combustibles usés et des déchets radioactifs incombe à leurs producteurs, même s’ils n’en sont pas les détenteurs et qu’ils les ont confiés à d’autres pour en assurer le traitement, le conditionnement, l’entreposage, et peut-être demain le stockage.
M. Luc-Marie Chatel. C’est très important !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 213.
La parole est à M. Christian Bataille, pour le défendre.
M. Christian Bataille. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Je crains que le thème de la réversibilité ne revienne comme une litanie. Ce point a été traité au niveau des définitions, qui valent pour l’ensemble du texte. Ne rouvrons pas le débat à chacune des occurrences du mot « stockage » !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable, pour les mêmes raisons.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 213.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 194.
M. Christian Bataille. Cet amendement est défendu !
M. Claude Birraux, rapporteur. Et la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 194.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 151.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 87 tombe.
Je suis saisi d'un amendement n° 9.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Je laisse le soin à M. Bataille de soutenir cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. L’adoption de cet amendement est importante pour l’avenir.
En effet, des recherches intéressantes sont conduites, souvent en parallèle avec celles menées en France, dans les pays étrangers : aux États-Unis, au Japon et en Europe, même chez nos voisins qui ont renoncé ou envisage de renoncer au nucléaire, comme l’Allemagne et la Suède. Il convient de les prendre en considération. Tel est l’objet de l’amendement n° 9.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.
Je suis saisi d’un amendement n° 10 rectifié.
Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement n° 164.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 10 rectifié.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit de préciser que seuls les éléments normatifs du plan national de gestion des matières et déchets radioactifs doivent être publiés par décret. Le plan faisant plus de cent pages, en publier toutes les dispositions ne présente, en effet, pas d’intérêt.
M. le président. La parole est à M. le ministre pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 10 rectifié et défendre le sous-amendement n° 164.
M. le ministre délégué à l’industrie. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 10 rectifié sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 164 tendant à remplacer les mots : « ministre chargé de l’énergie » par le mot : « Gouvernement ». Les prescriptions issues du plan national étant adoptées par décret, le plan lui-même doit, en effet, être établi par le Gouvernement.
M. Patrick Ollier, président de la commission. M. le ministre a raison !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 164 ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 164.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié, modifié par le sous-amendement n° 164.
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 195 tombe.
Je suis saisi de deux amendements, nos 207 et 132, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n° 207.
M. Daniel Paul. Cet amendement, dont j’ai déjà parlé dans mon intervention sur l’article, tend à faire en sorte que ne soit pas exclu du plan national de gestion des déchets l’objectif de poursuite des recherches sur la séparation-transmutation. Il n’est, en effet, pas mentionné à l’article 4 alors qu’il constitue un élément essentiel du dossier que nous examinons aujourd’hui.
Nous tenons à réaffirmer notre attachement à la poursuite de la recherche dans les trois voies de traitement des déchets. Elles ne sont pas concurrentes mais largement complémentaires. Ainsi, des résultats dans le cadre de la séparation-transmutation permettraient de diminuer considérablement le volume des déchets. Sans tomber dans le scientisme, les avancées de la recherche – bien qu’elle s’effectue toujours en laboratoire et sur de faibles quantités – font naître des espoirs pour les prochaines décennies.
Vous avez reconnu, monsieur le ministre, dans un article paru dans Le Figaro, que la séparation-transmutation avait progressé, mais vous avez indiqué qu’elle nécessitait encore quelques décennies de recherches pour passer du stade du laboratoire au stade industriel. C’est également l’avis des chercheurs du CEA. En tout cas, la perspective d’un débouché industriel de ce procédé est loin d’être irréaliste, même si nous ne voyons pas encore à quel horizon.
Cela est fort encourageant, mais la poursuite des recherches dans cette voie nécessite des moyens. Comment accepter dès lors qu’elle ne figure pas dans le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs ? Est-ce parce que vous avez conscience que les fonds accordés au CEA – qui s’élèvent à 980 millions d’euros – seraient insuffisants, même complétés par des apports des industriels et d’un certain nombre d’autres partenaires ?
Vous l’aurez compris : nous souhaitons des engagements plus clairs dans le texte en faveur d’une des voies probablement les plus prometteuses pour l’avenir à la fois proche et plus lointain.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, pour défendre l’amendement n° 132.
M. Yves Cochet. Permettez-moi de revenir quelques instants sur l’amendement que vient de défendre M. Paul. Ce dernier considère que l’une des voies figurant dans la loi de 1991 doit être plus valorisée qu’elle ne le semble dans l’article 4 du présent texte. J’ai peut-être été un peu ferme tout à l’heure mais je me pose des questions. Encore une fois, je ne suis pas un spécialiste pointu des matières nucléaires mais je sais que, pour réaliser une séparation, il faut un flux de neutrons et donc un générateur de flux de neutrons, lequel nécessite, pour fonctionner, de l’énergie. Il faut dès lors vérifier si l’énergie dépensée n’est pas supérieure à ce que vous récupérez après séparation. Vous pouvez également recourir à un réacteur nucléaire pour provoquer une transmutation spontanée des déchets que vous essayez de séparer, mais ce réacteur va lui-même produire d’autres déchets.
Ce n’est pas simplement le maillon « transmutation » qu’il faut regarder – qui est conceptuellement envisageable –, c’est l’intérêt soit thermodynamique soit nucléaire de l’ensemble de la chaîne y conduisant. Et c’est sur cet intérêt que je me pose des questions.
Personnellement, je n’y crois pas. Les chercheurs du CEA et du CNRS ne sont, bien sûr, pas de cet avis, monsieur Paul. Les personnes qui sont dans le lobby y croient forcément : cela leur donne des sous pour faire vivre leurs labos.
Je parle d’un autre point de vue, de celui de l’intérêt politique et même financier de poursuivre les recherches dans cette voie.
Je vais peut-être caricaturer, mais je ne suis pas sûr qu’il ne s’agisse pas de la poursuite du rêve des alchimistes et de la pratique du même nom abandonnée au siècle des Lumières !
J’en viens maintenant à mon amendement. Ce qui a été oublié, selon moi, dans le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs, c’est le fait qu’il faille réduire les déchets à la source. Or c’est la première chose à faire !
J’observe que, dans le vocabulaire du lobby nucléaire, on recycle – c’est le cas de le dire – les termes « écolos » de tri et de recyclage. Il n’est plus question, même dans la bouche de Mme Lauvergeon, de retraitement : on parle de recyclage.
