Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF

N° 1972

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2009.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946)

TOME IV

DÉFENSE

PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

FORCES TERRESTRES

PAR M. Jean-Louis BERNARD,

Député.

——

Voir le numéro : 1967 (annexe n° 11)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  PREMIER BILAN DE LA RÉFORME ET PERSPECTIVES POUR 2010 7

A. LA RÉFORME EN COURS 7

1. La cible 7

2. L’effort en cours 7

B. LES ENJEUX ET LES RISQUES 8

1. Les conditions de réussite de la réforme 8

2. Les bases de défense 8

II. —  LE BUDGET 11

A. ÉVOLUTION GÉNÉRALE 11

B. LES DÉPENSES DE PERSONNEL 12

C. LES CRÉDITS HORS TITRE 2 12

III. —  LES PERSONNELS 15

A. L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS 15

1. Évolution générale 15

2. Évolution par catégorie 15

B. L’ATTRITION DES PERSONNELS 16

1. Constat d’attrition : les militaires du rang, premiers concernés 16

2. Volet social : logement 17

C. LES RÉSERVES 18

D. L’ACCOMPAGNEMENT DE LA RÉFORME 19

IV. —  LES ÉQUIPEMENTS 20

A. DONNÉES GÉNÉRALES 20

B. UNE DISPONIBILITÉ QUI RESTE FRAGILE 21

a) Les matériels terrestres 21

b) Les matériels aériens 22

C. LES NOUVEAUX ÉQUIPEMENTS : PRIORITÉ À LA PROTECTION DES PERSONNELS 23

1. Le système FELIN 23

2. Le véhicule haute mobilité (VHM) 24

3. Les drones 24

a) un développement insuffisant 24

b) Le déploiement de modules SDTI en Afghanistan 25

D. LA NUMÉRISATION DE L’ESPACE DE BATAILLE 25

E. L’ESSOR DE L’ADAPTATION RÉACTIVE 26

V. —  UNE ARMÉE TRÈS SOLLICITÉE 27

A. UN ENGAGEMENT MAJEUR DANS LES OPEX 27

1. Les différents théâtres : point de situation et évolution 27

2. Les enseignements tirés des engagements 28

3. La présence au Tchad et l’avenir d’Épervier 29

a) La situation au Tchad 30

b) Le dispositif Épervier 31

c) Les EFT 31

d) Le plan Chari Baguirmi d’évacuation des ressortissants 32

B. L’ENGAGEMENT DANS LES OPÉRATIONS INTÉRIEURES 33

C. L’ENTRAÎNEMENT 33

TRAVAUX DE LA COMMISSION 35

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL ELRICK IRASTORZA, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE TERRE 35

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 52

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET DES DÉPLACEMENTS 55

I. —  AUDITIONS 55

II. —  DÉPLACEMENTS 56

INTRODUCTION

En 2010, l’armée de terre va poursuivre sa réorganisation autour des deux axes majeurs que sont l’interarmisation et l’interarméisation. Elle marque ainsi son engagement en faveur de la réforme et fait, une fois encore, preuve de sa capacité d’adaptation et de sa réactivité. Dans le même temps, l’expérimentation des bases de défense continuera.

Partout où elle déploie ses forces, la France cherche à développer, à côté des aspects propres à un engagement militaire, des actions humanitaires et civiles. La plus grande complexité de l’action de guerre réside dans la conjonction du facteur humain et du terrain ; c’est le défi que relèvent au quotidien les militaires de l’armée de terre, particulièrement sollicitée dans les opérations extérieures. Le rapporteur se félicite des efforts réalisés pour renforcer la protection des personnels particulièrement exposés. Les dégâts faits par les engins explosifs improvisés sont conséquents et l’évolution de leur nature et de leur puissance nécessite de s’adapter rapidement et en permanence à la menace.

Le rapporteur tient à rendre hommage aux militaires qui ont donné leur vie ou qui ont été blessés en service. Lors des différents déplacements effectués auprès des régiments ou dans les unités visitées au Tchad, il a apprécié la qualité de l’engagement et la haute motivation des soldats, quel que soit leur grade. Leur sens du devoir, leur volonté de défendre les valeurs de la République et leur détermination méritent d’être salués.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2009, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 45 réponses étaient parvenues, soit un taux de 100 %.

I. —  PREMIER BILAN DE LA RÉFORME ET PERSPECTIVES POUR 2010

A. LA RÉFORME EN COURS

L’armée de terre participe aux efforts de rationalisation et de déflation des effectifs engagés par le ministère de la défense afin de répondre aux objectifs ambitieux fixés par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

1. La cible

D’ici à 2014, les effectifs de l’armée de terre seront réduits de près de 24 000 postes, 14 000 dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), 10 000 au titre de la mise en œuvre des conclusions du Livre blanc. A cette déflation s’ajoutera le transfert d’environ 20 000 postes (1), contribution de l’armée de terre à la réforme du ministère. Ces personnels seront transférés au sein d’organismes comme les bases de défense (commandement interarmées de soutien), le service interarmées des munitions, la direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information (DIRISI), le service du commissariat des armées, le service de santé des armées ou encore l’agence de reconversion de la défense.

Le contrat opérationnel de l’armée de terre a été redéfini. Elle doit être en mesure de projeter en opérations extérieures (OPEX) sur plusieurs théâtres jusqu’à 7 000 à 8 000 kilomètres, en 6 mois, 30 000 hommes sur des missions d’intervention, de stabilisation ou de maintien de la paix. Elle doit en outre conserver la disponibilité permanente, et sous bref préavis, d’une capacité d’intervention et d’action autonome (dispositif Guépard) de 5 000 hommes. Enfin, en cas de crise majeure sur le territoire national, elle doit pouvoir mobiliser jusqu’à 10 000 hommes, sous préavis de quelques jours, pour renforcer la sécurité des installations d’importance vitale ainsi que les mouvements sur le territoire et l’accès à celui-ci. Ce sont donc en permanence jusqu’à 45 000 hommes des forces terrestres qui sont susceptibles d’être engagés.

2. L’effort en cours

Le nouveau format défini pour l’armée de terre impose une réorganisation de ses structures ainsi qu’un redéploiement de ses implantations et des personnels. Entre 2009 et 2014, 18 régiments, 30 détachements et 6 états-majors seront dissous, 7 régiments, 43 détachements, 6 centres de formation et 8 états-majors seront transférés et une trentaine de garnisons seront fermées. L’estimation des mouvements de personnel n’est pas encore finalisée ; le dimensionnement des nouvelles structures interarmées et les contributions de chacune des armées ne sont pas encore définitivement arrêtés.

La restructuration du commandement des forces terrestres (CFT) est en cours. Le commandement de la force logistique terrestre est dissout et une large part de ses attributions est reprise par le CFT. Une division « soutien » est créée au sein du CFT.

Une sous-direction de la formation et des écoles (SDFE) est créée au sein de la direction des ressources humaines de l’armée de terre (DRHAT). Elle résulte de l’intégration du commandement de la formation de l’armée de terre (CoFAT) à la DRHAT.

En 2010 seront initiées les évolutions suivantes :

– le 1er janvier, la création du service du commissariat des armées, issu de la fusion des trois commissariats d’armée, entraînera la dissolution de la direction centrale du commissariat de l’armée de terre ;

– à la même date, seront créés le service interarmées de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) et le service de maintenance industrielle terrestre (SMITER). Les prémices de ces organismes figureront à la direction centrale du matériel (DCMAT). La DCMAT contribuera également à la création du service interarmées des munitions qui interviendra à l’été 2010.

B. LES ENJEUX ET LES RISQUES

1. Les conditions de réussite de la réforme

L’armée de terre doit conserver les moyens de répondre au contrat opérationnel qui lui est fixé. L’objectif de déflation issu de la RGPP et des conclusions du Livre blanc est déterminé en prenant comme base de référence les effectifs en 2007 de chaque armée. Il convient donc qu’au fur et à mesure des transferts effectués, soit également transmis le potentiel de déflation lié à ces effectifs. L’ensemble des composantes de l’armée de terre doit supporter l’effort global qui lui est imposé. Le transfert d’effectifs sans glissement de la contrainte de déflation contraindrait l’armée de terre à accroître l’effort sur ses forces opérationnelles, au risque d’amoindrir ses capacités, et remettrait en cause l’équilibre global de la réforme. Le soutien doit assumer sa part de déflation ; cette rationalisation des effectifs garantira celle des processus.

2. Les bases de défense

La création des bases de défense a pour objet de contribuer à la réduction des effectifs en mutualisant les compétences d’administration générale et de soutien communs. 11 bases (2) expérimentales fonctionnent depuis le 1er janvier 2009. En 2010, l’expérimentation sera étendue à 7 bases (3) pilotes supplémentaires. Le fonctionnement en bases de défense sera généralisé en 2011.

Les premiers retours d’expérience tendent à confirmer l’intérêt du dispositif dans ses principes. Le manque d’outils de gestion ne permet toutefois pas de le valider en termes budgétaires.

Les modifications de structures induites portent plus particulièrement sur les unités d’administration et de soutien des régiments. Les compétences sont basculées au sein des bases de défense et les transferts de personnels nécessaires réalisés au fur et à mesure de leur montée en puissance.

Pour l’armée de terre, cette réforme doit également permettre aux chefs de corps de se recentrer sur leur cœur de métier : la préparation opérationnelle de leur formation, la gestion de leur personnel et le maintien en condition opérationnelle de leurs équipements de combat.

Les personnels ont fait part au rapporteur de leur inquiétude de perdre l’identité de leurs unités dans ces nouvelles structures. Si l’effort de rationalisation n’est pas remis en cause, ils redoutent cependant un manque de cohérence entre la planification établie au niveau de la base et celle opérationnelle nécessaire au régiment. Ils considèrent que la mise en œuvre des bases de défense ne tient pas compte de la spécificité de l’état de militaire. La notion de commandement est au cœur du problème : les militaires attendent de leurs chefs qu’ils exercent la plénitude de leur commandement au quotidien et la gestion du personnel en est un des éléments. Le retrait des personnels de santé des unités combattantes est mal perçu : la cohésion est importante au combat et les personnels estiment essentiel que le médecin puisse toujours être considéré comme un militaire du régiment ayant une spécialité médicale et non comme un prestataire de service adjoint à une unité le temps d’une mission.

II. —  LE BUDGET

L’architecture du PAP 2010 a été adaptée pour le programme 178 afin de mieux prendre en compte les évolutions qui touchent les armées. Ce programme poursuit deux finalités : la première consiste à garantir le meilleur niveau d’accomplissement des missions opérationnelles ; la deuxième appelée maintenant « optimiser le soutien » (4) introduit le nouvel axe stratégique (5) « conduire la réforme et optimiser l’emploi de la ressource en maintenant à un niveau optimum la préparation et l’emploi des forces » (6).

A. ÉVOLUTION GÉNÉRALE

Le tableau suivant présente l’évolution des crédits dévolus à l’armée de terre au sein du programme 178.

Crédits des forces terrestres (programme 178)

(en millions d’euros)

Titre

AE

CP

LFI 2009

PLF 2010

Évolution

LFI 2009

PLF 2010

Évolution

Titre 2

7 489,45

7 289,85

- 2,67 %

7 489,45

7 289,85

- 2,67 %

Titre 3

1 651,52

1 792,36

8,53%

1 541,17

1 485,19

- 3,63 %

Titre 5

160,09

135,26

- 15,51 %

153,58

147,67

- 3,85 %

Titre 6

2,37

2,18

- 8,02 %

2,37

2,18

- 8,02 %

Sous-total

9 303,43

9 219,65

- 0,90 %

9 186,57

8 924,89

- 2,85 %

Source : projet annuel de performances et ministère de la défense.

Les crédits réservés à l’armée de terre au titre du programme 178 baissent de 0,9 % en autorisations d’engagement et de 2,85 % en crédits de paiement. Pour ces derniers le seuil symbolique des 9 milliards d’euros est franchi.

B. LES DÉPENSES DE PERSONNEL

Les crédits inscrits au titre 2 pour l’armée de terre s’élèvent à 7 289,85 millions d’euros, soit une diminution de 2,67 %. Cette baisse est la conséquence de la réduction des effectifs. Le rapporteur observe toutefois qu’elle n’est pas à due proportion, compte tenu des mesures de revalorisation des soldes.

Les mesures indemnitaires prévues en 2010 s’élèvent à 33,48 millions d’euros, soit une progression de plus de 13 % par rapport à 2009 (7). 28,66 millions d’euros sont réservés à la deuxième tranche de la revalorisation des grilles indiciaires pour les officiers et sous-officiers ; les mesures catégorielles complémentaires sont dotées de 4,82 millions d’euros dont 4,8 millions d’euros pour l’extension de l’indemnité pour charges militaires aux pacsés, la dotation de 0,02 million d’euros pour la revalorisation de l’indemnité spéciale des plongeurs d’armes étant renouvelée.

Diverses mesures spécifiques à l’accompagnement du personnel en voie de reconversion ou qui quitte l’armée de façon anticipée sont reconduites. Le plan d’accompagnement des restructurations comporte une aide à la réalisation de projets professionnels et des mesures d’incitation au départ pour les militaires. 1,3 million d’euros sont à nouveau inscrits à ce titre en 2010. L’enveloppe dédiée aux pécules est quant à elle portée à 47,98 millions d’euros (8).

C. LES CRÉDITS HORS TITRE 2

Les crédits alloués à l’entretien programmé du matériel s’élèvent à 841 (9) millions d’euros d’autorisations d’engagement et 552,6 millions d’euros en crédits de paiement. Ces montants ne comprennent pas les crédits destinés aux grands programmes au titre du MCO initial.

Les crédits dédiés aux carburants opérationnels chutent de 12 % et s’établissent à 60,5 millions d’euros.

Avec 146,8 millions d’euros, les crédits de paiement réservés à l’entretien programmé du personnel augmentent de 9 %. En matière d’habillement et d’équipement, l’effort portera sur la protection des personnels et l’ergonomie. Dans le domaine des matériels de soutien opérationnel, l’objectif est de répondre au contrat capacitaire et de constituer un parc restreint de tentes collectives au confort accru qui sera dimensionné en fonction du flux des OPEX.

Les équipements d’accompagnement sont dotés de 243 millions d’euros. 30 % de ces crédits concernent l’achat d’équipements de cohérence en petite série et servant, par exemple, au combat de contact, à l’appui à la mobilité, au contrôle de zone et à l’aide à la population. 4 % des crédits sont réservés au renseignement avec la montée en puissance des équipes légères de guerre électronique et des unités de renseignement de brigades, ainsi qu’à la poursuite du développement de logiciels destinés à l’évolution des outils de simulation opérationnelle. Enfin, la plus grande part de ces crédits dédiés aux équipements d’accompagnement, soit 42 %, sont destinés à l’acquisition des munitions nécessaires aux actions de combat et à la préparation opérationnelle ; ces commandes répondent au besoin de remise à bon niveau des stocks suite aux consommations de l’année écoulée, y compris en OPEX. Elles concernent pour un tiers des munitions de petit calibre, 5,56 mm à 20 mm ; pour un autre tiers des munitions de mortier ; le dernier tiers est réservé aux grenades et artifices. Environ 34 millions de munitions sont tirées annuellement. Les difficultés rencontrées sur certaines munitions achetées à l’étranger invitent à s’interroger sur l’opportunité de conserver des compétences nationales en la matière.

