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le 30 juin 2006

N° 3183

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 juin 2006.

DÉCLARATION

DU GOUVERNEMENT

sur les orientations des finances sociales pour 2007,

PAR M. XAVIER BERTRAND,

ministre de la santé et des solidarités,

et

M. PHILIPPE BAS,

ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

DÉCLARATION DE M. LE MINISTRE

DE LA SANTÉ ET DES SOLIDARITÉS

Monsieur le Président,

Messieurs les rapporteurs,

Mesdames et messieurs les députés,

Le débat d'orientation sur les finances sociales qui nous réunit aujourd'hui est une première et il représente une avancée importante introduite par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale votée l'an dernier à l'initiative - je tiens à le rappeler - de votre assemblée, puisque c'est un amendement d'Yves Bur qui proposait ce nouveau rendez-vous.

C'est une avancée importante parce qu'il est en effet essentiel que le Parlement, au moment où le Gouvernement s'engage dans la phase d'élaboration et de préparation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisse disposer d'une présentation générale des orientations et des grands équilibres financiers.

Un tel rendez-vous de printemps existait déjà dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, et c'est à juste titre que vous l'avez étendu aux finances sociales, lesquelles représentent en effet des enjeux de plus de 350 milliards d'euros par an.

Plus que jamais, une cohérence d'ensemble s'impose dans le pilotage des finances publiques. En la matière, notre stratégie ne sera efficace qu'en associant à sa définition tous les acteurs de la dépense et en prenant en compte toutes les dimensions de la dépense publique. Telle est bien notre façon de travailler avec Philippe Bas, Thierry Breton et Jean-François Copé, et tel est bien le but que nous poursuivons dans le prolongement de la Conférence nationale sur les finances publiques présidée par le Premier ministre le 11 janvier dernier et qui a rassemblé, outre le Gouvernement et le Parlement, le Conseil économique et social, les associations d'élus locaux, les partenaires sociaux et les représentants des organismes de protection sociale. Cette conférence a marqué une étape décisive dans le pilotage de nos finances publiques, parce que chacun a pu donner sa vision. Afin de pérenniser cette démarche, le Gouvernement a institutionnalisé par un décret du 5 mai dernier la Conférence nationale et instauré un Conseil d'orientation des finances publiques, dont la composition est calquée sur celui de la Conférence, et qui a été installé avant-hier.

Souhaitant placer notre pays sur la voie de l'équilibre des comptes publics et pour mettre en œuvre une stratégie de désendettement, le Premier ministre a assigné aux finances sociales deux objectifs : un retour à l'équilibre du régime général de la sécurité sociale au plus tard à l'horizon 2009 ; ensuite, pour tenir compte des besoins croissants dus notamment aux effets du vieillissement et du progrès médical, un objectif d'évolution des dépenses de l'ensemble des administrations de sécurité sociale de plus 1 % au-dessus de l'inflation. C'est dans ces perspectives que sera élaboré le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 qui sera discuté à l'automne prochain.

Je me concentrerai sur ce que cela signifie pour l'assurance maladie et pour les dépenses de santé.

Le retour à l'équilibre de la branche maladie du régime général suppose que les dépenses d'assurance maladie évoluent en moyenne de 2,2 % en valeur, soit 0,4 % en volume sur la base d'une hypothèse d'inflation à 1,8 %. Il faut donc que se poursuive l'inflexion de tendance déjà constatée pour les dépenses d'assurance maladie que nous enregistrons depuis 2004 et encore davantage en 2005 et 2006, grâce à la réforme de 2004. En 2003, les dépenses relevant du champ de l'ONDAM ont crû de 6,4 %. En 2004, année du vote de la loi portant réforme de l'assurance maladie, nous avons enregistré une première inflexion à la baisse, avec une croissance de l'ONDAM de 4,9 %. Et en 2005, première année de mise en œuvre de l'ensemble des dispositifs prévus par la réforme, la progression a été de 3,9 %, avec, pour la première fois depuis 1997, le respect de l'ONDAM voté par le Parlement dans la loi de financement, à 135 milliards d'euros. Pour 2006, l'objectif fixé par la loi de financement est une progression de 2,5 %. Nous sommes donc résolument sur la voie de la maîtrise des dépenses d'assurance maladie, nous avons enrayé les rythmes de croissance atteints dans le passé.

