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N° 281

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2008 (n° 189),

TOME IV

JUSTICE

ACCÈS AU DROIT

PAR M. Jean-Paul GARRAUD,

Député.

Voir le numéro : 276 (annexe 25).

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, les réponses devaient parvenir au rapporteur au plus tard le 10 octobre 2007.

À cette date, la Chancellerie avait transmis 86 % des réponses.

INTRODUCTION 5

I.– LA JUSTICE JUDICIAIRE 7

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL 9

1. L’évolution des emplois 9

2. L’évolution des traitements et des primes 15

a) L’évolution du régime indemnitaire des magistrats 15

b) L’évolution du régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires 16

B. L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT : LA MAÎTRISE DES FRAIS DE JUSTICE 18

1. Une progression contenue 19

2. Une meilleure maîtrise de l’exécution des frais de justice 22

a) Les actions de maîtrise des frais de justice 22

b) La mise en œuvre des outils de suivi et d’analyse 23

C. LES PRIORITÉS DU PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES 24

1. La sécurisation des juridictions 24

2. Les technologies de l’information destinées à améliorer le fonctionnement de la justice 24

a) La visioconférence 25

b) La dématérialisation des documents et des procédures 26

D. L’ACTIVITÉ DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES 27

1. L’activité judiciaire civile 28

a) La Cour de cassation 28

b) Les cours d’appel 28

c) Les tribunaux de grande instance 29

d) Les tribunaux d’instance 30

e) Les juridictions de proximité 32

2. L’activité judiciaire pénale 32

a) La Cour de cassation 32

b) Les cours d’appel 33

c) Les tribunaux correctionnels 33

d) Les tribunaux de police 34

e) Les juridictions de proximité 34

3. La mesure de la performance de la justice pénale 35

a) Le taux de réponse pénale 35

b) L’exécution des décisions de justice pénale 36

c) Les délais d’inscription au Casier judiciaire national 36

d) La durée des procédures pénales 38

II. —  L’ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE 39

A. L’ÉVOLUTION DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE 40

1. La progression du nombre des bénéficiaires 41

2. Des améliorations récentes 41

3. Des pistes de réforme 42

4. Le contentieux autour du taux de TVA applicable 42

B. LES CRÉDITS EN FAVEUR DE L’ACCÈS AU DROIT, DE LA MÉDIATION FAMILIALE ET DE L’AIDE AUX VICTIMES 43

1. L’aide aux victimes 43

a) Le renforcement des dispositions législatives favorables aux victimes 43

b) L’action du ministère en faveur des victimes 44

c) Le renforcement de l’indemnisation des victimes 45

2. Le développement de l’accès au droit 46

3. La médiation familiale 46

III.– LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE ET LES ORGANISMES RATTACHÉS 47

A. UNE STABILISATION DES EFFECTIFS ET DES MOYENS DE L’ADMINISTRATION CENTRALE 47

B. LE RENFORCEMENT DES MOYENS DE LA COMMISSION NATIONALE INFORMATIQUE ET LIBERTÉS 48

EXAMEN EN COMMISSION 49

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 73

MESDAMES, MESSIEURS,

Alors que le projet de loi de finances prévoit que budget total de l’État pour 2008 ne progresse que de 1,6 %, celui de la Justice augmente de 4,5 % après une hausse de 5 % en 2007, de 4,6 % en 2006 et de 4 % en 2005. Il s’élève ainsi, au total, à 6,52 milliards d’euros, ce qui représente 2,40 % du budget de l’État, contre 1,69 % en 2002. Depuis 2002, le budget de la Justice a donc augmenté de près de 2 milliards d’euros. Cette priorité de la nouvelle législature marque la volonté du Gouvernement de poursuivre l’effort entrepris pour renforcer les fonctions régaliennes de l’État.

En ce qui concerne la mise en œuvre de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ), le taux d’exécution des crédits « hors investissement » (correspondant aux anciennes dépenses ordinaires et incluent les crédits de personnel) peut être estimé, à la fin de l’année 2007, à 72,7 % pour les services dépendant de la Chancellerie.

En revanche, l’exécution de la programmation en investissement s’avère très éloignée de la prévision. En effet, le ministère de la Justice a rencontré des difficultés en matière de crédits d’investissement, qui l’ont conduit à annuler certaines des autorisations d’engagement affectées à l’agence de maîtrise d’ouvrage des travaux du ministère de la Justice, les conventions signées ayant porté sur des montants trop importants au regard des crédits de paiement susceptibles d’être alloués au cours des prochaines années. Le taux d’exécution prévisible des crédits de paiement effectivement délégués aux ordonnateurs à la fin de l’année 2007 devrait être de 55,1 % pour les crédits relevant de la Chancellerie. Les projets devront donc être réalisés au-delà de la période de programmation.

Par ailleurs, le Gouvernement a engagé la nécessaire refonte de la carte judiciaire. La réforme sera mise en œuvre de 2008 à 2011. Premier élément de cette réforme, des pôles de l’instruction seront installés à partir de mars 2008 dans les juridictions importantes. En 2008 devrait également débuter la réforme de la carte des conseils de prud’hommes. Les réformes de 2008 n’auront pas immédiatement d’impact budgétaire. Dès lors, seule une dotation de 1,5 million d’euros a été prévue pour l’accompagnement social, afin que la situation particulière de chaque fonctionnaire soit prise en compte. En 2009 devrait être entreprise la réforme de la carte des tribunaux d’instance et celle des tribunaux de commerce. La réforme de la carte des tribunaux de grande instance interviendrait, elle, en 2010.

I.– LA JUSTICE JUDICIAIRE

Le programme « Justice judiciaire » regroupe les crédits nécessaires au fonctionnement de la justice civile, pénale, commerciale et sociale. Il concerne les magistrats et les agents des services judiciaires (fonctionnaires et contractuels), ainsi que plus de 20 000 juges non professionnels bénévoles ou rémunérés à la vacation (juges consulaires, conseillers prud'hommes, assesseurs des tribunaux pour enfants, juges de proximité…), assistants et agents de justice, déployés dans 1 159 juridictions judiciaires (1). Les services judiciaires ont pour mission principale de rendre la justice. Ils ont également la charge de la conduite des politiques publiques orientées vers la prévention et la dissuasion de la délinquance ainsi que vers la réinsertion. Ils participent en outre aux politiques publiques menées en matière économique ou sociale (prévention des difficultés des entreprises, protection des mineurs, droit du travail).

La gestion des juridictions est assurée exclusivement par des personnels des services judiciaires et comprend deux fonctions :

—  le support logistique de l'activité judiciaire proprement dite revient aux greffiers (catégorie B) et agents de catégorie C, encadrés par des greffiers en chef (catégorie A). Les greffiers assistent en outre les magistrats dans leurs missions, notamment par le suivi et l'authentification des procédures ;

—  la gestion des moyens humains et matériels est pour l'essentiel assurée de manière déconcentrée au niveau des chefs de cour. Ceux-ci disposent à cet effet d'un service administratif régional (sar), composé de fonctionnaires et contractuels des services judiciaires, professionnels de la gestion, et dirigé par un coordonnateur, magistrat ou greffier en chef, placé sous l'autorité des chefs de cour.

Les services judiciaires assurent par ailleurs la formation de leurs personnels. L'École nationale de la magistrature (enm), constituée sous la forme d'un établissement public, est en charge de la formation initiale et continue des magistrats professionnels et non professionnels (juges de proximité, juges consulaires). La formation initiale des greffiers et greffiers en chef et la formation continue de l'ensemble des fonctionnaires des services judiciaires incombent à l'École nationale des greffes (eng), service à compétence nationale. Enfin, le budget des services judiciaires inclut les crédits du Conseil supérieur de la magistrature (csm), organe constitutionnel qui, par ses missions en matière de nomination des magistrats du siège et du parquet et ses compétences disciplinaires sur le corps judiciaire, est le garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire.

Avec une dotation de 2 730,2 millions d’euros en crédits de paiement, le programme « Justice judiciaire » est en progression de 5,1 % par rapport à 2007 :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA JUSTICE JUDICIAIRE

(en millions d’euros)

Actions du programme « Justice judiciaire »

LFI 2007

PLF 2008

Évolution

Traitement et jugement des contentieux civils

735,1

857,1

16,6 %

Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales

936,4

921,0

– 1,6%

Cassation

56,9

61,1

7,4 %

Conseil supérieur de la magistrature

1,2

6,5

NS

Enregistrement des décisions judiciaires

13,5

13,1

– 3,0%

Soutien

740,8

752,9

1,6 %

Formation (ENM, ENG)

85,1

90,8

6,6 %

Support à l’accès au droit et à la justice

27,7

27,6

– 0,4%

Total

2 596,8

2 730,2

5,1 %

Source : projet annuel de performances pour 2008

La progression de 16,6 % des crédits de l’action « Traitement et jugement des contentieux civils » est en réalité de 13 % à périmètre constant. L’augmentation se justifie, d’une part, par une revalorisation des crédits du titre 2 permettant d’assurer la rémunération des magistrats et fonctionnaires contribuant à cette action et d’asseoir celle des arrivants, d’autre part, par une sous-estimation des dépenses de personnel de cette action en 2007 par rapport au contentieux pénal.

Les crédits de l’action « Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales » diminuent de 4 % en autorisations d’engagement et de 1,6 % en crédits de paiement. L’enveloppe des frais de justice est stable en crédits de paiement. Plusieurs mesures d’économie ont permis de réduire ces dépenses (marchés sur les empreintes génétiques et sur la téléphonie) mais certaines réformes (nouveaux textes générateurs de frais de justice et revalorisations de tarifs fixés par le code de procédure pénale) vont sans doute avoir un impact financier en 2008.

Les crédits de l’action « Cassation » progressent de 7 % du fait d’une augmentation des crédits de titre 3 pour faire face à diverses charges telles que les loyers, la maintenance ou encore l’informatique. L’action « Conseil supérieur de la magistrature » voit ses crédits augmenter fortement. L’essentiel de cette hausse s’explique par le rattachement des crédits de rémunération des personnels (titre 2) qui figuraient antérieurement à l’action « Soutien ». En outre, les crédits du titre 3 progressent également car le coût des frais de déplacement consécutif à l’arrivée des nouveaux membres du CSM en 2007 avait été sous-évalué.

L’action « Enregistrement des décisions judiciaires » connaît une diminution de ses crédits liés à une légère surévaluation des dépenses de frais de justice, au regard de la consommation du premier semestre 2007.

Les autorisations d’engagement de l’action « Soutien » sont en diminution de 16 % tandis que les crédits de paiement sont en augmentation de 1,5 %. Les crédits du titre 3 de cette action augmentent pour financer le plan de sûreté des juridictions en 2008 et pour prendre en compte l’augmentation des indemnités de détention provisoire et de la franchise postale. Les autorisations d’engagement du titre 5 (hors les crédits destinés aux partenariats public-privé) diminuent de 29 millions d’euros pour tenir compte de l’apparition de difficultés à financer les opérations d’investissement engagées les années précédentes. Les autorisations d’engagement demandées devraient permettre de poursuivre le plan de sûreté des juridictions et d’engager les opérations de sûreté et de sécurité indispensables. Parallèlement, les crédits de paiement du titre 5 augmentent par rapport à 2007.

Les crédits de paiement de l’action « Formation » sont en hausse de 6 % pour financer les recrutements de greffiers en 2008.

A. LES DÉPENSES DE PERSONNEL

1. L’évolution des emplois

Le programme « Justice judiciaire » comprend 29 349 équivalents temps plein travaillé (ETPT) (contre 30 301 en 2007), dont 7 919 ETPT de magistrats, 2 206 ETPT de fonctionnaires de catégorie A+ ou A, 8 046 ETPT de fonctionnaires de catégorie B (99 % sont des greffiers) et 11 019 ETPT de fonctionnaires de catégorie C.

Le tableau suivant retrace l’évolution des ETPT du programme par catégories d’emplois :

ÉVOLUTION DES EMPLOIS EN ÉQUIVALENTS TEMPS PLEIN

 

Exécution 2006

Plafond LFI 2007

Plafond PLF 2008

Variation

Magistrats de l’ordre judiciaire

7 592

7 714

7 918

+ 204

Personnels d’encadrement

2 152

2 038

2 206

+ 168

Personnel de greffe, d’insertion et éducatifs (catégorie B+)

7 766

8 804

8 046

– 758

Personnels administratifs et techniques de catégorie B

40

57

160

+ 103

Personnels administratifs et techniques de catégorie C type

10 621

11 688

11 019

– 669

TOTAL

28 171

30 301

29 349

– 952

Source : projet annuel de performances pour 2008

Derrière la baisse apparente du nombre des emplois du programme, se cache, en fait, une progression bien réelle de 389 équivalents temps plein travaillé. En effet, si le plafond d’emplois pour 2007 a été fixé dans le précédent projet annuel de performances à 30 301, il est apparu que ce chiffre ne correspondait pas à la réalité de la consommation des postes. Ce plafond d’emplois autorisés a donc été ramené à 28 960 pour 2007.

Le tableau suivant présente les évolutions des emplois entre 2007 et 2008 par catégories :

ÉVOLUTION DES EMPLOIS EN ÉQUIVALENTS TEMPS PLEIN

 

Plafond LFI 2007

Plafond réajusté 2007

Plafond PLF 2008

Variation réelle

Magistrats de l’ordre judiciaire

7 714

7 750

7 918

+ 168

Personnels d’encadrement

2 038

2 194

2 206

+ 12

Personnel de greffe, d’insertion et éducatifs (catégorie B+)

8 804

7 994

8 046

+ 52

Personnels administratifs et techniques de catégorie B

57

43

160

+ 117

Personnels administratifs et techniques de catégorie C type

11 688

10 979

11 019

+ 40

TOTAL

30 301

28 960

29 349

+ 389

Source : projet annuel de performances

La progression de 389 ETPT s’explique par :

– la création de 101 postes en 2008 ;

– l’extension en année pleine d’emplois créés en 2007, pour 288 ETPT.

Ce solde résulte de la combinaison d’hypothèses d’entrées et de sorties pour l’année 2008.

Ÿ  Au titre des départs en retraite, le ministère estime qu’ils concerneront :

– 165 magistrats de l’ordre judiciaire, correspondant à 82,5 ETPT, ce qui signifie que le ministère considère que ces personnes quitteront leurs fonctions, en moyenne, au 1er juillet 2008. L’économie escomptée est 6,8 millions d’euros en titre 2 ;

– 50 fonctionnaires d’encadrement (A+ et A), correspondant à 22,92 ETPT, pour une économie de 1,1 million d’euros en titre 2 ;

– 230 fonctionnaires de la catégorie B+ (greffiers), correspondant à 144,25 ETPT, pour une économie de 5,1 millions d’euros en titre 2 ;

– 520 fonctionnaires de catégorie C (dont seulement 315 départs à la retraite, les autres résultant de transformations d’emplois), correspondant à 312,25 ETPT, pour une économie de 8,8 millions d’euros en titre 2 ;

Au total, le ministère anticipe que 965 agents quitteraient leurs fonctions au cours de l’année 2008, soit 562 ETPT, pour une économie estimée de 21,9 millions d’euros.

Ÿ  Au titre des recrutements, le ministère estime qu’ils concerneront :

– 352 magistrats de l’ordre judiciaire, correspondant à 125,83 ETPT, pour un coût de 5,9 millions d’euros en titre 2 ;

– 50 fonctionnaires d’encadrement (A+ et A), correspondant à 22,75 ETPT, pour un coût de 1,1 million d’euros en titre 2 ;

– 417 fonctionnaires de la catégorie B+ (greffiers), correspondant à 170 ETPT, pour un coût de 5,6 millions d’euros en titre 2 ;

– 175 fonctionnaires de la catégorie B (secrétaires administratifs), correspondant à 116,67 ETPT, pour un coût de 3,9 millions d’euros en titre 2. La création de ces 175 postes résulte de la création du corps des secrétaires administratifs des services judiciaires par le décret n° 2007-1106 du 16 juillet 2007 relatif à la création du corps des secrétaires administratifs des services judiciaires et à la fusion des corps de secrétaires administratifs relevant du ministère de la justice et de la grande chancellerie de la Légion d'honneur ;

– 371 fonctionnaires de catégorie C, correspondant à 227,67 ETPT, pour un coût de 5,7 millions d’euros en titre 2 ;

Au total, le ministère anticipe que 1 365 agents prendraient leurs fonctions au cours de l’année 2008, soit 662,92 ETPT, pour un coût estimé de 22,3 millions d’euros.

Selon les informations fournies par le ministère de la Justice, la création de 101 ETPT correspond à la création de 400 postes physiques. Si l’écart entre ces deux chiffres peut paraître important, il convient de rappeler que compte tenu du fait que les entrées et sorties ont lieu en cours d’année, leur impact en équivalents temps plein sur 2008 est donc limité. Par exemple, le recrutement de 352 magistrats représente 125,83 ETPT.

Les 400 emplois créés se décomposent en :

– 187 créations de postes de magistrats qui permettront de mettre en œuvre les priorités fixées par la Chancellerie (mise en place des pôles de l’instruction, réforme de la carte judiciaire, création d’un juge délégué aux victimes) ;

– 187 créations de postes de greffiers ;

– 26 créations de secrétaires administratifs. Ces créations d’emplois seront complétées par la transformation de 149 emplois de catégorie C en secrétaires administratifs. Au total, 175 secrétaires administratifs entreront en fonction au cours de l’année 2008.

S’agissant des effectifs de magistrats, le tableau suivant montre que la progression constante des effectifs depuis 2002 :

ÉTAT DES EFFECTIFS (ETPT) DE MAGISTRATS
(au 1er septembre 2007)

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

A. Magistrats occupant un emploi :

7 290

7541

7742

7 902

8 055

8 295

B  – Magistrats en détachement

226

221

245

218

221

228

C – Magistrats en congé de longue durée

17

16

21

20

25

16

D – Magistrats en congé parental

19

21

15

7

11

13

E – Magistrats en disponibilité

76

77

79

71

80

88

F – Magistrats en activité

6 952

7 206

7 382

7 586

7 718

7 950

G. Magistrats maintenus en activité en surnombre

53

49

50

47

50

45

H. Effectifs réels des magistrats en activité (F+G)

7 005

7 255

7 432

7 633

7 768

7 995

Emplois

7 344

7 523

7 675

7 801

8 031

8 171

ETPT vacants

392

317

293

215

313

290

Source : ministère de la Justice

En ce qui concerne les fonctionnaires des services judiciaires, le tableau suivant montre l’évolution des effectifs depuis dix ans :

ÉVOLUTION DEPUIS 1997 DES EFFECTIFS RÉELS DE FONCTIONNAIRES
DES SERVICES JUDICIAIRES

Catégories de fonctionnaires

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Greffiers en chef

1 591

1 572

1 613

1 668

1 751

1 680

1 827

1 805

1 775

1 845

1 887

Greffiers

6 072

6 060

6 581

6 918

7 699

7 696

8 500

8 722

8 904

8 736

8 480

Personnel de catégorie C (1)

11 037

11 250

11 526

11 855

12.066

11 899

11 695

11 811

11 679

10 433

11 110

Total

18 700

18 882

19 720

20 441

21 516

21 275

22 022

22 338

22 358

21 014

21 477

(1) Personnels de bureau et personnels techniques

Source : ministère de la Justice

Ce tableau permet de constater l’ampleur de l’augmentation, de 2002 à 2007, des effectifs des greffiers en chef (+ 12 %) et des greffiers (+ 10 %). Parallèlement, les effectifs de catégorie C, après avoir progressé de 1997 à 2001, sont en diminution depuis 2002. Cette évolution générale des effectifs des fonctionnaires des services judiciaires s’explique par la poursuite des opérations qualitatives de transformations et de repyramidage d’emplois, afin notamment d’augmenter la proportion de personnels de catégorie B par la transformation d’emplois de catégorie C en B.

Le tableau suivant présente les effectifs des magistrats et des fonctionnaires ainsi que l’évolution du ratio entre magistrats et fonctionnaires depuis 1997 (les effectifs sont arrêtés au 1er juillet de chaque année) :

ÉVOLUTION DEPUIS 1997 DES EFFECTIFS DE FONCTIONNAIRES
DES SERVICES JUDICIAIRES ET DES MAGISTRATS (en poste au 1er juillet)

 

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Magistrats

6 117

6 187

6 327

6 539

6 846

7 144

7 294

7 434

7 525

7 891

7 931

Fonctionnaires (1)

17 460

17 686

17 819

17 966

18 172

18 665

19 125

19 757

19 841

20 057

20 107

Ratio

2,85

2,86

2,82

2,75

2,65

2,62

2,62

2,66

2,63

2,54

2,53

(1) hors ENM, ENG administration école et Administration centrale

Source : ministère de la Justice

Le nombre de fonctionnaires retenu dans le tableau précédent ne prend en compte que les greffiers en chef, les greffiers et les agents de catégorie C chargés de fonctions administratives, à l’exclusion donc des agents de catégorie C chargés de fonctions techniques.

Le rapporteur ne peut que déplorer la dégradation du ratio entre le nombre de magistrats et celui des fonctionnaires des services judiciaires. Ce ratio est passé de 2,85 en 1997 à 2,53 en 2007, alors que les missions confiées à la justice ont été, dans cet intervalle, profondément alourdies. Il est vrai que la diminution de ce ratio s’explique largement par les créations de postes de magistrats, le nombre de fonctionnaires n’ayant pas progressé au même rythme. Le rapporteur insiste donc sur le fait qu’un magistrat ayant besoin de concentrer sur ses missions, les fonctionnaires des services judiciaires doivent pouvoir pleinement jouer leur rôle essentiel dans le fonctionnement de la justice.

