Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF

N° 1974

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2009.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946),

TOME VII

RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

PAR M. Manuel AESCHLIMANN,

Député.

Voir le numéro : 1967 (annexe 38).

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les réponses aux questionnaires budgétaires devaient parvenir au rapporteur au plus tard le 10 octobre 2009 pour le présent projet de loi.

À cette date, 78% des réponses étaient parvenues au rapporteur pour avis, qui remercie les services du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales de leur bonne coopération.

INTRODUCTION 5

I. LA RECONDUCTION GLOBALE DES CONCOURS FINANCIERS VERSÉS PAR L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES 7

A. DES SOUTIENS QUI ÉVOLUENT AU RYTHME DE L’INFLATION PRÉVISIONNELLE, COMME LE BUDGET DE L’ÉTAT 7

1. La participation des collectivités locales à l’effort de maîtrise des dépenses publiques 7

2. Une règle d’évolution des concours de l’État qui s’avère protectrice pour les collectivités en cas de récession 9

B. LA STAGNATION DE L’ESSENTIEL DES PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES 10

1. L’érosion de la dotation globale de fonctionnement (DGF) 10

2. La nette progression des crédits du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) 13

3. La stabilité en volume des dotations d’équipement scolaire 14

4. La mise en place d’une compensation de la nouvelle réforme de la taxe professionnelle 15

5. L’évolution contrastée des autres prélèvements sur recettes 16

C. LA CROISSANCE LIMITÉE DES DOTATIONS DE LA MISSION « RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES » 17

1. La stabilité en volume de la plupart des grandes dotations 18

2. Le gel de la dotation de développement urbain (DDU) 21

3. Le net renforcement des dotations accompagnant la mise en place de la nouvelle « carte militaire » et des titres sécurisés 22

4. Le fonctionnement de l’administration centrale 23

II. DES BUDGETS LOCAUX FRAGILISÉS PAR LA CRISE ÉCONOMIQUE 25

A. DES RESSOURCES FISCALES MOINS DYNAMIQUES 25

1. Des assiettes parfois très exposées à la conjoncture économique 27

2. Des taux d’imposition dont la stabilisation est remise en cause 28

B. DES DÉPENSES LOCALES ENCORE ACCRUES 29

1. Un soutien à l’investissement utile mais coûteux 31

2. La croissance inévitable des dépenses sociales 32

3. Des dépenses de personnel alourdies par les transferts de compétences 34

C. UNE SITUATION FINANCIÈRE QUI DEMEURE GÉNÉRALEMENT SAINE 37

1. Un équilibre structurel nécessairement préservé 38

2. Un endettement alourdi et inégalement réparti 40

III. L’EFFORT ENGAGÉ POUR CLARIFIER LA DÉCENTRALISATION 44

A. LE TRANSFERT DES PARCS DE L’ÉQUIPEMENT AUX DÉPARTEMENTS, ULTIME ÉTAPE DE L’« ACTE II » DE LA DÉCENTRALISATION 44

1. La conséquence logique des transferts décidés en 2004 44

2. Des modalités de transfert respectueuses des souhaits locaux 45

B. LA PRÉPARATION CONCERTÉE D’UNE RÉORGANISATION TERRITORIALE MAJEURE 46

1. La simplification de l’architecture territoriale 47

2. La limitation des compétences concurrentes 50

3. L’encadrement des cofinancements 51

4. Les conditions d’émergence d’un « Grand Paris » 52

C. DE LA TAXE PROFESSIONNELLE À LA COTISATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE : LA NÉCESSAIRE MODERNISATION DES FINANCES LOCALES 54

1. Une fiscalité locale dont les outils sont aujourd’hui dépassés 54

2. Les incertitudes et inquiétudes liées à la réforme de la taxe professionnelle 55

3. La mise en place de ressources pérennes pour préserver l’autonomie financière des collectivités locales 57

4. Des mécanismes péréquateurs dont la cohérence et l’efficacité doivent être renforcées 58

EXAMEN EN COMMISSION 63

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS 87

MESDAMES, MESSIEURS,

En prise directe avec la vie quotidienne de nos concitoyens et l’activité des entreprises, les collectivités territoriales ressentent depuis l’automne 2008, tout comme l’État, les effets de la crise économique et sociale. Dans ce contexte difficile, qui a inévitablement des répercussions sur l’équilibre des budgets locaux, les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales doivent, dans toute la mesure du possible, être abordées avec un esprit d’objectivité et de responsabilité. Les tensions qui les caractérisent aujourd’hui reflètent, plus largement, l’importance des défis auxquels sont désormais confrontés les acteurs de la décentralisation, qu’il s’agisse de la rénovation de la fiscalité locale, de la maîtrise des dépenses de fonctionnement ou des projets de réorganisation territoriale bientôt soumis à la représentation nationale.

Dans un contexte budgétaire particulièrement dégradé pour l’État, le projet de loi de finances tente de préserver globalement le niveau des concours financiers versés aux collectivités locales. Ainsi, ces concours progresseront l’an prochain, comme les dépenses de l’État, au rythme de l’inflation prévisionnelle, c’est-à-dire de 1,2 %, alors que l’application des anciennes règles d’indexation aurait conduit, du fait de la récession, à une baisse des principales dotations en 2010. Comme en 2009, le dynamisme de l’investissement des collectivités locales devrait conduire à consacrer l’essentiel des marges de manœuvre budgétaires à la progression des crédits du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), qui devraient connaître une hausse de 6,4 %, tandis que la dotation globale de fonctionnement ne progressera que de 0,6 % – soit deux fois moins rapidement que l’inflation prévisionnelle. La croissance des dotations de la mission « relations avec les collectivités territoriales » sera, elle aussi, très limitée, puisque ces crédits seront portés de 2,49 à 2,51 milliards d’euros. Le projet de loi de finances prévoit toutefois de rétablir une légère progression de la dotation globale d’équipement (DGE) et de la dotation générale de décentralisation (DGD), qui avaient été gelées en 2009, et de renforcer nettement les dotations destinées à accompagner la réorganisation territoriale des armées et la mise en place des titres d’identité sécurisés.

En dépit du maintien du soutien financier que leur apporte l’État, les collectivités locales voient leurs finances se dégrader, sous l’effet conjugué d’un affaissement des bases de certains impôts locaux et d’une progression continue de leurs dépenses. Les collectivités locales jouent dans l’investissement public un rôle prépondérant et indispensable, que le Gouvernement s’est efforcé, avec le « plan de relance », de stimuler pour enrayer la récession et préserver l’emploi. L’augmentation durable des dépenses de fonctionnement, que l’importance des transferts de personnels n’explique qu’en partie, apparaît en revanche plus problématique sur le plan économique. Même si les règles légales constituent une garantie importante contre une dérive trop importante des finances locales, la nature et le dynamisme de l’endettement de certaines collectivités, lié à l’investissement, les placent aujourd’hui dans une situation d’autant plus délicate que la conjoncture économique et sociale s’est détériorée.

