Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF

N° 281

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189),

TOME II

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOUCES HUMAINES

FONCTION PUBLIQUE

PAR M. Bernard DEROSIER,

Député.

Voir le numéro : 276 (annexe 23).

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les réponses devaient parvenir au rapporteur au plus tard le 10 octobre 2007 pour le présent projet de loi.

À cette date, 65 % des réponses étaient parvenues au rapporteur, qui constate le progrès intervenu par rapport à l’année précédente, tant quantitatif que qualitatif. Toutefois, une vingtaine de questions sont restées sans réponse à la date de l’examen du budget en commission, sans que le ministère ne fournisse d’explication, alors même que le nombre de questions avait été très sensiblement réduit par rapport à l’année précédente. Le rapporteur souhaite que l’effort soit poursuivi dans les années à venir et que toutes les questions fassent l’objet d’une réponse.

INTRODUCTION 5

I. –  LE BUDGET DE LA FONCTION PUBLIQUE 6

A. LES CRÉDITS DE FORMATION 6

1. Les crédits de l’École nationale d’administration (ENA) et des instituts régionaux d’administration (IRA) 6

1. La formation interministérielle 7

B. L’ACTION SOCIALE INTERMINISTÉRIELLE 9

1. Les aides aux familles 10

2. Les aides au logement 12

3. Les autres crédits d’action sociale interministérielle 14

C. LES MISSIONS DE LA D.G.A.F.P. 14

II. –  LE PLAN DE RIGUEUR DE LA FONCTION PUBLIQUE 15

A. LA RÉDUCTION DU NOMBRE DE FONCTIONNAIRES 15

B. LA RÉDUCTION DU POUVOIR D’ACHAT S’ACCÉLÈRE 18

C. DES PALLIATIFS MODESTES À L’ABSENCE DE REVALORISATION SALARIALE 20

1. La défiscalisation des heures supplémentaires 20

2. Le développement de l’action sociale 21

3. Des mesures catégorielles 22

4. L’individualisation des rémunérations 24

III. – LA DISPARITION PROGRAMMÉE DU STATUT DE LA FONCTION PUBLIQUE 25

A. D’IMPORTANTES AVANCÉES SONT DÉJÀ EN COURS POUR LE DÉROULEMENT DES CARRIÈRES DES FONCTIONNAIRES 26

1. Le renforcement de la formation professionnelle 26

2. La réforme du système de notation et d’évaluation 27

3. Une gestion des ressources humaines modernisée 28

4. La fusion des corps 30

B. LA REMISE EN CAUSE DU RECRUTEMENT PAR CONCOURS ET LA BANALISATION DU RECOURS À DES AGENTS CONTRACTUELS 30

1. Plusieurs dispositions législatives ont accru la part des recrutements effectués sans concours 30

2. La banalisation annoncée du recrutement de contractuels 32

C. L’ABANDON DU SYSTÈME DE CARRIÈRE 34

1. La promotion d’une approche « métier » 34

2. L’intégration de personnels et de méthodes issus du secteur privé 34

EXAMEN EN COMMISSION 37

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 47

MESDAMES, MESSIEURS,

Compte tenu de la composition du gouvernement et du rattachement de la politique de la fonction publique au ministère du budget, le programme « Fonction publique » ne relève plus de la mission interministérielle « Direction de l’action du Gouvernement » mais de la mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

Le programme « Fonction publique » représente 1,9 % des autorisations d’engagement et 2 % des crédits de paiement de la mission. Il ne comprend pas de plafond d’emplois en équivalent temps plein car, malgré des demandes réitérées des parlementaires et la recommandation de l’audit du Comité interministériel d’audit des programmes (1), les crédits de personnel de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) ne sont pas intégrés au programme « fonction publique ». Cette décision est justifiée par le Gouvernement par le rattachement du programme à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et non plus à la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». Il a préféré attendre qu’il soit statué sur la question du positionnement administratif de la DGAFP et de ses personnels.

Le programme reste composé de deux actions, « Formation des fonctionnaires » et « Action sociale interministérielle ». Compte tenu de l’accent mis par le Gouvernement sur le développement de l’action sociale plutôt que la réévaluation du traitement indiciaire, cette dernière représente une part croissante des crédits, passant de 59 % en 2007 à 65 % en 2008.

Le rattachement de la politique de la fonction publique au ministère du budget témoigne de l’approche comptable des effectifs publics qui est privilégiée depuis 2002. Les perspectives annoncées pour la fonction publique en 2008 sont d’ailleurs la réduction des effectifs et l’absence de revalorisation du traitement indiciaire et de négociations salariales. Lors de son discours tenu le 19 octobre 2007 devant l’Institut régional d’administration de Nantes, le président de la République a d’ailleurs défini sa politique de la fonction publique en annonçant que « ne plus gaspiller un seul euro d’argent public, tel doit être l’idéal vers lequel nous devons tendre, telle doit être l’exigence que chaque agent public doit s’imposer à lui-même, telle doit être la première règle ». La France, en effet, n’aurait plus « les moyens de gaspiller ». Comme sous la précédente législature, la fonction publique reste vue sous l’angle de son coût, alors que les dépenses induites par la fonction publique sont d’abord la rémunération de services rendus à l’État et aux citoyens et non un « gaspillage ».

Les autres évolutions annoncées pour la fonction publique, à l’horizon de 2012, sont une profonde remise en cause du statut par le recrutement de contractuels de droit privé, le déclin du système de carrière au profit d’un système de métier et le développement de modes de recrutement autres que le concours.

I. –  LE BUDGET DE LA FONCTION PUBLIQUE

A. LES CRÉDITS DE FORMATION

Les crédits de paiement consacrés à la formation des fonctionnaires augmentent de 10,8 % par rapport à 2007, passant de 71,14 à 78,83 millions d’euros.

1. Les crédits de l’École nationale d’administration (ENA) et des instituts régionaux d’administration (IRA)

CRÉDITS DE L’ENA ET DES IRA

 

Crédits ouverts par la loi de finances initiale pour 2007

Crédits disponibles au premier
semestre 2007

Crédits demandés pour la loi de finances initiale pour 2008

ENA

30 900 000 €

30 310 000 €

32 000 000 €

IRA

32 610 000 €

32 310 000 €

39 470 000 €

Dans la loi de finances pour 2007, la dotation de l’École nationale d’administration avait été maintenue à son niveau de 2006, soit 30,9 millions d’euros. Cette décision, résultant de l’adoption d’un amendement de M. Georges Tron, était motivée par le souhait que l’ENA se montre exemplaire en matière de réforme de l’État et de gestion des deniers publics. Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit une réévaluation de 3,6 % de cette dotation, notamment afin de prendre en compte l’inscription dans le budget de l’école des 29 emplois du Centre des études européennes de Strasbourg, qui a été intégré à l’ENA en 2005.

À court terme, la réforme de la scolarité et le déménagement à Strasbourg ne semblent pas avoir permis à l’ENA de gérer plus efficacement ses crédits budgétaires. Ainsi, l’indicateur 2.1, « Dépenses consacrées à la formation initiale dans les IRA et à l’ENA », montre que le coût moyen d’un élève de l’ENA reste stable à 56 000 euros par an. Cette situation s’explique en partie par le maintien de coûts conjoncturels liés au transfert des services de l’ENA. Par exemple, si la vente de l’immeuble de la rue de l’Université a rapporté 46,35 millions d’euros, l’ENA a cependant dû acquitter un loyer au nouveau propriétaire durant l’année 2006, le temps d’achever les travaux de rénovation de l’immeuble de l’avenue de l’Observatoire. En outre, le regroupement des services à Strasbourg rend nécessaire l’agrandissement du siège de l’école, pour un coût de 12,356 millions d’euros.

Les crédits de fonctionnement des Instituts régionaux d’administration connaissent une forte hausse, de 21 %. Plus de 98 % de cette dotation
– soit 38,97 millions d’euros – est consacrée à la formation initiale des agents de catégorie A. L’augmentation des recrutements d’attachés se traduit par une augmentation du nombre d’élèves des IRA, qui est estimé à 767 en 2008, contre 700 en 2007, ce qui représente un surcoût de 2,3 millions d’euros. La réforme de la scolarité et la déconcentration des concours engendrent également des coûts conjoncturels estimés à 0,3 million d’euros. En effet, les IRA assument à partir de 2007 une part importante de l’organisation du recrutement puisque les candidats doivent choisir au préalable l’IRA dans lequel ils souhaitent être formés. Une réforme de la formation a également été effectuée afin de permettre une plus grande spécialisation des élèves à partir de la rentrée 2007. Après un enseignement de tronc commun, les élèves suivront une phase d’approfondissement dans l’un des trois univers professionnels auxquels préparent les IRA : l’administration centrale, l’administration territoriale de l’État et l’administration scolaire et universitaire.

Le reste de la dotation, environ un demi million d’euros, sera destiné aux actions de formation continue assurées par les IRA. 3 000 journées de formation sont ainsi prévues en 2008.

L’accroissement des crédits de l’ENA et des IRA est également dû, dans une moindre mesure, à l’augmentation de la contribution des employeurs aux charges de pension des fonctionnaires des organismes dotés de l’autonomie financière. Cette nouvelle charge représente 0,5 million d’euros pour l’ENA et 1,96 million d’euros pour les IRA.

1. La formation interministérielle

À l’inverse des crédits de l’ENA et des IRA, la dotation consacrée à la formation interministérielle connaît une diminution de 28,4 %, passant de 4,75 à 3,4 millions d’euros en 2008. Les crédits affectés à cette sous-action se répartissent entre :

––  une subvention annuelle de 65 000 euros versée à l’Institut européen d’administration publique de Maastricht ;

––  800 000 euros de dépenses de personnel consacrées à la rémunération des fonctionnaires qui assurent des formations ;

––  2,5 millions d’euros de crédits de fonctionnement finançant des actions de formation menées au niveau central et au niveau déconcentré. La répartition de ces crédits est détaillée dans le tableau ci-après.

CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT
CONSACRÉS À LA FORMATION INTERMINISTÉRIELLE

Actions de formation

Crédits prévus en 2007

Crédits prévus
en 2008

 

Organisation des concours d’entrée aux IRA

168 000 €

170 000 €

Formation interministérielle au niveau central

80 400 €

80 400 €

Formation interministérielle au niveau déconcentré

551 312 €

1 000 000 €

Actions de formation au niveau international :

   

Master européen de gouvernance et d’administration (MEGA)

270 000 €

270 000 €

Cycle des hautes études européennes

750 000 €

500 000 €

Autres actions de formation au niveau international

50 000 €

Instituts et centres de préparation à l’administration générale

n.c.

416 000 €

Associations et écoles intervenant en matière de formation

n.c.

44 500 €

TOTAL

1 819 712 €

2 530 900 €

Source : documents budgétaires.

Les actions de formation interministérielle menées au niveau central sont principalement les mêmes qu’en 2007 :

––  les travaux de l’« école de la gestion des ressources humaines (GRH) » créée en mars 2007. Ce réseau interministériel de formation a pour objectif de permettre une meilleure gestion des compétences au sein des administrations. Il s’attache notamment à construire des référentiels de formation, à apprendre comment construire une politique de GRH et à labelliser les formations pour permettre une meilleure lisibilité de l’offre de formation ;

––  les sessions de formation au développement durable organisées par l’Institut de formation de l’environnement (IFORE), sous la direction de la DGAFP et du ministère de l’écologie et du développement durable. Dans ce cadre, 158 journées de formation ont été organisées pour 1 673 stagiaires en 2006. Ces formations ont porté, par exemple, sur les achats publics éco-responsables, les actions possibles pour lutter contre l’effet de serre ou encore la gestion éco-responsable des bâtiments et des déchets dans une administration.

La formation interministérielle au niveau déconcentré est pilotée de concert avec le ministère de l’intérieur, qui gère le réseau des délégués interdépartementaux à la formation. Les crédits de personnel et de fonctionnement, qui atteignent 1,8 million d’euros, seront notamment mobilisés pour financer la mise en œuvre du droit individuel à la formation. En application des lois n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique et n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, chaque agent public bénéficie désormais d’un droit à la formation de 20 heures par an, mis en œuvre à sa demande, comme les salariés du secteur privé. L’accord du 21 novembre 2006 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des agents publics a également prévu une réorganisation de la formation professionnelle avec la création de plates-formes de formation placées auprès des préfets, regroupant les réseaux ministériels et interministériels de formation. Cette organisation permettra aux préfets de région de jouer un rôle de coordination entre les différentes initiatives locales.

Comme en 2007, la moitié de ces crédits sera consacrée aux formations d’initiative locale prévues dans le cadre des plans stratégiques de l’État en région (PASER) et dans le département (PASED).

Le master européen de gouvernance et d’administration (MEGA) est un programme franco-allemand de formation en administration publique, co-piloté par l’ENA et l’Université de Potsdam. Il consiste en un cursus d’une durée d’un an ouvert à des jeunes cadres français, de pays membres de l’Union européenne, de pays candidats ou d’institutions européennes (2) qui s’apprêtent à exercer des responsabilités dans un contexte européen et international.

