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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 5 octobre 2006

4e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. MAURICE LEROY,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

participation et actionnariat salarié

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié (nos 3175, 3337, 3339).

Hier soir, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 3.

Article 3

M. le président. La parole est à M. le président et rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président et rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, madame la ministre déléguée au commerce extérieur, monsieur le ministre le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, j’aimerais revenir sur les dispositions que nous avons votées hier soir. Le fait qu’elles aient été adoptées de manière consensuelle ne doit pas masquer l’importance de l’intéressement de projet. D’autant que nous allons commencer la discussion de l’article 3, dont l’esprit est commun : qu’il s’agisse de l’intéressement de projet, à l’article 2, ou du développement de l’épargne salariale dans les groupements d’employeurs et les groupements d’intérêt économique, à l’article 3, on touche le point central de la participation, dans sa dimension sociale et de concertation. Certes, le texte ne va peut-être pas assez loin dans ce sens, mais la concertation y figure bel et bien, à travers ces deux articles.

M. Yves Bur. Nous devrions tous nous y retrouver !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. En tant que rapporteur, je voudrais insister sur l’apport que constitue l’intéressement de projet. Si l’on en juge par l’enthousiasme qu’il suscite, nombreux sont déjà les convaincus. S’unir autour d’un projet commun n’a rien d’une nouveauté. Certains se sont même plu à rappeler que cette notion était à l’œuvre sous l’Antiquité égyptienne avec la construction des pyramides. Quoi qu’il en soit, cette notion a un sens aux yeux de beaucoup de salariés et de jeunes aujourd’hui. Les élèves de grandes écoles que nous avons auditionnés se sont montrés particulièrement intéressés.

Organiser une forme d’intéressement entre différentes entreprises et différents salariés afin de s’unir, d’assembler les énergies et de s’« associer », pour reprendre une formule employée par le général de Gaulle dans son discours aux mineurs de Saint-Étienne, voilà qui me paraît constituer une pièce maîtresse de la réforme que nous examinons aujourd’hui. Se concerter, d’après le Petit Larousse, madame Comparini, ce n’est pas autre chose que « s’entendre pour agir ensemble ».

Nous devons poursuivre nos réflexions, mais les dispositifs existants ne constituent-ils pas déjà une réponse à ces interrogations ?

Le groupe Eiffage, constructeur du viaduc de Millau, sixième major européen de la construction, est, depuis 1986, le pionnier de l’actionnariat salarié. M. Roverato, son président-directeur général, a montré un enthousiasme impressionnant lors de son audition. L’intéressement et la participation représentent dans ce groupe près de deux fois le montant des dividendes distribués aux actionnaires, soit 55 millions d’euros contre 30 millions d’euros.

M. Maxime Gremetz. C’est une exception !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Ce n’est qu’un exemple, mais il montre combien la volonté peut être mise au service de la réussite. Nul doute que ce nouvel outil juridique se nourrira des énergies déjà présentes sur le terrain.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur Dubernard, je comprends votre insistance à revenir sur ce point qui est déterminant pour vous, mais qui ne l’est pas pour moi. Vous présentez ce projet comme une grande nouveauté, pierre philosophale d’une nouvelle politique. Toutefois, l’intéressement remonte à soixante ans et, même si l’on peut toujours faire du moderne avec de l’ancien, l’expérience a montré dans ce pays que les salariés n’étaient pas dupes, et je ne parle pas seulement de mon cas personnel. L’intéressement et la participation font toujours l’objet de beaux discours, mais ils ne sont jamais devenus des réalités sur le terrain.

Prenons l’exemple de Valeo. C’est un groupe qui marche : avec 5,5 % d’augmentation de son chiffre d’affaires, il s’apprête à faire de nouvelles acquisitions à travers le monde. Mais, dans le même temps, il ferme son site d’Abbeville, dans la circonscription de votre ami Joël Hart. Il se trouve que Valeo pratique l’intéressement, je le sais bien, car j’y ai travaillé avant d’être licencié – par un ministre du travail. En fait, j’étais un propriétaire sans droits. Et contrairement à ce que je croyais naïvement, on est loin des primes financières et de la participation à la marche de l’entreprise.

Cette année, à Abbeville, non seulement il n’y a pas eu de prime d’intéressement, si peu élevée soit-elle pour des salariés payés au SMIC, mais a été décidé un plan de licenciement de deux cent cinquante salariés pour cause de rentabilité trop faible – on sait ce qu’on peut faire avec des jeux d’écriture. Aucune annonce n’a été faite au comité d’entreprise, c’est par la presse, avant que le comité de groupe ne se réunisse, que les salariés en ont appris l’existence. Dans ces conditions, comment voulez-vous qu’ils puissent croire au bien-fondé de l’intéressement ?

Vous êtes de bonne foi, mais vous êtes en panne, permettez-moi de vous le dire. Vous êtes allés rechercher un modèle qui date et qui n’a jamais fait ses preuves, c’est le moins que l’on puisse dire. Allez parler aux salariés de Valeo-Abbeville d’intéressement, ils vous riront au nez. Ce qu’ils veulent, ce sont des augmentations de salaires pour lesquelles ils sont en négociation depuis deux ans.

Il vous manquait une grande ambition avec un soubassement philosophique. Vous avez cherché, vous n’avez pas trouvé et vous êtes revenu à l’idée du général de Gaulle. Mais le problème, c’est que même si elle est excellente dans son principe, elle n’a jamais été appliquée.

La lutte des classes, ce n’est pas nous qui l’organisons, ce sont les entreprises qui licencient qui la provoque, en privant les salariés de leurs droits à la participation. Ceux-ci ne vont pas se contenter de dire « amen ».

La lutte des classes est une réalité. La situation s’est encore aggravée depuis que le capital financier a remplacé le capital industriel, et vous l’avez démontré.

M. le président. Monsieur Gremetz, il faut conclure !

M. Maxime Gremetz. Je termine, monsieur le président.

Il serait temps de nous proposer autre chose que la participation. Quand on innove, il faut penser avec son époque. Je ne suis pas un penseur, contrairement à vous qui êtes de grands savants, mais je sais une chose : vous n’avancerez pas tant que vous n’écouterez pas les salariés, les organisations syndicales et les comités d’entreprise.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Monsieur Dubernard, hier vous avez déjà alimenté le débat avec des exercices d’autosatisfaction. Pour notre part, nous sommes à votre disposition pour engager un débat de fond.

Vous ne pouvez pas affirmer qu’un consensus s’est dégagé sur l’article 2 car l’intéressement de projet suscite plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Les auditions auxquelles nous avons procédé montrent qu’il s’agit peut-être d’une piste, mais aussi d’une manière d’exclure certains salariés du bénéfice du dispositif.

Nous nous interrogeons, mais n’interprétez pas faussement nos interrogations.

Tout le monde connaît Eiffage, mais les poissons volants, comme on dit au cinéma, existent aussi et ils ne sont pourtant pas les plus répandus.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Vous auriez dû assister à l’audition du PDG d’Eiffage !

M. Alain Vidalies. La réalité des rapports salariaux, John Monks, secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats, en parle dans une excellente interview. Il dresse un bilan accablant de la situation des salariés de l’ensemble de l’Europe et explique qu’un salariat à deux vitesses se développe avec, d’une part, une minorité qui profite des dispositifs d’intéressement ou de stock-options, ce qui les conduit à dire que le capitalisme financier est un monde acceptable, et, d’autre part, la grande masse des salariés qui vivent de plus en plus mal. Voilà la réalité.

Nous pouvons discuter du texte d’un point de vue technique, mais si vous poursuivez sur ce ton, alors nous prendrons le temps nécessaire pour débattre au fond.

M. le président. La parole est à M. le président et rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Patrick Ollier, président et rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Monsieur Vidalies, je suis très heureux de ce débat qui démontre que rien n’est simple et que faire la loi, c’est aussi avoir le droit de douter.

Vous avez raison, nous ne sommes pas certains que les dispositifs que nous prévoyons fonctionneront comme on peut l’imaginer. Mais les incertitudes ne doivent pas pour autant entraver la volonté qu’a la majorité de faire avancer les choses.

Je ne prétends pas qu’il y aurait un consensus, non plus d’ailleurs que M. Dubernard, mais je suis certain, en dehors de tout clivage politicien entre vous et nous, que nous avons tous en la matière de bonnes intentions. Seulement, nous ne les traduisons pas dans le texte de la même manière.

L’article 3 est intéressant à double titre car il permet d’abord de faire évoluer les conditions du dialogue social. Prévoir l’obligation de négociations pour les groupements d’employeurs constitue, sans nul doute, une évolution.

J’ajoute que les groupements d’employeurs me tiennent particulièrement à cœur car, voilà dix ans environ, je me suis battu ici – et M. Coussain s’en souvient – pour que la pluriactivité soit effective, comme le souhaitaient certaines associations de défense du développement économique de la montagne. Et l’on s’aperçoit aujourd’hui que ces groupements d’employeurs sont utiles dans d’autres domaines que ceux que nous avions prévus à l’époque.

Ensuite, l’article 3 étend l’application de l’intéressement. Le fait que l’on puisse prendre en compte les résultats des entreprises membres du groupement constitue également un progrès.

Enfin, monsieur Gremetz, peut-être n’avez-vous pas écouté ce que nous avons essayé de dire hier soir.

M. Maxime Gremetz. J’écoute toujours avec beaucoup d’attention !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Si vous aviez mis la nuit à profit pour y réfléchir, vous auriez certainement compris que nous voulons aller dans votre sens.

Je vous respecte, monsieur Gremetz, parce que vous vous êtes battu, en tant que syndicaliste, et que vous continuez à le faire. Vos convictions sont respectables et, même si je ne les partage pas, je sais que vous êtes sincère. Mais vous vous trompez. Je vous engage à nous rejoindre dans cette quête d’une meilleure organisation du dialogue social. Nous construisons une loi pour demain, pas pour hier.

Si vous estimez que la loi a été mal appliquée hier ou qu’elle est mauvaise aujourd’hui, acceptez de comprendre que ce que nous faisons vise à ce qu’elle soit mieux appliquée demain. La majorité a un véritable projet social, qui sera à son honneur et qui sera d’ailleurs un élément du débat pendant la campagne présidentielle.

Nous aimerions, monsieur Gremetz, que vous cessiez de regarder systématiquement dans le rétroviseur. Tournez-vous vers l’avenir. Quant à nous, nous sommes une majorité de progrès, et l’article 3 en témoigne. Voilà pourquoi je souhaite qu’il soit voté.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Premièrement, il y a eu un consensus sur le livret d’épargne, mais pas sur l’article 2 – nous avons voté contre. Ne nous faites donc pas dire ce que nous n’avons pas dit !

Deuxièmement, vous avez dit, monsieur Ollier, que la loi était mauvaise et qu’elle était mal appliquée, et vous avez raison. Vous avez également indiqué que vous aviez la volonté de préparer l’avenir. Soit, mais comment peut-on imaginer un intéressement, une participation véritable lorsque l’on remet en cause tous les droits des comités d’entreprise et des organisations syndicales ?

M. le président. Nous en venons à l’examen des amendements à l’article 3.

Je suis d’abord saisi d’un amendement n° 15.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 5 de l’article 3, c'est-à-dire en réalité à rétablir le dernier alinéa de l’article L. 444-4 du code du travail, qui dispose que s’il n’existe pas de dispositif d’intéressement, de participation ou de plan d’épargne d’entreprise spécifique à un groupement d’employeurs, un salarié mis à la disposition d’une entreprise par ce groupement doit pouvoir bénéficier, comme les autres salariés de l’entreprise, des systèmes d’intéressement et de participation prévus.

Vous créez une obligation de négociation au niveau du groupement d’employeurs, mais que se passera-t-il s’il n’y a pas d’accord ? Les salariés qui bénéficient aujourd’hui de la protection de l’article L. 444-4 ne pourront plus l’invoquer. Nous ne comprenons pas cette régression. Nous considérons qu’il suffirait de supprimer l’alinéa 5 pour revenir au droit positif.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. M. Vidalies veut supprimer l’alinéa 5 de l’article 3 pour faire revivre le dispositif prévu au dernier alinéa de l’article L. 444-4 du code du travail, qui tendait à prévoir un mode d’intéressement ou de participation au profit des salariés mis à disposition d’une entreprise par un groupement d’employeurs. Un tel dispositif n’a pas été appliqué parce qu’il est inapplicable. En effet, il posait un problème en cas de rupture du lien de travail entre le groupement d’employeurs et l’entreprise utilisatrice, car il n’y a pas de contrat de travail. Comment, dès lors, apprécier la durée de présence dans l’entreprise ?

Mme Anne-Marie Comparini. Très juste !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. En outre, ce dispositif n’avait de sens que pour l’intéressement.

Pour l’ensemble de ces raisons, les services ministériels ne sont même pas parvenus à rédiger le décret d’application du dernier alinéa de l’article L. 444-4. Il serait donc pour le moins paradoxal de vouloir faire revivre un dispositif alors que le projet de loi apporte des solutions qui, elles, ont le mérite de pouvoir être appliquées.

Voilà pourquoi la commission a donné un avis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Avis défavorable également.

La présente disposition reprend un amendement sénatorial concernant notamment les groupements dans le secteur agricole. En fait, il est inopérant puisque, par nature, le groupement ne réalise pas de résultats – ou alors il faudrait élaborer une espèce de système de tuyaux pour additionner la part des résultats revenant aux salariés du groupement. Or, comme nous l’avons dit, il faut simplifier, clarifier les choses.

La situation créant donc des inégalités, nous proposons de permettre une négociation dans le domaine de l’épargne salariale et de l’intéressement.

Monsieur Vidalies, je souhaite donc que vous retiriez l’amendement puisque nous voulons tous, vous comme nous, que les salariés membres d’un groupement puissent bénéficier de dispositions favorables.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Je comprends votre argumentation, monsieur le ministre, et, sur le fond, nous ne sommes pas en opposition. Mais autant on peut dire que le dispositif adopté par amendement au Sénat est inopérant, autant il vous est difficile d’expliquer comment pourront bénéficier d’un accord de participation ou d’intéressement les salariés d’un groupement sans aucun continuum d’activité.

Ensuite, il faut regarder les choses en face, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à externaliser une partie de leurs tâches. Et, si les groupements territoriaux ne posent pas de problème, il en va autrement des groupements de branche, le groupement n’étant qu’une des formes que revêt la sous-traitance.

