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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 10 novembre 2006

45e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Loi de finances pour 2007

SECONDE PARTIE

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007 (nos 3341, 3363).

écologie et développement durable

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’écologie et au développement durable.

La parole est à M. Philippe Rouault, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. En cette dernière année de la législature, je tiens à vous remercier, madame la ministre, pour tout le travail accompli en matière d’écologie. Plus que jamais, le développement durable, dont dépend l’avenir de la planète, est l’enjeu de ce siècle. Le budget qui lui est consacré doit être l’un des budgets prioritaires de l’État, car les Français sont conscients de cet enjeu et leurs attentes en matière d’environnement sont de plus en plus fortes.

L’évolution des crédits de la mission « Écologie et développement durable » n’avait pas été, ces dernières années, à la hauteur de ces attentes. Je me félicite donc que le présent projet de loi de finances propose un rattrapage qui, selon vos propres termes, madame la ministre, place la mission « aux premiers rangs de l’effort financier du Gouvernement pour 2007 ».

Le PLF propose en effet une hausse appréciable des crédits de la mission, de l’ordre de 2,5 %. La dotation proposée pour 2007 s’élève à 637 millions d’euros en crédits de paiement et à 698 millions d’euros en autorisations d’engagement, contre 614 millions d’euros de crédits de paiement votés et 632 millions d’euros d’autorisations d’engagement ouvertes en 2006.

Au reste, les crédits inscrits pour cette seule mission ne permettent pas d’apprécier l’ensemble des efforts consentis : la loi de finances pour 2006 a affecté aux opérateurs de la mission, au premier rang desquels l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, des ressources fiscales qui justifient une diminution, voire une suppression, des dotations budgétaires qui leur étaient précédemment allouées. Compte tenu de ces différents facteurs, la politique de l’environnement devrait enregistrer pour 2007 une hausse globale de ses moyens de 9,3 %. Dans un contexte budgétaire difficile, cette augmentation prend une signification toute particulière, d’autant qu’elle s’accompagne de ce renforcement des ressources fiscales des opérateurs de la mission.

Cet effort traduit tout d’abord la volonté de renouveler notre engagement en matière de prévention de la pollution et des risques. Les moyens affectés à ce programme sont en hausse, puisque les autorisations d’engagement sont ouvertes à hauteur de 141 millions d’euros pour 2007 alors qu’elles devraient s’élever à 135 millions d’euros en 2006.

Dans le détail, on constate la montée en puissance du marché des quotas de gaz à effet de serre. Les crédits affectés à la prévention des pollutions et des risques proprement dite progressent de 28,5 %, pour atteindre 80,6 millions d’euros. Cinq ans après la catastrophe d’AZF à Toulouse, l’inspection des installations classées reçoit de nouveaux apports qui complètent le plan de renforcement pluriannuel de ses moyens d’intervention. La politique des déchets est toujours plus offensive, avec la mise en place d’une taxe sur les déchets d’équipements électriques et électroniques qui servira à financer la filière de recyclage tant attendue. La lutte contre les inondations, enfin, bénéficie d’un engagement de 110 millions d’euros, auquel il faut ajouter les sommes en provenance du fonds Barnier, dont la mobilisation passera de 81 à 109 millions d’euros.

La hausse des crédits de la mission concerne également la protection des milieux et la biodiversité : les moyens affectés au programme « Gestion des milieux et biodiversité » passent de 109,9 à 144,2 millions d’euros, soit une augmentation de 32 %. C’est un point qui fait débat et nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de la discussion.

Les crédits consacrés à la mise en œuvre de la loi sur les parcs nationaux, notamment, sont portés de 34 à 47,1 millions d’euros, soit une augmentation de 38,6 %, tandis que les crédits consacrés à Natura 2000 passeraient de 21,2 à 29,3 millions d’euros, en hausse de 38 %. Le texte prévoit également des crédits à hauteur de 14,8 millions d’euros pour financer les dépenses nécessaires à la gestion, à la préservation et à l’évaluation écologique des espaces. Les opérations « grand site » sont en légère progression : 1,84 million d’euros sont inscrits en autorisations d’engagement afin de poursuivre la restauration des sites naturels français les plus visités, dans le cadre d’une politique partenariale qui porte ses fruits.

En tant que président du groupe d’étude sur l’eau à l’Assemblée nationale et rapporteur pour avis du projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques – texte qui sera prochainement adopté –, je ne peux que soutenir la pérennisation du mode de financement des agences de l’eau, principaux opérateurs du ministère de l’écologie et du développement durable dans ce domaine. Notons que le budget annuel des agences de l’eau est de l’ordre de 2 milliards d’euros, soit plus de trois fois celui de la mission « Écologie et développement durable » : c’est dire leur importance.

Enfin, il est proposé d’augmenter de manière significative les moyens du programme « Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable » : les crédits de paiements prévus s’élèvent à 315,9 millions d’euros, contre 287,3 millions votés pour 2006.

La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances semble poser au ministère de l’écologie et du développement durable des problèmes particuliers, puisqu’elle interdit les mises à disposition qui y étaient jusqu’à présent un procédé de gestion courant. Rappelons que, par ce moyen, un agent rémunéré pour une tâche dans une administration donnée est finalement affecté à une autre administration, ce qui fausse considérablement la portée de l’autorisation budgétaire et ne paraît pas être une pratique de saine gestion.

Tout en estimant que la réduction des mises à disposition est en effet indispensable, je me permets d’insister sur ce phénomène préoccupant pour la capacité d’expertise du ministère. Il serait logique d’intégrer progressivement, dans le calcul du plafond d’emplois du ministère, tous les crédits de personnel concourant à la mise en œuvre de la mission, quel que soit aujourd’hui leur type d’imputation.

Je conclurai en attirant votre attention sur deux opérateurs du programme.

La Cour des comptes a publié en février 2006 un rapport consacré à l’ADEME. Elle y reconnaît la régularité des comptes de l’Agence mais souligne l’écart qui se creuse entre une gestion imparfaite et les sollicitations croissantes dont l’Agence fait l’objet au titre du développement durable. Il faut malheureusement constater que la délocalisation de l’Agence à Angers a été mal pensée et mal conduite, aussi bien sur le plan conceptuel que sur le plan financier. Plus généralement, la Cour des comptes a montré que les conditions de financement de l’Agence rendent difficile l’exercice de ses missions.

Il me semble que l’ADEME aurait tout intérêt à travailler en meilleure liaison avec la direction générale des impôts, afin de mieux connaître et apprécier l’évolution de ses nouvelles ressources fiscales. Elle développerait ainsi une capacité d’anticipation qui lui a trop fait défaut jusqu’à présent.

Le Muséum national d’histoire naturelle, pour sa part, est resté trop longtemps replié sur lui-même et oublié des pouvoirs publics. Cet établissement, auquel la loi a confié la responsabilité scientifique de l’inventaire du patrimoine naturel, a besoin d’un programme pluriannuel d’investissement pour réhabiliter son patrimoine immobilier et sauvegarder ses collections, qui regroupent soixante millions de spécimens botaniques, zoologiques et minéralogiques. Ce programme doit constituer une priorité. La réforme de 2001 fut certes bénéfique au Muséum, mais les efforts engagés doivent être poursuivis pour que, dans un pays où la culture scientifique est encore trop souvent négligée, l’établissement puisse à nouveau mériter son appellation de « Louvre des sciences » en mettant à la disposition du public toutes ses collections.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous ne devons plus considérer l’environnement comme un problème politique, mais comme le plus grand challenge moral de notre civilisation. Le reconnaître, c’est se contraindre à prendre des mesures en ce sens. Je souhaite donc que le programme « Écologie et développement durable » suscite un vrai débat et une prise de conscience de tous les parlementaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Priou, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Christophe Priou, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme Philippe Rouault, je soulignerai l'importance de l'effort consenti en faveur de l'écologie et du développement durable, compte tenu du contexte budgétaire. Les moyens en forte progression consacrés à la protection de la biodiversité permettront d'accompagner prioritairement l'entrée en application de la loi sur les parcs nationaux et de créer deux nouveaux parcs outre-mer, ainsi qu'un parc marin. De même, la politique de l'eau bénéficie de crédits globalement en hausse, tout comme la politique de prévention des risques naturels, en particulier des inondations et des crues. En revanche, il est regrettable que la gestion des déchets ne fasse pas partie de ces priorités, alors même que la réduction de la production des déchets et leur recyclage constituent un enjeu majeur. Dans de nombreux départements, en effet, les plans départementaux de traitement des déchets sont actuellement en panne.

Plusieurs autres points appellent des précisions supplémentaires. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour favoriser l’essor des énergies renouvelables ? Il est par trop réducteur d'aborder cette politique par le seul biais du crédit d'impôt, qui relève de Bercy. Votre ministère a peut-être raté là une occasion de constituer un pôle énergétique de premier plan regroupant les énergies traditionnelles et renouvelables, madame la ministre. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui m’ont conduit à voter contre le projet de fusion GDF-Suez. J’estime en effet que l’énergie, au même titre que la santé, la sécurité, l’éducation, fait partie des missions régaliennes de l’État.

La loi relative aux parcs nationaux a notamment pour objectif de garantir aux communes situées dans le cœur des parcs l'attribution d'une partie forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement afin de compenser les contraintes spécifiques pesant sur l'économie locale. Les crédits correspondant à ces financements n'étant pas inscrits dans le projet de loi de finances pour 2007, cela signifie-t-il que le dispositif est remis en cause ? En revanche, il convient de saluer des initiatives conjointes de votre ministère et de celui de l’agriculture concernant l’élevage dans les zones humides : dans deux régions pilotes, Poitou-Charentes et Pays de la Loire, une prime de 150 euros à l’hectare sera prochainement mise en place. Les quarante-quatre parcs naturels régionaux, telle la Camargue, récemment visitée par vous-même, madame la ministre, et l’assemblée générale des parcs naturels régionaux, sont eux aussi inquiets pour leur avenir, d’autant que de nouveaux parcs seront sans doute ouverts. Plusieurs associations de défense de l’environnement nous ont saisis quant au financement des réserves naturelles régionales. Si je note avec satisfaction l’augmentation de l’enveloppe de Natura 2000, nous avons toujours sur le terrain des problèmes avec les DIREN. À l’heure où nous mettons en place les documents d’objectifs de Natura 2000, nous nous battons par courrier pour que les chargés de mission soient pris en charge à 100 % et non pas seulement aux 80 % ou 90 % que nous obtenons à l’issue de discussions d’épiciers. Nous attendons de votre ministère qu’il donne des orientations fermes aux directions régionales de l’environnement.

S'agissant de la lutte contre la pollution de l'eau et du respect des directives européennes en la matière, quelle est la situation actuelle de la France vis-à-vis de la Commission européenne ? Quel est l'état écologique de l'eau en France et plus particulièrement dans l'Ouest ?

Le Sénat a revu à la baisse le dispositif de crédit d'impôt en faveur de la récupération des eaux pluviales introduit par amendement à l'Assemblée nationale en première lecture du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, que nous devrions examiner le 30 novembre en deuxième lecture. Quelle est votre position sur ce sujet ? Quelle sera, en 2007, l’enveloppe destinée à encourager ces installations de récupération des eaux pluviales ?

Quelle est, par ailleurs, la politique du ministère en matière de lutte contre la pollution marine ? Des entrepôts pour les plans Polmar ont été installés dans un certain nombre de régions. L'État s'est-il bien porté partie civile dans le procès emblématique de l’Erika, qui sera jugé l'année prochaine ? Cela est extrêmement important au regard des sommes engagées par l’État pour les plans Polmar et l’indemnisation des victimes.

Enfin, le Conservatoire du littoral, qui ne perçoit plus de subvention du ministère, bénéficie d'une partie du produit du droit de francisation et de navigation des bateaux à moteur. Or le rendement de cette taxe, qui a fait elle-même l'objet d'une réforme, est en baisse. Quelles solutions envisagez-vous pour garantir des ressources stables et durables à cet établissement, qui a étendu son champ d’intervention ?

Je sais, madame la ministre, que vous répondrez avec concision et amabilité aux ultimes questions et demandes de précision dont je viens de faire part. Comme le précédent rapporteur, et sans doute le suivant, je vous indique que la commission des affaires économiques soutient votre projet de budget pour 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre débat se tient au moment même où se réunit, à Nairobi, la 12e conférence internationale sur le climat. Cette coïncidence met en relief, s'il en était besoin, la dimension mondiale des problèmes qui relèvent de l'écologie et du développement durable. Depuis quelques années, ils figurent de façon constante sur l'agenda des grandes rencontres internationales, et la prise de conscience de l'opinion, tant en matière de changement climatique que de préservation de la biodiversité, se manifeste désormais quasi quotidiennement dans la presse et dans le cinéma. En quelques mois, le paysage s'est éclairci et des avancées notables ont eu lieu. Les réticences des Américains sur le changement climatique, qui ont conduit l'administration Bush à ne pas ratifier le protocole de Kyoto, sont battues en brèche par l'attitude de nombreux États et municipalités américains, laissant présager à court terme une nouvelle donne au niveau fédéral. Le résultat des élections américaines et les craintes en matière de sécurité énergétique favoriseront certainement cette tendance. Mais, dans le même temps, la nouvelle administration canadienne envisage de sortir du protocole et le Japon, dont l’efficacité énergétique lui vaut des lauriers, s'interroge lui-même sur la pertinence de certains aspects du protocole. C'est dire que l'effort doit se poursuivre en renforçant les mesures prises au plan national et en préparant Kyoto II, l'après 2012, à la lumière de l'expérience de la mise en œuvre engagée en 2005.

De ce point de vue, la France bénéficie de son adossement à l'Union européenne qui, dans ce domaine, est novatrice et fait preuve de cohésion. Il faut d’ailleurs saluer la performance de l’Europe sur cet aspect. Cet adossement est un atout pour notre politique. L'Union européenne est désormais unanime à soutenir la proposition française de mise en place d'une ONUE, qui a fait l'objet de discussions informelles lors de la soixante et unième assemblée générale de l'ONU. Cette proposition, préalable à la constitution d'une organisation mondiale de l’environnement qui serait le pendant de l’OMC, correspond à notre engagement en faveur du multilatéralisme et constitue ainsi un levier pour l'ensemble de notre politique étrangère. L’Union européenne représente également un atout en matière de recherche d'efficacité énergétique et de stratégie de développement durable. Je tiens ici à vous féliciter de la grande qualité et de la pertinence de la campagne de publicité en faveur de l’efficacité énergétique lancée par votre ministère. Je crois qu’elle contribuera efficacement à modifier les comportements pour arriver à des résultats. J’ai d’ailleurs indiqué, lors de la remise des prix Territoria au Sénat, que des changements de comportements dans les administrations publiques permettraient d’économiser 10 % d’électricité, soit 50 térawattheures sur 500, ce qui n’est pas négligeable. Enfin, l’Union européenne est un atout par l’application du système européen d'échanges de quotas. Ce dernier, s'il a connu quelques déboires en cours d'année en raison du niveau trop important des allocations, s'avère un outil précieux qu'il convient de perfectionner, ce que la Commission européenne s'apprête à proposer dans le cadre de l'approbation des PNAQ-II. Le marché du CO2 prend rapidement une ampleur importante en Europe comme aux États-Unis et il faut noter le rapprochement entre la Californie et le Royaume-Uni, sur lequel, après des hésitations, l’Union européenne se prononce favorablement. Les efforts concertés de lutte contre le changement climatique sont donc réels.

Toutefois, j’appelle l'attention sur un récent rapport des Nations unies : si les émissions de gaz à effet de serre ont légèrement diminué dans les pays industrialisés, entre 1990 et 2004, la tendance est à nouveau à la hausse pour la période 2000-2004. Le chef du secrétariat de la Convention climat estime cependant que les parties au protocole de Kyoto ont de bonnes chances d'atteindre leurs objectifs. Ce rapport indique également que la réduction des émissions a été faible en France et au Danemark – respectivement moins 0,8 % et moins 1,1 % – alors qu'elle a été très marquée au Royaume-Uni et en Allemagne : moins 14,3 % et moins 17,2 %. Il est vrai que les niveaux de départ étaient différents. Sur la période 2003-2004, l'Agence européenne de l'environnement relève que les émissions de CO2 en France ont augmenté de 0,3 %, alors que nous bénéficions de l’atout nucléaire. Ces évolutions doivent, à mon sens, nous conduire à redoubler d'efforts.

Je souhaiterais, madame la ministre, obtenir quelques précisions sur la création d'un fonds d'achat de crédits carbone qui avait été annoncée en février 2005, avec une dotation de 50 millions d'euros. Cette annonce avait été faite lors du dernier Congrès de Versailles, ce qui lui confère d’autant plus de solennité. Ce fonds était notamment destiné à compléter nos instruments de coopération avec les pays du Sud, en particulier les pays émergents, afin de les aider à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. J'ajoute qu’il pourrait servir à la constitution d'une réserve de crédits carbone, qui serait utile pour aider notre pays à remplir ses engagements de réduction par quatre de ses émissions de CO2 à l'horizon 2050. La mise en place de ce fonds est-elle prévue dans le plan Climat 2006 qui doit nous être présenté prochainement et sur lequel nous fondons beaucoup d’espoirs ?

Au-delà de la lutte contre le réchauffement de la planète, la France joue également un rôle actif dans les efforts de préservation de la biodiversité. Sur le plan international, elle milite notamment pour la mise en place d'un « mécanisme international d'expertise scientifique sur la biodiversité », d’ailleurs pas toujours bien compris dans notre pays. Ces deux champs d'action – changement climatique et biodiversité – constituent les priorités, à 33 % chacun, des interventions du Fonds pour l'environnement mondial, auquel la France apporte une contribution de plus en plus significative. Elles figurent désormais en tête des préoccupations de l'Agence française de développement, donc des actions de coopération bilatérales menées par notre pays.

Si les 2,5 millions d’euros de crédits de la mission « Écologie et développement durable » consacrés à l'action internationale – qui demeurent stables d'un exercice à l'autre dans un budget global en progression – ne reflètent pas cette réalité, c'est avant tout, et on doit le regretter, parce que l'action de la France est budgétairement éclatée entre plusieurs missions. Malgré la LOLF, l'effort de transversalité engagé au niveau du CIDD ou par la création de conseillers environnement dans les ambassades, à l'instar des hauts fonctionnaires du développement durable dans les ministères, la visibilité budgétaire de notre réel effort n'est pas parfaite. Je persiste à penser que votre ministère doit avoir un rôle pilote dans ce domaine, en étroite liaison avec le ministère des affaires étrangères, où il conviendrait d’ailleurs de créer une direction des affaires globales, qui permettrait de répondre au besoin de transversalité en matière de mondialisation comme d’environnement. Les contributions françaises aux différents fonds internationaux pour l'environnement ne sont pour l’essentiel pas versées par le ministère de l’écologie mais, selon les cas, par le ministère des affaires étrangères ou celui des finances. À titre d'exemple, la participation française au Fonds pour l'environnement mondial, qui est l'instrument financier des conventions issues de Rio, relève de Bercy. Cette gestion éclatée ne permet pas d'apprécier l'ensemble des contributions françaises aux organisations internationales impliquées dans la préservation de l'environnement. Cela est regrettable, car certaines d’entre elles ont progressé de façon significative : la France a ainsi versé, en 2006, 8,9 millions d'euros au PNUE, soit une participation en progression – plus obligatoire que volontaire, il faut bien le reconnaître – de 11 % par rapport à 2005. En ce qui concerne les fonds mis en œuvre au titre de la convention climat et du protocole de Kyoto, la France prévoit, en 2007, de verser une contribution de l'ordre de 10 millions de dollars au Fonds pour les pays les moins avancés. On le voit, ces contributions ne sont pas négligeables mais il faudrait pouvoir bénéficier d'une vision exhaustive de l'effort financier de la France, qui est significatif.

Je tiens, en revanche, à saluer la diffusion prochaine d'un document de politique transversale relatif à la politique « climat ».

Je tiens, madame la ministre, pour conclure, à souligner le travail remarquable de la mission interministérielle pour l’effet de serre, dont les moyens sont accrus dans le projet de budget qui nous est présenté, conformément à nos recommandations de l'année dernière. Cet investissement des experts est important au moment où se réunit la convention climat. Je crois utile de renforcer ses moyens dans l’avenir pour plusieurs raisons.

D’abord, il serait souhaitable de disposer de plus d’un seul expert international, aussi talentueux soit-il, connaissant bien les problèmes internationaux et maîtrisant parfaitement l’anglais – c’est important dans les conventions internationales – là où d’autres pays ont l’avantage d’avoir une dizaine d’experts. Dans ces conditions, il me semble nécessaire de renforcer la MIES, dont le fonctionnement repose sur la mise à disposition de personnels d'autres ministères.

Ensuite, le renforcement des outils d’expertise, sur lequel une étude est en cours, me paraît d’autant plus nécessaire que la coopération avec les pays émergents – la Chine, l’Inde – est importante et se développe.

Le renforcement de ces outils, à commencer par la MIES, est enfin à examiner dans la perspective d'une double échéance essentielle. La France assurera la présidence de l'Union européenne au second semestre de 2008, au moment clé de la négociation internationale sur le futur régime multilatéral du climat, c'est-à-dire Kyoto II. Cette concordance de calendrier constitue pour la France un enjeu important.

Sous réserve de ces modestes observations, la commission des affaires étrangères a, sur ma proposition, donné un avis favorable aux crédits de la mission « Écologie et développement durable ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en arrivons aux orateurs inscrits.

La parole est à Mme Geneviève Gaillard.

Mme Geneviève Gaillard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une enquête récente ayant pour thème les Français et l'environnement montre que 95 % des personnes interrogées sont très préoccupées par cette problématique, ce qui ne nous surprend pas au regard des dégradations permanentes dont ils peuvent quotidiennement se rendre compte et du fait des répercussions dont ils souffrent dans leur chair, sans parler du coût sociétal en termes de santé publique, d’autant plus que les premiers atteints sont, en France comme dans le monde, les plus pauvres.

Parallèlement, le rapport de l'Institut français de l’environnement, publié le 17 octobre dernier, est particulièrement clair quant à ce qui est en train de se produire dans notre pays et illustre le résultat des politiques publiques menées depuis quelques années. Malgré quelques petites avancées, souvent ponctuelles, l'état de l'environnement en général est loin d'être bon. J'aimerais souligner au passage que la possible entrée en lice pour les présidentielles de quelqu'un comme Nicolas Hulot, dont on sait par ailleurs qu'il a été, en son temps, conseiller du chef de l’État et a placé quelques espoirs en lui et en sa capacité d'engagement pour une politique volontariste, démontre la crise de confiance de l'opinion publique et des ONG vis-à-vis des politiques environnementales.

Les citoyens savent compter et faire la différence entre le nombre astronomique d'incantations écologiques du Gouvernement et le nombre pitoyable d'euros mobilisés, et ils se sentent aujourd'hui abusés, trompés. Ce budget pour 2007 ne fera que conforter tristement cette analyse. Les Français ne sont pas, par leur seul comportement, responsables de la pollution de l’air, des eaux, des sols, de la diminution de la biodiversité, de l’augmentation des gaz à effet de serre. Tous les ministères sont concernés : transport, agriculture, pêche, tourisme, ville, économie et finances. Le vôtre, madame la ministre, tente trop souvent de masquer les déviances des autres dans ce domaine. Ce n'est pas votre petit budget, représentant 0,4 % du budget de l'État, qui pourra rapidement améliorer la situation, même s’il augmente cette année.

Il en faut plus, madame la ministre, car avancer certes dans le bon sens mais sans élan collectif partagé peut se révéler fatal. De plus, il ne faut pas s'arrêter au milieu du gué, sous peine d'être vite submergé ! Que dire quand, parfois, on semble même reculer ? Prenons deux exemples qui illustrent ces absences d'avancées.

