_______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 mars 2003 RAPPORT D'INFORMATION DÉPOSÉ PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE (1), sur la sécurité maritime en Europe, ET PRÉSENTÉ par MM. Guy LENGAGNE et Didier QUENTIN, Députés. ________________________________________________________________ (1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page. Transports par eau. La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. Pierre Goldberg, François Guillaume, secrétaires ; MM. Alfred Almont, Bernard Bosson, Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin. SOMMAIRE _____ Pages PREMIERE PARTIE : DU NAUFRAGE DE L'ERIKA A CELUI DU PRESTIGE : L'INJUSTE PROCES DE L'IMMOBILISME DE L'EUROPE 17 I. LA MISE EN PLACE D'UNE STRATEGIE GLOBALE PAR L'UNION EUROPEENNE POSTERIEUREMENT AU NAUFRAGE DE L'ERIKA 19 A. Le renforcement de l'arsenal législatif communautaire 19 1) Le comblement des lacunes les plus graves 19 a) Les contrôles exercés par les Etats membres 19 (1) Le renforcement des contrôles techniques de l'Etat du port 20 (2) L'amélioration de la surveillance du trafic dans les eaux européennes 22 (3) La lutte contre les dégazages et les déballastages 24 b) L'encadrement plus étroit des sociétés de classification 26 2) Le renforcement de la coordination de l'action des Etats membres : la création de l'Agence de sécurité maritime 28 B. La volonté de l'Union européenne d'infléchir la législation internationale 29 1) L'accélération du calendrier du retrait des pétroliers à simple coque 29 2) L'amélioration du régime d'indemnisation des dommages résultant des pollutions par les hydrocarbures 33 II. UNE STRATEGIE QUI N'A PU PORTER PLEINEMENT SES FRUITS 39 A. La frilosité du Conseil et des Etats membres 39 1) Le soutien limité du Conseil aux propositions de la Commission 39 2) Le bilan médiocre de la transposition des paquets Erika I et II 41 B. Les effets récurrents du désordre maritime international 43 1) Les déséquilibres que recèle le système juridique international 44 2) Les dysfonctionnements du système international encouragent une chaîne d'irresponsabilités 45 DEUXIEME PARTIE : UN DEFI MAJEUR : PARVENIR A LA MISE EN œUVRE D'UNE VERITABLE POLITIQUE EUROPEENNE DE SECURITE MARITIME 47 I. LA DOUBLE AMBITION DE LA COMMISSION : ACCELERER LA CONSOLIDATION DE L'ESPACE MARITIME EUROPEEN TOUT EN IMPULSANT DIVERSES REFORMES AU PLAN INTERNATIONAL 49 A. Une priorité : l'application effective et rapide du cadre législatif communautaire existant 49 1) La mise en œuvre anticipée des dispositifs des paquets Erika I et II 49 2) La présentation d'un train de mesures complémentaires 54 a) La formation des gens de mer 54 b) L'institution d'un système de sanctions pénales 56 c) Les informations transmises par les pilotes à l'Etat du port 57 B. Les propositions de réformes ayant une portée internationale 58 1) Les nouvelles règles régissant le transport du pétrole par voie maritime 58 a) L'interdiction du transport des produits pétroliers les plus lourds dans les pétroliers à simple coque 58 b) La révision du calendrier du retrait des pétrioliers à simple coque 59 c) L'extension du système d'évaluation des navires 61 2) L'extension des prérogatives reconnues aux Etats côtiers 62 a) L'interdiction de l'accès des pétroliers à risque dans la zone économique exclusive (ZEE) 62 b) La proposition visant à créer des "zones particulièrement vulnérables" 64 II. UNE DEMARCHE CONTROVERSEE, QUI MERITE POURTANT D'ETRE SOUTENUE ET COMPLETEE 67 A. Les propositions de la Commission suscitent des réserves 67 1) Des doutes quant à leur efficacité 67 a) L'opportunité des mesures est contestée 67 b) Le débat inévitable sur l'adéquation des propositions de la Commission 71 2) Des doutes quant à leur licéité 72 B. La logique de la démarche de la Commission doit être soutenue et complétée 74 1) Une démarche qui doit être soutenue 74 a) Les attentes fortes de l'opinion publique 75 b) La crédibilité de l'Europe et des Etats est en jeu 75 2) La démarche de la Commission doit être complétée 78 a) L'Europe doit étoffer sa politique de sécurité maritime 78 b) L'action de l'Union européenne doit se prolonger au plan mondial 82 c) L'action de l'Union doit être relayée par celle des Etats membres 85 Audition de M. Dominique Bussereau, Secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, sur la sécurité maritime en Europe, le 15 janvier 2003 91 Réunion de la Délégation du mardi 4 mars 2003 102 Annexe 1 : Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs 113 Annexe 2 : Les paquets Erika I et Erika II 117 Annexe 3 : Dégazage et déballastage dans les transports maritimes 119 Annexe 4: Etat des lieux des installations de réception dans les principaux ports français 123 Annexe 5: Etat de la transposition des paquets Erika 125 Annexe 6 : Rapport au Conseil européen sur les suites à donner aux conséquences de la catastrophe du Prestige 127 Annexe 7 : Mesures prises par les Etats membres en vue d'améliorer le contrôle par l'Etat du port 149 Annexe 8 : Lettre de M. Romano Prodi, Président de la Commission européenne, à son Excellence M. Costas Simitis, Premier ministre de la Grèce, Président du Conseil européen, en date du 17 janvier 2003 151 Annexe 9 : Lettre de MM. Jacques Chirac, José Maria Aznar et José Manuel Durao Barroso à son Excellence M. Costas Simitis, Premier Ministre de la Grèce, Président du Conseil européen, en date du 7 février 2003 155 Annexe 10 : Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions, notamment pénales, en cas d'infractions de pollution 157 Annexe 11 : Missions de l'US Coast Guard 191 Annexe 12 : Motion de la délégation du Sud-Ouest de la Mission de la Mer 193 Le naufrage du Prestige survenu le 13 novembre 2002, trois ans seulement après celui de l'Erika, souligne de nouveau la vulnérabilité de l'Europe devant les marées noires puisque, pour la première fois, trois Etats membres sont affectés par la pollution : l'Espagne, le Portugal et la France. Mais surtout, cette catastrophe peut inciter l'opinion publique, de plus en plus sensible aux problèmes écologiques, à mettre en cause la crédibilité des mesures proposées en 2000 par la Commission postérieurement au naufrage de l'Erika, et que l'on appelle paquets Erika I et II. Légitime parce qu'elle illustre un refus de la fatalité et qu'elle révèle une profonde exaspération, cette réaction de l'opinion publique risque d'être pourtant taxée de partialité. C'est pourquoi, dans une première partie, les rapporteurs rappellent que la stratégie poursuivie par la Commission depuis trois ans a été entravée. Les Etats membres ont non seulement limité leur soutien aux propositions de la Commission, mais rares sont ceux qui ont pris les mesures nécessaires à la transposition des directives dans le délai prescrit. De fait, la Commission a beau jeu de souligner que la catastrophe du Prestige aurait été évitée, si les Etats membres avaient accepté d'adopter dès 2000 son calendrier de retrait des navires à simple coque, aux termes duquel des pétroliers tels que le Prestige auraient dû cesser de naviguer le 1er septembre 2002. Par ailleurs, le naufrage du Prestige a confirmé la persistance de dysfonctionnements graves dans le transport maritime international. La Commission entend tirer profit de ce contexte pour parachever l'élaboration d'une véritable politique européenne de la sécurité maritime. Le rapport en expose les grandes lignes dans sa deuxième partie. La démarche de la Commission consiste ainsi à consolider l'espace maritime européen, au travers de l'application anticipée des paquets Erika I et II. Elle entend aussi instituer un système de sanctions pénales, dont le champ d'application sera suffisamment large pour poursuivre les « voyous des mers ». Enfin et surtout, la Commission propose des projets ambitieux qui entraîneront, au plan international, des réformes de grande ampleur. Il convient de mentionner l'instauration d'un nouveau calendrier de retrait des pétroliers à simple coque, plus sévère même que celui prévu par la législation américaine, la limitation du transit de pétroliers à risque dans la zone économique exclusive des Etats membres ou encore la création de zones particulièrement vulnérables pour préserver des risques de pollution les zones à navigation intense. Ces différents projets suscitent des controverses, car la Commission est l'objet des mêmes reproches d'unilatéralisme que les Etats-Unis en 1990. Pour autant, les rapporteurs ont pris le parti de les soutenir, et même de leur apporter des compléments. Ils y voient en effet la meilleure voie pour permettre à l'Europe de jouer un rôle moteur dans la régulation de la mondialisation. The wreck of the Prestige on 13 November 2002, only three years after that of the Erika, emphasises once more Europe's vulnerability to oil spills since, for the first time, three Member States - Spain, Portugal and France - are affected by the pollution. But above all, this new disaster may cause the public, whose awareness of ecology has grown, to question the credibility of the measures, known as the Erika I and II packages, which the Commission proposed in 2000 following the wreck of the Erika. This reaction of public opinion is legitimate because it illustrates its refusal of the idea of fatality and reveals its deep exasperation. Yet the public could however be accused of bias. That's why, in a first part, the rapporteurs recall that the strategy the Commission has pursued for the past three years now has been hindered. The Member States have limited their support for the Commission's proposals and very few of them have taken the necessary steps to transpose the Directives within the prescribed time. But it is not difficult for the Commission to emphasise that the Prestige disaster would not have occurred had the Member States accepted to adopt in 2000 its schedule for the phasing-out of single-hull ships, according to which tankers like the Prestige should have stopped sailing on 1 September 2002. Also the wreck of the Prestige confirmed the persistence of dysfunctions prejudicial to international sea transport. The Commission wishes to take advantage of this context to complete the elaboration of a genuine European policy of maritime safety, which is outlined in the second part of the report. The Commission's approach consists therefore in consolidating the European maritime area by means of the early application of the Erika I and II packages. It also intends to set up a system of penalties whose scope will be sufficiently broad to pursue `sea rogues'. Lastly, and above all, the Commission proposes ambitious projects which will lead, internationally, to far-reaching reforms. Mention should be made of the setting in place of a new schedule for the phasing-out of single-hull tankers, even stricter than that laid down by American legislation, the limitation of the transit of sub-standard tankers in the exclusive economic zone of the Member States, and also the creation of what are known as particularly vulnerable areas in a bid to preserve areas of high shipping activity from the risks of pollution. These various projects are giving rise to controversies : the same reproaches of unilateralism are being levelled against the Commission as against the United States in 1990. Yet the rapporteurs have decided to support them and even add complementary elements because they feel this is the best way of allowing Europe to play a leading role in regulating globalization. Mesdames, Messieurs, « A chaque marée noire, les gouvernements entonnent la même rengaine : mais que fait donc l'Europe ? »(1). C'est à cette question, posée à la suite du naufrage du Prestige, survenu le 13 novembre 2002 au large des côtes espagnoles, que tente précisément de répondre le présent rapport d'information. Vos deux rapporteurs ont pu, au fil des auditions auxquelles ils ont procédé, mesurer à la fois l'ampleur et la nécessité de la double tâche qui leur a été confiée par la Délégation pour l'Union européenne. En effet, au-delà du présent rapport d'information sur la sécurité maritime en Europe, dont l'objet est d'évaluer les mesures envisagées ou déjà prises, et d'élaborer des pistes de réforme dans la perspective du Conseil européen des 20 et 21 mars 2003, il leur est demandé d'assurer le suivi de ces problèmes tout au long de la législature. Or, ce faisant, il apparaît tout à fait essentiel que l'Assemblée nationale - au travers des travaux de la Délégation pour l'Union européenne ou de ceux des commissions d'enquête(2), celle sur l'Erika et celle qui vient d'être constituée sur le Prestige - montre qu'elle tire les conséquences du nouveau contexte auquel l'Europe et les Etats membres sont désormais confrontés. Car, manifestant une impatience évidente et une sensibilité accrue à l'écologie(3), l'opinion publique semble exiger désormais une obligation de résultat, face à des catastrophes telles que les marées noires. Il y a là une évolution remarquable, en particulier en France, pourtant considérée, jusqu'à une période encore récente, comme un pays profondément terrien. Ces changements ne sont sans doute pas étrangers à la position très ferme adoptée notamment par les autorités françaises depuis plusieurs semaines. C'est la raison pour laquelle le naufrage du Prestige, trois ans seulement après celui de l'Erika, peut conduire l'opinion publique à s'interroger sur l'efficacité réelle des mesures proposées en 2000 et 2001 par la Commission dans ce que l'on appelle les paquets Erika I et II, d'autant que, pour la première fois, la pollution affecte trois Etats membres : l'Espagne, le Portugal et la France. La cause serait ainsi définitivement entendue. Non seulement, l'Europe n'aurait pas tiré les leçons du passé, ce qui lui interdirait d'invoquer une quelconque fatalité. Mais, en outre, l'Europe continue d'accuser un retard considérable par rapport aux Etats-Unis, qui, au prix d'une législation draconienne, sont parvenus à limiter le risque de marée noire depuis la catastrophe de l'Exxon Valdez survenue en 1989. Or, même s'ils partagent, en leur qualité d'élus du littoral, l'émotion des populations touchées par la catastrophe du Prestige, les rapporteurs estiment néanmoins nécessaire de souligner d'emblée deux séries de faits qui sont de nature à imposer une approche plus nuancée des problèmes de la sécurité maritime. D'une part, il convient de constater certaines améliorations. Ainsi, un mémorandum de l'OMI révèle que le nombre de morts par accident a diminué de 41 % entre 1998 et 2001, ayant été ramené de 507 à 306, tandis que le nombre des marées noires a été trois fois moins élevé au cours des années 90 que durant les années 70, alors que le trafic communautaire et international a presque triplé entre 1970 et 2000 selon les statistiques de la Commission. De même, la moyenne mondiale des sorties de flotte pour démolition des petits pétroliers tend à s'accroître : inférieure à 22 navires par an de 1995 à 1999 - soit à peine 700 000 tonnes - cette moyenne s'établit à 55 pour presque 2 millions de tonnes de 1999 à 2002 avec un maximum de 72 après le naufrage de l'Erika, ce qui montrerait que les mesures préconisées par la Commission n'ont pas été totalement dépourvues d'effets. D'autre part, il importe de souligner le fait que la politique de la sécurité maritime s'élabore dans un contexte où les différents niveaux de décision - national, européen et mondial - s'enchevêtrent. Il serait, dès lors, abusif que les Etats membres reprochent à l'Union européenne de ne pas prendre les mesures nécessaires, si, dans le même temps, ils ne transposent pas correctement les directives communautaires dans le délai prescrit, ou si encore ces mêmes Etats membres invoquent la nécessité de respecter les compétences de l'OMI pour empêcher l'Union européenne de prendre des initiatives. Cette pratique du double langage ne peut que nuire à la crédibilité des Etats membres et à celle de l'Europe et, en définitive, conforter le scepticisme - ou même l'euroscepticisme - de l'opinion publique. Une telle dérive serait d'autant plus regrettable qu'il leur incombe de relever un défi : dans un domaine particulièrement révélateur des impasses d'une mondialisation sauvage, concilier les exigences de la protection de l'environnement et de la sécurité maritime, avec celles du développement du transport maritime. Il s'agit pour l'Europe de jouer ici un rôle analogue à celui qui lui a permis de contribuer à une meilleure régulation du commerce international, grâce à la création de l'Organisation mondiale du commerce, ou de faire respecter la notion de développement durable au moyen du protocole de Kyoto. C'est cette conviction qui inspire la démarche du présent rapport, lequel, avant de plaider en faveur d'une véritable politique européenne de la sécurité maritime, rappelle pourquoi il est injuste d'imputer la catastrophe du Prestige à un prétendu immobilisme de l'Europe. PREMIERE PARTIE : Il n'est pas excessif de parler d'injuste procès. Car, d'une part, le naufrage du Prestige est malheureusement survenu avant que n'entrent en vigueur les paquets Erika I et II, c'est-à-dire les mesures préconisées en 2000 et en 2001 par la Commission à la suite du naufrage de l'Erika(4), dont la date d'application s'étale, selon les cas, entre 2002 et 2004. D'autre part, force est de constater que la Commission n'a pas bénéficié d'un soutien total de la part des Etats membres, que ce soit lors de la discussion de ses projets ou lors de leur transposition. C'est d'ailleurs pourquoi Mme Loyola de Palacio, commissaire européenne en charge des transports et de l'énergie, a réagi très vivement le 21 novembre dernier devant le Parlement européen en ces termes : « La marée noire aurait pu être évitée si toutes les propositions de la Commission avaient été pleinement adoptées et appliquées ». I. LA MISE EN PLACE D'UNE STRATEGIE GLOBALE PAR L'UNION EUROPEENNE POSTERIEUREMENT AU NAUFRAGE DE L'ERIKA C'est bien l'idée de stratégie globale qu'il convient d'évoquer, puisque la Commission a proposé un large éventail de dispositions touchant à la prévention, à l'indemnisation et aux sanctions. Elles ont eu pour objet de renforcer l'arsenal législatif communautaire et d'infléchir certains aspects de la législation internationale. Outre le comblement des lacunes les plus graves, les réformes préconisées ont concerné également le renforcement de la coordination de l'action des Etats membres par la création de l'Agence de sécurité maritime. 1) Le comblement des lacunes les plus graves a) Les contrôles exercés par les Etats membres Les mesures adoptées ont poursuivi un triple objectif : - le renforcement des contrôles techniques de l'Etat du port ; - l'amélioration de la surveillance du trafic dans les eaux européennes ; - la lutte contre les dégazages et les déballastages. (1) Le renforcement des contrôles techniques de l'Etat du port Les navires de commerce étrangers sont soumis à la juridiction de tout Etat côtier, lorsqu'ils se trouvent dans ses eaux intérieures ou dans ses ports. Ce contrôle - dit de l'Etat du port - est aujourd'hui régi par la convention sur le droit de la mer et les conventions de l'OMI. Il s'est développé essentiellement dans un cadre régional. En ce qui concerne l'Europe, ce cadre résulte du mémorandum d'entente de Paris. Signé le 26 janvier 1982, sur une initiative française consécutive aux naufrages de l'Amoco-Cadiz et du Tanio, cet accord organise une collaboration régionale pour contrôler, de façon harmonisée, les navires étrangers dans les ports des Etats signataires, tout en évitant les détournements de trafic et les distorsions de concurrence. A ce jour, le mémorandum d'entente de Paris regroupe dix-neuf Etats : les treize membres de l'Union européenne qui disposent d'un littoral, la Croatie, la Norvège, la Pologne, la Fédération de Russie, le Canada et l'Islande. Aux termes de cet accord, chacune des parties s'engage à inspecter, chaque année, au moins 25 % des navires étrangers faisant escale dans ses ports. Les résultats de ces inspections sont accessibles à l'ensemble des autres parties grâce à une banque de données commune, dénommée Sirenac, qui est gérée par l'administration française des affaires maritimes depuis 1983. C'est la directive 95/21/CE du 19 juin 1995 qui, sous réserve de diverses améliorations, intègre les mécanismes du mémorandum dans le cadre communautaire, en les rendant uniformes et obligatoires pour l'ensemble des Etats membres. En ciblant les navires à risques et en publiant des listes noires des navires ayant été retenus au moins deux fois au cours des deux dernières années, les signataires du mémorandum ont cherché à décourager les opérateurs d'exploiter des navires sous-normes dans les eaux européennes. Pour autant, les conditions d'application du mémorandum ont donné lieu à plusieurs critiques. On a, par exemple, fait observer que la répartition géographique des détentions avait laissé planer des doutes quant à l'efficacité du contrôle exercé dans certains ports. C'est ainsi que sur les 141 navires détenus deux fois au cours du second semestre 1997, le premier port du monde, Rotterdam, ne comptait que 12 immobilisations pour 7 230 navires entrés, tandis que Sète en totalisait 7 pour seulement 314 entrées(5) ! Quant à la Commission, elle a estimé que trois séries de raisons au moins justifiaient, à la suite du naufrage de l'Erika, une modification de la directive 95/21/CE : - le seuil des 25 % d'inspections de navires distincts fixé par la directive n'est toujours pas respecté par plusieurs Etats membres ; - le système du coefficient de ciblage - c'est-à-dire le faisceau d'informations contenues dans la base Sirenac à l'aide duquel les navires sont sélectionnés en vue de leur inspection - prévu par le mémorandum de Paris et rendu obligatoire par la directive n'est pas appliqué de manière satisfaisante ; - l'examen des comptes-rendus des inspections effectuées avant l'accident de l'Erika semble démontrer que les inspections renforcées conduites en application de la directive ne sont pas toujours effectuées avec la rigueur nécessaire(6). C'est pourquoi la directive 2001/106/CE du 19 décembre 2001 modifiant la directive 95/21/CE contient une série de mesures destinées à améliorer et à renforcer le régime d'inspections. On en retiendra deux qui revêtent une importance particulière, parce qu'elles devraient contribuer à bannir les navires sous-normes des eaux européennes : - la première institue le principe d'une obligation d'inspecter un navire, mesure dont était dépourvue la directive 95/21/CE. Elle s'applique - entre autres - aux navires ayant atteint un certain âge présentant un risque important d'accident ou de pollution. Ces navires font ainsi l'objet d'une inspection renforcée. Parmi eux figurent les pétroliers d'un tonnage brut supérieur à 3 000 tonnes et âgés de plus de quinze ans, parce que, d'une part, ils présentent des risques de pollution majeure et que, d'autre part, la grande majorité des anomalies conduisant à l'immobilisation concernent des navires de plus de quinze ans ; - la deuxième disposition impose aux Etats membres de refuser l'accès dans leurs ports à certains navires (navires citernes pour gaz et produits chimiques, vraquiers, pétroliers et navires à passagers), si le navire : ¬ bat pavillon d'un Etat figurant sur la liste noire publiée dans le rapport annuel du mémorandum d'entente de Paris et ¬ a été immobilisé plus de deux fois au cours des vingt-quatre mois précédents dans un port d'un Etat signataire du mémorandum d'entente de Paris ; ou bien ¬ bat pavillon d'un Etat décrit comme présentant « un risque très élevé » ou « un risque élevé » dans la liste noire publiée dans le rapport annuel du mémorandum d'entente de Paris et ¬ a été immobilisé plus d'une fois au cours des trente-six mois précédents dans un port d'un Etat signataire du mémorandum d'entente de Paris. Il est, en outre, imparti à la Commission de publier tous les six mois les informations relatives aux navires auxquels l'accès aux ports de la Communauté a été refusé sur la base des dispositions précitées. (2) L'amélioration de la surveillance du trafic dans les eaux européennes La directive 93/75/CEE du 13 septembre 1993 a mis en place un système d'information des autorités compétentes sur les navires transportant des marchandises dangereuses ou polluantes à destination des ports de la Communauté ou en sortant, ainsi que sur les incidents survenus en mer. Or, pour la Commission, cette directive ne permet pas d'avoir une connaissance et un suivi précis des navires, en particulier de ceux qui transitent le long des côtes européennes. En outre, elle a jugé nécessaire que les navires se conforment aux exigences de signalement posées par les règles de l'OMI. C'est pour y porter remède que la directive 2002/59/CE du 27 juin 2002 a prévu plusieurs dispositions dont certaines, comme les lieux de refuge, risquent de s'avérer d'application très délicate. Conformément à certaines recommandations déjà formulées en France(7), elle impose une obligation de signalement - au moins 24 heures à l'avance - à tout navire faisant route vers un port d'un Etat membre. En second lieu, conformément à une norme adoptée par l'OMI en décembre 2000, tout navire faisant escale dans le port d'un Etat membre doit être équipé d'un transpondeur, à l'image des boîtes noires des avions. Les transpondeurs - ou systèmes d'identification automatique - doivent faciliter l'identification et le suivi des navires le long des côtes européennes. Enfin, la directive impartit aux autorités compétentes des Etats membres, en cas de conditions météorologiques exceptionnellement défavorables, de risque grave de pollution de leurs zones maritimes ou côtières ou de celles d'autres Etats ou de menace pour la vie humaine, de recommander ou d'interdire l'entrée dans un port ou la sortie de ce dernier, jusqu'à ce qu'il ait été établi qu'il n'existe plus de risque pour la vie humaine ou l'environnement. Quant aux lieux de refuge, il est demandé aux Etats membres d'établir des plans en vue d'accueillir des navires en détresse dans leurs eaux territoriales. Ces plans comportent les dispositions et les procédures nécessaires tenant compte des contraintes opérationnelles et environnementales, afin de garantir que les navires en détresse puissent se rendre immédiatement dans un lieu de refuge, sans l'autorisation de l'autorité compétente. Lorsque les Etats membres le jugent nécessaire et faisable, les plans comportent des arrangements pour la fourniture de moyens et d'installations adéquats pour l'assistance, le sauvetage et la lutte contre la pollution. Ces dispositions revêtent une importance particulière à la lumière des conditions dans lesquelles est survenu l'accident du Prestige, puisque, d'après les premières informations obtenues, il n'a pu se réfugier dans un port espagnol. (3) La lutte contre les dégazages et les déballastages Il s'agit là de deux types de pollutions(8), qui d'après les informations communiquées aux rapporteurs représentent 45 % de la pollution marine, le reste se répartissant entre pollutions terrestres pour 45 % et 10 % pour les hydrocarbures. Dans le vocabulaire actuel, le dégazage paraît désigner l'opération qui consiste pour un navire à laisser dans son sillage une traînée irisée résultant de la présence d'hydrocarbures. Il s'agit alors d'une opération polluante et interdite. Le déballastage est l'opération consistant à se séparer du ballast lorsque le navire va commencer les opérations de chargement. Le ballast, longtemps composé de matières solides, est aujourd'hui composé d'eau de mer. Le ballastage qui permet de corriger l'assiette et la gîte de tout navire constitue en soi un important élément de sécurité de la navigation et permet au navire de se tenir aussi près que possible de ses lignes idéales, facteur d'efficience de l'appareil propulsif. Les déballastages recouvrent en fait deux types de rejets en mer, ceux provenant des machines et ceux provenant des espaces à cargaison. Ces rejets sont soumis à une réglementation déjà très stricte, qui trouve sa source principale dans la convention de Londres du 2 novembre 1973, modifiée par le protocole de 1978, dite Marpol 73-78. Au plan communautaire, la directive 95/21 du 19 juin 1995 sur le contrôle par l'Etat du port tente de prévenir les déballastages, en posant que les navires qui constituent une menace pour le milieu marin ne sont pas autorisés à appareiller. Allant plus loin, la directive du 27 novembre 2000 impose aux capitaines des navires faisant escale dans les ports de la Communauté de déposer tous les déchets d'exploitation des navires dans une installation portuaire, moyennant le paiement d'une redevance. A cet effet, chaque port doit établir et mettre en œuvre un plan de réception et de traitement des déchets. Conformément au principe du pollueur-payeur, les coûts des installations de réception portuaires, y compris le traitement et l'élimination des déchets d'exploitation, devraient être couverts par la redevance perçue sur les navires. En ce qui concerne la France, il résulte d'un tableau de la Direction du transport maritime, des ports et du littoral(9) que nos ports sont dotés d'équipements satisfaisants. Les rapporteurs ont pu constater au cours de leurs auditions que, malheureusement, cette directive était inégalement appliquée, ce qui est de nature non seulement à favoriser les distorsions de concurrence mais aussi à contraindre les navires à procéder à des déballastages faute d'installations portuaires. Il est vrai que les déballastages peuvent également être imputés à l'insuffisance d'effectifs. L'Association des capitaines de navire a, en effet, fait observer que le traitement propre des déchets pouvait être effectué à bord, à condition qu'une personne y soit affectée huit heures par jour. Or, il n'est pas certain que cette condition soit toujours remplie. On relèvera enfin que la répression des rejets se heurte à de sérieuses difficultés. Celles-ci tiennent à l'établissement des preuves, c'est-à-dire à la nécessité de rattacher un rejet à un navire déterminé. C'est pourquoi, aux Etats-Unis par exemple, on a eu recours à des techniques de traçabilité qui permettent de remonter jusqu'à l'auteur de l'infraction. En second lieu, on a pu déplorer que, jusqu'à une période très récente, les amendes infligées aient été très peu élevées et dépourvues ainsi de tout effet dissuasif, à la différence des Etats-Unis où des amendes de plusieurs millions de dollars ont permis de réduire la pollution volontaire de moitié en trois ans(10). La situation est toutefois en voie d'amélioration : c'est ainsi, par exemple, qu'un tribunal espagnol a infligé, au mois de décembre 2002, une amende d'un montant de 600 000 euros à un navire reconnu coupable de déballastage sauvage(11). b) L'encadrement plus étroit des sociétés de classification Tout navire est « classé ». Répondant à l'objectif d'améliorer la protection du bien que représente le navire, cette classification s'opérait, à l'origine, aux fins d'assurance. Il s'agit d'une opération de caractère « privé » effectuée par des sociétés de droit privé dites de classification, sur la demande de l'armateur. La sûreté du navire, qui repose sur un certain nombre de critères techniques - résistance, tenue à la mer, stabilité... spécifiques à chaque type d'embarcation, en fonction de l'utilisation commerciale, du genre de navigation, du mode de propulsion - doit, en outre, être conforme aux dispositions de caractère général prévues par les conventions internationales de l'OMI. Au-delà de leur activité privée (de classification) les sociétés de classification se sont vu, en raison de leurs compétences techniques, chargées par les Etats de vérifier la bonne application des règles internationales relatives à la sécurité maritime et à la protection de l'environnement. A ce titre, elles effectuent un certain nombre de visites, dont celles relatives à la prévention de la pollution par les hydrocarbures ainsi qu'aux vérifications relatives à l'attestation de conformité et au certificat de gestion de la sécurité (code ISM), et aux inspections. Elles délivrent, au nom des Etats, les titres officiels qui attestent la conformité du navire. Il s'agit de l'activité de certification. Or, trois séries de reproches leur sont généralement adressés : - les risques de conflits d'intérêt auxquels peuvent être exposées les sociétés de classification, lorsqu'elles sont elles-mêmes propriétaires ou exploitants du navire à inspecter ou lorsqu'elles ont des liens professionnels, personnels ou familiaux, avec le propriétaire ou l'exploitant du navire ; - le caractère de plus en plus commercial des sociétés de classification a entraîné une forte concurrence pour attirer la clientèle. Parallèlement, la Commission relève une tendance préoccupante à la prolifération de sociétés appliquant des normes de niveaux variables et une tendance croissante des propriétaires à pratiquer le changement de classe, pratique dite de « class-hopping » ; - « on peut sérieusement se demander si le système de classification dans son ensemble fait suffisamment d'efforts pour atteindre les niveaux de qualité requis », s'interroge la Commission(12). Au demeurant, cette dernière fait valoir que pour de nombreuses personnes du secteur, tous les membres de l'IACS (Association internationale des sociétés de classification) ne respectent pas les normes strictes nécessaires. Pour cet ensemble de raisons et afin de permettre l'adaptation de la réglementation communautaire aux normes de l'OMI, la directive 2001/105/CE du 19 décembre 2001 a modifié la directive 94/57/CE du 22 novembre 1994 pour instituer un cadre qui soit davantage harmonisé. Dans cette perspective, elle met en place une procédure de l'octroi, du retrait et de la suspension de l'agrément, dans laquelle la Commission joue un rôle central. De même, la Commission a vu son rôle renforcé dans la surveillance des activités des sociétés de classification. En second lieu, pour tenir compte des dysfonctionnements qui découlaient antérieurement des disparités entre les régimes de responsabilité des sociétés de classification, la directive prévoit un dispositif harmonisé, selon les principes suivants : - responsabilité illimitée pour un acte ou une omission volontaire ou une négligence grave ; - responsabilité limitée à 4 millions d'euros en cas de dommages corporels ou de décès résultant d'un acte ou d'une omission par négligence ou imprudence ; - responsabilité limitée à 2 millions d'euros en cas de préjudice ou de dommage matériel résultant d'un acte ou d'une omission par négligence ou imprudence. Cette harmonisation n'est toutefois qu'imparfaite, puisque ces limites sont des planchers, de façon à permettre à certains Etats - en particulier ceux qui, comme la France, ne connaissent pas de limitation de responsabilité - de conserver un régime plus sévère. 2) Le renforcement de la coordination de l'action des Etats membres : la création de l'Agence de sécurité maritime Créée par le règlement n° 1406/2002 du 27 juin 2002, l'Agence de sécurité maritime assiste la Commission dans l'élaboration et la mise en œuvre de la législation communautaire dans le domaine de la sécurité maritime et de la prévention de la pollution causée par les navires. La notion de mise en œuvre a trait : - au fonctionnement global du régime communautaire de contrôle par l'Etat du port ; - à la fourniture d'une assistance technique à la Commission pour participer aux travaux des agences techniques du mémorandum de Paris sur le contrôle par l'Etat du port ; - à la fourniture d'une assistance à la Commission dans l'accomplissement de toute tâche attribuée à cette dernière par la législation communautaire relative à la sécurité maritime et à la prévention de la pollution causée par les navires, notamment la législation relative aux sociétés de classification, à la sécurité des navires de passagers, ainsi que celle concernant la sécurité, la formation, la délivrance de brevets et la veille des équipages de navires. En outre, afin de mener à bien les tâches qui lui sont confiées, l'Agence peut effectuer des visites dans les Etats membres. C'est délibérément que la Commission a préconisé la formule de l'Agence, plutôt que celle de garde-côtes européens, dont l'action se substituerait à celle des administrations maritimes nationales. Elle a, en effet, écarté l'idée de s'inspirer du système américain des garde-côtes (US Coast Guard), en raison des fortes disparités caractérisant les structures administratives des Etats membres intervenant dans le domaine de la sécurité maritime. Or, l'Union européenne devrait compter avec une telle diversité, à la différence des Etats-Unis, qui disposent d'une structure fédérale de décision et donc d'une grande facilité pour imposer les procédures uniformes et en vérifier le respect(13). Les rapporteurs constatent - mais ils y reviendront ultérieurement - que le débat sur l'opportunité d'adopter ou d'adapter en Europe le système des garde-côtes est un débat récurrent. Ainsi, comme c'était déjà le cas après le naufrage de l'Erika, celui du Prestige a incité de nombreux observateurs ou responsables politiques à opposer l'efficacité américaine - laquelle repose sur les garde-côtes, bras séculier d'une législation draconienne - à l'impuissance de l'Europe...tristement illustrée par les images télévisées de bénévoles découragés, ou encore par celles d'oiseaux mazoutés. 1) L'accélération du calendrier du retrait des pétroliers à simple coque Le règlement n° 417/2002 du 18 février 2002, qui fixe ce calendrier, résulte du pari de la Commission de rapprocher l'Europe de la législation américaine, sans pour autant céder à l'unilatéralisme sur lequel repose celle-ci, en incitant l'OMI à adopter des propositions allant dans le même sens que celles de l'Europe. En effet, à la suite de la catastrophe de l'Exxon Valdez survenue le 24 mars 1989, qui a répandu 40 000 tonnes de pétrole brut sur les côtes de l'Alaska - c'est-à-dire, cinq à six fois moins que l'Amoco Cadiz sur les côtes bretonnes - le Congrès américain a adopté l'Oil Pollution Act (OPA). Cette loi impose l'usage obligatoire de la double coque pour tous les nouveaux pétroliers, cette technique étant réputée permettre de protéger les citernes de cargaison contre l'avarie et de réduire ainsi le risque de pollution. Elle prévoit, en outre, un calendrier d'interdiction progressive des navires à simple coque très complexe, sur la base de critères tenant compte de l'âge et du tonnage. Après la décision unilatérale des Etats-Unis, l'OMI a été obligée de réagir. En juillet 1993, sont donc entrés en vigueur d'importants amendements à la convention Marpol 73/78, qui prévoient un plan d'introduction progressive des nouvelles prescriptions pour les pétroliers à simple coque de plus de 20 000 tonnes de port en lourd livré avant le 6 juillet 1996 (règle 13G). Dans sa communication précitée sur la sécurité du transport maritime pétrolier, la Commission européenne a fait paraître le tableau suivant, résumant de manière aussi synthétique que possible les différences d'échéances entre l'OPA de 1990, la convention Marpol et les mesures contenues dans le projet de règlement de la Commission européenne qui avait été présenté dans le cadre du paquet Erika I en 2000. Calendrier comparatif de l'interdiction des pétroliers à simple coque
Source : Commission européenne. La Commission européenne avait alors estimé que les mesures qu'elle proposait permettraient de conduire à une diminution massive du nombre de pétroliers autorisés à naviguer dans les eaux européennes. Ainsi, les navires à simple coque Marpol destinés au transport de brut d'une taille supérieure à 20 000 tonnes et ceux destinés au transport des autres hydrocarbures de plus de 30 000 tonnes représentaient, en 2000, 2 000 unités. Selon la Commission européenne, le système proposé conduirait à retirer environ 70 % de ces 2 000 navires sur la base de la limite d'âge (28 ans) avant 2010 et environ 30 % d'entre eux (+/- 600 navires) sur la base de l'échéance de 2010. S'agissant des navires inférieurs à ces dernières dimensions, leur nombre était alors estimé à environ 3 000 unités. Les mesures proposées devaient avoir pour effet de retirer 70 % des navires avant 2015 sur la base de la limite d'âge (soit 25 ans), tandis que le reste serait éliminé à compter de l'échéance de 2015. Ces propositions n'étaient pas allées aussi loin que celles que les autorités françaises avaient pu présenter dans leur Mémorandum à la Commission européenne et à l'OMI. Dans le premier document, elles avaient demandé que la Commission n'accepte plus, dès 2005, les navires-citernes transportant des produits dangereux ou polluants à simple coque de plus de 160 000 tonnes et tous les autres navires à simple coque dès 2008. Quant au Mémorandum adressé à l'OMI, il demandait à cette dernière de prévoir les dispositions conduisant à la disparition, au plus tard en 2008, des navires transportant des matières dangereuses et des hydrocarbures. Quoi qu'il en soit, l'objectif de la Commission et des autorités françaises était d'obtenir une modification rapide de la réglementation de l'OMI afin qu'elle s'aligne sur leurs propositions, ou qu'elle s'en approche à tout le moins. Or, c'est par une résolution adoptée le 27 avril 2001 et entrée en vigueur le 1er septembre 2002, que l'OMI a fixé un nouveau calendrier du retrait des navires à simple coque. Le tableau ci-dessous permet de saisir les différences entre l'ancienne et la nouvelle réglementation de l'OMI.
