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N
° 1198

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 octobre 2008

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2009 (n° 1127),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 30

OUTRE-MER

Rapporteur spécial : M. Jérôme CAHUZAC

Député

____

SOMMAIRE

Pages

SYNTHÈSE 5

INTRODUCTION : SITUATION ÉCONOMIQUE DE L’OUTRE-MER 7

I.–  LA MISSION OUTRE-MER REPRÉSENTE UNE FAIBLE PART DE L’EFFORT PUBLIC GLOBAL EN FAVEUR DES COLLECTIVITÉS ULTRAMARINES. 11

A.– L’EFFORT FINANCIER DE L’ÉTAT EST RETRACÉ DANS UN DOCUMENT DE POLITIQUE TRANSVERSALE. 11

B.– L’OUTRE-MER BÉNÉFICIE DE DÉPENSES FISCALES APPELÉES À ÉVOLUER. 12

1.– Le montant des dépenses fiscales excède celui des crédits de la mission Outre-mer. 12

2.– Parmi les dépenses fiscales les plus importantes, certaines sont appelées à évoluer dans les prochains mois. 13

C.– L’OUTRE-MER PERÇOIT DES FINANCEMENTS COMMUNAUTAIRES. 14

1.– Les départements d’outre-mer 14

2.– Les autres collectivités 16

II.– L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE 2008 : BILAN AU 31 AOÛT 17

III.– LE PROJET DE BUDGET POUR 2009 19

A.– LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS 19

1.– La maquette budgétaire subit quelques modifications. 19

2.– Les prévisions budgétaires s’inscrivent désormais dans une perspective triennale. 20

3.– Les structures administratives du secrétariat d’État à l’Outre-mer ont été réformées. 21

B.– LE PROGRAMME EMPLOI OUTRE-MER 24

1.– L’action Soutien aux entreprises 24

a) Une nouvelle mesure sera financée depuis cette action. 24

b) La compensation des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale reste la première dépense de la mission Outre-mer. 25

c) Le dispositif de mesure de la performance 26

2.– L’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle 26

a) La principale mesure financée par cette action est le service militaire adapté. 26

b) L’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer (ANT) est chargée de mettre en œuvre des mesures de formation. 27

C.– LE PROGRAMME CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER 29

1.– L’action Logement 29

a) Les mesures d’amélioration de l’habitat tentent de répondre à une situation dégradée. 29

b) La politique d’accession à la propriété rencontre des difficultés. 30

c) Les crédits à destination du logement locatif social augmentent significativement. 30

d) L’État demeure débiteur des bailleurs sociaux. 32

e) La disponibilité foncière entrave le développement du logement social. 33

f) Le dispositif de mesure de la performance pourrait encore être amélioré. 35

2.– L’action Aménagement du territoire 37

3.– L’action Continuité territoriale 38

4.– L’action Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport 40

5.– L’action Collectivités territoriales 40

6.– L’action Insertion économique et coopération régionale 42

7.– L’action Fonds exceptionnel d’investissement 43

EXAMEN EN COMMISSION 45

Article 64 : Dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil dans les communes de Mayotte, et dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte 47

Article 65 : Réforme des exonérations de cotisations patronales en faveur de l’outre-mer 51

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 71

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 64,7 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial.

L’année dernière, votre Rapporteur spécial avait déploré les conditions de traitement des réponses au questionnaire budgétaire par le secrétariat d’État à l’Outre-mer. Or, le taux de réponse à la date limite fixée par la LOLF n’a pas progressé, puisqu’il était de 63 % au 10 octobre 2007. Cela est d’autant moins tolérable que le nombre de questions a été significativement réduit, passant de 87 à 51. Par ailleurs, et comme l’année dernière, la qualité des réponses est très variable.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2008, votre Rapporteur spécial voulait voir dans le traitement des réponses « le signe transitoire d’un rodage difficile, non le symptôme d’un problème de fond ». Ses espoirs auront donc été déçus.

Synthèse

La mission Outre-mer finance une partie très minoritaire de l’effort public global en faveur des collectivités ultramarines, estimé à 16,7 milliards d’euros, auxquels il faut rajouter les contributions de l’Union européenne.

Les dépenses fiscales représentent à elles seules plus que les crédits de la mission Outre-mer, étant estimées à 3,3 milliards d’euros pour 2009. Certaines de ces dépenses fiscales sont appelées à évoluer. Ainsi, l’article 43 du présent projet de loi de finances propose de plafonner l’avantage fiscal qu’un contribuable peut tirer de la réalisation d’un investissement outre-mer. Ce plafonnement répond partiellement aux recommandations de la mission d’information de votre commission des Finances sur les niches fiscales, dont votre Rapporteur spécial était membre.

Innovation introduite par la révision constitutionnelle de juillet dernier, la programmation triennale des finances publiques fait apparaître, pour la mission Outre-mer, une certaine stabilité pour 2010 et 2011. Les crédits demandés pour 2009 sont en revanche en forte augmentation par rapport à la dotation votée pour 2008. Les autorisations d’engagement passeraient de 1,75 à 1,97 milliard d’euros et les crédits de paiement de 1,72 à 1,88 milliard d’euros, soit une hausse de respectivement 12,6 % et 9,3 %.

Cette augmentation résulte pour l’essentiel de l’accroissement des crédits destinés à compenser les exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale spécifiques à l’outre-mer. L’effort entrepris pour 2009 doit être salué, mais l’encours de la dette contractée auprès des organismes de sécurité sociale demeure très élevé (près d’un milliard d’euros). L’article 65 du présent projet de loi de finances, rattaché à la mission Outre-mer, propose de réformer le dispositif d’exonérations, mais son dispositif est inapplicable en l’état (cf. commentaire infra).

Les crédits destinés au financement du logement social connaîtraient eux aussi une croissance certaine (+ 24 % en autorisations d’engagement et + 19 % en crédits de paiement). Conformément aux préconisations de la mission d’information précitée, la défiscalisation des investissements locatifs devrait être réorientée vers le logement social, ainsi que le prévoit le projet de loi de développement économique de l’outre-mer (PLODEOM), déposé en juillet dernier.

Le projet de budget pour 2009 est d’ailleurs très marqué par la perspective de l’adoption de ce projet de loi. Ainsi, il est prévu de doter en loi de finances un fonds exceptionnel d’investissement (action 7 du programme Conditions de vie outre-mer), dont la création est proposée par le PLODEOM. Si votre Rapporteur spécial juge une tel fonds indispensable au développement des infrastructures nécessaires à l’outre-mer, il craint que la dotation prévue soit insuffisante.

Le budget 2009 sera exécuté par un secrétariat d’État dont l’administration a été profondément rénovée. En effet, une délégation générale à l’Outre-mer (DéGéOM) s’est substituée aux deux directions d’administration centrale préexistantes. Cette structure resserrée (142 équivalents temps plein travaillé), composée pour l’essentiel de cadres, paraît mieux en mesure d’assurer le rôle de pilotage, de suivi et de coordination qui, selon votre Rapporteur spécial, doit être celui du ministère chargé de l’outre-mer. Mais la création très récente de la DégéOM ne permet pas, à ce stade, de porter un jugement plus avancé sur son action.

INTRODUCTION : SITUATION ÉCONOMIQUE DE L’OUTRE-MER

• Panorama général

Si le cas de chaque collectivité ultramarine est différent, la situation économique et sociale de l’outre-mer reste globalement dégradée par rapport à celle de la métropole.

Les cultures traditionnelles (banane, sucre, rhum, vanille) subissent une concurrence internationale difficilement surmontable en raison des coûts de production élevés et de la faiblesse des volumes exportables.

L’inflation y est plus forte qu’en métropole du fait notamment du coût des importations. En effet, le taux de couverture (rapport entre les exportations et les importations) est faible, voire très faible pour certaines collectivités, à l’exception de la Nouvelle-Calédonie.

ÉVOLUTION DU TAUX DE COUVERTURE

 

Importations2007/2006

Exportations2007/2006

Taux de couverture

Guadeloupe

– 2,1 %

– 27,3 %

6,2 %

Guyane

1,1 %

– 22,9 %

12,4 %

Martinique

0,8 %

– 22,4 %

13,2 %

La Réunion

1,5 %

12,2 %

6,7 %

Mayotte

7 %

– 16,1 %

1,8 %

Nouvelle-Calédonie

21,5 %

39,6 %

73,2 %

Polynésie française

3,4 %

– 10,3 %

10,4 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

3,4 %

– 3,2 %

10,1 %

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

Assez largement dépendantes de la métropole, qui reste pour la plupart d’entre elles le premier fournisseur, les collectivités ultramarines sont également soutenues par la commande publique et l’emploi public, qui représentait fin 2007 de 25,8 % (Saint-Pierre-et-Miquelon) à 55,3 % (Wallis-et-Futuna) des actifs occupés, soit une moyenne de près de 40 %, contre 23 % en métropole.

Le chômage, qui a sensiblement reculé dans les départements d’outre-mer (DOM) en 2007, est globalement beaucoup plus fort outre-mer qu’en métropole, en dépit d’une progression importante de l’emploi en 2006 (+ 7,3 %), ramenée au niveau de la métropole en 2007 (+ 2,2 %).

Au 31 décembre 2007, 17,8 % de la population des DOM étaient couverts par le revenu minimum d’insertion (RMI), contre 3,1 % en métropole.

Le tableau suivant fournit les principales données de la situation économique de l’outre-mer.

SITUATION ÉCONOMIQUE DE L’OUTRE-MER

 

Population
2007

Évolution
2007/2006

(en %)

PIB/tête
(en euros)

Évolution
(en %)

Taux de chômage
(en %)

Évolution
(en %)

Inflation
(en %)

Guadeloupe

450 622

0,8

17 221
(06)

3,6

22,7

– 2,4

1,4

Martinique

209 000

3,5

12 965
(04)

0,6

20,6

– 7

3,4

La Réunion

401 384

0,6

19 111
(06)

4,3

21,2

– 4

2,4

Guyane

793 000

1,1

16 244
(06)

5,8

24,2

– 3,3

2,4

Mayotte

186 452

2

3 960
(01)

nd

25,6 (06)

– 3,4

4,4

Polynésie française

240 390

1,6

22 735
(06)

nd

16,3 (04)

nd

1,8

Nouvelle-Calédonie

259 596

1,2

17 071
(03)

2,4

11,7 (02)

nd

2

Saint-Pierre-et-Miquelon

6 125

0

26 073
(06)

nd

9,3

+ 1,5

0,8

Wallis-et-Futuna

14 944 (03)

nd

nd

nd

15,2 (03)

nd

0,4

Saint-Martin

29 112 (99)

nd

14 500
(99)

nd

26,5 (99)

nd

1,4

Saint-Barthélémy

6 852 (99)

nd

26 000
(99)

nd

4,3 (99)

nd

1,4

Métropole

61 358 000

0,5

29 765

4

8,3

– 1,2

1,5

Les données sont celles de 2007, sauf indication contraire entre parenthèses. L’évolution est calculée par rapport à l’année n-1. Certaines données ne sont pas disponibles (nd). Les données sont en euros courants.

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

• Guadeloupe

L’année 2007 a été favorable à l’archipel, dans un contexte d’inflation contenue (+ 1,2 %). Le marché du travail a été bien orienté. La consommation des ménages ainsi que l’investissement des entreprises et des ménages ont été vigoureux. Le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) et, par effet d’entraînement, l’industrie et les services, ont témoigné d’un certain dynamisme. La campagne cannière a été excellente, avec une production de sucre record sur les 27 dernières années et des exportations de rhum en forte hausse. Le bilan touristique est en demi-teinte après une année 2006 relativement bonne.

• Martinique

La consommation des ménages a été modérée durant l’année 2007, dans un contexte de reprise de l’inflation. L’investissement des entreprises a fait preuve de robustesse, et l’année a été bonne pour les secteurs de l’industrie et des services. Cependant, l’activité dans le BTP, traditionnel moteur de l’économie, s’est montrée morose, et le secteur primaire a été fortement touché par le passage du cyclone Dean. Enfin, les résultats du tourisme sont décevants.

• La Réunion

La croissance s’est poursuivie en 2007. L’inflation a été contenue (+ 1,2 %) et le marché de l’emploi est resté bien orienté. La consommation et l’investissement des ménages se sont maintenus à un bon niveau. Le secteur du BTP demeure l’un des moteurs de l’économie, notamment grâce aux travaux publics. En fin d’année, l’activité dans le secteur du tourisme s’est légèrement améliorée, après avoir été longtemps en difficulté du fait de l’épidémie de chikungunya survenue en 2006. S’agissant du secteur primaire, la campagne sucrière a été la plus difficile depuis 1958, pour des raisons climatiques, techniques et économiques.

• Guyane

Dans un contexte d’inflation forte (+ 3 %), faisant suite à une hausse des prix de 3,6 % en 2006, la consommation des ménages semble ralentir. Cependant, le marché du travail reste favorablement orienté. Les deux secteurs clé (le BTP et l’activité spatiale) ont une nouvelle fois porté l’économie guyanaise, tandis que les résultats dans les filières traditionnelles (riz, bois, or, produits de la mer) sont mauvais. Le tourisme d’affaires a profité en fin d’année d’un nombre élevé de tirs de la fusée Ariane.

• Mayotte

L’investissement des ménages et des entreprises a été vigoureux au cours de l’année 2007, et la consommation soutenue. La forte hausse du salaire minimum survenue au mois de juillet 2007 (+ 17 %) a entraîné une inflation forte (+ 5 %), après une hausse des prix de 3,7 % en 2006. Le BTP a été à nouveau un moteur de l’économie mahoraise, malgré un ralentissement de la commande publique en fin d’année. Le secteur primaire est demeuré morose, et les exportations quasi-inexistantes. Le tourisme, bien qu’embryonnaire, a été en revanche favorablement orienté.

• Polynésie française

La croissance économique a bénéficié en 2007 d’un effet de rattrapage après une année 2006 de quasi-stagnation du produit intérieur brut (PIB), mais elle reste insuffisante pour stabiliser le taux de chômage. Les importations ont augmenté de 3 %, contre une baisse de 5 % en 2006. La fréquentation touristique a baissé de 1,5 % en 2007. En 2007, les exportations de perles ont rapporté 3,5 % de moins qu’en 2006.

• Nouvelle-Calédonie

L’activité a été tirée à la hausse par une demande intérieure dynamique et des exportations en forte augmentation par rapport à 2006. La situation de l’emploi a poursuivi son amélioration. Malgré une hausse en fin de période, l’inflation a été contenue à 1,8 %. Les principaux secteurs de l’économie ont affiché de bonnes performances. Le secteur des mines et de la métallurgie, sous l’effet de la flambée des cours du nickel, a vu ses exportations croître à un rythme soutenu. Seul le secteur de l’aquaculture a connu une baisse de son activité, les exportations de crevettes diminuant de près d’un tiers sur un an. Le nombre de touristes ayant séjourné en Nouvelle-Calédonie en 2007 a légèrement augmenté (+ 2,9 %) sous l’impulsion du tourisme régional.

• Saint-Pierre-et-Miquelon

Comme en 2006, la consommation des ménages a été soutenue, de même que les investissements des entreprises. L’année 2007 a été cependant marquée par une inflation relativement forte (+ 2,8 %) et un marché de l’emploi défavorablement orienté.

• Wallis-et-Futuna

La consommation des ménages, plutôt dynamique, a été le principal moteur d’une activité qui a faiblement progressé, entraînant une forte émigration. Après deux années de forte augmentation, les prix ont progressé de seulement 0,4 %. Les importations, quant à elles, ont augmenté.

• Saint-Martin

Les données, assez anciennes, limitent la capacité d’analyse. Saint-Martin, qui compte près de 30 000 habitants, avait en 1999 un PIB par tête estimé à 14 500 euros et un taux de chômage de 26,5 %.

• Saint-Barthélémy

Selon les estimations, le PIB par tête de Saint-Barthélémy (7 000 habitants) s’élevait en 1999 à près de 26 000 euros, avec un taux de chômage de 4,3 %. Le tourisme haut de gamme demeure la première activité de l’île.

I.– LA MISSION OUTRE-MER REPRÉSENTE UNE FAIBLE PART DE L’EFFORT PUBLIC GLOBAL EN FAVEUR DES COLLECTIVITÉS ULTRAMARINES.

Les crédits de la mission Outre-mer (1,88 milliard d’euros en crédits de paiement) représentent 11,25 % de l’effort global de l’État envers les collectivités ultramarines, estimé à 16,7 milliards d’euros, dont 3,3 de dépenses fiscales. Il faut ajouter à cela les financements communautaires.

Les développements qui suivent ne traiteront pas des avantages sociaux qui peuvent être consentis aux personnes décidant de s’installer outre-mer, tels notamment l’indemnité temporaire de retraite (ITR). Cette majoration de pension de retraite versée aux fonctionnaires de l’État installés outre-mer, sur laquelle s’est penché notre collègue Jean-Pierre Brard (1) dans le cadre d’un rapport d’information, devrait être réformée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

A.– L’EFFORT FINANCIER DE L’ÉTAT EST RETRACÉ DANS UN DOCUMENT DE POLITIQUE TRANSVERSALE.

Au moment de la présentation orale du présent rapport à votre commission des Finances, votre Rapporteur spécial ne disposait pas du document de politique transversale (DPT) Outre-mer, ce qui limite fortement l’utilité de ce document dans la procédure d’examen du projet de budget.

Le DPT recense 51 programmes du budget général qui contribuent au financement de mesures autour des axes suivants, rénovés par rapport au DPT 2008 : développer l’économie et l’emploi outre-mer ; soutenir le développement durable des territoires en partenariat avec les collectivités ; améliorer les conditions de vie des citoyens outre-mer ; offrir une véritable égalité des chances à la jeunesse outre-mer ; garantir la sécurité des citoyens outre-mer.

Si les crédits consacrés à la politique transversale s’élèvent à 8,8 milliards d’euros en 2009, l’effort financier total de l’État se monterait à environ 13,25 milliards d’euros, contre 13 milliards d’euros en 2008(2).

L’existence d’un DPT doit être saluée ; il conviendrait désormais :

– que ce document soit transmis au Parlement dans des délais compatibles avec l’examen du projet de loi de finances ;

– que la distinction entre les crédits consacrés à la politique transversale et ceux consacrés à l’outre-mer soit davantage expliquée.

B.– L’OUTRE-MER BÉNÉFICIE DE DÉPENSES FISCALES APPELÉES À ÉVOLUER.

1.– Le montant des dépenses fiscales excède celui des crédits de la mission Outre-mer.

