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N° 2367

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 juin 2005

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),

sur les perspectives financières 2007-2013
(COM [2004] 501 final / E 2674
, COM [2004] 487 final / E 2800),

ET PRÉSENTÉ

par Mm. René ANDRE et Marc LAFFINEUR,

Députés.

________________________________________________________________

(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. François Guillaume, Jean-Claude Lefort, secrétaires ; MM. Alfred Almont, François Calvet, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 9

I. UNE NEGOCIATION QUI DOIT RELEVER UN TRIPLE DEFI 13

A. L'enjeu institutionnel : définir à vingt-cinq des ambitions communes à moyen terme et les traduire en termes financiers 13

1) Le défi spécifique de la préparation des quatrièmes perspectives financières : un accord à vingt-cinq, à l'unanimité du Conseil et en association avec le Parlement européen 13

2) Quel calendrier pour les prochaines perspectives financières ? 15

a) Le calendrier de la préparation 15

b) La durée des perspectives financières 17

3) La méthode de la « boîte de négociation » 19

B. L'enjeu économique : faire face aux implications de l'élargissement et combler le déficit de croissance de l'Europe 19

1) L'élargissement de mai 2004 a creusé les disparités dans des proportions inédites 20

2) Les prévisions conjoncturelles encourageantes pour 2005-2006 ne suffisent pas à compenser le déficit structurel de croissance de l'Union et en particulier de la zone euro 22

3) Par contraste, les nouveaux Etats membres affichent une croissance soutenue 23

C. L'enjeu financier : tenir compte de l'impact du budget communautaire sur les Etats membres 24

1) L'essentiel des ressources de l'Union provient dorénavant de la contribution des Etats membres assise sur le PNB 25

a) Le budget de l'Union est financé par trois ressources propres, dont la principale, la ressource PNB, fournit presque les trois quarts de ses recettes 25

b) La part de la ressource PNB, considérée comme la plus équitable, n'a cessé de croître depuis sa création en 1988 28

2) L'Allemagne et la France fournissent les deux premières contributions brutes au budget de l'Union 30

3) Après prise en compte des dépenses engagées sur le territoire de chacun d'entre eux, les différents Etats membres se répartissent entre contributeurs nets, dont la France, et bénéficiaires nets 33

a) La répartition des dépenses selon les différents Etats membres permet de connaître "les retours" financiers des politiques communes 33

b) La plus forte contribution nette est fournie par l'Allemagne 37

c) Les Pays-Bas sont le contributeur net le plus important par rapport au PNB comme par habitant 38

d) Les différentes catégories d'Etats membres 40

e) Les conséquences financières de l'élargissement et du rattrapage économique des pays d'Europe du Sud et de l'Irlande 41

II. LA FORTE AUGMENTATION DES CREDITS PROPOSEE PAR LA COMMISSION NE RECUEILLE PAS L'ASSENTIMENT DE LA FRANCE 43

A. Les propositions de la Commission 44

1) En matière de dépenses, la Commission accumule de multiples priorités sans les hiérarchiser et demande en conséquence une forte augmentation des crédits 44

a) La Rubrique 1 : "Croissance durable" 45

(1) La sous-rubrique 1 a : la compétitivité au bénéfice de la croissance et de l'emploi 45

(a) La recherche-développement 46

(b) Transports et énergie 47

(c) Enseignement et formation 49

(d) Autres politiques liées à la compétitivité et politique sociale 49

(e) La création d'un « Fonds d'ajustement à la croissance » 50

(2) La sous-rubrique 1 b : la cohésion au bénéfice de la croissance et de l'emploi 51

(a) L'objectif de convergence (« promouvoir la convergence des Etats membres et régions moins développés ») 52

(b) L'objectif de compétitivité (« soutenir et renforcer la compétitivité régionale et l'emploi en dehors des régions les moins prospères ») 53

(c) L'objectif de coopération territoriale (« soutenir la coopération territoriale européenne ») 54

b) La Rubrique 2 : "Conservation et gestion des ressources naturelles" (agriculture, pêche et environnement) 54

(1) Les dépenses de marché et les paiements directs 55

(2) Le développement rural 55

(3) La pêche 56

(4) L'environnement 56

c) La Rubrique 3 : "Citoyenneté, liberté, sécurité et justice" 57

d) La Rubrique 4 : "L'Union européenne en tant qu'acteur mondial" 58

e) La Rubrique 5 : "Administration" 60

2) S'agissant des recettes, la Commission propose de supprimer l'abattement dont bénéficie le Royaume-Uni et de prévoir un mécanisme de correction généralisé des contributions les plus importantes, lequel n'emporte pas la conviction 65

a) Le mécanisme de la correction généralisé proposé par la Commission est complexe 65

b) Ce mécanisme n'a emporté la conviction d'aucun des Etats membres 72

B. La France est attachée à la maîtrise de la dépense au profit de la croissance, dans le respect des accords récents, de la solidarité avec les dix nouveaux membres ainsi que de l'équité dans le financement des charges 75

1) La France souscrit à l'objectif, partagé par plusieurs de ses partenaires, dont elle est solidaire, d'une limitation du niveau de la dépense communautaire à hauteur de 1 % du RNB 76

a) La France a exprimé très tôt, conjointement avec cinq de ses partenaires, sa position sur cet élément essentiel de la négociation 76

b) L'objectif du 1 % permet une certaine augmentation en volume du budget communautaire par rapport à 2006 77

2) L'objectif de 1 % du RNB consiste, pour la France, à appliquer au niveau de l'Union la discipline budgétaire qui s'impose durablement à elle et lui garantit le maintien de sa contribution à un niveau compatible avec cet effort de rigueur 79

a) La France, comme l'Allemagne, est tenue, par les règles européennes, au maintien de son effort de rigueur budgétaire 79

b) La maîtrise du poids de sa contribution au budget de l'Union est un impératif auquel la France ne peut se soustraire 80

c) A la différence des scénarios de la Commission et du Parlement européen, l'objectif de 1 % du RNB permet de maîtriser le poids budgétaire de la contribution de la France pour la période 2007-2013 et la dégradation de son solde net 82

d) Les Etats qui partagent la position de la France sur l'objectif du 1 % souhaitent éviter un même "choc" budgétaire 87

3) Cet objectif doit s'accompagner du respect de l'accord de Bruxelles d'octobre 2002 sur la PAC et ne fait pas obstacle au devoir de solidarité avec les nouveaux Etats membres 89

a) Cet objectif s'inscrit dans la perspective de l'accord de Bruxelles d'octobre 2002 sur le "premier pilier" de la PAC 90

b) L'objectif de 1 % du RNB ne fait pas obstacle aux impératifs de la solidarité envers les nouveaux Etats membres 98

4) Il fournit un cadre permettant de prévoir, pour d'autres grandes priorités et actions européennes, des ressources convenables 101

a) La croissance et le rôle de l'Europe dans le monde sont également les grandes priorités de la France 101

b) Les contraintes d'un budget européen construit autour de l'objectif de 1 % du RNB 102

5) Le renforcement de la solidarité, de l'équité et de la transparence du financement de l'Union exige la suppression de l'abattement britannique 104

a) Un régime spécifique en faveur du Royaume-Uni 104

b) Une charge anuelle de plus de 5 milliards d'euros, inéquitablement répartie entre les Etats membres et qui pèse particulièrement sur la France à raison de près du tiers du total 105

c) Un dispositif qui a perdu sa légitimité à la suite des progrès de l'économie britannique, de l'évolution du budget communautaire et du dernier élargissement 110

d) La position française sur le "chèque" britannique est officiellement soutenue par un très grand nombre d'Etats membres 113

III. LES ACTEURS DE LA NEGOCIATION DEVRAIENT S'ATTACHER A RENFORCER L'ADEQUATION DES CREDITS AUX OBJECTIFS DE LISBONNE, ET AMORCER LA MODERNISATION DU FINANCEMENT COMMUNAUTAIRE 115

A. Quels objectifs doivent guider le recentrage des dépenses ? 117

1) Le respect du principe de subsidiarité exige que les dépenses présentent, au niveau communautaire, une « valeur ajoutée » propre 117

2) La « stratégie de Lisbonne » et le souci de mieux cibler la politique régionale dans les Quinze plus anciens Etats membres amènent à mettre l'accent sur les dépenses pour la recherche-développement 120

3) Un Fonds européen de défense permettrait de donner corps à la Politique européenne de sécurité et de défense, en liaison avec les actions en faveur de la recherche 123

B. Quelle modernisation du système des ressources propres de l'Union ? 129

1) La négociation doit aborder la question des ressources propres de l'Union et prévoir un calendrier précis pour la suppression effective de l'abattement britannique 129

a) La future décision du Conseil européen et l'accord interinstitutionnel devront prévoir la disparition de l'abattement britannique au plus tard en 2013 129

b) Les modalités précises de la suppression par étapes de l'abattement restent à définir 131

2) L'Union européenne doit s'engager plus nettement dans la modernisation de son financement en affirmant le caractère prioritaire de l'harmonisation de la base de l'impôt sur les sociétés 132

a) L'objectif d'une modernisation des ressources communautaires est assez largement partagé, mais ses modalités ne donnent pas lieu à consensus 132

b) L'impôt sur les sociétés apparaît à maints égards la ressource la plus adaptée dans la perspective d'un financement plus autonome de l'Union 135

c) Les travaux sur l'harmonisation de l'assiette de l'impôt sur les sociétés revêtent donc un caractère prioritaire 139

TRAVAUX DE LA DELEGATION 145

1) Audition de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur les perspectives financières 2007-2013, le mercredi 6 avril 2005 145

2) Réunion de la Délégation du jeudi 9 juin 2005 157

PROPOSITION DE RESOLUTION 159

ANNEXES 163

Annexe 1 : Liste des personnes entendues par les rapporteurs 165

Annexe 2 : Glossaire 167

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les perspectives financières communautaires actuelles, qui précisent le cadre de référence pluriannuel et, notamment, les ressources et les grandes catégories de dépenses de l'Union européenne, viennent à échéance le 31 décembre 2006.

Il convient donc d'en établir de nouvelles, ce qui n'est guère aisé.

Il s'agit, tout d'abord, de fixer par consensus, à l'unanimité des Etats membres, le cadre qui va engager l'Europe pour plusieurs années, et d'obtenir ensuite un vote favorable du Parlement européen pour que ce cadre fasse l'objet d'un accord interinstitutionnel (AII) commun entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen.

Les enjeux sont considérables, bien que le montant du budget communautaire ne représente qu'une faible proportion de la richesse des Etats mesurée par leur PIB. L'arbitrage entre les différentes affectations envisageables porte sur une somme de l'ordre de 800 à 1.000 milliards d'euros, pour les sept années de la période 2007-2013. Les dépenses seront ensuite engagées en faveur soit des Etats membres, soit plus spécifiquement de leurs collectivités territoriales, de leurs entreprises, de leurs ressortissants, ou encore des institutions communes qui y sont implantées. Le budget communautaire étant obligatoirement en équilibre, l'absence de possibilité d'emprunt restreint au surplus le champ des négociations.

Il convient également d'ajuster la quote-part de la charge financière qui incombe à chaque Etat ainsi que, encore et surtout, de faire progresser, graduellement s'il faut s'y résigner, plus rapidement si les circonstances le permettent, le projet européen.

L'exercice concentre en une fois les tensions inhérentes à chaque décision collective d'ordre budgétaire. Il est d'autant plus délicat cette année qu'il s'agit de la première négociation de cette ampleur à vingt-cinq Etats. Apparaît ainsi dans toute son étendue la portée institutionnelle et politique du dernier élargissement, qui a fortement augmenté le nombre des acteurs dont l'accord unanime est nécessaire.

Il est cependant loin d'être insurmontable.

Ayant déjà abouti par trois fois, pour les périodes 1988-1992, 1993-1999 et 2000-2006, et même quatre si l'on tient compte de l'accord de Copenhague de décembre 2002 sur les conséquences financières de l'élargissement de mai 2004, ses rouages en sont bien connus.

Les propositions de la Commission, qui dispose de l'initiative comme en toute matière, constituent la base de la négociation. En l'espèce, le collège des commissaires a fait part suffisamment tôt de ses premières intentions, par la communication du 10 février 2004 « Construire notre avenir en commun : défis politiques et moyens budgétaires de l'Europe élargie 2007-2013 » (COM (2004) 101 final), notamment actualisée par la communication du 14 juillet 2004 « Etablir de nouvelles perspectives financières 2007-2013 » (COM (2004) 487 final / document E 2800).

Par le passé, les compromis et accords entre les Etats membres n'ont apporté que des aménagements aux projets établis par la Commission, sans les modifier en profondeur, et l'intervention du Parlement européen était relativement limitée.

Chaque Etat membre, chaque Gouvernement, a ses propres conceptions de l'Europe ou du rôle des politiques publiques, ses objectifs, ses stratégies, ses contraintes financières ou politiques. Il en fait part, ou non, selon des termes et un calendrier dont il souhaite conserver la maîtrise.

Les Présidences, qui se succèdent tous les six mois, tiennent un rôle essentiel. Elles œuvrent par étapes de manière à parvenir à un accord ou à un compromis, selon le qualificatif que préféreront en définitive retenir la presse et les services de communication.

La Présidence luxembourgeoise a pour objectif d'aboutir à un accord lors du prochain Conseil européen, qui aura lieu les 16 et 17 juin 2005, ce qui libérerait de ce délicat dossier le Royaume-Uni qui lui succédera pour le second semestre 2005, et l'Autriche, dont la présidence interviendra ensuite, au premier semestre 2006.

Forte de l'accord qu'elle a obtenu sur le Pacte de stabilité et de croissance lors du Conseil européen de printemps, en mars dernier, cette ambition de la Présidence luxembourgeoise n'est pas illégitime. Loin s'en faut.

Elle répond d'ailleurs aux attentes de la Commission, qui estime de bonne gestion de fixer suffisamment à l'avance le cadre financier de l'Union, tant l'efficacité de l'utilisation de la majeure partie des crédits européens repose sur une programmation opérationnelle qui exige du temps.

Comme ne manque pas de le rappeler la commissaire à la Programmation financière et au Budget, Mme Dalia Grybauskaité, la Commission estime que pour les précédentes perspectives financières, l'accord du Conseil européen est intervenu bien tard, en mars 1999, neuf mois seulement avant le début de la période couverte d'utilisation des crédits.

Cette considération doit certes être prise en compte.

Toutefois, elle ne saurait en aucun cas conduire la France, son Gouvernement comme ses assemblées parlementaires, à faire prévaloir ce qui est accessoire, la conclusion rapide d'un accord, sur l'essentiel, le contenu de l'accord, c'est-à-dire la qualité de ses dispositions et leur intérêt pour l'Europe comme pour ses Etats.

A cet égard, il convient de souligner que les attentes de certains Etats ne doivent pas être centrées sur les seules perspectives financières. Quand bien même ces négociations aboutiraient-elles à une répartition optimale des crédits entre les différentes actions communautaires possibles, à un budget européen équilibré, c'est la dynamique du marché intérieur qui offre, notamment pour les nouveaux Etats membres, des possibilités immédiates de développement et d'implantation d'activités économiques et plus généralement une perspective de rattrapage grâce à une croissance plus riche en emplois.

Dans de telles circonstances, les rapporteurs sont néanmoins en mesure de faire part, pour l'essentiel, des termes dans lesquels la France leur apparaît en droit de faire valoir sa position dans les présentes négociations. La proposition de résolution jointe au présent rapport permettra à l'Assemblée nationale de se prononcer, à ce stade, sur les principaux enjeux du renforcement de l'efficacité des interventions budgétaires de l'Union ainsi que de la rationalisation et de la modernisation de son financement.

Il appartient auparavant aux rapporteurs, en complément de leurs précédents travaux(1), de rappeler les grands enjeux politiques, économiques et financiers de la négociation en cours, puis de présenter les divergences entre les propositions de la Commission, qui se traduisent par une forte augmentation des dépenses (lesquelles représenteraient 1,24 % du RNB de l'Union en 2013), et la position de la France, attachée comme cinq de ses principaux partenaires à l'objectif d'une maîtrise de la dépense à hauteur de 1 % de ce même RNB.

I. UNE NEGOCIATION QUI DOIT RELEVER UN TRIPLE DEFI

A. L'enjeu institutionnel : définir à vingt-cinq des ambitions communes à moyen terme et les traduire en termes financiers

1) Le défi spécifique de la préparation des quatrièmes perspectives financières : un accord à vingt-cinq, à l'unanimité du Conseil et en association avec le Parlement européen

Les perspectives financières ne sont pas un budget pluriannuel mais un cadre de référence traduisant des ambitions politiques et une certaine conception de l'intérêt général communautaire à travers des plafonds de dépenses et en respectant un plafond de ressources. Selon le paragraphe 9 de l'accord interinstitutionnel en vigueur, « les perspectives financières visent à assurer, sur une période à moyen terme, une évolution ordonnée, par grandes catégories, des dépenses de l'Union européenne, dans les limites des ressources propres ». Depuis leur création à la fin des années 1980, elles ont fait la preuve de leur utilité pour améliorer les relations entre les institutions communautaires parties prenantes à la procédure budgétaire, et pour assurer un financement régulier aux grandes politiques communautaires.

Cette programmation à moyen terme est à la fois générale (elle s'applique à toutes les ressources et à toutes les dépenses, et engage toutes les institutions) et précise - sans pour autant descendre jusqu'au degré de détail propre aux budgets annuels. Elle est juridiquement contraignante, tant au stade de l'élaboration des budgets qu'au cours de leur exécution.

Précédant la négociation des budgets annuels, les perspectives financières expriment les orientations politiques majeures auxquelles chaque budget de la période couverte doit ensuite se conformer.

Les premières perspectives financières (1988-1992) ont été marquées par le lancement des politiques structurelles lié à l'élargissement de 1986 et ont permis de surmonter les crises budgétaires interinstitutionnelles des années 1980. Les perspectives financières 1993-1999 ont été marquées par la préparation de la mise en place de l'euro, le passage de 1,20 % à 1,27 % du PNB pour le plafond des ressources propres, une progression de 41 % des fonds structurels, et le passage des dépenses agricoles sous la barre des 50 % du budget. Les perspectives financières 2000-2006 ont constitué un revirement, avec une stabilisation des crédits, l'économie ainsi dégagée étant utilisée pour préparer l'élargissement.

Quelles vont donc être les orientations stratégiques des perspectives financières pour la période qui commencera en 2007, en termes d'objectifs internes à l'Union et d'ambitions tournées vers le reste du monde ?

L'enjeu est clairement politique avant d'être budgétaire. Son ampleur est inédite : par rapport aux programmations antérieures, négociées et conclues à onze, à douze puis à quinze, le nombre d'Etats concernés est quasiment doublé du fait du cinquième élargissement(2) et de l'éventualité de l'adhésion d'au moins deux Etats dans les prochaines années(3).

Le nombre des priorités nationales divergentes, les possibles alliances dans le cours des négociations, s'en trouvent inévitablement multipliés.

Ce sont vingt-cinq Etats qui ont aujourd'hui pour tâche de trouver un consensus pour aboutir à un accord à l'unanimité au sein du Conseil, dans un contexte politique influencé par les nouvelles incertitudes du processus de ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe et par des échéances électorales dans plusieurs Etats membres. Les négociations à vingt-cinq qui ont abouti à la réforme du Pacte de stabilité et de croissance ont cependant montré que la difficulté de l'exercice peut être surmontée, et que la détermination et l'efficacité de la présidence luxembourgeoise justifient la certitude affichée par la majorité des personnes à l'audition desquelles ont procédé les rapporteurs concernant la possibilité d'aboutir malgré tout à un accord au Conseil européen de la mi-juin.

La seconde particularité de ce cycle de négociations par rapport aux précédents vient encore accroître le nombre des acteurs : le Parlement européen manifeste la volonté politique nettement affirmée de faire prendre en compte dans ces prochaines perspectives les priorités qu'il sera parvenu à formuler.

Le Parlement européen a constitué en son sein une commission spéciale. Par ailleurs, toutes les commissions permanentes sectorielles du Parlement européen ont pris part aux travaux sur ces prochaines perspectives financières en se saisissant pour avis. Les groupes politiques du Parlement européen ont peiné à aplanir leurs divergences (et les divergences nationales en leur sein) mais la détermination des rapporteurs des différents groupes a conduit à l'adoption d'une résolution en séance plénière à une large majorité, le but étant de communiquer au Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement les positions du Parlement européen sans ambiguïté. Le schéma d'ensemble du rapport de la commission spéciale approuvé en plénière, dont le coût serait intermédiaire entre celui de la Commission et celui du groupe d'Etats dont la France fait partie, traduit cette volonté d'élaborer une alternative crédible et ainsi d'ériger le Parlement européen en un interlocuteur incontournable des négociations.

2) Quel calendrier pour les prochaines perspectives financières ?

a) Le calendrier de la préparation

La préparation des perspectives financières s'organise en trois étapes :

- l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 avait prévu que la Commission présenterait, avant le 1er juillet 2005, des propositions pour de nouvelles perspectives financières à moyen terme. La Commission a très largement respecté ce délai puisque à l'issue d'une phase de préparation interne (tout au long de l'année 2003), elle a présenté l'ensemble des communications et documents constituant son initiative entre février 2004 et avril 2005, le collège des commissaires présidé par M. José Manuel Barroso ayant fait siennes les propositions de la Commission Prodi concernant la structure et la durée d'application des nouvelles perspectives, le niveau des ressources y afférentes par année et par rubrique de dépenses, et toutes les propositions législatives collectivement dénommées « paquet Prodi » ;

- l'exercice par la Commission de son pouvoir d'initiative a permis ensuite aux négociations entre Etats de s'amorcer, et simultanément, au Parlement européen de commencer ses travaux, avec la constitution en septembre 2004 de la « commission temporaire sur les défis politiques et les moyens budgétaires de l'Union élargie » avec pour rapporteur M. Reimer Böge (PPE, Allemagne). Celui-ci a présenté le 22 mars 2005 son projet de rapport, qui a été adopté par la commission le 11 mai et en séance plénière le 8 juin. Les négociations entre Etats au niveau du COREPER et du Conseil suivent un échéancier incertain, peu de progrès sensibles en direction d'un accord ayant à ce jour été enregistrés ;

- les chefs d'Etat et de gouvernement réunis en Conseil européen formaliseront l'accord final sous la forme d'une décision politique, qui servira ensuite de base à l'élaboration d'un nouvel accord interinstitutionnel entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission.

Quelles seraient les conséquences d'un accord tardif sur les perspectives financières, et que se passerait-il en l'absence d'accord ?

1. L'hypothèse de l'absence d'accord est prévue par le droit en vigueur :

Le paragraphe 26 de l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 prévoit l'hypothèse où un accord ne serait pas atteint d'ici la fin de l'année 2006 : « A défaut de conclusion d'un accord sur de nouvelles perspectives financières, et

.../...
sauf dénonciation expresse des perspectives financières existantes par l'une des parties au présent accord, les plafonds pour la dernière année couverte par les perspectives financières existantes seront ajustés
[en fonction de l'évolution du PNB et des prix] en appliquant à ces montants le taux d'augmentation moyen constaté sur la période précédente [soit 2,1 %], hors les adaptations consécutives à un élargissement de l'Union. Ce taux de croissance ne peut toutefois excéder le taux de croissance prévu pour l'année concernée du PNB de la Communauté ».

L'ajustement ainsi prévu se ferait par la voie des budgets annuels, les traités en vigueur ne faisant aucunement obligation aux Etats membres de recourir à une programmation pluriannuelle. Celle-ci présent cependant l'avantage pratique, non négligeable, de rendre bien moins ardue la négociation budgétaire annuelle.
Les dispositions du traité en vigueur priment sur l'AII, et a fortiori s'appliquent en l'absence d'AII.

2. Les inconvénients d'un accord tardif sont apparus en 1999-2000 :


La grande majorité des programmes pluriannuels (de cohésion, d'aide au développement, de recherche, d'éducation et de formation...) arrivent à expiration à la fin de l'année 2006. Pour être renouvelées, ces actions nécessitent une base juridique, que l'accord interinstitutionnel formalisant les perspectives financières est destiné à fournir, et d'une phase de préparation technique préalable.

La Commission estime la durée de celle-ci à au moins douze mois, et fait valoir que pour les perspectives financières 2000-2006 l'accord n'avait pu être atteint qu'au mois de mars 1999, soit neuf mois avant le début de la période considérée, ce qui avait automatiquement décalé, dans certains cas jusqu'en 2001, le lancement effectif des actions ainsi encadrées, notamment pour les Fonds structurels. Par ailleurs, il apparaît souhaitable que les nouvelles perspectives financières soient établies avant que la Commission ne s'attache à la préparation du budget annuel pour 2007.

Dans les négociations en cours, il apparaît que les dix nouveaux Etats membres et les Etats dits « de la cohésion » sont particulièrement sensibles aux arguments de la Commission en faveur de la conclusion d'un accord dès 2005, tandis que des pays comme la France, l'Italie et l'Allemagne ont fait valoir très tôt que le souci, légitime, du calendrier ne saurait primer sur le caractère satisfaisant et global de l'accord recherché.

b) La durée des perspectives financières

Les perspectives financières en vigueur arriveront à expiration à la fin de l'année 2006. Le nouveau cadre financier a donc vocation à prendre effet à partir du 1er janvier 2007, mais quelle en sera la durée ?

Les premières perspectives financières ont inauguré l'exercice pour une période de cinq ans, les suivantes ont été négociées pour sept ans à deux reprises. La Commission a également retenu un horizon de sept ans pour la prochaine programmation, mais comme période transitoire, dans le but de pouvoir ensuite, à partir de 2014, aligner la durée des perspectives financières suivantes sur celle des législatures du Parlement européen et des mandats de la Commission elle-même (cinq ans). Elle prévoit de présenter des propositions pour les cinquièmes perspectives financières avant le 1er juillet 2011(4).

Cet objectif de coordination temporelle a également été mis en avant par M. Reimer Böge, rapporteur de la commission temporaire du Parlement européen, qui en tirait toutefois une conclusion différente puisqu'il proposait que les prochaines perspectives financières couvrent la période 2007-2011 puis la période 2012-2017, avec une révision à mi-parcours pour permettre au Parlement européen qui sera élu en 2009 de participer à la négociation du cadre financier valable à partir de 2012. Ce schéma était compliqué par la durée de sept ans de certains programmes (dans le cadre de la PAC, de la politique de cohésion et de la politique de la recherche).

Dans sa communication du 10 février 2004, la Commission a justifié le calendrier qu'elle a choisi en arguant des accords déjà conclus relatifs à la Politique Agricole Commune qui couvrent la période 2007-2013, et du fait que « la période couverte par le nouveau cadre financier doit être suffisamment longue pour offrir une couverture cohérente (...) en vue de l'introduction progressive totale des politiques communautaires réformées et en vue de l'intégration réussie de douze nouveaux Etats membres ». Les travaux menés au niveau du Conseil se sont jusqu'à présent basés sur l'hypothèse d'une durée de sept ans. Et le Parlement européen, s'il a adopté en séance plénière le rapport présenté par M. Reimer Böge, l'a amendé sur cette question de la durée des perspectives financières en se ralliant au schéma proposé par la Commission.

3) La méthode de la « boîte de négociation »

Les premières discussions, menées sous présidence irlandaise au premier semestre de l'année 2004, ont débouché au Conseil européen des 17-18 juin 2004 sur l'adoption de conclusions de nature essentiellement procédurale. La présidence néerlandaise au second semestre 2004 a utilisé avec l'accord des Etats une approche en « modules », ou « building blocks », consistant à présenter sur chacune des rubriques de dépenses des options alternatives aux propositions de la Commission.

La présidence luxembourgeoise a choisi une méthode différente, celle de la « boîte de négociation », document évolutif destiné à la fois à guider et à refléter les débats. La présidence en modifie la rédaction au fur et à mesure des discussions, de Conseil en Conseil, lorsque des éléments d'accord ou des points de blocage se dégagent, sous sa seule responsabilité. Pour autant, cette « boîte » dans ses versions successives ne constitue pas un rapport sur l'état des négociations, même si elle vise à identifier précisément les problèmes restant à régler.

Le fait qu'il s'agisse d'un document unique et qui, pour l'instant, n'engage pas les Etats, garantit le caractère global de l'accord final : tant que toutes les rubriques ne sont pas remplies, aussi bien sur les dépenses que sur les recettes, il n'y a pas d'accord. Le caractère global de la négociation résulte de la volonté affirmée de la majorité des Etats, à laquelle ont souscrit également la Commission et le Parlement européen.

B. L'enjeu économique : faire face aux implications de l'élargissement et combler le déficit de croissance de l'Europe

Par rapport à l'enjeu politique et institutionnel, l'enjeu économique, bien qu'important, ne doit pas être surestimé. Si le défi que représente l'élargissement de 2004 pour l'Union européenne constitue incontestablement un choc économique majeur, les perspectives financières ne permettront pas à elles seules de le relever.

La complexité des négociations et les orientations politiques qui sont évoquées lors des débats ne doivent pas faire oublier la taille modeste du budget communautaire. Certes, il représente un tiers du budget de la France, mais il ne représente qu'environ 1 % du RNB européen, et en volume il a augmenté de 8,2 % entre 1996 et 2003 pendant que les budgets nationaux augmentaient en moyenne de 22,9 % sur la même période.

Le budget modeste de l'Union, d'environ 100 milliards d'euros par an, n'a pas (pour l'instant ?) vocation a être un instrument puissant de politique économique.

Pour autant, l'enjeu économique existe. Les perspectives financières doivent répondre, de manière réaliste, aux attentes des Etats liées à l'élargissement, et le succès de celui-ci dépendra dans une certaine mesure de la négociation et de l'exécution de ce cadre financier. Les Etats peuvent raisonnablement espérer, sur la base du précédent irlandais, que le développement des échanges et le phénomène de « rattrapage » économique au sein de l'Union élargie contribueront à la fois à la réussite de l'intégration des nouveaux membres et à une relance nette et durable de la croissance dans les pays où elle fait défaut.

1) L'élargissement de mai 2004 a creusé les disparités dans des proportions inédites

Le Conseil européen des 16 et 17 décembre 2004 a décidé que le nouveau cadre financier devra « fournir les moyens financiers nécessaires pour relever efficacement et équitablement les défis futurs, y compris les défis résultant de disparités dans les niveaux de développement au sein de l'Union élargie ».

L'élargissement de 2004, par rapport aux élargissements antérieurs, a été exceptionnel par le nombre d'entrants et par le faible niveau de leur PIB. Jamais les disparités n'ont été aussi fortes et l'impact sur le revenu moyen, aussi élevé. L'entrée des Dix se traduit par un accroissement de 20 % de la population de l'Union et de 23 % de sa superficie mais de seulement 4,8 % de son RNB. En parité de pouvoir d'achat en 2004, si l'on affecte à l'Union à 15 un indice 100, les nouveaux entrants avaient en moyenne un indice de 47. Selon la Commission l'adhésion des dix nouveaux Etats a fait baisser le PIB moyen par habitant de 12,5 %. Cette diminution aura nécessairement un impact majeur pour le budget communautaire, en particulier sur la répartition des fonds structurels entre régions.

PRODUIT INTERIEUR BRUT PAR HABITANT

(prix courants)

 

En 2003

Prévisions pour 2006

Moyenne dans l'UE à Quinze

24 400

27 300

Moyenne dans les nouveaux Etats membres (adhésions de mai 2004)

6 000

7 800

Chypre

16 100

18 700

Slovénie

12 300

14 700

Malte

10 600

11 400

République tchèque

7 900

10 200

Hongrie

7 200

9 700

Estonie

5 900

7 900

Slovaquie

5 400

7 400

Lituanie

4 700

6 300

Lettonie

4 200

5 800

Source : Eurostat.

Tous ces pays sont moins prospères que les Quinze mais à un degré variable. Chypre, la République tchèque, Malte et la Slovénie ont un PIB par habitant supérieur à 50 % de la moyenne de l'Union à vingt-cinq. En Pologne et en Estonie, il ne s'élève qu'à environ 45 % de cette moyenne, et en Lettonie à 36 %. L'élargissement a eu un impact encore plus grand sur les disparités régionales.

L'élargissement de mai 2004 a été préparé par des crédits de pré-adhésion et d'adhésion prévus dans le cadre des perspectives financières pour 2000-2006 et des accords de Berlin (mars 1999) et de Copenhague (décembre 2002), en relais des crédits d'assistance accordés dès le début des années 90.

Au total les dix nouveaux membres recevront 27,8 milliards d'euros pour la période 2004-2006, en crédits de paiement, en additionnant les crédits d'adhésion fixés à Copenhague et les derniers crédits de pré-adhésion. Toutefois, le coût net de cet effort budgétaire pour les Quinze est seulement de 14,8 milliards(5) puisque les dix nouveaux Etats membres ont contribué dès 2004 aux ressources du budget communautaire, et que les dépenses agricoles et structurelles à leur bénéfice suivent une montée en charge progressive. C'est sur la période 2007-2013 que cette progression, et donc l'impact de l'élargissement, vont se faire pleinement sentir.

Ainsi, pour intégrer les nouveaux Etats, les Quinze vont devoir poursuivre de manière soutenue cet effort de solidarité. Mais le processus de rattrapage attendu dans ces Etats peut aussi être une formidable opportunité de croissance pour l'ensemble de l'économie européenne.

2) Les prévisions conjoncturelles encourageantes pour 2005-2006 ne suffisent pas à compenser le déficit structurel de croissance de l'Union et en particulier de la zone euro

Les prévisions économiques de printemps pour 2005-2006 publiées par la Commission le 4 avril 2005 annoncent un retour de la croissance de la zone euro et de l'Union européenne au niveau de leur taux de croissance potentielle dans le courant de l'année 2005, avec pour la zone euro une croissance annuelle moyenne de 1,6 % en 2005 et 2,1 % en 2006, et pour l'ensemble de l'Union une croissance de 2 % en 2005 et 2,3 % en 2006.

Mais globalement les performances de l'Union en termes de croissance se révèlent décevantes depuis plusieurs années, surtout par comparaison avec les principaux acteurs de la croissance économique mondiale.

La croissance économique de l'Union européenne a été de 2,3 % en 2004 (pour la zone euro, elle a été de 2 %), et l'Europe fait ainsi bien pâle figure par rapport au dynamisme de la croissance mondiale qui a atteint 5 % l'an dernier. Même au sein des pays de l'OCDE, le décalage est particulièrement net entre la faible croissance économique de la zone euro et la croissance soutenue des Etats-Unis (plus de 4 % en 2004), pourtant frappés, depuis 2000, par des chocs défavorables similaires.

La plupart des économistes qui ont analysé ce différentiel s'accordent à l'attribuer pour une part à des faiblesses structurelles de l'économie européenne, et pour une part au pilotage très actif de l'économie américaine, avec notamment la progression de 5 points de PIB du déficit public entre 2000 et 2004 et la réduction significative du taux d'intérêt de base à court terme au cours de la même période. Parmi les défauts structurels de l'Europe et notamment de la zone euro, ont été relevés le niveau trop faible des dépenses en recherche et développement, la rigidité du marché du travail, un déficit de productivité, un taux d'activité insuffisant...

Le retard structurel de croissance de l'Europe par rapport aux Etats-Unis est l'un des défis majeurs que les Etats de l'Union européenne doivent relever, le second défi, lié au premier, résidant dans les différences considérables observées à l'intérieur même de l'Union selon les Etats. Les performances médiocres des économies allemande, italienne et néerlandaise, notamment, pèsent sur le taux de croissance moyen de la zone euro, que le dynamisme de la croissance espagnole ne parvient pas à tirer vers le haut.

Ainsi que l'a fait remarquer le commissaire aux affaires économiques et monétaires, M. Joaquin Almunia(6), le retour annoncé de l'Europe à son taux de croissance potentielle est loin d'être suffisant, puisque celui-ci est inférieur au taux de 3 % par an qui est considéré comme nécessaire pour parvenir à réaliser les objectifs de la « stratégie de Lisbonne ».