B. L’ACTION SOCIALE INTERMINISTÉRIELLE

Les crédits d’action sociale interministérielle ouverts par la loi de finances initiale pour 2007 n’ont représenté qu’une partie des crédits disponibles, compte tenu de plusieurs transferts de crédits ministériels. Le montant des crédits de paiement disponibles au premier semestre 2007 s’est ainsi élevé à 156,86 millions d’euros, contre 100,96 millions d’euros prévus en loi de finances. Ces transferts ont permis de financer la montée en charge des mesures résultant du protocole d’accord du 25 janvier 2006, notamment le chèque emploi service universel (CESU) et le prêt mobilité.

CRÉDITS D’ACTION SOCIALE INTERMINISTÉRIELLE (en euros)

 

Crédits ouverts par la loi de finances initiale pour 2007

Crédits disponibles au premier semestre 2007

Crédits demandés pour 2008

Autorisations de programme

102 330 000 €

158 160 000 €

147 470 843 €

Aide aux familles

54 000 000 €

84 600 000 €

84 300 000 €

Retraités

27 010 000 €

26 330 000 €

25 960 843 €

Logement et restauration

19 620 000 €

45 390 000 €

27 510 000 €

Sections régionales interministérielles d’action sociale (SRIAS)

1 700 000 €

1 840 000 €

1 700 000 €

Autres

8 000 000 €

Crédits de paiement

100 960 000 €

156 860 000 €

145 470 843 €

Aide aux familles

54 000 000 €

83 380 000 €

84 300 000 €

Retraités

27 010 000 €

26 330 000 €

25 960 843 €

Logement et restauration

18 250 000 €

45 310 000 €

25 510 000 €

SRIAS

1 700 000 €

1 840 000 €

1 700 000 €

Autres

8 000 000 €

Source : documents budgétaires

Les crédits demandés pour 2008 sont légèrement inférieurs aux crédits disponibles en 2007 mais devraient probablement être abondés en cours d’exécution de la loi de finances, compte tenu de la montée en charge prévisible de certaines prestations. Le projet annuel de performances indique notamment qu’1,5 million d’euros supplémentaires devrait s’y ajouter au titre des fonds de concours et attributions de produits.

Les crédits d’action sociale interministérielle se répartissent entre :

––  des dépenses de fonctionnement à hauteur de 127,17 millions d’euros ;

––  des dépenses d’investissement à hauteur de 20,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 18,3 millions d’euros en crédits de paiement, consacrées au logement et à la restauration.

1. Les aides aux familles

Les aides aux familles sont les premières bénéficiaires des transferts de crédits intervenus en 2007, le montant total de crédits de paiement disponibles passant de 54 à 83,38 millions d’euros. La dotation demandée pour 2008, fixée à 84,3 millions d’euros, prend en compte cette croissance des besoins et se décompose comme le montre le tableau suivant.

AIDES AUX FAMILLES
(en millions d’euros)

Catégorie de prestations

Crédits demandés
pour 2008

Chèque vacances

32,3

CESU garde d’enfants de 0 à 3 ans

21

CESU garde d’enfants de 3 à 6 ans

15

Réservations de places en crèche

16

CESU : chèque emploi service universel.

Source : documents budgétaires

La principale évolution des aides aux familles concerne le chèque emploi service universel (CESU) garde d’enfants, dont le fonctionnement est amélioré et le champ d’application étendu.

Le CESU pour la garde d’enfants de moins de trois ans a fait l’objet d’une forte demande en 2007, avec en moyenne 3 300 nouveaux bénéficiaires par mois, soit 40 000 en année pleine. Le coût de cette prestation a été estimé à 21 millions d’euros en 2008, sur la base des dépenses prévues pour 2007 (20,5 millions d’euros). Cette estimation peut cependant paraître surprenante au vu des données fournies au titre de l’indicateur n° 3.3, « Taux de pénétration de la prestation CESU ». La DGAFP estime qu’en 2008, 61 % des bénéficiaires potentiels du CESU le percevront effectivement, contre 45 % en 2007. Si la croissance du nombre de bénéficiaires est conforme aux objectifs, les crédits semblent sous-évalués.

Les organisations syndicales auditionnées par le rapporteur ont fait part de difficultés d’utilisation du CESU, qui est refusé comme moyen de paiement dans de nombreuses crèches ou donne lieu à une majoration. L’existence de frais de remboursement à acquitter de la part des personnes morales a, en effet, constitué un sérieux obstacle à la diffusion du CESU. En outre, certaines structures de garde de taille modeste n’ont pas souhaité modifier leur dispositif de gestion pour accepter seulement quelques CESU en paiement. Cette situation a généré une forte insatisfaction des bénéficiaires du CESU, surtout lorsqu’ils percevaient auparavant la prestation pour la garde de jeunes enfants (PGJE), à laquelle le CESU garde d’enfants s’est substitué depuis le 1er janvier 2007. Pour mettre fin à cette difficulté, depuis le 1er septembre 2007, l’État prend en charge les frais de remboursement.

La création d’un CESU pour la garde d’enfants âgés de 3 à 6 ans a été effectuée par une circulaire du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique en date du 2 août 2007. Le CESU 3-6 ans sera mis en œuvre dès la fin de l’année 2007 et s’appliquera aux enfants nés entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2004, pour un coût estimé à 15 millions d’euros par an. Les demandes pourront être adressées dès l’annonce du choix du prestataire chargé de gérer cette prestation (3), fin octobre, la prestation étant versée pour l’ensemble de l’année 2007.

Le nombre de bénéficiaires de la prestation chèques-vacances connaît une progression régulière, de 1,4 % en 2006 (148 309 bénéficiaires) et de 1 % en 2007, notamment grâce à l’amélioration de l’information délivrée par l’Agence nationale pour le chèque-vacances (ANCV). Cette augmentation du nombre de dossiers, ajoutée à la revalorisation annuelle des barèmes de ressources et d’épargne, entraîne une croissance des dépenses, qui sont passées de 34,5 millions d’euros en 2005 à 35,4 millions d’euros en 2006 et 36,7 millions d’euros en 2007. Pourtant, alors que la dépense prévue en 2008 est de 37,2 millions d’euros, seuls 32,3 millions d’euros sont prévus dans le projet de loi de finances. Malgré la rénovation annoncée des modalités de gestion de cette prestation, il semble probable que des crédits supplémentaires devront être mobilisés au cours de l’année 2008.

La dotation prévue au titre des réservations de places en crèche, qui sont gérées par les préfectures avec l’appui des caisses d’allocations familiales (CAF), reste au même niveau qu’en 2006, soit 16 millions d’euros. Ces crédits permettent de financer les conventionnements entre les préfectures et les structures d’accueil de jeunes enfants afin de réserver des places en crèche pour les enfants d’agents de l’État.

2. Les aides au logement

Les prestations sociales en matière de logement connaissent également une forte augmentation des crédits disponibles en raison de la mise en place d’un dispositif de réservation de logements sociaux.

DÉPENSES EN MATIÈRE DE LOGEMENT

 

Crédits de paiement
demandés pour 2008

Dépenses de fonctionnement

 

–  aide à l’installation des personnels de l’État (AIP)

5 910 000 €

–  prêt mobilité

1 300 000 €

Dépenses d’investissement

 

–  réservation de logements sociaux

3 150 000 €

–  réservation de logements en Île-de-France (ex-FARIF)

3 150 000 €

Source : documents budgétaires.

L’aide à l’installation des personnels de l’État (AIP) a connu une augmentation sensible du nombre de bénéficiaires en 2007 en raison de la réforme intervenue en 2006. La circulaire FP/4 et 5BJPM-06-3056 du 24 août 2006 a notamment étendu le bénéfice de l’AIP à l’ensemble du territoire, alors qu’elle était réservée aux agents des régions Île-de-France et Provence-Alpes-Côte-d’Azur. À la suite de cette réforme, une nette augmentation du nombre de demandes a été observée en 2006 (+ 9,6 %). Le nombre de dossiers déposés a ensuite triplé en 2007, pour un budget prévisionnel de 5,7 millions d’euros. Cette progression devrait se stabiliser en 2008.

Le prêt mobilité prévu par le protocole d’accord du 25 janvier 2006 a été mis en œuvre à partir de juillet 2007 et s’est substitué au prêt à l’installation des personnels (PIP), supprimé à compter du 1er août 2007. Il s’agit d’un prêt à taux zéro ouvert aux primo-arrivants dans la fonction publique et aux agents en situation de mobilité subie (4) afin de financer le versement du dépôt de garantie lors de la location d’un logement. Le prêt consenti est d’un montant maximum de 1 000 euros et doit être remboursé dans un délai de trois ans. La dotation prévue pour 2008 correspond au financement de l’octroi de prêts à 15 000 agents, auquel s’ajoute la rémunération du prestataire, le CRESERFI (5). Cela ne représente que la moitié du budget prévu en 2007 (2,5 millions d’euros), qui se fondait sur une estimation de 30 000 bénéficiaires potentiels.

Une dotation nouvelle de 3,15 millions d’euros sera consacrée en 2008 au dispositif de réservations conventionnelles de logements sociaux au profit des agents de l’État, en complément du dispositif de réservation réglementaire par les préfets de département appelé « 5 % fonctionnaires ». Cette possibilité est prévue par l’article R. 314-4 du code de la construction et de l’habitation et permet à l’État d’obtenir la réservation de logements pour ses agents en contrepartie d’une contribution financière aux organismes HLM (6). Selon les informations figurant dans le projet annuel de performances, cette contribution fait l’objet de deux versements : 50 % lors de la signature de la convention, puis 50 % lors de la mise à disposition des logements. Ces deux actes sont, en effet, éloignés dans le temps puisque la convention est signée lors de la conclusion des projets de construction.

Une somme identique est prévue pour achever de financer les conventions de réservation de logements sociaux en Île-de-France signées avant 2004 dans le cadre du Fonds d’aménagement pour l’Île-de-France (FARIF). Ce dispositif supprimé il y a quatre ans sera donc en extinction complète en 2008.

3. Les autres crédits d’action sociale interministérielle

La dotation de 25,96 millions d’euros destinée aux aides aux retraités est majoritairement consacrée à l’aide ménagère à domicile (AMD) des retraités de la fonction publique de l’État (24 millions d’euros). L’AMD connaît une progression régulière du nombre de bénéficiaires, qui a augmenté de 1,77 % en 2006 (27 893 bénéficiaires) et devrait augmenter au même rythme en 2007. Selon les informations communiquées au rapporteur, les dépenses au titre de l’AMD sont ainsi estimées à 24,5 millions d’euros en 2007 et à 26,3 millions d’euros en 2008, soit 2,3 millions de plus que les crédits inscrits en projet de loi de finances.

Le reste de cette dotation constitue la participation de l’État au financement de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, dont la progression est indexée sur l’inflation (1,96 million d’euros).

Le programme pluriannuel de rénovation des restaurants interadministratifs engagé en 2007 est poursuivi. En 2007, ce programme a mobilisé 13,85 millions d’euros de crédits de paiement, alors que seuls 8,89 millions d’euros avaient été prévus en loi de finances. Les crédits prévus en 2008 pour la rénovation des restaurants interadministratifs sont réévalués à 12 millions d’euros de crédits de paiement. Ces crédits permettront de poursuivre les six rénovations en cours et d’en engager quatre nouvelles.

La dotation prévue pour les programmes mis en œuvre par les sections régionales interministérielles d’action sociale (SRIAS) est reconduite à l’identique par rapport à 2007, avec 1,7 million d’euros. Ces crédits financent divers projets d’action sociale au niveau déconcentré, afin de répondre à des besoins locaux particuliers ou de compléter les prestations mises en place au niveau central. Ils sont utilisés, par exemple, pour financer des séjours d’enfants ou des mesures facilitant l’accès des agents à des manifestations culturelles et sportives ou à des pratiques de loisirs.

Enfin, une provision de 8 millions d’euros est constituée par anticipation des réformes à venir de l’action sociale, notamment à la suite de la conférence sur le pouvoir d’achat dans la fonction publique engagée en octobre 2007.

C. LES MISSIONS DE LA D.G.A.F.P.

Les crédits destinés à la communication et aux études de la DGAFP, rattachés à l’action « Formation des fonctionnaires », correspondent en réalité aux missions de la DGAFP en matière de gestion des ressources humaines de l’État employeur. Ces crédits diminuent de 5,5 %, passant de 1,8 millions d’euros en 2007 à 1,7 millions d’euros en 2008. Cette réduction s’explique notamment par la suppression des crédits destinés à l’élaboration de revues de presse nationale et locale, audiovisuelles et écrites du ministre chargé de la fonction publique.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES D’ÉTUDES ET DE COMMUNICATION

 

2006

2007

2008

Revue « Service public »

600 000 €

600 000

650 000

Revue de presse audiovisuelle et écrite

200 000 €

100 000

Publications

300 000 €

400 000

400 000

Subventions aux associations

100 000 €

150 000

100 000

Conventions avec l’INSEE

30 000 €

30 000

30 000

Études et enquêtes

270 000 €

320 000

320 000

Organisation de séminaires, participation à des salons ou des colloques

200 000

200 000

Source : documents budgétaires

Les subventions aux organisations syndicales relèvent de la même catégorie de dépenses, qui ne présente qu’un lien ténu avec la formation des fonctionnaires. Pour l’année 2008, 2 359 724 euros de dépenses d’intervention sont prévus au titre des subventions aux organisations syndicales, soit un montant identique à celui des subventions versées en 2007. En effet, même si la loi de finances pour 2007 ne prévoyait qu’une dotation de 2,18 millions d’euros, des transferts ont augmenté les crédits effectivement disponibles en 2007. La répartition de cette somme entre les différents syndicats devrait donc être identique a celle effectuée par l’arrêté du 5 juillet 2007 fixant le montant de la subvention versée aux organisations syndicales représentatives de fonctionnaires de l’État. Cet arrêté a réparti les crédits disponibles en cinq subventions de 363 034,50 euros (7) et trois subventions de 181 517,25 euros (8) pour les huit organisations syndicales représentatives de la fonction publique.