Les dépenses fiscales rattachées à la mission Outre-mer, récapitulées dans le tableau ci-dessous, devraient s’élever en 2009 à 3,3 milliards d’euros, soit une progression de 11,8 % depuis 2008.

DÉTAIL DE LA DÉPENSE FISCALE EN FAVEUR DE L’OUTRE-MER

(en millions d’euros)

Objet de la mesure

2007

2008

2009

Dépenses fiscales contribuant au programme Emploi outre-mer

Imputation sur le revenu global des déficits industriels et commerciaux non professionnels provenant de la location d’un hôtel situé dans les DOM avec travaux

3

3

2

Exonération, sur agrément, des bénéfices en cas de création d’activité nouvelle dans les DOM

≤ 0,5

0

0

Exonération des bénéfices réinvestis dans l’entreprise pour les sociétés de recherche et d’exploitation minière dans les DOM

≤ 0,5

≤ 0,5

≤ 0,5

Prise en compte réduite des résultats provenant d’exploitations dans les DOM (jusqu’en 2017)

85

90

95

Exonération des rémunérations versées dans le cadre des contrats aidés pour les Rmistes dans les DOM

nc

nc

nc

Exonération de TVA de matières premières et des produits pétroliers dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion.

80

80

80

Déductibilité de la TVA afférente à certains produits exonérés.

200

200

225

Total pour le programme

369

373

402

Dépenses fiscales contribuant au programme Conditions de vie outre-mer

Déduction des investissements productifs réalisés outre-mer

nc

nc

nc

Réduction d’impôt au titre des investissements locatifs et de la réhabilitation de logements situés outre-mer

220

230

250

Réduction d’impôt sur le revenu au titre des investissements productifs réalisés outre-mer (jusqu’en 2017)

500

550

800

Réduction d’impôt sur le revenu (30 % en Guadeloupe, Martinique et Réunion, et 40 % en Guyane)

250

270

280

Déduction des investissements productifs réalisés outre-mer (jusqu’en 2017)

160

180

250

Réduction de 50 % des tarifs des droits d’enregistrement et de timbre en Guyane

2

2

3

Exonération de TVA des transports maritimes de personnes et de marchandises dans la limite de chacun des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion

nc

nc

nc

Régime de TVA des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion

1 040

1 070

1 180

Exclusion des DOM du champ d’application de la TIPP

130

130

133

Total pour le programme

2 306

2 436

2 896

Total pour la mission Outre-mer

2 702

2 809

3 298

nc : non chiffrable

Source : projet annuel de performances

Parmi les dépenses fiscales les plus importantes figurent entre autres :

– l’exclusion des DOM du champ d’application de la taxe intérieure de consommation applicable aux carburants. Dans ces départements, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques est remplacée par la taxe spéciale de consommation (TSC), dont les taux sont fixés par délibération des conseils régionaux. L’objectif poursuivi par la mise en place de la TSC est de donner aux régions des moyens supplémentaires pour assurer leur développement économique par une recette fiscale spécifique. Dès lors, le maintien de la taxe qui s’applique en métropole sur une assiette comparable devenait impossible ;

– la réduction de 30 ou 40 % de la cotisation d’impôt sur le revenu résultant du barème pour les personnes physiques domiciliées dans les DOM, justifiée par un coût de la vie plus élevé qu’en métropole ;

– l’abaissement du taux de taxe sur la valeur ajoutée dans les DOM (hors Guyane), à 8,5 % pour le taux normal et 2,1 % pour le taux réduit. Les DOM ont été longtemps soumis à une fiscalité de type douanier, caractérisée par la taxation de marchandises lors de leur entrée sur le territoire. Aujourd’hui encore, une part non négligeable des finances publiques locales, et particulièrement les budgets des communes, sont tributaires de l’octroi de mer, qui pèse sur les marchandises importées comme sur les produits similaires de fabrication locale. Afin de compenser cette forme de taxation, les taux de TVA applicables à la Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion sont approximativement deux fois plus faibles qu’en métropole. En Guyane, département où l’octroi de mer est plus élevé, la TVA n’est provisoirement pas applicable.

2.– Parmi les dépenses fiscales les plus importantes, certaines sont appelées à évoluer dans les prochains mois.

 L’article 15 du projet de loi de développement économique de l’outre-mer (PLODEOM), enregistré à la présidence du Sénat le 28 juillet 2008 (3), propose de réformer partiellement la TVA non perçue récupérable (TVA NPR(4). Cette dépense fiscale n’a pas de base légale très claire, trouvant son origine dans une instruction ministérielle de 1953. Le mécanisme consiste à exonérer de TVA à l’import les biens qui figurent sur une liste de produits, puis à permettre aux assujettis d’imputer, comme s’il avait été acquitté, le montant de cette taxe dont ils ont pourtant été exonérés (5). La TVA NPR fonctionne donc comme une quasi-subvention. Le PLODEOM prévoit de réserver le mécanisme, auquel une base légale sera ainsi conférée, aux seuls biens d’investissements.

 Votre Rapporteur spécial était membre de la mission d’information de votre commission des Finances sur les niches fiscales. Dans son rapport, la mission a consacré un long passage aux dispositifs de défiscalisation des investissements réalisés outre-mer, auquel on se reportera utilement pour connaître en détail le dispositif existant et les propositions de réforme (6).

Une partie des mesures proposées dans ce rapport a retenu l’attention du Gouvernement :

– d’une part, le PLODEOM propose, notamment, de ramener de 70 % à 50 % le taux de défiscalisation des investissements réalisés dans le secteur de la navigation de plaisance. Surtout, il est envisagé de réorienter vers le logement social la défiscalisation des investissements locatifs (cf. infra).

– d’autre part, l’article 43 du présent projet de loi de finances propose de plafonner l’avantage en impôt qu’un contribuable peut retirer chaque année des investissements productifs et locatifs réalisés outre-mer, ce qui n’est actuellement pas le cas. Un contribuable ne pourrait plus réduire son impôt sur le revenu de plus de 40 000 euros ou de 15 % de son revenu.

Curieusement, compte tenu de la perspective du plafonnement, la forte progression du montant prévu de dépenses fiscales résulte pour l’essentiel de la défiscalisation des investissements productifs prévue à l’article 199 undecies B du code général des impôts, dont le coût passerait de 550 millions d'euros en 2008 à 800 en 2009.

C.– L’OUTRE-MER PERÇOIT DES FINANCEMENTS COMMUNAUTAIRES.

1.– Les départements d’outre-mer

Les DOM font partie du territoire de l’Union européenne et bénéficient du statut de régions ultrapériphériques (RUP) ; à ce titre, ils sont éligibles aux fonds structurels de l’Union.

 Pour la période 2007-2013, dans le cadre de la politique de cohésion, les DOM bénéficieront de :

– 3,17 milliards d’euros au titre de l’objectif « Convergence », financé par le Fonds européen de développement régional (FEDER) et le Fonds social européen (FSE) ;

– 96 millions d’euros au titre de l’objectif « Coopération territoriale », financé par le FEDER. Les régions d’outre-mer sont éligibles pour la première fois à la coopération transfrontalière en plus de la coopération transnationale, ce qui permet de renforcer substantiellement l’enveloppe de 17 millions d’euros attribuée pour la période 2000-2006. Désormais les DOM bénéficieront de 68 millions d’euros au titre de la coopération transfrontalière et de 28 millions d’euros au titre de la coopération transnationale.

MONTANT DES FONDS « CONVERGENCE » 2007-2013

(en millions d’euros courants)

RUP

FEDER

FEDER RUP

FSE

Total

%

Guadeloupe

422

120

185

728

23

Guyane

257

48

100

405

13

Martinique

310

107

98

515

16

La Réunion

808

206

517

1 531

48

Total

1 798

482

900

3 179

100

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

MONTANTS DES FONDS « COOPÉRATION TERRITORIALE » 2007-2013

(en euros courants)

 

Transfrontalier

Transnational

Total

Caraïbes

28 086 740

19 795 368

47 882 108

Guyane

12 830 272

 

12 830 272

Océan indien

27 199 053

8 247 504

35 446 557

Total

68 116 065

28 042 872

96 158 937

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

 Au titre de la politique de développement rural, les RUP françaises bénéficieront d’un montant de 631 millions d’euros du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER).

Outre les aides agricoles versées par le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), chaque DOM bénéficie d’un programme de développement rural régional (PDRR) sur la période 2007-2013. La répartition entre les quatre DOM est présentée dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION FEOGA ET FEADER 2000-2006 / 2007-2013

 

FEOGA

%

FEADER

%

Différence
2000/2006

%

Guadeloupe

146

22

138

22

– 8

– 6

Guyane

69

11

74

12

+ 5

+ 8

Martinique

108

17

100

16

– 8

– 7

La Réunion

325

50

319

50

– 7

– 2

TOTAL

648

 

631

 

– 17

+ 3

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

 Au titre de la politique de la pêche, les DOM percevront 34,25 millions d’euros du Fonds européen pour la pêche (FEP).

2.– Les autres collectivités

Les collectivités d’outre-mer relevant de l’article 74 de la Constitution, de même que la Nouvelle-Calédonie, ne font pas partie du territoire de l’Union européenne. Elles bénéficient du statut communautaire de pays et territoires d’outre-mer (PTOM). Ce régime d’association implique l’éligibilité des PTOM au Fonds européen de développement (FED), qui reste largement inférieur aux aides dont bénéficient les RUP.

Les concours financiers communautaires alloués aux PTOM au titre des deux derniers exercices couvrent d’une part la période 2000-2007 pour le 9ème FED et d’autre part la période 2008-2013 pour le 10ème FED. Une enveloppe de 286 millions d’euros sera destinée aux PTOM sur la période. Les financements du FED sont alloués à chaque territoire dans le cadre d’un document unique de programmation (DOCUP) approuvé par la Commission européenne. Les DOCUP du 10ème FED sont actuellement en cours d’élaboration.

RÉPARTITION DU FED ENTRE LES PTOM

(en millions d’euros)

PTOM

Reliquats 9ème FED

Reliquats 10ème FED

Nouvelle-Calédonie

19,75

19,81

Polynésie française

16,65

19,79

Terres australes et antarctiques françaises

-

-

Wallis-et-Futuna

11,5

16,49

Mayotte

15,2

22,92

Saint-Pierre-et-Miquelon

18,4

20,74

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

II.– L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE 2008 : BILAN AU 31 AOÛT

À l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement pour 2007, votre Rapporteur spécial a publié un commentaire du rapport annuel de performances, qui dresse un bilan de l’exécution du budget de la mission Outre-mer au cours de l’exercice 2007(7). L’exercice 2008 fera de la même manière l’objet d’un commentaire détaillé en juin 2009.

Les crédits de la mission Outre-mer s’élèvent en loi de finances initiale pour 2008 à 1 753,45 millions d’euros en autorisations d’engagement et 1 719,86 millions d’euros en crédits de paiement.

Ces crédits se répartissent entre le programme 123 Conditions de vie outre-mer (762,62 millions d’euros en autorisations d’engagement et 722,07 millions d’euros en crédits de paiement) et le programme 138 Emploi outre-mer (990,83 millions d’euros en autorisations d’engagement et 997,79 millions d’euros en crédits de paiement).

Conformément à la circulaire du 10 décembre 2007 de la direction du Budget, une mise en réserve a été constituée à hauteur de 89,38 millions d’euros en autorisations d’engagement et 87,36 millions d’euros en crédits de paiement, dont 45,72 millions d’euros en autorisations d’engagement et 43,28 millions d’euros en crédits de paiement pour le programme 123 et 43,66 millions d’euros en autorisations d’engagement et 44,08 millions d’euros en crédits de paiement pour le programme 138.

Des reports de 2007 sur 2008 ont été obtenus, à hauteur de 50 millions d’euros en autorisations d’engagement et 73,62 millions d’euros en crédits de paiement.

Les fonds de concours 2008 rattachés à ce jour s’élèvent à 6,36 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement

Le décret d’avance n° 2008-629 du 27 juin 2008 a annulé 8,13 millions d’euros en autorisations d’engagement et 9,2 millions d’euros en crédits de paiement sur le programme 123, dans le cadre de la contribution de la mission Outre-mer au financement de dépenses urgentes en faveur des mesures de soutien à la pêche, de l’hébergement d’urgence et de la mission « Grand Paris ». L’annulation a porté sur les crédits mis en réserve.

Compte tenu des mouvements intervenus en cours de gestion 2008, les crédits de la mission Outre-mer s’élèvent à ce jour à 1 801,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et 1 790,64 millions d’euros en crédits de paiement.

III.– LE PROJET DE BUDGET POUR 2009

A.– LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS

1.– La maquette budgétaire subit quelques modifications.

 Le projet de budget pour 2009 prévoit un changement du périmètre des programmes qui, selon une réponse au questionnaire budgétaire, « traduit le recentrage des missions du secrétariat d’État sur la coordination et le pilotage des politiques publiques ».

Ainsi, les dotations obligatoires versées aux collectivités d’outre-mer sont transférées vers le programme Concours spécifiques et administration de la mission Relations avec les collectivités territoriales. Une action Dotations outre-mer a été créée au sein de ce programme, pour accueillir :

– la dotation globale de fonctionnement des provinces de Nouvelle-Calédonie (81,8 millions d'euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement) ;

– la dotation globale de compensation versée à la Nouvelle-Calédonie au titre des services et établissements publics transférés (3,7 millions d'euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement) ;

– la dotation globale de construction et d’équipement des collèges en Nouvelle-Calédonie (12,2 millions d'euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement) ;

– la dotation spéciale de construction d’équipements des établissements scolaires à Mayotte (4,6 millions d'euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement)(8).

 À l’inverse, les crédits consacrés par les autres départements ministériels à la politique contractuelle menée dans les collectivités du Pacifique, de Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon seront désormais rattachés au programme Conditions de vie outre-mer (30,2 millions d'euros en autorisations d’engagement et 23,2 millions d'euros en crédits de paiement). L’objectif est de permettre aux représentants de l’État de piloter de manière plus souple et en fonction des priorités locales les financements contractualisés.

Les anciennes actions Sanitaire et social et Culture, jeunesse et sport fusionnent en une seule action.

Une nouvelle action Fonds exceptionnel d’investissement est créée dans le programme 123. Ce fonds, dont la création est prévue par le PLODEOM, devrait permettre de contractualiser avec les collectivités territoriales le financement d’opérations d’investissement structurantes indispensables au développement de l’outre-mer.

 Dans le programme 138, l’action Soutien aux entreprises succède à l’action Abaissement du coût du travail. Il s’agit de prendre en compte, au-delà de la seule compensation aux organismes de sécurité sociale des exonérations de cotisations patronales spécifiques à l’outre-mer, l’aide aux entreprises pour le fret, dont la création est prévue par le PLODEOM.

Votre Rapporteur spécial reviendra en détail sur ces évolutions, au moment de l’examen des crédits demandés pour 2009.

2.– Les prévisions budgétaires s’inscrivent désormais dans une perspective triennale.

 La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a créé, à l’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, une nouvelle catégorie de lois. « Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. »

Premier exercice du genre, le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 fixe, en son article 5, les plafonds des crédits alloués aux missions du budget général de l’État pour les années 2009 à 2011, présentés dans le tableau suivant.

RÉCAPITULATION DES CRÉDITS PAR PROGRAMME

(en euros)

Mission/Programme

2009

2010

2011

Outre-mer

Plafond AE

1 969 769 735

2 001 033 854

1 997 742 228

Plafond CP

1 879 373 977

1 927 343 089

1 933 449 774

Emploi outre-mer

AE

1 191 603 938

1 242 451 305

1 280 886 069

CP

1 191 606 938

1 242 451 305

1 280 886 069

Conditions de vie outre-mer

AE

778 165 797

758 582 549

716 856 159

CP

687 770 039

684 891 784

652 563 705

Source : projet annuel de performances

Ainsi que le relève le Rapporteur général dans son rapport sur le projet de loi de programmation (9), « dès lors que cette programmation s’effectue à droit constant, ces plafonds ne sont juridiquement qu’indicatifs : le Parlement demeurera naturellement libre de modifier, dans le respect de l’article 40 de la Constitution et de l’article 47 de la LOLF, les crédits des missions et des programmes soumis à son vote dans les différents projets de loi de finances ».

 Pour 2009, les crédits de la mission Outre-mer sont en forte augmentation par rapport à la loi de finances initiale pour 2008. Les autorisations d’engagement passent de 1,75 à 1,97 milliard d’euros et les crédits de paiement de 1,72 à 1,88 milliard d’euros, soit une hausse de respectivement 12,6 % et 9,3 %.

Cet accroissement des crédits de la mission s’explique, pour l’essentiel, par le début de rattrapage de l’endettement de l’État auprès des organismes de sécurité sociale, au titre de la compensation des exonérations de charges (cf. infra).

3.– Les structures administratives du secrétariat d’État à l’Outre-mer ont été réformées.

 Créée par le décret n° 2008-687 du 9 juillet 2008, la délégation générale à l’Outre-mer (DéGéOM) est entrée en activité le 1er septembre 2008. Elle se substitue à deux directions d’administration centrale qui avaient été mises en place en 1979 : la direction des Affaires politiques, administratives et financières (DAPAF) et la direction des Affaires économiques, sociales et culturelles (DAESC).

Conforme aux orientations de la révision générale des politiques publiques (RGPP) arrêtées par le Conseil de modernisation des politiques publiques, la création de cette direction d’administration centrale au sein du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales est l'aboutissement d'une réflexion entamée à la suite de la publication de divers rapports soulignant la nécessité pour le ministère chargé de l’outre-mer de réorienter son action vers des fonctions de pilotage et d’évaluation. Les principaux constats et recommandations de l’insertion au rapport public 2006 de la Cour des comptes consacrée à l’outre-mer figurent dans l’encadré suivant.

Le rapport public 2006 de la Cour des comptes

La Cour a rappelé qu’eu égard à sa position dans l’appareil d’État, le ministère chargé de l’outre-mer est le département le mieux placé pour assurer la coordination des politiques publiques consacrées à l’outre-mer. Mais le ministère n’exerce pas cette mission de façon satisfaisante « faute, semble-t-il, d’une réelle volonté politique de le doter des moyens appropriés et d’avoir fait le choix entre une logique de mission et une logique de gestion ».

Or, la fonction de coordination interministérielle revêt pour l’outre-mer une importance particulière, en raison de la diversité des sources de financement de l’action publique.

