Version PDF
Retour vers le dossier législatif

graphique

N° 3159

--

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 juin 2006.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES

préalable au débat sur les orientations des finances sociales pour 2007,

ET PRÉSENTÉ

par M. Pierre-Louis FAGNIEZ,

Député.

--

INTRODUCTION 7

I.- LE NOUVEAU CADRE INSTITUTIONNEL DES FINANCES SOCIALES PERMET D'EN AMÉLIORER LA GOUVERNANCE 13

A. L'APPROCHE DE L'ORIENTATION DES FINANCES PUBLIQUES EST PLUS GLOBALE 13

1. Le 11 janvier 2006 s'est tenue la première conférence annuelle des finances publiques 13

a) La conférence annuelle des finances publiques facilite la concertation entre tous les acteurs de la dépense publique 13

b) Le Conseil d'orientation des finances publiques autorise une approche plus globale des finances publiques 14

2. L'objectif à moyen terme est de contenir la croissance des dépenses des administrations de sécurité sociale à un point au dessus de l'inflation 15

a) La dette publique est d'abord celle de l'Etat 15

b) L'objectif est de maîtriser la dépense sociale 15

B. LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE MET EN PLACE DE NOUVEAUX OUTILS D'ACTION POUR LE PARLEMENT 16

1. Le périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale est élargi et précisé 16

2. Les programmes de qualité et d'efficience (PQE) relèvent d'une approche modernisée des finances sociales 16

3. Le gouvernement doit communiquer régulièrement au Parlement l'état des dettes et des créances réciproques de l'Etat et des régimes obligatoires de la sécurité sociale 17

4. De nouveaux outils de contrôle parlementaire sont utilisés 17

II.- EN 2006, LA DYNAMIQUE DES DÉFICITS SOCIAUX EST ENRAYÉE 19

A. LES SOLDES PRÉVISIONNELS 2006 FONT APPARAÎTRE UNE LÉGÈRE AMÉLIORATION DU DÉFICIT DU RÉGIME GÉNÉRAL 19

1. Le solde 2006 du régime général connaît une amélioration limitée 19

a) Malgré l'évolution satisfaisante de la branche maladie, l'amélioration des finances du régime général est limitée en raison de la dégradation des résultats des branches vieillesse et famille 19

b) Le deuxième avis du comité d'alerte met en évidence des risques de dépassement 20

2. Les branches de la sécurité sociale, qui connaissent des dynamiques contrastées, sont toutes en déficit en 2006 21

a) Les dépenses de l'assurance maladie, particulièrement en médecine de ville, sont maîtrisées alors que les recettes progressent à un rythme soutenu 21

b) Les dépenses d'assurance vieillesse sont caractérisées par le coût croissant des dispositifs de retraite anticipée 22

c) L'évolution des dépenses de la branche famille est marquée par l'augmentation des dépenses d'action sociale et la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) 23

d) Les dépenses de la branche accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP) comprennent des dotations aux fonds amiante en forte croissance 23

B. LA PRÉVISION DE RECETTES POUR 2006 EST TENUE 23

1. L'année 2006 est marqué par l'augmentation du produit de la cotisation sociale généralisée (CSG) et des cotisations 24

2. La masse salariale croît désormais à un rythme proche de ses moyennes historiques 24

C. LES FONDS SOCIAUX CONNAISSENT TOUJOURS UNE SITUATION PRÉOCCUPANTE EN 2006 25

1. Le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) a fait l'objet d'une reprise de dette par l'Etat 25

2. Le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait être réduit 25

III.- EN DÉPIT DES DIFFICULTÉS, L'EFFORT PLURIANNUEL DE REDRESSEMENT DES COMPTES SOCIAUX DOIT ÊTRE POURSUIVI ET APPROFONDI 27

A. LE CONTEXTE DES FINANCES SOCIALES EST DE PLUS EN PLUS CONTRAINT 27

1. Les dépenses des régimes obligatoires de la sécurité sociale suivent une pente difficile à infléchir 27

a) Les besoins sont en hausse 27

b) Il est nécessaire de fixer des rendez-vous réguliers pour suivre l'évolution de la dépense 28

2. Les modes de financement sont difficiles à diversifier 28

a) L'effet de ciseaux continuera à jouer 28

b) Une réflexion est engagée sur l'élargissement de l'assiette de la cotisation employeur 29

3. La dette sociale, qui s'est déjà significativement accrue, ne pourra croître indéfiniment 29

a) L'endettement social, qui ne constitue qu'une faible partie de la dette publique totale, a augmenté ces dernières années 30

b) La dette sociale réduit les marges de manœuvre 30

B. LES PERSPECTIVES PLURIANNUELLES LAISSENT PRÉVOIR À TERME UN RETOUR DES COMPTES SOCIAUX VERS L'ÉQUILIBRE 31

1. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, le dernier de la législature, doit continuer l'effort de redressement engagé 31

a) La branche maladie poursuit sa trajectoire de redressement 31

b) Le problème de la compensation des allègements se pose 31

2. Les perspectives pluriannuelles laissent espérer un retour des comptes sociaux vers l'équilibre en 2009 32

a) Les engagements de la France s'inscrivent dans un contexte européen 32

c) Les objectifs 2006-2009 sont ambitieux mais réalisables 32

TRAVAUX DE LA COMMISSION 35

I. AUDITION DES MINISTRES 35

II. EXAMEN EN COMMISSION 51

INTRODUCTION

Le présent rapport de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales est le premier rapport préalable à la tenue à l'Assemblée nationale d'un débat sur les orientations des finances sociales (DOFS).

Ce débat est inspiré du débat d'orientation budgétaire (DOB), dont le régime juridique est fixé par l'article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), qui dispose :

« En vue de l'examen et du vote du projet de loi de finances de l'année suivante par le Parlement, le Gouvernement présente, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, un rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques comportant :

1°) Une analyse des évolutions économiques constatées depuis l'établissement du rapport mentionné à l'article 50 [rapport économique et financier annexé au projet de loi de finances] ;

2°) Une description des grandes orientations de sa politique économique et budgétaire au regard des engagements européens de la France ;

3°) Une évaluation à moyen terme des ressources de l'Etat ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions; 

4°) La liste des missions, des programmes et des indicateurs de performances associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de l'année suivante.

Ce rapport peut donner lieu à un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat. ».

Le DOB, qui présente un caractère facultatif, permet au gouvernement d'expliquer aux élus de la Nation la situation des finances publiques (Etat, finances sociales et finances des collectivités locales) à la fin de la session ordinaire. Il lui permet également de faire quelques annonces quant au contexte de la préparation du projet de loi de finances présenté à l'automne.

D'un point de vue démocratique, ce DOB présente également l'avantage de fournir à l'opposition une plate-forme susceptible de l'autoriser à interpeller, à la fin de la session ordinaire, le gouvernement sur la politique financière suivie. Cette procédure de débat est donc un élément important de la vie politique et démocratique de notre pays, et il y a lieu de se réjouir de son extension aux orientations des finances sociales.

En effet, l'article 6 de la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a introduit une novation en matière de contrôle parlementaire de l'évolution de la situation des finances sociales. En application de l'article LO 111-5-3 du code de la sécurité sociale, le gouvernement doit désormais présenter au cours du dernier trimestre de la session ordinaire un rapport sur les orientations des finances sociales.

Ce rapport comporte, d'une part, la description des grandes orientations de la politique de sécurité sociale au regard des engagements européens de la France et, d'autre part, l'évaluation pluriannuelle de l'évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale, y compris l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).

L'article LO 111-5-3 du code de la sécurité sociale dispose que ce rapport peut donner lieu à un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat ; il est précisé que ce débat peut être « concomitant du débat prévu à l'article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances » (cf. supra). Comme le précise le code de la sécurité sociale, le rapport est présenté par le gouvernement « en vue de l'examen et du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année suivante par le Parlement ».

Cette disposition a été introduite dans le code de la sécurité sociale lors de la discussion du projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale. Son support initial était un amendement déposé par M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, adopté contre l'avis de la commission saisie au fond1, le gouvernement s'en remettant à la sagesse de l'Assemblée nationale.

Le Rapporteur estime tout à fait opportune l'introduction de cette disposition. Le dépôt du rapport, obligatoire, permet en effet au gouvernement d'informer le Parlement sur la situation des finances sociales. L'organisation du débat, facultative, offre de surcroît la possibilité d'anticiper les discussions de l'automne et, le cas échéant, de présenter les mesures prises par le gouvernement et les caisses pour que soient respectés les engagements pris dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année en cours.

*

S'agissant de l'Assemblée nationale, la conférence des présidents a décidé des modalités d'organisation du débat sur l'orientation des finances sociales. Elle a décidé que les deux débats. Le DOB et le DOFS se tiendraient le même jour.

Le Rapporteur se réjouit de l'organisation retenue. Il y a beaucoup d'avantages pratiques et politiques à joindre les deux débats. En effet, de nombreuses variables macro-économiques ont un impact à la fois sur les finances de l'Etat et sur celles des régimes obligatoires de la sécurité sociale : le taux de croissance (de plus en plus déterminée par le contexte international), l'inflation ou la progression de la masse salariale, etc.

Joindre les deux débats permet d'organiser également une discussion globale sur le niveau et la structure des prélèvements obligatoires. De plus, les engagements internationaux contractés par la France, en particulier ceux pris dans le cadre européen, comprennent, outre les finances de l'Etat au sens strict et les dépenses des collectivités locales, les dépenses des « administrations de sécurité sociale » (même si le périmètre de ces dépenses diffère de celui des lois de financement de la sécurité sociale, cf. infra). Enfin, le montant de la dette publique, qui est aussi un indicateur sur lequel la France s'est engagée, intègre non seulement la dette de l'Etat mais aussi la dette sociale.

Les deux débats ont donc été joints, ce qui correspond au contenu des rapports rendus par le gouvernement. En effet, si le rapporteur se fonde sur le document provisoire qui lui a été communiqué quelques jours avant la réunion de la commission, le gouvernement a fait le choix d'appliquer les deux lois organiques en présentant au Parlement un rapport unique comportant cinq parties :

- 1) le cadrage macroéconomique ;

- 2) l'engagement national de désendettement ;

3) la gouvernance des finances publiques ;

- 4) les orientations des finances de l'Etat ;

- 5) les orientations des finances de la sécurité sociale.

*

Cependant, les similitudes sous-tendant les deux débats, le DOB et le DOFS, ne doivent pas masquer les spécificités et les problématiques particulières. Ces spécificités sont liées aux masses financières en jeu.

En effet, la majeure partie des dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale est versée conformément à des prescriptions légales, comme l'illustre le cas du versement des pensions de retraite ou des allocations familiales, allouées respectivement à chaque pensionné et à chaque famille. Or, il est difficile de prévoir les comportements des personnes (naissance, départ à la retraite, maladie ...). De surcroît, il est impossible de ne pas verser les prestations légalement dues.

D'ailleurs, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale évoque des « objectifs » de dépenses. Sous cet angle, la loi de finances, si elle comporte également des dépenses incompressibles, comprend des mesures pouvant plus facilement faire l'objet de mesures de régulation budgétaire (étalements, gels...). Elle comporte également beaucoup plus de dépenses d'investissement.

En outre, comme le rappelle opportunément le rapport du gouvernement préalable à la tenue du débat d'orientation, les dépenses des régimes de base de la sécurité sociale sont gérées par les partenaires sociaux. Cela constitue une différence politique fondamentale avec le budget de l'Etat. Enfin, la structure des prélèvements alimentant les caisses de l'Etat et celle des prélèvements sociaux sont très différentes.

Ces distinctions peuvent être gardées à l'esprit lors de la tenue des deux débats.

*

Le champ des lois de financement de la sécurité sociale est différent de celui retenu par la comptabilité nationale et européenne et appelé « solde des administrations de sécurité sociale » ou « ASSO ». Le cadre adopté par le présent rapport se limite à celui des lois de financement de la sécurité sociale tel qu'il est fixé par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

Il inclut donc les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, les fonds de financement de ces régimes obligatoires (le Fonds de solidarité vieillesse - FSV et le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles - FFIPSA), les organes chargés de porter la dette sociale, le Fonds de réserve des retraites (FRR) et la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Il intègre également les régimes de retraite des fonctionnaires (traités dans un autre agrégat dans le cadre de la comptabilité nationale) et des charges assumées in fine par l'Etat, comme le versement de l'allocation adulte handicapé (AAH).

En revanche, il exclut l'UNEDIC (assurance chômage), bien que ce régime d'assurance soit géré également par les partenaires sociaux, et les autres régimes obligatoires, notamment les régimes de retraite complémentaires comme l'AGIRC et l'ARRCO.

