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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du jeudi 8 novembre 2007

Séance de 15 heures
Commission des finances, de l'économie générale et du Plan
Commission des affaires culturelles, familiales et sociales
Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire
Présidence de M. Didier Migaud, Président, M. Pierre Méhaignerie, Président, M. Patrick Ollier, Président

La séance est ouverte à quinze heures.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances de l’économie générale et du Plan – Avec Pierre Méhaignerie et Patrick Ollier, nous avons le plaisir d’accueillir Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie, et M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur.

Comme il est de coutume en commission élargie, je vais donner immédiatement la parole aux différents rapporteurs. Les ministres répondront à leurs observations et questions, puis à une première série de questions de députés représentant les différents groupes. Enfin, tous les députés qui le souhaitent pourront s’exprimer.

Nous avons à entendre huit rapporteurs, ce qui représente une séance assez lourde. Nous avons déjà eu cette même expérience lors de l’examen d’un autre budget. Peut-être faudra-t-il donc à l’avenir revoir le format de nos commissions élargies.

Nous allons entendre successivement les rapporteurs spéciaux, M. Garrigue, M. Claeys, et M. Hénart, puis les rapporteurs pour avis, M. Jardé, M. Lejeune, M. Daniel Paul, Mme Rosso-Debord et M. Lasbordes.

M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial de la commission des finances pour la recherche – Le budget de la recherche est l’une des grandes priorités de l’action de l’État, comme en témoigne son augmentation exceptionnelle de 1,8 milliard, soit 7,8 %, malgré les contraintes budgétaires. Cet effort porte à la fois sur les crédits budgétaires, avec une progression de 3,4 % des crédits de paiement, et sur les agences, notamment l’Agence nationale de la recherche qui finance les projets. L’emploi scientifique, qui a connu une augmentation trois ans de suite, est désormais stabilisé, mais l’effort se poursuit pour améliorer la situation des jeunes chercheurs et les conditions matérielles. Enfin, ce secteur bénéficie d’importantes mesures fiscales, avec le crédit impôt recherche et, dans une moindre mesure, le statut de jeune entreprise universitaire et l’allègement de la fiscalité des brevets.

Dans un secteur où les acteurs et les programmes sont très nombreux, nous voulons aussi mieux assurer le pilotage de la recherche publique qui est essentiel pour la rendre plus efficace. Il faut en particulier augmenter la part du financement incitatif de l’ANR qui, avec 12 % du financement total de la recherche, n’a pas encore la place que des organismes de soutien au projet ont dans d’autres pays. On peut souhaiter que l’enveloppe dont elle dispose soit plus large qu’aujourd’hui et que, pour plus de souplesse et de réactivité, les dossiers soient plus simples. Une comparaison entre les procédures de l’ANR et celles du Conseil européen de la recherche devrait permettre des simplifications. Il y aura également une augmentation du préciput versé aux unités qui hébergent des bénéficiaires de projets aidés par l’ANR.

Pour autant, nous ne proposons pas un pilotage totalement centralisé. Il faut qu’il reste différencié. On a débattu de la transformation des grandes agences en agences de moyens et il y eu des avancées à l’INSERM. Cependant il faut être prudent et ne pas encadrer trop systématiquement la recherche si l’on veut développer la recherche fondamentale.

D’autre part, on observe un développement de l’emploi contractuel, désormais beaucoup mieux accepté dans ce domaine qu’il y a quelques années. Il faut encore accroître la souplesse. Par exemple, les agences de recherche n’ont pas profité de la possibilité donnée aux universités de recruter des CDI. Je proposerai un amendement à ce sujet. Il faut peut-être également introduire plus de souplesse dans certains modes de rémunération si l’on veut attirer les meilleurs et des chercheurs étrangers.

Je souligne l’effort accompli pour les jeunes chercheurs. Il convient de le poursuivre pour porter le taux de doctorants à 2 % alors qu’il est actuellement de 1,2 %. Un autre souci, qui relève d’ailleurs plutôt de la bonne application de la LOLF, est de disposer d’indicateurs plus exigeants, notamment en ce qui concerne les publications et les indices d’impact. Il y a là une faiblesse de la recherche française qui, de ce fait, n’occupe pas la place qu’elle mérite. Il faut inciter les chercheurs à publier dans les grandes revues internationales et y sensibiliser les organismes. Contrairement à certaines idées reçues, la recherche française est de bon niveau. Même si l’on n’y consacre pas les 3 % du PIB prévus par la stratégie de Lisbonne, nous sommes de ce point de vue entre l’Allemagne et le Royaume-Uni et il n’y a pas moins de prix Nobel français aujourd’hui qu’autrefois.

La réforme du crédit impôt recherche est essentielle. Elle tient compte des propositions de la Cour des comptes. On peut néanmoins regretter que le dispositif ne soit pas plus incitatif pour les jeunes entreprises à forte croissance, d’autant que l’on sait que ces PME très actives dans la recherche et dans l’exportation font la force de l’Allemagne. Avec d’autres collègues, nous proposerons un amendement pour relever le niveau de déduction fiscale accordée à ces PME pour les dépenses de recherche développement.

La France est extrêmement présente dans la recherche européenne à travers les grands projets et le programme communautaire de recherche et développement. Il paraît essentiel de s’efforcer avec nos partenaires d’éviter de dupliquer des structures d’autant que les systèmes nationaux et européens se recoupent largement. De même, on a trop tendance à multiplier les réseaux ce qui entraîne une déperdition d’énergie.

Il est également très important d’affirmer les priorités à l’échelle européenne et de les assumer, ce que l’on n’a pas su faire en France pour les sciences du vivant et pour les STIC. Dans ce contexte, les débats en cours sur GALILEO paraissent particulièrement intéressants puisque, pour la première fois, on va affirmer une véritable priorité partagée par l’ensemble des Européens.

La création d’une agence d’évaluation est extrêmement positive. Si dans notre pays, l’évaluation est relativement satisfaisante pour les sciences exactes, elle est en revanche bien trop faible dans les sciences humaines et sociales. La commission des finances aimerait que la Cour des comptes s’intéresse aux modalités de l’évaluation dans ce secteur.

Sous toutes ces réserves, je proposerai à la commission des finances de voter en faveur de ce projet de budget.

M. Alain Claeys, rapporteur spécial de la commission des finances pour la recherche dans le domaine du développement durable – Je suis favorable au crédit impôt recherche mais je considère que ce dispositif mérite une évaluation car on ne peut pas considérer comme telle l’enquête qui a été menée en 2006 auprès de deux mille entreprises et qui montrait surtout ce que ressentaient leurs dirigeants. Par ailleurs, comme M. Garrigue, je regrette que le dispositif institué cette année ne favorise pas le financement des PME innovantes. Peut-être serait-il judicieux de modifier cette mesure et j’aimerais connaître le sentiment de la ministre à ce propos.

Si je me félicite que l’Agence nationale de la recherche bénéficie de crédits d’État, je me demande toutefois si elle sera également soumise à la régulation budgétaire en cours d’année.

S’agissant plus précisément du développement durable, le ministre d’État nous a présenté la semaine dernière les orientations et les objectifs issus du Grenelle de l’environnement. Comment vont-ils se traduire en matière de recherche ? Une impulsion sera-t-elle donnée dès 2008 ? Les organismes de recherche se verront-ils fixer une orientation et dans quelle direction ? Pouvez-vous également nous indiquer si la loi cadre que Jean-Louis Borloo a annoncée pour janvier prochain comportera un volet recherche ? Je suis tout à fait d’accord avec ce que vous avez récemment déclaré à un journal du soir : il faut en effet associer recherche et développement durable mais aussi savoir, le moment venu, donner des signes dans des directions bien précises.

Enfin, la prochaine présidence française de l’Union sera-t-elle l’occasion d’une réflexion sur la recherche et développement permettant de fixer de nouvelles orientations au niveau européen ?

M. Laurent Hénart, rapporteur spécial de la commission des finances pour l’enseignement supérieur et la recherche universitaire En augmentation de 1,8 milliard d’euros, ce budget est à la hauteur des engagements présidentiels comme de la réforme des universités et de la loi de programmation sur la recherche. Il tire ainsi de façon heureuse les enseignements des nombreux rapports parlementaires sur ce thème.

L’insertion professionnelle est devenue l’une des missions de l’enseignement supérieur. L’université, qui reste un service public national d’enseignement supérieur, doit donner aux jeunes des informations leur permettant de comparer les établissements. Chaque université doit se doter des outils d’évaluation du taux de placement à l’emploi de ses étudiants, mais l’État, qui habilite les diplômes, doit prévoir un cadre national d’évaluation. Avez-vous un calendrier pour cela ?

Pour ce qui est de la vie étudiante et du pouvoir d’achat des étudiants, on sait que des frais illégaux sont parfois perçus par les établissements, la conférence des présidents d’universités le déplore et certaines affaires sont pendantes devant les tribunaux administratifs. Or il paraît difficile de demander une augmentation des moyens financiers sans mettre préalablement de l’ordre dans tout cela. Il paraît en particulier nécessaire que ce qui touche au sport universitaire et à la vie culturelle soit intégré dans les droits légaux. Je sais que vous avez demandé à vos services d’intervenir ; où en êtes-vous ?

En 2008, 55 millions d’euros sont prévus pour les bourses. Disposez-vous de perspectives pluriannuelles quant à la politique sociale menée par cet intermédiaire ? Est-il par ailleurs prévu d’exercer un contrôle plus rigoureux sur l’assiduité des étudiants boursiers ?

En ce qui concerne le logement, l’augmentation des crédits n’a pas permis d’aller vers les objectifs du rapport Anciaux.  L’inscription budgétaire pour 2008 paraît insuffisante et la commission des finances défendra donc un amendement pour y remédier.

S’agissant de la restauration étudiante, la part de l’État dans le prix du ticket de restaurant universitaire est tombée de 50 à 33 % alors qu’une forte pression s’exerce sur le prix des denrées et que la nourriture est essentielle à la qualité de vie et d’étude. Je souhaite donc savoir si l’État se montrera vigilant à ce propos dans la convention d’objectifs pour l’année qui vient.

Un effort considérable est fait en faveur de l’investissement, mais on manque, là aussi, de perspectives pluriannuelles. Disposerez-vous en 2009 des moyens d’une programmation pluriannuelle garantissant une cohérence avec les engagements pris dans le cadre des contrats de projet État-région et permettant aux universités de savoir dans quels délais les travaux qu’elles jugent nécessaires pourront être réalisés.

Pour les carrières, je ne reviens pas sur le caractère préoccupant de la pyramide des âges. La nouvelle loi confie une part importante de la gestion des ressources humaines aux universités. Un chantier est ouvert en la matière, je comprends que vous ayez différé les annonces le temps de la discussion générale sur la fonction publique, mais pourriez-vous nous dire quelques mots sur vos propositions et sur votre calendrier ?

J’en viens à l’organisation générale du service public de l’enseignement supérieur.