Peuvent être relevées, parmi les causes de l’incapacité du ministère à exercer sa mission de coordination :

– une insuffisante maîtrise de la fonction juridique, éclatée entre les deux directions d’administration centrale et en outre partagée avec les autres départements ministériels ;

– une organisation administrative défaillante, structurée autour de deux directions d’administration centrale concurrentes (DAPAF et DAESC) ;

– une insuffisance qualitative du nombre d’agents, dont le nombre a diminué de 15 % entre 1995 et 2005, alors que dans le même temps les dotations du ministère passaient de 375 à 1 700 millions d’euros ;

– une forte rotation des cadres, qui sont en général originaires d’autres administrations ;

– une imparfaite « remontée » de l’information vers le niveau central.

Sur la base de ce constat très critique, la Cour formulait quatre propositions :

– une simplification de la structure ministérielle ;

– une unification de la fonction juridique ;

– un renforcement des moyens du ministère ;

– la création d’une administration de mission capable d’assurer la coordination interministérielle.

 La DéGéOM compte 142 agents, contre 210 pour les anciennes DAPAF et DAESC. Désormais, une très grande majorité de ces agents est constituée de cadres. En effet, la mise en place de la délégation a été précédée, dans le cadre de la loi de finances pour 2008, d’un transfert des fonctions de support vers le ministère de l’Intérieur. Selon les informations fournies à votre Rapporteur spécial, cette opération de mutualisation aurait permis de dégager d’importants gains de productivité.

 La délégation générale à l'Outre-mer est composée de trois services.

Le service des politiques publiques anime et coordonne les politiques publiques conduites outre-mer. Il participe, avec les autres ministères compétents, à la conception, à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques spécifiques à l'outre-mer et propose les adaptations des politiques générales liées aux particularités de l'outre-mer. Il coordonne également la politique contractuelle de l'État dans les départements et régions d'outre-mer et veille à sa cohérence avec les politiques et programmations de l'Union européenne.

Ce service comprend : le département de la cohésion sociale, de la santé et de l'enseignement ; le département de l'écologie, du logement, du développement et de l'aménagement durables ; le département de la vie économique, de l'emploi et de la formation ; le département des politiques agricoles, rurales et maritimes ; le département des politiques européennes, d'insertion régionale et de valorisation de l'outre-mer.

Le service des affaires juridiques et institutionnelles apporte conseil et assistance en matière juridique aux services de la délégation générale et aux représentants de l'État outre-mer. Il assure la diffusion de l'information et des connaissances juridiques dans le domaine du droit de l'outre-mer. Il participe à la préparation des projets législatifs et réglementaires et est associé à l'élaboration des textes européens et internationaux intéressant l'outre-mer. Il contribue à l'élaboration des politiques de partenariat avec les collectivités de l'outre-mer et leurs établissements publics pour l'exercice de leurs compétences et traite, en liaison avec les autres services du ministère chargé de l'intérieur et de l'outre-mer et ceux des autres ministères compétents, les questions relatives à la fiscalité locale, aux concours financiers de l'État aux collectivités, à la fonction publique territoriale et à la formation des élus et des agents des collectivités. Il assiste les représentants de l'État outre-mer pour l'exercice du contrôle de légalité et le conseil aux collectivités.

Le service des affaires juridiques et institutionnelles comprend : le département du droit public et des affaires institutionnelles ; le département du droit privé et du droit des activités économiques et sociales, qui comprend la section de l'état civil ; le département des collectivités locales ; la mission du contentieux et de la légistique ; la mission du droit européen et international.

Le service de l'évaluation, de la prospective et de la dépense de l'État conduit ou coordonne l'évaluation des politiques engagées par l'État outre-mer, les études prospectives sur l'outre-mer ainsi que les réflexions et analyses stratégiques, territoriales ou thématiques. Il assure également la conduite ou le suivi de la dépense de l'État outre-mer et participe à l'élaboration et à la synthèse des statistiques nationales relatives à l'outre-mer.

Ce service comprend : le département de la statistique et du système d'information outre-mer ; le département de l'évaluation des politiques publiques et de la prospective ; le département de la dépense de l'État.

La création récente de la DéGéOM ne permet évidemment pas, à ce stade, de porter un jugement plus avancé. Si le souci de renforcer la fonction de pilotage et d’évaluation du secrétariat d’État à l’Outre-mer (SEOM) mérite d’être salué, il faudra veiller à ce que la « logique de mission » l’emporte sur la « logique de gestion ».

B.– LE PROGRAMME EMPLOI OUTRE-MER

Le tableau suivant présente l’évolution, action par action, des crédits du programme entre 2008 et 2009.

CRÉDITS DU PROGRAMME 138 EMPLOI OUTRE-MER

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé de l’action

Ouvertes en LFI pour 2008

Demandées pour 2009

Évolution
(en %)

Ouverts en LFI pour 2008

Demandés pour 2009

Évolution
(en %)

01 – Soutien aux entreprises (libellé modifié)

856 727 353

1 038 300 000

21,1

856 804 638

1 038 300 000

21,1

02 – Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle

134 099 186

153 303 938

14,4

140 981 901

153 303 938

8,7

Total

990 826 539

1 191 603 938

20,3

997 786 539

1 191 603 938

19,4

Source : projet annuel de performances

1.– L’action Soutien aux entreprises

a) Une nouvelle mesure sera financée depuis cette action.

Le nom de l’action a d’ailleurs évolué, puisqu’elle s’intitulait en 2008 Abaissement du coût du travail.

En 2009, l’action Soutien aux entreprises devrait financer une aide aux entreprises pour le fret.

Le PLODEOM prévoit en effet la création d’une aide aux exploitations situées dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon, destinée à abaisser le coût du fret des matières premières ou des produits lorsque ces derniers entrent dans un cycle de production localisé dans ces collectivités. Cette aide pourra bénéficier à toutes les entreprises sauf celles qui appartiennent aux secteurs de l’industrie automobile, des fibres synthétiques, de la sidérurgie ou des industries charbonnières.

S’agissant des DOM, l’allocation additionnelle spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques, mentionnée à l’article 11 du règlement (CE) n° 1080/2006 du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relatif au FEDER, permet une prise en charge des surcoûts de fret, à hauteur de 50 %, par l’Union européenne. Le dispositif proposé par le PLODEOM vise à assurer un cofinancement par l’État de la part non prise en charge par l’Union européenne et les régions.

Le coût couvert par cette aide est celui de l’acheminement des intrants et extrants en provenance ou à destination des DOM ou de la métropole.

Le coût pris en compte est un forfait calculé sur la base du moyen de transport le plus économique et de la voie la plus directe entre le lieu de départ et le lieu de destination. Pour 2009, 27 millions d'euros devraient être consacrés à cette nouvelle mesure en faveur des entreprises, sous réserve de l’adoption du PLODEOM.

b) La compensation des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale reste la première dépense de la mission Outre-mer.

L’article 65 du présent projet de loi de finances, rattaché à la mission Outre-mer, propose de réformer le dispositif d’exonération existant. Cet article fait l’objet d’un commentaire détaillé plus loin dans le présent rapport. À ce stade, votre Rapporteur spécial se contentera donc de commenter les aspects budgétaires de ce sujet.

En vertu de l’article L.131-7 du code de la sécurité sociale, l’État est tenu de compenser aux organismes de sécurité sociale les sommes dont ils n’ont pu être crédités du fait de la mise en œuvre d’une politique d’exonérations.

Depuis que la compensation des exonérations est opérée par le ministère chargé de l’outre-mer (2005), le montant d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement est insuffisant pour couvrir le montant total des exonérations. Chaque exercice voit donc le montant des impayés s’accroître. Ainsi, fin 2007, l’État restait débiteur des organismes de sécurité sociale à hauteur de 541,1 millions d'euros, et ce après intervention d’une convention d’apurement signée avec l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) le 1er octobre 2007, qui a permis de résorber la dette de 297,5 millions d'euros.

Pour 2008, le coût prévisionnel des exonérations s’élève à environ 1 171 millions d'euros, alors que les versements prévus sont inférieurs à 816 millions d'euros. Les impayés devraient donc se monter à plus de 355 millions d’euros pour la seule année 2008, soit une somme cumulée de 896 millions d’euros à la fin de l’année.

Pour 2009, les besoins en crédits de compensation s’élèveraient à 1 190 millions d'euros à droit constant. Or, l’article 65 du présent projet de loi de finances propose une rationalisation du dispositif actuel, qui permettrait une économie de 138 millions d'euros en année pleine. La réforme proposée ayant vocation à s’appliquer à partir du 1er avril prochain, le montant économisé en 2009 serait de 103 millions d'euros seulement. Si cette réforme était adoptée, le besoin de compensation serait donc de 1 087 millions d'euros. Or, il est prévu d’inscrire au budget une dotation de 1 011 millions d'euros.

Si cette dotation reste insuffisante pour financer les besoins réels en matière de compensation, il faut néanmoins relever l’effort qui serait fourni par rapport à 2008. La dette globale se creuserait de 76 millions d'euros « seulement », contre 355 millions d'euros en 2008. L’augmentation des crédits de compensation est significative, s’établissant à près de 24 % (816 millions d'euros ouverts au titre de 2008, 1 011 millions d'euros prévus en 2009).

Cette augmentation est le principal facteur explicatif de la croissance des crédits de la mission.

c) Le dispositif de mesure de la performance

Les deux indicateurs attachés à l’objectif n° 1 (Encourager la création et la sauvegarde d’emplois durables dans le secteur marchand) tentent de mesurer la contribution des exonérations de cotisations sociales à l’évolution de l’emploi salarié dans les DOM.

Les prévisions de l’indicateur 1.1 (Écart entre le taux de croissance de l’emploi salarié dans les entreprises d’outre-mer exonérées de cotisations sociales au titre d’une année et le taux de croissance de l’emploi salarié outre-mer au titre de la même année) ont été revues à la baisse, passant de 0,25 pour 2008 (révisée à 0,15) à 0,20 pour 2009. Selon le Gouvernement, « le résultat de l'indicateur depuis 2005 résulte non pas d'une atonie dans les secteurs exonérés mais d'une croissance soutenue dans les activités situées hors de ces secteurs, habituellement plus résistantes aux handicaps structurels des DOM ».

Le second indicateur mesure l’Écart entre le taux de croissance de l’emploi salarié dans les entreprises d’outre-mer exonérées de cotisations sociales au titre d’une année et le taux de croissance de l’emploi salarié dans les entreprises analogues de métropole. L'écart positif de 2005 entre DOM et métropole s'amplifie en 2006 et 2007. Il s'explique par une faible croissance des effectifs salariés en métropole (+ 0,82 %) dans les activités correspondant aux secteurs exonérés outre mer, mais surtout par la dynamique de la progression des effectifs salariés ultra marins dans les secteurs exonérés (+ 5 %). Cette dynamique se vérifie d'ailleurs, durant la même période, par une baisse sensible du chômage dans les DOM. De ce fait, les prévisions et les cibles pour cet indicateur ont été revues à la hausse depuis le projet annuel de performances (PAP) pour 2008.

2.– L’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle

Votre Rapporteur spécial commentera ici les principales mesures financées depuis cette action. Pour le reste, on se reportera utilement au projet annuel de performances (PAP) du programme, bien documenté.

a) La principale mesure financée par cette action est le service militaire adapté.

 Le service militaire adapté (SMA) permet aux jeunes ultramarins de recevoir une formation professionnelle dans un cadre militaire. Il s’adresse essentiellement aux jeunes en situation d’échec. Les effectifs du SMA participent aux plans de secours et d’aide au service public (notamment en cas de catastrophe naturelle), ainsi qu’aux plans de protection et de défense.

Le SMA a été créé en 1961 sous la forme du régiment mixte des Antilles-Guyane, qui donnera par la suite naissance à quatre unités qui sont aujourd’hui les régiments SMA de Martinique, de Guadeloupe, de Cayenne et de Saint-Jean du Maroni. Le dispositif a par la suite été étendu à La Réunion, à la Nouvelle-Calédonie, à Mayotte et à la Polynésie française.

Le SMA forme près de 3 000 volontaires entre 18 et 26 ans (garçons et filles), dans 37 filières professionnelles.

Le SMA rassemble désormais l’ensemble des personnels rattachés à la mission Outre-mer (3 715 équivalents temps plein travaillé). En plus des 2 900 volontaires, ces personnels sont constitués de militaires détachés par le ministère de la Défense (734), de personnels administratifs (32), de personnels techniques (31) et d’ouvriers d’État (18). Les effectifs sont stables par rapport à 2008.

Les crédits de paiement demandés en 2009 pour financer le SMA s’élèvent à 113,5 millions d’euros, répartis comme suit :

– 87,4 millions d’euros de crédits de personnel ;

– 19,5 millions d’euros de crédits de fonctionnement ;

– 6,6 millions d’euros de crédits d’investissement.

Le coût global par volontaire est de 39 139 euros.

 Le SMA dispose d’un indicateur dédié, rattaché à l’objectif n° 2 (Assurer la réussite du parcours de formation socio-éducative et professionnelle des volontaires du SMA), et qui mesure le Taux d’insertion des volontaires en fin de contrat. Malgré une réalisation de 76,5 % en 2006 et de 79 % en 2007, la prévision 2008 a été actualisée à 76 % afin de permettre la consolidation de ces résultats. En effet, la progression de la réalisation 2007 est due à un nombre de volontaires formés (dénominateur) légèrement en baisse par rapport au nombre de volontaires insérés (numérateur) qui reste constant.

b) L’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer (ANT) est chargée de mettre en œuvre des mesures de formation.

 L’ANT est opérateur de la mission Outre-mer. Elle est chargée par l’État de mettre en œuvre des dispositifs d’aide à la mobilité.

Les recettes de l’ANT proviennent :

– des subventions du SEOM pour couvrir des charges d’exploitation et mettre en œuvre les dispositifs d’aides à la formation au travers du programme 138 (versement de la subvention pour charges de service public et des crédits d’intervention destinés au financement du dispositif PIJ (10)-mobilité) et du programme 123 (versement de crédits d’intervention au titre du passeport mobilité dans son volet formation professionnelle) ;

– des recettes provenant de l’Union européenne dont principalement du Fonds social européen ;

– d’une participation des collectivités territoriales d’outre-mer ;

– de prestations et produits divers.

Au total, le budget de l’ANT a été de 38,1 millions d'euros en 2008. La subvention versée en 2009 à l’ANT devrait s’élever à près de 8 millions d'euros.

 Au titre de l’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle, l’ANT mettra en œuvre en 2009 :

– le volet « mobilité » du PIJ, qui vise à aider les jeunes ultramarins de moins de 30 ans à réaliser un projet professionnel en suivant un cursus de formation qualifiant hors de leur département ou collectivité d’origine. Cette mesure serait dotée en 2009 de 11,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement ;

– la formation individualisée en mobilité (FIM), qui vise à garantir aux jeunes de moins de 30 ans originaires des DOM la possibilité de participer à des actions de formation qualifiante en métropole, pour suppléer l’absence de certaines formations dans leur département d’origine (12,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement).

L’augmentation des crédits de l’action provient, pour l’essentiel, de l’accroissement des crédits du PIJ-mobilité et du FIM.

C.– LE PROGRAMME CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER

Le tableau suivant présente l’évolution, action par action, des crédits du programme entre 2008 et 2009.

CRÉDITS DU PROGRAMME 123  CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER
(LFI 2008 RETRAITÉE)

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé de l’action

Ouvertes en LFI pour 2008

Demandées pour 2009

Évolution
(en %)

Ouverts en LFI pour 2008

Demandés pour 2009

Évolution
(en %)

01 – Logement

236 000 000

258 000 000

9,3

200 000 000

209 000 000

4,5

02 – Aménagement du territoire

134 000 000

180 090 330

34,3

110 000 000

147 494 493

34

03 – Continuité territoriale

54 232 603

53 501 605

– 1,3

54 232 603

53 501 605

– 1,3

04 – Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports (libellé modifié)

38 231 515

35 550 000

– 7

38 231 515

35 550 000

– 7

06 – Collectivités territoriales

196 817 400

208 123 862

6,7

216 267 400

223 323 941

3,2

07 – Insertion économique et coopération régionales

3 000 000

2 900 000

– 3,3

3 000 000

2 900 000

– 3,3

08 – Fonds exceptionnel d’investissement (nouveau)

40 000 000

16 000 000

Total

662 281 518

778 165 797

17,5

621 731 518

687 770 039

10,6

Source : projet annuel de performances

1.– L’action Logement

a) Les mesures d’amélioration de l’habitat tentent de répondre à une situation dégradée.

 Le niveau d’habitat insalubre dans les DOM et à Mayotte est très préoccupant. Le quart du parc immobilier est constitué de logements insalubres. Si l’on met à part Mayotte dont la situation est atypique (la moitié du parc étant insalubre), les départements les plus touchés sont la Guyane et la Guadeloupe, qui comptait 21 000 logements insalubres en 2003 (derniers chiffres disponibles).

Les éléments de connaissance sur l’insalubrité restent parcellaires et empiriques faute d’observatoire spécifique ou de tout autre instrument statistique. Des efforts sont cependant entrepris : ainsi, La Réunion a lancé une étude afin de recenser les logements et de qualifier leur situation, étude dont les résultats seront connus à la fin de l’année 2008. En outre, l’insalubrité dans les DOM recouvre une réalité multiforme qui va du bidonville caractérisé à l’habitat spontané et illégal.

 Les crédits consacrés à la résorption de l’habitat insalubre (RHI) et à la participation à l’aménagement des quartiers (PAQ) augmentent dans le présent projet de loi de finances, notamment en autorisations d’engagement (31,5 millions d'euros contre 27,7 en 2008). Les crédits de paiement passent de 21,3 à 24,6 millions d'euros.

Cette politique se double d’aides à l’amélioration de l’habitat privé, dont la dotation augmentent sensiblement dans le présent projet de loi de finances : 45,6 millions d'euros en autorisations d’engagement (contre 33,6 en 2008) et 37 millions d'euros en crédits de paiement (contre 28,5 en 2008). Ces aides sont octroyées sous condition de ressources aux propriétaires occupants effectuant des travaux de remise aux normes de décence et de confort de leur logement.

b) La politique d’accession à la propriété rencontre des difficultés.

En application de l’article 23 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (dite « loi DALO »), la construction de 2 000 logements en accession dite « très sociale » à la propriété a été programmée pour 2008. 46 millions d'euros d’autorisations d’engagement et 51,4 millions d'euros de crédits de paiement étaient prévus à cette fin dans le projet de loi de finances pour 2008.

Mais la mise en œuvre de ce programme a rencontré des difficultés, se traduisant par une production très inférieure à l’ambition initiale. L’objectif pour 2009 a donc été revu à la baisse : il s’agira de construire 1 350 logements, pour lesquels 37,8 millions d'euros d’autorisations d’engagement et 31 millions d'euros de crédits de paiement sont prévus.

c) Les crédits à destination du logement locatif social augmentent significativement.