Il nous faut poursuivre dans cette voie. Les tendances qui se dégagent depuis le début de l'année 2006 confirment, mois après mois, la modération des dépenses, en particulier pour les soins de ville : de janvier à mai, la hausse n'a été que de 1,4 % par rapport à la même période de 2005.

La modération des dépenses a pour corollaire une réduction très nette du déficit de l'assurance maladie, que chacun s'accorde à reconnaître. Après avoir atteint 11,6 milliards d'euros en 2004, le déficit a été ramené 8 milliards en 2005, alors qu'il aurait été, il faut le rappeler, de 16 milliards d'euros en l'absence de réforme. En 2006, le déficit sera à nouveau significativement réduit, comme l'a confirmé la commission des comptes qui s'est réunie la semaine dernière, estimant le déficit prévisionnel pour 2006, à 6,3 milliards d'euros. Nous sommes donc bien sur la trajectoire du retour à l'équilibre et notre objectif pour 2007 est de continuer sur cette trajectoire, en visant un déficit inférieur à 4 milliards d'euros.

Nous sommes partis de 16 milliards, et, dans deux ans, nous aurons divisé le déficit par quatre !

Mesdames et messieurs les députés, tout cela fait beaucoup de chiffres, ce qui est normal dans le cadre d'un débat d'orientation budgétaire. Pourtant, les chiffres ne sont pas une fin en soi : nous voulons en effet, par un retour à l'équilibre financier, sauvegarder, pour nous et pour les générations futures, notre système de sécurité sociale, en le modernisant et en l'améliorant.

C'est en cela d'ailleurs que la réforme de l'assurance maladie issue de la loi du 13 août 2004 se distingue des autres « plans de sauvetage » qui l'ont précédée. S'inspirant en effet, point par point, du rapport et de l'analyse du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, elle repose avant tout sur les changements de comportement en plaçant la qualité au premier plan. Le redressement financier de l'assurance maladie va de pair avec une politique de santé ambitieuse car, selon nous, la seule façon de maîtriser durablement la dépense, c'est la maîtrise médicalisée et l'évolution des comportements.

Je voudrais en effet insister sur le développement de la prévention qui constitue un véritable investissement dans l'avenir. Elle est à la fois la condition de l'amélioration de l'état de santé de notre population et de la maîtrise durable des dépenses.

C'est donc bien une approche qualitative et structurante sur le long terme qui nous anime.

Tout d'abord, l'essor du parcours de soins coordonné autour du médecin traitant constitue un acquis incontestable de la loi du 13 août 2004. Je me souviens des Cassandre qui affirmaient que la réforme du médecin traitant ne marcherait jamais. Or, la réalité veut qu'en un peu plus d'un an et demi, près de quarante millions d'assurés sociaux ont choisi leur médecin traitant, ce qui montre que les Français se sont bien appropriés ce dispositif.

Je précise également que 78 % des consultations s'effectuent dans le cadre du parcours de soins, et moins de 2 % seulement sont réellement « hors parcours », le patient ayant consulté directement un spécialiste alors qu'il a un médecin traitant.

En outre, la maîtrise médicalisée est d'ores et déjà un succès. Les Cassandre annonçaient qu'elle ne marcherait jamais elle non plus. Or, le rythme d'évolution des soins de ville s'est ralenti grâce à une attention plus grande des professionnels aux conditions de prescription des médicaments et des indemnités journalières.

L'engagement de maîtrise médicalisée a produit des résultats favorables. La dynamique a non seulement été lancée, mais confirmée par l'avenant n° 12 à la convention, signé cette année, qui approfondit l'effort et l'engage dans un cadre pluriannuel en fixant de nouveaux objectifs : 800 millions d'euros pour 2006 et 600 millions d'euros pour 2007.

Grâce au parcours de soins et à la maîtrise médicalisée, nous sommes engagés dans une dynamique permettant d'améliorer la qualité des soins tout en maîtrisant les dépenses. Nous savons en effet qu'il existe encore aujourd'hui de réels gisements d'économies. Réaliser ces économies n'impliquerait en rien la diminution de la qualité des soins mais, au contraire, l'améliorerait.