L’armée de terre dispose des moyens nécessaires en termes de munitions pour approvisionner les forces engagées en opérations et d’alerte et pour la préparation opérationnelle. Ils lui permettent également de constituer les stocks d’alerte et d’engagement nécessaires au soutien des contrats opérationnels issus du Livre blanc. Le soutien des quatre premiers mois d’engagement d’une force de 30 000 hommes sur les 12 mois prévus par les contrats opérationnels est assuré ; au-delà du quatrième mois, un effort financier conséquent est nécessaire pour soutenir l’engagement dans la durée. Pour la préparation opérationnelle, les approvisionnements en munitions de 5,56 mm pour le FAMAS et en obus de mortier de 81 mm et de 120 mm restent tendus. Les dotations prévues en 2010 pour les munitions d’instruction sont de 97,34 millions d’euros en autorisations d’engagement et 86,85 millions d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de plus de 40 % par rapport à l’effort consenti en 2009. Un maintien de l’effort budgétaire à ce niveau devrait permettre à moyen terme d’assurer un niveau de stock suffisant pour faire face à l’ensemble des missions et assurer aux forces les ressources nécessaires à leur préparation. Au Tchad, les militaires français estiment que les dotations en munitions d’entraînement dont ils disposent restent à un seuil assez bas.

III. —  LES PERSONNELS

L’effort entrepris en 2009 sera poursuivi en 2010. L’exécution 2009 se caractérise au 31 juillet par une sous-réalisation des effectifs au regard des objectifs fixés mais la fin d’exercice devrait permettre de combler le retard. Le principal décalage concerne les officiers et s’explique par un nombre de départs légèrement supérieur aux prévisions et un décalage calendaire de la transformation des sous-officiers pilotes de l’aviation légère de l’armée de terre en officiers (196 personnels concernés).

A. L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS

1. Évolution générale

Le plafond d’emploi de l’action 2 du programme 178 est fixé à 134 034 ETPT, soit une baisse de 5,2 % par rapport à 2009, dont 2,7 % au titre des seules mesures de transfert. Il diminuera en 2010 de 7 422 ETPT. Le rapporteur constate un écart de 56 emplois entre le plafond d’emploi figurant dans le PAP et le total résultant des éléments détaillés transmis par le ministère de la défense.

La diminution d’effectifs prévue inclut des transferts internes au ministère, par exemple au profit du service du commissariat aux armées ; seuls les effectifs sont transférés, la masse salariale est maintenue, ces personnels restant payés par leur armée d’origine. Les principaux transferts vers les structures interarmées sont :

– le transfert de 2 434 ETPT vers la chaîne interarmées des soutiens (groupement de soutien des bases de défense) ;

– le transfert de 595 ETPT vers la direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information de la Défense (DIRISI) ;

– le transfert de 184 ETPT vers le centre de coordination du transit maritime.

2. Évolution par catégorie

Pour les personnels militaires, la réduction prévue est de 5 034 ETPT. L’armée de terre comptera en 2010 113 475 militaires, soit 4,2 % de personnels en moins par rapport à 2009. Cette diminution est répartie ainsi :

– transferts internes au ministère de 2 252 emplois et de 4 autres vers d’autres ministères ;

– suppression de 2 778 ETPT, 1 373 au titre des réductions d’effectifs pour 2010 et 1 405 résultant de l’extension en année pleine des économies réalisées en 2009.

Pour les personnels civils, l’effectif sera ramené à 20 559 ETPT, soit une baisse de 10,4 % par rapport à 2009. Parmi les 2 388 réductions d’effectifs, près des deux tiers (1 556 ETPT) concernent des transferts ; le dernier tiers (832 ETPT) comprend 422 suppressions au titre des économies prévues pour 2010 et 410 résultent de l’extension en année pleine des mesures prises en 2009.

B. L’ATTRITION DES PERSONNELS

Bien qu’offrant de réelles opportunités de promotion sociale, l’armée de terre rencontre des difficultés de recrutement et de fidélisation des personnels. Pour les militaires, la progression socioprofessionnelle est parfaitement illustrée par les données suivantes :

– 49 % des officiers de carrière ont débuté leur parcours militaire comme sous-officiers, 7 % l’ont débuté en qualité d’officier sous contrat ;

– 48 % des sous-officiers sont issus des militaires de rang.

1. Constat d’attrition : les militaires du rang, premiers concernés

Le recrutement des officiers ne pose pas de difficulté particulière. Le taux de sélectivité est satisfaisant : il est de 10,4 % pour l’accès à saint-Cyr, 25,6 % pour l’école militaire interarmes (10) et 18,2 % pour le corps technique et administratif.

S’agissant des sous-officiers, la cible de recrutement est de 2 068 personnels. Le ratio de sélection au recrutement direct est en 2009 inférieur à 3. Jugé acceptable par l’armée de terre, il révèle toutefois une tendance à l’assèchement de la ressource. Le recrutement est déficitaire dans certaines spécialités. Dans le même temps, la forte attractivité de certaines d’entre elles dans le secteur civil favorise le départ volontaire de personnels. Parmi les spécialités déficitaires, celles ayant trait aux systèmes d’information et de communication, à la maintenance, au traitement du signal, aux techniques aéronautiques sont particulièrement concernées. Les départs volontaires se sont accrus en 2008 et 2009. Ils sont amplifiés par les effets des dispositifs d’aide au départ mis en place dans le cadre de la manœuvre ressources humaines visant à accompagner une déflation significative d’ici à 2014.

Pour les militaires du rang, la situation est préoccupante. Le besoin est certes satisfait mais la qualité baisse et la motivation des nouvelles recrues semble moins forte, le nombre important d’abandons au cours des premiers mois de vie militaire en témoignant : en 2008, 26,4 % des nouveaux recrutés ont dénoncé leur contrat pendant la période de formation initiale. Cette même année, la durée moyenne de service s’est significativement raccourcie, passant de 6 ans et 4 mois à 5 ans et 4 mois, révélant une aggravation du problème de la fidélisation (11). Au-delà de la période de formation initiale, les départs décidés par les seuls engagés interviennent désormais à tout moment du parcours professionnel. Bien que l’armée de terre s’efforce de les conserver, les départs, au terme d’un contrat ou par décision des intéressés, sont en sensible augmentation depuis quatre ans. La volatilité des effectifs est d’autant plus importante que l’unité d’emploi est exposée sur le plan opérationnel. Pour les unités de mêlée, la durée moyenne de service d’un engagé est passée sous la barre des cinq ans, alors que la stabilité du modèle exige une ancienneté moyenne de huit ans. En 2008, seuls 32 % des engagés ont renouvelé leur contrat au-delà de 5 ans alors que le modèle n’est viable qu’avec un taux de prolongation de 40 %. La relève sera difficile à assurer, les militaires du rang n’ayant plus tendance à rechercher une carrière longue au sein de l’institution. L’armée de terre est confrontée pour les années à venir au double défi de conserver ses plus jeunes recrues et d’intéresser une part significative de ses militaires du rang à servir au-delà de 11 ans. Pour ce faire, elle a modifié les critères pour le renouvellement de contrat à 11 ans : ils sont sensiblement assouplis et fondés avant tout sur la manière de servir.

2. Volet social : logement

Le rapporteur s’est rendu le 16 septembre auprès du 27e bataillon de chasseurs alpins (27e BCA) d’Annecy et le 24 septembre auprès du 8e régiment parachutiste d’infanterie de marine (8e RPIMa) de Castres. Lors de ces déplacements, le rapporteur a observé un contraste saisissant entre la qualité, la technicité, la sophistication des matériels dont disposent les militaires et l’état des infrastructures des casernements.

Au 27e BCA, 78 % des militaires du rang sont logés au sein du régiment. Le rapporteur a constaté que les conditions d’hébergement ne sont pas satisfaisantes et la dégradation de certains locaux contraint les militaires à loger dans des conditions insalubres. De manière plus générale, à Annecy, les logements sont inadaptés (trop grands), anciens, et les loyers privés sont en outre chers.

Au 8e RPIMa de Castres, seuls 30 % à 40 % des personnels sont logés au quartier. La capacité d’hébergement est comprimée pour dédier de l’espace aux infrastructures nécessaires au système FELIN.

Outre le logement, la planification des dépenses d’infrastructures laisse parfois perplexe : dans le même régiment, alors que les ordinateurs et le mobilier nécessaires à l’entraînement en simulation au combat (opération Romulus) ont été livrés, les infrastructures nécessaires à leur mise en œuvre ne pourront être effectuées qu’en 2012 ou 2013 ; le matériel risque alors d’être obsolète. Les choix opérés par les chefs de corps successifs ne sont pas remis en cause et méritent au contraire d’être salués. C’est le cadencement des travaux imposés pour le déploiement de matériels qui ne paraît pas cohérent.

C. LES RÉSERVES

Après avoir connu une stabilisation des effectifs en 2008, la réserve connait en 2009 une baisse significative qui résulte de deux facteurs :

– des contraintes budgétaires et un non-renouvellement de contrats ;

– la mise en œuvre des premières dissolutions et restructurations de formations de l’armée de terre. Le personnel de réserve est fortement ancré dans sa garnison dans la mesure où il y exerce son activité professionnelle civile. Le taux d’attrition de cette ressource est ainsi plus élevé que pour le personnel d’active dès lors que l’unité est dissoute ou transférée dans une autre garnison et qu’aucune alternative n’est offerte localement.

Le taux moyen d’activité a connu également un tassement : en 2008 la contrainte budgétaire a conduit à diminuer le nombre moyen de jours d’activité. Le montant des crédits alloués à la réserve et l’inertie à la reprise d’activité des réservistes, moins sollicités en 2008, ne devrait pas permettre d’améliorer la situation cette année.

À partir de 2009, les nouveaux contrats opérationnels définis par le Livre blanc ont conduit à un ajustement du format de la réserve opérationnelle et à la définition de nouveaux objectifs de montée en puissance. Une augmentation du nombre d’unités spécialisées de réserve de 16 en 2009 à 24 en 2015 est prévue dans les domaines du génie, du nucléaire, de la biologie et de la chimie, de la logistique, du matériel, du renseignement et des mortiers de 120 mm. L’évolution du nombre de réservistes, de la durée moyenne d’activité et des crédits alloués à la réserve est retracée dans le tableau ci-après.

évolution des effectifs, de la durée d’activité
et des crédits alloués à la réserve

 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Prévisions 2009

Prévisions 2010

Nombre de réservistes

13 304

15 439

16 485

17 002

18 249

18 348

17 415

nc

Nombre de jours moyens d’activité

23

18

20

22

25

22

22

25

Budget RCS (en M€)

20,09

28,13

32,23

37,06

40,94

41,6

41,9

44,4

Variation des crédits

 

40 %

15 %

15 %

10 %

1,6 %

0,7 %

6 %

Source : ministère de la défense.

La réserve opérationnelle de l’armée de terre doit être confirmée et renforcée en tant que véritable complément de l’armée. Destinés à renforcer les capacités opérationnelles, les réservistes sont affectés dans toutes les formations d’active, soit en complément individuel, soit en unités constituées au sein d’un régiment. Ils participent à l’ensemble des activités de l’armée de terre. Chaque année, plusieurs centaines d’entre eux sont engagés en opérations extérieures et plusieurs milliers participent à la sécurité du territoire national (Vigipirate, lutte contre l’incendie, etc.). À l’instar des militaires d’active, ils sont soumis à une préparation différenciée en fonction du type d’emploi.

Des mesures sont prises dans le cadre de la manœuvre ressources humaines globale. La fermeture des bureaux réserve des régions terre à l’été 2009 et la montée en puissance des bases de défense ainsi que la mise en œuvre d’une nouvelle maquette organisationnelle engendreront un profond remaniement des processus et des modèles de gestion. Le rapprochement des règles de gestion et d’administration de la réserve avec l’active sera poursuivi en 2010, avec l’adoption d’un calendrier commun pour les travaux de chancellerie. S’agissant de la mobilité, la manœuvre est intégrée à celle de l’active.

D. L’ACCOMPAGNEMENT DE LA RÉFORME

Pour les officiers, les mesures incitatives au départ ont rencontré en 2009 un succès inégal : l’attribution des pécules a été satisfaisante mais les transferts vers la fonction publique sont en deçà des objectifs visés. Cependant, l’objectif de reclassement dans la fonction publique devrait être atteint pour les sous-officiers.

En matière de reconversion, la certification des titres professionnels militaires, en cours de développement, les conventions d’emploi entre la défense et les entreprises ou fédérations professionnelles, un accès facilité aux emplois publics et l’encouragement à la création ou à la reprise d’entreprise sont autant d’outils à privilégier. L’agence de reconversion de la défense « Défense mobilité », a été créée en juin 2009.

IV. —  LES ÉQUIPEMENTS

La politique d’équipement de l’armée de terre s’articule autour de six priorités : le renforcement des moyens de protection, notamment face aux nouvelles menaces, l’amélioration des moyens du combat de contact (programme SCORPION), le développement des moyens de renseignement, d’appréciation de situation et de commandement, la modernisation et la rénovation de l’aéromobilité et du combat débarqué, l’accroissement de la portée et de la précision des armes d’appui et, enfin, le développement de la simulation instrumentée.

A. DONNÉES GÉNÉRALES

En matière de blindés l’année 2010 devrait être marquée par la fin de la rénovation des chars AMX 10 RC. Débutée en 2008, la livraison des véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) devrait se poursuivre avec 99 exemplaires ; le premier régiment, le 35e RI, est entièrement équipé et formé ; le 92e RI sera le deuxième a être doté de cet équipement.

Le soutien du VBCI procède d’une démarche innovante. Les rechanges sont stockés chez l’industriel qui assure la livraison au point de montage ou au point de départ vers une opération extérieure en fonction de la disponibilité et du potentiel définis contractuellement. Il en est de même pour le soutien du camion auto-tracteur équipé d’un système d’artillerie (CAESAR).

77 canons CAESAR ont été commandés. 36 ont été livrés. Déployé depuis août 2009 en Afghanistan, le système a montré son efficacité et est pleinement opérationnel sur ce théâtre. La livraison de 34 unités est attendue en 2010.

La phase de conception du programme SCORPION débutera en 2010 pour un début de réalisation en 2012. Ce programme est structuré en deux étapes. La première, de 2010 à 2016, comprend le développement et la réalisation des équipements suivants : système d’information et de commandement, véhicule blindé multi-rôles, engin blindé de reconnaissance et de combat (EBRC), traitement des obsolescences du Leclerc. L’ensemble des capacités développées à cette étape devrait être entré en service opérationnel en 2020. La deuxième étape, à compter de 2016, concerne la suite de la réalisation de l’EBRC, la rénovation du Leclerc, le développement et la réalisation d’une deuxième génération d’équipement FELIN (fantassin à équipements et liaisons intégrées) et, enfin, l’intégration au sein du programme d’autres opérations en cours (VBCI, missile moyenne portée par exemple).