 La situation du logement social dans les DOM se caractérise par des besoins en logements sociaux très importants en raison d’une part de la croissance démographique (quatre fois supérieure à celle des départements métropolitains) et d’autre part de la très forte proportion des ménages à bas salaire.

La population « domienne » est éligible à 80 % au logement social, contre une moyenne nationale de 68 % en 2005. Selon les estimations des directions départementales de l’équipement, le nombre de demandeurs de logements sociaux serait de 62 000, décomposés de la manière suivante par département.

DEMANDEURS DE LOGEMENTS SOCIAUX PAR DÉPARTEMENT

Guadeloupe

15 000

Martinique

10 000

La Réunion

26 000

Guyane

11 000

Total

62 000

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

Or, la production de logements sociaux au cours des deux dernières années n’est pas à la hauteur des besoins, ainsi que l’illustre le tableau suivant.

PRODUCTION GLOBALE DE LOGEMENTS SOCIAUX DEPUIS 2003

 

Moyenne 1999/2002

2003

2004

2005

2006

2007

Logement social

5 176

4 432

3 226

4 711

4 021

3 480

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

 Pour 2009, ce sont 137,7 millions d'euros qui sont prévus en autorisations d’engagement et 112 millions d'euros en crédits de paiement, contre respectivement 111,1 et 94,1 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008 (soit + 24 % et + 19 %).

Ces crédits financent pour l’essentiel les subventions allouées aux bailleurs sociaux pour les opérations de constructions neuves de logement locatif social (LLS) et de logement locatif très social (LLTS).

Le PAP propose de retenir pour l’année 2009 une production de 4 500 logements et de prévoir une montée en puissance progressive pour atteindre d’ici 2012 l’objectif annuel de 5 400 logements, fixé par la loi DALO.

1 400 LLS et 1 800 LLTS seraient financés exclusivement par la ligne budgétaire unique (LBU) dont il est ici question, à hauteur de 129 millions d'euros d’autorisations d’engagement.

Le reste de la LBU, soit 8,2 millions d'euros en autorisations d’engagement, servirait de complément budgétaire au financement des logements sociaux défiscalisés.

La mission d’information de votre commission des Finances sur les niches fiscales recommandait une réorientation de la défiscalisation des investissements locatifs vers le logement social. Actuellement, en application de l’article 199 undecies A du code général des impôts, un contribuable réalisant un investissement locatif outre-mer peut réduire son impôt sur le revenu à concurrence d’une fraction de son investissement, qui peut aller jusqu’à 50 % si l’investissement est réalisé dans le secteur locatif intermédiaire (location soumise à une condition de plafonnement du loyer et à une condition de ressources du locataire). Le rapport de votre mission d’information dressait le constat suivant. « Les caractéristiques actuelles du dispositif ne sont pas particulièrement favorables au développement du logement social. La loi n’interdit pas la défiscalisation des investissements réalisés dans ce secteur, mais elle ne prévoit pas de dispositif spécifiquement incitatif. […] Il apparaît donc nécessaire de prévoir un dispositif de défiscalisation tendant à orienter l’épargne privée vers la construction de logements sociaux, au besoin en réorientant vers ce secteur l’aide actuellement accordée aux secteurs libre et intermédiaire. Il s’agirait de prévoir une extinction progressive de l’avantage fiscal accordé aux contribuables investissant dans ces secteurs et d’en faire bénéficier ceux qui souscrivent à des projets répondant aux caractéristiques du logement social, en réservant le bénéfice de la défiscalisation aux opérations portées par des bailleurs sociaux qui en assureraient la gestion. »

L’article 20 du PLODEOM propose la création d’un dispositif de défiscalisation pour le logement social, permettant une réduction d’impôt de 50 % pour les investissements réalisés dans ce secteur, réduction rétrocédée pour 60 % à l’organisme de gestion des logements. Parallèlement, il est prévu de supprimer de façon progressive la défiscalisation dans les secteurs libre et intermédiaire.

d) L’État demeure débiteur des bailleurs sociaux.

 Depuis 2000, le montant de crédits de paiement mandatés au titre d’un exercice pour le financement du logement social est systématiquement inférieur au montant des autorisations d’engagement. Il en résulte un écart, constitutif d’une dette. Celle-ci n’est pas immédiatement exigible dans son ensemble ; seules le sont les factures émises après service fait par les organismes du logement social.

Le secrétariat d’État distingue ainsi la dette « réelle » de la dette « virtuelle ». Il n’en demeure pas moins que 660 millions d'euros de crédits de paiement restaient à mandater à la fin de l’année 2007, ainsi que l’illustre le tableau suivant.

RESTES À MANDATER 2000-2008

(en euros)

Années

Autorisations d’engagement
engagées

Crédits de paiement
mandatés

Écart

2000

247 419 256

208 394 348

39 024 908

2001

261 283 603

198 178 222

63 105 381

2002

280 159 609

178 442 244

101 717 365

2003

240 353 853

167 693 390

72 660 463

2004

222 857 415

162 099 766

60 757 648

2005

323 490 018

184 174 641

139 315 377

2006

263 677 160

172 682 177

90 994 983

2007

259 216 304

196 743 921

62 472 383

2008

236 000 000

200 000 000

36 000 000

Total cumulé

2 098 457 217

1 468 408 709

660 048 508

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

Aucune amélioration n’est inscrite dans le présent projet de loi de finances, qui prévoit 258 millions d'euros en autorisations d’engagement pour 209 millions d'euros en crédits de paiement.

 Les créances réellement exigibles en fin d’année, après service fait, ont atteint des sommets en 2006, étant estimées alors à 115 millions d'euros. 60 millions d'euros de CP ont dû être injectés en 2006 et 2007 pour résorber partiellement la dette dite « réelle ».

Si la situation s’est améliorée, elle demeure insatisfaisante. Ainsi, au titre de l’année 2007, les impayés se montent à 17,1 millions d'euros, ainsi que l’indique le tableau suivant.

IMPAYÉS « LOGEMENT » EN 2007

(en euros)

Année 2007

Factures certifiées

Factures non certifiées

Total

Guadeloupe

4 054 741

4 855 979

8 910 720

Guyane

Martinique

4 480 272

858 692

5 338 964

La Réunion

7 133 818

10 239 558

17 373 376

Mayotte

1 435 554

4 786 682

6 222 236

Total

17 104 385

20 740 911

37 845 296

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

Selon le secrétariat d’État à l’Outre-mer, cette dette sera absorbée par l’augmentation des crédits de paiement au titre de l’exercice 2008 (+ 1,6 %). La nouvelle hausse des crédits de paiement en 2009 (+ 4,5 %) devrait empêcher la reconstitution de créances exigibles non payées fin 2009.

e) La disponibilité foncière entrave le développement du logement social.

 La situation des collectivités ultramarines se heurte d’une manière générale à une pénurie de foncier, liée à une forte croissance démographique, à l’insularité et aux risques naturels et sismiques.

La maîtrise foncière ressort principalement à la compétence des collectivités territoriales à travers l’élaboration de leurs documents d’urbanisme. L’État, garant de la politique du logement social, incite les collectivités à une meilleure mobilisation du foncier pour ce type de logement, à des coûts compatibles avec les loyers maîtrisés. Les difficultés financières et techniques des collectivités locales en matière d’aménagement foncier accroissent davantage encore la pénurie de logements sociaux.

 Cette situation a justifié la création des fonds régionaux d’aménagement foncier et urbain (FRAFU). La Réunion avait créé en 1994 un fonds régional d’aménagement urbain, expérimenté ensuite en Martinique en 1999. Un décret n° 2002-666 du 29 avril 2002 permet désormais la mise en place d’un FRAFU dans chaque département d’outre-mer. 80,8 millions d’euros ont été réservés par l’État à cet effet dans le cadre des contrats de plan 2000-2006, via le fonds d’investissement des départements d’outre-mer (FIDOM). Ce fonds trouve ses sources de financement auprès de la région, du département, de l’État et de l’Union européenne (FEDER). Il permet notamment de financer les études pré-opérationnelles, les frais financiers du portage de foncier à moyen terme ainsi que les équipements de viabilisation primaire (stations d’épuration, émissaires d’eaux usées ou pluviales).

À la suite de la conférence nationale du logement outre-mer, organisée en 2007, un décret en projet visera à améliorer l’efficacité des FRAFU afin de concentrer l’action publique sur la production de foncier aménagé et de favoriser l’intervention des collectivités locales. Il devrait être publié en fin d’année.

La réforme proposée repose sur quatre points :

– recentrer les objets éligibles aux fonds sur des actions d’aménagement opérationnel et non sur des actions de construction ;

– modifier les conditions d’éligibilité en supprimant l’obligation d’accueillir 60 % de logements sociaux dans les opérations ;

– créer une subvention spécifique de l’État au titre du logement social, définie proportionnellement au nombre de logements sociaux compris dans les opérations d’aménagement ;

– améliorer le dispositif de gestion des fonds par une programmation pluriannuelle validée par les partenaires.

 Le développement de démarches concertées avec les collectivités locales pour les inciter à mener localement des politiques foncières devrait s’engager avant la fin de l’année, via le lancement prochain de conventions d’action foncière (CAFO). Le dispositif consiste à inciter les maires à accroître dans leurs documents d’urbanisme leurs réserves foncières, au profit du logement social ; en contrepartie, l’État s’engagera à financer en priorité les projets de la collectivité éligibles à l’action Logement du programme 123.

La création d’établissements publics fonciers locaux, sur le modèle de celui de La Réunion, doit être encouragée.

f) Le dispositif de mesure de la performance pourrait encore être amélioré.

L’objectif n° 1 (Mieux répondre au besoin de logement social) est assorti de trois indicateurs, dont l’un, nouvellement créée, ne peut être commenté (11).

L’indicateur 2.2 (Part des ménages logés dans le parc social locatif ayant des ressources inférieures à 60 % du plafond LLS) a été critiqué par votre Rapporteur spécial lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2008, pour le manque de fiabilité des études sur lesquelles il repose. Il a néanmoins été maintenu.

Le dernier indicateur (1.3) mesure le Pourcentage de logements attribués à des ménages vivant en situation d’insalubrité. Cet indicateur rapporte le nombre de logements sociaux attribués dans l’année à des ménages concernés par une opération de RHI au nombre total de logements sociaux attribués la même année dans le département ou la collectivité. Un indicateur rapportant le nombre de logements sociaux attribués à des ménages vivant en situation d’insalubrité au nombre estimé de ménages vivant en situation d’insalubrité serait plus éclairant.

Le contrôle de la Société immobilière de la Martinique par la Cour des comptes

Dans un rapport particulier délibéré le 2 décembre 2007, la Cour des comptes a fait état des principales conclusions issues du contrôle des comptes et de la gestion des la Société immobilière de la Martinique (SIMAR), pour les exercices 2001 à 2005.

La SIMAR est une société anonyme d’économie mixte dont le capital est détenu majoritairement par l’État et l’Agence française de développement.

L’objet de la société est particulièrement large, visant notamment, sur le territoire de la Martinique :

– l’aménagement et l’allotissement des terrains urbains ou à urbaniser en vue de leur construction, la création de zones d’habitations ou de zones industrielles ou artisanales ;

– l’étude, l’acquisition, la réalisation, la gestion, l’administration, l’exploitation pour son compte ou pour le compte de tiers, de tous programmes et complexes immobiliers.

La Cour a relevé deux irrégularités tenant au mandat du président du conseil d’administration :

– alors que la durée du mandat des administrateurs est fixée, depuis 2002, à trois ans, le président du conseil d’administration, désigné depuis 1995, n’a pas été formellement renouvelé depuis 2002, date de sa dernière reconduction ;

– alors que la désignation du président du conseil d’administration doit recevoir l’approbation des ministres de tutelle, aucune trace de réponse aux sollicitations faites en ce sens par la SIMAR n’a pu être retrouvée.

La Cour a surtout constaté le versement illégal d’indemnités de licenciements à cinq cadres de la société.

La loi n° 2000-1207 d’orientation pour l’outre-mer du 13 décembre 2000 (LOOM) a instauré le dispositif de congé solidarité, dont l’objet est de favoriser l’embauche de jeunes de moins de 30 ans dans les DOM, par la cessation anticipée d’activité de salariés de plus de 55 ans.

La mise en œuvre de ce dispositif reposait sur la conclusion d’une convention cadre entre l’État, le Conseil régional, le Conseil général et les organisations représentatives des employeurs et des salariés, puis d’une convention d’application de cette convention cadre, conclue cette fois-ci entre l’État et l’employeur.

Aux termes de la LOOM, « pour bénéficier de l’allocation de congé solidarité, le salarié prend l’initiative de la rupture de son contrat de travail et adhère à la convention de congé solidarité ». La rupture du contrat de travail emporte, en l’espèce, « renoncement aux indemnités de licenciement », en application de la circulaire n° 4789 du 27 juillet 2001.

La convention d’application entre l’État et la SIMAR, conclue le 20 mars 2003, tout en rappelant le principe du renoncement par le salarié à toute indemnité de licenciement, a introduit la possibilité d’y déroger par voie d’accord particulier.

La Cour a constaté que cette possibilité n’est conforme ni à la lettre ni à l’esprit de la loi.

Cinq cadres de la SIMAR ont obtenu le versement d’indemnités de licenciement sur la base d’accords particuliers dont la régularité est donc très contestable. Le montant total des indemnités indûment versées dépasse 469 000 euros.

Le 14 février dernier, le Premier président de la Cour des comptes a adressé au ministre de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales un référé à ce sujet.

Ce référé, auquel le ministre n’a semble-t-il pas donné suite, a été transmis à votre commission des Finances, en application des dispositions de l’article L. 135-5 du code des juridictions financières.

Lors de l’examen du projet de loi de règlement pour 2007, votre Rapporteur spécial avait déjà appelé l’attention du secrétaire d’État à l’Outre-mer sur la situation de la SIMAR. Le secrétaire d’État indiquait alors : « L’organisation de la SIMAR, la Société immobilière de la Martinique, et le mandat de ses administrateurs font l’objet d’un rapport de la Cour des comptes de décembre 2007. Les deux parties n’ont manifestement pas la même approche juridique mais l’avis de la Cour des comptes primera et, d’après mes services, nous nous mettrons en phase avec ses souhaits dans les semaines à venir ».

Votre Rapporteur spécial souhaite que soient portées à la connaissance du Parlement les mesures prises ou envisagées, afin d’une part de sanctionner une gestion manifestement inadéquate et d’autre part, le cas échéant, de récupérer les sommes indûment versées.

2.– L’action Aménagement du territoire

Cette action permet au ministère chargé de l’outre-mer de contribuer au financement des infrastructures des collectivités territoriales.

 L’essentiel des crédits concerne les opérations contractualisées : 165,23 millions d’euros d’autorisations d’engagement sur 180 au total ; 135 millions d’euros de crédits de paiement sur 147,5 au total.

Cela concerne les contrats de projets État-régions 2007-2013, qui mobiliseront 703,48 millions d’euros au total, dont 268 millions d’euros à la charge du programme Conditions de vie outre-mer. Pour 2008, sont prévus 38,3 millions d’euros d’autorisations d’engagement, répartis ainsi : 9,8 millions d’euros pour la Guadeloupe, 7 millions d’euros pour la Guyane, 7,8 millions d’euros pour la Martinique et 13,7 millions d’euros pour La Réunion.

Sont également financées les dépenses engagées au titre des contrats et conventions conclues avec les COM et la Nouvelle-Calédonie :

– environ 963 000 euros d’autorisations d’engagement au titre du contrat de développement 2007-2013 de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

– les contrats signés les 4 et 6 mars 2006 avec la Nouvelle-Calédonie d’une part, les trois provinces, l’agglomération du Grand Nouméa et les autres communes d’autre part, ont engagé l’État à hauteur de 393,4 millions d'euros pour la période 2006-2010, dont 200,5 millions d'euros sont à la charge du programme 123 (soit une moyenne annuelle de 40 millions d’euros). De plus, 9 millions d'euros d’autorisations d’engagement supplémentaires sont prévus pour 2009 au titre des actions de logement ;

– 3 millions d’euros d’autorisations d’engagement au titre du contrat de développement des îles Wallis-et-Futuna ;

– 1,5 million d’euros d’autorisations d’engagement au titre du financement des actions d’investissement contenues dans le contrat urbain de cohésion sociale de l’agglomération de Papeete ;

– 42,2 millions d’euros d’autorisations d’engagement au titre d’une part du contrat de projets signé le 28 mars 2008 entre l’État et Mayotte pour la période 2008-2014 (337 millions d'euros dont 265 imputés sur le programme 123), d’autre part du contrat de projets 2008-2012 avec la Polynésie française, signé le 27 mai 2008 (177 millions d'euros dont 140 à la charge du programme 123).

 Le projet de loi de finances pour 2009 est l’occasion de regrouper l’ensemble des crédits des différents ministères destinés au financement des contrats de projets et de développement dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, afin de permettre une meilleure coordination et un suivi par le ministère chargé de l’outre-mer de l’ensemble de la dépense contractuelle afférente à la nouvelle génération de contrats.

Ces crédits ont été transférés au programme 123 en provenance des programmes des huit ministères concernés La participation du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche devrait être transférée vers le programme 123 courant 2009.

Le montant de ces transferts s’élève pour 2009 à 30,2 millions d'euros en autorisations d’engagement et 23,2 millions d'euros en crédits de paiement.

 Votre Rapporteur spécial, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2008, s’inquiétait de l’existence de créances impayées aux collectivités territoriales, au titre des différents dispositifs contractuels. Selon les informations recueillies, les insuffisances de crédits de paiement se monteraient à environ 80 millions d’euros fin 2008, dont 30 millions d'euros dus à la Nouvelle-Calédonie. Il est regrettable de faire ainsi peser sur la trésorerie des collectivités territoriales une charge incombant, en vertu de l’application des contrats signés, à l’État.

 Il serait bon que le dispositif de mesure de la performance, qui comprend actuellement deux indicateurs rattachés à l’objectif n° 2 (Encourager une approche partenariale pour l’aménagement et le développement durable de l’outre-mer) permette de suivre la régularité des versements de l’État aux collectivités territoriales.

3.– L’action Continuité territoriale

 Cette action financera pour l’essentiel le fonds de continuité territoriale que le PLODEOM propose de créer, ainsi que le volet formation du passeport mobilité (49,1 millions d'euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement).