Dans ces conditions, ne serait-il pas plus intéressant d’utiliser le plan d’épargne interentreprises, le PEI, que j’avais créé, et dont le rapport de M. Dubernard – page 88 – mentionne qu’il a progressé de 18 % dans les petites entreprises employant d’un à quarante-neuf salariés ? Pourquoi ne pas recourir à ce support ?

Votre argument contre l’amendement est bon, mais ce que vous proposez ne marchera pas mieux en raison de la discontinuité de l’activité d’un groupement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je souscris à la remarque de mon collègue, mais je voudrais étendre la discussion au-delà des groupements d’employeurs. Il faut – et je vous renvoie notamment à un amendement de M. Tian – généraliser le dispositif aux filiales de groupes étrangers installées en France auxquelles doit s’appliquer le droit français. C’est bien ce qu’établit la jurisprudence.

Comment traiter les groupements d’employeurs compte tenu de l’objection de M. Balligand qui a parfaitement raison ? L’amendement n° 15 n’est certes pas satisfaisant, mais il faut veiller à ne pas continuer à exclure les salariés des groupements d’employeurs d’un dispositif qui doit en principe bénéficier à tous et dont je rappelle qu’il ne concerne que 8 millions de personnes sur 22 millions.

La question se pose non seulement pour les entreprises sous-traitantes mais aussi pour les filiales de groupes étrangers installées en France. Allez-vous maintenir deux catégories de salariés ? Parce que le sujet ne peut être discuté au niveau du groupe, ceux qui travaillent dans les filiales de groupes étrangers ne pourront toujours pas profiter du système ! Nous ne demandons pas que la loi française s’applique dans les autres pays, mais il faut qu’en France, les salariés soient traités de la même façon.

Vous devez répondre sur ce point, ce qui nous permettra d’aller plus vite ensuite.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur et M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. On y viendra à l’article 6.

M. Maxime Gremetz. On ne peut pas se contenter de faire du cas par cas. Un balayage d’ensemble nous ferait gagner du temps.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Mesdames et messieurs les députés, notre objectif est de rendre accessible le dispositif de l’intéressement aux salariés des groupements d’employeurs, qui sont de fait privés du système de participation, la différence entre les deux mécanismes tenant à ce que le premier ne se fonde pas exclusivement sur des résultats financiers. S’agissant avant tout du secteur agricole, et en particulier de l’élevage, des critères de performance tant quantitatifs que qualitatifs peuvent être retenus, et ce sera l’objet de la négociation.

Les dispositifs d’épargne salariale et d’intéressement étant, à nos yeux, applicables, nous ne pouvons pas suivre les auteurs de l’amendement. Encore une fois, la position du Gouvernement est dictée par un souci d’efficacité et de pragmatisme, et non par une approche diamétralement opposée sur le sujet.

M. Jean-Pierre Balligand et M. Alain Vidalies. Vous commettez une erreur !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 320.

Cet amendement est-il soutenu ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je reprends à titre personnel cet amendement de M. Cornut-Gentille, que la commission n’a pas examiné.

Cet amendement, qui concerne la signature des accords d’intéressement dans les holdings, soulève donc une question bien réelle et il mérite notre attention. En effet, il simplifie les modalités d’ouverture de négociations dans les filiales.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Et voilà ! Je l’avais bien dit ! On y va par petits bouts ! Maintenant, nous en sommes aux holdings. Et les autres ? Que vous les appeliez holdings ou sociétés françaises appartenant à des groupes multinationaux, ce sont des cas spécifiques : nous ne sommes plus dans le domaine de la sous-traitance. Il s’agit bien d’établissements installés en France et le droit français doit s’appliquer ! Votre approche qui consiste à traiter un cas après l’autre ne convient pas. Il faut, à mon avis, une politique générale au lieu de se limiter à tel ou tel cas particulier. Ce n’est pas possible.

Prenons un cas concret, celui de la Picardie. Plus d’un tiers des salariés qui y travaillent, soit 40 % environ, sont employés par des filiales de groupes : Dunlop, Valeo, etc. Comment négocier ? Les employeurs pourront mettre en avant leur appartenance à un groupe pour éviter d’appliquer le droit français. Il faut donc bien stipuler que les salariés français, et pas les autres, sont concernés. Sinon, vous maintenez une discrimination flagrante entre salariés sur le sol français.

Encore une fois, il n’y a pas que les holdings. Je suis favorable à cet amendement, mais élargissons le propos pour régler, une bonne fois pour toutes, tous les cas particuliers. Vous qui réclamez des textes clairs et lisibles, messieurs les présidents de commission, rappelons donc clairement le principe fondamental selon lequel le droit français doit s’appliquer à tous les salariés qui travaillent en France, indépendamment du statut de leur entreprise.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Il est pour le moins singulier de voir un droit prévu dans le code du travail supprimé par voie d’amendement, qui plus est un amendement repris par le président de la commission des affaires sociales ! Nous n’avons jamais entendu parler de cette affaire ! C’est une vraie régression. Jusqu’à présent, le code du travail faisait obligation de négocier dans les filiales et cette disposition ne soulevait pas de problème particulier. Je m’étonne que cet amendement ne suscite pas plus de réaction. C’est proprement incroyable !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je ne peux pas laisser dire ça ! Le Conseil supérieur de la participation où les partenaires sociaux sont représentés a discuté le sujet !

M. Maxime Gremetz. Et quelle a été l’opinion des partenaires sociaux ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. La particularité des holdings faisait que les salariés de ce que l’on appelle en jargon les back-offices, et qui sont généralement extrêmement modestes, ne bénéficiaient de rien ! Nous sommes en train de faire œuvre de justice et le terrain a été préparé par le travail du Conseil supérieur de la participation.

M. Alain Vidalies. Alors, pourquoi ne l’avez-vous pas proposé dans le projet de loi ?

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, vous prétendez vouloir un débat sérieux ! Vous faites systématiquement référence au Conseil supérieur de la participation. Ce n’est pas pour rien que j’en ai rappelé la composition, il faut savoir de quoi nous parlons. Vous avez en outre souligné que son avis n’était que facultatif, mais vous vous gardez bien de donner la position des organisations syndicales ! Arrêtez ! Vous vous prévalez d’une prétendue concertation tenue au sein de telle ou telle commission, monsieur le ministre, mais la concertation n’exige rien d’autre que de parler ensemble. Après vient la décision qui n’est pas prise par ceux qui ont discuté. Donnez-nous donc le résultat de la concertation ! Les organisations syndicales sont en désaccord avec cette proposition – toutes les organisations syndicales – mais vous ne le dites pas ! Vous présentez le Conseil supérieur de la participation comme s’il énonçait des vérités indiscutables. Qui est pour la mesure qui est en discussion ? La voilà, la question !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Votez contre si vous n’êtes pas d’accord !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 320.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 181.

La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.

M. Dominique Tian. Cet amendement concerne les groupements d’intérêt économique auxquels la loi s’applique quand ils emploient plus de cinquante salariés. Le calcul de la participation doit alors se faire sur le résultat propre de l’entreprise, quelles que soient sa forme juridique et la nature de son activité. Or les GIE n’ont pas nécessairement de résultat en propre, en particulier lorsqu’ils ont pour objet des activités de service auprès de leurs membres.

Ainsi, dans une telle situation, comme l’a d’ailleurs récemment admis la Cour de cassation dans un arrêt du 1er juin 2005 pour le dispositif de l’intéressement, il convient que la réserve spéciale de participation puisse être calculée en prenant en compte la moyenne des résultats d’un ou de plusieurs membres constituant le GIE.

Cet amendement élargirait la participation à de nombreuses entreprises. Il éviterait toute contestation ultérieure par l’administration fiscale ou par les URSSAF, et, par conséquent, une remise en cause des avantages en résultant pour les salariés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté l’amendement, mais elle reconnaît qu’il soulève un véritable problème, celui de la diffusion de la participation dans les GIE, que le projet de loi aborde directement. Le calcul de la réserve spéciale de participation des GIE, tel qu’il est envisagé, risquerait d’aller à l’encontre de l’objectif visé en en diminuant le montant. D’où les réticences de la commission. La solution que vous préconisez, mon cher collègue, n’est pas forcément la plus opportune.

Les services du ministère ont procédé à une évaluation et je me tourne vers vous, monsieur le ministre, pour en connaître le résultat.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Tian, nous comprenons tout à fait votre intention d’améliorer la participation dans les groupements d’intérêt économique où elle est prévue par la loi. Toutefois, il me paraît utile de rappeler que la participation dans un GIE est aujourd'hui calculée à partir des résultats de chaque membre : passer à la moyenne risquerait de diminuer le résultat, dans la mesure où les filiales qui obtiennent des résultats négatifs abaisseraient cette moyenne.

Prenons l’exemple d’une chaîne de multiplexes : retenir le plus petit commun dénominateur entre ceux qui dégagent des bénéfices et ceux qui n’en dégagent pas conduirait à abaisser le niveau de la participation.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est mathématique !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. C’est mathématique, en effet, puisque cela suppose que les résultats négatifs sont également pris en compte. Tel n’est pas l’esprit du texte.

C’est pourquoi le Gouvernement souhaite le retrait de l’amendement n° 181.

M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux.

M. Xavier de Roux. Ne mélangeons pas tout ! S’il s’agit, j’en conviens, d’un problème très complexe, c’est en raison du fait que le GIE est transparent du point de vue des résultats.

En effet, le salarié est salarié du GIE et l’intéressement, qui est fondé sur les profits, va aux membres du GIE. Si nous voulons que le salarié du GIE profite de l’intéressement, alors même, je le répète, que l’organisme est transparent du point de vue des résultats, il faut bien trouver une solution !

M. Maxime Gremetz. Évidemment !

M. Xavier de Roux. Celle que propose l’amendement et qui repose sur le calcul de la moyenne est une des moins mauvaises. Si elle n’est pas adoptée, ou bien le salarié du GIE ne participera pas à l’intéressement ou bien il faudra remonter une partie de l’intéressement des sociétés membres du GIE vers les employés du GIE suivant une clé de répartition encore plus complexe que celle que cet amendement propose. Telle est la raison pour laquelle je soutiens celui-ci.

M. le président. Monsieur Tian, maintenez-vous votre amendement ?

M. Dominique Tian. Je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Monsieur de Roux, nous avons déjà eu ce débat sur le groupement d’employeurs. Il convient de bien distinguer ce qui relève de l’intéressement de ce qui relève de la participation. Or le GIE, en tant que tel, relève de la même situation que les groupements d’employeurs.

Telle est la raison pour laquelle, je le répète, le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement qui prend en compte les résultats négatifs, afin de maintenir, sur le fond, le dispositif tel qu’il est actuellement prévu.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 181, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

…………………………………………………………….

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 181.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est ouvert.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

L'Assemblée nationale a adopté.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Et je lève le gage.

M. Maxime Gremetz. Le vote de cet amendement est une grande victoire ! Bravo !

M. Philippe Auberger. C’est un amendement de M. Tian, pas de M. Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Et alors ? Nous ne sommes pas sectaires ! À partir du moment où il est bon, ce n’est pas parce qu’un amendement est présenté par la majorité que nous ne le votons pas !

En revanche, si l’amendement était venu de moi, vous auriez voté contre : vous êtes borné !

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Article 4

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, inscrit sur l’article 4.

M. Maxime Gremetz. L'article 4 participe plutôt d'une bonne démarche puisqu'il a pour objet la généralisation des comités de suivi des accords d’intéressement et la création de comités de suivi des accords de participation. De tels comités sont importants afin de permettre la réalisation des décisions prises.

L'objectif est louable en ce sens qu'il vise à favoriser l'implication des salariés dans ces dispositifs. Certes, nous sommes opposés à ces formes de participation financières en raison de l'utilisation qui en est faite : substitution au salaire ou alimentation de diverses formes de capitalisation en vue de la retraite. Toutefois, le principe de réalité s'impose et, puisque ces dispositifs existent – vous ne les avez pas inventés, puisque j’ai été moi-même actionnaire à la fin des années cinquante –, si nous continuons de penser qu’il faut les contenir, la loi doit s’imposer – c’est ce que nous ont dit les organisations syndicales – et il faut négocier en vue de les créer dans l’entreprise. L'exigence, prioritaire à nos yeux, d'augmenter les salaires ne nous empêche donc pas de faire des propositions sur l’évolution des dispositifs d'épargne salariale. Nous venons encore de le démontrer en prenant une position favorable à l’amendement n° 181 de M. Tian, qui appartient à la majorité.

En conséquence, ce n’est pas désarmer que chercher des outils permettant une meilleure utilisation de ces mécanismes. Il en est ainsi de la généralisation des comités de suivi des accords d’intéressement ou la création de comités de suivi des accords de participation : elles vont dans le bon sens puisqu’elles répondent à une attente des représentants des salariés impliqués dans ces dispositifs.

Toutefois, il faudrait aller plus loin. En effet, ces comités sont aujourd'hui relégués à un simple rôle d'information, notamment sur le contenu de l'accord instituant des règles d'intéressement ou de participation financière.

C'est ainsi que selon l'article L. 441-2 du code du travail, les accords d'intéressement « doivent instituer un système d'information du personnel et de vérification des modalités d'exécution de l'accord. Ils comportent notamment un préambule indiquant les motifs de l'accord ainsi que les raisons du choix des modalités de calcul de l'intéressement et des critères de répartition de ses produits ».

De même, la circulaire interministérielle du 3 janvier 1992 prévoit qu’« il est nécessaire que cette information soit effectuée de manière complète et régulière en adaptant la périodicité des communications aux représentants des salariés à celle retenue pour le calcul de l'intéressement ».

On ne peut, nous semble-t-il, se limiter à l'information : il faut donner aux salariés le pouvoir de participer réellement à la gestion de ces fonds. C’est ce à quoi, du reste, le président Dubernard nous a appelés : ce pouvoir ne doit pas être seulement financier, mais concerner également la gestion de l’entreprise. Nous sommes au pied du mur : les salariés doivent avoir un pouvoir de participation réelle à la gestion de ces fonds avant même d’obtenir un pouvoir de gestion des entreprises. Il faut donner aux représentants des salariés les moyens d'être concrètement présents dans les instances de gestion pour faire entendre la voix des intéressés en matière d'utilisation des fonds, des modalités de placement et de l'intérêt de ces placements.

Ces sommes, je le rappelle, appartiennent aux salariés : par leur détournement régulier, ces masses financières s’apparentent presque à un salaire différé. Il importe donc, dans un souci de transparence démocratique, que les salariés en soient pleinement maîtres.