Au-delà des aspects strictement budgétaires, la puissance publique est aujourd’hui mobilisée dans un effort sans précédent pour clarifier et améliorer le fonctionnement de la décentralisation, au service des citoyens. Cette action a conduit, cet automne, à l’adoption d’un projet de loi organisant le transfert aux départements des parcs de l’équipement, ce qui a permis de tirer la dernière grande conséquence de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. À cet achèvement de ce qu’il est convenu d’appeler « l’acte II » de la décentralisation succède aujourd’hui la préparation d’une réorganisation territoriale majeure, qui devrait notamment conduire à rénover notre architecture territoriale, à simplifier la « gouvernance » des collectivités locales et à favoriser, par des projets concrets, l’émergence d’un Grand Paris. Cette entreprise de modernisation, salutaire et courageuse, suppose une concertation renforcée avec les élus locaux. Elle ne portera pleinement ses fruits que si elle permet aussi, au-delà des questions électorales ou de structures, de limiter les compétences concurrentes et les financements croisés, qui réduisent la lisibilité et l’efficacité de l’action locale.

I. LA RECONDUCTION GLOBALE DES CONCOURS FINANCIERS VERSÉS PAR L’ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES

Alors que le contexte budgétaire est avant tout marqué par la lutte contre la crise économique, le projet de loi de finances pour 2010 s’inscrit dans la continuité de celui de l’année précédente. En effet, les concours financiers versés par l’État aux collectivités territoriales progresseront de 1,2 % l’an prochain, c'est-à-dire une nouvelle fois au rythme de l’inflation prévisionnelle, l’essentiel de cette hausse étant affecté aux crédits destinés au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

A. DES SOUTIENS QUI ÉVOLUENT AU RYTHME DE L’INFLATION PRÉVISIONNELLE, COMME LE BUDGET DE L’ÉTAT

1. La participation des collectivités locales à l’effort de maîtrise des dépenses publiques

Comme dans l’an dernier, l’État entend associer les collectivités locales à l’effort de maîtrise des déficits publics en assurant la simple reconduction, compte tenu de l’inflation, des moyens financiers qu’il leur alloue. Dès lors que le déficit des administrations publiques locales constitue l’une des composantes des déficits publics au regard des engagements européens de notre pays, il ne paraît pas absurde de soumettre les collectivités à des impératifs financiers qui concernent la Nation dans son ensemble (1). La cohérence de cette démarche suppose, bien entendu, que les administrations centrales et déconcentrées de l’État et celles de la Sécurité sociale s’engagent résolument, aussi vite que possible, à ramener leurs propres déficits à un niveau plus soutenable – il reviendra à la représentation nationale d’exercer pleinement, à cet égard, ses responsabilités. Rappelons, par ailleurs, que le projet de loi de finances prévoit également d’aligner le rythme de progression des dépenses de l’État sur celui de l’inflation prévisionnelle.

Les autorisations d’engagement de la mission « relations avec les collectivités territoriales », qui ne représentent qu’environ 4 % des concours financiers de l’État qui leur sont destinés, devraient rester stables à 2,57 milliards d’euros en 2010 à périmètre courant (2) (voir tableau ci-après). Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances au titre des prélèvements sur recettes, dont la masse est bien supérieure, progresseront quant à eux au strict rythme de l’inflation, prévue à 1,2 %, pour atteindre 52,89 milliards d’euros l’an prochain à périmètre constant – leur inscription, à périmètre courant, à hauteur de 84,61 milliards d’euros s’explique par l’instauration exceptionnelle, pour l’année 2010, d’une compensation-relais intégrale de la suppression de la taxe professionnelle d’un montant de 31,56 milliards d’euros.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES » ET DES PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES DEPUIS 2008

(autorisations d’engagement, en milliards d’euros)

Nature des concours financiers versés aux collectivités

2008

2009

2010

Évolution
2009-2010
(à périmètre courant)

Mission « relations avec les collectivités territoriales »

2,45

2,57

2,57

stable

Prélèvements sur recettes

51,21

52,25

84,61

+ 61,9 % (3)

Sources : Documents budgétaires (loi de finances initiale pour 2008 et 2009, projet de loi de finances pour 2010) et Ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL)

Rappelons que ces crédits ne permettent pas à eux seuls de rendre compte de l’ensemble de l’effort financier accompli par l’État en direction des collectivités locales. Ce dernier doit en effet inclure l’ensemble des dotations et subventions accordées par l’État et inscrites sur les crédits d’autres missions budgétaires, la compensation de dégrèvements et exonérations de fiscalité locale, ainsi que le produit de la fiscalité étatique dont le produit est transféré aux collectivités locales. Ce calcul fait apparaître qu’au total, l’État apportera aux collectivités locales des soutiens financiers qui s’élèveront, au total, à 126,82 milliards d’euros, somme qui est, à elle seule, 2,5 fois plus élevée que le produit de l’impôt sur le revenu.

Si l’on excepte les changements de périmètre, tels que la compensation-relais de la taxe professionnelle, qui constitue une mesure exceptionnelle, pour comparer ce montant à celui des années précédentes, on constate que l’augmentation de cet effort financier se poursuit à un rythme nettement supérieur à celui de l’inflation : en dépit d’un léger tassement en 2010, la comparaison fait apparaître une progression continue de 25,8 % en cinq ans (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DE L’EFFORT FINANCIER TOTAL DE L’ÉTAT
EN FAVEUR DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DEPUIS 2005

(en milliards d’euros)

Année

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Évolution 2005-2010

Effort financier hors fiscalité transférée

63,52

68,91

70,36

72,72

75,57

78,18

+ 23,1 %

Effort financier total

77,55

83,8

89,24

93,06

97,06

97,53

+ 25,8 %

Source : Documents budgétaires

2. Une règle d’évolution des concours de l’État qui s’avère protectrice pour les collectivités en cas de récession

Qu’il s’agisse du budget de la mission « relations avec les collectivités territoriales » ou de celui des prélèvements sur recettes qui leur sont versés, force est de constater que le Gouvernement propose pour 2010 une évolution moins favorable des crédits destinés aux collectivités territoriales. Ainsi, une simple reconduction se substitue à une augmentation de 1,9 % dans le premier cas (4), tandis que la hausse est réduite de 2,1 % à 1,2 % dans le second (5).

Il convient de rappeler que les tensions budgétaires croissantes ont conduit, dans la loi de finances pour 2008, à remplacer l’ancien « contrat de stabilité et de croissance », qui était en vigueur depuis 1999, par un simple « contrat de stabilité », en vertu duquel la norme d’évolution des principaux concours financiers versés aux collectivités territoriales correspond à la seule inflation prévisionnelle. Cette règle est appliquée à une « enveloppe normée » comprenant :

- en premier lieu, la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation spéciale instituteurs (DSI), la dotation particulière élu local, les dotations générales de décentralisation (DGD), la dotation globale d’équipement (DGE), les dotations d’équipement scolaire (DDEC et DRES), ainsi que la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) ;

- et, depuis l’instauration d’un « périmètre de dotations élargi » en 2009, le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), le produit des amendes de police, la dotation de développement rural (DDR), les compensations de diverses exonérations fiscales, la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) spécifique à la Corse, ainsi que le fonds d’aide aux collectivités territoriales victimes de catastrophes naturelles et la dotation relative aux restructurations militaires.

Votre rapporteur rappelle qu’à l’instar des élus représentés au Comité des finances locales, il considère que le FCTVA ne devrait pas être inclus dans ce nouveau périmètre, dans la mesure où il permet uniquement aux collectivités territoriales d’obtenir le remboursement de la TVA qu’elles acquittent lorsqu’elles investissent – utilisation des deniers publics que l’on souhaite, en outre, encourager pour soutenir les activités productives face à la crise économique.

