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N°1476

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 mars 2004

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),

sur les comptes rendus de missions sur le projet
de Constitution européenne
,

ET PRÉSENTÉ

par M. Pierre LEQUILLER
et
Mmes Arlette Franco, Elisabeth GUIGOU et Irene THARIN,
MM. Alfred ALMONT, François CALVET, Jacques FLOCH, Daniel GARRIGUE, François GUILLAUME, Michel HERBILLON, Jérôme LAMBERT, Edouard LANDRAIN, Robert LECOU et Didier QUENTIN,

Députés.

TOME I

Allemagne, Belgique , Estonie, Finlande, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume Uni, République Tchèque, Suède.

________________________________________________________________

(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. François Guillaume, Jean-Claude Lefort, secrétaires ; MM. Alfred Almont, François Calvet, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin.

SOMMAIRE

_____

Pages

INTRODUCTION 9

SYNTHESE 13

I. ALLEMAGNE ET POLOGNE : Mission réalisée à Berlin dans le cadre d'une réunion du Triangle de Weimar (28 janvier 2004) 17

A. Position exprimée par la délégation française 18

B. Position exprimée par la délégation allemande 19

C. Position exprimée par la délégation polonaise 20

II. BELGIQUE : Mission de Mme Irène Tharin (les 16 et 17 février 2004) 21

A. Un soutien à l'équilibre général du projet élaboré par la Convention 22

B. Une convergence de vues franco-belge au sein de la Conférence intergouvernementale 23

C. Un regret : l'absence de contrôle parlementaire sur la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) 27

D. La perception du rôle de la France dans l'édification d'un leadership européen 29

III. ESTONIE : Mission de M. François Guillaume (les 11 et 12 février 2004) 31

A. Une position conciliante sur le projet de Constitution 32

B. L'expression de réticences face à l'approfondissement de certaines politiques communes 33

IV. FINLANDE : Mission de M. Daniel Garrigue (les 11 et 12 février 2004) 35

A. Les points sur lesquels la Finlande est ouverte à la discussion 36

B. Les points auxquels les Finlandais sont très attachés 37

C. Un certain flou en matière de politique de défense 38

V. GRECE : Mission de M. Edouard Landrain (les 9 et 10 février 2004) 39

A. La position de la Grèce sur le projet de Constitution : une vision ambitieuse et constructive 40

B. Une attitude ouverte et constructive partagée par les anciens représentants du parlement grec à la Convention 42

VI. HONGRIE : Mission de M. Jérôme Lambert (le 18 février 2004) 47

A. Une approche constructive 47

B. Un consensus sur les principaux points de désaccord 48

C. Une position ouverte sur les autres sujets importants en discussion 49

VII. IRLANDE : Mission de M. Michel Herbillon (les 26 et 27 février 2004) 53

A. Le destin européen de l'Irlande 53

B. L'expression d'une position nationale favorable au maintien des équilibres du projet de Constitution européenne 56

C. L'exercice d'une présidence modeste au service d'un résultat ambitieux 58

VIII. ITALIE : Mission de M. Robert Lecou (le 2 mars 2004) 63

A. Un engagement européen traditionnel qui reste fort 63

B. Un climat politique intérieur peu propice au débat européen 64

C. Un soutien constant au projet de Constitution 65

IX. LETTONIE : Mission de M. Alfred Almont (les 16 et 17 février 2004) 69

A. Des priorités fondées sur le respect de l'égalité entre les Etats membres 70

B. Une position de négociation ouverte 71

X. LUXEMBOURG : Mission de Mme Arlette Franco (le 12 février 2004) 73

A. Un soutien actif à l'adoption du texte issu de la Convention 73

B. Deux exigences principales : le maintien à six du seuil minimal de parlementaires européens et des éclaircissements sur le champ de la majorité qualifiée 75

XI. PAYS-BAS : Mission de M. Jacques Floch (les 17 et 18 février 2004) 81

A. Un contexte difficile marqué par des tensions et des incertitudes 81

B. Les principales positions néerlandaises relatives au projet de Constitution européenne 83

C. Quelles perspectives ? 85

XII. PORTUGAL : Mission de M. François Calvet (le 12 février 2004) 89

A. Un soutien unanime quoique nuancé 90

B. Un dénominateur commun : l'attachement à la souveraineté nationale 91

C. Quelques préoccupations plus nationales 92

XIII. ROYAUME-UNI : Mission du Président Pierre Lequiller et de Mme Elisabeth Guigou (le 1er mars 2004) 95

A. Un contexte plus difficile 96

B. Une attitude ouverte sur les points « durs » 97

C. Les lignes rouges britanniques 98

XIV. REPUBLIQUE TCHEQUE : Mission de M. Didier Quentin (le 12 février 2004) 101

A. Un projet de Constitution soutenu par le gouvernement, mais contesté par l'opposition 102

B. Une approche relativement consensuelle sur les sujets principaux 103

C. Des souhaits précis sur les autres points importants en discussion 104

XV. SUEDE : Mission de M. Edouard Landrain (les 1er et 2 mars 2004) 107

A. Les points de désaccord essentiels 107

B. Parmi les autres points en discussion 108

C. Questions diverses 109

ANNEXES 113

Annexe 1 : Liste des personnes auditionnées 115

Annexe 2 : Tableau comparatif des positions nationales sur le projet de Constitution européenne 121

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

A la suite de l'échec des discussions du Conseil européen de Bruxelles sur la Conférence intergouvernementale, la Délégation pour l'Union européenne a décidé, le 17 décembre dernier, d'envoyer des « missi dominici » auprès de nos partenaires de l'Union, Etats membres et nouveaux adhérents. Une sélection de dix-neuf pays a été établie sur la base de l'état d'avancement des discussions de la CIG.

L'objectif fixé à ces prises de contact a été de défendre auprès de ces pays le projet de Constitution issu de la Convention. Il a été aussi de contribuer au rapprochement des points de vue entre la France et nos partenaires quant au futur texte constitutionnel.

Il s'est ainsi agi au cours des entretiens - qui ont privilégié les contacts parlementaires, en particulier avec les anciens conventionnels - de préciser les points d'accord et d'essayer d'esquisser librement des possibles convergences sur les points encore en discussion, ou qui font l'objet de désaccords.

Parmi les dix-neuf pays sélectionnés, seize ont pu faire l'objet de missions avant le 9 mars, date prévue pour l'interruption des travaux de l'Assemblée nationale (Allemagne, Belgique, Estonie, Finlande, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Royaume-Uni, Suède). Un second rapport sera publié ultérieurement après les missions qu'il est prévu d'accomplir dans les autres pays (Autriche, Danemark, Espagne) dans les semaines qui viennent.

Les comptes-rendus de missions ont été effectués devant la Délégation au cours de ses réunions des 25 février et 3 mars 2004.

Des contacts déjà pris, il ressort que le texte issu de la Convention continue à recevoir un large soutien, même si la focalisation des commentaires sur le principal sujet de désaccord, discuté sous présidence italienne, masque quelque peu d'autres sujets de discussion, sans doute plus importants comme le champ de la majorité qualifiée.

Le tableau ci-après - qui exprime de façon synthétique, pour chaque pays, les positions des interlocuteurs rencontrés lors des missions, pour huit thèmes principaux - reflète un soutien important aux dispositions prévues par la Convention. Mais il montre aussi que, le temps s'écoulant et la dynamique politique créée par le consensus de la Convention s'éloignant progressivement, beaucoup de points de débats risquent, au fil du temps, d'émerger - ou de resurgir.

Il est donc essentiel que les travaux de la CIG puissent aboutir sans tarder. L'Europe a besoin d'une Constitution et les citoyens européens le souhaitent : une récente enquête d'Eurobaromètre, réalisée dans l'Europe à vingt-cinq, montre que 77 % des Européens réclament une Constitution pour l'Europe.

S'il n'était pas possible qu'un accord se dégage sous présidence irlandaise - et si les discussions officielles de la CIG reprennent, il faut que ce soit pour réussir - il est en tout cas essentiel que les négociations aboutissent avant la fin de l'année 2004. Au-delà, il sera plus difficile de maintenir l'influx politique nécessaire à un accord.

C'est l'avenir de l'Europe qui est en jeu. Dans un monde qui change chaque jour et dans lequel nous risquons d'être marginalisés, nous ne pouvons nous permettre de gâcher la chance - peut-être la dernière - qui est encore à notre portée de donner les moyens à l'Europe de poursuivre son chemin, au service des valeurs qui sont les nôtres et de l'influence européenne dans le monde. Dans cet esprit, la Délégation pour l'Union européenne continuera, avec les moyens parlementaires qui sont les siens, à s'efforcer de contribuer à l'émergence d'un accord.

*

* *

Les rapporteurs remercient particulièrement les ambassadeurs de France dans les pays concernés par ces missions, et leurs collaborateurs, pour l'appui efficace qu'ils leur ont apporté.

SYNTHESE

Synthèse des positions exprimées*

· Règles de vote au sein du Conseil

Le vote à la double majorité est admis par une grande partie des Etats membres. Tandis que certains d'entre eux (Allemagne, Belgique, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas) déclarent soutenir les seuils fixés par la Convention (50 % des Etats, 60 % de la population), d'autres (Estonie, Finlande, Grèce, Hongrie, Portugal, République tchèque) disent préférer la parité entre les deux critères, 50-50, ou 60-60. Seule la Pologne, qui souhaite retenir le système de pondération des voix prévu dans le traité de Nice, se déclare nettement opposée à la double majorité (à ce stade, et en attendant de recueillir le point de vue espagnol, après les élections législatives). Plusieurs Etats (Belgique, Italie, Luxembourg) ont suggéré l'idée de majorités « super qualifiées » pour certains domaines (comme, par exemple, pour l'adoption des perspectives financières). Certains (Belgique, Luxembourg) ont estimé que le sujet des règles de vote au sein du Conseil ne devrait pas masquer d'autres questions, tout aussi importantes, sinon davantage (notamment le champ de la majorité qualifiée). Le report de l'entrée en vigueur du système de la double majorité a été évoqué comme une solution de compromis possible (Luxembourg, Royaume-Uni, Suède).

· Champ de la majorité qualifiée

Plusieurs Etats se montrent favorables à une extension du champ de la majorité qualifiée, même au-delà des dispositions du projet de Constitution (notamment pour la PESC : Allemagne, Belgique, Finlande, Grèce, Italie, Luxembourg). Certains expriment des réserves particulières concernant le passage à la majorité qualifiée : notamment pour la fiscalité (Estonie, République tchèque, Irlande, Luxembourg, Royaume-Uni, Suède), les perspectives financières (Hongrie, Pays-Bas, Royaume-Uni), l'harmonisation du droit pénal (Irlande, Pays-Bas, Royaume-Uni) et le domaine social (Suède).

· Composition de la Commission

Tandis que l'Allemagne, la Belgique, l'Irlande, l'Italie et le Luxembourg soutiennent le principe du compromis proposé par la Convention, une majorité s'exprime clairement en faveur du maintien d'un commissaire par Etat membre. La fixation d'une date ultérieure pour une Commission resserrée, pourrait, de l'avis de quelques Etats (Grèce, Hongrie, République tchèque, Suède), constituer une solution de compromis acceptable.

· Référence à l'héritage chrétien

Pour la plupart des pays, la question de l'héritage chrétien ne semble pas constituer un « point dur » des négociations. La Belgique, l'Estonie, la Grèce, la Lettonie et la Suède se sont déclarés opposés à une référence explicite à l'héritage chrétien. La Pologne, mais aussi, plus modérément, le Portugal, y sont attachés.

· Composition du Parlement européen

Plusieurs pays ont dit soutenir une élévation du seuil minimum des députés (Estonie, Finlande, Grèce, Lettonie, Luxembourg, République tchèque).

· Procédures de révision

Quelques pays (Belgique, Grèce, Italie, Luxembourg, Pays-Bas,) se sont déclarés favorables, ou ouverts, à un assouplissement des procédures de révision pour la partie III. Des réticences ont été exprimées dans certains pays vis-à-vis de la « clause passerelle » (Estonie, Hongrie, Royaume-Uni).

· Défense

Soutien général en faveur des avancées proposées par la Constitution, incluant la possibilité d'une coopération structurée (réticences de l'Estonie et de la Hongrie), mais de nombreux pays soulignent l'importance de sa complémentarité par rapport à l'OTAN. La Finlande exprime des réserves à l'égard de la clause de défense mutuelle.

· Procédure budgétaire

Les positions recueillies sont partagées : certains pays, dont l'Estonie, la Finlande, la Hongrie, la Lettonie et le Royaume-Uni, se sont déclarés favorables à l'application de la codécision, tandis que l'Allemagne et l'Italie semblent soutenir plutôt le renforcement du rôle du Parlement européen prévu dans ce domaine par la Convention.

I. ALLEMAGNE ET POLOGNE :
Mission réalisée à Berlin dans le cadre d'une réunion du Triangle de Weimar (28 janvier 2004)

ALLEMAGNE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

82,4

18,26

29

8,4

99

POLOGNE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

38,6

8,55

27

7,8

54

La délégation française était composée du Président Pierre Lequiller, de MM. Christian Philip, Jacques Floch, Pierre Forgues, Daniel Garrigue et Michel Herbillon.

Du côté allemand la rencontre était présidée par M. Matthias Wissmann, président de la commission des affaires de l'Union européenne du Bundestag.

La délégation parlementaire polonaise était conduite par M. Jerzy Czepulkowski ; M. Josef Oleksy, ancien président de la commission de l'intégration européenne de la Diète, nommé ministre de l'intérieur, vice-premier ministre, le 21 janvier 2004, participait également à la réunion.

L'objectif principal de la réunion était de faire un point sur les négociations constitutionnelles.

La réunion a confirmé l'approche commune de la France et de l'Allemagne, en faveur du texte issu des travaux de la Convention, et le refus actuel de la Pologne d'accepter le système de la double majorité.

Le souhait de voir les négociations sur le projet de constitution déboucher dès que possible est apparu partagé par chaque délégation. De même la nécessité que chaque partie « bouge » pour qu'un compromis puisse se dégager semble avoir fait l'objet d'un consensus. L'importance de la collaboration entre les trois parlements dans le domaine européen, et la responsabilité partagée pour faire pression sur les gouvernements, en vue d'un accord, ont été rappelés par de nombreux parlementaires, appartenant à chacune des trois délégations.

Mais sur les points actuels de blocage, et en particulier sur la question cruciale des modalités de vote au Conseil, aucune idée précise de compromis possible n'a été évoquée.

A. Position exprimée par la délégation française

Le Président Pierre Lequiller a notamment souligné la responsabilité importante du « Triangle de Weimar » pour faire avancer l'Europe, l'importance du développement d'une approche politique - au-delà des problèmes techniques - qui soit en particulier à même de donner à l'Union la capacité d'exister sur la scène internationale ; des points d'accord nombreux existent ; il faut faire des propositions de compromis. La France a accepté de perdre sa position de parité avec l'Allemagne au sein du Conseil, maintenue à Nice, pour permettre à l'Europe d'avancer. La question de fond est de savoir quelle Europe nous voulons.

M. Christian Philip a rappelé les avantages importants que comporte le système de la double majorité : permettre une prise de décision plus facile en abaissant sensiblement les seuils de majorité, constituer un système plus compréhensible et transparent, plus stable car ne nécessitant pas de nouvelles négociations à chaque élargissement.

M. Jacques Floch a estimé que l'important était la capacité de décider et non la capacité de bloquer. Il a souligné que la Constitution n'instituait pas un Etat fédéral.

M. Pierre Forgues a insisté sur la responsabilité qu'ont les parlementaires de faire librement des propositions pour tenter de débloquer la situation.

M. Daniel Garrigue a noté que la question des règles de majorité devait être relativisée, dans la mesure notamment où la formation des majorités variait suivant les sujets. Il a souligné qu'à chaque élargissement, la France avait perdu de son poids relatif au sein de l'Union. Il a estimé qu'un échec du processus constitutionnel ouvrirait la voie à un développement des coopérations renforcées.

M. Michel Herbillon a évoqué les progrès réalisés au cours des derniers mois dans le domaine de la défense européenne. Il a considéré que la question de la Constitution était celle du niveau de l'ambition européenne. Il s'est dit « optimiste de volonté ».

B. Position exprimée par la délégation allemande

Le Président Matthias Wissmann (CDU-CSU) a rappelé que pour l'Allemagne, le texte de la Convention constituait un équilibre satisfaisant. Il a souligné que son pays était très fermement attaché à maintenir la proposition de « double majorité » pour les décisions du Conseil. Il a noté que l'attente des citoyens européens était forte en ce qui concerne la Constitution et qu'il fallait donc aboutir sans tarder. Il a estimé que la formation de « groupes pionniers » n'était pas prioritaire à ce stade. Il a considéré que la position polonaise actuelle sur la Constitution avait créé une certaine amertume.

M. Peter Altmaier (CDU-CSU) a jugé qu'il serait opportun de tester le système de « double majorité ». Il a souligné que l'important était de favoriser un climat de confiance et la capacité à faire des compromis. Il a considéré que la pondération des voix n'avait jamais conditionné directement la prise de décision au niveau de l'Union.

Mme Anna Lührmann (Verts) a rappelé qu'avec le système de double majorité, l'Allemagne avait aussi accepté de perdre certaines capacité de blocage, notamment celle dont dispose jusqu'à présent le groupe des contributeurs nets.

Mme Sabine Leutheusser-Schnarrenberger (FDP) a noté que le Bundestag n'avait ratifié le traité de Nice que pour permettre l'élargissement.

M. Axel Schäfer (SPD) a considéré que le principe de la double majorité n'était pas négociable, mais que des variations à la marge des seuils de majorité pouvaient se discuter.

C. Position exprimée par la délégation polonaise

M. Josef Oleksy s'est exprimé en faveur d'une Europe politiquement forte, qui ne soit pas qu'un marché économique. Il a souhaité que la Constitution puisse être adoptée avant les élections européennes. Il a insisté sur la responsabilité des parlements nationaux et a souligné l'importance qui s'attache au développement d'un climat de confiance.

M. Jerzy Cezpulkowski, président de la délégation parlementaire polonaise, a estimé que la plupart des partenaires étaient d'accord pour constater le besoin d'une Constitution. L'Europe sera plus complexe à vingt cinq. Pour qu'un compromis soit possible, il faut que chacun accepte de bouger un peu. Il faut que les parlementaires agissent dans ce sens vis-à-vis de leurs gouvernements.

M. Janusz Lewandowski a noté qu'il fallait tenir compte, pour comprendre la position polonaise, de la souveraineté encore nouvelle de son pays. Il a estimé que la Pologne n'était pas réellement préparée à une négociation constitutionnelle au niveau européen. Il a considéré par ailleurs que d'autres facteurs avaient joué un rôle dans la position de la Pologne sur le projet de Constitution, comme la question irakienne. Il a jugé que l'Europe avait besoin d'une Constitution et qu'elle devait se développer sur un plan politique. Il a enfin souligné que la faiblesse politique interne du gouvernement polonais jouait un rôle important quant à sa position de négociation.

M. Jan Sztwiertnia a estimé qu'il convenait de tester le système de Nice avant d'envisager de le modifier.

M. Marek Kotinowski a considéré qu'il n'était pas de bonne méthode de changer les règles du jeu institutionnel européen, décidées à Nice, qui ont constitué la toile de fond de l'élargissement. Il a appelé de ses vœux une Europe plus concrète, plus proche des citoyens.

II. BELGIQUE :
Mission de Mme Irène Tharin (les 16 et 17 février 2004)

BELGIQUE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

10,3

2,28

12

3,5

24

La mission effectuée le 16 février a permis au rapporteur de rencontrer trois éminentes personnalités du parlement belge :

- Mme Marie Nagy, membre du parti « Ecolo », sénatrice devenue députée, secrétaire générale du groupe de réflexion des conventionnels belges, ancienne suppléante à la Convention de M. Elio di Rupo, sénateur titulaire ;

- Mme Anne-Marie Neyts-Uyttebroeck, membre du parti VLD libéral flamand du Premier ministre, M. Guy Verhofstadt, députée, Présidente de la commission des Relations extérieures, ancienne ministre adjointe auprès du ministre des affaires étrangères, M. Louis Michel ;

- M. Philippe Mahoux, Président du groupe socialiste au Sénat, Président du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes.

Ces entretiens ont permis de prendre la mesure du double consensus qui existe sur le projet de Constitution européenne issu des travaux de la Convention, d'une part entre l'ensemble des forces politiques belges (à l'exception du parti d'extrême droite Vlaams Blok), d'autre part entre la Belgique et la France.

A. Un soutien à l'équilibre général du projet élaboré par la Convention

Il convient d'abord de souligner qu'une telle identité de vues n'allait pas de soi il y a quelques années et que la convergence de la Belgique et de la France sur des points essentiels de la réforme constitutionnelle s'est opérée par une évolution des positions des deux pays.

Pour simplifier, du point de vue belge, la France est apparue moins souverainiste qu'autrefois, en approuvant ce qui pouvait renforcer les institutions communautaires, en particulier : la disparition des trois piliers, l'attribution de la personnalité juridique à l'Union européenne, le renforcement de la Commission et de son Président, l'extension de la codécision du Parlement européen et surtout l'extension du champ des domaines passant de l'unanimité à la majorité qualifiée.

Du point de vue français, la Belgique, Etat fédéral elle-même, est apparue moins fédéraliste en approuvant ce qui pouvait conforter le rôle des Etats membres dans l'Union, en particulier : la création d'une présidence du Conseil européen stable, la création d'un ministre des affaires étrangères à « double casquette » mais dépendant du Conseil pour la PESC, le développement d'une Europe de la défense plus autonome, tout en restant complémentaire et non concurrente de l'OTAN.

Il faut ensuite rappeler que la Belgique a joué un rôle déterminant d'impulsion, d'innovation et de modération pour trouver un compromis équilibré entre des ambitions disparates et assurer le succès final de la Convention.

Impulsion d'abord, sous la présidence belge de l'Union, au cours de laquelle M. Guy Verhofstadt faisait adopter par le Conseil européen de Laeken, le 15 décembre 2001, une déclaration sur l'avenir de l'Union européenne qui mettait clairement les Etats membres devant leurs responsabilités et lançait la procédure nouvelle de la Convention.

Innovation ensuite, avec le Vice-Président de la Convention, M. Jean-Luc Dehaene, dont la présidence remarquable du groupe de travail action extérieure a permis, avec les propositions du groupe de défense présidé par M. Barnier, d'aboutir à un véritable saut qualitatif en matière de PESC et de défense.

Modération enfin, grâce aux conventionnels de la Belgique, mais aussi des Pays-Bas et du Luxembourg qui, dans la difficile période du printemps 2003, sont parvenus à convaincre plusieurs représentants des moyens et petits Etats d'accepter un compromis sur les aspects que ceux-ci jugeaient trop intergouvernementaux et pas assez communautaires, comme la présidence stable du Conseil européen.

