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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Troisième séance du jeudi 15 février 2007

142e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR

1. Droit au logement opposable. – Suite de la discussion d’un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d’urgence (nos 3656, 3671)

discussion des articles

Article 1er (p.

M. Jean-Louis Dumont, Mme Martine Billard, MM. Jean-Claude Sandrier, Jean-Yves Le Bouillonnec, Michel Piron, Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles.

Amendement n° 186, amendements identiques nos 226 et 291 et amendement n° 333 avec le sous-amendement n° 372 : Mme Martine Billard, MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, Frédéric Dutoit, Thierry Mariani, Claude Goasguen, Mme la rapporteure, M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. – Rejet de l’amendement n° 186 ; rejet des amendements identiques ; retrait de l’amendement n° 333.

Amendements nos 290 et 305 : MM. Daniel Paul, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Rejets.

Adoption de l’article 1er.

Article 1er bis (p.

MM. Jean-Louis Dumont, Jean-Yves Le Bouillonnec, le ministre, Patrick Braouezec, Frédéric Dutoit.

Amendements identiques nos 30 et 80: MM. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. – Retrait de l’amendement n° 30.

M. Guy Geoffroy, vice-président de la commission des lois. – Retrait de l’amendement n° 80.

Adoption de l’article 1er bis.

Après l’article 1er bis (p.

Amendement n° 301 : M. Michel Piron, Mme la rapporteure, MM. le ministre, Frédéric Dutoit, Mme Martine Billard, M. Jean-Yves Le Bouillonnec. – Adoption de l’amendement n° 301 modifié.

Amendement n° 314 avec le sous-amendement n° 373 : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le ministre, Mme la rapporteure, MM. le vice-président de la commission des lois, Frédéric Dutoit, Mme Martine Billard, M. Jean-Louis Dumont.

Suspension et reprise de la séance (p.

M. le ministre, Mme la rapporteure. – Adoption du sous-amendement n° 373 rectifié ; adoption de l’amendement n° 314 rectifié modifié.

Article 1er ter (p.

Amendements identiques nos 1 rectifié et 31 rectifié : Mme la rapporteure, MM. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, le ministre. – Adoption.

L’article 1er ter est ainsi rédigé.

Article 1er quater. – Adoption (p.

Après l’article 1er quater (p.

Amendement n° 249 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, MM. le ministre, Frédéric Dutoit, Michel Piron. – Retrait.

Amendement n° 248 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Rejet.

Article 2 (p.

Amendement n° 227 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Adoption.

Amendements identiques nos 2, 32, 81 et 228 : Mme la rapporteure, M. le ministre. – Adoption.

Amendements identiques nos 3 et 33 : Mme la rapporteure, M. le ministre. – Adoption.

Amendements nos 285 et 188 : M. Patrick Braouezec, Mmes Martine Billard, la rapporteure, M. le ministre. – Rejets.

Amendement n° 229 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Rejet.

Amendement n° 230 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, M. le ministre, Mme Martine Billard, M. Frédéric Dutoit. – Rejet.

MM. le ministre, Jean-Yves Le Bouillonnec.

Renvoi de la suite de la discussion à une prochaine séance.

2. Ordre du jour des prochaines séances

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Droit au logement opposable

Suite de la discussion d’un projet de loi
adopté par le Sénat après déclaration d’urgence

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (nos 3656, 3671).

Nous abordons à présent l’examen des articles.

Article 1er

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.

La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, mes chers collègues, nous entrons dans le vif du sujet. L’article 1er est en effet l’article essentiel de ce projet de loi relatif au droit au logement opposable et il sera désormais contenu dans l’article L. 300-1.

Cet article indique que le droit opposable est garanti par l’État. L’État républicain doit en effet donner toutes les garanties possibles qu’il sera en mesure de faire appliquer le droit au logement opposable– que nous allons inscrire dans la loi – et ce sur l’ensemble eu territoire, y compris outre-mer. Ici se pose une question de crédibilité.

J’appelle donc votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que, depuis ce matin, nombre d’orateurs de la majorité et de l’opposition ont cité l’article 55 de la loi SRU et le ministre qui a défendu cette loi dans notre hémicycle. Son application n’a pas été facile, compte tenu des contingences locales, de l’histoire et des besoins réels des territoires. Je rappelle que M. Besson a inscrit dans la loi plusieurs obligations relatives aux aires d’accueil des gens du voyage. Je demande à chacun d’entre vous de réfléchir aux garanties que le représentant de l’État a pu assurer, bref, à ce qui a été fait dans sa circonscription, c’est-à-dire à peu près rien.

Enfin, l’État fait-il face à ses obligations financières ? Paie-t-il ses dettes ? À l’origine, il refusait parfois, par esprit de solidarité, une expulsion prononcée par le tribunal et se substituait au résident pour payer le loyer aux bailleurs sociaux, autrement dit les HLM. Désormais, on assiste à de sombres négociations, sur une décote de la dette qui peut dépasser 50 %. On m’a proposé une décote de 10 %. J’ai pensé que l’État avait peut-être des fins de mois difficiles, qu’il fallait se montrer solidaire et qu’il valait peut-être mieux récupérer un peu d’argent. J’ai donc signé cette décote et, la semaine suivante, on m’en proposait une de 20 % !

Nous débattons ce soir d’un grand principe, mais quelle en sera demain l’application ? L’État, quels que soient ceux qui le dirigent, et le ministre en charge du logement, de quelque bord qu’il soit, doivent à ceux qui espèrent de respecter les engagements pris aujourd’hui devant le Parlement.

Monsieur le président Dubernard, je comprends que mon intervention vous ennuie, mais, bien que le temps de parole soit limité, il est encore permis de s’exprimer dans cet hémicycle !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Je parlais au président de séance !

M. Jean-Louis Dumont. Cela ne m’a pas échappé ! Je constate que vous préférez parler entre présidents plutôt qu’avec l’opposition !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Je ne suis qu’un modeste président de commission !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Je reviendrai sur l’application prévue à l’article 1er bis, mais nous avons besoin de garanties supplémentaires.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Louis Dumont. Je continuerai tout à l’heure à défendre mon point de vue.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. L’article 1er inscrit dans la loi l’opposabilité du droit au logement pour certaines catégories de personnes non logées ou mal logées. Il s’agit d’une revendication ancienne des associations militant pour le droit au logement et la défense des personnes en situation d’exclusion par le logement, que les parlementaires de l’opposition – dont les Verts – ont à plusieurs reprises proposée par voie d’amendements.

Cependant l’opposabilité du droit au logement ne devrait pas avoir pour résultat d’entraîner les personnes sans logement ou mal logées dans un labyrinthe de démarches administratives ou judiciaires.

De plus, les commissions de médiation introduites par ce texte aux articles suivants pourront écrémer les publics « prioritaires non urgents », sans aucun critère précis, ni délai, ni motivation écrite, ni possibilité de recours. Les mêmes commissions pourront orienter les demandeurs vers un simple hébergement, qui ne permet pas de sortir de la précarité et qui ne correspond qu’à un public très précis.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Très bon combat !

Mme Martine Billard. Le droit au logement opposable doit créer un effet dissuasif afin que la puissance publique fasse en amont les efforts nécessaires pour rendre ce droit effectif et produire un nombre suffisant de logements correspondant à la réalité de la demande sociale. Il ne suffit pas de construire ; encore faut-il construire utile.

Le rapport 2007 de la Fondation Abbé Pierre, rendu public au début du mois, diagnostique une accélération et une diversification des phénomènes de mal-logement dans toutes ses manifestations : en milieu rural comme en centre-ville, dans les banlieues et les zones touristiques. Les travailleurs sociaux des grandes villes enregistrent de plus en plus d’occupations de locaux non adaptés à l’habitation. Les chiffres sont accablants : notre pays compte 3 millions de sans-logis ou de très mal-logés. Ces difficultés touchent désormais les classes moyennes, modestes et intermédiaires.

L’envolée des phénomènes d’exclusion ou de précarité dans le logement est le pendant de l’envolée de la précarité dans le monde du travail. Rappelons que les salariés payés au SMIC n’ont jamais été aussi nombreux – 4 millions –, que 50 % des salariés du secteur privé touchent moins de 1 400 euros nets par mois, 30 % moins de 1 200 euros et que seul un dixième des salariés à temps plein perçoit plus de 3 000 euros nets par mois.

Alors, quelle part de richesse la collectivité veut-elle consacrer à la redistribution en faveur de logements accessibles à tous ? Les formes les plus libérales d’intervention, telles que celles pratiquées ces dernières années, ne sont pas les moins chères pour la collectivité. Je pense notamment à la gabegie des hébergements d’urgence, payés au prix fort par les collectivités, dans des hôtels et autres lieux souvent indignes et insalubres. Pourrons-nous durablement laisser des maires se dédouaner impunément de leur obligation de 20 % de logements sociaux, inscrite à l’article 55 de la loi SRU ? La majorité UMP n’a eu de cesse de vouloir réduire le champ d’application de cet article en redéposant des amendements.

Pourrons-nous résoudre la crise du logement sans casser la spéculation immobilière et l’envolée des loyers ? À ce titre, monsieur le ministre, le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre est terrible pour le bilan de votre gouvernement. Certes, la construction de logements a augmenté, mais les aides aux secteurs locatifs publics et privés ont ignoré les caractéristiques de la demande sociale, se contentant d’accompagner un marché en hausse.

Je cite le rapport de la Fondation Abbé Pierre : « La politique du logement menée ces dernières années vise seulement la partie supérieure des couches moyennes, en laissant croire qu’elle s’adresse à tous. » Plus loin on peut lire : « Jamais si peu de produits nouveaux destinés à des ménages à revenus modestes n’auront été présentés sur le marché. »

Au-delà du discours d’autosatisfaction de la majorité sur les chiffres globaux de la construction de logements, il ne faut pas oublier que la part des logements attribués sous conditions de ressources a chuté de 67 % en 2000 et à 41 % en 2005-2006. Alors que les PLS représentaient 10 % de la construction locative sociale en 2000, ils constituent désormais plus du tiers des logements sociaux conventionnés. À l’inverse, le nombre de livraisons de véritables logements sociaux que sont les PLAI et les PLUS a stagné.

L’effort de la collectivité publique est quasiment à son niveau le plus bas depuis trente ans !

M. Patrice Martin-Lalande. Que ne faut-il pas entendre !

M. Michel Piron. C’est ahurissant !

Mme Martine Billard. En privilégiant les mécanismes d’incitation fiscale, vous avez favorisé la construction de patrimoine au détriment des besoins sociaux. En même temps, les aides au logement ont été réduites, alors que le taux d’effort des ménages n’a jamais été aussi élevé. Le budget des ménages pour le logement a atteint en 2005 un niveau historique, avec une moyenne de 24,7 %. Pour les plus modestes, ce taux d’effort peut affecter jusqu’à 50 % des ressources.

Oui, il nous faut instituer le droit au logement opposable, mais vous comprendrez qu’au nom des Verts, je veuille doter la loi, par voie d’amendements, de véritables outils pour le mettre en œuvre, tels que le blocage temporaire des loyers, l’augmentation de la taxe sur les logements vacants, le durcissement des prélèvements pour non-respect de l’article 55 de la loi SRU, l’exclusion des PLS du décompte des logements sociaux et la mise en œuvre de la loi de réquisition.

J’aurais également souhaité défendre un amendement renforçant la prévention, car, s’il y avait moins d’expulsions, il y aurait moins de gens à la rue. Or, aujourd’hui, il est malheureusement impossible, à cause de l’article 40 de la Constitution, de déposer un amendement qui fasse obligation, en cas d’expulsion de locataires de bonne foi, de leur proposer un relogement avant qu’ils soient à la rue. Je regrette que l’article 40 nous empêche d’engager une discussion sur la prévention : il ne nous reste qu’à nous lamenter sur le nombre croissant de personnes qui se retrouvent à la rue dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier. Ceux qui, hier encore, raillaient la proposition utopiste, irréaliste, voire démagogique, visant à inscrire dans la loi le droit au logement opposable, tentent aujourd’hui de nous convaincre qu’ils ont, eux aussi, changé et que tout est désormais possible.