C’est pourquoi nous ne comprenons pas, madame et monsieur les ministres, les motivations des amendements de M. Tian, lesquels visent, au contraire, à supprimer ces structures, dessaisissant ainsi les salariés de leurs droits. Ce sont eux qui paient, et d’autres gèrent ! Cela se pratique beaucoup en France : les payeurs ne sont pas les décideurs ! Ceux qui décident, ce sont les grands, tout en haut ! Nous sommes également défavorables à l’amendement du rapporteur visant à rendre facultative cette généralisation des comités de suivi. Qui peut, dans cette assemblée, être opposé à la généralisation des comités de suivi, alors que la transparence exige que ceux qui paient sachent comment leur argent sera utilisé ? Ils doivent notamment savoir si cet argent ira alimenter des placements financiers ou sera investi dans le développement de l’entreprise.

Nous nous opposerons donc à ces amendements et proposerons au contraire d’aller dans le sens d'une plus grande implication des représentants des salariés dans la gestion des plans d'épargne, leur contrôle et leur suivi.

Monsieur le président Dubernard, je vous le rappelle, vous avez parlé de grande innovation. Or une innovation qui consiste à retenir du salaire différé sans que les salariés aient leur mot à dire sur sa gestion ou son placement, cela n’a rien d’une révolution copernicienne mais constitue plutôt une régression !

M. le président. Je suis saisi d'un amendement, n° 182, qui vise à supprimer l’article 4.

La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.

M. Dominique Tian. Une fois n’est pas coutume : je serai en désaccord avec M. Gremetz !

Monsieur le ministre, si cet amendement tend à supprimer l’article 4, c’est que, comme l’a souhaité le Gouvernement, il faut un effet « turbo » : les accords signés ne concernant aujourd'hui que 8 millions de salariés, ils doivent être multipliés.

Or, si le système actuel fonctionne – du moins est-ce l’avis général –, pourquoi prévoir des rigidités supplémentaires venant entraver les entreprises ?

M. Maxime Gremetz. Alors les salariés sont des « rigidités supplémentaires » ! Mais ce sont eux qui payent ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Philippe Auberger. Nous n’entendons plus M. Tian !

M. Maxime Gremetz. De telles affirmations me mettent hors de moi !

M. le président. Seul M. Tian a la parole.

M. Dominique Tian. La généralisation des comités de suivi, ce sera moins de souplesse, moins de liberté et moins de négociation au sein de l’entreprise. Elle freinera l’effet « turbo », ce que personne ne souhaite ici.

M. Maxime Gremetz. Quel effet « turbo » ? Je ne comprends pas !

M. Dominique Tian. Le système actuel étant bon, pourquoi prévoir de l’alourdir ?

M. Maxime Gremetz. Sur une Ferrari, un turbo, je sais ce que c’est, mais ici, je ne comprends pas !

M. le président. Monsieur Gremetz, veuillez laisser chacun s’exprimer dans le cadre de ce débat.

Quel est l'avis de la commission sur l’amendement en discussion ?

M. Maxime Gremetz. Le rapporteur va avoir du mal à trouver des arguments !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Non, pas du tout !

La commission a rejeté cet amendement. L’article 5 comporte en effet un enjeu essentiel pour le texte et pour les principes que nous défendons. Avec les comités de suivi, c’est la dimension sociale de la participation qui est mise en avant, autrement dit l’association des salariés aux discussions sur la mise en œuvre de la participation financière dans leur entreprise. Ce point est donc très important.

M. Xavier de Roux. Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. De la mise en œuvre de la participation découle ce principe. Sans vouloir vous asséner de trop nombreuses citations, je rappellerai que de Gaulle disait en 1968 : « La participation implique que tous les salariés soient informés d’une manière suffisante de la marche de l’entreprise…

M. Maxime Gremetz. Ah, voilà !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. …et puissent, par des représentants qui seront tous nommés – vous serez moins d’accord avec le mot qui suit, monsieur Gremetz – librement. Ils doivent participer à la société et à ses conseils pour y faire valoir leur intérêt, leur point de vue et leurs propositions. »

Il est essentiel de pouvoir s’assurer que les salariés soient réellement associés à la vérification des conditions de mise en œuvre des accords de participation ou d’intéressement – question que nous allons examiner ultérieurement. Si le principe de structures de suivi semble acquis – il paraît d’ailleurs difficilement contestable –, les auditions menées en commission ont montré combien sa mise en œuvre se pouvait se révéler délicate. Des réticences multiples sont apparues. Que n’avons-nous entendu, en effet, sur cet article ? Trop lourd et trop complexe pour les uns, insuffisant pour les autres, le dispositif proposé serait par ailleurs mal adapté selon ceux qui sont notamment soucieux d’éviter les redondances entre les rôles impartis aux comités de suivi, aux comités d’entreprise ou encore aux conseils de surveillance des fonds communs de placements d’entreprise.

Pour être franc, j’étais moi aussi perplexe, d’où ma compréhension pour la position de Dominique Tian. Reste cependant que les dispositions prévues par cet article sont trop importantes pour être purement et simplement supprimées. En effet, seule la moitié, environ, des entreprises assurent le suivi de leurs accords par la mise en place d’un comité ad hoc, et l’on peut regretter que l’autre moitié n’ait pas encore jugé nécessaire d’y avoir recours. En outre, seul les comités de suivi des accords d’intéressement sont prévus aujourd’hui par le code du travail.

Je suis convaincu que la contrainte n’est pas la solution, qu’il faut insister sur la dimension de concertation prévue par le texte. C’est pourquoi j’ai proposé à la commission des affaires culturelles l’amendement n° 84 rectifié, dont nous allons discuter ensuite, qui prévoit de rendre les comités de suivi applicables à l’ensemble des types d’accords – accords de participation, d’intéressement, règlements de plans d’épargne salariale – sans pour autant les rendre obligatoires.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Nous souhaitons à la fois « mettre le turbo », pour reprendre les mots de M. Tian, et, comme le veulent les deux commissions, que les accords de participation et d’intéressement et les plans d’épargne salariale fassent l’objet de dialogue.

Je rappelle qu’il existe aujourd’hui des comités de suivi des accords d’intéressement. Leur rôle consiste à vérifier les performances atteintes, qui ne sont d’ailleurs pas toutes financières, comme l’intéressement de projet, déjà évoqué. Ces comités servent aussi à vérifier les modes de calcul de primes. Or il n’existe aucun autre dispositif garantissant aux salariés le versement des primes d’intéressement. En ce qui concerne l’épargne salariale, le suivi est réalisé par les conseils de surveillances des FCPE.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 84 rectifié de la commission, qui étend, de manière facultative, la généralisation des comités de suivi aux accords de participation et aux règlements de plans d’épargne salariale. Cependant, afin qu’il n’y ait pas recul par rapport à la situation actuelle, le Gouvernement propose un sous-amendement n° 323, qui a pour objet de conserver les dispositifs en vigueur dans plus de la moitié des entreprises, les comités de suivi contribuant à stimuler l’esprit d’intéressement.

Quand on parle de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences – nous y reviendrons lors de la discussion sur la loi de finances ou sur la loi de financement de la sécurité sociale –, quand on s’efforce d’anticiper les mutations économiques, il est important de prévoir des instances où les salariés puissent être informés des performances de l’entreprise, qu’il s’agisse des performances financières ou de celles à atteindre collectivement en matière de qualité ou de production.

Voilà pourquoi, monsieur Tian, si nous comprenons que trop de complexité puisse tuer cette dynamique, nous souhaitons que vous retiriez votre amendement au profit de celui, n° 84 rectifié, présenté par M. Dubernard, que le Gouvernement propose de sous-amender.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. L’amendement n° 84 rectifié est identique à l’amendement n° 308 que j’ai présenté.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. J’avais compris qu’il s’agissait d’un binôme.

M. Maxime Gremetz. Le binôme gaulliste !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Merci de le reconnaître, monsieur Gremetz !

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je reconnais volontiers que l’amendement du rapporteur de la commission des affaires sociales est infiniment meilleur que le mien. Je retire donc mon amendement.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je vous remercie.

M. Maxime Gremetz. Je vous ai donc convaincu, monsieur Tian !

M. le président. L'amendement n° 182 est retiré.

Je suis saisi d’un sous-amendement n° 323 du Gouvernement, à l’amendement n° 84 rectifié qui vient d’être défendu.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour défendre l’amendement n° 308, identique à l’amendement n° 84 rectifié.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Le fait que l’amendement de la commission des affaires économiques saisie pour avis soit identique à celui proposé par la commission des affaires sociales montre que M. Dubernard et moi-même sommes tout à fait d’accord sur la ligne à suivre.

Je suis heureux que M. Tian ait retiré son amendement au profit de celui de la commission, qui lui donne en grande partie satisfaction. En outre, la commission des affaires économiques est favorable au sous-amendement du Gouvernement.

J’ajoute que ces deux amendements identiques suppriment la possibilité pour un conseil de surveillance commun à plusieurs FCPE d’assurer le suivi des accords. Il s’agit, par ces amendements, d’apporter une certaine clarification en supprimant une confusion des genres. Chacun doit assumer sa responsabilité : d’une part, la gestion des fonds dans le cadre des FCPE, et, d’autre part, le suivi des accords dans les entreprises.

Je souhaite par ailleurs insister sur un point, sans citer, comme nous l’avons fait hier, les nombreux acteurs engagés depuis quarante ans dans le débat sur la participation. L’un des éléments essentiels de notre volonté de faire avancer cette idée de participation reste en effet la participation des salariés eux-mêmes à la mise en œuvre du projet. Celle-ci suppose une vraie information à la base et, j’insiste, une vraie « participation » des salariés au suivi des accords. Vous pourrez d’ailleurs mesurer, tout au long de l’examen du texte, notre souci commun avec le Gouvernement de faire œuvre de pédagogie pour faire évoluer les mentalités. On en trouve la trace ici comme on la retrouvera dans un chapitre que nous souhaitons ajouter au texte, relatif à la formation dans le cadre de l’entreprise. Nous constaterons alors, monsieur Gremetz, la nécessité de mettre en œuvre la formation professionnelle au service de l’actionnariat salarié, au service de l’intéressement et de la participation. En effet, l’absence de cet effort pédagogique peut expliquer certains blocages. Cet amendement traduit donc notre volonté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 323 du Gouvernement ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, je considère qu’il ne se discute pas puisqu’il porte sur la sécurisation des situations en vigueur en matière d’intéressement. J’y suis donc favorable.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 323.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n° 328 que M. Gremetz a rédigé en séance. Son objet est de remplacer, dans l’amendement n° 84 rectifié, les mots : « peuvent prévoir », par le mot : « prévoient ».

La parole est à M. Gremetz pour défendre son sous-amendement.

M. Maxime Gremetz. Nous sommes d’accord sur le fait que la participation doit permettre aux salariés non pas seulement de payer mais aussi de gérer le dispositif ; c’est en effet de leur argent qu’il s’agit. Il est donc normal qu’ils soient informés et consultés.

Mon sous-amendement propose donc de remplacer les mots : « peuvent prévoir » par le mot : « prévoient », dans le texte de l’amendement n° 84 rectifié. Si mon sous-amendement était adopté, cet amendement se lirait ainsi : « L’accord d’intéressement prévu au chapitre Ier du présent titre, l’accord de participation prévu au chapitre II du même titre ou le règlement d’un plan d’épargne salariale prévu au chapitre III du même titre prévoient les conditions dans lesquelles le comité d'entreprise ou une commission spécialisée créée par lui ou, à défaut, les délégués du personnel disposent des moyens d'information nécessaires sur les conditions d'application de cet accord ou de ce règlement. »

En écrivant « peuvent prévoir », on en reste à une disposition facultative, qui ne sera pas suivie d’effets. Dans ces conditions, aux bons soins de qui sera laissée la mise en place du comité de suivi de l’accord d’intéressement, de l’accord de participation ou du règlement d’un plan d’épargne salariale ? Aux bons soins de l’employeur en l’occurrence. Or, la loi parle de concertation, et MM. Dubernard et Ollier ne cessent de rappeler que la participation et l’intéressement ne sont pas seulement financiers. Puisque tout le monde est d’accord pour considérer que les salariés doivent participer à la gestion de leurs fonds, mon sous-amendement doit être adopté. Ce n’est peut-être pas le turbo évoqué par M. Tian, mais, sans l’adoption de mon sous-amendement, l’amendement n° 84 rectifié ne serait qu’une sorte de turbo pour faire marche arrière.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. La commission des affaires économiques est bien sûr défavorable à ce sous-amendement, …

M. Maxime Gremetz. Il est pourtant bon !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. …de même, je suppose, que la commission des affaires sociales. En effet, monsieur Gremetz, même si l’on peut considérer que votre intention, sur le fond, est bonne – je ne la discute pas –, il n’en reste pas moins qu’elle fait obstacle à la mise en œuvre de cette grande ambition qu’est la participation, née il y a plusieurs décennies et qui n’a toujours pas abouti.

Nous devons faire preuve de pédagogie et rechercher le consensus au sein de l’entreprise si l’on veut que l’association capital-travail et que l’actionnariat salarié fonctionnent – et c’est notre intention. Pour cela, la manière dont on souhaite mettre en œuvre ces principes est essentielle.

C’est là que nous ne sommes pas d’accord : si les intentions sont communes, la méthode est différente. Pour nous, mieux vaut s’assurer que le dialogue sur le terrain peut aboutir, plutôt que d’imposer par la loi une contrainte excessive qui risque de faire ressurgir les mauvais réflexes et de se traduire par une mauvaise application de la loi. Nous privilégions la négociation et le débat dans l’entreprise, afin que cette ambition puisse être partagée et fasse l’objet d’un vrai consensus.

M. Tian, M. Joyandet, M. Dubernard, M. Auberger, M. Guillaume, tous l’ont dit : nous sommes d’accord sur le fond mais, de grâce, allégeons les contraintes et faisons confiance aux hommes ! Notre amendement vise à instaurer cette souplesse en évitant les contraintes. Voilà pourquoi nous rejetons le sous-amendement de M. Gremetz.

M. le président. Je suppose que l’avis de la commission des affaires sociales est défavorable, monsieur Dubernard…

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission, bien entendu, n’a pu examiner ce sous-amendement. Avis défavorable à titre personnel.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Chez moi, nous sommes des paysans, des ruraux. Nous nous référons toujours au vieux dicton : « C’est au pied du mur qu’on voit le maçon. » M. Dubernard nous abreuve de grands discours philosophiques sur la participation des salariés et l’association capital-travail, de références au général de Gaulle, mais il ne s’agit nullement ici de capital et de travail : en fait, vous refusez aux salariés qui payent de donner leur opinion, sauf si le dieu employeur le décide.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. C’est faux !

