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N
° 1969

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2009

AVIS

présenté

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946),

TOME I


AGRICULTURE, PÊCHE, ALIMENTATION, FORÊT, ET AFFAIRES RURALES

PAR M. Antoine HERTH

Député.

——

Voir le numéro : 1967 (annexes 3 et 4)

INTRODUCTION 5

I.— UNE DOTATION STABLE DANS UN CONTEXTE ECONOMIQUE ET BUDGÉTAIRE DIFFICILE… 7

A.— UN EFFORT FINANCIER IMPORTANT POUR LE SECTEUR AGRICOLE 7

1. Les gains du bilan de santé de la PAC 7

2. Une dotation qui déroge à la programmation pluriannuelle 9

B.— UN MINISTÈRE QUI TENTE DE MAINTENIR LE CAP DE SES PRIORITÉS 12

1. Pour une agriculture durable et compétitive 12

2. Pour une administration efficace et mobilisée 16

II.— … MAIS UN BUDGET DÉJA DÉPASSÉ PAR L’AMPLEUR DE LA CRISE QUE TRAVERSÉ LE MONDE AGRICOLE 19

A.— UN BUDGET À LA MERCI DES CRISES CONJONCTURELLES 19

1. Gestion des crédits et reports de charges en 2009 19

2. Des dispositifs insuffisamment dotés en loi de finances initiale 21

B.— DES FLUCTUATIONS MARQUÉES AU SEIN DE CHAQUE PROGRAMME 23

1. Le programme 154 Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires 24

2. Le programme 149 Forêt 28

3. Le programme 206 Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation 30

4. Le programme 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture 33

EXAMEN EN COMMISSION 37

MESDAMES, MESSIEURS,

Alors que la crise s’étend à tout le secteur agricole et que les revenus des exploitants devraient diminuer de 10 % en 2009, après une baisse similaire en 2008, que peut faire le budget du ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche (MAAP) ?

La dotation du MAAP pour 2010 s’établit certes au même niveau qu’en 2009, à hauteur de 5 milliards d’euros en crédits de paiement, dérogeant ainsi aux objectifs fixés dans le cadre de la programmation pluriannuelle des finances publiques. Sur cette enveloppe, 3,4 milliards d’euros viendront abonder les crédits de la mission Agriculture, qui augmentent de plus de 6 % en autorisations d’engagement mais diminuent de 0,8 % en crédits de paiement. Cette dotation, qui tient compte des conclusions du bilan de santé de la PAC (politique agricole commune), permettra de poursuivre le financement des priorités de long terme du MAAP que sont la politique d’installation et l’adaptation de l’agriculture aux défis de la protection de l’environnement, de faire face au coût des mesures prévues dans le cadre du plan chablis 2009 mis en place suite au passage de la tempête Klaus dans le Sud-Ouest, de maintenir des crédits suffisants pour assurer un niveau élevé de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation et de mener à bien le recensement de l’agriculture en 2010.

Les efforts entrepris par le ministère de l’agriculture dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) commencent en outre à porter leurs fruits et à générer des économies, bien que dans le cadre de la réorganisation de ses services centraux et déconcentrés, le ministère doive encore temporairement faire face à des surcoûts, en particulier en matière immobilière. Le transfert de la gestion et du financement de l’équarrissage aux filières, effectif depuis le 18 juillet dernier, et la décrue d’un certain nombre de dispositifs dont le financement est désormais arrêté lui permettent néanmoins de redéployer les crédits ainsi dégagés entre ses différents programmes. Les décisions à l’origine de ces redéploiements ne sont toutefois pas sans poser question et il est parfois malaisé de comprendre les raisons des choix opérés, hormis la volonté qui anime légitimement le gouvernement de réduire la dépense publique.

À cet égard, si on peut estimer qu’un effort financier important sera de nouveau réalisé en 2010 en faveur de l’agriculture dans un contexte budgétaire et financier difficile, peut-on réellement considérer que les moyens susceptibles d’êtres mobilisés au niveau national pour faire face aux crises qui secouent de plus en plus fréquemment le monde agricole seront suffisants ? Dans le projet annuel de performances pour 2010, les crédits d’intervention de France Agri Mer sont affichés en baisse de plus de 13 %, le dispositif Agridiff voit sa dotation descendre en dessous des 4 millions d’euros, le fonds d’allègement des charges stagne à 8 millions d’euros et les dispositifs d’aides à la cessation d’activité ont quasiment tous été supprimés.

Le Président de la République a déjà répondu à cette question en dévoilant un plan exceptionnel de soutien à l’agriculture dans le discours qu’il a tenu le 27 octobre dernier à Poligny. L’ampleur des mesures annoncées démontre en effet l’insuffisance du budget de l’agriculture en temps de crise. Les dotations prévues en loi de finances initiale pour 2009, pourtant augmentées à plusieurs reprises en cours d’année, n’ont pas permis au MAAP de faire face aux difficultés qui frappent l’agriculture française tous azimuts. Et les crédits inscrits dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, tel qu’il se présente aujourd’hui, risquent tout autant de ne pas être à la hauteur des enjeux.

Ces enjeux dépassent toutefois le simple cadre national et doivent s’inscrire pleinement dans le débat au niveau communautaire. Les crédits de la PAC dont la France bénéficie représentent plus du double des crédits inscrits sur le budget du ministère de l’agriculture. Ils sont toutefois menacés d’une réduction drastique dans le cadre de la prochaine discussion sur les perspectives financières de l’Union après 2013. Si cette diminution va de pair avec une nouvelle réduction des mécanismes de régulation existants, c’est au modèle européen d’une agriculture multifonctionnelle, durable, compétitive, répartie sur tout le territoire, soucieuse de préserver l’environnement, de maintenir la vitalité du monde rural et d’assurer une alimentation de qualité à un prix raisonnable aux citoyens qu’il faudra renoncer.

Ainsi, s’il convient aujourd’hui de saluer l’engagement de l’État aux côtés des agriculteurs à travers les annonces faites par le Président de la République, il convient également de tirer les leçons de la crise. « La crise révèle en premier lieu un défaut de régulation européenne et mondiale auquel il est urgent de répondre. Elle révèle en second lieu des défaillances nationales réelles dans la répartition de la valeur au sein de nos filières agricoles ». Que ce soit pour fédérer nos partenaires européens autour d’un projet commun en faveur d’une politique agricole commune forte après 2013 ou pour mettre en œuvre les réformes qui s’imposent au niveau national dans le cadre de la future loi de modernisation de l’agriculture, le ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche sera fortement mobilisé en 2010. Afin qu’il puisse mener à bien ses missions, votre rapporteur vous propose de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales pour 2010.

I.— UNE DOTATION STABLE DANS UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET BUDGÉTAIRE DIFFICILE…

A.— UN EFFORT FINANCIER IMPORTANT POUR LE SECTEUR AGRICOLE

1. Les gains du bilan de santé de la PAC

Le 20 novembre 2008, les 27 ministres de l’agriculture de l’Union européenne sont parvenus, sous présidence française, à un accord sur le bilan de santé de la Politique agricole commune (PAC). Cet accord traduit la volonté des États membres d’adapter cette politique, avant l’échéance des perspectives financières et la révision de l’ensemble des politiques communes en 2013. Grâce à l’intervention décisive de la France, cet accord, tout en amplifiant le niveau de transfert du premier vers le second pilier, préserve la PAC comme politique économique et donne la possibilité aux États membres de réorienter les aides du premier pilier. De nouvelles marges ont ainsi été dégagées pour soutenir les productions fragiles, maintenir l’agriculture dans les territoires difficiles ou encore pour encourager les systèmes de production durables, en fonction de choix opérés au niveau national.

En France, ces choix ont été annoncés au Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO) du 23 février 2009. Les mesures décidées conduisent à réorienter en 2010 près de 1,4 milliard d’euros, soit 18 % des aides directes reçues par les agriculteurs sur les quatre objectifs suivants :

 consolider l’économie agricole et l’emploi sur l’ensemble du territoire. La réorientation des aides permettra de rééquilibrer le soutien en faveur des productions structurellement fragiles, telles que l’élevage ovin et caprin et de revaloriser l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) ;

 soutenir l’élevage et les productions herbagères en instaurant un nouveau mode de soutien pour l’élevage à l’herbe. Près d’un milliard d’euros seront mobilisés pour créer un soutien spécifique aux surfaces en herbe consacrées à l’élevage et pour poursuivre les engagements souscrits dans le cadre de la prime herbagère agro environnementale (PHAE) ;

 accompagner un mode de développement durable de l’agriculture, en encourageant le développement de la production de protéines végétales, en augmentant les moyens consacrés à l’agriculture biologique et, plus généralement, en contribuant à fournir une réponse aux « nouveaux défis » auxquels est confronté le secteur agricole, par exemple en termes de performance énergétique ;

 renforcer les outils de couverture des risques climatiques et sanitaires. Le bilan de santé sera mis à profit pour contribuer financièrement à la généralisation de l’assurance récolte et à la création d’un fonds sanitaire.

Ces réorientations s’accompagnent en outre d’un effort financier supplémentaire au niveau national. Ainsi, « il n’y aura pas de gel sur les crédits du ministère de l’agriculture en 2010 », conformément aux engagements pris par le Président de la République dans son discours de Daumeray du 19 février 2009, dans lequel il annonçait également le dépôt d’un projet de loi de modernisation agricole. En effet, alors que les gains obtenus dans le cadre du bilan de santé aurait pu justifier une diminution correspondante des crédits nationaux, estimée à 300 millions d’euros, le Gouvernement a fait le choix de ne pas y procéder mais au contraire d’amplifier les décisions prises au niveau communautaire. C’est à ce titre que le projet de loi de finances pour 2010 prévoit :

 une revalorisation des ICHN (indemnités compensatoires de handicaps naturels) pour les 25 premiers hectares nécessitant un abondement supplémentaire de près de 20 millions d’euros pour atteindre 248 millions d’euros. Ce sont au total plus de 550 millions d’euros qui bénéficieront aux zones défavorisées en 2010 grâce au cofinancement de la mesure par le FEADER à hauteur de 55 % (85 % outre-mer) ;

– le maintien de la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (PNSVA) à hauteur de 165 millions d’euros ;

– la poursuite du financement de la PHAE (prime herbagère agro environnementale) désormais cofinancée à 75 % par le FEADER : 240 millions d’euros pourront ainsi être attribués à la gestion extensive des prairies en 2010 dont 60 millions d’euros de crédits nationaux ;

– la poursuite des actions engagées dans le cadre du Grenelle de l’environnement avec en particulier un renforcement des moyens accordés au développement de l’agriculture biologique et la mobilisation de crédits supplémentaires au service de l’amélioration de la performance énergétique des exploitations : le plan de performance énergétique (PPE) se verra ainsi doté pour 2010 de 38 millions d’euros en  autorisations d’engagement (AE) et 28 millions d’euros en crédits de paiement (CP) ;

– un soutien renforcé pour la gestion des risques climatiques, avec une dotation pour l’assurance récolte en hausse de 8 millions d’euros pour 2010.