Ce fonds regroupera les crédits du passeport mobilité étudiant et les crédits d’aide à la continuité territoriale.

 Le passeport mobilité étudiant permet :

– la gratuité du transport aérien vers la métropole ou vers une autre collectivité d'outre-mer pour les jeunes « domiens » de 18 à 30 ans venant suivre une formation qualifiante ou venant occuper un emploi ;

– la prise en charge d’un voyage aller-retour pour les candidats admissibles aux oraux de concours des grandes écoles, aux oraux de concours des catégories A et B des trois fonctions publiques (État, hospitalière, territoriale), et aux oraux de concours des écoles d’infirmières.

En 2008, 15,8 millions d’euros (AE=CP) devaient être consacrés au financement du passeport mobilité. Ce montant apparaissait insuffisant au regard des dérives du dispositif.

Ainsi que l’a montré le rapport d’information de notre collègue Michel Bouvard publié en mars 2007(12), le passeport mobilité est victime de son succès. Le nombre de bénéficiaires est passé d’environ 2 000 lors de sa mise en place en 2002 à plus de 20 000 en 2005. Le coût du dispositif est passé de 8,3 millions d’euros en 2003 à 20,6 millions d’euros en 2005. L’engouement suscité par cette mesure témoigne de son utilité, mais également de certaines dérives. M. Bouvard a relevé de nombreux abus, qui risquent de conduire le système au bord de l’explosion. Ainsi, « la possibilité d'acheter un aller simple puis un retour simple, nécessairement plus onéreux qu'un aller-retour, et la liberté totale de choisir la date du voyage, qui favorise l'achat de billets au dernier moment et aux dates où les tarifs sont les plus élevés, constituent autant de facteurs de dérive des coûts ». Les centres régionaux des œuvres universitaires et sociales (CROUS) doivent faire face à un manque de crédits qui les oblige à suspendre les remboursements aux étudiants et aux compagnies aériennes concernées.

Il est regrettable que ni les réponses au questionnaire budgétaire ni le PAP ne donnent d’informations sur les crédits réellement nécessaires en 2008, ni sur les prévisions de dépenses pour 2009.

Le PLODEOM propose une certaine rationalisation du dispositif actuel, en soumettant à des conditions de ressources l’accès au fonds de continuité territoriale.

 Cette condition vaudra donc, au-delà du passeport mobilité étudiant, pour l’aide à la continuité territoriale. Jusqu’alors, chaque département d’outre-mer recevait une dotation annuelle lui permettant d’accorder à ses résidents une aide forfaitaire pour effectuer un voyage annuel aller et retour entre le département concerné et la métropole. Le montant de cette dotation évoluait comme la dotation globale de fonctionnement des communes. L’évolution du nombre de bénéficiaires aidés témoigne d’une montée en puissance du dispositif avec 9 443 passagers aidés en 2004, 55 478 en 2005 et 63 776 en 2006. Ces résultats sont néanmoins en deçà des ambitions du législateur ; en effet, alors que le dispositif devait être cofinancé par l’Union européenne, il ne l’a finalement pas été. L’article 26 du PLODEOM prévoit donc que l’État délèguera la gestion de l’aide aux régions et collectivités dès lors que ces dernières en feront la demande et qu’elles abonderont les crédits consacrés par l’État au financement de l’aide à la continuité territoriale, dans une proportion au moins égale à la moitié de ces crédits.

 L’objectif n° 3 (Optimiser l’efficience des dispositifs favorisant la continuité territoriale) est désormais assorti d’un indicateur (3.1) plus complet que l’ancien, qui mesure le Coût moyen des dispositifs de continuité territoriale corrigé de l’évolution du prix du pétrole. Un commentaire détaillé en sera fait lors de l’examen du projet de loi de règlement pour 2009.

4.– L’action Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport

 Cette action est le produit de la fusion des anciennes actions n° 4 (Sanitaire et social) et 5 (Culture, jeunesse et sport) du programme 123. Eu égard à la modicité des crédits de l’ancienne action n° 5 (3 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008), la fusion des actions est de bon sens.

 L’essentiel des crédits de l’action concerne donc le domaine sanitaire et social, et notamment le financement du fonctionnement de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna (23 millions d'euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement).

 Votre Rapporteur spécial s’interroge sur la pertinence de conserver au sein de la mission Outre-mer l’intégralité des crédits financés depuis cette action. Les actions de promotion et de diffusion des cultures des outre-mers revêtent une particularité qui peut justifier leur rattachement à la mission Outre-mer. En revanche, d’autres mesures inscrites sur cette action paraissent pouvoir être gérées par les ministères sectoriels sans pour autant méconnaître la spécificité des collectivités ultramarines ; ainsi, les actions sanitaires pourraient être transférées dans le champ de compétence du ministère de la Santé, eu égard notamment à la technicité requise pour mener à bien les actions de politique publique en ce domaine.

5.– L’action Collectivités territoriales

 Cette action finance pour l’essentiel des dotations spécifiques versées par l’État aux collectivités territoriales ultramarines.

Le PAP fournit une liste exhaustive de ces dotations, sur lesquelles votre Rapporteur spécial ne s’attardera donc pas.

 Le versement de deux de ces dotations, propres à Mayotte, devait prendre fin en 2008 : la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires et la dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil. L’article 64 du présent projet de loi de finances, rattaché à la mission Outre-mer, propose de proroger jusqu’en 2011 le versement de ces dotations. On se reportera donc utilement au commentaire de cet article (cf. infra).

 La plus importante des dotations servies depuis l’action Collectivités territoriales est l’aide à la reconversion de l’économie polynésienne : 182 millions d'euros en autorisations d’engagement (soit + 8,3 %) et 188 millions d'euros en CP (dotation stable).

La dotation globale de développement économique (DGDE) a été instituée par une convention conclue le 4 octobre 2002 entre le Premier ministre et le président du gouvernement de la Polynésie française. À compter du 31 décembre 2002, la DGDE s’est substituée au fonds de reconversion de l’économie de la Polynésie française. Ce fonds avait été créé en 1996, par voie de convention, afin de compenser les pertes économiques et financières consécutives à l’arrêt des essais nucléaires en Polynésie. Prévu pour durer dix ans, le fonds était doté chaque année de 150,92 millions d’euros par l’État. Le fonds a été finalement remplacé par la DGDE dès 2003. Jusqu’en 2009, une partie de l’aide à la reconversion correspondra d’ailleurs au reliquat des sommes dues par l’État à la Polynésie au titre du fonds de reconversion (31 millions d'euros en 2009, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement).

Une convention en date du 25 juillet 1996 précisait les modalités de fonctionnement du fonds. La Polynésie présentait à l’État un plan stratégique de développement, soumis à l’agrément préalable d’un comité mixte paritaire. L’État conservait donc un pouvoir d’approbation de chaque projet a priori, et déléguait les crédits (autorisation de programme et crédits de paiement) au fur et à mesure.

La DGDE poursuit le même objectif que le fonds : maintenir les ressources jadis apportées par le centre d’expérimentation nucléaire. La DGDE intervient pour le financement d’investissements divers : aides aux entreprises, grands travaux, logements sociaux. Jusqu’en 2005, la DGDE était inscrite au budget des Charges communes de l’État. Depuis, elle figure sur la mission Outre-mer. Il faut préciser que contrairement au fonds qu’elle a remplacé, la DGDE n’est pas limitée dans le temps.

Les modalités de fonctionnement de la DGDE sont très différentes de celles du fonds, et le contrôle de l’État est quasi-inexistant. L’État verse chaque année la DGDE de manière globale. Le gouvernement de la Polynésie affecte ensuite les crédits reçus aux projets du plan quinquennal d’investissement prévu à l’article 5 de la convention du 4 octobre 2002. Une fois les projets en question achevés, la Polynésie notifie leur achèvement à l’État, pièces administratives et comptables à l’appui. L’État ne donne donc plus d’agrément préalable aux projets entrepris. L’article 8 de la convention du 4 octobre 2002 stipule que « les projets financés par la DGDE font l’objet d’un suivi annuel d’exécution […] et d’un compte rendu d’exécution du gouvernement de la Polynésie française à l’État ».

Une avancée en matière de contrôle semble être intervenue en février 2006 : un avenant à la convention du 4 octobre 2002 a créé un comité de suivi. Ce comité mixte, comprenant six représentants de l’État et six représentants de la Polynésie française, est coprésidé par le haut-commissaire de la République et le président du gouvernement de Polynésie. Il doit se réunir une fois par an.

Selon les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, un mode alternatif de contrôle aurait été mis en place, empiriquement, par le ministère chargé de l’outre-mer : les crédits seraient versés en plusieurs tranches, après remontée des informations demandées à la Polynésie.

Un nouvel indicateur, rattaché à l’objectif 4 (Accompagner le développement des collectivités d’outre-mer), a été introduit dans le PAP 2008. Il mesure la Part des crédits de la DGDE dans les investissements financés par la Polynésie française. L’objectif est de réduire significativement cette part à horizon 2012. Mais cet indicateur ne paraît pas de nature à renseigner efficacement sur l’utilisation précise qui est faite de la DGDE.

Si votre Rapporteur spécial ne remet pas en cause le principe de la DGDE, il est en revanche très circonspect sur les modalités de son fonctionnement.

6.– L’action Insertion économique et coopération régionale

 Les crédits de fonctionnement demandés (111 424 euros) sont destinés à financer l’organisation de réunions et notamment les conférences de coopération régionale prévues à l’article L. 4433-4-7 du code général des collectivités territoriales.

 Le solde financera les fonds de coopération régionale. Il existe en effet quatre fonds de coopération régionale (un par département d’outre-mer), auxquels est venu s’ajouter un fonds de coopération régionale pour Mayotte.

Les crédits destinés à la coopération régionale sont utilisés pour le financement de projets acceptés par les préfectures à l’occasion des comités de gestion du fonds de coopération régionale (FCR). Ces projets visent au développement économique, social ou culturel des départements de la zone Caraïbe (Guadeloupe, Guyane, Martinique) ou de l’Océan indien (La Réunion, Mayotte).

Entre 2001 et 2007, 452 projets ont été financés avec une contribution totale des fonds de coopération régionale de près de 12 millions d’euros. Parmi les thématiques, le FCR a financé 130 projets dans le domaine des échanges artistiques, des événements sportifs et culturels.

Les financements sont destinés le plus souvent à la mise en place de partenariats bilatéraux ou multilatéraux avec les États voisins de l’outre-mer et la participation des collectivités aux programmes des organisations régionales. De par la nature des dépenses de fonctionnement (premiers contacts, missions exploratoires, échanges professionnels), les FCR sont devenus un outil financier permettant « l’effet de levier » de projets structurants, avec les autres fonds de l’État, les fonds régionaux et les fonds européens.

Les projets retenus par les comités de gestion sont intervenus pour l’essentiel dans le domaine du développement économique. Ils contribuent par exemple au renforcement des moyens de la pêche dans les zones concernées ou encore à la formation et à l’équipement des acteurs économiques des États voisins des collectivités françaises.

7.– L’action Fonds exceptionnel d’investissement

L’article 16 du PLODEOM prévoit la création de ce fonds, qui serait doté par le présent projet de loi de finances de 40 millions d'euros en autorisations d’engagement et de 16 millions d'euros en crédits de paiement.

Ce fonds serait destiné à participer au financement des équipements collectifs portés par des personnes publiques dans les DOM et les COM, en partenariat avec les collectivités territoriales. Il s’agirait, dans un but de rattrapage économique, de réaliser des opérations portant sur des équipements publics structurants, et qui ne sont pas pris en charge par les dispositifs contractuels entre l’État et les collectivités ultramarines.

La dotation du fonds serait fixée chaque année en loi de finances.

La création de ce fonds doit être saluée. Lors du déplacement de la mission d’information de votre commission des Finances sur les niches fiscales en Guadeloupe et en Martinique en janvier 2008, votre Rapporteur spécial a été frappé par l’insuffisance des infrastructures qui caractérise ces départements. En particulier, la congestion routière est telle qu’elle entrave les déplacements, notamment professionnels, de la population.

Dans sa contribution au rapport d’information de la mission, votre Rapporteur spécial appelait déjà de ses vœux la création d’un tel fonds. En effet, la part de la dépense fiscale à destination de l’outre-mer qui, aujourd’hui, rémunère les intermédiaires via une commission et les contribuables via un avantage en impôt « pourrait, sous la forme d'une dépense budgétaire, utilement abonder un fonds d'aide aux collectivités d'outre-mer pour assurer le financement de leurs investissements publics ou l'amélioration des services publics locaux, tels les transports en commun ».

Il conviendra donc, si le PLODEOM est adopté, de suivre l’emploi des crédits versés au fonds exceptionnel d’investissement. Mais, d’ores et déjà, il est à craindre que les montants prévus soient insuffisants pour faire face à des besoins massifs.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de la séance du 14 octobre 2008 à 23 heures 15, votre commission des Finances examine les crédits de la mission Outre-mer et les articles 64 et 65 rattachés, en commençant par l’exposé de votre Rapporteur spécial.

M. Michel Bouvard. Le dispositif du passeport mobilité est appelé à évoluer. Il ne pose pas seulement problème sur le plan financier : ses effets se font sentir également sur la capacité de recrutement de l’université Antilles-Guyane.

En matière de logement social, la question de l’opérateur se pose. Alors que le secrétariat d’État à l’outre-mer, les SIDOM, est favorable au transfert des sociétés immobilières des départements d’outre-mer à la Société nationale immobilière, le ministère des finances semble préférer travailler avec l’Agence française de développement, prouvant encore une fois la capacité de l’État à choisir la solution la plus coûteuse et la plus inadaptée en matière de cession de son patrimoine immobilier... En effet, outre que cette agence n’est toujours pas un opérateur au sens de la LOLF, elle n’a aucune compétence particulière en matière de gestion immobilière.

M. Hervé Mariton. L’Agence française de développement présente l’avantage d’être aussi sous la tutelle du secrétariat d’État à l’outre-mer.

Je souhaiterais que le rapporteur spécial nous éclaire davantage sur l’écart entre dette réelle et dette virtuelle, que je comprends comme la différence entre les factures immédiatement exigibles et celles qui ne le sont pas.

M. Alain Rodet. La pénurie de foncier sévit-elle également aux Antilles ? Pouvez-vous d’autre part nous donner des informations sur l’exploitation du nickel en Nouvelle-Calédonie ?

M. Victorin Lurel. Je veux féliciter le rapporteur spécial pour la clarté de son rapport, notamment en ce qui concerne l’article 65, dont l’intergroupe parlementaire des DOM-TOM demande unanimement la suppression à ce stade de nos travaux. Il appelle quelques observations sur la TVA non perçue récupérable, TVANPR, la révision de l’indemnité temporaire de retraite ou le plafonnement des niches fiscales.

Y a-t-il encore un secrétariat d’État à l’Outre-mer ? Même si la création de la DéGéOM est opportune, la réforme du secrétariat d’État a entraîné, dans la plus grande opacité, la perte d’une soixantaine d’agents.

Il me semble enfin illogique de voter l’article 65 avant l’examen du PLODEOM.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Le sujet des SIDOM mérite d’être étudié soigneusement. J’avais interrogé le secrétariat d’État sur la composition du conseil d’administration de la Société immobilière de la Martinique et sur l’élection de son président.

La dette réelle est constituée des factures impayées en fin d’exercice, alors que la dette virtuelle est l’écart entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement : soit. Je crains toutefois que cette notion serve à relativiser l’ampleur du stock de dettes, qui reste préoccupante en dépit d’une évolution positive.

En ce qui concerne l’exploitation du nickel en Nouvelle-Calédonie, monsieur Alain Rodet, je vous apporterai ultérieurement des informations dont je ne dispose pas pour l’instant.

La pénurie de foncier me semble plus aiguë aux Antilles françaises, du fait du relief et de la volonté de maintenir une certaine superficie en terres agricoles, ainsi que de l’absence d’une politique de réserve foncière dynamique.

M. le président Didier Migaud. Émettez-vous un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Outre-mer ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Comme l’an passé, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte les crédits de la mission Outre-mer.

Article 64

Dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil dans les communes de Mayotte, et dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte

Texte du projet de loi :

Dans le premier alinéa des articles L. 2572-62 et L. 2572-65 du code général des collectivités territoriales, l’année : « 2008 » est remplacée par l’année : « 2011 ».

Exposé des motifs du projet de loi :

Cet article reconduit – jusqu’en 2011 et en faveur des communes de Mayotte – le versement de la dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil (dont l’échéance est prévue fin 2008), ainsi que celui de la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires.

Réforme de l’état civil :

La dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil représente 300 000 euros par an. Ces crédits sont destinés à la sécurisation et la mise aux normes des locaux, à l’achat de fournitures et à la maintenance du matériel dans le cadre des opérations d’état civil conduites par les communes de Mayotte. Afin de mettre en place un état civil exhaustif, il apparaît nécessaire de poursuivre ces opérations jusqu’en 2011.

Reconduction de la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte :

Les communes mahoraises ne disposent pas de recettes fiscales locales suffisantes pour leur permettre d’assumer seules le financement de leurs charges dans le domaine scolaire. De plus, compte tenu de la croissance de la population de Mayotte (4 % en moyenne annuelle), les dépenses d’entretien et de construction des écoles à la charge des communes connaissent une augmentation significative. La mise en place des pré-requis nécessaires à la réforme de la fiscalité directe locale à Mayotte nécessitera plusieurs années. Il est considéré, à ce jour, que ces travaux s’échelonneront au moins jusqu’en 2011. Son montant s’élèvera en 2009 à 4 582 504 euros (+ 3,8 % par rapport à la dotation 2008, soit l’évolution prévisionnelle de la population scolaire des écoles élémentaires et préélémentaires dans cette collectivité).

Observations et décision de la Commission :

Le présent article a pour objet de proroger pour trois ans le versement de deux dotations spécifiques à Mayotte : la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires et la dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil dans les communes de Mayotte.

Le versement des ces dotations devait cesser fin 2008. Il s’avère nécessaire de les reconduire jusqu’en 2011.

I.– LE CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS N’ÉTANT TOUJOURS PAS APPLICABLE À MAYOTTE, LE FINANCEMENT DES BESOINS EN ÉQUIPEMENT SCOLAIRE IMPOSE LA PROROGATION D’UNE DOTATION CENSÉE ÊTRE PROVISOIRE.

A.– LA DOTATION SPÉCIALE DE CONSTRUCTION ET D’ÉQUIPEMENT DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES A ÉTÉ INSTITUÉE EN 2003.

L’article 67 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable à Mayotte. De plus, l’article 68 de la même loi prévoit l’application à Mayotte, à compter du 1er janvier 2007, des dispositions du code général des impôts et du code des douanes.