M. Maxime Gremetz. Vous ne pouvez soutenir que vous avez la volonté de traiter sur un pied d’égalité les employeurs et les salariés, les comités d’entreprise, les délégués du personnel, qui bénéficient, eux, de la confiance des salariés qu’ils représentent dans leur ensemble. Si vous contestez à ces derniers un droit de regard sur l’utilisation et la répartition de l’argent collecté – la part allant aux investissements et celle affectée à des placements financiers, par exemple –, vous ne pouvez parler de dialogue social, de nouveaux droits pour les comités d’entreprise et les délégués du personnel, de meilleure représentativité, etc. : tout votre truc tombe à l’eau !

« Peuvent, peuvent », dites-vous. Mais qui « peut » ? Jamais les salariés, toujours les employeurs ! Avouez que l’on n’est vraiment pas à égalité dans ce domaine !

Pour appuyer mon propos, je me trouve donc contraint de demander un scrutin public sur mon sous-amendement, monsieur le président. Que les choses soient fixées une bonne fois pour toutes ! Il faut cesser de parler de participation, de cogestion, d’autogestion, que sais-je encore… Dans un dialogue, il y a deux partenaires. Je sais que cela ne vous va pas, à droite : vous êtes pour les patrons de droit divin. Voilà pourquoi vous ne voulez pas que les salariés disposent de leur argent. C’est, je le sais, la position du MEDEF. Ce scrutin public mettra en évidence la distance qui sépare vos discours de vos actes.

M. le président. Sur le vote du sous-amendement n° 328, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

…………………………………………………………….

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 328 .

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est ouvert.

…………………………………………………………

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. Maxime Gremetz. Je m’en doutais. Ah ! les beaux discours ! Voilà ce qu’il en est vraiment de votre « intéressement » et de votre « participation » !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 84 rectifié et 308, modifiés par le sous-amendement n° 323.

M. Maxime Gremetz. Je vote contre !

(Ces amendements, ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 55.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le soutenir.

M. Maxime Gremetz. Dans ce projet de loi, c’est toujours la même chose : on fait payer, puis on décide seul ! Cet amendement vise au contraire à rénover la gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise. Les observateurs avisés s’accordent pour dire qu’une réforme de la participation ne peut aller sans une réforme de la gouvernance des dispositifs de placement. Pour M. Dubernard et M. Ollier, qui ne cessent d’invoquer la participation, la « troisième voie » du général de Gaulle, la « nouvelle société » de Jacques Chaban-Delmas, etc., il doit être en effet fondamental d’améliorer la participation sociale, par opposition à la participation strictement financière.

Dans cet esprit, nous proposons par cet amendement de poursuivre un double objectif : il est proposé d’abord que les conseils de surveillance soient obligatoirement composés majoritairement de représentants des salariés. L’épargne salariale ne relève pas, j’en suis d’accord, du paritarisme : les fonds épargnés déposés sur le FCPE appartiennent aux salariés, non aux employeurs.

Ensuite, les FCPE sont fréquemment des fonds « multi-entreprises », souscrits par les salariés de plusieurs entreprises, en particulier dans le cas des PME. La législation actuelle impose que l’ensemble des entreprises adhérentes soient représentées au conseil de surveillance du fonds.

Je dois m’interrompre, monsieur le ministre, car il est un peu désagréable de voir, à chacune de mes interventions, le conseiller qui est derrière vous se mettre à vous parler. Un peu de politesse et de respect à l’égard de la représentation nationale ne nuirait pas !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Les députés socialistes discutent aussi entre eux !

M. Alain Vidalies. Nous discutons de l’amendement, monsieur Dubernard !

M. Jean-Pierre Balligand. Et puis nous ne sommes pas au gouvernement.

M. Maxime Gremetz. Je dirais la même chose si vous y étiez, mes chers collègues !

M. Jean Le Garrec. Nous en convenons volontiers, monsieur Gremetz ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Ce qui m’importe, c’est ce qui est juste pour les salariés.

Pour un fonds collectant l’épargne d’une centaine d’entreprises, comme c’est souvent le cas, le conseil de surveillance est composé d’au moins deux cents membres : une sorte d’assemblée générale d’une section de l’UMP, pour donner un ordre de grandeur ! Pour résoudre ce problème, il est proposé que les conseils de surveillance des fonds « multi-entreprises » soient désignés sur la base des règles de représentativité du code du travail, de manière à permettre de former des conseils de taille limitée, qui ne ressemblent pas à des assemblées générales d’où rien ne peut sortir. Les conseils de surveillance seraient ainsi désignés par les organisations syndicales et patronales représentatives.

M. le président de la commission des affaires sociales, en l'occurrence rapporteur de ce projet de loi, a longuement et fort justement insisté, lors de la présentation du texte en commission, sur cette dimension de la participation des salariés à la gestion de l'entreprise, notamment à la gestion des fonds de placement commun. Je ne doute pas de votre bonne foi, monsieur Dubernard : vous reconnaîtrez, je le sais, que cet amendement répond parfaitement à votre préoccupation. Il serait tout naturel que vous nous suiviez sur ce sujet. Si tel n’était pas le cas, démonstration serait faite, une nouvelle fois, de la politique du grand écart de la majorité, entre ses déclarations et ses véritables intentions, entre l’ambition affichée et la concrétisation par les actes.

Comme les auditions de la commission l’ont démontré, l’attente est forte chez les organisations syndicales, et même de la part du Conseil supérieur de la participation. Une véritable participation suppose que les salariés soient informés et puissent peser sur les décisions. Quoi de plus naturel, puisque ce sont eux qui payent ? Cela n’a rien de révolutionnaire : c’est une affaire de transparence et de démocratie.

Tel est le sens de cet amendement, dont je ne doute pas qu’il fera plaisir tant à M. Dubernard qu’à M. Ollier qui a proclamé : « Vive la participation ! Vive la troisième voie ! Vive l’association capital-travail ! » En l’état du texte, on paye et l’employeur décide tout seul. Nous proposons, nous, que cela se fasse de façon concertée. Se concerter, nous a dit M. le président de la commission des affaires sociales, c’est se consulter et décider ensemble. Je ne vous propose rien d’autre. Convenez, monsieur Dubernard, que vraiment Maxime va dans le bon sens ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 55 ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Se concerter, ai-je dit, c’est s’entendre pour agir ensemble. Je suis très sensible à votre appel, monsieur Gremetz, et même touché, ému (Sourires), mais votre amendement pose un problème technique.

M. Maxime Gremetz. Encore un ! Il n’y a pas de problème technique lorsqu’il y a la volonté, monsieur le rapporteur !

M. Jean-Michel Dubernard. Je suis d’ailleurs très étonné que les assistants du groupe communiste, qui d’habitude font un travail de grande qualité, aient laissé passer ces menues erreurs.

D’abord, votre amendement tend à modifier le deuxième alinéa de l’article L. 214-39 du code monétaire et financier, lequel fait lui-même l’objet d’une nouvelle rédaction à l’article 13 du projet de loi. C’est à cet article qu’il eût été préférable de proposer une telle modification.

Ensuite, si cet amendement était adopté, les conseils de surveillance seraient composés en majorité des représentants de l’entreprise. Ce n’est pas ce que nous souhaitons.

M. Maxime Gremetz. Quels représentants ?

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Les cadres dirigeants.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Enfin, le dispositif que vous proposez apparaît rigide et inadapté. Reportez-vous à l’article 13, qui introduit au contraire une souplesse nouvelle dans la composition des conseils de surveillance des fonds dits « multi-entreprises ». En effet, le règlement du fonds pourra librement déterminer les modalités de représentation des entreprises et de désignation des représentants.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Nous vous protégeons contre vous-même, monsieur Gremetz !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement en discussion ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Au moment où vous m’avez interpellé, monsieur Gremetz, je me renseignais sur le nombre de conseils qui existent : ils sont au nombre de 3 197. Nous sommes donc à même de juger de leur mode de fonctionnement.

Si nous vous suivions, le compromis de représentation, qui est actuellement de 50 % de salariés actionnaires et 50 % de représentants des entreprises et des syndicats représentatifs du personnel, irait vers un autre équilibre, avec 50 % de managers de l’entreprise et 50 % seulement des salariés !

M. Maxime Gremetz. Mais non !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Bien sûr que si ! Il est essentiel que les salariés soient représentés au conseil de surveillance. Pour les fonds multi-entreprises, les modalités de représentation des salariés seront décidées par la négociation. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas être favorables à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Si vous m’écoutiez, vous ne répondriez pas cela ! Je répète donc ce que nous proposons pour résoudre le problème : de manière à rester de taille limitée, les conseils de surveillance des fonds multi-entreprises seraient désignés sur la base des règles de représentativité du code du travail, autrement dit par les organisations syndicales et patronales représentatives. Cela, vous ne l’avez pas entendu puisque vous aviez une réponse toute faite ! Dans un débat sérieux, on ne peut pas répondre à des questions que l’on n’a pas écoutées. Moi, j’écoute quand on me répond ! Sinon chacun fait son discours dans son coin et, dans huit jours, on y est encore ! Ou alors, s’il ne sert à rien de faire des propositions, dites-le, et nous nous en irons ! Quel bel exemple de participation démocratique !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Pour les lecteurs du Journal officiel,…

M. Maxime Gremetz. Ce n’est pas un journal très populaire !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. …il faut apporter une précision : nous voulons protéger M. Gremetz contre lui-même ! (Rires.)

M. Maxime Gremetz. Merci !

M. Xavier de Roux. Il en a bien besoin !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Nous allons tous vous aider, monsieur Gremetz, en rejetant votre amendement ! (Sourires.) Si nous l’adoptions,…

M. Maxime Gremetz. Chiche !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. …tel qu’il est rédigé, l’effet produit serait contraire à l’intention. Il est du devoir de la commission et du Gouvernement de vous empêcher de commettre une erreur.

M. Maxime Gremetz. Je n’ai été à l’école que jusqu’à quatorze ans !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Quand vous écrivez que les représentants de l’entreprise, donc les cadres, doivent être présents pour moitié au moins, cela signifie qu’ils doivent être plus nombreux. Vous donnez ainsi la prédominance aux représentants de l’entreprise et non à ceux des salariés !

M. Maxime Gremetz. Pas de l’entreprise : désignés par les organisations syndicales ! Vous jouez sur les mots !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Pas du tout ! On pourrait s’amuser à discuter pendant des heures.

M. Maxime Gremetz. Moi, je ne m’amuse pas ! J’ai vécu cette situation et j’ai la prétention de la connaître mieux que vous !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Je suis, comme M. Dubernard, un législateur consciencieux et je ne voudrais pas que nous commettions une erreur, qui vous couvrirait d’opprobre aux yeux du monde salarié. Vous seriez montré du doigt parce que vous auriez donné la prédominance aux représentants des cadres de l’entreprise.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Et nous ne le voulons pas !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Non, nous ne le voulons pas ! Nous voulons un juste équilibre entre les salariés et c’est pourquoi nous appelons à rejeter l’amendement de M. Gremetz.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président !

M. le président. Vous avez pris la parole deux fois sur cet amendement. Vous aurez l’occasion de vous exprimer sur les autres, car il nous faut avancer.

M. Maxime Gremetz. Ils veulent me protéger contre moi-même : c’est un fait personnel !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Vous le développerez à la fin de la séance !

M. Maxime Gremetz. Ce sont les organisations syndicales qui défendent cet amendement ! Vous les insultez !

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Avant l’article 5

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 16 portant article additionnel avant l’article 5.

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Balligand. Depuis le début du débat, chacun ici s’accorde à dire que le problème est la non diffusion de la participation et de l’intéressement dans les PME. C’est ainsi que la moitié seulement des salariés du privé, soit un peu plus de huit millions, ont droit au dispositif. Nous avons tout essayé pour y remédier. Il y a six ans, la loi sur l’épargne salariale, avec son système d’incitation, a permis aux plans d’épargne interentreprises d’augmenter de 18 % en 2003-2004, mais la participation ne se diffuse toujours pas. Il faut donc s’attaquer au vrai problème et lever le seuil de cinquante salariés pour donner à ceux des PME l’éligibilité au dispositif. Tout le reste ne serait qu’incantation.

J’attire en outre l’attention de M. le ministre, qui en est certainement le plus au fait, sur la conjoncture de baisse du chômage, due en particulier à la pyramide des âges et aux départs massifs à la retraite. À chaque période de baisse du chômage, les grandes entreprises exercent une pression pour prendre les salariés des PME. Cela leur est d’autant plus facile que le différentiel en salaire direct et différé – intéressement et participation – est important. Avec le papy boum, il est évident que les meilleurs employés des PME se verront démarchés, du jour au lendemain, pour aller dans les grandes entreprises. Il faut donc instaurer un peu plus d’égalité en diffusant la participation. C’est encore une raison pour lever le seuil de cinquante salariés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Cet amendement et le suivant concernent le seuil de salariés rendant obligatoire la mise en œuvre du dispositif de participation. Ces initiatives, que je salue, ont le mérite d’ouvrir un débat qui, bien qu’ayant beaucoup de sens, me semble pourtant être un faux débat.

M. Michel Charzat. Intéressant : nous ouvrons un faux débat !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Pour le démontrer, je me référerai au rapport de nos collègues François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain, selon lequel l’effet de seuil peut être « une mauvaise excuse ». Tout d’abord, parmi les entreprises de plus de cinquante salariés, un tiers environ ne souscrivent pas à l’obligation légale, comme l’ont montré les travaux du Conseil supérieur de la participation. Ensuite, abaisser le seuil reviendrait à ignorer la réalité économique des PME et les difficultés quotidiennes rencontrées par les chefs d’entreprise. Ce serait leur imposer une nouvelle contrainte, à l’image des 35 heures, dont on ne peut que rappeler ici le bilan pour le moins mitigé.

M. Jean Le Garrec et M. Jean-Pierre Balligand. Cette comparaison est déplacée !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. De plus, imposer une telle règle conduirait à établir une norme franco-française trop éloignée des normes internationales et singulariserait encore le modèle français dans une économie de plus en plus ouverte.