II. –  LE PLAN DE RIGUEUR DE LA FONCTION PUBLIQUE

A. LA RÉDUCTION DU NOMBRE DE FONCTIONNAIRES

Dans la continuité de la politique menée sous la précédente législature, la compression des effectifs de la fonction publique est affichée comme l’objectif prioritaire de la politique de gestion des ressources humaines de l’État.

Les effectifs publics ont été réduits de 9 500 postes en 2006 (9) et devraient l’être de 15 000 postes en 2007. Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit la suppression de 22 921 emplois en équivalent temps plein (ETP) pour environ 68 411 départs en retraite, ce qui équivaut au non-remplacement d’un départ en retraite sur trois. Ces réductions d’effectifs sont concentrées sur les ministères de l’éducation nationale, de la défense, du budget, de l’intérieur et de l’écologie. Seul le ministère de la justice connaît une nette progression de ses effectifs, en raison notamment des besoins de l’administration pénitentiaire.

L’objectif affiché reste le non-remplacement d’un départ en retraite sur deux sur la période 2007-2012, c’est-à-dire 30 000 à 35 000 postes supprimés par an. En février 2007, l’actuel président de la République avait ainsi annoncé que ne seraient remplacés que la moitié de 450 000 agents publics qui partiront à la retraite d’ici 2012, les réductions d’effectifs devant être concentrées dans les secteurs des douanes, des impôts, de la formation professionnelle et de l’action sociale. À ce rythme, en 2012, le nombre de fonctionnaires reviendrait au niveau de 1992.

RÉPARTITION DE LA RÉDUCTION DES EFFECTIFS DE L’ÉTAT EN 2008

Budget concerné

Solde des créations et des suppressions d’emplois (équivalents temps plein)

Éducation nationale

- 11 200

Défense

- 6 000

Budget, comptes publics et fonction publique

- 2 625

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

- 2 306

Écologie, développement et aménagement durables

- 1 192

Agriculture et pêche

- 575

Économie, finances et emploi

- 205

Travail, relations sociales et solidarité

- 183

Affaires étrangères

- 118

Santé, jeunesse et sports

- 107

Culture et communication

- 106

Services du Premier ministre

- 1

Enseignement supérieur et recherche

0

Conseil et contrôle de l’État

49

Immigration, intégration, identité nationale et codéveloppement

100

Logement et ville

100

Justice

1 615

Total budget général

- 22 791

Contrôle et exploitation aériens

- 106

Publications officielles et information administrative

- 24

Total budgets annexes

- 130

TOTAL GÉNÉRAL

- 22 921

Source : ministère du budget et des comptes publics.

Ces réductions d’effectifs s’appuient soit sur des audits de modernisation, soit sur des contrats pluriannuels de performance.

Dans certains cas, les suppressions de postes sont liées à des réorganisations consécutives à un audit de modernisation. Par exemple, le développement des téléprocédures dans les préfectures, pour la déclaration de divers impôts et le cadre de la politique agricole commune (PAC) entraînent des suppressions de postes dans les ministères de l’intérieur, du budget et de l’agriculture.

D’autres diminutions d’effectifs sont liées à la conclusion des « contrats pluriannuels de performance ». Ces contrats consistent, pour un ministère, à s’engager à améliorer la qualité du service et à effectuer des gains de productivité, en échange d’une garantie de ressources budgétaires pour une durée de trois ans. De tels contrats ont notamment été conclus par les ministères des affaires étrangères, du budget et de l’équipement.

En raison de ces suppressions de postes, mais également des transferts de personnels aux collectivités territoriales, le plafond global des autorisations d’emplois de l’État diminue de 2,8 %, passant de 2 283 159 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2007 à 2 219 035 ETPT en 2008.

Source : documents budgétaires.

Cette réduction du nombre de fonctionnaires s’accompagne cependant d’une augmentation du nombre d’emplois aidés dans le cadre du plan de cohésion sociale. La loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a instauré les contrats d’accompagnement dans l’emploi, destinés aux chômeurs de longue durée ou âgés, et les contrats d’avenir, destinés aux bénéficiaires de minima sociaux. La montée en charge de ces nouveaux dispositifs a inversé le mouvement de suppression des emplois aidés initié en 2002, notamment avec la suppression progressive des emplois-jeunes.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE CONTRATS AIDÉS DANS LA FONCTION PUBLIQUE

Nombre d’emplois aidés dans l’ensemble de la fonction publique, au 31 décembre de l’année.

CES : contrats emploi solidarité

CEC : contrats emploi consolidé

CAE : contrats d’accompagnement à l’emploi

CAV : contrats d’avenir

Source : DGAFP.

B. LA RÉDUCTION DU POUVOIR D’ACHAT S’ACCÉLÈRE

« Je souhaite une fonction publique moins nombreuse, mieux payée » a déclaré le président de la République lors de son discours du 19 septembre 2007 devant l’Institut régional d’administration (IRA) de Nantes. À cette fin, comme l’avait annoncé M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique, sous le précédent gouvernement, la moitié des économies budgétaires réalisées grâce à la réduction des effectifs doivent être consacrées à l’augmentation de la rémunération des fonctionnaires. Selon les estimations du ministère du budget, les économies réalisées devraient se monter à 458 millions d’euros en 2008, dont 225 millions d’euros redistribués aux fonctionnaires.

Cette somme est répartie entre plusieurs ministères sous forme de crédits dits « catégoriels », destinés à améliorer la rémunération ou le déroulement de carrière de certains agents publics. Par exemple, 102 millions d’euros sont accordés au ministère de la Défense pour améliorer la rémunération des militaires du rang et de certains sous-officiers, 18 millions d’euros pour les agents du ministère de l’écologie pour revaloriser les régimes indemnitaires et créer une indemnité de mobilité et 49 millions d’euros au ministère de l’éducation nationale pour poursuivre l’intégration des instituteurs dans le corps de professeur des écoles.

En dépit de cette « redistribution », la diminution du pouvoir d’achat des fonctionnaires constatée depuis quelques années devrait se poursuivre, compte tenu de l’absence de revalorisation indiciaire.

Depuis 2003, les augmentations de la valeur du point d’indice ont systématiquement été inférieures au taux d’inflation, entraînant une diminution de la rémunération moyenne en euros constants. Selon les chiffres publiés par l’INSEE, le salaire net moyen des agents publics a ainsi diminué de 0,9 % en 2005 en euros constants (INSEE Première, n° 1151, juillet 2007, « Les salaires des agents de l’État en 2005 »). Cette tendance devrait se poursuivre en 2007 puisque, malgré une inflation estimée à 1,8 %, aucune mesure de revalorisation indiciaire n’est intervenue depuis l’augmentation de 0,8 % au 1er février 2007, qui visait à compenser l’inflation constatée en 2006 (10). Le tableau ci-dessous montre que l’évolution des salaires des fonctionnaires a été moins rapide que l’inflation depuis 2003, à la différence des salaires du secteur privé. En 2006, seuls les agents de catégorie C n’ont pas subi, en moyenne, de détérioration de leur pouvoir d’achat en raison des mesures statutaires prises en application du protocole d’accord du 25 janvier 2006.

ÉVOLUTION DU SALAIRE MENSUEL DANS LE SECTEUR PRIVÉ ET DU TRAITEMENT MENSUEL DES FONCTIONNAIRES DE L’ÉTAT (EN EUROS COURANTS)

 

2003

2004

2005

2006

Évolution du salaire mensuel brut de base dans le secteur privé

2,4

2,5

2,7

2,8

–  ouvriers

2,5

2,8

3,0

3,0

–  employés

2,6

2,5

2,9

2,9

–  professions intermédiaires

2,3

2,3

2,4

2,6

–  cadres

2,1

2,1

2,3

2,5

Évolution du traitement mensuel brut de base des fonctionnaires titulaires de l’État

0,7

0,5

0,9

1,4

–  catégories C et D

0,7

0,5

1,1

1,9

–  catégorie B

0,7

0,5

0,8

1,3

–  catégorie A

0,7

0,5

0,8

1,2

Évolution de l’indice des prix à la consommation

2,2

2,1

1,9

1,5

Source : INSEE, « Salaires de base dans le secteur privé et dans la fonction publique d’État – Deuxième trimestre 2007 », INSEE conjoncture, 2 octobre 2007, n° 283.

Le Gouvernement n’a pas annoncé de nouvelles revalorisations du point d’indice en 2007, ni en 2008, aucune négociation sur les salaires n’étant prévue avec les syndicats de la fonction publique. Certes, quatre « conférences » commencent cet automne sur les valeurs et les missions de la fonction publique, le dialogue social, le pouvoir d’achat des fonctionnaires et les parcours professionnels des fonctionnaires, mais il a été précisé qu’elles ne seraient pas le lieu d’une discussion sur la valeur du point d’indice.

L’augmentation de la valeur du point d’indice est pourtant la seule mesure salariale universelle, s’appliquant à toutes les catégories de fonctionnaires de l’État ainsi qu’aux fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Votre rapporteur tient à rappeler, en conséquence, qu’il s’agit donc d’une mesure indispensable, en dépit de la position du Gouvernement selon laquelle l’approche indiciaire serait obsolète. M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a ainsi considéré que l’évolution du point d’indice était surtout un « symbole » et n’avait qu’un poids limité dans l’évolution salariale. Cette analyse est tout à fait contestable puisque le traitement indiciaire de base représente, en moyenne, 85,3 % de la rémunération des fonctionnaires.

C. DES PALLIATIFS MODESTES À L’ABSENCE DE REVALORISATION SALARIALE

Compte tenu de la volonté de ne pas revaloriser le point d’indice, pour des raisons d’économies budgétaires, le Gouvernement a annoncé plusieurs mesures tendant à compenser partiellement la stagnation du traitement des fonctionnaires.

1. La défiscalisation des heures supplémentaires

Conformément au souhait exprimé par M. Éric Woerth en mai dernier, les exonérations sociales et fiscale des heures supplémentaires prévues par la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (TEPA) ont été étendues aux fonctionnaires par un décret du 4 octobre 2007 (11). Les fonctionnaires devraient donc, comme les salariés du secteur privé, être incités à réaliser des heures supplémentaires, conformément au principe « travailler plus pour gagner plus ».

Les heures supplémentaires accomplies par les agents publics, qu’ils soient fonctionnaires ou contractuels, seront intégralement exonérées d’impôt sur le revenu et de charges sociales. Selon les informations communiquées par le ministère, l’exonération de charges sociales représente un supplément de 13,76 % de revenu pour les agents. Ces exonérations sont entrées en vigueur rétroactivement le 1er octobre, comme les dispositions concernant le secteur privé, et s’appliquent aux agents des trois fonctions publiques.

Ce dispositif, présenté comme un substitut à la revalorisation de la rémunération des fonctionnaires, devrait cependant avoir un impact beaucoup plus modeste que dans le secteur privé, notamment parce que les heures supplémentaires sont déjà largement exemptes de cotisations sociales. En outre, dans la fonction publique, l’heure supplémentaire est très souvent payée moins que l’heure normale alors qu’elle est majorée de 25 % dans le secteur privé.

Par ailleurs, tous les agents publics ne disposent pas de la possibilité de réaliser des heures supplémentaires rémunérées même s’ils le souhaitent. Dans de nombreuses administrations, les heures supplémentaires ne sont pas rémunérées mais compensées par des jours de repos. En pratique, on observe que 90 % de la masse d’heures supplémentaires est réalisée par les enseignants. Compte tenu du souci du Gouvernement de réduire les dépenses induites par la fonction publique, il apparaît probable que la possibilité pour les agents publics de faire des heures supplémentaires rémunérées restera très réduite. Il convient de rappeler que l’État doit déjà rémunérer les heures supplémentaires effectuées depuis plusieurs années par certaines professions, notamment les infirmières et les policiers. S’agissant des officiers de police, en particulier, le passif est estimé au minimum à 5 millions d’heures supplémentaires, le ministère de l’intérieur ayant proposé en juin dernier de ne rémunérer que 60 % des heures effectuées au tarif de 9,03 euros de l’heure
– alors que la rémunération horaire normale d’un officier de police est comprise entre 17 et 25 euros. Dans ces conditions, il paraît peu probable que les agents publics puissent effectuer davantage d’heures supplémentaires.