D’abord, le serpent de mer que constitue le projet de loi sur l'eau, actuellement en cours de discussion, qui, malgré l'inscription dans le corpus constitutionnel du principe de précaution et du principe pollueur-payeur, reste encore très en deçà de ce que nous sommes en droit d'attendre. Jean Launay reviendra sur le sujet de ce mi-parcours préjudiciable et je ne m'y attarderai donc pas.

Ensuite, la loi littoral date de 1986. Je déplore l’habile mais néfaste modification de l'article L. 145-1 du code de l'urbanisme par voie d'amendement. Il en est résulté, cet été, un décret qui permet de sortir du champ de la loi, donc de rendre vulnérables à la construction, les surfaces en bordure de petits estuaires, les rivages des rias, étiers et marais côtiers auparavant protégées par la loi. Ce sont de petites choses, me direz-vous, mais tellement importantes.

Survolons maintenant les programmes relatifs à votre budget. Le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions » est le grand perdant de ce budget. Tout diminue : les autorisations d’engagement et les crédits de paiement.

Je voudrais signaler que je trouve, ainsi que mon collègue Kucheida, assez surprenant, voire inadmissible, que le Gouvernement décide de dissoudre l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers. La gestion de ces risques correspond en effet à de forts enjeux pour les populations des 800 communes minières du Nord - Pas-de-Calais, Lorraine, Centre-Midi et Grand-Ouest. Le ministère de l'industrie est responsable. Ne pensez-vous pas qu'une telle disparition est superflue et que vous pourriez user, dans le cadre de vos compétences, de vos capacités de conviction pour éviter un tel gâchis ?

Le programme « Gestion des milieux et biodiversité » est le grand gagnant. Sur le volet préservation de la nature et de la biodiversité, on peut cependant émettre de sérieux doutes en regardant la mise en place plutôt lente des différents plans d'action. Car, malgré tout ce qui a été accompli depuis de nombreuses années, on s’aperçoit malheureusement que la biodiversité continue de diminuer. Il manque toujours des hommes, des crédits et une vraie détermination.

Je ne peux pas évoquer ce volet sans souligner que nous fêtons cette année la loi de 1976, qui organise entre autres la protection de la faune et la flore. Cette loi représente un des textes fondateurs du droit de l'environnement. C’est une grande loi de la République, qui constitue un repère dans notre histoire collective car elle consacre la protection de la nature dans son ensemble et qu'elle considère que la technique n'est pas simplement une source de progrès mais qu'elle peut aussi constituer un risque. Le cadeau d'anniversaire aurait pu être plus gros et plus appétent. C’est bien de créer des parcs naturels, y compris celui de Guyane. Il était attendu, mais vous avez été obligée de rappeler à l'ordre le ministre de l'industrie, qui, dans le même temps, autorisait une entreprise à continuer de pratiquer l’orpaillage en plein coeur du parc. C’est dommage. Cela montre bien le degré d'intérêt de certains de vos collègues pour la préservation de l'environnement !

On peut cependant constater que ce programme, qui profite d'une hausse sensible de ses moyens budgétaires, mérite une analyse plus détaillée, et mon collègue Jean-Paul Chanteguet y reviendra.

L'un des objectifs de ce programme comporte un indicateur concernant les zones humides. Pour atteindre une bonne préservation de ces territoires, il faudrait des objectifs bien plus ambitieux. Nous pouvons à cet égard regretter que l'on ait ergoté sur l'exonération de la taxe sur le foncier non bâti à l'occasion du vote de la « loi territoires ruraux », n'accordant une exonération totale qu'à une partie seulement des zones humides d'importance. Au surplus, prévoir que 2 % seulement des zones humides bénéficieront d'une intervention des agences de l'eau signifie-t-il que l'on accepte de tirer un trait sur les 98 % qui restent ? Nous savons que ces zones sont fragiles. Elles sont utiles dans une bonne gestion de l'eau et pour le maintien de la diversité biologique.

On a vu, pendant l'épisode de transe qui a traversé notre pays au sujet de l'influenza aviaire, combien ces zones sont importantes pour les oiseaux migrateurs et à quel point leur disparition remettrait en cause les équilibres naturels et pourrait avoir des conséquences néfastes en termes de santé publique.

J’espère que vous saurez vous opposer fermement au détournement de crédits affectés à l’accompagnement de la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées, qui sera proposé par amendement.

Je tenais à vous faire part de mon inquiétude concernant le dévoiement du plan loup, qui autorise le tir de six loups par an. Outre son injustice, ce plan peut s’avérer contre-productif. De plus, deux loups ont été tirés simultanément en Isère, en total irrespect de la procédure prévoyant la levée du dispositif dès l’abattage d’un loup. Que comptez-vous faire, madame la ministre ? Certains hurlent dans cet hémicycle, au nom du respect de la propriété privée. Je suis surprise de ne pas les entendre hurler de la même façon pour dénoncer le non-respect de la loi dans ce domaine.

Je voudrais connaître votre avis sur l'aboutissement de la procédure concernant la reconquête du label par le parc naturel interrégional du Marais poitevin, qui subit les assauts répétés de M. le président du conseil général de Vendée, M. de Villiers, et de certains parlementaires de votre majorité. Je crains que la situation ne soit dramatique et que nous ne parvenions pas à reconquérir le label parc naturel régional.

En ce qui concerne le programme « Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable », je pense que nous sommes encore loin d'atteindre les objectifs que les citoyens demandent, malgré les grandes déclarations qui peuvent être faites par le Gouvernement. Les sommes disponibles ne sont pas à la hauteur des défis à relever en matière de diminution des émissions de gaz à effet de serre et de développement des énergies renouvelables. Les politiques publiques sont parfois illisibles et, revenant à mon propos d'introduction, je ne pense pas que votre ministère ait aujourd'hui la capacité d’entamer une inflexion majeure. Mon collègue Tourtelier y reviendra ; je ne dispose pas d’assez de temps pour citer des exemples.

En ce qui concerne la stratégie nationale du développement durable, j’ai lu les rapports présentés au Parlement et je regrette que les recommandations du Conseil national du développement durable n'aient pas été intégrées à leur juste valeur. Je déplore le manque de cohérence de certains indicateurs de suivi choisis et le peu de lisibilité de l'évolution d'une année à l'autre. On ne rend pas compte des retards ou blocages, de façon que puissent être précisées les priorités de mise en œuvre. On insiste plutôt sur la nécessaire révision, ce qui est une manière d'effacer le mauvais état des réalisations.

J'ai peine à comprendre, après avoir étudié de nombreux budgets, comment le Haut comité des fonctionnaires peut être satisfait.

Au final, nous pouvons légitimement nous interroger sur la finalité actuelle de la stratégie nationale de développement durable, optimisation réelle de l'effort national ou faire-valoir un peu narcissique sans obligation de résultat.

Globalement, les crédits alloués à la mission « Écologie et développement durable » augmentent, mais on a déjà remarqué qu'une augmentation, aussi forte soit-elle sur un budget plus que maigre, ne donne jamais de grosses marges de manœuvre. De plus, le Gouvernement a décidé pour 2007 de reconduire les modalités de la réserve de précaution mise en place en 2006. Cela n’arrange rien.

Que dire, dans le contexte budgétaire général, de l'efficacité de la LOLF du point de vue de sa pertinence d'outil au service de la préservation de l'environnement et du développement durable ? La stratégie d’ensemble de la mission d'information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances manque de lisibilité. On peut regretter, en effet, le caractère purement ministériel du budget de la mission « Écologie ». Comme le soulignait le rapport d'information de la mission d'information sur la LOLF de mai 2004, cette présentation a l'inconvénient de maintenir l’éparpillement des actions de l'État, ce qui ne permet pas d'obtenir une analyse aussi pointue qu'on le voudrait. Il faut noter, en outre, que de nombreux indicateurs de performance utilisés dans la loi de finances pour 2006 ont été remplacés sans qu'on puisse aujourd'hui juger de leur efficacité.

D'un mot, enfin, je ne voudrais pas que la critique du budget confine ici à un dénigrement de votre action, madame la ministre. On connaît les combats que vous avez menés cet été pour tirer vers le haut les arbitrages budgétaires, alors que les estimations et prospectives sur le réchauffement climatique, puis le prix galopant du pétrole stocké et le tarissement parallèle des ressources accessibles ont suscité une réponse gouvernementale sous forme d'affichage électoraliste via la fausse bonne idée des biocarburants à tout-va. Je vous remercie d'avoir su dénoncer ces énormes faiblesses et limites.

Malheureusement, toute votre bonne volonté, madame la ministre, ne peut compenser la faiblesse de votre budget, parfois accentuée par l'action et les financements des autres ministères. Je le disais au début de mon intervention : les moyens budgétaires consentis pour la préservation de l'environnement et le développement durable sont inversement proportionnels à l'urgence et à la gravité des menaces, ainsi qu'à la somme des discours et vœux pieux, voire démagogiques, de votre gouvernement.

C'est pourquoi nous ne voterons pas ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous allons malheureusement examiner la partie qui est, depuis trente ans, la plus hypocrite du budget, celle réservée à l’environnement.

Pourtant, ce devrait être le tout premier budget, comme l’ont déjà indiqué nos collègues précédents, compte tenu de ce qui se passe et de ce que nous savons. Malheureusement, madame la ministre, il ne représente que 0,4 % du budget total de l’État. Nous allons l’étudier devant un auditoire restreint de dix députés, y compris vous-même, monsieur le président. Cela prouve la gêne que nous ressentons à évoquer un problème aussi délicat et crucial compte tenu des très faibles moyens dont dispose votre ministère.

Je me suis beaucoup interrogé, madame la ministre, pour comprendre pourquoi les propos que j’avais tenus l’année dernière sur le problème des nuisances sonores de l’aéroport de Roissy à Garges-lès-Gonesse, vous avaient autant blessée. Je me souviens que vous aviez jugé inadmissible que l’on se préoccupe de cette question, et que quelqu’un qui ne connaissait rien à ces problèmes « vous donne des leçons », à vous qui étiez maire de cette commune depuis trente ans. Pour ma part, j’avais trouvé cela un peu fort de la part d’un ministre, mais j’ai compris depuis.

L’autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires – l’ACNUSA – établit un bilan accablant et dénonce les carences de l’action publique en matière de lutte contre les nuisances des transports aériens. L’ACNUSA parle de véritable catastrophe environnementale. Certaines communes, en effet, ont une concentration plus importante que d’autres en oxyde d’azote. C’est le cas dans certains secteurs de Garges-lès-Gonesse, Bonneuil par exemple. Toujours selon l’ACNUSA, les atterrissages et décollages passeront à plus de 900 000 en 2015 contre 530 000 en 2004, soit d’un avion par minute, en heures de pointe, à un avion toutes les trente secondes : cela revient à doubler les émissions sonores et les rejets chimiques.

Face à cette catastrophe programmée, on tente de nous anesthésier à coups de développement durable, d’approche équilibrée ou de commerce équitable. Mais les populations survolées ne sont pas dupes. En effet, elles sont, plus que jamais, mobilisées, et, face au mépris des pouvoirs publics, elles sont déterminées à mener, cette année, un combat devant les tribunaux. Je pourrais, hélas, évoquer aussi les problèmes de santé publique et la décote des appartements.

C’est donc un bien tragique bilan, et je comprends votre gêne, madame la ministre.

Dans un autre domaine, on nous dit que la biodiversité réglera tout, notamment grâce à l’arrivée de cinq ours dans les Pyrénées, dont une, malheureusement, s’est suicidée : elle ne voulait probablement pas que son enfant naisse dans un lieu où elle avait été transportée d’une manière brutale, déracinée. Elle est montée jusqu’au sommet de la montagne et s’est donné la mort. Il vous a fallu trois cents gardes mobiles chaque fois qu’un ours a été introduit. Et vous êtes vous-même venue en papamobile, n’hésitant pas à traiter les Pyrénéens d’ânes et d’imbéciles ! Vous avez même réussi à réaliser une introduction de nuit !

Maintenant, on ne peut plus, dans nos Pyrénées, baisser culotte derrière un arbre sans y trouver un garde-chiourme. Il y a des gardes partout ! C’est un véritable régime policier, qui rappelle les plus tristes périodes de notre histoire. Et nous en sommes désormais réduits à nous expliquer devant les tribunaux !

Nous voilà bien loin des véritables enjeux de notre planète. Je reviens, mes chers collègues, du Rif marocain. Je suis passé par Melilla où j’ai vu des centaines d’hommes et de femmes qui essaient de passer du Maroc en Espagne pour rejoindre le continent européen, et certainement la France. Ils sont déracinés de leurs territoires, où il n’y a aucun avenir pour eux, car ils y sont méprisés.

Au nom de la biodiversité, vous avez, madame la ministre – certainement pour calmer ceux qui montaient trop vigoureusement au créneau contre vous du côté de Roissy – humilié les Pyrénées et les Pyrénéens. Vous n’aviez pas le droit de faire cela ! Je me fais, quant à moi, de l’écologie et de la politique environnementale de notre pays – de notre grand pays, celui des droits de l’homme –, une tout autre idée !

J’aurais tant à dire, mais je m’arrête là, car je pense que vous avez compris le sens de ma démarche !

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'actualité est dominée par la question du changement climatique, particulièrement cette semaine, quelques jours après la célébration de la journée internationale contre le changement climatique, passée totalement inaperçue alors que le débat international sur la planète se tient en ce moment à Nairobi, et, que l'écologie s'est invitée, depuis quelques jours, dans la campagne présidentielle.

Nous ne comptons plus, en effet, les films, documentaires ou fictions, les articles de presse et autres pages d'opinions, les rapports d'informations d'économistes, de parlementaires ou de scientifiques, les prises de positions politiques de tous bords, du Nord comme du Sud, qui s'alarment chaque jour des conséquences désastreuses de l'effet de serre sur notre planète : sécheresses de plus en plus dures, cyclones chaque fois plus violents, inondations de plus en plus fréquentes, hausse des températures. L'ensemble de ces catastrophes s'abattant particulièrement sur des populations déjà extrêmement vulnérables.

En avril dernier, la mission d'information sur l'effet de serre menée par notre collègue Nathalie Kosciusko-Morizet a remis un rapport préconisant de poursuivre, de toute urgence, un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 25 % d'ici à 2020, afin de limiter le réchauffement de la planète, au lieu des 5,2 % d’ici à 2012 du protocole de Kyoto.

Sans parler du Président Chirac qui, en 2002, rappelait, lors d'un discours solennel – que l’on doit à Nicolas Hulot – à Johannesburg : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l'admettre. L'humanité souffre ». Or, tout le monde en convient, politiques et scientifiques, économistes et citoyens, notre planète souffre toujours et plus que jamais. Ces mots sonnent juste et nous aurions envie d'applaudir mais qu'a fait ce gouvernement depuis 2002 pour inverser la tendance ? Vous avez privatisé GDF, adopté une loi sur l'eau qui en fait un bien marchand, abandonné la gestion des déchets nucléaires aux intérêts privés.

Qu’attendons-nous pour nous doter d'une véritable politique écologique qui prenne réellement en compte les urgences écologiques ?

Car aujourd'hui, fort d'une augmentation budgétaire non négligeable de ce ministère, puisqu'il passe de 0,26 % du budget de la nation à 0,39 %, tout en créant ses propres ressources fiscales, ce gouvernement se targue de prendre véritablement la mesure du problème !

Derrière de grands discours de façade, l'inconstance de votre position politique et financière face aux dangers dont je viens de faire état et qui n'auront échappé à personne est très claire : la recherche est inexistante, la ligne "Lutte contre le changement climatique" a purement et simplement disparu au sein de la mission "Écologie et développement durable". Quid enfin du grand programme pour le développement des énergies renouvelables ?

Mais surtout, comment vous est-il possible, madame la ministre, même si je comprends un certain nombre de vos contradictions, de défendre ce budget quand votre gouvernement vient d'adopter une loi privatisant Gaz de France alors que, aujourd'hui plus que jamais, seule l'existence d'un pôle public de l'énergie pourrait nous permettre de développer une recherche efficace en matière d'énergies renouvelables, entre autres ?

L'énergie et l'eau, pour ne prendre que ces deux secteurs, sont – et devraient être considérés comme tels – des biens publics mondiaux fondamentaux, trop importants pour les laisser aux seuls intérêts financiers. Or votre proposition budgétaire ne prend aucunement en compte ces aspects.

Plutôt que de favoriser l'intérêt général, ce sont, une fois encore, les opérations financières et privées qui primeront. Plutôt que de réfléchir sur le long terme, ce sont les intérêts financiers dictés par des enjeux à court terme qui auront raison de votre politique écologique.

Or, à l'heure où le très pertinent rapport Stern, rapport anglais commandé par Tony Blair et publié le 30 octobre dernier, révèle que le coût économique du réchauffement de la planète pourrait s'élever à plus de 5 500 milliards d'euros si les gouvernements ne prenaient aucune mesure significative pour mettre sous contrôle les émissions de gaz, pensez-vous vraiment que ce budget réponde à cet objectif prioritaire ? Non seulement l'investissement financier dans la lutte contre le réchauffement climatique ne pénaliserait pas l'essor économique des pays industriels ou non, mais, cette démarche politique et volontariste serait créatrice de richesses.

Le même rapport Stern, dont l’auteur, je le rappelle, n'est autre qu'un ancien économiste de la Banque mondiale, dont je ne partage d’ailleurs pas l'intégralité des idées, insiste sur l'importance d'investir dans la recherche et le développement, ainsi que dans les nouvelles technologies moins polluantes : je ne vois rien dans ce budget qui soit à la hauteur des signaux d’alerte que nous ne cessons de lancer.

M. Jean Lassalle. C’est vrai !

M. Patrick Braouezec. Ce rapport tombe à pic et insiste sur l'importance d'apporter une réponse politique et volontariste au changement climatique. La prise en compte doit se faire financièrement et sur le long terme : nous ne pouvons plus rejeter la faute sur nos concitoyens qui seraient, au choix, mal éduqués, incapables de gérer convenablement leur consommation d'électricité ou trop dépendants de leur véhicule. Même s’il est important de responsabiliser les citoyens français, dès leur plus jeune âge, à la question écologique, nous ne pouvons leur faire porter le chapeau.

Mme Geneviève Gaillard. En effet !

M. Patrick Braouezec. La réponse doit avant tout être politique.

M. Jean Lassalle. Absolument !

M. Patrick Braouezec. En attendant, le budget de l'ADEME, qui sera chargée de cette question, stagne.

Un exemple parmi d'autres, la crise du logement avec son lot de problèmes – hausse des loyers, incapacité à accéder à un logement – amène les populations urbaines à s'installer de plus en plus loin des centres. Or les moyens de transports ne sont pas automatiquement, loin s'en faut, aménagés pour faire face à ces nouvelles demandes. Le recours à la voiture augmente donc immanquablement. Le libéralisme sauvage, voire l'anarchisme – on arrive à faire coïncider anarchisme et libéralisme ! – dont ce gouvernement fait preuve dans la gestion du marché immobilier, du parc de logements et de l'aménagement du territoire, impose des choix tout à fait contraires aux principes fondamentaux du développement durable.

Mme Geneviève Gaillard. C’est vrai !

M. Patrick Braouezec. De la même façon, la manière dont est abordée la question du transport, qui n'est autre que le premier secteur d'émission de gaz à effet de serre, révèle votre difficulté à concrétiser des discours qui restent de façade.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Patrick Braouezec. Comment peut-on encore envisager de construire près de 3 000 kilomètres d'autoroutes d'ici à vingt ans ? Comment dès lors osez-vous, dans la présentation budgétaire, faire l'apologie des modes de transports complémentaires, alors que les crédits du programme « Transports terrestres et maritimes » sont en diminution de 11,5 % ?

M. Jean Lassalle. En effet !

M. Patrick Braouezec. Au-delà des beaux discours, nous attendions un réel engagement des pouvoirs publics en faveur du développement du ferroutage et du transport fluvial, qui passerait par la constitution d'un grand service public du transport.

Par ailleurs, nous devrions nous engager de façon déterminée vers une diversification de nos sources d'énergie et, notamment, la promotion des énergies renouvelables. Toutes les énergies seront utiles pour compenser à l'avenir non seulement l'épuisement rapide des sols, des ressources pétrolières, mais aussi les risques de perte d'indépendance énergétique consécutifs à l'insuffisante croissance de nos capacités de production. Le développement des énergies renouvelables n'est évidemment pas rentable à court terme, pas encore compétitif. Mais l'avenir de notre planète ne mérite-t-il pas quelques investissements afin, que, comme le préconise le rapport Stern, nous soyons capables de proposer des alternatives dans un avenir proche pour faire face à l'épuisement des énergies fossiles, à la réduction de la biodiversité et au réchauffement de la planète.

D'aucuns ont emprunté cette voie, individuellement ou collectivement. Mais quels avantages en tirent-ils financièrement ? Aucun, ou si peu !

Et une fois encore, ce sont les plus modestes qui pâtissent le plus de cette dégradation.

Mme Geneviève Gaillard. Eh oui !

M. Patrick Braouezec. En effet, qui se retrouve confronté le plus durement à la hausse des charges dans les logements ? Qui doit faire face à la hausse déraisonnable du prix de l'essence ? Qu'en est-il concrètement de la fameuse taxe pollueur-payeur ? Quels moyens vous donnez-vous pour éviter le pire ?

Et les pollueurs ? Sont-ils réellement taxés à la hauteur des pollution qu'ils engendrent ? Les bénéfices de certaines entreprises se révèlent souvent indécents aux yeux de leurs employés. Mais cette indécence est d’autant plus grande quand on sait que ces bénéfices ne sont jamais taxés. Les entreprises doivent être mises en face des conséquences de leurs actions afin que le slogan « qui pollue paie » soit effectif.

Réduire de 25 % nos émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020 supposerait, entre autres, de remettre à plat tout ce qui encourage l'émission de gaz à effet de serre, en commençant par abolir l’étrange exonération de TVA pour le kérosène utilisé dans le transport aérien.

Le rapport présenté par Nathalie Kosciusko-Morizet en avril dernier sur le changement climatique,…

M. Jean Launay. N’oubliez pas Jean-Yves Le Déaut !

M. Patrick Braouezec. …qui avait le mérite de pointer quelques éléments essentiels, ne semble pas avoir su retenir votre attention : quid de la proposition de faire basculer la fiscalité qui pèse sur le travail vers une fiscalité qui pèserait sur la pollution ?

Mes chers collègues, l'enjeu de notre débat porte sur les conditions de vie des générations futures et l'avenir de la planète. Parce que le budget que vous nous présentez, madame la ministre, n'est qu'un budget de façade qui replâtre, à grands coups de fausses mesures et de pseudo-missions, les fossés laissés béants par une incapacité politique et financière à prendre véritablement la mesure des catastrophes annoncées, le groupe communiste et républicain ne votera pas votre proposition budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin. Madame la ministre, il m'est d'abord agréable de saluer la détermination tranquille qui vous anime, malgré les difficultés de votre tâche, à un moment où le regard de la société française sur les questions de l'écologie et du développement durable s'aiguise et s'élargit. Les changements climatiques, la prise de conscience que les ressources naturelles ne sont pas illimitées, les menaces sur la biodiversité vont nous conduire, nous conduisent déjà, à des changements de priorités et de comportements. L'expression d’« urgence écologique » est même entrée dans le langage commun.

Il est donc satisfaisant que le projet de loi de finances pour 2007 consacre aux politiques environnementales des moyens en augmentation. Est ainsi réaffirmée la priorité accordée à la protection de la biodiversité, à la prévention des pollutions et des risques ainsi qu’à la préservation du bon état écologique de l'eau.