Mme Olin vous le dira elle-même, qu’il s’agisse des déchets ménagers ou des déchets urbains, la première chose à faire est de réduire leur quantité à la source. Je propose d’appliquer ce grand principe « écolo » aux déchets radioactifs – cela s’impose encore plus dans leur cas compte tenu de leur dangerosité et du coût de leur gestion – et de l’inscrire comme premier principe du plan national de gestion.
Moins il y aura de déchets nucléaires et mieux nous nous porterons. Mais, évidemment, pour réduire ceux-ci à la source, il faut sortir du nucléaire !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 207 et 132 ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Nous sommes allés au-devant des désirs de M. Paul puisque nous avons réaffirmé à l’article 1er l’objectif de poursuite des recherches sur la séparation et la transmutation. Son souhait est donc exaucé et son amendement satisfait.
M. Daniel Paul. Pourquoi ne pas réaffirmer cet objectif à l’article 4 ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Nous sommes également défavorable à l’amendement de M. Cochet car il est, lui aussi, satisfait.
M. Yves Cochet. Ah ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Le principe ALARA est un principe fondamental de sûreté systématiquement appliqué dans le nucléaire. Le traitement et le retraitement réaffirmés dans le texte réduisent très fortement le volume et la toxicité des déchets et les nouveaux réacteurs, à commencer par l’EPR, diminuent également fortement la quantité de déchets pour une même production d’électricité.
En tout état de cause, la question dépasse largement le seul cadre du PNGMDR.
J’ajoute que toute personne qui n’est pas d’accord avec M. Cochet ne fait pas obligatoirement partie du lobby nucléaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements en discussion ?
M. le ministre délégué à l’industrie. M. Paul a raison d’insister sur l’importance de la séparation-transmutation. Nous avons, nous aussi, à cœur de pousser l’axe 1 de la recherche, comme on l’appelle. Cela étant, M. Paul a satisfaction puisque cet objectif est clairement affirmé au 3° de l’article 1er.
M. Daniel Paul. Pourquoi ne pas le rappeler à l’article 4 ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Je précise au passage que la séparation est une opération chimique et qu’elle ne fait donc pas appel aux neutrons. C’est pour la transmutation qu’ils sont nécessaires.
M. Jean-Claude Lenoir. Voilà une mise au point utile pour M. Cochet !
M. le ministre délégué à l’industrie. Sur l’amendement n° 132 de M. Cochet, j’émets également un avis défavorable car nous ne partageons pas les prémisses de son raisonnement.
M. Jean-Claude Lenoir. C’est le moins que l’on puisse dire !
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Je soutiens l’amendement de M. Paul car la poursuite et même l’amplification des recherches sur la séparation et la transmutation sont inséparables de la notion de réversibilité. Si l’on ne poursuit pas la recherche fondamentale dans ce domaine, la notion de réversibilité perd tout son sens. Il faut poursuivre cette recherche pour pouvoir réduire, voire éliminer les déchets.
D’aucuns diront que cela relève de la science-fiction, mais, dans une perspective de cent ou deux cents ans, ce n’est pas complètement inenvisageable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Si j’ai présenté l’amendement n° 207, c’est, d’abord, pour réaffirmer le souci que nous avons depuis toujours – j’allais dire depuis Joliot-Curie ! – que la recherche, en particulier dans les questions énergétiques – mais pas uniquement – continue d’être portée. Or, quand j’entends certains responsables d’organisations syndicales et ceux des organismes actuellement en charge de ces questions – CEA ou CNRS –, je sens une inquiétude à ce sujet, et ce précisément au moment où il serait au contraire nécessaire de donner un « coup de collier ».
La seconde raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement, c’est qu’il existe trois voies de recherche : la transmutation, l’entreposage et le stockage.
Alors que les trois voies de recherche sont concernées, je trouve dommage que dans le III de l’article 4, consacré au plan national de gestion, le 1° soit en retrait sur les 2° et 3°, qui parlent de stockage et d’entreposage dans des termes qui me conviennent. Le groupe des député-e-s communistes et républicains ne peut s’empêcher d’établir un lien entre ce retrait, l’insuffisance des moyens liés à la recherche et les délais dont vous avez parlé, monsieur le ministre, dans un certain nombre de déclarations. J’ai cité tout à l’heure celle que vous avez faite au Figaro, mais il y en a eu bien d’autres.
L’essentiel des responsables de la recherche pensent que l’objectif de 2020 fixé par le Président Jacques Chirac ne correspond à rien et qu’il ne sera pas respecté. Mais nous ne serons plus nombreux pour le voir.
J’aurais trouvé judicieux de rappeler dans ce texte un certain nombre de principes plus forts que ceux qui sont mentionnés et qui ne me semblent entraîner aucune conséquence.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre délégué à l’industrie. Je partage, monsieur Paul, votre préoccupation et je voulais vous remercier de l’avoir mise en évidence.
Nous devons pousser, c’est vrai, la recherche sur la séparation-transmutation. C’est l’axe 1 et cela figure à l’article 1er. On traite de ce qu’est le plan de gestion à l’article 4. C’est une autre question. Il n’est donc pas nécessaire de l’ajouter. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à l’amendement n° 207.
Monsieur Paul, je voudrais vous rassurer sur le fond : nous augmentons les crédits dans ce domaine. Nous avons décidé de faire plus de recherches sur la séparation-transmutation. Nous ne sommes pas seuls et, dans l’exposé des motifs de ce texte, vous pouvez lire que le choix du traitement combustible usé a été fait par plusieurs pays. Le 6 février, donc très récemment, les États-Unis ont également annoncé leur intention d’y recourir. Nous sommes donc tout à fait sur cette ligne.
Il me semble très objectivement que ce qui figure à l’article 1er suffit.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Je voudrais rappeler un passage très bref du rapport récent de la Commission nationale d’évaluation concernant la transmutation : « Il n’y aura pas en 2006 d’argument décisif pour prendre une décision de nature scientifique, technique ou industrielle sur la transmutation. La transmutation est un espoir… » – nous sommes dans l’ordre du subjectif – « …qui repose sur des machines qui n’existent pas à ce jour. Le Commissariat à l’énergie atomique… » – on est là au cœur du lobby nucléaire – « …fonde de grands espoirs sur les réacteurs à neutrons rapides dont le caloporteur est du gaz. Ce réacteur n’existe qu’à l’état de concept, dans l’imagination des gens du CEA. La Commission nationale d’évaluation ne dispose d’aucun élément d’appréciation quant à la faisabilité et aux performances de la transmutation. »
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 207.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 132.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 11.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision, mais essentiel pour la réduction à la source.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 196.