Comme l’a rappelé la ministre de la Justice lors de son audition par la Commission, « sans greffier, aucun magistrat ne peut prendre de décision ». En effet, les fonctionnaires et les magistrats forment une équipe dont tous les acteurs jouent un rôle essentiel. C’est pourquoi le rapporteur a souhaité connaître le ratio entre les magistrats et les greffiers dans les juridictions. Ces données figurent dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DU NOMBRE DES MAGISTRATS ET
DES GREFFIERS AFFECTÉS AUPRÈS DE MAGISTRATS

 

2006

2007

Magistrats

7.891

7.931

Greffiers affectés auprès de magistrats

6.915

6.942

Ratio

0,87

0,87

Source : ministère de la Justice

Il convient de préciser que le nombre de magistrats présenté dans le tableau précédent correspond aux personnes physiques en activité au 1er juillet 2007. De même, le nombre de greffiers ne prend en compte que les greffiers affectés dans des services travaillant en liaison directe avec des magistrats à cette même date.

Les ratios observés montrent bien que les magistrats et les greffiers ne sont pas affectés paritairement dans les juridictions : les greffiers sont 13 % moins nombreux que les magistrats. Le rapporteur constate que les greffes se trouvent dans une situation très tendue. Seul le très fort dévouement au service public des fonctionnaires permet de maintenir l’équilibre fragile dans lequel se trouvent les juridictions.

Les juges de l’application des peines doivent faire face à une progression importante de leur activité. Leurs attributions ont été très sensiblement renforcées du fait des dernières réformes de la procédure pénale. Pour tenir compte de ces fonctions nouvelles, depuis le 1er janvier 2001, les effectifs de magistrats chargés de l’application des peines ont été quasiment doublés, passant de 177 à 353 (dont 192 vice-présidents et 161 juges). Parfois, ces créations résultent de la transformation d’un emploi de magistrat non spécialisé existant dans la juridiction.

Le rapporteur rappelle que seuls 13 % des juges de l’application des peines exercent cette fonction à temps complet. Il est vrai que pour les autres, leurs tâches annexes sont souvent des tâches de service général en tribunal de grande instance. Les juges de l’application des peines représentent 8,3 % des 4 256 emplois de magistrats du siège actuellement affectés dans les tribunaux de grande instance.

La loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs a de nouveau alourdi les tâches des juges de l’application des peines qui doivent notamment, en vertu de l’article 7 (modifiant le troisième alinéa de l'article 763-3 du code de procédure pénale), décider d’appliquer une injonction de soins aux personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire. Le recensement des condamnés concernés est, en soi, une lourde tâche pour les juges de l’application des peines.

En ce qui concerne la prise en charge des mineurs, la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a transféré les compétences des juges de l’application de peine, en matière de mineurs, aux juges des enfants (aménagement des courtes peines d’emprisonnement et des fins de peines, suivi et contrôle de la détention). Pour accompagner cette réforme, 56 emplois de juges des enfants ont été créés de 2004 à 2007. Les tribunaux pour enfants disposent actuellement de 444 postes de magistrats (dont 243 vice-présidents et 201 juges des enfants).

2. L’évolution des traitements et des primes

Le total des crédits de personnel prévus pour la justice judiciaire atteint 1 860,4 millions d’euros (+ 4,9 %) répartis de la manière suivante :

RÉPARTITION DES CRÉDITS DE PERSONNEL

(en millions d’euros)

Magistrats

898,7

Fonctionnaires d’encadrement

138,3

Fonctionnaires de catégorie B+

393,6

Fonctionnaires de catégorie B

8,0

Fonctionnaires de catégorie C

421,7

Source : projet annuel de performances pour 2008

a) L’évolution du régime indemnitaire des magistrats

Après avoir été fortement réévalués de 1988 à 1996 – les mesures inscrites en lois de finances pour 1988, 1990, 1991, 1994, 1995 et 1996 ont permis de faire passer le taux indemnitaire des magistrats de l’ordre judiciaire de 19 % en 1987 à près de 37 % en 1996 –, les taux indemnitaires des magistrats sont restés inchangés de 1997 à 2002, alors que dans le même temps les régimes indemnitaires des magistrats de l’ordre administratif ont bénéficié de revalorisations successives.

Afin d’assurer aux magistrats de l’ordre judiciaire un régime indemnitaire à la hauteur des responsabilités importantes et des fortes sujétions de service qui sont les leurs, le ministère de la Justice a engagé dès 2003 un effort significatif de revalorisation, avec pour objectif une parité avec les magistrats des juridictions administratives et financières.

Cette revalorisation s’est accompagnée, depuis le 1er janvier 2004, d’une nouvelle modification du régime indemnitaire des magistrats par une série de textes publiés au Journal officiel du 30 décembre 2003 comportant notamment l’instauration d’une modulation partielle de ce régime. En effet, le 1er octobre 2004, la part modulable du régime indemnitaire a été revalorisée de 4 %. Cette part a été à nouveau revalorisée de 1 % à compter du 1er octobre 2005 par des arrêtés du 8 septembre 2005.

La prime modulable est attribuée aux magistrats concernés en fonction de leur contribution au bon fonctionnement de l’institution judiciaire. Pour les magistrats exerçant leurs fonctions dans les juridictions du premier degré ou pour les magistrats de cours d’appel, l’attribution de cette prime modulable est gérée de manière déconcentrée au niveau des cours d’appel. Elle repose sur l’identification d’enveloppes régionales par cour d’appel, distinguant le siège et le parquet, réparties par décision de chaque chef de cour au profit des magistrats du ressort, sur proposition du chef de juridiction sous l’autorité duquel est placé le magistrat pour ceux affectés dans une juridiction du premier degré. Les enveloppes régionales sont globales et ne peuvent faire l’objet d’une subdélégation.

Le taux moyen de cette prime est fixé à 9 % du traitement indiciaire brut et le taux maximal d’attribution individuelle à 15 %. Le taux de la prime modulable versée aux chefs des cours d’appel et des tribunaux supérieurs d’appel ainsi qu’à l’inspecteur général des services judiciaires et au directeur de l’École nationale des greffes, est fixé à 9 %. Pour les magistrats exerçant leurs fonctions à la Cour de cassation, le taux moyen est de 14 % et le taux maximal de 20 %.

Par ailleurs, la nouvelle bonification indiciaire (NBI) en faveur des magistrats de l’ordre judiciaire exerçant des fonctions de responsabilité supérieure a été mise en œuvre par le décret n° 2004-676 du 5 juillet 2004 et son arrêté d’application du même jour. Sont concernés, à la Cour de cassation, les chefs de juridiction, les présidents de chambre et les premiers avocats généraux, les doyens de chambre et les magistrats chargés du secrétariat général. De plus, sont également concernés les chefs de cour d’appel ainsi que les magistrats chargés du secrétariat général des cours d’appel de Paris et Versailles, les chefs des 12 tribunaux de grande instance les plus importants et le directeur de l’école nationale des greffes. Au total, 117 magistrats bénéficient de cette première phase de mise en œuvre de la NBI.

Le décret du 7 décembre 2006 – et son arrêté du même jour – a permis d’attribuer une NBI à 179 magistrats supplémentaires.

En 2007, ce sont donc 296 magistrats de l’ordre judiciaire exerçant des responsabilités supérieures qui bénéficient de la nouvelle bonification indiciaire, pour un coût annuel de 1,8 million d’euros.

b) L’évolution du régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires

Le régime indemnitaire des greffiers en chef et des greffiers n’a pas évolué depuis 2001, malgré plusieurs demandes de revalorisation – dans le cadre de la préparation des projets de lois de finances – présentées par le ministère de la Justice, mais qui ont fait l’objet d’arbitrages interministériels défavorables. Le régime indemnitaire des fonctionnaires de catégorie C n’a pas été revalorisé depuis 2006.

En application du décret n° 2005-1602 du 19 décembre 2005, les greffiers en chef et les greffiers perçoivent une indemnité forfaitaire de fonction (IFF) fixée en pourcentage de l’indice réel moyen (IRM) de leur grade. Le taux indemnitaire moyen de ces deux corps n’a pas été revalorisé depuis 2001. Il a même diminué pour les greffiers, lors de la mise en œuvre de la réforme statutaire en 2003. En effet, la transformation de la structure de ce corps (deux grades au lieu de trois) a entraîné une modification de l’indice réel moyen par grade. Cependant, cette baisse du taux indemnitaire n’a pas entraîné de diminution des montants individuels servis.

En application du décret n° 2005-1603 du 19 décembre 2005, les fonctionnaires de catégorie C des services judiciaires bénéficient d’une indemnité spéciale fixée en pourcentage de l’indice réel moyen (IRM) de leur grade, dont le taux moyen a été régulièrement valorisé. Une augmentation de 2 points du taux indemnitaire avait été demandée par le ministère de la Justice, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2006, au bénéfice de l’ensemble des personnels de catégorie C. Les arbitrages interministériels rendus ont permis de revaloriser d’un point ce taux indemnitaire. La mesure nouvelle obtenue au titre de l’année 2006 a permis de faire passer le taux moyen de l’indemnité spéciale servie aux fonctionnaires de catégorie C à 24 %.

Le régime indemnitaire des fonctionnaires des services judiciaires a été modifié en 2005, afin de permettre à ceux-ci de bénéficier, sous certaines conditions, d’une indemnité complémentaire à raison d’attributions spécifiques qui peuvent leur être confiées. Si les conditions de son attribution sont réunies, l’indemnité complémentaire s’ajoute à l’IFF actuellement attribuée aux greffiers en chef et aux greffiers et à l’indemnité spéciale allouée aux fonctionnaires de catégorie C.

L’indemnité complémentaire est attribuée :

– aux fonctionnaires qui exercent à titre habituel leurs fonctions dans un service spécialisé dans la poursuite ou l’instruction des infractions terroristes. Le montant mensuel maximal de l’indemnité complémentaire « anti-terroriste » serait de 90 euros pour l’ensemble des fonctionnaires concernés, quel que soit leur grade, les personnels de ces services étant exposés au même risque ;

– et aux fonctionnaires qui exercent par intérim la fonction de chef de greffe, lorsque l’emploi afférent à cette fonction est vacant et que le fonctionnaire est d’un grade inférieur à celui de l’emploi vacant. Le montant mensuel de cette indemnité complémentaire serait fixé à 70 euros sauf pour les greffiers en chef du 1er grade assurant l’intérim d’un emploi de chef de greffe hors hiérarchie, pour lesquels il s’élèverait à 110 euros eu égard à l’importance des responsabilités exercées.

Par ailleurs, le ministère de la justice avait souhaité mettre en œuvre en 2007 une politique indemnitaire modulable concernant les fonctionnaires des services judiciaires, pour un montant de 1,06 million d’euros. Cette expérimentation n’a cependant pas été conduite. Interrogée par le rapporteur lors de son audition par la commission des Lois, la ministre de la Justice a précisé qu’elle avait choisi « de mettre l’accent sur les créations d’emplois », précisant que la priorité budgétaire retenue consistait à créer 400 postes supplémentaires pour les services judiciaires.

Le rapporteur souhaite rappeler la nécessité de réduire l’écart entre le régime indemnitaire des magistrats et celui des fonctionnaires des services judiciaires. L’effort consenti en faveur des catégories B et C n’est pas à la hauteur du rôle joué par les corps concernés dans le fonctionnement des juridictions. L’amélioration du service public de la justice est l’affaire de tous les personnels, qu’ils soient magistrats ou fonctionnaires. L’ensemble de ces personnels doit être intéressé aux résultats des juridictions par une généralisation de la modulation des primes, afin de combler le fossé entre les magistrats et les agents des services judiciaires.

Sur un plan plus général, le ministère de la Justice a besoin d’une modernisation de la gestion de ses ressources humaines. C’est un des rares départements ministériels où les corps sont cloisonnés par direction. La création de corps communs à plusieurs directions et le regroupement de la gestion du personnel au sein d’une direction unique permettraient de réaliser des économies d’échelle. L’instauration d’un secrétariat général est une première étape qui ne doit pas rester sans suite.

Selon les informations recueillies par le rapporteur, une stratégie de recrutement à moyen terme a été mise en place en prévision des départs en retraite importants auxquels le ministère sera confronté dans les dix prochaines années.

—  Pour les magistrats, les prévisions font état de plus de 150 départs à la retraite par an d’ici à 2009, de 200 à 300 par an de 2010 à 2013, et de plus de 300 par an à partir de 2014. Pour y faire face, le ministère a ouvert, ces dernières années, plus de 250 postes aux concours, de telle sorte que des promotions importantes de jeunes magistrats sont arrivées récemment en juridiction, ou sont encore en scolarité à l’ENM. Il faut que le nombre de places offertes aux concours demeure à un niveau compatible avec les départs en retraite attendus.

—  Pour les fonctionnaires, les départs en retraite devraient s’accélérer, puisqu’il est attendu un quasi-doublement des départs dans les cinq ans à venir, qui passeraient d’environ 500 en 2007 à plus de 900 par an en 2012. Le ministère confirme que le nombre des places offertes aux différents concours est adapté afin que les remplacements puissent s’effectuer au mieux.

B. L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT : LA MAÎTRISE DES FRAIS DE JUSTICE

Les efforts accomplis par le ministère de la Justice ont permis de diminuer de 22 % les frais de justice au cours de l’exercice 2006. C’est ainsi que la dépense est passée de 487 millions d’euros en 2005 à 379,4 millions d’euros en 2006. Il est vrai que la modification du périmètre des frais de Justice depuis 2006 rend délicate la comparaison entre ces deux exercices.

Outre les révisions de tarifs en matière de téléphonie et d’empreintes génétiques engagées par les services de l’administration centrale du ministère de la justice, la baisse considérable de la dépense de frais de justice trouve son origine dans la mise en œuvre d’un plan de maîtrise qui s’est traduit concrètement par la mise en place de structures dédiées, le développement d’action de formation et de sensibilisation, la création d’outils de suivi et d’analyse et les changements de comportement des magistrats prescripteurs. Enfin, le ministère de la justice s’attache aujourd’hui à adapter le circuit d’exécution des dépenses de frais de justice.

1. Une progression contenue

De 2002 à 2005, la dépense globale en frais de justice a progressé de 68 %. Sur la même période, les frais de justice pénale ont globalement augmenté de 82 %. L’année 2006 marque une rupture avec cette tendance structurelle à la hausse. Les frais de justice pénale sont la composante essentielle des frais de justice (70 % du volume global, soit un peu plus de 262 millions d’euros en 2006). Les frais de justice en matière commerciale (23,2 millions d’euros) constituent désormais une composante des frais de justice légèrement plus importante que les frais de justice en matière civile (22,9 millions d’euros).

En réalité, cette évolution correspond à une modification de la nomenclature budgétaire, consécutive de l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. En effet, les frais postaux relevant des frais de justice sont désormais imputés sur l’action « Soutien ». Or, ils représentaient près de 60 % des dépenses de frais de justice en matière civile et prud’homale. Par ailleurs, la présentation de la nouvelle nomenclature budgétaire ne permet plus de distinguer les différentes composantes des dépenses en matière commerciale.

Le tableau suivant présente l’évolution des frais de justice depuis 2002 (les frais postaux, figurant à l’action « Soutien » et non ventilés par catégorie sont présentés dans la ligne « autres frais de justice ») :

ÉVOLUTION DES FRAIS DE JUSTICE DEPUIS 2002

(en millions d’euros)

 

2002

2003

2004

2005

2006

Situation au 30 juin 2007

Frais de justice pénale

207,5

251,5

320,2

376,7

262,4

128,9

Frais de justice en matière civile et prud'homale

47,0

50,5

56,5

60,6

23,0

11,6

Frais de justice commerciale

27,1

28,8

30,1

37,5

23,2

12,3

Autres frais de justice

8,5

10,6

12,3

12,6

70,8

40,2

Total frais de justice

290,1

341,4

419,1

487,4

379,4

193,0

Source : ministère de la Justice

Le tableau suivant présente l’évolution des principaux postes de dépenses de frais de justice en matière pénale :

ÉVOLUTION DES PRINCIPAUX POSTES DES FRAIS DE JUSTICE EN MATIÈRE PÉNALE

(en millions d’euros)

Nature de dépenses

2002

2003

2004

2005

2006

Évolution 2002/2005

Évolution 2005 /2006

Frais médicaux (hors génétique à partir de 2005)

50,2

62,4

77,0

70,3

61,4

40,0 %

– 12,6%

Réquisitions opérateurs (hors location matériel)

35,8

41,4

66,0

69,1

38,3

92,8 %

– 44,6%

Traduction interprétariat

9,6

12,5

13,9

15,0

13,2

55,9 %

– 11,9%

Frais en matière de scellés

12,7

14,7

19,8

26,9

18,3

112,5 %

– 32,0%

Enquêtes sociales rapides, de personnalité, contrôle judiciaire

6,6

6,7

10,7

20,3

19,8

209,4 %

– 2,3%

Analyses génétiques

ND

ND

ND

23,9

20,5

-

– 14,2%

Total frais de justice pénale

207,5

246,3

313,5

367,5

262,4

77,1 %

– 28,6%

Source : ministère de la Justice

Domaine prioritaire du plan de maîtrise des frais de justice, la forte progression des frais liés aux réquisitions adressées aux opérateurs de télécommunications a été enrayée en 2006. La hausse constatée en 2005 (+ 12,9 %) était déjà bien moindre que celle constatée sur les dernières années (plus de 50 % en 2002 et 2004). L’augmentation spectaculaire de cette dépense
– de 242 % entre 1999 et 2004 – était essentiellement due à l’apparition et au développement de la téléphonie mobile.

Cet état de fait explique que le domaine des réquisitions téléphoniques est celui où les plus grands efforts ont été effectués dans le cadre du plan de maîtrise des frais de justice. Ces dépenses ont été réduites de 69 millions d’euros en 2005 à 38 millions d’euros en 2006 (chiffre corrigé du montant de la location du matériel d’interceptions, qui ont vocation à disparaître), soit une baisse de 44 %.

Dès la fin de l’année 2005, les négociations menées avec les opérateurs et les sociétés de locations de matériel d’enregistrement d’écoutes téléphoniques se sont traduites par d’importantes baisses de tarifs. De plus, l’arrêté du 22 août 2006, pris en application de l’article R. 213-1 du code de procédure pénale et qui fixe les tarifs applicables conformément au principe de « juste rémunération », a permis des économies significatives.

D’importantes d’économies sont encore attendues cette année. En effet, une partie des efforts initiés en 2006 porte actuellement pleinement ses effets, notamment la recherche d’une architecture technique plus adaptée à la mise en œuvre des écoutes téléphoniques grâce des nouvelles technologies (suppression des ouvertures de lignes téléphoniques provisoires auprès de France Télécom, grâce à la mise en place de centrales d’écoutes au niveau local).

Les frais médicaux comprennent les honoraires et les indemnités alloués pour la réalisation d’examens psychiatriques, médico-psychologiques ou psychologiques, les honoraires et indemnités alloués pour des examens toxicologiques, biologiques ou radiologiques, ainsi que les honoraires et indemnités alloués pour autres examens médicaux. Ces dépenses, qui représentaient 70,3 millions en 2005, ont été réduites à 61,43 millions d’euros en 2006, soit une baisse de 12,6 %. Ces frais font pour la plupart l’objet d’une tarification par le code de procédure pénale.

Cependant, une hausse de la dépense est à prévoir pour l’année en cours et pour 2008 à cause des revalorisations successives des honoraires applicables aux consultations de médecins généralistes (intervenues au 1er août 2006 et au 1er juillet 2007) qui déterminent le tarif de certaines prestations en matière de frais de justice (examen médical de garde à vue, examen médical des victimes avec fixation de l’incapacité temporaire de travail).

En ce qui concerne les frais d’interprétariat et de traduction, leur progression de 59 % entre 2002 et 2005 illustre la forte augmentation des procédures pénales impliquant des étrangers. Cependant, le montant de ces frais connaît une baisse : de 15 millions d’euros en 2005, ils ont été réduits à 13,2 millions d’euros en 2006 (– 11,9 %). Cette réduction de la dépense peut s’expliquer par les mesures d’information des juridictions – leur rappelant notamment que les textes obligent non pas une traduction dans la langue maternelle mais plus simplement dans une langue comprise par le prévenu –  et par la diffusion de certaines instructions mettant fin à des pratiques tarifaires contestables – notamment la pratique tendant à rémunérer le temps de transport de l’interprète requis.

Pour autant, un projet de revalorisation des tarifs étant actuellement à l’étude, une augmentation sensible des frais d’interprétariat et de traduction est à prévoir pour l’année 2008.

Le montant de la dépense relative aux scellés a connu une très forte hausse en 2005 (+ 35,7 %) qui faisait suite à une augmentation aussi importante en 2004 (+ 32 %). Ces montants élevés de dépenses s’expliquent principalement par le paiement d’importants stocks de mémoires de frais impayés présentés par la préfecture de police de Paris et correspondant au gardiennage de véhicules au cours des années antérieures. En 2006, le niveau de ces dépenses a retrouvé un niveau proche de celui observé en 2002.