Parmi les principales commandes attendues en 2010, on peut relever celle de 22 lance-roquette unitaire (LRU) et des munitions associées, de 187 petits véhicules protégés (PVP) et 220 camions (porteurs polyvalents terrestres), la rénovation de 100 missiles MISTRAL et celle de 3 hélicoptères Cougar. Outre les livraisons précisées par ailleurs pour certains équipements, sont attendues celles de 340 PVP.

B. UNE DISPONIBILITÉ QUI RESTE FRAGILE

Trois facteurs contraignent la disponibilité : l’obsolescence de certains matériels et l’augmentation de leurs coûts de maintenance ; la forte sollicitation des matériels en OPEX ; l’arrivée de nouveaux matériels de haute technologie dont la fiabilité est à améliorer. La mise en œuvre de la politique d’emploi et de gestion des parcs (PEGP) associée à la modernisation du MCO, d’une part, et le recours aux contrats globaux visant à contraindre l’industriel sur une disponibilité ou un potentiel, d’autre part, devraient permettre d’améliorer la situation dans les prochaines années. Le rapporteur est réservé sur le soutien sur le théâtre par l’industriel : cette démarche expose à une perte de savoir-faire interne aux armées à moyen terme et à un affaiblissement majeur des capacités lorsque, les compétences internes étant devenues inexistantes, l’industriel ne sera plus intéressé par ce marché.

a) Les matériels terrestres

La disponibilité des parcs de blindés reste fragile. Les véhicules de l’avant blindés (VAB) et les véhicules blindés légers (VBL) sont particulièrement sollicités. Les ERC 90 remis à niveau souffrent de défaillances techniques ; celles-ci sont couvertes par la garantie et l’industriel s’emploie à régler les difficultés. Le rapporteur a mesuré les problèmes rencontrés sur ces blindés déployés au Tchad. La situation est plus rassurante pour les moyens d’artillerie et du génie. La DTO globale des équipements terrestres est de 73 %. Celle des équipements déployés en OPEX est cependant satisfaisante avec 90,2 % au premier semestre 2009, la priorité étant donnée aux matériels projetés.

Le tableau suivant présente l’évolution de la disponibilité d’équipements significatifs.

Disponibilité technique opérationnelle
des principaux équipements terrestres de l’armée de terre

Catégorie

Matériel

2004

2005

2006

2007

2008

2009(1)

Tendance

Blindés lourds

LECLERC

54 %

45 %

42 %

37 %

32 %

34 %

ì

Blindés légers

ERC 90

nc

nc

nc

67 %

57 %

46 %

î

VAB

68 %

69 %

65 %

69 %

69 %

60 %

î

VBL/VB2L

nc

nc

nc

70 %

67 %

66 %

î

(1) Pour 2009, la disponibilité est calculée sur le premier semestre.

Source : ministère de la défense.


b) Les matériels aériens

La disponibilité globale des aéronefs de l’armée de terre est de 57,3 %. Celle des hélicoptères de manœuvre, qui s’établit à 48,1 %, est plus faible ; avec 44,2 %, celle des Tigre se situe près de 4 points en deçà du seuil d’acceptabilité (48 %) fixé par l’état-major de l’armée de terre. Le tableau suivant présente l’évolution de la disponibilité de ces matériels.

Disponibilité technique opérationnelle
des hélicoptères de l’armée de terre

Catégorie

Parcs

2007

2008

2009

(1er semestre)

Tendance pour le second semestre 2009

Hélicoptères de légers

Gazelle

58 %

57 %

61 %

ì

Fennec

59 %

71 %

75 %

è

Hélicoptères NG

Tigre EC 665

37 %

47 %

44 %

ì

Hélicoptères de Manœuvre

Cougar

46 %

48 %

43 %

ì

Puma

48 %

48 %

49 %

ì

EC 725 Caracal

27 %

36 %

54 %

è

Source : ministère de la défense.

Les difficultés rencontrées sur le Tigre sont liées à l’hétérogénéité du parc de l’école franco-allemande, à des difficultés d’approvisionnement de certains rechanges et à quelques problèmes techniques ponctuels. Des achats selon la procédure d’adaptation réactive ont été nécessaires pour les appareils projetés en OPEX. Le rapporteur a mesuré l’efficacité de cet hélicoptère en Afghanistan où 3 appareils sont déployés depuis l’été 2009.

L’insuffisance de disponibilité touche plus particulièrement les parcs anciens (Gazelle et Puma), pour lesquels le vieillissement conduit à l’allongement de la durée des opérations de maintenance préventive et curative. Il s’ensuit une augmentation des coûts financiers et du besoin en heures de travail à volume de main-d’œuvre constant. Toutefois, la disponibilité des Gazelle Viviane est satisfaisante (58,7 % pour 2008).

Les Gazelle étant utilisées comme hélicoptères de substitution et compléments des systèmes de simulation pour les équipages de Tigre, le potentiel d’heures de vol de ce parc a été augmenté en 2009.

Un effort particulier est consenti pour les hélicoptères de manœuvre. Il se traduit par une augmentation du nombre d’équipages et du potentiel alloué à la formation et à la préparation opérationnelle. La diminution du nombre global d’heures du parc Cougar résulte de la baisse du nombre d’appareils (21 en 2008, 18 en 2009). Lors de ses précédents avis, le rapporteur avait déjà relevé la situation critique de l’aéromobilité. Il regrette l’arrivée tardive du NH90 (12) dont la livraison du premier exemplaire est prévue en 2011. Cette situation, combinée au déficit de moyens en hélicoptère Cougar en cours de rénovation, d’une part, et à un allongement de l’indisponibilité pour entretien des Puma pour leur valorisation, d’autre part, conduit à une grande fragilité en matière de transport tactique entre 2010 et 2015 (13).

C. LES NOUVEAUX ÉQUIPEMENTS : PRIORITÉ À LA PROTECTION DES PERSONNELS

1. Le système FELIN

Le système FELIN vise à accroître l’efficacité, la protection et l’intégration dans l’espace numérique de bataille des combattants. Il est destiné à équiper les soldats des groupes de combat d’infanterie ayant vocation à être engagés au contact de l’adversaire. Il augmente la protection individuelle des personnels et est doté de moyens d’observation, de communication, d’agression. Il est opérationnel de jour comme de nuit. La qualification du système est programmée pour mars 2010 et la mise en service opérationnel pour l’été 2010. 4 régiments devraient être livrés en 2010, l’attribution des équipements se faisant en fonction de la programmation OPEX des unités et de la disponibilité des infrastructures nécessaires.

La cible est de 22 588 équipements, le contrat incluant également la fourniture de systèmes d’information terminaux du combattant débarqué. En 2010, 5 045 (14) systèmes devraient être livrés.

L’évaluation technico-opérationnelle de ce matériel a montré l’adéquation du système au besoin opérationnel. L’expérimentation a permis d’éprouver la numérisation aux conditions du combat. Celle-ci vise à acquérir une plus grande fiabilité et réactivité. L’évaluation a mis en évidence de réelles avancées : le système intègre tous les paramètres du combat (létalité, protection, liaison), favorise la maîtrise de l’environnement et accroît les capacités d’acquisition de cible et de tir. Mais le gilet pare-balles est jugé obsolète. Le système doit également être amélioré dans les domaines de l’énergie, du poids et de l’ergonomie. Des efforts d’allègement doivent absolument être réalisés. Le compromis à trouver entre le poids supporté par le fantassin et les capacités de déplacement en fonction du terrain est le défi à relever du combat à pied. Pour 24 heures, un fantassin emporte une charge d’environ 40 kg (15). Diverses pistes sont à explorer comme le recours à des moyens « mules » ; les Britanniques ont travaillé sur le sujet sans avoir encore dégagé de solution.

2. Le véhicule haute mobilité (VHM)

Ce nouveau matériel est aujourd’hui un outil de transport indispensable en terrain difficile. Ce véhicule pourrait en outre dans certains cas être utilement complété par des quads pour une meilleure mobilité élémentaire. En effet, utilisés comme porte-faix des fantassins, ils permettraient d’alléger leur charge et d’améliorer les capacités de déplacement des éléments de combat sur le terrain. Bien protégé, très manoeuvrant et doté de capacités tout-terrain – solide ou meuble – et amphibie, le VHM accroît les capacités de projection des fantassins au plus près de la zone de combat.

Un appel d’offres est en cours. La cible est de 129 VHM, permettant d’équiper un groupement tactique interarmes (GTIA) « terrain difficile », pour un montant de 197 millions d’euros.

3. Les drones

Sans préjuger des conclusions de ses collègues chargés de la mission d’information portant sur les drones qui rendront leurs conclusions fin novembre, le rapporteur a souhaité évaluer les capacités dont dispose l’armée de terre en la matière.

a) un développement insuffisant

Les capacités en matière de drones tactiques et d’exploitation des images délivrées sont concentrées au sein d’un seul régiment, le 61e régiment d’artillerie (61RA) de Chaumont auprès duquel s’est déplacé le rapporteur le 4 septembre dernier. Le renseignement image est essentiel pour apprécier une situation, réaliser différentes missions de renseignement au moyen de capteurs spécialisés, appuyer l’engagement des forces aéroterrestres (en planification et en conduite dans la manœuvre) et participer au ciblage par l’acquisition d’objectifs au profit d’effecteurs.

Le nombre de systèmes est faible. Ils sont destinés aux engagements et à l’entraînement. Le besoin en OPEX étant important, les matériels disponibles sont engagés sur des missions opérationnelles au détriment de l’entraînement. Cette situation est préoccupante : les personnels devant relever leurs camarades en OPEX ne peuvent être convenablement entraînés avant d’être projetés. Aujourd’hui, le déploiement en Afghanistan a asséché les capacités en systèmes de drones tactiques intérimaires (SDTI) (16) du régiment.

Pour les drones de reconnaissance au contact (DRAC), la cible est de 110 systèmes. La commande de 50 unités est prévue en 2010. Une livraison en 2009 de 35 DRAC est suspendue au règlement des difficultés rencontrées concernant les interférences entre les dispositifs optiques et de géoréférencement, d’une part, et de motorisation, d’autre part. Les éléments recueillis par le rapporteur auprès de l’industriel laissent espérer une issue favorable pour fin 2009.

L’intégration des drones dans la circulation aérienne est un des défis à relever. Le 61e RA bénéficie de zones de vol 8 jours par mois avec un préavis d’une semaine. Cette contrainte défie toute logique d’efficacité opérationnelle. Elle ne permet pas non plus de profiter de fenêtres météorologiques favorables. Or, les conditions d’emploi des vecteurs excluent leur usage en cas de vents trop faibles ou trop forts.

b) Le déploiement de modules SDTI en Afghanistan

Mis en œuvre depuis le 9 novembre 2008, le SDTI remplit des missions d’appui aux opérations aéroterrestres. Il revêt une importance particulière pour les troupes au sol qui savent pouvoir bénéficier d’une surveillance et d’un appui. Placés sous commandement de l’OTAN dans la RCC de Kaboul, les modules déployés effectuent jusqu’à deux missions par jour. Ils sont placés en alerte à 45 minutes. Les moyens français permettent de couvrir les zones d’action de Tora et Nijrab ; les images recueillies sont transmises à Tora et Kaboul par voie satellitaire et relayées à Nijrab. Le système de réception sur le terrain (RVT), dont le déploiement s’est terminé en septembre, est une avancée technologique considérable. Il répond à un besoin opérationnel émis par le théâtre. 60 % des missions ont été réalisées au profit du bataillon français (BATFRA) et 19 % pour le GTIA Kapisa. Sur 155 missions réalisées jusqu’en début septembre, 67 % concernaient de l’appui direct par fourniture de renseignement, 29 % du renseignement général et 4 % de l’escorte de convoi.

D. LA NUMÉRISATION DE L’ESPACE DE BATAILLE

La numérisation de l’espace de bataille (NEB) est une priorité de l’armée de terre. Sa pleine efficacité suppose que toutes les forces disposent de cette capacité. Dès 2010, un déploiement partiel des systèmes d’information terminaux dans l’ensemble des régiments leur permettra de s’entraîner avec une chaîne NEB complète.

2010 sera l’année de la fin de la montée en puissance de la NEB visant à permettre la projection la même année d’une force numérisée immédiatement apte au combat. Ainsi en 2009, 2 des 8 brigades interarmes sont certifiées « brigade numérisée » : la 6e brigade légère blindée (brigade multi-rôles), depuis octobre 2008, et la 2e brigade blindée (brigade de décision), depuis avril 2009. Il reste à réaliser la certification d’un groupe de soutien divisionnaire (chaîne logistique) lors de FORTEL (17) en mai 2010 pour achever le processus.

Les retours d’expérience tirés des opérations ou des expérimentations ont montré que la NEB apporte une réelle plus-value opérationnelle, renforçant l’efficacité des forces engagées et l’optimisation des moyens mis en œuvre.

La NEB constitue une avancée majeure : les moyens cartographiques, les moyens d’information et les moyens d’aide au commandement mis en œuvre accroissent l’autonomie de jugement, permettent une accélération du cycle décisionnel et du rythme de la manœuvre ainsi qu’une meilleure coordination. L’instantanéité de l’arrivée de l’information à l’échelon le plus bas en est l’atout principal. La numérisation est cependant complexe : les applications logicielles sont multiples, les difficultés d’interopérabilité sont réelles et l’instruction est difficile à mener compte tenu de la rotation des personnels.

Avant que ne soit introduite la NEB française, l’utilisation de l’américaine en Afghanistan a permis une intégration complète de la chaîne des forces, une meilleure coordination entre elles et la transmission en temps réel d’informations. Depuis l’été 2009 tous les théâtres français d’engagement des forces aéroterrestres disposent de moyens numérisés ; un effort particulier est consenti pour l’Afghanistan.

E. L’ESSOR DE L’ADAPTATION RÉACTIVE

Le concept d’adaptation réactive permet en cas d’urgence opérationnelle de répondre rapidement à une évolution des conditions d’engagement en recourant à une procédure accélérée d’acquisition ou de modification d’équipements militaires ou d’accélération de programmes en cours. Les principaux domaines concernés sont l’équipement du combattant, la surprotection des véhicules, les moyens d’observation complémentaires, la lutte contre les engins explosifs improvisés (IED).

L’année 2008 a été marquée par l’essor de ces procédures. Les différents achats en urgence opérationnelle se sont élevés à 116 millions d’euros. Ils ont été dictés par l’impérieuse nécessité d’améliorer la protection des personnels exposés notamment aux IED en Afghanistan ou aux tirs lors de la mise en œuvre de leur propres équipements. En 2009 la dépense devrait être ramenée à 89 millions d’euros. Parmi les adaptations réalisées on peut citer les renforts de blindage, en particulier des camions logistiques, des compléments feu pour les hélicoptères, des rechanges pour les drones déployés en OPEX.

V. —  UNE ARMÉE TRÈS SOLLICITÉE

A. UN ENGAGEMENT MAJEUR DANS LES OPEX

L’engagement dans les opérations extérieures a mobilisé, en 2008, 28 449 personnels, ce nombre étant ramené à 24 191 en 2009.