Compte tenu du caractère inédit du débat sur les orientations des finances sociales, le rapporteur juge utile de consacrer quelques développements au calendrier annuel de la loi de financement de la sécurité sociale présenté ci-après.

Calendrier de la loi de financement de la sécurité sociale

Date

Objet

Fin janvier (et fin juillet)

Transmission au Parlement par le gouvernement du récapitulatif des dettes et créances réciproques de l'Etat et des régimes de sécurité sociale

Avant le 31 mai 2006

Transmission d'une maquette des projets de « programmes de qualité et d'efficience » (PQE)

Au plus tard le 1er juin

Avis du comité d'alerte sur le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie

Juin

Réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale (régime général uniquement)

Avant le 15 juin

L'Union nationale des caisses d'assurance maladie doit transmettre au gouvernement chaque année avant le 15 juin ses propositions en matière d'évolution des charges et des produits des trois principales caisses d'assurance maladie et ses propositions concernant les mesures nécessaires pour atteindre l'équilibre financier pluriannuel des dépenses d'assurance maladie

Avant la fin de la session ordinaire (dernier jour ouvrable de juin)

Remise du rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques (art. 58-3 de la loi organique relative aux lois de finances)
Remise du rapport du gouvernement sur les orientations des finances sociales
Organisation éventuelle d'un débat au Parlement sur l'orientation des finances sociales

Avant la fin de la session ordinaire

Adoption par la commission des affaires culturelles, familiale et sociales du rapport sur la mise application de la loi de financement de la sécurité sociale en cours (au plus tôt six mois après la publication de la loi)

Avant le 10 juillet

Envoi des questionnaires parlementaires au gouvernement

Septembre

Remise du rapport de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale

Après la présentation des grandes lignes du projet de loi de financement de la sécurité sociale en commission des comptes de la sécurité sociale, saisine pour avis des acteurs sur l'avant-projet

Fin septembre

Saisine du Conseil d'Etat sur le projet de loi de financement

Avant le 8 octobre

Réception des réponses aux questionnaires parlementaires

Début octobre

Adoption du projet en Conseil des ministres (à titre indicatif, le projet 2006 a été adopté le 12 octobre 2005)

Mi-octobre/début novembre

Dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale, examen en commission, discussion du texte et adoption par le Parlement après une éventuelle commission mixte paritaire

Novembre

Éventuellement saisine du Conseil constitutionnel

Décembre

Promulgation et publication ; l'adoption du projet est enserré dans des délais constitutionnels (si l'Assemblée nationale ne s'est pas prononcée en première lecture dans le délai de vingt jours après le dépôt d'un projet, le gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de quinze jours ; si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de cinquante jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance)

I.- LE NOUVEAU CADRE INSTITUTIONNEL DES FINANCES SOCIALES PERMET D'EN AMÉLIORER LA GOUVERNANCE

L'application de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale et des réformes récentes modifient le cadre dans lequel les orientations des finances sociales sont appréhendées.

A. L'APPROCHE DE L'ORIENTATION DES FINANCES PUBLIQUES EST PLUS GLOBALE

La création d'une conférence des finances publiques et d'un Conseil d'orientation des finances publiques autorise une analyse plus globale des finances publiques, alors même que la préoccupation suscitée par l'endettement public est croissante.

1. Le 11 janvier 2006 s'est tenue la première conférence annuelle des finances publiques

a) La conférence annuelle des finances publiques facilite la concertation entre tous les acteurs de la dépense publique

Plus d'un mois après la remise au gouvernement du rapport de M. Michel Pébereau sur l'endettement de la France2 s'est tenue la première conférence annuelle des finances publiques. Lors de cette conférence, le Premier ministre, M. Dominique de Villepin, et le ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, ont présenté le programme de stabilité des finances publiques.

Commentant ainsi la création de la conférence annuelle des finances publiques, le Premier ministre a souligné qu'elle permet de réunir périodiquement « tous les acteurs de la dépense publique : l'Etat, les collectivités locales, les organismes de sécurité sociale, pour dégager ensemble les solutions à même de résoudre le problème de la dette. » Cela permet d'impliquer « les partenaires sociaux, qui sont parties prenantes, soit comme gestionnaires dans le domaine de la protection sociale, soit comme interlocuteurs de l'Etat et des collectivités locales ».

S'agissant des finances sociales, la conférence comprend le ministre chargé de la sécurité sociale, les présidents des commissions du Sénat et de l'Assemblée nationale chargées des affaires sociales, les organisations représentatives des employeurs et des salariés. Les dirigeants des six organismes nationaux de protection sociale sont membre de droit.

La réunion de cette conférence a permis de mettre l'accent sur la réduction nécessaire de l'endettement public. L'objectif est de passer d'un taux d'endettement de 66,6 % du PIB fin 2005 à 64,6 % fin 2006 et à 58,7 % en 2010 : cet objectif retenu par le rapport du gouvernement préalable au DOB et DOFS suppose un taux de croissance moyen sur la période de 2,25 %.

b) Le Conseil d'orientation des finances publiques autorise une approche plus globale des finances publiques

Un nouvel organe, de nature permanente, a également été créé : le Conseil d'orientation des finances publiques. Il fonctionnera comme une instance de travail destinée à faire progresser la réflexion entre deux conférences nationales. Présenté comme une instance de travail « transpartisane », il est chargé de remettre un rapport public au Premier ministre après l'adoption de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale et avant la conférence nationale des finances publiques. Outre la rédaction du rapport, le conseil est chargé de formuler toutes recommandations ou propositions qui permettraient notamment de respecter les objectifs de désendettement, d'améliorer les règles de gouvernance et la méthodologie de prévision des recettes des administrations.

Le décret n° 2006-515 du 5 mai 2006 relatif à la conférence nationale des finances publiques et portant création du Conseil d'orientation des finances publiques définit la composition du conseil. Parmi ses trente-trois membres, on compte notamment le président et le directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM), de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et de l'UNEDIC. Le ministre chargé de la sécurité sociale est membre de droit du conseil. Le secrétariat du conseil est assuré conjointement par la direction du budget, la direction générale du trésor et de la politique économique, la direction de la sécurité sociale et la direction générale des collectivités locales.

Les finances de l'Etat et celles des administrations de sécurité sociale dépendent de facteurs communs, comme la croissance économique ou l'inflation. Elles appellent donc des modes de suivi permettant une approche plus globale.

Le Parlement a montré la voie en prenant l'initiative de transformer le Conseil des impôts en Conseil des prélèvements obligatoires. En outre, conformément à l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, un débat parlementaire relatif aux prélèvements obligatoires se tient chaque année. Enfin, les multiples transferts financiers existants entre les deux sphères, étatique et sociale, justifient pleinement une approche globale de ces questions.

Le rapporteur estime donc opportune la création d'un Conseil d'orientation sur les finances publiques. Il espère que le travail de ce conseil comme la tenue annuelle de la conférence permettront de faire œuvre de pédagogie auprès de nos concitoyens, afin que la situation de nos finances publiques et les efforts qu'elle exige soient connus de tous.

2. L'objectif à moyen terme est de contenir la croissance des dépenses des administrations de sécurité sociale à un point au dessus de l'inflation

a) La dette publique est d'abord celle de l'Etat

A ce stade, il paraît nécessaire de fournir quelques données mettant en perspective les dynamiques respectives des finances de l'Etat et des administrations de sécurité sociale, données figurant dans le rapport du gouvernement préalable au débat d'orientation communiqué au rapporteur. Selon ce document, la capacité de financement de l'Etat atteint en 2005 (en points de PIB) - 3 %, contre - 0,2 % pour les administrations de sécurité sociale. En 2006, ces chiffres seront respectivement de - 2,8 % et - 0,2 %.

En vingt-cinq ans, la dette des administrations publiques a été multipliée par cinq. En 2004, elle a atteint 1 067 milliards d'euros. Cet accroissement de l'endettement public total est largement le fait de l'Etat.

En effet, comme le note le rapport de M. Michel Pébereau, l'État supporte 79 % de cette dette, les administrations publiques locales 10,5 %, les administrations de sécurité sociale (y compris la CADES) 8 % et les organismes divers d'administrations centrale (ODAC) 2,5 %. Ces chiffres permettent de mettre en perspective l'ampleur des déficits de l'Etat et des administrations de sécurité sociale, ainsi que l'effort de redressement à fournir.

b) L'objectif est de maîtriser la dépense sociale

Certes, la dette existante est principalement celle de l'Etat. Cependant, la dynamique de croissance actuelle des dépenses sociales, l'ampleur des besoins à couvrir et les évolutions démographiques à venir rendent indispensable un effort vigoureux de maîtrise de la dépense sociale. Lors d'une conférence de presse tenue le 31 mars 2006, M. Thierry Breton, ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie, a expliqué que le Conseil d'orientation « proposera des mesures concrètes pour que, dès 2007, la dépense locale s'oriente progressivement vers le « 0 volume » et la dépense sociale vers le « +1 volume3 ». La loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 s'inscrit pleinement dans cet objectif puisqu'elle a prévu une augmentation des dépenses d'assurance maladie de 2,5 % en valeur.

B. LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE MET EN PLACE DE NOUVEAUX OUTILS D'ACTION POUR LE PARLEMENT

La loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a mis en place une série de nouveaux outils destinés à améliorer le contrôle des parlementaires sur le pilotage des finances sociales. Ces outils devraient enrichir les débats sur l'orientation des finances sociales.

1. Le périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale est élargi et précisé

Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, les parlementaires votent à la fois l'ONDAM et ses sous-objectifs (soins de ville, établissements de santé tarifés à l'activité, autres dépenses relatives aux établissements, contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées et personnes handicapées, dépenses relatives aux autres modes de prise en charge). De plus, le périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale comprend désormais la dette sociale. Chaque année, le Parlement se prononce sur un objectif annuel d'amortissement de la dette sociale.

2. Les programmes de qualité et d'efficience (PQE) relèvent d'une approche modernisée des finances sociales

S'inscrivant dans une démarche coûts/objectifs, les programmes de qualité et d'efficience comportent un diagnostic de la situation sanitaire et sociale, des objectifs et des indicateurs précis ainsi que la présentation des moyens mis en œuvre pour réaliser ces objectifs et l'exposé des résultats atteints. Conformément à l'article 23 de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, les projets de programmes de qualité et d'efficience sont transmis, pour avis, aux commissions parlementaires saisies au fond des projets de loi de financement de la sécurité sociale, au plus tard le 31 mai 2006. Ils sont joints en annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Cependant, à la date de rédaction du rapport, ces projets n'avaient pas été transmis à la commission des affaires culturelles, familiale et sociales, qui n'a donc pu rendre l'avis prescrit. Le rapporteur estime ce retard préjudiciable à l'efficacité du contrôle parlementaire et espère que ces projets seront au moins transmis à la commission des affaires culturelles, familiale et sociales avant la fin de la session ordinaire du Parlement.

3. Le gouvernement doit communiquer régulièrement au Parlement l'état des dettes et des créances réciproques de l'Etat et des régimes obligatoires de la sécurité sociale

Conformément à l'article 17 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, avant la fin des mois de janvier et de juillet de chaque année, le gouvernement transmet au Parlement un état semestriel des sommes restant dues par l'Etat aux régimes obligatoires de base. Cet état a bien été transmis au Parlement, mais avec quelque retard par rapport à la date prescrite. Il montre que l'Etat, au 31 décembre 2005, est débiteur de 5,14 milliards d'euros vis-à-vis des régimes obligatoires de la sécurité sociale.

4. De nouveaux outils de contrôle parlementaire sont utilisés

La mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), constituée au sein de la commission des affaires culturelles, familiale et sociales au début de l'année 2005, a déjà rendu deux rapports remarqués, l'un consacré à la gestion des branches de la sécurité sociale et l'autre au financement des établissements hébergeant les personnes âgées. Elle rendra début juillet son rapport relatif à l'application de la tarification à l'activité.

Il importe maintenant de suivre la manière dont les préconisations de la mission sont suivies. S'agissant du rapport relatif à la gestion des caisses de la sécurité sociale, la conclusion prochaine de la convention d'objectif et de gestion (COG) avec la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) sera à cet égard un premier test.

II.- EN 2006, LA DYNAMIQUE DES DÉFICITS SOCIAUX EST ENRAYÉE

Les documents fournis par le gouvernement et ceux communiqués lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale du 8 juin dernier font apparaître une légère amélioration du solde du régime général en 2006, solde qui reste cependant déficitaire. L'amélioration continue et significative de la situation de l'assurance maladie est contre-balancée par la dégradation des résultats des autres branches. Le solde du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) continue de se creuser et le problème du FFIPSA n'a pas encore connu de solution.