Il n'est pas indifférent d'observer que, comme l'a indiqué M. Christian Serradji, directeur des affaires maritimes et des gens de mer, les Etats membres ont adopté une position unitaire qui a permis de mener cette réforme de façon fructueuse et d'accélérer, au plan communautaire, l'adoption d'une nouvelle réglementation. Entré en vigueur le 1er septembre 2002, comme la résolution de l'OMI, le règlement 417/2002 du 18 février 2002 l'a introduite dans le droit communautaire. Malgré les améliorations qu'elles apportent, ces dispositions sont toutefois moins ambitieuses que celles qui ont été proposées à l'origine par la Commission. C'est pourquoi celle-ci a suggéré, comme nous le verrons, de les reprendre dans les mesures qu'elle a présentées à la suite du naufrage du Prestige. 2) L'amélioration du régime d'indemnisation des dommages résultant des pollutions par les hydrocarbures Au titre du paquet Erika II, la Commission a présenté, en décembre 2000, une proposition de règlement relative à la mise en place d'un fonds d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Ce texte a pour objet de porter remède à certaines lacunes que recèle le régime international d'indemnisation de ces dommages. Ce dernier repose sur deux mécanismes. Le premier est celui de la convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de 1969 dite CLC, modifiée par un protocole de 1992. La responsabilité du propriétaire est objective et n'est dès lors pas conditionnée par une faute ou une négligence de sa part. Le propriétaire est en principe autorisé à limiter sa responsabilité à un montant en rapport avec le tonnage du navire. Ce montant s'élève à 90 millions d'euros maximum pour les plus gros navires et, dans le cas de l'Erika, à seulement 13 millions d'euros environ. Le propriétaire du navire ne perd son droit de limiter sa responsabilité que s'il est établi que le dommage par pollution « résulte de son fait ou de son omission personnels, commis avec l'intention de provoquer un tel dommage, ou commis témérairement et avec conscience qu'un tel dommage en résulterait probablement ». La convention CLC exige également des propriétaires qu'ils souscrivent une assurance en responsabilité et accorde aux requérants le droit d'intenter une action directe contre l'assureur dans les limites de la responsabilité du propriétaire. Le régime CLC est complété par le Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL) institué par la convention Fipol de 1971, afin d'indemniser les victimes lorsque la responsabilité du propriétaire ne suffit pas à couvrir les dommages. Il est possible d'y recourir dans trois cas : lorsque les dommages dépassent la responsabilité maximale du propriétaire (c'est le cas le plus fréquent) ; lorsque le propriétaire peut invoquer à sa décharge l'un des motifs prévus dans la convention CLC ; et lorsque le propriétaire (et son assureur) est dans l'impossibilité matérielle de remplir ses obligations. Le montant maximal de l'indemnisation autorisée par le Fipol s'élève à environ 200 millions d'euros. Le Fipol est financé par les contributions des entreprises ou autres entités recevant des hydrocarbures transportés par mer. En cas de déversement d'hydrocarbures, par conséquent, toutes les entités recevant des hydrocarbures établies dans les Etats parties à la convention Fipol contribuent à l'indemnisation et aux dépenses administratives supportées par le Fonds, indépendamment de l'endroit où la pollution s'est produite. Le Fipol ne verse aucune indemnisation si la pollution résulte d'un acte de guerre ou a été causée par un navire de guerre. Il faut également qu'il soit prouvé que les hydrocarbures proviennent d'un pétrolier. Les protocoles aux deux conventions sont entrés en vigueur en 1996. Les Etats-Unis, qui ont leur propre régime d'indemnisation ¬ S'agissant de la longueur des délais d'indemnisation, la Commission fait elle-même remarquer qu'en 2000, les victimes de plusieurs grandes marées noires survenues en Europe dans les années 90 ont soulevé des difficultés telles qu'elles ne savaient toujours pas si et quand elles seraient totalement indemnisées(14). Toutefois, pour la Commission, ces retards inacceptables résultent essentiellement du niveau insuffisant des plafonds d'indemnisation plutôt que de défaillances inhérentes aux procédures d'indemnisation proprement dites. En effet, elle estime que, du fait de leur structure, les requérants n'éprouvent généralement aucune difficulté à identifier la partie responsable et n'ont pas besoin, pour obtenir une indemnisation, de prouver que le propriétaire du navire s'est rendu coupable d'une faute ou d'une négligence. Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne les victimes du naufrage de l'Erika, les indications suivantes ont été fournies aux rapporteurs par l'administrateur du Fipol. Plus de 5 000 demandes ont été réglées, soit 75 % environ du total - 6 600 demandes - de celles, qui ont été présentées. 10 % des demandes ont été rejetées, pour cause d'irrecevabilité. ¬ Pour ce qui est de l'insuffisance des plafonds d'indemnisation, il est clair qu'en ayant été fixés - au début des années 80 - à environ 200 millions d'euros, ils ne permettent pas de couvrir toutes les catastrophes, qu'il s'agisse de celle de l'Erika ou du Prestige - puisque le montant des dommages a été estimé respectivement à 300 millions et à un milliard d'euros. En tout état de cause, ce plafond est très nettement inférieur à celui prévu par l'Oil Spill Liability Fund établi par la législation américaine, lequel est fixé à un milliard de dollars. C'est pourquoi la Commission critique, à juste titre, le projet ¬ Enfin, le système international souffre du caractère restrictif de son champ d'application, ce qui, là encore, le fait apparaître comme moins efficace que la législation américaine. A la différence de ce dernier, il ne permettrait pas d'appliquer le principe pollueur-payeur de façon satisfaisante. En effet, en ce qui concerne la responsabilité du propriétaire, qui est la seule à pouvoir être mise en cause en cas de pollution, elle est fixée en fonction du tonnage du navire, c'est-à-dire à un niveau qui peut être inférieur au montant des dommages. Il en va autrement aux Etats-Unis où les plafonds fixés par la législation sont supérieurs aux normes internationales. Par exemple, en ce qui concerne la responsabilité des opérations de nettoyage et des dommages dus au propriétaire du navire, les plafonds - qui varient en fonction de la nature et de la taille du navire - s'établissent entre 8 et 350 millions de dollars pour les installations portuaires. Ces limitations ne s'appliquent pas, si l'accident résulte d'une faute ou d'une négligence, ce qui est presque toujours le cas. Dans la pratique, la responsabilité est donc toujours illimitée. En second lieu, l'encadrement de la responsabilité prévue par la convention CLC va si loin qu'elle interdit expressément d'adresser des demandes à d'autres acteurs (dont les exploitants, les gérants et les affréteurs), qui peuvent fort bien exercer sur le transport une influence aussi grande que le propriétaire du navire. C'est pourquoi la Commission préconise l'abrogation de ces dispositions restrictives. Quant aux dommages couverts, ils se limitent essentiellement aux dommages et aux pertes matérielles et économiques. Pour ce qui est des dommages environnementaux, le régime couvre les mesures préventives, dont les coûts de dépollution et les « mesures raisonnables de remise en état qui ont été effectivement prises ou qui le seront ». Les pertes causées à l'environnement en tant que tel ne font l'objet d'aucune indemnisation, à la différence de ce qui prévaut dans la législation américaine. Ce sont ces diverses lacunes qui ont amené la Commission à annoncer - dans l'exposé des motifs du projet de règlement - qu'elle soumettrait à l'OMI ou, le cas échéant, au Fipol, une demande destinée à modifier la convention sur la responsabilité sur trois points repris par le dernier considérant de la proposition de règlement : - l'instauration d'une responsabilité illimitée du propriétaire, s'il est établi que les dommages causés par la pollution résultent d'une négligence grave de sa part ; - l'abrogation de la disposition interdisant des demandes d'indemnisation à l'encontre de l'affréteur, du gérant et de l'exploitant des navires ; - le réexamen du régime de l'indemnisation pour les dommages causés à l'environnement. En ce qui concerne les dispositions du projet de règlement destinées à régler, au plan communautaire, la question de l'insuffisance des limites existantes, elles prévoient d'abord la création d'un fonds d'indemnisation complémentaire en Europe L'indemnisation au titre du fonds Cope reposerait sur les mêmes principes et règles que le Fipol. A cet égard, le rapporteur du Parlement européen - M. Alain Esclopé - a toutefois relevé que le fait pour le fonds Cope d'être totalement intégré et dépendant en termes de procédure du Fipol, l'exposerait aux mêmes difficultés que ce dernier en ce qui concerne les problèmes de preuve de la pollution, de refus de paiement des entreprises, de retard de notification par les Etats membres des entreprises concernées, ou encore de difficulté d'évaluation du préjudice global. C'est d'ailleurs pourquoi, le Parlement européen a adopté un amendement tendant à permettre des versements anticipés au bénéfice des requérants dans un délai de six mois après l'admission de leur demande d'indemnisation. En second lieu, la proposition de règlement contient un article relatif aux pénalités financières ou sanctions à imposer, lorsqu'il est établi qu'une personne assurant le transport d'hydrocarbures par mer s'est rendue coupable d'une négligence grave. A la différence du Parlement européen, qui s'est prononcé le 14 juin 2001, le Conseil n'a toujours pas arrêté de position commune illustrant ici, comme sur d'autres textes, son refus d'accorder un soutien total aux initiatives de la Commission. Le Conseil a, en effet, estimé préférable d'attendre l'adoption d'une réforme du Fipol par la conférence diplomatique qui aura lieu en mai prochain. Cette situation, qui explique l'impression injuste d'immobilisme de l'Europe est imputable à une certaine frilosité du Conseil et des Etats membres, d'une part, et au désordre maritime international, d'autre part. Elle s'est révélée au travers de l'absence de soutien ferme, lors de leur discussion, aux propositions de la Commission et du bilan médiocre de la transposition des directives. 1) Le soutien limité du Conseil aux propositions de la Commission Deux exemples montrent bien que le Conseil est allé beaucoup moins loin que la Commission ou même le Parlement européen. Le premier exemple touche à la proposition de règlement relatif à l'accélération du retrait des navires à simple coque. Dans ce dossier, le Conseil a préféré adopter le calendrier préconisé par le Parlement européen plutôt que celui présenté par la Commission. Or, cette dernière fait valoir que si elle avait été suivie par le Conseil, le Prestige, âgé de 26 ans, aurait été contraint de cesser de naviguer dès le 1er septembre 2002, date d'entrée en vigueur du règlement du 18 février 2002, et non en 2005, comme le prévoyait un amendement du Parlement européen. Cet amendement, à l'origine du texte finalement adopté, était ainsi motivé : « Le calendrier proposé tient compte de la position commune des Etats membres dans le cadre des négociations de l'OMI et du calendrier convenu par le Comité de l'environnement marin de l'OMI en octobre 2000 et se rapproche le plus possible de la proposition initiale de la Commission » ! Il n'est pas exclu qu'ait joué l'influence des Etats membres La discussion de la proposition de directive sur le contrôle par l'Etat du port constitue un autre exemple révélateur, dans lequel le Conseil a été en retrait par rapport à la Commission et au Parlement européen. C'est ainsi que le Conseil a réduit le nombre de contrôles potentiels en décidant que le taux de 25 % devrait représenter le nombre annuel moyen de navires entrés dans les ports, calculés sur la base des trois années civiles les plus récentes pour lesquelles des statistiques sont disponibles. Ces dispositions, qui ont été finalement adoptées, vont en tout état de cause moins loin que le texte initial de la Commission, qui calculait le taux de 25 % sur la base du nombre de navires entrés dans les ports au cours de l'année civile écoulée. De même, en ce qui concerne l'application du régime de l'inspection obligatoire de certains navires, il a été prévu que ceux-ci seraient susceptibles d'y être assujettis, alors que la Commission avait imparti aux Etats membres le devoir de veiller à sa mise en œuvre. Le Conseil a justifié une telle restriction par le fait « qu'il serait illusoire d'exiger une extension importante du nombre de navires soumis à une inspection renforcée si cet objectif ne peut être atteint dans la pratique. Il lui (au Conseil) a semblé important de cibler les inspections renforcées sur les navires potentiellement les plus dangereux et pas seulement en fonction de l'âge ». On relève encore que le Conseil a accordé aux Etats membres un délai prenant fin le 1er janvier 2003 pour étoffer progressivement leur service d'inspection, dans le cas où ils seraient dans l'impossibilité d'augmenter leur capacité en temps voulu pour réaliser toutes les inspections supplémentaires requises. En outre, ce délai peut être allongé de six mois pour le port de Rotterdam ! Enfin, en ce qui concerne les conditions du bannissement de certains navires, le Conseil n'a pas retenu deux amendements du Parlement européen, à la différence de la Commission. L'un proposait le bannissement de navires battant pavillon d'un Etat classé comme très risqués dans la liste noire publiée dans le rapport annuel du mémorandum d'entente de Paris. Le second amendement visait à ériger l'absence de boîte noire en critère de bannissement des navires pour lesquels l'emport d'un tel équipement n'est pas obligatoire. 2) Le bilan médiocre de la transposition des paquets Erika I et II Dans sa communication sur le renforcement de la sécurité maritime suite au naufrage du pétrolier Prestige du 3 décembre 2002, la Commission regrette la lenteur de l'adoption et de la mise en œuvre de ses propositions, alors que - souligne-t-elle - « les Etats membres s'étaient engagés lors de la réunion du Conseil européen de Nice, les 7, 8 et 9 décembre 2000, à mettre en œuvre de façon anticipée les dispositions agréées à 15, dès lors qu'elles ne nécessitent pas un agrément international ». Or, lorsqu'on examine l'état de la transposition des paquets Erika I et II(15), on constate que les Etats membres n'ont pas tous satisfait à l'engagement pris au Conseil européen de Nice. D'après le rapport que la Commission entend présenter au Conseil européen du 21 mars 2003, seuls l'Allemagne, le Danemark et l'Espagne sont cités comme ayant procédé à cette transposition(16) . S'agissant plus particulièrement de la directive 2001/106/CE du 19 décembre 2001 relative au contrôle par l'Etat du port, le tableau ci-dessous fait apparaître que seuls la France et les Pays-Bas n'ont pas atteint en 2002 le taux de 25 % des contrôles exigés.
Source : Missions économiques et ministère de l'équipement. En ce qui concerne la France, la Commission l'a poursuivie devant la Cour de Justice des Communautés européennes, en juin 2002, à un moment où le taux des contrôles s'établissait à moins de 10 %. Cette médiocre performance fait l'objet de deux analyses divergentes. Telle qu'elle est rapportée par la presse(17), celle de la DGTREN (Direction générale des transports et de l'énergie) est extrêmement sévère : « Depuis la cession de la CGM (Compagnie générale maritime) à une société étrangère, la France a cessé d'être une grande puissance maritime. Pour que les ports français ne perdent pas trop de trafic, on n'est pas trop sévère, dans ces conditions, avec les navires battant pavillon étranger »... Une seconde analyse est celle dont M. Christian Serradji a fait part aux rapporteurs. Tout en soulignant la très grande qualité du contrôle exercé par les inspecteurs français, M. Serradji a d'abord rappelé que le corps des inspecteurs, du fait du non remplacement systématique des fonctionnaires partis en retraite, avait enregistré, dans la seconde moitié des années 90, une perte de la moitié de ses effectifs. Il a ensuite indiqué que les mesures prises en matière de formation et de recrutement depuis quatre années ont seulement commencé à porter leurs fruits au cours du second semestre 2002, grâce notamment à l'habilitation supplémentaire de neuf jeunes inspecteurs. C'est pourquoi le taux des inspections a pu atteindre 30 % au mois de décembre 2002. Deux séries de dispositions pourraient permettre à la France de respecter et même de dépasser le seuil de 25 % en 2003. Il s'agit, d'une part, de l'emploi des inspecteurs de cadre A, qui sont actuellement affectés à l'approbation des navires de plaisance construits à l'unité. Cette mesure qui n'exige aucun crédit supplémentaire, et qui peut être rapidement mise en œuvre par modification réglementaire, permettrait à elle seule d'augmenter de près de 20 % les contrôles de navires étrangers. La deuxième mesure consiste à faire appel - comme le propose d'ailleurs la Commission - à des inspecteurs vacataires recrutés sur titre parmi les anciens officiers de la marine marchande et ayant exercé les fonctions de commandant ou de chef mécanicien à bord des navires de commerce. Ces experts rémunérés à la vacation viendraient ainsi renforcer, à la demande, les équipes de contrôle, afin d'augmenter le nombre de ces dernières constituées à la base d'un inspecteur habilité. Plusieurs candidatures ont été déposées. En tout état de cause, l'objectif affiché par le Gouvernement est de doubler les effectifs d'inspecteurs, lesquels pourraient passer de 57 en 1999 à 114 en 2003. En ce qui concerne les Pays-Bas, la Commission leur a adressé un avis motivé signalant le non-respect en 2002 du seuil requis de 25 %, ce qui était déjà le cas en 2001, puisque le taux des contrôles avait alors atteint 23,6 %. D'après les renseignements communiqués aux rapporteurs, une telle situation serait due aux difficultés de recrutement rencontrées par les autorités néerlandaises. Le retard apporté au fonctionnement de l'Agence de sécurité maritime fournit une autre illustration des carences des Etats membres. Non seulement, la France a tardé à désigner son représentant, mais, à ce jour, le Conseil européen n'est toujours pas parvenu à désigner son siège. A cet égard, les rapporteurs ne peuvent que déplorer la guerre picrocholine que se livrent Nantes et d'autres villes françaises pour accueillir l'Agence. Tout ceci fait désordre et ne peut, à l'évidence, que nuire à la crédibilité de l'Europe et des Etats membres, ce qui a conduit, comme on le verra, la Commission à prendre les mesures propres à permettre le fonctionnement anticipé de l'Agence. Tout a déjà été dit et redit par différents rapports(18) sur les facteurs qui concourent à ce désordre. Pour autant - et sans entrer dans la détail de problèmes qu'ils seront appelés à aborder dans la deuxième partie - les rapporteurs entendent brièvement, à ce stade, rappeler les déséquilibres qui affectent le droit international actuel et, la chaîne d'irresponsabilités qui en résulte. Car, malheureusement, le naufrage du Prestige confirme la persistance de ces dérives. 1) Les déséquilibres que recèle le système juridique international Deux séries de déséquilibres ont été évoquées par plusieurs interlocuteurs des rapporteurs : - la distorsion entre les exigences de la liberté de navigation et les droits des Etats côtiers ; - le fossé entre la densité du cadre normatif et l'inapplication des règles qui en résultent. · La première question est d'autant plus cruciale pour la France que notre pays est celui qui a payé le plus lourd tribut en ce qui concerne le nombre de catastrophes. Il est même le premier « client » du Fipol. Mais, en outre, le trafic qui longe ses côtes est essentiellement un trafic de transit, dont les retombées économiques sont inexistantes. Or, le droit international actuel enserre dans d'étroites limites les possibilités d'intervention de l'Etat côtier. C'est ainsi, par exemple, que la convention de Bruxelles du 29 novembre 1969 autorise certes l'Etat riverain à intervenir en haute mer en cas d'accident ayant ou pouvant avoir pour conséquence une pollution par les hydrocarbures (puis par d'autres substances nocives en application du protocole de 1973). Ce droit d'intervention est toutefois limité aux cas de menace grave et imminente. · Quant au fossé entre la densité du cadre normatif et l'inapplication des règles qui en résultent, il suffit de rappeler le fait fréquemment évoqué des pavillons de complaisance, qui enfreignent les dispositions de l'article 5 de la convention sur la haute mer du 29 avril 1958, aux termes duquel : « les navires possèdent la nationalité de l'Etat dont ils sont autorisés à battre pavillon. Il doit exister un lien substantiel entre l'Etat et le navire ; l'Etat doit notamment exercer effectivement sa juridiction et son contrôle, dans les domaines technique, administratif et social, sur les navires battant son pavillon ! » Or, quel contrôle sérieux peut-on attendre de l'Etat qui autorise que des navires puissent être immatriculés sous son pavillon par la voie d'Internet ? 2) Les dysfonctionnements du système international encouragent une chaîne d'irresponsabilités Les « voyous des mers » stigmatisés par le Président de la République peuvent agir impunément, parce que, comme le montre la catastrophe du Prestige, peu différente en cela de l'Erika, ces navires étaient le reflet d'un système reposant sur l'opacité. Dans le cas de l'Erika, six niveaux de protection ont séparé le propriétaire réel du propriétaire de la cargaison, selon le schéma suivant : 1. Propriétaire réel : MM. Vitiella et Savarese (Italie). 2. Société holding : Drytank/Sa (Grèce). 3. Propriétaire nominal : Tevere Shipping (Malte), un seul navire : Erika (Malte). 4. Gestion nautique : PavShip (Italie). 5. Gestion du personnel embarqué : Mumbai (Inde). 6. Affrètement à temps : Selmont Amarsship (Suisse/Bahamas). 7. Courtier : Pétriann (Londres). 8. Propriétaire de la cargaison : Total Fina (Bermudes). Dans le cas du Prestige, la situation était tout aussi complexe : 1. Propriétaire réel : M. Coulouthros (Grèce). 2. Société holding : Universe Maritime (Libéria). 3. Propriétaire nominal : Mare Shipping Inc. (Libéria), un seul navire : Prestige (Bahamas). 4. Courtier : Pétriann (Londres). 5. Equipage philippin. 6. Affréteur au voyage et propriétaire de la cargaison : Crown Ressources AG (Suisse). Or, le conglomérat russe Alpha s'est séparé de sa filiale Crown Ressources, dont les actions ont été rachetées par un avocat suisse, lequel l'a rebaptisée ERC Trading. Ainsi, grâce à cette opération, le conglomérat russe s'est mis à l'abri des poursuites judiciaires susceptibles d'être engagées à la suite du naufrage du Prestige. Le mouvement capitalistique aurait été initié depuis le mois d'août, soit trois mois avant le naufrage du Prestige. En outre, avant de céder les parts de Crown Ressources, le conglomérat Alpha aurait reçu les indemnités des compagnies d'assurance pour la perte totale de la cargaison ! Ce sont de tels faits qui suscitent l'exaspération de l'opinion publique. Celle-ci considère, à juste titre, que les véritables responsables des marées noires jouissent trop facilement d'une totale impunité. Ce volet pénal n'est toutefois que l'un des chantiers - même si ce n'est pas le moindre - de ce qui pourrait être une politique de sécurité maritime européenne efficace. DEUXIEME PARTIE : Depuis le traité de Maastricht, la sécurité maritime fait partie des compétences communautaires. Pour autant, la catastrophe du Prestige, comme en convient la Commission, illustre une nouvelle fois la vulnérabilité de l'Europe. C'est pourquoi, la Commission veut saisir cette occasion pour accélérer la consolidation de l'espace maritime européen, commencée avec les paquets Erika, tout en impulsant diverses réformes au plan international, en vue d'inscrire le développement du transport maritime dans un cadre plus ordonné. Or, ce pari ambitieux suscite des controverses. Sans méconnaître ni les objections ni l'ampleur des défis que l'Europe doit relever, les rapporteurs considèrent que la démarche de la Commission mérite d'être soutenue et même renforcée. Il y va sans doute d'une certaine conception de l'Europe, qui doit jouer un rôle moteur dans la mise en place d'une mondialisation maîtrisée. III. LA DOUBLE AMBITION DE LA COMMISSION : ACCÉLERER LA CONSOLIDATION DE L'ESPACE MARITIME EUROPEEN TOUT EN IMPULSANT DIVERSES REFORMES AU PLAN INTERNATIONAL A. Une priorité : l'application effective et rapide du cadre législatif communautaire existant Cet objectif doit être poursuivi, par la mise en œuvre anticipée des paquets Erika I et II, et grâce à un train de mesures complémentaires. 1) La mise en œuvre anticipée des dispositifs des paquets Erika I et II Pour la Commission, doivent y concourir non seulement les initiatives qu'elle a déjà prises, mais aussi les mesures incombant aux Etats membres. a) Les initiatives de la Commission Ces initiatives ont été exposées dans sa communication du 3 décembre 2002, sur le renforcement de la sécurité maritime suite au naufrage du pétrolier Prestige. Tout d'abord, la Commission a pris la décision de rendre l'Agence de sécurité maritime européenne opérationnelle dans les douze mois qui suivent l'entrée en vigueur du règlement du 27 juin 2002 qui l'a instituée, c'est-à-dire d'ici à août 2003. C'est ainsi que son Conseil d'administration a été constitué avec la nomination des 15 membres représentant les Etats membres et des quatre membres représentant la Commission, ainsi que des quatre professionnels indépendants nommés par la Commission. Le Conseil d'administration a déjà tenu deux réunions, tandis que le directeur exécutif de l'Agence a été nommé au mois de janvier 2003. Mais surtout, sans attendre que le Conseil européen prenne une décision sur le siège de l'Agence, la Commission a décidé de l'héberger provisoirement dans ses locaux. Le souhait de la Commission de voir l'Agence exercer ses fonctions le plus rapidement possible s'est illustré par le fait qu'elle l'a associée à une réunion d'experts le 30 janvier dernier, consacrée au problème délicat des lieux de refuges et, en particulier, à la préparation des plans d'accueil des navires en détresse. Une seconde initiative de la Commission, à laquelle la presse a accordé un large écho, a trait à la publication d'une liste noire de navires sous-normes, en vertu de la directive 95/21/CE modifiée par la directive 2001/106 du 19 décembre 2001. Il s'agit de navires qui ont été immobilisés, à plusieurs reprises, dans les deux ou trois années précédentes et qui comptent un nombre d'immobilisations supérieur à la moyenne. Cette liste indicative est établie sur la base des informations disponibles dans le cadre du mémorandum d'entente de Paris sur le contrôle par l'Etat du port et dans la base de données Equasis(19) . La Commission ne manque pas de rappeler que ces navires auraient été bannis des ports européens, si les derniers amendements à la directive 95/21/CE avaient été en vigueur à ce jour. On retrouve là le reproche adressé par la Commission aux Etats membres de n'avoir pas pris les mesures nécessaires à la transposition plus rapide du paquet Erika I. L'importance d'une telle initiative ne doit pas être minimisée, car elle peut comporter des effets dissuasifs tant auprès des Etats du pavillon réputés complaisants que des armateurs. Mais pour que la publication d'une telle liste soit pleinement efficace, il faudrait sans doute qu'elle soit établie dans le cadre de l'OMI et que celle-ci en tire toutes les conséquences, par exemple, en prévoyant l'obligation de détruire les navires les plus dangereux figurant sur cette liste. La dernière initiative prise par la Commission touche à la mise en place d'un réseau télématique transeuropéen de suivi du trafic maritime, appelé Safe Sea Net. Ce réseau intègre les informations fournies en temps réel par les transpondeurs des navires et permet aux autorités opérationnelles de connaître à tout moment l'identité, la position et la cargaison des navires naviguant dans les eaux européennes. Par cette initiative, la Commission souhaite ainsi contribuer à l'application anticipée de la directive 2002/59/CE du 27 juin 2002 relative à la mise en place d'un système communautaire de suivi du trafic des navires et d'information, qui doit entrer en vigueur au plus tard le 5 février 2004. Cette directive prévoit toutefois un délai supplémentaire jusqu'en fin 2007 pour permettre aux Etats membres de compléter leur réseau national d'infrastructures terrestres destinées à assurer le suivi des navires au large de leurs côtes. b) Les mesures incombant aux Etats membres Pour la Commission, la catastrophe du Prestige doit inciter les Etats membres à prendre d'urgence trois séries de mesures qui concernent respectivement le contrôle par l'Etat du port ; l'adoption rapide du règlement prévoyant l'institution du fonds Cope, chargé de compléter l'indemnisation par le Fipol, la ratification de certaines conventions internationales et la désignation des lieux de refuge. · Sur le premier point, la Commission demande d'abord aux Etats membres de recruter un nombre suffisant d'inspecteurs, au besoin parmi les anciens officiers de marine marchande, afin de satisfaire aux exigences posées par la directive 95/21/CE modifiée. Comme on l'a déjà vu précédemment, ce sont de telles mesures que la France a prises. En ce qui concerne les autres Etats membres, on constate(20) que si bon nombre d'entre eux ont augmenté ou envisagent d'augmenter le nombre des inspecteurs, d'autres Etats En second lieu, la Commission souhaite que les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que, dans tous les ports et lieux de mouillage de l'Union, un niveau d'inspection suffisant soit atteint, afin de ne pas mettre en péril l'effet dissuasif de la directive vis-à-vis des navires sous-normes. A cet égard, on ne saurait qu'approuver la position de bon sens adoptée par la Commission, selon laquelle « Il ne serait, en effet, pas équitable que certains ports ou lieux de mouillage deviennent de facto, du fait de l'absence ou de l'insuffisance d'inspections, de véritables « ports de complaisance » au sein même de l'Union européenne ». Quoi qu'il en soit, les rapporteurs se félicitent de la décision prise par le Gouvernement français d'ordonner le contrôle, dès le · Quant au souhait exprimé par la Commission de voir les Etats membres ratifier rapidement le protocole établissant un fonds supplémentaire pour l'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, il s'agit là encore d'une mesure de bon sens inspirée par le souci de permettre une indemnisation correcte et rapide des victimes. Or, il y a lieu de craindre que cet objectif ne puisse être atteint de façon satisfaisante. En effet, il n'est pas certain que la conférence diplomatique, qui doit se réunir en mai 2003, accepte de porter le plafond d'indemnisation par le Fipol de 185 millions d'euros à un milliard d'euros. Cette conférence pourrait plutôt décider de le porter à une limite inférieure, qui pourrait être environ de 300 millions d'euros. Comme on l'a vu précédemment, le plafond d'un milliard avait été proposé par un projet de règlement de la Commission, en vue d'aligner l'Europe sur la législation américaine. Le Conseil n'a toutefois pas approuvé ce dispositif et a préféré promouvoir la création d'un fonds similaire au niveau international. En outre, compte tenu des délais afférents aux procédures de ratification, le nouveau régime n'entrera pas en application avant la fin de l'année 2003. · En troisième lieu, la Commission se déclare préoccupée par le fait qu'un certain nombre de conventions internationales, visant à améliorer les mécanismes d'indemnisation en cas de marée noire, ne sont pas encore ratifiées par tous les Etats membres et ne sont, dès lors, pas applicables dans l'Union européenne. Il en est ainsi de la convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute, ou encore de la convention internationale de 1996 sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses, dite convention HNS. Ces deux conventions concernent essentiellement l'indemnisation des dommages causés aux biens et aux personnes. La Commission estime, à juste titre, que les Etats membres doivent prendre immédiatement les mesures nécessaires pour ratifier ces deux conventions, comme le prévoient les décisions du Conseil des 19 septembre et 18 novembre 2002. · Enfin, le Conseil Transports du 6 décembre 2002 a décidé d'avancer au 1er juillet 2003 - au lieu du 5 février 2004, date d'entrée en vigueur initiale de la directive 2002/59 du 27 juin 2002 - l'application de l'article 20 de cette même directive. Cette disposition prévoit l'obligation pour les Etats membres de désigner des lieux de refuge pour les navires en détresse, dont l'importance a été particulièrement mise en lumière par la catastrophe du Prestige, puisque, faute de tels lieux, ce pétrolier a été refoulé en haute mer. En fait, il apparaît que les pratiques sont très variables selon les Etats membres(21). Certains Etats ont déjà désigné ces lieux comme, par exemple, l'Allemagne ou la Grande-Bretagne. Celle-ci a toutefois décidé de garder la liste secrète d'après les renseignements fournis aux rapporteurs, pour prévenir les réactions hostiles des populations concernées, même si l'on peut douter que le secret puisse être longtemps gardé. D'autres Etats ont refusé d'y procéder. A cet égard, le cas des Pays-Bas est très original, puisque les ports sont, en principe, libres de trouver un accord pour accueillir un navire en détresse, le ministère des transports se donnant toutefois la possibilité de trancher, en cas de différend entre les ports. Enfin, comme c'est le cas en France, la désignation des lieux de refuge est toujours à l'étude. Au vu de ces éléments, il est clair que les dispositifs qui seront mis en place ne pourront fonctionner efficacement que si la Commission et les Etats membres parviennent à établir une bonne coordination. 