Bien qu’elle soit souvent moins favorable aux collectivités que l’ancienne règle d’évolution de ces concours financiers, l’indexation sur la seule inflation prévisionnelle constitue aussi pour celles-ci un élément de sécurité en cas de retournement de la conjoncture, situation qui s’est précisément produite depuis un an. M. Eric Jalon, directeur général des collectivités locales au ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, a ainsi souligné lors de son audition que l’application des critères du « pacte de stabilité et de croissance » à ces concours aurait conduit, du fait de la récession économique prévue en 2009, à les faire diminuer de 0,85 % en 2010. Plus encore, ces concours auraient baissé de 2,7 % l’an prochain s’ils avaient été indexés sur l’investissement de l’année précédente, comptabilisé par le biais de la formation brute de capital fixe. Dans le contexte actuel, les nouveaux critères d’évolution des dotations sous enveloppe s’avèrent donc, en réalité, plus protecteurs pour les finances des collectivités territoriales.

B. LA STAGNATION DE L’ESSENTIEL DES PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES

Si l’on excepte le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), dont les crédits devraient croître de plus de 6 % en 2010, les autres prélèvements sur recettes, au premier rang desquels la dotation globale de fonctionnement (DGF), connaîtront l’an prochain une hausse moyenne de 0,6 %, inférieure à l’inflation prévisionnelle, c’est-à-dire une diminution en termes réels.

1. L’érosion de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

La DGF demeure, de très loin, le plus important concours financier versé par l’État aux collectivités territoriales. La répartition de ces ressources entre les différentes catégories de collectivités s’est caractérisée en 2009 par une grande stabilité, seule la part des intercommunalités connaissant une légère augmentation :

- les communes en ont perçu 40,9 %, soit 16,71 milliards d’euros, dont 14,09 milliards d’euros au titre de la dotation forfaitaire et 2,62 milliards d’euros au titre des dotations péréquatrices (dotation de solidarité urbaine, dotation de solidarité rurale et dotation nationale de péréquation) ;

- les versements destinés aux groupements de communes ont crû de 3,2 %, passant de 6,44 à 6,65 milliards d’euros, ce qui représente 16,3 % de l’ensemble de la DGF, contre 16 % en 2008. Parmi ces dotations destinées aux établissements publics de coopération intercommunale, 2,43 milliards d’euros ont été affectés à la dotation d’intercommunalité (qui assure la fonction péréquatrice) et 4,22 milliards d’euros à la dotation de compensation ;

- 29,7 % de la DGF a été consacré aux départements, qui ont reçu 12,12 milliards d’euros (contre 11,89 milliards d’euros en 2008), dont 10,78 milliards d’euros au titre des dotations forfaitaire et de compensation et 1,34 milliard d’euros au titre des dotations péréquatrices (dotation de péréquation urbaine et dotation de fonctionnement minimal) ;

- 13,3 % de la DGF a été affectée aux régions, dont 5,25 milliards d’euros pour leur dotation forfaitaire et 170 millions d’euros pour leur dotation de péréquation, laquelle a crû de 12,2 % par rapport à 2008.

D’une manière générale, le montant de la DGF atteindra 41,09 milliards d’euros en 2010, ce qui représente une augmentation de seulement 0,6 % par rapport aux 40,85 milliards d’euros engagés à ce titre l’année précédente. Toutefois, le budget consacré à cette dotation ne s’élevait qu’à 37,95 milliards d’euros en 2005 et aura donc augmenté de 8,3 % en l’espace de cinq ans (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DE LA DGF ET DE SES DOTATIONS PÉRÉQUATRICES DEPUIS 2005

(en millions d’euros)

Année

2005

2006

2007

2008

2009

Évolution 2005-2009

Ensemble de la DGF

37 949

38 106

39 209

40 053

40 854

+ 7,7 %

Inflation constatée ou prévue (en moyenne annuelle) (6)

+ 1,8 %

+ 1,6 %

+ 1,5 %

+ 2,8 %

+ 0,4 %

+ 7,9 %

Dotation de solidarité urbaine (communes)

760

880

1 000

1 093

1 163

+ 53,1 %

Dotation de solidarité rurale (communes)

503

572

650

711

756

+ 50,3 %

Dotation nationale de péréquation (communes)

632

652

662

687

699

+ 10,7 %

Dotation d’intercommunalité (communes)

2 045

2 144

2 249

2 329

2 428

+ 18,7 %

Dotation de péréquation urbaine (départements)

435

473

519

555

554

+ 27,5 %

Dotation forfaitaire minimale (départements)

563

634

696

744

784

+ 39,3 %

Dotation de péréquation des régions

96

114

132

152

170

+ 77,3 %

Total des dotations péréquatrices au sein de la DGF

5 032

5 469

5 908

6 272

6 554

+ 30,2 %

Proportion de la DGF consacrée aux dotations péréquatrices

13,3 %

14,4 %

15,1 %

15,7 %

16 %

+ 21 %

Sources : Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, INSEE et documents budgétaires.

Il convient de souligner que la DGF, dont l’organisation a été réformée en 2004, comprend, pour chaque niveau de collectivités, une part forfaitaire et une part péréquatrice, et que l’importance relative de cette dernière s’est renforcée depuis une quinzaine d’années, passant de 6,7 % en 1994 à 12,3 % en 2004, puis à 16,1 % en 2009. Plusieurs réformes engagées en 2009 ont permis d’affecter l’essentiel des marges de manœuvre – de plus en plus réduites compte tenu du quasi-gel des crédits de la DGF – à la péréquation. Ainsi, pour les départements, le taux d’évolution de la dotation de base est désormais compris entre 0 et 70 % de celui de la DGF dans son ensemble, alors que cette fourchette était auparavant de 35 % à 70 %, ce qui peut dégager des crédits supplémentaires pour les dotations péréquatrices, et la révision des critères d’éligibilité à la dotation de péréquation urbaine (DPU) a permis de la concentrer davantage sur les départements qui en ont le plus besoin. De même, pour les communes, la réforme partielle de la dotation de solidarité urbaine (DSU) en 2009 a permis de concentrer son augmentation de 6,4 % sur les communes les moins favorisées au regard de l’indice synthétique de ressources et de charges – ce qui n’a pu être fait qu’au détriment des autres communes.

Rappelons, par ailleurs, que la répartition de la DGF entre la douzaine de composantes qu’elle regroupe est encadrée par la loi mais relève de la décision du Comité des finances locales (CFL), ce qui ne permet guère d’anticiper sur l’évolution de chacune des dotations pour 2010. Plusieurs groupes de travail du CFL se sont réunis au cours du printemps de l’année 2009 pour étudier une réforme de la DSU, de la DSR et de la dotation de péréquation des régions. Si les réflexions portent généralement sur les moyens de renforcer l’efficacité péréquatrice de ces dotations grâce à une diminution du nombre de collectivités éligibles ou à une révision de critères de charges, la rénovation des modalités de distribution de ces dotations devra tenir compte du nouveau contexte créé par la réforme de la taxe professionnelle et celle des zonages de la politique de la ville – cette dernière devant être examinée au cours des prochains mois par le Gouvernement au sein du comité interministériel des villes.