Même si le retour d'une croissance plus marquée dans l'Union européenne est une source de soulagement, l'incertitude de la reprise économique reste préoccupante. Cela signifie que l'économie de l'Union est, à certains égards, plus éloignée de son objectif (devenir l'économie la plus compétitive du monde) qu'en mars 2000, au moment du sommet de Lisbonne. Bien que les concurrents de l'Union aient en général dû faire face aux mêmes chocs économiques, l'écart entre le potentiel de croissance de l'Europe et celui de ses partenaires économiques mondiaux n'a pas diminué de manière substantielle.

3) Par contraste, les nouveaux Etats membres affichent une croissance soutenue

La croissance économique suit un rythme nettement plus dynamique dans les Dix, ce qui leur permettra d'accroître progressivement leur contribution brute au budget communautaire. En 2002 et 2003, les nouveaux Etats membres ont globalement bien résisté au ralentissement mondial de la croissance économique, témoignant de leur potentiel de croissance à moyen terme. Les pays baltes, en particulier, ont bénéficié d'un décalage de cycle favorable et connaissent actuellement une phase de vive croissance, qui s'appuie sur des investissements relativement plus dynamiques.

CROISSANCE DU PIB
(en termes réels)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

(prévisions)

2006

(prévisions)

Moyenne dans l'Union à 15

+ 3,5 %

+ 1,6 %

+ 1,1 %

+ 0,9 %

+ 2,3 %

+ 2,2 %

+ 2,3 %

Moyenne dans les 10 nouveaux Etats membres

+ 3,9 %

+ 2,8 %

+ 2,8 %

+ 3,9 %

+ 5,2 %

+ 4,7 %

+ 4,5 %

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le principal objectif des nouveaux membres est de maintenir des taux élevés de croissance afin d'améliorer les niveaux de vie et d'emploi. Le taux de chômage s'établissait en moyenne à 14,5 % en 2003 dans les nouveaux Etats membres (19,6 % en Pologne, 17,6 % en Slovaquie...), contre 8,1 % dans l'Union à Quinze. Le surcroît de croissance attendu apparaît indispensable pour accélérer une convergence qui ne fait que commencer.

L'effort attendu de la part des anciens Etats membres, non seulement au niveau du budget communautaire mais aussi en termes d'investissements directs, peut s'avérer bénéfique pour toute l'Union si le rattrapage économique des nouveaux membres contribue à relancer la croissance de l'économie européenne dans son ensemble.

C. L'enjeu financier : tenir compte de l'impact du budget communautaire sur les Etats membres

Le budget européen a connu une forte croissance depuis l'origine, pour s'établir à environ 1 % du PIB de la Communauté, comme le montre le graphique suivant.

Evolution du budget communautaire depuis 1960
(en milliards d'euros)

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Il engage chaque année des sommes supérieures à 100 milliards d'euros. Elle s'élève plus précisément à 105 milliards, selon le budget adopté pour 2005.

1) L'essentiel des ressources de l'Union provient dorénavant de la contribution des Etats membres assise sur le PNB

a) Le budget de l'Union est financé par trois ressources propres, dont la principale, la ressource PNB, fournit presque les trois quarts de ses recettes

L'article 269 du Traité instituant la Communauté européenne précise que le budget de l'Union « est, sans préjudice des autres recettes, intégralement financé par des ressources propres », c'est-à-dire par des recettes qui lui reviennent directement, sans qu'une décision ultérieure des autorités nationales ne soit nécessaire.

Les règles qui les régissent actuellement sont prévues par la décision n° 2000/597/CE, Euratom du 29 septembre 2000 relative au système des ressources propres des Communautés européennes, selon les conclusions du Conseil européen de Berlin de mars 1999.

La principale d'entre elles est celle du plafond. Le produit des ressources propres ne peut ainsi dépasser 1,24 % du RNB de l'Union.

Les ressources propres traditionnelles (RPT)(7), dont le montant prévu pour 2005 est de 12,36 milliards d'euros, comprennent les prélèvements agricoles (0,82 milliard d'euros, et 0,78 % des recettes totales), les cotisations sur le sucre (0,79 milliard d'euros, et 0,75 % des recettes totales) et les droits de douane (10,75 milliards d'euros ; 10,21 % du total).

Le montant de la ressource TVA due par chaque Etat membre est calculé par l'application d'un taux déterminé par la décision « ressources propres » à son assiette de la TVA, évaluée d'une manière uniforme, dans la limite d'un plafond égal à 50 % du PNB.

Le taux d'appel maximum a été fixé à 0,5 % à partir de 2004. Pour 2005, le taux d'appel effectif est de 0,3 %.

Le produit prévu au titre de la ressource TVA en 2005 est de 15,31 milliards d'euros, soit une fois et demi le montant des ressources propres traditionnelles et 14,55 % du total.

Le budget communautaire étant nécessairement en équilibre, l'ajustement est opéré sur la ressource PNB, dont le produit inscrit pour 2005 est de 77,56 milliards d'euros(8) (73,70 % du total). C'est la ressource la plus récente puisqu'elle a été créée en 1988.

Le montant total de son produit est établi par l'application d'un taux fixé au cours de la procédure budgétaire au PNB de la Communauté, de manière à financer l'écart entre les dépenses et les autres ressources, selon la technique appliquée en matière fiscale pour les impôts de répartition.

La quote-part de chaque Etat membre est ensuite fixée au prorata de sa part dans le PNB communautaire.

Même en tenant compte des recettes diverses, qui sont d'un montant très faible, on constate que les trois-quarts environ du budget communautaire reposent sur la ressource PNB, contre un dixième pour les RPT et environ 15 % pour la ressource TVA.

Structures des recettes du budget communautaire en 2005
(selon le projet de budget pour l'UE à 25)

Source : PLF 2005 - Fascicule « jaune » : Relations financières avec l'Union européenne.

b) La part de la ressource PNB, considérée comme la plus équitable, n'a cessé de croître depuis sa création en 1988

La ressource PNB, créée en 1988, étant la plus récente, sa progression a été spectaculaire.

Sa part s'est même encore accrue ces dernières années. S'établissant à un peu plus des deux tiers en 2003, elle devrait atteindre un peu moins des trois-quarts en 2005, comme l'illustre le graphique suivant.

Composition des recettes du budget communautaire 1971-2003

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette évolution résulte de deux éléments.

D'une part, la diminution des droits de douane prévue dans le cadre des négociations du GATT puis de l'OMC, ainsi que des prélèvements agricoles dans le cadre des différentes réformes de la PAC, a réduit le poids des ressources propres traditionnelles.

D'autre part, la ressource PNB, jugée plus représentative de la capacité contributive réelle des Etats membres, a été progressivement substituée à la ressource TVA, qui représentait encore les deux tiers du financement communautaire en 1990.

Son taux d'appel maximum a ainsi été réduit par étapes de 1,4 % en 1985 à 0,5 % en 2004 par les différentes décisions ressources propres du Conseil.

2) L'Allemagne et la France fournissent les deux premières contributions brutes au budget de l'Union

Le budget pour 2005, pour l'ensemble de l'Union, donne une estimation précise de la contribution de chacun des vingt-cinq Etats membres, ainsi que de sa répartition entre les différentes catégories de ressources.

Avec 22,2 milliards d'euros en 2005, soit 21,1 % du total des recettes, l'Allemagne est le premier contributeur au budget communautaire.

Elle est suivie par la France, à raison de 17,3 milliards d'euros et 16,4 % du total.

Viennent ensuite l'Italie et le Royaume-Uni, lequel ne se trouve qu'au quatrième rang en raison de la correction dont il bénéficie au titre de l'accord de Fontainebleau de 1985.

Le tableau suivant récapitule les différents éléments relatifs aux contributions des Etats membres.

Répartition du financement du budget 2005 et de la correction en faveur du Royaume-Uni par Etat membre - (en euros)

Etats membres

Droits agricoles nets
(75 %) *

%

Cotisations nettes dans le secteur du sucre et de l'isoglucose
(75 %) *

%

Droits de douane nets
(75 %) *

%

Total des ressources propres traditionnelles nettes
(75 %) *

%

Ressources propres « TVA » au taux uniforme

%

Ressources propres « RNB », réserves exclues

Ressources propres « RNB », réserves

Total Ressource RNB

%

Correction en faveur du Royaume-Uni

%

Total des ressources propres

Participation au financement total en %

(1)

(2)

(3)

 

(4) = (1)+(2)+(3)

 

(5)

 

(6)

(7)

(6)+(7)

 

(8)

 

(9) = (4)+(5)+(6)+(7)+(8)

(10)

Belgique

15 675 000

1,91

42 675 000

5,38

1 200 675 000

11,17

1 259 025 000

10,18

371 009 090

2,42

2 143 952 896

12 396 158

2 156 349 054

2,78

248 930 663

-4,87

4 035 286 807

3,83

Rép tchèque

5 475 000

0,67

11 550 000

1,46

107 925 000

1,00

124 950 000

1,01

130 192 846

0,85

603 675 496

3 490 402

607 165 898

0,78

70 084 115

-1,37

932 392 859

0,89

Danemark

9 825 000

1,20

23 025 000

2,90

204 825 000

1,91

237 675 000

1,92

245 658 623

1,60

1 468 543 981

8 491 000

1 477 034 981

1,90

170 491 608

-3,33

2 130 860 212

2,02

Allemagne

113 475 000

13,85

249 525 000

31,44

2 153 025 000

20,03

2 516 025 000

20,35

3 044 023 939

19,88

16 237 343 858

93 882 970

16 331 226 828

21,05

327 163 174

-6,40

22 218 438 941

21,11

Estonie

900 000

0,11

0

0,00

17 325 000

0,16

18 225 000

0,15

13 307 426

0,09

61 703 595

356 766

62 060 361

0,08

7 163 521

-0,14

100 756 308

0,10

Grèce

8 700 000

1,06

10 800 000

1,36

148 275 000

1,38

167 775 000

1,36

276 501 911

1,81

1 282 078 345

7 412 870

1 289 491 215

1,66

148 843 753

-2,91

1 882 611 879

1,79

Espagne

22 875 000

2,79

25 650 000

3,23

760 725 000

7,08

809 250 000

6,55

1 313 797 064

8,58

6 091 787 073

35 222 206

6 127 009 279

7,90

707 230 145

-13,83

8 957 286 488

8,51

France

84 000 000

10,25

186 150 000

23,46

881 475 000

8,20

1 151 625 000

9,32

2 455 793 967

16,06

12 205 154 081

70 569 184

12 275 723 265

15,82

1 416 965 627

-27,70

17 303 107 859

16,44

Irlande

450 000

0,05

6 600 000

0,83

107 150 000

1,00

114 600 000

0,93

197 791 248

1,29

917 114 373

5 302 678

922 417 051

1,19

106 473 014

-2,08

1 341 281 313

1,27

Italie

56 400 000

6,88

62 700 000

7,90

1 084 200 000

10,09

1 203 300 000

9,73

1 811 071 404

11,83

10 112 607 486

58 470 254

10 171 077 740

13,11

1 174 030 013

-22,95

14 359 479 157

13,64

Chypre

825 000

0,10

1 800 000

0,23

16 875 000

0,16

19 500 000

0,16

20 164 214

0,13

93 497 011

540 592

94 037 603

0,12

10 854 599

-0,21

144 556 416

0,14

Lettonie

600 000

0,07

1 200 000

0,15

11 175 000

0,10

12 975 000

0,10

14 827 349

0,10

77 907 860

450 456

78 358 316

0,10

9 044 766

-0,18

115 205 431

0,11

Lituanie

1 875 000

0,23

4 050 000

0,51

37 500 000

0,35

43 425 000

0,35

26 054 036

0,17

135 949 208

786 046

136 735 254

0,18

15 783 115

-0,31

221 997 405

0,21

Luxembourg

150 000

0,02

0

0,00

13 125 000

0,12

13 275 000

0,11

36 789 380

0,24

170 584 235

986 304

171 570 539

0,22

19 804 092

-0,39

241 439 011

0,23

Hongrie

8 400 000

1,03

17 700 000

2,23

165 225 000

1,54

191 325 000

1,55

130 894 494

0,85

606 928 885

3 509 212

610 438 097

0,79

70 461 820

-1,38

1 003 119 411

0,95

Malte

525 000

0,06

1 125 000

0,14

10 725 000

0,10

12 375 000

0,10

7 261 368

0,05

33 669 360

194 674

33 864 034

0,04

3 908 867

-0,08

57 409 269

0,05

Pays-Bas

172 350 000

21,03

45 900 000

5,78

1 110 450 000

10,33

1 328 700 000

10,75

709 063 974

4,63

3 426 322 765

19 810 712

3 446 133 477

4,44

69 036 330

-1,35

5 552 933 781

5,28

Autriche

5 100 000

0,62

18 900 000

2,38

160 875 000

1,50

184 875 000

1,50

348 021 621

2,27

1 730 658 182

10 006 522

1 740 664 704

2,24

34 870 705

-0,68

2 308 432 030

2,19

Pologne

9 375 000

1,14

19 875 000

2,50

185 550 000

1,73

214 800 000

1,74

303 824 226

1,98

1 408 765 890

8 145 368

1 416 911 258

1,83

163 551 630

-3,20

2 099 087 114

1,99

Portugal

12 600 000

1,54

2 550 000

0,32

86 025 000

0,80

101 175 000

0,82

216 365 122

1,41

1 003 237 329

5 800 634

1 009 037 963

1,30

116 471 517

-2,28

1 443 049 602

1,37

Slovénie

1 575 000

0,19

3 300 000

0,42

30 600 000

0,28

35 475 000

0,29

42 651 223

0,28

197 764 311

1 143 456

198 907 767

0,26

22 959 582

-0,45

299 993 572

0,29

Slovaquie

2 625 000

0,32

5 550 000

0,70

51 975 000

0,48

60 150 000

0,49

49 397 043

0,32

252 792 048

1 461 622

254 253 670

0,33

29 348 064

-0,57

393 148 777

0,37

Finlande

1 950 000

0,24

4 950 000

0,62

76 125 000

0,71

83 025 000

0,67

209 193 032

1,37

1 116 533 799

6 455 706

1 122 989 505

1,45

129 624 747

-2,53

1 544 832 284

1,47

Suède

9 900 000

1,21

12 225 000

1,54

279 300 000

2,60

301 425 000

2,44

388 695 215

2,54

2 088 584 079

12 076 020

2 100 660 099

2,71

42 082 486

-0,82

2 832 862 800

2,69

Royaume-Uni

273 825 000

33,42

35 775 000

4,51

1 848 375 000

17,19

2 157 975 000

17,46

2 948 144 114

19,25

13 669 893 697

79 038 188

13 748 931 885

17,72

5 115 150 953

100 %

13 739 900 046

13,05

Total

819 450 000

100,00

793 575 000

100,00

10 749 900 000

100,00

12 362 925 000

100,00

15 313 493 929

100,00

77 137 049 843

446 000 000

77 583 049 843

100,00

0

0.00

105 259 468 772

100.00

* Ces sommes sont nettes de la retenue de 25 % au profit des Etats membres au titre des frais de perception.

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Il faut observer que les contributions globales de certains pays sont plus importantes que leur part dans le RNB de l'Union.

Les principaux écarts concernent la France, qui contribue à concurrence de 16,4 % au budget communautaire, contre 15,8 % au titre de son seul RNB, l'Italie, avec respectivement 13,6 % et 13,1 % et l'Espagne, avec respectivement 8,5 % et 7,9 %.

Pour la France, l'Italie et l'Espagne, cet écart s'explique pour l'essentiel par la correction britannique, dont ils sont les principaux contributeurs.

Ils en supportent, en effet, les trois quarts de la charge, à raison de 27,7 % pour la France, 23 % pour l'Italie et 13,8 % pour l'Espagne en 2005. Ce point est plus particulièrement développé ci-après, au 5 du B du II sur la position française.

Pour la France comme pour l'Espagne, on observe, en outre, que leur contribution au titre de la ressource TVA est supérieure à celle au titre de la ressource RNB dans l'Union, à raison de respectivement 16,1 % et 15,8 % pour la première et 8,6 % contre 7,9 % pour la seconde.

Le dernier élément conduisant à corriger les premières appréciations que l'on peut porter sur les contributions des Etats concerne les droits de douane et les prélèvements agricoles.

La surreprésentation des Pays-Bas et de la Belgique résulte de l'importance des ports de Rotterdam et d'Anvers, par lesquels transite une grande partie du trafic portuaire communautaire.

D'importants droits de douane sont donc prélevés sur les territoires de ces pays.

Ils ne sont pas pour autant à la charge d'entreprises qui y sont domiciliées, mais de sociétés implantées dans les autres Etats membres.

3) Après prise en compte des dépenses engagées sur le territoire de chacun d'entre eux, les différents Etats membres se répartissent entre contributeurs nets, dont la France, et bénéficiaires nets

Chaque année, au mois de septembre, la Commission publie un rapport sur la répartition par Etat membre des dépenses opérationnelles de l'Union au cours de l'exercice précédent.

Ces données permettent de calculer la position de chaque Etat membre, son solde, par soustraction de sa contribution aux dépenses « réparties » à son titre, soit que le principal bénéficiaire des paiements correspondants y réside, soit qu'il s'agisse d'une subvention versée à un organisme communautaire implanté sur son territoire.

Parce qu'elle repose sur une base purement comptable, qu'elle est encadrée par des conventions d'affectation des dépenses et qu'elle relève d'une vision particulièrement étroite de l'Union dans l'esprit de ceux qui considèrent que les résultats positifs d'une action communautaire ne se mesure pas aux seuls montants qui y sont affectés, cette approche est souvent critiquée.

Pour autant, elle n'en est pas moins inéluctable tant elle imprègne l'esprit dans lequel les Etats membres abordent la négociation sur les perspectives financières.

En outre, elle est largement diffusée par la presse des pays contributeurs nets.

a) La répartition des dépenses selon les différents Etats membres permet de connaître "les retours" financiers des politiques communes

Le dernier rapport de la Commission européenne sur les dépenses réparties par Etat membre concernant l'exercice 2003, il ne mentionne que les données relatives aux quinze anciens Etats membres.

Il permet d'établir plusieurs conclusions, quant aux retours des différentes politiques communes dans les Etats membres.

Les dépenses qui peuvent être réparties entre les Etats membres représentent plus de 90 % du total : elles concernent en premier lieu l'Espagne, puis la France, l'Italie et l'Allemagne

En 2003, les dépenses de l'Union européenne ventilées entre les Etats membres auront représenté près de 91 % du total.

Elles ont principalement concerné, comme les années précédentes, l'Espagne (17,54 % du total), ainsi que dans une moindre mesure la France (14,83 %), l'Italie (11,78 %) et l'Allemagne (11,75 %).

Le tableau suivant récapitule ces éléments depuis le début de la période couverte par les actuelles perspectives financières.

Dépenses totales de l'Union européenne dans les Etats membres
(réparties et non-réparties)

Etats membres

2000

2001

2002

2003

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

BE
DK
DE

4 357,5
1 654,8
10 375,4

5,23
1,99
12,45

4 049,2
1 348,3
10 346,8

5,06
1,69
12,94

4 372,6
1 472,1
11 685,3

5,14
1,73
13,72

4 230,6
1 494,3
10 637,1

4,67
1,65
11,75

EL
ES
FR

5 589,5
10 927,5
12 453,9

6,71
13,11
14,95

5 741,0
13 648,2
11 751,6

7,18
17,06
14,69

4 694,4
15 216,8
12 223,6

5,51
17,87
14,36

4 855,8
15 884,1
13 428,5

5,36
17,54
14,83

IE
IT
LU

2 625,3
10 880,2
907,9

3,15
13,06
1,09

2 319,1
8 693,0
900,1

2,90
10,87
1,13

2 599,9
8 240,6
974,8

3,05
9,68
1,14

2 690,8
10 665,6
1 061,6

2,97
11,78
1,17

NL
AT
PT

2 276,8
1 398,4
3 256,5

2,73
1,68
3,91

1 687,5
1 403,3
2 947,2

2,11
1,75
3,68

1 591,1
1 553,6
3 872,8

1,87
1,82
4,55

1 996,2
1 576,7
4 769,3

2,20
1,74
5,27

FI
SE
UK

1 396,3
1 214,5
7 896,1

1,68
1,46
9,48

1 020,1
1 092,9
5 938,0

1,28
1,37
7,42

1 202,5
1 245,3
6 167,8

1,41
1,46
7,24

1 346,6
1 454,4
6 216,3

1,49
1,61
6,68

UE rép.

77 210,7

92,66

72 886,5

91,12

77 233,1

90,71

82 307,8

90,89

UE non-rép.

6 120,4

7,34

7 100,9

8,88

8 031,4

9,43

8 249,7

9,11

UE

83 331,1

100,00

79 987,3

100,00

85 144,5

100,00

90 557,5

100,00

Note : Par comparaison avec le rapport sur la répartition des dépenses opérationnelles de l'Union européenne par Etat membre en 2002, les paiements à la Belgique au titre des politiques internes de l'Union européenne en 2002 ont été réduits de 120 millions d'euros. Ce dernier montant est maintenant intégré à la ligne des dépenses non réparties.

Source : Commission européenne. Répartition des dépenses opérationnelles par Etat membre en 2003.

Les dépenses agricoles concernent principalement la France, l'Espagne, l'Allemagne et l'Italie

En 2003, les dépenses agricoles sont intervenues en France pour 23,58 % du montant total. Leur impact est également important pour l'Espagne (14,61 %), l'Allemagne (13,24 %) et l'Italie (12,15 %).

Les retours de la politique agricole commune pour chaque Etat membre, depuis 2000, sont indiqués dans le tableau suivant.

Dépenses de l'Union européenne dans les Etats membres
Agriculture

Etats membres

2000

2001

2002

2003

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

BE
DK
DE

957,3
1 309,1
5 674,9

2,36
3,23
14,01

937,9
1 112,0
5 861,7

2,26
2,68
14,11

949,0
1 223,4
6 812,7

2,18
2,81
15,65

1 025,3
1 223,8
5 876,9

2,31
2,76
13,24

EL
ES
FR

2 598,2
5 498,6
9 005,8

6,42
13,58
22,24

2 613,5
6 184,5
9 230,1

6,29
14,89
22,22

2 637,2
5 959,7
9 781,5

6,06
13,69
22,48

2 762,1
6 485,4
10 464,1

6,22
14,61
23,58

IE
IT
LU

1 682,3
5 048,3
21,2

4,15
12,46
0,05

1 584,5
5 343,8
30,8

3,82
12,87
0,07

1 724,4
5 695,1
38,3

3,96
13,09
0,09

1 965,2
5 393,4
44,3

4,43
12,15
0,10

NL
AT
PT

1 441,9
1 018,7
657,2

3,56
2,52
1,62

1 111,8
1 052,6
875,0

2,68
2,53
2,11

1 177,5
1 092,1
768,6

2,71
2,51
1,77

1 397,3
1 128,1
855,9

3,15
2,54
1,93

FI
SE
UK

727,8
798,1
4 061,7

1,80
1,97
10,03

815,8
780,1
3 998,8

1,96
1,88
9,63

838,8
817,6
4 003,3

1,93
1,88
9,20

876,1
866,5
4 013,8

1,97
1,95
9,04

UE

40 501,1

100,00

41 532,9

100,00

43 519,5

100,0

44 378,1

100,0

Note : Jusqu'en 1999, la rubrique 1 des perspectives financières était dénommée « politique agricole commune » (PAC). Depuis 2000, la rubrique 1 est dénommée « Agriculture » et comprend deux sous-rubriques : « PAC » et « Développement rural et mesures d'accompagnement ».

Source : Commission européenne. Répartition des dépenses opérationnelles par Etat membre en 2003.

L'Espagne, ainsi que l'Italie, l'Allemagne et le Portugal, sont les principaux bénéficiaires des actions structurelles

En 2003, les dépenses au titre des actions structurelles ont principalement été engagées en Espagne (31,74 %, soit environ un tiers), en Italie (15,96 %), en Allemagne (13,31 %) et au Portugal (13,15 %).

Le tableau qui suit précise ces mêmes données pour l'ensemble des Etats membres, depuis 2000.

Dépenses de l'Union européenne dans les Etats membres
Actions Structurelles

Etats membres

2000

2001

2002

2003

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

BE
DK
DE

382,6
126,7
3 765,3

1,39
0,46
13,65

155,9
40,9
3 635,6

0,69
0,18
16,20

246,3
60,3
3 413,9

1,06
0,26
14,67

118,4
105,7
3 791,2

0,42
0,37
13,31

EL
ES
FR

2 798,2
5 114,7
2 520,7

10,14
18,54
9,14

2 940,1
7 141,7
1 475,9

13,10
31,83
6,58

1 832,5
8 832,9
1 277,6

7,88
37,96
5,49

1 909,5
9 037,6
1 979,2

6,71
31,74
6,95

IE
IT
LU

830,8
5 159,0
10,4

3,01
18,70
0,04

624,9
2 707,2
4,6

2,78
12,06
0,02

757,4
1 818,9
9,5

3,25
7,82
0,04

603,9
4 544,0
6,4

2,12
15,96
0,02

NL
AT
PT

478,2
260,8
2 400,1

1,73
0,95
8,70

225,8
206,4
1 969,8

1,01
0,92
8,78

55,4
185,9
2 994,4

0,24
0,80
12,87

218,4
300,5
3 742,9

0,77
1,06
13,15

FI
SE
UK

542,6
232,2
2 964,1

1,97
0,84
10,74

83,6
135,6
1 091,4

0,37
0,60
4,86

222,7
237,9
1 323,4

0,96
1,02
5,69

327,9
395,7
1 392,7

1,15
1,39
4,89

UE

27 586,5

100,00

22 439,5

100,00

23 269,0

100,0

28 474,0

100,0

Source : Commission européenne. Répartition des dépenses opérationnelles par Etat membre en 2003.

Les dépenses administratives concernent, quant à elles, à raison des trois quarts, la Belgique et le Luxembourg

Comme l'indique le tableau suivant, plus de 56 % des dépenses administratives de l'Union sont engagées en Belgique et un peu plus de 20 % au Luxembourg.

Dépenses de l'Union européenne dans les Etats membres
Depenses Administratives

Etats membres

2000

2001

2002

2003

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

Mio €

% UE

BE
DK
DE

2 399,5
39,7
142,6

58,96
0,98
3,50

2 318,1
40,9
140,7

55,92
0,99
3,39

2 500,7
45,2
153,1

55,59
1,00
3,40

2 534,5
45,7
162,3

56,56
1,02
3,62

EL
ES
FR

18,6
26,8
266,1

0,46
0,66
6,54

20,5
31,9
391,3

0,49
0,77
9,44

21,7
41,6
452,2

0,48
0,92
10,05

19,8
41,9
308,9

0,44
0,94
6,89

IE
IT
LU

25,1
109,3
802,4

0,62
2,69
19,72

28,9
117,7
799,5

0,70
2,84
19,29

36,8
127,4
840,1

0,82
2,83
18,67

37,5
134,7
913,3

0,84
3,00
20,38

NL
AT
PT

50,1
14,0
10,9

1,23
0,34
0,27

46,7
15,5
15,5

1,13
0,37
0,37

52,3
17,1
16,1

1,16
0,38
0,36

55,5
17,0
14,9

1,24
0,38
0,33

FI
SE
UK

16,3
20,0
127,9

0,40
0,49
3,14

18,7
23,0
136,2

0,45
0,55
3,29

24,6
23,1
146,9

0,55
0,51
3,27

24,3
24,2
147,9

0,54
0,54
3,30

UE

4 069,4

100,00

4 145,2

100,00

4 498,8

100,00

4 482,4

100,00

Note : Le niveau élevé de dépenses administratives attribuées à la France en 2001 et 2002 est principalement dû aux paiements relatifs au bâtiment du Parlement européen (PE) à Strasbourg. Les dépenses relatives au Parlement européen attribuées à la France pour 2003 (118,1 millions d'euros) se situent à nouveau au niveau de l'an 2000 (116,8 millions d'euros), après la forte hausse qu'elles avaient enregistrée en 2001 (271,8 millions d'euros) et en 2002 (230,5 millions d'euros).

Source : Commission européenne. Répartition des dépenses opérationnelles par Etat membre en 2003.

b) La plus forte contribution nette est fournie par l'Allemagne

En 2003, comme au cours des années précédentes, les trois pays d'Europe du Sud et l'Irlande ont été bénéficiaires nets, recevant plus de l'Union qu'ils ne lui versent, la Finlande a été proche de l'équilibre et les autres Etats membres ont été contributeurs nets.

La contribution nette la plus importante provient de l'Allemagne, avec 8,566 milliards d'euros, devant celle du Royaume-Uni (3,755 milliards d'euros), des Pays-Bas (2,9 milliards d'euros) et de la France (1,7 milliard d'euros).

Le tableau suivant récapitule ces éléments :

Soldes nets par Etat membre

 

2000

2001

2002

Moyenne
2000-2002

2003

Belgique

968,9

517,6

1 474,7

987,1

745

Danemark

-30,0

-429,4

-215,8

-225,1

-283

Allemagne

-11 399,5

-9 380,4

-5 869,9

-8 892,3

-8 566

Grèce

4 255,7

4 390,9

3 356,9

4 001,2

3 322

Espagne

4 482,1

7 056,7

8 665,6

6 734,8

8 455

France

-2 057,0

-2 719,7

-1 928,7

-2 235,1

-1 725

Irlande

1 550,9

1 107,8

1 581,1

1 413,3

1 563

Italie

-119,7

-2 919,5

-3 038,9

-2 026,0

-1 093

Luxembourg

722,5

643,6

791,0

719,0

857

Pays-Bas

-3 219,9

-3 829,5

-2 876,3

-3 308,6

-2 923

Autriche

-695,2

-687,7

-255,1

-546,0

-359

Portugal

2 001,5

1 681,2

2 685,5

2 122,7

3 476

Finlande

170,6

-213,1

18,0

-8,2

9

Suède

-1 418,4

-1 244,8

-840,9

-1 168,0

-1 047

Royaume-Uni

-5 970,9

-1 805,4

-3 985,0

-3 920,4

-3 755

Note : Calcul réalisé à partir des données établies par la Commission européenne dans son rapport annuel sur les dépenses réparties. Il repose sur l'approche dite « comptable », la plus simple, qui consiste tout bonnement à faire la différence entre les versements de l'Etat membre au cours d'une année donnée au titre de l'ensemble des ressources propres et le montant des dépenses effectuées dans l'Etat membre selon la répartition établie par Commission européenne, en y incluant les dépenses administratives. Cette méthode a pour conséquence une somme agrégée des soldes nets négative, puisqu'une part non négligeable des dépenses communautaires ne s'effectue pas sur le territoire de l'Union : action extérieure, aides de pré-adhésion.

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

La France est donc le quatrième contributeur net de l'Union.

c) Les Pays-Bas sont le contributeur net le plus important par rapport au PNB comme par habitant

Par rapport au PNB, ce sont les Pays-Bas qui apportent à l'Union sa contribution nette la plus importante, à raison de 0,64 % en 2003.

Viennent ensuite la Suède et l'Allemagne (0,40 % en 2003), le Royaume-Uni (0,22 %), l'Autriche (0,16 %), le Danemark et la France (0,11 %), ainsi que l'Italie, comme l'indique le tableau qui suit.

Soldes nets par Etat membre
en % du PNB

 

2000

2001

2002

Moyenne
2000-2002

2003

Belgique

0,41

0,20

0,56

0,39

0,27

Danemark

-0,02

-0,24

-0,12

-0,13

-0,15

Allemagne

-0,58

-0,46

-0,27

-0,44

-0,40

Grèce

3,50

3,41

2,38

3,10

2,19

Espagne

0,76

1,13

1,33

1,07

1,17

France

-0,14

-0,19

-0,13

-0,15

-0,11

Irlande

1,60

1,04

1,38

1,34

1,40

Italie

-0,01

-0,25

-0,25

-0,17

-0,08

Luxembourg

3,45

2,95

3,64

3,35

4,27

Pays-Bas

-0,82

-0,92

-0,69

-0,81

-0,64

Autriche

-0,34

-0,33

-0,12

-0,26

-0,16

Portugal

1,81

1,43

2,21

1,82

2,66

Finlande

0,14

-0,17

0,01

-0,01

0,00

Suède

-0,60

-0,56

-0,31

-0,49

-0,40

Royaume-Uni

-0,40

-0,13

-0,26

-0,26

-0,22

Note : Calcul réalisé à partir des données établies par la Commission européenne dans son rapport annuel sur les dépenses réparties. Il repose sur l'approche dite « comptable », la plus simple, qui consiste tout bonnement à faire la différence entre les versements de l'Etat membre au cours d'une année donnée au titre de l'ensemble des ressources propres et le montant des dépenses effectuées dans l'Etat membre selon la répartition établie par Commission européenne, en y incluant les dépenses administratives. Cette méthode a pour conséquence une somme agrégée des soldes nets négative, puisqu'une part non négligeable des dépenses communautaires ne s'effectue pas sur le territoire de l'Union : action extérieure, aides de pré-adhésion.

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette analyse est corroborée par l'examen des soldes nets par habitant.

En moyenne, entre 2000 et 2002, la contribution nette par habitant s'est établie à 208 euros par habitant pour les Pays-Bas, 132 pour la Suède, 108 pour l'Allemagne, 67 pour l'Autriche, 66 pour le Royaume-Uni, 42 pour le Danemark, 37 pour la France et 35 pour l'Italie.

Le graphique suivant montre le classement des différents Etats, et la situation très particulière du Luxembourg qui bénéficie, pour des raisons historiques, de l'implantation d'importantes institutions et administrations communautaires sur son territoire.

Solde net par habitant - moyenne 2000-2002 (€)

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

d) Les différentes catégories d'Etats membres

En définitive, les négociations financières au sein de l'Union conduisent à identifier quatre groupes d'Etats membres :

- le premier d'entre eux est celui des plus gros contributeurs nets, au premier rang desquels figurent les Pays-Bas, la Suède et l'Allemagne, mais également l'Autriche et le Royaume-Uni ;

- le deuxième est celui des contributeurs nets de niveau intermédiaire. Ce groupe comprend l'Italie, le Danemark et la Finlande, ainsi que la France, qui est le premier d'entre eux ;

- le troisième groupe est constitué des bénéficiaires nets qui bénéficient actuellement de la politique de cohésion, Irlande Espagne, Portugal et Grèce, ainsi que, pour les trois premiers d'entre eux, de la PAC ;

- le dernier cas est celui de la Belgique et du Luxembourg, dont le solde net de 0,28 % du PIB au titre des politiques communes est plus que largement compensé par les retours dont ils bénéficient en raison de l'importance des dépenses administratives engagées sur leurs territoires.

e) Les conséquences financières de l'élargissement et du rattrapage économique des pays d'Europe du Sud et de l'Irlande

Selon les simulations de la Commission, les dix Etats membres seront, à l'exception de Chypre, pour les prochaines années, des bénéficiaires nets de l'Union.

Selon les données relatives au budget 2005, ils contribuent pour 5,38 % à son budget.

La charge qui en résulte entraîne donc ceteris paribus une augmentation de l'ensemble des contributions nettes ou une diminution des soldes positifs des anciens Etats membres.

Les termes de cet alourdissement et de sa répartition sont l'un des éléments centraux de la négociation en cours.

II. LA FORTE AUGMENTATION DES CREDITS PROPOSEE PAR LA COMMISSION NE RECUEILLE PAS L'ASSENTIMENT DE LA FRANCE

La Commission a formulé ses propositions générales dans deux communications, du 10 février 2004 et du 14 juillet 2004, puis a détaillé le contenu de chacune des rubriques dans trois séries de propositions entre juillet 2004 et avril 2005.