A. LES SOLDES PRÉVISIONNELS 2006 FONT APPARAÎTRE UNE LÉGÈRE AMÉLIORATION DU DÉFICIT DU RÉGIME GÉNÉRAL

En 2006, le déficit du régime général, toujours largement négatif, connaît une légère amélioration. La dynamique des déficits sociaux croissants que connaissaient les régimes obligatoires de la sécurité sociale depuis quelques années est enrayée, ce qui est à mettre à l'actif de la politique du gouvernement et des gestionnaires des régimes.

1. Le solde 2006 du régime général connaît une amélioration limitée

a) Malgré l'évolution satisfaisante de la branche maladie, l'amélioration des finances du régime général est limitée en raison de la dégradation des résultats des branches vieillesse et famille

À titre de rappel, le solde du régime général a été de - 11,6 milliards d'euros en 2005, ce qui est un montant stabilisé par rapport à celui de 2004 (- 11,9 milliards d'euros).

Selon les comptes prévisionnels de la commission des comptes de la sécurité sociale du 8 juin dernier, le déficit 2006 atteindrait - 10,3 milliards d'euros, soit un montant supérieur à celui prévu par l'article 28 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (- 8,9 milliards d'euros). L'amélioration prévue pour 2006 reste donc limitée, même si elle a le mérite de casser la dynamique d'augmentation des déficits du régime général qui était à l'œuvre depuis quelques exercices.

Cette situation est marquée par la poursuite de l'effort du rétablissement de la branche maladie, dont le solde passe de - 8 milliards d'euros à - 6,3 milliards d'euros, soit quasiment le montant prévu par le plan de redressement des finances de l'assurance maladie de 2004. Le montant du déficit de l'assurance maladie « tous régimes » prévu pour 2006 par l'annexe B à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (cf. supra) se monte à - 7 milliards d'euros ; cet objectif sera donc sans doute respecté.

L'amélioration de la branche maladie est contrebalancée par la dégradation des comptes des autres branches, amorcée dès 2002 et qui connaît malheureusement une accélération en 2006. En effet, en 2006, la CNAV serait déficitaire de - 2,2 milliards d'euros et la CNAF de - 1,5 milliards d'euros.

b) Le deuxième avis du comité d'alerte met en évidence des risques de dépassement

Cette amélioration du solde du régime général repose sur des prévisions et elle est largement subordonnée au comportement des dépenses d'assurance maladie.

· Le comité d'alerte des dépenses d'assurance maladie

La loi n° 2004-810 relative à l'assurance maladie du 13 août 2004 a créé un « comité d'alerte » chargé de surveiller l'évolution des dépenses de l'assurance maladie. Cette structure, composée du secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale, du directeur général de l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et d'une personnalité qualifiée, est chargée d'alerter le Parlement, le gouvernement et les caisses nationales d'assurance maladie en cas d'évolution des dépenses d'assurance maladie incompatible avec le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) voté par le Parlement.

Chaque année, au plus tard le 1er juin, et en tant que de besoin, le comité rend un avis sur le respect de l'ONDAM pour l'exercice en cours. Lorsque le comité considère qu'il existe un risque sérieux que les dépenses d'assurance maladie dépassent l'ONDAM avec une ampleur supérieure à 0,75 % (montant fixé par le décret n° 2004-1077 du 12 octobre 2004), il le notifie au Parlement, au gouvernement et aux caisses nationales d'assurance maladie. Celles-ci doivent alors proposer des mesures de redressement.

· L'avis du comité d'alerte souligne qu'il subsiste un risque de dépassement de 600 millions d'euros de l'ONDAM

Le comité d'alerte a rendu le 31 mai dernier le deuxième avis de son histoire. Il estime que l'évolution des dépenses des régimes en matière de maladie depuis le début de l'année ne justifie pas le déclenchement de la procédure d'alerte. Le comité d'alerte, qui constate que l'évolution des dépenses d'assurance maladie reste modérée, note que les dépenses de l'assurance maladie en 2005 ont été un plus élevées que prévues par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Dès lors, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 fixant des objectifs de dépenses (et des sous-objectifs) en valeur absolue, l'effort à fournir en termes de maîtrise de la dépense entre les réalisations 2005 et les objectifs 2006 devient plus difficile. S'agissant de l'ONDAM, fixé en valeur absolue à 140,7 milliards d'euros pour 2006, l'objectif du taux de croissance passe ainsi de + 2,5 % à + 2,3 %.

L'avis du comité pointe le fait qu'un risque de dépassement de la partie « soins de ville » de l'ONDAM, de l'ordre de 600 millions d'euros, n'est pas à exclure. Ce risque résulte des délais nécessaires à la mise en œuvre de certaines mesures relatives à la politique du médicament, malgré l'augmentation rapide de l'utilisation des génériques (le taux de pénétration est passé de 61 % en décembre 2005 à 67 % fin avril 2006). Le comité relève ainsi que le retard pris à baisser les tarifs ou l'abandon de certaines mesures (comme l'instauration des tarifs forfaitaires de responsabilité) ont eu un effet négatif en termes de maîtrise de la dépense du médicament.

2. Les branches de la sécurité sociale, qui connaissent des dynamiques contrastées, sont toutes en déficit en 2006

L'assurance maladie voit sa situation s'améliorer en raison de recettes dynamiques et de dépenses en croissance modérée. La forte croissance des charges des branches famille et vieillesse, supérieure à celle des charges de la branche maladie en 2006, explique la dégradation de leur solde.

a) Les dépenses de l'assurance maladie, particulièrement en médecine de ville, sont maîtrisées alors que les recettes progressent à un rythme soutenu

C'est l'évolution des dépenses de médecine de ville (les dépenses d'honoraires, les prescriptions et le médicament) qui permet de contenir la progression des dépenses d'assurance maladie. Ainsi, comme le note le comité d'alerte, sur les quatre premiers mois de l'année 2006, les dépenses de soins de ville n'ont progressé que de 1,4 % (ces dépenses connaissaient des rythmes de croissance supérieurs à 7 % avant la mise en œuvre de la loi n° 2004-810 relative à l'assurance maladie du 13 août 2004). L'essentiel de l'effort concerne les honoraires médicaux, qui enregistrent une croissance modérée de 1,1 %.

On constate les effets de la mise en place du parcours du soin et de la tendance au ralentissement des prescriptions. Quant aux dépenses d'indemnités journalières, elles poursuivent leur baisse (- 3,5%). Dans l'ensemble, les dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM devraient augmenter de 2,7 % en 2006.

Le rapporteur note que l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) vient de décider d'ajuster certains tarifs d'actes de biologie - dont la numération formule sanguine - ayant connu une très forte progression en volume ces dernières années et dont la croissance a permis la réalisation d'importantes économies d'échelle. Selon les informations fournies par l'UNCAM, l'économie attendue se situe à 96 millions d'euros en année pleine. Le rapporteur se félicite de cette décision, qui va notamment dans le sens des recommandations du rapport de la Cour des comptes de septembre 2005.

S'agissant des établissements de santé, les dépenses des cliniques privées connaissent une forte croissance (+ 10,1 % à la fin avril). Elles pourraient conduire au dépassement du sous-objectif des dépenses des établissements de santé. Le ministre de la santé et des solidarités a rappelé par un communiqué de presse que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 a prévu une progression des dépenses des établissements de santé de + 3,44 %, soit plus de 2,1 milliards d'euros supplémentaires. En juillet, une conférence tarifaire nationale organisée par le ministre devrait mesurer l'évolution réelle de l'activité des établissements. Le cas échéant, elle permettrait d'ajuster les tarifs. En outre, les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) devraient lancer, avec l'aide de l'assurance maladie, des contrôles sur les facturations des cliniques.

Le rapporteur souligne que l'inflexion de tendance observée depuis la mise en œuvre de la réforme de l'assurance maladie se confirme. On ne le répétera jamais assez : en 2005, l'objectif national des dépenses de l'assurance maladie a été respecté pour la première fois depuis 1997. Il faut continuer sur cette voie.

L'évolution des recettes de la branche maladie est soutenue. Elle est marquée par les effets de la loi relative à l'assurance maladie du 13 août 2004 et par le produit de la modification de la taxation des « vieux » PEL conformément à la loi de financement de la sécurité sociale (4) (cf. infra).

b) Les dépenses d'assurance vieillesse sont caractérisées par le coût croissant des dispositifs de retraite anticipée

L'année 2006 est marquée par l'arrivée à l'âge de 60 ans de la génération née en 1946, première année du baby boom. Les prestations versées par la CNAV augmenteraient en 2006 de 4,8 %, contre 5,8 % en 2005. Comme le note le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, il est assez difficile d'anticiper le comportement des personnes en matière de départ à la retraite, compte tenu des multiples options qu'ouvre la réforme de 2003 ; en particulier, certains salariés peuvent être tentés de retarder leur départ à la retraite pour bénéficier du mécanisme de la surcote. L'essentiel de la croissance accélérée des dépenses provient du coût du mécanisme mis en place en 2003 et autorisant des départs à la retraite anticipée pour les salariés ayant commencé à travailler très jeune (coût total en 2005 : 1,35 milliard d'euros).

La CNAV a révisé à la hausse le montant des prestations versées en 2006 pour un peu plus de 800 millions d'euros. En outre, la CNAV connaît des frais financiers de plus en plus importants liés à la situation financière du Fonds de solidarité vieillesse. Face à ces dépenses en hausse, l'accroissement des recettes, liées notamment à la hausse de 0,2 % du taux de cotisation en vigueur depuis le 1er janvier 2006, n'est pas suffisant pour assurer l'équilibre.

c) L'évolution des dépenses de la branche famille est marquée par l'augmentation des dépenses d'action sociale et la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE)

L'évolution de la branche famille du régime général est marquée par une augmentation des dépenses supérieure aux prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Cette croissance est à imputer aux dépenses liées à la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), supérieures aux estimations et aux dépenses d'action sociale, dont les dépenses financent les crèches.

Le coût net pour 2006 de la PAJE se monterait à 1,43 milliards d'euros. Selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, ce coût aurait été sous-estimé. Les prestations légales versées par la CNAF augmenteraient de 4,7 % en 2006 après 4,4 % en 2005, avec des taux de croissance se situant entre 8 et 10 % pour les aides à la petite enfance. Si la branche famille bénéficie également des nouvelles modalités de taxation des « vieux » PEL, le surcroît de recettes ne parvient pas à couvrir le dynamisme des charges.

d) Les dépenses de la branche accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP) comprennent des dotations aux fonds amiante en forte croissance

Le déficit 2006 du régime CNAM AT-MP s'établirait à - 238 millions d'euros, ce résultat reposant sur une prévision de croissance des produits (+ 6,8%) supérieure à celle des charges (+ 4,4%). En 2005, les dotations de la branche au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) et au Fonds de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante (FCAATA) ont atteint 800 millions d'euros. Ces dotations augmenteraient en 2006 pour s'élever à un total de 1,015 milliards d'euros en 2006, soit un total cumulé de 4,282 milliards d'euros.

B. LA PRÉVISION DE RECETTES POUR 2006 EST TENUE

En 2005, les produits du régime général ont augmenté de 5,3 % après 4,0 % en 2004, en raison de l'augmentation des recettes dues aux impôts et cotisations, du dynamisme de la masse salariale et des modalités de l'adossement au régime général de certains régimes de retraites. Cette hausse des produits se monterait à 4,5 % en 2006 (5).

1. L'année 2006 est marqué par l'augmentation du produit de la cotisation sociale généralisée (CSG) et des cotisations

2006 verrait le produit de la CSG augmenter de 5,7 %, dont une progression de 19 % sur sa composante portant sur les revenus du capital. L'article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 modifiant les règles d'imposition relatives aux « vieux » PEL a connu un rendement particulièrement élevé. La commission des comptes de la sécurité sociale de juin dernier l'estime à environ 2 milliards d'euros pour 2006. Cet ordre de grandeur représente près du tiers du déficit 2006 de l'assurance maladie du régime général.

Le régime général profite également de l'augmentation des taux de cotisation vieillesse et accidents du travail - maladies professionnelles, qui a été augmenté de 0,2 % au 1er janvier 2006, ce qui devrait donner pour rendement annuel 710 millions d'euros.

L'article 56 de la loi de finances pour 2006 a prévu que le transfert d'un panier de taxes aux régimes de sécurité sociale compenserait les allègements de charges. Ces allègements de charge seraient en forte croissance en 2006, et seraient intégralement compensés grâce à une « clause de garantie » apportée par la loi de finances pour 2006. Cette réforme conduit à accroître significativement la part des impôts et taxes affectés dans le financement des régimes de la sécurité sociale.

Enfin, le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale note que la suppression de l'avoir fiscal se traduirait en 2006 par une perte de prélèvements sociaux de l'ordre de 550 millions d'euros, ce qui est substantiel.