M. Thierry Mariani. C’est un bon slogan !

M. Jean-Claude Sandrier. En l’espace de six mois, les conditions préalables et nécessaires à la concrétisation de ce droit ont-elles structurellement changé ? A-t-on produit massivement des logements à loyers accessibles ? Les communes qui, jusque-là, refusaient de satisfaire à l’obligation de construire 20 % de logements sociaux ont-elles été contraintes par les préfets de respecter la loi ? L’accès à la sécurisation des risques locatifs est-il désormais ouvert à tous, y compris aux bénéficiaires de minima sociaux, aux jeunes de moins de vingt-cinq ans ? Les avantages fiscaux consentis – et l’on sait qu’ils sont importants – ont-ils été conditionnés à une contrepartie sociale ? L’État s’est-il mobilisé pour enrayer la flambée des loyers et des prix de l’immobilier ?

La réponse à toutes ces questions – vous la connaissez – est assurément négative. Ce qu’il n’a pas fait en douze ans de mandat, le Président de la République se propose de l’accomplir en un instant, par le biais du présent texte, dont la mise en œuvre se ferait en 2008 et au-delà.

Les raisons de ce revirement soudain, de ces coups d’accélérateur sur le dispositif de garantie des risques locatifs et, maintenant, sur l’opposabilité du droit au logement, sont à rechercher du côté des sans-toit, qui ont crevé l’écran, et de la visibilité accrue des multiples visages de la nouvelle pauvreté française. Ce sont autant d’images dérangeantes, à quatre mois d’échéances électorales majeures.

Il est vrai que ce gouvernement se devait de trouver le moyen de masquer l’échec de sa politique consistant à laisser faire le marché. Il se devait aussi de faire oublier ses responsabilités dans une crise qui n’est pas seulement celle du logement, mais qui est aussi celle d’un ultralibéralisme qui soumet les droits sociaux à la loi d’un libre-échange sans limites. En tranchant positivement une problématique portée depuis de longues années déjà par l’ensemble du monde associatif, le Gouvernement s’offre donc une bouffée d’air politico-médiatique.

Je ne partage pas l’opinion des membres de la majorité pour lesquels le droit opposable apparaît comme le couronnement de la politique volontariste menée par le Gouvernement en faveur du logement et de l’hébergement. C’est bel et bien sous la pression que celui-ci s’est résolu à légiférer. Le projet de loi dont nous discutons a été véritablement arraché au Gouvernement par les associations. Depuis 2002, le haut comité pour le logement des personnes défavorisées travaille à donner son entière portée à ce droit fondamental et préconise, pour ce faire, la mise en œuvre du droit au logement opposable. En 2005, les modalités de cette opposabilité et son calendrier ont été définis.

Cela étant refermons cette parenthèse sur l’ironie d’une situation dans laquelle les plus farouches opposants au droit au logement opposable déploient des efforts surhumains pour s’en montrer les champions, et permettez-moi de vous faire part de ma satisfaction devant cette évolution des positions. Le législateur s’empare enfin de la question de l’opposabilité du droit au logement et propose de franchir une étape en introduisant à la charge de l’État une obligation de résultat.

Je regrette toutefois, comme l’ensemble des associations, que ce texte soit délibéré en urgence. En effet, selon les termes mêmes de la Fédération des associations pour la promotion et l’insertion par le logement, « la précipitation, dans le contexte actuel, ne peut que restreindre la portée d’un droit qui se veut fondamental et universel, si toutes les compétences qui y participent ne sont pas réorientées vers lui ».

Les députés du groupe communiste, républicain et citoyen abordent donc ce débat dans un esprit constructif, surtout depuis les avancées actées au Sénat, mais nous resterons prudents et réalistes, craignant que la réponse apportée ne se révèle être seulement médiatique, comme l’analyse le professeur de droit public Frédéric Rollin, et que les déceptions ne soient aussi grandes que les espérances suscitées par le projet de loi ; prudents aussi, car le seul instrument mobilisable par l’État pour s’acquitter de ces obligations est le contingent de droits à réservation de logements locatifs sociaux dont dispose chaque préfet dans son département : autant dire pas grand-chose pour satisfaire l’ensemble des besoins ; prudents enfin, car le Gouvernement n’envisage pas la mise en place de mesures exceptionnelles, d’un plan d’urgence en faveur du logement l’obligeant à produire en nombre des logements très sociaux, à adapter véritablement l’offre à la demande, à mobiliser les logements vacants et à arrêter les expulsions.

Nous en concluons que le projet de loi ne permettra pas à lui seul d’atteindre l’objectif qui lui est assigné.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L’article 1er est l’article fondateur du dispositif.

M. Michel Piron. Cela ne nous a pas échappé !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous pouvons donc nous arrêter quelques instants sur les conditions dans lesquelles le législateur peut fixer dans la loi le principe de l’opposabilité.

Nous aurions pu en effet opérer différemment. Non que je conteste la légitimité des rédacteurs, mais cet article vise l’article 1er de la loi du 31 mai 1990, lequel est ainsi rédigé :

« Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l'ensemble de la nation.

« Toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l'inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d'existence, a droit à une aide de la collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent et indépendant ou s'y maintenir […]. »

On aurait pu opter pour une autre technique juridique et simplement compléter cet article en ajoutant que l’État est garant de l’exercice de ce droit. L’édifice aurait ainsi reposé sur cette prescription préalable de la loi de 1990.

Le choix que l’on a fait introduit un troisième dispositif relatif à la notion de droit au logement à l’intérieur du code de la construction et de l’habitation. Je doute que ce soit une simplification. Du reste, le chiffre de trois est sans doute inexact : la loi Quillot de juin 1982 reconnaissait déjà un droit à l’habitat et la loi Mermaz de juillet 1989 évoque elle aussi le droit au logement ; puis vint la loi Besson ; enfin le dispositif introduit par la loi de lutte contre les exclusions en juillet 1998 est présenté en ces termes : « La présente loi tend à garantir sur l'ensemble du territoire l'accès effectif de tous aux droits fondamentaux dans les domaines de l'emploi, du logement, de la protection de la santé, de la justice, de l'éducation, de la formation et de la culture, de la protection de la famille et de l'enfance. »

Ces quatre textes nous font passer de la notion de droit à l’habitat à celle de droit au logement. Cependant la façon dont nous introduisons l’opposabilité ne met pas en évidence la continuité qui existe avec ces lois. Au demeurant, la formulation retenue reprend non pas les propositions de loi déposées par certains de nos collègues ou les suggestions du haut comité – même si celui-ci l’a validée –, mais bien la formulation du code de la construction et de l’habitation.

Il est dommage, selon moi, que la garantie assurée par l’État à toute personne, qui est un élément nouveau et extrêmement important, ne soit pas mise en exergue. Elle aurait pu l’être si l’on avait choisi de modifier la rédaction de la loi Besson.

À cet égard, on peut aussi regretter la rédaction initiale proposée par le Gouvernement, qui précisait que « l’État garantit le droit au logement mentionné à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 à toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière et stable, n'est pas en mesure d'accéder par ses propres moyens à un logement décent et indépendant ou de s'y maintenir ». L’examen des amendements va nous révéler que la rédaction du Sénat pose un problème, notamment quand elle renvoie à « la résidence sur le territoire de façon régulière et dans des conditions de permanence définies par décret ». Nous pensons que cela ouvre la porte à des imprécisions dangereuses.

Au total, la rédaction de cet article aurait pu mettre en exergue la garantie donnée par l’État à ce droit. Ainsi, cette garantie aurait été étendue aux droits ouverts par la loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998. La relative improvisation qui a présidé à l’élaboration du texte explique sans doute que l’on n’ait pas fait le lien. Cela est dommage car il aurait été intéressant de faire de l’État le garant de tous les droits énoncés par les lois successives que je viens d’évoquer.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Mme Billard a comparé le pourcentage de logements sociaux par rapport au parc total construit dans le domaine public en 2000 et en 2006. Je me trouvais moi aussi au Cirque d’hiver lorsque ces chiffres ont été avancés. Le raisonnement doit cependant être complété : s’il est exact qu’en 2000 les logements sociaux ou très sociaux représentaient un pourcentage plus fort, c’est parce que la construction, pour l’ensemble du parc public, était très faible. La gauche a construit 5 009 PLAI en 2000, alors que nous en étions à 8 200 en 2006. En revanche le total de constructions était de seulement 42 262 logements en 2000, contre 97 000 en 2006.

Vous avez donc raison en ce qui concerne les pourcentages, madame Billard, mais nous avons fait beaucoup mieux en chiffres absolus.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. J’interviens à ce stade du débat pour essayer de nous faire gagner un peu de temps dans la discussion des amendements.

L’article 1er vise à assurer la garantie par l’État du droit au logement. Le texte qui nous est soumis est le fruit d’une volonté politique très forte, exprimée par le Président de la République il y a à peine un mois : faire du droit au logement opposable une réalité. C’est pourquoi cinq des neuf articles du projet de loi initial y étaient consacrés.

Lors de son passage au Sénat, le texte a été enrichi. Certaines des nouvelles dispositions se rapportent au droit opposable, d’autres en sont plus éloignées. J’appelle l’attention de l’Assemblée nationale sur la nécessité, pour bien faire passer notre message, de garder à l’esprit l’intitulé de cette loi. C’est la raison pour laquelle j’ai limité au maximum le nombre d’amendements que j’ai présentés au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales : je ne voudrais pas qu’un débat, en particulier sur la loi SRU, vienne polluer l’identité profonde de ce projet.

J’ai beaucoup écouté, beaucoup auditionné dans les quelques jours qui ont séparé la discussion au Sénat de notre débat d’aujourd'hui. Cela m’a permis de prendre la mesure de l’unanimité avec laquelle ce texte est accueilli. Pour répondre à ces attentes, j’ai décidé de proposer à la commission quelques amendements ciblés, en souhaitant que la priorité reste à la défense du droit au logement opposable.

N’oublions jamais, mes chers collègues, qu’il s’agit davantage d’un problème humain que d’un problème de logement. L’opinion doit être convaincue de notre volonté de mettre en application ce droit opposable. Mes amendements ont donc trait aux garanties procédurales en matière de médiation, à la distinction entre l’hébergement et le logement, à l’accompagnement social des personnes logées, ou encore à la remise d’un rapport par le comité de suivi le 1er octobre 2007. Certains ont été adoptés par la commission à l’initiative du groupe socialiste. Je m’en réjouis : c’est peut-être le signe que nous pouvons entamer la présente discussion dans un esprit de confiance et que nos débats seront constructifs.

M. le président. Nous en venons à l’examen des amendements à l’article 1er.

Je suis d’abord saisi de quatre amendements, nos 186, 226, 291 et 333, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 226 et 291 sont identiques.

L’amendement n° 333 fait l’objet d’un sous-amendement n° 372.

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 186.

Mme Martine Billard. Cet amendement porte sur l’alinéa 6 de l’article 1er, qui tend à préciser quelles sont les personnes bénéficiant du droit au logement opposable.

Il convient de rappeler tout d’abord que le droit au logement concerne les familles éprouvant des difficultés particulières en raison de la faiblesse de leurs ressources. Actuellement, dans toutes les communes de France, seules les personnes en situation régulière ont le droit de déposer une demande de logement social. Or il semble logique que tout personne ayant le droit de déposer une demande de logement social puisse se voir reconnaître le droit au logement opposable. C’est une simple question de cohérence.

Certains proposent d’établir différentes catégories d’étrangers résidant en France. Ainsi, l’amendement de M. Mariani vise clairement à ce que le droit au logement opposable ne soit pas reconnu à tous les étrangers en situation régulière. On nous explique que la carte de résident de dix ans est obtenue, sauf exception, après cinq ans de résidence régulière en France : franchement, il ne faut pas être confronté souvent à cette question pour oser soutenir une chose pareille ! Combien d’étrangers, ces dernières années, n’ont pu obtenir la carte de dix ans alors qu’ils remplissaient tous les critères ? Combien d’étrangers résidant légalement dans notre pays et ayant déposé une demande de naturalisation n’obtiennent pas, pour autant, cette carte ? Et pourtant, quelle meilleure preuve de leur intégration et de leur amour de la France que le souhait d’être naturalisé ? Un amendement comme celui de M. Mariani interdirait à ces personnes, en cas de difficultés financières à un moment donné, d’être protégées par le droit opposable.

