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N° 344

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 novembre 2002

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),

sur la réforme de la politique commune de la pêche,

ET PRÉSENTÉ

par M. Didier QUENTIN,

Député.

________________________________________________________________

(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

Aquaculture et pêche professionnelle.

La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. Pierre Goldberg, François Guillaume, secrétaires ; MM. Alfred Almont, Bernard Bosson, Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, François Grosdidier, Michel Herbillon, Patrick Hoguet, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, M. René-Paul Victoria.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I. POURQUOI UNE POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE ? 7

1) La naissance de la politique commune de la pêche 7

a) Base juridique 7

b) Historique 8

2) Les fondements de la politique commune de la pêche 9

a) L'égalité de l'accès aux zones de pêche 9

b) La conservation des ressources 9

c) L'équilibre entre la capacité de la flotte et la ressource disponible 10

d) Les contrôles 11

e) L'organisation commune du marché 11

f) Les actions structurelles 13

g) La dimension internationale de la politique commune de la pêche 15

II. UN PROJET DE RÉFORME DÉSÉQUILIBRÉ, QUI SE PRÉOCCUPE DE LIMITER LES CAPTURES PAR DES MOYENS SOUVENT CONTESTABLES, ET IGNORE LA FONCTION SOCIO-ÉCONOMIQUE DE LA PÊCHE 17

1) Les origines de la réforme 17

2) Les inquiétudes sur l'avenir de la ressource ne sont pas toujours justifiées 18

a) Des avis scientifiques aléatoires 18

b) Des progrès insuffisants dans la gestion de la pêche 20

c) La pêche minotière oubliée 21

3) Un système de contrôle encore imparfait 22

4) Des mesures structurelles lourdes de conséquences 23

a) Des conséquences économiques et sociales 23

b) Des menaces sur la sécurité des marins 24

5) Un volet externe en voie d'abandon 25

III. LES CONDITIONS DE LA PÉRENNI-SATION D'UNE PÊCHE DURABLE ET COMPÉTITIVE EN EUROPE 27

1) Maintenir les grands équilibres en matière d'accès 27

2) Améliorer la gestion des TAC et des quotas 28

3) Mieux exploiter les ressources en fonction des réalités locales 28

4) Assouplir la politique de gestion de la flotte 29

5) Valoriser les produits de la mer 30

6) Favoriser l'équité et l'efficacité des contrôles 30

7) Prendre en compte la dimension sociale de la pêche 30

a) Investir dans la formation des jeunes pêcheurs 30

b) Harmoniser les conditions d'emploi 31

8) Rénover les accords de pêche communautaires 31

9) Reconnaître la spécificité de l'Outre-mer 32

10) Réussir l'intégration des pays candidats dans la politique commune de la pêche 33

CONCLUSION 35

TRAVAUX DE LA DELEGATION 37

PROPOSITION DE RESOLUTION 39

ANNEXE 43

Annexe : Liste des personnalités auditionnées 45

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Avec 6,7 millions de tonnes de captures par an, l'Union européenne est la deuxième puissance de pêche mondiale, loin derrière la Chine (17,4 millions de tonnes), mais devant le Pérou, le Canada, la Russie et le Japon.

Pourtant, la pêche et l'aquaculture contribuent pour une part modeste au PIB communautaire (à peine 1 %), mais le secteur constitue pour de nombreuses zones côtières (notamment sur la façade atlantique de la France, de l'Espagne et du Portugal ainsi qu'en Italie et en Ecosse) une source de revenus et d'emplois importante. La filière emploie 500 000 personnes, dont 30 % en Espagne, et 25 % en Italie. La flotte de pêche s'établit à 100 000 navires.

De plus, chaque emploi en mer génère d'autres emplois dans les terres et des revenus indirects liés aux activités de la pêche. La population concernée se concentre dans les régions littorales, dont l'économie, malgré l'essor touristique, dépend encore fortement de la pêche.

La politique commune de la pêche (PCP), qui constitue la politique communautaire la plus intégrée, est cependant peu coûteuse, surtout si on la compare à la politique agricole commune : elle ne représentait que 0,84 % du budget communautaire en 2001 et encore moins dans les budgets nationaux.

Dix ans après un premier réexamen de la PCP, le conseil des ministres européens de la pêche devra statuer, avant le 31 décembre 2002, sur une réforme de cette politique commune préparée par la Commission et présentée par le commissaire Franz Fischler.

Cette échéance déterminante pour l'avenir de la PCP survient au moment où l'Union européenne réfléchit à la pérennisation de ses politiques communes, dans la perspective de futurs élargissements et alors que l'hypothèse d'une raréfaction de la ressource halieutique relance le débat sur la validité du système communautaire de gestion des pêcheries.

I. POURQUOI UNE POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE ?

Depuis 1983, la politique commune de la pêche a pour ambition de protéger les espèces contre la surexploitation, tout en garantissant des revenus aux pêcheurs européens, et l'approvisionnement du marché intérieur. Face aux menaces qui pèseraient sur l'épuisement des réserves halieutiques, les meilleures chances de survie du secteur reposent sur l'application de règles communes.

1) La naissance de la politique commune de la pêche

a) Base juridique

La politique commune de la pêche (PCP) partage avec la politique agricole commune la même base juridique fondamentale. Cependant, même si ces deux politiques ont une racine commune, les caractéristiques des deux secteurs sont différentes. A l'opposé de la surproduction agricole, la pêche souffre d'une raréfaction des ressources et les défis auxquels la PCP doit faire face sont d'une toute autre nature (à savoir, protéger et répartir les ressources afin d'assurer la pérennité de l'activité de pêche).

Les articles 32 à 38 du titre II du traité instituant la Communauté européenne définissent la base juridique de la PCP. Il s'agit d'une compétence exclusive de la Communauté.

Ainsi, l'article 32 étend le marché intérieur aux produits de la pêche et stipule que son instauration doit s'accompagner de l'établissement d'une politique commune de la pêche. L'article 33 en énonce les objectifs généraux. Il s'agit d'accroître la productivité, d'assurer un niveau de vie équitable à la population du secteur, de stabiliser les marchés, de garantir la sécurité des approvisionnements et de maintenir des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs. Le reste du titre vise à établir une organisation commune des marchés (article 34), à prévoir une coordination des efforts dans le domaine de la recherche, de la formation professionnelle (article 35) et à fixer les règles de concurrence (article 36). Par ailleurs, les articles 37 et 38 concernent entre autres les règles de procédure relatives à l'organisation commune de marché.

b) Historique

Les premières réglementations communes dans le secteur de la pêche datent de 1970. Elles fixent les règles concernant l'accès aux zones de pêche, instaurent une organisation commune des marchés et mettent en place un régime-cadre de la politique structurelle.

Ces mesures ont été suivies de près par l'adhésion en 1972 de pays à forte tradition de pêche (Royaume Uni, Irlande et Danemark). Cela a permis de renforcer le cadre juridique de la PCP en établissant notamment l'obligation de créer une politique de conservation des ressources et en mettant en place des droits exclusifs de pêche côtière jusqu'à une distance de 12 miles.

Mais c'est seulement en 1983, après plusieurs années de négociations, que le Conseil a défini les bases d'une politique communautaire globale de la pêche. L'« Europe bleue » est finalement devenue une politique commune à part entière.

La PCP a dû ensuite s'adapter au retrait du Groenland de la Communauté en 1985, à l'adhésion de l'Espagne et du Portugal en 1986 et, dans une moindre mesure, à la réunification de l'Allemagne en 1990. Ces événements ont tous eu un impact sur la taille et la structure de la flotte communautaire, ainsi que sur sa capacité de capture.