2. La masse salariale croît désormais à un rythme proche de ses moyennes historiques

Comme le note l'avant-propos du rapport de la commission des comptes, le régime général retrouve progressivement un contexte plus favorable à son financement. En effet, on constate la remontée de la croissance de la masse salariale, déterminant principal de ses recettes, qui en atteignant 3,7 % en 2006, se rapproche de sa tendance de longue période (environ 4 %), après lui avoir été sensiblement inférieure entre 2002 et 2005.

En 2006, et pour la première fois depuis 2002, l'hypothèse retenue dans la loi de financement ne devrait pas être révisée à la baisse. Elle pourrait même être dépassée au vu des évolutions en cours. Cette évolution trouve partiellement sa source dans le rythme de créations d'emplois dans le secteur marchand, en croissance - certes légère - depuis le printemps 2004.

C. LES FONDS SOCIAUX CONNAISSENT TOUJOURS UNE SITUATION PRÉOCCUPANTE EN 2006

Le périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale comprend non seulement les régimes obligatoires de la sécurité sociale mais également les fonds concourant à leur financement. Les finances de deux de ces fonds sont particulièrement préoccupantes. Il s'agit d'une part du Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) et d'autre part du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

1. Le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) a fait l'objet d'une reprise de dette par l'Etat

Créé par la loi de finances pour 2004, le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) s'est substitué au budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA). En raison de l'absence de versement de la subvention d'équilibre versée par l'Etat, de la modification de l'affectation de la cotisation sociale de solidarité (C3S) et d'une moindre affectation du produit de la taxe tabac, le fonds a rapidement dégagé des déficits. L'Etat est intervenu à la fin de l'année 2005 et a procédé à une reprise de dette qui a permis de soulager partiellement les finances de ce fonds. Une mission de réflexion a été confiée à un expert, M. Jean-François Chadelat, afin d'explorer les pistes pouvant permettre de remédier au déficit structurel du FFIPSA.

2. Le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait être réduit

Le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait se réduire en 2006 (- 1,3 milliard d'euros contre - 2 milliards en 2005)) grâce à une baisse des cotisations prises en charge au titre du chômage et à une forte augmentation du produit de la CSG (+ 5,1 %). Ce chiffre portera le solde cumulé du FSV, négatif depuis 2002, à près de - 5 milliards d'euros à la fin de 2006. L'ampleur de ce déficit structurel devient très préoccupante.

Comme l'a déjà souligné la Cour des comptes, le code de la sécurité sociale oblige le gouvernement à équilibrer le FSV. Jusqu'à présent, le fonds, qui n'est pas autorisé à emprunter, retarde le versement d'une partie de ses transferts (les cotisations au titre du chômage), au détriment des régimes bénéficiaires : le régime général (la CNAV) et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA). L'insuffisance du financement du FSV se répercute donc principalement sur la trésorerie du régime général.

III.- EN DÉPIT DES DIFFICULTÉS, L'EFFORT PLURIANNUEL DE REDRESSEMENT DES COMPTES SOCIAUX DOIT ÊTRE POURSUIVI ET APPROFONDI

L'orientation des finances sociales, comme celle des finances de l'Etat, s'inscrit dans une perspective pluriannuelle. Elle est marquée par les engagements de la France dans le contexte européen. La maîtrise des dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et l'effort visant à dégager des soldes plus équilibrés doivent être poursuivis et approfondis, alors même que le contexte est de plus en plus contraignant pour la politique des finances sociales.

A. LE CONTEXTE DES FINANCES SOCIALES EST DE PLUS EN PLUS CONTRAINT

Le contexte des finances sociales tend à être de plus en plus contraint, réduisant d'autant les marges de manœuvre du gouvernement et des gestionnaires des caisses pour les prochaines années.

1. Les dépenses des régimes obligatoires de la sécurité sociale suivent une pente difficile à infléchir

a) Les besoins sont en hausse

Les besoins satisfaits par les prestations des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale tendent à suivre une pente croissante, en raison du progrès technique, des exigences des assurés et du vieillissement de la population. Ainsi, le changement démographique va brutalement accroître le nombre de retraités. Le vieillissement de la population française, conjugué aux progrès techniques et aux aspirations de nos compatriotes à un meilleur bien-être, va exercer une forte pression à la hausse sur les dépenses de santé. Selon une étude récente réalisée par l'agence de notation Standard and Poor's, si aucune réforme supplémentaire n'est mise en place, les dépenses liées au vieillissement représenteront 27,4 % du PIB en 2050. Les dernières projections du Conseil d'orientation des retraites, communiquées au Premier ministre le 31 mars dernier, font ainsi apparaître les besoins considérables à couvrir après 2020.

Compte tenu de cette tendance à la hausse des dépenses, il faudra trouver à moyen terme des gisements d'économie et tenter par tous moyens de rendre plus efficiente la dépense sociale. Ces gisements se trouvent par exemple dans les conditions de la mise en place de la tarification à l'activité, dans le régime des affections de longue durée (ALD) ou dans une réforme supplémentaire des régimes de retraites.

b) Il est nécessaire de fixer des rendez-vous réguliers pour suivre l'évolution de la dépense

L'orientation des finances sociales exige un suivi renforcé.

Ainsi, le rapport du gouvernement préalable au débat d'orientation indique, sans autres précisions, qu'un « point d'information régulier sur les finances sociales sera prochainement mis en place ». Il serait intéressant de connaître les modalités précises de ce nouveau rendez-vous.

S'agissant des finances de la branche vieillesse, la loi portant réforme des retraites du 21 août 2003 prévoit un rendez-vous en 2008. Le gouvernement devra alors transmettre un rapport à la représentation nationale. Ce rapport public permettra, compte tenu notamment des travaux réalisés par le Comité d'orientation des retraites, d'analyser les effets de la réforme de 2003, d'envisager le développement de stratégies alternatives à la fermeture progressive des dispositifs de préretraites et d'envisager des mesures complémentaires. Ce rapport devra parallèlement analyser les problématiques d'équité entre les assurés sociaux.

En outre, le ministre de la santé et des solidarités, M. Xavier Bertrand, a indiqué qu'il a mis en place un comité de suivi de la réforme de l'assurance maladie et des mesures concourant au respect de l'ONDAM.

Enfin, un moyen de suivre plus efficacement l'évolution des dépenses des différentes branches serait d'étendre le mécanisme du comité d'alerte, aujourd'hui limité à l'assurance maladie, aux branches de la famille et de la vieillesse. Le rapporteur soutient cette proposition avancée par le Premier ministre et rappelée dans le rapport préalable au débat d'orientation. Le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale sera peut-être l'occasion de réaliser cette réforme relativement simple.

2. Les modes de financement sont difficiles à diversifier

a) L'effet de ciseaux continuera à jouer

Face à des besoins en croissance, le financement de la sécurité sociale s'appuie sur des bases dont le dynamisme n'est guère comparable, qu'il s'agisse du revenu des ménages (contribution sociale généralisée) ou de la masse salariale (cotisations sociales). Or il est constant que la recherche de modes de financement alternatifs pour la sécurité sociale se heurte soit à des problèmes de définition de l'assiette, soit à des considérations d'ordre juridique (respect de la législation européenne), soit à des obstacles politiques. Dans ces conditions, la tension inévitable entre des besoins en hausse et des recettes moins dynamiques est appelée à perdurer.

b) Une réflexion est engagée sur l'élargissement de l'assiette de la cotisation employeur

Lors de l'examen et de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, de nombreux membres de la commission des affaires culturelles, familiale et sociales, en particulier le rapporteur chargé des recettes et de l'équilibre général, M. Jean-Pierre Door, avaient estimé qu'il manquait dans l'architecture institutionnelle un organisme de concertation destiné à permettre à tous les acteurs des finances sociales de se retrouver, notamment pour discuter du problème du financement des régimes de base de la sécurité sociale. Cette préoccupation avait donné lieu à l'adoption par la commission d'un amendement portant article additionnel et proposant de créer un groupe de travail ad hoc au sein de la commission des comptes de la sécurité sociale.

Ce groupe de travail, animé par le secrétaire général permanent, aurait été chargé d'étudier les pistes de réforme du financement de la sécurité sociale et de rendre un rapport particulier consacré à ce sujet. Lors de la discussion en séance publique, le ministre ayant assuré qu'une telle structure serait créée par décret et que le groupe de travail ainsi créé rendrait ses conclusions en juillet 2006, l'amendement n'a pas été adopté.

Le rapporteur rappelle que la réflexion actuellement en cours sur l'opportunité et la faisabilité d'élargir l'assiette de la cotisation employeur, permettant d'éviter de taxer excessivement le facteur travail, permettra, conformément à l'engagement du Président de la République, de lancer la réforme du financement de la sécurité sociale. Elle satisfait en partie le souhait exprimé par la commission des affaires culturelles, familiale et sociales lors de l'examen et la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

Le « cahier des charges » de la proposition du Président de la République sera sans doute difficile à respecter : préserver la compétitivité, assurer le financement durable de la protection sociale et favoriser l'emploi. En outre, la compatibilité du projet avec les engagements européens de la France devra être garantie.

Un premier comité interministériel sur l'assiette des cotisations patronales a été tenu le 31 janvier dernier. Un groupe de travail ad hoc a rendu ses conclusions. Le conseil d'orientation pour l'emploi (COE) et le Conseil d'analyse économique (CAE) devront ensuite rendre leur avis ; le Centre d'analyse stratégique (CAS) en fera la synthèse.

3. La dette sociale, qui s'est déjà significativement accrue, ne pourra croître indéfiniment

Le rapport du gouvernement souligne que le paiement des intérêts de la dette publique totale absorbe l'ensemble du produit de l'impôt sur le revenu. Cette donnée souligne la nécessité d'agir en la matière.

a) L'endettement social, qui ne constitue qu'une faible partie de la dette publique totale, a augmenté ces dernières années

Le niveau de la dette publique a conduit le gouvernement à créer une commission sur la dette publique, présidée par M. Michel Pébereau. Son rapport a constitué un constat opportun et un outil pédagogique adéquat pour que nos concitoyens prennent conscience de l'état véritable de nos finances publiques.

Les contraintes qui s'exercent sur les comptes sociaux depuis quelques années, mentionnées plus haut, ont conduit à accroître l'endettement social. Ainsi, la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) a repris à la fin de l'année 2004 et à la fin de l'année dernière les déficits de la branche maladie. Conformément à la loi n° 2004-810 relative à l'assurance maladie du 13 août 2004, elle reprendra le déficit de l'assurance maladie de 2006. Aucun dispositif particulier n'est prévu pour les déficits des autres branches et fonds, ainsi que pour les déficits des années 2007 et suivantes.

b) La dette sociale réduit les marges de manœuvre

Comme le note le rapport de M. Michel Pébereau, si la situation des finances sociales est encore soutenable, c'est en partie en raison du coût modéré de l'argent, situation qui n'est sans doute pas appelée à perdurer. Une éventuelle augmentation significative et soutenue des taux d'intérêt constituerait, via le refinancement des déficits de la branche maladie par la CADES, un fardeau supplémentaire pour les finances sociales. S'agissant des orientations des finances sociales, il convient d'avoir cette préoccupation à l'esprit. L'accroissement de la dette entraîne mécaniquement un resserrement des marges de manœuvre, en mobilisant des ressources (en l'occurrence la CRDS) pour son paiement.

Face au risque réel de financement des dépenses courantes de santé par les générations futures, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a constitué un apport certain en limitant l'accroissement de la durée de vie de la caisse. En effet, elle a posé le principe que l'augmentation de la dette sociale portée par la CADES doit donner lieu au versement à la CADES de la ressource supplémentaire correspondante. Le débat sur l'orientation des finances sociales devrait donc être l'occasion de souligner solennellement la nécessité de maîtriser la dette publique sociale.

Le rapport préalable du gouvernement souligne la nécessité d'une « amélioration de la gestion courante de la dette ». Si le principe recueille l'adhésion du rapporteur, il souhaiterait savoir quelles seront les implications précises de cette mention en ce qui concerne la CADES.

B. LES PERSPECTIVES PLURIANNUELLES LAISSENT PRÉVOIR À TERME UN RETOUR DES COMPTES SOCIAUX VERS L'ÉQUILIBRE

Après la réunion de la conférence annuelle des finances publiques en janvier dernier, le gouvernement a transmis à la Commission européenne un programme de stabilité portant sur les années 2007-2009. Pour les administrations du champ de la loi de financement de la sécurité sociale, l'enjeu principal est de contribuer au désendettement public.

1. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, le dernier de la législature, doit continuer l'effort de redressement engagé

a) La branche maladie poursuit sa trajectoire de redressement

En 2006, pour la quatrième année consécutive, le déficit du régime général est supérieur à 10 milliards d'euros. Certes, la diminution du déficit de l'assurance maladie est la bienvenue. Elle est cependant fragile car elle repose en partie sur le changement du mode de taxation des « vieux » PEL. Le gouvernement n'a cependant pas l'intention de relâcher l'effort. Ainsi, dans son discours devant la commission des comptes de la sécurité sociale de juin, le ministre de la santé et des solidarités, M. Xavier Bertrand, a indiqué qu'il avait pour objectif de réduire en 2007 le déficit de la branche maladie à moins de 4 milliards d'euros, ce qui est conforme avec les engagements pluriannuels pris dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (cf. infra).

Cette volonté affichée, que soutient le rapporteur, est à mettre en perspective avec le calendrier d'apurement des déficits de l'assurance maladie prévu par l'article 76 de la loi n° 2004-810 relative à l'assurance maladie du 13 août 2004. En effet, 2006 sera l'année de la dernière reprise de dette par la CADES (reprise qui se montera au maximum à 6,7 milliards d'euros compte tenu des montants déjà repris par la CADES). Dès lors, tout déficit ultérieur de l'assurance maladie pèsera sur la trésorerie de l'ACOSS et s'ajoutera aux autres déficits cumulés, ceux des autres branches et des fonds de financement.

b) Le problème de la compensation des allègements se pose

Un autre sujet important du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale sera la question de la compensation des allègements de charges. Le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale prévoit que les allègements de charge connaîtront une forte augmentation en 2006, croissance due notamment au plan de développement de l'emploi à domicile élaboré sous la présente législature. Comme l'a indiqué le ministre de la santé et des solidarités M. Xavier Bertrand lors de la dernière réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale, il conviendra que ces allègements « soient utilisés avec discernement » et fassent l'objet d'une compensation intégrale, ce qui n'est cependant pas assuré après 2006. Le rapporteur partage pleinement le souci exprimé par le ministre : il est exclu que le déficit de la sécurité sociale finance à crédit la politique de l'emploi.

Les parlementaires disposent à cet égard de nouveaux outils. Conformément à la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale approuve le montant des compensations. Seule une loi de financement de la sécurité sociale peut autoriser une dérogation à l'obligation de compensation.

2. Les perspectives pluriannuelles laissent espérer un retour des comptes sociaux vers l'équilibre en 2009

Le programme de stabilité transmis par le gouvernement aux autorités européennes prévoit qu'à compter de 2007, les dépenses des administrations sociales progressent annuellement de 1 % en volume.

a) Les engagements de la France s'inscrivent dans un contexte européen

Conformément à la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 comporte dans son annexe B des perspectives quadriennales en matière de financement de la sécurité sociale, perspectives qu'un article de la loi approuve formellement. Le rapport joint au projet de loi de finances de l'année, en application de l'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, dit « rapport économique et financier (REF) », comporte un rapport sur la programmation pluriannuelle des finances publiques, document auquel le rapport figurant en annexe B de la loi de financement de la sécurité sociale fait explicitement référence.

c) Les objectifs 2006-2009 sont ambitieux mais réalisables

· Le scénario de l'annexe à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 envisage pour 2009 un déficit du régime général à -1,8 milliards d'euros

Le scénario proposé par l'annexe B s'appuie sur les hypothèses annuelles moyennes suivantes sur la période 2006 à 2009 : le PIB augmenterait en volume de 2,6 %, la masse salariale du secteur privé augmenterait de 4,45 % et les dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM augmenteraient de 2,2 %. Ce niveau ambitieux mais atteignable exige l'application vigoureuse des mesures de maîtrise médicalisée et de la loi relative à l'assurance maladie. Comme le précise l'annexe B, il s'agit d'un scénario intermédiaire par rapport aux deux scénarios présentés dans le rapport économique et financier annexé à la loi de finances pour 2006, qui développe un scénario « volontariste » et un scénario « prudent » (dans le scénario prudent, les administrations de sécurité sociale vont « à l'équilibre » en 2009 ; dans le scénario optimiste, la dette sociale pourrait diminuer dès 2008).

Selon les hypothèses retenues par l'annexe B, les déficits des régimes obligatoires de base de sécurité sociale diminueraient sensiblement sur la période considérée. Le solde du régime général en 2009 serait ainsi de - 1,8 milliard d'euros.

En particulier, le solde de la branche maladie du régime général deviendrait positif en fin de période (2009). La progression ralentie des charges de la branche accidents du travail - maladies professionnelles conduirait à un solde positif en 2009. En revanche, en raison des évolutions démographiques, le déficit de la branche vieillesse s'accroîtrait significativement et atteindrait - 2,9 milliards d'euros en 2009 pour l'ensemble des régimes obligatoires de base. S'agissant de la branche famille, même si les coûts occasionnés par la mise en place de la PAJE se feront sentir jusqu'en 2007, le solde redeviendrait positif en 2009.

Quant au FSV, son solde négatif devrait se réduire sur la période en raison de l'amélioration prévue de la situation économique, ayant un impact sur la prise en charge des cotisations vieillesse par le fonds. En 2009, pourtant, son solde resterait négatif. Les déficits cumulés du FSV, suivant ces hypothèses, atteindraient 4,5 milliards d'euros de 2006 à 2009. S'agissant du FFIPSA, l'annexe B indique que dans l'hypothèse de l'absence de versement d'une subvention d'équilibre par l'Etat, le déficit annuel du FFIPSA se montera à 2 milliards d'euros.

· Le scénario envisagé par le rapport préalable au débat d'orientation et la conférence annuelle des finances publiques vise à l'équilibre du régime général en 2009

Le rapport préalable au débat d'orientation envisage un taux d'augmentation des dépenses des administrations sociales équivalant au taux d'inflation plus 1 %, soit + 1 % en volume. Cette progression correspondrait, pour chaque banche, aux taux de croissance suivants : + 0,4 % pour l'assurance maladie, + 2,5 % pour la maladie, + 1,6 % pour la famille et + 1,2 % pour la branche accidents du travail - maladies professionnelles. Le retour à l'équilibre de la branche maladie serait atteint mi-2008. Le régime général serait à l'équilibre en 2009.

· Les paramètres conditionnant la réalisation de ces objectifs

Un des paramètres importants pour la réalisation de cet objectif sera l'évolution du taux de chômage. En effet, sa baisse régulière, cohérente avec les évolutions démographiques, soulagera les finances du FSV et celles de l'assurance vieillesse. La confirmation du succès de la réforme de l'assurance maladie, dans tous ses volets (médecine de ville, médicament et hôpital) sera également, à l'évidence, un facteur essentiel.

Un autre paramètre important sera aussi la réalisation de gains d'efficacité dans la gestion des branches, dans la perspective des recommandations du rapport de la MECSS sur l'organisation et le coût de gestion des branches de la sécurité sociale. L'exploitation des programmes de qualité et d'efficience (PQE) pourra également faciliter le contrôle et l'évaluation parlementaires sur les dépenses de la sécurité sociale. Enfin, les succès de la lutte contre la fraude, qui exigent une action déterminée, pourraient également contribuer à la réalisation de l'objectif.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DES MINISTRES

La commission a entendu M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, et M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, au cours de sa séance du 14 juin 2006 préalablement au débat sur les orientations des finances sociales pour 2007.

Après avoir souhaité la bienvenue à M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, et à M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que leur audition par la commission permettra de faire le point sur les orientations des finances sociales. En effet, la commission des comptes de la sécurité sociale ayant rendu son rapport, les chiffres pour 2005 et les prévisions pour 2006 sont maintenant bien connus. L'audition permettra aussi de faire le point sur la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

L'article 6 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a en effet introduit une novation intéressante pour l'exercice du contrôle parlementaire, en disposant que le gouvernement présente au Parlement un rapport sur les orientations des finances sociales, rapport qui peut donner lieu à un débat en séance publique. La Conférence des Présidents a décidé que ce débat, joint au débat d'orientation budgétaire, se tiendra le 22 juin. Les ministres pourront donc donner à la commission des informations précieuses sur le cadrage de la préparation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Le président Jean-Michel Dubernard a enfin rappelé que M. Philippe Bas sera à nouveau entendu le 27 juin prochain par la commission afin de faire le point, conformément à l'article 86 du Règlement, sur la mise en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a souligné que le débat d'orientation sur les finances sociales est une grande avancée, introduite par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale grâce à un amendement de M. Yves Bur, député. Il est en effet essentiel pour le Parlement de disposer, au moment où le gouvernement s'engage dans la préparation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'une présentation générale des grands équilibres financiers afin de mieux préparer les choix budgétaires qui seront faits à l'automne. Ce rendez-vous de printemps existait déjà dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances ; cependant, les finances sociales représentent plus de 350 milliards d'euros par an, soit une masse financière supérieure à celle du budget de l'Etat, et il est donc instructif d'avoir sur ces sommes une vision d'ensemble au printemps.

Plus que jamais, un impératif de cohérence d'ensemble s'impose dans le pilotage des finances, et c'est bien dans le prolongement de la conférence nationale sur les finances publiques, présidée par le Premier ministre le 11 janvier dernier que s'inscrit cette audition. Cette conférence, qui réunit ministres, parlementaires, élus locaux, partenaires sociaux et représentants d'organismes de protection sociale, a été une étape décisive dans le pilotage des finances publiques, parce que chacun a pu donner sa vision de leur évolution. Afin de pérenniser cette démarche, le gouvernement a souhaité, par un décret en date du 5 mai dernier, institutionnaliser la conférence nationale et instaurer un Conseil d'orientation des finances publiques, dont la composition est calquée sur celle de la conférence nationale des finances publiques.

Souhaitant placer la France sur la voie de l'équilibre des comptes publics et mettre en œuvre une stratégie de désendettement, le Premier ministre a assigné aux finances sociales deux objectifs : d'une part, le retour à l'équilibre du régime général de la sécurité sociale à l'horizon 2009 et, d'autre part, une évolution des dépenses de l'ensemble des administrations de sécurité sociale limitée à 1 % hors inflation afin de tenir compte de la hausse des dépenses sociales nécessaire pour faire face aux besoins croissants liés aux effets du vieillissement et du progrès médical. C'est à partir de ces perspectives que sera construit le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. Quel en sera l'impact pour l'assurance maladie et pour les dépenses de santé ?

Le retour à l'équilibre de la branche maladie du régime général suppose que les dépenses d'assurance maladie évoluent sur la période, en moyenne, de 2,2 % en valeur sur la période, soit 0,4 % en volume sur la base d'une hypothèse d'inflation à 1,8 %. Cela implique la poursuite de l'inflexion des dépenses d'assurance maladie constatée depuis 2004 et davantage encore en 2005 et 2006 grâce à la réforme de 2004. En 2003, en effet, les dépenses relevant du champ de l'ONDAM ont crû de 6,4 %. En 2004, année du vote de la loi portant réforme de l'assurance maladie, la première inflexion à la baisse a été enregistrée, avec une croissance de l'ONDAM de 4,9 %. En 2005, première année de mise en œuvre de l'ensemble des dispositifs prévus par la réforme de l'assurance maladie - car celle-ci porte ses fruits alors même qu'elle n'est complètement mise en œuvre que depuis un an et demi -, la progression a été de 3,9 % avec, pour la première fois depuis dix ans, le respect de l'ONDAM voté par le Parlement. Pour 2006, l'objectif fixé par la loi de financement de la sécurité sociale est une progression de 2,5 %. La maîtrise des dépenses d'assurance maladie est donc résolument engagée, et les rythmes de croissance des dépenses atteints dans le passé sont enrayés.

Il faut poursuivre dans cette voie, car les tendances qui se dégagent pour le début de l'année 2006 confirment la modération des dépenses. En particulier, la progression des soins de ville n'a augmenté que de 1,4 % de janvier à avril 2006 par rapport à la même période de 2005. La conséquence de cette modération des dépenses, c'est la réduction très claire du déficit de l'assurance maladie. Après avoir atteint 11,6 milliards d'euros en 2004, le déficit a été ramené à 8 milliards d'euros en 2005, au lieu des 16 milliards attendus. En 2006, il sera à nouveau significativement réduit, comme l'a confirmé la commission des comptes de la sécurité sociale qui, lors de sa réunion de la semaine dernière, a estimé le déficit prévisionnel pour 2006 à 6,3 milliards d'euros. La trajectoire est donc bien celle du retour à l'équilibre.

