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N° 1594

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 mai 2004

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),

sur la présence et l'influence de la France

dans les institutions européennes,

ET PRÉSENTÉ

par M. Jacques FLOCH,

Député.

________________________________________________________________

(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. François Guillaume, Jean-Claude Lefort, secrétaires ; MM. Alfred Almont, François Calvet, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin.

SOMMAIRE

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Pages

RESUME DU RAPPORT 7

INTRODUCTION 15

PREMIERE PARTIE : LA PROGRESSIVE DILUTION DE LA PRESENCE FRANCAISE AU SEIN DES INSTITUTIONS EUROPEENNES 19

I. LA FIN DE « L'AGE D'OR » DE LA PRESENCE FRANCAISE 21

A. D'une présence héritée... 21

1) L'influence politique d'un pays fondateur 21

2) L'influence française sur le modèle administratif communautaire 24

3) Une influence linguistique : la place prépondérante du français 24

B. ... à une présence contestée 25

1) Les conséquences institutionnelles des élargissements successifs 26

a) Les dispositions du traité de Nice 26

b) Les réformes envisagées par le projet de Constitution européenne 27

2) Le déclin de l'utilisation de la langue française 28

a) L'évolution récente 28

b) Les perspectives 29

3) La remise en cause chronique du siège du Parlement européen à Strasbourg 31

a) La gestion, par le Parlement européen, de son triple siège 31

b) Les scénarios d'avenir 34

4) La France, mauvais élève de l'Europe 38

a) L'image de la France en Europe 39

(1) L'absentéisme au Parlement européen 39

(2) L'inégale participation des ministres au Conseil de l'Union 41

b) La transposition des directives 47

c) Les procédures d'infraction au droit communautaire 48

d) Les aides d'Etat 49

II. UNE PRESENCE QUI DOIT S'ADAPTER AUX DEFIS DE L'ELARGISSEMENT 51

A. Une présence politique affaiblie au Parlement européen 51

1) La dispersion des députés français au sein des groupes politiques 52

a) De l'utilité de siéger dans les groupes majoritaires 52

b) Perspectives 53

2) Une présence faible aux postes stratégiques 54

a) Les présidences des commissions 54

b) Les postes de coordinateurs 56

3) Une participation inégale aux travaux législatifs 56

B. Un potentiel administratif satisfaisant 57

1) Une répartition globalement satisfaisante des fonctionnaires français au sein des institutions de l'Union européenne 58

a) Au sein de l'administration du Parlement européen 58

b) Au sein de l'administration de la Commission 59

c) Au Conseil de l'Union 61

d) A la Cour de justice des Communautés européennes et au Tribunal de première instance 61

e) Dans les institutions financières de l'Union 61

2) Une présence française qui doit toutefois s'adapter à l'évolution du contexte européen 62

a) L'impact de l'élargissement 62

b) La réforme du statut des fonctionnaires européens 63

SECONDE PARTIE : UNE PRISE DE CONSCIENCE TARDIVE MAIS REELLE DE LA MONTEE EN PUISSANCE DES ENJEUX EUROPEENS 65

I. PARIS - BRUXELLES : LE CHOC DES CULTURES 67

A. L'institutionnalisation du « lobbying » dans le processus décisionnel européen 67

1) Bruxelles, capitale du lobbying 67

a) L'officialisation des lobbies 68

b) Les modalités d'intervention des lobbies 70

(1) Le lobbying à la Commission 70

(2) Le lobbying au Parlement européen 70

(3) Le lobbying au Conseil de l'Union 71

2) La participation tardive des Français à la communauté « d'influenceurs » 71

a) Le frein culturel à l'égard du lobbying 71

b) Vers un réveil français ? 74

(1) La représentation des entreprises françaises à Bruxelles 74

(2) La représentation des syndicats et organisations professionnelles 77

(3) La représentation des collectivités territoriales 79

(4) Les médias accrédités auprès des institutions européennes 82

B. Forces et faiblesses du dispositif français de suivi des négociations communautaires 85

1) La définition des positions françaises de négociation 86

a) Le rôle du SGCI 86

b) Le rôle de la Représentation permanente auprès de l'Union européenne 87

2) Une information insuffisante des députés français du Parlement européen 88

II. LA MARGINALISATION PERSISTANTE DES AFFAIRES EUROPEENNES AU NIVEAU NATIONAL 91

A. Au niveau politique 91

1) Au niveau gouvernemental 91

a) Rôle et statut du ministre des affaires européennes 91

b) L'insuffisante prise en compte du « fait européen » par les administrations nationales : l'exemple du ministère de l'intérieur 94

2) La réalité du contrôle parlementaire sur les affaires européennes 94

3) La responsabilité des partis politiques 97

B. Au niveau administratif : formation et carrières des fonctionnaires 98

1) Au niveau de la formation initiale 98

a) Les enjeux de l'européanisation de l'ENA 98

b) La préparation aux concours communautaires 100

(1) Les performances des Français aux concours de l'Union européenne 100

(2) L'enjeu stratégique que représente un centre de préparation 101

2) Au niveau du suivi des fonctionnaires en poste dans les institutions européennes 103

a) Le recrutement des Experts nationaux détachés (END) 104

b) Quel suivi pour les fonctionnaires français en poste dans les institutions européennes ? 104

CONCLUSION 107

TRAVAUX DE LA DELEGATION 109

ANNEXES 121

Annexe 1 : Liste des personnes auditionnées 123

Annexe 2 : Institutions et organes de l'Union européenne 129

Annexe 3 : Circulaire du 21 mars 1994 relative aux relations entre les administrations françaises et les institutions de l'Union européenne 135

RESUME DU RAPPORT


RESUME DU RAPPORT

La France, pays fondateur, a marqué la construction européenne de son empreinte. Ce que l'on peut qualifier « d'âge d'or » de la présence française est ainsi le fait d'une triple influence : politique, administrative et linguistique.

- L'influence politique est avant tout celle des Pères fondateurs : Jean Monnet, Robert Schuman (et avant eux Aristide Briand, Louise Weiss, les précurseurs de l'idée européenne). Ils ont imaginé la méthode communautaire, qui a aussi un autre nom : la « méthode Monnet ». Au plus haut niveau, les institutions ont été ou sont encore présidées par des Français : 2 présidents de la Commission européenne (pendant une durée totale de 14 ans), six présidents du Parlement européen sur 25. Et depuis peu, la présidence de la Banque centrale européenne.

- L'influence de la France porte également sur l'architecture administrative communautaire ainsi que sur le droit. Qu'il s'agisse de l'organisation de la Cour de Justice européenne, des règles de procédure ou encore des constructions jurisprudentielles, l'influence du droit administratif français est bien réelle sur l'édification de la « Communauté de droit » qu'est l'Union européenne. A titre d'exemple, les « principes généraux du droit communautaire » dégagés par le juge communautaire ne sont pas sans lien avec les principes généraux du droit dégagés jadis par le Conseil d'Etat français.

- L'influence linguistique, enfin. Un certain nombre de raisons objectives ont permis au Français d'occuper une place privilégiée dans les débuts de la construction européenne. C'est en premier lieu la localisation géographique des institutions européennes qui a joué en faveur de notre langue : Bruxelles, Strasbourg et Luxembourg sont trois villes françaises ou francophones.

Aujourd'hui pourtant, cette présence « héritée » est parfois contestée, pour plusieurs raisons :

- La première raison résulte des conséquences institutionnelles des élargissements successifs. Il s'agit d'une donnée arithmétique qui a provoqué un effet de dilution (et non pas de diminution) de la présence française. L'augmentation du nombre des pays membres a naturellement conduit à un rééquilibrage des nations au sein des institutions, qu'il s'agisse de la réduction du nombre des parlementaires européens, de la composition de la Commission européenne (la perte de notre second commissaire) et de la réforme des règles de vote au Conseil.

- Un deuxième indicateur d'influence est celui de l'utilisation de la langue française. Force est de constater que le français recule en Europe, même si notre langue n'est pas menacée dans son statut de deuxième langue la plus utilisée au sein des institutions. Le rapport pour l'année 2003 adressé au Parlement par la Délégation générale à la langue française et aux langues de France confirme malheureusement des statistiques préoccupantes : en à peine cinq ans, de 1997 à 2002, on est en effet passé à la Commission de 40 % de documents initialement rédigés en Français à seulement 29 %. Au Conseil, l'évolution est encore plus prononcée : 42 % en 1997 contre 18 % en 2002.

- L'image de la France est souvent mise à mal. L'arrogance française est une réputation qui nous colle à la peau, à tort ou à raison. C'est toutefois une donnée subjective dont il faut tenir compte. En outre, il faut bien reconnaître que dans plusieurs domaines, notre pays est le mauvais élève de l'Europe.

* L'absentéisme de nos responsables politiques, tant au Parlement européen qu'au Conseil des ministres. Au Parlement européen, la France se situe au 14e rang des membres de l'Union (dans l'Europe des quinze) avec un taux d'absence de 20 % aux sessions plénières de Strasbourg. Au Conseil des ministres, nous sommes également avant-derniers (ex-æquo avec l'Autriche et le Danemark) avec 18,9 % d'absence en 2003, ce qui représente 15 absences sur 79 réunions des formations sectorielles du Conseil.

* La transposition des directives : malgré les efforts déployés par le Gouvernement, la situation ne s'améliore pas. Dans le domaine du marché intérieur, nous sommes passés du 10ème au 15ème rang, à égalité avec la Belgique et l'Allemagne.

* Les procédures d'infraction au droit communautaire : fin octobre 2003, la France répondait à 135 procédures d'infraction, soit le deuxième nombre le plus élevé de l'ensemble de l'Union après l'Italie (146). La France et l'Italie totalisent 28 % des procédures d'infraction, soit plus que le Danemark, la Finlande, la Suède, le Luxembourg, le Portugal, l'Irlande et les Pays-Bas réunis.

* Les aides d'Etat : en montants absolus, la France arrive en deuxième position des pays qui ont versé le plus d'aides, avec près de 10 milliards d'euros (contre 13,3 milliards d'euros pour l'Allemagne).

Enfin, on ne saurait parler d'une présence française contestée sans évoquer la remise en cause chronique du siège du Parlement européen à Strasbourg. Sur le papier, Strasbourg n'est pas en danger puisqu'un protocole annexé au traité d'Amsterdam énonce que « le Parlement européen a son siège à Strasbourg où se tiennent les douze périodes de sessions plénières mensuelles, y compris la session budgétaire ». Pourtant, chaque année, la France doit se battre pour que le Parlement européen respecte ses engagements. C'est la raison pour laquelle il est urgent d'amplifier notre mobilisation pour préserver et conforter la vocation européenne de Strasbourg. De ce point de vue, les derniers mois ont été marqués par des résultats encourageants :

- engagement de l'Etat à travers la signature d'un nouveau contrat triennal « Strasbourg, ville européenne », pour la période 2003-2005 ;

- décision prise par le Conseil des ministres du 22 octobre 2003 de retenir Strasbourg comme site unique de l'ENA à partir de la rentrée 2005 ;

- décision prise par le Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire (CIADT) pour la réalisation de la deuxième phase du TGV Est-européen.

Tous ces efforts doivent être poursuivis, amplifiés et activement soutenus, tant politiquement que financièrement. Au-delà, il faut aller de l'avant et promouvoir un projet mobilisateur pour l'avenir européen de Strasbourg. La France doit prendre une initiative politique, même si le sujet apparaît tabou à certains. La France ne peut envisager le transfert à Bruxelles du siège du Parlement européen, car cela signerait le début d'une réelle perte d'influence. Un scénario d'avenir, régulièrement évoqué, consisterait à faire de Strasbourg la capitale européenne du droit, en y installant, en plus du siège du Parlement européen, la Cour de Justice de l'Union européenne, actuellement située à Luxembourg. Cette hypothèse n'est toutefois réaliste qu'à certaines conditions, notamment la nécessité d'obtenir un accord du Luxembourg, un pays qui a toujours soutenu la France dans la défense de Strasbourg. Une contrepartie satisfaisante consisterait à établir à Luxembourg le siège du Conseil européen, dans la perspective de l'instauration d'un Président stable de cette institution. Une telle option présenterait l'avantage d'un rééquilibrage entre les trois capitales européennes, avec un pôle d'impulsion politique à Luxembourg et un pôle juridictionnel à Strasbourg. Le dossier de Strasbourg n'est pas une affaire de droite ou de gauche, mais une question d'intérêt général, pour le rayonnement de Strasbourg et celui de la France.

· Quels sont les défis que pose l'élargissement à la présence française ?

Au niveau politique, tout d'abord :


Le premier défi est celui de notre présence au Parlement européen. Le 29 avril dernier, lors de sa conférence de presse sur l'Europe, le Président de la République a tenu des propos sans ambiguïté en affirmant que « le poids et l'influence de la France au sein du Parlement européen ne sont pas ce qu'ils devraient être ». Et pour cause :

La dispersion des élus français au sein des 7 groupes politiques et des non-inscrits est extrêmement préjudiciable en raison de l'application, au sein de l'Assemblée de Strasbourg, de la « règle d'Hondt » qui attribue les postes en fonction de l'importance numérique des groupes politiques. Or, sous la législature 1999-2004, seulement 40 de nos 87 députés européens étaient membres des trois groupes politiques les plus influents : 21 pour le PPE, 18 pour le PSE et 1 seul pour les Libéraux. Plus d'un député français sur deux étaient donc membres des 4 groupes politiques moins influents ou siégeaient parmi les non-inscrits.

En conséquence, les Français sont peu présents aux postes de responsabilités : seulement 2 présidences de commissions sur 17 (contre 4 pour l'Italie, et 3 pour l'Allemagne et pour le Royaume-Uni). Qui plus est, les députés français siègent peu dans les commissions dites législatives, c'est-à-dire celles où le Parlement européen dispose d'un pouvoir de codécision avec le Conseil de l'Union : ils ne sont que 7 sur 80 à la Commission budgétaire, 9 sur 83 à la Commission économique et monétaire et 13 sur 109 à la Commission de l'Industrie. Les Français siègent en revanche en nombre dans les commissions plus « prestigieuses » : affaires étrangères et affaires constitutionnelles, par exemple.

La participation des eurodéputés français aux travaux législatifs est également moindre que leurs homologues. Si l'on se réfère au nombre de rapports confiés à des Français, on constate un taux d'activité de 1,36 rapport (sur la période 1999-2003) contre 3,45 rapports pour un député néerlandais et 3 rapports pour un député allemand.

Avec l'élargissement, l'influence des députés français va se diluer. Il est donc urgent et indispensable de compenser cette dilution par une participation plus active de nos députés. Cela n'est possible qu'à deux conditions : d'une part, qu'ils se rassemblent - dans la mesure du possible - au sein des groupes majoritaires du Parlement européen et d'autre part, qu'ils siègent en priorité dans les commissions législatives. Le Parlement européen est le véritable lieu du pouvoir au sein de l'Union et la France ne pourra plus longtemps faire l'impasse sur une institution devenue incontournable.

Au niveau administratif, ensuite :


La présence des fonctionnaires communautaires de nationalité française au sein des institutions de l'Union est globalement satisfaisante. Beaucoup de nos partenaires envient notre position. Il est vrai qu'avec environ 3 700 personnes sur un total de 30 725 agents communautaires, la France occupe 12 % des effectifs, contre 9,3 % pour les Allemands et seulement 7,1 % pour les Britanniques. 45 % de notre effectif est composé de fonctionnaires de catégorie A.

Au Parlement européen, les Français représentent 12,75% des effectifs, mais la France arrive derrière les Allemands, les Italiens et les Britanniques en nombre d'administrateurs. Au niveau qualitatif, deux directions générales sont dirigées par des Français, mais qui ne sont pas en prise directe avec l'activité législative.

A la Commission, la situation française est confortable. Avec 49 postes d'encadrement supérieur, la France se hisse au premier rang des 15 pays membres avant le 1er mai 2004. Contrairement à des idées reçues tenaces, les fonctionnaires français sont présents en nombre, dans les Directions générales stratégiques telles que « Marché intérieur », « Entreprises » et « Commerce ». Ils sont toutefois moins nombreux au sein de la DG « Concurrence » où la présence allemande est historiquement forte.

Au Conseil, la situation des Français est quantitativement moins privilégiée, avec une 4e place derrière les Belges, les Italiens et les Allemands. Mais la France est bien représentée au niveau de l'encadrement supérieur avec le Secrétaire général adjoint, le directeur général du service juridique, le directeur général des questions politiques et le chef de l'Etat-major de l'Union européenne.

Dans le contexte de l'élargissement, la préparation aux concours européens est un enjeu stratégique. Le Centre d'études européennes de Strasbourg (CEES) a ainsi sensiblement renforcé depuis un an son module de préparation, qui a concerné près de 1 500 candidats en 2003. Les premiers résultats sont très encourageants dans la mesure où le taux de réussite des candidats préparés a été de 43,65 % contre un taux de réussite global du concours, au niveau de l'Union, de seulement 4,10 %. Le CEES doit ainsi s'imposer comme un centre de référence européenne pour la préparation aux concours de l'Union et occuper une place stratégique au sein d'un véritable pôle européen d'administration publique à Strasbourg, incluant notamment l'ENA, qui sera définitivement installée dans la capitale alsacienne à compter de la rentrée 2005.

· Comment la France prend-elle en compte la montée en puissance des enjeux européens ?

La représentation des intérêts français à Bruxelles


Face à la montée en puissance des enjeux européens, les intérêts français s'organisent. Le réveil a été tardif, mais il est bien réel. Entre Paris et Bruxelles, le Thalys a rapproché la France de l'Europe mais n'a pas encore entièrement comblé le choc des cultures. En France, les affaires européennes restent trop souvent traitées comme des affaires étrangères et continuent parfois à être marginalisées dans la vie politique, administrative et médiatique nationale.

Le choc des cultures, c'est d'abord celui de notre frein culturel à l'égard du lobbying souvent considéré comme une activité suspecte voire contraire à l'éthique. Or à Bruxelles, le lobbying est une activité transparente et encadrée par des règles déontologiques. Bruxelles est devenue la capitale mondiale du lobbying : sur 3 à 4 km², on y recense près de 10 000 lobbyistes, 700 associations professionnelles, 400 groupes d'intérêts, 150 sociétés de Conseil, 150 cabinets d'avocats spécialisés dans les affaires européennes, 30 chambres de commerce et près de 1 000 journalistes accrédités. Quoiqu'en progression, la présence bruxelloise française demeure plus faible que celle de nos concurrents.

Toutefois, les signaux positifs se multiplient, à tous les niveaux :

- Au niveau des entreprises, le Cercle des Délégués Permanents réunit environ 150 lobbyistes français auprès de l'Union européenne et noue des contacts étroits avec notre Représentation permanente à Bruxelles qui organise régulièrement des réunions d'information avant et après les réunions du Conseil des ministres ;

- Au niveau des syndicats, cinq organisations françaises participent activement aux travaux de la Confédération européenne des syndicats (CES) et plusieurs d'entre elles ont ouvert un bureau de représentation permanente auprès de l'Union européenne ;

- Au niveau des collectivités territoriales, tant les régions que les départements et les communes ont compris l'intérêt à être présent à Bruxelles, dès lors que 60 % à 70 % de la gestion locale est influencée par l'Europe. Ce sont aujourd'hui 20 régions sur les 22 métropolitaines qui ont ouvert un bureau à Bruxelles.

- Un point faible, cependant, concerne le nombre des médias français accrédités auprès des institutions. Avec 70 journalistes accrédités, la France arrive en 5e position, loin derrière l'Allemagne qui en compte 147.

Le traitement politique des affaires européennes


- Chargé d'assurer une double fonction d'impulsion politique et de coordination administrative, le ministre délégué chargé des affaires européennes ne dispose pas aujourd'hui des moyens suffisants pour affirmer son autorité. Il est en effet placé sous la tutelle du ministre des affaires étrangères et ne dispose pas d'une administration propre. Or, les affaires européennes n'étant depuis longtemps plus des affaires étrangères, il serait souhaitable que le débat s'engage sur les réformes à mettre en œuvre pour lui donner l'autorité politique nécessaire à l'exercice de ses fonctions ;

- Une réflexion doit aussi être menée sur les moyens de renforcer l'implication du Parlement dans les affaires européennes et plus particulièrement sur le rôle et sur le statut des Délégations pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale et du Sénat et leur transformation éventuelle en une commission ad hoc non législative, à l'instar de ce qui existe dans les autres pays de l'Union ;

- Les partis politiques doivent, quant à eux, assumer leurs responsabilités en ce qui concerne la place qu'ils réservent aux questions européennes, notamment à l'occasion des investitures pour les élections européennes.

- Enfin, à la frontière entre l'administratif et le politique, il convient de mentionner un point faible du dispositif français qui est celui de la mauvaise circulation de l'information entre l'administration française (SGCI à Paris, et Représentation permanente à Bruxelles) et nos députés au Parlement européen. Ceux-ci se plaignent d'être destinataires trop tardivement de notes d'information souvent incomplètes et parfois difficilement utilisables. A Bruxelles, ils ont encore le sentiment que la Représentation permanente ne s'intéresse pas assez à eux. Face à l'augmentation des pouvoirs du Parlement européen, il est urgent de valoriser le rôle des parlementaires européens et de les associer le plus en amont possible aux orientations définies par le Gouvernement. A Paris, dans chaque ministère, le responsable chargé des relations avec le Parlement européen devrait devenir un point d'entrée opérationnel, ce qui n'est souvent pas le cas aujourd'hui. Mais de leur côté, les députés européens français doivent aussi mieux s'organiser au sein d'une délégation nationale plus structurée afin de faciliter la transmission des informations avec les administrations nationales, d'une part, et la Représentation permanente, d'autre part.

L'adaptation de l'administration aux affaires européennes


Dans ce domaine, le chantier de la réforme de l'Etat doit aussi être celui de l'ouverture de l'administration française à l'Europe. Un enjeu concerne en particulier la gestion des carrières des fonctionnaires qui choisissent d'exercer leur mobilité dans les institutions européennes, c'est-à-dire les Experts nationaux détachés (END) pour lesquels il est indispensable de bien préparer le départ vers Bruxelles et, surtout, de mieux gérer le retour à Paris. Les END sont, la majeure partie du temps, des fonctionnaires nationaux mis à disposition des institutions de l'Union (en grande majorité à la Commission) par leur ministère d'origine pour une durée maximum de quatre ans. Ils continuent à être payés par leur administration d'origine et bénéficient en plus d'une indemnité de la Commission. Les END sont des vecteurs d'influence souvent peu valorisés. Or, contrairement à leurs collègues qui ont le statut de fonctionnaires communautaires, eux ont vocation à conserver un contact régulier avec leur administration nationale. Pourtant, ce n'est que très peu le cas : pendant leur séjour à Bruxelles, ils vivent loin des yeux et loin du cœur de leur administration. La plupart du temps, leur mobilité vers les institutions européennes n'est pas valorisée ; elle est même au contraire pénalisante pour ceux qui veulent légitimement faire carrière. Afin d'éviter le renouvellement d'expériences malheureuses souvent entendues, des dispositions statutaires devraient favoriser ce type de mobilité, et un entretien de préparation au retour devrait être systématiquement organisé six mois avant l'échéance du contrat de l'END.

***

Contrairement à certaines idées reçues particulièrement tenaces, notre pays n'a pas à rougir de son rang et de son influence en Europe. Pour autant, certaines faiblesses structurelles pourraient nous nuire de façon irréversible si rien ne change.

Pays fondateur, la France doit mieux assumer ses responsabilités européennes. A l'égard de nos partenaires, l'accumulation de mauvaises performances entache significativement notre crédibilité et donc, notre capacité d'impulsion. A l'égard de l'opinion publique, il est irresponsable et démagogique de faire peser sur Bruxelles tous les maux de la France alors que l'Europe représente un levier sans équivalent pour moderniser notre pays et réformer ses structures. A une condition, toutefois : que la construction européenne retrouve l'estime et l'adhésion de nos concitoyens, et que les gouvernants assument enfin notre destin européen.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

450 millions d'hommes, de femmes et leurs enfants décident en ce début du XXIe siècle de vivre ensemble dans un espace de paix, de sécurité et peut-être, sûrement, de solidarité.

C'est une première pour l'humanité. Jamais un ensemble aussi vaste ne s'était jusqu'à présent construit sans avoir recours aux conflits, aux armes, à la guerre. Ceux qui existent encore ont tous eu des naissances dramatiques, certains sont apaisés, d'autres se maintiennent par la contrainte. Des traces profondes marquent leur histoire.

Le continent européen, depuis la plus haute Antiquité, a été le théâtre constant de violences qui apparaissent aujourd'hui comme des sortes de guerres tribales. Toutes les tentatives d'unification ont été vouées à l'échec : l'Empire romain, l'Empire de Charlemagne, les tentatives des Habsbourgs, des Bourbons, l'aventure napoléonienne, sans oublier Hitler ou omettre Staline. Les traces visibles de ces vaines ambitions existent encore, mais elles sont là pour nous rappeler que contraindre des peuples ou des nations n'est pas gage d'éternité, voire de simple durée.

Notre pays, la France, a été de presque toutes ces aventures ; elle a fait la guerre, ou a été contrainte de la faire, à tous les peuples d'Europe depuis deux millénaires. Mais la France a aussi vu naître les grands esprits qui imaginèrent l'Europe unie.

L'Europe repoussant les nationalismes outranciers, les petits intérêts, a construit en 50 ans des institutions capables de créer une nouvelle citoyenneté. Des Françaises et des Français ont été initiateurs, porteurs, garants de ces institutions. Avec cinq autres partenaires, ils ont été les fondateurs de l'Union européenne d'aujourd'hui. Particulièrement actifs, présents, imaginatifs, ils ont naturellement occupé les plus hautes responsabilités, les plus hautes charges, leur influence étant déterminante, naturellement déterminante au sein de l'Europe en construction.

Au fil des années, de l'élargissement de l'Union européenne à de nouveaux pays membres, la prééminence des pays fondateurs n'a pas diminué, mais elle s'est diluée. De grands Etats ayant une longue histoire, de glorieux passés, des règles de droit bien ancrées, ont apporté leurs contributions, leurs savoir-faire, leurs conceptions de l'organisation de la bonne gouvernance. L'Europe en devenir en a tenu compte, la France a su accepter ces rencontres diverses mais parfois il lui a semblé que le prix à payer était lourd et que la conséquence directe de ce qui apparaissait comme différent de ses habitudes était sa propre réforme.

Lentement, certains diront trop lentement, d'autres à la bonne mesure et je suis de ceux-là, l'Europe s'est construite. Mais a-t-on suffisamment dit aux Françaises et aux Français la réalité de cette construction, n'a-t-on pas joué trop savamment le refrain absurde : « tout va bien, c'est grâce à nous, tout va mal, c'est à cause de Bruxelles ».

A-t-on précisé le rôle des institutions : le rôle du Parlement européen, de la Commission, du Conseil des ministres, du Conseil européen, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Médiateur ?

Présence et influence.

La France dans l'Union européenne d'aujourd'hui a-t-elle la présence qu'elle mérite ? Cette présence est-elle suffisante en quantité et en qualité ? Garantit-elle à notre pays l'influence liée à notre histoire, à notre génie propre, à nos apports à la civilisation, à notre humanisme ?

La construction de l'Union européenne est un vif combat, et d'autres nations que la nôtre peuvent légitimement estimer avoir les mêmes possibilités que nous. Un tel sujet impose un large débat, fondé sur une analyse objective afin de ne pas tomber dans la caricature et dans les extrêmes.

En effet, pour certains, la France n'est plus rien ou pas grand chose, d'autant que les « eurocrates », sorte d'envahisseurs, exigent, imposent, dirigent, au mépris de toute démocratie et de notre glorieuse existence. Pour d'autres, la France ne peut être grande et influente dans le monde et en Europe que seule derrière ses remparts, les plus hauts possibles pour éviter d'autres envahisseurs, ceux de l'Est et surtout du Sud. Ceux-là oublient, par exemple, que si, sous Louis Philippe, on avait élevé de telles barrières, la France d'aujourd'hui... compterait moins de 35 millions d'habitants.

L'objet de ce rapport est de faire le point des questions qui nous sont posées, d'assumer quelques réponses, de porter le regard sur des situations exemplaires (positives ou négatives), de réinventer des propositions, de souligner les points forts qui sont nombreux, d'analyser les points faibles, ils existent.

Tout cela afin de ne pas tomber dans une forme de béatitude qui nous éliminera à terme des réalités européennes ou de verser dans un complexe absurde d'inexistence dont on aime parfois, trop souvent, s'enduire pour donner raison à la paresse intellectuelle et à la démagogie ambiante.

Ce travail n'a pu être mené à bien que grâce à l'amabilité et à la détermination de près d'une centaine d'interlocuteurs de tous niveaux. Tous rendent optimiste l'idée que l'on peut se faire de l'influence de la France dans l'Union européenne : il suffit aux Françaises et aux Français, et à ceux qui les représentent et les dirigent, de la vouloir.

PREMIERE PARTIE :
LA PROGRESSIVE DILUTION DE LA PRESENCE FRANCAISE AU SEIN DES INSTITUTIONS EUROPEENNES

La France exerce au sein de l'Union européenne l'influence d'un pays fondateur dont le rôle a été décisif dans la construction européenne. Or les élargissements successifs ont provoqué, arithmétiquement, un effet de dilution de notre présence physique à Bruxelles. La présence n'est plus un héritage, mais devient une conquête ; et pour que notre dilution ne se transforme pas en diminution, la France doit désormais définir une stratégie d'influence offensive, exemplaire et pragmatique.

*

* *

I.