La parole est à M. Christian Bataille, pour le défendre.
M. Christian Bataille. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 196.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 133.
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
M. Yves Cochet. En m’inspirant du rapport de la Commission nationale d’évaluation et du débat public qui a eu lieu, je pense qu’il faut rédiger différemment l’alinéa 8 de l’article 4.
Je voudrais valoriser l’option dite « entreposage ». Elle ne semble pas retenue comme une option à part entière, alors que ce fut le cas dans le débat public. On a même parlé d’entreposage pérenne, qui est d’ailleurs un bon compromis avec le principe de réversibilité.
L’entreposage de longue durée, pour ne pas dire pérenne, mérite une réflexion approfondie. C’est actuellement l’option technique la plus abordable et c’est ce que l’on fera dans les prochaines décennies. Il est nécessaire que les produits refroidissent avant de les enfouir, de les stocker en profondeur, et cela demandera quelques décennies.
Pour le moment, il faudra faire de l’entreposage. C’est la seule option compatible, on pourrait même dire qu’elle est ontologiquement liée à la réversibilité. Dans la mesure où on a choisi la réversibilité, il convient d’entreposer les déchets pas trop loin, afin de pourvoir effectuer des contrôles. Des scientifiques, des techniciens pourraient découvrir, compte tenu des avancées attendues, une possibilité de reconditionner ces produits.
L’option dite géologique profonde nécessitera également un suivi. Si, dans quelques millénaires, les générations futures voulaient définitivement « refermer le trou », pour reprendre l’expression employée par l’un de nos collègues, la question de la mémoire du site d’enfouissement se poserait. Le travail des archéologues consiste à retrouver les choses que les générations passées auraient voulu nous transmettre.
L’entreposage pérenne et réversible est une notion de référence préférable au stockage profond.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission trouve la rédaction proposée un peu atypique. L’amendement prévoit qu’après entreposage les déchets fassent l’objet d’un stockage en surface ou en faible profondeur. Il me paraît difficile d’inscrire cela dans un texte de loi.
Nous avons réaffirmé dans les premiers articles que les trois axes définis par la loi Bataille de 1991 devaient être poursuivis dans la nouvelle loi, y compris, monsieur Paul, en ce qui concerne les recherches. Nous avons, de ce fait, adopté une rédaction permettant cette continuité.
Les trois axes sont complémentaires. Il ne faut pas exclure le stockage géologique, puisque la couche géologique apporte une barrière supplémentaire. Il y a des notions de sûreté et, parmi elles, la défense en profondeur, qui consiste à accumuler plusieurs barrières successives. La couche géologique constitue effectivement une barrière supplémentaire. M. Cochet voudrait que l’on se prive de l’étude et de la possibilité du stockage géologique.
Nous sommes bien évidemment défavorables à l’amendement n° 133.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Je rejoins l’avis de la commission.
Monsieur Cochet, j’ai bien écouté votre discours lors de la discussion générale. Vous avez commencé par dire qu’il ne fallait pas parier sur l’angélisme de l’humanité.
M. Yves Cochet. C’est vrai !
M. le ministre délégué à l’industrie. La solution d’entreposage renouvelée tous les cent ans ou deux cents ans a besoin de parier sur un angélisme assez long de l’humanité et du report des textes, des registres.
Nous préférons donc la rédaction actuelle de l’article 4.
M. Yves Cochet. Vous préférez la géologie à la démocratie, c’est cela ? (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. François Dosé.
M. François Dosé. Monsieur le rapporteur, l’alinéa 8 ne porte pas sur la recherche, mais il induit un principe de gestion. Sa rédaction – « Après entreposage, les déchets radioactifs ultimes ne pouvant […] font l’objet d’un stockage … » – montre tout de suite les rythmes que vous envisagez.
Je considère qu’il ne faut pas diaboliser le stockage, dès lors que l’on fait très attention. On parle de la réversibilité, du suivi, de la surveillance. Je suis d’accord, mais alors je ne vois pas ce qui s’oppose à des entreposages successifs.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 133.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 88 et 214.
La parole est à M. Christian Bataille, pour les défendre.
M. Christian Bataille. Ces deux amendements sont défendus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. L’avis de la commission st également défavorable.
M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 88 et 214.
(Ces amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 134.
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
M. Yves Cochet. Je propose, par l’amendement n° 134, d’insérer, après l’alinéa 8 de l’article 4, l’alinéa suivant : « Chaque pays est responsable des déchets et substances radioactives qu’il produit et doit développer ses propres moyens de gestions. Il est donc interdit d’exporter des déchets radioactifs à l’étranger. »
Il convient bien évidemment de rectifier la coquille qui s’est glissée dans le texte de l’amendement et de lire « ses » et non « ces ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 134 tel qu’il vient d’être rectifié ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. Mme Nathalie Kosciusko-Morizet nous a appelés, lors de la discussion générale, à faire preuve d’un peu de modestie.
Nous devons donc être modestes et nous contenter de légiférer pour notre pays. La France n’exporte pas de déchets radioactifs…
M. Yves Cochet. Ah ?
M. Claude Birraux, rapporteur. C’est pour cela que nous élaborons une loi visant à définir des solutions de gestion de ces déchets.
M. Adamov est actuellement dans les geôles russes et n’est plus en état de formuler les propositions fantasques qu’il faisait lorsqu’il assumait des responsabilités au sein du gouvernement russe.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 12 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 152.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. C’est là encore un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 152.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 13 rectifié, portant article additionnel après l’article 4.
Cet amendement fait l’objet de deux sous-amendements, nos 72 et 76.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 13 rectifié.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il faut savoir qu’à la fin de l’année 2004, seuls 36 % des déchets de moyenne activité à vie longue étaient conditionnés selon les indications de l’inventaire national des déchets radioactifs qu’a réalisé l’ANDRA.
L’amendement a pour objet de fixer un objectif aux propriétaires de ces déchets, dont nous avons, tout à l’heure, réaffirmé la responsabilité à l’horizon 2025.
M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol, pour soutenir les deux sous-amendements nos 72 et 76.
M. Claude Gatignol. Je voudrais apporter quelques précisions.
Nous devons gérer des déchets très différents. L’amendement prévoit de déployer les programmes de reprise des déchets anciens entre aujourd’hui – programme pour COGEMA La Hague et Marcoule – et un délai de quinze ans au-delà de la mise en service du stockage en couche géologique profonde.