La passation de marchés publics portant sur la réalisation d’analyses génétiques effectuées sur les individus aux fins d’alimentation du fichier national automatisé des empreintes génétiques a permis d’obtenir une baisse considérable du tarif unitaire de ces analyses. Cette mise en concurrence a également eu un effet général sur les prix pratiqués par les laboratoires publics et privés. Le coût de ces analyses représente 7,8 % de la dépense de frais de justice pénale en 2006. Les paiements effectués à ce titre s’élèvent à 20,5 millions d’euros, contre 23,8 millions d’euros en 2005 soit une baisse de 14 %. Un nouveau marché public a été passé par le ministère de la Justice pour l’année 2007 à des conditions tarifaires encore plus avantageuses. Un nouvel appel d’offres sera lancé pour l’année 2008.

Enfin, des revalorisations de tarifs du code de procédure pénale (expertise psychiatrique, indemnités allouées aux huissiers audienciers, rétribution des administrateurs ad hoc) devraient conduire à une hausse de la dépense pour l’année 2008.

Sur un montant total de crédits demandés pour 2008 au titre des frais de justice s’élevant à 417,35 millions d’euros, une dotation de 20,2 millions d’euros vise à financer ces revalorisations tarifaires, comme le montre le tableau suivant :

IMPACT PRÉVISIBLE DES REVALORISATIONS TARIFAIRES

(en millions d’euros)

Mesure

Coût prévisible

Revalorisation du tarif des traducteurs interprètes

16,0

Mesures prononcées en matière de violence conjugale

2,0

Ajustement lié à l’évolution des compositions pénales

1,8

Rémunération des administrateurs ad hoc

0,3

Total

20,2

2. Une meilleure maîtrise de l’exécution des frais de justice

L’amélioration de la gestion des frais de justice s’explique à la fois par des actions conduites pour en assurer la maîtrise et également par la refonte du circuit d’exécution des dépenses de frais de justice.

a) Les actions de maîtrise des frais de justice

Le ministère a mis en place une mission spécifique sur ce sujet au sein du secrétariat général. Celle-ci a permis de fédérer l’action des différentes directions concernées. Par ailleurs, le réseau des « référents frais de justice » implantés dans toutes les cours d’appel et les tribunaux de grande instance a permis, notamment grâce à l’intranet, des échanges significatifs entre les juridictions. Ce dialogue constant a permis une diffusion rapide de l’information et des bonnes pratiques et une mobilisation constante de tous les acteurs de la chaîne de la dépense.

Par ailleurs, plusieurs actions de formation et de sensibilisation ont été organisées à destination des magistrats, des fonctionnaires et des officiers de police judiciaire. C’est ainsi qu’une journée de rencontre sur ce thème, organisée à la demande du garde des Sceaux, a réuni tous les chefs des cours d’appel à la fin de l’année 2005. En mars 2006, les « référents frais de justice » des cours d’appel ont été réunis à Paris pour une journée de travail. Une réunion identique a également eu lieu en mars 2007. Des déplacements dans les cours d’appel ont été organisés par le secrétariat général, qui ont permis de rencontrer au total plus de 1 000 magistrats et fonctionnaires des juridictions. Par ailleurs, à l’échelon local, des groupes de travail ont très souvent été constitués dans les ressorts des cours d’appel associant magistrats, fonctionnaires et parfois les services de police et de gendarmerie. Il convient enfin de relever qu’à l’échelon national, une concertation étroite a été menée par le ministère de la justice avec les services des ministères de l’Intérieur et de la Défense, qui ont eux-mêmes diffusé une large information aux services enquêteurs sur la nécessaire maîtrise des frais de justice.

b) La mise en œuvre des outils de suivi et d’analyse

Plusieurs outils de suivi et d’analyse ont été développés. Le site intranet consacré aux frais de justice, créé par la direction des services judiciaires, permet aux juridictions de trouver des réponses pratiques, notamment en matière de tarification et de diffusion de la jurisprudence des chambres de l’instruction et de la Cour de cassation. La foire aux questions permet, dans des délais rapides, de répondre aux interrogations des magistrats et fonctionnaires confrontés à des mémoires de frais de plus en plus techniques.

En septembre 2007 a été mis en ligne un « observatoire des frais de justice », fruit du travail du pôle études et évaluation de la direction des affaires criminelles et des grâces. Il permet de disposer, sous la forme notamment de cartes ou de tableaux, des coûts comparés par ressort et par activité des principaux postes de dépense en matière de frais de justice. Cet outil doit permettre aux juridictions d’isoler certains coûts importants, de les rapporter aux spécificités locales ou à des éléments conjoncturels et leur permettre, enfin, de mesurer leurs actions en faveur de la maîtrise de la croissance des frais de justice.

Enfin, la délégation aux interceptions judiciaires a elle aussi créé un site intranet qui lui permet de diffuser une large information sur les tarifs en matière de téléphonie et en particulier les référentiels.

Globalement, l’essentiel des progrès accomplis en matière de frais de justice résulte de changements de comportement de la part des magistrats prescripteurs, qui se sont très fortement mobilisés. C’est ainsi que les magistrats du parquet ont assuré un suivi plus étroit de l’activité des officiers de police judiciaire, exigeant l’accord exprès d’un magistrat pour tout engagement de dépense significatif. Ils ont également été très attentifs à ce que ne soient pas supportées, au titre des frais de justice, des charges indues. Les magistrats du siège, en particulier les magistrats instructeurs, recourent désormais systématiquement à un devis préalable pour les dépenses significatives. De même, un contrôle plus strict des mémoires présentés a été exercé.

C. LES PRIORITÉS DU PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES

1. La sécurisation des juridictions

Le rapporteur se félicite de la mise en œuvre effective du plan de sécurisation des tribunaux, qui fait l’objet d’un effort considérable. Pour 2008, 39 millions d’euros sont prévus à cet effet, après 15 millions d’euros en 2007. S’agissant des portiques de sécurité, certaines juridictions ont recours à des sociétés privées et d’autres à la réserve civile de l’administration pénitentiaire. Lors de son audition par la commission des Lois, la ministre a précisé que « si l’utilisation des réservistes de la police nationale pour assurer la sécurité des tribunaux et des bâtiments judiciaires a été envisagée, c’est parce qu’une centaine seulement de réservistes de l’administration pénitentiaire est utilisée à ce jour ; il convient donc de faire la promotion de ce moyen de sécurisation ».

Le recrutement à titre expérimental des retraités de l’administration pénitentiaire et des réservistes de la police nationale pour participer à la sécurisation des tribunaux a été décidé à la fin de l’année 2005. Cette expérimentation a donné toute satisfaction. Le sens du dialogue et la connaissance du monde judiciaire des personnes recrutées sont unanimement reconnus. Le ministère a donc estimé qu’il n’était pas nécessaire de leur donner une formation particulière.

Le déploiement des dispositifs de sûreté se déroule de manière satisfaisante. Au 5 novembre 2007, 130 portiques sur les 154 prévus seront installés, soit 84 % d’entre eux. À la même date, 230 des 232 équipes de surveillance (soit 99 %) nécessaires à la mise en œuvre des dispositifs de sécurité seront en fonction.

Cette action s’inscrit dans une action d’envergure en faveur de l’amélioration de la sécurité des juridictions. Celle-ci concerne à la fois la sûreté des biens et des personnes dans les enceintes judiciaires et leur sécurité (notamment le risque incendie). C’est pourquoi des experts en matière de sûreté vont être affectés au sein de chaque juridiction interrégionale spécialisée afin d’adapter les solutions techniques aux besoins constatés pour chaque juridiction. De plus, des formations seront proposées aux magistrats et aux fonctionnaires dans ce domaine et un dossier « sûreté » sera élaboré pour chaque juridiction.

2. Les technologies de l’information destinées à améliorer le fonctionnement de la justice

L’Assemblée nationale a adopté le 9 octobre dernier, en première lecture, une proposition de loi (2) de simplification du droit, dont l’article 11 prévoit la possibilité d’introduire la visioconférence pour les audiences civiles des cours d’appel, des tribunaux de grande instance, des tribunaux d’instance et juges de proximité, après consentement de l’ensemble des parties. Cette proposition de loi a été adoptée, avec modifications par le Sénat le 25 octobre.

Si la visioconférence est encouragée, les technologies de l’information sont également utilisées pour numériser les documents et les procédures afin d’alléger les tâches matérielles des personnels pour garantir une meilleure qualité de la Justice.

a) La visioconférence

Le développement de l’utilisation de la visioconférence dans le processus judiciaire a pour but de limiter les transferts de personnes détenues, en garde à vue ou en retenue ou même des témoins afin de gagner en sécurité tout en diminuant les charges de travail. En 2007, l’ensemble des sites judiciaires (tribunaux et cours d’appel) est équipé et 75 % des établissements pénitentiaires seront dotés des matériels et des liaisons nécessaires d’ici à la fin de l’année.

Les cours d’appel ont initialement utilisé la visioconférence pour des réunions administratives avec les parquets du ressort (ou entre le parquet général des juridictions interrégionales spécialisées et les parquets généraux du ressort) et, plus largement, pour des réunions entre les différentes juridictions du ressort ou avec les services de la Chancellerie sur des sujets divers (frais de justice, préparation des budgets, conférences budgétaires, dialogue de gestion, formation).

La visioconférence a été utilisée à divers stades de la procédure. En matière d’entraide pénale internationale, elle a permis l’audition d’un témoin se trouvant sur le territoire britannique par une cour d’assises française. Elle a également été employée pour l’audition de témoins en France – détenus ou non, d’ailleurs – dans une procédure pendante devant une juridiction espagnole ou encore pour le témoignage de parties civiles dans une audience au Portugal. Elle est aussi utilisée dans le cadre des prolongations de gardes à vue ou bien par les juges des libertés et de la détention pour des prolongations de détention provisoire. Des juges d’instruction y ont recouru pour la notification d’une expertise à un mis en examen détenu ou encore pour l’audition d’un témoin domicilié en métropole par le juge d’instruction de Saint-Pierre-et-Miquelon. Les chambres de l’instruction l’ont utilisée pour l’examen de demandes de mise en liberté
– notamment pour limiter les transferts de personnes dangereuses détenues dans des établissements pénitentiaires éloignés. La chambre des appels correctionnels y a également recours pour faciliter l’intervention rapide d’interprètes qui ne peuvent se déplacer à l’audience et par les cours d’assises des départements d’outre-mer pour l’audition de témoins ou d’experts domiciliés en métropole. Elle a enfin permis une confrontation entre une personne mise en examen et un témoin anonyme et, plus récemment, pour l’audition d’une victime ne souhaitant pas se trouver face à ses agresseurs.

Selon les informations transmises au rapporteur, le tribunal de grande instance de Paris a procédé à une utilisation intensive de la visioconférence pour le suivi de l’application des peines en matière de terrorisme, les personnes concernées étant dispersées dans des établissements pénitentiaires sur l’ensemble du territoire national.

Pour accompagner le déploiement de ce dispositif, un groupe de travail interministériel (réunissant les ministères de la Justice, de l’Intérieur et de la Défense) a été constitué et a permis de désigner les sites expérimentaux en matière d’utilisation de la visioconférence pour les prolongations de garde à vue. Il a été décidé d’étendre l’expérimentation aux autres aspects domaines de la procédure pénale dans les juridictions choisies. Ces expérimentations ont débuté en octobre 2007 et doivent durer un an.

b) La dématérialisation des documents et des procédures

Les technologies de l’information permettent d’une part la transmission télématique des procédures pénales et, d’autre part, la numérisation et dématérialisation des procédures.

—  La transmission télématique des procédures pénales fait l’objet d’un groupe de travail interministériel, qui se réunit depuis juillet 2006. Il doit permettre la mise en œuvre d’échanges électroniques des données générées par les procédures (3)afin de limiter les doubles saisies et ainsi faciliter et fiabiliser la circulation de l’information. De plus, il doit instaurer une traçabilité statistique des procédures permettant de rapprocher les données statistiques de la délinquance constatée et élucidée du ministère de l’Intérieur et les données du ministère de la Justice.

Les travaux de groupe de travail ont permis de préciser que la transmission des données se fera en flux continu, même si, dans un premier temps, les procédures des personnes déférées ne pourront pas être transmises en temps réel aux juridictions. De même, il a été décidé qu’un numéro d’identifiant commun aux services enquêteurs et aux services de la Justice permettra de suivre la procédure. Initialement, il avait été convenu que ce numéro serait composé du numéro du service verbalisateur, l’année et le numéro chronologique. Cependant, la possibilité de générer automatiquement ce numéro dans Cassiopée est à l’étude. Une réflexion est actuellement menée afin de définir une table de correspondance entre les nomenclatures utilisées par les services de police et de gendarmerie et la table des infractions gérée par le ministère de la Justice (issue du système « nature d'infraction » – natinf) afin de permettre des échanges concernant la nature de l’infraction.

—  La numérisation des procédures pénales a été préconisée par la circulaire ministérielle du 9 octobre 2006 qui l’a consacrée comme l’un des chantiers majeurs du ministère de la Justice. En pratique, la numérisation des procédures permet de constituer des dossiers disponibles sous format électronique, qui demeurent envoyés sous format papier par les services enquêteurs.

La numérisation des procédures pénales doit favoriser, au sein de chaque juridiction, une transmission du dossier en temps réel entre les services – pour un gain de temps en cas de présentation, par exemple–  une meilleure connaissance qualitative du dossier – grâce aux recherches, par exemple – et une mise en commun du dossier – notamment pour la formation de jugement. Elle doit également alléger les tâches de reprographie incombant au greffe. Dans ses échanges avec ses partenaires, et en particulier, les avocats et les services d’enquête, la numérisation des procédures pénales doit permettre à la juridiction de transmettre, quasiment en temps réel des copies de dossiers et va ainsi leur permettre un travail plus performant.

Depuis l’été 2007, une centaine de juridictions est équipée de stations de numérisation afin d’en tester la mise en œuvre. Lors de son audition par la commission des Lois, la ministre de la Justice a souligné que toutes les juridictions seront dotées de stations de numérisation au 1er janvier 2008. Cette généralisation va induire l’instauration de nouvelles méthodes de travail par la mise en place, notamment, de communications facilitées avec les avocats et les services enquêteurs. Par exemple, les avocats abonnés au « réseau privé virtuel avocat » pourront avoir communication d’éléments de procédures (convocation, notification) en ligne. De même, les échanges électroniques avec les services enquêteurs seront facilités.

La numérisation des procédures pénales n’est qu’une étape. En effet, l’objectif final demeure bien la dématérialisation des procédures qui consiste, pour les services enquêteurs, à transmettre les documents de procédure directement sous format électronique. D’ores et déjà, une expérimentation est menée par les tribunaux de grande instance de Poitiers et d’Angoulême. Elle concerne principalement les procédures de comparution immédiate, de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et de comparution par procès-verbal. La dématérialisation des procédures pénales sera généralisée lorsque les applications informatiques des services de la Justice, de la police et de la gendarmerie seront en mesure de communiquer entre elles.

D. L’ACTIVITÉ DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES

Le tableau suivant présente, de manière synthétique, l’activité judiciaire observée en 2006 :

L’ACTIVITÉ JUDICIAIRE CIVILE EN 2006

Juridictions

Affaires nouvelles

Évolution par rapport à 2005

Affaires terminées

Durée moyenne
de traitement

Cour de cassation

19 034

+ 1,1 %

22 461

NC

Cours d’appel

212 421

– 3,2 %

228 035

13,3 mois

Tribunaux de grande instance

953 206

0 %

922 413

6,6 mois

Tribunaux d’instance

600 872

– 1,8 %

592 219

4,7 mois

1. L’activité judiciaire civile

a) La Cour de cassation

Le nombre d’affaires civiles nouvelles (19 034) portées devant la Cour de cassation a progressé en 2006 de 1,1 %. La Cour a rendu 22 461 décisions, soit 9,3 % de moins qu’en 2005.

La procédure de filtrage institué par la loi organique du 25 juin 2001 permet à la Cour de cassation de déclarer « non admis » « les pourvois irrecevables ou non fondés sur un moyen sérieux de cassation ». Depuis 2002 les affaires en « non-admissions » viennent diminuer à la fois les rejets et les irrecevabilités ; en 2006, 5.435 affaires (– 19,4 %) se terminent ainsi, soit plus d’une décision rendue sur quatre.

Les cassations ont augmenté en 2006 (+ 2,6 %) ralentissant la forte hausse observée en 2005. Elles ont représenté 22 % des décisions rendues. Si l'on ramène ce chiffre aux seules affaires soumises à la chambre, les cassations représentent alors près de 29,6 % des décisions. Les rejets de pourvois ont baissé et représentent 25,6 % de l'ensemble des affaires et 33,8 % des seules affaires admises.

b) Les cours d’appel

Après quatre années consécutives de hausse, le nombre d’affaires portées en appel est en baisse de 3,2 % en 2006. Pourtant, les affaires en appel provenant des tribunaux de grande instance continuent de progresser de près de 1,1 %. La baisse générale s’explique par le repli particulièrement net du nombre des appels pour les tribunaux de commerce (– 13 %) et dans une moindre mesure pour les conseils de prud’hommes (– 5,5%) et les tribunaux d’instance (– 5,3 %).

Pour analyser ces chiffres, il convient d’observer si l’évolution des affaires nouvelles des cours d'appel est un simple corollaire de la variation de l'activité des juridictions de première instance, ou s’il s’y superpose une évolution de la propension des justiciables à faire appel.

L'examen de l'évolution des taux d'appel contre les décisions de première instance fait apparaître une légère baisse de ces taux pour les tribunaux de grande instance et les tribunaux d’instance, bien que le nombre d’affaires traitées par ces juridictions soit en hausse. En revanche, les taux d’appel continuent de progresser contre les décisions des conseils de prud’hommes et des tribunaux de commerce.

S’agissant des affaires terminées, le mouvement de hausse observé depuis 2003 se poursuit. Avec 228 035 affaires terminées dont 4 421 référés, l’activité de l’année 2006 connaît une progression de 3 %. Comme les affaires terminées sont globalement supérieures en nombre aux affaires nouvelles, les cours d'appel ont à nouveau connu un dégonflement de leur stock d'affaires en cours d’environ 22 500 affaires, soit une diminution de 10 % d'un stock global estimé à 219 056 affaires, âgées en moyenne de 10,7 mois.

La durée moyenne des affaires terminées par les cours d'appel en 2006 s'établit à 13,3 mois, en réduction de 0,9 mois par rapport à 2005 et de 2 mois par rapport à 2004.

Au rythme moyen d'évacuation des affaires en 2006, les 219 056 affaires en stock dans les cours au 1er janvier 2007 demanderaient désormais 11,5 mois pour être traitées.

La baisse du stock d’affaires en cours est observable dans 28 des 33 cours d’appel, mais il faut souligner que deux d'entre elles – Aix en Provence et Metz – permettent à elles seules d’expliquer la moitié de la baisse constatée au plan national. Toutes les cours qui ont diminué leur stock d’affaires en 2006 ne l’ont pas fait au même rythme. Si la Cour d’appel de Metz a traité plus de 86 % de son stock d’affaires, celles de Chambéry et Lyon ne l’ont réduit que de 20 %. Par ailleurs, l’évolution de l’âge moyen des affaires restant en stock permet de savoir si la résorption a porté davantage sur des affaires anciennes ou sur des affaires récentes. On peut observer que l’âge moyen du stock diminue dans toutes les cours pour lesquelles il a fait l’objet d’un recul, à l’exception de la cour d’appel de Metz qui a, semble-t-il, gardé en stock un millier d’affaires très anciennes.

À l’inverse, seules cinq cours ont augmenté leurs stocks d’affaires en instance. Cette progression est ainsi de 12 % à Fort-de-France, de 11 % à Basse-Terre, de 8 % à Bastia et de 2,5 % à Paris.

c) Les tribunaux de grande instance

Pour l’analyse des statistiques relatives aux tribunaux de grande instance (TGI), il convient de rappeler que, depuis 2004, les données d’activité des TGI comprennent des procédures qui ne faisaient pas auparavant l’objet d’un enregistrement au Répertoire général civil (RGC). Avec la mise en place du nouveau RGC, ces procédures peuvent être identifiées en tant que telles puisqu’elles constituent l’activité de la juridiction au même titre que les affaires traditionnellement prises en compte. Ce changement provoque inévitablement une importante rupture de série en 2004, tant au niveau des flux d’affaires nouvelles et terminées que des durées d’affaires.

En 2006, le nombre d'affaires nouvelles portées devant les TGI s’élève à 953 206 affaires parmi lesquelles se trouvent 115 132 référés et 150 716 ordonnances sur requête. Ces données montrent qu’à quelques centaines d’affaires près, l’activité des tribunaux de grande instance est stable.

Après une diminution très lente du nombre d’affaires entre 2000 et 2002, l’année 2003 a connu une hausse sensible du nombre d’affaires nouvelles. À périmètre constant, l’année 2004 avait déjà permis de noter une pause dans cette évolution. En 2005 le nombre d’affaires portées devant les TGI était quasiment stable (+ 0,1 %). En 2006, le nombre d’affaires nouvelles est équivalent à celui de 2005 et cet état de fait se décline tant pour les référés et que les ordonnances sur requête.

