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No 347
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 novembre 2002.
PROPOSITION DE LOI
visant à réformer les modalités de contrôle
des
établissements de soins privés.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE

par MM. Claude GOASGUEN, Manuel AESCHLIMANN, Alfred ALMONT, Mme Sylvia BASSOT, MM. Jean-Claude BEAULIEU, Jacques-Alain BÉNISTI, Jean-Louis BERNARD, Marc BERNIER, Jean-Michel BERTRAND, Gabriel BIANCHERI, Étienne BLANC, Roland BLUM, Bruno BOURG-BROC, Mme Maryvonne BRIOT, MM. François CALVET, Antoine CARRÉ, Richard CAZENAVE, Gérard CHERPION, Georges COLOMBIER, Charles COVA, Paul-Henri CUGNENC, Olivier DASSAULT, Xavier de ROUX, Lucien DEGAUCHY, Léonce DEPREZ, Jean-Pierre DOOR, Jean-Michel DUBERNARD, Daniel FIDELIN, Jean-Claude FLORY, René GALY-DEJEAN, Daniel GARD, Claude GATIGNOL, Franck GILARD, Jean-Pierre GIRAN, Jean-Pierre GORGES, Gérard HAMEL, Emmanuel HAMELIN, Yvan LACHAUD, Édouard LANDRAIN, Michel LEJEUNE, Mme GeneviÈve LEVY, MM. Lionnel LUCA, Alain MARLEIX, Jean MARSAUDON, Patrice MARTIN-LALANDE, Mme Henriette MARTINEZ, MM. Christian MÉNARD, Denis MERVILLE, Alain MOYNE-BRESSAND, Jean-Marc NESME, Jacques PÉLISSARD, Philippe PEMEZEC, Mme Josette PONS, MM. Daniel PREVOST, Michel RAISON, Jacques REMILLER, Jean ROATTA, Michel ROUMEGOUX, André SCHNEIDER, Bernard SCHREINER, Frédéric SOULIER, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Michel TERROT, André THIEN AH KOON, Jean TIBERI, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Léon VACHET, Christian VANNESTE, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VITEL et Michel VOISIN,

Députés.