Les années 90 ont commencé par une révision en profondeur de l'ensemble de la politique commune de la pêche sur la base de rapports-bilans présentés par la Commission. La pierre angulaire du nouvel édifice a été l'adoption, en 1992, d'un règlement instituant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture qui jette notamment les fondements d'une modernisation de la politique de conservation et de gestion des ressources halieutiques.

2) Les fondements de la politique commune de la pêche

a) L'égalité de l'accès aux zones de pêche

Depuis 1976, les Etats membres se sont accordés pour étendre de 12 à 200 miles des côtes leurs droits d'exploitation des ressources marines. Parallèlement, les Etats membres ont reconnu que la Communauté était la mieux placée pour gérer la pêche dans les eaux relevant de leur juridiction, ainsi que pour défendre leurs intérêts dans les négociations internationales.

Le régime du libre accès des Etats membres aux eaux territoriales de chacun d'entre eux, adopté en 1970, a été aménagé trois ans plus tard, pour l'adhésion du Royaume Uni, du Danemark et de l'Irlande, qui ont souhaité conserver des droits exclusifs sur leur bande côtière. Depuis 1983, les Etats membres peuvent réserver à leurs pêcheurs une zone de 12 miles marins, tout en ménageant un accès aux droits historiques des autres pêcheurs de la Communauté (notamment des chalutiers français au large du Royaume Uni).

b) La conservation des ressources

Les stocks doivent se renouveler pour compenser la mortalité naturelle et la mortalité liée à la pêche. Afin d'assurer la reconstitution des stocks, il faut permettre aux jeunes poissons de grandir et de se reproduire.

La PCP fixe chaque année les quantités maximales de poissons pouvant être capturés sans risque de surexploitation. Sur la base d'études scientifiques réalisées sur les principaux stocks, le conseil des ministres statue chaque année, à la fin du mois de décembre, sur la quantité de poissons que les pêcheurs de l'Union européenne pourront capturer l'année suivante.

Ces quantités maximales, ou taux admissibles de captures (TAC), sont réparties entre les Etats membres qui en assurent le respect. La part obtenue par chaque Etat membre représente un quota national. Le système des quotas est établi, entre autres, sur la base des antériorités de pêche de chaque pays, en fonction du principe de stabilité relative.

Pour limiter la capture de jeunes poissons et les laisser grandir, diverses règles techniques ont été adoptées. Ainsi des maillages minimaux peuvent être fixés. De même, certaines zones peuvent être fermées pour la protection des stocks, certains engins de pêche interdits, et des techniques plus sélectives, facilitant la fuite des juvéniles ou limitant la capture des espèces non visées, peuvent être rendues obligatoires. Des tailles minimales de capture, en dessous desquelles il est illégal de débarquer les diverses espèces, sont également en vigueur.

c) L'équilibre entre la capacité de la flotte et la ressource disponible

Parallèlement, limiter la surpêche suppose aussi de réaliser un équilibre entre la capacité de la flotte communautaire et la ressource disponible.

Cet objectif, poursuivi par les plans d'orientation pluriannuels (POP) qui encadrent de façon trop rigide depuis 1983 l'évolution de la flotte, lie fortement considérations environnementales et économiques.

Les POP adoptés pour chaque Etat membre fixent des objectifs à atteindre en matière d'évolution de la flotte, tout en laissant une certaine souplesse dans les moyens employés. Depuis 1992, l'Union ne vise plus la simple réduction des capacités, mais celle de l'effort de pêche, défini comme le produit de la capacité d'un navire par le nombre de jours passés en mer. La panoplie des moyens va du « déchirage » ou du retrait des navires à la limitation de leur activité par des périodes d'immobilisation. Le POP IV (1997-2002), très critiqué, vise à réduire l'effort de pêche de 30 % pour les espèces en risque d'épuisement et de 20 % pour les espèces surexploitées.

En outre, depuis janvier 1995, un système de licences et de permis de pêche spéciaux permet de réguler l'accès des navires de toute provenance dans la zone de pêche communautaire de 200 miles nautiques, ainsi que l'activité des navires de l'Union opérant dans les eaux des pays tiers.

d) Les contrôles

Le contrôle du respect des dispositions de la PCP incombe aux autorités nationales. Les Etats membres assurent l'application des TAC, surveillent le niveau de consommation de leurs quotas, et doivent fermer les pêcheries concernées, dès que l'un d'eux est épuisé.

La Communauté n'intervient que pour vérifier la mise en œuvre effective, ainsi que les normes d'équité et de qualité de ce contrôle. Un service d'inspection communautaire a été créé à cet effet.

Le constat des faiblesses du contrôle de la pêche a conduit, en 1993, à un renforcement substantiel du système, prenant en compte tous les aspects de la PCP, afin d'aboutir à un contrôle intégré, à tous les niveaux de responsabilité, gage d'une application uniforme de la PCP.

Le dispositif bénéficie du concours des nouvelles technologies, notamment, depuis l'adoption en 1997, d'un plan d'extension de la surveillance des navires par satellite (système VMS).

e) L'organisation commune du marché

L'organisation commune des marchés des produits de la pêche et de l'aquaculture, inspirée du modèle agricole des fruits et légumes, a été mise en place il y a trente ans. Son objectif était de créer, au sein de la Communauté, un marché commun des produits de la pêche permettant, dans l'intérêt des consommateurs et des producteurs, un ajustement de la production à la demande.

La réalisation de cet objectif nécessitait deux types d'intervention :

· un démantèlement des barrières tarifaires et autres mesures susceptibles d'entraver la circulation des produits de la pêche entre Etats membres ;

· la définition des règles communes pour le marché du poisson.

Depuis lors, et à la suite de l'achèvement du marché unique, la libre circulation existe désormais pour l'ensemble des produits. Cela s'inscrit également dans un mouvement continu de libéralisation du commerce international marqué par une succession d'accords conclus dans le cadre de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), maintenant réglementés dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

L'organisation commune des marchés comporte quatre éléments :

· des normes de commercialisation communes pour les produits frais (tailles biologiques, calibres commerciaux, qualité, classe, conditionnement et étiquetage des produits de la pêche) ;

· les organisations de producteurs (OP), associations volontaires de pêcheurs établies pour faciliter la stabilisation des marchés et protéger les pêcheurs contre les fluctuations brusques de la demande ;

· un régime de soutien des prix qui fixe des prix minimaux en dessous desquels les produits de la pêche ne peuvent être vendus ; un prix d'orientation est fixé pour chaque campagne, ainsi qu'un prix de retrait, c'est-à-dire de 70 à 90 % du prix d'orientation ; les organisations de producteurs peuvent bénéficier d'une aide financière, si elles doivent retirer des produits de la pêche du marché, les stocker pour un usage ultérieur ou les transformer ;

· des règles régissant les échanges avec les pays tiers, visant à établir un équilibre entre les besoins du marché et les intérêts des pêcheurs de l'Union européenne, mais aussi à assurer le respect de la réglementation en matière de concurrence.

Des organisations de producteurs transnationales et des organisations interprofessionnelles rassemblant des représentants de la production, du négoce, de la transformation et des consommateurs, sont encouragées.

A l'instar d'autres volets de la PCP, l'organisation commune des marchés a dû s'adapter à de profondes mutations depuis sa création en 1970. L'offre n'est souvent guère adaptée aux besoins du marché, que ce soit en termes de quantité, de qualité et de régularité. L'amélioration des transports internationaux a entraîné une augmentation des importations de produits de la pêche. En outre, les structures de commercialisation ont évolué. Les chaînes de supermarchés, qui sont devenus les principaux acheteurs de produits de la pêche, exigent une régularité dans leurs approvisionnements et dépendent fortement des importations pour couvrir les besoins.

