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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 21 février 2007

146e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON

1. Droit au logement opposable. – Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d’urgence (nos 3656, 3671) (p.

discussion des articles (suite)

Avant l'article 6 M. (p.

Amendements identiques nos 20 rectifié et 59 rectifié : Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles ; Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. – Adoption.

Article 6 M.  (p.

Amendement n° 177 : Mmes Martine Billard, la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Amendement n° 193 : M. Dominique Tian, Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 129 : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 124 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mmes la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Amendement n° 130 : Mmes la ministre, la rapporteure, Martine Billard. – Adoption

Amendement n° 383 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 131 : Mmes la ministre, la rapporteure, M. Jean-Yves Le Bouillonnec. – Adoption.

Amendement n° 132 : Mme la ministre. – Adoption.

Amendement n° 340 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 133 : Mmes la ministre, la rapporteure, Martine Billard. – Adoption.

Amendement n° 139 : Mme la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 140 : Mmes la ministre, la rapporteure, M. Jean-Louis Dumont. – Adoption.

Amendement n° 134 : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 178 avec le sous-amendement n° 380 : Mmes Martine Billard, la ministre, la rapporteure. – Adoptions du sous-amendement n° 380 et de l’amendement n° 178 modifié.

Amendement n° 141 rectifié : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 127 : M. Alain Néri, Mmes la rapporteure, la ministre, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Martine Billard. – Rejet.

Amendement n° 195 : M. Dominique Tian, Mmes la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Amendement n° 180 : Mmes Martine Billard, la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Amendements identiques nos 341 et 181 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 182 : Mmes Martine Billard, la rapporteure, la ministre, MM. Michel Piron, Jean-Louis Dumont. – Rejet.

Amendement n° 135 : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption de l’amendement rectifié.

Amendement n° 136 : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 137 : Mme la ministre. – Adoption.

Amendement n° 138 : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 156 : Mmes la ministre, la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 342 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Amendements nos 196 et 386 : M. Dominique Tian, Mmes la rapporteure, la ministre. – Retrait de l’amendement n° 196, adoption de l’amendement n° 386.

Amendement n° 21 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 343 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Adoption de l’article 6 M. modifié.

Après l'article 6 M. (p.

Amendements identiques nos 97 rectifié et 203 rectifié : MM. Étienne Pinte, Dominique Tian, Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Article 6 N (p.

M. Alain Néri.

Amendement de suppression n° 122 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mmes la rapporteure, la ministre, M. Alain Néri. – Rejet.

Amendement n° 344 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 345 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 346 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 347 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 348 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 349 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Amendement n° 350 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 351 : Mme la rapporteure. – Adoption.

Amendement n° 352 : Mme la rapporteure, M. Jean-Yves Le Bouillonnec. – Adoption.

Adoption de l’article 6 N modifié.

Après l'article 6 N (p.

Amendement n° 276 : M. Frédéric Dutoit, Mmes la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Amendement n° 275 : Mme la rapporteure. – Rejet.

Amendement n° 277. – Rejet.

Amendement n° 279 : MM. Frédéric Dutoit, Michel Piron. – Rejet.

Amendement n° 278 : M. Frédéric Dutoit, Mmes la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Article 6 (p.

Amendement de suppression n° 280 : M. Frédéric Dutoit, Mmes la rapporteure, la ministre. – Rejet.

Amendement n° 22 : Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption de l’amendement modifié.

Amendement n° 353. – Adoption.

Amendement n° 23. – Adoption.

Amendement n° 354. – Adoption.

Amendement n° 355. – Adoption.

Adoption de l’article 6 modifié.

Après l'article 6 (p.

Amendements identiques nos 109 et 190 : MM. Pierre-Christophe Baguet, Dominique Tian, Mmes la rapporteure, la ministre, Martine Billard, MM. Frédéric Dutoit, Michel Piron, Jean-Louis Dumont, Alain Néri. – Rejet.

Suspension et reprise de la séance (p.

Article 6 bis (p.

Amendement n° 155 : M. Yves Censi, Mmes la rapporteure, la ministre, MM. Michel Piron, François Sauvadet. – Adoption.

Amendement n° 154 : M. Yves Censi, Mmes la rapporteure, la ministre, M. Michel Piron. – Adoption.

Amendement n° 356. – Adoption.

Adoption de l’article 6 bis modifié.

Article 6 ter (p.

Amendement de suppression n° 123 : M. Alain Néri. – Rejet.

Amendement n° 79 : M. Pierre Méhaignerie, Mmes la rapporteure, la ministre. – Adoption.

Adoption de l’article 6 ter modifié.

Article 6 quater (p.

Amendement n° 357. – Adoption.

Amendement n° 120 : Mme Paulette Guinchard. – Adoption.

Adoption de l’article 6 quater modifié.

Après l'article 6 quater (p.

Amendement n° 125 : Mmes Paulette Guinchard, la rapporteure, la ministre, MM. Yves Censi, Alain Néri. – Rejet.

Mme la présidente, M. François Brottes.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Ordre du jour des prochaines séances

PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Droit au logement opposable

Suite de la discussion d’un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d’urgence

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (nos 3656, 3671).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Hier soir, l’Assemblée s’est arrêtée pendant la discussion de l’article 3. La commission a demandé la réserve des articles jusqu’aux amendements portant articles additionnels après l’article 6 L inclus.

Par conséquent, nous en venons aux amendements identiques nos 20 rectifié et 59 rectifié portant articles additionnels avant l’article 6 M.

Avant l’article 6 M

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour présenter l’amendement n° 20 rectifié.

Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Cet amendement rédactionnel vise à clarifier le texte en proposant que le chapitre II soit intitulé « Dispositions en faveur de la cohésion sociale ».

Mme la présidente. L’amendement no 59 rectifié est défendu.

La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 20 rectifié et 59 rectifié.

(Ces amendements sont adoptés.)

Article 6 M

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 177.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Je me félicite tout à fait de l’introduction dans le projet de loi de dispositions concernant le droit à la domiciliation, qui corrigent une situation aujourd’hui peu lisible, et les associations les accueillent avec beaucoup d’intérêt. Mais je relève une contradiction entre le titre « Droit à la domiciliation » et la rédaction de l’article, laquelle fait de la demande de domiciliation une obligation. Les deux n’entraînent pas les mêmes conséquences : si le droit n’est pas reconnu en tant que tel, il est plus difficile de le faire appliquer. C’est pourquoi mon amendement propose que le droit à la domiciliation, soit reconnu à toute personne ne disposant pas d’une résidence stable afin de lui garantir une adresse postale. Celle-ci est un des éléments qui manque dans ce droit à la domiciliation, alors que les personnes ont besoin d’une adresse postale pour chercher du travail, pour faire reconnaître un certain nombre de droits. J’espère que cette modification de l’article 6 M sera acceptée par Mme la rapporteure et par Mme la ministre. Si ce n’était pas le cas, je serais déçue, parce qu’on n’aurait pas été jusqu’au bout d’une démarche qui me semblait positive au départ.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Madame Billard, vous allez être déçue, parce que la commission a émis un avis défavorable. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine Billard et M. Jean-Louis Dumont. Ça commence mal !

Mme Christine Boutin, rapporteure. La raison en est que votre amendement pose un vrai problème juridique en renvoyant à un décret la liste des droits sociaux, civils et civiques auxquels la procédure nouvelle d’élection de domicile donnera accès : c’est au législateur de préciser ces droits, en application de l’article 34 de la Constitution, et non au pouvoir réglementaire.

Cependant, votre amendement a le mérite de soulever la question de l’accès à une adresse postale et aux services bancaires de base. Un amendement ultérieur de la commission va préciser le dispositif sur ce point.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. L’article 6 M vise essentiellement à harmoniser et à simplifier la procédure d’élection de domicile. Il ne s’agit pas de remettre en cause le principe de l’obligation d’élire domicile pour le bénéfice des prestations sociales, la délivrance d’un titre national d’identité, l’inscription sur les listes électorales, parce que cette règle permet d’avoir une adresse administrative pour faire valoir ses droits et d’assurer leur suivi par les organismes de gestion concernés. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je crois qu’il y a un quiproquo. Je suis plutôt d’accord avec la liste proposée, y compris pour l’élargir,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien !

Mme Martine Billard. …puisque j’y ai ajouté l’adresse postale et la domiciliation bancaire, mais mon propos était de souligner que, tel qu’il est rédigé dans le projet de loi, l’article 264-1 du code de l’action sociale et des familles fixe des conditions pour prétendre aux bénéfices des prestations sociales et établit donc une obligation de domiciliation. Or le titre de la section est : « Droit à la domiciliation ». Ce n’est pas la même chose. Madame la ministre, vous allez faire voter une obligation de domiciliation pour tous ceux qui veulent prétendre à certains droits, alors que le sens du titre devrait se retrouver dans le contenu l’article. Si vous maintenez la rédaction telle qu’elle est, nous aurons un titre fictif.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 177.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 193.

La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.

M. Dominique Tian. L’utilisation du mot « bénéfice » des prestations peut comporter une confusion qu’il convient de lever. En effet, les personnes sans domicile fixe bénéficient dans les conditions de droit commun des prestations sociales, même en l’absence de domicile stable. En revanche, compte tenu de cette absence de domicile, les organismes débiteurs des prestations peuvent éprouver des difficultés, susceptibles de constituer un obstacle, dans le versement des prestations auxquelles les personnes concernées ont droit. Le terme « service » est donc plus précis et évite toute ambiguïté quant à une éventuelle condition nouvelle posée pour l’attribution des prestations. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée parce que le terme « bénéfice » peut paraître restrictif en ce qu’il ne vise que le versement des prestations, alors que le fait de disposer d’une adresse est nécessaire pour demander une prestation avant même de se la voir verser.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 193.

(L’amendement est adopté.)

M. Michel Piron. Bien, monsieur Tian !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 129.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. L’amendement vise à exclure du champ d’application de la procédure d’élection de domicile instituée par l’article 6 M les demandeurs de l’aide médicale d’État. En effet, pour ces derniers, la procédure de domiciliation qui est prévue à l’article L. 252-2 du code de l’action sociale et des familles reste applicable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 129.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour défendre l’amendement no 124.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons bien entendu Mme la ministre indiquer que c’était au législateur de déterminer le contenu des éléments référencés pour la mise en œuvre de cette domiciliation. Nous proposons donc de compléter par plusieurs éléments l’alinéa 6 de cet article en insérant, après les mots : « titre national d’identité », les mots : « d’un titre de séjour, d’un acte d’état civil, à l’accès aux services postaux et bancaires ». Il s’agit de ne pas adopter une attitude limitative quant à la liste des droits ouverts par la domiciliation. Je souligne la nécessité d’y faire figurer le titre de séjour, ce qui n’est apparemment pas dans l’intention des rédacteurs du dispositif. Parmi les situations que nous avons à connaître, nous mais aussi les caisses de coordination des assurances sociales, certaines concernent des personnes en attente de décision quant à leur titre de séjour. Notre collègue a d’ailleurs rappelé très justement qu’il ne s’agissait pas d’octroyer le bénéfice de prestations, mais seulement d’ouvrir la possibilité d’avoir une domiciliation pour l’accomplissement de ces formalités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission est défavorable à cet amendement parce qu’il aurait pour effet de rendre obligatoire une domiciliation pour accéder aux services bancaires et postaux. Or il est préférable de garantir l’accès à ces services aux détenteurs de l’attestation de domiciliation créée dans le cadre de la nouvelle procédure, et c’est ce que proposera un amendement à venir.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement partage ce que vient de dire Mme la rapporteure, qui a fait référence à l’amendement no 340. L’amendement défendu par M. Le Bouillonnec aboutirait en effet à rendre obligatoire l’élection de domicile des personnes sans domicile stable pour pouvoir accéder aux services postaux et bancaires.

Or il ne nous semble pas justifié d’obliger ces personnes à se domicilier pour exercer des droits liés à la vie quotidienne. En revanche, les personnes sans domicile stable qui possèdent une attestation d’élection de domicile en cours de validité ne doivent pas se voir privées de l’exercice de l’un de ces droits au motif qu’elles n’ont pas d’adresse stable.

Le Gouvernement donnera d’ailleurs un avis favorable à l’amendement n° 340, qui concerne la notion de « service essentiel garanti par la loi ». Puis-je dans ces conditions inviter M. Le Bouillonnec à retirer son amendement ? À défaut, le Gouvernement y serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En nous invitant si matin à retirer nos amendements, je crains, madame la ministre, que vous n’entendiez gâcher notre ouvrage ! (Sourires.)

J’ai bien noté que l’amendement n° 340 traitait de l’accès aux services bancaires et postaux : nous en examinerons donc la teneur. Pour ce qui est du titre de séjour, j’aurais aimé que Mme la ministre ainsi que Mme la rapporteure, nous indiquent ce qui leur semble pertinent. Comment, en effet, concevoir que la domiciliation des personnes concernées ne soit pas intégrée dans le dispositif ? Les parlementaires que nous sommes connaissent bien ce sujet. Pourquoi limiter la domiciliation tout en excluant de celle-ci les personnes qui demandent un titre de séjour ? Nous parlons, je le rappelle, de personnes qui n’ont pas d’adresse : aussi, je le répète – même si l’amendement n° 340 propose une mesure en ce sens –, l’accès aux services bancaires et postaux est nécessaire.

Expliquez-nous pourquoi on exclut du dispositif les personnes qui attendent un titre de séjour ou même un acte d’état civil : songeons, par exemple, aux étrangers en situation irrégulière donnant naissance à des enfants sur le territoire français. Je ne justifie pas cette situation, je constate qu’elle existe : il faut donc évidemment la traiter.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Pour obtenir un titre de séjour, monsieur Le Bouillonnec, la domiciliation n’est pas requise.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 124.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 130.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. L’amendement vise à améliorer la rédaction actuelle de l’alinéa 8, dans lequel les règles de répartition des compétences entre les départements ne semblent pas assez explicites.

Si le droit commun en matière d’aide sociale est constitué par la règle du domicile de secours, laquelle s’applique sauf dispositions contraires, il y a lieu de maintenir les dérogations actuelles à cette règle pour ce qui concerne l’allocation personnalisée d’autonomie, la prestation de compensation et le revenu minimum d’insertion. Il convient de préciser que le département compétent est, en l’espèce, celui dans lequel la personne a élu domicile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Permettez-moi de vous interroger sur un point qui m’inquiète, madame la ministre : puisque le versement du RMI est départementalisé, que se passera-t-il pour une personne qui change de département ? Qu’adviendra-t-il de cette personne le temps qu’elle trouve une association qui accepte de lui fournir une attestation de domicile ? Le département dont elle vient de partir sera tout à fait en droit de lui refuser le versement de son RMI, et celui dans lequel elle arrive ne sera pas encore en mesure de le verser : cette personne va-t-elle rester plusieurs mois sans revenus ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le principe, madame Billard, est le même que pour n’importe quel déménagement : tant que la personne n’a pas modifié son attestation, elle touche le RMI dans son département d’origine. Nous n’avons pas eu connaissance, à ce jour, de difficultés particulières.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 130.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure, pour défendre l’amendement n° 383.

Mme Christine Boutin, rapporteure. L’amendement vise à préciser que la limitation dans le temps de la validité doit s’appliquer à l’élection de domicile elle-même et pas seulement à l’attestation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 383.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 131.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. L’objectif de cet amendement est d’exclure du champ d’application de l’article 6 M les étrangers non ressortissants d’un État membre de l’Union européenne, d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse qui ne sont pas en situation régulière sur le territoire français.

En effet, la procédure d’élection de domicile n’a pas à s’appliquer à des personnes n’ayant pas vocation à rester de façon stable sur notre territoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Voici l’étape suivante : j’ai bien fait de ne pas retirer l’amendement n° 124, puisque nous sommes opposés à ce que propose le n° 131.

La confusion vient du problème suivant : lorsqu’il concerne les nationaux, le dispositif indique clairement que la domiciliation est la condition d’exercice de différents droits. M. Tian a d’ailleurs fort judicieusement proposé, par l’amendement n° 193, de remplacer le terme de « bénéfice » par celui de « service », de sorte que la domiciliation ne légitime pas le droit à la prestation : elle est seulement un instrument grâce auquel on peut y accéder. Pour les personnes non nationales ou non ressortissantes des États de l’Union, en revanche, la domiciliation prend une tout autre connotation, et semble générer un droit à rester sur le territoire français.

Pourquoi ne pas poser le problème autrement ? Reconnaissons qu’indépendamment de ce que décideront les autorités compétentes quant à la présence de la personne sur notre territoire – octroi ou refus d’un titre de séjour, injonction de quitter le territoire, y compris par la force –, tant que celle-ci y est présente, il faut lui donner, sinon un statut, du moins certains éléments qui conditionnent sa vie quotidienne.

On ne peut continuer à construire notre législation en niant la présence de ces femmes et de ces hommes, quelles que soient par ailleurs les conditions dans lesquelles ils séjournent chez nous ou sont priés de quitter notre territoire. Ce que je reproche à l’ensemble des dispositifs actuels, c’est de ne pas reconnaître aux personnes en situation irrégulière – puisque c’est d’elles qu’il s’agit –, pendant qu’elles sont présentes sur notre territoire, un état. En la matière, le Canada est d’ailleurs exemplaire car il reconnaît ce type de situation, alors même qu’il compte 20 % de population immigrée, tout en posant des règles parfois plus fermes qu’on ne le croit.

La domiciliation ne crée aucun droit : elle rend seulement possible l’accès à certaines demandes. Pourquoi donc la nier ? Ces derniers mois, notamment dans ma commune, les personnes concernées nous disaient : « Ne niez pas notre existence ! » Tant qu’elles sont présentes, elles veulent respecter la loi, même si elles l’ont par ailleurs enfreint pour des raisons qu’elles ont à expliquer. Or, lorsque l’on empêche leur domiciliation, on leur dénie la possibilité d’exister.