II. LA FIN DE « L'AGE D'OR » DE LA PRESENCE FRANCAISE

Cinquante ans ont passé : les Communautés européennes sont devenues l'Union européenne, et les six Etats fondateurs ont été rejoints par dix-neuf autres. Depuis le 1er mai 2004, l'Europe est à nouveau unie et le rideau de fer est bel et bien définitivement tombé. Un nouveau chapitre de l'Histoire de l'Union s'écrit : les défis sont immenses et imposent à la France, pour être en mesure de faire entendre sa voix, de repenser sa présence, pour renforcer son influence.

A. D'une présence héritée...

La France a marqué la construction européenne de son empreinte. L'« âge d'or » de la présence française est ainsi le fait d'une triple influence : politique, administrative et linguistique.

1) L'influence politique d'un pays fondateur

Aristide Briand, Louise Weiss, Jean Monnet, Robert Schuman...Qu'ils aient été précurseurs de l'idée européenne ou « pères fondateurs » de l'Europe, ces visionnaires ont offert à la France un rôle de premier plan dans ce qui a constitué la plus belle aventure politique du XXème siècle. Aujourd'hui encore, notre pays conserve, par son statut de membre fondateur, une responsabilité particulière dans la conduite du projet européen. Ce sont en effet deux Français, Robert Schuman, alors ministre des affaires étrangères, et Jean Monnet, commissaire général au Plan, qui proposent, dès 1951, la création de la Communauté européenne du Charbon et de l'Acier et imaginent ce qui deviendra la méthode communautaire, que l'on appelle aussi la « méthode Monnet ».

Avec ses partenaires, notamment l'Allemagne, notre pays a su donner les impulsions nécessaires à l'approfondissement de la construction européenne, qu'il s'agisse de la création du Conseil européen en 1974 et de la mise en place du système monétaire européen en 1979, précurseur de la monnaie unique inscrite dans le traité de Maastricht.

Dans le domaine de la défense également, notre pays a joué un rôle moteur en adoptant la Déclaration commune de Saint-Malo, signée avec le Royaume-Uni en décembre 1998.

Des Français précurseurs de l'idée européenne

Les Français ont été parmi les premiers à penser l'idée européenne. Dans ses Mémoires, le duc de Sully propose ainsi en 1638 un « grand dessein » visant à organiser une Confédération européenne de quinze Etats placés sous la sauvegarde d'un Conseil de l'Europe. Au XIXe, c'est Victor Hugo qui popularise l'expression « Etats-Unis d'Europe », en 1851, lors d'un Congrès européen pour la paix. Enfin et surtout, c'est le ministre français des affaires étrangères, Aristide Briand, qui propose en septembre 1929, devant la Société des Nations (S.D.N.), d'établir « une sorte de lien fédéral » entre les peuples européens, selon un projet mis en forme par Alexis Léger, alors secrétaire général du Quai d'Orsay.

Depuis les débuts de la construction européenne, la France a toujours été très bien représentée au sein des institutions communautaires, et notamment à leurs présidences :

- le premier président de la CECA fut Jean Monnet ;

- la Commission européenne a été présidée à deux reprises par un Français : François-Xavier Ortoli, de 1973 à 1977 et Jacques Delors, de 1985 et 1995 ;

- six présidents du Parlement européen sur 25 ont été français : Robert Schuman (1958-1960), Alain Poher (1966-1969), Georges Spénale (1975-1977), Simone Veil (1979-1982), Pierre Pfimlin (1984-1987) et Nicole Fontaine (1999-2002) ;

- les Français sont également présents à la tête des institutions financières et monétaires européennes, qu'il s'agisse de la Banque centrale européenne avec la nomination récente de M. Jean-Claude Trichet, ou encore de la réélection de M. Jean Lemierre à la tête de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD)(1).

Les portefeuilles des membres français de la Commission européenne

Robert Marjolin (1958-1967) : affaires économiques et financières, relations extérieures, concurrence, administration.

Robert Lemaignen (1958-1962) : développement des pays et territoires d'Outre Mer, agriculture, transports.

Henri Rochereau (1962-1970) : affaires sociales, agriculture, transports.
Raymond Barre
(1967-1973) : affaires économiques et financières, office statistique.

Jean François Deniau (1967-1973)

- 1967-1970 : commerce extérieur et contrôle financier ;

- 1970-1973 : coordination des négociations d'élargissement et aide au développement.

Claude Cheysson (1973-1981) :

- 1973 à 1977 : politique de développement, coopération, budgets et contrôle financier ;

- 1977 à 1981 : développement; 1985-1989 politique méditerranéenne et relations Nord Sud.

François-Xavier Ortoli (1973-1984) :

- 1973 à 1977 Président de la Commission des Communautés européennes ;

- 1977 à 1984 : Vice-Président de la Commission, chargé des affaires économiques et financières, de crédit et des investissements et de l'office statistique.

Edgard Pisani (1981-1984) : développement

Jacques Delors (1985-1995) : affaires monétaires et président de la Commission européenne.

Christiane Scrivener (1989-1995) : douanes, fiscalité, consommation, questions relatives aux prélèvements obligatoires.

Yves-Thibault de Silguy (1995-1999) : affaires économiques et financières, affaires monétaires et industrielles, crédits et investissements, office statistique.

Edith Cresson (1995-1999) : science, recherche et développement, centre commun de recherche, ressources humaines, éducation, formation et jeunesse.

Pascal Lamy (depuis 1999) : commerce.

Michel Barnier (1999- mars 2004) : politique régionale et conférence intergouvernementale.

Jacques Barrot (depuis avril 2004) : politique régionale

2) L'influence française sur le modèle administratif communautaire

La construction européenne a nécessité la mise en place d'une administration spécifique, organisée et structurée. Ce que l'on dénonce parfois - généralement à tort - comme la technocratie bruxelloise, est en réalité largement inspiré par la tradition administrative française. Au lendemain de la guerre, l'Allemagne en reconstruction, y compris au niveau des structures administratives de l'Etat, pouvait d'ailleurs difficilement contrebalancer l'influence française.

Plusieurs caractéristiques de l'administration communautaire témoignent des similitudes avec l'organisation administrative française : modes de recrutement par concours, système de la carrière plutôt que de l'emploi, organisation hiérarchisée et pyramidale des services...

Le droit français a également marqué l'organisation communautaire de son empreinte. Qu'il s'agisse de l'organisation de la Cour de justice des Communautés européennes et des différents recours ouverts, des règles de procédure ou encore des constructions jurisprudentielles, l'influence du droit administratif français est bien réelle sur l'édification de la « communauté de droit » qu'est l'Union européenne. A titre d'exemple, les « principes généraux du droit communautaire » dégagés par le juge communautaire ne sont pas sans lien avec les principes généraux du droit jadis dégagés par le Conseil d'Etat français.

Le droit communautaire repose sur des concepts de droit continental. Les services juridiques du Conseil et de la Commission, depuis quelque temps chasses gardées des Français (mais pendant combien de temps encore ?), s'emploient à perpétuer une tradition désormais plus que cinquantenaire.

3) Une influence linguistique : la place prépondérante du français

Le régime linguistique des institutions européennes est défini par le premier règlement adopté par les institutions communautaires, le règlement n°1 du 15 avril 1958 - amendé à chaque élargissement - qui pose le principe d'égalité des langues officielles des Etats membres. Depuis le 1er mai 2004, le nombre de langues officielles de l'Union est ainsi passé de onze à vingt.

Un certain nombre de raisons objectives ont permis au français d'occuper une place privilégiée dans les débuts de la construction européenne. C'est en premier lieu l'emplacement géographique des principales institutions européennes qui a joué en faveur de notre langue : Bruxelles, Strasbourg et Luxembourg sont trois villes françaises ou francophones, ce qui a engendré une présence importante de personnels francophones dans les sièges des institutions communautaires. Les fonctionnaires européens se sont rapidement trouvés confrontés à la nécessité d'adopter une langue véhiculaire. Or dans l'Europe des Six, le français se trouvait être la langue officielle de trois pays (Belgique, France, Luxembourg). Enfin, le Royaume-Uni n'ayant rejoint les Communautés qu'en 1973, la question du recours à l'anglais ne s'est pendant longtemps pas posée. En revanche, les élargissements successifs qui sont intervenus depuis, et notamment l'élargissement de 1995 à l'Autriche, à la Finlande et à la Suède ont affaibli la place du français au sein des institutions de l'Union.

Le français remplit également la fonction de langue du droit de l'Union européenne. Les régimes linguistiques de la Cour de justice et du Tribunal de première instance sont déterminés par le règlement de procédure de chacune des juridictions. S'il existe bien autant de langues de procédure que de langues officielles de l'Union, la Cour ne délibère que dans une seule langue. Cette langue est traditionnellement le français. En conséquence, toutes les pièces déposées par les parties dans la langue de procédure sont traduites vers le français pour constituer un dossier interne de travail(2).

B. ... à une présence contestée

A vingt-cinq, la présence est nécessairement plus diluée qu'à six. D'un point de vue institutionnel, la présence française n'est pas pour autant diminuée ; c'est en revanche pour des raisons politiques que notre pays, parce qu'il ne donne pas l'exemple, voit son autorité et sa crédibilité s'affaiblir.

1) Les conséquences institutionnelles des élargissements successifs

C'est une donnée arithmétique : les élargissements successifs des Communautés puis de l'Union européenne ont un effet mécanique de dilution (et non de diminution) de la présence française. Alors que la France comptait pour 1/6ème des pays en 1957, elle ne représente aujourd'hui plus qu'1/25ème des Etats et environ 13 % de la population (contre encore 16 % avant l'élargissement du 1er mai). L'augmentation du nombre de pays membres a naturellement conduit à un rééquilibrage du poids des pays au sein des institutions, qu'il s'agisse du nombre des parlementaires européens, de la composition de la Commission européenne et de la réforme des règles de vote au Conseil.

a) Les dispositions du traité de Nice

Le traité de Nice, entré en vigueur le 1er février 2003, prévoit ainsi une réduction du nombre des députés européens français de 87 à 72. Pendant une période transitoire, avant l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, la France disposera toutefois de 78 sièges au Parlement européen.

A l'instar de l'Allemagne, de l'Espagne, de l'Italie et du Royaume-Uni, la France va également perdre, à compter de novembre 2004, son second commissaire.

En ce qui concerne enfin les règles de vote au Conseil, la Déclaration annexée au traité de Nice définit une pondération des voix par pays membres ; l'attachement de l'Espagne et de la Pologne aux règles de Nice souligne l'enjeu de tels mécanismes. Avant l'élargissement, la France, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni disposaient de dix voix et l'Espagne de 8 voix pour une majorité qualifiée acquise à partir de 62 voix sur 87. A partir du 1er novembre 2004, l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France et l'Italie disposeront chacun de 29 voix, alors que l'Espagne et la Pologne en compteront chacune 27(3). Le seuil requis pour atteindre la majorité qualifiée sera alors de 232 voix (sur un total de 321), représentant 62 % de la population de l'Union.

b) Les réformes envisagées par le projet de Constitution européenne

Le projet de Constitution européenne élaboré par la Convention sur l'avenir de l'Europe confirme la dilution de la représentation des pays les plus peuplés, dans la perspective d'une Europe plus intégrée.

Le nombre des parlementaires européens serait ainsi plafonné à 736(4), tandis que le traité constitutionnel propose une Commission resserrée à quinze membres(5), soit un nombre inférieur à celui des Etats membres. Fondé sur une rotation égalitaire, le système envisagé par la Convention signifie donc que la France n'aura un commissaire européen que dans une Commission sur deux. Rappelons toutefois que la Commission n'a pas vocation à représenter les Etats membres, mais bien l'intérêt général européen auquel notre pays est attaché.

S'agissant du Conseil de l'Union, le passage au mécanisme de la double majorité repose sur un équilibre entre l'égalité des Etats et la prise en compte d'un critère démographique. Pour la première fois depuis les débuts de la construction européenne, la France accepte un décrochage de sa parité historique avec l'Allemagne. Mais le système envisagé dans le projet initial élaboré par la Convention prévoit qu'un acte ne peut être adopté que s'il réunit au moins la moitié des Etats membres, représentant les 3/5ème de la population de l'Union.

En ce qui concerne la Cour de justice européenne, le projet de Constitution pérennise le principe d'un juge par Etat, confirmant ainsi une stricte égalité entre les pays membres.

On peut observer, tant à travers les débats de la Convention que lors des difficiles négociations qui ont suivi au sein de la Conférence intergouvernementale, le clivage (artificiel dans la pratique des institutions) entre les « grands » et les « petits » pays. Or l'élargissement du 1er mai 2004 transforme le rapport de forces de 5 grands pays sur 15 Etats membres (soit 33 % de grands pays) à seulement 6 grands pays sur 25 (soit 24 % de grands pays).

2) Le déclin de l'utilisation de la langue française

a) L'évolution récente

En 2002, le recul du français au profit de l'anglais s'est une nouvelle fois accentué, à la Commission et surtout au Conseil. Cette tendance se confirme, principalement depuis 1995, date du « petit » élargissement à l'Autriche, à la Finlande et à la Suède.

Le principal indicateur des usages linguistiques dans la pratique quotidienne des institutions est celui de la langue utilisée pour la rédaction initiale des textes, avant traduction. L'édition 2003 du rapport au Parlement sur l'emploi de la langue française(6) révèle à ce sujet des statistiques préoccupantes. En seulement cinq ans, de 1997 à 2002, on est ainsi passé à la Commission de 40 % de documents initialement rédigés en français à seulement 29 % en 2002. Au Conseil, la tendance est encore plus prononcée : 42 % en 1997 contre 18 % en 2002.

Le rapport souligne également que les présidences espagnole (1er semestre 2002), danoise (2ème semestre 2002) et grecque (1er semestre 2003) ont privilégié l'anglais. Faut-il aussi rappeler que les négociations relatives à l'élargissement se sont déroulées essentiellement en anglais, y compris avec les représentants des pays membres ou observateurs de l'Organisation internationale de la Francophonie (Lituanie, Pologne, République tchèque, Slovaquie et Slovénie).

Langues de rédaction d'origine des documents à la Commission

 

anglais

français

allemand

autres

1996

45,7 %

38 %

5 %

12 %

1997

45 %

40 %

5 %

9 %

1998

48 %

37 %

5 %

10 %

1999

52 %

35 %

5 %

8 %

2000

55 %

33 %

4 %

8 %

2001

57 %

30 %

4 %

9 %

2002

57 %

29 %

5 %

9 %

Source : Commission européenne.

Langues de rédaction d'origine des documents au Conseil

 

anglais

français

1997

41 %

42 %

1998

50 %

29 %

1999

57 %

25 %

2000

45 %

36 %

2001

59 %

28 %

2002

73 %

18 %

Source : Conseil de l'Union européenne - Secrétariat général.

Il a en revanche été une enceinte où la langue française a occupé une place prépondérante : la Convention sur l'avenir de l'Europe, présidée par M. Valéry Giscard d'Estaing, ce qui n'a pas été indifférent à l'usage du français. Les sessions plénières se déroulaient dans les onze langues officielles de l'Union tandis que les groupes de travail avaient opté pour un nombre limité de langues incluant toujours le français. Quant aux réunions du Présidium - le bureau de la Convention - elles se sont systématiquement déroulées en français, la plupart du temps sans système d'interprétation.

b) Les perspectives

L'élargissement de l'Union à dix nouveaux pays a conduit chacune des institutions européennes à adapter son régime linguistique à la nouvelle donne provoquée par l'arrivée de neuf nouvelles langues(7).

Le rapport de notre collègue M. Michel Herbillon, adopté à l'unanimité par la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne en juin 2003(8), précisait le nouveau régime linguistique désormais en vigueur dans les institutions :

- le Parlement européen a ainsi opté pour un « multilinguisme maîtrisé » privilégiant le recours à un nombre limité de langues pivot (l'anglais, le français et l'allemand) pour assurer la traduction et l'interprétation vers les différentes langues ;

- la Commission a maintenu un régime de trois langues de travail (français, anglais et allemand) ;

- la Cour de justice européenne maintient le français comme langue unique de délibéré, tout en prévoyant de former au français les juges des dix nouveaux pays. Signe encourageant, il semblerait que huit des dix nouveaux juges de la Cour comprennent bien le français à l'oral et que sept d'entre eux le parlent, dans certains cas parfaitement.

Au Conseil, la réforme en cours du régime d'interprétation prévoit le maintien de l'ensemble des langues officielles pour les réunions du Conseil européen (chefs d'Etat et de gouvernement) et du Conseil (ministres). Le Comité des représentants permanents (COREPER) devrait continuer à fonctionner en trois langues (anglais, français et allemand) tandis que les groupes de travail sectoriels font l'objet soit d'un régime d'interprétation plein, soit d'une absence d'interprétation, soit de l'application d'un système de marché où s'applique le principe de l'utilisateur payeur.

Avec l'élargissement, l'enjeu de la formation au français des commissaires européens, des membres de leur cabinet et des fonctionnaires communautaires est vital. Un plan pluriannuel, associant depuis 2002 notre pays à la Communauté française de Belgique, au Grand-duché de Luxembourg et à l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie a permis en 2003 d'assurer la formation en français de 3292 fonctionnaires originaires des pays candidats et l'organisation de stages intensifs et sessions thématiques pour 448 personnes (diplomates, administrateurs de la Commission et du Conseil, interprètes, traducteurs, journalistes). Les dix nouveaux commissaires se sont vus offrir un stage intensif de français en immersion totale, ainsi que les membres des cabinets de catégorie A non francophones. D'autres actions concrètes démontrent que le déclin de la langue française n'est pas une fatalité et le succès rencontré par ces initiatives récentes souligne l'attrait que suscite notre langue. La vigilance doit rester de mise, et tous les acteurs - institutionnels et associatifs - doivent poursuivre et amplifier leur mobilisation.

Un autre élément essentiel pour la promotion de la langue française est celui de notre réseau de lycées français à l'étranger, qui contribuent activement au rayonnement de notre pays. Mais les difficultés budgétaires qui affectent le Quai d'Orsay ne sont pas sans conséquences sur le budget de l'Agence de l'enseignement du français à l'étranger (AEFE) qui gère notamment le lycée Jean Monnet de Bruxelles. Une grève des professeurs a eu lieu le 1er décembre 2003 pour dénoncer un désengagement continu de l'Etat. Or il s'agit là d'un investissement de long terme, et plus encore à Bruxelles, les moyens doivent être à la hauteur de cet enjeu stratégique.

3) La remise en cause chronique du siège du Parlement européen à Strasbourg

a) La gestion, par le Parlement européen, de son triple siège

La question de la localisation du siège du Parlement européen sur un triple site (Strasbourg, Luxembourg et Bruxelles)(9) fait l'objet d'attaques régulières qui imposent une stratégie réfléchie pour promouvoir et pérenniser le statut de Strasbourg comme capitale européenne.

Sur le papier, Strasbourg n'est pas en danger. La ville a été confirmée comme siège définitif du Parlement européen en 1992, par les chefs d'Etat et de gouvernement lors du Conseil européen d'Edimbourg. Les termes de l'accord prévoient que « le Parlement européen a son siège à Strasbourg où se tiennent les douze périodes de sessions plénières mensuelles y compris la session budgétaire ». Pourtant, c'est le même refrain chaque année lors de l'élaboration du calendrier de travail du Parlement européen quant au nombre réel de sessions organisées en Alsace.

Ainsi, le calendrier voté pour l'année 1996 prévoyait la tenue de onze sessions plénières à Strasbourg et de huit périodes de sessions additionnelles à Bruxelles(10). Le gouvernement français, soutenu par le Grand-duché de Luxembourg, considérant qu'il s'agissait là d'une violation de la décision prise à Edimbourg a décidé de saisir la Cour de justice. Les juges communautaires lui ont donné raison en annulant la délibération du Parlement européen du 20 décembre 1995 en raison de son incompatibilité avec la décision d'Edimbourg et en ne tolérant de dérogation que les années d'élection(11).

Depuis 1997, à la demande de la France, le Protocole n° 12 annexé au traité d'Amsterdam énonce ainsi que « Le Parlement européen a son siège à Strasbourg où se tiennent les douze périodes de sessions plénières mensuelles, y compris la session budgétaire. Les périodes de sessions plénières additionnelles se tiennent à Bruxelles. Les commissions du Parlement européen siègent à Bruxelles. Le secrétariat général du Parlement européen et ses services restent installés à Luxembourg ».

Pourtant, en dépit d'une garantie inscrite dans le traité et malgré une jurisprudence sans ambiguïté, le gouvernement français a de nouveau dû intervenir au printemps 2003 auprès du Président Pat Cox pour que le Parlement européen respecte ses obligations institutionnelles à Strasbourg. Un vote intervenu le 9 avril 2003 réduisait en effet à 10 le nombre des sessions plénières à Strasbourg en 2004 au lieu des 11 sessions résultant des traités et de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, en année électorale. Les 11 sessions de Strasbourg ont finalement été rétablies.

Encore récemment, le 17 mars 2004, la Commission de contrôle budgétaire (COCOBU) a adopté un rapport demandant purement et simplement la suppression du siège de Strasbourg et le transfert complet à Bruxelles. Selon le rapporteur néerlandais, M. Michiel van Hulten, le maintien de trois lieux de travail (Bruxelles, Luxembourg et Strasbourg) représenterait un surcoût de fonctionnement de quelque 185 millions d'euros annuellement, qui pourraient passer à 203 millions avec l'élargissement. Les arguments des « anti-Strasbourg » sont bien connus : désagréments liés aux déménagements mensuels de milliers de dossiers, surcoût important, mauvaises liaisons aériennes et ferroviaires. Plaiderait en revanche en faveur de Bruxelles le besoin pour les parlementaires européens d'être à proximité des autres institutions (Commission et Conseil) pour accomplir leur mission de contrôle.

Actuellement, l'article 289 du traité instituant la Communauté européenne énonce que « le siège des institutions de la Communauté est fixé du commun accord des gouvernements des Etats membres », ce qui signifie à l'unanimité. La France a donc les moyens juridiques de préserver le siège de Strasbourg. C'est pourquoi le rapport adopté par la Cocobu demande que le traité soit modifié pour permettre au Parlement européen et à ses députés de décider eux-mêmes de la fixation du siège(12) et invite le Président du Parlement européen à relayer cette demande à la Conférence intergouvernementale chargée de négocier le projet de Constitution européenne.

Sur les dix huit députés présents lors du vote en Commission, seuls deux voix ont été enregistrées contre la proposition du rapporteur néerlandais ; à l'exception de M. Daul qui a voté contre, aucun des autres députés français membres de cette commission n'était présent à la réunion... Toutefois, soumise au vote en session plénière, la proposition provocatrice de M. van Hulten, à quelques semaines des élections européennes, a été rejetée par les députés européens. Il serait par ailleurs paradoxal que le Parlement européen concentre ses activités à Bruxelles, au moment même où il vient d'acquérir, pour un montant de 445,6 millions d'euros, le bâtiment flambant neuf de Strasbourg dont il était jusqu'à présent locataire. Etonnamment, tant les pro que les anti-strasbourgeois ont cautionné l'opération : les uns estimant que cela permettra à l'institution de se « débarrasser » plus facilement de Strasbourg, les autres que cela confirme la vocation européenne de la ville.


La présence européenne à Strasbourg

Parlement européen : 53 personnes

Médiateur européen : 30 personnes

Conseil de l'Europe : 1 900 personnes

Eurocorps : 992 personnes

Assemblée des régions d'Europe : 15 personnes

Fondation européenne de la science : 71 personnes

Arte : 403 personnes

b) Les scénarios d'avenir

S'il impose la tenue des sessions plénières à Strasbourg, le traité ne précise cependant pas leur durée. C'est cette faille qu'utilisent habilement les partisans de Bruxelles pour réduire le temps de leur présence à Strasbourg. De cinq jours initialement, les sessions plénières sont ainsi passées à quatre avec la suppression, depuis 2001, de la journée du vendredi. Et la plupart des députés ont déjà regagné leur pays d'origine le jeudi, en début d'après-midi... Très récemment encore, la première session plénière du Parlement européen élargi (du 3 au 5 mai 2004) a été écourtée d'une journée supplémentaire pour s'achever le mercredi après-midi... Juridiquement, rien n'interdirait donc le Parlement européen de n'organiser que des « mini sessions » de deux ou trois jours à Strasbourg.

En se cantonnant dans une posture défensive, la France prend le risque d'une victoire à la Pyrrhus : des sessions plénières maintenues, parce que le droit l'impose, mais dont la durée sera réduite à peau de chagrin. C'est la raison pour laquelle il devient urgent, au-delà d'un soutien de principe à Strasbourg, de prendre les mesures appropriées afin d'assurer l'avenir européen de la ville, et de lui donner les moyens de participer pleinement au rayonnement européen de notre pays.

Il est urgent d'amplifier notre mobilisation pour préserver et conforter la vocation européenne de Strasbourg. A la différence de Bruxelles et Luxembourg, Strasbourg n'est pas une capitale d'Etat. Il lui faut donc savoir mobiliser les concours susceptibles d'être apportés à sa stratégie de rayonnement européen par l'Etat, d'une part, et par les collectivités locales, d'autre part : la région Alsace et le département du Bas-Rhin.

De ce point de vue, l'année 2003 a été marquée par des résultats encourageants :

- la signature, le 1er juillet 2003, par le Premier ministre, d'un nouveau contrat triennal « Strasbourg, ville européenne », pour la période 2003-2005 ;

- l'engagement souscrit par l'Allemagne, à l'issue du Sommet franco-allemand de Berlin du 18 septembre 2003, de réaliser, entre 2007 et 2010, un nouveau pont ferroviaire sur le Rhin ainsi que les aménagements entre Kehl et Appenweier destinés à permettre l'interconnexion des réseaux TGV et ICE ;

- la décision prise par le Conseil des ministres du 22 octobre 2003 de retenir Strasbourg comme site unique de l'ENA à partir de la rentrée 2005. Le ministre de la Fonction publique et de la réforme de l'Etat a annoncé le 3 mai dernier la vente du siège parisien de l'ENA (rue de l'Université), « le plus tôt possible » ;

- la décision prise le 14 novembre 2003 par le ministre délégué à l'industrie de retenir la candidature de Strasbourg comme siège du nouvel « Institut de formation à la propriété industrielle ».

Un récent rapport de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, présenté par M. Bernard Schreiner et adopté le 26 janvier 2004(13), se félicite de la création, par le gouvernement français, d'un Comité de pilotage spécial « Strasbourg capitale européenne », et recommande d'agir en priorité dans deux domaines :

- l'amélioration des liaisons aériennes et des liaisons ferroviaires à grande vitesse. A cet égard, il faut signaler la prise en charge par le budget de la ville (en partenariat avec le département du Bas-Rhin) de divers services et facilités mis à disposition des parlementaires européens : transferts depuis les aéroports de Mulhouse, Francfort et Stuttgart ; gratuité des déplacements urbains ; mise en place de navettes réservées pendant les sessions. S'agissant du TGV-Est, le Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire (CIADT) a confirmé, le 18 décembre 2003, la réalisation de la deuxième phase du TVG Est-européen(14), même si le calendrier des travaux n'est pas encore définitivement fixé. On ne peut que déplorer le retard pris dans le règlement de ce dossier pourtant stratégique pour l'avenir de Strasbourg. Les collectivités territoriales concernées par le trajet de la future ligne à grande vitesse ont trop tardé à prendre leurs responsabilités, notamment financières ;

- la création d'une véritable école internationale dispensant un programme complet en anglais depuis l'école primaire jusqu'à l'université(15).

Tous ces efforts doivent être poursuivis, amplifiés et activement soutenus, tant politiquement que financièrement.


Coût budgétaire annuel des services et facilités accordés par la ville de Strasbourg aux parlementaires européens à l'occasion des sessions plénières

¬ Accessibilité aérienne de Strasbourg

- Prise en charge de transferts entre les aéroports voisins et Strasbourg : 272 400 euros.

- Prise en charge de transferts entre l'aéroport d'Entzheim et le Parlement européen : 26 343 euros.

¬ Déplacements urbains

- Navettes spéciales reliant la gare centrale au Parlement européen ou au Palais de l'Europe : 82 425 euros.

- Navettes spéciales desservant les hôtels et le Parlement européen : 6 100 euros.

Coût total : 387 268 euros

Comment poser la question de l'avenir européen de Strasbourg ?

La France doit prendre une initiative politique, même si le sujet apparaît tabou à certains. Renforcer la place de Strasbourg signifie que le siège du Parlement européen ne doit pas être le seul avenir de Strasbourg, capitale européenne. Soyons clairs : la France ne peut envisager le transfert à Bruxelles du siège du Parlement européen, qui signerait le début d'une réelle perte d'influence ; car Strasbourg doit symboliquement rappeler que nous sommes un pays fondateur de l'Union que d'autres Etats ont rejoint.

Le renforcement du rôle de Strasbourg fait l'objet de plusieurs scénarios, dont l'un souvent évoqué consisterait à en faire la capitale européenne du droit en y installant, en plus du siège du Parlement européen, la Cour de justice de l'Union européenne, actuellement située à Luxembourg. Cette proposition présente le mérite de la cohérence, étant donné que Strasbourg accueille déjà la Cour européenne des droits de l'homme. Or, dans l'hypothèse désormais probable d'une constitutionnalisation de la Charte des droits fondamentaux de l'Union et d'une possible adhésion de l'Union à la Convention européenne des droits de l'homme, un rapprochement géographique des deux juridictions ne serait pas dépourvu d'intérêt. Associée au dynamisme du pôle universitaire Robert Schuman, au développement du Centre d'études européennes de Strasbourg (CEES) et au transfert complet de l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg à compter de la rentrée 2005, cette proposition permettrait la formation d'une véritable communauté de juristes européens associant des praticiens du droit, des professeurs et des étudiants.