La conséquence en est une dépendance croissante des produits importés, qui représentent actuellement 60 % de la consommation totale des produits de la pêche dans la Communauté.

A partir de 2001, de nouvelles exigences ont vu le jour en matière de traçabilité. Elles devraient être accrues avec l'élargissement de l'Union européenne. En outre, les importations font l'objet de contrôles renforcés, en particulier les règles d'origine dont le non-respect est une cause importante de dysfonctionnement des régimes préférentiels.

f) Les actions structurelles

La politique structurelle a pour rôle d'adapter et de gérer le développement des structures de la PCP, c'est-à-dire les équipements nécessaires à la pêche, aussi bien que l'organisation des processus de production.

Les premières mesures ont favorisé le renouvellement de vieux navires et le développement de l'aquaculture intérieure. Au fil des années, le champ couvert par la politique a été élargi. A la fin des années 70, il s'étendait à d'autres branches du secteur de la pêche ainsi qu'à l'aquaculture marine. En 1983, une politique structurelle globale a été établie pour l'ensemble du secteur. L'un des objectifs qui lui était assigné était le maintien d'un équilibre entre les flottes des Etats membres, dans le droit fil du principe de la « stabilité relative », qui prévoit une répartition stable des possibilités de pêche entre les membres de la Communauté.

De nouveaux défis sont apparus avec l'achèvement du marché unique communautaire, la mondialisation croissante du marché, les effets de la surpêche et l'essor de l'aquaculture. La concurrence exercée par les producteurs au niveau mondial est devenue plus âpre et la capacité de pêche de la Communauté trop importante pour les ressources disponibles. Une restructuration profonde était donc nécessaire.

Le réexamen de la PCP en 1992 a mis en lumière la nécessité de redéfinir les outils de la politique structurelle, dans le droit fil de la politique menée par la Communauté en matière de cohésion économique et sociale, politique qui vise à soutenir le développement des régions les moins favorisées. Une aide financière était indispensable pour la protection des collectivités, souvent fragiles, dépendant de la pêche sur le plan économique et social.

Cette aide a été fournie par l'Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP), institué en 1993 pour regrouper tous les budgets structurels pouvant être mis à la disposition de la pêche et de l'aquaculture. Cela a permis d'améliorer la cohérence de la programmation pluriannuelle en l'insérant dans le cadre d'une politique structurelle globale dotée de son propre instrument financier.

L'IFOP intervient principalement dans le cadre de la restructuration de la flotte communautaire au travers d'aides à la démolition, à l'exportation ou à la reconversion des bateaux de pêche, ainsi que des aides à la modernisation. Des aides à la formation et à la reconversion, ainsi que des mesures pour faciliter la retraite anticipée sont également prévues.

L'IFOP a aussi alloué des fonds pour la mise en œuvre de mesures structurelles dans la commercialisation, la transformation et l'aquaculture, ainsi que pour la création de zones marines protégées le long des côtes et pour le développement d'installations portuaires.

D'autres mesures, telles que la promotion et l'identification de nouveaux marchés, ont également pu bénéficier d'une aide. Pour atténuer les effets les plus néfastes de la restructuration sur les régions dépendantes de la pêche, des financements spécifiques ont été prévus. En outre, une initiative communautaire appelée PESCA a été instaurée pour que les zones fortement dépendantes de la pêche puissent avoir accès aux fonds structurels, afin de mettre en œuvre des programmes axés sur la diversification de leurs activités.

g) La dimension internationale de la politique commune de la pêche

La compétence exclusive de la Communauté en matière de pêche s'étend à l'action extérieure, qui se déploie à trois niveaux :

bilatéral : au cours des années 1970, la plupart des pays côtiers de la planète ont étendu leurs zones de pêche à 200 miles marins (contre 12 miles auparavant), prenant ainsi le contrôle de près de 90 % de la ressource exploitable. Pour assurer la continuité de l'accès de la flotte des Etats membres aux zones où elle pêchait traditionnellement, la Communauté a été amenée à conclure des accords de pêche avec de nombreux pays tiers.

Les accords passés avec les pays industrialisés (Norvège, Canada, Islande ...), aux capacités de pêche similaires à celles de l'Union européenne, sont fondés sur la réciprocité d'accès. En revanche, pour les pays qui n'exploitent pas encore l'intégralité de leur ressource, comme le Groenland, les pays africains et ceux de l'Océan indien, la Communauté verse une compensation financière en échange de l'accès aux zones de pêche. Celle-ci prend la forme d'une contribution au budget national, mais aussi d'un soutien croissant au développement de la filière de pêche des pays partenaires (recherche, surveillance des activités de pêche, développement des installations portuaires, aide à la petite pêche...).

Lorsque l'Espagne et le Portugal ont adhéré à la Communauté en 1986, leurs accords bilatéraux ont été remplacés par des accords communautaires. La plupart d'entre eux existent toujours et, depuis l'adhésion de la Finlande et de la Suède, le nombre total d'accords conclus entre la Communauté et des pays tiers s'élève à vingt-six.

régional : la Communauté participe à de nombreuses organisations régionales de pêche, qui assurent une gestion des activités de pêche dans certaines zones. Il s'agit notamment de la Commission internationale des pêches de la Baltique (CIPB), qui fixe et répartit les totaux de capture pour quatre espèces (cabillaud, saumon, hareng, sprat), de la Convention internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA), ainsi que du Conseil général des pêches pour la Méditerranée (CGPM).

mondial : l'Union européenne s'efforce de favoriser un meilleur respect des engagements internationaux pour une pêche responsable, notamment de la part des bateaux battant pavillon de parties non contractantes aux organisations régionales de pêche.

II. UN PROJET DE RÉFORME DÉSÉQUILIBRÉ, QUI SE PRÉOCCUPE DE LIMITER LES CAPTURES PAR DES MOYENS SOUVENT CONTESTABLES, ET IGNORE LA FONCTION SOCIO-ÉCONOMIQUE DE LA PÊCHE

1) Les origines de la réforme

La réforme de la PCP était d'ores et déjà programmée par le règlement (CE) n° 3760/92 du 20 décembre 1992, instituant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture. Celui-ci prévoyait dans son article 14 un réexamen limité de la PCP avant le 31 décembre 2002.

En mars 2001, la Commission a publié un rapport sur la situation de la pêche communautaire, prévu par la législation en vigueur, ainsi qu'un livre vert sur l'avenir de la politique commune de la pêche. Celui-ci passait en revue les faiblesses de la PCP et les défis qu'elle doit relever, et présentait un certain nombre de propositions en vue de sa réforme.

Sur la base de ce livre vert, la Commission a lancé une consultation de toutes les parties intéressées. En juin 2001, elle a organisé une audition publique à Bruxelles, ainsi que des auditions régionales. Au cours de l'année 2001, plusieurs débats ont eu lieu au sein du Conseil « Pêche ». Au début de 2002, le Parlement européen, le Comité économique et social, et le Comité des régions se sont également saisis du livre vert.

La Commission a présenté ses propositions de réforme le 28 mai 2002. Elles prennent la forme d'un paquet de six textes :

- une communication relative au calendrier de mise en œuvre de la réforme de la politique commune de la pêche (E 2045) ;

- une proposition de règlement relatif à la conservation et à l'exploitation durable des ressources halieutiques (E 2039) ;

- une communication définissant un plan d'action communautaire pour l'intégration des exigences de la protection de l'environnement (E 2046) ;

- un plan d'action communautaire en vue d'éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (E 2044) ;

- une proposition de règlement du Conseil relatif à l'établissement d'une mesure d'urgence communautaire pour la démolition des navires de pêche (E 2041) ;

- une proposition de modification du règlement définissant les modalités et conditions des actions structurelles de la Communauté dans le secteur de la pêche (E 2040).