Il y a donc une contradiction fondamentale : si vous reconnaissez la domiciliation comme une clé d’accès non négligeable à certains droits pour les nationaux ou les ressortissants de l’Union européenne – et vous avez bien fait de réorganiser le dispositif en ce domaine –, vous lui donnez, afin de la leur refuser, un tout autre sens pour les étrangers en situation irrégulière.

Je crains que nous ne vidions pas ce débat aujourd’hui. Cependant, vouloir s’occuper de l’immigration en réglementant le droit d’accès au territoire ne résoudra pas les problèmes quotidiens de personnes qui y sont présentes. On retrouve ce problème, certes dans une moindre mesure qu’à Cachan, au canal Saint-Martin.

Bref, donnons un état aux personnes concernées afin qu’elles puissent accéder à des droits fondamentaux, tout en recourant à la législation existante pour déterminer les conditions dans lesquelles une personne peut entrer puis résider sur notre territoire. Vous voyez que mes propos restent mesurés, mais, je le répète, exclure du dispositif les personnes en situation irrégulière…

Mme la présidente. Monsieur Le Bouillonnec, veuillez conclure, je vous prie.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …confère à la domiciliation une autre valeur que celle qui est reconnue pour les nationaux et les ressortissants de l’Union européenne.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 131.

(L’amendement est adopté.)

M. Jean-Louis Dumont. Le problème n’est pas réglé !

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 132.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Cet amendement rédactionnel vise à préciser que la prestation mentionnée à l’alinéa 12 de l’article 6 M est une prestation sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 132.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 340.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Christine Boutin, rapporteure. L’amendement n° 340, dont il a déjà été question, précise que la domiciliation permet la mise en œuvre des droits d’accès aux services bancaires et postaux. Voilà qui répond, je pense, aux préoccupations de l’ensemble de nos collègues.

Mme la présidente. Le Gouvernement est-il favorable à cet amendement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 340.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour défendre l’amendement n° 133.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. L’amendement vise à supprimer l’alinéa 13, lequel prévoit que « la possession d’une attestation en cours de validité permet à son titulaire de justifier de sa résidence en France ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. J’appelle votre attention sur un problème, madame la ministre : une personne peut posséder une attestation provisoire de séjour tout en ayant besoin, pour renouveler celle-ci, d’une attestation de domiciliation.

Si ce n’est plus possible, nous serons confrontés à des situations invraisemblables. Certaines personnes récemment régularisées ne possèdent que des attestations provisoires et n’ont pas encore un domicile stable. Si vous leur ôtez la possibilité de demander, alors qu’elles sont en situation régulière, une attestation de domiciliation auprès d’une association, la préfecture pourra justifier de l’absence d’attestation de domiciliation pour refuser un renouvellement du titre de séjour.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Madame Billard, il ne faut pas se méprendre. Notre amendement ne concerne ni le renouvellement du titre de séjour nécessaire ni l’attestation de résidence, qui relèvent de textes spécifiques.

Il ne faut donc pas faire d’amalgame. Quand quelqu’un a besoin de faire renouveler son titre de séjour, il doit présenter un certain nombre de documents ; une attestation de domicile n’est pas suffisante, et elle ne le sera pas davantage à l’avenir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 133.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 139.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Cet amendement a pour objectif de délimiter de façon précise les possibilités de refus de domiciliation par les CCAS, en les limitant aux seules situations dans lesquelles les demandeurs n’ont pas de lien avec la commune.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 139.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 140.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Il convient de tenir compte de la réalité des situations à l’échelon local et d’adapter les activités de domiciliation en fonction du volume des demandes et de la capacité des centres communaux à les gérer. C’est pour cela que le représentant de l’État dans le département peut conclure une convention avec un organisme agréé.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Je profite de cet amendement, compte tenu de ce qui vient d’être dit et voté, pour attirer l’attention de la ministre sur le point suivant. De nombreux décrets d’application vont être pris, qui sont destinés à évoluer. Il est donc nécessaire qu’une information de qualité soit disponible pour l’ensemble des publics et que les services concernés puissent fournir une information actualisée.

Je dis cela car j’ai l’exemple précis d’une personne venue demander des renseignements au bureau d’une sous-préfecture à qui l’on a fourni, sans doute par inadvertance, une information dépassée, sans lui indiquer qu’elle avait d’autres démarches à accomplir auprès des services de police. Nous avons réussi à rattraper le coup, mais les conséquences auraient pu être graves.

C’est la raison pour laquelle nous nous sommes opposés à l’amendement n° 133. Il est en effet nécessaire que la réglementation puisse s’appliquer sur l’ensemble du territoire et qu’elle soit relayée par une information de qualité qui garantisse qu’il n’y aura pas de manquements, même involontaires. Cela n’est jamais sans conséquences.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Pour que l’information soit la plus juste possible, un guide national de la domiciliation va être réalisé et mis en place dans toutes les préfectures. Je veillerai à ce que ses mises à jour soient régulières, car cela fait partie des documents qui doivent être actualisés en permanence.

M. Jean-Louis Dumont. Et il faut que l’information soit transmise dès qu’elle arrive dans les services administratifs.

Mme la présidente. Je ne vous avais pas donné la parole, monsieur Dumont.

Je mets aux voix l'amendement n° 140.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 134.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C’est un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 134.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 178, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 380, présenté par le Gouvernement.

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 178.

Mme Martine Billard. Cet amendement a précisément pour objet de rendre publique dans chaque commune la liste des organismes agréés, et le sous-amendement du Gouvernement me semble en effet indispensable.

À l’heure actuelle, certaines personnes doivent affronter un véritable parcours du combattant pour faire valoir leurs droits. Ce n’est pas tout à fait vrai pour celles qui sont totalement à la rue et sont, le plus souvent, suivies par des associations qui transmettent l’information ; en revanche, les personnes sans domicile stable ont, elles, plus de difficulté à obtenir l’information nécessaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour défendre le sous-amendement n° 380.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je propose qu’après les mots « organismes agréés », nous ajoutions les mots « dans le département ».

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. L’avis de la commission sur l’amendement n° 178 est favorable ; elle n’a pas étudié le sous-amendement du Gouvernement, mais j’y suis favorable à titre personnel.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 380.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 178, modifié par le sous-amendement n° 380.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 141 rectifié.

La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Il paraît nécessaire que le président du conseil général donne son avis sur le cahier des charges que le représentant dans le département compte arrêter ; tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n°141.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 194 et 179 tombent.

Je suis saisie d'un amendement n° 127.

La parole est à M. Alain Néri, pour le soutenir.

M. Alain Néri. Cet amendement, présenté au nom du groupe socialiste, vise à supprimer l’alinéa 24 de l’article 6M. En effet cet article nouveau du code de l’action sociale prévoit que l’agrément aux centres communaux ou intercommunaux d’action sociale pour la délivrance d’attestations d’élection de domicile peut définir un nombre d’élections de domicile maximal au-delà duquel il n’y aurait plus de nouvelles élections.

Cette disposition réduit à n’en pas douter la portée de l’élection de domicile indispensable à l’obtention de droits fondamentaux comme les prestations sociales, le titre de nationalité et l’inscription sur les listes électorales. Vous comprenez bien, madame la ministre, que ce n’est pas acceptable. C’est pourquoi nous vous demandons de bien vouloir donner un avis favorable à notre amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis défavorable, parce que l’article 6M a justement pour objet de créer une procédure unique de domiciliation pour tous les domaines, que les CCAS seront tenus de mettre en œuvre. Les organismes agréés – c'est-à-dire les associations – n’interviendront qu’en complément. Il est donc normal qu’ils puissent souhaiter limiter cette intervention à l’accès de certains droits, mais il est évident qu’une pression de fait s’exercera pour l’offre d’une domiciliation généraliste.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le droit effectif à la domiciliation reposera sur une juste répartition assurée par le préfet. Il est donc nécessaire que l’agrément puisse définir le nombre de domiciliations que l’organisme est tenu d’accepter. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous ne saisissons pas bien le sens de cette disposition, si ce n’est de soumettre les agréments délivrés par les associations à des quotas. Or on ne peut présumer de la réalité sociale du territoire sur lequel le CCAS et les associations interviennent dans le département, et je ne vois pas comment on peut faire dépendre, de manière raisonnable et suffisante, le dispositif d’accession à la domiciliation d’un nombre d’agréments déterminé à l’avance.

À quoi sert-il que le nombre d’agréments que peut octroyer une association soit limité ? Cela n’a pas de sens ! Supposons que les CCAS aient géré l’intégralité de leur demandes et que les associations aient atteint leurs quotas, que va-t-il se passer ?

Dans la réalité, la répartition se fait très bien sur le terrain entre les CCAS et les associations. Nous choisissons notamment, lorsqu’une domiciliation nécessite un accompagnement social, de la confier à une association, dans l’esprit qu’indiquait Mme Billard tout à l’heure.

Je ne suis pas certain que les quotas n’auront pas l’effet inverse de celui qui est recherché, en paralysant le travail des associations. Le renvoi systématique vers les CCAS est contraire aux stratégies équilibrées que nous mettons en œuvre sur nos territoires.

Si on m’explique la pertinence de cet amendement, je suis prêt à l’accepter, mais il ne me semble pas qu’il se justifie.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le dispositif va se mettre en place chemin faisant. L’idée aujourd’hui est que les CCAS et les autres organismes agréés puissent assumer leur mission d’accueil et faire face à la demande. Le nombre d’agréments sera donc déterminé en fonction des moyens et du réseau dont ils disposent.

Il s’agit avant tout d’éviter les engorgements et d’assurer un véritable maillage du territoire, pour être au plus près de l’ensemble de nos concitoyens. Ce sera ensuite aux préfets d’adapter le système, au fur et à mesure des évolutions.

M. Alain Néri. C’est le bon sens même !

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Oui, mais le bon sens peut parfois être pavé de mauvaises intentions…

Je suis, moi aussi, gênée par cet alinéa. Prenons, en effet, le cas de personnes amenées à déménager. Si elles se présentent alors que les quotas sont épuisés, elles ne peuvent pas élire domicile et perdent le RMI. Il est tout aussi dangereux de préciser d’emblée que les domiciliations peuvent être restreintes à certaines catégories de personnes ou à certaines prestations sociales. Nous savons en effet combien les multi-domiciliations posent problème.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Tout à fait !

Mme Martine Billard. Certaines associations ne domicilient que pour telle prestation, ce qui oblige à en solliciter une seconde pour une autre prestation. Cela va devenir invivable pour les personnes en difficulté, déjà obligées de courir d’une administration et d’un service à l’autre. Tout cela doit être simplifié si l’on veut que ces personnes puissent reprendre pied et se reconstruire. Il ne faut pas multiplier les guichets, et vous faites exactement le contraire ! C’est pour cela que je voterai l’amendement de nos collègues socialistes.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 127.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 195.

La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.

M. Dominique Tian. Le cahier des charges est l’un des éléments essentiels à partir desquels l’agrément peut être délivré ou renouvelé. L’évaluation du respect des engagements pris dans le cahier des charges doit être un élément-clef dans la procédure de renouvellement de l’agrément.

Compte tenu de son importance, il est essentiel de définir plus précisément le contenu du cahier des charges et notamment les engagements que l’association s’engage à respecter.

Les engagements peuvent être variables selon les organismes, et le renvoi à un décret fixant des engagements communs à tous les organismes apparaît inopportun.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable non pas sur le fond, mais parce que nous pensons que l’objet de cet amendement est satisfait par l’amendement n° 141 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je partage cette opinion.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 195.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 180.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Cet amendement vise à supprimer la première phrase de l’alinéa 27 de cet article, qui indique que les organismes mentionnés à l’article L. 264-1 s’assurent que la personne qui élit domicile est bien sans domicile fixe.

S’agissant des demandeurs, il serait préférable de créer un guichet unique. Par ailleurs, non contentes de crouler sous les demandes de statistiques et de comptes rendus, les associations passent un temps infini à courir après les subventions. Si, en plus, elles doivent s’assurer que la personne qui élit domicile est bien sans domicile fixe… J’ai d’ailleurs déposé un amendement de repli, que je vais défendre maintenant, visant à substituer la notion de « sans domicile stable » à celle de « sans domicile fixe », qui est restrictive. La notion de « sans domicile stable » est en effet plus large et ne recouvre pas seulement les personnes qui sont à la rue, mais aussi celles qui sont hébergées chez des amis ou des membres de la famille, ou encore qui passent d’un hébergement à l’autre.

Comment les associations vont-elles pouvoir s’assurer que la personne qui élit domicile est bien sans domicile fixe ? Elles ne peuvent que faire confiance aux personnes qui déclarent être sans domicile fixe et leur demandent une attestation, car elles n’ont aucun pouvoir de police ni d’investigation. En réalité, on demande à ces organismes de faire ce que les pouvoirs publics eux-mêmes ne sont pas capables de faire. Si l’on veut qu’elles continuent à s’occuper des missions que leur délèguent les pouvoirs publics, il faut veiller à leur éviter une surcharge de travail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable.

Devoir s’assurer que les personnes sans domicile fixe le sont réellement est bien le moins.

M. Michel Piron. Absolument !

M. Jean-Louis Dumont. On complexifie !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Par ailleurs, nous allons remplacer la notion de « sans domicile fixe » par celle de « sans domicile stable ».

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 180.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 341 et 181.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 341.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il s’agit de substituer aux termes « sans domicile fixe » les termes « sans domicile stable », lesquels recouvrent une notion plus large.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 181.

Mme Martine Billard. Il est défendu.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 341 et 181.

(Ces amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 182.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. Cet amendement vise à supprimer la dernière phrase de l’alinéa 27 de l’article 6 M, qui précise que les organismes mentionnés à l’article L. 264-1 rendent régulièrement compte de leur activité de domiciliation au représentant de l’État dans le département.

Certes, les associations délégataires de service public doivent être contrôlées, et je ne reviendrai pas sur l’argumentation que j’ai développée précédemment. Mais j’ai le souvenir que, lors de la création du RMI, les associations parisiennes étaient tenues de vérifier si les fonds disponibles étaient bien affectés aux attributaires du RMI et non aux allocataires de l’ASS ou de l’API.

Les associations passaient leur temps à déterminer qui bénéficiait du RMI, de l’API ou de l’ASS – alors que ces personnes, disposant de revenus à peu près similaires, se débattaient dans les mêmes difficultés – afin de remettre des statistiques à la préfecture. C’est l’éternel problème du cadre général de la loi et de la fixation des seuils, qui peuvent conduire à des situations inextricables.

Il est normal d’attendre des associations qu’elles travaillent dans le respect de leurs missions, mais si l’on veut qu’elles se prêtent à la domiciliation, il faut cesser de les surcharger, comme on le fait ici sans prévoir de les rémunérer pour ce travail.

M. Dominique Tian. Nous y voilà !

Mme Martine Billard. C’est un vrai problème, car elles ne vivent pas d’amour et d’eau fraîche !

M. Dominique Tian. Il s’agit de bénévolat !

Mme Martine Billard. La domiciliation est une lourde tâche et ce n’est pas un hasard si les CCAS la délèguent aux associations : faute de quoi, elles devraient embaucher et elles n’en ont pas les moyens. On demande donc aux associations à la fois d’œuvrer bénévolement et de se livrer à un interminable travail statistique ! Si l’on veut qu’elles effectuent ce contrôle et qu’elles rendent des comptes, qu’on les rémunère pour cela !

M. Maurice Giro. Les associations font du bénévolat !

Mme Martine Billard. Sinon, c’est impossible.

M. Michel Piron. C’est invraisemblable !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable.

Pour les raisons invoquées par Mme Billard, il me paraît normal que les associations délégataires, qui remplissent des missions essentielles, soient tenues de rendre compte de leur activité à l’État. La question de leur rémunération est autre.

Mme Martine Billard. Non, les deux vont de pair !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Que, chaque année, l’État dispose d’un instantané de l’activité des organismes concernés me paraît essentiel. Que, par ailleurs, une réflexion se fasse sur la rémunération des prestations globales de ces associations est un autre problème. Nous n’allons pas procéder à un inventaire, s’agissant du nombre d’heures qu’elles doivent passer sur telle question ou sur telle autre. Les associations – et donc, les bénévoles – font un travail d’ensemble remarquable, notamment en matière d’accompagnement,

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. J’ai du mal à comprendre la manière dont vous envisagez les relations entre les associations et les pouvoirs publics, madame Billard. Les associations jouent un rôle original, pour lequel elles sont aidées. Si j’ai bien compris vos propos, ces aides devraient être distribuées sans contrôle. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine Billard. Non !

M. Michel Piron. Demander un compte rendu des activités de ces associations, dans le cadre d’une relation dont je rappelle qu’elle est aidée, est bien le moins.

Vous avez raison de souligner que certaines associations sont parfois soumises à des contraintes importantes, mais c’est le sujet qui veut cela. Je ne pense pas que tel soit le sens de vos propos, mais il serait pour le moins surprenant de distribuer des aides sans demander en retour un compte rendu annuel d’activité ! C’est une règle élémentaire dans le cadre d’une relation entre personnes responsables.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. On compte beaucoup sur le monde associatif…

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Bien sûr !

M. Jean-Louis Dumont. …pour rassembler des énergies, pour accomplir un travail militant et bénévole, avec une grande capacité d’écoute et de compréhension. Mais, pour aller au bout de la mission qui est confiée à l’association, il faut aussi des professionnels. Et on formule à leur égard des exigences sans cesse croissantes. Ce qu’on leur demande ici, ce n’est pas un compte rendu annuel, mais un compte rendu mensuel, sans doute pour préparer un futur rapport de la Cour des comptes visant à contrôler l’utilisation des fonds. Ainsi, le coût de la domiciliation peut faire l’objet d’un rapport important. On sait que les travaux menés par la Cour des comptes sont excellents, mais son approche n’est pas la même que la nôtre. Nous avons présidé des associations, pour nombre d’entre nous, et nous savons bien que, chaque fois qu’on lance un nouveau projet, on définit une enveloppe budgétaire.