Il faut enfin souligner la légitimité particulière de la Belgique et du Bénélux à intervenir dans le débat qui s'est développé sur la place des petits, moyens et grands Etats dans l'Union élargie. Ces membres fondateurs savent d'expérience que la construction européenne ne s'est pas faite sur un clivage entre petits et grands Etats.

Il est à cet égard tout à fait remarquable que les pays du Bénélux n'aient pas signé la lettre de soutien à la position américaine sur l'Irak, en février 2003, pour ne pas fragiliser les institutions de l'Union européenne.

Pour autant, la Belgique n'a pas hésité à se prononcer avec la France, l'Allemagne et le Luxembourg, en faveur de la réalisation rapide et concrète d'une Europe de la défense plus autonome, lors de la réunion du 29 avril 2003, tenue au plus fort de la crise irakienne. Les quatre pays ont ainsi signifié que l'ambition n'était pas une question de taille, mais de volonté et de vision partagée d'un avenir commun.

B. Une convergence de vues franco-belge au sein de la Conférence intergouvernementale

Le consensus belge sur la réforme de l'Union européenne explique qu'il y ait eu dans l'ensemble peu de débats sur ce sujet au parlement comme dans les médias. Cependant, le Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes a tenu deux réunions, les 3 décembre et 17 décembre 2003, au cours desquelles les parlementaires ont eu un échange de vues avec le Premier ministre sur la position de la Belgique avant et après la réunion de la Conférence intergouvernementale (CIG) des 12 et 13 décembre.

Il convient de rappeler que le Comité d'avis fédéral comprend dix députés, dix sénateurs et dix députés européens, désignés à la proportionnelle des groupes. Il se réunit avant chaque Conseil européen, il a servi d'interface entre le Parlement et la Convention, il envoie des délégués à la COSAC (Conférence des Organes spécialisés dans les affaires communautaires) et il procède à un examen régulier de la transposition des textes communautaires avec le Secrétaire d'Etat aux affaires européennes.

Cette formule de coordination institutionnalisée entre les trois instances de représentation parlementaire permet un échange constant d'informations dans les deux sens et présentera un intérêt accru avec le développement de la codécision législative du Parlement européen et du Conseil et la création d'une procédure d'alerte précoce sur la subsidiarité.

M. Verhofstadt a déclaré devant le Comité d'avis fédéral qu'en cas de remise en cause du projet de la Convention, le vrai point de blocage pour la Belgique n'était pas le mode de calcul de la majorité qualifiée, mais l'extension du champ de la majorité qualifiée à de nouveaux domaines.

Cette position a été confirmée aussi bien lors des entretiens avec les parlementaires belges que par M. Jean-Luc Dehaene devant la commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen, réunie les 16 et 17 février dernier pour faire un état des lieux de la Conférence intergouvernementale. Celui-ci a déclaré qu'« il lui semblait beaucoup plus important d'avoir des extensions de votes à la majorité qualifiée (...) plutôt que de perdre son énergie sur cette question de prestige national qu'est devenu le système de vote au Conseil qui gagnerait effectivement à être plus simple, mais ce n'est pas l'essentiel ».

Mme Neyts considère qu'il y avait une possibilité de s'accorder avant la CIG de Bruxelles sur un critère de population entre 60 % et 70 % par rapport aux critères de Nice, correspondant à 72,27 % des voix pondérées et 62 % de la population. La solution des majorités superqualifiées, proposée par le Premier ministre belge pour les perspectives financières (60 % des Etats et 66 % de la population), a peut-être été trop tôt abandonnée. Les partisans du vote à l'unanimité devraient prendre conscience que la majorité qualifiée ne menace pas vraiment les Etats membres d'une mise en minorité parce qu'on vote très rarement au Conseil, mais qu'elle facilite la décision en incitant tous les Etats à négocier.

La Belgique est en tous cas favorable à une généralisation de la majorité qualifiée à toutes les politiques communes de l'Union et à une limitation de l'unanimité aux questions de principe constitutionnelles les plus importantes.

Elle a donc eu une petite divergence avec la France sur le maintien de l'unanimité pour la conclusion d'accords avec des pays tiers en cas de menace contre la diversité culturelle, que notre pays a obtenu d'inscrire dans le projet de la Convention.

Elle est en revanche totalement d'accord avec la France, d'une part, pour s'opposer aux reculs proposés par la présidence italienne en matières pénale, sociale, fiscale et de perspectives financières, d'autre part, pour approuver l'extension de la majorité qualifiée en matière de PESC proposée par la présidence italienne.

Elle défend également la même position que la France pour s'opposer au recul proposé par la présidence italienne sur la clause passerelle introduite par la Convention. L'opposition d'un parlement national ne doit pas empêcher le Conseil européen de décider, à l'unanimité, de faire passer un domaine de l'unanimité à la majorité qualifiée.

La Belgique considère que les propositions de la Convention et de la présidence italienne pour assouplir la procédure de révision constitutionnelle ne suffiront pas à lever les blocages inévitables résultant du maintien de la double unanimité du Conseil européen et des Etats membres dans une Union de vingt-cinq membres et plus. La Belgique a une expérience particulière de la complexité des ratifications nationales dans un Etat fédéral, puisque sept assemblées parlementaires doivent ratifier et que, si l'une d'entre elles refuse, l'Etat belge ne peut ratifier. Elle se prononce donc en faveur de l'unanimité pour la première et la deuxième parties du traité (principes fondamentaux et Charte) et d'une majorité superqualifiée pour la troisième partie (les politiques). Les pays qui refuseraient une évolution vers une union plus intégrée, à souveraineté partagée, pourront désormais utiliser le nouveau droit de retrait, car l'Union est plus qu'un club de coopération intergouvernementale.

Dans le domaine des coopérations renforcées et notamment des coopérations structurées en matière de défense, la Belgique est en faveur de critères suffisamment souples pour qu'elles ne soient pas exclusives, mais ouvertes. Elle approuve les fortes avancées de la Convention et les compromis trouvés par la présidence italienne en matière de défense. Mme Neyts a résumé la position belge sur ce chapitre en indiquant que son pays avait une position maximaliste mais aussi réaliste et voulait aller aussi loin qu'on le peut dans le contexte actuel, en affirmant la complémentarité de la défense européenne par rapport à l'OTAN, en impliquant totalement le Royaume-Uni et en rassurant les nouveaux adhérents mais aussi les neutres. Mme Nagy a déclaré que les Etats membres à la recherche d'un poids international pays par pays seraient désormais dans l'erreur et que l'Union n'a pas à concurrencer les Etats-Unis mais à jouer un rôle différent en négociant d'autres rapports de stabilité dans son voisinage et dans le monde.

La Belgique considère que le traité doit aller au-delà du renforcement de la gouvernance économique et sociale proposé par la Convention parce que l'euro et le Pacte de stabilité doivent être complétés par une vraie capacité de décision en matière de politique économique européenne entre les membres de l'eurogroupe, même s'il n'existe pas de consensus réel en Belgique sur le contenu d'une telle politique.

Il existe, en revanche, un vrai consensus belge en matière sociale. La Belgique soutient, comme la France, les propositions de la présidence italienne concernant la clause sociale horizontale, défendue par la Belgique à la Convention, ainsi que la reconnaissance du droit des Etats membres d'établir, de mettre en œuvre et de financer des services d'intérêt économique général. M. Mahoux regrette que le droit d'association et le droit de grève restent exclus des compétences de l'Union européenne.

La mention de l'héritage chrétien dans le préambule de la Constitution divise la Belgique, entre les sociaux-chrétiens, qui ont longtemps exercé le pouvoir et sont dans l'opposition, et les libéraux, les socialistes et les écologistes. Une majorité parlementaire forte se prononce, comme la France, contre cette mention et pour la formule de la Convention sur « les héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe ». Celle-ci représente déjà un compromis par rapport à la Charte sur les droits fondamentaux, qui mentionnait le spirituel et non le religieux. En revanche, M. Mahoux juge l'article 1-51, selon lequel l'Union maintient le dialogue ouvert avec les Eglises et reconnaît leur identité et leur contribution spécifique, superflu ou dangereux. Il est superflu par rapport à l'article 1-47 sur les relations entre les institutions communautaires et les organisations de la société civile qui comprennent les mouvements religieux. Il est même dangereux dans son troisième alinéa relatif aux contacts réguliers avec les Eglises, en créant une obligation de consulter présentant un risque d'ingérence, comme jadis, du pouvoir politique sur les cultes ou, plus actuel, des cultes ou des courants philosophiques sur le pouvoir politique.

En ce qui concerne l'autre désaccord essentiel entre les membres de la CIG sur la composition de la Commission, Mme Neyts s'est distinguée du Premier ministre, qui reste favorable à une Commission resserrée, et s'est prononcée en faveur d'un commissaire par Etat membre, au nom du réalisme montrant qu'il n'y a pas de majorité alternative pour une autre formule.

Enfin, tout en se déclarant très favorable au renforcement des institutions communautaires, M. Mahoux accepterait la demande de la France sur la procédure budgétaire annuelle tendant à ne pas donner le dernier mot au Parlement européen, comme le propose la Convention, et à remettre le Conseil et le Parlement européen sur un pied d'égalité.

C. Un regret : l'absence de contrôle parlementaire sur la politique européenne de sécurité et de défense (PESD)

M. Armand De Decker, Président du Sénat de Belgique et Président de l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale (UEO), a souligné, lors de son audition par la Délégation pour les affaires européennes du Sénat français, le 14 janvier 2004, l'anomalie constituée par l'absence de tout contrôle parlementaire sur la politique européenne de sécurité et de défense de l'Union européenne (PESD).

En effet, l'Assemblée parlementaire de l'UEO ne contrôle plus que la clause de défense mutuelle de l'UEO depuis que l'Union européenne a repris à cette organisation les missions de gestion de crise. Or, le projet de la Convention n'a pas prévu de contrôle parlementaire sur la PESD susceptible de remplacer celui de l'UEO, alors qu'il s'efforce de créer au sein de l'Union européenne une clause de défense mutuelle analogue à celle de l'UEO, conduisant à terme à la disparition de l'UEO et de son assemblée.

Selon M. De Decker, les parlements nationaux doivent être impliqués dans le contrôle de la PESD parce que, d'une part, ils votent les budgets de défense, décident de l'envoi des troupes, vont porter des messages de réconfort aux familles qui ont perdu un soldat, et que, d'autre part, le Parlement européen n'a ni la légitimité ni les compétences pour contrôler une politique qui demeurera largement intergouvernementale encore longtemps.

Mme Neyts considère que M. De Decker a raison de critiquer l'absence de contrôle parlementaire sur la PESD, mais que l'Assemblée parlementaire de l'UEO n'exerce pas un vrai contrôle. L'efficacité du contrôle en ces matières varie selon les traditions nationales des Etats membres, inclinant plutôt vers une intervention parlementaire active dans les pays du Nord ou une reconnaissance du privilège de l'exécutif dans les pays du Sud. Des parlements nationaux ne veulent en aucun cas confier cette compétence au Parlement européen, mais la militarisation de l'Union européenne, encore inconcevable il y a dix ans, pose désormais des questions pratiques et non plus académiques sur les conditions de déclenchement d'une opération et il n'est pas certain que les parlements nationaux en aient une claire vision.

M. Mahoux a rappelé que la Convention avait écarté la création d'un Congrès réunissant des représentants des parlements nationaux et du Parlement européen pour ne pas accroître la complexité institutionnelle et ne pas revenir à la coopération intergouvernementale. Le renforcement du rôle de parlements nationaux, grâce à la création d'une procédure d'alerte précoce pour la subsidiarité et à l'accroissement de moyens de la COSAC, lui a paru suffisant. En revanche, il ne verrait aucun inconvénient à confier le contrôle de la politique de sécurité et de défense au Parlement européen, tout en reconnaissant que ce contrôle ne relevait pas de sa compétence dans les circonstances actuelles.

Il faudra désormais beaucoup d'abnégation aux gouvernements, en CIG, pour qu'ils s'imposent à eux-mêmes un contrôle parlementaire de la PESD que la Convention, composée en majorité de parlementaires, n'a pas traité, après le rejet sans appel de la formule pourtant très souple et innovante du Congrès.

D. La perception du rôle de la France dans l'édification d'un leadership européen

Le message politique le plus important adressé en conclusion des entretiens concerne la relation de la France avec les autres Etats membres dans l'édification d'un leadership européen.

Le message final de Mme Nagy est en effet que la France a été très présente à la Convention et y a joué un rôle très positif reconnu par tous et notamment par la Belgique, mais qu'elle gagnerait à avoir une diplomatie amicale et plus empathique à l'égard des nouveaux adhérents, comme l'ont si bien pratiqué les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Les nouveaux adhérents ont en effet plus de fondements européens qu'on ne le croit.

Mme Neyts a également souligné la nécessité de reconnaître aux nouveaux membres les mêmes droits qu'aux anciens et d'éviter les commentaires inutilement méprisants à l'encontre de la Pologne lors du débat sur la majorité qualifiée. Son message final est que la multiplication des rencontres à deux ou trois sur une politique de l'Union ne contribue pas à la sérénité.

Notre pays doit être d'autant plus attentif à ce signal amical qu'il émane de parlementaires d'un Etat membre fondateur partageant notre vision ambitieuse de l'avenir de l'Europe. Dans un conseil de famille, les membres les plus importants ne peuvent exercer leur influence sur les autres que dans le respect de leurs droits et dans un dialogue permanent avec eux. Les trois grands de l'Union élargie ont une légitimité incontestable en tant que source de proposition pour entraîner cet ensemble de vingt-cinq Etats, à condition de ne pas garder l'exclusivité des initiatives et de ne pas se transformer en directoire imposant ses vues aux autres.

L'édification d'un leadership supranational dans une Union d'Etats à droits égaux et à ambitions et capacités variables va devenir une question politique majeure. La solution dépendra plus des pratiques de consultation et de concertation qui seront mises en œuvre par les dirigeants européens que des dispositifs du traité constitutionnel.

III. ESTONIE :
Mission de M. François Guillaume (les 11 et 12 février 2004)

ESTONIE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

1,3

0,29

4

1,2

6

Le rapporteur s'est rendu à Tallinn les 11 et 12 février pour y rencontrer les représentants du parlement estonien monocaméral, le Riigikogu, à la Convention, et faire le point avec eux sur les perspectives de la Conférence intergouvernementale.

Il a ainsi pu s'entretenir avec M. Toomas Savi, premier vice-président du Riigikogu et observateur au Parlement européen (parti de la Réforme) ; M. Marko Mihkelson, président de la commission des affaires étrangères du Riigikogu (parti Respublica) ; M. Rein Lang, président de la commission des affaires européennes du Riigikogu, membre titulaire de la Convention, et futur ministre des affaires étrangères (parti de la Réforme) ; M. Tunne Kelam, président du parti Pro Patria, membre titulaire de la Convention, M. Sim Kallas, ancien Premier ministre, nouveau commissaire européen désigné par l'Estonie (parti de la Réforme) ; M. Urmas Reinsalu, président de la commission des lois du Riigikogu et membre suppléant de la Convention (parti Respublica) ; ainsi qu'avec des parlementaires présidant les groupes du parti du Centre et du parti du Peuple.

Ces entretiens avec les représentants des différentes sensibilités politiques du pays ont fait apparaître une large convergence des points de vue exprimés sur les affaires européennes et sur le projet de Constitution en particulier.

A. Une position conciliante sur le projet de Constitution

1) Les propos des responsables politiques estoniens ont mis en valeur leur philosophie très libérale et leurs réticences à l'égard de l'approfondissement de certaines politiques communes. Toutefois, malgré une vision de l'Europe assez différente de la nôtre, les sujets concrets de divergence sur les dispositions du projet de Constitution sont apparus assez peu nombreux et la volonté des Estoniens de contribuer à l'adoption du texte avant les élections européennes, voire avant le 1er mai, a été unanimement soulignée. Leur crainte est qu'un retard dans l'adoption de la Constitution ne favorise un chantage des grands Etats et des actuels Etats membres lors de l'adoption des nouvelles perspectives financières fin 2004-début 2005.

2) L'Estonie, tout en reconnaissant que les commissaires européens ne représentent pas les Etats, tient absolument à avoir « son » commissaire. Peu importe le nombre final de commissaires, même dans une Europe à 27 ou à 28. Il s'agit d'une question de principe, dont la portée symbolique est forte, les Estoniens ne cessant de rappeler leur attachement à l'égalité des Etats membres de l'Union européenne et leur refus d'une Europe à deux vitesses.

Dans ce contexte, les Estoniens ne souhaitent pas s'engager sur une date à partir de laquelle le nombre de commissaires diminuerait et ne manifestent pas d'hostilité particulière au maintien de deux commissaires pour les grands Etats.

3) Les parlementaires estoniens sont très réticents à l'égard de la clause passerelle, dans le mesure où leur régime politique est un régime parlementaire dans lequel le Riigikogu détient l'essentiel des pouvoirs. Ils ne veulent pas cautionner une disposition qui permettrait de passer de l'unanimité à la majorité qualifiée dans certains domaines, même avec l'accord unanime des gouvernements des Etats membres.

4) L'Estonie souhaite le relèvement du plancher de 4 à 5 pour lui permettre d'avoir 6 parlementaires européens. Le respect des engagements pris à Nice est mis en avant. La véritable explication de cette revendication tient au fait qu'il y a 6 partis politiques d'un poids assez semblable dans le pays, et que cela permettrait à chacun d'eux d'avoir son représentant au Parlement européen.

5) Les modalités de vote à la majorité qualifiée laissent les parlementaires estoniens plus indifférents que le gouvernement. Ils sont prêts à se rallier à une prise en compte des deux critères (nombre d'Etats membres et population) selon la règle 50/60, alors que leur gouvernement préférerait une parité entre les deux critères.

6) Ils ont manifestement du mal à accepter la création du président du Conseil européen et du ministre des affaires étrangères, dans la mesure où ils sont hostiles à toute évolution vers un pouvoir trop fédéral, mais ils n'en feraient pas un point de blocage.

7) Comme la France, les parlementaires estoniens ne souhaitent pas que, dans la procédure budgétaire, le dernier mot puisse revenir au Parlement européen.

8) Comme la France, ils ne sont pas non plus favorables à une référence trop marquée à l'héritage chrétien, et considèrent la formule retenue par la Convention comme suffisante.

B. L'expression de réticences face à l'approfondissement de certaines politiques communes

- La politique commune de défense ne suscite pas d'hostilité de principe, si elle n'est pas conçue comme un contrepoids à l'influence américaine, mais comme un complément indispensable de l'OTAN.

- Les parlementaires estoniens sont apparus comme très défavorables à la PAC et peu intéressés par le développement rural et l'aménagement du territoire. Cela tient probablement à leur mode d'élection, mais également à leur méconnaissance des réalités. Ils semblent notamment attachés à des idées ultra libérales un peu naïves, en ignorant parfaitement les aides massives du gouvernement américain à son agriculture.

- Les Estoniens sont hostiles à l'Europe sociale et au passage à la majorité qualifiée pour la fiscalité. Ils souhaitent conserver leurs avantages concurrentiels dans ces deux domaines. L'Estonie a aujourd'hui un taux de croissance du PIB de 7 % par an, un niveau de vie encore faible mais très sensiblement supérieur à celui des deux autres Etats baltes, et son objectif est de rattraper le plus rapidement possible son voisin, modèle et partenaire, la Finlande.

- L'Estonie souhaite adhérer très rapidement à l'euro et met en avant la nécessité de respecter strictement la rigueur budgétaire. On peut d'ailleurs noter que c'est l'un des 6 Etats signataires de la lettre conjointe du 16 février adressée au Premier ministre irlandais et demandant une application non discriminatoire du Pacte de stabilité.

*

* *

En conclusion, l'Estonie semble disposée à accepter un compromis, quitte à faire des concessions sur certains points sensibles mais non cruciaux, à la condition d'obtenir symboliquement un commissaire, quel que soit le nombre d'Etats membres dans l'Union européenne. Les parlementaires estoniens, dont le pays a été occupé de 1940 à 1991, en font une question de principe à la portée hautement symbolique.

Ils ont en outre unanimement insisté sur l'intérêt des échanges entre parlementaires et accepté avec beaucoup de joie l'invitation de notre Délégation pour l'Union européenne le 5 mai prochain à Paris.

*

* *

Lors de la réunion de la Délégation du 25 février 2004, M. André Schneider a rappelé qu'il avait pu se familiariser avec les positions politiques estoniennes en se rendant deux fois à Tallinn, à l'occasion de son travail de rapporteur sur l'adhésion et d'un déplacement de Mme la ministre Noëlle Lenoir. A leur tour, les parlementaires ont accueilli le Président de la République estonien au Palais-Bourbon et les observateurs estoniens au Parlement européen à Strasbourg. Ses contacts lui ont fait découvrir un pays très organisé et très structuré qui saura faire valoir ses droits dans la construction européenne.

IV. FINLANDE :
Mission de M. Daniel Garrigue (les 11 et 12 février 2004)

FINLANDE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

5,2

1,15

7

2

14

Depuis son adhésion à l'Union européenne en 1995, la Finlande a fait preuve, sous l'impulsion de son Premier ministre (1996-2003) M. Lipponen, d'un fort volontarisme européen.

Elle se distingue en cela de ses voisins nordiques, qui ont refusé l'adhésion (Norvège) ou l'entrée dans la zone euro (Suède, Danemark).

On peut par ailleurs noter que deux finlandais envisagent d'être candidats pour la présidence de la future Commission européenne : M. Lipponen (PSE) et M. Niinistö (PPE-DE).

Les élections du printemps 2003 ont conduit au gouvernement une nouvelle coalition, associant le parti du centre (ex agrarien), dont est issu le nouveau Premier ministre M. Vanhanen, et le parti social démocrate, auquel appartient le ministre des affaires étrangères, qui était déjà en poste sous le précédent gouvernement.

Ce nouveau gouvernement semble nettement moins favorable au développement de la construction européenne, dans laquelle il voit surtout une zone économique.

Les trois parlementaires rencontrés au cours de cette mission ne sont pas forcément représentatifs de la nouvelle ligne gouvernementale.

Deux d'entre eux sont membres du parti conservateur, qui est dans l'opposition (M. Jari Vilen, conventionnel depuis mai 2003, ancien ministre des affaires européennes ; M. Ville Itälä, président de la « Grande commission », chargée des questions européennes dans un régime parlementaire monocaméral).

Le troisième, M. Kimmo Kiljunen, conventionnel, appartient au même parti que le ministre des affaires étrangères - le PSD - mais a une plus grande sensibilité européenne.

En fait, le clivage européen n'oppose pas les partis entre eux, mais intervient en leur sein même.

Toutefois, s'agissant des questions relatives à la Constitution européenne, il existe un certain consensus sur les positions de la Finlande. Seul le problème de la défense paraît plus discuté.