Les réflexions et discussions au niveau du Conseil ont donc commencé sous présidence irlandaise (premier semestre 2004). Elles se sont poursuivies sous présidence néerlandaise (deuxième semestre 2004), avec l'établissement par celle-ci d'un rapport sur l'état des travaux le 14 décembre 2004(9) qui a permis de mesurer l'ampleur des divergences entre les Etats en termes de fixation du montant global des dépenses, tout en constatant qu'un certain nombre de principes recueillait d'ores et déjà, à ce stade, l'assentiment d'une majorité d'Etats membres.

S'agissant des premières discussions sur le montant global des dépenses du budget communautaire, le rapport de la présidence néerlandaise constate qu'étant donné les fortes divergences entre les Etats, si ceux-ci optaient soit pour tous les montants les plus bas, soit pour tous les montants les plus élevés des fourchettes estimées pour chacune des rubriques, « on obtiendrait pour la période 2007-2013 une fourchette budgétaire globale comprise entre 694 milliards d'euros (soit 0,85 % du RNB-UE en moyenne) et 1 056 milliards d'euros (soit 1,30 % du RNB-UE) », sachant qu'en crédits d'engagement la proposition de la Commission s'élève à environ 1 022 milliards d'euros, et à environ 943 milliards d'euros en crédits de paiement(10).

Quant aux propositions chiffrées adoptées par le Parlement européen, le 8 juin 2005, elles s'élèvent pour la période 2007-2013 à environ 975 milliards d'euros en crédits d'engagement et à 883 milliards d'euros en crédits de paiement. Par rapport au cadre présenté par la Commission, le rapport de M. Böge envisage notamment une réduction des dépenses administratives de la Commission, une réduction des crédits de la sous-rubrique 1a, et une augmentation des crédits des rubriques 3 et 4 ; il exclut du calcul de l'enveloppe globale les crédits du Fonds européen de développement et plusieurs milliards d'euros de réserves.

Les travaux se poursuivent à présent sous présidence luxembourgeoise, avec l'objectif de parvenir à un accord politique lors du Conseil européen des 16 et 17 juin 2005.

A. Les propositions de la Commission

1) En matière de dépenses, la Commission accumule de multiples priorités sans les hiérarchiser et demande en conséquence une forte augmentation des crédits

La Commission a tenté de trouver un équilibre entre le maintien des politiques traditionnelles de l'Union et le développement de politiques plus innovantes, mais son initiative donne, en définitive, plus l'image d'une accumulation que d'un équilibre ou d'un compromis entre ces deux ensembles.

Par rapport au tableau des perspectives financières 2000-2006, la Commission propose une nouvelle structure fondée sur la méthode de l'élaboration du budget par activités(11), afin de déterminer le coût global des politiques (les dépenses administratives nécessaires pour mettre en œuvre tel ou tel programme sont donc comprises dans le montant global des rubriques). Le nombre des rubriques, qui était de huit, est ramené à cinq. La ventilation des crédits entre les différentes rubriques et sous-rubriques est exprimée en crédits d'engagement.

CADRE FINANCIER 2007-2013 PROPOSE PAR LA COMMISSION

Tableau 1 : Répartition globale des crédits d'engagement

En prix 2004

 

Total pour 2007-2013 en millions d'euros

Part en % du total 2007-2013

Changement en % par rapport aux dépenses correspondantes prévues dans les PF 2000-2006

1a. Compétitivité pour la croissance et l'emploi

132 755

12,9 %

+ 194 %

1b. Cohésion pour la croissance et l'emploi

338 710

33,1 %

+ 33 %

2. Conservation et gestion des ressources naturelles

404 655

39,6 %

+ 3 %

3. Citoyenneté, liberté, sécurité et justice

24 705

2,4 %

+ 90 %

4. L'Union européenne en tant que partenaire mondial

92 110

9 %

+ 40 %

Source : Commission européenne.

Les points principaux des propositions de la Commission sont les suivants :

a) La Rubrique 1 : "Croissance durable"

La Rubrique 1 est la plus importante en volume de crédits d'engagement. Elle regroupe au sein d'une première sous-rubrique les dépenses dites « de croissance » issues des actuelles politiques internes, et au sein d'une seconde sous-rubrique, les actions structurelles.

(1) La sous-rubrique 1 a : la compétitivité au bénéfice de la croissance et de l'emploi

Cette sous-rubrique couvre les politiques liées à la « stratégie de Lisbonne ». Pour faire de l'Union européenne une « économie de la connaissance » dynamique, et considérant que l'augmentation des dépenses opérées à l'échelon européen est une composante essentielle de la stratégie, la Commission prévoit d'affecter à cette sous-rubrique une enveloppe de 132,8 milliards d'euros en crédits d'engagement pour 2007-2013, et énonce cinq objectifs : la promotion de la compétitivité au sein d'un marché unique pleinement intégré ; la recherche et le développement technologique ; la poursuite de l'interconnexion de l'Europe par l'intermédiaire de réseaux communautaires ; l'enseignement et la formation ; et l'agenda pour la politique sociale. 

C'est à cette rubrique que se rattache le projet de programme-cadre pour la compétitivité et l'innovation, qui serait doté de 4,2 milliards d'euros, et dont l'objectif est de donner une meilleure visibilité aux actions communautaires liées au volet du même nom de la stratégie de Lisbonne.

Le Parlement européen a revu à la baisse les propositions de la Commission pour cette sous-rubrique, en prévoyant d'y consacrer 120,6 milliards d'euros.

(a) La recherche-développement

Plus de la moitié (53 %) des dépenses envisagées par la Commission au titre de la sous-rubrique 1a sont consacrées à la recherche-développement. L'objectif est la mise en place d'un espace européen de la recherche à travers la promotion de l'excellence scientifique et technologique, avec une « montée en puissance » progressive : 6,325 milliards en 2007 (contre 5,256 milliards en 2006), puis une augmentation régulière des crédits jusqu'à atteindre une dépense de 13,6 milliards pour l'année 2013.

Le budget proposé pour le septième programme-cadre de Recherche et de Développement (PCRD)

Le septième PCRD (2007-2013) a été présenté le 6 avril par la Commission européenne(12). Il comporte quatre volets :

· 44,73 milliards d'euros pour le volet « Coopération », c'est-à-dire pour la recherche collaborative sur neuf thèmes ;
.../...
· 11,9 milliards d'euros pour le volet « Idées » sur la recherche fondamentale, qui sera piloté par un Conseil européen de la Recherche, sur la base de deux principes : l'autonomie de la communauté scientifique dans ses choix par rapport aux autorités politiques, et le soutien sur la base exclusive de l'excellence ;

· 7,18 milliards pour le volet « Personnel » (bourses Marie Curie pour la formation, carrière et mobilité des chercheurs) ;

· 7,54 milliards pour le volet « Capacités » (infrastructures, soutien aux PME, fonds versés aux régions, coopération internationale...) ;

Le total des quatre volets est de 73,215 milliards d'euros.

Ils sont accompagnés d'un programme-cadre Euratom (4,777 milliards d'euros pour 2007-2013) qui concerne la recherche sur la fission thermonucléaire, la fission nucléaire et la radioprotection, et les activités nucléaires du Centre Commun de Recherche.

La proposition budgétaire totale de la Commission pour la recherche communautaire approche donc les 78 milliards d'euros sur sept ans. A titre de comparaison, le budget alloué au sixième PCRD (dont la durée n'était toutefois pas de sept ans mais de quatre ans, pour 2003-2006) était de 17,5 milliards d'euros au départ et a été majoré de 1,7 milliard d'euros pour permettre l'extension du programme aux nouveaux Etats membres.

(b) Transports et énergie

17 % de la sous-rubrique sont consacrés aux transports et à l'énergie, notamment pour couvrir deux instruments : le programme Marco Polo relatif à l'intermodalité et visant une réduction du volume du fret routier, et le programme Galileo de radionavigation par satellite.

L'objectif est de promouvoir la compétitivité, la sécurité et la viabilité environnementale des réseaux communautaires de transport, d'énergie et de télécommunication, avec une enveloppe totale de 22,7 milliards d'euros pour la période 2007-2013 et, là aussi, un développement progressif : 1,675 milliard pour 2007 (contre 1,175 milliard pour 2006), puis 2,2 milliards pour 2008... jusqu'à 4,8 milliards prévus pour l'année 2013. Une ligne budgétaire spécifique serait créée sous cette rubrique pour être consacrée au démantèlement de centrales nucléaires.

Les réseaux transeuropéens de transport et d'énergie (RTE) et les participations aux programmes Galileo et Marco Polo

Pour les prochaines perspectives financières, la Commission propose une augmentation de l'enveloppe prévue en faveur des RTE, des programmes Galileo et Marco Polo. Celle-ci s'établirait à 22,7 milliards d'euros, soit une augmentation de 23 % en moyenne par an et de 309 % par rapport à 2006.

* En ce qui concerne les transports, la somme prévue s'élève à 20,35 milliards d'euros. Il s'agit de cofinancer les 30 projets prioritaires décidés par le Parlement européen et le Conseil le 29 avril 2004, et dont le coût total s'établit à 225 milliards d'euros, ainsi que le déploiement des systèmes européens de gestion du trafic aérien et ferroviaire.

Plusieurs projets concernent la France : les TGV Sud-ouest de l'Europe, avec deux tronçons, de Tours à Hendaye, et de Montpellier à la frontière espagnole ; le TGV Est et la liaison Strasbourg-Stuttgart ; l'axe ferroviaire Lyon-Turin ; le nouvel axe ferroviaire à grande capacité pyrénéen ; les autoroutes de la mer de l'Europe de l'Ouest, de l'Europe du Sud-Ouest (Méditerranée occidentale) ; Eurocaprail sur l'axe ferroviaire Bruxelles-Strasbourg par Luxembourg ; le canal Seine-Escaut.

La proposition de règlement concentre les aides, comporte la faculté de prévoir à titre exceptionnel pour des projets transfrontaliers une participation jusqu'à 50%, contre 20 % habituellement, l'obligation de respecter des objectifs en matière de rééquilibrage entre les modes de transport et l'interopérabilité.

* S'agissant de l'énergie, la Commission prévoit une somme de 340 millions d'euros pour prendre part au cofinancement des études de faisabilité des gazoducs et interconnexions électriques nécessaires tant à l'achèvement du marché intérieur qu'à la sécurité des approvisionnements.

* Les dotations prévues pour les programmes Marco Polo I et II visant à rééquilibrer le transport de marchandises de la route vers d'autres modes, sont de 740 millions d'euros pour la période 2007-2013. Marco Polo II porte sur de nouveaux projets comme les Autoroutes de la mer et les actions dites d'évitement de trafic.

* Une somme d'un milliard de francs est enfin prévue pour prendre part au lancement du système de radionavigation par satellite Galileo.

* Le rapport de la commission temporaire ad hoc du Parlement européen mentionne également une somme égale à 1,12 milliard d'euros pour le déclassement des centrales nucléaires d'Ignalina (Lituanie) et Bohunice (Slovaquie).



.../...
Dans l'ensemble, la commission ad hoc du Parlement européen évalue les besoins budgétaires correspondants à la réalisation des trente projets prioritaires prévue pour 2007-2013, à 4 milliards d'euros par an alors que la Commission n'a inscrit que 2,9 milliards dans sa proposition.

On observera que la majeure partie des projets sont concernés par l'initiative européenne de croissance relancée sous la Présidence italienne par le Conseil européen des 16 et 17 octobre 2003, centrée sur 54 projets à « démarrage rapide » notamment dans le domaine des transports.

Pour développer les partenariats public-privé, la Commission envisage, dans ce cadre, la création d'un système de garantie de revenus en faveur des investisseurs privés.

L'hypothèse de la bonification d'intérêts pourrait également être évoquée.

(c) Enseignement et formation

En matière d'action communautaire relative à l'enseignement et à la formation, la Commission cherche à améliorer cette politique par une refonte des instruments actuels (Erasmus, Socrates, Leonardo da Vinci...), qui permettra une diminution de leur nombre, tout en prévoyant d'y affecter une enveloppe totale de 12,95 milliards pour 2007-2013, soit environ 10 % de la sous-rubrique 1 a.

La Commission cherche à mettre particulièrement l'accent sur les subventions à la mobilité, notamment pour que 10 % des étudiants universitaires se voient offrir la possibilité d'aller étudier à l'étranger et que chaque année 150 000 stagiaires professionnels puissent participer à des actions de mobilité d'ici à 2013.

(d) Autres politiques liées à la compétitivité et politique sociale

Il s'agit de promouvoir la compétitivité et l'esprit d'entreprise sur un marché intérieur pleinement intégré, et de mettre en œuvre l'agenda pour la politique sociale, dans le cadre d'un programme unique, « Progrès », qui regroupera les actions actuellement menées dans ce domaine (EURES, libre circulation des travailleurs...). Un total de 20,405 milliards y seraient affectés pour 2007-2013, soit 15 % de la sous-rubrique 1 a.

(e) La création d'un « Fonds d'ajustement à la croissance »

Ce Fonds serait doté d'un milliard d'euros par an, et servirait à augmenter l'enveloppe des instruments existants et des actions de la rubrique 1. Il figure sous la rubrique 1a mais la Commission propose qu'il puisse être le cas échéant complété par des crédits non utilisés provenant de la rubrique 1 b.

Si quelques Etats se sont déclarés intéressés par cette proposition de création d'un Fonds, la plupart d'entre eux (notamment la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et la Pologne) ont manifesté leur opposition ou du moins leur scepticisme, faisant remarquer qu'un tel Fonds n'est pas nécessaire puisque les conclusions du Conseil européen de décembre 2004 ont relevé que les mécanismes de flexibilité existants fonctionnent de manière satisfaisante. Le rapporteur de la commission temporaire du Parlement européen, M. Reimer Böge, s'est également prononcé contre la création de ce Fonds dans son rapport, mais en proposant d'instituer à sa place une « réserve pour la compétitivité » du même montant.

La Commission a relancé l'idée d'un tel Fonds au mois d'avril 2005, lors de la présentation de sa troisième et dernière série de propositions détaillées, en suggérant d'y consacrer 7 milliards d'euros sur la période et de réserver, à travers cet instrument et à travers l'objectif de compétitivité de la sous-rubrique 1b, 11,3 milliards d'euros pour aider les travailleurs victimes des restructurations industrielles.

La deuxième version de la « boîte de négociation » de la présidence luxembourgeoise, présentée le 25 avril 2005 au Conseil, a marqué l'abandon de cette idée, la création de ce Fonds ayant été critiquée par l'ensemble des Etats membres.

Deux autres mécanismes de flexibilité sont intégrés dans les propositions de la Commission pour ces prochaines perspectives financières : la procédure de révision des plafonds de dépenses, qui existe déjà dans le cadre actuel, et une nouvelle possibilité de
« ré-affectation » permettant dans certaines limites d'opérer des virements de crédits.

(2) La sous-rubrique 1 b : la cohésion au bénéfice de la croissance et de l'emploi

La sous-rubrique 1b, dotée par la Commission d'un budget de 338,7 milliards d'euros pour 2007-2013 en crédits d'engagement, couvre principalement les Fonds structurels actuels.

L'augmentation du montant global des dépenses communautaires préconisée par la Commission est en grande partie liée à cette sous-rubrique, puisqu'elle aboutit à doter la politique régionale de crédits équivalant à 0,42 % du RNB de l'Union. Le Parlement européen a approuvé cette proposition de la Commission.

La Commission considère que l'élargissement de l'Union à vingt-cinq et bientôt à vingt-sept Etats, voire plus, représente un défi sans précédent pour la compétitivité et la cohésion interne de l'Union. Elle cherche à concilier l'effort attendu par les nouveaux Etats membres (dans son projet, environ 52 % des dépenses opérationnelles de la politique de cohésion bénéficieraient aux nouveaux Etats membres) et la volonté des anciens Etats de conserver l'éligibilité à ces aides ou d'en perdre le moins possible. Le président de la Commission, M. José Manuel Barroso, a ainsi déclaré qu'en matière de politique de cohésion « il faudra garder un équilibre global, tenant compte des besoins des nouveaux Etats membres, mais aussi des anciens »(13)

Tirant les conséquences des conclusions des Conseils européens de Lisbonne(14) et de Göteborg(15), la Commission a choisi de diviser cette sous-rubrique en trois objectifs : la convergence (78 % des ressources de la sous-rubrique 1b), la compétitivité régionale et l'emploi (18 %), et la coopération territoriale (4 %).

La Commission propose de maintenir le plafond de 4 % du PIB national en ce qui concerne le montant maximum des transferts versés à un Etat membre au titre des actions structurelles. Ce plafonnement, introduit par l'accord de Berlin sur les perspectives financières pour 2000-2006, recueille l'assentiment d'une grande majorité d'Etats membres, en raison de la nécessité de prendre en compte la capacité des Etats à utiliser les ressources de manière effective (« capacité d'absorption ») et la pression imposée aux ressources nationales en raison de l'application, en matière de Fonds structurels, du principe de l'additionnalité. Toutefois, la méthode de calcul du plafond ne fait pas l'unanimité.

(a) L'objectif de convergence (« promouvoir la convergence des Etats membres et régions moins développés »)

Cet objectif correspond à l'actuel « Objectif 1 » des actions structurelles. Il concerne les régions dont le PIB par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne communautaire et, s'agissant du Fonds de cohésion, les Etats dont le RNB est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire, cette prospérité relative étant désormais calculée sur la base de l'Union à 25.

Une enveloppe de 264 milliards d'euros est attribuée à l'objectif de convergence, qui couvre une partie du FEDER et du FSE, ainsi que le Fonds de cohésion. Environ 24 % de cette enveloppe alimenteraient le Fonds de cohésion, auquel sont éligibles tous les nouveaux Etats membres ainsi que la Grèce et le Portugal, et 0,42 % seraient alloués aux régions ultra-périphériques de l'Union afin de compenser leurs contraintes spécifiques, la France et l'Espagne se montrant très fermement attachées au maintien de la mention expresse d'une enveloppe distincte en faveur de ces régions.

Un régime transitoire à l'intérieur de cet objectif, avec une aide temporaire financée par 8,4 % de son budget, est prévu par la Commission pour les régions qui ne seront plus éligibles en raison de la diminution statistique de la moyenne du PIB par habitant de l'Union à 25 (régions subissant l'« effet statistique » de l'élargissement).

Du fait de l'élargissement, le PIB moyen par habitant de l'Union a diminué de 12,5 % ; il s'ensuit que certaines régions ne seront plus éligibles au titre du nouvel objectif « Convergence » pour la période 2007-2013, sans que cela soit le résultat d'une progression de leur richesse. Il s'agit surtout de certaines régions espagnoles, grecques et portugaises (les Länder est-allemands, en revanche, ne sont pas concernés car leur PIB par habitant reste inférieur à 75 % de la moyenne de l'Union à 25).

Les régions en question ne se trouvant pas dans la même situation que celles qui perdent leur éligibilité en raison de leur croissance économique, la Commission estime justifié de prévoir pour elles des modalités de suppression progressive particulières(16), ce soutien devant cesser en 2013.

S'agissant de l'éligibilité au Fonds de cohésion, dans la mesure où elle est calculée pour chaque Etat et non pas pour les régions, seul un Etat est concerné par « l'effet statistique » qui le fait passer au-dessus du seuil des 90 % de la moyenne communautaire. Il s'agit de l'Espagne. La Commission n'a pas prévu de dispositif de phasing-out pour le Fonds de cohésion, et l'Espagne demande sa mise en place pour atténuer la brutalité de son changement de situation.

(b) L'objectif de compétitivité (« soutenir et renforcer la compétitivité régionale et l'emploi en dehors des régions les moins prospères »)

Cet objectif couvre des interventions du FEDER, et des interventions du FSE (Leader), pour un montant total de 57,9 milliards d'euros pour 2007-2013. La Commission fait valoir qu'il existe des défis importants qui concernent tous les Etats membres, tels que les restructurations industrielles, la mondialisation des échanges, le vieillissement de la population, le passage à une économie et une société fondées sur la connaissance, les pénuries de main-d'œuvre dans certains secteurs, ou les problèmes d'exclusion sociale.

La Commission propose que, dans le cadre de l'objectif de compétitivité, un dispositif de soutien soit mis en place au bénéfice des régions qui ne seront plus éligibles au titre du nouvel objectif de convergence en raison de la croissance de leur économie (phasing-out « naturel »), en les intégrant progressivement (phasing-in) dans l'objectif de compétitivité. Le soutien correspondant à ce phasing-in ne serait toutefois pas aussi important que celui correspondant au phasing-out évoqué plus haut(17), car un certain nombre d'Etats ont fait savoir qu'ils estimaient injustifié de faire bénéficier ces régions d'une aide financière communautaire.

(c) L'objectif de coopération territoriale (« soutenir la coopération territoriale européenne »)

Se fondant sur l'expérience de l'initiative « Interreg », la Commission propose de créer un nouvel objectif auquel seront éligibles toutes les régions situées le long des frontières intérieures de l'Union, et certaines régions situées le long des frontières extérieures. L'enveloppe prévue est de 14,25 milliards d'euros pour 2007-2013. Le but sera de promouvoir des solutions communes à des problèmes de développement urbain, rural et côtier, le développement de relations économiques, la mise en réseau de PME...

b) La Rubrique 2 : "Conservation et gestion des ressources naturelles" (agriculture, pêche et environnement)

La Rubrique 2 du cadre proposé par la Commission couvre les programmes actuels suivants : agriculture, pêche (IFOP, accords de pêche internationaux), politiques internes concernant la protection de l'environnement. Le budget total pour cette rubrique, pour 2007-2013, serait d'environ 404,7 milliards d'euros en crédits d'engagement.

Concernant la politique agricole et ses deux piliers (le pilier « soutien au marché et aides directes » et le pilier « développement rural »), les propositions de la Commission impliquent, par rapport aux perspectives financières pour 2000-2006 :

- une diminution du volume total des paiements directs et des mesures de soutien des marchés de 3,3 % et ce, en dépit de l'élargissement,

- une augmentation d'environ 20 % des crédits de développement rural sous le seul effet de l'élargissement,

- finalement, sous couvert d'une progression globale des dépenses agricoles liée à l'élargissement, une contraction de la part des crédits afférents dans l'ensemble des engagements du budget communautaire (35 % pour l'année 2013 contre 45 % pour l'année 2006).

(1) Les dépenses de marché et les paiements directs

L'analyse de la rubrique 2 repose essentiellement sur le fait qu'elle intègre les réformes de la Politique Agricole Commune résultant des accords de 2002 et 2003, en particulier le plafond des dépenses liées au marché et des paiements directs en agriculture fixé, pour la période allant jusqu'en 2013, lors du Conseil européen de Bruxelles des 24-25 octobre 2002.

Les dépenses de marché et les paiements directs forment 74,4 % de la rubrique, avec un montant total de 301 milliards d'euros. Celui-ci se décompose entre 265,5 milliards d'euros pour les quinze plus anciens Etats membres (pour lesquels l'enveloppe globale annuelle diminuera régulièrement entre 2007 et 2013 sur la base d'un déflateur de 2 %), 27,6 milliards d'euros pour les dix nouveaux Etats membres (qui bénéficieront au contraire d'une augmentation progressive des crédits annuels), et enfin un montant d'environ 8 milliards d'euros correspondant aux dépenses prévisibles pour la Roumanie et la Bulgarie à partir de leur adhésion à l'Union, en sus du « plafond de Bruxelles » qui ne les englobait pas.

(2) Le développement rural

Le second volet de la Politique Agricole Commune, le développement rural, n'est pas inclus dans le champ des réformes de 2002 et 2003. Le montant des crédits devant y être affectés dans le cadre des perspectives financières n'est donc pas prédéterminé par des engagements déjà conclus.

La politique en faveur du développement rural est présentée par la Commission autour des objectifs suivants : améliorer la compétitivité de l'agriculture et de la sylviculture par un soutien aux restructurations, améliorer l'environnement et l'espace rural ainsi que la qualité de la vie dans les zones rurales, encourager la diversification des activités économiques.

Les propositions de la Commission consacrent au développement rural environ 88,7 milliards d'euros en crédits d'engagement sur la période, dont 50,3 milliards pour les Quinze (avec un montant annuel décroissant), 28,1 milliards pour les Dix (avec un montant annuel croissant) et 10,3 milliards pour la Bulgarie et la Roumanie.

(3) La pêche

Dans le tableau de la Commission, la politique de la pêche est financée à hauteur de 7,6 milliards d'euros en crédits d'engagement pour 2007-2013, soit une augmentation de 24 % par rapport à la période précédente, et toutes les dépenses afférentes à la pêche, à l'exception de la recherche (qui relève du programme-cadre de recherche-développement inclus dans la sous-rubrique 1a), feront partie de la Rubrique 2.

La Commission a proposé, en juillet 2004, la création d'un nouveau Fonds, le Fonds européen pour la pêche(18), qui serait doté de 4,96 milliards d'euros pour 2007-2013 et destiné à remplacer, dans une Europe élargie à vingt-sept Etats membres, l'Instrument financier d'orientation pour la pêche (IFOP).

(4) L'environnement

Les crédits affectés à ce chapitre ne représentent qu'1 % de la Rubrique 2, car selon la Commission « en ce qui concerne l'environnement, l'essentiel de l'action communautaire consiste à intégrer la dimension environnementale dans les autres politiques ».

Des moyens budgétaires pour atteindre les objectifs stratégiques de l'Union en matière d'environnement se trouvent donc dispersés entre les rubriques 1a, 1b, 2 et 4, notamment les fonds destinés au financement de la gestion du réseau Natura 2000 qui se trouvent répartis entre différents Fonds structurels. Au sein de la Rubrique 2 est prévu le financement d'un instrument unique permettant de prendre des mesures de nature strictement environnementale, le programme LIFE +.

Le fait de ne pas avoir intégré le budget de Natura 2000 (21 milliards d'euros) dans le programme LIFE + est contesté par le Parlement européen, dont la commission de l'environnement a demandé que les deux programmes soient regroupés au niveau budgétaire.

c) La Rubrique 3 : "Citoyenneté, liberté, sécurité et justice"

Selon la communication de la Commission du 14 juillet 2004, « jusqu'à présent, la citoyenneté européenne a été une question de valeurs : elles doivent être traduites en action ».

Pour autant, la Rubrique 3 est la plus faiblement dotée, avec 24,7 milliards d'euros pour la période, dont 8,3 milliards pour la politique de liberté, sécurité et justice, et 1,2 milliard pour le programme-cadre d'action communautaire en matière de santé et de protection des consommateurs qui vise à réunir deux domaines jusqu'ici séparés(19).

Par rapport à la structure antérieure des perspectives financières, la Rubrique 3 concerne les actuelles politiques relatives à la justice et aux affaires intérieures (JAI) et d'autres volets des politiques internes tels que la santé publique, la protection des consommateurs et la culture.

Elle présente une structure simplifiée basée sur trois programmes-cadre qui ont vocation à remplacer la multitude d'instruments existants : « Liberté de mouvement et solidarité en matière de frontières extérieures, d'asile et d'immigration » (avec la création de l'Agence des frontières extérieures et la mise en place d'un fonds pour les frontières extérieures de 2,15 milliards d'euros), « Sécurité », et « Justice et droits fondamentaux ». Cette rubrique comprend également des actions et programmes pour l'accès aux biens et services de base, la culture, et la création d'un dispositif de solidarité et de réaction rapide en cas de catastrophe touchant un Etat membre.

La Commission propose la budgétisation du Fonds de solidarité (qui représente 6,2 milliards d'euros sur la période) : seule l'Estonie s'est montrée favorable, la France et de nombreux autres pays se sont prononcés contre, ainsi que le rapporteur du Parlement européen. La présidence luxembourgeoise a fait disparaître de sa boîte de négociation la mention du Fonds de solidarité et de réaction rapide, en prenant acte de la position presque unanime du Conseil concernant ce Fonds.

La présidence a par ailleurs proposé de scinder la Rubrique 3 en deux sous-rubriques, l'une intitulée « Liberté, sécurité et justice » et consacrée exclusivement à la protection des droits des individus, et l'autre regroupant les autres politiques intéressant directement les citoyens européens (culture, jeunesse, audiovisuel, santé, protection des consommateurs).

d) La Rubrique 4 : "L'Union européenne en tant qu'acteur mondial"

Cette rubrique est dotée par la Commission de 92,1 milliards d'euros. Elle correspond à la rubrique « Actions extérieures » des précédentes perspectives financières, à laquelle viennent s'ajouter les aides de pré-adhésion qui se trouvaient jusqu'à présent dans une rubrique distincte, et le Fonds européen de développement. Elle est destinée à permettre à l'Union d'atteindre un poids politique cohérent avec son poids économique, en tant qu'acteur du développement durable et de la sécurité.

Lors du Conseil « Affaires générales » du 21 novembre 2004, la plupart des délégations ont approuvé la proposition de la Commission visant à simplifier la structure de cette rubrique, qui prévoit six instruments financiers en matière de relations extérieures(20), dont quatre nouvellement créés.

Dans la nouvelle architecture proposée, trois instruments soutiennent directement des politiques extérieures spécifiques (l'instrument de pré-adhésion, l'instrument européen de voisinage et de partenariat, l'instrument de coopération au développement et de coopération économique), le dernier incluant le FED. Les trois autres instruments doivent permettre à l'Union de faire face aux crises : l'instrument d'aide humanitaire, l'assistance macro-financière (AMF) et le nouvel instrument dit « de stabilité » consacré aux défis transfrontaliers tels que la sécurité nucléaire, l'assistance électorale et le développement d'une capacité de maintien de la paix.

Le débat sur la « budgétisation » du Fonds européen de développement reste ouvert.

Budgétiser le Fonds européen de développement ?

Au-delà de l'exigence de plafonnement à 1%, la France réclame l'application de principes de bonne gestion et de transparence, impliquant notamment un meilleur respect du principe d'unité en matière budgétaire : c'est pourquoi elle demande la budgétisation du Fonds européen de développement.

L'évolution du budget communautaire est dans l'ensemble marquée par l'unification de ses instruments. Pourtant les interventions financières du Fonds européen de Développement (FED), ont toujours été réalisées en marge du budget : le FED fonctionne par renouvellement périodique des conventions qui le régissent, il n'est pas inscrit au budget général mais alimenté par des contributions des Etats membres déterminées selon une clé de répartition ad hoc.
Comme le relevait déjà M. Gérard Fuchs, rapporteur de votre Délégation sur les perspectives financières pour 2000-2006(21), « les liens entre le budget


.../...
général (...) et le FED sont complexes et contradictoires : d'une part, bien que n'y figurant pas en principe, un titre du budget est réservé à ce fonds depuis 1993. Par ailleurs le huitième FED bénéficie non seulement des contributions des Etats membres mais aussi d'une participation du budget général
(...) En outre, les financements du FED abondent significativement les interventions extérieures de la Communauté en faveur des pays en voie de développement (...)». Enfin, les conditions d'exécution du FED font comme le budget général l'objet d'un contrôle par la Cour des comptes européenne et donnent lieu à l'octroi d'une décharge par le Parlement européen.

La clé de répartition pour le financement du Fonds est différente de celle qui concerne le budget général : les Etats qui sont proportionnellement moins mis à contribution pour le FED que pour le budget général, notamment l'Allemagne, s'opposent fort logiquement à la budgétisation du Fonds. La France se trouve dans la situation inverse, et fait valoir :

- que la lisibilité de l'action communautaire en direction des pays en voie de développement se trouverait accrue par la budgétisation du FED,

- que sa budgétisation permettrait au Parlement européen de se prononcer sur l'ensemble de l'aide au développement de l'Union européenne dans le cadre de la procédure budgétaire,

- et surtout, qu'il en découlerait une sécurité accrue et un signal fort pour les pays ACP puisque l'exclusion du FED du champ du budget en rend incertaine chaque reconstitution quinquennale.

Pour l'établissement des perspectives financières 2000-2006, la Commission n'avait pas proposé la budgétisation du FED. En revanche, elle a inclus cette mesure dans ses propositions pour les perspectives financières 2007-2013, en prévoyant que le FED serait inclus dans le budget général à partir de 2008.

Plusieurs Etats ont rejoint la France dans le soutien à cette proposition (notamment la Suède, le Danemark, l'Autriche, la Finlande, Chypre et la Lettonie), contre laquelle se sont en revanche exprimés le Royaume-Uni, l'Italie, l'Espagne, la Grèce, la Pologne, la République tchèque, le Portugal, la Slovénie et la Hongrie. La commission spéciale du Parlement européen a également choisi de ne pas intégrer le FED à l'intérieur du cadre financier.

e) La Rubrique 5 : "Administration"

Conformément à la logique de la budgétisation par activités, cette Rubrique ne regroupe que les dépenses administratives qui ne sont pas rattachables à une politique spécifique de l'Union. Il s'agit des dépenses administratives des institutions autres que la Commission, sachant que les nombreuses agences communautaires ne reçoivent de fonds communautaires que sous forme de subventions provenant du budget de la Commission.

La nouvelle Rubrique 5 comprend donc les dépenses administratives du Conseil, du Parlement, du Médiateur, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du Contrôleur européen de la protection des données, les charges de retraite des institutions, et les dépenses des écoles européennes. Elle représenterait 28,6 milliards d'euros sur la période, soit 2,8 % du total des crédits d'engagement.

Ventilation des dépenses administratives

(crédits d'engagement, en millions d'euros)

Dépenses de la Commission :

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Dans la Rubrique 1

1 570

1 690

1 810

1 930

2 040

2 150

2 270

Dans la Rubrique 2

560

580

600

630

650

670

690

Dans la Rubrique 3

410

450

490

540

580

620

670

Dans la Rubrique 4

920

970

1 020

1 070

1 110

1 160

1 210

Total Commission

3 460

3 690

3 920

4 160

4 380

4 600

4 840

Rubrique 5 (autres dépenses administratives)

3 675

3 815

3 950

4 090

4 225

4 365

4 500

TOTAL des dépenses administratives

7 135

7 505

7 870

8 250

8 605

8 965

9 340

Le rapporteur de la commission temporaire du Parlement européen, M. Reimer Böge, a envisagé dans son rapport une réduction de 10 % des dépenses administratives de la Commission, c'est-à-dire des dépenses administratives incluses dans les Rubriques 1 à 4 uniquement.

CADRE FINANCIER 2007-2013 PROPOSE PAR LA COMMISSION

Tableau 2 : Correspondances entre la nouvelle structure proposée par la Commission pour 2007-2013 et les rubriques des perspectives 2000-2006

NOUVELLES RUBRIQUES

RUBRIQUES DES PF 2000-2006 DANS LESQUELLES SE TROUVAIENT LES CREDITS CORRESPONDANTS

1. CROISSANCE DURABLE

 

1. a. Compétitivité pour la croissance et l'emploi

Rubrique 3 actuelle « Politiques internes »

1. b. Cohésion pour la croissance et l'emploi

Rubrique 2 actuelle « Actions structurelles »

2. CONSERVATION ET GESTION DES RESSOURCES NATURELLES :

environnement

agriculture :

- mesures de marché

- développement rural

- secteur forestier, dépenses de contrôle et d'inspection

protection des animaux et de la flore

pêche (sauf dépenses de recherche) :

- mesures de marché

- interventions structurelles

- contrôles et inspections

- accords internationaux de pêche

Rubrique 3 actuelle « Politiques internes »

- actuelle Rubrique 1a « P.A.C. »

- actuelles Rubrique 1b « Développement rural » et Rubrique 2 « Actions structurelles »

- actuelle Rubrique 3 « Politiques internes »

Rubrique 1a actuelle « P.A.C. »

- actuelle Rubrique 1a « P.A.C. »

- actuelle Rubrique 2 « Actions structurelles »

- actuelle Rubrique 3 « Politiques internes »

- actuelle Rubrique 4 « Actions extérieures »

3. CITOYENNETE, LIBERTE, SECURITE ET JUSTICE

(culture, mesures anti-discrimination, JAI, protection des consommateurs, santé, communication...)

Rubrique 3 actuelle « Politiques internes »

4. L'UNION EUROPEENNE COMME PARTENAIRE MONDIAL :

dépenses opérationnelles liées à l'action extérieure

aide aux victimes de violations des droits de l'homme

instrument structurel de pré-adhésion, dépenses liées à l'élargissement

Commerce, aide humanitaire, assistance macrofinancière, instrument de coopération et de développement...