Tout cela fait beaucoup de chiffres, mais ces chiffres ne sont pas une fin en soi. Ce que veut le gouvernement en revenant à l'équilibre financier, c'est donner à la population la garantie que le système de sécurité sociale sera préservé, tout en le modernisant et donc en l'améliorant. C'est en cela que la réforme de l'assurance maladie se distingue des plans de sauvetage qui l'ont précédée. C'est une réforme structurelle qui s'appuie sur les travaux du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, dont certains commissaires font partie. Elle vise à soigner mieux en dépensant mieux et, pour ce faire, elle table sur les changements de comportement et place la qualité au premier plan. Ce ne sont pas seulement des mots, c'est la logique qui sous-tend la réforme. Le redressement financier de l'assurance maladie va de pair avec la nouvelle politique de santé que le gouvernement entend mener pour assurer un meilleur accès aux soins et, notamment, un accès rapide aux innovations thérapeutiques. La maîtrise durable de la dépense suppose la maîtrise médicalisée et l'évolution des comportements, mais aussi le développement de la prévention, véritable investissement dans l'avenir, condition à la fois de l'amélioration de l'état de santé de la population et de la maîtrise durable des dépenses.

L'approche du gouvernement est donc une approche qualitative et structurante sur le long terme. L'essor du parcours de soins coordonné autour du médecin traitant constitue à cet égard un acquis incontestable de la loi du 13 août 2004. Les Cassandre disaient que le dispositif ne marcherait jamais. La réalité, c'est que 40 millions d'assurés sociaux ont désormais choisi leur médecin traitant, ce qui démontre que les Français se sont appropriés ce dispositif ; 78 % des consultations s'effectuent dans le cadre du parcours de soins, et moins de 2 % des consultations sont réellement « hors parcours de soins ». Les Cassandre disaient aussi que la maîtrise médicalisée ne fonctionnerait jamais ; or elle est un succès. Le ralentissement du rythme d'évolution des soins de ville est en effet le fruit d'une attention plus grande des professionnels aux prescriptions de médicaments et aux indemnités journalières. L'engagement de maîtrise médicalisée conclu en 2005 a produit des résultats favorables. La dynamique enclenchée grâce à l'avenant n° 12 à la convention médicale fixe de nouveaux objectifs, à hauteur de 800 millions d'euros pour 2006 et de 600 millions d'euros pour 2007.

La séquence engagée permet d'améliorer la qualité des soins tout en maîtrisant les dépenses, l'un des objectifs visés étant de réduire les redondances et les actes et consultations inutiles. La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et la Cour des comptes estiment entre 6 et 8 milliards d'euros les dépenses inutiles chaque année. Il faut les éviter et utiliser à des investissements durables les sommes ainsi économisées. Quant aux indemnités journalières, elles poursuivent leur baisse année après année : la baisse a été de 3,5 % en 2005. Voilà qui montre que, lorsqu'un système est bien géré et mieux organisé, cela se traduit par une économie et par la sauvegarde du principe de solidarité.

Le secteur du médicament contribue aussi de manière significative au redressement durable des comptes. L'augmentation de la pénétration des génériques dans le répertoire a été à l'origine d'une économie de 170 millions d'euros dès 2005, et les différentes mesures mises en œuvre en matière de génériques ont permis au total 234 millions d'euros d'économies supplémentaires. En 2006, une nouvelle impulsion a été donnée à la substitution, grâce à l'accord tripartite signé entre l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM), les pharmaciens et les médecins, qui prévoit la progression régulière de la substitution, avec un objectif de 70 % de pénétration en décembre 2006. Au 15 mai, la pénétration des génériques dans le répertoire s'établissait à 66,9 %, et cette proportion continue de croître. Le gouvernement a choisi de renoncer à la généralisation du tarif forfaitaire de responsabilité (TFR) initialement envisagée, car cette mesure aurait certes procuré un gain immédiat mais elle risquait de casser la dynamique du générique. L'approche plus structurante de la substitution, productrice d'économies plus pérennes, a été privilégiée. Les chiffres montrent que le gouvernement a eu raison de faire le pari de la confiance avec les pharmaciens. Tout donne à penser que, de même, on pourrait impliquer davantage les médecins dans cette démarche.

La politique des prix a permis de dégager 365 millions d'euros supplémentaires en 2005. Enfin, plus d'une vingtaine de médicaments sont désormais disponibles en conditionnement de trois mois. La délivrance de ces grands conditionnements produira ses effets à partir du deuxième semestre 2006, mais le gouvernement ne compte pas en rester là : les laboratoires pharmaceutiques seront relancés pour que l'on envisage aussi des conditionnements de petite taille, adaptés aux traitements. Actuellement, les boîtes ouvertes ne sont, pour les trois quarts, jamais terminées... Au total, les différentes mesures prises dans le secteur du médicament commencent à produire leurs effets et l'on assiste déjà à l'infléchissement indéniable des dépenses de médicaments. Les dernières données relatives aux remboursements émanant de la CNAMTS montrent en effet un taux d'évolution de 2,2 % seulement pour avril par rapport à la même période en 2005, alors que ce taux était de 3,9 % en mars, de 4,6 % en février et de 5,7 % en janvier.

Les établissements de santé se sont engagés dans les réformes structurelles lancées dans le cadre du plan « Hôpital 2007 ». La part de tarification à l'activité s'élève à 35 % en 2006 pour les établissements publics et privés participant au service public hospitalier. Le gouvernement a aussi engagé des travaux de mesure des charges spécifiques pesant sur le service public hospitalier afin de réaliser une convergence réussie entre les tarifs des établissements publics et privés. Parallèlement, la rationalisation des achats et l'amélioration du contrôle de gestion et des systèmes d'information doivent permettre au secteur hospitalier de pouvoir proposer les meilleurs services et soins au meilleur coût.

L'offre de soins continuera en 2007 à s'adapter à l'évolution des besoins de la population. Les schémas régionaux d'organisation sanitaire de troisième génération ont été adoptés en mars 2006 et seront mis en œuvre au cours des cinq années à venir. Les besoins particuliers - santé mentale, périnatalité, cancer ou maladies rares pour ne citer que ces quatre exemples - ont été pris en compte dans le cadre de plans de santé publique spécifiques. Surtout, le gouvernement prépare le système de soins à relever le défi de la dépendance, avec le plan « Solidarité grand âge 2007-2012 », qui comporte, outre d'importantes avancées pour la lutte contre les maladies neuro-dégénératives, un fort volet hospitalier.

Il faut enfin ancrer le système de santé dans la prévention pour garantir, à terme, la maîtrise durable des dépenses d'assurance maladie, et bien sûr pour améliorer l'état de santé de la population. En complément de la dynamique instaurée par la réforme de l'assurance maladie et par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, il faut renforcer la stratégie de prévention, en la focalisant dans un premier temps sur les risques aux différents âges de la vie et sur les populations cibles afin de réduire les inégalités de santé. Ainsi, un examen bucco-dentaire de prévention sera désormais systématique à six ans et à douze ans ; il sera pris en charge à 100 %, de même que les soins consécutifs à cet examen, sans avance de frais. Dans ce cadre, cinq plans stratégiques de santé publique sont définis pour la période 2004-2008 : lutter contre le cancer ; limiter l'impact sur la santé des facteurs d'environnement ; améliorer la prise en charge des maladies rares ; améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques ; limiter l'impact sur la santé de la violence, des comportements à risque et des conduites addictives. Outre ces plans stratégiques, des plans et programmes de santé couvrent la plupart des risques actuellement connus. Leur objectif est de rationaliser et de coordonner les actions visant soit des pathologies - maladie d'Alzheimer, sida, maladies cardio-vasculaires... -, soit des déterminants, soit des risques, soit des groupes de population.

Grâce à l'ensemble de ces actions, fidèles à la logique de maîtrise médicalisée des dépenses, des marges de manœuvre seront dégagées qui permettront de continuer à améliorer la qualité du système de santé et renforcer l'accès aux soins. S'agissant de l'accès aux soins, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 a revalorisé fortement le montant de l'aide à la complémentaire, notamment pour les personnes âgées de plus de 60 ans, qui bénéficient désormais d'une aide de 400 euros par an. Le Président de la République vient de demander que ce dispositif soit étendu par le biais du relèvement du plafond de revenus des bénéficiaires de 15 à 20 % au-dessus du plafond de ressources de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC), ce qui permettra de porter le nombre de bénéficiaires potentiels de cette aide de 2 à 2,9 millions de personnes. Telle est la dynamique dans laquelle le gouvernement est engagé et que, fidèle à la feuille de route tracée par le Président de la République s'agissant du retour à l'équilibre des comptes publics, il poursuivra dans la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Le président Jean-Michel Dubernard a remercié le ministre, dont l'exposé a montré qu'une réforme de l'ampleur de celle qui a été engagée n'aboutit pas en un claquement de doigt mais que le calendrier prévu sera respecté, pour le plus grand bien de la santé publique, à laquelle chacun, sur tous les bancs, est très attaché.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, a souligné à son tour l'intérêt d'un débat global sur les finances publiques, comptes de l'Etat et comptes sociaux, qui ne font qu'un dans l'esprit des Français. Quel que soit le budget en cause, il s'agit toujours de faire fonctionner au mieux des services publics également importants, par exemple, l'école ou l'hôpital, en garantissant à nos compatriotes le bon emploi des fonds publics.

Cela présente un avantage supplémentaire pour les parlementaires et ministres chargés des comptes sociaux. En effet, les relations, étroites, entre comptes sociaux et finances publiques s'établissent plutôt, dans le long terme, en défaveur des comptes sociaux : on sait qu'au 31 décembre 2005, la dette de l'Etat à l'égard de la sécurité sociale était de 5,14 milliards d'euros - dont 3,58 milliards d'euros pour le régime général. Le débat d'orientation budgétaire doit permettre d'instaurer des relations transparentes permettant de mesurer exactement les efforts de réforme fournis, afin que les décisions financières soient dorénavant prises dans la clarté et la transparence et que le solde des uns ne soit pas subordonné aux impératifs et des contraintes des autres.

La loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale a clarifié les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, en particulier en prévoyant la fixation dans la loi de financement de la sécurité sociale du montant de la compensation par l'Etat des dispositifs d'exonérations de cotisations sociales et en disposant aussi que, désormais, seule une loi de financement pourra déroger au principe de non-compensation. La loi organique a donc renforcé la portée et la lisibilité des lois de financement de la sécurité sociale. Elle a également prévu une annexe présentant les « programmes de qualité et d'efficience » de la politique de sécurité sociale. Ces dispositions visent à mieux identifier les efforts de chacun, sans interférences, afin que les comptes sociaux ne soient pas la variable d'ajustement des finances publiques.

La branche vieillesse, comme la branche famille, accuse un déficit, dont la commission des comptes de la sécurité sociale a mesuré la légère dégradation. Ces déficits sont moindres que celui de la branche maladie, mais ce dernier s'améliore alors que les premiers se dégradent. S'agissant de la branche vieillesse, cette dégradation est due au succès du dispositif des départs anticipés pour les salariés ayant effectué des carrières longues. Cette réforme, dont personne ne conteste l'utilité, a satisfait par la négociation avec les partenaires sociaux une revendication sociale présentée depuis de longues années et qui avait été refusée par des gouvernements qui n'avaient pu engager la réforme de l'assurance vieillesse. La mesure a eu des effets dépassant les espérances, puisque, fin 2006, on dénombrera 300 000 départs en retraire anticipés. Il faut s'en réjouir. Les travaux du Conseil d'orientation des retraites (COR) ont confirmé que la mise en œuvre de la réforme des retraites permettra d'améliorer les perspectives financières de la branche vieillesse ; dans son rapport, le COR évalue l'impact de la réforme d'août 2003 sur le régime général à horizon 2020 à près de 50 % du besoin de financement. Par ailleurs, le redéploiement des cotisations chômage lié à la baisse engagée du chômage permettra d'équilibrer le régime général à condition que le taux de chômage soit inférieur ou égal à 7 %. La diminution du nombre de chômeurs - 200 000 en un an - montre que la tendance est bonne, ce qui permet, tout en étant lucide, d'être optimiste sur les effets de la réforme. L'insistance mise par le gouvernement sur le plan pour l'emploi des seniors participe aussi de la nécessité de renforcer les régimes de retraite. En effet, aider ces personnes âgées de 55 à 60 ans, qui ont été éloignés de l'emploi par une politique d'exclusion du marché du travail, permet aussi d'améliorer la situation financière de la branche.

En 2008, le gouvernement transmettra au Parlement un premier rapport d'étape, qui sera rendu public et qui permettra d'analyser les effets de la réforme compte tenu des travaux du COR. Il engagera aussi une réflexion sur les problèmes d'équité entre assurés.