Pour simplifier le débat et clarifier la situation, je propose de rectifier mon sous-amendement n° 72 en remplaçant les mots « au plus tard dans les quinze ans après la date de mise en service des centres de stockage en couche géologique profonde et d’entreposage destinés à la gestion de ces déchets » par les mots « au plus tard en 2030 ». Je réduis ainsi le délai, ce qui est parfaitement cohérent avec les articles précédents, afin de fixer un calendrier et d’indiquer une date précise aux entreprises et aux exploitants.
M. le président. Le sous-amendement n° 72 est ainsi rectifié.
Qu’en est-il du sous-amendement n° 76 ?
M. Claude Gatignol. Il s’agit d’un sous-amendement de repli.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 72 rectifié ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Dans sa version initiale, le sous-amendement n° 72 prévoyait une échéance à 2040. J’avais pour ma part fixé l’échéance à 2025. M. Gatignol vient de rectifier son sous-amendement en faisant une proposition médiane en faveur d’une échéance à 2030. J’y souscris.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 76 ?…
M. Claude Gatignol. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 76 est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 72 rectifié et l’amendement n° 13 rectifié ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Il me semble que nous avions renoncé à fixer des échéances et décidé qu’il fallait attendre, pour apporter ce genre de précisions, les décisions qui seront prises en 2015, ce que par ailleurs je souhaite. Mais fixer aujourd’hui, en 2006, ces échéances dans la loi n’est pas sérieux !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 72 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié, modifié par le sous-amendement n° 72 rectifié.
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille, inscrit sur l’article 5.
M. Christian Bataille. Cet article nous ramène à l’histoire de la gestion des déchets nucléaires. Dans une période récente, le contrôle des déchets en provenance de l’étranger était peu ou mal exercé. Les déchets en provenance d’Allemagne, par exemple, ont été entreposés sur notre territoire national de manière quasi clandestine. Il s’agit donc avec cet article de clarifier la situation en matière de circulation des déchets nucléaires d’un pays à l’autre. Leur entreposage dans des pays tiers a été mis à l’ordre du jour, il y a quelques années, au niveau européen, par Mme de Palacio qui avait même envisagé des stockages qu’elle appelait régionaux, mais qui, en fait, étaient internationaux. Je pense que ce n’est pas une bonne chose.
Chaque pays doit être responsable de ses propres déchets. La France doit avoir la responsabilité de ses déchets, mais elle ne doit pas prendre sous sa responsabilité, cela tombe sous le sens, ceux d’autres pays. Elle peut les retraiter et il peut y avoir des opérations industrielles dans notre pays, mais avec des clauses de retour. Cela figurait déjà dans la loi de 1991. Cela dit, forts de quinze ans d’expérience, nous souhaitons, avec le texte de 2006, aller plus loin. Nous examinerons tout à l’heure des amendements, émanant notamment de notre groupe, qui visent à mieux contrôler les déchets en provenance de l’étranger et à s’assurer de leur retour après traitement.
Les citoyens, l’opinion publique, sont extrêmement attentifs à cette question. Il convient donc d’être très clair sur ce sujet.
M. le président. Nous en arrivons aux amendements à l’article 5.
Je suis saisi de deux amendements, nos 90 et 135, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir l’amendement n° 90.
M. Christian Bataille. Il s'agit de reprendre, en la développant et en la précisant, une disposition de la loi du 30 décembre 1991, concernant l'entreposage temporaire de combustibles irradiés destinés au retraitement et la réexpédition des déchets générés par le retraitement.
Nous proposons de clarifier les dispositions existantes en améliorant l’arsenal juridique, ce qui devrait permettre d’éviter les dérapages et les polémiques.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l’amendement n° 135.
M. Yves Cochet. Je viens de prendre connaissance de l’amendement de M. Bataille, qui, s’inscrivant dans la continuité de la loi de 1991, me semble meilleur que la formulation actuelle de l’alinéa 2 de l’article 5.
Je propose pour ma part une formulation proche de celle adoptée il y a quinze ans.
Constatant que la proposition de M. Bataille est plus complète, je retire mon amendement au profit du sien.
M. le président. L’amendement n° 135 est retiré.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 90 ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, car il est largement satisfait par des dispositions de l’article 5 enrichi par des amendements de la commission, dont l’un a d’ailleurs été adopté à l’initiative de Christian Bataille.
En outre, l’amendement n° 90 tend à instituer une procédure d’une lourdeur excessive qui nécessiterait un décret pour chaque entrée de substances en France, ce qui n’est pas souhaitable.
Enfin, la disposition proposée est inutile car le contrôle de la puissance publique est déjà assuré par la nécessité d’accords intergouvernementaux, dont la transparence sera totale, M. Bataille ayant proposé que leur publication soit systématique, ce que nous avons accepté en commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis que la commission.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 14.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 15.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un autre amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 136 et 74, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l’amendement n° 136.
M. Yves Cochet. Cet amendement tend à supprimer, à la fin de l’alinéa 4 de l’article 5, les mots : « ou de recherche ». Il vise à ne pas permettre l’introduction de déchets sur le territoire national à des fins de recherche, car cela reviendrait à ouvrir la porte à tous les abus que l’on a pu constater, d’autant qu’aucune condition de retour n’est prévue. Nous serions en pleine contradiction avec le principe de juste retour que l’on vient d’adopter.
M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol, pour soutenir l’amendement n° 74.
M. Claude Gatignol. Il s’agit de compléter la rédaction de l’alinéa 4 de l’article 5 en substituant aux mots « ou de recherche », les mots « de recherche ou de transfert entre états étrangers ».
Il importe en effet de permettre le transit sur le territoire national de combustibles usés ou de déchets en provenance de l’étranger dans le cadre de transferts entre États étrangers. Ces opérations devront évidemment être conformes aux dispositions nationales, communautaires et internationales concernant les transports de matières radioactives, et en particulier à la directive Euratom transposée par décret le 22 septembre 1994, qui pourvoit aux dispositions prises pour ces transports.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements en discussion ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 136 de M. Cochet, car il ne faut pas bloquer la recherche. En revanche, elle est favorable à l’amendement n° 74 de M. Gatignol.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis que la commission.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 136.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 225.
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
M. Yves Cochet. Je propose une nouvelle rédaction de l’alinéa 5 de l’article 5, car cet article est extrêmement favorable au lobby nucléaire – le mot « lobby » n’étant pas un vain mot.