Réserves pour aide d'urgence et réserve pour garantie de prêts

Actuelle Rubrique 4 « Actions extérieures »

Actuelle Rubrique 3 « Politiques internes »

Actuelle Rubrique 7 « Aides de pré-adhésion »

Actuelle Rubrique 4 « Actions extérieures »

Actuelle Rubrique 6 « Réserves »

5. ADMINISTRATION

(institutions autres que la Commission, retraites, écoles européennes )

Rubrique 5 actuelle « Administration »

CADRE FINANCIER 2007-2013 PROPOSÉ PAR LA COMMISSION (tableau 3)

En millions d'euros à prix 2004

Crédits d'engagement

2006 (a)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Total 2007-2013

1. Croissance durable

46 621

58 735

61 875

64 895

67 350

69 795

72 865

75 950

471 465

1a. Compétitivité pour la croissance et l'emploi

8 791

12 105

14 390

16 680

18 965

21 250

23 540

25 825

132 755

1b. Cohésion pour la croissance et l'emploi (b)

37 830

46 630

47 485

48 215

48 385

48 545

49 325

50 125

338 710

2. Conservation et gestion des ressources naturelles

56 015

57 180

57 900

58 115

57 980

57 850

57 825

57 805

404 655

Dont : Agriculture - Dépenses relatives aux marchés et aides directes

43 735

43 500

43 673

43 354

43 034

42 714

42 506

42 293

301 074

3. Citoyenneté, liberté, sécurité et justice

2 342

2 570

2 935

3 235

3 530

3 835

4 145

4 455

24 705

4. L'UE en tant que partenaire mondial (c)

8 501

8 300

11 985

12 755

13 720

14 495

15 115

15 740

92 110

5. Administration (d)

3 436

3 675

3 815

3 950

4 090

4 225

4 365

4 500

28 620

Compensations (e)

1 041

419

191

190

0

0

0

0

800

Total des crédits d'engagement

117 956

130 879

138 701

143 140

146 670

150 200

154 315

158 450

1 022 355

Total des crédits de paiement

(b) (c)

114 740

129 625

131 855

120 995

136 135

136 860

142 525

145 085

943 080

Crédits de paiement en % du RNB-UE

1.08 %

1.18 %

1.17 %

1.05 %

1.16 %

1.14 %

1.16 %

1.15 %

1.14 %

Marge disponible

0.16 %

0.06 %

0.07 %

0.19 %

0.08 %

0.10 %

0.08 %

0.09 %

0.10%

Plafond ressources propres en % du RNB-UE

1.24%

1.24%

1.24%

1.24%

1.24%

1.24%

1.24%

1.24%

1.24%

(a) Les dépenses 2006 dans le cadre des perspectives financières actuelles ont été ventilées selon la nouvelle nomenclature proposée afin de faciliter les comparaisons. Les dépenses des rubriques 3 et 4 comprennent les montants correspondant au Fonds de solidarité (961 millions d'euros à prix 2004) et au F.E.D. (estimés à 3 milliards d'euros).

(b) Incluant les dépenses du Fonds de Solidarité à partir de 2006. Cependant, les paiements correspondants sont uniquement calculés à partir de 2007.

(c) L'intégration du FED dans le budget de l'UE, proposée par la Commission, prendrait effet en 2008.

(d) Incluant les dépenses administratives des institutions autres que la Commission, les retraites et les écoles européennes. Les dépenses administratives de la Commission sont intégrées dans les quatre premières rubriques de dépenses.

(e) Montants prévus dans le projet de traité d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à l'UE.

L'EVOLUTION DE LA REPARTITION DES DEPENSES PROPOSEE PAR LA COMMISSION

Répartition des dépenses prévue pour 2006 Répartition des dépenses proposée pour 2013

2) S'agissant des recettes, la Commission propose de supprimer l'abattement dont bénéficie le Royaume-Uni et de prévoir un mécanisme de correction généralisé des contributions les plus importantes, lequel n'emporte pas la conviction

Le 27 juillet 2004, Mme Michaele Schreyer étant commissaire chargée du budget, la Commission a adressé au Conseil une proposition de décision(22) relative aux ressources propres des Communautés européennes et une proposition de règlement du Conseil fixant ses mesures d'exécution, de manière à remplacer le mécanisme de correction exclusive octroyé en juin 1984, par le Conseil européen de Fontainebleau, au Royaume-Uni, par un mécanisme de correction généralisé des déséquilibres budgétaires excessifs.

En introduction, il est rappelé que la décision « ressources propres » du 7 mai 1985 prévoit que « tout Etat membre supportant une charge budgétaire excessive au regard de sa prospérité relative est susceptible de bénéficier, le moment venu, d'une correction ».

Sur la légitimité de la suppression de la correction britannique, les arguments de la communication de la Commission rejoignent ceux de la France. Ils seront donc évoqués avec l'exposé de la position française sur ce point, au 5) du B ci-dessous.

a) Le mécanisme de la correction généralisé proposé par la Commission est complexe

Poursuivant simultanément deux objectifs, régler le problème de la correction britannique et réduire la pression financière qui s'exerce sur les plus gros contributeurs nets, la Commission a proposé un mécanisme nécessairement complexe, avec deux volets :

- d'une part, un mécanisme de limitation des contributions les plus importantes ;

- d'autre part, un lissage des effets de la disparition du système exclusif dont bénéficie le Royaume-Uni.

· La Commission propose de faire bénéficier les Etats membres dont le solde net est supérieur à 0,35 % du PIB d'un remboursement partiel et plafonné de leur contribution, dans le cadre d'une enveloppe globale de 7,5 milliards d'euros pour l'ensemble de ses bénéficiaires

L'excès de la charge budgétaire résultant de l'appartenance à l'Union d'un Etat membre, au regard de sa prospérité relative, se mesurant avant tout par le poids de son solde budgétaire net dans le PIB, la Commission propose de créer un mécanisme de remboursement partiel de leur contribution en faveur de tous les Etats dont le solde avant correction s'établit à au moins 0,35 % du PIB.

Ce seuil d'au moins 0,35 % du PIB reflète naturellement l'idée que se fait la Commission du degré de solidarité considéré comme acceptable dans une Union à 25.

Il délimite plus certainement le champ des Etats éligibles, qui comprendrait, en l'état, cinq pays : le Royaume-Uni et les quatre Etats bénéficiant actuellement d'un abattement des trois quarts sur leur participation au financement du rabais britannique, à savoir l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et la Suède.

Les modalités précises de la correction généralisée seraient complexes, en dépit d'éléments de simplification par rapport à l'abattement britannique :

- le montant du solde net qui excède pour chaque Etat membre le seuil précité d'au moins 35 % servirait de base de calcul du remboursement. Le solde net constaté serait apprécié en rapprochant la part de chaque Etat dans les dépenses réparties et celle de sa contribution au titre des ressources propres contributives, TVA et ressource PNB ;

- le montant total des remboursements accordés à tous les bénéficiaires ne pourrait excéder un plafond global de 7,5 milliards d'euros ;

- le taux de remboursement serait par conséquent variable. Il serait toutefois plafonné aux deux-tiers (66 % plus précisément) de l'assiette, de manière à ne jamais dépasser le niveau de l'actuelle compensation britannique ;

- enfin, tous les Etats membres, y compris les bénéficiaires du mécanisme de correction généralisé, participeraient au financement de l'ensemble des corrections, y compris la leur. L'option diamétralement opposée, selon laquelle seuls les Etats non bénéficiaires participeraient au financement de la mesure, conduirait à n'asseoir celui-ci que sur 50 % du RNB de l'Union, ce qui serait trop étroit.

· Le Royaume-Uni resterait en termes absolus le principal bénéficiaire de ce dispositif, qui lui serait toutefois beaucoup moins favorable que l'actuel abattement - le solde des autres Etats membres serait, en revanche, amélioré, à l'exception de celui de l'Autriche.

Selon les simulations de la Commission, le Royaume-Uni serait le principal bénéficiaire du mécanisme qu'elle propose.

Cet Etat bénéficierait d'une compensation nette d'environ 2,1 milliards d'euros, soit un montant deux fois supérieur à celui que recevrait l'Allemagne.

Toutefois, comme on l'a vu, son niveau est très inférieur à celui de l'actuelle compensation, qui s'est établie en 2002 comme en 2003 à quelques 5 milliards d'euros, et à 8 milliards d'euros pour le montant net de la correction britannique pour la période 2008-2013.

En pourcentage du RNB, le solde net du Royaume-Uni passerait par conséquent de -0,25 % en moyenne, selon le dispositif actuel, à -0,51 %.

En ce qui concerne les autres pays, deux catégories doivent être distinguées, d'après les soldes budgétaires moyens établis pour 2008-2013 par la Commission européenne.

La première regroupe les Etats pour lesquels le mécanisme de correction généralisé diminue le solde net tant par rapport au mécanisme actuel de l'abattement britannique et du rabais dont bénéficie les plus gros contributeurs sur sa charge.

Il s'agit des Pays-Bas, de l'Allemagne et de la Suède, qui sont les seuls bénéficiaires de l'abattement des trois-quarts sur le rabais britannique.

Le nouveau dispositif serait très favorable aux Pays-Bas, dont le solde net s'améliorerait de 0,08 point par rapport aux règles actuelles, et de 0,07 point par rapport à l'absence totale de correction.

Il serait également avantageux pour l'Allemagne, avec des gains de respectivement 0,06 et 0,04 point ainsi que pour la Suède, avec 0,05 et 0,02 point respectivement.

La deuxième catégorie regroupe les contributeurs nets pour lesquels le mécanisme de correction généralisé serait plus avantageux que le régime de l'abattement britannique, mais resterait moins favorable que l'absence de toute correction.

Il s'agit de la France, dont le solde estimé s'établirait pour 2008-2013 à -0,33 % avec la correction généralisée proposée et
-0,37 % en l'absence de correction. L'Italie, Chypre, le Danemark et la Finlande relèvent de cette même catégorie.

L'Autriche relève en revanche du cas atypique auquel le régime proposé serait moins favorable que celui de l'actuel abattement britannique. Selon le système proposé par la Commission, son solde s'élèverait à -0,41 % contre -0,38 % avec le dispositif actuel et -0,37 % en l'absence de toute correction.

Le tableau suivant récapitule ces éléments. Il mentionne également la situation des bénéficiaires nets du budget communautaire, qui serait améliorée par rapport à celle du « chèque britannique ».

Soldes budgétaires nets estimés (moyenne 2008(23) - 2013)

 

en % du RNB

 

Mécanisme de correction généralisé

Décision « ressources propres » actuelle

Aucune correction

Royaume-Uni

-0,51

-0,25

-0,62

Pays-Bas

-0,48

-0,56

-0,55

Allemagne

-0,48

-0,54

-0,52

Suède

-0,45

-0,50

-0,47

Autriche

-0,41

-0,38

-0,37

Italie

-0,35

-0,41

-0,29

France

-0,33

-0,37

-0,27

Chypre

-0,33

-0,37

-0,28

Danemark

-0,25

-0,31

-0,20

Finlande

-0,19

-0,25

-0,14

Espagne

0,26

0,23

0,32

Irlande

0,51

0,47

0,56

Malte

1,10

1,06

1,16

Belgique

1,27

1,21

1,32

Slovénie

1,34

1,31

1,40

Portugal

1,54

1,50

1,60

Grèce

2,20

2,16

2,25

Hongrie

3,09

3,06

3,15

République tchèque

3,21

3,17

3,26

Slovaquie

3,31

3,27

3,36

Estonie

3,79

3,76

3,85

Pologne

3,80

3,76

3,85

Lituanie

4,44

4,41

4,50

Lettonie

4,45

4,40

4,51

Luxembourg

5,84

5,80

5,89

Source : Commission européenne.

En définitive, la proposition de la Commission n'est défavorable, en moyenne, sur 2008-2013, qu'au Royaume-Uni et à l'Autriche.

· Le « lissage » de l'impact financier d'un tel changement sur le Royaume-Uni, grâce à des mesures transitoires qui affecteraient peu les Etats membres en moyenne

Soucieuse de ne pas infliger au Royaume-Uni un transfert trop brutal, d'un quart de point de PIB, puisque le niveau de sa contribution nette passerait de -0,25 % actuellement à -0,51 % en moyenne pour la période 2008-2013, la Commission a prévu d'assortir le dispositif pérenne qu'elle a proposé, de mesures transitoires reposant sur l'octroi de paiements complémentaires au Royaume-Uni et l'application progressive du mécanisme de correction généralisé aux autres Etats membres.

Quatre versements complémentaires interviendraient en faveur du Royaume-Uni entre 2008 et 2011

Pour le Royaume-Uni, quatre paiements complémentaires interviendraient.

Le premier, en 2008, d'un montant de 2 milliards d'euros, serait suivi d'un deuxième versement égal à 1,5 milliard d'euros en 2009, 1 milliard en 2010 et 0,5 milliard en 2011.

Comme le mécanisme de correction généralisé devrait entraîner le versement d'une somme de 2,1 milliards d'euros, en moyenne, les mesures transitoires prévues élèveraient ce montant à 3,1 milliards d'euros, soit une augmentation de 50 %.

Ces sommes complémentaires ne seraient pas, en effet, prises en compte pour le calcul des effets du mécanisme de correction généralisé.

La charge de ces compléments serait répartie selon les mêmes modalités que l'actuel abattement britannique

Considérant qu'ils résultent de la suppression progressive de l'actuel abattement, la Commission prévoit d'appliquer les mêmes règles pour leur financement.

L'ensemble des Etats membres y participerait, la part de l'Allemagne, de l'Autriche, des Pays-Bas et de la Suède étant cependant limitée au quart de son montant normal.

Le Royaume-Uni ne serait pas pris en compte.

Le poids financier de l'ensemble du dispositif serait limité, pendant la période transitoire, par une application progressive du mécanisme de correction généralisé aux Etats membres.

L'adjonction au mécanisme de correction généralisé d'une période transitoire conduisant à un surcoût important, la Commission propose de limiter celui-ci à 430 millions d'euros par an, en appliquant avec progressivité le mécanisme de correction généralisé aux autres Etats membres.

Le taux de remboursement, dont on a vu qu'il était variable dans la limite d'un plafond, serait ainsi limité à 33 % en 2008, 50 % en 2009, 50 % en 2010 et 66 % en 2011.

Dans l'ensemble, les soldes nets des Etats membres seraient peu affectés, le gain moyen de 0,5 point du Royaume-Uni sur la période 2008-2013 étant assez bien réparti

Comme l'indique le tableau suivant, le dispositif affecterait peu, en moyenne, le solde de chaque Etat membre, à l'exception de celui des Pays-Bas, qui passerait de -0,48 % à -0,50 %.

Soldes budgétaires nets estimés des contributeurs nets (moyenne 2008 - 2013)

 

en % du RNB

 

Sans correction

Correction
britannique
actuelle

Mécanisme de correction généralisé avec un seuil de 0,35 % et un plafond de
7,5 Mds d'euros

Proposition de la Commission : mécanisme de correction généralisé + période transitoire

Belgique

1,32

1,21

1,26

1,26

République tchèque

3,26

3,17

3,20

3,20

Danemark

-0,20

-0,31

-0,26

-0,26

Allemagne

-0,52

-0,54

-0,48

-0,49

Estonie

3,85

3,76

3,79

3,78

Grèce

2,25

2,16

2,19

2,19

Espagne

0,32

0,23

0,26

0,25

France

-0,27

-0,37

-0,33

-0,34

Irlande

0,56

0,47

0,51

0,50

Italie

-0,29

-0,41

-0,35

-0,36

Chypre

-0,28

-0,37

-0,33

-0,34

Lettonie

4,51

4,40

4,45

4,44

Lituanie

4,50

4,41

4,44

4,43

Luxembourg

5,89

5,80

5,83

5,83

Hongrie

3,15

3,06

3,09

3,09

Malte

1,16

1,06

1,10

1,09

Pays-Bas

-0,55

-0,56

-0,48

-0,50

Autriche

-0,37

-0,38

-0,41

-0,41

Pologne

3,85

3,76

3,79

3,79

Portugal

1,60

1,50

1,54

1,53

Slovénie

1,40

1,31

1,34

1,33

Slovaquie

3,36

3,27

3,30

3,30

Finlande

-0,14

-0,25

-0,20

-0,20

Suède

-0,47

-0,50

-0,45

-0,46

Royaume-Uni

-0,62

-0,25

-0,51

-0,46

Source : Commission européenne.

b) Ce mécanisme n'a emporté la conviction d'aucun des Etats membres

L'initiative de la Commission ne convainc pas. Aucun Etat membre ne l'a soutenu, ni dans son principe ni dans ses modalités.

· Les réserves du Royaume-Uni

L'opposition vient d'abord du Royaume-Uni, où plusieurs éléments sont avancés et qui reste avant tout attaché, dans son principe, au dispositif de 1984.

En outre, le rapport de la Chambre des Lords, publié en mars 2005, Future financing of the European Union, invoque trois motifs de désaccord :

- la méthode choisie pour procéder à l'abattement et le plafonnement de l'ensemble des abattements dont bénéficient les Etats membres éligibles au dispositif sont jugés insatisfaisants ;

- elle ne règle pas la situation des Etats comme le Danemark et l'Irlande, qui tirent d'importants avantages de l'Union alors qu'ils comptent parmi les plus prospères ;

- la réforme proposée est dans l'ensemble inadaptée.

· La lettre des Pays-Bas, de la Suède et de l'Allemagne sur l'insuffisance de son ampleur

Les pays susceptibles d'être les principaux bénéficiaires du mécanisme de correction généralisé, les Pays-Bas, la Suède et l'Allemagne, ne sont pas non plus satisfaits du mécanisme tel qu'il est prévu par la Commission, assorti de la période transitoire en faveur du Royaume-Uni. Ils le jugent d'une ampleur insuffisante.

Rappelant qu'ils viennent, dans cet ordre, aux trois premiers rangs des contributions nettes au budget de l'Union en fonction de leur RNB alors qu'ils n'occupent respectivement que la cinquième, la huitième et la onzième place des Etats membres en fonction du niveau de richesse relative, ces Etats membres estiment que :

- le système actuel des ressources propres qui préside à l'imputation des charges communes entre les Etats membres n'a pas permis d'en garantir une juste répartition ;

- son maintien durant la période 2008-2013 ne ferait qu'exacerber les déséquilibres budgétaires ;

- le dispositif proposé par la Commission ne prend pas suffisamment en compte le problème des insuffisances actuelles, puisque les Pays-Bas n'en tireraient profit qu'à concurrence de 0,06 % de son RNB, l'Allemagne 0,05 % et la Suède 0,04 %.

Ils estiment donc que les insuffisances des règles actuelles de la répartition des charges financières de l'Union ne sont pas corrigées.

Ils souhaitent aller plus loin dans la limitation des soldes nets.

· L'opposition de la majorité des Etats membres et les réserves de la France

Selon les informations communiquées aux rapporteurs, les deux-tiers des Etats membres se sont prononcés contre le mécanisme de correction généralisé.

La France et l'Autriche, ainsi que le Danemark, ont mis en doute son opportunité, de même que le groupe des dix-sept Etats membres du groupe des « amis de la cohésion(24). Vingt des vingt-quatre Etats membres autres que le Royaume-Uni sont donc opposés à un tel mécanisme.

Pour la France, ainsi que l'a exprimé lors de son audition par la Délégation, le 6 avril dernier, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, la maîtrise des soldes nets passe d'abord par une meilleure gestion de la dépense communautaire, dont le niveau doit être limité à ce qui est nécessaire.

Dans l'hypothèse inverse, si l'évolution de la dépense n'est pas bien maîtrisée, la limitation des contributions les plus fortes, même dans des conditions qui ne satisfont pas les Etats membres concernés, reportera inéluctablement la charge la plus importante sur les actuels contributeurs de deuxième rang, entraînant de leur part des demandes reconventionnelles qui n'apparaîtront pas illégitimes et, à terme, se traduiront par des dispositions spécifiques.

En outre, comme l'indique le rapport précédemment établi par MM. Serge Vinçon, sénateur, et Marc Laffineur, député, le mécanisme de correction généralisé pose un problème de principe. Sa compatibilité avec l'idée même de la solidarité qui est à la base de la construction européenne n'est guère avérée.

De nombreux pays comme l'Espagne estiment également que l'efficacité de l'avantage qu'un Etat membre retire de l'Union ne se mesure pas nécessairement à son solde net.

Parmi les autres opinions qui ont été émises, l'une des plus pertinentes, si ce n'est la plus fondée, est en définitive celle suivant laquelle le mécanisme de correction généralisé tendrait à étendre une erreur passée à la situation de plusieurs autres Etats membres et irait à l'encontre des principes de transparence, de simplicité et d'équité que doit respecter le mécanisme des ressources propres du budget communautaire.

B. La France est attachée à la maîtrise de la dépense au profit de la croissance, dans le respect des accords récents, de la solidarité avec les dix nouveaux membres ainsi que de l'équité dans le financement des charges

Comme l'a rappelé le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, lors de la réunion de la Délégation du 6 avril 2005, sur les perspectives financières communautaires, la position de la France s'articule autour de trois priorités et trois pierres angulaires.

Les trois priorités sont la solidarité, avec les nouveaux Etats membres et les agriculteurs, la croissance, conformément aux objectifs de Lisbonne, ainsi que l'affirmation de la place et du rôle de l'Europe dans le monde.

Les trois pierres angulaires de la négociation sont le cantonnement du budget communautaire à hauteur de 1 %, le respect des accords de Bruxelles et de Copenhague s'agissant du « premier pilier » de la PAC, ainsi que le renforcement de l'équité et de la transparence du budget, par la suppression de l'abattement britannique.

Leur légitimité n'est pas contestable.

1) La France souscrit à l'objectif, partagé par plusieurs de ses partenaires, dont elle est solidaire, d'une limitation du niveau de la dépense communautaire à hauteur de 1 % du RNB

a) La France a exprimé très tôt, conjointement avec cinq de ses partenaires, sa position sur cet élément essentiel de la négociation

C'est dès le mois de décembre 2003 que six chefs d'Etat et de Gouvernement ont adressé au Président de la Commission la lettre lui demandant la stabilisation des dépenses communautaires à leur niveau d'alors, sans dépasser 1 % du RNB de l'Union.

Cette démarche conjointe de la France - la lettre a été signée par le Président de la République - ainsi que des principaux contributeurs au budget communautaire, en termes absolus ou relatifs, l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède, a été rendue publique après l'échec de la Conférence intergouvernementale à Bruxelles le 13 décembre 2003.

Intervenant au moment où la Commission préparait le texte de sa communication sur les perspectives financières, elle a délivré un message de discipline budgétaire.

Les termes de ce courrier ont ultérieurement fait l'objet d'un élément d'interprétation essentiel, qui a permis de bien préciser la portée de la volonté de rigueur de ses initiateurs.

En octobre 2004, les six Etats signataires ont, en effet, indiqué que ce plafond de 1 % concernait les crédits d'engagement et non les crédits de paiement, lesquels leur sont par définition au plus égaux.

Enfin, cette position a été réaffirmée lors des négociations.

Dans le document commun transmis le 13 mai à la présidence, les six Etats concernés ont rappelé qu'un budget à hauteur de 1 % en termes d'engagements produirait un budget conforme aux principes de subsidiarité, de proportionnalité et de valeur ajoutée de l'Union.

Par ailleurs, la Commission ayant indiqué à la date de la rédaction du présent rapport que sur la base des hypothèses de croissance révisées, 1 % du RNB ne représenterait plus 815 milliards d'euros, comme initialement, mais 824 milliards d'euros, il a été indiqué aux rapporteurs que les Etats membres attachés à l'objectif du 1 % souhaitent le maintien du plafond de dépenses antérieurement prévu, soit ces mêmes 815 milliards d'euros.

L'enveloppe prévue par les pays signataires pour l'ensemble de la période 2007-2013 est donc de 815 milliards d'euros, en prix 2004, contre 1.022 milliards d'euros, y compris les dépenses du Fonds européen de développement, pour la proposition de la Commission.

b) L'objectif du 1 % permet une certaine augmentation en volume du budget communautaire par rapport à 2006

L'objectif d'un budget à hauteur de 1 % du RNB ne représente pas pour les finances communautaires un objectif hors d'atteinte, ce qui nuirait à sa crédibilité.

Il s'inscrit notamment dans la continuité des exercices précédents.

Selon les informations communiquées aux rapporteurs, le budget exécuté des Communautés et du FED a représenté, en paiements effectifs, 0,96 % de la richesse de l'Union en 2001, 1 % en 2002, 0,98 % en 2003 et 0,99 % en 2004.

Cet objectif permet, en outre, la poursuite de l'augmentation en volume des dépenses communautaires, au-delà de la compensation de l'inflation.

L'élargissement intervenu le 1er mai 2004 a certes modifié les données budgétaires de l'Union, mais l'objectif du 1 % n'en a pas pour autant perdu sa valeur :

- d'une part, il permet par rapport au budget voté de 2004, première année de l'élargissement, une augmentation de 11 % en volume répartie sur toute la période 2007-2013, soit une croissance de 1,6 % par an ;

- d'autre part, il représente un accroissement en volume des dépenses communautaires par rapport au plafond prévu par les perspectives financières pour 2006, qui s'établit à 119 milliards d'euros en prix 2004. Cet accroissement en volume est de 4 % sur l'ensemble de la période, soit 0,5 % par an.

Ainsi que l'a indiqué à la Délégation, lors de sa réunion du 6 avril 2005, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, la progression du budget européen serait de quelque 50 milliards d'euros par rapport à la période 2000-2006, selon le scénario à 1 %.

C'est le mode de calcul des perspectives financières, en pourcentage du RNB, qui explique cette situation paradoxale au premier abord : le volume des dépenses augmente avec la croissance.

Selon certains observateurs, la possibilité de faire coexister un principe de rigueur, la limitation à 1 % du RNB du plafond des dépenses européennes, et une certaine marge de manœuvre pour l'augmentation de ces mêmes dépenses, en volume, au-delà donc de la seule compensation de l'inflation, chaque année,  relève du paradoxe.

Tel n'est pas en fait le cas.

Exprimé en fonction du RNB, le plafond prévu pour les dépenses communautaires évolue chaque année comme la richesse nationale, selon la croissance.

Il s'agit d'un mode particulièrement sain d'évolution de la dépense publique, puisque les moyens nouveaux sont ceux autorisés par la progression de la richesse et non par une augmentation du taux des prélèvements obligatoires.

2) L'objectif de 1 % du RNB consiste, pour la France, à appliquer au niveau de l'Union la discipline budgétaire qui s'impose durablement à elle et lui garantit le maintien de sa contribution à un niveau compatible avec cet effort de rigueur

a) La France, comme l'Allemagne, est tenue, par les règles européennes, au maintien de son effort de rigueur budgétaire

Dans son deuxième rapport sur la mise en œuvre des GOPE 2003-2005, la Commission distingue, en ce qui concerne les déficits publics, les Etats membres qui, en 2003 ou 2004, «ont maintenu ou sont parvenus à des positions budgétaires saines, à savoir proches de l'équilibre ou excédentaires » (Belgique, Danemark, Estonie, Espagne, Irlande, Luxembourg, Finlande et Suède), et les autres.

Elle souligne notamment que pour les deux principaux contributeurs au budget communautaire, la France et l'Allemagne, le déficit est de 3,7 %, au-dessus donc de la limite de 3 % prévue par le Pacte de stabilité.

Ce diagnostic a été confirmé par les prévisions de « printemps » publiées le 5 avril 2005 par la Commission.

Celles-ci font état pour la France d'un déficit public de 3,7 % du PIB en 2004, 3 % en 2005 mais 3,4 % en 2006, comme l'indique le graphique suivant.

Evolution du déficit public en pourcentage du PIB en France

Source : Etabli d'après les données chiffrées des prévisions économiques de la Commission européenne - Printemps 2005.

S'agissant de la dette publique, l'évolution prévue par la Commission ne laisse espérer non plus aucune marge de manœuvre.

Son niveau, qui était de 63,9 % du PIB en 2003, devrait encore progresser, à raison de 67,1 % en 2007.

La situation est similaire pour l'Allemagne, avec toutefois un déficit qui serait dès 2006 compatible avec les critères de Maastricht, puisqu'il n'atteindrait que 2,8 %, contre 3,3 % en 2005 et 3,7 % en 2004, mais, en revanche, un niveau de dette qui atteindrait 68,9 % du PIB en 2006 contre 64,2 % en 2003.

Ainsi, en l'absence de perspective d'une croissance permettant la résorption du déficit et le rétablissement d'une situation conforme aux critères du Pacte de stabilité, la France ne peut que se résoudre à la poursuite de la maîtrise de ses finances publiques.

C'est d'ailleurs ce qu'elle fait depuis plusieurs années puisque, depuis la loi de finances pour 2003, qui a succédé à un budget initial de 2002 reposant sur une progression de 0,5 % des crédits en volume, le Gouvernement s'attache à respecter l'objectif d'une stabilité des dépenses du budget de l'Etat en volume.

Pour 2005, ainsi que l'indique d'ailleurs le rapport économique et financier annexé au projet de loi de finances, le respect de cette ambition exige, compte tenu de la hausse des charges incompressibles, dettes et pensions, comme de la nécessité de financer les priorités du Gouvernement, d'importants efforts de redéploiement.

b) La maîtrise du poids de sa contribution au budget de l'Union est un impératif auquel la France ne peut se soustraire

· La contribution de la France au budget de l'Union a connu une forte progression sur plusieurs années.

Comme l'indique le graphique suivant, la contribution de la France au budget de l'Union, qui fait l'objet chaque année d'un article spécifique dans le cadre de la loi de finances, a fortement progressé.

Elle s'établissait à 4,1 milliards d'euros en 1982 et représente dorénavant 16,6 milliards d'euros prévus pour 2005.

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Sur le plan financier, la France a parfaitement assumé sa part de la croissance des compétences et interventions communautaires.

· Par son poids notamment par rapport aux recettes de l'Etat, la contribution de la France est l'un des éléments centraux du budget.

D'un point de vue juridique, la contribution de la France au budget des Communautés européennes est un prélèvement sur les recettes de l'Etat.

Elle n'est donc pas comptabilisée en dépenses, mais en recettes, et vient dans le tableau de synthèse correspondant, en déduction des produits affectés au budget général.

Son poids budgétaire n'est pas négligeable.

Elle a en effet représenté 6,82 % du montant de recettes fiscales de l'Etat, nettes des remboursements et dégrèvements, en 2003.

La baisse de cette proportion prévue pour 2005, à raison de 6,09 %, doit être interprétée avec prudence. On ne saurait en inférer quelque tendance que ce soit pour les années futures.

En effet, l'importance des décalages entre l'engagement des crédits européens et les paiements correspondants, pourrait entraîner dans les prochaines années une forte progression de la contribution de la France à l'Union.

c) A la différence des scénarios de la Commission et du Parlement européen, l'objectif de 1 % du RNB permet de maîtriser le poids budgétaire de la contribution de la France pour la période 2007-2013 et la dégradation de son solde net

Dans un tel contexte, où la France, comme l'Allemagne, d'ailleurs, doit s'en tenir à la rigueur budgétaire, la limitation des dépenses de l'Union à 1 % du RNB et 815 milliards d'euros est jugée non seulement raisonnable, mais également indispensable et inéluctable.

L'écart entre le scénario de la Commission, à 1,26 % du RNB en moyenne (1,27 % en 2013) en crédits d'engagement, et celui à 1 % défendu par la France, est, en effet, important.

· Le scénario à 1 % permet de limiter l'évolution de la contribution française, contrairement aux propositions de la
Commission et du rapporteur du Parlement européen
(25), et d'éviter une dégradation trop importante de son solde net.

A leur demande, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a adressé aux rapporteurs des simulations qui permettent de mesurer les enjeux financiers des différentes hypothèses.

En ce qui concerne la contribution brute française, il apparaît ainsi que :

- la simple reconduction à l'identique du budget prévu pour 2006 entraînerait pour la France une certaine progression par rapport à la période actuelle. Elle passerait de 16,6 milliards d'euros en 2005 à 18 milliards en 2013 ;

la proposition de la Commission en dépenses et en recettes, c'est-à-dire après application du mécanisme de correction généralisé, se traduit par une contribution brute de l'ordre de 23 milliards d'euros en 2013, soit un écart de quelque 6 milliards d'euros par rapport à 2005 et 5 milliards d'euros par rapport à 2006 ;

la limitation du budget de l'Union à 1 % du RNB selon la demande de la France (mais avec un statu quo en recettes) permet à l'opposé de maintenir à 18 milliards d'euros sa contribution en 2013 ;

- en ce qui concerne la contribution totale de la France pour la période 2007-2013, l'écart entre la proposition de la Commission, en dépenses et en recettes, celle du rapporteur du Parlement européen et un budget à 1 % est significatif : 149 milliards d'euros pour le scénario de la Commission en dépenses et en recettes, 147 milliards d'euros selon la proposition du rapporteur du Parlement européen et avec un statu quo en recettes ; 129 milliards pour le budget à 1 % et le statu quo en recettes, soit un écart de l'ordre de 20 milliards d'euros entre la position de la Commission et celle de la France.

Cette inopportunité de retenir la proposition de la Commission, ou tout autre scénario dépensier, d'ailleurs, est confirmée par la prise en compte du profil des paiements au cours de la période 2007-2013.

Le pic des crédits de paiement en 2008, prévu par la Commission au titre du rattrapage à effectuer sur le décalage entre ceux-ci et les crédits d'engagement sur la période précédente, implique une progression rapide de la contribution française. Celle-ci atteindrait 22,5 milliards d'euros au cours de cette même année 2008.

· Le scénario à 1 % limite également la dégradation du solde net de la France

A la suite du dernier élargissement, le solde net de la France évolue d'une manière défavorable.

S'établissant à -0,19 % du RNB en 2004, il devrait être de l'ordre de -0,21 % en 2006.

Les propositions budgétaires de la Commission se traduisent, pour la France, par un solde moyen de -0,35 % du RNB sur la période 2007-2013 et égal à -0,37 % en 2013.

Il en est de même de celles du rapporteur du Parlement européen, avec des soldes identiques de -0,35 % du RNB sur la période 2007-2013 et -0,37 % en 2013 dans l'hypothèse où ces propositions de dépenses seraient couplées avec le mécanisme de correction généralisé. Le solde net serait respectivement -0,39 % en moyenne et -0,41 % en 2013 en l'absence de modification du mécanisme des recettes.

A l'opposé, un budget à 1 %, avec un statu quo en recettes, permettrait de limiter à -0,31 % du RNB en moyenne sur 2007-2013 et à -0,32 % en 2013 le solde de la France.

· La maîtrise des dépenses européennes est donc la seule garantie pour la France d'un contrôle de l'évolution de ses finances publiques

En définitive, la situation de la France est assez claire, sur le plan budgétaire, vis-à-vis de l'Union :

- l'état de ses finances publiques ne lui permet pas d'envisager avec sérénité une progression significative de sa contribution brute ;

- son solde net tend à se dégrader rapidement ;

- le niveau de ce même solde net ne lui permet cependant pas d'envisager de tirer parti d'un mécanisme de correction généralisé.

Le graphique suivant donne une vision dynamique année par année des résultats pour la France des trois principales hypothèses envisageables, et confirme les éléments qui président au choix du Gouvernement : même le gain résultant de la suppression de l'abattement britannique (laquelle serait partiellement compensée toutefois par le coût du mécanisme de la correction généralisé), entraînerait une dérive de sa contribution, de plus de 4 milliards d'euros en 2013, que l'état de ses finances publiques, selon les règles fixées par l'Union, ne lui permet pas d'assumer.

Evolution de la contribution française (2007-2013)

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Naturellement, il ne saurait être considéré que notre pays pourrait entreprendre sur d'autres postes de dépenses publiques les économies nécessaires. Cela ne semble pas opportun, au contraire.