À trop vouloir créer des catégories idéologiques, à toujours faire la chasse à ceux qui n’entreraient pas dans la norme selon certains,…

M. Patrick Braouezec. Comme ceux qui font la queue à la soupe populaire !

Mme Martine Billard. …on en arrive à créer des situations invraisemblables. Restons dans la cohérence : toute personne qui a le droit de déposer une demande de logement dans notre pays doit pouvoir, de la même façon, se voir reconnaître le droit au logement opposable. Le sens de mon amendement est donc de nous en tenir à la loi actuelle et ne pas ouvrir la porte à la fixation de nouveaux critères par décret.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l’amendement n° 226.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mon argumentation est la même que celui de Mme Billard. La rédaction initiale du Gouvernement qui indiquait, « résidant sur le territoire français de façon régulière et stable », faisait référence à la loi Besson et permettait de ce fait à toute personne en situation régulière d’accéder au dispositif. Être en situation régulière aujourd’hui est moins facile qu’au moment de la loi Besson, puisqu’il faut satisfaire aux dispositions – que j’ai combattues – de la loi de juillet dernier. C’est dire que ce dispositif est restrictif et qu’il est de nature à rassurer ceux qui craignent de voir en bénéfier des gens qui ne devraient pas y avoir droit.

En supprimant la mention « et dans des conditions de permanence définies par décret en Conseil d’État », nous proposons de revenir à une rédaction proche de celle du Gouvernement, qui porte en elle l’essence et le sens du dispositif de la loi Besson. C’est à nous en effet qu’il appartient de définir ces conditions, pas au Conseil d’État.

M. Thierry Mariani. Tout à fait ! Sur ce point, nous sommes d’accord.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est au législateur de définir ce droit fondateur. Il n’appartient pas au Conseil d’État, même s’il est compétent pour cela, de donner une formulation juridique sur le sens que le législateur veut attacher à la loi. En maintenant le dispositif ancien, nous conserverons la portée historique de ce texte.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour soutenir l’amendement n° 291.

M. Frédéric Dutoit. Notre amendement a le même objet.

M. le président. Essayez d’être bref, alors.

M. Frédéric Dutoit. Il est important que le groupe des député-e-s communistes et républicains puisse exposer sa position.

M. Patrick Braouezec. Et qu’il le dise avec sa sensibilité communiste ! (Sourires.)

M. Frédéric Dutoit. L’article 1er du projet de loi pose le principe de la garantie par l’État du droit au logement décent et indépendant mentionné à l’article 1er de la loi du 31 mai 1990 et prévoit les voies de recours pour exercer ce droit. Puisque celui-ci est, avec raison, fondé sur la loi de 1990, pourquoi limiter le champ des bénéficiaires à toute personne résidant sur le territoire, non seulement de façon régulière, mais encore « dans des conditions de permanence définies par décret en Conseil d’État » ? Pareille formule est choquante : elle se montre sans nécessité plus restrictive que les règles ordinaires d’accès au logement social.

Rien ne justifie une telle limitation, sinon peut-être la volonté subreptice de porter atteinte au droit au logement, dont l’article R. 441-1 du code de la construction et de l’habitation précise les bénéficiaires. Aux termes de cet article, ont en effet accès aux logements locatifs sociaux « les personnes physiques admises à séjourner régulièrement sur le territoire français dans des conditions de permanence définies par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'intérieur, du ministre chargé des affaires sociales et du ministre chargé du logement ». Le ministère du logement précise qu’il s’agit de personnes admises à séjourner régulièrement sur le territoire, c’est-à-dire titulaires d’un titre de séjour en cours de validité, sans d’ailleurs en déterminer la durée. Il nous paraît éminemment souhaitable de revenir sur la rédaction du texte. C’est le sens de notre amendement.

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l’amendement n° 333.

M. Thierry Mariani. Le projet de loi tel qu’il nous est soumis prévoit que seuls les étrangers en situation régulière pourront bénéficier du droit au logement opposable . En tant que rapporteur des lois de 2003 et de 2006 relatives à l’immigration et à l’intégration, je me félicite que ce droit ne puisse être applicable aux étrangers en situation irrégulière. Cela me semble être la moindre des choses. Il serait anormal qu’il puisse bénéficier à des personnes ne respectant pas les lois de notre République. Il est par conséquent tout à fait justifié d’empêcher les étrangers en situation irrégulière de pouvoir accéder à ce droit. La France n’a pas vocation à devenir un guichet social universel.

L’article 1er du projet de loi précise que la liste des étrangers en situation régulière pouvant bénéficier du droit au logement sera définie par décret. Pour une fois, je suis d’accord avec certaines remarques de nos collègues de l’opposition : c’est à nous, élus de la nation, et non à un décret, qu’il appartient de déterminer qui pourra prétendre au droit au logement opposable. Nous devons le faire de manière transparente, claire et juste.

L’objet de mon amendement, cosigné par de nombreux députés du groupe de l’UMP, est de limiter le droit au logement dans la loi en le réservant aux seuls étrangers détenteurs d’une carte de résident de dix ans, car celle-ci témoigne de leur intégration parfaite à la République française. Ceux qui la détiennent ont réussi leur parcours d’intégration de cinq ans,…

M. Patrick Braouezec. Dites plutôt parcours du combattant !

M. Thierry Mariani. …au cours duquel ils ont signé le contrat d’accueil et d’intégration rendu obligatoire par la loi de 2003, appris la langue française et respecté les principes démocratiques de la République française.

M. Frédéric Dutoit. Et où ont-ils habité pendant ce temps ? Dans la rue ?

M. Thierry Mariani. Le droit au logement opposable doit être réservé aux étrangers n’ayant commis aucun délit et ayant rempli leurs devoirs vis-à-vis de notre pays. Il est indispensable que nous, élus de la nation, aidions ceux qui ont accompli ces longs et nombreux efforts d’intégration à en disposer. C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement qui, je le crois, apportera une réelle amélioration au projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir le sous-amendement n° 372.

M. Claude Goasguen. Il est curieux, monsieur le président, que les amendements précédents et celui de M. Mariani soient examinés en discussion commune : ils ne disent pas du tout la même chose !

M. Frédéric Dutoit. Vous avez raison, les nôtres n’ont rien à voir avec les vôtres !

M. Claude Goasguen. Les trois amendements précédents ne posent aucune condition.

M. le président. Ils portent tout simplement sur la même partie du texte.

M. Claude Goasguen. Comme mon collègue communiste, vient de le faire, je tiens à souligner que nos propositions n’ont rien à voir : il ne sera pas dit que je soutiens les mêmes propositions que lui !

M. le président. Je n’ai pas le sentiment qu’il puisse y avoir confusion. (Sourires.)

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il n’y a pas de honte !

M. Claude Goasguen. Je voudrais poser le problème de manière plus précise que dans les déclarations d’intention qui ont été faites précédemment.

L’accès des étrangers au droit au logement opposable est une vraie question et Thierry Mariani a raison de la poser, même si je ne partage pas tout à fait l’exposé des motifs qu’il vient de développer.

En l’état, le texte me paraît très perfectible. Le projet de loi initial du Gouvernement prévoyait que les étrangers accèdent au droit au logement opposable lorsqu’ils résident sur le territoire français « de façon régulière et stable », critère retenu par le Conseil constitutionnel en 1993 pour l’accès des étrangers à la protection sociale. Puis le Sénat a renvoyé à un décret en Conseil d’État le soin de définir les conditions de permanence du séjour des étrangers. Le législateur ne peut pas s’en satisfaire : c’est à la loi de définir les conditions d’accès au droit, faute de quoi elle risque d’être entachée d’incompétence négative.

M. Frédéric Dutoit. La loi définit déjà cela !

M. Claude Goasguen. Je parle du décret. Je comprends que la passion vous aveugle lorsque vous regardez dans la direction de la droite, mais vous devriez tout de même écouter. (Sourires.) Il arrive que l’on étudie aussi les textes de loi !

M. Frédéric Dutoit. Je n’ai aucune passion pour la droite !

M. Claude Goasguen. Pour que la loi ne soit pas entachée d’inconstitutionnalité, il ne faut pas nous défausser sur le pouvoir réglementaire. Nous devons dire nous-mêmes ce que nous entendons recouvrir avec la notion de stabilité du séjour en France.

Par mon sous-amendement, je propose que les étrangers accèdent au droit au logement opposable dans les mêmes conditions qu’ils accèdent au RMI, telles que les définit la loi du 1er décembre 1988, adoptée ici à l’unanimité. Les conditions d’accès des étrangers au RMI ont été approuvées sur les bancs de droite comme sur les bancs de gauche et le Conseil constitutionnel les avait parfaitement à l’esprit en 1993 quand il a précisé sa jurisprudence sur l’accès des étrangers à la protection sociale.

Nous proposons donc que les ressortissants de l’Union européenne accèdent au droit au logement opposable dans les conditions définies à l’article L. 262-9-1 du code de l’action sociale et des familles, qui sont celles de l’accès au RMI. Il s’agit, sauf exception, des Européens qui bénéficient du droit au séjour et ont résidé en France durant les trois mois précédant la demande.

Concernant les ressortissants de pays tiers, le droit au logement opposable sera ouvert, d’une part, aux titulaires d’une carte de résident de dix ans – comme le propose M. Mariani –, d’autre part, à ceux qui résident régulièrement en France depuis cinq ans et qui sont titulaires d’une carte de séjour temporaire autorisant à travailler, qu’il s’agisse d’une carte de séjour temporaire délivrée à un actif ou d’une carte attribuée au titre de la vie privée et familiale. En reprenant les conditions d’accès définies par la loi relative au RMI, votée à l’unanimité, nous respecterions parfaitement les exigences constitutionnelles.

Je veux également lever les inquiétudes exprimées ici ou là concernant les étrangers malades, dont la presse s’est fait l’écho ces derniers jours.

M. le président. Il faudrait conclure, monsieur Goasguen.

M. Claude Goasguen. Je conclus.

La question est réglée par mon sous-amendement puisqu’il est prévu une carte de séjour « vie privée et familiale ». Les termes de la loi sont clairs : l’étranger gravement malade qui réside habituellement en France, même s’il est en situation irrégulière, a droit à des papiers pour se faire soigner dans notre pays s’il ne peut bénéficier de ces soins dans son pays. La question qui a été soulevée par un certain nombre de nos collègues n’a donc pas lieu d’être : en toute hypothèse, ils disposent de papiers. Nous n’avons pas modifié la loi à ce sujet.

Pour apaiser les inquiétudes des uns et l’exaspération des autres, je rappelle qu’en 2001, 2 891 cartes ont été délivrées à des étrangers malades et qu’en 2005, il y en a eu 7 200.

M. Jean-Claude Sandrier. Quelle horreur !

M. Claude Goasguen. Par conséquent, personne ne peut nous reprocher d’avoir adopté une interprétation restrictive en la matière.

M. Jean-Claude Sandrier. Seriez-vous laxistes ?

M. Claude Goasguen. Quel laxisme ? Ne plaisantez pas avec des choses comme celles-là. Il est très désagréable de voir des permanences attaquées par des personnes qui ne connaissent pas la loi, mais pensent la connaître après avoir entendu des propos de préaux d’école.

M. Daniel Paul. Vous les connaissez mal !

M. le président. Monsieur Goasguen, je vous en prie !

M. Claude Goasguen. J’adore parler à mes collègues. Je ne les vois pas assez souvent.

M. Patrick Braouezec. Vous n’êtes pas obligé de répondre à toutes nos provocations !

M. le président. Je vous rappelle que je suis tenu de faire respecter le règlement et vous avez utilisé tout votre temps de parole.

M. Claude Goasguen. Je sens que cela les passionne. Monsieur le président, laissez-moi les passionner de temps en temps. Je pense que nous ne nous verrons plus d’ici plusieurs années. (Sourires.)

M. le président. Je perçois un peu de nostalgie dans vos propos.

Mme Martine Billard. Cela n’a rien à voir avec les permanences !

M. Claude Goasguen. Une permanence a été attaquée à Paris. Lisez la presse !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je ne peux pas donner l’avis de la commission sur le sous-amendement défendu avec talent par M. Goasguen, puisqu’elle ne l’a pas examiné. Toutefois, je reconnais que le problème des personnes malades mérite attention.

