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N° 3304 (rectifié)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 septembre 2006

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),

sur la participation des salariés dans l'Union européenne,

ET PRÉSENTÉ

par M. François GUILLAUME,

Député.

________________________________________________________________

(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. François Guillaume, Jean-Claude Lefort, secrétaires ; MM. Alfred Almont, François Calvet, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe-Armand Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

I. UNE PARTICIPATION PEU DÉVELOPPÉE ET TRES DIVERSE DANS UNE EUROPE OÙ LA FRANCE ET LE ROYAUME-UNI FONT EXCEPTION 13

A. Des pratiques d'ampleur variable 13

1) Des dispositifs de participation financière plus fréquents et plus développés en France et au Royaume-Uni que dans les autres Etats membres 14

2) Des différences qui s'expliquent par les choix politiques et les incitations fiscales ou sociales prévues par les Gouvernements 17

3) Le cas particulier des stock options en faveur des dirigeants d'entreprises 17

B. Des philosophies et des mécanismes assez différents d'un pays à l'autre 18

1) La France dispose d'une large gamme de mécanismes, dont l'un est même obligatoire, de partage des bénéfices et d'épargne salariale, selon des modalités qui permettent l'actionnariat salarié et débouchent dans certains cas sur la participation aux décisions 19

a) Les différents instruments français de participation, d'intéressement et d'épargne salariale, peuvent se cumuler et bénéficient d'allègements fiscaux et sociaux 19

b) Le rôle des comités d'entreprise reste assez spécifique 31

c) La participation de représentants des salariés aux conseils d'administration ou de surveillance des sociétés fera prochainement l'objet d'une mesure législative 33

2) Une approche de l'actionnariat salarié essentiellement financière au Royaume-Uni 34

3) Un dispositif pour l'instant centré sur la cogestion en Allemagne 40

4) Des situations variables ailleurs en Europe 46

a) Les spécificités des plans de participation en Belgique 46

b) L'exemple original des sociedades laborales en Espagne 49

c) Un régime de participation financière supprimé en Suède où l'association aux décisions prévaut 51

d) Le cas particulier des nouveaux Etats membres d'Europe centrale 52

5) Un « modèle » américain d'épargne salariale et d'actionnariat salarié largement orienté vers l'épargne retraite 52

II. UN CADRE COMMUNAUTAIRE INCITATIF, INSUFFISAMMENT COORDONNÉ ET QUI NE PERMET PAS AUX ENTREPRISES D'AVOIR UNE APPROCHE EUROPEENNE DE LA PARTICIPATION 65

A. La participation, souvent reconnue comme un élément du modèle social européen, ne fait l'objet que de recommandations ou résolutions indicatives 65

1) La participation a toute sa place aux côtés des principaux éléments du modèle social européen 65

2) Seules des recommandations et résolutions sont cependant intervenues à la suite des rapports d'experts PEPPER I (1991) et PEPPER II (1996) 66

3) La participation des salariés n'est abordée que d'une manière ténue par les directives ou règlements communautaires en matière de droit des sociétés ou de droit social 69

a) L'approche limitée de la deuxième directive « sociétés » 77/91/CEE du 13 décembre 1976 69

b) Des mesures d'une portée modeste sur l'information et la consultation des travailleurs dans les directives sociales 70

c) L'absence d'élément fort dans le régime de la société européenne, si ce n'est lors de sa création 71

B. Les blocages transnationaux interdisent d'établir des plans de participation qui traitent d'une manière similaire les salariés d'une entreprise dans les différents Etats membres 72

1) L'impossibilité de prévoir un programme de participation financière unique, équitable et commun au niveau européen 73

2) Les propositions du groupe d'experts de haut niveau réuni à l'initiative de la Commission 78

C. Le rapport d'experts PEPPER III, présenté à la fin du mois de juin dernier, propose une approche modulaire et recommande une initiative en matière de droit communautaire des sociétés 80

III. QUELQUES RÈGLES NATIONALES ET DES INITIATIVES COMMUNAUTAIRES, SELON LE RAPPORTEUR, POUR DÉVELOPPER LE DIALOGUE SOCIAL, AMÉLIORER LA GOUVERNANCE DES ENTREPRISES ET RENFORCER LEUR COHÉSION 87

A. Développer le dialogue social et donner aux entreprises accès à une gestion plus moderne et plus efficace grâce à la participation et, notamment, à l'actionnariat salarié 88

1) Des perspectives intéressantes et peu exigeantes 88

a) La participation, facteur de confiance et de performance face à la mondialisation 88

b) L'actionnariat salarié pour compléter les dispositifs de participation, développer le dialogue social et associer les salariés aux objectifs de long terme de l'entreprise 91

c) Prévoir également la présence de représentants des salariés en tant qu'« apporteurs en industrie » au sein des conseils d'administration ou de surveillance 98

d) Des initiatives nécessairement spécifiques en faveur des petites entreprises 100

e) L'opportunité de moderniser le lien entre le coopérateur et la coopérative 102

2) Surmonter le blocage du dialogue social européen, par des initiatives politiques communautaires 103

a) Les positions actuelles des partenaires sociaux ne permettent pas d'espérer un accord au niveau européen, les représentants des employeurs étant en l'espèce particulièrement attachés au respect des spécificités nationales 104

b) L'approche modulaire du rapport PEPPER III constitue une base de réflexion 107

c) La France doit appuyer toute initiative communautaire, qu'il s'agisse d'un texte général sur la participation ou l'actionnariat salarié, de la reconnaissance de la valeur juridique des résultats d'une négociation collective transnationale ou encore d'initiatives sectorielles 108

d) Une coordination est indispensable s'agissant des incitations fiscales et des exonérations sociales 111

B. S'appuyer sur la participation et l'actionnariat salarié pour stabiliser le capital des entreprises et mettre un terme aux actuelles polémiques sur leur gouvernance 112

1) Les salariés, un actionnaire de long terme 113

a) Réintroduire une vision de long terme dans les conseils d'administration ou de surveillance et corriger l'actuel face à face actionnaire-dirigeant 113

b) Constituer grâce à l'actionnariat salarié un bloc de stabilité indispensable en cas d'OPA hostile 114

2) Mettre fin notamment par la transparence et une initiative coordonnée au niveau de l'Union, voire de l'OCDE, à la polémique sur la rémunération des dirigeants des plus grandes entreprises 116

a) Une initiative politique est inéluctable 116

b) Les Etats-Unis tendent à renforcer la transparence et exercent un contrôle effectif en cas de délit d'initié 121

c) Pour la France, des mesures législatives devraient notamment renforcer, pour l'information des actionnaires, la transparence des rémunérations des dirigeants de sociétés 122

d) Les mesures nationales doivent être complétées par une coordination au niveau de l'Union européenne et même, plus largement, de l'OCDE 127

CONCLUSION 129

TRAVAUX DE LA DELEGATION 133

ANNEXE : Liste des personnes à l'audition desquelles a procédé le rapporteur 137

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

S'inscrivant dans l'esprit de la révision la plus récente de l'article 86 du règlement de l'Assemblée nationale, qui dispose que « Les rapports faits sur un projet ou une proposition de loi portant sur les domaines couverts par l'activité de l'Union européenne comportent en annexe des éléments d'information sur le droit européen applicable ou en cours d'élaboration », le présent rapport d'information vise à donner un éclairage comparatif et européen sur la participation financière des salariés et leur association aux processus de décision, avant l'examen par l'Assemblée nationale du projet de loi n° 3175 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.

La matière exige une telle démarche. La participation, au sens large est, en effet, avant toute autre chose une philosophie, une conception de l'entreprise qui s'attache à dépasser l'approche dialectique trop simpliste qui conduit à ne concevoir les relations entre l'actionnaire et le salarié, entre le capital et le travail, qu'en termes conflictuels.

Une telle association des travailleurs à leur entreprise résulte d'un choix éminemment politique.

Pour sa part, la France l'a fait depuis plus d'un demi-siècle, depuis une époque où il s'agissait non seulement de fixer comme le fit le programme du Conseil national de la Résistance, une orientation de politique intérieure, mais également de retenir comme le pressentait le général de Gaulle, lequel a exposé très tôt ses vues sur l'entreprise, le 4 janvier 1948, à Saint-Etienne, ville alors industrielle et minière, une nouvelle conception d'ensemble, spécifique entre, d'une part, un capitalisme dur et incontrôlé où l'économique commande au politique, cas auquel on a ultérieurement parfois pu assimiler les Etats-Unis du « big business », et le collectivisme alors incarné pour tous par l'Union soviétique et ses satellites.

Ainsi le préambule de la Constitution de 1946, dont la valeur a été reconnue par celle de la Ve République, a-t-il donné à ce principe sa place parmi les valeurs de la République : « tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ». Dans cet esprit ont été créés les comités d'entreprise, par une ordonnance du 22 février 1945.

Néanmoins, il faut attendre que le Général de Gaulle revienne aux plus hautes responsabilités pour que l'association du travail et du capital soit animée d'un véritable souffle, dans un contexte d'autant moins aisé qu'il était en opposition avec les conceptions syndicales, même celles de FO qui préférait la voie de la négociation en vue d'obtenir des avantages plus immédiats pour les salariés. Cette ambition a été maintes fois exprimée, de manière ultime lors de l'entretien du 10 avril 1969 avec Michel Droit : « Rien n'est donc plus important, pour l'équilibre moral et social de la France, qu'une organisation nouvelle des contacts et de la coopération entre ceux qui dirigent et ceux qui sont dirigés.( ...) Il s'agit de faire en sorte que les hommes qui ont à accomplir une œuvre commune soient assez près les uns des autres pour se comprendre, s'expliquer, s'associer. ». Sa déclinaison pratique a été précisée, notamment lors de la conférence de presse du 9 septembre 1968 : « Dans une entreprise, la participation doit revêtir trois formes distinctes. Pour ceux qui y travaillent, il faut d'abord qu'elle comporte l'intéressement matériel direct aux résultats obtenus, ensuite le fait d'être mis au courant de la marche de l'entreprise dont le sort de chacun dépend, et enfin la possibilité de faire connaître et de faire valoir leurs propositions pratiques. »

Une telle ancienneté confère à cet élément de la tradition française un caractère exceptionnel. C'est essentiellement le résultat d'une grande continuité dans l'action, avec dans un premier temps la création en 1959, par ordonnance, de l'intéressement, facultatif, aux résultats de l'entreprise, puis ultérieurement, en 1967, par ordonnance également, de la participation aux fruits de l'expansion de l'entreprise, alors obligatoire dans les entreprises de plus de 100 personnes (ce seuil a été ultérieurement abaissé à 50 salariés), ainsi que du plan d'épargne d'entreprise (PEE). Les successeurs du Général de Gaulle ont ensuite apporté leur contribution à l'édifice. Le Président Georges Pompidou a ainsi prévu la distribution d'actions aux salariés du secteur public, dans le cadre de la loi du 2 janvier 1970 pour la Régie Renault. C'est en 1970 également qu'a été introduit en France le dispositif d'origine anglo-saxonne des souscriptions ou d'achats d'actions, les stock options. La loi du 27 décembre 1973 a ensuite donné aux entreprises la faculté de proposer aux salariés des plans d'option ou de souscription d'actions. En 1980, la loi du 29 octobre a rendu plus aisée la distribution aux salariés d'actions gratuites créées à l'occasion d'une augmentation de capital.

C'est ensuite le ministre d'Etat, ministre des finances de 1986 à 1988, M. Edouard Balladur, qui a mis en œuvre les orientations essentielles, le Président Jacques Chirac étant alors Premier ministre, à l'occasion des privatisations. Une fraction du capital des entreprises concernées a été réservée aux membres de leurs personnels. L'ordonnance du 21 octobre 1986 a par ailleurs apporté des améliorations à la participation. Le statut fiscal du plan d'épargne d'entreprise a entre autres été rendu plus attractif. Ensuite, en 1994, M. Edouard Balladur étant Premier ministre, la loi « Giraud » du 25 juillet 1994 a notamment consacré la participation des salariés au conseil d'administration des entreprises privatisées.

Ultérieurement, la loi « Fabius » du 19 février 2001 sur l'épargne salariale, intervenue à la suite du rapport remis au Premier ministre en 2000 par MM. Jean-Pierre Balligand, député, et Jean-Baptiste de Foucauld, inspecteur général des finances, ancien Commissaire au Plan, a amélioré et développé les régimes d'épargne salariale au sens large, créant notamment le plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV) pour l'épargne retraite.

Ensuite, le calendrier s'est accéléré. Les règles ont été modifiées, aménagées et retouchées à plusieurs reprises tant par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, s'agissant de la représentation des salariés actionnaires dans les conseils d'administration et de surveillance, que par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, créant le PERCO en remplacement des PPESV, la loi du 4 mai 2004 sur la formation tout au long de la vie et le dialogue social, l'ordonnance du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières, s'agissant des augmentations de capital réservées aux salariés, et la loi du 9 août 2004 relative au soutien à la consommation et à l'investissement.

Un apport essentiel a, enfin, été opéré par la loi de finances pour 2005, l'adoption d'un amendement, présenté par M. Edouard Balladur, ayant créé un régime de cession d'actions gratuites aux salariés et le plafond de l'abondement de l'employeur applicable aux versements aux PEE étant porté de 50 % à 80 %. Ensuite, la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a étendu l'intéressement, la participation et l'épargne salariale aux salariés de groupements d'employeurs mis à la disposition d'une entreprise et la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise, a instauré une passerelle entre le PERCO et le compte épargne temps.

C'est ce contexte qui a conduit nos collègues MM. François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain, députés, à recommander, dans leur rapport remis au Premier ministre en septembre 2005, intitulé « Une ambition : la participation pour tous », une « pause législative » pour que ce cadre juridique, qui concerne des millions de salariés, soit stable.

Une telle « pause » n'interdit naturellement, comme le précisent nos collègues, ni des aménagements à la marge ni une mise en cohérence avec les besoins de la société française, de manière à faire de la participation au sens large un élément central de la modernisation des entreprises dont les salariés comme les dirigeants le souhaitent. Il n'interdit non plus ni une simplification ni naturellement une initiative communautaire qui en fasse l'un des piliers du modèle social européen et lui donne toute la place qu'elle mérite.

Pour ce qui est des autres pays d'Europe et des Etats-Unis, l'exception française ne s'affirme pas, en la matière, en contrepoint d'un modèle anglo-saxon, bien au contraire.

Aux Etats-Unis, la réflexion sur l'actionnariat salarié a été assez tôt inspirée et lancée par Louis O. Kelso, un avocat et économiste de San Francisco, qui a d'abord publié, en 1956, à compte d'auteur, La dynamique distributive du capitalisme (The Distributive Dynamics of Capitalism) puis, en collaboration avec le philosophe Mortimer J. Adler, Le Manifeste capitaliste (The Capitalist Manifesto) en 1958 (Random House, New York).

Kelso reste perçu comme le père fondateur de l'Employee share Ownership Plan (ESOP), conçu dès cette même année 1956 pour mettre en œuvre ses conceptions et qui est le programme d'actionnariat salarié le plus commun aux Etats-Unis. L'idée de base était que le développement de l'économie exige que les salariés ne perçoivent plus uniquement des revenus de leur travail, mais disposent également de produits du capital, pour participer pleinement au système libéral, fondé sur la propriété privée. Quelques décennies plus tard, l'ESOP apparaît surtout comme un élément de l'épargne retraite dans un système où la prévoyance individuelle joue le premier rôle.

Orientée dans une perspective purement financière, l'actionnariat salarié est également assez développé au Royaume-Uni.

En ce qui concerne, en revanche, l'Europe continentale, la participation reste modeste. L'Allemagne et la Suède ont opté pour la cogestion qui associe les salariés et les syndicats aux décisions de l'entreprise et leur permet de siéger dans ses instances dirigeantes. Ailleurs, elle doit dans l'ensemble encore être mise en œuvre, dans ses différentes composantes. Une telle diversité européenne s'explique aisément. Chacun des Etats membres a sa propre histoire et ses orientations politiques n'ont pas été toujours celles de ses voisins. Aucune norme communautaire obligatoire sur la participation n'est non plus intervenue. Ce domaine ne fait donc pas partie de l'« acquis » communautaire qu'il incombe à chaque Etat membre et à chaque nouvel adhérent de respecter. Seules des recommandations ou résolutions indicatives sont intervenues.

Dans un tel contexte, il y a donc matière à des initiatives majeures en faveur d'un cadre coordonné au niveau communautaire, voire, pour certains de ses aspects, au niveau de l'OCDE. L'enjeu l'exige. L'extension de la participation et de l'actionnariat salarié permettrait, en effet, de renforcer le modèle social européen et de mieux répondre aux défis de la mondialisation:

- d'une part, elle améliorerait l'efficacité des entreprises en développant leur cohésion et en rééquilibrant le poids de chacune des principales composantes de l'entreprise, actionnaires, salariés, dirigeants ;

- d'autre part, elle permettrait de mettre fin à certaines des polémiques actuelles sur leur gouvernance.

I. UNE PARTICIPATION PEU DÉVELOPPÉE ET TRES DIVERSE DANS UNE EUROPE OÙ LA FRANCE ET LE ROYAUME-UNI FONT EXCEPTION

A. Des pratiques d'ampleur variable

D'une manière classique, on distingue deux grands types de régimes de participation, la participation financière, qui prévoit des modalités de partages des profits au bénéfice des salariés ou l'actionnariat salarié, et la participation non financière, à savoir leur association aux décisions.

S'agissant de la participation financière, il faut distinguer, d'une part, la participation au sens le plus strict, participation aux bénéfices ou modulation d'une fraction des salaires selon les performances collectives de l'entreprise, lesquelles peuvent être financières ou non financières et, d'autre part, l'actionnariat salarié, ainsi que l'épargne salariale, dont certains instruments donnent lieu à des investissements sur des placements diversifiés.

Les mécanismes de participation aux bénéfices, ou d'une manière plus générale aux performances de l'entreprise, visent à faire profiter les salariés de ses résultats.

Les mécanismes de participation au capital des entreprises, d'actionnariat salarié, reposent non pas sur les résultats de l'entreprise, mais sur la valeur de l'action. L'intérêt des salariés n'est donc plus la seule distribution des bénéfices, à laquelle ils peuvent préférer une augmentation de la valeur de l'action. Trois modalités permettent de développer l'actionnariat salarié :

- l'achat d'actions dans le cadre de plans d'entreprise, à des conditions préférentielles, notamment fiscales, avec ou sans abondement de l'entreprise et parfois, avec un effet de levier, selon le mécanisme introduit pas plusieurs sociétés en France et en Allemagne, où des actions sont achetées au nom des salariés par un fonds spécifique institué par l'entreprise et financé par crédit bancaire ;

- l'attribution gratuite d'actions sans contrepartie aux salariés ;

- d'une manière un peu différente, les options d'achat d'actions ou de titres (stock options).

A côté la participation non financière, à savoir l'association des salariés par l'intermédiaire de leurs représentants, doit être mentionnée.

Les deux formes de participation ne sont pas nécessairement couplées.

1) Des dispositifs de participation financière plus fréquents et plus développés en France et au Royaume-Uni que dans les autres Etats membres

Dans l'ensemble, on estime que l'intéressement, la participation aux bénéfices et l'actionnariat salarié concernent 19 % des travailleurs des quinze anciens Etats membres de l'Union européenne. La situation est cependant très diverse selon les Etats.

En collaboration avec l'Université de Cranfield au Royaume-Uni, la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, située à Dublin, a procédé à un étude sur les 2.500 entreprises de plus de 200 salariés, situées dans quatorze Etats membres de l'Union européenne à partir des données de l'enquête « Cranet-E » 1999-2000. Le Luxembourg n'a pas été pris en compte. Ses conclusions, établies par M. Erik Poutsma de la Nijmegen Business School de l'Université de Nimègue aux Pays-Bas et publiées en 2001, ont été de trois ordres(1).

Sur un plan général, en premier lieu :

- les formules d'intéressement et de participation des salariés ne concernent pas la majorité des entreprises étudiées : moins de la moitié d'entre elles (45 %) seulement avaient prévu un mécanisme d'intéressement ; moins d'un tiers (31 %) avaient mis en œuvre un plan d'actionnariat salarié ;

- le nombre de ces entreprises s'est néanmoins fortement accru dans la décennie 1990 sous l'effet du développement du marché des capitaux, lesquels sont ainsi devenus de plus en plus familiers ;

- plusieurs facteurs sont favorables au développement des formules de participation financière, notamment la taille de l'entreprise et le type de propriété dont elle relève (les petites entreprises familiales sont moins susceptibles de disposer de tels instruments que les grandes sociétés de capitaux) et la présence d'une autre forme de participation (la participation non financière des salariés et la participation financière tendent à se favoriser l'une l'autre).

Sur un deuxième plan, les entreprises qui ont plus fréquemment recours à la participation financière ont plusieurs éléments caractéristiques d'une gestion plus moderne :

- elles communiquent davantage sur leur stratégie et leurs résultats ;

- leur personnel est, dans l'ensemble, plus qualifié que dans les autres : la proportion des diplômés y est plus grande que dans les entreprises qui ne recourent pas à un plan de participation ;

- leur effort de formation permanente est plus important.

La troisième grande conclusion de l'étude précitée est que les différents régimes de participation financière au sens large, participation et intéressement, sont plus développés en France et au Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, aux Pays-Bas que dans les autres Etats membres :

- les plans d'actionnariat des salariés sont nombreux pour les entreprises du Royaume-Uni (45 % des entreprises étudiées), des Pays-Bas (45 % également) et de la France (41 %) et ont, au contraire, une très faible incidence, de moins de 10 % des entreprises, en Autriche et au Portugal ;

- on observe des variations substantielles dans l'étendue des plans entre les pays : 67 % d'entre eux étaient ouverts à tous les salariés au Royaume-Uni contre 26 % seulement en Espagne.

La situation est en revanche assez différente pour les régimes de participation aux bénéfices, très répandus non seulement en France, au Royaume-Uni ainsi qu'aux Pays-Bas, mais également en Allemagne et en Autriche. Toutefois, dans des deux derniers Etats, il s'agit non pas de plans participation larges qui concernent l'ensemble du personnel, mais de plans de participation restreinte s'adressant uniquement à l'une de ses fractions

Le graphique suivant récapitule ces éléments :

PARTICIPATION FINANCIERE EN EUROPE

Entreprises disposant de régimes de participation financière,

en 2000 (en % du total des entreprises interrogées)

2) Des différences qui s'expliquent par les choix politiques et les incitations fiscales ou sociales prévues par les Gouvernements

L'étude précitée de M. Erik Poutsma, développée sous l'intitulé « Les tendances récentes de la participation financière dans l'Union européenne », et publiée en 2001 sous l'égide de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail et de la Commission européenne, précise qu'en dehors des différences de culture sur les relations sociales dans l'entreprise et des rapports que chaque peuple entretient avec le capital, la grande variété des régimes de participation financière dans les différents pays européens tient essentiellement à un facteur politique.

La fréquence des dispositifs de participation financière et d'actionnariat salarié en France et au Royaume-Uni s'explique pour une large part par l'importance des incitations prévues, notamment sur le plan fiscal et en matière d'exonération de cotisations sociales.

Ce sont, en effet, la France et le Royaume-Uni qui ont mis en place la gamme la plus complète des mesures incitatives dans ce domaine.

Dans les deux pays, il s'agit d'un choix politique : le gaullisme, comme on l'a vu en introduction en France ; le « Thatchérisme » puis le « Blairisme » au Royaume-Uni.

En outre, il faut mentionner en France l'obligation d'avoir un plan de participation au-delà de 50 salariés.

3) Le cas particulier des stock options en faveur des dirigeants d'entreprises

Si les stock options constituent indéniablement un instrument de participation financière, celles qui ne bénéficient qu'aux seuls dirigeants d'entreprise apparaissent d'une nature un peu différente.

Comme le note en introduction le rapport de l'OCDE sur la fiscalité des stock options (The Taxation of the Employee Stock Options, 2005), les plans d'option en faveur des dirigeants d'entreprises, qui ne sont plus l'apanage de quelques pays anglo-saxons, Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie et Canada, mais se sont largement diffusés dans le reste du monde depuis quinze ans, constituent dorénavant un élément substantiel de la rémunération permanente des dirigeants, dans tous les pays.

Ils sont d'ailleurs, selon la même étude, devenu l'élément essentiel de la rémunération des dirigeants d'entreprises aux Etats-Unis.

D'une part, ils bénéficient d'une manière générale d'une fiscalité le plus souvent avantageuse.

D'autre part, ce procédé de rémunération est réputé capable d'attirer et de fidéliser les personnes les plus qualifiées, qui sont en même temps internationalement les plus mobiles, et présenter l'avantage de lier l'intérêt de l'actionnaire et celui du dirigeant, dont la rémunération dépend en définitive de la valeur de l'action. L'option, qui permet d'acquérir une action à un prix déterminé à l'avance, est d'autant plus intéressante que le prix de l'action à la date d'exercice de l'option est plus élevé que le prix fixé à l'avance.

Cependant, par leur nature, par l'ampleur des sommes en cause, qu'il s'agisse pour ne s'en tenir qu'à notre pays sans naturellement évoquer les exemples les plus récents de dérives, ainsi que par leur objectif, ces plans doivent être, en l'état, distingués des autres dispositifs de participation financière ou l'épargne salariale, les montants et les proportions par rapport aux salaires étant très différents.

B. Des philosophies et des mécanismes assez différents d'un pays à l'autre

Quatre pays, qui présentent chacun un profil d'ensemble assez caractéristique, permettent de dresser un tableau d'ensemble des différentes possibilités en matière de participation financière et non financière : la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne et, hors d'Europe, les Etats-Unis.

1) La France dispose d'une large gamme de mécanismes, dont l'un est même obligatoire, de partage des bénéfices et d'épargne salariale, selon des modalités qui permettent l'actionnariat salarié et débouchent dans certains cas sur la participation aux décisions

a) Les différents instruments français de participation, d'intéressement et d'épargne salariale, peuvent se cumuler et bénéficient d'allègements fiscaux et sociaux

En France, le régime le plus ancien, celui de l'intéressement, prévu dès 1959, est entièrement facultatif, de même que les différents plans d'épargne salariale, plus récents. Tel n'est en revanche pas le cas de la participation aux résultats de l'entreprise, obligatoire à partir de 50 salariés.

Ces dispositifs présentent trois caractéristiques essentielles :

- d'une part, ils ne sont pas incompatibles les uns avec les autres et peuvent ainsi être cumulés par un même salarié ;

- d'autre part, ils peuvent également, dans certaines limites, s'alimenter les uns les autres, ce qui permet ainsi la circulation de flux financiers en franchise d'impôt et de cotisations sociales pour leurs bénéficiaires ;

- enfin, ils n'ont pas le même objet : l'intéressement permet d'orienter le personnel vers des objectifs, lesquels ne sont pas nécessairement financiers ; la participation vise à distribuer une partie des résultats financiers et peut déboucher soit sur l'actionnariat salarié, soit sur l'épargne salariale, selon l'affectation des sommes considérées ; les plans d'épargnes salariales relèvent d'une autre philosophie, complexe, où se rejoignent le souci de la constitution d'un capital, du développement de l'actionnariat salarié et de la constitution de l'épargne retraite.

L'intéressement, instrument de gestion des performances de l'entreprise, donne lieu à versement en espèces qui peuvent alimenter les autres instruments de participation financière

Créé par une ordonnance de 1959, l'intéressement permet aux salariés de bénéficier en espèces et sans période d'indisponibilité, des résultats de leur entreprise, qu'il s'agisse des résultats financiers ou de performances non financières telles qu'elles ont été préalablement définies, comme par exemple le cas du « zéro défaut » ou de la réduction du nombre des accidents du travail. En pratique cependant, il est souvent lié, par routine, à des éléments financiers.

Indépendant des régimes de la participation comme des plans d'épargne, l'intéressement peut s'ajouter à eux ou à un seul d'entre eux. Il peut même être le seul instrument de participation financière des salariés dans les entreprises qui ne sont pas légalement assujetties à la participation.

Prévu aux articles L. 444-1 et suivants du code du travail, l'intéressement est mis en œuvre dans le cadre d'un accord d'une durée de trois ans, conclu, selon les mêmes modalités que les accords de participation, par accord entre l'employeur et les salariés lui-même conclu soit dans le cadre de conventions ou accords collectifs de travail, soit entre le chef d'entreprise et les représentants des organisations syndicales représentatives, soit au sein du comité d'entreprise, ou bien par ratification à la majorité des deux tiers du personnel d'un projet proposé par le chef d'entreprise. Le projet d'accord doit par ailleurs être soumis au comité d'entreprise, quand celui-ci existe.