Tel qu'il est rédigé, l’alinéa 5 de cet article permet à Areva de faire très exactement ce qu' « elle » veut – ce féminin désigne la société et non Mme Lauvergeon !
Areva peut importer des déchets ou combustibles usés à des fins de recherche, sans retour, ce que l’on vient d’accepter et je le déplore. Elle peut aussi importer des déchets pour les « traiter » et les stocker pendant des années puisque les délais de traitement ne relèvent plus de la loi mais d'accords intergouvernementaux.
Les délais de retour ne doivent pas être renvoyés à des accords intergouvernementaux, c’est-à-dire à des négociations entre clients et prestataires. Ils doivent être – et cela peut se faire très facilement – clarifiés dans la loi ! On se retrouverait sinon dans des cas d'abus aujourd’hui condamnés par la justice, mais qui seraient demain légitimés grâce à l’adoption de cette loi, ce qui serait tout de même un comble !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement, car le projet de loi prévoit que la durée de maintien sur notre sol de substances radioactives étrangères est fixée par des accords intergouvernementaux. Celle-ci sera donc définie de manière tout à fait claire par une décision politique prise par les instances politiques.
Le dispositif de M. Cochet fait appel à des concepts flous comme « délais techniques liés au traitement » ou « les plus brefs délais », ce qui reviendrait à laisser au juge, au coup par coup, le soin de reconnaître, sans critères objectifs, si la loi est ou non respectée. Nous préférons quant à nous que la loi définisse ces critères et que le juge applique ensuite la loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 225.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 16.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Je laisse à M. Christian Bataille le soin de défendre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. La proposition que j’ai faite a, en effet, été adoptée par la commission.
Il s’agit de publier le texte des accords intergouvernementaux au Journal officiel. Il ne sera pas interdit à d’autres médias de reprendre ces informations. Il convient d’assurer une totale transparence qui évitera bien des polémiques. Tout ce qui ne sera pas publié au Journal officiel n’existera pas !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 215.
La parole est à M. François Dosé, pour le soutenir.
M. François Dosé. Notre collègue Jean-Louis Dumont a attiré l’attention sur la filière nucléaire à usage militaire. La filière civile a été marquée au cours des dernières décennies par une certaine dose de secret, de confidentialité, voire de confusion. Mais que dire de la filière militaire ! Il serait normal que les coopérations internationales ne s’appliquent pas dans le domaine du nucléaire militaire en provenance de l’étranger.
En outre, nous savons bien qu’il peut y avoir un conflit entre les intérêts d’un État et ceux de notre pays. S’agissant des coopérations internationales, nous avons fait un effort tout à l’heure en acceptant qu’il y ait quelques échanges. Mais faisons tout de même attention ! L’une des peurs paniques dans le nucléaire, c’est le transport. Qu’il se fasse par camion ou par train, c’est un maillon particulièrement fragile de la chaîne. Il ne faudrait pas que les coopérations internationales aboutissent à une multiplication des convois traversant la France, avec des déchets provenant de pays étrangers ou leur étant destinés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Avis défavorable.
Les accords de désarmement START ont déclassifié certaines matières nucléaires militaires et prévoient leur conversion dans des réacteurs civils, question qui a fait l’objet d’un rapport de l’OPECST. Nous souscrivons à ces accords, ne serait-ce que pour des raisons liées à la recherche : il ne faut pas s’interdire d’utiliser à des fins civiles ces matières déclassifiées. Mieux vaut les retraiter que de les laisser dans des ogives.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable, pour les mêmes raisons.
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Je soutiens cet amendement très intéressant défendu par M. Dosé. J’ai toujours considéré, contrairement à ce que croit le parti communiste depuis cinquante ans, et peut-être M. Paul lui-même, qu’il existe une consubstantialité entre nucléaire civil et nucléaire militaire. Elle est même institutionnalisée en France à travers l’aspect bicéphale, militaire et civil, du Commissariat à l’énergie atomique. Elle transparaît aussi dans la structure des laboratoires : les mêmes installations abritent un laboratoire civil et, quelques mètres plus loin, un laboratoire militaire.
D’ailleurs, si la France a choisi le nucléaire, ce n’était pas pour produire de l’électricité. Les gaullistes, s’il en reste sur les bancs de la majorité,…
M. Patrick Ollier, président de la commission. Oui, il y en a !
M. Yves Cochet. …savent que la décision du général de Gaulle tenait à des raisons de stratégie. L’électricité, il y a dix autres manières moins coûteuses et moins dangereuses d’en produire qu’avec le nucléaire !
Cette confusion entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire donne une posture particulière à la France au sein de l’Union européenne. Cette dernière se pose des questions sur sa défense et sur la possibilité d’adopter une stratégie européenne en ce domaine. Pour l’instant, elle n’en est qu’au stade des débats : il n’y a en effet pas de politique de défense commune comme il y a une politique agricole commune.
M. Patrick Ollier, président de la commission. Et la force de dissuasion, qu’en faites-vous ?
M. Yves Cochet. La France est très favorable à cette perspective car elle a trop de plutonium de qualité militaire. Stocké en grosses quantités sur des étagères à La Hague, elle ne sait qu’en faire. Si jamais l’Europe, sous prétexte que le monde est moins sûr que par le passé, décidait de se doter d’une force nucléaire, la France, qui se considère comme la championne du monde du nucléaire civil et militaire, deviendrait la première pourvoyeuse de plutonium de qualité militaire. Et l’adoption de l’amendement de M. Dosé mettrait à bas ce grandiose dessein.
Le plutonium n’est pas une substance naturelle, c’est une sorte de déchet que produisent inévitablement les centrales nucléaires. Quitte à ce qu’il y en ait, autant l’utiliser à faire des bombes, d’après certains. À la fin des années soixante-dix, le général Gallois a ainsi déclaré que plus les surgénérateurs se multiplieraient, plus la France produirait du bon plutonium, du plutonium 239 issu de l’uranium 238 en couverture fertile.
Que la France devienne la pourvoyeuse en plutonium de l’Europe en vue de la fabrication de bombes, je ne le veux pas. C’est pour cela que je vous appelle à voter en faveur de l’amendement n° 215.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Ayant été nommément cité par Yves Cochet…
M. Jean-Claude Lenoir. De façon inadmissible !
M. Daniel Paul. …je le renverrai tout simplement, même si je ne devrais pas avoir à le faire dans cette enceinte, à tous les textes de nos congrès qui, depuis des années, font du désarmement et de la non-prolifération des armes nucléaires un objectif du parti.