L’ensemble des amendements présentés en discussion commune ont tous reçu un avis défavorable de la commission. Le Sénat a longuement discuté de la question fondamentale de la définition des bénéficiaires du droit au logement opposable, alors que le projet de loi évoquait initialement une condition de résidence sur le territoire français de façon régulière et stable. Il a finalement préféré retenir une condition de résidence sur le territoire français, « de façon régulière et dans des conditions de permanence définies par décret en Conseil d’État. »

Cette référence renvoie à celle qui figure déjà dans le code de la construction et de l’habitat à l’article R. 441-1, laquelle évoque lui-même un arrêté du 25 mars 1988, relatif aux conditions de séjour des personnes physiques. À l’évidence, certaines questions restent ouvertes.

Notre débat en commission a montré que des éléments d’éclaircissement complémentaires étaient nécessaires. C’est la raison pour laquelle je me tourne vers le Gouvernement pour connaître ses intentions quant à la rédaction de ce décret. C’est aussi pour cette raison que la commission a repoussé l’ensemble des amendements remettant en cause l’apport du Sénat.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement pour donner l'avis du Gouvernement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs, l’article 1er est évidemment l’article fondamental.

Pour résumer d’un mot, je dirais que l’article 1er du droit au logement opposable n’était pas prêt en 2000, 2001, 2002, 2003, comme il a été dit.

Bien plus, le projet du parti socialiste, dans sa grande sagesse, prévoit l’éventualité de mettre en place un droit au logement opposable et de saisir le Conseil économique et social pour en étudier les modalités.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. « La mise en œuvre », comme votre premier texte.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je parle sans passion. Je désire simplement expliquer les difficultés que représente un tel texte. Tout le monde, je crois, partage sur ces bancs l’idée générale que c’est un droit fondamental.

Tout le monde souscrit également à l’idée que cela force à mettre en route toutes les machines de construction de logement social, très social, privé-social, privé-non social. Ne nous y trompons pas : le texte qui, je pense, sera voté mettra une énorme pression sur tout le monde dans le pays.

C’est pour cela qu’un comité de suivi sera nécessaire et qu’interviendront probablement quelques évolutions, voire des révolutions puissantes dans notre propre conception du logement et du logement social. Il y aura à l’évidence un débat en Île-de- France. Le haut comité le mentionne dans son texte. D’ailleurs il hésitait encore, il y a environ quatre ou six semaines, sur la marche à suivre. Devait-on expérimenter ou non afin de savoir à qui ce droit serait opposable dans cinq ans ? Le Conseil d’État a préféré que l’on commence par indiquer dès le début qui serait le garant. Le choix de l’État a été fait.

C’est dire combien ce texte est complexe à mettre en place. Je souhaite que l’on accepte l’idée qu’il s’agit d’un texte évolutif.

La définition de l’article 1er a évolué, au regard du rôle du Conseil d’État. Nous voulons un texte à la fois parfaitement constitutionnel et qui puisse être évolutif. À cet égard, je vais répondre tout de suite sur la définition des bénéficiaires à l’ensemble des amendements, que je qualifierai d’extension.

Je crois vraiment que nous n’avons pas vocation à ouvrir un droit à tous, quelles que soient les conditions de résidence et de régularité sur le territoire français.

Je crois réellement que le dumping des opportunités sur le territoire européen sera déjà compliqué. Je vous encourage à aller sur quelques sites, que vous connaissez en Île-de-France, voir quelques populations récemment entrées, que je ne citerai pas. Vous pourrez ainsi constater que nous avons de vrais problèmes d’accueil.

Nous avons enfin, au bout de quarante ans, mis en place un contrat d’accueil et d’intégration rendu obligatoire et qui contient des droits et des devoirs. Il est ouvert et exigeant. C’est une véritable avancée. Le Conseil d’État a défini non par un décret simple, mais par un décret élaboré par les trois ministères compétents, les conditions du bénéfice du contrat d’accueil et d’intégration. Il s’agit d’une ouverture, mais cela ne peut pas en même temps être une aubaine. Je suis convaincu qu’il faut rendre les conditions homogènes avec les droits à la sécurité sociale, qui sont en permanence revisités par le Conseil d’État. C’est lui, le dernier garant des libertés individuelles, qui adapte ces droits qui font l’objet de dispositions législatives particulières.

Nous prévoyons donc le principe d’un décret en Conseil d’État, présenté dans les trois ou quatre semaines, et dont les dispositions seront semblables à celles retenues pour le contrat d’accueil et d’intégration, lequel a d’ailleurs fait l’objet d’un texte dont vous étiez même, monsieur Goasguen, le rapporteur.

Nous nous situons dans la souplesse d’adaptation, dans la cohérence avec d’autres dispositifs et nous respectons la Constitution. La note du Conseil d’État, rédigée par Mme Vestur, me permet de répondre au débat d’incapacité négative que vous évoquiez : il n’y a pas de risque de ce côté-là. Nous pouvons à peu près nous mettre d’accord pour refuser les effets d’aubaine. C’est apparemment généreux, mais ce n’est pas responsable.

Madame Boutin, il s’agit d’une adaptation dans l’esprit du contrat d’accueil et d’intégration.

Nous souhaitons le retrait de l’ensemble des amendements et, à défaut, le maintien du texte en l’état pour un vote conforme à celui de la Haute assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Nous avons l’impression, lorsque l’on entend évoquer les contrats d’accueil et d’intégration, que tout étranger non communautaire qui rentre sur le territoire national ne parle pas français et a des rapports à la laïcité forcément ambigus.

M. Claude Goasguen. Je n’ai pas dit cela !

Mme Martine Billard. De nombreux étrangers qui viennent en France sont totalement bilingues, lorsque le français n’est pas leur langue maternelle à égalité avec une autre langue. Ils n’éprouvent donc aucun problème d’intégration. Je voulais insister sur ce point, car cette façon de sous-entendre que tout étranger entrant en France pose un problème d’intégration devient pesante et c’est une contre-vérité.

M. Claude Goasguen. Je n’ai pas parlé d’intégration !

Mme Martine Billard. Aujourd’hui, des personnes en situation régulière en France ne possèdent pas de carte de dix ans et ne parviennent pas à l’obtenir, alors qu’elles remplissent toutes les conditions. Je ne peux vous citer en séance des exemples, qui mettraient éventuellement ces personnes en difficulté. Nous voyons constamment de tels cas, surtout chez des personnes percevant le SMIC par exemple, mais qui participent également à la richesse de notre pays. Celles qui ont des revenus élevés obtiennent la carte au bout du délai minimum et ne sont pas concernées par ce droit. Aujourd’hui, il faut attendre deux ans pour obtenir la naturalisation à Paris en ayant un dossier parfait, en étant parfaitement francophone depuis la naissance.

Compte tenu des arguments avancés, je crains que l’on ne doive gérer des situations où des personnes qui ne posent aucun problème ne pourront malheureusement pas utiliser ce droit. Je n’ose parler du cas des autres.

M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen

M. Claude Goasguen. M. le ministre nous a apporté des explications, sans doute lacunaires, mais intéressantes.

Je veux donc préciser les raisons qui m’ont amené à sous-amender ce texte avec de nombreux collègues. Il ne s’agit pas du tout du problème de l’intégration, du fait de parler français ou non. La question ne se pose pas.

Pour ce qui concerne les Européens, elle est d’ailleurs réglée juridiquement. La question qui se pose est celle de l’accès à une protection sociale, que la loi accorde. J’ai bien noté que la réponse du ministre portait sur l’action et la protection sociale. Vous avez raison, monsieur le ministre, car, lorsque l’on regarde de plus près l’application du regroupement familial, on constate qu’il est fondé depuis une loi que nous avons votée, il y a quelques mois, sur les mêmes conditions : le logement et la possibilité d’avoir un revenu stable qui ne soit pas un revenu tiré de l’assistance nationale. On voit bien que les critères posés sont des critères non de ségrégation, mais d’application.

Comme mon collègue Thierry Mariani, je redemande à M. le ministre que le décret ne soit pas un décret fourre-tout qui ferait naître un contentieux effroyable – il est déjà suffisant – dans les années à venir et qu’il soit bien précisé que nous adopterons le principe du droit au logement opposable par référence à la protection sociale.

Je répète qu’il n’est pas question de créer une ségrégation ; nous voulons simplement marquer les limites juridiques pour faciliter le travail des tribunaux et des commissions de médiation.

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Je rejoins les remarques formulées par M. Goasguen.

J’ai compris que ce texte était évolutif. Néanmoins d’où part l’évolution ? Nous votons un texte qui s’appliquera à certaines personnes, mais aujourd’hui ce n’est toujours pas très clair.

Jouera-t-il en faveur des titulaires de cartes de résident ? Je pense que tout le monde est d’accord et qu’il est inutile de reposer la question.

Les titulaires d’une carte d’un an pourront-il faire usage de ce droit au logement opposable  ?

Si vous me répondiez que ce droit opposable sera réservé aux titulaires d’une carte de résident, je vous fais confiance. Cela figurera au Journal officiel et je retirerais mon amendement.

M. Patrick Braouezec. Nous, c’est le contraire !

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Compte tenu des différentes lois répressives à l’encontre des étrangers qui ont déjà été adoptées, nous touchons là aux limites de votre exercice.

Nous ne voulons pas retirer notre amendement. Nous pensons en effet que tout étranger séjournant régulièrement en France, même si nous ne partageons pas l’esprit de vos lois, puisse bénéficier de ce droit opposable. Il ne saurait être question d’une carte d’un an, de cinq ou dix ans. Tous doivent pouvoir en bénéficier. Sinon, nous serions en totale contradiction avec vos propres lois.

Nous nous trouvons devant une difficulté.

Madame Boutin, vous soulignez l’aspect humain de ce projet de loi. Cependant où vont habiter tous les étrangers qui, aujourd’hui comme demain, n’ont pas et n’auront pas de carte de séjour, de papiers ? Où se logeront les étrangers qui sont aujourd’hui sur notre territoire et qui le seront encore demain, car vous savez fort bien que vos lois répressives n’empêcheront en rien l’immigration clandestine, bien au contraire, et qu’elles rendront encore plus clandestin l’étranger d’aujourd’hui ?

Où vont-ils se loger ? Au bord du canal Saint-Martin ? Dans les rues de mes arrondissements de Marseille où il n’y a aucun contrôle et où ils sont livrés à des marchands de sommeil ?

Où vont-ils se loger ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est bien cela le problème !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame Billard, pendant quarante ans, le mot « accueil » signifiait « indifférence ». Bref, nous n’avions aucune structure d’accueil.

M. Patrick Braouezec. C’est faux !

M. Thierry Mariani. Non, c’est exact !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je suis navré de vous contredire, monsieur Braouezec, mais c’est ainsi. C’est ce Gouvernement qui a créé les plateformes d’accueil et d’intégration, une par département.

Les contrats d’accueil et d’intégration visent non pas à imposer des contraintes, mais à offrir une formation car si certains parlent le français, d’autres non. Nous leur proposons 500 heures pour apprendre le français, car ces personnes ont vocation à acquérir notre langue parce qu’elles sont venues en France pour y travailler. L’apprentissage du français coûte cher et ce n’est pas facile. Le contrat est une aide pour bien recevoir ceux que l’on souhaite accueillir.

J’ai visité ces plateformes. La diversité qui y règne est extraordinaire. J’ai été frappé par l’envie de France – même s’ils ne l’expriment pas toujours en français – et le sourire de ceux que nous accueillons. Ils étaient perdus. Ils ne savaient pas à qui s’adresser pour trouver un logement ou apprendre notre langue, certaines mairies assurant ce service et d’autres pas. L’accueil était donc très compliqué. Ces structures d’accueil que nous avons créées sont une vraie réussite, et je le souligne d’autant plus volontiers que ce n’est pas moi qui les ai proposées, mais François Fillon.

M. Patrick Braouezec. Je ne vois pas le lien entre le fait de parler français et le logement.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Quant aux conditions du droit au logement, nous reprenons celles du décret de décembre 2006 sur lequel nous nous sommes mis d’accord. Il n’y a aucune raison pour ne pas suivre ce qui a été fait, car il faut éviter toute incohérence entre les textes. C’est la raison pour laquelle je défends la rédaction actuelle de cet article et que je demande le retrait des amendements.

Si l’on n’y prend pas garde, monsieur Dutoit, les prestations sociales risquent de baisser, partout en Europe, à cause des effets d’aubaine…

M. Daniel Paul. Comment fait-on alors ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. … s’il suffit, pour choisir son statut social ou son logement social, de passer de Valenciennes à Tournai ou l’inverse. Nous créerions une dynamique néfaste. Or je ne pense pas que c’est cela que vous souhaitez.