En ce qui concerne l’organisation des sites, comment pensez-vous qu’il sera possible de concilier les projets de rapprochement sur des sites où l’on trouve plusieurs établissements avec le passage à l’autonomie des universités ?

Les fondations universitaires ont été instituées par la loi de programmation de 2006 afin de mobiliser des moyens nouveaux pour la recherche. Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur ne peuvent pas constituer de telles fondations. Il paraîtrait judicieux que cette possibilité soit ouverte au moins aux établissements publics de coopération scientifique.

Enfin, les crédits alloués à l’enseignement supérieur privé sont en recul alors que les étudiants accueillis dans ces établissements ont droit à un enseignement de même qualité que les autres. Comment vous paraît-il possible de faire évoluer la situation ? Envisagez-vous une politique de contractualisation comme celle dont bénéficie l’enseignement privé dans le primaire et dans le secondaire ? Quoi qu’il en soit, la commission des finances proposera de réévaluer quelque peu la dotation de ces établissements.

M. Olivier Jardé, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour les crédits de la recherche – Je me suis plus particulièrement intéressé à la recherche biomédicale qui me paraît très importante pour l’avenir car elle est une clé de la recherche mondiale, mais aussi parce que ses répercussions industrielles sont très importantes. Si un effort important est consenti dans ce domaine à l’occasion de ce budget, on ne saurait ignorer que les États-Unis, qui ont doublé les crédits destinés à cette recherche au cours des huit dernières années, et la Chine, dont l’investissement est sur le point de dépasser le nôtre, font encore beaucoup mieux.

A l’occasion des auditions, j’ai été frappé par l’extrême fragmentation et par l’empilement des structures qui coexistent sans passerelles et sans coordination. Ne vous semble-t-il pas qu’il conviendrait d’en regrouper certaines afin d’atteindre une taille critique dans un certain nombre de domaines, comme les sciences du vivant.

S’agissant des crédits incitatifs, ne craignez-vous pas que la multiplication des agences de moyens conduise, là encore faute de coordination, à un saupoudrage ? Une rationalisation paraît indispensable.

De même, la rationalisation des carrières est un sujet récurrent car les deux pôles que sont la recherche universitaire et les établissements publics ont des moyens de recrutement différents. La réforme des universités a ouvert la possibilité de recruter des chercheurs sous contrat, il faut l’utiliser.

M. Michel Lejeune, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire pour la recherche dans le domaine du développement durable – Au fond, tout est développement durable, mais je m’en tiendrai, faute de temps, aux programmes de la mission recherche et enseignement supérieur qui lui sont plus spécifiquement consacrés.

Ma première question porte sur le septième programme cadre européen de recherche et de développement technologique qui vient d’être adopté. Il disposera, pour la période 2007-2013 d’une enveloppe importante d’environ 50 milliards d’euros, mais quelle place est accordée dans ce cadre aux recherches dans le domaine du développement durable ? Comment les organismes de recherche français concernés comptent-ils participer au montage des projets européens ?

Le captage et le stockage des gaz à effet de serre, notamment du Co2 , est un enjeu majeur de la lutte contre le réchauffement climatique. Quelle place prend cette préoccupation dans les activités et dans les projets de l’IFP et de l’ADEME ? Quel budget leur est consacré ?

Un travail important est en cours sur les revêtements routiers. Le laboratoire central des Ponts et Chaussées développe un programme d’optimisation des matériaux incorporant des recyclés dans la route, ce qui est particulièrement intéressant pour les déchets ultimes. La lutte contre la pollution par les ruissellements routiers passe aussi par un travail novateur sur les revêtements. Pouvez-vous faire le point sur ces questions ?

Enfin, il n’y aura pas de développement durable sans agriculteurs et éleveurs, et pas d’éleveurs sans vétérinaires. Or le programme 142, qui dépend du ministère de l’agriculture, ne semble pas bénéficier des mêmes augmentations que les programmes rattachés au ministère de l’enseignement supérieur. Pourtant, la formation et la recherche sont essentiels dans ce domaine. Le budget pour 2008 de la plus prestigieuse des écoles vétérinaires, celle de Maisons-Alfort, paraît sous-estimé compte tenu de son état de vétusté. Le nouveau directeur s’inquiète de ces difficultés, alors que l’institution est connue dans le monde entier pour l’excellence de son enseignement et de sa recherche. Un effort supplémentaire semble indispensable pour réaliser les investissements les plus urgents.

Je donne malgré tout un avis favorable à ce projet de budget.

M. Daniel Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour la politique de recherche et de recherche industrielle – Vous ne vous étonnerez pas que la tonalité de mon propos soit quelque peu différente. Si l’on constate en effet un réel effort pour les crédits de la recherche, la question essentielle du contrôle et du pilotage n’est pas résolue. La France accuse un retard réel en matière de recherche industrielle, y compris comparativement à d’autres États européens. Il faut donc s’interroger sur l’efficacité des politiques mises en œuvre.

Le crédit impôt-recherche a déjà subi cinq modifications depuis sa création, sans jamais aucune évaluation. Ses retombées en matière d’emploi et de qualification, qui sont la clé d’une recherche performante, restent inconnues. Il y a donc un risque de gâchis des fonds publics, d’autant que certains groupes privés semblent utiliser les financements publics de façon pour le moins critiquable, comme cela a été le cas à Crolles, où la coopération avec les laboratoires publics s’est soldée par des licenciements et des délocalisations. Ce budget se contente donc de donner un coup de pouce à des aides fiscales dont l’efficacité n’est pas garantie. Votre gouvernement semble féru de contrôles : que comptez-vous faire en ce domaine ?

Le dynamisme de l’économie française a largement été porté par les grands programmes de recherche des années 70 et 80, concentrés sur des secteurs stratégiques. C’est dans cet esprit qu’avait été créée l’AII en 2005. Depuis, elle a su faire ses preuves, mais vous avez décidé de la dissoudre dans OSEO, sous prétexte de concentrer le soutien de l’État sur les entreprises moyennes, lesquelles étaient les principales bénéficiaires des actions de l’Agence. Néanmoins la énième réforme du crédit impôt-recherche devant favoriser les grands groupes, vos justifications paraissent peu crédibles. Est-ce la présence au sein de l’Agence de partenaires sociaux qui gêne ? Est-ce le fait d’avoir été soutenu par le précédent Président de la République ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire – Oh !

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – Voyons, monsieur Paul !

M.  Daniel Paul, rapporteur pour avisCe sont d’éminents responsables de grands groupes industriels français qui font état de cette éventualité. Quelle garantie avons-nous qu’au sein d’OSEO, des fonds suffisants, identifiés, seront consacrés à la recherche industrielle ?

La question du pilotage est en outre essentielle dans le contexte actuel de privatisation des entreprises. EDF et GDF notamment, qui assuraient une part importante de la recherche industrielle au profit de la nation tout entière, ont tendance à baisser les crédits qui y sont consacrés au profit de retours sur investissement plus rapides, et à orienter leur recherche sur les activités commerciales et de marketing ou sur des sujets d’intérêt moins commun qu’auparavant. Bref, elles ne font plus de la recherche que pour leur propre compte.

Ce problème de pilotage recoupe celui de la liberté de la recherche. Le sous-financement chronique des universités, la multiplication des contrats précaires dans la recherche pénalisent son développement et son efficacité. La loi sur les universités ne fera que renforcer les inégalités entre les établissements, entraînant un gâchis considérable en matière de ressources humaines. Les chercheurs qui n’atterriront pas dans les universités les plus prisées connaîtront des difficultés considérables. Enseignants et étudiants se mobilisent donc pour en demander l’abrogation.

Il est impératif de développer un emploi stable et correctement rémunéré pour favoriser la recherche fondamentale, dans un système qui fait de plus en plus la part belle à des projets ponctuels, sans vision de long terme. C’est aussi le seul moyen d’éviter que les jeunes diplômés de nos meilleures écoles s’orientent tous vers le secteur de la banque et de la finance, aux carrières bien plus attractives. Si les salaires de la recherche ne pourront sans doute jamais concurrencer ce secteur, la perspective d’un travail stable et sécurisé peut tout de même constituer un avantage.

Pour développer la recherche fondamentale, il faut aussi freiner le développement de la concurrence entre laboratoires, qui se lancent dans une course aux contrats pour pouvoir obtenir des fonds : le mouvement Sauvons la recherche insiste sur ce point. Les implications sur la recherche industrielle sont réelles, car la recherche fondamentale d’aujourd’hui, c’est la recherche appliquée de demain.

La recherche bénéficiant à l’ensemble de la population, l’effort devrait en être supporté plus largement par le secteur bancaire notamment. Les fonds nécessaires sont colossaux. Pourquoi une partie des aides publiques accordées aux PME ne pourrait-elle servir à lever des emprunts bonifiés auprès des banques, en échange de formation et de créations d’emplois ? Enfin, comment comptez-vous rééquilibrer les pouvoirs à l’intérieur des pôles de compétitivité en faveur des salariés et des universités ? Un secteur particulier est à l’ordre du jour : celui de la batellerie, pour son potentiel en matière de développement durable. Il est question d’une relance des investissements, notamment avec le canal Seine nord. Pourquoi ne pas créer un pôle de compétitivité dans ce secteur ?

Vous aurez compris que je donne un avis défavorable à ce projet de budget.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis pour les formations supérieures, la recherche universitaire et la vie étudianteLa loi du 10 août 2007 vise à renforcer la qualité des études, mais aussi à concourir au bien-être des étudiants. L’autonomie doit faire de l’université un lieu vivant et accueillant où les jeunes se sentent pris en charge et peuvent envisager sereinement leur avenir. Elle apportera ainsi une contribution décisive à l’égalité des chances et au renforcement de l’attractivité de notre territoire.

Trois domaines sont essentiels pour l’amélioration du bien-être étudiant.

Le premier est celui de la santé. Celle des étudiants est globalement bonne, mais reste trop souvent la cinquième roue du carrosse pour les universités. La dotation de fonctionnement accordée aux SUMPPS n’avait pas été majorée depuis dix ans. Je suis heureuse que le budget pour 2008 marque une rupture salutaire à cet égard, mais tout reste à faire pour qu’ils deviennent de véritables services de médecine préventive et de promotion de la santé. Ils devraient ainsi avoir la latitude d’adapter leur politique de prévention aux profils de leur établissement, ou pouvoir servir de médecin référent pour les étudiants éloignés de leur domicile familial.

Il faudrait aussi envisager la création d’un chèque santé pour améliorer l’accès des étudiants à une couverture complémentaire. Les médecins des SUMPPS devraient pouvoir décider de leur attribution sur des critères médicaux, les assistants sociaux étant chargés de vérifier que les étudiants satisfont aux critères sociaux. Enfin, les services de médecine préventive doivent définir la politique du handicap de l’université, qui s’ajoute à la charte Handicap Université qui vient d’être signée.

Le deuxième axe, très complémentaire du premier, est le sport. Pour pouvoir pratiquer plus aisément, peut-être faudrait-il inclure des droits spécifiques dans les droits d’inscription à l’université.