L'intéressement doit être collectif. Son montant doit également présenter un caractère aléatoire et calculé selon une formule liée au résultat ou aux performances de l'entreprise sur une année, ou sur une période d'une durée inférieure mais d'au moins trois mois. Il est réparti d'une manière uniforme, ou en fonction du salaire ou de l'ancienneté dans l'entreprise. Son montant global ne peut dépasser 20 % du total des salaires de l'entreprise (il n'est pas un substitut au salaire). Chaque montant individuel est également plafonné à la moitié du montant du plafond annuel de la sécurité sociale. Enfin, l'intéressement peut être modulé par établissement ou par unité de travail en fonction d'objectifs fixés. L'intéressement est versé dans les sept mois qui suivent la clôture de l'exercice concerné.

L'intéressement peut être affecté par un salarié, en tout ou partie, à son plan d'épargne d'entreprise Il peut également donner lieu à affectation au compte épargne temps.

Les sommes versées au titre de l'intéressement bénéficient d'exonérations fiscales et sociales. Pour l'entreprise, elles sont déductibles du résultat imposable. Par ailleurs soumis à la CSG et à la CRDS, l'intéressement est cependant exonéré de cotisations sociales et des prélèvements assimilés. Il n'est en revanche exonéré de l'impôt sur le revenu que s'il est affecté à la demande du salarié à un plan d'épargne salariale, plan d'épargne entreprise (PEE) ou plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO), où il est alors bloqué 5 ans dans le premier cas et jusqu'à la sortie en rente au moment du départ en retraite dans le second cas.

Selon le Conseil supérieur de la participation, l'intéressement a concerné, en 2003, 3,8 millions de salariés, qui ont perçu 4,9 milliards d'euros (montant brut), soit 4,5 % de la masse salariale.

Statistiques relatives à l'intéressement

Année

Nombre d'accords conclus

Nombre de salariés concernés

1995

4 465

1 112 363

1996

4 232

946 382

1997

4 473

969 325

1998

5 236

818 466

1999

5 545

935 050

2000

6 676

923 636

2001

4 858

603 900

2002

4 182

544 100

Source : Ephraïm Marquer, Guide de l'épargne salariale, Editions du Siècle.

La participation, obligatoire au-delà de 50 salariés, permet un certain partage des bénéfices de l'entreprise et peut, le cas échéant, conduire à l'actionnariat salarié

La participation, créée par une ordonnance du 17 août 1967, est une obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés. Elle vise à attribuer à ces derniers une fraction du bénéfice de l'entreprise. Les entreprises qui n'atteignent pas ce seuil n'en sont toutefois pas exclues, et peuvent s'y assujettir volontairement.

Les modalités d'application de la participation sont en principe définies par accord entre l'employeur et les salariés, accord conclu selon les modalités précédemment exposées s'agissant de l'intéressement. Lorsque la participation est obligatoire, un régime d'autorité permet en outre de pallier l'absence d'accord. Les accords de participation peuvent être conclus avec ou sans limitation de durée, avec également des possibilités de tacite reconduction.

La réserve spéciale de participation, à laquelle sont affectées les sommes correspondant à la participation, est abondée par l'employeur, lorsque l'exercice est bénéficiaire, selon une formule prévue par avance. En outre, selon les accords de droit commun, ce bénéfice doit être supérieur à 5 % des capitaux propres, en raison de la nature de la formule employée. Chaque salarié a, en principe, un droit personnel sur une part de la réserve de participation. L'accord de participation peut toutefois prévoir une condition d'ancienneté qui ne peut excéder trois mois.

Sous réserve des dispositions de l'accord, qui peut prévoir d'autres modalités de répartition, les droits de chaque salarié sont, en principe, proportionnels à son salaire dans les limites d'un double mécanisme de plafonnement : le salaire n'est pris en compte que dans la limite d'un plafond fixé par l'accord ; nul ne peut non plus recevoir plus que les trois quarts du plafond annuel de la sécurité sociale.

Les droits de chaque salarié subissent également une période d'indisponibilité, qui est en général de 5 ans (le délai est de 8 ans en cas d'absence d'accord). Les sommes correspondantes ne peuvent, effectivement être perçues par l'intéressé qu'à l'issue de cette période d'indisponibilité. Toutefois, plusieurs exceptions à cette période sont prévues. Il s'agit d'événements professionnels, personnels ou familiaux tels que le mariage, la naissance ou encore la cessation du contrat de travail, notamment le licenciement.

Les règles qui régissent la gestion des fonds inscrits à la réserve spéciale offrent plusieurs options qui peuvent conduire, mais ne le font pas nécessairement, à l'actionnariat salarié ou à des formes plus diversifiées d'épargne salariale.

Elles prévoient, en effet, soit des attributions d'actions ou d'obligations de l'entreprise, des attributions aux salariés d'un droit de créance sur l'entreprise, pour alimenter un fonds affecté à des investissements (compte courant d'entreprise bloqué), soit le placement dans des valeurs mobilières dans le cadre de SICAV ou d'un fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) spécialement créé à cet effet, soit encore la souscription d'actions émises dans le cadre d'une opération de rachat d'une entreprise par un salarié.

Un FCPE ne peut détenir qu'un tiers de l'entreprise ou d'une entreprise liée s'il ne veut pas être considéré comme un fonds d'actionnariat salarié, soit au moins un tiers dans l'hypothèse inverse.

En outre, l'affectation des sommes issues de la participation à un plan d'épargne salariale, PEE ou PERCO, est également possible.

Que son application soit obligatoire ou volontaire, un accord de participation est assorti d'avantages fiscaux et sociaux. Les sommes inscrites à la réserve spéciale de participation sont ainsi, s'agissant de l'entreprise, déduites du résultat imposable, et les entreprises qui appliquent une formule dérogatoire peuvent constituer en franchise d'impôt une provision égale à la moitié du supplément de participation qu'elles octroient par rapport à la clause de droit commun. Ces sommes n'entrent pas non plus dans l'assiette des cotisations sociales et des prélèvements assimilés.

En ce qui concerne le salarié, les sommes concernées sont affranchies de l'impôt sur le revenu lorsque le délai d'indisponibilité est de 5 ans (la participation est imposable à 50 % lorsque le délai est de 3 ans). Les revenus issus des instruments de la participation sont exonérés d'impôt sur le revenu dans les mêmes conditions. En revanche, ils sont assujettis à la CSG et à la CRDS. Il n'y a pas non plus, en principe, d'imposition au titre de la plus-value des titres cédés dans le cadre de la participation.

Selon le Conseil supérieur de la participation, en 2003, plus de 4 millions de bénéficiaires ont reçu plus de 5 millions d'euros au titre de la participation, soit 4,6 % de la masse salariale.

Nombre d'accords de participation

Date de référence

Nombre d'accords

Evolution annuelle

Nombre de salariés

1995

14 650

-

4 600 124

1996

15 511

+ 5,9 %

4 792 415

1997

16 193

+ 4,3 %

4 774 014

1998

16 989

+ 5,0 %

5 012 399

1999

17 836

+ 5,0 %

5 189 246

Rupture méthodologique

Nouveaux accords

Evolution annuelle

Nombre de salariés

2000

1 331

-

504 191

2001

1 462

+ 9,8 %

276 400

2002

1 399

- 4,3 %

338 700

Source : Ephraïm Marquer, Guide de l'épargne salariale, Editions du Siècle.

La vigilance syndicale sur la gestion de l'épargne salariale : le comité intersyndical de l'épargne salariale (CIES)

En janvier 2002, quatre grandes organisations syndicales (CFE-CGC, CFDT, CFTC et CGT) ont créé le CIES pour labelliser les différents produits de placements offerts aux salariés dans le cadre des dispositifs d'épargne salariale.

L'objectif est favoriser l'évolution de l'offre d'épargne salariale de la part des opérateurs (banques, assurances, organismes paritaires) vers des produits qui préservent les intérêts réels des salariés, notamment sur le niveau des commissions de gestion et la qualité des prestations aux salariés (information claire et pertinente ; existence d'un choix ; possibilités d'arbitrages ; gestion en titres socialement responsables et accès à l'épargne solidaire).

Les plans d'épargne salariale peuvent être investis non seulement dans des actions de l'entreprise, mais également dans des placements diversifiés

Les plans d'épargne salariale donnent aux salariés la faculté de constituer, sur une base volontaire, avec l'aide de leur employeur et le bénéfice d'avantages fiscaux et sociaux, un portefeuille de valeurs mobilières. Ils sont facultatifs et débouchent, selon le cas, soit sur une épargne diversifiée, soit sur une épargne salariale lorsqu'il s'agit d'actions de l'entreprise, soit sur l'épargne retraite dans le cadre du PERCO. Les sommes versées sont bloquées, soit de manière temporaire, soit d'une manière plus longue, jusqu'à la retraite, pour le PERCO. En contrepartie, des exonérations fiscales et sociales sont accordées. Trois instruments doivent être distingués.

Le plan d'épargne d'entreprise (PEE), prévu par une ordonnance du 17 août 1967, peut être créé soit de manière unilatérale par l'entreprise, soit par accord conclu avec le personnel selon les mêmes modalités que les accords de participation. Le plan doit être déposé auprès de l'administration du travail pour être assorti d'avantages fiscaux et sociaux.

Il peut être alimenté par cinq sources : les versements directs du salarié, lesquels sont éventuellement complétés par des abondements de l'entreprise ; les sommes provenant de l'intéressement ; la participation ; les transferts provenant d'un compte épargne temps.

Une aide de l'entreprise est certes obligatoire, mais elle peut se limiter à la prise en charge des frais de gestion. Les versements additionnels à ceux des salariés (les abondements) sont donc facultatifs. Ils sont plafonnés à 2.300 euros par an, et ne peuvent excéder le triple du versement personnel du bénéficiaire.

Les règles sur l'affectation des sommes à un portefeuille de valeurs mobilières, prévoient certaines hypothèses d'actionnariat salarié, mais proposent également des formules diversifiées. Le portefeuille collectif correspondant doit être constitué soit de titres de SICAV, soit de parts de FCPE, lequel peut ou ne pas être, comme on l'a vu, un fonds d'actionnariat, soit de valeurs mobilières émises par l'entreprise ou le groupe dont elle relève, d'actions émises dans le cadre du rachat d'une entreprise par un salarié.

En général, l'abondement est important pour l'acquisition des actions de l'entreprise : il favorise l'acquisition de celles-ci par le salarié.

Le délai d'indisponibilité des actions ou parts acquises pour le compte d'un salarié est de cinq ans. Cependant, comme pour la participation, des événements particuliers justifient leur liquidation (événement personnel, cessation du contrat de travail), ou bien une levée d'option pour des actions créées par l'entreprise ou rachetées sur le marché par elle.

Le régime fiscal et social préférentiel repose sur les principes suivants :

- l'abondement est déductible du résultat imposable et est exonéré de cotisations sociales et n'est pas assujetti à l'impôt sur le revenu pour ses bénéficiaires ;

- les revenus du portefeuille collectif sont également exonérés de l'impôt sur le revenu lorsqu'ils sont réemployés dans le plan d'épargne, avec la même période d'indisponibilité que les titres auxquels ils se rattachent. La CSG, la CRDS et le prélèvement de 2 % sur les revenus du capital sont cependant perçus.

En revanche, les sommes qui sont versées par le salarié ne bénéficient pas d'exonération et ne sont pas déductibles de l'assiette de l'impôt sur le revenu, sauf naturellement pour celles qui proviennent de la participation ou de l'intéressement.

Il faut également mentionner que les groupes d'entreprises peuvent mettre en œuvre au niveau du groupe un plan d'épargne de groupe selon des modalités similaires.

Le plan d'épargne interentreprises a vocation à permettre, dans un cadre commun à plusieurs entreprises, en en mutualisant le coût de mise en œuvre et de fonctionnement, l'accès des salariés des PME à cette forme d'épargne salariale.

Le plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO) est un instrument d'épargne salariale constitué en vue de la retraite. Il est assorti d'une aide de l'entreprise ainsi que d'exonérations fiscales et sociales. Il a remplacé, en application de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, le plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV) créé par la loi sur l'épargne salariale de 2001.

Le PERCO est mis en œuvre par accord collectif de travail. Tel ne peut cependant être le cas que si le salarié peut opter pour un instrument d'une durée plus courte, PEE ou PEI.

Le PERCO est alimenté par les versements facultatifs du salarié, ainsi que par les sommes issues de l'intéressement et de la participation et les transferts issus d'un plan d'épargne d'entreprise ou interentreprises.

Le régime fiscal et social est le même que celui du PEE avec cependant quelques spécificités. L'abondement de l'entreprise relève d'un plafond spécifique de 4.600 euros par an, sur lequel les abondements éventuels au plan d'épargne d'entreprise ou interentreprises ne sont pas pris en compte.

Il s'agit d'un dispositif de longue échéance puisque le terme du plan est le départ en retraite du salarié. Les fonds sont donc affectés d'une manière diversifiée. Les participants au plan doivent pouvoir choisir entre trois OPCVM, l'acquisition de titres de l'entreprise n'étant possible que dans certaines limites par l'intermédiaire d'un OPCVM.

En outre, selon les éléments communiqués au rapporteur, les formules de placement effectif évoluent selon l'âge du salarié et aboutissent à des placements sans risques à proximité de l'âge de la retraite.

La sortie du PERCO se fait en au moment du départ en retraite du salarié, en principe en rente, laquelle est imposée selon le régime des rentes viagères à titre onéreux (c'est-à-dire prises en compte pour 40 % de leur montant entre 60 et 69 ans et 30 % au-delà). Toutefois, si l'accord le prévoit, la sortie peut intervenir en capital, lequel n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu.

Principaux chiffres sur la participation financière en France selon le rapport du Conseil supérieur de la participation pour 2004-2005

Au 31 décembre 2003, 53 % des salariés du secteur marchand non agricole, soit 8 millions de personnes, avaient accès à un dispositif de participation financière.

Les salariés de PME n'ont cependant que très peu accès : ils n'en représentaient que 8,7 % des bénéficiaires, contre 42 % de l'ensemble des salariés. 5,8 millions de salariés relevant d'entreprises de moins de 50 salariés n'ont accès à aucun dispositif. A l'opposé, la moitié d'entre eux étaient employés dans les entreprises de plus de 1.000 salariés, qui ne représentent toutefois que le quart des salariés.

Le montant global de la participation et de l'intéressement distribué au titre de l'exercice 2003 se monte à 10,3 milliards d'euros, dont 5,3 milliards au titre de la participation et 5 milliards au titre de l'intéressement.

Le montant de l'abondement versé par les entreprises, au cours de l'exercice 2003, au titre de l'épargne salariale s'est établi à 1,3 milliard d'euros.

En 2004, les bénéficiaires de la participation financière dans toutes ses composantes ont reçu 1.830 euros. 4,9 millions de salariés ont eu accès à un plan d'épargne en entreprise.

Le montant total des dépôts a atteint 7,5 milliards d'euros en 2003, dont 16 % (1,3 milliard d'euros comme on l'a vu) au titre de l'abondement des entreprises.

A la fin de l'année 2004, 125.000 entreprises, contre 10.000 en 2000, avaient institué un PEE pour leurs salariés.

En 2005, plus de 117.000 salariés relevant de 12.000 entreprises avaient alimenté un PERCO.

Au total, l'encours des FCPE ou des SICAV d'actionnariat salarié avait atteint 65 milliards d'euros au 30 juin 2005, dont, au 31 décembre 2004, 25 milliards d'euros d'actions de l'entreprise et 2 milliards d'obligations de l'entreprise.

l'attribution gratuite d'actions aux salariés et aux mandataires sociaux

La loi de finances pour 2005 a inséré dans les articles
L.225-197-1 à L.225-197-5 du code de commerce, un dispositif favorisant l'attribution gratuite d'actions par les sociétés, cotées ou non cotées.

Autorisées par l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires, de telles attributions sont soumises à des conditions de délai : les deux délais d'acquisition et de conservation des titres ne peuvent être inférieurs à deux ans, ce qui crée une période d'indisponibilité d'au moins quatre ans. Les conditions et critères d'attribution, ainsi que l'identité des bénéficiaires relèvent des compétences du conseil d'administration.

La part maximale consacrée par l'entreprise à l'attribution gratuite d'actions est fixée à 10 % du capital social. L'imposition des plus-values a uniquement lieu lors de la vente des actions gratuites par les bénéficiaires. Sauf option du contribuable pour l'impôt sur le revenu selon le barème progressif, les taux de prélèvements proportionnels sont les suivants :

- 30 % (41 %, compte tenu des prélèvements sociaux) de la valeur des titres, gratuitement attribués, à la date d'acquisition ;

- 16 % (27 %, compte tenu également des prélèvements sociaux) de la plus-value réalisée lors de la cession des actions gratuites (différence entre le prix de cession et la valeur des titres à la date d'acquisition).

L'attribution gratuite d'actions est exclue de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, n'étant pas considérée comme un salaire.

Ce dispositif peut éventuellement concerner l'ensemble des salariés.

les options d'achat de titres (stock options)

Les stock options ont été introduites en France en 1970. Elles concernent en pratique, outre les dirigeants, un petit nombre de salariés, même si la loi du 27 décembre 1973 a permis de proposer aux salariés des plans d'achat ou de souscription d'actions.

Les conditions et modalités d'attribution des stock options sont de la compétence des conseils d'administration.

Actuellement, les gains réalisés dans le cadre des stock options bénéficient d'une fiscalité favorable (outre le fait que l'option est donnée et non acquise à titre onéreux par son titulaire) que si elles respectent la forme nominative et la durée d'indisponibilité fiscale de 4 ans, qui interdit la cession des actions correspondantes dans ce délai.

La fiscalité française favorise donc la détention à moyen terme des options, et permet en principe d'éviter les stratégies de court terme.

A défaut, les gains correspondants sont imposés comme des salaires et assujettis aux cotisations sociales (outre la CSG et la CRDS qui s'appliquent dans tous les cas).

Cette fiscalité favorable, qui repose sur la distinction de trois éléments, ne concerne dans sa forme actuelle que les options les plus récentes, attribuées après avril 2000.

L'avantage tiré de la levée de l'option, c'est-à-dire la différence entre le prix d'exercice prévu lors de l'attribution de l'option et la valeur de l'action au jour de l'exercice de l'option, est imposé au taux proportionnel de 30 % pour la fraction de l'avantage n'excédant pas 152.400 euros et de 40 % au-delà. A ce prélèvement s'ajoutent en outre la CSG et la CRDS ainsi que le prélèvement de 2 % sur les revenus et produits du patrimoine.

Ces taux sont respectivement réduits de 30 % à 16 % et de 40 % à 30 % lorsque les actions sont cédées après un délai supplémentaire de 2 ans suivant la période d'indisponibilité.

La plus-value de cession, différence entre la valeur de marché de l'action au jour de l'exercice de l'option et la valeur de cession est imposée pour sa part comme une plus-value de droit commun.

Le rabais, à savoir la différence entre la valeur de l'action au jour de l'attribution de l'option et le prix, inférieur, de la future souscription, relève d'un régime fiscal complexe. On rappellera que le rabais ne peut excéder 20 % pour les sociétés cotées : le prix d'exercice ne peut donc être à 80 % de la valeur de l'action au jour de l'attribution.

Jusqu'à 5 %, le rabais bénéficie de la fiscalité favorable applicable à l'avantage titré de la levée de l'option.

Le rabais excédentaire, à savoir la fraction du rabais total qui excède 5 % (et qui peut aller jusqu'à 15 %), est assujetti aux mêmes prélèvements que les salaires et, notamment, imposé suivant le barème de l'impôt sur le revenu.

Un cas particulier est celui des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise (BSPCE), comparables dans leurs mécanismes aux stock options et réservés aux sociétés non cotées ou aux sociétés cotées sur un marché d'instruments financiers réglementés dont la capitalisation est inférieure à 150 millions d'euros. Ces sociétés doivent avoir été créées depuis moins de 15 ans. Elles bénéficient d'une fiscalité favorable, avec une imposition du gain net au taux de 16 % (27 % avec les prélèvements sociaux), ou 30 % (41 % avec les prélèvements sociaux), lorsque le bénéficiaire exerce son activité depuis moins de trois ans à la date de la cession.

Pour mémoire, enfin, il faut rappeler l'existence des mécanismes de rachat de l'entreprise par ses salariés, qui sort du cadre du présent rapport.

b) Le rôle des comités d'entreprise reste assez spécifique

En France, le code du travail rend obligatoire la constitution d'un comité d'entreprise au-delà de 50 salariés. On observera que le seuil de 50 salariés est le même tant pour la participation que pour la représentation des salariés, les deux étant obligatoires une fois que celui-ci est atteint. En deçà, un comité d'entreprise peut être créé par convention ou accord collectif de travail.

Pour les entreprises dont l'organisation interne est plus complexe, le code du travail prévoit des structures adaptées : des comités d'établissement sont créés dans les établissements distincts, avec, également, un comité central d'entreprise ; dans le cas des groupes, certaines prérogatives sont exercées par le comité de groupe, qui a compétence pour la centralisation des informations ; pour les entreprises ou les groupes de dimension communautaire, la constitution d'un comité d'entreprise européen, ou une procédure de d'information spécifique, est prévue.

Présidé par le chef d'entreprise, qui peut se faire représenter et, le cas échéant, assister par un ou deux collaborateurs ayant voix consultative, le comité d'entreprise est composé de membres élus par le personnel, dont le nombre dépend de la taille de l'entreprise. Chaque titulaire a un suppléant. Dans les entreprises de moins de 200 salariés, les salariés peuvent être représentés, sur l'initiative du chef d'entreprise, par les délégués du personnel (principe de la délégation unique). Chaque organisation syndicale représentative peut par ailleurs désigner un représentant au comité, qui y dispose d'une voix consultative.

Outre la gestion des activités culturelles ou sociales de l'entreprise, ou son contrôle, le comité d'entreprise a des compétences d'information, de consultation et de décision dans le domaine professionnel :

- en ce qui concerne l'information, l'employeur est tenu de lui communiquer un certain nombre de documents et d'informations (situation de l'emploi, nombre et évolution des types d'emploi, notamment les motifs du recours au travail temporaire, autres éléments sociaux, économiques, comptables et financiers, éléments généraux sur l'évolution des rémunérations, notamment) ;

- la consultation du comité d'entreprise est obligatoire avant toute décision ayant compétence sur la structure et le volume des effectifs, notamment en cas de projet de licenciement collectif pour motif économique ;

- dans les entreprises de moins de 300 salariés, cette communication entre l'employeur et le comité d'entreprise prend la forme d'un rapport annuel unique, sur lequel il donne son avis ;

- l'avis conforme du comité d'entreprise, l'absence d'opposition ou son accord sont parfois exigés pour des éléments précis tels que la nomination et le licenciement du médecin du travail ou la mise en place de la semaine de 4 jours ou d'horaires individualisés ;

- le comité d'entreprise dispose également d'un droit d'alerte, qui lui donne le droit d'invoquer tout élément qu'il estime pouvoir « affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise ». En cas de réponse insatisfaisante ou si la situation l'exige, il peut transmettre un rapport aux commissaires aux comptes ;

- le comité d'entreprise peut également se faire assister par un expert comptable de son choix, à la charge de l'entreprise.

c) La participation de représentants des salariés aux conseils d'administration ou de surveillance des sociétés fera prochainement l'objet d'une mesure législative

La loi « Giraud » du 27 juillet 1994 a consacré et rappelé le principe selon lequel les sociétés anciennement nationalisées et qui ont été privatisées doivent assurer, par une disposition de leurs statuts, une représentation des salariés au sein du conseil d'administration ou du conseil de surveillance avec, lorsque cette entité comporte moins de quinze membres, deux membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires et, quand elle compte quinze membres ou plus, trois membres représentant les salariés et un membre représentant les salariés actionnaires.

Par ailleurs, plusieurs dispositions législatives visent à permettre la représentation de l'actionnariat salarié dans les organes de gestion des entreprises.

D'une part, la faculté pour les sociétés anonymes de prévoir, dans leurs statuts, la présence de membres élus par le personnel salarié au sein des conseils d'administration ou de surveillance est insérée par les articles L. 225-27 et L. 225-79 du code de commerce. Les candidatures sont présentées par les syndicats représentatifs au sens du droit du travail ou par 5 % des salariés électeurs, ou encore par 100 salariés au-delà d'un effectif de 2.000 personnes. Le scrutin est majoritaire à deux tours.

D'autre part, une obligation a été instituée pour les entreprises dont les salariés détiennent 3 % du capital social, de nommer un ou plusieurs représentants des salariés actionnaires.

Toutefois, cette disposition n'est pas appliquée. Selon les éléments communiqués au rapporteur, la question, de droit, de l'éventuelle nécessité d'un texte réglementaire pour l'application de cette disposition est en cause.

2) Une approche de l'actionnariat salarié essentiellement financière au Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, il existe une assez longue tradition de participation financière et de plans d'actionnariat salarié, qui se sont développés grâce à la souplesse du droit et à la culture de la négociation entre les partenaires sociaux dans le cadre de la relation de travail.

Certains de ses développements les plus marquants depuis près d'un quart de siècle sont cependant dus à l'impulsion de l'Etat, provenant d'une double inspiration. La première a été thatchérienne, au début des années 1980, visant à faire des salariés des propriétaires de leur entreprise, notamment à l'occasion des dénationalisations, et à les intéresser à leurs performances grâce à un système d'acquisition d'options dans le cadre d'un plan d'épargne mensuel, le dispositif SAYE. La deuxième, travailliste, s'est développée à partir de 1997, inspirée par le Chancelier de l'Echiquier, M. Gordon Brown, voyant dans l'actionnariat salarié l'un des moyens de combler l'écart de productivité entre le Royaume-Uni et ses principaux partenaires continentaux.

A côté des systèmes de rémunération individuellement liée aux bénéfices (Profit Related Pays), il existe donc des dispositifs d'intéressement (Profit Sharing ou Gain Sharing) qui sont mis en œuvre à la discrétion de l'employeur. Il n'y a en la matière aucune obligation, ni sur la procédure - il peut ou non y avoir négociation avec les partenaires sociaux - ni sur le contenu des plans. Aucun avantage n'est non plus prévu sur le plan fiscal ou sur le plan social. Les sommes concernées sont considérées comme des salaires.

Les systèmes d'actionnariat salarié et de stock options sont beaucoup plus développés, car certains d'entre eux, au nombre de quatre, bénéficient d'avantages fiscaux et sociaux. Ils sont parfois appelés les plans légaux, car prévus par la loi, dont la dernière en date a été pour l'essentiel l'Employee Share Act de 2002. Les autres plans sont dits extralégaux.

Les plans légaux sont fondés soit sur l'attribution ou l'achat d'actions, soit sur l'attribution ou l'achat d'options.

Par rapport au système français, ils présentent plusieurs particularités :

- aucun d'entre eux n'est obligatoire. Il n'y a pas, au Royaume-Uni, d'équivalent à notre obligation de la participation ;

- ils doivent bénéficier d'un agrément (d'une approbation) de l'administration fiscale, le HM Revenus and Customs Service. Soucieuse d'éviter toute critique, cette administration affiche, comme a pu le constater le rapporteur, son engagement en faveur d'une procédure rapide et aisée. Elle est investie non seulement d'une mission d'agrément individuel de chaque plan, mais également d'évaluation du fonctionnement de l'ensemble du dispositif ;

- la procédure de mise en place est très souple, aucune obligation de concertation ou d'accord avec le personnel ou les syndicats n'étant prévue, ni non plus prohibée. L'employeur dispose en la matière d'une grande latitude pour associer, ou non, son personnel ou ses représentants ;

- l'absence de cadre institutionnel pour la consultation des salariés fait que ces plans n'ont qu'une portée financière et ne débouchent pas sur l'association des salariés aux décisions de l'entreprise.

La principale différence entre les plans dits « légaux », qui bénéficient des avantages fiscaux prévus par la loi, et les autres plans qualifiés parfois « d'extralégaux », dont les gains sont considérés comme des salaires et par conséquent taxés comme tels. Pour les plans légaux, l'administration s'assure, lors de l'agrément, que le plan déposé est conforme au schéma tel qu'il a été fixé par le législateur pour bénéficier des avantages fiscaux et sociaux.

