Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2006-2007)

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Troisième séance du mercredi 8 novembre 2006

41e séance de la session ordinaire 2006-2007


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Loi de finances pour 2007

SECONDE PARTIE

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007 (nos 3341, 3363).

défense (suite)

M. le président. Nous poursuivons l’examen des crédits relatifs à la défense.

La parole est à Mme le ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous sommes réunis pour examiner, pour la cinquième fois, les crédits de la mission « Défense ». Même s’il nous reste plusieurs mois de travail, je suis heureuse de vous dire, sans fausse modestie, ma fierté du travail accompli, (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), d’autant que cette fierté doit être aussi la vôtre, du moins la fierté de ceux qui m’ont toujours soutenue publiquement et, pour certains, un peu moins publiquement. Oui, grâce à votre soutien, depuis 2002, nous avons bien fait avancer les choses et je tiens à remercier tout particulièrement la commission de la défense et son président, Guy Teissier, ainsi que les rapporteurs.

Afin de ne pas me contenter de mots, je vais tâcher de vous présenter les éléments grâce auxquels nous pouvons considérer que c’est à juste titre que nous éprouvons un sentiment de fierté pour l’action accomplie en faveur de la défense nationale et de nos forces armées depuis 2002. Néanmoins, il est aussi de notre devoir de regarder ensemble l’avenir et de mesurer les enjeux de la défense pour les prochaines années.

Commençons par le bilan, comme le veut la tradition. J’insiste : ensemble, nous pouvons être fiers de l’action menée. Le budget que j’ai l’honneur de vous présenter respecte totalement la loi de programmation militaire que vous avez votée en début de législature. Comme MM. Cornut-Gentille, Fromion et Voisin l’ont souligné, la loi de programmation militaire est respectée pour la cinquième année consécutive, et cela pour la première fois depuis au moins vingt-cinq ans.

Dès que M. Boucheron sera de retour dans l’hémicycle, qu’il sache qu’à force de volonté, on peut tenir des engagements. Quand il y a une volonté politique, on peut avancer, on peut réaliser. C’est peut-être sur ce point que se situe la différence entre ce que nous avons fait depuis cinq ans et ce que vous avez fait au cours des années précédentes.

Ainsi, 75 milliards d’euros ont été ouverts pour les équipements, comme prévu, et comme en atteste le rapport d’information au Parlement sur l’exécution de la loi de programmation militaire de 2003 à aujourd’hui. Messieurs Teissier et Michel, je vous confirme que les reports de crédits passeront de 2 milliards d’euros à environ 1,2 milliard d’euros à la fin de cette année et qu’ils seront totalement résorbés à la fin de l’année 2007. Nous avons en effet pris les dispositions le permettant.

Je souhaite aussi rappeler, puisqu’on m’y a invitée, qu’entre 1997 et 2002, il a manqué plus de 13 milliards d’euros, soit une annuité complète d’exécution de la loi de programmation. Aussi, quand on nous parle des problèmes rencontrés par certains équipements et de retards de programmes, j’ai tendance à me tourner vers le côté gauche de l’hémicycle.

M. Bernard Deflesselles. C’est la vérité !

M. Philippe Vitel. L’équivalent de quatre porte-avions !

Mme le ministre de la défense. Je pense d’ailleurs que M. Boucheron connaît trop le dossier pour ignorer que ces retards sont dus à la politique menée à l’époque où ses amis étaient au Gouvernement.

M. Jérôme Rivière. Très bien !

Mme le ministre de la défense. Ma fierté ne vient pas simplement de l’exécution de la loi de programmation, mais aussi – je dirai même : surtout – de l’action de nos armées depuis cinq ans. Je pense que c’est une fierté que nous pouvons et que nous devons tous partager.

Les armées et la gendarmerie sont engagées hors de France dans vingt-six opérations, qui mobilisent 14 500 personnes, soit environ, compte tenu des rotations, 50 000 militaires impliqués en permanence sur les théâtres d’opérations extérieures. Où en étions-nous en 2002, où en étions-nous avant la professionnalisation des armées ? Je rappelle que, lors de la première guerre d’Irak, consécutive à l’invasion par ce dernier pays du Koweït, nous n’avions pas été capables d’assurer la relève de nos forces envoyées sur place.

En effet, la présence de 50 000 hommes à l’extérieur du pays implique une organisation très lourde, mais supportable. Si, en effet, vous avez estimé que les clignotants étaient à l’orange, cela signifie qu’ils ne sont pas au rouge ! Si nous nous trouvons dans une situation de tension, nous ne sommes toutefois pas en surtension. Ce qui prouve bien que ce qui a été réalisé depuis cinq ans permet à nos forces armées de tenir nos engagements internationaux et d’assurer notre protection.

Oui, monsieur Le Bris, si cela est possible aujourd’hui, c’est que le rôle de nos forces n’est ni flou ni superfétatoire, non plus qu’incertain. Que ce soit en Afghanistan, en Côte d’Ivoire, dans les Balkans, ou au Liban, nos forces armées jouent un rôle essentiel dans les missions qui leur sont confiées, et ces missions ne sont pas floues.

Il s’agit, en Afghanistan, de permettre à un pays qui a été le berceau du terrorisme et qui en reste une potentielle base de repli, de redonner aux institutions nationales, à son gouvernement, le contrôle de l’État. Cela implique la lutte contre le terrorisme ainsi que des actions de stabilisation, auxquelles participent tant nos forces spéciales que nos forces engagées dans la FIAS.

En Côte d’Ivoire, certes, la situation politique ne progresse pas, mais la situation sécuritaire et militaire est aujourd’hui stable. Nos forces y contribuent notamment parce qu’elles soutiennent les Casques bleus. Or, vous savez tous que les pays qui ont fourni des contingents à l’ONU ne l’ont fait qu’à la condition que les forces françaises soient parties prenantes à l’ONUCI.

Il n’est pas besoin de dire ce que nous faisons au Liban ni ce que nous faisons dans les Balkans.

Monsieur Carré, vous m’avez interrogée sur la situation au Liban. Aujourd’hui, sur le plan sécuritaire, la situation y est calme mais extrêmement fragile, et je m’inquiète des risques de provocations de part et d’autre, qu’il s’agisse des tentatives de certains de contourner l’embargo sur les armes, ou bien du survol, par des avions de la chasse israélienne, du territoire national libanais.

À ce sujet, je dois informer la représentation nationale que des incidents qui auraient pu être extrêmement graves se sont déroulés au Liban. À plusieurs reprises, les avions de la chasse israélienne ont adopté des attitudes hostiles à l’égard d’abord de bâtiments maritimes français puis allemands, ensuite, très récemment, à l’égard d’une installation terrestre de la FINUL. Une catastrophe a été évitée de justesse par nos militaires.

En effet, des F15 se sont présentés en piqué puis en redressement immédiat, ce qui constitue d’une façon très claire une posture d’attaque – celle qui correspond normalement à la délivrance de bombes ou au tir au canon. En situation de légitime défense, nos militaires se trouvant sur les lieux ont été amenés à enlever les caches de la batterie de missiles et, à deux secondes près, ils tiraient sur les avions qui les menaçaient directement. Ceci n’est pas tolérable. Nous sommes donc ici confrontés au risque d’un incident très grave et nos militaires se trouvent dans la situation de devoir procéder, le cas échéant, à des tirs de légitime défense.

J’attire donc une nouvelle fois votre attention, après l’avoir fait à l’ONU, sur le nécessaire respect des forces de la FINUL et sur le risque que des pilotes irresponsables…

M. Jacques Brunhes. Des pilotes ou leur gouvernement ?

Mme le ministre de la défense. …prennent en agissant de cette façon.

Engagés à l’extérieur, les militaires français le sont également sur le territoire national aussi bien dans le cadre du plan Vigipirate, que dans la lutte contre les incendies de forêts, voire dans la lutte contre le chikungunya.

Je suppose que vous serez d’accord pour dire que nous, tous ensemble, souhaitons rendre hommage à ces hommes et à ces femmes pour leur action, pour leur dévouement, pour leur disponibilité.

Je voudrais, nous voudrions également rendre hommage à leurs familles et à leurs proches qui acceptent de longs éloignements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, nous devons rendre hommage à ceux qui sont morts ou qui ont été blessés en opération : 13 militaires sont morts en service, 96 ont été blessés dans des opérations menées par les armées depuis douze mois. S’y ajoutent 7 morts et 1 500 blessés chez les gendarmes. Ne les oublions pas et n’oublions pas leurs familles.