M. Michel Piron. Eh oui !

M. Jean-Louis Dumont. Au début, tout va bien, puis les crédits viennent inéluctablement à manquer. On commence alors à compter…

M. Michel Piron. Comment faire autrement ?

M. Jean-Louis Dumont. …et l’on se rend compte que les missions de service public ne peuvent être menées à bien que grâce à l’action des bénévoles. Je ne suis pas contre cet engagement, mais encore faut-il prévoir aussi la présence de professionnels. Le public auquel s’adressent les associations ne peut répondre en quelques minutes sur l’ensemble des éléments constitutifs d’un dossier de domiciliation. Il faut une approche, une écoute, des explications. La personne concernée vient le matin, le soir ou le lendemain, et elle ne sait plus où elle en était la veille. Connaissez-vous ce public ? Nous le recevons dans nos permanences…

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité et Mme Christine Boutin, rapporteure. Nous aussi !

M. Jean-Louis Dumont. …et nous savons le temps qu’il faut pour constituer un tel dossier. Il faut beaucoup de temps, d’énergie et d’élans du cœur pour mener à bien une domiciliation, trouver un accueil d’urgence et mettre en place l’accompagnement social qui conduira à la réinsertion, mais il faut aussi beaucoup de professionnalisme.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Absolument !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Nous sommes d’accord !

M. Jean-Louis Dumont. Or j’ai l’impression que vous pensez déjà aux statistiques qu’il faudra fournir demain,…

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité et Mme Christine Boutin, rapporteure. Non !

M. Jean-Louis Dumont. …alors qu’il s’agit de tout autre chose.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je voudrais revenir sur ce sujet, à la lumière de certains éléments dont on parle beaucoup en ce moment, et notamment de l’évolution du traitement de l’urgence sociale dans notre pays.

Il ne vous a pas échappé que, depuis quelques semaines, le Gouvernement a beaucoup travaillé sur cette question et qu’il a fait considérablement avancer les choses. En adoptant un amendement prévoyant qu’il ne serait plus possible de remettre à la rue les personnes hébergées dans les centres d’urgence, votre assemblée a contribué au changement que vous allez constater dans les semaines ou les mois qui viennent : 10 500 des 13 500 places d’hébergement d’urgence vont être transformées en hébergement de stabilisation, c’est-à-dire des lieux où les gens pourront rester vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Nous avons là de facto une réponse au problème de domiciliation. Je ne prétends pas qu’il sera totalement réglé dès demain. Notre débat ne porte pas seulement sur la domiciliation, il vise aussi à faire évoluer le traitement social de l’urgence, et j’en prends acte.

Chacun sait que les enjeux budgétaires sont massifs. Si, depuis vingt ans, le traitement social de l’urgence est organisé d’une certaine façon, c’est bien parce que, au-delà des lieux, il s’agit de coûts de fonctionnement, c’est-à-dire de personnels. Et dès lors que le Gouvernement délègue 94 millions d’euros, c’est qu’il est conscient de la nécessité d’octroyer des moyens supplémentaires.

Notre débat doit être éclairé à l’aune de ce qui se passe aujourd’hui. Les 1 051 millions d’euros, que vous avez votés sur proposition du Gouvernement, mesdames, messieurs les députés, pour le budget 2007, sont appelés à augmenter, quelle que soit l’évolution de la situation dans les semaines à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Les grandes villes ont probablement des problèmes spécifiques. À Paris, des milliers de personnes sont concernées. Certes, les personnes à la rue y seront moins facilement remises, puisque le problème de la domiciliation va être en partie réglé, mais malheureusement des milliers de personnes, sans être à la rue, n’ont pas de domicile stable.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C’est vrai.

Mme Martine Billard. Ces personnes qui errent entre plusieurs domiciles – famille ou amis – sont dans une situation difficile car elles ne sont pas véritablement à la rue et ne sont donc pas suivies par des associations qui s’occupent des sans domicile fixe, et elles ne peuvent se faire domicilier chez les familles qui les hébergent parfois, à moins de les mettre en danger, car les offices HLM interdisent l’hébergement de secours.

À Paris, la demande de logement social ne cesse de croître, mais il n’y sera malheureusement pas répondu…

M. Michel Piron. On peut aussi envisager des réponses territoriales !

Mme Martine Billard. …parce qu’il ne s’agit pas de personnes demandeuses de places en centre d’hébergement, même stable, mais de personnes demandeuses de logement social.

M. Maurice Giro. Il n’y a pas assez de logements sociaux à Paris !

Mme Martine Billard. Ces personnes, qui ont besoin d’une attestation de domiciliation, exigent un travail différent de la part des associations. Celles-ci devront s’adapter.

J’insiste sur ce point : certaines personnes, qui ont un emploi, mais dont le salaire est trop faible, ne demandent aucune autre aide que celle nécessaire pour obtenir un logement et, en attendant, n’ont besoin que d’une domiciliation. Or les associations, qui ne peuvent pas tout faire, tendent à s’occuper en priorité des personnes pour lesquelles un travail social est nécessaire.

M. Alain Néri. C’est juste.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 182.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 135.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Cet amendement a pour objet d’exclure explicitement du champ d’application de l’article 6 M les procédures de domiciliation des demandeurs d’asile. Ces derniers relèvent d’une disposition spécifique, prévue par un décret de juin 1946, lui-même modifié par le décret du 14 août 2004.

Dans un souci de clarté juridique, nous souhaitons rectifier l’amendement en remplaçant les mots : « les présentes dispositions » par les mots : « les dispositions du présent chapitre ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 135, tel qu’il vient d’être rectifié.

(L’amendement, ainsi rectifié, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 136.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Les cas de refus de procéder à une élection de domicile et les modalités de conclusion des conventions par le représentant de l’État doivent être précisés pas un décret en Conseil d’État et non par un décret simple.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 136.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 137.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Cet amendement vise à regrouper dans un seul et même article les règles relatives à la domiciliation des personnes sans domicile stable. Il s’applique également aux personnes demandant à bénéficier de l’allocation personnalisée d’autonomie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 137.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 138.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Cet amendement vise à tirer les conséquences du regroupement dans un seul et même article des règles relatives à la domiciliation des personnes sans domicile stable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 138.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement, n° 156, tendant à supprimer l’alinéa 35 de l’article 6 M.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. La demande d’aide médicale de l’État ne relève pas du champ d’application de l’article 6 M, qui ne vise pas les personnes en situation régulière. Il y a donc lieu de maintenir la procédure spécifique prévue à l’article 252-2 du code d’action sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 156.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 342.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, substituant au mot : « résidence » celui de « domicile ».

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 342.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 196.

La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.

M. Dominique Tian. Il nous a paru important, à mon collègue Maurice Giro et à moi-même, de préciser que les décisions de délivrance ou de retrait d’attestation de domicile prises par l’organisme agréé doivent systématiquement être adressées aux organismes de sécurité sociale compétents.

Cette procédure présente de nombreux avantages. D’abord, elle permet à la personne sans domicile fixe de faire valoir ses droits même si elle n’est pas en possession de son attestation.

Ensuite, les associations perdent souvent de vue de nombreux SDF domiciliés auprès d’elles. Elles hésitent cependant à les radier de leur fichier, ne sachant pas s’ils ont élu ou non domicile auprès d’une autre association. La transmission aux organismes de sécurité sociale permettra de repérer les personnes sans domicile fixe domiciliées auprès de plusieurs associations et de procéder à une mise à jour régulière des fichiers des associations, sans pour autant porter atteinte aux droits de ces personnes

Enfin, la transmission des décisions d’attribution ou de retrait permettra de mieux évaluer et de contrôler les conditions de délivrance d’attestation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission est consciente du problème posé par cet amendement, mais elle lui a toutefois préféré l’amendement n° 386 du Gouvernement, mieux rédigé.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée, pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 196 et présenter l’amendement n° 386.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement comprend bien la préoccupation de M. Tian, et souscrit à sa volonté de simplifier les démarches des usagers. Cependant, nous pensons qu’il ne faut pas alourdir la charge des organismes de domiciliation en leur imposant la notification de chaque décision. Le Gouvernement propose donc de mettre en place un système d’information périodique. Il convient également de rendre les départements destinataires de ces informations.

C’est pourquoi, monsieur Tian, nous vous proposons de retirer l’amendement n° 196 au profit de l’amendement n° 386, qui complète l’alinéa 41 de l’article 6 M par la phrase suivante : « Dans le but de simplifier les démarches des intéressés, les organismes de sécurité sociale concernés et le département sont informés par l’organisme agréé des décisions d’attribution ou de retrait des attestations d’élection de domicile mentionnées à l’article L. 264-2, dans des conditions définies par décret ».

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Vous parlez, madame la ministre, d’un système d’information périodique. N’est-ce pas un peu flou ? Par ailleurs, pourquoi renvoyer à un décret, dont on ne sait quand il sera publié ? L’amendement que nous avons déposé me paraissait plus favorable, notamment pour les SDF.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Il s’agira d’un relevé mensuel. Quant au décret, il sera publié dans les meilleurs délais.

M. Dominique Tian. Dans ce cas, je retire l’amendement.

M. Pierre-Louis Fagniez. Nous vous faisons confiance, madame la ministre !

Mme la présidente. L’amendement n° 196 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 386.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 21.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il corrige une erreur de référence.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 21.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 343.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Amendement de précision : l’alinéa 46 s’applique non à l’ensemble des personnes sans domicile stable, mais aux seuls gens du voyage, pour lesquels est prévue une règle dérogatoire en matière de domiciliation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 343.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6 M, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 6 M, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 6 M

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 97 rectifié et 203 rectifié.

La parole est à M. Étienne Pinte, pour soutenir l’amendement n° 97 rectifié.

M. Étienne Pinte. Le présent amendement vise à allouer, au bénéfice des salariés intérimaires, des financements supplémentaires pour l’action sociale – notamment en faveur du logement – et pour la formation professionnelle, en transférant vers ces actions l’équivalent des fonds correspondant à la taxe d’apprentissage dont les intérimaires ne peuvent bénéficier.

Les entreprises de travail temporaire versent aujourd’hui 0,15 % de la masse salariale des intérimaires à un organisme géré paritairement. Je propose que ses moyens soient accrus par une cotisation supplémentaire équivalant à 0,2 % de la masse salariale.

D’autre part, les entreprises de travail temporaire ont une obligation légale fixée à 2 % de la masse salariale. Il est proposé de la porter à 2,3 % et de porter de 0,3 % à 0,4 % la contribution en faveur du congé individuel de formation.

La taxe d’apprentissage resterait applicable à la masse salariale des salariés permanents des agences, mais la masse salariale des intérimaires en serait exonérée, les salariés de la branche ne pouvant bénéficier des fonds correspondants puisqu’ils ne peuvent conclure de contrat d’apprentissage.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian, pour défendre l’amendement n° 203 rectifié.

M. Dominique Tian. L’amendement est identique. Le Gouvernement souhaite développer les instruments de sécurisation des trajectoires professionnelles, notamment pour les salariés les plus fragiles. L’affectation des sommes équivalentes à la taxe d’apprentissage à des actions de formation continue et d’aide au logement y contribuerait grandement. J’espère donc que cet amendement sera accueilli favorablement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission est évidemment sensible à la préoccupation exprimée par les auteurs de ces amendements. Ces mesures pourraient permettre de développer les actions de la branche du travail temporaire dans les domaines de la formation et du logement. Toutefois, l’impact de l’exonération de la taxe d’apprentissage n’a sans doute pas été suffisamment évalué. L’intérim représente environ 3 % de l’emploi. Quelle serait l’incidence, pour le financement des CFA et des organismes de formation, d’une diminution du rendement de la taxe d’apprentissage ? C’est donc la prudence qui a conduit la commission des affaires culturelles à donner un avis défavorable sur ces amendements.

M. Michel Piron. Prudence est mère de sûreté !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement ne méconnaît pas l’enjeu mis en avant par M. Pinte et M. Tian, mais je partage l’avis de Mme Boutin. Le financement du Fonds d’action social du travail temporaire est assuré par une contribution de toutes les entreprises d’intérim. S’agissant de la formation professionnelle, le Fonds d’assurance formation du travail temporaire accompagne les entreprises et leurs salariés dans des actions de formation, y compris des actions de validation des acquis de l’expérience. Le Gouvernement n’envisage pas aujourd’hui, sans avoir au préalable consulté les partenaires sociaux, de relever les taux des contributions visées. On risquerait d’alourdir les contraintes sur les entreprises de travail temporaire et, en fin de compte, de pénaliser les salariés. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 97 rectifié et 203 rectifié.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. Étienne Pinte. Très bien !

Article 6 N

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri, inscrit sur l’article.

M. Alain Néri. Cet article, introduit au Sénat par un amendement de plus de trois pages du Gouvernement, a pour objet principal d’autoriser l’État à expérimenter, dans le cadre de l’article 37-1 de la Constitution et conjointement avec les départements volontaires, un contrat unique d’insertion, qui fusionnerait les dispositifs CAE, CIE, contrat d’avenir et CI-RMA et serait ouvert aux bénéficiaires de minima sociaux, qu’il s’agisse du RMI, de l’ASS, de l’API ou de l’AAH.

On peut lire dans l’exposé des motifs que cette disposition « permettra de décloisonner les dispositifs relatifs aux bénéficiaires de minima sociaux et de gagner en efficacité » et que « ce contrat simplifié sera plus lisible pour le bénéficiaire comme pour l’employeur. » Est-ce à dire que les dispositifs Borloo sont compliqués et difficiles à mettre en œuvre ? Quel aveu !

Ce contrat unique serait assorti d’une aide modulable en fonction du degré d’éloignement de l’emploi du bénéficiaire, d’une part, des engagements pris par l’employeur en matière d’accompagnement, de formation ou de pérennisation du contrat, de l’autre.

La part de cette aide relevant de l’activation des minima sociaux, le financement devrait être clairement identifiable : prise en charge par l’État pour les bénéficiaires de l’API, l’AAH et l’ASS, et par le département pour les bénéficiaires du RMI. C’est justement cela qui cause notre inquiétude, madame la ministre. En effet, à la lumière de notre expérience, la compensation par l’État du financement du RMI nous a déjà causé, à tout le moins, quelques déconvenues ! Aujourd’hui, chacun sait que les départements ne reçoivent pas la compensation à l’euro près, même si M. Copé l’affirme chaque fois la main sur le cœur dans cet hémicycle. Je citerai à cet effet l’exemple du Puy-de-Dôme que je connais bien pour occuper, dans ce département, la fonction de vice-président chargé des affaires sociales.

M. Michel Piron. C’est un beau département !

M. Alain Néri. Certes, monsieur Piron, mais l’État nous doit tout de même 9 millions d’euros pour la seule année 2006 ! Puisque vous vous êtes rendu dans notre beau département, monsieur Piron, vous devez savoir que l’action sociale y prend une grande place et que ces 9 millions lui manquent cruellement !

Du fait de cette proposition, les départements ne risquent-ils pas, à terme, de devoir supporter la charge de l’insertion des exclus de l’emploi ?

L’article 6 N complète l’article 142, rattaché à la loi de finances pour 2007, qui fait trois pages également, et a été adopté par amendement sans véritable discussion en séance publique à l’Assemblée nationale le 9 novembre dernier, lors de l’examen des crédits de la mission « travail et emploi ».

Ce dispositif expérimental du contrat unique d’insertion déroge, en matière d’activation du RMI, aux règles de versement de la prime de retour à l’emploi et de la prime forfaitaire mensuelle dont peuvent bénéficier les titulaires des minima sociaux reprenant un emploi, primes instituées par la récente loi du 23 mars 2006 relative au retour à l’emploi et au développement de l’emploi.

Ce dispositif déroge aux règles des contrats d’insertion que sont les contrats d’avenir créés par la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 et les contrats d’insertion revenu minimum d’activité créés par la loi du 18 décembre 2003, qui n’ont d’ailleurs jamais bien fonctionné : on ne connaît ni leur forme juridique – contrat à durée indéterminée, à durée déterminée ou contrat de travail temporaire –, ni leur durée minimale et maximale – six mois minimum et vingt-quatre mois maximum ? – ni leur renouvellement ; la durée hebdomadaire pourra varier de vingt heures à trente-cinq heures, contre vingt-six heures imposées. Tout cela reste encore confus ! Le dispositif étend ces dérogations aux contrats d’insertion dans l’emploi, aux contrats d’accompagnement dans l’emploi et aux contrats initiative emploi créés également par la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005. Notons que les dispositifs d’insertion que sont les contrats d’avenir, les CAE et le CIE ont été récemment créés par la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005, qui a, dans le même temps, abrogé les contrats emploi solidarité et les contrats emploi consolidés, auxquels vos dispositifs, modifiés à plusieurs reprises, ressemblent pourtant de plus en plus étrangement !

Ainsi, ces dispositifs miracles, comme les présentait ici même M. Borloo, maintiennent les bénéficiaires de minima sociaux dans une précarité qui n’est pas acceptable.

Aujourd’hui, le Gouvernement, par le biais d’amendements successifs, propose l’expérimentation par les départements d’un contrat unique d’insertion, avec des dispositifs dérogatoires selon les territoires. Cette manière de légiférer, convenez-en, n’est pas acceptable ; elle est même insupportable. Un tel dispositif mériterait de faire l’objet d’un texte législatif à lui seul, qui devrait être précédé d’une étude sérieuse sur les difficultés de fonctionnement et les problèmes posés par les dispositifs d’insertion existants ainsi que d’une vraie discussion publique avec les acteurs concernés, en particulier les conseils généraux. Or il n’en est rien à ce jour. Nous sommes pour notre part tout à fait disposés à participer à ces discussions et à ces auditions pour accomplir un véritable travail de fond.

Faut-il comprendre que le plan de cohésion sociale du Gouvernement aurait fait fausse route parce qu’il serait trop précipité ? Ou bien le Gouvernement ne voit-il pas là une brèche où s’engouffrer pour qu’à terme les collectivités territoriales supportent la charge des bénéficiaires des minima sociaux, dont le nombre malheureusement s’alourdit, comme nous vous le rappelons à chaque séance ! Vous faites diminuer artificiellement le nombre des chômeurs en augmentant concrètement le nombre des RMIstes ! Ce n’est pas une façon sérieuse de travailler.