M. Frédéric Dutoit. Alors, comment fait-on ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 186.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 226 et 291.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Maintenez-vous votre amendement n° 333, monsieur Mariani ?

M. Thierry Mariani. Je le retire, monsieur le président, compte tenu des explications de M. le ministre, mais je serai très vigilant sur la rédaction du décret. Ce serait un précédent dangereux d’ouverture d’un droit qui n’aurait pas été clairement défini.

M. le président. L’amendement n° 333 est retiré et le sous-amendement n° 372 tombe.

M. le président. Les amendements nos 290 et 305 peuvent être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n° 290.

M. Daniel Paul. La pénurie de logements sociaux réservés aux étudiants par l’intermédiaire du CROUS comme le renchérissement de l’offre locative privée rendent l’accès au logement des étudiants particulièrement difficile. Toutes les villes universitaires sont contraintes de faire face à cette situation. Dans ce contexte, les étudiants de nationalité étrangère constituent un public particulièrement vulnérable, confrontés à des situations de grande précarité et à une insécurité quasi permanente.

L’ouverture aux étudiants étrangers en situation régulière du droit au logement opposable permettrait d’apporter une réponse concrète à ces jeunes gens qui souffrent d’une situation sanitaire et sociale déplorables. Une telle mesure apporterait aussi la démonstration, dans le respect de la tradition d’accueil de la France, de notre volonté d’intégrer au mieux dans notre société tous ceux qui veulent y faire leurs études et s’engager par là même dans une démarche de transmission et de partage des savoirs.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous proposons d’adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l’amendement n° 305.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je partage les explications de notre collègue Daniel Paul.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Patrick Braouezec. Madame Boutin, enfin !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je crains de vous décevoir, monsieur Braouezec, car la commission a repoussé ces deux amendements pour les raisons que j’exposais précédemment. Si nous restons dans le cadre du décret, ces personnes ne relèvent pas de ce texte.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 290.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 305.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er .

(L’article 1er est adopté.)

Article 1er bis

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er bis.

La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Cet article proposé par le Sénat définit les capacités minimales d’hébergement d’urgence dans les communes et les EPCI, et instaure une sanction, prévue au paragraphe 7, qui s’appliquerait en cas de non respect de leurs obligations. Cette sanction est-elle suffisante ? Nous pouvons en douter, car nous savons tous, par expérience, que certaines mesures votées par le Parlement et voulue par une grande majorité dépassant les clivages politiques traditionnels n’ont pas été appliquées.

L’hébergement d’urgence peut correspondre à une mesure de sécurité pour la personne et relèverait de la responsabilité des communes. Eu égard aux articles du code pénal ou aux possibilités de faire intervenir les tribunaux administratifs – si ces derniers veulent bien délibérer et étudier les requêtes qui sont déposées – il y aurait matière à ester en justice au titre de la non assistance à personne en péril. Dans une commune, la sécurité incombe au maire. Si, faute de structure d’accueil adaptée, des personnes se retrouvent à la rue, après leur séjour en milieu hospitalier, le délaissement pourrait être invoqué afin que les responsables de la sécurité de la commune soient sanctionnés. Même le maire, au titre de ses pouvoirs de police, relatifs à la sécurité en termes d’épidémie ou de sécurité sanitaire, pourrait être mis en cause.

Si certains de nos collègues, voire des représentants de l’État n’agissent pas pour que le territoire soit maillé de structures d’accueil d’urgence pour répondre au problème de sécurité, la justice pourrait être saisie.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L’article 1er bis constitue bel et bien le cœur du sujet qui a présidé au dépôt de ce projet de loi. Il répond à la première question de la charte des enfants de Don Quichotte.

Il est évident que s’il est extrêmement difficile de faire monter en charge les réponses que nous pouvons apporter à la demande de logements sociaux accessibles à la majorité des demandeurs de logement, il existe une solution qui permet d’offrir dans des délais plus rapprochés un logement à ceux qui sont sans domicile. Le problème de l’hébergement est au cœur de la problématique posée par les personnes qui se sont installées au bord du canal Saint-Martin et tout le monde a voulu leur dédier nos débats. Ce problème s’est aussi posé à d’autres catégories de population ces dernières années.

Au-delà du dispositif du droit au logement opposable, ce projet de loi prévoit un dispositif qui permettra de tisser, sur le territoire, un véritable réseau d’accueil et d’hébergement, lequel permettra à l’État et aux collectivités de ne plus louer des chambres d’hôtel, formule qui est la négation même de toute condition de vie décente.

Sur ce point, je suis enclin à penser que nous avons besoin d’un dispositif en réseau sur l’ensemble du territoire, notamment dans les zones d’agglomération dense, reposant sur des centres de proximité, porteur de tous les instruments de l’accompagnement social, nécessaire à l’accueil en site d’urgence. C’est la raison pour laquelle à mes yeux, cet article est fondamental pour l’accueil des personnes sans domicile fixe.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. En matière d’urgence, tout le monde en convient, il faut favoriser la création de toutes petites structures d’accueil de proximité. Les maires ont toujours indiqué qu’ils avaient la capacité de les encadrer, et je ne parle pas du coût financier. L’idée est de les étendre partout en France, comme autant de petites bougies allumées. Certes, l’on n’empêchera jamais les concentrations autour des gares ou des nœuds de communication, par exemple. Toutefois il est important d’aller vers les toutes petites structures que l’on sait encadrer. À cet égard, cet article est très important.

Il ne m’a pas échappé que des amendements de cohérence, par rapport à l’article 55 de la loi SRU, ont été déposés.

M. Patrick Braouezec. En effet !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je le comprends bien, mais le sujet ici est bien différent. La volonté de cohérence par rapport à l’article 55 n’a donc pas vraiment de sens. Je vous demande de suivre le Sénat, dans sa sagesse, et de retirer vos amendements.

M. Guy Geoffroy ,vice-président de la commission des lois. Nous sommes d’accord.

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Monsieur le ministre, comme tout le monde, nous nous félicitons du travail accompli par nos collègues sénateurs, qui a permis l’introduction du présent article dans le projet de loi. La vocation des centres d’hébergement est effectivement d’accueillir des personnes en grande précarité, dont les difficultés nécessitent soutien et accompagnement. Aujourd’hui, une part non négligeable de la population est concernée puisqu’on évalue à 100 000 le nombre de personnes dans cette situation, parmi lesquelles 14 000 enfants. C’est dire combien ces centres d’hébergement correspondent à un besoin.

Nous sommes bien conscients que cette disposition ne résout en rien le problème de la crise du logement : en aucun cas, ces centres n’ont vocation à devenir le logement des pauvres. Toutefois, pour les personnes en situation d’urgence, ils constituent un sas indispensable, dans nombre de nos villes. Nous ne pouvons donc qu’être choqués par les amendements scandaleux adoptés par les commissions, qui visent à diminuer par dix les sanctions qui s’appliqueraient aux communes ne respectant pas l’obligation légale prévue par le Sénat. Nous retrouvons l’esprit qui a présidé au refus obstiné de certains maires d’appliquer la loi SRU. Nous y reviendrons, si ces amendement sont maintenus.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Monsieur le ministre, je partage votre préoccupation s’agissant des centres d’accueil de petite taille. À Marseille, il existe au cœur de ma circonscription un gros centre d’hébergement d’urgence, dont la capacité d’accueil va être portée à plus de 450 places. J’ai réclamé à plusieurs reprises la mise en place de petits centres, répartis sur l’ensemble du territoire municipal, notamment pour l’accueil des SDF. De telles structures sont très importantes mais, à l’heure actuelle, ni Paris, ni Lyon, ni Marseille n’en disposent.

Le maire prétend qu’un problème de coût se pose et je serais heureux d’avoir votre avis à ce sujet. Que pensez-vous d’une incitation législative ? Dans ma ville, cela permettrait de déconcentrer l’offre d’accueil en disséminant des petites structures dans chaque arrondissement. La vie des personnes hébergées dans le gros centre comme celle des riverains en serait sans doute facilitée.

M. le président. Sur l’article 1er bis, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 30 et 80.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour soutenir l’amendement n° 30.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. J’ai entendu les arguments du ministre et je les comprends. Nous avions sans doute mal évalué les conséquences de l’harmonisation visée par notre amendement.

M. le président. L’amendement n° 30 est donc retiré. En est-il de même de l’amendement n° 80 ?

M. Guy Geoffroy, vice-président de la commission des lois. Nous avions le souci d’être cohérents et nous nous sommes trompés, en toute bonne foi. Les arguments du ministre nous convainquent de retirer cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 80 est également retiré.

Je mets aux voix l'article 1er bis.

(L'article 1er bis est adopté.)

Après l’article 1er bis

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 1er bis.

La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n° 301

M. Michel Piron. Cet amendement s’inscrit dans le dispositif gouvernemental fondé sur la mise à disposition de 27 100 places nouvelles d’hébergement.

Afin d’augmenter et d’améliorer les capacités d’accueil des personnes les plus démunies, il est prévu de pérenniser des places d’hébergement d’urgence. Des places de stabilisation seront créées par transformation de places existantes et par modification des capacités d’accueil en centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS. En outre, des places d’urgence seront améliorées et aménagées. Au total, 13 500 places d’urgence seront ainsi transformées.

Le présent amendement a pour objet de faciliter les opérations d’investissement correspondantes en faisant bénéficier ces structures de la TVA à taux réduit et d’une exonération de la taxe sur le foncier bâti, dès lors que le gestionnaire ou le propriétaire des locaux passera, ce qui constitue une condition impérative, une convention avec le représentant de l’État dans le département.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il s’agit d’un amendement très important et je ne m’étonne pas que M. Piron l’ait déposé. Il permet de rendre applicable le principe de non remise à la rue. D’une certaine manière, il donne une dimension d’effectivité au projet de loi. La commission y est donc très favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mesdames, messieurs les députés, c’est un amendement crucial. Une des grandes difficultés, pour répondre à M. Dutoit sur la question de la grande urgence, est qu’il n’y a plus de sorties des CHRS vers le logement social. La gestion de l’extrême urgence est devenue du mauvais CHRS, si j’ose dire.

Aujourd’hui, il importe certes qu’il y ait quelques places pour un accueil nocturne immédiat, mais il faut aussi qu’il y ait de véritables structures de soutien et d’accueil.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Absolument.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Or la transformation des places d’extrême urgence en structures d’accompagnement et de soutien, dans le cadre de CHRS, nécessite un accompagnement budgétaire de l’État. Les structures elles-mêmes doivent bénéficier d’un taux de TVA réduit et d’une exonération de la TFPB. Tous les acteurs des CHRS le souhaitent sans vraiment avoir osé l’exprimer. Pour remplir notre objectif d’humanisation de l’accueil et de transformation des 13 500 places d’hébergement en places de stabilisation, l’adoption de cet amendement est nécessaire. Je ne suis d’ailleurs pas surpris que ce soit le président du Conseil national de l’habitat qui l’ait déposé.

M. le président. Levez-vous le gage, monsieur le ministre ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Bien sûr, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Pour aller dans le sens que j’ai indiqué, je vous informe que je voterai cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Aujourd’hui, les personnes à la rue ne sont plus les mêmes qu’il y a trente ans. Tant qu’on n’aura pas rendu le droit au logement opposable inutile en offrant un nombre suffisant de logements, nous aurons besoin de structures d’accueil organisées de manière à éviter aux personnes de téléphoner au 115 tous les jours à la même heure pour trouver une place. Toute avancée vers la stabilisation est toujours utile, en attendant mieux. Je voterai donc aussi cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout d’abord, je me félicite du retrait des amendements à l’article 1er bis : quand ça urge, il faut se donner les moyens de faire bouger ceux qui ont une solution.

Quant à l’amendement n° 301, nous sommes favorables au dispositif qu’il propose. Les communes qui veulent s’engager dans l’accueil d’urgence doivent être aidées. Ce devrait même être une philosophie : chaque fois qu’une commune mène une action en faveur du logement social ou de l’accueil d’urgence, elle devrait en tirer avantage, au lieu de subir de nouvelles charges, telles que surcharge foncière ou acquisition du terrain. Ce serait d’abord honorer toutes les communes qui le font par éthique et par morale et ensuite inciter celles qui n’agissent que lorsqu’elles y ont intérêt.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Je remercie les uns et les autres pour avoir fait la démonstration que nous pouvons nous rassembler autour de cet enjeu essentiel de réinsertion sociale, qui est notre objectif en matière d’hébergement.