Pour la France, en effet, le dilemme entre sa vocation généreuse, qui l'inclinerait à consentir une augmentation des moyens financiers européens, et le principe de réalisme, qui lui impose de tenir compte tant des contraintes que de la continuité des attentes de ses ressortissants vis-à-vis des politiques publiques, est particulièrement aigu.

De telles circonstances donnent des orientations très claires sur la faible latitude des politiques envisageables, afin de ne pas risquer nuire à l'image et en conséquence à la légitimité de l'Europe.

En définitive, la portée de cette incontournable contrainte européenne a été résumée par le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, à l'Assemblée nationale, le 6 avril dernier, en réponse à une question de M. Pierre Cohen, député :

« Chacun sait que l'Union européenne souhaite, pour elle-même et pour les Etats, la meilleure gestion possible. Les Etats répondent donc qu'ils sont d'accord pour une telle gestion, et qu'ils font d'ailleurs du pacte de stabilité et de croissance la règle de l'Union. Toutefois il faut aussi que l'Union s'applique à elle-même les règles qu'elle impose aux Etats. Elle doit donc surveiller ses dépenses et nous avons bien l'intention que tout euro dépensé par l'Union soit bien dépensé pour les Européens.

« Nous invitons donc l'Union à maîtriser son budget et, naturellement, nous abordons la discussion avec une position de négociation établie par le chef de l'Etat en concertation avec plusieurs partenaires, laquelle fixe ce budget à 1 % du PIB communautaire, pour que nous puissions étudier tous ensemble les véritables propositions d'avenir que l'Union est capable de faire, notamment sur des sujets majeurs tels que la recherche. »

d) Les Etats qui partagent la position de la France sur l'objectif du 1 % souhaitent éviter un même "choc" budgétaire

Les simulations communiquées aux rapporteurs dans le même cadre montrent que les Etats membres qui s'attachent à la poursuite de l'objectif du 1 % et 815 milliards d'euros ne peuvent que partager les mêmes préoccupations que la France.

Selon les propositions de la Commission, en recettes et en dépenses, leurs contributions brutes progressent fortement, passant de quelque 24 milliards d'euros en 2006 à 28 milliards en 2013 pour l'Allemagne, de 14 milliards à 21 milliards, respectivement, pour le Royaume-Uni, 6 à 7 milliards respectivement pour les Pays-Bas, ainsi que 3 à 4 milliards pour la Suède, 2 à 3 milliards pour l'Autriche.

Une forte augmentation de leur contribution est également recensée pour certains des Etats qui ne sont pas sur la position du 1 %, avec une progression de 15 à 19 milliards entre 2006 et 2013 pour l'Italie et de 9 à 12 milliards pour l'Espagne.

Le graphique suivant récapitule ces éléments :

Evolution des contributions brutes
Propositions de la Commission

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

A l'opposé, la limitation du budget de l'Union à 1 % du RNB (avec un statu quo en recettes) se traduit par une stabilisation des contributions brutes à leur niveau de 2006 ou une légère augmentation.

La même remarque vaut en ce qui concerne les soldes nets.

La proposition de la Commission implique, en effet, une dégradation plus prononcée du solde des principaux contributeurs nets que la limitation à 1 % du budget communautaire, à raison  :

- d'un solde net de -0,47 % du RNB en 2013 pour l'Allemagne, qui tirerait pourtant un certain profit du mécanisme de correction généralisé, contre -0,45 % avec un budget limité à 1 % du RNB selon la proposition de la France, et avec un statu quo sur les recettes. L'hypothèse du 1 % limite donc la dégradation du solde allemand, qui s'est établi à -0,39 % du RNB en 2004 et devrait être égal à -0,41 % en 2006  ;

- d'un solde net de -0,51 % pour le Royaume-Uni en 2013, contre -0,28 % en 2006 et -0,19 % en 2004  ;

- et, pour prendre l'exemple d'un autre Etat membre, l'Autriche, d'un solde net de -0,41 % en 2013 contre -0,27 % en 2006. A l'opposé, le solde de cet Etat membre s'établirait à -0,31 % en 2013 avec un budget à 1 %, et en l'absence de changement en recettes.

Le graphique suivant récapitule ces éléments pour l'Allemagne et le Royaume-Uni :

Evolution des soldes nets de l'Allemagne et du royaume-Uni
Propositions de la Commission

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'impact budgétaire des propositions de la Commission est particulièrement lourd pour l'ensemble des contributeurs nets.

Selon certaines simulations, le solde négatif de l'Allemagne pourrait même atteindre 12 milliards d'euros en 2013, alors qu'il était de 7,6 milliards d'euros en 2003.

3) Cet objectif doit s'accompagner du respect de l'accord de Bruxelles d'octobre 2002 sur la PAC et ne fait pas obstacle au devoir de solidarité avec les nouveaux Etats membres

Parce qu'il exige des ajustements par rapport à la proposition de la Commission, l'objectif du 1 % est parfois présenté comme entraînant d'inéluctables remises en cause du financement de la PAC et des actions structurelles en faveur des dix nouveaux adhérents.

Tel n'est pas le cas tant en raison du volume des dépenses concernées, que des engagements de solidarités souscrits dans des termes adaptés tant à l'égard des agriculteurs de l'ensemble des Etats membres de l'Union qu'en faveur de ces mêmes nouveaux Etats membres.

a) Cet objectif s'inscrit dans la perspective de l'accord de Bruxelles d'octobre 2002 sur le "premier pilier" de la PAC

· Les plafonds prévus par l'accord de Bruxelles, récent, issu d'une initiative conjointe à la France et l'Allemagne visant modérer le poids budgétaire du « premier pilier » de la PAC, ne doivent pas être diminués

L'accord de Bruxelles conclu les 24 et 25 octobre 2002, qui fixe le plafond des dépenses agricoles de marché et de paiements directs, l'actuelle rubrique 1 a) du budget communautaire, jusqu'en 2013. Il ne concerne donc que le « premier pilier », et non le « deuxième pilier » de la PAC : le développement rural. Il est parfois considéré, à tort, non comme un accord définitif, mais comme un élément de négociation, selon des points de vue assez différents.

Tel est notamment le cas de celui exprimé par la commissaire au budget d'alors, Mme Michaele Schreyer, lors de la rédaction du rapport au Premier ministre sur « Les perspectives financières européennes 2007-2013 » par MM. Serge Vinçon, sénateur, et Marc Laffineur, député : le respect de la limite de 1 % ne serait possible qu'en touchant aux dépenses agricoles.

Dans son rapport précité « Future financing of the European Union », la Chambre des Lords juge quant à elle « regrettable » un tel accord qui « préempte » une aussi grande partie du budget communautaire et considère qu'il prévoit des plafonds de dépenses à l'intérieur desquels il est possible d'ouvrir de nouvelles négociations.

De semblables points de vue ne sauraient être partagés, tant ils méconnaissent la portée de cet accord comme le contexte et le but dans lequel il a été conclu.

En ce qui concerne la portée de l'accord de Bruxelles, elle est clairement incontestable. Celui-ci a été conclu à l'unanimité des membres du Conseil. Seul un autre accord unanime des vingt-cinq Etats membres pourrait dorénavant en modifier la teneur.

Il ne faut pas non plus méconnaître que cet accord est issu d'une initiative conjointe à la France et à l'Allemagne, destinée à gérer au mieux sur le plan budgétaire les défis de l'élargissement pour l'agriculture européenne, avec à l'Est une forte proportion de la population active encore employée dans l'agriculture et, par voie de conséquence, des structures très morcelées avec des exploitations de petites tailles et de faibles surfaces. En Pologne, ainsi, l'agriculture représentait 3,1 % du PIB en 2003, et employait 27,5 % d'une population active estimée à 17 millions de personnes.

La légitimité financière de cet accord n'est pas contestable. Les plafonds qui en font la teneur reposent, en effet, sur le réalisme et l'esprit de responsabilité.

Les modalités de calcul retenues ont été très pragmatiques. Le montant du plafond prévu à compter de 2007, pour les vingt-cinq Etats membres, a été soigneusement ajusté.

Le plafond actuellement prévu pour quinze Etats membres a, en effet, été augmenté du montant des crédits prévus en 2006 pour les dix nouveaux adhérents et majoré de 1 % par an, pour tenir compte, partiellement, de l'érosion monétaire.

Il ne s'agit pas, contrairement à ce qui a pu être parfois écrit, de répartir à vingt-cinq la somme prévue pour quinze, puisque les dépenses effectives ont toujours été inférieures aux prévisions.

L'objectif est au contraire de mieux mobiliser les moyens existants et d'établir à l'avance un projet qui sera plus proche de l'exécution.

En outre, l'accord de Bruxelles s'inscrit donc une logique de discipline budgétaire et de solidarité financière, à plusieurs titres :

- les modalités de prise en compte de l'inflation, à raison de 1 % par an, sont particulièrement raisonnables, sur le plan financier, dès lors que l'objectif de la Banque centrale européenne est plutôt de ne pas laisser les prix dériver de plus de 2 % l'an ;

le plafond prédéfini s'imposera même en cas de réforme de certains volets de la politique agricole. Les coûts budgétaires des futures réformes seront donc financés à plafond inchangé ;

- la stabilité du plafond ne doit pas cacher un important effort de solidarité avec les nouveaux Etats membres. Conformément au principe du phasing in, les dépenses en faveur de ses derniers vont croître, alors que l'enveloppe globale restera inchangée. Par ailleurs, la part des aides directes devrait passer d'un quart actuellement à un cinquième en 2013.

Le tableau suivant récapitule l'évolution prévisible des dépenses agricoles entre 2007 et 2013, en prenant pour référence l'année 2006.

Evolution des plafonds des dépenses agricoles selon l'accord de Bruxelles

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

En milliards d'euros courants

45,502

45,759

46,217

46,679

47,146

47,617

48,093

48,574

En milliards d'euros 2004

43,735

43,120

42,697

42,279

41,864

41,453

41,047

40,645

Taux de phasing-in des 10

35 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

90%

100 %

Paiements directs dans les 10(*)

1,718

2,044

2,290

2,807

3,302

3,777

4,232

4,667

(*) Les versements, au titre d'une année, sont réglés sur le budget de l'année suivante.

Source : Direction du Budget, in rapport précité de MM. Serge Vinçon, sénateur, et Marc Laffineur, député.

L'accord de Bruxelles représente donc vis-à-vis du monde agricole un effort qui doit être respecté.

Il permet en contrepartie une stabilisation de l'enveloppe, exprimée en euros courants, affectée aux dépenses de marché et de paiements directs, et ainsi d'éviter toute évolution incontrôlée de ce poste budgétaire.

La part du 1er pilier de la PAC, qui représentait 0,61 % du PIB de l'Union en 1993 et s'établit actuellement à 0,43 %, diminuerait à 0,34 % en 2013.

En ce qui concerne la France, deuxième bénéficiaire des retours au titre de la PAC, et de l'Allemagne, qui en est le troisième bénéficiaire, avoir pris l'initiative de l'accord de Bruxelles représente un incontestable effort de rigueur et de solidarité.

Selon les projections mentionnées dans le rapport précité de MM. Serge Vinçon, sénateur, et Marc Laffineur, député, le solde net de la France au titre de la PAC pourrait en effet diminuer, passant de quelque 2,5 milliards d'euros en 2004, à 2 milliards en 2007 et moins de 1,5 milliard en 2013.

· Son interprétation ne doit donner lieu à aucune entorse, fût-ce pour les dépenses agricoles destinées dans le futur à la Bulgarie et à la Roumanie

Dans sa proposition, la Commission a prévu de respecter l'accord de Bruxelles, qui ne concerne que l'élargissement aux dix Etats qui sont entrés dans l'Union le 1er mai 2004.

En conséquence, sa proposition de plafond pour les dépenses de marché et de paiements directs sur l'ensemble de la période 2007-2013, a été majorée d'une somme de 7,9 milliards d'euros pour tenir compte des conséquences de l'adhésion, prévue en l'état pour 2007, de la Roumanie et de la Bulgarie.

L'enveloppe destinée à ces deux Etats est à la hauteur de la place qu'y tient l'agriculture.

En Roumanie, ce secteur économique occupait en 2003 41,4 % d'une population active estimée à 9,3 millions de personnes et représentait 13,1 % du PIB.

En Bulgarie, l'agriculture représentait en 2003 également 11,4 % du PIB et employait 26 % d'une population active estimée à 3,3 millions de personnes.

Cette proposition financière de la Commission recueille l'assentiment de la France.

Cette position n'est malheureusement pas partagée par tous les Etats membres, ni par le Parlement européen, qui considèrent que le plafond de l'accord de Bruxelles est indépendant de l'étendue territoriale de l'Union et que l'entrée de deux nouveaux Etats dans l'Union doit se faire à budget constant.

Une telle approche n'est pas acceptable.

Elle ne conduit qu'à fragiliser un accord dont on a vu qu'il était adapté aux enjeux.

Le plafond de 301 milliards d'euros prévu pour les dépenses de marché et de paiement direct au titre du premier pilier de la PAC, qui tient compte des conséquences de l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, doit clairement être considéré comme un élément intangible du budget communautaire.

· Le respect de l'accord de Bruxelles s'impose, au-delà de la seule valeur des accords conclus et de la « parole donnée », en raison de la forte légitimité de la PAC

- Le bilan d'ensemble de la PAC est positif

Lorsque la PAC a été créée, l'Europe était encore marquée par sa dépendance alimentaire vis-à-vis du reste du monde, notamment des approvisionnements provenant des grands pays agricoles au premier rang desquels, les Etats-Unis, le Canada, les pays du cône sud de l'Amérique latine, ainsi que l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

Politique volontariste, la PAC a été extrêmement intégrée, ouvrant des droits à financement, et non des possibilités de financement.

Parce qu'elle a conduit à des excès de production dans les années 1980 et parce qu'elle a représenté un important enjeu dans les négociations commerciales internationales en raison de sa philosophie « protectionniste », la PAC a souvent été critiquée.

Sont également mis en avant, parfois, l'inéluctable inégalité de la répartition des aides selon les Etats, puisqu'elle profite nécessairement plus aux pays agricoles qu'à ceux qui ne le sont pas, ceteris paribus, ou encore ses effets négatifs sur l'environnement et l'inefficacité de certains de ses instruments.

De telles considérations ne doivent pas conduire à méconnaître quatre éléments clefs de la réussite de la PAC :

- l'Europe bénéficie de l'autosuffisance alimentaire, laquelle lui a souvent fait antérieurement défaut ;

- elle dispose ainsi de plus de latitude pour répondre aux attentes de sa population en ce qui concerne l'amélioration de la qualité de l'alimentation, la sécurité sanitaire des produits et la couverture de ses besoins, que si elle dépendait des pays tiers ;

- elle bénéficie d'un instrument qui lui permet de maintenir un certain équilibre dans la répartition géographique de sa population, ainsi qu'une harmonie entre le milieu urbain et le monde rural ;

- elle a montré à plusieurs reprises sa capacité à en réviser les dispositifs, pour poursuivre des objectifs essentiels. Tel a été le cas de la réforme de 1992, fondée sur le basculement des soutiens à la production vers un système d'aide au revenu, une baisse des prix à la production et les aides au développement rural, réforme complétée par une nouvelle baisse de prix en 1999, permettant ainsi, en deux temps, l'élimination des surproductions. Tel est également le cas de la réforme adoptée par le Conseil européen de Luxembourg le 26 juin 2003, qui a prévu notamment le découplage ainsi que, pour répondre aux préoccupations croissantes en matière protection de l'environnement, le renforcement de l'éco-conditionnalité, c'est-à-dire de la subordination des aides directes au respect de normes environnementales et d'emploi.

- La PAC bénéficie d'une grande légitimité dans l'opinion publique européenne

La Commission européenne a publié le 2 mars dernier sur son site Internet une étude sur la manière dont les Européens perçoivent la PAC, fondée sur les résultats d'un sondage d'opinion d'Eurobaromètre.

Ses conclusions sont éclairantes. Elles montrent que l'opinion publique européenne a une bonne image de cette politique et ne met nullement en doute son efficacité, dans l'ensemble.

Le communiqué de la Commission auquel ce sondage avait donné lieu était, en effet, à la date de la rédaction du présent rapport, le suivant :


« Que pense l'Europe élargie de la politique agricole commune (PAC) ?

« 66 % des citoyens de l'Union européenne pensent qu'accorder plus de crédits à la protection et au développement de l'économie rurale en général et au soutien direct des agriculteurs est une bonne chose, d'après les résultats du dernier sondage Eurobaromètre. Dans la première étude de ce type à être réalisée dans les 25 Etats membres de l'UE, une nette majorité a affirmé soutenir les changements récents de la politique agricole commune (PAC) et souhaiter voir continuer à évoluer dans cette direction la façon dont celle-ci soutient les agriculteurs de l'Union.

« Découvrez ci-dessous quelques-uns de ces résultats intéressants ou consultez le rapport complet pour plus d'information.

· 57 % des Européens estiment que la PAC fait du bon travail en veillant à ce que les produits agricoles soient sains et sûrs.

· 55 % pensent que la PAC est dans son rôle en encourageant le respect de l'environnement.

· 48 % estiment que la PAC rend l'agriculture européenne plus compétitive sur les marchés mondiaux.

· 47 % des citoyens considèrent que la PAC joue un rôle de soutien en favorisant les méthodes de production biologique.

· 29 % des Européens (9 % de plus qu'en 2003 et qu'en 2002) reconnaissent l'importance de l'information sur l'origine géographique des produits alimentaires et le rôle que la PAC joue à cet égard.

· Les personnes interrogées à Chypre et à Malte semblent les plus convaincues des avantages que présente la PAC (76 % de Chypriotes et 72 % de Maltais pensent que la PAC garantit que les produits alimentaires que l'on achète sont sûrs pour la consommation), tandis que les citoyens suédois et danois le sont nettement moins (25 % et 31 % respectivement). »

· L'hypothèse d'un cofinancement de la PAC, notamment évoquée par le rapporteur du Parlement européen, doit être exclue

A deux reprises, l'hypothèse d'un cofinancement des dépenses de marché et de paiements directs de la PAC a été officiellement évoquée, lors des débats sur les perspectives financières 2007-2013.

Dans une lettre adressée le 1er février 2005 au président du Conseil, M. Jean-Claude Juncker, ainsi qu'au président de la Commission européenne, M. José Manuel Barroso, le Premier ministre italien, M. Silvio Berlusconi, contestant également la pertinence de l'objectif du 1 %, a estimé qu'une réduction substantielle du budget proposé par la Commission suppose que l'on fasse des économies dans les limites fixées pour les paiements directs, par le Conseil européen d'octobre 2002, par l'introduction « d'un élément de cofinancement national du premier pilier de la PAC ».

Le rapporteur du Parlement européen, M. Reimer Böge (PPE, Allemagne), n'a pas exclu cette hypothèse, en des termes très prudents il est vrai, et la résolution du Parlement européen indique : « Il conviendrait de prévoir la possibilité de mettre en œuvre progressivement dans l'UE-15, si les besoins excèdent les prévisions, un processus de cofinancement obligatoire. »

Pour la France, le respect de l'accord de Bruxelles exclut de retenir de telles suggestions, quelles que soient les précautions qui, à ce stade, les entourent.

Elles conduiraient en effet à réduire les plafonds prévus par l'accord de Bruxelles et à reporter sur le budget des Etats membres des charges supplémentaires fixées au niveau communautaire.

En termes de technique budgétaire, il s'agirait d'une opération de débudgétisation du budget européen vers les finances des pays, contraire à l'esprit de rigueur que le maintien de sa légitimité exige de l'Union.

b) L'objectif de 1 % du RNB ne fait pas obstacle aux impératifs de la solidarité envers les nouveaux Etats membres

· L'exigence d'un effort de solidarité au profit des nouveaux membres

La proposition de la Commission se traduisant par une forte augmentation des dépenses de cohésion, qui devraient atteindre 0,41 % du RNB de l'Union, l'objectif de la limitation à 1 % du RNB de l'Union entraîne d'inéluctables ajustements.

Il importe par conséquent de rappeler que, notamment pour la France, ceux-ci ne devront pas affecter la teneur de l'effort de solidarité avec les nouveaux Etats membres tel qu'il a été prévu, à ce titre, par la Commission.

Les crédits de la cohésion doivent être concentrés dans les zones les moins développées, avec une priorité en faveur des nouveaux Etats membres.

Telles sont d'ailleurs les orientations retenues par le Conseil européen de décembre, lorsqu'il a acté les avancées de la présidence néerlandaise sur cette question :

- le maintien de la solidarité parmi les principes à respecter pour les interventions communautaires, à côté de la subsidiarité et de la proportionnalité ;

- l'inscription dans le cadre des prochaines perspectives financières, des moyens nécessaires permettant la réduction des disparités de développement des nouveaux Etats membres.

De même, le document commun aux six signataires de la lettre en faveur d'une limitation à hauteur de 1 % du budget communautaire, transmis à la présidence le 13 mai 2005, rappelle ce principe de concentration dans les Etats membres les plus pauvres.

· La légitimité de la limitation à un maximum de 4 % du PIB des retours d'un Etat membre au titre de la politique de cohésion

En matière de politique de cohésion, la France est également attachée à la règle du plafonnement à 4 % du PIB des retours dont peut bénéficier un Etat membre au titre de la politique de cohésion.

Etablie lors du Conseil européen de Berlin en mars 1999, elle prévoit précisément que le total des aides annuelles reçues par les Etats membres au titre des actions structurelles ne doit dépasser cette limite.

La légitimité de la méthode de Berlin, sous une forme d'ailleurs adaptée par la Commission, est incontestable vis-à-vis de nouveaux adhérents, puisque celle-ci a été décidée avant même que la question de leur entrée dans l'Union ne soit prévue.

Elle n'est pas seulement d'ordre budgétaire, mais également d'ordre économique et historique.

D'une part, jamais un Etat membre de l'Union européenne n'a reçu de tels transferts.

D'autre part, il s'agit d'éviter, en raison de la règle de cofinancement des dépenses concernées par l'Union européenne et les administrations publiques des Etats membres, que les finances publiques des Etats les moins riches ne soient soumises à de trop fortes pressions en matière de dépenses.

Enfin, il convient de veiller à ce que le niveau des transferts au titre de la cohésion et des actions structurelles n'aille pas au-delà de la capacité d'absorption des Etats concernés.

Cette capacité dépend de deux éléments.

Il s'agit, d'une part, de la bonne adéquation des structures administratives. L'histoire de l'Union et de ses membres a montré que même de grands Etats tels que la France connaissaient une sous-exécution des crédits de la politique de cohésion(26), pouvaient avoir des difficultés à absorber l'ensemble des fonds auxquels ils pourraient avoir accès.

D'autre part, en termes économiques, il ne faut pas négliger que des transferts supérieurs à la capacité productive des secteurs bénéficiaires de la politique de cohésion pourraient provoquer des effets de bulle et d'inflation qui nuiraient à la poursuite de la croissance, à terme.

Le taux d'investissement dans les dix nouveaux Etats membres est d'environ 5 %. Le plafond de 4% permet déjà, ce qui est considérable, un quasi doublement de ce taux.

Il convient d'ailleurs de rappeler que ce plafond est bien une limite supérieure, laquelle ne crée pas de droit de tirage.

Les modalités d'application de cette limite ont été contestées par les trois Etats baltes, qui jugent que la Commission ayant sous-estimé leur croissance dans le cadre de ses prévisions économiques, les sommes prévues pour eux au titre des actions structurelles et de la politique de cohésion doivent être réévaluées en conséquence. Ils invoquent également que la méthode et les données utilisées conduisent octroyer par tête d'habitant, une aide inférieure aux Etats qui sont au sein de l'Union les plus pauvres.

Une telle démarche rappelle combien certains éléments doivent être clarifiés quant aux objectifs de la politique de cohésion.

4) Il fournit un cadre permettant de prévoir, pour d'autres grandes priorités et actions européennes, des ressources convenables

a) La croissance et le rôle de l'Europe dans le monde sont également les grandes priorités de la France

Au-delà de cette exigence de solidarité, la France a pu rappeler, ainsi que l'a précisé le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, lors de son audition par la Délégation le 6 avril dernier, quelles étaient ses autres grandes priorités dans un budget aussi diversifié que celui de l'Union européenne.

La première d'entre elle est la croissance. A quelques semaines de la révision à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, il convient en effet, comme l'a d'ailleurs prévu la Commission, de resserrer les interventions financières de l'Union sur ses objectifs.

La deuxième priorité de la France est la place de l'Europe dans le monde, avec notamment un engagement fort en faveur du développement et du continent africain.

Sur le plan technique, la France est très attachée à la budgétisation du Fonds européen de développement, ce qu'a d'ailleurs proposé la Commission.

Il faut rappeler que ce fonds a été créé à l'initiative de la France, à une époque où la Communauté ne s'engageait pas dans des actions extérieures.

Le régime particulier du FED, qui remonte à 1958, correspond donc à un anachronisme qu'il convient de corriger.

Ses interventions représentent environ 0,03 % du RNB de l'Union. Toutefois, financé sur une base volontaire, le 9ème FED (2000-2005) tient actuellement l'essentiel de ses ressources de l'Allemagne et de la France, avec quelque 23,4 % et 24,3 % respectivement.

Le rapporteur de la commission ad hoc du Parlement européen, M. Reimer Böge, a certes proposé le statu quo, mais l'absence d'argument de fond sur cette question permet de penser qu'il s'agit peut-être d'une approche purement financière destinée à mieux marquer sa volonté d'afficher un budget en baisse par rapport à celui de la Commission. Il est également regrettable que plusieurs Etats membres ne soutiennent pas cette idée, défendue par la France.

Sur le fond, en effet, la budgétisation du FED permettrait de rétablir l'unité du budget de l'Union, en associant pleinement le Parlement européen à la définition des orientations de l'aide aux pays ACP et à celles relatives à l'ensemble de l'aide au développement.

Par ailleurs, lors des négociations, la France a indiqué que pour la rubrique 3 « citoyenneté, liberté, sécurité, justice », sa priorité allait au volet « liberté, sécurité, justice ».

Enfin, parmi les éléments d'un rang financièrement plus modeste, mais néanmoins indispensable, figure le maintien prioritaire des règles spécifiques en faveur des régions ultra-périphériques (RUP) de l'Espagne, du Portugal et de la France, notamment celle du financement jusqu'à 85 %.

b) Les contraintes d'un budget européen construit autour de l'objectif de 1 % du RNB

A ce stade de l'élaboration des perspectives financières, établir les grands traits d'un budget construit autour de l'objectif de 1% repose sur trois éléments.

Le premier d'entre eux est la définition de priorités, afin d'éviter la fausse solution des réductions linéaires. Une telle prérogative appartient en premier lieu à l'autorité qui détient le pouvoir d'initiative. Néanmoins, au cas particulier, et on doit le regretter, la Commission, comme on l'a vu, ne l'a pas fait.

En annexe au rapport précité remis au Premier ministre par MM. Serge Vinçon, sénateur, et Marc Laffineur, député, figurent trois exemples de budget à 1 % du RNB de l'Union. Chacun d'entre eux traduit une orientation.

De même, lors des négociations entamées sous présidence néerlandaise, la France a fait part en novembre 2004 des ses priorités, en indiquant quels étaient les buildings blocks qu'elle retenait. Ils conduisent à une fourchette resserrée, centrée sur l'objectif du 1 %.

Le deuxième élément qu'il est essentiel de prendre en compte dans la négociation, est celui des différents critères sur lesquels repose la légitimité de la dépense européenne.

L'Union doit conserver, en effet, des interventions susceptibles de toucher l'ensemble de ses ressortissants, de manière que chacun puisse mesurer son existence concrète et que personne ne puisse y voir une entité abstraire n'effectuant en définitive que des transferts financiers sur une base immatérielle entre les Etats les plus prospères et les pays les moins riches. L'Union n'est pas une « banque de transferts ».

De ce point de vue, dans le respect du principe de la solidarité avec les régions et les pays les moins riches, il importe de veiller à ce que les interventions au titre de l'objectif 2 des fonds structurels et du développement rural, qui sont les seules à concerner l'immense majorité de la population européenne, ne soient pas les inéluctables variables d'ajustement d'une diminution des enveloppes prévues par la Commission.

Il s'agit d'éléments qui doivent figurer parmi les autres priorités de la France.

Le troisième élément sur lequel il convient d'insister, enfin, est la rigueur du cadre dans lequel s'amorce la négociation.

De ce point de vue, la technique des building blocks de la présidence néerlandaise, qui imposait de dégager des priorités, était pertinente.

Pour ce qui est de l'actuelle phase des négociations, la « boîte de négociation » présentée dans sa première version le 10 mars dernier, par la Présidence luxembourgeoise, au Comité des représentants permanents est satisfaisante, si ce n'est qu'elle est, peut-être, restée trop pessimiste sur la possibilité d'atteindre l'objectif de la limitation des dépenses à 1 % du RNB.

5) Le renforcement de la solidarité, de l'équité et de la transparence du financement de l'Union exige la suppression de l'abattement britannique

Il n'appartient pas aux rapporteurs de déterminer si l'abattement britannique relève plus de l'anomalie que de l'anachronisme, tant il est imprégné de ces deux défauts.

Les éléments qui ont conduit à prévoir en 1984 ce mécanisme au profit du seul Royaume-Uni ont disparu. Celui-ci impose aux Etats membres, notamment à la France qui en est le premier contributeur, une charge croissante. Son maintien exonérerait en outre le Royaume-Uni de l'essentiel de sa participation aux charges résultant du dernier élargissement.

a) Un régime spécifique en faveur du Royaume-Uni

Ayant accédé dans un contexte politique difficile et pour répondre à des motifs précis invoqués par le gouvernement de Mme Margaret Thatcher, alors Premier ministre, à la requête du Royaume-Uni émise dès 1979, les pays membres de la Communauté ont prévu au Conseil européen de Fontainebleau, en juin 1984, une correction de la contribution versée par cet Etat membre.

Il s'agissait à l'époque de reverser les deux-tiers de l'écart entre la part du Royaume-Uni dans la ressource TVA et sa part dans les dépenses communes, définies comme les dépenses réparties.

Depuis, ce dispositif a été aménagé sur le plan technique, notamment pour tenir compte des différentes réformes des ressources propres et principalement de la création de la ressource PNB en 1988.

Il permet au Royaume-Uni de bénéficier d'un remboursement égal des deux tiers de sa contribution budgétaire au titre des ressources propres et du montant des dépenses communautaires en sa faveur, au cours du dernier exercice clos.

b) Une charge anuelle de plus de 5 milliards d'euros, inéquitablement répartie entre les Etats membres et qui pèse particulièrement sur la France à raison de près du tiers du total

Une charge annuelle de 5,115 milliards d'euros pour 2005 pour l'ensemble des vingt-quatre autres Etats membres

La correction britannique a été d'un coût croissant pour les finances de l'Union.

Le premier versement, intervenu en 1986 en raison du décalage d'un exercice entre l'année au titre de laquelle est calculé le montant du versement et l'année de sa perception par le Royaume-Uni, s'est établi à 1,9 milliard d'euros.

Après un pic de 7,3 milliards d'euros en 2001, il s'est porté à un niveau un peu supérieur à 5 milliards d'euros depuis l'année 2002. Pour 2005, son coût s'établit à 5,115 milliards d'euros.

Le graphique suivant récapitule ces éléments.

L'évolution du coût de la correction britannique

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Pour la période 2008-2013, la Commission estime, après révision de ses hypothèses de croissance, le coût de l'abattement britannique à 8 milliards d'euros par an, en moyenne, soit une augmentation substantielle, si rien ne change.

Une atteinte à l'équité dans le financement de l'Union, notamment pour la France qui assume près du tiers de son poids

L'abattement britannique est assuré par les autres Etats membres selon des modalités au départ simples, mais dorénavant complexes. Sa charge s'ajoute aux contributions qui leur sont normalement imputées.

En principe réparti au prorata de la part des Etats membres dans le PIB communautaire, son financement a donné lieu, dès l'origine, à une réduction en faveur de la République fédérale d'Allemagne, le plus gros contributeur au budget communautaire, qui a bénéficié d'un abattement des deux tiers de sa participation.

Ultérieurement, en mars 1999, le Conseil européen de Berlin a tenu compte des pressions subies par les principaux contributeurs nets et a réduit à un quart de son montant normal la participation de l'Allemagne, de l'Autriche, des Pays-Bas et de la Suède. Formalisé par la décision n° 2002/597/CE du Conseil, cet accord est mis en œuvre depuis le 1er janvier 2002.

Ce « rabais sur le rabais » est également financé par l'ensemble des autres Etats membres.

Deux éléments caractérisent bien l'iniquité inhérente à l'abattement britannique.

D'une part, il ne fait l'objet d'aucune autre exception que celles qui viennent d'être évoquées, même en faveur des Etats issus du dernier élargissement. Chaque nouveau membre contribue donc, même ceux dont le PNB est le plus faible, à réduire le poids de la part britannique.

Comme le rappelle le rapport de la Commission européenne de la Chambre des Lords sur les perspectives financières (Future financing of the European Union, Report with evidence, HL Paper 62), l'abattement britannique va significativement augmenter à la suite du dernier élargissement de mai 2004 et le Royaume-Uni n'assumera que les deux tiers de la part qui lui incomberait normalement à ce titre en raison des règles de calcul de cet avantage.

En outre, le Royaume-Uni n'assurera pas toutes les conséquences de l'élargissement, l'abattement sera partiellement financé par ces mêmes nouveaux adhérents, dont le revenu par tête représente, pour les trois plus pauvres d'entre eux, les Etats baltes, le tiers de son niveau.

Une telle situation réduit d'autant le solde net positif dont ils bénéficient au titre de leur adhésion à l'Union et en définitive, également, l'effet des transferts qui leur sont consentis de la part des Etats membres les plus anciens.

Elle n'est donc pas admissible et ne peut perdurer.

D'autre part, la charge financière de l'abattement britannique pèse plus particulièrement sur un nombre limité d'Etats membres, notamment sur la France.

Les trois plus importants contributeurs au « chèque » britannique en supportent les trois quarts de la charge, à raison de 27,7 % pour la France, 23 % pour l'Italie et 13,8 % pour l'Espagne en 2005.

Le tableau qui suit détaille la participation de chacun des Etats, et notamment des dix nouveaux Etats membres au « chèque britannique » :

Financement de l'abattement britannique en 2005

Etats membres

En millions d'euros

En %

Belgique

249

4,87%

République tchèque

70

1,37%

Danemark

170

3,33%

Allemagne

327

6,40%

Estonie

7

0,14%

Grèce

149

2,91%

Espagne

707

13,83%

France

1 417

27,70%

Irlande

106

2,08%

Italie

1 174

22,95%

Chypre

11

0,21%

Lettonie

9

0,18%

Lituanie

16

0,31%

Luxembourg

19

0,39%

Hongrie

70

1,38%

Malte

4

0,08%

Pays-Bas

69

1,35%

Autriche

35

0,68%

Pologne

164

3,20%

Portugal

116

2,28%

Slovénie

23

0,45%

Slovaquie

29

0,57%

Finlande

130

2,53%

Suède

42

0,82%

Total en faveur du Royaume-Uni

5 115

100

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

La France est donc le premier contributeur à la correction britannique, avec 29 % en 2003 et 29,2 % en 2004, et 27,7 % du total en 2005.

Si l'on se rapporte au tableau du 2 du C du I, relatif aux contributions des Etats membres, on constate que la correction britannique porte atteinte à l'équité du financement communautaire, car elle contribue à augmenter l'écart entre la quote-part de la majeure partie des Etats membres dans les ressources du budget communautaire et leur part dans le PIB de l'Union.

Elle perturbe donc les conséquences équitables du transfert progressif du financement de l'Union de la ressource TVA sur la ressource PNB depuis quinze ans.