Enfin, il convient également de noter la relance de la mesure rotationnelle à hauteur de 135 millions d’euros en AE et 29,5 millions d’euros en CP. Cofinancée à 55 % dans le cadre du plan de développement rural hexagonal (PDRH), cette mesure qui vise à encourager la rotation des assolements, sera engagée sur cinq ans et donnera lieu à 60 millions d’euros de paiements annuels, soit 300 millions d’euros au total sur l’ensemble de la période. Elle permettra d'accompagner la mise en œuvre de la réorientation des aides pour les exploitations les plus contributrices et de répondre à l’inquiétude des agriculteurs qui redoutent, en 2010, une baisse de leurs revenus, liée à celle du prix des céréales.

2. Une dotation qui déroge à la programmation pluriannuelle

Conformément aux engagements pris par le Président de la République, le budget du ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche bénéficie d’une relative stabilité, à un niveau équivalent de celui qui était le sien dans la loi de finances pour 2009 en crédits de paiement (-0,7 %), et progresse même de près de 3 % en autorisations d’engagement. Le budget du MAAP pour 2009 s’élevait en effet à 4,8 milliards d’euros en AE et à un peu plus de 5 milliards d’euros en CP. Cette somme représentait déjà une hausse de crédits importante, de l’ordre de 2,7 % en CP, faisant suite à une baisse continue des crédits alloués à l’agriculture depuis 2007. Dans un contexte difficile pour les finances publiques et alors que la programmation pluriannuelle des finances publiques prévoyait une baisse du budget du ministère de l’agriculture de 5,7 % en crédits de paiement en 2010 et de 2 % en 2011, cette stabilité est à souligner.

BUDGET DE L’AGRICULTURE POUR 2010

 

LFI 2009 en euros

PLF 2010 en euros

% Évolution
PLF 2010/LFI 2009

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Mission ministérielle
« Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales »

 

Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires

1 577 117 519

1 755 703 513

1 663 406 848

1 693 341 985

5,5  %

– 3,5 %

Forêt

290 861 981

308 289 443

368 729 268

340 726 730

26,7 %

10,5 %

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

523 975 472

579 475 472

542 294 590

562 794 590

3,5 %

– 2,9 %

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

833 015 154

831 983 234

849 964 340

850 867 013

2 %

2,3 %

TOTAL

3 224 970 126

3 475 451 662

3 424 395 046

3 447 730 318

6,2 %

– 0,8 %

Mission interministérielle
« Enseignement scolaire »

 

Enseignement technique agricole

1 298 323 757

1 284 923 757

1 283 862 964

1 269 362 964

– 1,1 %

– 1,2 %

Mission interministérielle
« Recherche et enseignement supérieur »

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

293 292 541

296 732 542

300 340 071

303 780 072

2,4 %

2,4%

TOTAL

4 816 586 424

5 057 107 961

5 008 598.081

5 020 873 354

3,98 %

– 0,7 %

Source : Ministère de l’agriculture et de la pêche.

Comme l’indique le tableau qui précède, la relative stabilité du budget du MAAP ne bénéficie pas de manière égale à l’ensemble des programmes relevant de la compétence du ministère chargé de l’agriculture. Seule la dotation du programme Enseignement supérieur et recherche agricoles progresse nettement de 2,4 % en AE comme en CP, après avoir connu une forte hausse déjà l’an passé de plus de 5,5 % ; il s’agit toutefois là du plus petit budget du ministère de l’agriculture, doté d’environ 300 millions d’euros en AE et en CP. Parallèlement, on regrettera qu’en dépit de la tenue des Assises de l’enseignement agricole dont les conclusions ne seront pas connues avant la mi-novembre 2009, le programme Enseignement technique agricole connaisse une régression de ses crédits d’un peu plus de 1 % en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement pour 2010, après une quasi-stagnation l’an passé (0,7 % en CP, -1,6 % en AE). 211 postes d’enseignants devraient ainsi être supprimés l’an prochain.

Quant à la mission Agriculture, sa dotation évolue globalement de manière plus favorable que ce qui était prévu dans le cadre de la loi du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, puisque les crédits inscrits dans le PLF pour 2010 sont en hausse de 16,7 % en AE et de 9,2 % en CP par rapport aux montants fixés par l’article 6 de cette loi.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION AGRICULTURE POUR 2010 PAR RAPPORT À LA LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES POUR 2009-2012

(en milliards deuros)

AE 2010
Loi de programmation

AE 2010
PLF

Évolution

CP 2010
Loi de programmation

CP 2010
PLF

Évolution

2,93

3,42

16,7 %

3,16

3,45

9,2 %

Rapportés aux montants inscrits dans la loi de finances initiale pour 2009, ces crédits connaissent toutefois une évolution plus contrastée, en raison à la fois d’une différence marquée entre la dotation en AE et la dotation en CP de la mission, et d’une évolution plutôt heurtée de ses différents programmes.

Alors que dans la LFI pour 2009, la dotation de la mission Agriculture avait fortement diminué à hauteur de 9,5 % en AE tout en augmentant de 2,7 % en CP, on assiste à une évolution inverse pour 2010 avec une dotation en hausse de 6,2 % en AE et en diminution de 0,8 % en CP. En effet, l’an passé, la suppression de plusieurs dispositifs dans le cadre de la RGPP s’était traduite par une absence de dotation ou une moindre dotation de ces derniers en AE, notamment au sein du programme 154 (-16,5 %), faisant ainsi chuter globalement le montant des autorisations d’engagement. La relance d’un certain nombre de dispositifs suite au bilan de santé de la PAC, la nécessité d’abonder les crédits du plan chablis 2009 ou encore l’organisation en 2010 du recensement de l’agriculture impliquent a contrario que la dotation en AE de la mission augmente à nouveau cette année. Toutefois, le Gouvernement s’est efforcé parallèlement de faire évoluer la dotation en CP de la mission dans un sens plus conforme à ce qui était prévu dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques : ils s’inscrivent ainsi en baisse de 0,8 % pour 2010. C’est beaucoup moins que les 9 % programmés initialement, mais cette diminution contribue néanmoins à l’objectif fixé de réduction des dépenses publiques.

Par ailleurs, il faut noter que les seules hausses constatées en crédits de paiement concernent les programmes 149 et 215 où s’imputent les dépenses afférentes, d’une part, au plan chablis 2009 et, d’autre part, au recensement agricole : si on fait abstraction de ces dépenses, l’évolution des dotations de ces deux programmes est elle aussi orientée à la baisse.

En termes de répartition des crédits entre les différents programmes gérés par le MAAP, on constate que le programme 154 conserve sa place prépondérante, acquise l’an passé grâce à la fusion opérée avec le programme 227, au sein de la mission Agriculture, dont il concentre 49 % des crédits en CP. L’ensemble des programmes compris dans cette mission représentent quant à eux près de 70 % du budget du ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, comme en témoigne le graphique ci-après.

B.— UN MINISTÈRE QUI TENTE DE MAINTENIR LE CAP DE SES PRIORITÉS

1. Pour une agriculture durable et compétitive

La dotation de la mission Agriculture pour 2010 doit permettre au Gouvernement de poursuivre la mise en œuvre des priorités arrêtées l’an dernier en faveur d’une agriculture durable et compétitive. La politique de soutien à l’installation des jeunes agriculteurs et la réalisation des objectifs arrêtés dans le cadre du Grenelle de l’environnement y occupent une place prépondérante. On constate toutefois que le financement des dispositifs visés dans le cadre de ces politiques n’est pas toujours à la hauteur de ce qui avait été annoncé l’an passé.

Les moyens consacrés à l’installation se situent pour 2010 à hauteur de 164,9 millions d’euros en AE et 152 millions d’euros en CP, ces derniers se décomposant comme suit : 6 millions d’euros pour les stages à l’installation, 79,7 millions d’euros pour les prêts à l’installation, 54,8 millions d’euros pour la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) et 11,5 millions d’euros pour le fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture (FICIA). On assiste ainsi à une progression de plus de 3 millions d’euros en CP et de près de 13 millions d’euros en AE qui concourt à une montée en puissance du soutien accordé par l’État encore plus rapide que ce qui était initialement envisagé dans le PLF 2009. À cet égard, on ne peut que regretter que l’objectif affiché l’an dernier de passer de 6000 à 7000 voire à 7 500 installations aidées par an ait été revu à la baisse et reste fixé à 6000. La raison invoquée est semble t-il liée à un moindre cofinancement communautaire : certains dossiers seraient finalement considérés comme « non éligibles » à un financement en provenance de l’Union européenne, ramenant ainsi le taux « réel » de cofinancement à 48 %, au lieu de 50 % voire 60 % ou 75 % outre-mer.

La mise en œuvre des dispositifs agricoles concourant à la réalisation des objectifs arrêtés dans le cadre du Grenelle de l’environnement se poursuivra également en 2010, avec notamment l’inscription dans la mission Agriculture :

– de 3 millions d’euros supplémentaires pour la conversion au mode de production biologique. 15 millions d’euros sur cinq ans devraient ainsi venir s’ajouter aux sommes déjà consacrées à la réalisation du plan Agriculture biologique : horizon 2012 dans le cadre des mesures « nouveaux défis » prises suite au bilan de santé de la PAC ;

– de 28 millions d’euros budgétés au titre de la réalisation du plan de performance énergétique des exploitations.

En revanche, force est de constater que la mobilisation des crédits du programme 149 pour mener à bien le plan chablis 2009 dans le Sud-Ouest obère quelque peu la capacité du MAAP à soutenir par ailleurs une « gestion plus dynamique de la filière bois » (1) conformément aux orientations arrêtés dans le cadre du Grenelle de l’environnement. S’agissant toutefois plus largement de l’action de l’État en faveur d’une plus grande mobilisation du bois, il faut noter, dans la continuité du discours d’Urmatt du Président de la République du 19 mai 2009, la création d’un fonds stratégique bois doté de 20 millions d’euros (2).

Des interrogations demeurent néanmoins sur certains dispositifs.

Ainsi, le plan pour la certification environnementale des exploitations, qui vise à engager 50 % des exploitations agricoles dans une démarche de certification environnementale d’ici 2012, n’a toujours pas démarré, le dispositif de certification devant lui-même être défini dans le cadre du projet portant engagement national pour l’environnement (article 42).