1. Les différents théâtres : point de situation et évolution

L’effort est concentré sur l’Afghanistan, premier théâtre d’engagement, le Kosovo et le Liban dans des opérations multinationales, ainsi qu’en Afrique (Tchad, République de Côte-d’Ivoire et République de Centrafrique), plus d’un quart des effectifs étant déployés sur ce continent sous mandat national. Le tableau suivant retrace par mandats les principales opérations et précise les effectifs.

Effectifs de l’armée de terre déployés en OPEX en 2009

Mandat

Aires géographiques

Opérations

Total

OTAN

Europe

KOSOVO TRIDENT

4 268

AUTRES

49

Asie

AFGHANISTAN-PAMIR dont OMLT

5 400

Sous-total OTAN

9 717

National

Afrique

TCHAD-EPERVIER

2 318

RCI-LICORNE

3 449

RCA-BOALI

681

Sous-total National

6 448

Forces ONU

Afrique

Sahara Occidental-MINURSO

30

RDC-MONUC

20

RCI-ONUCI

191

TCHAD-RCA-MINURCAT

1058

Moyen-Orient

LIBAN-FINUL

4 350

Divers

 

22

Sous-total Forces ONU

5 671

Union Européenne

Europe

EUFOR BiH

123

TCHAD

EUFOR-TCHAD/RCA

1 219

RDC

EUSEC-RDC

27

Sous-total UE

1 369

Divers

Asie

PAKISTAN, TADJIKISTAN-RENFORTS HERACLES

49

AFGHANISTAN-EPIDOTE

100

Moyen-Orient

FMO-Sinaï

6

Sous-total Divers

155

Forces spéciales

 

831

Total des effectifs cumulés

24 191

Source : ministère de la défense.

L’année 2009 est marquée par la relève de l’Eufor-Tchad par la Minurcat. Les effectifs indiqués dans le tableau concernant ces opérations connaissent des variations importantes tout au long de l’année.

Les surcoûts liés aux OPEX ont représenté, en 2008, 406,28 millions d’euros. Ils ont concerné en premier lieu les dépenses de personnel à hauteur de 263,09 millions d’euros puis de fonctionnement avec 111,18 millions d’euros. Plus du quart de ce dépassement a été réalisé en Afghanistan. Le surcoût de MCO a été limité à 15,08 millions d’euros. À compter de 2009, l’évaluation du coût de MCO des matériels projetés est affinée pour tenir compte, en complément du coût fixe lié à la contractualisation, de la part variable liée à l’utilisation de ces équipements. Ces estimations seront consolidées en 2010, à l’aide d’un traitement systématisé de l’historique des données de soutien de la DCMAT.

De manière générale, les rotations des personnels sont organisées tous les quatre mois à l’exception de l’Afghanistan où elles s’effectuent tous les 6 mois pour des raisons économiques et opérationnelles. La périodicité des rotations doit tenir compte du rythme et de la nature des projections. Il reste absolument nécessaire qu’entre deux OPEX, le soldat ait un temps suffisant pour se reconditionner. La récupération après une projection et la préparation différenciée avant la suivante ne sauraient être raccourcies.

2. Les enseignements tirés des engagements

L’engagement sur le théâtre afghan du 8e RPIMa en 2008 a mis en évidence la nécessité de maintenir un haut niveau de qualification et de maîtriser les fondamentaux militaires. L’instruction dans des centres spécialisés est indispensable. Dans ce régiment, l’effort est porté sur l’instruction spécialisée des troupes aéroportées, le combat d’infanterie à pied et en VAB, le combat en localité et le secourisme de combat.

Désormais, l’instruction et l’entraînement sont conduits au plus près de la réalité. Ainsi, l’instruction sur le tir de combat se fait en configuration de guerre avec protections balistiques, casque, équipement complet ; la notion de poids est ainsi prise en compte en situation de tir. Tous les personnels sont formés au sauvetage de combat (18). Pour s’intégrer le mieux possible dans un environnement international, tous suivent également des formations d’anglais ainsi qu’aux procédures et matériels de transmission aux normes OTAN et américaines. Lors de chaque entraînement, des incidents santé sont simulés ; le risque IED est pris en compte et l’environnement extérieur (hiérarchie et appuis) est systématiquement simulé.

Après la bataille du plateau des Glières en mars 1944, la bataille d’Alasay (19) en mars 2009 constitue le deuxième fait d’armes majeur du 27e bataillon de chasseurs alpins d’Annecy au cours duquel, pour la première fois en Afghanistan, la France, adoptant une posture offensive, a repris l’initiative sur l’ennemi. Ce combat a également démontré l’importance de la culture militaire ; cette imprégnation se révèle particulièrement indispensable dans la planification d’une opération, la flexibilité et la réactivité au combat.

D’autres enseignements peuvent être tirés des engagements extérieurs des armées. Ainsi, la politique à l’égard des interprètes locaux auxquels ont recours les unités pourrait être revue. Les risques pris par ces personnes travaillant avec les forces françaises sont réels. Il ne serait pas indécent de leur ouvrir l’accès à la nationalité française ; cette opportunité constituerait également une garantie de fiabilité.

Enfin, un effort doit être consenti pour une vraie prise en compte, notamment psychologique, des blessés actuels et futurs. Comme c’est le cas au sein du 27e BCA, des actions de « dépistage » des personnels touchés doivent être menées afin de les soutenir ainsi que leurs familles.

La médiatisation des pertes au combat depuis août 2008 et l’ampleur des réactions qu’elles ont suscitées ont provoqué une prise de conscience de l’opinion publique qui semble découvrir certaines facettes de la guerre. Élus et armées ont une action commune à mener pour expliquer aux concitoyens l’action et le métier des armes afin que la résilience de la Nation ne se trouve pas fragilisée faute de compréhension de la nécessité des engagements et de leurs conséquences possibles.

3. La présence au Tchad et l’avenir d’Épervier

Le rapporteur s’est rendu auprès des éléments français au Tchad (EFT) du 30 septembre au 2 octobre 2009. Ce pays occupe une position stratégique centrale et relève d’une zone potentiellement instable aux termes du Livre blanc (20). L’abandon de ce théâtre serait catastrophique, le Tchad restant une carte importante de la géopolitique africaine : la France pourrait alors être accusée d’avoir favorisé la déstabilisation de ce pays.

a) La situation au Tchad

Devenu un petit producteur de pétrole (21), le Tchad a connu une grande évolution. Le processus démocratique mis en œuvre fonctionne (22). Ce pays est géré, administré. Il assure le paiement de ses fonctionnaires et engage de gros investissements. Malgré son essor, il n’y a pas de zone de calme mais plutôt une situation de fracture. Le nombre des rebelles est évalué à 6 000. Plutôt convenablement équipés (23), ils sont alimentés en carburant par le Soudan.

L’avenir est incertain et préoccupant, aucune solution ne se dessinant pour le Darfour. La grave crise au Soudan a des répercussions importantes à l’est du pays : l’afflux de 300 000 réfugiés a provoqué le déplacement de 180 000 tchadiens. 120 ONG se sont implantées dans l’est, introduisant un certain niveau de vie et de confort dans les camps où elles s’installent. Au final, les populations déplacées et l’environnement humanitaire exercent une pression locale forte. La présence des réfugiés et le déploiement des moyens pour leur venir en aide favorisent le banditisme. Les troubles imposent le maintien d’une capacité militaire.

Depuis 2005, le Tchad se rééquipe militairement. Il investit entre 400 et 500 millions de dollars et achète principalement auprès de la Chine, l’Ukraine, la Biélorussie et Israël. Les techniques de combat ont connu une évolution majeure. L’armée est aujourd’hui crédible mais n’est toutefois pas à l’abri d’un dérapage. Après les deux dernières offensives majeures en février 2008 et mai 2009, la rébellion reste en échec mais le risque demeure. En 2009, l’armée tchadienne a montré de réelles capacités combattantes et l’apparition de l’aviation a changé les équilibres.

Les relations franco-tchadiennes sont qualifiées d’excellentes. Un accord de coopération entre les deux États porte sur le soutien médical, la logistique et le renseignement. En outre, 18 gendarmes sont intégrés au sein de la Minurcat pour une mission de formation de la police tchadienne. Les tchadiens apprécient la sensibilité française à leur spécificité et les EFT sont bien considérés. Ils sont en revanche plus réservés quant à la présence de la Minurcat. Les objectifs de cette dernière sont modestes. Ils se limitent à une assistance technique et humanitaire mais ne comprennent pas la mise en place d’outils de fonctionnement des provinces. Cette force est centrée sur elle-même, se protégeant et s’administrant principalement. Les ONG sont mal perçues, les tchadiens estimant que leur comportement et leurs moyens n’apportent rien au pays.

b) Le dispositif Épervier

Conçu comme un dispositif visant à contribuer à la stabilité et à la sécurité du Tchad et de sa région, l’opération Épervier a été initiée en février 1986. L’implication militaire s’est réduite et porte principalement sur le renseignement.

Le dispositif a pour mission :

– d’assurer une présence pour défendre les intérêts de la France et en particulier ses ressortissants ;

– de contribuer à une action hors du Tchad en s’appuyant sur ses groupements terre et air et sur son centre médical ;

– de mettre en œuvre l’accord de coopération technique avec le Tchad comprenant deux volets : d’une part, une aide à l’armée nationale tchadienne en matière de transports, de produits pétroliers, de rations, d’autre part, une aide à la population civile au travers une coopération civilo-militaire, une aide médicale avec gratuité des soins, l’intervention en sécurité incendie, le sauvetage ;

– la recherche du renseignement ;

– l’accomplissement de missions particulières comme le soutien à la Minurcat ou à certains pays parties.

Le théâtre tchadien a évolué : les déplacements ne se font plus désormais que sous blindage.

Le contrat opérationnel fixé au groupement terre est un engagement total à 12 heures, des éléments précurseurs – un demi état-major opérationnel et 3 sections à 12 – étant rapidement mis en œuvre.

Le pays est enclavé et ne dispose pas de voies ferrées. La maîtrise de l’espace aérien est nécessaire à l’approvisionnement, les voies terrestres étant difficilement praticables à certaines périodes de l’année. La principale difficulté logistique réside dans les élongations. La liaison stratégique pour le soutien passe par le Cameroun et le ravitaillement en oxygène pour les Mirage s’effectue en République de Côte-d’Ivoire. Le développement de l’aéroport d’Abéché, sous l’égide de l’ONU, est programmé.

Le dispositif est opérationnel et qualifié par le COMANFOR de « justement dimensionné » aux missions qui lui sont confiées mais avec une disponibilité des matériels qui n’est pas toujours satisfaisante, ceux-ci étant certes adaptés mais vieillissants.

c) Les EFT

Les EFT disposent d’une aviation de combat et d’un ravitailleur, de moyens de transport, d’hélicoptères, de moyens terrestres – y compris blindés –, de soutiens techniques et administratifs. Ils assurent le soutien des éléments français restant au sein de la Minurcat et, par contrat, celui des éléments togolais et albanais de cette mission.

Le soutien santé est assuré par 49 personnels dont deux médecins généralistes, un médecin anesthésiste, deux chirurgiens (viscéral et orthopédique) et l’environnement infirmier nécessaire. Deux autres médecins sont également déployés, l’un à Abéché, l’autre à Faya. 50 % des consultations sont au bénéfice des EFT, le reste relève de l’aide médicale à la population tchadienne au profit de qui sont réalisés également 99 % des actes dentaires et de chirurgie.

Le soutien pétrolier est conséquent. Avec 35 personnels projetés, ce théâtre constitue le plus fort engagement du service des essences des armées. Le carburant arrive via le Cameroun. Des accords ont été passés localement avec Oil Lybia et Total pour un approvisionnement direct à N’Djaména. Un accord avec le Tchad impose de mettre du carburant des EFT à la disposition de ce pays et l’autorise à le prélever dans le dépôt de son choix. Grâce à cet accord, l’aviation tchadienne est assurée de bénéficier d’un carburant de grande qualité et de possibilités de ravitaillement en plusieurs points du territoire.

Fort de 410 soldats, le groupement « terre » répond au contrat opérationnel fixé et assure également la protection de différents sites (Faya Largeau et Abéché). Il dispose de compétences de contrôle aérien avancé. Pendant leur séjour, les militaires du groupement consacrent un tiers de leur temps à la protection des emprises françaises. Chaque section effectue également deux à trois missions de patrouille, des campagnes de tir et s’entraîne. Un soutien à la formation de l’armée tchadienne est assuré, sauf pendant les vacances d’été.

Les éléments français disposent d’une liberté totale de manœuvre sur le territoire, sous bref préavis. Disposant de cette opportunité, l’entraînement et l’aguerrissement en milieu semi-désertique est l’essentiel de l’activité des EFT, l’accomplissement de leurs missions restant bien sûr prioritaire. Ce théâtre offre en particulier des possibilités d’entraînement interarmes et interarmées qui ne se retrouvent pas sur d’autres engagements.

d) Le plan Chari Baguirmi d’évacuation des ressortissants

Sur ce théâtre, les forces sont utilement préparées pour l’évacuation des ressortissants : en février 2008, lors de l’opération rebelle sur N’Djaména, 1 400 personnes ont été évacuées. La force est dimensionnée pour évacuer les ressortissants français (de l’ordre de 1 200 personnes) mais il n’est pas exclu qu’il lui soit demandé de procéder à l’évacuation des ressortissants européens ou encore de l’OCDE, voire plus.

En application du plan Chari Baguirmi d’évacuation des ressortissants, les EFT doivent assurer la libre disposition de la plate-forme aéroportuaire, protéger les ressortissants français, mettre en œuvre le centre d’évacuation et conduire le regroupement puis l’évacuation des ressortissants. Le plan est décliné en 4 phases :

– la montée en puissance des EFT et leur renforcement éventuel ;

– le déploiement sur la plate-forme aéroportuaire et l’établissement des contacts aux points de regroupement et aux points sensibles ;

– le regroupements des ressortissants et leur protection sur les points de regroupement ;

– l’escorte sur le camp Kossei et la mise en condition avant évacuation.

Les moyens disponibles permettent de tenir la position mais la réalisation de l’évacuation nécessitera le recours à des renforts. Pour les responsables de ce plan, des moyens complémentaires seraient utiles pour en optimiser la réalisation : deux compagnies de combat, une section du génie et du matériel de franchissement, un renfort en forces spéciales et en équipement aérien.

B. L’ENGAGEMENT DANS LES OPÉRATIONS INTÉRIEURES

L’armée de terre participe activement à différentes missions sur le territoire national. Certaines sont permanentes ou récurrentes comme la contribution aux plans de protection du territoire tels Vigipirate ou Hephaïstos (24). En 2009, elle a également été mise à contribution dans la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane (opération « Harpie 2 ») et l’immigration clandestine dans ce même département d’outre-mer ; le coût de la participation à cette opération est estimé à 14 millions d’euros.

C. L’ENTRAÎNEMENT

À compter de 2010 l’activité des forces est exprimée en journées de préparation et d’activité opérationnelle (25) (JPAO). Elles intègrent les projections en opérations extérieures et les missions intérieures mais excluent les activités hors préparation opérationnelle et les unités ne concourant pas directement au contrat opérationnel de l’armée de terre.