M. Patrice Martin-Lalande. Quelle belle unanimité !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 301.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Nous en venons à l’amendement n° 314, qui fait l’objet du sous-amendement n° 373.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l’amendement n° 314.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En présentant cet amendement, nous avons voulu répondre aux revendications de ceux qui ont accompagné les sans domicile fixe à la fin de l’année dernière.

L’un des problèmes soulevés, qui a fait l’objet de débats entre le ministre et leurs représentants, était l’accueil d’urgence. Dans les différents entretiens que nous avons pu avoir avec eux, ils ont bien souligné qu’il était absolument inacceptable qu’une personne puisse partir d’une structure d’accueil d’urgence le lendemain de son arrivée ou quelques jours après, sans qu’aucune solution n’ait été trouvée. Si l’on veut vraiment enraciner les personnes à accueillir et les insérer dans un processus d’accompagnement pour éviter qu’elles ne se retrouvent à la rue totalement démunies, il faut mettre un terme à cette situation.

Cet amendement prévoit ainsi : « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y demeurer, avec son consentement – tout cela relève de la liberté individuelle –, jusqu’à ce qu’une orientation vers une structure pérenne lui soit proposée ». Il ne doit pas y avoir de sortie sèche : si une personne libère une place, c’est pour bénéficier d’une solution d’accueil. L’important pour nous est qu’un accueil temporaire puisse être le début d’un processus au terme duquel un logement est proposé.

M. le président. La parole est à M. le ministre pour présenter le sous-amendement n° 373 et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 314.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

L’orientation vers une structure pérenne suppose d’accompagner et de soutenir la personne. Après une réunion organisée hier par Catherine Vautrin avec l’ensemble des acteurs, nous proposons de préciser les termes « structure pérenne », trop indéterminés, pour les remplacer par les termes « structure d’hébergement, de soins, ou de logement adaptée à sa situation ». Cela nous paraît plus conforme à la réalité vécue par les personnes concernées et à leur détresse psychologique, sur laquelle je ne m’étendrai pas.

Par ailleurs, un logement pérenne ne se rapporte qu’à la durée et peut contribuer à isoler. En outre, il est nécessaire de prendre en compte les structures de soins, qui nécessitent un accompagnement beaucoup plus lourd, domaine dans lequel, je ne vous le cache pas, nous accusons un retard certain.

Voilà qui confirme que nous refusons toute remise à la rue sans accompagnement : il ne peut y avoir qu’une orientation vers un accueil stable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 314 et le sous-amendement n° 373.

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission avait émis un avis défavorable à l’amendement n° 314, considérant qu’il s’agissait d’une pétition de principe.

À titre personnel, j’émets un avis favorable à l’amendement tel qu’il vient d’être sous-amendé.

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des lois.

M. Guy Geoffroy, vice-président de la commission des lois. Dans un souci d’améliorer encore la rédaction du texte, je propose de remplacer les mots : « avec son consentement » par les mots : « dès lors qu’elle le souhaite ». En effet, les termes « doit pouvoir y demeurer » induisent déjà l’expression d’un consentement qui semble minorée par la formule « avec son consentement ».

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Je partage la préoccupation de M. le Bouillonnec et je voterai son amendement.

Monsieur le ministre, je profite de l’occasion pour aborder le cas particulier des Chibanis.

À Marseille, ils ont été expulsés des logements dégradés, voire insalubres dans lesquels ils habitaient, puis relogés dans des hôtels ou des foyers Sonacotra. On leur a dit que, pendant le temps où ils seront retournés dans leur pays, la chambre qu’ils occupent à Marseille pourra être habitée par d’autres personnes, par exemple des SDF. Mais cela casserait l’idée qu’ils auraient un petit « chez soi » dans le pays où ils ont travaillé pendant des années et auquel ils ont tant apporté.

Quelle solution pourrait-on trouver, pour qu’ils disposent d’un logement pérenne tout en ayant la possibilité de retourner dans leur pays d’origine ?

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Si je résume les différentes propositions qui sont présentées, l’amendement serait ainsi rédigé : « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation doit être effectuée vers une structure d’hébergement de soins ou de logement adaptée à sa situation ».

Si je suis d’accord pour que les personnes alcooliques par exemple, celles souffrant de troubles psychiatriques ou atteintes du sida, soient orientées vers des structures d’hébergement de soins, je vois moins bien ce que l’on entend par « structure d’hébergement ». D’un côté, on dit que les personnes qui sont dans une structure d’hébergement d’urgence doivent pouvoir y demeurer si tel est leur souhait et, de l’autre, on leur propose une structure d’hébergement. Voilà qui est assez ambigu.

Je comprends qu’on puisse passer d’une structure d’hébergement d’urgence à une maison-relais par exemple, mais j’aimerais qu’il soit clairement écrit qu’il ne s’agit en aucun cas de les ballotter d’une structure d’urgence à une autre.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame Billard, vous avez tout à fait raison. Je suppose que le mot « hébergement » a été écrit à dessein, mais l’idée mérite d’être précisée. Il peut s’agir d’une maison-relais, d’un CHRS de qualité, de structures locales d’accueil et de soutien, d’un logement social voire d’un logement privé. On sait, en pratique, qu’un sas est nécessaire.

Effectivement, la rédaction proposée n’est pas très heureuse. Laissez-moi réfléchir quelques minutes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Partant du principe qu’une personne en grande difficulté trouve un lieu d’hébergement, d’accueil, il s’agit d’élaborer pour elle un vrai projet, afin qu’elle ne se retrouve pas dans la rue, comme c’est le cas actuellement, ou qu’elle ne soit pas cantonnée dans un lieu d’hébergement ne bénéficiant d’aucun suivi.

Pour ma part, je propose, après l’article 2, un amendement qui commence par les mêmes termes. Il faut surtout prévoir un vrai projet d’accompagnement, d’insertion, soit vers des structures de soins, soit vers des ateliers, par exemple. Il serait nécessaire que nous parvenions à une rédaction qui satisfasse tout le monde.

M. le président. Mes chers collègues, je vous propose de suspendre la séance pendant quelques minutes, afin que vous puissiez parvenir à une rédaction commune.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinq, est reprise à vingt-trois heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je voudrais simplement lire le texte sur lequel nous venons de nous mettre d’accord : « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation doit être effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. » Il s’agit clairement d’un amendement « anti-remise à la rue », qui renforce le soutien et l’accompagnement dans un parcours qui tienne compte de la diversité des situations. Cette orientation pourra se faire vers une résidence publique sociale, un logement social, un centre d’hébergement et de réinsertion sociale ou vers un lit thérapeutique. (« Très bien ! » sur divers bancs.) Un tel engagement me semble indispensable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette proposition ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je voudrais exprimer toute ma satisfaction de nous voir aboutir à une rédaction commune qui illustre, comme l’adoption de l’amendement de M. Piron, la volonté déterminée de l’Assemblée de rendre effectif le droit au logement opposable.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Très bien !

Mme Christine Boutin, rapporteure. L’amendement de M. Piron comme le présent amendement sont véritablement très importants et prouvent combien la représentation nationale tout entière veut rendre effectif le droit au logement opposable .

M. Patrice Martin-Lalande. Nous nous réjouissons tous.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 373 tel qu’il vient d’être rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 314 rectifié, et modifié par ce sous-amendement.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

Article 1er ter

M. le président. Sur l’article 1er ter, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1 rectifié et 31.

La parole est Mme la rapporteure, pour défendre l’amendement n° 1 rectifié.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je voudrais souligner la très bonne entente qui a régné entre les différentes commissions puisque la commission des affaires économiques a déposé un amendement identique au nôtre. Et cela se reproduira plusieurs fois.

Notre amendement vise à enrichir un dispositif, fort bien venu, adopté par le Sénat, qui crée l’obligation, pour le représentant de l’État dans le département, d’assurer une diffusion optimale de l’information sur le droit au logement. La commission a souhaité procéder à la codification de ce dispositif tout en resserrant la rédaction de l’article sur sa vocation première, à savoir la mobilisation de l’ensemble des acteurs concernés par la mise en œuvre du droit au logement.

Cet amendement se rapproche d’un autre amendement de la commission à l’article 2, amendement qui est destiné à favoriser la diffusion par le préfet de l’information sur les dispositifs d’accompagnement social mis en œuvre dans le département.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour défendre l’amendement n° 31 rectifié.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Un mot seulement, pour me réjouir, comme Mme Boutin, de la position commune des commissions.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1 rectifié et 31 rectifié.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’article 1er ter est ainsi rédigé.

L’amendement n° 310 tombe.

Article 1er quater

M. le président. L’article 1er quater ne fait l’objet d’aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L’article 1er quater est adopté.)

Après l’article 1er quater

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 1er quater.

Je suis saisi d’un amendement n° 249.

La parole est à M. Yves Le Bouillonnec, pour le défendre.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dans le texte proposé par le Gouvernement, le droit au logement opposable ne concerne que certains logements appartenant aux organismes d’HLM – les logements financés par les aides de l’État et appartenant aux organismes d’HLM en vertu de l’article L. 441-1 du code de la construction.

Nous proposons, parce que c’est nécessaire, que l’ensemble des logements sociaux, selon la définition de l’article 55 de la loi SRU, soient compris dans le dispositif, y compris les logements privés conventionnés, les logements conventionnés gérés par des associations agréées ou les logements éligibles aux prêts locatifs sociaux – les PLS – réalisés par les investisseurs privés.

lon l’amendement n° 249, les logements sociaux « au sens de l’article L. 302-5 ainsi que les autres logements locatifs construits, améliorés ou acquis et améliorés avec le concours financier de l’État et appartenant à un organisme d’habitations à loyer modéré ou une société d’économie mixte ou gérés par ceux-ci » seront « attribués par leur propriétaire. »

Le sens de cet amendement est donc bien d’élargir le champ d’application de l’opposabilité du droit au logement. En effet, une des critiques que nous formulons à l’égard du dispositif tel qu’il est actuellement prévu, après avoir été proposé par le Gouvernement et modifié par le Sénat, c’est de ne concerner que le patrimoine locatif relevant du droit de réservation du préfet, c’est-à-dire le patrimoine locatif des bailleurs sociaux. Or – cela a été souvent souligné sur tous les bancs de cette assemblée et par le Gouvernement lui-même – il existe un parc privé qui peut être sollicité et qui doit pouvoir répondre lui aussi à la demande de logements de nos concitoyens comme à l’effort de solidarité. Comme il s’agit de patrimoine conventionné, il est déjà en relation avec l’État.

Ce dispositif n’est, dans mon esprit, qu’une première étape. Une deuxième consisterait dans l’ouverture du secteur conventionné aux demandeurs de logement inscrits sur les listes des communes et une troisième dans l’ouverture des dispositifs d’accompagnement social aux personnes en difficulté accueillies dans le parc privé, notamment, pour les communes concernées, dans le cadre de l’accompagnement de proximité. Cela permettrait en quelque sorte d’apprivoiser le propriétaire privé, afin qu’il accepte de prendre un locataire aux revenus certes modestes mais qui paierait son loyer dans le cadre de l’accompagnement social – qu’il s’agisse de l’APL ou de tous les autres dispositifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable, bien que nous ayons fort bien compris la louable intention qui a présidé au dépôt de cet amendement.

M. Michel Piron. Louable, vraiment ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. En effet, la commission saisie au fond, tout comme les deux commissions saisies pour avis, a déposé un amendement à l’article 2 – en ce qui concerne notre commission, c’est l’amendement n° 8 –, qui va dans le même sens, tout en répondant de manière à la fois plus précise et de façon plus opérationnelle à la préoccupation de M. Le Bouillonnec.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Défavorable.

Monsieur Le Bouillonnec, cet amendement ne concerne pas le bénéficiaire du droit au logement opposable – ce droit est ouvert à tous – mais le mode opératoire. Je rappelle qu’il appartient au préfet de mobiliser très en amont et le parc public et le parc privé, notamment, pour ce dernier, le parc conventionné, à défaut de quoi l’État pourra être mis en cause – c’est le principe même du droit au logement opposable. Il est donc parfaitement clair que le préfet doit avoir vocation à stimuler l’offre de logements à des loyers adaptés sur le territoire dont il a la responsabilité.