Quant au plan Ecophyto 2018, destiné à atteindre, si possible, une réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires de moitié d’ici 10 ans et à permettre, dans les meilleurs délais, le retrait des produits contenant les 53 substances actives les plus préoccupantes, votre rapporteur ne dispose d’aucune information sur sa mise en œuvre. Rappelons que seul un million d’euros est budgété annuellement sur les crédits du programme 206 pour assurer la compatibilité du retrait des produits phytopharmaceutiques avec la viabilité économique des exploitations, et notamment financer des recherches sur les cultures et usages dits « mineurs » ou « orphelins ». L’essentiel du financement de plan est en effet censé être assuré par le relèvement des taux de la redevance pour pollutions diffuses prévu à l’article 122 de la loi du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 qui dispose qu’une fraction du produit annuel de cette redevance est désormais versé à l’ONEMA (office national de l’eau et des milieux aquatiques) « afin de mettre en œuvre le programme national arrêté par le ministre chargé de l’agriculture, visant à la réduction de l’usage des pesticides dans l’agriculture et à la maîtrise des risques y afférents, en particulier à travers des actions d’information des utilisateurs de produits phytopharmaceutiques, des actions de mise au point et de généralisation de systèmes agricoles permettant de réduire l’utilisation des pesticides, des programmes et réseaux de surveillance sur les bio-agresseurs et sur les effets non intentionnels de l’utilisation des pesticides, notamment en zone agricole ». Un bilan précis et chiffré des sommes mobilisées dans ce cadre et des actions qu’elles ont permis de financer serait nécessaire pour apprécier l’évolution de ce plan pour lequel la mobilisation de 206 millions d’euros sur la période 2008-2011 avait été annoncée.

Enfin, la question des modalités de financement du plan de performance énergétique des exploitations (PPE) et même de la pérennité de ce financement ne peut être considérée comme réglée à ce jour.

Rappelons que dans le cadre du Plan de Relance de l’Économie, 30 millions d’euros en AE et 22 millions d’euros en CP ont été alloués en 2009 au ministère chargé de l’agriculture afin de lancer le plan de performance énergétique qui doit contribuer à « atteindre un taux de 30 % d’exploitations agricoles à faible dépendance énergétique d’ici 2013 ». Ces crédits ont été engagés en totalité au 30 juin 2009, permettant de mobiliser 188 millions d’euros d’investissements sur trois types d’action :

– la réalisation de 11 bancs d’essai moteurs, c'est-à-dire de tests sur des engins agricoles susceptibles de déboucher sur des préconisations permettant de réaliser des économies d’énergie (1,3 million d’euros) ;

– le financement de 83 projets de réalisation d’unités de méthanisation pour un montant total de 165 millions d’euros. Cette action a bénéficié de la mise en place d’un tarif de rachat de l’électricité issue de la méthanisation ainsi que d’une modification de la réglementation des installations classées (en cours) ;

– la réalisation de diagnostics énergétiques dans 1 067 exploitations agricoles afin d’encourager la réalisation d’investissements conduisant à des économies d’énergie dans les systèmes d’exploitation les plus consommateurs d’énergie, comme les bâtiments d’élevage. La participation des exploitants à hauteur de 60 % du coût des diagnostics est néanmoins à signaler.

Types d’investissement

Montant de la subvention (M€)

Coût total des investissements aidés (M€)

Nombre de projets soutenus

Exploitation agricole

11.2

22

1067

Bancs d’essais moteurs

1

1.3

11

Unités de méthanisation

17.8

165

83

Total

30

188

1162

Face au succès rencontré par ce dispositif et en l’absence de financement dédié, le Gouvernement a décidé de prolonger le PPE en 2010 en faisant reposer son financement sur le quart de la taxe carbone destiné à être « compensé » aux agriculteurs, les trois quarts de la taxe leur étant par ailleurs remboursés. Ce mode de financement n’est pas sans poser question.

Rappelons tout d’abord que l’article 31 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement prévoyait la mise en place par l’État « d’un crédit d’impôt pour la réalisation d’un diagnostic énergétique de l’exploitation agricole » : or, cette mesure ne figure ni dans le projet de loi de finances pour 2010 ni dans le projet de loi portant engagement national pour l’environnement. Par ailleurs, rien n’indique dans le projet annuel de performances pour 2010, où les crédits correspondants (38 millions d’euros en AE et 28 millions d’euros en CP) sont inscrits au sein de l’action 13 du programme 154, que ce mécanisme de financement soit pérenne, et ce d’autant plus que le principe du remboursement des trois quart de la taxe carbone aux agriculteurs et de la compensation du quart restant n’est pas non plus acquis. Le détail de la provenance de cette dotation serait à cet égard plutôt inquiétant : le MAAP indique en effet que 20,8 millions d’euros sont issus de la réserve au titre du bilan de santé de la PAC, 8,8 millions d’euros correspondraient aux « retours attendus de la taxe carbone versée par les agriculteurs » et 8,4 millions d’euros auraient été redéployés au sein du programme 154. Enfin, ces crédits seraient en tout état de cause insuffisants, les besoins de financement pour le PPE en 2010 étant évalués par le ministère de l’agriculture à 85 millions d’euros, comme le montre le tableau ci-après.

Type d’investissement

Descriptif

Montants des subventions

Besoin de financement annuel

Montants des investissements aidés annuellement

Nombre de projets soutenus par an

Diagnostics énergétiques

Objectif : réaliser 100 000 diagnostics pour 2013

10 M€

20 M€

20 000

Production d’énergie renouvelable (EnR)

Méthanisation et petites unités de production d’EnR dans les élevages (chauffe-eau solaire, séchage en grange…)

35 M€

145 M€

60 méthaniseurs + 2 000 projets d’EnR

Économies d’énergies

Développement des équipements d’économies adaptés aux exploitations agricoles

30 M€

88 M€

4 000

Productions sous les serres

Adaptation des productions sous serres, particulièrement sensibles à l’augmentation du coût de l’énergie

5 M€

12.5 M€

500

Tests Bancs d’essais moteur

Contrôle des machines agricoles sur les dysfonctionnements de consommation

5 M€

12.5 M€

25 000

Total

85 M€

278 M€

51 560

Quant à l’instauration d’une « contribution climat énergie » au niveau national, celle-ci appelle plusieurs remarques. La taxe carbone instituée à l’article 5 du projet de loi de finances pour 2010 au profit du budget de l’État est applicable aux « produits énergétiques mis en vente, utilisés ou destinés à être utilisés comme carburant ou combustible ». En décidant de son remboursement partiel aux agriculteurs, soulignons que le Gouvernement s’est précisément efforcé de concilier durabilité et compétitivité. L’article 7 du PLF 2010 précise à cet égard qu’« au titre de 2010, le montant du remboursement est égal à 75 % du tarif de la taxe carbone » et que « le remboursement fait l’objet d’un acompte versé au début de l’année ». Le principe même de l’assujettissement des agriculteurs et surtout des sylviculteurs à cette taxe peut néanmoins être légitimement discuté dans la mesure où, parallèlement, la contribution des cultures végétales et de la forêt au captage du carbone et, partant, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre n’est toujours pas reconnue et valorisée, bien que de nombreuses études aient été publiées à ce sujet (3). S’agissant des modalités concrètes de calcul de cette nouvelle contribution, on peut que s’étonner de voir figurer les biocarburants dans l’assiette de la taxe (4). Enfin, le remboursement partiel à hauteur de 75 % ne vaut que pour 2010 : qu’adviendra t-il en 2011 ? quel sera le rôle de la commission de suivi de la taxe carbone qui doit être créée afin d’évaluer l’efficacité de cette taxe et donner un avis sur la détermination de son assiette et l’évolution ? Aujourd’hui, ces questions restent entières.

2. Pour une administration efficace et mobilisée

Le ministère de l’alimentation, de l'agriculture et de la pêche est sans doute l’un des ministères les plus impliqués dans la réalisation des objectifs fixés par le Gouvernement dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). L’ambitieuse réforme de l’organisation de ses services et de ses principaux opérateurs qu’il mène depuis fin 2007 devrait générer des économies d’emplois, dont l’impact budgétaire, significatif à terme, est dans un premier temps compensé par les surcoûts liés aux réformes en matière d’immobilier et de formation continue.

S’agissant de l’année en cours, rappelons qu’au 1er avril 2009, deux fusions décidées lors du conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) du 12 décembre 2007 se sont concrétisées :

– d’une part, celle de l’Agence unique de paiement (AUP) et du Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) pour former l’Agence de services et de paiement (ASP), organisme unique de paiement dans le secteur agricole ;

– d’autre part, celle des principaux offices d'intervention agricoles (à l’exception de l’ODEADOM), auxquels s’est ajouté le Service des nouvelles des marchés (SNM), au sein d’un établissement unique France Agri Mer (établissement national des produits de l'agriculture et de la mer).

Si cette réforme, dont le premier objectif est bien de rationaliser l’intervention publique dans le domaine agricole, a pu être menée à bien avec succès, votre rapporteur souhaite néanmoins attirer l’attention sur la nécessité de donner à ces nouveaux établissements les moyens de fonctionner pleinement. Leur rôle est en effet crucial pour les exploitants, notamment pour le paiement des aides qui leur sont destinées. Or, il semblerait, d’une part, que le budget de l’ASP ait été sous-estimé cette année (voir infra le commentaire sur l’action 15 du programme 154) et, d’autre part, que les réductions d’effectifs imposés à France Agri Mer ne se traduisent in fine par des difficultés concrètes de l’établissement à mener à bien ses missions. Les objectifs de réductions d’emploi affichés (4 % par an, soit un passage de 1370 ETP à 1305 ETP entre fin 2009 et fin 2010) apparaissent en effet à la fois très sévères et mal cadencés avec l’opération de fusions des établissements. Des gains de productivité semblent difficilement pouvoir être réalisés dès la première année de fonctionnement de l’établissement qui a par ailleurs repris, sans aucune compensation, plusieurs nouvelles missions en 2009, dont deux seulement avaient été initialement décidées dans le cadre de la RGPP (5).

Suite aux décisions du CMPP du 11 juin 2008, cette dynamique de fusions se poursuivra en 2010 avec :

– le rapprochement des Haras Nationaux et de l’École nationale d’équitation (ENE) parallèlement au recentrage des Haras Nationaux sur ses seules missions de service public et son évolution vers un office du cheval permettant de mieux structurer la filière ;

– l’intégration de l’Inventaire forestier national (IFN) à l’Office national des forêts (ONF) ;

– la fusion du Centre national professionnel de la propriété forestière (CNPPF) et des Centres régionaux de la propriété forestière (CRPF) pour former un établissement national unique doté d'échelons régionaux ;

– la fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) avec l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET).