Pour toutes ces raisons, même si un contrat d’insertion plus simple, plus adaptable à chaque situation et géré au plus près du terrain, peut être un moyen plus approprié pour rapprocher les personnes en difficulté de l’emploi, le groupe socialiste vous propose, madame la ministre, de gagner en temps et en clarté en supprimant cet article, car ce sont des moyens réels qui doivent être mis en place pour régler le problème de l’exclusion, et non des dispositifs expérimentaux. Une réforme de fond est sans doute nécessaire, mais pas au détour d’un amendement gouvernemental, et surtout pas, madame la ministre, à l’avant-veille de la fin d’une législature !

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement, n° 122, tendant à supprimer l’article 6 N.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le soutenir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. M. Néri a, bien entendu, développé l’ensemble des arguments qui concluent à la suppression de l’article.

Je me contenterai de citer un exemple qu’il a omis de préciser, alors qu’il le connaît bien mieux que moi encore. Ainsi, les contrats d’avenir ont été créés le 18 janvier 2005, modifiés une première fois par la loi relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale du 26 juillet 2005. Qui a mis en place ces contrats en janvier 2005 pour les modifier au mois de juillet suivant, puis, le 23 mars dernier, dans la loi relative au retour à l’emploi ? Et, vous proposez aujourd’hui une modification du dispositif, qui plus est dans un cadre expérimental ! Comment s’y retrouver ? Où est la force de l’instrument juridique qui permettrait effectivement de conduire une véritable politique en faveur des personnes concernées par ces contrats ?

Enfin, au fil des modifications des textes récents, vous en revenez de plus en plus aux dispositifs – tels les CES – que nous avions mis en place et que vous avez supprimés. Cela démontre que le Gouvernement ne maîtrise pas l’intention politique en faveur des personnes en difficulté, qu’il faut rapprocher de l’emploi. De plus, il est exclusivement animé par l’idée de transférer la charge de ces dispositifs vers les régions et les départements. Il utilise ces instruments comme régulateurs budgétaires. Il l’a fait tout au long de la législature avec pour seul objectif la dérégulation budgétaire. Par cet amendement, nous proposons donc la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. J’ai écouté avec une très grande attention les arguments de MM. Néri et Le Bouillonnec. Malgré cela, la commission a émis un avis défavorable. Effectivement, mes chers collègues, vous n’avez pas souligné avec suffisamment de force la dimension expérimentale du contrat unique d’insertion, à laquelle nous sommes très attachés. Elle prévoit en effet pour les contrats aidés la mise en œuvre par l’État des mêmes règles que pour les personnes percevant le RMI. Nous pensons qu’il serait prématuré de revenir sur ces conditions pour l’instant.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Vous ne serez pas surprise, madame la présidente, de m’entendre répondre que je partage bien évidemment l’avis de Mme la rapporteure. Nous sommes là dans le cas d’une expérimentation. Mesdames, messieurs les députés, l’objectif et la volonté du Gouvernement pendant cinq ans ont été de tout essayer pour apporter des solutions à toutes celles et tous ceux qui sont encore très éloignés de l’emploi. En l’occurrence, il est question, dans cet article, d’essayer, avec des départements volontaires, de nouvelles règles permettant une approche encore différente pour conduire vers l’emploi. Il s’agit donc d’une expérimentation. Il n’est donc pas question de légiférer à la va-vite pour changer le code du travail, mais d’autoriser une expérimentation dans un contexte déterminé et précis. Tel est le sens de cet article. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Il s’agit certes d’une expérimentation, mais engagée dans la précipitation. Je le dis d’autant plus que nous avons déjà été échaudés, et chat échaudé craint l’eau froide. En effet, ce n’est pas une façon sérieuse de travailler avec les départements. Lorsque les maisons départementales pour les personnes handicapées – les MDPH – ont été mises en place, on nous a dit que c’était urgent, qu’il fallait agir très vite, et on est même allé jusqu’à nous proposer une prime si l’on signait avant le 31 décembre 2005. C’était tout de même une première ! Ce n’est pas une façon d’agir. Aujourd’hui, malgré la bonne volonté de tout le monde – État, associations et conseils généraux – on a de grandes difficultés pour faire tourner convenablement les maisons départementales pour les personnes handicapées. Madame la ministre, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Il est vrai qu’il y a urgence sociale, mais ce n’est pas une raison pour s’engager avec précipitation dans des actions qui risquent de se retourner contre ceux que l’on veut aider ! Ce n’est pas votre bonne foi qui est en cause : je vous appelle simplement à un peu plus de responsabilité. Vous devez prendre le temps de la réflexion, du travail en commun avec les conseils généraux, les associations et les partenaires sociaux.

Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir supprimer cet article. L’enfer est parfois pavé de bonnes intentions et cela risque d’être le cas avec votre texte !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Dans le cas de l’expérimentation, on ne peut pas parler aujourd’hui de précipitation. Je pense notamment au travail de Martin Hirsch avec l’agence nouvelle de solidarités actives. Tout un travail a été fait. Des rapports nombreux ont été rédigés. On s’inscrit dans le droit fil de la proposition de loi de Mme Létard, examinée il y a peu de temps par vos collègues sénateurs. Il ne s’agit donc pas d’une dernière disposition à la veille de la fin de la législature, mais bien d’une idée travaillée, portée par de nombreux élus et accompagnée aujourd’hui par des départements, dont je rappelle qu’ils sont volontaires, de la majorité ou de l’opposition. Ce n’est qu’une expérimentation, tenons-nous en à ce stade et essayons d’en tirer des enseignements intéressants. Ce qui peut paraître aujourd’hui comme précipité pourrait peut-être servir d’exemple et, pourquoi pas, ouvrir demain la voie à une évolution plus importante.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Puisque nous sommes en fin de législature, nous pouvons apprécier l’action du Gouvernement.

Le Gouvernement a commencé par supprimer les CES et les contrats emplois consolidés, simplement parce qu’ils avaient été faits par la gauche ! C’est de la politique. Une fois qu’ils ont été supprimés, il a bien fallu régler le problème ! Est-ce cela une action gouvernementale, une action publique d’État ? Dans l’improvisation, mais après presque deux ans de difficultés, le Gouvernement s’est engagé dans le dispositif des contrats d’avenir, créé en janvier 2005 et modifié depuis à deux reprises. Je préside une mission locale, comme beaucoup de collègues. Qui peut prétendre que les contrats d’avenir sont actuellement opérationnels ? Le dispositif législatif n’est pas en œuvre sur tous les territoires parce qu’il ne peut pas l’être, car vous avez à deux reprises modifié ce qui a été mis en place en 2005 ! Et vous venez aujourd’hui nous dire qu’il est important et urgent de décider une quatrième modification à titre expérimental !

Personne ne peut considérer que c’est une action publique d’État. Il faudra bien que l’on arrête de rayer d’un trait tout ce qui a été fait par le précédent gouvernement, ce que vous avez fait, et c’était de l’idéologie, pour mettre en place, dans l’improvisation, et sous la pression de la rue, des dispositifs dont on voit bien qu’ils sont totalement incertains, au point que le Gouvernement en arrive à présenter un amendement de trois pages au Sénat. Ce n’est même pas un dispositif législatif bien bouclé. C’est encore et toujours de l’improvisation, ce n’est pas acceptable quand il s’agit d’un public fragilisé. Bref, ce n’est pas une vraie politique d’État.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le dispositif CAE concerne 250 000 personnes, 110 000 contrats d’avenir ont été conclus sur l’ensemble du territoire. Enfin, comme je l’ai dit tout à l’heure, il s’agit d’une expérimentation qui fait suite à différents travaux. Il est important qu’elle puisse être conduite, pour éventuellement offrir de nouvelles opportunités.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 122.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 344.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 344.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 345.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement consiste, dans le cadre de l’expérimentation visant l’État, à préciser que les départements, les communes et les EPCI ne sont pas autorisés à prescrire et à mettre en œuvre les contrats d’avenir expérimentés. Il s’agit d’une mesure de cohérence avec l’expérimentation réalisée par les conseils généraux pour les bénéficiaires du RMI, qui prévoit également cette limitation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 345.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 346.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 346.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 347.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement a pour objet d’aligner la durée maximale de versement de l’aide de l’État au titre des CIE conclus à durée indéterminée sur celle déjà prévue pour ceux conclus en contrat à durée déterminée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 347.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 348.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 348.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 349.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement a pour objet d’aligner la durée maximale de versement de l’aide de l’État au titre des CAE conclus en contrat à durée indéterminée sur celle déjà prévue pour ceux conclus en contrat à durée déterminée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 349.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 350.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 350.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 351.

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est également un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 351.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 352.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Comme si ce n’était pas assez confus, on va encore attendre un décret pour mettre en œuvre cette expérimentation ! Je n’ajoute rien à ce que nous avons dit tout à l’heure.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 352.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6 N, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 6 N, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 6 N

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 276.

La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le défendre.

M. Frédéric Dutoit. Cet amendement reprend plusieurs aspects d’une proposition de loi que nous avons déposée en mars dernier.

En effet, devant l’abus manifeste dont sont victimes les stagiaires, notre groupe a élaboré plusieurs mesures. Soumises à plusieurs organisations syndicales de salariés, d’étudiants et du collectif « génération précaire », elles reçoivent unanimement leur approbation.

Aujourd’hui, dans le champ des nombreuses formes d’emploi atypique, apparaît une nouvelle forme : le stage. Détourné de son objectif pédagogique, le stage, avec la convention qui en détermine les contours, est devenu abusivement un recours normal du patronat pour s’attacher les services d’une force de travail grandissante.

Dans un contexte de chômage massif, en particulier pour les jeunes, le patronat use du stage pour exercer une pression sur l’emploi des jeunes et bénéficier ainsi d’une main-d’œuvre à bon marché sans s’embarrasser des garanties protectrices obligatoires d’un contrat de travail, lorsque celui-ci est justifié. En effet, nombreux sont les jeunes « embauchés » dans un stage alors que leurs missions comme la durée de leur présence dans l’entreprise relèvent avant tout du contrat de travail. Les abus sont manifestes.

Comme le fait observer le collectif « génération précaire », cette multiplication des stages pour les étudiants, en lien avec l’allongement de la durée des études, a fourni aux entreprises, administrations et associations une quantité croissante de stagiaires, dont on connaît malheureusement, maintenant, l’utilisation qui en est faite. C’est ainsi que ces jeunes étudiants sont inscrits durablement dans la précarité, sans perspectives durables pour leur avenir professionnel et personnel.

Sans objectif pédagogique clair, sans qu’il y ait une ouverture du monde enseignant au monde professionnel alors que c’est la raison principale de toute conclusion de convention de stage, nécessaire à l’obtention de leur diplôme, ces jeunes sont recrutés sous une nouvelle forme de sous-emploi. Par ce procédé, les stages ne constituent plus un tremplin pour l’emploi mais sont devenus une forme d’emploi.

Il faut lutter résolument contre cette dérive que constitue le remplacement du contrat de travail par des conventions de stage. Cela suppose de mieux définir le sens des conventions et de réaffirmer le lien pédagogique entre les parties : l’employeur, l’établissement d’enseignement et l’étudiant. Lutter contre ces abus, c’est naturellement garantir aux salariés le respect de leurs droits, mais cela revient également à revaloriser le rôle complémentaire de la formation pratique vis-à-vis de la formation théorique et à revaloriser le stage.

Compte tenu du développement massif des stages obligatoires, il importe d’apporter des solutions légales à sa définition pour accorder aux stagiaires des droits nouveaux afin que leurs premiers pas dans le monde de l’entreprise ne détournent pas l’objectif pédagogique qui préside à leur demande de stage.

Sans véritable distinction entre contrat de travail et convention de stage, ce statut peu clair entraîne de nombreuses dérives au regard du droit social comme l’absence de rémunération obligatoire ou la privation de certains droits sociaux.

Il apparaît clairement que le statut juridique doit s’adapter à cette évolution et tirer l’enseignement de la pratique du stage. C’est pourquoi, avec cet amendement et notre proposition de loi, nous souhaitons apporter des éléments de réponse pour lutter contre les manquements les plus pénalisants pour les stagiaires.

Il s’agit ici de renforcer la définition du stage dans l’enseignement supérieur et de clarifier les recours à cette forme de formation pratique qui le distingue d’un contrat de travail.

En conséquence, la conclusion de toute convention de stage ne doit pas se détourner de l’objectif pédagogique et du respect de l’équilibre entre formation théorique et formation pratique. Cela pose les principes de sa durée comme de son renouvellement.

S’il y avait volonté d’en dénaturer l’objet, il conviendrait alors de prévoir la requalification de la convention de stage en contrat de travail et d’accorder les droits comme les obligations afférentes au contrat de travail tel qu’il sera requalifié par le tribunal.

Cette première mesure permet donc la requalification des conventions de stage en contrat de travail en cas d’abus.

Mme la présidente. Puis-je considérer, monsieur Dutoit, que vous avez défendu en même temps les amendements suivants ?

M. Frédéric Dutoit. Oui pour les amendements n°s 275 et 277.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 276 ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable.

Le présent gouvernement est le premier à s’être efforcé d’encadrer les stages offerts aux jeunes en début de carrière professionnelle. Il s’agissait de trouver un équilibre entre deux impératifs : mettre fin à des abus manifestes mais aussi conserver une certaine souplesse car les stages débouchent aussi sur des embauches.

Dans le cadre de la loi pour l’égalité des chances du 31 mars 2006, il est prévu que les stages en entreprise doivent faire l’objet d’une convention. Ils ne peuvent durer plus de six mois et font l’objet d’une gratification quand ils dépassent trois mois. Un décret a été publié le 29 août 2006 pour préciser le contenu des conventions.

Ce décret précise aussi qu’aucune convention de stage ne peut être conclue pour remplacer un salarié en cas d’absence, de suspension de son contrat de travail ou de licenciement, pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ou pour occuper un emploi saisonnier. Ces précisions devraient vous satisfaire, monsieur Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Pas du tout !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Enfin, une charte des stages étudiants en entreprise a été signée le 26 avril 2006 par M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche, les représentants patronaux, les représentants des établissements d’enseignement supérieur ainsi que trois organisations d’étudiants. Il convient de laisser au dialogue social la possibilité de se déployer sans adopter une nouvelle mesure législative.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement a la même position que la commission.

Comme vient de le rappeler Mme Boutin, le Gouvernement, conscient des abus, vous a soumis l’année dernière, dans le cadre du projet de loi sur l’égalité des chances, un article concernant l’encadrement des stages.

L’ensemble des dispositions de ce texte ont pour objectif d’ancrer les stages dans leur vocation pédagogique et de prévenir toute dérive.

S’agissant de la gratification des stagiaires, l’article 9 de la loi pose le principe d’une gratification pour tous les stages d’une durée supérieure à trois mois consécutifs et renvoie aux partenaires sociaux la responsabilité de fixer le montant de cette gratification par un accord ou une convention collective étendue. En effet, il apparaît qu’une négociation de branche est préférable à une négociation nationale interprofessionnelle, parce qu’elle permet de s’adapter aux particularités du secteur d’activité concerné. Toutefois, afin de garantir le droit reconnu aux stagiaires, le Gouvernement publiera au printemps un décret fixant le montant de cette gratification dans les branches n’ayant pas conclu d’accord.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 276.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 275.

Il a été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 275.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 277.

Il a été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 277.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 279.

La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le défendre.

M. Frédéric Dutoit. Je tiens en effet à défendre cet amendement, bien que je n’aie aucune illusion sur ses chances d’être adopté.

Farouchement opposé à la création du CNE, le groupe des député-e-s communistes et républicains fait de son abrogation une exigence non négociable.

Cette entorse aux principes communs du contrat de travail, que certains voudraient voir généralisée, ou dont, à tout le moins, ils voudraient s’inspirer pour créer le contrat unique, est inacceptable, mais aussi inefficace pour l’emploi.

Le contrat nouvelles embauches est inacceptable car il vient nier des décennies de législation en matière de droit social, et ce sur deux points fondamentaux : la justification du motif de licenciement et la limitation de la durée de la période d’essai.

En outre, alors qu’il nous était promis des créations d’emplois avec ce nouveau contrat, force est de constater qu’il n’en est rien, et on voit déjà que c’est une tromperie.

Selon une étude, 35 % des contrats nouvelles embauches signés l’ont été par des salariés qui étaient déjà dans l’entreprise sous d’autres formes d’emploi. Or 71 % des entreprises qui ont signé des CNE avouent qu’elles auraient embauché de toute façon et 40 % en CDI. Là, vous leur offrez la possibilité d’attendre deux ans, les salariés étant dans la plus totale incertitude.

Une étude du ministère de l’emploi publiée à la mi-juin précise même que 90 % des CNE se sont substitués à des CDI et à des CDD, et que seulement 10 % des contrats signés constituent réellement des créations d’emplois.

L’INSEE révèle quant à elle que 30 % de ces contrats étaient rompus six mois après leur création.

En d’autres termes, le CNE – comme nous l’avions dénoncé à l’époque de sa création – est venu se substituer à des contrats de travail plus stables et s’est inscrit dans un contexte où la part des contrats précaires ne cesse de croître.

Enfin, selon une étude de la DARES publiée ce mois-ci, la moitié des CNE sont rompus au bout d’un mois !

M. Michel Piron. À l’initiative de qui ?

M. Frédéric Dutoit. Avec cette politique, nos concitoyens sont victimes d’une double peine : ils sont condamnés aux petits boulots, donc aux petits salaires. Nous voulons rompre avec cette spirale infernale dans laquelle vous entraînez le pays et le monde du travail. On ne peut pas se féliciter que l’emploi temporaire et précaire devienne la seule perspective d’embauche pour nos concitoyens. Nous refusons de nous résigner face à une telle situation. Nous n’en faisons pas notre projet de société.