Pour autant, cette hypothèse n'est réaliste qu'à certaines conditions, notamment la nécessité d'obtenir un accord du Luxembourg, qui a toujours soutenu la France dans la défense de Strasbourg. C'est pourquoi une réflexion devrait dès lors s'engager sur une contrepartie satisfaisante pour Luxembourg. A cet égard, une piste pourrait être approfondie, qui consisterait à y établir le siège du Conseil européen, dans la perspective de l'instauration d'une présidence stable envisagée par le projet de Constitution européenne. La localisation du Conseil européen dans un « petit » pays pourrait également contribuer à désamorcer les craintes des Etats faiblement peuplés, réticents quant à la création d'un président stable du Conseil européen qui aurait tendance à servir les intérêts des plus « grands ».

Cette option présenterait aussi l'avantage d'un rééquilibrage entre les trois capitales européennes : l'impulsion politique à Luxembourg et le développement d'un pôle juridictionnel à Strasbourg.

Le dossier de Strasbourg n'est pas une affaire de droite ou de gauche, mais une question d'intérêt national, pour le rayonnement de Strasbourg et celui de la France. Strasbourg peut et doit réaliser son potentiel européen, qui dépasse la seule question du siège du Parlement européen. Tout en demeurant le siège du Parlement européen, la ville devrait se porter candidate à l'accueil supplémentaire d'autres instances : Strasbourg serait ainsi également la ville des rencontres interparlementaires entre les parlements nationaux et le Parlement européen, et pourrait à ce titre accueillir la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC), lorsqu'il sera mis fin au mécanisme de présidence tournante de l'Union européenne(16).

Au regard de sa situation géographique, Strasbourg apparaît également comme la ville symbole de l'amitié franco-allemande. A cet égard, il pourrait être décidé d'organiser plus systématiquement à Strasbourg les sommets bilatéraux et Conseils des ministres conjoints franco-allemands.

4) La France, mauvais élève de l'Europe

Depuis quelques années, la France se distingue par son refus de se soumettre à la règle commune : non-transposition des directives, chiffre record des procédures d'infraction diligentées contre elle, transgression des règles du pacte de stabilité, difficile gestion de l' « Affaire Alstom » : autant d'éléments qui entament l'image de la France, sa crédibilité et son autorité en Europe.

a) L'image de la France en Europe

« L'arrogance française » est une image qui nous colle à la peau, à tort ou à raison. C'est toutefois une donnée subjective dont il faut tenir compte. Plusieurs éléments participent de la perception qu'ont de nous nos partenaires européens : les attaques répétées de nos gouvernements contre le pouvoir de Bruxelles, le non-respect du Pacte de stabilité ou la défense absolue de Strasbourg comme siège du Parlement européen. Certaines critiques sont probablement injustes ; il en est une cependant que les statistiques confirment : il s'agit du fort taux d'absentéisme des représentants français au Parlement européen et, dans une moindre mesure, des ministres aux réunions du Conseil.

(1) L'absentéisme au Parlement européen

Un classement officieux(17) de la présence des députés européens depuis 1999 aux sessions plénières organisées à Strasbourg place la France au 14ème rang des pays membres de l'Union, avec un taux de présence moyen de 80 %. L'Italie arrive après avec seulement 68 % de députés présents.

Taux de présence des députés aux sessions plénières du Parlement européen

Etat membre

Taux de présence

Belgique

90 %

Finlande

89 %

Grèce

89 %

Luxembourg

89 %

Pays-Bas

88 %

Autriche

88 %

Allemagne

87 %

Suède

85 %

Espagne

85 %

Danemark

84 %

Royaume-Uni

84 %

Irlande

84 %

Portugal

83 %

France

80 %

Italie

68 %

Ce chiffre doit toutefois être pris avec précaution pour au moins trois raisons :

- la première, c'est que l'assiduité n'est pas un gage de participation active au travail législatif. Une présence silencieuse a peu d'effets sur l'influence ;

- la deuxième, c'est qu'il s'agit là d'une moyenne qui révèle des disparités très importantes. Ainsi, le classement fait apparaître que les 4 députés les plus assidus du Parlement européen sont français(18;

- enfin, ces statistiques ne prennent pas en compte la présence aux réunions des commissions, cette donnée n'étant pas publique.

(2) L'inégale participation des ministres au Conseil de l'Union

La participation des ministres aux différentes réunions du Conseil de l'Union révèle une participation inégale des membres du Gouvernement, pour l'année 2003(19).

CLASSEMENT GENERAL

Etat membre

Taux d'absentéisme

Belgique

24% (19 absences sur 79)

Autriche

Danemark

France

18,9% (15 absences sur 79)

Luxembourg

16,4% (13 absences sur 79)

Royaume-Uni

13,9% (11 absences sur 79)

Finlande

12,6 % (10 absences sur 79)

Pays-Bas

11,3 % (9 absences sur 79)

Allemagne

10,1 % (8 absences sur 79)

Grèce

7,5 % (6 absences sur 79)

Suède

6,3 % (5 absences sur 79)

Irlande

5 % (4 absences sur 79)

Espagne

5 % (4 absences sur 79)

Portugal

2,5 % (2 absences sur 79)

Italie

0 % (aucune absence sur 79)

Sur l'ensemble des formations du Conseil, la France se situe à l'avant-dernier rang (ex æquo avec l'Autriche et le Danemark) des pays membres de l'Union européenne. Avec 15 absences sur 79 réunions, le taux d'absentéisme s'établit à 18,9 %, soit presque une réunion sur cinq.

A l'opposé, l'assiduité du gouvernement italien est totale puisque aucune absence n'est relevée dans les comptes rendus des sessions du Conseil.

Pour la France, l'assiduité est variable selon les formations du Conseil. En 2003, aucune défaillance ministérielle n'est à signaler pour deux formations : « Agriculture et pêche » et « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs ».

Au Conseil « Affaires générales et Relations extérieures », qui relève de la compétence du ministre des affaires étrangères et/ou du ministre délégué chargé des affaires européennes, la France est en position satisfaisante avec seulement trois absences sur un total de 23 réunions.

Le taux d'absentéisme est en revanche plus préoccupant dans deux formations du Conseil : le Conseil « Justice et affaires intérieures » et, en raison de son importance stratégique, le Conseil « Affaires économiques et financières ».

S'agissant plus spécifiquement du Conseil « Justice et affaires intérieures », la France se singularise par un taux d'absentéisme particulièrement élevé : quatre absences sur six réunions où l'ordre du jour est scindé en deux : une partie consacrée aux questions de justice, qui relève de la compétence des ministres européens de la justice, et l'autre consacrée aux affaires intérieures, qui relève de la compétence des ministres européens de l'intérieur.

Le ministre de la justice a participé à trois réunions sur six tandis que le ministre de l'intérieur ne s'est rendu au Conseil qu'une seule fois, et a été représenté une fois par son ministre délégué à la sécurité intérieure et aux libertés locales. Dans les autres cas, le gouvernement français a été représenté par notre ambassadeur auprès de l'Union européenne. A titre de comparaison, le ministre allemand de l'intérieur a, quant à lui, été présent aux six réunions qui ont lieu en 2003. Alors que Paris et Berlin se disputent actuellement la direction d'Europol(20), la présence du ministre aux réunions du Conseil n'est pas dénuée d'intérêt.

L'absentéisme français au Conseil « JAI » ne doit cependant pas masquer le rôle particulièrement actif que joue la France au sein du « G5 des ministres de l'intérieur », une structure informelle qui réunit les ministres de l'intérieur de l'Allemagne, de l'Espagne, de la France, de l'Italie et du Royaume-Uni.

M. Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était ministre de l'intérieur, justifiait la création de ce G5 par le fait que les cinq Etats participants représentent 80 % de la population de l'Union et sont les principaux pays exposés aux enjeux de l'immigration.

Mais pour être bien acceptées par les Etats membres qui n'en font pas partie, de telles initiatives - dont l'utilité est incontestable - ne doivent pas se doubler d'une absence des ministres au Conseil « JAI ».

Le caractère particulièrement formel des réunions du Conseil est fréquemment invoqué pour justifier les absences ministérielles. Le Conseil reste pourtant une institution essentielle dans l'équilibre démocratique du fonctionnement communautaire en raison de sa dimension politique ; or cette dimension s'efface lorsque la représentation gouvernementale est assurée par un fonctionnaire, qu'il s'agisse du représentant permanent ou de son adjoint.

Le critère de la présence ministérielle au Conseil ne doit cependant pas être surestimé : de nombreux autres indicateurs entre en ligne de compte pour mesurer l'influence d'un pays.

VENTILATION PAR CONSEILS SECTORIELS

Conseil « Justice et affaires intérieures »

6 sessions en 2003

 

Conseil « Education, jeunesse, culture »

3 sessions en 2003

Etat membre

Taux d'absentéisme

 

Etat membre

Taux d'absentéisme

France

66,66 % (4 absences sur 6)

 

Autriche

Danemark

Espagne

Finlande

France

Pays-Bas

33,33 % (1 absence sur 3)

Belgique

Espagne

Finlande

Grèce

16,6 % (1 absence sur 6)

 

Allemagne

Belgique

Grèce

Irlande

Italie

Luxembourg

Portugal

Royaume-Uni

Suède

0 % (aucune absence)

Allemagne

Autriche

Danemark

Italie

Irlande

Luxembourg

Pays-Bas

Portugal

Royaume-Uni

Suède

0 % (aucune absence sur 6)

     

Conseil « Affaires économiques et financières »

13 sessions en 2003

 

Conseil « Environnement »

4 sessions en 2003

Etat membre

Taux d'absentéisme

 

Etat membre

Taux d'absentéisme

Royaume-Uni

38,4 % (5 absences sur 13)

 

France

Grèce

25 % (1 absence sur 4)

Autriche

Belgique

Danemark

France

Luxembourg

30 % (4 absences sur 13)

 

Allemagne

Autriche

Belgique

Danemark

Espagne

Finlande

Irlande

Italie

Luxembourg

Pays-Bas

Portugal

Royaume-Uni

Suède

0 % (aucune absence)

Grèce

23 % (3 absences sur 13)

     

Allemagne

15,38 % (2 absences sur 13)

     

Irlande

Portugal

7,6 % (1 absence sur 13)

     

Espagne

Finlande

Suède

Italie

Pays-Bas

0 % (aucune absence sur 13)

     

Conseil « Compétitivité » (marché intérieur, industrie et recherche)

7 sessions en 2003

 

Conseil « Transports, télécommunications et énergie »

7 sessions en 2003

Etat membre

Taux d'absentéisme

 

Etat membre

Taux d'absentéisme

Finlande

42,85 % (3 absences sur 7)

 

Belgique

57,14 % (4 absences sur 7)

Belgique

Luxembourg

Pays-Bas

28,5 % (2 absences sur 7)

 

Autriche

Danemark

42,85 % (3 absences sur 7)

Autriche

Danemark

France

Grèce

Irlande

Royaume-Uni

Suède

14.28 % (1 absence sur 7)

 

Luxembourg

Pays-Bas

Royaume-Uni

28,5 % (2 absences sur 7)

Allemagne

Espagne

Italie

Portugal

0 % (aucune absence)

 

Allemagne

Espagne

Finlande

France

Irlande

Portugal

14.28 % (1 absence sur 7)

     

Grèce

Italie

Suède

0 % (aucune absence)

Conseil « Affaires générales et relations extérieures »

23 sessions en 2003

 

Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs »

5 sessions en 2003

Etat membre

Taux d'absentéisme

 

Etat membre

Taux d'absentéisme

Belgique

26 % (6 absences sur 23)

 

Autriche

40 % (2 absences sur 5)

Danemark

Luxembourg

21,7 % (5 absences sur 23)

 

Danemark

Finlande

20 % (1 absence sur 5)

Allemagne

Suède

17,3 % (4 absences sur 23)

 

Allemagne

Belgique

Espagne

France

Grèce

Irlande

Italie

Luxembourg

Pays-Bas

Portugal

Royaume-Uni

Suède

0 % (aucune absence)

France

Royaume-Uni

13 % (3 absences sur 23)

     

Autriche

Finlande

Pays-Bas

8,6 % (2 absences sur 23)

     

Espagne

Irlande

4,3 % (1 absence sur 23)

     

Grèce

Italie

Portugal

0 % (aucune absence sur 23)

     

Conseil « Agriculture et pêche »

11 sessions en 20033

   

Etat membre

Taux d'absentéisme

     

Autriche

Belgique

Pays-Bas

18,18 % (2 absences sur 11)

     

Allemagne

Finlande

9 % (1 absence sur 11)

     

Danemark

Espagne

France

Grèce

Irlande

Italie

Luxembourg

Portugal

Royaume-Uni

Suède

0 % (aucune absence)

     

b) La transposition des directives

En dépit des efforts déployés par le Gouvernement, la France ne parvient pas à rattraper le retard qu'elle accuse en matière de transposition des directives communautaires. Dans le domaine du marché intérieur, notre pays est passé du 10ème au 15ème et dernier rang, à égalité avec la Belgique et l'Allemagne, alors que plusieurs Etats - cinq en avril 2003, six en novembre - sont parvenus à respecter l'objectif de 1,5 % fixé par le Conseil européen.

Déficit de transposition des Etats membres

 

Pourcentage

au 15 avril 2003

Pourcentage

au 30 novembre 2003

Nombre de directives en retard au 30 novembre 2003

Belgique

1,8

3,5

54

France

3,3

3,5

54

Allemagne

3,0

3,5

53

Luxembourg

3,2

3,4

52

Grèce

3,3

3,1

48

Italie

3,9

3,0

46

Pays-Bas

2,0

2,6

40

Autriche

3,4

2,5

38

Portugal

3,7

2,2

33

Suède

1,0

1,6

25

Royaume-Uni

1,5

1,4

22

Irlande

3,5

1,4

21

Finlande

1,0

1,4

21

Espagne

1,2

0,9

14

Danemark

0,6

0,3

5

Source : Commission européenne.

Nombre de directives dont le délai de transposition

était dépassé de plus de deux ans au 30 novembre 2003

Luxembourg

8

France

7

Belgique

5

Allemagne

4

Irlande

3

Autriche

2

Espagne

2

Italie

2

Royaume-Uni

1

Grèce

1

Pays-Bas

1

Suède

1

Danemark

0

Finlande

0

Portugal

0

Source : Commission européenne.

Afin d'améliorer le taux de transposition des directives, un chargé de mission spécifique, rattaché au directeur d'administration centrale, devrait être désigné au sein de chaque ministère pour suivre la transposition des directives. L'organisation mise en place par le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires rurales est à cet égard exemplaire et mérite d'être déclinée dans les autres ministères(21).

c) Les procédures d'infraction au droit communautaire

La France se singularise également quant au nombre de procédures d'infraction au droit communautaire dont elle fait l'objet, en comptabilisant à elle seule 13,4 % du total des cas de procédures d'infractions engagées par la Commission européenne, soit un taux comparable à celui constaté sur les deux années antérieures. La France comptait ainsi, à la fin octobre 2003, 135 procédures d'infraction, soit le deuxième nombre le plus élevé de l'ensemble de l'Union après l'Italie (146). La France et l'Italie totalisent ensemble 28 % des procédures d'infraction, soit plus que le Danemark, la Finlande, la Suède, le Luxembourg, le Portugal, l'Irlande et les Pays-Bas réunis.

Procédures d'infraction en cours au 31 octobre 2003

Italie

146

France

135

Espagne

102

Allemagne

90

Belgique

81

Grèce

75

Royaume-Uni

58

Autriche

57

Pays-Bas

54

Irlande

54

Portugal

44

Luxembourg

38

Suède

26

Finlande

25

Danemark

21

Source : Commission européenne.

d) Les aides d'Etat

En 2002, le montant total des aides d'Etat accordées par les quinze Etats membres a été estimé par la Commission européenne à 49 milliards d'euros. En termes absolus, c'est l'Allemagne qui a accordé le plus d'aides (13 milliards d'euros), suivie par la France (10 milliards d'euros) et l'Italie (6 milliards d'euros).

Total des aides d'Etat (hors secteur ferroviaire)

(en milliards d'euros)

Allemagne

13,3

France

9,7

Italie

6,0

Espagne

4,3

Royaume-Uni

3,9

Pays-Bas

1,9

Finlande

1,7

Danemark

1,6

Autriche

1,3

Belgique

1,3

Irlande

1,0

Portugal

1,0

Suède

1,0

Grèce

0,7

Luxembourg

0,1

Total UE

48,8

Source : Commission européenne.

III. UNE PRESENCE QUI DOIT S'ADAPTER AUX DEFIS DE L'ELARGISSEMENT

Les modifications successives des traités européens ont conduit à un renforcement sensible des pouvoirs du Parlement européen, qui intervient de plus en plus en qualité de « co-législateur » sur un pied d'égalité avec le Conseil des ministres. Or le poids que représentent les députés français - dispersés dans l'ensemble des groupes - est très nettement inférieur à ce qu'il devrait être.

En ce qui concerne la présence des fonctionnaires de nationalité française dans les différentes institutions de l'Union, la situation est globalement satisfaisante. Toutefois, certaines évolutions récentes, liées à l'élargissement, nécessitent d'être vigilants et d'organiser notre présence pour l'adapter aux nouveaux enjeux de la construction européenne.

A. Une présence politique affaiblie au Parlement européen

« Au fil des améliorations des institutions de l'Union, les pouvoirs du Parlement se sont accrus. Et je suis bien obligé de constater que le poids et l'influence de la France au sein du Parlement européen ne sont pas ce qu'ils devraient être, ne sont pas à la hauteur des enjeux pour notre pays. Je souhaite que les futurs députés français sachent se regrouper, se regrouper notamment au sein des principales formations du Parlement où se situe le vrai pouvoir de décision de l'assemblée, et ceci de façon à se faire entendre, de façon plus efficace, et à faire entendre la voix de la France de façon plus efficace. Par ailleurs, je voudrais souligner qu'être élu au Parlement européen, être élu à Strasbourg requiert, sans aucun doute, un engagement à temps plein pour accomplir sa mission ».

Jacques Chirac, Président de la République

Conférence de presse sur l'Europe, 29 avril 2004

Sous la Vème législature (1999-2004), le Parlement européen était composé de 626 députés parmi lesquels : 99 Allemands, 87 Français, 87 Britanniques, 87 Italiens et 64 Espagnols. Le nouveau Parlement qui sera élu le 13 juin 2004 comptera désormais 732 membres dont 99 Allemands, 78 Français, 78 Britanniques, 78 Italiens, 54 Espagnols et 54 Polonais.

En proportion, le nombre de députés français est ainsi passé de 13,8 % à 10,6 % lorsque le pourcentage de députés allemands est de 13,5 % contre 15,8 %.

1) La dispersion des députés français au sein des groupes politiques

a) De l'utilité de siéger dans les groupes majoritaires

Sous la Vème législature (1999-2004), le Parlement européen a compté sept groupes politiques, ainsi que des députés « non-inscrits »(22).

Chaque groupe politique est doté d'un président ou de plusieurs co-présidents, d'un bureau et d'un secrétariat. Avant le vote en séance plénière, ces groupes examinent les rapports issus des commissions parlementaires, et déposent des amendements. Ils jouent un rôle majeur dans la fixation de l'ordre du jour des sessions plénières ainsi que dans le choix des débats dits d'actualité.

L'application de la « règle d'Hondt » (mécanisme de représentation proportionnelle) confère certains avantages à siéger dans un groupe, qui plus est numériquement important. La mise à disposition de moyens techniques (collaborateurs, secrétariat, salle de réunion, budget pour publications, traductions, etc.) ainsi que le droit de parole et d'initiative politique sont en effet proportionnels à la taille du groupe. Il en est de même de l'accession aux postes de responsabilités (vice-présidences du Parlement européen et questure de l'Assemblée, présidences et vice-présidences des commissions et délégations, rapporteurs).

Il est donc essentiel, pour accéder aux postes de responsabilité, de siéger dans les groupes majoritaires du Parlement européen. Or, La France est le seul pays dont les représentants au Parlement européen sont dispersés dans l'intégralité des groupes politiques constitués à Strasbourg, avec la caractéristique d'être sous-représentés dans les deux principales formations (PPE-DE et PSE) et sur représentés dans les groupes minoritaires.

Répartition des 86 députés européens français(23)

dans les groupes politiques du Parlement européen

PPE-DE

PSE

ELDR

GUE

VERTS

UEN

EDD

NI

21

18

1

15

9

4

8

10

Ainsi, au sein du premier groupe du Parlement, Le PPE, la France se situe, avec 21 députés, loin derrière l'Allemagne (53 élus), le Royaume-Uni (37 élus), l'Italie (34 élus) et l'Espagne (28 élus). Cependant, des relations de travail étroites se sont nouées au PPE entre députés allemands et français et ce jeu d'alliance permet de limiter la perte d'influence des représentants français.

Plus d'un député français sur deux appartient à un des groupes qui figurent dans le quart minoritaire du Parlement. Cependant, la France dispose ainsi des présidences de groupes qui lui permettent d'être représentée à la Conférence des présidents par MM. Pasqua (UEN), Wurtz (GUE/ NGL), Cohn-Bendit (Verts/ALE) et Mme Garaud (Non inscrits).

b) Perspectives

Avec l'élargissement, le Parlement européen accueille désormais les représentants de dix nouveaux pays. Dès le 1er mai 2003, ces dix Etats avaient envoyé 162 observateurs (qui ont depuis le 1er mai 2004 le statut de députés européens) et qui sont affiliés aux groupes politiques, selon la répartition suivante :

Députés européens des 10 nouveaux pays membres (mai 2004)

 

Chypre

Estonie

Hongrie

Lettonie

Lituanie

Malte

Pologne

Rép.
tchèque

Slovaquie

Slovénie

Total

PPE-DE

2

2

12

5

3

3

13

13

7

3

63

PSE

1

1

10

1

5

2

27

7

2

1

57

ELDR

1

2

2

0

5

0

0

1

1

3

15

GUE/NGL

2

0

0

0

0

0

0

3

1

0

6

VERTS

0

0

0

2

0

0

0

0

0

0

2

UEN

0

1

0

1

0

0

4

0

1

0

7

EDD

0

0

0

0

0

0

0

0

0

0

0

NI

0

0

0

0

0

0

10

0

2

0

12

TOTAL

6

6

24

9

13

5

54

24

14

7

162

Source : Parlement européen.

On constate que 74 % des 162 observateurs siègent dans l'un des deux groupes majoritaires ; ce taux monte à 83 % en y incluant les membres du groupe libéral qui représente la troisième force politique de l'Assemblée de Strasbourg. Ces données confirment le renforcement prévisible des groupes majoritaires dans le Parlement qui sera élu en juin prochain.

Alors qu'avec 21 députés sur 233, la représentation française au sein du groupe PPE était, jusqu'au 1er mai 2004, de 9 %, elle est depuis quelques jours tombée à 7,1 % (21 membres sur 295). Au PSE, la tendance est similaire, de 10 % avant l'élargissement (18 députés sur 180), le taux n'est désormais plus que de 7,5 % (18 députés sur 237).

Les députés français qui seront élus le 13 juin au Parlement européen devraient se regrouper dans les groupes majoritaires s'ils entendent être réellement influents.

2) Une présence faible aux postes stratégiques(24)

a) Les présidences des commissions

Il existe au sein du Parlement européen 17 commissions permanentes. Deux d'entre elles sont présidées par des députés français : la commission « Agriculture » par M. Joseph Daul (PPE-DE) et la commission « Culture » par M. Michel Rocard (PSE). La Conférence des présidents des commissions est présidée par M. Daul.

A titre de comparaison, l'Italie dispose de quatre présidences, l'Allemagne et le Royaume-Uni de trois et l'Espagne de deux.

La répartition des élus français dans les commissions témoigne de choix traditionnels vers des secteurs non techniques et de réflexion : affaires constitutionnelles, questions internationales, coopération, droits de l'homme.

En revanche, les commissions dites « législatives », dans lesquelles le Parlement européen a progressivement acquis un pouvoir de codécision avec le Conseil des ministres, sont relativement délaissées par les Français. C'est le cas notamment de la commission juridique, des affaires économiques et monétaires, de l'environnement ou encore la commission budgétaire.

Participation française aux commissions (5e législature 1999-2004)

(titulaires et suppléants)

Rang

Commission

Nombre

de députés français

En %

1er

Culture jeunesse

15 sur 70

21,42 %

2ème

Affaires constitutionnelles

13 sur 70

18,57 %

3ème

Développement, coop.

11 sur 64

17,18 %

4ème

Régionale, tourisme

18 sur 115

15,65 %

5ème

Pêche

7 sur 23

15,26 %

6ème

Affaires étrangères

20 sur 138

14,50 %

7ème

Juridique

9 sur 68

13,23 %

8ème

Libertés publiques

12 sur 97

12,37 %

9ème

Emploi, Affaires sociales

12 sur 99

12,12 %

10ème

Agriculture

9 sur 39

12,00 %

11ème

Industrie

13 sur 109

11,92 %

12ème

Economique et monétaire

9 sur 83

10,84 %

13ème

Droits de la femme

12 sur 115

10,43 %

14ème

Environnement, santé, consommateur

7 sur 66

10,66 %

15ème

Pétitions

5 sur 50

10,00 %

16ème

Contrôle budgétaire

5 sur 50

10,00 %

17ème

Budgétaire

7 sur 80

8,75 %

b) Les postes de coordinateurs

Au sein de chaque commission parlementaire, un député est désigné par son groupe politique pour assurer la fonction de « coordinateur ». Son rôle est stratégique puisqu'il est chargé, lors des réunions de son groupe politique, de faire rapport des travaux de la commission parlementaire dans laquelle il siège et de proposer au vote du groupe, une position à adopter vis-à-vis du texte, objet de la discussion en commission et des amendements présentés.

Or dans les commissions techniques, importantes pour les entreprises, les coordinateurs des groupes PPE et PSE se répartissent ainsi :

Nationalité des coordinateurs

 

PPE

PSE

Commission juridique

Allemand

Espagnol

Commission économique et monétaire

Autrichien

Luxembourgeois

Commission industrie

Anglais

Anglais

Commission affaires sociales

Anglais / Néerlandais

Anglais

Commission environnement consommateur

Allemand

Allemand

Commission politique régionale - transport - tourisme

Grec

Anglais

3) Une participation inégale aux travaux législatifs

Outre le taux préoccupant d'absentéisme signalé précédemment, un indicateur pertinent de la participation aux travaux législatif est celui du nombre de rapports confiés aux députés français. L'application de la règle d'Hondt pénalise nos députés en raison de leur faible poids numérique dans les groupes majoritaires du Parlement européen.

Une récente étude réalisée par le MEDEF(25) révèle que de 1999 à fin 2003, les députés allemands ont rédigé 299 rapports, les Britanniques 238, les Espagnols 192, les Italiens 150 et les Français 119. Le taux d'activité est de 3,45 rapports pour un député néerlandais, contre seulement 1,36 pour un député français. En outre, sur la même période, 38 députés français sur nos 87 représentants au Parlement européen n'ont jamais été rapporteurs au fond(26) d'un seul des quelque 1 300 rapports examinés par le Parlement.

Les rapporteurs actifs

Taux d'activité

31 députés néerlandais ont rédigé 107 rapports

99 députés allemands ont rédigé 299 rapports

87 députés britanniques ont rédigé 238 rapports

63 députés espagnols ont rédigé 192 rapports

87 députés italiens ont rédigé 150 rapports

87 députés français ont rédigé 119 rapports

3,45

3,02

2,73

3,04

1,72

1,36

Il serait toutefois erroné de privilégier une vision essentiellement quantitative du travail législatif. Plusieurs députés français, à gauche comme à droite, jouent un rôle déterminant dans la vie du Parlement européen, et sont écoutés et respectés dans leurs domaines de compétence. Le mandat de député européen nécessite un investissement à long terme et à plein temps, ce qui suppose de pouvoir exercer plusieurs mandats consécutifs.

Les députés européens allemands ont ainsi établi une pratique fondée sur l'exercice de trois mandats : le premier mandat pour apprendre (i.e découvrir et comprendre le fonctionnement du Parlement européen, développer un réseau de contacts), le deuxième mandat pour agir (i.e une participation législative active et influente) et le troisième mandat pour transmettre aux nouveaux députés. Cette vision est le reflet d'une stratégie d'influence, qui n'est possible qu'avec le concours des partis politiques au moment de l'investiture des candidats aux élections européennes.

B. Un potentiel administratif satisfaisant

Tant d'un point de vue quantitatif que qualitatif, la présence des fonctionnaires français se révèle satisfaisante. Les statistiques infirment l'idée trop souvent répandue d'un déclin français, même si l'élargissement et la réforme du statut des fonctionnaires européens doivent conduire à mieux organiser notre stratégie d'influence afin de tenir compte des nouveaux paramètres de gestion de carrières.

1) Une répartition globalement satisfaisante des fonctionnaires français au sein des institutions de l'Union européenne

Les Français bénéficient d'une excellente présence quantitative au sein des administrations communautaires qui emploient 3 691 Français sur un total de 30 725 agents. 1 641 Français sont de catégorie A, soit près de 45 % de notre effectif.

Effectifs des institutions de l'Union européenne

Français

Allemands

Britanniques

Italiens

Belges

3691

12,01%

2886

9,39%

2195

7,14%

3876

12,62%

6313

20,55%

Source : Représentation permanente française auprès de l'Union européenne.

L'importance du nombre de fonctionnaires de nationalité belge s'explique en grande partie par l'« effet de siège » des institutions et une fonction publique communautaire financièrement plus attractive que la fonction publique belge.

a) Au sein de l'administration du Parlement européen

Les Français représentent 12,75 % des 3 370 fonctionnaires du Parlement européen. Toutefois, les Allemands, les Italiens et les Britanniques y ont plus d'administrateurs que nous. En matière d'encadrement supérieur, la France compte 2 A1 sur 11 et 5 A2 sur 28.