Or votre proposition concerne le quota d’intervention directe du préfet sur les parcs,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Exactement !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. …en vue de l’étendre, que ce soit ou non dans le cadre du projet de loi.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais dans l’objectif de favoriser l’application de la loi.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est donc bien, pour vous, une question de quotas !

Je ne partage pas votre sentiment. En effet, contrairement à ce que j’ai souvent entendu dire, ce n’est pas en augmentant le quota du préfet, c’est-à-dire à travers l’organisation de l’offre adaptée sur tout le territoire, quelles que soient les formes que prendra celle-ci, qu’on répondra aux exigences du texte. Nous sortirions alors du cadre du projet de loi.

M. Michel Piron. Évidemment !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. En effet, l’extension du quota au parc privé conventionné poserait un vrai souci. Le conventionnement – dois-je le rappeler ? – consiste à accorder, dans le cadre du parc privé, un avantage fiscal en contrepartie d’un loyer réduit. L’accord conventionnel est signé pour une durée déterminée, d’où les débats relatifs au déconventionnement. Or nous avons déjà eu le plus grand mal à faire passer le parc privé social de 8 000 à 40 000 logements par an, notre objectif étant de réaliser une vraie production de logements sociaux avec 60 000, voire 80 000 conventions annuelles. Si nous expliquons aux propriétaires privés, qui font déjà un effort en termes de logement social, qu’ils ne pourront plus du tout choisir leurs locataires, indépendamment du plafond de ressources, pour lequel ils n’ont évidemment pas le choix, je crains que vos bonnes intentions n’entraînent le résultat inverse de celui que vous recherchez et n’aboutissent qu’à raréfier l’offre. Alors que tous, je le pense du moins, nous partageons le même objectif, ne prenons pas le risque d’une raréfaction du parc social privé en voulant bien faire !

M. Michel Piron. Le mieux est l’ennemi du bien !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je le répète : je poursuis le même objectif que vous, mais je suis en désaccord sur la façon de procéder. Encore une fois, ce n’est pas en jouant de cette façon sur le quota réservé au préfet qu’on résoudra le problème posé : la solution passe par la contrainte qui pèsera, en amont, sur l’État et donc sur ses représentants dans les départements que sont les préfets.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Évidemment !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Telle est la raison pour laquelle je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 249.

M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, retirez-vous l’amendement n° 249 ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. J’approuve l’amendement, parce qu’il répond à une des questions posées au cours de la discussion générale : comment ferez-vous, monsieur le ministre, pour que le droit au logement opposable devienne réalité ?

Je prendrai l’exemple de Marseille : le préfet des Bouches-du-Rhône a tiré la sonnette d’alarme du fait que de nombreuses communes du département ne respectent pas la loi SRU qui impose aux communes un quota de 20 % de logements sociaux. J’avais du reste déposé un amendement qui prévoyait qu’à Paris, Lyon et Marseille cette disposition, dans le cadre de la loi PLM, s’applique par arrondissement, mais il a été rejeté au titre de l’article 40. Or, si les communes se refusent à appliquer la loi et que, de ce fait, l’offre publique de logement demeure insuffisante, comment le préfet fera-t-il appliquer le droit au logement opposable ?

Nous sommes donc bien au cœur de la question principale posée par le débat : s’il est bien d’inscrire dans la loi un droit au logement opposable, comment le faire appliquer puisqu’un trop grand nombre de communes se refuse à ce jour à atteindre l’objectif de construction de logements sociaux permettant de répondre aux besoins ?

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Je suis surpris d’entendre de tels arguments, même si je poursuis le même objectif.

L’enfer, on le sait, est pavé de bonnes intentions. Il suffit de regarder le travail remarquable réalisé par l’ANAH depuis quelques mois pour se rappeler d’où on vient en matière de conventionnement et l’objectif visé, à savoir dépasser les 40 000 logements par an ! Tout doit d’abord être fait pour remettre sur le marché le plus grand nombre possible de logements vacants conventionnés ! C’est pourquoi je crains que l’adoption d’un tel amendement ne vienne contredire le message d’encouragement très fort qui est actuellement envoyé. Il y a une contradiction entre le désir d’augmenter l’offre, qui est une nécessité absolue, et des propositions qui auraient pour conséquence de la réduire en décourageant les investisseurs privés, voire en leur faisant peur, alors qu’ils sont prêts à remplir leurs obligations sociales dans le cadre d’un conventionnement. J’ai le sentiment, je le répète, que le mieux est l’ennemi du bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je le répète, monsieur Le Bouillonnec, je ne suis pas hostile au principe que vous défendez mais au moyen que vous préconisez pour y parvenir. Je vous rappelle du reste que vous avez cosigné, Mme la rapporteure et vous-même, un amendement n° 8 à l’article 2, qui va dans ce sens et que l’amendement n° 13 portant article additionnel après l’article 2, qui complète le précédent, prévoit que les logements du parc privé ayant bénéficié d’aides de l’Agence nationale de l’habitat faisant l’objet d’un programme social thématique – PST –, ainsi que ceux donnés en location à des organismes ou associations dans le cadre d’une convention avec l’ANAH de niveau social puissent – il s’agit d’une possibilité, non d’une obligation – être loués à des organismes publics ou privés en vue de leur sous-location, meublés ou non, aux demandeurs visés à l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation, bénéficiaires du droit au logement opposable.

Or je puis d’ores et déjà vous indiquer que le Gouvernement donnera un avis favorable à ces deux amendements. C’est pourquoi j’insiste pour que vous retiriez l’amendement 249.

M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, retirez-vous finalement l’amendement n° 249 ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement 249 est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 248.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le soutenir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Par l’amendement n° 248, nous proposons de revoir le contingent préfectoral en imposant un taux minimum de 25 % de logements réservés afin que l’État ait les capacités de réservation suffisantes lui permettant d’assurer son rôle de garant du droit au logement opposable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. J’ai sur cet amendement un avis très partagé… Or je sais devoir donner un avis tranché ! Si j’avais le droit d’employer ce terme, je dirais « sagesse » !

M. le président. Mais vous incarnez la sagesse, madame la rapporteure. (Sourires.)

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Défavorable.

En effet, on ne peut, au détour d’un amendement et sans qu’une concertation ait eu lieu ni avec les partenaires sociaux qui gèrent le 1 %, ni avec l’Association des maires de France, ni avec les offices d’HLM, décréter tout à coup que le préfet aura des pouvoirs plus étendus. La production de logements sociaux, c’est le résultat d’une action collective donnant lieu à un consensus, dans le cadre de financements variés mais complémentaires. Cette disposition déséquilibrerait l’offre de logements sociaux.

M. Michel Piron. Il vaut mieux 20 % de quelque chose que 25 % de rien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 248.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 2

M. le président. À l’article 2, je suis saisi d’un amendement n° 227.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le soutenir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cet amendement vise à obliger l’État à créer les commissions de médiation dans chaque département avant le 1er janvier 2008.

Je rappelle que la situation a certes un peu évolué mais qu’il y a encore quelques années, ou seulement quelques mois, un nombre infime de commissions de médiation avaient été créées. Par ailleurs, on le constatera au cours de l’examen d’autres amendements, elles travaillent dans des conditions fort peu satisfaisantes, certaines ne fonctionnant même pas du tout.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement.

Certes, M. Le Bouillonnec a raison : il n’existe que 78 commissions de médiation alors que la loi impose à chaque département d’en créer une. Toutefois, nous croyons en ce texte et nous pensons que, dans chaque département, les représentants de l’État auront intérêt à la constitution rapide de ces commissions de médiation puisque, garants eux-mêmes de l’application de ce droit opposable, ils vont être responsables de leur mise en place et de leur fonctionnement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée. L’idée est que nous devons mettre en place ces commissions dans l’immédiat. Il existe en effet nombre d’autres motifs de les réunir. Nous n’avons donc, à vrai dire, pas de délais à nous donner.

M. Frédéric Dutoit. La semaine prochaine ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Dès la semaine prochaine nous nous assurerons qu’elles seront bien mises en place.

M. Patrick Braouezec. On verra après les élections !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227.

(L'amendement est adopté.)

Mme Christine Boutin, rapporteure. Puisque le président le dit ! (Sourires.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 2, 32, 81 et 228.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Dès la présentation du projet au Sénat, le ministre avait annoncé sa volonté d’organiser la division des quatre collèges de la commission de médiation à parts égales.

Le groupe socialiste a proposé à la commission d’inscrire cette garantie importante dans le texte et la commission a consacré ce nouvel équilibre. Nous ne savons pas résister, en effet, aux propositions raisonnables de M. Le Bouillonnec.

M. Patrice Martin-Lalande. Ah bon ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 2, 32, 81 et 228.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 et 33.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il s’agit d’amendements rédactionnels, qui montrent combien les deux commissions ont travaillé en harmonie, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3 et 33.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 285 et 188, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Patrick Braouezec, pour soutenir l’amendement n° 285.

M. Patrick Braouezec. J’espère que Mme Boutin aura la même mansuétude à mon égard qu’avec M. Le Bouillonnec (Sourires),…

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cela viendra !

M. Michel Piron. Il a parlé de mansuétude, pas de séduction !

M. Patrick Braouezec. …à propos d’un amendement lui-même plutôt intéressant, clair et n’appelant pas de longs développements.

Nous remarquons, en effet, que l’article 2, qui définit notamment la composition des commissions de médiation départementales, en écarte les représentants des associations de défense des personnes en situation d’exclusion par le logement. L’amendement se fonde sur l’idée que la présence de ces associations garantira une parole indépendante et clairement située du côté de ceux à qui cette loi est dédiée. Notre amendement n’a donc vocation qu’à réparer un oubli.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 188.

Mme Martine Billard. Je sais que les situations peuvent évoluer mais, tel qu’est rédigé l’alinéa 8 de l’article, vous ne pourriez pas proposer aux Enfants de Don Quichotte de participer à une commission de médiation puisque seules sont concernées les associations agréées.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est exact !

Mme Martine Billard. Je crois donc qu’il faut admettre que les commissions de médiation soient non seulement composées par les représentants des associations chargées du logement et de l’hébergement, mais également par les représentants des associations de défense des personnes qui se retrouvent à la rue, ce qui est un autre aspect de la question. Ce qui s’est passé au bord du canal Saint-Martin a certes obligé les pouvoirs publics à agir, mais a aussi eu des conséquences positives du point de vue des SDF, puisque j’ai l’impression qu’un certain nombre s’organisent pour sortir de la rue. Ils doivent donc avoir le droit de s’exprimer au sein de ces commissions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je souhaite, bien sûr, être agréable à M. Braouezec…

M. Patrick Braouezec. Je vous remercie, madame Boutin.

Mme Martine Billard. Et à madame Billard ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. …et à madame Billard, mais, cela dit, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements, non parce que votre intention n’était pas bonne, mais parce que votre suggestion est prise en compte par l’amendement n° 8 à l’article 2, qui sera examiné ultérieurement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 285.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 188.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 229.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le soutenir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cet amendement force le trait sur les difficultés rencontrées par les commissions de médiation et vise à conduire l’État, notamment les préfets, à mettre en œuvre les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement. On nous a signalé qu’en certains lieux les commissions n’ont pas pu siéger faute de moyens.

M. Michel Piron et M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Cela relève du domaine réglementaire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Si le dispositif place au cœur de la stratégie le travail des commissions de médiation, nous devons veiller à ce que l’État leur assure des moyens en secrétariat mais aussi des moyens pour réaliser des enquêtes sociales. En effet, si la commission ne dispose pas des instruments nécessaires,…

M. Michel Piron. Il manque la marque des crayons, dans votre amendement !

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Et celle des gommes !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …elle travaillera dans l’approximation sans pouvoir remplir le rôle qu’on attend d’elle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable. Comme vous, monsieur Le Bouillonnec, nous regrettons que quelques commissions de médiation ne puissent effectivement se réunir. Cependant, s’il est bon d’avoir soulevé cette question, elle n’en relève pas moins du domaine réglementaire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 229.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 230.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le soutenir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cet amendement traite à nos yeux d’un sujet beaucoup plus important que le précédent. À l’alinéa 10 de l’article 2, nous proposons la suppression de la mention « de bonne foi », qui s’applique au demandeur. Le début de l’alinéa se lirait donc ainsi : « La commission peut être saisie sans condition de délai lorsque le demandeur est dépourvu de logement, menacé d’expulsion… »

Nous pensons en effet que, s’agissant du droit de la construction et du droit de l’habitat, la notion de bonne foi a un sens, un contenu que lui ont donné depuis longtemps les juridictions et qui dépasse de beaucoup le seul fait de payer ou non son loyer. Il existe donc, juridiquement, des situations dans lesquelles on peut considérer qu’une personne n’est pas de bonne foi alors qu’elle se trouve dans une situation de difficulté involontaire. Ainsi une famille nombreuse ayant fait l’objet d’un congé pour vente de la part de son propriétaire, dès lors qu’elle ne peut acheter l’appartement qu’elle occupe et qu’elle se maintient dans les lieux, sera passible d’une décision de justice prononçant l’expulsion. Le jugement ayant validé le congé, la famille peut être considérée comme de mauvaise foi puisqu’elle occupe le logement sans droit ni titre. Ce qui va à l’encontre, bien entendu, de notre préoccupation de ne pas laisser les gens dans la rue.