Notre engagement en OPEX est un élément clé de notre diplomatie et de notre influence dans le monde. Aussi ai-je toujours considéré que les OPEX devaient être traitées d’une façon prioritaire, notamment en ce qui concerne leur financement – tout comme vous, monsieur le président Teissier et monsieur le député Michel Voisin.

Jusqu’en 2002, on ponctionnait le budget des OPEX sur celui des programmes. J’ai obtenu en quatre ans, grâce à votre soutien, la création d’une réelle provision. Celle-ci s’élèvera en 2007 à 375 millions d’euros, soit plus du double du montant de cette année et environ deux tiers de la somme moyenne annuelle affectée à ces opérations, sachant qu’il est très difficile de prévoir ce montant d’une année sur l’autre.

Au-delà de l’enveloppe prévue, le PLF pour 2007 présente une nouveauté : la provision concernera également la gendarmerie, pour 15 millions d’euros, et elle permettra là aussi de couvrir ses dépenses de maintenance. Il faut souligner à ce propos que de plus en plus de gendarmes vont en OPEX. Je souhaite que ce mouvement s’amplifie car c’est une bonne façon de marquer le caractère militaire de la gendarmerie.

M. Philippe Folliot. Très bien ! (Sourires.)

M. Charles Cova. C’était le cri du gendarme !

M. Jean-Louis Léonard. Folliot, en OPEX !

Mme le ministre de la défense. Merci, monsieur Folliot.

Grâce à vous, mesdames et messieurs les députés, au-delà de la juste reconnaissance de l’action de nos forces armées, et singulièrement de la gendarmerie, en OPEX, nous avons également accompli un grand progrès en matière de sincérité budgétaire.

Je rappelle par ailleurs que le coût des OPEX de 2006 s’élève à 630 millions d’euros. L’importance de cette somme, malgré les efforts que nous avons consentis pour faire des économies, s’explique par le fait que certaines opérations, notamment celle du Liban, n’étaient pas prévues. À l’intention de M. Louis Giscard d’Estaing, je précise que le coût de notre engagement au Liban en 2006 s’élève à 46 millions d’euros, et non à 460 millions, comme on peut le lire dans un certain hebdomadaire, sans doute parce qu’une virgule n’a pas été placée au bon endroit. En année pleine, le coût de l’opération avoisinera sans doute les 100 millions d’euros, desquels il faudra déduire un remboursement relativement limité de la part de l’ONU, de l’ordre de 10 à 20 millions d’euros.

Vous m’avez interrogée, monsieur Michel Voisin, sur les opérations intérieures et sur leur financement. J’ai demandé que l’on crée une ligne dans le budget pour identifier les surcoûts des armées en opérations intérieures. Jusqu’à présent, nous n’avions pas cherché à établir un dispositif budgétaire comparable à celui des OPEX, étant donné que ces surcoûts restent relativement limités : ils n’ont pas dépassé 15 millions d’euros et nous les avons autofinancés. Il serait cependant naturel de les inscrire sur une ligne spécifique et de leur affecter une provision, selon la logique qui prévaut pour les OPEX.

J’en viens à un troisième motif de satisfaction et de fierté : les armées ont reçu les moyens des missions que nous leur confions. Cela peut sembler évident, mais ce n’était pourtant pas le cas auparavant.

Pour 2007, 48 milliards d’euros sont prévus pour la mission « Défense », soit une augmentation de 2,5 %. C’est un effort important, par comparaison avec la progression moyenne du budget de l’État.

Cela se traduira par des mesures importantes dans presque tous les domaines, à commencer par celui de l’équipement. Avec 16 milliards d’euros de crédits de paiement et 15,6 milliards d’autorisations d’engagement, auxquels s’ajoutent 3,6 milliards de reports de 2006, les commandes prévues seront passées. Nous pourrons commencer la réalisation du second porte-avion. C’est un choix que je souhaite irréversible, car il correspond à la nécessité de la permanence à la mer. À cet égard, je remercie M. Vitel, M. Lemière et Mme Lamour d’avoir souligné avec force l’importance de la permanence à la mer du groupe aéronaval. C’est une nécessité stratégique compte tenu de la multiplication des crises, qui peuvent se déclarer dans des endroits où l’environnement ne permet pas de baser nos forces aériennes.

De ce point de vue, monsieur Rivière, vous commettez une erreur en confondant ce qui relève de la coopération avec des économies d’échelle dans la mise en commun d’un certain nombre de capacités. Trois porte-avions au lieu de quatre, cela voudrait dire un porte-avion et demi en permanence à la mer. Selon vous, nous pourrions demander à la Grande-Bretagne de mettre à notre disposition un de ses porte-avions. C’est impossible, tant pour des raisons techniques que pour des raisons politiques.

Tout d’abord, les porte-avions britanniques, même s’il peut y avoir des convergences à l’avenir, ne sont pas équipés de la même façon que les nôtres parce qu’ils n’ont pas les mêmes types d’avions. Nous ne pourrions y apponter et y catapulter nos avions. En outre, ils ne transportent pas, contrairement aux nôtres, d’armements nucléaires et ne sont donc pas équipés en conséquence.

Ajoutons que, si la Grande-Bretagne se trouve engagée dans des opérations, elle aura besoin de ses porte-avions et ne pourra en mettre un à notre disposition. Est-il acceptable d’être dépendants d’un autre pays, fût-il un partenaire et un ami, pour une composante essentielle de notre capacité d’intervention ?

Nous avons donc besoin de ce second porte-avion, contrairement à ce que vous avez dit, monsieur Rivière, et à ce que j’ai cru entendre hier soir…

M. Bernard Deflesselles. Eh oui !

M. Jean-Michel Boucheron. Vous regardez trop la télévision, madame la ministre ! (Sourires.)

Mme le ministre de la défense. Envisager de demander aux Britanniques le prêt d’un porte-avion trahit une certaine méconnaissance des réalités techniques.

En dehors de cela, nous commanderons cinquante missiles de croisière navals, les cent dix-sept premiers VBCI, douze hélicoptères NH90 dans leur version terrestre, ce qui nous permettra de remplacer les vieux Puma, qui ont près de quarante ans et sont à bout de souffle.

Plusieurs d’entre vous sont intervenus pour souligner les besoins des forces terrestres : il aurait été préférable, j’en conviens volontiers, qu’une loi de programmation militaire précédente nous ait permis d’anticiper sur ce programme (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), car ces équipements seraient déjà à notre disposition et nous nous en réjouirions. M. Rivière et M. Hart ont souligné à juste titre les difficultés actuelles, dont je me devais de rappeler les raisons. Désormais, le NH90 permettra de redonner à l’armée de terre les capacités dont elle a besoin pour son aéromobilité.

Nous allons également commander cinq mille systèmes FELIN. Je vous confirme enfin, monsieur Lemière, que le contrat pour les sous-marins Barracuda sera signé avant la fin de l’année.

M. Philippe Vitel. Bravo !

Mme le ministre de la défense. Mais je ne me contente pas de regarder aujourd'hui ou demain. Il faut se projeter plus loin et regarder l’avenir en se donnant les moyens de sa préparation. C’est pourquoi j’ai décidé, monsieur Carayon, monsieur Fromion, que les commandes d’études amont s’élèveraient à 700 millions d’euros en 2007. Si l’on ajoute les sommes consacrées au développement des programmes, cela fait 3,5 milliards d’euros que la Défense dépensera pour la recherche et le développement.

M. Rivière m’a interrogée sur les drones. Depuis le mois de septembre, le SIDM a déjà effectué trois vols à Istres. Sa mise en service est prévue pour la fin du premier semestre 2007. C’est un bon produit, qui durera et qui intéressera sûrement d’autres pays. S’agissant du drone MALE, le besoin a été identifié grâce à un travail approfondi à l’état-major des armées. Après l’accord avec l’Espagne, nous avons besoin de trouver un nouveau partenaire. Ce sera sans doute l’Allemagne, qui se rapproche, mais il reste encore beaucoup à faire au niveau industriel pour ce qui est des coûts et des délais.

Ce budget permettra également le maintien en conditions opérationnelles, qui demeure une de mes priorités. Vous savez aussi bien que moi, monsieur Boucheron, que la disponibilité des matériels telle que je l’ai trouvée en 2002 était extrêmement inquiétante. MM. Cornut-Gentille, Vitel et Giscard d’Estaing ont souligné à juste titre que le rétablissement n’est pas l’affaire d’une année : il demande une action de longue haleine. C’est pourquoi j’ai décidé d’augmenter les crédits correspondants de 10 %, en les portant à 3,4 milliards d’euros. Cet effort financier accompagne l’effort de modernisation, étant entendu que le maintien en conditions opérationnelles réclamera de toute façon des moyens croissants, soit parce que nous aurons affaire à des matériels vieillissants qui demanderont de plus en plus d’entretien, soit à cause de l’obsolescence de plus en plus rapide de matériels modernes et sophistiqués. Après ce qui a été fait pour le MCO aéronautique et pour le MCO naval, j’ai lancé un audit sur le MCO terrestre, qui demeure aujourd'hui le plus fragile : sur ce point, monsieur Hart, je partage votre souci.