D'un point de vue qualitatif, deux Directions générales sont dirigées par des Français : la DG VI « Administration » et la DG VII « Traduction et services généraux ».

4 directeurs sont français, et 17 chefs de division. Aux niveaux A4 et A5, la France est représentée par 26 administrateurs principaux.

Au sein des groupes politiques, la France compte un poste de secrétaire général (au PSE) et trois postes de secrétaires généraux adjoints.

b) Au sein de l'administration de la Commission

2 653 Français travaillent à la Commission, sur un total (toutes nationalités confondues) de 22 055 agents, ce qui représente 12 % des effectifs.

La France compte 1 396 agents de catégorie A. En ce qui concerne plus particulièrement des postes d'encadrement supérieur, on dénombre 9 A1 sur 61 et 40 A2 sur 226. Pour les postes A1, la France arrive en seconde position derrière l'Allemagne (11), mais devant l'Italie (7) et le Royaume-Uni (5).

Fonctions exercées à la Commission européenne (catégorie A)(27)

Directeur général (A1)

Directeur (A2)

Chef de division (A3)

Chef d'unité (A4)

Fonctionnaire A5 (minimum 12 ans d'expérience)

Fonctionnaire A6 et A7 (minimum 2 ans d'expérience)

Fonctionnaire A8 (sans expérience)

Distribution géographique du personnel
d'encadrement supérieur de la Commission (grades A1 et A2)

France

49

Allemagne

40

Royaume-Uni

38

Italie

27

Espagne

26

Belgique

25

Pays-Bas

14

Grèce

13

Danemark

12

Portugal

11

Irlande

10

Suède

7

Autriche

6

Finlande

6

Luxembourg

4

Source : Commission européenne.

Quelques idées reçues tenaces doivent être remises en cause. Contrairement à ce qui est généralement écrit, les fonctionnaires français ne sont pas les plus présents dans la DG « Agriculture » : ils y représentent 12,5 % des fonctionnaires de catégorie A, derrière les Belges (14,7 %), les Italiens (14,7 %) et les Espagnols (12,9 %).

En revanche, les Français sont les mieux représentés dans de nombreuses directions générales, notamment les DG « JAI », « Relations extérieures », « Marché intérieur » et « Entreprises ». Le nombre de fonctionnaires français est en revanche plus faible à la DG « Concurrence » (10,4 % des effectifs de catégorie A) où les Allemands sont traditionnellement les plus nombreux (20,8 %). Toutefois, les Français s'y positionnent sensiblement mieux que les Britanniques, qui ne représentent que 7,8 %.

Pourcentage de fonctionnaires français dans l'effectif de catégorie A

des directions générales de la Commission (janvier 2004)

Justice et affaires intérieures

22,9 %

Marché intérieur

18,7 %

Pêche

17,9 %

Relations extérieures

17,9 %

Presse et communication

17,7 %

Entreprises

17,2 %

Recherche

16,6 %

Commerce

16,1 %

Transport - Energie

15,8 %

Développement

15,2 %

Eurostat

15,1 %

Politique régionale

14,9 %

Santé et protection des consommateurs

14,2 %

Emploi et affaires sociales

13,5 %

Environnement

13,2 %

Service juridique

12,9 %

Agriculture

12,6 %

Budget

12 %

Elargissement

12 %

Affaires économiques et financières

11,8 %

Personnel et administration

11,7 %

Société de l'information

11,2 %

Concurrence

10,4 %

Source : Commission européenne (source SYSPER).

La présence française est également significative dans les cabinets des commissaires avec 15 Français présents dans les cabinets de 9 commissaires : M. Prodi, Président de la Commission(28), Mme Redding et MM. Liikanen, Bolkestein, Busquin, Solbes, Byrne, Lamy et Barrot.

L'enjeu consiste désormais à placer des Français dans les cabinets des dix nouveaux commissaires issus des nouveaux pays membres de l'Union européenne.

c) Au Conseil de l'Union

Au Secrétariat général du Conseil, la situation des Français est, d'un point de vue quantitatif, moins privilégiée : 4ème rang, toutes catégories confondues (7,19 % des emplois), après les Belges, les Italiens et les Allemands (197 sur 2 692 agents) et 5ème rang pour les cadres A derrière les Allemands, les Italiens, les Britanniques et les Belges.

En matière d'encadrement supérieur, la France est cependant bien représentée : elle compte 2 A1 sur 14 et 4 A2 sur 34. Le secrétaire général adjoint du Conseil, le directeur général du Service juridique et le directeur général des questions politiques sont de nationalité française.

Le chef de l'Etat-major de l'Union européenne est également un Français depuis l'arrivée à ce poste, en février 2004, du Général Jean-Paul Perruche qui succède à l'Allemand Rainer Schuwirth.

d) A la Cour de justice des Communautés européennes et au Tribunal de première instance

La France arrive en tête avec 209 ressortissants sur un effectif total de 1 097. Avec 47 agents de catégorie A sur 193, notre pays est à ce niveau le mieux représenté.

e) Dans les institutions financières de l'Union

A la Banque centrale européenne (BCE) et à la Banque européenne d'investissement (BEI), les Français représentent environ 14 % des effectifs.

2) Une présence française qui doit toutefois s'adapter à l'évolution du contexte européen

a) L'impact de l'élargissement

L'arrivée de dix nouveaux pays dans l'Union européenne s'accompagne d'un recrutement sans précédent au sein des différentes institutions. D'ici à 2010, environ 6 000 postes sont à pourvoir par des ressortissants des nouveaux pays, ce qui justifie
- pendant une période transitoire - l'organisation de concours séparés « EUR-15 » (pour les 15 Etats membres avant le 1er mai 2004) et « EUR-10 » (pour les 10 nouveaux Etats membres depuis le 1er mai 2004). Pour les nouveaux pays, des concours généraux seront organisés par nationalité tandis que les recrutements de linguistes seront organisés par langue.

La Commission européenne a établi à 3 900 le nombre de personnes supplémentaires qui lui seront nécessaires. Selon une Communication(29) du commissaire Neil Kinnock, le nombre de postes A1 devrait passer de 62 à 72, les A2 de 250 à 290 et les postes d'encadrement intermédiaire de 1 131 à 1 311. Pour la seule année 2004, la Commission devrait réserver un certain nombre de postes aux ressortissants des nouveaux Etats membres : 8 postes au niveau A1 (2 directeurs généraux et 6 directeurs généraux adjoints), 29 au niveau A2 et 83 au niveau de l'encadrement intermédiaire.

L'élargissement ne signifie pas l'arrêt des recrutements pour les ressortissants des 15 « anciens » pays membres. A la Commission, le renouvellement d'environ 3 500 postes est prévu jusqu'en 2010, en raison de départs à la retraite. Ces postes s'ajoutent aux créations d'emplois liés à l'élargissement et réservés aux nouveaux entrants. Il est donc indispensable d'améliorer l'information à destination des candidats français qui souhaiteraient se présenter aux concours de l'Union, et qui pourraient penser, à tort, que la majeure partie des concours seront désormais réservés aux ressortissants des nouveaux Etats membres.

b) La réforme du statut des fonctionnaires européens

Le statut des fonctionnaires de l'Union européenne vient de faire l'objet d'une réforme en profondeur. Un changement important concerne la réforme de la structure des carrières. Afin de renforcer la responsabilisation, les quatre catégories (A, B, C et D) sont désormais fusionnées pour ne former que deux groupes de fonctions : les assistants et les administrateurs. Une nouvelle structure de carrière comprenant 16 grades couvrira ces deux groupes.

Les assistants remplaceront les fonctionnaires B et C actuels (la catégorie D est supprimée), tandis que les administrateurs correspondent à l'actuelle catégorie A.

La nouveauté du statut réside dans la possibilité désormais offerte aux assistants d'évoluer vers la catégorie des administrateurs, sous certaines conditions (notamment la réussite à un examen d'aptitude).

Ces nouvelles règles de gestion des carrières impliquent donc de mieux suivre ceux de nos ressortissants qui sont assistants et qui ont vocation à devenir administrateurs. Il faut ainsi veiller à ce que notre stratégie d'influence prenne en compte le suivi des postes intermédiaires et privilégie une vision de long terme. Les postes de « encadrement intermédiaire », c'est-à-dire ceux de « chefs d'unité », sont en effet essentiels dans la chaîne d'élaboration des textes.

SECONDE PARTIE :
UNE PRISE DE CONSCIENCE TARDIVE MAIS REELLE DE LA MONTEE EN PUISSANCE DES ENJEUX EUROPEENS

L'Europe reste encore trop souvent considérée comme un monde à part, réservé à une caste qui fonctionne selon des règles éloignées de nos repères hexagonaux. L'Union des années 2000 n'est plus l'Europe des années 1950, créée sous une forte influence administrative française. Un nouveau modèle de gouvernance s'affirme à l'échelle européenne : il intègre des cultures administratives différentes de la nôtre et se fonde notamment sur les principes de transparence, d'externalisation des fonctions, de décentralisation et d'avancement au mérite. Face à la montée en puissance des enjeux européens, les intérêts français s'organisent. Le réveil a été tardif, mais il est bien réel. Entre Paris et Bruxelles, le Thalys a rapproché la France de l'Europe mais n'a pas encore entièrement comblé le choc des cultures. En France, les affaires européennes restent trop souvent traitées comme des affaires étrangères et continuent à être marginalisées dans la vie politique, administrative et médiatique nationale.

*

* *

IV. PARIS - BRUXELLES : LE CHOC DES CULTURES

Les institutions européennes ne fonctionnent pas comme les institutions françaises. Il n'existe pas de majorité et d'opposition au Parlement européen où les lignes de partage se dessinent en fonction des sujets.

L'accès à l'information est la clé de l'influence dans un univers où les décideurs sont multiples et les compromis sont la règles. Le lobbying est ainsi le point de rencontre de tous ceux qui font l'Europe au quotidien.

A. L'institutionnalisation du « lobbying » dans le processus décisionnel européen

A l'origine, le mot « lobby » désigne, en langue anglaise, une « allée couverte dans un monastère », puis tout simplement un « couloir », et enfin « le hall ouvert au public dans le lieu d'une assemblée législative ». Le mot anglais est sans doute issu de la même étymologie que celui du mot « loge » (qui peut lui aussi être rapproché de l'idée d'influence et de pression sur le pouvoir). Le mot a connu une sorte de glissement de sens métonymique et a fini par désigner non pas ce fameux couloir de l'Assemblée mais les personnes qui s'y trouvent. Dans son acception moderne, lobby renvoie aux personnes qui fréquentent assidûment les couloirs d'une assemblée législative pour essayer d'influencer leurs membres dans l'exercice de leurs fonctions.

1) Bruxelles, capitale du lobbying

De la construction européenne et du droit qui l'accompagne est née une nouvelle profession : celle de lobbyiste. En cinquante ans, Bruxelles est ainsi devenue la capitale mondiale du lobbying ; une activité concentrée sur seulement 3 à 4 km2, la superficie du quartier européen de Bruxelles. On y recense près de 10 000 lobbyistes, 700 associations professionnelles, 400 groupes d'intérêts, 150 sociétés de conseils en affaires européennes, plus de 150 cabinets d'avocats spécialisés sur les sujets européens, 30 chambres de commerce, près de 1 000 journalistes accrédités...

a) L'officialisation des lobbies

A l'opposé de l'opacité qui régit leur action en France, les lobbyistes de Bruxelles ont pignon sur rue, et sont des acteurs à part entière du processus d'élaboration normative. Comme le souligne un rapport de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris(30), « le lobbying communautaire est à l'image de l'Europe : très étendu dans la couverture des sujets traités, d'une grande variété dans son approche et un espace où la dimension culturelle et les traditions y pèsent tout leur poids. Il s'exerce à l'égard d'institutions européennes qui se veulent avant tout ouvertes dans leurs relations avec les groupes d'intérêt et la société civile ».

Le lobbying est considéré à Bruxelles comme un élément fonctionnel et indispensable du système ; c'est un processus essentiel pour le développement des politiques de la Commission et ses fonctionnaires reconnaissent la nécessité de cet apport extérieur. Il en est de même au Parlement européen où les députés ont souvent besoin des groupes d'intérêts pour être informés ; la multiplicité des lobbies leur permet d'avoir accès à une information diversifiée et contradictoire.

Tous ces intérêts se croisent, se complètent et se confrontent. Les stratégies d'influence constituent des vecteurs subtils pour conforter des positions économiques, politiques et culturelles et participent au rayonnement d'un pays. Dans de telles stratégies, les intérêts privés peuvent d'ailleurs soutenir une diplomatie au service de l'intérêt national.

Il faut également penser le lobbying en dépassant le seul cercle national. La grande majorité des réseaux d'influence agit en anglais et Bruxelles exige une approche multilingue et multiculturelle pour réussir. Une stratégie d'influence doit donc se fonder sur des regroupements d'intérêts et sur un jeu d'alliance. En d'autres termes, l'influence de la France ne repose pas que sur les Français ou les francophones.

En toute transparence, 4810 groupes d'intérêts sont actuellement accrédités auprès du Parlement européen(31) . La liste des organisations peut d'ailleurs être consultée sur le site Internet de l'institution(32).

La Commission a pour sa part pris une série de mesures en vue de clarifier et d'encourager le dialogue avec les groupes d'intérêts. Elle a, dans une communication du 2 décembre 1992(33), distingué deux catégories de groupes d'intérêts : les organisations sans but lucratif (associations/fédérations européennes et (inter)nationales) et les organisations à but lucratif (conseillers juridiques, agences de relations publiques, consultants). Les premières sont souvent, mais pas nécessairement, des organisations professionnelles. Les secondes agissent généralement sur instructions d'une tierce partie qui les charge d'exposer et de défendre ses intérêts.

Une base de données baptisée « CONECCS »(34) recense dans un répertoire en ligne les organes consultatifs et organisations de la société civile sans but lucratif, constituées au niveau communautaire. Ce répertoire représente un outil de travail et non un moyen d'accréditation. Elaboré sur une base volontaire, il n'a pas pour objectif de restreindre l'accès des groupes d'intérêts aux services de la Commission, mais au contraire de sensibiliser les fonctionnaires à l'importance de consulter plus systématiquement les milieux intéressés. Il contribue ainsi à ce que certaines organisations moins connues et donc moins consultées se fassent mieux connaître et donc mieux entendre.

La Commission invite les groupes d'intérêts à respecter un code de déontologie dans leurs relations avec la Commission ; ils doivent se garder de toute forme de sollicitation à l'égard des fonctionnaires en vue d'obtenir des informations ou un traitement privilégié. Parallèlement, la Commission a elle-même pris l'initiative d'adopter, le 13 décembre 2000, un code de bonne conduite administrative de son personnel en ce qui concerne ses relations avec le public.

b) Les modalités d'intervention des lobbies

La capacité d'influence est liée à la maîtrise de certains atouts: une excellente connaissance du fonctionnement institutionnel, une bonne maîtrise technique des dossiers, la pratique de l'anglais et un carnet d'adresse multinational. D'une façon générale, la règle d'or du lobbyiste est l'anticipation. Les lobbyistes agissent différemment selon qu'ils interviennent auprès de la Commission, du Parlement européen ou du Conseil.

(1) Le lobbying à la Commission

Dans le cadre d'une meilleure gouvernance européenne, la Commission multiplie les procédures de consultation avant de proposer un texte, notamment lors de l'adoption des Livres verts qui précèdent tout processus législatif et incitent les entreprises à s'exprimer sur le sujet abordé. La Commission attend alors du lobbyiste qu'elle lui apporte une argumentation scientifique et juridique. En effet, les fonctionnaires de la Commission sont dans l'impossibilité de connaître par eux-mêmes toutes les spécificités sectorielles de chaque Etat membre, ce qui rend essentiel pour les deux parties l'échange d'informations.

Il est indispensable d'intervenir le plus en amont possible de la prise de décision en identifiant le rédacteur d'une proposition. C'est donc à un niveau hiérarchique intermédiaire qu'il est le plus utile d'agir ; une intervention directement auprès d'un directeur général ou d'un directeur ne peut avoir qu'un caractère exceptionnel.

(2) Le lobbying au Parlement européen

Les députés européens sont souvent à la recherche d'une expertise scientifique lorsqu'ils doivent rapporter sur un texte technique. Il existe pour les lobbyistes plusieurs points d'entrée : les députés européens directement ou leurs assistants, les commissions parlementaires, les groupes politiques, les rapporteurs, les coordinateurs. En tout état de cause, l'anticipation est de mise, et les lobbyistes n'attendent pas les sessions plénières de Strasbourg pour agir.

(3) Le lobbying au Conseil de l'Union

Les points d'accès sont plus limités, car la logique décisionnelle suit davantage les canaux diplomatiques. Un dialogue est néanmoins possible avec les groupes de travail du Conseil. Dans la mesure où les décisions sont de plus en plus prises à la majorité qualifiée, une action de lobbying auprès du seul gouvernement national n'est pas suffisante, ce qui rend indispensable le développement de contacts réguliers avec les délégations des différents pays membres. Les gouvernements seront davantage réceptifs à une argumentation politique, que ne pourraient l'être la Commission et, dans une moindre mesure, le Parlement européen.

2) La participation tardive des Français à la communauté « d'influenceurs »

a) Le frein culturel à l'égard du lobbying

En France, le lobbying est souvent considéré comme une activité suspecte, voire contraire à l'éthique ; travailler avec les groupes d'intérêts pose généralement la question de leur légitimité. Non pas que les lobbyistes n'existent pas en France, mais leur existence n'est pas institutionnalisée. La situation qui prévaut au Parlement français en est une illustration : le lobbying existe mais ne dit pas son nom, car c'est en réalité à travers les groupes d'études que sont relayés les intérêts sectoriels.

Cette hypocrisie devient ridicule ; c'est la raison pour laquelle il est essentiel de réhabiliter le lobbying en l'encadrant par des règles déontologiques.

Le lobbying à l'Assemblée nationale(35)

Les activités de « lobbying » ne sont pas réglementées et ne font pas l'objet de dispositions de type déontologique. Aussi n'existe-t-il ni registre ni liste (publique ou non) des groupes de pression, lesquels ne sont ni « connus » ni « reconnus » en tant que tels.

Tout au plus, convient-il de signaler que, en application des dispositions de l'Instruction générale du Bureau de l'Assemblée nationale relatives à la circulation dans l'Assemblée, les personnalités en possession de cartes spéciales délivrées par le Président ou par les Questeurs personnellement, ont accès au salon de la Paix.

Il s'agit, en pratique, d'une vingtaine de personnes chargées des relations publiques ou seulement de la partie « parlementaire » de ces relations dans quelques grandes entreprises publiques (ex.: Electricité de France), dans quelques organismes « institutionnels » (ex.: Caisse des dépôts et consignations) ou dans des instances représentatives de l'organisation professionnelle (ex.: chambres consulaires).

Pour autant, ces personnes ne peuvent pas être considérées comme les seules susceptibles d'exercer à l'Assemblée nationale des activités de « lobbying ». Il est, en effet, évident que beaucoup d'autres ont accès à certains locaux, de manière permanente ou non, à la demande d'un ou plusieurs députés par exemple, et peuvent ainsi, dans la réalité, faire connaître le point de vue de nombre de grandes entreprises privées ou organismes professionnels et syndicaux.

L'article 23 du Règlement de l'Assemblée nationale interdit la constitution au sein de l'Assemblée nationale de groupes de défense d'intérêts particuliers, locaux ou professionnels et entraînant pour leurs membres l'acceptation d'un mandat impératif ainsi que la réunion dans l'enceinte du Palais de groupements permanents tendant à la défense des mêmes intérêts.

L'article 79 du Règlement interdit, sous peine de sanctions disciplinaires, à tout député d'exciper, de laisser user ou d'user de sa qualité ou de son titre pour d'autres motifs que l'exercice de son mandat. Il lui interdit également d'adhérer à une association ou à un groupement de défense d'intérêts particuliers, locaux ou professionnels ou de souscrire à l'égard de ceux-ci des engagements concernant son activité parlementaire, lorsque cette adhésion ou ces engagements impliquent l'acceptation d'un mandat impératif.

Il existe néanmoins à l'Assemblée nationale des « groupes d'études » ouverts aux députés appartenant à tous les groupes politiques. Ces organismes sont actuellement au nombre de 118 (mai 2004) et, pour y appartenir, il suffit à un député de manifester sa volonté d'adhésion.

Selon les règles de fonctionnement qui leur sont applicables, les groupes agréés par le Bureau de l'Assemblée nationale peuvent disposer de la collaboration d'un fonctionnaire de l'Assemblée chargé d'assurer le secrétariat, si toutefois un volontaire se manifeste. Ils peuvent également utiliser les salles de réunion de l'Assemblée et les moyens de reprographie de documents offerts par les services compétents. Ils ne bénéficient d'aucun crédit de fonctionnement.

Le lobbying au Bundestag(36)

Selon l'annexe 2 du règlement du Bundestag, il est établi annuellement une liste publique où figurent tous les groupements souhaitant exprimer ou défendre leurs intérêts devant le Bundestag ou le gouvernement fédéral.

L'inscription dans ce registre est une condition préalable pour que les représentants des groupes de pression soient entendus par les commissions parlementaires ou obtiennent un laissez-passer leur donnant accès aux locaux du Parlement. Les indications suivantes doivent être fournies : nom et siège du groupement; composition de l'organe qui en assure la présidence et du secrétariat; domaines dont relèvent ses intérêts : nombre de membres; noms des représentants désignés; adresse de son bureau au siège du Bundestag ou du gouvernement fédéral.

Cette liste publique n'a toutefois aucune valeur juridique. Elle est établie dans le but d'assurer la transparence de la représentation d'intérêts dans le domaine parlementaire et de réunir et, au besoin, de fournir des informations pour les travaux du Bundestag et de ses commissions. L'inscription au registre ne confère pas automatiquement au groupement inscrit le droit de prétendre à un traitement privilégié, ni celui d'être entendu lors d'auditions. Le Bundestag peut suspendre unilatéralement la validité du laissez-passer délivré; d'autre part, le Bundestag et ses commissions peuvent, s'ils l'estiment nécessaire, inviter à leurs réunions des associations ou des experts qui ne sont pas inscrits sur la liste.

L'édition 2002 de la liste au « Bundesanzeiger » énumère 1 781 groupements d'intérêts.

b) Vers un réveil français ?

Au fil des années - et surtout depuis l'entrée en vigueur du traité de Maastricht - une véritable communauté des intérêts français s'est progressivement constituée à Bruxelles. Entreprises, partenaires sociaux, collectivités territoriales, médias : la prise de conscience semble désormais établie qu'il faut compter avec l'Europe et qu'un bureau de représentation permanente auprès de l'Union européenne n'est pas dénué d'intérêt.

(1) La représentation des entreprises françaises à Bruxelles

La présence bruxelloise française, quoiqu'en progression, demeure plus faible que celle de nos concurrents. Selon des statistiques fournies par le Cabinet de Conseil APCO(37), la présence française dans les milieux d'affaires bruxellois serait sensiblement moindre que celle de nos concurrents avec :

- 5 cabinets d'avocats français ayant des activités communautaires contre 28 Anglais, 24 Américains et 14 Allemands ;

- 9 associations professionnelles contre 46 allemandes et 15 anglaises ;

- 37 % des grandes entreprises françaises n'auraient pas de bureau ou de représentant permanent à Bruxelles.

Répartition par nationalité du nombre de cabinets d'avocats installés à Bruxelles et ayant des activités communautaires

Belgique

30

Royaume-Uni

28

Etats-Unis

24

Allemagne

14

Espagne

7

Pays-Bas

6

France

5

Suède

3

Danemark

2

Norvège

2

Finlande

1

Irlande

1

Italie

1

Luxembourg

1

Source : European Affairs Directory, 2002.

Au niveau patronal, le MEDEF dispose d'une antenne permanente à Bruxelles qui lui permet d'entretenir des contacts réguliers avec les patronats européens et les fédérations sectorielles. Le responsable du MEDEF à Bruxelles assure aussi la fonction de délégué permanent de son organisation auprès de l'UNICE (Union des confédérations de l'industrie et des employeurs d'Europe).

S'agissant des petites et moyennes entreprises, il faut mentionner l'ouverture en 2003 d'un bureau de représentation de la CGPME à Bruxelles dont le rôle est de favoriser la prise en compte des intérêts des PME françaises auprès des institutions européennes et d'informer les chefs d'entreprises sur l'actualité de l'Union.

En collaboration avec l'ACFCI (Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie), la Délégation du MEDEF anime le Cercle des délégués permanents français (CDP) qui réunit les lobbyistes français auprès de l'Union européenne. Il s'agit d'une association qui existe depuis 1994 et dont l'objectif est de regrouper et de structurer la représentation des intérêts français auprès de l'Union européenne. Le CDP réunit environ 150 représentants issus d'entreprises, d'associations professionnelles, d'organismes de recherche, des collectivités locales, de cabinets avocats et de consultants.

Le Cercle a ainsi pour vocation, par des rencontres et des échanges d'expériences, à promouvoir les intérêts français dans un souci de cohésion, grâce à des contacts réguliers avec la Représentation permanente (RP), les instances communautaires et toutes autres institutions directement concernées par le développement de l'Union européenne.

Les réunions d'information qui sont régulièrement organisées à la RP avant et après les sessions du Conseil des ministres permettent aux représentants des entreprises d'être informés des positions françaises dans les négociations en cours. A cela s'ajoutent les contacts établis avec la cellule entreprise et coopération de notre Représentation permanente.

Parmi les activités proposées par le CDP, il faut mentionner l'organisation de débats d'actualité et de conférences animées par de hautes personnalités. Le Cercle des Délégués Permanents fait ainsi davantage office de lieu d'échange d'informations que de réelle structure d'influence, en raison de la diversité des intérêts qui y sont représentés.

C'est la raison pour laquelle des structures plus informelles et plus restreintes viennent compléter l'action du CDP. C'est ainsi que le « club des grandes entreprises françaises à Bruxelles », créé à la fin des années 1980, réunit actuellement les représentants des sociétés suivantes : Areva, Bouygues, EADS, EDF, France Télécom, Gaz de France, Groupe Lagardère, La Poste, Péchiney Alcan, PSA Peugeot Citroën, Renault, Suez, Thales, Total, Veolia Environnement, ainsi que le représentant du MEDEF.

Un exemple de représentation professionnelle :

La Délégation des Barreaux de France

La Délégation des Barreaux de France existe depuis 1993. Elle participe, auprès des institutions européennes, à la promotion des valeurs de la profession ainsi qu'à la défense des positions des avocats français sur les questions relatives au statut des avocats dans l'Union européenne. Cellule d'expertise en droit communautaire, cette Délégation exerce une mission de formation et d'information des avocats sur les développements du droit communautaire. Elle joue également un rôle de représentation des avocats français auprès des institutions européennes, de la Représentation permanente française et des autorités représentatives de la profession d'avocat à Bruxelles.

Dans le cadre de sa mission de défense des intérêts des avocats, la Délégation des Barreaux de France a récemment mené des actions de lobbying sur plusieurs dossiers : proposition de directive sur la liberté d'établissement des avocats sur le territoire de l'Union européenne, « rapport Monti » sur la concurrence dans le secteur des professions libérales, et nouvelle directive « blanchiment ».

(2) La représentation des syndicats et organisations professionnelles

Compte tenu de l'ampleur croissante du rôle joué par l'Union européenne dans les domaines qui concernent les droits des travailleurs, les syndicats ne peuvent se contenter de cantonner leur activité au niveau national.

Il existe deux moyens pour les syndicats d'intervenir au niveau européen : soit en développant des relations institutionnelles afin de peser sur le processus décisionnel, et/ou en favorisant l'émergence d'une mobilisation sociale européenne à travers, notamment, l'organisation d'Euromanifestations, comme celle qui avait eu lieu à Vilvoorde en 1997. C'est ainsi que SUD-G10-solidaires, qui ne souhaite pas intégrer la Confédération européenne des syndicats, entend mener son action au niveau européen et participer ainsi à l'animation d'un mouvement altermondialiste, favorable au renforcement de la dimension sociale de la construction européenne.

A l'échelle de l'Union européenne, la Confédération européenne des syndicats (CES), créée en 1973, agit en vue d'influencer les législations et les politiques européennes par le biais de représentations directes auprès des diverses institutions, tout en garantissant la participation des syndicats à un vaste processus de consultation entre autorités européennes et partenaires sociaux, dans des domaines comme l'emploi, les affaires sociales et la politique macro-économique. Les divergences idéologiques n'ont pas empêché le mouvement syndical de chercher très tôt son unité au niveau européen. Et, progressivement, la CES s'est imposée comme un interlocuteur privilégié qui a d'ailleurs bénéficié du statut d'observateur à la Convention européenne.

Cinq syndicats français sont représentés à la CES : la CFDT, la CFTC, la CGT, FO et l'UNSA. Le Secrétariat de l'organisation, qui gère les activités de la CES au quotidien et est chargé des relations avec les institutions européennes et les organisations patronales, est composé de 7 personnes, dont un secrétaire confédéral de nationalité française. Il est heureux d'observer que dans bien des cas, les divergences syndicales hexagonales s'effacent au sein des groupes de travail de la CES où ne participe qu'un seul délégué par pays. L'Europe favorise ainsi un dialogue et une concertation constructive entre les syndicats français.

Mentionnons que les syndicats jouent également un rôle important de formation de leurs cadres aux affaires européennes. Des séminaires de formation, parfois co-financés par la Commission européenne, sont ainsi régulièrement organisés et contribuent à diffuser l'information européenne auprès d'un public trop souvent peu ou mal informé.