2) La présentation d'un train de mesures complémentaires Ces mesures peuvent être classées en deux catégories : les unes - bien qu'elles aient pour objet de protéger l'espace maritime communautaire - ont également une dimension internationale. Elles seront examinées ultérieurement. Les autres ont une portée plus spécifiquement communautaire et touchent respectivement à la formation des gens de mer, à l'institution d'un système de sanctions pénales et à l'amélioration du contrôle par l'Etat du port. a) La formation des gens de mer La Commission a présenté une proposition de directive, dont l'objet est d'établir un système communautaire efficace et fiable de reconnaissance des brevets d'aptitude délivrés en dehors de l'Union européenne et de permettre le recrutement à bord des navires communautaires d'équipages compétents en provenance des pays tiers. Dans cette perpective, la Commission suggère d'introduire une procédure harmonisée et centralisée permettant d'évaluer plus efficacement le respect par les pays tiers des exigences internationales en matière de formation et de délivrance de brevets aux gens de mer, posées par la convention de l'OIT de 1978, dite convention SCTW. En effet, l'un des principaux problèmes posés par la réglementation actuellement en vigueur résulte, d'une part, de ce que le contenu de ces notifications est très différent d'un Etat membre à l'autre et de ce que, d'autre part, les évaluations effectuées par la Commission et les Etats membres ne reposent pas toujours sur une base commune. C'est pourquoi la Commission prévoit d'évaluer elle-même, avec l'aide de l'Agence européenne pour la sécurité maritime, les demandes de reconnaissance introduites par les Etats membres. Après cette évaluation, la décision de reconnaissance sera prise par la Commission selon la procédure de comité et sera valable pendant cinq ans. Les décisions de reconnaissance de brevets d'aptitude prises conformément à la procédure actuelle resteront valables. En second lieu, la Commission souhaite remédier à l'absence de suivi des décisions prises par les pays tiers dont sont ressortissants les gens de mer recrutés à bord des navires communautaires. Ainsi, en vue de veiller à ce que les gens de mer titulaires de brevets délivrés par les pays tiers soient formés et obtiennent leur brevet conformément aux prescriptions internationales, la Commission préconise l'instauration d'une évaluation fréquente et centralisée de cette conformité, et la possibilité de proroger ou de révoquer la reconnaissance. Enfin, pour assurer la cohérence avec les prescriptions de la convention STCW, la Commission propose, d'une part, d'aligner sur la convention STCW les dispositions actuelles concernant les exigences en matière de connaissances linguistiques pour la délivrance des brevets d'aptitude par les Etats membres, ainsi que pour les visas attestant la délivrance d'un brevet. D'autre part, elle prévoit la mise à jour des dispositions existantes de la directive relatives à l'emploi des langues pour les communications entre les navires et les autorités à terre, en vue de les mettre en conformité avec les exigences correspondantes de la convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, dite convention Solas de 1974. Le principe de ces dispositions mérite d'être soutenu, car elles sont de nature à garantir la bonne formation des équipages, qui constitue un facteur essentiel de la sécurité. b) L'institution d'un système de sanctions pénales Le principe de telles sanctions est déjà prévu par l'article 10 de la proposition visant à instituer le fonds Cope, aux termes duquel des sanctions pénales peuvent être infligées à toute personne - y compris les personnes morales - qui serait responsable d'une pollution en raison de sa négligence. Le Conseil, comme on l'a vu, n'a toujours pas arrêté de position commune sur ce texte. Les Etats membres ont, en effet, préféré négocier la réforme du Fipol. Dans la même perspective que l'article 10 précité, la décision-cadre(22) 2003/80/JAI du Conseil du 27 janvier 2003 relative à la protection de l'environnement par le droit pénal impose aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour qualifier d'infractions pénales un certain nombre d'actes commis par négligence ou au moins par négligence grave. Certes, ce texte ne se rapporte pas exclusivement à la pollution par hydrocarbures. Celle-ci est néanmoins visée, puisque constituent notamment une infraction pénale « le rejet, l'émission ou l'introduction illicites d'une quantité de substances ou de radiations ionisantes dans l'atmosphère, le sol ou les eaux, qui causent ou sont susceptibles de causer leur détérioration durable ou substantielle ou la mort ou de graves lésions à des personnes ou des dommages substantiels à des monuments protégés, à d'autres objets protégés, à des biens, à des animaux ou à des végétaux ». Les infractions visées sont celles commises par les personnes physiques ou morales. C'est dans le double souci de prévoir un régime spécifique à la pollution par les hydrocarbures et de briser la chaîne d'irresponsabilités évoquée précédemment que M. Romano Prodi, Président de la Commission européenne, a annoncé la présentation « d'une proposition législative prévoyant notamment l'imposition par les Etats membres de sanctions pénales à toute personne (c'est-à-dire non seulement l'armateur, mais également le propriétaire de la cargaison, la société de classification ou toute autre personne concernée) responsable d'une pollution en raison de sa négligence grave et de la violation par elle des dispositions concernant la lutte contre les déversements illicites intentionnels en mer »(23). Dans leur lettre du 7 février 2003(24) adressée à M. Costas Simitis, Premier ministre de la Grèce et Président du Conseil européen, M. Jacques Chirac, Président de la République française, M. José-Maria Aznar, Premier ministre d'Espagne, et M. José Manuel Duras Barroso, Premier ministre du Portugal, partagent le même objectif que la Commission. En effet, ils expriment le souhait que le projet de texte préparé par cette dernière soit soumis dans les meilleurs délais à l'examen du Conseil. La Commission a publié une proposition de directive le 5 mars 2003, le lendemain même de la présentation de notre rapport, qui vise également les dégazages et les déballastages. Outre qu'il constitue un pas décisif vers l'instauration du cercle vertueux que l'opinion publique et les rapporteurs appellent de leurs vœux, ce texte permet de combler certaines lacunes de la décision-cadre du 27 janvier 2003 relative à la protection de l'environnement par le droit pénal. En effet, dans le cas d'une décision-cadre, la Commission ne peut intenter de recours en manquement à l'encontre des Etats membres. c) Les informations transmises par les pilotes à l'Etat du port La directive 95/21/CE relative au contrôle par l'Etat du port impartit aux pilotes d'informer les autorités compétentes de toute anomalie susceptible de mettre en péril la navigation du navire ou de constituer une menace pour l'environnement marin. Les navires ainsi signalés par les pilotes doivent faire l'objet d'une inspection prioritaire dans le prochain port. La Commission propose de réexaminer les dispositions du mémorandum d'entente de Paris sur le contrôle par l'Etat du port, en vue d'étendre cette procédure de transmission d'informations aux navires en transit dans les eaux de l'Union - y compris les détroits - et de permettre aux pilotes Ces propositions ont trait, d'une part, à de nouvelles règles régissant le transport du pétrole par voie maritime et, d'autre part, à l'extension des prérogatives reconnues aux Etats côtiers. 1) Les nouvelles règles régissant le transport du pétrole par voie maritime Le projet de règlement prévoit trois séries de dispositions : - l'interdiction du transport des produits pétroliers les plus lourds dans les pétroliers à simple coque ; - une révision du calendrier du retrait des pétroliers à simple coque ; - l'extension du champ d'application du régime spécial d'inspection des pétroliers. a) L'interdiction du transport des produits pétroliers les plus lourds dans les pétroliers à simple coque La Commission propose ainsi d'interdire le transport des pétroles lourds dans des pétroliers à simple coque à destination ou au départ des ports d'un Etat membre de l'Union européenne, ce qui représente environ 28 % de l'ensemble des transports assurés par la flotte pétrolière mondiale. Les produits visés sont le fioul lourd - type de pétrole que transportaient l'Erika et le Prestige - le brut lourd, les huiles usagées ainsi que le bitume et le goudron. Ces produits sont très polluants, lorsqu'ils se répandent dans la mer, leur faible volatilité et leur grande viscosité font que les pétroles lourds s'évaporent plus lentement que les huiles plus légères et se dispersent difficilement. De ce fait, ils tendent à se maintenir en nappes, ne se dégradent que très lentement et peuvent causer des dommages écologiques très importants aux écosystèmes des milieux marins et côtiers - ainsi que l'illustrent ceux provoqués par le naufrage du Prestige. Comme le montre le tableau ci-dessous reproduit par la Commission, le brut lourd représentait approximativement 15 % de tout le pétrole brut importé par l'Union européenne. Volume des importations et exportations annuelles de produits pétroliers (extra-ue et intra-ue) par la voie maritime, total ue (en millions de tonnes)
Source : Eurostat (COMEXT). Or, la Commission fait observer que le fioul lourd, en raison de sa valeur commerciale limitée et de son caractère peu inflammable ou explosif, est fréquemment transporté dans des navires plus anciens. Ceux-ci présentent les risques les plus élevés au plan de la sécurité, comme en témoigne le cas du Prestige, navire à simple coque, âgé de 26 ans et transportant 77 000 tonnes de fioul lourd ! Selon la Commission, tous ces éléments suffiraient à justifier, pour l'avenir, l'interdiction des pétroliers à simple coque. Certains Etats membres ont déjà appliqué cette décision. Ainsi, l'Espagne a été le premier pays à proposer l'interdiction d'accès à ses ports des navires à simple coque transportant des fiouls lourds et des goudrons. L'Italie a également pris la même mesure, par un décret publié le 23 février 2003. Enfin, pour la France, c'est le décret visant à transposer la directive du 27 novembre 2000 relative aux installations portuaires de réception des déchets qui contiendra des dispositions analogues. b) La révision du calendrier du retrait des pétrioliers à simple coque Comme on l'a rappelé précédemment, le règlement n° 417/2002 du 18 février 2002 a, conformément à une nouvelle réglementation adoptée par l'OMI, établi les dates suivantes de retrait pour l'exploitation des pétroliers à simple coque entrant dans les ports ou les terminaux en mer relevant de la juridiction d'un Etat membre et des pétroliers battant le pavillon d'un Etat membre : - 2007 pour les pétroliers à simple coque de la catégorie 1 : ce sont des transporteurs de brut d'un port en lourd égal ou supérieur à 20 000 tonnes, ainsi que les transporteurs de produits pétroliers d'un port en lourd égal ou supérieur à 30 000 tonnes, non équipés de citernes à ballast séparé ; - 2015 pour les pétroliers à simple coque des catégories 2 et 3. Les premiers ont le même port en lourd que ceux de la catégorie 1, mais sont équipés de citernes à ballast séparé. Quant aux seconds, ils ont une taille inférieure à celle des pétroliers des catégories 1 et 2, mais un port en lourd supérieur à 5 000 tonnes. Comme la Commission n'a pas manqué de le souligner, ces dispositions sont moins ambitieuses que celles qu'elle avait présentées en 2000 dans le cadre du paquet Erika I, puisque les dates limites préconisées étaient les suivantes :
En outre, la Commission avait proposé une limite d'âge de 23 ans pour les pétroliers de la catégorie 1. Mais celle-ci a été étendue à une fourchette de 26 à 30 ans dans le texte finalement adopté. Ainsi que l'on rappelé la Commission, mais aussi le Président Chirac et MM. Aznar et Durao Barroso(25), le Prestige - âgé de 26 ans - aurait donc dû cesser de naviguer dès le 1er septembre 2002, date d'entrée en vigueur du règlement du 18 février 2002, si les dispositions proposées par la Commission avaient été adoptées. Or, en application du règlement du 18 février 2002, c'est seulement en mars 2005 qu'il aurait dû être retiré. C'est pourquoi, dans son nouveau projet, la Commission propose de revenir à son calendrier initial pour les pétroliers de la catégorie 1 en ramenant la date de leur retrait de 2007 à 2005, avec une limite d'âge de 23 ans. En ce qui concerne les pétroliers de la catégorie 2, la Commission suggère de revenir également à la date limite de 2010, pour aligner la législation européenne sur celle des Etats-Unis avec une limite d'âge de 28 ans. Enfin, s'agissant des navires de la catégorie 3, la limite d'âge est également fixée à 28 ans comme pour la catégorie 2. Pour la Commission, ces dispositions devraient donner une nouvelle impulsion à la construction de navires neufs, sans aucune rupture d'approvisionnement en produits pétroliers. Comme on le verra, ce second point est néanmoins très contesté par certains Etats membres, dans le cadre des discussions qui se déroulent actuellement sur le projet de règlement au sein du groupe de travail. En tout état de cause, avec de telles mesures, l'Union européenne se voit reprocher d'agir de façon unilatérale, à la manière des Etats-Unis. Elle est également accusée comme ces derniers, de détourner les navires à risques vers d'autres régions du monde. c) L'extension du système d'évaluation des navires Le système d'évaluation de l'état des navires (CAS) introduit par le règlement (CE) n° 417/2002 est un régime supplémentaire d'inspections renforcées, spécialement élaboré pour détecter les faiblesses structurelles des pétroliers à simple coque. L'inspection est effectuée tous les deux ans et demi par l'Etat du pavillon et par les sociétés de classification agissant au nom de l'Etat du pavillon. Ces inspections renforcées sont essentielles, car la sûreté d'un bateau ne résulte pas seulement de son âge, mais aussi de son intégrité structurelle, qui dépend souvent d'autres facteurs, tels que les travaux d'entretien, par exemple. Tant le règlement 417/2002 que la règle 13G de l'annexe I de la convention Marpol exigent que les pétroliers des catégories 1 et 2 répondent au système d'évaluation de l'état des navires, à compter du dépassement de la date d'anniversaire de la livraison du navire, en 2005 et 2010 respectivement. Or, actuellement, le CAS ne s'applique pas aux navires de la catégorie 3, alors que ces navires peuvent également être à l'origine de pollutions importantes. C'est pourquoi la Commission propose d'introduire une disposition prévoyant que les pétroliers à simple coque de toutes les catégories encore en exploitation doivent satisfaire au système d'évaluation de l'état des navires, dès qu'ils ont atteint l'âge de 15 ans. La date d'entrée en vigueur de ce dispositif est toutefois fixée à 2005, afin de permettre aux inspecteurs de pouvoir s'adapter aux nouvelles exigences. 2) L'extension des prérogatives reconnues aux Etats côtiers On aborde ici les problèmes les plus sensibles, au regard du droit international, soulevés par les mesures édictées par la France et l'Espagne dans le cadre de l'accord de Malaga du 26 novembre 2002, et dont le Conseil « Transports » du 6 décembre 2002 a approuvé le principe. Il s'agit de l'interdiction de l'accès à la zone économique exclusive (ZEE) des pétroliers à risque. Une autre proposition de réforme consisterait en la création de zones maritimes protégées - dites zones particulièrement vulnérables - en Europe, en vue de préserver ces dernières de tout risque de pollution. a) L'interdiction de l'accès des pétroliers à risque dans la zone économique exclusive (ZEE) En application de l'article 55 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, du 10 décembre 1982 - dite convention de Montego Bay - « la zone économique exclusive est une zone située au-delà de la mer territoriale et adjacente à celle-ci, soumise au régime particulier établi par la présente partie, en vertu duquel les droits et la juridiction de l'Etat côtier et les libertés des autres Etats sont gouvernés par les dispositions pertinentes de la convention ». La ZEE peut, en vertu de l'article 57 de la convention, s'étendre jusqu'à 200 milles des lignes de base - soit sur 188 milles pour les Etats qui ont établi une mer territoriale. Plusieurs dispositions de la convention précisent les droits, la juridiction - traduction « française » malheureuse du mot anglais « jurisdiction », dont le terme français « compétence » est l'équivalent - et obligations de l'Etat côtier dans la ZEE. Ainsi, l'article 56, dans son premier paragraphe, alinéa b, point iii), reconnaît à l'Etat côtier juridiction en ce qui concerne « la protection et la préservation du milieu marin ». Quant à l'article 220 de la convention, il précise les pouvoirs que l'Etat côtier peut exercer, lorsqu'il a de sérieuses raisons de penser qu'un navire naviguant dans sa ZEE a commis une infraction aux règles et normes internationales. L'article 220 indique que cette infraction peut revêtir la forme de rejets importants dans le milieu marin, qui y ont causé ou risquent d'y causer une pollution notable, ou encore celle de rejets qui ont causé ou risquent de causer des dommages importants au littoral ou aux intérêts connexes de l'Etat côtier ou à toutes ressources de sa mer littorale ou de sa ZEE. Dans le premier cas, l'Etat côtier peut procéder à l'inspection matérielle du navire. Dans le second cas, il peut « notamment ordonner l'immobilisation du navire conformément à son droit interne ». Dans le cadre de l'accord franco-espagnol de Malaga, il apparaît que c'est l'article 56 de la convention qui a été invoqué, en vue de limiter le transit dans la zone des 200 milles des pétroliers à simple coque transportant du fioul lourd. Aux termes de cet accord, dont le Portugal a également appliqué les dispositions, les parties sont convenues d'une mesure d'effet immédiat pour contrôler les navires dangereux du même type que le Prestige, c'est-à-dire les pétroliers de plus de quinze ans à simple coque, transportant du fioul lourd ou du goudron et dépourvus de dispositifs de mesures de niveau et de pression des hydrocarbures dans les soutes. Dorénavant, les armateurs et affréteurs de ce type de navires se présentant à l'entrée de la ZEE de la France et de l'Espagne devront obligatoirement fournir toutes les informations requises concernant l'Etat du pavillon, la nature exacte de la cargaison, la société de classification, les contrôles effectués sur le navire dans le port de départ avant l'appareillage, l'ensemble des opérateurs concernés par l'application commerciale. En cas de doute, il sera procédé à une inspection en mer par des contrôleurs de l'Etat côtier et le navire pourra être refoulé. En ce qui concerne la France, il a été procédé à 28 refoulements de navires depuis la conclusion de l'accord de Malaga. Ces mesures, on le verra, souffrent d'une certaine fragilité de leur base juridique. Pour autant, le Conseil « Transports » du 6 décembre 2002 a décidé que, dans l'attente d'une réglementation européenne, les Etats membres qui le souhaitent, doivent, comme la France et l'Espagne, pouvoir prendre de telles mesures. C'est ainsi que le gouvernement italien vient de prendre un décret allant dans ce sens. b) La proposition visant à créer des "zones particulièrement vulnérables" Il s'agit d'une proposition d'inspiration française que soutiennent, pour le moment, l'Espagne et le Portugal. Son objectif serait d'obtenir de l'OMI la création de zones particulièrement vulnérables, par application de l'article 211, paragraphe 6, de la convention sur le droit de la mer. Cet article prévoit en effet que « (...) lorsque les règles et normes internationales visées au paragraphe 1(26) ne permettent pas de faire face d'une manière adéquate à des situations particulières et qu'un Etat côtier est raisonnablement fondé à considérer qu'une Zone particulière et clairement définie de sa Zone économique exclusive requiert l'adoption de mesures obligatoires spéciales pour la prévention de la pollution par les navires (...), cet Etat peut (...) adresser à cette organisation une communication concernant la Zone considérée (...). Si l'organisation décide qu'il en est ainsi, l'Etat côtier peut adopter pour cette Zone des lois et règlements visant à prévenir, réduire et maîtriser la pollution par les navires qui donnent effet aux règles et normes ou pratiques de navigation internationales que l'organisation a rendues applicables aux Zones spéciales ». Ces dispositions ont déjà été appliquées pour la Grande Barrière de corail australienne en 1990, l'archipel cubain de Sabana-Camaguey en 1997, l'île colombienne de Malpelo et les abords des Keys, au large de la Floride, en avril 2002, et la mer de Wadden (Allemagne, Danemark et Pays-Bas) en octobre de la même année. Pour ce qui concerne la France, de telles zones pourraient être créées dans la Manche et la Bouche de Bonifacio. Ces réserves portent à la fois sur leur efficacité et sur leur licéité. 1) Des doutes quant à leur efficacité a) L'opportunité des mesures est contestée Certains interlocuteurs des rapporteurs et des délégations des Etats membres au sein du groupe de travail se sont demandé s'il était nécessaire pour la Commission de légiférer de nouveau, alors même que le naufrage de l'Erika remonte seulement à trois ans. ¬ Les uns ont, en effet, fait valoir leur crainte d'une inflation de textes, mais surtout le risque d'une instabilité juridique. Ces personnalités soutiennent que les paquets Erika I et II auraient dû normalement permettre aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour éviter une catastrophe telle que le naufrage du Prestige. Or, s'il en a été différemment, c'est parce que l'ensemble des acteurs n'a pas disposé du temps suffisant pour s'adapter à la nouvelle réglementation et permettre à l'expérience humaine - qui est un facteur important dans le transport maritime - de se consolider. Dès lors, il est à craindre que la présentation d'un nouveau calendrier de retrait des navires à simple coque ne comporte également des effets pervers et ne débouche sur une crise. C'est ainsi par exemple que pour M. Francis Vallat, Président de l'Institut Français de la Mer, la Commission a tort d'assimiler tout vieux navire à un navire dangereux. Il soutient que certains navires à simple coque âgés de plus de quinze ans peuvent être aussi sûrs que des navires à double coque neufs. Aussi regrette-t-il que la Commission n'ait pas procédé à une étude approfondie sur les navires à simple coque. Celle-ci aurait pu faire ressortir que, sur environ 1 200 pétroliers concernés âgés de 20 ans, 800 sont sûrs. Ces observations ne sont pas dépourvues de pertinence. Avant de publier un nouveau texte, il serait, en effet, préférable de s'assurer que les textes existants sont appliqués, ce qui, comme on l'a vu, n'est pas toujours le cas dans le transport maritime. Pour autant, il est difficile de reprocher à la Commission et aux Etats membres de tenter, par tous les moyens, de lutter contre les carences, dont la sécurité maritime a souffert pendant trop longtemps, souvent du fait même de la négligence de certains gouvernements. ¬ Outre cette critique envers la méthode, il est reproché à la Commission d'avoir une confiance excessive dans le système de la double coque, au point d'y voir une véritable panacée. Certains praticiens rencontrés par les rapporteurs - constructeurs de navires ou anciens officiers - ont ainsi fait valoir qu'hormis l'avantage d'inciter au renouvellement de la flotte, cette technique ne possède pas toutes les vertus qu'on lui prête. D'une part, elle ne protège le navire d'un risque de pollution que lorsque la vitesse de collision est peu élevée. D'autre part, elle accroîtrait les risques d'explosion et d'incendie. Enfin, l'étroitesse du ballast - soit deux mètres - entre les deux coques, espace rempli de tirants et de renforts de structure, empêche les inspections de la coque, au point que seuls de nouveaux petits ramoneurs savoyards seraient en mesure d'y procéder ! Il est, en tout cas, révélateur qu'aux Etats-Unis, qui ont, à l'origine, imposé la double coque, on ait admis que même si le Prestige avait été équipé d'une double coque, il n'aurait peut-être pas été préservé du naufrage(27). En second lieu, il convient d'observer que la moitié de la flotte des navires à simple coque naviguant dans le monde est américaine, et ce sont ces mêmes navires qui transportent du pétrole du Caucase vers les Etats-Unis ! Enfin, pour mieux illustrer le caractère dogmatique de la décision prise par les Etats-Unis en 1990, il n'est pas inutile de rappeler que ces derniers ont toujours refusé les pétroliers à pont intermédiaire conçus par les Européens et les Japonais. Baptisé E3 ¬ Un second débat de nature technique également est au centre des discussions du groupe de travail et concerne la définition des fiouls lourds retenue dans la proposition de règlement sur le retrait des simples coques. C'est ainsi, par exemple, qu'au cours de la réunion du 19 février 2003, la délégation grecque - qui a souhaité exclure les pétroles bruts denses - a estimé que les critères de viscosité cinématique(28) et de densité devaient être utilisés pour définir les fiouls lourds. Elle a, en outre, précisé que l'utilisation de ces deux critères - bien connus des armateurs - n'était pas nouvelle. La Commission a considéré que le recours au critère de viscosité, pour définir les pétroles bruts, dans la proposition grecque, ne serait pas pertinente dans la mesure où les pétroles bruts denses mais suffisamment fluides (non visqueux) ne représentent qu'une partie non négligeable - moins de 1 % - du trafic maritime en Europe. Quant à la France, à titre de compromis, elle a proposé que : - les pétroles bruts lourds soient définis par leur seule densité, dans la mesure où densité et viscosité sont liées pour ce type d'hydrocarbures ; - les fiouls lourds soient définis par leur densité et leur viscosité cinématique, afin de garantir une meilleure sécurité maritime. Les fiouls lourds sont des produits raffinés, qui ont des caractéristiques très variées et pour lesquels il n'existe pas de relation entre densité et viscosité cinématique. Pour la France, il serait dangereux de se borner à un seul critère, la viscosité apparaissant, quant à elle, comme un critère complémentaire pertinent de la densité. Un navire qui transporte un fioul lourd, dont la densité est faible, mais dont la viscosité présente un danger (ou l'inverse) se verrait ainsi interdire l'accès dans un port communautaire. Cette proposition, que la Présidence grecque a demandé à la France de présenter par écrit, a été favorablement accueillie par la Commission et plusieurs Etats membres (Espagne, Italie et Allemagne). ¬ S'agissant des objections d'ordre économique formulées à l'encontre de la proposition sur le retrait des navires à simple coque, elles ont trait aux difficultés d'approvisionnement qui en résulteraient et au surcoût qui serait imposé aux constructeurs. Le premier problème vient du fait que la proposition de règlement inclut les pétroliers de 600 à 5 000 tonnes dans son champ d'application. Or, si une telle disposition était maintenue, des difficultés pourraient en résulter pour la desserte des îles. De même, les avitailleurs - ces bateaux qui approvisionnent les gros navires dans les ports - ne pourraient plus être exploités. Enfin, ces navires effectuant le plus souvent du cabotage, le règlement de la Commission entre ainsi en contradiction avec son Livre blanc qui, précisément, voit dans le développement du cabotage l'un des moyens destinés à réduire le trafic routier. Pour leur part, les autorités italiennes ont rédigé un projet de décret, qui ouvrirait la possibilité aux navires de petite dimension - moins de 5 000 tonnes - d'effectuer l'approvisionnement. Il semble que l'une des solutions vers laquelle on pourrait s'orienter consisterait à prévoir un moratoire de deux années. Quant au surcoût entraîné par la mise en œuvre du projet de la Commission de remplacer des simples coques par des doubles coques, il serait de 20 % en investissement et de 25 % en maintenance. Pour ce qui les concerne, les armateurs norvégiens ont évalué à 500 millions d'euros le montant du coût additionnel de cette mesure. A cet égard, M. François Lamoureux, directeur général des transports et de l'énergie de la Commission, a fait observer - à juste titre - qu'il serait excessif d'attribuer un rôle important au passage à la double coque dans la hausse éventuelle du baril de pétrole. En effet, d'après une étude du Conseil National de la Recherche des Etats-Unis citée par le rapport de la commission d'enquête parlementaire sur l'Erika, l'impact des mesures relatives à la double coque sur le coût des produits pétroliers peut être estimé à environ 10 cents par baril ou un dixième du coût du transport, qui, lui-même, ne représente que 5 à 10 % du coût total du produit(29). b) Le débat inévitable sur l'adéquation des propositions de la Commission Ce débat est d'autant plus légitime que la Commission a pris le parti - clairement annoncé dans sa communication du 3 décembre 2002 - de limiter le nombre de mesures nouvelles. C'est pourquoi, par exemple, la Commission a opposé une fin de non-recevoir à toute révision de la directive sur les sociétés de classification, au motif que les circonstances exactes du naufrage du Prestige n'auraient pas été établies par l'enquête sur cet accident. On peut s'étonner de cette frilosité et du caractère spécieux de cet argument d'autant que la responsabilité de la société de classification - American Bureau of Shipping - pourrait être engagée car elle n'aurait pas su ou voulu détecter un défaut de structure du Prestige ! Mais au-delà, les rapporteurs constatent l'existence d'un fossé entre la position très prudente de la Commission et la demande de mesures fortes exprimées soit au sein de notre Délégation, lors de l'audition de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, le 15 janvier dernier(30), soit par plusieurs de nos interlocuteurs. Il en est ainsi du projet de garde-côtes européen. Son contenu est susceptible de varier selon les interlocuteurs, allant d'une simple structure de coordination à l'instauration d'une véritable police des mers, à l'exemple de l'US Coast Guard. D'autres personnalités ont, en revanche, douté que, du fait de la configuration géopolitique et institutionnelle, l'Europe puisse parvenir à imiter le modèle américain. C'est pourquoi elles ont estimé préférable de faire jouer les mécanismes de coopération renforcée prévus par le traité. Quoi qu'il en soit, ces discussions confirment que l'Europe ne pourra faire plus longtemps l'économie d'une réflexion en ce domaine, dans le cadre d'une politique de sécurité maritime qui aurait l'ambition d'être mieux harmonisée et plus efficace, même si, a priori, la majorité de nos partenaires y est hostile, ou au mieux indifférente. En effet, d'après les renseignements fournis aux rapporteurs, seuls l'Espagne et le Portugal se prononcent très clairement en faveur de cette idée. 2) Des doutes quant à leur licéité A l'image de ce qui se passa aux Etats-Unis après le vote de l'Oil Pollution Act, les mesures préconisées par la Commission concernant le retrait des pétroliers à simple coque ou les projets de limitation du transit dans la ZEE ont été dénoncées comme unilatérales. A cet égard, il n'est pas sans intérêt de remarquer que Mme Lois Capps, représentante démocrate de Californie, a déposé une proposition de loi au mois de janvier 2003, dont l'objet est d'aligner la législation américaine sur le calendrier proposé par la Commission. En effet, la crainte existe que les navires concernés ne se rendent ensuite dans les eaux américaines. Au sein du groupe de travail, ce reproche d'unilatéralisme a été formulé de façon vigoureuse par le Royaume-Uni, qui a déclaré préférer l'adoption d'une réglementation internationale dans tous les domaines. Adoptant une position analogue, la Belgique a estimé que la question des simples coques devait obligatoirement être traitée à l'OMI, car cela figure dans les conclusions du Conseil. Sur la question de la limitation du transit dans la zone des 200 milles, elle a considéré qu'elle devait être examinée dans le cadre du droit international et jugé « héroïque » notre interprétation (à nous Européens) de la convention de Montego Bay sur le droit de la mer. Elle craint qu'une telle position ne soit imitée par d'autres Etats. Il est intéressant de relever que, pour certains autres Etats Pour ce qui est de la question de la limitation du transit dans la zone exclusive, l'Allemagne souhaite qu'elle soit examinée par l'OMI. Elle a fait part de son intention d'ouvrir une procédure contre le Maroc, qui a pris les mêmes décisions que la France et l'Espagne. Tout en déclarant n'être pas opposée à une démarche à l'OMI, l'Espagne a considéré que ne devait pas être entravée la prise de décisions au plan communautaire. Pour elle, il n'y a pas de lien entre les deux procédures : elle souhaite donc que le règlement communautaire sur les pétroliers à simple coque fasse l'objet d'un accord au Conseil « Transports » des 26 et 27 mars 2003. En ce qui concerne les contrôles renforcés dans la ZEE, elle accepte une procédure de réflexion au sein de l'OMI, mais demande à la Commission de prendre également des mesures au niveau communautaire. Quant à la Grèce, les rapporteurs déplorent vivement qu'au moment même où elle assure la présidence du Conseil de l'Union, le ministre hellène de la marine marchande ait pu déclarer que la Grèce s'opposerait aux mesures unilatérales de l'Union européenne qui mineraient le statut de l'OMI. C'est pourquoi dans la proposition de résolution présentée en conclusion de leur rapport, ils demanderont au Gouvernement français d'être très attentif à la mise en application des normes proposées par la Commission, compte tenu de ces déclarations très préoccupantes. Pour sa part, la Commission rappelle l'impossibilité pour l'OMI de statuer avant le mois de juin 2003 sur l'accélération du retrait des navires à simple coque. Elle précise qu'en vertu du règlement communautaire existant, il s'agit désormais d'une compétence communautaire. En second lieu, elle souligne qu'il n'existe aucune difficulté à prendre des règles régionales, comme le montre l'exemple des Etats-Unis. A l'évidence, les rapporteurs considèrent qu'une telle position mérite d'être soutenue, même si elle appelle des compléments. 1) Une démarche qui doit être soutenue Deux raisons justifient ce soutien : les attentes fortes de l'opinion publique et le fait que la crédibilité de l'Europe et celle des Etats membres sont en jeu. a) Les attentes fortes de l'opinion publique Dans leurs propos liminaires, les rapporteurs ont souligné l'exaspération de l'opinion publique devant la succession des marées noires. Les Etats sont désormais tenus de mettre en œuvre des mesures lisibles et efficaces. Les manifestations qui ont rassemblé plus de 100 000 personnes dans les rues de Madrid(31) réclamant des « sanctions politiques » après la catastrophe du Prestige, illustrent avec éclat les nouvelles exigences de l'opinion publique. Celle-ci ne se contentera plus d'une politique qui, en matière de sécurité maritime, se borne à réagir aux conséquences d'une catastrophe et néglige de s'attaquer à leurs causes. En d'autres termes, l'opinion publique s'attend à ce que soient tirées toutes les conséquences de la notion de développement durable, consacrée à l'article 2 du traité(32). Une telle attente implique que les Etats et l'Europe soient réellement à la hauteur des enjeux et crédibles. b) La crédibilité de l'Europe et des Etats est en jeu Même s'il convient de relativiser la portée des sondages il n'en demeure pas moins qu'une enquête d'opinion effectuée le 27 novembre 2002 sur le niveau de confiance accordé par les citoyens au Gouvernement et à l'Europe pour lutter contre les marées noires devrait faire réfléchir(33). En effet, à la question « Faites-vous confiance ou pas confiance au Gouvernement français pour prendre des mesures efficaces, pour éviter de nouvelles marées noires sur les côtes françaises ? », 43 % des personnes interrogées ont répondu positivement, tandis que 54 % ont répondu négativement, 3 % ne se prononcent pas. La même question a été posée à propos de l'Union européenne. Les réponses ont été les suivantes : 46 % accordent leur confiance, 49 % ne font pas confiance, 5 % ne se prononcent pas. On constate donc une réelle crise de confiance de la majorité des citoyens en ce qui concerne l'aptitude tant du Gouvernement que de l'Union européenne à mettre en œuvre une politique efficace de sécurité maritime. S'agissant de l'Europe, le jugement est un peu sévère, surtout si l'on se rappelle que, par exemple, au titre de mesures d'indemnisation d'urgence, un crédit de 50 millions d'euros financé sur les fonds structurels a été ouvert au profit des pêcheurs galiciens par le Conseil « Pêche » du 20 décembre 2002. En outre, un véritable élan de solidarité européenne s'est manifesté de la part des autres Etats membres, au travers de l'envoi d'experts et de matériels. Mais, au-delà, et sous réserve de la confiance sans doute excessive accordée par la Commission aux navires à double coque, les rapporteurs considèrent que les propositions de la Commission reflètent bien sa volonté de faire franchir un cap nouveau à la politique européenne de sécurité maritime. C'est pourquoi, les rapporteurs approuvent les initiatives prises ou envisagées par la Commission depuis le naufrage du Prestige, en matière de prévention, d'indemnisation et de sanctions. ¬ Sont ainsi de nature à assurer une meilleure prévention : - le retrait accéléré des pétroliers à simple coque, puisqu'une telle mesure présentera l'avantage indéniable de contribuer à la rénovation des flottes. Les rapporteurs jugent toutefois nécessaire que le futur règlement impose des détecteurs de gaz, pour prévenir les risques d'explosion, auxquels sont exposés, comme on l'a vu, les navires à double coque ; - l'encouragement adressé aux Etats membres par le Conseil « Transports » des 5 et 6 décembre 2002 afin de limiter le transit des pétroliers dans la zone économique exclusive des Etats membres. En effet, à l'objection selon laquelle une telle mesure serait dépourvue de base légale et porterait atteinte à la liberté de navigation par son caractère général, l'Europe et les Etats membres peuvent répondre qu'il s'agit d'empêcher, du fait des risques de pollution présentés par certains types de navire, leur passage qui ne serait pas inoffensif ; - les mesures contenues dans la proposition de directive relative à la formation des gens de mer, en ce qu'elle instaure une procédure harmonisée de reconnaissance des qualifications des professionnels des pays tiers recrutés par les Etats membres. ¬ En ce qui concerne l'indemnisation, les rapporteurs estiment qu'il importe de remédier aux insuffisances patentes du régime international. Il n'y a aucune raison justifiant l'écart actuel entre la législation américaine, qui prévoit un plafond d'un milliard de dollars et celui du Fipol qui pourrait atteindre 270 millions d'euros, dans le cadre du projet qui sera soumis à la conférence diplomatique du mois de mai prochain. C'est pourquoi les rapporteurs considèrent qu'en cas de refus par cette conférence diplomatique de retenir une proposition analogue à celle formulée par la Commission, au travers du fonds Cope (fonds européen complémentaire d'indemnisation), il conviendrait que le Conseil reprenne les discussions du projet de la Commission. ¬ Enfin, les rapporteurs, dans leur souci de substituer un cercle vertueux à la chaîne actuelle d'irresponsabilités, approuvent fortement le projet visant à instaurer des sanctions pénales. Celles-ci seraient infligées à l'armateur, au propriétaire de la cargaison, à la société de classification ou à toute autre personne concernée, responsable d'une pollution en raison de sa négligence grave. Le lendemain même de la présentation de ce rapport, la Commission a déposé, le 5 mars 2003, une proposition de directive relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions, notamment pénales, en cas d'infractions(34). Les rapporteurs se félicitent de la diligence dont la Commission a fait preuve en la circonstance. 