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N° 2189

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 23 mars 2005.

PROPOSITION DE LOI

tendant à modifier les conditions d'élaboration
des
plans de prévention des risques naturels prévisibles
relatifs aux inondations,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Max ROUSTAN et Olivier JARDÉ

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis le début de la législature, le Groupe d'Etudes de l'Assemblée nationale sur les Inondations travaille activement sur la problématique des risques naturels et leur prévention. Au cours de ses travaux et plus particulièrement lors de ses auditions à Alès (Gard) et à Amiens (Somme) où il a réuni plus de deux cents élus et des représentants d'associations de sinistrés, le groupe d'étude de l'Assemblée nationale sur les inondations a pu mettre en exergue divers problèmes dans la mise en œuvre des Plans de Prévention du Risque Inondations (PPRi).

Tous les témoignages se rejoignent sur l'importance à accorder à la prévention des risques, mais soulignent d'une part que la mise en œuvre des PPRi n'est pas satisfaisante et regrettent d'autre part l'absence de lien entre cette mise en œuvre et l'amélioration effective des conditions de sécurité.

La loi n° 95-101 du 2 février 1995, dite loi « Barnier » a créé un chapitre intitulé « Mesures de sauvegarde des populations menacées par certains risques naturels majeurs », désormais codifié aux articles L. 562-1 et suivants du code de l'environnement. Ces dispositions permettent, dans les zones de population menacées par un risque naturel prévisible, de mettre en place des plans de prévention des risques (PPR) lesquels comprennent diverses mesures de protection, de prévention et de sauvegarde. Or, lorsqu'un PPR a pour objet la prévention des inondations (PPRI), ces mesures se résument, dans la majorité des cas, à des établissements de servitudes restrictives en matière d'usage du sol.

Il en ressort un constat inquiétant :

- Dans leur ensemble, les PPRi n'améliorent pas les conditions de sécurité dans les secteurs inondables, car ils ne traitent pas de protection, ni de prévention ou de sauvegarde contrairement aux vœux du législateur.

- Ils sont élaborés sans véritable concertation avec les élus qui sont responsables de la sécurité de leurs concitoyens. Ils sont vécus très souvent comme une véritable agression. En effet, des études techniques sont effectuées sur les communes sans que le Maire en soit informé ; les résultats sont envoyés par simple courrier sans tenir compte des projets de développement en cours, projet dont la dynamique est renforcée par les dernières lois de décentralisation. Pire dans certaines situations, il apparaît clairement qu'une position de tutelle des administrations sur le développement urbanistique des collectivités est instaurée (restaurée !) par l'intermédiaire des PPRi. Il apparaît alors comme un instrument de reconquête d'une tutelle perdue plus que comme un outil d'aide à la prévention des risques. Il semble fondamental dans l'esprit des lois de décentralisation que les dispositions soient établies dans le cadre d'une compétence « partagée » et que les collectivités ne soient plus consultées pour avis « simple » mais pour avis « conforme ».

- Finalement, les PPRi se révèlent majoritairement être des moyens de protection pour les administrations qui les instruisent. Ils prévoient des dispositions standard qui se révèlent sans proportion avec la gravité et l'intensité des situations à risque. Ils sont instruits dans une logique définitive considérant le risque comme fatal. Au contraire le législateur a prévu que les PPRi soient révisables à mesure que les dispositions effectives mises en place améliorent les conditions de sécurité (« caractère proportionné des mesures à la gravité et l'intensité du risque »). Il faut que les travaux réalisés (dans le cadre de la loi) qui visent à lutter efficacement contre le risque inondation soit pris en compte dans la mise en œuvre des PPRi.

Peu de départements ont connu une mise en place de PPRi sereine dans la concertation permettant aux élus et à l'administration de s'accorder sur les niveaux de risque admissibles, sur les voies d'amélioration des conditions de sécurité dans les secteurs exposés, sur le caractère progressif et réaliste des prescriptions.

La concertation et la primauté du rôle des élus locaux quant aux positions et dispositions à prendre doivent être recherchées de manière absolue. La prise en compte du risque doit pouvoir se faire dans la perspective du développement du territoire et non indépendamment de lui. Un guide sur la concertation pour l'élaboration des PPR a été conçu par le Ministère de l'Ecologie et du développement durable à l'attention de ses services. Il n'a fait l'objet d'aucune diffusion significative, d'aucune formation des services concernés et n'est de fait pas utilisé.

Des moyens adaptés à la situation de risque doivent être recherchés et permettre une véritable prévention à laquelle tous les citoyens doivent pouvoir prétendre. Des solutions techniques efficaces existent. Si ces travaux restent conformes aux finances et aux règles légales d'aménagement des cours d'eau, il faut absolument qu'aucune barrière administrative (ou idéologique) ne vienne les empêcher ou retarder.

Cette proposition de loi vise avant tout à améliorer les conditions de sécurité pour les personnes et les biens exposés au risque inondation. Cela passe par le rétablissement effectif de la concertation entre élus (responsables devant leur population) et administration qui en cas de conflit laisse le juge administratif trancher sans se remettre en question. Les acteurs doivent se retrouver côte à côte face au risque et non face à face avec le risque comme sujet de discorde.

Tel est l'objet de la proposition de loi que nous vous prions, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L'article L. 562-3 du code de l'environnement est ainsi rédigé :

« Le préfet procède à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles en concertation avec les représentants des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale concernés. Il définit préalablement les modalités de cette concertation avec les autorités communales concernées. S'agissant d'une problématique complexe, un guide méthodologique sur la concertation est mis à sa disposition. »

Les services instructeurs doivent avoir connaissance de ce guide et recevoir une formation à la concertation, de façon à élaborer ces plans dans cet esprit.

« Lorsqu'il a pour objet la prévention de risques d'inondations, le projet de plan établi dans la concertation est soumis à l'avis conforme des organes délibérants des collectivités territoriales concernées. »

« Le projet de plan et ses annexes éventuelles sont soumis à une enquête publique menée dans les conditions prévues aux articles L. 123-1 et suivants. Au cours de cette enquête, sont entendus, après avis conforme de leur conseil municipal, les maires des communes sur le territoire desquelles le plan doit s'appliquer.

« A l'issue de l'enquête publique, le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé par arrêté préfectoral. Toutefois, lorsque le plan a pour objet la prévention de risques inondation, cet arrêté ne peut être pris qu'après une réunion tendant à permettre au préfet et aux représentants visés au premier alinéa, de se concerter sur les suites à donner au rapport et aux conclusions motivées du commissaire enquêteur. En particulier, cette réunion doit veiller au caractère réaliste des mesures envisagées et à leur proportionnalité à la gravité et l'intensité du risque. Les modalités et conditions de révision du PPR doivent également être prévues à ce stade. »

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-119070-5
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 2189 - Proposition de loi tendant à modifier les conditions d'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles relatifs aux inondations (Max Roustan et Olivier Jardé)


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