J’en viens aux effectifs, car les matériels ne sont rien sans les hommes et les femmes qui les servent. Mon objectif est que ces effectifs soient adaptés aux missions. Celles du service de santé sont de plus en plus importantes, comme l’ont souligné M. Hart et M. Beaulieu. L’engagement pris lors de l’examen de la loi de programmation militaire a été entièrement tenu. Les créations d’emploi de cette année sont dans la ligne de ce qui avait été demandé.

D’autres emplois sont créés à la DGSE, également conformes, en nombre, à ce qui avait été prévu dans la loi de programmation militaire. On pourrait sans doute faire plus, monsieur Fromion, mais convenez que les obligations de la loi de programmation militaire ont été respectées et que ce n’est pas chose si fréquente !

M. Yves Fromion. Je ne l’ai pas contesté.

Mme le ministre de la défense. Par ailleurs, je veille à donner à la DGSE les moyens de ses missions, ce qui suppose aussi un certain nombre de matériels sur lesquels on comprendra que je garde une certaine discrétion.

Les effectifs de l’armée de terre, monsieur Folliot, correspondent exactement à ses missions. S’il y a eu dans le passé des polémiques à ce sujet, ce n’est plus le cas. L’étude réalisée avec l’état-major de l’armée de terre a établi que les effectifs sont conformes aux missions confiées. Sans doute pourrions-nous assurer encore une ou deux autres missions ; au-delà, nous passerions dans le rouge.

Un effort tout particulier est fait en faveur de la réserve, dont le rôle est essentiel pour une armée professionnelle. Les crédits sont augmentés de 14 %, ce qui représente 19 millions supplémentaires et permettra de porter le nombre d’engagements dans la réserve à soixante-deux mille, soit deux fois plus qu’en 2002. Toutes les composantes sont concernées, dont la gendarmerie et le service de santé des armées. Je suis heureuse de saluer, en la personne de M. Beaulieu, un de nos réservistes de choix et je remercie M. Louis Giscard d’Estaing d’avoir exprimé son attachement à la réserve.

S’il convient d’avoir des personnels en nombre suffisant, il faut également leur donner des signes de notre reconnaissance en prenant en compte leurs contraintes particulières. C’est pourquoi, madame Païx, la condition des personnels de la défense doit être une de nos préoccupations. Une dotation de 66 millions d’euros est ainsi consacrée au plan d’amélioration de la condition du personnel militaire, complétée par 15 millions d’euros pour les personnels civils. Le logement en particulier est, pour les militaires astreints à des mutations fréquentes, une préoccupation majeure, surtout en région parisienne et dans les zones touristiques. J’ai donc engagé, depuis quatre ans, le ministère dans une politique de logement ambitieuse, car c’est, monsieur Vitel, un élément essentiel de la condition des personnels. À cet égard, nous disposons d’un tout nouveau moyen d’action. J’ai en effet obtenu de pouvoir utiliser les ressources du fonds de prévoyance militaire. Ces capacités nouvelles extrêmement importantes représentent plusieurs milliers de logements. Jusqu’à présent, ces fonds étaient uniquement placés en valeurs financières ; dorénavant, en respectant les règles de diversité et de liquidités, une partie des 600 millions d’euros en réserve sera placée dans des projets immobiliers au profit des personnels militaires. J’en attends, dès le début 2007, des résultats concrets dans les zones où il est le plus difficile de se loger.

Un deuxième élément important pour le moral des personnels tient à leurs conditions d’exercice et d’entraînement. J’ai fait de l’entraînement une priorité absolue, car il y va de l’efficacité et de la sécurité des interventions des armées.

MM. Cornut-Gentille, Carré et Bernard m’ont interrogée sur l’activité des armées. Je leur répondrai d’abord en citant des chiffres puisque ceux qui ont été avancés laissaient entendre qu’il y aurait de gros déficits en la matière. En 2005 et 2006, les objectifs pour l’activité ont été atteints à 95 %. Si le taux d’activité n’est pas de 100 %, c’est que l’envol des prix des carburants nous a contraints d’utiliser les matériels avec parcimonie et que nous avons maintenu une très forte activité en OPEX. Je ne peux pas demander aux hommes et aux femmes de la défense engagés dans les OPEX de s’entraîner en prenant sur leur temps de récupération. Dans un tel contexte, je considère la situation actuelle comme satisfaisante.

MM. Giscard d’Estaing, Hart et Bernard m’ont interrogée sur la possibilité de faire des prévisions identiques concernant l’armée de terre et l’armée de l’air pour 2007. Elles existent. La prévision de réalisation est de 100 % pour l’entraînement des pilotes de chasse et des pilotes d’hélicoptères de l’armée de terre et de la marine ; de 97 % – en progression de 6 points – pour le nombre de jours à la mer des bâtiments de la marine ; de 96 % pour les jours d’activité de l’armée de terre ; de 88 % pour les pilotes d’hélicoptères de l’armée de terre et de 80 % pour les pilotes d’avions de transport, en raison de matériels très anciens que les armées ménagent en attendant la livraison des nouveaux matériels en 2007 et 2008.

En complément des interventions de MM. Cornut-Gentille, Voisin et Carré, je reviens sur le problème du carburant, qui est effectivement majeur.

Depuis 2002, le prix du baril a presque triplé, passant de 25 dollars à 70 dollars, montant retenu pour les prévisions de dépenses du ministère pour 2007. Pour y faire face, nous avons pris plusieurs dispositions. D’abord, le ministère s’est montré économe en réduisant le volume de carburant consommé de 15 % depuis 2002, sans que cela affecte l’activité des forces, plus élevée qu’en 2002. Ce résultat a été obtenu grâce notamment au retrait des vieux appareils et à une gestion fine des besoins. Ensuite, j’ai décidé une augmentation significative des dotations : en 2007, les ressources seront de 33 % supérieures à celles de 2004. Enfin, depuis un an, nous mettons en œuvre un mécanisme de couverture contre le risque pétrole en liaison avec l’Agence France Trésor. Ces mesures, complétées par les occasions que nous saisissons de reconstituer les réserves dès que les cours sont à la baisse, doivent nous permettre d’atténuer l’effet de la hausse des coûts sans annuler la charge supplémentaire pour les armées. Nous devons donc rester vigilants.

Enfin, je voudrais vous faire part d’un troisième motif de satisfaction. Au-delà des aspects budgétaires, je suis fière d’avoir placé, depuis 2002, le ministère de la défense à la pointe de la réforme de l’État. La plupart de ces sujets ayant été évoqués, je passerai rapidement sur chacun d’eux.

Vous connaissez nos objectifs : clarification des responsabilités, mutualisation et interarmisation des moyens, diversification des modes de gestion. Dans ce cadre, plusieurs réformes ont été mises en œuvre : réforme de la DGA et de la conduite des programmes d’armement, création du service unique d’infrastructure, réforme de l’état-major des armées, nouveau statut général des militaires, que vous avez adopté l’année dernière.

Monsieur Beaulieu, vous m’avez interrogée sur les systèmes de communication : la direction générale des systèmes de communication a été créée au cours de l’été 2006.

J’ai mis en œuvre, monsieur Bernard, l’externalisation et le recours aux contrats public-privé pour permettre aux armées de se recentrer sur les raisons qui ont conduit les agents à choisir la défense. Les jeunes mécaniciens n’y sont pas venus pour s’occuper de voitures de la gamme commerciale, mais pour participer aux actions de la défense nationale. Même si nous ne sommes pas toujours aidés par les règles de la TVA, nous avons accompli les efforts nécessaires pour faire effectuer certaines activités à l’extérieur de façon à recentrer les personnels civils et militaires de la défense sur le cœur de leurs métiers. C’est ainsi que nous procédons aujourd’hui à l’externalisation des véhicules de la gamme commerciale et de la gestion des logements de la gendarmerie, qui ne réclament pas les savoir-faire particuliers des personnels de la défense. Après les hélicoptères de l’armée de terre à l’école de Dax, le réseau internet des bases aériennes et l’École interarmées des sports, des projets de partenariat public-privé sont en cours pour la formation des pilotes d’hélicoptère NH90, les bâtiments de soutien ou l’affrètement des navires pour le transport stratégique. Cette politique de modernisation porte ses fruits : en cinq ans, le ministère a non seulement fait des économies, mais a aussi gagné en productivité.