A. Les points sur lesquels la Finlande est ouverte à la discussion

· Le calendrier

Si M. Vilen souhaite qu'on puisse trouver un accord avant les élections au Parlement européen, les Finlandais semblent plutôt apprécier le « profil bas » de la présidence irlandaise, qui envisage un accord au cours de la présidence suivante (Pays-Bas).

· Les règles de vote au sein du Conseil

Officiellement, la Finlande est en faveur d'une majorité qualifiée fixée à 50/50 (50 % des Etats membres et 50 % de la population).

Toutefois, ils tiennent essentiellement au maintien de la parité (ce pourrait donc être, par exemple, 60/60).

Le président de la « Grande commission », qui est traditionnellement dans ce pays le chef de l'opposition, serait même prêt à accepter la proposition de la Convention (50/60).

Par ailleurs, les Finlandais sont favorables à l'extension des domaines relevant de la majorité qualifiée.

· L'héritage chrétien

Selon eux, ce n'est pas une question importante et ils n'ont pas, sur ce point, une position stricte.

B. Les points auxquels les Finlandais sont très attachés

· La composition de la Commission

Ils tiennent à ce que chaque Etat membre dispose d'un commissaire de plein exercice.

La proposition visant à n'avoir que 15 commissaires disposant d'un droit de vote, et 10 commissaires sans portefeuille, est qualifiée de la « pire des solutions ».

· Le vote à l'unanimité sur les accords commerciaux touchant au régime social

Le texte de la Convention prévoit une compétence exclusive de l'Union en matière commerciale, et le vote à la majorité est généralisé.

Mais, sur l'initiative de la France, il est prévu le maintien de l'unanimité « lorsque ces accords risquent de porter atteinte à la diversité culturelle et linguistique de l'Europe ».

Les Finlandais tiennent à ce que l'unanimité soit également prévue pour les accords touchant au régime social.

Ils semblent avoir peu apprécié de n'avoir eu connaissance de l'initiative française touchant à la culture qu'à la dernière minute, lorsque l'amendement était déjà rédigé.

C. Un certain flou en matière de politique de défense

En raison de son histoire récente et de son voisinage avec la Russie, la Finlande est très attachée à sa neutralité.

Dès lors, il y a un consensus pour que ce secteur relève du vote à l'unanimité.

En revanche, la clause de défense mutuelle soulève plus de difficultés.

La Finlande n'est pas hostile aux « coopérations structurées » et souligne sa forte participation à diverses opérations militaires en Europe. Elle se demande, néanmoins, si la politique de défense européenne sera crédible par rapport à l'OTAN, tout en ne voulant pas adhérer à cette dernière organisation.

· Autre point évoqué : le budget

La Finlande s'est prononcée en faveur d'un budget communautaire maximum de 1,1 % du PNB (contre 1,27 %). Cette décision a été prise sans débat par le gouvernement mais le parti conservateur (dans l'opposition) n'y semble pas hostile, car elle maintient la discipline budgétaire tout en rendant possible la continuité du financement des fonds structurels.

V. GRECE :
Mission de M. Edouard Landrain (les 9 et 10 février 2004)

GRECE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

11

2,44

12

3,5

24

C'est dans un contexte marqué par une actualité très riche que s'est inscrite la mission du rapporteur en Grèce sur le suivi des travaux de la Conférence intergouvernementale.

La veille, M. Georges Papandréou, le ministre grec des affaires étrangères (qui représentait son gouvernement à la Convention) a été élu à la tête du PASOK, dont il mènera la campagne en vue des élections législatives du 7 mars prochain, en remplacement du Premier ministre Costas Simitis.

Le 10 février, les dirigeants chypriotes se réunissaient à New York, au siège des Nations Unies, avec des représentants de la Grèce, de la Turquie et du Royaume-Uni, afin d'entamer des pourparlers visant à réunifier Chypre avant son adhésion, sur le fondement du plan présenté par le secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan. Ce même jour était également le dernier du parlement grec avant sa dissolution, et la date choisie pour la ratification du traité d'adhésion.

Les deux grandes formations politiques grecques, le PASOK et la Nouvelle Démocratie, soutiennent le projet de la Convention, à quelques nuances près (concernant, en particulier, la référence à l'héritage chrétien), et partagent une vision ambitieuse de l'avenir de l'Europe. Les entretiens du rapporteur avec les anciens représentants du parlement grec à la Convention ont confirmé cette attitude constructive, proche des positions françaises.

A. La position de la Grèce sur le projet de Constitution : une vision ambitieuse et constructive

Le gouvernement grec considère que le projet élaboré par la Convention est remarquablement équilibré, et souhaite son adoption par la Conférence intergouvernementale (CIG) sans modifications importantes. Le projet de Constitution aurait pu être plus ambitieux en termes d'intégration européenne, mais il va aussi loin que la situation politique actuelle le permet. La CIG devrait donc se contenter de clarifier ou de compléter certaines dispositions.

La position de la Grèce est constructive et inspirée par une vision ambitieuse de l'avenir de l'Europe. Au cours de la CIG, Athènes s'est constamment attachée, comme la France, à défendre le texte de la Convention et ses avancées. Lorsqu'elle s'en écarte, c'est au nom de plus d'intégration (majorité qualifiée dans le domaine de la PESC) ou de la défense des « petits pays » (composition de la Commission), mais toujours avec une volonté de compromis.

· Définition de la majorité qualifiée

La Grèce s'est prononcée en faveur de la double majorité simple (50 % des Etats membres, représentant 50 % de la population), mais a dit pouvoir accepter la formule de la Convention en cas d'accord unanime.

· Composition de la Commission européenne

Pour ce qui est de la composition de la Commission, la Grèce a d'abord fait des propositions de compromis (une seconde catégorie de commissaires aurait un droit de vote limité aux secteurs relevant de leur responsabilité), avant de revenir à la position d'un Commissaire avec droit de vote par Etat membre, compte tenu de l'évolution des débats. Le gouvernement hellénique est également très attaché aux prérogatives de la Commission et au renforcement des compétences de son président.

· Ministre des affaires étrangères de l'Union

La Grèce tient à ce que le ministre des affaires étrangères ait toute sa place au sein de la Commission. Elle a proposé d'ajouter, parmi ses missions, le fait de « contribuer à renforcer et développer la solidarité politique mutuelle parmi les Etats membres de l'Union ».

· Seuil minimal de parlementaires européens

Athènes a défendu l'élévation du nombre minimum de députés européens (de quatre à cinq), avec à l'esprit le cas de Chypre.

· Champ d'application de la majorité qualifiée

Le gouvernement grec souhaite l'extension de la majorité qualifiée pour la politique sociale et les questions de « justice et affaires intérieures ». Les dernières propositions de la présidence italienne sur cette question ne la satisfont pas.

En matière de PESC, la Grèce a proposé le passage à la majorité qualifiée dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de la Constitution, avec un droit d'appel au Conseil européen (statuant à l'unanimité) si un Etat membre s'oppose à un vote pour des raisons importantes.

· Défense européenne

La Grèce, comme la France, est favorable aux avancées obtenues à Naples dans le domaine de la défense, en ce qui concerne la clause de défense mutuelle notamment.

· Révision de la Constitution

La Grèce partage la position française sur la nécessité de dispositions plus souples pour la révision de la partie III de la Constitution, relative aux politiques de l'Union. Cette partie pourrait ainsi être révisée par une majorité des 5/6e des Etats membres, sous réserve que la répartition des compétences entre l'Union et les Etats membres ne soit pas affectée.

· Formations et présidence du conseil des ministres

Athènes s'est prononcée, comme la majorité des délégations, pour la suppression du Conseil législatif. Chaque formation du Conseil aurait une fonction législative, publique pour l'adoption de toutes les lois et lois-cadres.

Seul le conseil des affaires étrangères devrait être doté d'une présidence fixe, les autres formations étant présidées selon un système de présidences par équipes (trois Etats membres, pour un an, selon un système de rotation égalitaire).

· Banque centrale européenne

Le gouvernement hellénique propose que le « plein emploi » figure parmi les objectifs de la Banque centrale européenne, au même titre que la stabilité des prix.

· Droit de retrait

La Grèce souhaiterait la suppression du droit de retrait volontaire prévu par le projet (art.59).

B. Une attitude ouverte et constructive partagée par les anciens représentants du parlement grec à la Convention

Le rapporteur a rencontré, au cours de sa mission, les deux anciens conventionnels représentant le parlement grec (Mme Marietta Giannakou(1) et M. Paraskevas Avgerinos(2)), des responsables du ministère des affaires étrangères grec (M. Tsigouris(3) et Mme Koika(4)) et des universitaires (M. Constantine Stephanou(5) et M. Stelios Perrakis(6)).

Les deux anciens conventionnels représentant le parlement grec, Mme Marietta Giannakou et M. Paraskevas Avgerinos, estiment urgent de parvenir à un accord sur le projet de Constitution européenne avant l'élargissement, le 1er mai 2004, et au plus tard avant les élections européennes, sinon l'élan créé par la Convention sera perdu. Il leur semble difficile de faire campagne pour les élections européennes avec une telle incertitude concernant l'avenir de l'Union. Ils souhaitent que les parlementaires nationaux, en collaboration avec la commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen, exercent une pression sur la présidence irlandaise en vue d'un accord.

Ils se sont tous deux déclarés inquiets, en raison du peu d'empressement manifesté par la présidence irlandaise, et surtout de l'attitude du représentant du parlement polonais lors de la réunion des parlementaires européens et des représentants des parlements nationaux du 20 janvier dernier. Le député polonais, M. Pawel Poncyliusz, a en effet rappelé la résolution adoptée par le parlement polonais en octobre 2003 - qui refuse, notamment, de voir réduit le poids octroyé à son pays par le traité de Nice dans la pondération des voix au Conseil - et a exclu tout compromis sur ce point.

Mme Marietta Giannakou a souligné les avancées du projet de Constitution et son équilibre entre l'approche fédérale, qui avait sa faveur, et les préoccupations des exécutifs des Etats membres, qui ont été prises en compte lors de la Convention (ce qui rend difficilement compréhensible l'attitude de certains d'entre eux lors de la CIG). Elle a rappelé la contribution décisive des parlementaires nationaux et européens à l'obtention d'un accord. Sur les points de désaccords les plus importants, elle préconise de reporter, si nécessaire, certaines décisions à 2009 ou au-delà.

M. Paraskevas Avgerinos a confirmé le soutien apporté par la Grèce au projet, mais estime que les désaccords, même s'ils ne portent que sur une faible proportion du texte (5 % environ), restent très importants. Le recours aux coopérations renforcées lui paraît indispensable pour continuer à avancer.

Les positions des deux anciens représentants du parlement grec à la Convention sur les principaux points en discussion à la CIG sont relativement proches, à l'exception de la référence aux valeurs chrétiennes dans le préambule.

· Définition de la majorité qualifiée

Les représentants du parlement grec sont tous deux favorables à la double majorité simple (50 % des Etats, représentant 50 % de la population), mais peuvent accepter la formule de la Convention (50/60).

Mme Giannakou a reconnu qu'il fallait trouver un équilibre entre grands et petits pays, qui ne laisse ni les grands pays faire ce qu'ils veulent, ni les petits imposer leur volonté aux grands. M. Avgerinos s'est déclaré ouvert sur les deux formules (50/50 ou 50/60), mais opposé à ce que le seuil démographique soit augmenté au-delà de 60 %. Avec une minorité de blocage inférieure à 40 % de la population, la prise de décision serait rendue trop difficile et l'Europe pourrait être « prise en otage » par un groupe ayant des positions différentes (l'Espagne, la Pologne et le Royaume-Uni).

· Composition de la Commission

Sur ce point, le soutien au projet de la Convention est moins net. Mme Giannakou estime que chaque Etat membre devrait avoir un commissaire avec droit de vote, parce que tous les citoyens doivent s'identifier et avoir confiance dans la Commission. L'efficacité de la Commission ne serait pas remise en cause : de nombreux Etats membres, y compris parmi les plus petits, ont des gouvernements dont les effectifs sont supérieurs.

M. Avgerinos s'est montré plus ouvert à un compromis entre la nécessité que la Commission soit réduite et efficace, et la volonté que l'égalité des Etats membres soit reflétée dans toutes les institutions. Il considère qu'un effectif de vingt-cinq commissaires n'est pas excessif pour l'instant, mais qu'une réduction sera nécessaire à terme.

· Référence à l'héritage chrétien

M. Avgerinos y est clairement opposé, parce qu'une telle mention serait contraire au caractère multiculturel de l'Europe.

Mme Giannakou a, en revanche, rappelé qu'elle avait présenté une proposition, finalement rejetée par la Convention, se référant à la fois aux civilisations grecque et romaine, aux valeurs chrétiennes et au siècle des Lumières. Il s'agissait, selon elle, d'une référence culturelle, et non religieuse (à la différence de la formule retenue par la Constitution polonaise, qui n'aurait pu être retenue). Mais elle s'est également montrée consciente de l'importance de la laïcité, rappelant qu'elle avait un des rares députés de la Nouvelle Démocratie à accepter la suppression de la mention de la religion sur les cartes d'identité.

*

* *

L'initiative prise par la Délégation semble avoir été très bien accueillie par nos interlocuteurs, qui se sont montrés très favorables à un accord rapide, le plus proche possible du texte de la Convention, et très ouverts au dialogue. Elle contribue, en outre, à un développement des relations interparlementaires particulièrement utile dans la perspective de la mise en place du droit d'alerte précoce prévu par le projet de la Convention.

VI. HONGRIE :
MISSION DE M. JÉRÔME LAMBERT (LE 18 FÉVRIER 2004)

HONGRIE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

10,1

2,24

12

3,5

24

La mission en Hongrie a permis de rencontrer deux représentants du parlement appartenant aux deux principaux partis politiques hongrois, à savoir M. Attila Gruber, membre de la FIDESz (droite, principal parti d'opposition) et Observateur au Parlement européen, et M. Pal Vastagh, membre du MszP (parti socialiste, principale formation de l'actuelle majorité), ancien ministre de la justice (de 1994 à 1998), Président de la commission de la Constitution et de la justice, et représentant du gouvernement hongrois à la Convention sur l'avenir de l'Europe.

Le rapporteur s'est également entretenu avec M. Árpád Gordos, Directeur du Département de l'intégration européenne et des affaires institutionnelles au ministère des affaires étrangères.

A. Une approche constructive

La diplomatie hongroise a adopté, au cours des négociations sur le projet de Constitution européenne, une attitude globalement constructive, fondée sur une stratégie et des objectifs définis dès le 24 septembre 2003 par le gouvernement. Cette stratégie repose sur l'acceptation du principe d'une Constitution européenne, la volonté de ne pas « détricoter » le texte de la Convention - jugé dans son ensemble satisfaisant - et le souhait de faire valoir des intérêts spécifiques - telle que la reconnaissance du droit des minorités - et ceux propres à un « petit pays » - comme l'attribution d'un commissaire par pays et la parité, dans les règles de vote au sein du Conseil, entre la part faite aux Etats et celle faite à l'importance démographique.

Après l'échec de la Conférence intergouvernementale de décembre 2003, la position des autorités hongroises est restée constante. Celles-ci souhaitent que les négociations reprennent sur la base du dernier compromis de la présidence italienne, qui constitue pour elles un progrès par rapport au texte de la Convention. En effet, ce compromis reconnaît le droit des minorités et répond davantage aux demandes hongroises concernant la composition de la Commission et la présidence de l'Union.

La Hongrie affiche aujourd'hui à la fois une grande ouverture et une large souplesse sur les principaux points restant en discussion au sujet du projet de Constitution. La seule question primordiale pour elle, qui constitue une condition absolue, est la reconnaissance du droit des minorités, en raison des importantes minorités hongroises habitant dans les pays limitrophes (environ 3 millions de personnes), en particulier en Roumanie.

Le gouvernement, comme la plupart des partis politiques, est favorable dans l'ensemble à l'adoption rapide d'un projet de Constitution européenne. Pour M. Pal Vastagh, il serait souhaitable de pouvoir se mettre d'accord avant le mois de juin 2004, afin de ne pas risquer un enlisement du processus de négociation. A cet effet, la discussion devrait se concentrer prioritairement sur les points essentiels de désaccord.

B. Un consensus sur les principaux points de désaccord

Sur les points essentiels de désaccord, on observe un consensus des principaux partis politiques hongrois sur le projet de Constitution, à l'exception de la mention de l'héritage chrétien dans le Préambule.

S'agissant des règles de vote au sein du Conseil des ministres, la Hongrie défend le principe d'une double majorité paritaire entre les Etats et la population (60 % des Etats et 60 % de la population). Elle reste néanmoins ouverte à toute autre formule, y compris celle proposée par la Convention (50 % des Etats, 60 % de la population).

Concernant plus précisément la clause dite « passerelle », la Hongrie marque sa préférence pour la définition d'une clause de révision plutôt qu'une règle permettant au Conseil européen d'autoriser, de sa propre initiative et à l'unanimité, le Conseil à statuer dans un nouveau domaine à la majorité qualifiée.

Au sujet de la composition de la Commission, la Hongrie souhaite l'attribution d'un commissaire européen par pays, sans différenciation de statut ou de droit de vote. Elle pourrait néanmoins se montrer favorable à une clause de rendez-vous en 2009 (ou plus tard), au terme de laquelle la Commission aurait une composition réduite, comme l'a proposé la Convention.

S'agissant de la mention de l'héritage chrétien dans le Préambule de la Constitution, les autorités hongroises n'ont pas encore pris de position officielle. Cela étant, dans ce pays où 80 % de la population est chrétienne, plusieurs partis, en particulier le principal parti d'opposition qu'est la FIDESz, sont très attachés à cette mention. Dans ces conditions, le gouvernement (composé à la fois du parti socialiste et de l'Alliance des Démocrates Libres) pourrait très certainement, à la fois pour des raisons de tradition culturelle et de politique intérieure, soutenir un compromis incluant cette référence.

C. Une position ouverte sur les autres sujets importants en discussion

Sur les autres questions importantes en discussion, on observe également un consensus des principales formations politiques.

A propos de l'extension du champ de la majorité qualifiée, les autorités hongroises n'ont pas de position arrêtée. Cette question n'est pas à leurs yeux une priorité. Cela étant, à la veille du Conseil européen de Thessalonique, elles avaient soutenu les propositions suédoises et néerlandaises sur le maintien de la règle de l'unanimité pendant six ans pour le budget communautaire, ainsi que dans les domaines de l'éducation et de la culture. Elles devraient donc vraisemblablement se rallier sans difficulté au compromis final qui pourrait être proposé.

Concernant la procédure budgétaire annuelle, la Hongrie souhaite préserver un équilibre des pouvoirs entre le Parlement européen et le Conseil et a appuyé les propositions françaises en matière budgétaire. En revanche, elle est favorable au maintien du vote à l'unanimité pour la définition du cadre financier pluriannuel.

Au sujet des coopérations renforcées, il convient de rappeler que la Hongrie s'est ralliée au compromis de la présidence italienne. Elle défend la fixation d'un seuil de 50 % des Etats pour leur mise en œuvre. Elle souhaite également que soit prévu un mécanisme de rattrapage permettant aux Etats n'ayant pu rejoindre des coopérations renforcées de le faire ultérieurement. Ces procédures devraient, selon elle, s'appliquer à la politique étrangère et à la défense, y compris dans le cadre des coopérations structurées.

Cela étant, il convient de souligner l'importance accordée par les autorités hongroises à la préservation des bonnes relations avec les Etats-Unis.

La Hongrie, ayant obtenu quatre sièges supplémentaires au Parlement européen (grâce à la redistribution des quotas attribués à la Roumanie et à la Bulgarie) et bénéficiant, au titre du dernier compromis, de vingt-quatre sièges, ne demande pas de modification particulière concernant le nombre de parlementaires européens attribué aux Etats membres.

S'agissant de la présidence du Conseil des ministres, les autorités hongroises souhaitent maintenir, sous une forme ou sous une autre, le principe de rotation de la présidence des différentes formations du Conseil des ministres. Un système de présidence collégiale pourrait, selon elles, être retenu. Quelle que soit la formule adoptée, l'essentiel, pour Budapest, est que le principe d'une « stricte égalité » entre les Etats soit respecté.

*

* *

En conclusion, la Hongrie a adopté, au sujet du projet de Constitution, une position à la fois stable et extrêmement ouverte. Compte tenu de ce que sa demande concernant la reconnaissance du droit des minorités a été satisfaite et de ce que l'actuelle majorité devrait a priori rester en place jusqu'en 2006, ce pays devrait normalement se rallier au compromis qui sera finalement proposé.

VII. IRLANDE :
Mission de M. Michel Herbillon (les 26 et 27 février 2004)

IRLANDE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

3,8

0,84

7

2

13

La mission du rapporteur s'est déroulée les 26 et 27 février 2004, à un mois du Conseil européen de Bruxelles (25 et 26 mars 2004) au cours duquel la présidence irlandaise doit présenter un rapport d'évaluation sur les perspectives d'avancée des travaux de la Conférence intergouvernementale (CIG).

Ce déplacement à Dublin a été l'occasion de nombreux entretiens avec d'anciens représentants du parlement irlandais à la Convention (MM. Bruton, Carey et Gormley) ainsi qu'avec des membres du Comité parlementaire pour les affaires européennes (MM. Quinn et Andrews). Un échange de vues a également eu lieu avec des universitaires de l'Institut des affaires européennes de Dublin (Mme Donoghue) et de l'Institut européen de Dublin de l'Université UCD (M. McAuley)

A. Le destin européen de l'Irlande

1) L'Irlande : un pays transformé par l'Europe

Depuis son adhésion à l'Union européenne, l'Irlande n'est plus tout à fait « une île derrière une île », pour reprendre une expression souvent utilisée pour rappeler tant le caractère insulaire du pays que la domination britannique entre 1172 et 1921. Depuis son adhésion à la CEE en 1973, l'Irlande considère son appartenance à l'Union européenne comme primordiale pour la défense de ses intérêts économiques et politiques.

Depuis trente ans, l'Irlande a très largement bénéficié des politiques communes (PAC et fonds structurels). Alors que le PIB par habitant ne représentait que 59 % de la moyenne européenne en 1973, il atteint aujourd'hui 95 % et le « miracle irlandais » s'est traduit par des taux de croissance records et un dynamisme économique sans comparaison au sein de l'Union européenne.

Il faut d'ailleurs mentionner que de très nombreux responsables politiques et fonctionnaires des futurs pays membres se sont régulièrement rendus en Irlande ces dernières années afin de s'informer sur la façon dont l'Irlande a si bien géré les fonds structurels dont elle a bénéficié.

2) Le choc du traité de Nice

Le vote négatif lors du référendum de ratification du traité de Nice, le 7 juin 2001 (53,87 %) a créé une véritable surprise dans un pays qui a pourtant largement bénéficié de la construction européenne. On a expliqué ce résultat par le très faible taux de participation (30 % de votants) et l'absence de mobilisation des partisans du traité de Nice. A la suite de cet échec, le gouvernement a pris l'initiative de créer, à l'automne 2001, le « Forum national sur l'Europe » pour structurer un débat itinérant dans tout le pays(7). Axée sur la défense des intérêts nationaux de l'Irlande, la campagne pour le second référendum du 19 octobre 2002 s'est concrétisée par une nette victoire du « oui » qui l'a emporté avec 62,89 % des suffrages exprimés. La mobilisation des élites politiques, économiques et syndicales s'est révélée décisive pour parvenir à ce résultat, même si le taux d'abstention est resté élevé, à 50 % des inscrits.