Une charge annuelle importante pour la France, qui en est le premier contributeur, d'environ 1,5 milliard d'euros, et dont le coût cumulé depuis l'origine s'élève à 20 milliards d'euros

Chaque année, depuis le début de la période couverte par les actuelles perspectives financières (2000-2006), la France contribue pour plus de 1,5 milliard d'euros au financement de la correction britannique, à raison plus précisément de 1,7 milliard d'euros en 2001, 1,5 milliard en 2002, 1,6 milliard en 2003 et 1,5 milliard de nouveau en 2004.

Le coût cumulé de la correction britannique, pour la France, s'établissait à la fin de l'année 2004 à 19,1 milliards d'euros, comme l'indique le graphique suivant.

Cout cumule de la correction britannique pour la france (mds€ - prix 2004)

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette somme est significative à plusieurs titres :

- elle représente presque un tiers de la charge totale annuelle de l'abattement (27,7 %) en 2005. La France acquitte annuellement presqu'un tiers du « chèque » britannique  ;

- elle équivaut à 1,17 % du PIB de la France en 2004 ;

- elle correspondait à la fin de cette même année à 2 % de la dette publique.

En toute rigueur, pour calculer la charge budgétaire annuellement supportée par la France au titre de la correction britannique, il faudrait également ajouter au coût budgétaire, une fraction des intérêts dus par l'Etat au titre de sa dette publique. La France n'ayant pas été en équilibre budgétaire depuis la création de ce dispositif, il lui a, en effet, été imposé d'emprunter au-delà de ce qu'exigeait sa situation budgétaire. Pour 2004, le taux d'intérêt moyen s'étant établi, pour le Trésor, à quelque 4,5 %, le montant des intérêts versés au titre de la fraction de dette publique imputable au financement de la correction britannique s'est élevé à quelque 860 millions d'euros.

Le coût total pour la France de la correction britannique peut donc être estimé, tous éléments pris en considération, à 2,4 milliards d'euros en 2004.

En définitive, pour la France, le maintien de l'abattement britannique n'est pas acceptable tant pour des raisons de principe, qu'en raison de la charge qu'il impose aux autres Etats membres, notamment les nouveaux adhérents et à son budget, qui en supporte presque le tiers.

c) Un dispositif qui a perdu sa légitimité à la suite des progrès de l'économie britannique, de l'évolution du budget communautaire et du dernier élargissement

La prospérité britannique ne permet plus de prévoir un tel abattement

En premier lieu, les éléments objectifs qui avaient pu justifier, lors du sommet de Fontainebleau en 1984, un geste en faveur du Royaume-Uni plaident dorénavant en défaveur du dispositif de l'abattement alors prévu. Comme l'observe la Commission, les fondements économiques et financiers de cette correction ont disparu.

D'une part, comme le montre le tableau suivant, le Royaume-Uni est le plus prospère des contributeurs nets du budget communautaire, avec un PIB par tête s'établissant à 111,2 % de la moyenne en 2003, en standard de pouvoir d'achat. Il était en revanche le moins développé des contributeurs nets en 1984. A l'époque, son RNB part tête ne représentait que 90,6 % de cette même moyenne.

RNB par habitant des contributeurs nets
(moyenne UE-15 = 100)

 

2003

1984

Royaume-Uni

111,2

90,6

Danemark

111,1

104,0

Autriche

109,8

--

Pays-Bas

106,6

95,0

Suède

104,6

--

France

104,2

104,0

Allemagne

98,6

109,6

Italie

97,3

92,9

Source : Commission européenne.

D'autre part, les estimations auxquelles a procédé la Commission montrent qu'en l'absence de correction, le solde net négatif du Royaume-Uni serait certes élevé, mais ne serait pas non plus significativement supérieur à celui des autres contributeurs nets, que sont l'Allemagne et les Pays-Bas.

La comparaison des soldes nets moyens, pour la période 1996-2002, avant la correction britannique, fait en effet apparaître un solde net négatif de -0,47 % pour le Royaume-Uni, comparable aux -0,44 % de l'Allemagne et de -0,43 % des Pays-Bas.

Soldes budgétaires nets estimés avant la correction britannique
(moyennes annuelles 1996 - 2002)

 

En % du RNB

Royaume-Uni

-0,47

Allemagne

-0,44

Pays-Bas

-0,43

Suède

-0,38

Autriche

-0,24

Italie

-0,06

France

-0,04

Source : Commission européenne.

Les projections opérées pour la période 2008-2013 n'obèrent pas réellement ce raisonnement, même si l'écart du Royaume-Uni se creuserait en l'absence de toute correction.

Soldes budgétaires nets estimés avant la correction britannique
(moyennes annuelles 2008 - 2013)

 

En % du RNB

Royaume-Uni

-0,62

Pays-Bas

-0,55

Allemagne

-0,52

Suède

-0,47

Autriche

-0,37

Italie

-0,29

France

-0,27

Danemark

-0,20

Finlande

-0,14

Source : Commission européenne.

Enfin, la pérennisation du mécanisme actuel conduit à faire du Royaume-Uni le plus petit des contributeurs nets de l'Union en 2013, avec un solde de -0,25 % du PIB, comparable à celui de la Finlande, mais significativement moins élevé que celui des sept premiers contributeurs, parmi lesquels la France et Chypre.

Soldes budgétaires nets estimés apres la correction britannique
(moyennes annuelles 2008 - 2013)

 

En % du RNB

Pays-Bas

-0,56

Allemagne

-0,54

Suède

-0,50

Autriche

-0,38

Italie

-0,41

Chypre

-0,37

France

-0,37

Danemark

-0,31

Finlande

-0,25

Royaume-Uni

-0,25

Source : Commission européenne.

Le budget de l'Union a évolué et la part des dépenses agricoles a été notablement réduite

La principale motivation de fond de la correction britannique, qui était l'insuffisance des retours sur le poste dominant du budget de la Communauté, ne cesse de s'estomper.

La part des dépenses agricoles dans le budget de l'Union est, en effet, passée de 70 % en 1984 à 54 % en 2002, et 43 % en 2005.

Elle devrait encore diminuer dans le cadre des prochaines perspectives financières en application de l'accord de Bruxelles de 2002.

Les propositions de la Commission prévoient, en crédits d'engagement, une allocation totale de l'ordre de 35 %, à raison de 357 milliards d'euros, y compris les dépenses de développement rural pour les crédits des actuelles rubriques 1A et 1B, sur un total de 1.022 milliards d'euros.

Le budget communautaire ne cesse donc d'évoluer et les nouvelles dépenses ne posent pas au Royaume-Uni de difficulté spécifique.

d) La position française sur le "chèque" britannique est officiellement soutenue par un très grand nombre d'Etats membres

Dans la contestation de la pérennité de l'abattement britannique, deux initiatives fortes sont déjà intervenues à l'occasion de la négociation encore en cours.

D'une part, la Finlande a préconisé, dans le cadre de sa propre proposition de réforme du financement de l'Union, la dégressivité de la compensation budgétaire versée au Royaume-Uni.

D'autre part, l'Autriche ne manque pas de rappeler son attachement aux principes de simplicité et de transparence. Elle estime ainsi dans cet esprit que le rabais britannique relève d'une autre époque.

Enfin, dans un cadre plus large, le 3 mai dernier, le groupe des 17 pays européens « amis de la cohésion »(27) a demandé la suppression de la correction britannique, considérant, selon les termes du secrétaire d'Etat aux affaires européennes du Portugal, M. Fernando Neves, qu'il est « essentiel de parvenir à un accord sur les ressources propres de l'Union européenne, clair et transparent, sans rabais ni mécanismes de correction » en faveur de certains pays.

III. LES ACTEURS DE LA NEGOCIATION DEVRAIENT S'ATTACHER A RENFORCER L'ADEQUATION DES CREDITS AUX OBJECTIFS DE LISBONNE, ET AMORCER LA MODERNISATION DU FINANCEMENT COMMUNAUTAIRE

La Présidence luxembourgeoise a reconnu formellement le 21 avril 2005 que la recherche d'un compromis entraînera inévitablement des réductions dans chacune des catégories de dépenses (bien que partagées de façon différente entre les différents plafonds) par rapport à la proposition de la Commission(28).

Encore faut-il déterminer dans quelle mesure chaque rubrique sera affectée, sachant que la France s'opposera résolument à ce que le « plafond de Bruxelles » relatif au premier pilier de la PAC soit un élément négociable. La Politique Agricole Commune a fourni dès 2002, avec ce plafonnement, sa contribution à l'effort général de discipline budgétaire que doivent désormais fournir les autres catégories de dépenses par comparaison avec la proposition de la Commission.

Pour mettre l'accent sur la solidarité, la présidence luxembourgeoise a mis sur la table certaines propositions de modification : l'attribution à l'objectif de convergence d'une part supérieure des dépenses de cohésion (82 % de la sous-rubrique 1 b, contre 78 % dans la proposition de la Commission) ; la modulation, en fonction du RNB par habitant, du pourcentage maximal de fonds alloués aux nouveaux Etats membres, à la place d'une application mécanique de la règle des « 4 % du RNB », pour favoriser les pays

les moins riches(29) ; une période transitoire de deux ans pour la sortie « statistique » du Fonds de cohésion qui concerne l'Espagne. Cinq Etats ont d'ores et déjà fait connaître leur opposition à cet assouplissement en faveur de l'Espagne (l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas, le Danemark et la Suède).

Au-delà des débats sur la taille globale du budget européen, sur les différents scénarios chiffrés envisageables, sur les « retours » liés à telle ou telle politique, et sur les soldes nets, une approche plus constructive consiste à insister sur l'aspect qualitatif des dépenses communautaires et sur les « biens publics »(30) que les pays européens pourraient vouloir fournir ou renforcer, soit conjointement par l'intervention directe de l'Union à travers son budget, soit indirectement en incitant les gouvernements nationaux à les fournir.

Il est possible d'envisager la combinaison de deux approches, à budget constant : réviser les postes de dépenses du budget communautaire en les réorientant vers des objectifs nouveaux, ceux définis dans le cadre de la « stratégie de Lisbonne », et convenir d'incitations financières dont l'envergure peut être faible si elles sont bien ciblées, pour encourager les gouvernements à promouvoir des biens publics tels qu'une défense commune.

A. Quels objectifs doivent guider le recentrage des dépenses ?

1) Le respect du principe de subsidiarité exige que les dépenses présentent, au niveau communautaire, une « valeur ajoutée » propre

Le fédéralisme monétaire européen qui se traduit par l'existence de la monnaie unique et de la Banque centrale européenne ne s'accompagne pas d'un fédéralisme budgétaire. Comme on l'a vu, le budget communautaire reste modeste par rapport aux budgets nationaux et n'a pas vocation à se substituer à eux : il demeure très subsidiaire par rapport à ceux des Etats membres.

Se pose dès lors une double question : celle de la coordination des politiques budgétaires nationales, et celle de l'affectation des dépenses du budget communautaire qui doit être opérée de manière strictement conforme à cette nature subsidiaire.

Les débats qui ont conduit à la réforme en cours du Pacte de stabilité et de croissance ont permis de relancer la réflexion sur la première question, de manière fructueuse puisque les Etats membres sont parvenus à un accord au Conseil européen des 15 et 16 mars 2005. Les négociations sur les prochaines perspectives financières offrent fort logiquement l'opportunité de relancer, parallèlement, un débat constructif sur la seconde question.

L'utilisation rigoureuse du critère de la « valeur ajoutée communautaire » doit permettre de déterminer l'équilibre, dans les dépenses de l'Union, entre la pérennisation de politiques existantes (qui n'exclut pas leur réorientation) et le développement d'actions nouvelles, équilibre que la Commission n'est parvenue à définir qu'au prix d'une augmentation trop substantielle des crédits nécessaires.

La Commission elle-même a placé la recherche de la « valeur ajoutée » au centre de sa démarche, en particulier dans la rédaction de sa communication du 14 juillet 2004, mais en la définissant de manière très large. D'où une certaine contradiction entre le grand nombre d'actions ainsi justifiées et les propos du président de la Commission (à l'occasion du Conseil « Affaires générales » des
25-26 avril 2005) exprimant son accord pour que soit appliqué un critère rigoureux de valeur ajoutée.

Le Parlement européen a également attaché une grande importance à ce critère puisque c'est le tout premier paragraphe de la résolution adoptée le 8 juin qui « insiste (...) sur le fait que toutes les dépenses à la charge du budget de l'Union européenne devraient être conçues pour ajouter aux dépenses publiques des Etats membres un avantage européen spécifique et qu'il convient d'observer strictement le principe de subsidiarité (...) ».

L'objet de l'analyse de la valeur ajoutée communautaire est de démontrer au cas par cas qu'il y a une justification à l'action envisagée au niveau communautaire par rapport à ce qui est fait au niveau national ou régional. Son appréciation doit être conçue comme un processus continu : le constat de l'existence d'une valeur ajoutée avérée ou potentielle ne doit jamais empêcher de s'interroger ensuite périodiquement sur sa persistance, notamment au fur et à mesure que les actions nationales se diversifient et se perfectionnent, rendant moins évidente la nécessité d'une action communautaire pour les compléter ou pallier leur absence.

Ainsi, la Commission fonde une partie de sa recherche de valeur ajoutée communautaire sur le constat de l'absence d'interconnexions dans de nombreux domaines tels que l'éducation, les infrastructures de transport, d'énergie, de technologies de l'information, ou l'action pénale : puisque « les systèmes nationaux demeurent fragmentés dans une large mesure », une action communautaire, financée par le budget de l'Union, est susceptible de présenter une plus-value appréciable. Toutefois, s'agissant du domaine judiciaire par exemple, toute action ne saurait trouver de la sorte une justification : la France et la Belgique, avec le soutien de la Pologne et du Portugal notamment, ont fait savoir qu'elles considèrent que le caractère de priorité politique du pilier « Justice-Affaires intérieures » ne devait pas nécessairement se refléter dans le volume des dotations budgétaires communautaires, les dépenses (et les progrès à réaliser) dans ce domaine relevant principalement des Etats membres.

En revanche, la présence d'une plus-value considérable apparaît aux rapporteurs comme justifiant pour encore longtemps la politique des réseaux transeuropéens et les mesures qui pourraient être prises pour compléter les politiques nationales d'encouragement de la mobilité des étudiants.

Ces deux politiques illustrent l'hypothèse où des résultats ne peuvent être obtenus que par une action menée (et financée) au niveau de l'Union européenne, et où des mesures utiles en elles-mêmes présentent l'avantage supplémentaire de contribuer à la réalisation d'autres objectifs de l'Union. Ainsi, des réseaux de transport et d'énergie performants et plus nombreux, et des programmes de mobilité touchant un nombre beaucoup plus grand d'élèves et d'étudiants, ne peuvent que contribuer à donner à l'action de Union européenne une plus grande visibilité et donc à donner corps au concept de citoyenneté européenne.

De même, il est logique que dans l'ensemble les Etats aient accueilli favorablement les propositions de la Commission concernant l'objectif de coopération territoriale (au sein de la sous-rubrique 1b relative au financement de la politique régionale) compte tenu de sa valeur ajoutée, notamment dans le cadre d'une Europe élargie. Le caractère transnational ou transfrontalier d'un projet permet très largement de présumer l'existence d'une « valeur ajoutée communautaire ».

La deuxième hypothèse où une plus-value significative permet de justifier le financement de dépenses par le budget communautaire au nom de la « valeur ajoutée » correspond aux cas où l'action de l'Union présente un meilleur « rapport qualité-prix » parce que la mise en commun des ressources et du savoir-faire permet de réaliser des économies tout en réalisant des objectifs essentiels. L'aide au développement se rattache certainement à ce cas de figure. Il en va de même pour la recherche-développement, qui sera abordée plus loin.

Enfin, la Commission met en avant une troisième série de cas, ceux où la valeur ajoutée provient de ce que l'action communautaire est nécessaire pour « compléter, stimuler ou lancer » l'action nationale. Il convient d'être particulièrement vigilant dans cette hypothèse pour assurer le respect du principe de subsidiarité et, en termes de financement, pour éviter au niveau du budget communautaire les dépenses qui feraient double emploi avec des dépenses relevant des compétences des Etats ou des collectivités locales. C'est à cette dernière série de cas que la Commission rattache la politique régionale et le développement rural. Il convient également d'y intégrer la « stratégie de Lisbonne », dans la mesure où son application, au plan budgétaire, dépend pour l'essentiel d'une appropriation de ses objectifs par les Etats membres et non d'une action communautaire.

2) La « stratégie de Lisbonne » et le souci de mieux cibler la politique régionale dans les Quinze plus anciens Etats membres amènent à mettre l'accent sur les dépenses pour la recherche-développement

Lors du Conseil européen de Lisbonne en mars 2000, les Etats membres ont défini « un nouvel objectif stratégique dans le but de renforcer l'emploi, la réforme économique et la cohésion sociale dans le cadre d'une économie fondée sur la connaissance »(31). Dans de nombreux domaines concernés par cette stratégie globale et ambitieuse, les actions à mener ne relèvent pas de la compétence de l'Union mais de celle des Etats : contribuer à l'achèvement du marché intérieur, assurer la viabilité à long terme des finances publiques nationales ...

Malgré tout, la prise en compte de la réalisation des objectifs de Lisbonne dans le budget communautaire doit être garantie, pour permettre le financement de la participation de l'Union européenne prévue par les conclusions du Conseil européen.

Celles-ci ont en particulier mis l'accent sur la poursuite de la politique communautaire en faveur de la recherche-développement, par la mise en réseau des programmes nationaux et communs de recherche, la promotion des « centres d'excellence », les mesures destinées à faciliter le financement de l'investissement privé dans la recherche... soit l'ensemble des éléments constitutifs de l'« espace européen de la recherche et de l'innovation ». Dans le cadre de l'élaboration des perspectives financières 2007-2013, la Commission a donc prévu un septième programme-cadre pour la recherche-développement plus long et considérablement plus lourd que le précédent en termes budgétaires(32). Elle a également élaboré un projet de programme-cadre pour la compétitivité et l'innovation, mais celui-ci apparaît à ce stade essentiellement comme la juxtaposition de programmes existants (le programme pluriannuel pour les entreprises, celui relatif à l'énergie intelligente en Europe...) sans véritable valeur ajoutée ou dynamique nouvelle générées par leur rapprochement.

Parmi les lignes fortes de la position française dans les négociations en cours figure le développement des politiques de croissance, dans des conditions compatibles avec les impératifs budgétaires et les capacités d'absorption des économies des Etats membres, qu'il s'agisse de la recherche, des transports ou de l'éducation. La France considère comme la Commission que, s'agissant de la recherche, un effort significatif est indispensable dans les prochaines années, mais que le montant de l'enveloppe allouée à ce programme-cadre dans les propositions de la Commission peut paraître excessif. Un montant d'environ 40 milliards représenterait déjà un progrès considérable par rapport au programme-cadre précédent.

Dans ce domaine de l'action communautaire comme dans les autres, le respect du principe de subsidiarité et la notion-clé de valeur ajoutée communautaire imposent que l'intervention communautaire se concentre sur les hypothèses dans lesquelles les besoins en moyens humains et financiers dépassent à l'évidence les capacités nationales, ou dès lors qu'un programme ne peut être valablement appréhendé et exécuté qu'à l'échelle européenne (ou mondiale). Dans des domaines scientifiques et technologiques émergents, des projets à la mesure des capacités d'un seul Etat membre peuvent également relever d'une telle intervention, au titre du partage des risques. La valeur ajoutée peut enfin être appréciée au niveau de l'exploitation des résultats à l'échelle du marché européen. En matière de recherche-développement, ces éléments d'appréciation sont tous présents, et l'action communautaire est donc parfaitement légitime et souhaitable, mais elle doit conserver des proportions réalistes.

L'enveloppe prévue par la Commission en faveur de la recherche-développement pourrait toutefois conserver son importance et acquérir une légitimité supplémentaire si elle faisait l'objet d'un certain redéploiement pour enrichir et diversifier la politique régionale de l'Union.

La communication de la Commission du 14 juillet 2004 présente la stratégie de Lisbonne comme un « nouvel élan (...) pour faire de l'Europe une économie dynamique fondée sur la connaissance et, parallèlement, renforcer la cohésion de l'Union ». Mais pourquoi se contenter de progresser parallèlement dans ces deux directions ? Etablir un lien entre la politique régionale (et plus précisément l'objectif de compétitivité ou « objectif 2 ») et la politique de recherche permettrait de contribuer simultanément à ces deux objectifs essentiels, grâce à une politique d'appels à projets lancés par les institutions communautaires et permettant de stimuler l'activité de recherche des universités et laboratoires régionaux.

Les négociations sur les perspectives financières sont compliquées par le déroulement en parallèle d'une négociation difficile sur les fonds structurels, dans laquelle certains Etats ont beaucoup à perdre (en particulier l'Espagne et le Portugal), d'autant plus que plusieurs autres Etats plaident pour que l'action des fonds structurels soit concentrée sur les régions les moins prospères de l'Union en calculant la richesse relative sur la base de la moyenne par habitant à vingt-sept Etats membres, et non à vingt-cinq comme le propose la Commission. Et une incertitude, dont les conséquences sont à craindre notamment pour la France, plane sur l'évolution de l'objectif de compétitivité (objectif 2), sachant que la Présidence luxembourgeoise propose de ramener la part de cet objectif au sein de la politique de cohésion de 18 % à 15 % (par rapport à la répartition envisagée par la Commission).

Le montant total des financements alloués à la recherche pourrait se trouver déterminé par l'issue de cette négociation conflictuelle mais pourrait également, à l'inverse, servir à ménager un terrain d'entente, par l'établissement de synergies entre le programme-cadre pour la recherche et les fonds structurels. Ce point de vue est partagé par plusieurs Etats : ainsi, lors de la présentation du septième programme-cadre par la Commission, la Lituanie et le Portugal, par exemple, ont mis l'accent sur l'objectif de cohésion qu'il conviendrait d'assigner à ce programme.

Il existe toutefois un clivage en matière de politique de recherche entre les Etats qui sont favorables à une affectation des crédits basée sur un principe de solidarité et d'encouragement du « rattrapage », comme l'Espagne, et ceux qui préconisent de concentrer ces crédits sur des pôles et projets satisfaisant un critère d'excellence, comme l'Allemagne.

La position de la France tend également à privilégier le critère de l'excellence. Mais ce clivage peut être surmonté, et le maintien d'un « objectif 2 » convenable peut être assuré au bénéfice des régions des Quinze plus anciens Etats membres, par le déplacement d'une partie des crédits de recherche vers le cadre d'action qui est celui des fonds structurels. La politique régionale de l'Union s'en trouverait enrichie, et un degré de cohérence satisfaisant entre la stratégie de Lisbonne et les aides communautaires tournées vers les régions pourrait être atteint.

La politique communautaire en faveur de la recherche-développement présente un fort potentiel en termes de valeur ajoutée, qu'il est encore possible d'augmenter en la mettant partiellement au service d'autres objectifs communautaires, qu'il s'agisse de la cohésion ou, ce qui constitue une autre piste de réflexion, du rôle que l'Union européenne pourrait être amenée à acquérir dans le domaine de la défense.

3) Un Fonds européen de défense permettrait de donner corps à la Politique européenne de sécurité et de défense, en liaison avec les actions en faveur de la recherche

Dans sa communication du 14 juillet 2004, la Commission souligne que « le regroupement des moyens nationaux au niveau communautaire peut générer des économies significatives pour les budgets nationaux ». Une excellente illustration de cette démarche pourrait être trouvée dans le domaine de la défense, et particulièrement en matière de recherche liée à la défense.

L'idée d'un Fonds européen pour la recherche de défense a été présentée à plusieurs reprises(33). Il est temps de relancer la réflexion sur ce sujet, tant il va être ardu de persuader les Etats, surtout ceux qui ne sont pas des acteurs majeurs de l'industrie d'armement, que l'accès de la recherche de défense aux crédits européens répond à l'intérêt commun.

Plus largement, puisque la PESD se trouve dans une phase de montée en puissance et que la défense et la sécurité constituent incontestablement des biens publics, ne serait-il pas concevable d'ouvrir dans les prochaines perspectives financières de l'Union un « espace budgétaire spécifiquement dédié aux dépenses entraînées par la PESD », selon l'expression de M. Patrice Cardot(34) ?

En matière de dépenses de défense, et surtout en ce qui concerne la recherche liée à la défense, les comparaisons entre pays sont difficiles. Malgré les méthodes de calcul variables d'un pays à l'autre, les données chiffrées permettent de formuler les constats suivants :

- les Etats de l'Union européenne dépensent ensemble environ la moitié de ce que les Etats-Unis dépensent pour leur défense ;

- parmi les Etats européens, sept pays sont dotés d'un budget de défense significatif : le Royaume-Uni et la France, avec environ 49 et 40 milliards d'euros en 2004, suivis de l'Allemagne (environ 30 milliards), l'Italie (environ 17 milliards), puis l'Espagne, les Pays-Bas et la Suède (entre 6 et 9 milliards) ;

- l'écart observé pour les dépenses de défense globales (du simple au double) entre l'Europe et les Etats-Unis se creuse en matière de R&D militaire pour atteindre la proportion du simple au quintuple ; les Etats de l'Union européenne ont entre eux des dépenses de recherche militaire aussi inégales que leurs budgets de défense respectifs.

Même si leur nature essentiellement intergouvernementale fait qu'elles n'absorbent pour l'instant que des moyens financiers réduits et transitant en majorité par les budgets nationaux, les actions liées à la PESC et à la PESD représentent potentiellement un enjeu majeur pour l'Union.

La PESC dispose d'une ligne budgétaire communautaire (inscrite au sein de l'actuelle rubrique « Actions extérieures », dont elle représente environ 1 %). En revanche, s'agissant de la PESD, seules les dépenses relatives aux aspects civils de cette politique et aux dépenses administratives sont financées par le budget communautaire ; les dépenses afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense sont à la charge des budgets nationaux, les coûts communs étant répartis au prorata du PNB alors que les autres coûts (95 %) sont à la charge des seuls Etats qui participent effectivement aux opérations.

Le problème du décalage par rapport aux Etats-Unis ne se situe pas tant au niveau du montant total des dépenses (l'Union européenne ne prétendant pas au statut de super-puissance militaire) qu'au niveau du morcellement de l'effort de recherche. En décembre 2000 un rapport de l'Assemblée de l'UEO notait que « les programmes R&D de l'Europe sont des gaspillages d'énergie éparpillée entre 78 entreprises ; les regroupements d'entreprises aux Etats-Unis permettent des économies d'échelle plus rentables dans la mise au point de technologies »(35).

En matière de recherche de défense, l'Union européenne n'a pas encore résolu les questions fondamentales : comment élaborer une stratégie européenne ? avec quels moyens et quel financement ? comment coordonner les travaux effectués au niveau national et européen ? L'évaluation des besoins militaires, le développement des programmes, la recherche-technologie demeurent nationaux et sont majoritairement attribués à des sociétés nationales dans un marché de défense européen qui reste largement nationalisé.

Comme le relève M. Patrice Cardot, les initiatives de l'Union relatives à la PESD, pas plus que celles relatives aux luttes contre le terrorisme ou la criminalité organisée, « n'ont pas encore produit les processus intégrateurs, notamment en matière budgétaire, sans lesquels l'action publique restera très vraisemblablement impuissante ».

Or ni l'OTAN ni l'UEO ne disposent aujourd'hui des instruments institutionnels et juridiques qui permettraient d'entreprendre une telle intégration budgétaire. Seule l'Union européenne en dispose, surtout depuis la décision récente de créer l'Agence européenne de défense, et à travers le Programme de recherche européen dans le domaine de la sécurité (PRES) en cours d'élaboration sur la base de la communication de la Commission du 7 septembre 2004(36).

L'Agence européenne de défense aura pour mission d'harmoniser les besoins capacitaires des pays de l'Union, la coopération en matière de programmes d'armement, la recherche et le renforcement de la base industrielle et technologique européenne de défense.

Les budgets de défense des Etats membres étant plutôt orientés à la baisse, l'une des missions de l'Agence est de faire en sorte que la dépense militaire européenne soit plus efficace. Au préalable, les Etats doivent s'entendre sur la priorité à donner à la recherche ou à certains aspects de politique industrielle. Des convergences sont susceptibles d'apparaître, notamment entre France et le Royaume-Uni sur la recherche.

L'Agence n'a pas pour l'instant les moyens de ses ambitions, mais les premières déclarations de son directeur, M. Nick Witney, permettent d'espérer que cette nouvelle structure amènera l'Union européenne à s'impliquer significativement dans la recherche à travers les programmes liés à la sécurité. Il conviendra cependant de veiller à ce que le travail de la Commission dans le cadre du PERS soit bien coordonné avec celui de l'Agence : compte tenu des chevauchements inévitables, il importe de développer les synergies en évitant les duplications.

L'Agence européenne de défense

Le traité constitutionnel (articles I-41 et III-311) a prévu la mise en place d'une « Agence dans le domaine du développement des capacités de défense, de la recherche, des acquisitions et de l'armement (l'Agence européenne de défense) ». Le principe de la création de cette Agence a également été affirmé par le Conseil européen de juin 2003, et l'agence a été formellement créée le 12 juillet 2004, avec l'adoption par le Conseil de ses principes de fonctionnement. L'Agence est placée sous l'autorité du Conseil, et à ce titre, du secrétaire général Haut représentant pour la PESC. Elle dispose d'une pleine personnalité juridique et peut donc passer des contrats. .../...


Les quatre principales missions de l'Agence se matérialisent par les quatre branches de son administration, qui sont :

· la branche Capacités doit développer les capacités militaires européennes en liaison avec les structures existantes (Headline task force, état-major de l'UE, comité militaire de l'UE) ;

· la branche Recherche et Technologie (R&T) cherchera à renforcer l'efficacité de la recherche européenne et gérera directement les contrats de recherche de défense en coopération ; les Etats membres ont décidé le 22 avril 2005 que l'Agence devait reprendre les activités du Groupe d'armement de l'Europe occidentale (GAEO) dont les activités cesseront en mai 2005, et de l'Organisation de l'armement de l'Europe occidentale (OAEO), pour faire en sorte que la collaboration en matière de recherche-développement réponde aux besoins de la Politique européenne de sécurité et de défense ;

· la branche Armement a pour vocation de promouvoir les acquisitions d'équipements de défense en coopération, en s'appuyant autant que possible sur l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCRA) qui conserve son rôle de développement des programmes en coopération ;

· la branche Marchés / Base industrielle et technologique de défense (BITD) a vocation à favoriser la création d'un marché européen compétitif des équipements de défense et de renforcer la BITD.

Le budget 2005 de l'Agence prévoit une contribution des Etats de 19,9 milliards d'euros, dont l'essentiel sera affecté aux frais de personnel et aux nouveaux locaux. Toutefois, 3 milliards d'euros sont consacrés à la partie opérationnelle et vont donc lui permettre de lancer des études d'évaluation dans ses différents domaines d'action et d'assurer le financement de programmes de recherche pilotes ou d'actions préparatoires. Tous les Etats membres de l'Union européenne participent au financement de l'Agence, à l'exception du Danemark. D'ici la fin de l'année 2005, il est prévu que les vingt-quatre Etats adoptent un budget sur trois ans pour l'Agence.

Les programmes de recherche et d'armement conduits dans le cadre, plus restreint, de coopérations à quelques Etats seulement (option qui constituera le mode de fonctionnement habituel de l'Agence) seront financés par les seuls Etats concernés.

En 2003, parmi les vingt-cinq Etats membres, neuf ont consacré au moins 2 % de leur PIB aux dépenses de défense, et neuf y ont consacré entre 1,5 et 1,9 % de leur PIB.

Dépenses de défense (en % du PIB)

 

1999

2000

2001

2002

2003

Allemagne

1,6 %

1,5 %

1,5 %

1,5 %

1,5 %

Autriche

0,8 %

0,9 %

0,8 %

0,8 %

1 %

Belgique

1,5 %

1,4 %

1,3 %

1,3 %

1,3 %

Chypre

nc

4,1 %

3,6 %

2,4 %

2,3 %

Danemark

1,6 %

1,5 %

1,5 %

1,6 %

1,6 %

Espagne

1,3 %

1,2 %

1,2 %

1,2 %

1,2 %

Estonie

1,5 %

1,5 %

1,7 %

1,5 %

2 %

Finlande

1,4 %

1,3 %

1,2 %

1,4 %

1,4 %

France

2,7 %

2,6 %

2,6 %

2,5 %

2,6 %

Grèce

5 %

4,9 %

4,8 %

4,3 %

4,1 %

Hongrie

1,6 %

1,7 %

1,8 %

1,8 %

1,9 %

Irlande

0,9 %

0,6 %

0,5 %

0,6 %

0,5 %

Italie

2 %

2,1 %

2 %

1,9 %

1,9 %

Lettonie

1 %

1 %

1,2 %

1,3 %

1,9 %

Lituanie

1 %

1,8 %

1,8 %

1,8 %

1,8 %

Luxembourg

0,8 %

0,7 %

0,8 %

0,9 %

0,9 %

Malte

nc

0,7 %

0,7 %

1,9 %

2,1 %

Pays-Bas

1,8 %

1,6 %

1,7 %

1,6 %

1,6 %

Pologne

2,1 %

2 %

2 %

1,9 %

2 %

Portugal

2,2 %

2,1 %

2 %

2,3 %

2,1 %

République tchèque

2,3 %

2,3 %

2,2 %

2 %

2,2 %

Royaume-Uni

2,6 %

2,5 %

2,5 %

2,4 %

2,4 %

Slovaquie

1,9 %

1,8 %

2 %

1,9 %

1,9 %

Slovénie

1,8 %

1,5 %

1,5 %

1,2 %

1,4 %

Suède

2,3 %

2 %

1,9 %

1,9 %

1,8 %

Etats-Unis

3,1 %

3,1 %

3,2 %

3,3 %

3,7 %

Sources : Publications de l'OTAN et de l'IISS (The Military Balance 2002-2003 et 2004-2005).

Un financement « communautarisé » de la recherche en matière de défense et de sécurité, et du coût commun des opérations liées à la PESD, doit être envisagé. Certes, la France y trouverait à la fois un avantage à son profit et un facteur de rapprochement avec le Royaume-Uni, mais cet objectif de partage équitable des coûts et des risques d'un bien public profitant à tous peut intéresser également d'autres Etats, selon la part du PIB que représentent pour chacun d'eux les dépenses consacrées à la défense.

En définitive, si le contenu de la dépense européenne pouvait être amélioré, notamment selon les pistes indiquées par les rapporteurs, le niveau des perspectives financières pourrait être ajusté à 1 % du RNB en crédits de paiement et 1,05 % en crédits d'engagement.

B. Quelle modernisation du système des ressources propres de l'Union ?

1) La négociation doit aborder la question des ressources propres de l'Union et prévoir un calendrier précis pour la suppression effective de l'abattement britannique

Evoquer la question de la suppression de l'abattement britannique sera nécessairement délicat pour le Conseil européen.

L'unanimité étant indispensable, plane en effet l'hypothèse d'un veto du Royaume-Uni, déjà évoquée par le ministre des affaires étrangères, M. Jack Straw.

On ne peut cependant se résoudre à penser que le Royaume-Uni ne s'en remette pas en définitive à une solution raisonnable consistant à une extinction progressive de ce qui constitue, maintenant que les fondements historiques en ont disparu, un très inéquitable archaïsme.

a) La future décision du Conseil européen et l'accord interinstitutionnel devront prévoir la disparition de l'abattement britannique au plus tard en 2013

· La suppression de l'abattement britannique devra nécessairement être décidée en même temps que l'adoption des perspectives financières 2007-2013

Pour opérer la suppression de l'abattement britannique, le Conseil européen au cours duquel les perspectives financières 2007-2013 seront adoptées, représente le cadre le plus adéquat.

Tel est notamment le cas si un accord doit intervenir dès juin comme l'espèrent la Présidence luxembourgeoise, mais aussi la Commission : il n'est pas concevable qu'un tel accord ne porte que sur les seules dépenses sans aborder la question des ressources.