2. Le développement de l’action sociale

L’action sociale à destination des agents publics a bénéficié d’une reconnaissance législative avec l’adoption des lois précitées de modernisation de la fonction publique et relative à la fonction publique territoriale. L’article 9 de la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique définit l’action sociale en indiquant que, « collective ou individuelle, [elle] vise à améliorer les conditions de vie des agents publics et de leurs familles, notamment dans les domaines de la restauration, du logement, de l’enfance et des loisirs, ainsi qu’à les aider à faire face à des situations difficiles ». Cette définition a été complétée par le décret n° 2006-21 du 6 janvier 2006 relatif à l’action sociale au bénéfice des personnels de l’État, qui précise notamment dans quelles conditions les agents participent à la définition et à la gestion de l’action sociale interministérielle au sein du comité interministériel consultatif d’action sociale des administrations de l’État (CIAS) et de ses sections régionales (SRIAS).

Les articles 70 et 71 de la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale concrétisent également ce principe en indiquant que l’assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale doit déterminer les mesures d’action sociale qu’elle compte engager et que les dépenses correspondantes constituent des dépenses obligatoires.

Il convient également de signaler que le problème du financement des mutuelles par les pouvoirs publics est partiellement réglé par l’application de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, en ce qui concerne l’État. Un décret du 19 septembre 2007 (12) donne une nouvelle base légale au financement de la protection sociale complémentaire des agents publics, compatible avec les règles communautaires en matière de concurrence. L’État devra ainsi mettre en concurrence des mutuelles, des institutions de prévoyance et des sociétés d’assurance avant de signer des conventions avec un ou plusieurs organismes de référence respectant des garanties minimales, notamment en termes de solidarité tarifaire. Le rapporteur espère que les décrets d’application relatifs à la fonction publique territoriale et à la fonction publique hospitalière seront publiés rapidement.

Les dépenses d’action sociale à destination des agents de l’État se composent, d’une part, de l’action sociale interministérielle prévue dans le programme « Fonction publique » et, d’autre part, de l’action sociale mise en œuvre par chaque ministère, qui représente les deux tiers des crédits avec 478 millions d’euros en 2006 et en 2007. Une partie de l’augmentation de la dotation consacrée à l’action sociale interministérielle provient en réalité de transferts de crédits ministériels d’action sociale à l’occasion de la création de nouvelles prestations interministérielles se substituant aux prestations ministérielles. Par ailleurs, la majeure partie de l’action sociale ministérielle consiste en services collectifs, tels la construction ou la rénovation de restaurants administratifs et la réservation de logements ou de places en crèche. La création de nouvelles prestations sociales pour les agents publics ne peut donc compenser la diminution de la rémunération des agents en termes réels car elle ne crée pas nécessairement de pouvoir d’achat supplémentaire pour les agents. En outre, à l’inverse d’une revalorisation indiciaire, l’action sociale est loin de concerner tous les agents. En premier lieu, elle s’adresse surtout à des agents placés dans des situations particulières, tels les pères de famille, les retraités ou les agents percevant les rémunérations les plus modestes. En second lieu, les décisions prises par l’État au profit de ses agents ne se répercutent pas nécessairement sur les agents des autres fonctions publiques. Votre rapporteur regrette notamment l’absence d’instauration d’un socle minimum d’action sociale par la loi du 19 février 2007 précitée relative à la fonction publique territoriale.

3. Des mesures catégorielles

Le protocole d’accord du 25 janvier 2006 est à l’origine d’une série de mesures statutaires. Après la réforme de la catégorie C intervenue en 2006, plusieurs dispositifs favorables aux agents accédant à la catégorie B ont été instaurés.

Tout d’abord, les indices de début de carrière des corps de catégorie B type ont été revalorisés à partir du 1er novembre 2006, en application d’un arrêté du 24 novembre 2006 (13). Une revalorisation similaire a été effectuée pour la fonction publique territoriale mais pas encore pour la fonction publique hospitalière. Par ailleurs, les modalités de classement des agents publics accédant à la catégorie B ont été améliorées dans les trois fonctions publiques (14) avec l’instauration :

––  d’une bonification d’ancienneté pour les lauréats des troisièmes concours ;

––  d’une reprise d’ancienneté prenant en compte les services privés accomplis dans des fonctions d’un niveau au moins équivalent à celui de la catégorie B, à hauteur de la moitié de leur durée dans la limite de sept ans.

Deux décrets en date du 30 avril 2007 (15) ont accru le taux maximum de promotion interne de la catégorie C vers la catégorie B, qui est passé de 20 % à 40 % des recrutements opérés par les autres voies, c’est-à-dire les concours ou le détachement. Une « clause de sauvegarde » prévoit que le taux de promotion interne est fixé à 5 % de l’effectif du corps d’accueil si ce mode de calcul permet un nombre de nominations plus élevé que la règle des 40 % des recrutements. Ces dispositions renforcent les possibilités de progression de carrière ouvertes aux agents de catégorie C.

Les règles de classement d’échelon lors de l’accès à un corps de catégorie A de la fonction publique de l’État ont également été aménagées de façon à simplifier le dispositif et à éviter les inversions de carrière par le décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d’échelon consécutif à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l’État. Les fonctionnaires de catégorie B nommés dans un corps de catégorie A ne sont plus classés en fonction d’une reprise partielle de l’ancienneté acquise dans leur précédent corps, mais en fonction de l’indice qu’ils détenaient : leur promotion en catégorie A doit leur assurer un gain d’au moins 60 points d’indice brut. Ce décret instaure par ailleurs une reprise d’ancienneté pour les agents ayant travaillé dans le secteur privé, selon les mêmes modalités que pour l’accès à la catégorie B.

Enfin, la prime de fin de grade versée en 2005 aux fonctionnaires de catégorie A ou B bloqués depuis au moins cinq ans à l’indice terminal de leur corps a été reconduite pour les années 2006 à 2008 dans les trois fonctions publiques (16). Le montant de cette bonification annuelle est de 700 euros pour les fonctionnaires de catégorie A et de 400 euros pour les fonctionnaires de catégorie B.

Si ces mesures statutaires permettent de favoriser le déroulement de carrière des fonctionnaires, elles ne concernent néanmoins qu’une minorité d’agents publics, principalement ceux qui ont bénéficié d’une promotion interne d’une catégorie à une autre. À l’instar de l’action sociale, elles ne sauraient remédier à l’absence de revalorisation salariale.

4. L’individualisation des rémunérations

L’accroissement de la part des primes et indemnités dans la rémunération des fonctionnaires constitue un autre moyen d’éluder la question de la revalorisation du traitement indiciaire.

Les conférences de gestion prévisionnelle des ressources humaines mises en place en 2006 pour permettre à la DGAFP d’engager un dialogue de gestion avec les différents ministères ont notamment été l’occasion de définir une politique de refondation indemnitaire. La réforme de nombreux statuts particuliers lors des fusions de corps a été l’occasion de redéfinir des régimes indemnitaires afin d’accorder une plus grande part à la performance. Les régimes indemnitaires doivent ainsi se composer de deux parts :

––  une part fonctionnelle, liée à la difficulté et à la pénibilité du poste, au niveau des responsabilités exercées et au niveau d’expertise exigé. Cette part peut notamment être utilisée pour pallier financièrement le manque d’attractivité de certains territoires ;

––  une part de rémunération au mérite ou à la performance, liée soit à l’évaluation du mérite individuel de l’agent, soit à la mesure des résultats collectifs obtenus par un service.

La rémunération à la performance devrait être étendue à de nouveaux corps de catégorie A en 2008, après l’extension à tous les directeurs d’administration centrale au 1er janvier 2006, qui a fait l’objet d’une évaluation de l’inspection générale des finances (IGF) au printemps 2007. Elle pourrait ainsi s’appliquer aux sous-directeurs et aux chefs de service en 2008, éventuellement sous la forme d’une expérimentation menée dans certains ministères. L’indicateur 1.2 du projet annuel de performance, intitulé « Part de l’encadrement concernée par le dispositif de rémunération à la performance », affiche un objectif de 51 % des personnels d’encadrement rémunérés à la performance pour 2008, cette part devant atteindre 100 % en 2010.

III. – LA DISPARITION PROGRAMMÉE DU STATUT DE LA FONCTION PUBLIQUE

Lors de son discours prononcé le 19 septembre 2007 devant l’Institut régional d’administration (IRA) de Nantes, le président de la République a annoncé une profonde réforme de la fonction publique, dans le cadre d’un « nouveau pacte avec les fonctionnaires et les citoyens », appelé « Service public 2012 ».

On peut s’étonner du lancement d’un grand chantier de rénovation de la fonction publique à peine huit mois après la publication de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique et de la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, qui comptaient à elles deux 135 articles. Une grande partie des décrets d’application de ces deux lois n’ont pas encore été publiés. Dans ces conditions, on comprend mal que la réforme de la fonction publique soit qualifiée d’« urgence nationale » par le Premier ministre.

Dans le cadre du pacte « Service public 2012 », quatre conférences sont menées à l’automne 2007 avec les organisations syndicales sur le thème de la réforme de la fonction publique. Ces conférences portent respectivement sur les valeurs du service public, les missions et les métiers de la fonction publique (ouverte le 1er octobre 2007), le pouvoir d’achat des fonctionnaires (ouverte le 8 octobre 2007), la rénovation du dialogue social (ouverte le 15 octobre 2007) et les parcours professionnels (ouverte le 29 octobre 2007).

Malgré l’organisation de ces débats, les orientations de la réforme de la fonction publique à venir ont été fixées dès le discours de Nantes. Le président de la République a ainsi annoncé que la fonction publique devait faire l’objet d’une « révolution culturelle » dont les principaux aspects sont :

––  la porosité entre secteur public et secteur privé avec une plus grande mobilité des personnels ;

––  la possibilité de conclure des contrats de droit privé avec les nouveaux entrants plutôt que de les faire bénéficier d’une position statutaire ;

––  la remise en cause du concours ;

––  la fin de la gestion par corps au profit d’une gestion par métiers ;

––  la réduction des effectifs de la fonction publique, assortie du versement d’une indemnité de départ pour inciter les fonctionnaires à quitter la fonction publique.

Ainsi quel que soit le résultat des conférences sur l’avenir de la fonction publique, l’objectif affiché est la disparition progressive du statut au profit d’une fonction publique qui n’aura guère d’autre de public que l’employeur. Le ministre du budget l’a clairement exprimé en indiquant qu’il ne fallait plus « conclure systématiquement que service public induit nécessairement fonction publique ».

A. D’IMPORTANTES AVANCÉES SONT DÉJÀ EN COURS POUR LE DÉROULEMENT DES CARRIÈRES DES FONCTIONNAIRES

L’urgence d’une réforme fondamentale de la fonction publique est discutable au vu des nombreuses modifications encore en cours pour améliorer la gestion des personnels publics, notamment en application des lois précitées de modernisation de la fonction publique et relative à la fonction publique territoriale.

1. Le renforcement de la formation professionnelle

Les possibilités de progression de carrière pour les agents sont étroitement liées à la formation continue qui leur est proposée. C’est pourquoi le protocole d’accord du 25 janvier 2006, puis l’accord du 21 novembre 2006 sur la formation professionnelle des agents publics, prévoient d’étendre à la fonction publique plusieurs dispositions en matière de formation continue existant dans le secteur privé et de valoriser les acquis de l’expérience professionnelle.

Les mesures prévues par ces accords ont été instaurées par les lois précitées de modernisation de la fonction publique et relative à la fonction publique territoriale.

En premier lieu, ces lois ont étendu à la fonction publique le droit individuel à la formation (DIF) prévu par le code du travail (17). Le DIF est mis en œuvre à l’initiative de l’agent et effectué, en principe, en dehors du temps de travail. Sa durée – 20 heures par an – et ses modalités d’application ont été fixées par le décret n° 2007-1470 du 15 octobre 2007 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des fonctionnaires de l’État. Le décret déclinant ce dispositif pour les agents territoriaux devrait être publié prochainement.

En second lieu, les deux lois ont instauré des mécanismes de reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle (RAEP). L’expérience professionnelle devient l’un des éléments à prendre en compte pour l’inscription au tableau d’avancement ou sur une liste d’aptitude. La RAEP s’applique aussi pour les concours de la fonction publique, où elle peut se substituer à une épreuve (18). Dans la fonction publique territoriale, la reconnaissance de l’expérience professionnelle permettra également de réduire la durée de la formation statutaire obligatoire.

L’utilisation du DIF et de la RAEP dans la fonction publique de l’État fait l’objet de deux nouveaux indicateurs dans le projet annuel de performances pour 2008. L’indicateur 2.2, « Mise en œuvre du droit individuel à la formation », affiche une prévision de consommation des heures de DIF de 10 % en 2008, avec une cible de 30 % en 2010. Les résultats obtenus à l’avenir seront cependant difficiles à analyser puisque les droits acquis au titre du DIF peuvent être cumulés sur une durée de six ans. L’indicateur 2.3, « Mise en œuvre de la reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle », prévoit quant à lui que 30 % des ministères mettront en place en 2008 un dispositif de RAEP pour un concours ou un examen professionnel.