L’analyse des affaires nouvelles par famille de contentieux civils est fournie pour 2006 à partir des tableaux de bord et du nouveau RGC. Toute comparaison avec les années antérieures est difficile (exception faite du juge aux affaires familiales), voire impossible du fait de la prise en compte de procédures non comptabilisées jusqu’alors :

– avec 368 533 affaires, les contentieux du juge aux affaires familiales sont stables en 2006, tout en se maintenant au niveau le plus élevé des dix dernières années. Cette stabilisation s’explique par la baisse des ruptures d’union dont le nombre se réduit de 0,3 % (185 063 demandes) combinée à une légère hausse des contentieux hors divorce, qui traitent du droit de visite, de l’autorité parentale et des obligations alimentaires des parents non mariés ;

– les affaires relatives à l’activité du juge de la liberté et de la détention en matière de rétention administrative des étrangers sont comptabilisées depuis 2004 ; leur nombre s’est accru de façon importante pour atteindre 17 551 affaires en 2005 et 21 207 affaires en 2006, soit une progression de 21 % ;

– les affaires relatives aux procédures de vente et d’expropriation nouvellement prises en compte également sont en légère hausse à 12 305 affaires en 2006 ;

– les contentieux de l'exécution s’élèvent à 130 699 affaires (+ 0,9 %) ce qui inclut depuis 2004 les ordonnances sur requête, au nombre de 67 252 en 2006, tandis que les ordonnances sur requête du Président s’élèvent à 71 337 (+ 0,8 %) ;

– le nombre total de référés est à la baisse avec 115 132 référés nouveaux.

Le nombre d’affaires terminées est en baisse de 2,4 % en 2006. De ce fait, son niveau demeure inférieur à celui des affaires nouvelles, ce qui provoque une hausse des affaires en cours de plus de 30 000 (contre une hausse de seulement 8 000 en 2005). Le stock s’établit en fin d’année à 577 029 affaires avec des affaires âgées en moyenne de 13,6 mois. La durée moyenne de traitement toutes affaires confondues (fond et référé) s’établit à 6,6 mois, mais cette durée intègre les ordonnances sur requête qui durent en moyenne 6 jours et les référés dont la durée moyenne d’établit à 2 mois.

Si l’on exclut les ruptures d’union (– 11 % en 2006), les affaires au fond terminées en 2006 se situent à un niveau sensiblement identique à celui de 2005.

d) Les tribunaux d’instance

En 2006 les tribunaux d’instance ont été saisis de 600 872 nouvelles affaires, soit 1,8 % de moins qu’en 2005. Cependant, le nombre de référés progresse de 1,5 % pour atteindre 74 249 affaires. Cette situation tranche avec la hausse sensible observée en 2003 et en 2004.

L'évolution des principales familles de contentieux civils en 2006 est la suivante :

– pour la deuxième année consécutive, les affaires de protection des personnes (tutelle ou curatelle des majeurs, incapacité des mineurs) diminuent en 2006 diminuent (– 1,1 %). Les ouvertures de régime de protection pour les majeurs progressent très légèrement pour atteindre 110 972 affaires. Les demandes concernant le fonctionnement des régimes en cours et les ouvertures de régime de protection pour les mineurs sont stables ;

– le contentieux de la responsabilité est de nouveau en hausse de 6,1 % après une hausse de 4,7 % l’année précédente ;

– le contentieux de l’impayé représente 37,5 % des affaires soumises aux tribunaux d’instance. Sa tendance à la baisse s'était interrompue en 1999-2000 à la suite du relèvement du seuil de compétence des tribunaux d’instance. Ce mouvement ne s'est pas ralenti et la hausse a continué jusqu’en 2004 (+ 3,4 %). L’année 2005 a été marquée par une inversion de tendance avec une baisse de 2,7 %, qui s’est amplifiée en 2006 avec une diminution de 7,5 %. Cette tendance s’observe dans tous les domaines. La forte diminution du contentieux de l’impayé doit être rapprochée de celle des injonctions de payer qui baissent également de 7 %, même si le nombre des référés dans le même domaine (61 203 référés) progresse de 1,4 %.

– les autres contentieux civils sont en progression ;

– concernant le contentieux de l'exécution, l'année 2006 confirme la tendance de 2004 et 2005 : les dossiers de rétablissement personnel progressent de 25 % pour atteindre un volume de 13 624 affaires.

Le nombre d'affaires terminées par les tribunaux d'instance en 2006 s’établit à 592 219, en légère hausse, dont plus de 74 000 référés (+ 0,9 %).

Malgré la stabilisation du nombre d’affaires terminées, leur niveau est resté en dessous de celui des affaires nouvelles. Le stock d'affaires restant à traiter au 31 décembre 2006 (482 314 affaires) s'est donc accru mécaniquement de 8 653 affaires par rapport à l'année précédente.

La durée moyenne de toutes les affaires terminées en 2006 par les tribunaux d'instance s'est établie, comme les années précédentes, à 4,7 mois. Parmi celles-ci, les référés sont traités en 3,1 mois. Cette durée moyenne recouvre l'éventail suivant : 25 % des affaires terminées par les tribunaux d'instance l'ont été en moins de 1,9 mois ; 50 % l'ont été en moins de 3,4 mois ; en revanche 25 % des affaires ont été terminées en plus de 5,8 mois.

e) Les juridictions de proximité

En juillet 2007, 578 juges de proximité exercent dans 331 juridictions de proximité, soit 69,5 % de l’ensemble des 476 juridictions existantes. Parmi les juges de proximité, 43 % appartiennent à des professions libérales juridiques et judiciaires, 39 % sont des juristes d’entreprise ou assimilés et 8,67 % sont d’anciens magistrats de l’ordre judiciaire et de l’ordre administratif. Les professionnels du droit exerçant ces fonctions ont une moyenne d’âge de 56 ans et la proportion d’hommes et de femmes est équivalente.

Le ministère estime que 42 % des juges de proximité exercent concomitamment une activité professionnelle, les professions juridiques et judiciaires étant majoritaires et suivies par les juristes d’entreprise ou assimilés.

L’année 2006 a été marquée par une croissance rapide du contentieux, illustrée par la multiplication par 6 – depuis 2004 – du nombre des affaires civiles terminées et l’augmentation de 75  du nombre de ces mêmes affaires de 2005 à 2006. Les affaires civiles nouvelles reçues par les juridictions de proximité connaissent une progression comparable. On observe ainsi une multiplication par 5,2 de 2004 à 2006 du nombre des affaires civiles nouvelles et une augmentation de 26 % du nombre de ces mêmes affaires de 2005 à 2006.

Plus significative encore est la part du contentieux civil de la juridiction de proximité par rapport à celui de l’instance, qui en 2006 avoisine les 16 %, alors qu’elle n’était que de l’ordre de 3 % en 2004.

2. L’activité judiciaire pénale

a) La Cour de cassation

Le volume d'affaires pénales nouvelles soumises à la Cour de cassation est en forte hausse en 2006 de 18,5 %, après plusieurs années de tendance à la baisse. Le nombre d'arrêts rendus par la Cour de cassation s'est établi à 9 047 décisions, soit 15,6 % de plus qu'en 2005.

Comme en matière civile, la procédure de filtrage instituée par la loi organique du 25 juin 2001 permet à la cour de déclarer « non admis » les pourvois irrecevables ou non fondés sur un moyen sérieux de cassation. Depuis 2002 les affaires en non-admission représentent environ la moitié des décisions rendues, part qui semble en légère augmentation (57,4 % en 2006). Ces non-admissions viennent diminuer d'autant les décisions de rejet, d’irrecevabilité et les autres décisions.

Les arrêts de cassation prononcés en matière pénale (488 en 2006) ont progressé de 18 % par rapport à l’année précédente. Ils ont constitué 21,2 % de l’ensemble des décisions soit un taux deux fois plus élevé qu’en 2002.

b) Les cours d’appel

En 2006, les chambres des appels correctionnels ont été saisies de 50 222 affaires, ce qui constitue une baisse de 2 % par rapport à 2005. Avec 48 873 arrêts rendus, le volume des affaires terminées s’est contracté. Malgré un nombre d’affaires terminées inférieur à celui des affaires nouvelles, le stock d’affaires en cours au 31 décembre a baissé de 8 %. Ce décalage s’explique sans doute par le fait qu’un arrêt rendu ne termine pas nécessairement l’affaire, en particulier sur les intérêts civils, une même affaire pouvant ainsi donner lieu à plusieurs arrêts. Le stock en fin d’année (25 504 affaires) représentait 6,3 mois d’activité. Par ailleurs, le nombre de personnes condamnées a diminué de 7,4 % et celui des personnes relaxées a baissé de 6,6 %.

En outre, depuis le 1er janvier 2005, les appels contre les décisions des juges de l’application des peines relèvent de la chambre de l’application des peines ou de son président. En 2006 elle a ainsi été saisie de 9 398 affaires et a rendu 10 957 décisions dont la moitié par le seul Président de la Chambre.

De leur côté, les chambres de l’instruction ont rendu 40 837 arrêts, soit une progression de 3,4 % par rapport à 2005. Par ailleurs, les arrêts de mise en accusation baissent de nouveau. Comme en 2005, les arrêts statuant sur la détention provisoire ou sur le contrôle judiciaire diminuent fortement (– 14 %), tandis que ceux statuant sur appel des décisions des juges d’instruction augmentent de 27 %. Le stock d’affaires en cours s’est accru en 2006 de près de 2 000 affaires.

c) Les tribunaux correctionnels

Le nombre de jugements portant condamnation ou relaxe rendus par les tribunaux correctionnels (380 323) est en diminution sensible par rapport à 2005. Cependant cette baisse est largement compensée par une progression de 35 % des ordonnances pénales (118 673) et une augmentation encore plus massive (+ 80 %) des ordonnances d’homologation dans le cadre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (plus de 36 000). Si l’on considère l’ensemble de ces décisions, ont été enregistrés en 2006 7,3 % de jugements supplémentaires.

Cette hausse d’activité est la traduction de l'augmentation du nombre d’affaires transmises par les parquets (+ 6,8 %).

Dans ces jugements :

– 484 523 personnes physiques ont été soit condamnées (457 029), soit relaxées (22 522), ce qui aboutit à un taux de relaxe de 4,7 %, en hausse en 2006 ;

– 1 728 personnes morales ont été soit condamnées (1 274), soit relaxées (445), soit un taux de relaxe de 26 % très éloigné de celui observables pour les personnes physiques ;

– 118 673 ordonnances pénales ont condamné 118 356 personnes et relaxé 280 soit un taux de relaxe infime de 0,3 %.

Globalement les condamnations correctionnelles qui atteignent 576 659 en 2006 ont augmenté de plus de 3,7 % par rapport à 2005.

Les autres décisions des tribunaux correctionnels (jugements sur intérêts civils essentiellement) se sont élevées à 40 000, soit une hausse de 5,6 % en 2006, alors même que la tendance est à une très forte baisse à l’échelle de la décennie passée.

d) Les tribunaux de police

11,4 millions de procédures ont été transmises aux officiers du ministère public en 2006, soit une baisse de 8,2 % par rapport à 2005. Les amendes forfaitaires impayées constituent l'essentiel de ces procédures.

Avec moins d’un million d’affaires classées, les classements sans suite ont diminué de plus de 15 %, pour atteindre le taux le plus bas des dix dernières années.

Par ailleurs, les amendes forfaitaires majorées sont restées en dessous de la barre des 10 millions, comme en 2004, et elles ont représenté une part à peu près équivalente des amendes forfaitaires impayées (88 %).

Les décisions de poursuite devant les tribunaux de police ont encore diminué après la fin du transfert de compétence vers les juridictions de proximité. Ainsi, seulement 7 800 affaires ont été poursuivies devant les tribunaux de police, soit une baisse de 63 % par rapport à 2005.

En corollaire, les affaires traitées par les tribunaux de police ont baissé de 21,3 %, mais cette baisse est plus marquée pour les décisions concernant les contraventions des quatre premières classes que pour celles de 5classe.

Ainsi, les jugements des quatre premières classes rendus par les tribunaux de police ont baissé au point de devenir résiduels (3 000 jugements) tandis que les jugements portant sur les contraventions de 5e classe ont progressé de 8 %.

Toutes procédures et juridictions confondues (notamment les juridictions de proximité), les condamnations pour contravention de 5classe ont diminué de 19 % en 2006, et celles des quatre premières classes de 5,5 %.

e) Les juridictions de proximité

Depuis la loi n° 2005-47 du 26 janvier 2005, la juridiction de proximité est compétente pour juger les contraventions des quatre premières classes à l’exception des contraventions de diffamation et d’injure non publiques présentant un caractère raciste ou discriminatoire (décret n° 2005-284 du 25 mars 2005), le tribunal de police ayant compétence pour juger toutes les contraventions de la 5e classe.

Les affaires poursuivies devant les juridictions de proximité ont légèrement progressé (+ 3,2 %) en 2005, mais le nombre de décisions rendues a baissé de 12,9 % par rapport à 2004. En 2006, les affaires poursuivies devant les juridictions de proximité ont diminué (– 0,3 %) tandis que se confirmait la baisse (– 4 %) du nombre des affaires traitées.

Cette évolution, qui est inverse à celle enregistrée pour le contentieux civil, est à relativiser. En effet, il s’agit non pas d’une baisse réelle mais plutôt d’un réajustement de l’activité de la juridiction de proximité (notamment à la suite du retrait des contraventions de 5e classe par la loi du 26 janvier 2005 précitée), à laquelle avaient été initialement transférés près de 80 % du contentieux pénal en matière de contraventions au détriment du tribunal de police.

L’étendue de la participation des juges de proximité aux audiences correctionnelles est variable selon les juridictions et va de la simple présence à l’audience et au délibéré à la préparation de l’audience, au rapport de dossiers, voire à la rédaction de jugements.

Au 31 décembre 2006, près de 90 % des tribunaux de grande instance étaient intéressés par l’assessorat en correctionnelle et environ 68 % des juges de proximité exerçaient les fonctions d’assesseur. L’assessorat des juges de proximité constitue un apport non négligeable pour une meilleure organisation de l’activité judiciaire et facilite le rapprochement des juges de proximité et des magistrats professionnels. Ainsi, grâce aux juges de proximité, les magistrats professionnels se trouvent plus disponibles pour une participation active aux sessions d’assises et consacrent plus de temps au traitement des contentieux spécialisés ou techniquement complexes qui leur sont habituellement confiés.

Dans le même temps, les juges de proximité voient s’élargir leur horizon et leur espace d’intervention par leur implication au sein de la juridiction de grande instance et bénéficient de l’opportunité de se perfectionner au contact des magistrats professionnels.

3. La mesure de la performance de la justice pénale

a) Le taux de réponse pénale

Mesuré depuis 1997, le taux de réponse pénale compare le nombre des poursuites, des procédures alternatives et des compositions pénales réussies rapportées au total des affaires poursuivables. Le rapporteur se félicite que ce taux, qui n’était que de 68,2 % en 2002, ait été porté à 72,1 % en 2003 et atteigne 80,4 % en 2006.

La réponse pénale prend soit la forme de poursuites, soit la forme d’alternatives aux poursuites. Les poursuites – poursuites devant les tribunaux correctionnels, de police, les juridictions pour enfants, l’ouverture d’une instruction – ont augmenté de 4,6 % en 2006 par rapport à l’année précédente et correspondent à 46,4 % des affaires poursuivables. Cette hausse s’explique par une augmentation des poursuites devant le tribunal correctionnel (+ 6,8 % en 2006) et en particulier par un fort développement des procédures d’ordonnances pénales (+ 22,5 %) et de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (+ 87,6 %).

Les affaires classées sans suite après réussite d’une procédure alternative ont progressé de 9 %. Elles concernent 69 318 procédures dont 7 834 réparations pour un mineur (+ 9 %), 1 645 médiations (– 38 %), 678 injonctions thérapeutiques (– 13 %), 2 341 plaignants désintéressés (+ 15 %), 3 083 régularisations (+ 30 %) et 48 518 rappels à la loi (+ 11 %).

b) L’exécution des décisions de justice pénale

Le rapporteur rappelle que la commission des Lois de l’Assemblée nationale a créé, lors de sa réunion du 18 juillet 2007, une mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale.

Actuellement, il n’existe pas d’outil outil informatique permettant de recueillir et d’exploiter au plan national les données des juridictions en matière d’exécution des peines. Seules les sept juridictions d’Île-de-France (Paris, Evry, Créteil, Bobigny, Pontoise, Versailles et Nanterre) sont dotées d’un équipement permettant de recenser les informations liées à l’exécution des peines. En 2006, ces sept juridictions ont prononcé 17.137 peines d’emprisonnement ferme. Le taux d’exécution de ces peines – qui mesure la part des peines prononcées pendant une année et mise à exécution avant le 1er septembre de l’année suivante – est de 68,2 %, toutes natures de jugement confondues. Plus précisément, ce taux est de 86,9 % pour les jugements contradictoires (soit 10.370 peines) et de 40,1 % pour les jugements contradictoires à signifier (soit 4.632 peines).

c) Les délais d’inscription au Casier judiciaire national

Le délai d’inscription au casier judiciaire résulte de l’addition de deux délais distincts : le délai de transmission de la décision au casier judiciaire et le délai de saisie par les services chargés de la gestion du casier judiciaire.

Le délai de transmission de la décision au casier judiciaire correspond au temps écoulé entre le moment où le jugement devient définitif et la date de réception effective du courrier postal par les services chargés de la gestion du casier judiciaire. Le délai de saisie correspond au temps écoulé entre la réception de ce courrier et l'enregistrement effectif de la condamnation, afin de la rendre disponible sur les bulletins.

Depuis 2006, ces délais figurent dans le projet annuel de performances sous la forme d’indicateurs. Compte tenu du nombre important de juridictions pénales (33 cours d’appel, 185 tribunaux de grande instance, 550 tribunaux de police), qui nécessiterait un document volumineux et peu lisible pour retracer les délais par juridiction, le tableau suivant présente, outre le délai moyen d’ensemble, l’évolution des délais de 2004 à 2007 par type de juridiction :

ÉVOLUTION DES DÉLAIS D’INSCRIPTION AU CASIER JUDICIAIRE
DE 2004 À 2007 PAR TYPE DE JURIDICTION

(en mois)

Type de juridiction

2004

2005

2006

2007

Cours d'appel majeurs

4,32

4,26

4,12

4,01

Cours d'appel mineurs

3,99

4,08

4,07

4,17

Cour d'assises majeurs

3,42

3,1

3,35

3,05

Cour d'assises mineurs

2,33

2,25

2,78

3,04

Cour d'assises d'appel majeurs

5,05

4,89

4,81

Cour d'assises d'appel mineurs

1,87

1,61

1,58

Tribunal correctionnel

4,52

4,36

4,93

4,74

Tribunal pour enfants

3,49

4,03

4,3

4,52

Juge des enfants

2,46

2,71

3,2

2,86

Tribunal de police

3,19

4,14

3,84

3,38

Juge de proximité

1,85

2,61

3,2

3,66

Délai de transmission moyen

4,0

4,1

4,6

4,6

Délai de saisie

1,9

1,8

1,4

1,6

Délai total d'inscription

5,9

5,9

6,0

6,2

Source : ministère de la Justice

L’application informatique Cassiopée devrait couvrir à terme près de 70 % de l'activité judiciaire pénale. Elle comportera un module de communication électronique des décisions à enregistrer au Casier judiciaire national, qui devrait réduire considérablement les délais d’inscription, en systématisant les envois, en contrôlant les données avant envoi (ce qui limitera les rejets, donc le temps perdu avant correction et enregistrement effectif) et en éliminant les délais de constitution et d'envoi postal des fiches à enregistrer ainsi que le délai de saisie propre au Casier judiciaire national.

Jusqu’à la fin du premier trimestre 2008, une phase d’expérimentation concerne les tribunaux d’Angoulême, de Caen, de Rouen et de Bordeaux. Ensuite, une phase de « pré-généralisation » concernera les dix tribunaux des cours d’appels de Caen et Rouen au second trimestre 2008. Enfin, 161 tribunaux (hors Île-de-France) devraient être concernés avant novembre 2009, au rythme de trois nouveaux tribunaux de grande instance par semaine.

d) La durée des procédures pénales

La durée moyenne des procédures pénales est calculée à partir des données du Casier judiciaire. Elle correspond au délai écoulé entre la date des faits et la date de la condamnation définitive. Pour la grande majorité des délits et les contraventions de 5e classe, ce délai est une bonne estimation de la durée de procédure.

En matière criminelle, la date des faits pouvant être très éloignée du début de l'instruction, les données du Casier judiciaire sont complétées par des informations directes sur la durée de l’instruction et sur les délais d’audiencement aux assises. En matière criminelle (toutes juridictions confondues), le délai de procédure imputable à l'institution judiciaire a été de 36,2 mois en 2005, dernière année connue. Il se décompose en 24,8 mois pour le déroulement de l'instruction et 11,4 mois pour le délai d'audiencement. Ce chiffre est nettement supérieur à celui observé en 2004, qui était de 34 mois. La durée moyenne de l'ensemble des procédures délictuelles est de 11 mois. Les condamnations en matière de stupéfiants sont prononcées en moyenne 16 mois après les faits à cause d’un recours fréquent à l’instruction. À l’inverse les infractions de circulation routière et à la police des étrangers sont jugées beaucoup plus rapidement (respectivement en 5,3 mois et en 7,8 mois). Enfin la durée de traitement des contraventions de 5e classe a augmenté de nouveau pour s'établir à 11,5 mois en 2005.