Les plans légaux et extralégaux ne s'excluent pas, mais parfois se complètent. Ainsi, les plans légaux prévoyant, comme on le verra, des plafonds financiers, ils sont dans certaines entreprises complétés par des mécanismes identiques mais extralégaux, identiques dans leurs mécanismes, mais qui ne bénéficient pas d'avantages fiscaux.

Par ailleurs, contrairement à la France, il n'y a pas de diversification possible des actifs. Les investissements concernent les seules actions de l'entreprise.

Selon les informations communiquées par l'administration fiscale, les quatre plans légaux concerneraient 4 millions de salariés, qui auraient bénéficié d'une dépense fiscale de 1,3 milliard de livres en 2000/2001. Depuis 1998, les salariés anglais auraient ainsi bénéficié d'un montant en actions de 5,2 milliards de livres et de 31,4 milliards au titre des actions sous-jacentes aux stock options.

Comme ces quatre plans ne sont pas exclusifs l'un de l'autre, les statistiques dans ce domaine sont cependant difficiles à établir.

Le plus ancien de ces quatre plans est, comme on l'a vu, le SAYE (Save as you earn), créé par la loi de finances de 1980.

Il s'agit d'un plan d'épargne salariale à caractère général qui permet de constituer une épargne pour exercer des options. Il s'adresse à tous les employés, sous réserve d'une éventuelle condition d'ancienneté qui ne peut excéder 5 ans.

Il fonctionne de la manière suivante :

- les salariés reçoivent des options leur permettant d'acquérir dans le futur, à la date d'exercice, des actions de leur entreprise à un prix fixé par avance ;

- ce prix peut être plus avantageux que le cours du jour de l'action, mais ne peut être inférieur à 80 % de la valeur de l'action sous-jacente à l'option (le rabais est ainsi limité à 20 %) ;

- en contrepartie, chaque employé bénéficiaire du plan s'engage, par un contrat souscrit auprès d'une banque ou d'une société d'épargne immobilière (6 opérateurs sont agréés pour le Royaume-Uni), à épargner chaque mois entre un minimum de 5 livres et un maximum de 250 livres, pour une durée de trois, cinq ou sept ans. C'est le total des sommes ainsi versées et de leurs intérêts, perçus en franchise d'impôt, qui permet l'exercice de l'option ;

- l'option peut être exercée à l'issue de cette période, pendant les six mois qui suivent l'achèvement de la période d'épargne. Elle peut également ne pas être exercée, le salarié récupérant alors son épargne. Des cas de cessation anticipée sont prévus tant pour le salarié que pour l'entreprise, en cas d'événement exceptionnel.

La participation à un plan SAYE donne droit à une franchise d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales.

Seul l'impôt sur la plus-value doit être acquitté lors de la cession des actions. En pratique, selon les règles actuelles, l'impôt peut être réduit à 10 % lorsque les actions sont détenues deux ans, après l'exercice de l'option.

Pour les entreprises, les gains réalisés dans le cadre d'un tel plan par les salariés sont considérés comme des dépenses et sont donc déductibles du résultat imposable.

Fin 2004, 2.457 SAYE avaient été agréés. La valeur cumulée des actions sous-jacentes correspondant à ces options, lors de leur attribution, atteignait 36 milliards de livres.

Le deuxième dispositif, le Share Incentive Plan (SIP), s'adresse également à tous les employés. Il s'est substitué, en application de la loi de finances pour 2000, à l'Approved Profit Sharing Scheme (APSS), lequel peut néanmoins se poursuivre jusqu'à l'échéance.

Le SIP permet aux salariés d'acquérir, en franchise d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, des actions de l'entreprise selon trois modalités :

- l'acquisition à titre onéreux (Partnership Shares), dans la limite de 1.500 livres par an et par employé ainsi que de 10 % du salaire. Les sommes sont directement prélevées sur le salaire brut et, donc, exclues de la base des prélèvements obligatoires ;

- l'attribution gratuite (Free Shares), dans la limite de 3.000 livres par employé et par an, le niveau de cette attribution pouvant, le cas échéant, dépendre des performances individuelles ou collectives au sein de l'entreprise ;

- l'abondement, sous la forme d'actions supplémentaires gratuites lors de l'achat d'actions par le salarié (Matching Shares)(2), dans le rapport de maximum de 2 pour 1 ;

- en outre, les dividendes annuels peuvent être versés non en espèces mais en actions supplémentaires (Dividend Shares).

Les actions concernées ne sont pas directement acquises par les salariés, mais le sont indirectement, pour leur compte, par un trust spécialement constitué à cet effet et dans lequel elles doivent rester trois ans au moins. Le trust est géré par une personne physique, le trustee, qui exerce les droits relatifs à l'action. Il s'agit parfois, mais pas nécessairement, d'un salarié membre du personnel de l'entreprise.

Le coût des attributions gratuites d'actions aux salariés (Free shares), comme celui des attributions d'abondement en complément des acquisitions payantes (Matching shares), est déductible du bénéfice imposable des entreprises. Il y a également exonération de la cotisation au National Insurance.

Les franchises fiscales et sociales ne sont définitivement acquises que si les salariés respectent un délai d'indisponibilité de 5 ans :

- pour les actions gratuites et versées à titre complémentaire (Free et Matching Shares), il n'y a aucun impôt en cas de sortie après 5 ans. En revanche, en cas de sortie entre 3 et 5 ans, ou avant trois ans, il y a réintégration de la valeur historique de l'action, selon des modalités assez complexes, dans l'assiette de l'impôt ;

- pour les actions acquises (Partnership Shares), il y a remise en cause de la déductibilité opérée lors de l'acquisition, selon les mêmes règles de délais de 3 et 5 ans en cas de sortie anticipée du dispositif.

Selon les dernières statistiques disponibles, 471 SIP avaient été approuvées à la fin de l'année 2004, représentant une valeur de 730 millions de livres. 2,9 millions d'employés avaient des Partnership Shares. Pour mémoire, 1.596 APSS étaient encore en cours.

Contrairement au SIP et au SAYE, le Company Share Option Plan (CSOP), qui a remplacé en 1996 le dispositif Discretionary Share Option Scheme (DSOP) datant de 1984, est de type discrétionnaire : il ne s'adresse pas à l'ensemble des salariés mais uniquement à certains d'entre eux, choisis par l'employeur.

Il s'agit d'un plan de distribution d'options, sans rabais sur la valeur des actions, pour une valeur ne dépassant pas 30.000 livres par salarié. Pour le salarié, le gain enregistré lors de l'exercice de l'option est exonéré d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, dès lors que cet exercice est exercé dans un délai compris entre 3 et 10 ans. En revanche, il y a paiement de l'impôt sur la plus-value, plus avantageux cependant que l'impôt sur le revenu, sur le gain réalisé entre l'exercice de l'option et la cession de l'action.

Comme précédemment, les gains des employés sont considérés pour les entreprises comme des dépenses déductibles du résultat imposable.

Fin 2004, 9.973 CSOP et, pour les années antérieures à 1996, DSOP, avaient été agréés. La valeur cumulée des actions sous-jacentes correspondant à ces options, lors de leur attribution, atteignait 29 milliards de livres.

Pour sa part, l'Enterprise Management Incentive (EMI), également créé par la loi de finances de 2000, comme le SIP, est un mécanisme d'acquisition d'options au profit d'une certaine partie du personnel seulement, le cas échéant. Il est ciblé sur les petites et moyennes entreprises indépendantes qui ne dépendent pas d'un groupe et dont l'actif brut ne dépasse pas 30 millions de livres. Les attributions sont plafonnées à 100.000 livres par salarié et 3 millions de livres pour l'entreprise. Les franchises fiscales et sociales sont similaires à celles en faveur du CSOP. Le délai de détention court du jour de l'attribution de l'option, et non de son exercice, ce qui est très favorable car permet de bénéficier plus vite du taux minimum de la taxation des plus-values.

Selon les derniers éléments disponibles, 5.944 entreprises avaient mise en place un EMI, lequel concernait 75.000 salariés.

Sur le plan technique, par ailleurs, il faut mentionner pour les entreprises non cotées, le système utilisé de la phantom share, qui donne aux salariés la reconnaissance d'un droit patrimonial sur une fraction du capital. Une fraction du bénéfice leur est distribuée annuellement et un versement complémentaire leur est alloué au moment où ils quittent l'entreprise. La liquidité est assurée par l'entreprise elle-même par affectation d'une partie des résultats. Le complément est, le cas échéant, assuré par recours au crédit bancaire qui se garantit en prenant des gages sur les portefeuilles d'actions.

Au Royaume-Uni, il n'est pas ressenti comme nécessaire d'aller au-delà de cette participation strictement financière, dont on estime généralement qu'elle suffit à l'attachement et à la fidélisation du salarié.

Les aspects non financiers, notamment les droits de vote, sont administrés par le trustee.

3) Un dispositif pour l'instant centré sur la cogestion en Allemagne

En Allemagne, la loi du 4 février 1920 a prévu les premiers éléments de cogestion. Celle-ci a été supprimée en 1934, et ensuite rétablie, après 1945, dans la zone britannique, pour affaiblir, selon de F. Pesin et C. Strassel, in Le modèle allemand en question, Economica, l'industrie allemande.

Deux dispositifs parallèles se sont ensuite développés dans le cadre de l'économie sociale de marché, la cogestion ou codécision (Mitbestimmung) ; l'aide à la constitution d'un patrimoine (Vermögensbildung), qui donnait, entre autres, la faculté d'acquérir des actions de l'entreprise.

Leur développement a été inégal. La codécision s'est beaucoup diffusée. La Vermögensbildung est restée sur sa philosophie d'une aide aux plus modestes.

La spécificité des entreprises allemandes, où les sociétés de personnes dominent largement et les sociétés de capitaux sont très minoritaires, est également un élément à prendre en considération.

· Des incitations limitées en faveur de la participation financière

L'Allemagne dispose, comme la France, de dispositifs d'intéressement et de participation, mais à un bien moindre degré. Il n'existe pas de cadre législatif d'ensemble.

Les lois sur la formation du patrimoine privé (il y en a eu 5), les Vermögensbildungsgesetze, visent à faciliter la constitution d'un patrimoine par les salariés, les entreprises s'engageant à affecter des sommes d'argent en tant que participation aux bénéfices.

En outre, comme les éléments relatifs aux rémunérations, les dispositions sur l'intéressement, la participation et l'épargne salariale dépendent de la négociation collective, convention collective au niveau de la branche en général, mais également à un niveau inférieur des accords d'entreprise (Betriebsvereinbarung).

Divers dispositifs de participation aux bénéfices ou d'intéressement, Gewinn ou Erfolgsbeteiligung, permettent d'associer les salariés aux performances collectives des entreprises. Ils ne sont pas assortis d'avantages fiscaux ou en termes de cotisations sociales. Trois modalités sont, d'une manière générale, citées : un intéressement aux performances, un intéressement au rendement et un intéressement au profit.

Des règles assez précises peuvent être fixées au niveau des branches, selon l'association patronale BDA, pour l'industrie chimique, les agences de voyages ou l'industrie alimentaire.

A côté, les mécanismes dits de participation au capital (Kapitalbeteiligung) sont peu répandus puisqu'ils ne concernent, selon les chiffres de 2006 donnés par le même organisme, que 3.600 entreprises et 2 millions de salariés (13 milliards d'euros d'actifs en 2004).

Ils sont toutefois assez divers ce qui reflète la diversité des structures juridiques des entreprises allemandes, dont 70 % sont des entreprises individuelles, 13 % des sociétés de personnes (OHG et KG), 15,5 % des Sarl (GmbH) et 0,2 % des sociétés par actions.

On constate que la participation tacite, sans droit à la décision, (Stille Beteiligung), l'actionnariat salarié et le prêt du salarié à l'employeur (Arbeitnehmerdarlehen), équivalent de notre compte courant bloqué, sont les trois dispositifs les plus fréquents pour les entreprises, mais que s'agissant des salariés, c'est la détention d'actions qui est la plus importante : les grandes entreprises allemandes sont aussi des sociétés par actions, lesquelles sont en partie détenues par le personnel. Les droits de jouissance (Genuβrecht) reposent également sur la séparation entre le profit et la propriété.

participation au capital, selon les formes juridiques,
en allemagne

Forme de participation

Entreprises

Salariés

Nombre

Pourcentage

Nombre

Pourcentage

Prêt du salarié

590

16,4

115.000

5,8

Participation tacite

970

26,9

250.000

12,5

Participation indirecte

470

13,1

93.000

4,7

Droit de jouissance

390

10,8

120.000

6,0

Actionnariat salarié

610

16,9

1.400.000

69,9

Coopératives

340

9,5

17.000

0,8

Participation aux Sarl (GmbH)

230

6,4

7.000

0,3

Source : BDA, d'après AGP/GIZ, année 2006.

Deux aides fiscales sont prévues par la législation allemande.

La première relève du cadre très large de la cinquième loi sur la formation du patrimoine (5. Gesetz zur Förderung der Vermögensbildung der Arbeitnehmer), dont le texte initial a été adopté en 1965, qui vise d'une manière générale à aider les personnes dont les revenus n'excèdent pas certains plafonds à se constituer un patrimoine, grâce au versement par l'Etat d'une prime spécifique : l'Arbeitnehmer-Sparzulage (ANSpZ) ou Vermögenwirksameleistung.

Elle ne vise donc pas que les seules actions ou titres de l'entreprise du salarié, mais également les autres investissements, notamment les biens immobiliers.

L'épargne que le salarié constitue, son employeur effectuant périodiquement les prélèvements correspondants sur son salaire, est complétée par un subside de l'Etat (un crédit d'impôt, en pratique) égal à 18 % des montants engagés, dans la limite d'un plafond de 400 euros par an. Ce taux a été temporairement majoré à 22 % pour les nouveaux Länder, jusqu'au 31 décembre 2004. Il est, comme pour l'Ouest, de 18 % à partir de 2005.

Ce taux de 18 % ne concerne que les valeurs mobilières et financières, ainsi que les titres émis par l'employeur (mais pas uniquement eux). Pour les investissements immobiliers, le taux est de 9 % et le plafond de 470 euros.

Les plafonds de l'ANSpZ sont actuellement de 17.900 euros pour les célibataires et de 35.800 euros pour un couple marié, ce qui ne vise donc que les ménages des catégories intermédiaires et modestes. Le montant de l'ANSpZ n'est pas assujetti à l'impôt sur le revenu et n'est pas non plus inclus dans l'assiette des cotisations sociales.

La deuxième aide fiscale, qui peut se cumuler avec l'ANSpZ, est prévue par l'article 19 a de la loi sur l'imposition des revenus (Einkommensteuergesetz), adoptée en 1984. Les actions qui sont gratuitement attribuées aux salariés ne sont prises en compte que pour la moitié de leur valeur pour le calcul du revenu imposable. Il en est de même pour l'avantage financier que constitue la cession d'actions de l'entreprise à ses salariés à prix réduit. Cet avantage est cependant modeste, puisqu'il est limité à 315 euros par an.

Il n'y a donc pas, en Allemagne, contrairement à la France et au Royaume-Uni, de dispositif fort d'épargne salariale.

· La participation des salariés passe donc par la cogestion

L'enjeu de l'intéressement, de la participation financière et de l'épargne salariale est purement financier en Allemagne, puisque l'association des travailleurs aux décisions de l'entreprise repose sur deux autres modalités : l'association aux décisions, avec le comité d'entreprise ou conseil d'établissement ; la présence de représentants des salariés aux conseils de surveillance des sociétés.

le comité d'entreprise

Dans les établissements autonomes d'au moins cinq salariés, la loi du 15 janvier 1972 sur l'organisation interne de l'entreprise (Betriebsverfassunggesetz), qui a largement remplacé celle de 1952, prévoit la mise en place d'un comité d'entreprise ou conseil d'établissement. Celui-ci est uniquement constitué de représentants des salariés. Il jouit d'un véritable pouvoir de codécision en matière sociale (temps et conditions de travail, hygiène et sécurité, primes et rémunérations liées à la performance). En cas de désaccord entre l'employeur et le conseil, il y a arbitrage par une instance interne et paritaire, la commission interne de conciliation. Le conseil d'établissement doit par ailleurs être préalablement informé avant toute décision relative au personnel. Il est notamment consulté sur les licenciements.

En matière économique, il est informé et consulté par le chef d'entreprise.

Pour les grandes entreprises, des comités centraux d'entreprise sont prévus. Ils peuvent décider de mettre sur pied un comité d'entreprise commun au groupe.

En outre, dans les entreprises de plus de 100 salariés, un comité économique (Wirtschaftsausschuss) doit être établi, chargé de remettre au comité d'entreprise un rapport sur les questions d'ordre économique.

la cogestion et la représentation presque paritaire des salariés aux conseils de surveillance des grandes sociétés

Dans les grandes entreprises de plus de 2.000 salariés, constituées sous la forme de sociétés de capitaux, la loi de 1976 sur la cogestion (Mitbestimmung) prévoit que le conseil de surveillance, qui désigne et contrôle le directoire, est constitué de manière paritaire, comprenant pour moitié des représentants des salariés.

Ceux-ci sont désignés soit par les syndicats, soit directement par eux.

En pratique, c'est le président du conseil de surveillance, qui représente le capital, qui assure, le cas échéant, la prépondérance de ce dernier.

Pour les entreprises de plus de 500 salariés et de moins de 2.000, les représentants du personnel constituent un tiers des membres du conseil de surveillance, dans le cadre de la loi du 18 mai 2004.

Par ailleurs, en application de la loi du 21 mai 1951 sur les entreprises minières et sidérurgiques de plus de 1.000 salariés, le conseil de surveillance est composé de manière presque paritaire dans ce secteur d'activité.

Plus de 750 grandes entreprises sont concernées par la cogestion.

· Un dispositif qui pourrait évoluer

La cogestion fait actuellement l'objet d'une importante réflexion, le précédent Gouvernement, celui de M. Gerhard Schröder, ayant invité les partenaires sociaux à se réunir dans le cadre d'une commission spécifique, la Biedenkopf Kommission.

Il s'agit de faire face à la mondialisation, la cogestion rendant plus difficiles les fusions transfrontalières et étant mal comprise des investisseurs étrangers, notamment anglo-saxons, qui envisagent mal que des personnes qui ne sont pas choisies par les actionnaires siègent dans une instance dirigeante d'une entreprise. Le dispositif est ainsi réputé favoriser les délocalisations.

Les représentants des employeurs proposent de réduire à un tiers la représentation des salariés. La DGB propose au contraire de baisser de 2.000 à 1.000 l'effectif au-delà duquel la parité est prévue. L'ouverture des conseils de surveillance aux représentants des salariés des sites étrangers est étudiée.

Lors de la célébration du trentenaire de la loi précitée de 1976, à Berlin, le 30 août dernier, la Chancelière Mme Angela Merkel a évoqué des aménagements, à savoir un toilettage. Cet élément fait partie du contrat de la grande coalition entre la CDU-CSU et le SPD.

La commission devait se réunir pour la dernière fois le 16 septembre 2006 et rendre ses conclusions en novembre prochain.

4) Des situations variables ailleurs en Europe

Pour s'en tenir à un rapide panorama des anciens Etats membres, il y a ceux qui favorisent un ou plusieurs dispositifs de participation financière ou d'actionnariat salarié, tels que la France et le Royaume-Uni, comme on l'a vu, mais aussi, dans une moindre mesure, l'Irlande et la Belgique. On observe, à l'opposé, l'absence de cadre juridique ou fiscal dans d'autres Etats membres, notamment le Portugal et la Suède. Avec des cadres moins développés que dans les pays « en pointe », l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la Grèce et les Pays-Bas sont dans une situation intermédiaire.

Certains Etats membres présentent des spécificités intéressantes, à côté de la situation particulière des nouveaux Etats membres d'Europe centrale, fortement marqués par les privatisations qui ont suivi la chute du mur de Berlin.

a) Les spécificités des plans de participation en Belgique

les dispositifs de participation

Parmi les exemples de mécanismes les plus couramment cités s'agissant de la Belgique, le premier est l'acquisition spontanée d'actions de l'entreprise ou d'une de ses filiales, par les salariés dans le cadre du dispositif dit Monory bis.

Celle-ci bénéficie d'un régime fiscal favorable, mais complexe, avec une réduction d'impôt plafonnée à 600 euros, égale au produit du montant de l'investissement et du « taux moyen spécial amélioré d'imposition » du salarié. Cet avantage peut être remis en cause si certaines conditions ne sont pas respectées.

La deuxième mesure est le plan de participation, prévu par la loi du 22 mai 2001, relative aux régimes de participation des travailleurs au capital et aux bénéfices des sociétés.

Ce dispositif, facultatif, est mis en place sur l'initiative de l'employeur qui doit engager, s'il y en a une, une concertation avec la représentation du personnel, le conseil d'entreprise ou, à défaut, le comité de prévention et de protection au travail ou la délégation syndicale. L'instauration du plan se fait, en principe, dans le cadre d'une convention collective spécifique.

Le plan de participation a une vocation générale. Il s'adresse à tous les employés. Une condition d'ancienneté d'au maximum un an peut toutefois être prévue. A défaut d'autres critères objectifs définis par convention collective, les avantages attribués à chacun des salariés dépendent d'éléments figurant dans la liste de droit commun : l'ancienneté, le grade, la fonction, le niveau de barème, le niveau de rémunération et le niveau de formation.

Il s'agit d'un dispositif souple puisque le plan de participation peut prendre la forme :

- soit d'une participation aux bénéfices, avec attribution d'un intéressement en espèces immédiatement disponibles ou temporairement bloquées ;

- soit d'une participation au capital, avec attribution gratuite d'actions ou de parts de la société employeur ou d'une entreprise liée à celle-ci. Ces actions doivent être assorties d'un droit de vote. Si la société ne dispose pas d'actions propres en portefeuille, elle en émet dans le cadre d'une augmentation de capital par incorporation de bénéfices. Les titres sont bloqués pour une durée allant de 2 à 5 ans, selon ce que précise la convention collective, sous réserve de possibilité de déblocage anticipé en cas d'événement exceptionnel (licenciement, mise à la retraite, décès...). Les titres nominatifs font l'objet d'une inscription spéciale dans le registre des associés. Les actions au porteur sont déposées sur un compte bloqué, au nom du salarié, géré par un établissement de crédit ou une société de bourse.

Par ailleurs, une structure intermédiaire, une société coopérative de participation peut être créée pour la détention et la gestion des actions.

Plusieurs grands principes président, en outre, à la conception du plan de participation :

- la participation doit s'ajouter à la rémunération et non se substituer à elle ;

- le plan doit prévoir une formule prédéterminée où le lien avec le résultat de l'entreprise apparaît clairement ;

- le montant total de la participation au capital et aux bénéfices ne peut à la clôture de l'exercice concerné excéder 10 % de la masse salariale brute et 20 % du bénéfice après impôt.

Sur le plan fiscal, le plan de participation tel qu'il est prévu en Belgique est assez atypique, en ne s'en tenant qu'à ses principes essentiels :

- les sommes provenant d'un plan de participation sont, pour le salarié, exonérées de l'impôt sur le revenu, mais une retenue à la source (taxe assimilée à l'impôt sur le revenu) est prélevée sur les montants ou parts attribués. Son taux est de 15 % sur la participation au capital et de 25 % sur la participation aux bénéfices. Cependant, il est réduit à 15 % si elles sont attribuées dans le cadre d'un plan d'épargne d'investissement ;

- une taxe additionnelle au taux de 23,29 % est prélevée lorsque la période d'indisponibilité n'est pas respectée ;

- les participations, la taxe et l'éventuelle taxe additionnelle à cette dernière ne sont pas déductibles de l'assiette du bénéfice imposable ;

- s'agissant des cotisations sociales, les paiements en espèces ou parts au titre d'un plan de participation ne sont pas considérés comme une rémunération. Une cotisation de solidarité, au taux de 13,07 %, est ainsi retenue sur cette participation aux bénéfices.

la spécificité de la fiscalité des stock options

En Belgique, la taxation des stock options intervient lors de l'attribution de l'option, ce qui oblige à procéder au décaissement correspondant.

Le taux de l'impôt est, en principe, de 15 % de la valeur de l'action, que l'option soit ou non conditionnelle, avec une majoration de 1 % par an au-delà d'une durée de validité supérieure à 5 ans.

Ce taux est réduit à 7,5 %, et la majoration annuelle supplémentaire de 1 % réduite de moitié, lorsque plusieurs conditions sont remplies. Tel est notamment le cas lorsque le prix d'exercice est définitivement fixé lors de l'offre, que la levée de l'option n'intervient ni avant un délai de trois ans, ni après un délai de dix ans, que l'option n'est pas transmise à autrui, et que les risques de chute de valeur ne sont pas couverts par l'employeur.

b) L'exemple original des sociedades laborales en Espagne

Les sociedades laborales se développent en Espagne depuis le milieu des années 1960. La première a été créée pour reprendre un service urbain de bus, à Valence. Elles sont actuellement estimées à 18.400, occupant 110.000 travailleurs. Ce sont donc de très petites entreprises, de six personnes en moyenne. Il s'en crée environ 1.000 chaque trimestre.

Sur le plan du droit, les sociedades laborales sont définies par la loi comme un modèle particulier de société anonyme (SA) ou de société à responsabilité limitée. Tel est le cas lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes :

- les travailleurs sont majoritaires dans le capital ;

- nul ne détient plus d'un tiers du capital ;

- deux catégories d'actions coexistent : les actions des travailleurs et les actions des associés non employés ;

- en cas de transmission des actions, il y a un droit de préemption, par ordre de préférence, en faveur des travailleurs qui ne sont pas encore associés, des travailleurs déjà associés, des autres actionnaires et de la société elle-même ;

- chaque sociedad laboral doit, en outre, constituer un fonds spécial de réserve de 10 % en vue de faire face à d'éventuelles difficultés ;

- les actionnaires existants bénéficient d'un droit de souscription préférentiel en cas d'augmentation de capital.

En outre, la loi sur les sociedades laborales fixe les modalités selon lesquelles se détermine le prix de cession des actions et organise les conditions de la vente des actions en cas de cessation de la relation de travail avec l'entreprise. Elle définit aussi le régime de sécurité sociale et d'assurance chômage de leurs travailleurs, administrateurs, administrateurs directeurs ou gérants.

En 2000, les deux tiers environ des sociedades laborales avaient pris la forme de la SA, le reste ayant celle de la société à responsabilité limitée.

La sociedad laboral permet à l'ensemble des travailleurs de participer non seulement au capital, mais aussi à la gestion de l'entreprise.

Comme dans la majorité des entreprises, l'élection du conseil d'administration se fait par vote proportionnel à la participation au capital. Ce mode de scrutin diffère de celui des coopératives, où est généralement appliqué le principe « une personne, une voix ». La limite de détention du capital implique toutefois qu'aucune décision ne pourra être prise par une seule fraction des membres de l'entreprise.

La gestion courante de l'entreprise relève de la compétence de la direction et du conseil d'administration, dans lesquels des travailleurs-associés sont le plus souvent majoritaires.

Il arrive que le conseil d'administration et la direction se confondent, particulièrement dans le cas des entreprises de moins de 10 travailleurs. Dans les entreprises plus importantes, chaque secteur d'activité de l'entreprise est représenté au conseil.

Des dividendes sont versés chaque année aux actionnaires en fonction des bénéfices de l'entreprise. La loi de 1997 impose cependant que 25 % des bénéfices soient préalablement prélevés pour affectation au fonds de réserve.

Lors d'un départ à la retraite, le travailleur qui quitte l'entreprise doit revendre ses parts, en priorité à ceux qui n'ont pas encore eu la possibilité de prendre une participation financière au capital social de l'entreprise.

En 2000, les travailleurs-associés des sociedades laborales représentaient 78 % du total des actionnaires, pour 81 % en 1989.

c) Un régime de participation financière supprimé en Suède où l'association aux décisions prévaut

La Suède est un cas spécifique qui se rapproche par certains égards de l'Allemagne par l'accent mis sur la seule participation à la décision. Les fonds salariaux collectifs, mis en place en 1975 sur l'initiative de la Confédération nationale du travail, ont été supprimés au cours des années 1990. Toutefois, certains des fonds antérieurement créés continuent à opérer et les sommes qui leur ont été allouées ont été exonérées de cotisations sociales. Comme en Allemagne cependant, l'enjeu de ces dispositifs n'était que purement financier.

La loi de 1976 sur la codétermination assure, en effet, la participation des salariés aux décisions de l'entreprise et rend également obligatoire le dialogue social dans certains domaines. Elle prévoit le droit des syndicats à la négociation avec l'employeur et réciproquement, ainsi que l'obligation de négocier sur tout ce qui concerne les conditions de travail et les licenciements économiques, ou les transferts d'activité, en l'absence d'accord collectif.