Ces deux innovations importantes s’accompagnent d’une amélioration des conditions dans lesquelles les agents publics peuvent définir leurs projets en matière de formation. Un entretien de formation, distinct de l’entretien d’évaluation, est organisé avec le supérieur hiérarchique du fonctionnaire afin de déterminer les besoins de formation de celui-ci au vu des objectifs qui lui sont fixés et de son projet professionnel. Les fonctionnaires bénéficient également d’un droit à congé pour bilan de compétences, qui doit leur permettre d’analyser leurs compétences, leurs aptitudes et leurs motivations pour définir un projet professionnel et, éventuellement, un projet de formation. Un autre droit à congé est créé pour mettre en œuvre une procédure de validation des acquis de l’expérience (VAE) aboutissant à l’octroi d’un diplôme ou d’un titre.

La loi de modernisation de la fonction publique oblige les administrations publiques à mettre en œuvre une politique coordonnée de formation professionnelle tout au long de la vie, sur le modèle de la politique de formation applicable aux salariés du secteur privé. Les organisations syndicales représentatives sont associées à la définition de cette politique, qui doit faire l’objet d’une consultation des trois conseils supérieurs de la fonction publique.

Cette loi permet enfin aux fonctionnaires de bénéficier de périodes de professionnalisation, visant à faciliter la reconversion professionnelle ou la requalification des agents qui souhaitent exercer de nouvelles fonctions ou changer de corps ou de cadre d’emplois.

2. La réforme du système de notation et d’évaluation

Dans un souci de moderniser la gestion des ressources humaines, les articles 58 et 59 de la loi de modernisation de la fonction publique ont autorisé une expérimentation de la suppression de la notation individuelle, remplacée par un entretien professionnel visant à apprécier la valeur professionnelle des fonctionnaires. Cette expérimentation réalisée en 2007, 2008 et 2009 concerne les fonctions publiques de l’État et hospitalière. Elle devra s’achever par la présentation d’un bilan au Parlement début 2010.

Les modalités d’évaluation des fonctionnaires ont été largement rénovées par le décret n° 2002-682 du 29 avril 2002 relatif aux conditions générales d’évaluation, de notation et d’avancement des fonctionnaires de l’État, qui a harmonisé les procédures et introduit le principe d’un entretien d’évaluation, sans toutefois supprimer l’attribution d’une note chiffrée.

Ce dispositif a rencontré des difficultés d’applications, liées notamment à la lourdeur des opérations administratives de notation et au manque d’articulation entre l’entretien individuel des fonctionnaires et la notation. Saisi de la question au début de l’année 2006, le Comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics a rendu son rapport en février 2007. Celui-ci préconise d’aller plus loin que le décret du 29 avril 2002 en fondant l’appréciation de la valeur professionnelle des agents non plus sur la notation, mais sur des entretiens professionnels.

Les conditions de cette expérimentation sont détaillées par le décret n° 2007-1365 du 17 septembre 2007 portant application de l’article 55 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État. Les administrations de l’État qui le souhaiteront pourront ainsi, à partir du début de l’année 2008, organiser des entretiens professionnels annuels consacrés aux résultats professionnels atteints par l’agent, à sa manière de servir, à la fixation des objectifs pour l’année et aux perspectives d’amélioration professionnelle et de promotion. Cet entretien donnera lieu à compte rendu, pour répondre à l’exigence de transparence de l’évaluation. Ensuite, la valeur professionnelle de l’agent exprimée par le compte rendu de l’entretien professionnel pourra donner lieu soit à l’attribution de primes, dans une perspective de rémunération au mérite, soit à l’octroi de bonifications d’ancienneté par le chef de service.

3. Une gestion des ressources humaines modernisée

Indépendamment des évolutions statutaires, législatives ou réglementaires, la gestion des ressources humaines de l’État se modernise très rapidement depuis une dizaine d’années et notamment depuis la création de l’Observatoire de l’emploi public en septembre 2000. Cet organisme est, en effet, chargé d’une double mission : d’une part, il améliore la connaissance des effectifs publics et, d’autre part, il promeut le développement de la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC). Il a notamment apporté son expertise aux ministères pour l’élaboration de scénarios de GPEEC et la mise en place de systèmes d’information sur les ressources humaines (SIRH).

Les conférences de gestion prévisionnelle des ressources humaines organisées par la DGAFP avec plusieurs ministères ont permis de donner suite aux travaux de l’Observatoire en engageant un dialogue interministériel sur l’amélioration de la GRH et la création d’outils de GPEEC. Ces conférences ont été généralisées à l’ensemble des ministères par une circulaire du ministre de la fonction publique datée du 16 novembre 2006. Le ministère a, en effet, souhaité que ces conférences permettent d’examiner les observations formulées par la Cour des comptes dans son référé n° 45.412 du 16 juin 2006 portant sur la GPEEC dans dix ministères (19). Elles constituent donc un rendez-vous annuel permettant la contractualisation d’objectifs partagés entre la DGAFP et les ministères. Les ministères présentent leurs objectifs stratégiques de gestion prévisionnelle. Leurs politiques en matière de GRH font ensuite l’objet d’une discussion au regard des objectifs stratégiques avancés.

Les 17 conférences menées en début d’année 2007 ont ainsi porté sur les sujets suivants :

––  l’élaboration de répertoires métiers dans chacun des ministères, en lien avec le répertoire interministériel des métiers de l’État (RIME), afin de référencer les compétences existantes ou attendues au sein du ministère ;

––  la meilleure prise en compte des règles de gestion financière des ressources humaines établies par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Un guide méthodologique devrait être rédigé à la fin de l’année 2007 pour donner des outils opérationnels aux responsables de programmes et de budgets opérationnels locaux ;

––  la gestion des mobilités, aussi bien fonctionnelles que géographiques, qui doit intégrer plusieurs paramètres tels le développement des parcours professionnels des agents, les problèmes d’attractivité de certaines régions, le respect des règles statutaires et du rôle des commissions administratives paritaires (CAP) ou encore le souhait des gestionnaires que l’affectation des agents soit plus rapide. La bourse interministérielle de l’emploi public créée en juin 2001, qui propose des postes vacants des ministères et de leurs établissements publics, constitue un moyen privilégié de développer un marché interne de l’emploi public pour favoriser une meilleure adéquation entre les profils des candidats et les postes vacants. Son fonctionnement devrait être amélioré en 2008 avec l’utilisation d’outils informatiques plus performants. Par ailleurs, les régions Lorraine et Champagne-Ardenne ont expérimenté en 2006 des bourses locales de l’emploi public, système qui pourrait être généralisé rapidement ;

––  l’amélioration de la formation à la GRH grâce à une mutualisation des moyens des différents ministères au sein de l’« école de la GRH » (20) ;

––  le développement d’une gestion individualisée des carrières et des agents dans les corps d’encadrement et dans certains corps de catégorie B, sur le modèle des dispositifs mis en place par les ministères de l’équipement et de l’intérieur.

L’un des principaux éléments de la modernisation consiste à refondre les SIRH afin de gérer plus facilement la masse salariale. Certains ministères ont mis ou vont mettre en place des « infocentres » ou des « outils de simulation » permettant de disposer de données fiables et d’outils d’analyse afin de déterminer une politique de GPEEC. La DGAFP a souhaité assurer l’interopérabilité des outils mis en place par les différents ministères en élaborant des référentiels techniques et fonctionnels communs aux différents SIRH. Le travail interministériel a ainsi permis de définir les caractéristiques d’un « noyau SIRH commun » garantissant, d’une part, l’interopérabilité et, d’autre part, la sécurité des données. En 2005, une version du noyau SIRH commun, élaborée à partir du progiciel SAP (21), a été acquise par l’État. Les ministres n’ayant pas encore construits leur propre SIRH pourront ainsi réaliser des gains de temps et d’argent en utilisant ce progiciel. Les autres ministères devraient progressivement mettre leurs systèmes en conformité avec le noyau commun.

Dans le cadre de la modernisation des SIRH, un projet de refonte du système de paye des agents de l’État a été mis à l’étude en 2006. Le noyau SIRH commun pourrait en effet servir de base à la création d’un opérateur national de paye qui assurerait la paye des agents, la maintenance du noyau SIRH commun et la prise en charge des systèmes décisionnels interministériels en matière de ressources humaines et de paye. La création de cet opérateur a été effectuée par le décret n° 2007-903 du 15 mai 2007 portant création d’un service à compétence nationale à caractère interministériel dénommé « opérateur national de paye ».

4. La fusion des corps

Enfin, la gestion des ressources humaines a été facilitée par la politique de fusion de corps, qui a permis une réduction très importante du nombre de corps. Alors qu’en 1996, le nombre de corps où avaient lieu des recrutements atteignait 900 (22), ils n’étaient plus que 500 environ en septembre 2007. En 2005, dix corps ont été fusionnés en cinq corps regroupant 15 000 fonctionnaires. Ce mouvement s’est amplifié en 2006, avec la fusion de 96 corps regroupant 118 000 fonctionnaires, qui ont donné lieu à 35 corps. Enfin, en 2007, de nombreuses fusions de corps de catégorie C ont été effectuées en application des mesures de restructuration prévues par le protocole d’accord du 25 janvier 2006. 225 corps et 433 000 agents ont ainsi été concernés par des fusions qui ont abouti à 81 corps, c’est-à-dire à la suppression de 144 corps de catégorie C. Indépendamment de l’application du protocole, 18 corps ont été fusionnés en huit corps regroupant 28 000 fonctionnaires.

B. LA REMISE EN CAUSE DU RECRUTEMENT PAR CONCOURS ET LA BANALISATION DU RECOURS À DES AGENTS CONTRACTUELS

1. Plusieurs dispositions législatives ont accru la part des recrutements effectués sans concours

La XII° législature a été marquée par des remises en cause successives du principe du recrutement par concours, qui avaient amené votre rapporteur à évoquer une « réforme rampante de la fonction publique ».

En premier lieu, l’institution de contrats à durée indéterminée (CDI) de droit public par la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique a apporté une dérogation au principe selon lequel les emplois permanents de la fonction publique doivent être occupés par des fonctionnaires. Au lieu d’encadrer et contrôler plus strictement le recours à des personnels contractuels, ce qui aurait permis d’éviter que des personnes restent employées des années sous contrat à durée déterminée (CDD), le choix a été fait de transformer automatiquement les CDD en CDI à l’expiration d’une durée de six ans. Selon les informations communiquées par le Gouvernement, près de 9 000 agents non titulaires avaient déjà bénéficié de cette mesure en octobre 2006 (23).

La création d’une voie parallèle de recrutement dans la fonction publique a rendu nécessaire la création d’un statut bis pour les non titulaires. La loi relative à la fonction publique territoriale a ainsi prévu que les agents territoriaux bénéficiant d’un CDI voient leur rémunération évoluer dans le temps et peuvent, dans certains cas, faire l’objet d’une mise à disposition auprès d’une autre collectivité territoriale ou d’un autre établissement public. Les agents non titulaires sous CDI de la fonction publique de l’État ont également fait l’objet d’une organisation de leur carrière par un décret daté du 12 mars 2007 (24). Ces agents font désormais l’objet d’un entretien d’évaluation tous les trois ans, à la suite duquel leur rémunération est réévaluée. Ils pourront être mis à disposition dans les mêmes conditions que les fonctionnaires, ce qui suppose qu’ils resteront dans la fonction publique même si le besoin qui a motivé leur recrutement a pris fin. Il apparaît donc que les agents sous CDI sont davantage des fonctionnaires recrutés par contrat que des agents recrutés pour faire face à des besoins spécifiques des administrations.

En second lieu, les possibilités de recrutement hors concours au sein de la catégorie C ont été élargies. En 2005 a été créé le parcours d’accès aux carrières de la fonction publique (PACTE) ouverts aux jeunes non diplômés âgés de 16 à 25 ans (25). Les personnes recrutées par la voie du PACTE suivent une formation en alternance, à l’issue de laquelle ils peuvent être titularisés. Lors de la création de ce contrat, l’objectif annoncé par le ministère était d’opérer 10 % du recrutement en catégorie C par cette voie. Le recours à cet instrument a cependant été beaucoup plus large, puisqu’il a représenté 20 % des recrutements en 2006. Cette proportion devrait être encore plus élevée en 2007 car, au 31 juillet, on dénombrait déjà 600 postes proposés au Journal officiel.

Il convient de rappeler que les recrutements opérés par voie de PACTE ne constituent pas les seuls recrutements sans concours de la catégorie C. Les possibilités de recrutement sans concours dans les corps dont le grade de début est doté de l’échelle de rémunération la moins élevée de la fonction publique ont été élargies par les décrets du 28 octobre 2005 fusionnant les échelles 2 et 3 de rémunération (26). En outre, à l’occasion de la restructuration des corps de catégorie C, plusieurs décrets statutaires ont instaurés, de façon pérenne, des recrutements sans concours dans la catégorie C de la fonction publique de l’État, sur le modèle des règles applicables aux deux autres fonctions publiques (27).