Etablissements de santé.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le paradoxe semble être le caractère principal du secteur médical français. D'un côté, les chercheurs et médecins multiplient les découvertes scientifiques extraordinaires permettant de sauver des vies par milliers, de l'autre les infirmières, privées ou publiques, vivent dans leur immense majorité de revenus indignes du travail admirable qu'elles fournissent auprès des malades sans jamais ménager leurs efforts ou leur temps. Dans les hôpitaux ou les cliniques, les services les plus modernes d'un point de vue technologique côtoient d'autres services qui ne possèdent même pas les moyens en ordinateurs ou en matériel d'il y a vingt ans. Sans oublier les ahurissantes différences qui peuvent être observées à tous les niveaux entre deux régions ou deux villes voisines.
Pour exister, ces contrastes n'en sont pas moins la véritable plaie du secteur médical de notre pays et pas une semaine ne s'écoule sans que l'une des professions qui constitue ce secteur n'appelle à l'aide ou n'attire l'attention de l'opinion publique sur le profond dénuement dans lequel elle exerce : infirmières des secteurs public et privé, médecins libéraux, internes, scientifiques, etc.
A l'intérieur même du monde médical, les cliniques privées figurent parmi les plus oubliées. En effet, depuis quelques années, les fermetures de cliniques se sont multipliées, affectant particulièrement Paris et l'Ile-de-France.
Les raisons d'un si grand nombre de disparitions sont diverses : non-respect des normes sanitaires et techniques, obligeant les autorités de tutelle à obtenir d'urgence et légitimement la fermeture, ou trop grande concentration d'établissements de soins, publics ou privés, qui conduit à un rééquilibrage naturel. Mais elles ne peuvent pas tout expliquer.
Une mystérieuse malédiction semble s'être acharnée sur les cliniques privées. Une à une, elles disparaissent sans qu'aucune des raisons évoquées ci-dessus n'intervienne. Parallèlement, la plupart des acteurs de ce secteur - médecins, directeurs de cliniques, infirmières, etc. - n'hésitent pas à pointer les abus procéduriers des autorités de tutelle. Certains parlent même de « nationalisation rampante ».
Il est vrai que les rapports actuels entre les cliniques privées et l'administration sont particulièrement défavorables aux premières.
En vertu notamment de l'article L. 6122-13 du code de la santé publique, l'autorité de tutelle exerce un contrôle sur l'ensemble des établissements de santé. Les agences régionales d'hospitalisation peuvent suspendre ou annuler les autorisations d'exercer aux établissements de santé, privés ou publics, si certaines conditions ne sont pas remplies.
Cette procédure de contrôle, pour légitime qu'elle soit, ne prend cependant pas en compte les différences de situation économique entre cliniques privées indépendantes et hôpitaux publics appuyés sur l'Etat. Elle se révèle donc injuste, manquant singulièrement de transparence. En effet, après une inspection de l'agence régionale d'hospitalisation et avant que la décision finale ne soit communiquée à l'établissement concerné, l'accès au dossier est impossible et les recours sont faibles, voire inexistants.
Il est donc grand temps de revoir les relations entre ces établissements privés et les autorités de tutelle. C'est pourquoi cette proposition de loi vise à rationaliser et à rendre plus justes les liens qui unissent les agences régionales d'hospitalisation et les établissements privés, tant dans les modalités d'inspection que dans les décisions d'inspecter en amont et de fermer en aval.
Ainsi, il est proposé de créer une commission de surveillance, dont l'indépendance serait garantie par une composition mixte et paritaire. Elle réunirait des représentants de l'administration régionale, des syndicats de cliniques et des médecins libéraux également délégués par leurs syndicats. Cette commission serait la seule, après demande motivée, à pouvoir autoriser l'agence régionale d'hospitalisation à diligenter une inspection dans une clinique, étant également présente lors des contrôles par l'intermédiaire d'un représentant. Par ailleurs, la procédure actuelle ne laisse que peu de droits aux établissements privés. Un procès-verbal recensant les éventuelles infractions serait donc remis aux dirigeants de la clinique inspectée à l'issue du contrôle de l'agence régionale. Il est également proposé d'instaurer une véritable procédure contradictoire, qui respecterait le droit légitime des établissements à se défendre, par le biais d'une réunion de conciliation, avant que l'agence régionale ne décide d'une suspension d'autorisation d'exercer.
Pour tous ces motifs, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, d'adopter la proposition de loi suivante.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L'article L. 6122-13 du code de la santé publique est remplacé par quatre articles ainsi rédigés :
« Art. L. 6122-13-1. - Une commission régionale de surveillance des établissements privés est créée. Y siègent de manière paritaire des membres de l'agence régionale d'hospitalisation, des représentants des syndicats des établissements privés et des médecins libéraux. Après demande motivée de l'agence régionale d'hospitalisation, la commission autorise celle-ci à diligenter une enquête dans un établissement de soins privé. La commission est consultée par l'agence régionale pour toute affaire concernant un établissement privé.
« Art. L. 6122-13-2. - Selon les cas, le ministre chargé de la Santé ou le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation peut prononcer la suspension totale ou partielle de l'autorisation de fonctionner d'une installation ou d'une activité de soins :
« 1° En cas d'urgence tenant à la sécurité des malades ;
« 2° Lorsque les conditions techniques de fonctionnement prévues au 3° de l'article L. 6122-2 ne sont pas respectées ou lorsque sont contactées dans un établissement de santé et du fait de celui-ci des infractions aux lois et règlements pris pour la protection de la santé publique entraînant la responsabilité civile de l'établissement ou la responsabilité pénale de ses dirigeants.
« Art. L. 6122-13-3. - La suspension de l'autorisation accordée à un établissement de soins privé requiert une inspection diligentée par l'agence régionale d'hospitalisation, qui nécessite l'accord préalable de la commission régionale de surveillance créée à l'article L. 6122-13-1. La commission délègue un représentant lors de l'inspection de l'établissement concerné.
« A l'issue de l'inspection, les inspecteurs remettent immédiatement aux responsables de l'établissement visité un procès-verbal de l'inspection précisant les éventuels manquements ou infractions. Les dirigeants de l'établissement disposent d'un délai de quinze jours pour faire parvenir à l'agence régionale d'hospitalisation les pièces pouvant compléter le dossier.
« L'agence régionale d'hospitalisation transmet son rapport final à l'établissement concerné ainsi qu'à la commission régionale de surveillance, qui se charge d'organiser une réunion de médiation réunissant les inspecteurs et les responsables de l'établissement. La décision de suspension ne peut intervenir avant la tenue de cette réunion de médiation.
« Art. L. 6122-13-4. - Lorsqu'il s'agit d'un établissement public ou en cas d'échec de la réunion de médiation prévue par l'article L. 6122-13-3 lorsqu'il s'agit d'un établissement privé, la décision de suspension est transmise sans délai à l'établissement concerné, assortie d'une mise en demeure.
« A l'issue d'un délai d'un mois si la mise en demeure est restée sans effet, le ministre ou le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation saisit dans un délai de quinze jours, selon les cas, le Comité national ou le comité régional de l'organisation sanitaire et sociale qui, dans les quarante-cinq jours de la saisine, émet un avis sur la mesure de suspension au vu des observations formulées par l'établissement concerné.
« Le ministre ou le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation doit alors se prononcer à titre définitif, éventuellement sur le retrait d'autorisation ou sur la modification de son contenu. Il peut également assortir l'autorisation de conditions particulières mentionnées à l'article L. 6122-7.
« Les décisions de suspension ou de retrait prises selon les modalités mentionnées ci-dessus ne font pas obstacle à d'éventuelles poursuites judiciaires. »

N° 0347 - Proposition de loi sur le contrôle des établissements de soins privés (Claude Goasguen)


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