L’effort est porté prioritairement sur les mises en condition avant projection. Le renforcement du dispositif en Afghanistan, le retour dans la structure militaire intégrée de l’OTAN, la mise en œuvre de la PEGP et de la réforme des armées auront un effet sur la préparation opérationnelle.

La montée en puissance du nombre de jour d’activité ne permettra pas d’atteindre l’objectif fixé par la LPM mais marquera déjà un effort significatif. Pour les pilotes, le nombre d’heures de vol prévu est conforme à la programmation. La moyenne fixée est de 180 heures de vol par an. L’entraînement des équipages sera complété à l’avenir par l’utilisation de simulateurs (26) et d’hélicoptères de préparation opérationnelle. Les difficultés rencontrées par l’armée de terre en matière de disponibilité des hélicoptères lui imposent des efforts d’organisation, d’optimisation et de rationalisation du parc pour atteindre les buts fixés. Le tableau ci-après rappelle les objectifs et la cible pour 2010 ainsi que les résultats 2008 et 2009.

Activité des forces

Année

Nombre de JPAO

Nombre d’heures de vol par pilote

2008

109,9

168

2009 (1)

110

174

Cible 2010

120

180

Objectifs LPM 2009-2014

150

180

(1) Prévisions actualisées au 30 juin 2009.

Source : ministère de la défense.

Les premiers effets du retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN devraient se faire sentir. Le pays sera nation hôte de la préparation de l’alerte OTAN - NATO RESPONSE FORCE n°15 - pour la certification de l’état-major du corps de réaction rapide Europe et participera à l’exercice AUSTERE CHALLENGE 2010 avec les États-Unis. Le nombre d’exercices majeurs effectués dans un cadre multinational en 2010 devrait ainsi être supérieur à celui de 2009. Les entraînements nationaux seront marqués par la fin de la montée en puissance de la numérisation de l’espace de bataille. Un exercice majeur mettant en œuvre les capacités amphibies à caractère interarmées avec le déploiement d’un groupe amphibie est programmé en mer Rouge de mars à avril 2010.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL ELRICK IRASTORZA, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE TERRE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Elrick Irastorza, chef d’état–major de l’armée de terre, sur le projet de loi de finances pour 2010 (n° 1946), au cours de sa réunion du mercredi 14 octobre 2009.

M. le président Guy Teissier. Nous accueillons le général Elrick Irastorza, chef d’état-major de l’armée de terre, qui va nous présenter les crédits destinés à l’armée de terre dans le projet de loi de finances. Au-delà de l’aspect strictement budgétaire, je souhaiterais vous interroger sur plusieurs points.

Les rapporteurs de la loi de programmation militaire ont beaucoup insisté pour que les petits programmes de cohérence opérationnelle ne fassent plus l’objet d’ajustements budgétaires. Cette volonté du législateur trouve-t-elle sa traduction dans le projet de loi de finances ?

Qu’en est-il du moral de notre armée de terre avec la mise en œuvre de la loi de programmation et de la réorganisation du ministère ? Quel est le profil des personnels qui sollicitent le droit au départ ?

Concernant le financement des OPEX en cours, soit 870 millions d’euros dont près de 50 % pour le seul Afghanistan, comment gérez-vous les lacunes, notamment dans l’aéromobilité ?

Je tiens enfin à vous remercier au nom de tous mes collègues pour la remarquable prestation de l’armée de terre à l’occasion des universités de la défense à Saumur en septembre dernier.

M. le Général Elrick Irastorza, chef d’état-major de l’armée de terre. Je vous remercie de l’opportunité que vous m’offrez chaque automne de pouvoir vous présenter un point de situation sur l’armée de terre, et de vous faire part de mes éléments d’appréciation sur le projet de loi de finances.

Tout en s’acquittant, et de belle manière, de toutes les missions opérationnelles qui lui sont confiées, l’armée de terre s’est engagée depuis maintenant plus d’un an dans la réorganisation annoncée à l’été 2008. Consciente de la portée de la crise économique, elle mesure la constance des moyens consentis par notre pays pour sa défense, confortée en cela par l’adoption de la loi de programmation militaire du 29 juillet 2009.

Destinée à retrouver d’indispensables marges de manœuvre, cette transformation de grande ampleur représente un effort considérable. En effet, elle constitue tout à la fois et simultanément un rééquilibrage des capacités opérationnelles – sans qu’elle en abandonne aucune, conformément au Livre blanc –, une adaptation des ressources humaines, une évolution de l’organisation et du plan de stationnement, mais aussi la modification en profondeur des processus de fonctionnement, tout en conduisant le renouvellement des équipements et, bien sûr, en assumant nos engagements opérationnels.

2010 sera l’année charnière qui verra l’armée de terre véritablement basculer vers son nouveau format, dans la continuité des mesures prises en 2009. C’est un point de non-retour qui sera alors atteint.

Au vu des financements mis à ma disposition dans le cadre du projet de loi de finances, j’estime avoir globalement les ressources strictement indispensables à la préparation des opérations et à la conduite de la réforme, mais je reste préoccupé par les ressources attendues pour le programme 212, qui concernent essentiellement l’infrastructure.

De façon désormais traditionnelle, je me propose, à travers le prisme budgétaire, d’évoquer les problématiques liées aux ressources humaines, à la réorganisation, aux équipements et, enfin, à la préparation opérationnelle.

La manœuvre des ressources humaines en 2009 a impliqué la déflation des effectifs à hauteur de 3 630 personnels et le transfert vers d’autres budgets opérationnels de programme (BOP) de 1 030 personnels, sans qu’aient été constatées à ce stade de difficultés majeures. Nous devrions aborder 2010 dans des conditions satisfaisantes, grâce en particulier aux 60 millions d’euros consacrés à l’incitation aux départs et à l’accompagnement des restructurations. Il est en effet impératif de favoriser un allégement du sommet de la pyramide si l’on veut maintenir le flux de recrutement et de formation de soldats jeunes dont ont besoin nos régiments.

Le cadencement de la déflation des effectifs est inscrit en LPM, et je remercie la représentation nationale d’avoir bien voulu prendre en compte cette préoccupation forte qui était la mienne l’année dernière. Il donne à l’armée de terre la visibilité indispensable pour conduire humainement la déflation, il permet de préserver l’équilibre entre flux de départ et de recrutement, et il garantit in fine la capacité opérationnelle des unités.

Je relève qu’avec, en 2010, plus de 7 milliards d’euros – pensions comprises – consacrés à la masse salariale, je dispose a priori des ressources pour financer les effectifs et les mesures prévues d’amélioration de la condition militaire – soit plus 37 millions d’euros –, pour rendre plus lisibles et plus attractifs les parcours professionnels, et pour opérer la suppression de 3 600 postes – dont, il faut le souligner, 67 % dans l’administration générale et les soutiens communs, conformément aux orientations de la révision générale des politiques publiques (RGPP) – et le transfert de 3 800 autres. Au total, le BOP terre, c’est-à-dire l’armée de terre stricto sensu, perdra 7 400 postes en 2010 sur une déflation totale de plus de 43 000 postes programmée d’ici le terme de la réorganisation en 2014 : 24 000 imputables à des réductions d’effectifs – soit 14 000 au titre de la RGPP et 10 000 à celui des réductions capacitaires découlant du Livre blanc – et plus de 19 000 par transfert vers d’autres BOP.

Il convient de relever enfin, dans le domaine des ressources humaines, le coût quantitatif, qualitatif et financier de notre participation pleine et entière aux structures de commandement militaire intégré de l’OTAN qui s’étalera sur quatre ans, de 2009 à 2012, pour un total de 571 postes, dont l’attractivité dépendra très largement des conditions de vie faites à notre personnel muté à l’étranger. Les premières affectations réalisées au cours de l’été dernier seront analysées afin de rectifier tout dysfonctionnement notamment en matière d’accompagnement familial.

L’armée de terre a déjà réalisé les réorganisations prévues en 2009. Elles ont eu pour objet, pour les plus marquantes d’entre elles, la dissolution de deux états-majors opérationnels – le commandement de la force logistique terrestre et une brigade logistique – et de quatre régiments, le transfert à Haguenau du 2e régiment de hussards de Sourdun, le regroupement au sein des « Écoles militaires de Bourges » des écoles du train et du matériel, et la fermeture de neuf garnisons en métropole.

L’année 2010 sera plus complexe. En effet, il s’agira de dissoudre quatre états-majors opérationnels et d’en transférer quatre, de dissoudre quatre régiments et d’en transférer trois, de déménager deux écoles – dont l’école d’infanterie à Draguignan – enfin, de fermer six garnisons.

L’enveloppe de 697 millions d’euros consacrée aux activités et au fonctionnement courant équivaut comme d’habitude à environ 10 % de la masse salariale. Elle permettra de répondre aux besoins, même s’il convient de rester vigilant sur les risques liés aux surcoûts des déménagements et à la réalité des hypothèses d’inflation retenues. En effet, en période de réforme d’envergure, les ressources de fonctionnement doivent impérativement être préservées. La somme d’1 million d’euros n’a pas la même signification en fonctionnement courant qu’en équipement : l’impact positif ou négatif est immédiat, tant sur le moral que sur la bonne réalisation des restructurations.

Dans le domaine de l’infrastructure, l’armée de terre avait exprimé un besoin de 351 millions d’euros au titre des opérations directement liées aux réorganisations, 2010 étant l’année cruciale. Il devrait être globalement satisfait, mais une fois encore au détriment de l’entretien programmé qui sera limité pour l’essentiel aux travaux de mise aux normes et de sécurisation. Il en résulte un manque de visibilité et un décalage préoccupant entre les ressources envisagées et les besoins d’entretien du patrimoine – évalués en 2010 à 300 millions d’euros –, risque accentué par les reports de programmation de 2009. C’est la réserve que j’exprimai en introduction.

J’aborde maintenant les équipements. Conformément aux priorités à accorder aux forces terrestres inscrites dans le Livre blanc et traduites en LPM, et en cohérence avec la réalité de nos engagements opérationnels, 2009 a été une année exceptionnelle marquée par la prise de commandes majeures, dont celle, globale, de 332 véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) et celle, groupée, de la totalité des FELIN restants, soit 16 454. Ces commandes concrétisent l’indispensable renouvellement des matériels terrestres, le troisième d’ampleur depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.

Les commandes et livraisons attendues en 2010 s’inscrivent dans le droit fil de cette régénération d’ensemble de l’outil de combat.

Les commandes concernent 22 lance-roquettes unique (LRU), suite à l’interdiction des roquettes à sous-munitions, et la seconde tranche de 252 roquettes, 76 postes de tirs et 380 missiles à capacités de tir à partir d’espace confiné et « tire et oublie » en attente du nouveau missile moyenne portée, 1 500 parachutes, 100 missiles sol-air MISTRAL rénovés, 200 camions logistiques protégés, 187 petits véhicules protégés (PVP) et la rénovation de 3 Cougar. Enfin, un effort particulier est consenti pour la protection des vecteurs logistiques.

Les livraisons attendues concernent 99 VBCI – les 630 en cible sont tous commandés –, 7 Tigre sur 80 envisagés, 34 CAESAR sur 141 prévus, 3 107 FELIN sur 22 588 demandés, 340 PVP au lieu de 154, grâce au plan de relance, sur 1 500 en cible, sans oublier les équipements en système d’information et de communication (SIC) dont la conduite d’opérations interarmes, interarmées et interalliées en Afghanistan nous confirme le caractère indispensable.

Je souligne que, sitôt arrivés dans les forces, les équipements neufs sont mis en service et déployés sur les théâtres d’opérations, une fois bien sûr conduits les six mois de mise en condition opérationnelle du personnel avec son matériel. Nous avons ainsi engagé à l’été des hélicoptères Tigre et des canons CAESAR en Afghanistan, et nous préparons l’envoi du PVP, du VBCI et de FELIN. Tous ces matériels viennent en effet satisfaire des besoins opérationnels avérés, que confirme l’amélioration remarquable des capacités des forces terrestres constatée dès l’emploi de ces nouveaux équipements sur les théâtres.

Avec 550 millions d’euros, l’entretien programmé du matériel reste le principal poste de dépense après les salaires. Dans la continuité de celui entrepris en 2009, cet effort devrait permettre une disponibilité technique supérieure à 90 % sur les théâtres, et juste suffisante en métropole pour conduire l’entraînement compatible avec nos contrats opérationnels. À enveloppe constante, l’effort ne peut être porté partout au même niveau, notamment à l’arrière sur le territoire national, ce que comprend parfaitement le personnel.

Compte tenu de l’augmentation continue des coûts de maintenance d’équipements vieillissants ou bénéficiant a contrario des dernières technologies, le maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels sera la préoccupation majeure pour les années à venir, car nous n’avons pas d’autre choix que de nous donner les moyens d’entretenir des équipements de plus en plus sollicités. Le MCO n’est pas une action résultant d’un évènement malheureux dans la vie d’un équipement, il est consubstantiel à l’existence de ce matériel.

L’armée de terre s’est donc engagée depuis 2008 dans une démarche résolue pour contenir les coûts de MCO, en lançant une nouvelle politique d’emploi et de gestion des parcs. Son acceptation est toujours difficile car elle rompt avec des habitudes, mais les personnels peuvent constater qu’ils disposent de ce qu’il faut lors de l’entraînement comme des engagements opérationnels. La formation et l’entraînement ont été organisés en conséquence, en faisant de plus en plus appel à des équipements de substitution, les chars Leclerc, par exemple, étant particulièrement contraignants en termes de MCO.

2010 sera marquée par la réforme de la gouvernance de la maintenance, avec la création au 1er janvier de la structure intégrée de maintien en condition des matériels terrestres – la SIMMT, maître d’ouvrage délégué de chacune des armées –, et du service de la maintenance industrielle terrestre – le SMITER, maître d’œuvre – organisation symétrique à celle du MCO des matériels aériens.

La rationalisation des implantations des unités dédiées à la maintenance sera poursuivie en 2010 avec la réduction de 61 à 24 emprises à terme, permettant in fine une diminution de 22 % du personnel consacré à cette fonction, donc un gain en masse salariale de l’ordre de 170 millions d’euros qui couvre largement le surenchérissement de 14 % du MCO attendu en fin de LPM, soit 85 millions d’euros.

L’armée de terre fait donc déjà tout son possible pour contenir les coûts de MCO. Mais cette préoccupation doit maintenant être mieux prise en compte par les industriels qui doivent s’attacher à proposer leurs services à des rapports coût / efficacité / réactivité acceptables.

Enfin, s’agissant des équipements, l’armée de terre entreprendra un effort particulier en 2010 dans deux domaines. Il est tout d’abord urgent de poursuivre la reconstitution des stocks de munitions : les autorisations d’engagement augmenteront de plus de 30 % en 2010, passant de 69 millions d’euros en 2009 à 98 millions d’euros en 2010. Ensuite, 153 millions d’euros d’autorisations d’engagement seront consacrés à l’entretien programmé du personnel : ils permettront de poursuivre la montée en gamme du paquetage du combattant, dont l’ergonomie sera améliorée, ainsi que les efforts ciblés déjà entrepris dans le domaine de la protection individuelle. Il s’agit là pour moi d’un effort absolument prioritaire compte tenu de son impact immédiat sur le moral de nos hommes et de leurs familles, donc sur leur capacité opérationnelle et sur la solidité des bases arrières. Il faut aujourd’hui entrer dans une logique de stocks tournant très rapidement et permettant de s’adapter à l’évolution permanente des équipements.