Nous opposons une autre vision ; d’autres choix sont possibles que de casser les acquis sociaux et de dilapider l’argent public à coup d’aides versées sans autre effet que de permettre aux actionnaires d’alourdir un peu plus leur portefeuille. Trois mesures doivent être engagées pour relever le défi de l’emploi et des salaires : augmenter sans délai toutes les grilles salariales, et notamment porter tout de suite le SMIC à 1 500 euros ; engager dans chaque entreprise des négociations en faveur du remplacement des départs à la retraite contre embauche – j’ai eu l’honneur de présenter cette proposition de loi ; enfin légiférer, après négociation avec les partenaires sociaux, pour mettre en œuvre un véritable plan de sécurité d’emploi et de formation.

M. Dominique Tian. Sans succès !

M. Frédéric Dutoit. Cette sécurisation des parcours passe notamment par le droit d’occuper un emploi stable et correctement rémunéré, de bénéficier de formations tout au long de la vie ; elle passe aussi par la résorption de toutes les formes dégradées de l’emploi et dérogatoires au CDI ainsi que par l’instauration de droits nouveaux pour les salariés, leur permettant d’intervenir dans la marche de l’entreprise afin de défendre l’emploi et les salaires . Elle permet , enfin, de faire émerger des financements publics alternatifs à la loi de la rentabilité et du profit maximum.

La période à venir va nous permettre d’éclairer chacun de ces choix et de faire tomber les masques en distinguant ceux qui souhaitent alléger davantage encore les protections garanties par le code du travail et ceux, qui comme nous, se placent résolument du côté du progrès social, en faveur du monde du travail, dans la perspective d’une vie meilleure. Commencer par abroger le CNE participe de cette démarche de changement. Ce serait le prolongement logique de l’abandon du CPE.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Le CNE ne mérite pas tant d’indignation, ni d’ailleurs autant d’éloges. Mais il est une donnée de base dont il faut se souvenir : pour qu’il y ait des emplois, il faut qu’il y ait des employeurs, qui prennent le risque d’employer. Cette donnée de base est au cœur de la création du CNE.

Puisque M. Dutoit vient de citer différents rapports, notamment celui de la DARES, il faut aller jusqu’au bout. Certes, on relève un certain taux de rupture des CNE, mais je lis dans ces rapports que la moitié sont rompus à l’initiative des salariés. De plus, de l’avis de la plupart des statisticiens, le CNE n’a pas consisté seulement à remplacer des emplois par d’autres. Il a aussi contribué à la création d’emplois.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 279.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 278.

La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le soutenir.

M. Frédéric Dutoit. Permettez-moi de vous faire remarquer, monsieur Piron, qu’avec le CNE votre Gouvernement transforme le contrat à durée indéterminé en une situation précaire. C’était aussi le cas avec le CPE qui, heureusement, a été supprimé grâce au mouvement social. Je considère donc, pour prolonger notre débat d’hier, que les politiques peuvent servir à quelque chose : ils ont des choix à faire. Malheureusement les vôtres sont, une fois de plus, négatifs pour le monde du travail.

J’en viens à l’amendement n° 278. À l’heure des bilans, il en est un que le Gouvernement et sa majorité ne peuvent éviter : celui des inégalités de revenus. Tandis que 7,5 millions de nos concitoyens vivent sous le seuil de pauvreté avec moins de 750 euros par mois, le nombre des super-riches, dont le patrimoine dépasse les 20 millions d’euros, a augmenté de 24 % depuis 2000, pour atteindre les 2 000 foyers en 2005.

La moitié des salariés perçoivent moins de 1 460 euros nets par mois – 600 euros en moyenne pour un employé de la grande distribution – alors qu’un patron d’une société du CAC 40 touche l’équivalent de 200 000 euros par mois, les quarante PDG des groupes du CAC disposant d’un pactole de stock-options d’une valeur totale de 700 millions d’euros. On ne peut accepter de tels écarts de richesse, et naturellement toujours au détriment des mêmes.

En cette période, nous entendons tous, ici ou là, des propositions. Nous en avons une, utile au pays – surtout à Marseille – et utile à l’économie, qui consiste à relever immédiatement les salaires, et notamment le SMIC, qui serait porté immédiatement à 1 500 euros.

M. Dominique Tian. C’est original !

M. Frédéric Dutoit. Nous sommes les seuls à le proposer !

Les écarts de richesse sont également liés à une réforme fiscale injuste – qui accroît encore la pression sur le pouvoir d’achat des plus modestes – favorisant la finance et les contribuables les plus aisés : réduction de l’impôt sur les sociétés par la suppression de la surtaxe Juppé, pour 500 millions d’euros ; plafonnement de la taxe professionnelle, pour 1,5 milliard ; allégement du mécanisme d’imposition des plus-values à long terme sur la cession de titres de participation des entreprises, pour 1 milliard ; réduction de la progressivité de l’impôt sur le revenu et intégration de l’abattement de 20 %, soit 885 millions pour 100 000 foyers aisés ; bouclier fiscal, soit 250 millions d’euros pour 14 000 foyers fortunés ; abattement sur ISF pour les PDG et les hauts cadres actionnaires, à hauteur de 68 millions d’euros. Au total, les cadeaux au capital et aux nantis atteignent les 6 milliards d’euros dans le budget pour 2007.

Pendant ce temps, les gens peinent à joindre les deux bouts et à se loger faute de moyens – c’est le débat d’aujourd’hui. Ne croyez-vous pas que ces 6 milliards d’euros auraient été plus utiles à la relance de la croissance par la consommation, donc par l’augmentation du pouvoir d’achat ?

Cet amendement vise donc à envoyer un véritable signal au monde du travail, pour dire que nous avons entendu la nécessité d’augmenter significativement les salaires, ce que nous proposons.

M. Dominique Tian. Le signal, vous l’aurez au moment des présidentielles !

M. Frédéric Dutoit. Je vous rappelle, monsieur Tian, qu’à Marseille plus de la moitié de la population n’est pas imposable sur le revenu et n’a pas les moyens de vivre correctement.

M. Alain Néri. Ces ménages-là n’ont pas pu bénéficier des baisses d’impôt !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je n’entrerai pas dans la discussion ouverte par M. Dutoit. Cet amendement relevant de la pétition de principe, la commission a émis un avis défavorable.

M. Alain Néri. C’est dommage !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement est d’autant plus défavorable à cet amendement que depuis mars 2005, sous l’égide de Gérard Larcher, il s’est employé à relancer la négociation salariale de branche. Les résultats analysés par les partenaires sociaux à l’issue de la première période ont été probants. Toutes les branches ont ouvert des négociations. Sur 158 branches du secteur général, seules 21 n’avaient pas réussi à conclure un accord entre mars 2005 et avril 2006. Certaines branches ont réussi à renouer les négociations alors même qu’aucun accord n’avait été signé depuis de très nombreuses années.

Au regard de ce bilan, et à la demande unanime des membres de la commission nationale de la négociation collective, il a été décidé de reconduire ce suivi. Le directeur général du travail réunira le 21 février –aujourd’hui – les membres du comité de suivi, pour établir avec eux un bilan de la négociation salariale de branche depuis le 1er juillet 2006. Pour autant, il ne convient pas que les pouvoirs publics se substituent aux partenaires sociaux dans un domaine où la négociation annuelle est d’ores et déjà obligatoire en vertu des dispositions de l’article L.132-12 du code du travail.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement et rappelle qu’aucun salarié ne peut être rémunéré en dessous du SMIC par son employeur, quelle que soit sa qualification ou la durée du travail.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 278.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 6

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 280.

La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le soutenir.

M. Frédéric Dutoit. L’article 6 vise à réintroduire dans le présent projet de loi une mesure qui n’a pu entrer en vigueur dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, dont l’article 13 a été censuré, apparemment pour des raisons de forme, par le Conseil constitutionnel. En clair, c’est au détour d’un amendement déposé bien après l’examen du texte par le Conseil d’État, et en vue de tenir une promesse à l’intention d’un électorat précis, que cet article 13 avait été introduit dans le PLFSS.

Ces dispositions sont-elles plus recevables dans le cadre du présent projet de loi ? Nous ne le croyons pas, et ce pour des raisons de fond que le Conseil constitutionnel n’a pas eu à invoquer, ayant d’emblée relevé un vice de procédure.

Sur le fond, cet article méconnaît le principe d’égalité entre assurés sociaux en permettant aux travailleurs indépendants de moduler leur participation au financement de la sécurité sociale proportionnellement à la réalité de leurs revenus. Pour le coup, l’État crée les conditions de la couverture éventuelle de cette exonération, car certains déclareront un peu plus au titre de leurs revenus d’activité non salariée, avec tout ce que cela implique pour les recettes fiscales de l’État.

À l’évidence, ces entrepreneurs vont payer moins pour leur protection sociale : en fait, on adapte le principe de mutualisation, principe général fondateur de la sécurité sociale, à la situation particulière des bénéficiaires de la couverture.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis défavorable. Monsieur Dutoit, vous justifiez la suppression de cet article par l’avis négatif du juge constitutionnel. Je vous rappelle que la censure du Conseil constitutionnel était uniquement fondée sur une raison de procédure. Sur le fond, le prélèvement social proportionnel simplifie les obligations déclaratives pour les travailleurs indépendants, mais leurs déclarations seront contrôlables. Il contribuera donc à la résorption du travail au noir, sans imposer des contraintes administratives lourdes, et je ne comprends pas que vous ne soyez pas favorable à cela. Ce dispositif est équitable, car il tient compte des moyens non redevables. Enfin, il favorisera le développement des activités non salariées, et par là même l’emploi et le pouvoir d’achat, en évitant les prélèvements excessifs et les effets de ressaut au moment des régularisations que l’on constate avec le système des cotisations forfaitaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement partage l’analyse de votre rapporteure. La cotisation sociale proportionnelle permettra d’atteindre plusieurs objectifs : un objectif de justice sociale, puisqu’elle instaure le principe du paiement des cotisations à hauteur des moyens du travailleur ; un objectif d’égalité entre le salariat et le travail indépendant, puisque les salariés n’ont pas à s’acquitter des cotisations minimales ; un objectif de soutien du pouvoir d’achat des travailleurs les plus modestes, lesquels seront ainsi exonérés d’une partie des prélèvements obligatoires qui pèsent sur leur activité ; enfin un objectif d’emploi puisque la cotisation sociale proportionnelle permet de ne plus condamner certains travailleurs à l’inactivité ou au travail illégal en simplifiant les procédures et en rendant le travail plus rémunérateur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 280.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 22.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de cohérence. Je souhaite que le Gouvernement lève le gage.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement est favorable à cet amendement et lève le gage.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 22, compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 353.

Mme Christine Boutin., rapporteure. C’est un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 353.

(L’amendement est adopté.)

Mme le président. Je suis saisie d’un amendement n° 23.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Celui-ci est rédactionnel.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Et le Gouvernement y est également favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 23.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 354 de la commission est un amendement de précision, auquel le Gouvernement est favorable.

Je le mets aux voix.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Même vote sur l’amendement n° 355.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 6

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 109 et 190.

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour défendre l’amendement n° 109.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je m’étendrai quelque peu sur cet amendement que présente également Dominique Tian. Il a en effet une longue histoire, à laquelle nous devons, avec votre soutien, madame la ministre, mettre un terme définitif.

La disposition proposée, qui vise à clarifier les règles de décompte des effectifs dans les entreprises a déjà été adoptée deux fois par le Parlement : dans la loi pour l’égalité des chances, qui vous est chère, madame la rapporteure et madame la ministre, et dans la loi pour le développement de la participation.

Vous me répondrez, avec raison, que le Conseil constitutionnel a censuré par deux fois la mesure : la première fois pour vice de forme, considérant qu’il s’agissait d’un « cavalier législatif » – elle ne le serait pas dans le cas qui nous occupe, puisqu’il s’agit bien de cohésion sociale – ;…

Mme Martine Billard. Bien sûr que si !

M. Pierre-Christophe Baguet. … la seconde fois pour une question de fond, qui est réglée par la nouvelle rédaction, conforme au souhait exprimé par l’assemblée de la rue de Montpensier.

Il faut absolument régler ce problème, qui date de 2004, avant la fin de la législature. D’une part, l’impératif de sécurité juridique commande de clarifier définitivement cette situation génératrice de nombreux contentieux. D’autre part, et surtout, nombre d’entreprises persuadées, au nom du simple bon sens et parce que cela avait été promis à plusieurs reprises, que le problème serait réglé en 2006, ont repoussé au premier trimestre 2007 la tenue d’élections professionnelles.

Il n’y a pas d’obstacle politique : je vois mal comment la majorité, à laquelle j’appartiens, pourrait ne pas voter aujourd’hui ce qu’elle a, par deux fois, voté hier. Ne nous déjugeons pas !

Il n’y a plus, me semble-t-il, d’obstacle constitutionnel puisque la nouvelle rédaction ne remet pas en cause le préambule de 1946 et le droit des salariés de participer par l’intermédiaire de leurs délégués à la « détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

Les entreprises mettent beaucoup d’espoir dans cet amendement : ne les décevons pas, madame la ministre

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian pour défendre l’amendement n° 190.

M. Dominique Tian. Mon amendement est identique et vient d’être parfaitement défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cette proposition a été acceptée par la commission. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Elle correspond en effet à une mesure que nous avions adoptée dans le projet de loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié.

À titre personnel, et à l’issue d’une nuit de réflexion, je me pose quelques questions. (« Ah ! Quand même ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Vous n’avez pas honte d’empêcher Mme Boutin de dormir ! (Sourires.)

Mme la présidente. Ce n’est quand même pas la Nuit des longs couteaux ! (Rires.)

Mme Christine Boutin, rapporteure. La jurisprudence fluctuante de la Cour de cassation justifie sans doute que l’on cherche à clarifier les règles de décompte des effectifs. Cela dit, comme l’a rappelé le juge constitutionnel dans sa décision sur la loi relative à la participation, les salariés bénéficient, aux termes du préambule de la Constitution de 1946, d’un droit constitutionnel à participer à la détermination des conditions de travail et à la gestion des entreprises par l’intermédiaire de leurs délégués. Le Conseil constitutionnel a estimé que ce droit appartenait non seulement aux salariés directs d’une entreprise, mais aussi à tous ceux qui sont « intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de travail ». Sommes-nous certains que cet amendement, qui reprend une partie de l’article censuré par le Conseil pour le motif indiqué, n’écarte pas des personnels qui pourraient être considérés comme intégrés étroitement à la communauté de travail ? (« Voilà ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Par ailleurs, l’idée de réserver un traitement distinct aux élections aux comités d’hygiène et de sécurité, auxquels la nouvelle règle ne s’appliquerait pas, par rapport aux autres élections professionnelles, est discutable. Elle rend compte assurément d’un souci de garantir l’hygiène et la sécurité des salariés. Mais ce traitement différencié recrée une complexité, qui peut conduire à se demander si la mesure proposée clarifie et simplifie vraiment le droit positif.

Je confirme donc, madame la présidente, que cet amendement a été accepté par la commission. Mais, pour toutes les raisons que je viens d’indiquer, et à l’issue de cette nuit de réflexion, j’émets personnellement un avis réservé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Mesdames et messieurs les députés, Gérard Larcher mène actuellement des consultations relatives au dialogue social, dont la représentation des salariés est évidemment une composante essentielle.

Je vous le dis très clairement : le Gouvernement n’entend pas revenir, à l’occasion de ce texte, sur les dispositions relatives à la représentation du personnel dans les entreprises. Nous pensons en effet que cette question doit être abordée dans le cadre plus adapté des négociations menées actuellement par le ministre de l’emploi.

En un mot, monsieur Baguet, sans nier la réalité du problème que vous avez légitimement soulevé, le Gouvernement préfère laisser la place aux consultations.

M. Dominique Tian. Ça fait des années qu’on consulte !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C’est pourquoi, tout en reconnaissant sur le fond l’intérêt de cet amendement, il s’y oppose et vous demande de ne pas le voter.

M. Pierre-Christophe Baguet. Il l’a pourtant fait voter par deux fois !

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je vous reconnais au moins une qualité, mes chers collègues : l’obstination ! Obstinés, vous l’êtes au point, pour certains d’entre vous, de vous organiser pour être en séance au bon moment ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est un simple constat.

M. Dominique Tian. Il est vrai qu’à trois, vous devez vous sentir plus à l’aise !

M. Yves Censi. Appelez Ségolène, vous serez plus nombreux !

Mme Martine Billard. Cette disposition reste un cavalier législatif, puisqu’elle a aussi peu à voir avec le texte que nous sommes en train de discuter – qui ne porte pas sur le code du travail – qu’avec la loi sur l’égalité des chances ou celle sur la participation.

Pour une fois, je soutiendrai la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Tout arrive !

Mme Martine Billard. On a voté dans cet hémicycle une loi sur le dialogue social qui consacrait solennellement l’engagement que toute modification du droit du travail devrait être précédée de négociations avec les partenaires sociaux. Nous avions souligné, à l’occasion de l’examen de ce projet, que la Constitution ne nous permettait pas de nous opposer au dépôt d’amendements et que la question n’était donc pas réglée. De fait, votre amendement montre que vous essaierez, jusqu’au dernier jour de la législature, de faire voter cette disposition.

M. Yves Censi. On a encore la liberté de penser !

M. Denis Jacquat. Et de faire notre boulot !

Mme Martine Billard. Bien sûr.

M. Patrick Braouezec. Du moment que vous nous faites grâce de vos pensées !

Mme la présidente. Poursuivez, madame Billard.

Mme Martine Billard. Vous essayez, comme nous le faisons tous, de trouver les meilleurs arguments pour défendre vos amendements. C’est légitime et je ne fais que reconnaître votre habileté, même si je désapprouve vos propositions.

L’article L.620-10 du code du travail dispose que les salariés titulaires d’un contrat à durée déterminée ou d’un contrat de travail intermittent, les travailleurs mis à la disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure, y compris les travailleurs temporaires, sont pris en compte dans l’effectif de l’entreprise au prorata de leur temps de présence au cours des douze mois précédents. Cette dernière précision est déjà très importante. Mais l’article précise aussi que ces personnels sont exclus du décompte des effectifs lorsqu’ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu.