M. Yves Cochet. Certes, mais vous êtes favorable au nucléaire civil !
M. Daniel Paul. Bien évidemment, monsieur Cochet,…
M. Yves Cochet. L’un ne va pas sans l’autre !
M. Daniel Paul. …nous y sommes favorables dans la mesure où nous estimons que, pour faire face aux besoins énergétiques auxquels nous sommes confrontés, pour prendre en compte les enjeux liés à l’effet de serre et pour remédier à la raréfaction des énergies fossiles, il faut avoir recours à toutes les sources d’énergie. Mais je suis un élu du littoral et je n’ai pas envie de voir les côtes se couvrir, à quelques centaines de mètres de ce littoral, de dizaines de milliers d’installations diverses et variées.
Si d’autres énergies pouvaient se substituer au nucléaire, je m’en réjouirais au même titre que si les centrales thermiques au charbon ou au gaz, qui polluent beaucoup, étaient remplacées. Pour le moment, nous n’en sommes pas là.
Ce qui m’importe, c’est la sécurisation maximale des installations nucléaires civiles existantes. Nous devons être très attentifs à ce que pensent nos concitoyens et veiller à ne pas les tromper. Il faut leur dire réellement ce qu’il en est et faire confiance à leur bon sens. Nous avons pu constater ce qui se passe lorsqu’on leur explique ce qu’il y a derrière les textes : ils votent non à un référendum réputé très complexe et s’opposent au CPE alors qu’ils étaient censés y être favorables initialement.
Je reste persuadé que, si nous adoptons la même démarche pédagogique, politique, au bon sens du terme, à propos des questions énergétiques, nos concitoyens seront capables de faire la part des choses.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Patrick Ollier, président de la commission. Un certain nombre d’entre nous se sont sentis interpellés par votre intervention, monsieur Cochet, et je voudrais que les choses soient claires. Je comprends votre raisonnement mais je ne l’accepte pas.
Dans cet hémicycle, il y a des gaullistes, mais ils ne sont pas les seuls à avoir soutenu la vision d’avenir d’un homme, qui, incarnant le destin national de la France, a mis en place des recherches sur la force de frappe nucléaire qui ont ensuite permis le développement du nucléaire civil. Il ne faut pas inverser les choses. Si le général de Gaulle a souhaité que la France se dote d’une force de dissuasion, c’est pour préserver son indépendance nationale. Et je me réjouis que, grâce à cela, la voix de la France soit entendue dans le monde et que notre pays puisse tenir un discours qui détonne par rapport à ceux qu’on entend par ailleurs – je pense en particulier aux déclarations de Jacques Chirac sur la guerre en Irak. Voilà qui honore la France et je ne voudrais pas que l’on oublie que, s’il en est ainsi, c’est qu’elle sait que son indépendance est garantie par la force de frappe voulue par le général de Gaulle, à l’action duquel je veux rendre hommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Qu’il s’agisse du nucléaire militaire, du nucléaire civil ou, ne l’oublions pas, du nucléaire médical, pas une voix ne manquera de ce côté de la majorité pour soutenir cette politique ! (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Permettez-moi de faire à mon tour une petite précision historique.
C’est sous la IVe République, grâce à l’impulsion décisive de Pierre Mendès France et de son gouvernement, que le nucléaire militaire a commencé à se développer. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. Luc-Marie Chatel. Avec l’apport du professeur Rocard !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 215.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 147.
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
M. Yves Cochet. Cet amendement prévoit une nouvelle rédaction de l’alinéa 6 du texte proposé pour l’article L. 542-2-2 du code de l’environnement. Pour disposer d’une véritable visibilité sur les stocks de substances étrangères, il faut avoir une idée des calendriers de traitement et de retour des matières et des déchets. C’est un facteur déterminant de transparence, de précision et de contrôle du respect des délais.
Actuellement, cet alinéa est rédigé d’une manière incompréhensible qui devrait faire bondir M. le rapporteur. Permettez-moi d’en citer la dernière phrase : « Le rapport comporte également des indications sur les prévisions relatives aux opérations de cette nature ». Pour mettre fin à ce flou et à cette incertitude, je propose une nouvelle rédaction.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, déjà en grande partie satisfait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Défavorable également.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 147.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 17.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 64.
La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.
M. Daniel Paul. Suivant une recommandation du Conseil économique et social, cet amendement vise à établir le principe de l’interdiction de l’exportation de déchets produits sur le territoire national. Il établit une symétrie avec le principe de l’interdiction du stockage de déchets d’origine étrangère. Ancrer cette disposition dans la loi, c’est affermir la crédibilité de notre pays : nous ne pouvons en effet mettre en œuvre l’interdiction du stockage de déchets en provenance de l’étranger sans nous engager nous-mêmes à stocker nos déchets sur notre propre territoire. Cette réciprocité sera d’ailleurs une garantie pour la poursuite du travail de l’ANDRA en la matière. Je le dis à l’intention de M. Gonnot, qui préside cette agence.
Nous souhaitons par cet amendement éviter des dérives indignes de notre pays et susceptibles d’affaiblir sa crédibilité dans la filière nucléaire civile.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Avis défavorable, pour deux raisons.
Premièrement, nous n’avons pas l’intention d’exporter nos déchets.
M. Daniel Paul. Écrivez-le dans la loi !
M. Claude Birraux, rapporteur. Deuxièmement, la rédaction de l’amendement présente un grave inconvénient. Comme nous traitons des combustibles usagés en provenance de l’étranger susceptibles de produire des déchets, cette disposition, si elle était adoptée, nous empêcherait de renvoyer le « paquet cadeau » à l’expéditeur !
M. Daniel Paul. Vous savez bien que ce n’est pas la question !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Le Gouvernement émet un avis défavorable pour les mêmes raisons. J’ajoute que nous avons signé et ratifié la convention internationale sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs, qui exclut l’exportation de déchets radioactifs vers les pays en voie de développement.
M. le président. La parole est à M. François Dosé.
M. François Dosé. Je comprends parfaitement les arguments donnés par M. le rapporteur et M. le ministre. Cela étant, ce n’est pas parce que la France n’exporte pas aujourd’hui qu’elle n’exportera pas demain. L’hypothèse n’a d’ailleurs rien de dramatique. Mme Loyola de Palacio avait esquissé un avant-projet que Mme Fontaine a bloqué au nom de la France. Si les différents gouvernements ont été clairs sur le sujet au cours de la dernière décennie, l’Union européenne pourrait changer de position, et pas seulement pour de mauvaises raisons puisqu’il s’agirait en l’espèce de permettre aux pays Baltes qui, à leur entrée dans l’Union, ne disposaient pas des ressources économiques et technologiques suffisantes, de se regrouper.