Votre rapporteur constate, d’une manière générale, que les réformes de la DGF menées au cours de ces dernières années, visant notamment à éviter la dilution des dotations péréquatrices, ont vu leur ambition réduite en raison des blocages provoqués par les collectivités dont les dotations auraient pu connaître une évolution moins favorable : aucune d’entre elle n’acceptant d’être « perdante » dans une nouvelle répartition, seules les augmentations de crédits, modestes compte tenu du contexte budgétaire, ont pu être utilisées pour améliorer l’efficacité des mécanismes de redistribution des ressources.

2. La nette progression des crédits du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010 au titre du FCTVA s’élèvent à 6,23 milliards d’euros (contre 5,86 milliards d’euros en 2009), ce qui représente 11,8 % des prélèvements sur recettes versés aux collectivités locales, si l’on en exclut la compensation-relais de la réforme de la taxe professionnelle. Les crédits du FCTVA devraient donc progresser de 6,4 % l’an prochain, après des hausses encore plus soutenues (comprises entre 10,2 et 16,9 % par an) de 2007 à 2009. Cette progression, en moyenne trois fois plus rapide que celle du PIB, reflète le grand dynamisme de l’investissement des collectivités locales au cours des dernières années.

Il convient toutefois de rappeler qu’il ne s’agit que de crédits évaluatifs en loi de finance initiale, leur montant étant ensuite corrigé en loi de finances rectificative pour tenir compte des dépenses réelles d’investissement effectuées par les collectivités locales. Votre rapporteur constate d’ailleurs que, depuis 2002, les crédits réellement consommés au titre du FCTVA ont été constamment supérieurs à l’évaluation de la loi de finances initiale, l’écart dépassant 300 millions d’euros depuis 2005 (voir tableau ci-après). Entre 2000 et 2008, les crédits effectivement utilisés ont, pour ce budget, augmenté de 71 %.

ÉVOLUTION COMPARÉE DES CRÉDITS ÉVALUATIFS ET DES CRÉDITS CONSOMMÉS
DU FCTVA DEPUIS 2002

Années

Crédits évaluatifs inscrits pour le FCTVA en loi de finances initiale

(en milliards d’euros)

Variation des crédits évaluatifs par rapport à ceux de l’année précédente

Crédits réellement consommés au titre
du FCTVA

(en milliards d’euros)

Variation des crédits consommés par rapport à ceux de l’année précédente

2002

3,61

+ 0,9 %

3,79

+ 6 %

2003

3,64

+ 0,9 %

3,92

+ 3,4 %

2004

3,71

+ 1,8 %

3,91

- 0,4 %

2005

3,79

+ 2,2 %

4,16

+ 6,5 %

2006

4,03

+ 6,3 %

4,55

+ 9,2 %

2007

4,71

+ 16,9 %

5,06

+ 11,2 %

2008

5,19

+ 10,2 %

5,55

+ 9,8 %

2009

5,86

+ 12,8 %

ND

ND

2010

6,23

+ 6,4 %

ND

ND

Source : Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales

Compte tenu de cette sous-évaluation chronique du budget du FCTVA et alors même que les collectivités locales ont été appelées à engager un investissement soutenu dans le cadre du plan de relance depuis près d’un an, il n’est pas certain que le ralentissement de la hausse des crédits évaluatifs prévu pour 2010, avec une progression limitée à 6,4 %, soit réaliste. Précisons, en revanche, que le surcoût de 395 millions d’euros en 2010, résultant pour l’État des versements anticipés de crédits du FCTVA accordés à plus de 19 500 collectivités locales dans le cadre du plan de relance, ne sera pas imputé sur cette enveloppe et n’entraînera donc pas de diminution corrélative d’autres prélèvements sur recettes.

3. La stabilité en volume des dotations d’équipement scolaire

Alors que les crédits inscrits pour les dotations d’équipement scolaire avaient été gelés en 2009, ils devraient progresser de 1,2 % l’an prochain, pour atteindre respectivement 330 millions d’euros pour la dotation départementale d’équipement des collèges (DDEC) et 669 millions d’euros pour la dotation régionale d’équipement scolaire (DRES). Cette évolution sera également plus favorable que celle prévue par les articles L. 3334-16 à L. 4332-3 du code général des collectivités territoriales : l’indexation de ces dotations sur le taux prévisionnel de croissance de la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques aurait, en principe, conduit à en réduire les crédits de 2,2 %.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS D’ÉQUIPEMENT SCOLAIRE DE 2006 À 2010

(en millions d’euros)

Année

2006

2007

2008

2009

2010

Évolution 2009-2010

DDEC

318

327,2

326

326

330

+ 1,2 %

DRES

640,3

658,9

661

661

669

+ 1,2 %

Total dotations d’équipement scolaire

958,3

986,1

987

987

999

+ 1,2 %

Source : Documents budgétaires

Réformées en 2008, les modalités de calcul de ces dotations ont certes été simplifiées, la part de chaque collectivité étant cristallisée et déterminée :

- pour les départements, à partir de la moyenne actualisée des crédits versés par l’État au cours des dix années précédentes ;

- pour les régions, à partir du montant des crédits versés par l’État en 2007.

Toutefois, l’absence de respect des règles d’indexation alors arrêtées pour ces dotations, pour la seconde année consécutive, devrait peut-être conduire à s’interroger sur leur pertinence : l’investissement public pouvant présenter une grande variabilité d’une année sur l’autre, la recherche de stabilité devrait peut-être conduire à privilégier, explicitement et durablement, une évolution au rythme de l’inflation prévisionnelle. Cette révision permettrait d’éviter de déroger chaque année aux normes d’évolution prévues par le code général des collectivités territoriales, facilitant d’autant les prévisions budgétaires des conseils généraux et régionaux.

4. La mise en place d’une compensation de la nouvelle réforme de la taxe professionnelle

Afin de préserver les recettes des collectivités territoriales l’an prochain, le choix de supprimer dès 2010 la taxe professionnelle – qui constitue une excellente décision – s’accompagne de la mise en place exceptionnelle d’une compensation-relais. Les crédits inscrits au titre de ce prélèvement sur recettes correspondent à ce qu’avaient reçu les collectivités en 2008 au titre de la taxe professionnelle et s’élèvent à 31,56 milliards d’euros. Optiquement, ils conduisent à « gonfler » temporairement le montant des prélèvements sur recettes destinés aux collectivités territoriales.

Le délai d’un an ainsi accordé aux collectivités territoriales avant qu’elles ne perçoivent directement les effets de la suppression de la taxe professionnelle pourra être mis à profit par celles-ci pour anticiper les effets, positifs ou négatifs selon les cas, de la mise en place annoncée des impôts et dotations appelés à succéder à ce qui était jusqu’ici la plus importante des taxes locales. Votre rapporteur estime que le raisonnement consistant à garantir à chaque collectivité un niveau de ressources préexistant, s’il est pertinent pour une mesure transitoire, pourrait entraver toute véritable réforme des finances locales s’il devait s’étendre durablement à toutes les catégories de recettes. Pour l’avenir, un équilibre devrait donc être recherché entre l’exercice autonome de responsabilités fiscales et la recherche de prévisibilité ou de stabilité des ressources.