2) La démarche de la Commission doit être complétée Outre l'opportunité pour l'Europe d'étoffer sa politique de sécurité maritime, il importe que celle-ci soit prolongée à l'échelle mondiale au sein de l'OMI ainsi que par des actions de coopération. Il convient aussi qu'elle soit relayée par les Etats membres, dont la politique doit être exemplaire. a) L'Europe doit étoffer sa politique de sécurité maritime ¬ En matière de prévention, les rapporteurs estiment indispensable de ne pas la limiter à la seule pollution par les hydrocarbures. Comme le montre le naufrage du chimiquier Ievoli Sun survenu en 2000, les produits chimiques et d'autres matières dangereuses peuvent être sources de pollutions. C'est pourquoi le champ d'application du projet de règlement de retrait accéléré des navires à simple coque devrait inclure opportunément les navires transportant des matières dangereuses. En second lieu, l'Europe pourrait s'inspirer des disposition de l'Oil Pollution Act concernant le traitement des sinistres. Celles-ci imposent, en effet, aux navires de disposer d'un « plan de réponse ». Ce plan décrit les procédures et identifie les personnels et les moyens nécessaires pour faire face à toutes les hypothèses de pollution. Il comporte deux volets pour les actions du navire et pour les interventions menées depuis la terre. Le volet concernant le navire trouve en partie un équivalent international dans le Plan d'urgence du navire de la Convention Marpol, et les exigences du code ISM (International Safety Management). En revanche, le volet terrestre est original et implique davantage l'armateur dans la lutte contre la pollution : la fourniture des moyens de ramassage nécessaires est de sa responsabilité, soit par ses moyens propres, soit par un contrat avec des organisations spécialisées. Le plan de réponse impose d'identifier un « individu qualifié » représentant l'armateur, qui doit résider aux Etats-Unis, parler anglais, connaître le plan, être formé à ce rôle et être agréé par les Coast Guards. Il doit avoir autorité pour engager toutes les ressources identifiées dans le plan, agir avec le coordinateur fédéral et pouvoir engager les fonds nécessaires. Il dispose d'une équipe technique et de toutes les données concernant le navire. Le système de l'« individu qualifié » garantit le répondant technique de l'armateur et la réalité de ses moyens, de façon plus sûre que le code ISM dont les certificats ont une valeur réelle variable. La multiplication de systèmes purement nationaux, comme le système américain, représenterait une lourde contrainte. Néanmoins, une forme allégée de « l'individu qualifié », éventuellement au niveau européen, peut sembler plus intéressante que la « personne responsable » dans le code ISM. En tout état de cause, l'orientation proposée ici serait de nature à régler les difficultés soulevées par l'appel aux « bénévoles », que l'on a pu rencontrer lors du naufrage de l'Erika et du Prestige. Quant à la désignation des lieux de refuge, les rapporteurs souhaiteraient que la Commission et les Etats membres puissent coordonner efficacement leurs actions. Car il importe de prévenir ici les investissements improductifs et de faciliter une utilisation optimale des équipements. ¬ Pour ce qui est du contrôle, l'Europe pourrait assujettir tout pétrolier chargé et âgé de plus de 15 ans, souhaitant entrer dans la ZEE d'un Etat membre ou faire escale dans un port de l'Union, à l'obligation de présenter un certificat européen de conformité de structure, CECS. Ce certificat serait délivré pour une durée de 30 mois après une inspection de la structure et une visite des citernes, du ballast et de la capacité du navire, ce dernier étant visible à sec en cale sèche. L'inspection serait effectuée aux frais de l'armateur (y compris les frais de déplacement et d'hébergement), et sur demande de ce dernier, par les inspecteurs de l'Etat du port européen de destination, ou l'équipe d'inspecteurs des Etats côtiers compétents lors de l'entrée dans la ZEE d'un Etat membre. Le certificat délivré par un Etat membre de l'Union européenne serait opposable aux autres Etats membres pendant sa période de validité. L'armateur ou son représentant qui en effectue la demande devrait disposer sur le territoire de l'Union européenne, d'un mandataire habilité qui se porte caution pour le paiement des frais inhérents à l'organisation de la visite de structure. La communication d'un exemplaire du CECS pourrait être effectuée : - à partir du port de départ du dernier chargement aux autorités maritimes en charge du contrôle du port d'arrivée (s'il s'agit du port d'un Etat membre de l'Union européenne) ou 48 heures avant de pénétrer dans la ZEE aux autorités ayant en charge le contrôle du trafic maritime au titre de l'Etat côtier, lorsque le navire est à destination d'un port situé hors de l'Union européenne ; - la communication de l'information pourrait être automatisée dans le cadre du système obligatoire AIS, puisque tous les navires citernes devront être équipés de ce matériel au 1er juillet 2003. Compte tenu du nombre de visites qu'il conviendrait d'effectuer lors de la mise en place de cette mesure et à moins que son application ne soit de la compétence de l'agence européenne de sécurité maritime, les contrôles pourraient être mutualisés entre les Etats membres riverains d'une même ZEE. Ainsi, dans le contexte maritime français on pourrait distinguer les trois secteurs suivants : - 1- Manche ouest : Irlande, Royaume-Uni, France ; - 2- Atlantique : Espagne, Portugal, France et Irlande ; - 3- Méditerranée : Espagne, Italie, France. A l'image des visites obligatoires pour l'exploitation des navires transbordeurs prévues dans le cadre d'une directive européenne (99/35), la Commission pourrait présenter un projet de directive communautaire qui organiserait ce type de contrôle conjoint pour les navires citernes à risques. Ces dispositions permettraient de contourner les difficultés d'ordre juridique soulevées par la limitation du transit dans la ZEE. l Une seconde mesure, qui apparaît également indispensable aux yeux des rapporteurs consisterait à instituer la responsabilité illimitée des sociétés de classification. Il importe, en effet, au travers de ce mécanisme juridique, d'éliminer les petites sociétés de classification qui, guidées par le seul souci du profit, n'hésitent pas à émettre une classification de complaisance des « navires poubelles ». Parallèlement, cela pourrait inciter les grandes sociétés de classification à se regrouper et, ainsi, les conduire à défendre la qualité de leurs produits. Cette règle de responsabilité illimitée est, au demeurant, celle qui est applicable en France et en Espagne notamment. l Enfin, l'un des enseignements que tirent les rapporteurs est le souhait de plusieurs de leurs interlocuteurs de voir l'Agence de sécurité maritime jouer pleinement et rapidement un rôle important. Il est, à cet égard, révélateur que sur la question délicate des garde-côtes, l'Agence ait pu être considérée comme le meilleur cadre pour un tel corps. Compte tenu de la configuration institutionnelle et géopolitique de l'Europe, il semble que ce soit la solution la plus adaptée. En tout cas, les rapporteurs estiment que l'on ne pourra faire l'économie d'une réflexion sur ce problème, surtout si l'Union européenne devait se doter d'un système de sanctions pénales et d'une réglementation limitant le transit dans la ZEE. Dans cette perspective, le corps de garde-côtes serait, en effet, appelé à jouer le rôle de bras séculier de cette législation européenne, à l'exemple de l'US Coast Guard(35). ¬ Le développement des moyens techniques et scientifiques consacrés à la sécurité maritime est aussi un domaine dans lequel l'Union européenne doit agir. M. Lamoureux, directeur général des transports et de l'énergie de la Commission, a indiqué aux rapporteurs qu'une proposition de règlement serait très rapidement présentée, afin de permettre à l'Agence de sécurité maritime de mettre au point des navires dépollueurs et de coordonner les actions destinées au pompage du fuel en cas de pollution. A cet effet, des crédits d'un montant de 25 à 30 millions d'euros seront inscrits au budget de l'Union européenne pour 2004. S'il y a lieu de se féliciter de cette initiative de la Commission, on peut néanmoins remarquer que la technologie existe déjà, puisqu'Alstom a mis au point le navire dépollueur OSH, un navire trimaran capable de pomper en une semaine 40 000 tonnes d'hydrocarbures, soit l'équivalent de la cargaison de l'Erika. D'un coût de 100 millions d'euros, le navire offre également l'avantage de pouvoir être affecté à d'autres missions, telles que le contrôle du trafic, la police douanière ou la surveillance des pêches. b) L'action de l'Union européenne doit se prolonger au plan mondial Cette orientation revêt cinq aspects. ¬ Le premier touche aux initiatives que l'Union européenne et les Etats membres pourraient prendre au sein de l'OMI. En effet, la quasi-totalité des réformes évoquées - retrait accéléré des pétroliers à simple coque, réforme du Fipol, extension de la responsabilité civile des acteurs du transport maritime et création de zones particulièrement vulnérables - doit être examinée à l'OMI. Or, au sein de l'OMI, la Commission a un statut d'observateur, comme d'autres organisations intergouvernementales. Elle peut s'y exprimer librement, les Etats membres ayant toutefois refusé de permettre à l'Union d'y adhérer. Le poids des Etats membres dépend surtout de leur degré d'implication sur un sujet donné, de leur présence et de leur participation active aux débats, mais aussi du degré de coordination communautaire. Les réunions de coordination - à Bruxelles avant les sessions de l'OMI et à Londres au siège de l'OMI - tendent à devenir fréquentes. Par ailleurs, d'après les renseignements communiqués aux rapporteurs, le seul poids des Etats membres de l'Union, et a fortiori de l'Union élargie aux pays candidats - Chypre et Malte surtout -, permet à une convention d'entrer en vigueur, notamment lorsque la condition requise repose à la fois sur un nombre d'Etats et un tonnage de la flotte mondiale suffisants. Dans ce contexte, la Commission européenne souhaite voir les Etats membres jouer un rôle très actif dans les principales propositions de réforme qu'elle a présentées. Ainsi, par exemple, la Commission souhaiterait que les Etats membres aillent jusqu'à dénoncer la convention CLC sur la responsabilité civile du propriétaire, dans le cas où la conférence diplomatique de mai 2003 ne parviendrait pas à établir un système de responsabilité élargie, ni à porter le fonds complémentaire d'indemnisation du Fipol à un milliard d'euros. La Commission fait, en effet, valoir que c'est après avoir dénoncé la convention CLC que les Etats-Unis ont décidé de prévoir le dispositif de l'Oil Pollution Act. De même, c'est la dénonciation par les Etats membres de l'Union de la convention de Varsovie de 1929 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international qui a permis d'obtenir une amélioration du régime de la responsabilité des transporteurs. Quoi qu'il en soit, la décision des Etats membres devrait toutefois prendre en compte le fait que certains d'entre eux, et en premier lieu la France, sont les grands bénéficiaires du système actuel, dont le financement est assuré par de gros contributeurs tels que le Japon(36). D'autre part, certains estiment que le dispositif pourrait être amélioré non seulement par le relèvement à 270 millions d'euros du plafond d'indemnisation complémentaire, mais également par l'élargissement des actions en justice que peut exercer le Fipol. ¬ Le deuxième axe de l'action internationale de l'Union a trait à la promotion de la coopération entre le Nord et le Sud. Sur bien des points, une telle coopération s'avère nécessaire, dans l'intérêt des uns et des autres. Il en est ainsi de la constitution d'une véritable administration maritime dans plusieurs Etats, en particulier ceux figurant sur la liste noire publiée par le mémorandum d'entente de Paris. Le développement d'une telle coopération pourrait utilement compléter les travaux que l'OMI veut consacrer à l'audit des Etats du pavillon et, au-delà, contribuerait à mieux combattre les navires sous-normes. De même, dans le domaine de la formation des équipages, dont la qualité est l'un des éléments essentiels de la sécurité maritime, il serait utile de mettre en place un système international de validation des connaissances et des formations par un organe indépendant de l'Etat du port et de l'Etat du pavillon. Un dernier aspect de cette coopération touche au statut social des marins. A cet égard, les rapporteurs se félicitent du rôle qu'a joué la France au sein du groupe de travail mixte OMI-OIT. Celui-ci est en effet parvenu à faire adopter deux résolutions en 2002, l'une sur les garanties que doivent présenter les armateurs en matière de sécurité sociale notamment, l'autre ayant trait à l'abandon, au rapatriement, au décès, et aux blessures des marins. Ces textes sont toutefois dépourvus de valeur contraignante et doivent être intégrés dans les conventions correspondantes de l'OMI et de l'OIT. ¬ En troisième lieu, l'Union aurait intérêt à conclure des accords avec les pays producteurs d'hydrocarbures dont l'Union importe la production, comme la Russie ou l'Algérie, afin qu'ils acceptent d'appliquer les règles communautaires. Cette question a été très fréquemment évoquée lors de l'examen par le groupe de travail du projet de règlement sur le retrait accéléré des simples coques. Au-delà même du cas des pays producteurs d'hydrocarbures, des Etats tels que le Japon, Israël, le Yémen et le Maroc envisagent aussi d'appliquer les futures règles communautaires. ¬ Un quatrième axe, de nature offensive, pourrait consister à poursuivre les Etats soupçonnés d'immatriculer des pavillons de complaisance devant l'Organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce, en fondant cette saisine sur les distorsions de concurrence résultant des avantages fiscaux et sociaux que ces Etats en tirent. ¬ Enfin, dans la ligne des initiatives prises, au plan communautaire, en vue d'assurer la protection de l'environnement par le droit pénal, il ne serait pas inconcevable de réfléchir à la création d'un tribunal pénal maritime international. De même que la notion de crimes contre l'humanité a fini par déboucher sur la création du tribunal pénal international, on ne peut exclure que dans l'avenir, les Etats en viennent à consacrer également la notion de « crime contre l'environnement »(37). Ils tireraient ainsi les conséquences - au plan juridique - de l'idée formulée par certains d'ériger la mer en patrimoine commun de l'humanité. c) L'action de l'Union doit être relayée par celle des Etats membres A l'évidence, il ne pourra y avoir de véritable politique européenne de sécurité maritime que si les Etats membres sont eux-mêmes persuadés de la nécessité de mettre en œuvre les mesures adéquates dans trois domaines cruciaux, qui ont été très fréquemment abordés au cours de nos auditions. ¬ Il s'agit d'abord de la quantité et de la qualité des équipements concourant à la sécurité maritime ou à la lutte contre la pollution. En ce qui concerne la France, il appartiendra à la Commission d'enquête parlementaire de se pencher, de façon plus approfondie, sur ces problèmes. Mais pour leur part, les rapporteurs tiennent à déplorer le sous-équipement patent dont souffre la France en matière de lutte contre la pollution. L'un des rapporteurs a ainsi pu constater que ce sont deux navires anti-pollueurs norvégiens qui pompent le fuel échappé du Prestige dans le Golfe de Gascogne. De même, le nombre de remorqueurs apparaît très insuffisant. Enfin, il est regrettable que la dernière loi de finances rectificative ait annulé 5 millions de crédits consacrés à la sécurité maritime, au moment même où la catastrophe du Prestige était survenue. Dans ce contexte persistant de sous-investissement dont le transport maritime souffre depuis trop longtemps, peut-être conviendra-t-il d'envisager une loi de programmation, pour tenter de combler une partie des retards ainsi accumulés. L'exemple américain confirme que le contrôle de l'US Coast Guard est redouté, car il possède les moyens techniques et humains nécessaires. ¬ Le deuxième domaine dans lequel les Etats membres doivent se montrer exemplaires est celui du contrôle par l'Etat du port. Certes, le risque zéro n'existe pas, comme le confirme malheureusement le cas du Prestige, lequel a été contrôlé par l'US Coast Guard et la société de classification ABS ! Néanmoins, pour lutter contre les distorsions de concurrence et prévenir les risques d'accident résultant du maintien en service de navires sous-normes, il est de l'intérêt des Etats membres d'améliorer en quantité et en qualité les contrôles de tout navire, y compris celui des conditions sociales à bord. Aucune raison ne justifie, en effet, que le contrôle par l'Etat du port ne suscite pas la même crainte révérencielle que celui effectué par les douanes. ¬ Enfin, il importe que les Etats membres veillent à la qualité du processus de décision en cas de crise. Les rapporteurs ne souhaitent toutefois pas empiéter sur les prérogatives de la commission d'enquête parlementaire. C'est pourquoi ils se borneront à faire état des critiques de professionnels qu'ils ont rencontrés et qui n'hésitent pas à qualifier de calamiteux le processus actuel, du fait de la multiplicité des intervenants. Sur ce point, la situation française apparaît en retrait par rapport à celle de plusieurs de nos partenaires, par exemple l'Italie. Voulant tirer les conséquences du naufrage du Prestige, la Confirmata, association regroupant l'ensemble des armateurs italiens, envisage de mettre en place une cellule de crise, afin d'éviter un incident majeur le long des côtes italiennes ou du moins d'en limiter les conséquences négatives. Cette cellule, que la Confirmata mettra en œuvre avec ses propres ressources, sera mobilisée en permanence et aura trois missions essentielles : - informer les autorités de l'architecture du navire en difficulté, de son équipage, de son chargement et de sa classification. A cette fin, la cellule aura à sa disposition une base de données, alimentée par l'ensemble des membres de l'association ; - conseiller les autorités en matière de guidage du navire et de soutien de son équipage ; - gérer la communication auprès des médias afin de permettre une gestion sereine de l'incident. Basée à Gênes, cette unité sera composée d'une dizaine de personnes et pourra intervenir, quel que soit le pavillon du navire en difficulté. Elle devrait être mise en place dans les mois à venir, selon des modalités qui restent encore à déterminer avec les autorités italiennes. Des discussions sont en cours à ce sujet entre la Confirmata et le ministère des infrastructures et des transports. * * * Y aura-t-il un avant Prestige et un après Prestige, comme on a pu dire qu'il y a eu un avant Erika et un après Erika ? La prudence s'impose, même si les Etats ont conscience que l'opinion publique les met devant leurs responsabilités. Ainsi, un changement d'attitude est perceptible chez plusieurs d'entre eux. Ils conviennent qu'ils ne sont pas à l'abri d'une catastrophe. A cet égard, l'évolution du Danemark est remarquable. Depuis le dernier Conseil européen de Copenhague du 13 décembre 2002, ce pays est moins hostile au principe de mesures communautaires, d'autant qu'au mois de janvier 2003, a été évité au large de ses côtes un naufrage qui aurait pu être comparable à celui de l'Erika. De même, le représentant permanent adjoint de la Grèce auprès de l'Union européenne a fait part aux rapporteurs de la crainte des autorités grecques des conséquences qu'entraînerait pour leur pays un naufrage analogue à celui du Prestige. En tout cas, les rapporteurs sont intimement convaincus qu'il n'est de fatalité en la matière que celle résultant du manque de moyens dont le transport maritime a trop souvent souffert. C'est pourquoi ils entendent, pour l'avenir et jusqu'à la fin de la législature, conformément au mandat qui leur a été confié par la Délégation, inciter les autorités françaises à procéder aux réformes nécessaires et à jouer un rôle moteur dans l'élaboration d'une politique européenne de sécurité maritime. {texte de la conclusion...} Audition de M. Dominique Bussereau, Secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, sur la sécurité maritime en Europe, le 15 janvier 2003 Le Président Pierre Lequiller a souligné que la sécurité maritime était une question d'actualité européenne et qu'elle était devenue la première préoccupation de l'opinion publique. Il a indiqué que la Délégation avait décidé de confier un rapport d'information sur la sécurité maritime en Europe à MM. Didier Quentin et Guy Lengagne qui seront également chargés du suivi de ce secteur. Le ministre s'est félicité que cette audition fasse suite aux premières questions européennes posées dans le cadre de la séance des questions au Gouvernement, dont l'une a porté sur la sécurité maritime, à l'initiative du Président Pierre Lequiller, confirmant bien la dimension européenne de ce problème. Avant d'exposer les grandes orientations de la politique du Gouvernement, le ministre a rappelé que les deux-tiers du pétrole mondial étaient acheminés par voie maritime dans des zones fréquentées et très dangereuses, comme le détroit du Pas-de-Calais qui nous concerne au premier chef et qui est aussi fréquenté que le détroit de Malacca. Il a, en outre, fait observer que l'opacité du monde maritime favorisait le changement très fréquent des propriétaires de cargaisons et le comportement - répandu -des voyous des mers. Il a souligné que la sécurité maritime était l'une des priorités du Gouvernement, en raison de l'ampleur des dommages causés par les naufrages de l'Erika et du Prestige. Une flotte pétrolière moderne requiert l'existence d'équipages qualifiés, même si les pays développés se heurtent actuellement à de sérieuses difficultés pour recruter des marins. Ceci ne doit pas empêcher la France et ses partenaires de viser au renforcement de la sécurité maritime au plan international. Il importe d'éviter que ne se développent des pratiques quasi-esclavagistes dans l'embauche des équipages et d'accorder au Fipol (Fonds d'indemnisation des pollutions par les hydrocarbures) des moyens d'indemnisation adéquats. A l'échelle de l'Europe, les Etats membres doivent s'efforcer d'accélérer la transposition de l'ensemble des textes, car on peut reprocher à certains d'entre eux de n'avoir toujours pas procédé à la transposition des paquets Erika I et II. Cela étant, le ministre s'est félicité que lors du Conseil « Transports » du 6 décembre 2002, les Etats membres aient partagé la détermination dont la France et l'Espagne ont fait preuve lors du sommet de Malaga. Tous les Etats membres ont accepté le principe de l'élimination rapide des navires à simple coque transportant des marchandises dangereuses. Le ministre est toutefois convenu que malgré les diverses mesures techniques existantes ou envisagées, il pouvait toujours exister un défaut de vigilance, comme le montre l'incident du Vicki, pétrolier turc ayant touché l'épave du Tricolor, qui aurait pu provoquer une catastrophe comparable à celle du Prestige. S'agissant de l'Agence européenne de sécurité maritime, elle a tenu sa première réunion en décembre dernier, une nouvelle réunion étant prévue le 20 janvier 2003. Il importe de compléter ses structures administratives, de déterminer son siège - les villes du Havre et de Nantes figurant parmi les candidates - et de lui donner des moyens. Posant la question de savoir si la France était « bonne élève » en matière de contrôle des navires dangereux, le ministre a reconnu qu'au mois de juillet 2002 ce taux n'atteignait que 9,4 %, et 16 % sur la moyenne de l'année, situation due au fait que si les postes avaient été créés par le Gouvernement précédent, les inspecteurs alors recrutés n'étaient toutefois pas encore opérationnels mais en cours de formation. Le ministre a souligné que grâce à une meilleure productivité, le taux d'inspection s'était établi à 30 % en décembre 2002. Il a considéré que le taux de 25 % ne devait pas être interprété de façon arithmétique, mais tenir compte des contrôles effectivement exercés sur les navires les plus dangereux. En vue de réduire les zones de non-droit et de mieux lutter contre les pavillons de complaisance, le ministre a jugé important que les mesures prises par les autorités françaises et espagnoles à Malaga en vue d'écarter les pétroliers à simple coque, âgés de plus de quinze ans de la zone économique exclusive (ZEE), aient été confirmées par le Conseil à Copenhague. Depuis lors, seize navires ont été écartés par la marine nationale de la ZEE. Evoquant les incidences de l'élargissement, le ministre a noté des changements de comportement de la part de Chypre et de Malte, mais également de la Lettonie et de l'Estonie. En outre, il a rappelé que le Conseil avait décidé le principe d'une action avec la Russie dont l'Union européenne importe une partie importante de son pétrole. Enfin, le ministre a abordé la question des sanctions à infliger aux vrais coupables : affréteurs, « moins-disants maritimes », par exemple. Il a jugé nécessaire que, pour lutter contre ces derniers, l'Europe s'inspire de mesures prises aux Etats-Unis telles que le renchérissement des obligations d'assurance et souhaité que l'Union européenne engage une coopération avec les Etats-Unis au plan international. En ce qui concerne l'amélioration des moyens de lutte, le ministre a rappelé que Alstom étudiait la mise au point d'un projet de catamaran rapide capable de pomper 8 000 tonnes de carburant, matériel qui pourrait efficacement être utilisé sur la façade atlantique et en Méditerranée, mais qu'il existait d'autres projets que le Secrétariat général à la mer expertisait. En conclusion, déclarant que la question de la sécurité maritime était de nature politique et qu'elle se posera aux Etats membres et à l'Europe, le ministre s'est opposé à l'idée de vouloir réduire le transport maritime, alors que ce dernier - avec le transport ferroviaire ou le transport fluvial - pourrait absorber l'excédent du transport de marchandises actuellement acheminé par la route. Il importe donc de développer le cabotage maritime et d'assurer un niveau de sécurité accru du transport maritime. M. Didier Quentin, rapporteur, a estimé que la crédibilité de l'Union européenne était en jeu et que la sécurité maritime était devenue l'une des préoccupations majeures des Français. Approuvant les déclarations indignées du chef de l'Etat, il a souhaité que des mesures draconiennes soient prises rapidement et enfin appliquées. Il a salué l'intensification des contrôles effectués à l'initiative du Gouvernement français. Il a jugé que les média avaient parfois exagéré les effets de la catastrophe du Prestige pour certaines régions françaises, toutes les plages n'étant pas atteintes par la pollution. Il convient notamment de ne pas utiliser l'expression « marée noire », dans la mesure où il s'agit de boulettes compactes. Les professionnels de la mer et du tourisme sont victimes de cette désinformation. M. Didier Quentin a demandé que les professionnels français de la mer soient indemnisés par l'Union européenne dans les mêmes conditions que les pêcheurs de Galice. Relevant que le système de réparation par le Fipol était plafonné, il a rappelé que les Etats-Unis avaient adopté, avec un certain succès, un programme de mesures draconiennes et dissuasives, et mis en place un corps de garde-côtes, même si ce dispositif s'inscrit dans une configuration géographique et institutionnelle particulière. M. Guy Lengagne, rapporteur, a regretté qu'à l'occasion du dernier collectif budgétaire, 5 millions d'euros de crédits, consacrés à la sécurité maritime, aient été annulés. Cette situation a des conséquences sur les possibilités de sortie en mer des vedettes des affaires maritimes. Le détroit du Pas-de-Calais constitue le plus grand boulevard maritime du monde, et le fait qu'il n'y ait pas davantage d'accidents très graves est un miracle, car les courants maritimes peuvent être très violents. Il a suggéré la présence dans ce passage d'un gros remorqueur extrêmement puissant, permettant d'aider un bateau en difficulté. M. Didier Quentin a rappelé que la création de « ports refuges », prescrite par le paquet Erika II, n'a pas été suivie d'effets, du fait des oppositions que les populations concernées n'auraient pas manqué de manifester. Ainsi, les Espagnols ont refusé l'accès du Prestige à un « port refuge », alors que cela aurait permis de limiter l'ampleur de la pollution. Il a regretté qu'aucune sanction effective n'ait été prise à l'encontre des dirigeants de la compagnie Total après le naufrage de l'Erika. Il a proposé que, sur le modèle des crimes contre l'humanité, la notion de crime contre l'environnement soit définie et assortie de sanctions pénales très lourdes, une telle orientation étant la clé d'une politique de sécurité maritime crédible. M. Guy Lengagne a interrogé le ministre sur les intentions du Gouvernement en ce qui concerne les « ports refuges ». Faut-il les choisir en concertation avec toutes les parties concernées, ou décider de façon unilatérale mais discrète de leur localisation ? Il a rappelé l'insuffisance des règles juridiques applicables aux zones économiques exclusives. Le territoire national est limité aux eaux territoriales (zone des 12 milles), ce qui, par exemple, ne permet pas à la marine nationale d'intervenir manu militari dans la zone ZEE. Il a souhaité que le siège de l'Agence européenne de sécurité maritime soit en France, et qu'en complément - fût-ce au prix d'une atteinte à l'indépendance nationale - soit mis en place un corps de garde-côtes européens pouvant intervenir dans l'ensemble des zones économiques exclusives des pays membres. Il a souligné à cet égard que la mise en commun des zones économiques exclusives était déjà pratiquée dans le cadre de la politique commune de la pêche, tout en doutant que les autres Etats membres partagent les préoccupations de la France, qui est de loin la plus menacée par les risques de pollution. Le ministre a annoncé que le Gouvernement présenterait des propositions spécifiques aux départements et territoires d'outre mer. M. Didier Quentin a demandé quelles garanties permettaient d'assurer que Chypre et Malte lutteront effectivement contre les pavillons de complaisance. S'agissant des dégazages sauvages, il a rappelé qu'ils étaient à l'origine de 90 % de la pollution par hydrocarbures. Ainsi, les boulettes récupérées à la fin décembre et début janvier sur l'île d'Oléron venaient principalement non pas du fioul du Prestige mais de dégazages. L'extrême faiblesse des sanctions constitue, en effet, une forte incitation au dégazage en mer. M. Guy Lengagne a précisé que la Grèce était le pays d'Europe ayant le plus de navires et que beaucoup d'armateurs grecs possédaient des navires poubelles. Il a souhaité savoir quelle était l'attitude de la Grèce sur ce sujet alors qu'elle vient de prendre la présidence de l'Union européenne. M. Dominique Bussereau a apporté les éléments de réponse suivants : - il existe en effet, à côté des dégâts liés à la pollution, des dégâts « médiatiques », provoqués par l'exagération de certains problèmes, comme on l'a vu en décembre 1999 sur la côte atlantique avant la tempête. Une grande part de la pollution est due au dégazage, tandis que l'on profite des marées noires pour recourir à cette pratique ; - une aide structurelle a été apportée par l'Union européenne à la Galice à la suite de l'accident du Prestige. Par ailleurs, le ministre français de l'agriculture intervient au sein des instances communautaires pour obtenir des aides en faveur des pêcheurs ou des ostréiculteurs français touchés par la catastrophe, notamment ceux du bassin d'Arcachon ; - une nouvelle convention du Fipol a fixé une enveloppe de 270 millions d'euros à la suite de l'accident du Prestige, contre 180 millions après celui de l'Erika. De plus, la création d'un fonds complémentaire d'indemnisation est étudiée dans le cadre de l'OMI, et l'Union européenne a indiqué qu'elle envisageait, sinon, son propre fonds, doté d'un milliard d'euros. Il faudra, à ce sujet, également prendre en compte le cas des victimes indirectes des catastrophes qui ne peuvent être indemnisées au titre du Fipol ; - s'agissant du régime de responsabilité objective en fonction du tonnage des navires, qui prévaut aux Etats-Unis, il est moins difficile à appliquer par ce pays compte tenu de sa situation (possibilité de s'immatriculer dans des micros-Etats, contrôle par des armateurs américains de pavillons libériens circulant en dehors des eaux américaines...). Par ailleurs, il est vrai que - en l'absence d'un consensus -le principe pollueur-payeur n'est pas encore suffisamment appliqué en Europe ; - sur le plan budgétaire, il est exact que la combinaison du gel et de la régulation des crédits peut avoir des effets négatifs sur la sécurité maritime. Par ailleurs, 11 millions de crédits ont été reportés de 2002 à 2003. Il a été convenu avec le ministère de l'économie et des finances qu'en cas de gel des crédits en 2003, ceux relatifs à la sécurité maritime ne seraient pas concernés ; - le ministère de la défense vient de lancer un appel d'offres pour se doter de trois nouveaux remorqueurs, qui seraient affectés à la mer du Nord, à la Manche et à l'Atlantique, tandis que les deux remorqueurs actuels seraient transférés en Méditerranée ; - s'agissant du régime de sanctions et de responsabilité, un décret du 11 février 2002 a créé des parquets maritimes spécialisés en matière de pollutions maritimes. Cependant, aucun Etat du monde ne pouvant seul remédier aux accidents, il y a lieu de renforcer davantage la coopération internationale dans ce domaine ; - les « ports refuges » posent le problème de savoir quels sont les pays qui vont devoir les héberger. La France remettra, conformément aux exigences communautaires, une liste de sites à la Commission d'ici le 1er juillet 2003 : elle devra tenir compte pour ce faire des sites nucléaires et autres zones sensibles ; - la création d'un corps de garde-côtes européens est une très bonne idée : la mise en place de l'Agence de sécurité maritime devrait d'ailleurs y conduire. Cela dit, la France doit aussi mieux répartir et organiser ses différentes forces d'intervention (affaires maritimes, gendarmerie, douanes, police nationale, services d'incendie et de secours, marine nationale...) ; - la question de la lutte contre les pavillons de complaisance à Chypre et à Malte sera évidemment posée. Quant à la Grèce, son attitude de totale coopération n'appelle aucune observation particulière à ce sujet depuis six mois ; - les dégazages sauvages constituent en effet une part considérable de la pollution maritime. Pour y remédier, on peut envisager soit la pose d'appareils à bord des navires jouant le rôle de boîtes noires, soit le recours à des satellites spécialisés dans le repérage de ces phénomènes, qui pourraient être testés dans un délai de cinq ans, puis déployés ultérieurement. M. Bernard Deflesselles a souligné l'importance des pollutions liées aux dégazages et aux déballastages, estimées à environ 1 800 000 tonnes de brut par an soit douze fois plus que celles liées aux accidents maritimes. Il a précisé que plus de quarante dégazages avaient été recensés concomitamment au naufrage de l'Erika. Il a rappelé qu'il avait déposé une proposition de loi en 1999, adoptée en mai 2000, qui avait très sensiblement renforcé les peines d'amende et d'emprisonnement prévues en cas de dégazage et de déballastage. En complément aux recrutements d'inspecteurs effectués parmi les personnels à la retraite, il conviendrait également d'attirer vers ce métier des jeunes issus des écoles de la marine marchande, ce qui impliquait sans doute une revalorisation des salaires. S'agissant des corps de garde-côtes, il faut passer outre aux problèmes juridiques et d'organisation que pose la nécessaire unification des corps existants, la situation actuelle du dispositif n'étant nullement satisfaisante. Il s'est félicité de la volonté de réorganisation exprimée dans ce domaine par Mme Loyola de Palacio, commissaire européenne chargée des transports. Il a estimé que le droit maritime international restait encore un droit du 19ème siècle - à la différence du droit aérien - et qu'un effort d'adaptation de ce droit apparaissait indispensable. Il a considéré que l'Europe devait agir dans ce sens au niveau de l'Organisation maritime internationale (OMI), regrettant la faiblesse de l'influence française dans cette enceinte, liée à l'importance réduite de la flotte sous pavillon français. M. Dominique Bussereau a exprimé son accord avec les points de vue exprimés par M. Bernard Deflesselles. Il a souligné la volonté politique existant au niveau de l'Union pour apporter des solutions satisfaisantes à la question des garde-côtes, tout en convenant des difficultés qui l'entourent, tenant aux exigences de souveraineté et de défense. Il a également regretté la faiblesse du pavillon français, évoquant les possibilités de mise en place en France d'un second pavillon, ou second registre, qui fait l'objet d'une mission qui a été confiée à M. Henri de Richemont. Il a souhaité que l'action diplomatique de l'Union européenne se renforce au sein de l'OMI, au besoin en développant la coopération avec les Etats-Unis. S'agissant des inspecteurs, il a indiqué qu'un recrutement important, portant sur cinquante inspecteurs, avait été décidé, en plus de l'apport complémentaire des officiers de la marine marchande en retraite. Il a estimé qu'il convenait parallèlement d'envisager la reconversion aux fonctions d'inspecteur de personnels existants, de réfléchir à l'établissement de passerelles possibles avec le secteur privé, comme de revaloriser les carrières concernées. M. Michel Herbillon a interrogé le ministre sur les informations disponibles à propos des dégazages qui se seraient produits à l'occasion de la catastrophe du Prestige. Le ministre a précisé que la présence de boulettes de fioul, ne provenant pas du Prestige, avait effectivement été constatée sur les côtes de Charente-maritime ; il a noté que la même constatation avait été faite sur les côtes espagnoles et portugaises. M. Edouard Landrain a indiqué qu'il avait récemment déposé, conjointement avec M. Jacques Barrot et avec M. Christophe Priou, une proposition de résolution visant à la création d'une commission d'enquête parlementaire relative aux suites données aux préconisations qui avaient été faites par la commission d'enquête sur l'Erika. Il a souligné que beaucoup de temps avait été perdu depuis la catastrophe de l'Erika. Il a notamment évoqué la proposition de loi qu'il avait déposée en mars 2000, avec M. Pierre Hériaud et M. Dominique Caillaud, relative à la création