Les services déconcentrés du ministère poursuivront également la modernisation entamée en 2009. Les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche (DRAAF), pilotes des politiques publiques du MAAP en régions, ont ainsi été constituées au 1er janvier. Leurs missions ont été étendues à cette occasion, avec en particulier la création des services régionaux de l’alimentation (SRAL) qui assument désormais les missions relevant de la protection des végétaux et mettent en œuvre la politique d’offre alimentaire du ministère. Les délégations régionales de France AgriMer leur sont en outre intégrées, pour une plus grande mutualisation des fonctions support.

À l’échelon départemental, la réorganisation des services du MAAP s’inscrit dans un contexte de réforme plus général qui verra la création dès 2010 de directions départementales des territoires et de directions départementales en charge de la protection des populations. Les premières sont directement issues de la fusion entre les directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) et les directions départementales de l'équipement (DDE) au sein de directions départementales de l’équipement et de l’agriculture (DDEA) entamée depuis deux ans. Ce mouvement s’est étendu à 55 départements début 2009. Dans les futures DDT, les interventions dans le domaine de l’ingénierie concurrentielle seront supprimées d’ici fin 2011. Les économies réalisées à ce titre (environ 250 ETP par an) contribueront à la réduction des emplois en services déconcentrés et à leur redéploiement vers les missions désormais prioritaires, notamment celles relevant de l'agriculture durable et de la mise en œuvre des objectifs fixés par le Grenelle de l’environnement dans le domaine agricole. Enfin, les missions aujourd’hui assurées par les directions départementales des services vétérinaires (DDSV), seront exercées, dès 2010 également, au sein des nouvelles directions départementales en charge de la protection des populations (DDPP) ou directions départementales en charge de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP), en fonction des caractéristiques et des besoins locaux.

L’ensemble de ces réorganisations s’accompagne de la mise en œuvre d’un plan « Emplois Métiers Horizon 2012 » piloté par le service des ressources humaines du MAAP et destiné, selon les termes employés dans le projet annuel de performances à « placer les agents au cœur du dispositif de transformation du ministère ». Ce plan met en œuvre une démarche pluriannuelle très active de gestion des emplois et des métiers en identifiant les ressources disponibles, les opportunités de redéploiement interne et externe et les besoins de recrutement. Le MAAP vise ainsi, dans un cadre de réduction d’emplois contraint, à anticiper les besoins des services, à renforcer la professionnalisation des agents et à organiser les mobilités adaptées au développement des missions. Le plan se fonde sur un dispositif d’accompagnement individualisé des agents, qui paraît effectivement indispensable dans le cadre de la dynamique de réforme engagée.

II.— … MAIS UN BUDGET DÉJA DÉPASSÉ PAR L’AMPLEUR
DE LA CRISE QUE TRAVERSÉ LE MONDE AGRICOLE

A.— UN BUDGET À LA MERCI DES CRISES CONJONCTURELLES

1. Gestion des crédits et reports de charges en 2009

Face à la nécessité permanente de redéployer les moyens dont il dispose au sein de la mission Agriculture, le MAAP a tendance à utiliser comme variable d’ajustement les crédits destinés à faire face aux crises, utilisant pour cela un argument imparable : on ignore à l’avance l’ampleur des crises, climatiques, sanitaires ou économiques, susceptibles de survenir. Le projet de budget du ministère se caractérise donc généralement par une sous-estimation volontaire des crédits mobilisables en cas de crise au cours de l’exercice suivant, mais également par d’importants mouvements de crédits en gestion. En effet, face à l’urgence, le MAAP n’a d’autre choix que de dégager en gestion les fonds nécessaires : dans le meilleur des cas, grâce à des ouvertures de crédit (loi de finances rectificative, décrets d’avance), dans le moins bon, par des redéploiements impliquant a priori l’existence de marges de manœuvre dans un budget cependant calibré au plus juste et, dans le pire des cas, par un transfert de charges sur d’autres acteurs (les établissements payeurs par exemple).

Cette pratique contribue en outre à alimenter les reports de charges qui, fin 2007, atteignaient le milliard d’euros. Grâce à un meilleur calibrage de ses besoins, le MAAP est toutefois parvenu à réduire considérablement le montant de ces reports, qui étaient évalués à 554,7 millions d’euros fin 2008, somme qui reste néanmoins conséquente. En milieu d’année, les reports de charges prévisibles pour 2009 étaient estimés à 334,7 millions d’euros, dont 290 millions d’euros au titre du seul programme 154. En dépit d’une réduction de ces reports de près de 50 % par rapport à l’an passé, votre rapporteur constate qu’il n’y a eu aucune résorption des reports affectant le dispositif des aides aux départs et même une augmentation des reports concernant les apurements communautaires, qui se chiffrent désormais à plus de 194 millions d’euros.

En 2009, les mouvements de crédits ont été nombreux. On observe ainsi que la dotation nette au 30 juillet 2009 de la mission Agriculture se monte à 3,4 milliards d’euros en AE et 3,6 milliards d’euros en CP, pour une LFI 2009 votée de 3,2 milliards d’euros en AE et 3,4 milliards d’euros en CP. L’écart, qui se chiffre à environ 209 millions d’euros en AE et 171 millions d’euros en CP, est dû à la fois à des reports de crédits de 2008 sur 2009, à des rattachements de fonds de concours mais également à des ouvertures de crédits. 125,36 millions d’euros en AE et 83,11 millions d’euros en CP ont notamment été ouverts par la loi de finances rectificative pour 2009 du 20 avril 2009 afin de financer les premières mesures de soutien au secteur forestier suite au passage de la tempête Klaus (108,9 millions d’euros en AE et 70,1 millions d’euros en CP sur le programme 149) et rembourser une partie de la dette du service public de l’équarrissage avant le transfert effectif de la gestion et du financement de l’équarrissage aux filières (16,3 millions d’euros en AE et 12,9 millions d’euros en CP sur le programme 206). 30 millions d’euros en AE et 15,8 millions d’euros en CP ont en outre été ouverts par les décrets de transferts n° 2009-209 du 19 février 2009 et n° 2009-591 du 25 mai 2009 au titre du plan de relance de l’économie (30 millions d’euros en AE et 14,6 millions d’euros en CP sur le programme 154 + 1,2 million d’euros en CP sur le programme 215).

S’agissant des autres mouvements de crédits intervenus en cours d’année, rappelons tout d’abord qu’une mise en réserve de crédits s’est appliquée dès l’entrée en vigueur de la loi de finances initiale par application d’un taux de gel de 5 % pour les crédits de fonctionnement, d’investissement et d’intervention et de 0,5 % pour les crédits de personnel. Le montant de la mise en réserve sur les crédits de la LFI 2009 s’est ainsi élevé à 99,2 millions d’euros en AE et 111,7 millions d’euros en CP sur les programmes de la mission Agriculture. Au cours des sept premiers mois de l’année, un certain nombre de mesures de « dégel » ont dû être prises ramenant le niveau de la réserve à 10,2 millions d’euros en AE et 11,4 millions d’euros en CP. Les crédits dégelés ont notamment permis de financer : les mesures du plan chablis 2009 (6,7 millions d’euros en CP sur le programme 149) ; les aides économiques accordées dans le cadre de la lutte contre la fièvre catarrhale ovine (FCO), des aides annoncées lors de la conférence sur le revenu et des aides attribuées au secteur agricole après le passage de la tempête Klaus (78 millions d’euros en CP sur le programme 154) ; le financement de vaccins contre le sérotype 1 de la FCO, de dépenses relatives à la tremblante des petits ruminants et de l’amende due au titre de la condamnation de la France dans le cadre du contentieux relatif à la transposition de la législation communautaire sur les OGM (11,5 millions d’euros).

S’agissant des principaux redéploiements de crédits internes aux programmes composant la mission Agriculture, on signalera notamment le redéploiement au sein du programme 149, dans le cadre du plan chablis 2009, de 19,6 millions d’euros pour les prêts bonifiés, de 4,81 millions d’euros pour la desserte des pistes forestières et de 19,75 millions d’euros pour les aides d’urgence aux scieries. Sur le programme 154, on notera principalement l’abondement des crédits du fonds d’allègement des charges, initialement doté de 8 millions d’euros, à hauteur de 51,77 millions d’euros pour le financement de la conférence sur le revenu et des aides pour le secteur agricole suite au passage de la tempête Klaus.

Enfin, il faut signaler qu’un certain nombre de mesures annoncées par le Gouvernement depuis l’été devront également être financées en 2009 sans que l’on sache encore très bien comment. Il en est ainsi des 30 millions d’euros débloqués pour soutenir la trésorerie des producteurs de lait (juin 2009), des 15 millions d’euros accordés dans le cadre d’un plan de soutien immédiat à la filière fruits et légumes (août 2009) et des 30 millions d’euros supplémentaires annoncés pour toutes les filières d’élevage lors du salon des productions animales de Rennes (septembre 2009). S’y ajoutent désormais les aides promises par le Président de la République dans son discours de Poligny du 27 octobre, celui-ci ayant annoncé que le plan exceptionnel de soutien mis en place au profit des agriculteurs serait « engagé dans son intégralité avant la fin de l’année 2009 ». 200 millions d’euros d’allègement de charges d’intérêts d’emprunts et d’aides à la restructuration ont notamment été prévus à ce titre, qui nécessiteront vraisemblablement l’intervention d’une loi de finances rectificative. L’ensemble de ces mesures « rétroactives » laisse toutefois entière la question du calibrage des dispositifs de crise dans le projet de budget pour 2010.

2. Des dispositifs insuffisamment dotés en loi de finances initiale

Comme l’a indiqué le rapporteur spécial sur la mission Agriculture dans son commentaire du rapport annuel de performances pour 2007 : « Le MAP ne dispose pas en début d’exercice des crédits nécessaires pour gérer les crises qui ne manquent pas de survenir chaque année dans le monde agricole. (…) Dépourvu de moyens suffisants pour gérer [ces] crises, le MAP se voit contraint de recourir à des mesures de gestion interne, qui se révèlent insuffisantes. En effet, elles ne font que déplacer les problèmes de sous-budgétisation » (6). Ce constat risque de se révéler malheureusement une nouvelle fois exact en 2010. En effet, force est de constater que, dans le contexte de crise profonde que traverse l’agriculture aujourd’hui, plusieurs dispositifs clés apparaissent insuffisamment dotés dans le cadre du PLF 2010, sans compter que le MAAP se trouve aujourd’hui privé d’un certain nombre de leviers d’action suite aux décisions prises dans le cadre de la RGPP.