Enfin, la haute fonction publique a également été concernée par l’accroissement des recrutements dérogatoires au droit commun. Dès 2005, l’accroissement des recrutements au tour extérieur dans les corps normalement pourvus par la voie de l’ENA a été annoncé. Les grands corps ont également été davantage pourvus par la voie du détachement suivi d’une intégration dans le corps de détachement. Dans ces conditions, l’annonce d’une diminution de 10 % du nombre de postes offerts au concours de l’ENA est peu significative de l’évolution des effectifs des grands corps.

2. La banalisation annoncée du recrutement de contractuels

Dans son discours du 19 septembre dernier, le président de la République a clairement fait apparaître que le principe selon lequel le statut est la règle et le contrat l’exception ne s’appliquera plus à l’avenir. Il a ainsi jugé « souhaitable qu’on laisse le choix aux nouveaux entrants entre le statut de fonctionnaire ou un contrat de droit privé négocié de gré à gré », au motif que cela donnerait « de la souplesse et du sang neuf ». Toutefois, la possibilité de « choix » évoquée resterait largement théorique puisque, probablement, les fonctionnaires resteraient recrutés par concours tandis que les autres agents se verraient proposer des contrats.

Votre rapporteur tient à rappeler que le concours est la garantie du respect de l’égalité entre les candidats à un emploi public, notamment grâce aux règles d’anonymat et au recours à un jury soumis à des règles strictes. Ce principe d’égalité est consacré par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui dispose que « Tous les citoyens, étant égaux […], sont également admissibles à toutes dignités, toutes places ou emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ». Il semble cependant avoir été jugé obsolète, le président de la République ayant déclaré vouloir « sortir d’une approche purement […] juridique, égalitariste » de la fonction publique pour « remettre dans l’administration de l’humain, de l’individualité, de la différenciation ».

L’idée selon laquelle le recrutement par contrat permettrait de diversifier la fonction publique et d’apporter du « sang neuf » est cependant très discutable. Dans le secteur privé, il ne semble pas que le recrutement par conclusion de contrats de gré à gré soit particulièrement ouvert aux minorités. De nombreuses études ont mis en évidence les discriminations dont souffrent les demandeurs d’emploi issus de minorités dites « visibles », habitant des quartiers populaires, souffrant d’un handicap ou n’ayant pas de réseau relationnel étendu. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la fonction publique a si longtemps joué le rôle d’« ascenseur social » pour les catégories sociales les moins favorisées.

Dans ce but, le projet de loi de finances pour 2008 prévoit d’ailleurs que 2 millions d’euros seront consacrés aux « allocations pour la diversité dans la fonction publique » destinées aux jeunes issus de milieux défavorisés qui préparent les concours de la fonction publique (28). En 2007, mille allocations d’un montant de 2 000 euros par an devraient ainsi être versées dans le cadre de l’opération « Parrainage pour la fonction publique », qui recouvre trois catégories de mesures :

––  le renforcement de l’information sur les concours de la fonction publique, en portant une attention particulière aux habitants des zones géographiques où ce type d’informations est souvent le plus difficile d’accès ;

—  généraliser les démarches de tutorat individuel mises en place par certaines écoles de service public. Les candidats les plus méritants pourront ainsi bénéficier d’un accompagnement individualisé de la part d’autres élèves ou d’anciens élèves en vue de la préparation des concours ;

—  la mise en place d’allocations permettant d’apporter un soutien financier aux candidats les plus méritants qui préparent les concours de la fonction publique. L’arrêté du 5 juillet 2007 relatif au régime des allocations pour la diversité dans la fonction publique prévoit que ces allocations sont attribuées sous condition de ressources et en fonction des résultats obtenus lors des études antérieures. En contrepartie, le bénéficiaire s’engage à se présenter à l’issue de l’année de préparation aux épreuves d’admissibilité de l’un des concours pour lesquels l’aide de l’État lui a été accordée et en cas de succès, de rester effectivement au service de l’État pendant cinq ans.

Dans la même optique, plusieurs ministères ont pris l’initiative de mettre en place des classes préparatoires aux concours destinés aux jeunes des zones sensibles ou d’éducation prioritaire. Ces actions témoignent que concours et diversité, loin d’être antinomiques, sont liés.

C. L’ABANDON DU SYSTÈME DE CARRIÈRE

Le système de gestion par corps des agents publics se voit accusé de tous les maux. Il serait source de « cloisonnements statutaires catastrophiques » qui ne permettent pas de « faire circuler les hommes, les idées, les compétences », en conséquence de quoi « le corps doit devenir progressivement l’exception » (29). Il est vrai que, comme le principe du concours, la gestion par corps participe de la même vision égalitariste des agents publics.

1. La promotion d’une approche « métier »

La politique de fusions de corps menée sous la précédente législature devrait pendre une nouvelle dimension à partir de 2008, puisque son objectif ne sera plus de réduire le nombre de corps pour faciliter la gestion des personnels, mais de remplacer les corps par des cadres statutaires. La gestion des ressources humaines sera ainsi davantage axée sur la notion de métier.

La création de cadres statutaires devra favoriser la mobilité des fonctionnaires. Les modalités du changement d’affectation devraient évoluer : plutôt que de demander un changement de poste, qui peut être refusé, l’agent public pourra quitter son emploi sans que l’administration s’y oppose à condition de respecter un préavis. Votre rapporteur observe que cet alignement sur les règles du secteur privé ne sera pas sans poser de problème si l’agent ne réussit pas être nommé sur un autre poste. Dans ce cas, l’agent devrait logiquement se retrouver en situation de chômage et donc percevoir les allocations créées par la loi de modernisation de la fonction publique (30). Sous prétexte de favoriser la mobilité, cette évolution apparaît défavorable aussi bien à l’administration qu’aux agents. La première devra indemniser l’agent parti tout en nommant un autre agent pour remplir ses fonctions. Les agents pourront se retrouver privés temporairement d’emploi alors même qu’ils auraient pu préférer rester affectés à leur ancien poste.

Il convient de remarquer que l’accroissement des effectifs des corps résultant des fusions permet de recourir plus facilement au tour extérieur, puisque le nombre de nominations effectuées au tour extérieur est lié au nombre total de recrutements effectués par concours ou détachement.

2. L’intégration de personnels et de méthodes issus du secteur privé

Dans son discours du 19 septembre 2007, le président de la République a mis l’accent sur la mobilité dans la fonction publique. Cette mobilité doit notamment s’exercer davantage avec le secteur privé :

—  les fonctionnaires doivent pouvoir plus facilement être orientés vers une deuxième carrière dans le secteur privé, moyennant éventuellement le versement d’un « pécule » pour qu’ils quittent la fonction publique. S’ils décident de revenir dans la fonction publique, des mécanismes de compensation seront mis en place pour éviter des pertes de rémunération trop sensibles ;

—  à l’inverse, le recrutement de personnes ayant travaillé dans le secteur privé doit être favorisé dans la fonction publique. Pour cela, dans la haute fonction publique, cent postes devraient être créés hors des catégories habituelles de rémunération pour attirer des personnes ayant géré ou dirigé des entreprises privées.

L’accroissement de la mobilité avec le secteur privé, où les rémunérations sont notoirement supérieures à celles versées dans la fonction publique, se traduira donc, à niveau de responsabilités équivalent, par le versement de traitements plus élevés aux agents issus du secteur privé qu’à ceux qui n’ont pas quitté la fonction publique. Loin de fidéliser ses agents, l’administration commettra donc des discriminations salariales au détriment de ceux qui se sont engagés à servir l’État pendant toute leur carrière. Dans ces conditions, on se saurait s’attendre à ce que l’attachement au service public garde longtemps un sens.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du jeudi 8 novembre 2007, la commission a procédé en commission élargie, dans les conditions fixées à l’article 117 du Règlement, à l’audition de M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, sur la mission « gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2008.

Au cours de cette séance, la commission a examiné les crédits du programme « fonction publique ».

M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances pour les crédits de la fonction publique Voilà plusieurs années que je demande que les crédits d’intervention et les crédits de personnel de la DGAFP soient rattachés au programme « fonction publique » et non au programme « coordination du travail gouvernemental » de la mission « gestion des finances publiques et des ressources humaines », afin que le pilotage de la fonction publique fasse l’objet d’une action au sein de ce même programme. Je regrette que cette demande n’ait pas été suivie d’effet car cela irait dans le sens d’une plus grande cohérence. Je défendrai donc un amendement sur ce point.

Nous avions également souhaité l’an dernier que l’ENA soit exemplaire dans le cadre de la politique de maîtrise de dépenses publiques. Or, alors que les effectifs des promotions diminuent, la convention d’objectifs et de moyens destinée à mieux gérer le budget de l’école n’a toujours pas été signée. Je reviens d’autant plus volontiers sur ce sujet qu’il nous est présenté cette année une nouvelle demande d’augmentation de la subvention de l’ENA et que des ponctions continuent à être opérées sur le produit de la vente de l’immeuble de la rue de l’Université – plus de douze millions d’euros au mois de juillet et encore 2,4 millions en novembre. Si je rends hommage à la qualité de la formation que dispense l’école, je m’interroge à nouveau sur les crédits qui lui sont destinés. Je défendrai donc un amendement destiné à les réduire d’un million d’euros, afin surtout de manifester ma volonté que l’ENA rentre dans la norme budgétaire.

Pour en venir au budget proprement dit, le gouvernement se donne les moyens d’honorer les engagements qu’il a pris à l’égard des syndicats. C’est d’abord vrai pour la formation : les crédits des IRA augmentent de plus de six millions d’euros et, au titre de la formation continue ministérielle, deux millions d’euros sont consacrés à l’allocation pour la diversité dans la fonction publique, qui s’adresse en particulier aux fonctionnaires des quartiers défavorisés.

C’est vrai aussi pour le renforcement du cadre juridique sur la protection sociale complémentaire des fonctionnaires dans la mesure où un arrêt du Conseil d’État et une directive européenne interdisent toute intervention financière directe de l’État en faveur des ministères.

C’est vrai surtout aussi pour l’action sociale interministérielle, dont l’enveloppe augmente de 31 % en raison de la montée en charge du chèque emploi service universel (CESU) pour la garde des jeunes enfants, de l’extension des aides à l’installation des personnels et des prêts mobilité, qui répond à un vrai besoin et à une demande des agents, en particulier dans les plus grandes régions.

De façon plus générale, ce budget de 224 millions d’euros prend en compte l’individualisation des prestations qui répond à une aspiration nouvelle des fonctionnaires. En effet, on se situe de moins en moins dans une logique collective qui conduit par exemple à demander l’ouverture de restaurants universitaires, et de plus en plus dans une logique individuelle, avec l’octroi de chèques-restaurant.

Les fonctionnaires n’ayant plus les mêmes besoins, l’État doit redéfinir sa stratégie pour la fonction publique. Je considère pour ma part qu’il est extrêmement utile de s’interroger sur la politique des effectifs. Le budget 2008 prévoit 22 791 suppressions de poste. Le rapport les décrit en détail car il ne s’agit pas uniquement de suppressions nettes : certaines sont liées à des non-remplacements de départs en retraite, d’autres à des opérations de décentralisation. Cette action s’inscrit dans une politique générale de dépense publique : en cinq ans, avec le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, soit 155 000 départs non remplacés, l’économie devrait atteindre 4,5 milliards d’euros. Je ne partage pas à ce propos le sentiment de mon collègue Muet car les efforts varient en fonction des priorités de l’État. Ainsi, certains ministères, comme l’agriculture, l’économie et la défense, vont au-delà du non remplacement d’un départ sur trois tandis que d’autres, comme le logement, la ville et la justice, bénéficient de créations de postes. On voit bien que l’on se garde d’appliquer une norme stricte de façon trop brutale.

Qui plus est, ce mouvement résulte d’un certain nombre d’audits et fait suite aux contrats pluriannuels de performance de plusieurs ministères dont celui de l’économie et des finances, celui de l’écologie et celui des affaires étrangères. Aujourd’hui, tout ceci s’inscrit dans la RGPP conduite sous la direction du secrétaire général de l’Élysée et du directeur de Cabinet du Premier ministre.

Les dépenses de personnel du titre II progressent malgré une réduction des effectifs. Cela devrait conduire à s’intéresser de plus près aux cotisations et aux contributions sociales, qui sont en augmentation de deux milliards d’euros, l’augmentation annuelle des pensions étant estimée 4 % pour la période 2008-2012.

Je souhaite par ailleurs revenir sur une question que j’avais également soulevée les années précédentes, celle des opérateurs d’État. Dans le cadre de la politique immobilière, ces opérateurs sont des sources de cantonnement pour l’immobilier, mais aussi pour les personnels. Le PLF 2008 recense 649 opérateurs contre 798 en 2007, or, en dépit de la politique de réduction globale des effectifs on note une augmentation de 247 ETPT, dont 209 sont liés à la création de nouveaux opérateurs. Ne conviendrait-il pas de veiller à ce que les opérateurs soient soumis, en matière d’effectifs comme de gestion immobilière, aux mêmes règles que l’État ?

En ce qui concerne le pouvoir d’achat des fonctionnaires, une clarification me paraît nécessaire. Pourquoi, en effet, se fonder uniquement sur la variation de la valeur du point sans prendre en compte des paramètres comme l’avancement, les promotions, le régime indemnitaire, les rémunérations accessoires, l’intéressement collectif ou individuel, les heures supplémentaires ou l’action sociale ? Je suggère donc dans le rapport d’harmoniser l’estimation de l’augmentation du pouvoir d’achat et de simplifier les feuilles de paye. On pourrait en particulier dans le GVT (glissement vieillesse technicité) distinguer le V et les mesures automatiques du T et des choix discrétionnaires.