Le tableau suivant présente l’évolution de la durée moyenne des procédures pénales ayant abouti à une condamnation :

DURÉE MOYENNE DES PROCÉDURES PÉNALES AYANT ABOUTI À UNE CONDAMNATION

(en mois)

 

2002

2003

2004

2005

Toutes condamnations

11,2

10,8

11,5

11,6

Crimes

32,5

32,9

34,0

36,2

Délits

11,3

11,0

11,5

11,4

dont : Vol, recel

9,3

8,9

10,3

11,2

Circulation routière

4,5

4,8

5,1

5,3

Stupéfiants

17,4

16,5

17,0

15,9

Étrangers

5,2

5,4

7,1

7,8

Contraventions de 5e classe

9,2

8,5

10,8

11,5

dont : Circulation routière

8,4

8,1

10,1

12,0

Environnement

9,4

7,7

10,2

10,4

Coups et blessures volontaires

8,5

7,0

9,6

10,2

Source : ministère de la Justice

II. —  L’ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE

Le programme « Accès au droit et à la justice » regroupe les crédits destinés à permettre au citoyen de connaître ses droits pour les faire valoir. Ces politiques comprennent quatre volets :

—  l’aide juridictionnelle, qui s’adresse aux personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits devant une juridiction, en matière gracieuse ou contentieuse, en demande ou en défense. Elle s’applique aux procédures, actes et mesures d’exécution pour lesquels une admission a été prononcée. Les prestations sont versées aux auxiliaires de justice soit directement, soit par l’intermédiaire des caisses de règlements pécuniaires des avocats ;

—  le développement de l’accès au droit, qui repose sur les conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD), institués dans 86 départements. Ces groupements d’intérêt publics sont chargés de recenser les besoins, de définir une politique locale, de faire l’inventaire des dispositifs en place et d’impulser des actions nouvelles. Leurs interventions sont complétées par le réseau judiciaire de proximité, le plus souvent implanté dans les zones urbaines sensibles, constitué d’une centaine de maisons de la justice et du droit, ainsi que d’antennes et de points d’accès au droit ;

—  l’aide aux victimes, qui vise à améliorer la prise en compte des victimes d’infractions par l’institution judiciaire, et à rechercher des modalités d’indemnisation plus justes et plus transparentes. Elle s’appuie aujourd’hui sur les commissions d’indemnisation des victimes d’infractions qui constituent des juridictions spécialisées, installées dans chacun des 181 tribunaux de grande instance, et sur un réseau d’associations d’aide aux victimes, chargées d’accueillir, d’orienter et d’accompagner les victimes. Le ministre de la Justice a cependant confirmé, lors de son audition par votre commission des Lois, la réforme profonde de ce dispositif pour instaurer un service d’assistance au recouvrement des victimes d’infraction (SARVI) et la création d’un juge délégué aux victimes sera instauré. Le ministre a ajouté que « les missions du juge qui préside la commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) seront élargies ».

—  la médiation familiale, que la loi de finances pour 2007 a inscrite dans le périmètre du programme « Accès au droit et à la Justice ». Ces crédits, auparavant inscrits sur le programme « Justice judiciaire », sont destinés au soutien des fédérations nationales et du réseau des associations et services intervenant en ce domaine.

Il est proposé de doter le programme « Accès au droit et à la justice » de 335 millions d’euros en crédits de paiement, en baisse apparente de 7 millions d’euros par rapport à 2007. En réalité, cette diminution sera plus que compensée par le plan de recouvrement des avances de frais de procédure faites au titre de l'aide juridictionnelle qui, en gestion, viendra atténuer les charges de l'action par rétablissement de crédits de hauteur de 8,9 millions d’euros.

Le tableau suivant détaille, par action, l’évolution des crédits de paiement du programme « Accès au droit et à la Justice » :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME
« ACCÈS AU DROIT ET AIDE AUX VICTIMES »

(en millions d’euros)

Actions du programme « Accès au droit et à la Justice »

LFI 2007

PLF 2008

Évolution

Aide juridictionnelle

326,9

318,2

– 2,7 %

Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité

3,5

3,6

+ 4,0 %

Aide aux victimes

9,5

10,9

+ 14,6 %

Médiation familiale et espaces de rencontre (1)

2,0

2,3

+11,3 %

Total

342,0

335,0

– 2,0 %

(1) anciennement libellé « Médiation familiale et lieux neutres de rencontre »

Source : projet annuel de performances pour 2008

A. L’ÉVOLUTION DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE

Le projet de loi de finances prévoit d’allouer 318,2 millions d’euros au dispositif d’aide juridictionnelle. Ce montant, en repli de près de 5 millions d’euros par rapport aux crédits ouverts en 2007, sera majoré en gestion de 8,9 millions d’euros. En réalité, les crédits disponibles devraient donc atteindre 327,1 millions d’euros (+ 0,6 % par rapport à 2007).

Ce budget est destiné à financer plusieurs dispositifs prévus par la loi du 10 juillet 1991 : l’aide juridictionnelle proprement dite, l’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue, l’aide en matière de médiation et de composition pénales, et l’aide à l’intervention de l’avocat pour l’assistance aux détenus au cours de procédures disciplinaires.

Cette dotation finance également des protocoles d’amélioration de la défense des justiciables conclus entre les juridictions et les barreaux, conduisant à une majoration de la rétribution de l’avocat, limitée dans une proportion maximum de 20 %, pour certaines missions d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue et en matière de médiation ou de composition pénales. Ces dispositions concernent les barreaux qui ont souscrit avec les chefs de juridictions des engagements d’objectifs assortis de procédures d’évaluation visant à assurer une meilleure organisation de la défense.

La dépense résultant de l’application de ces protocoles homologués par le garde des Sceaux était de 5,2 millions d’euros en 2006. La dotation prévue pour 2008 devrait atteindre 6,08 millions d’euros, pour un montant moyen de 1,52 million d’euros par barreau concerné.

1. La progression du nombre des bénéficiaires

Le nombre total des admissions a augmenté de 10,1 % en 2004, de 6,6 % en 2005 et de 2,1 % en 2006 pour atteindre le nombre de 904 961 admissions. Au premier semestre 2007, 467 736 admissions ont été prononcées, soit une hausse de 0,8 % (contre 0,5 % au premier semestre 2006). Les données transmises au rapporteur tendant donc à confirmer que la forte hausse du nombre des bénéficiaires de l’aide juridictionnelle est enrayée. Leur progression est aujourd’hui limitée.

Parallèlement, la dépense d’aide juridictionnelle est passée de 219,2 millions d’euros en 2002 à 300,4 millions d’euros en 2006, soit une hausse de 37 %. Elle a, en effet, crû à un rythme élevé jusqu’en 2005 : après avoir progressé de 8,4 % en 2002, elle a bondi de 23,5 % en 2003, avant d’augmenter de 1,2 % en 2004 et de 9,9 % en 2005. Pour la première fois depuis dix ans, cette dépense est demeurée stable en 2006, avec une légère tendance à la baisse de 0,2 %.

Il convient de rappeler que la forte hausse de la dépense observée en 2003 est liée au fait que le ministère a versé à la caisse autonome de règlement pécuniaire des avocats, à la fin de l’année 2003, une dotation lui permettant de faire face aux conséquences du décret du 5 septembre 2003 portant revalorisation du barème de rétribution de l’avocat effectuant des missions d’aide juridictionnelle.

2. Des améliorations récentes

La hausse du nombre des admissions à l’aide juridictionnelle enregistrée au cours des dernières années s’explique par les mesures prises en faveur des justiciables les plus fragiles ou démunis en 2002 et en 2003. C’est ainsi qu’ont été permis l’admission sans condition de ressources des victimes des atteintes les plus graves à la personne ou de leurs ayants droit, l’augmentation des correctifs familiaux pour les deux premières personnes à charge du demandeur et l’exclusion des allocations logement de l’appréciation des ressources pour l’admission.

Certaines améliorations récentes ont porté sur la rémunération des avocats. Le décret du 5 septembre 2003, précité, a revalorisé le barème de rétribution de l’avocat effectuant des missions d’aide juridictionnelle. La loi de finances pour 2004 a augmenté de 2 % l’unité de valeur de référence. La loi de finances pour 2007 a poursuivi cet effort puisqu’elle a conduit à augmenter de 6 % l’unité de valeur de référence permettant de fixer la contribution de l’État à la rétribution des avocats pour les missions d’aide juridictionnelle, entraînant une hausse de 6 % des rétributions versées aux avocats pour les missions d’aide juridictionnelle achevées à compter du 1er janvier 2007.

D’autres réformes ont conduit à accroître le nombre des bénéficiaires. La loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 (et les décrets du 2 avril et du 5 septembre 2003) a amélioré le régime de l’aide juridictionnelle pour les familles aux ressources modestes et les victimes. La loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine a institué une procédure de rétablissement personnel qui a induit une augmentation de 19 % des admissions pour des procédures devant le juge de l’exécution en 2004, suivie d’une hausse de 12 % en 2005 et 5 % en 2006.

S’agissant des procédures d’appel des reconduites à la frontière, l’article 22 bis de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France a prévu le principe du transfert aux cours administratives d’appel de l’appel des décisions des tribunaux administratifs en matière de reconduite à la frontière, antérieurement porté devant le Conseil d’Etat. Le décret n° 2004-789 du 29 juillet 2004 a fixé la date de ce transfert de compétence au 1er janvier 2005, ce transfert de l’appel aux cours s’est traduit par un nombre important de demandes d’aide juridictionnelle et de décisions d’octroi de l’aide.

Par ailleurs, la proportion des personnes n’ayant pas de ressources ou bénéficiant du RMI, de l’allocation d’insertion ou du fonds national de solidarité dans le total des admissions à l’aide juridictionnelle est passée de 53 % en 2001 à 59 % en 2005.

3. Des pistes de réforme

Le fonctionnement actuel de l’aide juridictionnelle continue de susciter un débat. Les avocats estiment qu’au-delà de la revalorisation des unités de valeur, une refonte globale du système de rémunération doit être envisagée.

Le sénateur Roland du Luart, rapporteur spécial des crédits de la mission « Justice » a récemment souhaité (4) établir un « barème horaire » mieux adapté qu'aujourd'hui à la réalité du travail accompli par l'avocat, afin de permettre sa « juste rémunération ». À l’instar de votre rapporteur, il recommande le maintien du principe selon lequel le barème applicable est forfaitaire, sous réserve que ce forfait soit adapté à chaque type de procédure.

4. Le contentieux autour du taux de TVA applicable

Le taux de TVA applicable aux prestations d’aide juridictionnelle est de 5,5 %. En effet, ces prestations, bénéficiant du taux réduit de TVA, entrent dans le champ défini au f de l’article 279 du code général des impôts.

En application du de l’article 51 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, le projet annuel de performances précise que la moins-value fiscale liée à l’application de ce taux réduit serait de 50 millions d’euros en 2008, contre 45 millions d’euros en 2007 et 40 millions d’euros en 2006. Évidemment, ces dépenses fiscales ne peuvent être évaluées très précisément et les chiffres mentionnés ne sont que des ordres de grandeur.

Cependant, la Commission européenne a notifié, fin 2006, à la représentation permanente française auprès de l’Union européenne, un avis motivé pour manquement à cause du taux de TVA appliqué aux prestations des avocats au titre de l'aide juridictionnelle. En effet, la Commission considère que l’application du taux réduit de TVA contrevient aux règles communautaires et estime que les dérogations au principe d’application du taux normal de la TVA sont strictement limitées par l’annexe de la sixième directive relative à la TVA.

La France a répondu aux arguments de la Commission le 2 février 2007. Elle estime que le taux réduit de TVA facilite l’accès des personnes les plus modestes à la justice et que les règles communautaires laissent aux États membres une marge d’appréciation dans le choix des dérogations au taux de TVA normal pour les prestations de services à caractère social. La France observe également que l’aide juridictionnelle n’est source d’aucune distorsion de concurrence au sein du secteur des professions juridiques car sans l’aide juridictionnelle, les personnes les plus modestes ne pourraient voir leur défense assurée. Enfin, tous les avocats, y compris les avocats des autres États membres, ont la liberté de défendre de clients bénéficiaires de l’aide juridictionnelle.

La Cour de justice des communautés européennes a été saisie par la Commission le 6 juillet 2007.

Interrogée par le rapporteur lors de son audition par la commission des Lois, la ministre de la Justice a souligné que la France maintenait toutefois sa position « au motif que cette aide ne fausse pas la concurrence car elle ne concerne que les plus modestes ». La France considère donc sa position comme extrêmement solide et attend la suite de la procédure sereinement.

B. LES CRÉDITS EN FAVEUR DE L’ACCÈS AU DROIT, DE LA MÉDIATION FAMILIALE ET DE L’AIDE AUX VICTIMES

L’amélioration de la prise en compte des victimes d’infractions par l’institution judiciaire est un élément essentiel de la politique pénale. Cette évolution majeure s’est traduite par un renforcement des droits des victimes dans le cadre de la procédure pénale et la mise en place de structures appropriées.

1. L’aide aux victimes

a) Le renforcement des dispositions législatives favorables aux victimes

La loi d’orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) du 9 septembre 2002 a donné la possibilité à la victime d’obtenir la désignation d’un avocat dès le début de la procédure, et a conféré l’aide juridictionnelle sans condition de ressources aux victimes d’infractions les plus graves. L’intégration de l’assistance des parties civiles dans le champ des protocoles d’amélioration de la défense conclus entre les barreaux et les juridictions, assure la mise en œuvre effective de ces droits.

La loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a renforcé, d'une part, l’information des victimes (remise du procès-verbal de plainte à la demande de la victime, information systématique des motifs de classement sans suite) tout en organisant, d'autre part, les conditions d'une meilleure prise en compte des intérêts des victimes au stade de l’exécution des peines et la simplification de la procédure d’indemnisation devant les Commissions d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI).

Par la suite, la loi du 12 décembre 2005 relative à la prévention de la récidive permet à l’avocat de la partie civile de présenter ses observations devant les juridictions de l’application des peines, lors de l’examen d’une demande de libération conditionnelle. La loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme, rend possible l’indemnisation des ayants droit des victimes françaises d’actes de terrorisme commis à l’étranger, même lorsque ces ayants droit n’ont pas la nationalité française. Enfin, la loi du 4 avril 2006 relative à la répression des violences au sein du couple étend la circonstance aggravante liée à l’existence d’une relation de couple aux infractions de meurtre, viol et autres agressions sexuelles.

b) L’action du ministère en faveur des victimes

Le ministère de la Justice accompagne la mobilisation du secteur associatif en finançant, par l'intermédiaire des crédits déconcentrés auprès des cours d'appel, l'action des associations d'aide aux victimes.

En 2006, les crédits ouverts pour les 168 associations locales d'aide aux victimes s'élevaient à 7,3 millions d’euros, en hausse de 12 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005.

En 2007, le montant total des crédits déconcentrés aux cours d'appel dans le cadre du soutien aux 172 associations locales d'aide aux victimes est de 7,45 millions d’euros.

Pour 2008, les crédits destinés au financement du réseau des associations d’aide aux victimes sur le territoire national sont portés à 8,8 millions d’euros. Cette dotation se décompose de la manière suivante :

—  7,5 millions d’euros consacrés au soutien des activités du réseau des associations locales d’aide aux victimes, dont 6 millions d’euros pour le financement des conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO) et 1,49 million d’euros pour le réseau des associations et services d’aide aux victimes n’ayant pas signé de convention pluriannuelle d’objectifs ;

—  1,3 million d’euros au titre d’actions nouvelles, dont 0,5 million d’euros sera consacré au recrutement de psychologues et de juristes à temps partiel (pour 17 ETPT) en 2008 et 0,77 million d’euros consacré au développement des permanences des associations. Il est notamment prévu de privilégier les permanences en vue de l’accompagnement des victimes lors des procès et au sein des bureaux de l’exécution immédiate des peines pour parvenir à l'accueil d'une population de 250.000 victimes d’infractions pénales et au suivi de plus de 150.000 victimes au cours des trois prochaines années.

Des actions spécifiques en direction de victimes particulièrement fragilisées (mineurs victimes, femmes victimes de violences intra-familiales et conjugales, victimes prises en charge dans les services d'urgence des hôpitaux) seront également développées. Le ministère de la Justice prévoit de consacrer une somme de 1,9 million d’euros au versement de subventions à ces structures ainsi qu’au soutien des projets d’accompagnement des personnes particulièrement fragilisées connues du ministère de la Justice, cofinancés par le Fonds social européen.

Il est en outre prévu de maintenir un fonds de réserve de 200 000 euros pour les accidents collectifs et les procès exceptionnels.

c) Le renforcement de l’indemnisation des victimes

Une Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) existe dans chacun des 181 tribunaux de grande instance. Cette juridiction civile est composée de deux magistrats et d’un assesseur non professionnel. Les CIVI sont avec le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) les éléments clefs du dispositif autonome d’indemnisation des victimes d’infractions.

Aujourd’hui, deux tiers des victimes qui peuvent prétendre à une indemnisation ne sont pas indemnisés. Elles sont pourtant souvent éligibles à la CIVI mais les délais très courts qui encadrent la procédure les empêchent souvent de constituer des dossiers recevables. C’est pourquoi le Gouvernement propose la création d’un service d’assistance au recouvrement des victimes d’infractions (SARVI). Il aura pour objectif de permettre aux victimes qui le souhaitent de recouvrer leurs dommages et intérêts dans les meilleures conditions, sans avancer de frais, et de se voir proposer le versement d’une avance forfaitaire sans attendre le premier versement de l’auteur. Il permettra ainsi aux plus modestes d’être indemnisés rapidement ou, pour le moins, de toucher une provision.

Par ailleurs, lorsque les victimes ont obtenu une décision de justice, le SARVI sera l’intermédiaire entre ces victimes et les personnes condamnées.

Simultanément, la ministre de la Justice a indiqué lors de son audition par votre commission des Lois qu’elle entendait remettre à plat le fonctionnement de la CIVI. Elle souhaite améliorer en particulier les délais de fonctionnement et les conditions d’éligibilité. Cependant, cette commission étant financée par les assureurs, une concertation avec eux sur son coût de fonctionnement doit être menée.

2. Le développement de l’accès au droit

En 2008, les crédits du ministère de la justice destinés au développement de l’accès au droit et au réseau judiciaire de proximité s’élèvent à 3,65 millions d’euros (hors personnels), contre 3,69 millions d’euros en 2007.

La majorité de ces crédits (3,52 millions d’euros) est allouée, sous forme de subventions pour charges de service public, aux conseils départementaux d’accès au droit (CDAD).

Dans un contexte où la réforme de la carte judiciaire conduit à développer l’offre de services de proximité en matière d’accès au droit, les principales actions qui seront soutenues en 2008 visent à étendre la couverture du territoire national en CDAD et à améliorer la qualité du service rendu aux usagers du service public de l’accès au droit.

Au 1er juillet 2007, 86 départements étaient dotés d’un CDAD et 6 nouveaux conseils devraient être constitués d’ici la fin de l’année. Outre ces 92 CDAD, il est prévu de créer de cinq autres CDAD en 2008, pour un coût total de 125 000 euros.

3. La médiation familiale

L’action « Médiation familiale et espaces de rencontre » serait dotée de 2,26 millions d’euros en 2008 (hors dépenses de personnel).

L’essentiel de ces crédits d’intervention (2,19 millions d’euros) est destiné au financement du réseau des associations de médiation familiale ou d’espaces de rencontre sur le territoire national. Sur cette somme, 1,95 million d’euros permettra de payer les dépenses courantes de ces structures et 0,23 million d’euros servira à financer des mesures nouvelles.

III.– LA CONDUITE ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE ET LES ORGANISMES RATTACHÉS

Le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés » est le programme de soutien de la mission « Justice ». Il serait doté en 2008 de 262 millions d’euros en crédits de paiement, soit une progression de 3 % par rapport à 2007.

Le tableau suivant présente l’évolution des crédits du programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés » :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME « CONDUITE ET PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE ET ORGANISMES RATTACHÉS »

(en millions d’euros)

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2007

Demandées pour 2008

Évolution

Ouverts en LFI pour 2007

Demandés pour 2008

Évolution

294

274

– 6,7%

254

262

3,0%

A. UNE STABILISATION DES EFFECTIFS ET DES MOYENS DE L’ADMINISTRATION CENTRALE

Après plusieurs années de croissance de ses effectifs, l’administration centrale du ministère de la Justice est engagée dans un mouvement de stabilisation du nombre de ses agents et de ses moyens de fonctionnement.

Au titre des économies structurelles 52 ETPT d’administration centrale sont supprimés, suite à des départs en retraite. Le volume total des emplois du programme est donc ramené (hors commission nationale informatique et libertés) à 1 467 ETPT.

En conséquence, les crédits demandés en titre 2 sont en repli de 0,14 million d’euros pour l’ensemble du programme. L’action « gestion administrative commune » verrait ses crédits de titre 2 baisser de 2,52 millions d’euros, tandis que ceux de l’action « commission nationale informatique et libertés » progresseraient de 1,05 million d’euros, du fait de la création de 15 ETPT.

Parmi les priorités budgétaires du projet annuel de performances, la dématérialisation de documents fait l’objet d’un souci particulier. La dématérialisation des procédures pénales et des échanges en matière civile et administrative fait suite aux recommandations d'un récent audit (5) de modernisation de l'État. Cette mesure doit permettre d’accompagner la réforme de la carte judiciaire et la modernisation de la justice et bénéficie de l’inscription de 1,2 million d’euros en crédits de paiement.