La première remarque de votre rapporteur portera sur les crédits d’intervention de France Agri Mer inscrits sur l’action 12 du programme 154 : 126 millions d’euros sont ainsi prévus pour 2010 en crédits de paiement, soit une baisse de 13,6 % par rapport à 2009. Comment interpréter cette baisse : s’agit-il d’une diminution ponctuelle, toutefois inexplicable en raison du contexte actuel, ou d’une nouvelle « base » pour cette dotation ? Rappelons en effet que dans le projet annuel de performances pour 2007, les crédits d’intervention des offices agricoles (qui sont désormais rassemblés au sein du nouvel établissement France Agri Mer) atteignaient 170 millions d’euros. Cette dotation est ensuite passée, pour des raisons techniques, à 106 millions d’euros dans la loi de finances pour 2008 (7) avant de reconnaître un « rebasage » à hauteur de 146 millions d’euros en 2009. La baisse enregistrée cette année est donc particulièrement inquiétante. On notera d’ailleurs que si, au sein de la dotation globale de France Agri Mer, les crédits consacrés aux mesures de crise sont quasiment multipliés par neuf, cette évolution est avant tout la conséquence d’une sous dotation patente dans la loi de finances pour 2009. En effet, sur une dotation initiale d’environ 5,5 millions d’euros, la consommation réelle des crédits en 2009 devrait avoisiner les 160 millions d’euros dont plus de la moitié (70 millions d’euros) aura été financée par France Agri Mer, par redéploiement et prélèvement sur les réserves de l’établissement. Outre le fait que les ressources France Agri Mer ne permettront pas de réitérer cette expérience l’an prochain, il serait de meilleure politique de doter l’établissement d’une somme raisonnable et réaliste en début d’exercice, ne serait-ce que pour le responsabiliser dans la gestion des crises et en faire une force de proposition auprès du ministre en cas de crise.

S’agissant toujours de l’action 12 du programme 154, on ne peut que s’étonner que les crédits abondant le dispositif AGRIDIFF soient de nouveau en baisse à 3,75 millions d’euros. Rappelons que ce dispositif bénéficiait encore en 2007 d’une dotation de 10 millions d’euros en CP, avant que celle-ci ne diminue brutalement de moitié en 2008 et poursuive depuis inexorablement sa chute. Il s’agit cependant d’un dispositif particulièrement pertinent dans un contexte où le nombre d’exploitations endettées explose, puisqu’il permet d’accorder une aide sous forme de prise en charge de frais bancaires. Il en va de même du fonds d’allègement des charges (FAC) qui bénéficie pour 2010 d’une dotation identique à celle de l’an passé à hauteur de 8 millions d’euros. Alors que le réseau des centres d’économie rurale estime que 15 % des exploitations laitières nécessiteront une restructuration dans les mois à venir, il est difficile d’imaginer que cette ligne sera suffisante. Enfin, signalons que la suppression des prêts de crise est confirmée avec l’absence de dotation de ce dispositif en autorisations d’engagement pour 2010 et une dotation en crédits de paiement qui n’a d’autre objet qu’honorer les engagements pris jusqu’au 31 décembre 2008. Cette dotation est en outre en diminution à 25,6 millions d’euros contre 30 millions budgétés en 2009. Chose curieuse, le projet annuel de performances précise que le dispositif a été remplacé en 2009 par un « dispositif d’allègement des charges » : or, s’il est vrai que les crédits abondant le FAC ont été multipliés par deux en 2009, leur stagnation ne permettra de remplacer totalement ce dispositif.

Enfin, on assiste également à une diminution mécanique des crédits finançant les aides au départ inscrites au sein de l’action 13 du programme 154. Leur dotation tombe ainsi à 62 millions d’euros en crédits de paiement, contre 71 millions d’euros en 2009 et 80 millions d’euros en 2008. S’agissant de l’IVD (indemnité viagère de départ), celle-ci ne compte plus de nouveaux entrants depuis 1990 et le nombre de bénéficiaires est en baisse de 7 % environ chaque année. L’arrêt des autres dispositifs est cependant plus récent et résulte des décisions prises dans le cadre de la RGPP. Ainsi, après la suppression de l’aide à la transmission (ATE), du congé formation institué par la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006 et du dispositif de préretraite, ne subsistent plus au titre des aides à la cessation d’activité que l’aide à la réinsertion professionnelle (IRP) et deux mesures spécifiques aux départements d’outre-mer (la préretraite et l’indemnité de retrait volontaire qui ne s’applique en outre qu’en Guadeloupe) : celles-ci ne mobiliseront donc en 2010 que 3 millions d’euros en AE et 8,8 millions d’euros en CP. La poursuite du désengagement de l’État du financement des mesures de cessation d’activité ne laisse toutefois pas d’étonner. La mesure préretraite avait en effet une utilité sociale importante en permettant aux exploitants agricoles contraints de cesser leur activité, notamment en raison des crises, de partir à la retraite par anticipation. Elles concouraient en outre indirectement à la réalisation des projets d’installation des jeunes agriculteurs. Le maintien de la suppression de ce dispositif entraîne donc un vide important dans l’éventail des mesures susceptibles d’être mises en œuvre par le MAAP pour apporter des réponses à la crise. Par ailleurs, comme le souligne l’APCA (Assemblée permanente des chambres d’agriculture), « avec la suppression de la plupart des aides au départ, c’est un pan entier de la politique de la transmission qui a disparu ».

B.— DES FLUCTUATIONS MARQUÉES AU SEIN DE CHAQUE PROGRAMME

Face à la nécessité de maintenir les crédits du MAAP dans des marges cohérentes avec les objectifs de réduction de la dépense et du déficit publics fixés par le Gouvernement et, parallèlement, à l’impératif de financer un certain nombre de dépenses inéluctables, les crédits inscrits sur le budget du ministère de l’agriculture n’évoluent pas de manière linéaire mais ont tendance à fluctuer au gré des années, en fonction des priorités du moment, nationales ou communautaires, et des besoins de financement qui se font jour. L’action 16 du programme 154 qui retracent les crédits en faveur de la pêche ou encore les actions 01 (production végétale) et 03 (denrées alimentaires) du programme 206 en témoignent tout particulièrement, qui connaissent d’une année sur l’autre des baisses brutales suivies de hausses tout aussi conséquentes. Le projet annuel de performance (PAP) pour 2010 n’échappe pas à cette observation. Or, s’il apparaît difficile de faire la part dans ces évolutions entre ce qui est dû à la conjoncture et ce qui relève uniquement d’une « gestion de la pénurie », force est néanmoins de constater que cette situation ne permet pas aux acteurs économiques d’évoluer dans un cadre économique et juridique stable et prévisible.

1. Le programme 154 Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires

PRÉSENTATION ET ÉVOLUTION PAR ACTION DU PROGRAMME

Numéro et intitulé de l’action

AE
LFI 2009

AE
PLF 2010

Évolution

CP
LFI 2009

CP
PLF 2010

Évolution

154

Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires

 

11

Adaptation des filières à l’évolution des marchés

417 653 028

443 073 728

6 %

416 240 262

431 960 962

3,8 %

12

Gestion des crises et des aléas de la production

44 000 000

49 100 000

11,6 %

74 600 000

75 530 000

2 %

13

Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles

276 323 326

291 254 431

5,4 %

310 358 556

302 180 604

– 2,6 %

14

Gestion équilibrée et durable des territoires

406 013 346

552 887 450

36,2 %

549 841 876

524 199 180

– 4,7 %

15

Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions

270 665 549

274 631 239

1,5 %

270 665 549

274 631 239

1,5 %

16

Gestion durable des pêches et de l’aquaculture

162 462 270

52 460 000

– 67,7 %

133 997 270

84 840 000

– 36,7 %

 

TOTAUX

1 577 117 519

1 663 406 848

5,5 %

1 755 703 513

1 693 341 985

– 3,5 %

Source : Projet annuel de performance, PLF 2010.

Les dotations du programme 154 connaissent pour 2010 une évolution particulièrement contrastée avec, d’une part, une hausse en autorisations d’engagement (AE) de près de 5,5 % à laquelle correspond une baisse en crédits de paiement (CP) à hauteur de 3,5 % et, d’autre part, des fluctuations importantes au sein de chaque action. En autorisations d’engagement, la plupart des actions du programme bénéficient d’une revalorisation conséquente allant de 5,4 % pour l’action 13 à 36,2 % pour l’action 14. Seuls les moyens de mise en œuvre des politiques publiques (action 15) progressent peu (1,46 % en AE et CP). En crédits de paiement, les baisses s’imputent sur les actions 13, 14 et surtout 16.

Les crédits consacrés à la pêche et à l’aquaculture (action 16) diminuent en effet fortement en raison de l’arrivée à échéance du plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) : la baisse est toutefois plus sensible en AE (-67,7 %) qu’en CP (-36,68 %) dans la mesure où certains paiements se poursuivront en 2010. La représentation nationale doit pouvoir disposer rapidement d’un bilan chiffré de ce plan qui a mobilisé d’importants moyens sur une durée éclair (310 millions d’euros sur trois ans) afin, non seulement, de soutenir les pêcheurs dans une nouvelle période de hausse des prix du gasoil mais également de mettre en œuvre des mesures économiques structurantes et d’initier de nouvelles pratiques. À cet égard, il conviendrait de s’interroger sur l’opportunité de pérenniser les dispositifs relevant du chapitre écologique et halieutique du PPDR, comme les contrats bleus, plus que jamais pertinents dans un contexte où la gestion de la ressource constitue désormais un aspect incontournable de la politique de la pêche. Il est malheureusement difficile de savoir, à la seule lecture du projet annuel de performance, si ces dispositifs seront maintenus, au moins en 2010, voire au-delà. S’agissant des autres postes de dépense au sein de cette action, on notera que la seule hausse de crédits notable pour 2010 concerne l’installation de journaux de bord électroniques sur les navires de pêche conformément aux obligations fixées par les règlements 1966/2006 du Conseil et 1566/2007 de la Commission : celle-ci se poursuivra l’an prochain avec l’équipement des navires dont la longueur est comprise entre 15 et 24 mètres et mobilisera 10,8 millions d’euros en crédits de paiement (contre 2,3 millions d’euros en 2009).

S’agissant de l’action 11 du programme, les hausses de crédits prévus dans le PAP pour 2010 à hauteur de 6 % en AE et 3,7 % en CP sont dues essentiellement à la montée en charge du dispositif « sucre des DOM » (de 56 millions d’euros en CP prévus en 2009 à 90 millions d’euros inscrits pour 2010). Les dotations consacrées au financement de la PNSVA (prime nationale supplémentaire à la vache allaitante), à la génétique animale et à la promotion des signes de qualité sont stables. On peut en revanche s’interroger sur la diminution de la dotation du fonds pour les investissements stratégiques des industries agroalimentaires (- 1 million d’euros en autorisations d’engagement) et surtout des crédits d’intervention de France Agri Mer (- 20 millions d’euros).