Un exemple de lobbying sectoriel :

l'organisation de la représentation agricole française

Dès le début de la construction européenne, la Commission a rapidement manifesté le souhait d'une coopération étroite avec les représentants des organisations agricoles, et les a invités à participer à titre d'observateurs à la Conférence de Stresa en 1958 puis a instauré un dialogue institutionnalisé par l'intermédiaire des Comités Consultatifs.

Les agriculteurs eux-mêmes, convaincus de l'importance de la Communauté européenne pour leur secteur, ont créé la première organisation européenne représentative, le COPA, qui a vu le jour le 6 septembre 1958. Un an plus tard, le 24 septembre 1959, les coopératives agricoles de la Communauté européenne ont créé une organisation représentative au niveau européen, le COGECA (Comité général de la coopération agricole).

Au niveau de l'organisation consulaire, les Chambres d'Agriculture se sont organisées afin d'ouvrir un bureau de représentation à Bruxelles à la fin des années 60. Les autres organisations professionnelles agricoles ont suivi plus tardivement (la FNSEA en 1988).

Actuellement, les organisations nationales généralistes sont regroupées dans les mêmes locaux : le GIE BEAF, l'Assemblée Permanente des Chambres d'Agriculture, et Coop de France. Le GIE BEAF a été créé le 1er janvier 2003, il regroupe 18 organisations professionnelles agricoles dont FNSEA, JA, Coop de France APCA et des associations spécialisées.

Afin de renforcer l'influence politique de la profession agricole, trois niveaux d'action sont identifiés : une mission d'information, une mission de suivi des instances et une mission de lobbying agricole tant technique que politique.

(3) La représentation des collectivités territoriales

60 % à 70 % de la gestion locale est influencée par l'Europe. Alors que les associations d'élus locaux de nombreux pays membres sont depuis longtemps présentes à Bruxelles, les associations françaises ont pris un retard important qu'elles sont toutefois en train de combler. Les collectivités territoriales mesurent en effet l'intérêt qu'il y a à disposer d'un bureau de représentation permanente à Bruxelles. 20 régions sur 22 sont représentées, soit individuellement, soit au sein d'un bureau commun à plusieurs régions(38).

Au niveau des communes, l'Association des maires de France (AMF) vient d'ouvrir un bureau de représentation à Bruxelles dont le rôle consiste à assurer une veille législative, à intervenir auprès des institutions sur des enjeux d'intérêt local et à assurer des contacts réguliers avec les associations d'autres Etats membres.

La multiplication des bureaux de représentation, si elle est souhaitable, ne doit toutefois pas provoquer un éclatement de la représentation. Aussi, l'enjeu pour les collectivités territoriales françaises consiste désormais à se regrouper - dans la mesure du possible - afin de gagner en efficacité et en visibilité. C'est ce à quoi s'emploie l'AMF en emménageant dans un local commun à plusieurs représentations : Association des départements français, Association des grandes villes de France, Association des villes moyennes. L'Association des régions françaises pourrait également décider de rejoindre ce bureau commun.

Une stratégie efficace suppose aussi de développer davantage les relations multilatérales avec les organisations territoriales d'autres pays membres, sur des sujets spécifiques. Car il est de plus en plus difficile de faire passer des messages exclusivement nationaux. Il est en revanche plus facile d'être entendu lorsque l'on est porteur d'une revendication d'intérêt européen.

Il est également nécessaire de valoriser la présence française au sein du Comité des régions, organe consultatif composé de représentants des collectivités régionales et locales, qui sont (depuis le traité de Nice) soit titulaires d'un mandat électoral au sein d'une collectivité régionale ou locale, soit politiquement responsables devant une assemblée élue.

Le Comité des régions est composé de 222 membres nommés pour 4 ans par le Conseil de l'Union européenne (puis 350 membres au maximum après l'élargissement de l'Union). La France dispose de 24 membres et d'un nombre égal de suppléants. Actuellement, la répartition entre les niveaux de collectivités territoriales est la suivante : 12 membres issus des conseils régionaux, 6 membres pour les conseils généraux et 6 membres pour représenter les communes.

Il est à noter que, pour l'essentiel, les membres du Comité des régions sont, en raison d'un choix discrétionnaire de chacun des Etats membres, des représentants des collectivités régionales. Les représentants de niveaux infra-régionaux, et notamment des communes, y sont en effet très minoritaires. Ainsi, les communes allemandes se plaignent de leur absence au Comité des régions et, par exemple, leur position sur les services d'intérêt général, proche de celle de la France mais éloignée de celle des Länder allemands, n'a ainsi pas été prise en compte par le Comité des régions.

Comme pour les autres pays, les représentants français ont mis en place une délégation nationale, actuellement présidée par M. Philippe Richert, Président du Conseil général du Bas-Rhin et président de la Commission « Europe » de l'Assemblée des départements de France(39).

Entre mars 2002 et octobre 2003, le Comité des régions a émis 99 avis : 23 saisines obligatoires, 55 saisines facultatives, dont 10 par le Conseil et 45 par la Commission, 2 saisines par le Parlement européen et 19 avis d'initiative. A cela s'ajoutent 6 résolutions, 3 déclarations et 2 contributions.

Sur ces 99 avis, 10 ont été élaborés par un rapporteur français, dont 2 conjointement avec un autre membre du Comité. Cela représente 10 % des avis émis, ce qui correspond globalement à la représentation française au sein du Comité des régions. Mais à titre de comparaison, les représentants des pays qui disposent du même nombre de membres que la France ont rapporté : 23 avis pour le Royaume-Uni, 17 avis pour l'Italie et 12 avis pour l'Allemagne.

Les Länder allemands :

une représentation ancienne à Bruxelles

En 1985, Hambourg et Schleswig-Holstein ont été les premiers à établir leur propre représentation, tandis que les autres Länder ont rapidement suivi. Alors que le gouvernement fédéral a pendant un temps fait preuve d'une relative méfiance à l'égard de cette « concurrence régionale », il souligne aujourd'hui l'excellente coopération avec les représentations de Länder qui contribue à renforcer la position allemande à Bruxelles. Depuis 1992, ces représentations bénéficient d'un statut sur la base d'une loi fédérale.

Les moyens financiers et le personnel employé varient fortement selon la situation budgétaire du Land. Ainsi, la représentation du Bade-Wurtemberg, Land relativement prospère, vient d'inaugurer son nouveau bâtiment (superficie : 2 600 m2) au cœur du quartier européen dont le coût total d'acquisition et des travaux de rénovation s'élève à 20,8 millions d'euros ; environ 30 personnes y travaillent. En revanche, la représentation de la Saxe-Anhalt comprend un effectif de « seulement » 11 personnes avec un budget guère comparable à celui des grands Länder.

La Bavière est, quant à elle, devenue propriétaire de l'ancien Institut Pasteur, un imposant bâtiment en briques rouges, construit en 1903 et inoccupé depuis 1987. Situé au cœur du quartier européen, face au Parlement européen et au Comité des régions, son emplacement présente un « un grand avantage stratégique » selon le ministre bavarois aux affaires européennes. Il a été acquis pour un montant de 29,4 millions d'euros.

(4) Les médias accrédités auprès des institutions européennes

Selon les services de la Commission européenne, 920 journalistes sont accrédités permanents à la date du 3 mai 2004. Bruxelles est ainsi, avec Washington aux Etats-Unis, la ville qui héberge le plus de journalistes au monde. La Commission organise chaque jour un point de presse (depuis 1995 en deux langues : français et anglais) auquel participent environ 200 journalistes.

La Représentation permanente française organise également ses propres points de presse, généralement avant et après les réunions du Conseil des ministres. Au cours de ces rencontres, de nombreuses informations « off » sont communiquées, et les journalistes étrangers sont nombreux à s'y rendre (près de 50 % des participants). Les points de presse de notre RP sont parmi les plus suivis car ils se tiennent en français, une langue parlée et/ou comprise par la très grande majorité des journalistes, ce qui confère à la France un avantage comparatif non négligeable.

Le tableau qui suit recense les journalistes accrédités auprès de la Commission européenne, selon leur nationalité. L'Allemagne figure nettement en tête du classement, avec 147 journalistes accrédités, issus de 79 médias différents. La France se situe au cinquième rang, avec 70 journalistes provenant de 45 médias. Il est surprenant, pour ne pas dire préoccupant, de constater qu'aucun journaliste de TF1 - le média télévisé le plus regardé en France - ne figure sur la liste des journalistes accrédités. En presse écrite, c'est le magazine l'Express qui fait figure d'exception en n'ayant aucun correspondant permanent à Bruxelles à la différence de ses deux principaux concurrents que sont Le Nouvel Observateur et Le Point.

Répartition, par nationalité, des journalistes accrédités

auprès de la Commission européenne(40)

Allemagne

147

Royaume-Uni

110

Belgique

108

Italie

77

France

70

Espagne

65

Pays-Bas

45

Grèce

16

Pologne

16

Autriche

14

Portugal

14

Finlande

13

Hongrie

13

Suède

13

Danemark

12

Chypre

8

République tchèque

8

Irlande

6

Luxembourg

6

Slovaquie

4

Slovénie

4

Estonie

3

Lettonie

2

Lituanie

1

Malte

1

Source : Commission européenne.

D'une façon générale, les médias français traitent peu des sujets européens, même s'il faut se réjouir ces derniers temps d'une meilleure couverture européenne par la presse écrite, essentiellement la presse quotidienne. L'Europe a la réputation d'ennuyer, d'être compliquée et surtout de ne pas faire vendre. C'est à la télévision que la situation est la plus dramatique, à quelques exceptions près, notamment la couverture de l'élargissement qui a occupé une place significative. Or la contribution des médias de masse est indispensable pour rendre l'Europe plus proche des citoyens, pour expliquer ce qui est compliqué et pour alimenter un débat d'idées trop souvent caricatural dans notre pays. L'émergence d'une société civile européenne et l'affirmation d'une identité européenne ne sera réellement possible que le jour où les médias prendront la mesure de leurs responsabilités.

Dans son « Journal d'un Conventionnel », M. Olivier Duhamel, député européen et ancien membre de la Convention, relate ainsi le traitement médiatique observé le 13 juin 2003, lorsque la Convention est parvenue à un consensus « imparfait mais inespéré »(41) sur le projet de Constitution européenne.

14 juin 2003

Revue de presse de mauvais augure

Des grands journaux internationaux, peu à redire. L'adoption quasi-unanime du projet de constitution par la Convention mérite leur Une. La Repubblica (Roma) : « Costituzione un successo insperato », citant Giscard. La Stampa : « Nasce la costituzione della nuova Europa ». Corriere della Sera (Milano) : « Costituzione europea, c'è il primo testo ». ABC (Madrid) : « Ciudadanos y Estados, titulares de los derechos en la Constitucion europea ». Le Soir (Bruxelles) : « La Constitution européenne serait soumise à référendum ». International Herald Tribune : « Writing a new rulebook for Europe ». Financial Times (London) : grande photo couleur de Dehaene, Amato et Giscard trinquant sur fond de drapeau européen. Süddeutsche Zeitung : « Europa gibt sich eine Verfassung », « la meilleure possible » explique l'édito. Le Monde souligne : « Une importante réforme des institutions ».

Nos quotidiens nationaux se distinguent eux par leur discrétion, Libération excepté, qui titre « Nous, peuple d'Europe... ». Jean Quatremer et Patrick Sabatier soulignent l' « avancée ». Le Figaro publie un bon papier de leur jeune nouvelle correspondante, Alexandrine Bouilhet, mais se contente d'une mention discrète à la Une. Ouest-France, le premier tirage de la presse française, le plus européen de nos quotidiens, traite bien le sujet mais n'a pas jugé utile de porter le sujet en Une, lui préférant les 24 heures du Mans, des filières clandestines de chiots et la mort de Guy Lux. L'Humanité se tait. Le Parisien ne fait quasiment rien : moins de trente lignes sur une seule colonne en page 4 dans un de nos meilleurs journaux populaires, pour cause de mort de Guy Lux ...

TF1, « Journal télévisé » de 20h. L'adoption d'un projet de constitution européenne par la Convention est évoquée vers 20h 29. En une minute. En gros : Giscard a réussi et images de lui trinquant dans l'hémicycle. Rien sur le contenu, évidemment. Et cela s'appelle « Journal télévisé ». Cela prétend nous donner des informations. France 2 fit mieux, ce qui n'est pas difficile. Sujet plus long, cartons d'explications des principaux changements sur le fond, et Christian-Marie Monnot, correspondant permanent à Bruxelles (TF1 n'en a même pas, il me semble), d'expliquer pour conclure à l'antenne que l'histoire n'est pas terminée, puisque le projet doit encore être approuvé par les gouvernements, puis, souvent, les citoyens.

Convaincre les citoyens, certes. Mais comment lorsque des médias ultra-populaires demeurent infra-protozoaires ?

Olivier Duhamel

Extrait de : Olivier Duhamel, « Pour l'Europe », Seuil, Paris, 2003

Certaines initiatives heureuses méritent cependant d'être encouragées. Le quotidien régional Ouest France a ainsi engagé en 2003 une vaste opération de formation et de sensibilisation de ses journalistes aux sujets européens. Un « groupe Europe » s'est constitué au sein du journal, et réunit une cinquantaine de journalistes « volontaires », de tous les services, de tous les départements et de toutes les générations. L'opération baptisée « Ouest-France, rédaction européenne », lancée en 1997, repose sur deux programmes :

- une série de colloques et de conférences organisées dans la zone de diffusion du journal, parrainées par les institutions européennes et réunissant journalistes et décideurs locaux et régionaux ;

- un programme de déplacements dans les institutions européennes pour familiariser les journalistes au fonctionnement des institutions européennes. Le premier séminaire s'est déroulé à Strasbourg et Bruxelles, du 23 au 25 septembre 2003. A l'ordre du jour : rencontre avec les Présidents du Parlement européen et de la Commission, visite des institutions et ateliers de travail sur les grands dossiers européens. Fort du succès de ce premier séminaire, deux autres déplacements ont déjà été organisés depuis, qui ont permis à 120 participants (essentiellement des journalistes, mais aussi quelques cadres) de mieux comprendre les enjeux européens et le fonctionnement des institutions. Pour les cinq ans à venir, l'objectif est de réaliser trois séminaires par an, ce qui porterait à 700 le nombre de participants d'ici fin 2009.

B. Forces et faiblesses du dispositif français de suivi des négociations communautaires

Le Secrétariat général du comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne (SGCI) et la Représentation permanente française auprès de l'Union européenne sont deux structures administratives essentielles dans l'élaboration des positions françaises de négociation et leur expression au sein du Conseil. De leur bonne articulation dépend une partie de l'influence française, qui se joue également de plus en plus au Parlement européen. C'est pourquoi l'amélioration des relations entre l'administration et les députés français du Parlement européen doit constituer une priorité pour la prochaine législature de l'Assemblée de Strasbourg.

1) La définition des positions françaises de négociation

a) Le rôle du SGCI

La coordination interministérielle pour les affaires européennes est assurée par le SGCI, une structure administrative interministérielle directement rattachée au Premier ministre. Environ 200 fonctionnaires y sont affectés.

Le SGCI a été créé par Robert Schuman avec pour mission d'optimiser l'utilisation des fonds distribués dans le cadre du Plan Marshall. Après les traités de Paris (CECA, 1951) et de Rome (1957), il lui a été confié le soin de coordonner les relations entre les autorités françaises et les institutions communautaires.

Aujourd'hui, le SGCI coordonne les positions françaises sur les sujets européens, sauf la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) qui relève du Quai d'Orsay(42). En pratique, le SGCI est divisé en secteurs qui correspondent aux différents départements ministériels avec à leur tête un fonctionnaire délégué de chaque ministère.

Lorsque la Commission européenne présente une proposition d'acte communautaire, celle-ci est transmise au Conseil, à l'ensemble des Représentations permanentes et au SGCI qui se charge de diffuser le projet de texte aux ministères concernés, qui doivent lui transmettre leur position. Le SGCI joue alors le rôle de coordonnateur afin d'établir, au niveau interministériel, la position de négociation française. En cas de difficultés, le SGCI peut recourir à l'arbitrage du cabinet du Premier ministre ou au Premier ministre lui-même. La proximité du SGCI avec le pouvoir politique est d'autant plus forte qu'il est fréquent que le secrétaire général du SGCI soit en même temps le Conseiller pour les affaires européennes du Premier ministre.

Le SGCI est également chargé de veiller à la bonne application du droit communautaire, ce qui concerne essentiellement la transposition des directives européennes.

Le SGCI est une structure que nous envient beaucoup de pays européens, même si certaines limites ne peuvent être ignorées. Dans un rapport publié en décembre 2002(43), le Commissariat général du Plan pointait la faiblesse politique du SGCI dont l'autorité n'est pas toujours suffisante pour procéder aux arbitrages nécessaires.

Les relations entre le SGCI et le Secrétariat général du gouvernement (SGG) mériteraient également d'être clarifiées. Une réflexion devrait être menée sur un possible rapprochement des deux structures.

b) Le rôle de la Représentation permanente auprès de l'Union européenne

La Représentation permanente (RP) est chargée d'assurer, au sein des groupes de travail du Conseil, et du Comité des représentants permanents (COREPER) la négociation des projets de textes en discussion, sur la base du mandat de négociation qui lui est transmis par le SGCI.

Comme pour le SGCI, la RP est composée de fonctionnaires issus des différents ministères, et chacun est responsable du suivi d'un secteur donné. Les fonctionnaires affectés à la RP sont généralement considérés comme faisant partie des meilleurs de chacune des administrations représentées.

La RP doit constamment gérer l'adaptation des positions nationales avec l'évolution de la négociation communautaire, sans pour autant contrevenir aux instructions adressées par le SGCI. Du bon dialogue entre les deux structures dépendent donc l'efficacité et la viabilité du dispositif de négociation français. En outre, l'extension du champ d'application du vote à la majorité qualifiée impose de plus en plus une certaine souplesse dans les positions de négociation.

Cela justifie de renforcer les contacts entre Paris et Bruxelles, et d'assurer une présence plus fréquente à Paris du Représentant Permanent, à l'instar de son homologue britannique, invité à participer à Londres à une réunion de travail hebdomadaire.

2) Une information insuffisante des députés français du Parlement européen

Les relations entre l'administration française et les députés français du Parlement européen font l'objet d'une circulaire du Premier ministre en date du 21 mars 1994(44). Sur le papier, l'organisation des rapports est excellente ; dans la réalité, les principes affichés ne sont pas toujours respectés, faute de moyens et de volonté suffisants.

Officiellement, tous les ministères sont dotés d'une structure chargée des relations avec les représentants français au Parlement européen. Il existe cependant une grande hétérogénéité des situations : si certains ministères tels que l'Agriculture, l'Environnement, Bercy ou encore les Transports se sont dotés de structures disposant de réels moyens, d'autres sont quasiment absents sur le terrain.

Les députés européens se plaignent d'être destinataires trop tardivement de notes d'information souvent incomplètes et parfois difficilement utilisables. Dans bien des cas, ils ne reçoivent les documents du SGCI que quelques jours avant les sessions plénières, c'est-à-dire trop tard pour modifier l'équilibre d'un texte adopté en commission.

A Bruxelles, les parlementaires européens ont encore le sentiment que la RP s'intéresse davantage aux travaux du Conseil - c'est bien sa raison d'être - qu'aux leurs. Mais alors que plus de 60% du droit applicable en France prend sa source dans la législation de l'Union, la place et le rôle du Parlement européen se révèlent de plus en plus importants. L'extension de la procédure de codécision envisagée dans le projet de Constitution européenne renforce encore le poids du Parlement européen au sein du « triangle institutionnel ». La stratégie d'influence doit donc se tourner vers une institution dont les pouvoirs sont désormais, dans bien des domaines, comparables à ceux du Conseil.

Au sein de la Représentation permanente, un conseiller est spécialement chargé des relations avec les députés européens. Mais ses moyens financiers et matériels sont sensiblement inférieurs à ceux de nos partenaires. L'enveloppe budgétaire dont il dispose lorsqu'il se rend aux sessions plénières de Strasbourg, ne lui permet pas toujours d'inviter un député à déjeuner. Il doit se loger à la périphérie de la ville lorsque ses homologues des autres Etats membres résident dans les mêmes hôtels que leurs parlementaires, ce qui facilite nettement les contacts informels. Il doit souvent écourter d'une ou deux journées son séjour à Strasbourg en raison de frais de mission insuffisants. Quelques centaines d'euros... A-t-on réellement pris, en France, la mesure de l'enjeu ? Les Allemands et les Britanniques proposent, eux, lors de chaque session plénière un « débriefing » autour d'un buffet pour leurs parlementaires ; des déjeuners de travail et d'information sont régulièrement organisés.

Il est donc urgent de valoriser le rôle des parlementaires européens et de les associer le plus en amont possible aux orientations définies par le Gouvernement. Parce que les affaires européennes ne sont depuis longtemps plus des affaires étrangères, les députés européens doivent retrouver toute leur place dans le paysage politique national ; et ils pourront ainsi mieux remplir leur fonction de relais auprès des citoyens. A cet égard, la réforme du mode de scrutin applicable aux élections européennes, même imparfaite, est une évolution positive qui facilitera un meilleur ancrage territorial.

Au niveau gouvernemental, le ministre chargé des affaires européennes doit naturellement être l'interlocuteur privilégié des députés européens. Des réunions devraient être organisées - comme c'était le cas dans le courant des années 1990 - sur un rythme mensuel, avec les députés français du Parlement européen afin de préparer les sessions plénières de Strasbourg, suffisamment à l'avance.

A Paris, dans chaque ministère, le responsable chargé des relations avec les parlementaires européens doit devenir un point d'entrée opérationnel. Ces chargés de mission devraient être régulièrement réunis par le ministre des affaires européennes.

De leur côté, les députés européens français devraient mieux s'organiser au sein d'une délégation nationale plus structurée afin de faciliter la transmission des informations avec les administrations nationales d'une part, et la Représentation permanente, d'autre part.

En tout état de cause, l'amélioration des relations avec l'administration nécessite de la part des députés européens un engagement plus soutenu dans le travail législatif et une participation effective aux réunions organisées par le ministère des affaires européennes et par la Représentation permanente. Leur participation à ces réunions sera d'autant plus grande qu'ils y trouveront un intérêt à s'y rendre.

V. LA MARGINALISATION PERSISTANTE DES AFFAIRES EUROPEENNES AU NIVEAU NATIONAL

La société française souffre d'un cloisonnement qui isole les questions européennes du champ politique et administratif national. Cette situation conduit à marginaliser une Europe, généralement mal connue et donc mal comprise.

A. Au niveau politique

Tant au niveau gouvernemental que parlementaire, les affaires européennes n'apparaissent pas comme une priorité dans l'agenda politique. Et les partis politiques ne pourront pas éternellement s'exonérer de leurs responsabilités.

1) Au niveau gouvernemental 

a) Rôle et statut du ministre des affaires européennes

Dans le dispositif gouvernemental, le ministère des affaires européennes assure une double fonction d'impulsion politique et de coordination administrative. Or aujourd'hui, les conditions d'un bon exercice de ces fonctions ne sont pas réunies.

Donner une impulsion politique nécessite de bénéficier d'un rang hiérarchique suffisant au sein du Gouvernement pour disposer d'un poids politique auprès des différents ministres. Or, placé sous l'autorité du ministre des affaires étrangères, le ministre délégué aux affaires européennes ne dispose pas de l'autonomie dont il aurait besoin. Intervenant dans des domaines par nature interministériels, ce ministre n'a pas l'autorité politique que lui imposent ses fonctions. Son rôle est souvent marginalisé, et plusieurs exemples le soulignent, comme l'absence de sa participation aux travaux de la Convention(45) sur l'avenir de l'Europe. Ainsi, le ministre délégué aux affaires européennes n'a même pas été autorisé à prendre la parole lors du débat en séance publique organisé le 3 décembre 2002 à l'Assemblée nationale, au cours duquel le Président Valéry Giscard d'Estaing est venu solennellement présenter aux députés, dans l'hémicycle, l'état d'avancement des travaux de la Convention.

Assurer une coordination administrative suppose que le ministre délégué aux affaires européennes puisse s'appuyer sur une administration qui lui serait dédiée. La réalité est différente : certes, il peut s'appuyer sur la Direction de la Coopération européenne du Quai d'Orsay ainsi que sur le SGCI, en tant que besoin. Mais il ne bénéficie pas, à proprement parler, de l'autorité pleine et entière sur une administration qui lui serait propre.

Dès lors, certaines réformes apparaissent nécessaires pour que les structures gouvernementales reflètent davantage la réalité communautaire. En d'autres termes, il serait temps de tirer les conséquences du fait que les affaires européennes ne sont plus des affaires étrangères. Plusieurs propositions ont, par le passé, été formulées :

- rattacher le ministre des affaires européennes au Premier ministre ;

- lui accorder le statut de Vice-premier ministre ;

- en faire un ministre résidant à Bruxelles, en lieu et place du Représentant Permanent.

Pour des raisons différentes, ces trois propositions - bien qu'intellectuellement séduisantes - ne sont pas envisageables à court et à moyen terme. Le rattachement au Premier ministre n'est pas sans poser de difficultés au regard du périmètre du domaine réservé du Président de la République, dans la mesure où les affaires européennes sont, dans ce cas, assimilées à des affaires étrangères qui ne relèvent pas de la compétence du Premier ministre. Quant à l'idée d'élever le ministre des affaires européennes au rang de Vice-premier ministre, cette proposition n'aurait de sens que si elle est également appliquée dans les autres Etats membres de l'Union. Or l'existence, dans beaucoup de pays, de gouvernements de coalition, rend l'exercice difficile pour des raisons d'équilibre politique. Enfin, la proposition d'un ministre résidant à Bruxelles présente aujourd'hui plus d'inconvénients que d'avantages, dans la mesure où il pourrait conduire à isoler un peu plus encore les affaires européennes de la vie politique nationale.

Aussi, une option pragmatique mais plus réaliste consisterait dans un premier temps à faire du ministère des affaires européennes un ministère à part entière, émancipé de la tutelle du ministre des affaires étrangères, sans pour autant le rattacher au Premier ministre. Le ministre des affaires européennes ne doit plus être un ministre délégué, mais un membre du Gouvernement doté d'une reconnaissance politique suffisante et ayant autorité sur ses propres services administratifs. Ceci plaide dès lors pour un rattachement du SGCI au ministre des affaires européennes.

Ce statut rénové sera plus en phase avec les dispositions du projet de Constitution européenne qui prévoit la création d'un Conseil « Affaires étrangères » composé des ministres des affaires étrangères de l'Union. Or on imagine mal le ministre des affaires étrangères siéger également au Conseil « Affaires générales » (CAG) comme c'est le cas aujourd'hui. Il reviendra donc au ministre des affaires européennes de participer aux travaux du CAG avec l'autorité politique liée à son rang.

Le débat doit donc s'ouvrir pour une meilleure prise en compte des affaires européennes au niveau gouvernemental.

b) L'insuffisante prise en compte du « fait européen » par les administrations nationales : l'exemple du ministère de l'intérieur(46)

Trop nombreux sont encore les ministères où l'Europe demeure un objet non identifié, une préoccupation de second ordre. La dimension européenne au sein des administrations centrales est souvent insuffisante. Le cas du ministère de l'intérieur est révélateur et l'on peut s'étonner qu'il n'y existe toujours pas de direction des affaires européennes, même s'il faut signaler la création, en décembre 1997, d'une délégation aux affaires internationales, qui constitue une première étape.

Mais la dilution des responsabilités au sein du ministère de l'intérieur constitue à n'en pas douter un obstacle à l'adoption rapide d'une position de ce ministère, en raison de l'important travail d'harmonisation entre les directions concernées. Cette dispersion complique également la tâche des négociateurs français, qui ne disposent pas d'un interlocuteur bien identifié au ministère de l'intérieur et sont tenus de s'adresser à tous les services intéressés.

Il est clair que l'organisation du ministère n'est plus adaptée au développement de la coopération policière européenne depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam.

2) La réalité du contrôle parlementaire sur les affaires européennes

L'influence croissante exercée par la construction européenne sur le droit national a conduit à la création en 1979, dans chacune des chambres du Parlement, d'une Délégation pour l'Union européenne. Jusqu'à cette date, aucun organe interne à l'Assemblée nationale, ni au Sénat, n'était spécifiquement chargé de suivre les questions communautaires dans la mesure où il incombait aux députés de l'Assemblée nationale désignés pour siéger au Parlement européen de présenter chaque année, devant la Commission des affaires étrangères, un rapport d'information sur les principaux enjeux de la construction européenne.

A la différence des six commissions permanentes, dont l'existence est prévue par la Constitution, les Délégations parlementaires pour l'Union européenne ne disposent que d'un statut législatif. Si leur fonctionnement est semblable à celui d'une commission, leur mission est cependant différente. Alors que les commissions sont chargées de préparer l'examen et le vote en séance publique de la législation française, les Délégations pour l'Union européenne exercent essentiellement un contrôle politique sur les activités européennes du Gouvernement. Elles interviennent en amont du processus décisionnel, lors de la phase de négociation des textes européens.

En 1992, à l'occasion de la ratification du traité de Maastricht, la Constitution française a été révisée et un nouvel article 88-4 a été intégré. Dans sa rédaction actuelle (issue d'une modification intervenue en 1999), il énonce :

Article 88-4 de la Constitution

« Le Gouvernement soumet à l'Assemblée nationale et au Sénat, dès leur transmission au Conseil de l'Union européenne, les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative. Il peut également leur soumettre les autres projets ou propositions d'actes ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne.

Selon des modalités fixées par le règlement de chaque assemblée, des résolutions peuvent être votées, le cas échéant en dehors des sessions, sur les projets, propositions ou documents mentionnés à l'alinéa précédent ».