La gestion de la diversité biologique et paysagère constitue l'une des priorités de l'action de votre ministère, avec pour objectif d’enrayer la perte de biodiversité d'ici à 2010. Dans cette perspective, les crédits affectés à la biodiversité sont en forte augmentation – + 30 % –, accompagnant deux mesures phares.

Il s’agit, d’une part, de l'application de la loi du 14 avril 2006 sur les parcs nationaux, dont notre collègue Jean-Pierre Giran a été le brillant rapporteur, et qui a conduit à créer le parc amazonien, celui de La Réunion et l'établissement public des parcs nationaux de France. Nous nous félicitons qu'un amendement adopté lors de la discussion de la première partie de la loi de finances permette d'abonder de 3 millions d'euros la dotation globale de fonctionnement des communes situées dans les parcs nationaux.

Il s’agit, d’autre part, de la constitution du réseau d'espaces protégés Natura 2000. Le 30 avril 2006, respectant enfin l'échéance fixée, la France a présenté à la Commission européenne un réseau cohérent de 1 700 sites qui couvrent désormais 6,5 millions d'hectares, soit 11,8 % du territoire métropolitain.

S'agissant plus particulièrement de la prévention des risques technologiques, ce budget poursuit, et c'est tant mieux, la mise à niveau du nombre d'inspecteurs des installations classées, notamment grâce à la création de nouveaux postes qui étaient attendus pour assurer un contrôle efficace des sites industriels.

Ce programme permet également d'accompagner la montée en puissance des plans de prévention des risques technologiques et des plans de prévention des risques naturels.

Je tiens également à souligner les progrès faits en matière de gestion des déchets, qui rendent réaliste l'objectif fixé de réduire dans cinq ans à 250 kilos par personne et par an les déchets mis en décharge ou incinérés et, dans dix ans, à 200 kilos. Le nombre des décharges illégales a pu être ramené de 942 en septembre 2004 à 414 en juillet 2006. Grâce à votre détermination, madame la ministre, la mise aux normes de tous les incinérateurs a été achevée et nous pouvons nous en réjouir.

Vous vous êtes également engagée dans une politique volontariste d'amélioration de la qualité de l'air et de l'environnement sonore, avec l'application du plan national d'action contre le bruit. Toutefois, il serait souhaitable à l'avenir de mieux identifier dans le bleu budgétaire les crédits affectés à cette action.

Pour ce qui est de la politique de l'eau, très bien traitée par Philippe Rouault, votre ministère va se doter d'un nouvel instrument : l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA. Pouvez-vous nous préciser quand il sera opérationnel ?

Permettez-moi aussi de faire remarquer que la dispersion des crédits consacrés à la politique de l'eau et leur répartition sur deux programmes différents au sein de la mission « Écologie » n'en facilitent pas la lisibilité.

Mme Geneviève Gaillard. Très juste !

M. Didier Quentin. Il apparaît souhaitable pour l'avenir de regrouper ces moyens au sein d'un même programme, afin d'affirmer le caractère essentiel de la politique de l'eau.

M. Jean Lassalle. Tout à fait !

M. Didier Quentin. À côté de ces politiques sectorielles, votre action accompagne les politiques transversales de développement durable et de lutte contre l'effet de serre.

Le pacte national pour l'environnement, présenté par le Premier ministre lors de sa conférence de presse du 4 octobre 2006, est l'illustration d'une politique volontariste dont nous ne pouvons que nous féliciter. Elle comprend notamment la création d'un livret de développement durable et la mise en place d'un plan de développement des biocarburants, avec pour objectif la multiplication par dix, d'ici à 2015, de leur production.

Je ne reviendrai pas sur l'action conduite au plan international, en particulier dans le cadre du protocole de Kyoto, largement évoquée par notre rapporteur Jean-Jacques Guillet.

J'aurais souhaité également aborder l'enseignement de l'environnement à l'école, mais le temps presse. Je tiens toutefois à noter que près de la moitié des propositions de loi au Parlement des enfants portait cette année sur des sujets liés à l'écologie.

Vous me permettrez enfin, madame la ministre, après Christophe Priou, de souligner l'action du Conservatoire du littoral, dont j'ai l'honneur de présider le conseil d'administration. Avec le soutien du Président de la République, qui a décidé d'attribuer au Conservatoire, pour le trentième anniversaire de sa création, une ressource pérenne, l'établissement public poursuit sa mission.

En 2006, le Conservatoire, dont le domaine reçoit annuellement plus de 30 millions de visites, a franchi le seuil de 100 000 hectares définitivement protégés, soit plus de 10 % des rivages de métropole et d'outre-mer. Ce résultat est encourageant mais en France, comme dans le reste du monde, l’attractivité du littoral pour des activités et des populations nouvelles ne se dément pas. Il convient donc de ne pas baisser la garde. Je rappelle que notre objectif est d'atteindre, à l'horizon 2050, le « tiers naturel », soit 270 000 hectares acquis ou affectés.

Dans cette perspective, le Premier ministre, M. Dominique de Villepin, a annoncé lors de l'installation du Conseil national du littoral, le 13 juillet 2006 – à laquelle vous assistiez, madame la ministre –, le versement au Conservatoire de 100 %, et non plus 80 % comme en 2006, du produit du droit de francisation des navires, soit 35 millions d'euros. Ce montant, qui représenterait, comme l'a voulu le Président de la République, une augmentation de 40 % environ de nos moyens d'action, nous permettrait d'engager des opérations ambitieuses, comme l'achat de près de 4 000 hectares aux Salins du Midi en Méditerranée, l'extension de plus de 800 hectares du domaine du Marquenterre en Manche-Mer du Nord et une intervention sur plus de 1 500 hectares dans l'estuaire de la Gironde, le plus grand estuaire naturel d'Europe.

Ces acquisitions ne sont pas une fin en soi. Leur rôle est de préserver l'avenir et d'autoriser une mise en valeur en liaison avec les collectivités territoriales, premiers partenaires du Conservatoire, ainsi qu'avec les usagers et les exploitants, qu'ils soient agriculteurs, éleveurs ou conchyliculteurs.

Je tiens néanmoins à vous faire part d'une inquiétude, tout en demeurant optimiste car, comme le disait Saint-Augustin, « rien n'est perdu tant qu'il reste l'inquiétude ».

M. Jean Lassalle. Belle formule !

M. Didier Quentin. Le nouveau régime de perception du droit de francisation, qui a substitué, depuis le 1er janvier 2006, la longueur des bateaux au tonnage, a généré une recette inférieure aux prévisions. Pour y remédier, tout en exonérant les bateaux d'intérêt patrimonial et en ménageant un meilleur équilibre entre les bateaux motorisés et les voiliers, comme l’a souhaité à juste titre le Conseil supérieur de la navigation de plaisance, un projet d'amendement à la loi de finances rectificative sera présenté à mon initiative, avec le soutien du Gouvernement. Je me permettrai de compter sur chacune et chacun d'entre vous pour donner au Conservatoire les moyens de poursuivre son action, dans l'esprit du contrat d'objectifs que nous avons signé ensemble, vous vous en souvenez, madame la ministre, fin juillet, à Hyères.

Je crois aussi pouvoir ajouter que l’action de cet établissement public est très consensuelle et qu’elle sert de référence à de nombreux pays. À cet égard, je me réjouis que vous ayez pu vous-même directement apprécier l’intérêt de la contribution que nous apportons à l’action de coopération internationale de la France en vous rendant récemment, à l’invitation des autorités tunisiennes, sur le site de Korba, au Cap Bon, protégé et aménagé avec l’assistance scientifique et technique du Conservatoire du littoral.

Ainsi, ce budget 2007, sérieux et rigoureux, s’inscrit dans l’action déterminée qui est conduite depuis 2002 en faveur de l’environnement et du développement durable. C’est pourquoi, au nom du groupe UMP, je vous invite à voter les crédits du ministère de l’écologie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.

M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la ministre, pour ma part, je voudrais évoquer le programme 153 de votre ministère « Gestion de milieux et biodiversité », plus particulièrement les actions concernant la protection de la biodiversité, c’est-à-dire l’action 3 « Développement du réseau des espaces réglementés au titre de la nature et des paysages » et l’action 4 « Incitation à la gestion durable du patrimoine naturel ».

Nous le savons, la biodiversité est un enjeu essentiel du vivant mais aussi un enjeu vital pour les sociétés humaines, par les biens et services qu’elle procure : la nourriture, l’eau, le traitement des maladies, l’épuration de l’air, celle de l’eau, la régulation des climats, la pollinisation, la régénération de la fertilité des sols et toutes sortes de biens primaires, nécessaires autant à l’agriculture qu’à l’industrie.

Sa préservation est devenue un enjeu international majeur depuis la signature, en 1992, de la convention de Rio, sous l’égide des Nations unies. Or, nul ne peut le contester, la situation est aujourd’hui alarmante. La diversité biologique, qui est une caractéristique essentielle du vivant, régresse au niveau planétaire. Et si nous ne faisons rien, de nombreuses espèces vivantes, de la faune ou de la flore, auront disparu dans quelques années. En France, 10 % des espèces connues de flore et près de 35 % des espèces de mammifères sont considérées comme étant en danger ou vulnérables.

Lors du sommet de Johannesburg, en 2002, l’Union européenne s’est engagée à freiner la perte de bioversité d’ici à 2010. Face à ce défi, madame la ministre, Mme Roselyne Bachelot, votre prédécesseur à ce ministère, a initié une démarche stratégique nationale pour la biodiversité, qui a débouché, en novembre de l’année dernière, sur la présentation des premiers plans d’action sectoriels lesquels, pour la plupart d’entre eux, regroupaient des décisions déjà prises.

La lecture de vos propositions budgétaires me conduit à relever avec une certaine satisfaction que les crédits consacrés à la protection de la biodiversité sont en progression, passant de 110 millions à 144 millions pour 2007, soit une augmentation de près de 32 %. Mais ces chiffres, aussi encourageants soient-ils, ne peuvent masquer le fait que cela représente seulement 0,053 % du budget de l’État alors que la biodiversité constitue la plus grande problématique environnementale actuelle, après le réchauffement climatique.

Vous nous précisez que ce budget, en très forte augmentation, doit permettre la mise en œuvre de deux mesures phares : d’une part, l’application de la nouvelle loi sur les parcs nationaux, avec la création notamment des parcs de la Guyane et de La Réunion, et, d’autre part, la gestion concertée du réseau Natura 2 000.

Bien sûr, je loue votre volonté de faire aboutir dans les meilleurs délais le parc amazonien en Guyane. Néanmoins, je ne peux que m’inquiéter d’une certaine incohérence gouvernementale. En effet, alors que le Gouvernement a annoncé le 9 octobre qu’il n’autorisait pas le projet de mine d’or du canadien Cambior, en Guyane, en raison de quelques lacunes sur le plan écologique, les Guyanais venaient d’apprendre que le ministre délégué à l’industrie, contre l’avis des élus locaux, des administrations et du préfet, avait accordé le 1er août un permis de recherche de mines d’or à la société Rexma, sur la commune de Saül, dans une zone classée « zone de protection forte » par le schéma d’aménagement régional, en bordure d’une « zone cœur » du projet de parc national amazonien. Le conseil régional a même annoncé son intention d’attaquer en justice l’arrêté ministériel.

Vous-même, madame la ministre, vous vous êtes inquiétée des conséquences de cette décision, qui tombe en pleine enquête publique sur le projet de parc. Par courrier, vous avez ainsi indiqué au ministre François Loos que le permis qu’il venait d’accorder ferait immanquablement basculer la mairie de Saül dans l’opposition au projet de parc national et ferait le jeu des opposants au parc. C’est pourquoi vous lui avez demandé de publier dans les plus brefs délais, au Journal officiel, un arrêté de retrait du permis. À ce jour, M. Loos a-t-il répondu favorablement à votre sollicitation ? Nous souhaiterions le savoir car il est à craindre, en cas de refus de sa part, que l’État ne soit pas en mesure d’atteindre l’objectif qu’il s’était fixé de créer le parc amazonien de Guyane au début de l’année 2007.

Comme vous l’avez rappelé, le réseau Natura 2 000 constitue un outil privilégié de la mise en œuvre de votre politique de préservation de la biodiversité. Notons que les crédits que vous y consacrez augmentent de 38 %, passant de 21,2 millions à 29,3 millions d’euros entre 2006 et 2007.

Les parcs naturels régionaux, quant à eux, directement engagés dans l’objectif de gestion durable du patrimoine naturel, contribuent depuis quarante ans à la conservation de la biodiversité et des paysages par des démarches de planification et d’animation concertée des territoires. Ils constituent de fait une véritable infrastructure écologique représentant 12 % du territoire et 7 millions d’habitants.

Alors que la contribution de l’État au fonctionnement des parcs naturels régionaux a connu une baisse moyenne de 7 % entre 2005 et 2006, pour un concours moyen de 115 000 euros par parc, ceux-ci ne comprendraient pas que vous ne donniez pas suite à leur demande de revalorisation de leur dotation de fonctionnement.

L’élaboration des futurs contrats de projet appelés à remplacer les contrats de plan État-région constitue, pour les responsables des parcs, une autre source d’inquiétude puisqu’ils s’interrogent encore sur la place qui leur sera réservée. En effet, ils entendent être présents à la fois dans le volet régional au titre de leur fonctionnement et dans le volet territorial pour leurs programmes d’action et les crédits d’ingénierie, tant il est vrai que la sauvegarde de la biodiversité s’appuie sur les activités humaines.

Enfin, je veux dénoncer avec force l’incapacité de nos responsables politiques à prendre la mesure du rôle essentiel joué par les zones humides dans la protection de la biodiversité, comme le montrent deux exemples récents.

Tout d’abord, la mise en œuvre de la loi sur le développement des territoires ruraux devait, grâce à une douzaine d’articles spécifiques, fixer un nouveau cadre juridique pour les zones humides. Or, à ce jour les décrets d’application n’ont toujours pas été publiés.

Ensuite, le ministère de l’agriculture a rejeté l’idée d’instituer une indemnité spéciale zones humides dans le plan de développement rural en cours de finalisation pour la période 2007-2013. Cette proposition, faite par le groupe zones humides, groupe d’experts et de réflexion réuni par le ministère de l’écologie et du développement durable, vise à mettre la France en cohérence avec ses engagements internationaux – la convention de Ramsar – et l’application des directives européennes, notamment la directive cadre sur l’eau et Natura 2 000. En effet, il importe aujourd’hui de soutenir financièrement l’activité d’élevage dans les prairies humides pour compenser les contraintes d’exploitation spécifique et renforcer ses fonctions de sauvegarde et d’entretien de la biodiversité, de préservation de la qualité des sols, des ressources en eau, de conservation du paysage et de régulation des crues et des inondations.

Le rejet de cette proposition par le ministère de l’agriculture est d’autant plus choquant et le signe d’un manque de volonté qu’il existe aujourd’hui des dispositifs identiques dont l’efficacité n’est plus à démontrer, qu’il s’agisse pour les zones de montagne de l’Indemnité compensatoire de handicaps naturels ou d’une ICHN à titre expérimental pour le marais poitevin.

Telles sont, madame la ministre, les observations et les réserves dont je voulais vous faire part à l’occasion de l’examen du budget de la mission « Écologie et développement durable ». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à onze heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Denis Merville.

M. Denis Merville. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le dernier budget de la législature consacre aux politiques environnementales des moyens en augmentation. Il témoigne ainsi de l’importance accordée par le Gouvernement à la protection de l’environnement, même s’il me semble nécessaire d’aller beaucoup loin dans les années qui viennent.

Avec une hausse de 2,5 % des crédits, le budget s’inscrit dans la continuité des actions et réalisations que le Gouvernement mène ou a menées dans le domaine de l’environnement : la loi sur l’eau et les milieux aquatiques, le plan climat, la stratégie nationale pour la biodiversité, le renforcement de la prévention des risques technologiques ou naturels. Le budget réaffirme également les engagements pris par le Gouvernement en matière de développement durable et de lutte contre le réchauffement climatique. Ce sont autant de raisons de saluer votre budget, madame la ministre. Je sais que vous aussi auriez souhaité aller plus loin, mais la conscience écologique n’est pas encore suffisamment développée chez certains fonctionnaires, en particulier à Bercy.

M. Yves Cochet. C’est vrai !

M. Denis Merville. Cela fait plus de dix ans que tout le monde attend avec impatience une loi sur l'eau, qui modernise notre législation, l'adapte aux nouveaux enjeux du développement durable et transpose la directive cadre européenne fixant comme objectif le bon état écologique des eaux d'ici à 2015. Cette réforme est, je l'espère vivement, sur le point d'aboutir. Pouvez-vous nous confirmer que le calendrier de la suite de la discussion permettra l’adoption et la promulgation de la loi sur l’eau avant la fin de l'année ?

Au cours de l'examen de ce projet de loi, vous avez accepté plusieurs amendements, autorisant ainsi un certain nombre d'avancées : représentation des maires et de présidents d'EPCI au sein du collège « élus » des comités de bassin, solidarité envers les communes rurales, maintien des missions actuelles du service public d’assainissement non collectif.

Le projet de loi sur l'eau doit également jouer un rôle pédagogique en nous aidant à prendre conscience des enjeux et en nous encourageant à modifier nos comportements. Nous le savons tous, l'eau est un bien commun précieux. Rendre potable l'eau du robinet nécessite de lourds traitements, souvent coûteux. Or, pour laver les véhicules ou la vaisselle, pour arroser le jardin, point n’est besoin d’eau potable, l'eau de pluie peut suffire. Pour inciter nos concitoyens à installer des systèmes de récupération et de traitement des eaux pluviales, vous aviez accepté l’amendement que nous avions déposé en première lecture, visant à attribuer un crédit d’impôt à hauteur de 40 % de la dépense occasionnée, taux qui a été ramené à 15 % au Sénat. Si nous voulons véritablement favoriser de telles installations, il convient de revenir à 40 %.

En avril dernier, la mission d'information sur l'effet de serre, à laquelle j'ai l’honneur d’appartenir, a présenté son rapport. La conclusion de nos travaux est sans ambiguïté : le changement climatique constitue bien le défi majeur du siècle qui s'ouvre et les activités humaines sont indéniablement l'origine principale du réchauffement observé, avec des conséquences qui, si rien n'est fait, risquent de se révéler dramatiques.

Après un tel constat, qui s’apparente à un cri d’alarme, notre rapport formule un ensemble de recommandations qui illustrent la diversité des moyens d'action mobilisables : meilleure implication des pouvoirs publics, formation et information des citoyens, meilleure utilisation de la fiscalité, renforcement du système des droits à polluer, soutien à la recherche. Je pourrais en citer bien d’autres qu'il appartiendra aux gouvernements de mettre en œuvre. Je vous remercie de nous préciser, madame la ministre, les mesures que vous entendez prendre pour lutter contre le réchauffement climatique, notamment dans le cadre de l'actualisation du plan climat.

Je souhaiterais également avoir l'assurance que les objectifs de la France en matière de valorisation des énergies renouvelables et d'économies d'énergie seront atteints et que les moyens donnés à l'ADEME seront à la hauteur. J'ai posé des questions à ce sujet en commission des finances, lors de l’examen d’autres budgets que le vôtre, madame la ministre, mais sans toujours obtenir de réponses aussi précises que ce que je souhaitais. Je compte donc sur vous.

Pour permettre à la France de respecter ses engagements en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le Gouvernement a mis en place un plan de développement et de promotion des biocarburants, et nous nous en félicitons. En effet, dans le contexte énergétique actuel, notre pays se doit de prendre des mesures incitatives fortes en faveur de ce type de carburant. C'est aussi un moyen de redonner des espoirs à un monde agricole qui en a bien besoin.

Ne faudrait-il pas également promouvoir la production et l'utilisation des huiles végétales pures ? Cela permettrait de réduire encore les émissions de gaz à effet de serre, d'aider les agriculteurs à diversifier leurs activités et de diminuer globalement la facture pétrolière. La France a déjà montré sa volonté de faire évoluer ce dossier en autorisant, dans la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006, la commercialisation de l'huile végétale pure en tant que carburant agricole à compter du 1er janvier 2007. Cela n'est pourtant pas suffisant au regard de la directive européenne dont on attend toujours, c’est-à-dire depuis 2004, la transposition en droit français. Il convient aujourd'hui d'aller plus loin en généralisant l'autorisation de l'utilisation de l'huile végétale pure comme carburant, du moins, dans un premier temps, en étendant cette autorisation à d'autres secteurs d'activité, notamment aux collectivités locales et aux administrations. Pourriez-vous également nous apporter des éléments de réponse sur ce point ?

S’agissant des parcs nationaux, nous avons voté un texte pour les réformer. Cette loi traduit les engagements de la Charte de l'environnement adoptée en mars 2005, qui fait de la préservation de l'environnement un objectif constitutionnel.

Je voudrais dire un mot des parcs naturels régionaux,...

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Denis Merville. ...dont vous savez que les trois quarts sont dans une situation financière difficile. D'une façon générale, les financements du fonctionnement de ces parcs se composent de la part statutaire, d'une participation de votre ministère et de financements spécifiques au titre des contrats de plan et des fonds européens. Certains avaient réussi, dans le cadre du dernier contrat de plan, à signer un contrat de parc permettant de globaliser sur plusieurs années l'ensemble de leurs ressources de fonctionnement.

Dans mon département, le parc naturel régional des Boucles de la Seine Normande avait présenté une demande en 2002, mais elle n'avait pas été acceptée. Or, actuellement, avec la disparition des emplois aidés, l’échéance des contrats de plan et la fin des financements européens, ce parc connaît des difficultés et nous aimerions avoir la certitude que les PNR seront éligibles aux contrats de projet, notamment pour la partie ingénierie financière.

M. Jean Lassalle. Tout à fait !

M. Denis Merville. Enfin, nous avons voté il y a quelques années un texte sur la prévention des risques technologiques et naturels. Les plans sont importants, mais la part des travaux réalisés à ce titre qui reste à la charge des propriétaires est souvent élevée. Je suis dans un secteur industriel et il me semble que les particuliers ne devraient pas participer autant à la protection contre des risques d’origine industrielle.

Mon département, la Seine-Maritime, est particulièrement touché par le problème de l'érosion des sols. Les dossiers avancent, mais les procédures sont souvent trop lourdes.

M. Jean Lassalle. C’est vrai !

M. Denis Merville. Nous avons malheureusement connu de nouvelles inondations il y a quelques semaines, et les victimes se tournent systématiquement vers les élus, considérés comme responsables. Ce sont pourtant des fonctionnaires qui bloquent les dossiers et qui nous empêchent de faire avancer les travaux.

M. Jean Lassalle. Il a raison !

M. Denis Merville. Pour la première fois dans notre histoire, le Gouvernement, et plus particulièrement le ministère de l’écologie, a arrêté des actions en faveur de la qualité de l’environnement – lesquelles s’échelonnent sur la période 2004-2008 – qui sont destinées à améliorer la santé de nos concitoyens. Cette première étape marque un tournant dans la lutte contre les pollutions ayant un impact sanitaire. Ce plan appelle toutefois un suivi et une mise à jour en fonction de l'évolution des connaissances. Un premier rapport d'étape a-t-il pu être élaboré et quels sont les enseignements que l'on peut en tirer ?

Je tiens également à aborder les problèmes soulevés par l'installation de lignes à très haute tension, installation qui, selon plusieurs études scientifiques récentes, présenterait des risques pour la santé humaine. Or, alors que certains pays de l'Union européenne ont prescrit le déplacement de ces lignes à haute tension ou interdit de les implanter à proximité des lieux d'habitation – c’est notamment le cas de la Suède et de l'Italie –, la France continue d’en construire. Je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous assuriez que toutes les précautions sont prises pour que ces lignes n'affectent en rien la santé humaine.

