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le 9 octobre 2003

No 911

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 juin 2003.

PROPOSITION DE LOI

visant à promouvoir un commerce international équitable entre le Nord et le Sud.

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Yves NICOLIN, Manuel AESCHLIMANN, Mme Sylvia BASSOT, MM. Patrick BEAUDOUIN, Jean-Claude BEAULIEU, Jacques BENISTI, Jean-Louis BERNARD, Marc BERNIER, Jean BESSON, JérÔme BIGNON, Claude BIRRAUX, Roland BLUM, Mme Chantal BOURRAGUE, MM. LoÏc BOUVARD, Ghislain BRAY, Yves BUR, Pierre CARDO, Richard CAZENAVE, Roland CHASSAIN, Jean-François CHOSSY, Jean-Louis CHRIST, Dino CINIERI, Georges COLOMBIER, Louis COSYNS, Jean-Yves COUSIN, Alain COUSIN, Henri CUQ, Olivier DASSAULT, Marc-Philippe DAUBRESSE, Christian DECOCQ, Jean-Pierre DECOOL, Léonce DEPREZ, Philippe DUBOURG, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Francis FALALA, André FLAJOLET, Jean-Claude FLORY, Nicolas FORISSIER, Marc FRANCINA, Mme Arlette FRANCO, MM. Claude GAILLARD, Jean-Jacques GAULTIER, Franck GILARD, Maurice GIRO, Mme Claude GREFF, MM. François GROSDIDIER, Jean-Claude GUIBAL, Jean-Jacques GUILLET, Emmanuel HAMELIN, Michel HEINRICH, Laurent HENART, Pierre HERIAUD, Jean-Yves HUGON, Michel HUNAULT, Sébastien HUYGHE, Edouard JACQUE, Christian JEANJEAN, Patrick LABAUNE, Robert LAMY, Dominique LE MENER, Jacques LE NAY, Michel LEJEUNE, Jean-Louis LEONARD, Gérard LEONARD, Jean LEONETTI, Mme Geneviève LEVY, MM. Lionnel LUCA, MM. Richard MALLIE, MM. Thierry MARIANI, Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, MM. Alain MARLEIX, Jean MARSAUDON, Philippe-Armand MARTIN, Mme Henriette MARTINEZ, MM. Patrice MARTIN-LALANDE, Christian MENARD, Denis MERVILLE, Jean-Claude MIGNON, Jean-Marc NESME, Jean-Pierre NICOLAS, Yves NICOLIN, Jean-Marc NUDANT, Jacques PELISSARD, Bernard PERRUT, Mme Bérengère POLETTI, MM. Daniel PREVOST, Eric RAOULT, Frédéric REISS, Jacques REMILLER, Marc REYMANN, Dominique RICHARD, Mme Juliana RIMANE, MM. Jean ROATTA, Philippe ROUAULT, Bernard SCHREINER, Alain SUGUENOT, Michel TERROT, Léon VACHET, Christian VANNESTE, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VITEL, Michel VOISIN et Gérard WEBER.

Députés.

Consommation.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

De la guerre d'Irak au Sommet d'Evian, la France est de retour sur la scène mondiale. Sous le regard bienveillant de la communauté internationale, le Président de la République Jacques Chirac lui permet de prendre la place qui est la sienne, à la tête du vaste mouvement pour l'émergence d'un monde multipolaire et d'une mondialisation plus humaine.

Il y a en effet urgence : alors que le volume du commerce mondial est 14 fois supérieur à ce qu'il était en 1950, la planète a dans le même temps perdu environ 30% de ses richesses naturelles, près de la moitié de la population mondiale vit avec moins de 2 euros par jour et plus de 250 millions d'enfants travaillent. De même, l'écart entre les pays du Nord et les pays du Sud n'a cessé de s'accroître et les inégalités en leur sein ne cessent de s'y creuser.

Si le commerce équitable n'est certes pas l'alternative miracle aux déséquilibres du commerce international, il apparaît comme l'outil privilégié d'une solidarité effective, qui mise non sur l'assistanat mais sur l'auto-développement du Sud.

A côté du cadre institutionnel, s'est en effet instaurée depuis les années 60 une autre forme de dialogue, à l'initiative de différentes organisations soucieuses de promouvoir un mode de commerce entre le Nord et le Sud fondé sur le respect de principes d'ordre éthique.

Aux pratiques commerciales jugées responsables de l'appauvrissement des pays du Sud devrait se substituer un système d'échanges propre à assurer l'auto-développement de ceux-ci et la mise en œuvre de relations commerciales plus justes.

Ainsi s'est progressivement développé en Europe un " commerce équitable " ayant pour principaux objectifs de payer aux petits producteurs le juste prix de leurs récoltes, d'améliorer les conditions de travail, de favoriser la réalisation de projets collectifs, de réduire le poids des intermédiaires et de mieux respecter l'environnement.

A titre d'exemple, une association hollandaise qui délivre un label de commerce équitable à des produits de consommation courante : café, thé, miel, banane, cacao, sucre et jus d'orange, indique que pour un paquet de café, vendu en grande surface entre 12 et 20 F, un petit producteur perçoit environ 1,20 F dans le système traditionnel, contre 4,75 F pour un produit labellisé vendu entre 15 et 22 F en grande surface. Ainsi, pour une tasse de café labellisé, le consommateur supporte un surcoût moyen de huit centimes, mais le producteur bénéficie d'un supplément de revenu de 40 %.

