Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 433
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 novembre 2002.
PROPOSITION DE LOI
visant à créer un certificat de dégazage afin de prévenir
et de réprimer les rejets polluants en mer.

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE
par M. Didier JULIA,

Additions de signatures :
M. Jean-Yves Besselat


Députés.

Déchets, pollution et nuisances.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Le naufrage du pétrolier Le Prestige, le 19 novembre 2002, créant une nouvelle catastrophe écologique touchant les côtes espagnoles, relance le débat sur la protection du littoral maritime.
Il n'est cependant pas que les marées noires qui causent des pollutions par hydrocarbures. En effet, les dégazages en mer représentent un volume dix fois plus important de pollutions maritimes. Ces déversements frauduleux constituent un problème sur lesquels les pouvoirs publics semblent demeurer impuissants.
Pour exemple, à la suite du naufrage du pétrolier Erika, une « opération coup de poing » avait réalisée sur l'axe de circulation maritime situé à la pointe de Bretagne, par des avions des douanes et de la marine nationale. Le bilan était accablant : pas moins de trente-neuf pollutions par dégazages sauvages de pétroliers ou de cargos, nettoyant leurs cuves en pleine mer, ont été observés entre l'île d'Ouessant et la Gironde entre les 18 et 23 février 2000. A cette époque, sur les trente-neuf pollutions dûment constatées, seules trois ont pu être verbalisées.
Un mois plus tard, les 13 et 14 mars 2000, une opération du même type avait permis d'observer neuf dégazages en vingt-quatre heures. A l'exception d'un seul, repéré au large du cap de la Chèvre dans le Finistère, ils ont tous été localisé à environ deux cents kilomètres à l'ouest de l'épave du pétrolier Erika, et plus précisément dans la partie Nord de l'axe, empruntée habituellement par les navires se rendant en Méditerranée ou en Atlantique sud.
Cette nouvelle opération de surveillance n'avait donné lieu qu'à un seul procès-verbal, concernant un navire marchand battant pavillon libérien, le Rokya Delmas.
Ces deux « opérations coup de poing » attestent d'une triste réalité que ne cessent de dénoncer les marins-pêcheurs et tous les élus côtiers et qui est aussi, hélas ! de notoriété publique : certains navires profitent d'une catastrophe pétrolière pour déguiser leur délit.
Mais, au-delà de ce constat, il convient surtout d'être frappé par l'impuissance des pouvoirs publics pour sanctionner de telles pratiques dont les conséquences s'avèrent lourdes en termes écologiques, touristiques et économiques.
Ces dégazages pratiqués impunément constituent une véritable insulte à l'autorité des Etats chargés de faire respecter le droit maritime.
La loi du 5 juillet 1983, modifiée par la loi du 3 mai 2001 réprimant la pollution de la mer par les navires, définit et renforce les sanctions encourues par les auteurs de rejets polluants. En effet, elle dissuade fortement les auteurs de rejets délibérés en renforçant et en diversifiant les sanctions répressives dont ils sont passibles. Egalement, un dispositif a été adopté dans le cadre de la loi du 16 janvier 2001, laquelle comporte diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports et prévoit le déballastage des navires avant leur sortie du port sous peine de sanction.
Face aux marées noires et aux dégazages, devenus de plus en plus fréquents, force est néanmoins de constater que ce dispositif paraît non seulement obsolète, mais aussi localement inopérant.
Aussi, considérant que la création d'un certificat de dégazage constitue un moyen de lutter efficacement contre ce type de pollution intentionnelle et sans préjuger des conclusions ou des propositions de la commission d'enquête parlementaire sur la sécurité du transport en mer, il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Tout navire pénétrant dans les eaux territoriales françaises à fin de transit ou à fin d'escale doit être en mesure de présenter un certificat de dégazage délivré par un organisme agréé par l'Etat français.

Article 2

Tout navire qui ne serait pas en mesure de prouver la régularité de sa situation au regard de l'article 1er sera arraisonné sans délai par les autorités maritimes françaises compétentes, qui pourront ensuite l'enjoindre d'effectuer à quai un dégazage réglementaire.

Article 3

Les conditions d'application de la présente loi seront précisées par un décret, lequel établira notamment la liste des organismes habilités à délivrer le certificat de dégazage suscité.

Article 4

Le gouvernement françaiss s'engage à prendre toutes les initiatives nécessaires, au plan international et européen, en vue d'empêcher les dégazages clandestins dans les eaux internationales et d'interdire la navigation aux navires ne présentant pas les garanties requises à l'article 1er.

Article 5

Nonobstant les dispositions prévues à l'article 2, sera puni d'une amende de 30 000 à 300 000 ¤ et d'un emprisonnement de six mois à cinq ans, ou de l'une de ces deux peines seulement, et, en cas de récidive, du double de ces peines, tout propriétaire d'un navire n'étant pas en mesure de présenter le certificat défini à l'article 1er. Seront également punis de la même peine l'armateur et l'affréteur d'un tel navire.

________________
N° 0433 - Proposition de loi sur la création d'un certificat de dégazage pour réprimer les rejets polluants en mer (M.. Didier Julia )


© Assemblée nationale