Destinataire des projets de textes européens qui lui sont transmis par le Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat formulent, par l'intermédiaire de leurs délégations respectives pour l'Union européenne, des avis et peuvent, le cas échéant, voter des résolutions. Celles-ci ne sont pas juridiquement contraignantes pour le Gouvernement, leur portée étant essentiellement politique. A la différence de plusieurs Etats membres de l'Union, notamment les pays scandinaves, le Gouvernement n'est jamais lié par un mandat de négociation parlementaire.

A l'avenir, quelle pourrait être l'évolution du rôle des Délégations parlementaires pour l'Union européenne ?

Une réflexion pourrait s'engager autour de l'idée d'une possible transformation des Délégations en Commissions pour les affaires européennes, qui seraient chargées d'assurer un contrôle politique sur les grands enjeux de la construction européenne et auditionneraient régulièrement les ministres avant et après les réunions du Conseil de l'Union et du Conseil européen. Dans la perspective d'une adoption du projet de Constitution européenne, cette Commission aurait un rôle d'aiguillon politique dans le cadre du contrôle du respect du principe de subsidiarité et de l'activation du mécanisme d'alerte précoce tel qu'il est envisagé.

Une réflexion devrait également s'engager sur une meilleure articulation avec le travail des Commissions. A cet égard, une simplification des procédures serait souhaitable pour favoriser une meilleure perception des liens étroits qui existent entre la législation européenne en préparation et la législation nationale.

Des réformes récentes engagées à l'Assemblée nationale soulignent la volonté politique d'impliquer davantage les parlementaires dans les questions européennes. Ainsi, depuis janvier 2003, quatre questions d'actualité posées au Gouvernement sont une fois par mois réservées à des thèmes européens. Par ailleurs, l'Assemblée nationale (depuis 2003) et le Sénat (depuis 1999) ont ouvert à Bruxelles un bureau de représentation permanente(47), confié à un fonctionnaire parlementaire et particulièrement utile pour faciliter l'accès à l'information et renforcer les relations de travail avec les institutions européennes.

3) La responsabilité des partis politiques

A-t-on, tant au niveau des responsables politiques, économiques et sociaux que des médias, fait l'effort de pédagogie nécessaire pour que l'ensemble de nos concitoyens adhèrent à l'idée européenne ?

Il semble bien que non. Une électrice de ma circonscription m'a demandé un jour pourquoi c'était toujours les Belges qui dirigeaient l'Europe. Devant mon étonnement, elle me précisa que le journal, la radio ou la télévision, en donnant des nouvelles de l'Europe, répétaient toujours : « Bruxelles a progressé, Bruxelles a imposé, Bruxelles a décidé... »

Pour en finir avec une telle méconnaissance il serait bon, à l'occasion par exemple des élections européennes, que tous les partis politiques fassent cet effort de clarification. D'autant qu'ils ont une responsabilité particulièrement engagée dans le processus de la construction de l'Union européenne.

La Constitution française en fait les garants de la démocratie dont ils assurent le bon fonctionnement tandis que la loi électorale pour désigner les représentants français au Parlement européen en fait des acteurs de premier plan. C'est eux et eux seuls qui présentent des listes dans les huit circonscriptions électorales, listes dont l'ordre ne pourra être modifié par les électrices et les électeurs. Les organisations politiques désignent donc celles et ceux qui nous représenteront, les électrices et les électeurs ne faisant qu'entériner ces choix. S'il y a des député(e)s défaillants, c'est donc aux partis politiques de répondre de leur défaillance. S'ils sont « bons », par exemple en participant à l'élargissement de l'influence de la France, les partis politiques ne pourront que s'en féliciter.

Dans un souci de responsabilisation, les partis politiques pourraient demander à leurs élus au Parlement européen de signer publiquement un engagement moral à siéger à Strasbourg, et à ne pas démissionner en cours de mandat. En contrepartie, les formations politiques devraient accorder une place plus importante aux élus européens au sein de leurs organes de direction.

B. Au niveau administratif : formation et carrières des fonctionnaires

Le chantier de la réforme de l'Etat doit aussi être celui de l'ouverture de l'administration française à l'Europe. Les enjeux, multiples, concernent notamment la formation initiale ainsi que la gestion des carrières des fonctionnaires qui choisissent d'exercer leur mobilité dans les institutions européennes.

1) Au niveau de la formation initiale

a) Les enjeux de l'européanisation de l'ENA

Le rapport remis en juin 2003 par la Commission sur la réforme de l'ENA et la formation des cadres supérieurs des fonctions publiques, présidée par M. Yves-Thibault de Silguy(48), estime nécessaire une européanisation de l'ENA. Mais le rapport précise aussitôt, à juste titre, que « l'influence française au sein des instances européennes est un problème dont la solution ne réside pas à l'ENA. Elle dépend de la politique gouvernementale à l'égard de ces institutions, et, en particulier, des dispositions prises pour détecter les experts nationaux, les détacher, et les réintégrer ensuite dans l'administration française ».

L'ENA n'est certes pas une école de préparation à l'administration communautaire. Pour autant, les plus hauts fonctionnaires de l'Etat ne sauraient négliger une dimension européenne désormais omniprésente dans la vie administrative. Les critiques adressées sur la trop faible européanisation doivent cependant être relativisées. Les candidats au concours d'entrée doivent obligatoirement passer une épreuve de questions européennes, à l'écrit ou à l'oral. Cette épreuve nécessite une excellente connaissance du fonctionnement des institutions européennes ainsi que du contenu des politiques communautaires.

Une fois scolarisés, nombreux sont les élèves qui effectuent leur stage dans des administrations en relation avec l'Europe : Représentation permanente à Bruxelles, services de la Commission et cabinets de commissaires, etc.

Le décret n°2004-313 du 29 mars 2004 ouvre l'accès à l'ENA, dès le concours 2004, aux ressortissants de l'Union européenne et de l'Espace économique européen. S'ils réussissent le concours, les élèves étrangers suivront ainsi la même scolarité que les élèves français et pourront choisir, selon leur classement de sortie, une affectation dans l'administration française. L'accès à certains emplois de souveraineté devrait toutefois continuer à être réservés aux lauréats de nationalité française.

En outre, depuis la fusion avec l'Institut international d'administration publique (IIAP), la coopération administrative internationale se situe au cœur même des missions de l'ENA. L'école accueille chaque année plus d'un millier d'élèves et auditeurs étrangers représentant plus d'une centaine de nationalités(49). Il s'agit là d'un outil d'influence non négligeable si l'on considère que de jeunes étrangers formés en France (et qui plus est en langue française) deviennent des amis de la France. L'influence a besoin de relais et ne saurait s'appuyer sur les seuls fonctionnaires français.

b) La préparation aux concours communautaires

(1) Les performances des Français aux concours de l'Union européenne

L'attrait pour les emplois offerts par les institutions européennes ne cesse de croître. Il s'explique par de nombreux facteurs : perspective d'une carrière internationale, fonctions variées, rémunérations attractives, stabilité de l'emploi. Un seul moyen permet d'acquérir le statut de fonctionnaire : le concours.

Aux concours communautaires de 2002, les Français ont cependant connu une moindre performance, notamment lors du concours « Relations extérieures » (Relex) à l'occasion duquel seuls 5 lauréats français ont été retenus (soit 6,25 % des reçus) contre 29 Allemands (36,25 % des reçus). Or le nombre de candidats ne pouvait à lui seul expliquer un tel écart : sur les 2 064 présents aux tests de présélection, il n'y avait que 426 Allemands (20,64 %) et 253 Français (11,39 %).

Plusieurs facteurs éclairent la contre performance des Français :

- d'une part, l'augmentation du nombre des candidats, et donc de la sélectivité aux concours communautaires. A titre d'exemple, lors du dernier concours général organisé pour le recrutement de fonctionnaires d'encadrement (catégorie A), sur plus de 30 000 candidats admis à concourir, seuls 825 ont été convoqués à l'épreuve orale et 470 ont été inscrits sur la liste de réserve sur laquelle les services de la Commission choisissent les candidats pour les postes vacants. Ainsi, 1,56 % seulement des candidats admis à concourir ont réussi ce concours ;

- d'autre part, l'évolution de la nature des épreuves de présélection avec l'instauration d'un test de raisonnement verbal et numérique s'inspirant du GMAT américain(50).

On observe également depuis plusieurs années une multiplication des concours très spécialisés par matière (ingénierie, chimie, recherche nucléaire, informatique...) au détriment des concours généralistes auxquels les candidats français sont traditionnellement mieux préparés. On observe ainsi les meilleures performances des Français aux concours « droit et administration publique » où il y a eu en 2000 20,83 % de reçus pour 10,63 % de candidats.

(2) L'enjeu stratégique que représente un centre de préparation

Face à l'enjeu que représente pour l'avenir de notre influence de bons résultats aux concours organisés par les institutions de l'Union, la France a réagi en décidant de renforcer depuis l'an dernier le module méthodologique opérationnel de préparation aux concours du Centre d'études européennes de Strasbourg (CEES).

La préparation dispensée au CEES se veut avant tout méthodologique. Les concours européens sont en effet devenus ces dernières années d'une grande technicité. Ils comportent des tests de présélection composés de questionnaires à choix multiples (QCM), une épreuve écrite d'admissibilité consistant généralement en une note sur dossier et une épreuve orale d'admission. L'expérience prouve que de solides connaissances en matière européenne ne suffisent pas pour passer ces épreuves avec succès. Lors des récents concours, nombreux sont en effet les candidats français qui ont échoué dès les tests de présélection, en raison d'une impréparation à la nature de tels QCM auxquels nos grandes écoles et universités ne préparent pas. C'est pourquoi un entraînement portant sur la technique même des épreuves devient indispensable.

En 2003, le CEES a ainsi préparé 1 454 candidats à l'occasion de 32 sessions. Les premiers résultats sont très encourageants ; ils concernent un ensemble de concours « agriculture, pêche, environnement » pour le recrutement d'administrateurs et révèlent un taux de réussite de 43,65 % (55 lauréats sur 126 candidats) alors que le taux de réussite global du concours n'est que de 4,10 % (500 lauréats sur 12 188).

Ces bonnes performances soulignent l'importance à intensifier les activités de préparation aux concours, en les ouvrant également à des candidats non français qui seront ainsi formés en langue française. Le CEES a d'ores et déjà préparé plusieurs centaines de candidats en provenance des nouveaux pays membres, majoritairement francophones. Parmi les chantiers de l'avenir, figure la nécessité d'augmenter sensiblement le nombre des bourses allouées à des préparations aujourd'hui payantes et parfois difficilement accessibles pour les ressortissants des nouveaux pays membres.

Il apparaît également souhaitable de renforcer l'information sur les calendriers des concours et de développer des préparations en ligne. C'est la voie qui a été privilégiée par le gouvernement allemand et qui semble porter ses fruits, au vu des très bons résultats obtenus par les candidats allemands aux derniers concours communautaires. Depuis 2001, en effet, une information détaillée sur l'intérêt des concours et leur déroulement est disponible sur le site Internet du ministère des affaires étrangères allemand et des séminaires de préparations aux QCM et aux oraux sont désormais régulièrement organisés, ce qui a engendré une augmentation du nombre de candidats allemands aux concours de l'Union.

La préparation doit également être ouverte aux fonctionnaires déjà en poste dans l'administration française. Dans ce domaine, le CEES pourrait créer une préparation inspirée du dispositif britannique du « European Fast Stream » qui sélectionne au moyen de tests un nombre limité de candidats et leur propose une formation de haut niveau aux questions européennes. Les participants à cette préparation seraient dans l'obligation de présenter un ou plusieurs concours européens, et en cas d'échec, se verraient proposer une affectation dans un poste en liaison avec les affaires européennes. Ainsi, l'objectif est double : d'une part, renforcer notre présence dans les institutions de l'Union, et d'autres part, constituer un vivier de fonctionnaires nationaux bien formés aux questions européennes.

Fort de résultats très encourageants, le CEES doit s'imposer comme un centre de référence européenne pour la préparation aux concours de l'Union et occuper une place stratégique au sein d'un véritable pôle européen d'administration publique à Strasbourg. Le CEES deviendra naturellement le pilier européen de l'ENA, complètement et définitivement installée dans la capitale alsacienne à compter de la rentrée 2005.

2) Au niveau du suivi des fonctionnaires en poste dans les institutions européennes

Le développement de l'intégration européenne a rendu nécessaire une meilleure implication des administrations nationales dans la politique globale de présence française au sein des institutions européennes. Dans cette perspective, la mise à disposition d'agents relevant de l'autorité des administrations nationales, dénommés par la Commission « Experts nationaux détachés » (END) auprès des institutions de l'Union, constitue pour ces administrations un moyen privilégié de contribuer à la qualité du dialogue entre les administrations françaises et communautaires.

Les END sont des fonctionnaires nationaux mis à disposition des institutions de l'Union (en grande majorité à la Commission) par leurs ministères d'origine pour une durée maximum de quatre ans. Ils continuent à être payés par leur administration d'origine et bénéficient en plus d'une indemnité de la Commission, d'environ 3 400 euros.

La France dispose d'environ 170 END en poste dans les institutions de l'Union (147 à la Commission, 20 au Conseil mais aucun au Parlement européen). Notre pays arrive en première position, ex-aequo avec l'Allemagne, et devant le Royaume-Uni (137 END) et l'Italie (84 END).

Ces END ne sont pas uniquement des fonctionnaires, car plusieurs organismes parapublics et parfois privés peuvent proposer des candidats. In fine, c'est la Commission qui recrute le candidat de son choix.

Les END sont des vecteurs d'influence souvent peu valorisés. Or, contrairement à leurs collègues qui ont le statut de fonctionnaires communautaires, ils ont vocation à conserver un contact régulier avec leur administration d'origine qui continue d'ailleurs à les rémunérer. C'est pourquoi il est essentiel de bien préparer leur départ, mais aussi de bien gérer leur retour.

a) Le recrutement des Experts nationaux détachés (END)

Les recrutements interviennent au fur et à mesure des besoins de la Commission. Les avis de vacances de postes à pourvoir sont, pour la plupart, transmis au SGCI par la Représentation permanente de la France auprès de l'Union. Le SGCI se charge de les diffuser à l'ensemble de ses correspondants : l'administration centrale, mais également l'administration territoriale et, dans une moindre mesure la fonction publique hospitalière.

Il est indispensable que la circulation de l'information soit la plus importante possible, dans le cadre d'une mutualisation de l'offre de postes disponibles. A cette fin, une bourse aux emplois dans l'Union européenne devrait être créée, laquelle serait consultable en ligne par les agents publics.

b) Quel suivi pour les fonctionnaires français en poste dans les institutions européennes ?

Il existe, au sein du SGCI comme de la Représentation permanente à Bruxelles, un secteur spécialement dédié au suivi de la présence française dans les institutions européennes.

Les fonctionnaires français dans les institutions européennes expriment une double demande vis-à-vis de la France : ils souhaitent que l'on respecte leur indépendance en tant que personne agissant pour le compte d'une institution communautaire, mais ils attendent aussi l'écoute et la réactivité des autorités françaises vis-à-vis de leur expérience. Or mis à part le traditionnel rendez-vous du 14 juillet à la Représentation permanente, les occasions de se voir restent peu fréquentes.

De façon plus informelle, l'Association des Français fonctionnaires des Communautés européennes (AFFCE)(51) a pour objet et pour vocation de traiter toutes les questions intéressant le personnel français des institutions européennes, de coordonner les efforts de celui-ci, de renforcer son action et de le représenter auprès des autorités et administrations, tant françaises que communautaires.

Le cas récent d'un élève de l'ENA ayant été reçu, alors qu'il n'avait pas terminé sa scolarité, à un concours de la fonction publique communautaire, a posé la question de la compatibilité de son appartenance à la fonction publique communautaire avec la fonction publique nationale.

La réponse à cette question est que cela est juridiquement possible. Dans sa rédaction actuelle, le statut général de la fonction publique n'impose pas la radiation de son corps d'origine du fonctionnaire qui est titularisé dans une autre fonction publique, que celle-ci soit nationale ou non. La jurisprudence administrative admet donc qu'un agent puisse être simultanément titulaire dans les deux fonctions publiques(52). Toutefois, dans un avis du 9 juin 1994, le Conseil d'Etat a rappelé que l'administration est tenue de placer l'agent dans une position statutaire régulière.

En réalité, l'administration a tout à gagner à maintenir un contact avec les fonctionnaires français qui travaillent dans les institutions européennes et devrait les rencontrer au moins une fois par an afin de se faire une idée précise de leur activité.

Six mois avant son retour, l'END devrait être systématiquement convoqué à un entretien de préparation au retour, au cours duquel un profil de poste sera établi qui tienne compte de son expérience au sein des institutions européennes.

Car la gestion des retours est le point faible du dispositif. Pendant leur séjour à Bruxelles, les END vivent loin des yeux, loin du cœur. La plupart du temps, leur mobilité vers les institutions européennes n'est pas valorisée ; au contraire, elle est trop souvent pénalisante pour ceux qui veulent légitimement faire carrière. Un fonctionnaire a intérêt, pour son avancement, à consacrer toutes ses activités à son corps plutôt que d'effectuer des mobilités à l'extérieur.

C'est la raison pour laquelle il est nécessaire d'instaurer des mécanismes incitatifs. Plusieurs pistes pourraient être explorées : pourquoi pas un avancement automatique de grade ou bien un abaissement du nombre d'annuités requises pour le départ à la retraite des fonctionnaires ayant exercé une mobilité internationale ?

En tout état de cause, le dispositif doit être suffisamment souple pour être viable. Il ne s'agit pas d'imposer une mobilité, mais de la rendre plus attractive. De même, les échanges entre fonctionnaires nationaux et européens devraient être développés. Pourquoi des fonctionnaires de la Commission ne passeraient-ils pas quelques années de leur carrière dans des administrations nationales ? Souvent critiqués pour leur manque de proximité avec les réalités nationales, ils pourraient faire profiter l'institution communautaire de leur expérience dans un Etat membre.

Enfin, la mise à disposition de fonctionnaires français au sein des administrations des pays devant prochainement assurer la présidence de l'Union se serait pas dénuée d'intérêt.

CONCLUSION

Quelles conclusions tirer de cette photographie de la présence française dans les institutions européennes ?

Contrairement à certaines idées reçues particulièrement tenaces, notre pays n'a pas à rougir de son rang et de son influence en Europe. Pour autant, certaines faiblesses structurelles pourraient nous nuire de façon irréversible si rien ne change.

Notre handicap majeur est sans aucun doute la faiblesse de notre représentation politique au Parlement européen. Or la manière dont s'engage la campagne pour les élections européennes ne prête guère à l'optimisme. En focalisant le débat sur la Turquie, les responsables politiques de tous bords sont hors sujet et les Français ne sont pas informés des véritables enjeux de ce scrutin.

Le second point faible est celui de notre approche culturelle de l'Europe. Longtemps en retard par rapport à ses partenaires, la France semble enfin engager sa « révolution culturelle » en organisant mieux sa présence à Bruxelles. Plus que jamais, l'élargissement doit nous conduire à être attentif aux attentes des nouveaux pays, d'autant que l'influence se mesure aussi à la façon dont nous réussirons à faire partager nos idées et à nous appuyer sur nos partenaires pour promouvoir nos conceptions. Le service public et l'exception culturelle, par exemple, sont deux notions qui ont un avenir en Europe à condition de ne pas être exclusivement identifiées à la France.

Pays fondateur, la France doit mieux assumer ses responsabilités européennes. A l'égard de nos partenaires, l'accumulation de mauvaises performances entache significativement notre crédibilité et donc, notre capacité d'impulsion. A l'égard de l'opinion publique, il est irresponsable et démagogique de faire peser sur Bruxelles tous les maux de la France alors que l'Europe représente un levier sans équivalent pour moderniser notre pays et réformer ses structures. A une condition, toutefois : que la construction européenne retrouve l'estime et l'adhésion de nos concitoyens, et que les gouvernants assument enfin notre destin européen.

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* *

TRAVAUX DE LA DELEGATION

La Délégation s'est réunie, le mercredi 12 mai 2004, sous la présidence de M. Michel Herbillon, puis de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information.

L'exposé du rapporteur a été suivi d'un débat.

Le Président Pierre Lequiller s'est réjoui de la participation au débat de députés français du Parlement européen. Il a salué les efforts déployés par le Gouvernement pour améliorer les performances de la France dans les différents domaines mentionnés par le rapporteur et a estimé que la dispersion des élus dans les sept groupes politiques et les non-inscrits pénalisait lourdement l'influence française à Strasbourg.

M. Jacques Myard s'est, en revanche, félicité du fait que les Français soient en conséquence très bien représentés au sein de la Conférence des Présidents du Parlement européen.

M. Guy Lengagne a estimé que le choix des candidats investis pour les élections européennes relevait davantage de l'influence des personnes concernées au sein de leur parti respectif que de leur travail au Parlement européen.

Le Président Pierre Lequiller a souligné l'intérêt de ce rapport, présenté avant la tenue des élections européennes, qui propose un regard concret et non abstrait sur l'Europe et analyse un phénomène, la dilution de notre influence au sein des institutions européennes, ressenti par de nombreux Français.

Il a jugé, en outre, que ce rapport permet de battre en brèche des idées reçues, comme celle de la faiblesse de la présence des fonctionnaires français au sein de la Commission européenne. Observant que les tableaux figurant dans le rapport fournissent des informations très intéressantes et détaillées, il a souhaité qu'il puisse trouver un large écho médiatique et alimenter la réflexion des autorités françaises. Car la France doit impérativement renforcer son influence en Europe et rattraper son retard par rapport à l'Allemagne ou au Royaume-Uni.

Mme Pervenche Berès, députée européenne, a félicité le rapporteur pour la qualité de son travail, qui porte sur un sujet latent mais récurrent, apparaissant enfin au grand jour en raison de l'élargissement. Les Français craignent en effet que cette nouvelle étape européenne ne vienne diminuer l'influence de leur pays au sein des institutions européennes. Il est indéniable que la place de la France dans l'Union élargie ne ressemble en rien à celle qui a été la sienne dans l'Europe des Six.

Elle a souligné que le déclin de notre place dans l'Union ne résulte pas seulement des effets de facteurs mathématiques, comme l'élargissement, mais aussi de l'absence d'une stratégie nationale d'influence. Elle a noté, à cet égard, que, représentante du Parlement européen à la Convention sur l'avenir de l'Europe, elle n'a été reçue qu'une seule fois par le Chef de l'Etat, à la différence de certains de ses homologues.

Sur ce point, le Président Pierre Lequiller a rappelé que les Conventionnels français ont été reçus à plusieurs reprises par les responsables de l'exécutif - Président de la République, Premier ministre et ministre des affaires étrangères -. Il s'est opposé à toute utilisation partisane du sujet de l'influence française en Europe : cette question est trop grave pour que ni la majorité ni l'opposition en fassent un thème polémique pour la campagne électorale en cours.

Mme Pervenche Berès a estimé que la France a commencé à perdre son influence de manière significative au moment de l'adoption de l'Acte unique. Ce Traité a en effet donné pour la première fois au Parlement européen le rang de co-législateur, une évolution décisive dont la France n'a pas saisi toute l'importance. En effet, la stratégie d'influence nationale ne comporte pas une authentique dimension parlementaire, ce qui fait aujourd'hui gravement défaut. Or, le rôle du Parlement européen n'est pas comparable à celui des parlements nationaux. Ainsi, le Parlement européen exerce moins un parlementarisme de représentation qu'un « parlementarisme d'expertise ». C'est pourquoi, en raison de la nature particulière de cette fonction d'expertise, la présence des députés européens en séance plénière importe moins que la présence et le travail effectifs au sein des commissions. C'est donc sur ce terrain que la France doit porter son combat d'influence.

S'agissant de la présence des députés européens aux travaux du Parlement, le choix de bons candidats aux élections est bien entendu essentiel. Mais l'éclatement de la représentation des députés européens français au sein de plusieurs groupes politiques constitue un élément encore plus déterminant. Ainsi, la présence de quatre députés européens français actifs au sein de la Conférence des Présidents pèse moins que la capacité pour un Etat membre de se faire entendre au moment d'un vote important par la voix d'un député européen s'exprimant au nom de tout un groupe. Il convient donc de mettre en place des stratégies nationales pour que tous les acteurs puissent être, ensemble, plus actifs et plus efficaces.

Mme Geneviève Fraysse, députée européenne, a souligné la qualité du travail effectué par le rapporteur. Elle a évoqué son parcours de députée européenne, atypique, car issue de la société civile. Elle a également insisté sur le fait que le travail effectué au sein des commissions du Parlement européen était aussi important que la participation aux débats en séance plénière. Puis, elle a déploré que le Gouvernement n'ait jamais établi de lien permanent avec les députés européens français. A cet égard, la présidence française, en ce qui concerne la relation entre les autorités exécutives et les députés européens, peut être qualifiée de véritable « désert ».

Mme Geneviève Fraysse, faisant part de son expérience de membre de la commission culturelle et de la commission des droits des femmes du Parlement européen, a rappelé qu'elle a défendu des amendements communs avec Mme Marie-France Garraud, autre députée européenne, alors qu'elle ne partage pas les mêmes idées politiques. Elle a appelé de ses vœux la constitution d'un espace public européen auquel la France doit apporter sa contribution. En effet, la stratégie d'influence française ne doit pas oublier d'inclure cette dimension de la construction européenne. Il convient donc de développer des réseaux, d'organiser des contacts et de mener une réflexion commune sur les enjeux européens. La présence ministérielle au Conseil de l'Union, le travail réalisé au sein du Parlement européen constituent autant de terrains d'action, mais la France doit aussi œuvrer en faveur de la création d'une opinion publique européenne.

Le Président Pierre Lequiller a estimé que le rapprochement entre les institutions et les citoyens européens sera favorisé par la réforme du mode de scrutin intervenue en France. Observant que le système de circonscriptions en Angleterre permet de concilier représentation et efficacité, il a jugé que le scrutin proportionnel jusqu'alors pratiqué en France n'incitait pas les députés européens à rendre compte de leur activité auprès de leurs électeurs.

Il a souhaité que le rapporteur et M. Michel Herbillon travaillent de concert pour proposer des solutions innovantes aux autorités exécutives concernant le renforcement de la langue française et de la présence française au sein de l'Union européenne. Il a noté que la France défend ses intérêts de manière moins habile que les Britanniques, qui savent plaider la cause de leurs industries auprès de Bruxelles.

Puis il a fait deux remarques. En premier lieu, tout en rappelant que la Délégation n'a pas vocation à concurrencer la Commission des affaires étrangères, la première doit devenir une commission ad hoc pour deux raisons essentielles. D'abord, le terme même de « délégation » n'a pas de réelle lisibilité auprès de l'opinion publique : le citoyen estime généralement que les membres de cette instance n'effectuent qu'un travail de représentation auprès des instances de l'Union. Ensuite, la Délégation est le seul organe spécialisé dans les affaires européennes des parlements nationaux à s'appeler ainsi, tous les autres étant des commissions à part entière.

En second lieu, le Président Pierre Lequiller a fait part de son désaccord avec les conclusions du rapporteur concernant l'autonomie du statut du ministre des affaires européennes par rapport au ministre des affaires étrangères, tout en estimant qu'il doit disposer de l'autorité politique nécessaire à l'exercice de ses fonctions et d'une proximité avec le Premier ministre.

Le rapporteur a rappelé à cet égard que les affaires étrangères relèvent, dans la tradition constitutionnelle de la Ve République, du domaine réservé du Président de la République. C'est donc la coutume qui empêche le ministre des affaires européennes de disposer d'une réelle latitude d'action. Il serait néanmoins hautement souhaitable que ce ministre jouisse d'une réelle autorité politique.

Le Président Pierre Lequiller a souhaité que le ministre des affaires européennes soit davantage présent à Bruxelles. Idéalement, ce dernier devrait assurer une représentation « permanente » de la France au sein du Conseil, une fonction parfois trop souvent confiée aux ambassadeurs. Le Président Pierre Lequiller a en outre déploré le rôle de bouc émissaire qui est parfois attribué à « Bruxelles ». Les ministres utilisent le résultat des négociations entre les Etats membres pour ne pas endosser la responsabilité politique des décisions prises à Bruxelles. Or, au sein du système institutionnel européen, dans de nombreux cas, le dernier mot appartient aux ministres, c'est-à-dire à des responsables politiques et non aux technocrates.

M. Michel Herbillon a salué la qualité du rapport sur un sujet passionnant, dont l'importance n'est pas conjoncturelle, parce que liée au calendrier électoral. La Délégation devrait assurer un suivi régulier de cette question, comme elle le fait pour la diversité linguistique au sein de l'Union. Dans tous les domaines cités (présence dans les institutions et dans l'administration européennes, lobbying, etc.), il faut exprimer une forte volonté politique, pour définir une stratégie d'influence. Cette stratégie devrait conduire à fixer des objectifs précis, assortis d'un programme de mesures concrètes et d'un calendrier, pour sortir des déclarations incantatoires sur le passé glorieux de la France. Pour Strasbourg, par exemple, il ne faut pas se contenter de réaffirmer son statut de capitale européenne, mais formuler des propositions, comme le fait ce rapport, en suggérant l'installation de la Cour de justice, ou en créant à Strasbourg un centre de formation initiale et continue des fonctionnaires européens, comme l'Assemblée nationale l'a proposé dans la résolution sur la diversité linguistique.

