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No 542
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 janvier 2003.
PROPOSITION DE LOI
relative à la création
d'un
Observatoire national de la délinquance.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Jean-Marc AYRAULT, Christophe CARESCHE, Daniel VAILLANT, Bruno Le ROUX, Paul QUILÈS, Mme Patricia ADAM, MM. Damien ALARY, Jean-Marie AUBRON, Jean-Paul BACQUET, Jean-Pierre BALLIGAND, Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Christian BATAILLE, Jean-Claude BATEUX, Jean-Claude BEAUCHAUD, Jean-Louis BIANCO, Jean-Pierre BLAZY, Serge BLISKO, Patrick BLOCHE, Jean-Claude BOIS, Daniel BOISSERIE, Maxime BONO, Mme Danielle BOUSQUET, MM. François BROTTES, Marcel CABIDDU, Mmes Martine CARILLON-COUVREUR, Marie-Françoise CLERGEAU, M. Gilles COCQUEMPOT, Mme Claude DARCIAUX, M. Michel DASSEUX, Mme Martine DAVID, MM. Michel DELEBARRE, Bernard DEROSIER, Julien DRAY, Pierre DUCOUT, Jean-Pierre DUFAU, Jean-Paul DUPRÉ, Henri EMMANUELLI, Claude EVIN, Laurent FABIUS, Albert FACON, Jacques FLOCH, Mmes Nathalie GAUTIER, Catherine GÉNISSON, MM. Jean GLAVANY, GaËtan GORCE, Alain GOURIOU, Mmes élisabeth GUIGOU, Paulette GUINCHARD-KUNSTLER, M. David HABIB Mme Françoise IMBERT, MM. Serge JANQUIN, Armand JUNG, Jean-Pierre KUCHEIDA, Mme Conchita LACUEY, MM. Jérôme LAMBERT, Jean LAUNAY, Jean-Yves Le BOUILLONNEC, Gilbert Le BRIS, Jean-Yves Le DÉAUT, Jean-Yves Le DRIAN, Michel LEFAIT, Guy LENGAGNE, Jean-Claude LEROY, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. François LONCLE, Victorin LUREL, Christophe MASSE, Didier MIGAUD, Mme Hélène MIGNON, MM. Henri NAYROU, Alain NÉRI, Mme Marie-Renée OGET, MM. Michel PAJON, Christian PAUL, Germinal PEIRO, Jean-Claude PEREZ, Mmes Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Geneviève PERRIN-GAILLARD, MM. Alain RODET, Bernard ROMAN, Michel SAINTE-MARIE, Mme Odile SAUGUES, MM. Pascal TERRASSE, Philippe TOURTELIER, Manuel VALLS, Michel VERGNIER, Alain VIDALIES et Jean-Claude VIOLLET,

et les membres du groupe socialiste (1) et apparentés (2),

(1) Ce groupe est composé de : Mme Patricia Adam, M. Damien Alary, Mme Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Éric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, MM. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Élisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin, Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque.
(2) MMJean-Pierre Defontaine, Paul Giacobbi, Joël Giraud, Guy Lengagne, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Christiane Taubira.

Additions de signatures :
M. Arnaud Montebourg
M. Jean Delobel et Mme Catherine Génisson
Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Gérard Bapt, Augustin Bonrepaux, Pierre Bourguignon, Thierry Carcenac, Alain Claeys, Pierre Cohen, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Yves Durand, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean-Yves Le Bouillonnec, Jean Le Garrec, Alain Gouriou, Patrick Lemasle, Philippe Martin, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Henri Sicre et Mme Christiane Taubira


Députés.

 

...