La Cour des comptes souligne que les dépenses inutiles représentent un montant de 6 à 8 milliards d'euros dont environ 1 milliard d'euros pour les seuls examens inutiles - environ 15 % du total des examens. De même, s'agissant des dépenses d'indemnités journalières - qui jusqu'à ces dernières années avaient crû à des rythmes déraisonnables de l'ordre de 10 % et qui faisaient aussi l'objet d'abus -, nous avons réussi, grâce à la réforme, à inverser la tendance puisque, après une première baisse de 1 % en 2004, le rythme s'accentue pour atteindre 1,4 % en 2005. Il en va de même pour les premiers mois de 2006, où nous enregistrons de janvier à mai une diminution de 3,7 % par rapport à la même période de l'année précédente. Ces données représentent 500 millions d'euros d'économie, et cela simplement en organisant et en contrôlant mieux le système.

Le secteur du médicament contribue lui aussi significativement au redressement durable des comptes et à la réforme de l'assurance maladie. Nous privilégions des axes d'action structurants.

Grâce aux médicaments génériques, 234 millions d'euros au total ont été économisés en 2005, dont 170 millions d'euros au titre de l'augmentation de la pénétration des génériques. En 2006, une forte impulsion a été donnée à la substitution, grâce aux accords signés entre l'UNCAM, les pharmaciens et les médecins. Ces accords prévoient une progression régulière de la substitution avec un objectif de 70 % de pénétration en décembre 2006. Ces engagements sont même en passe d'être dépassés puisqu'au 15 mai, la pénétration des génériques atteignait déjà près de 67 %.

Nous avons préféré l'approche plus structurante de la substitution, au TFR initialement envisagé. Je souhaite aussi préciser que nous menons une action résolue en matière de politique de prix, qui a permis en 2005 de dégager 365 millions d'euros d'économies.

Enfin, les grands conditionnements ne répondent pas seulement à une logique de santé publique ou à un esprit de bon sens, mais il faut savoir qu'ils permettront de générer des économies. Plus de vingt médicaments sont désormais disponibles en conditionnement de trois mois. Leur délivrance produira tous ses effets à partir du deuxième semestre 2006. Nous sommes aussi en mesure de mettre un terme à cette gabegie constatée depuis des années : trois quarts des boîtes de médicaments ouvertes ne sont jamais terminées.

Au total, les mesures prises dans le secteur du médicament produisent leurs effets. Ce qui est particulièrement encourageant, et nous voulons prolonger cette tendance en 2007, c'est que l'on assiste à un infléchissement indéniable des dépenses de médicaments. Les dernières données relatives aux remboursements de la CNAMTS font en effet état d'une progression de seulement 1,8 % pour le mois de mai contre 2,2 % pour avril, ce taux étant de 3,9 % en mars, 4,6 % en février et 5,7 % en janvier.

En ce qui concerne les établissements de santé, ils se sont engagés dans les réformes structurelles prévues par le plan « Hôpital 2007 ». La part de tarification à l'activité s'élève à 35 % en 2006 pour les établissements publics et privés participant au service public. Le Gouvernement a aussi engagé des travaux de mesure des charges spécifiques pesant sur le service public hospitalier afin de réussir une convergence entre les tarifs des établissements publics et privés.

Parallèlement, la rationalisation des achats, l'amélioration du contrôle de gestion et des systèmes d'information vont permettre au secteur hospitalier de savoir et de pouvoir toujours mieux servir la collectivité en proposant les meilleurs services et les meilleurs soins aux meilleurs coûts. Il s'agit aussi de la logique du « dépenser mieux pour soigner mieux ».

Enfin, il faut développer la prévention, une priorité non seulement pour cette année, mais qui sera prolongée et amplifiée en 2007. Comme je l'ai indiqué, la prévention est à la fois une condition pour garantir, à terme, la maîtrise durable des dépenses d'assurance maladie et une condition pour améliorer l'état de santé des Français. En complément de la dynamique instaurée par la réforme de l'assurance maladie, la majorité a en effet adopté la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique afin de préparer l'avenir. Je souhaite donner tout son essor à cette loi et à l'ensemble des dispositifs qu'elle prévoit.

Je pense qu'il faut renforcer la stratégie de prévention en la focalisant sur les risques aux différents âges de la vie ainsi que sur certaines populations cibles, afin de réduire les inégalités de santé, qu'elles soient territoriales ou sociales. J'ai annoncé un certain nombre d'initiatives dont, à partir du 1er juillet, le remboursement de l'ostéodensitométrie. Par ailleurs, à partir de la rentrée, les enfants âgés de six ans et ceux âgés de douze ans seront soumis à un examen bucco-dentaire de prévention. Enfin, vous le savez, nous avons lancé un certain nombre de plans de santé publique et de plans stratégiques.