M. Michel Herbillon s'est déclaré frappé par la faiblesse de la représentation française au Parlement européen, sur le plan politique comme administratif. Une stratégie d'influence au sein de la fonction publique communautaire doit être développée, et le déroulement des carrières devrait prendre davantage en compte la dimension européenne. Les Français ont besoin d'un autre regard sur l'Europe, afin de mettre un terme à cette distance de l'opinion française à l'égard de l'Union. La présence de l'Europe en France doit être renforcée, au Parlement - il n'y avait que 45 députés dans l'hémicycle lors de l'ouverture du débat sur la ratification du traité d'adhésion des Dix - mais aussi dans les médias, le monde de l'entreprise et la société civile en général.

M. Michel Delebarre a souligné que la dispersion des députés français au Parlement européen au sein des groupes s'explique aussi par la faiblesse des seuils de constitution des groupes. Leur relèvement pourrait conduire à réduire cette dispersion. En ce qui concerne la représentation française au sein de la fonction publique européenne, il a relevé que les Français qui intègrent cette fonction publique deviennent fonctionnaires européens, alors que les Britanniques, par exemple, restent des Britanniques. Cette différence de mentalité est à mettre à l'honneur de la fonction publique française et de son sens du service public, mais elle constitue aussi une faiblesse pour notre pays. L'expérience acquise par les fonctionnaires détachés au sein des institutions européennes devrait être valorisée davantage, lors de leur retour dans leur administration d'origine. La création d'un poste, au sein du secrétariat général du gouvernement, exclusivement dédié à ce suivi, constituerait une excellente initiative. M. Michel Delebarre s'est interrogé sur l'attitude des grands corps de l'Etat (Inspection générale des Finances, Conseil d'Etat et Cour des comptes) à cet égard, et a souhaité que les cadres de la fonction publique territoriale aient également accès à ces détachements.

M. Michel Delebarre a estimé que le comité de régions et le comité économique et social européens constituent des pôles d'influence importants, où la France devrait s'investir davantage. La France est, en ce qui concerne la représentation des collectivités locales, défavorisée par rapport aux Etats fédéraux ou régionaux, dont les Etats fédérés ou les régions sont très influentes à Bruxelles. La Bavière, par exemple, y dispose d'une représentation impressionnante. Cette représentation contribue à accroître l'influence d'un pays, et non à l'affaiblir. Le rôle essentiel des interprètes doit aussi être pris en compte. Leurs organisations professionnelles sont en effet influentes, au sujet de Strasbourg, par exemple.

M. Michel Delebarre a rappelé que les affaires européennes ne peuvent plus être considérées, aujourd'hui, comme relevant des affaires étrangères. Elles devraient être confiées à un Vice-premier ministre, exerçant ses fonctions à Bruxelles et se rendant régulièrement dans les autres capitales. Cette évolution est inévitable, pour donner un poids politique au titulaire de ce portefeuille.

Mme Anne-Marie Comparini a évoqué, au sujet de l'influence des collectivités territoriales sur l'Europe, l'exemple du débat sur les réseaux de transport européens, lors duquel la région Rhône-Alpes, associée au Bade-Wurthemberg et au Piémont, a pu faire entendre sa voix. D'autre part, il est urgent d'encourager la présence de fonctionnaires français dans les institutions de l'Union européenne.

Enfin, concernant la question de la participation des ministres français au Conseil, il serait souhaitable que le ministre des affaires européennes remplace les ministres absents, car il dispose d'un poids politique supérieur à celui du Représentant permanent.

Le Président Pierre Lequiller a approuvé ce dernier point.

M. Michel Herbillon a estimé que la fonction du ministre des affaires européennes, son influence au sein du Gouvernement, vis-à-vis du Parlement et des Etats membres de l'Union européenne, étaient plus importants que son autonomie par rapport au ministre des affaires étrangères.

Par ailleurs, il est étonnant que l'information des députés français du Parlement européen par l'administration française soit insuffisante ; un lien devrait être établi entre ces derniers et le ministre des affaires européennes.

Le Président Pierre Lequiller a émis le souhait que la Délégation établisse des comparaisons entre les Etats membres sur cette question de l'autonomie du ministre des affaires européennes.

La Délégation a ensuite examiné la proposition de conclusions du rapporteur.

Le rapporteur, a suggéré une nouvelle rédaction du point 14 : « considère que le ministre des affaires européennes doit disposer de l'autorité politique nécessaire à sa fonction ».

M. Bernard Derosier a jugé que, dans le premier paragraphe de la proposition de conclusions, l'expression « l'Europe est à nouveau unie » n'était pas totalement exacte, car le continent européen est loin d'être totalement réunifié. Le rapporteur a suggéré de remplacer ces termes par « l'Europe s'est élargie ».

M. Bernard Derosier a demandé que l'expression « think tank » soit remplacée par son équivalent en français.

M. Michel Delebarre a regretté le faible nombre d'organes de presse français accrédités auprès de l'Union européenne.

Le rapporteur, a estimé que certains médias régionaux s'efforçaient d'intéresser le public aux questions européennes, comme TV Breizh ou Ouest-France. Il est d'ailleurs significatif que 60 % des électeurs de l'Ouest de la France aient voté en faveur de l'autorisation de ratifier le Traité de Maastricht.

M. Michel Delebarre a proposé de compléter le point 12 de la proposition de conclusions par la phrase suivante : « Suggère que certaines fonctions dans l'administration française ne puissent être confiées qu'à des fonctionnaires ayant une expérience européenne ».

M. Michel Herbillon a indiqué que M. Jacques Myard lui avait fait part de ses réserves sur le point 14, mais que l'amendement proposé par le rapporteur serait sans doute de nature à le rassurer. Il a souhaité par ailleurs amender le point 5 en supprimant l'adjectif « nouveau », pour renforcer la formation à la langue française de l'ensemble des fonctionnaires des Etats membres.

Après que les membres de la Délégation ont marqué leur accord à ces modifications, la Délégation a adopté les conclusions dont le texte figure ci-après.

CONCLUSIONS ADOPTEES PAR LA DELEGATION

Depuis le 1er mai 2004, l'Europe s'est élargie. Vingt-cinq Etats ont librement choisi de rassembler leurs forces pour bâtir ensemble un destin commun.

Pays fondateur de l'Union européenne, la France a depuis cinquante ans exercé avec ses partenaires un rôle déterminant dans la conception et dans la conduite du projet européen.

L'Europe est à la croisée des chemins et la France, dont la présence se trouve arithmétiquement diluée dans l'Union élargie, doit se donner les moyens de son ambition et définir les priorités d'une réelle stratégie d'influence.

A cette fin, la Délégation :

1. Refuse le discours du déclin de l'influence française, qui n'est pas conforme à la réalité et accrédite l'idée d'une Europe subie plutôt que choisie ;

2. Est convaincue que l'élargissement impose plus que jamais de définir une stratégie d'influence ouverte et pragmatique, motivée par l'intérêt général européen, au-delà des clivages nationaux ;

3. Encourage la création et le développement des cercles de réflexion consacrés à l'Europe dans la mesure où ils contribuent à faire entendre la voix de la France dans le débat d'idées qui alimente la réflexion sur l'avenir de l'Europe ;

4. Souhaite que l'approfondissement des relations franco-allemandes s'inscrive dans la perspective de la définition progressive d'une stratégie d'influence commune à nos deux pays ;

5. Considère que la langue est un vecteur essentiel d'influence, ce qui rend indispensable de soutenir matériellement la formation au français des responsables politiques et des fonctionnaires des pays membres ;

6. Salue l'organisation, parfois tardive mais désormais réelle, de la représentation des intérêts français à Bruxelles et la prise de conscience d'une montée en puissance des enjeux européens ;

7. Regrette le traitement lacunaire de l'Europe par les médias français, tout en se félicitant de certains progrès récents, notamment à l'occasion de l'élargissement ;

8. Déplore l'accumulation des mauvaises performances françaises (non-transposition des directives, procédures d'infraction, aides d'Etat, absentéisme au Parlement européen et au Conseil de l'Union) qui contribuent à alimenter une fausse image d'arrogance pénalisante pour la défense de nos intérêts en Europe ;

9. Invite les partis politiques à prendre leurs responsabilités à l'occasion des élections européennes en exigeant de leurs élus au Parlement de Strasbourg qu'ils s'engagent moralement à effectuer leur mandat jusqu'à son terme ;

10. Estime souhaitable que les députés européens français siègent en priorité au sein des commissions législatives et participent plus activement aux travaux du Parlement européen ;

11. Apporte son soutien déterminé au développement de Strasbourg, capitale européenne qui, outre l'accueil du siège du Parlement européen, a vocation à devenir la capitale du droit de l'Union européenne ;
12. Souligne l'enjeu que représente le suivi des fonctionnaires français au sein des institutions européennes, qui doit s'exercer à tous les niveaux hiérarchiques et pas seulement pour les plus hauts postes, et suggère que certaines fonctions dans l'administration française ne puissent être confiées qu'à des fonctionnaires ayant exercé une mobilité dans les institutions européennes ;

13. Estime indispensable de valoriser la mobilité des fonctionnaires français vers les institutions européennes, de bien préparer leur départ et de mieux gérer leur retour ;

14. Considère que le ministre des affaires européennes doit disposer de l'autorité politique nécessaire à sa fonction ;

15. Souhaite que s'engage une réflexion sur le rôle et le statut des Délégations parlementaires pour l'Union européenne afin de mieux associer le Parlement français au suivi des affaires européennes, notamment dans la perspective de l'adoption d'une Constitution européenne.

ANNEXES

Annexe 1 :
Liste des personnes auditionnéesAnnexe-1

- Mme Martine ALLAIS VAN PUYVELDE, responsable du bureau de la Représentation permanente des régions Pays de la Loire et Bretagne auprès de l'Union européenne ;

- M. Gherard ALMER, conseiller pour les affaires politiques à l'ambassade d'Allemagne en France ;

- Mme Pascale ANDREANI, secrétaire générale du SGCI ;

- M. Fabrice ANDREONE, secrétaire général de l'Association des Français fonctionnaires des Communautés européennes (AFFCE) ;

- M. Alain BARRAU, administrateur principal au Parlement européen, ancien président de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne ;

- M. Gérard BELIARD, directeur de cabinet du maire de Strasbourg et du président de la Communauté Urbaine de Strasbourg ;

- Mme Pervenche BERES, députée européenne ;

- M. Pierre de BOISSIEU, secrétaire général adjoint du Conseil de l'Union européenne ;

- M. Gaël du BOUËTIEZ, directeur d'European Intermediation ;

- Mme Claire BOUSSAGOL, directrice générale d'APCO France ;

- M. Bernard CARAYON, député UMP du Tarn ;

- Mme Nathalie CHADEYRON, responsable du bureau de représentation d'Electricité de France (EDF) auprès des institutions européennes ;

- Mme Françoise CHOTARD, responsable du bureau de la région Ile-de-France auprès de l'Union européenne ;

- Mme Juliette CLAVIERE, chef du secteur « Parlements » au SGCI ;

- M. Claude COURTY, secrétaire national de Confédération française de l'encadrement (CGC) ;

- M. Noël COUPAYE, délégué auprès des institutions européennes de Gaz de France ;

- M. Ralph DASSA, directeur du Centre d'études européennes de Strasbourg (CEES) ;

- Mme Sylvie DONNE, chef du secteur « présence française dans les institutions » au SGCI ;

- M. Patrick DOSTES, conseiller à la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne, chargé des relations avec le Parlement européen ;

- M. Olivier DUHAMEL, député européen ;

- M. Antoine DURRLEMAN, directeur de l'Ecole nationale d'administration (ENA) ;

- M. Pascal FONTAINE, secrétaire général adjoint du groupe PPE-DE au Parlement européen ;

- Mme Nicole FEIDT, maire de Toul, rapporteure de la Commission « Europe » de l'Association des maires de France ;

- M. Antoine GOSSET-GRAINVILLE, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel, ancien membre du cabinet de M. Pascal Lamy, à la Commission européenne.

- Mme Sylvie GOULARD, membre du groupe des conseillers politiques de la Commission européenne ;

- M. Christophe GOULT, directeur de l'antenne de Bruxelles de l'Association des régions françaises du grand Est ;

- M. Gérard GOURGUECHON, chargé des questions européennes, Union syndicale G10-solidaires ;

- M. Michel GUERLAVAIS, secrétaire national de l'Union syndicale des syndicats autonomes (UNSA) ;

- M. Gilles GUILLARD, rédacteur en chef à l'Association des Français fonctionnaires des Communautés européennes (AFFCE) ;

- Mme Claudie HAIGNERE, ministre déléguée chargée des affaires européennes ;

- Mme Ségolène HALLEY des FONTAINES, conseillère technique au cabinet du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

- M. Erik HALSKOV, directeur de l'Office européen de sélection du personnel (EPSO) ;

- Mme Annie JAVELLE, conseillère à la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne, chargée de la présence française dans les institutions européennes ;

- M. Guy JUQUEL, conseiller confédéral de la Confédération générale du travail (CGT), chargé des affaires européennes et internationales ;

- Mme Sarita KAUKAOJA, représentante permanente du Parlement finlandais auprès de l'Union européenne ;

- Mme Fabienne KELLER, maire de Strasbourg ;

- M. Michael KELLER, chargé des relations internationales et européennes à l'Association des maires de France (AMF) ;

- Mme Laurence LAIGO, secrétaire confédérale de la Confédération française du travail (CFDT), service International Europe ;

- M. Alain LAMASSOURE, député européen, ancien ministre ;

- M. Sylvain LAMBERT, conseiller technique au cabinet du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

- Amiral Jacques LANXADE, auteur du rapport Organiser la politique européenne et internationale de la France (Commissariat général du Plan, décembre 2002) ;

- M. Gérard LAPRAT, directeur au Parlement européen ;

- M. Stéphane LE MOING, sous-directeur des affaires européennes, service des relations internationales à la direction des politiques économique et internationale, ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

- M. Gérard LEGRIS, chef d'unité à la Commission européenne, Task force « Avenir de l'Europe »;

- M. Olivier LEMERLE, chef de service au Bureau de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie auprès de l'Union européenne (ACFCI) ;

- Mme Noëlle LENOIR, ancienne ministre déléguée chargée des affaires européennes ;

- M. Arnaud LEPARMENTIER, journaliste au Monde, responsable du Bureau de Bruxelles ;

- M. Jacques LOVERGNE, directeur de la mission « Relations avec Parlement européen » du ministère de l'économie et des finances ;

- M. Jacques MALECOT, consultant senior, APCO France ;

- M. Claude MARIOTTE, délégué auprès de l'Union européenne de France Telecom ;

- M. Philippe MAZE-SENCIER, Associate Manager, APCO France ;

- M. Blaise MISTLER, conseiller parlementaire au cabinet du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

- M. André-Luc MOLINIER, directeur adjoint, responsable des affaires européennes du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) ;

- M. Christian-Marie MONNOT, responsable du Bureau de France 2 à Bruxelles ;

- M. Pierre MOSCOVICI, ancien ministre délégué chargé des affaires européennes ;

- M. Christian MULLER, superviseur d'audit à la Commission européenne ;

- M. Jean-Michel NATHANSON, chargé des questions européennes, Union syndicale G10-solidaires;

- Mme Chantal PHILIPPET, chargée de mission, délégation à la stratégie et aux relations institutionnelles de Gaz de France ;

- M. Hervé PICHON, délégué aux relations avec les assemblées parlementaires et les élus, PSA Peugeot Citroën ;

- M. Raymond PIGANIOL, chef de mission, Mission des affaires européennes et internationales de la Direction générale de l'administration et de la fonction publique ;

- Mme Emilie PISTORIO, juriste à la Délégation des Barreaux de France auprès de l'Union européenne ;

- M. Etienne de PONCINS, porte-parole de la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne ;

- M. Frédéric PUEL, avocat associé au cabinet Fidal à Bruxelles ;

- M. Aimeric RAMADIER, adjoint au chef du bureau du statut général à la Direction générale de l'administration et de la fonction publique ;

- M. Ferdinando RICCARDI, éditorialiste au Bulletin Quotidien Europe ;

- Mme Christine ROGER, chef du cabinet de M. Michel Barnier, commissaire européen ;

- Mme Isabelle ROUSSEL, chargée d'études à la Confédération française de l'encadrement (CFE-CGC) ;

- Cyril SARRAZIN, directeur par intérim de la Délégation des Barreaux de France auprès de l'Union européenne ;

- S. Exc. M. François SCHEER, ambassadeur de France, ancien secrétaire général du Quai d'Orsay, ancien représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne ;

- S. Exc. M. Philippe de SCHOUTHEETE, ancien représentant permanent de la Belgique auprès de l'Union européenne ;

- M. Pierre SCHREIBER, mission des affaires européennes internationales, Direction générale de l'administration et de la fonction publique ; 

- M. Bernard SCHREINER, député UMP du Bas-Rhin, président de la délégation française aux Assemblées du Conseil de l'Europe et de l'U.E.O. ;

- S. Exc. M. Pierre SELLAL, ambassadeur, représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne ;

- M. Francis TEITGEN, vice-président-directeur général délégué de Ouest France, ancien bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris ;

- M. Nicolas TENZER, administrateur civil hors classe, rapporteur du groupe de travail présidé par l'Amiral Lanxade sur la politique européenne et internationale de la France (Commissariat Général du Plan, décembre 2002) ;

- M. Nicolas THERY, chef du cabinet de M. Pascal Lamy, commissaire européen ;

- M. Yvon THIEC, délégué général d'Eurocinéma ;

- Mme Catherine TRAUTMANN, ancienne ministre de la culture et de la communication, ancienne maire de Strasbourg ;

- Mme Marie-Christine VACCAREZZA-SILVESTRE, représentant permanent du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) auprès de l'Union européenne;

- Mme Catherine de VALLOIS, directeur de Salamandre stratégies ;

- M. Pascal VERDEAU, correspondant permanent de France 3 à Bruxelles ;

- Mme Christine VERGER, secrétaire générale du groupe PSE au Parlement européen ;

- Mme Julie VERMOOTEN, chef du service « Parlement européen » du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) ;

- M. Pierre VERNHES, conseiller à Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne ;

- M. Yves VEYRIER, secrétaire confédéral de Force ouvrière (FO), secteur International et Europe ;

- M. Gaël VEYSSIERE, conseiller commercial, responsable de la cellule « entreprises et coopération » à la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne ;

- M. Nick WALKER, représentant permanent de la Chambre des communes auprès de l'Union européenne.

Annexe 2 :
Institutions et organes de l'Union européenneAnnexe-1

LISTE DES PRESIDENTS ET DIRECTEURS

PARLEMENT EUROPEEN

1952-1954 Paul-Henri SPAAK (B)

1954 Alcide de GASPERI (IT)

1954-1956 Guiseppe PELLA (IT)

1956-1958 Hans FURLER (D)

1958-1960 Robert SCHUMAN (FR)

1960-1962 Hans FURLER (D)

1962-1964 Gaetano MARTINO (IT)

1964-1965 Jean DUVIEUSART (B)

1965-1966 Victor LEEMANS (B)

1966-1969 Alain POHER (FR)

1969-1971 Mario SCELBA (IT)

1971-1973 Walter BEHRENDT (D)

1973-1975 Cornelius BERKHOUWER (NL)

1975-1977 Georges SPENALE (FR)

1977-1979 Emilio COLOMBO (IT)

1979-1982 Simone VEIL (FR)

1982-1984 Pieter DANKERT (NL)

1984-1987 Pierre PFIMLIN (FR)

1987-1989 Lord PLUMB (GB)

1989-1992 Enrique BARON CRESPO (ES)

1992-1994 Egon KLEPSCH (D)

1994-1997 Klaüs HANSCH (D)

1997-1999 José-Maria GIL ROBLES (ES)

1999-2002 Nicole FONTAINE (FR)

2002-2004 Pat COX (IRL)

COMMISSION EUROPEENNE

1958-1967 Walter HALLSTEIN (D)

1967-1970 Jean REY (B)

1970-1972 Franco-Maria MALFATTI (IT)

1972-1973 Sicco MANSHOLT (NL)

1973-1977 François-Xavier ORTOLI (FR)

1977-1981 Roy JENKINS (GB)

1981-1985 Gaston THORN (LUX)

1985-1995 Jacques DELORS (FR)

1995-1999 Jacques SANTER (LUX)

1999-2004 Romano PRODI (IT)

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

1952-1958 Massimo PILOTTI (IT)

1958-1964 A.M. DONNER (NL)

1964-1967 Charles-Léon HAMMES (LUX)

1967-1976 Robert LECOURT (FR)

1976-1980 Hans KUTSCHER (D)

1980-1984 J. MERTENS DE WILMARS (NL)

1984-1988 Lord MACKENZIE-STUART (GB)

1988-1994 Ole DUE (DK)

1994-2003 Gil Carlos RODRIGUES IGLESIAS (ES)

2003- Vassilios SKOURIS (GR)

BANQUE CENTRALE EUROPEENNE

1999-2003 Wim DUISENBERG (NL)

2003- Jean-Claude TRICHET (FR)

COUR DES COMPTES EUROPEENNE

1977 Sir Norman PRICE (GB)

1977 -1981 Michael N. MURPHY (IR)

1981- 1984 Pierre LELONG (FR)

1984-1989 Marcel MART (LUX)

1989-1992 Aldo ANGIOI (IT)

1993-1995 André J. MIDDELHOEK (NL)

1996-1999 Bernhard FRIEDMANN (D)

1999-2001 Jan O. KARLSSON (SW)

2001- Juan Manuel FABRA VALLÉS (ES)

MEDIATEUR EUROPEEN

1995-2003 Jacob SÖDERMANN (FI)

2003- Nikiforos DIAMANDOUROS (GR)

COMITE DES REGIONS

1994-1996 Jacques BLANC (FR)

1996-1998 Pasqual MARAGALL I MIRA (ES)

1998-2000 Manfred DAMMEYER (D)

2000-2002 Jos CHABERT (B)

2002-2004 Albert BORE (GB)

2004- Peter STRAUB (D)

COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL

1958-1960 Roger DE STAERCKE (B)

1960-1962 Ludwig ROSENBERG (D)

1962-1964 Emile ROCHE (FR)

1964-1966 Piero GIUSTINIANI(IT)

1966-1968 Louis MAJOR (B)

1968-1970 Mathias BERNS (LUX)

1970-1972 J.D. KUIPERS (NL)

1972-1974 Alfons LAPPAS (D)

1974-1976 Henri CANONGE (FR)

1976-1978 Basil de FERRANTI (GB)

1978-1980 Fabrizia BADUEL GLORIOSO (IT)

1980-1982 Tomas ROSEINGRAVE (IR)

1982-1984 François CEYRAC (FR)

1984-1986 Gerd MUHR (D)

1986-1988 Alfons MARGOT (B)

1988-1990 Alberto MASPRONE (IT)

1990-1991 François STAEDELIN (FR)

01.01.1992 au

21.10.1992 Michael GEUENICH(D)

1992-1994 Susanne TIEMANN (D)

1994-1996 Carlos FERRER (ES)

1996-1998 Tom JENKINS (GB)

1998-2000 Beatrice RANGONI-MACHIAVELLI (IT)

2000-2002 Göke FRERICHS (D)

2002-2004 Roger BRIESCH (FR)

BANQUE EUROPEENNE DE RECONSTRUCTION ET DE DEVELOPPEMENT (BERD)

1991-1993 Jacques ATTALI (FR)

1993-1998 Jacques de LAROSIÈRE (FR)

1998-2000 Horst KÖHLER (D)

2000- Jean LEMIERRE (FR)

BANQUE EUROPEENNE D'INVESTISSEMENT (BEI)

1958-1959 Pietro CAMPILLLI (IT)

1959-1970 Paride FORMENTINI (IT)

1970-1984 Yves LE PORTZ (FR)

1984-1993 Ernst-Günther BRÖDER (D)

1993-1999 Sir Brian UNWIN (GB)

2000- Philippe MAYSTADT (B)

AGENCES DE L'UNION EUROPENNE

Centre européen pour le développement de la formation professionnelle

(CEDEFOP)

1976-1977 Carl JORGENSEN (DK)

1977-1984 Roger FAIST (FR)

1984-1994 Ernst PIEHL (D)

1994- Johan van RENS (NL)

Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (EUROFOUND)

1976-1984 Wiebe de JONG (NL)

1985-1999 Clive PURKISS (GB)

2000-2003 Raymond-Pierre BODIN (FR)

2003-2004 Willy BUSCHAK (D) - directeur faisant fonction

Agence européenne pour l'environnement

(AEE)

1994-2002 Domingo JIMÉNEZ-BELTRÁN (ES)

2002-2003 Gordon McInnes (GB) - directeur faisant fonction

2003- Jacqueline McGLADE (GB)

Fondation européenne pour la formation

(ETF)

1994-2004 Peter de ROOIJ (NL)

2004 (juin) - Muriel DUNBAR (GB)

Observatoire européen des drogues et des toxicomanies

(OEDT)

1994- Georges ESTIEVENART (FR)

Agence européenne pour l'évaluation des médicaments

(EMEA)

1994-2000 Fernand SAUER (FR)

2000- Thomas LÖNNGREN (SW)

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur

(OHMI)

1993- 2000 Jean-Claude COMBALDIEU (FR)

2000- Wubbo de BOER (NL)

Agence pour la sécurité et la santé au travail

(EU-OSHA)

1996- Hans-Horst KONKOLEWSKY (DK)

Office communautaire des variétés végétales

(OCVV)

1995-  Bart KIEWIET (NL)

Centre de traduction des organes, Luxembourg

(CdT)

1995-  Francisco de VICENTE (ES)

Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes

(EUMC)

1998- Beate WINKLER (D)

Agence européenne pour la reconstruction

(GR)

2000-2002 Hugues MINGARELLI (FR)

2002- Richard ZINK (D)

Autorité européenne de sécurité des aliments

(EFSA)

2002- Geoffrey PODGER (GB)

Agence européenne pour la sécurité maritime

(AESM)

2003- Willem DE RUITER (NL)

Agence européenne de la sécurité aérienne

(AESA)

2003- Patrick GOUDOU (FR)

AUTRES ORGANISMES

Institut d'études de sécurité de l'UE

(IES)

2002- Nicole GNESOTTO (FR)

Centre satellitaire de l'Union européenne

(CSUE)

2001- Fernando DAVARA (ES)

Office européen de police

(EUROPOL)

1999- Jürgen STORBECK (D)

EUROJUST

2002- Michael G. KENNEDY (GB)

*

* *

Annexe 3 :
Circulaire du 21 mars 1994 relative aux relations
entre les administrations françaises et les institutions
de l'Union européenne

Le Premier ministre à Mesdames et Messieurs les ministres.

Le traité sur l'Union européenne est entré en vigueur le 1er novembre 1993. Les institutions de l'Union européenne sont depuis cette date dotées de nouvelles responsabilités : leurs compétences sont élargies ou précisées. Le Parlement européen participe plus étroitement au processus de décision, le cadre institutionnel d'une politique étrangère et de sécurité commune et celui d'une coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures sont définis.

La place, l'identité et les intérêts de la France doivent être défendus avec conviction dans les négociations européennes. Les positions françaises dans toutes les instances et l'Union européenne doivent donc être exprimées avec clarté et dans la plus grande cohérence. En outre, l'action de l'administration doit pleinement intégrer la dimension européenne. Les principes d'organisation du travail interministériel, énoncés ci-dessous et précisés dans les annexes, sont édictés à cet effet.

L'unité des positions françaises est une condition de l'efficacité de notre action. Tout ministre ou délégué français s'exprimant dans le cadre des institutions de l'Union européenne engage la France.

S'agissant des questions communautaires, la position que les représentants français expriment dans ces institutions est arrêtée après concertation interministérielle par le S.G.C.I., placé sous l'autorité du Premier ministre. Il appartient à ce secrétariat général, en cas de désaccord persistant entre deux ou plusieurs membres du Gouvernement, de me saisir des difficultés rencontrées. Je souhaite n'intervenir que de façon exceptionnelle. La représentation permanente auprès de l'Union européenne est garante du respect des instructions par les délégations.

Les mêmes règles s'appliquent pour l'O.C.D.E. Elles s'appliquent également pour les organisations où la Communauté est présente notamment au GATT, à la future organisation multilatérale du commerce et à l'Organisation des Nations Unies pour l'agriculture et l'alimentation, lorsque ces organisations traitent de questions de compétence communautaire.

L'information de nos partenaires, de la Commission et du Parlement européen sur les positions de la France est un élément essentiel de l'efficacité de notre action. Le dialogue doit donc être entretenu à tous les échelons afin de convaincre chacune des parties à la discussion du bien-fondé de nos positions.

Cette effort d'information et de persuasion entre dans la mission des ministères concernés en concertation avec le S.G.C.I. Celui-ci veille à la définition et à l'unité des positions françaises suivant les modalités définies dans l'annexe I.

Le ministère des affaires étrangères a la responsabilité de la politique étrangère et de sécurité commune. Lorsque la mise en œuvre d'une action commune implique l'adoption de mesures nationales à caractère financier, le ministère des affaires étrangères saisit les ministères compétents.

Lorsque les actions communes font appel à des instruments ou à des politiques communautaires, le S.G.C.I. assure la coordination interministérielle pour la préparation de la position française sur les aspects communautaires conformément aux procédures définies en annexe II.

L'introduction des questions de coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures au sein de l'Union européenne impose une coordination au sein du S.G.C.I. La mission de ce secrétariat général est donc étendue aux sujets du titre VI du traité sur l'Union européenne, des conventions de Schengen, de Dublin et des conventions qui pourraient être établies en vertu de l'article K 3 du traité. Les annexes I et II précisent les modalités du travail interministériel pour les sujets des titres V et VI du traité sur l'Union européenne.

L'entrée en vigueur du traité sur l'Union européenne renforce le rôle du Parlement européen dans la procédure de décision communautaire. Le traité crée un comité des régions composé de représentations des collectivités locales. Je vous demande de veiller personnellement à entretenir un dialogue étroit avec les parlementaires européens et les élus siégeant au comité des régions afin de faire prendre en compte nos préoccupations dans les travaux de ces institutions.