Cela signifie que les travailleurs détachés dans une entreprise de manière permanente font partie des effectifs. Prenons l’exemple très concret des grands magasins, sujet que je connais un peu puisque la Samaritaine se trouve sur le territoire de ma circonscription. La Samaritaine comptait, avant sa fermeture, 1 500 salariés, dont 750 employés directement et 750 détachés par les marques. Si votre amendement était voté, ces derniers ne seraient plus pris en compte dans les effectifs de l’entreprise : ce serait comme s’ils n’existaient plus. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pierre-Christophe Baguet. Aujourd’hui ils sont comptés deux fois !

Mme la présidente. Je vous prie de laisser Mme Billard s’exprimer !

Mme Martine Billard. Cela poserait problème notamment en cas de plan social suivant la fermeture d’une entreprise, puisque celui-ci doit également bénéficier, selon la jurisprudence, aux salariés détachés. Cela prouve qu’on ne doit pas distinguer entre les salariés employés directement par l’entreprise, la Samaritaine en l’espèce, et ceux qui y sont détachés par les marques.

Je n’ignore pas que les dirigeants des grands magasins aimeraient bien échapper à cette contrainte. Car adopter votre amendement reviendrait à dépouiller de certains droits sociaux les salariés de ces entreprises, qui sont parfois majoritairement des salariés détachés. Les effectifs passeraient alors en dessous des seuils de déclenchement de certains droits : c’est bien ce que vous voulez, pour complaire au patronat de ces entreprises, et c’est bien pourquoi il faut refuser cet amendement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Ces deux amendements identiques cherchent visiblement à faire le solde de tout compte de cette fin de législature – et je doute, madame la ministre, de la réalité de votre opposition, puisque vous dites approuver l’amendement quant au fond.

Vous profitez en effet de ce texte, messieurs de la majorité, notamment de sa partie relative à la cohésion sociale, qui va finir par mériter bien peu son nom, pour enfoncer encore un peu plus le clou de la déréglementation du code du travail. Encore une fois, la majorité s’apprête à adopter, avec l’aide d’alliés fidèles, deux amendements visant à modifier le mode de calcul des effectifs des entreprises, qui conditionne la mise en place d’institutions représentatives du personnel.

À quoi bon avoir débattu longuement du dialogue social et défendu les vertus de la négociation dans l’entreprise, si c’est pour porter un tel coup aux institutions représentatives du personnel, qui servent le dialogue social et la démocratie d’entreprise ?

Cette démarche fait suite à une première tentative faite à l’occasion du débat sur le projet de loi de développement de la participation et de l’actionnariat salarié, mesure censurée par le Conseil constitutionnel, comme elle l’avait été lorsqu’elle avait été introduite dans le projet de loi pour l’égalité des chances : la censure est double, mais visiblement vous y tenez !

Notre opposition totale à ces deux amendements se justifie enfin par l’absence de consultation des partenaires sociaux. En effet, comme vous l’avez rappelé, madame la ministre, le Gouvernement s’était engagé à consulter les partenaires sociaux pour légiférer au mieux. À ce jour, il ne semble pas l’avoir fait.

Depuis l’ordonnance 2004-602 du 24 juin 2004, l’article L.620-10 du code du travail fixe toutes les modalités de calcul des effectifs à prendre en compte pour l’application des dispositions sociales ou fiscales dont le déclenchement dépend d’un seuil. Ce calcul conditionne, entre autres, la représentation des personnels – définition des institutions représentatives, fixation du nombre d’élus et des prérogatives –, l’application des dispositions en matière de santé et de sécurité, et la mise en œuvre de diverses autres dispositions, comme l’emploi des personnes handicapées ou le droit à congé pour création d’entreprise.

L’application d’une telle mesure aboutirait à une réduction drastique de la représentation des salariés, notamment dans les grands sites industriels, où l’éclatement des statuts et la précarité posent les plus graves problèmes.

Elle constitue en outre une violation flagrante du droit constitutionnel des salariés de participer à la détermination collective des conditions de travail. En effet, le deuxième alinéa de l’article L. 422-1 du code du travail dispose : « Les salariés d’entreprises extérieures qui, dans l’exercice de leur activité, ne se trouvent pas placés sous la subordination directe de l’entreprise utilisatrice, peuvent faire présenter leurs réclamations individuelles et collectives concernant celles des conditions d’exécution du travail qui relèvent du chef d’établissement par les délégués du personnel de cet établissement dans les conditions fixées au présent titre. »

Cette disposition concerne en particulier les salariés travaillant dans une entreprise dans le cadre d’un contrat de sous-traitance ou de prestation de service. En les excluant du calcul des effectifs de l’entreprise donneur d’ordre, on diminuerait le nombre et les moyens des délégués du personnel, représentants au comité d’entreprise et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, CHSCT, de celle-ci, c’est-à-dire de ceux-là mêmes qui sont habilités à présenter leurs réclamations sur des sujets essentiels à leur vie professionnelle, à leur santé et à leur sécurité.

Ce serait également un recul considérable par rapport à la jurisprudence. En effet, de nombreux arrêts confirment depuis six ans l’intégration des salariés des entreprises extérieures dans les effectifs au titre de l’article L. 620-10. En d’autres termes, ces amendements visent à faire pression sur les juges pour qu’ils infléchissent leur jurisprudence. Je veux bien croire que le Gouvernement n’y est pour rien, puisque vous le dites, madame la ministre. Outre ses conséquences déjà évoquées pour la santé, la sécurité et la représentation des salariés, la mesure proposée va à l’encontre de l’adaptation nécessaire du droit social comme des pratiques d’embauche à l’évolution des entreprises. C’est pourquoi j’espère que la majorité ne votera pas ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Même si cette question n’est pas le thème central du projet de loi dont nous débattons – il porte, je le rappelle, sur le droit opposable au logement –, chacun a bien compris qu’il s’agit d’un vrai sujet. Il est tout aussi clair que des nuances assez fortes s’expriment au sein de notre groupe, et même en chacun et chacune d’entre nous, si j’en juge par les conseils que peuvent porter les nuits ! (Sourires.)

M. Jean-Louis Dumont. Très bons conseils !

M. Michel Piron. Je m’en tiendrai à trois observations.

Tout d’abord, j’y insiste, ce dont il est question depuis la semaine dernière est bien le droit au logement opposable, et non pas forcément une révision du droit du travail.

En deuxième lieu, le moins qu’on puisse dire est que l’amendement qui nous est proposé laisse planer un risque constitutionnel incontestable.

M. Jean-Louis Dumont. Ah !

M. Michel Piron. Il ne s’agit pas d’une certitude, mais du moins me semble-t-il pouvoir dire, sur le fond de ce que nous avons lu et entendu, qu’il demeure une grande part d’incertitude constitutionnelle.

M. Patrick Braouezec. C’est vrai de toute cette loi !

M. Michel Piron. Ma troisième et dernière observation, qui me paraît la plus importante parce qu’elle nous concerne tous, porte sur le fond. Cet amendement nos ramène en effet à la question du dialogue social.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Absolument !

M. Michel Piron. On sait que l’un de nos ministres, M. Larcher, mène actuellement une discussion à ce sujet avec l’ensemble des représentants syndicaux, notamment sur la question de la représentation syndicale. Le premier impératif, le premier préalable à toute mesure législative n’est-il pas, mes chers collègues, de laisser se dérouler le dialogue social en cours ?

Bref, il me semble que nous avons de nombreuses raisons de ne pas adopter cet amendement en l’état, ici et maintenant.

M. Alain Néri. Bravo !

M. Michel Piron. Il faut, je le répète, que le dialogue en cours puisse être mené à son terme.

M. Patrick Braouezec. Je n’irai pas jusqu’à vous applaudir, mais le cœur y est !

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement est très important et mérite que nous y prêtions attention. Sans reprendre la démonstration de M. Piron, qui vient d’indiquer les trois éléments qui plaident pour son rejet, je me contenterai d’insister, en particulier à l’attention de mes collègues de la majorité, sur le fait qu’il mettrait à mal le dialogue social en cours et aurait sur l’évolution de notre droit du travail des conséquences qui vont bien au-delà de l’intention louable de ses auteurs.

M. Patrick Braouezec. Pire : il serait révélateur de bien autre chose !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Le moment n’est donc pas bien choisi pour adopter cet amendement, et j’émets de très fortes réserves à cet égard.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je rappelle que la commission a émis un avis favorable.

M. Patrick Braouezec. La commission peut se tromper !

M. Dominique Tian. Si donc la nuit vous a porté conseil, madame la rapporteure, il n’en demeure pas moins que, le jour où nous avons examiné cet amendement, les membres de la commission ont rendu un avis favorable.

M. Patrick Braouezec. Vous avez noyauté la commission ?

M. Dominique Tian. En second lieu, je rappelle également que le texte que nous examinons a été voté deux fois par l’Assemblée et par le Sénat et qu’il a été publié. Il n’y avait donc – je le souligne pour M. Piron – aucun doute possible, au moins du côté de l’UMP.

M. Alain Néri. Oui, du côté de l’UMP !

M. Dominique Tian. Le Conseil constitutionnel a certes rendu un avis défavorable…

M. Alain Néri. Ce n’est quand même pas rien !

M. Dominique Tian. …mais, comme l’a expliqué M. Baguet, la nouvelle version en tient compte.

Mme Martine Billard et M. Patrick Braouezec. Non !

M. Dominique Tian. Et après tout, la censure du Conseil constitutionnel est une épée de Damoclès suspendue au-dessus de tout texte législatif.

Mme Martine Billard. Il y a des gens qui persévèrent dans l’erreur !

M. Dominique Tian. Sur le fond, il est extrêmement grave que les tribunaux puissent rendre des décisions inverses. Les entreprises ont besoin de sécurité juridique.

Mme Martine Billard et M. Alain Néri. Les salariés aussi !

M. Dominique Tian. C’est ce que nous tentons aujourd’hui de leur apporter.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Alors que les mauvais coups se font généralement de nuit, nous pouvons au moins nous féliciter que cet amendement soit examiné au grand jour !

Je rappelle que le projet de loi portant diverses dispositions d’ordre économique et social avait déjà porté un mauvais coup au corps électoral qui sera appelé à voter en 2008 pour les élections prud’homales. On s’est longuement interrogé pour savoir comment revenir sur les résultats des dernières élections. On vient de s’aviser que si le président de l’association en charge du statut d’employeur n’est pas fonctionnaire ou retraité, il n’aura pas le droit de vote. Lundi, à Versailles, lors de la réunion du Congrès, certains de nos collègues de la majorité présentaient des analyses sur le corps électoral de la Nouvelle-Calédonie. Dans le même temps, ils organisent les futures élections aux conseils prud’homaux en éliminant le plus possible de dirigeants. Les cellules de réflexion du MEDEF ont sans doute beaucoup travaillé pour vous convaincre, mais c’est là un mauvais coup porté au dialogue social.

Dialogue social, disiez-vous ? Certes, un ministre peut parler durant des heures, des jours ou des semaines, voire des mois. Pendant ce temps, sa majorité prépare ses mauvais coups.

Alors que le texte qui nous occupe devait nous rassembler tous sur le droit au logement opposable, le traitement de l’hébergement d’urgence, l’accompagnement social et la réinsertion, les ajouts qui lui sont faits aujourd’hui nous auront surtout conduits à dénoncer ses dérives.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Bien que n’étant pas un parlementaire très ancien,…

M. Patrick Braouezec. Et ça ne va pas durer très longtemps !

M. Pierre-Christophe Baguet. …je voudrais rappeler à mes collègues socialistes et communistes qu’à la fin de la session de 2002, un texte portant « diverses mesures d’ordre social », un DMOS, contenait le plan d’aide au retour à l’emploi, un article sur la télévision et un article sur la réglementation des colonies de vacances. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Ce texte, dont vous vous souvenez sans doute, était un extraordinaire fourre-tout.

M. Jean-Louis Dumont. Il s’agissait en effet de « diverses mesures » !

M. Patrick Braouezec. Ici, il ne s’agit pas d’un texte fourre-tout, mais d’un projet de loi dont l’intitulé est précis !

M. Pierre-Christophe Baguet. On n’avait jamais vu ça. Mme Buffet elle-même était venue à la tribune pour défendre les colonies de vacances alors qu’on examinait le plan d’aide à l’emploi. Ne nous donnez donc pas de leçons à propos de nos amendements, et cela d’autant moins que le projet que nous examinons est intitulé « Droit au logement opposable et diverses mesures en faveur de la cohésion sociale ».

M. Jean-Louis Dumont. Vous cassez la cohésion sociale !

M. Pierre-Christophe Baguet. Sur le fond, le problème qui se pose n’est pas celui de la prise en compte des salariés dans les entreprises, mais celui du double décompte. Les salariés peuvent en effet voter deux fois.

M. Jean-Louis Dumont. Il y a des chambres de commerce qui peuvent voter trois fois !

M. Pierre-Christophe Baguet. En outre, contrairement à ce que dit Mme Billard, notre amendement ne concerne nullement les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Il permet simplement, sur la base des recommandations du Conseil constitutionnel, de clarifier la situation concernant le nombre de délégués du personnel ou de membres du comité d’entreprise. En effet, l’article L. 620-10 prévoit, pour sa détermination, la prise en compte des salariés mis à disposition de l’entreprise par une entreprise extérieure. Longtemps, la jurisprudence et l’administration ont considéré que cette disposition concernait l’intérim et les prêts de main-d’œuvre à but non lucratif. À l’inverse, les salariés des entreprises sous-traitantes et des entreprises prestataires de services, lorsqu’ils travaillaient dans les locaux d’une entreprise d’accueil, ne devaient pas être décomptés dans ses effectifs.

Or, en 2004 – et c’est la raison pour laquelle nous avons voté deux fois depuis cette date –, un revirement de jurisprudence a remis en cause cette interprétation, d’où le flou juridique évoqué par M. Tian. La nouvelle situation, qui revient à décompter notamment dans l’effectif de la société d’accueil les salariés des entreprises de nettoyage, de maintenance des machines, de restauration et de gardiennage, a deux conséquences majeures. Tout d’abord, le double décompte entraîne des franchissements de seuils – fixés à 20, 50, 199 et 300 salariés – totalement indépendants des effectifs de l’entreprise utilisatrice, laquelle, par hypothèse, s’est recentrée sur son cœur de métier en confiant certaines tâches à des entreprises prestataires. En second lieu, le double décompte déterminant le nombre d’élus du personnel – délégués du personnel et membres du comité d’entreprise –, et donc le nombre d’heures de délégation accordées dans chacune des entreprises concernées, on en arrive à des cas aberrants.

Ainsi, lors des dernières élections dans une grande entreprise, la prise en compte des salariés des entreprises sous-traitantes et des entreprises prestataires de services a fait passer, sur l’un des sites de l’entreprise, le nombre de délégués du personnel de 26 titulaires et 26 suppléants à 51 titulaires et 51 suppléants, pour lesquels il a fallu trouver une salle de réunion ad hoc. Dans une autre entreprise, le nombre de délégués du personnel est passé de 20 titulaires et 20 suppléants à 27 titulaires et 27 suppléants.

Dans ces deux cas, les salariés des entreprises sous-traitantes ou prestataires de services ont été décomptés deux fois : une fois dans les effectifs de l’entreprise d’accueil et une autre fois dans les effectifs des entreprises dont ils sont salariés.

Compte tenu de la multiplication des risques de contentieux, il est essentiel que cette question soit réglée rapidement par voie législative, en conformité avec les précisions apportées par la récente décision du Conseil constitutionnel.

Je terminerai sur une note d’humour, en réponse à l’intervention très « soft » de Mme Billard : les Verts sont pour le mandat unique ; ne devraient-ils pas être pour l’entreprise unique ?

Mme Martine Billard. Ce n’est pas très clair !

M. Patrick Braouezec. Je n’ai pas bien compris le trait d’esprit !

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Si je souscris à bien des propos qui ont été tenus jusqu’à présent, je ne partage pas du tout l’avis de Mme la rapporteure lorsqu’elle dit que cet amendement procède d’une intention louable. Il s’agit, bien au contraire, d’un amendement provocateur, qui n’a rien à voir avec l’objet du texte que nous examinons – le droit au logement opposable, aspect essentiel de la cohésion sociale.

M. Jean-Louis Dumont. Ils veulent casser la cohésion sociale !

M. Alain Néri. À un examen, on inscrirait : « hors sujet » dans la marge de votre copie ! Le Conseil constitutionnel, ne s’y trompant pas, ne manquera d’ailleurs pas de déclarer, comme pour le précédent amendement, que vous êtes hors sujet, et vous serez battu.

Dans le même ordre d’idées, vous nous dites que le moment n’est pas bien choisi. Je me demande au contraire, madame la rapporteure, si nos collègues Tian et Baguet n’ont pas judicieusement choisi leur moment en essayant de faire passer à la hussarde un amendement de régression sociale dans un texte qui veut au contraire venir en aide à ceux qui sont le plus en difficulté, un texte éminemment social.

Je rappelle enfin que la majorité a voté une loi disposant qu’il ne faut pas modifier le code du travail en période de négociation avec les partenaires sociaux ; or de telles négociations sont précisément en cours.

Pour toutes ces raisons, simples, claires et logiques, madame la ministre, nous allons vous aider en votant contre cet amendement antisocial. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Je le répète, nous discutons d’un projet qui porte exclusivement sur le droit au logement opposable. Justifier la présentation de ces amendements en arguant que des textes fourre-tout ont été adoptés à la fin de la législature précédente me paraît indéfendable. Ce n’est pas parce que des erreurs ont été commises sur les bancs socialistes que nous devons nous sentir obligés de les reproduire !

M. Jean-Louis Dumont. Quelle rigueur ! (Sourires.)

M. Michel Piron. Je choisis pour ma part la vertu et souhaite que nous restions dans le sujet du droit au logement. En raison du risque d’inconstitutionnalité et parce que le dialogue social est nécessaire, ces amendements ne me semblent pas devoir être retenus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Louis Dumont. Bien parlé !