C'est grâce à ces actions, fidèles à la logique de maîtrise médicalisée des dépenses, que nous dégageons et continuerons de dégager en 2007 les marges de manœuvre nous permettant de poursuivre l'amélioration de la qualité du système de santé et de renforcer l'accès aux soins.

En ce qui concerne l'accès aux soins, au-delà des mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 revalorisant fortement le montant de l'aide à la complémentaire - notamment pour les personnes âgées de plus de soixante ans qui bénéficient désormais d'une aide de 400 euros par an -, le Président de la République vient de demander un relèvement du plafond de revenus des bénéficiaires de 15 % à 20 % au-dessus du plafond de ressources de la CMUC

Le PLFSS 2007 devra mettre en œuvre cette décision, qui fera passer le nombre de bénéficiaires potentiels de 2 millions à 2,9 millions.

La question de l'égalité d'accès aux soins est aujourd'hui fondamentale, et je tiens à vous informer que j'ai saisi M. le président du conseil de l'Ordre des médecins de l'étude que vient de publier le fonds CMU et qui montre des restrictions inacceptables à l'offre de soins. Je lui ai demandé quelles décisions il entendait prendre à l'égard des professionnels de santé qui ne respecteraient pas le principe sacré de l'égalité aux soins, et qui retarderaient la prise en charge des bénéficiaires de la CMU.

Tous les professionnels de santé sans exception sont concernés, mais vous aurez compris, monsieur Brard, que le président du conseil de l'Ordre des médecins est avant tout compétent pour les médecins !

Moderniser notre système de santé, c'est aussi l'améliorer. Les économies réalisées nous permettent aujourd'hui, avec la prise en charge de traitements innovants, de pouvoir valoriser un certain nombre de points trop longtemps oubliés. Je pense à la prise en charge de la douleur, mais aussi à un certain nombre de dossiers essentiels, comme la mise en œuvre du plan de démographie médicale.

En conclusion, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, voilà la dynamique dans laquelle nous sommes engagés. Nous sommes fidèles à la feuille de route tracée par le Président de la République en ce qui concerne le retour à l'équilibre des comptes publics et à l'équilibre des finances sociales.

Cette réforme est en marche, elle produit ses résultats. Notre objectif pour 2007 est de poursuivre et d'amplifier les dynamiques à l'œuvre en gardant la même logique d'action. Cette logique est celle de la réforme souhaitée par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie et instaurée par la loi du 13 août 2004.

Atteindre les objectifs ambitieux du Gouvernement nécessite un travail de longue haleine. Ainsi, cette réforme a toujours eu une vocation pluriannuelle. Mais il faut aussi assurer un suivi constant. Nous devons donc poursuivre avec persévérance la mise en œuvre de cette réforme dans toutes ses dimensions. Elle repose sur les changements de comportements des acteurs.

Voilà pourquoi j'ai décidé de réunir depuis le début du printemps un comité de suivi de la réforme de l'assurance maladie et de pilotage de l'ONDAM, qui regroupe le directeur de la sécurité sociale, le directeur des hôpitaux, le directeur général de la santé, le président du comité économique du médicament et le directeur général de l'UNCAM. Le PLFSS 2007 s'inscrira dans la même logique.

Nous continuerons à travailler de la même façon, pour poursuivre le redressement de l'assurance maladie afin de sauvegarder notre système de santé mais surtout de le moderniser et de l'améliorer.

DÉCLARATION DE M. LE MINISTRE

DÉLÉGUÉ À LA SÉCURITÉ SOCIALE,

AUX PERSONNES ÂGÉES, AUX PERSONNES HANDICAPÉES ET À LA FAMILLE.

Monsieur le Président,

Mesdames et messieurs les députés,

Il est important que nous puissions aujourd'hui nous réunir pour nous mobiliser tous ensemble sur le thème de l'équilibre de nos finances publiques, envisagé pour la première fois au sens le plus large, et cela au lendemain de la réunion de la Conférence nationale des finances publiques présidée par Thierry Breton avant-hier. Pour la première fois dans notre histoire économique, financière et même politique, le Gouvernement, les gestionnaires de la sécurité sociale et les responsables de toutes les collectivités territoriales de la République ont été réunis. Cela marque bien une prise de conscience importante de la nécessaire solidarité de tous face aux défis et aux contraintes de l'avenir de nos finances publiques.