Avant de conclure, je terminerai par l’engagement opérationnel et sa préparation. Nous avons connu un allégement de nos dispositifs sur plusieurs théâtres, ramenant notre charge de projection annuelle à environ 36 000 hommes, ce qui constitue finalement, mais sur un tempo bien évidemment différent, l’équivalent de notre contrat de projection du Livre blanc qui est de 30 000 + 5 000 hommes.

Nous avons 8 000 hommes en opérations contre 10 000 en début d’année, 4 000 en mission de présence et de souveraineté, 5 800 en alerte guépard et 1 000 hommes déployés sur le territoire national essentiellement dans le cadre du plan Vigipirate. L’augmentation de 60 millions d’euros de la dotation pour les OPEX permettra de mieux couvrir les surcoûts et continuera d’alléger la contrainte qui pèse traditionnellement sur la fin de gestion.

L’armée de terre combat au quotidien en Afghanistan. Le durcissement de cette opération depuis un an et demi confirme le bien-fondé de toutes les démarches entreprises depuis 2007 pour adapter nos dispositifs, nos matériels et notre préparation opérationnelle. Plus de 200 millions d’euros ont été consacrés à l’adaptation de nos équipements depuis 2008, avec une implication totale de l’état-major des armées (EMA) et une réactivité de la Direction générale de l’armement (DGA) qu’il me plaît de souligner. L’effort sera poursuivi en 2010. Contrairement à certaines armées étrangères, nous ne comptabilisons que ce que nous faisons en plus des programmes, par exemple en matière de blindage. Ainsi, intégrer dans cette facture l’engagement du programme CAESAR n’aurait pas de sens.

L’engagement sur sept théâtres principaux – Tchad, République de Côte-d’Ivoire, République Centrafricaine, Kosovo, Afghanistan, Liban, ainsi que l’opération Harpie en Guyane – entraîne une dispersion dont nous devons payer le prix. Avec par exemple 2 500 véhicules dont 1 000 blindés déployés en opérations, c’est-à-dire l’équivalent du matériel de dix régiments, elle est coûteuse sur le plan du soutien logistique, notamment en MCO, en raison de la grande ventilation des compétences et des lots d’outillage : que l’on déploie deux hélicoptères ou dix, le même nombre de spécialistes est nécessaire.

Quelles que soient les perspectives d’engagement, tous nos régiments doivent pouvoir conduire une formation initiale standardisée de qualité, s’entraîner aux missions communes de l’armée de terre et, bien entendu, se préparer à tout engagement générique dans leur cœur de métier. Seule la mise en condition à la projection pour la mission du moment fait l’objet d’une préparation opérationnelle différenciée, adaptée à chaque théâtre d’engagement. Nous ne construisons pas une armée à plusieurs vitesses : la formation initiale est la même, tous les régiments sont formés à l’engagement générique prévu dans le Livre blanc, avec un effort ciblé ensuite en fonction de l’engagement opérationnel à venir. Une unité envoyée en Guyane ne sera pas formée comme une unité engagée en Afghanistan. Les 133 millions d’euros du projet de loi de finances permettront de financer cet effort.

Sur tous les théâtres, notamment en Afghanistan, nos soldats reconnaissent qu’ils sont bien préparés et que la qualité de cette préparation constitue la meilleure protection. Comme les années précédentes, les ressources consacrées à la préparation opérationnelle, qui ne représentent finalement que 1,5 % du BOP terre, mais qui ne recouvrent que le carburant afférent, les dépenses diverses d’instruction, les transports d’instruction et l’indemnisation des déplacements, sont donc préservées. A ce niveau, elles ne peuvent plus être une variable d’ajustement budgétaire. Les munitions, l’usure des équipements et les autres charges sont comptabilisées par ailleurs.

Sous réserve que la fin de gestion 2009 s’effectue dans de bonnes conditions, l’armée de terre aborde 2010, année cruciale de sa transformation, avec les ressources strictement nécessaires. S’inscrivant dans la dynamique créée par le décret 2005-520, l’entrée en vigueur du décret 2009-869, fixant les attributions du chef d’état-major des armées et des chefs d’état-major d’armée, ne pose aucun problème particulier.

Elle dispose à strict niveau de suffisance des ressources pour réaliser les multiples et difficiles réorganisations qu’elle conduit, tout en assurant l’ensemble des missions opérationnelles qui lui sont fixées.

Elle s’engage résolument dans le processus d’interarmisation et de rationalisation des soutiens, dont la mise en place rapide implique d’ores et déjà un transfert vers d’autres BOP d’une partie de ses effectifs, donc de la charge de déflation qui y est attachée. Le rythme annuel de déflation de ses effectifs devra être réduit d’autant si l’on souhaite préserver la cible finale de 94 000 militaires et 9 000 civils pour le seul BOP terre – l’armée de terre au sens strict. Il importe donc qu’un suivi normalisé et notarié de ces transferts soit mis en œuvre si l’on veut éviter qu’une fois de plus, les forces ne paient plus que de raison une déflation qui doit porter sur l’administration générale et les soutiens communs. Je rappelle que l’objectif premier de la réforme est bien de réduire le ratio soutenants - soutenus.

Le Livre blanc a souligné l’effort initial à consentir au profit des forces terrestres ; les événements confortent cette analyse. La LPM et le PLF 2010 devraient en conséquence permettre de donner le meilleur possible aux soldats qui remplissent au péril de leur vie les missions qui leur sont confiées. Ils l’attendaient ; ils constatent que cet effort est réel et ils y sont sensibles.

M. le président Guy Teissier. Dans l’incompréhension générale, les deux centres nationaux d’aguerrissement en montagne de Briançon et Barcelonnette – pour lequel 100 millions de francs ont été consacrés à la rénovation du casernement voilà une douzaine d’années – ont été fermés en faveur d’un autre, situé à Modane, dont la mise aux normes nécessitera 500 000 euros d’investissements. La raison avancée étant le passage à onze des unités concernées, alors que les deux centres pouvaient en accueillir trois fois plus, n’aurait-il pas été plus simple de fermer un centre ?

M. le Général Elrick Irastorza. C’est toujours un crève-cœur d’abandonner des garnisons et des infrastructures remarquables – je pense par exemple à Châteauroux –, mais la logique aujourd’hui répond à un resserrement de notre dispositif, nous n’avons pas d’autres choix.

La fermeture du 11e bataillon de chasseurs alpins, basé à Barcelonnette, avait entraîné, pour maintenir une garnison en Ubaye, sa transformation en centre d’instruction et d’entraînement au combat en montagne. Celle du 159e régiment d’infanterie, pour rester dans le Briançonnais, a donné lieu à la création d’un centre national d’aguerrissement en montagne. Je considère que l’aguerrissement relève avant tout de chaque régiment et que ces centres pouvaient être considérés comme de l’aisance fonctionnelle.

La préparation opérationnelle, en particulier à l’Afghanistan, sera donc organisée à Canjuers et sur ses champs de tir, ainsi que dans l’arrière-pays. Modane ne sera qu’une base arrière rustique, rattachée au 13e bataillon de chasseurs alpins, qui permettra ponctuellement d’entraîner à l’engagement en montagne des unités pour une mission précise, à hauteur de onze unités par an.

Quitter des infrastructures que nous venons de rénover peut paraître du gaspillage, fermer deux centres qui donnaient satisfaction peut sembler étonnant, mais je ne suis plus en mesure de conserver les uns et les autres.

M. le président Guy Teissier. Les onze unités en question auraient pu tout aussi bien être reçues à Briançon ou à Barcelonnette. Les 500 000 euros ainsi économisés auraient pu servir, par exemple, à valider, pour les pensions des élèves de l’école d’Issoire des promotions 63, 64 et 65, les années d’apprentissage effectuées avant que l’école ne soit officielle.

M. le Général Elrick Irastorza. Dans le temps, la nouvelle organisation se révélera moins coûteuse.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis pour les forces terrestres. Où en sont les programmes du lance-roquettes unitaire et du véhicule à haute mobilité (VHM) ? Quand le VBCI pourra-t-il être engagé en opérations et sur quels théâtres ?

M. le Général Elrick Irastorza. Pour ce qui est du LRU, dont le dossier de lancement de réalisation (DLR) a été signé par le délégué général pour l’armement, la transformation du lanceur actuel se fera en liaison avec les Allemands, la roquette étant étudiée avec les Américains et le propulseur étant fabriqué par la société française Roxel. Ce système d’armes permettra à l’armée de terre de conserver une capacité de frappe tous temps, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce que ne peut pas faire la chasse aérienne. Les Américains et les Britanniques sont déjà dotés de cet équipement qui présente une valeur dissuasive très forte sur un théâtre d’engagement puisqu’il permet d’emporter une charge de 70 kilos à soixante-dix kilomètres avec un écart décamétrique.

Après que nous avons dissous un des deux régiments dotés de vingt-quatre lanceurs chacun, seul restera le 1er régiment d’artillerie aux Fougerets près de Belfort qui disposera de vingt-quatre lanceurs plus deux en maintenance, livrés par tranches de sept et huit lanceurs d’ici à la fin de la loi de programmation militaire. Quant aux roquettes, les douze premières devraient être livrées en 2010 et les suivantes en deux fois, en 2011 et 2012.

Le véhicule à haute mobilité – véhicule chenillé et articulé dont sont dotées les troupes alpines – servira également aux troupes à vocation amphibie puisque cet engin peut être considéré comme le chaînon manquant après le BPC et le chaland de débarquement rénové pour aborder les plages. Les offres portant sur 129 véhicules sont en cours de dépouillement et les premières commandes devraient intervenir à la fin de l’année. Les livraisons seraient ainsi étalées de 2011 jusqu’en 2014. Les alternatives sont essentiellement celles présentées par la société Hägglunds et par la firme singapourienne ST Kinetics avec le Bronco.

Pour sa part, le VBCI donne toute satisfaction au 35e régiment d’infanterie qui a conduit toutes les expérimentations. Cet engin remplace l’AMX 10 et non le VAB, lequel cédera la place au véhicule blindé multirôles (VBMR). Le 92e régiment d’infanterie va maintenant monter en puissance. Nous envisageons de projeter le VBCI sur un ou deux théâtres, après analyse et préparation opérationnelle des équipages – qui serait de six mois pour l’Afghanistan. Nous n’engagerons pas précipitamment un matériel nouveau sans que l’équipage ait reçu la formation adaptée à l’engagement opérationnel correspondant. Ce dernier ne pourrait donc avoir lieu au plus tôt qu’à l’été 2010, quel que soit le théâtre.

M. Bernard Cazeneuve. Votre armée étant celle qui contribuera le plus à la réduction des effectifs, pourriez-vous préciser dans quelles conditions se mettent en place les bases de défense, pierre angulaire de la réforme du ministère de la défense ? A-t-on une idée de ce qu’elles coûtent et de ce qu’elles rapportent, et dispose-t-on d’indicateurs fiables permettant d’évaluer l’efficacité du dispositif ?

Sachant que la réussite de la réforme dépend en grande partie du flux des départs programmés – le ministre de la défense a annoncé que les demandes de départ étaient supérieures aux moyens disponibles pour les financer –, comment fera-t-on pour favoriser le départ de ceux que l’on voudrait voir partir et pour garder ceux dont les compétences sont nécessaires ?

Enfin, les frais d’infrastructure engagés sont-ils compensés par des économies de fonctionnement ?

M. Damien Meslot. Le nombre des bases de défense devrait, paraît-il, être réduit. Est-ce parce qu’une première expérimentation a montré une moindre efficacité, voire un coût supérieur à ce qui était prévu ?

Où en est-on par ailleurs de l’équipement en drones de nos armées ? Est-il vrai que nous nous apprêterions à acheter du matériel américain ?

Enfin, qu’en est-il du manque de spécialistes de la langue arabe dans nos services de renseignement ?

M. le Général Elrick Irastorza. Les bases de défense sont la conséquence de l’objectif de réduction des effectifs, en particulier de ceux dédiés à l’administration générale et aux soutiens communs où elle doit atteindre 15 % au minimum. Si ces bases sont essentielles pour la réforme, leur réussite ne doit pas se faire au détriment du reste.

Une base de défense, c’est d’abord une circonscription d’administration militaire à laquelle sont rattachés les régiments et unités qui y sont stationnés. Si la réduction du nombre de bases est envisagée, c’est parce qu’il a semblé finalement préférable d’accroître leur périmètre plutôt que de laisser isolé un régiment stationné à cinquante kilomètres d’une base. Pour autant, assurer aux hommes que les bases de défense nous permettront de mieux fonctionner qu’à l’heure actuelle ne va pas de soi car, comme toujours, il y a rupture avec les habitudes prises. Cependant, la réorganisation est indispensable pour permettre de préserver l’outil opérationnel. La mission de coordination des restructurations suit de façon notariée l’évolution. Les onze bases expérimentales qui nous ont déjà permis de tirer certaines conclusions, se verront adjoindre sept autres bases en 2010, ce qui nous rapprochera encore d’un fonctionnement de la totalité des bases en 2011.

Concernant la maîtrise des départs, je rappelle que ne part pas qui veut. Les personnels postulent et c’est la direction du personnel qui décide. L’administration générale et les soutiens communs constituent une cible privilégiée pour bénéficier des dispositifs d’aide au départ. Cela peut paraître injuste, mais au moins cela nous permet d’éviter les déséquilibres dans certains métiers dont nous avons besoin.

L’abandon de certaines infrastructures permettra d’économiser les programmes de rénovation les concernant. Si, au départ, le programme de rationalisation nécessite d’autres investissements, le coût sera amorti dans la durée. C’est à cette aune qu’il faut comprendre la suppression de 147 emprises.

L’armée de terre emploie trois types de drones.

Le 61e régiment d’artillerie dispose ainsi du CL 289, qui est en fin de vie, et du système de drone tactique intérimaire (SDTI), petit avion qui, après avoir connu certains déboires, donne toute satisfaction grâce à sa très bonne qualité d’optique. Son utilisation est quasi quotidienne, que ce soit pour appuyer les reconnaissances, pour régler les tirs d’artillerie ou encore pour faciliter l’appui aérien. Nous avons d’ailleurs décidé de prolonger son utilisation et nous avons même racheté aux Canadiens des vecteurs de la même famille.

Le drone de reconnaissance au contact (DRAC) est un petit drone tactique mis en œuvre au niveau de l’unité pour aller chercher du renseignement à une dizaine de kilomètres. Une section par brigade en est dotée. Il a présenté deux difficultés majeures de mise au point, mais la première, due à l’interférence entre l’optique et le système de géo-référencement, a été réglée par l’industriel, et la seconde, liée à des problèmes de motorisation, est en cours de règlement. Les vols devraient être relancés assez rapidement.