5. L’évolution contrastée des autres prélèvements sur recettes

Les crédits affectés aux autres prélèvements sur recettes versés aux collectivités locales devraient atteindre 4,74 milliards d’euros en 2010, contre 4,56 milliards d’euros l’année précédente. L’essentiel de cette hausse de 3,9 % est affectée au fonds de solidarité pour les collectivités frappées par des catastrophes naturelles, dont les crédits doublent en passant de 10 à 20 millions d’euros, à la compensation des pertes de base de taxe professionnelle, le montant de ce prélèvement étant porté de 164 à 184 millions d’euros, ainsi qu’à diverses compensations de taxes locales (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS INSCRITS POUR LES AUTRES PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES DE 2008 À 2010

(en millions d’euros)

Année

2008

2009

2010

Évolution
2009-2010

Dotation élu local

63

65

65

stable

Dotation spéciale instituteurs

52

38

28

- 26,3 %

Amendes de police de la circulation

650

600

640

+ 6,7 %

Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

500

500

500

stable

Fonds de solidarité pour les catastrophes naturelles

20

10

20

+ 100 %

Reversement de TIPP en Corse

43

44

41

- 6,8 %

Compensation d’exonérations de taxes locales

3 642

3 303

3 446

+ 4,3 %

Total

4,97

4,56

4,74

+ 3,9 %

Source : Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL)

Le budget de la dotation spéciale instituteurs (DSI) poursuit sa diminution régulière, passant de 38 à 28 millions d’euros, ce qui semble bien correspondre au rythme de la baisse progressive du nombre d’instituteurs auxquelles les communes doivent assurer un logement ou verser une indemnité à ce titre. Rappelons qu’au cours des huit dernières années, plus de 10 000 instituteurs ont été intégrés au corps des professeurs des écoles, qui ne disposent pas de ce droit. En 2008, le nombre d’instituteurs logés n’atteignait plus que 8 553, contre 24 268 en 2000, et celui des instituteurs indemnisés avait été ramené, sur la même période, de 138 643 à 11 770.

Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit, par ailleurs, que le montant prévisionnel du prélèvement sur recettes versé aux communes et à leurs groupements au titre des amendes forfaitaires recouvrées par l’État dans le cadre de ses activités de police de la circulation routière atteindra l’an prochain 640 millions d’euros, contre 600 millions d’euros en 2009. La répartition du produit de ces amendes, destiné à financer l’amélioration des transports en commun et de la sécurité routière, doit s’effectuer au prorata du nombre de contraventions dressées l’année précédente sur le territoire de chaque commune ou intercommunalité ; le comité des finances locales n’y procède donc que l’année suivant celle de la perception. Les statistiques montrent que la perception de ces recettes est géographiquement concentrée, puisque 40 % à 50 % des amendes de polices sont émises dans des communes d’Ile-de-France. Les données disponibles pour l’année 2008 montrent que le produit effectivement recouvré n’a atteint que 553,1 millions d’euros, alors que 680 millions d’euros avaient été inscrits en loi de finances initiale. Ce constat devrait inciter, pour l’avenir, à éviter toute surestimation pour les crédits évaluatifs inscrits en loi de finance initiale.

Enfin, la prise en compte d’une diminution de la consommation de carburant conduit à ramener, pour 2010, de 44 à 41 millions d’euros les crédits consacrés au reversement de taxe intérieure sur les produits pétroliers à la collectivité territoriale et aux départements de Corse, tandis que les crédits destinés à la dotation élu local et au fonds de mobilisation départemental pour l’insertion devraient s’élever, comme l’an dernier, respectivement à 65 et 500 millions d’euros.

C. LA CROISSANCE LIMITÉE DES DOTATIONS DE LA MISSION « RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »

Le projet de loi de finances prévoit de porter les crédits de paiement de la mission « relations avec les collectivités territoriales » à 2,51 milliards d’euros en 2010, contre 2,49 milliards d’euros l’année précédente, ce qui représente une hausse de 0,7 % à périmètre courant – les autorisations d’engagement demeurant, pour leur part, stables à 2,57 milliards d’euros. Toutefois, les crédits de paiement devraient diminuer de 4,6 % à périmètre constant (7), ce qui s’explique par de multiples changements de périmètre budgétaire prévus pour 2010 :

- un abondement de la dotation forfaitaire versée aux communes pour la délivrance des titres sécurisés, destiné à compenser une sous-évaluation de ces crédits en 2009, s’élèvera à 6,86 millions d’euros en 2010 (programme 119 « concours financiers aux communes et groupements de communes ») ;

- les charges supplémentaires subies par les régions en matière ferroviaire, du fait de la construction du TGV Est et d’une réforme de la tarification ferroviaire, seront compensées à hauteur de 65,75 millions d’euros, ces crédits constituant pour les régions un complément de dotation générale de décentralisation (DGD) (programme 121 « concours financiers aux régions ») ;

- diverses compensations de transferts de personnels, intervenant en matière de routes nationales ou de formation, conduisent à majorer de 10,91 millions d’euros les crédits de la DGD de la région Auvergne et des régions d’outre-mer, et à minorer de 0,18 million d’euros celle de la collectivité territoriale de Corse (programme 121 « concours financiers aux régions ») ;

- la correction d’une erreur dans l’attribution de compensations de transfert de personnels affectés aux monuments historiques conduit à transférer 0,09 million d’euros de la DGD des départements vers celle des régions (programme 120 « concours financiers aux départements » et programme 121 « concours financiers aux régions ») ;

- enfin, d’autres compensations de transferts de personnels, affectés à la gestion des ports et aérodromes ou à l’inspection du travail, entraînent une augmentation de 5,38 millions d’euros du montant de dotations transversales (inscrites sur les actions 3 et 4 du programme 122 « concours spécifiques et administration »).

Votre rapporteur regrette que, comme l’an dernier, ces diverses modifications de périmètres budgétaires, en dépit de leur utilité technique, réduisent la lisibilité des comparaisons de crédits d’une année sur l’autre, ce qui n’est pas transparent et a pour effet pervers de fausser l’analyse des évolutions budgétaires.

1. La stabilité en volume de la plupart des grandes dotations

Il convient de rappeler que les crédits de la mission « relations avec les collectivités territoriales » sont, à près de 90 %, composés de la dotation générale de décentralisation et de la dotation globale d’équipement, même s’ils regroupent également la dotation de développement rural et diverses subventions.

Le projet de loi de finances prévoit de soumettre en 2010 les crédits destinés à la dotation générale de décentralisation (DGD) à la règle d’évolution prévue à l’article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales : ils progresseront donc globalement au même rythme que la dotation globale de fonctionnement (DGF), c’est-à-dire de 0,6 % par rapport à l’année précédente (soit seulement la moitié de l’inflation prévisionnelle pour 2010). Cette hausse, qui correspond à la moitié de l’inflation prévue l’an prochain, constitue un progrès par rapport à la loi de finances initiale pour 2009, qui s’était caractérisée par une dérogation exceptionnelle à la règle précitée et avait abouti à un gel des crédits de la DGD. Rappelons que les crédits de la DGD sont répartis sur chacun des quatre programmes de la mission et ont vocation à compenser, pour chaque catégorie de collectivités, les transferts de compétences décidés dans le cadre des phases de décentralisation successives.

Dans cet ensemble, l’évolution des crédits de la DGD des régions paraît la plus dynamique, puisque ceux-ci devraient être formellement portés de 810,9 millions d’euros en 2009 à 892,6 millions d’euros en 2010 (voir tableau ci-après), si l’on inclut les DGD spécifiques versées à la collectivité territoriale de Corse et au Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS INSCRITS EN LOI DE FINANCES INITIALE
POUR LA DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION DE 2007 À 2010

(en millions d’euros)

Années

2007

2008

2009

2010 (8)

Évolution
2009-2010

DGD des communes

126,6

129,4

129,4

130,2

+ 0,6 %

DGD des départements

250,5

263,4

264,8

266,3

+ 0,6 %

DGD des régions (9)

788,5

841,9

810,9

892,6

+ 10,1 %

Source : Documents budgétaires.