Comme le disait à l'instant Xavier Bertrand, après Thierry Breton et Jean-François Copé, il est essentiel de disposer d'une vision d'ensemble de nos finances publiques pour en appréhender clairement les enjeux.

Les comptes publics, en effet, ne font qu'un dans l'esprit de nos concitoyens, qui, bien entendu, ont raison : quelle que soit la source de financement en cause - budget de l'État ou des collectivités territoriales, dépenses de sécurité sociale -, il s'agit toujours de faire fonctionner des services publics aussi importants que l'école ou l'hôpital. Que la première soit financée par l'État et par les collectivités territoriales, et le second par la sécurité sociale, est de peu d'intérêt pour nos compatriotes.

En définitive, c'est toujours la collectivité qui les finance, et c'est toujours sur le même contribuable que la charge repose.

Ce qui importe, c'est que les services publics fonctionnent efficacement et au meilleur coût, et que la solidarité soit assurée en maintenant un haut niveau de protection sociale pour tous les Français.

Je rappelle à ce sujet que, contrairement aux idées fausses que certains se complaisent à colporter, le taux de couverture des dépenses de santé a progressé au cours des dix dernières années, atteignant aujourd'hui 79,8 %, soit deux points de plus qu'en 1994.

La sécurité sociale, c'est le patrimoine commun de tous les Français.

C'est pour défendre ce patrimoine qu'ils ont massivement accepté de choisir leur médecin traitant et que les médecins eux-mêmes se sont massivement engagés dans une nouvelle maîtrise de leurs prescriptions, notamment en ce qui concerne les arrêts de travail injustifiés, les prescriptions de certains médicaments, comme les antibiotiques, les antidépresseurs ou l'essor des génériques.

Il n'y a pas d'alternative sérieuse à cette politique. Imaginez qu'un autre gouvernement, qu'une autre majorité veuille réduire le taux de couverture des dépenses de santé par l'assurance maladie, ce serait inefficace pour réduire les déficits, puisque ceux-ci sont causés par l'augmentation des dépenses et non par les modalités de leur prise en charge.

D'ailleurs, dans les pays dépourvus de sécurité sociale, les dépenses de santé sont beaucoup plus importantes, évoluent beaucoup plus vite, sont beaucoup moins contrôlées, comme en témoigne l'exemple américain qui prouve bien que, dans ces pays, les malades ne sont en rien mieux soignés, certains ne l'étant même pas du tout !

Cette politique - et je crois savoir, en dépit de vos vociférations, que ce n'est pas celle que vous préconisez, mesdames et messieurs les députés de l'opposition - serait également coûteuse pour les Français : j'ai calculé qu'une baisse de 5 % du taux de couverture des dépenses de santé par l'assurance maladie entraînerait une hausse de 35 % des cotisations d'assurance complémentaire, soit l'équivalent de 0,75 % de CSG ! De cela, nous ne voulons pas, et c'est bien pourquoi nous réformons la sécurité sociale : l'enjeu est de maintenir un haut niveau de protection sociale financée par la solidarité.

Vous seriez bien inspirés de soutenir cet effort. Pour leur part, les Français ont choisi de le faire.

Notre débat est aussi l'occasion de faire progresser la transparence des comptes.

Les relations sont depuis longtemps très étroites entre comptes sociaux et finances publiques. Dans le long terme, elles jouent plutôt en défaveur des comptes sociaux. On sait désormais - puisque nous avons pris le parti de la transparence - qu'au 31 décembre 2005, la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale s'établissait à 5,14 milliards d'euros, dont 3,6 milliards pour le régime général. Il ne saurait être question pour le Gouvernement de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Nous entendons mener de front la réduction des déficits de l'État et celle des déficits de la sécurité sociale, sans qu'aucun des deux serve de variable d'ajustement à l'autre.

Le Premier ministre et l'ensemble du Gouvernement veulent que s'instaurent des relations transparentes entre comptes publics et comptes sociaux, afin de mesurer exactement les efforts de réforme consentis par les différents acteurs, d'en identifier les résultats et d'éviter que le solde des uns soit subordonné aux impératifs et contraintes des autres.