M. Jean-Pierre Balligand. Dans ce cas, la participation elle-même est une spécificité française !

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Non, en Allemagne il y a aussi une forme de participation.

Enfin, passer par la loi et la contrainte, c’est nier le dialogue social auquel le ministre travaille.

Pour l’ensemble de ces raisons, il ne me paraît pas raisonnable d’envisager de légiférer aujourd’hui sur cette question.

Selon le dernier rapport du Conseil supérieur de la participation, qui concerne les années 2003-2004, la participation financière continue à progresser en France, notamment grâce à l’ouverture aux salariés des petites entreprises de l’accès au plan d’épargne entreprise. Il reste toutefois que la moitié des salariés ayant accès à un tel mécanisme de participation financière travaillent dans des entreprises de mille salariés et plus, alors qu’ils ne représentent que le quart de l’ensemble des salariés.

En outre, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère de l’emploi a montré, dans une étude parue il y a quelques jours à peine, que « dans les entreprises de moins de cinquante salariés, l’épargne salariale ne progresse plus, après plusieurs années de développement dues au succès des plans d’épargne interentreprises ».

La présente réforme prend ce thème au sérieux et le projet de loi me semble offrir de multiples solutions équilibrées pour favoriser la participation dans les petites entreprises : l’article 5 conduit les branches à négocier des régimes de participation dans les trois ans suivant la publication de la loi ; l’article 8 contribue à sécuriser les accords de participation au regard des contrôles administratifs et des contrôles URSSAF, véritables épées de Damoclès qui constituent un obstacle psychologique au développement de la participation ; l’article 13 contient de nombreuses mesures favorisant le développement des plans d’épargne interentreprises ; l’article 14 offre aux entreprises non cotées de nouvelles possibilités d’organiser leurs liquidités. Enfin, avec Patrick Ollier, nous avons déposé, au nom des deux commissions, un amendement destiné à promouvoir la participation dans les petites entreprises en ouvrant la possibilité à l’employeur de la mettre en œuvre de manière unilatérale. Cette panoplie offerte par le présent texte me paraît à même de répondre aux préoccupations des auteurs des amendements avant l’article 5, qui ont été rejetés par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. L’extension des dispositifs de participation aux employés des entreprises de moins de cinquante salariés est une préoccupation partagée depuis longtemps. En 2000 et 2001, le sujet était déjà sur la table. Il a fait l’objet d’un véritable débat de fond au Conseil supérieur de la participation et lors des concertations bilatérales que nous avons eues avec l’ensemble des partenaires sociaux. Entre deux solutions – rendre le mécanisme obligatoire dans le temps pour les entreprises de vingt à cinquante salariés ou le maintenir facultatif avec une incitation – nous avons choisi une voie intermédiaire : l’obligation sur trois ans de négocier des accords de branche « sur étagère », dont la mise en œuvre effective sera suivie par le Conseil supérieur de la participation, qui se verra confier là une mission nouvelle. Cette voie est l’objet de la synthèse, que j’ai transmise à M. Dubernard, des débats du 25 avril sur ce sujet.

Nous sommes conscients aussi de la nécessité, soulignée sur tous les bancs, de rendre les PME attractives. Le travail que nous faisons sur les grilles salariales porte d’ailleurs essentiellement sur les petites et moyennes entreprises. Les grandes entreprises en effet, grâce aux accords d’entreprises, se situent en général au-dessus de la moyenne. Le comité de suivi de la négociation, que j’ai évoqué plusieurs fois, aura également un rôle à jouer dans l’attractivité.

Nous souhaitons, en l’état actuel des choses, nous en tenir au dispositif équilibré résultant de la nécessité d’induire plus fortement une volonté de simplification pour les petites et moyennes entreprises. Le Conseil supérieur de la participation devra, d’une part, suivre, dans son rapport annuel, l’évolution de la participation dans les petites et moyennes entreprises – et pas simplement au travers de colonnes annuelles de statistiques – et, d’autre part, constater si le caractère obligatoire des négociations de branches et d’accords de branches a été respecté dans le délai de trois ans.

Voilà pourquoi nous ne sommes pas favorables à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, nous avons en France 22,5 millions de salariés. Or ce texte ne s’adresse qu’à environ 8 millions d’entre eux. De ce fait, 14 millions de salariés, soit les deux tiers, sont exclus.

Vous savez que je n’exagère pas. En effet, toutes les entreprises de moins de cinquante salariés ne sont pas concernées. Et pourtant, ce sont elles qui créent de l’emploi et se développent.

Et comment allez-vous expliquer aux agents de la fonction publique qu’ils sont laissés à l’écart ? Sont-ils des pestiférés ?

M. Xavier de Roux. Effectivement, les bénéfices de la fonction publique, c’est un vrai problème ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Les hauts fonctionnaires ne perçoivent-ils pas des primes ?

M. Xavier de Roux. Ce n’est pas tout à fait le même sujet !

M. Maxime Gremetz. Il n’y a qu’eux qui bénéficient de primes ! Comment sont attribuées les primes ? À la tête du client ?

M. Xavier de Roux. Oui !

M. Maxime Gremetz. C’est parce qu’ils sont en haut qu’ils touchent des primes ?

M. Xavier de Roux. Oui !

M. Maxime Gremetz. Et ceux qui sont en bas n’ont rien !

M. Xavier de Roux. Évidemment !

M. Maxime Gremetz. Voilà la participation à la mode gaulliste !

M. Jean-Pierre Balligand. M. de Roux n’est pas gaulliste !

M. Maxime Gremetz. Je sais parfaitement qu’il n’est pas gaulliste. Il serait plutôt du genre stock-options ! (Sourires.) Ce n’est pas une tare, et tant mieux pour lui s’il a beaucoup de stocks-options ! Moi, je n’en possède pas, mais il faut de tout pour faire un monde ! C’est ce qui fait la diversité de notre pays, de notre peuple,…

M. Xavier de Roux. Absolument !

M. Maxime Gremetz. …et il est bon que nous puissions débattre ensemble.

Va-t-on s’installer dans une société où les salariés ne sont pas traités de la même façon parce qu’ils ont le bonheur, ou le malheur, de travailler dans des petites et moyennes entreprises de moins de cinquante salariés – et cela représente des millions de personnes – ou parce qu’ils ont le « privilège » de travailler dans la fonction publique – « les privilégiés de la fonction publique », comme on les appelle en général à la télévision.

Je me souviens, monsieur le Garrec, de nos discussions lors de l’examen de la première loi sur les 35 heures. Nous avions décidé, compte tenu des difficultés d’application pour les petites et moyennes entreprises, de leur laisser deux ans pour s’adapter et réfléchir.

M. Jean Le Garrec. C’est vrai !

M. Maxime Gremetz. Nous devrions agir de la même façon aujourd’hui. Nous savons, en effet, que les petites et moyennes entreprises seront confrontées à des difficultés particulières.

Si nous n’agissons pas ainsi, cela signifiera que nous ne faisons pas preuve d’une volonté politique suffisante pour que tous les salariés soient traités de la même façon. Va-t-on laisser de l’autre côté de la route les agents de la fonction publique ? On ne peut pas parler de leur situation particulière : ils n’ont même pas d’intéressement. Pourtant, c’est le général de Gaulle qui voulait l’intéressement, la participation. Ces millions de fonctionnaires, qui remplissent des fonctions très importantes, à part quelques privilégiés tout en haut de l’affiche, n’ont rien. C’est une discrimination insupportable.

Nous allons devoir saisir la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, que nous venons de mettre en place.

M. le président. La parole est à François Guillaume.

M. François Guillaume. Je ne doute pas des bonnes intentions affichées par M. Balligand lorsqu’il propose d’étendre l’obligation de mise en œuvre du dispositif de participation aux entreprises de moins de cinquante salariés. Mais interrogeons-nous : pourquoi le nombre d’entreprises de plus de cinquante salariés ne mettant pas en œuvre les accords d’intéressement est-il aussi élevé ? Quelles en sont les raisons ?

M. Maxime Gremetz. Ils ne sont pas obligés !

M. François Guillaume. Monsieur Balligand, vos propositions tendant à obliger les très petites entreprises à se soumettre à l’obligation de mettre en œuvre la participation seraient contreproductives. Je préfère qu’elles puissent, à titre facultatif, mettre en place un dispositif simple de participation, comme je l’ai proposé.

Si l’on se dirige vers l’obligation, il y a un risque, compte tenu de la complexité du système en place, que cela ait des effets négatifs sur l’emploi, car une contrainte supplémentaire risquera d’entraîner les très petites et moyennes entreprises à réduire le nombre de leurs salariés, voire à supprimer tous les postes.

Il faut s’en tenir à un système facultatif de participation des salariés aux résultats, au moins pour les TPE.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Comparini.

Mme Anne-Marie Comparini. Nous constatons tous, comme M. Balligand, la fracture qui s’aggrave entre les salariés des grandes entreprises, qui bénéficient de nombreux avantages, et ceux qui travaillent dans les PME.

N’oublions pas non plus que nous votons des tombereaux de lois qui ne sont pas appliquées – vous le rappeliez tout à l’heure, monsieur Gremetz – faute d’être applicables aux entreprises de petite taille.

Nous devons garder présent à l’esprit la nécessité d’un égal traitement de tous les salariés. Toutefois, il faut réserver un traitement particulier aux PME-PMI, non seulement pour la participation, l’intéressement, mais aussi pour l’innovation et le commerce extérieur. Les petites entreprises ne peuvent pas tout faire. Il faut essayer d’apprivoiser – comme le dit Saint-Exupéry – de donner envie au chef d’entreprise et à son personnel d’adopter des dispositifs de modernisation, plutôt qu’imposer des dispositifs qu’ils ne suivront pas.

M. Xavier de Roux. C’est le bon sens qui s’exprime !

Mme Anne-Marie Comparini. Je ne voterai donc pas l’amendement de M. Balligand.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 17, portant article additionnel avant l’article 5.

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Balligand. Il s’agit d’un amendement de repli, qui fera plaisir à M. Guillaume, puisqu’il se fonde sur son argumentation.

Cet amendement rejoint également la position défendue par M. Joyandet en commission des finances, lorsqu’il a présenté une disposition dérogatoire pour essayer de remédier aux problèmes des TPE.

Par cet amendement, il s’agit de retirer du dispositif les entreprises de moins de dix salariés. Toutefois, pour celles employant entre dix et cinquante personnes, c’est autre chose : il faut permettre aux salariés des PME d’avoir accès à la participation. La question centrale est celle de la diffusion du dispositif de participation dans les PME, ainsi que l’ont rappelé MM. les rapporteurs et M. le ministre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Ne nous berçons pas d’illusions ! Le vrai progrès réside dans la négociation pour les petites et moyennes entreprises. J’ai cité l’exemple de la coiffure, car il y a eu un dialogue, une négociation sociale.

M. Dominique Tian. Il nous faut enfin de la souplesse !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Ce débat est intéressant, monsieur Balligand, car si nous voulons faire progresser la participation, l’intéressement et l’épargne salariale dans les PME, il faut en faire une priorité. Cela passe par le dialogue, les négociations de branche, la préparation d’accords simples, adaptables aux entreprises, avec une véritable sécurisation juridique pour les PME – le sentiment d’insécurité est dévastateur pour une PME, qui ne peut passer de provisions à ce titre, contrairement aux grandes entreprises.

M. Dominique Tian. Très juste !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Nous sommes le seul pays en Europe à considérer que le même droit doit s’appliquer indifféremment quel que soit le nombre de salariés d’une entreprise : 30 ou 30 000.

Mme Anne-Marie Comparini. C’est vrai !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je ne suis pas certain que ce soit au bénéfice des personnels des PME. Il faut engager une réflexion collective sur le sujet.

Sans entrer dans le débat sur le temps de travail, nous avons bien été obligés de traiter différemment les salariés des PME et les autres. J’ai lu un ouvrage écrit par un ancien ministre, que connaît bien M. Le Garrec, qui reconnaissait qu’il y avait bien là un problème d’adaptation. Ce souci d’adaptation est d’autant plus essentiel que c’est dans les PME que se développe l’emploi. Paradoxalement, et aussi bizarre que cela puisse paraître, un même texte n’apporte pas la même protection à tous – c’est même le contraire : le fossé s’élargit !

Depuis deux ans et demi que je suis à la tête de ce ministère, je suis frappé par l’iniquité de situation des salariés selon la taille de l’entreprise.

M. Jean Le Garrec. C’est vrai !

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je ressens ce sentiment sur quantité d’autres sujets, comme l’amiante. L’iniquité est, à chaque fois, au rendez-vous, alors que nous avons l’illusion d’avoir fait un texte généraliste. Il faut donc entamer une réflexion collective. (« Très bien ! » sur divers bancs.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je ne peux pas vous laisser dire, monsieur le ministre délégué, que les TPE et les petites et moyennes entreprises sont traitées comme les grandes entreprises.

M. Xavier de Roux. Mais si ! C’est la vérité, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Non ! M. le ministre a tort en prétendant qu’il en va ainsi dans notre pays.

M. Xavier de Roux. La loi est la même pour tous !

M. Maxime Gremetz. Cela se saurait si tel était le cas, y compris dans le code du travail.

Comment se fait-il qu’un salarié sur deux ne puisse voter aux élections prud’homales – l’ABC de la démocratie ? Cela dépend de la taille de l’entreprise.

Dans ces conditions, on ne peut dire que tous les salariés sont logés à la même enseigne.

M. Jean Le Garrec. Ce ne sont pas les propos du ministre !

M. Maxime Gremetz. Ce n’est pas parce que vous êtes d’accord avec le Gouvernement que vous allez m’expliquer ce qu’il a dit. J’ai fort bien entendu ses propos.

On ne peut donc dire que le code du travail s’applique de la même façon dans les petites et moyennes entreprises, car il existe des seuils. Vous généralisez trop, monsieur le ministre délégué. Que l’on n’ait pas suffisamment pris en compte la réalité de chaque entreprise – pas seulement sa taille, mais aussi son secteur d’activité –, j’en conviens.

Les salariés et les dirigeants de PME ont des idées, monsieur le ministre délégué. Il faudrait les écouter. Nombre de dirigeants de petites et moyennes entreprises attendent autre chose qu’une loi sur l’intéressement. Ils savent qu’ils doivent augmenter les salaires et les primes pour éviter que leurs meilleurs ouvriers professionnels ne partent.