Toutefois, cette hausse des crédits de la DGD des régions s’explique avant tout par l’impact de certaines des modifications de périmètre budgétaire prévues par le projet de loi de finances pour 2010 et qui ont été précédemment exposées. Ainsi, la compensation de charges ferroviaires supplémentaires se traduit par un accroissement de DGD de 45,62 millions d’euros pour les quatre régions concernées par le TGV Est et de 20,14 millions d’euros pour douze régions affectées par une réforme de la tarification ferroviaire. Par ailleurs, la DGD versée à la région Auvergne sera augmentée de 0,45 million d’euros pour compenser les charges résultant du transfert d’un centre de formation d’apprentis, tandis que les régions Bourgogne et Centre bénéficieront d’un surcroît de 0,09 million d’euros au titre des transferts de personnels intervenus pour certains monuments historiques.

La dotation globale d’équipement (DGE), perçue par les communes et leurs groupements, ainsi que par les départements, sous forme de subventions à des projets d’investissement, devrait connaître une évolution plus favorable encore que la DGF, puisqu’ils augmenteront de 1,2 % en 2010, alors qu’ils avaient été strictement gelés en 2009 (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS INSCRITS EN LOI DE FINANCES INITIALE
POUR LA DOTATION GLOBALE D’ÉQUIPEMENT DE 2007 À 2010

(autorisations d’engagement, en millions d’euros)

Années

2007

2008

2009

2010

Évolution
2007-2010

DGE des communes et groupements de communes

472,3

484,6

484,6

490,4

+ 1,2 %

DGE des départements

218,8

224,5

224,5

227,1

+1,2 %

Total DGE

691,1

709,1

709,1

717,5

+ 1,2 %

Source : Documents budgétaires.

Il convient de rappeler que la gestion de la DGE, qui obéit à des critères complexes (mêlant population, potentiel fiscal, dépenses d’investissement et longueur de voirie), est déconcentrée au niveau des préfectures de départements. En 2008, 35 761 communes et 14 066 groupements de communes ont été éligibles à la DGE et les projets soutenus dans ce cadre ont bénéficié d’un taux moyen de subvention qui s’est élevé à 24,6 %. La DGE des départements, dont l’enveloppe budgétaire est deux fois moins importante, se caractérise par une plus forte dispersion, puisque le taux moyen de subvention des projets d’investissement qu’elle a permis d’accompagner ne dépasse pas 16,6 %.

Enfin, les crédits de la dotation de développement rural (DDR) devraient progresser l’an prochain au rythme de l’inflation prévisionnelle, passant de 131 à 133 millions d’euros. Votre rapporteur se félicite qu’après avoir été gelée en 2009 – ce qui n’était pas conforme à la norme d’indexation résultant de l’article L. 2334-40 du code général des collectivités territoriales –, cette dotation, dont les crédits avaient progressé de plus de 2,5 % par an en 2007 et 2008, soit désormais, à tout le moins, stabilisée en volume.

Il convient de rappeler que la DDR, inscrite à l’action n° 1 du programme 119 de la mission, intitulée « soutien aux projets des communes et groupements de communes », permet à l’administration de subventionner, par l’intermédiaire des préfectures, les projets des collectivités destinés à soutenir le développement économique et social, ainsi que le maintien de services publics en milieu rural. De 2008 à 2009, le nombre de collectivités éligibles à cette dotation a poursuivi sa progression modérée, passant de 34 502 à 34 512 pour les communes et de 2 329 à 2 341 pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Ces chiffres élevés ne signifient pas pour autant que les crédits correspondants soient « saupoudrés », car les services déconcentrés de l’État sélectionnent un nombre limité de projets, si bien que le taux moyen de subvention est compris, pour les communes, entre 22 % et 24 %.

Par ailleurs, indépendamment de l’importance des projets soutenus par ce biais en milieu rural, il convient de s’interroger sur la pertinence du cadre budgétaire dans lequel est gérée la DDR. En effet, la complexité des règles de gestion et de répartition de cette dotation, et ses points communs avec la DGE des communes et groupements de communes, plaident en faveur d’un rapprochement de ces deux dotations, comme l’avait déjà relevé la Cour des Comptes, en 2007, dans une enquête sur les concours financiers de l’État aux collectivités locales. Ainsi, la DDR et la DGE ont pour objet de financer les équipements et investissements des collectivités locales, essentiellement en zone rurale, et bénéficient le plus souvent aux mêmes communes, mais chacune d’entre elle repose sur des règles d’attribution spécifiques et des modalités de calcul extrêmement complexes, ce qui génère des erreurs. Un regroupement des deux dotations, dont les crédits sont déjà fongibles, devrait donc être étudié ; dans cette perspective, il serait d’ores et déjà souhaitable de mettre en œuvre une première mesure de simplification administrative, consistant à fusionner les deux commissions d’élus actuellement chargées de gérer l’attribution de ces crédits en fonction des besoins exprimés localement.

2. Le gel de la dotation de développement urbain (DDU)

La dotation de développement urbain (DDU), créée par la loi de finances pour 2009 pour aider les 100 communes urbaines dont la population est la plus démunie, verra en 2010 son budget strictement reconduit.

Rappelons que cette dotation fait l’objet d’une gestion déconcentrée, les préfets de départements ayant été chargés, pour l’année 2009, de conclure avec les villes éligibles des conventions, signées avant le 15 septembre dernier, afin de subventionner des projets favorables à la mixité sociale et à la réduction des inégalités. Pour être éligibles à la DDU, les communes doivent déjà l’être à la dotation de solidarité urbaine (DSU), avoir au moins 20 % de leur population située en zone urbaine sensible (ZUS) et comprendre un territoire faisant l’objet d’une convention pluriannuelle conclue avec l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU). Parmi les communes qui remplissent ces critères, ne reçoivent la DDU que les 100 premières d’entre elles dans le classement établi par un indice synthétique de ressources et de charges prenant en compte :

- pour 45 %, le potentiel financier par habitant ;

- pour 45 %, la proportion de bénéficiaires d’aides au logement ;

- pour 10 %, le revenu moyen par habitant.

L’attribution des crédits inscrits sur les enveloppes départementales ainsi calculées doit privilégier, dans cette centaine de communes, le financement d’équipements publics dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et leur périphérie immédiate (notamment ceux qui contribuent à réduire les inégalités dans l’accès aux services collectifs), l’incitation de l’ensemble de la population à les utiliser (notamment grâce aux associations de quartier), ainsi que les initiatives favorables à l’emploi et à la sécurité, ou encore l’accès à la connaissance, à la culture et aux nouvelles technologies.

Si le montant global de cette dotation ne sera pas accru l’an prochain, il fera néanmoins l’objet d’une évolution sensible au profit des communes urbaines défavorisées des départements d’outre-mer (DOM). L’article 75 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 d’orientation pour le développement économique des outre-mer a, en effet, modifié les articles L. 2334-41 et L. 2334-42 du code général des collectivités territoriales pour prévoir l’attribution à ces communes ultramarines d’une quote-part de la DDU correspondant à un ratio, majoré de 33 %, rapportant la population des DOM à la population nationale.