La modification, l'an dernier, de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a apporté à cet égard des avancées significatives, permettant en particulier une coordination renforcée entre les finances de l'État et les finances sociales pour assurer une présentation et une maîtrise globales des finances publiques. Sont ainsi clarifiées les relations financières entre l'État et la sécurité sociale concernant la compensation des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale : la loi organique prévoit en effet que le montant de cette compensation - qui doit bien sûr être intégrale - doit être approuvé annuellement dans la loi de financement de la sécurité sociale. La loi organique dispose également que seule une loi de financement pourra désormais déroger au principe de non-compensation, ce qui permettra de mieux encadrer cette pratique, d'en avoir une vision plus globale et de la circonscrire. Ces dispositifs d'exonération font par ailleurs l'objet d'une présentation détaillée dans une nouvelle annexe de la loi de financement de la sécurité sociale, l'annexe 5.

Plus généralement, la loi organique a renforcé la portée et la lisibilité des lois de financement de la sécurité sociale, qui comportent désormais des tableaux d'équilibre permettant de rapprocher les objectifs de dépenses et les prévisions de recettes des différentes branches ainsi que des fonds de financement. Ainsi, le Parlement peut se prononcer sur les soldes de chacune de ces catégories d'organismes et disposer d'une vision d'ensemble du financement de la sécurité sociale.

Enfin, dans le prolongement de la démarche engagée en 1996 par les conventions d'objectif et de gestion, et en s'inspirant de la loi organique relative aux lois de finances, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale prévoit une annexe présentant les « programmes de qualité et d'efficience » de la politique de sécurité sociale pour chacune de ses branches et pour les exercices à venir. À travers ces programmes, vous disposerez d'éléments d'information précieux pour appréhender, grâce à un petit nombre d'indicateurs précis et à un diagnostic de la situation, les objectifs et réalisations des politiques mises en œuvre. Des avant-projets de ces programmes de qualité et d'efficience viennent d'être soumis pour avis à votre commission des affaires culturelles, familiales et sociales, conformément à la loi organique.

L'ensemble de mesures ainsi constitué représente une avancée importante dans le pilotage des finances sociales.

J'en viens maintenant aux orientations des politiques de sécurité sociale concernant la vieillesse et la famille.

S'agissant de la branche vieillesse, le Gouvernement a proposé en 2003 une réforme structurelle pour la sauvegarde de notre système par répartition - lequel se trouvait en grand péril du fait, précisément, que cette réforme s'était si longtemps fait attendre ! Il existe entre les différents acteurs un consensus sur la nécessité de la mettre en œuvre dans le cadre d'un processus continu. La loi de 2003 s'est inscrite dans des réflexions de long terme, sur la base d'un diagnostic partagé résultant notamment des travaux du Conseil d'orientation des retraites. Le calendrier et les échéances fixés en 2003 seront respectés. À cet égard, le principe des rendez-vous réguliers constitue une avancée forte.

Une attention particulière sera apportée à l'évolution de certains dispositifs introduits ou modifiés par la loi de 2003, comme les départs anticipés ou les rachats de cotisations.

Il conviendra également de veiller au développement de stratégies susceptibles d'accroître le taux d'activité des seniors : c'est tout le sens du plan national d'action concertée pour l'emploi des seniors qui a été présenté par le Premier ministre.

Le dynamisme des prestations vieillesse observé en 2006 et que vient de mesurer la Commission des comptes de la sécurité sociale résulte de la montée en charge du dispositif des départs anticipés pour les salariés ayant effectué des carrières longues : ceux qui ont commencé dans la vie comme apprenti ou ouvrier, qui ont travaillé durement et à qui a été refusé ce droit élémentaire de pouvoir partir à la retraite plus tôt ! Sur certains bancs, on a pendant des années déposé en vain des amendements que le gouvernement socialiste de l'époque s'est obstiné à refuser. Comment pouvait-il faire autrement, d'ailleurs, puisqu'il refusait aussi de réformer les retraites et ne dégageait donc pas les ressources nécessaires pour répondre à cette demande sociale dont la légitimité est incontestable ? Vous l'avez refusé, mesdames et messieurs les socialistes, nous l'avons fait !