Il est remarquable de souligner que, fort de son succès, le « Forum national sur l'Europe » existe toujours en Irlande ; il représente un outil pédagogique important et permet de maintenir, sur les sujets européens, un dialogue permanent avec la population. Cela est d'autant plus important que la future Constitution européenne devra être soumise à référendum.

3) Une culture politique du consensus et de la proximité

L'Irlande est gouvernée depuis 1997 par une coalition de centre droit (Fianna Fail et Progressive Democrats) dirigée par le Premier ministre (Taoiseach) M. Bertie Ahern. Le Taoiseach a fait du dossier de l'Irlande du Nord sa priorité majeure ; la coopération entre les gouvernements de Dublin et Londres a joué un rôle significatif dans l'obtention de « l'Accord du Vendredi Saint », le 10 avril 1998, qui a été massivement approuvé (à 95 %) par les électeurs de République d'Irlande. Les qualités de négociateurs unanimement reconnues à M. Ahern constituent un atout remarquable dans le contexte actuel des négociations sur le projet de Constitution européenne.

Il ressort des entretiens du rapporteur que la classe politique irlandaise est rassemblée autour d'un objectif commun visant à faire aboutir les négociations actuellement en cours au sein de la Conférence intergouvernementale. Majorité et opposition font taire leurs différences quand l'intérêt européen est en jeu, et tant le Taoiseach que MM. Brian Cowen, ministre des affaires étrangères, et Dick Roche, ministre délégué chargé des affaires européennes, peuvent compter sur le soutien des principaux responsables politiques de leur pays.

Plus généralement, il existe en Irlande une culture politique du dialogue et de la proximité, qui ne se résume pas aux périodes électorales. C'est ainsi que le Premier ministre en exercice pratique régulièrement le porte-à-porte dans sa circonscription, sans pour autant convoquer les médias.

S'agissant du projet de Constitution européenne, les différents interlocuteurs rencontrés par le rapporteur ont souligné la nécessité de populariser les avancées importantes proposées par la Convention : intégration de la Charte des droits fondamentaux, clarification de la répartition des compétences, simplification des instruments et des procédures, renforcement du rôle des parlements nationaux. Un travail d'information et de pédagogie doit d'ores et déjà être entrepris.

B. L'expression d'une position nationale favorable au maintien des équilibres du projet de Constitution européenne

L'Irlande soutient le projet de Constitution européenne. Un consensus existe au sein de la classe politique irlandaise pour estimer que l'équilibre du texte élaboré par la Convention doit être préservé même si, comme ses partenaires, l'Irlande souhaite faire valoir quelques revendications.

1) Garantir le respect de l'égalité entre les Etats membres

Dublin est attaché au principe du respect de l'égalité entre les pays membres de l'Union européenne, ce qui a des conséquences sur les sujets suivants :

a) La composition de la Commission

L'Irlande n'est pas opposée, par principe, à une Commission resserrée, à la condition que ses membres soient désignés sur la base d'une rotation strictement égalitaire afin d'éviter une surreprésentation des « grands » pays au sein du collège des commissaires. Pour autant, les autorités irlandaises ont conscience que la proposition formulée par la Convention n'a que peu de chances d'aboutir (alors même qu'elle prévoit une rotation égalitaire) et que la perspective d'un accord fondé sur le principe d'un commissaire par Etat membre est désormais la plus probable et finalement...la plus souhaitable. Les interlocuteurs rencontrés ont fait part de leur sentiment selon lequel il leur semble nécessaire de ménager une période de transition pour permettre à tous les nouveaux Etats membres de bénéficier d'un commissaire de plein exercice, avant de passer à un format plus réduit.

b) La présidence du Conseil européen et des Conseils des ministres

Les autorités irlandaises ne sont pas enthousiasmées par la création d'un président stable du Conseil européen, mais se rallient à cette proposition par réalisme.

Soucieuse du respect d'un équilibre des responsabilités entre les Etats membres, l'Irlande est favorable à l'instauration de présidences par équipe s'agissant des formations sectorielles du Conseil des ministres.

L'Irlande souhaite enfin des précisions sur la répartition des compétences entre le Ministre des affaires étrangères, le Président du Conseil et le Président de la Commission, afin d'éviter toute concurrence qui pourrait nuire aux intérêts de l'Union.

c) La définition de la règle de la majorité qualifiée

L'Irlande est favorable au principe de double majorité proposé par la Convention, plus simple et plus efficace dans la perspective d'une Europe à vingt-cinq. Un compromis peut être trouvé sur la base d'une modification des seuils ou d'un passage progressif à la règle proposée par la Convention.

d) Un recours encadré aux coopérations renforcées

L'Irlande n'est pas opposée au principe des coopérations renforcées (ou « groupes pionniers »), pour autant qu'elles s'inscrivent dans le cadre des traités. En revanche, les initiatives isolées qui pourraient conduire à l'instauration d'un « directoire » sont perçues comme portant atteinte à l'unité de la construction européenne.

En revanche, une intégration européenne plus importante dans des domaines tels que la politique étrangère ou la défense est acceptée par l'Irlande car son statut d'Etat neutre n'est pas remis en question. A cet égard, les progrès récemment enregistrés dans le domaine de la défense n'ont pas suscité l'opposition de l'Irlande(8) dans la mesure où la clause de solidarité mutuelle ne serait pas automatique.

2) Préserver « l'exception irlandaise »

Il existe essentiellement deux « points durs » exprimés par les autorités irlandaises :

a) Le maintien de l'unanimité sur la fiscalité

L'économie irlandaise est l'une des plus dynamiques de la zone euro, et les faibles taux d'imposition rendent le pays très attractif pour les investisseurs étrangers, notamment américains(9). Alors que la compétitivité irlandaise tend à s'éroder du fait de la hausse des coûts de production et de la nouvelle concurrence des pays d'Europe centrale et orientale, la question de la fiscalité des entreprises est primordiale.

La position du gouvernement est très ferme sur cette question sensible en Irlande. Des voix plus nuancées existent toutefois dans l'opposition où l'on évoque parfois l'éventuelle extension de la majorité qualifiée en ce qui concerne l'assiette des taxes et les moyens de lutter contre la fraude fiscale. En revanche, il n'existe pas d'ouverture en ce qui concerne la fixation des taux, où à l'instar de l'Amérique, cette compétence reste dévolue aux Etats fédérés.

b) L'opposition à la création d'un Parquet européen

L'Irlande s'oppose à la création d'un procureur européen et refuse toute harmonisation des règles de droit pénal qui porterait atteinte à la « Common Law ». Sur ce dernier point, le compromis proposé par la présidence italienne avant le Conseil européen de Bruxelles (introduction d'une clause d'appel au Conseil européen) semblerait toutefois être acceptée par les Irlandais.

En revanche, les interlocuteurs rencontrés par le rapporteur ont réaffirmé la nécessité d'une coopération plus forte en matière d'asile et d'immigration.

C. L'exercice d'une présidence modeste au service d'un résultat ambitieux

Aucun délai impératif n'est fixé pour l'achèvement des travaux de la Conférence intergouvernementale. La Présidence irlandaise est chargée d'élaborer pour le Conseil européen de Printemps (25 et 26 mars 2004) un rapport d'évaluation sur les perspectives d'avancée des travaux. Des consultations bilatérales sont menées depuis le début de l'année, et le Conseil « Affaires générales » du 26 janvier a, semble-t-il, montré une volonté partagée par l'ensemble des Etats membres, de conclure les négociations si possible avant les élections européennes de juin prochain.

1) Une méthode des « petits pas »

La présidence irlandaise travaille, avec modestie mais détermination. Elle entend rester à l'écart des pressions médiatiques et intensifie son travail en coulisses. Le Taoiseach multiplie les contacts bilatéraux et le climat de négociation est désormais nettement plus serein qu'il n'a été. Les délégations semblent apprécier l'ouverture et la qualité d'écoute manifestées par la présidence.

Une première tournée européenne s'est achevée, et une seconde série d'entretiens vient de commencer. M. Bertie Ahern aurait multiplié ces dernières semaines ses contacts avec le Président de la République, M. Jacques Chirac.

Il a été confirmé au rapporteur que la base de travail de la présidence demeure bien le texte de la Convention tel qu'il a été modifié à l'issue de la réunion ministérielle de Naples, en novembre 2003.

Il ressort des entretiens du rapporteur que le gouvernement irlandais aurait à ce stade identifié une vingtaine de questions sensibles, parmi lesquelles figureraient notamment: la composition de la Commission, la définition de la règle de la double majorité, l'extension du champ de la majorité qualifiée, la clause passerelle, les modalités de révision de la Constitution, les pouvoirs du Ministre européen des affaires étrangères. S'agissant de la référence à l'héritage chrétien, il ne semblerait plus qu'il s'agisse là d'un point de blocage important.

La question de la double majorité est clairement la plus délicate, et son règlement devrait permettre un accord rapide sur les autres sujets. Plusieurs propositions de compromis seraient actuellement à l'étude, même si les interlocuteurs du rapporteur ont affirmé ne pas avoir connaissance de leur contenu. En tout état de cause, plusieurs personnes rencontrées ont estimé qu'une solution ne sera trouvée que si la France et l'Allemagne font un geste en direction de l'Espagne et de la Pologne. C'est vraisemblablement sur les seuils et/ou le délai de passage à la nouvelle règle qu'existerait une marge de manœuvre.

2) Un calendrier qui demeure incertain

Il est très difficile d'établir le moindre pronostic sur les chances de succès des négociations, et tel n'était pas l'objet de la mission effectuée par le rapporteur.

En revanche, il ressort des différents entretiens que la présidence est déterminée à faire tout son possible pour aboutir avant les élections européennes. Partant du principe selon lequel plus le temps s'écoule, plus les chances de succès s'amenuisent, la présidence entend travailler avec détermination à la recherche d'un compromis global respectant les équilibres du texte de la Convention. Mais l'absence d'accord reste préférable à un mauvais accord.

La présidence souhaite poursuivre et intensifier son travail afin d'être en mesure de présenter un rapport au Conseil européen des 25 et 26 mars. Toutefois, ce rapport pourrait se révéler ambigu sur l'opportunité de rouvrir la Conférence intergouvernementale, et la Présidence irlandaise pourrait n'annoncer qu'à Pâques, vers la mi-avril, son intention de convoquer ou non la CIG. En tout état de cause, l'Irlande ne reprendra les négociations que si elle estime qu'il existe une réelle possibilité d'aboutir. Dans le cas contraire, le risque ne sera pas pris d'un nouvel échec qui condamnerait définitivement le projet de Constitution.

Les interlocuteurs du rapporteur ont insisté sur la nécessité d'obtenir un accord le plus rapidement possible, afin que le projet de Constitution européenne ne subisse pas les interférences provoquées tant par l'ouverture des discussions sur les perspectives financières que par la décision que devront prendre en décembre 2004 les Chefs d'Etat et de gouvernement sur la candidature de la Turquie à l'Union européenne.

Le temps est l'adversaire d'un accord, car plus il s'écoule, plus la mémoire de la Convention s'efface ; et la pression va inéluctablement retomber après l'élection, en juin, d'un nouveau Parlement européen et la mise en place, à l'automne, d'une nouvelle Commission.

Par ailleurs, la tenue d'élections législatives au Royaume-Uni au printemps 2005 fait peser une incertitude sur la position britannique, ce qui plaide en faveur d'un aboutissement rapide des négociations.

L'état d'esprit de la présidence irlandaise est prudent, mais avant tout constructif, et dans une certaine mesure optimiste. Les dirigeants irlandais ont acquis une expérience de la négociation qui pourrait se révéler décisive dans un contexte historique pour l'avenir de l'Europe.

*

* *

Lors de la réunion de la Délégation du 3 mars 2004, le Président Pierre Lequiller a souligné la justesse de l'analyse de M. John Bruton, ancien représentant du Parlement irlandais à la Convention, et ancien membre du Présidium, selon laquelle une Commission resserrée garantira mieux la prise en compte des « petits » pays.

VIII. ITALIE :
Mission de M. Robert Lecou (le 2 mars 2004)

ITALIE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

56,3

12,48

29

8,4

78

M. Robert Lecou a pu rencontrer au cours de cette mission le sénateur M. Lamberto Dini, ancien représentant du parlement italien à la Convention, et ancien Premier ministre (membre de la « Marguerite »), et le sénateur M. Andrea Manzella (membre du bureau de la commission des affaires européennes, membre des démocrates de gauche). Le représentant parlementaire de la majorité à la Convention, M. Marco Follini (chef du parti démocrate chrétien de la coalition gouvernementale), n'a pas pu confirmer le rendez-vous prévu (par ailleurs il n'a malheureusement pas été possible de rencontrer M. Giuliano Amato, ancien vice-président de la Convention, retenu par un séminaire législatif sur l'affaire Parmalat). Une réunion de travail à l'Ambassade, organisée préalablement aux entretiens, a permis de faire un tour d'horizon des questions liées au débat constitutionnel.

Dans un contexte préélectoral très politisé, l'Italie confirme son soutien à une adoption prochaine du projet de Constitution.

A. Un engagement européen traditionnel qui reste fort

L'Italie, Etat fondateur, a été très naturellement amenée à soutenir activement la construction européenne qui lui a apporté, outre un soutien économique important, une perspective politique fédératrice. Celle-ci rassemble encore très largement les Italiens, tant au sein de la classe politique - à l'exception bien entendu des extrêmes - que parmi la population. L'Europe apparaît notamment comme un moyen pour l'Italie de répondre à ses aspirations universalistes. Il existe un certain consensus bipartisan en Italie sur les sujets européens : il est plutôt en faveur d'un confortement du rôle de la Commission, du Parlement européen, de l'extension du champ de la majorité qualifiée, d'une défense du budget communautaire. Les interlocuteurs du rapporteur sont apparus comme des europhiles convaincus.

Dans cet esprit, l'Italie est restée un acteur très actif, en particulier au sein de la Convention, par l'intermédiaire, bien sûr, du vice-président Amato, mais aussi de la participation remarquée des représentants du parlement, comme du gouvernement italiens (M. Gianfranco Fini, vice-premier ministre, Alliance nationale).

Le déroulement de la présidence italienne, et en particulier le pilotage par le président du conseil italien du Conseil européen de Bruxelles de décembre, a été nettement critiqué par les deux parlementaires de l'opposition rencontrés. M. Andrea Manzella a évoqué le « brouillard » qui avait résulté de la présidence italienne.

B. Un climat politique intérieur peu propice au débat européen

L'approche des échéances électorales (européennes de juin, mais aussi, le même jour, élections régionales et communales), attise un climat politique très tendu. La coalition majoritaire est divisée par des tensions très vives, marquées en particulier par les déclarations de M. Umberto Bossi, leader de la Ligue du Nord.

Les résultats des élections de juin - pour lesquelles il n'y a pas de liste unique de la majorité - pourraient conduire à un remaniement ministériel important et pourraient même provoquer une crise de la majorité. L'opposition est, quant à elle, à la recherche d'une tête de liste. Enfin, M. Romano Prodi est plus impliqué que jamais dans la vie politique italienne, et a annoncé son retour après la fin de la Commission actuelle.

C. Un soutien constant au projet de Constitution

Compte tenu du contexte politique actuel, il est très peu probable que l'Italie prenne, à court terme, des initiatives significatives dans le débat institutionnel du moment. D'autant plus que le Président Silvio Berlusconi semble avoir sur le fond une approche très souple des formules constitutionnelles qui pourraient être adoptées, et fortement liée à sa proximité personnelle avec certains partenaires européens, et en particulier, à l'heure actuelle, le Premier ministre espagnol.

Néanmoins, le ministère des affaires étrangères maintient la ligne traditionnelle italienne, pro-européenne, et le ministre Frattini semble vouloir jouer un rôle actif dans de cadre des discussions en cours.

Le Président de la République italienne, M. Carlo Azeglio Ciampi, a une influence positive importante, dans le sens d'un soutien au texte de la Convention. Il s'est ainsi efforcé d'agir en faveur d'une position commune des pays fondateurs.

L'Italie reste, dans cet esprit, favorable à une adoption rapide du projet de Constitution, sur la base d'un texte qui serait proche du projet de la Convention. D'après les informations disponibles, le ministère des affaires étrangères italien semble souple quant aux solutions techniques qui pourraient être adoptées, tout en restant globalement en faveur de solutions qui ne reviennent pas en arrière par rapport aux compromis de la Convention. L'Italie souhaite un accord si possible avant les élections de juin, mais en tout état de cause avant la fin de l'année. Au-delà, la dynamique conventionnelle s'affaiblirait sensiblement.

Pour autant, M. Lamberto Dini n'est pas apparu très optimiste sur la possibilité de déboucher sur un accord avant les élections européennes, compte tenu en particulier de la rigidité de la position polonaise, et de l'impossibilité pour le gouvernement polonais de sortir de l'impasse dans laquelle il s'est mis lui-même, sans perdre la face. Il s'est par ailleurs montré réservé quant à l'idée de l'adoption du texte constitutionnel par le Parlement européen, soulignant que celui-ci se trouverait politiquement dévalorisé si ensuite les gouvernements se mettaient d'accord sur des bases différentes.

En revanche, M. Andrea Manzella est apparu plus positif sur les chances de succès de la présidence irlandaise, et a souhaité qu'en tout état de cause « quelque chose soit fait » avant les élections européennes pour que les électeurs disposent d'une perspective politique. En l'absence d'accord au Conseil de mars, il s'est dit en faveur de l'adoption d'une déclaration politique par le Conseil européen, afin que l'acquis de la Convention puisse être sauvegardé pour la période suivante, en tenant compte que le Parlement et la Commission allaient être renouvelés (et seul le Conseil européen assurera alors la continuité). Cette déclaration pourrait ainsi jouer le rôle d'un « pont » assurant la transmission du flambeau des négociations de la Conférence intergouvernementale à la présidence néerlandaise.

La position italienne sur les principaux points restant en discussion semble proche de celle de la France.

L'Italie est en faveur de la double majorité, qui présente des avantages importants de simplicité et de lisibilité, et pour faciliter la prise de décision de l'Union. Une discussion serait néanmoins possible sur les seuils, sans que cela ne rende la prise de décision trop difficile. M. Dini s'est déclaré réservé sur une modification significative des seuils, ceux ci représentant à son sens un point d'équilibre.

Il serait également possible de réfléchir à l'instauration de « super majorités » pour certains domaines, comme les questions relatives aux finances de l'Union.

La question de l'entrée éventuelle de la Turquie dans l'Union a été évoquée, du point de vue de son impact sur le fonctionnement des règles de décision au sein du Conseil. M. Lamberto Dini a d'abord rappelé la décision prise à Helsinki de lancer la procédure d'adhésion de la Turquie. Il a estimé que les règles constitutionnelles n'avaient pas vocation à être intangibles, et que par conséquent, si des difficultés advenaient quant à la prise de décision au sein de l'Union, il faudrait alors examiner la nécessité d'évolutions constitutionnelles. M. Andrea Manzella est apparu nettement ouvert à l'adhésion turque. Tous deux se sont déclarés en faveur de la fixation d'une date d'ouverture des négociations avec la Turquie, dans la perspective d'une adhésion à long terme.

Pour la Commission, il serait possible d'accepter l'idée d'une Commission composée d'un commissaire par Etat membre (le parlement italien a adopté une résolution acceptant le principe d'un commissaire par Etat). M. Lamberto Dini s'est déclaré favorable à une hiérarchisation de la Commission, organisée par le Président de la Commission, en tenant compte des équilibres démographiques et géographiques (de préférence à la formule prévue par le texte de la Convention qui introduirait deux catégories de commissaires, et seraient susceptibles de créer des tensions liées à la différence de statut). M. Andrea Manzella a dit approuver la proposition du sommet de Berlin prévoyant la création d'un « super commissaire économique ».

Pour la question de l'héritage chrétien, sujet très politique en Italie, il ne semble pas que les responsables italiens en fassent un point majeur. Les deux sénateurs italiens se sont dits en faveur de l'équilibre du texte de la Convention sur ce point.

L'Italie soutient l'extension du champ de la majorité qualifiée, notamment pour la politique étrangère et de sécurité. Les deux sénateurs rencontrés ont regretté les marches arrières de la présidence italienne à ce propos. Dans le même esprit, ils souhaitent le maintien des « clauses passerelles » que M. Lamberto Dini a qualifié de respiration indispensable du texte constitutionnel.

Néanmoins, les spécificités politiques italiennes actuelles rendent l'Italie à présent très prudente en matière de majorité qualifiée dans le domaine de la coopération pénale.

En ce qui concerne les coopérations renforcées, l'Italie soutient tout ce qui permettra d'avancer dans ce sens, dans le cadre institutionnel de l'Union (selon la formule de l'euro et non de Schengen). En revanche, elle est très réticente pour tout « noyau dur » extérieur à l'Union (M. Andrea Manzella a déclaré préférer le terme d'« archipel », assemblage de coopérations renforcées), ou, a fortiori, à tout directoire. Il faut souligner à cet égard que l'Italie a réagi très négativement à la rencontre tripartite de Berlin. Mais les deux sénateurs rencontrés ne se sont pas offusqués de ce sommet. M. Andrea Manzella a utilisé une image sportive, évoquant un cycliste et un peloton à l'approche d'un col : l'essentiel est de se trouver dans le peloton !

L'assouplissement des modalités de révision de la Constitution apparaît nécessaire aux interlocuteurs rencontrés, en particulier pour la troisième partie du projet constitutionnel, relatif aux politiques de l'Union. M. Lamberto Dini a évoqué les traités internationaux qui entrent en vigueur lorsqu'une majorité d'Etats a ratifié, sans attendre l'unanimité. Néanmoins, les interlocuteurs rencontrés ne se sont pas montrés très optimistes sur les chances de progresser à ce propos.

S'agissant de la procédure d'adoption du budget communautaire, les réactions recueillies semblent plutôt en faveur du maintien des droits du Parlement européen tels qu'ils sont prévus par le projet de Constitution - pour notamment, selon M. Andrea Manzella, « responsabiliser » le Parlement -, mais il ne semble pas que cet aspect constitue un point dur pour lequel il faudrait remettre en cause les propositions du conclave ministériel de Naples en novembre dernier.

En marge du débat constitutionnel, les perspectives financières 2007- 2013 ont été évoquées : l'Italie semble favorable à un budget communautaire qui permette à l'Union de poursuivre ses politiques à un niveau d'ambition important, notamment les politiques de solidarité. Elle est néanmoins consciente des contraintes représentées par la surveillance des déficits excessifs (l'Italie est à environ 2,4 % de déficit).