2) Les inquiétudes sur l'avenir de la ressource ne sont pas toujours justifiées

a) Des avis scientifiques aléatoires

Le plan Fischler entend proclamer une évidence scientifique sur laquelle les scientifiques eux-mêmes sont partagés :

« La première insuffisance de la PCP concerne l'état alarmant de nombreux stocks halieutiques, dont le volume est en deçà des limites biologiques raisonnables. La taille des stocks et les débarquements ont diminué de façon spectaculaire au cours des vingt-cinq dernières années.

Pour de nombreux stocks commercialement importants d'espèces démersales, le nombre de poissons adultes était à peu près deux fois plus élevé au début des années 70 qu'à la fin des années 90. Si les tendances actuelles persistent, de nombreux stocks halieutiques communautaires s'épuiseront.

Par ailleurs, la capacité de pêche des flottes communautaires est bien supérieure à celle nécessaire pour exploiter les ressources halieutiques disponibles d'une manière durable. Le dernier avis scientifique du CIEM indique que, pour garantir une pêche durable, le taux de mortalité par pêche de principaux stocks halieutiques communautaires devrait être réduit d'un tiers à la moitié selon le type de pêcherie (poisson plat, autres espèces démersales, espèces pélagiques) et la zone concernée ». (Communication de la Commission relative à la réforme de la politique commune de la pêche, extrait).

Comme l'a souligné M. Jean-François Minster, président directeur général de l'Ifremer, la Commission commet une erreur d'approche. Il n'y a de problèmes de diminution des captures que pour 8 espèces sur 150 (dont la morue, le cabillaud, le merlu, la sole, la langoustine et les espèces profondes). Malgré les généralités alarmistes avancées par la Commission, il n'y aurait pas de menace globale sur la ressource. Bien plus, pour certaines des espèces considérées en danger, comme la sole ou la langoustine, les observations des pêcheurs vont parfois à l'encontre des constatations faites par l'Ifremer. Ainsi, après deux années de diminution des captures, le tonnage mensuel de langoustines pêchées par les 19 chalutiers côtiers de la Cotinière (île d'Oléron) a fortement augmenté en 2001 et surtout en 2002, ce qui est le signe d'une permanence de la ressource.

L'amélioration des avis scientifiques est, en tout état de cause, une préoccupation majeure des professionnels, qui insistent pour que la recherche soit considérablement intensifiée et coordonnée, en fonction de critères homogènes au sein des différents Etats membres. Ils souhaitent aussi que l'on améliore le modèle biologique qui sous-tend l'avis sur les TAC, et que l'on se donne les moyens humains et financiers d'y parvenir.

Dans ce contexte, on doit remarquer que le plan Fischler mentionne la nécessité d'avis scientifiques plus sérieux pour fixer les TAC, ce qui revient à reconnaître qu'ils sont actuellement peu fiables. On ne peut que se féliciter des intentions de la Commission de créer un Centre européen d'évaluation et de gestion de la pêche réunissant l'expertise scientifique au niveau communautaire. Elle envisage aussi fort opportunément de renforcer le Comité scientifique, technique et économique de la pêche (CSTEP), et d'accroître la coopération entre scientifiques et pêcheurs, à travers des conseils consultatifs régionaux. C'est un pas vers une plus grande concertation entre autorités communautaires, scientifiques et professionnels, comme cela se pratique à titre expérimental pour l'évaluation des stocks en mer du Nord depuis quelques mois.

b) Des progrès insuffisants dans la gestion de la pêche

La Commission considère comme nécessaire une réduction de 30 à 60 % selon les espèces, des quotas de capture. Les principales mesures proposées concernent :

· l'instauration de plans de gestion pluriannuels (PGP) comprenant des objectifs de capture à définir en fonction de l'état de la ressource et la fixation de règles de capture visant à limiter l'effort de pêche ;

· le renforcement des mesures techniques par une plus grande sélectivité des engins de pêche, des mesures de restriction pour protéger les juvéniles, une prise en compte de la taille minimale de débarquement et le projet d'un code de conduite volontaire pour limiter les rejets ;

· le transfert à la Commission, dans le cadre de la procédure des comités de gestion, des pouvoirs jusque là détenus par le Conseil des ministres en matière de fixation des autorisations de captures et des mesures techniques ;

· l'intégration des préoccupations environnementales par l'instauration d'indicateurs d'impact environnemental et de mesures de protection des espèces vulnérables.

Le rapporteur considère comme inacceptable l'extension à toutes les espèces des contraintes figurant dans les plans de gestion, actuellement instaurés pour les seules espèces menacées. Cette attitude de la Commission est excessive, bureaucratique, et ne repose sur aucune analyse scientifique fiable. La superposition des instruments qui est envisagée dans ces plans va à l'encontre du besoin de simplicité et d'efficacité de la PCP. En particulier, il convient de s'opposer à l'introduction d'une gestion par l'effort de pêche dans ces plans. Une distinction très nette devrait être effectuée entre les plans de restauration pour les stocks réellement en difficulté et la fixation pluriannuelle des taux admissibles de capture (TAC) et des quotas. Il est souhaitable de procéder à la mise sous TAC et quotas de l'ensemble des stocks halieutiques pour lesquels ceci est justifié scientifiquement et techniquement.

Le transfert des compétences à la Commission dans des domaines aussi importants que la fixation des TAC, la mise en place des mesures techniques ou le pouvoir de sanction ne peut pas non plus être accepté.

En revanche, certaines orientations vont dans le bon sens, notamment en matière d'accès aux ressources (respect du principe de la stabilité relative et de l'accès à la zone des 6 à 12 miles). Le régime d'accès aux eaux doit en effet être empreint de stabilité, qu'il s'agisse de stabilité pour les pêcheurs côtiers qui exploitent les ressources à quelques miles de leur port d'attache, ou de stabilité pour les Etats membres en ce qui concerne les allocations de droits de pêche. L'idée d'une possible remise à plat de la stabilité relative doit donc être écartée.

c) La pêche minotière oubliée

Par pêche minotière, on entend la pêche au moyen de filets à petites mailles, dont les captures sont destinées à la production industrielle de farine et d'huile de poisson. Elle prend chaque année à son compte quelque 30 % des captures totales effectuées dans le monde. Les espèces cibles sont celles qui ne sont pas utilisées directement - ou qui le sont dans une moindre mesure - aux fins de la consommation humaine.

Avec environ 50 % de la production, le Pérou et le Chili sont les deux plus grands producteurs mondiaux de farine de poisson. Dans l'Union européenne, le Danemark, notamment, est un important producteur de farine de poisson (6 % du marché mondial). La farine de poisson sert à hauteur de 75 % d'aliment pour les volailles et les porcs, le reste - 25 % - étant utilisé dans l'aquaculture. La plus grande partie de cette huile (70 %) est utilisée dans l'industrie alimentaire où elle constitue un additif intervenant dans la fabrication de la margarine et des graisses de cuisson.

La Commission donne souvent le sentiment de soutenir la pêche minotière, car elle considère qu'elle est bien encadrée, ce qui est parfois exact. Il faut cependant souligner que la pêche minotière détruit le fourrage d'espèces prédatrices et casse la chaîne alimentaire. La pêche minotière procède à des captures accessoires de poissons de consommation n'ayant pas atteint la majorité de reproduction, qui sont définitivement perdus pour les stocks des espèces en question, sans avoir pu contribuer à leur préservation. Pratiquement, aucune limitation des prises n'est imposée à la pêche minotière.