En ce qui concerne la question des déchets, vous nous avez fixé des objectifs : diminuer dans un premier temps leur production annuelle de 360 kilogrammes à 250 kilogrammes, avant de la réduire à 200 kilogrammes dans dix ans. À cette fin, des moyens ont été mis en œuvre ces derniers mois : comptez-vous poursuivre les efforts entrepris en la matière l’an prochain ? Quant à la disposition visant à accorder un avantage aux communes acceptant l’implantation d’incinérateurs sur leur territoire, que nous avons adoptée par voie d’amendement dans la loi de finances de 2006, je tiens à souligner que Jacques Pélissard a déposé un amendement tendant à la préciser.

Vous êtes également ministre de la chasse : vous avez fait avancer ce dossier, lequel doit concilier les points de vue des écologistes et ceux des chasseurs. Toutefois demeure le problème du gibier d’eau, dont les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse sont régulièrement modifiées, ce que nous ne pouvons que regretter. Il convient de lever ces incertitudes en fixant des dates précises, ce qui permettra de pacifier la situation.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Denis Merville. Enfin, je tiens à souligner que je suis favorable à l’amendement, dont l’examen est reporté, sur la récupération des textiles – d’autres orateurs aborderont ce sujet –, car je crois qu’il va dans le bon sens.

Madame la ministre, mes chers collègues, j’en suis bien conscient : toutes ces actions et tous ces engagements ont un coût. Toutefois, il est certain qu’en matière d’environnement, le coût de l'indifférence, de l'inaction et de l'égoïsme se révélera dans quelques années bien plus lourd.

M. Jean Lassalle. C’est certain !

M. Denis Merville. Il faut qu'à la pratique habituelle du « chacun pour soi », source de bien des pollutions, succède celle, vitale, du « chacun pour tous », car c’est à chacun qu’il appartient désormais de se mobiliser pour répondre aux défis de l’heure après en avoir mesuré les enjeux. Chacun doit se sentir responsable et comprendre qu'il lui faut agir sans attendre. Seule l'éco-citoyenneté hissée au rang d’ambition majeure permettra d’intégrer l’environnement à toutes nos politiques et d’entrer dans la voie d’un vrai développement durable afin de préserver le monde que, demain, nous laisserons à nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Lassalle. Il s’agit, jusqu’à présent, de la meilleure intervention !

M. le président. La parole est à M. Philippe Tourtelier.

M. Philippe Tourtelier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre discussion de ce matin n'est pas sans rappeler la chute de Constantinople qui sanctionna, il y a plus de cinq siècles, la fin de l'Empire romain d'Orient : alors que les Turcs campaient aux portes de la ville, les responsables de la cité continuaient de « discuter du sexe des anges » – une situation si paradoxale que l’expression est restée dans notre langue.

M. Claude Gaillard. C’est vrai !

M. Philippe Tourtelier. C’est que nous examinons le budget de votre ministère dont vous vous félicitez que, pour la première fois, il atteigne 0,4 % du budget global. Il est vrai, cette année, madame la ministre, vous avez, non sans pragmatisme, essayé d’utiliser toutes les marges de manœuvre, bien minces assurément, dont vous disposez – et nous vous en donnons acte –, mais vous n'êtes pas à l'abri des gels de crédits : ainsi, l'an dernier, les associations de terrain chargées des réserves naturelles avaient obtenu une rallonge de 10 % des crédits de paiement, signifiée par les DIREN dès décembre 2005. Or, dans ma région, les associations concernées m'ont fait savoir qu’à la suite des gels de crédits les gestionnaires n'avaient, fin août 2006, toujours reçu aucun versement et devaient négocier avec leurs banques des déficits de trésorerie souvent importants. Vous en êtes donc réduite, comme d'habitude et à l’instar d’un grand nombre de vos collègues, à « faire de l'épicerie » avec Bercy sur votre budget, déjà l'un des plus faibles du projet de loi de finances.

Or, durant ce temps, dans les domaines dont vous êtes théoriquement responsable – l'écologie et le développement durable –, il se passe un phénomène qui peut être qualifié de majeur parce qu’il conditionne tout le reste : le changement climatique. L'année 2006 a vu à ce sujet la parution de trois rapports : en avril, celui de la mission d’information sur l’effet de serre, dont j’ai eu l’honneur d’être secrétaire ; en juin, celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ; en juillet, le rapport « Facteur 4 ». Or, alors que tous ces rapports insistent sur l'extrême urgence des mesures à prendre…

M. Jean Lassalle. Que fait Nicolas Hulot ?

M. Philippe Tourtelier. …et que, la semaine dernière, c'est le rapport Stern, en Grande Bretagne, qui a enfoncé le clou juste avant l’ouverture de la conférence sur le climat à Nairobi, on en est réduit à chercher dans votre budget ce qui relève du changement climatique. Nous restons dans les classifications anciennes – lesquelles ne dépendent pas que de vous, mais que vous n'avez pas tenté d'adapter –, à savoir trois programmes dont aucun n’affiche comme prioritaire la lutte contre l'effet de serre.

M. Jean Launay. Eh oui !

M. Philippe Tourtelier. Pire : dans le premier programme, « Prévention des risques et lutte contre les pollutions », la ligne « lutte contre le changement climatique » qui en constituait la sixième action dans le budget 2006, a été supprimée, suite à son externalisation.

M. Jean Lassalle. Mais que fait donc Nicolas Hulot ?

M. Philippe Tourtelier. C'est dans le troisième programme, « Conduite et pilotage des politiques environnementales et du développement durable », qu'on retrouve la lutte contre les gaz à effet de serre, mais de façon marginale puisqu’elle ne représente que 5,5 % de ce programme. Votre budget donne l’impression que vous faites comme si la terre ne se réchauffait pas, alors même que près des deux tiers des crédits de votre ministère sont directement concernés par le changement climatique : la ressource en eau, qualitative et quantitative, les risques naturels – notamment les inondations – et la biodiversité. Dans quelques années, on constatera non seulement que les crédits de votre ministère étaient dramatiquement insuffisants, mais que, surtout, ils auront été dépensés en pure perte, compte tenu du manque de prise en compte du réchauffement climatique.

M. Jean Lassalle. Voilà trente ans qu’on ne fait rien !

M. Philippe Tourtelier. C'est évident pour la ressource en eau ou la définition des zones inondables, d’autant que les phénomènes extrêmes – sécheresse et pluies torrentielles – sont en constante augmentation. Ce l'est encore plus pour la politique actuelle de gestion des milieux naturels et de la biodiversité, qui est dans une logique de climat supposé constant. Or que vont devenir les espèces actuellement protégées avec l'augmentation de la température ?

M. Jean Lassalle. Elles vont mourir !

M. Philippe Tourtelier. Dans le meilleur des cas, elles migreront vers le Nord de 100 kilomètres par degré supplémentaire, à condition toutefois qu'une politique de grands corridors écologiques soit menée. Sinon, elles monteront de 150 mètres en altitude, si elles le peuvent,…

M. Jean Lassalle. Et elles étoufferont !

M. Philippe Tourtelier. … ou, dans le pire des cas, elles disparaîtront, si bien que les milieux naturels d'intérêt écologique et les parcs naturels de demain ne seront plus ceux d'aujourd'hui du fait que les espèces n’y seront pas les mêmes. Ce sont ces mutations qu'il convient d’anticiper avec l'aide des associations de terrain qui suivent au jour le jour les évolutions de ces milieux.

Puisque nous savons tous que les principales politiques influençant le changement climatique ne dépendent pas de votre ministère, jusqu’à quand, madame la ministre, allez-vous accepter de servir d'alibi à un manque d'action à la hauteur des enjeux ?

M. Jean Lassalle. Longtemps encore !

M. Philippe Tourtelier. Vous affirmez que le changement climatique est une de vos préoccupations essentielles, ce dont je ne doute pas, mais votre budget ne le confirme pas, l’action véritable en la matière – vous le savez bien – devant s’inscrire dans une démarche interministérielle et être conduite avec une autorité suffisante. Or la mission prétendument « interministérielle » sur l'effet de serre a beaucoup perdu de son efficacité en devenant un simple service de votre ministère. Celui-ci ne représente que 0,4 % du budget global alors même que, chacun le sait, l’autorité d’un ministère dépend aussi des moyens dont il dispose.

Dans quinze ans, nos discussions actuelles risquent d'apparaître dérisoires.

M. Yves Cochet. C’est vrai !

M. Philippe Tourtelier. Même le nom de votre ministère – de l'écologie et du développement durable – surprendra : l'écologie ne fait-elle pas partie du développement durable ? On cherche en effet en vain dans votre ministère les politiques concernant les autres piliers, économiques et sociaux, du développement durable. C'est le Premier ministre qui est en réalité responsable du développement durable, et, en dépit de toute la bonne volonté éventuelle des ministres de l’écologie et du développement durable successifs, l’organisation des moyens est datée et donc insuffisamment efficace pour être à la hauteur des enjeux actuels.

Espérons que la période électorale à venir permettra de remédier à cette situation.

De fait, vous avez externalisé ce qui devrait être la priorité et le cœur de votre budget – la lutte contre le changement climatique –, vous contentant de coordonner un plan climat déjà très insuffisant et de vous appuyer sur l'ADEME, dont l’efficacité à mobiliser les collectivités territoriales et les particuliers est limitée par les moyens dont elle dispose, ce qui révèle, de nouveau, le manque d’ambition du Gouvernement en la matière.

Je le répète : la situation de ce budget est paradoxale, puisqu’il n’inscrit pas comme prioritaire la lutte urgente à mener contre les gaz à effet de serre. Dans ces conditions, vous comprendrez, madame la ministre, que nous ne puissions pas le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Voisin.

M. Gérard Voisin. Madame la ministre, la lecture de votre budget offre des motifs de satisfaction. Dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, l'augmentation de 2,5 % par rapport au budget 2006, et de 9,3 %, si on prend en compte l'ensemble des crédits mobilisés pour la protection de l'environnement, est conforme à la priorité que le Gouvernement accorde à celle-ci.

M. Yves Cochet. C’est faux !

M. Gérard Voisin. Cette priorité est sans aucun doute justifiée : les Français le savent bien, qui expriment de plus en plus nombreux leurs préoccupations à ce sujet. Il y a urgence à intensifier notre action.

Toutefois le budget de la mission « Écologie et développement durable » ne représente malheureusement toujours que 0,4 % du budget de la nation,…

Plusieurs députés du groupe socialiste. C’est insuffisant !

M. Gérard Voisin. …même s’il convient de rappeler qu’il n’était que de 0,35 % sous le dernier gouvernement de gauche.

M. Yves Cochet. C’est faux ! Il était de 0,8 % !

M. Claude Gaillard. Nous disons tous la même chose !

M. Gérard Voisin. Cela permet de relativiser la portée de certaines affirmations précédentes.

Il n’en reste pas moins qu’un tel budget demeure bien en deçà de l’objectif souhaitable : 1 %. Certes, cette année, la mission bénéficiera de quarante nouveaux emplois, mais l'ensemble des effectifs reste inférieur à 3 800 emplois. Nous sommes donc incontestablement en droit de penser qu’il existe encore un décalage entre les moyens limités que notre pays accorde à cette mission et l'ampleur de la tâche que nous devrons accomplir pour relever les défis écologiques auxquels, l’information aidant, nous sommes de plus en plus sensibilisés : lutte contre le réchauffement climatique, protection de la nature et des paysages, prévention des risques ou encore lutte contre la pollution de l'eau.

M. Jean Lassalle. Et Nicolas Hulot est toujours en hélicoptère !

M. Gérard Voisin. Dans une telle situation, je soulignerai la hausse de 32 % du budget consacré à la protection de la biodiversité, hausse qui permettra la création de nouveaux parcs nationaux et la conduite de la politique Natura 2000 qui, j'en témoigne en tant qu'élu du Mâconnais, lorsqu'elle est conduite dans un esprit de concertation et d'ouverture, n'est pas le repoussoir qu'on veut bien nous dépeindre, mais constitue un atout pour nos territoires ruraux.

J'exprimerai toutefois des regrets : la présentation de ce budget ne met pas assez en évidence l'action en matière de paysage, parent pauvre de votre ministère, alors qu'elle est un élément clé d'un développement durable.

M. Jean Lassalle. C’est vrai, surtout à Roissy-en-France !

M. Gérard Voisin. À côté de la préservation de la flore, de la faune et des milieux naturels dans leur ensemble, la demande d'une meilleure préservation des paysages, dans leurs dimensions naturelle et culturelle, correspond à une attente très forte des citoyens. Elle est pourtant insuffisamment mise en évidence et soutenue, alors qu'elle relève des attributions directes de la mission écologie et développement durable.

La préservation et la bonne gestion des paysages contribuent en effet à la qualité de vie des Françaises et des Français, tout en représentant des atouts économiques considérables pour notre pays, première destination touristique au monde. Ce capital est en danger : en cela, je me fais l'écho de tous ceux qui, élus locaux, professionnels ou associations, tirent la sonnette d'alarme. Il y a quelques mois le président de l'Assemblée nationale a bien voulu accueillir ici la présentation du Manifeste pour les paysages, dont les signataires, très nombreux et issus d'horizons très divers, souhaitent rappeler toute l'attention qu'il convient d'accorder à nos paysages, qui font la qualité de notre cadre de vie. Leur dégradation est un des aspects les plus visibles des atteintes que l'activité humaine fait subir à notre environnement. La préservation de la qualité des paysages, qu'ils soient urbains ou ruraux, ordinaires ou exceptionnels, appelle aujourd'hui une mobilisation générale qui s'exprimera aux cours des États généraux du paysage, qui se dérouleront, vous le savez, madame la ministre, le 8 février prochain.

M. Didier Quentin. Nous y serons.

M. Gérard Voisin. Nous sommes tous concernés et responsables. Toutefois, votre ministère, chargé de conduire et d'animer la politique du paysage de la France, doit prendre toute la place qui lui revient en vue de conduire une action beaucoup plus ambitieuse en faveur de la préservation et de la bonne gestion des paysages ainsi que de la création de nouveaux paysages que nous serons fiers de léguer aux générations qui nous succéderont. En effet, alors que la France vient de ratifier la Convention européenne du paysage, nous souhaiterions voir la place de cette politique dans l'action de votre ministère fortement réévaluée. Elle doit gagner en cohérence, afin que le paysage devienne une composante forte de tous les choix du pays en matière d'équipement, d'énergie et d'agriculture.

Les sites remarquables de notre pays doivent faire l’objet de toute notre attention. Nous célébrons cette année le centième anniversaire de la première loi – votée le 21 avril 1906 – sur la protection des sites remarquables, loi renforcée par celle du 2 mai 1930. Quel travail accompli pour édifier un ensemble extraordinaire de 2 700 sites classés et de plus de 4 700 sites inscrits, recouvrant une superficie deux fois supérieure à celle des parcs nationaux et plus de quatre fois supérieure à celle des réserves naturelles !

Pourtant, madame la ministre, cette politique reste le parent pauvre de votre ministère, elle est peu reconnue et souvent sacrifiée en termes de moyens. Je connais votre attachement à la poursuite de cette politique car vous savez que beaucoup reste à faire, mais elle ne pourra être menée à bien que grâce au renforcement des personnels compétents dans les directions régionales de l’environnement,…

M. Jean Lassalle. Alors là, il y a du travail !

M. Gérard Voisin.… que grâce au renforcement des moyens nécessaires à la gestion active et à la mise en valeur des grands sites remarquables et menacés.

Je vous félicite pour votre action à la tête de ce ministère tout en souhaitant encore une fois que les moyens d’action en faveur des paysages, des sites remarquables et des Grands sites de France, dont je suis l’heureux président, soient considérablement renforcés et figurent parmi vos priorités budgétaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Didier Quentin. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Madame la ministre, chacun d’entre nous – décideur, élu, citoyen – prend conscience des problèmes posés par le changement climatique et approuve l’objectif de réduction à l’échelle mondiale des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050. La France doit y prendre toute sa place – c’est d’ailleurs l’objet du facteur 4 du plan climat. Cela devrait donc se traduire par une réelle ambition pour votre ministère et pour votre budget.

Or, à cet égard, en raison de son manque de lisibilité, la mission « Écologie et développement durable » ne révèle pas de véritable stratégie. Le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions » souffre de n’être pas interministériel. L’action « Lutte contre le changement climatique » a disparu. La gouvernance dans le domaine de l’eau s’essouffle dans un programme « Gestion des milieux et biodiversité » qui ne masque pas la nécessité – que j’ai déjà soulignée l’an dernier en commission élargie – d’élaborer un véritable programme politique de l’eau, d’autant que les indicateurs choisis relèvent plutôt de la mise en œuvre de procédures alors qu’ils devraient révéler la performance des actions engagées.

Vous me direz, madame la ministre, que votre budget augmente en autorisations de programmes et en crédits de paiement. C’est vrai, mais n’oublions pas la mise en réserve sur les autorisations d’engagements et, surtout, interrogeons-nous sur la cohérence de ce budget non seulement avec ce que vous faites – votre bonne foi n’est pas en cause –, mais avec l’ensemble de la politique gouvernementale.

Premier exemple, qu’en est-il du réchauffement climatique et de la nécessaire diminution des émissions françaises de gaz à effet de serre. Comment passer de 140 millions de tonnes à 38 millions de tonnes en ne recourant qu’aux solutions technologiques et en négligeant la maîtrise de la demande d’énergie ? Par ailleurs, le projet de loi sur l’énergie ne prévoit aucune mesure coercitive commune pour réduire les émissions de dioxyde de carbone dans l’habitat et dans les transports. Pourtant, le rapport de la mission d’information sur le réchauffement climatique, présidée par Jean-Yves Le Déaut, comportait de nombreuses préconisations fiscales et financières à cet égard.

Deuxièmement, comment trouver crédible le pacte de l’environnement annoncé par le Premier ministre alors que, dans le même temps, la campagne de promotion des biocarburants ne constitue qu’un encouragement donné aux constructeurs automobiles et aux céréaliers en mal de débouchés nouveaux, sans qu’aucun bilan écologique ait été établi,

M. Yves Cochet. Absolument !

Mme Geneviève Gaillard. Très bonne question !

M. Jean Launay. Nous savons que le développement des biocarburants industriels aggravera la dégradation de l’environnement et que du point de vue énergétique, les procédés de fabrication actuels sont condamnés à court terme. Où en sont donc les efforts en matière de recherche pour la deuxième génération de procédés de production de carburants verts ?

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

M. Jean Launay. Troisièmement, quelle est votre autorité, madame la ministre, face à la puissance de Bercy et du ministère de l’industrie ? Je ne reprendrai pas l’exemple du parc de Guyane ; j’évoquerai seulement la question de l’hydroélectricité, dont on sait qu’elle est considérée comme une énergie renouvelable mais dont on connaît aussi l’impact négatif sur le milieu naturel. Or je m’interroge sur votre capacité à peser sur la rédaction des cahiers des charges lors du renouvellement des concessions de barrages hydroélectriques. Il faut prendre en compte la notion de mieux-disant environnemental…

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

M. Jean Launay.… et apporter des réponses mixtes entre opérateurs industriels et entités responsables de la gestion intégrée dans les bassins versants, le but étant de rendre possible la démodulation et une utilisation plurielle, éco-compatible de l’eau.

Mme Geneviève Gaillard. Excellent !

M. Jean Launay. Quatrièmement, Geneviève Gaillard y a fait allusion, nous attendons, comme vous, la fin de l’examen par le Parlement de la loi sur l’eau, même si nous l’aurions conçue différemment. Nos agences de bassin ont besoin que ce texte soit adopté pour finaliser leur neuvième programme d’action portant sur la période 2007-2012. Mais combien d’inquiétudes subsistent dans ce domaine ? Le million d’euros d’astreinte par jour qui pèse sur notre pays pour le non-respect des directives cadres nitrate et eaux résiduelles urbaines oblitère votre action, alors même que la directive cadre sur l’eau et les objectifs de bon état à atteindre à l’horizon 2015 nécessiteront de notre part une volonté sans faille et les moyens correspondants.

L’Institut français de l’environnement, dans son récent rapport, nous rappelle la nécessité d’accélérer le changement des pratiques car l’état des eaux souterraines reste préoccupant et les pesticides sont toujours très présents dans la plupart des cours d’eau et dans une grande partie des nappes. Force est de constater aussi que la pression exercée par l’irrigation sur la ressource peut se révéler localement très forte et provoquer des déséquilibres dans les systèmes aquatiques.

Mme Geneviève Gaillard. C’est vrai !

M. Jean Launay. Le programme des Nations unies pour le développement – la question de l’eau revêt en effet une dimension planétaire – préconise que la communauté internationale reconnaisse le droit à l’eau, ce droit fondamental de tout être humain à disposer d’au moins vingt litres d’eau potable par jour, gratuits pour les plus pauvres. Il reste – c’est un constat redoutable pour l’équilibre mondial – que 17 % de l’humanité manque d’eau potable, et l’hypothèse de guerres de l’eau n’est pas, je le crains, une simple vue de l’esprit. Notre pays doit jouer un rôle moteur sur ce sujet au plan international.

Madame la ministre, le congrès des maires de France, qui se tiendra dans quelques jours, aura pour thème le rôle du maire au cœur de la République en tant qu’acteur au quotidien. Je souhaite à cet égard relayer l’interrogation de François Brottes et vous demander pourquoi le maire – nous sommes nombreux à l’être dans cette assemblée – n’est pas systématiquement consulté ni même informépar le préfet au moment du lancement de l’enquête publique lorsqu’une entreprise a déposé un projet d’installation dans sa commune, et que ce projet est susceptible de comporter un risque technologique. Il faut combler cette lacune des textes, ce qui ne coûtera rien au budget de l’État mais permettrait, sur le terrain, de dissiper bien des incompréhensions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Yves Jego.

M. Yves Jego. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’écologie est un combat majeur et je partage les propos que mes prédécesseurs ont tenus à cette tribune sur la nécessité d’agir toujours plus, toujours mieux, pour préserver notre planète.

Avant d’aborder un sujet qui avait déjà nourri nos débats l’année dernière, je veux souligner que nous n’avons pas à rougir de notre politique écologique et dire à quel point les critiques que je viens d’entendre ne me semblent pas correspondre à la réalité. Nous n’avons pas à rougir de notre bilan, en effet, puisque les émissions de gaz à effet de serre sont, en France, inférieures de 21 points à la moyenne mondiale ; voilà un résultat qu’il faut saluer même si l’on ne doit pas s’en satisfaire mais chercher à l’améliorer encore. Nous n’avons pas à rougir non plus de notre soutien au développement des énergies renouvelables puisque, en quelques années, nous avons multiplié par 14 la production d’énergie éolienne. Nous n’avons pas à rougir d’avoir réduit de 12 % la pollution de l’air dans la plupart de nos grandes villes. Ces résultats encourageants ne doivent évidemment pas, madame la ministre, nous empêcher de poursuivre et d’amplifier nos efforts, mais ils devraient conduire certains de nos collègues, surtout si l’on y ajoute l’augmentation de vos crédits, à tenir des propos plus équilibrés.

Je regrette, pour ma part, que ceux qui, sur ces bancs, n’ont pas voté la Charte de l’environnement que nous avons introduite dans la Constitution…

M. Jean Launay. Sur ce point, nous sommes à l’aise !

M. Yves Jego.… ou ceux qui nous ont légué en 2002 le ministère de l’écologie dans l’état où nous l’avons trouvé, avec des crédits très réduits,…

M. Yves Cochet. Pas du tout ! En proportion, ils représentaient le double de ce qu’ils sont aujourd’hui !

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. C’est faux, monsieur Cochet !

M. Yves Jego.… viennent aujourd’hui essayer de transformer le combat pour l’écologie en un médiocre affrontement politicien et idéologique. À ceux qui veulent faire de l’écologie une affaire politicienne, la présence dans l’actualité de Nicolas Hulot démontre pourtant qu’ils ont tort, parce que, en agissant de la sorte, ils détournent une partie des Français de la lutte pour la préservation de la planète, cause qui devrait nous rassembler bien au-delà de nos clivages.