Jusqu’à la mise en place d’une fiscalité locale à Mayotte, l’État se devait donc d’assurer à Mayotte un niveau de ressources suffisant pour financer ses projets d’investissements, dans un contexte de très forte croissance démographique.

L’ordonnance n° 2002-1450 du 12 décembre 2002 relative à la modernisation du régime communal, à la coopération intercommunale, aux conditions d’exercice des mandats locaux à Mayotte et modifiant le code général des collectivités territoriales (CGCT) instaure donc, en son article 6, une dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte pour la période 2003-2007. Cette ordonnance a été ratifiée par la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer. Le dispositif est désormais codifié à l’article L. 2572-65 du CGCT.

Cet article prévoit le versement par l’État d’une dotation sur une base de 3,5 millions d’euros en 2003 indexée annuellement, à compter de 2004, sur l’évolution du nombre d’élèves des écoles élémentaires et préélémentaires. La dotation est répartie dans les communes par arrêté du préfet au prorata du nombre d’élèves scolarisés dans chacune d’elles.

En outre, lorsque la commune délègue la compétence de construction et d’entretien des établissements scolaires à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) qui ne comprend que des collectivités territoriales, le produit de la dotation est réservé à cet EPCI par la commune. À Mayotte, les communes ont délégué cette compétence au syndicat mixte d’investissement pour l’aménagement de Mayotte (SMIAM).

Le code général des impôts n’ayant pas été étendu à Mayotte en 2007 compte tenu des nombreuses particularités locales de l’île qui rendent le travail technique d’adaptation du droit fiscal difficile, les communes ne disposaient pas des ressources suffisantes pour compenser l’extinction prévue de cette dotation fin 2007.

Par conséquent, une première prorogation de cette dotation pour l’année 2008 a été décidée, via un amendement gouvernemental présenté en séance publique, par l’article 105 de la loi de finances pour 2008. À cette occasion, votre Rapporteur spécial a indiqué qu’ « il faudra adapter rapidement le code général des impôts, pour ne pas avoir à recourir de manière chronique à ce type d’amendement de toilettage ».

B.– LA DOTATION SPÉCIALE DE CONSTRUCTION ET D’ÉQUIPEMENT DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES DOIT ÊTRE À NOUVEAU PROROGÉE.

Fin 2008, il apparaît que les conditions nécessaires à la réforme de la fiscalité directe ne sont toujours pas réunies, et qu’elles ne le seront pas avant plusieurs années.

Or, la population scolaire de l’île progresse de manière significative (+ 4 % par an environ), conduisant à un accroissement continu des investissements et frais d’entretien. Il convient donc de permettre aux communes mahoraises de disposer des ressources nécessaires au financement des infrastructures scolaires en l’absence de ressources fiscales propres.

Le Gouvernement estime à ce jour que les travaux d’adaptation du droit fiscal aux particularités locales de Mayotte s’échelonneront jusqu’en 2011 Ces travaux comprennent notamment le développement d’une valorisation exhaustive du foncier permettant ensuite une émission des rôles pour les impôts fonciers et la généralisation d’une comptabilité commerciale dans le cadre de la transposition de la taxe professionnelle.

La prorogation, pour la période 2009-2011, de la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte représente, sur la base d’un taux prévisionnel de progression des effectifs scolarisés dans les écoles préélémentaires et élémentaires de près de 3,8 % par an, un coût de près de 4,6 millions d’euros en 2009 (en autorisations d’engagement et crédits de paiement). Les montants prévisionnels pour 2010 et 2011, à taux inchangé, seraient respectivement d’environ 4,6 millions d’euros et 4,9 millions d’euros.

C.– LA PROROGATION DE CETTE DOTATION AURAIT DÛ ÊTRE RATTACHÉE À LA MISSION RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES.

Le projet de loi de finances pour 2009 propose de transférer le versement de certaines dotations de la mission Outre-mer vers la mission Relations avec les collectivités territoriales (RCT). C’est notamment le cas de la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires à Mayotte.

En effet, celle-ci figure dans le programme Concours spécifiques et administration de la mission RCT, à l’action Dotations outre-mer.

II.– LE RETARD PRIS DANS LA MISE EN PLACE D’UN ÉTAT CIVIL EXHAUSTIF À MAYOTTE EXPLIQUE LA PROROGATION DE LA DOTATION EXCEPTIONNELLE VERSÉE À CE TITRE.

Créée par l’article 6 de l’ordonnance précitée du 12 décembre 2002, la dotation pour réforme de l’état civil a été codifiée à l’article L. 2572-62 du CGCT.

D’un montant annuel de 300 000 euros, cette dotation est versée depuis le programme Conditions de vie outre-mer de la mission Outre-mer. Un arrêté du préfet répartit la dotation entre chaque commune au prorata de leur population.

Ces crédits étaient destinés à la sécurisation et la mise aux normes des locaux, à l'achat de fournitures et à la maintenance du matériel, dans le cadre des opérations d'état civil conduites par les communes de Mayotte, en association avec la commission de révision de l'état civil (CREC). Il a notamment été décidé de fournir un équipement informatique adapté ; un logiciel unique a été acheté auprès d’une société privée.

La nécessité de mettre en place un état civil fiable à Mayotte se justifie par le processus qui pourrait conduire à la départementalisation de cette collectivité, et qui appelle la mise en place de règles civiles communes, mais aussi par un contexte de forte immigration clandestine.

Il s'avère aujourd'hui que l'objectif de mise en place d'un état civil exhaustif nécessite la poursuite des ces opérations jusqu'en 2011. Des crédits seront notamment nécessaires pour le financement des démarches conduites par les agents communaux de recensement des Mahorais qui ne justifient pas avoir déjà saisi la CREC ou être en possession de documents d'identité (environ 50 000 personnes sont susceptibles d'être concernées). Des crédits sont également nécessaires dans le cadre du financement d'actions de formation des agents communaux.

Le présent article propose donc de proroger de trois ans la dotation, qui devait être supprimée fin 2008.

*

* *

Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la Commission adopte l’article 64 sans modification.

Article 65

Réforme des exonérations de cotisations patronales
en faveur de l’outre-mer

Texte du projet de loi :


I. – Après l’article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale, il est ajouté un article L. 752-3-2 ainsi rédigé :


« Art. L. 752-3-2.  I. – En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique à La Réunion et à Saint-Martin, les employeurs, à l’exclusion des entreprises publiques et établissements publics mentionnés à l’article L. 2233-1 du code du travail, sont exonérés du paiement des cotisations à leur charge au titre de la législation de sécurité sociale à l’exclusion de celles dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, dans les conditions définies au présent article.


« II. – L’exonération s’applique :


« 1° Aux entreprises, employeurs et organismes mentionnés au premier alinéa de l’article L. 2211-1 du code du travail, occupant dix salariés au plus. Si l’effectif vient à dépasser le seuil de dix salariés, le bénéfice intégral de l’exonération est maintenu dans la limite des dix salariés précédemment occupés ou, en cas de départ, remplacés. Un décret fixe les conditions dans lesquelles le bénéfice de l’exonération est acquis dans le cas où l’effectif d’une entreprise passe au-dessous de onze salariés ;


« 2° Aux entreprises, quel que soit leur effectif, du secteur du bâtiment et des travaux publics, de l’industrie, de la restauration, de la presse, de la production audiovisuelle, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies de l’information et de la communication et des centres d’appel, de la pêche, des cultures marines, de l’aquaculture, de l’agriculture, y compris les coopératives agricoles et sociétés d’intérêt collectif agricoles et leurs unions, les coopératives maritimes et leurs unions, du tourisme, de la restauration de tourisme et de l’hôtellerie ;


« 3° Aux entreprises de transport aérien assurant :


« a) La liaison entre la métropole et la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon ou Mayotte ;


« b) La liaison entre ces départements ou collectivités ;


« c) La desserte intérieure de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion ou de Saint-Martin.


« Seuls sont pris en compte les personnels de ces entreprises concourant exclusivement à ces dessertes et affectés dans des établissements situés dans l’un de ces départements ou à Saint-Martin ;


« 4° Aux entreprises assurant la desserte maritime ou fluviale de plusieurs points de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion ou de Saint-Martin, ou la liaison entre les ports de ces départements ou collectivités ou la liaison entre les ports de la Réunion ou de Mayotte.


« III. – Le montant de l’exonération est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié, en fonction de sa rémunération telle que définie à l’article L. 242-1. Lorsque la rémunération horaire est inférieure à un seuil égal au salaire minimum de croissance majoré de 40 %, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations à la charge de l’employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales. À partir de ce seuil, le montant de l’exonération décroît de manière linéaire et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à 3,8 fois le salaire minimum de croissance.


« IV. – Par dérogation aux dispositions du paragraphe précédent, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations à la charge de l’employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales lorsque la rémunération horaire est inférieure à un seuil égal au salaire minimum de croissance majoré de 60 %, puis décroît de manière linéaire à partir de ce seuil, et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à 4,5 fois le salaire minimum de croissance, pour les entreprises situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion respectant les conditions suivantes :


« 1° Employer moins de deux cent cinquante salariés et avoir réalisé un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros ;


« 2° Avoir une activité principale relevant de l’un des secteurs d’activité éligibles à la réduction d’impôt prévue à l’article 199 undecies B ou correspondant à l’une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques à destination des entreprises ;


« 3° Être soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d’imposition.


« 4° À l’exception des entreprises situées en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante, et à la Désirade, exercer leur activité principale dans l’un des secteurs suivants :


« a) Recherche et développement ou technologies de l’information et de la communication ;


« b) Tourisme, environnement ou énergies renouvelables pour les entreprises situées en Martinique et en Guadeloupe ;


« c) Tourisme, agro-nutrition ou énergies renouvelables pour les entreprises situées à La Réunion ;


« 5° À l’exception des entreprises situées en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante, et à la Désirade, avoir :


« a) Signé avec un organisme public de recherche ou une université une convention, agréée par l’autorité administrative, portant sur un programme de recherche dans le cadre d’un projet de développement sur l’un de ces territoires si les dépenses de recherche, définies aux a à g du II de l’article 244 quater B du code général des impôts, engagées dans le cadre de cette convention représentent au moins 5 % des charges totales engagées par l’entreprise au titre de l’exercice au cours duquel l’abattement est pratiqué ;


« b) Ou réalisé des opérations sous le bénéfice du régime de transformation sous douane défini aux articles 130 à 136 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaire si le chiffre d’affaires provenant de ces opérations représente au moins un tiers du chiffre d’affaires de l’exploitation au titre de l’exercice au cours duquel l’abattement est pratiqué.


« Les conditions prévues aux 1° et 2° s’apprécient à la clôture de chaque exercice.


« V. – Pour l’application des dispositions du présent article, l’effectif pris en compte est celui qui est employé par l’entreprise dans chacune des collectivités mentionnées au I, tous établissements confondus dans le cas où l’entreprise compte plusieurs établissements dans la même collectivité. L’effectif est apprécié dans les conditions prévues par les articles L. 1111-2 et L. 1251-54 du code du travail.


« Lorsque dans une même entreprise ou un même établissement sont exercées plusieurs activités, l’exonération est applicable au titre de l’activité exercée par chacun des salariés employés.


« VI. – Le bénéfice de l’exonération prévue au présent article est subordonné au fait, pour l’employeur, d’être à jour de ses obligations déclaratives ou de paiement à l’égard de l’organisme de recouvrement. La condition de paiement est considérée comme remplie dès lors que l’employeur a d’une part souscrit et respecte un plan d’apurement des cotisations restant dues et d’autre part acquitte les cotisations en cours à leur date normale d’exigibilité.


« Les exonérations prévues par le présent article ne peuvent être cumulées avec une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales de sécurité sociale, à l’exception de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18.


« VII. – Le bénéfice de l’exonération prévue au présent article, ainsi que de tous autres allègements et exonérations de cotisations patronales prévus par le présent code, est subordonné au fait, pour l’entreprise ou le chef d’entreprise, de ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation pénale passée en force de chose jugée soit pour fraude fiscale, soit pour travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de main-d’
œuvre, en application des articles L. 5224-2, L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4, L. 8224-5, L. 8224-6, L. 8234-1 et L. 8234-2 du code du travail.


« Lorsqu’un organisme chargé du recouvrement est avisé, par la transmission du procès-verbal établi par un des agents de contrôle mentionnés à l’article L. 8271-1 du code du travail, de la commission d’une des infractions mentionnées à l’alinéa précédent, il suspend la mise en
œuvre des exonérations prévues par le présent article jusqu’au terme de la procédure judiciaire.


« VIII. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »


II. - L’article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale est modifié comme suit :


1° Dans le premier alinéa, les mots : « Dans les départements mentionnés à l’article L. 751-1 » sont remplacés par les mots : « À Saint-Pierre-et-Miquelon » ;


2° Dans le troisième alinéa, les mots : « à l’article L. 131-2 » et : « de l’article L. 421-2 » sont remplacés respectivement par les mots : « au premier alinéa de l’article L. 2211-1 » et : « des articles L. 1111-2 et L. 1251-54 » ;


3° Dans le 2° du I, au premier alinéa du 3° du I, au II, au III, la référence : « L. 131-2 » est remplacée par la référence : « L. 2211-1 » ;


4° Dans le deuxième alinéa du 3° du I, les mots : « dans l’un de ces départements ou de la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon » sont remplacés par les mots : « à Saint-Pierre-et-Miquelon » ;


5° Dans le troisième alinéa du 3° du I, les mots : « les entreprises assurant la desserte maritime ou fluviale de plusieurs points de chacun des départements d’outre-mer ou de la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, ou la liaison entre les ports de Guadeloupe, Martinique et Guyane, ou la, liaison entre les ports de La Réunion et de Mayotte » sont remplacés par les mots : « les entreprises de Saint-Pierre-et-Miquelon assurant la desserte maritime ou fluviale de plusieurs points des îles de Saint-Pierre-et-Miquelon » ;


6° Dans le quatrième alinéa du 3° du I, les référence : « L. 421-1 » et : « L. 421-2 » sont remplacées respectivement par les références : « L. 1111-2 » et : « L. 1251-24 » ;


7° Le V est remplacé par les dispositions suivantes :


« V. – Le bénéfice de l’exonération prévue au présent article est subordonné au fait, pour l’entreprise ou le chef d’entreprise, de ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation pénale soit pour fraude fiscale, soit pour travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de main-d’
œuvre, en application des articles L. 5224-2, L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4, L. 8224-5, L. 8224-6, L. 8234-1 et L. 8234-2 du code du travail. »


III. – Les dispositions du présent article sont applicables aux cotisations afférentes aux salaires et rémunérations dus à compter du 1er avril 2009. Les cotisations susceptibles de faire l’objet d’un plan d’apurement mentionné au VI de l’article L. 752-3-2 sont celles qui restaient dues à la date de la publication de la présente loi.

Exposé des motifs du projet de loi :

Cet article comprend plusieurs mesures destinées à rendre plus efficiente l’intervention publique en la concentrant sur les salaires pour lesquels l’impact des exonérations est le plus fort, et en subordonnant sa mise en œuvre au respect par les entreprises des règles qui s’imposent à elles. Pour autant, il s’agit de maintenir un dispositif différencié de celui applicable en métropole, compte tenu des handicaps structurels des départements et collectivités d’outre-mer.

La loi de programme pour l’outre-mer du 21 juillet 2003 a introduit trois groupes d’activités professionnelles, bénéficiant d’un plafond différencié d’exonérations. Par souci de simplification, la réforme crée un plafond unique applicable au périmètre des entreprises actuellement exonérées. Fixé à 1,4 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), il constitue le point de départ d’une exonération linéairement dégressive, qui s’annule lorsque le salaire atteint 3,8 fois le SMIC.

La loi renforce ce dispositif par une mesure d’exonération plus incitative qui s’applique aux entreprises qui bénéficieront, tel que prévu par le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, des mesures fiscales les plus incitatives dans le cadre des zones franches globales d’activités. Pour ces entreprises, le plafond de 1,4 SMIC est porté à 1,6 SMIC, et l’exonération devient nulle à 3,8 SMIC au lieu de 4,5 SMIC.

La loi du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l’emploi dans les départements et collectivités d’outre-mer a subordonné le bénéfice des exonérations aux entreprises à jour de leurs cotisations. Malgré les efforts accrus des organismes chargés du recouvrement, une part de celles-ci ne respecte pas ce principe d’équité qu’il convient de rappeler dans la loi, en l’assortissant de modalités de régularisation (plan d’apurement) adaptées aux entreprises qui connaissent de réelles difficultés économiques.

La réforme est appliquée aux départements d’outre-mer, ainsi qu’à Saint-Martin du fait de la situation économique de cette collectivité récente.

La collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui se trouve hors du champ de la réforme fiscale prévue dans le projet de loi pour le développement économique, est exclue de la réforme des exonérations de cotisations sociales. Les dispositions issues de la loi du 21 juillet 2003 continueront à s’y appliquer. Le II du présent article modifie en ce sens l’article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale.

L’ensemble de ces dispositions s’applique à compter du 1er avril 2009.

Observations et décision de la Commission :

Le présent article a pour objet de réformer le dispositif d’exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale spécifique à l’outre-mer.

Créé en 1994, ce dispositif est en vigueur dans sa forme actuelle depuis 2003. Reposant sur un mécanisme d’exonération différencié selon les secteurs d’activité, ses résultats sont incertains, et en tout état de cause difficiles à évaluer.

La réforme proposée par le présent article consiste à simplifier et rationaliser le dispositif de base, auquel serait adjoint un dispositif préférentiel pour certains secteurs.

Le présent article reprend le texte de deux articles du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, qui n’a pas encore été examiné. L’importation d’une partie de ce texte dans le projet de loi de finances pour 2009 empêche de discuter de la réforme proposée dans le cadre global auquel elle appartient, et entraîne en outre un certain nombre d’incohérences juridiques qui rendraient le présent article en l’état inapplicable.

I.– LA PROCÉDURE CHOISIE PAR LE GOUVERNEMENT N’EST PAS SATISFAISANTE.

Les exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale spécifiques à l’outre-mer sont compensées par l’État auprès des organismes de sécurité sociale, en application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, qui dispose que « toute mesure de réduction ou d'exonération de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale, donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l'État pendant toute la durée de son application ».

En l’espèce, la compensation s’opère depuis la mission Outre-mer, plus précisément depuis l’action Soutien aux entreprises du programme Emploi outre-mer.