Pour le pacte de stabilité, l'Italie semble ouverte à une relecture du pacte, en traitant de façon spécifique certaines catégories de dépenses, en particulier celles relatives aux infrastructures ou à la défense.

*

* *

Au cours de la réunion de la Délégation du 3 mars 2004, le Président Pierre Lequiller a relevé la souplesse de la position italienne et la confirmation de sa disponibilité pro-européenne. Il a noté que l'Italie et la France étaient sur la même ligne pour l'essentiel des points en discussion.

IX. LETTONIE :
Mission de M. Alfred Almont (les 16 et 17 février 2004)

LETTONIE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

2,3

0,51

4

1,2

9

Quelques mois après une précédente mission portant sur la préparation de l'élargissement, le rapporteur s'est rendu de nouveau à Riga les 16 et 17 février 2004 dans un contexte politique un peu particulier. En effet, à trois mois de son entrée dans l'Union européenne, la Lettonie connaît une nouvelle crise gouvernementale. Le jeune Premier ministre M. Enars Repse a été contraint de démissionner le 5 février. Son parti politique, la « Nouvelle Ere » était arrivé en tête des élections au parlement monocaméral, la Saeima, d'octobre 2002 avec 26 sièges sur 100. Le Premier ministre est entré en conflit avec son Vice-Premier ministre, chef d'une des composantes de sa majorité. Le départ de ce dernier a entraîné l'éclatement de la coalition libérale de droite, qui dirigeait le pays depuis quinze mois, privant le gouvernement d'une majorité au parlement.

Pour sortir de cette impasse politique, la Présidente de la Lettonie, Mme Vike-Freiberga, a proposé, le 20 février, au leader de l'Union des Verts (12 députés) M. Indulis Emsis, ministre de l'environnement, de former un gouvernement de coalition avec les partis de Centre droit de la précédente coalition. Il deviendrait ainsi le premier chef de gouvernement écologiste d'un pays membre de l'Union européenne.

Cette situation politique agitée n'a pas compromis le succès de la mission, qui a permis au rapporteur de rencontrer successivement pour des entretiens particulièrement longs et denses, deux des principaux responsables politiques du pays, M. Guntars Krasts, ancien Premier ministre, Président de la Commission des affaires européennes du parlement, membre de la Convention, et M. Krisjanis Karins, Président du premier parti politique du pays, la « Nouvelle Ere », et également représentant du parlement letton à la Convention.

Ces entretiens ont été complétés par une réunion de travail au ministère des affaires étrangères, une rencontre avec la presse écrite et audiovisuelle, et une soirée avec la communauté française de Lettonie.

La position de la Lettonie sur le projet de Constitution est apparue sans surprise, combinant des demandes classiques et compréhensibles pour un petit pays (notamment un commissaire par Etat) avec une véritable volonté d'aboutir dans les meilleurs délais, et si possible avant les élections européennes, à un résultat conforme à l'intérêt général. De plus, en dépit de la crise gouvernementale, les opinions sur le projet de Constitution semblent très consensuelles et ne seront pas remises en cause.

A. Des priorités fondées sur le respect de l'égalité entre les Etats membres

1) Les parlementaires lettons estiment que l'Europe a besoin d'une Constitution, qui lui permette de fonctionner de façon plus efficace, et soutiennent le texte de la Convention, qui rassemble en un seul texte les principes qui fondent et structurent l'Union.

2) La Commission européenne doit comporter un commissaire par Etat membre, disposant d'un portefeuille et d'un droit de vote à part entière. Même si la Commission est un organe collégial qui défend exclusivement les intérêts communautaires, c'est le principe symbolique de l'égalité des Etats qui est en cause.

Pour la Lettonie, cette commissaire sera Mme Sandra Kalniete, ancien ministre des affaires étrangères, ancien ambassadeur à Paris, parfaite francophone, comme la Présidente de la République.

Les Lettons ne souhaitent pas par ailleurs s'engager sur la composition de la Commission après un nouvel élargissement et après 2009. Une Commission à 27, 30 ou 35 membres ne leur paraît pas trop nombreuse. Avec l'élargissement et l'approfondissement, la tâche de la Commission va être très lourde et les portefeuilles actuels sont trop larges.

3) S'agissant de la composition du Parlement européen, il convient de préserver l'acquis du traité de Nice. Le seuil minimal devrait être fixé à cinq députés, et non pas à quatre, et les Lettons veulent au moins huit députés européens, pour permettre une représentation équilibrée de toutes les régions et de toutes les sensibilités politiques du pays.

4) Les coopérations structurées, notamment en matière de défense, doivent rester ouvertes en permanente à tous les Etats.

B. Une position de négociation ouverte

Ce sont des points sur lesquels il y a encore des interrogations, mais il nous a semblé qu'ils ne constituaient pas une « ligne rouge » pour les Lettons.

1) L'articulation entre le Président du Conseil européen, le Président de la Commission et le ministre des affaires étrangères n'est pas très clairement perçue par les Lettons, qui souhaitent une Commission plus forte et un Président du Conseil dont le rôle serait essentiellement de coordonner.

2) S'agissant de la présidence du Conseil des ministres, ils préféreraient le principe de rotation, qui symbolise l'égalité des Etats, mais ils en comprennent les inconvénients et le défendent avec moins d'insistance que le commissaire par Etat membre.

3) Les modalités de vote à la majorité qualifiée semblent laisser les parlementaires lettons indifférents. Ils soutiennent le principe de la double majorité, mais semblent préférer la parité (50/50 ou 60/60) à la proposition de 50/60. Cela ne sera toutefois pas un point de blocage.

4) L'approfondissement de l'Europe sociale ou le passage à la majorité qualifiée en matière fiscale susciteraient des réserves, les Lettons souhaitant conserver leurs avantages concurrentiels et, ainsi, soutenir la croissance. Par contre, les clauses passerelles et l'extension de la majorité qualifiée sont acceptées sur les sujets évoqués par la Convention, à condition que les Etats disposent d'un veto en cas de mise en cause d'un intérêt national majeur (ex. : problème du droit d'asile et des relations entre l'Union européenne et la Russie).

5) Enfin, sur l'héritage chrétien, la Lettonie considère que la formule choisie par la Convention est tout à fait satisfaisante.

Toutefois, les Lettons ne s'opposeraient pas par principe à la demande polonaise.

*

* *

En conclusion, les parlementaires lettons reconnaissent avoir beaucoup appris à la Convention. Ils sont apparus comme plus européens qu'on ne le pense généralement. L'intérêt européen est de plus en plus pris en compte et semble prévaloir sur l'intérêt national. Les Lettons sont bien conscients que leur pays n'a aucun avenir isolé face à la Russie, et que le meilleur moyen d'éviter une Europe à deux vitesses est précisément de signer rapidement le projet de Constitution.

Ils regrettent que la présidence italienne n'ait pas joué son rôle de synthèse et font confiance à la présidence irlandaise pour aboutir à un accord avant les élections européennes et avant l'ouverture d'un débat sur les futures perspectives financières de l'Union européenne.

X.

XI. LUXEMBOURG :
Mission de Mme Arlette Franco (le 12 février 2004)

LUXEMBOURG

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

0,4

0,09

4

1,2

6

A. Un soutien actif à l'adoption du texte issu de la Convention

Le Luxembourg est fondamentalement en faveur de l'intégration européenne et d'une approche qui fasse prévaloir l'intérêt commun européen sur les intérêts nationaux. Il est particulièrement attaché à son statut d'Etat fondateur de l'Europe. Son histoire et sa position géographique expliquent et soutiennent cette approche. Le Luxembourg souhaite être toujours aux avant-postes de l'intégration européenne.

Dans cet esprit, il est traditionnellement attaché à la méthode communautaire, au rôle de la Commission au sein des institutions communautaires, comme au renforcement des pouvoirs du Parlement européen.

Ayant fortement soutenu le processus qui a abouti à la mise en place de la Convention, et l'idée même d'une Constitution européenne, le Luxembourg a joué au cours de la Convention un rôle très actif. Les conventionnels luxembourgeois ont été ainsi très souvent au cœur des débats, en particulier M. Jacques Santer, représentant le gouvernement, ainsi que MM. Ben Fayot et Paul Helminger, représentant la chambre luxembourgeoise.

Après s'être clairement opposés à certains éléments des propositions institutionnelles franco-allemandes, et en particulier à la création d'une présidence stable du Conseil européen (en laquelle ils voyaient un risque de remise en cause de l'équilibre des institutions et dont ils ont souhaité une limitation des pouvoirs à ceux d'une présidence de séance, ce qui ressort en définitive du projet de la Convention), ils se sont pleinement ralliés au consensus final. Les parlementaires luxembourgeois rencontrés - MM. Fayot et Helminger - ont tous deux rendu hommage au rôle actif joué par les parlementaires français au sein de la Convention.

Le Luxembourg reste attaché à l'équilibre obtenu par les travaux de la Convention (il souhaite néanmoins maintenir à six le seuil minimal pour le Parlement européen, et obtenir des éclaircissements et des précisions sur la portée des dispositions prévoyant le passage à la majorité qualifiée pour certains sujets fiscaux et de sécurité sociale).

Il se trouve fondamentalement sur la même ligne que la France pour soutenir le texte issu de la Convention (les positions des deux pays sont quasi sur la même ligne sur l'ensemble des sujets, les divergences se limitant à la procédure d'adoption du budget annuel - pour laquelle le Luxembourg souhaite pouvoir préserver les avancées en faveur du Parlement européen obtenues à la Convention - et à une grande prudence luxembourgeoise en ce qui concerne la majorité qualifiée dans le domaine fiscal).

Il était donc particulièrement intéressant d'échanger tout à fait librement avec des partenaires dont l'inspiration est proche de la nôtre.

Il en ressort clairement que le Luxembourg est à nos côtés pour faire progresser le processus de la CIG et soutiendra toutes les propositions qui seraient de nature à débloquer la situation, sans remettre en cause les avancées obtenues dans le cadre de la Convention.

Le Luxembourg est partisan d'aboutir à un accord dans les meilleurs délais, mais ne paraît pas excessivement optimiste sur les chances de déboucher sous présidence irlandaise.

B. Deux exigences principales : le maintien à six du seuil minimal de parlementaires européens et des éclaircissements sur le champ de la majorité qualifiée

1) Réunion de travail avec les conventionnels parlementaires luxembourgeois

Mme Arlette Franco a rencontré les deux parlementaires qui ont représenté le Luxembourg à la Convention, comme titulaires, M. Ben Fayot et M. Paul Helminger.

Sur un plan général, les deux parlementaires luxembourgeois ont souligné que le Luxembourg était disposé à accepter le compromis auquel la Convention avait abouti, le meilleur possible compte tenu des positions des uns et des autres. Bien que les points de blocage soient limités, il est difficile d'être optimiste à court terme quant à un accord global.

M. Paul Helminger a estimé que ceux qui étaient opposés au principe même d'une Constitution avaient obtenu en compensation une délimitation relativement précise des compétences dans le projet de la Convention.

Les parlementaires ont indiqué que le Luxembourg souhaitait fortement que le nombre minimal de députés au Parlement soit maintenu à six, compte tenu en particulier des équilibres politiques internes du pays. M. Paul Helminger a noté qu'il était en effet essentiel que les Etats puissent se retrouver dans les institutions européennes.

En ce qui concerne les règles de vote au Conseil, ils ont rappelé que le Luxembourg avait déjà proposé le système de double majorité lors des discussions de Nice. M. Ben Fayot a estimé que des variations de seuil ne pourraient que constituer un « compromis boiteux ».

S'agissant de la composition de la Commission, ils ont rappelé l'importance de conserver une échéance précise pour une Commission resserrée, comme le prévoit le traité de Nice. Il faut par ailleurs conserver le principe d'une rotation égalitaire.

M. Ben Fayot a souligné que le Luxembourg ne s'était rallié à l'idée d'une présidence stable du Conseil européen que sous réserve que les pouvoirs du président soient étroitement encadrés (un « président de séance »). Il a considéré que le Conseil européen s'occupait à l'heure actuelle de trop de choses et qu'il fallait éviter que toutes les affaires n'aient vocation à remonter à ce niveau. Il a souligné l'intérêt que les parlementaires luxembourgeois ont porté à la proposition d'une présidence unique du Conseil européen et de la Commission, avancée par le président Pierre Lequiller. Il a rappelé à ce propos que le projet de Constitution laissait finalement la porte ouverte à cette possibilité, qu'il a considéré comme une hypothèse d'avenir.

En ce qui concerne la présidence des conseils des ministres, les parlementaires ont regretté l'abandon par la CIG du Conseil législatif prévu par la Convention. M. Ben Fayot a jugé que l'idée d'une présidence par équipe compliquerait la nécessaire coordination des formations du Conseil.

Pour les parlementaires, l'éventuel assouplissement des modalités de révision constitutionnelle ne poserait pas de problème, mais ils sont pessimistes quant à la possibilité de faire progresser ce sujet au sein de la CIG.

M. Ben Fayot a estimé que dans une Europe à vingt-cinq, les domaines qui resteront à l'unanimité ne pourront plus faire l'objet de décision. Les deux parlementaires ont néanmoins rappelé que le Luxembourg restait, à ce stade, attaché à ce que les questions fiscales restent soumises à l'unanimité, comme de nombreux autres pays membres.

S'agissant de la question religieuse, le Luxembourg s'est rallié sans difficulté à la rédaction d'équilibre proposée par la Convention. L'introduction d'une référence directe au christianisme, à laquelle le Luxembourg ne serait sans doute pas opposé, constituerait un sujet de discorde majeur - notamment pour la France - qu'il convient donc d'éviter.

En ce qui concerne le domaine « Justice et affaires intérieures », M. Ben Fayot a souligné que le Luxembourg était très attaché aux avancées obtenues au sein de la Convention et que toute marche arrière à ce sujet serait très négative.

M. Paul Helminger a jugé que la création d'un ministre des affaires étrangères « double casquette » constituait un pas dans la bonne direction, mais que le développement d'une politique étrangère commune ne se ferait pas seulement par le biais institutionnel.

M. Ben Fayot a estimé que dans le domaine de la défense, la perspective est nécessairement européenne. L'augmentation éventuelle de l'effort de défense ne peut être envisagée que dans un cadre européen. Il faut aussi que la dimension européenne se traduise par une participation en terme de personnels.

M. Paul Helminger a noté que l'introduction d'un mécanisme d'alerte précoce en matière de contrôle de la subsidiarité constituait un des aspects les plus « créatifs » du texte de la Convention, qui allait nécessairement conduire à renforcer la coopération entre les parlements nationaux. Il a considéré que ce dispositif avait en outre le mérite de souligner que le rôle des parlements nationaux était de contrôler les décisions prises par les gouvernements au sein du Conseil, et que ce rôle ne devait pas interférer avec celui du Parlement européen.

Enfin la coopération transfrontalière aurait besoin d'un cadre européen pour pouvoir se développer.

2) Entretien au ministère des affaires étrangères (avec M. Marc Thill, directeur général des relations économiques internationales, en charge de la CIG)

M. Marc Thill a confirmé le très large soutien qu'apporte le Luxembourg au texte issu de la Convention, alors qu'il était au départ très réticent sur certains points, en particulier la création d'une présidence stable du Conseil européen. Le Luxembourg souhaite certaines clarifications sur des points restés en suspens.

En ce qui concerne les règles de vote au Conseil, le Luxembourg soutient les propositions de la Convention. Le report de l'entrée en vigueur du système de la double majorité pourrait être envisageable, mais il faut par contre éviter de remettre en cause l'équilibre entre les deux types de majorité. Le Luxembourg préfère la règle 50/60. Une piste de compromis possible pourrait consister à définir certains domaines qui seraient soumis à une « super majorité ».

Le maintien d'un seuil minimal de six parlementaires européens constitue un point majeur pour le Luxembourg.

En ce qui concerne le champ de la majorité qualifiée, le Luxembourg souhaite préciser la portée des dispositions nouvelles introduites par le texte de la Convention, notamment pour la fiscalité et pour la sécurité sociale (par exemple quelle est la portée précise de la règle selon laquelle les actes européens qui seraient « de nature à porter atteinte à l'équilibre financier » des régimes de sécurité sociale resteraient soumis à la règle de l'unanimité ?). En tout état de cause, le Luxembourg est par principe favorable à l'extension du champ de la majorité qualifiée. En ce qui concerne les perspectives financières, un éventuel maintien de l'unanimité ne serait pas forcément favorable aux contributeurs nets. Les « clauses passerelles » prévues par le texte de la Convention sont utiles, mais il faut que les parlements nationaux soient informés.

Pour la PESC, le Luxembourg est favorable à la proposition de la présidence italienne de soumettre à la majorité qualifiée les décisions prises sur proposition du ministre des affaires étrangères. L'institution d'un ministre « double casquette » est un point très positif. Il faut que le ministre soit membre à part entière de la Commission.

Le Luxembourg est favorable aux dispositions relatives à la défense telles qu'elles ont été débattues au conclave de Naples. L'un des points les plus négatifs du conseil de Bruxelles a été que les avancées obtenues dans ce domaine n'aient pas été avalisées.

Dans le domaine de la coopération pénale, le texte de la Convention constitue un minimum. Il faut avancer sur ce sujet. Il ne faut pas limiter les compétences du futur parquet européen.

S'agissant de la question de la présidence des conseils des ministres, le Luxembourg peut accepter l'idée des présidences par équipes, mais il préfère une durée de douze mois, plutôt que de seize, ce qui permettrait une rotation plus rapide. Il faut maintenir les conseils sectoriels, ce qui permet de responsabiliser les ministres « techniques ».

En ce qui concerne la composition de la Commission, le Luxembourg a accepté la solution proposée par la Convention. La solution préconisée par la Commission elle-même prévoyant des groupes différenciés de commissaires présente des risques d'aboutir à une Commission à deux vitesses. En tout état de cause, il faut préserver la perspective précise d'un passage ultérieur à une Commission resserrée. La proposition qu'avait faite le Luxembourg d'une Commission composée de dix-huit membres visait à permettre à certains commissaires de pouvoir rester au-delà d'un seul mandat.

Le Préambule de la Constitution constitue un équilibre acceptable en l'état.

Pour la procédure d'adoption du budget annuel, la suppression de la distinction dépenses obligatoires/dépenses non obligatoires constitue un point positif important. En ce qui concerne l'équilibre entre le Conseil et le Parlement européen, le Luxembourg soutiendra la formule qui sera acceptable par le Parlement.

S'agissant de la procédure de révision constitutionnelle, il est important de maintenir le pouvoir des parlements nationaux, y compris pour la troisième partie de la Constitution relative aux politiques.

M. Marc Thill a par ailleurs évoqué l'ordre du jour de la future présidence luxembourgeoise (premier semestre 2005) et notamment : les perspectives financières ; l'évaluation du processus de Lisbonne ; le Pacte de stabilité ; les sommets Union européenne/Etats-Unis, Canada, Japon, Russie ; la suite des discussions de l'OMC ; et la CIG, si la question n'est pas résolue d'ici là.

XII. PAYS-BAS :
Mission de M. Jacques Floch (les 17 et 18 février 2004)

PAYS-BAS

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

16,1

3,57

13

3,8

27

La mission du rapporteur aux Pays-Bas s'est déroulée les 17 et 18 février 2004. Elle a été l'occasion de nombreux entretiens, tant au niveau politique avec d'anciens membres de la Convention (MM. Van der Linden et Timmermans) qu'avec des représentants de la société civile, universitaires et journalistes. Cette mission a permis de souligner à plusieurs reprises la volonté conjointe d'un approfondissement des relations franco-néerlandaises, à l'heure d'un élargissement historique de l'Union européenne.

A. Un contexte difficile marqué par des tensions et des incertitudes

1) Des tensions

Plusieurs faits récents ont provoqué des tensions qui restent perceptibles :

- Le non-respect du Pacte de stabilité par la France et l'Allemagne est mal perçu aux Pays-Bas qui y voient un déficit de crédibilité franco-allemand. Pourtant, la conjoncture économique difficile que traverse actuellement l'Union européenne pourrait conduire, à leur tour, les Pays-Bas à ne pas respecter le Pacte : des prévisions, rendues publiques le jour même du déplacement du rapporteur, faisaient état d'un déficit budgétaire de 3,3 % du PIB pour 2004.

- Le refus d'un « directoire des grands » à travers la multiplication de réunions restreintes telles que la rencontre de Berlin entre allemands, britanniques et français. De telles initiatives font resurgir la crainte d'une avant-garde organisée à l'extérieur de tout cadre institutionnel, renforçant la dimension intergouvernementale de la construction européenne, au détriment de sa dimension communautaire.

L'ouverture prochaine des négociations sur les perspectives financières. Les Pays-Bas se placent au premier rang des contributeurs nets au budget de l'Union et exigent le maintien de l'unanimité tant qu'un mécanisme de correction généralisée des soldes nets n'est pas mis en place. Les Pays-Bas sont signataires de la lettre adressée à la Commission le 15 décembre 2003 par les six contributeurs principaux au budget européen ; mais ils sont également signataires d'une autre lettre commune adressée à la Commission le 16 février 2004 avec le Portugal, la Pologne, l'Italie et l'Estonie dans laquelle ils défendent le respect « sans discrimination » du Pacte de stabilité.

2) Des incertitudes

- Au niveau intérieur, le pays reste marqué par l'épisode « Pim Fortuyn » qui a bouleversé le paysage politique lors des élections législatives du 15 mai 2002. Les Pays-Bas traversent depuis deux ans une période d'incertitude politique ; des élections anticipées ont été organisées en janvier 2003, et un cabinet de centre droit (coalition CDA/VVD, avec l'appui du D66) est dirigé par M. Balkenende depuis le 27 mai dernier.

Face à un désintérêt croissant manifesté par l'opinion publique néerlandaise sur les sujets européens, le résultat d'un référendum sur le projet de Constitution européenne demeure incertain.

- Une seconde incertitude concerne le mandat qui sera celui de la présidence néerlandaise de l'Union européenne au second semestre 2004, si les Pays-Bas héritent de la négociation constitutionnelle, en cas d'échec de la présidence irlandaise. Or la présidence néerlandaise sera également celle de la préparation du Conseil européen de décembre 2004 au cours duquel les dirigeants européens seront appelés à se prononcer sur l'ouverture ou non des négociations d'adhésion avec la Turquie.

B. Les principales positions néerlandaises relatives au projet de Constitution européenne

1) Œuvrer au rapprochement des positions dans la perspective de la présidence de l'Union européenne

Au cours des travaux de la Convention, les Pays-Bas avaient témoigné à plusieurs reprises de leur volonté de favoriser les compromis, en adoptant des positions constructives susceptibles de rapprocher des positions souvent divergentes entre d'une part, les petits et les grands pays et d'autre part, les intergouvernementalistes et les communautaristes.