Ces remarques valent également pour les dispositifs de crise (Agridiff, fonds d’allègement des charges, charges de bonification des prêts de crise) dont les crédits sont retracés au sein de l’action 12 qui, comme les années précédentes, ne comprend aucune dotation pour le FNGCA (fonds national de garantie des calamités agricoles). Rappelons cependant que sur les trois dernières années (2006, 2007, 2008), le budget annuel du fonds a varié entre 200 et 250 millions d’euros dont 90 millions d’euros de cotisations professionnelles qui appellent, en principe, une participation de l’État à parité. Si une section sanitaire devait être créée au sein du FNGCA, conformément aux orientations dégagées dans le cadre du bilan de santé de la PAC, il conviendrait de se saisir de cette opportunité pour améliorer la pratique budgétaire. Enfin, signalons que la dotation consacrée au développement de l’assurance récolte augmente de plus de 6 millions d’euros (AE=CP). En outre, à partir de 2010, une partie des primes des contrats d’assurance pourra désormais être également financée par des crédits communautaires, portant le taux de prise en charge publique à 65 %. On soulignera néanmoins que les objectifs cibles en matière de taux de pénétration de l’assurance récolte ont été revus à la baisse dans le PAP pour 2010 : ainsi, alors que l’an passé, on envisageait pour 2011 une couverture par l’assurance récolte à hauteur de 25 % dans le secteur des cultures fruitières et de 40 % dans la viticulture, ces chiffres ont été ramenés respectivement à 15 % et 29 %. Les objectifs ont en revanche été relevés pour les grandes cultures, passant de 40 à 49 %. Parallèlement, le Gouvernement compte sur une montée en puissance du dispositif de la dotation pour aléas (DPA) rénovée cette année (8) : le coût de la dépense fiscale est en effet estimé à 100 millions d’euros pour 2010 contre 1 million d’euros seulement en 2009. Une extension du mécanisme de la DPA aux aléas économiques pourrait en outre être autorisée dans le cadre du projet de loi de modernisation agricole.

S’agissant de la baisse des crédits retracés au sein de l’action 13 de 2,6 % en CP, elle est imputable à la décrue des dispositifs n’acceptant plus de nouveaux entrants, telle l’indemnité viagère de départ (IVD), ou dont il a été décidé de réduire la voilure dans le cadre de la RGPP (maintien du dispositif de préretraite uniquement dans les DOM, limitation des prêts de modernisation aux seuls MTS-CUMA). En revanche, il faut souligner, d’une part, le soutien continu aux dispositifs en faveur de l’installation avec 146 millions d’euros en crédits de paiement pour les prêts à l’installation, la DJA (dotation jeune agriculteur) et le FICIA (fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture), et, d’autre part, la forte hausse des crédits consacrés à la modernisation des exploitations avec l’inscription de 28 millions d’euros en CP au titre du financement du plan de performance énergétique des exploitations (PPE).

Les crédits de l’action 14 sont ceux qui enregistrent la hausse la plus importante en autorisations d’engagement à 36,2 % tout en subissant une diminution importante en crédits de paiement, de 4,6 %. La hausse des AE est essentiellement due aux 135 millions d’euros budgétés au titre de la mesure rotationnelle, relancée dans le cadre du bilan de santé de la PAC pour une durée de cinq ans. Rappelons en effet que l’an passé, seuls 3 millions d’euros en crédits de paiement avaient été prévus pour le financement de cette mesure qui ne faisait plus l’objet de nouveaux engagements depuis 2008 ; cette dotation passe à 29,5 millions d’euros cette année dont 27 millions pour la souscription de nouveaux contrats dans le cadre d’un cahier des charges rénové. Cette mesure est cofinancée par l’Union européenne à hauteur de 55 %, ce qui permettra d’y consacrer au total 300 millions d’euros. Il convient également de noter la hausse des crédits finançant les ICHN (indemnités compensatoires de handicaps naturels) correspondant à la revalorisation longtemps attendue des 25 premiers hectares à 50 % ; cette dotation passe ainsi de 235 à 248 millions d’euros (AE = CP). Les crédits inscrits au titre des mesures agro environnementales régionales augmentent également en AE, alors qu’une contraction en CP est observée : celle-ci serait cependant technique, afin de tenir compte de la hausse du taux de cofinancement communautaire de 55 à 75 % pour l’ensemble des mesures mises en œuvre dans les zones Natura 2000. La dotation 2010 comprend néanmoins 3 millions d’euros supplémentaires destinés spécifiquement à financer les mesures de conversion à l’agriculture biologique. Plus généralement, s’agissant des crédits de paiement, on assiste sur cette action comme sur les autres à la diminution des moyens consacrés à un certain nombre de dispositifs « en fin de vie », tels le PMPOA ou le financement par l’État des travaux d’hydraulique agricole, dont le conseil de modernisation des politiques publiques du 11 juin 2008 a décidé de l’arrêt. Enfin, il convient de s’arrêter un instant sur l’absence de dotation en autorisations d’engagement pour la PHAE (prime herbagère agro environnementale) en 2010 ainsi que sur la réduction de moitié des crédits de paiement inscrits dans le projet annuel de performances. L’absence de dotation en AE traduit la volonté du Gouvernement de ne pas renouveler les contrats PHAE à partir de 2010, en raison de la création d’une nouvelle prime à l’herbe au sein du 1er pilier de la PAC conformément aux décisions du bilan de santé. Force est néanmoins de constater que ce soutien, qui bénéficiera d’un effort sans précédent à hauteur de 700 millions d’euros, ne s’appliquera pas tout à fait aux mêmes exploitations que celles qui relèvent aujourd’hui de la PHAE. Cette aide sera en effet versée à taux maximal pour un seuil de chargement de 0,8 ugb/ha et sera ensuite dégressive entre 0,8 et 0,5 ugb/ha. Or ces critères d’éligibilité risquent d’écarter d’emblée du dispositif certaines zones typiques d’élevage de montagne aujourd’hui éligibles à la PHAE, qui sont les plus extensives, avec des taux de chargement inférieurs à 0,5 ugb (9). S’agissant en revanche des crédits de paiement pour 2010, le projet annuel de performance indique le dispositif sera désormais cofinancé à hauteur de 75 % par le FEADER, alors que son coût reposait uniquement sur le seul budget national depuis 2009: ainsi, ce seront quelques 240 millions d’euros qui pourront mobilisés dans ce cadre en 2010 dont 60 millions d’euros à la charge de l’État.

Enfin, en ce qui concerne l’action 15, au sein de laquelle sont retracés les moyens de fonctionnement des opérateurs du programme, les crédits augmentent en AE comme en CP de 1,5 %, permettant notamment une revalorisation des dotations de France Agri Mer et de l’ODEADOM, d’une part, de l’Agence de services et de paiement (ASP) et de l’ODARC, d’autre part. S’agissant plus particulièrement des crédits de fonctionnement de l’ASP, l’ajustement opéré dans le PLF 2010 (+ 10 millions d’euros) était attendu afin de répondre aux besoins de cet établissement désormais unique payeur des aides agricoles de la PAC. Rappelons en effet que le budget prévisionnel de l’ASP pour 2009, calculé sur douze mois avec application de règles de proratisation visant à tenir compte de sa mise en place officielle au 1er avril, avait été largement sous-estimé. En dépit d’une décision modificative à l’état prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD) intervenue le 25 juin 2009 portant la dotation du MAAP à 94,2 millions d’euros, l’EPRD est ressorti en déficit de 7,4 millions d’euros (contre 3,5 millions d’euros approuvé dans l’EPRD initial). Il s’est en outre avéré que la capacité de financement de l’établissement (à hauteur de 1,8 million d’euros) était insuffisante pour couvrir les opérations en capital prévues au titre de l’exercice. Un important prélèvement sur le fonds de roulement de l’établissement (21 millions d’euros) a dû être opéré à hauteur de 15,7 millions d’euros. Au total, après la décision modificatrice de juin, la capacité de financement de l’établissement est devenue une insuffisance de financement à hauteur de 3 millions d’euros.

2. Le programme 149 Forêt

PRÉSENTATION ET ÉVOLUTION PAR ACTION DU PROGRAMME

Numéro et intitulé de l’action

AE LFI 2009

AE
PLF 2010

Évolution

CP
LFI 2009

CP
PLF 2010

Évolution

149

Forêt

 

01

Développement économique de la filière forêt – bois

37 015 065

31 238 883

– 15,6 %

36 951 244

36 409 707

– 1,5 %

02

Régime forestier et patrimoine forestier domanial

162 613 999

163 680 175

0,6 %

172 454 862

167 736 388

– 2,7 %

03

Amélioration de la gestion des forêts

48 997 897

134 805 191

183,3 %

56 653 820

98 548 751

73,9 %

04

Prévention des risques et protection de la forêt

42 235 020

39 005 019

– 7,6 %

42 229 517

38 031 884

– 9,9 %

 

TOTAUX

290 861 981

368 729 268

26,7 %

308 289 443

340 726 730

10,5 %

Source : Projet annuel de performance, PLF 2010.

Comme l’indique clairement le tableau qui précède, la formidable hausse de la dotation du programme Forêt pour 2010, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, est exclusivement concentrée sur l’action 03 du programme : toutes les autres actions subissent a contrario des diminutions plus ou moins importantes de crédits.

C’est en effet sur l’action 03 que sont regroupés les financements accordés par le MAAP dans le cadre du plan chablis 2009 mis en œuvre suite au passage de la tempête Klaus dans le Sud-Ouest le 24 janvier dernier. 120 millions d’euros en CP ont déjà été consacrés à la réalisation de ce plan en 2009 soit par le biais d’ouverture de crédits (70 millions d’euros inscrits en loi de finances rectificative) soit grâce à des redéploiements internes et des mesures de dégels (50 millions d’euros). Si la ventilation précise de ces crédits sur les différents volets du plan chablis n’a pas été communiquée à votre rapporteur, il constate néanmoins qu’aucune dotation n’est prévue en 2010 pour le financement de la création d’aires de stockage et des aides au transport : il en conclut que l’enveloppe qui devait y être consacrée a été consommée. Or, comme le suggérait Jean-Pierre Nicolas dans son rapport d’information sur la tempête Klaus présentée à la commission des affaires économiques le 15 juillet dernier (10), il conviendrait peut-être de s’interroger sur l’opportunité d’engager dans les appels à projets une nouvelle enveloppe d’aides au transport (11), en particulier au transport de plaquettes forestières, débouché quelque peu négligé dans le cadre de ce plan. Cette démarche permettrait de « compenser » un moindre engagement en 2009 de l’enveloppe initialement envisagée pour la mise en œuvre des prêts bonifiés, qui n’a pas permis d’atteindre les objectifs fixés en matière de stockage. Alors que les possibilités de valorisation par les industries locales s’amenuisent en raison de la dépréciation des bois chablis, il ne faut pas négliger les actions s’appuyant sur des débouchés extérieurs qui, bien que moins structurantes pour la filière, permettraient de relancer la mobilisation du bois.