Enfin, le logement est indispensable à l’attractivité de nos établissements et ses crédits doivent être augmentés. On pourrait bâtir des formules de financement innovantes, associant le CROUS et les collectivités locales aux universités. Il faudrait pour cela que les CROUS puissent recourir au partenariat public-privé et que les universités propriétaires de leurs terrains puissent les confier à des organismes chargés de la construction et de l’entretien de logements. Quant aux collectivités locales, elles participent de façon importante au financement du logement étudiant mais aucun EPCI n’a encore accepté un transfert du patrimoine des CROUS. Une réflexion interministérielle est nécessaire pour mobiliser ces crédits d’investissement, en particulier au profit des étudiants boursiers. Enfin, les CROUS doivent à leur tout devenir plus autonomes, pour gagner en efficacité, et mieux articuler leurs actions avec l’université, notamment dans le cadre des PRES.

M. Pierre Lasbordes, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques pour les grands organismes de recherche Les quelques observations et questions que j’ai à formuler ne remettent pas en cause l’avis favorable que je donne aux crédits consacrés aux grands organismes de recherche.

Il me semble d’abord que le CEA devrait être au centre des recherches sur les énergies nouvelles que préconise le Grenelle de l’environnement. Son statut d’EPIC lui donne une grande souplesse de gestion et ses bons résultats sont reconnus par tous. Or il lui manque au moins 33 millions pour faire face aux missions qui lui ont été confiées en 2006, dont notamment le développement des réacteurs de quatrième génération. Le CEA dispose de ressources propres importantes, il doit en conserver la maîtrise. Il voudrait ainsi consacrer à la recherche une part plus importante du dividende qui lui est versé par AREVA, ce qui semble raisonnable.

Quant à l’ANR, sa place dans la recherche française est dorénavant bien établie et son budget suit son développement constant. Pour renforcer encore son efficacité, il faudrait pouvoir mieux prendre en compte les demandes des chercheurs et des instituts. 900 questionnaires ont été distribués, qui ont obtenu 600 réponses mais le point de vue des grands organismes semble s’exprimer difficilement. Comment améliorer la prise en compte des thèmes de recherche proposés par les organismes ? Par ailleurs, les départs en retraite étant importants dans les équipes de chercheurs, qu’est-il prévu pour les jeunes chercheurs ?

Le CNRS, qui est le principal bénéficiaire des crédits de l’ANR, ne sait pas toujours faire connaître ses réalisations. Je suis heureux que le récent prix Nobel Albert Fert lui ait rendu hommage. Après des années de doute, le CNRS s’est remis en marche. Il ne faudrait pas l’entraver par des règles budgétaires trop contraignantes, telles que la réserve de précaution ou les gels et dégels tardifs de crédits : 6 % de crédits bloqués se traduisent pas 15 % de crédits en moins pour les laboratoires ! Et la progression du budget de l’établissement sera absorbée pour l’essentiel par sa cotisation aux pensions civiles de l’État. J’aimerais être rassuré sur les perspectives budgétaires du CNRS

Enfin, la politique spatiale est au cœur de la recherche. Le crédit du CNES et la contribution française à l’Agence spatiale européenne sont conformes aux engagements pris, mais les retards de GALILEO, les incertitudes qui pèsent sur la recherche américaine et le développement des projets chinois et indiens renforcent la nécessité d’une politique spatiale européenne, que le traité simplifié permet par ailleurs. Sera-ce une des priorités de la présidence française ?

J’ajoute pour finir que je proposerai à la commission des affaires économiques deux recommandations, relatives à cette présidence française et au crédit impôt-recherche.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – M. Garrigue et M. Jardé ont évoqué l’hypothèse de développer l’emploi contractuel dans les organismes de recherche. La loi Libertés et responsabilités des universités offre cette souplesse, que réclament les grands organismes de recherche. Ils y voient le moyen d’attirer des chercheurs étrangers et de faire revenir en France des chercheurs français partis à l’étranger et qui ne pourraient, étant donné leur âge, être recrutés d’une autre manière. La question mérite d’être posée, et elle l’a d’ailleurs été publiquement par la présidente du CNRS. Toutefois, le sujet ne me paraît pas pouvoir être réglé au décours de la discussion budgétaire. Il s’agirait en effet d’une modification majeure de la politique de recrutement des organismes de recherche. Une réflexion préalable approfondie est donc nécessaire, qui suppose une phase de dialogue social et un débat national, sachant que, dans tous les cas, il s’agit de se procurer une marge de souplesse supplémentaire et non de substituer des recrutements contractuels à l’emploi statutaire.

Parler des jeunes chercheurs, c’est pointer le principal défi de la recherche française, qui est en effet d’ordre démographique. Le Gouvernement a permis le recrutement de 3 000 emplois statutaires composés pour moitié d’enseignants chercheurs et d’emplois supports. Sachant que, d’ici à 2012, 25 % des effectifs de l’INSERM et 20 % de ceux du CNRS partiront à la retraite, il est indispensable d’attirer de jeunes chercheurs. C’est pourquoi le budget prévoit la revalorisation du doctorat et, pour la deuxième année consécutive, celle de l’allocation recherche, qui aura donc été augmentée de 16 % en deux ans.

Le budget qui vous est présenté prévoit aussi la création de 2 250 supports de monitorat. Ainsi, chaque doctorant pourra devenir moniteur, et, en particulier, accomplir des missions de conseil en entreprise. Notre volonté de revaloriser le doctorat nous fait d’autre part travailler à sa reconnaissance dans les conventions collectives et dans les recrutements administratifs. Nous souhaitons également rendre le contrat « jeune chercheur » vraiment attrayant. Il nous faut retenir nos cerveaux, et notamment les meilleurs. Il ressort en effet des enquêtes sur ce point qu’un petit nombre seulement de chercheurs français choisit de s’exiler, mais que ce petit nombre est constitué des meilleurs, débauchés à des prix qui sont hors de proportion avec ce que permettent les contrats statutaires en France. Ceux-là, nous voulons les retenir en leur offrant un environnement de recherche stimulant.

Il faut, c’est exact, des indicateurs ; la tâche de l’AERS est de les mettre au point et elle le fait.

J’en viens au crédit d’impôt-recherche – le CIR – qui, avez-vous dit, ne serait pas assez incitatif pour les PME de croissance. Allons ! Le PLF 2008 est l’occasion d’une réforme historique, avec le triplement du montant alloué à ce dispositif, qui est destiné par nature aux PME de croissance.

Certains souhaiteraient le quintuplement du crédit impôt-recherche. Soyons raisonnables ! En année pleine, grâce à la réforme, 3 milliards seront consacrés au financement du CIR. Avec cet outil, nous sommes aujourd’hui le pays qui fait le pari de la recherche privée puisque, selon l’enquête du ministère, 80 % des bénéficiaires sont des PME. Rapporté aux 3 milliards prévus, c’est un montant considérable, et dire qu’il faudrait quintupler cette somme au bénéfice des PME de croissance, c’est en fait dire qu’il faudrait le quintupler tout court. Or l’effort consenti est déjà gigantesque, puisqu’il représente un quart du budget de l’enseignement supérieur. Un moment vient où il faut savoir s’arrêter.

Vous avez parlé de la recherche européenne. Je partage votre constat : les structures se sont multipliées sans cohérence d’ensemble, chaque État membre de l’Union européenne ayant souhaité construire ses propres infrastructures de recherche et éprouvant des réticences à s’en déposséder. L’un des enjeux de la présidence française de l’Union sera donc de mettre la recherche européenne au service de la société en l’orientant en priorité vers les défis du siècle que sont le changement climatique, le vieillissement de la population, la santé, l’énergie et le développement durable. La présidence française de l’Union nous donnera l’occasion d’y inciter nos partenaires.

S’agissant de GALILEO, nous faisons tout, vous le savez, pour que ce projet trouve ses financements avant la fin de 2007. Le Président de la République s’implique personnellement dans ce dossier, qu’il a évoqué avec Mme Merckel et M. Barroso, et que M. Barrot, commissaire européen, suit avec une particulière attention, car il s’agit d’un projet de première envergure au service de la société européenne.

Vous me demandez, monsieur le député, que la Cour des comptes évalue les sciences humaines et sociales comme elle l’a fait, de manière remarquable, pour les sciences du vivant. Procéder dès maintenant à une telle évaluation serait prématuré, puisque l’AERS en est encore à définir une batterie d’indicateurs. Il conviendra, dans un second temps, de demander à la Cour de vérifier que ces indicateurs, indispensables, sont pertinents.

M. Claeys a demandé l’évaluation du CIR, récusant celle qu’a réalisée mon ministère en 2006.

M. Alain Claeys – Je ne la récuse pas, je la juge insuffisante.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – Elle était pourtant intéressante, puisqu’elle a fait apparaître que 1 euro de crédit impôt-recherche génère 2,4 euros d’investissement en recherche et développement. Elle a aussi montré que le dispositif bénéficie pour 80 % aux PME, comme je vous l’ai indiqué. Elle a permis de définir les dépenses ainsi financées, qui servent pour 40 % au recrutement de jeunes chercheurs et pour 30 % aux dépenses de fonctionnement. Je souligne, d’autre part, qu’un quart de ces dépenses environ revient à des organismes de recherche habilités, ce qui montre la porosité des frontières entre recherche privée et recherche publique.

Ceux qui critiquent le dispositif le font donc pour de mauvaises raisons, une partie des sommes investies par l’État revenant aux organismes publics par le biais de contrats de collaboration. Je l’ai dit, le crédit impôt-recherche connaîtra en 2008 une très importante réforme, ses modalités d’attribution étant radicalement simplifiées et son budget triplé. Mieux vaut donc attendre l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions avant de procéder à une nouvelle évaluation, qui aura lieu, si vous le souhaitez, l’année suivante.

Vous m’avez interrogé sur la situation de l’ANR au regard de la régulation budgétaire. A l’heure où nous parlons, la décision n’est pas prise, mais je souhaite que les crédits de l’Agence n’y soient pas soumis.

Ma collègue Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie, traitera plus complètement que moi du Grenelle de l’environnement, mais vous m’avez interrogé sur les crédits qui lui sont liés. Un volet « recherche » très important a évidemment été décidé, ce qui est logique, la recherche sur le développement durable étant de notre champ de compétence. Ainsi 34 millions seront consacrés aux programmes de l’ANR liés au Grenelle de l’environnement, dans un budget en progression de 17 %.

Vous m’avez aussi demandé si la loi-cadre sur l’environnement comprendrait un volet « recherche ». Je ne peux imaginer qu’il en aille autrement, mais Mme la Secrétaire d’État chargée de l’écologie vous en parlera beaucoup mieux que moi.

S’agissant de la place de la recherche dans les efforts visant à favoriser le développement durable, je souhaite, je vous l’ai dit, que la présidence française de l’Union soit l’occasion de donner la priorité à une recherche européenne au service de la société.

M. Hénart m’a, à juste titre, demandé la définition d’une matrice nationale permettant de juger de l’insertion professionnelle de toutes nos universités. Je retiens cette excellente proposition que j’inscrirais à l’ordre du jour des travaux de la direction générale de l’enseignement supérieur.

