Accueil > Documents parlementaires > Propositions de loi
La version en format HTML, à la différence de celle en PDF, ne comprend pas la numérotation des alinéas.
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 3222

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 juin 2006.

PROPOSITION DE LOI

instaurant une délégation de responsabilité parentale
pour les actes de la vie courante de l’enfant
,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais

prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par Mmes Valérie PECRESSE, Martine AURILLAC, MM. Marc BERNIER, Gabriel BIANCHERI, Étienne BLANC, Bruno BOURG-BROC, Mme Chantal BOURRAGUÉ, MM. Michel BOUVARD, Loïc BOUVARD, Mmes Josiane BOYCE, Maryvonne BRIOT, M. Yves BUR, Mme Patricia BURCKHART VANDEVELDE, MM. Antoine CARRÉ, Gilles CARREZ, Roland CHASSAIN, Luc CHATEL, Gérard CHERPION, Jean-François CHOSSY, Philippe COCHET, Alain COUSIN, Charles COVA, Olivier DASSAULT, Hervé DE CHARETTE, Jean DE GAULLE, Xavier DE ROUX, Jean-Pierre DECOOL, Bernard DEFLESSELLES, Richard DELL'AGNOLA, Léonce DEPREZ, Jean-Jacques DESCAMPS, Jean-Pierre DOOR, Philippe DUBOURG, Jean-Pierre DUPONT, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Francis FALALA, Philippe FENEUIL, Daniel FIDELIN, Jean-Claude FLORY, Mme Arlette FRANCO, MM. René GALY-DEJEAN, Jean-Jacques GAULTIER, Guy GEOFFROY, Jean-Marie GEVEAUX, Charles-Ange GINESY, Mmes Claude GREFF, Pascale GRUNY, MM. Michel HEINRICH, Pierre HERIAUD, Jean-Yves HUGON, Sébastien HUYGHE, Édouard JACQUE, Mme Marguerite LAMOUR, MM. Robert LAMY, Pierre LASBORDES, Thierry LAZARO, Jean-Pierre LE RIDANT, Lionnel LUCA, Richard MALLIÉ, Alain MARSAUD, Pascal MÉNAGE, Christian MÉNARD, Gérard MENUEL, Gilbert MEYER, Mmes Marie-Anne MONTCHAMP, Nadine MORANO, MM. Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, Denis MERVILLE, Étienne MOURRUT, Jean-Pierre NICOLAS, Dominique PAILLÉ, Mme Bernadette PAÏX, MM. Jacques PÉLISSARD, Bernard PERRUT, Christian PHILIP, Étienne PINTE, Mmes Bérengère POLETTI, Josette PONS, MM. Daniel PRÉVOST, Christophe PRIOU, Didier QUENTIN, Michel RAISON, Frédéric REISS, Jean-Luc REITZER, Jacques REMILLER, Jean-Marie ROLLAND, Jean-Marc ROUBAUD, Martial SADDIER, Francis SAINT-LÉGER, François SCELLIER, André SCHNEIDER, Jean-Pierre SOISSON, Daniel SPAGNOU, Mme Hélène TANGUY, MM. Michel TERROT, Guy TEISSIER, Léon VACHET et Michel VOISIN

Addition de signature :
M. Emmanuel Hamelin

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La plus grande fréquence des séparations des parents entraîne la multiplication des familles recomposées, dans lesquelles les enfants vivent avec un beau-parent. En outre, dans les familles dites « monoparentales », le parent non gardien est souvent absent et le parent gardien, généralement la mère, peut éprouver le besoin de se faire assister par des proches (grands-parents, oncles, tantes, amis) dans la prise en charge et les soins des mineurs. D’autres adultes que les parents légaux ont ainsi acquis une place importante dans l’éducation de l’enfant.

En 1999, 2,2 millions d’enfants de moins de 18 ans vivaient avec un seul de leurs deux parents et 0,8 million d’entre eux vivaient avec un de leur parent et un beau-parent, chiffre qui atteignait 1,1 million pour l’ensemble des jeunes de moins de 25 ans. Parmi ces derniers, 0,5 million ne vivaient qu’avec ces deux personnes, tandis que 0,6 million vivaient avec un demi-frère ou une demi-sœur. Si l’on ajoutait les enfants vivant avec leurs deux parents et un ou plusieurs demi-frères ou demi-sœurs, c’étaient 1,6 million de jeunes de moins de 25 ans qui vivaient dans une famille recomposée, sur les 16,3 millions de jeunes vivant au foyer parental.

Afin de prendre en compte la situation des trois millions de mineurs qui ne vivent pas avec leurs deux parents, de mieux reconnaître le rôle des « parents en plus » – beaux-parents, grands-parents, proches de confiance – ces adultes qui vont aider les parents à élever l’enfant, sans pour autant dévaloriser la responsabilité primordiale des parents, la présente proposition de loi apporte, conformément aux préconisations de la mission d’information sur la famille et les droits des enfants, des solutions pragmatiques adaptées aux difficultés rencontrées, en respectant strictement les liens de filiation et sans ériger en norme une organisation de vie qui peut évoluer au fil du temps.