À la fin de cette année, 300 000 de nos compatriotes auront pu bénéficier de ces retraites anticipées.

Sans doute est-ce une erreur - car je m'interdis de penser qu'il puisse s'agir de légèreté - si, dans certains programmes en cours d'élaboration, on veut remettre en cause cette réforme des retraites !

Comment ceux qui préconisent une telle mesure comptent-ils expliquer à ces 300 000 Français qu'il n'y a désormais plus les moyens de prendre en charge les retraites anticipées ? Faudra-t-il donc que vous invitiez chacun d'entre eux à revenir au travail ? Et quels emplois allez-vous leur trouver ?

La Commission des comptes de la sécurité sociale indique que les résultats de la branche vieillesse sont légèrement dégradés par rapport à nos prévisions, puisqu'ils vont s'établir cette année à 2,2 milliards au lieu des 1,9 prévus. Mais c'est parce que nous avons investi dans le social et dans l'avenir en permettant ces départs en retraite anticipée. Cela, mesdames, messieurs, nous l'assumons !

La réforme des retraites permettra d'améliorer très fortement les perspectives financières de la branche vieillesse, comme l'ont confirmé les récents travaux du Conseil d'orientation des retraites. Dans son rapport, celui-ci évalue à près de 50 % du besoin de financement l'impact de la réforme à l'horizon 2020. Il relève par ailleurs le rythme accéléré de la baisse du chômage depuis la prise de fonction du gouvernement de Dominique de Villepin. Avec cette baisse, remarque le Conseil, le redéploiement des cotisations et des crédits consacrés aux emplois aidés permettra d'équilibrer le régime général tout en faisant face aux besoins accrus liés au vieillissement de la population, notamment dans le domaine de la santé et de la dépendance. Un niveau de chômage inférieur ou égal à 7 %.est suffisant pour atteindre cet équilibre à moyen terme. Nous sommes donc aujourd'hui sur la bonne voie.

La politique que le Gouvernement mène en faveur l'emploi a déjà permis de réduire le nombre de chômeurs de plus de 200 000 en un an.

Ces résultats sont certes insuffisants et il convient de les amplifier, mais ils sont sans précédent.

C'est l'un des facteurs de redressement structurel du régime général, d'autant que la reprise du marché de l'emploi entraîne l'augmentation du produit des cotisations sociales.

La politique de la famille constitue également un volet important des dépenses de protection sociale, représentant près de 50 milliards d'euros chaque année, dont 62 % sont gérés par la branche famille du régime général de sécurité sociale. Interviennent également les collectivités locales, à travers notamment l'action sociale en direction des enfants, la branche maladie, qui prend en charge les dépenses de maternité, ou encore l'État, qui, en tant qu'employeur, assume le versement d'un supplément familial de traitement, et qui finance par exemple les bourses scolaires et universitaires.

Au cours de ces dernières années, la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle a constitué un élément structurant de la réorientation de notre politique familiale. La France a cette particularité qu'elle est le seul pays d'Europe qui connaît à la fois un taux de fécondité exceptionnellement élevé - même s'il est encore insuffisant pour assurer le renouvellement des générations, c'est le plus élevé en Europe - et un taux d'activité des femmes entre vingt-cinq et cinquante ans de 80 %. Cela signifie que le travail des femmes n'est pas l'ennemi de la natalité.

Toute notre politique familiale vise donc à favoriser la garde des enfants. Cet effort, dont nous sommes fiers, pèse naturellement sur les comptes de la branche famille, dont les déficit sont heureusement stabilisés, à peu de choses près, au niveau de l'année dernière.

Nous consentons également un effort sans précédent pour l'ouverture de places de crèche. Je remercie la majorité de soutenir cette politique visant à concilier vie familiale et vie professionnelle. Nous la menons en veillant à la maîtrise des coûts, grâce à la mise en place d'un nouveau pilotage des dépenses d'action sociale et familiale de la Caisse nationale d'allocations familiales.

Ces dépenses avaient augmenté de 17 % en 2004 et de 15 % en 2005. Un tel rythme n'était pas soutenable à moyen terme, d'autant qu'il n'a pas toujours correspondu à une amélioration réelle des services rendus.