Droit pénal.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Régulièrement, en France, la publication de statistiques relatives à la délinquance fait l'objet de polémiques. Ces chiffres, qui devraient être interprétés avec sérieux et objectivité pour servir la lutte contre l'insécurité, sont malheureusement susceptibles d'être déformés et exploités, y compris à des fins politiciennes.
Si ces chiffres sont contestables, c'est parce que leur valeur scientifique n'est pas avérée. En effet, les outils statistiques utilisés actuellement dans notre pays ne permettent pas de mesurer l'évolution des phénomènes de délinquance au travers d'une approche scientifique. Une exigence de connaissance plus précise et de transparence impose la construction de véritables outils statistiques et de méthodes de travail plus fines. Il est, en outre, important de parvenir à mettre en relation les faits constatés par les services de police et de gendarmerie et leur traduction judiciaire pour apprécier l'efficacité et la continuité du traitement pénal.
C'est sur la base de ces constats qu'une mission parlementaire avait été confiée, en juillet 2001, à MM. Christophe Caresche et Robert Pandraud, relative à la création d'un observatoire national de la délinquance.
Les travaux de cette mission ont notamment mis en évidence les problèmes suivants :
1° La statistique de la délinquance présentée périodiquement par les pouvoirs publics résulte des faits constatés par les services de police et de gendarmerie qui sont traduits dans un outil appelé «état 4001», centralisé par la direction centrale de la police judiciaire au ministère de l'Intérieur. Cet état, utilisé depuis une trentaine d'années, a fait l'objet d'améliorations et de validations interministérielles, mais il ne couvre qu'en partie la délinquance. En effet, le souci premier des services n'était pas d'étudier ce phénomène mais de disposer de chiffres concernant leur activité. Aussi, l'évolution de la statistique publiée par le ministère de l'Intérieur reflète la propension des victimes à se plaindre autant que l'initiative des services de police et de la gendarmerie : deux éléments dont les variations se surajoutent à celle propre de la délinquance.
2° La présentation actuelle ne tient pas compte de toutes les sources statistiques disponibles : lui échappent notamment les contraventions, y compris celles de la cinquième classe (les plus graves) tels que les délits routiers; lui échappent également, en tout ou en partie, les faits relevés par d'autres administrations habilitées à constater des infractions, comme les douanes, le fisc, la répression des fraudes, la concurrence et consommation, etc.
Fait plus lourd de conséquence sans doute : cette statistique n'est que le premier maillon d'une chaîne d'information dont une part essentielle se situe au niveau de l'institution judiciaire. A l'heure actuelle, aucun rapprochement n'est réalisé entre les statistiques des ministères de l'Intérieur et de la Défense et celles de la Justice, en dehors de quelques efforts locaux menés dans le cadre des contrats locaux de sécurité.
3° Les statistiques judiciaires elles-mêmes ne traduisent pas l'ensemble du processus pénal dans sa continuité. Elles sont diverses (cadres du parquet casier judiciaire central), non reliées entre elles, souvent centrées sur des séquences particulières (activités des juridictions d'instruction, des tribunaux pour enfants, des mineurs suivis en justice, application des peines...), même si depuis plusieurs années un réel effort a été fait pour qu'elles traduisent les politiques pénales de façon plus satisfaisante. C'est ainsi que les motifs de classement sans suite font l'objet d'une statistique détaillée. Cependant, l'informatisation non homogène des juridictions fait que seules celles de la région parisienne disposent d'infocentres permettant de trier et de croiser des données, alors que cela n'est pas possible à l'heure actuelle dans les juridictions de province.
4° A l'exception du ministère de la Justice qui est doté d'une sous-direction de la statistique, les administrations n'ont pas de vrais services statistiques. Aussi, malgré des progrès au fil du temps, leurs instruments de mesure demeurent trop sommaires et leur collaboration pour le rapprochement des données et une tentative de présentation commune n'a pas été concluante.
5° La statistique de la délinquance présentée par le ministère de l'Intérieur n'est pas recoupée ou croisée avec d'autres instruments de mesure utilisés depuis longtemps dans les pays voisins de la France, comme les enquêtes de victimation qui permettent d'apprécier de façon plus large les faits de délinquance, les enquêtes auto-reportées qui recueillent les témoignages des auteurs d'infractions, les enquêtes sur l'insécurité qui obéissent à de nombreux critères et essaient de distinguer entre insécurité objective et sentiment d'insécurité.
La prise de conscience de ces déficiences avait conduit la mission à proposer la création d'un organisme spécialisé, indépendant et pluridisciplinaire, en relation avec les ministères et les administrations intéressés par le phénomène. Les grandes lignes de ces recommandations consensuelles sont reprises dans la présente proposition de loi que nous vous demandons d'adopter.
Cet organisme, constitutif d'une catégorie d'établissement public, aurait la qualité d'un établissement public administratif. La proposition de loi en définit les règles constructives et les missions. Son président du conseil d'administration serait nommé par décret en Conseil des ministres. Il serait assisté d'un conseil d'orientation. L'établissement aurait pour mission de rechercher, de collecter et d'analyser les données chiffrées de la délinquance et de mettre au point les indicateurs pertinents destinés à les analyser, ces informations faisant l'objet d'un rapport annuel.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
I. - Il est crée un établissement public de l'Etat à caractère administratif dénommé « Observatoire national de la délinquance », placé sous la tutelle des ministres de l'Intérieur, de la Justice, et de l'Économie, des Finances et de l'Industrie.
Il a pour mission d'élargir le champ des statistiques relatives à la délinquance et les croiser avec d'autres sources, mettre en relation les statistiques policières et judiciaires et faire évoluer la statistique 4001.
Pour cela, il doit notamment rechercher, collecter et analyser les données chiffrées de la délinquance, communiquées par les services de police et de gendarmerie, les autorités judiciaires, ainsi que toutes les administrations habilitées à constater des infractions (douanes, fisc, répression des fraudes, concurrence et consommation, etc.). Il doit également mener des enquêtes systématiques de victimation et des études sur l'insécurité. Il doit être un appui pour la production de statistiques locales par les instances locales.
Il met au point scientifiquement des indicateurs pertinents destinés à évaluer et analyser le phénomène de la délinquance.
Ces informations, transparentes et publiques, font l'objet d'un rapport annuel.
II. - L'Observatoire national de la délinquance est doté d'un conseil d'administration et d'un conseil d'orientation.
Le conseil d'administration est composé de représentants des administrations concernées, de parlementaires, de représentants d'associations d'élus locaux et de personnalités publiques qualifiées. Le président du conseil d'administration est nommé par décret en Conseil des ministres.
Le conseil d'orientation est composé de chercheurs, de personnalités qualifiées en raison de leur compétence, de représentants d'associations d'usagers et de représentants de la presse.
III. - Les services de l'établissement sont dirigés par un directeur nommé par décret. Le conseil d'administration assiste le président du conseil d'administration et le directeur de l'établissement sur les aspects scientifiques et techniques de l'activité de l'établissement.
IV - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article.
Article 2
La dépense pour l'Etat est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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N° 0542 - Proposition de loi  sur la création d'un observatoire national de la délinquance (M. Jean-Marc Ayrault)


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