M. Patrick Braouezec. C’est la sagesse même !

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Je tiens à ce que les choses soient claires. Effectivement, monsieur Tian, la commission a adopté ces amendements…

M. Alain Néri. Par erreur !

Mme Christine Boutin, rapporteure. …mais j’ai réfléchi et, la nuit portant conseil, je vous ai fait part de mes réserves. Aujourd’hui, après vous avoir entendus les uns et les autres, je vous le dis clairement : je suis contre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Monsieur Tian, je vous rappelle que ces deux amendements ont été examinés, au titre de l’article 88, au sein d’une liasse de trois cents amendements dont il fallait débattre en peu de temps. Cela peut expliquer qu’ils aient été adoptés par la commission. Aujourd’hui, votre rapporteure qui, depuis, a étudié le sujet, émet à titre personnel un avis contraire à celui de la commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je souscris aux propos de Mme la rapporteure. Il est clair que le sujet évoqué n’a rien à voir avec le droit au logement opposable.

Par ailleurs, le double décompte est une question de fond, qui doit être discutée comme un élément du dialogue social puisqu’il s’agit de la représentation des salariés. Alors que le ministre délégué à l’emploi mène une consultation, le vote de ces amendements serait particulièrement malvenu. Le Gouvernement est contre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. Avant de passer au vote sur ces amendements, je vais donner la parole à Mme Billard et à M. Dutoit. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mes chers collègues, je connais le règlement : chaque groupe a le droit de répondre !

La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Je serai très brève. Ces amendements seraient de toute façon inapplicables car, selon le code du travail, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, délégués du personnel et membres du CHSCT peuvent être confondus.

M. Patrick Braouezec et M. Alain Néri. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Les auteurs de ces amendements nous conduisent à défendre la position du Gouvernement : voilà qui est assez cocasse, surtout en fin de législature, et devrait figurer dans les annales de l’Assemblée !

Mme la présidente. Cela démontre l’intelligence des députés ! (Sourires.)

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Exactement !

M. Frédéric Dutoit. Surtout celle du groupe communiste et de l’opposition, madame la présidente !

Plus sérieusement, Mme la rapporteure a rappelé dans la discussion générale que les députés communistes se sont toujours prononcés pour le droit au logement opposable. Si nous avons dit que ce projet de loi était une opportunité pour le Gouvernement, nous avons voulu engager la discussion dans un esprit constructif. Présenter de tels amendements à un texte qui, comme l’a souligné Mme la rapporteure, aurait pu faire l’objet d’un consensus, n’est pas innocent.

M. Alain Néri. C’est de la provocation !

M. Frédéric Dutoit. C’est de la provocation, en effet, pour nous obliger à manifester notre opposition à ce projet sur le droit au logement opposable. Faut-il y voir une manœuvre politicienne de certains de nos collègues ? (Protestations sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Louis Dumont. Retirez vos amendements !

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 109 et 190.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Bravo, messieurs !

M. Alain Néri. Quel succès !

Mme la présidente. La commission m’a fait savoir qu’elle souhaitait une suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à douze heures vingt.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 6 bis

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 155.

La parole est à M. Yves Censi, pour le soutenir.

M. Yves Censi. La discussion parlementaire sur l’article 71.12° de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit avait permis au Parlement de préciser les orientations qu’il souhaitait donner à l’organisation du nouveau régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants. Je ne reprendrai pas l’historique des débats de l’époque ; ce fut désolant au regard du respect du Parlement.

Aujourd’hui, il s’agit de maintenir la distinction entre le régime et les gestionnaires. Si l’on se contente des mots « peut confier », on ne maintient pas cette distinction. Si, au contraire, comme le propose cet amendement, on remplace les mots « peut confier » par le mot « délègue », il y a une véritable délégation de gestion. Il convient en effet que la délégation de plein droit aux organismes conventionnés assureurs et mutualistes de l’ensemble des activités de gestion des prestations maladie et maternité soit clairement indiquée.

Si notre amendement n’est pas adopté, nous resterons dans le flou, ce qui laissera libre cours à des interprétations toujours favorables à la bureaucratie, comme les deux dernières années l’ont prouvé.

J’ajoute que le ministre de la santé a, auprès de plusieurs parlementaires, et surtout dans un courrier aux gestionnaires, réaffirmé son souci de garantir l’effectivité de la délégation de gestion aux organismes conventionnés. Malgré les assurances qui nous ont ainsi été données, nous demandons instamment le maintien de cette garantie. Tel est l’objet du présent amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. J’en suis désolée pour M. Censi, mais cet amendement a été repoussé par la commission.

La mise en place depuis 2005 du régime social des indépendants, le RSI, et de leur interlocuteur social unique est le fruit d’une maturation très complexe. C’est aussi un vrai progrès pour la protection sociale des indépendants. Afin de leur apporter un service de qualité avec un guichet unique, les organismes du régime général de sécurité sociale tels que les URSSAF sont sollicités par le RSI. Celui-ci pourra également continuer à s’appuyer sur des organismes mutualistes ou d’assurance pour certaines opérations. Cela aboutit à un équilibre institutionnel qui risquerait d’être profondément remis en cause par le présent amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je voudrais d’abord rappeler que les organismes conventionnés sont assurés de conserver à partir du 1er janvier 2008, date prévue pour la mise en place de l’interlocuteur social unique des travailleurs indépendants, la totalité du service des prestations qui leur était auparavant confié par le régime d’assurance maladie des travailleurs indépendants.

On sait que les organismes conventionnés vont conserver, comme l’ont souhaité les professions libérales, l’encaissement et le contentieux des cotisations maladies de ce groupe de professions. L’activité de recouvrement par les organismes conventionnés ne va pas simplifier les systèmes d’information du RSI et va maintenir des coûts informatiques pour ce régime dont il aurait pu faire l’économie. C’est le choix qui a été fait et qui est réaffirmé.

Sur le plan juridique, l’habilitation donnée au gouvernement par l’article 71.12° de la loi de simplification de décembre 2004 permet d’offrir à la Caisse nationale du RSI la possibilité de confier ou non le service des prestations maladies aux organismes conventionnés actuels ou à des organismes de sécurité sociale. L’ordonnance qu’il vous est proposé de ratifier est donc strictement conforme à la loi d’habilitation.

Le 28 mars dernier, M. Bas et M. Bertrand ont écrit au président de la FNMF et de la FFSA, rappelant la faculté ouverte par l’ordonnance d’un élargissement du conventionnement par le RSI à des organismes de sécurité sociale, qui vise uniquement à assurer la continuité du service public des prestations dans le cadre d’un désengagement des organismes conventionnés actuels, faculté inhérente à tout contrat ou toute incapacité à assurer la délégation de gestion. C’est pourquoi le Gouvernement demande à M. Censi de retirer son amendement.

Mme la présidente. Monsieur Censi, retirez-vous l’amendement ?

M. Yves Censi. Non, madame la présidente. Je précise que ce que nous avions voté dans la loi d’habilitation était bien la rédaction « délègue » et non « peut confier ». Quelle n’a pas été notre surprise de voir revenir dans l’ordonnance, au mépris de notre vote, les termes « peut confier » ! Plusieurs de mes collègues en ont été outrés, et ils vont vous l’expliquer.

Quant à l’amendement sénatorial qui vise à conforter cette ordonnance, il ne me paraît pas conforme à l’idée que je me fais personnellement du fonctionnement républicain et du rôle du Parlement.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Je ne crois pas que l’on puisse me soupçonner d’un manque de solidarité envers le Gouvernement…

M. Dominique Tian. Ça…

M. Michel Piron. …mais, sur ce sujet, j’ai une divergence avec lui. La loi d’habilitation ne laissait en aucun cas la possibilité de déléguer ou pas. Ce n’était pas « peut confier », c’était bien une délégation inscrite en bonne et due forme, l’indicatif valant impératif.

Si nous introduisions un doute en faisant de cette délégation une simple possibilité, les organismes éventuellement délégataires auraient à gérer un poids d’incertitude considérable en termes de personnels et de ressources humaines, car ils ne sauraient pas quel volume d’activité leur serait délégué ou non. Ce n’est ni l’esprit ni la lettre de la loi d’habilitation. Je ne peux donc que souscrire à l’amendement.

M. Louis Giscard d'Estaing. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Vous vous souvenez, mes chers collègues, que notre débat sur la loi d’habilitation avait été fort long, et que plusieurs d’entre nous s’étaient interrogés. On nous avait dit à l’époque que le recours à l’ordonnance était dicté par une seule considération : la nécessité d’avancer plus vite. Or j’ai l’impression que l’on a avancé en reculant puisqu’un nouvel amendement a été déposé au Sénat sur un sujet essentiel, alors que nous nous étions tous engagés à parvenir à une simplification.

Derrière tout cela se pose la question du recouvrement, du choix et de l’implication des professionnels. Il faut, comme le souhaite M. Censi, et nous l’avions souligné à l’époque, garantir le choix des professionnels, l’organiser et le prévoir dans la loi. Or une certaine ambiguïté a été introduite.

J’aimerais donc, madame la ministre, obtenir des précisions sur les réelles intentions du Gouvernement en matière de délégation. En effet, au-delà de la question de déléguer ou de ne pas déléguer, il y a celle de l’accompagnement des personnes en difficulté, des entreprises et des artisans. Dites-nous très clairement si la garantie de délégation est bien liée à l’obligation de délégation.

Nous l’avons dit depuis le début : autant nous sommes tous très engagés pour une simplification, qui était espérée et attendue, autant elle ne peut se faire sans l’implication et sans le choix des professionnels eux-mêmes. Je peux en témoigner pour avoir été présent aux côtés de M. Censi et d’autres dans ce débat : c’était bien la volonté de l’Assemblé nationale, telle qu’elle a été affirmée au moment du vote de la loi d’habilitation.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Vous le savez tous : il y a un recours devant le Conseil d’État. Les conclusions du commissaire du Gouvernement sont les suivantes : la délégation de service public ouvre bien une possibilité de déléguer, pas une obligation de déléguer. En d’autres termes, ce n’est rien d’autre que la position que soutient aujourd’hui le Gouvernement.

Ma réponse est donc claire. Premièrement, il s’agit bien par cet article, de ratifier l’ordonnance. Deuxièmement, il y a effectivement eu des recours, et l’on sait comment s’oriente la réponse à ces recours. Troisièmement, bien sûr que le Gouvernement va déléguer ! Il n’a jamais été question d’autre chose.

Cependant − et c’est en cela que nous divergeons −, le Gouvernement veut se ménager la possibilité de reprendre la délégation car, si une difficulté survient, il faudra bien continuer d’assurer le fonctionnement.

M. Michel Piron. On changera de délégataire !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement.

M. Alain Néri. Ça va mal, hein !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Malgré tout le respect et l’amitié que j’ai pour vous, madame la ministre, je dois reconnaître que nous avons là une différence de vision…

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. En effet !

M. Yves Censi. …et je voudrais vous éclairer. Dans le cas de figure que vous envisagez, on aboutit à une vision collectiviste (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste),…

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. C’est nouveau !

M. Yves Censi. …ce qui fait pousser des cris d’orfraie même à nos collègues écologistes et socialistes !

M. Michel Piron. Ils ne vont pas s’en remettre !

M. Yves Censi. Quant à nous, avec cet amendement, nous proposons une vision de responsabilité, c’est-à-dire le maintien de la distinction entre, d’un côté, le régime et, de l’autre, les gestionnaires. Pour affirmer et clarifier cette distinction, le mot « délègue » est le seul qui convienne car, en vérité, les mots « peut confier » impliquent une prise en main technocratique, voire bureaucratique, l’administration imposant forcément ses choix et sa volonté de donner au RSI une gestion qui aboutira forcément aux URSSAF. Je ne suis pas du tout opposé aux URSSAF, je suis contre tout monopole et ne vois pas pourquoi on autoriserait, dans la loi, la constitution d’un monopole. Avec le mot « délègue », on préserve la diversité nécessaire à ce type de régime.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Quelques précisions. Il ne s’agit pas ici des URSSAF, mais de l’assurance maladie. D’autre part, chacun se souvient que, lorsque la MNEF a connu des difficultés, il a bien fallu que nous reprenions les choses en main, pour assainir la gestion. Ce que nous voulons faire, c’est déléguer, mais garder la capacité de nommer quelqu’un d’autre en cas de défaillance.

M. Louis Giscard d’Estaing. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Il ne faut pas croire que les organismes conventionnés sont dirigés par des irresponsables.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je n’ai pas dit cela !

M. Yves Censi. On peut fort bien reprendre une délégation et l’attribuer à un autre organisme conventionné. Que se passerait-il si l’on tenait ce type de raisonnement pour le régime agricole, si l’on considérait que les mutualités sociales agricoles peuvent être dans l’incapacité de jouer leur rôle, certains ont même parlé de faillite ? C’est non seulement purement théorique, mais c’est grandement méconnaître la diversité des organismes conventionnés et la possibilité de se retourner vers d’autres organismes, fussent-ils privés.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 155.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 154.

La parole est à M. Yves Censi, pour le soutenir.

M. Yves Censi. La délégation de gestion aux organismes conventionnés concerne actuellement les organismes régis par le code de la mutualité ou bien ceux prévus par le code des assurances à des groupements de sociétés d’assurances.

Le texte introduit par l’ordonnance élargit ces catégories aux organismes de sécurité sociale, c’est-à-dire aux caisses primaires d’assurance maladie. Cette rédaction me semble contraire à la loi d’habilitation qui n’a pas prévu de délégation de gestion des prestations de maladie aux régimes des salariés.

De plus, justifier cet ajout par la volonté d’assurer la continuité du service public des prestations dans le cas d’un désengagement des organismes conventionnés, comme vous l’avez fait, madame la ministre, ne repose sur aucun fondement et ne correspond pas à la rédaction du Gouvernement qui crée une troisième catégorie d’organismes conventionnés à titre permanent.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable, pour les mêmes raisons qu’au précédent amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Idem.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Ayant entendu l’argument « pour les mêmes raisons », je ne peux que rappeler que les raisons sont en effet les mêmes. (Rires.)

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Cette intervention restera dans les annales !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 154.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 356.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 356.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6 bis, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 6 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6 ter

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement de suppression, n° 123.

La parole est à M. Alain Néri, pour le soutenir.

M. Alain Néri. Si vous le permettez, madame la présidente, je voudrais commencer par un rappel. L’article 6 ter du projet de loi, qui a été adopté au Sénat à l’initiative du Gouvernement, modifie l’habilitation du 23 mars 2006 et l’ordonnance du 13 avril 2006 relative à l’expérimentation du contrat de transition professionnelle qui a été ratifiée et modifiée par l’article 49 de la toute récente loi du 30 décembre 2006, pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social : un de ces textes que vous nous reprochiez tout à l’heure, mes chers collègues.

Cet article prolonge de deux à trois ans l’expérimentation du contrat de transition professionnelle destiné au salarié licencié économique et appliqué dans sept bassins d’emploi. Je ne suis pas le seul à m’étonner de cette mesure, puisque, dans son rapport, Mme Boutin écrit : « Sur la méthode, il est permis de s’étonner de ce second ajustement, en quelques mois, d’une ordonnance vieille de huit mois… » Il semble bien qu’on soit là encore dans la précipitation et que tout cela ne soit pas complètement justifié, pour ne pas dire que c’est parfaitement injustifié.

Il convient de rappeler que le contrat de transition professionnelle est destiné à faciliter les conditions de reclassement des salariés licenciés pour motif économique dans les entreprises de moins de 1 000 salariés.

Il est à noter que l’habilitation du Gouvernement a été introduite par le biais d’un amendement gouvernemental au Sénat, sans que l’Assemblée nationale ait pu s’exprimer à ce sujet, puisque la commission mixte paritaire est intervenue ensuite.

On ne peut occulter que, un peu plus d’un an auparavant, la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 avait institué la convention de reclassement personnalisé, également destinée aux salariés licenciés pour motif économique dans les entreprises de moins de 1 000 salariés. Ce dispositif de reclassement propose essentiellement des actions de formation professionnelle pour les salariés concernés, afin de faciliter leur reconversion.

A contrario, le contrat de transition professionnelle insère dans son dispositif de reclassement des périodes de travail chez un nouvel employeur dans le cadre de contrats à durée déterminée, correspondant à une sorte de période d’essai, dans le dessein de favoriser la mobilité professionnelle vers des emplois disponibles et ne nécessitant pas une formation professionnelle importante.

En conséquence, ce contrat de transition professionnelle ne peut fonctionner que pour des reconversions vers des postes de travail peu qualifiés. Est-ce vraiment l’objectif à rechercher ? Ne doit-on pas, au contraire, privilégier des reconversions professionnelles qualifiantes pour permettre aux salariés concernés d’envisager une reconversion durable, correspondant à une véritable sécurisation du parcours professionnel ?

Selon l’habilitation prévue par l’article 32 de la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l’emploi, le contrat de transition professionnelle, qui remplace la convention de reclassement personnalisé, est « prévu à titre expérimental pour une durée qui ne saurait excéder deux ans ».

Il est à noter que la DARES ne présente pas encore d’éléments statistiques concernant le CTP dans son tableau de bord des politiques de l’emploi mis à jour mensuellement et qu’il apparaît donc difficile de savoir si ce dispositif rencontre ou non le succès.

Le CTP existe depuis dix mois et il n’y a pas lieu de prolonger la période expérimentale de deux à trois ans avant que le rapport d’évaluation prévu par l’article 13 de l’ordonnance du 13 avril 2006 ne soit présenté au Parlement par le Gouvernement. Une telle mesure ne respecterait pas les droits du Parlement. C’est pourquoi le groupe socialiste propose la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 123.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 79.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, pour le soutenir.