Néanmoins, en faire un principe général reviendrait à donner le feu vert aux autres pays. Dans ce contexte, il ne serait pas mauvais d’anticiper et de préciser dans la loi que, quelles que soient les directives européennes, la position de la France ne changera pas.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 64.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 153 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
M. Claude Birraux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 153 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 19.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Cet amendement est de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 20.
M. Claude Birraux, rapporteur. Amendement rédactionnel !
M. le ministre délégué à l’industrie. Et le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 197.
La parole est à M. Christian Bataille, pour le soutenir.
M. Christian Bataille. Je le soutiens d’autant plus qu’il a été adopté par la commission.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Sagesse.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 197.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 137.
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
M. Yves Cochet. Puisque nous avons tous, sur tous les bancs de cette assemblée, les mots de transparence et de démocratie à la bouche, il vaudrait mieux ajouter à l’article 5 un alinéa précisant que les infractions pourront faire l’objet d’un recours. En l’état actuel du texte, ce n’est pas possible puisque le projet de loi exclut tout recours de la part des associations. Passons sur leur force dans notre pays, mais leur accorder un droit de recours serait un gage du contrôle démocratique. C’est ce que M. Pierre Rosanvallon appelle, dans son cours au Collège de France, la « contre-démocratie », qui prouve qu’un pays est vivant. Pour rendre la France plus vivante, adoptez mon amendement !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Défavorable. Une infraction peut faire l’objet non d’un recours, mais d’une sanction qui est prévue par l’alinéa 7 de l’article 5 et qui peut aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. Les sanctions sont donc prévues.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis, pour le même motif.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. Deux orateurs sont inscrits sur l’article 6.
La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. L’article 6 est largement consacré à la Commission nationale d’évaluation et le groupe socialiste a déposé, afin de nourrir la réflexion, un amendement sur sa composition.
Innovation de la loi de 1991, la Commission nationale d’évaluation s’est révélée extrêmement utile. Elle a permis d’associer des experts dans plusieurs domaines à ses travaux annuels. Je peux en témoigner en tant que membre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques et auditeur de son rapport annuel.
Il faut tirer les leçons des quinze années de fonctionnement de la Commission et prendre des dispositions pour permettre son renouvellement tout en lui conservant son caractère technique. À cet égard, je ne comprends pas, mais peut-être M. le ministre nous fournira-t-il des explications, pourquoi il est prévu de lui adjoindre des membres de l’Académie des sciences morales et politiques, alors que son rapport est essentiellement technique.
Nous devons également réfléchir aux propositions du projet de loi. Ainsi, le Gouvernement prévoit non plus deux experts internationaux, mais quatre. Cette mesure me semble absurde et inapplicable dans la mesure où nous avons toujours eu des difficultés à trouver des experts internationaux parlant français qui acceptent de se rendre régulièrement en France. On veut doubler la difficulté ! Mais j’entre déjà dans le détail de la discussion.
Je souhaite seulement que les suggestions du groupe socialiste à propos de la Commission nationale d’évaluation fassent l’objet de la part du Gouvernement et du rapporteur d’une écoute attentive. Nous voulons assurer le bon fonctionnement de la Commission comme cela a été le cas pendant quinze ans. Il faut en remercier ses membres qui ont accompli avec dévouement un travail régulier et sérieux. Mais nous pouvons encore aller plus loin dans le sens d’une amélioration.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Nous avons également un amendement pour faire une place au sein de la Commission nationale d’évaluation aux représentants des salariés.
S’agissant de l’article lui-même, nous nous félicitons du fait que la CNE travaille désormais sur l’état d’avancement de l’ensemble des recherches. Autrement dit, elle ne se cantonnera pas aux déchets à haute activité et à durée de vie longue.
Toutefois, concernant la composition de la Commission, le respect des critères de déontologie n’est pas abordé dans l’article. Rien ne garantit que ne feront pas partie de la CNE des personnes impliquées dans des travaux de recherche. Il faut pourtant veiller à ce que les membres de la CNE ne soient pas conduits à évaluer des travaux auxquels ils ont participé, ce qui les placerait en position d’être à la fois juge et partie. Notre réserve porte non pas sur la qualité des scientifiques – elle n’est nullement en cause – mais sur le respect de règles de déontologie simples et nécessaires.
Il y a quinze jours, nous parlions de transparence du nucléaire. L’indépendance des personnalités qui seront désignées pour faire partie de la CNE nous paraît indispensable. Pour la garantir, il faut préciser la rédaction de l’article. Peut-être notre discussion permettra-t-elle d’y parvenir.
M. le président. Nous en venons aux amendements à l’article 6.
Je suis saisi d’un amendement n° 91.
La parole est à M. Christian Bataille, pour le soutenir.
M. Christian Bataille. Cet amendement précise la composition de la CNE. Sept de ses membres seraient désignés par l’Assemblée nationale et le Sénat sur proposition de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques – la méthode, qui a très bien fonctionné, établit un lien entre la CNE et le Parlement – et sept autres par le Gouvernement, les ministres chargés de l’énergie, de l’environnement et de la recherche. Nous proposons que les membres de la Commission se voient confier un mandat de quatre ans, renouvelable une fois, de sorte à assurer un renouvellement régulier.
Nous proposons également qu’elle remette un rapport sur l’état du plan national de gestion et, tous les quatre ans, un rapport global d’évaluation. Nous nous inspirons du régime actuel, mais le rythme des travaux de la Commission serait différent et sa compétence étendue à l’ensemble des déchets.
Je répète que le chiffre de deux experts internationaux était suffisant. Le doubler serait absurde et inapplicable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Avis défavorable et je vous demande, monsieur Bataille, de retirer votre amendement. L’amendement n° 154 rectifié, adopté par la commission, résulte d’un travail en commun et d’un compromis entre les propositions du rapporteur, de M. Bataille et de M. Brottes. Comme il est plus complet, nous pourrions tous, si vous en êtes d’accord, nous y rallier.
M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
M. Christian Bataille. Je n’avais plus cet amendement en mémoire. Je voudrais, monsieur le rapporteur, que vous me répondiez sur les experts internationaux. C’est la seule réserve que je fais.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Birraux, rapporteur. Tout a été réécrit, y compris sur les experts internationaux, qui seront ramenés à trois.