B. LE RENFORCEMENT DES MOYENS DE LA COMMISSION NATIONALE INFORMATIQUE ET LIBERTÉS

L’activité de la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) a progressé de 570 % entre 2004 et 2007, avec plus de 70 000 fichiers déclarés cette année.

Outre l’accélération de la constitution de fichiers, la loi « informatique et libertés » du 6 août 2004 a réformé en profondeur la loi de 1978 conformément aux exigences de la directive 95/46 (CE), du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.

En plus de ses anciennes missions d’avis sur les projets de loi ou de décret, la CNIL se voit attribuer de nouvelles compétences, nombreuses et lourdes : contrôles sur place, mise en œuvre d’une formation contentieuse, création et animation du réseau des correspondants « informatique et libertés », missions de conseil et d’information ou encore autorisation des fichiers les plus sensibles mis en œuvre tant par le secteur public que privé.

Le tableau suivant présente les emplois de la CNIL par catégorie :

EMPLOIS EN ÉQUIVALENTS TEMPS PLEIN TRAVAILLÉ DE LA CNIL

(en équivalents temps plein travaillé)

 

Plafond LFI 2007

Plafond 2007 révisé

Personnels d’encadrement

59

68

Personnels administratifs et techniques de catégorie B

22

24

Personnels administratifs et techniques de catégorie C

19

21

Total

100

113

Les moyens attribués à la CNIL par le projet de loi de finances s’inscrivent dans une démarche pluriannuelle de montée en puissance sur les cinq prochaines années de la législature (2008-2012).

Avec la création de 8 ETPT – portant donc le total à 121 ETPT – et l’abondement des crédits de fonctionnement de la CNIL, un effort significatif est réalisé en sa faveur, qui conforte et amplifie l’évolution favorable engagée depuis 2005. Compte tenu de la montée en puissance des missions dévolues à la CNIL, cet effort devra être poursuivi ces prochaines années.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 17 octobre 2007, la Commission a procédé à l’audition de Mme Rachida Dati, garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur les crédits de la mission « Justice » pour 2008.

Mme Rachida Dati, garde des Sceaux, ministre de la justice, a souligné sa volonté d’améliorer la qualité de la justice dans l’intérêt du justiciable. Aujourd’hui, 66 % des Français considèrent que leur justice fonctionne très mal. Ils lui reprochent d’être lente et de manquer d’efficacité. Ils ont le sentiment qu’elle ne s’applique pas de la même manière partout et pour tous.

Les Français doivent pouvoir se reconnaître dans cette justice qui est rendue en leur nom. Ils attendent qu’elle se montre plus ferme avec la délinquance, et plus humaine avec les victimes. Ils attendent qu’elle rende ses décisions dans des délais raisonnables et qu’elle les fasse exécuter. Ils attendent enfin qu’elle soit plus facile d’accès. Ils veulent qu’elle s’adresse à eux dans un langage compréhensible. Ils attendent qu’elle s’acquitte efficacement de ses missions au service du bien commun.

Il faut donc rénover l’organisation de la justice, la rendre plus cohérente, plus rationnelle, plus efficace. Cette action demande de la volonté et du courage. Elle appelle la mobilisation de tous. Elle est déjà en marche, avec les réformes qui ont été engagées depuis mai dernier. Le Parlement y prend sa part, les projets qu’il a déjà adoptés en témoignent.

Le Gouvernement est conscient des défis que la justice doit relever. Il a fait du budget de la justice une priorité dans son projet de loi de finances pour 2008. Ainsi, le projet de budget de la justice augmente de 4,5 %, pour atteindre 6,52 milliards d’euros, tandis que que le budget de l’État ne progresse que de 1,6 %. Dans le même temps, 1615 créations d’emploi sont prévues pour la justice, alors que l’État ne remplace pas 22 900 départs en retraite dans l’ensemble de ses ministères.

En faisant ce choix clair, le Gouvernement confie à la garde des Sceaux une grande responsabilité. Il faut sans plus attendre moderniser le système pénitentiaire pour mieux enrayer la récidive ; changer le regard que les victimes portent sur la justice, en changeant celui que la justice pose sur elles ; améliorer le fonctionnement des juridictions.

Le premier axe est celui de la modernisation du système pénitentiaire.

La loi du 10 août 2007 a permis de prendre de front le phénomène de la délinquance, en particulier celui de la récidive. Une politique pénale n’est légitime que si elle repose sur le respect de la personne humaine en détention, c’est d’ailleurs un point auquel Michèle Tabarot, rapporteure pour avis, est particulièrement sensible.

Le futur Contrôleur général des lieux de privation de liberté aura la mission de veiller au respect de ces droits fondamentaux.

La loi pénitentiaire qui sera présentée en novembre redéfinira le rôle et les missions de la prison. Elle améliorera les conditions de prise en charge des détenus et les conditions de travail des personnels.

La France doit par ailleurs disposer du nombre de places en détention dont elle a besoin. Elle doit aussi améliorer la réinsertion des détenus.

En 2008, 1100 postes supplémentaires seront créés au sein de l’administration pénitentiaire. Sept nouveaux établissements ouvriront leurs portes, dont trois spécialement dédiés aux mineurs.

Les « séjours » de courte durée en prison et les sorties « sèches », sans mesures d’accompagnement, préparent mal à la réinsertion. Lutter contre la récidive suppose ainsi de développer l’aménagement des peines, afin de permettre aux condamnés de retrouver une place dans la société.

Ainsi, 5,4 millions d’euros seront consacrés au financement des bracelets électroniques fixes ou mobiles et ce sont quelque 3 000 bracelets qui seront disponibles dès 2008. Par ailleurs, un million d’euros sera consacré au financement des associations qui aident à la réinsertion des condamnés.

Les mineurs reçoivent une attention particulière dans la politique pénale. Les centres éducatifs fermés ont montré leur efficacité : 61 % des adolescents qui en sortent ne récidivent pas. En leur donnant les repères qui leur ont manqué, ces centres leur offrent une nouvelle chance.

Dix nouveaux centres ouvriront en 2008, ce qui portera leur nombre à 43. En outre, cinq d’entre eux seront dotés d’une prise en charge pédopsychiatrique renforcée répondant ainsi à une demande des juges pour enfants et des éducateurs.

Le budget pour 2008 permet la création de cent emplois supplémentaires qui permettront de renforcer l’action de la PJJ dans les centres fermés et dans les établissements pour mineurs.

Le deuxième axe vise à changer le regard que la justice pose sur les victimes. Pour ces dernières, les procédures judiciaires relèvent souvent d’un « parcours du combattant ». Les victimes ont le sentiment que la justice a pour elles moins de considération que pour les condamnés. Trop souvent, les faits leur donnent raison.

La ministre a donc exprimé la volonté d’améliorer la réponse judiciaire qui leur est faite. Des progrès ont déjà été accomplis, en particulier grâce aux bureaux de l’exécution des peines, dispositif qui sera généralisé. Il faut mieux accompagner les victimes, leur garantir que les peines prononcées seront bien exécutées et améliorer leur indemnisation.

Une série de mesures a été annoncée, qui seront mises en œuvre en 2008 : un service d’assistance au recouvrement des victimes d’infraction (SARVI) sera créé. Un juge délégué aux victimes sera instauré. Les missions du juge qui préside la commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) seront élargies. L’action des associations sera confortée par une augmentation de 15 % de leurs crédits.

Le sénateur Roland du Luart a présenté la semaine dernière un rapport qui propose de nombreuses pistes pour réformer l’aide juridictionnelle. Elles seront étudiées pour que le dispositif fonctionne mieux, pour qu’il soit plus juste et pour que son coût pour l’État soit stabilisé.

Troisième axe : l’organisation judiciaire doit se moderniser en profondeur.

Avec 400 emplois supplémentaires, le projet de budget pour 2008 renforce le fonctionnement des juridictions. Outre le remplacement des départs en retraite, les juridictions bénéficieront de 187 emplois de magistrats supplémentaires et d’un nombre équivalent de greffiers, car, sans greffier, aucun magistrat ne peut prendre de décision.

Le budget permettra également la promotion de 149 fonctionnaires de catégorie C et la création de 26 emplois de secrétaires administratifs de catégorie B.

La justice est avant tout constituée d’hommes et de femmes qui se dévouent avec passion à leur métier. Pour qu’ils puissent être fiers de leurs missions, il faut leur donner les moyens de l’accomplir efficacement et dans la sérénité. Le rapporteur pour avis, en est parfaitement conscient.

Les bâtiments de la Justice doivent être adaptés à leur travail : 121 millions d’euros seront consacrés à la rénovation de certains tribunaux, ainsi qu’à la mise aux normes de sécurité incendie et d’accessibilité pour les handicapés.

La justice doit être rendue dans la sérénité mais aussi en toute sécurité. Chacun a en tête les drames de Metz et de Laon. On ne peut accepter qu’ils se reproduisent. Plusieurs rapports avaient été rendus sur ce sujet au cours des cinq dernières années, les commissions d’hygiène et de sécurité avait rendu de nombreuses conclusions de non-conformité. Dès son arrivée, la ministre a souhaité que les tribunaux qui ne l’étaient pas soient remis aux normes et que la sécurité dans les juridictions soit mieux assurée. C’est aujourd’hui le cas dans 90 % d’entre elles, soit par l’installation de portiques avec des agents de surveillance, soit par l’affectation de personnel supplémentaire, soit par la mise aux normes des installations. 20 millions d’euros ont été débloqués dès le mois de juin 2007 pour cela. Cet effort sera poursuivi en 2008, puisque quelque 39 millions d’euros y seront consacrés.

Il faut également tenir compte des attentes de nos concitoyens en faveur d’une justice plus rapide, plus compréhensible, et plus facile d’accès. La justice doit recourir aux progrès qu’offrent les nouvelles technologies. La numérisation des procédures pénales et civiles sera opérationnelle dès le 1er janvier 2008. Demain, le justiciable et son avocat pourront recevoir un jugement par courrier électronique. Ils pourront suivre l’avancement de leur procédure sans avoir à se déplacer. Ils pourront compléter ou consulter un dossier à distance. Les greffes gagneront un temps précieux, qui sera consacré à des travaux plus importants que la reproduction, la gestion manuelle des dossiers ou le stockage.

Toutes les juridictions doivent bénéficier de ces avancées. Pour cela, plus de 67 millions d’euros seront consacrés aux programmes informatiques de la justice.

Les questions amènent à aborder celle de la carte judiciaire car l’arrivée des nouvelles technologies dans les prétoires va rapprocher la justice des Français, dans le temps et dans l’espace. Une justice de proximité, ce n’est pas un tribunal à un quart d’heure de chez soi. C’est une justice qui rend ses décisions rapidement, qui sait les rendre lisibles, qui a les moyens de les faire appliquer. C’est une justice proche des préoccupations des citoyens, qui sanctionne la délinquance et qui accueille les victimes.

La réforme de la carte judiciaire, sans cesse évoquée, sans cesse reportée, est plus que jamais une nécessité. Il n’est plus possible de disséminer des moyens sans cesse croissants dans 800 juridictions, réparties sur 1 200 sites.

Là où les caractéristiques des territoires le permettent, il faut regrouper les plus petits tribunaux au siège d’une juridiction ayant une activité suffisante pour assurer un service permanent de qualité. Le regroupement et la mutualisation des moyens sont la condition d’une justice plus rapide et plus efficace : dans une juridiction plus importante, l’organisation du travail permet un audiencement plus rapide, la charge de travail est mieux répartie, les magistrats peuvent échanger et s’entraider, les services du greffe peuvent se spécialiser et la continuité du service est assurée, même en cas d’absence, de congé de maternité ou de formation.

La concertation, engagée depuis le 27 juin, a donné lieu à de nombreux débats dans le ressort des cours d’appel concernées. Sur la base de toutes les propositions qui sont apportées, un schéma d’organisation a été élaboré, qui prend en compte, région par région, l’impératif d’équilibre des territoires.

La ministre a indiqué faire actuellement le tour des régions pour recueillir les observations des élus et des acteurs du monde judiciaire. Chaque fois que cela est possible, leurs observations sont prises en compte. Si les uns ou les autres ont de meilleures propositions, elles sont étudiées avec attention, c’est ce qui s’est produit dans les deux dernières cours d’appel visitées.

Il n’y a pas de schéma national préétabli. Il n’y aura pas de réforme mécanique. La concertation se poursuit tous les jours. La ministre a encore reçu cette semaine les syndicats des personnels de la justice ainsi que les représentants des barreaux. Elle fera le point la semaine prochaine avec le comité consultatif. Les propositions des professions et des organisations représentatives ont largement alimenté les réflexions.

La réforme se fera progressivement, en trois ans. Elle commencera en 2008, par les pôles de l’instruction, et s’achèvera en 2010.

Cette réforme aura des conséquences immobilières. Il faudra restructurer certains bâtiments, en agrandir d’autres, voire construire de nouveaux palais de justice.

Les magistrats et les fonctionnaires des services judiciaires seront acteurs de cette réforme. Ils seront accompagnés individuellement dans sa mise en œuvre. Des mesures seront prises pour faciliter les transports, les déménagements, pour aider ceux qui le souhaitent à trouver un nouveau logement. Sur ces sujets également, des concertations avec les organisations syndicales sont déjà engagées, à chacun des déplacements de la ministre.

Dès 2008, une provision de 1,5 million d’euros est destinée à cet accompagnement social. Grâce à la réserve de précaution que constitue en début d’année le Gouvernement, les mesures nécessaires en 2008 pourront être financées en respectant le plafond de dépenses voté par le Parlement.

La réforme de la justice demandera de grands efforts. Elle se fera grâce à la mobilisation de toutes les forces, de toutes les volontés. C’est à ce prix que l’on pourra rapprocher la justice des citoyens.

Le rapporteur a salué les efforts accomplis par le Gouvernement en faveur de la justice, que traduit un budget en hausse sensiblement plus importante que celui de l’État. Au sein du programme « justice judiciaire » on observe également une augmentation significative dans l’action « traitement et jugement des contentieux civils » - + 13 % -, dans l’action « cassation » - +7 % -, et dans l’action « formation » - + 6 % - afin de financer le recrutement supplémentaire de greffiers.

Par ailleurs, les frais de justice, qui avaient explosé au cours des années précédentes, sont désormais tout à fait contrôlés, en particulier grâce aux économies réalisées sur les marchés des empreintes génétiques et de la téléphonie.

Un effort considérable de 39 millions d’euros est également fait pour le plan de sûreté des juridictions, qui en avaient bien besoin.

Pour assurer cette sécurité, on fait appel soit à des sociétés privées, soit à la réserve civile de l’administration pénitentiaire. Cette dernière solution paraissant excellente car il s’agit de personnels expérimentés, ne conviendrait-il pas de la généraliser ?

Par ailleurs, depuis mai 2007, le logiciel informatique « outilgref », qui permet d’estimer les besoins en personnel compte tenu des affaires nouvelles et terminées, a été mis à la disposition de l’ensemble des juridictions. Est-il possible d’en dresser un bilan ?

La prime modulable, qu’on appelait à l’origine prime au mérite, a été instituée pour les magistrats et elle joue pleinement son rôle. Toutefois, dans la mesure où les magistrats sont entourés de toute une équipe qui les aide dans leur décision, on peut se demander pourquoi les fonctionnaires de justice ne bénéficient pas de ces primes, ce qui est parfois mal ressenti dans les juridictions. Comme l’a souligné la garde des Sceaux, un magistrat ne saurait agir sans greffier ; pourquoi ne pas appliquer la même règle à l’ensemble de l’équipe ? Une enveloppe pourrait-elle être prévue à cet effet ?

On sait par ailleurs qu’un nombre important de magistrats et de fonctionnaires partiront à la retraite au cours des dix prochaines années. Il convient donc d’anticiper ces départs afin de mieux assurer la gestion des effectifs. La commission d’enquête sur l’affaire dite d’Outreau a d’ailleurs préconisé la création d’une grande direction des ressources humaines au sein du ministère de la justice. Pour l’instant, ce dernier compte quatre services chargés des relations humaines, est-il envisagé de les regrouper ?

Enfin, le taux de TVA applicable à l’aide juridictionnelle est de 5,5 %, mais la Commission européenne considère qu’il conviendrait d’appliquer le taux normal de 19,6 %, ce qui augmenterait sensiblement le coût de cette aide. Le gouvernement envisage-t-il de négocier un accord avec la commission ? À défaut, a-t-il prévu les crédits nécessaires en cas d’application d’une TVA à taux normal ?

Mme Michèle Tabarot, rapporteure pour avis pour l’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse, s’étant réjouie des efforts accomplis par le Gouvernement, en particulier de l’augmentation de 6,4 % des crédits destinés à l’administration pénitentiaire, a posé à la ministre les questions suivantes :

Le programme immobilier est considérable, puisqu’il est prévu l’ouverture de sept établissements pénitentiaires pour majeurs en 2008, dont trois pour les mineurs et de sept autres en 2009. Ce calendrier prévisionnel sera-t-il respecté ?

La ministre peut-elle par ailleurs indiquer quand les premières unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) entreront en fonction ?

Les établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) paraissent également un outil très intéressant. Quels enseignements peut-on tirer des premiers mois de fonctionnement des premiers établissements en 2007 en vue de prochaines ouvertures en 2008 ?

S’agissant des centres éducatifs fermés (CEF), une démarche « lolfienne » invite à comparer coûts et résultats. Certes, cet outil semble donner satisfaction, mais serait-il possible de disposer de plus d’informations sur les instruments d’évaluation du taux de récidive ? Ne conviendrait-il pas en outre de vérifier si une augmentation du nombre des mineurs accueillis ne permettrait pas de réduire le coût de journée qui est actuellement de plus de 600 € par jour et par mineur ?

Dans le cadre de la mission d’information sur l’exécution des décisions de justice dont Mme Michèle Tabarot est rapporteure du volet mineurs, les déplacements sur le terrain ont permis de mesurer les problèmes rencontrés par les greffes des tribunaux et par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), mais c’est surtout la question des mesures en attente qui a été évoquée. Quels sont les moyens alloués à la PJJ pour remédier à ce problème préoccupant ?

La rapporteure avait par ailleurs déjà interrogé le Gouvernement l’an dernier sur les retards de paiement de l’État envers le secteur associatif habilité. Où en est-on désormais ?

Pour le nouveau Contrôleur général des lieux de privation de liberté, un budget de 2,5 millions d’euros avait été évoqué à l’occasion du débat parlementaire, la ministre peut-elle confirmer ce chiffre ?

S’agissant enfin de la mission « santé », la loi sur la récidive du 10 août dernier a généralisé l’injonction de soins pour les personnes condamnées pour des infractions à caractère sexuel. Cela suppose que des moyens soient engagés, en particulier pour le recrutement de médecins coordonnateurs. Qu’en est-il exactement ?

M. René Couanau, rapporteur spécial de la commission des finances, a salué un budget dynamique, qui s’inscrit dans la ligne politique de l’action déjà engagée. Il a également remercié les services du ministère pour les réponses rapides qu’ils ont apportées à la plupart de ses questions.

Il a souhaité savoir, comme Mme Tabarot, si les moyens prévus seraient suffisants, d’une part pour permettre au Contrôleur général des lieux de privation de liberté de remplir ses missions, d’autre part pour assurer une application effective de l’injonction de soins.

Il a par ailleurs observé que les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) sembleraient être des points faibles de la justice et a souhaité savoir si la ministre avait l’intention d’en renforcer l’efficacité, dont dépendent la politique pénale comme la politique d’alternative à l’incarcération.

Il a également estimé qu’il convenait de contrôler les délais de recrutement et de remplacement afin de s’assurer que les emplois sont assez rapidement pourvus, car on sait que le ministère des finances est prompt à supprimer tout poste non pourvu effectivement ! On peut nourrir quelque inquiétude quand on constate des retards dans les recrutements au sein des services de PJJ et dans le remplacement des greffiers et des personnels administratifs, qui sont indispensables au fonctionnement de la justice. En effet, un greffier qui n’est pas remplacé dans les six mois, c’est autant de retard pris dans les instructions et dans les notifications. Il a enfin demandé à la ministre des précisions sur la création d’une direction des ressources humaines.

En réponse aux rapporteurs, la garde des Sceaux a apporté les précisions suivantes :

Le plan de sécurisation des juridictions bénéficiera de 39 millions d’euros en 2008, 20 millions d’euros lui ayant déjà été consacrés en 2007. À son arrivée à la chancellerie, la ministre a trouvé pas moins de quatre rapports traitant des problèmes de sécurité dans les juridictions. La commission d’hygiène et de sécurité avait rendu un avis défavorable à propos de 90 juridictions. Alors que les personnes qui ne respectent pas ces avis sont passibles de poursuites, comment aurait-on pu admettre que la justice soit rendue dans des lieux en infraction ? Les besoins de remise aux normes ont été évalués et les juridictions où il manquait un portique, des agents de sécurité ou des agents d’accueil ont été recensées. Le bilan est aujourd’hui assez satisfaisant puisque beaucoup d’intrusions ont pu être empêchées et que 90 % des juridictions sont désormais équipées en portiques et dotées d’agents de surveillance.

Si l’utilisation des réservistes de la police nationale pour assurer la sécurité des tribunaux et des bâtiments judiciaires a été envisagée, c’est parce qu’une centaine seulement de réservistes de l’administration pénitentiaire est utilisée à ce jour ; il convient donc de faire la promotion de ce moyen de sécurisation.