Je pense à la refonte des régimes financiers des universités ou à la question de l’insertion professionnelle. Votre suggestion est excellente. Il serait à ce propos souhaitable d’avoir un cadre national pour évaluer les renseignements que les universités donneront à leurs étudiants.

Cette année, très peu de cas de frais d’inscription illégaux ont été signalés et j’ai systématiquement donné aux recteurs l’instruction de les déférer au tribunal administratif. Les droits d’inscription sportifs ne constituent pas, quant à eux, des frais d’inscription illégaux puisqu’ils ne sont pas consubstantiels à la scolarité de l’élève. Il ne faut en aucun cas « couler » les associations sportives des universités qui se démènent pour assurer des offres sportives aux étudiants. J’ai validé juridiquement cette question.

Je suis par ailleurs d’accord avec Mme Rosso-Debord : l’offre sportive devrait être développée et incluse dans le cursus de l’élève, mais cela sera long et compliqué. Je me propose de lancer dans quelques semaines une mission sur le sport à l’université.

Outre les 2,5 % de revalorisation à la rentrée de 2007, ce qui représente 4 millions, le PLF pour 2008 prévoit 55 millions pour les bourses. Chaque année, ce sont 100 millions supplémentaires qui seront consacrés au financement des études. La réforme des bourses que nous avons présentée en octobre, permettra d’avoir 50 000 boursiers supplémentaires, la création d’un échelon de 4,5 % supplémentaire pour les 100 000 étudiants les plus défavorisés et un doublement des bourses de mobilité. Les bourses au mérite seront également allouées aux étudiants méritants des BTS, IUT et licence  et il sera enfin possible de bénéficier de prêts avec des paiements différés, l’État devant s’engager à garantir en partie la défaillance de remboursement. Cette réforme, en revanche, doit s’accompagner d’un contrôle de l’assiduité par production des relevés de notes, comme j’ai eu l’occasion de le dire aux directeurs de CROUS.

Le logement étudiant est une question prioritaire et nous voulons remplir les objectifs fixés par le rapport Anciaux, soit 7 000 rénovations par an et 5 000 constructions nouvelles. Des moyens sont d’ores et déjà mobilisés par les CROUS et dans le cadre des contrats de projets État-région. Au total, 117 millions seront consacrés cette année au logement étudiant. D’ores et déjà, 5 850 chambres ont été rénovées et 2 780 ont été construites. Avec les offices d’HLM et les collectivités territoriales, on dénombrera à la fin de 2007 plus de 5 000 constructions nouvelles.

M. le rapporteur propose un amendement pour augmenter le nombre de rénovations. Compte tenu des retards qui ont été pris dans les travaux de Jussieu, 11 millions ne seront sans doute pas consommés en 2008. De la même manière, j’ai demandé au CNOUS de s’engager sur le nombre de logements supplémentaires qui seront vraiment rénovés en 2008. Dans ces conditions, sans doute peut-on envisager de porter le nombre de rénovations à 6 350.

Des inquiétudes se font jour s’agissant du ticket restaurant. Depuis 2004, il a augmenté de 10 centimes chaque année et il s’élève aujourd’hui à 2,80 euros. Son coût réel est en fait de 5,20 euros, l’État le subventionnant à hauteur de 54%. Nous devons prendre un certain nombre de mesures préventives pour éviter que ce coût ne soit encore plus élevé dans les années à venir. Je propose que la mission Lambert réfléchisse à cette question.

Nous sommes engagés dans un grand plan de rénovation universitaire, ce budget visant avant tout à achever le financement des CPER 2000-2006. Ce sont 265 millions de CP qui en apureront les dettes et 66 millions de CP qui financeront les premiers travaux des CPER de 2007-2013. Au total, nous disposons de 331 millions de CP cette année et 21 milliards seront consacrés aux CPER pour 2007-2013.

Les décrets d’application de la loi sur les libertés et responsabilités des universités auront un impact considérable sur les carrières. Nous avons engagé une concertation avec les personnels sur les modifications des décrets statutaires et nous commencerons dans le semaines à venir le chantier des carrières des enseignants chercheurs.

L’autonomie des sites universitaires est indissociable de la politique des PRES, outils très puissants de structuration de l’offre universitaire. L’émiettement de nos universités nuit à son rayonnement international. D’ici deux ans, notre enseignement supérieur devra être structuré en une quinzaine de pôles. La création des fondations universitaires au niveau des PRES est quant à elle une excellente idée mais elle est prématurée car elle suppose une modification de la loi LRU. Je propose que la question soit posée à l’issue de la première évaluation de la loi d’ici un an.

Vous avez évoqué une moindre augmentation de la dotation annuelle des établissements privés. Sur ce point, nous avons une vraie divergence. Si leur subvention, à 56 millions cette année, est en légère diminution, c’est que mon ministère s’est battu pour que ces établissements récupèrent tout le montant de la taxe sur les salaires qu’ils versaient à Bercy. Cela représente 14 millions, soit le quart de leur subvention ! Grâce à la mobilisation de tous les parlementaires, celle-ci avait augmenté de 63 % depuis 2003. Je vous demande donc de bien en avoir conscience : plus 63% en quatre ans et plus 25 % en 2007, si tous les établissements de France avaient connu une telle augmentation, ils en seraient certainement très satisfaits ! (Rires)

Monsieur Jardé, si la recherche biomédicale connaît un tel émiettement entre agences et structures, c’est que, historiquement, la création de celles-ci est apparue comme la bonne ou la seule réponse pour développer telle ou telle stratégie. Mais effectivement, on atteint les limites de l’exercice et je suis franchement hostile à la création d’une agence de moyens supplémentaire sur la maladie d’Alzheimer. S’agissant des sciences du vivant, il faut effectivement un rapprochement entre le CNRS et l’Inserm et leurs présidents auront à cœur d’organiser les convergences. J’ai confié à François d’Aubert une mission sur les partenariats entre organismes et universités. Ce sera l’occasion d’aborder la question des unités mixtes qui, dans les sciences du vivant, dépendent souvent du CNRS, de l’Inserm et de l’Université, afin d’essayer de rendre le système moins bureaucratique.

Monsieur Lejeune, en 2008, sous présidence française de l’Union, nous organiserons une conférence sur le développement durable. Vous souhaitez un effort budgétaire supplémentaire pour l’enseignement agricole privé. En 2007, un effort exceptionnel de 2,6 millions a été consenti pour les travaux de remise en état et de sécurité de l’école vétérinaire de Maisons-Alfort ; il sera poursuivi. Monsieur Barnier vous donnera par écrit des réponses complémentaires.

Monsieur Paul, j’ai répondu à propos de l’efficacité du crédit impôt recherche, même si je sais que je ne vous ai pas convaincu. Un euro de crédit d’impôt, c’est 2,4 euros de dépenses de recherche et les entreprises qui bénéficient de ce dispositif font davantage de recherche que celles qui bénéficient de subventions. Enfin, il y a aussi un retour partiel pour les organismes de recherche.

La fusion entre Oséo et l’AII est une bonne chose car Oséo Innovation s’intéresse au démarrage des PME et complète donc l’éventail des instruments en leur faveur.

Vous regrettez la multiplication des contrats précaires dans la recherche ? Le pacte de 2006 a permis de créer 6 000 emplois statutaires, soit 3 000 de chercheurs et enseignants-chercheurs et 3 000 d’emplois-supports techniques et administratifs. Le problème aujourd’hui, c’est plutôt qu’il va falloir recruter 3 700 chercheurs et enseignants-chercheurs par an d’ici à 2012 alors que 4 000 allocataires de recherche seulement entrent en doctorat. Le défi à relever est donc plutôt d’ordre démographique, en relation avec l’attractivité du métier. Mais il faut effectivement travailler à ce que les contrats de post-doctorant, qui, dans les EPIC, étant de droit privé, sont limités à dix-huit mois, deviennent plus longs. Il faudra réfléchir également aux conditions de rémunération et d’encadrement afin que cette période entre la thèse et l’entrée dans un emploi statutaire qui, depuis une dizaine d’années, se fait entre 31 et 35 ans, soit la plus stable possible et la plus propice à la recherche. Dans ce domaine, nous essaierons de reprendre ce qui se fait de mieux en Europe. M. Novelli vous répondra sur l’effort du secteur bancaire pour la recherche industrielle et sur les pôles de compétitivité. La liaison entre ces derniers et l’université est importante et la loi LRU permet que les présidents des pôles fassent partie des conseils d’administration des universités. Il faut également que les pôles de compétitivité aient des liens avec les réseaux thématiques de recherche avancée et que les PRES puissent y participer, pour améliorer la liaison entre recherche fondamentale et recherche appliquée et entre formation et emploi.

Madame Rosso-Debord, je souhaiterais que vous transmettiez à mes services votre proposition sur la couverture complémentaire des étudiants et le chèque santé car elle me paraît un peu différente de ce qui figure dans le rapport de M. Wauquier sur la santé étudiante. Notre objectif est que 100 % des étudiants aient une couverture complémentaire. Actuellement, 9 % n’en ont pas. Pour certains, c’est simplement par insouciance, et il faut leur faire prendre conscience de sa nécessité. Pour d’autres, c’est pour des raisons financières, mais les dispositifs d’ordre général comme la CMU, qui concernent tous les jeunes, leur en donnent la possibilité.

Pour ce qui est du droit de prescription de la médecine préventive, j’y suis favorable, mais la décision appartient à Mme Bachelot. Nous souhaitons bien que tous les jeunes entrent dans la logique de la prévention et du parcours de soins.

S’agissant du logement, le CROUS peut recourir à des partenariats privé public. Le problème c’est leur complexité et leur lourdeur administrative. Le Président de la République a demandé au Premier ministre de créer une mission sur le développement de ces partenariats, qui est nécessaire. Je souhaite les développer à l’université mais je constate que, malgré l’aide de la Caisse des dépôts, certains établissements ont du mal à mettre sur pied leur dossier. Il en va de même pour le CROUS.

L’un des objectifs de la loi relative à l’autonomie des universités est de donner à celles-ci la maîtrise de leur foncier – qui est mal géré, comme tout le foncier de l’État. En leur transférant la propriété des bâtiments, il ne s’agit nullement de s’en décharger, mais de leur permettre d’en faire un meilleur usage et d’accroître l’offre de logements pour étudiants.

S’agissant de la gouvernance du CROUS, nous attendons les conclusions de la mission Lambert pour la fin de cette année.

Monsieur Lasbordes, vous suggérez de répartir différemment le dividende qu’AREVA verse au CEA afin d’en affecter une part plus importante au financement du réacteur de quatrième génération. Mais le dividende d’AREVA finance le fonds de démantèlement des centrales nucléaires. On a pris beaucoup de retard dans ce domaine depuis longtemps et, dans le prolongement du Grenelle de l’environnement, il ne serait pas acceptable de ne pas provisionner le fonds de démantèlement à la hauteur nécessaire. Pour ce qui est du réacteur de quatrième génération, le CEA a toutes marges de manœuvre pour recentrer ses activités sur son cœur de métier.