d'un corps de garde-côtes, qui s'est heurtée aux désaccords existant entre les différentes administrations concernées, et qui n'a pas pu être prise en compte. Il a également critiqué le fait que rien de significatif n'ait été engagé depuis trois ans pour mieux organiser la disponibilité des remorqueurs sur les côtes françaises. En ce qui concerne la question des inspecteurs, il a noté que l'exercice des missions de contrôle supposait une certaine expérience et qu'il n'était donc pas opérationnel de vouloir recruter directement à l'issue des formations initiales. Il a vivement regretté que l'on n'ait pas encore progressé à propos de la question des « ports refuges ». Il a rappelé que le Prestige aurait très bien pu être conduit dans des abris naturels, près des ports de Vigo ou de La Corogne, qu'il a approchés de très près, ce qui aurait très sensiblement limité la pollution. Il a fortement soutenu la décision de création de l'Agence européenne de sécurité maritime. A propos des plans « Polmar terre » et « Polmar mer », il a notamment regretté que l'on n'ait pas déployé davantage d'efforts pour améliorer les moyens techniques de récupération du pétrole. Il a constaté que la législation américaine avait eu pour effet de renvoyer les « bateaux poubelles » vers l'Europe et que la mise en place d'un dispositif renforcé en Europe les renverra vers l'Asie, ce qui n'est pas une solution satisfaisante. Dans le même esprit, il convient de favoriser le traitement sur place des déchets industriels dangereux Il a enfin souligné que le droit maritime était totalement dépassé. Il a cité comme exemple la règle selon laquelle tout voilier a encore la priorité sur un bâtiment à moteur, même s'il s'agit d'un pétrolier de 300 000 tonnes. En conclusion, il a souhaité que l'Union européenne soit, dans ce domaine, plus sagace et plus audacieuse. M. Christian Philip a estimé que la catastrophe du Prestige pouvait faire prendre conscience à l'opinion publique de l'utilité de l'Europe pour répondre collectivement à ce genre d'évènement. Citant l'exemple de l'oubli dans lequel sont tombées les mesures et propositions efficaces contenues dans les deux paquets Erika, il a souligné la nécessité d'engager rapidement un grand effort de communication auprès des citoyens européens, qui, trop souvent, ignorent que l'Europe peut agir pour répondre à leurs préoccupations immédiates. Il a jugé cependant qu'une telle démarche ne pourrait porter ses fruits que si elle s'accompagnait d'un renforcement de la capacité de l'Europe à appliquer rapidement les décisions qu'elle a prises. L'idée de la création d'un corps de garde-côtes européens est bienvenue, mais encore faut-il savoir dans quels délais celui-ci peut être mis en place. Il convient aussi d'accélérer la mise en œuvre de l'interdiction des navires à simple coque, en limitant au besoin cette mesure dans un premier temps à certains ports ou encore que l'Union européenne se dote d'un règlement relatif aux ZEE. Des signaux forts doivent donc être envoyés en direction de l'opinion publique, qui trop souvent pense encore que l'Europe est impuissante à agir vite et bien. M. Jean-Yves Bessselat a observé que l'évolution du monde maritime conduisait inéluctablement à une augmentation des problèmes de respect de l'environnement. Le trafic maritime croît en effet de 7 %, le transport par bateau étant le moins coûteux et constituant une source de développement pour de nombreux pays. Par ailleurs, un accident grave est enregistré en mer tous les trois jours, ce qui porte le nombre de ces accidents à 120/130 par an. Enfin, la moitié de ces accidents sont provoqués par la vétusté des navires âgés de plus de 15 ans. La France a adopté des mesures utiles pour lutter contre le fléau des navires dangereux en instituant notamment la taxe sur le tonnage. Mais l'Europe doit prendre aussi des décisions pragmatiques dans ce domaine. M. Jean-Yves Besselat a cité en premier lieu la mesure adoptée au dernier sommet bilatéral franco-espagnol visant à interdire aux navires poubelles d'entrer dans la zone des 200 milles. Il a ensuite estimé nécessaire d'engager une réflexion sur l'opportunité de créer des équipes de professionnels pouvant être hélitreuillées sur des navires en détresse, afin que ces experts donnent à l'équipage des conseils sur les mesures à prendre. Il a cité à ce propos l'exemple de l'Erika, le commandant de ce navire ayant pris une mauvaise décision, qui a précipité la catastrophe. Ces équipes devraient être soigneusement composées pour comprendre des hommes d'expérience et préserver leur indépendance. Enfin, M. Jean-Yves Besselat a évoqué la question du corps européen de garde-côtes, qui selon lui ne pourra être mis en place avant quelques années. Il a estimé qu'une solution provisoire devait être adoptée, consistant à confier aux 45 000 hommes expérimentés de la marine nationale une mission de surveillance, d'autant que la loi de finances pour 2003 l'a dotée de moyens importants. M. René-Paul Victoria a fait part de ses inquiétudes concernant l'impact de la croissance du trafic maritime sur l'outre-mer. Celui-ci a été jusqu'à maintenant préservé des grandes catastrophes maritimes, mais n'en est pas moins affecté par le problème du dégazage. M. René-Paul Victoria a appelé l'attention du ministre sur le fait que l'outre-mer ne devait en aucun cas rester absent des projets nationaux et européens visant à sécuriser l'espace maritime. Les navires des pays en développement, qui viennent en plus grand nombre pêcher ou transiter à proximité des côtes des DOM et des TOM, vont poser un réel défi, dans les prochaines années, à la sécurité maritime de ces régions. M. René-Paul Victoria a souhaité que le ministre se rende outre-mer afin de manifester l'intérêt du gouvernement pour cette partie de la France, qui a la volonté d'être une vitrine exemplaire de l'Europe auprès de ses voisins. Le ministre a apporté les réponses suivantes : - la réaction de l'Europe face à la catastrophe du Prestige a été d'autant plus forte qu'elle a agi avec le sentiment d'avoir subi un échec collectif dans la gestion de l'après-Erika. L'Europe a désormais compris la leçon. Sur le plan bilatéral, la réaction commune des autorités espagnoles et françaises a été excellente, comme le montre la position commune forte adoptée au sommet bilatéral de Malaga. Au niveau européen, les Quinze ont également pris de réelles décisions alors qu'on pouvait craindre que seule une déclaration d'intention serait adoptée ; - l'Union européenne et les Etats membres doivent continuer d'agir vite. Dans ce but, les procédures de transposition des directives doivent être améliorées et le Parlement peut y apporter sa contribution. L'Europe doit aussi prendre très rapidement des initiatives à l'OMI, afin d'éviter de se trouver en infraction avec le droit de la mer en vigueur. Enfin, l'élargissement revient à intégrer des pays dont les flottes posent des problèmes en matière de sécurité maritime. Les inspections renforcées récemment conduites dans ce domaine dans un des pays baltes constituent une première avancée ; - dans le Pas-de-Calais, la surveillance de la navigation doit avoir une précision et une qualité comparables à celle pratiquée dans le cadre du contrôle aérien. L'Union européenne doit donc engager une réflexion dans ce domaine, afin d'élaborer des instruments de contrôle de la trajectoire des navires aussi sûrs que ceux utilisés pour le trafic aérien ; - il faut se montrer attentif à l'outre-mer et ne pas négliger la dimension ultra-marine de la France. Il existe d'ailleurs deux centres opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) outre-mer, l'un aux Antilles et l'autre à La Réunion, qui connaissent une montée en puissance progressive ; - la marine nationale est déjà très présente dans le dispositif : elle participe, par exemple, à la gestion des CROSS. Mais ce rôle devrait peut-être être renforcé. Réunion de la Délégation du mardi 4 mars 2003 La Délégation s'est réunie le mardi 4 mars 2003, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information. L'exposé des rapporteurs a été suivi d'un débat. M. Edouard Landrain a estimé que les rapporteurs avaient accompli un travail remarquable et a souhaité que leur rapport puisse être annexé au rapport de la commission d'enquête qu'il préside sur l'application des mesures préconisées en matière de sécurité du transport maritime des produits dangereux ou polluants et l'évaluation de leur efficacité. Le Président Pierre Lequiller a donné son accord à cette demande et a rejoint l'opinion exprimée par M. Edouard Landrain quant à l'excellence du travail des rapporteurs. M. Didier Quentin a évoqué le contenu d'un mémorandum de l'OMI, qui montre que la sécurité maritime se serait améliorée depuis ces dernières années. Ainsi, ce mémorandum indique-t-il que le nombre des marées noires a été réduit d'un tiers entre 1970 et 1990, alors que le trafic maritime a continué à augmenter très sensiblement pendant la même période. Le nombre des sorties de navires a augmenté sensiblement depuis 1999. Par ailleurs, les morts par accident maritime, qui étaient au nombre de 500 en 1998, seraient environ de 300 en 2002. Puis, s'est engagé un débat auquel ont participé, outre le Président Pierre Lequiller et les rapporteurs, MM. Jacques Floch, Edouard Landrain et Bernard Deflesselles, sur les thèmes suivants : Les lieux de refuge : - la position des autorités néerlandaises semble la plus réaliste, devant les difficultés à garder secrète la liste des lieux désignés ; - il est concevable de prévoir un financement des équipements de ces lieux de refuge par le budget communautaire. Le remplacement des navires à simple coque par les navires à double coque : - les navires à double coque ne constituent pas la panacée, car ils ne préviennent pas les accidents. Outre les risques d'explosion et d'incendie, ces navires seront confrontés à un problème de vieillissement précoce, du fait des risques de corrosion auxquels ils sont exposés. Enfin, leur amortissement sera coûteux ; - les Etats-Unis ont interdit aux navires à simple coque de naviguer dans leurs eaux territoriales ou d'entrer dans leurs ports, alors que la moitié de la flotte des navires à simple coque navigant dans le monde est américaine et que des navires de ce type transportent du pétrole de la région du Caucase vers les Etats-Unis. La position de la Grèce : - la Grèce s'oppose à la prise de décisions unilatérales par l'Union européenne qui mineraient le statut de l'OMI, comme l'a déclaré le ministre grec des transports, Georges Anomeritis ; - la Grèce dispose de la première flotte mondiale mais utilise des pavillons de complaisance. Les zones particulièrement vulnérables : - ces zones ne font pas l'objet d'une définition précise. Elles sont simplement mentionnées dans une liste et sont caractérisées par le fait qu'elles sont traversées par un trafic intense ; L'Organisation maritime internationale (OMI) : - la France ne pèse guère dans cette organisation internationale, qui est dominée par les pays dont la flotte est la plus importante. Il conviendrait de revoir les règles de fonctionnement de cette organisation. Les sociétés de classification : - celles-ci apparaissent juges et parties car leurs missions de classification et de contrôle ne sont pas clairement séparées. Puis, sous réserve de précisions d'ordre rédactionnel, la Délégation a adopté la proposition de résolution dont le texte figure ci-après. EXPOSE DES MOTIFS Le naufrage du pétrolier Prestige, survenu le 13 novembre 2002 au large des côtes espagnoles, trois ans seulement après le naufrage de l'Erika, souligne de nouveau la vulnérabilité de l'Union européenne face aux marées noires, d'autant qu'en l'espèce, pour la première fois, les dommages causés par la pollution affectent trois Etats membres : l'Espagne, la France et le Portugal. Il serait injuste d'imputer cette catastrophe à l'insuffisance des mesures proposées par la Commission en 2000 et 2001, dans ce que l'on appelle les paquets Erika I et Erika II. En effet, non seulement leur transposition n'est pas pleinement achevée, mais cette catastrophe vient aussi rappeler la persistance des dysfonctionnements qui perturbent le transport maritime international. Dans ce contexte, il incombe aux Etats membres de parvenir d'urgence à l'élaboration d'une politique européenne de la sécurité maritime, en vue de porter remède à de tels dysfonctionnements et de répondre aux attentes fortes de l'opinion publique. Cette politique européenne de la sécurité maritime devrait ainsi conduire l'Europe à jouer un rôle analogue à celui qui lui a permis de mieux réguler le commerce international au travers de la création de l'Organisation mondiale du commerce, ou de faire respecter la notion de développement durable grâce au protocole de Kyoto. C'est dans cette perspective que la présente proposition de résolution formule diverses recommandations. L'Assemblée nationale, Annexe 1 : Les rapporteurs souhaitent remercier vivement les personnalités qui ont bien voulu accepter de les rencontrer, à l'occasion des auditions auxquelles ils ont procédé, ou qui leur ont adressé une contribution écrite. Ils remercient également les missions économiques de leur aide très précieuse. EN FRANCE I. Les représentants des départements ministériels - M. Pascal Brice, ministère des affaires étrangères ; - Mme Marie-Henriette Chambon, conseillère technique au Cabinet du secrétaire d'Etat aux transports et à la mer ; - M. Alain Correia, SGCI ; - Amiral Jean-François Cotte, secrétariat général de la mer. - M. Jean-Paul Guenole, ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; - M. Pierre Sallenave, ministère de l'écologie et du développement durable ; - Mme Anne Schmidt, ministère des affaires étrangères ; - M. Christian Serradji, directeur des affaires maritimes et des gens de mer, ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; - M. Didier Simonnet, directeur du transport maritime, des ports et du littoral, ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, accompagné de Mme Marie-Sophie Dufaut-Richet, chef du bureau des relations internationales à la direction du transport maritime, des ports et du littoral. II. Les représentants des organisations professionnelles et syndicales - M. Bernard Anne, directeur de la division marine du Bureau Véritas ; - M. Edouard Berlet, délégué général du Comité central des armateurs de France ; - M. Philippe Boisson, Bureau Véritas - M. Jean-Pierre Dalby, Association des capitaines de navires ; - M. Gérard Gardes, directeur technique environnement à l'Union française des industries pétrolières ; - M. Pierre Karsenti, président du Comité des chargeurs maritimes français ; - M. André Latile, secrétaire-adjoint des cadres navigants de la marine marchande ; - M. Didier Leandri, délégué général de l'Association des utilisateurs de fret ; - M. Patrick Le Bris, secrétaire des marins du Havre et coordonnateur du remorquage ; - M. Daniel Marrec, Association des capitaines de navires ; - M. Charles Marelli, secrétaire général de la Fédération des officiers de la marine marchande EUGICT-CGT ; - M. Alain Merlet, secrétaire général de la Fédération nationale des syndicats maritimes CGT ; - M. Jérôme Orsel, directeur des transports internationaux à l'Association des utilisateurs de fret ; -- M. Jean-Louis Schilansky, délégué général de l'Union française des industries pétrolières ; - M. Fabrice Théobald, président de la Chambre syndicale des constructeurs de navires ; - M. Francis Vallat, président de l'Institut français de la mer. III Personnalités qualifiées : - M. Jean-Pierre Beurier, directeur du CDMP, professeur à la faculté de droit de Nantes ; - M. Philippe Delbecque, professeur de droit des transports à l'université de Paris I. A L'ETRANGER I. A LONDRES · Ambassade de France : - M. Gérard Gasc, représentant de la France auprès de l'OMI, conseiller maritime près l'ambassade de France au Royaume Uni ; · FIPOL (Fonds international d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures) : - M. Mans Jacobsson, administrateur. · Organisation maritime internationale (OMI) : - M. William O'Neil, secrétaire général de l'OMI, en présence de l'amiral Efthimios Mitropoulos, assistant du secrétaire général et directeur de la division de la sécurité maritime, et Mme Rosalie Balkin, directrice de la division juiridique. · Department for Transport, Local Gouvernment and the Regions : - M. Brian Wadsworth, Director Logistics and Maritime Transport, en présence de MM. David Rowe, Head of Shipping Policy 2, et Maurice Storey, Chief Excutive du MCA (Maritime and Coast guard Agency). II. A BRUXELLES · Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne : - M. Christian Masset, représentant permanent adjoint ; - Mme Virginie Dumoulin, conseillère Transports ; - Mme Isabelle Jegouzo, conseillère JAI (Justice et affaires Intérieures) ; - Mme A. Lapidus, conseillère environnement. · Représentation permanente de la Grèce auprès de l'Union européenne : - M. Dimitri Rallis, représentant permanent adjoint. · Commission : - M. François Lamoureux, directeur général de la direction générale des transports et de l'énergie. Annexe 2 : 1. ERIKA-I Le paquet Erika I concerne les lacunes les plus graves de la législation communautaire en matière de sécurité maritime révélées par la marée noire de décembre 1999: - En premier lieu, il renforce la directive en vigueur relative au contrôle des navires par l'État du port. Le nombre d'inspections approfondies de navires dans les ports de l'UE est nettement en hausse. Plus de 4 000 navires jugés particulièrement peu sûrs seront soumis à des inspections annuelles obligatoires de leur structure. Les navires qui ont été déclarés plusieurs fois en mauvais état à l'issue d'une inspection seront mis sur une liste noire et l'accès aux ports de l'UE leur sera refusé. Ensuite, il renforce la directive en vigueur régissant les activités des sociétés de classification, qui vérifient la sûreté de la structure des navires pour le compte des États du pavillon. Les critères de qualité applicables aux sociétés de classification ont été renforcés. Pour obtenir l'agrément les autorisant à exercer leurs activités dans l'UE, les sociétés de classification devront respecter ces critères en permanence, et la qualité de leurs prestations fera l'objet d'une surveillance rigoureuse. À défaut de répondre aux critères, elles s'exposeront à un retrait temporaire ou permanent de l'agrément communautaire qui les autorise à prêter leurs services aux Etats membres de l'UE. - Enfin, il a établi un calendrier pour le retrait progressif d'exploitation des pétroliers à simple coque dans le monde. Les pétroliers à double coque assurent une meilleure protection de l'environnement en cas d'accident. Se fondant sur cette constatation, l'OMI a décidé que tous les pétroliers construits à partir de 1996 devaient être à double coque. Le remplacement progressif des pétroliers à simple coque par des doubles coques a toutefois été étalé sur une très longue période, qui se termine en 2026. L'UE a insisté pour accélérer ce processus, ce que les acteurs du secteur maritime ont fini par accepter après d'âpres négociations. L'industrie a rapidement suivi le mouvement et les pétroliers à double coque représentent désormais près de la moitié du tonnage mondial. Conformément aux nouvelles normes internationales et communautaires, les derniers pétroliers à simple coque se verront interdire l'accès aux eaux de l'UE dès 2015. 2. ERIKA-II Le paquet Erika II : - préconise la création d'une Agence européenne pour la sécurité maritime. D'une manière générale, l'Agence aura pour tâche de fournir à la Commission des avis scientifiques et techniques en matière de sécurité maritime et de prévention de la pollution par les navires, afin de l'aider dans ce processus continu qui consiste à mettre à jour et à développer la législation. Pour s'assurer du bon fonctionnement du système communautaire de sécurité maritime et de prévention de la pollution par les navires, des représentants de l'agence effectueront des visites de contrôle dans les États membres. Parmi ses tâches spécifiques, l'Agence contribuera au renforcement du régime de contrôle par l'État du port, au contrôle des sociétés de classification reconnues au niveau européen, à la mise en place des base de données sur la sécurité maritime, à l'élaboration d'une méthode d'enquête commune sur les accidents maritimes et à la mise en place d'un système européen d'information sur le trafic maritime. L'agence travaillera en étroite collaboration avec les Etats membres. Elle les assistera dans l'implémentation des mesures communautaires, et organisera des activités de formation ad hoc sur le régime du contrôle par l'Etat du port et celui de l'Etat du pavillon. De cette façon, elle favorisera la coopération entre les États membres ainsi que la diffusion des meilleures pratiques dans la Communauté. - propose une directive qui créera un système de notification visant à améliorer la surveillance du trafic dans les eaux européennes. Les Etats membres seront dotés de pouvoirs accrus pour intervenir en cas de menace d'accident ou de pollution. Les navires à destination des ports de l'Union devront être équipés de systèmes d'identification automatique pour la communication automatique avec les autorités côtières, ainsi que d'enregistreurs des données du voyage (boîtes noires) dans le but de faciliter les enquêtes sur les accidents. La directive améliorera les procédures pour les échanges de données sur les cargaisons dangereuses, au travers d'un réseau télématique trans-européen, et permettra aux autorités d'empêcher des navires d'appareiller lorsque les conditions météorologiques sont très mauvaises. Elle exigera en outre que chaque Etat membre maritime aménage des lieux de refuge pour les navires en difficulté. - aborde la question de l'indemnisation des victimes de marées noires et propose d'améliorer le régime international actuel dans ce domaine. La Commission a proposé de relever les plafonds des indemnisations en cas de marée noire de grande ampleur dans les eaux européennes (jusqu'à 1 milliard d'euros, alors que le plafond actuel est de 200 millions d'euros) et de prévoir des sanctions appropriées pour les opérateurs qui se rendent responsables de pollution par négligence. Bien que cette proposition n'ait pas abouti à l'adoption d'une législation communautaire, elle a donné lieu à une révision et une amélioration substantielles du mécanisme international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, le Fipol. Un accord sur un fonds international ayant approximativement le même objectif que le fonds Cope devrait être adopté en mai 2003. Annexe 3 : 1-Terminologie Le dégazage est une opération qui consiste à remplacer les vapeurs d' hydrocarbures potentiellement dangereuses contenues dans les espaces cargaisons par des gaz inertes ,généralement les gaz d'échappement du moteur (oxydes de carbone).Cette opération est réalisée lorsque des opérations de réparation ou de gros entretien ont lieu et enfin lors des opérations de préparation à la démolition. Le dégazage , au sens propre, ne concerne que les navires transportant des produits générateurs de gaz (pétroliers principalement) Dans le vocabulaire actuel, le dégazage parait désigner l'opération qui consiste pour un navire à laisser dans son sillage une traînée irisée résultant de la présence d'hydrocarbures. Il s'agit alors d'une opération polluante et interdite. Le déballastage est l'opération consistant à se séparer du ballast lorsque le navire va commencer les opérations de chargement. Le ballast, longtemps composé de matières solides, est aujourd'hui composé d'eau de mer. Le ballastage qui permet de corriger l'assiette et la gite de tout navire constitue en soi un important élément de sécurité de la navigation et permet au navire de se tenir aussi près que possible de ses lignes idéales, facteur d'efficience de l'appareil propulsif. 2-Dégazage Les traînées irisées peuvent être provoquées par des rejets dont l'origine est soit le compartiment machine soit le compartiment cargaison. 21-Compartiment machine Les navires dotés d'un appareil propulsif fonctionnant avec des hydrocarbures produisent tous des déchets contenant des hydrocarbures, qu'il s'agisse de navires de charge, de navires à passagers et de navires de plaisance. Les grands navires disposent dans le compartiment machine d'un espace appelé "sludge tank" qui recueille tous ces déchets et qui est vidé et nettoyé périodiquement lors d'une escale en ayant recours à une installation spécialisée. Donc tous les navires à moteur sont potentiellement concernés, qu'ils soient civils ou militaires, pétroliers ou non, âgés ou jeunes et tous peuvent polluer en rejetant intentionnellement ou involontairement ces déchets. 22-Compartiment cargaison Les navires concernés sont essentiellement les pétroliers (brut et produits)et parmi ceux ci on doit distinguer deux cas suivant que le navire est "pré marpol" simple coque ou soit simple coque "post marpol" soit double coque. Dans le premier cas, l'eau de mer qui sert de ballast peut être placée dans des citernes à cargaison, alors que dans le second cas l'eau de mer qui sert de ballast est toujours placée dans des espaces séparés n'ayant jamais contenu de cargaison. Le point important est que dans les deux cas il peut exister des rejets polluants :dans le premier cas, le ballast d'eau de mer ayant été placé dans une citerne non nettoyée peut être volontairement rejeté en mer sans traitement approprié, dans le second cas, lorsque les citernes cargaisons sont nettoyées les résidus du nettoyage peuvent volontairement être rejetés sans traitement : il y aura des irisations dans le sillage. 3-Déballastage Le déballastage fait que le navire relâche dans le milieu naturel de l'eau qui a été intentionnellement chargée ailleurs. Cela peut provoquer des arrivées d'espèces animales ou végétales plus ou moins favorables. Cela conduit également à des échanges de matériaux solides chargés en suspension ,qui déposent durant le voyage et qui sont remis en suspension lors du déballastage et alors rejetés au port d'arrivée. Ceci est valable pour tout navire Pour les pétroliers, l'affaire est simple :si le navire est double coque ou pourvu de ballast séparés (post marpol) le cas est absolument similaire à celui de n'importe quel navire, mais s 'il est simple coque pré marpol et donc sans ballast séparés, il convient d'être plus précis. En effet le navire "pré marpol" simple coque, espèce en voie de disparition rapide, utilise une partie de ses citernes à cargaison pour charger de l'eau de mer comme ballast. Normalement, le processus est le suivant :lorsque le navire décharge, une ou plusieurs citernes sont vidées en priorité pour servir de "citernes de ballast départ" remplies d'eau de mer sans avoir été nettoyées. Une fois le navire vidé de sa cargaison et convenablement lesté ,un nouveau voyage commence et toutes les cuves vides sont alors lavées, le liquide de lavage et de rinçage est dirigé vers un espace prévu à cet effet et qui est appelé "slop tank" où aura lieu la décantation favorisée par le système de réchauffage dont sont pourvus les "slops". Après la décantation, l'eau de mer est rejetée directement dans le milieu naturel dès lors que l'appareil de mesure automatique, réglé à 15 ppm d'hydrocarbures maximum, le permet. A ce moment-là, les citernes vides et maintenant propres seront progressivement remplies d'eau de mer : elles constitueront le ballast de voyage. Ensuite les citernes utilisées initialement ,les "citernes de ballast départ" vont être traitées : les hydrocarbures seront montés à la surface en raison de leur densité, ils seront envoyés dans les "slops" et l'eau de mer restante ne sera rejetée que si elle peut franchir l'appareil de mesure réglé à 15 ppm. 4-Nettoyage Le dernier cas à traiter est celui des navires les plus modernes où l'eau de mer de ballast dispose de ses propres circuits et de ses propres espaces :il s'agit des navires "post marpol" simple coque et des navires double coque. Les "post marpol " simple coque ont des citernes dédiées exclusivement au ballast ("segregated ballast tankers" SBT) et par conséquent ces navires ne peuvent pas produire de traînée irisée à raison de leur ballast. Si malgré cela ils en produisaient ,ce serait à raison de l'inobservation des procédures de nettoyage des cuves à cargaison. Ces procédures sont analogues à celles décrites ci-dessus pour les citernes à ballast : le liquide de nettoyage et de rinçage est dirigé vers les slops où il décante, l'eau étant directement rejetée après passage dans l'appareil de mesure réglé à 15 ppm. Les résidus solides sont débarqués aux ports pourvus des installations appropriées. Le non-respect de ces procédures peut produire des irisations qui ne relèvent stricto sensu ni du dégazage ni du déballastage. Annexe 4:
Annexe 5:
Annexe 6 :
Bruxelles, le 5.3.2003 COM(2003) 105 final COMMUNICATION DE LA COMMISSION Rapport au Conseil européen sur les suites à donner aux 1. Introduction 2. La prévention : protection civile, sécurité maritime et aspects internationaux 2.1. Protection civile 2.1.1. Dispositifs de coopération entre les autorités nationales 2.1.2. Expertise scientifique 2.2. Sécurité maritime 2.2.1. Application anticipée des mesures déjà adoptées par le Parlement européen et le Conseil 2.2.1.1. Mise en place accélérée de l'Agence européenne pour la sécurité maritime 2.2.1.2. Liste noire des navires sous normes 2.2.1.3. Lieux de refuge 2.2.1.4. Transposition inégale par les Etats membres des paquets ERIKA I et II 2.2.1.5. Aides d'Etat dans le transport maritime 2.2.1.6. Accord volontaire avec les compagnies pétrolières 2.2.2. Les nouvelles propositions de la Commission 2.2.2.1. Transport de fuel lourd et retrait accéléré des navires à simple coque 2.2.2.2. Formation et compétence des gens de mer 2.2.2.3. Sanctions pénales 2.2.3. Initiatives européennes sur le plan international 2.2.3.1. Soutien actif à l'adhésion de la Communauté européenne à l'Organisation maritime internationale (OMI) 2.2.3.2. Demande d'application de la législation communautaire en matière de sécurité maritime au plan international 2.2.3.3. La Convention des Nations-Unies sur le droit de la mer 2.2.3.4. Une meilleure indemnisation des victimes de la pollution 2.2.3.5. La responsabilité civile 3. Mobilisation des financements et des moyens techniques communautaires pour les interventions de réparation immédiate et la reconstitution du potentiel économique 3.1. Fonds européen de développement régional 3.2. Fonds de cohésion 3.3. Initiative communautaire INTERREG III (volet transnational) 3.4. IFOP/aides aux conchyliculteurs, aux aquaculteurs et aux pêcheurs 3.5. Fonds de solidarité de l'Union européenne 3.6. Recherche dans de nouvelles technologies 3.7. Projets pilotes et autres actions 3.8. Lutte contre la pollution et remise en état de l'environnement 3.8.1. Evaluation des effets sur l'environnement 3.8.2. Réparation et indemnisation des dommages causés à l'environnement 3.8.3. Mise en commun des moyens de lutte contre la pollution et échange d'expériences 4. Conclusion Une catastrophe transnationale et de grande ampleur Le 13 novembre 2002, le Prestige, pétrolier à simple coque chargé de 77 000 tonnes de fuel lourd et battant pavillon des Bahamas a été victime d'une avarie alors qu'il se trouvait au large de la côte ouest de la Galice. Des conditions météorologiques très défavorables ont entravé les opérations de remorquage qui avaient été entreprises et le navire a sombré le 19 novembre à une profondeur de quelques 4000 mètres. Si une quantité importante de fuel s'est répandue dans l'océan au moment du naufrage42, des fuites plus diffuses n'ont cessé d'être constatées ultérieurement. Outre les côtes espagnoles et portugaises, les côtes françaises ont été à leur tour souillées et continuent de l'être. On estime à environ 40.000 tonnes les quantités d'ores et déjà échappées des cuves du pétrolier. Le comité scientifique chargé de conseiller le gouvernement espagnol sur la neutralisation de l'épave a identifié plusieurs solutions techniques, parmi lesquelles le pompage des quantités restantes dans les cuves et la technique du "sarcophage" visant à bétonner l'épave de manière définitive. Bien que les coûts de mise en œuvre de ces différentes solutions varient, les autorités espagnoles ont estimé que des dépenses de l'ordre de 150 à 200 millions d'euros restaient nécessaires. Des réactions rapides et des réponses concrètes de la Communauté européenne Grâce à une action rapide d'information - dès le 24 novembre le Président Prodi rencontrait le Premier Ministre espagnol, M. Aznar - un grand élan de solidarité européenne a joué aussitôt. En effet, en réponse à la demande d'assistance des autorités espagnoles, plusieurs Etats membres ont mis à leur disposition, des barrières flottantes, plusieurs navires et des avions de surveillance. Le 3 décembre, la Commission adoptait une communication sur le renforcement des mesures de sécurité maritime43 prévoyant notamment la mise en place accélérée de l'Agence pour la Sécurité maritime, l'interdiction du transport du fuel lourd par des navires à simple coque et la mise en place de sanctions pénales. Cette communication qui a été transmise au Parlement européen et au Conseil a reçu un large soutien de la part de ces deux institutions. Le Conseil "Transport" du 6 décembre et le Conseil "Environnement" du 9 décembre ont également confirmé le bien fondé de l'approche proposée et le caractère particulièrement urgent des dispositions à mettre en œuvre. L'action de la Communauté est guidée par l'expression de la solidarité de l'Union à l'égard de ses Etats membres et de ses citoyens. Cette solidarité ne doit cependant pas se substituer à la responsabilité des tiers qui, en vertu du principe du pollueur-payeur, sont responsables au premier chef des dommages qu'ils ont causés, ni décourager les actions de prévention, tant au niveau des Etats membres que de la Communauté. Présentation d'un rapport au Conseil européen de printemps conformément au mandat du Conseil européen de Copenhague Lors du Conseil européen de Copenhague des 12 et 13 décembre 200244, les Chefs d'Etat et de Gouvernement ont réitéré leurs conclusions adoptées lors du Conseil européen de Nice en décembre 2000 pour une application anticipée des paquets législatifs ERIKA I et ERIKA II. Ils ont également demandé à la Commission de présenter un rapport sur les progrès réalisés lors de leur prochaine réunion (point 34 des conclusions). Le texte qui suit décrit les multiples actions déjà entreprises ou à réaliser au niveau communautaire et dans les Etats membres. En particulier, il reprend en les développant les points énoncés par le Président Prodi dans le courrier qu'il a adressé le 17 janvier 2003 au Président du Conseil européen, M. Simitis, et qu'il a transmis aux autres Chefs d'Etat et de Gouvernement. Ces points sont regroupés autour des aspects relatifs à la prévention, d'une part, et des aspects ayant trait à l'indemnisation et à la réparation des dommages, d'autre part. 2. La prévention : protection civile, sécurité maritime et aspects internationaux 2.1.1. Dispositifs de coopération entre les autorités nationales Les dispositifs de coopération mis en place ces derniers mois ont permis, par l'intermédiaire du Centre de réponse de la Commission45, de répondre immédiatement aux demandes d'assistance en moyens de lutte spécialisés faites par les autorités espagnoles. La Commission a ainsi facilité l'assistance fournie par les autres Etats membres : 14 navires spécialisés en provenance de 8 pays européens, près de 20 km de barrières flottantes et plusieurs avions de surveillance spécialisés ont été mis à disposition. Reste à effectuer : poursuite de la mise à disposition des moyens d'assistance par l'intermédiaire du Centre de réponse de la Commission. Responsables : Commission et Etats membres. 2.1.2. Expertise scientifique Le Centre commun de recherche a apporté son expertise technique et scientifique pour analyser les conséquences de la catastrophe à partir des premières images satellites recueillies par l'Agence spatiale européenne. Par ailleurs, il a constitué une structure de coordination pour fournir une assistance rapide en cas d'accidents majeurs dans le cadre des compétences de la Commission en matière de protection civile. D'autre part, la Commission a communiqué aux autorités espagnoles les noms d'experts pouvant se joindre au Comité scientifique qu'elles avaient créé afin d'établir sur une base scientifique la liste des actions à entreprendre. Reste à effectuer : information sur les suites données à la liste des experts mobilisables pour le Comité scientifique. Responsable : Etat membre concerné. 2.2. Sécurité maritime 2.2.1. Application anticipée des mesures déjà adoptées par le Parlement européen et le Conseil 2.2.1.1. Mise en place accélérée de l'Agence européenne pour la sécurité maritime L'Agence européenne dont le rôle est d'améliorer l'efficacité de l'application des règles communautaires en matière de sécurité maritime a été mise en place de façon accélérée, la Commission ayant décidé de l'héberger provisoirement dans ses locaux en l'attente de la détermination de son siège par le Conseil. Le 4 décembre 2002, le Conseil d'administration a pris une série de décisions tant administratives que techniques, afin de rendre rapidement l'Agence opérationnelle. Le 29 janvier 2003 le directeur exécutif de l'Agence a été nommé. Il procède actuellement au recrutement du personnel de l'Agence et met en place sa structure administrative. Il est envisagé de mieux définir et d'élargir les compétences de l'Agence pour lui permettre de procéder à l'achat ou à la location de navires dotés de technologies avancées ou d'autres moyens d'intervention antipollution au service de l'Union. La valeur ajoutée d'une telle initiative serait d'avoir une capacité d'action complémentaire par rapport à la situation actuelle. Toute décision sera prise en fonction d'un maximum d'efficacité et d'un impact budgétaire optimal. D'ores et déjà, un financement a été prévu dans l'APS 2004 adopté par la Commission le 5 mars 200346. Ces activités seraient développées en coordination avec le mécanisme de protection civile de la Commission. Reste à effectuer : déterminer un siège pour l'Agence et conforter son activité. Responsable : Conseil. Mieux définir et élargir les compétences de l'Agence. Responsable : Commission (présentation d'une proposition). 