La réforme proposée devrait, selon le Gouvernement, réduire de 138 millions d’euros le besoin de crédits de compensation en année pleine, soit à hauteur de 103,5 millions d’euros pour les 9 mois d’application prévus en 2009 (avril à décembre). C’est d’ailleurs à ce titre que le présent article est rattaché à la mission Outre-mer (13).

En tout état de cause, le projet de loi de finances pour 2009 n’est pas le vecteur législatif idéal pour la réforme proposée. Pour preuve, le texte de l’article 65 figure, en deux articles distincts (11 et 12), dans le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer (PLODEOM), enregistré pour première lecture à la présidence du Sénat le 28 juillet 2008 (14). Le présent article anticipe d’ailleurs la mise en œuvre de certaines dispositions du PLODEOM, dont le Gouvernement souhaite l’entrée en vigueur au 1er avril 2009, date retenue pour l’application du présent article, qui en dispose ainsi en son alinéa 41 (15). Il est d’autant plus étonnant d’avoir inséré le présent article dans le projet de loi de finances que sa date d’entrée en vigueur coïncide avec celle anticipée pour le PLODEOM, dans lequel le dispositif ici proposé était initialement inclus.

Au-delà d’un certain nombre d’imperfections rédactionnelles, le présent article comporte de véritables incohérences qui en fragilisent l’équilibre juridique. En effet, les dispositions de l’article, qui ont été extraites du PLODEOM, se réfèrent pour certaines d’entre elles à des notions ne figurant pas ailleurs que dans le projet de loi en question. Si cet article devait être voté, il serait donc pour partie inopérant. Votre Rapporteur spécial reviendra, tout au long du présent commentaire, sur les imperfections qui affectent le texte.

Dans un souci de cohérence et afin de permettre à votre Assemblée d’analyser convenablement la réforme des exonérations de cotisations sociales spécifiques à l’outre-mer, votre Rapporteur spécial a déposé un amendement tendant à la suppression de cet article, dont les dispositions ont vocation à être discutées au moment de l’examen du PLODEOM. Il serait en effet regrettable que l’examen de cette réforme, qui présente au fond des aspects positifs, soit pollué par des problèmes de forme et de cohérence juridique.

En tout état de cause, si le texte du présent article devait demeurer dans le projet de loi de finances, il conviendrait que le Gouvernement présente au Parlement une rédaction juridiquement cohérente et corrigée des erreurs matérielles.

II.– LE DISPOSITIF ACTUEL D’EXONÉRATION SPÉCIFIQUE À L’OUTRE-MER EST D’UNE EFFICACITÉ INCERTAINE.

A.– LE DISPOSITIF ACTUEL A ÉTÉ INSTITUÉ EN 2003.

La situation dégradée de l’emploi outre-mer, caractérisée par un taux de chômage moyen plus de deux fois supérieur à celui de la métropole, a paru justifier la mise en place d’un dispositif spécifique d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale.

Un premier régime d’exonération a été créé par la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte (loi dite « Perben »).

Ce régime a été modifié par la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer (LOOM), puis, en dernier lieu, par la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer (LOPOM). Le dispositif est codifié à l’article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale, que le présent article tend à modifier.

Depuis le 1er janvier 2008, en application de l’article 22 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, les cotisations liées aux accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) ne sont plus exonérées. Seules le sont désormais les cotisations à la charge de l’employeur au titre des allocations familiales et des assurances sociales (maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès).

Les dispositions de l’actuel article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale sont applicables aux quatre départements d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion) et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

1.– Le dispositif d’exonération prend la forme d’une franchise, dont le niveau est différent selon les entreprises concernées.

 Pour les trois situations décrites ci-après, l’exonération est égale au montant total des cotisations patronales de sécurité sociale (hors AT-MP), dans la limite d’un plafond égal au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) majoré, selon le cas, de 30, 40 ou 50 %.

Tous les salaires bénéficient d’une franchise de cotisations sociales, étant éligibles aux exonérations sans plafond. Ainsi, un salaire de 1,4 SMIC versé dans une entreprise du secteur dit « exposé » (cf. infra) est exonéré de toute cotisation sociale (hors AT-MP). Dans la même entreprise, un salaire de 5 SMIC bénéficie de la même franchise jusqu’à 1,4 SMIC : les cotisations patronales ne sont dues que sur la fraction du salaire comprise entre 1,4 et 5 SMIC.

 Sont exonérées dans la limite d’un salaire égal à 1,3 SMIC :

– les entreprises d’au plus 10 salariés. Si l’effectif vient à dépasser ce seuil, le bénéfice de l’exonération est maintenu pour les 10 premiers salariés (16) ;

– les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) de moins de 50 salariés (17);

– les personnels des entreprises de transport aérien concourant exclusivement à certaines dessertes (18) et affectés dans des établissements situés dans l’une des cinq collectivités concernées ;

– les entreprises assurant, sous certaines conditions, une desserte maritime et fluviale(19).

 Sont exonérées dans la limite d’un salaire égal à 1,4 SMIC, quel que soit leur effectif, les entreprises du secteur dit « exposé », c’est-à-dire subissant les contraintes liées à l’éloignement et la concurrence de pays dans lesquels le coût du travail est particulièrement bas.

Il s’agit des secteurs suivants : industrie, restauration (à l'exception de la restauration de tourisme classée), presse, production audiovisuelle, énergies renouvelables, nouvelles technologies de l'information et de la communication et centres d'appel, pêche, cultures marines, aquaculture, agriculture (y compris les coopératives agricoles et sociétés d'intérêt collectif agricoles et leurs unions, les coopératives maritimes et leurs unions).

 Sont exonérées à hauteur de 1,5 SMIC les entreprises du tourisme, de la restauration de tourisme classée et de l’hôtellerie, secteurs réputés « surexposés ».

2.– Le champ des entreprises et secteurs exonérés est très large.

Sont exclues du bénéfice des exonérations, principalement, les administrations publiques et les moyennes et grandes entreprises de commerce et de services. Ainsi, « un peu plus des trois-quarts des entreprises du secteur concurrentiel bénéficient d’exonérations au titre de la LOPOM »(20). En conséquence, le dispositif est sans doute trop peu ciblé sur les secteurs et les entreprises prioritaires.

ENTREPRISES ET SECTEURS BÉNÉFICIAIRES DES EXONÉRATIONS

Données ACOSS concernant
le régime général
(1)

Répartition des effectifs salariés 2006

Effectifs salariés

Nombre établissements

2006

Répartition par secteur exonéré

Secteurs

en nombre

en %

en nombre

en %

Secteurs surexposés (1,5 SMIC)

16 383

9,6

2 808

17,5

Tourisme

4 275

2,5

849

5,3

Restauration classée

12 108

7,1

1 959

12,2

Secteurs exposés (1,4 SMIC)

55 298

32,5

7 550

47

Agriculture

10 060

5,91

1 665

10,4

Pêche, aquaculture

588

0,35

76

0,5

Industrie extractive

1 267

74

111

0,7

Industrie manufacturière

27 751

16,3

3 977

24,8

Presse

960

0,56

56

0,3

Énergie renouvelable

2 789

1,64

94

0,6

Hôtel restaurant - Restauration non classée

4 946

2,91

985

6,1

NTIC

5 227

3,07

424

2,6

Production audiovisuelle

1 710

1

162

1

Autres secteurs (1,3 SMIC)

33 378

19,6

5 703

35,5

BTP entreprises moins de 50 salariés

23 681

13,91

5 500

34,2

BTP entreprises de 50 et plus de 50 salariés

5 186

3,05

51

0,3

Transports et communication - Transports aériens non réguliers

131

0,08

16

0,1

Transports et communication –
Transports aériens réguliers

2 495

1,47

46

0,3

Transports – communication – autres

1 885

1,11

90

0,6

Total des trois plafonds

105 059

61,7

16 061

39,1

Entreprises hors secteurs exonérées du fait de leur taille (1,3 SMIC)

65 156

38,3

24 969

60,9

Total des entités exonérées

170 215

57,4

41 030

89,3

Entités non exonérées

126 481

42,6

4 900

10,7

Total secteur concurrentiel

296 696

100

45 930

100

(1) Les montants relatifs aux travailleurs indépendants et employeurs d'employés de maison ne sont pas pris en compte.

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES BÉNÉFICIAIRES

Données ACOSS 2006

Total DOM

Guadeloupe

Guyane

Martinique

La Réunion

Salariés

296 696

73 151

22 989

72 094

128 462

%

 

24,7

7,7

24,3

43,3

Établissements
(secteur concurrentiel)

45 930

11 899

3 838

9 758

20 435

%

 

25,9

8,4

21,2

44,5

Source : secrétariat d’État à l’Outre-mer

3.– Le dispositif spécifique est exclusif.

Le dispositif propre à l’outre-mer ne peut être cumulé avec aucune autre exonération de cotisations patronales de sécurité sociale, ce que réaffirme le présent article (alinéa 28).

La seule exception concerne la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 du code de la sécurité sociale, applicable aux heures supplémentaires, aux heures complémentaires et aux jours de repos auxquels renonce un salarié.

Les entreprises non éligibles au dispositif ultramarin peuvent se voir appliquer le dispositif de droit commun en vigueur en métropole, régi par l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. L’exonération dite « Fillon » prévoit un allègement de cotisations patronales de sécurité sociale dégressif, s’annulant lorsque le salaire atteint 1,6 SMIC.

B.– L’ÉVALUATION DU DISPOSITIF EST LACUNAIRE ET SES RÉSULTATS INCERTAINS.

L’article 5 de la LOPOM prévoit une évaluation triennale du dispositif d’exonération. Un premier bilan a donc été réalisé en juillet 2006 par une mission d’audit de modernisation(21).

Le principal obstacle à une évaluation de l’impact des exonérations réside dans la difficulté à isoler les seuls effets des exonérations, l’outre-mer bénéficiant d’un ensemble de dispositifs spécifiques censés favoriser le développement économique, par exemple la défiscalisation des investissements ou la taxe sur la valeur ajoutée non perçue récupérable (TVA NPR).

Le résultat des travaux de la mission s’en ressent, puisque « les investigations de la mission n’ont pas permis de tirer de conclusions précises et probantes en matière de créations d’emplois. » En revanche, l’élargissement du dispositif d’exonération introduit par la LOPOM pourrait avoir fait croître l’emploi déclaré.

L’analyse des données recueillies sur la période 2000-2005 a permis les observations suivantes :

– une progression sensible des effectifs, supérieure à 14 %, dans l’ensemble des entreprises outre-mer. Cette progression a été de 15,5 % dans les entreprises qui bénéficient des exonérations, soit 2,8 points de plus que dans les entreprises non exonérées ;

– une augmentation importante des effectifs des entreprises de moins de 11 salariés dans les DOM : + 22,5 % contre + 1,5 % en métropole ;

– une diminution des effectifs dans l’agriculture, l’hôtellerie et la restauration de tourisme ainsi que les transports terrestres et maritimes, à hauteur respectivement de 12 %, 8 % et 2,7 % ;

– une progression significative des effectifs de tous les autres secteurs.

C.– LA COMPENSATION DES EXONÉRATIONS PÈSE LOURDEMENT SUR LA MISSION OUTRE-MER.

Le montant des exonérations spécifiques s’est fortement accru depuis 2001, ce qui s’explique essentiellement par la croissance des effectifs et l’évolution du SMIC.

Le montant prévisionnel des compensations d’exonérations s’élevait, pour 2008, à 1 130 millions d’euros, alors que seuls 867 millions d’euros de crédits de paiement étaient inscrits en loi de finances. Au seul titre de l’année 2008, la dette envers les organismes de sécurité sociale se serait donc accrue de 263 millions d’euros. En raison d’un phénomène identique de sous-budgétisation les années précédentes, ces 263 millions d’euros s’ajouteraient à un stock de dette évalué par le rapport annuel 2006 du contrôle budgétaire et comptable ministériel (CBCM) à 993 millions d’euros en 2007. Votre Rapporteur spécial a critiqué à plusieurs reprises cette situation.

Dans une réponse au questionnaire budgétaire préparatoire à l’examen du projet de loi de finances pour 2009, il est indiqué que les impayés cumulés pour la période 2005-2008 sont estimés à 899 millions d’euros fin 2008.

Pour 2009, les besoins s’élèveraient à 1 190 millions d’euros à droit constant, sans tenir compte des économies générées par le présent article. Le projet de loi de finances pour 2009 prévoit 1 011,3 millions d’euros, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement(22).

La compensation des exonérations demeure, de loin, le premier poste de dépenses de la mission Outre-mer, dont le volume total s’élèverait à 1 879 millions d’euros de crédits de paiement en 2009.

II.– LES MODIFICATIONS PROPOSÉES PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Les mesures de réforme proposées par le présent article, notamment celles tendant à rationaliser le dispositif et à renforcer le contrôle de son application, sont assez largement inspirées par le rapport d’audit de modernisation précité, dont les propositions ont été en partie reprises lors de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

A.– LE CHAMP D’APPLICATION EST MODIFIÉ.

1.– Le dispositif est étendu à Saint-Martin, mais ne sera pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.

 Le dispositif est étendu à Saint-Martin (alinéa 2), qu a accédé au statut de collectivité d’outre-mer (COM) en 2003. Le Gouvernement justifie cette extension par les difficultés économiques de cette COM, autrefois rattachée administrativement à la Guadeloupe et qui, à ce titre, bénéficiait du dispositif d’exonération prévu par la LOPOM.

Le caractère daté des données statistiques disponibles ne permet pas d’apprécier finement le différentiel en termes de croissance et d’emploi qui peut exister entre Saint-Martin et les DOM ; lors du dernier recensement, en 1999, le taux de chômage s’élevait à 26,5 %. Il est sans doute inférieur aujourd’hui.

 En revanche, Saint-Pierre-et-Miquelon resterait soumis au régime actuellement en vigueur (cf. infra).

2.– Les employeurs publics seront totalement exclus du dispositif.

L’alinéa 2 dispose que sont exonérés « les employeurs, à l’exclusion des entreprises publiques et établissements publics mentionnés à l’article L. 2233-1 du code du travail », à savoir « les entreprises publiques et les établissements publics à caractère industriel ou commercial et les établissements publics déterminés par décret assurant à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial, lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé ».

L’exclusion des administrations publiques se déduit de cette disposition d’ordre général et de la liste des différents secteurs éligibles, qui sont constitués par des entreprises de droit privé.

La rédaction de l’actuel article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale exclut de la même manière les structures publiques, à l’exception des employeurs occupant 10 salariés au plus, éligibles de ce fait au premier niveau d’exonération (1,3 SMIC), en application du 1° du I de cet article.

La décision de supprimer totalement la possibilité pour les employeurs publics de bénéficier de l’exonération tire les conséquences d’une pratique très faible du dispositif, au demeurant résiduel, prévu par la LOPOM.

B.– LE DISPOSITIF EST SIMPLIFIÉ.

 Les trois plafonds différenciés (1,3 SMIC, 1,4 SMIC et 1,5 SMIC) sont remplacés par un plafond unique, à 1,4 SMIC (alinéa 12).

Dorénavant, l’exonération s’appliquera donc aux entreprises suivantes :

– celles occupant au plus 10 salariés (alinéa 4) ;

– celles exerçant leurs activités dans des secteurs bénéficiaires du régime introduit par la LOPOM, quel que soit leur effectif. La condition d’effectifs applicable jusqu’alors au secteur du BTP (cf. supra) est donc supprimée (alinéa 5).

 Au-delà de la simplification, la réforme du dispositif aurait un impact sur les différents secteurs concernés :

– les entreprises occupant 10 salariés au plus verraient leur plafond d’exonérations passer de 1,3 à 1,4 SMIC. Or, la part des entreprises de moins de 11 salariés est extrêmement forte dans les territoires concernés, représentant 58 % des effectifs exonérés ;

– le BTP bénéficierait également du relèvement du plafond de 1,3 à 1,4 SMIC, en plus de la suppression de la condition d’effectifs ;

– les secteurs dits exposés (actuellement soumis au plafond de 1,4 SMIC), qui représentent le tiers des effectifs exonérés, verraient leur situation inchangée pour les salaires ne dépassant pas 1,4 SMIC ;

– les secteurs dits surexposés ne sont pas favorisés par le dispositif général prévu par le présent article, étant jusqu’alors soumis à un plafond supérieur à celui proposé (1,5 SMIC contre 1,4). Mais ces secteurs pourraient bénéficier du régime préférentiel d’exonération (cf. infra).

C.– LA FRANCHISE D’EXONÉRATION DEVIENT DÉGRESSIVE.

Rappelons que dans le dispositif actuel, les employeurs éligibles bénéficient de l’exonération quel que soit le niveau du salaire concerné.

Le nouveau dispositif rend la franchise de cotisations dégressive. La franchise est totale pour les salaires inférieurs ou égaux à 1,4 SMIC horaire : pour ces salaires, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations dues (alinéa 12). Pour les salaires supérieurs à 1,4 SMIC, le montant de l’exonération ne peut qu’être inférieur au montant atteint pour un salaire égal à 1,4 SMIC. La dégressivité de l’exonération s’applique donc sur la seule partie du salaire située sous le plafond de 1,4 SMIC. Lorsque le salaire dépasse 1,4 SMIC, le montant de l’exonération décroît de manière linéaire et s’annule lorsque la rémunération atteint 3,8 SMIC.

L’exemple suivant, fondé sur des chiffres volontairement simplifiés, peut aider à mieux comprendre le dispositif proposé.

Un salarié est rémunéré 1,4 SMIC, soit, par convention, 1 400 euros mensuels pour un nombre d’heures de travail égal à la durée légale. Supposons que le taux de charge applicable à ce salaire est de 35,7 % (hors AT-MP). Le montant de cotisations patronales est donc de 500 euros. Si l’entreprise est éligible au dispositif prévu par le présent article, elle est alors totalement exonérée de cotisations.

Supposons que la même entreprise emploie un salarié rémunéré 2 600 euros mensuels, soit le salaire médian entre celui pour lequel l’exonération est maximale (1 400 euros) et celui pour lequel l’exonération s’annule (3 800 euros). Le montant de l’exonération étant linéairement dégressif dès lors que le salaire dépasse 1,4 SMIC, le salaire de 2 600 euros ouvre droit à une exonération inférieure de moitié à l’exonération maximale ; en l’espèce, le montant de l’exonération sera donc de 250 euros.

Le schéma ci-dessous illustre bien la différence entre le régime actuel et le régime proposé. Dans le premier cas, la franchise de cotisations est plafonnée à hauteur du montant dû pour 1,4 SMIC, mais elle s’applique quel que soit le niveau du salaire. Dans le second cas, le montant de la franchise est d’autant plus faible que le niveau du salaire est élevé.