Nous devrions tous nous réjouir, en particulier, quand on parvient, au service de cette cause, à marier engagement environnemental et lutte pour l’emploi. Il y a un an, à cette tribune, je plaidais pour que l’on vienne en aide au secteur de la récupération des textiles. Portée notamment par de nombreuses associations à vocation sociale comme Emmaüs, cette filière se trouvait en difficulté, à cause notamment de la mondialisation et de la dégradation de la qualité des tissus. Elle emploie aujourd’hui 3 000 personnes en France et nous évite de retrouver dans nos poubelles les 100 000 tonnes de déchets qu’elle retraite.

Depuis un an, grâce à l’engagement du Gouvernement, des groupes de travail se sont mobilisés pour trouver une solution permettant de pérenniser cette filière. Un amendement dont la présentation a été reportée de quelques jours pour des raisons techniques, devrait prochainement instituer une contribution des entreprises du textile en faveur du retraitement. Si elle contribue à la protection de la planète, cette filière présente aussi des vertus pour l’emploi puisque l’objectif est de passer de 3 000 à 6 000 emplois dans les années qui viennent et de pouvoir ainsi retraiter de 400 000 à 600 000 tonnes de vêtements et de textiles. Autant de déchets, là encore, qui ne viendront plus encombrer nos poubelles !

Je salue cet engagement  gagnant-gagnant grâce auquel nous préservons la planète tout en favorisant l’activité économique et en créant des emplois. C’est un modèle à suivre. Voilà pourquoi, madame la ministre, soulignant à nouveau votre implication dans un combat qui devrait tous nous réunir, je voterai les crédits de la mission « Écologie ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, dernier orateur inscrit.

M. Yves Cochet. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, comme l’ont souligné les orateurs précédents, l’écologie est à l’ordre du jour. Nous en entendons parler dans les conversations de nos concitoyens, nous la voyons des reportages à la télévision, nous regardons les films de Nicolas Hulot, de Yann Arthus-Bertrand et même celui d’Al Gore.

Néanmoins, la question n’est pas médiatique mais budgétaire et politique : est-ce que l’écologie est une priorité du Gouvernement ? La réponse est non. Votre ministère, madame la ministre, n’est pas au premier rang de l’effort budgétaire du Gouvernement pour 2007. Bercy nous parle, comme d’habitude, d’adéquation des moyens aux objectifs : avec 0,4 % du budget de l’État, les objectifs seront à proportion des moyens, c’est-à-dire une misère.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. Le budget de l’écologie représentait 0,35 % du budget de l’État quand vous étiez ministre !

M. Yves Cochet. Non, 0,8 % ! Il faut calculer en proportion. Il faut aussi – j’y viendrai – rappeler le nombre d’emplois créés.

Si, depuis 2002, vous ne nous épargnez ni effets d'annonce, ni grands discours vertueux, du Président de la République notamment, ni campagnes de communication, les crédits environnementaux n'ont cessé de diminuer depuis que vous êtes au pouvoir, alors qu'ils avaient atteint, je le répète, 0,8 % du budget général quand nous étions aux responsabilités.

Mais un budget, ce ne sont pas seulement des moyens financiers, ce sont aussi des personnels. Vous annoncez la création nette de 40 emplois au ministère : nous en avions créé 800 !

M. Jean Lassalle. Hélas !

M. Yves Cochet. Comment, cher collègue ? Vous pensez donc qu’il y a trop de personnels pour défendre l’écologie sur le terrain, dans les directions régionales de l’environnement ou à l’ADEME ? L’écologie, c’est du terrain, et vous êtes bien placé pour le savoir !

M. Jean Lassalle. Pour ce qu’ils font, il y en a beaucoup trop !

M. Yves Cochet. Je comprends mieux pourquoi vous êtes favorable à ce budget si vous jugez qu’il y a trop de personnes qui défendent l’écologie en France ! De tels propos sont stupéfiants !

M. Jean Lassalle. Je ne suis pas du tout favorable à ce budget !

M. Yves Cochet. Avec moins de 4 000 agents, le ministère de l’écologie et du développement durable compte moins de personnels que la mission de conseil et de contrôle de l'État.

Mais venons-en à une analyse détaillée par programme. Vous annoncez une hausse de 32 % des crédits du programme « Gestion des milieux et biodiversité », dont bénéficient, il est vrai, les parcs nationaux, l’Agence des aires marines protégées et le réseau Natura 2000. Mais les réserves naturelles nationales ne constituent toujours pas une priorité budgétaire, alors que sept d’entre elles viennent d’être créées ou sont en cours de création. Si les apparences d’une stabilité des crédits de paiement sont préservées, sur le terrain, en région, les organismes gestionnaires de réserves naturelles sont en fait confrontés à une baisse ou à une stagnation de leurs dotations.

L’État continue de délaisser les associations engagées dans la sauvegarde de la biodiversité, qui avaient déjà vu leurs subventions baisser de 20 % en 2006.

M. Jean Lassalle. Ça, c’est bien !

M. Yves Cochet. Elles remplissent pourtant des missions que le ministère de l’écologie ne peut pas forcément assurer.

M. Jean Lassalle. C’est la Cour des comptes qu’il faut pour les associations !

M. Yves Cochet. En ce qui concerne le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions », vous annoncez une hausse des crédits de 28,5 %. Le budget de ce programme ayant connu une baisse de 25 % en 2006, on se retrouve au niveau de 2005 ! Ce programme est le grand perdant des choix budgétaires du Gouvernement : les autorisations d'engagement sont passées de 178 millions d’euros en 2006 à 141 millions pour 2007. La baisse frappe les crédits des six actions du programme.

Comme en 2006, le programme « Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable » bénéficie d’une hausse de ses moyens budgétaires, puisque la hausse affichée est de 9 % en crédits de paiement et de 20 % en autorisations d’engagement. Mais, si les pourcentages sont intéressants, les chiffres réels sont tout à fait décevants, comme le faisait observer notre excellente collègue du groupe socialiste. La mise en œuvre du plan climat ne mobilise que 1,25 million d’euros, au moment même où chacun reconnaît que le réchauffement est le problème majeur du xxie siècle, non seulement pour la France mais pour l’ensemble de la planète !

M. Jean Lassalle. C’est vrai !

M. Yves Cochet. Mais vous pensez peut-être, monsieur Lassalle, que c’est encore trop ?

M. Jean Lassalle. Non, pas pour cela !

M. Yves Cochet. J’en suis heureux, mais il faut bien payer ceux qui sont chargés de mettre ce plan en œuvre, c’est-à-dire les agents de l’ADEME. L’ADEME, c’est du travail de terrain, puisqu’elle fait du conseil auprès des collectivités, des entreprises ou des particuliers. Or quinze postes de cette agence sont gelés.

M. Patrick Braouezec. Quand le climat se réchauffe, c’est en effet paradoxal ! (Sourires.)

M. Yves Cochet. Quand il n’y a pas assez de femmes et d’hommes sur le terrain, quand l’Agence ne bénéficie que de 1,25 million d’euros, comment voulez-vous que ça marche ?

Outre les crédits consacrés au plan climat, 442 000 euros sont consacrés à l’adoption de modes de production et de consommation durables ; 320 000 euros à la reconnaissance et à l’évaluation des « agendas 21 » locaux ; 220 000 euros à l’éducation à l’environnement, et enfin 100 000 euros aux études. Tout cela est parfaitement dérisoire.

Depuis 2002 et les coupes claires qui ont été opérées dans le budget de l’ADEME, les moyens, financiers ou humains, de cette agence ne sont plus à la hauteur des enjeux de notre époque.

L'écologie, madame la ministre, n'est pas une affaire de mots, mais d’actes. L’urgence écologique nous impose des changements radicaux, non seulement dans notre vie quotidienne, mais également dans les politiques publiques. On ne les trouve pas dans votre politique. Avec votre budget, ce n’est même plus la maison qui brûle, c’est le bateau qui prend l'eau de partout et qui coule ! Ce budget-là n’est qu’une rustine dérisoire eu égard aux enjeux.

Pour conclure, je reprendrai à mon compte, moi aussi, les propos de Nicolas Hulot, l'ami avec lequel tout le monde souhaite être pris en photo ces derniers temps : « Avec 0,4 % du budget de l'État, l'écologie reste le parent pauvre de la politique française. » La planète et ses habitants méritent mieux que ce 0,4 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Lassalle. Et la fondation de Nicolas Hulot, elle fonctionne comment ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie et du développement durable.

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, sachez que c’est pour moi un honneur de présenter devant l'Assemblée nationale, pour la seconde fois, le budget du ministère de l'écologie et du développement durable.

Les crédits du ministère sont répartis, dans le cadre de la LOLF, entre deux missions et quatre programmes.

Trois programmes constituent la mission « Écologie et développement durable », pour un total de 637 millions d’euros : le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions », pour 133 millions ; le programme « Gestion des milieux et de la biodiversité », pour 188 millions ; enfin le programme « Conduite et pilotage des politiques environnementales et du développement durable », d’un montant de 316 millions. Ce dernier programme porte l'ensemble des 3 775 « équivalents temps plein travaillé » attribués au ministère par ce budget pour 2007.

En outre, dans le cadre de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », le ministère pilote un programme « Recherche dans le domaine des risques et des pollutions » doté de 278 millions d’euros.

La progression des crédits est de 22,4 millions d’euros pour la mission « Écologie et développement durable » et le programme de recherche, soit une augmentation de 2,5 % pour l'ensemble de mon budget si l’on s'en tient à la seule loi de finances. Mais, si l’on prend en compte l'ensemble des crédits mis en œuvre pour la protection de l'environnement, l'augmentation est nettement plus forte. En effet, d'autres ressources financières que les crédits budgétaires contribuent à financer les politiques dont j'ai la charge : le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », à hauteur de 50 millions d'euros supplémentaires cette année ; s’y ajoutent 3,76 millions d'euros au titre des taxes affectées à des établissements publics, dont l’ADEME, qui voit ainsi ses moyens financiers d'intervention assurés et confortés, contrairement à ce qui vient d’être dit.

M. Yves Cochet. Parlez-nous des postes, madame la ministre !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Ayant écouté tous les orateurs sans les interrompre, je pense être en droit d’attendre de vous la même courtoisie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

De même, le programme des interventions territoriales de l'État, le PITE, mobilise 16 millions d'euros pour les actions relatives à l'environnement.

Il est donc nécessaire de prendre en compte ces différents financements pour apprécier l'augmentation réelle des moyens mis en œuvre, qui est de 9,3 % au total. Une telle progression est loin d’être négligeable compte tenu des contraintes budgétaires.

En ce qui concerne les effectifs, l'augmentation est de 58 ETPT, soit une création nette de 40 emplois, 18 résultant de transferts d'emplois existants. Ces 40 nouveaux emplois sont affectés prioritairement à Natura 2000, à l'évaluation environnementale et à l'inspection des installations classées, ainsi qu'à la mise en œuvre du futur règlement Reach. Cela constitue un effort substantiel dans le cadre contraint qui est aujourd'hui celui des finances publiques.

Je ne peux parler des moyens de mon ministère sans élargir mon propos au service public de l'environnement. Les politiques publiques de l’environnement, dont ce ministère a la responsabilité, mettent à contribution de très nombreux établissements publics. Les autres ministères, quant à eux, participent, chacun dans son domaine, à la mise en œuvre des politiques de l’écologie et du développement durable : je souhaite définir et renforcer avec chacun d'entre eux les actions qu'il convient de mettre en œuvre en 2007.

La prise en compte de cette réalité permet d’entrevoir l'importance, notamment financière, des champs couverts de façon transversale par le MEDD, et celle de la politique conduite par le Gouvernement. Le service public de l'environnement pèse plus de 3 milliards d'euros et emploie plus de 13 000 personnes.

M. Yves Cochet. Évidemment si vous incluez l’ONF dans ce total !

M. le président. Je vous en prie, monsieur le député.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Interrompre un ministre est un manque de courtoisie caractérisé, surtout lorsqu’il n’a, pour sa part, interrompu personne !

Encore plus que sur la croissance de mon budget, je veux attirer votre attention sur la manière dont mon ministère anime cet ensemble.

Je dois cependant souligner, comme je l’ai fait devant la commission des affaires économiques, que je ne suis pas totalement satisfaite par la répartition des programmes LOLF. Je considère en effet que mon ministère mène trois grandes politiques sectorielles, outre le développement durable et la lutte contre l'effet de serre, qui sont des politiques transversales : la lutte contre les risques, la politique en faveur de la biodiversité et la politique de l’eau. Chacune de ces politiques relevant logiquement d'une direction d'administration centrale, il me semble anormal qu'on ne leur ait pas attribué à chacune un programme budgétaire. Quand on fera le bilan de la LOLF et des modifications qui devront être apportées, je pense qu’il faudra mettre la politique de l’eau sur le même pied que les deux autres à cet égard, en créant un programme « Eau ». (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Je voudrais évoquer à nouveau le risque contentieux auquel mon ministère est directement confronté du fait des retards pris dans de nombreux domaines, dont je tiens à souligner qu’ils ne sont pas imputables à ce seul gouvernement. Je n'ai pas ménagé mes efforts pour assurer la transposition des directives européennes, qui était achevée quatre mois après mon arrivée à la tête du ministère. Grâce à cet effort soutenu, dont – je tiens à le souligner – le Parlement a pris sa part, la prévision du risque contentieux a pu être ramenée de 2 à 1 milliard d'euros. D’une façon générale, le respect de nos obligations communautaires est une de mes priorités. II nous reste donc à régler les contentieux liés aux difficultés de mise en œuvre du droit de l'environnement sur le terrain. Le contentieux national fait l’objet d’une provision de 835 millions d’euros en PLF 2007. Je confirme mon intention de développer mon action sous cet angle du respect du droit, notamment de la Charte de l'environnement.

Vous avez pu constater que, comme l’an dernier, nous avons recherché l'affectation la plus pertinente des moyens du point de vue des objectifs et de la performance attendue de l’action publique.

Depuis 2005, la part du budget du ministère dans le budget civil de l'État augmente dans des proportions notables, pour atteindre 0,40 % en 2007. Je ne me satisfais pas pour autant de ce résultat : nous sommes encore loin du seuil symbolique de 1 %. Ce serait pourtant un objectif pertinent, dans la mesure où notre budget est un extraordinaire levier de mobilisation des ressources pour la protection de l’environnement : un euro investi par le MEDD sur un projet est le plus souvent complété par trois euros d'autres provenances.

L’écologie doit nous rassembler tous, au-delà de nos différences de sensibilité politique, et je vous remercie, mesdames et messieurs les députés, de prendre part au nécessaire effort de pédagogie dont elle a plus que jamais besoin, ainsi que de l'aide que vous m'apporterez en vous prononçant sur ce projet de budget.

Je voudrais, monsieur le président, répondre maintenant aux orateurs qui sont intervenus sur ce projet de budget, et d’abord à MM. les rapporteurs.

Monsieur Rouault, je tiens tout d'abord à vous remercier pour le travail que vous avez réalisé et pour la qualité de votre rapport, même si, comme vous le savez, je ne partage pas toutes les positions adoptées par la commission des finances.

Pour ce qui est du déménagement de l’ADEME, un terrain et un bâtiment pleinement adaptés à l’accueil de l'ensemble des personnels ont été clairement identifiés et la présidente de l'ADEME, Mme Michèle Pappalardo, a remarquablement repris en main ce dossier, qui n’avait pas été bien engagé. Je puis donc vous rassurer : les procédures d'acquisition et de déménagement sont lancées et les difficultés initiales sont à présent derrière nous.

Vous m'avez également interrogée sur l'équité de l'indemnisation des dégâts provoqués par les espèces sauvages protégées. Comme nous le rappelle régulièrement le Conseil d’État, il n’est pas inéquitable de traiter différemment des situations qui ne sont pas comparables.

Le programme 153, que nous examinons, est intitulé « Gestion des milieux et biodiversité ». Je ne vous apprendrai pas, monsieur le rapporteur, que la biodiversité ne peut être résumée ni gérée de façon simpliste et uniforme. Tant sur la prise en charge des dégâts éventuels que sur la gestion des espèces, je partage le point de vue du président Méhaignerie, qui a estimé lors de la dernière réunion de votre commission qu’il convient de privilégier les leviers locaux. Pour les grues cendrées, par exemple, qui créent une forte économie touristique locale, c'est au niveau départemental et régional que peuvent être mises en œuvre, au moyen du contrat d'agriculture durable, des mesures de prévention bien plus utiles qu’une indemnisation qui n’a pas d’effet structurant. La biodiversité relève de la responsabilité de tous et, aux problèmes rencontrés, il n'existe pas de solution unique dont l'État serait le seul promoteur.

Monsieur le rapporteur Priou, la politique des déchets n'est nullement sacrifiée. La stabilité des moyens de l'ADEME, qui proviennent principalement de taxes affectées, lui permet en effet de poursuivre ses actions de soutien et d'appui aux collectivités selon des modalités qui ne se résument plus au soutien massif à des équipements lourds. Nous mettons en effet l’accent sur la prévention de la production de déchets et le développement du recyclage et de la valorisation matière.

Pour ce qui concerne la prévention, je rappelle le succès de l’opération Stop Pub et des actions menées pour limiter la distribution de sacs de caisse. Grâce à la volonté du Gouvernement, le nombre de sacs distribués est en effet passé de 15 milliards en 2003 à 7,5 milliards aujourd’hui – ce qui est certes encore trop, mais représente tout de même une diminution de moitié.

Nous allons en outre lancer sous peu un plan de compostage individuel. Quant au recyclage et à la valorisation matière, nous poursuivons le développement du tri sélectif et les taux de recyclage et de valorisation des emballages progressent régulièrement.

Il faut aussi citer le développement des filières spécialisées mises en place pour les pneus, les véhicules hors d'usage, les DEEE à partir du 15 novembre et les imprimés non sollicités d'ici à la fin de l'année. Ces filières responsabilisent les producteurs et favoriseront donc le développement de produits moins générateurs de déchets ainsi que la valorisation.

Enfin, l'effort de mise en conformité des installations reste pour moi prioritaire. Après les incinérateurs en 2005, l'accent est mis sur la résorption des décharges non autorisées d'ici à 2007. L’un de vous a rappelé à juste titre que le nombre de ces décharges est déjà passé de plus de 900 à 380, ce qui témoigne, au-delà des paroles et des promesses, d’un travail considérable.

La qualité du traitement des déchets est fondamentale pour la protection de la santé et de l'environnement ainsi que pour la confiance des citoyens. J'y veille avec la plus grande énergie.

Pour ce qui est de l’eau, il faut avoir le courage de reconnaître que la situation de la France au regard des directives européennes n'est pas satisfaisante pour les textes antérieurs. Ainsi, malgré une condamnation en 2004, la France est toujours en retard dans le domaine des eaux résiduelles urbaines, c'est-à-dire pour la mise aux normes des stations d'épuration. J’ai déjà été amenée, et je le serai encore dans les semaines qui viennent, à prendre des mesures réglementaires fortes envers les collectivités qui sont en retard dans ce domaine. Ce point est également la première priorité du neuvième programme des agences de l'eau, qui est en cours d'élaboration.

Quant au crédit d'impôt pour la récupération des eaux de pluie prévu dans la loi sur l'eau, qui intéresse également M. Merville, son impact financier devrait être relativement faible en 2007, compte tenu du temps nécessaire à la montée en puissance du dispositif.

Vous avez enfin évoqué, monsieur Priou, la catastrophe de l’Erika, qui restera longtemps dans nos mémoires. Je sais combien ce dossier vous tient à cœur et combien vous vous êtes engagé sur le terrain. Je vous confirme que l’État s’est porté partie civile, ne faisant en cela que son devoir.

Monsieur le rapporteur Guillet, vous m'avez interrogée sur la mise en place du fonds d'achat de crédits carbone. Si ce fonds ne figure pas dans le plan climat 2006, il n’en a pas moins pour objet de financer les mécanismes de développement propre, c'est-à-dire de permettre aux entreprises françaises de financer des projets sobres en carbone dans les pays en voie de développement. Je tiens à rappeler à cet égard que la France a joué un rôle prépondérant dans le financement de la convention climat, qui a mis en place ces mécanismes de développement propre.

Dans le plan climat 2006, un fonds destiné à financer des projets domestiques sera mis en place dès lundi. Beaucoup reste à faire en France, vous le savez, pour lutter contre le changement climatique. L’appel à projets que nous lançons portera sur l’équivalent de 5 millions de tonnes de CO2 – ce qui, le coût de la tonne étant aujourd’hui estimé à 15 euros, n’exprime nullement un désengagement de la part du Gouvernement, mais bien au contraire une volonté d’agir sur tous les tableaux sur la scène internationale avant la convention climat.

Pour ce qui est de la visibilité budgétaire des actions du Gouvernement, je rappelle que le document de politique transversale qui sera créé dans le cadre de la loi de finances rectificative répond à vos observations légitimes.

Nous continuons par ailleurs à faire avancer l’idée de l’ONUE, à laquelle ont adhéré à ce jour trente-cinq pays, dont des pays de la Francophonie. Nous poursuivons nos démarches et notre mobilisation, car ce projet mérite l’attention de tous. Une délégation française est déjà présente à Nairobi, où je me rendrai au début de la semaine prochaine pour faire entendre la voix de la France et défendre ses positions.

Madame Gaillard, je vous indique que l'enquête publique relative à la relabellisation du PNR du Marais Poitevin est achevée et que les communes délibèrent actuellement, et jusqu’au 20 novembre, sur leur adhésion à la charte. Après délibération des conseils régionaux de Poitou-Charentes et des Pays-de-Loire, le projet fera l'objet d'un examen par le Conseil national de protection de la nature. Son aboutissement est l’un des onze engagements pris par la France devant la Commission européenne dans le cadre du contentieux du Marais poitevin, enfin classé aujourd'hui grâce à ces engagements.

Sur la suppression de l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers – qui relève, comme vous le savez, de la compétence du ministre délégué à l'industrie et a été votée le 3 novembre –, je suis en mesure de vous apporter les éléments d'information suivants.

Pourquoi, tout d’abord, cette suppression ? Cette agence avait deux missions principales : l'archivage d'un double des dossiers d'arrêt définitif de travaux postérieurs au 8 mars 2001 et l'émission d’un avis sur les projets de plans de prévention des risques miniers. La première de ces missions peut être confiée à un autre organisme, par exemple au BRGM dans le cadre de ses nouvelles missions exercées par l’entité « après-mine » créée en son sein pour gérer les obligations de sécurité incombant à l'État. La seconde n'est plus indispensable, compte tenu des procédures d'enquête publique déjà prévues dans le cadre de la procédure d'élaboration des PPRM et des dispositions de concertation que nous prévoyons.

Les élus ont toutefois souligné leur attachement à l'instance de concertation que constituait l'APSRM et le Gouvernement souscrit pleinement au souci d'améliorer la concertation entre les élus et l'État sur les risques miniers. Le dispositif proposé est double : il concerne d'une part le niveau local de proximité et, d'autre part, le niveau national.

Des commissions locales d’information sur les risques miniers seront mises en place, réunissant l’État, les élus, les exploitants miniers, les associations et, plus généralement, les citoyens concernés. Elles auront pour vocation d’assurer l’information, dans les zones concernées, sur les risques liés à l’après-mine et sur les actions menées par l’État et les exploitants pour y remédier.

Une Commission nationale de concertation sur les risques miniers sera également créée, qui réunira l'État, les élus et les principaux organismes concernés. Sur ce sujet d’importance, elle pourra formuler toute recommandation en matière de connaissance, de surveillance et d'expertise des risques miniers. Ces recommandations pourront également porter sur la prise en compte de ces risques dans l'urbanisation, en s'appuyant sur des expériences locales et dans une optique de bonne coordination.

