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N° 3084

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 mai 2006.

PROPOSITION DE LOI
ORGANIQUE

relative à l'évolution de la redevance audiovisuelle,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Dominique RICHARD, Pierre-Christophe BAGUET, Patrick BALKANY, Marc BERNIER, Émile BLESSIG, Mme Maryvonne BRIOT, MM. Dino CINIERI, Olivier DASSAULT, Patrick DELNATTE, Léonce DEPREZ, Jean-Pierre DOOR, Dominique DORD, Jean-Paul GARRAUD, Charles-Ange GINESY, Mme Pascale GRUNY, MM. Joël HART, Michel HERBILLON, Pierre HÉRIAUD, Francis HILLMEYER, Jean-Yves HUGON, Olivier JARDÉ, Mme Maryse JOISSAINS-MASINI, M. Marc JOULAUD, Mme Geneviève LEVY,
M. Thierry MARIANI, Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, MM. Alain MARLEIX, Christian MÉNARD, Gérard MENUEL, Jean-Marc NESME, Étienne PINTE, Michel PIRON, Daniel PRÉVOST, Éric RAOULT, Jacques REMILLER, Jean-Marie ROLLAND, Francis SAINT-LÉGER, Michel SORDI, Daniel SPAGNOU, Francis VERCAMER et Gérard WEBER

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En 2005, les récepteurs de télévision étaient allumés en moyenne 5 h 39 par jour dans chaque foyer français équipé. Début 2006, moins d'un an après le lancement de la télévision numérique terrestre (TNT), les personnes recevant les signaux de la TNT et disposant d'un adaptateur regardent, chaque jour, 4 heures et 4 minutes leur écran contre 3 h 44 pour celles qui ne reçoivent pas la TNT. Nos enfants passent désormais plus de temps sur une année devant un écran de télévision et/ou d'ordinateur que sur les bancs de l'école.

La question de la télévision fait donc partie intégrante de la vie quotidienne de nos concitoyens et joue un rôle majeur en terme de vision de la société, de structuration des jeunes, de transmission des connaissances, d'ouverture sur le monde, de culture, de divertissement, d'information.

Elle constitue assurément un élément central de la vie des Français.

Or, les grands principes législatifs qui encadrent la diffusion télévisuelle en France, et particulièrement le service public, remontent à une époque encore récente (loi du 30 septembre 1986, dite « loi Léotard ») où nos concitoyens n'avaient qu'une offre réduite à cinq chaînes hertziennes gratuites. Jusqu'à l'arrivée de la TNT le 31 mars 2005, un quart des Français seulement bénéficiaient d'une offre élargie de 15 chaînes de télévision ou plus...

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Aujourd'hui, le paysage audiovisuel français évolue dans une ampleur et à une vitesse inconnues : l'outil télévisuel tel que nous le connaissons depuis bientôt 50 ans change radicalement avec son entrée dans l'ère numérique. Les enjeux sont bien plus considérables qu'il n'y paraît à première vue :

- l'offre de programmes se décline à travers de nouveaux modes de transmission (la TNT, l'ADSL, les téléphones mobiles...) qui, peu à peu, démocratisent l'accès à des bouquets multiples ;

- la consommation des contenus se modifie : multiplication, ces dernières années, des chaînes thématiques visant une population précise, essor rapide des services dits non linéaires (vidéo à la demande ou VOD, le téléchargement par Internet), mobilité, vulgarisation imminente de la Haute-Définition. Ce bond qualitatif aura un impact inéluctable sur la durée d'écoute et le type de programmes recherchés ;

- l'émergence de nouveaux entrants dans le secteur audiovisuel, notamment des télécoms, dont la puissance financière dépasse les ordres de grandeur jusque-là établis pour tout ce qui concerne les achats de programmes, de droits de diffusion (qu'il s'agisse de films, de documentaires, de concepts d'émissions, ou bien de droits sportifs)...

Dans ce contexte, le service public audiovisuel a une mission particulière qu'il ne pourra honorer si le contexte législatif n'est pas modifié pour lui donner les moyens de faire face à une concurrence de plus en plus vive.

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Notre système national, s'il est parfois envié pour la qualité de ses programmes, n'est pas parfaitement adapté aux années qui viennent. Il souffre, en effet, de plusieurs maux :

- ses objectifs sont négociés et décidés sans que les Français ne puissent y participer ni se l'approprier soit directement soit par leurs représentants élus,

- instabilité et faiblesse de ses ressources,

- manque de temps pour développer une véritable stratégie, lourdeurs administratives,

- successions multiples des dirigeants,

- marché national trop concentré...