Ce budget respecte les engagements pris par le Président de la République en ce qui concerne l’intéressement des fonctionnaires aux économies réalisées grâce à la baisse des effectifs. En 2008, 450 millions d’euros d’économies seront réalisées pour 22 800 non-remplacements, 225 millions d’euros venant ainsi s’ajouter aux mesures catégorielles.

Il me semble également nécessaire de continuer à aller vers plus de souplesse dans la gestion de la fonction publique. Il conviendrait en particulier de déconnecter la détermination du point pour les trois fonctions publiques car le système actuel empêche d’accomplir les efforts nécessaires, en particulier pour la fonction publique hospitalière.

Je plaide également en faveur d’une plus grande individualisation des rémunérations et des carrières, en particulier avec une extension de la rémunération au mérite, non seulement pour les agents mais aussi pour leur service.

[…]

M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis de la commission des lois sur les crédits de la fonction publique – La fonction publique se trouve sous les projecteurs de l’actualité. D’abord, le Gouvernement a annoncé des suppressions d’emplois, dont 22 921 figurent dans le budget pour 2008. On peut en déduire que l’objectif prioritaire de la politique de gestion des ressources humaines de l’État est la suppression d’emplois. En revanche, parmi les mesures salariales qui ont été annoncées, ne figure aucune revalorisation du point d’indice, alors que la partie indiciaire représente 85,3 % de la rémunération des fonctionnaires. Quant aux heures supplémentaires défiscalisées, tous les fonctionnaires n’en font pas. Vous avez par ailleurs lancé un cycle de conférences sur la fonction publique, qui devrait déboucher sur un livre blanc, et, enfin, l’ensemble des organisations syndicales de la fonction publique ont annoncé une journée de grève pour le 20 novembre.

Je veux d’abord noter, monsieur le ministre, qu’à la date prévue, la commission n’avait reçu des réponses qu’à 65 % du questionnaire qu’elle vous avait adressé. C’est un peu mieux que l’année dernière, mais le nombre des questions était bien moins élevé. À ce jour, une vingtaine de questions n’ont toujours aucune réponse. Je vous encourage à faire mieux pour l’an prochain.

Le premier objectif du programme « fonction publique » est la promotion d’une nouvelle gestion des ressources humaines dans la fonction publique d’État. Or, compte tenu du nombre de départs en retraite et des recrutements nécessaires, une connaissance précise des effectifs et des missions exercées est indispensable au contrôle parlementaire. Il est donc nécessaire d’élaborer un indicateur plus clair pour la gestion prévisionnelle des emplois et des effectifs.

Un objectif a été fixé pour rendre le service public plus efficace – synonyme d’économies d’emplois, et non de recherche de qualité du service rendu – mais sans qu’ait été réglée au préalable la question des missions que l’État doit continuer à exercer ou abandonner. Sur quoi s’est donc fondé le Gouvernement pour décider des postes qui seraient supprimés ? En ce qui concerne la part de l’encadrement concerné par le dispositif de rémunération à la performance, elle serait de 18 % en 2007.

Vous proposez de porter ce taux à 51 % en 2008 et à 100 % en 2010. Peut-être votre approche est-elle un peu réductrice et je tends à considérer que le manque de pertinence de cet indicateur révèle l’insuffisance des critères d’évaluation des agents. Si l’on veut vraiment rémunérer les personnels à la performance, il faut mobiliser des moyens financiers et définir des objectifs pertinents et évaluables. A ce stade, j’estime que l’État ne s’en donne pas vraiment les moyens.

L’objectif 2 du programme a trait à l’optimisation de la formation des fonctionnaires. Or, à l’inverse de ce qui est prévu pour l’ENA et les IRA, je déplore que les crédits accusent une baisse globale de 28,4 %. Comment pourra-t-on affirmer le droit individuel à la formation des agents avec des crédits en baisse ? Je regrette aussi qu’aucun indicateur de performance concernant l’ENA et les IRA ne soit inclus dans le périmètre du programme. N’est-il pas en effet impératif de mesurer l’efficacité de l’ensemble des formations ? Je souhaite que ce problème soit rapidement résolu.

L’objectif 3 concerne l’optimisation de la gestion des prestations d’action sociale interministérielles. Je remarque que la montée en puissance du chèque emploi service universel demeure limitée, puisque le taux de pénétration de la prestation ne devrait pas dépasser 65 % à l’horizon 2010. L’on peut d’ores et déjà se demander si la dotation de 21 millions prévue pour 2008 sera suffisante, compte tenu du nombre de bénéficiaires potentiels.

Après concertation avec la Commission européenne et le Conseil d’État, une disposition législative – complétée d’un décret d’application pour la seule fonction publique d’État – a ouvert la possibilité aux collectivités publiques de subventionner les mutuelles de fonctionnaires et d’aider leurs agents à adhérer à une mutuelle. Quand le dispositif sera-t-il applicable à la fonction publique territoriale et à la fonction publique hospitalière ?

Quelles sont les intentions du Gouvernement en matière salariale pour 2008 et les années suivantes ? Comment envisagez-vous de mener le dialogue social sur le pouvoir d’achat des fonctionnaires, sachant que la valeur du point a diminué de 6 à 7 % ? Et ne me répondez pas, monsieur le ministre, que les mesures catégorielles concernant la catégorie C ou les 25 000 agents en fin de grade peuvent compenser la perte globale !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Monsieur le ministre, je vous donne la parole pour répondre à toutes ces questions.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – Merci pour toutes ces questions et bravo aux rapporteurs pour leur excellent travail !

[…]

Je partage le souci de M. Tron d’aller vers plus de cohérence dans la présentation budgétaire s’agissant du programme « Fonction publique ». Il n’a pas été possible de le faire cette année mais je m’y emploierai pour 2009.

C’est sans doute parce qu’elle est emblématique de la fonction publique que l’ENA, même éloignée de Paris, suscite tant d’intérêt dans cette assemblée. À mon sens, c’est à la formation dans l’ensemble de la fonction publique qu’il faudrait aujourd’hui réfléchir.

L’ENA est une belle école, qui fournit des fonctionnaires de grande qualité et qui fait des efforts en ramenant de 90 à 80 le nombre de ses diplômés. La convention d’objectifs et de gestion est aujourd’hui rédigée ; elle est en cours de discussion entre l’établissement et le Gouvernement et elle sera signée avant la fin de l’année.

S’agissant des crédits, l’effort demandé par l’établissement en 2008 est supérieur au montant qui résulterait de l’adoption de l’amendement de M. Tron. L’ENA devra supporter l’an prochain des charges supplémentaires à hauteur de 2,5 millions d’euros. L’augmentation prévue de la subvention pour charges de services publics est en fait limitée à 1,1 million d’euros car 1,4 million est redéployé au sein même de l’école, la diminution des postes offerts représentant une économie de 450 000 euros et les rationalisations permettant d’économiser 850 000 euros.

L’extension envisagée, sur un terrain annexe à Strasbourg, devrait être financée par une partie du produit de la cession de l’immeuble de la rue de l’Université.

En ce qui concerne les IRA, qui dispensent une excellente formation, il me semble que nous allons dans la bonne direction.

J’en viens aux négociations salariales. Le cycle de discussions « à froid » que nous avons entamé doit se poursuivre dans le même esprit constructif malgré le climat social tendu. Les discussions portent sur deux sujets, le dialogue social et le pouvoir d’achat. Sur le pouvoir d’achat, il faut commencer par se mettre d’accord sur la façon dont nous mesurons – hors mesures 2007 et 2008 bien entendu – l’augmentation du pouvoir d’achat. Y intègre-t-on seulement le point d’indice, ou aussi le GVT, les mesures catégorielles ? Il faut au moins que nous nous mettions d’accord là-dessus. On peut aussi se demander si l’on distingue dans le GVT le « V » et le « T ». Le « T » correspond-il à l’individualisation des rémunérations, à l’ancienneté ? Beaucoup de réponses ont déjà été apportées. Ce qu’il faut, c’est avoir une réponse commune à tous. Et que regarde le fonctionnaire dans sa feuille de paye ?

Il faudrait prévoir un rendez-vous annuel coordonné avec la construction du budget. Cela suppose, comme je l’ai dit, que nous nous mettions d’accord sur les fondamentaux : c’est l’objet de ces discussions. Il n’y a pas eu d’accord salarial depuis une dizaine d’années. Est-ce à dire que personne n’a intérêt à en signer ?

Il faut aussi – comme nous y invite Georges Tron – clarifier le mode de rémunération. Qu’est-ce qui doit être individualisé ? Tout peut être évalué, et c’est heureux, car ce processus permet d’assurer l’équité dans la progression des parcours professionnels. Si tout le monde avance en même temps, c’est inéquitable !

S’agissant des opérateurs, je suis d’accord : leurs effectifs ne devraient pas augmenter en 2008. Il me semble que nous devons de plus en plus avoir avec eux un rapport de « sanction » même si le terme est peut-être un peu fort. Cela surtout valable pour l’immobilier. Nous avons trois ans pour procéder au recensement de l’immobilier. Peut-être pourrons-nous le faire en un an et demi, mais nous sommes en retard, car nous nous heurtons à une certaine mauvaise volonté. Or il n’y a pas de raison que l’État continue à subventionner des opérateurs qui disposent par ailleurs d’un patrimoine immobilier qui pourrait être cédé. Nous allons soumettre les opérateurs aux mêmes règles que l’État, que ce soit dans le domaine de l’immobilier ou dans celui des emplois, et nous aurons à cœur que les représentants de l’État dans les conseils d’administration le fassent entendre.

[…]

M. Derosier a posé plusieurs questions auxquelles je n’ai pas encore répondu.

En ce qui concerne le taux de réponse au questionnaire, qui est d’environ 80 %, je ne peux qu’exprimer mes regrets. J’essaierai de faire mieux l’année prochaine. Quant aux indicateurs, je dois préciser que l’indicateur de performance pour le pilotage de la gestion des ressources humaines est déjà prévu dans les projets annuels de performance. Il permettra d’apprécier, pour chaque ministère, l’état de mise en œuvre par exemple du répertoire des métiers ou des scénarios quantifiés d’évaluation des emplois. Cet indicateur n’est pas encore renseigné, mais j’espère qu’il le sera pour la loi de règlement. La formation des élèves des IRA fait l’objet d’un indicateur de qualité qui repose sur des sondages auprès des élèves et des employeurs. La convention d’objectifs et de gestion de l’ENA contient aussi de tels indicateurs. Tout cela pourra être complété par la suite : l’essentiel est de rester très souple.

Les dépenses de formation ne peuvent pas avoir diminué de 20 % : les crédits interministériels se montent à 3,4 millions, contre 3,54 l’année dernière et 2,7 en 2006. En revanche, il peut y avoir des différences plus fortes selon les échelons. Les crédits de la formation au niveau central ont ainsi été réduits au profit du niveau déconcentré, car 97 % des agents de l’État travaillent hors administration centrale.

En ce qui concerne le CESU, le taux de pénétration augmente progressivement. Il a d’abord fallu passer des marchés publics, pour le cas des enfants de trois à six ans, pour choisir le gestionnaire. Les premiers chèques seront disponibles en décembre. Les crédits pour 2008 ont été, cela va de soi, fixés en fonction des besoins estimés.

En ce qui concerne les suppressions d’emplois, et sans entrer dans le débat politique, vous avez demandé sur quelles bases techniques nous nous étions fondés. Il va de soi que nous n’avons pas appliqué bêtement un taux de réduction uniforme à tous les ministères. Nous sommes partis de la situation de chacun, en nous fondant sur des audits et sur leurs propres réflexions et nous avons essayé d’aller le plus loin possible sans trop chahuter les missions de service public. Il y a des gisements importants dans certains ministères. L’éducation nationale, qui a sa propre problématique, est en dessous d’un départ sur deux non remplacé ; d’autres ministères sont au-dessus. J’ajoute que réduire les effectifs de l’État, les mettre en tension, est aussi un moyen de provoquer la réforme. C’est au moment où il y a tous ces départs à la retraite qu’il faut agir, pas quelques années après. Nous sommes à ce moment de vérité.

En ce qui concerne les mutuelles, les bases sur lesquelles l’aide était fondée ont été remises en cause. Un dispositif semblable à celui qui est en vigueur dans la fonction publique d’État est en cours de concertation avec la DGCL. Les discussions devraient aboutir début 2008. Quant à la politique salariale, l’État a toujours rempli ses obligations. Je ne veux pas afficher d’objectifs pour 2008 parce que nous avons besoin d’une discussion sur le fond. Il est évident que le pouvoir d’achat de la fonction publique est un élément aussi déterminant que celui du secteur privé, et qu’il se trouve au cœur de notre action. Il n’y donc pas d’inquiétude à avoir sur la rémunération des fonctionnaires en 2008, même si le contexte budgétaire est très tendu. Les fonctionnaires doivent prendre leur part dans l’effort de la nation et nous aurons un dialogue entre gens responsables à ce sujet.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances Merci, monsieur le ministre, de la volonté que vous avez manifestée de répondre à toutes les questions d’une manière aussi précise que possible. Nous allons passer aux questions suivantes.