C'est ainsi que malgré leur opposition initiale à l'instauration d'une présidence stable du Conseil européen, les Néerlandais se sont finalement ralliés, dans l'intérêt européen, à l'esprit de la proposition institutionnelle franco-allemande présentée en janvier 2003.

Pays fondateur, les Pays-Bas ont acquis une expérience de la négociation qui pourrait se révéler décisive dans la perspective de leur présidence de l'Union européenne. Car il semble de plus en plus probable que c'est à eux que reviendra la difficile tâche de faire aboutir les négociations sur le projet de Constitution européenne.

2) Les priorités néerlandaises

· Sur le plan institutionnel

Les Néerlandais sont très attachés au respect de la méthode communautaire, car ils y voient un moyen de contenir l'influence des « grands » et de rétablir ainsi un certain équilibre des puissances en Europe.

Les Pays-Bas souhaitent le renforcement des prérogatives du Parlement européen (notamment en ce qui concerne les modalités d'élection du Président de la Commission) ainsi que la garantie de l'égal accès des Etats membres aux présidences du Conseil européen et de la Commission.

S'agissant de la composition de la Commission, le parlement néerlandais s'est prononcé en faveur du principe d'un Commissaire par Etat membre, sans distinction entre des commissaires avec ou sans droit de vote. La perspective du référendum que les Pays-Bas envisagent d'organiser sur le projet de Constitution européenne n'est pas étrangère à cette revendication ; il serait en effet difficile, lors de la campagne référendaire, d'expliquer aux citoyens néerlandais que leur pays risque de ne pas être représenté au sein du collège des commissaires. Pour autant, le gouvernement - à la différence du parlement - maintient son appui à la proposition de la Convention, tout en estimant implicitement qu'elle a peu de chance d'aboutir en l'état.

En ce qui concerne les règles de révision de la Constitution, les Pays-Bas ne seraient pas opposés à l'introduction d'une procédure de révision plus souple pour certaines dispositions de la IIIème partie.

· En ce qui concerne les politiques de l'Union

Une évolution sur l'Europe de la défense

En matière de politique européenne de défense, les Pays-Bas se sont progressivement ralliés à l'idée d'un renforcement de l'Europe de la défense mais restent attentifs à éviter toute concurrence avec l'OTAN.

L'existence de deux « points durs » : le maintien de l'unanimité pour les perspectives financières et pour la JAI

¬ Le maintien de l'unanimité sur les perspectives financières

La question budgétaire constitue le principal - voire l'unique - « point dur » des Pays-Bas, qui sont les premiers contributeurs net/habitant au budget de l'Union (en montant global, leur contribution nette est proche de celle de la France). Ils estiment que leur contribution financière est disproportionnée, au regard de ce que versent, par exemple, la France ou le Danemark. Il ressort des entretiens du rapporteur que, dans ce domaine, tout geste à leur égard serait particulièrement apprécié et permettrait un assouplissement de la position néerlandaise sur d'autres sujets en négociation.

Le dernier document de la présidence italienne prévoit de préciser que l'unanimité ne s'appliquerait que pour les premières perspectives financières après la signature de la Constitution, c'est-à-dire celles de 2007, et que l'unanimité ne s'appliquerait pour le cadre financier suivant que si le Conseil européen le décidait à la majorité qualifiée. Cette proposition ne convient pas aux Pays-Bas qui souhaiteraient plutôt la possibilité pour le Conseil européen de décider le passage à la majorité qualifiée.

Les Néerlandais souhaitent également un renforcement du Pacte de stabilité dans la Constitution, ce qui pourrait notamment passer par la possibilité de recours en manquement devant la Cour de justice de l'Union européenne sur l'ensemble de la procédure pour déficit excessif.

¬ Le maintien de l'unanimité dans le domaine de la justice et des affaires Intérieures (JAI)

Les Pays-Bas souhaitent restreindre la compétence d'un éventuel Parquet européen à la protection des intérêts financiers de l'Union et maintenir l'unanimité en matière de droit pénal. Les Néerlandais considèrent que l'application du principe de subsidiarité plaide en faveur d'un maintien des questions pénales dans le champ des compétences nationales, à l'exception des infractions transfrontalières. Leur position peut se résumer ainsi : oui à la coopération pénale européenne, mais non à l'intégration communautaire en matière pénale.

C. Quelles perspectives ?

1) Préparer la prochaine présidence de l'Union européenne

Les Pays-Bas se préparent à la présidence de l'Union qu'ils exerceront au second semestre 2004. Dans cette perspective, les autorités néerlandaises se refusent à toute prise de position qui pourrait gêner l'actuelle présidence irlandaise.

Au cas où les négociations n'aboutiraient pas sous présidence irlandaise, les Pays-Bas feront tout leur possible pour que la Constitution soit signée avant le Conseil européen de décembre 2004 afin que le débat constitutionnel n'interfère pas avec la décision que devront prendre les Chefs d'Etat ou de gouvernement sur l'ouverture ou non des négociations d'adhésion avec la Turquie.

L'objectif serait ainsi de conclure les négociations lors du Conseil européen d'octobre 2004, si l'état d'avancement des travaux au sein de la Conférence intergouvernementale le permet.

2) Clarifier les règles du jeu du fonctionnement de l'Europe élargie

Tant les déclarations récentes du Président de la République, M. Jacques Chirac, sur les groupes pionniers, que l'initiative prise par l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France de se réunir à trois, ont été mal perçues par les Néerlandais, qui y voient le risque d'une dislocation de l'Europe.

Les autorités néerlandaises ne souhaitent pas que de telles initiatives se répètent et ne se rallieront à d'éventuelles coopérations renforcées (sans pour autant les initier) qu'à la condition qu'elles se déploient dans le cadre des traités. Le rapporteur à tenu à rassurer ses interlocuteurs sur les intentions françaises ainsi que sur les déclarations du Président de la République, lequel a levé toute ambiguïté en précisant que des coopérations renforcées ne sont envisageables que dans le strict cadre des traités.

Il convient enfin de souligner une certaine perte de crédibilité de l'Allemagne et de la France auprès des Néerlandais, après « l'affaire » du Pacte de stabilité. Quelque chose s'est brisé et du temps sera nécessaire pour rétablir une confiance sereine entre nos deux pays.

La visite prévue le 10 mars prochain du ministre des affaires étrangères, M. Dominique de Villepin, souligne les très bonnes relations qu'il entretient avec son homologue néerlandais, M. Bernard Bot, et sera une occasion de resserrer des liens étroits et historiques qui unissent nos deux pays, au service de l'Europe.

*

* *

Au cours de la réunion de la Délégation du 3 mars 2004, le Président Pierre Lequiller a indiqué l'intérêt que certains pays auront à rejoindre des coopérations renforcées qu'ils n'auront pas initiées. En ce qui concerne la composition de la Commission, il a souligné la singularité de la position exprimée par le Parlement néerlandais (différente de celle du gouvernement des Pays-Bas) favorable à un commissaire par Etat membre, au regard des positions recueillies en Belgique et au Luxembourg.

M. Marc Laffineur a souhaité savoir si les Pays-Bas seraient favorables à rouvrir le débat sur le « chèque britannique » dans la perspective d'une renégociation du budget de l'Union.

En réponse, M. Jacques Floch a estimé que cette question sera inévitablement présente dans le prochain débat sur les perspectives financières.

XIII. PORTUGAL :
Mission de M. François Calvet (le 12 février 2004)

PORTUGAL

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

10,3

2,28

12

3,5

24

Le rapporteur a rencontré la plupart des représentants du parlement portugais à la Convention ainsi que le Président de la commission des affaires européennes et de la politique extérieure de l'Assemblée de la République, chambre unique du parlement portugais. Il a pu aussi s'entretenir avec MM. José Luis da Cruz Vilaça et Alvaro Vasconcelos, universitaires spécialistes des questions européennes, ainsi qu'avec Mme Alexandra Prado Coelho et M. Luis Naves, représentants de la presse nationale.

Dans les conversations interparlementaires, la majorité comme l'opposition se trouvaient représentées. M. Jaime Gama, Président de la commission des affaires européennes et de la politique extérieure, est membre du Parti socialiste, dans l'opposition, de même que MM. Alberto Costa et Guilherme d'Oliveira Martins, représentants de l'Assemblée de la République à la Convention. M. Antonio Nazaré Pereira, représentant de l'Assemblée de la République à la Convention, était le seul député présent à faire partie de la majorité, puisqu'il est membre du parti social-démocrate, principale formation de la coalition gouvernementale.

Ce déséquilibre relatif n'a pas nui cependant au déroulement des entretiens, car les uns et les autres paraissent partager des opinions proches sur les questions européennes. M. Jaime Gama appartient au demeurant à la frange atlantiste du parti socialiste. Les échanges de vue ont fait apparaître un soutien général en faveur de l'adoption du projet de Constitution, quoique cette position de principe n'exclue pas des réserves sur de nombreux points du texte, voire des critiques sur les lacunes qu'il comporterait.

Le rapporteur tient à souligner d'emblée que les réticences exprimées lui ont moins semblé révéler une hostilité irréconciliable à telle ou telle solution constitutionnelle qu'une inquiétude générale à l'endroit d'une possible tentation des prétendus grands pays à former une sorte de directoire européen qui repousserait les Etats de taille plus modeste dans l'ombre de leur voisin plus puissant, par exemple l'Allemagne en Europe du Nord ou encore l'Espagne dans la péninsule ibérique. Le rapporteur s'est employé à montrer par son attitude que sa venue s'inscrivait précisément dans une démarche tout à fait opposée.

Il a longuement écouté ses interlocuteurs, qui ont tous eu le talent et l'exquise amabilité de s'exprimer en français. Il s'est enquis de leur avis sur l'ensemble du texte avant de recueillir leur opinion sur les points en discussion à la Conférence intergouvernementale, comme sur ceux qui leur paraîtraient y avoir été injustement passés sous silence.

A. Un soutien unanime quoique nuancé

M. Pereira a salué le texte de la Convention comme une réussite exceptionnelle. Malgré certains choix discutables, le projet de Constitution contient des propositions qui sont acceptables pour tous les Etats membres. La Convention est parvenue à réaliser un indéniable pas en avant sans introduire de rupture dans l'évolution institutionnelle de l'Union européenne. La présidence irlandaise paraît avoir restauré une atmosphère de dialogue propice à l'adoption du projet avant la fin de l'année, ce que les Portugais appellent de leurs vœux.

Sans se démarquer de ces propos, M. Jaime Gama a cependant regretté que le projet de Constitution n'ait pas nettement défini le partage des compétences entre l'Union européenne et les Etats membres, ce qui laisse la porte ouverte à des développements qui rendront nécessaires de constantes révisions constitutionnelles dans les Etats membres.

B. Un dénominateur commun : l'attachement à la souveraineté nationale

Les interlocuteurs du rapporteur ont ensuite passé en revue la plupart des points qui font encore discussion à la conférence intergouvernementale, en exprimant les appréciations suivantes.

1) Au Conseil, les effets déformants de la démographie

Il revient au Parlement européen de refléter les rapports de population en Europe, tandis que le Conseil des ministres est par définition l'organe de représentation des Etats. Le texte de la Convention, en fixant à 60 % le seuil requis pour atteindre la majorité démographique dans les scrutins à majorité qualifiée, dénature ce partage naturel des fonctions représentatives entre le Parlement européen et le Conseil des ministres, où le facteur démographique acquiert une importance trop grande. Au demeurant, accepter les exigences hispano-polonaises aggraverait encore la situation.

2) Des commissaires sur un pied d'égalité

Priver certains commissaires de droit de vote reviendrait à en faire des membres du collège de seconde catégorie. Des règles calquées sur la composition du Conseil de sécurité de l'ONU auraient, quant à elles, pour effet de faire naître un directoire européen dont la formation n'est pas souhaitable.

3) Revendication mesurée de l'héritage chrétien

La question n'a pas été abordée par nos interlocuteurs, quoique le gouvernement portugais ait défendu à la Convention un rappel explicite à l'héritage chrétien. Au sein de la coalition gouvernementale, cette revendication était plus spécialement soutenue par le parti populaire (CDS-PP), petit parti de droite allié au parti social-démocrate.

4) Un président du Conseil européen choisi par tous les Etats

Il ne semble pas logique d'élire à la majorité qualifiée le président du Conseil européen quand toutes les décisions sont prises par consensus dans le domaine des affaires étrangères ou de la justice et des affaires intérieures. Ce choix ne peut que faire naître la méfiance parmi les Etats de taille plus modeste.

5) Une défense européenne crédible et complémentaire de l'OTAN

Tous nos interlocuteurs ont déploré que l'Union européenne reste impuissante sur la scène internationale. Dans le domaine de la politique extérieure et de sécurité commune, l'action européenne en reste trop souvent au stade déclaratoire. Les interventions réalisées ne sont pas à la dimension du rayonnement politique naturel de l'Union européenne. La puissance américaine tire précisément sa force de la faiblesse des autres Etats. Une voie à suivre pourrait être de faire évoluer l'OTAN vers le partenariat égalitaire qu'elle n'est pas encore, plutôt que d'en répliquer inutilement les structures sans pouvoir peser efficacement sur le cours de la politique américaine.

Le Portugal se félicite par ailleurs de toute évolution du texte constitutionnel qui lui permette de devenir rapidement partie prenante aux futures coopérations renforcées.

6) Pas d'exception pour le Conseil « Affaires étrangères »

Alors que toutes les formations du Conseil sont présidées par des ministres nationaux, la logique institutionnelle et historique voudrait qu'il en soit de même pour la formation « Affaires étrangères ».

C. Quelques préoccupations plus nationales

1) Le risque d'un télescopage avec les discussions sur les perspectives financières

Tout en soulignant que le débat sur les perspectives budgétaires et les négociations constitutionnelles en cours procédaient de la même ambition d'instaurer une solidarité financière et institutionnelle à l'échelle du continent, nos interlocuteurs ont exprimé la crainte que le débat budgétaire ne pèse sur le déroulement des négociations constitutionnelles. Comme bénéficiaire de fonds structurels européens à hauteur de 3 % de son PIB, le Portugal est particulièrement sensible à ce danger.

2) Le principe de l'égalité entre Etats membres

Le Portugal est le seul Etat à avoir demandé que la future Constitution consacre expressément le principe de l'égalité entre les Etats membres. Sur ce terrain, il a du reste trouvé l'appui du Luxembourg et de la Lituanie.

3) La controverse autour de la Constitution portugaise

À la revendication de l'égalité entre les Etats membres semble liée la volonté de clarifier les rapports entre le droit communautaire et les droits constitutionnels nationaux, en affirmant la supériorité du droit constitutionnel des Etats membres sur le droit européen. La formule retenue par l'article 5 du projet paraît à cet égard beaucoup trop vague : « L'Union respecte l'identité nationale des Etats membres, inhérente à leurs structures fondamentales politiques et constitutionnelles... ».

Cette indétermination porte en elle des risques d'inconstitutionnalité au sein des Etats membres, tant sur le plan matériel que sur le plan formel. Un acte de droit européen pourra contredire une norme constitutionnelle portugaise sans que cette dernière puisse prévaloir sur le fondement d'une disposition explicite de la Constitution européenne. À l'intérieur de l'ordre constitutionnel de la République portugaise, le gouvernement sera d'autre part amené à prendre à la table du Conseil des ministres des décisions qui relèvent pourtant des compétences réservées du Parlement.

Sur le plan strictement juridique, une révision constitutionnelle permet de surmonter la difficulté en remédiant à l'incompatibilité des deux normes. Mais l'éventualité d'une telle démarche est précisément utilisée par les eurosceptiques, qui en prennent argument pour dénoncer le danger d'une perte de souveraineté. Sur ce point encore, l'inquiétude de l'opinion paraît moins devoir suggérer un changement des dispositions textuelles en discussion qu'inciter les partisans du projet de Constitution à mieux en faire comprendre le contenu. Beaucoup des interlocuteurs rencontrés se sont déjà engagés, par leurs publications dans la presse nationale, dans ce lent et difficile travail d'explication.

XIV. ROYAUME-UNI :
Mission du Président Pierre Lequiller et de Mme Elisabeth Guigou (le 1er mars 2004)

ROYAUME-UNI

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

58,9

13,05

29

8,4

78

Le Président Pierre Lequiller et Mme Elisabeth Guigou se sont rendus à Londres, le 1er mars 2004. Ils ont eu des entretiens avec les anciens conventionnels représentant la Chambre des Communes et la Chambre des Lords, ainsi qu'avec M. Denis MacShane, ministre des affaires européennes.

Un déjeuner de travail, organisé par M. Gérard Errera, ambassadeur de France à Londres, a réuni, autour des rapporteurs, le conseiller aux affaires européennes de M. Tony Blair, le directeur du think tank « center for european reform » et des parlementaires britanniques.

Cette rencontre fait apparaître une faible mobilisation des responsables britanniques pour parvenir à l'adoption du projet de Constitution. Le débat européen se situe dans un contexte moins favorable au Royaume-Uni qu'en 2002, qui a vu débuter les travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe, en raison des difficultés du gouvernement sur la crise irakienne, qui empêchent M. Tony Blair, le plus europhile des Premiers ministres britanniques, de jouer dans la période actuelle un rôle de premier plan sur la scène européenne, comme il l'ambitionne.

A. Un contexte plus difficile

Comme Lord Tomlinson (travailliste) l'a souligné devant le Président Pierre Lequiller et Mme Elisabeth Guigou, il faut reconnaître le chemin parcouru par les responsables britanniques qui ont accepté ou se sont ralliés au principe même d'une Constitution européenne, à la définition et aux symboles de l'Union, à la simplification de son architecture (en supprimant les trois piliers et en fusionnant les traités), à la reconnaissance de la personnalité juridique de l'Union, à l'inclusion dans la Constitution de la Charte des droits fondamentaux, moyennant certaines réserves d'interprétation...

Ils ont demandé et obtenu une présidence stable du Conseil européen et participé pleinement à l'introduction d'un mécanisme d'alerte précoce pour le contrôle de la subsidiarité, qui peut être engagé par les parlements nationaux, avec une possibilité de saisine de la Cour de justice(10).

Leur attitude a été plus défensive sur les autres sujets. Les autorités britanniques ont néanmoins considéré que le texte élaboré était un bon point de départ pour les longues négociations de la Conférence intergouvernementale.

Les positions du Royaume-Uni ont été rappelées dans un Livre blanc, préfacé par le Premier ministre, M. Tony Blair, le 9 septembre 2003.

Mme Gisela Stuart (travailliste) a indiqué aux rapporteurs qu'elle n'approuvait pas le texte de la Convention à différents titres. En décembre 2003, dans un pamphlet, elle a lancé une attaque brutale et inattendue contre le projet de Constitution et contre le processus par lequel la Convention l'a élaboré. Elle considère que l'Europe élargie ne pourra pas fonctionner avec ce projet, lequel ne permettra pas d'effectuer les réformes économiques dont les pays ont besoin, que le rôle des parlements nationaux n'a pas été suffisamment pris en compte dans le processus de décision et que si la Constitution est adoptée dans ces termes, elle ne fera qu'accroître le décalage entre l'Europe et le citoyen. Elle a même précisé que l'adoption de la Constitution avant les élections européennes serait une prime à tous les opposants à l'Europe et que cela transformerait ces élections en référendum sur la Constitution.

M. David Heathcoat-Amory (conservateur) s'est prononcé contre le projet de Constitution : son parti exige un référendum si la Constitution était adoptée par la Conférence intergouvernementale.

D'une manière générale, les rapporteurs ont constaté un pays plutôt sur la défensive en matière européenne, craignant un très fort taux d'abstention aux élections de juin prochain. Le gouvernement Blair n'a pas mené de campagne d'explication contre les préjugés anti-européens, ce que lui reproche notamment Lord MacLennan of Rogart (libéral démocrate). On peut d'ailleurs noter que les Lords
- Lord Grenfell (travailliste), Lord Tomlinson, Lord MacLennan of Rogart - se sont montrés pro-européens et ouverts sur la Constitution.

Selon l'entourage pro-européen du Premier ministre, M. Tony Blair doit reprendre l'initiative, comme il l'a fait pour l'Europe de la défense, qui s'est traduite au cours de ces derniers mois par des progrès significatifs.

B. Une attitude ouverte sur les points « durs »

M. Denis MacShane, ministre des affaires européennes, a rappelé au Président Pierre Lequiller et à Mme Elisabeth Guigou l'accord de principe du gouvernement pour adopter un projet de Constitution dans des conditions acceptables pour l'ensemble des pays actuels et futurs de l'Union, vraisemblablement pour la fin 2004.

Le Royaume-Uni s'en remet à la présidence irlandaise pour rapprocher les positions respectives. M. Denis MacShane a rappelé la fermeté de la position polonaise qui ne paraît pas avoir évolué. Considérant que les politiques de l'Union sont plus importantes que les règles institutionnelles, le Royaume-Uni adopte une attitude ouverte sur les points institutionnels considérés comme « durs » :

le système de vote à la double majorité. Pour des raisons de lisibilité et de simplicité, le gouvernement est favorable au principe de la double majorité, tout en restant ouvert sur la question des seuils. Mais il ne s'oppose pas au maintien du système prévu par le traité de Nice pendant quelques années ;

la taille de la Commission. Les responsables britanniques semblent avoir accepté la présence d'un Commissaire par Etat membre, tout en reconnaissant qu'une Commission plus resserrée serait plus cohérente et plus indépendante ;

l'héritage chrétien. Cette question ne fait pas l'objet de débat au Royaume-Uni qui s'en remet à la présidence irlandaise.

C. Les lignes rouges britanniques

« Il est important de savoir que nous avons fixé nos lignes rouges et que nous nous y tiendrons » a déclaré M. Tony Blair dans un discours prononcé après la remise officielle du projet de Constitution au Conseil européen le 20 juin 2003.

Les lignes rouges britanniques sont traditionnelles et ont été confirmées, dans l'ensemble, par les interlocuteurs des rapporteurs. Elles concernent la limitation du champ de la majorité qualifiée au Conseil, pourtant essentielle à la prise de décision dans une Europe élargie.

L'objectif du gouvernement britannique - qui a déjà beaucoup obtenu à la Convention - est de préserver les concessions qu'il estime avoir engrangées de la part de la présidence italienne avant et pendant le Conseil européen de Bruxelles et qui remettent en cause les avancées de la Convention, ce que ne souhaite pas la France :

politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Les Britanniques ont une approche intergouvernementale de la PESC, citant à plusieurs reprises les succès obtenus à Téhéran par les ministres des affaires étrangères MM. Fischer, Straw et de Villepin. Ils sont donc réservés à l'égard de la prise de décision à la majorité qualifiée dès lors que la proposition émane du ministre des affaires étrangères (proposition émise par la présidence italienne avant le Conseil européen de Bruxelles) ;

coopération judiciaire en matière pénale : la Convention a remplacé les instruments du troisième pilier par les nouvelles lois et lois-cadres européennes et la majorité qualifiée sera applicable pour fixer les règles minimales dans certains domaines de procédure pénale et de droit pénal matériel. La présidence italienne a proposé de garantir le respect de la particularité des systèmes de common law et de prévoir une clause d'appel au Conseil européen ;

politique sociale : la sécurité sociale des travailleurs migrants, seul domaine à passer à la majorité qualifiée dans le texte de la Convention serait, selon le compromis de la présidence italienne, soumise à la clause d'appel au Conseil européen ;

en matière fiscale : les mesures d'harmonisation concernant la coopération administrative ou la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales sont soumises à la majorité qualifiée dans le texte de la Convention. Mais elles ne doivent pas affecter les régimes fiscaux des Etats membres, selon la proposition de la présidence italienne ;

en matière budgétaire : le Royaume-Uni s'oppose à la majorité qualifiée pour les perspectives financières après 2013 ainsi que pour la fixation des modalités des ressources propres, pourtant prévue par la Convention ;

la clause passerelle générale, permettant de décider, à l'unanimité, de passer une matière de l'unanimité à la majorité qualifiée pose pour les Britanniques, le problème du contrôle des parlements nationaux.