Monsieur Brunhes, je ne suis pas d’accord avec vous lorsque vous prétendez que ces actions ont affaibli la capacité des armées à remplir leur mission ainsi que les savoir-faire des personnels de la défense. Je pense, au contraire, qu’elles les ont préservés : la qualité du soutien s’est améliorée et les militaires peuvent se concentrer sur le cœur des métiers. Au total, sous ma responsabilité, la France dispose aujourd’hui d’une armée forte de militaires mieux payés, mieux entraînés, dotés de matériels plus modernes et plus disponibles. À la fois plus économe et plus efficace, l’outil de défense est aujourd’hui renforcé.

Tels sont, mesdames, messieurs les députés, les résultats de notre action depuis cinq ans. Il s’agissait de rattraper le retard pris entre 1997 et 2002 tout en avançant dans l’adaptation de la défense française aux nouveaux besoins.

Aujourd’hui comme demain, une politique ambitieuse pour la défense est une nécessité. Les risques, que vous connaissez probablement mieux que personne, sont toujours présents : nucléaire, terrorisme, armes de destruction massive, crises multiples qui seront, à mon avis, de plus en plus nombreuses dans les années qui viennent. Je suis d’accord, monsieur Brunhes, qu’il faut essayer de régler ces crises par la diplomatie, par le soutien au développement et à la santé. Il n’empêche que, lorsqu’il faut réagir de façon immédiate, tant pour nous protéger que pour protéger les populations, nous avons besoin d’abord des militaires.

Au-delà même des impératifs de protection, nous avons aussi des besoins liés à nos engagements dans le cadre d’accords bilatéraux et à notre statut de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. La crise libanaise a d’ailleurs confirmé que la défense est aujourd’hui l’outil principal de notre diplomatie. Elle constitue un élément clé du rayonnement de nos valeurs et de nos principes et, par là même, de notre capacité à influer sur l’environnement international en faveur de la paix et la stabilité. Cela doit nous conduire à conserver la capacité d’intervenir où et quand il le faut.

Monsieur Quilès, vous m’avez interrogée sur le partenariat global dans le cadre de l’OTAN, dont il a été question il y a quelques semaines. Il s’agit en effet de l’un des objectifs que les Américains souhaitent faire valider à Riga.

J’étais à Washington il y a quinze jours et j’ai dit à mes interlocuteurs que nous ne faisions pas de théologie, que nous voulions travailler avec une approche pragmatique. Face aux crises multiples qui se développent, nous ne pouvons certes pas négliger les contributions très opérationnelles de certains pays comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou le Japon. Mais la réponse ne peut être globale : elle doit être adaptée à chaque crise et chaque offre de contribution doit être examinée indépendamment, sans être intégrée dans une institution figée. Nous ne voulons pas d’une structure à trente ou quarante, qu’une bureaucratie inefficace aurait tôt fait d’entraver. Nous intervenons tantôt seuls, tantôt dans le cadre de l’OTAN, tantôt dans celui de l’Union européenne : c’est à nous de choisir chaque fois, en fonction du contexte et du mandat.

N’oublions jamais que la voix de la France est un espoir pour beaucoup de peuples du monde. Nous avons donc l’obligation de conserver nos capacités d’intervenir, conformément à notre histoire et à notre tradition. Or cela n’est possible que si nous avons une armée forte qui rend notre parole crédible et la fait respecter. Beaucoup d’autres peuvent parler, mais si nous sommes davantage entendus, c’est aussi parce que nous avons, grâce à nos militaires, les moyens de faire entendre notre parole – s’il le faut, les armes à la main. Cette force doit être préservée à tout prix pour l’avenir et notre politique de défense doit y contribuer. Elle doit également permettre à la France de conserver ses capacités dans des domaines à caractère vital, tels que la dissuasion, qui a été largement évoquée aujourd’hui, ce dont je me réjouis.

La force de dissuasion, c’est l’ultime garantie contre des menaces extérieures. Il est normal qu’elle soit conservée et elle ne peut l’être que si elle est modernisée à chaque fois, car il est évident que l’obsolescence a pour corollaire immédiat l’inefficacité, et donc l’absence de dissuasion. Oui, messieurs Michel, Voisin et Sainte-Marie, vous avez raison en la matière.

Permettez-moi de vous dire, monsieur Brunhes, que je vous trouve d’un angélisme extrême lorsque vous affirmez qu’il suffit que la France renonce à sa dissuasion et puisse éventuellement en entraîner d’autres avec elles…

M. Jacques Brunhes. Je n’ai jamais dit cela ! Relisez mes propos !

Mme le ministre de la défense. …pour qu’il n’y ait plus besoin de dissuasion.

Monsieur Brunhes, lorsque l’on regarde ceux qui, aujourd’hui, cherchent à s’équiper de l’armement nucléaire, pensez-vous vraiment que, si les grandes nations n’avaient pas la dissuasion nucléaire, cela les inciterait, eux, à ne pas s’en doter ? Je crois que vous faites vraiment preuve d’angélisme.

M. Jean-Claude Sandrier. Il ne faut pas caricaturer !

Mme le ministre de la défense. Nous ne sommes pas dans le concept d’emploi, nous le savons bien. La dissuasion est l’élément de protection ultime.

Monsieur Quilès, notre doctrine d’emploi est inchangée.

M. Jacques Brunhes. Ce n’est pas vrai !

Mme le ministre de la défense. L’actualisation de l’indication de ce que sont les risques me semble la moindre des choses.

Vous ne pouvez pas nous reprocher de ne pas actualiser dans certains cas notre doctrine sur les armements classiques – nous ne la moderniserions soi-disant pas – et, dans d’autres, de le faire. Notre doctrine d’emploi est inchangée.

M. Jacques Brunhes. Mais non ! L’Île Longue !

Mme le ministre de la défense. Nous établissons simplement, comme vous, la liaison avec la menace terroriste. Je connais les problèmes aussi bien que vous. Il est évident que le terrorisme ne se gère pas par la dissuasion. Mais il est bon qu’un État qui voudrait utiliser le terrorisme, éventuellement nucléaire, sache que nous sommes capables, éventuellement, de répondre.

La défense anti-missiles ne saurait en rien être comparée à la dissuasion. Vous savez bien, monsieur Quilès, qu’aujourd’hui la protection anti-missiles en dehors du théâtre n’est pas une chose dont la fiabilité soit garantie. Au contraire, pourrais-je dire. C’est une raison majeure pour conserver notre dissuasion.

Le domaine de l’espace comptera énormément dans les prochaines années. J’ai déjà eu l’occasion de le dire ici même : l’espace est certainement l’un des éléments de la puissance du xxie siècle, comme l’était le nucléaire au xxe siècle. Il est donc essentiel que la prochaine loi de programmation militaire – car c’est là que beaucoup se jouera – prenne en compte cette dimension et que nous essayions d’entraîner encore plus nos partenaires européens dans cette action.

Monsieur Carayon, avec le lancement du satellite d’observation Helios II, en décembre 2004, avec le lancement des satellites de communication Syracuse III-A à la fin 2005 et Syracuse III-B cet été, nous avons d’ores et déjà franchi des étapes importantes, d’une part, pour le renseignement et, d’autre part, pour notre autonomie d’appréciation des situations et de communication. Il faut assurément continuer à développer nos capacités.

Monsieur Michel, la consommation de nos crédits se fait en fonction de cycles de recherches, de développement et de réalisation, ce qui explique les fluctuations. À certains moments, il y a davantage de crédits sur certaines lignes, qui baissent ensuite et remontent les années suivantes. Il s’agit là de la gestion classique d’un budget.

Je vous parlais, il y a un instant, de l’Europe. Une défense française forte est une impérieuse nécessité pour l’Europe, de la même façon qu’une défense européenne est une impérieuse nécessité pour l’Europe. Je vous remercie, monsieur Deflesselles, de l’avoir brillamment rappelé.

Nous avons beaucoup avancé depuis 2002. L’Agence européenne de l’armement, les groupements tactiques 1500, la force de gendarmerie européenne, la cellule de planification et de commandement représentent de véritables avancées. J’ai entendu, aujourd’hui encore, certains, dont M. Sainte-Marie, prétendre que l’on pourrait réduire les budgets en développant plus de programmes en coopération. Dois-je rappeler que les frégates multi- missions, le porte-avions, la plupart de nos missiles, notre nouvel avion de transport A 400 M, l’hélicoptère Tigre, l’hélicoptère NH90, le programme Helios sont des programmes réalisés en coopération européenne ? Ce sont des réalités. Il ne s’agit pas simplement d’invoquer. Nous, nous avons fait.