« Outilgref » sert à mettre en relation la charge de travail et les moyens à affecter. Il a permis en 2007 le lissage des emplois non affectés. Il permet également de rééquilibrer les moyens entre les juridictions en fonction des vacances de postes constatées. Il s’agit d’un très bon outil de gestion et d’organisation dont la version actualisée en 2006 donne satisfaction.

Faire bénéficier les fonctionnaires et les greffiers de primes modulables à un taux comparable à celui des magistrats nécessiterait 10 à 15 millions d’euros de crédits supplémentaires. Il a plutôt été choisi, dans la mesure où la concertation a montré que les syndicats ne souhaitaient pas que les personnels fassent davantage d’heures supplémentaires, de mettre l’accent sur les créations d’emplois. Ainsi, 400 postes supplémentaires ont été créés pour les services judiciaires.

En revanche, s’agissant des primes d’installation, la ministre a souhaité, lors de son dernier déplacement en Corse, que les greffiers et les fonctionnaires bénéficient des mêmes primes que les magistrats, car les risques encourus sont identiques.

Par ailleurs, même si les règles d’avancement dans la fonction publique sont contraignantes, il faut essayer de mettre en œuvre des mesures incitatives afin d’attirer les magistrats et les greffiers vers les postes que l’on ne parvient pas à pourvoir.

Au ministère de la justice, tous les départs à la retraite seront compensés. Grâce à 357 sorties de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM), le solde net sera de 187 magistrats. Autant d’emplois de fonctionnaires et de greffiers seront créés.

Dès son arrivée, la ministre a voulu créer un service de ressources humaines. Il était pour le moins surprenant que l’on puisse nommer uniquement sur dossier, sans jamais les recevoir, des personnes à des postes de responsabilités importantes, dans lesquelles ils doivent garantir les libertés individuelles. Ce service est opérationnel, pour les magistrats comme pour les greffiers dont il était important de valoriser les compétences, depuis le 1er août dernier. Il ne s’agit pas d’une direction, tout simplement parce que des statuts différents coexistent au sein du ministère.

Ce service comporte trois bureaux. Le premier est destiné à la valorisation des compétences et à l’aide à l’orientation, afin d’éviter qu’une affectation n’empêche un magistrat de mettre à profit son expérience ou que l’on se prive de lui là où l’on a besoin d’une personne connaissant parfaitement les procédures. Le deuxième bureau est dédié au placement car il est regrettable que lorsque l’on recherche les magistrats spécialisés pour une autre administration, un organisme privé ou des organisations internationales, on n’ait personne à proposer. Le troisième bureau sera celui du statut.

Il est primordial que la gestion des ressources humaines se fasse dans l’intérêt des magistrats et des greffiers, ce qui marque quand même une petite révolution au sein du ministère. Qui plus est il était important de faire le lien entre l’évaluation, exercée au niveau local, et la promotion et l’avancement, organisés au niveau central.

Il est vrai que la Commission européenne a saisi la Cour de justice en juillet dernier en vue d’une augmentation du taux de la TVA applicable à l’aide juridictionnelle. La France maintient toutefois sa position au motif que cette aide ne fausse pas la concurrence car elle ne concerne que les plus modestes.

En ce qui concerne l’administration pénitentiaire, ce sont bien quatre établissements pour majeurs et trois établissements pour mineurs qui seront ouverts en 2008, et sept autres en 2009, afin d’atteindre l’objectif de 63 000 places de détention en 2012.

Les UHSA, ou « hôpitaux-prisons », sont destinées à accueillir des condamnés dangereux toujours placés en détention mais atteints de troubles psychiatriques graves et dont on a par conséquent souhaité une prise en charge par un hôpital, sous surveillance pénitentiaire. Les deux premières unités ouvriront en 2009, à Lyon pour 60 places et à Rennes pour 40 places. Au total, il est prévu que 705 places soient ouvertes d’ici fin 2011.

La LOPJ de 2002 a prévu la création de sept EPM : quatre fonctionnent déjà et trois seront ouverts en 2008. Ces établissements permettent d’éviter de placer les détenus mineurs dans les quartiers pour mineurs des établissements pénitentiaires où, si l’obligation scolaire s’impose jusqu’à 16 ans, il n’existe en revanche aucune obligation d’activité entre 16 et 18 ans, ce qui est particulièrement néfaste pour des jeunes qui ne parviennent pas à se réinsérer et récidivent souvent. À l’inverse, le règlement intérieur des EPM impose aux jeunes de tenir leur chambre propre et rangée et les oblige à avoir une activité tout au long de la journée.

Il conviendrait d’améliorer la prise en charge des mineurs délinquants : les CEF fonctionnent bien mais accueillent des mineurs multiréitérants, c’est-à-dire pris un peu tard dans leur parcours délinquant. Il faut une vraie politique pénale des mineurs en France.

Dès son arrivée, la ministre a envoyé une circulaire rappelant qu’à chaque infraction devait être apportée une réponse pénale, ce qui ne signifie pas forcément une incarcération. Les mineurs qui font l’objet d’une première condamnation sont rarement des primo-délinquants. La loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance a élargi la palette non seulement des sanctions mais aussi des mesures éducatives, permettant un traitement différencié, individualisé, adapté à chaque branche d’âge (10/13 ans, 13/16 ans et 16/18 ans).

En outre, les juges pour enfants sont en charge à la fois de l’assistance éducative et du traitement de la délinquance ; ils protègent et punissent et sont souvent amenés à mêler les deux aspects dans leur décision, si bien que des mineurs victimes côtoient souvent les mineurs auteurs. Depuis le mois de juillet 2007 est expérimentée la dissociation des fonctions entre juges dédiés uniquement à la protection des mineurs et juges qui se consacrent exclusivement au pénal. Une évaluation sera conduite pour voir si une telle dissociation permet une meilleure appréhension des mineurs. L’intérêt n’est pas de sanctionner mais de réinsérer et si le mineur arrive à l’âge de 18 ans sans aucune mesure de protection ou d’aide à la réinsertion, c’est que la justice a failli dans sa mission.

Ce sont par ailleurs dix CEF qui ouvriront en 2008. Dans cinq d’entre eux, il est prévu une prise en charge pédopsychiatrique renforcée, les éducateurs des CEF étant aujourd’hui parfois obligés de surveiller certains mineurs atteints de troubles graves pour qu’ils n’agressent pas les autres. Or ce n’est le métier ni des éducateurs ni des juges pour enfants et il est bon que la prise en charge pédopsychiatrique intervienne le plus en amont possible.

La ministre a reconnu qu’il y a de nombreuses mesures en attente concernant la PJJ. Cette dernière bénéficiera de 100 postes supplémentaires en 2008. La ministre s’intéressera plus particulièrement, après la réforme de la carte judiciaire, à la réforme de l’ordonnance de 1945 et à la protection des mineurs. La loi du 5 mars dernier a retiré à la PJJ la charge de la protection administrative, qui relève des conseils généraux, pour ne lui laisser que celle de l’enfance en danger et de l’enfance délinquante.

L’amélioration de l’exécution des mesures passe sans doute aussi par la réorganisation de la PJJ, qui est aujourd’hui dotée de 15 directions interrégionales, contre 9 pour l’administration pénitentiaire. Une harmonisation est souhaitable dans l’organisation territoriale des différentes directions du ministère de la Justice.

Le dispositif des bureaux d’exécution (BEX) sera généralisé.

S’agissant des crédits du secteur associatif, le report des charges de 2005 à 2006 s’est élevé à 62 millions d’euros. Du fait des abondements et des dégels de crédits, ce report a été de 36 millions d’euros entre 2006 et 2007. Mi-octobre 2007, les retards de paiement devraient atteindre 2 millions d’euros. La ministre s’est engagée à ce que le retard soit résorbé avant la fin de l’année.

Concernant le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, la ministre a indiqué que 2,5 millions d’euros ont été inscrits dans le programme « coordination du travail gouvernemental ». Le contrôleur disposera d’une équipe de 40 personnes qui pourront être à temps plein ou à temps partiel. Le projet du Gouvernement s’est inspiré du modèle britannique, afin que les vacations et les mises à disposition puissent faire varier les effectifs en fonction des besoins.

En ce qui concerne les dispositions sur les délinquants sexuels inscrites dans la loi du 10 août 2007 sur la récidive, l’application de l’injonction de soins a été différée au 1er mars 2008 compte tenu de la nécessité de recruter 300 nouveaux médecins coordinateurs, dont les indemnités vont par ailleurs être doublées.

Les moyens affectés aux SPIP augmentent de 6 % en 2008 pour atteindre 336 millions d’euros. Dès le 27 juin dernier, la ministre, qui avait anticipé l’absence de grâce collective, a lancé les conférences régionales d’aménagement des peines. Le taux d’aménagement est aujourd’hui de 45 %, ce qui est sans précédent. On a beaucoup progressé en ce qui concerne les bracelets électroniques et la semi-liberté, moins en revanche pour les libérations conditionnelles. En effet, pour l’instant la libération conditionnelle intervient à la demande du détenu et le juge d’application des peines (JAP) n’a aucune possibilité d’anticiper une telle demande. Les femmes, en particulier, n’entament les démarches de réinsertion qu’au moment où elles sont « conditionnables » et elles ne demandent parfois la libération qu’à un mois de leur sortie. Il est souhaitable d’inciter les détenus à préparer plus tôt leur libération conditionnelle.

Les SPIP vont par ailleurs être déchargés de ce qui n’a pas trait au cours de leurs missions afin de les recentrer sur l’insertion et la probation. Aujourd’hui, l’unité de visite familiale (UVF) dépend non pas du JAP mais de l’administration pénitentiaire. Dès lors, pourquoi ne pas confier à cette dernière d’autres mesures, telles que les permissions de sortie pour se rendre auprès de l’ANPE ou d’une mission locale, ce qui éviterait en outre aux détenus d’être obligés d’attendre une prochaine audience du JAP ?

Un décret du 1er août 2007 a étendu à l’exécution des peines l’application du bracelet électronique, jusque-là réservée aux libérations conditionnelles. Ainsi, l’administration pénitentiaire ayant signalé comme dangereux un détenu qui allait être libéré, la ministre a donné au parquet l’instruction qu’on le retienne le temps d’aménager sa sortie et il est sorti sous placement sous surveillance électronique mobile (PSEM). Les 3000 bracelets fixes et mobiles disponibles en 2008 permettront des réinsertions et des aménagements de peines.

Il faut faire confiance à la ministre pour éviter l’immobilisme qui susciterait la convoitise de « Bercy ». Les sorties d’école prévues en 2008 permettront d’affecter les greffiers et les fonctionnaires sur les postes vacants. Dès son arrivée, consciente du problème des greffes, la ministre a demandé à toutes les juridictions quels étaient leurs besoins ponctuels. Elle a alors débloqué 5 millions d’euros et affecté 500 vacataires pour résorber les retards et alléger les tâches quotidiennes des greffiers et des fonctionnaires.

La ministre a enfin informé M. Couanau que le président du tribunal de grande instance de Saint-Malo serait affecté prochainement.

M. Georges Fenech s’est félicité de la croissance du budget de la justice : alors que celui-ci avait déjà augmenté de 36 % entre 2002 et 2007, l’effort sera poursuivi en 2008 avec une hausse de 4,5 % et un solde net de créations d’emplois de magistrats de 187 postes car, contrairement aux autres administrations, il n’y aura pas de départ en retraite qui ne soit pas remplacé.

Il a ensuite rappelé que la ministre avait annoncé la création du service d’aide au recouvrement des victimes d’infractions (SARVI), ainsi que d’un juge délégué aux victimes. Comment ces créations pourront-elles être prises en charge par le budget de la justice au regard de la masse que représentent les dommages-intérêts prononcés en faveur des milliers de victimes éligibles à l’aide juridictionnelle ?

Pourquoi ne réfléchit-on pas par ailleurs à la création, dont on parle depuis de nombreuses années, d’un corps intermédiaire d’assistants de justice, qui pourraient permettre d’améliorer la qualité et la rapidité de la justice ? En effet, les magistrats sont aujourd’hui les derniers responsables de la haute administration à cumuler des tâches décisionnelles avec d’autres, purement administratives. Certes, il y a les greffiers, dont le nombre augmente d’ailleurs parallèlement à celui des magistrats, mais ils sont là pour authentifier, pour assurer la régularité et la légalité de l’acte ; ils ne participent en aucun cas à l’aide à la décision. Le magistrat est donc seul – que serait un parlementaire sans assistant ? – alors que l’on pourrait très bien concevoir, comme cela existe dans les chambres régionales des comptes, une forme d’aide à la décision, de recherche de jurisprudence, de mise en forme des dossiers, mais qui touche déjà au fond de la procédure et qui permette au magistrat de se consacrer uniquement à sa décision. Ce corps pourrait en outre offrir des perspectives de carrière aux greffiers.

M. Arnaud Montebourg a observé que les « bleus » budgétaires montraient une diminution d’environ 1 000 équivalents temps plein travaillé (ETPT) sur l’ensemble de la mission justice et il a souhaité savoir à quoi correspondaient ces suppressions et obtenir le détail des pertes et des gains de postes, puisque l’on annonce par ailleurs des embauches.

La LOLF a permis, grâce aux indicateurs de performance, de mesurer la productivité du système judiciaire. On voit ainsi apparaître le travail mené, année après année, dans certaines juridictions encombrées. Il faut en particulier saluer les efforts du Premier président Guy Canivet pour résorber le retard du contentieux de la Cour de cassation. Les tableaux de bord montrent aussi les efforts qui restent à faire. Il serait toutefois souhaitable – et c’est une demande que fait le groupe SCR – que ces tableaux de bord ne soient plus des moyennes mais que, dès lors que l’on entre, et c’est heureux, dans une culture de l’efficacité des fonds publics, ils permettent d’apprécier ce qui se passe dans chacune des juridictions. Et cela paraît plus nécessaire encore dans la perspective de la réforme de la carte judiciaire, qui risque d’entraîner une dégradation des délais de jugement.

Là où de petites juridictions sont efficaces, rapides et rendent des services, si ce n’est « au coin de la rue », du moins à proximité du domicile des justiciables, il serait utile de pouvoir mesurer où en sont les nominations et comment évoluent les délais de jugement. Il y a en effet des écarts très importants dans les délais de réponse entre les différentes cours d’appel, et le moment semble venu de travailler en toute transparence sur l’efficacité des juridictions.

Pour restaurer la crédibilité de la justice, c’est un effort qu’il faut faire, bien sûr, sur le plan pénal, mais aussi pour le civil, qui est la justice du quotidien des Français. Sans doute sera-t-il d’autant plus facile d’obtenir ces informations que les juridictions ne seront plus si nombreuses après l’application de la réforme de la carte judiciaire… Cette transparence paraît d’autant plus indispensable que le ministère a longtemps vécu dans une tradition régalienne de sous-administration et il est donc nécessaire de travailler tous ensemble pour améliorer l’efficacité de la justice in concreto.

La ministre a par ailleurs annoncé 121 millions d’euros de travaux pour les juridictions, ce qui semble peu au regard de l’investissement en faveur de la sécurisation des tribunaux. Or les modifications de la carte judiciaire rendront nécessaires des efforts d’investissement en faveur des programmes immobiliers. Lorsque l’on supprimera, comme dans beaucoup de départements, trois ou quatre tribunaux d’instance pour les intégrer dans un palais de justice où l’on est déjà à l’étroit, comment fera-t-on ? Quelle est la programmation les travaux avant la fin de la réforme, en 2010 ? C’est un sujet sur lequel il serait également nécessaire de travailler ressort par ressort.

Par ailleurs, si l’intention est excellente, chacun se demande comment fonctionnera le SARVI, avec quels moyens et dans quelles proportions il pourra répondre aux demandes des justiciables.

Quelle est également la ligne politique de la ministre en ce qui concerne l’aide juridictionnelle, c’est-à-dire l’accès à la justice pour les plus modestes ? Le budget n’augmente que de 1 % sur cette ligne alors que le nombre des affaires et donc des victimes progresse. S’agit-il pour le Gouvernement d’une priorité ? Est-il disposé à s’engager financièrement dans les cinq années qui viennent ? Considère-t-il que cela incombe plutôt aux assurances privées, comme les franchises en matière de santé ?

Enfin, Mme Tabarot a eu raison de demander une évaluation des CEF. L’évaluation ne doit pas être uniquement financière, car, s’il est moins onéreux de mettre les mineurs en prison, ce n’est pas pour autant souhaitable et il convient au contraire de rechercher systématiquement les alternatives à l’emprisonnement. Il faut aussi évaluer le fonctionnement des centres, dont la gestion est souvent concédée à des associations et où il y a beaucoup de fugues et des problèmes de sécurité. Si le ministère a déjà fait procéder à des évaluations, peut-il les communiquer aux parlementaires ?

M. Alain Vidalies a souhaité savoir quel avenir était réservé aux maisons de la justice et du droit, les élus locaux se demandant si l’État ne s’apprête pas à se désengager financièrement.

Il s’est étonné que la ministre ait affirmé la veille, à l’occasion l’une question d’actualité sur la réforme de la carte judiciaire, que « la justice publique de proximité n’est pas remise en cause. Le greffier et le magistrat se déplaceront par exemple chez toutes les personnes placées sous tutelle, qu’elles vivent à l’hôpital, en maison de retraite ou à leur domicile ».

Cette « justice à domicile » est une idée d’autant plus novatrice qu’elle n’avait jamais été envisagée à l’occasion de la réforme des tutelles pourtant opérée il y a quelques mois seulement. Ce serait un saut qualitatif considérable, et on en cherche vainement des traces dans ce projet de budget, alors que l’effort financier sera d’autant plus important que l’éloignement sera plus grand, en raison de la suppression des tribunaux d’instance opérée dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire.

M. Philippe Goujon s’est réjoui de l’effort considérable fait par l’État à l’occasion de ce budget, en particulier en faveur de l’administration pénitentiaire.

Il a estimé que les UHSA vont permettre l’hospitalisation des détenus atteints de troubles mentaux et rappelé qu’il avait rédigé à ce propos un rapport, adopté en son temps à l’unanimité par la commission des lois du Sénat, préconisant que des chambres médicalisées soient réservées en détention pour permettre à des détenus d’y purger une bonne partie de leur peine, ce qui permettrait d’assurer une continuité des soins, en particulier pour les personnes condamnées à une détention de plus de dix ans. Que pense la ministre de cette idée ?

On évoque par ailleurs depuis plusieurs années le transfert à l’administration pénitentiaire de la mission d’extraction, d’escorte et de transfèrement actuellement confiée à la police et à la gendarmerie. A-t-on avancé sur ce sujet important ?

Où en est par ailleurs le programme d’extension des unités de vie familiale (UVF) pour 2008 ? Quel est le plan d’équipement des maisons centrales en UVF à plus long terme ?

Enfin, on annonce de très importantes opérations de rénovation de ces grands établissements pénitentiaires que sont les Baumettes et la Santé. Qu’est-il prévu dans le budget 2008 pour le début de la rénovation de la maison d’arrêt de la Santé ?

M. Michel Vaxès s’est félicité que ce budget progresse en volume davantage qu’en 2007, mais il s’est interrogé sur sa structure.

Ainsi, si l’on annonce la création de 1 100 postes dans l’administration pénitentiaire, ceux-ci iront pour l’essentiel aux nouveaux établissements et au remplacement des départs en retraite et ils ne serviront donc pas à combler les lacunes des services de probation et d’insertion. Or 80 % des effectifs et 62 % des crédits sont affectés à la garde et au contrôle. Les autres activités paraissent pourtant essentielles dans la mesure où, pour éviter la récidive, il faut créer les conditions d’une bonne réinsertion. On peut donc se demander si la loi pénitentiaire consacrera les mêmes déséquilibres ou si elle commencera à les corriger.

Il est regrettable que l’activité judiciaire ne soit évaluée que de façon quantitative et non qualitative. En effet, la justice ne se mesure pas seulement à sa rentabilité mais aussi à sa qualité. La ministre compte-t-elle prendre des dispositions afin d’introduire des indicateurs de qualité dans les procédures d’évaluation ?

L’annonce faite hier d’une « justice à domicile » est source d’interrogation chez les citoyens. Quels éléments de réponse est-il possible de leur apporter ?

On peut craindre que la réforme de la carte judiciaire ne pénalise les familles d’origine modeste, en particulier pour les contentieux liés aux affaires familiales et à la jeunesse, qui appellent une relation directe entre les juges et les familles. Il s’agit souvent de personnes pour lesquelles il est très difficile de se déplacer, pas seulement pour des questions financières. Ainsi, dans les Bouches-du-Rhône, si l’on supprime les tribunaux d’instance, elles auront bien du mal à se rendre dans l’une des deux métropoles.

Cette réforme aura par ailleurs un coût élevé dans la mesure où il faudra aménager ou construire des salles d’audience et des locaux pour accueillir les personnels et le public. Puisque l’on a déjà évalué le nombre de tribunaux qui devront être supprimés, a-t-on procédé aussi à l’évaluation de ce coût ?

M. Bernard Carayon a souhaité savoir quelle appréciation la ministre portait, quatre mois après son entrée en fonctions, sur les conditions de la formation initiale des magistrats. Puis il a posé les questions suivantes :

Que penser de l’évolution de l’appréciation des agents de la PJJ sur les établissements pénitentiaires pour mineurs ?

