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APRÈS L'ART. 75 TER
N° 467
ASSEMBLÉE NATIONALE
24 septembre 2010

IMMIGRATION, INTÉGRATION ET NATIONALITÉ - (n° 2814)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 467

présenté par

M. Dionis du Séjour

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE 75 TER, insérer l'article suivant :

La première phrase de l’article L. 742-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigée :

« L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. ».

EXPOSÉ SOMMAIRE

Deux procédures d'examen des demandes d'asile existent en France.

La première dite « procédure normale », la seconde dite « procédure prioritaire », ou encore « accélérée ».

Quels sont les demandeurs d'asile concernés par la « procédure prioritaire » ?

La loi vise trois situations (article L741-4 du CESEDA) :

. les demandeurs ressortissants des pays d'origine sûrs (liste de 18 pays établie par le conseil d'administration de l'OFPRA – Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides –) :

. les demandeurs dont la présence en France constitue une «  menace grave pour l'ordre public », la sécurité publique ou la sûreté de l'État :

. les personnes dont la demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile, ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement.

Cette procédure concerne tant les premières demandes d'asile que les réexamens.

En 2009 : 8.632 personnes ont été placées en procédure prioritaire (51 % de ces personnes demandaient l'asile pour la première fois).

Quelles sont les règles spécifiques à la procédure prioritaire ?

Préalablement, rappelons que le demandeur d'asile placé en procédure prioritaire n'est pas admis au séjour, ne bénéficie d'aucune aide financière et n'a pas accès aux CADA (Centres d'Accueil pour les Demandeurs d'Asile).

. la personne a 15 jours pour déposer sa demande (contre 21 jours en « procédure normale ») ;

. l'O.F.P.R.A. a 15 jours pour statuer (en « procédure normale », l'O.F.P.R.A. statue, en moyenne, en 4 mois) ;

. le demandeur a un mois pour saisir la C.N.D.A. – Cour Nationale du Droit d'Asile – (à compter de la notification du rejet de sa demande par l'O.F.P.R.A.).

La C.N.D.A. juge, en moyenne, en 13 mois.

Lorsque la personne est placée en rétention, elle dispose de 5 jours pour déposer sa demande. L'O.F.P.R.A. a, lui, 96 heures pour statuer. Le retenu a ensuite un mois pour saisir la C.N.D.A.

A la différence de l'appel dans le cadre de la « procédure normale », l'appel en « procédure prioritaire » n'a aucun effet suspensif.

En d'autres termes, la mesure d'éloignement prise à l'encontre du demandeur d'asile peut être exécutée.

Dans l'hypothèse où le requérant est éloigné avant même que la C.N.D.A. n'ait statué sur sa demande, la Cour prononce un non-lieu à statuer : le recours n'est pas examiné. Or, rappelons qu'il s'agit là d'un recours de plein contentieux : la Cour, dans l'hypothèse où elle annule la décision de rejet de l'O.F.P.R.A, lui substitue une nouvelle décision, à savoir l'octroi d'une protection.

Cela signifie que des personnes, alors même qu'elles invoquent des craintes de persécutions ou de violations graves de leurs droits, en cas de retour dans leur pays, sont renvoyées de force nonobstant leurs recours.

D'un point de vue humain, ce n'est pas tolérable, en ce que les risques d'un tel retour contraint peuvent être d'une exceptionnelle gravité.

D'un point de vue juridique, l'absence d'effet suspensif n'est pas acceptable.

Prononcer un non-lieu à statuer lorsque le demandeur d'asile a été éloigné, revient purement et simplement à le priver de son droit même à un recours.

Notre législation n'est en conformité ni avec le droit communautaire ni avec le droit européen.

Enfin, la France, dans sa contribution au « livre vert » de la Commission Européenne sur le futur régime d'asile européen commun, ne préconisait-elle pas que l'Union Européenne retienne « le principe d'un recours qui soit systématiquement juridictionnel et suspensif en matière d'asile ».

Quelle est la portée du droit à un recours effectif tel qu'il est garanti par l'article 13 de la C.E.D.H (Convention Européenne des Droits de l'Homme) en l'absence de cet effet suspensif ?