M. Dominique Tian. C’est ce qu’on ne cesse de dire !

M. Maxime Gremetz. Mais cela ne les gêne pas tous !

M. Xavier de Roux. Pourquoi cela les gênerait-il ?

M. Dominique Tian. C’est pour cela qu’il faut de la liberté.

M. Maxime Gremetz. Si cela ne les gêne pas, pourquoi les exclure du dispositif ?

L’intéressement et la participation auraient plus de sens dans les petites et moyennes entreprises que dans les grandes, lesquelles, de toute façon, ne tiennent pas compte des modifications qui sont intervenues.

En tant qu’ancien délégué du personnel chez Valeo, à Amiens, je sais comment les choses se passent. À l’époque, la situation était relativement simple car les résultats de la société ne présentaient pas de difficultés majeures. Mais maintenant que le groupe est multinational, c’est différent, la situation est beaucoup plus complexe car les grands groupes multinationaux refusent de faire la transparence sur leurs résultats. Dans les petites entreprises, c’est plus facile.

Quant au problème soulevé par Mme Comparini, je pense que lorsqu’une loi est votée, elle doit s’appliquer à tous les salariés,…

Mme Anne-Marie Comparini. Non !

M. Maxime Gremetz. …en tenant compte certes des différences de situation. Ainsi, nous avions proposé d’appliquer les 35 heures aux grandes entreprises et de se donner le temps de la réflexion pour les autres, les PME et la fonction publique. Il fallait évaluer les différentes situations et ne pas appliquer mécaniquement un dispositif ; il convenait de s’accorder deux ans à trois ans pour examiner concrètement chaque cas en prenant en compte le souci des entrepreneurs et en ne défavorisant aucun salarié. L’égalité, ce n’est pas l’égalitarisme, vous en conviendrez.

Enfin, quel exemple donne l’État ? Il fait voter une loi sur l’intéressement et la participation, en décidant d’emblée de ne pas l’appliquer à ses agents ! Où est la morale ? Que devient l’enthousiasme exprimé par M. Dubernard et M. Ollier ? Si l’État ne donne pas l’exemple, il n’y aucun effet stimulant !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Maxime Gremetz. Avant d’aborder l’article 5, je souhaite une suspension de séance, monsieur le président.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 5

M. le président. Sur l’article 5, je suis saisi d’un amendement n° 85.

Cet amendement de la commission des affaires culturelles est de nature rédactionnelle.

Le Gouvernement y est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 85.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 18.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.

M. Alain Vidalies. Il pourrait y avoir une contradiction entre un accord d’entreprise et l’accord de branche. Nous proposons donc de compléter l’alinéa 3 de l’article 5 afin de préciser que si l’accord d’entreprise est plus favorable aux salariés, c’est bien lui qui s’applique. Avec la rédaction actuelle, l’accord de branche risque de s’appliquer dans tous les cas, fut-ce au détriment des salariés.

Cela nous renvoie au long débat que nous avons eu sur la loi Fillon relative la démocratie sociale, lorsque des amendements de dernière minute avaient bouleversé des principes reconnus du droit social tel que le principe de faveur et celui de la hiérarchie des normes. Cet amendement vise à en corriger les effets. L’adopter reviendrait à protéger l’intérêt des salariés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, faute d’en avoir saisi le bien-fondé. Il me semble que les principes du droit social offriraient déjà toutes garanties. Je me tourne néanmoins vers le Gouvernement pour en obtenir confirmation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. La loi ne peut pas permettre un accord de branche moins favorable. Je ne peux que confirmer ce principe général bien connu : un accord collectif ne peut qu’améliorer la situation des salariés par rapport aux dispositions de la loi, sauf si celle-ci en disposait autrement de manière expresse.

Dans ces conditions, l’amendement n’est pas utile et j’en souhaite le retrait.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Avant l’adoption de la loi Fillon, monsieur le ministre délégué, je n’aurais rien trouvé à redire à votre argumentation. Mais aujourd’hui, les choses ne sont plus si sûres.

M. Jean-Pierre Balligand. En effet !

M. Alain Vidalies. Depuis que vous avez touché aux dispositions organisant la hiérarchie entre accord d’entreprise et accord de branche, nous nous demandons, avec certaines organisations syndicales et certains juristes, ce qui peut se passer. Nous allons certainement être confrontés à un problème d’interprétation, et c’est pourquoi il est important que votre analyse figure au Journal officiel. Selon vous, rien n’a changé : c’est l’accord le plus favorable aux salariés qui continuera à s’appliquer. J’en prends acte, mais je préfère l’écrire, et c’est pourquoi je maintiens mon amendement.

M. Maxime Gremetz. C’est un bon amendement !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 86 et 4.

L’amendement n° 86 fait l’objet du sous-amendement n° 324.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 86.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Prévoir des négociations de branche afin de favoriser le développement de la participation dans les plus petites entreprises, voilà un objectif à la fois ambitieux, parce que nous jouons ainsi clairement la carte du dialogue social et d’une concertation approfondie, et raisonnable – je ne reviens pas sur la question des seuils ; nous avons eu ce débat tout à l’heure. Nous apportons une réponse à la nécessité de développer la participation financière dans les plus petites entreprises, afin que le plus grand nombre d’entre elles soient concernées. Patrick Ollier et moi-même avons d’ailleurs déposé un autre amendement sur ce sujet.

L’article 5 est donc très important, et l’amendement n° 86 vise à en assurer la bonne application. Nous nous sommes inspirés du mécanisme établi par la loi du 23 mars 2006 sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, qui permet, en l’absence d’initiative patronale, l’ouverture automatique de négociations de branche à la demande d’une organisation syndicale représentative.

J’y insiste, une chose est d’ouvrir des droits nouveaux par la loi ; une autre est de veiller de près à leur mise en œuvre. C’est tout l’objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement n° 4.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Nous sommes convenus, avec le président Dubernard, de ne pas intervenir chacun sur tous les amendements.

M. Maxime Gremetz. Si vous voulez gagner du temps, c’est comme cela qu’il faut faire !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Toutefois, s’agissant de ces deux amendements identiques, il nous est apparu nécessaire de compléter nos propos respectifs.

M. Dubernard, avec la commission des affaires sociales, moi-même, avec la commission des affaires économiques, et les membres de la majorité qui ont participé à l’examen de ce texte avons le souci d’aller au-delà des textes de loi actuels et de mettre pleinement en œuvre le principe de la participation, en particulier dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Les formules proposées sont multiples. Et, ne nous le cachons pas, il y a débat. Toutefois, nous espérons parvenir à un accord après cette discussion. Il existe, en effet, plusieurs instruments de participation : l’intéressement, la participation, l’actionnariat salarié et la participation à la gestion de l’entreprise.

M. Maxime Gremetz. Et les stock-options !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Ce que nous souhaitions au départ, c’est qu’en dessous de cinquante salariés, les chefs d’entreprise et les salariés puissent choisir ensemble l’un de ces systèmes. Bien entendu, lorsqu’il n’existe pas d’organisation par actions du capital, on ne peut pas choisir l’actionnariat salarié ; opter pour la participation à la gestion de l’entreprise s’avère également difficile, mais on peut se rabattre sur l’intéressement, qui touche autant l’aspect financier que l’aspect projet d’entreprise, ou éventuellement sur la participation.

Comme le président Dubernard l’a démontré, nous nous sommes donc fortement interrogés sur ce point. Suite aux discussions que nous avons pu avoir lors des auditions, nous avons renoncé à rendre ce choix obligatoire.

M. Maxime Gremetz. Vous avez eu tort !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Nous avons essayé d’entendre ce qui nous a été dit, monsieur Gremetz ! L’abaissement du seuil des cinquante salariés a aussi été évoqué, mais n’a pas été retenu pour les raisons de contraintes que l’on peut imaginer. L’association Fondact, par exemple, considérait qu’il était indispensable de choisir un système et de le rendre obligatoire. Mais l’obligation crée la contrainte. Or si nous voulons vraiment, à l’occasion de l’examen de cet article 5, faire évoluer le projet participatif, il faut que les salariés et les chefs d’entreprise s’approprient le projet et qu’il y ait consensus. Qui dit obligation par la loi dit, dans bien des cas, rejet sur le terrain. Nous avons donc renoncé à l’obligation.

Les amendements que nous proposons démontrent donc que le débat a eu lieu et qu’il y a consensus sur l’article 5 : l’accord de branche est la bonne formule. Mais nous avons estimé qu’il fallait aller plus loin. Si, comme cela peut arriver, il n’y a pas d’accord, il faut que l’on puisse enclencher le processus. C’est l’objet des amendements nos 86 et 4 : la négociation doit s’engager dans les quinze jours qui suivent la demande d’une organisation syndicale.

Nous avons proposé une commission mixte. Je sais, monsieur le ministre, que vous n’y êtes guère favorable. Avec Jean-Michel Dubernard, nous ne verrions pas d’inconvénient à y renoncer, parce que cela alourdit le système. Mais conservons au moins la première partie des amendements.

L’amendement n° 264, qui sera appelé ultérieurement, répond, quant à lui, aux préoccupations de MM. Guillaume et Joyandet. Nous sommes dans une logique de participation et non dans une logique de prime attribuée aux salariés.

M. Maxime Gremetz. Ce sont eux qui paient !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement propose donc d’ouvrir au chef d’entreprise la possibilité de décider unilatéralement, s’il n’y a pas d’accord de branche, de mettre en œuvre le principe de la participation dans son entreprise. Cela le conduira tout naturellement ensuite à signer un accord avec les salariés.

Nous avons, vous le constatez, essayé d’élargir le système sans contrainte, de donner de la souplesse et de permettre à chacun – organisations syndicales et chefs d’entreprise –de prendre l’initiative de faire avancer les choses.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour donner l’avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques et présenter le sous-amendement n° 324.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Le dispositif proposé par ces amendements – la négociation s’engage dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation représentative –, constitue un apport extrêmement important.

En revanche, s’agissant du fonctionnement des commissions mixtes, le Gouvernement souhaite conserver le dispositif actuel qui permet leur mise en place à l’initiative d’un des partenaires sociaux, en cas de défaillance. Plus de 100 commissions mixtes fonctionnent aujourd’hui à la demande d’un des partenaires sociaux. L’obligation de réponse se fait sous les quinze jours. Dans le secteur du spectacle vivant, les commissions mixtes revoient le droit conventionnel : il s’agit de passer de quarante-trois accords à huit conventions collectives.

Ces commissions mixtes se réunissent parfois sous l’autorité du ministre lui-même ou du directeur général du travail. J’ai eu l’occasion, il y a moins de trois semaines, d’en présider une et de m’adresser à ceux qui actuellement poursuivent les négociations salariales. D’excellents résultats ont été obtenus en matière de salaire dans le secteur de la chimie, et je ne désespère pas que, dans les jours qui viennent, la raison l’emporte, au travers du dialogue, dans celui de l’hôtellerie-restauration. L’initiative des partenaires sociaux est essentielle, car elle permet d’avancer vers un accord.

Par ce sous-amendement n° 324, je vous propose donc de supprimer l’alinéa 3 de ces amendements. J’ai d’ailleurs cru comprendre qu’au vu de la pratique, M. Dubernard et M. Ollier y étaient favorables.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 324 ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Nous comprenons votre souci, monsieur le ministre, d’éviter une procédure lourde, ce qui est tout à fait louable et logique. Votre sous-amendement préserve l’objectif que nous visions, à savoir l’effectivité de la mise en œuvre des négociations de branche sur la participation. Dans ces conditions, j’y suis tout à fait favorable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. M. Dubernard s’est exprimé en mon nom, monsieur le président !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J’ai entendu les propos des deux présidents de commission.

Je suis d’accord avec la démarche proposée selon laquelle, à défaut d’initiative de la partie patronale, la négociation s’engage dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation représentative. Afin d’éviter toute ambiguïté, je souhaite donc simplement savoir s’il s’agit d’une organisation représentative au sens de la loi – à savoir l’une des cinq confédérations –, et non simplement des seules organisations syndicales de l’entreprise.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Il s’agit bien sûr des organisations syndicales de l’entreprise !

M. Maxime Gremetz. Mais il n’y a pas d’organisation syndicale dans ces entreprises ! Vous vous en tirez donc à bon compte ! Je veux que l’on m’apporte cette précision.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Cela figure dans le code du travail !

M. le président. Poursuivez votre propos, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le président, car il découle de la réponse qui me sera donnée. S’il n’y a pas d’organisation syndicale, la commission mixte s’impose.

M. Xavier de Roux. C’est dans le code du travail !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Monsieur Gremetz, je vous renvoie à l’article L. 132-2 du code du travail. Les accords de branche ne pouvant intervenir qu’au plan national, vous avez donc la réponse à votre question pertinente !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J’ai bien compris qu’il s’agissait d’une représentation au plan national. Mais cela ne répond pas à ma question.

Par exemple, lorsque les petites entreprises n’ont pas d’organisation syndicale, la demande peut-elle émaner d’une union syndicale au niveau de la ville ? Il est essentiel de le savoir.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Le code du travail s’applique ! Relisez-le !

M. Maxime Gremetz. Le ministre n’en est pas si sûr !

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec. Il est bien fait référence ici à l’accord de branche.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Bien sûr !

M. Jean Le Garrec. Et, dans ce cas, la représentativité est assurée par les syndicats représentatifs, comme le prévoit le code du travail. Toutefois, la question posée par M. Gremetz de la non-représentativité syndicale au niveau de la petite entreprise est une vraie question.

Les amendements me semblent intéressants, car ils s’efforcent de répondre à la remarque, que je partage, de M. Larcher sur l’aggravation des inégalités entre les petites et les grandes entreprises.

Cela nous conduira – et je sais que, là aussi, M. Larcher serait d’accord – à réfléchir aux relations entre le donneur d’ordres et la petite entreprise. En effet, les inégalités s’accentuent dans ce domaine. Si la situation n’est pas nouvelle, elle s’aggrave considérablement. Voyez l’exemple d’Airbus. Qui va trinquer ? Les petites, voire les moyennes entreprises !

Ces amendements sont une initiative intéressante, puisqu’ils permettent au moins de poser le problème s’agissant de la participation et de l’intéressement. Il ne faut pas pour autant mélanger intéressement, participation et participation à la gestion de l’entreprise. M. Ollier a justement fait la distinction, et je le rejoins en cela. Je regrette qu’hier, alors que nous posions ce type de question, nous nous soyons fait traiter de « vulgates marxistes » ou d’archaïques !

M. Maxime Gremetz. Mais être marxiste, c’est honorable !

M. Jean Le Garrec. Ces amendements ne régleront pas tous les problèmes, mais ils permettront au moins que la négociation s’engage.

