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N° 3377

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 octobre 2006.

PROPOSITION DE LOI

instaurant une cotisation patronale
pour le
régime local d’assurance maladie
d’
Alsace-Moselle,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Armand JUNG

Député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

1. Présentation du régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle

Legs de l’histoire sociale de l’Alsace-Moselle, le régime local d’assurance maladie, obligatoire et complémentaire du régime général, est l’expression d’une véritable solidarité régionale.

Rattachés à l’Allemagne pendant plus de quarante ans, les trois départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle ont bénéficié d’un système de protection sociale contre le risque maladie particulièrement favorable, mis en place par la loi locale du 15 juin 1883, codifiée par la suite dans le code local des assurances sociales de 1911. Ce système a été maintenu en vigueur par l’article 7-3° de la loi civile du 1er juin 1924 réintroduisant la législation française dans les trois départements de l’Est. Le régime local a continué de s’appliquer jusqu’en 1945, alors qu’il n’existait pas de législation aussi protectrice dans le reste de la France. Il a été conservé en symbiose avec le régime général, lors de la création de ce dernier en 1945, sous la forme d’un régime local complémentaire obligatoire.

Au regard du haut niveau de protection sociale et de l’attachement des Alsaciens et des Mosellans à cet élément de leur patrimoine historique, culturel et social, le régime local d’assurance maladie a été pérennisé et modernisé par la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991. Ses modalités de mise en œuvre ont ensuite été précisées par les lois nos 94-43 du 18 janvier 1994 et 94-637 du 25 juillet 1994.

Les conditions de cette pérennisation, notamment en raison des difficultés financières que connaissait alors le régime local, avaient fait l’objet d’une mission d’information effectuée en février 1992 par une délégation de la Commission des affaires sociales du Sénat. Dans un rapport d’information (n° 420, 1991-1992) publié à la suite de cette mission, Messieurs Jean-Pierre Fourcade, André Bohl, Louis Boyer, Roger Husson, Claude Prouvoyeur, Joseph Ostermann et Paul Souffrin avaient formulé des propositions, concernant notamment la nécessité d’octroyer au régime une autonomie de gestion, qui ont pu inspirer les réformes récentes.

Depuis 1995, le régime local d’assurance maladie est géré par une Instance de gestion, mentionnée à l’article L. 242-13 du code de la sécurité sociale qui, entre autres attributions, fixe les taux de cotisation sur les rémunérations et gains perçus par les assurés, nécessaires à l’équilibre financier du régime, et détermine la nature des avantages vieillesse et des autres revenus de remplacement à soumettre à cotisations. Elle définit également les prestations.

2. Un système en proie à des difficultés financières

En 2005, le régime local comptait 1,5 millions d’assurés cotisants et 2,3 millions de personnes protégées, ayants droits compris. La proportion des retraités est évaluée entre l/5e et l/6e des effectifs. Depuis le 1er janvier 2006, le taux de la cotisation supplémentaire, prélevée sur les rémunérations, les pensions de vieillesse ou les autres revenus de remplacement, est de 1,8 % pour les seuls actifs et retraités. En effet, il n’existe pas, à ce jour, de cotisation patronale.

Les prestations du régime local complètent celles du régime général et portent actuellement le taux de remboursement des dépenses d’hospitalisation à près de 100 % dès le premier jour, grâce à la prise en charge du forfait journalier, et celui des prestations de médecine ambulatoire, honoraires médicaux et médicaments, à près de 90 %.

Aujourd’hui, le régime local est confronté à la politique de déremboursement du régime général qui n’est pas sans incidence sur son équilibre financier. L’augmentation des cotisations à la charge des actifs et des retraités et, parallèlement, la diminution des taux de remboursement n’est certainement pas la politique la plus adéquate compte tenu du vieillissement de la population et de la montée en charge corrélative des dépenses de santé.

Il faut noter que la situation financière du régime local, sans être alarmiste, connaît une tendance au déficit depuis plusieurs années déjà. C’est ainsi que pour 2006, les besoins de financement s’établissent à 40 millions d’euros. Le déficit structurel de 28 millions d’euros devrait être partiellement comblé par une augmentation de 0,10 % de la cotisation versée par les seuls salariés, qui est passée de 1,7 à 1,8 % au 1er janvier 2006. Le reste du déficit doit être comblé par une diminution des prestations, notamment le remboursement des médicaments dits « à vignette bleue », pris en charge non plus à hauteur de 90 % mais de 80 %.