Certes, compte tenu du mode de financement de l'Union, un tel examen conjoint n'est pas, sur le plan du droit, indispensable.

Il l'est néanmoins d'un point de vue politique.

Accepter de définir un nouveau cadre de dépense sans aborder la question de la correction d'une telle entorse à l'équité dans le mode de calcul des recettes porterait, alors que les deux questions sont étroitement liées, une atteinte dommageable au crédit des actions de l'Union.

· Une clause de rendez-vous en vue d'un réexamen de la question, dans le futur, ne serait pas satisfaisante

Dans les négociations communautaires, la clause de rendez-vous fait partie des compromis classiques. La mesure dont la pérennité est contestée est maintenue, mais l'accord conclu prévoit que la question de son abrogation sera réexaminée dans le futur.

Pour ce qui concerne l'abattement britannique, une telle disposition ou toute autre clause d'inspiration similaire, qui n'engage qu'à une réouverture du dossier quelques années après, sans offrir une garantie quant à la suppression effective de la mesure contestée, ne serait pas acceptable.

L'absence totale de légitimité de cet avantage s'y oppose.

· Le calendrier doit prévoir l'extinction progressive du dispositif et sa suppression totale avant l'échéance des futures perspectives financières

L'élément clef de la négociation de la suppression de l'abattement britannique est donc son calendrier.

Selon les estimations de la Commission, l'avantage que retire le Royaume-Uni de la correction dont il bénéficie sur sa contribution au budget de l'Union devait représenter pour la période 2008-2013 0,27 % de son PNB, à raison d'un solde négatif égal, en moyenne, à -0,25 % après correction et -0,62 % en l'absence de toute correction.

Il n'est donc pas envisageable de prévoir un arrêt brutal sur une année. Il n'appartient en effet pas à l'Union de prendre des mesures qui puissent, par leurs effets macro-économiques, provoquer un ralentissement, même temporaire compte tenu du remarquable dynamisme du Royaume-Uni, de la croissance économique de l'un de ses membres.

La suppression de l'abattement britannique ne peut donc être que progressive.

La question essentielle est par conséquent celle de la date à laquelle son extinction définitive et totale interviendra.

La durée de la période couverte des prochaines perspectives financières, 2007-2013, étant à raison de sept années suffisante pour une réduction à un rythme adapté du « chèque britannique », il convient de prévoir un terme définitif au 31 décembre 2013 au plus tard et l'absence de tout versement après cette date.

b) Les modalités précises de la suppression par étapes de l'abattement restent à définir

Plusieurs possibilités sont envisageables pour organiser la suppression progressive de la correction en faveur du Royaume-Uni.

Il n'appartient pas aux rapporteurs de proposer la solution qui leur semble la plus adaptée, à ce stade.

Ils peuvent seulement observer que la voie la plus simple consiste à constater le délai restant à courir jusqu'à la suppression totale du versement, et à calculer ainsi la somme qu'il faut lui retrancher chaque année.

La Finlande a présenté sa propre proposition de réforme du financement de l'Union. Elle préconise notamment l'introduction d'une compensation budgétaire « temporaire » dégressive pour le Royaume-Uni, de 5 milliards d'euros en 2007 à 2 milliards d'euros en 2012, soit au total 21 milliards d'euros sur la période. Cette compensation budgétaire serait inscrite en dépenses via la création d'une Rubrique 6 ad hoc, et financée suivant les règles actuellement applicables au rabais britannique (donc avec le « rabais sur le rabais ») afin d'éviter une détérioration de la situation allemande.

Cette proposition finlandaise mérite de figurer parmi les différentes options possibles de la négociation mais propose une disparition progressive extrêmement généreuse du rabais britannique, qui doit disparaître dans des délais courts. La proposition finlandaise ne répond donc pas totalement aux attentes de la France mais peut être considérée comme une piste intéressante.

Pour sa part, la présidence luxembourgeoise a proposé dans la quatrième version de sa "boîte de négociation" que le montant de la correction soit fixé, en 2007, d'après la moyenne des restitutions intervenues sur sept ans (1997-2003), avec l'élargissement, et qu'il diminue ensuite à partir de l'année suivante. La réduction substantielle et rapide du montant de l'abattement britannique et un « phasing out » sont ainsi bien identifiés comme les éléments clefs de la négociation.

Néanmoins, le dispositif manque encore de précision.

2) L'Union européenne doit s'engager plus nettement dans la modernisation de son financement en affirmant le caractère prioritaire de l'harmonisation de la base de l'impôt sur les sociétés

a) L'objectif d'une modernisation des ressources communautaires est assez largement partagé, mais ses modalités ne donnent pas lieu à consensus

Opérer un examen critique du mode de financement de l'Union, conduit à constater un certain archaïsme : alors que l'entité commune aux Etats membres n'a cessé de se développer, elle ne dispose d'aucune ressource autonome lui donnant une véritable compétence financière.

Notamment, à l'heure où les règles de rigueur s'imposent à l'ensemble des Etats membres, l'Union européenne est privée de toute possibilité d'asseoir sa légitimité, comme le fait toute entité politique, en modulant ou en diminuant le niveau des prélèvements obligatoires.

Une telle situation est d'abord étrange, car elle rend l'Union invisible pour le citoyen.

Elle est, en outre, particulièrement peu efficace d'un point de vue financier, car elle n'incite pas à la maîtrise budgétaire. Les augmentations de dépenses n'ont qu'un effet très indirect sur le niveau de l'impôt. C'est en effet aux seuls Etats membres qu'il revient d'assumer, en définitive, la charge de voter les conséquences financières des décisions communautaires, dont ils ne maîtrisent, par définition, pas tous les éléments. La forte progression des dépenses telle qu'elle est proposée par la Commission pour les perspectives financières 2007-2013 constitue une illustration de ce principe, si besoin était.

L'idée d'une certaine autonomie financière au niveau européen est donc de ce point de vue parfaitement légitime. Un tel instrument permettrait de mieux clarifier les responsabilités.

Celle d'un impôt européen est même évoquée dans les sphères d'ailleurs les plus diverses. Récemment encore, le 23 mars, M. Alain Trautman, porte-parole de Sauvons la recherche, et M. Pierre Larrouturou, porte-parole de l'Union pour l'Europe sociale, ont évoqué dans le quotidien Le Monde, avec l'idée d'une défense commune et d'une recherche intégrée, d'un impôt européen qui permettrait libérer les crédits nationaux consacrés à ces deux priorités budgétaires à d'autres actions.

Néanmoins, elle se heurte à plusieurs types d'oppositions ou difficultés.

En premier lieu, la création d'une ressource européenne, avec une compétence de l'Union pour fixer son taux et, le cas échéant, prévoir des aménagements de son assiette et de ses modalités de recouvrement, ferait franchir un pas de plus à la construction européenne. Lever la ressource, même en association avec ses membres, est, pour une construction supranationale, l'un des attributs de la souveraineté. En pratique, certains craignent l'apparition de conflits entre le Parlement européen et les parlements nationaux.

En deuxième lieu, le contexte économique actuel n'est pas favorable à l'idée de la création d'une recette nouvelle. Les pays du cœur économique de l'Europe, l'Allemagne, l'Italie et la France, sont dans une phase de faible croissance et de déficits budgétaires trop élevés, et la concurrence fiscale avec les Etats de la périphérie, les soumet à une forte pression pour diminuer les prélèvements obligatoires. Les cycles économiques des différents Etats membres d'Europe n'étant actuellement pas synchronisés, il convient d'attendre des circonstances plus favorables.

En troisième lieu, si l'hypothèse de la création d'un prélèvement européen pour alimenter le budget courant de l'Union était envisagée, le débat ne manquerait pas d'interférer avec les travaux actuellement en cours sur le financement de l'aide au développement.

Il s'agit d'assurer la mise en œuvre du consensus de Monterrey, adopté en mars 2002 par la communauté internationale, dans le cadre de la Conférence sur le financement du développement, qui prévoit notamment un accroissement de l'aide publique au développement.

Pour l'Europe, l'objectif est d'appliquer les engagements décidés sur ces questions dans le cadre du Conseil européen de Barcelone le 14 mars 2002.

Cette initiative est soutenue par le Président de la République, M. Jacques Chirac, qui a notamment parrainé, avec le Premier ministre espagnol et les Présidents brésilien et chilien, le rapport Quadripartite présenté aux Nations unies par le Président Lula en septembre 2004 et émis en janvier 2005, au Forum de Davos, l'hypothèse d'une taxe internationale sur les transactions financières internationales ou les billets d'avion pour financer l'aide aux pays les plus pauvres et, dans un premier temps, les assister dans la lutte contre le sida.

Le document de travail de la Commission, daté du 5 avril dernier, « New sources of financing of development : a review of options », fait état des différentes hypothèses envisagées. Il s'agit :

- d'une taxe sur le kérosène utilisé pour les transports nationaux et intra-communautaires, par les transporteurs aériens. Au taux de 330 euros pour 1.000 litres, son produit serait de 6 à 7 milliards d'euros. Le kérosène utilisé pour de tels vols transfrontaliers est actuellement exonéré ;

- d'une taxe de départ au taux de 10 euros par passager sur les vols intérieurs à l'Union et de 30 euros sur les vols internationaux. La recette annuelle serait de l'ordre de 6 milliards d'euros ;

- d'une taxe sur les transactions financières en devises, qui, introduite sur une base unilatérale, rapporterait, selon une estimation du Trésor français, quelque 7 à 11 milliards d'euros par an ;

- d'une surtaxe de TVA au taux de 0,5, s'ajoutant aux taux actuels. Son produit annuel serait de 14 milliards d'euros ;

- d'une surtaxe de 3 centimes d'ajoutant aux droits d'accises sur les carburants. La ressource serait de quelque 11 à 12 milliards d'euros par an.

Ces éléments recommandent clairement de ne pas envisager, à ce stade la création, d'un prélèvement fiscal européen finançant le budget général de l'Union. Une telle initiative risquerait de provoquer la confusion dans les esprits et serait prématurée.

En revanche, ils n'interdisent pas la mise en place de taxes spécifiques permettant de financer des actions d'aide au développement, le cas échéant, ni naturellement, la poursuite de la réflexion sur les éléments d'une modernisation de l'Union.

b) L'impôt sur les sociétés apparaît à maints égards la ressource la plus adaptée dans la perspective d'un financement plus autonome de l'Union

Compte tenu des difficultés et réticences liées à la création d'un prélèvement européen, seule l'amorce d'un financement autonome de l'Union peut à ce stade être envisagée.

Le budget commun doit rester encore pour une large part financé par les contributions des Etats membres.

Le prélèvement communautaire qui serait ainsi institué n'aurait vocation à couvrir qu'une part du budget de l'Union. Un très grand nombre d'hypothèses est par conséquent envisageable.

Certaines des recettes qui viennent d'être évoquées à propos du financement de l'aide au développement, telles que la taxe sur les vols de départs, ne peuvent être qu'écartées, au premier abord. Pour rester légitime, leur taux doit être réaliste. Dans de telles conditions, elles ne peuvent fournir que des recettes accessoires, de l'ordre de 6 milliards d'euros, dont il ne serait pas sain que le budget de l'Union, sauf si c'est pour couvrir un besoin spécifique tel qu'une majoration de l'aide au développement, devienne le réceptacle.

Dans un rapport en date du 6 septembre 2004 (COM (2004) 505 final/2) intitulé « Le financement de l'Union européenne », la Commission a donc envisagé trois hypothèses portant sur des contributions fiscales offrant des perspectives plus ambitieuses.

La première est la taxation de la consommation d'énergie. La Commission remarque que depuis l'intervention de la directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation d'énergie, la plupart des produits énergétiques sont soumis à des taxes harmonisées, avec des minima d'imposition. Elle envisage toutefois une contribution qui se limiterait aux seuls carburants, avec une possibilité d'extension au kérosène, dont il faut rappeler qu'il est exonéré, notamment pour les vols intra-communautaires.

La deuxième des voies envisagées est la création d'une ressource TVA véritablement fiscale. Elle serait mise en œuvre par le biais d'un taux communautaire, imputé sur le taux global acquitté par les assujettis au niveau national, appliqué à la même base d'imposition. Le taux communautaire viendrait ainsi se substituer à une fraction du taux national. L'opération serait « transparente » pour le redevable.

Cette hypothèse est séduisante dans la mesure où, en l'état, un taux communautaire de 1 % permettrait de couvrir la moitié environ des besoins financiers de l'Union, selon la Commission.

Sur le plan technique, elle se heurte néanmoins à certaines difficultés dans la mesure où l'harmonisation est encore incomplète en matière de TVA. Ce sont essentiellement les éléments taxés au taux zéro qui posent problème. En même temps, mettre fin à ces régimes favorables risquerait de susciter l'hostilité du consommateur.

Quelles que soient les vertus intrinsèques de la taxation de l'énergie ou de la TVA, c'est par conséquent la troisième solution, celle de l'impôt sur les bénéfices des entreprises, qui paraît être la plus adaptée.

D'une part, le produit total de l'impôt sur les sociétés dans les Etats membres, qui représente actuellement entre 2,5 % et 3 % du RNB de l'Union, permet d'envisager de couvrir sans difficulté une fraction, et même une large fraction, des besoins financiers de l'Union.

D'autre part, un impôt sur les sociétés harmonisé au niveau européen permettrait de mieux associer l'Union aux résultats des deux principaux axes de sa stratégie économique : en premier lieu, le parachèvement du marché intérieur, qui donne aux entreprises l'occasion de bénéficier de la liberté d'installation comme de prestation de service, ainsi que d'un marché plus étendu propice aux économies d'échelle ; en second lieu, la stratégie de Lisbonne, qui est notamment centrée sur le développement des activités économiques de haut niveau et à forte valeur ajoutée, dans l'Union.

Ensuite, cette hypothèse permettrait d'améliorer le fonctionnement du marché intérieur en rendant plus rigoureuse, et loyale, la comparaison des niveaux d'imposition entre les différents Etats membres de l'Union.

Pour des raisons d'équité fiscale, l'introduction d'une telle ressource requiert, en effet, l'harmonisation préalable de son assiette de manière qu'un taux unique ne conduise pas à des niveaux de prélèvement différents selon le niveau de la base imposable définie par les Etats membres.

Serait ainsi mis fin à la situation actuelle où l'absence d'homogénéité des bases empêche de procéder à une toute comparaison fiable, notamment des taux. Une telle confusion explique l'absence d'étude simple et incontestable sur ce point.

De plus, les entreprises n'auraient plus à supporter les coûts d'adaptation à 25 régimes fiscaux articulés entre eux par des conventions fiscales, et les incitant toujours à surveiller si elles ne peuvent pas bénéficier d'une « niche » fiscale.


La complexité de la comparaison de l'imposition des entreprises
vue par un expert

Sans même aborder la question des différences de bases, le tableau des taux de l'impôt établi dans le cadre de l'étude du cabinet KPMG, intitulée « KPMG corporate tax rate survey for 2004 - Rates still falling », qui ne fait que donner les pourcentages de prélèvement sur les bénéfices au 1er janvier 2003 et au 1er janvier 2004, ne comprend pas moins de douze pages et demi de note explicative.

En Belgique, par exemple, le taux légal était au 1er janvier 2004 de 33,99 %, mais un taux réduit s'applique lorsque les capitaux sont détenus pour plus de 50 % par des personnes physiques.

Pour l'Allemagne, par exemple, le taux au 1er janvier 2004 est de 38,29 %. Il s'agit en fait, selon la note explicative, de la somme du taux de l'impôt sur les sociétés proprement dit, qui est de 25 %, de la surtaxe de solidarité de 5,5 % ainsi que de la taxe sur le commerce, dont le taux varie entre 13,04 % et 20 % par le biais d'une majoration locale.

En ce qui concerne l'Irlande, la note rappelle que le taux de droit commun de l'impôt sur les sociétés est de 12,5 %, mais qu'un taux de 25 % s'applique à certains produits ou à certaines activités, dont les mines et le pétrole. Un taux réduit de 10 % concerne à l'opposé le Centre des services financiers internationaux des anciens docks de Dublin et le site de Shannon.

Enfin, il est nécessaire de mener au niveau européen une réflexion sur le niveau de taxation des bénéfices des entreprises dans le contexte de la mondialisation.

Comme l'observe l'étude précitée du cabinet KPMG, la réduction des taux nominaux de l'impôt sur les sociétés est particulièrement spectaculaire en Europe. En 2003, la Pologne a réduit le sien de 27 % à 19 %. La Slovaquie a fait de même, de 25 % à 19 %, ainsi que le Portugal à raison de 33 % et 27,5 %.

Les taux de droit commun les plus faibles étaient en 2004 au sein de l'OCDE ceux de pays européens : l'Irlande (12,5 %), la Hongrie (16 %), l'Islande (18 %), la Pologne et la Slovaquie (19 %).

Certes, on comprend que chaque pays veuille tenter de reproduire l'exemple de l'Irlande.

Néanmoins, il importe que l'Europe veille à conserver des taux d'imposition des entreprises comparables avec ceux de ses principaux partenaires économiques et commerciaux.

En effet, si les taux européens leur sont nettement plus élevés, les entreprises européennes seront pénalisées, mais l'inverse n'est pas nécessairement exact compte tenu du grand nombre des facteurs qui président à la localisation d'une activité.

Dès lors que le cabinet KPMG recense comme taux d'imposition des bénéfices, au 1er janvier 2004, 40 % aux Etats-Unis, 36,1 % au Canada, 33 % au Mexique, 33 % en Turquie, 33 % en Chine ou encore 35,875 % en Inde, on doit s'interroger sur l'intérêt réel de l'actuelle course à la baisse des taux en Europe.

Comme les sociétés sont toujours détenues in fine par des personnes physiques et que l'impact de l'impôt sur les sociétés est en principe neutralisé pour le calcul de l'impôt sur le revenu, il est à craindre que les principaux gagnants ne soient en définitive les pays tiers où résident les actionnaires étrangers des sociétés européennes, leurs administrations financières voyant croître le produit de leur impôt sur le revenu.

c) Les travaux sur l'harmonisation de l'assiette de l'impôt sur les sociétés revêtent donc un caractère prioritaire

Face à l'intérêt manifesté par plusieurs de ses Etats membres, parmi lesquels l'Allemagne et la France, d'une harmonisation des bases de l'impôt sur les sociétés, la Commission n'est pas restée inerte.

Elle a constitué à l'automne 2004 un groupe de travail sur une base commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés.

Il faut saluer cette initiative qui s'est heurtée au scepticisme du Royaume-Uni et de l'Irlande, notamment.

Ces travaux peuvent s'appuyer sur les résultats de l'harmonisation des bases comptables, l'application des normes IAS-IFRS (International accounting standards) étant dorénavant obligatoire pour toutes les sociétés de l'Union européenne cotées en bourse, les institutions financières et les compagnies d'assurance, pour établir leurs comptes consolidés, à partir de 2005.

Sur le plan technique, les questions à évoquer pour l'harmonisation d'une base de l'impôt sur les sociétés sont nombreuses.

Elles imposent notamment d'examiner les règles relatives aux amortissements, aux provisions, aux plus-values, aux produits financiers et aux revenus de la propriété intellectuelle.

Le groupe de travail a tenu deux réunions seulement, l'une le 23 novembre 2004, l'autre le 10 mars dernier. Une troisième a été prévue avant la fin du mois de juin 2005.

En l'état, ces travaux ne sauraient donc aboutir à une échéance peu éloignée.

Il convient donc que la Commission prévoie des moyens supplémentaires de manière à permettre à un terme suffisamment rapproché, dès 2006 ou 2007, l'intervention d'une proposition de directive.

Si l'on tient compte ensuite des délais d'adoption puis de transposition d'un tel texte par les Etats membres, il est à craindre que si ces échéances ne sont pas respectées, la Commission ne soit même pas en mesure d'évoquer la modernisation du financement de l'Union en 2010 lors que les premières ébauches de perspectives financières, qui devraient débuter en 2014, seront tracées.

C'est d'ailleurs le calendrier que confirme implicitement la présidence luxembourgeoise en proposant, dès la troisième version de sa "boîte de négociation", présentée le 19 mai 2005, de demander à la Commission de présenter « en 2010, un examen du système des ressources propres, prévoyant notamment la possibilité de modifier la structure des ressources propres en créant de nouvelles ressources propres autonomes. ». Cette proposition est intégralement reprise par la quatrième version de la "boîte".

Si son produit était, à l'avenir, partiellement transféré au niveau européen, l'impôt sur les sociétés n'aurait naturellement pas, lors de sa création, vocation à entraîner de variation de la pression fiscale : il se substituerait soit à la ressource TVA, soit à une fraction de la ressource PNB.

Les principaux éléments des dernières versions de la « boîte de négociation » de la présidence luxembourgeoise, présentées le 19 mai et le 2 juin 2005

I. En matière de dépenses

a) La troisième version de la "boîte de négociation" présentée au Conseil par la présidence luxembourgeoise a apporté les éléments suivants :

Par rapport à la deuxième version, qui avait été soumise aux membres du Conseil le 25 avril 2005, le document révisé par la présidence et présenté le 19 mai comporte les premiers éléments d'un chiffrage des différentes rubriques des perspectives financières, sous forme de fourchettes. Au total, ces nouvelles propositions esquissent pour le compromis final une fourchette de 870 à 905 milliards d'euros pour 2007-2013, soit 1,055 à 1,1 % du RNB communautaire, en crédits d'engagement. Rappelons que les propositions de la Commission s'élèvent à 1 022 milliards d'euros en crédits d'engagement, tandis que la France préconise une enveloppe globale de 815 milliards.

· Concernant la sous-rubrique 1a, pour laquelle la Commission proposait une enveloppe totale de 132,7 milliards, la fourchette proposée est de 84,7 à 95,5 milliards d'euros. Mention explicite est faite de la politique en faveur de la recherche, et il est à noter qu'en plus d'un critère d'excellence, la proposition de la présidence choisit de mentionner le souci d'un « accès juste et équitable », ce qui pourrait constituer un lien avec la politique de cohésion.

· Concernant la sous-rubrique 1b, la fourchette proposée est de 305 à 313 milliards, soit entre 0,37 et 0,38 % du RNB communautaire, à comparer aux 0,42 % prônés par la Commission.

La répartition des crédits entre les trois objectifs serait la suivante : 82 % pour l'objectif de convergence, 15 % pour l'objectif de compétitivité, et 3 % pour l'objectif de coopération territoriale. S'agissant de l'enveloppe réservée aux régions ultra-périphériques de l'Union, la mention explicite de leur spécificité conforte la position française et espagnole en faveur d'un soutien à ces régions, mais le montant envisagé du financement (indiqué sous forme d'un taux d'aide par habitant) est moins favorable que dans les propositions précédentes. Le document maintient la proposition, précédemment formulée, d'introduction d'un « phasing out » du Fonds de cohésion lié à l'«effet statistique », ce qui représente un geste en faveur de l'Espagne. Le « phasing out » des régions touchées par l'effet statistique est accéléré*. Le plafonnement différencié des
.../...
fonds structurels en fonction de la prospérité relative des nouveaux Etats membres est conservé dans une version moins rigoureuse (chaque tranche voyant son taux plafond relevé d'un dixième de point)**.

· Concernant la rubrique 2, le document de la présidence prend acte du fait que les dépenses prévues pour la Bulgarie et la Roumanie constituent encore un point en discussion, alors que la France considère qu'il ne saurait être question de financer ces dépenses sous le plafond fixé par l'accord de Bruxelles.
· Concernant la rubrique 4, la présidence envisage d'exclure le FED alors que la France (comme la Commission) maintient sa position en faveur de la budgétisation de ce fonds.

b) Le 2 juin 2005 la Présidence a formulé une nouvelle proposition qui, par rapport à la troisième version présentée ci-dessus, se base sur une enveloppe globale de 875 milliards d'euros en crédits d'engagement (1,06 % du RNB communautaire) et 786 milliards d'euros en crédits de paiement (0,96 % du RNB) et se place donc au bas de la fourchette précédemment envisagée.

Cette nouvelle proposition, qui constitue la quatrième version de la "boîte de négociation" :

- aborde la question des dépenses du "premier pilier" de la PAC en prenant acte de l'enveloppe de 293 milliards découlant des accords de 2002-2003 et en proposant d'y ajouter une somme de 2 milliards pour tenir compte de l'adhésion à l'Union de la Roumanie et de la Bulgarie ;

- prévoit pour la sous-rubrique 1a un total de 74 milliards pour 2007-2013, et un total de 12 milliards pour la rubrique 3, soit des montants très nettement inférieurs à ceux préconisés par la Commission ;

- prend acte du fait que la budgétisation du FED est encore un point non tranché à ce stade mais confirme la volonté du Luxembourg de proposer que le FED demeure en dehors du budget général (puisque seul un chiffrage global hors FED est proposé pour la Rubrique 4 : 51 milliards d'euros) ;

- enfin, propose pour la Rubrique 5 un montant total de 51,3 milliards d'euros pour la période et pour les dépenses administratives de toutes les institutions, alors que les propositions de la Commission se basaient sur une enveloppe totale de 57,67 milliards répartie entre les différentes rubriques***.


.../...

II. En ce qui concerne les ressources propres
, la présidence prévoit :

- de fixer, en 2007, le montant de la correction britannique sur la base d'une moyenne calculée au cours d'une période antérieure à l'élargissement intervenu au 1er mai 2004, d'une durée de sept ans (1997-2003), et de le faire aller en diminuant à partir de l'année suivante ;

- de mettre en place, pour la période 2007-2013, des mesures spécifiques en faveur de l'Allemagne, des Pays-Bas et de la Suède, financées par tous les Etats membres au prorata de leur RNB respectif, afin que ces Etats ne supportent pas une charge budgétaire excessive au regard de leur prospérité relative. Ces mesures consisteraient en une réduction du taux d'appel de la ressource TVA pour les trois Etats concernés ;

- d'améliorer la transparence et la simplicité du financement communautaire, en gelant à 0,30 % le taux d'appel de la ressource TVA (il s'agit d'une mesure de nature technique) ;

- d'ouvrir la voie à un système présentant un caractère plus permanent, en demandant à la Commission de présenter en 2010 un réexamen général du système des ressources propres et en prévoyant la possibilité de modifier celui-ci en créant, le cas échéant, de nouvelles ressources propres autonomes.

TRAVAUX DE LA DELEGATION

1) Audition de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur les perspectives financières 2007-2013, le mercredi 6 avril 2005

Après avoir considéré qu'il était important que la Délégation auditionne le ministre le plus rapidement possible après sa prise de fonction à Bercy, le Président Pierre Lequiller l'a interrogé sur l'état d'avancement des négociations sur les perspectives financières, ce sujet ayant fait, tout à l'heure, l'objet d'une question d'actualité à laquelle le Premier ministre a répondu.

En ce qui concerne l'enveloppe proposée pour les réseaux transeuropéens de transport et d'énergie, soit 22,7 milliards d'euros pour la période 2007-2013, il a souhaité connaître la position française vis-à-vis de cette enveloppe.

M. Thierre Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a affirmé qu'il était important pour tous les acteurs politiques de cette négociation, c'est-à-dire le Parlement et le Gouvernement, de jouer « collectif ». En effet, comme le Premier ministre l'a rappelé cet après-midi, les négociations sur les perspectives financières revêtent une importance cruciale pour la France.

Le ministre a précisé qu'il présenterait le cadre de ces négociations et la tactique adoptée par le Gouvernement, la perspective du prochain référendum sur le projet de traité constitutionnel accentuant le caractère très particulier des discussions en cours.

Après avoir souligné que cette audition par la Délégation était la première du genre pour lui, il a d'abord rendu hommage au travail du Parlement sur l'élaboration des prochaines perspectives financières. Il a déclaré que sa réflexion se nourrit des travaux du Parlement, plus particulièrement des propositions issues de la mission confiée par le Premier ministre à M. Marc Laffineur, ainsi qu'au sénateur Serge Vinçon, et de celle confiée par la Délégation à MM. René André et Marc Laffineur.

La qualité de ces contributions incite à la multiplication des échanges entre le Gouvernement et le Parlement sur un sujet aussi complexe et important pour l'avenir de l'Europe.

Abordant le premier point de son exposé, le ministre a présenté le contexte et les enjeux des négociations.

L'enjeu de la négociation consiste à donner à l'Europe un cadre budgétaire maîtrisé. Le Premier ministre l'a rappelé dans sa réponse aux questions d'actualité : à l'heure où la France doit respecter les règles européennes du jeu budgétaire, les institutions européennes doivent, en contrepartie, maîtriser leurs dépenses.

Cette stricte réciprocité des efforts impliquera, du côté européen, de hiérarchiser les moyens affectés aux politiques, un objectif d'autant plus prioritaire qu'à l'heure actuelle, le désordre règne dans ce domaine.

Parallèlement, l'Europe, avec ce cadre maîtrisé, doit se doter de moyens adaptés à son ambition politique. Le ministre a alors estimé que cette ambition peut se décliner en trois axes prioritaires.

Premièrement, la solidarité doit rester au cœur de la construction européenne. Elle doit impérativement s'exercer à l'égard des nouveaux Etats membres, afin de favoriser leur rattrapage économique et social. Car la dynamique qui a été si efficace pour l'Europe du Sud doit maintenant leur bénéficier.

Ainsi, la politique de cohésion doit exercer ses effets bénéfiques sur l'ensemble du territoire de l'Union. Cette ambition est noble : elle consiste à faire de l'harmonisation économique et sociale la base et le moteur de la construction européenne.

En outre, depuis le début des années 1990, l'Europe a établi avec les nouveaux entrants des relations commerciales ouvertes, qui sont bénéfiques pour nos entreprises et pour nos emplois. Dès lors que le jeu des localisations et des délocalisations s'exerce dans les deux sens, cette stimulation mutuelle peut jouer très avantageusement pour tous les pays.

Il reste que le maintien de l'objectif de cohésion aura un coût. Toutefois, cet effort pèsera sur un PIB qui, lui aussi, sera « élargi ». Aussi est-il tout à fait normal de vouloir redistribuer quand l'Europe, globalement, s'enrichit.

La solidarité doit aussi s'exercer vis-à-vis des agriculteurs, sur le fondement d'une PAC pérennisée jusqu'en 2013 par les accords de Bruxelles d'octobre 2002 et la réforme de Luxembourg de juin 2003.

Deuxièmement, l'Europe politique qu'il faut construire doit aussi accorder une priorité à la croissance.

En mars dernier, le Conseil européen a réformé le pacte de stabilité et de croissance, tout en révisant la stratégie dite de Lisbonne. Ces développements doivent encourager les Etats membres à stimuler la croissance et l'emploi, qui toutes deux conditionnent le maintien du modèle social européen.

Parallèlement, sans être la clé de l'avenir de l'Union, l'argent européen pourra jouer un véritable rôle de catalyseur, à la condition d'être intelligemment utilisé.

Troisièmement, l'Europe doit accorder la plus grande importance à l'affirmation de son rôle dans le monde. Dans cette perspective, le G8, actuellement sous présidence anglaise, devrait placer l'Afrique au centre de ses priorités, dans le prolongement des propositions du Président de la République. De même, l'engagement de la communauté internationale en faveur de l'aide publique au développement doit être relancé. Enfin, les dispositifs d'aide extérieure de l'Union doivent être réformés, afin d'en améliorer l'efficacité, ce qui implique, notamment, la budgétisation du fonds européen de développement.

Le ministre a alors abordé, le deuxième point de son exposé, les motivations de la position française.

Tous ces défis peuvent être relevés en dépensant moins que le propose la Commission. C'est pourquoi la France, avec cinq autres pays contributeurs nets, a proposé que le budget européen soit contenu en dessous de 1 % du revenu national brut de l'Union, soit 815 milliards d'euros en crédits d'engagement au prix de 2004 pour l'ensemble de la période 2007-2013.

Le ministre a insisté sur le fait que la position française n'a pas pour objectif caché de « rogner » les ailes au projet européen et de le priver des moyens de son développement. Celle-ci n'a qu'un but : réussir le pari d'une Europe politique, qui puisse agir comme telle, en utilisant les moyens les plus qualifiés.

Il a rappelé par ailleurs que la position de négociation sur le 1 % permet une progression du budget européen de près de 50 milliards d'euros supplémentaires par rapport à la période 2000-2006, soit l'équivalent du produit annuel de l'impôt sur le revenu, avant de souligner, une fois encore, que maîtriser la dépense pour la rendre plus efficace revient à traduire au niveau européen les engagements pris sur le plan national.

La France a donc tenu, par la voix du Président de la République, à rappeler la nécessité d'une discipline budgétaire. L'enjeu est d'autant plus important que la proposition de la Commission entraînerait, à horizon 2013, une hausse de l'ordre de 5 milliards d'euros de la contribution française, et à augmenter ainsi d'un tiers un prélèvement européen qui déjà atteindra, en 2005, environ 16,6 milliards d'euros.

Mais le principe de réalité commence à s'imposer aux négociateurs : ainsi, il est apparu, au cours des premières discussions, qu'une large majorité d'Etats membres a considéré que les propositions de la Commission sont beaucoup trop élevées.

Le ministre a donc estimé que la proposition de la Commission est très loin du point d'équilibre de la négociation et ne peut paraître une base réaliste pour trouver un accord.

La seconde pierre angulaire de la position française concerne le respect plein et entier des engagements pris par le Conseil européen à Bruxelles et à Copenhague en matière de PAC.

L'analyse selon laquelle la PAC coûterait trop cher ne résiste pas à un examen approfondi. De plus, la PAC d'aujourd'hui ne ressemble en rien à sa première construction : elle a été réformée en juin 2003 pour définir un nouvel équilibre entre les aspirations des agriculteurs et celles de la société. Le cadre mis en place renforce la qualité et la sécurité de l'alimentation, tout en encourageant le respect de l'environnement. Surtout, il convient de ne pas oublier que tout étant devenue plus vertueuse, la PAC représente un effort budgétaire qui n'est pas très éloigné de celui constaté aux Etats-Unis.

Par ailleurs, le compromis budgétaire sur la PAC négocié par la France et l'Allemagne a permis le déblocage, fin 2002, des négociations d'élargissement. Dans ces conditions, remettre en cause l'accord de Bruxelles, que ce soit par la proposition d'un cofinancement des aides directes, comme le suggère le député européen Reimer Böge, ou par le refus de relever les plafonds à concurrence des dépenses prévues pour l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, empêcherait tout accord global sur les perspectives financières.

L'engagement du Président de la République et du Gouvernement pour défendre les accords de 2002 et 2003 est donc total. Le ministre a jugé d'ailleurs rassurant, le fait que, contrairement à la situation prévalant il y a sept ans, les négociateurs commencent leur travail en partant d'une base négociée par les chefs d'Etat et de Gouvernement.

La troisième pierre angulaire de la position française est le souhait d'un financement équitable et transparent du budget, en particulier de la charge budgétaire liée à l'élargissement.

De ce souhait, découlent trois conséquences.

Tout d'abord, le chèque britannique ne se justifie plus. Si Mme Thatcher a réussi un « beau tour », les conditions qui prévalaient en 1984 ont changé, que ce soit la place de l'agriculture dans le budget européen ou le retard économique du Royaume-Uni.

Il n'est plus concevable qu'un pays soit exonéré de son devoir de solidarité vis-à-vis des dix nouveaux Etats membres. La France, à cet égard, contribue actuellement à hauteur de 30 % au financement du chèque britannique. C'est la raison pour laquelle le Président de la République plaide, avec une fermeté certaine, en faveur du réexamen de ce système.

Par ailleurs, l'introduction d'un mécanisme de correction généralisée, qui appliquerait le principe du chèque britannique aux principaux contributeurs nets n'est pas acceptable. L'analyse du Président Jean-Claude Junker, selon laquelle on ne corrige pas une erreur en la généralisant, est partagée par plusieurs de nos partenaires, notamment l'Allemagne.

La dernière conséquence est qu'un accord intérimaire sur les dépenses pour quelques années, même assorti d'une clause de rendez-vous, ne présenterait pas les garanties suffisantes dont la France a besoin.