M. François Brottes – Mais AREVA n’est pas exploitant de centrales nucléaires !

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur – Les crédits d’AREVA sont affectés au fonds de démantèlement par la loi et il n’est pas possible d’en modifier la destination.

S’agissant de l’ANR, vous déplorez que la programmation ne prenne pas en compte les réponses des différents organismes aux questionnaires qui leur ont été envoyés.

M. Pierre Lasbordes, rapporteur pour avis  – J’ai dit en fait qu’avec la création de l’établissement public, les demandes des dirigeants des organismes ne me paraissaient pas suffisamment prises en compte.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – Cela relève du conseil d’administration de l’ANR, qui est une autorité indépendante et qui n’est pas là pour lancer des appels à projet correspondant exactement aux demandes stratégiques des organismes car, si tel était le cas, on pourrait parler de financement récurrent. Cela étant, même si les responsables de l’ANR et des grands organismes se réunissent tous les quinze jours dans mon bureau, peut-être conviendrait-il de renforcer quelque peu le dialogue institutionnel sur les grandes priorités de recherche ?

Le CNRS constitue une réserve de précaution conformément à la demande qui est faite à tous les établissements publics. J’ai toutefois demandé, compte tenu de la priorité nationale accordée à la recherche, que la situation des organismes soit examinée cas par cas, mais la décision n’a pas encore été prise.

En ce qui concerne l’espace, j’ai déjà répondu pour Galileo. Vous souhaitez que l’espace soit une priorité de l’Union européenne. Il est déjà formidable qu’il s’agisse désormais d’une compétence communautaire, ce qui va changer beaucoup de choses. Sans doute la présidence française de l’Union nous donnera-t-elle l’occasion de nous intéresser à nouveau à ce sujet, encore faudrait-il que Galileo n’ait pas échoué d’ici là, ce qui marquerait d’un signe noir la politique spatiale européenne et qui serait très difficile à surmonter en quelques semaines. Mais nous savons tous que Galileo réussira, avant la présidence française…

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur – Ma présence en ces lieux se justifie par le fait que le ministère de l’Économie, de l’emploi et des finances est responsable du programme « recherche industrielle ». Mais avant d’en venir plus précisément à ce dernier, je souhaite rappeler que la politique de compétitivité de notre pays est tout particulièrement axée sur l’innovation. C’est un domaine qui, depuis l’élection du président de la République, a fait l’objet de toutes les attentions du Gouvernement. Quand nous nous battons, la ministre de la recherche et moi-même, en faveur de la ratification du protocole de Londres, nous agissons bien en faveur de l’innovation. De même, c’est l’innovation que nous défendons quand nous faisons adopter un projet de loi réprimant la contrefaçon.

C’est aussi cette politique que l’on retrouve dans le programme spécifique de recherche industrielle à travers la fusion des grandes agences et le développement des pôles de compétitivité.

Dans ce projet de loi de finances, les dispositions relatives à la fiscalité des brevets poursuivent également cet objectif. Il s’agit de faire diminuer les revenus de cession des brevets en leur appliquant un taux réduit et d’assouplir le régime fiscal applicable à l’apport par un inventeur d’un brevet à la société qui l’exploite. En fait, tout ce qui a trait à la promotion et à la défense des droits de propriété intellectuelle s’inscrit dans la politique en faveur de l’innovation.

C’est aussi le cas des dispositions relatives au crédit impôt recherche. Mme Pécresse a souligné que le nouveau dispositif était en rupture avec le précédent. Le premier changement est d’ordre quantitatif puisque trois milliards d’euros seront consacrés en année pleine au CIR, contre 900 millions seulement en 2006. Une autre nouveauté tient à la procédure du rescrit fiscal réduit à trois mois, qui permet de sécuriser les dépenses éligibles. Désormais, lorsque l’administration n’aura pas répondu à la demande de l’entrepreneur sur l’éligibilité de ses dépenses dans un délai de trois mois, celles-ci seront réputées acceptées. En outre, grâce au déplafonnement, le dispositif pourra désormais profiter également aux grandes entreprises. En effet, ce sont maintenant 30 % des dépenses qui seront prises en compte jusqu’à 100 millions d’euros et 5 % au-delà.

Tout cela fait du crédit impôt recherche le dispositif fiscal le plus puissant en faveur des dépenses de recherche et développement dans toute l’OCDE, à l’exception de l’Espagne.

Selon les derniers chiffres connus, 7 000 entreprises ont eu recours au CIR. C’est fort peu, mais cela tient sans doute aux contrôles fiscaux qui ont trop souvent suivi les demandes et à la complexité du dispositif. Celui-ci étant désormais très simple, on peut s’attendre à une progression des demandes. Je rappelle enfin que jusqu’en 2005, le crédit impôt-recherche s’adressait aux entreprises de moins de 250 salariés, jusqu’à 81 % des dépenses.

Parmi les autres dispositifs du programme « recherche industrielle », M. Paul s’est inquiété des effets de la fusion AII-OSEO sur les personnels. Dans la mesure où AII n’emploie que 24 personnes, il sera tout à fait possible d’adopter une gestion personnalisée et de mener à fond une concertation apte à lever ces inquiétudes !

Le Gouvernement est convaincu de la nécessité de recentrer l’effort de recherche et développement sur les entreprises moyennes. Les grands groupes ne seront pas pour autant pénalisés. Sur les 23 milliards d’euros, soit 1,3% du PIB, que les entreprises privées consacrent à la recherche et développement, la moitié proviennent des 13 plus grands groupes français. Les dépenses du seul groupe Sanofi dépassent quatre milliards d’euros. Tout cela nous prouve la nécessité de concentrer les crédits sur les PME : la totalité de l’enveloppe de l’AII ne permettrait pas de couvrir les besoins d’une seule grande entreprise !

La fusion sera effective le 1er janvier 2008. M. Paul s’est également préoccupé de la gouvernance en rappelant que les salariés étaient associés à celle d’AII. Ils ont été reçus par mon directeur de cabinet et il apparaît que la réforme en cours permettra également de les associer à la gouvernance d’OSEO.

Je suis par ailleurs persuadé que les pôles de compétitivité sont une réponse moderne dans une politique industrielle moderne. Depuis la fin de 2004, 71 pôles ont été créés. Le mouvement est interrompu pour l’instant car la semaine prochaine, un cabinet d’audit sera choisi afin d’étudier la façon dont les procédures de gouvernance des pôles ont fonctionné. Les conclusions seront rendues publiques en juin 2008. Nous avons souhaité ce processus d’évaluation afin d’aboutir à une politique d’excellence. C’est bien le moins que l’on puisse demander à ces pôles, qui ont commencé à essaimer un peu partout en Europe, qu’on les appelle clusters ou parcs de haute technologie. Nous avons donc donné un élan et cette réponse simultanée de plusieurs pays européens pourrait être à l’origine d’une politique industrielle européenne moderne car venant de la base. En effet, dans ce système, ce sont les entreprises, les laboratoires de recherche, les organismes de formation qui font naître les projets que la puissance publique accompagne mais qu’elle ne choisit pas.

S’agissant du pôle batellerie, attendons la fin de l’audit, Monsieur Paul. Soyez assuré que nous le laisserons voguer s’il a quelque utilité !

Si je ne suis pas toujours d’accord avec vous, je ne m’interdis pas de prendre en compte ce que vous avez dit à propos des banques. A la demande du Président de la République, nous avons réuni à plusieurs reprises l’ensemble du secteur bancaire à la suite des soubresauts que nous avons connus récemment. Nous avons ainsi obtenu de pouvoir mettre en ligne sur le site du ministère les informations relatives aux encours offerts aux PME par le réseau bancaire, y compris selon la taille et selon l’âge des entreprises. C’est ainsi, par la transparence qui favorise la concurrence, que les banques seront amenées à offrir de meilleures capacités de soutien aux PME. Je ne suis pas hostile à ce qu’une réflexion plus approfondie soit menée sur les façons d’associer ce secteur au financement de tel ou tel projet innovant au sein des pôles de compétitivité.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – Le ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durable est directement concerné par trois programmes entiers et pour partie par d’autres, ce qui illustre d’ailleurs sa compétence transversale. Il est directement intéressé par ce qui concerne le crédit impôt recherche, dans la mesure où le développement durable est le moteur d’une nouvelle compétitivité fondée sur la recherche et l’innovation. Des problèmes structurels et de financement nous ont empêchés par le passé d’être très performants en matière de technologies innovantes, pour les nouvelles technologies de l’information et de la communication par exemple. Les technologies vertes ouvrent une nouvelle ère que la nouvelle formule du crédit impôt recherche nous permettra sans doute de saisir.

Le premier des trois programmes qui nous intéressent particulièrement concerne la recherche dans le domaine des risques et pollutions environnementaux sanitaires ou nucléaires. Il constitue une priorité pour le ministère de l’écologie. Ses crédits, en augmentation de 5 %, permettront de répondre à des enjeux de taille, tels que les risques technologiques, traités notamment par l’Ineris, ou les risques sanitaires environnementaux. Si la ligne budgétaire qui y est consacrée peut vous paraître faible, il faut savoir que l’ensemble du budget de l’Agence française de la sécurité sanitaire de l’environnement et du travail est en augmentation. En ce qui concerne l’évaluation des risques nucléaires, les travaux portent sur les questions classiques de radioprotection mais aussi sur des problèmes récents comme l’irradiation en milieu médical. Enfin, des actions de recherche et développement sont menées par l’ADEME en matière d’habitat économe ou de véhicules propres. Les crédits du service de la recherche et de la prospective de la direction des études économiques augmentent fortement pour mettre tout cela en cohérence.

Le deuxième programme porte sur la recherche dans le domaine de l’énergie : il s’agit du nucléaire civil, des nouvelles technologies d’énergie – dont les énergies renouvelables, mais pas seulement – et des usages durables qui peuvent être faits des hydrocarbures ; 441 millions sont destinés au démantèlement d’installations nucléaires, à la sécurité du parc et à la recherche sur les déchets et sur le nucléaire du futur ; 85 millions vont aux énergies non productrices de gaz à effet de serre, comme l’hydrogène, le solaire photovoltaïque, les biocarburants de deuxième génération, soit une progression de 8 % sur un an ; 138 millions sont aussi consacrés à l’Institut français du pétrole pour ses recherches sur l’utilisation rationnelle des hydrocarbures, notamment en ce qui concerne le captage et le stockage du CO2. Cette question est au cœur de nos préoccupations, d’autant qu’au plan international, l’Inde, la Chine ou des pays comme la Pologne réclament des assurances dans ce domaine, ainsi que des projets pilotes, avant d’accepter de s’engager dans la lutte contre le changement climatique. Outre l’IFP, le BRGM, le CNRS, l’ANR et l’AII travaillent sur ce sujet. Plus de 36 millions y ont été consacrés depuis 2005, mais ce n’est pas suffisant. Il faut passer à l’étape des prototypes. Deux projets pilotes sont prévus, avec le plan de soutien correspondant.