Sur les perspectives financières pour 2007-2013, le Royaume-Uni a signé la lettre des Six demandant que le budget européen soit limité à 1 % du PIB moyennant une meilleure utilisation des fonds européens.

Par ailleurs, M. Denis MacShane s'est déclaré favorable à l'ouverture des négociations avec la Turquie, jugeant nécessaire de soutenir les efforts de modernisation de ce pays.

Au cours des entretiens, Mme Elisabeth Guigou a estimé qu'il convenait de donner aux citoyens européens le sentiment que les responsables politiques ont une prise sur les événements. Sur certains sujets (économie, monnaie, sécurité, politique étrangère et de sécurité commune...), les décisions, pour être efficaces, ne peuvent être adoptées qu'à l'échelon européen. La Convention a clarifié la répartition des compétences entre les Etats membres et l'Union. Les procédures ne règlent rien à elles seules mais elles peuvent aider, sur la durée, à rapprocher les positions. Sans doute, un signe sur les perspectives financières pour 2007-2013 serait de nature à faire évoluer les positions espagnole et polonaise et à faciliter l'adoption de la Constitution dont l'Europe élargie a besoin pour répondre aux attentes des citoyens.

Le Président Pierre Lequiller a regretté la position plutôt défensive des Britanniques qui pourraient jouer un rôle de premier plan en Europe et dans les relations transatlantiques. Il a estimé qu'il n'y aura pas d'Europe politique vraiment forte sans une pleine participation du Royaume-Uni à la construction européenne.

En conclusion, il apparaît que le Royaume-Uni ne devrait pas empêcher l'adoption de la Constitution par la Conférence intergouvernementale.

*

* *

Au cours de la réunion de la Délégation du 3 mars 2004, le Président Pierre Lequiller a estimé que les responsables britanniques soutenaient le projet de Constitution et a confirmé qu'ils avaient obtenu sous la présidence italienne des concessions traduisant un recul par rapport au projet de la Convention.

M. Marc Laffineur a indiqué qu'une opposition très nette se faisait jour au sein du parti travailliste, le Premier ministre, M. Tony Blair, restant favorable à l'approfondissement de la construction européenne alors que le ministre de l'économie, M. Gordon Brown, y est plutôt réticent.

Confirmant ce constat, le Président Pierre Lequiller a précisé que l'opposition conservatrice critiquait l'absence de campagne du parti travailliste en vue des élections européennes. Cette absence a pour conséquence de focaliser le débat sur des thèmes de politique intérieure. Selon lui, le Royaume-Uni souhaite néanmoins jouer de son influence en Europe, notamment en matière de défense européenne.

XV. REPUBLIQUE TCHEQUE :
Mission de M. Didier Quentin (le 12 février 2004)

REPUBLIQUE TCHEQUE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

10,2

2,26

12

3,5

24

La mission en République tchèque a permis de rencontrer des parlementaires représentatifs des principaux partis et sensibilités politiques nationales. Il s'agit de M. Libor Roucek, vice-président de la commission pour l'intégration européenne de la Chambre des députés, membre du CSSD (parti social-démocrate, principal parti de la majorité gouvernementale) et tête de liste de son parti pour les prochaines élections européennes, M. Jaromir Kohlicek, également vice-président de la commission et membre du parti communiste (opposition), M. Jaroslav Zverina, également vice-président de la commission et membre de l'ODS (parti démocratique civique ou droite libérale, principal parti d'opposition) et M. Jaroslav Lobkowicz, membre de la commission et du parti chrétien démocrate (parti de centre-droit associé à la coalition gouvernementale).

Le rapporteur a également rencontré les deux représentants titulaires tchèques à la Convention, à savoir M. Jan Zahradil, membre de la commission des affaires étrangères de la Chambre des députés, vice-président de l'ODS et tête de liste de ce parti pour les prochaines élections européennes, et M. Josef Zieleniec, ancien ministre des affaires étrangères de 1993 à 1997, sénateur ODS et tête de la liste « Indépendants-démocrates européens » pour ces mêmes élections.

A. Un projet de Constitution soutenu par le gouvernement, mais contesté par l'opposition

Il ressort de ces entretiens que la République tchèque soutient le principe de l'adoption du projet de Constitution européenne à une échéance aussi rapprochée que possible. Cependant, des divergences de point de vue se font jour selon les partis. Ainsi, les représentants de l'ODS expriment leur opposition, non seulement au projet de Constitution, mais au principe même d'une Constitution européenne. M. Zverina a récemment affirmé vouloir « éviter le constructivisme, qui consisterait, par exemple, à construire une politique étrangère commune sur la base de la Constitution, et privilégier le pragmatisme ». De son côté, M. Zahradil, qui vient d'être nommé ministre des affaires étrangères du « gouvernement fantôme » de l'ODS, appartient au camp des « eurosceptiques libéraux », fermement opposés à tout projet d'approfondissement. Fervent adversaire de la politique étrangère et de sécurité commune, il n'hésite pas à dénoncer dans la presse « l'impérialisme franco-allemand » et le risque pour la République tchèque d'être reléguée au rang de « province d'un super Etat franco-allemand », selon lui plus dangereux que le « prétendu unilatéralisme américain ». En revanche, M. Zieleniec, qui est membre fondateur de l'ODS, s'exprime en faveur de l'adoption rapide du projet de Constitution et, pour manifester sa différence par rapport à l'ODS, a choisi de conduire une liste indépendante favorable à la construction communautaire.

Cela étant, deux données nouvelles de la vie politique tchèque doivent être prises en compte, qui pourront influencer la position future de ce pays à l'égard du projet de Constitution et de la construction communautaire.

D'abord, la perspective d'entrer dans l'Union ne semble pas susciter d'enthousiasme particulier. L'opinion publique ne voit pas l'avantage immédiat que le pays pourra tirer de cette entrée à partir du 1er mai prochain. Elle est, en revanche, sensibilisée à certaines difficultés liées aux conditions d'adhésion, telles que l'augmentation du taux de TVA ou les limitations transitoires apportées à la libre circulation des travailleurs tchèques, en particulier ceux souhaitant exercer dans les actuels pays de l'Union. Elle est, de manière générale, très attachée, après les « années de plomb » de la période communiste, à ne pas « retomber » dans un nouveau carcan réglementaire ou bureaucratique trop contraignant. Dans ce contexte, les interlocuteurs du rapporteur estiment que le taux d'abstention aux prochaines élections européennes pourrait être très élevé et atteindre un niveau de l'ordre de 70 %.

En deuxième lieu, les rapports de forces politiques sont susceptibles de s'inverser, dans une année qui va être marquée par la conjonction d'élections cantonales, européennes et sénatoriales : l'ODS, qui représente 58 députés sur 200 aujourd'hui, est crédité de 30 % d'intentions de vote, contre seulement 15 % au principal parti du gouvernement qu'est le CSSD. Etant donné que, par ailleurs, la coalition au pouvoir ne dispose que d'un siège de majorité à la Chambre des députés et que le parti chrétien démocrate a indiqué qu'il entendait se séparer de cette coalition pour rejoindre l'ODS, une crise gouvernementale n'est pas à exclure d'ici les prochaines élections générales de 2006. Si cette crise conduisait à des élections anticipées ou à de nouvelles coalitions, l'ODS pourrait revenir au pouvoir et afficher, au sujet du projet de Constitution européenne, une position beaucoup plus réservée que le gouvernement actuel.

B. Une approche relativement consensuelle sur les sujets principaux

Sur les points de désaccord essentiels que la Conférence intergouvernementale a révélés concernant le projet de Constitution, les interlocuteurs du rapporteur ont fait valoir une position globalement consensuelle. Le principal point d'achoppement concerne, selon eux, la règle de la double majorité. Le gouvernement tchèque souhaiterait, en effet, que l'on substitue à la règle de la majorité des Etats et de 60 % de la population pour les décisions au sein du Conseil des ministres - proposée par la Convention -, celle de 60 % des Etats et 60 % de la population, qui constitue, selon lui, un régime plus clair, plus égalitaire et plus respectueux de la volonté des Etats. En l'absence de consensus sur ce point, il souhaiterait plutôt le maintien des dispositions retenues à Nice (majorité des Etats, 232 voix sur 321 et 62 % de la population).

S'agissant de la composition de la Commission, la République tchèque demande à avoir un commissaire à part entière, au moins dans un premier temps, ne serait-ce que pour « se constituer une première expérience ». Cependant, plusieurs interlocuteurs ont indiqué comprendre et accepter le principe d'une Commission à composition réduite (proposition de la Convention) et semblent ouverts - ainsi que le gouvernement tchèque, selon les informations communiquées par notre ambassade - à une clause de rendez-vous en 2009, date à laquelle une Commission de taille réduite pourrait être instaurée.

Au sujet de la mention de l'héritage chrétien dans le Préambule de la Constitution, l'actuel ministre des affaires étrangères tchèque, qui est de sensibilité chrétienne démocrate, a souhaité que figure cette mention. Cela étant, le gouvernement et la plupart des partis politiques tchèques n'en font pas, semble-t-il, une demande prioritaire. Il est, à cet égard, intéressant de souligner que, pour M. Zieleniec (ex ministre des affaires étrangères de 1993 à 1997), l'absence d'une telle mention pourrait expliquer le refus de la Pologne d'accepter les règles de majorité au Conseil proposées par la Convention. Selon lui, accorder à ce pays cette concession le conduirait sans doute à une attitude plus conciliante concernant les règles de majorité.

C. Des souhaits précis sur les autres points importants en discussion

Sur les autres sujets importants en discussion, il ressort que le gouvernement et les principales formations politiques tchèques défendent les points de vue suivants :

ils s'opposent à une extension du champ de la majorité qualifiée en matière fiscale (sans pour autant refuser, semble-t-il, les propositions de la Convention). Les régimes fiscaux des Etats membres doivent, selon eux, continuer de relever de l'unanimité, de même que les ressources propres ;

la République tchèque est favorable à de nouvelles coopérations renforcées, dans la mesure où les règles applicables seraient transparentes et l'accessibilité de tous les Etats garantie. Elle souhaite, s'agissant de la politique étrangère et de défense, que soit clarifiée la règle selon laquelle une action de coopération renforcée pourrait être décidée à la majorité qualifiée et appelle au respect de la plus grande transparence dans la mise en œuvre d'un tel dispositif. Le Premier ministre, M. Vladimir Spidla, a déclaré que « la République tchèque ne souhaite pas l'apparition de divisions au sein de l'Union européenne mais, le cas échéant, elle entend bien faire partie d'un éventuel noyau dur ». En revanche, M. Zahradil a indiqué, au nom de l'ODS, qu'il n'était pas opposé
- loin s'en faut - à une Europe à plusieurs vitesses ou à géométrie variable ;

- concernant le nombre de parlementaires européens par Etat membre, la République tchèque soutient la demande de plusieurs petits Etats de voir croître le nombre de leurs sièges ;

- le gouvernement est favorable à une rotation de la présidence du Conseil sous forme d'équipes présidentielles comprenant trois ou quatre pays ;

- il estime enfin que, s'agissant des élargissements ultérieurs, pourront être admis les pays satisfaisant aux conditions d'adhésion, sachant qu'il n'y a pas de débat dans le pays sur les limites géographiques de l'Union. Toutefois, les élargissements ne doivent pas, selon lui, conduire à « réduire » la qualité de l'intégration européenne.

{texte de la conclusion...}

XVI. SUEDE :
Mission de M. Edouard Landrain (les 1er et 2 mars 2004)

SUEDE

Population 1.01.2002
(Source : Eurostat)

Nombre de voix au Conseil
(à partir du 1er novembre 2004)

Nombre de députés au Parlement européen

(élections de juin 2004)

en millions d'habitants

en %
de l'UE 25

voix

en %

8,9

1,97

10

2,9

19

Ce déplacement a permis au rapporteur de constater que, malgré l'échec du référendum sur l'adhésion de leur pays à l'euro, les Suédois étaient - du fait de leur culture du compromis raisonnable - soucieux de surmonter les divergences.

Avec - notamment - les anciens membres de la Convention ont été évoqués les points de désaccord essentiels, les autres points de discussion et des questions d'ordre général.

A. Les points de désaccord essentiels

1) Les règles de vote au sein du Conseil

Les opinions divergent entre les partis et groupes parlementaires.

M. Ingvar Svenson - chrétien démocrate - a déclaré approuver la formule de la Convention, M. Kenneth Kvist - parti de gauche - défendant une opinion différente de son parti, a rappelé que ce problème délicat était prévisible au vu du compromis de Nice, lequel aurait dû être conservé.

Tout en rappelant que la Suède a voulu mettre la Convention en garde contre tout changement des dispositions contenues dans le traité de Nice, il a estimé que même s'il est difficile, un compromis pourrait être établi en ce domaine.

M. Sören Lekberg - social-démocrate, ancien député - a considéré qu'en cas de désaccord persistant sur les règles de vote, l'Union européenne pourrait néanmoins appliquer les dispositions du traité de Nice.

2) La composition de la Commission

Il y a unanimité sur la nécessité de retenir le principe d'un commissaire par pays. M. Ingvar Svenson a précisé qu'il était opposé à la formule qui retirerait le droit de vote à certains commissaires. Quant à MM. Kvist et Lekberg, ils admettent le principe d'un réexamen ultérieur du mode de fonctionnement de la Commission. Ainsi, un système de rotation pourrait être mis en place.

3) La mention de l'héritage religieux dans le Préambule

Hormis M. Ingvar Svenson, tous les autres membres de la Convention s'y sont déclarés opposés au nom du principe de la séparation de l'Eglise et de l'Etat.

B. Parmi les autres points en discussion

Les points suivants ont été évoqués.

1) Le budget européen

M. Sören Lekberg a indiqué que le Parlement suédois avait soutenu la position du Gouvernement suédois, selon laquelle la contribution des Etats devait être calculée sur la base de leur PIB.

2) Les coopérations renforcées

M. Sören Lekberg s'est félicité que le projet de traité ait subordonné leur mise en œuvre à la participation d'un tiers des Etats membres, la crainte initiale des Suédois étant que ces coopérations renforcées puissent être déclenchées par un ou deux pays.

3) L'extension du champ de la majorité qualifiée

Au nom du principe de subsidiarité, les interlocuteurs du rapporteur s'y sont opposés, par exemple, dans les domaines fiscal et social. Y contribuent la méfiance de la population à l'encontre de la Commission, - assimilée à un organe bureaucratique - et cette croyance encore très vivace dans la supériorité du modèle suédois.

4) Le nombre de parlementaires européens par Etat membre

La Suède a accepté la réduction du nombre de ses représentants, mesure qui est considérée comme une conséquence normale de l'élargissement.

5) La Présidence du Conseil européen

Les parlementaires rencontrés par le rapporteur se sont déclarés hostiles à la proposition d'une présidence stable du Conseil européen.

C. Questions diverses

Les questions suivantes ont été évoquées :

1) L'entrée de la Turquie dans l'Union européenne

Si la Turquie parvient à respecter les critères de Copenhague, il sera difficile de s'opposer à son adhésion.

2) Le trio Grande-Bretagne-Espagne-Pologne

A la question posée par le rapporteur de savoir si le rôle joué par ce trio n'avait pas pour effet de ralentir la construction européenne, M. Sören Lekberg a répondu que les Etats membres étaient libres de s'affilier aux regroupements de leur choix. Par exemple, la Suède coopère avec la France dans certains domaines et, dans d'autres, avec des pays de l'Europe centrale. Mais il importe d'éviter d'instaurer une coupure entre grandes et petites nations.

3) La conférence de Berlin entre MM. Gerhard Schröder, Tony Blair et Jacques Chirac

M. Carl B. Hamilton - libéral - Vice-Président du Comité consultatif pour les affaires européennes du Riksdag, a exprimé la crainte que ce trio n'annonce la naissance d'un directoire. En revanche, M. Magnus Robach, Directeur d'Europe au ministère suédois des affaires étrangères, a estimé nécessaire que les trois plus importants Etats membres puissent donner l'impulsion à un ensemble tel que l'Union européenne.

4) Modalités d'adoption du projet de Traité

M. Sören Lekberg a indiqué que la possibilité de soumettre le projet de Traité à un référendum faisait l'objet d'une discussion, principalement au sein du parti de gauche. Pour autant, M. Sören Lekberg a estimé qu'une telle voie pourrait s'avérer très dangereuse, car un vote négatif - qui n'est pas à exclure - ne manquerait pas d'être interprété comme un rejet en bloc de la construction européenne.

Pour sa part, le rapporteur a répondu que, bien qu'une décision n'ait pas encore été prise en France, il se déclarait plutôt favorable à la voie parlementaire.

5) L'attitude de l'opinion publique à l'égard de la construction européenne

Le rapporteur a constaté qu'une certaine crainte de l'opinion publique avait remplacé l'enthousiasme à l'égard de la construction européenne partagé par beaucoup de responsables ou de citoyens des différents Etats membres. Il s'est enquis de l'évolution de l'opinion en Suède, en particulier en ce qui concerne l'élargissement et la politique étrangère.

M. Göran Magnusson - social-démocrate et Vice-Président de la commission des affaires constitutionnelles - est convenu que le référendum sur l'adhésion de la Suède à l'euro a été un échec. Il a toutefois souligné que des enquêtes d'opinion avaient confirmé le souhait de la majorité des Suédois de rester dans l'Union européenne, tout en constatant que la classe politique suédoise a préféré insister non pas sur les aspects positifs de l'Union européenne mais plutôt sur ses aspects négatifs, par exemple, la propension de la Commission à vouloir tout régler, y compris
- selon ses propos - « la taille des fraises et des concombres ».

M. Sören Lekberg a indiqué que le Gouvernement avait pris certaines initiatives afin de sensibiliser les Suédois aux travaux de la CIG, en particulier en versant des subventions aux écoles et en créant un site Internet afin que les citoyens puissent suivre ces travaux. Il a relevé qu'un grand nombre d'entre eux s'y étaient intéressés, même s'ils ne s'étaient pas déclarés enthousiastes. Il a enfin souhaité savoir si un débat avait également eu lieu en France.

Le rapporteur a indiqué qu'un débat comparable n'avait pas eu lieu en France, où la discussion se déroule sur la base des propositions présentées par le Président Valéry Giscard d'Estaing.

Il a toutefois tenu à préciser que la Délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale avait décidé d'envoyer des « missi dominici » dans les différentes capitales de l'Union pour recueillir les observations des partenaires de la France, tandis que Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes, effectue également de nombreux déplacements.

Il a considéré que le grand débat sur l'Union s'effectuera sur l'adoption du projet de Constitution avec toutes les améliorations qui pourront y être introduites.

*

* *

En conclusion, le rapporteur a insisté auprès de ses interlocuteurs sur la nécessité de parvenir très rapidement à un accord, sauf pour l'Union européenne à se résigner, dans le contexte actuel de la mondialisation, à abandonner toute ambition au profit de pays émergents tels que la Chine. Or, une telle attitude ne manquerait pas de nous être très sévèrement reprochés par les générations futures.

ANNEXES

Annexe 1 :
Liste des personnes auditionnéesAnnexe-1

¬ Allemagne et Pologne (réunion du Triangle de Weimar)

Allemagne :

- les députés de la commission des affaires européennes du Bundestag présidée par M. Matthias Wissmann.

Pologne :

- M. Józef Cepil, député de la Diète, légitime défense de la République polonaise (SAMOOBRONA) ;

- M. Jerzy Czepulkowski, député de la Diète, alliance de la gauche démocratique (SLD) ;

- M. Marek Kotlinowski, député de la Diète, ligue des familles polonaises (LPR) ;

- M. Janusz Lewandowski, député de la Diète, programme civique (PO) ;

- M. Josef oleksy, ancien président de la commission de l'intégration européenne de la Diète, nommé ministre de l'intérieur, vice-premier ministre ;

- M. Jan Sztwiertnia, député de la Diète, union travailliste (UNIA PRACY).

¬ Belgique

- M. Philippe Mahoux, président du groupe socialiste au Sénat, président du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes.

- Mme Marie Nagy, membre du parti « Ecolo », sénatrice devenue députée, secrétaire générale du groupe de réflexion des conventionnels belges, ancienne suppléante à la Convention de M. Elio di Rupo, sénateur titulaire ;

-  Mme Anne-Marie Neyts-Uyttebroeck, membre du parti VLD libéral flamand du Premier ministre, M. Guy Verhofstadt, députée, présidente de la commission des relations extérieures, ancienne ministre adjointe auprès du ministre des affaires étrangères, M. Louis Michel.

¬ Estonie

- M. Sim Kallas, ancien Premier ministre, nouveau commissaire européen désigné par l'Estonie (parti de la Réforme) ;

- M. Tunne Kelam, président du parti Pro Patria, membre titulaire de la Convention ;

- M. Rein Lang, président de la commission des affaires européennes du Riigikogu, membre titulaire de la Convention, et futur ministre des affaires étrangères (parti de la Réforme) ;

- M. Marko Mihkelson, président de la commission des affaires étrangères du Riigikogu (parti Respublica) ;

- M. Urmas Reinsalu, président de la commission des lois du Riigikogu et membre suppléant de la Convention (parti Respublica) ;

- M. Toomas Savi, 1er vice-président du Riigikogu et observateur au Parlement européen (parti de la Réforme) ;

¬ Finlande

- M. Martti Ahtisaari, ancien Président de la République de Finlande ;

- M. Ville Itälä, président de la Grande Commission et du parti conservateur

- M. Kimmo Kiljunen, député (parti social-démocrate), ancien représentant finlandais à la Convention sur l'avenir de l'Europe ;

- M. Jary Vilen, député (parti conservateur), ancien ministre chargé des affaires européennes et représentant finlandais à la Convention sur l'avenir de l'Europe.