Si l’on s’accorde sur l’idée que les victimes doivent être la priorité de la justice, il y a des victimes plus singulières que d’autres, celles de la justice elle-même. Qu’entend faire la ministre pour améliorer la réparation des dommages causés par la justice aux citoyens ?

Enfin, la promotion du droit français dans le monde est un sujet important, souvent sous-estimé. Où en est aujourd’hui la Fondation du droit ?

M. Émile Blessig s’est réjoui des efforts accomplis pour que l’on puisse rendre une décision de qualité dans des délais raisonnables, mais il a souhaité insister sur la situation des agents de catégories B et C.

La LOLF a permis de mettre en adéquation les postes et les missions et « outilgref » permet de définir des plafonds d’emplois par juridiction. Mais, pour combler les postes vacants, il faut tenir compte des délais de formation. Ainsi, deux à trois ans seront nécessaires pour que les 187 greffiers recrutés en 2008 soient sur le terrain. Pour faire le lien, il est nécessaire de recruter des vacataires. Pour cela, la masse salariale ne doit pas être strictement ajustée au plafond d’emplois mais prendre en compte ce décalage afin que les juridictions puissent opérer ces recrutements temporaires indispensables pour assurer une bonne justice.

M. Étienne Blanc a souligné l’indigence des services informatiques des institutions judiciaires. Un effort sera certes fait en 2008, mais l’on continue à reporter la mise en œuvre d’un certain nombre de logiciels, en particulier de Cassiopée. Va-t-on enfin avancer ? Procédera-t-on à l’acquisition des nouveaux matériels nécessaires ? Une formation spécifique des personnels est-elle prévue ?

M. Serge Blisko s’est réjoui qu’avec une augmentation de 4,5 % ce budget soit moins mal loti que d’autres. Un certain nombre de problèmes demeurent toutefois.

S’agissant de l’administration pénitentiaire, il faut rappeler l’actuelle situation alarmante de surpopulation carcérale. Cette situation est aggravée par des textes récents, comme la loi du 10 août 2007 sur la récidive. Même si l’on peut plutôt s’accorder sur le refus de grâce collective du 14 juillet, on n’en est pas moins aujourd’hui dans une situation indigne et fort éloignée des recommandations du Conseil de l’Europe. Et la construction de nouveaux établissements ne paraît pas de nature à répondre à ce problème in abstracto. La politique pénale qui consiste à mettre toujours plus de gens en prison soulève de légitimes interrogations, notamment sur la détention provisoire et sur sa durée.

La ministre semble décidée à avancer résolument sur la voie du développement du bracelet électronique. Cependant n’y a-t-il pas un risque de ne faire de ce dispositif qu’un simple outil de localisation, afin que la personne puisse être arrêtée plus facilement à chaque fois qu’elle se trouve en dehors de la zone fixée ou qu’elle récidive ? Dans ces conditions, il s’agirait plus d’une facilité policière que d’un substitut à l’incarcération. Mieux vaudrait utiliser le bracelet comme un premier pas vers la réinsertion.

En dépit des efforts annoncés, la situation des SPIP est extrêmement problématique, le nombre des détenus dont chaque agent de probation à la charge étant trop élevé pour leur permettre de faire un réel travail de fond.

Enfin, il est vrai que l’on ne distingue pas encore clairement ce que seront les UHSA. La ministre peut-elle préciser le calendrier et les modalités d’organisation du débat fondamental sur la future loi pénitentiaire ?

M. Jean-Michel Clément a rejoint les appréciations de ses collègues sur la réforme de la carte judiciaire. Il est indispensable de faire le lien avec les questions immobilières, en particulier parce que dans un certain nombre de villes, comme Poitiers, le débat sur la création d’une cité judiciaire est lancé depuis longtemps. L’amélioration du fonctionnement de la justice passe aussi par des moyens matériels. Plutôt que de mettre autant d’argent dans des moyens de sécurité dont on sait qu’ils seront rapidement obsolètes, mieux vaudrait mettre à plat tous les éléments, y compris la question des locaux qui accueilleront, demain, cette nouvelle organisation.

La réforme qui a touché aux compétences des huissiers de justice est passée inaperçue bien qu’elle soit particulièrement importante. Compte tenu du coût très élevé de fonctionnement des études, il est très probable qu’elles seront bientôt toutes concentrées au chef-lieu de département. Déjà, les huissiers proches de la retraite ne trouvent plus de repreneurs pour les études rurales. Il y a de quoi être inquiet car cela crée des inégalités dans l’accès au droit.

Répondant aux intervenants, la ministre a précisé que :

Aujourd’hui, deux tiers des victimes qui peuvent prétendre à une indemnisation ne sont pas indemnisées. Elles sont pourtant souvent éligibles à la commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI) mais les délais très courts qui encadrent la procédure les empêchent souvent de constituer des dossiers recevables. Pour obtenir l’exécution d’une décision de justice, il faut avoir un avocat ou avancer les frais d’huissier. Le SARVI servira à avancer les frais liés aux procédures d’indemnisation, mais il pourra aussi verser une avance forfaitaire sur l’indemnisation allouée par la justice. Il permettra ainsi aux plus modestes d’être indemnisés rapidement ou, pour le moins, de toucher une provision.

Par ailleurs, lorsque les victimes ont obtenu une décision de justice, elles n’ont pas toutes un avocat et, outre que faire exécuter les décisions de justice est particulièrement onéreux, un certain nombre d’entre elles, en particulier les femmes victimes de violences conjugales ou de viols, refusent tout nouveau contact avec les personnes condamnées, y compris pour faire valoir leur droit à indemnisation auquel elles renoncent ainsi souvent, même quand il s’agit de la pension alimentaire pour leurs enfants. Le SARVI sera donc l’intermédiaire entre ces victimes et les personnes condamnées. Il n’est pas question ici d’assurance puisque ce dispositif concernera les condamnés solvables.

La ministre remet par ailleurs actuellement à plat le fonctionnement de la CIVI. Elle revoit en particulier les délais de fonctionnement et les conditions d’éligibilité. Cette commission est financée par les assureurs et il convient donc de mener avec eux une concertation sur son coût de fonctionnement.

S’il existe en Grande-Bretagne un système de « clercs » qui aident les magistrats dans la décision de justice, la création d’un corps intermédiaire n’est pas souhaitable en France, non seulement en raison de son coût budgétaire, mais aussi parce que cela nuirait à la fluidité du système judiciaire. Pour autant, une réflexion a été engagée sur l’environnement des magistrats, qui font aujourd’hui des choses qui ne relèvent pas de leur mission. La numérisation des documents de la procédure permettra d’y accéder plus vite, donc d’améliorer la qualité de la justice civile, dont M. Montebourg a eu raison de rappeler qu’elle est la justice du quotidien. Il y a d’ailleurs chaque année 2,5 millions de décisions civiles pour 1,5 million de décisions pénales. La dématérialisation évitera au greffier de faire des copies, aux avocats de se déplacer, aux magistrats de multiplier les dossiers papiers. On peut voir à Angoulême, où le mouvement a débuté, qu’il apporte un confort aux fonctionnaires, aux greffiers et aux magistrats et qu’il réduit les délais de jugement.

Il faut enfin rappeler que la réforme du statut des greffiers leur permet aujourd’hui de préparer des pré-projets de décision, ce qui aide les magistrats, notamment pour les affaires familiales.

La commission « Outreau » avait mis l’accent sur la faiblesse de la formation des magistrats et sur les mauvaises conditions de leur avancement. Cette formation doit être en relation avec ce qu’est la justice aujourd’hui, avec l’évolution de la société et avec celle de la délinquance. Il convient aussi que les magistrats soient formés au management et à l’organisation, ne serait-ce que pour travailler en bonne intelligence avec les greffiers. Le nouveau directeur de l’École nationale de la magistrature a reçu une lettre de mission claire, qui peut être consultée sur Internet, dans laquelle il lui est demandé de revoir la formation initiale et continue des magistrats pour ce qui touche aux modules, aux enseignements, aux enseignants mais aussi à la position des magistrats au sein de leur environnement.

En 2007, les ministères ont dû étudier la réalité de l’emploi public et ont observé que de très nombreux emplois étaient vacants depuis des années et que les postes étaient conservés par tacite reconduction : ainsi, s’agissant de la justice, en cas d’augmentation du contentieux, on n’accroissait pas forcément le nombre de postes budgétaires mais en cas de diminution, on ne le réduisait pas non plus. Il a donc été décidé de réajuster les emplois aux nécessités. « Outilgref » permet d’ailleurs de mettre en adéquation la charge de travail et les besoins en emplois. C’est ce qui explique l’évolution du nombre des ETPT.

Il existe effectivement des indicateurs de performance juridiction par juridiction et la ministre est prête à les rendre publics. Elle les fournit d’ailleurs à chacun de ses déplacements car c’est aussi sur eux que se fonde la réforme de la carte judiciaire. On se rend compte toutefois que la forme de ces indicateurs varie entre chacune des directions du ministère et la ministre a souhaité réorganiser l’administration centrale afin de disposer d’un outil statistique unique. De même, elle entend qu’il y ait un seul service informatique, dirigé par un spécialiste de ces questions.

M. Arnaud Montebourg a remercié la ministre car ces indicateurs seront fort utiles à la représentation nationale. Il a observé que sur les documents fournis par les chefs de cours, on disposait du nombre des affaires mais pas des délais de jugement.

Mme la garde des Sceaux a répondu qu’il était tout à fait possible de les transmettre également. Elle a toutefois noté que la différence entre les délais dépend également de l’importance des dossiers. Il convient donc de croiser les indicateurs.

La ministre a fait remarquer que c’est aussi en raison de la dispersion des moyens que certaines cours rendent plus lentement leurs décisions. Quand un juge d’instance n’a que 100 dossiers à traiter dans son tribunal, cela fonctionne très bien. Pour autant faut-il multiplier les postes de dépenses publiques ou au contraire mutualiser les moyens et disposer de davantage de magistrats, mieux formés, au bénéfice d’une justice meilleure et plus rapide ? Quand un juge d’instance isolé prend un congé pour des vacances ou pour une formation, il bloque le fonctionnement de sa juridiction. On est en outre obligé de sécuriser un site pour un seul juge. Aujourd’hui, il existe une cinquantaine de juridictions sans aucun magistrat ni greffier. L’intérêt de regrouper les magistrats est aussi qu’ils ne soient plus livrés à eux-mêmes.

La ministre a indiqué son intention de remettre à plat de nombreuses dispositions du code civil, ce qui améliorera les performances de la justice civile.

Les crédits consacrés aux programmes immobiliers augmentent de 21 %, 121 millions d’euros étant consacrés au programme lié aux juridictions. C’est bien parce qu’il n’est pas possible de trouver du jour au lendemain des lieux permettant de regrouper les magistrats que la réforme de la carte judiciaire doit être étalée dans le temps. Tout ceci se fera de manière concertée et en prenant le temps nécessaire, qui a été estimé à trois ans.

La ministre est particulièrement attachée à l’aide juridictionnelle qui permet l’accès à la justice mais aussi l’exercice des droits de la défense des plus démunis. À cet égard, la commission « Outreau » a montré que certains avocats ne connaissaient pas les dossiers, qu’ils se contentaient de téléphoner en disant « je m’en rapporte », qu’ils ne se déplaçaient pas. Si l’on améliore l’aide juridictionnelle, on est donc en droit de demander aux avocats une véritable contrepartie en termes de service public. Si les avocats se crispent, sur ce sujet, c’est sans doute parce qu’ils sont conscients de la forte détermination de la ministre.

S’il y a eu au début un nombre assez important de fugues dans les centres éducatifs fermés, le taux est aujourd’hui passé à 3 % et les fugues ne dépassent pas 24 heures. Les CEF sont une bonne solution parce qu’ils permettent de réduire significativement la récidive : 61 % des mineurs qui en sortent ne récidivent pas un délai d’un an. Toutefois, il est vrai que, faute d’une véritable politique pénale des mineurs, les mineurs placés en CEF ont déjà un lourd passé de délinquants : ils y sont placés trop tardivement. Ce sont des structures qui coûtent cher mais qui fonctionnent très bien parce que l’encadrement est renforcé. La ministre souhaite améliorer la prise en charge des mineurs en CEF, mais elle veut aussi que l’on intervienne le plus en amont possible pour les mineurs délinquants comme pour ceux qui doivent être protégés : une réponse adaptée (prise en charge éducative, sanction pénale, soins) doit être apportée rapidement.

Cinq centres seront dotés de structures pédopsychiatriques. Si l’on a fait basculer vers la loi sur la protection de l’enfance la disposition sur les troubles du comportement qui figurait à l’origine dans le projet de loi de prévention de la délinquance, c’est parce que l’on s’est rendu compte que ces troubles sont souvent décelés dès la protection maternelle et infantile, sans être jamais soignés, laissant le jeune sur la voie de la délinquance.

Dissipant les inquiétudes qui ont pu être émises, la ministre a indiqué que toutes les maisons de la justice et du droit qui existent seront pérennisées et que d’autres seront créées, car c’est un dispositif dans lequel la ministre croit.

La justice de proximité à domicile existe déjà. On la voit peu parce que, quand un juge d’instance est seul, il s’occupe à la fois des tutelles, de la consommation, du surendettement et de l’accueil du justiciable dans le cadre de l’accès au droit. Un tribunal d’instance, ne fait pas que rendre des décisions de justice, mais répond aussi à de nombreuses demandes de renseignements. Regrouper les moyens permettra donc de dédier un juge aux tutelles.

Les magistrats se rendent déjà dans les maisons de retraite. Et ce ne sont pas les tutelles qui sont dévolues aux greffiers, mais la gestion des comptes. C’est parce qu’il y a eu un certain nombre de scandales que la loi sur les tutelles a changé des choses, mais il est déjà permis de rendre visite aux personnes qui ne peuvent pas se déplacer. Cela vaut aussi pour le pénal, avec la mise en examen à l’hôpital.

M. Alain Vidalies a fait observer que la ministre avait indiqué la veille qu’en contrepartie de la suppression des tribunaux d’instance, qui inquiète en raison de l’éloignement qu’elle entraînera, on généraliserait la justice à domicile. Cette annonce nécessitait donc des explications.

Poursuivant ses réponses, la ministre a précisé que :

Les UHSA permettront de soigner des personnes atteintes de troubles mentaux graves sous la surveillance du personnel pénitentiaire. Si elles vont mieux, elles retourneront en détention sinon, elles poursuivront leur détention à l’hôpital.

La responsabilité des transfèrements et des escortes continuera à incomber aux forces de police et de gendarmerie, à l’exception des deux expérimentations qui sont poursuivies à Marseille et à Toulouse pour les escortes médicalisées.

Les études sont en cours pour la rénovation de la maison d’arrêt de la Santé.

On n’a jamais autant augmenté les effectifs consacrés à l’insertion et à l’approbation que depuis 2002. Les moyens progresseront encore fortement en 2008. La loi pénitentiaire fera de l’insertion et de la probation une priorité. Si les SPIP impliqués interviennent très peu en détention c’est tout simplement parce qu’ils sont surtout en milieu ouvert, au titre des aménagements de courtes peines. Toutes les peines inférieures à un an d’emprisonnement sont en effet aménageables ab initio.

Une importante partie de la loi pénitentiaire sera en outre consacrée à la formation, à l’éducation et à tout ce qui concerne la réinsertion, afin qu’il n’y ait plus de sorties « sèches ».

M. Michel Vaxès a observé que si les moyens avaient effectivement beaucoup progressé, ils n’en restaient pas moins insuffisants au regard des besoins.

Mme la garde des Sceaux a répondu que la loi pénitentiaire déchargera les agents de probation d’un certain nombre de missions qu’ils exercent aujourd’hui et qui peuvent être confiées à l’administration pénitentiaire.

Bien évidemment, l’évaluation ne doit pas être seulement quantitative mais aussi qualitative et il existe pour cela un certain nombre de critères, en particulier en ce qui concerne les délais et l’accueil des justiciables.

La réforme de la carte judiciaire ne devrait pas concerner les affaires familiales et la protection de l’enfance, qui relèvent du tribunal de grande instance. En effet, quand un TGI disparaît, on maintient sur place un tribunal d’instance et il est possible au cas par cas de lui déléguer les affaires familiales. La ministre le fera ponctuellement, là où cela sera nécessaire en raison de l’existence d’un important contentieux en la matière. La proximité n’est ainsi pas remise en cause.

Bien sûr, la réforme de la carte judiciaire aura un coût, mais celui-ci sera immédiat alors que si la carte n’est pas réformée, la dispersion des moyens se poursuivra, au détriment de la qualité. Le coût de la réforme aujourd’hui permettra donc une économie à moyen terme. Ce coût est évalué cour par cour, en particulier en fonction de l’impact immobilier de la réforme.

Les victimes de l’institution judiciaire sont indemnisées par l’État. Il convient déjà de faire fonctionner le régime existant avant toute réforme d’envergure, qui pourrait trouver sa place dans celle des institutions.

Pour la promotion du droit français dans le monde, 300 000 € sont affectés à la Fondation du droit.

Des vacataires seront embauchés en fonction de la charge de travail, mais on ne peut pas recruter des fonctionnaires uniquement pour répondre à des besoins ponctuels.

On attend depuis 2004 que les juridictions soient informatisées et cela n’a jamais été fait. Désormais une convention a été passée avec la Caisse des dépôts et consignations : au 1er janvier 2008, toutes les juridictions seront informatisées et l’application Cassiopée pourra être utilisée dans le courant de l’année. La formation des personnels relèvera d’une mission conjointe des services de la Chancellerie et la Caisse des dépôts dont c’est le métier.

Malgré la surpopulation carcérale, il n’y a pas eu d’incident en milieu pénitentiaire lié à l’absence de grâce collective. Mais il y a chaque jour deux agressions contre les personnels, et il faut rendre hommage à leur dévouement dans l’exercice de leur mission difficile. Il est important de rénover les établissements et de créer des places de détention. Humaniser et réinsérer n’excluent pas la création de places supplémentaires, bien au contraire !

La détention provisoire a fortement diminué puisqu’elle ne concerne plus que 17 000 détenus sur 60 000.

Le GPS mobile est un moyen de localisation mais c’est surtout un mode d’exécution d’une peine, assorti d’obligations. Martial Leconte avait une obligation de soins ; il a été retrouvé errant, alcoolisé et a donc été remis en détention.

Grâce aux 1 000 créations d’emplois dans les services de probation, chaque agent traite aujourd’hui environ 80 dossiers contre une centaine avant 2002.

La question des huissiers est étrangère à ce budget. La réforme envisagée ne devrait pas toucher les études rurales.

S’agissant enfin du calendrier de la loi pénitentiaire, le comité d’orientation remettra son rapport lundi prochain et l’on peut espérer que la première lecture aura lieu avant la fin de l’année.

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Après le départ de la ministre, la Commission a examiné les crédits de la mission « Justice » pour 2008. Conformément aux conclusions de Mme Michèle Tabarot pour l’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse et de votre rapporteur pour la justice et l’accès au droit, elle a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Justice ».

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR(6)

GIE Conseil national des barreaux, Ordre des avocats de Paris et Conférence des Bâtonniers

  Conseil national des barreaux :

—  Mme Brigitte MARSIGNY, président de la commission accès au droit

—  M. Jean-Jacques UETTWILLER, membre du bureau

  Ordre des avocats de Paris :

—  M. Jean-Michel TRON, avocat au barreau de Paris

—  M. Jacques-Édouard BRIAND, conseiller du GIE

  Conférence des Bâtonniers :

—  M. Frédéric COVIN, ancien bâtonnier du barreau de Valenciennes

Union syndicale des magistrats

—  M. Bruno THOUZELLIER, président

—  M. Laurent BEDOUET, secrétaire général

Syndicat magistrature

—  Mme Emmanuelle PERREUX, présidente

—  Mme Natacha RATEAU, vice-présidente

Association nationale des juges de l’application des peines  (ANJAP)

—  Mme Pascale BRUSTON, vice-présidente de l’application des peines à Melun

Interco-justice CFDT

—  Mme Josette DABEL-CLÉRIN, secrétaire générale

Syndicat CGT des chancelleries et des services judiciaires

—  Mme Martine MOTARD, secrétaire générale

—  M. Pierre LAUDET, secrétaire national

Syndicat des greffiers de France

—  M. Joël RECH, secrétaire général adjoint

—  M. Richard GAINE, délégué

—  Mme Sophie GRIMAULT, déléguée

Syndicat C-justice

—  Mme Lydie QUIRIÉ, secrétaire générale

© Assemblée nationale

1 () Celles-ci comprennent la Cour de cassation, 37 cours d'appel et tribunaux supérieurs d'appel et 1 121 juridictions du premier degré (186 tribunaux de grande instance et tribunaux de première instance, 473 tribunaux d'instance, 191 tribunaux de commerce et 271 conseils de prud’hommes, tribunaux des affaires de sécurité sociale, tribunaux paritaires des baux ruraux).

2 () Proposition de loi de MM. Jean-Luc Warsmann, Étienne Blanc et Yves Jégo relative à la simplification du droit, n° 177

3 () nom, prénom, adresse des mis en cause et des victimes, qualification des faits, réponse judiciaire apportée.

4 () Rapport d’information n° 23 sur l’aide juridictionnelle, Commission des Lois du Sénat, 9 octobre 2007.

5 () Rapport d’audit de modernisation « La dématérialisation de la chaîne pénale », le 11 juin 2006.

6 () L'Association des greffiers en chef des tribunaux d'instance a fait parvenir une contribution écrite.