S'agissant du droit à l'information, toute partie qui cite un document lors d'une négociation doit le communiquer à l'autre si elle en fait la demande et un employeur doit informer un syndicat avec lequel il a conclu un accord collectif tant sur la manière dont les activités de l'entreprise évoluent en matière financière que sur sa politique du personnel. En contrepartie, une obligation de confidentialité est prévue.

Par ailleurs, la loi de 1987 sur la représentation des salariés dans le secteur privé prévoit que, dans les entreprises de plus de vingt-cinq salariés, deux postes sont réservés à des représentants du personnel au sein du conseil d'administration. Ceux-ci sont désignés par les sections syndicales. Dans les entreprises de plus 1.000 salariés, les représentants du personnel ainsi désignés sont au nombre de trois.

d) Le cas particulier des nouveaux Etats membres d'Europe centrale

Les Nouveaux Etats membres d'Europe centrale sont dans une situation particulière.

L'actionnariat y a été créé à l'occasion des transferts de propriété qui ont suivi l'effondrement du système communiste. Les méthodes de privatisation ont souvent conduit à l'émergence d'un actionnariat salarié important, issu de la vente d'actions au personnel à des conditions préférentielles.

Les salariés en ont notamment bénéficié en Slovénie, où la tradition d'autogestion leur était favorable, ainsi qu'en Pologne dans le cadre de la loi de privatisation de 1991 sur les petites et moyennes entreprises, qui leur a permis de devenir propriétaires de leurs entreprises, ainsi qu'en Hongrie, où la loi de 1992 a introduit le système de l'ESOP, calqué sur le système américain. Plus tard, en 1995, la loi de privatisation a renforcé les incitations à devenir actionnaire de l'entreprise.

L'actionnariat salarié est ainsi, en pratique, la seule forme connue de participation financière. Les systèmes de participation aux bénéfices sont peu fréquents. Si le droit des sociétés mentionne cette possibilité en République tchèque et en Slovaquie, ainsi qu'en Pologne et en Slovénie, c'est un futur adhérent, la Roumanie, qui est le seul à avoir une législation spécifique sur un régime général de participation aux bénéfices en espèces dans les entreprises d'Etat.

5) Un « modèle » américain d'épargne salariale et d'actionnariat salarié largement orienté vers l'épargne retraite

Aux Etats-Unis également, un grand nombre de dispositifs de participation des salariés au capital ou aux bénéfices des entreprises, sont en place, dans un cadre juridique très flexible, comparable à celui du Royaume-Uni.

En 2001, la General Social Survey a estimé à 21 % la proportion des salariés américains détenant une participation dans leur entreprise. Cette part atteignait 60 % dans l'informatique contre un minimum de 14 % dans les mines, l'agriculture et le BTP.

D'une manière générale, comme cela est présenté sur un document d'entreprise dont un exemplaire a été montré au rapporteur, les dispositifs de participation et d'actionnariat salariés s'insèrent dans un ensemble d'avantages présentés aux salariés dans leur entreprise, et qui vont d'éléments aussi essentiels que la retraite complémentaire à des avantages sur des éléments de la vie quotidienne tels que les subventions pour les adhésions à des clubs de sport.

Certains, notamment ceux en faveur des dirigeants, ont pour objectif de diminuer l'impôt, soit pour l'entreprise en raison de l'instauration d'un plafond à la déductibilité du salaire individuel, soit pour le chef d'entreprise.

Pour ce qui est de l'intéressement ou de la participation au bénéfice, il existe différents mécanismes de profit sharing.

Un tel supplément de rémunération peut être versé en espèces, en actions ou en obligations. Son bénéfice peut être immédiat ou, au contraire, différé jusqu'au départ en retraite, grâce à l'interposition d'un trust.

Les Stock Bonus Plans prévoient le versement de l'intéressement uniquement en actions de l'entreprise.

Alors que l'actionnariat salarié répond, comme on l'a vu, à un motif purement financier au Royaume-Uni, les deux grands dispositifs actuellement en vigueur aux Etats-Unis, l'ESOP et le 401 (k), du nom de la disposition du code général des impôts qui lui est consacrée, ont un objectif d'épargne retraite.

C'est une nécessité puisque le régime public de répartition, que l'on y appelle la social security, financée par des cotisations employeurs et salariés aux taux identiques de 6,2 %, ne procure qu'une pension de base, laquelle ne représente actuellement, dans l'ensemble, que 42 % du revenu des américains de plus de 65 ans.

Ce sont donc les régimes complémentaires de retraite, qui sont indispensables pour que les salariés puissent espérer maintenir un certain niveau de vie une fois en retraite, qui expliquent l'importance de l'actionnariat salarié aux Etats-Unis.

Ces régimes sont ainsi facultatifs et sont donc prévus soit dans un cadre multi-employeur, dans les branches d'activité où les taux de syndicalisation sont élevés (mines, transports routiers, constructeurs automobiles américains), soit au niveau de l'entreprise, soit sur une base individuelle.

Les régimes multi-employeurs sont exceptionnels.

La participation des syndicats, sur une base paritaire, à la gestion des régimes de retraite multi-employeur

Les premiers fonds multi-employeurs à gestion syndicale ont été mis en place assez tôt aux Etats-Unis, sur une base géographique et professionnelle, dans certains secteurs : transports routiers ; textile ; construction.

Le syndicat de l'automobile (UAW - United Auto Workers) et celui de la sidérurgie (USW-United steel workers) ont ensuite négocié de tels fonds à partir de 1949. Un fonds a également été institué après la Seconde guerre mondiale, à la suite d'une grève arbitrée par le Président Truman, pour les mineurs.

La loi Taft-Hartley de 1947 rend obligatoire une gestion paritaire.

Ces fonds multi-employeurs restent cantonnés, pour l'essentiel, dans les secteurs des entreprises de petite taille. Il y a environ 3.000 fonds Taft-Hartley couvrant 10 millions de personnes, actifs et retraités (chiffres de 2000). Le plus connu est celui des Teamsters (camionneurs).

S'agissant des régimes d'entreprises, on observe actuellement une importante mutation aux Etats-Unis.

Les plans de retraite étaient autrefois, assez souvent, des plans à prestations définies, dans le cadre desquels les employeurs garantissent un certain niveau de revenus à leurs anciens salariés.

Les difficultés auxquelles doivent faire face les entreprises, qui ne s'estiment plus en mesure d'en régler les charges dans le cadre d'une économie mondialisée, et le recours de plus en plus fréquent au fonds de garantie qui les couvre, le Pension Benefit Guaranty Corp (PBGC), font qu'ils sont de plus en plus rares et remplacés, comme le fait IBM à partir de 2008, pour ses nouveaux salariés, par des plans à contribution définies, dont le 401 (k), qui repose sur l'épargne salariale, est couramment proposé par l'employeur.

Le déclin des régimes de pensions à prestations définies aux Etats-Unis

Plusieurs faillites intervenues en 2005, notamment celle de Delphi, équipementier automobile, après celles de Northwest Airlines et Delta Air Lines, ont aggravé la situation financière du Pension Benefit Guaranty Corp (PBGC), organisme public garantissant les fonds de pension "définis", grâce auxquels les titulaires bénéficient d'une retraite mensuelle fixe dont le versement est financé par leur entreprise. 

Créé en 1974, il se substitue donc aux entreprises insolvables ou disparues. Il est financé par les employeurs, mais bénéficie de la garantie de l'Etat fédéral.

Environ 31 000 fonds "définis" sont recensés aux Etats-Unis, dont 45 millions d'actuels et futurs retraités du privé bénéficient, essentiellement dans les industries des « Trente glorieuses » : l'automobile, le transport aérien, la sidérurgie, le pétrole, la pharmacie, les télécommunications.

L'organisme assure entre autres le paiement des retraites de plus d'un million de personnes, dont les anciens employés de LTV Steel, Bethlehem Steel, TWA, Pan Am ou encore Eastern Airlines.

· les plans de type 401 (k) organisent un actionnariat salarié par l'intermédiaire de l'abondement de l'employeur, lequel peut être fonction des performances de l'entreprise dans le cadre d'un dispositif d'intéressement

Le 401 (k) est un plan d'épargne salariale qui s'adresse à tous les employés. Une condition d'ancienneté, qui ne peut excéder un an, peut être prévue.

Il s'agit d'une formule très souple dont nombre de dispositions sont librement fixées. A côté du plan traditionnel, il existe notamment une variante simplifiée pour les petites entreprises, le SIMPLE 401 (k) plan.

Pour l'essentiel, il convient de rappeler que :

- le salarié est libre de s'affilier ou non au 401 (k) proposé par son entreprise. Traditionnellement, il devait le faire volontairement. Toutefois, les employeurs peuvent dorénavant procéder à l'inscription automatique, à charge pour l'employé, s'il le souhaite, de se faire radier du plan. Cette disposition est appréciée tant de la part des autorités politiques que des syndicats, dans un pays où le taux d'épargne de l'ensemble des ménages, voisin de zéro, est très insuffisant ;

- le plan est alimenté par des versements du salarié et, si ses dispositions le prévoient, par un abondement de l'employeur, lequel doit être versé selon des règles qui ne doivent pas être discriminatoires. L'abondement est en général égal à 50 % de la somme versée par l'employé. Lorsqu'elles graduent leur abondement en fonction de la contribution du salarié, les entreprises ne versent 100 % de celle-ci que jusqu'à 3 % du revenu. Une moindre proportion est généralement ensuite versée jusqu'à 5 % ;

- le 401 (k) bénéficie d'un régime fiscal de faveur, avec un différé d'imposition sur le revenu ;

- ainsi, les versements du salarié, pour lesquels le plan peut prévoir un plafond en pourcentage du salaire, sont déductibles de son revenu imposable, dans la limite de 15.000 dollars par an et de 20.000 dollars au-delà de 50 ans. L'imposition intervient ultérieurement, au fur et à mesure du retrait des sommes ainsi épargnées et de leurs produits. Ces retraits peuvent commencer à 59 ans et demi et doivent en tout état de cause débuter avant 69 ans et demi ;

- l'abondement est également déductible du résultat imposable de l'entreprise, dans certaines limites.

Normalement, les sommes ne sont retirées par le salarié au fur et à mesure de ses besoins, qu'à compter de 59 ans et demi, comme on vient de le voir. Toutefois, le salarié peut demander le transfert de ses avoirs sur un compte de retraite individuel (IRA) ou bien sur un plan proposé par son nouvel employeur en cas de départ de l'entreprise. De même, des facultés de retrait sont prévues pour des cas exceptionnels (acquisition d'une résidence principale, paiement d'études pour les enfants, financement de frais de santé).

En outre, les droits au titre d'un plan 401 (k) peuvent permettre d'obtenir un prêt d'un montant pouvant aller jusqu'à la moitié de leur montant. Un dispositif de reconstitution progressive des droits initiaux est alors mis en œuvre. Le capital et les intérêts dus sont reversés sur le compte personnel du salarié au fur et à mesure des remboursements.

C'est dans sa gestion que le 401 (k) débouche sur l'actionnariat salarié. Si les versements des salariés doivent faire l'objet de propositions de placements diversifiés, l'abondement de l'employeur est le plus souvent versé sous la forme d'actions de l'entreprise, lesquelles peuvent être assorties d'un délai obligatoire de conservation qui peut être plus ou moins long.

En outre, il faut compter avec la culture de certaines entreprises, notamment du milieu industriel, où la part des investissements dans leurs propres actions, selon la volonté des seuls salariés, dépasse la norme recommandée par les dirigeants. Tel est notamment le cas de General Electric. Les enseignements du contre-exemple d'ENRON, où la faillite a entraîné la perte de la totalité de l'épargne retraite des salariés, ne sont pas universellement suivis.

Enfin, le 401 (k) est utilisé comme un plan d'intéressement ou de profit sharing dès lors que l'une de ses dispositions prévoit que l'abondement de l'employeur est fonction de certains résultats de l'entreprise.

· Créés notamment pour la reprise des entreprises par les salariés, les ESOP sont également et de fait un dispositif d'épargne retraite

Le dispositif de l'Employee stock ownership plan (ESOP) a été créé en 1956, comme on l'a vu en introduction, par un avocat de San Francisco, Louis O. Kelso, pour le rachat par les salariés des parts de la Peninsula Newspaper. Il a fait l'objet d'un statut législatif bien plus tard, en 1974, dans le cadre de l'Employee Retirement Income Security Act (ERISA). Il a été conçu pour permettre aux employés de recevoir tout ou partie du capital de l'entreprise sans que leurs salaires en soient affectés.

C'est également un plan d'épargne retraite qui s'adresse à tous les salariés, financé par le seul employeur, lequel verse chaque année, en numéraire ou bien en actions, dans la limite d'un plafond en valeur et en pourcentage de la masse salariale, une contribution en principe investie en actions de l'entreprise. Les charges de l'ESOP ne sont déductibles du revenu imposable que dans la limite de 25 % de la masse salariale.

Les actions sont détenues par un fonds d'investissement (trust), qui peut également requérir à l'emprunt pour en acquérir. Dans ce cas, le schéma consiste pour l'entreprise à verser au trust le montant nécessaire pour faire face aux annuités de l'emprunt qui a servi à les acquérir.

Chaque salarié dispose d'un compte personnel alimenté par les contributions de l'entreprise. Les actions correspondantes y sont conservées jusqu'à son départ en retraite.

Les actions acquises par emprunt sont, le cas échéant, quant à elles, sur un compte bloqué jusqu'au remboursement de l'emprunt correspondant. Elles sont ensuite réparties sur les comptes personnels.

Du point de vue du salarié, l'ESOP permet donc d'acquérir des actions sans risque ni apport d'origine, en recourant parfois, en outre, à un crédit qu'il ne pourrait obtenir à titre personnel.

Sur le plan fiscal, le régime est favorable à plusieurs titres :

- les contributions de l'entreprise sont, comme on l'a vu, déductibles du résultat imposable ;

- les dividendes versés à l'ESOP sont également déductibles de l'assiette de l'impôt sur les bénéfices s'ils sont « raisonnables » et utilisés pour rembourser le prêt qui a permis de les acquérir, alors que les dividendes ne sont normalement pas déductibles aux Etats-Unis ;

- l'employeur peut en outre acquitter les intérêts dus par l'ESOP, qui sont alors considérés comme une charge déductible ;

- le trust n'est pas imposable (seuls le sont les éventuels dividendes directement versés aux salariés au titre de leurs droits personnels) ;

- les salariés bénéficient d'un différé d'imposition, jusqu'au moment où ils effectuent des retraits.

Des facultés de diversification sont offertes à partir de l'âge de 55 ans et de 10 ans d'ancienneté : les entreprises doivent proposer aux salariés concernés trois possibilités d'investissement diversifié pour 25 % de leurs avoirs, ou bien la liquidation de la somme correspondante. Cette proportion est relevée à 50 % à l'âge de 60 ans.

En 2004, on recensait aux Etats-Unis quelque 11.500 ESOP qui concernaient 10 millions de salariés et 500 milliards de dollars d'actifs.

La plupart des ESOP sont mis en œuvre par des sociétés qui ne sont pas cotées en bourse.

· L'actionnariat salarié direct des Employee stock purchase plans

Il existe deux types de plan d'achat d'actions aux Etats-Unis : les « qualified », qui bénéficient d'un traitement fiscal préférentiel car répondant aux prescriptions de le section 423 du code général des impôts, et les « non qualified ».

Les premiers doivent être offerts à tous les employés, mais peuvent cependant exclure ceux qui ont moins de deux ans d'ancienneté, les salariés à temps partiel et les titulaires des rémunérations les plus élevées.

Dans ce cadre, les salariés peuvent acquérir, à partir des sommes préalablement précomptées de leur paie pendant une période donnée (« offering period ») sans être fiscalement déductibles, des actions de l'entreprise en bénéficiant sur leur prix d'un rabais pouvant aller jusqu'à 15 %.

Le dispositif est très souple. La plupart des plans permettent de calculer le rabais soit sur la valeur de l'action en début de période, soit sur celle en fin de période. La période d'épargne peut aller jusqu'à cinq ans si le prix d'acquisition de l'action est celui en fin de période, de 27 mois si c'est le prix de début de période.

L'avantage fiscal concerne uniquement le salarié et tient à l'absence d'impôt sur la plus-value, au taux de 15 %, sur le rabais (qui peut lui-même aller jusqu'à 15 %). Il faut avoir conservé les actions pendant un délai de deux ans à compter de leur attribution et d'un an après leur acquisition.

En pratique, ce dispositif ne concerne que les sociétés cotées.

· Les stock options

Le régime des stock options, n'est pas le même, aux Etats-Unis, selon que celles-ci concernent une minorité d'employés, ou au contraire une large majorité d'entre eux.

Avant même que le développement des sociétés Internet ne conduise, à la suite de l'exemple antérieur de Microsoft pour les nouvelles technologies, à une très large diffusion des stock options dans les start up, certaines entreprises américaines ont, en effet, procédé à une large distribution des stock options : PepsiCo, Cisco, Starbuck et Whole Foods.

les plans d'attribution à tous les employés

Les Incentive stock options bénéficient d'un régime fiscal de faveur, mais doivent respecter certaines conditions, qui sont pour l'essentiel les suivantes :

- les options sont proposées à tous les salariés et uniquement à eux (les membres non salariés du Board n'y ont pas droit) et doivent être exercées dans les trois mois au plus, en cas de départ de l'entreprise ;

- le plan fait l'objet d'un document écrit, qui doit être approuvé dans les douze mois par les actionnaires, et préciser le nombre de parts délivrées et les employés concernés ;

- un délai maximum de dix ans est prévu tant pour l'attribution de l'option qu'ensuite, pour son exercice ultérieur ;

- chaque option est attribuée dans le cadre d'un accord qui précise les conditions de son exercice, et notamment la période pendant laquelle elle peut être exercée à l'intérieur des limites générales précédentes ;

- le prix d'exercice ne peut être inférieur à la valeur de marché de l'action au jour de l'attribution de l'option ;

- les salariés ne doivent pas détenir, à la date d'attribution, un capital représentant plus de 10 % des droits de vote de l'entreprise, à moins que la valeur de l'exercice ne soit d'au moins 10 % supérieure à la valeur de marché et que l'option ne puisse être exercée dans un délai supérieur à 5 ans ;

- la valeur des actions acquises lors de l'exercice d'options ne peut excéder 100.000 dollars sur une période de douze mois. Au-delà, les ISO sont soumis au régime des non qualified options, qui sont discrétionnairement attribuées.

Sur le plan fiscal, l'avantage des ISO concerne les employés, qui ne paient que le seul impôt sur la plus-value entre le prix d'exercice et le prix de cession.

Les attributions discrétionnaires

Les non qualified options ne bénéficient d'aucun avantage fiscal. Elles peuvent être attribuées à tout employé, et même aux personnes qui ne sont pas salariées, selon le choix de l'entreprise. La différence entre la valeur lors de d'exercice et le prix fixé lors de l'attribution de l'option est assujettie à l'impôt sur le revenu. La somme correspondante est déduite du résultat de l'entreprise.

Pour les dirigeants d'entreprise, les stock options ont été créées pour contourner les plafonds prévus en matière fiscale pour la déductibilité des salaires, selon les éléments communiqués au rapporteur.

· Les stock appreciation rights (SAR) et les actions fantômes

Il s'agit de modalités de versements de suppléments de rémunération, qui interviennent soit en espèces soit en actions, soit par combinaison des deux.

Le SAR permet au salarié de recevoir la somme équivalente à l'augmentation de la valeur d'un portefeuille uniquement composé d'actions de l'entreprise pendant une période donnée.

Le gain est le même que dans le cadre d'un plan d'options, mais le salarié a l'avantage de n'avoir pas à exercer l'option et à débourser la somme nécessaire à l'acquisition des actions sous-jacentes, s'il y a lieu.

Le dispositif est très voisin avec également une valeur de référence donnée et connue à l'avance, une période d'exercice ainsi qu'une date d'expiration.

Il existe plus précisément deux types de SARs : les stand alone SARs, qui fonctionnent selon les modalités qui viennent d'être indiquées, et les tandem SARs, qui sont associées avec des stock options, avec possibilité d'arbitrage pour l'employé entre l'option et le paiement direct de l'appréciation de la valeur de l'action.

Les actions fantôme (Phantom stocks) sont similaires, et donnent en outre droit au versement d'un dividende.

Sur le plan fiscal, les sommes correspondantes sont considérées comme des salaires.

Dans le cadre d'un trust, ces dispositifs donnent lieu à un différé d'imposition.

· L'association des salariés à la gestion des entreprises est restée exceptionnelle

La participation de représentants des salariés au conseil d'administration des grandes entreprises est restée aux Etats-Unis exceptionnelle.

L'exemple le plus couramment cité est celui de la compagnie aérienne United Airlines, où les salariés sont devenus l'actionnaire majoritaire à la fin de l'année 1994 à la suite d'un plan de recapitalisation, et sont entrés dans le Board (conseil d'administration). Selon le quotidien Les Echos du 25 juillet dernier, la deuxième compagnie aérienne américaine est sortie du régime des faillites en février dernier, régime à l'abri duquel elle s'était placée en 2002 et qui lui a permis de ne plus servir ses pensions à ses anciens employés.

Pour de nombreux interlocuteurs du rapporteur aux Etats-Unis, cet insuccès condamne la formule de la participation pleine et entière des salariés aux instances de direction du personnel.

Ils mettent en évidence que l'association des salariés aux décisions qui intéressent directement leur environnement professionnel est, aux Etats-Unis, très développée, ce qui est à leurs yeux plus important.

II. UN CADRE COMMUNAUTAIRE INCITATIF, INSUFFISAMMENT COORDONNÉ ET QUI NE PERMET PAS AUX ENTREPRISES D'AVOIR UNE APPROCHE EUROPEENNE DE LA PARTICIPATION

Au niveau communautaire, la participation, financière ou non financière, n'a encore fait l'objet d'aucune action à la hauteur de l'enjeu.

Les institutions ne se sont, en effet, limitées qu'à un dispositif très timide et très ténu d'encouragement et de promotion, dans le cadre d'une démarche que désigne l'acronyme PEPPER (Promotion of participation by employed persons in profits and enterprise results - Promotion de la participation des salariés aux bénéfices et aux résultats de l'entreprise).

Il n'y a pas de directive sur ce thème et les rares directives sectorielles qui abordent l'un ou l'autre de ses aspects, le font d'une manière très limitée.

A. La participation, souvent reconnue comme un élément du modèle social européen, ne fait l'objet que de recommandations ou résolutions indicatives

1) La participation a toute sa place aux côtés des principaux éléments du modèle social européen

Comme le remarque M. Daniel Vaughan-Withehead, de l'Organisation internationale du travail (OIT), la participation est largement évoquée dans les principaux textes relatifs à la modernisation de l'organisation du travail en Europe.

Tel est d'abord le cas de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, de 1989, dont l'article 17 mentionne le droit des travailleurs à l'information, à la consultation et à la participation.

La participation est également mentionnée dans le Livre vert de 1997 sur le partenariat pour une nouvelle organisation du travail et la communication qui a suivi en 1998.

Ultérieurement, ce sont les grandes orientations de politique économique (GOPE) adoptées en 2000 qui ont mis l'accent sur le développement de l'actionnariat salarié comme élément d'animation et de stimulation du marché du capital, puis enfin, la Stratégie de Lisbonne, en 2000 également, qui reconnaît le développement des politiques sociales comme facteur productif et dont l'Agenda social européen qui lui est associé, confirmé par sa révision à mi-parcours en 2005, a souligné le besoin d'un nouveau développement de la participation financière.

2) Seules des recommandations et résolutions sont cependant intervenues à la suite des rapports d'experts PEPPER I (1991) et PEPPER II (1996)

La démarche PEPPER a débuté en 1989, par l'inscription de la participation financière des employés parmi les éléments prioritaires du programme d'action défini par la Commission pour la mise en œuvre de la Charte des droits fondamentaux des travailleurs.

Elle s'est ensuite traduite par la publication en 1991, sous l'égide de la Commission, du rapport d'experts PEPPER I, faisant le bilan de la participation en Europe, à l'époque.

Cette dernière a été suivie de la recommandation du Conseil du 27 juillet 1992 concernant la participation des travailleurs salariés aux bénéfices et aux résultats de l'entreprise (y compris la participation au capital). Celle-ci invitait les Etats membres à reconnaître les avantages d'un développement du recours à la participation financière.

Ultérieurement, en 1996, le rapport PEPPER II concernant l'application de cette recommandation a mis l'accent sur l'intérêt de la participation : une plus grande productivité, l'amélioration de l'emploi et de la participation des travailleurs, ainsi que sur le rôle clef des Gouvernements par le biais des incitations fiscales.

Le bilan qu'il a dressé de la précédente recommandation du Conseil a été en demi-teinte. Aucun pays n'avait changé son approche de la participation et les échanges d'informations entre les Etats membres étaient restés très réduits.

C'est en fait le Parlement européen qui a donné à cette deuxième étape de la démarche PEPPER son plus large écho, en invitant, dans sa résolution du 15 janvier 1998 adoptée sur le rapport de Mme Marie-Thérèse Hermange (France), tant la Commission que les Etats membres et les partenaires sociaux à assurer une diffusion plus étendue des différents mécanismes de participation financière.

Reconnaissant ultérieurement que la participation pouvait apporter une contribution positive à la stratégie de Lisbonne, telle que définie au Conseil de printemps de mars 2000, la Commission a alors répondu à cette impulsion par une large consultation, lancée en juillet 2001 sur la base d'un document de travail, et qui a débouché sur la Communication du 5 juillet 2002 intitulée « Cadre pour la promotion de la participation financière des salariés ».

Cette communication a été articulée autour de trois piliers : les principes généraux de la participation tels qu'ils sont identifiés au niveau communautaire ; la levée des obstacles transnationaux au développement de la participation financière ; les moyens de promouvoir cet élément au sein des différents Etats membres.

Son orientation a reçu l'aval tant du Comité économique et social européen, qui s'est prononcé en ce sens dans son avis du 26 février 2003, que du Parlement européen, dont le point de vue a été exprimé dans le cadre d'une résolution du 10 mars 2003, adoptée sur le rapport de M. Winfried Menrad (Allemagne).

En l'état, la démarche initiée sur la base des deux rapports PEPPER I et PEPPER II n'a toutefois donné que deux résultats tangibles, dont la portée s'avère limitée.

En premier lieu, elle a permis d'identifier les principes communs dits PEPPER qui permettent de qualifier les différents dispositifs de participation au sein des Etats membres :

- ces régimes de participation sont définis au sein de l'entreprise, et non élaborés en dehors de son cadre ;

- ils s'adressent ainsi à l'ensemble des salariés en général, et non à une fraction d'entre eux ;

- ils sont mis en œuvre de manière régulière, et non de manière ponctuelle comme le sont a contrario les régimes d'options d'achat d'action qui interviennent au cours d'une année particulière ;

- ils doivent proposer un intéressement des salariés aux bénéfices de l'entreprise, au-delà du salaire régulièrement versé.

La participation des salariés à la décision n'est pas abordée dans le cadre de cette démarche.

Sur le fond, on observera que deux éléments, pourtant importants, ne sont pas exigés pour qu'un plan puisse relever du « label » PEPPER :

- aucun accord de l'entreprise avec les salariés n'est exigé ni aucune consultation non plus prévue ;

- par ailleurs, même si l'actionnariat salarié n'est pas exclu de leur champ, les régimes PEPPER sont avant tout des régimes de partage des résultats des performances de l'entreprise.

En second lieu, la démarche PEPPER a permis d'identifier avec précision les blocages au développement de la participation, point développé au B ci-après.

3) La participation des salariés n'est abordée que d'une manière ténue par les directives ou règlements communautaires en matière de droit des sociétés ou de droit social

a) L'approche limitée de la deuxième directive « sociétés » 77/91/CEE du 13 décembre 1976

En matière de droit des sociétés, la question de la participation n'est abordée sur le plan communautaire que d'une manière très indirecte, par la deuxième directive « sociétés », à savoir la directive 77/91/CEE du Conseil, du 13 décembre 1976, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 58, alinéa 2, du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital.

Trois dispositions sont concernées. La plus importante est la dernière.

D'une part, parmi les exceptions au principe général qui interdit à une société de racheter ses propres actions, le paragraphe 3 de l'article 19 permet aux Etats membres d'autoriser une telle opération en vue d'une distribution d'actions à son personnel ou à celui d'une société liée.