M. Maxime Gremetz. Je ne suis pas satisfait des réponses, je voudrais une précision, monsieur le président !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. La commission mixte paritaire, c’est l’organisation représentative dans la branche.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 324.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 86 et 4, modifiés par le sous-amendement n° 324.

(Ces amendements, ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 57.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le défendre.

M. Maxime Gremetz. Je n’ai pas eu de réponse à la question concrète que j’ai posée.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Si !

M. Maxime Gremetz. Quand il n’y a pas de syndicat dans une petite ou moyenne entreprise, une organisation syndicale représentative dans une ville pourra-t-elle ou non demander l’ouverture d’une négociation ?

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Relisez le code du travail !

M. Maxime Gremetz. Ce serait une précision utile, me semble-t-il, mais M. le ministre ne veut pas se mouiller.

M. le président. Défendez votre amendement, monsieur Gremetz.

M. Maxime Gremetz. L’amendement n° 57 tend à compléter les missions du Conseil supérieur de la participation.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Pourquoi voulez-vous compléter ses missions puisque vous estimez qu’il ne sert à rien ?

M. Maxime Gremetz. Je n’ai pas dit qu’il ne servait à rien, j’ai simplement expliqué à l’Assemblée comment il était composé, puisque, selon vous, une fois cette autorité consultée, nous ne pourrions plus discuter. Ne soyez pas provocateur, monsieur Ollier. Je suis tellement pour ce conseil que je veux élargir ses missions.

Ce conseil, institué par la loi de juillet 1994, a déjà plusieurs missions : observer les conditions de mise en œuvre de la participation, contribuer à sa connaissance statistique, rassembler l’ensemble des informations disponibles sur les modalités d’application de la participation dans les entreprises et les mettre à la disposition des salariés et des entreprises qui en font la demande, apporter son concours aux initiatives prises dans les entreprises pour développer la participation à la gestion et la participation financière des salariés, formuler des recommandations de nature à favoriser le développement de la participation et renforcer les moyens d’une meilleure connaissance des pratiques de participation.

Il établit en outre, voyez comme il est important, un rapport annuel sur l’intéressement, la participation des salariés aux résultats de l’entreprise, les plans d’épargne d’entreprise et les négociations salariales dans les entreprises ayant conclu des accords d’intéressement. Vous voyez qu’on ne sépare pas salaires et intéressement !

Il convient donc de compléter ses prérogatives et d’enrichir son rapport d’une nouvelle étude : celle de l’utilisation de la participation financière comme élément de substitution à la rémunération.

Nous l’avons dit, le risque avec ces mécanismes est de transformer le salaire en prime, en action ou en participation, plus aléatoire et moins pérenne et, surtout, plus dangereuse.

Les analyses statistiques en témoignent, alors que le pouvoir d’achat des salaires a diminué de 0,5 % au deuxième trimestre, poursuivant la dégringolade observée depuis cinq ans, entre 5 et 7,5 %, les formes de participation et d’intéressement ont, elles, augmenté de 8,3 %.

Il y a bien un phénomène de vases communicants, et nous en avons détaillé les raisons. La participation financière n’est pas pérenne, à la différence d’une augmentation des salaires, ce qui permet de flexibiliser les revenus. La fiscalité est plus avantageuse en matière de participation, surtout pour les hauts revenus, que celle appliquée aux salaires, pourtant plus légitime et au service de l’intérêt général. Enfin, l’augmentation de salaires peut concerner tous les salariés. Or la participation financière comme l’intéressement n’en concernent qu’à peine 50 %.

Il faut donc avoir un regard lucide sur ces pratiques, et il nous semble que le Conseil supérieur de la participation peut l’avoir.

L’article 5 lui assigne déjà une nouvelle mission puisque, à partir de la promulgation de la loi, ce conseil sera chargé de suivre la mise en œuvre de la nouvelle négociation de branche.

Nous proposons, à notre tour, d’élargir ses missions sur ce point précis de l’utilisation de la participation financière, son impact sur l’évolution des salaires et, surtout, le caractère de substitution ou non au salaire.

Cela dit, je sais bien que « cause toujours », comme on dit chez moi. Pour vous, ce projet est formidable et n’a pas lieu d’être amendé. Il y a les grands seigneurs, qui décident. Nous, nous parlons pour le Journal officiel, pour la mémoire collective. Quand nous serons morts, on verra que nous l’avions bien dit. Malheureusement, certains parlaient d’autre chose, M. le ministre avec M. Dubernard, M. Ollier avec M. Joyandet. S’ils avaient écouté, ils auraient peut-être fait moins de bêtises et seraient toujours au pouvoir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.

Je ne reviens pas sur la gentillesse remarquable dont fait preuve M. Gremetz vis-à-vis d’un conseil dont il jugeait hier la composition particulièrement inique, mais je crois sérieusement que l’amendement est satisfait.

M. Maxime Gremetz. Ah ! C’est pourquoi vous ne m’écoutiez pas.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur. Je l’ai lu et je l’ai analysé. Dans la mission générale du Conseil supérieur de la participation, il y a l’observation des conditions de mise en œuvre de la participation. Adopter cet amendement serait donc surcharger le texte.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Le suivi des salaires, c’est le rôle de la Commission nationale de la négociation collective, notamment de sa sous-commission des salaires.

Au moment où nous sommes engagés dans un dialogue avec les partenaires sociaux pour savoir comment formaliser une procédure de dialogue social, il serait tout de même assez étonnant, après vous avoir entendu hier, monsieur Gremetz, critiquer la composition non paritaire du Conseil supérieur de la participation, de donner en quelque sorte à ce dernier des compétences de la Commission nationale de la négociation collective.

Voilà pourquoi je pense que nous devons en rester aux missions qu’évoquaient il y a un instant les présidents des commissions. C’est à la Commission nationale de la négociation collective et à sa sous-commission sur les salaires, où est respecté le principe paritaire et où le Gouvernement est présent, d’assurer le suivi du salaire et la non-substitution.

Le Conseil supérieur de la participation, dans sa séance du 25 avril, dont j’ai remis les minutes au président Dubernard, insiste d’ailleurs bien sur la non confusion des genres entre salaires et notamment dispositifs de participation.

Le Gouvernement ne peut donc être favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je reviens à l’amendement précédent, car le système est très complexe.

M. Gremetz a posé une question. Qui peut demander l’ouverture d’une négociation au sein de l’entreprise s’il n’y a pas de délégué syndical ? J’aurais voulu qu’on nous dise exactement ce qu’est l’organisation représentative au sens de l’article L.132-2 du présent code pour être bien sûr de ce que j’ai voté. S’il y a un délégué syndical, les choses sont claires. S’il n’y en a pas, la négociation ne peut pas s’ouvrir, sauf si le chef d’entreprise le demande.

M. Maxime Gremetz. Vous entendez, monsieur le ministre ?

M. le président. La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. Vous avez peur, monsieur Gremetz, et vous nous le répétez depuis plusieurs jours, que les primes d’intéressement se substituent aux salaires. Ce sont d’ailleurs des réflexions que nous avons entendues lorsque nous avons consulté les syndicats pour l’élaboration du rapport que j’ai présenté.

Je m’étonne que vous ne fassiez pas confiance aux organisations représentatives pour éviter cela.

M. Maxime Gremetz. Je leur fais confiance !

M. François Guillaume. Dans les entreprises où il y a des représentants syndicaux, un comité d’entreprise, c’est là que le problème pourra se régler. Il faut tout de même faire confiance aux gens qui négocient.

Vous auriez pu d’ailleurs, pour défendre votre thèse, prendre l’exemple de ce qui s’est passé à Air France. Il y a un certain nombre d’années, les pilotes ont fait grève pour obtenir une augmentation de leurs salaires et bloqué l’ensemble de la flotte. Les négociations avaient du mal à aboutir parce que la société n’était pas dans une situation financière telle qu’elle pouvait augmenter les salaires à concurrence de ce qui était demandé. Une négociation s’est engagée avec les organisations syndicales représentatives pour trouver une solution, et il a été décidé qu’on n’augmenterait pas les salaires à hauteur de ce qui était demandé mais qu’on compenserait en distribuant des actions d’Air France aux pilotes. Ce sont les centrales syndicales qui ont négocié avec le représentant patronal.

M. Maxime Gremetz. Je sais ! Elles se sont fait avoir d’ailleurs !

M. François Guillaume. Cela démontre bien que c’est sur le terrain, au cas par cas, que les organisations syndicales peuvent veiller à ce qu’on ne substitue pas aux salaires des primes qui ne supportent ni impôts ni cotisations sociales.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Je vais apporter une précision, même si cela m’oblige à revenir sur l’amendement précédent, pour écarter tout risque de confusion : ce qui était visé était l’ouverture de négociations dans les branches, car la commission mixte paritaire n’existe que dans la branche. Les organisations représentatives, tant des salariés que des entreprises, peuvent être soit les organisations représentatives reconnues pour les salariés au titre de l’arrêté de 1966, soit des organisations reconnues représentatives dans la branche : ce peut être le cas pour les salariés – l’UNSA existe dans un certain nombre de branches – comme pour les employeurs – dans la branche du spectacle vivant, que j’ai évoquée tout à l’heure, il y a des organisations représentatives d’employeurs qui ne sont rattachées ni au MEDEF, ni à la CGPME, ni à l’UPA. Cela ne vient pas en contrepoint d’une réalité, s’il n’existe pas d’organisation.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je serais bien le dernier à ne pas faire confiance aux organisations syndicales, mais vous oubliez que beaucoup d’entreprises n’en ont pas. Pour celles qui en ont, cela ne pose pas de problème.

Vous ne voulez pas obliger les entreprises de moins de cinquante salariés à adopter des dispositifs d’épargne salariale, mais les y inciter. Comment voulez-vous inciter ces entreprises s’il n’y a pas de syndicat ? S’il n’y a pas ouverture des négociations par la direction, qui va agir ?

M. Dominique Tian. C’est le choix des salariés !

M. Maxime Gremetz. Heureusement, monsieur Tian, que M. le ministre ne dit pas la même chose !

M. Dominique Tian. Au contraire, il dit la même chose que moi !

M. Maxime Gremetz. Non ! Ce n’est pas ce que le ministre a dit ! Il a dit : cela se fait dans le cadre d’un accord de branche.

M. François Guillaume. L’accord de branche, c’est le cadre !

M. Maxime Gremetz. Cela veut dire, monsieur Tian, – et M. le ministre nous départagera – qu’à partir du moment où il y a un accord de branche, toute organisation syndicale représentative, locale, départementale, régionale, peut s’adresser à une entreprise. C’est cela précisément que vous contestez. Votre interprétation des propos du ministre est tout à fait différente de la mienne. Nous sommes dans le flou le plus total : M. le ministre me donne une réponse qui me satisfait et que M. Tian vient contredire. Monsieur le ministre, je vous demande de préciser ce point.

Quant au Conseil supérieur de la participation, monsieur le ministre, même si je pourrais souhaiter que sa composition soit un peu plus démocratique, je ne remets pas en cause son travail. Je dis simplement qu’il ne faut pas s’y référer, comme on a eu tendance à le faire dès le départ. Car lorsqu’il a été consulté, qui s’est exprimé ? Il ne faut pas oublier que les organisations syndicales n’étaient pas d’accord. Donc, ce ne peut pas être une autorité, même morale. Il réalise des travaux, il a des missions, et c’est bien ainsi.

Par ailleurs, je vous rappelle que le Conseil supérieur de la participation établit en outre un rapport annuel sur l’intéressement, la participation des salariés aux résultats de l’entreprise, les plans d’épargne d’entreprise et sur les négociations salariales dans les entreprises ayant conclu des accords d’intéressement. Est-ce ou non les missions que vous lui avez fixées ? C’est pourquoi nous proposons de lui confier une étude pour savoir si l’intéressement se substitue au salaire ou s’il s’y ajoute. Ce n’est pas trop demander, cela figure dans la mission du Conseil supérieur de la participation.

Je ne vous tends aucun piège. Je prends en compte tous les travaux, même s’ils sont pluralistes. La composition des conseils supérieurs – qu’ils soient d’orientation des retraites, de l’emploi ou de la formation – est diverse : il est normal que des opinions différentes s’expriment.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Il y a un accord de branche ou il n’y en a pas. S’il y en a un, les choses sont simples.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur et M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. L’amendement est déjà voté !

M. Dominique Tian. Oui, mais c’est tellement ambigu que personne n’a rien compris !

S’il n’y a pas d’accord de branche, il faut savoir s’il y a un délégué syndical dans l’entreprise. S’il y en a un, c’est très simple, les négociations peuvent s’ouvrir. Sinon, on laisse la liberté de négocier, entreprise par entreprise.

M. Maxime Gremetz. Mais qu’est-ce que cela veut dire ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 57.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 264.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le soutenir.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement a déjà été défendu dans ses grandes lignes, mais j’y reviens un instant. L’amendement n° 264, cosigné par le président Dubernard, ouvre la possibilité au chef d’entreprise, en l’absence d’accord de branche, de prendre seul l’initiative d’engager une répartition de la participation.

Nous pensons qu’il est important de donner cette opportunité au chef d’entreprise. Vous savez que nous avons voulu éliminer la contrainte et faire en sorte que l’initiative parte, s’il en a envie, du chef d’entreprise. Ce qui, tout naturellement, s’il le fait – et il sera incité à le faire – conduira ensuite l’entreprise à conclure un accord de participation. La négociation suivra. Cet amendement laisse l’initiative à l’employeur. C’est le principe de la participation, avec un système de blocage, sur lequel je ne reviendrai pas.

Si le Gouvernement est favorable à cet amendement, il lui faudra lever le gage.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes. Mesdames, messieurs les députés, hier soir, à l’occasion de l’examen de l’amendement n° 280 défendu par M. Guillaume, nous avions déjà engagé cette discussion. Je voudrais faire le point car je sens bien que le sujet a préoccupé M. Guillaume et préoccupe aussi M. le rapporteur pour avis de la commission des finances. Je pense que la réponse qu’apportent les présidents Ollier et Dubernard est de nature à contribuer à la diffusion des mécanismes, des réflexes de participation dans les petites et moyennes entreprises. Elles peuvent éprouver, dans un premier temps en tout cas, des difficultés, – et cela reprend des préoccupations que M. Tian a exprimées tout à l’heure – à parvenir à un accord sur un sujet qui demeure encore complexe, quels que soient les progrès que nous réaliserons à l’occasion de ce débat.