Une circulaire sera adressée dans les prochaines semaines aux préfets pour organiser la mise en place des commissions locales. Un décret sera très prochainement signé pour créer la Commission nationale de concertation sur les risques miniers.

Comme vous, madame Gaillard, je considère que les espèces sauvages protégées sont notre patrimoine commun et notre propriété collective. Je veille avec détermination et dans un dialogue permanent, même s'il est difficile, au respect des textes que le Parlement a bâtis ou transposés.

Pour le loup, je plaide pour des solutions pragmatiques et adaptées, année après année, et pour une gestion commune de ce dossier avec le ministre de l’agriculture. L'expérience a enseigné qu’au-delà même du respect des textes, nous devons faire en sorte, à chaque étape de notre action, que les orientations politiques attendues par les citoyens ne soient pas remplacées par des décisions de justice qui figent des situations conflictuelles. Des décisions prises conjointement en ce domaine avec le ministère de l'agriculture ont été validées par les tribunaux. Quant au dernier tir de deux loups – sur un quota de six –, la justice a été saisie et j'attends sa décision.

Enfin, en ce qui concerne le Conseil national du développement durable, le contact et la consultation régulière sont relancés. En installant son nouveau président, Michel Ricard, le 22 septembre dernier, j'ai souhaité un travail plus étroit avec l'État, dans un cadre pacifié. Le délégué interministériel a présenté au CNDD, le 18 octobre, toutes les réponses aux propositions que celui-ci avait formulées. Le Premier ministre a saisi le Conseil en lui demandant un avis et des propositions sur la méthode de révision de la stratégie nationale de développement durable.

Dans le sens du pacte pour l'environnement proposé par le Premier ministre, il faut que la nouvelle stratégie soit celle de l'ensemble des Français et qu’elle permette un engagement des collectivités locales, des entreprises, des syndicats et des associations, c'est-à-dire de l'ensemble de forces vives de la nation et non pas seulement de celles de l'administration.

Je vais maintenant répondre aux différents orateurs qui se sont exprimés, que je prie de m’excuser de ne pas suivre l’ordre de leurs prises de parole.

Monsieur Lassalle, la politique menée en France en vue de la réduction des nuisances sonores générées par les avions comporte plusieurs axes d'action.

Le premier consiste à inciter à l'emploi d'avions moins bruyants. Ainsi, les avions les plus bruyants sont maintenant tous interdits de vol la nuit.

Le deuxième axe est l’optimisation des règles d'exploitation des aérodromes et le contrôle de leur respect. Des procédures de décollage et d'atterrissage « à moindre bruit » ont été définies pour les grands aérodromes français. En Île-de-France, la définition de volumes de protection environnementale dans lesquels doivent s'inscrire les trajectoires des avions contribue à limiter les nuisances perçues au sol et à diminuer le nombre des populations exposées.

Troisième axe : prévenir l'exposition au bruit par la maîtrise de l'urbanisation au voisinage des aérodromes. Plus de 250 aérodromes français font ainsi l'objet d'un plan d'exposition au bruit qui impose des restrictions d'urbanisme au voisinage des aérodromes.

Quatrième axe : l’aide à l'insonorisation des logements anciens exposés au bruit des aérodromes. Le dispositif actuel d'aide à l'isolation phonique des logements riverains des dix principaux aéroports permet de prendre en charge entre 80 % et 100 % du coût des travaux d'isolation des logements éligibles situés à l’intérieur des plans de gêne sonore.

Le 1er janvier 2005, la taxe sur les nuisances sonores aériennes, ou TNSA, qui concerne les dix aérodromes comptant plus de 20 000 mouvements excédant 20 tonnes, s’est substituée au volet bruit de la taxe générale sur les activités polluantes, ou TGAP. Le produit escompté est de 55 millions d'euros par an. Les modalités d’application retenues pour la TNSA en 2005 n'ayant pas permis d'atteindre ce montant, le Gouvernement a décidé de proposer une modification du dispositif de la TNSA à l'occasion de l’examen de la prochaine loi de finances rectificative.

En ce qui concerne le renforcement de la population ursine, qui a beaucoup agité le monde politique et le monde rural, je me limiterai, monsieur Lassalle, à rappeler certaines de vos déclarations, telles qu’elles sont consignées dans les comptes rendus officiels de l’institut que vous présidez et qui sont donc incontestables.

En 1996 – il y a donc assez longtemps – vous évoquiez, à propos du plan ours, « la poursuite et l’intensification du suivi de la population ours par des méthodes modernes, l’élaboration d’un programme d’accompagnement pour le renforcement de la population d’ours, qui débuterait dès le troisième trimestre 1997 – c’est-à-dire bien avant mon arrivée au Gouvernement – par le lâcher expérimental d’une ourse équipée d’un collier télémétrique ». Vous ajoutiez : « De la mise en œuvre et de la réussite de ce programme résultera le lâcher éventuel d’une deuxième ourse l’année suivante. »

En 2004 – il y a donc un peu moins longtemps –, vous proposiez « que le renforcement de la population d’ours en Béarn soit lancé et instruit à compter de ce jour ». Vous précisiez plus loin qu’il y aurait à l’issue de la concertation – qui, je le rappelle, a duré un an – un « renforcement de la population d'ours du Haut-Béarn par l'apport de deux ourses exogènes, en partenariat avec l'État français et l'Union européenne ». Vous ajoutiez encore : « L'homme vivant dans les montagnes et l'ours sont aujourd'hui tous les deux condamnés à disparaître. Sauvons-les tous les deux et faisons en sorte qu'ils puissent vivre ensemble, avec une approche et des moyens de notre temps, comme ils le firent dans un contexte autrement plus difficile et sans interruptions en Béarn depuis la nuit des temps. »

Il est inutile de prolonger ces citations. Je peux comprendre, monsieur Lassalle, que vous ayez changé d’avis et de position, mais je regrette que vous ayez dû trouver des subterfuges et dévier vers d’autres sujets qui ne vous concernent guère, et que vous ne maîtrisez pas autant que nous ou les riverains des aéroports. En tout cas, essayer de fuir vos responsabilités par rapport à vos prises de position en évoquant le dossier de Roissy ne me semble pas très appréciable ni très courageux. Il faut savoir reconnaître ses erreurs – tout le monde en fait –, et surtout, quand on prend des responsabilités personnelles, accepter de les assumer jusqu’au bout.

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Monsieur Braouezec, je suis surpris de votre appréciation du projet de loi sur l’eau : loin de ramener l'eau à un bien marchand, il en consacre au contraire le caractère public, il affirme la responsabilité des communes pour l'eau potable, et surtout met en place le droit à l'eau pour tous, dans le prolongement du forum de Mexico. Il prévoit également d'encadrer les modalités de gestion par les collectivités pour garantir équité et transparence. Plutôt que l’idéologie et l'incantation, le gouvernement a choisi de donner une réalité concrète à la gestion publique de l’eau. C’est une loi qui, d’ailleurs, est attendue depuis dix années !

Par ailleurs, je ne peux souscrire à votre propos sur les moyens consacrés à la lutte contre le changement climatique : la ligne « Lutte contre le changement climatique » n'a pas disparu du budget, les moyens non plus. Cette ligne budgétaire est passée du programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions » au programme « Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable », dotant ainsi l’ADEME de 10 millions d’euros supplémentaires. De plus, celle-ci bénéficie de taxes affectées : taxe sur les cartes grises et taxe sur le gaz naturel. Le Premier ministre, je le rappelle, a annoncé que l'ADEME doublerait ses moyens pour la production de chaleur à partir des sources d'énergies renouvelables. Cela se fera à partir de ressources supplémentaires, dont une taxe sur le charbon, en cours de finalisation. Par ailleurs, la recherche sur ce thème figure au rang des priorités du Gouvernement, au travers des politiques d'autres ministères, ainsi que des pôles de compétitivité, dont plusieurs traitent de ces sujets, et des programmes d'action de l’Agence nationale de la recherche et de l'Agence de l'innovation industrielle.

S’agissant de la recherche environnementale en général, les crédits budgétaires affectés ne relèvent pas de la mission « Écologie et développement durable », mais de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur ». Au sein de cette mission, notre ministère est en charge du programme 189 intitulé «Recherche dans le domaine des risques et des pollutions », et doté de 279 millions d’euros, ce qui est stable par rapport à 2006, et non en baisse. S'y ajoute une affectation de 10 millions provenant de la taxe sur les installations nucléaires de base affectée à l’IRSN, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, ce qui accroît les capacités de recherche de cet organisme. Vous voyez donc que la recherche reste extrêmement importante. À mes yeux, elle est nécessaire pour éclairer nos politiques publiques.

Monsieur Quentin, je vous remercie pour vos propos, et je salue le travail qui est fait par le Conservatoire du littoral. En ce qui concerne le vote par votre assemblée d'un amendement parlementaire visant à limiter la durée de l'affectation de la taxe de francisation et de navigation, je tiens à préciser que cette mesure ne vise pas spécifiquement ni prioritairement le Conservatoire du littoral, et que, de surcroît, elle ne remet pas en cause l'intérêt qu'il y a à assurer – le Président de la République l’a rappelé – un financement pérenne à cet établissement. Elle s'inscrit dans la volonté du Parlement de limiter la multiplication des affectations de recettes issues du budget général à des organismes publics, qui vous pose des problèmes quant au contrôle parlementaire de la dépense. Je suis évidemment fort ennuyée, vous le savez bien, que cette mesure affecte le Conservatoire, et croyez bien que nous réfléchissons à la manière d'en pallier les inconvénients.

Le budget du Conservatoire était, jusqu'en 2006, abondé par une dotation budgétaire du ministère de l'écologie. Le CIADT 2004 a décidé de lui affecter une ressource pérenne, ce qui va dans le bon sens. Le dispositif retenu a été l’affectation du produit de la taxe de francisation des navires de plaisance, à hauteur de 80 % en 2006 et de 100 % en 2007. Le Président de la République, en juillet 2005, et le Premier ministre, en juin 2006, ont annoncé des montants de 28 millions et de 35 millions. L'attribution de la TFNP ayant été concomitante à la modification de son mode de calcul en 2006 par le Parlement, fondé sur la longueur des navires et non plus sur leur jauge en tonneaux, il s'est avéré que cette taxe, dans son nouveau mode de calcul, ne rapportera que 30 millions. Afin de résoudre cette difficulté le Premier ministre a demandé qu'un groupe de travail étudie les différentes solutions envisageables pour rétablir durablement le niveau prévu de ressources pour le Conservatoire. Pour l’année 2006, un dégel de crédits au budget de mon ministère a permis de lui attribuer 2,3 millions d’euros de ressources complémentaires,…

M. Didier Quentin. Très bien !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. …ce qui pallie le manque à gagner. Pour l'année 2007, la taxe sera modifiée pour apporter impérativement au Conservatoire les 35 millions d’euros annoncés et qui lui sont nécessaires.

M. Didier Quentin. Je vous remercie, madame la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. En ce qui concerne l'identification des moyens de la politique de l’air et de la lutte contre le bruit, ils figurent dans le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions ». Ils prennent diverses formes : moyens d'intervention, actions de l’INERIS, financement des réseaux de surveillance de la qualité de l'air, travaux réalisés par Météo France, action de l’ADEME dans ce domaine. II y a aussi des moyens extra-budgétaires, comme la taxe sur les nuisances sonores aériennes pour l'insonorisation des logements près des aéroports – je viens d’en parler –, et d'autres ministères ont des crédits de lutte contre le bruit, tel le ministère des transports.

Les nouvelles modalités de présentation du budget induites par la LOLF et le souhait d'avoir des données synthétiques ont induit des changements de description du budget et ne nous permettent pas toujours de répondre simplement à toutes les demandes. Si nous n’y parvenons pas, c'est aussi parce que notre champ d'action est vaste et multiforme, les thèmes étant souvent imbriqués. Je note, monsieur Quentin, votre souci de présentation pour l’année prochaine, et demande par ailleurs à mes services de vous fournir une synthèse pour les prévisions 2007.

Je vous remercie du soutien que vous apportez au Gouvernement pour les résultats obtenus, notamment en ce qui concerne les parcs nationaux et la confection du réseau Natura 2000 ; là aussi, pendant des années, des retards considérables ont été pris.

Monsieur Chanteguet, je considère comme vous que la conservation de la biodiversité est un enjeu vital pour l'ensemble des hommes de cette planète, et c'est la raison pour laquelle j'ai souhaité augmenter les moyens budgétaires du programme 153 « Gestion des milieux et de la biodiversité ». Je vous remercie d'avoir salué cette augmentation.

Vous m'alertez sur les conditions d'élaboration du projet de parc amazonien de Guyane. Souvenez-vous du travail fructueux et serein accompli ici même et du dialogue entretenu entre Mme Rimane, Mme Taubira et le Gouvernement : nous avons ensemble bâti des bases législatives spécifiques à ce parc national. Je n'ai pas de doute sur le point de départ, parce que je rencontre régulièrement les élus de la Guyane ; je n'ai pas non plus de doute sur le point d'arrivée, qui me semble aujourd’hui ne pas être loin : l'enquête publique pour la création du parc vient de se terminer. Tout me porte à croire que le travail de concertation et d'explication de ce projet ambitieux porte aujourd'hui ses fruits. Je continue à travailler avec les élus guyanais, y compris les maires bien évidemment. Dans le budget 2007, je vous propose 2 millions d'euros pour le fonctionnement et 2,5 millions d'euros pour investir dans le plan pour le développement de la Guyane. Ainsi, ce parc national, dès sa création en 2007, donnera un cadre complètement neuf et ouvert, qui appellera l'innovation dont la biodiversité de la Guyane a besoin, notamment au regard des enjeux de développement de ce département.

Monsieur Merville, les dates de chasse aux oiseaux migrateurs sont aujourd'hui stabilisées : le 13 juillet dernier, pour la première fois depuis que le conflit sur les dates de chasse est ouvert, le Conseil d’État a intégralement donné raison au ministre chargé de la chasse en rejetant les recours formés contre mon arrêté du 24 mars 2006 sur l'ouverture de la chasse. Les attendus de l'arrêt du Conseil d'État donnent très nettement deux indications précises qui nous indiquent les pistes à suivre pour l’avenir.

Premièrement, je le rappelle parce que c’est important, l'abandon par la Commission européenne du contentieux sur les dates de chasse a constitué pour les juges un argument fondamental. Ne serait-ce que pour cette seule raison, il était important de stopper le contentieux avec la Commission, d’où mon arrêté du 24 mars. Le résultat est que les chasseurs au gibier d'eau bénéficient d'une première avancée liée au guide interprétatif, alors même que celui-ci n'est pas encore intégré à l'annexe V de la directive : l'ouverture de la chasse au gibier d'eau sur les zones humides intérieures n'est plus fixée au 1er septembre comme le prescrivait l'arrêt du Conseil d'État en date du 28 mai 2003 relatif à l'arrêté d'ouverture de la chasse de 2002, mais à l'intérieur de la dernière décade d'août. La chasse au gibier d'eau a ainsi ouvert, à l’exception de sept espèces, le 26 août en 2006, et ouvrira le 25 août en 2007. Le juge ne fait ainsi que confirmer que le respect du droit européen est un critère essentiel.

En tenant également, dans son arrêt, le plus grand compte d'études scientifiques approfondies et préalablement validées, le Conseil d'État a confirmé que la présentation de données scientifiques nouvelles et correctement évaluées serait désormais un ressort essentiel pour faire évoluer les dates de chasse. Il ne suffit pas d'avoir réuni des données pour qu'elles puissent valoir devant la juridiction administrative. Elles doivent être obtenues, je tiens à le répéter, dans le cadre d'études scientifiques sérieuses.

Les dates de fermeture sont également stabilisées depuis le 17 janvier 2005 et j'attends avec intérêt la décision du Conseil d'État sur mon arrêté du 31 janvier 2006 qui repousse dans dix-sept départements du Sud-Est de la France de dix jours la fermeture de la chasse aux grives et aux merles noirs.

Vous connaissez mon attachement à la politique de partenariat exemplaire menée avec les parcs naturels régionaux, partenariat qui a vocation à être inscrit dans l’outil plus global de collaboration entre l'État et les collectivités que sont les contrats de projet État-région, et cela, j'y insiste, dans toutes les régions. Je souhaite donc, monsieur le député, vous rassurer : j'ai obtenu du Premier ministre la possibilité d'inscrire de façon pérenne le soutien financier de l'État aux actions d'ingénierie liées à des projets d'infrastructures écologiques. Je dois dire que, là aussi, c’est une première. Nous entendons reconnaître et soutenir l’effort des PNR dans les contrats de projet en y affectant l’essentiel des moyens que le ministère de l'écologie et du développement durable attribue au fonctionnement des parcs régionaux, maintenant ainsi des dotations nécessaires et attendues. Le label « PNR » est un atout pour le développement touristique et la création d'emplois. Ce n’est pas à vous que je vais l’apprendre. Par ailleurs, compte tenu de la mise en place, dès 2007, des fonds structurels européens, il est judicieux que la contractualisation sur les PNR soit signée dès 2006, que ce soit au titre des grands projets ou du volet territorial des contrats.

Le plan national santé-environnement a été adopté en 2004. Un suivi régulier est effectué, et l'état d'avancement de sa mise en œuvre est régulièrement mis en ligne sur le site de mon ministère. Le dernier bilan, publié en juillet 2006, fait apparaître que les quarante-cinq actions de ce plan sont engagées. On peut également noter des avancées sur les trois grands objectifs du plan : les émissions de dioxine ont été divisées par dix en 2006, et près de 200 établissements industriels ont engagé des actions de réduction de leurs émissions toxiques ; en vue de prévenir les épidémies de légionellose, divers textes réglementaires sur l’eau chaude sanitaire et les tours aéro-réfrigérantes ont été publiés, et les inspections ont été renforcées ; le nouveau plan de lutte contre les pollutions liées aux produits phytosanitaires a été adopté.

Un plan santé au travail a été adopté en février 2005 pour améliorer la prévention des risques professionnels. Pour prévenir le risque de saturnisme infantile, le constat de risque d'exposition au plomb lors de la vente de logements anciens a été rendu obligatoire.

Toutes ces avancées sont significatives. Je présenterai très prochainement une communication en conseil des ministres sur la gestion des risques liés aux substances chimiques, qui sera structurée autour de cinq axes : le renforcement et la coordination de la gestion par les ministères ; le développement de programmes de contrôle opérationnels ; l'organisation de l'expertise nationale pour assurer la bonne mise en œuvre de Reach – et ce n’est pas simple – ; le développement de la recherche finalisée ; l'accompagnement des acteurs économiques.

En ce qui concerne les plans de prévention des risques technologiques, je vous rappelle, monsieur Merville, qu’ils ont été créés par la loi du 30 juillet 2003, qui a prévu cette possibilité de travaux que vous avez évoquée, et a aussi voulu en limiter le coût pour les particuliers, d'où la limite de 10 % que vous avez citée. La loi ne prévoit pas la possibilité pour l'État d'imposer aux industriels le financement de ces travaux. Par contre, les industriels devront bien sûr financer les investissements d'amélioration de la sécurité de leurs installations et cofinancer avec l’État et les collectivités les mesures foncières lourdes, telles que les expropriations ou les délaissements. Mes services seront attentifs au retour d'expérience des premiers PPRT. C’est un chantier lourd, il faut le savoir, et nous identifierons clairement les questions et les problèmes qui se poseront.

S’agissant de la lutte contre les inondations et les érosions des sols, les plans de prévention des risques naturels sont un élément clé de la politique de prévention des risques majeurs. C'est pour améliorer la qualité de la concertation et l'association des élus à cette démarche que j'ai créé, en juin dernier, un groupe de travail chargé de formuler des propositions concrètes. Elles me seront rendues en décembre prochain, et je veillerai bien sûr à leur application.

Par ailleurs, l'opération « Objectif déchets » est pour moi la clé de voûte de la politique des déchets que j'ai présentée au conseil des ministres en septembre 2005. Deux catégories d'actions doivent être menées en parallèle : la prévention, avec la réduction de la production de déchets, et la poursuite du développement du recyclage et de la valorisation matière. Nous allons lancer sous peu, avec l’ADEME, le plan compostage individuel. Je rappelle qu’une telle action peut permettre l’évitement d'une production de déchets pouvant aller jusqu’à 70 kilos par habitant, ce qui est important.

Pour le recyclage et la valorisation matière, nous poursuivons bien sûr les actions de tri sélectif. La progression est là aussi importante, notamment pour les taux de recyclage et de valorisation des emballages. Sur le terrain, vous constaterez que, grâce au fort développement des centres de tri, nous avançons d’une manière positive.

Il faut aussi citer le développement des filières spécialisées, notamment pour les piles, pneumatiques, véhicules, déchets d'équipements électriques et électroniques, qui seront en service dans quelques jours. Bref, je pense que la politique que nous mettons en œuvre en ce domaine permettra d’atteindre les objectifs fixés.

Vous avez raison, monsieur Jego : les filières de récupération textile – longuement évoquées au Sénat l’an dernier –, qui étaient jusqu'à présent autofinancées, connaissent aujourd'hui des difficultés du fait d'une baisse des prix de revente des vêtements récupérés. À la suite de la demande forte des associations de l'économie sociale et solidaire, qui font un travail remarquable, vous vous êtes avec plusieurs de vos collègues saisi de ce dossier. Le groupe de travail mis en place par Jean-François Copé et présidé par Jacques Pélissard vient de rendre ses conclusions. Un amendement au projet de loi de finances les reprend. Il sera présenté à votre assemblée la semaine prochaine et apportera une réponse pertinente à ce dossier, ce dont je me félicite.

Monsieur Voisin, je partage votre volonté de rendre beaucoup plus lisible la politique du paysage. En cette année d'entrée en vigueur de la Convention européenne des paysages et de commémoration du centenaire de la loi de 1906, j’ai eu l’occasion de m’exprimer à plusieurs reprises sur ce sujet. Je m'emploie à progresser dans ce domaine, selon trois orientations principales.

D'abord, la connaissance : j'ai lancé en 2006 un programme pluriannuel de recherche sur le thème des paysages et du développement durable, et je compte achever en 2007 la réalisation des atlas du paysage sur l'ensemble du territoire national. Ce n’est pas à vous que j’apprendrai l'intérêt de ces documents de référence partagés entre l'État et les collectivités territoriales. Cette connaissance de la diversité des paysages doit être accessible : c'est l'enjeu du système d'information sur la nature et les paysages qui, je le rappelle, est inscrit dans la stratégie nationale pour la biodiversité, et dont les modules relatifs aux paysages seront également formalisés dès 2007.

Deuxième orientation : l'intégration dans les politiques publiques. Le paysage, comme vous l’avez rappelé, est un patrimoine commun de la nation ; chaque collectivité publique en est le gestionnaire et le garant. Pour cette raison, la qualité du paysage est le reflet de la qualité des politiques publiques et de leur mise en cohérence. Je soumettrai très prochainement au Conseil national du paysage, organe qui ne s'est hélas réuni qu'une seule fois depuis 2000 et que je souhaite relancer, un plan interministériel de reconquête des paysages urbains et périurbains, qui vise à intégrer la dimension paysagère dans le portage des politiques de l'État et des collectivités territoriales. Ce plan interministériel pourrait promouvoir plusieurs orientations : développer des espaces naturels urbains, réhabiliter les entrées de ville, gérer l'espace de manière économe, concilier les espaces publics avec les trames écologiques, maîtriser l'affichage publicitaire – ce qui serait particulièrement bienvenu – et évaluer le dispositif réglementaire.

M. Gérard Voisin. Très bien !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Nous nous efforçons enfin de développer le soutien à la compétence. La réponse à la demande sociale de paysages d'une meilleure qualité passe par le soutien aux professionnels, et mon ministère s'implique de façon grandissante aux côtés des ministères de tutelle des écoles qui forment les paysagistes. La délivrance du prix du paysage, auquel je tiens particulièrement et qui récompense chaque année une réalisation exemplaire et ses acteurs, marque également la reconnaissance et la promotion de la qualité paysagère.