¬ Grèce

- M. Paraskevas Avgerinos, vice-président (PASOK) de la commission des affaires européennes du Parlement grec, ancien ministre de la Santé et parlementaire européen ;

- Mme Marietta Giannakou, vice-présidente (Nouvelle Démocratie) de la commission des affaires européennes du Parlement grec, ancien ministre de la Santé et parlementaire européen ;

- Mme Koika, directrice adjointe du cabinet de M. Tassos Yannitsis, ministre délégué aux affaires européennes ;

- M. Stelios Perrakis, professeur à l'université d'Athènes et ancien secrétaire général du ministère des affaires étrangères grec.

- M. Constantine Stephanou, professeur titulaire de la chaire Jean Monnet à l'Université Panteion d'Athènes ;

- M. Tsigouris, directeur chargé du suivi de la CIG à la direction générale des affaires européennes.

¬ Hongrie

- M. Árpád Gordos, directeur du Département de l'intégration européenne et des affaires institutionnelles au ministère des affaires étrangères.

- M. Attila Gruber, membre de la FIDESz (droite, principal parti d'opposition) et Observateur au Parlement européen ;

- M. Pal Vastagh, membre du MszP (parti socialiste, principale formation de l'actuelle majorité), ancien ministre de la justice (de 1994 à 1998), Président de la commission de la Constitution et de la justice, et représentant du gouvernement hongrois à la Convention sur l'avenir de l'Europe.

¬ Irlande

- M. Barry Andrews, député Fianna Fail, membre du Comité parlementaire sur les affaires européennes ;

- M. John Bruton, TD, député du parti Fine Gael, représentant du Parlement irlandais à la Convention européenne (ancien membre du Présidium), ancien Premier ministre ;

- M. Pat Carey TD, député du parti Fianna Fail, représentant suppléant du Parlement irlandais à la Convention européenne, membre du comité parlementaire sur les affaires européennes ;

- Mme Jill Donoghue, Institut des Affaires Européennes (Dublin) ;

- M. John Gormley TD, député Vert, représentant suppléant du Parlement irlandais à la Convention européenne ;

- M. Finbarr McAuley, universitaire, Institut européen de Dublin, université UCD ;

- M. Feargal Quinn, sénateur indépendant, membre du comité parlementaire sur les affaires européennes.

¬ Italie

- M. Lamberto Dini, sénateur, ancien représentant du parlement italien à la Convention, et ancien Premier ministre (membre de la « Marguerite ») ;

- M. Andrea Manzella, sénateur, (membre du bureau de la commission des affaires européennes, membre des démocrates de gauche).

¬ Lettonie

- M. Krisjanis Karins, président du premier parti politique du pays, la « Nouvelle Ere », représentant du Parlement letton à la Convention.

- M. Guntars Krasts, ancien Premier ministre, président de la commission des affaires européennes du Parlement, membre de la Convention.

¬ Luxembourg

- M. François bausch, président du groupe parlementaire les Verts ;

- M. Ben Fayot, parlementaire, représentant du Luxembourg à la Convention ;

- M. Paul Helminger, représentant du Luxembourg à la Convention ;

- M. Gast giberyen, président du groupe parlementaire Comité d'Action pour la démocratie et la justice sociale ;

- M. Marc thill, directeur général des relations économiques au ministère des affaires étrangères ;

- M. Jean-Paul rippinger, président du groupe démocratique ;

- M. Claude wiseler, député et membre du parti chrétien-social.

¬ Pays-Bas

- M. Brill , journaliste au Volkskrant ;

- Dr. H.J. Labohm (Institut Clingendael) ;

- Dr. Alfred Pijpers, (Institut Clingendael) ;

- M. Schlaghecke, journaliste au Financieele Dagblad ;

- M. Franz Timmermans, député, ancien représentant néerlandais (titulaire) à la Convention, vice-président de la commission des affaires étrangères de la Tweede Kamer ;

- M. René Van der Linden, sénateur, ancien représentant néerlandais du Parlement (Eerste Kamer - Chambre haute) à la Convention européenne ;

- Dr. Peter van Ham (Institut Clingendael) ;

- M. Van Straeten, journaliste au NRC-Handelsblad.

¬ Portugal

- M. Alberto Costa, député (parti socialiste), représentant de l'Assemblée de la République à la Convention ;

- M. José Luis da Cruz Vilaça, universitaire spécialiste des questions européennes ;

- M. Jaime Gama, président de la commission des affaires européennes et de la politique extérieure, membre du Parti socialiste ;

- M. Luis Naves, représentant de la presse nationale ;

- M. Antonio Nazaré Pereira, député (parti social-démocrate), représentant de l'Assemblée de la République à la Convention ;

- M. Guilherme d'Oliveira Martins, représentant de l'Assemblée de la République à la Convention ;

- Mme Alexandra Prado Coelho, représentante de la presse nationale ;

- M. Alvaro Vasconcelos, universitaire spécialiste des questions européennes.

¬ Royaume-Uni

- M. Stuart Bell (MP travailliste) ;

- M. Charles Grant (Directeur du Center for European Reform) ;

- Lord Grenfell (travailliste), Président de la Commission des affaires européennes de la Chambre des Lords ;

- M. David Heathcoat-Amory (conservateur), représentant la Chambre des Communes à la Convention ;

- M. Roger Liddle (conseiller aux affaires européennes du Premier ministre) ;

- Lord MacLennan of Rogart (Lib Dem), suppléant à la Convention ;

- M. Denis MacShane, Minister of State (Europe) ;

- M. Peter Mandelson (MP travailliste) ;

- Mme Gisela Stuart (travailliste), représentant la Chambre des Communes et membre du Praesidium à la Convention ;

- Lord Tomlinson (travailliste), suppléant à la Convention.

¬ République tchèque

- M. Jaromir Kohlicek, vice-président de la commission pour l'intégration européenne de la Chambre des députés et membre du parti communiste (opposition) ;

- M. Jaroslav Lobkowicz, membre de la commission pour l'intégration européenne de la Chambre des députés et du parti chrétien démocrate (parti de centre-droit associé à la coalition gouvernementale) ;

- M. Libor Roucek, vice-président de la commission pour l'intégration européenne de la Chambre des députés, membre du CSSD (parti social-démocrate, principal parti de la majorité gouvernementale) ;

- M. Jan Zahradil, membre de la commission des affaires étrangères de la Chambre des députés, vice-président de l'ODS représentant titulaire tchèque à la Convention pour l'avenir de l'Europe ;

- M. Josef Zieleniec, ancien ministre des affaires étrangères de 1993 à 1997, sénateur ODS représentant titulaire tchèque à la Convention pour l'avenir de l'Europe.

- M. Jaroslav Zverina, également vice-président de la commission et membre de l'ODS (parti démocratique civique ou droite libérale, principal parti d'opposition).

¬ Suède

- M. Carl B. Hamilton, vice-président du comité consultatif pour les affaires européennes (parti libéral) ;

- M. Hans Hegeland, administrateur à la commission parlementaire des finances ;

- M. Gunnar Hökmark, président de la commission parlementaire des affaires constitutionnelles (parti modéré) ;

- M. Henrik Järrel, député membre de la commission des affaires constitutionnelles (groupe d'amitié avec la France) ;

- M. Kenneth Kvist, ancien représentant à la Convention (parti de la Gauche) ;

- M. Kenneth Lantz, député (groupe d'amitié avec la France) (parti chrétien-démocrate) ;

- M. Sören Lekberg, (social-démocrate), ancien député ;

- M. Axel Moberg, directeur adjoint pour les questions politiques (CIG) au ministère des affaires étrangères ;

- Mme Anna-Maria Narti, députée, membre du groupe d'amitié Suède-France ;

- M. Magnus Robach, directeur d'Europe au ministère des affaires étrangères ;

- M. Ingvar Svensson (chrétien démocrate), membre de la Commission des affaires constitutionnelles.

Annexe 2 :
Tableau comparatif des positions nationales
sur le projet de Constitution européenneAnnexe-1

Avertissement : les positions recensées dans ce tableau le sont à titre indicatif, selon les informations recueillies au cours des missions des rapporteurs. Elles ne sauraient engager officiellement les gouvernements des Etats concernés.

 

Règles de vote au Conseil

Champ de la majorité qualifiée

Composition de la Commission

Référence à l'héritage chrétien

Composition du Parlement européen

Procédure de révision

Défense

Procédure budgétaire

Allemagne

Soutien à la règle de la double majorité proposée par la Convention (50% des Etats représentant 60% de la population).

Favorable à l'extension de la règle de la majorité qualifiée, notamment dans le domaine de la PESC.

Favorable au compromis proposé par la Convention. En cas de remise en cause du principe d'une Commission resserrée, l'Allema-gne revendiquerait deux commissaires.

Cette question ne constitue pas un « point dur » pour l'Allemagne.

Ouverte à la discussion sur les seuils minimaux.

____

Favorable aux coopéra-tions structurées et à la clause de défense mutuelle.

Attachée aux prérogatives du Parlement européen contenues dans le texte de la Convention, tout en faisant preuve d'une relative flexibilité.

Belgique

Soutien à la formule de la Convention (50/60) mais ce n'est pas le point essentiel. Piste de compromis avec les majorités superqualifiées (60/66) pour les perspectives financières.

Favorable à une généralisation de la majorité qualifiée à toutes les politiques de l'Union et donc pour toutes les extensions proposées par la Convention et la CIG. C'est le point essentiel de la Constitution.

Favorable à une réduction ou, dans un compromis, à une clause de rendez-vous. Mme Neyts (VLD) est pour un commissaire par Etat membre.

Opposition du gouvernement et d'une forte majorité parlementaire qui approuvent en revanche la formulation retenue par la Convention. M. Mahoux (PS) juge l'article 1-51 (contacts réguliers avec les Eglises) superflu
(1-47 sur la société civile) et dangereux (ingérence).

____

Favorable à une majorité superqualifiée pour la partie III relative aux politiques de l'Union.

Favorable aux avancées de la Convention et au compromis obtenu le 12 décembre 2003 lors du Conseil européen de Bruxelles.

M. Mahoux accepterait l'égalité du Conseil et du Parlement européen.

Estonie

Relative indifférence à l'égard des règles de vote au Conseil. Pas d'opposition à la règle prévoyant 50% des Etats représentant 60% de la population, même si le gouvernement estonien préférerait la parité entre les deux critères.

Réserve de principe à l'égard d'une approche fédérale et d'une extension trop forte de la majorité qualifiée. Accord pour étendre la majorité qualifiée à la PESC.

Volonté de conserver l'unanimité en matière fiscale (avantages concurrentiels).

Un commissaire par Etat membre. Peu importe le nombre final de commissaires.

La référence à l'héritage chrétien n'est pas souhaitée par les Estoniens.

Favorable à un relèvement du plancher de 4 à 5 pour obtenir 6 parlementaires européens.

La clause passerelle est jugée inacceptable.

Une politique commune n'a d'intérêt que si elle est complémentaire de l'OTAN.

Le dernier mot ne doit pas revenir au Parlement européen en matière de dépenses.

Finlande

Favorable à une double majorité fixée à 50% des Etats représentant 50% de la population. Très attachée au principe d'une parité entre les deux critères.

Favorable à l'extension du champ de la majorité qualifiée. Souhaite néanmoins le maintien de l'unanimité dans les domaines de la défense et des accords commerciaux touchant au régime social.

Favorable au principe d'un commissaire par Etat membre, sans différenciation de statut ou de droit de vote

Question considérée comme peu importante ne faisant pas l'objet d'une position stricte.

Plutôt favorable à un seuil minimal de cinq parlementaires par Etat membre.

____

Réservée à l'égard de la clause de défense mutuelle en raison de la neutralité du pays. Favorable aux coopérations structurées.

Favorable à un équilibre entre les pouvoirs du Conseil et ceux du Parlement européen.

Grèce

Favorable à une double majorité « simple » (50 % des Etats représentant 50 % de la population), mais peut accepter la formule de la Convention (50/60) en cas d'accord unanime.

Favorable à l'extension de la majorité qualifiée en matière sociale, de justice et d'affaires intérieures et de PESC.

Un commissaire par Etat membre.

M. Avgerinos (PASOK) juge cepen-dant qu'une réduction sera, à terme, nécessaire.

Opposition du gouvernement grec. Mme Giannakou, parle-mentaire ND, est en faveur d'une référence aux valeurs chrétiennes, ainsi qu'aux civilisations grecque et romaine.

Favorable à l'élévation du seuil minimal de parlementaires européens de quatre à cinq.

Favorable à un assouplissement de la procédure de révision pour la partie III (5/6e des Etats, sous réserve de ne pas porter atteinte à la répartition des compétences).

Favorable à la clause de défense mutuelle.

____

Hongrie

Favorable au principe d'une double majorité paritaire entre les Etats et la population (60 % des Etats et 60 % de la population), mais reste ouverte à toute autre formule, y compris celle proposée par la Convention

Pas de position arrêtée, mais a exprimé le souhait du maintien de l'unanimité pendant six ans pour le budget communau-taire, ainsi que dans le domaine de l'éducation et de la culture

Favorable au principe d'un commissaire par Etat membre, sans différenciation de statut ou de droit de vote, avec éventuellement une clause de rendez-vous à partir de 2009, au terme de laquelle la Commission aurait une composition réduite

Absence, à ce jour, de position officielle du gouvernement, mais pression de l'opposition en faveur de cette référence

Pas de souhait particulier

____

Favorable au compromis de la présidence italienne et à un mécanisme de rattrapage pour les Etats n'ayant pu initialement participer à des coopérations renforcées

Souhait de préserver un équilibre des pouvoirs entre le Parlement européen et le Conseil. Favorable au maintien du vote à l'unanimité pour la définition du cadre financier pluriannuel

 

Règles de vote au Conseil

Champ de la majorité qualifiée

Composition de la Commission

Référence à l'héritage chrétien

Composition du Parlement européen

Procédure de révision

Défense

Procédure budgétaire

Irlande

Soutien à la règle de la double majorité proposée par la Convention (50% des Etats représentant 60% de la population)

Maintien de l'unanimité sur les questions fiscales ainsi que sur l'harmonisation des règles de droit pénal

Soutien au principe d'une Commission resserrée, à condition que soit respectée une stricte égalité des règles de rotation entre les Etats membres. Ne s'opposerait pas la fixation d'une période de transition prévoyant un commissaire par Etat membre.

Favorable à une référence au christianisme mais il ne s'agit pas d'un « point dur » pour les Irlandais.

____

____

Pas d'opposition à une Europe de la défense pour autant que cela n'affecte pas la neutralité de l'Irlande

____

Italie

Favorable au texte de la Convention. Ouverture possible à une variation des seuils (mais ne pas rendre plus difficile la prise de décision). Réflexion possible sur l'idée de majorités « superqualifiées » dans certains domaines. La perspective de l'entrée possible de la Turquie dans l'Union ne doit pas influer sur le choix du système de décision (avis parlementaire)

Soutien au texte de la Convention. Favora-ble à l'extension du champ de la majorité qualifiée. Importance du maintien des clauses passerelles comme « respiration » possible du texte constitutionnel.

Favorable au texte de la Convention. Toutefois, nécessité de maintenir, dans l'hypothèse d'un commissaire par Etat membre, la perspective précise d'une Commission resserrée. Prône également la possibilité d'une hiérarchisation interne, organisée sous l'autorité du Président de la Commission (avis parlementaire).

Favorable à une référence à l'héritage chrétien. N'en fait pas un point de blocage.

Ouvert à revoir le seuil minimal prévu par le texte de la Convention.

Favorable à l'assouplissement des conditions de révision (en particulier pour la troisième partie).

Favorable aux coopérations structurées, à la clause de défense mutuelle

Favorable au maintien des droits du Parlement européen (avis parlementaire).

 

Règles de vote au Conseil

Champ de la majorité qualifiée

Composition de la Commission

Référence à l'héritage chrétien

Composition du Parlement européen

Procédure de révision

Défense

Procédure budgétaire

Lettonie

Soutien à la double majorité. Cependant, la Lettonie souhaiterait la parité des deux critères.

Hostilité de principe à l'égard d'un renforcement du champ de la majorité qualifiée, sans que cela constitue un enjeu prioritaire dans la négociation.

Favorable au principe d'un commissaire par Etat membre, disposant d'un portefeuille et d'un droit de vote.

La Lettonie n'y est pas favorable.

Préservation de l'acquis du traité de Nice. Seuil minimal à 5 députés, soit au moins 8 députés pour la Lettonie.

Pas de souhait particulier.

Favorable à la PESD, en complémentarité et non pas en concurrence avec l'OTAN.

La Lettonie est proche de la position française.

Luxembourg

Favorable au texte de la Convention. Ouverture possible à une variation des seuils (mais préfère seuils de la Convention). Idée de majorités « superquallifiées » pour certains sujets (évoquée au ministère des affaires étrangères).

Ce ne doit pas être un point de blocage (un report à 2014 serait acceptable).

Soutien aux propositions de la Convention. Favorable à l'exten-sion du champ de la majorité qualifiée, y compris pour la PESC et la coopé-ration pénale (mais réserve forte en ce qui concerne le domaine fiscal ; souhaite des préci-sions). Importance des « clauses passerelles ».

Favorable au texte de la Convention. Accepterait éventuellement un commissaire par Etat si une date précise était fixée pour une Commission resserrée.

Soutient l'équilibre de la formulation proposée par la Convention. Aurait pu accepter une référence à l'héritage chrétien (avis des parlementaires rencontrés).

Très fortement attaché au maintien à six du seuil minimal de parlementaires européens par pays.

Pourrait envisager un assouplissement des modalités de révisions (pour la troisième partie). Mais maintenir les droits des parlements nationaux (avis des parlementaires rencontrés).

Favorable aux coopérations structurées.

Favorable au maintien des droits du Parlement européen (avis des parlementaires rencontrés).

Pays-Bas

Favorable à la règle de la double majorité proposée par la Convention (50% des Etats représentant 60% de la population)

Maintien de l'unanimité sur les perspectives financières ainsi que sur l'harmonisation des règles de droit pénal

Le gouvernement soutient le principe d'une Commission resserrée (proposition de la Convention) sur la base d'une rotation égalitaire entre les Etats membres.

Position différente exprimée par le Parlement qui soutient le principe d'un commissaire par Etat membre.

____

Souhaite limiter l'augmentation du nombre des parlementaires européens.

Pas opposés à un assouplissement pour la troisième partie.

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Pologne

Opposé au principe de la double majorité. Attachée au maintien du système de pondération des voix prévu par le Traité de Nice.

Favorable aux propositions de la Convention.

Soutien le principe d'un commissaire par Etat membre.

Soutien actif à une référence chrétienne. Il s'agit d'une revendication forte de la Pologne.

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____

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Portugal

Préférence pour une double majorité « simple » de 50% des Etats représentant 50% de la population.

Ne doit pas s'étendre au choix du Président du Conseil européen

Favorable au principe d'égalité entre les commissaires.

Soutien mesuré

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Favorable à une politique de défense européenne crédible et complémentaire de l'OTAN

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République tchèque

Très attachée à la règle de la double majorité paritaire, cor-respondant à 60 % des Etats et 60 % de la population. En l'absence de consensus sur ce point, préférerait plutôt le maintien des dispositions retenues à Nice.

Opposition à une extension du champ de la majorité qualifiée en matière fiscale (sans pour autant refuser, a priori, les propositions de la Convention).

Favorable au principe d'un commissaire par Etat membre, sans différenciation de statut ou de droit de vote, avec éventuellement une clause de rendez-vous à partir de 2009 (la Commission pourrait à partir de là avoir une composition réduite.

Ne constitue pas, a priori, une priorité, même si le ministre des affaires étrangères, de sensibilité chrétienne démocrate, s'y est montré favorable.

Soutien la demande de plusieurs petits Etats d'accroître le nombre de leurs sièges.

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Favorable à de nouvelles coopérations renforcées, notamment en matière de défense. Attachée à la règle de la majorité qualifiée et à la transparence dans la mise en œuvre de ces coopérations.

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Royaume-Uni

Favorable à la règle de la double majorité (50 % des Etats représentant 60 % de la population), mais ouverture sur la question des seuils. Pas d'opposition au maintien du système de Nice (pondération des voix) pendant une période transitoire.

Existence de lignes rouges britanniques. Opposition à une extension du champ de la majorité qualifiée, notamment en matière de PESC, de fiscalité et d'harmonisation des règles de droit pénal.

Soutien au principe d'une Commission resserrée., mais ouverture quant à la possibilité d'un commissaire par Etat membre pendant une période transitoire.

Soutien à la formulation proposée par la Convention. N'en fait pas un point de blocage.

____

Plutôt opposé aux clauses passerelles. Souhaite garantir le rôle des parlements nationaux dans la procédure de révision de la Constitution.

Favorable au texte de la Convention et au compromis obtenu le 12 décembre 2003 lors du Conseil européen de Bruxelles.

Favorable à la suppression du dernier mot au Parlement européen et souhaite une égalité stricte entre les pouvoirs du Conseil et ceux du Parlement européen.

 

Règles de vote au Conseil

Champ de la majorité qualifiée

Composition de la Commission

Référence à l'héritage chrétien

Composition du Parlement européen

Procédure de révision

Défense

Procédure budgétaire

Suède

En l'absence d'accord, les dispositions adoptées à Nice pourraient être retenues.

Hostilité à l'extension du champ de la majorité qualifiée, en particulier dans les domaines social et fiscal.

Favorable au principe d'un commissaire par Etat membre, sans différenciation de statut ou de droit de vote.

La Suède n'est toutefois pas opposée à une révision ultérieure du mode de fonctionnement de la Commission.

Opposition largement partagée.

Pas de souhait particulier.

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Favorable aux coopérations renforcées dans les conditions précisées par le projet de Traité.

Favorable à la fixation des contributions des Etats membres sur la base de leur PIB.

* voir également, en annexe 2, le tableau comparatif des positions nationales

1 () Vice-présidente (Nouvelle Démocratie) de la commission des affaires européennes du Parlement grec, ancien ministre de la Santé et parlementaire européen.

2 () Vice-président (PASOK) de la commission des affaires européennes du Parlement grec, ancien ministre de la Santé et parlementaire européen.

3 () Directeur chargé du suivi de la CIG à la direction générale des affaires européennes.

4 () Directrice adjointe du cabinet de M. Tassos Yannitsis, ministre délégué aux affaires européennes.

5 () Professeur titulaire de la chaire Jean Monnet à l'Université Panteion d'Athènes.

6 () Professeur à l'Université d'Athènes et ancien secrétaire général du ministère des affaires étrangères grec.

7 () Le « Forum national sur l'Europe » permet à la population de s'exprimer sur les sujets européens, soit directement, soit par l'intermédiaire d'organisations représentant la société civile.

8 () Le Fine Gael, parti d'opposition, défend même une position très favorable à l'édification d'une Europe de la Défense.

9 () En 2002, l'Irlande a capté un quart des investissements américains en Europe, soit 65% des flux entrant dans le pays.

10 () Mme Gisela Stuart (travailliste), ancien membre du Praesidium de la Convention, a présidé le groupe de travail sur le rôle des parlements nationaux dans la prise de décision européenne mais était favorable au carton rouge et non au carton jaune finalement adopté par la Convention.

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