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BIOÉTHIQUE (Deuxième lecture) - (n°
Commission |
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Gouvernement |
AMENDEMENT N°
présenté par
M. Muselier et M. Door
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ARTICLE
Après l’alinéa 1, insérer l’alinéa suivant :
« II bis. – Le deuxième alinéa de l’article L. 2141-6 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « L’Agence de la biomédecine est chargée de tenir un registre national des informations non identifiantes des couples donneurs d’embryons et des couples d’accueil ainsi que de leurs appariements respectifs. Elle veille à ce que les procédures respectent dans la mesure du possible le souhait des couples donneurs comme celui des couples receveurs. ».
EXPOSÉ SOMMAIRE
Création d’un registre national sur l’accueil d’embryon
Lorsqu’un embryon fécondé in vitro est en situation de rupture avec son projet parental initial, son devenir est soumis pendant cinq ans au choix du couple géniteur soit de procéder à l’arrêt de sa conservation (via ou non une recherche), soit à son accueil par un couple tiers stérile.
Cette pratique de l’accueil d’embryon inscrit dans la loi depuis 1994, n’a pas pu se développer de par les difficultés qu’ont eues les praticiens d’apprécier la volonté du législateur sur les conditions d’appariement de l’embryon avec son couple d’accueil.
L’embryon est en attente d’un autre projet parental à la demande de ses géniteurs et ce devenir doit être respecté dans la mesure du possible.
Il appartient aujourd’hui au législateur de décider ce qu’il entend par accueil d’embryon :
- soit l’accueil d’embryon est considéré comme une activité de don, comparable au don de gamètes : cette position ignore que le tiers donneur est ici en aval de la fécondation et non plus en amont comme pour le don de spermatozoïdes ou d’ovocytes. Elle sous-entend que les embryons des couples donneurs doivent être appariés aux couples receveurs, mais alors sur quel critères (âge de la mère biologique, indication d’AMP comme l’ICSI, mais aussi groupes sanguins, caractéristiques physiques…), au risque de rejeter et de détruire contrairement au souhait initial des géniteurs, des embryons dont un frère ou une sœur sont peut-être déjà nés sans discrimination préalable. Si l’on comprend que dans de rares cas, cette situation peut se produire, la dérive sélective peut devenir insupportable. Le récent texte, rédigé au sein de l’Agence de le Biomédecine envisage « des critères d’acceptabilité des embryons destinés à l’accueil ». Par exemple, « conformément aux recommandations de la Commission de génétique de la Fédération des CECOS, il est préconisé de ne pas proposer les embryons d’un couple dont la femme était âgée de plus de 38 ans » : ainsi, un embryon conçu par une femme de plus de 38 ans ne pourrait pas être accueilli, même par une femme du même âge et en dépit d’un éventuel diagnostic prénatal.
En tout état de cause, si le don d’embryon est considéré par le législateur superposable au don de spermatozoïdes pratiqué par les CECOS, devraient être alors habilités à cette pratique comme pour le don de gamètes, « les organismes et établissements de santé publics et privés à but non lucratifs », le législateur laissant au secteur privé la possibilité de créer à cette fin un organisme à but non lucratif, comme le fût la fédération des CECOS pendant près de 20 ans
- soit l’accueil d’embryon se rapproche davantage de « l’adoption ante natale d’un embryon » par un couple qui n’a pas d’autre solution médicale pour vivre une grossesse et un accouchement que d’y recourir, ce qui est la position jusqu’à présent retenue : cette position différencie l’embryon des gamètes en matière de don et tend à considérer que tout embryon dont la qualité autorise le transfert est susceptible d’être accueilli, après consentement expresse du couple géniteur. Dès lors, l’accueil n’impose pas un appariement aussi spécifique entre l’embryon et le couple d’accueil que celui entre un tiers donneur de spermatozoïdes et un couple receveur. Il engage clairement jusqu’à son transfert, la responsabilité du laboratoire ayant mis en conservation l’embryon. Sachant de plus qu’il est soumis, comme dans le cadre de l’adoption, à une décision judiciaire, il pourrait même être considéré du devoir de toute équipe clinico-biologique pratiquant la conservation d’embryon, d’assumer la poursuite de sa conservation et secondairement son accueil, dans les conditions définies par la loi et sous le contrôle de l’Agence.
Dès lors, pour l’enfant à naître et ses parents, la responsabilité médico-légale, en cas de problème ultérieur, ne serait pas à partager entre plusieurs laboratoires et établissements, entre d’une part celui qui aura congelé et conservé l’embryon pour le couple géniteur et d’autre part celui qui l’aura transporté, conservé, décongelé et transféré en vue de son accueil par un autre couple.
C’est à l’Agence de Biomédecine qu’il revient de tenir un registre national des embryons conservés et de leur traçabilité. Un registre propre à l’accueil d’embryon, à l’exemple des greffes doit être mis en place.
Ce système aurait de plus l’avantage d’éviter à l’État des dépenses inconsidérées dans la création de nouvelles entités propres à l’accueil d’embryon, par le biais notamment d’importants financements MIG, pointés du doigt dans le rapport de l’IGAS, à propos du don d’ovocytes mais aussi d’embryon, publié en février dernier, juste après notre première lecture de la loi.