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N° 1768

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 juillet 2004.

PROPOSITION DE LOI

relative au plafonnement de la taxe professionnelle
par rapport à la
valeur ajoutée,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Augustin BONREPAUX, Didier MIGAUD, Henri EMMANUELLI, Eric BESSON, Gérard BAPT, Pierre BOURGUIGNON, Thierry CARCENAC, Jean-Louis DUMONT, Jean-Louis IDIART, Jean-Pierre BALLIGAND, Jean-Marc AYRAULT

et les membres du groupe socialiste (1) et apparentés (2)

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le Président de la République Jacques Chirac a indiqué en janvier 2004 sa volonté de voir supprimer la taxe professionnelle. Afin d'identifier les solutions permettant de mettre en œuvre ce vœu présidentiel, le Gouvernement a créé une commission chargée d'émettre des propositions en ce sens.

Dans l'attente de ces propositions, le Gouvernement a annoncé une exonération temporaire de taxe professionnelle, à compter du 1er janvier 2004 et pendant 18 mois, pour les investissements nouveaux.

Cette annonce était surprenante car elle intervenait quelques jours seulement après l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2004 dont l'équilibre ne prévoit pas une telle perte de recettes.

D'autre part, le Gouvernement avait repoussé, au cours des débats sur cette même loi de finances, un amendement, proposé par les députés socialistes. Ses modalités permettaient de répondre aux préoccupations avancées par le Président de la République.

Ce dispositif fait ici l'objet d'une proposition de loi.

Face à un impôt unanimement critiqué depuis sa création en 1976, les socialistes ont cherché, de longue date, à en corriger les effets pervers. C'est ainsi que sous la précédente législature ont été votées deux réformes d'ampleur de cet impôt.

La mise en place de la taxe professionnelle unique de zone a permis à la fois un financement des politiques publiques au niveau intercommunal et surtout une plus grande solidarité fiscale au sein d'un territoire économiquement plus pertinent, ce qui permet d'offrir aux entreprises une meilleure visibilité et stabilité de la fiscalité.

La suppression de la part de la taxe professionnelle portant sur les salaires a permis de réorienter la fiscalité pesant sur les entreprises dans un sens favorable à l'emploi. La pertinence de cette réforme a été reconnue par le Gouvernement puisque le choix a été fait, en 2003, de mener à son terme cette réforme.

Aujourd'hui existe un risque de voir les collectivités contraintes d'augmenter fortement leur taux de taxe professionnelle puisque les budgets locaux se voient dans l'obligation d'assumer des charges supplémentaires que l'Etat ne veut plus assurer. Ceci aurait pour conséquence de faire peser la charge fiscale de façon déséquilibrée au détriment des entreprises industrielles dont les investissements sont importants. Ce risque doit être pris en compte dans le cadre des réflexions sur la lutte contre la désindustrialisation et les délocalisations.

Le dispositif de cette présente proposition de loi permet de limiter ce risque. Il propose que la cotisation due par les entreprises, tout en étant calculée selon les règles actuelles, soit plafonnée en référence à l'année 2004 et non plus 1995, les effets de ce plafonnement étant compensés par un relèvement de la cotisation minimale due par toutes les entreprises. L'actuel plafonnement en fonction de la valeur ajoutée n'est en effet plus opérant dans un grand nombre de cas en raison des mesures prises par le Gouvernement d'Alain Juppé en 1996. Certaines entreprises officiellement plafonnées à 3,5 % supportent aujourd'hui définitivement une taxe professionnelle supérieure à 5 % de leur valeur ajoutée.

La solution que nous proposons permet donc de limiter davantage la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée, sans aucune perte de recettes pour l'Etat ni pour les collectivités locales. Elle garantit en outre aux collectivités locales la possibilité de voter les taux de la taxe professionnelle et est donc compatible avec le principe d'autonomie financière.

Le coût de cette mesure pourrait être supporté par les entreprises les moins taxées, c'est-à-dire celles soumises à la cotisation minimum, à savoir 1,5 %, en ajustant à due concurrence le taux de cette dernière. Le coût pour les finances publiques de cette réforme serait ainsi nul.

Il est ainsi proposé le relèvement de cotisation minimale à due concurrence comme gage de neutralité financière pour l'Etat. En effet, actuellement l'Etat est le bénéficiaire de la différence entre l'application du barème et la cotisation minimale. Le plafonnement proposé conduirait d'abord à une perte de recettes pour les collectivités. Celle-ci serait compensée par le relèvement de la DGF versée par l'Etat. La hausse de la DGF, qui est un prélèvement sur recettes, serait compensée par un relèvement de la cotisation minimale au profit de l'Etat.

Cette proposition, qui correspond à une des propositions de la Commission Fouquet, est simple, efficace et juste. Elle répond à des objectifs clairs : préservation de l'autonomie financière des collectivités territoriales, ajustement du prélèvement dans un sens plus favorable aux investissements et aux entreprises industrielles. Elle écarte la proposition, formulée imprudemment par le MEDEF, d'une suppression totale de la taxe professionnelle qui supprimerait le lien nécessaire entre les entreprises et les collectivités qui les accueillent. Ce dispositif a ainsi l'intérêt de ne pas délocaliser les bases et de ne pas porter atteinte au système de péréquation.

Le Gouvernement ne semble pas décidé à engager une réforme de la taxe professionnelle rapidement, malgré les vœux du Président de la République, certainement faute de préparation d'un dispositif acceptable. Cet ajournement pourrait entraîner la prolongation au-delà de 18 mois du dispositif, mis en place en janvier dernier, d'exonération temporaire de taxe professionnelle sur les investissements. Une telle prolongation poserait alors un double problème : d'une part la compensation aux collectivités locales, qui bénéficient d'un dégrèvement sur la base des taux pratiqués en 2003, deviendra de plus en plus défavorable à mesure que les taux réellement pratiqués augmenteront. D'autre part le prétendu effet incitatif de ce dispositif, qui ne peut jouer que si la mesure est exceptionnelle et provisoire, disparaîtra totalement si l'exonération est pérennisée. Seul demeurerait alors l'effet d'aubaine.

Pour éviter ces errements qui engagent des sommes considérables et font peser de lourdes incertitudes sur l'avenir des collectivités territoriales et de leurs groupements et sur le financement de leurs compétences, le Groupe socialiste a décidé de soumettre au Parlement la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I - Après le paragraphe I ter de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, il est inséré un paragraphe I quater ainsi rédigé :

« I quater - A compter des impositions établies au titre de 2005 et des années suivantes, le taux de référence pour l'application du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée est le taux appliqué au titre de 2004. »

Article 2

I - Les pertes de recettes éventuelles qui résulteraient pour les collectivités locales de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement.

II - Les pertes de recettes éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par le relèvement du taux de la cotisation minimale de taxe professionnelle prévue à l'article 1647 E du code général des impôts.

Imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118493-4
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

N° 1768 - Proposition de loi de M. Augustin Bonrepaux relative au plafonnement de la taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée

1 () Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Mme Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (Gers), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM.  Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque.

2 () MM. Jean-Pierre Defontaine, Paul Giacobbi, Joël Giraud, François Huwart, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Christiane Taubira.


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