Dois-je rappeler que la France est le seul pays à participer à la quasi-totalité des programmes confiés à l’organisation conjointe en matière d’armement, c’est-à-dire à la structure européenne ? Dans ce domaine comme dans d’autres – je l’ai toujours constaté –, la France entraîne les autres pays. Elle peut le faire et être crédible, parce que la loi de programmation militaire est intégralement respectée. L’ambiance a changé du jour au lendemain lorsque j’ai indiqué que la loi de programmation militaire, d’une part, marquait un redressement de l’effort de défense et, d’autre part, serait respectée chaque année. J’ai pu montrer, chaque année, qu’elle était respectée. J’ai pu entraîner beaucoup de mes collègues européens dans certains programmes parce qu’ils savaient que, si nous nous engagions, les financements français seraient là.

L’Europe de la défense a beaucoup progressé. Depuis quatre ans, c’est pratiquement le seul domaine européen qui ait progressé.

M. Bernard Deflesselles. En effet !

Mme le ministre de la défense. Mais c’est en même temps un domaine où l’Europe est perceptible par nos concitoyens. Nous savons – nous qui avons tant de mal à faire passer l’idée européenne – que les Européens, interrogés sur l’Europe de la défense, disent savoir à plus de 80 % ce que c’est. Ils considèrent que c’est une bonne chose et souhaitent que plus de crédits soient consacrés à l’Europe de la défense.

Soyons en toujours persuadés : il n’y aura pas d’Europe politique sans Europe de la défense. Et il n’y aura pas d’Europe de la défense sans un effort militaire prolongé de la part de la France. L’effort devra se poursuivre après 2007 pour une autre raison : la politique de défense représente un formidable levier de notre croissance industrielle, économique et sociale. N’oubliez pas que la défense est le premier recruteur, le deuxième employeur public de France, et aussi le premier investisseur. Grâce à ses investissements et à ses commandes, elle donne, directement ou indirectement, du travail à plus de 10 000 entreprises, c’est-à-dire à près de 2 millions de salariés.

Monsieur Boucheron, je ne vous cacherai pas que je vous ai trouvé bien critique à l’égard du programme industriel. Je suis fière de mon programme d’industrie « défense », et sûrement plus fière que ne pouvaient l’être mes prédécesseurs sur leurs actions en la matière.

Lors de la passation de pouvoirs, Alain Richard m’a confié le dossier GIAT en disant : « On n’y a pas touché, c’est explosif ! » Je me souviens encore des remarques formulées au début sur ce sujet. Ce fut difficile pour les personnels, et j’ai une pensée pour eux. Mais nous avons aujourd’hui une entreprise qui, premièrement, fait des bénéfices et, deuxièmement, est à même de passer des alliances européennes. Nous sommes bien loin des conseils qui m’avaient été prodigués de laisser fermer cette entreprise.

M. Yves Fromion. Eh oui !

M. Jean-Claude Sandrier. Il ne reste pas grand-chose !

Mme le ministre de la défense. DCN a changé de statut et s’est rapprochée de Thales. Le fait qu’il y ait un certain nombre de longueurs – sans parler de difficultés – dans la mise en œuvre du rapprochement existe dans toutes les entreprises, qu’elles soient publiques ou privées. Aujourd’hui, nous avons plutôt bien avancé. Nous disposons, avec DCN-Thales, d’un pôle naval remarquable, qui va servir, là aussi, à créer un pôle naval européen, dont nous pourrons être le cœur et le moteur. C’est certainement la seule façon de lutter contre la concurrence des entreprises navales d’Asie du Sud-Est. C’est bien ce qu’il fallait faire pour le personnel, et je revendique mon action en la matière. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

J’ai indiqué tout à l’heure que j’avais fait un gros effort budgétaire et sanctuarisé les crédits de défense. Il faudra continuer à faire des efforts sur les crédits de recherche, notamment de recherche industrielle. Nous en avons besoin. Mais toute l’économie française en a également besoin,…

M. Bernard Deflesselles. Absolument !

Mme le ministre de la défense. …parce que la recherche militaire a des retombées dans le domaine civil. L’investissement technologique, c’est la croissance de demain. Si nous voulons regarder l’avenir avec confiance – et nous avons toutes les raisons d’y croire, contrairement à ce que certains prétendent, car notre pays dispose de nombreux atouts –, nous devons être conscients que la recherche nous donnera une marge technologique supplémentaire pour ne pas être dépassés par les pays émergents. Mesdames, messieurs, l’importance de la recherche devrait susciter, au minimum, un consensus sur tous les bancs de cet hémicycle, parce qu’il y va du devenir et de l’emploi de la France de demain. Ne nous privons jamais de l’atout que représentent notre savoir-faire et l’expérience de nos ingénieurs.

M. Carayon m’a interrogée sur les PME. Elles ont été, dès le départ, au centre de mes préoccupations. En effet, c’est souvent dans les PME que nous trouvons la réactivité et la créativité. À Istres, hier encore, nous avons vu, avec le Président de la République, le rôle qu’elles peuvent jouer dans la recherche de pointe. Elles font le maillage de notre territoire et, la France, c’est la richesse de ses territoires. J’ai veillé, à tous les échelons, à ce que les PME soient représentées, y compris dans les instances auxquelles participe le ministère – je pense au Conseil économique de défense. J’ai veillé à ce que les PME soient traitées en priorité lorsque nous avions des problèmes de report de crédits et qu’elles soient servies les premières en début d’année sur les crédits de paiement. J’ai veillé aussi à ce que des crédits de recherche leur soient réservés.

Monsieur Fromion, s’agissant des exportations, j’ai lu attentivement votre rapport. Il est source de nombreuses propositions. Il y a effectivement un certain nombre de choses à faire. Vos propositions sur les contrôles des exportations ont d’ores et déjà fait l’objet d’actions ; des décisions ont été prises au niveau du ministère de la défense et nous allons continuer.

M. Folliot m’a questionnée sur le rôle de notre défense dans la cohésion nationale, notamment pour les jeunes qui suivent la Journée d'appel de préparation à la défense. Nous avons tous eu l’occasion de parler de la JAPD, de ce moment privilégié – même s’il est très court – de contact entre les jeunes et les armées. J’ai essayé de moderniser la JAPD à la fois dans ses modules, dans la présentation de ce qu’est notre histoire commune et donc notre destin commun. J’ai essayé de la rendre plus attractive pour les jeunes, notamment à travers des modules nouveaux, tels que l’initiation au secourisme. Les jeunes sont satisfaits à plus de 85 % de la JAPD. Cela montre que ces premiers efforts ont porté leurs fruits quant à l’intérêt que les jeunes manifestent à l’égard de la défense.

J’ai également été interrogée sur le plan « défense deuxième chance ». L’intervenant a mentionné les très bons résultats obtenus avec ce dispositif. La même idée de cohésion nationale, l’idée que l’on ne doit laisser personne sur le bord de la route, nous a guidés, là aussi, comme dans le cadre de la JAPD.

Je pense, mesdames et messieurs les députés, avoir répondu à chacun d’entre vous. Si j’avais oublié certaines questions, j’y répondrai par écrit.

En conclusion, je tiens à vous dire que le travail accompli au cours de la législature a prouvé que la maîtrise des finances publiques et l’effort de défense sont des objectifs parfaitement compatibles. C’est un résultat sans précédent à mettre à l’actif de l’actuelle majorité. L’intérêt supérieur de la nation, la sécurité des Français, la construction de l’Europe exigent que nous poursuivions notre action dans la durée, gage d’efficacité – quelles que soient les échéances. Nous devons également manifester notre confiance aux forces armées, confiance qu’ils nous rendent bien.

Ce soir, je veux vous dire que je suis fière de notre outil de défense ; les Français le sont et ne s’y trompent pas, car jamais, depuis que nous disposons de statistiques, l’image de l’armée n’a été aussi bonne qu’en 2006.

Nous devons poursuivre ensemble dans cette voie, animés par le souci de l’intérêt général, au-delà de toute préoccupation électoraliste, le sujet étant trop grave pour être instrumentalisé à des fins électorales – au demeurant j’ai toujours constaté que cette conception était largement partagée. Il nous faut donc œuvrer dans l’intérêt général, les militaires le défendant eux aussi avec beaucoup de compétence et en étant prêts à prendre tous les risques.