Quant aux autres drones, il s’agit de systèmes plus lourds qui sont servis par l’armée de l’air. Ils entrent dans une autre logique que celle de l’armée de terre, laquelle a besoin de drones opérationnels permettant d’aller chercher tout de suite l’information face à une situation donnée ou de venir immédiatement en appui d’une décision. Les grands drones obéissent, eux, à une logique d’ordre plutôt stratégique impliquant une programmation des vols avec une réactivité différente.

Nos besoins en drones sont satisfaits en Afghanistan, mais ils restent fragilisés du fait des difficultés rencontrées par le DRAC que l’industriel s’emploie à régler activement.

Enfin, disposer de traducteurs ou d’opérateurs d’écoute performants n’est pas chose aisée. On ne sait jamais ce qui sera répété par un interprète dans une autre langue. De même, le renseignement exige une grande maîtrise de la langue écoutée, car de l’écoute dépendront nombre de décisions.

M. Michel Grall. Quel est l’état de nos relations actuelles avec l’OTAN sur le plan opérationnel au Kosovo, en Afghanistan ou sur d’autres théâtres d’opération ? L’arrivée à Norfolk de personnels d’état-major à l’exemple du général Abrial nommé à la tête de l’état-major chargé de réfléchir à la transformation de l’OTAN, a-t-elle entraîné pour l’armée de terre des évolutions en termes de fonctionnement ?

M. Michel Voisin. Si l’implantation de la base de défense expérimentale de La Valbonne, dans mon département, n’a pu que réjouir les élus locaux, je tiens tout de même à appeler l’attention sur le problème que va poser l’accueil de plus de 1 000 personnels du 1er régiment médicalisé de Metz en raison du délai très court laissé aux collectivités locales, en particulier pour engager des programmes de construction.

Concernant la Mission des Nations unies en République Centrafricaine et au Tchad (Minurcat), le désengagement du contingent français sera effectif à la fin de l’année 2009 et son remplacement pourvu par des forces burkinabées que nous devons équiper. Qu’est-il prévu sur le plan budgétaire ?

M. le Général Elrick Irastorza. Notre participation aux opérations de l’OTAN n’est pas une nouveauté. La nomination du général Abrial n’a pas eu d’effet particulier sur le fonctionnement de l’armée de terre, contrairement à l’affectation, à l’été 2009, d’officiers et de sous-officiers dans les organismes de l’OTAN. La gestion de cette ressource de qualité devra faire l’objet à l’avenir d’un suivi attentif.

Pour ce qui est de nos relations avec l’OTAN sur les théâtres d’opération, aucun problème particulier ne se pose. Tel est le cas en Afghanistan où des personnels français sont rattachés à la région Est, sous commandement américain.

Les restructurations peuvent poser des problèmes dans des bassins où la capacité d’absorption n’est pas très importante. Mais il convient aussi de ne pas laisser se dégrader une emprise délaissée par une unité ou encore de ne pas fragiliser l’économie locale en retardant l’arrivée de celle qui reprend ses infrastructures. C’est ainsi qu’entre le départ de l’armée de l’air de Meyenheim et l’arrivée du régiment de marche du Tchad, tout délai de vacance conduirait à une dégradation de l’infrastructure militaire et des logements et à des difficultés pour le marché local. Un délai très court a été laissé à Draguignan avant l’arrivée de l’école d’infanterie, mais la réactivité a été bonne.

Enfin, pour la MINURCAT, je ne peux vous donner le coût exact de son équipement qui pourrait faire l’objet d’une cession. Mais il ne s’agit pas d’un équipement très lourd. Cette cession pourrait s’effectuer dans le cadre du dispositif Recamp (Renforcement des capacités africaines de maintien de la paix) d’appui à la formation et à l’entraînement.

M. Christophe Guilloteau. Pour le site de Balard, des sommes extravagantes ont été avancées. Quelle sera réellement la quote-part de l’armée de terre ?

Mme Françoise Hostalier. Les mutations de nos armées sont sans commune mesure avec ce qui a été supporté précédemment. Outre les conséquences sur le moral des hommes et des familles, des actions sont-elles prévues, y compris sur le plan interministériel, pour faciliter les adaptations, au-delà d’une simple aide aux déménagements ?

Pour ce qui est des opérations, il est essentiel que nos hommes puissent continuer à éprouver une certaine fierté de leur matériel, et le choix de l’évolutivité de ce dernier doit être appuyé.

Un redimensionnement de notre engagement en Afghanistan est-il envisagé, sachant que l’on parle d’une modification de la position des Américains ?

Quant à l’évolution des effectifs, est-il prévu de renforcer l’image de l’armée auprès de notre jeunesse ? Je pense en particulier au dispositif Défense deuxième chance, qui avait donné, me semble-t-il, de bons résultats. De même, des actions seront-elles menées à l’occasion de la Journée d’appel de préparation à la défense en faveur des opérations civilo-militaires afin de modifier la vision que peuvent avoir les jeunes des opérations militaires ?

Enfin, concernant les stocks de munition, qu’en est-il de l’application du traité d’Oslo qui tend à interdire les bombes à sous-munitions ?

M. le Général Elrick Irastorza. Le site Balard relève du programme 212. Il n’y a donc pas de participation directe de l’armée de terre à cette implantation.

Le moral est un sujet important. Si les militaires partagent les préoccupations des Français, sur la situation économique actuelle par exemple, ils ont la fierté de faire leur métier même s’il leur faut faire avec le vieillissement de certains équipements, sans oublier les préoccupations des familles, en particulier en termes de mobilité. Plus de 18 000 militaires ont ainsi connu une mutation l’été dernier.

Concernant les jeunes, il convient d’abord de se rappeler que l’armée de terre est composée à 72 % de contractuels, avec un turn-over très fort. Elle reste donc toujours un outil d’intégration et un « escalier » social. Nos sous-officiers sont pour moitié d’anciens militaires du rang et la proportion est la même pour les officiers. Pour ce qui est du dispositif Défense deuxième chance, nos lycées militaires – qui ont été élargis au groupe 3, c’est-à-dire à la société civile– comprennent des classes de soutien menant aux classes préparatoires. Il faut aussi compter sur la volonté des individus de s’élever socialement.

Enfin, nos opérations civilo-militaires font partie depuis vingt ou trente ans de tous nos engagements.

Nous n’utilisons plus les roquettes à sous-munitions dont était équipé le 1er régiment d’artillerie et c’est la raison pour laquelle il nous faut nous doter du lance-roquettes unitaire.

M. Jean-Claude Beaulieu. Comment évolue le service de santé des armées dont la qualité professionnelle et technique est reconnue, aussi bien par les militaires que par les civils, tant sur le territoire national que sur les théâtres d’opérations extérieures ? Comment est organisé l’accompagnement des blessés – je pense notamment au traitement des séquelles post-traumatiques sur le plan tant physique que moral – ainsi que des familles ?

M. le Général Elrick Irastorza. Laissant au directeur central le soin de s’exprimer sur l’évolution du service de santé des armées, je vous ferai simplement part d’une certitude, celle de la nécessité de conserver un service spécifique de l’état militaire afin d’assurer le soutien de nos unités en opérations puis d’éviter toute gestion chaotique de l’accompagnement de nos blessés. Pour les soins apportés aux blessures physiques, la situation peut être qualifiée de tout à fait correcte. L’accompagnement des traumatismes psychiques ou psychologiques est en revanche beaucoup plus compliqué.

Le dispositif mis en place comprend une partie expérimentale, avec l’ouverture à Chypre, pour les troupes de retour d’Afghanistan, de ce que nous avons appelé un sas où, pendant deux ou trois jours, nos hommes peuvent se poser plutôt que passer brutalement d’un théâtre d’opération à un cadre familial, ce qui n’est pas simple à gérer aussi bien pour celui qui rentre que pour la famille. Cette courte période permet par exemple d’expliquer à nos soldats qu’il n’est pas anormal qu’ils s’interrogent et qu’ils soient perturbés, et que nous pouvons les aider. Il est en effet compréhensible, quel que soit le grade, qu’après six mois de vie particulièrement intense et exposée, on ressente une perte de repères et l’on se questionne.

La partie pérenne du dispositif porte sur l’accompagnement dans la durée, avec des fiches d’entretien et des rendez-vous d’étape aussi bien avec le chef de section qu’avec le commandant de l’unité. Nous avons en effet voulu une certaine formalisation en la matière, même s’il appartient au chef de section de savoir si ses hommes vont bien ou pas. La cellule d’intervention et de soutien psychologique de l’armée de terre (CISPAT) est envoyée en renforcement sur le théâtre dès qu’un problème se pose, mais nous avons sur place des psychologues à temps plein.

Pour ce qui concerne l’accompagnement des familles de nos tués et de nos blessés, le soutien actuel, en appui de la solidarité de la nation, se fait correctement. Notre association « Terre fraternité » permet d’être très réactif, en particulier dans des situations de détresse que l’administration aurait, pour mille raisons, des difficultés à gérer immédiatement. Elle vient en appui de la cellule d’aide aux blessés et aux familles de nos tués (CABAT), rattachée au Gouverneur de Paris.

Honnêtement, je crois que nous faisons le maximum de ce qui peut être fait. Je tiens en particulier à souligner que nos tués en opération sont honorés comme il se doit, depuis l’accueil dans les aéroports jusqu’aux obsèques familiales.

Mme Françoise Olivier-Coupeau. Disposez-vous de critères tant qualitatifs que quantitatifs permettant d’analyser les conséquences de l’externalisation sur nos armées aussi bien sur le territoire national que sur les théâtres d’opération, et, dans l’affirmative, quels premiers enseignements en avez-vous tirés ?

M. Francis Hillmeyer. Rencontrez-vous des difficultés en matière de recrutement pour assurer l’équilibre entre les flux de départ et d’arrivée ? Quelle est votre analyse de l’efficacité de nos forces à terme, une fois les 43 000 suppressions de postes réalisées ?

M. le Général Elrick Irastorza. Passé l’engouement initial, l’externalisation étant alors comprise comme la solution à tous nos problèmes, la situation s’est quelque peu rationalisée. Ainsi, dans certains domaines très sensibles, comme celui du maintien des matériels en condition opérationnelle, il est apparu nécessaire de conserver un savoir-faire, ne serait-ce que pour entretenir nos équipements sur les théâtres d’opération les plus exposés. La mission pour la coordination de la réforme procède ainsi à des ajustements relevant du pur bon sens.

Pour autant, il ne faut pas confondre externalisation et sous-traitance. Des opérations de sous-traitance sont en effet conduites dans certaines garnisons permettant de nous décharger, par exemple, de l’entretien des espaces verts. L’objectif est de dégager les soldats professionnels de charges qui pourraient paraître ancillaires et qu’ils acceptent d’ailleurs de moins en moins, ce qui me conduit tout naturellement à la question relative au recrutement.

Nous ne connaissons pas à l’heure actuelle de problème en la matière, sinon celui de la réalisation des effectifs. Il s’agit d’un phénomène mécanique dû, en phase de réduction des effectifs, à la peur de dépasser les crédits de la masse salariale. Quand vous déclinez cette politique par sous-ensembles, tout le monde prend de la marge, et à force de vouloir être juste, on se retrouve finalement en dessous de l’objectif visé. Nous n’avons en tout cas pas de problème de recrutement d’officiers, de sous-officiers et de militaires du rang.

Toutefois, un effort de fidélisation est nécessaire pour ces derniers. Il est en effet déraisonnable de recruter, comme à l’heure actuelle, trop de sous-officiers ab initio alors que nous faisons partir dans le civil des engagés qui ne demanderaient pas mieux que de poursuivre leur carrière. J’ai pris la décision de supprimer toutes les barrières qui jalonnaient le parcours des militaires du rang. Si nous conservons le dispositif attractif permettant aux personnels partant entre neuf et onze ans de recevoir une prime de départ, les quinze ans pourront être dépassés, le tout sans impact sur les pensions puisque les flux seront gérés. Simplement, il n’existe plus de barrière automatique : à partir du moment où un militaire compétent veut rester et où nous avons le poste, il n’y a pas de raison pour que nous ne le gardions pas. La compensation sera immédiate, grâce à une réduction des flux d’entrée, donc des coûts de recrutement et de formation initiale. Ainsi nos militaires pourront avoir dans nos régiments une carrière un peu plus longue. Tous ne le souhaitent d’ailleurs pas forcément.

M. le président Guy Teissier. Donner à ceux qui le veulent la possibilité de rester est une excellente mesure de promotion sociale.

M. Jean-Claude Viollet. Concernant les DRAC, la procédure d’acquisition a été lancée en 2003 et le contrat d’acquisition finalisé en 2004. Or seuls vingt-cinq appareils, qui « pourraient » voler, ont été livrés à ce jour sur les 110 attendus. La commande de 50 engins prévue en 2009 pourrait ne pas être passée et aucun crédit n’est inscrit en 2010 en cas de report. Faut-il dans ces conditions faire de « l’acharnement thérapeutique » ou procéder, comme le commandement des opérations spéciales, à l’achat du Skylark israélien qui donne toute satisfaction, y compris en matière de suivi de cible ?

M. Philippe Folliot. On parle beaucoup des OPEX, mais très peu des forces de souveraineté. Alors que les îles Éparses, au large de Madagascar, pourraient être laissées à l’abandon, qu’est-il envisagé pour nos forces de souveraineté notamment dans les territoires d’outre-mer tels que les terres australes et l’île de Clipperton ?

M. le Général Elrick Irastorza. La question relative aux drones pose celle d’ordre plus général de nos relations avec les industriels. En l’occurrence, nous avons de vrais sujets de satisfaction avec le VBCI, le CAESAR, le PVP, etc., mais également des sujets de préoccupation, dont les drones, et il faut sortir très rapidement de l’impasse que vous avez relevée, d’autant que d’autres engins existent sur le marché. Pour autant, faut-il raisonner en termes de base industrielle et technologique de défense (BITD) ou donner la préférence à d’autres industriels ? C’est là une question dont vous connaissez certainement la réponse...

Les territoires comme les îles Éparses n’entrent pas, vous le comprendrez, dans le cadre de mes attributions mais dans celles du chef d’état-major des armées (CEMA). Tout dépendra de la redéfinition du déploiement des forces de souveraineté découlant du Livre blanc, car les effectifs du BOP terre resteront eux à 94 000 militaires et à 9 000 civils. C’est ce qui explique que nous ayons recours aux unités tournantes afin de ne pas geler d’effectifs permanents, en particulier sur ces territoires.

M. Daniel Boisserie. Le site de Limoges devant d’ici quelques années ne plus accueillir de militaires, pourrait-on disposer d’un planning précis afin que les acteurs économiques concernés puissent mieux s’organiser ?

M. Nicolas Dhuicq. Le missile Milan semble poser quelques difficultés en Afghanistan sans doute en raison de son âge. Que pensez-vous de l’achat sur étagère du Javelin ? Faut-il conserver une compétence industrielle nationale dans ce type d’arme ?

M. Jean-Jacques Candelier. Au nom de la RGPP et de la loi de programmation militaires, des milliers d’emplois sont supprimés et des garnisons sont fermées tandis qu’en contrepartie les équipements sont renouvelés. Cette volonté de remplacer le soldat par le matériel ne me satisfait pas. Cette politique est-elle acceptée par tous ?