Or, une réforme de la PCP devrait comprendre des dispositions visant à soumettre la pêche minotière à un système de contrôle rigoureux, et à une limitation des prises et des captures accessoires, reposant sur des avis scientifiques. Il convient de contrôler attentivement les incidences de la pêche minotière sur toutes les espèces. Il faut élaborer pour la pêche minotière un plan de gestion impliquant l'identification de signaux d'alarme et la délimitation de zones de protection régionale. Il est enfin nécessaire de réduire la part des captures accessoires autorisées.

3) Un système de contrôle encore imparfait

Comme l'a souligné le ministre Hervé Gaymard à plusieurs reprises, le succès de la réforme de la PCP passera moins par l'adoption de nouveaux règlements que par une application rigoureuse et harmonisée des règles existantes. A cet égard, la Commission semble vouloir faire des efforts pour renforcer l'équité du contrôle et harmoniser les sanctions pour les infractions les plus graves. Elle prévoit des pénalités plus lourdes.

L'efficacité des contrôles sera améliorée en favorisant les échanges d'inspecteurs d'un Etat membre à l'autre, en constituant des équipes d'inspecteurs mixtes et en encourageant une plus grande implication de la Commission dans l'accomplissement de ses missions de contrôle.

A terme, il serait souhaitable d'aller vers une communautarisation complète des sanctions et des contrôles, avec la création d'une agence communautaire. Cela soulève toutefois des difficultés juridiques qui dépassent le cadre de la réforme de la PCP.

En tout état de cause, il convient de rétablir la crédibilité de la politique de contrôle, et la confiance entre Etats membres. Or, à l'heure actuelle, les Etats qui, comme la France, disposent d'un système transparent de contrôle et qui se conforment aux règles, seront plus facilement punis, s'ils ne les respectent pas, que ceux qui n'ont pas de système de contrôle bien établi et transparent.

4) Des mesures structurelles lourdes de conséquences

a) Des conséquences économiques et sociales

Une très forte réduction de la flotte communautaire (soit le retrait de 8 600 navires conduisant à la disparition de 28 000 emplois) serait la conséquence directe de plusieurs des mesures préconisées par la Commission :

- la suppression, dès le 1er janvier 2003, des aides publiques à la construction de navires de pêche et à leur exportation ou à la mise en place de sociétés mixtes avec les pays tiers ;

- la limitation de ces mêmes aides publiques en faveur de la modernisation de la flotte aux mesures visant à améliorer la sécurité à bord et la qualité des produits ;

- des mesures spéciales d'augmentation des primes à la démolition pour les pêcheurs contraints à réduire leur activité dans le cadre des plans de gestion pluriannuels ;

- des mesures destinées à limiter la capacité de la flotte en remplaçant les programmes d'orientation pluriannuels (POP) par la fixation d'un plafond global des capacités de pêche et la fixation de niveaux de référence établis sur la base des objectifs finals du POP IV, ce qui signifie que toute nouvelle entrée devra s'accompagner d'un retrait de capacités au moins équivalent.

La suppression des aides publiques à la construction de navires de pêche au 1er janvier 2003 est une provocation pour les pêcheurs et les régions concernés. Cela conduira à une concentration des armements, au détriment de la fonction socio-économique de la pêche dans les zones du littoral.

b) Des menaces sur la sécurité des marins

La pêche est un secteur qui présente un grand nombre d'accidents de travail, d'où un taux de mortalité élevé (plus de 30 morts par an en France). Du fait que cette activité s'exerce loin de la terre ferme, dans l'équilibre précaire d'un navire, à la merci d'un milieu hostile et de conditions de travail difficiles, où l'application des normes de sécurité est très relative, la pêche peut être définie comme un métier très dangereux.

Contrairement à ce que prétend la Commission, les aides publiques ne peuvent pas être tenues pour responsables de la surcapacité. Elles forment au contraire l'élément indispensable au maintien d'une flotte de pêche communautaire, diversifiée et modernisée.

La Commission semble proposer un modèle de gestion adapté uniquement aux contraintes des flottes industrielles monospécifiques, mais qui ne tient pas compte des préoccupations socio-économiques des Etats qui souhaitent maintenir une pêche artisanale. Dans le cas précis de la France, le niveau de capitalisation financière de ce secteur est tel que l'on ne peut envisager des renouvellements, voire des modernisations, dans le cas de la petite pêche côtière et de la pêche hauturière artisanale, sans un accompagnement financier des pouvoirs publics. La suppression brutale de ces aides conduirait inévitablement à un vieillissement des flottilles et donc à une mise en danger accrue des pêcheurs. Ces mesures freineraient l'amélioration des conditions de travail des marins, alors qu'il existe déjà des difficultés de recrutement.

Bien au contraire, le dispositif d'aides à la modernisation et au renouvellement des navires devrait s'appliquer globalement, et de manière identique, à l'ensemble de la flotte communautaire sans distinguer selon la longueur des bateaux.

En revanche, il serait effectivement envisageable que ces aides soient, selon les cas, différenciées : GIE fiscal pour les gros bateaux, aides directes pour les petits.

5) Un volet externe en voie d'abandon

Le plan Fischler comprend un plan d'action contre la pêche illicite, dans le cadre d'une coopération internationale renforcée, ainsi qu'une stratégie de partenariat avec les pays tiers.

La Commission veut modifier la répartition actuelle du coût des accords de pêche entre l'armement à la pêche et la Communauté, ce qui risque d'affecter la compétitivité des flottes concernées. En prétendant que les accords de pêche avec des pays tiers devront être réorientés dans une optique de développement durable, la Commission semble donner du crédit à la thèse selon laquelle ces accords de pêche menaceraient les stocks des pays en voie de développement.

Or, il convient de réaffirmer l'importance capitale de ces accords de pêche, d'abord parce qu'ils constituent un apport financier vital pour certains pays africains, une part de l'aide étant obligatoirement affectée au développement de la pêche artisanale locale, et ensuite parce que l'accès à ces ressources halieutiques est essentiel pour la France et l'Espagne et fait vivre des centaines de pêcheurs de ces deux Etats.

En revanche, la stratégie proposée par la Commission en matière d'éradication de la pêche illicite recueille a priori l'assentiment des professionnels qui, sous réserve d'un examen approfondi de la communication de la Commission sur un plan d'action communautaire en la matière, estiment qu'il faut poursuivre les efforts engagés tendant à l'identification directe ou indirecte des navires illégaux, l'interdiction de leurs débarquements et l'entrée de leurs captures dans les ports et sur les marchés communautaires.

III. LES CONDITIONS DE LA PÉRENNISATION D'UNE PÊCHE DURABLE ET COMPÉTITIVE EN EUROPE

La politique commune de la pêche fait incontestablement partie des acquis de la construction européenne et doit être préservée. Cela ne signifie pas qu'elle ait toujours atteint les objectifs visés par ses concepteurs. Cependant, si une rénovation de la PCP est nécessaire, cette rénovation devra être acceptable par ceux qu'elle concerne. Il n'est pas admissible que la Commission européenne souhaite traiter un secteur d'activité économique sans lui donner des perspectives d'avenir. C'et pourquoi il convient avant tout de recueillir autant que possible l'adhésion des professionnels du secteur, de rechercher davantage de souplesse et de cohérence, et de tenir compte de l'extrême diversité des situations. Une politique commune de la pêche rénovée et efficace doit reposer sur la confiance de tous ses acteurs.

1) Maintenir les grands équilibres en matière d'accès

L'encadrement de l'accès aux ressources et aux eaux, en conformité avec le droit de la mer, et dans le respect des droits historiques des pêcheurs, est une condition nécessaire à l'exercice durable de la pêche.

La stabilité relative doit être confortée, même si elle tend à être remise en cause par les Etats ayant récemment rejoint l'Union européenne. Elle doit constituer un outil de répartition des possibilités de capture, tout en laissant le soin aux Etats, dans le cadre du respect des quotas, de prendre les choix de gestion interne qui s'imposent.