Je me suis engagé auprès de la Caisse nationale d'allocations familiales, au nom du Gouvernement et de l'État, à assurer une progression de ses crédits de 7,5 % par an pendant quatre ans pour l'ouverture de nouvelles places de crèche. C'est un effort sans précédent en valeur, puisqu'il représente 2,4 millions d'euros en quatre ans. Il permettra de passer de 240 000 places en 2002 à 310 000 en 2008.

Dois-je vous rappeler, mesdames, messieurs les députés de l'opposition, combien de nouvelles places de crèche ont été ouvertes en 2000 par le ministre chargé de la famille, dont d'ailleurs le nom m'échappe ?

Pour toute la France, il y en a eu 264 !

L'année dernière, nous en avons ouvert - excusez du peu - 8 500 et cette année, il y en aura plus de 10 000. Ne vous engagez pas dans une mauvaise compétition sur ce terrain : la politique des crèches, c'est nous qui la conduisons, avec succès et persévérance !

Je veux également préciser que le déficit de la branche famille n'est en rien structurel, mais conjoncturel, pour une simple raison mathématique : les dépenses sont indexées sur les prix, tandis que les recettes sont proportionnelles à l'évolution des salaires. Celles-ci progressent donc plus vite que les dépenses, et nous reviendrons, toutes choses égales par ailleurs, naturellement à l'équilibre, en même temps que la branche maladie, pour laquelle nous conduisons cette réforme essentielle à la préservation d'un haut niveau de protection sociale dans notre pays.

Ce pays des merveilles, en tout cas, monsieur Brard, ce n'est pas vous qui le construisez !

Sur tous les points que j'ai mentionnés, les progrès de la politique sociale du Gouvernement et de cette majorité sont réels et objectifs. Je vous défie de dire le contraire !

Pour terminer, je souhaiterais aborder rapidement la question du renforcement de la performance de gestion des organismes de sécurité sociale, qui constitue également une orientation fondamentale de notre politique en matière de sécurité sociale. Cette dernière, vous le savez, est le service public le plus apprécié des Français : avec 85 % des usagers satisfaits, elle atteint le score le plus élevé de tous les services publics.

Les conventions d'objectifs et de gestion ont inscrit le service public de la sécurité sociale dans une dynamique d'amélioration de la qualité de service, qui porte, année après année, ses fruits. Ces conventions ont préfiguré, dès 1996, la démarche aujourd'hui engagée avec un très fort volontarisme par le Gouvernement, notamment par Jean-François Copé, dans les services de l'État eux-mêmes. Ce haut niveau de qualité de service se conjugue avec des coûts de gestion modérés, qui se comparent très favorablement avec ceux du secteur privé : le rapport du total des dépenses de gestion et des prestations servies par les organismes de sécurité sociale est de 4,13 %, soit deux à trois fois moins que les coûts de gestion des assurances complémentaires - mutuelles, institutions de prévoyance sociale et assurances privées. Vis-à-vis de l'État, la comparaison est également favorable : les cotisations sociales ont un coût de recouvrement très inférieur à celui de l'impôt.

Le Gouvernement étant très attaché au développement de la performance de gestion des organismes de sécurité sociale, il faut conforter cette dynamique. C'est la raison pour laquelle les conventions d'objectifs et de gestion signées avec les caisses nationales du régime général à partir de 2005 comportent toutes un objectif de renforcement de l'efficience des branches, notamment par des gains de productivité, en tirant parti du potentiel offert par la croissance des départs à la retraite. Dans la branche vieillesse, ces efforts se traduisent par une quasi-stabilité des effectifs dans un contexte de forte augmentation de la charge de travail liée à la réforme des retraites. Dans les autres branches, des efforts de productivité correspondant au non-remplacement de 30 % à 50 % des départs à la retraite ont été demandés. Quant à l'assurance maladie, la négociation de la nouvelle convention devra assigner à la branche des objectifs de productivité s'inscrivant dans la continuité de ceux déjà entrepris depuis 2004. Toutes ces exigences ont permis, depuis deux ans, de stabiliser les dépenses de gestion des organismes du régime général à 10 milliards par an. Cette démarche d'efficience montre toute la part que les organismes de sécurité sociale prennent au redressement de l'efficacité de l'ensemble de nos services publics.

Mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement est déterminé à poursuivre cet effort, qui trouvera toute sa traduction dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale !

Imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121334-9
ISSN : 1240 - 8468

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N° 3183 - Déclaration du Gouvernement sur les orientations des finances sociales pour 2007