M. Michel Piron – Ainsi que cela a été déjà dit, la gestion prévisionnelle des effectifs prend une importance prédominante à une époque de départs en retraite massifs. Vous avez parlé d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs. Je pense que les premiers seront assez aisément renseignés, mais quel est l’horizon pour les seconds ? Il y a urgence en la matière, car le choix des postes à remplacer ne peut être fondé uniquement sur des critères quantitatifs.

Par ailleurs, on entend périodiquement réclamer une plus grande fongibilité : les fonctionnaires territoriaux se sentent parfois bridés par un fléchage excessif des crédits. Je n’ignore pas qu’il y a des tensions inévitables, un équilibre à trouver entre deux visions contraires – l’une « verticale » qui facilite la communication entre le centre et la périphérie et l’une « horizontale » qui permet à la périphérie d’exercer ses responsabilités de façon plus réactive. Quelles sont les évolutions prévisibles en la matière ?

M. Georges Tron – En ma qualité de président du Conseil de l’immobilier de l’État, vous ne serez pas surpris que le fil rouge de ma dernière intervention soit l’immobilier.

Ne croyez pas que je veuille faire de la cession des locaux parisiens de l’ENA un symbole de mauvaise gestion, mais je souhaite tout de même revenir sur cette opération. En effet, la cession des locaux de la rue de l’Université a rapporté 46,4 millions, 85 % de ce produit étant affectés au BOP des services du Premier ministre, sur le compte d’affectation spéciale, en vue de clore une série d’opérations liées au regroupement de l’école à Strasbourg. Dans la LFR pour 2004, des crédits complémentaires ont été votés pour le déménagement et, en 2006, une nouvelle dotation de 800 000 euros a été allouée pour couvrir des loyers résiduels. En juillet 2007, une aide supplémentaire de 12 millions a été allouée et 2,4 millions ont été dégagés pour la maison des élèves de Strasbourg. Je n’ai pas fait le compte exact, mais l’on peut raisonnablement estimer qu’il ne reste que 25 millions sur les 46 millions de départ.

Alors que Louis Giscard d’Estaing vous a régulièrement sensibilisé sur la nécessité de « sanctuariser » le produit de la cession, notre nouvel amendement exprime simplement le fait qu’il vient un moment où il faut savoir dire non. Cette affaire est emblématique de l’état d’exception que l’État s’arroge volontiers à lui-même. Sans doute vos arguments, monsieur le ministre, nous conduiront-ils à le retirer, mais il reste que la situation de l’ENA est pour le moins surprenante !

[…]

M. Éric Woerth, ministre du budget – Je vais donc m’efforcer de répondre aussi précisément que possible à cette nouvelle série de questions !

Monsieur Piron, la gestion qualitative des emplois et des carrières dans la fonction publique, c’est aussi essentiel que difficile à faire ! Plusieurs initiatives intéressantes sont cependant en cours. Je pense notamment au répertoire des métiers de la fonction publique, qui permet d’appréhender les choses autrement, en raisonnant en termes de métiers plutôt que de corps statutaires…

M. Michel Piron – À ce sujet, la FPT est très en avance.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Des scénarios de GPEC existent dans les différents ministères et toutes les DRH sont sensibilisées. Les effets de ces actions restent difficiles à évaluer. Ce qui est certain, c’est que lorsque l’on contracte les effectifs, la machine, mise sous tension, a plus que jamais besoin d’une gestion fine des ressources humaines. Raréfiée, la ressource doit être optimisée. Sans doute faudra-t-il à cet égard se doter de capacités d’expertise extérieures.

La LOLF tend à redéployer les moyens plus facilement en contrepartie de responsabilités supplémentaires. Le nombre de BOP a été réduit. Il faut veiller à ce que les gestionnaires en administration centrale ne les flèchent pas de façon inconsidérée jusqu’à ce qu’ils deviennent de véritables carcans sur le plan local. Un chantier est ouvert sur l’organisation de l’état local dans le cadre de la RGPP.

S’agissant de l’ENA, 10 millions seront consacrés au désendettement sur les 46 millions résultant de la vente du site.

M. Georges Tron, rapporteur spécial La totalité de la somme devait être sanctuarisée.

M. Eric Woerth, ministre du budget Je ne suis pas responsable des décisions prises précédemment.

[…]

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Je vous remercie, Monsieur le ministre, pour votre intervention.

*

* *

À l’issue de l’audition de M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, la Commission a examiné pour avis les crédits du programme « fonction publique » de la mission « gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2008.

Votre rapporteur s’étant prononcé contre l’adoption des crédits, la Commission n’a pas émis un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « fonction publique » de la mission « gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2008.

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

UNION DES FÉDÉRATIONS C.F.D.T. DES FONCTIONS PUBLIQUES ET ASSIMILÉES

—  M. Éric FRITSCH, secrétaire général

—  Mme Maïté DRUELLE, secrétaire générale adjointe

—  Mme Brigitte JUMEL, secrétaire générale adjointe

FÉDÉRATION GÉNÉRALE DES FONCTIONNAIRES C.F.T.C.

—  M. Michel MOREAU, président

—  M. Denis LEFEBVRE, secrétaire général

FÉDÉRATION SYNDICALE UNITAIRE (F.S.U.)

—  Mme Anne FERAY, secrétaire nationale

—  M. Jean-Michel DREVON, secrétaire national

—  M. Michel ANGOT, membre du conseil national

UNION GÉNÉRALE DES FÉDÉRATIONS DE FONCTIONNAIRES C.G.T.

—  M. Patrick HALLINGER, secrétaire national

U.N.S.A. FONCTIONNAIRES

––  Mme Elisabeth DAVID, secrétaire générale

—  M. Jérôme DARSY, secrétaire national

—  M. Guy GRAFEUILLE, secrétaire national

© Assemblée nationale

1 () Comité interministériel d’audit des programmes, Avis sur les programmes n° 129 « Coordination du travail gouvernemental » et n° 148 « Fonction publique », rapport d’audit n° 2006-AI-R-51, décembre 2006.

2 () La première session, ouverte en octobre 2005, a compris 24 participants, dont 10 Français, 12 Allemands, un Estonien et une Hongroise.

3 () Compte tenu de l’importance des sommes en jeu, il a été décidé de lancer un nouvel appel d’offres plutôt que de conclure un avenant au contrat passé avec ACE, filiale des groupes Accor Services France et Caisses d’Épargne, qui gère le CESU 0-3 ans.

4 () L’article 18 du décret n° 90-437 du 28 mai 1990 définit la mobilité subie comme un changement de résidence rendu nécessaire par une mutation d’office, une promotion de grade, une nomination sur un autre emploi, une réintégration dans une localité différente ou l’accomplissement d’une obligation de mobilité.

5 () Le CRESERFI est l’établissement financier du Crédit social des fonctionnaires (CSF).

6 () Cet article dispose que « Des conventions peuvent être conclues par l’État et ses établissements publics n’ayant pas le caractère industriel et commercial avec des organismes ou sociétés de construction ou de construction et de gestion de logements ainsi qu’avec des organismes gestionnaires de la participation des employeurs à l’effort de construction qui s’engagent, en contrepartie d’une contribution financière revêtant la forme de prêts ou de subventions, à réserver des logements destinés à être loués à des agents de l’État ou de ces établissements publics. Ces conventions doivent être conformes à une convention type déterminée par arrêté conjoint des ministres des finances et du logement. Elles sont signées, au nom de l’État, par les ministres qui peuvent déléguer ce pouvoir au représentant de l’État dans le département et, au nom des établissements publics, par les autorités habilitées en vertu de leurs statuts. »

7 () Union des fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilés (UFFA-CFDT) ; Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF-CGT) ; Union interfédérale des agents de la fonction publique (UIAFP-FO) ; Fédération syndicale unitaire (FSU) ; UNSA-Fonctionnaires.

8 () Union fédérale des cadres des fonctions publiques (Fonction publiques-CGC) ; Fédération générale CFTC des syndicats chrétiens de fonctionnaires, agents de l’État et assimilés (FGF-CFTC) ; Union syndicale Solidaires Fonctions publiques et assimilés.

9 () La loi de finances pour 2006 prévoyait seulement 5 430 suppressions.

10 () Au titre de l’année 2006, le point d’indice a été réévalué de 0,5 % au 1er juillet 2006 puis de 0,8 % au 1er février 2007. En outre, au 1er novembre 2006, le traitement de chaque fonctionnaire a été augmenté d’un point. Ces mesures indiciaires n’ont toutefois pas permis de compenser les effets de l’inflation en 2006 (1,5 %).

11 () Décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 portant application aux agents publics de l’article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (Journal Officiel du 5 octobre 2007).

12 () Décret n° 2007-1373 du 19 septembre 2007 relatif à la participation de l’État et de ses établissements publics au financement de la protection sociale complémentaire de leurs personnels.

13 () L’arrêté du 24 novembre 2006 fixant l’échelonnement indiciaire applicable aux grades de la catégorie B régis par le décret n° 94-1016 du 18 novembre 1994 est entré en vigueur rétroactivement au 1er novembre 2006. L’article 57 de la loi précitée du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique avait prévu cette rétroactivité afin que les mesures d’application du protocole d’accord du 25 janvier 2006 puissent entrer en vigueur à la date annoncée, malgré le retard pris pour leur élaboration.

14 () Décret n° 2006-1441 du 24 novembre 2006 modifiant le décret n° 94-1016 du 18 novembre 1994 fixant les dispositions statutaires communes applicables à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B ; décret n° 2006-1689 du 22 décembre 2006 modifiant le décret n° 2002-870 du 3 mai 2002 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux cadres d’emplois des fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique territoriale et les décrets portant statut particulier de cadres d’emplois de fonctionnaires de la catégorie B ; décret n° 2007-837 du 11 mai 2007 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique hospitalière.

15 () Décrets n° 2007-654 du 30 avril 2007 portant modification de certaines dispositions statutaires relatives à des corps de catégorie B de la fonction publique de l’État et n° 2007-656 du 30 avril 2007 portant modification de certaines dispositions statutaires relatives à des corps de catégorie B de la fonction publique de l’État.

16 () Décrets n° 2006-778 du 30 juin 2006 portant attribution d’une bonification indemnitaire à certains fonctionnaires et militaires et n° 2006-1481 du 29 novembre 2006 portant attribution d’une bonification indemnitaire à certains personnels de la fonction publique hospitalière.

17 () Le DIF a été créé dans le secteur privé par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.

18 () Les modalités d’application de la RAEP ont été fixées par une circulaire du ministre de la fonction publique datée du 30 mars 2007.

19 () La Cour des comptes définit quatre orientations susceptibles d’améliorer la gestion prévisionnelle des ressources humaines :

–  améliorer le pilotage des ressources humaines de l’État ;

–  moderniser les systèmes d’information des ressources humaines (SIRH) ;

–  réexaminer sans a priori les structures et les pratiques qui freinent la mobilité ;

–  mieux placer la formation au service des besoins futurs.

20 () Voir page 8.

21 () SAP (Systems, Applications, and Products for data processing) est un progiciel de gestion intégré.

22 () Conseil d’État, rapport public 2003, page 272.

23 () Une enquête organisée par la DGAFP a fait apparaître que, parmi les 9 321 agents contractuels ayant plus de six ans d’ancienneté au 1er octobre 2006, 8 932 ont bénéficié d’un renouvellement de leur CDD en CDI, dont 68 % d’agents relevant du ministère de l’éducation nationale.

24 () Décret n° 2007-338 du 12 mars 2007 portant modification du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’État pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.

25 () Le PACTE a été créé par l’ordonnance n° 2005-901 du 2 août 2005 relative aux conditions d’âge dans la fonction publique et instituant un nouveau parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique de l’État.

26 () Décrets n° 2005-1344 du 28 octobre 2005 portant modification du décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégorie C et n° 2005-1345 du 28 octobre 2005 portant modification du décret n° 87-1108 du 30 décembre 1987 fixant les différentes échelles de rémunération pour la catégorie C des fonctionnaires territoriaux.

27 () Il s’agit des décrets n° 2006-1760 du 23 décembre 2006 relatif aux dispositions statutaires communes applicables aux corps d’adjoints administratifs des administrations de l’État, n° 2006-1761 du 23 décembre 2006 relatif aux dispositions statutaires communes applicables aux corps d’adjoints techniques des administrations de l’État et n° 2007-655 du 30 avril 2007 modifiant plusieurs décrets statutaires relatifs à des corps de fonctionnaires de catégorie C de la fonction publique de l’État.

28 () Ces crédits proviennent du budget du ministère de l’enseignement supérieur.

29 () Discours de M. Nicolas Sarkozy, président de la République, devant l’IRA de Nantes le 19 septembre 2007.

30 () L’article 62 de cette loi a ouvert aux fonctionnaires de l’État le bénéfice des allocations de chômage en cas de perte d’involontaire d’emploi.