Le dispositif proposé permettrait donc de concentrer l’exonération sur les plus bas salaires.

Selon les informations fournies par le Gouvernement, environ 40 % du montant des exonérations de cotisations concernent actuellement des salaires supérieurs à 1,6 SMIC (soit le salaire médian français). À titre de comparaison, plus de 80 % des allègements généraux (régime dit « Fillon ») sont concentrés sur les salaires inférieurs à 1,3 SMIC.

D.– UN RÉGIME PRÉFÉRENTIEL D’EXONÉRATION EST PRÉVU.

1.– Le dispositif proposé se voudrait calé sur celui des futures zones franches globales d’activité.

 Les articles 1 à 4 du PLODEOM proposent la mise en place, pour les DOM, de zones franches globales d’activité (ZFGA), reposant sur des exonérations d’impôt sur les sociétés, de taxe professionnelle et de taxe sur le foncier bâti. Le taux d’exonération de droit commun sera de 50 %, mais, pourra être porté à 80 % dans certains cas(23).

Pour les cas où les exonérations fiscales seront possibles à hauteur de 80 %, le présent article propose un dispositif d’exonération de cotisations sociales plus favorable que le droit commun (alinéa 13). Le salaire y serait versé en franchise de cotisations jusqu’à 1,6 SMIC. Pour une rémunération supérieure à 1,6 SMIC, l’exonération décroîtrait de manière linéaire pour s’annuler à 4,5 SMIC.

Les alinéas 14 à 23 dressent donc la liste des caractéristiques de ces futures ZFGA « à 80 % », reprenant en cela des dispositions du PLODEOM. Celles-ci ont vocation à être le cadre d’application du régime bonifié d’exonération de cotisations sociales prévu par le présent article, alors qu’elles ne seront pas créées par la loi de finances pour 2009.

 La rédaction du présent article ne permet pas d’avoir une vision claire de ce que seraient les ZFGA et les ZFGA « à 80 % ». Votre Rapporteur spécial a donc du étudier l’exposé des motifs et le dispositif du PLODEOM afin d’être en mesure de présenter à votre commission des Finances le cadre d’application du régime bonifié d’exonération prévu au présent article.

Pour être éligibles au taux d’exonération fiscale de 50 %, les entreprises doivent :

– employer moins de 250 salariés et avoir réalisé un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros (condition reprise par l’alinéa 14) ;

– exercer leur activité principale dans l’un des secteurs d’activité éligibles à la défiscalisation des investissements productifs prévue par l’article 199 undecies B du code général des impôts (24) (CGI), auxquels il est ajouté le secteur des services aux entreprises rendus dans le domaine de la gestion (comptabilité, conseil, ingénierie et études techniques). Cette condition est reprise à l’alinéa 15 ;

– être soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d’imposition (condition reprise par l’alinéa 16).

La LOPOM a élargi le champ des secteurs éligibles à la défiscalisation : l’éligibilité est devenue la règle, l’article 199 undecies B du CGI dressant désormais la liste des seuls secteurs non éligibles, retracée dans le tableau ci-dessous. Le PLODEOM prévoit d’élargir à la recherche et développement la liste des secteurs éligibles.

SECTEURS NON ÉLIGIBLES ET EXCEPTIONS

Secteurs non éligibles

Exceptions

Commerce

 

Restauration, cafés, débits de tabac, débits de boisson

Restaurants de tourisme classés

Conseil ou expertise

 

Recherche et développement

 

Éducation, santé et action sociale

 

Banque, finance et assurance

 

Toutes activités immobilières

 

Navigation de croisière, locations sans opérateur, réparation automobile

Location de véhicules automobiles et de navires de plaisance

Services fournis aux entreprises

Maintenance, activités de nettoyage et de conditionnement à façon, centres d’appel

Activités de loisirs, sportives et culturelles

Activités s’intégrant à titre principal à une activité hôtelière ou touristique (hors jeux de hasard et d’argent)

Production et diffusion audiovisuelles et cinématographiques

Activités associatives

 

Activités postales

 

Source : code général des impôts

Dans le cadre des futures ZFGA, le taux bonifié de 80 % s’appliquera aux entreprises éligibles dans les conditions précisées plus haut :

– dont les activités relèvent des trois secteurs prioritaires choisis par les DOM (tourisme, énergies renouvelables et agro-nutrition pour La Réunion ; tourisme, énergies renouvelables et environnement pour la Martinique et la Guadeloupe). Cette condition est reprise aux alinéas 17, 19 et 20 ;

– ou qui sont situées en Guyane et dans les îles de Guadeloupe (Marie-Galante, La Désirade et Les Saintes), territoires dont la situation économique est particulièrement difficile (condition reprise, en creux, aux alinéas 17 et 21) ;

– ou qui appartiennent au secteur de la recherche-développement, des technologies de l’information et de la communication (condition reprise à l’alinéa 18) ;

– ou qui mènent un programme de recherche avec une université, un institut ou un établissement de recherche (condition reprise à l’alinéa 22) ;

– ou qui réalisent une fraction de leur activité en régime de transformation sous douane (25) (condition reprise à l’alinéa 23). L’objet est ici d’encourager la fabrication locale de produits qui, à l’heure actuelle, sont pour la plupart importés.

2.– D’importantes erreurs rédactionnelles affectent la cohérence du dispositif proposé.

 Les alinéas 14 à 23 du présent article essaient en réalité de reconstituer les critères d’éligibilité à la ZFGA « à 80 % », afin d’appliquer aux entreprises qui les vérifient le dispositif préférentiel d’exonérations de cotisations sociales.

Mais la rédaction de l’article ne permet pas, en l’état, de comprendre quelles sont, parmi les conditions énumérées, celles qui sont cumulatives et celles qui sont alternatives. S’il paraît impossible que les conditions énumérées soient cumulatives, il est également improbable qu’elles soient alternatives. Il est donc nécessaire de procéder à une nouvelle rédaction du texte pour le rendre applicable.

Sur la base du PLODEOM, votre Rapporteur spécial croit avoir compris :

– que les conditions énumérées aux alinéas 14, 15 et 16 sont cumulatives ;

– que les conditions énumérées aux alinéas 17, 19 et 20 d’une part et 21 à 23 d’autre part sont entre elles alternatives mais cumulatives avec les trois précédentes ;

– qu’à l’intérieur des «  » (alinéa 17) et « 5° »° (alinéa 21), les conditions identifiées par des lettres sont alternatives (alinéas 18, 19 et 20 d’une part ; alinéas 22 et 23 d’autre part) ;

– que l’alinéa 18 est mal placé dans le texte. En effet, le PLODEOM entend élargir la liste des secteurs éligibles au sens de l’article 199 undecies B du code général des impôts au secteur de la recherche et développement. La mention de ce secteur devrait donc être faite dès l’alinéa 15.

 Le bénéfice du régime préférentiel d’exonération de cotisations est conditionné, dans le secteur de la recherche et de la transformation sous douane, à ce que les activités en question représentent une fraction minimale de l’activité de l’entreprise « au titre de l’exercice au cours duquel l’abattement est pratiqué » (alinéas 22 et 23). Or, la notion d’abattement ne renvoie à aucun dispositif existant mentionné, même indirectement, par l’article ; il s’agit en effet des abattements fiscaux (d’impôt sur les sociétés et de taxe professionnelle) prévus par les articles 1er et 2 du PLODEOM, abattements auxquels le présent article se réfère comme s’ils étaient déjà en vigueur.

 L’alinéa 22 prévoit que peuvent bénéficier du dispositif préférentiel d’exonération les entreprises ayant « signé avec un organisme public de recherche ou une université une convention […] portant sur un programme de recherche dans le cadre d’un projet de développement ». Or, la notion de projet de développement n’est précisée nulle part. Votre Rapporteur spécial a interrogé le secrétariat d’État à l’Outre-mer, qui n’a pas été en mesure de le renseigner.

Cette situation particulièrement complexe et juridiquement insatisfaisante justifierait l’adoption de l’amendement de suppression de l’article déposé par votre Rapporteur spécial.

E.– LE BÉNÉFICE DES EXONÉRATIONS EST SOUMIS À DES CONDITIONS RENOUVELÉES.

1.– Le bénéfice des exonérations sera conditionné au paiement des cotisations.

La loi dite « Perben » avait conditionné le bénéfice des exonérations spécifiques qu’elle créait à ce que les bénéficiaires soient à jour de leurs cotisations sociales ou s’engagent dans un processus d’apurement progressif de leurs dettes contractées au titre de ces cotisations.

La LOOM, sans reprendre intégralement ce que prévoyait la loi dite « Perben », avait organisé un dispositif d’apurement des dettes.

La LOPOM, en revanche, ne subordonne plus le bénéfice des exonérations à la mise en règlement des dettes sociales. La mission d’audit de modernisation, dans son rapport précité, constatait un taux de cotisations non recouvrées beaucoup plus fort que le taux métropolitain. De ce fait, « ce sont les organismes sociaux qui, à leur corps défendant, assurent une partie des besoins de trésorerie des entreprises ».

Afin de mettre un terme à cette situation et de rendre le dispositif actuel plus équitable, l’alinéa 27 du présent article subordonne le bénéfice de l’exonération au fait, pour les employeurs, d’être à jour de leurs obligations déclaratives ou de paiement, la condition de paiement étant toutefois considérée comme remplie dès lors qu’un plan d’apurement des cotisations restant dues est appliqué.

L’alinéa 41 précise que les cotisations susceptibles de faire l’objet d’un plan d’apurement sont celles qui restent dues à la date de la publication de la loi de finances pour 2009. L’objectif de cette disposition est d’empêcher l’effet pervers consistant en ce que les entreprises ralentissent leurs paiements de cotisation en attendant l’entrée en vigueur au 1er avril 2009 du dispositif rendant obligatoire le plan d’apurement.

2.– Les conditions de suppression des exonérations pour cause d’infraction pénale sont précisées.

L’actuel article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale dispose que « toute condamnation pénale de l’entreprise ou du chef d’entreprise pour fraude fiscale, travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de main-d’œuvre […] entraîne la suppression des […] exonérations ».

L’alinéa 29 du présent article modifie ce mécanisme, afin que seule une condamnation définitive de l’employeur puisse donner lieu à la suppression des exonérations :

– l’alinéa 29 précise que seule une condamnation passée en force de chose jugée entraîne la suppression de l’exonération ;

– en conséquence, l’alinéa 30 prévoit la simple suspension des exonérations jusqu’au terme de la procédure judiciaire lorsqu’un agent de contrôle avise un organisme chargé du recouvrement de la commission d’une infraction pénale susceptible de justifier la suppression de l’exonération.

L’objectif des ces deux alinéas est de rendre plus équitable le dispositif actuel, qui permet la suppression des exonérations avant le terme de la procédure judiciaire.

F.– LE RÉGIME APPLICABLE À SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON EST SEULEMENT « TOILETTÉ ».

Le régime d’exonération des cotisations actuellement applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon n’est pas réformé par le présent article, la collectivité n’entrant pas dans le champ de la réforme fiscale prévue par la LODEOM.

Le II de l’article 65 (alinéas 32 à 40) en tire les conséquences, en modifiant la rédaction de l’actuel article L 752-3-1 du code de la sécurité sociale afin de le rendre applicable à la seule collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Par ailleurs, des modifications sont apportées à l’article L. 752-3-1 afin de tenir compte de l’entrée en vigueur le 1er mai 2008 d’un code du travail remanié.

Une modification introduite par le I de l’article 65 sera néanmoins applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, à savoir l’impossibilité pour les employeurs publics de bénéficier de l’exonération (alinéa 34).

*

* *

La Commission est saisie d’un amendement de M. le rapporteur spécial, tendant à la suppression de l’article 65.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Cet article réforme le dispositif d’exonération de cotisations patronales spécifique à l’outre-mer, dont il modifie le champ d’application et qu’il simplifie en instituant un plafond unique à 1,4 SMIC. Si j’approuve le caractère dégressif du nouveau dispositif, je juge cet article inapplicable, du fait notamment que sa rédaction renvoie à des dispositifs qui n’existent pas encore. Il convient, soit que l’exécutif réécrive cet article, soit que ce nouveau régime d’exonération ne soit examiné que dans le cadre du PLODEOM.

Pour ces raisons, je recommande la suppression de cet article, même si – et il y a là une difficulté – l’économie de dépenses sociales qu’il devrait permettre est déjà prise en compte par le projet de loi de finances.

M. Hervé Mariton. La courbe de dégressivité pourrait être modifiée, de façon à favoriser les emplois de cadres intermédiaires, tout en limitant les effets d’aubaine.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Ce débat, intéressant en soi, n’a pas d’objet si ce dispositif est en concurrence avec d’autres dispositifs plus favorables prévus par le PLODEOM.

M. Michel Diefenbacher. La solution du rapporteur serait plus douloureuse encore que celle proposée par le texte. La présence de ce dispositif en loi de finances initiale n’est pas anormale, d’autant que cela lui permettra de s’appliquer dès le 1er avril. Nous pouvons l’adopter, et demander au Gouvernement de proposer des amendements permettant de résoudre les difficultés juridiques nées du fait que ces dispositions ont été sorties de leur contexte juridique d’origine.

M. Michel Bouvard. La présence dans la loi de finances des dispositions qui ont un coût budgétaire ou fiscal est conforme constante à la doctrine de la commission. J’hésite donc à renvoyer cette disposition à un autre texte, même si je comprends la difficulté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Adopter cet article obligerait le Gouvernement à amender le texte, ce qui impliquera des contorsions périlleuses dont je doute qu’elles aboutissent à un texte cohérent.

M. Victorin Lurel. Au delà de ces problèmes juridiques, le contexte politique est défavorable à l’adoption dès la loi de finances de ce texte, à propos duquel le Président de la République va s’entretenir avec l’intergroupe parlementaire. Alors que l’examen du PLODEOM, prévu depuis 2007, est renvoyé à une date indéterminée, on ne cesse de faire voter en loi de finances ou de financement des réductions des acquis économiques et sociaux en faveur de l’outre-mer, qu’il s’agisse de la TVANPR, des ITR ou du plafonnement des niches fiscales, sans oublier le financement du RSA. Si justifiées que puissent être ces mesures, nous en percevrons les inconvénients immédiatement, et les éventuels bienfaits plus tard seulement. Il convient de respecter l’engagement du Président de la République de réserver à ce type de dispositions un unique texte global. Pourquoi se précipiter pour voter un texte dont l’entrée en vigueur est prévue pour avril, et qui suscite des interrogations au sein même de la majorité parlementaire ?

La Commission rejette l’amendement du rapporteur spécial puis adopte l’article 65 rattaché.

ANNEXE

Liste des auditions réalisées par votre Rapporteur spécial

– M. Éric Pilloton, délégué général à l’Outre-mer

– M. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes

– Mme Anne Bolliet, inspectrice générale des Finances, responsable de la révision générale des politiques publiques pour l’outre-mer

© Assemblée nationale

1 () La légitimité des compléments de traitement et de pension outre-mer est-elle toujours fondée ? , document Assemblée nationale n° 3780, mars 2007.

2 () Outre les dépenses budgétaires de l’État, ces montants incluent les prélèvements sur recettes, notamment la dotation globale de fonctionnement versée aux collectivités territoriales.

3 () Doc. Sénat, n° 496.

4 () Dans le tableau ci-contre, la TVA NPR figure dans la première ligne.

5 () Afin d’éviter que le mécanisme conduise à défavoriser la production locale, le régime a été rendu applicable aux opération de revente des produits de fabrication locale.

6 () Didier Migaud, Gilles Carrez, Jean-Pierre Brard, Jérôme Cahuzac, Charles de Courson, Gaël Yanno, Maîtriser la dépense fiscale pour un impôt plus juste et plus efficace, doc. AN n° 946, juin 2008, pages 66 à 92.

7 () Gilles Carrez, Rapport sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007, tome 2, Commentaires des rapports annuels de performances par les Rapporteurs spéciaux, doc. AN n° 1004, juin 2008, pages 237 à 251.

8 () Cf. infra le commentaire de l’article 64 du projet de loi de finances, rattaché.

9 () Gilles Carrez, doc. AN n° 1155, octobre 2008, page 16.

10 () Projet initiative jeune.

11 () Indicateur 1.1, Pourcentage des crédits de l’action Logement engagés dans le cadre d’un convention d’action foncière.

12 () Le passeport mobilité menacé par ses dérives : 20 propositions pour une réforme urgente, doc. AN n° 3781.

13 () L’article aurait pu figurer dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il n’aurait en revanche pas eu sa place en première partie du projet de loi de finances, car il concerne les dépenses.

14 () Doc. Sénat n° 496.

15 () Par souci de clarté, il sera fait référence, dans le présent commentaire, aux alinéas de l’article 65.

16 () Le décompte des effectifs se fait en application des dispositions de l’article L. 1111-2 du code du travail.

17 () Les entreprises de plus de 50 salariés bénéficient tout de même d’une exonération égale à 50 % du montant des cotisations.

18 () Liaison entre la métropole et les départements d’outre-mer ou les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte ; liaison entre ces départements ou ces collectivités ; desserte intérieure des départements ou de Saint-Pierre-et-Miquelon.

19 () Desserte de plusieurs points de chacun des DOM ou de Saint-Pierre-et-Miquelon ; liaison entre les ports de Guadeloupe, Martinique et Guyane ; liaison entre les ports de La Réunion et de Mayotte.

20 () Mission d’audit de modernisation, Rapport sur l’évaluation du dispositif d’exonérations de charges sociales spécifiques à l’outre-mer, juillet 2006.

21 () Rapport précité.

22 () Dont 993 millions d’euros pour les seules exonérations telles que modifiées par le présent article, le solde servant à compenser les exonérations dues au titre des contrats ultramarins d’accès à l’emploi et de retour à l’emploi (annexe 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009).

23 () Pour information, les taux de 50 ou 80 % s’appliqueront durant les sept premières années puis seront dégressifs pendant les trois années suivantes.

24 () L’alinéa 15 du présent article vise d’ailleurs le seul article 199 undecies B, sans préciser « du code général des impôts ».

25 () Prévu par l’article 130 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, le régime de transformation sous douane « permet de mettre en œuvre sur le territoire douanier de la Communauté des marchandises non communautaires pour leur faire subir des opérations qui en modifient l’espèce ou l’état et sans qu’elles soient soumises aux droits à l’importation ni aux mesures de politique commerciale, et de mettre en libre pratique aux droits à l’importation qui leur sont propres les produits résultant de ces opérations ».