La PCP doit continuer à réserver l'accès aux eaux territoriales aux seuls pêcheurs nationaux, afin de conserver une pêche côtière artisanale, dont l'activité est indispensable à l'aménagement des zones littorales. Des exceptions ne se justifient que dans le cas où existent des droits historiques.

La communautarisation des eaux ne doit donc s'appliquer que dans la zone économique, au delà des eaux territoriales.

2) Améliorer la gestion des TAC et des quotas

Comme le souhaitent la plupart des professionnels, le système des TAC et des quotas doit demeurer à la base de la gestion des ressources.

Ce système doit toutefois être amélioré pour mieux prendre en compte la multispécificité et pour introduire la pluriannualité. Les pêcheries multispécifiques sont particulièrement nombreuses dans la Communauté. Certains stocks étant capturés simultanément, leur gestion ne peut être considérée séparément.

La pluriannualité doit viser à éviter des évolutions brutales, à la hausse ou à la baisse, du niveau de certains TAC. Dans l'esprit du rapporteur, il ne s'agit pas, comme le propose Franz Fischler, de donner à la Commission le pouvoir de fixer bureaucratiquement pour cinq ans les TAC et les quotas. Il s'agirait avant tout d'encadrer les variations des TAC d'une année sur l'autre, afin de ne pas désorganiser la gestion durable de l'activité de pêche. Un taux maximum de variation de 15 % serait souhaité par de nombreux professionnels.

En tout état de cause, la répartition des TAC au niveau communautaire doit se limiter à la fixation des quotas nationaux.

3) Mieux exploiter les ressources en fonction des réalités locales

Une meilleure exploitation des ressources pourrait passer par des fermetures de zones localisées dans le temps et dans l'espace.

Par ailleurs, l'utilisation d'engins sélectifs doit être particulièrement encouragée. Les progrès techniques enregistrés dans le domaine de la sélectivité devraient être mieux diffusés auprès des professionnels.

Une PCP efficace doit en outre reconnaître la spécificité des caractéristiques des différentes zones de pêche communautaire et rechercher une insertion harmonieuse de la pêche dans son environnement. La notion même de développement durable suppose de rendre compatibles les impératifs de protection environnementale avec la pérennité de l'action économique.

Ainsi, au Japon, la gestion de l'activité de pêche par écosystème permet de faire vivre 300 000 marins-pêcheurs sur 1 500 écosystèmes, alors que les mers n'y sont pas plus riches en poissons qu'en France.

En effet, la mer n'est pas un ensemble abstrait et uniforme. L'approche par écosystème permettrait d'affiner la connaissance économique et biologique du milieu marin, afin de pérenniser une pêche responsable.

Il est enfin surprenant que la Commission se livre à une analyse « intégriste » du problème de la ressource, en mettant uniquement en cause les pêcheurs, et en oubliant les pollutions d'origine terrestre, les aménagements du littoral, le développement industriel ou le transport maritimes qui ont souvent un impact négatif sur les ressources halieutiques. Il faudra donc veiller à une meilleure articulation entre la PCP et les autres politiques communautaires.

4) Assouplir la politique de gestion de la flotte

L'abandon des POP était inévitable. Ces instruments lourds et coûteux ne sont pas parvenus à assurer un équilibre entre la capacité de la flotte et la ressource disponible. Ils ont fait preuve de leur inefficacité, menaçant par ailleurs l'équilibre socio-économique et l'activité de nombreuses régions littorales.

Il ne serait pas réaliste de faire l'économie d'un encadrement de la flotte communautaire, mais il conviendrait de laisser aux Etats membres, dans le cadre du respect du principe de subsidiarité, davantage d'initiative pour définir les moyens permettant d'atteindre une harmonie entre les capacités de pêche de leurs flottilles et les ressources qu'elles exploitent. Les instruments mis en œuvre doivent être souples et réversibles.

5) Valoriser les produits de la mer

Valoriser les produits de la pêche nécessite d'agir sur la qualité des produits, sur leur identification et leur promotion, et de répondre aux attentes des consommateurs, qui recherchent notamment une garantie sanitaire maximale. Du fait de l'importance des échanges commerciaux et des importations, les principes de la traçabilité des produits doivent être définis au niveau communautaire.

La labellisation de produits de qualité supérieure, qui a réussi dans le domaine de l'agriculture, pourrait être adaptée aux produits de la mer. L'Ofimer constate en effet que les consommateurs sont disposés à payer plus cher le poisson, s'il est de qualité.

6) Favoriser l'équité et l'efficacité des contrôles

Tous les professionnels considèrent les contrôles comme indispensables, à condition que les procédures et les sanctions soient harmonisées. La Commission européenne doit voir ses moyens renforcés, afin de participer de façon effective aux opérations de contrôle. On ne peut donc qu'encourager le développement du corps des inspecteurs communautaires, et leur habilitation auprès des autorités judiciaires et administratives des Etats membres, afin qu'ils puissent constater valablement les infractions et être en mesure de poursuivre celles-ci devant les juridictions de l'Etat concerné.

7) Prendre en compte la dimension sociale de la pêche

a) Investir dans la formation des jeunes pêcheurs

La filière de formation des marins-pêcheurs doit être optimisée. Sans remettre en cause sa qualité, les professionnels considèrent généralement que la formation ne comporte pas assez d'embarquements avant ou en cours de formation. L'acquisition des compétences par l'expérience est fortement mise en avant. Il convient également de trouver de nouvelles voies d'accès dans le secteur pour des jeunes adultes ayant déjà un parcours professionnel, et permettre la reconnaissance à l'extérieur des qualifications maritimes, afin d'offrir des ouvertures de carrière ou des reconversions aux pêcheurs. L'objectif serait de valoriser la filière de formation pêche, en la faisant apparaître pour les jeunes et leurs familles comme une filière porteuse d'avenir professionnel.

b) Harmoniser les conditions d'emploi

La promotion de l'image de la profession passe également par une amélioration des conditions de travail, du statut, de la rémunération, de la carrière, de la formation continue.

Or, l'absence d'un volet social dans la réforme de la PCP est particulièrement choquante. L'harmonisation des conditions sociales est l'un des objectifs majeurs de la construction européenne. Il apparaît donc aujourd'hui nécessaire de rechercher une réelle amélioration des conditions de travail, en particulier par la réduction du temps de travail à la pêche et la mise en œuvre d'une politique de prévention des risques professionnels, afin d'attirer davantage de jeunes vers ce métier.

8) Rénover les accords de pêche communautaires

On oublie trop souvent la justification historique des accords de pêche : maintenir l'activité des flottilles communautaires qui préexistait à la mise en place d'une zone économique exclusive par les Etats côtiers, et communautariser des accords bilatéraux.

Ces accords ont favorisé le maintien de l'activité de nombreuses entreprises de pêche et préservé des emplois. Ils ont permis l'approvisionnement du marché communautaire en produits de la mer. Ils ont concouru à une politique de coopération avec les pays tiers. L'abandon des accords de pêche laisserait le champ libre à des flottes concurrentes de celles de l'Union européenne, dont la participation au développement et à la gestion durable des pêcheries locales ne serait pas la principale préoccupation.

Pour améliorer la gestion de ces accords de pêche, la stratégie de l'Union européenne devrait reposer sur plusieurs axes :

- renforcer le réseau existant en Afrique et dans l'Océan indien, et le compléter en mettant l'accent sur l'Océan pacifique, qui constitue une zone de pêche prometteuse ;

- harmoniser les modalités de répartition de la prise en charge du coût financier de ces accords entre l'Union européenne et les armateurs ;

- améliorer le suivi de l'activité des flottilles et de l'impact sur les pays tiers en terme de politique de coopération.