Nous pouvons nous retrouver pour assumer notre responsabilité, qui est d’assurer la sécurité de nos concitoyens et le respect de nos engagements internationaux pour la paix et la stabilité du monde. C’est ce que nous faisons. Le faire tous ensemble nous permet d’être fiers de nos armées comme nous sommes fiers de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Nous en arrivons aux questions.

Pour le groupe des député-e-s communistes et républicains, la parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Ma question portera sur un aspect ponctuel mais non négligeable de votre budget, la participation des armées françaises à des opérations dites extérieures. La France est engagée sur différents théâtres d'opérations, à la demande de l'ONU ou de ses alliés : par exemple, en Côte d'Ivoire, où près de 4 000 soldats sont déployés. Les OPEX génèrent chaque année d'importants surcoûts – 600 millions d'euros en 2004, 532 millions d'euros en 2005, et en 2006 non pas 575 millions comme je le croyais, mais 630 millions selon votre estimation, madame le ministre.

Mais quel est le bilan de ces interventions ? Certes, de façon générale, la France défend son rang de puissance mondiale et propose une vision du monde qui s’oppose au manichéisme de certains. Mais, dans le cadre de l'opération en Côte d'Ivoire, la France investit des moyens humains et financiers ; elle engage sa parole et son image pour se voir, hélas, accuser fort injustement. Ni le pouvoir en place, ni les opposants ne semblent accepter la présence des troupes françaises. Or en droit international, la légitimité d'une présence armée en territoire étranger suppose l'accord des belligérants et au moins de l'État qui l’accueille.

La contestation de la légitimité de notre présence par la présidence ivoirienne place nos forces dans une situation très délicate. Elles ont, presque quotidiennement, à faire face à la menace de groupes ou milices commandés ou manipulés par M. Gbagbo, alors même que la présidence ivoirienne ne doit son maintien qu'à la présence armée étrangère.

Certes, il est concevable que nous investissions des fonds, que nous risquions la vie de nos soldats, mais uniquement si cela évite un génocide, préserve les intérêts de notre nation ou améliore la vie d’un peuple, et surtout, si notre présence est le prélude utile à la survenue incontournable et indispensable d’une solution politique.

Quel est, madame la ministre, le bilan des coûts et des avantages de la présence française en Côte d’Ivoire ?

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme le ministre de la défense. Nous sommes en Côte d’Ivoire dans le cadre d’une résolution de l’ONU qui prévoit une élection présidentielle démocratique. Celle-ci a été reportée d’un an. Notre présence doit permettre à la Côte d’Ivoire d’organiser une élection qui lui permettra d’envisager un avenir paisible.

Si certains contestent notre présence, dans leurs propos, la grande majorité – et je dispose de témoignages réguliers – de la population ivoirienne soutient nos forces et le manifeste quotidiennement. Les Ivoiriens savent bien que si nous n’étions pas là, les massacres reprendraient. N’oubliez pas qu’à l’origine nous sommes allés en Côte d’Ivoire, à la demande du président Gbagbo. Nous sommes certains que sans notre présence, les accrochages auxquels nous assistons se transformeraient en massacres.

Nos soldats savent qu’ils sont là pour éviter les massacres, et permettre, conformément à la résolution de l’ONU, l’organisation d’élections grâce auxquelles les Ivoiriens retrouveront, je l’espère pour eux, la stabilité institutionnelle et le développement qui, malheureusement, est fortement compromis par la situation politique actuelle.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. Madame la ministre, à la suite de la restructuration de MBDA décidée en 2005, l'établissement de Bourges subit l'essentiel des 270 suppressions d'emplois programmées dans la région Centre. Cela pourrait être bien plus si les 100 000 heures de charges en activités nouvelles prévues dans le projet de restructuration n'étaient pas effectives dans les années qui viennent. Dans le même temps, la situation financière de MBDA est on ne peut plus florissante et l’augmentation des dividendes versés aux actionnaires représente le double du résultat d'exploitation.

La mise en oeuvre de cette restructuration soulève de nombreuses inquiétudes.

Les postes supprimés dans l'établissement de Bourges sont plus nombreux que ceux prévus dans le plan, notamment en raison de départs plus importants en retraite non remplacés, d'où une perte de compétences.

Cette perte de compétences est amplifiée à chaque nouvelle organisation mise en œuvre au sein de l'entreprise, laquelle aboutit systématiquement à installer en région parisienne les activités hautement qualifiées pour laisser à Bourges et à la région Centre, les activités nécessitant des infrastructures.

Pourtant, l'établissement MBDA de Bourges se livre depuis toujours à une double activité, les missiles et l’aéronautique, ce qui peut lui permettre de réussir à capter plus que les 100 000 heures de charges nouvelles décidées lors des discussions du projet de restructuration.

Les compétences développées à Bourges peuvent permettre à Airbus de réaliser au mieux, et dans les délais, la mise en œuvre des nouveaux programmes A380 ou A350. D'autre part, il existe un projet visant à déconstruire les munitions obsolètes qu'il est nécessaire de mettre en oeuvre sans attendre.

Je n'insisterai pas sur la fragilité économique du bassin d'emploi de Bourges et du département du Cher qui souffrent de choix politiques et industriels guidés par des visions financières à court terme.

M. Yves Fromion. Tu parles !

M. Jean-Claude Sandrier. Je vous demande donc, madame la ministre, quelles sont les mesures que vous comptez prendre pour exiger de MBDA, dans le capital duquel l'État a une participation au travers d’EADS, un véritable projet industriel et économique, et une diversification de l'activité fondée sur l'aéronautique, au lieu d'encourager la course à des rendements financiers, destructrice d'emplois et de compétences, rendements sans rapport avec les richesses réellement créées ?

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme le ministre de la défense. J’ai été souvent saisie par vous-même, monsieur Sandrier, comme par M. Fromion et M. Vannson des problèmes de MBDA. Effectivement, il y a un certain nombre de restructurations qui ont des impacts sur les personnels. Je comprends donc parfaitement que vous interveniez. Ce qui est certain, c’est qu’il faut démonter des munitions obsolètes. Nous examinons cette possibilité dans un esprit très positif.

Nous avons toujours essayé de donner à MBDA, des charges de travail qui permettent de garder le maximum de salariés.

M. Yves Fromion, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour le soutien de la politique de défense et pour l’équipment des forces. Exactement !

Mme le ministre de la défense. Cela dit, il s’agit d’une entreprise et comme toute entreprise elle suit une logique contre laquelle nous ne pouvons pas aller. Nous essayons de faire le maximum, comme les parlementaires le demandent.

M. Yves Fromion, rapporteur pour avis. Très bien !

Mme le ministre de la défense. Nous avons avancé un certain nombre de commandes, par exemple. Nous avons essayé de donner le maximum de possibilités à cette entreprise, mais nous ne pouvons pas nous substituer aux dirigeants de l’entreprise.

M. Yves Fromion, rapporteur pour avis. Merci, madame le ministre !

M. le président. Nous en arrivons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Dominique Caillaud.

M. Dominique Caillaud. Avec ce budget pour 2007, vous maintenez fermement le bon cap en respectant pour la cinquième année consécutive la loi de programmation militaire. Je tiens moi aussi, madame la ministre, à vous exprimer toute ma satisfaction et ma confiance.

Ma question concernera cette année encore la formation et la reconversion du personnel militaire qui a fait l’objet d’un excellent rapport de nos collègues Michel Dasseux et Hugues Martin.

La loi du 24 mars 2005 a confirmé que le statut offre à ceux qui quittent l'état militaire au sein des trois armes, les moyens d'un retour à une activité professionnelle dans la vie civile.

À l'heure de la professionnalisation de nos armées, les études menées par votre ministère montrent que nos armées voient chaque année quelque 29 000 militaires en fin de carrière ou de contrat quitter leurs rangs, 16 500 ayant droit à des prestations de reconversion.

À ce sujet, je regrette que cet indicateur des ayants droit ait été supprimé dans la LOLF ; il me semblait utile et objectif pour apprécier ces éléments.

Toutefois, sur les 12 000 personnes qui n'entrent pas dans le champ de la reconversion, 11 290 étaient des militaires n'ayant pas quatre ans de service, dont un pourcentage important de gendarmes auxiliaires volontaires, lesquels fournissent proportionnellement les plus gros contingents des départs réels avant quatre ans de service.

Peu d'informations sont disponibles sur cette catégorie de la population, soit insérée directement dans la vie active, grâce aux excellentes compétences que la vie militaire leur apporte, soit au chômage sans qu’on puisse l’identifier.