La politique de la famille constitue également un volet important des dépenses de protection sociale, représentant près de 50 milliards d'euros, dont 62 % sont gérés par la branche famille du régime général de sécurité sociale. Interviennent également les collectivités locales par le biais de l'action sociale en direction des enfants, la branche maladie qui prend en charge les dépenses de maternité et l'Etat en tant qu'employeur pour le supplément familial de traitement ou par le financement des bourses scolaires et universitaires. Au cours de ces dernières années, la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle a constitué un élément structurant de la réorientation des politiques familiales. La France connaît à la fois le taux de fécondité le plus élevé d'Europe occidentale et l'un des taux d'activité des femmes parmi les plus forts. Le travail des femmes favorise la natalité, à condition qu'une politique ambitieuse permette de concilier vie familiale et vie professionnelle. A cet égard, la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) a elle aussi connu un succès dépassant les espérances, puisque d'ici la fin de l'année, 250 000 familles supplémentaires en bénéficieront au lieu des 200 000 prévues.

Le déficit de la branche famille était de 1,3 milliard d'euros en 2005 et la commission des comptes de la sécurité sociale l'évalue à 1,5 milliard d'euros pour 2006. Mais ce déficit n'est que conjoncturel. En effet, les comptes de la branche tendent spontanément vers l'équilibre puisque les prestations sont indexées sur les prix et les recettes sont indexées sur les salaires qui, du fait de la croissance, progressent plus vite que les prix. Certes, la situation actuelle demande des mesures de bonne gestion, mais la branche famille, toutes choses égales par ailleurs, devrait revenir à l'équilibre dans le même délai que l'assurance maladie.

Au nombre des mesures de bonne gestion, figure celle relative aux crèches. Le gouvernement s'est engagé avec les CAF à permettre le développement de la construction de crèches et un budget en augmentation de 7,5 % par an pendant quatre ans y est consacré. Mais les dépenses d'action sociale relatives à ces équipements ont enregistré une croissance de 15 % en 2005, après avoir augmenté de 17 % en 2004. Avec l'entière coopération des partenaires sociaux, il a fallu mettre bon ordre à cette dérive. Les réformes nécessaires ont été faites, ce qui permet de mieux piloter ces dépenses, et le programme de création de crèches reprend au rythme prévu dans la convention d'objectifs et de gestion. Enfin, le 3 juillet prochain se tiendra, sous la présidence du Premier ministre, la conférence de la famille 2006 autour du thème de la solidarité entre les générations, ce qui permettra de souligner le rôle pivot de la génération des 55-70 ans et de soutenir les aidant familiaux.

En conclusion, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille s'est dit déterminé à poursuivre les efforts engagés, avec l'impératif de maintenir un haut niveau de protection sociale, un haut niveau de couverture des dépenses de santé par l'assurance maladie, une politique familiale ambitieuse et une politique de sécurisation du financement des retraites compatible avec le grand progrès social qu'a constitué la retraite anticipée.

Le président Jean-Michel Dubernard a remercié les ministres et s'est félicité du vent d'optimisme qu'ils ont fait lever sur la commission.

Un débat a suivi les exposés des ministres.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur, a posé les questions suivantes :

-  En 2004, l'objectif de la réforme de l'assurance maladie était de revenir « à » ou « vers » l'équilibre en 2007. Quel sera l'objectif du gouvernement en matière de déficit de la branche maladie dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ?

-  Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 sera-t-il l'occasion d'adosser des régimes d'entreprises publique - par exemple celui de La Poste - au régime général ? Si oui, selon quelles modalités ? Un calendrier est-il prévu pour le régime des retraites de la SNCF ?

-  Un rapport conjoint de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l'Inspection générale des finances (IGF) vient d'être rendu sur la gestion des crèches ; le gouvernement a-t-il l'intention d'en suivre les recommandations ?

-  Où en sont les négociations de la COG de l'assurance maladie et dans quelle mesure les recommandations de la MECSS seront-elles mises en pratique ?

-  La réforme de l'avoir fiscal se traduit par un manque à gagner de 550 millions d'euros pour la sécurité sociale en 2006 ; le gouvernement a-t-il l'intention de compenser cette perte ?

-  Où en est l'exploration de l'élargissement de l'assiette des cotisations de sécurité sociale employeurs ? Quelles sont les conséquences pour les comptes sociaux de la mise en place du régime additionnel de retraites dans les fonctions publiques ?

-  Enfin, dans le document que le gouvernement a transmis à la commission, la nécessité d'une politique active de la dette est soulignée ; quelles en seront les conséquences pour la CADES ?

M. Jean-Marie Le Guen a d'abord indiqué percevoir une pointe d'ironie dans le propos du président Jean-Michel Dubernard selon lequel les ministres feraient se lever un vent d'optimisme. À vouloir peindre la situation en rose, on tombe dans une exagération qui masque mal le trouble dans lequel l'état des comptes sociaux plonge tous ceux qui s'y intéressent. Pour la cinquième année consécutive, ces comptes sont déficitaires, et le fait que ce déficit était prévu n'est pas suffisant pour rassurer. Pour la troisième année consécutive, le déficit des comptes de la sécurité sociale est supérieur à 10 milliards d'euros, somme qui n'est pas négligeable, pour employer un euphémisme... Cette dégradation est particulièrement sensible dans les branches famille et retraite ; c'était pour partie prévisible et il aurait donc fallu être plus ferme pour ne pas laisser les comptes dériver. A la dégradation des comptes sociaux de 3 milliards d'euros par rapport aux prévisions, il faut en outre ajouter le défaut de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Si l'on en tient compte, on se trouve face à un déficit qui est en fait plus proche de 14 ou de 15 milliards d'euros que des 7 ou 8 milliards annoncés. La situation est donc dramatique, et elle l'est d'autant plus qu'aucun signe de redressement n'est perceptible.

En particulier, la présentation qui a été faite des comptes de l'assurance maladie est contestable. L'augmentation moindre des dépenses est essentiellement imputable à la baisse du montant des indemnités journalières, baisse vraisemblablement due à un transfert de prestations qui auraient dû être servies à des salariés âgés malades, et qui sont pour partie en préretraite ou au chômage.

M. Xavier Bertrand , ministre de la santé et des solidarités, s'est élevé contre cette interprétation.

M. Jean-Marie Le Guen a souligné que la baisse des indemnités journalières est un phénomène qui trouvera vite ses limites dans le temps et d'un point de vue quantitatif. Quant à la réduction des dépenses relatives aux consultations de spécialistes, elle signale une évolution intéressante, si elle ne traduit pas une pénurie de praticiens.

Sur un plan général, comment peut-on se satisfaire d'une réforme qui organise le transfert de 60 milliards d'euros, soit environ un point de CSG pendant cinq ans, de 2007 à 2012 ? Le ministre de la santé explique en fait que si le ministre précédent, M. Jean-François Mattei, était resté au pouvoir, le déficit aurait été de 16 milliards d'euros ; pourtant, les chiffres de la commission des comptes de la sécurité sociale en matière d'assurance maladie établissent de manière irréfutable que la période 1998-2002 a été marquée par une bonne gestion.

Faut-il rappeler que les comptes de l'assurance maladie ont dû être renfloués par les salariés et les prélèvements sociaux exceptionnels opérés sur les plans d'épargne-logement ? Il en a résulté une recette de 2 milliards d'euros, mais pour une année seulement. En réalité, aucun changement structurel n'a eu lieu ou, s'il y en a, il faut les chercher à la loupe et ils ne sont manifestement pas à la hauteur des enjeux.

Le ministre a eu raison d'écouter le groupe socialiste qui s'était prononcé contre le tarif forfaitaire de responsabilité (TFR), considérant qu'il se traduirait par une charge supplémentaire pour les assurés. La majorité a voté cette disposition à la demande du ministre et il est pour le moins curieux d'entendre aujourd'hui celui-ci se féliciter de ne pas avoir appliqué un article de loi. Il faut néanmoins reconnaître que la menace de l'instauration de TFR a pu jouer un rôle significatif.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a fait valoir que les TFR relèvent d'une disposition d'ordre réglementaire. Si cela avait été du domaine législatif, le gouvernement n'aurait pas pu revenir sur cette mesure.

M. Jean-Marie Le Guen a contesté cette interprétation, soulignant que le débat relatif au TFR a eu lieu lors de la discussion du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale et qu'il avait donné lieu à un vote. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que le gouvernement n'applique pas une loi.

Par ailleurs, le ministre n'a pas été très disert sur l'application du plan médicament. Des précisions sur ce point seraient bienvenues, d'autant qu'il ressort des indications données par M. Xavier Bertrand dans une autre enceinte - ce qui est d'ailleurs problématique - que son application souffre d'un certain retard. Sur un plan général, comment espérer accroître le recours aux médicaments génériques si tout tient à la substitution opérée par les pharmaciens et que rien n'est fait en matière de prescription ? Enfin, qu'en sera-t-il des demandes de rallonges budgétaires demandées par les hôpitaux et par une fédération représentative des établissements ? L'ONDAM hospitalier sera-t-il respecté ?

M. Jean-Pierre Door a indiqué qu'il constate des progrès là où M. Jean-Marie Le Guen parle de drame. La lecture du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale montre que le Parlement a eu raison de voter des sous-objectifs, ce qui permet d'évoquer plus clairement qu'auparavant les points satisfaisants et ceux qui le sont moins. À cet égard, la satisfaction est réelle sur l'évolution des dépenses de soins de ville, dont la courbe s'infléchit depuis 1998 grâce à la responsabilisation des professionnels et des assurés. S'agissant des indemnités journalières, la durée que doit avoir un arrêt de travail est subjective ; il s'agit d'une responsabilité partagée entre médecin et patient. C'est cette responsabilité qui joue désormais dans la diminution des dépenses relatives aux indemnités journalières et il ne s'agit pas, contrairement à ce qui a été affirmé, d'un transfert de charges.

On constate toutefois que les dépenses relatives aux médicaments sont toujours très élevées. Les objectifs en matière de médicament générique sont-ils respectés ? La substitution a-t-elle réellement lieu ?

S'agissant des recettes, un amendement avait été adopté par la commission dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Cet amendement proposait la création d'un groupe d'étude chargé de réfléchir à de nouveaux modes de financement de la sécurité sociale, qui ne seraient pas toujours axés sur le travail. L'amendement n'avait pas été adopté mais le ministre s'était déclaré favorable à cette proposition, et prêt à s'engager dans cette voie. Où en est-on ? Il est nécessaire de ne pas laisser cette question exclusivement discutée par les partenaires sociaux. Qu'en est-il enfin des exonérations de charges sociales ? Des progrès ont-ils eu lieu dans les relations entre le ministère de l'économie et des finances et le ministère de la santé, et les transferts se font-ils normalement ?

Après avoir rappelé l'époque pas si lointaine où le Parlement n'avait pas à connaître des comptes sociaux, M. Jean-Luc Préel s'est félicité de la tenue d'un débat tout en déplorant qu'aucune indication n'ait été donnée quant aux orientations pour 2007. Chacun souhaite que les comptes sociaux reviennent à l'équilibre, chacun souhaite une bonne couverture des dépenses de santé, des soins de qualité et une politique de prévention efficace, mais pour assurer cela, il reste beaucoup à faire.

Or, si le volontarisme du ministre est remarquable, son optimisme ne l'est pas moins. Force est de constater que les quatre branches sont toujours déficitaires et que le déficit global à fin 2006 sera très proche de ce qu'il était fin 2004 et fin 2005. La commission des comptes de la sécurité sociale l'estime à 10,3 milliards d'euros, ce qui représente une dérive de 1,4 milliard d'euros par rapport à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Le déficit est très marqué pour la branche famille, supérieur de 0,4 milliard d'euros aux prévisions en raison du succès de la PAJE et du renforcement des structures collectives d'accueil, qui sont des mesures intéressantes et souhaitables ayant vocation à être financées par la collectivité nationale.

S'agissant de la branche vieillesse, le déficit supérieur aux prévisions de 0,8 milliard d'euros s'explique par le succès des retraites anticipées des salariés ayant commencé à travailler très jeunes et par les premiers départs en retraite liés au papy boom. Cette branche demeurera longtemps déficitaire, et l'on ne peut que s'étonner d'entendre le Parti socialiste déclarer vouloir revenir sur la loi Fillon. Pour sa part, l'UDF a proposé la mise en œuvre de la retraite par points et l'extinction des régimes spéciaux. La branche accidents du travail - maladies professionnelles est proche de l'équilibre.

L'augmentation du déficit de la branche maladie, à 6,3 milliards d'euros contre 6,1 milliards d'euros prévus, a été contenue par l'augmentation des recettes due à la CSG et en particulier à la CSG portant sur la capital. À cet égard, le ministre devrait insister sur le fait que cette contribution s'applique aussi aux revenus du capital. Le surcroît de recettes s'explique également par l'augmentation de 3,8 % de la masse des cotisations, elle-même liée à l'accroissement de la masse salariale. Le surcroît de recettes est aussi imputé aux prélèvements sociaux opérés sur les plans d'épargne logement PEL, comme l'a rappelé M. Jean-Marie Le Guen à juste titre. La réduction des déficits doit être mise en regard aux recettes supplémentaires. À cela, on ajoutera l'entrée en vigueur du forfait de 18 euros.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a indiqué que la mesure n'est pas encore appliquée.