Enfin, je vous rappelle que les 44 parcs naturels régionaux se créent notamment selon l'exigence, partagée par l’ensemble des communes adhérentes, de maîtriser l'évolution de leurs paysages. Ces parcs constituent un élément essentiel de notre politique des paysages, laquelle, je tiens à le souligner, est soutenue par des élus engagés, attentifs et courageux, dont il faut saluer et reconnaître l’action. L'appui que leur apporte mon ministère forme donc aussi un pan non négligeable de la politique des paysages.

Je ne peux conclure la réponse que je vous dois, monsieur Voisin, sans mentionner la dimension internationale de notre action, avec la participation active de mon ministère au suivi de la convention UNESCO relative à la protection du patrimoine mondial, en particulier pour ce qui concerne les biens naturels et les paysages culturels.

La politique relative aux biocarburants, monsieur Launay, doit en effet, comme vous l’avez dit, faire l'objet de bilans écologiques complets : c’est ce que je fais valoir tous les jours dans les travaux concrets de mise en place des filières. Vous avez parfaitement raison : les effets bénéfiques sur l’émission de gaz à effet de serre ne doivent pas être contrebalancés par d'autres effets négatifs.

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Je partage aussi l'idée qu'il faut développer des procédés plus efficaces de passage de la biomasse aux biocarburants. Aussi la recherche dans ce domaine sera-t-elle développée, par exemple par certains pôles de compétitivité.

Monsieur Tourtelier, vous m’avez alertée sur la protection de la biodiversité. En ce domaine, j'essaie de conduire une politique qui implique tous les ministères. C'est bien parce que je ne veux pas servir d’alibi que j'ai choisi de faire piloter les dix plans d'action de la stratégie nationale pour la biodiversité par chacun des ministères concernés.

Vous avez attiré mon attention sur le rythme d'attribution des subventions aux gestionnaires des réserves naturelles. Je suis attentive à ce que vous venez de me dire et prends l'engagement devant vous d'accélérer en 2007 l'affectation de ces moyens de fonctionnement annuels aux gestionnaires.

Enfin, vous établissez une corrélation forte entre l’évolution du climat et l’avenir de la biodiversité. Je fais la même interprétation que vous, et souhaite donc vous informer de ma volonté de protéger non seulement des monuments naturels comme les réserves naturelles, mais aussi cette nature ordinaire qui appelle toute notre attention. C'est pourquoi j'ai souhaité, avec la campagne de communication, une information pédagogique, sans pour autant rendre nos concitoyens responsables de la situation.

Monsieur Cochet, le niveau de 0,4 % du budget civil de l'État n'a jamais été atteint jusqu'à aujourd'hui. La progression est constante depuis 2002. Le graphique que voici reflète bien cette évolution.

M. Didier Quentin. C’est clair !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Lorsque l'on parle des crédits, monsieur le député, il faut raisonner à périmètre constant. On peut, comme cela a été fait en 1999 pour l'ADEME et en 2001 pour I'IRSN, intégrer dans le budget du ministère celui des établissements publics : il peut alors en effet en résulter une augmentation importante. Mais celle-ci n’est due qu’à un effet d’optique, et n’induit aucune augmentation réelle des moyens consacrés à l’environnement.

J'ai donc choisi une autre manière de faire et préféré conforter, pour 2007, les établissements publics relevant de mon ministère. Les taxes qui leur sont affectées traduisent cette volonté, et l'augmentation des crédits budgétaires correspond donc bien à la mise en œuvre des politiques qui relèvent de mon ministère.

J’en viens au problème des effectifs. Pour l’inspection des installations classées, 346 emplois ont été créés entre 2002 et 2006, dont 196 depuis 2004. Dans un contexte difficile, j’ai obtenu la création de dix nouveaux emplois en région et de quatre au ministère pour la politique des produits chimiques. Cela montre bien que, contrairement à ce que vous avez prétendu, nous avons renforcé les effectifs.

Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les réponses circonstanciées que je voulais apporter à vos légitimes interrogations. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en arrivons aux questions.

Pour le groupe Union pour la démocratie française, la parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur la place réservée aux fibres céramiques réfractaires, dont l'utilisation risque d'être très prochainement interdite. Ces fibres sont des matériaux isolants haute température aux propriétés uniques, ce qui explique qu'elles sont essentiellement utilisées dans l'industrie, où elles favorisent les économies d'énergie.

II convient de rappeler tout d'abord que, selon le classement de l'Union européenne, ces fibres relèvent de la liste des produits cancérogènes de catégorie 2, et ne peuvent donc être commercialisées auprès du grand public.

En outre, dans le cadre du PNSE – plan national santé-environnement –, qui vise notamment à diminuer de façon significative les effets sanitaires d'une exposition aux agents les plus dangereux, le Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels a proposé l’abaissement de la limite d'exposition des fibres céramiques réfractaires de 0,6 fibre par millilitre à 0,1 fibre par millilitre.

Dans le contexte du fléau sanitaire de l'amiante que nous connaissons, tout indique que le principe de précaution joue à plein, au risque d’ailleurs de faire disparaître les quelques entreprises spécialisées dans ces productions. C'est pourquoi l'Association européenne des industries de la fibre céramique, l’ECFIA, a entrepris une démarche d'explication auprès des autorités administratives compétentes. Elle a d'ailleurs été auditionnée par notre collègue Jean Le Garrec, président de la mission d'information parlementaire sur le sujet, et travaille actuellement avec l'AFSSET – Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail – sur ce dossier.

L’ECFIA souhaite démontrer plus précisément que les fibres céramiques réfractaires ne sont pas des substituts de l'amiante ; elle s'efforce donc de sensibiliser le groupe de travail compétent et s’applique à faire admettre qu'une large consultation des experts mondiaux serait de nature à favoriser une nouvelle approche de ce dossier.

Avec cette situation, n'atteignons-nous pas, madame la ministre, l'une des limites du fameux principe de précaution ? Pourriez-vous nous indiquer quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour donner suite à cette demande des professionnels ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie et du développement durable.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Cette problématique, qui a trait à l’exposition professionnelle, relève de préoccupations sanitaires qui sont suivies en particulier par le ministère chargé du travail. Je suis cependant en mesure de vous apporter les éléments d'information suivants.

Les fibres céramiques réfractaires sont des fibres de silicate d'aluminium – vous le savez bien mieux que moi, monsieur le député – de nature et d'utilisation variées. Ces fibres sont classées cancérogènes de catégorie 2 au niveau communautaire : cela veut dire que ces substances sont des cancérogènes certains sur les animaux. Aussi ces produits sont-ils interdits de vente au grand public. Par ailleurs, le droit du travail impose leur substitution, à la charge de l'employeur.

Le fibres céramiques réfractaires, compte tenu de leurs caractéristiques, suscitent des préoccupations en ce qui concerne leurs effets sur la santé, en particulier en milieu professionnel. À cet égard, le plan national santé-environnement, adopté par le Gouvernement en juin 2004, fixe parmi ses objectifs prioritaires de réduire les expositions professionnelles aux agents cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques – CMR –, notamment celles concernant les fibres céramiques réfractaires.

En application du PNSE et du plan santé au travail, le ministère du travail a engagé un chantier de fixation des valeurs limites d'exposition professionnelle – VLEP – contraignantes pour les produits classés CMR, dont les fibres céramiques réfractaires, jusqu'ici concernées seulement par des valeurs indicatives. Un projet de décret en cours vise à retenir une VLEP relative aux FCR identique à celle retenue pour la valeur limite applicable à l'amiante,…

M. François Rochebloine. Soit 0,1 fibre ?

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. …c'est-à-dire, en effet, 0,1 fibre par centimètre cube, puisque ces fibres ont sur les animaux des effets comparables à ceux de l'amiante.

Ce décret fait actuellement l'objet de larges consultations, et devrait être présenté au début de l'année prochaine au Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels, ces consultations permettant aux entreprises de faire valoir leurs préoccupations.

On peut par ailleurs ajouter qu'une étude a été confiée par l'État à l'AFSSET sur les substituts possibles aux fibres céramiques réfractaires. Je ferai bien entendu part de vos préoccupations à MM. Borloo et Larcher, pour que leurs services vous apportent, si besoin, les informations complémentaires que vous souhaiteriez sur ce sujet.

M. le président. Pour le groupe des député-e-s communistes et républicains, la parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Ma première question concerne la pollution des sols. J’ai déjà évoqué ce sujet lors de la discussion, et j'aimerais y revenir, car il préoccupe nos concitoyens qui résident ou travaillent dans des territoires anciennement industriels et souvent pollués de longue date.

Il semblerait qu'une fois encore, les choix politiques de ce gouvernement trahissent la promesse qu’il a pourtant affichée de punir les véritables pollueurs. Alors que le principe pollueur-payeur est censé être l'une des grandes règles du droit de l'environnement français, son application ne semble pas toujours tenir compte de l'histoire particulière de certains sols. En règle générale, le pollueur est facilement identifiable, d'autant plus quand il s'agit de grandes entreprises comme Total ou GDF. Mais lorsqu’il n’y a pas de traçabilité, les pollueurs ne peuvent pas être identifiés : quid de ces situations financièrement désastreuses pour certains vendeurs de terrains, qui doivent les dépolluer alors qu'ils ne sont pas directement responsables de leur état ? Dans certains cas, le coût de la dépollution peut même s'avérer supérieur à la valeur réelle du terrain.

Il serait utile que l'État prenne enfin l’initiative de créer un fonds de péréquation permettant la prise en charge de ces dépollutions. Faire appel aux collectivités territoriales ne peut être la solution à ce type de problèmes, qui doivent relever de la solidarité nationale.

De la même manière, lors d'une expropriation des sols, l’état de pollution de ces derniers devrait automatiquement être pris en compte par le juge, quitte à ce qu'il en fasse estimer le coût par des experts spécialisés, afin qu’il puisse en estimer convenablement la valeur réelle.

Enfin, il est urgent que les arrêtés préfectoraux de dépollution des sols soient harmonisés d'une préfecture à l'autre afin que, dans le cas qui m'occupe quotidiennement en tant que président de Plaine Commune, les villes de la première couronne de Paris soient traitées de manière égalitaire, sans que les collectivités locales aient besoin d'intervenir financièrement. En l’état, le principe de l'égalité de concurrence entre les sites de la petite couronne n’est pas respecté, ce qui crée un déséquilibre territorial.

Ma question est donc simple et multiple : afin de rétablir une certaine égalité territoriale, êtes-vous disposée, madame la ministre, à mettre en place un mécanisme de péréquation qui éviterait de pénaliser le vendeur non pollueur de terrain et à faire en sorte, par ailleurs, que les juges prennent enfin en compte l’état de pollution des sols en question ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Monsieur Braouezec, il ne me semble pas exact de dire que l’action de l’État sur les sites pollués est faible. Depuis plusieurs années, des politiques importantes sont conduites, et le temps consacré par les services de l'État en région à ce sujet va croissant. Je connais bien votre département, et je sais que s’y trouvent des sites pollués de longue date, mais il me semble qu’un travail remarquable a été fait, puisque vous avez pu redynamiser certains de ces sites. Le laxisme n'est donc pas de mise, je peux vous le garantir.

M. Patrick Braouezec. Ce ne sont que des déclarations !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Non, vous me connaissez assez pour savoir que je ne m’arrête pas aux déclarations.

L'action est orientée selon plusieurs axes : prévenir la pollution des sols, en imposant aux usines des règles drastiques de fonctionnement et de surveillance – ce qui n’était pas le cas auparavant ; connaître les sites pollués, voire potentiellement pollués, grâce à des inventaires, rendus publics ; assurer une dépollution de qualité qui garantisse la protection de l'environnement et de la santé publique, en fonction des usages définis pour le futur des sites ; garder la mémoire des sites et les surveiller, car il ne peut jamais s’agir d’affaires classées.

Le sujet est de grande ampleur, je ne vous l’apprendrai pas, et réutiliser certains sites pour des usages sensibles, comme l’implantation d’écoles, entraîne des coûts importants, qui doivent être partagés entre l'industriel et l'aménageur.

Il est vrai que nous avons encore trop de sites orphelins, sans responsable solvable identifié. Cependant la situation progresse : des dizaines de sites sont dépollués chaque année, y compris pour des usages tels que les logements.

M. Patrick Braouezec. Mais ce sont les collectivités qui paient !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Je ne vous ai pas interrompu, monsieur le député !

M. Gérard Voisin. On n’interrompt pas les ministres !

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Par ailleurs, avec la loi de juillet 2003, nous avons introduit une obligation de concertation au moment de l'arrêt des activités, entre l'exploitant et le maire – ou l’intercommunalité –, le préfet pouvant être saisi en cas de désaccord sur l'usage futur du site.

S’il reste donc des sites orphelins qui posent problème, je ne peux pas laisser dire de l’État, qui accomplit un vrai travail, qu’il se désengage.

Pour ce qui concerne la création d’un fonds de péréquation – point qui, sans doute, vous intéresse le plus –, cette proposition est à étudier. Je précise cependant qu’il n’est pas question d’instaurer un financement public qui se substituerait à la responsabilité des pollueurs. Par ailleurs, des moyens publics sont déjà mobilisés, avec l’ADEME, le FNADT et le Fonds européen, qui confirment la présence de l’État.

Quant à l’harmonisation des arrêtés préfectoraux entre les départements, nous y veillons au quotidien. Je reste sur ce point à votre écoute, si vous constatiez des dysfonctionnements.

M. Patrick Braouezec. D’accord.

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec pour une seconde question.

M. Patrick Braouezec. Madame la ministre, ma seconde question porte sur la performance énergétique des logements. Le 4 novembre, l'ONU a organisé une journée internationale d'actions contre le changement climatique, et je ne reviendrai pas sur le documentaire d’Al Gore qui traite du même sujet. Or le bâtiment est actuellement responsable à lui seul de 20 % des émissions de gaz à effet de serre. Tous les spécialistes s'entendent à cet égard pour considérer ce secteur comme celui où résident les plus grandes marges de manœuvre pour lutter contre ce phénomène. C'est pourquoi il apparaît nécessaire de mettre sur pied un vaste plan de rénovation énergétique du parc immobilier et de construction de bâtiments hautement performants. Ce serait un pari sur l'avenir, car les temps de retour sur investissement sont très courts par rapport à la durée de vie des bâtiments. Outre les conséquences positives sur l'environnement, ces innovations auraient également pour effet de doper le secteur du bâtiment, secteur moins touché par la mondialisation et donc porteur de nombreuses créations d'emplois, les salariés étant recrutés localement.

Les gouvernements successifs n'ont répondu que superficiellement à ce défi. Ils se sont contentés pour l'essentiel de proposer des mesures d'incitation sous la forme de crédits d'impôt, là où il faudrait qu'une réglementation volontariste soit mise en place. Et même si le devoir, depuis le 1er novembre dernier, d'établir à l'occasion des promesses de vente un diagnostic de performance énergétique va dans le bon sens, il s'agit encore une fois d'une mesure insuffisante au regard des enjeux.

Très concrètement, tant qu'il n'y aura pas obligation, lors des constructions ou des rénovations, d'intégrer les énergies renouvelables, comme le solaire ou la géothermie, mais aussi des isolations thermiques efficaces, l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments demeurera marginale. Or les collectivités locales ne peuvent pallier toutes les carences, et notamment celles de l'État, puisqu’elles n’ont pas le droit de fixer des normes plus contraignantes que les normes nationales.

L'État doit donc donner l'exemple, et notamment en ce qui concerne ses commandes publiques, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. De leur côté, les plans d'entreprise d'EDF et GDF n'intègrent les énergies renouvelables que de manière limitée, et leurs experts sont le plus souvent mal formés à ces nouveaux métiers.

C'est pourquoi ma question est la suivante : quand et comment entreprendrez-vous de mettre en place une réglementation digne de ce nom en matière de performance énergétique des logements ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Monsieur le député, dans le domaine de l'efficacité énergétique des bâtiments, le Gouvernement s'efforce de mobiliser l'ensemble des instruments de politique publique de nature fiscale, réglementaire et incitative.

Je rappellerai l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation thermique RT 2005 à partir de début 2007 ; elle devrait permettre une amélioration de la performance de 15 %.

En matière fiscale, les crédits d'impôt ont été fortement renforcés en 2006, tant pour la maîtrise de l'énergie dans le bâtiment que pour les équipements en énergie renouvelable. C'est ainsi que l'on assiste à une augmentation significative des installations de panneaux solaires.

En matière d'information des consommateurs a été introduit le diagnostic de performance énergétique. Ce diagnostic est obligatoire dès aujourd'hui pour la vente de logements anciens et le sera à partir de juillet prochain pour les locations.

D’autres actions complémentaires sont également mises en œuvre grâce au pacte national pour l’environnement annoncé par le Premier ministre. Le livret développement durable, dont le plafond va être relevé, doit générer 10 milliards de prêts uniquement dévolus à des projets écologiques.

Par ailleurs, avec l’aide de la Caisse des dépôts et consignations, un quart des logements neufs, notamment dans le cadre de l’ANRU, seront mis aux normes de haute protection environnementale. Ce n’est certes pas suffisant, mais, là aussi, c’est un bon début qui peut sans doute nous permettre d’atteindre demain un taux de 50 %.

Vous avez raison, en tout cas, de dire que le logement et les transports sont les secteurs qui produisent le plus de CO2, c’est donc à eux qu’il fallait s’attaquer en priorité.

M. le président. Nous en arrivons aux questions du groupe UMP.

La parole est à Mme Juliana Rimane.

Mme Juliana Rimane. Madame la ministre, l’Office de l’eau mis en place en Guyane depuis à peine un an n’est pas en mesure d’être opérationnel. En 2007, il ne pourra toujours pas bénéficier de redevances et devra continuer à dépendre des subventions ministérielles et des collectivités locales. Pour lui permettre d’assurer sa mission de collecte des données sur la ressource en eau et d’assistance aux collectivités, il est indispensable que la contribution de votre ministère reste à un niveau élevé. La Guyane connaît des retards si considérables en matière d’infrastructures d’assainissement qu’aucune agglomération ne peut être en conformité avec la directive eau résiduaire urbaine.

En l’absence de prélèvement d’une redevance et dans l’attente de la création de l’ONEMA, l’abondement significatif des aides de votre ministère pour financer cet investissement est une condition essentielle si l’on veut rattraper le gigantesque retard pris dans ce domaine.

De nombreuses opérations lancées en 2005 devraient être réalisées en 2007. Pour atteindre cet objectif, les maîtres d’ouvrage estiment à 2,2 millions d’euros les besoins de financement. Il est donc impératif que les crédits de paiement des subventions engagées soient versés sans attendre, afin de pas aggraver davantage la situation financière des collectivités locales. Leurs demandes d’aides pour ces nouveaux investissements – notamment à Cayenne et Saint-Laurent-du-Maroni – sont estimées à environ 3 millions d’euros. Dans le cadre du programme opérationnel 2007-2013 où une très faible part du FEDER sera sans doute réservée aux investissements, ces collectivités attendent un engagement fort de l’État.

De même, le réseau hydrométrique, géré par la DIREN, n’est plus en mesure de fonctionner, fautes de moyens appropriés. En 2006, le réseau comprenait douze stations, il n’en comprend plus que 5, ce qui est en totale contradiction avec la directive cadre sur l’eau, qui impose la mise en œuvre d’un réseau de qualité et dense basé sur le débit. Une mise en commun de moyens interadministrations est à l’étude mais, là aussi, une augmentation significative des dotations est nécessaire pour rendre ce réseau efficace.

Madame la ministre, quels moyens comptez-vous dégager pour mettre un terme à cette situation en Guyane ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Je tiens à vous rassurer, madame Rimane : l’État continuera à assurer un soutien financier au fonctionnement de l'Office de l'eau, d'autant que celui ci est récent et ne disposera effectivement pas en 2007 de ressources propres : 150 000 euros sont ainsi prévus.

En ce qui concerne l'investissement, l'effort de solidarité nationale en faveur des DOM en général et de la Guyane en particulier sera poursuivi sur le budget de l'État en 2007, en attendant la mise en place de l'ONEMA, qui reprendra cette mission à partir de 2008. C'est ainsi une dotation de 1,5 million d'euros qui est prévue pour la Guyane en 2007.

J’ai omis, à ce propos, de répondre à une question qui m’a été posée : la loi sur l’eau sera bien votée avant la fin de l’année.

J'attire toutefois votre attention, madame la députée, sur la nécessité pour les élus de se mobiliser et de préparer les projets bien en amont. Plus d'un million de crédits de paiement n’ont pu être utilisés cette année, faute d'avancement suffisant des projets. Il ne faut pas qu’une telle mésaventure se renouvelle l’an prochain, car cela pénalise le territoire.

Enfin, il convient de rappeler que les services d'eau et d'assainissement sont des services industriels et commerciaux, devant normalement être financés par le prix de l'eau. A cet égard, il est important d'améliorer progressivement le taux de récupération des coûts, particulièrement faible en Guyane. Il faut y aller progressivement, mais parvenir à un niveau se situant dans la moyenne, pour faire avancer ce dossier. Nous sommes prêts à vous y aider.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Madame la ministre, ma question est double. Elle concerne le programme 181, et particulièrement l’action no 4, « Gestion des déchets et évaluation des produits ». Des orateurs ont évoqué ce sujet avant moi et vous avez vous-même, dans votre intervention, largement abordé la question des déchets. Vous avez également dit votre satisfaction de la mise en conformité des incinérateurs et votre volonté de faire disparaître les décharges non contrôlées. J’y souscris totalement.

En tant que membre d’un bureau de SMICTOM, je voudrais vous interroger, en premier lieu, sur la taxe générale sur les activités polluantes payée par les syndicats de traitement des ordures ménagères. La TGAP doit permettre l’application du principe pollueur-payeur, principe plutôt bien compris par nos concitoyens. Son champ d’application est multiple et son produit va au budget de l’État, comme l’a évoqué Philippe Rouault dans un excellent rapport ; il devait initialement permettre d’abonder un fonds de l’ADEME, assurant une redistribution aux collectivités.

La TGAP, d’un montant de 9,15 euros par tonne entrant dans un CET ou un CSDU, grève les budgets des syndicats de traitement des ordures ménagères et, par voie de conséquence, augmente les montants des taxes ou redevances payées par l’usager.

La réglementation draconienne, les contraintes nouvelles imposées aux exploitants de centres de stockage ou d’unités d’incinération génèrent des investissements énormes, dont les coûts sont également répercutés sur les usagers.

Je suis un ardent défenseur du tri sélectif et du compostage individuel, pour lequel vous prévoyez un plan ambitieux de développement. Nos concitoyens sont d’ailleurs prêts à faire de plus en plus d’efforts pour trier à la source et jouer la carte de l’apport volontaire dans les déchetteries. Mais ils acceptent de plus en plus difficilement que les taxes et les redevances auxquelles ils sont assujettis ne fassent qu’augmenter.

Ne peut-on imaginer un dispositif efficace et lisible qui permettrait de revoir l’assiette de la TGAP concernant la gestion des centres de stockage, en tenant compte, par exemple, des investissements réalisés, et de financer ainsi l’ADEME, dont l’aide sera précieuse pour atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés, à savoir ramener de 360 à 250 kilos par personne et par an d’ici à cinq ans le poids des déchets mis en décharge ou incinérés ?

Deuxième volet de ma question : le rapport relatif à la mission « Écologie » indique que les conditions d’élimination des pneus usagers ont été améliorées et que de bons résultats ont été obtenus pour l’élimination des pneumatiques nouvellement produits.