Chaque armée organise pour ses propres militaires des actions de reconversion, dont les résultats sont proches ou supérieurs à l’objectif de 60 % fixé par le ministère : 56 % de reclassement toutes armes confondues en 2005, 48 % pour les officiers, 65 % pour les sous-officiers, et 49 % pour les militaires du rang.

Grâce à la LOLF, ces actions se font dans une rigueur budgétaire qui a permis à la fois d'améliorer sensiblement l'utilisation des crédits de reconversion, et, d'autre part, de contenir les indemnités chômage à l'exception de l'armée de l'air qui connaît un dérapage dans ce domaine. Les états-majors ont en effet bien perçu que la diminution de cette charge résultait directement de la qualité de la reconversion.

Ce bilan globalement très positif m’inspire toutefois trois questions.

Vous orientez-vous vers un maillage national d'établissements de reconversion inter-armées à l'image du CMPF de Fontenay-le-Comte qui fait un remarquable travail pour l'armée de terre, mais peine à recruter dans les autres armes ?

Maintenez-vous le principe d'établissements de reconversion à encadrement militaire avec le partenariat de formateurs extérieurs de type AFPA, ou envisagez-vous l'externalisation des reconversions ?

Prévoyez-vous de généraliser des actions de soutien et de formation dans la période des quatre premières années à l'image de ce que met en œuvre l'armée de l'air, actions qui pourraient également stabiliser le parcours des jeunes recrues ?

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme le ministre de la défense. Monsieur Caillaud, l’amélioration de l’organisation et de l’efficacité de la reconversion est une priorité ministérielle pour 2007. Nous avons déjà bien réussi en la matière, mais c’est pour nous une obligation, et c’est, de plus, un moyen de favoriser le recrutement.

Le maillage inter-armées constitue effectivement l’un des éléments que nous allons mettre en œuvre dès cette année et que nous avons commencé à préparer. Il ne s’agit pas de fusionner les structures d’armée qui sont adaptées à des besoins qui peuvent être spécifiques, mais de rationaliser les actions par la mutualisation des offres d’emploi notamment : c’est la moindre des choses, car il y va de l’intérêt de tous. Cela concernera également les centres de formation en fonction de leurs besoins. Ainsi, le CMFP de Fontenay-le-Comte, qui est une structure de l’armée de terre, est déjà pleinement concerné puisqu’il s’ouvre aux stagiaires issus des autres armées.

En ce qui concerne les établissements d’encadrement militaire, quatre-vingts formations de l’armée de terre ont établi un partenariat local avec l’Association pour la formation professionnelle des adultes. Cela leur permet d’envoyer en formation professionnelle leurs militaires en reconversion. C’est donc une opération gagnante et ce partenariat est venu progressivement se substituer aux anciennes sections de formation professionnelle. Pour autant, cela ne change ni la nature ni l’efficacité des prestations.

Les actions en direction des militaires ayant moins de quatre ans de service sont le deuxième grand axe de notre effort, avec notamment le développement de sessions d’orientation, une meilleure coordination avec les missions locales d’insertion, qui elles aussi s’adressent aux jeunes, et le développement de la validation des acquis professionnels, qui constitue pour nous une façon de permettre aux jeunes militaires de préparer leur avenir dans les meilleures conditions.

M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la base aérienne 273, située sur les communes de Pruniers-en-Sologne et de Gièvres, à proximité de Romorantin-Lanthenay dans le Loir-et-Cher, abrite des unités chargées du stockage et de l'expédition de matériel de l'armée de l'air, un centre chargé de l'impression et de l'émission de la documentation technique de l'armée de l'air ainsi qu’un centre de vol à voile de réputation mondiale où se dérouleront l’année prochaine les championnats du monde dans cette discipline. Elle emploie 400 militaires et 220 civils.

La numérisation de nombreuses informations et documentations utiles à l'armée transforme profondément les conditions d'exercice de la mission de cet établissement. Aussi le général Jean-Paul Palomeros, major général, est-il venu en inspection en avril dernier pour commencer à définir l'avenir de la base, sur lequel, madame la ministre, vous avez aussi fait mener une étude, dans un cadre plus général.

Le bassin d'emploi de Romorantin et de Salbris, successivement sinistré par l'effondrement des industries de l'armement et par la fermeture de Matra Automobile qui a touché 2 500 salariés, a fait l'objet de l'un des premiers contrats de site entre le Gouvernement et les collectivités territoriales. Dans ces conditions, l’avenir de la base 273 revêt une importance particulière. Pouvez-vous, madame la ministre, préciser les projets retenus ou à l'étude pour préserver les emplois ?

D'autre part, de quelle manière votre ministère entend-il contribuer au maintien et si possible au développement des activités et des emplois de l'ETAMAT de Salbris, qui est l’un des rares établissements à avoir survécu à la vague de restructuration qui a touché Salbris, pôle important de l’industrie de la défense ?

Je tiens par ailleurs à saluer publiquement l’excellente décision que vous avez prise en 2004, notamment à ma demande insistante, pour mener à bien la dépollution pyrotechnique de l’ex-site GIAT de Salbris. En apportant 7 millions d’euros et en assurant la maîtrise d’œuvre, votre ministère a contribué de manière décisive à la création de quelque 700 emplois à partir de 2008. Je vous en remercie à nouveau car la région de Salbris a beaucoup souffert de la restructuration des industries de défense.

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme le ministre de la défense. Monsieur Martin-Lalande, je sais combien vous êtes attentif aux problèmes de la région de Salbris et vous me saisissez souvent de moyens permettant de préserver des emplois. Sachez que vous trouverez toujours au ministère de la défense une oreille attentive à vos propositions. Je me réjouis donc tout particulièrement que nous ayons pu relayer vos efforts pour développer de nouveaux emplois dans cette région.

L’entrepôt situé sur la base aérienne 173 revêt une importance majeure pour l’armée de l’air puisque 50 % de son stock aéronautique y sont rassemblés. Ces fonctions d’entreposage et de distribution ont reçu la certification « ISO 9001 » en 2002, il était donc normal que nous y fassions des investissements importants.

Depuis 2004, les effectifs du site sont stabilisés à hauteur de 650 personnes environ. Un projet est à l’étude pour améliorer les synergies entre les entrepôts de Salbris et de Romorantin. Il figure parmi les travaux de la mission de modernisation de la maintenance aéronautique. Au début de l’année 2007, je disposerai d’un certain nombre de propositions à ce sujet et je ne manquerai pas de vous en tenir informé. J’espère que nous disposerons ainsi des moyens de trouver ensemble l’environnement qui permettra aux populations de cette région de bénéficier de débouchés.

Pour ce qui est de l’ETAMAT de Salbris, je n’ai pas ici les éléments pour vous répondre. Mais je vous écrirai dès la semaine prochaine pour vous donner toutes les garanties que vous souhaitez.

M. le président. La parole est à M. Bernard Carayon.

M. Bernard Carayon. Madame le ministre, je souhaite revenir sur la question des études amont. Dans mon intervention, j’ai déjà eu l’occasion de souligner l'effort considérable entrepris en ce domaine au cours de cette législature et de vous en féliciter et c’est sur un autre point que je souhaiterais maintenant appeler votre attention.

À partir des données fournies par vos services, j’ai pu établir dans mon rapport – page 19 – un tableau présentant la répartition des contrats d'études amont. Vous m'avez apporté des précisions à ce propos dans votre réponse tout à l'heure. Néanmoins, je m'interroge sur les variations d'une année sur l'autre, qui sont parfois très importantes : certaines sociétés voient leur part multipliée par deux, voire par cinq, tandis que d'autres la voient diminuer très sensiblement.

La sélection des programmes d'études amont, les PEA, s'inscrit, je le sais, dans la perspective de la directive ministérielle d'orientation. Ces programmes sont liés à une politique de réalisation de démonstrateurs, dont le coût est beaucoup plus élevé que certaines technologies propres aux études de base. En outre, le fait que le nombre de contrats passés soit réduit à quelques unités par an donne lieu à de fortes variations annuelles, particulièrement flagrantes sur la période 2002 à 2005.

Pour autant, je souhaite savoir, madame le ministre, si vous seriez favorable à ce que ces variations soient atténuées pour s'assurer que les groupes détenteurs de technologies-clés bénéficient de crédits d'études amont dans des proportions comparables aux autres.

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme le ministre de la défense. Monsieur Carayon, le phénomène que vous décrivez est un phénomène normal. Nous essayons, bien entendu, de surveiller le volume de contrats par entreprise afin qu’il n’y ait pas de droits d’acquis car notre rôle est d’innerver tout ce réseau, qui comprend des PME.