Il convient également de rappeler que les produits financiers attendus sont aléatoires et même nuls pour 2006. De plus, les réserves dont dispose le régime local équivalent à un peu plus de six mois de prestations.

Par ailleurs, la perspective de remboursement à 100 % des médicaments génériques pour 2006, et surtout pour 2007, va considérablement augmenter les charges du régime local.

3. La nécessaire instauration d’une cotisation patronale

La situation financière du régime local est donc fortement compromise d’une manière durable pour les prochaines années et aucun élément nouveau ne nous permet d’être optimistes, d’autant plus que le Gouvernement a ordonné le déremboursement de nombreux médicaments à plusieurs reprises.

C’est pour ces raisons qu’il est nécessaire de trouver une nouvelle source de financement du régime local d’assurance maladie. À cet égard, le régime local d’assurance maladie applicable aux assurés des professions agricoles et forestières prévoit une cotisation à la charge des employeurs (C. rur., art. L. 761-5, 3°). Assise sur les gains ou rémunérations, cette cotisation est actuellement d’un montant de 0,10 %.

Ce modèle pourrait être transposé au régime local d’assurance maladie, seul système de sécurité sociale dépourvu de financement patronal. En effet, instaurer une cotisation patronale durable et stable contribuerait à combler le déficit chronique du régime local d’assurance maladie et d’en assurer le bon fonctionnement pour les années à venir.

Le taux de cotisation patronale régulièrement avancé par certaines associations, mais aussi par des syndicats et des membres de l’Instance de gestion du régime local, s’élève à 0,20 % au départ. Ce chiffre n’est pas choisi au hasard : cette ressource générerait un gain de 44 millions d’euros et comblerait ainsi le déficit du régime local. Notons qu’il évoluerait dans la même proportion que le taux de cotisation salariale.

Par ailleurs, l’introduction d’une cotisation patronale permettrait aux organisations patronales de siéger au sein de l’Instance de gestion, à due concurrence avec les représentants des salariés.

À titre de rappel, le texte actuel de l’article L. 242-13 du code de la sécurité sociale indique, pour les cotisations salariales :

« I. Le régime local d’assurance maladie complémentaire obligatoire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle est financé par :

1° Une cotisation à la charge des assurés mentionnés aux 1° à 3° du II de l’article L. 325-1, assise sur leurs gains ou rémunérations, précomptée par leurs employeurs au bénéfice de ce régime et recouvrée par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général.

2° Une cotisation à la charge des assurés mentionnés aux 5° à 11° et à l’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 325-1, assise sur les avantages de vieillesse d’un régime de base, d’un régime complémentaire ou d’un régime à la charge de l’employeur, que ces avantages soient servis au titre d’une législation française ou d’une législation d’un autre État, et sur les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 131-2. Les modalités de prise en compte des avantages de vieillesse acquis au titre de la législation d’un autre État pour le calcul de la cotisation prélevée sur les avantages servis par un régime français sont déterminées par décret. La cotisation est précomptée par les organismes débiteurs français au bénéfice du régime local lors de chaque versement de ces avantages ou allocations et versée directement à ce régime.

II. Le conseil d’administration de l’Instance de gestion du régime local détermine les exonérations accordées en cas d’insuffisance de ressources, selon les principes fixés par l’article L. 136-2 et par le premier alinéa de l’article L. 380-2.

Il fixe les taux de cotisation permettant de garantir le respect de l’équilibre financier du régime dans la limite d’une fourchette fixée par décret. L’article L. 131-7-1 n’est pas applicable à ces cotisations. »

Par conséquent, il conviendrait d’instaurer, pour le régime local, une cotisation patronale dont le montant serait fixé par l’Instance de gestion, dans une fourchette arrêtée par le pouvoir réglementaire. Partant, l’équilibre du régime local et sa pérennité seraient garantis.

Tel est l’objectif de la présente proposition de loi qu’il vous est demandé d’adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L’article L. 242-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Une cotisation à la charge des employeurs des assurés mentionnés aux 1° à 3° du II de l’article L. 325-1, assise sur leurs gains ou rémunérations, précomptée au bénéfice de ce régime et recouvrée par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général. » ;

2° Après la première phrase du dernier alinéa du II, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Les taux des cotisations mentionnées au 1° et 3° du I du présent article doivent varier dans une même proportion. »

Composé et imprimé pour l’Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121506-6
ISSN : 1240 – 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
7, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 00 33


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