Certes, le commerce équitable ne peut, à lui seul, constituer un remède aux difficultés que connaissent trop de petits producteurs des pays du Sud, mais il constitue une voie que de nombreux consommateurs, soucieux de réduire les inégalités nées du commerce international, empruntent de plus en plus souvent. Selon les associations de consommateurs, il apparaît que le commerce équitable concerne 800 000 travailleurs, soit près de 5 millions de personnes, dans environ 45 pays. S'agissant de la consommation, le café équitable représente 5 % de parts de marché en Suisse et au Royaume-Uni.

Les enquêtes de consommation convergent : à une démarche " qualité " s'ajoute désormais l'intérêt des consommateurs pour les conditions de production et de distribution. Aux Etats-Unis et en Europe, des initiatives privées ont conduit de grandes entreprises à respecter des codes de bonne conduite, portant par exemple sur l'interdiction ou la limitation du travail des enfants, les horaires de travail ou la liberté syndicale. Tel a aussi été le cas, notamment, de la Fédération mondiale de l'industrie et du sport, qui a défini un code de bonne conduite auquel ont adhéré de très grandes entreprises comme Adidas, Nike et Reebok. A également été créée une norme internationale, dite SA 8000, qui, à partir de critères sociaux reconnus par la plupart des conventions de l'Organisation internationale du travail, garantit les bonnes pratiques sociales de l'entreprise adhérente.

Pour que ces différentes initiatives aient un réel impact sur le comportement des consommateurs, au-delà de la réaction de sympathie qu'elles peuvent provoquer, il est nécessaire qu'elles soient portées à la connaissance du plus grand nombre. En France, en 1998, plus de 70 % des consommateurs se disaient disposés à payer plus cher un produit fabriqué dans des conditions socialement acceptables, mais de très nombreux consommateurs ne connaissaient pas encore l'existence du commerce équitable, même si l'idée fait son chemin.

Ainsi, lors du sommet de Cancun en septembre 2003, le commissaire européen Pascal Lamy a présenté un plan d'action du développement durable. De même, l'AFNOR a tenté de définir les acteurs du commerce équitable ainsi que la notion même de commerce équitable.

Il est proposé aujourd'hui de relayer toutes ces initiatives par la création d'un dispositif légal ayant pour objet d'instituer au plan national, prélude à une initiative identique aux plans européen et international, une véritable certification du commerce équitable.

Le dispositif proposé retient deux idées principales. D'une part, instituer une certification pour tout produit ou denrée répondant à certaines conditions fixées dans un référentiel.

D'autre part, affirmer le principe d'un contrôle effectué par des organismes indépendants ayant reçu l'agrément des ministères concernés.

Les modalités d'application de ces nouvelles règles seraient renvoyées à un décret en Conseil d'Etat. Ce décret pourrait ainsi définir un référentiel fondé sur les principes suivants : pour le producteur, les engagements porteraient sur le niveau de salaire, les normes de sécurité et d'hygiène, la liberté syndicale, l'interdiction de recourir au travail forcé et au travail des enfants, le respect de l'environnement ; pour l'acheteur, la garantie de payer un juste prix, l'aide au financement de projets de développement, le paiement à la commande, le respect de délais de production raisonnables, l'engagement de relations commerciales à long terme.

S'agissant, par ailleurs, de la certification, elle devrait être confiée à un organisme indépendant, à savoir l'Association française de normalisation.

Ce dispositif prendrait place au sein du code de la consommation, en s'inspirant de la rédaction de l'article L. 115-27 relatif à la certification des services et des produits autres qu'alimentaires.

A ce stade de la procédure, il a paru souhaitable de proposer un dispositif concis qui pourra s'enrichir des fruits de la concertation avec toutes les parties concernées : associations, ministères et entreprises notamment.

TELLES SONT LES RAISONS POUR LESQUELLES NOUS VOUS DEMANDONS D'ADOPTER LA PROPOSITION DE LOI SUIVANTE.
PROPOSITION DE LOI

Article unique

Avant la section 1 du chapitre V du titre Ier du livre Ier du code de la consommation, est insérée une section 1 A intitulée : « Certification "commerce équitable" » et comprenant un article L. 115-1-A ainsi rédigé :

« Art. L. 115-1-A. - Peut recevoir la certification "commerce équitable", tout produit ou denrée alimentaire répondant à des caractéristiques de production, d'achat et de commercialisation décrites dans un référentiel et faisant l'objet de contrôles effectués par des organismes certificateurs ayant reçu l'agrément des ministères en charge de l'économie, du commerce, du travail et de l'environnement. »

« Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application de cet article. »

Yves Nicolin

et plusieurs de ses collègues

Députés

www.assemblee-nationale.fr

Prix de vente: 0,75 E

ISBN 2-11-118010-6

ISSN 1240-8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale

4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél: 01 40 63 61 21

N° 0911- Proposition de loi visant à promouvoir un commerce international équitable entre le Nord et le Sud (M. Yves Nicolin)


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