2.2.1.2. Liste noire des navires sous normes La Commission a procédé à l'établissement d'une première liste noire des navires sous normes en décembre 2002. Il s'agit d'une liste indicative des navires qui auraient été bannis si les dispositions du paquet ERIKA I avaient été en vigueur. La Commission a organisé une première réunion le 31 janvier 2003 avec les Etats membres afin d'anticiper la désignation des lieux de refuge pour l'accueil des navires en détresse dans les eaux relevant de leurs juridictions telle que prescrite par la directive sur le suivi du trafic maritime. Cette réunion a permis d'analyser quel serait le contenu des plans nationaux et places de refuge pour les navires en détresse. Reste à effectuer : fourniture de la documentation pertinente nécessaire à l'établissement des plans nationaux de refuge et à la désignation des lieux de refuge avant le 1er juillet 2003. Responsables : Etats membres. 2.2.1.4. Transposition inégale par les Etats membres des paquets ERIKA I et II L'accident du Prestige confirme le bien fondé des mesures figurant dans les deux séries de propositions législatives ERIKA I (mars 2000) et ERIKA II (décembre 2000). Si les mesures adoptées par l'Union européenne avaient été en vigueur, le Prestige aurait été mis hors service deux mois avant son naufrage. Il convient de rappeler qu'au titre de ces propositions législatives, les Etats membres doivent transposer avant le 22 juillet 2003 les directives sur le contrôle par l'Etat du port et sur les sociétés de classification, et avant le 5 février 2004 la directive sur le suivi du trafic maritime. Le règlement sur les premiers retraits de pétroliers à simple coque est applicable depuis le 1er janvier 2003. D'après les informations reçues par la Commission, le processus est loin d'être achevé dans la plupart des Etats membres. Les Etats membres s'étaient engagés à anticiper ces mesures lors des Conseils européens de Nice et de Copenhague mais, seuls trois Etats membres - l'Allemagne, le Danemark et l'Espagne - ont pour l'instant communiqué à la Commission des mesures nationales de transposition. Reste à effectuer : généraliser la transposition des directives. Responsables : Etats membres. 2.2.1.5. Aides d'Etat dans le transport maritime Les aides d'Etat au transport maritime peuvent être autorisées sous certaines conditions47, notamment pour améliorer la sécurité à bord des bateaux et pour doter les navires d'équipements supérieurs aux standards en vigueur en matière de sécurité et d'environnement48. Les aides à la construction navale sont encore plus limitées car elles sont normalement incompatibles avec le Traité. A condition de refléter la perte économique subie par le propriétaire, les aides au déchirage anticipé peuvent être également autorisées. Il existe un précédent en la matière, l'Italie, qui a développé avec succès un système visant au retrait volontaire des navires à simple coque, en particulier les plus anciens, ayant été approuvé en 2002. Ceci pourrait être une piste à explorer par les Etats membres intéressés. En tout état de cause, la Commission doit examiner au cas par cas des demandes sur base d'une notification par les Etats membres, en particulier pour une évaluation très poussée des effets sur la concurrence. Reste à effectuer : examen des demandes éventuelles introduites par les Etats membres. Responsable : Commission. 2.2.1.6. Accord volontaire avec les compagnies pétrolières Le Conseil "Transport" du 6 décembre a demandé aux Etats membres de conclure des accords avec leurs industries respectives afin d'assurer un transport de qualité et d' éliminer les vieux pétroliers à simple coque pour le transport du fuel lourd. Le Conseil a également invité la Commission à développer un accord type. A cet effet, la Commission européenne a mené depuis décembre 2002 des discussions avec les compagnies pétrolières européennes pour définir un « code de bonne conduite ». Un tel accord permettrait d'accélerer l'application des mesures d'interdiction du transport du fuel lourd à bord de pétroliers à simple coque, sans attendre la fin d'un processus législatif. Surtout, il garantirait la couverture des navires en transit dans la zone économique exclusive, c'est-à-dire de ceux qui ne sont pas affrétés par des compagnies pétrolières européennes, les contraintes internationales ne permettant à la législation communautaire de ne couvrir que les navires relâchant dans les ports de l'Union. Cependant, pour l'instant, les industries européennes ont exprimé de fortes réticences à s'engager sur un accord volontaire et leur préférence pour la voie réglementaire qui leur assure une égalité de traitement avec les compagnies pétrolières concurrentes des pays tiers. 2.2.2. Les nouvelles propositions de la Commission 2.2.2.1. Transport de fuel lourd et retrait accéléré des navires à simple coque La Commission a transmis le 20 décembre 2002 au Parlement européen et au Conseil un projet de règlement qui propose notamment : le bannissement des ports, des terminaux et des zones d'ancrage de l'Union européenne des pétroliers à simple coque transportant des produits pétroliers lourds, quels que soient leurs pavillons ; un calendrier accéléré sur l'élimination des pétroliers à simple coque. Reste à effectuer : aboutir à l'interdiction du transport de fuel lourd à bord des navires à simple coque et à un retrait accéléré de ces pétroliers. Responsables : Parlement européen et Conseil (accord final au terme de la Présidence grecque). 2.2.2.2. Formation et compétence des gens de mer La Commission a transmis le 13 janvier 2003 au Parlement européen et au Conseil une proposition de directive relative à l'agrément des certificats de compétence des marins, afin de garantir un niveau minimal de formation et qui devrait faire l'objet d'un accord politique par le Conseil "Transport" du mois de mars 2003. Cette proposition prévoit un système communautaire de reconnaissance des brevets d'aptitude afin de garantir un niveau adéquat de formation et de brevets des gens de mer non communautaires travaillant à bord de bateaux battant pavillon des Etats membres de l'Union européenne. Reste à effectuer : adoption de la proposition de directive relative à l'agrément des certificats de compétence des marins. Responsables : Parlement européen et Conseil. 2.2.2.3. Sanctions pénales Suite à la demande du Conseil européen de Copenhague et sans exclure la possibilité d'engager d'autres initiatives législatives, la Commission est sur le point d'adopter une proposition de directive au Parlement européen et au Conseil sur la pollution par les navires et sur l'introduction de sanctions, incluant des sanctions pénales. La proposition couvre les déversements illégaux et les pollutions majeures par hydrocarbures. Cette proposition concernera toute la chaîne de responsabilité (armateur, affréteur, société de classification, etc.) et palliera les lacunes du droit communautaire en matière de pollutions délibérées ou accidentelles par les navires. Les auteurs de telles pollutions ne pourront plus s'exonérer de leurs responsabilités. Reste à effectuer : suite à l'adoption par la Commission de la proposition de directive instituant un régime de sanctions pénales à l'encontre des auteurs de pollution marines, aboutir à un accord. Responsables : Parlement européen et Conseil (accord politique au terme de la Présidence grecque). 2.2.3. Initiatives européennes sur le plan international Seulement 34% de la flotte mondiale est contrôlée par des armateurs européens, dont une grande partie se trouve enregistrée sous pavillon et donc sous juridiction des pays tiers. Dans son courrier à M. Simitis, le Président Prodi rappelait l'importance pour l'Union européenne de pouvoir procéder à un changement de fond de sa politique à l'égard des pays politiquement responsables des désastres économiques et écologiques dus aux marées noires, notamment ceux qui, en offrant des pavillons de complaisance ou par manque de contrôle permettent que des bateaux dangereux et inadaptés circulent impunément dans les eaux internationales. Il suggérait en particulier que la Commission propose au Conseil d'agir directement vis-à-vis de ces pays, dont la plupart entretiennent des liens étroits avec l'Union. 2.2.3.1. Soutien actif à l'adhésion de la Communauté européenne à l'Organisation maritime internationale (OMI) La Commission a adressé le 9 avril 2002 une recommandation au Conseil en vue de l'adhésion de la Communauté européenne à l'OMI afin que l'Union européenne soit en mesure de peser de tout son poids dans l'élaboration et l'adoption de règles internationales plus strictes en matière de sécurité maritime. Comme l'a rappelé le Conseil européen de Copenhague, l'Union doit jouer « un rôle déterminant dans les efforts déployés au niveau international, notamment au sein de l'OMI, pour atteindre les objectifs fixés par la politique de sécurité maritime. Reste à effectuer : saisine rapide de cette proposition. Responsable : Conseil. 2.2.3.2. Demande d'application de la législation communautaire en matière de sécurité maritime au plan international La Commission a demandé aux pays limitrophes, notamment la Russie et les partenaires méditerranéens, dans le cadre des accords qui les lient à l'Union européenne, d'adopter des mesures équivalentes sur l'interdiction du transport du fuel lourd et sur l'élimination accélérée des pétroliers à simple coque à celles de l'Union européenne. Reste à effectuer : poursuivre les démarches avec les pays tiers et traiter également avec la Russie des conditions de navigation des pétroliers dans les zones de glace. Responsables : Commission et Etats membres. 2.2.3.3. La Convention des Nations-Unies sur le droit de la mer L'Union européenne doit prendre l'initiative de proposer une révision de la Convention des Nations-Unies sur le droit de la mer, afin que les Etats côtiers puissent mieux se protéger, y compris dans la zone économique exclusive de 200 milles, contre les risques liés au passage des navires qui représentent un danger pour l'environnement et ne respectent pas les normes de sécurité. Reste à effectuer : obtenir un mandat de négociation au Conseil en vue de la révision de la Convention. Responsable : Commission. Entre temps, une action coordonnée de l'Union européenne sera nécessaire pour soutenir les demandes formulées notamment par la France en vue d'une saisine rapide de l'OMI visant à l'identification et à la protection des zones particulièrement sensibles en raison notamment de leurs ressources et du caractère particulier du trafic. Responsables : Etats membres. 2.2.3.4. Une meilleure indemnisation des victimes de la pollution Une conférence diplomatique se tiendra à l'Organisation maritime internationale (OMI) du 12 au 16 mai 2003 pour la mise en place d'un troisième niveau d'indemnisation des victimes des marées noires. La Commission a transmis à cette organisation, conjointement avec la France et l'Espagne, un document prévoyant de faire passer le seuil en deçà duquel l'armateur perd le droit de limiter sa responsabilité de 185 millions d'euros à 1 milliard d'euros. Reste à effectuer : obtenir un soutien de tous les Etats membres sur cette question à l'OMI. Responsables : Etats membres. A défaut, adoption immédiate de la proposition de règlement visant à instituer un fonds européen spécifique doté d'1 milliard d'euros conformément à l'engagement pris par le Conseil le 6 décembre 2002 et établissement de ce fonds d'ici la fin de l'année 2003. Responsable : Conseil. 2.2.3.5. La responsabilité civile La Commission a proposé de modifier le régime international d'indemnisation et de responsabilité, dans le cadre de la Convention internationale sur la responsabilité civile (CLC) afin de pouvoir engager la responsabilité financière des responsables en cas de pollution. La réunion des 3 et 7 février 2003 a donné un avis favorable sur les besoins de réviser le système de responsabilité civile sans indiquer toutefois les orientations et le calendrier de révision. Reste à effectuer : un soutien actif des Etats membres sur cette question à l'OMI. Responsables : Etats membres. A défaut, la Commission proposera un système d'indemnisation et de responsabilité pour l'Union européenne élargie. 3. Mobilisation des financements et des moyens techniques communautaires pour les interventions de réparation immédiate et la reconstitution du potentiel économique 3.1. Fonds européen de développement régional S'agissant des mesures de réparation des effets de la marée noire sur le territoire des régions des Etats membres affectés, les autorités concernées peuvent avoir recours au cofinancement du FEDER, dans la limite des sommes allouées pour la période 2000 - 2006, dans le respect des priorités de développement économique et à l'exception des coûts pris en charge par les assurances Objectif 1: Les autorités responsables du Programme opérationnel (PO) Galice (2000-2006) utilisent une mesure existante du PO pour cofinancer le nettoyage de certaines plages. L'utilisation d'autres mesures pour combattre les effets - pas seulement environnementaux - de la catastrophe est également possible, sachant que l'autorité de gestion peut modifier le complément de programmation pour consacrer plus de ressources à ce type de mesures dans la limite des montants qui ont été attribués par axe dans le programme. La Commission est disposée à aider l'Espagne à effectuer une reprogrammation très rapide des Fonds structurels.. Cette décision ne pourrait intervenir que lorsque les solutions techniques à appliquer tant à l'épave qu'au nettoyage de certaines côtes d'accès difficile et les coûts respectifs seront mieux connus. Objectif 2: Pour lutter contre les effets de la marée noire sur le littoral, l'utilisation du FEDER peut être envisagée pour le nettoyage des plages, à condition que ces zones soient éligibles aux programmes "objectif 2" de la région. Pour la région Aquitaine, il en est ainsi du littoral basque, à l'exception des plages de Biarritz. En ce qui concerne le littoral de la région de Poitou Charente, il est en grande partie éligible à cet objectif 2. Par ailleurs, le programme objectif 2 peut d'ores et déjà être mobilisé pour financer des campagnes de soutien au tourisme de l'ensemble de la région. Reste à effectuer: adaptation éventuelle des programme opérationnels. Responsables : Etats membres/autorités compétentes concernés Le recours au Fonds de cohésion pourrait être envisagé si les autorités espagnoles le souhaitent et conformément aux procédures habituelles du Fonds, pour les travaux à entreprendre sur l'épave qui se trouve dans la zone économique exclusive espagnole. Bien que pour l'Espagne les priorités environnementales pour la période 2000-2006 se limitent aux secteurs des déchets, de l'assainissement et de l'approvisionnement, de nombreux projets de régénération de côtes ont été cofinancés dans ce pays par le passé. En conséquence, la Commission pourrait, après examen, accepter de modifier le programme et d'adopter les projets correspondants si les autorités espagnoles le demandaient. Le montant alloué à l'Espagne au titre de ce Fonds et pour la période 2000-2006 qui n'a pas encore été engagé s'élève à environ 6 200 millions d'euros. Reste à effectuer: adaptation éventuelle du programme par la Commission, suite à une demande de l'Etat membre concerné. Responsables : Etat membre concerné (demande) - Commission (accord). 3.3. Initiative communautaire INTERREG III (volet transnational) La Commission a indiqué aux Etats membres riverains de l'Atlantique concernés, que les mesures de prévention, de contrôle et de restauration, par exemple pour des opérations de colmatage ou de pompage des cuves du Prestige, pourraient être éligibles dans le cadre des programmes INTERREG transnationaux (financés par le FEDER), ces opérations ayant un caractère clairement transnational. Ces programmes, qui permettent déjà le financement de telles actions à hauteur de 23 millions d'euros, pourraient être révisés en tant que de besoin. Reste à effectuer: possibilité d'utiliser les mesures existantes à hauteur de 23 millions d'euros. Responsables : Etats membres concernés. Au-delà, adaptation éventuelle des programmes. Responsables : Etats membres concernés (demande) - Commission (approbation). 3.4. IFOP/aides aux conchyliculteurs, aux aquaculteurs et aux pêcheurs Le Conseil a adopté le 20 décembre 2002 un règlement instaurant des mesures spécifiques destinées à indemniser les pêcheurs, les propriétaires de navires et les secteurs de la conchyliculture et de l'aquaculture espagnols touchés par la pollution pétrolière consécutive au naufrage du Prestige. Il ouvre en particulier aux conchyliculteurs et aquaculteurs le bénéfice des aides à la cessation temporaire uniquement réservé jusqu'ici aux pêcheurs. Les attirails de pêche endommagés, ainsi que les équipements aquacoles pourront également être remis en état ou reconstruits, grâce à une ré-allocation du Fonds structurel de pêche (IFOP). La Communauté a aussi autorisé l'Espagne à utiliser une partie des moyens financiers (30 millions d'euros) résultant de l'absence de d'accord de pêche avec le Maroc pour compléter les financements disponibles. Reste à effectuer : la Commission est disposée à soumettre au Conseil - si l'importance des dégâts est confirmée - une proposition similaire à celle présentée pour la Galice pour les régions françaises affectées afin d'élargir le champ d'application des dispositions existantes dans le cadre des allocations existantes de l'IFOP. Responsable : Etat membre concerné. 3.5. Fonds de solidarité de l'Union européenne Le Fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE) a été créé en 2002 pour venir en aide rapidement à des populations et des territoires victimes de catastrophes naturelles. Il reste à vérifier si la catastrophe du Prestige est éligible pour une aide au titre de ce fonds49. Une intervention de l'ampleur demandée nécessiterait une modification de sa base légale que la Commission est prête à proposer au Conseil. Cette modification s'orienterait dans le sens de la proposition initale de la Commission présentée en septembre 2002 et pourrait notamment prévoir : la couverture par le Fonds de solidarité de catastrophes d'origine technologique ou environnementale, l'abaissement de son seuil d'intervention (actuellement 3 milliards d'euros ou 0.6% du RNB de l'Etat concerné) et l'extension des actions éligibles définies à l'article 3 du règlement pour inclure des actions préventives destinées à minimiser les dégâts d'une catastrophe en cours ou imminente. Reste à effectuer: examen de la recevabilité de la demande introduite par les autorités espagnoles et proposition de modification du règlement FSUE ou, à défaut, proposition de création d'un instrument spécifique. Responsables : Etat membre concerné (informations complémentaire) et Commission (examen et proposition). 3.6. Recherche dans de nouvelles technologies D'ores et déjà, dans le 6ème programme-cadre de recherche, de développement technologique et de démonstration, les activités de recherche visant l'étude de l'impact sur l'environnement sont inclues dans la priorité, "Changement planétaire et écosystèmes". A compter de 2003, le programme de travail couvre les liens entre la société, l'économie, la biodiversité et les habitats ainsi que les stratégies d'atténuation et de restauration. Pour 2004, il permettra de développer des modèles pour mesurer l'impact de la pollution environnementale sur l'eau et les écosystèmes marins. Reste à effectuer : proposition d'inclure dans le programme de travail 2004 de nouvelles activités de recherche visant l'intervention sur les épaves de navires contenant des produits contaminants (priorité "Transport de surface durable") et d'étendre la notion de cycle de vie des véhicules jusqu'au stade de l'intervention dans les épaves en cas d'accident (domaine qui ne couvre actuellement que la maintenance et l'inspection de véhicules pour le transport de surface). Responsable : Commission50. 3.7. Projets pilotes et autres actions Le Président Prodi a évoqué, dans son courrier du 17 janvier 2003, la possibilité de conduire d'autres actions communautaires à court et à moyen terme pour soutenir les efforts des Etats membres concernés, comme par exemple des projets pilotes ou des actions spécifiques. L'exécution des projets pilotes ne requiert pas l'adoption préalable d'une base légale. Mais ils ne peuvent être inscrits au budget que pour deux exercices budgétaires au maximum et leur montant total ne peut dépasser 32 millions d'euros par an, toutes rubriques et tous domaines confondus. La Commission encouragera également les initiatives51 visant à améliorer l'innovation et la recherche dans le secteur de la construction et de la réparation navales et à promouvoir des normes plus élevées en matière d'environnement et de sécurité. Reste à effectuer : possibilité pour une institution européenne (Commission, Parlement européen, Conseil) de proposer des projets pilotes sur ce thème. 3.8. Lutte contre la pollution et remise en état de l'environnement 3.8.1. Evaluation des effets sur l'environnement Dans le cadre de la coopération prévue à cet effet et dotée de moyens budgétaires très modestes, la Commission envisage de contribuer à hauteur de 300.000 euros au financement de l'évaluation et du suivi des effets sur l'environnement de cette marée noire. Reste à effectuer : soumission d'une proposition et d'une demande de cofinancement. Responsable : Etat membre concerné. 3.8.2. Réparation et indemnisation des dommages causés à l'environnement D'ici le mois de juin 2003, la Commission entreprendra une évaluation des instruments législatifs et politiques actuels, notamment en matière d'environnement, mais aussi dans le domaine de la santé, de la recherche, de la pêche et du développement régional, afin de déterminer s'ils doivent être adaptés pour minimiser le risque de voir se reproduire de tels accidents et les dommages qu'ils occasionnent (immédiatement ou à plus long terme). En particulier, prenant en compte que le régime international actuel ne prévoit pas une compensation adéquate des dommages à l'environnement, d'autres mesures en relation avec le dommage écologique peuvent s'avérer nécessaires. La Commission a adopté le 23 janvier 2002 une proposition de directive relative à l'indemnisation des dommages causés à l'environnement lorsqu'un accident n'est pas couvert par une convention internationale en vigueur dans les Etats membres concernés52. Reste à effectuer : lancement de l'évaluation des instruments législatifs et politiques dans le cadre de la stratégie de protection et de conservation de l'environnement marin53. Responsable : Commission. Approbation de la proposition de directive sur l'indemnisation des dommages causés à l'environnement lorsqu'un accident n'est pas couvert par une convention internationale en vigueur dans les Etats membres concernés. Responsables : Parlement européen et Conseil. 3.8.3. Mise en commun des moyens de lutte contre la pollution et échange d'expériences Conformément aux conclusions du Conseil "Environnement" du 9 décembre dernier, la Commission a travaillé à l'établissement d'un réseau d'échange d'expériences en matière de pollution par les hydrocarbures. Ce réseau qui est en voie de constitution permettra la mise à disposition d'experts nationaux auprès d'autres Etats membres, pour améliorer leurs compétences, comparer les différentes techniques de dépollution utilisées, étudier les approches retenues dans les services d'intervention d'urgence ou d'autres organismes compétents. Reste à effectuer : approbation d'une décision pour assurer le financement de ce réseau d'échange d'expériences (mars-avril 2003). Responsable : Commission (mars-avril 2003). 4. Conclusion Le présent rapport met en évidence la détermination de la Commission européenne à mobiliser, en coopération avec les Etats membres, tous les moyens financiers et techniques pour venir en aide aux victimes du naufrage du Prestige. Elle entend également doter l'Union européenne des outils nécessaires pour se prémunir à l'avenir contre de tels accidents par une réglementation adéquate et une action internationale vigilante. Elle s'efforcera de poursuivre dans ces propositions législatives et administratives futures une stratégie d'ensemble de prévention, de réparation et de sanction en impliquant tous les acteurs concernés. Annexe 7 :
Source : Missions économiques et ministère de l'équipement. Annexe 8 : - TRADUCTION - Bruxelles, le 17 janvier 2003 Monsieur le Président, Immédiatement après la conclusion du Conseil européen de Copenhague la Commission a examiné toutes les mesures nécessaires conformément au mandat que le Conseil lui a confié dans le point 34 de ses conclusions au sujet des suites du naufrage du "Prestige". C'est ainsi que, en s'appuyant également sur les conclusions du Conseil Transports du 6 décembre dernier, la Commission a, en premier lieu, transmis au Parlement européen et au Conseil le 20 décembre 2002 une proposition de règlement en vue de l'interdiction du transport du fioul lourd dans les pétroliers à simple coque et de l'accélération du calendrier de leur élimination. La Commission a demandé que le Parlement européen et le Conseil examinent ce texte d'urgence en vue de son adoption rapide, idéalement lors du Conseil Transports du 27 mars 2003. En deuxième lieu, la Commission considérera dans les prochains jours deux mesures participant à l'objectif d'une meilleure prévention des accidents: une proposition législative prévoyant notamment l'imposition par les Etats membres de sanctions pénales à toute personne (c'est-à-dire non seulement l'armateur, mais également le propriétaire de la cargaison, la société de classification ou toute autre personne concernée) responsable d'une pollution en raison de sa négligence grave et de la violation par elle des dispositions concernant la lutte contre les déversements illicites intentionnels en mer. En troisième lieu, en ce qui concerne la lutte contre les conséquences des marées noires, la Commission considère qu'il est urgent d'obtenir de l'OMI, lors de la Conférence diplomatique de mai 2003 à Londres, un relèvement des plafonds d'indemnisation du FIPOL jusqu 'à 1 milliard d'euros. Si un tel résultat ne peut être atteint, les Etats membres devraient s'engager à adopter au plus vite la proposition de règlement de la Commission créant un troisième niveau d'indemnisation (le Fonds COPE) qui se trouve déjà sur la table du Conseil. En quatrième lieu, il conviendrait de confier à l'Agence européenne de sécurité maritime, par un complément à son règlement, la tâche supplémentaire de procéder à l'achat ou à la location de navires technologiquement avancés ou d'autres moyens d'intervention antipollution au service de l'Union. La valeur ajoutée d'une telle initiative serait grande puisqu'elle permettrait des économies d'échelle à tous les Etats membres avec une façade maritime. En cinquième lieu, l'Union européenne devrait prendre l'initiative de proposer une modification de la Convention des Nations unies sur le Droit de la Mer, afin que les Etats riverains puissent mieux se protéger, y compris dans la zone économique exclusive de 200 milles, contre les risques liés au passage de navires « à risque » en transit. A cette fin, la Commission demandera un mandat de négociation au Conseil, pour les compétences qui lui sont propres, et coordonnera l'action des Etats membres dans les autres domaines. Dans ce contexte, une initiative forte s'impose à l'égard des pays qui, en offrant des pavillons de complaisance ou par manque de contrôle, ou par toute autre négligence, permettent que des bateaux dangereux et inadaptés circulent impunément dans les eaux internationales. La Commission proposera au Conseil d'agir directement vis-à-vis de ces pays, dont la plupart entretiennent des liens étroits avec l'Union. En sixième lieu, en ce qui concerne les mesures spécifiques à prendre pour financer au niveau communautaire les opérations liées aux conséquences du naufrage du "Prestige", la Commission voudrait rappeler que plusieurs instruments financiers communautaires sont disponibles concernant les coûts non pris en charge par les assurances. D'une part, s 'agissant des mesures à adopter pour lutter contre les effets de la marée noire sur le territoire des différentes régions des Etats membres affectés, les autorités concernées, dans la limite des fonds allouées pour l'ensemble de la période 2000 - 2006 et dans le respect des priorités de développement économique, pourraient avoir recours au cofinancement FEDER. D'autre part, le recours au Fonds de cohésion pourrait être envisagé si les autorités espagnoles le souhaitent et conformément aux procédures habituelles du Fonds, pour les travaux à entreprendre sur l'épave qui se trouve dans la zone économique exclusive espagnole. La Commission examine également d'autres pistes de financement, notamment le Fonds européen de solidarité, tout en tenant compte du fait que le Fonds a été créé pour intervenir principalement en cas de catastrophes naturelles et que les critères d'éligibilité ont été fixés par le législateur de façon restrictive. La Commission examinera la demande introduite par les autorités espagnoles dans les meilleurs délais. D'autres actions communautaires à court et à moyen terme pour soutenir les efforts des Etats membres concernés à surmonter cette catastrophe pourraient être considérées, comme par exemple, des projets pilotes, l'utilisation des fonds du Programme cadre de recherche ou encore une action spécifique. En septième lieu, en ce qui concerne la pêche, l'Union a adopté le 20 décembre 2002, en un temps record de deux jours, une proposition permettant au Fonds structurel de pêche (IFOP) de faire bénéficier les conchyliculteurs et aquaculteurs en Espagne d'aides à la cessation temporaire qui étaient réservées jusqu'ici aux pêcheurs en raison des dégâts causés à leurs activités par la pollution du "Prestige". Si nécessaire, cette mesure pourrait être étendue à la France et au Portugal sur demande de leurs autorités. Les attirails de pêche endommagés, ainsi que les équipements aquacoles pourront également être remis en état ou reconstruits. En outre, l'Union a permis à l'Espagne d'utiliser une partie des moyens financiers (30 mio €) résultant de l'absence d'accord de pêche avec le Maroc pour compléter les financements disponibles. En huitième lieu, la Commission tient à souligner avec satisfaction le grand élan de solidarité européenne qui s 'est déployé à l'occasion de cette catastrophe et se félicite de l'efficacité des dispositifs de coopération mis en place ces derniers mois qui ont permis, par l'intermédiaire du Centre de suivi et d'information, de répondre immédiatement aux demandes d'assistance en moyens de lutte spécialisés faites par vos autorités. La Commission a ainsi facilité l'assistance fournie par d'autres Etats membres et notamment l'envoi de plusieurs milliers de mètres de barrières flottantes, de plusieurs navires de récupération et d'avions de surveillance. De plus, dans le cadre de la coopération communautaire prévue à cet effet et dotée de moyens budgétaires très modestes, la Commission envisage de contribuer à hauteur de € 300.000 au financement de l'évaluation et du suivi des effets sur l'environnement de cette marée noire. D'ici le mois de juin 2003, la Commission entreprendra une évaluation des instruments législatifs et politiques actuels, notamment en matière d'environnement, mais aussi dans le domaine de la santé, de la recherche, de la pêche et du développement région, afin de déterminer s'ils doivent être adaptés pour minimiser le risque de voir se reproduire de tels accidents et les dommages qu'ils occasionnent (immédiatement ou à plus long terme). En particulier, prenant en compte que le régime international actuel ne prévoit pas une compensation adéquate des dommages à l'environnement, d'autres mesures en relation avec le dommage écologique peuvent s'avérer nécessaires. La Commission examinera aussi, suite aux conclusions du Conseil Environnement du 9 décembre dernier, l'établissement d'un réseau d'échange d'expérience en matière de pollution de hydrocarbures. Enfin, la Commission a suggéré aux autorités espagnoles les noms d'experts pouvant rejoindre le Comité scientifique qu'elles ont établi afin de préparer la base scientifique des actions à entreprendre. Je veux ici encore une fois souligner la détermination de la Commission à continuer à prêter sa collaboration pour la mobilisation de toutes les énergies de l'Union pour contrer les effets de la catastrophe du "Prestige" et pour la mise en place d'une politique cohérente et complète de l'Union en matière de sécurité maritime. Veuillez croire. Monsieur le Président, à l'assurance de ma très haute considération. Romano PRODI Annexe 9 :
Paris, Madrid, Lisbonne, le 7 février 2003 Monsieur le Président, L'émotion suscitée en Espagne, au Portugal et en France, alors que le pétrole échappé du « Prestige » continue à arriver sur nos côtes, demeure extrêmement vive. Elle avait conduit nos trois pays à appeler l'ensemble des Etats membres de l'Union à prendre des nouvelles mesures efficaces de renforcement de la sécurité maritime. Cette nouvelle marée noire, deux ans après celle de « l'Erika » sur les côtes bretonnes, a suscité une vague de sympathie et de solidarité dans toute l'Europe dont nous avons été heureux de retrouver la traduction dans les travaux du Conseil. Comme vous le savez, le Conseil européen de Copenhague a décidé d'examiner à nouveau l'ensemble des questions liées à la sécurité maritime lors de sa prochaine réunion, le 21 mars 2003, sous votre Présidence et sur la base d'un rapport de la Commission. Cette échéance est à nos yeux fondamentale et doit donner lieu à des résultats concrets. Comme le Président Prodi le confirme dans sa lettre du 17 janvier, la Commission européenne a marqué sa volonté d'aller à nouveau de l'avant, et cela sans délai, ce dont nous nous réjouissons. Une proposition de règlement concernant la réglementation de la circulation des navires potentiellement les plus dangereux et une nouvelle accélération du calendrier d'élimination des navires à simple coque est désormais en cours d'examen dans les instances du Conseil. Nous en souhaitons l'adoption la plus rapide possible, lors du Conseil des ministres des Transports de l'Union du 27 mars 2003. Cette exigence est d'autant plus indispensable que si de telles normes avaient été en vigueur, l'accident du « Prestige » ne se serait pas produit. Le Président de la Commission européenne confirme par ailleurs que la Commission présentera dans les tous prochains jours, conformément à la demande du Conseil européen, une proposition visant à aborder les questions cruciales, de la responsabilité des opérateurs des transports maritimes, de la meilleure indemnisation des victimes et de la prise en compte des dommages écologiques. Elle doit également porter sur le régime des sanctions pénales pour les personnes responsables d'une pollution. Nous souhaitons que cette proposition soit soumise dans les meilleurs délais à l'examen du Conseil. Des travaux complémentaires sur le régime de responsabilité civile nous semblent également nécessaires. Nous souhaitons en outre vous informer que la France, l'Espagne et le Portugal ont décidé de co-parrainer une proposition de la Commission concernant l'adaptation des règles du FIPOL pour garantir les droits des victimes et l'établissement des responsabilités dans de tels drames. Dans ce contexte, au cas où les plafonds du FIPOL n'étaient pas augmentés jusqu'à un milliard d'euros lors de la prochaine conférence diplomatique de l'OMI à Londres en mai 2003, nos trois pays réaffirmeraient leur volonté d'examiner sans délai un règlement communautaire sur la création d'un fonds pour indemniser les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, en vue d'instituer ce fonds avant la fin de l'année 2003. L'action concertée des Etats membres de l'Union devra en effet concerner également les organisations internationales concernées, comme le FIPOL et l'Organisation Maritime Internationale - pour la direction de laquelle nous avons d'ailleurs récemment confirmé notre appui à un candidat de nationalité grecque. En ce qui concerne l'Organisation Maritime Internationale, nous souhaitons que l'ensemble des Etats membres y propose de manière concertée la création d'une nouvelle catégorie de zone maritime protégée, dont les critères de définition recouperaient les problèmes rencontrés dans les zones d'intense navigation dans l'Union et permettraient de leur donner un règlement approprié. Ce régime dérogatoire inclurait des mesures de protection. Nous souhaitons que cette demande soit formulée lors des toutes prochaines réunions des instances compétentes de l'OMI, à compter de mars 2003. Nous comptons sur votre diligence, Monsieur le Président, pour que dans les meilleurs délais, sous votre Présidence, des décisions concrètes soient prises d'ici mars et des impulsions données en faveur de la sécurité maritime. Nous avons là une nouvelle occasion de démontrer aux citoyens européens que l'Union sait apporter les réponses que l'urgence commande. Nous transmettons copie de cette lettre aux autres membres du Conseil européen. Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de notre haute considération.