D'autre part, l'article 23 précise que l'interdiction à une société d'avancer des fonds, d'accorder des prêts ou de donner des sûretés en vue de l'acquisition de ses actions par un tiers, ne s'applique notamment pas aux opérations dont l'objectif est de permettre l'acquisition d'actions par le personnel de l'entreprise ou d'une société qui lui est liée.

Enfin, d'une manière plus significative, le paragraphe 1er de l'article 41 autorise les Etats membres à prévoir certaines dérogations pour favoriser la participation des travailleurs, ou bien d'autres catégories de personnes déterminées par la loi, au capital des entreprises. Ces dérogations concernent le délai de libération des actions ainsi que les modalités d'augmentation du capital.

b) Des mesures d'une portée modeste sur l'information et la consultation des travailleurs dans les directives sociales

Pour ce qui est des directives à caractère social, elles ne prévoient rien sur la participation proprement dite des salariés.

Elles abordent uniquement l'information et la consultation des salariés, pour lesquelles elles tracent un cadre général, d'une portée essentielle et très pratique.

Ce cadre général ne porte pas atteinte aux procédures d'information et de manière ponctuelle, comme celles de la directive 98/59/CE sur les licenciements collectifs et de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 sur les transferts d'entreprises. Le dialogue social est en effet l'un des éléments tangibles du modèle social européen. Les mesures nationales ne sont pas non plus affectées.

Deux directives fixent le cadre général précité :

- d'une part, la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002, dite directive « Vilvorde » du nom de l'usine que Renault venait alors de fermer en Belgique, lorsque la Commission l'a proposée en 1998, qui institue, pour les entreprises d'au moins 50 salariés, et les établissements d'au moins 20 personnes, une procédure de d'information et de consultation sur les évolutions récentes ou probables de l'activité, la structure et l'évolution de l'emploi ainsi que sur toute décision concernant l'emploi, l'organisation du travail ou les contrats de travail. La consultation doit s'effectuer au niveau pertinent. Des garanties sont prévues pour garantir la confidentialité des éléments communiqués. Le Royaume-Uni et l'Irlande ont obtenu de n'appliquer totalement ce texte qu'à partir de 2009 ;

- d'autre part, la directive 94/45/CE du 24 septembre 1994 sur le comité d'entreprise européen, organe d'information et de consultation des salariés sur les questions transnationales. Ce texte ne concerne toutefois que les entreprises de dimension communautaire, c'est-à-dire de plus de 1.000 salariés et ayant moins 150 salariés dans deux Etats membres, les groupes d'entreprises communautaires remplissant des conditions d'effectif identiques, ainsi que les multinationales des pays tiers ayant au moins deux filiales en Europe.

c) L'absence d'élément fort dans le régime de la société européenne, si ce n'est lors de sa création

Le statut de la société européenne a été prévu par le règlement 2157/2001/CE. La question de la participation des travailleurs, qui n'est abordée que sous le seul angle non financier, a été renvoyée à un autre texte, la directive 2001/86/CE complétant le statut de la société européenne pour ce qui concerne l'implication des travailleurs.

Il s'agit d'un statut facultatif : les entreprises peuvent se constituer ou non sous cette forme, qui leur permet d'exercer leur activité à partir d'une personne morale unique reconnue comme telle dans tous les Etats membres. Elle évite de devoir acquérir cette même personnalité dans chaque Etat membre. Peu d'entreprises ont cependant adopté ce statut.

Le droit s'applique à deux niveaux pour la société européenne : la base européenne définie par le règlement et la transposition de la directive dans l'Etat membre où elle a son siège ; la base nationale, le droit du pays du siège statutaire, pour tout ce dont le règlement ne dispose pas.

Il n'a pas été possible pour la participation d'établir un modèle unique en raison de la différence entre le modèle de cogestion à l'allemande et les formules plus souples comme celles du Royaume-Uni, précédemment évoquées.

La seule obligation en la matière concerne donc la négociation collective transnationale, qui doit impérativement être menée lors de la création de la société, en matière d'information et de consultation des travailleurs.

Cette négociation sur la future implication des travailleurs est menée par un groupe spécial de négociation qui représente les salariés des sociétés participantes (ses membres sont élus ou désignés en proportion des salariés de chaque Etat membre) Elle doit définir l'organe de représentation, qui assurera cette même implication des salariés. Elle porte notamment sur la composition de celui-ci, ses attributions, la procédure prévue pour son information et sa consultation et la fréquence de ses réunions, ainsi que sur la durée de l'accord qui l'établit et les modalités de sa révision.

Cet organe est nécessairement composé de travailleurs élus ou désignés par les salariés ou leurs représentants.

Si aucun accord n'est possible à l'issue de cette négociation, un ensemble d'éléments prévus en annexe au texte de la directive doivent être mis en œuvre, notamment des rapports périodiques des dirigeants sur l'évolution de la société servant de base à une consultation et une information régulière des salariés.

Ainsi, il faut un accord pour que la participation aux décisions dépasse ce minimum.

Toutefois, il est possible d'aller au-delà car le droit de participation aux décisions s'impose à l'ensemble des salariés d'une société européenne issue d'une fusion dont 25 % de ses salariés bénéficiaient antérieurement de ce droit dans leurs anciennes sociétés.

A contrario, ont été prévues, à la demande de l'Espagne, deux dérogations de taille permettant dans certains cas de créer une société européenne sans une telle participation : d'une part, lorsqu'aucune des sociétés fondatrices n'a connu un tel régime ; d'autre part, lorsqu'un accord en ce sens des dirigeants et des salariés, qui peuvent ainsi renoncer à ce droit, est conclu.

B. Les blocages transnationaux interdisent d'établir des plans de participation qui traitent d'une manière similaire les salariés d'une entreprise dans les différents Etats membres

Alors que le marché unique conduit les entreprises à avoir une approche européenne, l'insuffisante coordination des dispositifs de participation financière leur interdit une telle approche pour la participation : un même plan aura des effets différents, et donc inégaux, pour les salariés des 25 Etats membres.

1) L'impossibilité de prévoir un programme de participation financière unique, équitable et commun au niveau européen

Il n'est pas possible pour une entreprise de prévoir un plan unique de participation financière au niveau européen pour ses salariés.

Les éléments de droit sont si hétérogènes que si un tel plan n'est pas en théorie impossible, il l'est en pratique et toute tentative pour l'établir ne peut entraîner que des coûts prohibitifs en conseils juridiques.

Les blocages qui font que les mécanismes de participation ont « du mal à passer les frontières », ont fait l'objet d'une première évaluation dans le cadre de la Communication précitée de la Commission, du 5 juillet 2002.

Leur teneur a été confirmée, sous une forme plus détaillée, par le rapport du groupe de haut niveau d'experts indépendants sur les obstacles transfrontaliers à la diffusion de la participation financière des salariés des entreprises à caractère transnational.

Sur l'initiative de la Commission européenne, ce groupe, composé de sept membres, s'est réuni sous la présidence de M. Jean-Baptiste de Foucauld, inspecteur général des finances en France, ancien Commissaire au Plan en France. Il a remis son rapport en décembre 2003.

· Les obstacles généraux

Le premier des obstacles généraux à la participation financière en Europe est de nature juridique.

Comme il n'existe pas, comme on l'a vu, de cadre commun, c'est, dans chaque Etat membre, les seuls droits nationaux qui s'appliquent, et ceux-ci ne sont pas compatibles.

Plus précisément, plusieurs éléments empêchent le recours à un même véhicule juridique qui serait partout utilisable.

Il y a d'abord l'opposition entre les pays qui ont un cadre juridique et fiscal qui favorise un ou plusieurs dispositifs de participation financière ou d'actionnariat salarié, tels que la France, le Royaume-Uni, l'Irlande et la Belgique, et ceux où il n'y a aucun cadre, notamment le Portugal et la Suède. Avec des cadres moins développés que dans les pays « en pointe », l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la Grèce et les Pays-Bas sont dans une situation intermédiaire.

En conséquence, lorsqu'une entreprise essaie de prévoir un plan transnational, la simple légalité des dispositifs qu'elle envisage est incertaine dans certains Etats membres.

Il y a ensuite parmi la catégorie des Etats qui ont prévu un cadre des éléments d'incompatibilité de l'un à l'autre. Les conditions de régularité des plans varient en effet sur plusieurs facteurs essentiels.

Il s'agit, d'une part, du niveau de l'implication des salariés dans la procédure de mise en place des dispositifs de participation. Certains pays sont plus stricts que d'autres et exigent un accord avec les salariés ou leurs représentants, comme la France, ou bien une convention collective comme la Belgique, ou bien encore une simple intervention du comité d'entreprise. En revanche, aucune consultation des travailleurs n'est nécessaire au Royaume-Uni.

Il s'agit, d'autre part, de la définition de l'entreprise ou du groupe, lequel ne recouvre pas nécessairement le même périmètre d'un pays à l'autre. Certains salariés seront couverts dans un pays, mais leurs homologues d'un autre pays seront exclus.

Par ailleurs, la couverture des plans, c'est-à-dire la proportion minimale des salariés susceptibles d'en bénéficier n'est pas la même d'un Etat à l'autre. Les critères d'accès des salariés, notamment celui de l'ancienneté minimale dans l'entreprise pour être en mesure d'y prétendre sont parfois différents. Les seuils et critères utilisés pour calculer les montants alloués à l'ensemble des salariés, les critères de répartition de ces montants entre les salariés ne sont pas non plus nécessairement les mêmes.

En outre, les durées des périodes de blocage et d'indisponibilité, ainsi que les modalités de leur fixation, ne sont pas identiques, de même que les règles régissant la gestion des fonds. Des trusts (fiducies) spécifiquement dédiés doivent ainsi être constitués au Royaume-Uni et en Irlande. Ils sont gérés par le trustee, personne physique. Il s'agit d'un système très différent du FCPE français, qui est géré par un conseil de surveillance composé pour au moins la moitié de ses membres de représentants des salariés porteurs de parts. L'absence de la fiducie en droit français, par exemple, représente de ce point de vue un élément de blocage.

Le deuxième obstacle a trait à la fiscalité et aux prélèvements sociaux.

Les règles fiscales et sociales, ainsi que les niveaux de taxation, varient notablement selon les pays et les types de plan.

Ce ne sont pas en l'espèce les différences de taux qui posent problème, mais celles qui ont trait au fait générateur de la taxation.

Des cas de double taxation ou au contraire de double exonération ont ainsi été identifiés, notamment entre la France et la Belgique. Si un salarié reçoit une stock option en Belgique et la lève en France, il est deux fois assujetti à la taxation : d'une part, lors de l'attribution de l'option (législation belge), d'autre part, lors de son exercice (législation française).

A l'opposé, il échappe totalement à l'impôt s'il réside en France au moment de son attribution (pas de taxation à ce moment là) et en Belgique au moment de son exercice (taxation lors de l'attribution uniquement).

L'UNICE a réalisé sur ce point, s'agissant des stock options, une étude dont les conclusions figurent dans l'encadré ci-après.

L'harmonisation européenne à opérer sur les plans de participation financière selon l'UNICE : la fiscalité des stock options

L'étude de l'UNICE se concentre sur le moment où intervient la taxation.

Elle donne plusieurs exemples de taxations multiples, notamment entre la Belgique, le Danemark et la Suède.

Un salarié qui réside en Belgique et se voit attribuer des options juste avant sa mutation au Danemark, où il reste trois ans, puis doit aller ensuite en Suède, où il exerce l'option, doit acquitter trois fois l'impôt : en Belgique (taxation lors de l'attribution de l'option), au Danemark (taxation lors du départ du pays) puis en Suède (taxation au titre de l'exercice de l'option).

Si l'on considère les mêmes pays dans un autre ordre (Suède, puis Danemark et, enfin, Belgique) l'impôt sera dû deux fois seulement...

Pour les 15 anciens Etats membres, l'étude indique que deux d'entre eux retenaient la taxation lors de l'attribution (Belgique et Grèce), un seul la taxation lors de la cession de l'action acquise lors de l'exercice de l'option (la France), sept la taxation lors de l'exercice (Danemark, Finlande, Allemagne, Irlande, Italie, Luxembourg et Suède), les cinq autres ayant un système mixte (Autriche, Espagne, Pays-Bas, Portugal et Royaume-Uni).

Le rapport met ensuite en évidence, dans un deuxième temps, des cas de taxation élevés, plutôt que de double taxation stricto sensu, en dépit des conventions fiscales destinées à l'élimination des doubles impositions, en raison de l'absence de méthode commune.

Il examine ensuite les différentes solutions possibles.

S'agissant du moment où la taxation doit intervenir, le rapport se prononce en faveur d'une taxation dans l'Etat d'attribution, plutôt que lors de l'exercice. L'Etat de résidence du salarié lors de l'attribution de l'option aurait seul le droit de taxer les gains entre l'attribution et l'exercice. Ensuite, les gains ultérieurs obéiraient aux règles de droit commun.

Cette solution présente des avantages, mais impose un suivi du contribuable, lequel est par définition conduit à bouger (il n'est pas toujours aisé de taxer un non résident), et empêche a priori d'avoir une vision d'ensemble des gains globaux résultant de l'option, notamment de la plus-value postérieure à l'exercice...

Sur la question d'une méthode unique pour l'élimination des doubles impositions, l'étude envisage soit la méthode du crédit d'impôt (pour tenir compte de l'impôt acquitté dans un autre pays), soit la méthode de la répartition de l'assiette de l'impôt entre les différents Etats concernés par la taxation. Il écarte la taxation proportionnelle, avec la répartition de l'impôt entre tous les Etats où une activité a été exercée durant la période entre l'attribution de l'option et la dernière des opérations qui suit, car certains Etats membres de séjour où aucun événement générateur d'une taxation n'est intervenu devraient modifier leur législation pour ouvrir droit à taxation...

Le troisième des obstacles identifiés par le groupe de haut niveau est la diversité des règles relatives aux valeurs mobilières, notamment en matière d'information à délivrer au public. Cette difficulté a en principe été réglée par l'intervention de la directive dite « prospectus » 2003/71/CE du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d'offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l'admission de valeurs mobilières à la négociation.

Ce texte a prévu des dispositions spécifiques sur les plans de participation financière et les actions proposées aux salariés. Selon les éléments communiqués au rapporteur, il peut cependant encore y avoir des difficultés pour les sociétés non cotées et des divergences d'interprétation des règles communes entre les Etats membres.

Le groupe de haut niveau a d'ailleurs recommandé l'adoption par la Commission de lignes directrices de manière à éviter tout risque de divergence.

La quatrième difficulté identifiée par le groupe de haut niveau concerne le droit du travail et les questions liées à l'emploi.

L'inclusion ou non des différents éléments de la participation dans la définition du salaire, l'impact des plans sur les droits à pension ainsi que les droits du salarié vis-à-vis du plan en cas de licenciement injustifié ou illégal ou encore en cas de suppression d'emploi, ne sont pas les mêmes d'un Etat membre à l'autre. De même, la notion de droits acquis diffère d'un pays à l'autre.

Il faut également tenir compte des divergences pratiques sur la manière dont s'appliquent les règles de lutte contre les discriminations ou dont est pris en considération le travail à temps partiel.

La protection des données personnelles intervient aussi, sur des éléments très concrets. Le cas d'un pays, la Belgique, qui ne prévoit pas la faculté d'opérer des prélèvements sur salaire dans le cadre des opérations d'épargne salariale, est notamment cité.

· Les obstacles par type de plans

le plan d'actionnariat salarié

Pour les salariés d'un groupe européen, le plan d'actionnariat salarié est considéré comme le moins difficile à mettre en œuvre, mais apparaît lourd et coûteux avec notamment l'obligation de prévoir dans certains pays un support spécial pour gérer les fonds (trust ou FCPE), de préciser à chaque salarié le régime fiscal auquel il sera soumis et la nécessité d'entrer en relation avec chaque autorité boursière concernée.

le plan de participation aux bénéfices

En ce qui concerne les dispositifs de participation aux bénéfices et aux performances, le rapport du groupe d'experts insiste particulièrement sur trois obstacles :

- les conditions de la mise en place d'un tel plan: un accord avec les salariés est obligatoire en France et une convention collective spécifique en Belgique alors que cet élément est laissé à la discrétion de la direction de l'entreprise au Royaume-Uni notamment ;

- la conception d'ensemble retenue pour la participation financière aux bénéfices : en France ou en Allemagne, la participation est traitée avant tout comme un instrument d'épargne permettant de constituer un patrimoine éventuellement diversifié, alors qu'au Royaume-Uni par exemple, elle est uniquement considérée comme un instrument d'attribution d'actions au personnel ;

- les cas d'exonération au titre de l'impôt sur le revenu et les cotisations sociales ne sont pas harmonisés. L'exonération totale, avec déductibilité du résultat imposable pour l'entreprise, telle qu'elle est prévue en France n'est pas universelle. En Belgique ainsi, il n'y a pas de déductibilité du résultat et il n'y a pas non plus, comme on l'a vu, d'exonération totale.

2) Les propositions du groupe d'experts de haut niveau réuni à l'initiative de la Commission

Le rapport du groupe de haut niveau présidé par M. Jean-Baptiste de Foucauld a fait dans la perspective ouverte par la Communication de la Commission de juillet 2002, sept propositions pour améliorer la situation.

Aucune n'appelle d'observation particulière tant la réalité telle qu'elle est perçue et objectivement décrite les rend impératives.

Au chapitre des recommandations générales, trois propositions visent à créer un dialogue et une culture commune entre les Etats membres :

améliorer la communication entre les Etats membres grâce à un Comité de la participation financière auprès de la Commission. Il s'agirait d'une instance non seulement d'information et de promotion, mais également de recommandation. Sur le plan technique, ce comité pourrait contribuer à élaborer un plan de participation financière européen ;

renforcer la sensibilité des partenaires sociaux au thème de la participation, de manière que le dialogue social corrige les différences actuelles, de manière progressive. Le groupe a constaté sur un plan général une sensibilité moindre que celle que l'on pourrait souhaiter ;

créer un site Internet d'information sur la participation.

S'agissant de la levée des obstacles qui viennent d'être exposés, le groupe de haut niveau a proposé :

- le renforcement de l'approche commune en matière d'émission d'actions, notamment sur la base de la directive prospectus précitée ;

- une convention fiscale pour les stock options, dont l'usage est fréquent et relativement simple par rapport à d'autres instruments plus sophistiqués de participation et d'épargne salariale ;

Pour la France, un projet d'instruction sur lequel la réflexion est encore en cours devrait régler les difficultés provoquées par le droit interne. Elle se fonde sur les principes dégagés en la matière par le rapport, du 16 juin 2004, du comité des affaires fiscales de l'OCDE.

- la création d'une procédure de reconnaissance mutuelle entre les Etats membres pour les instruments autres que les stock options, de manière à ce que chaque plan et chaque dispositif de gestion régulièrement mis en œuvre, et agréé dans un Etat membre, soit agréé par un autre Etat, avec les incitations qui lui sont liées. Par exemple, les salariés implantés en France d'une société ayant son siège au Royaume-Uni et mis en place un SIP pourraient bénéficier des avantages du PEE et inversement. Le trust et le FCPE seraient considérés comme équivalents ;

- élaborer un plan européen type de participation financière, tant pour le partage des profits, que pour l'actionnariat salarié et les stock options. Ce cadre commun fixerait des principes légaux et fiscaux qui s'appliqueraient ensuite dans tous les Etats. Ce serait la meilleure solution pour les entreprises implantées dans plusieurs Etats membres, dès lors que chacun des salariés bénéficierait du régime le plus avantageux dans son pays d'implantation.

Ces propositions n'ont cependant, à la date de la rédaction du présent rapport, pas fait l'objet d'un début de mise en œuvre.

C. Le rapport d'experts PEPPER III, présenté à la fin du mois de juin dernier, propose une approche modulaire et recommande une initiative en matière de droit communautaire des sociétés

Présenté à Paris dans le cadre d'une Conférence débat au Palais du Luxembourg les 29 et 30 juin derniers, le dernier des trois rapports d'experts, le rapport PEPPER III, s'inscrit dans la continuité des deux précédents en ayant pour objectif de lui apporter des compléments sur deux points :

- d'une part, il présente une synthèse et des monographies très détaillées pour les dix Etats qui ont adhéré à l'Union européenne le 1er mai 2004, ainsi que sur chacun des quatre pays candidats, Bulgarie, Roumanie, Croatie et Turquie ;

- d'autre part, il fait des propositions en vue d'une plate-forme commune en matière de participation financière.

Ses recommandations tiennent elles-mêmes en trois éléments.

En premier lieu, s'agissant notamment des nouveaux Etats membres, le rapport met l'accent sur l'importance du rôle de l'Union européenne pour mette en valeur l'expérience acquise en la matière dans les anciens Etats membres, ce qui vise notamment, sans la désigner, la France.

En deuxième lieu, le rapport propose plutôt qu'un plan type stricto sensu, une approche modulaire dont toutes les options sont facultatives pour les entreprises comme pour les salariés concernés, selon le schéma constitué autour des trois éléments suivants : la participation au capital ; les plans d'actionnariat collectifs ; l'actionnariat individuel.

L'auteur de cette proposition, M. Jens Lowitzsch, a présenté son approche selon le schéma suivant :

Facultatifs pour les entreprises comme pour les salariés, tous les éléments peuvent être choisis pour former la combinaison souhaitée, les modules pouvant être ajustés selon les besoins spécifiques de l'entreprise concernée.

Selon son auteur, la plate-forme européenne doit plus précisément reposer sur les principes suivants :

- tous les éléments de base sont facultatifs pour les entreprises comme pour les salariés ;

- les modules se combinent librement selon l'entreprise ;

- chacun des régimes doit respecter le principe de non discrimination ;

- chacun doit être compatible avec la mobilité des travailleurs et doit avoir pour ambition d'être diffusé à l'échelle européenne.

Le rapport présente ensuite trois schémas pour chacune de ces grandes catégories.

Schema pour la participation aux benefices en especes et participation differee

Ce schéma est accompagné du commentaire suivant :

« Dans les régimes de participation aux bénéfices versée en espèces (PBE) et de participation différée aux bénéfices (PDB), une partie de la rémunération du salarié dépend directement des bénéfices dégagés par l'entreprise. Contrairement aux systèmes d'incitations individuels, cette formule met en jeu un régime collectif qui concerne généralement tous les salariés. Elle peut s'appliquer aux bénéfices, à la productivité et au retour sur investissement. Habituellement, les primes sont attribuées en sus d'un salaire de base fixe et constituent une source de revenu variable. Versées soit en espèces soit de façon différée sur un plan d'épargne d'entreprise, elles peuvent être investies sur les marchés financiers ou dans les actions de la société. »

Schema pour les plans d'options sur titres a large acces et actions
distribuées aux salaries

Ce schéma est accompagné du commentaire suivant :

« Dans les plans d'actionnariat, les actions peuvent être soit distribuées gratuitement soit vendues au prix du marché ou à des conditions préférentielles. Dans cette dernière éventualité, la vente peut avoir lieu avec décote (plan d'achat d'actions décotées), à un prix inférieur par le biais de certaines formes de paiement différé (généralement dans le cadre d'une augmentation de capital) ou en donnant la priorité lors de l'émission publique d'actions à tous les salariés ou à une partie d'entre eux. Pour éviter le problème de l'évaluation dans les PME non inscrites à la cote, la participation au capital peut d'abord prendre la forme d'un prêt des salariés à l'entreprise, ce qui crée du capital externe qui sera ultérieurement converti en actions. Il est possible de retarder l'évaluation des actions destinées à être acquises par l'intermédiaire du prêt jusqu'au moment de la conversion effective en actions (dettes en actifs), sans que cela n'affecte la mise en œuvre du plan. »

Schéma pour les plans d'actionnariat salarie collectif (ESOP) et participation aux benefices sous forme d'actions

Ce schéma est accompagné du commentaire suivant :

« La participation aux bénéfices sous forme d'actions (PBA) est une forme de participation différée aux bénéfices attribuée sous forme d'actions de l'entreprise qui sont habituellement gelées dans un fonds pendant une certaine période de temps, après quoi les salariés peuvent en disposer librement. De même, les plans ESOP sont créés par l'entreprise qui y contribue soit par des actions ou par des apports en espèces que le plan utilise pour acquérir des actions, soit en incitant le plan à emprunter pour acheter des actions nouvelles ou existantes. Les dispositifs peuvent se combiner :

- l'entreprise institut un trust d'actionnariat salarié (ESOT, Employee Share Ownership trust) en faveur de son personnel ;

« - généralement, le trust emprunte de l'argent directement à une banque ou à l'entreprise qui, à son tour, peut contracter un emprunt auprès d'une banque ou d'un autre bailleur de fonds. Les actions sont acquises soit directement auprès des actionnaires soit au moyen d'une nouvelle émission. L'emprunt du trust est souvent garanti par l'entreprise ;

« - les actions sont conservées sur le compte d'attente du trust, avant d'être affectées aux comptes individuels des salariés dès que le prêt aura été amorti ;

« - lorsque la distribution des actions se fait par l'intermédiaire d'un régime de participation sous forme d'actions, l'entreprise peut effectuer un versement à ce régime afin de lui permettre d'acheter les actions du trust ;

« - le prêt peut être remboursé sous forme de versements directs en espèces effectués par la société au profit du trust, par l'affectation de fonds provenant de la vente d'actions au régime de participation aux bénéfices sous forme d'actions ou de dividendes au titre des actions détenues dans le trust.

« A l'inverse des plans de retraite, dont la règle est la diversification, l'ESOP a été conçu spécialement pour accueillir les titres de l'employeur. La création d'un marché pour les actions d'une société autrement à court de liquidités en fait un outil financier avantageux à la fois pour les salariés et l'entreprise qui les emploie. Dans ce contexte, l'ESOP présente une caractéristique importante, à savoir la possibilité de contracter un emprunt externe afin d'acheter des actions de l'entreprise. »

Sur le plan du droit, le rapport PEPPER III envisage deux hypothèses pour l'adaptation du droit communautaire, excluant en raison de sa lourdeur et de l'importance des éventuels délais d'aboutissement d'une directive spécifique :

- d'une part, une recommandation incitative sur la base du premier paragraphe de l'article 249 du Traité ;

- d'autre part, une modification du droit européen des sociétés, notamment de la deuxième directive « sociétés » précitée 77/91/CEE, et non pas une directive sociale.

III. QUELQUES RÈGLES NATIONALES ET DES INITIATIVES COMMUNAUTAIRES, SELON LE RAPPORTEUR, POUR DÉVELOPPER LE DIALOGUE SOCIAL, AMÉLIORER LA GOUVERNANCE DES ENTREPRISES ET RENFORCER LEUR COHÉSION

A la suite de cette présentation comparative et européenne, le rapporteur, à titre personnel, souhaite faire part à la Délégation de quelques éléments de réflexion, qui naturellement n'engagent pas l'ensemble de ses membres.

Dans leur rapport précité remis au Premier ministre « Une ambition : la participation pour tous », MM. François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain, députés, présentent la participation comme le moyen de développer une nouvelle gouvernance des entreprises, non seulement plus efficace mais également plus satisfaisante sur le plan social. Le rapporteur partage en tous points ce constat. La participation financière et non financière, l'intéressement aux performances de l'entreprise et surtout l'actionnariat salarié apparaissent comme les conditions d'un rééquilibrage de l'entreprise face aux bouleversements qu'engendre la mondialisation.

Elles s'avèrent également et surtout un élément de renforcement et de rénovation du dialogue social, sur la base d'un partenariat renforcé.

Aussi appartient-il à la France, qui dispose en la matière, comme le Royaume-Uni mais d'une manière plus étendue et plus complète, non seulement d'améliorer son dispositif, ce que prévoit le projet de loi n° 3175 déposé par le Gouvernement le 26 juin dernier, mais également et surtout de favoriser l'intervention au niveau communautaire d'initiatives majeures qui permettent à l'ensemble des entreprises et des salariés qui le souhaitent, d'œuvrer dans un cadre plus efficace et plus moderne grâce à la participation.

De telles initiatives devraient également s'attacher à créer les conditions d'un rééquilibrage de la gouvernance des entreprises vers le long terme et les objectifs stratégiques, et mettre en outre fin aux polémiques sur les rémunérations des plus hauts dirigeants d'entreprises.