Au total, ces pré-conditions posées, les Etats membres doivent avoir le courage de poser la question des ressources propres du budget européen.

Venant au troisième point de son exposé, le ministre a présenté les résultats obtenus dans les négociations et la justification de la ligne du 1 %.

A ses yeux, le premier bilan des discussions plaide en faveur de la position de négociation du Gouvernement. En effet, cette position va, compte tenu de ce qui peut être observé, permettre de nouer des alliances et des dynamiques utiles pour l'avenir. Cette stratégie, qui a fait la preuve de son efficacité à l'occasion de la réforme du pacte de stabilité, permettra sans doute d'obtenir d'autres résultats. Car en ce qui concerne le Pacte, le lien franco-allemand a impulsé le changement d'attitude de l'Italie, puis œuvré en faveur de la neutralisation de l'Autriche et des Pays-Bas

D'ores et déjà, l'accord avec les cinq autres pays sur le 1 % s'est accompagné de la pleine reconnaissance des accords de Bruxelles sur la PAC, ce qui a par ailleurs conduit nos partenaires britanniques, néerlandais et suédois à une certaine retenue vis-à-vis de la PAC.

De même, la proposition italienne de cofinancement des aides directes de la PAC n'a reçu qu'un faible écho, alors que cette position a été, par le passé, défendue par tous les partenaires de la France au sein du groupe des six.

Toutefois, la sanctuarisation de la PAC restant fragile, l'objectif prioritaire de la France, sur cette question, est qu'elle ne devienne pas une ligne de partage des positions des Etats membres.

La cohésion du groupe des six a permis également de faire évoluer le débat sur les perspectives financières.

A l'heure actuelle, les Etats membres ne se positionnent plus pour ou contre la proposition de la Commission, mais estiment tous que son projet doit être revu à la baisse : le caractère irréaliste de ce dernier fait désormais consensus. Le groupe des six aura donc fait sortir la Commission du bois, en l'obligeant à abandonner sa position tactique.

Le ministre a alors considéré que l'Europe se fera, quelle que soit l'issue du référendum. Le choix des Français est un choix souverain, qu'il conviendra de respecter. Cependant, plus ce choix sera conforme à l'intérêt européen de la France, plus cette dernière sera forte en Europe. Dans le cas contraire, il est à craindre que la voix de la France ne se fera pas aussi bien entendre.

Le ministre a insisté sur le fait que cette négociation, qui présente autant d'enjeux, ne peut être gérée comme une négociation courte. La dimension tactique prend donc toute sa place.

Une concession affichée trop tôt est immédiatement engrangée et déplace le curseur sans retour possible. D'autre part, il est encore trop tôt pour savoir si les lignes bougeront dans les semaines qui viennent, car cela dépendra de la perception de chaque Etat membre quant à la possibilité de conclure un accord en juin.

Enfin, la ligne du 1 % est le meilleur moyen d'éviter l'introduction d'un mécanisme de correction généralisée. Plus la dépense communautaire, et donc la contribution de l'ensemble des « gros contributeurs nets » est maîtrisée, moins le maintien ou la mise en place de dispositifs de correction apparaîtra comme indispensable. A l'inverse, une telle garantie risquerait de peu bénéficier à la France, qui est un contributeur net de second rang et est assurée d'être le principal financeur d'un tel mécanisme.

Abordant le dernier point de son exposé, le ministre a présenté les prochaines étapes des négociations.

La présidence souhaite conclure un accord en juin prochain, en profitant de la dynamique créée par le succès de la réforme du pacte de stabilité et de croissance. Mais il reste encore trop d'incertitudes dans les paramètres de la négociation pour prédire les chances d'un accord à cette échéance. Une chose est sûre toutefois : la France sera d'autant plus écoutée dans ces négociations que la victoire du oui au référendum aura été plus nette.

La présidence prépare le Conseil européen de juin sur la base d'une « boîte de négociations », sensée constituer l'ossature des futures conclusions du Conseil européen. Cependant, il est manifeste que tous les sujets sensibles resteront sur la table jusqu'au dernier moment.

La position de la France découle de ce calendrier et de ces incertitudes quant à la possibilité d'un accord dès juin 2005.

Quoi qu'il en soit, la France maintient la ligne du 1 %. Deuxièmement, la discussion de fond sur le volet de dépenses doit être engagée, afin de sortir de la logique de la Commission selon laquelle un bon budget est un budget dont toutes les rubriques progressent uniformément.

Cela implique de réfléchir à la politique de cohésion ou aux domaines pour lesquels la Commission propose des augmentations spectaculaires, comme le doublement des dépenses de recherche ou la multiplication par sept des dépenses relatives aux infrastructures de transport. On voit bien que l'effet d'affichage est privilégié par rapport à la substance.

Or, la démarche des Etats membres doit être réaliste, c'est-à-dire compatible avec l'efficacité économique et les capacités d'absorption réelles des Etats membres.

En conclusion, M. Thierry Breton a déclaré que la France abordait la suite des discussions dans un état d'esprit résolument positif, tout en affirmant que le contenu de l'accord devra primer sur le respect du calendrier.

M. René André, rapporteur, a estimé que le plafond proposé par la Commission à 1,14 % permettrait difficilement de préserver la PAC, les fonds structurels, de financer la recherche ou la stratégie de Lisbonne. Or, il apparaît également souhaitable, selon lui, de prévoir une ligne budgétaire pour la politique de la défense, ce qui permettrait de réduire l'effort de la France en ce domaine et de faciliter les négociations avec la Grande-Bretagne sur la diminution de son « chèque ».

Evoquant les négociations à venir, il a jugé nécessaire de travailler avec l'Allemagne et a souligné la vive inquiétude de l'Espagne quant aux conséquences de la diminution des fonds structurels, assimilée dans ce pays à ce qu'il a appelé un « effet guillotine ».

En conclusion, il a insisté sur la nécessité de préserver la PAC et d'approfondir la construction européenne.

Le ministre a fait remarquer que sur les projets cités par M. René André, les priorités n'avaient pas été clairement identifiées en vue d'un arbitrage. Il a donc souhaité, avec le Gouvernement, que la définition des projets soit hiérarchisée. Evoquant la question de l'Europe de la défense, il a relevé qu'en ce domaine il n'existait toujours pas de consensus, tout en comprenant la proposition défendue par M. René André. Le ministre a rappelé que la France avait suggéré que, dans le cadre de l'aménagement du pacte de stabilité, ne soient pas prises en compte les dépenses consacrées à la recherche y compris la recherche militaire, ni celles en matière de solidarité extérieure - c'est-à-dire celles engagées pour faire face à des tragédies militaires, climatiques ou aux interventions sur des théâtres d'opérations extérieures dans le cadre d'un mandat de l'ONU. Il a estimé que la conclusion d'un accord au mois de juin lui paraissait un objectif ambitieux, lequel nécessitera, en tout état de cause, beaucoup de discussions.

M. Philippe Martin, constatant que le budget pourrait être plafonné à 1 %, a souhaité savoir quelles seraient les réactions des autorités françaises face à la proposition du Premier ministre belge, qui souhaite fixer à 16 % des crédits d'engagement et à 18 % des dépenses le montant du budget de la recherche-développement.

Le ministre a marqué son accord pour un tel objectif, déclarant que la France avec 2 % du PIB consacré à la recherche-développement se disqualifiait. La recherche est une véritable priorité sur laquelle les Etats membres devraient tomber d'accord et, à cet effet, se donner les moyens pour accroître les dépenses et pas seulement celles consacrées à la recherche publique. Il s'agit également de faciliter les allers-retours entre les secteur public et privé et de donner des perspectives aux jeunes chercheurs. Pour ce qui est de la France, ce sont les objectifs que le projet de loi sur la recherche veut poursuivre, conformément à la volonté clairement exprimée par le Gouvernement. Mais il importe aussi d'inciter les entreprises à réinvestir une partie de leurs bénéfices dans le domaine de la recherche ou dans des entreprises innovantes. A l'échelle de l'Europe, il est nécessaire que de grands projets soient de nouveau définis car, depuis le programme Eurêka qui a permis d'irriguer la recherche européenne en particulier dans le domaine des semi-conducteurs, les grands projets font défaut. Le ministre a estimé qu'il serait nécessaire de définir au moins dix grands projets en vue de restructurer la recherche européenne.

M. Bernard Deflesselles, tout en notant que la France s'engage dans une négociation délicate, a déclaré qu'une Europe de la défense devait exister afin de permettre l'apparition d'une Europe politique. Soulignant les difficultés auxquelles se heurte la construction d'une Europe de la défense, il a rappelé que d'après le rapport qu'il a remis à la commission de la défense sur les industries de défense européennes, 99 % des capitaux s'investissant dans l'Union européenne provenaient des Etats-Unis. En outre, seulement six Etats membres ont un budget militaire significatif, ce qui imposera de convaincre les autres d'accroître leur effort dans le domaine de la recherche militaire. Evoquant le cas de la France, M. Bernard Deflesselles a relevé que la recherche militaire irriguait la recherche civile et que le budget de la défense à travers la loi de programmation militaire permettait à l'Etat d'être le premier investisseur en France. Il a également fait valoir que le fait que l'Agence européenne de défense tienne ses missions des Etats membres pourrait inciter ces derniers à augmenter les crédits. Evoquant la situation de la Grande-Bretagne, M. Bernard Deflesselles a considéré que la France devrait négocier avec elle compte tenu du fait que son budget en matière de défense est le plus important de l'Union européenne. En revanche, M. Bernard Deflesselles a craint que la situation de contributeur net du Royaume-Uni ne soit de nature à compliquer la discussion sur la diminution de son « chèque ».

M. Jacques Myard a approuvé la proposition française visant à plafonner les dépenses européennes à 1 % du revenu national brut de l'Union, mais a estimé que cette position sera difficile à tenir, compte tenu de l'impact de l'élargissement, de l'essor des politiques de coopération tous azimuts et de la faiblesse de certains pays de la zone euro, la Grèce en particulier. Il s'est interrogé sur l'efficacité du budget européen, qui opère un véritable « saupoudrage » à travers une kyrielle d'actions, notamment en matière d'action extérieure. Il faut mener de grandes politiques au niveau européen, mais d'une autre nature que les politiques actuelles. En ce qui concerne les fonds structurels, une telle usine à gaz n'est pas nécessaire. Le pacte de stabilité et de croissance continue de prévoir que les sanctions applicables à un Etat membre pourront prendre la forme d'amendes allant jusqu'à 0,5 % du PIB de l'Etat concerné, ce qui aura un effet déflationniste important.

M. Jacques Floch a souhaité beaucoup de courage au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie au cours de cette négociation sur les perspectives financières 2007-2013, en particulier en ce qui concerne la remise en cause du « chèque britannique ». Il a rappelé que des élections législatives sont en effet prévues le 5 mai prochain au Royaume-Uni, et il a mis en doute la volonté de la droite française, qui souhaite la victoire du Premier ministre actuel, de porter atteinte à la popularité de M. Tony Blair en obtenant une diminution du « rabais britannique ». Cette correction budgétaire apparaît injustifiée à beaucoup d'Européens, compte tenu de l'augmentation du PIB du Royaume-Uni, et il faudra y mettre un terme. Ces fonds doivent bénéficier aux nouveaux Etats membres, dont les besoins sont importants. Il a souhaité savoir quelles perspectives le gouvernement français pourrait dessiner pour l'Europe à partir de sa proposition de plafonner les dépenses européennes à 1 % du revenu national brut de l'Union.

M. Daniel Garrigue a souligné l'aspect théorique de ce débat, les négociations de cet ordre se terminant généralement « à l'arraché ». Il a souligné que le plafonnement des dépenses européennes à 1 % du revenu national brut de l'Union conduirait à une augmentation du budget de près de 50 milliards d'euros par rapport à la période 2000-2006, et a souhaité savoir si ce plafond de 1 % a déjà été dépassé lors des perspectives financières actuelles. L'Europe n'agit de toute façon pas qu'à travers ses dépenses budgétaires, elle avance aussi grâce à des coopérations intergouvernementales et en coordonnant l'action des Etats membres.

M. Robert Lecou a indiqué qu'il a participé, le 5 avril 2005, à une réunion interparlementaire organisée par le Parlement européen à Bruxelles sur les perspectives financières, et il a souligné la nécessité de défendre une position cohérente sur ce sujet. Le budget européen a surtout été consacré, jusqu'ici, à la politique agricole et aux fonds structurels. Or certaines régions françaises n'ont pas su utiliser ces fonds, alors qu'ils sont essentiels pour certaines d'entre elles, en particulier les régions en reconversion économique bénéficiaires de l'objectif 2. Il s'est également inquiété que des crédits soient prévus pour la Croatie et la Turquie.

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a remercié les intervenants pour leurs encouragements et a apporté les éléments de réponse suivants :

- la France ne mènera pas cette négociation seule. Plusieurs de nos partenaires partagent notre vision, en particulier les cinq autres contributeurs nets (Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède), ayant signé la lettre du 15 décembre 2003. Le dialogue sera poursuivi avec eux, pour défendre une position commune au cours des négociations ;

- d'autres Etats se servent de leurs industries de défense pour soutenir, directement ou indirectement, leur politique de recherche et développement. La défense européenne est en marche, et beaucoup de progrès ont été accomplis, grâce à l'axe franco-britannique et à l'axe franco-allemand. La France joue donc un rôle central. La révision du pacte de stabilité et de croissance est un premier pas dans la bonne direction. Il faudra aussi développer des coopérations intergouvernementales et entre les entreprises concernées, qui le font déjà pour atteindre une taille mondiale sur un socle européen. La nationalité des actionnaires pèse peu dans leurs choix, mais il est important que les entreprises de défense conservent une identité européenne ;

- la négociation des nouvelles perspectives financières est le bon moment pour discuter du « chèque britannique », en ayant une vision plus dynamique de cette question ;

- les fonds structurels fonctionnent bien dans certaines régions, même si des économies pourraient être réalisées, en ciblant des projets plus spécifiques ;

- les crédits relatifs à la Croatie et à la Turquie sont des crédits de pré-adhésion. Les négociations d'adhésion dureront, pour certaines, dix, quinze ou vingt ans peut-être, et elles ne signifient pas que ces Etats adhéreront à l'Union.

2) Réunion de la Délégation du jeudi 9 juin 2005

La Délégation s'est réunie le jeudi 9 juin 2005, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information.

L'exposé des rapporteurs a été suivi d'un débat.

Le Président Pierre Lequiller a jugé important que la Délégation pour l'Union européenne prenne position, alors que la négociation sur les perspectives financières se révèle très difficile, surtout après le rejet du Traité constitutionnel par la France et les Pays-Bas. Après avoir indiqué que la Commission des Finances de l'Assemblée nationale se prononcera à son tour le 15 juin sur le texte adopté par la Délégation, le Président Pierre Lequiller a fait état d'une récente inflexion de l'Allemagne, qui pourrait assouplir sa position, sous certaines conditions. Par ailleurs, si le Premier ministre britannique, M. Tony Blair, a réaffirmé le 8 juin devant la Chambre des Communes qu'il n'est pas question de supprimer l'abattement dont bénéficie son pays, il semblerait toutefois qu'il ait été moins catégorique sur le montant de ce « chèque », ce qui pourrait laisser entendre une évolution de la position du Royaume-Uni. En tout état de cause, les questions budgétaires se trouvent au centre du débat européen, comme cela s'est vérifié lors du référendum néerlandais sur le Traité constitutionnel. Il est souhaitable que les parlementaires apportent un soutien constructif à la position française.

Après avoir salué la qualité de l'exposé des rapporteurs, M. Bernard Deflesselles s'est interrogé sur l'éventualité d'une évolution de la position française dans le cadre d'un compromis global sur le budget européen. Dans cette hypothèse, il a demandé aux rapporteurs quelles marges de manœuvre avaient pu être prises en compte pour que, in fine, le Parlement ne se trouve pas en décalage par rapport au Gouvernement.

En réponse, M. René André, rapporteur, a regretté qu'en effet, sur certains sujets, à l'image de l'intention exprimée par le nouveau ministre de l'Education nationale de ne pas signer les décrets d'application de la loi sur l'école, le travail parlementaire soit malheureusement trop souvent tenu pour quantité négligeable. Mais en l'espèce, le texte de la résolution est adapté aux circonstances.

M. Marc Laffineur, rapporteur, a confirmé que la position de la Délégation s'inscrivait dans le cadre des négociations en cours.

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que la position de la France concernant la limitation du niveau de la dépense communautaire à hauteur de 1 % du RNB est parfaitement compréhensible si on la lie à la phase d'entrée en négociation. C'est pourquoi le Gouvernement doit être soutenu par le Parlement : cette position est un signe de responsabilité.

Après les observations de M. André Schneider, sur proposition de M. René André, rapporteur, la Délégation a adopté deux amendements à la proposition de résolution présentée précisant, d'une part, que les Etats membres doivent se plier à l'effort de maîtrise de la dépense publique et, d'autre part, que les propositions de la Commission prévoient une progression trop importante des dépenses communautaires.

A l'issue de ce débat, la Délégation a adopté la proposition de résolution, ainsi modifiée, dont le texte figure ci-après :

PROPOSITION DE RESOLUTION

L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

- Vu la communication de la Commission « Construire notre avenir commun - Défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie 2007-2013 » (COM [2004] 101 final du 10 février 2004),

- Vu la communication de la Commission du 14 juillet 2004 sur les perspectives financières 2007-2013 (COM [2004] 487 du 14 juillet 2004 / E 2800),

- Vu le document de travail de la Commission relatif au renouvellement de l'accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire (COM [2004] 498 final du 14 juillet 2004),

- Vu la proposition de décision du Conseil relative au système des ressources propres des Communautés européennes et la proposition de règlement du Conseil fixant les mesures d'exécution de la correction des déséquilibres budgétaires conformément aux articles 4 et 5 de la décision du Conseil relative au système des ressources propres des Communautés européennes (COM [2004] 501 final du 14 juillet 2004 / E 2674),

- Considérant que les interventions budgétaires de l'Union européenne doivent être réservées aux domaines où l'action communautaire est plus efficace que les actions nationales et apporte une réelle valeur ajoutée,

- Considérant que les choix budgétaires qui seront opérés dans le cadre de l'élaboration du nouveau cadre financier de l'Union devront à la fois assurer la poursuite de la Politique Agricole Commune selon les conditions définies par l'accord de Bruxelles d'octobre 2002, garantir la continuité de la politique régionale et structurelle dans une Europe élargie, ainsi que pour les régions ultra-périphériques, et permettre le développement d'actions nouvelles pour lesquelles l'Union est en mesure d'intervenir plus efficacement que ses Etats membres,

- Soulignant que l'Union européenne ne saurait s'exonérer de l'effort de maîtrise de la dépense publique auquel doivent se plier les Etats membres,

- Constatant que les propositions de la Commission pour l'établissement des prochaines perspectives financières prévoient une progression trop importante des dépenses communautaires en suivant une logique d'accumulation des priorités sans établir de hiérarchie suffisamment claire entre ces multiples objectifs,

1. Soutient l'objectif d'une limitation du budget de l'Union à hauteur de 1% du Revenu National Brut, en ce qu'il garantit à la France que le niveau de sa contribution brute sera compatible avec l'effort continu de rigueur budgétaire que lui impose son appartenance à l'Union et à la zone euro ;

2. Insiste sur la priorité qui doit être accordée, en matière de dépenses, à la recherche-développement, conformément à la stratégie de Lisbonne, en y consacrant au niveau communautaire des moyens appropriés car réalistes, et suggère qu'une attention particulière soit accordée à l'effort de recherche dans le domaine de la sécurité et de la défense ;

3. Insiste sur le fait que les solutions qui seront proposées par le Conseil devront être conformes au principe de solidarité qui est à la base de la construction européenne, et assurer la pérennité des politiques communes ;

4. S'oppose à la création d'un mécanisme de correction généralisé des soldes budgétaires négatifs jugés excessifs comme à la création d'un dispositif de cofinancement national des aides directes et des dépenses de marché versées au titre de la Politique Agricole Commune ;

5. Estime donc indispensable le maintien à 301 milliards d'euros l'enveloppe prévue pour ces mêmes dépenses du « premier pilier » de la PAC, cette somme intégrant déjà les conséquences du futur élargissement de l'Union de la Bulgarie et de la Roumanie ;

6. Se prononce en faveur d'une réforme du financement de l'Union de manière à ce qu'une fraction en soit assurée à terme, à prélèvement constant, par l'impôt sur les sociétés ;

7. Considère donc que l'harmonisation de l'assiette de cet impôt entre les Etats membres, qui est le préalable à une telle modernisation du système des ressources propres de l'Union, doit intervenir dans les meilleurs délais ;

8. Estime que la correction budgétaire dont bénéficie le Royaume-Uni a désormais perdu toute sa raison d'être ; demande par conséquent sa suppression totale, par étapes, avant la fin de l'année 2013.

ANNEXES

Annexe 1 :
Liste des personnes entendues par les rapporteurs

I. A Paris :

- M. Pierre VIMONT, directeur de cabinet de Monsieur le ministre des affaires étrangères, et M. Gilles BRIATTA, Directeur de la Coopération européenne ;

- M. Charles FRIES, conseiller de Monsieur le Président de la République pour les dossiers européens ;

- Mme Pascale ANDREANI, conseiller auprès de Monsieur le Premier ministre pour les affaires européennes ;

- Son Excellence M. Giovanni DOMINEDO, ambassadeur d'Italie en France ;

- Son Excellence Sir John HOLMES, ambassadeur de Grande-Bretagne en France,

II. A Berlin :

- Son Excellence M. Claude MARTIN, ambassadeur de France ;

- Dr Carsten PILLATH, directeur adjoint pour les affaires européennes au ministère fédéral des finances.

III. A Madrid :

- Son Excellence M. Claude BLANCHEMAISON, ambassadeur de France ;

- M. Manuel HUERTAS VICENTE, vice-président de la commission mixte des Cortès pour l'Union européenne et membre de la commission des finances ;

- M. Miguel Angel NAVARRO, secrétaire général pour l'Union européenne au ministère des affaires étrangères et de la coopération ;

- MM. Carlos MULAS-GRANADOS et Domingo JIMENEZ BELTRAN, bureau économique de la présidence du Gouvernement.

IV. A Bruxelles :

- Mme Dalia GRYBAUSKAITE, commissaire européen en charge du budget et de la programmation financière ;

- M. Jacques BARROT, commissaire européen en charge des transports ;

- M. Pierre SELLAL, ambassadeur à la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne.

Annexe 2 :
Glossaire

Contribution brute : ensemble des fonds mis à disposition de l'Union par un Etat au cours de l'exercice considéré.

Crédits d'engagement et crédits de paiement : la distinction entre crédits d'engagement et crédits de paiement est comparable à celle appliquée en France entre autorisations de programme et crédits de paiement, à la différence que les autorisations de programme ne concernent que les dépenses en capital alors que les crédits d'engagement communautaires s'appliquent à tous les types de dépenses. L'engagement couvre le coût d'une obligation juridique et crée une obligation financière : l'Union « s'engage » à effectuer une dépense. L'engagement est autorisé pour un an mais le paiement peut s'étaler sur plusieurs années. Le paiement est une opération comptable qui découle des engagements antérieurs. La contribution due par les Etats membres au budget communautaire pour une année donnée est calculée sur la base des crédits de paiement.

Elaboration du budget par activités (E.B.A) ou « activity-based budgeting » (A.B.B) : dans le cadre de la réforme de la Commission engagée en mars 2000, le choix a été fait d'une gestion par activités pour améliorer la qualité de sa gestion interne. Sur le plan budgétaire, ce choix s'est traduit par la mise en place d'une procédure d'élaboration du budget par activités, qui consiste à substituer à l'ancienne présentation du budget (organisée autour de la distinction entre ressources administratives et ressources opérationnelles) une structure présentant les opérations de la Commission par domaine politique et par activité. La méthode d'E.B.A a été appliquée pour la première fois dans le cadre de la préparation du budget communautaire pour 2004.

Plafond des ressources propres : pourcentage du montant total du RNB des Etats membres que ne peut pas dépasser le montant total des ressources propres attribué à l'Union pour couvrir ses crédits de paiement. Ce plafond figure dans les perspectives financières mais résulte d'un autre accord, une décision du Conseil sur les ressources propres. Il n'est pas exprimé en valeur mais en proportion du revenu national brut. Depuis 2002, ce plafond est fixé à 1,24 % du RNB. Il est fixe, impératif, illimité dans le temps, et n'est pas révisable, sauf nouvelle décision du Conseil.

Ressources propres : assurent la quasi-totalité des rentrées financières de l'Union et sont réparties selon deux catégories : d'une part, les ressources propres dites traditionnelles (RPT), c'est-à-dire les droits de douanes, les cotisations sur le sucre et les prélèvements agricoles, et, d'autre part, les ressources « TVA » et « PNB », calculées comme des contributions des Etats membres.

Les autres recettes sont de nature et d'ampleur bien moindres et très variables : impôts et prélèvements sur les rémunérations du personnel, intérêts bancaires, contributions des pays tiers à certains programmes communautaires, etc.

Initialement, seule la CECA a disposé de ressources propres. Euratom et la CEE étaient financées par les seules contributions des Etats membres, conformément aux traités de Rome. Un dispositif de ressources propres à la Communauté n'était prévu qu'avec la mise en place de l'Union douanière. Ce n'est donc qu'en 1970 qu'un tel régime a été mis en place, par la décision du Conseil du 21 avril 1970, adoptée à l'unanimité et ratifiée par les parlements nationaux. La même procédure a été suivie pour les décisions qui ont ensuite formalisé chacune de ses réformes en 1985 (abattement britannique), 1988 (création de la ressource PNB), 1994 (évolution du plafond des ressources propres) et 2000 (rabais en faveur de l'Allemagne, de l'Autriche, des Pays-Bas et de la Suède sur le financement de l'abattement britannique et divers aménagements techniques).

Reste à liquider (R.A.L.) : part des engagements qui n'a pas donné lieu à paiement. Le RAL résulte donc de la différence entre les engagements et les décaissements et permet d'apprécier les performances d'exécution des budgets.

Rubrique : les rubriques des perspectives financières, puis des budgets annuels de la période qu'elles couvrent, regroupent les dépenses par grandes catégories. Au nombre de sept jusqu'en 2003 (P.A.C., fonds structurels, politiques internes, actions extérieures, dépenses administratives, réserves, aides de pré-adhésion), elles sont passées à huit ensuite (création d'une rubrique 8 « compensations budgétaires transitoires aux Etats adhérents » par l'accord de Copenhague de décembre 2002). Pour les perspectives financières 2007-2013, la Commission a proposé de ramener leur nombre à cinq, selon la procédure d'élaboration du budget par activités (EBA, voir ci-dessus).

Solde net (ou contribution nette) : la notion de « solde net » n'est pas un terme juridique. Dans la pratique, les montants versés par un Etat membre peuvent être calculés et comparés à ceux qu'il a reçus au titre des divers programmes communautaires. La Commission se livre à ce calcul dans ses rapports annuels (depuis 1998) sur la « répartition des dépenses opérationnelles de l'Union par Etat membre », mais ne manque jamais de souligner combien l'imputation des dépenses aux Etats membres est un exercice purement comptable qui ne procure qu'une vision très limitée des avantages que chacun d'eux retire de son appartenance à l'Union. Les montants des dépenses de politique extérieure, les aides de préadhésion et les réserves sont exclus de cet exercice de répartition du fait qu'ils ne profitent pas directement aux Etats membres actuels ou qu'il est pratiquement impossible de les imputer précisément à tel ou tel Etat membre.

1 () Rapport de MM. Marc Laffineur et Serge Vinçon au Premier ministre sur les perspectives financières européennes 2007-2013, février 2004. Rapport présenté à la Délégation par M. René André sur l'élargissement de l'Union européenne à dix pays candidats, n° 773, 8 avril 2003. Rapport présenté à la Délégation par M. René André sur l'avant-projet de budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2005, n° 1722, 8 juillet 2004.

2 () Le 1er mai 2004 sont entrés dans l'Union européenne la République tchèque, la Pologne, la Slovaquie, la Hongrie, la Slovénie, Chypre, Malte, la Lettonie, l'Estonie et la Lituanie.

3 () Le 25 avril 2005 a été signé à Luxembourg le traité d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, prévoyant une entrée de ces deux Etats dans l'Union européenne au 1er janvier 2007.

4 () Proposition de la Commission en vue du renouvellement de l'Accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire (COM (2004) 498 final), point 29.

5 () La France est le deuxième contributeur à ce « paquet », après l'Allemagne.

6 () Lors du sixième Forum économique de Bruxelles, le 21 avril 2005.

7 () Leur produit est recouvré par les administrations compétentes des Etats membres. Il est ensuite directement reversé au budget communautaire, après un prélèvement de 25 % au titre des frais de perception. Ce prélèvement était de 10 % avant que la décision du 29 septembre 2000 ne le relève à compter de 2001.

8 () Ce chiffre tient compte du montant maximum des réserves susceptibles d'être appelées.

9 () Rapport de la présidence néerlandaise au Conseil européen sur l'état des travaux sur les perspectives financières 2007-2013, présenté au Conseil européen de Bruxelles des 16 et 17 décembre 2004.

10 () Les données chiffrées du tableau des perspectives financières proposé par la Commission ont été révisées, le 12 avril 2005, par rapport à ses estimations initiales, pour tenir compte de la mise à jour des agrégats économiques et des prévisions économiques de printemps pour 2005-2006 (document de travail de la Commission sur les ajustements techniques pour le cadre financier pluriannuel 2007-2013, SEC(2005)494 final).

11 () Voir Glossaire annexé au présent rapport.

12 () Communication de la Commission « Bâtir l'espace européen de la recherche pour une croissance fondée sur la connaissance », COM (2005) 118 final, 6 avril 2005.

13 () Conférence de presse de M. José Manuel Barroso, 25 avril 2005.

14 () Conseil européen des 23-24 mars 2000.

15 () Conseil européen des 15-16 juin 2001.

16 () Les modalités de ce phasing-out (sortie progressive) proposées par la Commission sont les suivantes :

- un plafonnement à 85 % du niveau d'aide de 2006,

- une dégressivité établie à 85 % en 2007 et 2008, 80 % en 2009, 75 % en 2010, 70 % en 2011, 65 % en 2012 et 60 % en 2013

- un niveau d'aide global moyen équivalent à 66 % du montant dont les régions concernées auraient bénéficié si elles avaient été des régions de convergence à part entière

- un taux de cofinancement de 75 %.

17 () Modalités prévues par la Commission pour le phasing-in :

- plafonnement à 75 % du niveau de l'aide accordée en 2006 (80 % pour les régions faiblement peuplées)

- réduction linéaire de l'aide entre 2008 et 2010, et intensité moyenne de l'aide égale à 21 euros par habitant pour la période 2011-2013

- un niveau d'aide global moyen équivalent à 35 % du montant dont ces régions auraient bénéficié si elles avaient été des régions de convergence à part entière

- un taux de cofinancement de 50 %.

18 () Proposition de règlement du 14 juillet 2004 sur le Fonds européen pour la pêche, COM (2004) 497.

19 () Ce projet de programme a été présenté par la Commission le 6 avril 2005, dans sa communication « Des citoyens en meilleure santé, en plus grande sécurité et plus confiants : une stratégie pour la santé et la protection des consommateurs »
(COM (2005) 115 final)

20 () Présentés globalement par la Commission dans sa communication du 29 septembre 2004 relative aux instruments consacrés à l'aide extérieure dans le cadre des futures perspectives financières 2007-2013 (COM (2004) 626 final), puis dans les quatre communications du même jour relatives, respectivement, à chacun des quatre nouveaux instruments (COM (2004) 627, 628, 629 et 630).

21 () Rapport d'information du 18 février 1999 présenté à la Délégation par M. Gérard Fuchs, sur le renouvellement du cadre financier de l'Union européenne pour 2000-2006 (n° 1408)

22 () Document COM (2004) 501 final du 14 juillet 2004, transmis à l'Assemblée nationale et au Sénat sous le numéro E 2674.

23 () En raison du décalage d'un an entre l'exercice au titre duquel est calculé la correction et celui qui suit, au cours duquel elle est versée, les simulations de la Commission ne concernent que l'année 2008 et les années qui suivent.

24 () Le groupe des « amis de la cohésion » comprend : la Belgique, Chypre, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie.

25 () Ce scénario est celui du rapport présenté par M. Reimer Böge et adopté par la Commission temporaire sur les défis politiques et les moyens budgétaires de l'Union élargie 2007-2013, avec un budget à 1,20% du RNB. Il était seul disponible lorsque ces simulations ont été effectuées. Il se caractérise, par rapport aux propositions de la Commission, par :

- une baisse de 10 % des dépenses administratives de la Commission ;

- la prise en compte sous les plafonds de Bruxelles des dépenses du 1er pilier de la PAC destinées à la Bulgarie et à la Roumanie ;

-- le choix de ne pas budgéter le fonds d'ajustement à la croissance, le fonds européen de développement et l'instrument de solidarité et de réaction rapide,

-- une faible baisse des dépenses de la rubrique 1a ;

- une hausse supplémentaire modérée des dépenses des rubriques 3 et 4.

26 () Cf. projet de loi de finances pour 2005 - Relations financières avec l'Union européenne - fascicule « jaune », pages 53 et 54. La France a été classée au 9ème rang en termes d'absorption de son enveloppe financière.

27 () Le groupe des « amis de la cohésion » comprend : la Belgique, Chypre, l'Espagne, l'Estonie, la Finlande, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie.

28 () Lettre adressée par M. Jean Asselborn, ministre luxembourgeois des affaires étrangères, à l'ensemble des ministres des affaires étrangères des Etats membres dans le cadre de la préparation de la réunion du Conseil « Affaires générales » du 25 avril 2005.

29 () La présidence a proposé dans la quatrième version de sa « boîte de négociation » que le taux d'aide de 4 % ne soit acquis qu'aux Etats dont le RNB par habitant ne dépasse pas 40 % de la moyenne communautaire, et diminue d'un dixième de point pour chaque tranche de RNB supérieure de 5 % : l'aide se trouverait ainsi plafonnée à 3,9 % du RNB national pour les Etats dont le RNB/habitant est compris entre 40 et 45 % de la moyenne, 3,8 % pour un RNB/habitant compris entre 45 et 50 %, etc.

30 () Par « biens publics » on désigne les biens, services et ressources caractérisés par une double défaillance des marchés et des Etats : le marché ne permet pas de les produire de manière optimale, et les Etats ont intérêt à être des « passagers clandestins » en laissant aux autres le soin de les financer et de les produire. Les biens publics peuvent être immatériels (recherche, diffusion des connaissances, sécurité, justice...), matériels (dépollution...) ou naturels (le climat, les milieux).

31 () Conclusions de la Présidence du Conseil européen de Lisbonne des 23-24 mars 2000.

32 () Voir plus haut, encadré page 46.

33 () Par exemple par M. Klaus Bühler, président de l'Assemblée de l'UEO, en 2002, ou conjointement par les présidents des commissions de la défense de l'Assemblée nationale et du Bundestag en 2000.

34 () Patrice Cardot, « Dotons l'Union européenne d'un budget de PESD », in Défense nationale n° 7, juillet 2004, et « Vers un budget européen dédié à la sécurité et à la défense », in Quel budget européen à l'horizon 2013 ? Moyens et politiques d'une Union élargie, ouvrage collectif de l'IFRI et du CEES sous la coordination de Maxime Lefebvre, 2004

35 () L'écart entre l'Europe et les Etats-Unis dans le domaine de la recherche et de la technologie en matière de défense, rapport présenté par la commission technique et aérospatiale de l'Assemblée de l'UEO, 6 décembre 2000.

36 () COM (2004) 590 final du 7 septembre 2004 : « Recherche sur la sécurité - Les prochaines étapes ».

* Voir note 16, page 53

** Voir note 29, page 116.

*** Voir le tableau de ventilation des dépenses administratives dans les propositions de la Commission, page 61.

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