Annexe-1 Annexe 10 :
Bruxelles, le 5.3.2003 COM(2003) 92 final 2003/0037 (COD) Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions, notamment pénales, en cas d'infractions de pollution (présentée par la Commission) EXPOSÉ DES MOTIFS Des accidents récents, tout particulièrement les naufrages du Prestige en novembre 2002 et de l'Erika en décembre 1999, ont mis en lumière la nécessité de renforcer l'arsenal de lutte contre la pollution causée par les navires. Malgré la vaste gamme de mesures visant à améliorer la sécurité qui ont été adoptées au niveau de l'UE au cours de la dernière décennie, des navires dans un état douteux chargés de cargaisons polluantes continuent à naviguer dans les eaux européennes et à engendrer des pollutions massives suite à des accidents, sans que les parties responsables soient convenablement punies. Les accidents de grande ampleur ne sont toutefois pas l'unique problème. La majeure partie de la pollution mondiale par les hydrocarbures causée par les navires est le résultat de rejets délibérés. Les pratiques inacceptables des rejets «opérationnels», c'est-à-dire intentionnels, des navires, y compris les opérations de nettoyage des citernes et d'élimination des huiles usagées ont encore largement cours dans les eaux côtières des Etats membres et au-delà. Différentes mesures adoptées aux niveaux international et de l'UE, associées à un certain nombre d'initiatives du secteur maritime pour limiter la pollution provenant des navires, ont certes réduit ces pratiques, mais le problème reste répandu. En 2001, la surveillance aérienne a décelé 390 nappes de pétrole en mer Baltique54 et 596 en mer du Nord55. Une étude de la Commission concernant la mer Méditerranée fait état de 1 638 rejets illicites en 1999.56 Seul un faible pourcentage des navires qui pratiquent illégalement des déversements est effectivement détecté et un petit nombre d'entre eux est en définitive poursuivi. Conformément à la proposition de la Commission concernant une directive relative à la protection de l'environnement par le droit pénal57, la directive proposée établit que des rejets effectués en violation du droit communautaire constitueront une infraction pénale et que des sanctions, notamment pénales, doivent être infligées si des personnes concernées sont reconnues coupables d'un tel acte ou d'y avoir contribué, intentionnellement ou par négligence grave. En ce qui concerne les personnes physiques, les sanctions peuvent aller, dans les cas les plus graves, jusqu'à des peines privatives de liberté. L'introduction de sanctions appropriées pour les infractions de pollution est particulièrement importante en matière de pollution par les navires, car les effets dissuasifs des régimes internationaux de responsabilité civile qui régissent les incidents de pollution causés par les navires sont insuffisants. À la lumière des accidents de pollution récents, la nécessité de disposer d'une mesure spécifique concernant la pollution causée par les navires a été soulignée avec force au niveau politique le plus élevé au sein de l'UE. Lors du Sommet du Conseil européen tenu à Copenhague le 13 décembre 2002, les chefs d'Etat ou de gouvernement de tous les Etats membres de l'UE ont exprimé leur grande préoccupation en ce qui concerne l'accident du pétrolier Prestige et ont particulièrement évoqué la nécessité de prendre de nouvelles mesures spécifiques se rapportant à la responsabilité et aux sanctions correspondantes. Pour sa part, le Conseil «Transports, télécommunications et énergie» du 6 décembre 2002 s'est félicité de «l'intention de la Commission de présenter une proposition visant à garantir que toute personne convaincue d'avoir causé ou contribué à causer des dommages par pollution par une négligence grave soit soumise à des sanctions appropriées.»58 En outre, le Conseil «Justice et affaires intérieures» du 19 décembre 2002 a convenu que des mesures complémentaires devraient être envisagées pour «renforcer la protection de l'environnement, en particulier les mers, au moyen du droit pénal.»59 La Commission partage complètement les avis des Etats membres concernant l'urgence d'une telle proposition et considère, compte tenu de ce qui précède, qu'une mesure spécifique relative aux sanctions à infliger en cas d'infractions de pollution causée par des navires est justifiée, sans préjudice d'un régime plus général applicable pour la protection de l'environnement par le droit pénal.60 En conséquence, la Commission, comme déjà annoncé dans sa communication sur le renforcement de la sécurité maritime suite au naufrage du pétrolier Prestige (COM(2002) 681 final), propose de combler certaines des lacunes réglementaires restantes les plus importantes dans ce domaine, concernant les rejets tant accidentels que délibérés.61 2.1 La nécessité de disposer de règles a l'échelle communautaire concernant la pollution causée par les navires Il est communément admis que les rejets délibérés de déchets et de résidus de cargaisons des navires en mer sont inacceptablement courants. La majeure partie de ces rejets est illégale, c'est-à-dire, réalisée en violation des règles internationales sur les rejets des navires telles qu'elles sont fixées dans la Convention MARPOL 73/78 (Convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires, telle que modifiée par le Protocole de 1978 y relatif, modifiés ultérieurement), qui est très largement ratifiée dans le monde entier. Or, seule une poignée des contrevenants est traduite en justice. Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d'abord, les rejets illégaux sont favorisés par le manque d'installations de réception des déchets appropriées dans les ports. En second lieu, l'application des règles de MARPOL 73/78 n'est pas cohérente dans le monde, voire au sein de l'UE. Troisièmement, les rejets ne sont pas toujours détectés à temps. Quatrièmement, même si le rejet est détecté et attribué à un navire particulier, l'infraction est rarement portée devant la justice et, lorsqu'elle l'est, il n'y a souvent pas assez d'éléments de preuve pour condamner le contrevenant. Enfin, même en cas de condamnation d'un contrevenant, dans beaucoup d'Etats, les peines appliquées pour ce type d'infractions sont assez légères, parfois seulement infligées au capitaine des navires, plutôt qu'à la société propriétaire, dont le capitaine suit les instructions. La Convention MARPOL 73/78, qui est acceptée au niveau mondial, fixe des normes détaillées et des conditions strictes pour le rejet de déchets et de résidus à la mer, avec des exigences plus sévères pour des zones maritimes qui ont été désignées comme «zones spéciales» (comprenant, dans le cas de la pollution par des hydrocarbures, la mer Baltique, la mer Méditerranée et la région de la mer du Nord). Étant donné la sévérité et l'acceptation générale de ces normes, le problème de la fréquence des rejets illégaux peut être résumé comme étant lié à une mise en œuvre et une application imparfaites des règles en vigueur, plutôt qu'à des normes insuffisantes en soi. Au niveau international, il y a actuellement peu de mécanismes pour appliquer la Convention MARPOL 73/78. Si les capitaines, les propriétaires de navires ou les Etats choisissent d'ignorer ses dispositions, la communauté internationale en tant que telle a peu de mesures d'application, mais compte sur les mesures d'application nationales ou régionales pour cela. L'écart entre les règles existantes et la pratique dominante dans ce secteur a été reconnu par la Commission déjà dans sa communication intitulée «Pour une politique commune de la sécurité maritime» du 24 février 1993, qui indiquait que le respect des exigences de MARPOL 73/78, à laquelle tous les Etats membres sont parties contractantes, pourrait être renforcé et que de nouvelles initiatives étaient nécessaires pour améliorer la mise en œuvre des règles et des normes internationales. Depuis lors, un certain nombre d'initiatives ont été prises au niveau communautaire. Tout d'abord, ce type d'infractions est contrôlé lors du contrôle par l'Etat du port en vertu de la directive 95/21/CE, selon laquelle le registre des hydrocarbures et d'autres registres doivent notamment être vérifiés à chaque inspection. Des incohérences ou des doutes peuvent entraîner d'autres inspections ou l'immobilisation du navire. En second lieu, afin de lutter contre la pollution marine causée par les rejets (délibérés) opérationnels des navires, la Communauté a adopté la directive 2000/59/CE qui impose, d'une part, aux ports de fournir des installations de réception adéquates pour les déchets des navires et, d'autre part, aux navires d'utiliser ces installations. En prévoyant des règles détaillées pour le dépôt des déchets et des résidus de cargaison dans les ports, cette directive a pour but d'éviter qu'il soit plus avantageux pour les navires de rejeter des substances polluantes à la mer. En outre, la directive impose des inspections de déchets spécifiques qui, comme les inspections de contrôle par l'Etat du port, sont des contrôles sur place. Troisièmement, la directive relative au suivi du trafic (2002/59/CE) améliorera encore les informations disponibles pour un Etat côtier concernant les navires situés dans ses eaux et les cargaisons qu'ils transportent. Cette directive définit également des procédures pour la détection des rejets illégaux en mer et pour les mesures complémentaires à prendre par les Etats membres en mer quand de tels rejets ont eu lieu. Tous ces instruments représentent certes des étapes importantes pour éliminer les rejets illégaux, mais ils ne permettent pas de traiter complètement le problème au niveau communautaire. Un élément manque dans le cadre réglementaire. L'infraction elle-même, c'est-à-dire la violation des normes applicables en matière de pollution, n'est pas entièrement régie par la législation communautaire. La mise en œuvre de MARPOL 73/78 est effectuée différemment par les Etats membres, à la fois dans la pratique et légalement.62 La promptitude à réaliser des inspections et à poursuivre les contrevenants potentiels varie énormément selon les Etats membres. En outre, les sanctions imposées aux contrevenants diffèrent d'un Etat membre à l'autre, tant en ce qui concerne les personnes à poursuivre que l'ampleur et la nature des sanctions infligées. Par conséquent, une directive spécifique sur les rejets provenant des navires aurait le double avantage de compléter et de clarifier la réglementation communautaire dans ce domaine et de réaliser une harmonisation de l'application des règles. La fourniture du cadre juridique définissant l'infraction et les sanctions concernant les rejets des navires facilitera également considérablement l'établissement de mesures permettant une coopération accrue pour la mise en œuvre de telles règles. Par exemple, il est admis qu'il faut que les Etats membres coopèrent plus étroitement dans un certain nombre de domaines connexes, notamment la surveillance des marées noires, l'identification des pollueurs et la collecte de preuves qui seraient décisives dans les procédures en justice. Cet instrument juridique constituerait finalement la plate-forme juridique permettant à l'Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM) d'intervenir sur cette question. L'AESM est toute désignée pour traiter les sujets afférents à la surveillance et aux preuves en matière de rejets illégaux, et il y a un large soutien politique pour la charger de ce type d'activités, mais la base juridique en vertu du droit communautaire fait actuellement défaut. En conclusion, il y a un certain nombre de justifications juridiques, pratiques et politiques pour une nouvelle mesure communautaire, permettant l'inclusion de règles concernant la pollution provenant des navires dans le droit communautaire et réglementant leur application en détail. 2.2 La justification de sanctions, notamment pénales, contre les contrevenants Assurer la sécurité du transport maritime et protéger les eaux communautaires de la pollution causée par les navires sont des objectifs incontestés de la Communauté. Ils doivent être poursuivis par la politique communautaire selon le Titre V du traité, et notamment son article 80, paragraphe 2. La Communauté dispose du pouvoir de réglementer un comportement afin d'atteindre un objectif communautaire et elle est compétente pour décider que le comportement faisant l'objet de la réglementation (ou le non-respect dudit comportement) doit être réprimé à l'échelon national. La Communauté ne dispose pas en tant que telle d'une compétence matérielle dans le domaine pénal. Toutefois, dans la mesure où cela est nécessaire pour atteindre des objectifs communautaires, la Communauté peut obliger les Etats membres à prévoir des sanctions pénales. En outre, même lorsque le droit communautaire ne prévoit pas expressément de sanctions (ou de sanctions pénales), les Etats membres peuvent être obligés à prendre des mesures appropriées pour faire respecter la législation communautaire. Si le droit pénal est l'unique moyen de garantir que le droit communautaire est appliqué efficacement, les Etats membres peuvent être obligés à prévoir des sanctions pénales. Les questions à considérer pour déterminer si une mesure proposée relève de la compétence de la Communauté portent donc sur la nature et l'objet de l'action envisagée. La mesure en question étant destinée à améliorer la sécurité maritime ou à protéger l'environnement marin, elle relève de la compétence de la Communauté. En conformité avec sa politique sur les infractions liées à la criminalité environnementale, la Commission considère que seules des sanctions pénales seront suffisamment efficaces pour assurer les effets projetés des règles en matière de pollution causée par les navires. Une mesure de nature pénale permettra d'appliquer à l'échelle communautaire une sanction dissuasive pour tous ceux qui sont concernés par le transport maritime de marchandises polluantes. Des effets suffisamment dissuasifs ne seront obtenus qu'en établissant que les rejets illégaux constituent une infraction pénale, ce qui reflète une désapprobation de la société qualitativement différente de celle manifestée par le biais d'une indemnisation au civil ou de mesures administratives. Cela transmet donc un message fort aux délinquants potentiels, avec un effet plus dissuasif. Indépendamment de ces considérations, toutefois, il y a une autre caractéristique importante du droit maritime existant qui rend particulièrement nécessaires des mesures pénales en matière de pollution par les navires. De fait, les effets dissuasifs des régimes internationaux de responsabilité civile qui régissent les événements de pollution provenant des navires sont insuffisants. Pour ce qui est de l'indemnisation de la pollution par les hydrocarbures, la pollution par les pétroliers est actuellement réglementée au niveau international par le régime établi par la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (CLC) et la Convention internationale portant création d'un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (convention FIPOL), modifiées par leurs protocoles de 1992, auxquelles tous les Etats membres côtiers sont parties. Ces deux conventions instituent un système à deux niveaux de responsabilité, reposant sur une responsabilité objective - mais dans pratiquement tous les cas limitée - pour le propriétaire du navire et sur un fonds, alimenté collectivement par les entités réceptionnant des hydrocarbures, qui fournit aux victimes de dommages par pollution par les hydrocarbures une indemnisation complémentaire lorsqu'elles ne peuvent pas être indemnisées complètement par le propriétaire. Ainsi, le régime international en matière de pollution par les hydrocarbures (et de pollution par d'autres substances nocives et potentiellement dangereuses, qui est réglementée par une convention qui doit encore entrer en vigueur) porte principalement sur l'indemnisation des victimes. La responsabilité du véritable pollueur est un point considérablement moins important dans ces régimes, car la responsabilité personnelle du pollueur est diluée par un droit presque inaliénable du propriétaire de limiter la responsabilité et par la compensation collective par les entités qui reçoivent les cargaisons, par l'intermédiaire des fonds, indépendamment de leur rôle réel dans l'accident en question. Le régime de responsabilité et d'indemnisation en cas de pollution maritime tel qu'il est comporte donc peu d'éléments dissuasifs pour décourager ceux qui sont concernés par le transport maritime de marchandises dangereuses ou polluantes d'agir négligemment ; il a par conséquent une valeur limitée pour aider à éviter des accidents. Néanmoins, en raison des contraintes juridiques internationales, ce régime international de responsabilité ne peut pas être modifié au moyen d'une législation communautaire. Dans la communication dite «Erika II» (COM(2000) 802 final), la Commission a souligné la nécessité de procéder à deux modifications en particulier qui auraient ces effets : - la responsabilité du propriétaire devrait être illimitée s'il est établi que les dommages causés par la pollution résultent d'une négligence grave de sa part ; et - l'interdiction des demandes d'indemnisation à l'encontre de l'affréteur, du gérant et de l'exploitant du navire doit être éliminée des conventions concernées. La Commission a ajouté que si les efforts déployés pour apporter les améliorations requises aux règles internationales en matière de responsabilité et d'indemnisation échouaient, elle présenterait une proposition de législation communautaire introduisant un régime communautaire de responsabilité et d'indemnisation en cas de pollution maritime. Un tel régime communautaire nécessiterait la dénonciation des conventions existantes en matière de responsabilité et d'indemnisation en cas de marées noires. La Commission poursuit les efforts entrepris en vue de modifier le régime international conformément à ce qui est décrit ci-dessus, mais les résultats de ces efforts ne sont pas encore certains. Pour ces raisons, la Commission considère qu'une mesure de nature pénale doit être introduite au niveau de l'UE pour compléter le régime existant en matière de responsabilité civile et d'indemnisation en cas de dommages dus à la pollution. De cette façon, le mécanisme de la responsabilité directe des parties impliquées dans l'accident peut être introduit et un régime prévoyant des effets répressifs - et préventifs - appropriés peut être établi sans les contraintes juridiques susmentionnées et sans aucune répercussion sur l'indemnisation rapide et complète des victimes. La proposition relative au Fonds COPE, figurant dans le paquet Erika II (COM(2000) 802 final), contenait déjà un article concernant des sanctions financières (article 10), mais le règlement dans son ensemble n'ayant pas été examiné en détail par le Conseil, cette question particulière n'a pas progressé. À la lumière de ces considérations, la Commission, comme annoncé dans sa communication du 3 décembre 2002 sur le renforcement de la sécurité maritime suite au naufrage du pétrolier Prestige (COM(2002) 681 final) - ce qui a été accueilli favorablement par le Conseil -, propose que les infractions liées à une pollution causée par les navires, lorsqu'elles sont commises intentionnellement ou par négligence grave, fassent l'objet de sanctions, notamment pénales. La directive proposée porte sur la pollution engendrée par n'importe quel navire, pétrolier ou non, et outre la pollution par les hydrocarbures, concerne également les rejets illégaux de substances liquides nocives. Comme cela a été expliqué, une mesure de cette nature est nécessaire pour assurer un lien suffisamment clair entre la cause de la pollution et la responsabilité des personnes impliquées. Compte tenu des contraintes juridiques internationales et de la nécessité d'assurer une indemnisation efficace et complète des victimes, une mesure de nature pénale est le mécanisme le plus efficace pour atteindre ce but. L'article 6 de la directive proposée est donc un élément nécessaire afin d'atteindre une politique communautaire efficace en matière de protection de l'environnement et de sécurité maritime. La mesure proposée n'oblige pas les Etats membres à modifier leur système fondamental de droit pénal, notamment, par exemple, la doctrine de la responsabilité pénale ou les définitions générales de la culpabilité. Des mesures concernant ces principes et ces définitions générales ne sont pas liées spécifiquement aux objectifs communautaires en question. La proposition ne prévoit pas d'exigences (minimales) en matière de sanctions pénales, et ne porte pas sur des principes généraux de droit pénal, d'administration de la justice, et/ou de juridiction pénale et de procédure pénale. Cette proposition comprend deux mesures distinctes, mais d'égale importance. Premièrement, elle introduit dans le droit communautaire les règles internationales applicables en matière de rejets polluants provenant des navires et réglemente l'application de ces règles en détail. La partie correspondante de la proposition comprend certaines dispositions nouvelles importantes, notamment l'inclusion des infractions qui ont eu lieu en haute mer (zones maritimes en dehors de la juridiction de tout Etat). Deuxièmement, la directive proposée établit que les infractions aux règles en matière de rejets seront des infractions pénales et fournit des indications sur la nature des sanctions à infliger. Ces deux mesures comblent des vides juridiques importants, car actuellement les rejets provenant de navires ne sont pas suffisamment réglementés par le droit communautaire, et le droit maritime existant n'est pas assez dissuasif pour éviter des pratiques dangereuses de la part de ceux qui sont impliqués dans le transport maritime de substances polluantes. Les deux mesures vont au-delà du problème de la pollution par les hydrocarbures, puisqu'elles concernent les infractions liées à la pollution en générale, y compris la pollution par des substances chimiques. 4.1. Objet Le premier article précise que l'objectif sous-jacent de la directive est d'améliorer la sécurité maritime et la protection de l'environnement marin et que les mesures proposées sont des moyens nécessaires à cet effet. 4.2. Définitions Les définitions servent à spécifier l'ampleur des mesures proposées. Les rejets seront jugés illégaux ou non selon les normes MARPOL 73/78, la définition des substances polluantes incluant les hydrocarbures et les substances liquides nocives, tels qu'ils y sont définis. Les normes MARPOL 73/78 sont largement applicables dans le monde entier et donc bien connues par les parties concernées. En ce qui concerne la rigueur des normes, la Commission estime qu'il n'y a pas, dans l'immédiat, de raison d'aller au-delà de ces normes. La Convention MARPOL 73/78 traite toutes les formes d'hydrocarbures, par exemple, et elle fait référence généralement à un effluent maximal d'un mélange ne contenant pas plus de 15 parts par million. En termes simples, les règles pourraient être résumées en disant que tout rejet d'hydrocarbures qui est effectivement visible dans l'eau constituera très probablement une infraction aux normes MARPOL 73/78. L'utilisation des normes MARPOL 73/78 comme la référence fournira également la base juridique pour appliquer les règles au-delà des eaux territoriales des Etats membres, conformément aux règles de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM-UNCLOS) de 1982, à laquelle la Communauté est partie contractante. Comme la directive est destinée à régir tout rejet illégal, elle porte également sur la pollution provenant d'une avarie survenue au navire ou à son équipement, qui est en grande partie exemptée du régime de MARPOL 73/78. Il convient de noter, néanmoins, que selon l'article 6 de la proposition, des sanctions pour les rejets illégaux ne seront appliquées que si la pollution résulte d'un comportement intentionnel ou d'une négligence grave des parties concernées. La définition des navires est large, intégrant toutes sortes de navires de mer, car n'importe quel type de navire peut effectuer des rejets illégaux de substances polluantes. Pour des raisons semblables, la définition des personnes pouvant faire l'objet de sanctions englobe un éventail très large de contrevenants potentiels, y compris les personnes physiques et morales. 4.3. Champ d'action géographique La directive porte sur la pollution marine causée par des navires dans toutes les eaux côtières de la Communauté, et va au-delà en incluant également la haute mer. La zone économique exclusive est concernée dans la mesure où elle a été établie, conformément au droit international, par un Etat membre. 4.4. Application dans les ports L'article 4 est basé sur le régime de l'application par l'Etat du port conformément à la partie XII de l'UNCLOS. L'interdiction des rejets dans les zones maritimes au-delà de la juridiction de tout Etat (haute mer) est une étape importante pour souligner l'inadmissibilité des rejets illégaux et l'universalité de l'infraction en question. Peu d'Etats mettent en œuvre actuellement la possibilité d'appliquer les règles sur les infractions liées à des rejets en haute mer, qui est prévue à l'article 218, paragraphe 1, de l'UNCLOS. Or, cet aspect est d'une importance cruciale pour beaucoup d'Etats membres, notamment ceux qui n'ont pas établi de zones économiques exclusives, ce qui est en particulier le cas en mer Méditerranée. Associée à des efforts communs appropriés de surveillance et d'identification, cette règle améliorera considérablement les possibilités d'identifier les contrevenants, même lorsque le rejet a eu lieu en dehors des frontières nationales des Etats concernés. La Commission estime que cela est essentiel car la pollution ne connaît pas les frontières nationales non plus et toute limitation des possibilités pour les Etats d'agir qui est basée sur la zone maritime où le rejet a eu lieu est immanquablement artificielle. Des précisions supplémentaires concernant les raisons pour entreprendre un examen d'un navire sont abordées en se référant aux instruments de droit communautaire existants, en utilisant ainsi pleinement le système d'informations et de partage des données qui a été établi au sein de la Communauté pour le suivi des navires et des rejets y afférents. L'article n'indique pas la nature du suivi judiciaire à accorder aux rejets présumés, cette question relevant de la législation nationale de chaque Etat membre. 4.5. Application en ce qui concerne les navires en transit L'UNCLOS comporte certaines limitations considérables quant aux méthodes pour appliquer les lois en matière de pollution par les navires aux navires en transit dans les zones côtières. Néanmoins, par la participation de plusieurs Etats à un réseau de partage d'informations et leur coopération pour l'application, une part importante du trafic communautaire de transit peut relever du mécanisme décrit à l'article 5. 4.6. Sanctions pénales L'article 6 prévoit que les violations des dispositions de la directive seront considérées comme des infractions pénales, en conformité avec la proposition de la Commission concernant une directive relative à la protection de l'environnement par le droit pénal.63 Des sanctions doivent être infligées si l'une des personnes concernées est reconnue coupable d'avoir causé un tel acte, d'y avoir contribué ou de l'avoir suscité, intentionnellement ou par négligence grave. L'article 6 spécifie également que les sanctions contre les infractions doivent être appropriées quant à leur nature dissuasive, ce qui revêt une importance évidente pour que les interdictions de rejets soient efficaces. Étant donné les pratiques divergentes entre les Etats membres en ce qui concerne l'imposition et la nature des sanctions contre les infractions de pollution, l'article proposé joue un rôle essentiel en harmonisant l'approche communautaire des violations liées aux rejets, notamment au sujet des personnes pouvant faire l'objet de sanctions, y compris, et c'est important, la compagnie propriétaire. La Commission estime que l'application de sanctions légères aux contrevenants dans le domaine de la pollution aboutit à peu de résultats. Des violations concernant le déversement délibéré de substances polluantes, par exemple en n'utilisant pas de matériel de séparation des eaux et des hydrocarbures ou en falsifiant des registres devraient, selon la Commission, en elles-mêmes donner lieu à des amendes très substantielles. De même, une négligence grave entraînant des marées noires importantes et des dommages considérables doit être très sévèrement sanctionnée si l'on veut obtenir les effets dissuasifs projetés. Les sanctions auront vraisemblablement souvent la forme de pénalités financières, ou amendes, mais en ce qui concerne les personnes physiques, elles peuvent inclure, dans les cas les plus graves, des peines privatives de liberté. Afin d'assurer l'efficacité de la mesure, il est primordial que les personnes morales puissent être reconnues responsables et que des sanctions leur soient appliquées dans toute la Communauté. Il pourrait néanmoins être malaisé pour certains Etats membres de prévoir des sanctions pénales contre les personnes morales sans adapter les principes fondamentaux de leur ordre juridique interne. Dans ce cas, les Etats membres auront la possibilité de prévoir des sanctions autres que pénales, pour autant que celles-ci soient effectives, proportionnées et dissuasives. Par exemple, les sanctions applicables pourront comprendre des amendes à caractère non pénal, la confiscation des produits du crime, l'interdiction d'accès à l'aide et aux subventions publiques, le placement sous contrôle judiciaire ou la liquidation judiciaire. Une référence au droit international sert à prendre en considération différentes restrictions qui peuvent exister dans ce domaine, notamment l'article 230 de l'UNCLOS. Il est également précisé que les sanctions doivent être indépendantes des responsabilités civiles des personnes impliquées et qu'elles ne doivent pas être assurables. Ce dernier point est loin d'être évident dans les pratiques d'assurances maritimes en vigueur, où la couverture d'assurance fournie aux navires par les polices des Protection and Indemnity Clubs (qui assurent la couverture d'environ 90 % du tonnage mondial) peut inclure les pénalités financières, y compris les sanctions de nature pénale liées aux infractions de pollution. 4.7. Garanties L'article 7 contient un certain nombre de garanties qui sont établies pour assurer que les mesures prises conformément à la directive ne sont pas discriminatoires ni contraires au droit international, notamment à la partie XII, section 7, de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982. 4.8. Mesures d'accompagnement Afin d'être pleinement efficaces, les règles concernant l'interdiction de la pollution et leur application doivent être accompagnées de mesures de nature pratique. Il s'agit notamment du partage d'informations entre les Etats membres et de l'établissement de procédures communes pour le suivi et l'identification des navires procédant à des rejets de substances polluantes, déjà largement en cours au niveau de l'UE ou sous-régional.64 En outre, les technologies permettant que des équipements de bord enregistrent les rejets lorsqu'ils ont lieu et préviennent les personnes concernées à bord et à terre doivent être pleinement exploitées, car de tels dispositifs peuvent grandement aider à déterminer de manière objective si des rejets ont eu lieu et dans quelle mesure. 4.9. Rapports Afin d'assurer une application harmonisée de la directive et d'évaluer son efficacité, il est essentiel que la Commission soit informée de la mesure dans laquelle elle a été appliquée dans la pratique et de la nature des sanctions infligées. À cet effet, l'article 9 prévoit que les Etats membres fournissent un rapport à la Commission tous les trois ans. 4.10. Comité et amendements Les articles 10 et 11 font référence au nouveau Comité pour la sécurité maritime et la prévention de la pollution par les navires (COSS) créé par le règlement (CE) n° 2099/2002 du 5 novembre 2002. La participation de ce Comité facilitera, notamment, l'actualisation de la directive à la lumière des modifications continuelles de la Convention MARPOL 73/78 au niveau international. 2003/0037 (COD) Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions, notamment pénales, en cas d'infractions de pollution (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE, vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 80, paragraphe 2, vu la proposition de la Commission65, vu l'avis du Comité économique et social européen66, vu l'avis du Comité des régions67, statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 du traité68, considérant ce qui suit : (1) La politique de la Communauté en matière de sécurité maritime vise un niveau élevé de sécurité et de protection de l'environnement et est basée sur l'idée partagée que toutes les parties concernées par le transport de marchandises par mer ont une responsabilité pour assurer que les navires utilisés dans les eaux communautaires se conforment aux règles et aux normes applicables. (2) Les normes matérielles pour les rejets de pollution provenant des navires dans tous les Etats membres sont fondées sur la Convention MARPOL 73/78 ; mais ces règles sont quotidiennement ignorées par les navires qui naviguent dans les eaux communautaires, sans qu'aucune mesure corrective ne soit prise. (3) La mise en œuvre de MARPOL 73/78 est assurée différemment d'un Etat membre à l'autre, de sorte qu'une harmonisation est nécessaire au niveau communautaire ; en particulier, les pratiques des Etats membres concernant l'imposition de sanctions pour les rejets illégaux par les navires sont très diverses. (4) Des mesures de nature dissuasive font partie intégrante de la politique de sécurité maritime de la Communauté, car elles assurent un lien entre la responsabilité des parties concernées par le transport de marchandises polluantes par mer et leur exposition aux sanctions. Pour atteindre une protection efficace de l'environnement, il est donc nécessaire de disposer de sanctions efficaces, dissuasives et proportionnées. (5) Ni le régime international relatif à la responsabilité civile et à l'indemnisation en cas de pollution par les hydrocarbures ni celui concernant la pollution par d'autres substances dangereuses ou nocives ne comportent assez d'effets dissuasifs pour décourager les parties concernées par le transport de cargaisons dangereuses par mer d'exécuter des pratiques inférieures aux normes. Les effets dissuasifs requis ne peuvent être assurés que par l'introduction de sanctions de nature pénale, qui s'appliquent à quiconque cause ou contribue à causer une pollution marine, délibérément ou par négligence grave. (6) Les personnes morales doivent également être susceptibles de faire l'objet de sanctions dans toute la Communauté, car des violations peuvent être perpétrées dans leur intérêt ou pour leur compte. (7) Les mesures de nature pénale ne sont pas liées à la responsabilité civile des parties intéressées et ne sont donc soumises à aucune règle concernant la limitation ou la canalisation des responsabilités civiles, pas plus qu'elles ne restreignent l'indemnisation efficace des victimes des incidents de pollution. (8) Il convient que les Etats membres coopèrent davantage pour assurer la détection à temps des rejets illégaux ainsi que l'identification des contrevenants. (9) La directive est conforme aux principes de proportionnalité et de subsidiarité fixés à l'article 5 du traité. L'introduction dans le droit communautaire des normes internationales applicables en matière de pollution causée par les navires et l'instauration de sanctions, notamment de sanctions pénales en cas d'infractions à ces normes, est une mesure nécessaire pour atteindre un niveau élevé de sécurité et de protection de l'environnement dans le transport maritime. Seule la Communauté peut atteindre ces objectifs efficacement grâce à des règles harmonisées. La directive se limite au minimum requis pour atteindre ces objectifs et n'excède pas ce qui est nécessaire à cette fin. (10) La directive respecte pleinement la Charte des droits fondamentaux, ONT ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE : Article premier Le but de la présente directive est d'introduire dans le droit communautaire les normes internationales relatives à la pollution provenant de navires et d'assurer que les personnes responsables de rejets illégaux font l'objet de sanctions appropriées, notamment pénales. L'objectif sous-jacent de la directive est d'améliorer la sécurité maritime et de protéger l'environnement marin contre la pollution par les navires. Article 2 Aux fins de la présente directive, on entend par : 1. «MARPOL 73/78», la Convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires, et son Protocole de 1978, tels que modifiés69 ; 2. «substances polluantes», les substances visées aux annexes I (hydrocarbures) et II (substances liquides nocives en vrac) de MARPOL 73/78 ; 3. «rejets illégaux», les rejets effectués en violation de MARPOL 73/78, y compris les rejets provenant d'une avarie survenue au navire ou à son équipement non visés par MARPOL 73/78 en vertu des exceptions figurant à l'Annexe I, règle 11, alinéa b) et à l'Annexe II, règle 6, alinéa b) de la Convention. 4. «navire», un bâtiment de mer, indépendamment de son pavillon, de quelque type que ce soit, exploité en milieu marin, y compris les hydroptères, les aéroglisseurs, les engins submersibles et les engins flottants ; 5. «personne», une personne physique ou morale ; 6. «personne morale», toute entité juridique ayant ce statut en vertu du droit national applicable, sauf les Etats ou tout autre organisme public agissant dans le cadre de l'exercice de leur prérogative de puissance publique, ainsi que les organisations internationales publiques. Article 3 1. La présente directive s'applique aux rejets de substances polluantes dans : a) les eaux intérieures, y compris les ports, d'un Etat membre ; b) les eaux territoriales d'un Etat membre ; c) les détroits utilisés pour la navigation internationale soumis au régime du passage en transit, conformément à la partie III, section 2, de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982, dans la mesure où un Etat membre exerce une juridiction sur ces détroits ; d) la zone économique exclusive d'un Etat membre, établie conformément au droit international ; et e) la haute mer. 2. La présente directive s'applique aux rejets illégaux provenant de tout type de navire, quel que soit son pavillon, à l'exception des navires de guerre et navires de guerre auxiliaires, ainsi que des autres navires appartenant à un Etat ou exploités par un Etat tant que celui-ci les utilise exclusivement à des fins gouvernementales et non commerciales. Article 4 1. Si des irrégularités ou des informations laissent soupçonner qu'un navire qui est dans un port ou à un terminal en mer d'un Etat membre a effectué un rejet illégal de substances polluantes dans l'une des zones maritimes visées à l'article 3, paragraphe 1, l'Etat membre veille à ce qu'un examen approprié soit entrepris conformément à son droit national. 2. Une liste non exhaustive des irrégularités ou informations au sens du paragraphe 1 est fournie à l'annexe II. 3. Si l'examen visé au paragraphe 1 révèle des faits susceptibles de constituer des preuves concernant un rejet illégal, les autorités compétentes en matière pénale doivent être informées. Article 5 Si le rejet illégal soupçonné a lieu dans une zone maritime visée aux points b), c), d) ou e) de l'article 3, paragraphe 1, et le navire qui est suspecté d'avoir commis le rejet ne fait pas escale dans un port de l'Etat membre qui détient les informations relatives au rejet soupçonné, les dispositions suivantes s'appliquent : - si la prochaine escale du navire est dans un autre Etat membre, les Etats membres concernés coopèrent étroitement à l'examen visé à l'article 4, paragraphe 1, et à la prise de décision quant aux mesures administratives appropriées en ce qui concerne le rejet en question ; - si la prochaine escale du navire est dans un port d'un Etat en dehors de la Communauté, l'Etat membre prend les mesures nécessaires afin d'assurer que la prochaine escale du navire est informée du rejet soupçonné et demande que l'Etat de la prochaine escale prenne les mesures appropriées en ce qui concerne le rejet en question. Article 6 1. Les Etats membres veillent à ce que les rejets illégaux de substances polluantes, et la participation et l'incitation à ces rejets soient considérés comme des infractions pénales lorsqu'ils sont commis intentionnellement ou par négligence grave. 2. Toute personne (c'est-à-dire non seulement le propriétaire du navire, mais également le propriétaire de la cargaison, la société de classification ou toute autre personne impliquée) qui a été jugée responsable au sens du paragraphe 1 par un tribunal, fait l'objet de sanctions, y compris, le cas échéant, de sanctions pénales. 3. Les sanctions visées au paragraphe 2 sont effectives, proportionnées et dissuasives. 4. En ce qui concerne les personnes physiques, des sanctions pénales sont prévues, qui peuvent aller, dans les cas les plus graves, jusqu'à des peines privatives de liberté, dans le respect du droit international applicable. 5. En ce qui concerne les personnes physiques et morales, les Etats membres prévoient notamment les sanctions suivantes : a) des amendes ; b) la confiscation des produits résultant des infractions visées au paragraphe 1. Le cas échéant, les Etats membres prévoient également les sanctions suivantes : c) l'interdiction permanente ou temporaire d'exercice d'activités commerciales ; d) le placement sous contrôle judiciaire ; e) la liquidation judiciaire ; f) l'interdiction d'accès à l'aide ou aux subventions publiques. 