Au total, les crédits inscrits sur l’action 03 du programme 149 (105,3 millions d’euros en AE et 50,4 millions d’euros en CP) devraient contribuer à financer en 2010 :

– les charges de bonification versées aux établissements de crédits au titre des prêts bonifiés à 1,5 % accordés dans le cadre d’appels à projets : un peu plus de 8 millions d’euros en CP sont prévus à ce titre ;

– la participation de l’État au renforcement des moyens en personnel des structures d’animation et d’appui technique de la filière forêt-bois (« emplois tempête ») à hauteur de 2 millions d’euros (AE = CP) ;

– les aides au nettoyage des parcelles sinistrées à plus de 40 %, qui bénéficieront d’une dotation de plus de 30 millions d’euros en CP permettant de lancer des chantiers de nettoyage sur 40 000 hectares ;

– les aides à la reconstitution, pour lesquelles 10 millions d’euros en CP sont prévus.

S’agissant de l’action 01 du programme, la diminution constatée des crédits s’impute principalement sur les aides à l’investissement accordées aux scieries (7 millions d’euros en crédits de paiement, en baisse d’un peu plus de 2 millions d’euros) en raison de l’arrivée à échéance du plan de relance de la compétitivité des scieries (2007-2009), pour lequel un bilan précis est attendu. Dans le cadre de l’action 02, 144 millions d’euros seront versés en 2010 à l’ONF au titre de ses charges de service public, conformément aux engagements pris dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens (COM) signé entre l’État et l’établissement pour la période 2007-2011. S’y ajouteront plus de 18 millions d’euros correspondant à la participation de l’État au financement de l’augmentation du taux de cotisation des pensions civiles des personnels fonctionnaires de l’ONF. Les transferts de crédits nécessaires à la couverture des engagements passés avec l’ONF pour la réalisation des travaux de reconstitution postérieurs au passage des tempêtes de 1999 dans les forêts domaniales sont quant à eux, logiquement, en diminution d’environ 50 %. Enfin, l’action 04, qui a pour objet de contribuer à la prévention des risques et à la protection de la forêt, connaît pour 2010 une très importante baisse de sa dotation (de plus de 7 % en AE et de près de 10 % en CP). On ne peut que regretter cette évolution qui concerne la quasi-totalité des postes de dépense au sein de l’action. On notera tout particulièrement la diminution des subventions versées par l’État aux collectivités locales pour le financement des travaux de restauration des terrains de montagne (-35 %) et celles versées à l’ONF pour la réalisation de missions d’intérêts général (organisation de la défense de la forêt contre les incendies – DFCI – en région méditerranéenne, dunes littorales, interventions dans les départements d’outre-mer, etc…). Le projet annuel de performances pour 2010 précise à cet égard que cette diminution, à hauteur de 1,7 million d’euros par an, est conforme au COM de l’établissement qui prévoit une internalisation progressive de ces missions.

3. Le programme 206 Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

PRÉSENTATION ET ÉVOLUTION PAR ACTION DU PROGRAMME

Numéro et intitulé de l’action

AE LFI 2009

AE
PLF 2010

Évolution

CP
LFI 2009

CP
PLF 2010

Évolution

206

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

 

01

Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

16 552 911

19 834 803

19,8 %

19 503 827

21 334 803

9,4 %

02

Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

104 045 746

109 980 147

5,7 %

104 942 413

110 876 814

5,6 %

03

Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

26 365 000

21 533 433

– 18,3 %

26 365 000

21 533 433

– 18,3 %

04

Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires

54 430 263

57 757 708

6,1 %

54 430 263

57 757 708

6,1 %

05

Élimination des farines et des coproduits animaux

30 200 000

22 800 000

– 24,5 %

82 330 000

40 700 000

– 50,6

06

Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaire de l’alimentation

290 148 552

307 427 499

5,9 %

289 670 969

307 630 832

6,2 %

08

Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

2 233 000

2 961 000

32,6 %

2 233 000

2 961 000

32,6 %

 

TOTAUX

523 975 472

542 294 590

3,5 %

579 475 472

562 794 590

– 2,9 %

Source : Projet annuel de performance, PLF 2010.

La première remarque qui s’impose concernant la dotation du programme 206 pour 2010 est la diminution très importante des crédits de paiement des actions 03 et 05. Signalons d’emblée que celle-ci ne constitue pas une coupe budgétaire mais est le résultat des actions engagées depuis plusieurs années par le MAAP afin d’atteindre un meilleur état sanitaire des élevages et trouver une solution viable aux problèmes de l’équarrissage et des farines animales. Ainsi, la politique de lutte contre les salmonelles en élevage ayant largement porté ses fruits, comme le prouve l’indicateur 3.1 du programme, les transferts prévus au titre de l’indemnisation des éleveurs en cas d’abattage des troupeaux diminuent de près de 3 millions d’euros au sein de l’action 03. On signalera également la diminution des moyens consacrés aux inspections sanitaires, avec le transfert de la ligne consacrée aux visites sanitaires en élevage porcin vers l’action 02.

En ce qui concerne l’action 05, la baisse de moitié des crédits de paiement et du quart des autorisations d’engagement pour 2010 est imputable :

– d’une part, au transfert de la gestion et du financement de l’équarrissage aux filières (opéré par la loi de finances pour 2009 et effectif depuis le 18 juillet), qui laisse à la charge de l’État le service public résiduel (12) géré par France Agri Mer pour 5 millions d’euros par an ainsi que l’apurement de la dette du SPE vis-à-vis des équarrisseurs (20 millions d’euros en CP sont prévus à ce titre en 2010, le solde, y inclus les intérêts, devant être versé en 2011) ;

– et, d’autre part, à la résorption du stock des farines animales qui permet d’envisager une dotation en AE à hauteur de 4 millions d’euros seulement afin de couvrir le loyer d’un entrepôt au Havre et de 15,7 millions d’euros en CP pour financer le déstockage supplémentaire de 130 000 tonnes de farines l’an prochain, la location des sites restant à déstocker ou à nettoyer et leur remise en état après déstockage.

Ainsi, si l’on fait abstraction des deux actions dont nous venons de parler, on constate que les crédits du programme 206 sont en forte progression pour 2010. Les crédits de l’action 01 augmentent nettement (de près de 20 % en AE et 10 % en CP), principalement en raison de la situation sanitaire dans le domaine végétal qui oblige à renforcer les moyens consacrés à la gestion des foyers et à prévoir des transferts supplémentaires au titre de l’indemnisation des producteurs en cas d’arrachage (3 millions d’euros pour 2010 contre 1,6 million d’euros en 2009). La lutte contre la sharka et la chrysomèle figurent au premier rang de ces mesures. Dans le même ordre idée, la surveillance du territoire et la lutte préventive bénéficient d’une revalorisation des transferts aux fédérations régionales de défense contre les organismes nuisibles (FREDON) pour la prospection et le suivi des organismes de lutte obligatoire : à hypothèse identique (réalisation de 55 plans de surveillance), la dotation passe de 3,8 millions d’euros en 2009 à 4,6 millions d’euros pour 2010.

L’action 02 est elle aussi en hausse, d’environ 5,7 % en AE et en CP, hausse qui participe essentiellement au financement de l’identification électronique des petits ruminants, rendue obligatoire à l’échelle européenne à partir du 1er janvier 2010 : ce poste de dépense bénéficie ainsi d’une dotation de 9,7 millions d’euros pour 2010, contre 2,8 millions d’euros en 2009. Cette hausse est due également à la multiplication par deux des crédits destinés à l’indemnisation des éleveurs en cas d’abattage des troupeaux atteints de tremblante ovine en raison d’un moindre cofinancement communautaire : on constate en effet qu’à hypothèse identique (260 troupeaux ovins, 19 caprins et 80 cas de suspicions cliniques), l’estimation du coût pour 2010 correspond au double de la somme inscrite dans le projet annuel de performances pour 2009. En revanche, force est de constater que les crédits consacrés à la lutte contre la fièvre catarrhale ovine (FCO) ne permettront pas de financer la poursuite de la vaccination obligatoire en 2010 et sa prise en charge par l’État, conformément à l’annonce faite le 7 octobre 2009 par le ministre de l’agriculture lors de son déplacement au sommet de l’élevage de Cournon. Le coût total de ces mesures est estimé à 98 millions d’euros. Etant donné l’importance de cette somme, il est à espérer qu’elle ne soit pas financée en gestion par des redéploiements mais que les crédits correspondants soient effectivement ouverts en loi de finances rectificative.

La subvention pour charges de service public de l’AFSSA (agence française de sécurité sanitaire des aliments), retracée au sein de l’action 04, est affichée en hausse de 3 millions d’euros par rapport à 2009, à 55,5 millions d’euros. L’agence, doté d’un nouveau directeur en la personne de M. Marc Mortureux, nommé par décret du Président de la République en date du 26 août 2009, devrait connaître l’an prochain une profonde réforme de son organisation à l’occasion de sa fusion programmée avec l’AFSSET (agence française de sécurité sanitaire de l’environnement). L’article 115 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires prévoit qu’un nouvel établissement public sera institué par ordonnance reprenant l’ensemble des missions préalablement exercées par les deux agences.

Quant aux moyens consacrés à la mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation, ils progressent de 6,2 % en crédits de paiement (action 06). Cette hausse s’impute essentiellement sur les crédits du titre 2 (+15 millions d’euros, à 286,6 millions d’euros) en raison du transfert de 166 ETP depuis le programme support de la mission (voir infra). L’année 2010 sera en effet une année charnière pour les services déconcentrés du MAAP en charge de ces questions : ils auront notamment la responsabilité de décliner au niveau régional la politique d’offre alimentaire définie en 2008, qui bénéficie cette année d’une hausse importante de ses moyens au sein de l’action 08 (+32,6 %) ; il est ainsi prévu 15 ETP supplémentaires pour mener à bien cette mission ainsi que la mise en œuvre de formations relatives à la qualité nutritionnelle de l’alimentation. 2010 verra également l’application du projet stratégique de la Direction générale de l’alimentation (DGAL) et la poursuite des réformes engagées dans le cadre de la RGPP. À cet égard, le regroupement sur un site unique des services des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) se traduira par un coût supplémentaire en matière de gestion immobilière, les DDSV (directions départementales des services vétérinaires) étant jusqu’à présent très majoritairement logées dans des locaux mis à disposition à titre gratuit par les conseils généraux au titre de la partition (+1,1 million d’euros).