9) Reconnaître la spécificité de l'Outre-mer

L'article 299 paragraphe 2 du traité instituant la Communauté européenne rend la PCP applicable aux DOM (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion), tout en leur reconnaissant un certain nombre de particularités, qui doivent faire l'objet de mesures spécifiques, visant à adapter les conditions d'application de la PCP dans chacun des DOM.

La situation spécifique des DOM sur les plans géographique, économique et social fait que le secteur des pêches dans ces départements est soumis à des handicaps et bénéficie d'opportunités qui leur sont propres et qui méritent d'être pris en compte dans le cadre de la PCP, pour permettre un développement endogène des régions concernées.

Ce principe devrait trouver à s'appliquer notamment sur les points suivants :

- le système communautaire d'encadrement de la capacité de pêche (l'actuel POP) doit être modifié pour permettre une augmentation de la capacité des flottilles de pêche locales, en fonction des potentiels de développement halieutique dans les DOM, considérés séparément, et de façon à favoriser prioritairement le développement endogène de ces départements ;

- les taux d'intervention des fonds communautaires (IFOP) et des aides publiques nationales pour l'investissement dans l'ensemble de la filière devraient être revus à la hausse ;

- les coopérations régionales dans le domaine de la recherche halieutique devraient être favorisées, de même que devraient être mobilisés l'ensemble des moyens communautaires destinés à la recherche (notamment le programme cadre de recherche et développement) ;

- les pêches des DOM doivent être insérées dans leur environnement géographique, en recherchant notamment :

l le développement de possibilité de pêche dans les eaux d'Etats tiers voisins ;

l la préservation des intérêts des secteurs des pêches des DOM, dans le cadre des négociations d'accords commerciaux et d'accords de pêche les concernant.

Pour les régions intéressées, le régime de compensation des surcoûts induits par l'éloignement devrait être maintenu en même temps que réévalué, en ce qui concerne les volumes, le nombre d'espèces et le type de produits éligibles, afin de tenir compte des évolutions de la production et d'offrir des perspectives de développement de l'activité dans les régions concernées et l'intégration de la réalité des coûts d'acheminement des produits vers le marché communautaire.

10) Réussir l'intégration des pays candidats dans la politique commune de la pêche

Des treize pays candidats à l'adhésion à l'Union européenne, dix ont une façade maritime. Parmi les douze ayant entamé les négociations d'adhésion, seuls la Pologne et les trois pays baltes disposent d'un secteur de pêche important. Le total des captures des treize pays (Turquie comprise) représente 18 % du tonnage total des captures communautaires ; sans la Turquie les captures des douze sont inférieures à 10 % de ce total. Depuis 1990, début de la période de transition, les pays d'Europe centrale et orientale ont enregistré une chute brutale de la production due tant à la surexploitation des ressources qu'à l'effondrement des marchés à la suite de l'éclatement de l'Union soviétique.

Les négociations sur le chapitre pêche sont provisoirement closes avec tous les pays candidats (qui ont accepté l'acquis communautaire dans sa totalité), à l'exception de la Pologne et de Malte, deux demandes de dérogation présentées par ces deux pays faisant encore l'objet de discussions au Conseil.

La Pologne voudrait pouvoir interdire, pendant une période de transition de 5 ans à compter de son adhésion, l'accès à sa zone économique exclusive, à tous les navires d'une puissance supérieure à 611kW et d'une longueur dépassant 30 mètres. Quant à Malte, elle voudrait conserver sa limite de protection de 25 miles marins instaurée en 1971, au lieu des 12 miles en vigueur dans l'Union européenne.

La Pologne et la Lettonie ont demandé d'inclure de nouvelles espèces dans les listes d'espèces bénéficiant des mécanismes d'intervention sur les marchés. Une demande maltaise vise également l'inclusion d'un nombre élevé de nouvelles espèces.

Conformément aux conclusions du sommet de Göteborg, les négociations devraient être conclues pour la fin de l'année 2002. Au cours de cette année, la Direction générale de la pêche de la Commission européenne a préparé ses propositions, afin d'adapter la stabilité relative qui permet de répartir les possibilités de pêche entre les Etats membres. Celles-ci concerneront notamment certains stocks de la mer Baltique et des quotas pour certaines espèces en Méditerranée, ainsi que l'inclusion de navires des pays Baltes dans certains accords de pêche internationaux.

Globalement, l'impact de l'élargissement sur la PCP sera donc limité.

CONCLUSION CONCLUSION

Le projet de réforme de la politique commune de la pêche, qui se fonde sur un catastrophisme injustifié en ce qui concerne l'état des stocks, comprend de nombreuses dispositions inacceptables. Bien plus, il semble désigner les pêcheurs comme des prédateurs qui pillent la ressource halieutique. Il ignore la fonction socio-économique essentielle de la pêche et il oublie les efforts considérables des professionnels pour développer une pêche durable et responsable en Europe.

Dans ces conditions, on ne peut qu'approuver le gouvernement, et en particulier le ministre Hervé Gaymard, qui a, dès l'origine, adopté une position très ferme contre les propositions de la Commission, et qui a pris l'initiative de réunir un « groupe des amis de la pêche » comprenant six pays : France, Espagne, Grèce, Irlande, Italie et Portugal. La France n'est donc pas seule !

Ce groupe a pour but de mettre sur pied une plateforme commune et de formuler des contre-propositions sur la gestion de la ressource. Il convient de l'aborder espèce par espèce, zone de pêche par zone de pêche, avec un éclairage scientifique plus rigoureux, et dans le cadre d'un véritable dialogue avec les professionnels.

C'est sur cette base, et conformément aux propositions formulées dans le présent rapport, que devra être élaboré un compromis équilibré pour une réforme de la politique commune de la pêche, qui est attendue avec espoir par l'ensemble des pêcheurs européens.

{texte de la conclusion...}

TRAVAUX DE LA DELEGATION

La Délégation s'est réunie le mercredi 6 novembre 2002, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information.

L'exposé du rapporteur a été suivi d'un débat.

M. Guy Lengagne a souligné l'importance des accords de pêche avec les pays tiers, indiquant que le port de Boulogne traitait actuellement 300 000 à 360 000 tonnes de poisson, alors que la totalité de la production française représentait environ 265 000 tonnes. Il a jugé que c'était toute une partie du secteur de l'agroalimentaire qui était ainsi concernée. Il a précisé que la balance commerciale française accusait un déficit de 1 à 1,5 milliard d'euros dans ce secteur. Il a considéré que la pêche minotière constituait un problème ancien auquel jusqu'à présent personne n'avait eu le courage de réellement s'attaquer. La flotte minotière du Danemark pêche de façon très importante, au large du Jütland, tous types de poisson confondus, l'ensemble de la pêche étant destiné à être broyé sans distinction d'espèces ou de tailles.

Il a estimé que le développement de l'aquaculture ne pouvait être considéré comme la solution absolue, précisant que pour produire 1 kilo de poissons d'élevage, il fallait 8 kilos de poissons sauvages. Il a jugé que la transformation en farine, pour l'alimentation de poissons d'élevage, d'espèces sauvages consommables par l'homme, constituait une absurdité économique et écologique. Tout en jugeant que la raréfaction de la ressource halieutique au niveau mondial était une réalité qu'il fallait sérieusement prendre en compte, il a critiqué la récente décision d'interdiction totale de la pêche au cabillaud. Il a considéré que de telles mesures d'interdiction risquaient de provoquer des réactions de blocage de la part des professionnels, ce qui serait négatif pour l'ensemble de l'économie du pays, évoquant le blocage des ports français de 1980.