6. Les amendes visées dans le présent article ne sont pas assurables. Article 7 Les Etats membres appliquent les dispositions de la présente directive sans aucune discrimination de droit ou de fait parmi les navires étrangers et conformément au droit international applicable, notamment la partie XII, section 7, de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982, et ils notifient rapidement à l'Etat du pavillon du navire et à tout autre Etat concerné les mesures prises en vertu de la présente directive. Article 8 Les Etats membres et la Commission coopèrent, en collaboration étroite avec l'Agence européenne pour la sécurité maritime et, le cas échéant, dans le cadre du programme d'action destiné à répondre à la pollution marine accidentelle ou intentionnelle instauré par la décision n° 2850/2000/CE70 pour : a) élaborer les systèmes d'information nécessaires pour assurer la mise en œuvre efficace de la présente directive ; b) établir des pratiques et orientations communes pour, notamment : - le suivi et l'identification rapide des navires procédant à des rejets de substances polluantes en violation de la présente directive, notamment, le cas échéant, grâce à des équipements de bord qui permettent le suivi ; - l'élaboration de méthodes fiables pour attribuer des substances polluantes détectées en mer à un navire particulier ; et - l'application juridique efficace de la présente directive. Article 9 Tous les trois ans, chaque Etat membre transmet un rapport à la Commission pour l'informer sur l'application de la présente directive par ses tribunaux et autres autorités compétentes. Sur la base de ces rapports, la Commission soumet un rapport communautaire au Parlement européen et au Conseil. Article 10 1. La Commission est assistée par le Comité pour la sécurité maritime et la prévention de la pollution par les navires (COSS) établi par l'article 3 du règlement (CE) n° 2099/2002 du Parlement européen et du Conseil du 5 novembre 2002 instituant un Comité pour la sécurité maritime et la prévention de la pollution par les navires (COSS)71. 2. Lorsqu'il est fait référence au présent paragraphe, les articles 5 et 7 de la décision 1999/468/CE72 s'appliquent, dans le respect des dispositions de l'article 8 de ladite décision. La période prévue à l'article 5, paragraphe 6, de la décision 1999/468/CE est fixée à trois mois. 3. La Commission informe régulièrement le Comité instauré par la décision n° 2850/2000/CE de toute mesure proposée ou autre activité pertinente concernant la lutte contre la pollution marine. Article 11 1. Les annexes de la présente directive et les références à MARPOL 73/78 peuvent être modifiées conformément à la procédure prévue à l'article 10, paragraphe 2. 2. Les modifications de MARPOL 73/78 visées au paragraphe 1 peuvent être exclues du champ d'application de la présente directive en application de l'article 5 du règlement (CE) n° 2099/2002. Article 12 1. Les Etats membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard six mois après la date de son entrée en vigueur. Ils en informent immédiatement la Commission. 2. Lorsque les Etats membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les Etats membres. Article 13 La présente directive entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne. Article 14 Les Etats membres sont destinataires de la présente directive. Fait à Bruxelles, le Par le Parlement européen Par le Conseil Le président Le président ANNEXE I Partie I : Hydrocarbures (Annexe I de MARPOL 73/78) Aux fins de l'Annexe I de MARPOL 73/78, «hydrocarbures» désigne le pétrole sous toutes ses formes, à savoir notamment le pétrole brut, le fuel-oil, les boues, les résidus d'hydrocarbures et les produits raffinés (autres que les produits pétrochimiques qui sont soumis aux dispositions de l'Annexe II de MARPOL 73/78) et «mélange d'hydrocarbures» désigne tout mélange contenant des hydrocarbures. Extraits des dispositions pertinentes de l'Annexe I de MARPOL 73/78 : Règle 9 : Réglementation des rejets d'hydrocarbures 1) Sous réserve des dispositions des règles 10 et 11 de la présente Annexe et du paragraphe 2) de la présente règle, il est interdit à tout navire auquel la présente Annexe s'applique de rejeter à la mer des hydrocarbures ou des mélanges d'eau et d'hydrocarbures, sauf lorsque toutes les conditions suivantes se trouvent réunies : a) en ce qui concerne les pétroliers, sauf dans les cas prévus à l'alinéa b) du présent paragraphe : i) le pétrolier n'est pas dans une zone spéciale ; ii) le pétrolier est à plus de 50 milles marins de la terre la plus proche ; iii) le pétrolier fait route ; iv) le taux instantané de rejet des hydrocarbures ne dépasse pas 30 l par mille marin ; v) la quantité totale d'hydrocarbures rejetée à la mer ne dépasse pas, pour les pétroliers existants, 1/15 000 de la quantité totale de la cargaison particulière dont les résidus proviennent et, pour les pétroliers neufs, 1/30 000 de la quantité totale de la cargaison particulière dont les résidus proviennent ; et vi) le pétrolier utilise un dispositif de surveillance continue et de contrôle des rejets d'hydrocarbures et un ensemble de citernes de décantation tels que prescrits à la règle 15 de la présente Annexe. b) en ce qui concerne les navires d'une jauge brute égale ou supérieure à 400 tonneaux, autres que les pétroliers, et en ce qui concerne les pétroliers, pour les cales de la tranche des machines, à l'exclusion des cales de la chambre des pompes à cargaison à moins que leurs effluents ne soient mélangés avec des résidus de cargaison d'hydrocarbures : i) le navire n'est pas dans une zone spéciale ; ii) le navire fait route ; iii) la teneur en hydrocarbures de l'effluent non dilué ne dépasse pas 15 parts par million ; et iv) le navire utilise le matériel prescrit à la règle 16 de la présente Annexe [dispositif de surveillance continue et de contrôle et matériel de filtrage]. 2) En ce qui concerne les navires d'une jauge brute inférieure ou égale à 400 tonneaux, autres que les pétroliers, qui naviguent hors des zones spéciales, l'Autorité [de l'Etat du pavillon] veille à ce qu'ils soient équipés, dans la mesure du possible et du raisonnable, d'installations permettant la conservation des résidus d'hydrocarbures à bord et leur rejet dans des installations de réception ou à la mer conformément aux dispositions du paragraphe 1), alinéa b) de la présente règle. - - - 4) Les dispositions du paragraphe 1) de la présente règle ne s'appliquent pas au rejet de ballast propre ou séparé ni aux mélanges non traités d'eau et d'hydrocarbures dont la teneur en hydrocarbures, sans dilution, n'excède pas 15 parts par million, à condition que ces mélanges ne proviennent pas des bouchains de chambres des pompes à cargaison et qu'ils ne contiennent pas de résidus de la cargaison d'hydrocarbures. 5) Le rejet à la mer ne doit contenir ni produits chimiques ou autres substances en quantité ou sous des concentrations dangereuses pour le milieu marin, ni produits chimiques ou autres substances utilisés pour échapper aux conditions de rejet prévues dans la présente règle. 6) Les résidus d'hydrocarbures qui ne peuvent être rejetés à la mer dans les conditions énoncées aux paragraphes 1), 2) et 4) de la présente règle sont conservés à bord ou rejetés dans des installations de réception. - - - Règle 10 : Méthodes de prévention de la pollution par les hydrocarbures due aux navires exploités dans les zones spéciales 1) Aux fins de la présente Annexe, les zones spéciales sont la zone de la mer Méditerranée, la zone de la mer Baltique, la zone de la mer Noire, la zone de la mer Rouge, la «zone des golfes», la zone du golfe d'Aden, la zone de l'Antarctique et les eaux de l'Europe du Nord-Ouest, [qui sont définies comme suit]. 2) Sous réserve des dispositions de la règle 11 de la présente Annexe : a) Il est interdit à tout pétrolier, ainsi qu'à tout navire d'une jauge brute égale ou supérieure à 400 tonneaux autre qu'un pétrolier, de rejeter à la mer des hydrocarbures ou des mélanges d'hydrocarbures pendant qu'il se trouve dans une zone spéciale. [...] b) [...], il est interdit à tout navire d'une jauge brute inférieure à 400 tonneaux, autre qu'un pétrolier, de rejeter à la mer des hydrocarbures ou des mélanges d'hydrocarbures pendant qu'il se trouve dans une zone spéciale, sauf si la teneur en hydrocarbures de l'effluent ne dépasse pas, sans dilution, 15 parts par million. 3) a) Les dispositions du paragraphe 2) de la présente règle ne s'appliquent pas au rejet de ballast propre ou séparé. b) Les dispositions de l'alinéa a) du paragraphe 2) de la présente règle ne s'appliquent pas au rejet des eaux de cale traitées provenant de la tranche des machines, si toutes les conditions suivantes se trouvent réunies : i) les eaux de cale ne proviennent pas des bouchains des chambres des pompes à cargaison ; ii) les eaux de cale ne sont pas mélangées avec des résidus de la cargaison d'hydrocarbures ; iii) le navire fait route ; iv) la teneur en hydrocarbures de l'effluent non dilué ne dépasse pas 15 parts par million ; v) le navire utilise un matériel de filtrage des hydrocarbures conforme aux dispositions du paragraphe 5) de la règle 16 de la présente Annexe ; et vi) le matériel de filtrage est muni d'un dispositif d'arrêt permettant de garantir que le rejet est automatiquement interrompu lorsque la teneur en hydrocarbures de l'effluent dépasse 15 parts par million. 4) a) Le rejet à la mer ne doit contenir ni produits chimiques ou autres substances en quantité ou sous des concentrations dangereuses pour le milieu marin, ni produits chimiques ou autres substances utilisés pour échapper aux conditions de rejet prévues dans la présente règle. b) Les résidus d'hydrocarbures qui ne peuvent être rejetés à la mer dans les conditions énoncées aux paragraphes 2) et 3) de la présente règle sont conservés à bord ou rejetés dans des installations de réception. 5) Aucune disposition de la présente règle n'interdit à un navire dont une partie seulement du trajet se trouve dans une zone spéciale d'effectuer des rejets en dehors de la zone spéciale conformément aux dispositions de la règle 9 de la présente Annexe. - - - Règle 11 : Exceptions Les règles 9 et 10 de la présente Annexe ne s'appliquent pas : a) au rejet à la mer d'hydrocarbures ou de mélanges d'hydrocarbures effectué par un navire pour assurer sa propre sécurité ou celle d'un autre navire, ou sauver des vies humaines en mer ; ou b) [non applicable]73 c) au rejet à la mer de substances contenant des hydrocarbures approuvées par l'Autorité [de l'Etat du pavillon], lorsque ces substances sont utilisées pour lutter contre un cas particulier de pollution afin de réduire les dommages dus à cette pollution. Tout rejet de cette nature est soumis à l'approbation du gouvernement, quel qu'il soit, dans les limites de la juridiction duquel ce rejet devrait selon toute prévision intervenir. Partie II : Substances liquides nocives (Annexe II de MARPOL 73/78) Extraits des dispositions pertinentes de l'Annexe II de MARPOL 73/78 : Règle 3 : Classement en catégories et liste des substances liquides nocives 1) Aux fins des règles de la présente Annexe, les substances liquides nocives sont divisées en quatre catégories, comme suit : a) Catégorie A : Substances liquides nocives qui, si elles sont rejetées à la mer lors des opérations de nettoyage des citernes ou de déballastage, présentent un risque grave pour les ressources marines ou pour la santé de l'homme ou nuisent sérieusement à l'agrément des sites ou aux autres utilisations légitimes de la mer et justifient en conséquence la mise en œuvre de mesures rigoureuses de lutte contre la pollution. b) Catégorie B : Substances liquides nocives qui, si elles sont rejetées à la mer lors des opérations de nettoyage des citernes ou de déballastage, présentent un risque pour les ressources marines ou pour la santé de l'homme ou nuisent à l'agrément des sites ou aux autres utilisations légitimes de la mer et justifient en conséquence la mise en œuvre de mesures particulières de lutte contre la pollution. c) Catégorie C : Substances liquides nocives qui, si elles sont rejetées à la mer lors des opérations de nettoyage des citernes ou de déballastage, présentent un faible risque pour les ressources marines ou pour la santé de l'homme ou nuisent quelque peu à l'agrément des sites ou aux autres utilisations légitimes de la mer et appellent en conséquence des conditions d'exploitation particulières. d) Catégorie D : Substances liquides nocives qui, si elles sont rejetées à la mer lors des opérations de nettoyage des citernes ou de déballastage, présentent un risque discernable pour les ressources marines ou pour la santé de l'homme ou nuisent très légèrement à l'agrément des sites ou aux autres utilisations légitimes de la mer et appellent en conséquence certaines précautions en ce qui concerne les conditions d'exploitation. - - - [D'autres directives pour classer les substances en catégories, y compris une liste de substances classées, figurent à la règle 3, paragraphes 2) à 4) et à la règle 4 ainsi qu'aux appendices de l'Annexe II de MARPOL 73/78] Règle 5 : Rejet de substances liquides nocives Rejet de substances des catégories A, B et C hors des zones spéciales et rejet de substances de la catégorie D dans toutes les zones Sous réserve des dispositions [...] de la règle 6 de la présente Annexe : 1) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie A définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa a) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances. Lorsque les citernes contenant ces substances ou mélanges sont nettoyées, les résidus résultant du nettoyage sont rejetés dans une installation de réception jusqu'à ce que la concentration de la substance dans l'effluent soit égale ou inférieure à 0,1 % en poids et jusqu'à ce que la citerne soit vide, sauf pour le phosphore, jaune ou blanc, pour lequel la concentration résiduelle doit être de 0,01 % en poids. Toute eau ajoutée par la suite à la citerne peut être rejetée à la mer quand toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; b) le rejet s'effectue sous la flottaison, compte tenu de l'emplacement des prises d'eau de mer ; et c) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche et dans des eaux d'une profondeur d'au moins 25 m. 2) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie B définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa b) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances, sauf lorsque toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; b) la méthode et les dispositifs utilisés pour effectuer le rejet sont approuvés par l'Autorité [de l'Etat du pavillon]. Ils sont fondés sur des normes élaborées par l'[OMI] et garantissent que la concentration et le taux de rejet de l'effluent sont tels que la concentration de la substance ne puisse dépasser une part par million dans le sillage du navire, à l'arrière de celui-ci ; c) la quantité maximale de cargaison rejetée de chaque citerne et de son système de tuyautage ne dépasse pas la quantité maximale correspondant à la méthode agréée visée à l'alinéa b) du présent paragraphe, cette quantité ne devant en tout état de cause pas excéder la plus grande des deux quantités suivantes : 1 m3 ou 1/3 000 de la capacité en mètres cubes de la citerne ; d) le rejet s'effectue sous la flottaison, compte tenu de l'emplacement des prises d'eau de mer ; et e) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche et dans des eaux d'une profondeur d'au moins 25 m. 3) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie C définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa c) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances, sauf lorsque toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; b) la méthode et les dispositifs utilisés pour effectuer le rejet sont approuvés par l'Autorité [de l'Etat du pavillon]. Ils sont fondés sur des normes élaborées par l'[OMI] et garantissent que la concentration et le taux de rejet de l'effluent sont tels que la concentration de la substance ne puisse dépasser dix parts par million dans le sillage du navire, à l'arrière de celui-ci ; c) la quantité maximale de cargaison rejetée de chaque citerne et de son système de tuyautage ne dépasse pas la quantité maximale correspondant à la méthode agréée visée à l'alinéa b) du présent paragraphe, cette quantité ne devant en tout état de cause pas excéder la plus grande des deux quantités suivantes : 3 m3 ou 1/1 000 de la capacité en mètres cubes de la citerne ; d) le rejet s'effectue sous la flottaison, compte tenu de l'emplacement des prises d'eau de mer ; et e) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche et dans des eaux d'une profondeur d'au moins 25 m. 4) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie D définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa d) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances, sauf lorsque toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; b) la concentration du mélange ne dépasse pas une part de substance pour 10 parts d'eau ; et c) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche. 5) Une méthode de ventilation approuvée par l'Autorité [de l'Etat du pavillon] peut être utilisée pour débarrasser une citerne des résidus de cargaison. Cette méthode doit être fondée sur des normes élaborées par l'[OMI]. Toute eau introduite par la suite dans la citerne est considérée comme propre et n'est pas soumise aux dispositions des paragraphes 1), 2), 3) ou 4) de la présente règle. 6) Il est interdit de rejeter à la mer des substances qui n'appartiennent pas à une catégorie ou qui n'ont pas été provisoirement classées ou qui n'ont pas été évaluées conformément à la règle 4, paragraphe 1) de la présente Annexe, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances. Substances des catégories A, B et C à l'intérieur des zones spéciales [telles que définies à l'Annexe II de MARPOL 73/78, règle 1, y compris la mer Baltique] Sous réserve des dispositions du paragraphe 14) de la présente règle et de la règle 6 de la présente Annexe : 7) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie A définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa a) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances. Lorsque les citernes contenant ces substances ou mélanges sont nettoyées, les résidus résultant du nettoyage sont rejetés dans une installation de réception mise en place par les Etats riverains de la zone spéciale conformément aux dispositions de la règle 7 de la présente Annexe, jusqu'à ce que la concentration de la substance dans l'effluent soit égale ou inférieure à 0,05 % en poids et jusqu'à ce que la citerne soit vide, sauf pour le phosphore, jaune ou blanc, pour lequel la concentration résiduelle doit être de 0,005 % en poids. Toute eau ajoutée par la suite à la citerne peut être rejetée à la mer quand toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; b) le rejet s'effectue sous la flottaison, compte tenu de l'emplacement des prises d'eau de mer ; et c) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche et dans des eaux d'une profondeur d'au moins 25 m. 8) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie B définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa b) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances, sauf lorsque toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) la citerne a été prélavée conformément à la procédure approuvée par l'Autorité [de l'Etat du pavillon] et fondée sur les normes établies par l'[OMI] et les résidus de lavage de la citerne qui en résultent ont été rejetés dans une installation de réception ; b) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; c) la méthode et les dispositifs utilisés pour effectuer le rejet et le nettoyage sont approuvés par l'Autorité [de l'Etat du pavillon]. Ils sont fondés sur des normes élaborées par l'[OMI] et garantissent que la concentration et le taux de rejet de l'effluent sont tels que la concentration de la substance ne puisse dépasser une part par million dans le sillage du navire, à l'arrière de celui-ci ; d) le rejet s'effectue sous la flottaison, compte tenu de l'emplacement des prises d'eau de mer ; et e) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche et dans des eaux d'une profondeur d'au moins 25 m. 9) Il est interdit de rejeter à la mer des substances de la catégorie C définies à la règle 3, paragraphe 1), alinéa c) de la présente Annexe, des substances provisoirement classées dans cette catégorie, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances, sauf lorsque toutes les conditions ci-après se trouvent réunies : a) le navire fait route à une vitesse d'au moins 7 nœuds pour les navires à propulsion autonome et d'au moins 4 nœuds pour les autres navires ; b) la méthode et les dispositifs utilisés pour effectuer le rejet sont approuvés par l'Autorité [de l'Etat du pavillon]. Ils sont fondés sur des normes élaborées par l'[OMI] et garantissent que la concentration et le taux de rejet de l'effluent sont tels que la concentration de la substance ne puisse dépasser une part par million dans le sillage du navire, à l'arrière de celui-ci ; c) la quantité maximale de cargaison rejetée de chaque citerne et de son système de tuyautage ne dépasse pas la quantité maximale correspondant à la méthode agréée visée à l'alinéa b) du présent paragraphe, cette quantité ne devant en tout état de cause pas excéder la plus grande des deux quantités suivantes : 1 m3 ou 1/3 000 de la capacité en mètres cubes de la citerne ; d) le rejet s'effectue sous la flottaison, compte tenu de l'emplacement des prises d'eau de mer ; et e) le rejet s'effectue à une distance d'au moins 12 milles marins de la terre la plus proche et dans des eaux d'une profondeur d'au moins 25 m. 10) Une méthode de ventilation approuvée par l'Autorité [de l'Etat du pavillon] peut être utilisée pour débarrasser une citerne des résidus de cargaison. Cette méthode doit être fondée sur des normes élaborées par l'[OMI]. Toute eau introduite par la suite dans la citerne est considérée comme propre et n'est pas soumise aux dispositions des paragraphes 7), 8) ou 9) de la présente règle. 11) Il est interdit de rejeter à la mer des substances qui n'appartiennent pas à une catégorie ou qui n'ont pas été provisoirement classées ou qui n'ont pas été évaluées conformément à la règle 4, paragraphe 1) de la présente Annexe, ainsi que des eaux de ballast, des eaux de nettoyage de citernes ou d'autres résidus ou mélanges contenant de telles substances. 12) Les dispositions de la présente règle n'empêchent pas les navires de conserver à bord les résidus d'une cargaison de la catégorie B ou C et de les rejeter, hors d'une zone spéciale, conformément aux dispositions des paragraphes 2) et 3), respectivement, de la présente règle. - - - Règle 6 : Exceptions La règle 5 de la présente Annexe ne s'applique pas : a) au rejet à la mer des substances liquides nocives ou de mélanges contenant de telles substances nécessaire pour assurer la sécurité d'un navire ou pour sauver des vies humaines en mer ; ou b) [non applicable]74 c) au rejet à la mer de substances liquides nocives approuvées par l'Autorité [de l'Etat du pavillon], ou de mélanges contenant de telles substances, lorsque ces substances sont utilisées pour lutter contre un cas particulier de pollution afin de réduire les dommages dus à cette pollution. Tout rejet de cette nature est soumis à l'approbation du gouvernement, quel qu'il soit, dans les limites de la juridiction duquel ce rejet devrait selon toute prévision intervenir. ANNEXE II 1) Toute irrégularité en ce qui concerne le registre des hydrocarbures et d'autres registres pertinents, ou autrement liée à des infractions de pollution potentielles, découverte lors d'inspections de contrôle par l'Etat du port effectuées en vertu de la directive 95/21/CE ; 2) Toute irrégularité en ce qui concerne le dépôt des déchets d'exploitation des navires et des résidus de cargaison, ou la notification s'y rapportant, de la manière prescrite en vertu de la directive 2000/59/CE ; 3) Toute information fournie par un autre Etat membre concernant des infractions de pollution potentielles du navire, obtenue par les procédures prévues dans la directive 2002/59/CE ou autrement ; ou 4) Toute autre information fournie par des personnes impliquées dans l'exploitation du navire, y compris les pilotes, qui suggère des irrégularités concernant le respect des obligations fixées en vertu de la présente directive. FICHE FINANCIÈRE L'incidence financière de cet instrument est limitée aux propriétaires de navires et autres acteurs du secteur maritime qui, intentionnellement ou par négligence grave, agissent en violation des règles qui s'appliquent depuis de nombreuses années. Aucune incidence financière n'étant prévue au niveau communautaire, une fiche financière plus détaillée paraît superflue. Annexe 11 : L'importance des moyens et des prérogatives des Coast Guards est la spécificité la plus frappante du système américain et la condition de son efficacité. Un dispositif aussi complexe que l'OPA (Oil Pollution Act) 90 ne peut fonctionner sans être soutenu à bout de bras par une administration maritime forte. Le système international se caractérise par l'acceptation de documents émis par l'Etat du pavillon ou par des sociétés privées, tels que certificats d'assurance ou certificats ISM. Les Coast Guards par contraste n'acceptent un pétrolier que pourvu des documents qu'ils ont eux-mêmes définis, délivrés et vérifiés, dans le cadre de la législation américaine. Les Coast Guards élaborent les réglementations d'application, délivrent les certificats de responsabilité financière, approuvent les plans de réponse des navires. Tout pétrolier arrivant à la limite des 200 milles nautiques doit se signaler par fax satellite, préciser son temps estimé d'arrivée 48 et 24h d'avance, et signaler toute défaillance technique. Il doit disposer d'un certificat annuel autorisant le navire à toucher les ports des Etats-Unis, délivré par les Coast Guards après une visite approfondie préalable à toute opération commerciale. Les équipes d'inspection peuvent comprendre 12 personnes dont des spécialistes qui vont essayer les équipements du bord. Si des mesures correctives sont demandées, elles devront être exécutées avant les opérations commerciales. Un navire qui présente une lacune majeure, telle que l'absence de certificat de responsabilité financière, sera renvoyé sans même avoir été autorisé à rentrer dans le port. Avec un budget qui a atteint près de 5,6 milliards de dollars en 2002(76), 38000 hommes en service actif, 35000 auxiliaires, 211 avions et hélicoptères, 195 navires et 1400 embarcations, les Coast Guards disposent des moyens nécessaires. Sous le régime de l'OPA 90, les quantités de pétrole déversées dans l'environnement marin ont diminué des 2/3, mais il convient de souligner que même un système aussi sévère et exhaustif n'élimine pas tout risque, comme l'atteste, par exemple, les 4000 tonnes déversées en 1996 dans l'accident du Scandia et du North Cape. Annexe 12 : MOTION à l'intention de M. Didier QUENTIN (et autres responsables politiques) 1. C'est le 10/12/1982 qu'a été ouverte à la signature des Etats la Convention des Nations unies sur le DROIT DE LA MER. Cette Convention a, entre autres, institué la ZONE ECONOMIQUE EXCLUSIVE (ZEE) de 200 milles, où l'espace marin a un statut dérogatoire par rapport aux eaux internationales. L'état riverain y exerce un droit de souveraineté nationale sur ses ressources économiques.Annexe-1 Les récents accidents de mer des deux chalutiers sablais « CISTUDE » et « PEPE RORO », avec abordage et mort d'hommes, fuite du bateau abordeur dans le premier cas cité, leur immobilisation respective dans les ports de Dunkerque et Lorient, puis la possibilité de repartir vers le pays de l'état de pavillon pour jugement (acquis pour le « BOW EAGLE », se fera sans doute pour le bateau hollandais), montrent que cette Convention doit être complétée par la possibilité d'un jugement en flagrant délit par les autorités de la ZEE concernée, à savoir l'état souverain du lieu, le bateau abordeur restant à quai. La rapidité de la mise en route des procédures, l'engagement à faire respecter les lois et règlements maritimes concernant la sécurité sont deux impératifs pour la crédibilité des institutions et conforteraient tous les marins qui, sur leurs petits bateaux, sont exposés aux dangers engendrés par l'irresponsabilité de ceux que Monsieur le Sous-préfet des Sables d'Olonne a désignés dans son allocution au cours de la cérémonie religieuse du 14 février 2003 comme les « TUEURS DES MERS ». 2. Dans les eaux internationales, la MER, lieu de régulation de la vie de toutes les espèces en général et de l'homme en particulier, doit être inscrite au PATRIMOINE MONDIAL DE L'HUMANITE. La France s'honorerait en prenant cette initiative et en impulsant les moyens pour que se mettent en place les structures politiques à l'échelon planétaire nécessaires à la conservation de ce bien collectif (en veillant en particulier au respect des règles applicables pour les pollutions marines, car les outils existent). Nous rappelons qu'un changement de la température moyenne de la planète de quelques degrés a des conséquences immenses sur la vie et que les eaux océaniques peuvent absorber jusqu'à 30 % du dioxyde de carbone atmosphérique, régulant ainsi la température du globe en agissant sur les conséquences dues à l'effet de serre. 3. concernant les Femmes de Marins Pêcheurs, il existe des formations pour les conjointes depuis 1985. La loi Pêche de 1997 accorde aux femmes, en même temps que le droit à la retraite, l'accès à ces formations. Actuellement, il existe une grande inégalité, port à port, dans la mise en œuvre de ces formations : frais d'inscription, rémunération ou non... Mais surtout, les femmes de marins pêcheurs souhaitent que ces formations soient reconnues sur le plan maritime et qu'elles soient accessibles à toutes (conjointes de patrons et de membres de l'équipage). En effet, les marins consacrent de plus en plus de temps à leur travail, ils sont moins disponibles pour traiter les dossiers économiques, administratifs et sociaux. C'est ainsi qu'ils sont amenés à solliciter toujours davantage leur conjointe pour se faire aider dans ces domaines. Il est primordial, si l'on veut éviter une crise sociale grave, que les marins et leurs conjointes soient vigilants, afin de s'adapter aux évolutions économiques et sociales du secteur de la pêche. Il nous paraît indispensable pour mener à bien ces différents projets, de pouvoir compter sur les organismes concernés et les pouvoirs publics. Il appartient donc aux politiques et aux élus des circonscriptions maritimes d'être nos intermédiaires auprès de ces institutions. C'est dans cet esprit que nous nous adressons à vous et que nous vous remercions, Monsieur le Député, d'être notre porte-parole dans cette démarche. La délégation du Sud-Ouest de la Mission de la Mer 1 () Jean Quatremer, l'Europe épingle 66 navires - poubelles et hypocrisie des Etats, Libération, 3 décembre 2002. 2 () Commission d'enquête sur la sécurité maritime des produits dangereux ou polluants ; rapport (n° 2535) L'Erika, l'urgence. Commission d'enquête sur l'application des mesures préconisées en matière de sécurité du transport maritime des produits dangereux ou polluants et l'évaluation de leur efficacité. 3 () Commentant un sondage sur les références idéologiques des Français, M. Alain Duhamel constate que parmi les thèmes politiques « L'écologie est le courant qui suscite les réactions les plus positives (66 % contre 25 %) », site internet des études de la SOFRES, 13 juillet 2000. 4 () On trouvera, dans l'Annexe 2, les grandes lignes de ces mesures. 5 () Philippe Boisson, Politiques et droit de la sécurité maritime, p. 569. 6 () Exposé des motifs de la proposition de directive modifiant la directive 95/21/CE. 7 () Par le Conseil économique et social, la commission d'enquête sur l'Erika et le mémorandum du 15 février 2000 adressé par les autorités françaises à la Commission européenne sur le renforcement de la sécurité maritime. 8 () On se reportera à l'annexe 3, qui expose en détail les différences entre les deux notions. 9 () Voir l'Annexe 4, les installations portuaires de réception des déchets en France. 10 () Nicolas-Jean Brehon, L'utilisation des satellites d'observation pour la détection des déballastages en mer, Transports, septembre-octobre 2000, p. 366. 11 () Le Marin, 3 janvier 2003. 12 () Communication de la Commission sur la sécurité maritime du transport pétrolier du 21 mars 2000, p. 20. 13 () Communication de la Commission sur la sécurité maritime du transport pétrolier, p. 35. 14 () Exposé des motifs de la proposition de règlement relative à la mise en place du fonds d'indemnisation. 15 () Voir l'Annexe 5, Etat des transpositions des paquets Erika. 16 () Voir l'Annexe 6, Rapport au Conseil européen sur les suites à donner aux conséquences de la catastrophe du Prestige 17 () Didier Pavy, La France exaspère Bruxelles, Transports Actualités, n° 763, p. 10. 18 () Pour ne citer qu'eux, les rapports du Conseil économique et social et de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'Erika. 19 () D'invention française, Equasis est un système de gestion de données factuelles sur la sécurité des navires, compilant sur Internet les informations produites par des intervenants privés ou institutionnels (administrations maritimes, sociétés de classification ...). Cette banque de données doit permettre de mieux identifier et de contrôler les navires douteux. 20 () Voir l'Annexe 7 : Mesures prises par les Etats membres en vue d'améliorer le contrôle par l'Etat du port. 21 () Voir l'annexe 5, Etat de la transposition des paquets Erika. 22 () La décision-cadre est fondée sur l'article 34 du Traité. 23 () Lettre de M. Romano Prodi du 17 janvier 2003 adressée à la présidence grecque. Cette lettre est reproduite à l'Annexe 8. 24 () Cette lettre est reproduite à l'Annexe 9. 25 () Lettre à M. Costas Simitris, Premier ministre de la Grèce, Président du Conseil européen. 26 () Ce paragraphe dispose que : « Les Etats, agissant par l'intermédiaire de l'organisation internationale compétente ou d'une conférence diplomatique générale, adoptent des règles et normes internationales visant à prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin par les navires(...) ». 27 () Audition de l'American Petroleum Institute par la Commission du Sénat chargée du Commerce, de la Science et des Transports, 9 janvier 2003. 28 () La viscosité cinématique est un facteur nécessaire pour dimensionner les pompes, lors du chargement et du déchargement des navires. Quant à la densité, elle est un facteur indispensable pour déterminer le chargement d'un navire. 29 () MM. Daniel PAUL et Jean-Yves LE DRIAN, Après l'Erika, l'urgence, Rapport n° 2535, Tome I, p. 180. 30 () Voir les Travaux de la Délégation, p. 91. 31 () Libération, Aznar interpellé par la rue sur le « Prestige », 24 février 2003. 32 () Cet article dispose que « La Communauté a pour mission ... de promouvoir dans l'ensemble de la Communauté, un développement harmonieux, équilibré et durable ». 33 () Sondage de l'Institut de sondages CSA publié dans Internet. 34 () Voir l'Annexe 10, Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions, notamment pénales, en cas d'infractions de pollution. 35 () Voir en Annexe 9 les missions de l'US Coast Guard. 36 () En 2001, la part du Japon dans le budget du FIPOL a été de 21 %, contre 8 % pour la France, 5 % pour l'Espagne, 11 % pour l'Italie, 8 % pour les Pays-Bas et 6 % pour la Grande-Bretagne. 37 () Voir l'annexe 10, Motion de la délégation du Sud-Ouest de la Mission de la Mer. 38 () Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur le renforcement de la sécurité maritime suite au naufrage du pétrolier Prestige, Annexe I. 39 () Cette note a été communiquée aux rapporteurs par la Direction du transport maritime, des ports et du littoral. 40 () Source : Direction du transport maritime, des ports et du littoral. 41 () Source : Missions économiques et SGCI. 42 De l'ordre de 22 000 tonnes (à mettre en relation avec les 20 000 tonnes échappées des cuves de l'ERIKA sur un total de 35 000 tonnes) 43 COM (2002) 681 final du 03.12.2002 sur le renforcement de la sécurité maritime suite au naufrage du pétrolier Prestige 44 Conclusions de la Présidence - Document 15917/02 du 29.01.2003 45 Décision du Conseil du 23 octobre 2001 instituant un mécanisme communautaire visant à favoriser une coopération renforcée dans le cadre des interventions de secours relevant de la protection civile (2001/792/CE, Euratom) 46 COM(2003)83 du 05.03.2003 sur la stratégie politique annuelle pour 2004 47 Orientations communautaires sur les aides d'Etat au transport maritime (JOCE C 205/1997) et Communication COM(1993) 66 du 24.02.1993 48 Encadrement communautaire des aides d'Etat pour la protection de l'environnement (JOCE C 37/2001) 49 Règlement (CE) N° 2012/2002 du 11.11.2002 du Conseil instituant le Fonds de solidarité de l'Union européenne 50 L'introduction des domaines proposés reste cependant sujette à l'approbation des comités des programmes et les projets financés doivent faire l'objet d'une sélection au sein des évaluations organisées dans le cadre des appels à proposition 51 Telles que, par exemple, "Leadership 2015" 52 COM (2002) 17 du 23.01.2002 53 COM (2002) 539 du 02.10.2002 54 http://www.helcom.fi/sea/maps2001.pdf. Depuis 1988, ce sont au total 7 216 rejets polluants confirmés provenant de navires qui ont été détectés en mer Baltique par surveillance aérienne. 55 http://www.bonnagreement.org/ 56 http://europa.eu.int/comm/environment/civil/marin/reports_publications/jrc_illicit_study.pdf 57 COM(2001) 139 final du 13 mars 2001, modifié par le COM(2002) 544 final du 30 septembre 2002. 58 Paragraphe 13 bis des conclusions du Conseil concernant la sécurité maritime et la prévention de la pollution du 6 décembre 2002. 59 Déclaration du Conseil «Justice et affaires intérieures» du 19 décembre 2002. 60 Comme proposé par la Commission en mars 2001. Voir note 4. 61 Voir également la communication de la Commission intitulée «Vers une stratégie pour la protection et la conservation du milieu marin», COM(2002) 539 du 2 octobre 2002, dans laquelle la réglementation de la pollution illicite causée par les navires est indiquée comme l'un des objectifs essentiels à court terme. 62 Voir, par exemple, le document MEPC 48/12 de l'OMI. 63 Voir note 4. 64 Il est en particulier fait référence à la mise en place d'un réseau télématique transeuropéen de suivi du trafic maritime (SafeSeaNet) et aux efforts en cours pour harmoniser la politique permettant la poursuite et la condamnation des contrevenants coupables de violations des règles en matière de rejets par les navires qui sont entrepris dans le cadre de la protection de l'environnement de la mer Baltique (HELCOM) et de la mer du Nord (Accord de Bonn). En outre, la recherche financée par la Commission semble indiquer que le marquage des hydrocarbures par leur ADN peut être une méthode très utile pour établir le lien entre des hydrocarbures déversés en mer et un navire particulier. Voir par exemple les documents BLG 7/INF.5 et BLG 6/11 de l'OMI. 65 JO C ... du ..., p. .... 66 JO C ... du ..., p. .... 67 JO C ... du ..., p. .... 68 JO C ... du ..., p. .... 69 À titre de référence, un résumé des règles pertinentes de MARPOL 73/78 concernant les rejets d'hydrocarbures et de substances liquides nocives figure à l'annexe I (Parties I et II). 70 Décision nº 2850/2000/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2000 établissant un cadre communautaire de coopération dans le domaine de la pollution marine accidentelle ou intentionnelle, JO L 332 du 28.12.2000, p. 1. 71 JO L 324 du 29.11.2002, p. 1. 72 JO L 184 du 17.7.1999, p. 23. 73 Comme indiqué à l'article 2, paragraphe 3, l'exception prévue à la règle 11, alinéa b) de l'Annexe I de MARPOL 73/78 ne s'applique pas dans le cadre de la présente directive. Ce point est libellé comme suit: «b) au rejet à la mer d'hydrocarbures ou de mélanges d'hydrocarbures provenant d'une avarie survenue au navire ou à son équipement: i) à condition que toutes les précautions raisonnables aient été prises après l'avarie ou la découverte du rejet pour empêcher ou réduire ce rejet, et ii) sauf si le propriétaire ou le capitaine a agi soit avec l'intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu'un dommage en résulterait probablement; ou» 74 Comme indiqué à l'article 2, paragraphe 3, l'exception prévue à la règle 6, alinéa b), de l'Annexe II de MARPOL 73/78 ne s'applique pas dans le cadre de la présente directive. Ce point est libellé comme suit: «b) au rejet à la mer de substances liquides nocives ou de mélanges contenant de telles substances provenant d'une avarie survenue au navire ou à son équipement: i) à condition que toutes les précautions raisonnables aient été prises après l'avarie ou la découverte du rejet pour empêcher ou réduire ce rejet, et ii) sauf si le propriétaire ou le capitaine a agi soit avec l'intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu'un dommage en résulterait probablement; ou» 75 () Note de la Direction du Transport maritime, des ports et du littoral. 76 () Le budget prévisionnel pour 2003 s'établirait à 7,1 milliards de dollars. |
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