4. Le programme 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

PRÉSENTATION ET ÉVOLUTION PAR ACTION DU PROGRAMME

Numéro et intitulé de l’action

AE LFI 2009

AE
PLF 2010

Évolution

CP
LFI 2009

CP
PLF 2010

Évolution

215

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

 

01

Moyens de l’administration centrale

220 303 730

208 348 728

– 5,4 %

209 757 396

213 392 463

1,7 %

02

Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique

26 382 852

40 785 032

54,6 %

24 805 272

42 219 538

70,2 %

03

Moyens des DRAAF, des DDAF, des DEEA et des DAF

510 300 049

513 994 359

0,7 %

510 300 049

513 994 359

0,7 %

04

Moyens communs

76 028 523

86 836 221

12,9 %

87 120 517

81 260 653

– 6,7 %

 

TOTAUX

833 015 154

849 964 340

2 %

831 983 234

850 867 013

2,3 %

Source : Projet annuel de performance, PLF 2010.

L’évolution de la dotation du programme 215 pour 2010, en hausse globale d’un peu plus de 2 % en AE comme en CP, est principalement marquée par la très forte augmentation des crédits de l’action 02 à hauteur de 54,6 % en AE et 70,2 % en CP. Cette hausse est destinée à financer l’organisation, l’an prochain, du recensement de l’agriculture (+ 4,2 millions d’euros, à 8,2 millions d’euros) et à répondre à l’augmentation du coût des études commandées par le MAAP (+ 200 000 euros correspondant à la revalorisation du coût unitaire de la vingtaine d’études programmées qui passe de 30 000 à 40 000 euros). Cette hausse joue toutefois sur des montants relativement faibles (42 millions d’euros en CP) comparés à la masse que représentent les moyens de l’administration déconcentrée (près de 514 millions d’euros) ou de l’administration centrale (213 millions d’euros) du ministère. Ces crédits, retracés respectivement dans les actions 03 et 01 du programme, restent quant à eux constants voire diminuent.

La diminution en AE de 5,4 % des crédits figurant sur l’action 01 s’explique par l’engagement en 2009 de trois années de loyers du site Vaugirard du ministère ; les besoins sont logiquement moindres cette année. On notera en revanche la hausse des crédits de paiement destinés à couvrir les dépenses d’action sociale du ministère (+ 500 000 euros à 8,2 millions d’euros) qui permettra de renforcer les actions d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

Quant aux crédits retracés au sein de l’action 03, ils sont revalorisés à hauteur de 0,7 %. Cette moyenne ne reflète toutefois pas l’évolution des différents postes de dépense au sein de l’action : les crédits du titre 2 sont ainsi en diminution de près de 8 millions d’euros, alors que les dépenses de fonctionnement augmentent parallèlement d’environ 10 millions d’euros. Les crédits nécessaires à la gestion immobilière nécessitent en effet un apport de plus de 12 millions d’euros afin de faire face à une augmentation des charges de 3 % et à une hausse des loyers budgétaires. Parallèlement, la réduction des effectifs du ministère se poursuit : alors que 9 222 ETPT étaient comptabilisés au sein de l’action 03 dans le projet annuel de performances pour 2008, ce chiffre est passé à 8 184 dans le projet annuel de performances pour 2009 et à 7 623 dans le projet annuel de performances pour 2010. Il convient cependant de souligner que 166 ETP sont transférés cette année vers le programme 206 : 120 pour assurer les fonctions support des nouvelles directions départementales de la protection de la population, 15 sont déployés sur les nouvelles missions concernant l’offre alimentaire et 31 affectés aux services régionaux de l’alimentation sur le volet « protection des végétaux ». Au total, 450 millions d’euros sont prévues pour 2010 au titre des dépenses de personnel.

L’action 04, qui regroupe les moyens communs, connaît une augmentation de près de 13 % en AE permettant, d’une part, d’engager en 2010 le marché de téléphonie du ministère pour trois années et, d’autre part, de poursuivre la modernisation du système d’information des ressources humaines initié en 2008. La diminution des crédits de paiements à hauteur de 10,5 millions d’euros s’explique quant à elle par les redéploiements rendus nécessaires au sein du programme afin de financer le recensement agricole de 2010. Cette baisse porte sur les dépenses de fonctionnement informatiques et surtout sur les crédits visant à assurer la maintenance courante des bâtiments et poursuivre les opérations de réhabilitation, qui sont divisés par deux. On notera également que les actions de communication retrouvent le niveau de dotation qui était le leur avant l’attribution l’an passé de 1,4 million d’euros supplémentaires correspondant à la subvention précédemment allouée à l’AFICAR (agence française d’information et de communication pour l’agriculture et la ruralité). Enfin, il faut également signaler la diminution du coût du remboursement du personnel de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) mis à disposition du MAAP en raison d’un transfert de crédits correspondant au transfert en 2009 d’une partie des agents de caisse de la MSA vers le ministère en charge du travail.

Pour finir, votre rapporteur souhaite revenir sur l’action 02 du programme, car il s’interroge sur le financement de l’observatoire des distorsions de concurrence, créé par l’article 56 de la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006, dont les crédits de fonctionnement, à hauteur de 45 000 euros en 2009, y étaient jusqu’à présent retracés (13). Alors que les distorsions de concurrence intracommunautaires sont un sujet de plus en plus sensible pour de nombreuses filières, la « disparition » de ce poste de dépenses constitue un signal d’autant plus inquiétant que, pour s’attaquer à ce problème, il est au préalable indispensable de disposer de données solides et d’établir des comparaisons étayées, tous éléments qu’est précisément censé fournir l’observatoire dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par la loi : « repérer et expertiser les différentes distorsions, tant en France qu'au sein de l'Union européenne, quelles que soient leurs origines, qui pourraient conduire à la déstabilisation des marchés des produits agricoles » (14).

EXAMEN EN COMMISSION

À l’issue de la commission élargie (voir compte rendu officiel de la commission élargie du jeudi 29 octobre 2009 sur le site internet de l’Assemblée nationale), la commission des affaires économiques a examiné pour avis les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », sur le rapport de M. Antoine Herth, rapporteur pour avis.

Conformément à l’avis favorable de M. Antoine Herth, rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » pour 2010.

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© Assemblée nationale

1 () Article 34 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.

2 () Sur la base de participations, à parité, du groupe Eiffage, du Crédit agricole, du Fonds d’investissement stratégique et d’ONF Participations. Le fonds sera géré par la Caisse des dépôts et consignations.

3 () Voir notamment « Approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes », rapport du groupe de travail présidé par Bernard Chevassus-au-Louis, Centre d’analyse stratégique, avril 2009.

4 () L’article 5 du PLF 2010 précise en effet que « tout produit destiné à être utilisé, mis en vente ou utilisé comme carburant pour moteur ou comme additif en vue d’accroître le volume final des carburants pour moteur, est assujetti à la taxe carbone au tarif applicable au carburant équivalent ou au carburant dans lequel il est incorporé ».

5 () Ces missions sont : la gestion des retraits Fruits et Légumes (18 ETP), auparavant effectué par les douanes ; la gestion des programmes opérationnels et de l’agrément des organisations de producteurs dans le cadre de l’OCM Fruits et Légumes (47 ETP), auparavant effectué par les DDAF ; la gestion des livres de bords et des feuilles de pêche (25 ETP) ; la mise en place de deux axes du plan Ecophyto 2018 (4 ETP) ; la maîtrise d’œuvre de l’ensemble des mesures de gestion de crise (15 ETP) ; la mise en place des observatoires de prix et des marges et des industries agro-alimentaires (5 ETP).

6 () Gilles Carrez, Rapport sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007, tome 2, Commentaires des rapports annuels de performances par les Rapporteurs spéciaux, doc. AN n° 1004, 25 juin 2008, pages 37 à 56.

7 () Elles avaient ensuite bénéficié d’un abondement en cours d’année suite à la vente d’un bien immobilier.

8 () Dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2008 il a été créé deux plafonds séparés pour la DPI (déduction pour investissement) et la DPA, celui de la DPA étant désormais fixé à 23 000 euros. Les modalités de constitution, de réintégration et d’utilisation de la DPA ont également été améliorées et la rémunération des sommes déposées sur un compte DPA n’est plus imposée qu’à l’occasion de leur utilisation.

9 () La Lozère présente ainsi un taux de chargement de 0,45 ugb/ha.

10 () Rapport d’information n° 1836 présenté au nom de la commission des affaires économiques par M. Jean-Pierre Nicolas sur les conséquences de la tempête du 24 janvier 2009 dans le Sud-Ouest.

11 () Aux termes des articles 1er et 2 du décret n° 2009-542 du 15 mai 2009 relatif au financement des coûts de mobilisation, de transport et de stockage des bois issus des parcelles sinistrées par la tempête Klaus du 24 janvier 2009, les opérateurs retenus dans le cadre des appels à projets sont éligibles : à des bonifications d’intérêt d’emprunts contractés pour couvrir les coûts de mobilisation du bois comprenant les frais engagés pour l’achat, le façonnage et le débardage des bois en attente d’être cédés ; des bonifications d’intérêts d’emprunts contractés pour couvrir les coûts de stockage sur une durée minimale de deux ans des bois sous forme de bois ronds ou de produits transformés ; des subventions au transport des chablis sur une distance supérieure à 150 km, calculée entre la place de dépôt en forêt et le point d’utilisation ou l’aire de stockage.

12 () Prise en charge par l'État des animaux trouvés morts dans les exploitations outre-mer et des animaux trouvés morts sur la voie publique.

13 () Conformément aux dispositions de l’article 2 du décret n° 2006-1073 du 28 août 2006 relatif à l’observatoire des distorsions qui précise que « les crédits nécessaires au fonctionnement de l'observatoire des distorsions pour l'accomplissement de sa mission sont inscrits au budget du ministère de l'agriculture et de la pêche ».

14 () L’article D. 691-1 du code rural précise à cet égard que « (…) l'Observatoire des distorsions :

« - collecte et analyse les informations et les données relatives à différents cas de distorsions pouvant conduire à la déstabilisation des marchés des produits agricoles ;

« - rassemble et utilise les connaissances et les outils statistiques disponibles permettant d'analyser les distorsions, réalise ou fait réaliser les études nécessaires à son activité ;

« - produit des rapports de synthèse sur les distorsions qu'il a analysées et sur les réglementations nationales et communautaires ;

« - oriente les organisations professionnelles des secteurs agricoles et agroalimentaires et les associations de consommateurs dans leurs démarches auprès des instances de l'Union européenne ou de tout autre organisme appelé à traiter de ces problèmes ;

« - assure la diffusion régulière de ses travaux, notamment auprès des organisations professionnelles agricoles et des associations de consommateurs. »