Le troisième programme concerne la recherche dans le domaine des transports, de l’équipement et de l’habitat. En 2008, la priorité sera donnée à la recherche aéronautique dont les crédits seront doublés par rapport à 2007. L’objectif est de résister à la concurrence américaine et de préserver notre réseau de PME sous-traitantes, qui représentent beaucoup d’emplois. Ces fonds permettront de contribuer au plan de soutien à la filière aéronautique. Pour le reste, les crédits du programme serviront à consolider les moyens d’établissements de recherche tels que le laboratoire des Ponts-et-Chaussées, l’INRS ou le CSTB et des incitations dans le domaine de l’habitat et des transports. À ce propos, pour répondre à la question qui m’a été posée sur le revêtement des routes, le laboratoire des Ponts-et-Chaussées travaille sur des matériaux recyclables très intéressants. Un chantier expérimental a été lancé sur l’autoroute A6 en 2003, mais il est difficile de faire adopter ce savoir-faire innovant aux professionnels. Nous y travaillons. Le programme de recherche sur le ruissellement devrait, lui, bientôt déboucher sur des recommandations pour la conception de modèles adaptables au cas par cas.

La question de la recherche a évidemment été très présente tout au long du Grenelle de l’environnement. C’était une des priorités de l’atelier sur la biodiversité, par exemple, mais elle a été évoquée aussi à propos, par exemple, des pratiques agricoles, du climat, des transports ou de l’habitat. Le Président de la République a évoqué un plan massif d’investissements d’un milliard supplémentaire sur quatre ans, avec une équivalence entre les moyens consacrés à la recherche nucléaire et ceux de la recherche sur les technologies propres et la prévention des atteintes à l’environnement. Un groupe de travail va être installé pour définir un programme précis d’ici au 15 décembre. D’ores et déjà, les conclusions du Grenelle permettent d’envisager des actions dans cinq domaines : la santé environnementale, dans laquelle la France est en retard, les engagements que nous avons pris dans le cadre du règlement Reach, les nouvelles technologies en matière de CO2 et de transport propre, le soutien aux démonstrateurs en matière de technologies éco-responsables et enfin la formation et la recherche appliquée dans le domaine de l’agriculture durable.

Au niveau national, nous espérons commencer à donner des déclinaisons concrètes au Grenelle de l’environnement dans la loi qui devrait être examinée fin janvier, mais il est difficile de dire exactement lesquelles, sauf en matière d’OGM, car le périmètre de cette première « loi Grenelle » n’est pas encore défini. En revanche, certains engagements reçoivent déjà une traduction par le financement d’actions.

Au niveau européen, le septième PCRD est certes orienté vers le développement durable, mais sans être à la hauteur des enjeux. Il ne permet certainement pas de faire de l’environnement la « nouvelle frontière » de l’Union et d’en faire la source de la nouvelle compétitivité des économies européennes. La France s’est beaucoup impliquée dans la recherche européenne sur le développement durable, et l’Ineris, notamment se classe bien dans les appels d’offres européens. Les indicateurs de performance du programme 189 tiennent compte, par exemple, de cette implication. Mais la recherche européenne reste très loin de ce qu’elle devrait être. Une consultation est en cours pour un Livre vert sur l’espace européen de recherche. La présidence française sera l’occasion de faire progresser nos idées à ce sujet, et Nicolas Sarkozy a d’ailleurs placé le climat et l’énergie parmi ses priorités. Il y aura aussi à examiner la directive Sols et la directive Mer, qui appellent beaucoup de travaux de recherche – en particulier sur l’acidification des océans.

Le Président de la commission des finances – Nous en arrivons aux interventions des groupes.

M. Claude Birraux – En 2006 et 2007 ont été menées deux réformes d’envergure concernant la recherche et les universités. Avec le recul, les craintes qu’avait suscitées la loi sur la recherche se sont dissipées et l’on ne parle plus aujourd’hui que d’aménagements à la marge. Les chercheurs, par exemple, ont compris que la création de l’ANR leur permettait de disposer de budgets pluriannuels.

Pour 2008, les crédits de la recherche connaissent une augmentation de 7,8 % en volume, appréciable dans un contexte budgétaire extrêmement contraint. L’enseignement supérieure et la recherche ne souffrent notamment pas de la diminution de l’emploi public – l’encadrement des étudiants est même amélioré. Mais la visibilité à long terme des postes qui seront ouverts pour faire face aux départs à la retraite devrait être aussi bonne que celle qui concerne les financements.

Les mesures d’accompagnement de la loi sur les universités ont aussi été prises, concernant l’allocation recherche, l’ANR ou OSEO par exemple – mais, si vous me permettez une observation particulière à propos de la construction du nouvel accélérateur à particules, le LHC, est-ce le directeur de recherche qui nous représente aujourd’hui au conseil du CERN ? Les engagements ont aussi été tenus en ce qui concerne le renforcement de l’encadrement, la revalorisation des carrières, les jeunes chercheurs, le transfert du parc immobilier, le bien-être étudiant, les bourses ou le logement. Néanmoins, il paraît possible de trouver des solutions de financement innovantes, notamment par le biais d’un conventionnement avec les bailleurs privés.

Je tiens beaucoup, vous le savez, à ce que le doctorat soit reconnu comme première expérience professionnelle. La loi sur la recherche en donne la possibilité. Si des réticences persistent à ce sujet au sein des organismes paritaires, elles doivent être levées, et un courrier cosigné par plusieurs ministres doit les inciter à mettre d’urgence ce point à leur ordre du jour.

Je constate avec satisfaction que des PRES se créent. Ils constituent une force de frappe bienvenue, au service des collectivités.

Lors de la préparation du « Grenelle de l’environnement », l’importance du volet « recherche » n’est pas apparue immédiatement. Un effort considérable est pourtant nécessaire, comme l’a souligné Mme Kosciusko-Morizet. L’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques peut aider à éclairer le débat.

Je suis favorable au crédit impôt recherche, à condition que le dispositif soit véritablement évalué et que des comparaisons européennes permettent d’en améliorer l’efficacité. Surtout, des interfaces doivent être créées pour assurer la valorisation de la recherche et les transferts de technologies à l’étranger. Je me suis laissé dire que l’Université de Corte a créé une cellule de valorisation qui donne d’excellents résultats, sans que cela ait en rien influé sur les méthodes de travail des chercheurs.

Pour atteindre l’objectif fixé à Lisbonne, il faut accroître la part, notoirement insuffisante, du secteur privé dans la recherche.

J’en viens à l’avenir de l’Université. Je comprends l’impatience des jeunes et leur inquiétude à l’idée du changement mais j’observe aussi que, nolens volens, tout le monde se réfère désormais au « classement de Shanghai ». Or, la taille des établissements n’explique ni n’excuse tout, puisque le MIT, qui ne compte que 6 000 étudiants, est classé premier ou deuxième dans presque tous les domaines, que l’Université de Genève, qui en compte 14 000, est classée à la trente-et-unième place mondiale et que six établissements suisses, tous de petite taille, figurent au nombre des cent meilleurs. Nous devons tendre à cette excellence en insérant, comme il se doit, la recherche et l’Université au sein de la société française car de leurs succès dépendra l’avenir de notre jeunesse et de notre pays. Or - et M. Brottes ne me démentira pas -, des sonneurs d’alarme se répandent, qui réclament à hauts cris un moratoire sur la recherche. Cela ne se peut ! Nous avons besoin de la recherche pour progresser. Le groupe UMP votera ce budget qui traduit le changement engagé par la loi que nous avons adoptée cet été.

M. Alain Claeys – Mon intention n’est pas de rouvrir le débat que nous avions eu lors de l’examen du projet « Libertés et responsabilités des universités », au cours duquel vous nous aviez reproché de vouloir faire une « loi cathédrale » lorsque nous disions que la loi ne réglerait pas tout, et il serait d’ailleurs injuste de prétendre que le budget que vous nous présentez est entièrement mauvais. Je dois toutefois souligner la persistance du malaise qui touche les chercheurs, les présidents d’université et les étudiants.

Ce malaise, les chercheurs l’éprouvent, en particulier ceux des grands organismes tels que le CNRS, et on ne peut le laisser perdurer. Après la création de l’ANR et sachant la volonté d’autonomie des universités, vous devez, Madame la ministre, clarifier l’avenir de cet organisme et dissiper ainsi la néfaste ambiguïté actuelle.

Le préciput de l’ANR s’établit à 11 % ; je regrette que vous n’ayez pu convaincre Bercy de le porter à 20 %. De plus, quelle sera son affectation précise ? Il ira, avez-vous dit, à la structure d’accueil ; mais qu’en sera-t-il dans le cas de laboratoires mixtes ?

J’en viens au malaise des présidents d’université. Le budget supplémentaire qui leur est affecté semble considérable, mais c’est un montant d’affichage.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur  – Vous y allez fort !

M. Alain Claeys – Non, Madame la ministre et je vais vous expliquer pourquoi. Examinons, par exemple, la ligne « Accompagnement à l’autonomie des universités », qui est en augmentation apparente de 381 millions. Si l’on regarde attentivement ce dont il s’agit, on se rend compte que 329 millions sont affectés aux chantiers immobiliers et que, de plus, certains de ces crédits sont – à juste titre – « fléchés » vers l’Université Jussieu ou celle de Mulhouse. Comme, en outre, il faut rattraper les crédits non versés entre 2000 et 2006, ne restent en réalité que 45 millions.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – Mais non !

M. Alain Claeys – J’attends vos précisions mais je considère pour ma part qu’un effort important reste à faire. De même, s’agissant des crédits de personnels, une grande partie – 232 millions – des sommes inscrites au budget sert à couvrir la cotisation au compte spécial « pensions ». Là encore, l’écart est très grand entre l’affichage et les montants réellement destinés à l’accompagnement à l’autonomie.

J’en viens au malaise des étudiants, qui impose de ne pas rester l’arme au pied. Un effort important est nécessaire en matière de logements, comme l’a souligné un rapport parlementaire, et il faut aussi faciliter les crédits directs aux étudiants.

En résumé, c’est une urgence vitale pour nos organismes de recherche que de les rassurer. D’autre part, les crédits destinés à accompagner les universités vers l’autonomie ne sont pas conformes aux engagements pris. Enfin, je ne suis pas certain d’avoir parfaitement compris vos propos à ce sujet, mais je vous signale que si vous vous proposez d’associer fondations et PRES…

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur J’ai dit que la démarche est prématurée !

M. Alain Claeys – …vous allez mettre le feu au poudre. Restons-en à ce qui a été décidé : la création des PRES doit découler des délibérations des conseils d’administration des universités. Je constate à ce sujet que, s’agissant des petites et des moyennes universités, la création des PRES semble quelque peu en panne.

Enfin, je vous saurai gré de nous communiquer les résultats des audits réalisés dans quelques universités à l’occasion du passage au budget global, ce qui nous permettrait d’apprécier les difficultés apparues.