M. Jean-Luc Préel a observé que, lorsqu'elle entrerait en vigueur, elle rapporterait des recettes supplémentaires. Le ralentissement des dépenses est surtout lié aux versements moindres s'agissant des indemnités journalières. La dépense en soins de ville a connu une augmentation modérée sur les quatre premiers mois de l'année.

Des progrès ont donc été accomplis, mais des incertitudes demeurent, en premier lieu sur les soins de ville, pour lesquels la commission des comptes de la sécurité sociale fait état d'un dépassement de 600 millions d'euros.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a relevé que le comité d'alerte n'a pas déclenché le mécanisme d'alerte.

Rappelant qu'une augmentation des honoraires de l'ordre de un euro interviendra au 1er août, M. Jean-Luc Préel a souhaité interroger le ministre sur les résultats des dernières élections professionnelles montrant que les syndicats de médecins qui s'étaient engagés en faveur de la convention ont été désavoués. Quels seront les effets de cette manifestation d'humeur sur l'application de la convention ? Sur un autre sujet, comment répondre aux dépenses en forte hausse des dépenses des cliniques ? Les tensions sont aigües à l'hôpital, où il manque près d'un milliard d'euros. Les attentes des autres professionnels de santé sont très vives ; comment y répondra-t-on ? Dans un autre domaine, le FSV est déficitaire de 1,5 milliard d'euros et le fonds de financement des prestations sociales agricoles (FFIPSA) de 1,8 milliard d'euros ; comment seront-ils financés ? Enfin, comment le fonds de réserve pour les retraites sera-t-il alimenté cette année ?

M. Simon Renucci a dit partager, pour l'essentiel, les observations de M. Jean-Luc Préel. Si les capacités de présentation et de travail du ministre sont connues, son analyse globale ne correspond peut-être pas à la réalité.

D'abord, il n'est pas certain que l'égalité d'accès aux soins ait été maintenue pour tous. Par ailleurs, compte tenu des résultats aux dernières élections, il n'est pas sûr que le corps médical en son entier ait adhéré aux termes de la convention. Il s'agit là d'une constatation de terrain.

Des progrès ont indéniablement été réalisés, mais la présentation qui a été faite des comptes sociaux montre quelques contradictions. Ainsi, on ne peut à la fois se féliciter d'un fort taux de fécondité et s'inquiéter du déficit de la branche famille. En ce domaine, il faut procéder à des modifications structurelles. Le sujet est difficile et demande de l'humilité. Certes, il faut pointer ce qui va mieux, mais il faut dire aussi que le chemin qui reste à parcourir est encore très long.

Revenant sur le FSV, M. Denis Jacquat a rappelé que la commission des comptes de la sécurité sociale souligne que les dépenses augmentent mécaniquement en fonction des revalorisations du SMIC, qui ont été fortes ces derniers temps. Les recettes actuelles ne suffisant pas, des mesures nouvelles précises sont-elles prévues ?

Mme Valérie Pecresse a demandé quel impact est attendu du plan de rigueur relatif à la gestion des fonds d'action sociale de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), ce plan de rigueur étant parfois mal vécu localement. D'autre part, les objectifs prévus dans le plan crèches seront-ils tenus ?

M. Pierre-Christophe Baguet a rappelé que le déficit cumulé du FSV serait de 5 milliards d'euros en 2006, ce qui ne laisse pas d'inquiéter. La contribution très contestable de la branche famille à ce fonds est-elle appelée à perdurer ? Si tel n'est pas le cas, comment le FSV sera-t-il alimenté ? Qu'en est-il, par ailleurs, du gel des dépenses de financement destinés aux crèches depuis le 1er janvier ? Tous les investissements prévus en 2006 seront-ils réalisés ? Peut-on raisonnablement espérer boucler en six mois des dossiers prévus pour s'étaler sur un an ?

En réponse aux commissaires, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a apporté les précisions suivantes :

- S'agissant de l'assurance maladie, l'objectif du gouvernement est bien le retour « à » l'équilibre, comme le montre la courbe descendante du déficit, passé de 8 milliards d'euros fin 2005 à 6 milliards fin 2006, et qui sera inférieur à 4 milliards fin 2007. Ces prévisions sont données sans tenir compte d'une éventuelle bonne surprise en matière de recettes. En effet, dans le cadrage général, si la croissance de la masse salariale avait été conforme aux prévisions, le déficit de l'assurance maladie aurait atteint 7 milliards d'euros et non 8 milliards d'euros. Le gouvernement suit donc fidèlement la feuille de route fixée par le président de la République qui s'est traduite dans les orientations pluriannuelles annexées à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

- La négociation de la COG de l'assurance maladie est en voie d'achèvement ; elle sera prête cet été et tiendra comptes des vœux de la MECSS. La méthode choisie n'a pas été de commencer par fixer un taux de remplacement mais d'y aboutir. Il a été demandé de définir, au cas par cas, dans quels services la dématérialisation ou la multiplication des plates-formes téléphoniques permettraient de réduire les effectifs tout en maintenant les conditions de travail des personnels et la qualité du service public. L'assurance maladie est un des services publics dont l'indice de satisfaction parmi la population est l'un des plus élevés ; il faut poursuivre dans cette voie. Sachant que dans certains services les besoins en personnel vont croître au cours des années à venir, notamment en ce qui concerne les délégués à l'assurance maladie, il faut déterminer, région par région, les marges de manœuvre qui peuvent être dégagées ; la mutualisation des moyens y contribuera. L'approche retenue est celle de la concertation, l'objectif général étant de définir les emplois qu'il faudra remplacer pour satisfaire les besoins du public et les obligations de service public. Les directions des caisses doivent communiquer avec le personnel pour calmer d'éventuelles inquiétudes. Il n'y aura ni licenciements, ni déplacements, ni fermetures de caisses. L'objectif est de réaliser des économies sans diminuer la qualité du service, pour prendre en charge de nouvelles missions, par exemple la gestion de la carte Vitale avec photo, qui sera bien mise en place avant la fin de l'année, comme prévu.

- Contrairement à ce qu'a dit M. Jean-Marie Le Guen, ce n'est pas à l'augmentation des recettes qu'est due la réduction du déficit. La courbe de baisse continue de la dépense le montre. Passer de 8 milliards d'euros à 6 milliards d'euros de déficit représente en fait un effort considérable de 5 milliards d'euros si l'on tient compte du tendanciel, qui représente 2 à 3 milliards d'euros.

- S'agissant du plan médicament, le « revignettage » et la politique de prix ont demandé plus de temps que prévu et le niveau des stocks était également plus important qu'attendu. Il en est résulté un retard dans l'application des mesures décidées, qui induit un risque de dépense de 480 millions d'euros, intégré dans la prévision de dépenses de la commission des comptes. D'une part, ce risque peut être compensé par l'augmentation du recours aux médicaments génériques. D'autre part, on peut s'attendre aussi à un effet de la réforme sur le montant des prescriptions, ce qui entraînera un ralentissement de la dépense supplémentaire. Ces 480 millions d'euros, dans cette hypothèse, interviendront à la fin de l'année 2006 et au début de l'année 2007.

- Le système de retraite par points, tel qu'il existe en Italie, donne une photographie exacte d'une carrière, alors que le système français actuel gomme les quinze moins bonnes années. Si l'on adoptait le système suggéré par M. Jean-Luc Préel, on pénaliserait ceux qui pendant quelques années ont eu un salaire faible.

- S'agissant de la question de l'assiette des cotisations, le Conseil d'analyse économique et le Conseil d'orientation pour l'emploi se penchent sur la question ; les premiers travaux de synthèse de ces organismes pourront être naturellement évoqués avec les parlementaires intéressés.

En réponse aux intervenants, M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille a apporté les éléments d'informations suivants :

- En matière de places de crèche, il n'y a pas eu gel mais bien surchauffe : en l'an 2000, alors que Mme Ségolène Royal était en charge de la famille au sein du gouvernement, 240 places ont été créées, contre 8 550 en 2005. Mais les dépenses des fonds d'action familiale et sociale des caisses d'allocation familiale se sont emballées à un rythme inédit : + 17 % en 2004 et + 15 % en 2006. Le gouvernement a fait le choix d'amplifier le rythme de création de places en crèche : il n'est donc pas question de rigueur, mais au contraire d'expansion. Pour autant, il était impératif de maîtriser la gestion des fonds d'action sociale de la CNAF. Entre 2002 et 2008, grâce aux COG successives, le nombre des places en crèche aura augmenté de 30 % en quelques années, pour atteindre 310 000. Compte tenu des difficultés de gestion financière, et pour rendre soutenable cet effort, il a fallu en début d'année remettre d'aplomb le dispositif et revoir les procédures ; le pilotage de ces opérations devait être recadré. Le 23 mai dernier, la commission des affaires sociales et familiales de la CNAF a adopté un nouveau calibrage pour les nouveaux contrats enfance-jeunesse. L'ensemble des directeurs des caisses d'allocations familiales seront bientôt invités à faire repartir le dispositif très rapidement. Le rapport conjoint de l'IGAS et de l'IGF a formulé d'utiles recommandations, qui ont été suivies, ce qui permet au programme prévu de redémarrer, les engagements financiers étant sécurisés.

- S'agissant de la branche vieillesse, proposer la remise en cause de la réforme des retraites est criminel pour l'équilibre de la branche. C'est aussi remettre en cause les départs à la retraite anticipés. Ceux qui le préconisent iront-ils l'expliquer aux salariés qui ont droit à cet avantage légitime ? De même, ceux qui critiquent aujourd'hui le déficit du FSV sont ceux qui ont diminué ses recettes en 2001, mis à sa charge 400 millions d'euros de dépenses nouvelles relatives aux cotisations des chômeurs aux régimes de retraite complémentaire et l'ont enfin obligé à majorer ses charges de 700 millions d'euros en raison de l'augmentation répétée du SMIC à la suite de l'application des 35 heures. Sans ces dispositions, le FSV serait en fort excédent. Le gouvernement, contraint de tirer les conséquences de cette situation, n'est pas resté inactif. Grâce à la baisse du chômage, le déficit du FSV cette année est de 35 % inférieur à celui de l'année dernière ; la commission des comptes de la sécurité sociale indique qu'il sera ramené à 1,3 milliard d'euros fin 2006 au lieu des 1,5 milliard d'euros prévus. La fin de l'exportation du minimum vieillesse, votée l'année dernière, a permis d'économiser 50 millions d'euros au FSV. A terme, la tendance à la réduction du chômage permettra d'améliorer la situation de ce fonds ;

- S'agissant de la Poste, le principe de la stricte neutralité financière des adossements de régimes au régime général, principe posé par le Parlement, sera respecté. Le gouvernement ne s'engagera pas dans ce dossier délicat sans en avoir étudié longuement la faisabilité, ce qui pourra prendre des mois ;

- En vertu de la loi organique, toute exception au principe de la compensation des exonérations de charges est désormais réservée à la loi de financement de la sécurité sociale. Cela aide les ministres chargés de la sécurité sociale dans le débat interministériel. Cela permettra que l'instrument des exonérations de charge soit utilisé avec tout le discernement nécessaire. La compensation exacte est prévue pour 2006 mais il faudra sans doute une disposition spécifique dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 afin d'assurer une compensation totale en 2007.

II. EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le rapport d'information de M. Pierre-Louis Fagniez sur les orientations des finances sociales pour 2007.

Après l'exposé du rapporteur, le président Michel Dubernard a souligné tout l'intérêt du débat sur les orientations des finances sociales pour 2007, qui se tiendra le jeudi 22 juin.

En application de l'article 145 du Règlement, la commission a décidé le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.

-------

N° 3159 - Rapport d'information de M. Pierre-Louis Fagniez déposé en application de l'article 145 du règlement par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales préalable au débat sur les orientations des finances sociales pour 2007

1 commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République

2 « Des finances publiques au service de notre avenir », décembre 2005

3 « +1 volume » : désigne une progression en volume de 1 %

4 () L'article 10 de la loi de financement pour 2006 modifie les règles relatives aux prélèvements sociaux assis sur les intérêts des PEL. A compter du 1er janvier 2006, ces prélèvements sont prélevés à compter du dixième anniversaire du plan (une première fois sur les intérêts cumulés au cour des dix premières années du plan).

5 () Ce chiffre n'intègre pas le transfert en provenance de la CNSA.