A. Développer le dialogue social et donner aux entreprises accès à une gestion plus moderne et plus efficace grâce à la participation et, notamment, à l'actionnariat salarié

1) Des perspectives intéressantes et peu exigeantes

a) La participation, facteur de confiance et de performance face à la mondialisation

· Une efficacité économique certaine

Dans une allocution radiotélévisée du 11 mars 1969, le général de Gaulle avait indiqué que sa conception des relations sociales dans l'entreprise n'était pas exempte d'un souci d'efficacité, selon une approche très noble et très vraie de l'homme d'après laquelle le respect de la dignité n'est pas source d'inefficacité, au contraire : « il s'agit donc, partout où des hommes sont ensemble pour vivre et travailler, de rendre leurs rapports plus humains, plus dignes, par là plus efficaces. ». Presque quarante ans après, en dépit des améliorations intervenues depuis, dont nul ne pouvait à l'époque concevoir ni anticiper l'ampleur, l'essentiel de la teneur de ce message reste d'actualité.

C'est, comme on l'a vu, au Royaume-Uni, le Labour qui a estimé à la fin des années 1990 que l'amélioration de la productivité des salariés, qui était inférieure à celle des principaux Etats du continent, passait par un renforcement de leur motivation grâce aux différents plans de participation.

Ce raisonnement d'un mécanisme « gagnant-gagnant », où tant le salarié que l'entreprise, et par conséquent l'Etat, qui touche les « dividendes » de son « investissement » fiscal puisque l'activité économique est meilleure qu'elle ne le serait sinon, est largement corroboré par les différentes études.

C'est un facteur essentiel alors que la mondialisation exige toujours plus d'efficacité.

Pour ne s'en tenir qu'aux éléments citées par Mme Milica Uvalić, de l'Université de Pérouge, en Italie, dans sa contribution au rapport PEPPER III récemment rédigé sous l'égide de la Commission européenne, on constate que :

- les systèmes de participation aux bénéfices influent d'une manière positive sur la productivité ;

- ils auraient même un effet favorable sur l'emploi, en introduisant un élément de souplesse pour les dépenses de personnel des entreprises, qui seraient sinon totalement fixes. Il n'y a cependant pas de certitude en la matière. La participation financière, au sens large, n'est pas un substitut aux salaires, mais peut cependant être utilisée comme telle lors d'opérations de redressement d'entreprises, comme ce fut par exemple le cas à Air France pour les pilotes en 1994 dans le cadre du plan de redressement alors mis en œuvre. Ainsi, il y aurait des effets importants mais uniquement perceptibles au niveau microéconomique de l'entreprise ;

- aux Etats-Unis, les effets positifs des dispositifs de type ESOP, lorsqu'ils sont constatés, sont d'autant plus perceptibles que le degré d'implication des salariés est élevé.

Sur la productivité, le document de travail du parlement européen SOCI 109 FR de février 2003 « participation aux bénéfices et actionnariat salarié : les éléments du débat » était plus précis. Les études opérées sur les années 1980 et le début des années 1990 concluaient à un accroissement de la productivité de 3 à 32 % aux Etats-Unis dans les entreprises ayant une formule d'intéressement aux bénéfices, tandis que l'effet était moindre au Royaume-Uni, avec une augmentation de l'ordre de 3 à 8 %, aux Japon (3 à 8 % également) et en France (7 à 9 %).

Comme le soulignent, enfin, les conclusions du groupe Gouvernance du rapport du Conseil supérieur de la participation pour 2004/2005, les performances boursières des entreprises ayant organisé une participation ne sont pas inférieures à la moyenne : au contraire, l'indice boursier IAS créé par la Fédération de l'actionnariat salarié évolue plus favorablement que « les autres indices de la place ».

· Un enjeu essentiel sur le plan des valeurs

Sur le plan des valeurs, la reconnaissance de la valeur du travail par un « dividende du travail », qui devrait, en France, prendre la forme d'un supplément négocié d'intéressement ou de participation, selon le projet de loi précité, est fondamentale.

Elle fait partie d'un contexte de reconnaissance de la valeur du travail et la participation des salariés à l'un des éléments de l'affectio societatis.

· Un élément d'atténuation des effets des futures difficultés des régimes de retraite

En favorisant la constitution d'un patrimoine pour une part grandissante de leurs salariés, les entreprises qui recourent aux différentes formules de participation financière permettent de mettre en œuvre des amortisseurs essentiels aux conséquences des évolutions démographiques (vieillissement de la population, successions aux générations actuelles de générations moins nombreuses) sur les mécanismes de retraite par répartition. Tel est d'ailleurs le sens de la création du PERCO en France en 2003 par la loi « Fillon ».

Il s'agit uniquement d'un élément qui s'ajoute aux grands régimes de base et de retraite complémentaire actuels.

Mêmes aux Etats-Unis, comme on l'a vu, les régimes de pension d'entreprises ne sont que des compléments au régime de base de la social security.

· Un complément aux actuelles mutations de l'économie et au développement des entreprises des nouvelles technologies

La participation est complémentaire aux évolutions de l'économie telles qu'elles doivent intervenir dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.

Les entreprises innovantes, dynamiques et adaptées à l'économie de la connaissance, qui emploient pour l'essentiel un personnel hautement qualifié, doivent répondre à ses attentes.

La part de l'investissement personnel de chacun en dépend directement et la participation sous forme de stock options ou d'actions y est considérée comme allant de soi, comme le montre l'exemple des sociétés Internet à la fin des années 1990 ou celui, plus actuel, des start up dans les biotechnologies.

La tertiairisation par le haut de l'économie est donc un facteur naturel de développement de la participation.

· Un élément rassurant face aux incertitudes de la mondialisation

Lorsqu'elle s'accompagne d'un renforcement de la portée de leur voix au sein de l'entreprise, la participation permet sans aucun doute d'apaiser la principale des inquiétudes des salariés face à l'un des éléments actuels de la mondialisation : celle des délocalisations.

La participation au sein des instances dirigeantes leur donne notamment une certaine prise sur les événements, qu'ils n'auraient pas sinon. Leur statut est ainsi vécu comme moins passif. Si les salariés d'un pays peuvent, en effet, tenter d'agir contre une menace de délocalisation en pesant directement sur la décision, ils ne pourront jamais envisager d'influer d'une manière symétrique sur une éventuelle relocalisation, qui se décide elle à l'étranger, dans un cadre qui leur est par définition inaccessible.

b) L'actionnariat salarié pour compléter les dispositifs de participation, développer le dialogue social et associer les salariés aux objectifs de long terme de l'entreprise

· Les conditions de la réussite des dispositifs de participation sont assez peu exigeantes

- Les conditions générales

Les auditions menées par le rapporteur ont permis d'identifier plusieurs des principaux facteurs qui influent sur l'efficacité des dispositifs de participation, financière ou non financière, d'actionnariat salarié ou d'épargne salariale. Celles-ci sont peu exigeantes.

Il s'agit, d'une part, de la légitimité, qui vient en la matière du dialogue social et de la négociation collective, notamment au niveau de l'entreprise comme le prévoit le système français.

Il s'agit, d'autre part, de la simplicité. Les dispositifs et leurs mécanismes, de même que leurs enjeux, doivent être accessibles à tous.

Il s'agit en outre, de la souplesse. Les différents instruments doivent laisser aux salariés la faculté de faire des choix. Il ne s'agit pas de les forcer à investir.

Enfin, et ce volet est pour l'instant trop peu développé, la participation est un facteur de développement de la formation des salariés, notamment sur le plan économique, dès lors que des actions spécifiques sont prévues.

- La question de l'évaluation des actifs

Pour les sociétés non cotées, l'une des difficultés est celle de l'évaluation des actions, à défaut de pouvoir faire référence, comme pour les sociétés cotées, au marché.

Les règles prévues doivent être simples, claires et universellement reconnues pour ne donner lieu à aucune contestation.

Si le critère de la valeur de l'actif net, apparemment le plus simple, n'est pas satisfaisant, la valeur à dire d'expert est parfois difficile à expliquer aux salariés, en l'absence d'éléments universels ou de formule unique.

Force est de constater que sur ce plan là, le « pragmatisme » des réponses obtenues au Royaume-Uni n'a pas éclairé le rapporteur comme il l'avait espéré un temps.

De manière pragmatique, le code du travail français prévoit actuellement en France une évaluation au moins une fois l'an et une révision de la méthode retenue tous les cinq ans.

- La nécessité de préserver des facultés d'arbitrage au profit des formes d'investissement diversifiées, mais pas uniquement

La philosophie de la participation est différente de celle de l'épargne salariale : elle veut que les avoirs du salarié soient placés dans l'entreprise, pour financer ses investissements et son développement.

La diversification atténue indéniablement la portée de ce principe. Néanmoins, elle apparaît inéluctable dès lors que il faut tenir compte de ce qu'à l'échelle de chaque salarié, un arbitrage, un choix patrimonial est opéré.

Cette diversification est d'autant plus importante que de nombreux salariés ont pu voir ce qu'il advenait des salariés, qui tels ceux d'ENRON aux Etats-Unis, ont perdu lors de la disparition de l'entreprise à la fois leur emploi et leur épargne retraite.

Néanmoins, cette diversification ne doit pas conduire à supprimer, pour l'avenir, des formules qui sont appréciées telles que le compte courant bloqué. Or, c'est ce que propose, en contradiction avec l'opinion de certains syndicats, le projet de loi n° 3175 précité.

Proposition

« Maintenir la faculté d'ouvrir de nouveaux comptes courants bloqués »

· L'actionnariat salarié, qui permet de prendre en compte le long terme, complète les dispositifs d'intéressement à court terme

Dans l'ensemble des éléments qui viennent en plus de la rémunération courante du salarié, l'actionnariat salarié occupe une place particulière.

Le bonus ou les gratifications de fin d'année ne concernent que le salarié à titre individuel, et reflètent des résultats immédiats, tout comme, pour les professions concernées, les primes sur objectifs individuels.

L'intéressement et la participation aux bénéfices ne sont perçus que comme des compléments variables dès lors qu'ils restent sous forme d'espèces ou sont placés en compte courant ou en épargne diversifiée. En outre, ils sont aussi des éléments de court terme. Leur montant dépend des résultats les plus proches.

L'actionnariat salarié crée, en revanche, un lien particulier entre le salarié et l'entreprise : celui-ci en devient copropriétaire et voit ainsi de manière concrète l'influence des performances individuelles et collectives sur la marche de l'entreprise et la valeur de ce qu'il détient ou détiendra, à moyen ou à long terme.

A cet égard, l'actionnariat salarié est d'une efficacité qui soutient largement la comparaison avec celle de la stock option, qui n'intéresse à long terme son détenteur que lorsque la loi ou, comme c'est le cas en France, des dispositions fiscales l'incitent à conserver ses options un certain temps.

Il a en outre l'avantage de faire le lien entre la direction de l'entreprise, au sens large, et la capacité de l'ensemble des salariés qui exercent concrètement les métiers de l'entreprise, à concevoir et anticiper ses développements industriels.

· L'actionnariat salarié permet de développer les modalités du dialogue social, notamment en légitimant la participation des salariés au conseil d'administration ou de surveillance

la nécessité d'une participation des salariés au conseil d'administration ou de surveillance, au-delà d'un certain niveau de détention du capital

Dès lors qu'il intervient dans un cadre collectif et non dans un cadre purement individuel (le salarié d'une société cotée peut toujours acheter en bourse des titres de l'entreprise), l'actionnariat salarié a pour principal avantage de renforcer par le jeu des mécanismes du droit des sociétés la légitimité de l'association des salariés aux décisions de l'entreprise.

Par conséquent, dès qu'il a un certain poids, l'actionnariat salarié débouche immanquablement sur la participation à l'instance délibérante de l'entreprise, conseil d'administration ou conseil de surveillance.

Tel est le sens de la règle déjà fixée par le code de commerce français, dans sa partie législative, qui prévoit une telle hypothèse dès lors que les salariés détiennent au moins 3 % du capital. Le projet de loi n° 3175 précité a pour objectif de la clarifier.

La question du statut et de la nature des actions délivrées aux membres du personnel de l'entreprise, doit par conséquent faire l'objet d'une grande attention. La flexibilité du droit commercial permet, en effet, le plus souvent de démembrer les actions et de prévoir des formules telles que des actions sans droit de vote avec d'ailleurs, à l'opposé, des actions avec droit de vote multiple, comme c'est parfois le cas des parts de fondateurs. Les Pays-Bas sont réputés pour de tels démembrements.

S'agissant de l'actionnariat salarié, il va de soi que de telles formules, avec des actions sans droit de vote ou à droit de vote minoré, ne sont pas souhaitables. Outre qu'elles introduisent la confusion dans les esprits, elles ne peuvent que provoquer un sentiment de défiance des salariés, leur donnant le sentiment d'une participation incomplète.

En revanche, on peut légitimement penser, comme le fait M. Jean Peyrelevade, dans sa contribution intitulée « L'entreprise aux travailleurs ? », à la revue Commentaire de l'été 2006 (n° 114), qu'un droit de vote double serait justifié, pour les actions détenues par les salariés. Une telle mesure doit être étudiée.

la possibilité de renforcer le rôle économique du comité d'entreprise

Dans sa philosophie première, le comité d'entreprise a été créé à la Libération, sous l'impulsion du général de Gaulle, comme l'un des éléments permettant de faire pleinement participer les salariés au fonctionnement institutionnel des entreprises.

Le comité d'entreprise a un certain rôle en matière économique, mais il est en pratique bien moindre que celui qui avait initialement été envisagé.

Aussi convient-il, en complément de plusieurs dispositions techniques, de prévoir une réunion annuelle conjointe d'une délégation du comité d'entreprise et du conseil d'administration ou de surveillance, pour discuter notamment des perspectives économiques de l'entreprise.

Proposition

« Prévoir pour toutes les entreprises, en complément de la disposition sur la représentation des salariés au sein du conseil d'administration ou de surveillance, au-delà de 3 % du capital, une réunion annuelle conjointe d'une délégation du comité d'entreprise et d'une délégation du conseil d'administration ou de surveillance. »

la création de nouvelles institutions dans lesquelles s'expriment les intérêts des salariés actionnaires

L'une des questions clefs de l'actionnariat salarié est celle de l'organisation des salariés actionnaires, et du cadre dans lequel s'inscrivent les droits sociaux associés à la participation financière.

Bien qu'il ne soit pas inexistant avec notamment la gestion paritaire des FCPE, le droit français peut être développé sur ce point de deux manières.

D'une part, il s'agirait d'inciter les salariés à se regrouper dans le cadre d'associations d'actionnaires salariés, de manière à ce qu'ils puissent exercer plus efficacement leurs prérogatives. Ces associations auraient le droit de présenter des candidats aux conseils d'administration, ce que peuvent, comme on l'a vu faire, soit les seuls syndicats, soit des regroupements informels représentant une certaine proportion de l'effectif de l'entreprise. Cette formule serait également adaptée à l'une des spécificités françaises, qui est la faiblesse du taux de syndicalisation, comme le montre le graphique suivant.

Taux de syndicalisation dans les principaux pays developpes

Source : OCDE

D'autre part, cela permettrait aux salariés de faire exercer par leurs seuls représentants, s'ils le souhaitent, le contrôle des FCPE dans lesquels sont investis les fonds de l'épargne salariale. S'agissant de fonds qui appartiennent aux salariés, l'association employeurs-salariés au sein du conseil de surveillance du FCPE, telle qu'elle est actuellement prévue par le droit français, ne s'impose pas nécessairement.

Propositions

« - inciter les salariés actionnaires à se grouper dans des associations spécifiques ayant la faculté de présenter des candidats pour la désignation des représentants des salariés aux conseils d'administration ou de surveillance ;

« - prévoir la faculté pour les salariés d'opter pour la seule présence de leurs représentants dans les conseils de surveillance des FCPE. »

c) Prévoir également la présence de représentants des salariés en tant qu'« apporteurs en industrie » au sein des conseils d'administration ou de surveillance

La présence de représentants des salariés actionnaires n'épuise pas le sujet de la représentation des salariés dans les instances de contrôle que sont, selon l'option juridique choisie pour la société, les conseils d'administration et les conseils de surveillance.

Il s'agit notamment de modifier un régime « où le poids dans la décision est mesuré à l'argent risqué, au capital détenu dans la société où l'on est associé à raison de ce que l'on a et non pas en raison de ce que l'on est ».

Comme l'a prévu la loi « Giraud » précitée pour les sociétés autrefois nationalisées en France, il est légitime que les salariés, tous les salariés, qu'ils soient ou non actionnaires, qu'ils le soient à titre individuel par la détention directe d'actions ou à titre collectif par un FCPE par exemple, soient représentés en tant que véritables « apporteur en industrie » dans l'entreprise. Siègent alors deux types de représentants des salariés au conseil d'administration.

Cette conviction n'est pas universellement partagée, y compris par certains syndicats de salariés.

La question est d'autant plus difficile qu'elle peut interférer avec celle de l'affiliation syndicale de ces représentants, qui soulève deux difficultés majeures, mais qui ne sont pas insolubles :

- d'une part, celle des conditions d'un maintien de l'autonomie syndicale ;

- d'autre part, celle de la gestion au sein des syndicats des conflits d'intérêts entre les sections des différentes entreprises concurrentes d'une même branche.

L'une des manières d'atténuer les conflits d'intérêts est d'éviter que des personnalités syndicales qui n'exercent pas de fonction salariée effective dans l'entreprise soient membres des instances syndicales. La situation de l'Allemagne n'est pas à cet égard un exemple. La présence du chef de la fédération syndicale de branche au sein du conseil de surveillance de Volkswagen ou de celui de Lufthansa a pu créer des situations impossibles et incomprises dès lors que des grèves interviennent dans une entreprise du secteur.

Une autre difficulté tient à la nature de plus en plus plurinationale des entreprises. La représentation de salariés du pays d'origine de l'entreprise, du pays où elle a son siège, est indéniablement l'objectif poursuivi. Pourtant, force est de constater qu'elle n'épuise pas le sujet en laissant ouverte la question des salariés des autres pays.

Néanmoins, la participation des salariés en tant que tels, et non en tant qu'actionnaires uniquement, au conseil d'administration ou de surveillance des entreprises s'avère intéressante à trois points de vue :

- d'une part, elle permet d'assurer une stabilité de la présence de représentants des salariés, ce qui rend moins nécessaire et, le cas échéant, moins délicat, le réajustement de la représentation des salariés actionnaires au fur et à mesure des fluctuations de leur participation au capital ;

- d'autre part, elle permet d'éviter toute discrimination entre les salariés selon leur patrimoine ;

- enfin, elle garantit que, parmi les représentants des salariés, certains représentent le travail et uniquement lui, indépendamment de toute considération patrimoniale de court terme.

Sur un plan plus large, enfin, une telle présence affirme clairement le principe de l'association entre le capital et le travail, qui seul peut implanter durablement et en profondeur un véritable actionnariat populaire dans notre pays.

En outre, une telle mesure ne doit pas rester confidentielle au point qu'une grande entreprise comme Alcatel puisse envisager leur suppression pure et simple dans le cadre de sa fusion avec Lucent.

Une résolution adoptée par l'assemblée générale des actionnaires d'Alcatel le 7 septembre dernier, parmi celles soumises au vote pour avaliser la fusion, a prévu la suppression des deux administrateurs représentants des salariés, et leur remplacement par un censeur sans droit de vote ni pouvoir de décision.

Proposition

« Assurer la présence de représentants des salariés en tant qu'apporteurs en industrie aux conseils d'administration ou de surveillance des entreprises».

d) Des initiatives nécessairement spécifiques en faveur des petites entreprises

Les études de la Fondation de Dublin rappellent toujours que la taille des entreprises est un facteur favorable à la participation. L'un des enjeux essentiels est donc d'étendre au plus grand nombre de ces entreprises, sur une base optionnelle et incitative, les dispositifs de participation financière.

Pour ne s'en tenir qu'à la France, le rapport précité 2004/2005 du Conseil supérieur de la participation, « La participation financière », rappelle l'importance de l'écart à combler, en dépit des progrès dans les petites entreprises et notamment dans les très petites entreprises.

S'agissant d'abord de la participation proprement dite, de nombreux accords sont intervenus dans les petites et moyennes entreprises, ainsi que dans les très petites entreprises, à raison de 376 accords de participation volontaires en 2003, concernant 379 entreprises et 7.700 salariés. Néanmoins, les entreprises de moins de cinquante salariés ne représentent qu'une minorité des effectifs concernés par les accords ou les renouvellements d'accord, à raison de 25 % environ chaque année (24,4 % en 2002, 27,4 % en 2003 ; 25,1 % en 2004). En outre, les modalités de la participation présentent une spécificité quant à leur mode de gestion des fonds. La proportion des FCPE y est un peu inférieure à la moyenne. Elle n'est prévue que par 43,4 % des entreprises de moins de 50 salariés contre 50,7 % des accords en moyenne. En revanche, la formule du compte courant bloqué y est nettement plus développée, à raison de 24,7 % contre 19,2 % en moyenne et 8,7 % dans les très grandes entreprises. Les formules mixtes offrant plusieurs types de placements sont prévues par un quart des accords (24,5 %). Un peu plus de la moitié de ces accords volontaires de participation est, enfin, approuvé par consultation de l'ensemble du personnel.

En ce qui concerne l'intéressement, mis en œuvre sur une base volontaire, dans les grandes comme dans les petites entreprises, l'essentiel des accords a été conclu en 2003 dans les entreprises de 72,1 %. Au total, les 4.757 accords concernés se sont répartis en parts à peu près égales entre les très petites entreprises, de moins de 10 salariés, et les entreprises dont l'effectif est compris entre 10 et 50 salariés, à raison de 2.189 et 2.568 respectivement. Dans ces entreprises, la presque totalité des accords est ratifiée par les deux tiers du personnel, à raison de 87,2 % en 2003 et selon des estimations encore provisoires, de 92,2 % en 2004. Plus des deux tiers environ (71,9 %) des accords sont des accords d'intéressement aux résultats, fondés sur les performances financières de l'entreprise, et un cinquième (20 % en 2003) prévoient en revanche un intéressement sur des résultats autres que financiers.

On observera que la forte proportion des accords d'intéressement au résultat est l'une des caractéristiques des petites entreprises, les grandes entreprises, parce qu'elles ont des stratégies plus complexes, recourant plus à l'intéressement à des performances non financières.

En dépit de ces éléments, il reste que la participation financière reste très peu développée dans les petites entreprises. Dans l'ensemble, seuls 7 % du total de ces entreprises a accès à un dispositif de participation financière.

Les PME restent dont une terra nova pour la participation. L'enjeu est d'autant plus important que la participation financière permet souvent, pour nombre d'entre elles, de régler l'un des autres enjeux majeurs de ces entreprises, à savoir leur pérennité, en amorçant des mécanismes de reprise par les salariés.

Toutefois, cette nécessaire évolution ne peut intervenir que progressivement et des mesures à application différée, ou bien des mesures simplifiées, doivent éventuellement être prévues.

A ce stade, il peut paraître opportun de s'en tenir à prévoir deux mesures.

L'une s'adresse aux plus petites entreprises et viserait à leur permettre de verser un « dividende du travail », contrepartie du dividende servi au capital, même en l'absence de dispositif de participation ou d'intéressement, comme le prévoit déjà pour certaines entreprises le projet de loi n° 3175. Pour ces plus petites entreprises, entrer dans la logique institutionnelle d'un accord d'intéressement ou de participation est, en l'état, hors de portée et leur permettre de faire de l'intéressement et de la participation de manière dérogatoire, ne saurait les inciter à ne jamais entrer dans le droit commun.

L'autre concerne les autres entreprises non cotées, pour lesquelles le système utilisé en Grande-Bretagne pourrait être copié en France. Comme on l'a vu, les sociétés non cotées utilisent au Royaume-Uni le système de la phantom share, laquelle donne aux salariés la reconnaissance d'un droit patrimonial sur une fraction du capital. Une fraction du bénéfice leur est distribuée annuellement et un versement complémentaire leur est alloué au moment où ils quittent l'entreprise. La liquidité est assurée par l'entreprise elle-même par affectation d'une partie des résultats. Le complément est, le cas échéant, assuré par recours au crédit bancaire, garanti sur le portefeuille d'actions.

Propositions

« - permettre aux plus petites entreprises de verser un « dividende du travail » même en l'absence de dispositif de participation ou d'intéressement ;

« - créer un mécanisme similaire aux phantom shares anglaises, pour faciliter la participation dans les sociétés non cotées. »

e) L'opportunité de moderniser le lien entre le coopérateur et la coopérative

Le système de la coopérative, qui remonte au Moyen âge comme en témoignent les fruitières jurassiennes créées pour assurer la conservation de fromages, repose dans l'ensemble sur un mécanisme économique d'avantage direct au coopérateur soit sous la forme de prestations de services, soit sous la forme d'approvisionnement à un prix moindre que celui qu'il devrait acquitter à titre individuel, soit par une meilleure capacité à écouler les produits.

La philosophie de la participation peut néanmoins lui être appliquée dès lors que les coopératives constituent également des réserves.

Il n'est pas illégitime, comme l'a déjà proposé le rapporteur, que la partie du résultat destinée aux réserves facultatives qui sont statutairement impartageables puisse être attachée à des parts de coopérateurs et que la fraction correspondante soit ultérieurement versée au coopérateur, lorsqu'il cesse son activité pour prendre sa retraite.

Rendre effectif ce mécanisme permettra, comme pour les salariés, la constitution d'une épargne, ou d'une épargne retraite, pour l'agriculteur coopérateur notamment.

Proposition

« Rendre effectif, pour les coopératives, un dispositif de distribution d'une fraction du résultat destinée aux réserves facultatives impartageables au profit des coopérateurs, avec différé d'imposition et sous la forme de parts sociales gratuites remboursées aux intéressés lors de leur départ en retraite. »

2) Surmonter le blocage du dialogue social européen, par des initiatives politiques communautaires

Conformément à l'article 138 du traité instituant la Communauté européenne, la Commission a pour mission de favoriser le dialogue social et doit à cet effet consulter les partenaires sociaux, d'abord sur les orientations possibles d'une action communautaire puis, dans une phase ultérieure, sur le contenu l'action envisagée, si tel est le cas. Ensuite, les partenaires sociaux informent éventuellement la Commission qu'ils entament les négociations en vue de la conclusion d'un accord.

S'agissant de la participation, la conclusion d'un tel accord européen, qui serait la solution idéale et ô combien symbolique, ne peut être envisagée en l'état, tant les positions des partenaires sociaux sont différentes.

Il convient donc par conséquent d'opter plutôt, comme le prévoir le Traité, pour l'intervention d'une initiative législative communautaire appropriée.

a) Les positions actuelles des partenaires sociaux ne permettent pas d'espérer un accord au niveau européen, les représentants des employeurs étant en l'espèce particulièrement attachés au respect des spécificités nationales

En ce qui concerne les salariés, la Confédération européenne des syndicats (CES) s'est déclarée favorable à la participation financière des salariés dès lors qu'elle intervient dans un environnement dont plusieurs des points essentiels sont précisés :

- la participation financière n'est qu'un des éléments, complémentaires aux autres aspects de la participation des travailleurs aux processus de décision à tous les niveaux ;

- c'est à la négociation collective qu'il appartient de prévoir les modalités de la participation financière, dont le cadre précis doit être défini par des accords collectifs ;

- des dispositions doivent être établies pour éviter les cas d'insolvabilité ;

- la gestion des fonds doit être assurée conjointement par les salariés et les dirigeants d'entreprises ;

- la participation financière a vocation à fournir un revenu complémentaire, et non un substitut au salaire.

Lors de l'entretien qu'il a eu avec l'un des représentants de la confédération syndicale, le rapporteur a pu constater que les compléments apportés à ces éléments généraux n'ont rien de dirimant. La confédération est intéressée par l'actionnariat salarié dans sa forme collective, plutôt qu'individuelle, et elle est favorable à des fonds collectifs diversifiés pour éviter la concentration des risques. Elle estime également qu'il est important que les salariés puissent jouer un rôle au niveau des conseils d'administration ou de surveillance, sans méconnaître les risques que cela peut représenter en cas de présence syndicale : celui d'une perte d'indépendance, celui des conflits au sein d'un syndicat entre les salariés des différentes entreprises d'un secteur. Des fonds d'épargne collectifs sectoriels sont envisagés pour jouer un rôle sur les marchés financiers.

Toutefois, la confédération considère également que les dispositifs mis en œuvre ne doivent pas conduire à une utilisation systématique du salaire comme un instrument d'acquisition des actions de l'entreprise. Le salaire rémunère une compétence et ne doit pas obligatoirement contraindre le salarié à devenir un propriétaire de l'entreprise. Le salarié doit uniquement avoir cette faculté parmi d'autres.