M. le président. Compte tenu de ces éléments, monsieur Bataille, retirez-vous votre amendement ?
M. Christian Bataille. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 91 est retiré.
Nous en venons à l’amendement n° 21.
La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
M. Claude Birraux, rapporteur. Cet amendement est de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 22 et 119.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 22.
M. Claude Birraux, rapporteur. Je laisse à M. Chatel le soin de soutenir ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Luc-Marie Chatel.
M. Luc-Marie Chatel. Plusieurs rapports font état de recherches menées dans d’autres pays développés. Aussi ces amendements prévoient-ils de reprendre la disposition de l’article L. 542-3 du code de l’environnement pour que le rapport de la CNE fasse le point sur ces travaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 22 et 119.
(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 177.
La parole est à M. Claude Birraux, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Cet amendement concerne le nombre d’experts étrangers, qu’il faut réduire. Pour ce faire, je vous propose de supprimer l’alinéa 5 de l’article 6.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 177.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 178.
La parole est à M. Claude Birraux, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. L’amendement prévoit un seul expert étranger parmi les personnalités proposées par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable, malgré une évidente frustration. (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 178.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 169 rectifié.
La parole est à M. Daniel Paul, pour le soutenir.
M. Daniel Paul. Cet amendement vise de nouveau à élargir les points de vue au sein de la Commission nationale d’évaluation en y incluant des représentants d’organisations syndicales.
En effet, les salariés du secteur nucléaire, peut-être plus que d’autres, ont acquis, grâce à leur formation, leur expérience professionnelle et les responsabilités qu’ils exercent, une connaissance particulière de l’appareil de production. Demain, ils posséderont également un savoir-faire inégalé des outils relatifs au traitement des déchets.
Les représentants des organisations syndicales peuvent donc répercuter la voix de ceux qui travaillent quotidiennement sur les sites de traitement ou au sein des centres de recherche. Ils sont également à même de révéler des lacunes, de souligner des difficultés, notamment de mise en œuvre, et de détecter des anomalies.
Tel est le sens de l’amendement n° 169 rectifié, qui vise à inclure deux représentants des organisations syndicales représentatives de la filière nucléaire dans la Commission nationale d’évaluation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Défavorable.
Il ne s’agit pas pour moi de mettre en cause la compétence scientifique des représentants des organisations syndicales avec lesquels, dans le cadre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, j’entretiens des relations régulières, confiantes et, j’ose le prétendre, amicales. Toutefois, la Commission nationale d’évaluation est une instance purement scientifique où ne siègent aucun représentant des exploitants, des centres ou des agences de recherche ou de l’État, ni aucun élu. C’est très bien ainsi. Autant chacun a pu se réjouir que la loi sur la transparence et la sécurité en matière nucléaire, adoptée il y a peu, ait renforcé le rôle des organisations syndicales par le biais des CHSCT, autant la même démarche ne s’impose pas dans le cadre du présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 169 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 154 rectifié.
La parole est à M. Christian Bataille, pour le soutenir.
M. Christian Bataille. Je tiens à faire amende honorable : je ne me rappelais plus que M. le rapporteur, François Brottes et moi-même avions élaboré en commission un texte aussi précis qui donne toute satisfaction en ce qui concerne la rédaction de l’article 6.
Cet amendement vise à préciser les règles de fonctionnement de la CNE, notamment son renouvellement et l’élection de son président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. La parole est à M. François Brottes.
M. François Brottes. Je souhaiterais que le rapporteur nous précise si la disposition selon laquelle les membres de la Commission « ne peuvent détenir d’intérêt direct ou indirect dans les organismes, auteurs des recherches et des études évaluées par eux », concerne à la fois les personnes détenant des parts du capital des organismes visés et les prestataires de services, notamment les consultants, qu’ils soient salariés ou qu’ils perçoivent des honoraires.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre délégué à l’industrie. Monsieur Brottes, j’avais préparé un sous-amendement en ce sens qui, malheureusement, n’a pu être déposé à temps. C’est pourquoi je le présenterai au Sénat.
Il permettra de répondre avec précision à votre préoccupation si, comme je l’espère, le Sénat l’adopte.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, rien ne vous interdit de le déposer maintenant !
M. le ministre délégué à l’industrie. Je pourrais effectivement le faire. Il tendrait à substituer au dernier alinéa de l’amendement n° 154 rectifié un alinéa ainsi rédigé : « Les membres de la Commission exercent leurs fonctions en toute impartialité et ne peuvent directement ou indirectement exercer de fonctions ni recevoir d’honoraires au sein ou en provenance des organismes évalués et des entreprises ou établissements producteurs et détenteurs de déchets. »
M. le président. La commission serait-elle favorable à ce sous-amendement s’il était présenté en séance ?
M. Claude Birraux, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. François Brottes. Nous faisons actuellement un travail de commission. C’est, il est vrai, tout l’intérêt d’un travail mené collectivement.
Monsieur le ministre, tel qu’il est rédigé, si votre sous-amendement ne s’ajoutait pas mais se substituait au dernier alinéa, il n’interdirait pas aux membres de la Commission nationale d’évaluation de détenir des parts d’une société de prestation de services.
M. Daniel Paul. Ce sous-amendement devrait s’ajouter et non se substituer au dernier alinéa de l’amendement n° 154 rectifié !
M. François Brottes. On peut en effet très bien ne pas toucher d’honoraires ni siéger au conseil d’administration d’une telle société tout en en détenant des parts.
M. le ministre délégué à l’industrie. Monsieur le président, je comprends tout à fait la préoccupation de M. Brottes, qui a eu raison de souligner que notre présent travail s’apparentait à un travail de commission. C’est pourquoi je déposerai mon sous-amendement au Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 154 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 92 tombe.
Je suis saisi d’un amendement n° 23 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
M. Claude Birraux, rapporteur. Cet amendement vise à laisser plus de temps à la Commission nationale d’évaluation pour rédiger son premier rapport, lequel devra être remis au plus tard non pas le 31 mars mais le 30 juin 2007.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre délégué à l’industrie. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.
M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :
Proposition de loi, n° 3013, de MM. Bernard Accoyer, Jean-Michel Dubernard et Laurent Hénart sur l’accès des jeunes à la vie active en entreprise :
Rapport, n° 3016, de M. Laurent Hénart, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l'Assemblée nationale,
jean pinchot