De nombreux rapports consacrés à l'avenir du service public audiovisuel ont été rendus :

- la Cour des Comptes en 1997, 1998, 2004, le Commissariat général du Plan (2005) et, récemment, par l'Inspection générale des finances (2006), d'une part ;

- le Parlement d'autre part, notamment en juillet 2003 et dernièrement, celui remis au nom de la mission d'information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale sur les « missions du service public de l'audiovisuel et l'offre de programmes ».

De très nombreux ouvrages de librairie complètent cette panoplie.

Ce foisonnement est la preuve, s'il en était besoin, de la nécessité de se pencher sur le rôle que la représentation nationale entend donner au média qui occupe tant de temps de la vie de nos concitoyens.

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Aujourd'hui, il apparaît clairement que France Télévisions, dont les missions sont évidemment distinctes des services commerciaux, ne possède pas tous les atouts juridiques, financiers, managériaux, techniques nécessaires pour se battre « à armes égales » avec les concurrents du marché.

La présente proposition de loi organique, complétant une proposition de loi ordinaire, veut mettre fin à ces différents archaïsmes et relever les défis imminents.

Il vous est donc proposé de moderniser le service public audiovisuel français en faisant en sorte de garantir la dynamique de ses ressources, notamment publiques. La redevance constitue les deux tiers (61 %) des ressources totales du Groupe. En France, son taux est de 116 euros quand la moyenne européenne se situe aux alentours de 200 euros.

La présente proposition de loi organique vise donc à obtenir cette dynamique par deux moyens :

1. Asseoir clairement le principe du remboursement intégral des exonérations sociales de redevance consenties par l'État, conformément à la loi du 1er août 2000.

· En effet, chaque année, l'État accorde, sur des motifs sociaux par ailleurs légitimes, pour environ 70 millions d'euros d'exonérations de redevance, qui échappent ainsi à France Télévisions, dont le rôle n'est assurément pas de financer la politique sociale de son actionnaire. L'État doit donc se montrer responsable de ses décisions et prendre à sa charge la totalité de ces exonérations sociales.

2. Mettre en place un système instituant le principe d'une adaptation annuelle minimum du taux de la redevance comparable à celle appliquée par l'État pour la fixation de la dotation globale de fonctionnement allouée aux communes et groupements de communes.

· En effet, sur les six dernières années, l'inflation cumulée se chiffre à 10,5 %. Sur la même période, le taux nominal de la redevance n'a augmenté que de 1,5 %. Dans la mesure où la réévaluation rapide du taux de la redevance ne semble pas accessible, sa revalorisation annuelle selon un indice mêlant la moitié du taux de l'inflation (hors tabac) d'une part, au taux de croissance du PIB d'autre part, permettrait d'accroître les ressources du service public audiovisuel au même rythme que celui de l'économie française. Le Groupe France Télévisions pourrait ainsi suivre le train des augmentations annuelles de chiffre d'affaires des groupes privés, qui sont ses concurrents directs, sur les mêmes marchés d'achats de droits et de programmes.

C'est pour toutes ces raisons qu'il vous est proposé d'adopter la présente proposition de loi organique.

PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

Article unique

I. - Dans le chapitre III de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, il est inséré un article 24 bis ainsi rédigé :

« Art. 24 bis. - Le budget général de l'État rembourse l'intégralité du montant des dégrèvements de redevance audiovisuelle décidés pour des motifs sociaux par la loi et les règlements. Ce montant est inscrit dans les recettes du compte de concours financiers ouvert dans les écritures du Trésor pour retracer les opérations faites avec le produit de la redevance audiovisuelle.

« Le montant de la redevance audiovisuelle prévue par l'article 1605 du code général des impôts est revalorisé chaque année en fonction d'un indice au moins égal à la somme de la moitié du taux prévisionnel d'évolution des prix à la consommation des ménages hors tabac prévu par le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année considérée, sous réserve que celui-ci soit positif, d'une part, et du taux d'évolution prévisionnelle du produit intérieur brut en volume de l'année en cours prévu par le même rapport, sous réserve que celui-ci soit positif, d'autre part.

« Si l'évolution réelle constatée des prix à la consommation des ménages hors tabac et du produit intérieur brut en volume montre que la revalorisation à laquelle il a été procédé est inférieure à celle qui aurait résulté de l'application des taux d'évolution effectifs constatés, le montant de la redevance audiovisuelle applicable pour l'exercice suivant est ajusté par la loi de finances initiale suivante de manière à compenser le différentiel. »

II. - Les charges résultant pour l'État de l'application du I sont compensées par l'augmentation à due concurrence des taxes visées aux articles 1560 à 1566 du code général des impôts.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121232-6
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 3084 - Proposition de loi organique relative à l'évolution de la redevance audiovisuelle (M. Dominique Richard)


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