Ces éléments, au demeurant tout à fait compatibles avec le système français, constituent une base de négociation et d'accord collectif européen.

En ce qui concerne les employeurs, la position de base de l'UNICE a été exposée dans un document d'octobre 2001 intitulé : « Participation financière des travailleurs dans l'Union européenne : position de l'UNICE ». Ces éléments ont pu être présentés, et précisés, lors de l'entretien qu'a eu le rapporteur dans les locaux de l'organisation, le 12 juillet dernier à Bruxelles.

Sur le fond, l'organisation ne s'affirme pas dans sa prise de position écrite, de 2001, hostile à la participation financière des salariés au sens large, puisqu'elle en reconnaît les bénéfices et accueille favorablement l'idée d'y recourir plus largement.

Elle souhaite seulement que sa mise en œuvre repose sur la base du volontariat, que les différents obstacles de nature juridique et fiscale soient levés par les Etats membres et que la Commission fasse un travail de recensement de ces obstacles juridiques et fiscaux.

Ce sont autant de considérations de bon sens, d'autant qu'il a été précisé au rapporteur que l'organisme était favorable à la diversité des instruments de participation financière, même si l'UNICE accorde, comme on l'a vu, une priorité aux stock options.

Néanmoins, un certain nombre d'éléments complémentaires, dont nul ne peut penser qu'ils aient un objectif purement tactique, rendent en pratique cette intention pourtant clairement affichée peu opératoire.

D'une part, l'UNICE, qui est pourtant favorable à une coordination s'agissant de la fiscalité des stock options, est hostile à une harmonisation au niveau communautaire en matière sociale et ne croit pas, s'agissant de la participation financière et de la participation non financière qu'une telle harmonisation soit possible, compte tenu des différences entre les systèmes nationaux, auxquels chacun tient.

En ce qui concerne plus spécifiquement la participation ou l'association des salariés aux décisions - ce que l'on appelle souvent au niveau européen les relations industrielles -, l'UNICE met en avant le respect des diversités nationales. Les évolutions doivent se faire selon elle dans un cadre souple, sous la forme par exemple d'échanges d'expériences, chaque Etat évoluant ainsi. En outre, elle estime que le traité ne donne pas compétence à l'Union pour légiférer dans le domaine de la participation des travailleurs. Et elle n'envisage pas non plus, compte tenu des différences entre les pays et, on doit en déduire, entre ses composantes nationales, qu'une décision puisse intervenir à l'unanimité des Etats membres sur la base de l'article 308 du traité qui permet au Conseil, sur proposition de la Commission et après consultation du parlement européen, de prendre les dispositions appropriées à la réalisation d'un objectif de la Communauté - un objectif social en l'occurrence - sans que le traité ait prévu les pouvoirs d'action nécessaires à cet effet.

D'autre part, l'UNICE considère lorsque le débat est porté sur la gouvernance des entreprises, qu'il y a des règles qui ne sont pas harmonisables au niveau européen.

Une position aussi stricte a certes le mérite de ne pas risquer de porter atteinte aux compétences des Etats membres ni au principe de subsidiarité, mais on ne peut s'empêcher de penser, à la lumière de l'expérience de l'évolution des structures agricoles, notamment des coopératives, qu'elle est trop pessimiste.

L'adopter conduit donc à maintenir la situation actuelle, dont on a vu que tout conduisait à souhaiter qu'elle s'améliore pour le plus grand nombre, et favorise l'immobilisme ce qui n'est pas le moindre des paradoxes pour une organisation qu'anime l'esprit d'entreprise et, en principe, l'esprit de modernisation et d'innovation.

Il est vrai que certaines de ses fédérations ne sont pas nécessairement favorables à la participation.

Lors de son déplacement en Allemagne, le rapporteur a pu constater que le patronat allemand, BDA et BDI, s'interroge sur la codécision telle qu'elle est actuellement en vigueur, considérant que son coût et les lenteurs qu'elle engendre ne sont peut-être plus adaptés à un dialogue social serein, et propose de diminuer la présence des représentants des salariés aux conseils de surveillance des grandes entreprises.

b) L'approche modulaire du rapport PEPPER III constitue une base de réflexion

Déjà présenté au C du II ci-dessus, le troisième rapport d'experts commandé par la Commission, le rapport PEPPER III propose une approche qui représente une bonne base de départ à un double point de vue.

D'une part, son optique modulaire décompose d'une manière très systématique et donc très pédagogique les différents aspects des dispositifs de participation financière au sens large et permet ainsi de faciliter la compréhension mutuelle des mécanismes actuellement en vigueur ou qui seront institués dans le futur dans les différents Etats membres. Par voie de conséquence, la mise en place d'un éventuel dispositif de reconnaissance mutuelle qui permettra la mobilité des salariés en Europe, en est clarifiée.

D'autre part, en proposant d'intervenir sur le droit des sociétés, il s'inscrit dans la bonne perspective compte tenu des travaux qui sont effectués par la Commission dans ce domaine.

Néanmoins, ces éléments ne sont pas suffisants par eux-mêmes pour faire aboutir un projet substantiel au niveau communautaire en matière de participation financière et non financière.

c) La France doit appuyer toute initiative communautaire, qu'il s'agisse d'un texte général sur la participation ou l'actionnariat salarié, de la reconnaissance de la valeur juridique des résultats d'une négociation collective transnationale ou encore d'initiatives sectorielles

Les conditions de la réussite du dialogue social pour le développement de la participation financière et non financière, notamment de l'actionnariat salarié, au niveau européen n'étant pas réunies, il appartient à l'autorité politique de prendre une initiative.

Une telle initiative doit avoir deux objectifs : d'une part, la promotion de la participation, pour renforcer l'efficacité économique de l'Europe ; d'autre part, la coordination, pour lever les obstacles à une gestion centralisée par l'entreprise, de la participation au niveau communautaire.

Dans ce domaine, la France ne peut institutionnellement prendre seule quelque initiative que ce soit, même si un Etat membre, en liaison avec certains de ses partenaires, peut influer sur l'exercice de cette compétence par la Commission. De nombreux exemples le montrent. Récemment, le Fonds européen d'ajustement à mondialisation (FEAM), a été décidé par le Conseil européen de décembre 2005. Les Conseils européens peuvent ainsi inviter la Commission à prendre des initiatives et que celle-ci les suit, avec des délais plus ou moins longs.

La France peut et doit donc appuyer l'ensemble des initiatives communautaires susceptibles de faire évoluer la situation actuelle plus vite que ne le fera le simple échange d'expériences tel qu'il est en vigueur notamment pour la méthode ouverte de coordination.

Une initiative générale sur la participation permettant de créer un plan de participation européen et de distribuer dans des conditions fiscales et de cotisations sociales homogènes des actions à des salariés

Le soutien de la France doit naturellement intervenir si la Commission, qui en a le monopole, prend l'initiative d'une proposition de texte ou directive sur le thème de la participation, en application du traité.

Une telle initiative devrait notamment prévoir un plan européen de participation et des mécanismes de reconnaissance mutuelle, selon les recommandations précitées du groupe d'experts présidé, en 2003, par M. Jean-Baptiste de Foucauld, inspecteur général des finances, ancien Commissaire au Plan. La France devrait y veiller une fois le texte en débat, si son contenu le permet par ailleurs.

Elle devrait également permettre de manière plus spécifique, afin de rendre les entreprises plus européennes, la distribution d'actions aux salariés par les entreprises selon un mode homogène sur le plan fiscal et social, dans tous les Etats membres.

Lors de sa visite au Royaume-Uni, le rapporteur a d'ailleurs pu constater l'intérêt des acteurs de la participation pour le mécanisme de l'attribution gratuite d'actions tel qu'il a été prévu par la loi de finances pour 2005, à la suite d'un amendement présenté par M. Edouard Balladur.

Veiller à l'aboutissement du projet de cadre juridique pour la négociation collective transnationale et à la teneur du statut de l'éventuelle société privée européenne

Au-delà de cette faculté d'une initiative à la teneur, de portée générale, sur la participation, il ne faut pas méconnaître l'importance de plusieurs initiatives ou projets communautaires en cours qui devraient permettre de renforcer la place de la participation au niveau communautaire, et sur le dénouement desquels la France peut influer favorablement.

Le premier de ces projets, inscrit à l'Agenda social 2005-2010 tel qu'il a été révisé lors du Conseil européen de printemps, en mars 2005, sous la présidence luxembourgeoise, consiste à donner « un cadre européen optionnel pour la négociation collective transnationale », c'est-à-dire une valeur juridique aux résultats d'une telle négociation, ce qui n'est pas actuellement le cas.

Il s'agit de prévoir les règles relatives à la conclusion des accords collectifs transnationaux, qu'il s'agisse d'accords de participation ou d'actionnariat salariés conclus par des sociétés ou des groupes implantés dans plusieurs Etats membres, ou bien également d'accords intervenant dans les autres domaines couverts par le dialogue social.

La Confédération européenne des syndicats souhaite vivement que cette initiative puisse aboutir.

La deuxième initiative concerne un élément encore en gestation, celui de la société privée européenne qui serait, notamment selon l'UNICE, plus adaptée que le statut de l'actuelle société européenne, aux besoins des PME.

Si ce projet devait aboutir, il serait naturellement nécessaire qu'il le fît avec des possibilités explicites, plus explicites que dans le statut de la société européenne, d'actionnariat salarié ainsi que de participation financière et non financière.

Enfin, le troisième cadre dans lequel la France peut favoriser la promotion et la mise en œuvre de la participation des salariés au niveau européen, est celui des différentes directives sectorielles qui intéressent les sociétés et d'une manière plus générale les entreprises.

On peut ainsi regretter que la directive 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil sur les OPA, du 21 avril 2004, n'ait pas prévu une procédure de consultation des représentants du personnel qui permettrait, en cas d'offre hostile, de renforcer les éventuelles mesures de défense déjà envisagées.

Propositions

« Soutenir les initiatives communautaires en la matière, notamment :

« - celles qui viseraient à créer un plan européen de participation et qui prévoiraient des mécanismes de reconnaissance mutuelle ;

« - celles qui permettraient la distribution d'actions aux salariés par les entreprises selon un modèle homogène sur le plan fiscal et social.

« Veiller également à l'aboutissement du projet de cadre juridique pour la négociation collective transnationale et aux conditions du dialogue social et de l'implication des travailleurs dans le statut de l'éventuelle société privée européenne »

d) Une coordination est indispensable s'agissant des incitations fiscales et des exonérations sociales

La participation financière sous toutes ses formes, y compris l'actionnariat salarié, n'a pris une réelle ampleur que dans les Etats où des incitations fiscales sont en place.

Il convient donc qu'à terme chaque Etat membre en prévoit et que celles-ci soient coordonnées pour ne pas créer de distorsion ni par conséquent d'entrave à la mobilité des salariés.

Sur le plan communautaire, ces incitations fiscales sont a priori hors du champ du traité instituant la Communauté européenne, puisqu'elles concernent les impôts directs (impôt sur les sociétés, impôt sur le revenu, contributions et cotisations sociales), alors que ses dispositions fiscales, prévues aux articles 90 à 93, ne concernent que la seule fiscalité indirecte.

Néanmoins, dans le sens de la démarche entreprise par la Commission pour la promotion d'une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés et d'une taxation selon les règles du pays d'établissement pour les PME, il y a lieu de considérer que pour la participation, une telle coordination est nécessaire au bon fonctionnement du marché intérieur.

C'est d'ailleurs le sens de la proposition précitée du groupe de haut niveau sur l'harmonisation pour la taxation des stock options.

Qu'il s'agisse d'une reconnaissance mutuelle, d'un plan européen de participation financière ou d'une simple coordination entre Etats, la solution envisagée doit, en tout état de cause, ne pas concerner que les seules stock options.

Le raisonnement est similaire s'agissant des cotisations et contributions sociales.

B. S'appuyer sur la participation et l'actionnariat salarié pour stabiliser le capital des entreprises et mettre un terme aux actuelles polémiques sur leur gouvernance

L'un des interlocuteurs du rapporteur, M. Walter Cerfada, secrétaire confédéral de la CES, a utilisé la formule, très juste, de capitalisme de « casino », pour qualifier certains aspects de notre économie actuelle qui ternissent sans aucune contestation possible l'image du libéralisme, du capitalisme et, pour finir, de la mondialisation.

Cette stratégie du gain maximum et immédiat, sans aucune vision de moyen terme (sans même parler du long terme), résulte largement d'une insuffisance de l'organisation institutionnelle des sociétés, qui dérive parfois vers un système de face à face entre l'actionnaire et le dirigeant.

Le premier exige de plus en plus souvent, comme notamment c'est le cas des investisseurs institutionnels que sont les fonds de pensions anglo-saxons, une rentabilité très élevée et régulière, sans même évoquer les acteurs qui n'ont que des stratégies purement financières et multiplient les offres publiques d'acquisition ou les opérations similaires sans aucune stratégie industrielle solide et durable en arrière-plan.

En France, un record a été battu au premier semestre 2006 en matière de fusions-acquisitions. Leur montant s'est élevé à près de 111 milliards de dollars contre 36 milliards de dollars au cours du premier semestre 2005.

Quant au second, certains exemples, certes encore rares mais insupportables pour l'opinion, montrent que les voies de la tentation d'un enrichissement aussi excessif qu'injustifié ne leur sont pas totalement fermées.

1) Les salariés, un actionnaire de long terme

a) Réintroduire une vision de long terme dans les conseils d'administration ou de surveillance et corriger l'actuel face à face actionnaire-dirigeant

Actuellement, dans l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne, les conseils d'administration ou de surveillance sont, sauf dans des cas d'exception tels que l'Allemagne, le champ clos d'un débat bipolaire entre, d'une part, les actionnaires et, d'autre part, les plus hauts dirigeants d'entreprises.

Sous l'effet notamment des fonds de pension américains, qui sont les investisseurs institutionnels par nature, les exigences des actionnaires en matière de rentabilité ont largement crû depuis plus de 25 ans et une sorte de consensus s'est établi, sans d'ailleurs qu'aucun raisonnement économique ne soit en mesure de l'étayer, sur une rentabilité de l'ordre de 15 % l'an. Une telle perspective est d'ailleurs intenable à long terme, puisque le taux de rentabilité du capital ne peut indéfiniment progresser plus vite que l'ensemble de l'économie.

Face à des actionnaires qui sont par définition mobiles et ont des exigences de rentabilité qui peuvent parfois n'être satisfaites qu'au détriment des intérêts à long terme de l'entreprise, les managers, qui sont en principe révocables ad nutum sont dans une situation de dépendance objective. Aussi n'est-il pas étonnant qu'un tel système dérive de plus en plus vers le court terme, les coups financiers et la croissance externe par rachat plutôt que par expansion de l'activité.

L'un des moyens de corriger cette situation est de changer la composition du conseil d'administration ou du conseil de surveillance en prévoyant systématiquement, au niveau européen, la représentation des salariés au moins en qualité d'actionnaire de l'entreprise, de manière à changer la vision et à transformer l'actuel face à face en relation tripartite.

Les salariés sont en effet soucieux de la pérennisation de leur l'emploi et ont une vision à long terme qui doit permettre, dans le cadre du dialogue, de trouver un équilibre entre les différents intérêts en présence.

b) Constituer grâce à l'actionnariat salarié un bloc de stabilité indispensable en cas d'OPA hostile

En l'absence d'un grand marché financier, alimenté par un important actionnariat populaire - situation qui résulte d'ailleurs en France, par comparaison avec les grands pays anglo-saxons, de l'absence de fonds de pension -, la structure du capital des sociétés cotées est souvent, dans notre pays, particulièrement vulnérable aux tentatives de reprises, par la voie d'OPA notamment, par des actionnaires extérieurs dont les projets ne coïncident nécessairement pas avec l'intérêt du pays ni de sa population.

Point n'est besoin de rappeler l'émotion qu'ont suscité les premiers termes de l'OPA de Mittal sur Arcelor ou de celle d'ENEL sur Suez depuis le début de l'année. Ces offres ont pu intervenir parce que le capital des entreprises cibles était suffisamment dispersé. Elles l'ont également pu parce que les valorisations boursières telles qu'elles résultent du marché, étaient considérées par les analystes comme suffisamment attractives, ce qui signifie au demeurant qu'il y a en l'espèce une faiblesse des mécanismes de marché.

L'actionnariat salarié est indéniablement l'un des éléments de réponse face à une telle situation. Un exemple le rappelle, celui de l'échec, en 1999, de la tentative d'OPA de la BNP sur la Société générale en raison notamment de l'opposition de l'actionnariat salarié, s'élevant à quelque 8 % du capital. Dans des économies où la structure du capital est parfois très diffuse, c'est ainsi l'actionnariat salarié qui peut être un actionnaire de référence. Le confirment d'ailleurs les éléments communiqués dans le rapport précité de MM. Cornut-Gentille et Godfrain. Plusieurs entreprises du CAC 40, mais aussi plusieurs sociétés cotées qui ne sont pas dans cet indice, ont un actionnariat salarié qui pèse plus de 7,5 %, c'est-à-dire qui compte.

actionnariat salarie en france en 2005 :
societes du cac 40
(3)

SOCIETE

PART DU CAPITAL DETENU PAR LES SALARIES

BOUYGUES

11,53

VINCI

9

ESSILOR

8,5

SOCIETE GENERALE

7,42

SAINT GOBAIN

6,7

BNP PARIBAS

5,1

THALES

5,1

AXA

5,06

DEXIA

4,8

DANONE

4,51

SUEZ

4,2

TOTAL

4

SCHNEIDER ELECTRIC

3,76

THOMSON

3,5

TF1

3,3

RENAULT

3,2

LAGARDERE

3,14

EADS

3,13

FRANCE TELECOM

2,94

AGF

2,6

CARREFOUR

2,39

GAZ DE FRANCE

2,3

PEUGEOT SA

2,18

MICHELIN

2,1

PERNOD RICARD

2,1

ALCATEL

1,95

ARCELOR

1,94

ACCORD

1,73

LAFARGE

1,7

CREDIT AGRICOLE

1,43

SANOFI AVENTIS

1,29

VIVENDI UNIVERSAL

1,13

AIR LIQUIDE

0,86

PPR

0,7

CAP GEMINI

NC

L'OREAL

NC

LVMH

NC

PUBLICIS

NC

STMICROELECTRONICS

NC

VEOLIA ENVIRONNEMENT

NC

Source : « Une ambition : la participation pour tous », rapport au Premier ministre de MM. François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain, députés.

En outre, comme le remarquent les auteurs du rapport, LINEDATA (31,5 %) et Air France (9,5 %) parmi les entreprises cotées, et Auchan (16,5 %), parmi les entreprises non cotées, ont un important actionnariat salarié.

2) Mettre fin notamment par la transparence et une initiative coordonnée au niveau de l'Union, voire de l'OCDE, à la polémique sur la rémunération des dirigeants des plus grandes entreprises

a) Une initiative politique est inéluctable

- La polémique affecte les plus grands pays

Dans la plupart des pays, les niveaux et les modes de rémunération des dirigeants d'entreprises sont contestés. Les stock options en représentent le symbole le plus couramment remis en cause.

C'est d'abord le cas en France, où les rémunérations des chefs d'entreprises atteignent des sommets en Europe, selon un article du Spiegel, dans sa version électronique du 22 juin 2006, et où la question a été récemment remise à l'ordre du jour avec deux incidents.

Le premier a été révélé lors du départ en juin du président-directeur général de Vinci, M. Antoine Zacharias, dont les gains s'établiraient selon la presse (Le Monde daté du mercredi 12 juillet 2006), à 173 millions d'euros.

Le second est celui du calendrier de mise en jeu de ses options par M. Noël Forgeard, président exécutif d'EADS, peu de temps avant l'annonce de retards sur la sortie et la production du nouvel appareil Airbus A 380.

En outre, récemment, à propos du projet de fusion entre Alcatel et Lucent, le président du cabinet français de conseil aux investisseurs Proxinvest, M. Pierre-Henri Leroy, a jugé la fusion « incroyablement trop favorable » à Lucent et a plaidé pour que chaque actionnaire d'Alcatel reçoive pour chaque titre plus d'actions Lucent qu'actuellement prévu.

La polémique n'est pas circonscrite à la France. Selon le même article du Spiegel, elle affecte aussi l'Allemagne, où l'on se pose également la question de savoir si la rémunération, quelle que soit sa forme, est en adéquation avec la réalité du service rendu.

Le rapporteur a d'ailleurs pu constater lors de sa mission sur place que les salaires et avantages des plus divers des dirigeants s'y négociaient, comme chez nous, dans la confidentialité.

Mais, c'est également le cas aux Etats-Unis, où les rémunérations des dirigeants d'entreprises sont passées de 40 fois le salaire moyen à 170 fois ce même salaire moyen, entre 1970 et 2005.

Selon une analyse de l'expert comptable Brian Foley faite pour le compte du New York Time, le PDG, sur le départ, d'Exxon Mobil aurait perçu entre 1993 et 2005 144.573 dollars par jour.

On rappellera que, selon le banquier John Pierpont Morgan, au début du XXe siècle, l'ordre de grandeur correct en la matière était de 1 à 20.

En outre, après les scandales comme celui d'ENRON où les salariés étaient incités à acquérir des actions alors que les comptes de l'entreprise ne reflétaient pas la réalité de son activité et en avaient une vision exagérément optimiste, une étude réalisée par deux universitaires, les professeurs Erik Lie, de l'Université de l'Iowa, et Randall Heron, de la Kelley School of Business, l'Université de l'Indiana, plus de 2.000 entreprises américaines auraient manipulé les dates d'attribution des stock options, pour les faire coïncider avec des dates où leurs valeurs étaient plus faibles, de manière que leurs bénéficiaires puissent enregistrer les plus-values encore plus importantes.

23 % des attributions d'avant le 29 août 2002, date à laquelle la US Security and Exchange Commission a contraint de déclarer dans les deux jours de leur attribution d'options, sont concernées. Néanmoins, la pratique aurait néanmoins continué par la suite et 10 % des sociétés auraient continué à manipuler ces éléments, selon les auteurs.

L'étude montre également que les abus ont été plus fréquents dans les groupes de la haute technologie, notamment au moment de la bulle Internet.

Une enquête publiée le 15 juillet par le Wall Street Journal révèle par ailleurs qu'un certain nombre d'entreprises ont attribué, immédiatement après le 11 septembre, des options à leurs dirigeants, à une période où les cours étaient particulièrement peu élevés. Sans être illégale, cette pratique est perçue comme caractéristique de « la volonté de certaines sociétés de saisir toutes les occasions pour enrichir leurs dirigeants », y compris les plus dramatiques.

Pus de 60 entreprises ont indiqué en juillet être sous le coup d'enquêtes, ou bien être poursuivies par des investisseurs ou avoir ouvert des procédures internes d'enquêtes sur les dates de remise des stock options. Plusieurs procédures judiciaires ont ultérieurement été ouvertes. La Security and exchange commission a été saisie.

Le cadre étroit du présent rapport impose de s'arrêter à ce stade, mais la liste des exemples, articles et études serait longue.

- Le mécanisme est maintenant mal perçu par l'opinion publique, d'autant plus qu'il permet de gagner des sommes très importantes dans une seule journée par un simple jeu d'écritures

Une initiative politique, afin de changer les règles pour corriger ces abus, est inéluctable.

A deux titres, le législateur ne peut pas ne pas faire face à ses responsabilités.

D'une part, l'opinion publique est scandalisée et choquée, et il convient de répondre à ses attentes. La loi est également une expression de la morale telle qu'elle est acceptée par le plus grand nombre.

D'autre part, ce serait un recul de l'Etat que de laisser aux seuls courants de pensée le soin d'intervenir sur la question, hors des partis politiques et du Gouvernement. Lorsque dans l'édition du journal Le Monde du 29 juin dernier, le Primat des Gaules, Mgr Barbarin, estime que « les rémunérations incroyables appellent des initiatives politiques », il répond indéniablement à des attentes fortes des citoyens...

Par ailleurs, dans un article publié dans le quotidien « Le Monde », daté du 6 septembre, « Le salaire des patrons est-il juste ? », M. Daniel Cohen rappelle que l'étude de MM. Xavier Gabaix et Augustin Landier « Why has CEO pay increased so much ? » montre que l'influence des PDG des grandes sociétés américaines cotées sur la valeur boursière de celles qu'ils dirigent est très faible.

La sensibilité de l'opinion est d'autant plus forte que le mécanisme ne peut jamais être perdant et qu'il permet de gagner dans une seule journée, par de simples jeux d'écritures, des sommes fort importantes.

En effet, le bénéficiaire, lorsqu'il exerce l'option, certes achète l'action correspondante, mais il n'est pas obligé de la conserver.

S'il la conserve, il doit soit redistribuer son patrimoine personnel en ce sens, soit emprunter les sommes nécessaires à l'acquisition.

S'il ne souhaite pas la conserver, au risque d'ailleurs de devoir subir une fiscalité plus lourde, il procède à une cession immédiate. Il ne débourse aucune somme, si ce n'est la commission qu'il doit verser à l'intermédiaire financier réputé lui avoir prêté pour une durée très courte la somme nécessaire à l'acquisition des actions sous jacentes aux options levées.

Le bénéficiaire de stock options ne peut être que gagnant. En effet, si le cours de l'action s'effondre, l'option ne sera pas exercée et comme elle a été attribuée gratuitement, cela sera sans dommage pour lui.

Enfin, il ne faut pas méconnaître que l'impopularité des stock options vient de ce qu'elles permettent à des dirigeants salariés de s'enrichir vite, plus vite que des créateurs d'entreprises.

Or, de tels dirigeants salariés ne sont pas des créateurs d'entreprises et ils ne sont pas non plus, comme les sont par exemples certains associés de sociétés de personnes, responsables sur leurs biens propres des éventuelles dettes de l'entreprise.

Cette image du gain à coup sûr et à moindre effort est largement partagée et ne permet pas d'envisager un rétablissement rapide de la réputation des stock options.

le dispositif n'atteint pas son objectif, qui est la fidélisation des meilleurs, et peut même perturber la capacité d'appréciation de ses bénéficiaires

Une régulation des stock options est d'autant plus nécessaire que celles-ci n'atteignent pas leur objectif, à savoir la fidélisation des meilleurs.

A l'origine, en effet, la stock option est un instrument qui permet non seulement d'intéresser le salarié ou le dirigeant aux performances de l'entreprise, mais également de le lier à elle grâce au délai entre l'attribution de l'option et la date à laquelle il est possible de l'exercer.

Or, en pratique, les stock options n'ont pas toujours défavorisé le nomadisme des cadres les plus performants. Ils sont parfois devenus tout au contraire un élément de surenchère entre les entreprises, dont ceux qui sont les plus réputés, à tort ou à raison d'ailleurs, jouent habilement.

Cette course est sans limite, car c'est en définitive l'actionnaire qui en paie les conséquences, d'une manière indolore, par la dilution de l'action qui représente une part d'autant moins importante du capital au fur et à mesure que les stock options sont attribuées puis les options levées.

Si l'on compare les stock options aux attributions d'actions gratuites d'actions, on peut certes objecter, comme le fait dans un article publié dans Le Figaro du 1er juillet dernier, M. Claude Bébéar, que ce dispositif récompense quand même la performance médiocre, puisque son bénéficiaire continue à enregistrer un gain même si l'action a chuté. Cependant, il ne faut pas non plus méconnaître que le dirigeant concerné peut grâce au cours de l'action mesurer les conséquences de sa gestion sur sa fortune au fur et à mesure que l'action baisse. Le sentiment de devoir éviter de perdre ce qui est déjà acquis est également un puissant élément de motivation.

Par ailleurs, les stock options peuvent dans certaines circonstances modifier l'appréciation du chef d'entreprise, en le conduisant à privilégier le très court terme.

Tel est notamment le cas si l'on prend l'exemple, réel selon les informations communiquées au rapporteur, d'un dirigeant d'entreprise qui détenait 50 millions d'euros de stock options, alors que son salaire annuel s'établissait à 2 millions d'euros.

Dans de telles circonstances, tout élément qui va dans le sens de l'intérêt à long terme de l'entreprise, mais qui peut diminuer sa rentabilité à très court terme risque inéluctablement d'être perçu au travers du prisme des a priori défavorables.

b) Les Etats-Unis tendent à renforcer la transparence et exercent un contrôle effectif en cas de délit d'initié

Aux Etats-Unis, les stock options et l'ensemble des éléments des rémunérations des dirigeants d'entreprises font l'objet d'un contrôle de la part de la Security and Exchange Commission (SEC).