Le président de la commission des finances – Je constate que personne ne souhaite plus poser de questions à Mme la secrétaire d’État à l’écologie, que je remercie de ses réponses.

M. Benoist Apparu – Pourriez-vous, Madame la ministre, nous dire quelles sont les traductions budgétaire et réglementaire précises de la loi « Libertés et responsabilités des universités » ? Comment sera affecté le milliard supplémentaire alloué à l’enseignement supérieur ? Quel est l’état d’avancement des décrets d’application ? Ce projet avait été négocié avec les organisations étudiantes ; j’aimerais savoir si la discussion se poursuit pour les décrets d’application, afin de permettre une osmose complète.

M. Armand Jung – Madame la ministre, vous avez souligné, pour le regretter, que la France compte autant d’universités que de départements, si bien qu’elles n’ont aucune visibilité à l’étranger. Vous avez aussi insisté sur la nécessité de relancer les quinze PRES adossés aux pôles de compétitivité, au risque d’un nouvel empilement incompréhensible. La loi du 10 août 2007 fait allusion à la fusion des universités, une fusion qui aurait un intérêt certain et qui, là où elle est souhaitée et possible, doit être encouragée au moins aussi vivement que les PRES. Ces projets ayant un coût, j’aimerais savoir, Madame la ministre, quelles aides spécifiques seront allouées aux universités qui ont choisi de fusionner. Une annonce officielle encouragerait cette démarche.

M. Daniel Fasquelle – La lutte contre l’échec à l’université doit être une de nos priorités. Quels moyens supplémentaires sont destinés à renforcer le tutorat en première année et l’encadrement pédagogique en licence ? D’autre part, une insertion professionnelle suppose de développer les licences professionnelles et de renforcer l’autonomie des universités, qui doivent pouvoir créer des diplômes nouveaux. Or, la procédure actuelle d’habilitation est très lourde ; peut-on imaginer la simplifier ?

Je vous ai entendue évoquer la revalorisation de l’allocation de recherche ; ne pourrait-on les multiplier, de manière que chaque doctorant ait un statut professionnel ?

Mme Geneviève Fioraso – Nous sommes tous préoccupés par la croissance insuffisante des jeunes entreprises innovantes. La principale difficulté réside pour elles dans l’accès aux marchés et aux financements. Sans doute faudrait-il s’inspirer de l’exemple allemand où les grandes entreprises mais aussi les centres de recherches sont très proches des PME et des PMI. Dès lors, je suis inquiète lorsque M. Novelli oppose ces deux structures. La suppression de l’AII n’est pas de bonne politique, de même d’ailleurs que le saupoudrage des pôles de compétitivité : 71 pôles, est-ce bien sérieux lorsque les États-Unis ont trois grands axes de recherche ? De même, dix pôles dans le domaine du développement durable sans mise en réseau, est-ce bien raisonnable ?

L’augmentation des crédits de recherche relève de la politique d’affichage, comme en témoigne par exemple le budget de l’INRIA qui semble augmenter de 7,8% en 2008 alors que l’impact du seul rattrapage de la TVA et des régimes de retraite fait baisser cette croissance de 5 points. A cela s’ajoutent les gels de crédits. Au lieu, par ailleurs de remplacer poste par poste les départs à la retraite dans les organismes, vous auriez dû réfléchir à des orientations stratégiques précises et, en particulier, à ces priorités que doivent être le développement durable et l’investissement dans des énergies nouvelles.

Le parc du logement étudiant est insuffisant et très dégradé. Or, vous avez prévu de dégager 100 millions quand les universités de la seule communauté d’agglomération grenobloise auraient besoin de 84 millions !

Enfin, c’est infamant envers les chercheurs que de qualifier le CNRS d’agence de moyens.

M. Daniel Paul, rapporteur pour avis – Les établissements d’enseignement supérieur privés peuvent donc récupérer la taxe qu’ils versent sur les salaires depuis le 1er septembre 2007. Cela intéressera sans nul doute d’autres établissements !

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur – Cette mesure a été votée par le Parlement.

M.  Daniel Paul – Quel montant représente-t-elle ?

Vous avez également indiqué qu’AREVA interviendra dans le démantèlement des centrales nucléaires. Quels sont précisément les modes de financement du fonds de démantèlement ?

Enfin, des grandes entreprises telles que la SNCF, Airbus ou GDF ont joué un rôle moteur dans leur domaine. L’AII permettait ainsi à des entreprises de mettre la puissance de grands groupes au service de projets de rupture technologique. Croyez-vous que le crédit impôt recherche jouera pas le même rôle ? Aucune grande entreprise ne le refusera évidemment, mais nous n’aurons aucune garantie qu’elle n’ira pas développer son projet à l’étranger.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur – Ce ne sera pas possible. Le fisc est très vigilant.

Mme Sandrine Mazetier – Si la France veut tenir les objectifs de Lisbonne, elle devrait augmenter le nombre d’étudiants et assurer leur réussite. Or, ni la mini- réforme de juillet ni ce budget ne le permettront.

S’agissant des bourses, 100 millions étaient annoncés mais ce sont en fait 52,8 millions qui seront débloqués. Selon les préconisations de M. Wauquiez, ce sont 150 à 500 millions qui seraient nécessaires ! Je m’inquiète également de l’extinction programmée des prêts d’honneur – à taux zéro – au profit d’un système où l’État donnera aux banques dix millions pour cautionner des prêts qui, eux, seront à intérêt.

En outre, l’exonération d’impôt consentie aux étudiants qui travaillent ne bénéficie qu’aux familles imposables et non aux étudiants qui sont le plus souvent victimes de l’échec à l’université.

Ce que le budget prévoit en faveur du logement étudiant est très inférieur aux besoins : le scandale, en la matière, est patent. Le rapporteur Hénart a lui-même souligné qu’il faudrait ajouter 70 millions. Une augmentation des crédits de 11 millions serait en tout cas bien en deçà des besoins.

A ce propos, d’ailleurs, il faudrait s’interroger sur les retards du chantier de Jussieu et ne pas théoriser l’impuissance. Les autres universités manquent également de moyens pour rationaliser leurs locaux et louent à grand frais des lieux d’études « baroques » où s’entassent les étudiants. Oui, l’investissement en faveur du logement étudiant doit augmenter, mais pas en prenant les 11 millions de Jussieu qui, éventuellement, devraient être affectés aux autres universités parisiennes !

Mme Annick Girardin – Le Gouvernement assure vouloir effectuer l’ensemble des démarches nécessaires au dépôt par la France du dossier de demande d’extension du plateau continental au large de Saint-Pierre-et-Miquelon. La date butoir est le 13 mai 2009. Or, le dossier doit s’appuyer sur un argumentaire à la fois juridique et technique, ce qui exige notamment une campagne scientifique menée dans le cadre du programme EXTRAPLAC. Le 26 septembre, le secrétaire d’État aux affaires européennes a réitéré cet engagement tout en affirmant que Saint-Pierre-et-Miquelon figurait sur la liste préparatoire des missions de ce programme. Compte tenu du délai, il est impératif de dépasser le stade de la liste préparatoire et les crédits pour cette mission scientifique doivent être explicitement inscrits dans le PLF pour 2008, dernier exercice budgétaire plein avant la date limite du dépôt du dossier.

M. François Brottes – Je reviens sur la question de M. Paul à propos du démantèlement des centrales nucléaires.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur – Il ne s’agit pas des centrales mais de l’ensemble des installations nucléaires du CEA.

M. François Brottes – Je comprends mieux car AREVA ne peut pas financer le démantèlement d’installations relevant d’autres opérateurs. Ce serait de toute façon contraire à la loi de 2006 relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs qui a créé une commission nationale d’évaluation des charges du démantèlement des installations et du traitement des déchets. Cette commission n’est d’ailleurs toujours pas en place. Il est souhaitable que le Gouvernement se saisisse de cette question majeure.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur Absolument.

M. François Brottes – Je ne suis pas d’accord néanmoins avec M. Paul sur l’analyse qu’il fait des résultats obtenus sur le site de Crolles. On peut considérer que les entreprises ont tenu leurs engagements en ce qui concerne l’investissement et l’emploi. La vraie question concerne l’avenir : je ne souhaite pas que l’État se désengage.

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur Merci de venir au secours de l’État.

M. François Brottes – J’en viens à ma question. Aujourd’hui, la recherche sur les nanotechnologies a quitté la France et même l’Europe pour les États-Unis. En effet, l’Europe n’a pas su mobiliser les fonds nécessaires. J’appelle donc votre attention ainsi que celle du ministre de l’industrie sur la nécessité d’être très vigilants et de protéger cette filière majeure pour les innovations à venir.

Je souhaite également une précision sur les chiffres. Mme Kosciusko-Morizet a rappelé l’engagement du président Sarkozy de consacrer un milliard en quatre ans aux énergies et aux moteurs du futur. Vous avez parlé de 232 millions pour cette année ; ce n’est pas tout à fait le premier quart. J’aimerais y voir plus clair.

Nous prenons acte du triplement du budget pour le crédit impôt recherche. Si néanmoins on s’apercevait, en fin d’année, que les entreprises n’ont pas demandé à bénéficier de la totalité de cette somme, utiliseriez-vous les crédits qui restent pour les laboratoires de recherche ?

Enfin, la responsable de l’ANR a indiqué qu’elle était « sous commande » des pouvoirs publics en ce qui concerne le choix des programmes. Cela signifie-t-il que l’Agence s’en tient aux grands thèmes décidés nationalement ou que le Gouvernement lui passe des commandes précises ?

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur Monsieur Birraux, l’État français est représenté au CERN par Michel Spiro, le directeur de l’IN2P3 et par le représentant permanent de la France auprès de l’ONU à Genève.

Pour ce qui est du conventionnement avec les bailleurs privés pour le logement étudiant, il existe, mais on peut effectivement faire plus. Les collectivités locales, en particulier les régions, sont également parties prenantes dans le cadre des contrats de plan État-Région. En revanche, les municipalités ne s’investissent peut-être pas suffisamment. J’ai demandé à l’AMF de faire du logement étudiant un des thèmes de travail de son groupe sur le logement. Il est certain que le mal-logement est un problème général et que, à tort certainement, on considère que les étudiants sont mieux lotis que la plupart des autres jeunes. Je n’en fais pas grief aux collectivités locales, mais il y a là une véritable priorité. Pouvoir s’épanouir pendant ses études, avoir le sentiment d’une promotion sociale est important pour le reste de la vie. Comme le demande le président de la République, pensons à récompenser le travail et le mérite.

Pour ce qui est du doctorat comme première expérience professionnelle, nous y travaillons mais le problème est celui de la reconnaissance du doctorat comme qualification dans les conventions collectives, ainsi que de la reconnaissance par l’administration des compétences d’un doctorant. Or, actuellement elle ne reconnaît pas de diplôme supérieur à la licence et donc pas les compétences issues de la recherche. Je discute du sujet avec M. Woerth.