Cette guerre en Afghanistan nous coûte très cher en matériel et en hommes avec trente-trois tués, auxquels je rends hommage. Il est temps d’élaborer un calendrier de retrait de nos troupes.

M. le Général Elrick Irastorza. Je vous répondrai par une considération d’ordre général : les militaires sont sans ambiguïté subordonnés au pouvoir politique. Sur le plan militaire, ma réponse sera celle que je donne aux soldats, voire à leur famille, qui me posent des questions : quand on a choisi le métier militaire, on ne choisit pas ses missions sinon on change de métier.

Je confirme que nous quitterons le site de Limoges en 2011.

Le missile Milan vieillit mal, mais il donne toujours satisfaction. C’est pourquoi nous essayons de le maintenir pour le prolonger jusqu’en 2015 voire 2017 afin de laisser aux industriels le temps nécessaire pour proposer l’arme que nous appelons de nos vœux et qui existe dans d’autres pays. D’ici là, j’ai obligation de donner à mes soldats l’engin qui leur permette de remplir leurs missions dans les meilleures conditions, c’est-à-dire un matériel qui autorise de tirer en espace clos, semi-clos ou contraint et, surtout, de quitter la position de tir une fois le missile parti. En effet, le missile filoguidé dont nous sommes dotés implique de rester vingt secondes derrière un poste de tir non abrité. Ce missile, qui est maintenant ancien, répondait à d’autres conditions d’engagement remontant au pacte de Varsovie.

La solution relais actuelle permet de répondre à un besoin dimensionné au plus juste, c’est-à-dire 76 postes de tirs et 5 missiles par poste.

M. le président Guy Teissier. C’est donc une solution palliative qui a été choisie avec l’achat sur étagère de l’un des deux missiles qui restent dans la compétition, c’est-à-dire soit l’américain soit l’israélien...

M. le Général Elrick Irastorza. Le choix est déjà fait.

M. le président M. Guy Teissier. ...en laissant à l’industriel français le temps de trouver le missile qui répondra aux besoins que vous avez exprimés ?

M. le Général Elrick Irastorza. Tout à fait.

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de la Mission « Défense » : « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) » pour 2010, au cours de sa réunion du mercredi 28 octobre 2009.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Philippe Folliot. Je partage les inquiétudes du rapporteur en ce qui concerne l’état des infrastructures en général et de l’armée de terre en particulier. Le plan de relance a ouvert des pistes pour rattraper ce retard et investir au profit des infrastructures. Cela s’est-il produit dans les faits ?

Je me demande par ailleurs si nos forces ont toujours les moyens de s’entraîner. Je pense notamment aux parachutistes qui disposent de moins en moins d’avions de transport, les Transall étant dans un état de vétusté avancée.

M. le président Guy Teissier. Sur l’hébergement, je note que toutes les casernes ne sont pas équipées de logements « Vivien ». L’hébergement collectif, qui pouvait se justifier pour un stationnement temporaire du temps de la conscription, n’est en revanche plus adapté pour des engagés qui passent plusieurs années dans les casernes, même si beaucoup d’entre eux préfèrent résider à l’extérieur pour être avec leurs familles. Disposez-vous d’éléments à ce sujet ?

M. Jean-Louis Bernard. Les logement que j’ai visités étaient plutôt révélateurs d’un mauvais état, sans doute les responsables de l’armée de terre ont-ils ainsi voulu attirer mon attention plutôt qu’en me montrant des bâtiment plus modernes.

Concernant l’hébergement, je crois qu’il faut également prendre en considération le prix de l’immobilier dans la zone où est installé le régiment. En effet, il est difficile pour les militaires, et notamment les militaires du rang, de se loger à l’extérieur de la caserne. De fait, il sont forcés de se contenter des conditions d’hébergement au sein du régiment, parfois peu satisfaisantes. Cette difficulté est par exemple très nette à Annecy ; la région de Castres souffre sans doute moins de ce problème.

J’ajoute qu’avec le déplacement ou la disparition de certaines unités, nous allons arriver à une situation paradoxale en libérant des emprises avec des logements rénovés pour renforcer des sites qui n’ont pas bénéficié d’un effort similaire.

Sur le plan de relance, je ne suis pas en mesure de vous confirmer que les annonces ont été suivies d’effet pour les infrastructures.

Concernant l’entraînement, nous souffrons d’un manque d’espace en métropole, notamment pour les exercices aériens et sommes contraints d’en réaliser hors du territoire. Je suis conscient de l’état de notre flotte d’avions de transport. Il faut d’abord que ces appareils soient dédiés à la projection des forces. Cet effort ne doit toutefois pas se faire au détriment de l’entraînement.

M. Michel Voisin. Vous avez évoqué les bases de défense dont la création doit permettre d’inverser le rapport entre le soutien et l’opérationnel, le premier ne devant pas dépasser 40 % de l’effort. Dans le cadre de vos déplacements, avez-vous constaté que ce rapport commence à s’inverser ?

M. Jean-Louis Bernard. Je crois que le chef d’état-major des armées a répondu à cette question, indiquant qu’il est encore trop tôt pour disposer de retours exploitables sur les bases de défense. Quoi qu’il en soit, toute réforme commence par coûter cher avant de générer des économies.

Au-delà des aspects financiers, il est primordial de veiller à la proximité. L’exemple des médecins militaires me semble parlant : ils doivent être placés au sein des unités, en être membres à part entière.

M. Christophe Guilloteau. Nous avons réalisé des investissements lourds avec la commande de nombreux programmes. Est-ce que la réduction du format des armées a bien été intégrée ? En d’autres termes y a-t-il un risque que nous disposions de trop d’équipements sans avoir suffisamment de militaires pour les utiliser ?

M. Jean-Louis Bernard. Il n’y a pas d’équipements en surplus dans les armées, les commandes ayant intégré les nouveaux contrats opérationnels. Je veux d’ailleurs indiquer que les achats récents sont indispensables : FELIN assure par exemple la protection individuelle de nos combattants. De même, nous avons équipé nos VAB de tourelleaux et renforcé la protection de nos véhicules contre les engins explosifs improvisés, les brouilleurs ne pouvant pas tous les neutraliser ni les engins de détection les repérer.

Quoi qu’il en soit, nous devons garder à l’esprit que nos soldats agissent dans un contexte de guerre où le risque zéro n’existe pas. Je suis néanmoins certain que les armées agissent aujourd’hui avec l’équipement nécessaire et que la protection du combattant est bien une préoccupation permanente des responsables du ministère de la défense.

M. Christian Ménard. Comment analysez-vous la baisse du nombre de réservistes en 2009 ?

M. Jean-Louis Bernard. Les restructurations et les déplacements d’unités expliquent en partie cette diminution. Il est également possible que des réservistes aient renoncé faute d’être suffisamment employés.

M. Damien Meslot. Lors de l’embuscade de la vallée d’Ouzbine, j’ai été très frappé par l’exploitation médiatique qui a été faite des réactions des familles des victimes. Il est indigne que les médias aient cherché à exploiter la douleur et le désespoir des proches pour l’utiliser contre le Gouvernement ou contre nos armées. Cette instrumentalisation du malheur m’inspire un profond dégoût. Il n’en reste pas moins que j’ai le sentiment que la communication des armées n’a pas réussi à faire face à cette offensive médiatique. Nos armées disposent-elles des moyens modernes pour agir dans les médias et défendre nos soldats ? Pensez-vous que les armées ont progressé sur ce point depuis l’année dernière ?

M. Jean-Louis Bernard. Les armées ont essayé de tirer toutes les conséquences de ce dramatique évènement. L’accompagnement des familles m’a semblé exemplaire. L’armée de terre, faute d’avoir été engagée dans des opérations de guerre depuis longtemps, avait sans doute perdu l’habitude de communiquer sur de pareils sujets. Le déchaînement médiatique a été particulièrement important, d’autant qu’il a souvent atteint directement les militaires qui avaient le sentiment d’être mis en accusation. Je crois que depuis, des efforts conséquents ont été faits. Il faut d’ailleurs plutôt mettre en valeur la dignité et l’émotion qui ont prévalu lors des cérémonies officielles.

M. Franck Gilard. Disposez-vous d’un état comparatif de la disponibilité des différents matériels ? Avez-vous des éléments de comparaison par rapport à d’autres armées équivalentes, comme par exemple celle du Royaume-Uni ou de l’Allemagne ?

M. Jean-Louis Bernard. Je ne dispose pas d’éléments de comparaison internationale. Vous trouverez dans mon avis un état des lieux de la disponibilité des matériels. Par exemple, la tendance est à la hausse pour les chars ; pour les blindés légers, elle est plutôt à la baisse. Au-delà de ces éléments, il faut surtout s’assurer que les matériels déployés sont totalement disponibles ; c’est à cette occasion qu’ils sont absolument nécessaires.

*

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission de la défense a donné un avis favorable au programme « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) ».

*

* *

La commission de la défense a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mission « Défense ».

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
ET DES DÉPLACEMENTS

I. —  AUDITIONS

État-major de l’armée de terre.

§ M. le général Elrick Irastorza, chef d’état-major de l’armée de terre.

Société EADS.

§ M. le général (2S) Georges Ladeveze ;

§ M. Bertrand de Cordoue ;

§ Mme Annick Perrimond-du Breuil.

Société MBDA.

§ Amiral (2S) Jean-Pierre Tiffou ;

§ M. Pierre Muller ;

§ Mme Patricia Chollet.

II. —  DÉPLACEMENTS

– Visite du 61e régiment d’artillerie de Chaumont, le 4 septembre 2009.

§ M. le colonel Fabrice Jaouën, chef de corps ;

§ Le personnel du régiment.

–  Visite du 27e bataillon de chasseurs alpins d’Annecy, le 16 septembre 2009.

§ M. le colonel Pierre-Joseph Givre, chef de corps ;

§ Le personnel du régiment.

–  Visite du 8e régiment parachutiste d’infanterie de marine, le 24 septembre 2009.

§ M. le colonel Philippe du Chaxel, chef de corps ;

§ M. le lieutenant-colonel Eric Lesieur, commandant en second ;

§ M. le lieutenant-colonel Vincent Tassel, commandant le bureau opérations emploi ;

§ Le personnel du régiment.

–  Déplacement auprès des éléments français au Tchad, du 30 septembre au 2 octobre 2009.

§ M. Bruno Foucher, ambassadeur de France au Tchad ;

§ M. le colonel Bruno Caïtucoli, commandant les éléments français au Tchad, représentant de la France auprès de la MINURCAT ;

§ M. le colonel Dominique Laugel, commandant en second ;

§ M. le colonel Patrick Jaffres, adjoint chargé du soutien interarmes ;

§ Mme le commissaire-colonel Maguelonne Frison-Roche, chef du détachement du commissariat ;

§ M. le médecin-chef Patrick Malaguti, commandant le détachement santé ;

§ M. le lieutenant-colonel Bernard Ernst, commandant la base de soutien à vocation interarmes ;

§ M. le colonel Marc Boileau, commandant le groupement terre ;

§ M. le lieutenant-colonel Thierry Jaeger, commandant le groupement air ;

§ Les personnels des éléments français au Tchad.

© Assemblée nationale

1 () Les estimations du ministère de la défense font état de 10 500 postes de militaires et 9 500 postes civils.

2 () Brest, Rennes, Creil, Avord, Nancy, Clermont-Ferrand, La Valbonne, Valence, Marseille et Djibouti.

3 () Cherbourg, Coëtquidan, Rochefort, Montlhéry, Besançon, Pau et La Réunion.

4 () La deuxième finalité était précédemment intitulée « optimiser l’emploi de la ressource ».

5 () Les 3 autres axes stratégiques sont : faire face à une aggravation de la situation internationale, assurer la sécurité de nos concitoyens et la protection de nos intérêts, contribuer à la lutte contre l’instabilité mondiale.

6 () Quelques ajustements des indicateurs de performance pour 2010 résultent, pour le programme 146, des propositions formulées par les responsables de programme à l’issue de l’audit du contrôle général des armées effectué en décembre 2008.

7 () En 2009, le montant de ces mesures est de 29,58 millions d’euros.

8 () En 2009, ce montant était de 33,9 millions d’euros. En réalisation il s’est élevé à 35,1 millions d’euros.

9 () Ce montant inclut 270 millions d’euros dédiés au soutien post-production des chars Leclerc.

10 () Recrutement semi-direct.

11 () À titre d’exemple, le 8e RPIMa de Castres connaît un fort renouvellement de ses effectifs : le régiment doit recruter 150 à 170 militaires par an sur un effectif total d’environ 1 200 hommes.

12 () L’affermissement de la tranche de 22 NH90 TTH est intervenu tardivement, fin décembre 2008.

13 () Cette situation avait déjà été dénoncée par les rapporteurs d’information MM Alain Marty, Michel Sordi et Jean-Claude Viollet lors de la publication du rapport n° 666 « L’aéromobilité, comment sortir de la crise ? » en février 2008.

14 () Source PAP. Lors de son audition, le chef d’état-major de l’armée de terre a fait état de la livraison de 3 107 systèmes en 2010.

15 () Ce poids comporte l’armement (équipement FELIN le cas échéant), les équipements de protection balistique, l’alimentation, les munitions et peut varier en fonction des équipements particuliers de chacun selon sa spécialité.

16 () En dotation depuis 2004, le SDTI permet de réaliser des missions de reconnaissance, de surveillance, d’acquisition d’objectif, de jour comme de nuit, à 8  kilomètres de la base, pendant 4 heures, à 230 km/h. La transmission des images vidéo s’effectue en temps réel.

17 () Tous les ans l’armée de terre déroule un exercice majeur des forces terrestres en terrain libre (FORTEL).

18 () La formation de 1er niveau dure 8 heures. Au 8e RPIMa tous les personnels suivent 3 jours de formation.

19 () L’opération « Dinner out » conduite du 12 au 23 mars 2009 contre 300 insurgés répartis sur un espace de 9X3 km au milieu d’une population de 30 000 habitants s’est déroulée à des altitudes variant de 1 500 à 2 700 mètres. Les principales idées directrices de cette opération sont les suivantes : prendre l’initiative l’hiver ; tenir les hauteurs et investir la vallée ; prendre l’ascendant sur les insurgés et manoeuvrer sur leurs arrières ; constituer une matrice des feux par imbrication en 3 dimensions des différents moyens. Le renseignement a joué un rôle essentiel.

20 () Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, p. 33.

21 () Les recettes sont estimées à 2 milliards de dollars annuels pendant 25 à 30 ans.

22 () Le recensement vient de s’achever. Les élections législatives devraient pouvoir se tenir au 2e semestre 2010 et la présidentielle en 2011. L’accord politique du 13 août 2007 et le comité de suivi fonctionnent ; l’opposition (87 partis) sera dotée d’un statut.

23 () ils disposent de missiles Milan.

24 () Plan annuel de lutte contre les feux de forêts.

25 () Précédemment, l’activité des forces était exprimée en journées d’activité, avec ou sans matériel. La nouvelle unité de mesure tient compte de la LPM. La distinction entre sorties avec et sans matériel n’existe plus.

26 () Le simulateur est déjà largement utilisé lors de la formation initiale à Dax ou dans le cadre de la formation des pilotes Tigre à l’école franco-allemande du Luc-en-Provence.