D'une part, les transactions liées à des stock options doivent être déclarés à la SEC dans un délai de deux jours.

D'autre part, la SEC a prévu la publicité des éléments de rémunération des dirigeants d'entreprises.

De nombreux interlocuteurs rencontrés par le rapporteur lors de son déplacement aux Etats-Unis ont également insisté sur le fait que les dirigeants y encourent réellement des sanctions pénales.

Le 25 mai dernier, Kenneth Lay, l'ancien PDG d'ENRON, a été jugé coupable par le tribunal fédéral de Houston (Texas) de banqueroute frauduleuse, faux et usage de faux et complot, quatre ans après la faillite du groupe de courtage en énergie et matières premières qu'il avait créé. Il est décédé peu après, en juillet dernier, avant le prononcé de la sentence, prévu pour octobre.

L'un de ses principaux collaborateurs, Jeffrey Skilling, qui avait pris la direction générale de l'entreprise jusqu'à l'été 2001, a pour sa part été reconnu coupable de 19 chefs d'inculpation dont complot, fraude, délit d'initié et fausse déclaration.

Kenneth Lay avait vendu entre 1989 et octobre 2001 pour plus de 300 millions de dollars de ses titres ENRON tout en encourageant les employés du groupe à continuer à en acheter, affichant sa confiance dans l'avenir du groupe. Il lui était reproché ainsi qu'à Jeffrey Skilling d'avoir menti sur les difficultés financières qui ont ruiné des milliers d'actionnaires et d'employés qui avaient investi dans les actions du groupe.

c) Pour la France, des mesures législatives devraient notamment renforcer, pour l'information des actionnaires, la transparence des rémunérations des dirigeants de sociétés

Dans l'article précité publié dans Le Figaro, M. Claude Bébéar estime à juste titre que pour éviter les abus en matière de stock options et de rémunération des dirigeants d'entreprise, l'éthique et le bon sens doivent s'imposer.

On ne peut donc que regretter que la France notamment ne soit pas comme certains pays où la culture commune porte l'individu à s'autolimiter. Les pays scandinaves ont cette réputation.

Définir par la loi un bon équilibre est, en effet, délicat.

D'abord, il faut aller au-delà de ce que prévoit l'article L. 621-18-2 du code monétaire et financier, qui transpose une disposition de la directive communautaire 2003/6/CE sur les opérations d'initiés et les manipulations de marchés, et prévoit que les personnes exerçant des responsabilités au sein d'une société cotée et celles ayant un lien étroit avec elles, doivent déclarer à l'Autorité des marchés financiers l'ensemble des opérations qu'elles effectuent sur les titres de la société et sur les titres pouvant donner accès au capital, tels que les stock options.

La déclaration doit intervenir dans un délai de cinq jours. Les opérations concernées sont les acquisitions, les cessions, les échanges et les souscriptions.

Par ailleurs, les dirigeants ont l'obligation, pour éviter les conflits d'intérêt ou l'usage d'informations privilégiées, de ne pas faire d'opération dans les 30 jours précédant la présentation des résultats, ni autour des opérations susceptibles d'avoir un impact sur les cours de bourse.

Ensuite, pour tenter de parvenir à un système incontestable, il apparaît nécessaire d'agir sur cinq éléments :

- d'une part, la transparence vis-à-vis des actionnaires. Une large part de la polémique actuelle vient de ce que les sommes concernées ne sont découvertes qu'après coup, et qu'elles apparaissent alors déconnectées de tout résultat. En l'espèce, comme il n'y a pas transparence, on a tôt fait d'assimiler le secret à une volonté de dissimulation et donc à une irrégularité ;

- d'autre part, les modalités d'attribution des stock options ;

- de plus, les modalités de leur gestion ;

- en outre, le calendrier de leur cession, pour que le soupçon permanent du choix dans le secret du moment le plus opportun, avant une chute des cours, ne puisse plus être invoqué ;

- enfin, la diffusion des stock options, qui doivent retrouver toute leur place dans la gamme des instruments de participation financière, et ne pas rester perçues comme l'apanage des « nouveaux milliardaires ».

A ce sujet, le principal enjeu est celui d'un équilibre, lequel n'est actuellement pas atteint, entre la diffusion des stock options et celle des attributions d'actions gratuites.

· La transparence vis-à-vis de l'actionnaire

En ce qui concerne la transparence et les modalités d'attribution des stock options, un nouveau point d'équilibre semble s'imposer, dans le même sens que les mesures prises aux Etats-Unis, de deux manières :

- d'une part, par le renforcement de l'information des actionnaires sur les principaux éléments de la rémunération et les avantages des dirigeants et cadres des très haut niveau des entreprises ;

- d'autre part, par la reconnaissance du rôle du comité des rémunérations.

On peut en ce sens envisager un rapport annuel aux actionnaires sur les rémunérations, plus précisément l'ensemble des éléments des rémunérations, des dirigeants. Ce rapport retracerait notamment l'activité du comité des rémunérations, l'ensemble des suites données à ses travaux et recommandations, ainsi que les conditions dans lesquelles l'indépendance de ses membres est assurée et les éventuels conflits d'intérêts évités. Il serait soumis à l'assemblée générale des actionnaires.

Les éléments de rémunération délivrés par les filiales et les entreprises liées, y compris celles implantées à l'étranger, seraient naturellement mentionnés.

· L'amélioration des modalités de leur gestion

Pour que les stock options ne donnent plus lieu à polémique, il faut que les modalités de leur gestion soient incontestables.

Tel ne peut être le cas que si elles sont confiées à un mandataire indépendant extérieur à l'entreprise, lui-même contrôlé.

Il convient donc d'envisager que la gestion de tous les plans d'options soit confiée à de tels mandataires, qui seraient chargés de faire un rapport périodique sur les effets patrimoniaux des stock options, pour leurs bénéficiaires.

· Un encadrement du calendrier de leur cession

S'agissant du calendrier, la proposition de loi n° 3234 relative aux administrateurs salariés et aux options de souscription d'actions, présentée par M. Edouard Balladur et un grand nombre de députés, vise à interdire la levée des options par les mandataires sociaux pendant l'exercice de leurs fonctions et prévoit que ceux-ci soient, à défaut, tenus d'en conserver une certaine proportion fixée par le conseil d'administration ou de surveillance.

Elle vise à éviter que les dirigeants qui n'ont plus confiance dans les capacités de croissance leur entreprise - en un mot, qui ont des doutes sur les résultats de leur stratégie - puissent échapper à leur responsabilité. Elle apparaît de nature à régler certaines difficultés sur ce point.

Compte tenu de l'ampleur de la polémique actuelle, elle peut être complétée par un dispositif visant à interdire la cession, le jour même, des actions acquises par la levée des options correspondantes, grâce à un délai minimum, suffisamment long - d'un mois, par exemple - entre l'ordre de cession de l'action acquise grâce à l'exercice de l'option et l'exécution de cet ordre. Cette mesure concernerait les dirigeants et mandataires sociaux.

· Un meilleur équilibre avec les autres instruments de participation financière, notamment les attributions d'actions gratuites

Pour parvenir à un meilleur équilibre avec les autres instruments de participation financière, notamment les attributions d'actions gratuites, il convient de faire sortir les stock options du régime d'exception, qui est favorable, dans lequel elles se trouvent.

En premier lieu, la fin de leur exception fiscale exige, comme c'est d'ailleurs le cas aux Etats-Unis, et aussi au Royaume-Uni, de réserver l'application du régime fiscal le plus favorable aux seules options délivrées dans le cadre d'un plan largement ouvert au personnel de l'entreprise. Le même principe vaut naturellement pour les prélèvements sociaux.

C'est d'ailleurs ce que prévoit la France pour les attributions d'actions gratuites : le régime de faveur est réservé aux plans ouverts à tous les salariés.

En deuxième lieu, il convient de parvenir à un meilleur équilibre entre les attributions d'actions et les stock options.

Un tel équilibre ne peut naturellement être obtenu par des règles strictes et arithmétiques.

En revanche, il s'établira naturellement si on laisse faire le libre choix des acteurs.

De ce point de vue, il apparaît nécessaire de demander aux dirigeants d'entreprise d'opter, lors de leur entrée en fonction, entre soit le bénéfice de stock options, soit le bénéfice d'actions gratuites.

Propositions

- renforcer l'information des actionnaires sur les rémunérations des dirigeants d'entreprises (salaires, indemnités de départ, stock options, retraite « chapeau »...), ainsi que le rôle et l'activité du comité des rémunérations, grâce à un rapport soumis à l'assemblée générale ;

- prévoir la gestion des options par un mandataire extérieur à l'entreprise, qui ferait périodiquement un rapport sur l'effet patrimonial des stock options pour leurs bénéficiaires ;

- interdire la levée des options par les dirigeants d'entreprises pendant l'exercice de leurs fonctions : interdire aux mandataires sociaux en poste la vente de leurs actions acquises au titre des stock options ou prévoir que ceux-ci soient à défaut tenus d'en conserver une certaine proportion fixée ne varietur par l'Assemblée générale extraordinaire ;

- prévoir, en complément, pour interdire aux dirigeants et mandataires sociaux la vente immédiate des actions acquises grâce à la levée d'options, un délai suffisamment long entre l'ordre de cession de l'action correspondante et l'exécution de cet ordre ;

- réintégrer les stock options dans le droit commun en réservant, comme au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, le régime fiscal le plus favorable aux seules options délivrées dans le cadre de plans largement ouverts au personnel de l'entreprise ;

- rééquilibrer l'intérêt des stock options et des attributions d'actions en demandant aux dirigeants d'entreprises d'opter, lors de leur entrée en fonction, pour l'un ou l'autre de ces deux dispositifs.

d) Les mesures nationales doivent être complétées par une coordination au niveau de l'Union européenne et même, plus largement, de l'OCDE

Dans l'optique dorénavant mondiale qui s'impose à un nombre croissant d'entreprises et à leurs dirigeants, une mesure nationale peut être rapidement vouée à l'inefficacité, car contournée par des éléments aussi simples que des changements de domiciliation, ou des versements de salaires et avantages par une filiale étrangère.

Il conviendra donc, en tout état de cause, de compléter les mesures nationales qui seraient prévues, par un cadre communautaire qui permette une réaction coordonnée entre les Etats membres et empêche la tentation de prévoir des règles plus attractives, tentation que la concurrence entre les Etats membres favorisera toujours.

Dès lors qu'aucun Etat européen n'admettra plus l'abus des stock options, la règle commune s'imposera. Le risque de délocalisation ne concerne pas l'Europe. Celle-ci restera encore longtemps un marché et un espace de production suffisants pour que les entreprises non européennes s'y implantent et que les entreprises européennes y restent.

Sur le plan du droit, la compétence communautaire est avérée, puisqu'il ne s'agit pas d'une question de rémunération, domaine qui n'est effectivement pas mentionné dans la partie sociale du traité, et qui pourrait donner lieu à contestation en cas de tentative d'intervention communautaire, mais de gouvernance d'entreprise et de droit des sociétés.

L'article 44 prévoit, en effet, une harmonisation du droit des sociétés pour protéger les intérêts des associés et des tiers. Or, l'abus des stock options, en entraînant une certaine dilution de l'action et ainsi une diminution de sa valeur, avec en contrepartie un bénéfice concentré sur un nombre très réduit de personnes, affecte les intérêts des « actionnaires de base ».

Cette nécessité d'une réaction commune est largement corroborée par les organismes tels que l'UNICE, qui considère, comme on l'a vu, qu'une coordination européenne est nécessaire pour la taxation des stock options, alors même que la matière, à savoir la fiscalité directe est explicitement hors du champ du traité... Ce dernier ne mentionne, en effet, explicitement que la seule fiscalité indirecte.

Dès lors qu'une intervention communautaire est fondée, ont doit également se poser la question d'une même coopération au niveau de l'OCDE.

C'est en effet à ce niveau que les travaux comparatifs sur les stock options et leur fiscalité sont menés. L'idée d'une nécessaire action conjointe est donc universelle et latente.

En outre, si la polémique prend fin pour tous les Etats concernés, dans un tel cadre, la légitimité des institutions européennes ou de coopération internationale, trop souvent entamée, sera confortée.

CONCLUSION

En conclusion, à l'issue de cette étude qui relève d'une perspective européenne et comparative, il apparaît que la France bénéficie d'un ensemble de règles assez complet en matière de participation des salariés.

Parce qu'il s'attache aux deux dimensions de la participation, le volet financier et le volet non financier, et parce qu'il conduit à l'actionnariat salarié et à la représentation du travail au sein du conseil d'administration ou de surveillance, il tranche avec le système anglais, lui aussi assez complet mais purement financier, et, à l'opposé, avec les régimes en vigueur en Allemagne, et en Suède, où la cogestion repose sur la forte représentation des salariés dans les conseils de surveillance, de même qu'avec celui des Etats-Unis, largement orienté vers l'épargne retraite.

En ce qui concerne l'Europe, l'extrême diversité des situations provient de l'absence de cadre juridique prévoyant la participation des salariés. Les démarches jusque-là entreprises sont restées essentiellement incitatives. Une telle situation est préjudiciable, car elle interdit aux entreprises implantées dans plusieurs Etats membres de concevoir un même plan de participation pour tous leurs salariés.

La situation peut néanmoins être améliorée, selon le rapporteur, qui a souhaité faire part, à titre personnel, de ses éléments de réflexion.

S'agissant de notre pays, pour lequel tous les acteurs souhaitent la stabilité des règles, qui ont trop souvent changé, les aménagements nécessaires sont d'ampleur assez variable.

Certaines sont techniques, avec notamment le maintien de la faculté d'ouvrir de nouveaux comptes courants bloqués, disposition à laquelle certains syndicats sont attachés, ainsi qu'un dispositif adapté aux coopératives, permettant la distribution effective d'une fraction du résultat destinée aux réserves facultatives impartageables au profit des coopérateurs, avec différé d'imposition et sous la forme de parts sociales gratuites remboursées aux intéressés lors de leur départ en retraite

D'autres visent les petites entreprises, de manière à permettre aussi aux plus petites d'entre elles de verser un « dividende du travail », contrepartie du dividende servi au capital, même en l'absence de dispositif de participation ou d'intéressement, et à créer un mécanisme similaire aux phantom shares anglaises, pour faciliter la participation dans les sociétés non cotées, et permettre au salarié qui quitte l'entreprise de percevoir une part du capital correspondant à l'enrichissement de la société qui l'a employé.

Les dernières mesures ont une portée plus large, visant notamment à développer le dialogue social et l'association du capital au travail :

- d'une part, en prévoyant pour toutes les entreprises, en complément de la disposition sur la représentation des salariés au sein du conseil d'administration ou de surveillance, au-delà de 3 % du capital, une réunion annuelle conjointe d'une délégation du comité d'entreprise et d'une délégation du conseil d'administration ou de surveillance ;

- d'autre part, en renforçant le rôle des salariés actionnaires, en les incitant à se grouper dans des associations spécifiques ayant la faculté de présenter des candidats pour la désignation des représentants des salariés aux conseils d'administration ou de surveillance, et en prévoyant la faculté pour les salariés d'opter pour la seule présence de leurs représentants dans les conseils de surveillance des FCPE ;

- en outre, en étudiant l'opportunité d'un vote double des salariés actionnaires ;

- enfin, en assurant la présence de représentants des salariés en tant qu'apporteurs en industrie dans les conseils d'administration ou de surveillance, indépendamment de leur actionnariat.

Il s'agit, d'autre part, de créer les conditions de l'extinction des polémiques récurrentes sur les stock options et les rémunérations des plus hauts dirigeants d'entreprises.

Les mesures envisageables pourraient viser à :

- renforcer l'information des actionnaires sur les rémunérations des dirigeants d'entreprises, ainsi que sur le rôle et l'activité du comité des rémunérations, grâce à un rapport soumis à l'assemblée générale ;

- prévoir la gestion des options par un mandataire extérieur à l'entreprise, qui ferait périodiquement un rapport sur l'effet patrimonial des stock options pour leurs bénéficiaires ;

- interdire la levée des options par les dirigeants d'entreprises pendant l'exercice de leurs fonctions : interdire aux mandataires sociaux en poste la vente de leurs actions acquises au titre des stock options ou prévoir que ceux-ci soient à défaut tenus d'en conserver une certaine proportion fixée ne varietur par l'Assemblée générale extraordinaire ;

- prévoir, pour empêcher le système d'achat-vente virtuel des actions, générant une plus-value, un délai suffisamment long entre l'ordre de cession de l'action acquise grâce à l'exercice de l'option et l'exécution de cet ordre, de manière à interdire aux dirigeants et mandataires sociaux les opérations de levée d'option et vente des actions correspondantes dans la journée ;

- réintégrer les stock options dans le droit commun en réservant le régime fiscal le plus favorable aux seules options délivrées dans le cadre de plans largement ouverts au personnel de l'entreprise ;

- rééquilibrer l'intérêt des stock options et des attributions d'actions en demandant aux dirigeants d'entreprise d'opter, lors de leur entrée en fonction, pour l'un ou l'autre de ces deux dispositifs.

Naturellement, pour éviter tout risque, et toute polémique sur les risques de délocalisation, une réaction coordonnée devrait intervenir non seulement dans le cadre communautaire de l'Union européenne, mais également dans celui de l'OCDE.

Sur le plan européen, il convient de faire en sorte que les différents Etats membres de l'Union européenne aient une conception commune de la participation. Ceci exige de la France qu'elle soutienne ou encourage les initiatives qui viseraient à créer un plan européen de participation ou qui prévoiraient des mécanismes de reconnaissance mutuelle, ainsi qu'à permettre la distribution d'actions aux salariés par les entreprises selon un mode homogène sur le plan fiscal et social.

Dans cette perspective, il conviendra de veiller également à l'aboutissement du projet de cadre juridique pour la négociation collective transnationale et aux conditions du dialogue social et de l'implication des travailleurs dans le statut de l'éventuelle société privée européenne.

Dans une optique large, la participation des salariés au capital de l'entreprise aide à faire face aux OPA hostiles et la représentation des salariés au sein des conseils d'administration ou de surveillance, permet de rompre, en y apportant une vision de long terme et un sens du développement industriel, avec la rigueur du face à face entre le dirigeant, lui-même salarié, même s'il est de très haut niveau, et l'actionnaire, trop souvent tourné vers la seule rentabilité de court terme.

Ce sont indéniablement des atouts, face à la mondialisation, qui sont ainsi proposés.

TRAVAUX DE LA DELEGATION

La Délégation s'est réunie le mercredi 13 septembre 2006, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Le Président Pierre Lequiller a souligné l'intérêt du rapport, qui apporte des éléments d'information sur les dispositifs en vigueur au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Etats-Unis et fait ressortir l'absence de législation européenne. S'agissant des propositions personnelles du rapporteur, il a fait valoir qu'elles figureront à part dans le rapport, l'objet de ce dernier étant principalement d'éclairer l'Assemblée nationale sur la législation européenne et dans les Etats membres en vue du débat qui se tiendra en séance publique.

M. Michel Delebarre a jugé préoccupant que, dans le cas des groupes européens, la législation applicable soit celle du pays dans lequel ils ont leur siège. Il a estimé que pourrait être imaginé un système de représentation des salariés et de négociation à l'échelle européenne valable pour les salariés de ces groupes. En outre, il a souhaité que le rapport fasse état de l'avis du Comité économique et social européen sur la question.

Le rapporteur a considéré, comme M. Michel Delebarre, que les groupes européens posaient effectivement un problème, que ce soit pour la participation financière ou la participation non financière, car c'est la législation du siège du groupe qui s'applique, ce qui crée des disparités entre salariés, en l'absence d'harmonisation des législations. A cet égard, les régimes actuels sont divers puisqu'en Grande-Bretagne, l'accent est mis sur la participation financière à la différence de l'Allemagne, tandis que le système français repose sur une combinaison des deux systèmes de participation.

Le Président Pierre Lequiller a considéré que les difficultés invoquées résultaient de l'absence d'harmonisation, notamment fiscale au sein de l'Union européenne.

M. Daniel Garrigue a tout d'abord fait remarquer que durant les années 60 et 70, au cours desquelles la participation s'était développée, les entreprises se déployaient principalement dans un cadre national, alors qu'aujourd'hui leurs activités revêtent une dimension de plus en plus transnationale. A ses yeux, une telle évolution commande de réfléchir à l'élaboration de mécanismes et de solutions communes à l'échelle européenne, à défaut desquels le développement de la participation risquerait d'être entravé.

Il a ensuite souligné la nécessité de trancher le débat des années 90 sur l'alternative entre le développement de la participation et celui des fonds de pension et de choisir entre ces deux systèmes.

S'agissant de la cogestion, M. Daniel Garrigue a fait remarquer que l'idée gaulliste de l'association entre le capital et le travail en était proche. Rappelant que l'amendement Vallon avait eu précisément pour objet de promouvoir une telle association, il a relevé qu'une certaine cogestion était parfois assez avancée aussi au niveau de la branche, en France, et qu'en Allemagne elle se déploie à la fois au niveau de la branche et des entreprises.

En ce qui concerne les stock options, il a souligné la nécessité d'une réglementation et il a souhaité savoir si des Etats membres avaient déjà mis en place un cadre juridique en la matière.

Le rapporteur a apporté les réponses suivantes :

- accomplir des progrès dans le domaine de la participation financière et celui de la participation non financière exige uniquement d'apporter des aménagements à la législation française actuelle, et d'éviter d'être en contradiction avec les règles en vigueur dans les autres Etats membres. Sinon apparaîtraient des blocages auxquels se heurteraient les entreprises multinationales ;

- les fonds de pension sont assez ouverts et ne sont pas réservés aux salariés d'une même entreprise ;

- il importe d'instaurer un équilibre dans l'affectation des avoirs des salariés et d'éviter, comme c'est le cas dans le système américain, de rechercher une diversification excessive des dépôts des salariés issus de la participation, ce qui risquerait de réduire toute justification de la légitimité d'une participation non financière ;

- les accords sont en tout état de cause plus rapides en ce qui concerne la participation financière, laquelle pose moins de problèmes politiques et philosophiques que la participation non financière qui concerne la détention du pouvoir dans l'entreprise ;

- il y a également des polémiques sur les stock options dans les autres pays. Il faut effectivement encadrer le régime des stock options du fait des abus constatés. Il serait souhaitable d'accroître le caractère attractif de la participation financière grâce à la distribution d'actions gratuites. Dans le cas où le choix serait libre pour les dirigeants entre les stock options et ces dernières, nombre d'entre eux demanderont à en bénéficier, car cela les prémunira également contre le reproche de délit d'initiés, en cas de cession.

M. Jérôme Lambert a indiqué que le rapport abordait en fait la question de fond du fonctionnement du système capitaliste. Le problème majeur est celui de la répartition de la richesse entre les revenus du travail et ceux du capital. Le rapport de force actuel, au niveau mondial, défavorable au travail, ne permet pas de trouver un équilibre.

On ne règlera pas le problème avec une amélioration des règles sur la participation des salariés. Dans ce domaine comme dans d'autres, il faut d'abord procéder à une harmonisation européenne, les entreprises utilisant les différences entre les législations fiscales et sociales.

M. Gérard Voisin a félicité le rapporteur de l'importance de son travail et a regretté que le graphique comparant la participation financière dans les divers pays de l'Union à quinze ne permettait d'apprécier cette participation qu'en termes de proportions et non pas de masses financières réparties.

M. Robert Lecou a mis l'accent sur la situation française, paradoxale, associant un fort taux de participation financière et un très faible niveau de syndicalisation.

Le rapporteur a d'abord rappelé que la Délégation ne se réunissait pas aujourd'hui pour discuter de la remise en cause du système libéral et se contentait d'explorer des pistes pour l'amélioration de la participation. Il a précisé que certains chiffres figurant dans d'autres parties du rapport apportaient des compléments d'information sur la participation financière, tout en soulignant que les comparaisons rigoureuses étaient toujours difficiles. Il a ajouté que le faible niveau de syndicalisation n'empêchait pas les syndicats français d'exiger de se voir reconnaître le droit à l'exclusivité pour représenter les salariés dans les conseils d'administration.

Le Président Pierre Lequiller a confirmé qu'il serait intéressant de préciser le niveau des masses financières concernées dans le rapport. Il a également demandé que les taux de syndicalisation soient mentionnés. Il a enfin incité les membres de la Délégation, quelle que soit leur appartenance politique, à utiliser et à citer le présent rapport lors de la discussion du projet de loi en séance publique, afin de contribuer à l'européanisation du débat national.

La Délégation a ensuite autorisé la publication du rapport d'information.

ANNEXE :
Liste des personnes à l'audition desquelles a procédé
le rapporteur

¬ A Paris :

- M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes ;

- M. Claude Bébéar, président du conseil de surveillance d'AXA, président de l'Institut Montaigne ;

- M. Jean-Michel Content, secrétaire général de l'Association internationale pour la participation financière ;

- M. Jean-Baptiste de Foucauld, inspecteur général des finances ;

- M. Jean Peyrelevade, vice-président de Toulouse & Associés ;

- M. Lionel Tourtier, délégué général de Fondact,

- M. Jean-Baptiste Segard, président de la Commission « gestion financière de l'épargne salariale », directeur Placement et épargne dans l'entreprise de Société générale Asset Management ; et M. Ephraïm Marquer, directeur de l'épargne salariale et de l'épargne retraite, de l'Association française de la gestion financière (AFG) ;

- M. Michel Lamy, secrétaire national, CFE-CGC ;

- MM. Jean-Jacques Guille, secrétaire confédéral, et Jean-Pierre Poulet, CFDT ;

- Mme Francine Blanche, secrétaire confédérale ; M. Pierre-Yves Chanu, conseiller confédéral ; Mme Isabelle Depuydt, CGT ;

- Mme Marie-Suzie Pungier, secrétaire confédérale, CGT-FO ;

- MM. Marc Mathieu, secrétaire général, et Laurent Bellamy, Fédération européenne de l'actionnariat salarié (FEAS) ;

- M. Thierry Plas, directeur juridique et fiscal de l'UIMM, et Mme Christine Manuelyan, chef du service des affaires européennes et internationales, (MEDEF et UIMM).

¬ A Berlin :

- M. Bernhard Steinkühler, avocat en droit du travail ;

- M. Ottenheinrich Freiherr von Weitershausen, secrétaire général, BDA.

¬ A Bruxelles :

- M. Walter Cerfada, secrétaire confédéral de la CES ;

- Mme Thérèse de Liedekerke, directrice des affaires sociales de l'UNICE.

¬ A Londres :

- Mme Carol Dempsey, partner, Price Waterhouse Coopers

- Mme Diane Hay, sous-directeur, HM Revenues and Customs

- Mme Virgine Pérotin, Professeur, Université de Leeds ;

- M. Robert Postlethwaite, avocat.

¬ A New York :

- M. Paul Chatelus, président, Du Parc, Lyons & associates ;

- M. Jean-Marc Moriani, président et CEO de Calyon ;

- M. Frédéric Gamet, conseiller du commerce extérieur, conseiller financier, AXA ;

- M. Eric W.Goff, senior vice-president, AXA equitable.

¬ A Washington :

- M. Gordon Smith, sénateur de l'Oregon, président du comité spécial sur le vieillissement ;

- M. Mark Warshawsky, secrétaire adjoint au Trésor, chargé de la politique économique, auprès du Secrétaire au Trésor ;

- Mme Ann Combs, secrétaire adjoint auprès du Secrétaire au Travail, chargée des systèmes de retraite des salariés ;

- M. Roel Campos, commissaire, U.S. Securities and Exchange Commission ;

- M. Craig Copeland, Employee Benefit Research Institute ;

- M. Gerald M. Shea, AFL-CIO, assistant du président ;

- Mme Aliya Wong, directeur des politiques de retraite, US Chamber of Commerce ;

- MM. John Dauphiné, directeur, David Certner, directeur, et Mme Line Vreven, American association of retired persons (AARP) ;

- MM. David Wray, ancien président, et Ed Ferrigno, vice-président, association internationale pour la participation financière.

Annexe-1

1 () Les catégories statistiques qui ont été constituées pour cette étude reposent sur un certain nombre de conventions. Parfois, pourtant, des dispositifs sont difficiles à classer. Les conclusions présentées peuvent donc être, pour une certaine part, nuancées.

2 () On parle aussi de système BOGOF, acronyme de Buy One, Get One Free.

3 () Données publiques disponibles au 26 août 2005 dans les documents de référence de sociétés ou auprès d'Europafinance/Cofisem.

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