Sans pour autant conduire à modifier les grands principes du droit civil en matière de filiation, la proposition de loi répond également aux difficultés concrètes rencontrées par des couples de même sexe qui élèvent ensemble un enfant. Il s’agit de sécuriser juridiquement la situation de ces enfants en cas de disparition du parent légal ainsi que, dans la vie quotidienne, de permettre aux deux membres du couple d’effectuer l’ensemble des actes de la vie courante de l’enfant.

La loi ne permet actuellement que le partage de l’autorité parentale entre les parents et un tiers. Cela exige une décision du juge aux affaires familiales, et cela conduit à placer un tiers au même niveau de responsabilité qu’un parent légal. De fait, ces dispositions sont très peu utilisées. Dans la très grande majorité des cas de familles recomposées, ni les parents, ni les enfants, ne souhaitent voir un tiers désigné comme exerçant l’autorité parentale en concurrence avec le parent non gardien. Il en va de même lorsqu’un seul parent légal élève l’enfant : s’il a besoin d’aide dans la vie courante, il ne souhaitera pas pour autant nécessairement déléguer son autorité parentale, car cela reviendrait à reconnaître implicitement son incapacité à exercer pleinement ses responsabilités vis-à-vis de son enfant.

Il est pourtant dans l’intérêt de l’enfant que le rôle éducatif des adultes qui l’entourent soit pleinement reconnu par la société et par lui-même, afin notamment d’éviter qu’il puisse contester la légitimité de la personne qui l’élève. À cette fin, l’article premier de la proposition de loi donne aux parents la possibilité de désigner un délégué pour les actes de la vie courante de l’enfant. Il s’agit d’affirmer la liberté des parents dans l’organisation de la vie quotidienne de l’enfant et dans le choix des adultes de confiance appelés à les aider dans leur mission d’éducation : les parents légaux qui le souhaitent auront la possibilité de donner par convention à un tiers, beau-parent, grand-parent, voire à une autre personne qui s’occupe habituellement de l’enfant, un pouvoir pour les actes usuels de la vie de l’enfant. Cette convention fera l’objet d’un simple enregistrement au greffe du tribunal d’instance. L’accord des deux parents légaux sera requis, un désaccord entre eux mettant fin au pouvoir. Ainsi le délégué verra-t-il son rôle reconnu de manière générale – alors qu’aujourd’hui il doit présenter une autorisation personnelle pour chacun des actes de la vie de l’enfant (sortie de classe, hospitalisation, vacances⋖) –, sans toutefois être placé au même rang ou en concurrence avec les parents, ni dans le regard de la société, ni dans celui de l’enfant.

Lorsque disparaît le parent qui faisait le lien entre l’enfant et l’adulte qui l’élève, il existe, en l’état actuel du droit, un risque de séparation, préjudiciable à l’enfant. Pour prévenir ce risque, l’article 2 autorise la personne qui élève l’enfant à demander au juge de le lui confier en cas de décès du parent.

Dans le même esprit, l’article 3 prévoit, à défaut de désignation d’un tuteur par les parents, l’attribution de la tutelle aux ascendants, sauf si le conseil de famille estime que l’intérêt de l’enfant justifie de désigner comme tuteur le tiers qui l’élève. Cette mesure permettra par exemple d’éviter de confier la responsabilité d’un enfant très jeune à des ascendants trop âgés pour s’en occuper longtemps, alors qu’il a un beau-parent avec lequel il a vécu pendant plusieurs années et qui, dans certains cas, continue à élever ses demi-frères et demi-sœurs.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après la section III du chapitre Ier du titre IX du livre Ier du code civil, il est inséré une section III bis ainsi rédigée :

« Section III bis

« Du pouvoir d’accomplir les actes usuels

relatifs à la surveillance et à l’éducation de l’enfant

« Art. 377-4. – Les père et mère peuvent par décision conjointe conférer à un tiers, membre de la famille ou proche digne de confiance, le pouvoir d’accomplir tous les actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation de l’enfant. Ce pouvoir ne porte pas atteinte à l’exercice de l’autorité parentale par chacun des parents.

« Le pouvoir est exécutoire après enregistrement au greffe du tribunal d’instance dans le ressort duquel l’un des deux parents au moins a sa résidence.

« Un des parents peut à tout moment modifier le pouvoir ou y mettre fin, en signifiant sa décision à l’autre parent et au tiers et en adressant copie de cette signification au greffe du tribunal d’instance qui a enregistré l’acte initial. »

Article 2

Le dernier alinéa de l’article 373-3 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il est saisi par les parents ou l’un d’eux, par le ministère public ou par la personne qui souhaite que l’enfant lui soit confié. »

Article 3

L’article 402 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si l’intérêt de l’enfant l’exige, le conseil de famille peut cependant désigner un autre parent ou un proche digne de confiance. »

Composé et imprimé pour l’Assemblée nationale par JOUVE
11 bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121340-3
ISSN : 1240 – 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

-----------------

N° 3222 – Proposition de loi instaurant une délégation de responsabilité parentale pour les actes de la vie courante de l’enfant (Mme Valérie Pecresse)


© Assemblée nationale