La solution qui est proposée par les présidents de commission a le mérite de répondre à cet enjeu, tout en permettant de faire un premier pas vers la participation, avec des avantages, mais aussi des contraintes que nous avons évoquées hier : un intérêt financier un peu inférieur pour l’entreprise. C’est donc, nous semble-t-il, une excellente porte d’entrée vers la participation.

Par conséquent, le Gouvernement est favorable à l’amendement et il lève le gage.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Hier, à la suite de ce débat, j’avais proposé à M. Guillaume de cosigner cet amendement. M. Joyandet serait également le bienvenu s’il voulait nous rejoindre.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Permettez-moi d’anticiper sur un amendement de la commission des finances qui viendra après l’article 6.

Je suis tout à fait favorable à cet amendement et je pense que la commission des finances l’aurait été si elle avait eu à l’examiner. L’absence de participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés touche tout de même 6 millions de salariés. L’amendement va donc dans le bon sens puisqu’il lève une des complications auxquelles les petites entreprises ont bien du mal à faire face, alors que dans les grandes entreprises les choses sont naturelles.

Je vais bien évidemment voter cet amendement. Je suis même prêt à le cosigner, mais je crains qu’il ne fasse que mettre le doigt sur le problème, qu’il concrétise en quelque sorte les difficultés que nous rencontrons pour faire entrer la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés, sans régler grand-chose, et que nous fassions le constat, dans la foulée, que cela ne marchera toujours pas.

Comment encourager un chef d’entreprise de moins de cinquante salariés, comme d’ailleurs les salariés, en lui disant qu’il faut entrer dans un processus pluriannuel, que cet intéressement doit être bloqué sur une période de cinq ans, que, pour le calculer, il faut appliquer une formule à rallonge et que, si l’on veut y déroger, il faut un système plus avantageux, ce qui implique que cette fameuse formule soit préalablement calculée ? On entre donc dans le processus de la négociation salariale qui n’existe pas dans les PMI-PME.

Si l’on veut étendre le système de la participation et de l’intéressement tel qu’il existe aux entreprises de moins de cinquante salariés et si l’on veut que cela fonctionne, il faut le rendre obligatoire. Comme il n’en est pas question, tout système un peu hybride ne marchera pas, c’est ma conviction.

On aurait donc intérêt, comme on le fait pour un certain nombre d’autres sujets, à élaborer un dispositif de substitution, que je n’appelle pas volontairement un dispositif de participation. C’est là où j’anticipe sur l’amendement n° 43, adopté par la commission des finances et qui ne viendra qu’après l’article 6, qui propose un dispositif très simple, permettant au chef d’entreprise, à la fin de l’année, lorsqu’il aura fait des bénéfices, d’en distribuer une partie à ses salariés, lesquels pourront bénéficier de cette exonération sociale – pas fiscale – au même titre que ceux qui travaillent dans les grandes entreprises.

On nous oppose le coût de la mesure ou le risque de substitution de l’intéressement au salaire. Mais ce n’est pas dans les TPE, avec 500 ou 600 euros par an et par tête de pipe, qu’il peut y avoir substitution !

D’autre part, en ce qui concerne l’argument du coût, je m’inscris en faux. Vous avez l’air de dire qu’il n’y a pas de coût si l’argent est bloqué pendant cinq ans – l’État lève les gages et on compense – mais qu’il y en a un s’il est libre tout de suite. Mais c’est dans les grandes entreprises que l’on discute, au moment de l’embauche, d’une manière globale, du salaire, de l’intéressement, et de la participation. C’est là que se crée le transfert entre le salaire, la participation et les primes.

Vous ouvrez aussi le robinet de la compensation. Irez-vous donc dire au salarié d’une PME, qui gagne 1,2 ou 1,3 fois le SMIC, qu’à la fin de l’année on retranchera 300 ou 400 euros de son salaire officiel, soumis aux charges, pour lui donner en échange 400 euros de primes ?

Voilà ce que vivent les gens dans les TPE et les entreprises de moins de cinquante salariés !

C’est ce qui justifie l’amendement proposé par la commission des finances, que nous examinerons après l’article 6 – raison pour laquelle je ne m’étendrai pas ici sur ce sujet.

Je voterai, bien évidemment, l’amendement n° 264, qui vise à alléger une contrainte supplémentaire et à créer un effet d’appel. Je souhaite qu’en retour les autres commissions et le Gouvernement soient attentifs à la démarche de la commission des finances, étant entendu que nous sommes ouverts à la discussion : puisque le seuil de 6 000 euros est trop élevé, il va de soi qu’on peut le baisser. Tout est négociable.

Sur le plan des principes, il me semble souhaitable qu’un chef d’entreprise de moins de cinquante salariés qui souhaite partager les dividendes puisse le faire au même titre que dans les grandes entreprises, mais avec un dispositif très simple, qui ne soit pas pluriannuel, ne soit pas soumis à la négociation et n’implique pas une formule de calcul alambiquée.

Enfin, bien que je ne sois pas devenu socialiste, ni communiste, ni – le terme est plus juste – collectiviste, je trouve choquant que ces petites entreprises ne bénéficient pas d’une participation qui soit exonérée de charges. Après tout, ces entreprises ont des actionnaires. Est-il acceptable que l’actionnaire qu’on voit une fois par an lorsqu’il vient toucher son chèque de dividendes après l’assemblée générale du mois de juin puisse se contenter de mettre ce chèque à la banque sans qu’on prélève de charges sociales, tandis que le salarié qui travaille toute l’année dans l’entreprise voit le montant de son chèque amputé de 22 % et que ce même chèque coûte 40 % de plus à son employeur ?

M. Jean Le Garrec. Voilà un discours révolutionnaire !

M. Maxime Gremetz. C’est simplement un homme honnête !

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances. En tant qu’actionnaire et chef de petite entreprise, je suis persuadé qu’il faut faire quelque chose pour capter l’attention de cette grande partie de nos concitoyens qui ne bénéficient de rien parce qu’ils ont le tort de travailler dans les TPE, qui constituent pourtant le maillage économique du territoire français.

M. le président. Cela signifie-t-il, monsieur Joyandet, que vous cosignez l’amendement n° 264 ?

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume. Je souscris à l’argumentation de M. Joyandet, qui est éclairée de la connaissance des petites et moyennes entreprises. À dire vrai, je souscris plus encore à son amendement n° 43, que nous examinerons tout à l’heure.

Si j’approuve l’ amendement n° 264, qui va dans le sens de ce que je souhaite, il me semble aussi, au vu de tous les articles du code du travail auxquels il se réfère, que les conditions seront sans doute difficiles à réunir pour les petites et moyennes entreprises, dont certaines reculeront vraisemblablement devant tant de complications.

Je voterai donc cet amendement, qui est un premier pas dans le bon sens, mais, je le répète, j’attends avec intérêt le débat que nous aurons sur l’amendement présenté par le rapporteur de la commission des finances.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Puisque le débat sur l’amendement n° 43 de M. Joyandet est lancé,…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Pas encore, monsieur Tian ! Il viendra après l’article 6.

M. le président. Je rappelle que nous examinons l’amendement n° 264 sur l’article 5.

M. Dominique Tian. La technique évoquée par M. Joyandet a été utilisée récemment par le Gouvernement avec la prime Breton et la prime Villepin, qui obéissaient aux mêmes critères et ont été très appréciées par les chefs d’entreprises et par les salariés.

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Il s’agit ici d’un débat de fond. La situation des salariés des petites entreprises, notamment des entreprises de moins de cinquante salariés, a bien évidemment été abordée au cours de nos travaux. L’Assemblée a toutefois rejeté les amendements que nous avions déposés en vue de leur appliquer le droit commun.

Aujourd’hui se dessinent deux propositions. L’une, que nous jugeons très dangereuse, est celle de la commission des finances, que nous examinerons tout à l’heure. Elle porte en elle un danger de confusion entre le salaire et la participation. L’autre proposition, qui est celle de cet amendement n° 264, peut être décrite comme une participation octroyée.

Le fond du débat est de savoir pourquoi vous écartez tout autre mécanisme permettant d’aboutir à des accords par la négociation, au motif qu’il n’y aurait pas dans l’entreprise les interlocuteurs nécessaires. Le problème n’est pas nouveau en droit du travail, et nous avons tout intérêt à lui apporter une réponse qui nous servira de fil rouge pour orienter nos décisions. De fait, il existe plusieurs solutions.

Il peut s’agir, tout d’abord, du mandatement. Pourquoi, en effet, ne pas reprendre les dispositions, déjà utilisées à l’occasion des 35 heures et dans d’autres circonstances, qui prévoient qu’un syndicaliste mandaté par l’une des organisations représentatives puisse mener la négociation dans l’entreprise et, ainsi, nouer le dialogue social ?

On peut aussi recourir à la représentation syndicale territorialisée dans les petites entreprises – les « délégués de site ».

M. Maxime Gremetz. Les unions locales !

M. Alain Vidalies. Quel que soit le nom qu’on donne à ce dispositif, il permet qu’il y ait, du côté des employeurs comme du côté des salariés, ait un système de négociation se donnant pour périmètre celui du territoire.

Reste enfin, quand on ne peut recourir à ces mécanismes, le procédé plus traditionnel qui consiste à faire remonter la négociation au niveau de la branche professionnelle.

Chacune de ces solutions a son intérêt, mais il faut privilégier la souplesse, et sans doute le mandatement ou le recours au délégué de site – appelons-le « délégué territorialisé » – sont-ils les mécanismes qui en offrent le plus, car ils évitent de renvoyer à l’accord de branche tout en restant dans le cadre de la négociation.

L’amendement n° 264 écarte le principe selon lequel l’accord doit être le fruit d’un dialogue. La participation est octroyée, ce qui change la nature du processus et n’est pas acceptable.

Si donc l’amendement de la commission des finances nous inquiète, l’amendement n° 264 ne nous rassure guère, car il nous semble fermer des pistes qui auraient mérité d’être explorées dans le sens d’un élargissement du processus aux petites entreprises et de procédures souples de négociation, comme le mandatement. Examiner de telles mesures aurait pourtant signifié aux salariés des petites entreprises qu’on s’efforçait de leur appliquer le même traitement qu’aux autres.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Je souscris aux propos de notre collègue Alain Vidalies.

Au demeurant, ne soyons pas naïfs ! Chacun aura compris que l’amendement de M. Joyandet examiné en commission des finances ne fait pas l’unanimité et que certains – le Gouvernement, le président de la commission ou le rapporteur – allument des contre-feux en proposant cet amendement n° 264.

M. Maxime Gremetz. Vous n’êtes pas naïf !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Pas du tout ! Nous avions rédigé notre amendement avant celui de M. Joyandet ! Ne dites pas n’importe quoi !

M. Jean-Pierre Balligand. Toujours est-il que les deux dispositifs se télescopent. Ce sont peut-être là, après tout, des discussions internes à votre groupe, mais elles n’en concernent pas moins le texte que nous examinons.

Monsieur le ministre, j’appelle aussi votre attention sur le fait que l’amendement de M. Dubernard et celui de M. Joyandet procèdent tous deux de la même idée : la participation sera octroyée…

M. Maxime Gremetz. D’en haut !

M. Jean-Pierre Balligand. …par le chef d’entreprise.

On peut certes arguer que les entreprises de moins de cinquante salariés n’ont pas de comité d’entreprise, et donc généralement pas de section syndicale, et que par conséquent le dialogue social n’est pas possible. Cela n’est cependant pas tout à fait vrai.

Il n’est pas inutile d’évoquer ici le plan d’épargne interentreprises, ou PEI, dont j’ai proposé jadis la création avec Jean-Baptiste de Foucauld et qui est maintenant inscrit dans la loi. Nous sommes au cœur du sujet avec ce plan qui a connu une augmentation de 18 % en 2003-2004 pour les PME de moins de cinquante salariés, et dont M. Dubernard lui-même souligne le succès dans son rapport. En effet, lorsque, pour respecter l’homogénéité des salaires dans un même bassin d’emploi, le plan d’épargne interentreprises est territorialisé, il est négocié par mandatement territorial. Ce mécanisme permet de dialoguer avec des représentants mandatés par les organisations syndicales et connaissant le tissu local et les salaires moyens, et d’éviter ainsi des interlocuteurs extérieurs au bassin d’emploi et appliquant des références très différentes en matière salariale.

On peut aussi négocier le PEI au niveau de la branche, et vous avez fort justement rappelé, monsieur le ministre, que cela s’est fait par exemple pour le bâtiment et les travaux publics ou pour la coiffure, et qu’il s’agit même là d’un des meilleurs accords en matière de plans d’épargne interentreprises. Même ces petits patrons, pourtant réputés parfois pour être assez durs, ont négocié.

M. Dominique Tian. Pourquoi insultez-vous les coiffeurs ?

M. Jean-Pierre Balligand. On présente parfois ces petits patrons comme des gens assez durs. Toujours est-il qu’ils ont accepté sans difficulté le mandatement syndical de branche.

Monsieur le ministre, vous qui êtes attaché au dialogue social, ne vous émancipez pas d’une méthode reposant sur la négociation de la participation et de l’intéressement avec les salariés, quelle que soit la taille de l’entreprise.

Ces amendements de M. Dubernard et de M. Ollier participent d’une philosophie entièrement opposée, qui conduit à une participation octroyée et à des systèmes qui ne sont nullement négociés. Or les organisations syndicales ont considérablement avancé dans ces domaines au cours des dernières années. Ainsi, la CGT, la CFDT, la CFTC et la CGC ont mis en place, dans le cadre de l’Observatoire de l’épargne salariale, des formations destinées à leurs salariés qui siègent dans les fonds communs de placement. Il est en effet nécessaire aujourd’hui, dans l’action syndicale, d’être en mesure non pas, certes, de gérer ces fonds, mais d’exercer un regard critique sur leur fonctionnement.

Ne cassez donc pas cette méthode partenariale qui associe l’entreprise et le monde syndical. Il faut éviter de tels amendements qui détournent de la discussion, de la négociation salariale entre le chef d’entreprise, dont la tendance historique était d’octroyer la participation, et les organisations syndicales, qui veulent discuter de ces questions.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 264 rectifié, compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

ordre du jour
des prochaines séances

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi, nos 3175, 3337, pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié :

Rapport, n° 3339, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire ;

Avis, n° 3334, de M. Patrick Ollier, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire ;

Avis, n° 3340 de M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)