Le S.G.C.I. et le ministère chargé des affaires européennes assurent la coordination des contacts avec les élus du Parlement européen et du comité des régions suivant des modalités définies à l'annexe III. S'agissant des relations avec l'Assemblée nationale et le Sénat, la mise en œuvre des dispositions de l'article 88-4 de la Constitution incombe au S.G.C.I. et au S.G.G.

Je vous demande toutefois de fournir au Parlement toutes les informations complémentaires qu'il estimera nécessaires à l'exercice de ses compétences, tant sur la portée que sur le calendrier d'adoption des propositions d'actes communautaires suivies par votre département ministériel. Vous veillerez, en liaison avec le S.G.C.I. et le ministre chargé des affaires européennes, à ce que les résolutions votées par les Assemblées fassent l'objet d'un examen interministériel en vue de leur prise en compte dans les négociations européennes.

Le contrôle en France de la Cour des comptes européenne s'effectue en liaison avec la Cour des comptes française. Celle-ci tient informé le S.G.C.I. Les corps de contrôle assistent la Cour des comptes française, sur sa demande, dans cette tâche. Les réponses des administrations françaises ayant fait l'objet d'un contrôle sont coordonnées par le S.G.C.I.

Je vous demande d'être vigilant sur la qualité juridique des textes européens notamment lorsque ces textes nécessitent une transposition en droit français. Celle-ci doit pouvoir se faire de manière simple et cohérente. A cette fin, les objectifs de négociation au niveau communautaire doivent intégrer les préoccupations de clarté, de lisibilité et de rigueur juridique. Une procédure de suivi juridique des textes européens (voir annexe IV) est mise en place sous la responsabilité des ministères avec le concours du Conseil d'Etat.

Le français est une langue officielle de l'Union européenne et de l'O.C.D.E. ; il convient de s'assurer scrupuleusement que ces organisations en respectent l'usage. Il est de la responsabilité des ministres et de tous les agents appelés à travailler en liaison avec ces organisations de faire respecter l'usage du français comme langue de travail. A cet égard, il leur appartient de faire les rappels à l'ordre qui s'imposent, de refuser qu'une décision juridique définitive soit prise sur un texte dont la version française ne serait pas disponible voire de surseoir à la discussion d'un point de l'ordre du jour pour lequel les documents en français n'auront pas été distribués en temps utile.

Les principes rappelés ci-dessus ont pour but de garantir la cohérence et l'unité des positions du Gouvernement, exprimées dans les enceintes de l'Union européenne, afin d'en assurer, la pleine efficacité. je demande au secrétaire général du comité interministériel pour les questions de coopération du comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne et à l'ambassadeur représentant permanent de me saisir de toute difficulté rencontrée dans l'application de la présente circulaire.

Paris le 21 mars 1994.

ANNEXES

ANNEXE I

REGLES RELATIVES A LA COMMUNICATION AVEC LES INSTITUTIONS DE L'UNION EUROPEENNE ET AUX DELEGATIONS FRANCAISES POUR LES QUESTIONS COMMUNAUTAIRES

I. - Communication avec les institutions, de l'Union européenne

L'exigence de cohérence dans les positions françaises impose un strict respect des procédures de concertation interministérielle et de communications avec les institutions de l'Union européenne.

Toute instruction adressée à notre représentation permanente auprès de l'Union européenne doit être transmise la le S.G.C.I. par les moyens protégés dont il dispose. Les correspondances écrites des autorités françaises destinées aux institutions de l'Union européenne, en particulier la commission et le Parlement européen, doivent être acheminées par notre représentation permanente sur instruction adressée par le S.G.C.I. Il incombe à ce dernier de s'assurer que les projets de message émanant d'une administration font l'objet d'un accord interministériel avant leur transmission ou, dans le cas contraire, de saisir le Premier ministre pour l'arbitrage. Le S.G.C.I. veille, en outre, à la diffusion auprès des administrations intéressées de toute demande d'information ou sollicitation émanant de ces instructions.

Doivent être préparés en concertation avec le S.G.C.I. :

- les entrevues entre les membres du Gouvernement et les membres de la Commission ou la présidence en exercice du conseil ;

- les contacts entre les représentants de l'administration et les services de la Commission ;

- les rencontres bilatérales entre les administrations françaises et leurs partenaires des autres Etats membres portant sur des sujets communautaires ;

- les missions d'information auprès du Parlement européen et du comité des régions ;

- les réunions informelles de ministres. Un membre de la représentation permanente doit être associé à ces rencontres si elles se tiennent à Bruxelles. Ces réunions ou contacts font systématiquement l'objet d'un compte rendu écrit et accompagné des documents recueillis à cette occasion.

Ces dispositions s'appliquent sous réserve des règles de confidentialité qui s'imposent pour certains sujets.

II. - Les délégations françaises

Les procédures pour assurer la représentation de la France auprès des institutions de l'Union européenne, notamment en ce qui concerne la composition et le fonctionnement des délégations françaises se rendant dans ces instances, doivent être strictement respectées.

1. La composition de la délégation française au Conseil de l'Union européenne

Le Conseil est formé par un représentant de chaque Etat membre au niveau ministériel, habilité à engager son gouvernement (art. 146 du traité). La France doit donc être représentée pendant toute la durée de la session du Conseil par un membre du Gouvernement. En cas de force majeure, l'ambassadeur, représentant permanent ou le représentant permanent adjoint, chef de délégation en l'absence d'un membre du Gouvernement, s'exprime au Conseil au nom de la France sur la base des instructions interministérielles.

Seuls peuvent être membres de la délégation les fonctionnaires désignés à cet effet dont le nombre peut être limité par la décision du Conseil (art. 4- 3 du règlement intérieur du Conseil).

En salle du Conseil, le nombre des places par délégation est limité à six : outre le ministre et l'ambassadeur représentant permanent de la France auprès des Communautés, ou le représentant permanent adjoint, seuls peuvent être admis en salle :

- le représentant du S.G.C.I. ;

- le conseiller de la représentation permanente, chargé du dossier et responsable du compte rendu ;

- deux autres membres de la délégation désignés par le ministre, chef de la délégation.

Lorsque le Conseil se réunit en formation restreinte, le ministre, chef de délégation est accompagné de l'ambassadeur ou du représentant permanent adjoint et, dans la limite des places disponibles, des membres de la délégation qu'il désigne. En tout état de cause, le chef de délégation prend les dispositions nécessaires pour que la délégation soit informée des débats du Conseil et qu'un compte rendu en soit établi.

En salle d'écoute, le nombre des personnes présentes au titre de la délégation française est limité à trois. Une place est attribuée au ministère chef de file. Deux autres membres de la délégation sont désignés, sur demande des ministères, par le S.G.C.I.

La délégation française pour chaque Conseil doit donc se limiter aux seuls membres dont la présence sur place est strictement indispensable au bon déroulement de la négociation.

Sur ces bases, le secrétaire général du S.G.C.I. arrête, préalablement à chaque conseil la liste des membres de la délégation française.

2. Participation des fonctionnaires aux travaux des instances de l'Union

La participation des fonctionnaires aux travaux du Conseil et des divers groupes et comités du Conseil et de la Commission est subordonnée à leur inscription au plus tard la veille de la réunion concernée, à 16 heures auprès du S.G.C.I.

Le nombre des experts pris en charge des réunions organisées par la Commission est, sauf exception définie par la Commission, limité à deux représentants par Etat membres.

Une plus grande rigueur dans l'utilisation des frais de mission et dans les demandes de remboursement des trajets auprès du Conseil doit permettre de réduire les coûts pour le budget français.

Aussi, les moyens financiers disponibles pour couvrir les frais de mission doivent ils être gérés avec la plus grande attention. La prise en charge financière des indemnités de séjour correspondantes n'est assurée que pour les fonctionnaires dont la présence sur place est indispensable. Les indemnités de séjour sont attribuées pour le ou les seuls jours de la réunion. La prise en charge d'un départ la veille de la réunion est acceptée dans l'hypothèse d'une réunion convoquée avant 10 heures ou si le domicile du délégué est situé hors de Paris et de la petite couronne. Hormis ces cas, toute demande de départ la veille de la réunion doit, compte tenu des implications financières qu'elle comporte, être justifiée par écrit au nom d'exigences précises. La prise en charge d'un retour le lendemain de la réunion ne sera acceptée que dans le cas où la réunion se terminerait moins d'une heure avant le départ du dernier train ou avion pour Paris. Dans tous les cas, un justificatif de la dépense effectuée est exigé pour le paiement de la nuitée.

ANNEXE II

TRAITEMENT DES TITRES V ET VI DU TRAITE SUR L UNION EUROPEENNE

I. - La politique étrangère et de sécurité commune (P.E.S.C.)

Le ministère des affaires étrangères a la responsabilité de la politique étrangère et de sécurité commune. Le directeur politique du ministère des affaires étrangères est le membre français du comité politique.

Lorsque la mise en œuvre d'une action commune implique l'adoption des mesures nationales à caractère financier, le ministère des affaires étrangères consulte les ministères compétents.

Lorsque les actions communes font appel à des instruments ou à des politiques communautaires, le S.G.C.I. assure la coordination interministérielle pour la préparation de la position française sur les aspects communautaires.

Lorsque l'action commune est susceptible de faire appel à des instruments ou à des politiques communautaires, les télégrammes diplomatiques du réseau COREU sont communiqués sans délai par le ministère des affaires étrangères et la représentation permanente, en faisant appel en tant que de besoin à l'expertise technique des ministères concernés.

La représentation permanente veille à ce que les convocations aux groupes du Conseil soient diffusées sans délai au S.G.C.I. Elle établit un compte rendu des groupes de travail.

Le S.G.C.I. diffuse aux départements ministériels concernés les instructions et compte rendus des réunions sur les aspects communautaires.

II. - La coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures

1. La mission du S.G.C.I. est étendue aux sujets du titre VI du traité sur l'Union européenne, notamment ce qui concerne la définition des positions et des actions communes et l'élaboration des instruments juridiques et des textes communautaires.

A ce titre, le S.G.C.I. est chargé de préparer de façon interministérielle la position française tenue dans les réunions du Conseil de l'Union européenne du COREPER, du K, des groupes directeurs et des différents groupes de travail du conseil. A cette fin, il recueille les propositions des différents ministères et, en cas de désaccord entre les ministères, il soumet le problème à l'arbitrage du Premier ministre.

La coopération opérationnelle entre services des douze Etats membres, notamment en matière de sécurité, ne relève pas de cette procédure. Toutefois, les ministères concernés saisissent le S.G.C.I. lorsqu'une position de principe à caractère interministériel doit être prise, et en particulier si elle a des incidences budgétaires ou diplomatiques.

2. Il est créé au sein du S.G.C.I. un poste de "coordonnateur chargé de mission" auprès du secrétaire général. Le chargé de mission, sous l'autorité du secrétaire général, est chargé des affaires relevant du titre VI du traité sur l'Union européenne et de l'article 100 C du traité de Rome. Il est également en charge des affaires relevant de la convention d'application de Schengen. Le chargé de mission est nommé par arrêté du Premier ministre, sur proposition du ministre de l'intérieur, du garde des sceaux et du ministre des affaires étrangères.

3. La représentation de la France au comité K 4 est assuré par le coordonnateur chargé de mission.

4. Les dispositions de l'annexe I de la présente circulaire sont applicables, en particulier pour ce qui concerne la composition des délégations aux réunions des instances du Conseil et des relations entre les administrations nationales et les institutions de l'Union.

Le ministère chef de délégation, dans le cadre de la position définie au niveau interministériel, conformément au paragraphe 1, est le ministère de l'intérieur pour les groupes directeurs 1 et 2 et le ministère de la justice pour le groupe directeur 3.

Dans les groupes de travail du Conseil, la fonction de chef de délégation sera confiée à un représentant du ministère principalement responsable de la négociation et de la mise en œuvre des textes, positions et actions communes discutées et préparées au sein du groupe de travail. La répartition entre les ministères est fixée annuellement par le Premier ministre et éventuellement modifiée en fonction de l'évolution de la structure des groupes.

En fonction des points abordés dans la discussion, au sein des groupes directeurs et des groupes de travail, le chef de délégation associe les représentants des autres ministères composants la délégation à la présentation de la position française.

La représentation permanente participe aux travaux des instances du Conseil concernant le titre VI dans les mêmes conditions que pour les autres sujets abordés dans le cadre de l'Union.

ANNEXE III

RELATIONS AVEC LE PARLEMENT EUROPEEN, LE COMITE DES REGIONS ET LE COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL

I.- Le Parlement européen

Les pouvoirs du Parlement européen ont été renforcés par le traité sur l'Union européenne entré en vigueur le 1er novembre 1993. Le Parlement européen dispose désormais d'un pouvoir de codécision sur de nombreux sujets.

Le renforcement substantiel des pouvoirs législatifs accordés au Parlement européen impose d'améliorer le suivi des travaux de cette institution et l'information des parlementaires européens sur les positions du Gouvernement français.

Il revient à chaque ministère de désigner en son sein un chargé de mission pour les relations avec le Parlement européen qui assure un rôle de coordination entre les services de son ministère ; il est destinataire de tous les documents du Parlement européen et collecte toutes les informations y afférentes ; il les fait parvenir aux différents services concernés. Il travaille en relation avec les conseillers compétents de la représentation permanente.

Le domaine de compétence du chargé de mission peut être élargi par une lettre d'accréditation de son ministre. Il devient alors l'interlocuteur privilégié des parlementaires européens au sein du ministère ; il suit les travaux des groupes des commissions et des sessions plénières.

Le S.G.C.I. communique au chargé de mission toutes les informations et documentations dont il dispose sur les travaux des commissions parlementaires et des séances en assemblée plénière. Les notes d'information dont les ministères veulent rendre destinataire le Parlement européen doivent être préalablement communiquées au S.G.C.I. Celui-ci les transmet au ministère chargé des affaires européennes et à la représentation permanente après avoir vérifié leur conformité avec la position interministérielle et recueilli, si besoin est, l'avis des autres ministères concernés, avant de les transmettre au Parlement européen.

Le chargé de mission accrédité par son ministre a compétence pour faire valoir auprès des parlementaires européens après information préalable du S.G.C.I. la position française dans les domaines de compétence de leur ministère notamment pour les amendements déposés et examinés ; il établit un compte rendu après chaque mission qu'il fait parvenir pour information, dans les 24 heures, au S.G.C.I., au ministère chargé des affaires européennes et à la représentation permanente.

La représentation permanente met à disposition des chargés de mission les locaux de passage et les moyens de communication nécessaires à l'accomplissement de leur mission à Strasbourg et à Bruxelles.

Une cellule de coordination est créée au S.G.C.I. afin de suivre les travaux du Parlement européen pour l'ensemble de l'administration française. Elle est constituée par les chargés de mission désignés ou accrédités par leur ministre. Le S.G.C.I., en liaison avec le ministre chargé des affaires européennes et la représentation permanente, est chargé d'animer les activités de cette cellule.

II - Le comité des régions

Le traité sur l'Union européenne crée un comité des régions. Le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire est chargé, en liaison avec le ministère chargé des affaires européennes de suivre les travaux du comité des régions. Il associe la représentation permanente. Il désigne au sein de ses services un correspondant chargé d'informer les membres du comité sur les positions françaises. Ce correspondant est destinataire de tous les documents du comité des régions. Il les fait parvenir aux autres ministères qui pourraient être concernés par ces textes. Il est associé aux travaux de la cellule de coordination créée pour suivre ceux du Parlement européen.

Chaque ministère veille à tenir compte des travaux du comité des régions dans la définition de la position française.

Les notes d'information dont les ministères veulent rendre destinataires les membres du comité des régions doivent être préalablement communiquées au S.G.C.I., qui vérifie leur conformité avec la position interministérielle.

III - Le comité économique et social

Le S.G.C.I. assure le suivi des relations avec le comité économique et social, en liaison avec les ministères concernés.

ANNEXE IV

ASPECTS JURIDIQUES

Il est nécessaire d'améliorer la qualité juridique des textes européens en général et français lorsqu'il résultent d'une transposition d'un texte européen. Pour cel, les ministères doivent intégrer les préoccupations juridiques de clarté, de lisibilité et de cohérence dans les objectifs de négociation au niveau communautaire en respectant les instructions suivantes :

I. Etude d'impact juridique

Pour la négociation d'un texte communautaire, une étude d'impact juridique peut être nécessaire. Elle est réalisée par le ministère chef de file. L'étude d'impact juridique doit comporter :

- un avis sur le principe même du texte, sous l'angle juridique et celui de la subsidiarité ;

- un tableau comparatif des dispositions communautaires envisagées et des dispositions nationales qui devront le cas échéant être modifiées ou abrogées ;

- la liste des points des textes en discussion qui posent un problème au regard du droit interne ;

- lorsque l'importance du texte le justifie, une note de droit comparé élaborée par le ministre chef de file.

Ces dispositions doivent être adaptées en fonction de la nature et de l'importance de l'acte communautaire examiné.

Cette étude doit être remise au S.G.C.I. dans un délai d'un mois à compter de la transmission au ministère de la proposition d'acte communautaire. Le S.G.C.I. assure la diffusion de cette étude à l'ensemble des ministères intéressés et au Conseil d'Etat.

II - Meilleure prise en compte des aspects juridiques dans la procédure d'examen interministériel d'un texte communautaire

Dès l'étude d'impact juridique réalisée, le S.G.C.I. examine l'utilité d'engager des consultations supplémentaires.

- pour les textes ayant des incidences importantes sur le droit interne, une demande d'avis peut être présentée au Conseil d'Etat ;

- pour chaque texte, il est établi une fiche de suivi juridique par le ministère compétent, transmise au S.G.C.I., au Conseil d'Etat et au ministère chargé des affaires européennes. Cette fiche est actualisée en fonction de l'évolution de la négociation.

_____________________

1 () C'est également un Français, M. Jacques Attali, qui a été le premier président à diriger la BERD lors de sa création en 1991. Un autre Français, M. Jacques de Larosière lui a succédé de 1993 à 1998.

2 () Les documents communiqués aux parties sont cependant toujours rédigés dans la langue de procédure.

3 () Pendant une période transitoire, entre le 1er mai et le 31 octobre 2004, les quinze Etats membres avant l'élargissement conservent leur nombre initial de voix. Les dix nouveaux Etats membres obtiennent chacun un nombre de voix correspond au système en vigueur avant leur adhésion. Le nombre total de voix est ainsi porté à 124. La majorité qualifiée est de 88 voix. Toutes ces modalités ont été définies dans le traité d'adhésion.

4 () Article I-19 du projet de Constitution élaboré par la Convention.

5 () Article I-25 du projet de Constitution élaboré par la Convention.

6 () Ministère de la culture et de la communication, Délégation générale à la langue française et aux langues de France, Rapport au Parlement sur l'emploi de la langue française, Paris, 2003.

7 () Les neuf nouvelles langues de l'Union européenne sont l'estonien, le letton, le lituanien, le polonais, le tchèque, le hongrois, le slovaque, le slovène et le maltais. Si Chypre était entré réunifié dans l'Union, le turc aurait également été une langue officielle de l'Union.

8 () Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, Les langues dans l'Union élargie : pour une Europe en V.O., rapport d'information n° 902 de M. Michel Herbillon. Voir aussi : résolution de l'Assemblée nationale sur la diversité linguistique en Europe (TA n° 229 du 6 janvier 2004).

9 () En effet, Luxembourg accueille des services administratifs du Parlement européen.

10 () Il s'agit des « mini sessions » bruxelloises, dans le jargon communautaire.

11 () C-345/95, 1er octobre 1997, République française soutenue par le Grand-duché de Luxembourg c/ Parlement européen. En année électorale, le nombre de sessions plénières à Strasbourg peut cependant être ramené de douze à onze, ce qui est le cas en 2004.

12 () Cette demande relaye une pétition signée par 126 députés européens et adressée le 8 décembre 2003 aux ministres des affaires étrangères des 25 pays membres de l'Union.

13 () Réaliser le potentiel de Strasbourg, capitale européenne ; rapport de M. Bernard Schreiner présenté au nom de la Commission des questions économiques et du développement de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

14 () Le « TGV-Est » reliera dans un premier temps Paris et Metz en 2007, puis sera prolongé ultérieurement jusqu'à Strasbourg.

15 () Le Lycée international de Strasbourg accueille près de 800 élèves au sein de cinq sections linguistiques, outre l'enseignement dispensé en français.

16 () Actuellement, la COSAC se réunit au moins une fois tous les six mois dans le pays qui préside l'Union. Avec la suppression des présidences tournantes envisagée par le projet de Constitution européenne, la COSAC pourrait être amenée à choisir un lieu unique pour le déroulement de ses réunions. Le débat sur le rôle et la place de Strasbourg pose en fait le problème d'une capitale pour l'Europe. Imagine-t-on les Etats-Unis d'Amérique sans Washington, la Chine sans Pékin, la Russie sans Moscou, l'Inde sans New-Delhi ? Lors du débat sur la Communauté européenne de Défense, en août 1954, certains avaient imaginé que Paris aurait été le siège de cet organisme, et implicitement de l'Europe en construction... Quand bien même l'Union européenne n'est pas un Etat (du moins pas encore), a-t-elle besoin d'une capitale unique ou doit-elle rester polycentrique ?

17 () Ce classement peut être consulté sur le site Internet indépendant : www.europarliament.net.

18 () Les eurodéputés français les plus assidus sont : Gérard Caudron, Christine de Veyrac, Gérard Onesta et Jean-Thomas Nordmann.

19 () Le classement qui suit a été réalisé sur la base des communications à la presse établies par le Conseil et mises en ligne sur son site Internet www.consilium.eu.int. Il existe neuf formations du Conseil qui statuent sur des sujets relevant, selon l'ordre du jour, de la compétence d'un ou plusieurs ministres d'un même gouvernement. Ainsi, par exemple, le Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » concerne notamment le ministre de l'emploi et des affaires sociales et le ministre de la santé ; et le Conseil « Justice et affaires intérieures » le ministre de l'intérieur et le Garde des Sceaux. En cas d'absence du ministre, le Représentant permanent du pays concerné (voire son adjoint) assure la représentation du Gouvernement. Aussi, la méthodologie retenue pour établir ce classement consiste à considérer la représentation ministérielle comme défaillante dès lors que le représentant permanent ou son adjoint figure sur la liste officielle des participants. Dans le cas où l'ordre du jour d'une réunion concerne plusieurs ministres, la défaillance ministérielle est constatée dès lors que le Représentant Permanent figure sur la liste des participants, même si l'un des ministres concernés par l'ordre du jour a effectivement participé aux travaux pour les débats qui le concernent.

20 () Le mandat de l'Allemand Juergen Storbeck à la tête de l'Office européen de police Europol s'achève le 30 juin 2004. M. Storbeck est candidat à sa propre succession, mais deux autres candidats sont également en lice : le Français Jacques Franquet et l'Italien Emmanuele Marotta. Cette nomination requiert un vote à l'unanimité des Etats membres ; les gouvernements n'ayant pas trouvé un accord lors du Conseil « JAI » du 29 avril 2004, la décision est reportée en mai et nécessitera donc un accord des dix nouveaux pays membres.

21 () Cf. Christian Philip, Rapport annuel de la Délégation pour l'Union européenne sur l'état de transposition des directives européennes, Rapport n°1009 du 9 juillet 2003.

22 () Le nouveau règlement intérieur en vigueur au Parlement européen prévoit que « tout groupe politique est composé de députés élus dans au moins un cinquième des Etats membres. Le nombre minimum de députés nécessaires pour constituer un groupe politique est fixé à seize ».

23 () Situation au 6 mai 2004 . La France compte à cette date 86 députés au lieu de 87, en raison du non remplacement de M. Michel Raymond (CPNT), déchu de son mandat en avril 2004.

24 () Les statistiques présentées ici concernent le Parlement européen avant l'élargissement du 1er mai 2004.

25 () Memorandum MEDEF Europe 2004, mars 2004. Voir aussi Bertoncini Yves, Chopin Thierry, Le Parlement européen : un défi pour l'influence française, Note n° 21 de la Fondation Robert Schuman, avril 2004.

26 () La liste des députés européens français qui n'ont jamais été rapporteurs sous la Vème législature (1999-2004) a été publiée par La Lettre de L'Expansion (n° 1707 du 3 mai 2004).

27 () Classification en vigueur avant la réforme du statut des fonctionnaires européens qui prévoit une nouvelle structure de carrières comprenant 16 grades.

28 () Seulement 4 nationalités sont représentées au sein du groupe des conseillers politiques du Président Prodi : 3 Anglais, 1 Belge, 1 Français et 1 Italien.

29 () COM(2003) 436 final du 18 février 2003.

30 () Chambre de commerce et d'industrie de Paris, Renforcer le « lobbying » des entreprises françaises à Bruxelles, Rapport présenté par M. Jacques Derieux au nom de la Commission du commerce international et adopté à l'Assemblée générale du 5 septembre 2002.

31 () A la date du 12 mai 2004.

32 () http://www2.europarl.eu.int/lobby/lobby.jsp?lng=fr.

33 () Un dialogue ouvert et structuré entre la Commission et les groupes d'intérêt, Communication de la Commission publiée au J.O.C.E. C63 du 5 mars 1993.

34 () http://europa.eu.int/comm/civil_society/coneccs/index.htm.

35 () Extrait d'une étude publiée par la Direction générale des Etudes du Parlement européen, Lobbying in the European Union : current rules and practices, Constitutional Affairs series, AFCO 104, avril 2003.

36 () Extrait d'une étude publiée par la Direction générale des Etudes du Parlement européen, Lobbying in the European Union : current rules and practices, Constitutional Affairs series, AFCO 104, avril 2003.

37 () APCO est un cabinet de conseil créé en 1984 à Washington et qui dispose actuellement d'un réseau de 23 bureaux en Amérique du Nord, en Europe, en Asie et en Afrique. APCO-Europe, qui emploie 120 consultants, est présent à Bruxelles depuis 1995 et à Paris depuis 1998. Le bureau de Bruxelles est composé de 40 personnes représentant 12 nationalités et 10 langues différentes.

38 () C'est notamment le cas du Bureau de représentation des régions « Grand Est » et des régions « Bretagne - Pays de la Loire ».

39 () Le secrétariat de cette délégation est assuré par les services de l'Association Française du Conseil des Communes et Régions d'Europe (AFCCRE) en liaison avec un fonctionnaire de la Division « collectivités locales » du Sénat.

40 () Il convient de préciser que certains journalistes peuvent travailler pour plusieurs médias, qui plus est de pays différents.

41 () Il s'agit de l'expression utilisée par le Président Valéry Giscard d'Estaing à l'occasion de la clôture des travaux de la Convention.

42 () Il ne faut également pas sous-estimer le rôle du ministère des affaires étrangères dans l'élaboration des positions de négociation, à travers les contacts bilatéraux qui se développent au cours des négociations communautaires.

43 () Commissariat Général du Plan, Organiser la politique européenne et internationale de la France, Rapport du groupe présidé par l'amiral Jacques Lanxade, décembre 2002.

44 () Cette circulaire est annexée au rapport (Annexe III).

45 () A titre de comparaison, le suppléant de M. Joschka Fischer, ministre des affaires étrangères, représentant le gouvernement allemand à la Convention était M. Hans Martin Bury, ministre des affaires européennes.

46 () Cette question a fait l'objet d'une analyse détaillée dans le rapport de la Mission d'information de la Commission des lois du Sénat chargée d'étudier le suivi, par les ministères intéressés, du processus européen de coopération policière : Paul Masson, Alex Türk, Quand les policiers succèdent aux diplomates, rapport d'information n°523, 1997-1998.

Voir aussi : Jacques Floch, L'avenir d'Europol : vers une police criminelle européenne ?, rapport d'information n°819, 29 avril 2003.

47 () Au 1er janvier 2004, onze parlements nationaux disposaient d'un représentant permanent à Bruxelles : Danemark, Finlande, France, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Suède, Slovénie et Royaume-Uni. D'autres parlements devraient prochainement être représentés, notamment les Pays-Bas, la Hongrie et la République tchèque.

48 () Moderniser l'Etat : le cas de l'ENA ; Yves-Thibault de Silguy ; ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire ; Paris, 2003.

49 () L'offre internationale proposée par l'Ena regroupe les filières suivantes :

- Le cycle international long (CIL), destiné à de jeunes fonctionnaires ou étudiants très qualifiés, totalement intégrés à une promotion de l'ENA et suivant la même scolarité que leurs camarades français.

- Le cycle international court (CIC), ouvert à des fonctionnaires plus expérimentés, comprend neuf mois de formation, partagée pour l'essentiel avec les administrateurs civils français nommés au tour extérieur.

- Le cycle international d'administration publique (CIAP) s'adresse à de hauts responsables étrangers et leur propose une formation polyvalente enchaînant stage, tronc commun et filière de spécialisation.

- Les cycles internationaux spécialisés d'administration publique (CISAP) regroupent des cycles courts (environ six semaines) sur des thèmes spécifiques.

Parallèlement à cette activité de formation, l'ENA développe aussi une activité d'ingénierie administrative et de formation sur place, en particulier dans le cadre d'appels d'offres multilatéraux.

50 () Le Graduate Management Admission Test (GMAT) est un examen standard qui mesure les compétences générales verbales et mathématiques et de rédaction analytique que l'on est censé avoir développées au bout d'un certain temps d'étude.

51 () De plus amples informations sur les activités de l'AFFCE sont disponibles sur Internet : www.affce.net

52 () CE 24 janvier 1994, Commune de Saint-Philippe 

CE 4 juillet 1997, De Lemos Peixoto

CE 30 novembre 1998, Dedours

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