Les projets d’études amont sont programmés en fonction du plan prospectif à trente ans, qui donne une visibilité sur le long terme, mais également des enjeux de maintien et de développement des capacités des entreprises. Nous sommes très attentifs à cet aspect, que nous avons déjà évoqué. À cela s’ajoutent les besoins en programmes futurs qui sont, quant à eux, déterminés par les armées et par la DGA.

Tout cela fait qu’il est difficile de garantir un socle commun aux entreprises. Cela pourrait d’ailleurs être plus gênant pour les PME que pour les grands groupes, qui peuvent jouer, pour leur budget, sur la multiplicité des programmes qui leur sont confiés. Sans cette adaptation permanente, on nous reprocherait de ne pas avoir la réactivité nécessaire. Dans les compromis que nous faisons, nous essayons toujours de faire le choix du dynamisme.

M. le président. Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. Madame le ministre, le dispositif « Défense deuxième chance » que vous avez lancé en 2005 connaît une montée en puissance particulièrement rapide et prometteuse pour les valeurs républicaines que nous partageons.

Sur un plan quantitatif, notons d'abord qu’en douze mois, l'établissement public d’insertion de la défense, l’EPIDe a pratiquement accompli ce qui a demandé vingt-cinq ans au service militaire adapté, le SMA. Selon les projections faites à ce jour, il devrait, d'ici à la fin 2008, atteindre l'objectif fixé de 20 000 jeunes, garçons et filles, accueillis.

Sur le plan qualitatif, ensuite, soulignons qu’une évaluation encourageante a été faite de la première promotion du centre de Montry, consacrant l'évolution du dispositif, qui a progressivement trouvé ses propres marques par rapport au SMA.

Pour autant, deux interrogations subsistent et des réponses devront être rapidement apportées pour garantir l'avenir de ce dispositif sans équivalent.

La première porte sur le manque de patrimoine immobilier pour l’accueil des centres. Les outils nécessaires ont certes été mis en place avec la création d’une société foncière par actions, Immobilier Insertion Défense – 2IDE – associant l'EPIDe et la Caisse des dépôts et consignations, qui bénéficie de transferts d’actifs de la défense, conformément à l'article 124 de la loi de finances rectificative pour 2005. Mais la lenteur et la complexité de ces transferts limitent singulièrement la capacité de 2IDE à lever des capitaux, contraignant l'EPIDe à se tourner vers des opérateurs privés, qui réaliseraient les infrastructures en contrepartie d'une location avec un bail de vingt-cinq ans. Cette transformation de fait du budget de fonctionnement de l'EPIDe en budget d’investissement suscite apparemment des réticences de la part du ministère des finances. Comment pensez-vous gérer cette situation ?

La deuxième interrogation porte sur le budget même de l'EPIDe. Le coût d'un volontaire est aujourd'hui estimé à 28 000 euros, hors amortissement, ce qui représente quelque 560 millions d'euros en année pleine, à partir de 2009. Or, pour 2007, alors qu’il existe un besoin avéré de plus de 160 millions d’euros au regard des objectifs fixés, 50 millions d'euros seulement seraient prévus au budget de l'emploi, le reste provenant du Fonds social européen, qui effectue des versements différés, comme chacun sait, ainsi que des dispositifs communs d’accompagnement dans l'emploi ou d'aide personnalisée au logement, dont les apports sont calculés au prorata des effectifs réalisés.

Comment envisagez-vous de remédier à cette fragilité ? Ne pensez-vous pas que ce dispositif, par ses objectifs mêmes – l’insertion sociale et professionnelle de jeunes en difficulté, le renforcement de notre cohésion nationale –, appelle un développement de liens interministériels plus larges et plus forts, y compris financiers, avec les ministères de l'emploi, de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports ou de l’intérieur ?

M. le président. La parole est à Mme le ministre.

Mme le ministre de la défense. Je vous remercie, monsieur Viollet, de saluer cette opération « Défense deuxième chance », sur laquelle nous pouvons tous nous retrouver, ce dont je me réjouis tout particulièrement. Ce dispositif monte en puissance, certains souhaiteraient qu’il se développe plus vite mais nous sommes déjà parvenus à des résultats importants, dans des délais extrêmement rapides. Seule la défense était sans doute capable, en l’espace de trois mois, de faire voter un texte et d’ouvrir un premier centre. Nous avons bien progressé : le processus, lent au début, s’accélère et les résultats positifs de la première promotion incitent à aller encore plus vite.

Cela dit, nous sommes confrontés à plusieurs difficultés, notamment d’ordre immobilier. Pour établir un centre « deuxième chance », il faut disposer, d’une part, de locaux d’hébergement susceptibles d’accueillir les jeunes en nombre suffisant pour créer les synergies nécessaires – 150 places minimum – et, d’autre part, d’équipements sportifs de nature à accompagner la formation comportementale, qui va de pair avec la formation scolaire et professionnelle. Or, nous manquons encore d’un patrimoine immobilier adapté. Des propositions nous sont faites, mais les locaux sont trop petits, ou trop isolés pour que les jeunes puissent rentrer chez eux, ou encore situés dans des bassins d’emploi où il n’y a pas de débouchés possibles, ce qui empêche l’accompagnement vers l’emploi. De surcroît, certains des maires prêts à mettre à notre disposition des locaux n’acceptent pas forcément d’entrer dans le système mis en place par l’EPIDe, ce qui est source de retards. Il nous faut régler les problèmes au cas par cas, ce qui est la seule façon de faire. J’en appelle à tous ceux qui sont ici présents : nous recherchons des locaux pour accueillir ces jeunes.

Je tiens tout particulièrement à saluer M. Borloo, puisque c’est le ministère de la cohésion sociale qui participe principalement à cette opération. Je remercie également le ministère de l’éducation nationale ; j’irai même, pour une fois, jusqu’à remercier Bercy qui a accepté ces formules. Je peux, en conséquence, vous affirmer que ce ne sont pas 50 millions d’euros mais 110 millions d’euros qu’il est prévu d’inscrire à ce titre au budget pour 2007 du ministère de la cohésion sociale, le complément venant de l’Europe. Je ne sais donc pas d’où vous tenez votre chiffre, monsieur Viollet.

M. le président. Nous avons terminé les questions.

Mission « Défense »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Défense », inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Sur l’état B, je suis saisi d’un amendement n° 112 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Cet amendement vise à corriger une erreur matérielle. La commission des finances y est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 112 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Défense », modifiés par l’amendement n° 112 rectifié.

(Les crédits de la mission « Défense », ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à la défense.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

ordre du jour
des prochaines séances

M. le président. Jeudi 9 novembre 2006, à neuf heures trente, première séance publique :

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007, n° 3341 :

Rapport, n° 3363, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Travail et emploi ; articles 57, 58, 59, 60 et 61 :

Rapport spécial, n° 3363, annexe 39, de M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan :

Avis, n° 3364, tome XIII, de M. Bernard Perrut, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Discussion du projet de loi, n° 3080, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil relatif à la construction d’un pont routier sur le fleuve Oyapock reliant la Guyane française et l’État de l’Amapá :

Rapport, n° 3358, de M. Jacques Remiller, au nom de la commission des affaires étrangères.

(Procédure d’examen simplifiée en application de l’article 107)

Discussion du projet de loi, no 3191, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation du protocole du 27 novembre 2003 établi sur la base de l’article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d’un Office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention :

Rapport, n° 3386, de M. Yves Nicolin, au nom de la commission des affaires étrangères.

(Procédure d’examen simplifiée en application de l’article 107)

Discussion du projet de loi, no 3196, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement du Royaume de Norvège et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord relatif à la propriété commune d’un système de sauvetage sous-marin :

Rapport, n° 3403, de M. Jean-Pierre Kucheida, au nom de la commission des affaires étrangères.

(Procédure d’examen simplifiée en application de l’article 107)

Discussion du projet de loi, no 3400, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif au raccordement de l’autoroute A 35 à la route nationale N 2 entre Bâle et Saint-Louis :

Rapport, n° 3402, de Mme Martine Aurillac, au nom de la commission des affaires étrangères.

(Procédure d’examen simplifiée en application de l’article 107)

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007, n° 3341 :

Rapport, n° 3363, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Travail et emploi ; articles 57, 58, 59, 60 et 61 (suite) :

Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ; Développement agricole et rural (compte spécial) ; article 41 :

Rapport spécial, n° 3363, annexe IV, de M. Alain Marleix, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Avis, n° 3365, tome I, de MM. Antoine Herth et Aimé Kergueris, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures.)