M. Pierre Méhaignerie. Une fort intéressante expérimentation du contrat de transition professionnelle est menée dans sept bassins d’emploi. Elle constitue la première étape de ce que peut être la sécurisation des parcours professionnels. On constate que 70 % des licenciés pour raisons économiques adhèrent au contrat de transition professionnelle. Ce qui est important, pour eux, c’est le maintien de leur salaire pendant une durée de neuf à douze mois et leur rattachement à l’Association de la formation professionnelle des adultes. Mais l’esprit même du contrat de transition professionnelle est de favoriser un retour à l’emploi aussi rapide que possible. Or l’expérience montre qu’un salarié ne peut pas utiliser le contrat de travail temporaire, alors que c’est l’une des voies par excellence qui permettent de retrouver l’emploi, d’entrer dans une entreprise, de la tester et, souvent, au terme de quelques mois, d’y obtenir un CDI. Cette interdiction n’est pas du tout comprise par les salariés et par les entreprises.

M. Michel Piron. C’est vrai !

M. Pierre Méhaignerie. Après une étude et un contrôle de l’IGAS, tout le monde est aujourd’hui convaincu qu’un changement doit intervenir pour permettre aux bénéficiaires du contrat de transition professionnelle de passer par l’intérim. Placés devant ce dilemme, les salariés préfèrent parfois abandonner le contrat de transition professionnelle plutôt que de perdre la chance de gagner un emploi. La modification que nous proposons est donc tout à fait conforme à la philosophie du contrat de transition professionnelle, qui accorde la priorité au retour à l’emploi. Cette expérience paraît extrêmement utile, car elle nous permettra, dans un deuxième temps, d’élargir et d’aller vers une sécurisation des parcours professionnels, en échange d’une plus grande souplesse, dont l’entreprise a besoin si l’on veut surmonter la peur de l’embauche.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Je voudrais remercier M. Méhaignerie et les autres auteurs de cet amendement. L’ordonnance n’avait pas prévu cette possibilité, dont il est important, pour toutes les raisons qui viennent d’être exposées, qu’elle puisse compléter le dispositif. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6 ter, modifié par l’amendement n° 79.

(L’article 6 ter, ainsi modifié, est adopté.)

 Article 6 quater

Mme la présidente. Sur l’article 6 quater, je suis saisie d’un amendement n° 357 de la commission.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 357.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 120.

La parole est à Mme Paulette Guinchard, pour le soutenir.

Mme Paulette Guinchard. Cet amendement permet aux établissements sociaux et médico-sociaux d’exercer une action en justice directement contre les obligés alimentaires de leurs résidents. Cette mesure, votée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, a été censurée par le Conseil constitutionnel.

Ces établissements s’efforcent de serrer les coûts des services afin de rester accessibles financièrement au plus grand nombre. Il convient de leur donner la possibilité de faire respecter aux descendants qui en ont les moyens – j’insiste sur ce point – leurs obligations envers leurs ascendants.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 120.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6 quater, modifié par les amendements adoptés.

(L’article 6 quater, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 6 quater

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 125, portant article additionnel après l’article 6 quater.

La parole est à Mme Paulette Guinchard, pour le soutenir.

Mme Paulette Guinchard. Cet amendement fait suite à un travail effectué par la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale. Celle-ci s’est en effet penchée, dans le cadre de son rapport, d’ailleurs voté à l’unanimité par les membres de la commission des affaires culturelles, sur le financement des établissements d’hébergement des personnes âgées et sur la question du reste à charge pour l’ensemble des résidents. Il s’agit de faire en sorte qu’au niveau fiscal, le dispositif applicable en matière de taxe sur les salaires et de TVA soit égal pour tous au sein du secteur habilité à l’aide sociale – et de ce seul secteur.

Chacun sait combien le coût du reste à charge est immense – j’utilise intentionnellement ce mot – pour nombre de personnes âgées et leurs familles. La mise au point d’un dispositif harmonieux sur le plan fiscal, s’agissant en particulier de la TVA, permettrait justement de diminuer de façon très importante ce coût.

La proposition de la MECSS d’intervenir en ce domaine par le biais du PLFSS, a déjà permis une diminution de la TVA à 5,5 % pour certaines structures. Avec cet amendement, ce serait l’ensemble du secteur habilité à l’aide sociale qui pourrait bénéficier du taux de 5,5 %. Certes, il conviendrait également d’élargir le bénéfice de l’exonération de taxe sur les salaires, mais cette première mesure concernant la TVA serait déjà de nature à diminuer ou, en tout cas, à ne pas augmenter le coût du reste à charge des personnes âgées hébergées en maison de retraite.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Défavorable. Si nous pensons que l’intention est bonne, l’impact financier est sans doute important, et il conviendrait de le connaître avant d’envisager d’appliquer une telle mesure.

Peut-être le Gouvernement a-t-il des éléments à nous apporter sur ce point ? Je reste prudente, suite à notre échange de tout à l’heure avec Mme Guinchard et M. Censi !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Chacun le sait, le Gouvernement a travaillé sur différentes mesures afin de diminuer le coût d’hébergement en maison de retraite,...

Mme Paulette Guinchard. C’est vrai.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. ...sujet extrêmement important pour les intéressés. Il dispose notamment du rapport Gisserot, qui propose plusieurs pistes en la matière.

S’agissant de l’exonération de taxe sur les salaires, je serai très claire : elle aurait des conséquences négatives immédiates sur les ressources de la sécurité sociale, puisque le produit de cette taxe lui revient dans le cadre du panier de recettes fiscales qui lui est affecté et qui permet de compenser intégralement les allégements de charges. Je ne vois pas comment l’on pourrait, au détour d’un amendement, régler un problème aussi important. Je comprends que l’on veuille améliorer la situation des personnes âgées dépendantes, mais si, dans le même temps, on réduit les ressources de la sécurité sociale, la mesure ne pourrait avoir qu’un effet boomerang. Le Gouvernement ne peut donc être favorable à l’amendement sur ce point.

Pour ce qui est de la TVA à 5,5 %, il n’est pas exclu que le Gouvernement soit en mesure, dans le cadre du volet logement du projet de loi, d’envisager une telle proposition. Faute cependant de disposer d’éléments en la matière, je donne un avis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Censi.

M. Yves Censi. Nous sommes tous d’accord sur les objectifs du plan « Solidarité-grand âge » lancé en juin dernier, dont nous ne pouvons que louer l’efficacité. Les principes d’action de ce plan reposent sur des mesures permettant de répondre au défi de la longévité et d’assurer un véritable libre choix entre le maintien à domicile et l’entrée en établissement, sachant que des services intermédiaires existent entre les deux – je pense tout particulièrement aux MARPA, les maisons d’accueil rural pour personnes âgées, que chacun connaît bien.

Mme Paulette Guinchard. Absolument !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. En effet.

M. Yves Censi. Un principe essentiel est inscrit dans le plan, celui de la maîtrise du prix payé par les personnes âgées qui ont fait le choix de résider en institution. Dans une MARPA ou, plus généralement, dans les foyers-logements ou les petites unités de vie, il s’agit du prix du loyer et, dans les maisons de retraite, du prix d’hébergement.

Aujourd’hui, au détour d’une mesure adoptée dans la loi de finances pour 2007 et de l’instruction fiscale qui s’en est suivie, l’assujettissement à la TVA au taux de 5,5 %, au-delà des seuls établissements d’hébergement touristique auxquels la mesure fiscale était destinée, touche également – alors que l’on ne peut considérer les résidents des MARPA comme des touristes – les établissements d’hébergement de personnes âgées.

La remise en cause indirecte de l’exonération de TVA jusqu’alors admise pour ces établissements entraînera directement un coût supplémentaire pour les résidents de ces établissements, en contradiction de l’action pourtant nécessaire de maîtrise des prix. Si l’amendement de Mme  Guinchard ne peut être accepté dans sa totalité, qu’au moins un amendement du Gouvernement vienne réparer cette malencontreuse évolution, ce qui serait de nature à rassurer, dans leur volonté de maîtriser les coûts, les gestionnaires des établissements d’accueil de personnes âgées, mais aussi de personnes handicapées.

Je conclurai en schématisant : il serait dommageable que l’effort consenti par la nation en faveur de la revalorisation des petites retraites agricoles, dont les premiers effets se font sentir dès ce mois-ci, ne serve qu’à aider les personnes hébergées en établissement ou en MARPA à faire face à l’assujettissement de leur loyer à la TVA ! Je serais heureux d’être entendu sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à Mme Paulette Guinchard.

Mme Paulette Guinchard. J’ai bien entendu la réponse de Mme Vautrin, et je me félicite que la question de la TVA des établissements d’hébergement soit clairement posée.

Je souhaiterais cependant revenir sur le principe applicable en la matière. Le prix d’hébergement des personnes âgées comprend non seulement le gîte et le couvert, mais également les amortissements des investissements et donc des emprunts. Il faudra bien, à l’instar des autres pays européens – je pense à la Belgique en particulier – ouvrir le débat sur ce point afin de savoir quelle collectivité devrait intervenir pour prendre en charge les travaux entrepris par les maisons de retraite. Aujourd’hui, la situation équivaut à demander aux élèves d’un pensionnat de payer non seulement le gîte et le couvert, mais également le remboursement des emprunts et l’amortissement des investissements ! C’est exactement ce que l’on demande aux personnes âgées.

M. Loïc Bouvard. Eh oui !

Mme Paulette Guinchard. Ainsi que nous en sommes tous tombés d’accord tant au sein de la commission des affaires culturelles que de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, faire passer le taux de TVA de 19,6 à 5,5 % aurait un effet non négligeable en termes sinon de diminution des coûts, du moins de leur maîtrise.

Je maintiens donc mon amendement, mais j’assisterai à l’examen de la partie financière du texte afin d’entendre les propositions du Gouvernement en matière de TVA.

Pour les MARPA, ces petites unités de vie dont parlait M. Censi, il s’agit d’un véritable enjeu, avec toutes les conséquences que cela pourrait avoir pour les familles, car l’on sait combien celles-ci peuvent se déchirer à cause du coût de la prise en charge des personnes âgées.

M. Loïc Bouvard. C’est vrai.

Mme Paulette Guinchard. Au-delà de ces enjeux humains, c’est aussi un problème d’inégalité qui se pose. Pourquoi dans un cas – celui des personnes âgées – est-ce la famille qui doit payer l’hébergement, et pourquoi dans un autre – celui des enfants en pensionnat ou des malades en structure hospitalière – est-ce un tout autre dispositif qui s’applique ? Je le dis d’autant plus sereinement que je ne siégerai plus dans cet hémicycle lors de la prochaine législature : on se trouve là face à une réelle discrimination. Que faire le jour où on portera plainte contre la France devant la Cour européenne ?

Le monde politique, toutes tendances confondues, qui n’a jamais osé en discuter, doit s’emparer de la question de la prise en charge de la construction des maisons de retraite. On l’a fait pour les pensionnats ou encore pour le handicap dans le champ social, et on ne le ferait pas pour les personnes âgées ? Vraiment, y parvenir dans le cadre de cette loi serait formidable ! (« Très bien ! » sur divers bancs.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Ce sujet, madame Guinchard – et je salue votre enthousiasme –, constitue certainement l’un des principaux défis des années qui viennent.

Je partage par ailleurs l’opinion de M.  Censi : une MARPA n’a rien en effet d’un hôtel ni d’une résidence de tourisme. Mais elle constitue en termes d’aménagement du territoire un outil essentiel en permettant à nombre de nos concitoyens de continuer à vivre au plus près de chez eux. Il faut donc aller vers l’application d’une TVA à 5,5 % comme cela existe dans d’autres domaines : telle est la proposition qui vous sera faite cet après-midi par l’intermédiaire d’un amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Madame la ministre, si vous avez écouté avec beaucoup d’attention les interventions de M. Censi et Mme Guinchard, je souhaite pour ma part appeler votre attention sur le fait qu’aujourd’hui nous sommes confrontés à une situation qui va devenir de plus en plus difficile à gérer.

L’espérance de vie augmente considérablement, et les personnes âgées finissent malheureusement par arriver à des situations de dépendance telles qu’elles sont obligées, en dépit des efforts des familles et de notre politique de maintien à domicile, d’entrer en maison de retraite. En dépit de l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie, il vient en effet un moment où une telle obligation s’impose.

Moralement, il est de notre devoir de veiller à ce que ces personnes soient accueillies dans de bonnes conditions. Il faut donc soit construire des maisons de retraite de qualité, soit rénover les structures existantes, afin que nos anciens puissent vivre leurs derniers jours dans les meilleures conditions possibles. Or, même si les conseils généraux accomplissent des efforts importants, en particulier pour aider à la construction ou à la rénovation des maisons de retraite, les prix de journée restent relativement élevés, voire, dans de nombreux cas, insupportables eu égard au montant des retraites perçues par les personnes âgées hébergées et aux revenus de leurs obligés alimentaires que sont leurs enfants.

Nous ne pouvons donc, sur tous les bancs, que voter l’amendement proposé par Mme Guinchard. Il s’agit en effet d’une mesure de solidarité et d’humanité, et nous ferions en même temps une action de prévention.

Parce que nous vieillissons dans de meilleures conditions, parce que les services de maintien à domicile sont de qualité, les personnes âgées, en milieu rural comme en milieu urbain, entrent beaucoup plus tard en maison de retraite. On doit s’en féliciter, car cela signifie qu’elles peuvent rester le plus longtemps possible chez elles, au plus près de leurs racines, de leur famille et de leurs amis. Quel constat cependant chacun d’entre nous peut-il faire ?

En 1993, lorsque j’ai ouvert une maison de retraite dans ma commune, l’âge moyen des personnes âgées accueillies était de l’ordre de soixante-seize ans. Aujourd’hui, elles arrivent en maison de retraite à l’âge de quatre-vingt-cinq ou quatre-vingt-six ans, parfois plus. Cela signifie certes que, jusqu’à cet âge, elles ont pu rester chez elles, ce qui est merveilleux, mais il reste que le montant de leur retraite est souvent, pour ne pas dire toujours, insuffisant pour payer le coût de leur hébergement.

On se retourne alors vers leurs obligés alimentaires, leurs enfants. Le drame, c’est qu’ils arrivent eux-mêmes à l’âge de la retraite, ce qui signifie pour eux une perte de ressources importante.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Eh oui !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Nous sommes tout à fait d’accord.

M. Alain Néri. Et cette perte ne fera que s’accentuer dans les prochaines années si l’on s’en tient à la loi sur les retraites actuelle.

Nous allons ainsi nous retrouver dans la situation dramatique où les personnes âgées accueillies en maison de retraite ne pourront pas payer les prix de journée et où leurs enfants, eux-même retraités, ne pourront pas payer le différentiel qui restera à charge. Pour ces familles, c’est également un problème moral. Le fait de ne pas pouvoir assurer à ses parents des conditions de vie décentes durant leurs dernières années, malgré sa bonne volonté, est une situation très difficile à vivre sur le plan psychologique. Il faut donc faire le maximum. C’est le sens de la proposition de Paulette Guinchard visant à assurer la maîtrise du prix de journée.

J’ajoute que quand les parents ne pourront pas payer, quand les enfants ne pourront pas payer pour leurs parents, on se tournera vers l’aide sociale. Ce sera une charge supplémentaire pour les conseils généraux, et qui va financer cette aide supplémentaire qui leur sera réclamée ? C’est encore le contribuable départemental et souvent, à travers la taxe d’habitation, ceux qui n’ont déjà pas beaucoup de moyens.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, je crois que l’Assemblée pourrait, dans un élan de solidarité et d’humanité, voter l’amendement proposé par Mme Guinchard. Une telle mesure permettrait à nos anciens de partir en maison de retraite en toute sérénité, sachant qu’ils ne mettront pas leurs enfants en difficulté.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Nous sommes tous d’accord, je crois, sur le constat et sur l’enjeu que représente l’équipement du pays en maisons de retraite. Pour bien connaître le sujet, comme d’autres ici, je sais combien est importante la qualité non seulement des établissements, mais également de leur équipement. Les personnes qui y entrent aujourd’hui sont en situation de très grande dépendance. Elles ont besoin d’être accompagnées par un personnel de qualité. C’est tout l’enjeu.

Cependant, je crois qu’il convient de revenir au débat sur le droit au logement opposable. L’amendement présenté par Mme Guinchard comporte deux aspects : le premier entraînerait une diminution immédiate des revenus de la sécurité sociale, et c’est la raison pour laquelle, je le répète, le Gouvernement y est défavorable ; le second établirait une TVA à 5,5 %, proposition approuvée par M. Censi. Je l’ai déjà indiqué, le Gouvernement proposera cet après-midi, dans la partie droit au logement opposable, un amendement en ce sens.

M. Loïc Bouvard. Très bien !

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. En attendant, il est défavorable à l’amendement n° 125, sachant qu’il a non seulement écouté mais entendu ses auteurs.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Nous avons bien entendu l’argumentaire de M. Néri et je ne voudrais pas laisser accroire que, parce que la commission a émis un avis défavorable, elle manquerait d’humanité. Nous adhérons parfaitement à tout ce que vous avez dit, monsieur Néri.

Cela étant, compte tenu des précisions apportées par Mme la ministre, et en particulier de sa proposition, très importante, tendant à ramener à 5,5 % le taux de TVA, je maintiens notre avis défavorable à l’amendement n° 125.

Mme Paulette Guinchard. Et nous, madame la présidente, nous maintenons l’amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 125.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Avant de lever la séance, je voudrais simplement vous dire, madame la ministre, mes chers collègues, que, si nous ne siégeons pas ce soir, je vais quitter dès à présent le perchoir. Je tiens à remercier tous ceux qui, ici, pendant ces années, nous ont aidées, moi et Mme Guinchard, que j’associe puisque nous nous sommes succédé à cette place et que nous avons œuvré, en pleine entente, à travailler avec efficacité et dans la sérénité. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Madame la présidente, ayant compté les amendements, nous avons la quasi-certitude que nous nous retrouverons ce soir et que nous aurons alors l’occasion de vous rendre l’hommage que vous méritez.

Mme la présidente. Ce sera un vrai plaisir, monsieur Brottes.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour des prochaines séances

Mme la présidente. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi, n° 3656, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale :

Rapport, n° 3671, de Mme Christine Boutin, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 3675, de M. Jérôme Bignon, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire,

Avis, n° 3685, de M. Georges Fenech, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures cinq.)