Votre rapporteur se félicite qu’à la suite des troubles sociaux survenus au printemps 2008 dans ces départements et, en particulier, aux Antilles, l’importance des besoins des habitants des zones urbaines pauvres et délabrées y soit, par ce biais, prise en compte à sa juste mesure. Le renforcement de cette action outre-mer ne devrait toutefois pas s’effectuer au détriment des communes confrontées aux mêmes difficultés en métropole et aurait donc dû conduire le Gouvernement à prévoir une progression, en 2010, des crédits consacrés à la DDU au moins égale à la dotation supplémentaire allouée aux communes ultramarines.

3. Le net renforcement des dotations accompagnant la mise en place de la nouvelle « carte militaire » et des titres sécurisés

Parmi les crédits que le projet de loi de finances pour 2010 prévoit de consacrer au « soutien aux projets des communes et groupements de communes » (action n° 1 du programme 119 de la mission) figure également, outre la DGE, la DDR et la DDU, la dotation forfaitaire relative à la délivrance des titres sécurisés, dont les crédits devraient connaître l’an prochain une forte progression. Ainsi, le budget alloué à cette dotation devrait presque tripler, passant de 6 à 19 millions d’euros.

Il convient toutefois de rappeler que les crédits prévus en 2009 avaient été sous-évalués de 6,86 millions d’euros, nécessitant un rattrapage sur le budget de l’année 2010. Il est, néanmoins, souhaitable que l’augmentation de l’enveloppe prévue pour l’an prochain permette aux 2 000 communes chargées, depuis 2009, d’accueillir les personnes sollicitant un titre d’identité sécurisé (10) sans être domiciliées dans leur territoire, d’obtenir plus aisément l’indemnisation des dépenses engendrées par cette tâche administrative supplémentaire.

Par ailleurs, les crédits consacrés, depuis 2009, au Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées, devraient être doublés l’an prochain pour atteindre 10 millions d’euros. Le renforcement de cette aide exceptionnelle, dont le budget est inscrit à l’action n° 1 du programme n° 122 de la mission (intitulée « aides exceptionnelles aux collectivités territoriales »), atteste bien de la volonté de l’État de renforcer l’effort de solidarité nationale accompli en faveur de collectivités confrontées à des circonstances exceptionnelles, dont les conséquences économiques de la rénovation de la « carte militaire » font assurément partie.

4. Le fonctionnement de l’administration centrale

La direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales a, notamment, pour mission de répartir les dotations versées par l’État aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, tout en veillant à l’adaptation des normes nationales qui les concernent. Pour ce faire, cette direction dispose d’un département chargé des études et des statistiques, ainsi que d’une cellule chargée des fonctions de soutien, mais l’essentiel de ses effectifs sont répartis en trois sous-directions, respectivement chargées des finances locales et de l’action économique (5 bureaux), des compétences et institutions locales (4 bureaux, ainsi qu’une mission légistique et un pôle d’appui au contrôle de légalité) et des élus locaux et de la fonction publique territoriale (3 bureaux).

Les indicateurs de performance figurant dans les documents budgétaires ne donnent qu’une vue parcellaire de l’activité de la DGCL, mais on peut notamment remarquer qu’un effort a été accompli en 2009 pour diminuer les délais de réponse aux questions posées par les pouvoirs publics (tels que le Parlement, la Cour des Comptes ou les préfectures). Si le nombre de réponses qui leur ont été communiquées, après une forte augmentation en 2008, a été ramené de 3 025 à 2 600 en 2009, en revanche les trois quarts d’entre elles ont été fournies en moins d’un mois, contre seulement 68 % en 2008 (voir tableau ci-après).

INDICATEURS DE PERFORMANCE
DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Indicateurs de performances

2007

2008

2009 (11)

2010 (12)

Délais réels de parution des textes réglementaires

6,8 mois

6 mois

6 mois

6 mois

Nombre de rectifications relatives à la DGF et au FSRIF effectuées dans l’année

43

165

Moins de 200

Moins de 200

Montant moyen de ces rectifications (en euros)

145 285

64 013

Moins de 30 000

Moins de 30 000

Nombre de rectifications liées à la prise en compte d’une donnée erronée

36

138

Moins de 100

Moins de 100

Date de communication de la part forfaitaire de la DGF

7 février

6 février

Avant le 15 février

Avant le 15 février

Date de communication de la part péréquation de la DGF

13 mars

11 mars

Avant le 20 mars

Avant le 20 mars

Nombre de réponses adressées aux pouvoirs publics

2 229

3 025

2 600

2 600

Proportion de ces réponses produites dans un délai d’un mois

72 %

68 %

75 %

75 %

Proportion de ces réponses produites dans un délai de trois mois

93 %

80 %

80 %

80 %

Source : Documents budgétaires.

L’imprécision selon laquelle de nombreux indicateurs sont renseignés, même pour l’année 2009, permet difficilement de se faire une idée exacte de la nature des évolutions en cours, d’autant que les indicateurs relatifs à la fréquentation du site Internet de la DGCL ont été supprimés – et ce alors même que ce dernier vient de faire l’objet d’une rénovation appréciée. Toutefois, au vu des résultats successivement obtenus jusqu’en 2008, votre rapporteur préconise qu’un effort particulier soit mené afin de réduire, dans la gestion de la DGF et du FSRIF, le nombre de rectifications engendrées par la prise en compte de données erronées.

II. DES BUDGETS LOCAUX FRAGILISÉS PAR LA CRISE ÉCONOMIQUE

En frappant les entreprises françaises et leurs salariés, la crise économique et financière internationale a également ébranlé les finances des collectivités locales depuis la fin de l’année 2008. La récession a entamé les bases de plusieurs impôts locaux, ce qui conduit les collectivités, pour maintenir leurs recettes fiscales, à opter pour une augmentation parfois forte des taux d’imposition. Dans le même temps, les dépenses locales sont alourdies par l’effet des transferts de compétences et l’élargissement mécanique du public pris en charge par les dispositifs sociaux, ainsi que par le soutien local à l’effort national de relance des investissements. Si l’interdiction faite aux collectivités de financer par l’emprunt leurs dépenses de fonctionnement les préserve d’une dérive structurelle de leurs finances, ces dernières sont aujourd’hui soumises à des contraintes et à un endettement croissants. Cette évolution présente des risques, en particulier pour certains départements, et impose, pour l’avenir, une vigilance particulière de l’ensemble des décideurs publics.

A. DES RESSOURCES FISCALES MOINS DYNAMIQUES

Les recettes fiscales des collectivités locales sont un élément essentiel de leur autonomie financière, qui leur permet de dégager des marges de manœuvre budgétaires en cas de moindre progression des dotations versées par l’État. Elles représentent près de 60 % de leurs recettes de fonctionnement – lesquelles se sont élevées, en 2008, à 166,8 milliards d’euros, ce qui représente une hausse de 3,4 % par rapport à l’année précédente.

Selon le rapport 2009 de l’Observatoire des finances locales, le produit voté des quatre grandes taxes locales (taxe professionnelle, taxe d’habitation, taxe sur les propriétés foncières bâties et taxe sur les propriétés foncières non bâties) représente, à lui seul, 39 % de leurs recettes de fonctionnement. Il a augmenté de 4,2 % en 2008 pour atteindre 63,9 milliards d’euros, contre 61,3 milliards d’euros en 2007 (voir tableau ci-après), mais cette progression est inférieure à la hausse annuelle variable, constatée depuis 2003 (comprise entre 4,3 % et 6,1 % selon les années). Rappelons que les communes et leurs groupements perçoivent près de 62 % du produit de ces quatre taxes, contre plus de 30 % pour les départements et seulement 7,5 % pour les régions, collectivités qui connaissent toutefois la progression la plus forte sur la période – 59,7 % de hausse du produit de cette fiscalité directe en l’espace de cinq ans.