Dans ma circonscription, une commune de 1 800 habitants a hérité, sur un de ses terrains, de 2 100 mètres cubes, soit environ 400 tonnes, de pneus usagés – ce volume a été estimé par la DRIRE – provenant d’une entreprise aujourd’hui liquidée. Il n’y a donc aucun recours possible. Le devis d’évacuation et de traitement est d’environ 50 000 euros, frais impossibles à supporter pour le budget communal.

Comment l’État peut-il aider les collectivités à résorber les dépôts existants, qui s’élèvent à plus de 250 000 tonnes ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Il y a un an, monsieur Reiss, j'ai pris la décision d'engager des actions visant à résorber les dépôts de pneumatiques, qui sont au demeurant extrêmement dangereux, sources potentielles d’incendies et vecteurs de maladies. Un premier bilan fait apparaître que des progrès ont été réalisés, et je vous remercie de l’avoir souligné. Tout d'abord, l'obligation faite aux manufacturiers ou importateurs de pneumatiques, depuis 2004, pour toute mise sur le marché, de procéder à l'enlèvement et au traitement des pneumatiques usagés dans des conditions respectueuses de l’environnement, a permis d'empêcher la création de nouveaux dépôts.

Concernant les anciens dépôts, un recensement initial, basé sur les données de l'agence de l'environnement de la maîtrise de l'énergie et d'acteurs du monde associatif, faisait état de 242 000 tonnes de pneumatiques usagés répartis sur 114 sites. De tels dépôts peuvent entraîner des nuisances pour les riverains, comme la prolifération de reptiles ou de moustiques, mais aussi présenter des risques d'incendie.

Le bilan établi à ce jour montre qu'après un an, 41 sites ont été évacués, pour un total de 56 000 tonnes, et que 18 sites, représentant 23 000 tonnes, sont en cours de traitement. Nous avons enfin demandé aux exploitants de prendre les mesures nécessaires pour évacuer les pneumatiques usagés en surplus avant la mi-2007. Par ailleurs, 55 sites, représentant 163 000 tonnes, ne sont plus exploités ou ont un exploitant insolvable. Le coût de l’évacuation et du traitement des pneumatiques déposés doit revenir au pollueur, et j’ai demandé que, pour ces 55 sites, les préfets poursuivent la recherche des entreprises clientes des sociétés défaillantes, afin qu’elles prennent les pneumatiques usagés confiés et procèdent à leur élimination. Ces clients demeurent en effet responsables de leurs pneumatiques usagés tant qu’ils n’ont pas été éliminés. Par ailleurs, certains acteurs se sont engagés à reprendre les pneumatiques usagés pour lesquels aucun responsable solvable n’a pu être identifié, et les manufacturiers ont ainsi demandé à Aliapur, une filière de valorisation des pneus usagés, de remplir leurs obligations en matière de reprise et de traitement des pneumatiques et de prendre en charge 30 000 tonnes de déchets.

Comme vous, je pense qu’il faut intensifier et pérenniser cette action. Il faut que tous les acteurs s’associent à cette démarche pour évacuer le plus rapidement possible ces stocks de pneus dangereux. Je m’engage également, monsieur Reiss, à me pencher sur le problème spécifique que vous avez évoqué.

Il est difficile de stabiliser le coût des traitements des déchets ménagers. Mais la fin des investissements de mise en conformité des décharges et des incinérateurs devrait contribuer à régler ce problème. Dans cette optique, les objectifs de réduction des quantités mises en décharge ou incinérées devraient contribuer à la réduction des coûts, qu’il s’agisse des coûts de traitement ou de la TGAP acquittée. Je me tiens à votre disposition, ainsi que mes services, pour discuter plus en détail de cette affaire.

M. Frédéric Reiss. Je vous remercie, madame la ministre.

M. le président. La parole est à M. Gérard Voisin.

M. Gérard Voisin. Madame la ministre, à la suite des attentes que j’ai exprimées tout à l’heure concernant la politique en faveur des paysages et des sites, je souhaiterais revenir plus précisément à la présentation des crédits destinés aux opérations « grand site ».

L’action de l’État sur ces opérations relève du programme 153 « Gestion des milieux et biodiversité », action 04 « Incitation à la gestion durable du patrimoine naturel ». Si les opérations « grand site » figuraient explicitement parmi les dépenses d’intervention de l’État dans la présentation du projet 2006, ce n’est plus le cas pour l’année 2007 et ce manque de visibilité est tout à fait regrettable. D’après les informations transmises par vos services, les opérations « grand site » s’inscrivent dans le dispositif intitulé « interventions sur les espaces et milieux spécifiques ou exceptionnels », ce qui appelle des précisions. Je souhaiterais, madame la ministre, que vous me confirmiez que les 1,4 million d’euros inscrits en autorisations de programme et les 2 070 000 euros inscrits en crédits de paiement concernent exclusivement les opérations « grand site ».

Par ailleurs, je m’inquiète de la baisse affichée des crédits d’autorisations d’engagement. En effet, globalement, les autorisations d’engagement de l’action 04 augmentent. En revanche, pour les grands sites, ces crédits sont fixés à 1,4 million d’euros, alors qu’ils étaient bien au-delà l’année dernière, puisque vous aviez accepté de les abonder au cours de la discussion budgétaire.

Je tiens à préciser que les crédits de paiement en 2006 ont surtout permis d’apurer les dettes de plusieurs années et non de financer de nouvelles actions. Ces montants ne permettront pas en tout cas de poursuivre, au rythme prévu, les actions sur lesquelles l’État est pourtant engagé dans le cadre des conventions d’OGS – les opérations « grand site » – signées avec les collectivités, et qui ont déjà dû être ajournées les années précédentes. Ils permettront encore moins de donner à cette politique le développement qu’elle mérite, en permettant à de nouveaux sites classés emblématiques, mais tellement dégradés, de faire l’objet des opérations de réhabilitation et de mise en valeur dont ils ont besoin.

Il serait enfin souhaitable que les contrats de projet État-région puissent porter, non seulement sur des études, mais aussi sur des travaux réalisés dans les grands sites.

M. Jean Launay. Bonne idée !

M. Gérard Voisin. Je vous serais donc particulièrement reconnaissant, madame la ministre, de bien vouloir me confirmer l’intérêt que vous portez aux opérations « grand site » et d’indiquer les moyens budgétaires qui leur seront effectivement consacrés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Monsieur le député, je partage vos préoccupations sur les opérations « grand site » : elles constituent en effet une politique partenariale, soucieuse du développement local, autour d'un projet de réhabilitation et de mise en valeur de nos paysages les plus beaux, les plus fréquentés, mais, hélas, les plus menacés dans leur intégrité.

Dans cette perspective, ce sont 2,2 millions d’euros en autorisations d’engagement – dont 1,8 million d’euros sont d’ores et déjà programmés en région – et 1,8 million d’euros en crédits de paiement, qui seront consacrés en 2007 au soutien d’une quarantaine de ces opérations. Il convient d’ajouter les crédits consacrés à l'OGS du Marais-Poitevin compris dans le programme d'intervention territoriale de l'État – le fameux PITE – auquel mon ministère contribue.

Ces montants permettront à mes services de répondre aux besoins de réhabilitation de sites prestigieux et d'assurer la participation du ministère – à hauteur de 10 % en moyenne – à ces opérations, tout en intégrant les prévisions de crédits des autres partenaires que sont la région, le département et l’Union européenne.

La dotation prévue dans le projet de loi de finances pour 2007 s’inscrit par conséquent dans la poursuite de la politique menée en 2006, qui a non seulement permis d’honorer les engagements de l’État, en soldant un grand nombre d’opérations, mais également d’initier des opérations nouvelles.

Enfin, les opérations « grand site », de par leur caractère partenarial et leur assise territoriale, se prêtent à des démarches infrarégionales de contractualisation qu’il convient de promouvoir. Ces dernières peuvent être mentionnées dans le cadre des contrats de projet État-région, qui offrent par ailleurs la possibilité d'inscrire les crédits relatifs aux études préalables et à toute autre opération participant à la création d’une infrastructure écologique à l’échelle régionale.

Bien entendu, monsieur le député, si vous avez besoin d’informations complémentaires sur ces dossiers, je reste à votre disposition.

M. le président. La parole est à M. Gérard Voisin, pour une deuxième question.

M. Gérard Voisin. Je pose cette question au nom de Michel Voisin, député de l’Ain, et accessoirement mon cousin…

M. Patrick Braouezec. On reste en famille ! (Sourires.)

M. Gérard Voisin. Madame la ministre, la prolifération du grand cormoran sur la plupart des sites de notre pays, et plus particulièrement sur la Saône et le pays des mille étangs, la Dombes, est devenue l’attention constante des agriculteurs, des pisciculteurs et des exploitants d’étangs.

L’arrivée d’un nouvel intrus, le cygne, dont chacun s’accorde à reconnaître la part prépondérante qu’il a pu jouer dans la transmission du virus H5N1 sous sa forme la plus virulente, n’est pas faite pour les rassurer.

Les mesures d’effarouchement autorisées sur le site de Crépieux-Charmy ont montré leurs limites. L’obligation d’utiliser la grenaille de plomb dans les zones humides ne permet plus la régulation du grand cormoran.

Dans un premier temps, quelles mesures comptez-vous prendre et quelles démarches entreprendre pour que le cormoran cesse d’être considéré comme une espèce protégée ?

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Gérard Voisin. Que pensez-vous faire pour favoriser une régulation efficace ? Quelles dispositions comptez-vous prendre pour autoriser les tirs sur le site de Crépieux-Charmy, devenu un véritable lieu de villégiature pour les cormorans ? (Sourires.) Quand prendrez-vous l’arrêté de tir au plomb pour le cormoran, la grenaille d’acier étant totalement inefficace ?

M. Jean Lassalle. Excellent !

M. Gérard Voisin. Je vous en prie, monsieur Lassalle ! C’est déjà assez pénible pour moi qui ne suis pas chasseur ! (Rires.)

Enfin, madame la ministre, quelles mesures de forte régulation envisagez-vous concernant le cygne, nouvel intrus dans les fleuves et les étangs ?

Ce problème est récurrent. Tous les agriculteurs, pisciculteurs, exploitants d’étangs, qu’ils soient scandinaves, européens ou latins, souffrent de l’absence de mesures, qu’ils souhaitent simples, précises et rapides. Ils ne sauraient accepter que la réglementation européenne serve d’alibi, car ils savent que, quand il y a une volonté politique, il y a des solutions.

M. Jean Lassalle. Et comment !

M. Gérard Voisin. Madame la ministre, ils attendent votre réponse avec beaucoup d’espoir. Mon cousin aussi ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Pour m’être rendue récemment en Sologne, monsieur le député, je suis au fait des problèmes posés par les cormorans. Michel Voisin et moi-même avons d’ailleurs travaillé ensemble à ce sujet.

Des efforts ont été accomplis ces dernières années. Actuellement, nous autorisons la destruction d'environ 36 000 cormorans par an afin de limiter l'augmentation de cette population et les dégâts sur les piscicultures et la faune d'eau douce. Ceci représente une augmentation de près de 50 % par rapport aux 25 000 tirs autorisés en 2002. Mais, bien que le nombre d’autorisations ait progressé par rapport à la période 2003-2005, le taux de réalisation des tirs d’élimination n’est pas à la hauteur des possibilités offertes. Ce taux s'améliore cependant, car j'ai rappelé aux préfets le large éventail des personnes pouvant participer à ces opérations, élargi les zones où ces opérations peuvent intervenir et allongé les périodes de tir pour les piscicultures dans les départements les plus concernés par l'alevinage tardif.

Comme je m'y étais engagée, je fais examiner les conditions dans lesquelles, à titre dérogatoire, la grenaille de plomb, interdite pour le gibier d'eau, pourra être utilisée dans la saison en cours. Le résultat de cet examen permettra de donner des instructions précises pour éviter qu’en voulant faciliter le tir des cormorans autorisés, les pisciculteurs ou leurs ayants droit ne soient verbalisés, car le tir s'effectue au même endroit que la chasse.

Je sais qu’en application de mes instructions, le préfet de l’Ain a commencé la préparation de ces mesures qui pourront rapidement être mises en œuvre.

S’agissant en revanche des cygnes, je ne suis pas aujourd’hui en mesure de vous apporter une réponse. Je la ferai connaître dès que possible à Michel Voisin.

M. le président. Nous avons fini les questions.

Mission
« Écologie et développement durable »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Écologie et développement durable », inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Sur l’état B, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 168 et 179.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement no 168.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. La commission a souhaité un débat sur le bien-fondé de la politique d’introduction des ours dans les Pyrénées. Je laisse à Jean Launay le soin de défendre cet amendement dont l’initiative revient à M. Bonrepaux.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Je vais donc soutenir l’amendement de la commission, puisque, selon nos règles de travail, l’amendement no 179 de M. Bonrepaux ne peut être défendu que par son auteur et ne peut pas être repris.

Les membres de l’Association nationale des élus de la montagne, récemment réunis en congrès annuel à Ax-les-Thermes, en Ariège, ont voté une motion très détaillée, motivée et circonstanciée sur la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées.

La commission et Augustin Bonrepaux proposent de modifier les autorisations d’engagement et les crédits de paiement en supprimant au sein du programme « Gestion des milieux et biodiversité » une somme de 1 million d’euros correspondant à la surveillance et au déplacement des ours dans les Pyrénées et affectée à l’Office national de la chasse. L’augmentation correspondante, au profit de la prévention des risques matériels, permettrait à l’action 02 du programme concerné d’engager des actions de lutte contre les avalanches, les feux de forêt et les inondations.

Augustin Bonrepaux et les élus de la montagne pensent que l’introduction d’ours slovènes que vous avez réalisée, madame la ministre – même si vous avez considérablement réduit le nombre initialement prévu par vos prédécesseurs –, ne répond pas aux prescriptions de la convention de Berne, qui précisent qu’une telle mesure doit être acceptée par les populations. L’analyse de la gestion de cette réintroduction permet de relever tous les gaspillages qu’elle entraîne, avec un résultat déplorable pour la sérénité des populations comme pour leur sécurité.

Nous constatons que la gestion de ces fauves échappe totalement à ses promoteurs. Les ours se déplacent vers des villes comme Toulouse ou Saint-Girons. Le fait qu’ils échappent à ceux qui devraient en assurer le suivi mobilise énormément les services publics : interventions de la gendarmerie et des sapeurs-pompiers, vols d’avions et d’hélicoptères, captures, reconduites dans les montagnes. Ces redéploiements génèrent des coûts considérables et représentent un surcroît de travail. Et je n’évoquerai pas le danger pour les populations de montagne !

M. Jean Lassalle. C’est malheureux !

M. Jean Launay. L’expérience prouve qu’il n’est pas possible de prévenir la prédation. Aussi, la solution raisonnable et économe pour maintenir les ours dans les Pyrénées sans conséquences graves pour les habitants est de les cantonner sur des territoires réservés à cet effet. L’État, propriétaire de plusieurs milliers d’hectares dans les Pyrénées, peut certainement trouver les territoires nécessaires. Avec des marges plus réduites, il est possible de réaliser un projet viable pour l’ours des Pyrénées, dans le cadre d’une gestion économe des deniers publics.

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. La commission des finances a effectivement adopté cet amendement. Cependant, à titre personnel, j’y suis défavorable.

M. Jean Lassalle. Courage, fuyons !

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial. En effet, le programme « Gestion des milieux et biodiversité » est sans doute à mon avis encore insuffisamment doté. J’en veux pour preuve certaines associations qui gèrent des espaces naturels, comme la Bretagne vivante – SEPNB, et ont besoin de crédits supplémentaires.

Cet amendement n’apporterait pas de réponse à la question de l’introduction de l’ours mais, bien au contraire, créerait des difficultés supplémentaires. Dois-je rappeler que cinq ours ont été récemment introduits pour en rejoindre d’autres. Ils sont actuellement dix-sept et nous sommes obligés d’en assurer le suivi et, le cas échéant, d’indemniser les dégâts.

M. le président. Je soupçonne que l’avis du Gouvernement est défavorable…

Mme la ministre de l’écologie et du développement durable. Bien entendu, monsieur le président.

Monsieur le rapporteur spécial, puisque nous évoquons les crédits consacrés à la biodiversité, permettez-moi de saluer votre engagement en la matière : vous n’avez pas ménagé votre peine pour défendre ces dotations. Quand j’évoquais, il y a quelques minutes, les efforts que je ne manquerai pas de consentir vis-à-vis du monde associatif en ce domaine, je n’oublie pas que c’est grâce à vous que je pourrai y parvenir.

M. Bonrepaux est à l’origine de cet amendement qui me préoccupe beaucoup. Il propose de supprimer 1 million d’euros dédiés aux actions de surveillance de l’ours sur le programme 153 et d’abonder d’autant les actions de prévention des risques sur le programme 181. Ce transfert est contraire, je tiens à le préciser, aux intérêts que M. le député de l’Ariège prétend défendre, à savoir ceux des habitants des Pyrénées. La colère n’est pas forcément bonne conseillère.

Le budget que mon ministère se propose de consacrer en 2007 à l’ours s’élève à 1,9 million d’euros, ce qui revient à la valeur du budget de 2005 – et je vous remercie de l’avoir remarqué –, avant même la réintroduction de nouveaux ours. Il est le résultat d’une année de concertation avec ceux qui n’ont pas manifesté dans la rue, mais qui ont accepté de se mettre autour de la table. Ce budget est en baisse par rapport à celui de 2006 puisque les actions de renforcement du printemps et de l’été sont désormais achevées. En le réduisant, monsieur Launay, vous nuiriez à plusieurs titres aux intérêts des Pyrénéens. En effet, cette dotation est nécessaire dans sa totalité pour mener à bien la politique de suivi des ours et de soutien aux activités pastorales. Il n’y a pas que quatre malheureux ours slovènes aujourd’hui dans les Pyrénées ; d’autres y vivent également et c’est tant mieux. Dois-je rappeler que plus de 50 % de ces crédits seront consacrés aux éleveurs et au pastoralisme ? Cela consiste en des aides au gardiennage, aux équipements de protection et à l’équipement des cabanes pastorales. De plus, des emplois d’aides bergers que finance jusqu’à présent mon ministère disparaîtront si ces crédits sont supprimés. Je vous laisse donc le choix. Si l’on ajoute les crédits prévus pour les actions en faveur des forestiers et des chasseurs, c’est environ 70 % du budget ours de la mission « Écologie et développement durable », soit plus de 1,4 million, qui sont destinés aux acteurs locaux pyrénéens.

Sur ce budget de 1,9 million en 2007, le coût strictement dédié au suivi et à la surveillance des ours, hors l’animation pastorale, représentera environ 500 000 euros, somme effectivement allouée à l’ONCSF. Là encore, cette mission profite avant tout aux Pyrénées. Outre que l’équipe technique est la seule capable d’effectuer les expertises en cas d’attaque et que ses avis sont d’ailleurs respectés et sa compétence reconnue, la mission qu’elle accomplit répond à une demande fortement exprimée par les élus pyrénéens concernant la localisation des animaux ; le plan de renforcement a d’ailleurs prévu d’en augmenter les moyens. Comme vous le savez, cette tâche a constitué au cours des derniers mois une part majeure du travail de suivi de l’équipe de l’ONCSF. La suppression de ce million d’euros au budget consacré à l’ours entraînerait donc un retrait de l’État de missions de soutien tout à fait importantes pour les activités pyrénéennes et de missions d’information des élus pyrénéens, ce que M. Bonrepaux a toujours été le premier à réclamer. Le plan de restauration que j’ai mis en place en prévoit, quant à lui, le renforcement. Contrairement à ce qui a été dit, cette politique est peu coûteuse. Le démembrement de l’équipe « ours » risque, en réalité, de faire perdre à notre pays une expérience acquise mise uniquement au service des Pyrénéens. Grâce à cette équipe et à son excellente collaboration avec les fédérations de chasseurs, les activités cynégétiques peuvent se poursuivre, sans contrainte, mais dans le cadre d’un dialogue permanent et dans la concertation. Cela se déroule depuis de longues années, puisque cette situation est antérieure au plan de renforcement « ours ». Il faut donc savoir ce que l’on veut !

Vous avez évoqué le coût que représente l’intervention des forces de l’ordre : celles-ci n’auraient pas été sur le terrain pour l’arrivée des ours si les manifestants ne s’étaient pas conduits de façon totalement irresponsable.

M. le président. Maintenez-vous cet amendement, monsieur Launay ?

M. Jean Launay. Tout à fait, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Gaillard.

Mme Geneviève Gaillard. Les autres parlementaires socialistes ici présents partagent les points de vue de Mme la ministre. Nous ne voterons donc pas cet amendement.

M. le président. Mais vous l’avez cosigné, comme tous les membres du groupe socialiste ! (Sourires.)

Mme Geneviève Gaillard. Il l’est peut-être par certains, mais pas par moi !

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Madame Olin, j’ai écouté très attentivement vos propos. Nous sommes avant tout deux élus locaux et vous êtes, je le crois, appréciée dans votre région. Tout à l’heure, vous m’avez dit que je n’étais pas cohérent sur la question de l’ours et que je m’acharnais donc sur celle de Roissy. Or le député Lassalle a toujours été cohérent. Vous êtes remontée en effet jusqu’en 2004, madame la ministre, et je vous invite à aller jusqu’en 1970. Vous auriez alors constaté que j’ai toujours été un partisan de la cohabitation entre les hommes et les ours. Je suis fils de berger et j’ai moi-même été berger. Je ne pense pas que nous soyons si nombreux ici à avoir vécu cette cohabitation. Si elle ne venait pas du fond du cœur, elle était admise. Mais elle ne l’a jamais été par la force. Voilà ce qui s’est passé ! Il fallait procéder dans l’esprit de la décentralisation et de la nouvelle gouvernance, chère à ce gouvernement, et pour laquelle il s’est battu. Ce n’est pas une affaire d’ours, mais une affaire de malentendu entre les hommes !

Madame la ministre, vous avez désigné sur la carte une partie de la France devenue inutile : les Pyrénées. Les hommes n’y ont plus droit de cité. La disparition des paysans et des bergers n’a aucune importance, du moment qu’il y a les ours sauveurs de la biodiversité du monde ! Grâce à eux n’y a plus de gaz à effet de serre ! Tout est parfait !

Je suis opposé à l’action conduite par Mme Olin et ses services. Malheureusement, plutôt que d’écouter les Pyrénéens, elle a cédé à des groupes de pression terrifiants dont la chambre régionale des comptes serait bien inspirée de regarder les ressources. Qui les finance, à commencer par la fondation de Nicolas Hulot ? On y verrait certainement plus clair. Le rôle d’un État quel qu’il soit est de rassembler tous les citoyens du pays et non de les dresser les uns contre les autres. Vous avez fait appel à des gardes et à 300 policiers. C’est parce que je suis opposé à la présence de tous ces gardes dans notre montagne, qui a toujours été un territoire de liberté, que je voterai de tout mon cœur et de toutes mes forces pour la suppression de ce million ! Il est indigne de notre pays, monsieur le président !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 168 et 179.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Écologie et développement durable ».

(Les crédits de la mission « Écologie et développement durable » sont adoptés.)

Article 48

M. le président. J’appelle maintenant l’article 48 du projet de loi de finances, rattaché à cette mission.

Cet article ne fait l’objet d’aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 48 est adopté.)

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs à l’écologie et au développement durable.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de LA prochaine séance

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007, no 3341 :

Rapport, no 3363, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Solidarité et intégration ; articles 53, 54, 55 et 56 :

Rapport spécial, no 3363, annexe 33, de Mme Marie-Hélène des Esgaulx, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Rapport spécial, no 3363, annexe 34, de Mme Béatrice Pavy, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Avis, no 3364, tome X, de M. Patrick Beaudouin, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, no 3364, tome XI, de M. Gérard Cherpion, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures trente.)