M. Patrick Hoguet a souhaité que le point 8 du projet de résolution précise que les aides visées par le texte sont les aides « structurelles » et que l'on évoque l'intérêt, non seulement de la sécurité des marins, mais aussi de l'équilibre du secteur et des zones concernées.

M. Jérôme Lambert a souhaité savoir si le projet de budget 2003 pour la pêche, discuté en séance publique la veille, anticipait ou non sur l'application des mesures proposées par la Commission européenne et contestées par le projet de résolution.

Le rapporteur a indiqué que le projet de budget n'anticipait pas sur l'application des mesures contestées.

M. Alfred Almont a évoqué la pêche dans les régions ultra périphériques et son fort potentiel de développement. Il a regretté que les propositions de la Commission ne contiennent aucune mesure spécifique à ce propos, contrairement aux dispositions de l'article 299 paragraphe 2 du traité instituant la Communauté européenne, et a considéré que le prochain Conseil « Pêche » constituait une opportunité pour faire des propositions en ce sens.

Le rapporteur a indiqué que le projet de rapport intégrait la nécessité de prendre en compte les spécificités de la pêche outre-mer. Il a noté que la pêche s'était notamment développée très rapidement à la Réunion depuis quelques années, du fait en particulier de l'augmentation de la pêche dans les zones australes.

M. René-Paul Victoria a souligné que le développement de la pêche à la Réunion, dont l'importance dans l'économie de l'île allait bientôt dépasser celle du tourisme, représentait un potentiel très important.

A l'issue de ce débat, la Délégation a adopté la proposition de résolution dont le texte figure ci-après.

CONCLUSIONS ADOPTEES PAR LA DELEGATION

PROPOSITION DE RESOLUTION

L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

- Vu la proposition de règlement du Conseil relatif à la conservation et à l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche (E 2039),

- Vu la proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2792/1999 définissant les modalités et conditions des actions structurelles de la Communauté dans le secteur de la pêche (E 2040),

- Vu la proposition de règlement du Conseil relatif à l'établissement d'une mesure d'urgence communautaire pour la démolition des navires de pêche (E 2041),

- Vu la communication de la Commission relative au plan d'action communautaire, en vue d'éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (E 2044),

- Vu la communication de la Commission relative à la réforme de la politique commune de la pêche (calendrier de mise en œuvre) (E 2045),

- Vu la communication de la Commission définissant un plan d'action communautaire pour l'intégration des exigences de la protection de l'environnement dans la politique commune de la pêche (E 2046),


- Vu la lettre rectificative n° 1 à l'avant-projet de budget 2003 (E 2075),

Considérant que l'Union européenne est, avec 6,7 millions de tonnes de captures par an, la deuxième puissance de pêche mondiale ;

Considérant que le secteur de la pêche et de l'aquaculture constitue pour de nombreuses zones côtières, et notamment pour la façade atlantique de la France, une source de revenus et d'emplois importante ;

Considérant que chaque emploi en mer génère d'autres emplois dans les terres et des revenus indirects liés aux activités de la pêche ;

Considérant que la politique commune de la pêche est particulièrement peu coûteuse pour les finances publiques, en ne représentant que 0,84 % du budget communautaire ;

Considérant que, dix ans après l'adoption du règlement instituant un régime communautaire de la pêche, le Conseil des ministres européens de la pêche devra statuer, avant le 31 décembre 2002, sur le projet de réforme préparé par la Commission ;

1.  Apporte son soutien au Gouvernement français dans son opposition au projet de réforme de la politique commune de la pêche, présenté par le commissaire Fischler, et approuve la démarche du groupe des « Amis de la pêche », réuni à l'initiative de la France ;

2.  Réaffirme la nécessité de respecter le principe de la stabilité relative et de l'accès à la zone des douze milles marins ;

3.  Regrette que la Commission justifie ses propositions par des menaces globales sur l'avenir de la ressource, alors que seules quelques espèces sont réellement en danger ;
4.  Souhaite que la Commission se fonde sur des avis scientifiques plus sérieux et plus fiables, pour fixer les taux admissibles de captures (TAC) espèces par espèces et zone par zone, et que les professionnels soient plus étroitement associés à l'évaluation de la ressource et à la gestion de la pêche ;

5.  Demande que la gestion des ressources continue d'être fondée sur le système des TAC et des quotas, mais que celui-ci soit amélioré afin d'encadrer les variations d'une année sur l'autre ;

6.  Forme le voeu que la pêche minotière, curieusement oubliée par la réforme de la politique commune de la pêche, soit soumise à un système de contrôle très strict et à une limitation des prises et des captures accessoires ;

7.  Se prononce avec insistance pour la constitution d'un régime de contrôle intégré, reposant sur un corps d'inspecteurs communautaires aux pouvoirs renforcés et sur des sanctions dissuasives, qui seul paraît susceptible de permettre l'application effective et égalitaire de la politique commune de la pêche ;

8.  Insiste pour que le régime des aides structurelles à la pêche soit maintenu et renforcé, afin d'assurer le maintien d'une flotte communautaire diversifiée et modernisée, dans l'intérêt de la sécurité des marins, de l'équilibre de ce secteur et des régions concernées ;

9.  Est convaincue que la politique commune de la pêche doit se concevoir dans la cadre d'une coopération internationale renforcée, grâce à un réseau d'accords de pêche, conclus avec des pays tiers et mutuellement profitables, qui assurent la présence extérieure de la Communauté et contribuent à une gestion durable des ressources mondiales de poissons.

ANNEXE

Annexe :
Liste des personnalités auditionnées

1) Auditions du rapporteur

· A Paris

- M. Michel Dion, délégué général de l'Union des armateurs à la pêche de France,

- M. Jean-Luc de Feuardent, secrétaire général de la Coopération, de la Mutualité et du Crédit maritime,

- M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de la pêche, de l'alimentation et des affaires rurales,

- M. Loïc Jagot, secrétaire général de la Fédération des organisations de producteurs de la pêche artisanale,

- M. Christian Lequesne, directeur-adjoint du CERI, directeur de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques, auteur de « L'Europe bleue : à quoi sert une politique communautaire de la pêche ? »,

- M. Alain Merckelbagh, directeur de l'Ofimer,

- M. Jean-François Minster, président directeur général de l'Ifremer,

- M. Alain Parrès, président du Comité national des pêches maritimes et président d'Europêche (association européenne des entreprises de pêche).

· Au port de la Cotinière (île d'Oléron)

- M. Jean-Claude Blémon, président de la Communauté de communes d'Oléron,

- M. Gilbert Crochet, président de la coopérative La Cotinarde,

- M. Nicolas Dubois, directeur du développement du port de la Cotinière,

- M. Albert Etien, président du comité régional des pêches maritimes de Poitou-Charente,

- M. Gilbert Fesseau, président du Comité local des pêches de l'île d'Oléron,

- M. Guy Jouinot, proviseur du lycée de la mer et du littoral de Bourcefranc,

- M. Guy Joussemet, président et M. Didier Veteau, directeur de la coopérative de gestion COGESCO,

- M. Jean-Claude Pelletier, président de la société nationale de secours en mer de l'île d'Oléron,

- M. Jean-Paul Peyry, maire de Saint-Pierre d'Oléron,

- M. Jean-Louis Picq, président du comité local des pêches de La Rochelle,

- M. Alain Poisson, directeur régional des affaires maritimes de Poitou-Charente,

- M. Eric Renaud, directeur de l'organisation des producteurs de la Cotinière.

2) Auditions de la Délégation pour l'Union européenne

- M. Franz Fischler, commissaire européen,

- M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de la pêche, de l'alimentation et des affaires rurales.

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