Un crédit impôt recherche d’un montant aussi élevé est un dispositif unique en Europe. Nous voulons absolument que la France crée les conditions fiscales favorables pour que les entreprises choisissent d’y implanter leurs centres de recherche et donc des emplois. C’est une façon de lutter contre les délocalisations. Quand une entreprise française délocalise la recherche, on ne voit pas pourquoi elle maintiendrait en France son centre de décision. Le classement de Shanghai a ses limites mais il existe et il détermine le choix d’implantation des professeurs, des post-doctorants et des étudiants étrangers. Il faut donc bien en tenir compte. Dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, je mettrai en avant deux thèmes, la rénovation d’Erasmus et l’assurance qualité. Si les étudiants indiens ne connaissent pas le nom de nos universités, il faut au moins qu’ils sachent qu’en venant dans tel établissement, ils recevront une bonne formation. De même, les étudiants européens pourront organiser leur mobilité s’il existe un dispositif pour valider la qualité des diplômes en Europe.

Vous avez abordé la question des rapports entre science et société. Je suis préoccupée comme vous par la méfiance qui se manifeste dans la société civile envers le progrès scientifique. Le Grenelle de l’environnement a permis de commencer un travail pédagogique à ce sujet.

M. Claeys a soulevé la question fondamentale de la place des grands organismes de recherche et d’une vision globale de la politique de la recherche. Cette politique s’appuie sur 4 piliers : des universités puissantes et autonomes ; des organismes de recherche d’excellence et soumis à évaluation ; une recherche sur projets dynamique ; une recherche privée plus ambitieuse. Tels sont les facteurs de la réussite dans tous les pays développés. Mais je veux rassurer ceux qui s’inquiètent au CNRS : ni les stratégies, ni les statuts de l’organisme ne sont en cause. Simplement, à côté de ces grands organismes, il est nécessaire que l’université ait aussi sa stratégie de recherche. Les grands organismes en question ont d’ailleurs été les premiers à se lamenter qu’elle n’en ait pas. Quant à la recherche sur projets, en 2006, l’ANR n’a financé que 12% des projets au total quand on en était à 50% dans la plupart des pays voisins. Cette recherche sur projets est un outil de pilotage stratégique qui permet à l’État de déterminer de grands enjeux prioritaires dans une dynamique d’excellence. Elle permet aussi de financer des projets de jeunes entreprises innovantes, qui ne le seraient pas dans un système structuré uniquement autour des établissements publics.

Cela dit, il est évident qu’il faut que d’autres organismes de recherche aient leur stratégie propre et indépendante. Lorsqu’est survenue l’épidémie de la vache folle, il était heureux qu’au CEA un chercheur ait fait des recherches sur le prion à l’époque où ce n’était pas une priorité. On ne peut en effet prévoir les crises ni les nouvelles découvertes. Le CNRS qui absorbe aujourd’hui 25 % du budget de la recherche publique est présent dans 35% des laboratoires qui emportent les appels d’offres à projets de l’ANR. Il gagne donc à l’existence de celle-ci.

S’agissant du préciput versé par l’ANR aux établissements qui hébergent des chercheurs bénéficiaires d’une aide au projet, le pacte de recherche l’a fixé à 6 %. La commission des affaires sociales souhaitait le porter à 15 %. J’ai obtenu qu’il passe à 11 % cette année, ce qui avec les 4% de frais de gestion, nous met en effet à 15 %. M. Claeys souhaite aller jusqu’à 20 %. Je suis favorable à une telle évolution qui a un effet vertueux car elle incite les universités à recruter les meilleures équipes, susceptibles d’amener des crédits. M. Claeys parle par ailleurs d’un malaise des présidents d’université. A mon avis, ils sont plutôt satisfaits de disposer d’un milliard de dotation, de 329 millions pour les chantiers immobiliers et de 381 millions et 700 postes d’encadrement pour accompagner le passage à l’autonomie !

J’ai dit ce que j’avais à dire sur les bourses et sur les logements étudiants.

M. Claeys considère que les PRES des petites et moyennes universités sont en panne. Ce n’est pas le cas. Ainsi, Nantes, Angers et Le Mans viennent de saisir de leur décision de créer un nouveau PRES pour passer à l’autonomie dès le 1er janvier 2009 et j’ai accédé à leur demande avec plaisir, tout comme à celle, identique, des deux universités clermontoises.

S’agissant des audits d’universités, nous disposons de trois conclusions complètes qui montrent que Tours et Nancy I ne sont pas prêtes à passer à l’autonomie, tandis que Cergy pourra le faire le 1er janvier 2009.

En effet, les universités ne veulent pas rester seules face à leurs difficultés et elles réclament de l’État un outil pour faciliter ce passage à l’autonomie. J’ai répondu volontiers à ce souhait. Les trente universités qui ont demandé à passer à l’autonomie au 1er janvier 2009 feront l’objet d’un audit avant la fin de l’année, mais il est vrai que nous avons été un peu débordés car nous ne misions que sur une vingtaine de candidats. Nous répondrons néanmoins à toutes les universités demandeuses.

M. Apparu m’a interrogée sur la traduction budgétaire de la loi sur l’autonomie. Eh bien, il s’agit tout simplement des 700 emplois et du milliard d’euros.

Je peux bien évidemment faire le point sur les décrets d’application. Le décret électoral est sorti et toutes les universités peuvent désormais élire leur nouveau conseil d’administration, vingt d’entre elles ayant déjà modifié leurs statuts et choisi la composition de leur conseil d’administration de leur université autonome.

Le décret sur le recrutement des étudiants à l’université est prêt, il lui reste simplement à passer en CTP du ministère le 21 novembre prochain. Il sera publié dans la foulée. Il est extrêmement attendu par les étudiants pour tout ce qui à trait aux aides aux handicapés, aux emplois de bibliothèque et au tutorat.

La transmission au Conseil d’État du décret sur les fondations est imminente.

Le pré-projet d’ordonnance sur l’université Antilles-Guyane a été présenté à l’ensemble des parties hier. Il a fait l’objet d’un accord et sera modifié en ce qui concerne le siège.

Les dispositions relatives au comité de suivi de la loi seront publiées avant la fin de l’année. Toutes les mesures règlementaires encore en cours de rédaction paraîtront d’ici à février 2008. Nous pourrons ainsi avoir un très beau « Warsmann », qui montrera à quel point le ministère a fait diligence.

Il n’y a pas eu de « négociations » avec les syndicats mais une concertation intense engagée dès l’origine et qui se poursuit sur les décrets d’application. Tous les partenaires ont été fréquemment reçus par mon cabinet et par la direction du ministère. Ce dernier peut ainsi être qualifié de « ministère de la concertation permanente ».

Monsieur Jung, je ne regrette pas le nombre des universités, j’en prends acte et je les invite à se regrouper. Je n’impose pas la fusion mais je plaide en sa faveur si elle vise une vraie mise en cohérence et un vrai projet, comme à Strasbourg. Il y a bien un engagement de l’État auprès des universités en voie de fusion. Même si cela est fort lourd, nous avons fait le choix d’un audit conjoint des trois universités strasbourgeoises afin de pouvoir faire des propositions d’organisation à la fois pour aujourd’hui et pour la future université fusionnée. Tout cela est coûteux en temps et en argent, mais l’État fera ce qui est nécessaire pour aboutir à un projet de fusion bien ficelé !

Monsieur Fasquelle, l’encadrement pédagogique et le tutorat sont des priorités de ce budget. Par ailleurs, il ne saurait y avoir de nouveaux diplômes car je rappelle que les diplômes sont nationaux et que la procédure demeure inchangée.

Il ne m’est pas possible de répondre à toutes les questions de Mme Fioraso, en particulier parce que je ne connais pas les banques et les PME. Je lui indique toutefois que l’augmentation de 7,8 % du budget de l’INRIA est conforme au contrat signé en 2006. Pourquoi ne tiendrait-on pas compte des retraites et de la TVA alors que celles-ci entrent bien dans le budget de l’établissement ?

S’agissant des gels de crédits, les négociations sont en cours et je ne puis vous répondre immédiatement. Sachez toutefois que je soutiens l’idée d’un examen au cas par cas en fonction de la situation de l’organisme.

En ce qui concerne les départs en retraite, j’ose espérer que lorsqu’un organisme envisage le remplacement des retraités, il n’exclut pas un redéploiement en fonction de ses priorités scientifiques. Si tel n’est pas le cas, c’est qu’il est mal géré …

Peut-être n’y a-t-il pas dans ce budget de priorité claire en faveur du développement durable, mais il y en a un certain nombre d’autres comme la santé, l’énergie, les nanotechnologies, les technologies de l’information, les biotechnologies.

Le CNRS peut lui-même être considéré comme une agence de moyens. En effet, un organisme de recherche peut avoir trois natures : opérateur de recherche, agence de moyens au service d’une autre entité, agence de financement. Dans la mesure où 80 % des chercheurs du CNRS travaillent dans des unités mixtes, extérieures à l’établissement, celui-ci est à la fois agence de moyens pour ces unités et opérateur de recherche pour ses unités propres. Mais il est vrai que la symbolique est importante et j’attends les conclusions de la mission que j’ai confiée à François d’Aubert sur cette question.

Ma réponse à la question de M. Paul est 85 millions d’euros. Je considère par ailleurs que la fusion AII-OSEO ne cassera pas la dynamique de l’innovation.

Mme Mazetier m’a interrogée sur l’augmentation du nombre des étudiants. Mais les inscriptions sont libres et ils peuvent tout s’inscrire.

Je l’ai dit, les bourses représenteront 52 millions en 2008 et 100 millions en année pleine.

Dans la mesure où 35 % des prêts d’honneur ne sont pas consommés, on peut considérer qu’il ne s’agit pas d’un bon outil ou, pour le moins, qu’il ne répond pas à l’attente des étudiants.

Le logement étudiant bénéficie d’une dotation de 117 millions d’euros. Ce n’est pas très loin des 120 millions préconisés par le rapport Anciaux et, si l’on y ajoute les 11 millions de l’amendement parlementaire, on atteindra 128 millions.

En ce qui concerne le retard du chantier de Jussieu, il faut prendre en considération le fait qu’il n’est pas possible de désamianter un site occupé par 50 000 étudiants. J’ai par ailleurs du mal à comprendre comment Mme Mazetier peut proposer que les crédits non consommés soient donnés aux universités parisiennes juste après qu’elle a dénoncé le scandale du logement étudiant …

J’indique à Mme Girardin que l’IFREMER travaille sur la question de l’extension du plateau continental de Saint-Pierre-et-Miquelon, mais je lui apporterai plus de précisions par écrit.

Je comprends mal, Monsieur Brottes, comment vous pourriez, dans le cadre de la LOLF, transformer une dépense fiscale en crédits de paiement !

S’agissant enfin des priorités de l’ANR, je vous rappelle que l’Agence est dotée d’un conseil d’administration qui choisit les programmes. Même si l’État est majoritaire, ce conseil comporte des scientifiques et l’on y confronte les points de vue.

M. le président de la commission des finances  – Je vous remercie pour ces réponses extrêmement précises.

La séance est levée à 18 heure 50.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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