Nous suggérons donc de retirer cette notion de bonne foi, laissant à la commission de médiation le soin d’apprécier la situation et, du même coup, de se porter elle-même juge des conditions dans lesquelles on pourrait considérer que la personne concernée ne relève pas du dispositif.

Nous pensons qu’il est d’autant plus inutile de faire référence à la notion de bonne foi que le juge administratif aura toujours l’occasion de se prononcer sur la question – du reste de manière différente par rapport au juge judiciaire, la jurisprudence n’étant pas la même pour les deux ordres. Nous proposons donc d’élargir le champ de la saisine de la commission de médiation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Vous me permettrez de développer quelque peu la question que vient de soulever M. Le Bouillonnec car elle est importante.

M. Michel Piron. Très importante !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Si la commission a rejeté votre amendement, mon cher collègue, j’ai toutefois bien entendu votre argumentation et je vais tâcher d’expliquer à l’Assemblée nationale cette notion de bonne foi.

L’article 2 du texte précise que chacune des cinq catégories de demandeurs doit être de bonne foi. Cet élément est important et correspond à une préoccupation du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées. Dans son rapport de décembre 2005, celui-ci avait d’ailleurs rappelé qu’en Écosse, aux termes du Housing Act de 1977, un certain nombre de conditions doivent être remplies par le demandeur d’un logement. Il doit ainsi, notamment, ne pas s’être mis intentionnellement dans une situation de homeless, de mal-logement, ainsi que le traduit le Haut comité – or ce critère participe de la bonne foi. Le dispositif du présent projet s’inspire donc d’un exemple étranger dont on sait combien il a été concluant.

Toutefois, on ne peut pas cacher que certaines questions juridiques peuvent se poser, comme l’ont montré nos débats en commission. M. Le Bouillonnec nous a exposé sa conception de la notion de bonne foi dans le droit locatif. Il me semble néanmoins que cette notion doit être distinguée de la bonne foi dans le cas présent.

Il est vrai également – et je souhaite faire montre d’une complète transparente vis-à-vis de vous tous – qu’en 2003, en Écosse, un nouveau Homeless Act

M. Daniel Paul. Parlez français ! Parlez de « sans-logis » ou de « mal-logement », tout simplement !

M. Michel Piron. C’était entre guillemets, mon cher collègue !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je suis bien obligée de reprendre le terme écossais !

Au fur et à mesure de l’application du critère de bonne foi, on s’est aperçu qu’il était de moins en moins demandé. Aussi l’Écosse a-t-elle prévu, depuis 2003, la réduction de l’impact du critère d’intentionnalité. L’autorité locale n’est plus tenue par la loi de s’assurer que le demandeur est mal logé à cause de son propre comportement. Si la situation de mal-logement est cependant reconnu comme intentionnelle, le demandeur a néanmoins droit à un bail de courte durée et à un accompagnement.

M. Michel Piron. Voilà !

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est précisément cette évolution qui est intéressante. Elle montre que la législation que nous proposons aujourd’hui peut avoir vocation à évoluer dans le temps. Nous devons faire accepter à l’ensemble des parlementaires mais aussi à l’ensemble de nos concitoyens ce droit au logement opposable. Pour cela, il convient de comprendre que notre volonté d’utiliser le critère de bonne foi s’inscrit dans la même logique que celle qui a présidé à la législation écossaise. Ainsi, cette logique n’interdit pas la possibilité de faire évoluer le critère de bonne foi et, personnellement, je compte beaucoup, en la matière, sur les propositions du comité chargé du suivi de l’application de ce texte.

Mon cher collègue, si nous retirons aujourd’hui ce critère, quand bien même il suscite un certain nombre d’interrogations chez nos concitoyens – on ne peut le nier –, je crains que nous ne recueillions une moindre adhésion à ce projet de droit au logement opposable, que si nous affirmons clairement la nécessité de cette notion de bonne foi.

C’est pourquoi la commission n’est pas favorable à la suppression de ce critère.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le Gouvernement est du même avis. Autant nous pouvons faire un pas de géant en faveur de l’habitat pour tous, en faisant peser une pression maximale sur tous les acteurs, autant il serait regrettable de donner une impression de démagogie ou de laisser-aller. Il s’agit d’un texte révolutionnaire, porteur d’un changement radical. De grâce, ne mettons pas à mal ce bel effort collectif !

La bonne foi n’est pas une notion en apesanteur ; elle s’apprécie par rapport à l’objet du texte. Par nature, celui-ci concerne des personnes ne se situant pas tout à fait dans la norme, et il appartiendra au comité de suivi d’en tenir compte.

Nous avons déjà eu ce débat à propos des expulsions des HLM. Sous la gauche, quand un locataire ne payait pas son loyer, l’APL était supprimée au bout de six mois. Pour certaines familles en situation de surendettement, la machine inexorable était alors lancée. Nous avons proposé de modifier la législation de sorte que le versement soit rétabli en cas de signature d’une convention de bonne foi entre bailleur et locataire. À l’époque, certains m’avaient mis en garde, jugeant que c’était du laisser-aller ; en réalité, les choses se passent beaucoup mieux.

Certains locataires de bonne foi ne peuvent pas payer leur loyer ; d’autres sont clairement de mauvaise foi. La différence compte, y compris s’agissant de la garantie universelle, instituée par ce projet de loi quel que soit le contrat de travail – et même en l’absence de tout contrat. Dans le pilotage du dispositif par les partenaires sociaux, la notion de bonne foi est en effet retenue. Il ne s’agit pas d’exclure des personnes éprouvant des difficultés momentanées, puisque le texte leur est justement destiné.

Qui trop embrasse mal étreint : le Gouvernement suit donc l’avis de la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L’expression « de bonne foi » ne figure pas parmi les critères pris en compte par la commission pour considérer une demande comme prioritaire.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Et c’est bien normal !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Être de bonne foi est en revanche une condition pour pouvoir saisir la commission. Si j’insiste sur ce point, c’est parce qu’il me semble y avoir confusion dans la rédaction. En l’état actuel, qui juge de la bonne foi, et donc de la recevabilité de la demande ? La commission. Il n’existe, à cet égard, aucun contrôle préalable.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Non : c’est un recours gracieux.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Or si le contrôle a lieu au niveau de la recevabilité, il ne peut s’effectuer que sur des critères juridiques, qui, eux, sont dangereux. Je préférerais que la notion de bonne foi soit un des éléments d’appréciation utilisés par la commission pour juger du caractère prioritaire d’une demande.

C’est parce qu’elle est placée à cet endroit, à l’alinéa 10, qui détermine les modalités de saisine de la commission, que l’expression « de bonne foi » me paraît superfétatoire – ce qu’elle ne serait pas s’il ne s’agissait que d’apprécier le caractère prioritaire de la demande. Supprimons ce critère, laissons la commission apprécier elle-même la pertinence de la saisine.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je suis sensible à la remarque de M. Le Bouillonnec. Je suis députée de la première circonscription de Paris, qui regroupe les quatre premiers arrondissements. Dans ce quartier historique, dont les habitants ne sont généralement pas à plaindre, nous connaissons depuis quelques années une situation très spécifique : de nombreux petits propriétaires vendent leur bien et adressent un congé pour vente à leurs locataires, ce qui ne laisse à ces derniers que six mois pour trouver un nouveau logement. Pour ces personnes d’un certain âge, qui souvent occupaient leur appartement depuis vingt ou trente ans, un tel délai est bien trop court pour se reloger. À Paris, c’est infaisable ! Faute d’autre solution, elles restent donc dans les lieux, en dépit des mises en demeure. On peut les considérer de bonne foi, mais il n’en reste pas moins qu’elles occupent illégalement leur logement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Elles sont sans droit ni titre, donc juridiquement de mauvaise foi !

Mme Martine Billard. De telles situations ne sont pas rares. Elles touchent des personnes qui ne sont pas protégées par leur âge et qui ne disposent pas de revenus leur permettant de trouver rapidement un nouveau logement. À moins de se voir attribuer un logement social, elles risquent donc de se retrouver à la rue. Si, en demeurant dans un logement dont elles auraient dû rendre les clés, elles ne sont pas considérées comme de bonne foi, elles ne pourront bénéficier de votre dispositif, alors qu’elles ne sont en rien responsables de la situation.

M. Michel Piron. Elles sont de bonne foi, dans ce cas-là !

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. La bonne foi s’apprécie de façon très subjective. Dans ma propre circonscription, dans les quartiers d’Arenc, de Saint Mauron ou de la Belle de mai, je pourrais vous donner mille exemples de personnes occupant des habitations sans droit ni titre – parfois même sans papier – et qui n’ont donc aucune légitimité à se prétendre de bonne foi. Il y a là un vrai problème. Prenons l’exemple d’une famille vivant dans un logement privé mais dont on n’a même pas pu retrouver le propriétaire. Dans l’illégalité, elle peut être perçue comme squatteur. Comment lui garantir que sa bonne foi sera reconnue ?

M. Michel Piron. Un squatteur, de bonne foi ? Il ne faut pas exagérer !

M. Frédéric Dutoit. Je soutiens donc la proposition de M. Le Bouillonnec : il faut supprimer cette notion afin de garantir le droit au logement pour tous.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 230.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je souhaite répondre aux défenseurs de l’amendement. Il ne paraît pas raisonnable de traiter de la même façon la bonne ou la mauvaise foi. En revanche, si ce qui vous gêne, c’est que ce critère soit pris en compte lors de la saisine de la commission,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec et M. Patrick Braouezec. Oui, c’est bien la question !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. …on pourrait supprimer les mots « de bonne foi » dans l’alinéa 10 et les ajouter à l’alinéa 12 : « Dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu’elle reconnaît prioritaires et de bonne foi… » On peut l’envisager, même si je pense que c’est du pinaillage. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il est trop tard, à cette heure-ci, pour me pour donner des leçons de droit. Vous avez sûrement raison, et je pense ne pas avoir tort : en toute bonne foi (Sourires), je vous propose d’élaborer, avant la fin de la discussion, une rédaction susceptible de satisfaire tout le monde.

M. Frédéric Dutoit. Très bien !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mais il faut bien distinguer les gens de parfaite mauvaise foi de ceux qui se retrouvent, contre leur gré, dans une situation pas tout à fait régulière.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je le répète : si la personne n’est pas de bonne foi, il appartient à la commission de considérer que cet élément ne la place pas dans la situation d’être prioritaire. En revanche, maintenir le critère au niveau de la saisine risquerait de compromettre l’efficacité du système, car personne ne se fait d’illusion sur les conditions dans lesquelles cette loi va s’appliquer : nous risquons de voir s’élever les piles de dossiers et augmenter les files d’attente. La bonne foi doit servir à l’appréciation du caractère prioritaire de la demande, et non être évaluée au stade de la saisine.

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

Je vous rappelle que le Parlement se réunira en Congrès à Versailles lundi 19 février, à onze heures.

2

Ordre du jour
des prochaines séances

M. le président. Mardi 20 février 2007, à neuf heures trente, première séance publique :

Questions orales sans débat.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi, n° 3656, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale :

Rapport, n° 3671, de Mme Christine Boutin, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;

Avis, n° 3675, de M. Jérôme Bignon, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire ;

Avis, n° 3685, de M. Georges Fenech, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le vendredi 16 février 2007, à zéro heure quinze.)