PRODUIT VOTÉ DE LA FISCALITÉ DIRECTE LOCALE
PAR CATÉGORIES DE COLLECTIVITÉS DEPUIS 2003

(en milliards d’euros)

Collectivités métropolitaines

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Évolution 2003-2008

Communes et EPCI

32,5

33,9

35,2

36,6

38,1

39,5

+ 21,6 %

Départements

14,5

15,2

16,4

17,8

18,7

19,6

+ 35 %

Régions

3

3,1

3,9

4,3

4,5

4,8

+ 59,7 %

Total

50

52,2

55,4

58,8

61,3

63,9

+ 27,8 %

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009.

Parmi ces quatre taxes, la taxe professionnelle demeurait en 2008, de très loin la plus productive, puisqu’elle a apporté 28,1 milliards d’euros de recettes aux collectivités locales, ce qui explique l’appréhension de leurs élus face aux incertitudes entourant son futur remplacement par de nouvelles impositions – projet essentiel qui doit conduire à s’interroger plus largement sur l’évolution souhaitable de notre fiscalité locale et sur lequel votre rapporteur reviendra ultérieurement. Si l’on fait abstraction de la taxe sur les propriétés foncières non bâties – imposition peu dynamique qui apporte aux collectivités locales un produit annuel inférieur au milliard d’euros – le produit de ces taxes a connu depuis 2003 une progression régulière, selon un rythme comparable d’une taxe à l’autre : celui-ci a crû de près de 30 % en cinq ans (voir tableau ci-après).

PRODUIT VOTÉ DE LA FISCALITÉ DIRECTE LOCALE PAR IMPÔT DEPUIS 2003

(en milliards d’euros)

Impôt local

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Évolution 2003-2008

Taxe professionnelle

21,9

22,8

24,2

25,8

26,8

28,1

+ 28 %

Taxe sur les propriétés foncières bâties

15,4

16,1

17,3

18,4

19,2

20

+ 29,9 %

Taxe sur les propriétés foncières non bâties

0,9

0,9

0,9

0,8

0,8

0,8

- 4,5 %

Taxe d’habitation

11,8

12,3

13

13,8

14,4

15

+ 27,8 %

Total métropole

50

52,2

55,4

58,8

61,3

63,9

+ 27,8 %

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009.

Les recettes tirées par les collectivités d’autres impôts et taxes se sont élevées à 32,9 milliards d’euros en 2008 (dont 5 milliards d’euros pour la seule taxe d’enlèvement des ordures ménagères), ce qui représente une hausse de 5,1 % par rapport à 2007, année où la progression atteignait 14,4 % : là encore, la croissance des recettes s’est nettement ralentie dès l’année dernière.

La situation apparaît plus tendue encore pour 2009, du fait de l’impact très marqué de la crise sur les bases de certaines impositions, que les collectivités ont anticipé en accroissant nettement la pression fiscale.

1. Des assiettes parfois très exposées à la conjoncture économique

Le produit de plusieurs ressources fiscales perçues par les collectivités locales est particulièrement sensible aux variations de l’environnement économique.

Tel est naturellement le cas de tout prélèvement imposant les entreprises d’un territoire à la mesure de leur activité. Ainsi, pour les communes, les bases d’imposition de la taxe professionnelle, assises notamment sur les investissements effectués par une entreprise – en principe plus réduits en période de récession –, connaissent d’importantes fluctuations d’une année sur l’autre, contrairement à celles des taxes foncières et de la taxe d’habitation (13). Depuis dix ans, le taux de croissance des bases d’imposition de la taxe professionnelle, s’il est resté positif, a tout de même varié, à législation constante et en euros courants, de 2 % à 6,3 %.

Surtout, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), ressource essentielle des départements (14), ont pâti du retournement du marché immobilier, qui a non seulement conduit à une baisse du prix des biens achetés, mais aussi et surtout à une forte réduction du nombre des transactions taxées. Alors que ces recettes fiscales avaient, pour les départements, augmenté de 5,2 % à 16,2 % par an au cours des cinq années précédentes, elles ont déjà baissé de 8,6 % en 2008, passant de 7,95 à 7,27 milliards d’euros (voir tableau ci-après). Le rapport 2009 de l’Observatoire des finances locales estime que « ce déclin devrait se poursuivre en 2009 et est un élément d’explication parmi d’autres de l’importante hausse des taux votés en 2009 par les départements ». Selon les éléments encore provisoires transmis à votre rapporteur, la dégradation serait, effectivement, beaucoup plus forte en 2009 qu’en 2008, puisque les premières données disponibles mettent en évidence une baisse de plus de 50 % de ces recettes entre janvier et juillet 2009.

ÉVOLUTION ANNUELLE DU PRODUIT DES DMTO PERÇU PAR LES DÉPARTEMENTS
DE 2003 À 2008

(en milliards d’euros)

Années

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Produit perçu

5,02

5,83

6,68

7,56

7,95

7,27

Évolution par rapport à l’année précédente

+ 10,3 %

+ 16,2 %

+ 14,5 %

+ 13,2 %

+ 5,2 %

- 8,6 %

Source : Ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL)

De même, les recettes issues de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), dont une fraction est reversée aux départements et aux régions, sont étroitement liées à des cours mondiaux du pétrole, ainsi qu’à l’évolution des modes de consommation et de l’activité économique, qui déterminent l’importance des volumes pétroliers consommés. Le produit que les régions tirent de la TIPP ont certes augmenté de 26 %, passant de 2,8 à 3,6 milliards d’euros entre 2007 et 2008, mais cette hausse trouve son origine dans la compensation financière de nouveaux transferts de compétences. L’évolution des recettes de TIPP des départements, qui n’ont pas bénéficié récemment d’un tel transfert, témoigne en revanche d’une érosion spontanée de ces recettes : 4,6 milliards ont été versés aux départements à ce titre en 2008, ce qui représente une baisse de 5,9 % par rapport à 2007, année où un repli de 2 % avait déjà été enregistré.

2. Des taux d’imposition dont la stabilisation est remise en cause

Variable d’ajustement des recettes à la disposition des collectivités locales, les taux des quatre grandes taxes locales ont connu, ces dernières années, des variations essentiellement liées au cycle électoral : leur croissance était soutenue après les échéances électorales (cas notamment des régions en 2005 et 2006), ou au contraire modérée à leur approche (cas des communes en 2007 et 2008). Toutes collectivités et taxes confondues, une tendance globale s’est clairement dessinée : à la forte hausse des années 2005 (+ 3,2 %) et 2006 (+ 2,7 %) a succédé une stabilisation des taux en 2007 et 2008, année où leur progression ne dépasse plus 0,8 % par an (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DES TAUX VOTÉS DE LA FISCALITÉ DIRECTE LOCALE DE 2005 À 2009

Collectivités concernées

2005

2006

2007

2008

2009

Communes et leurs groupements

+ 1 %

+ 1,1 %

+ 0,4 %

+ 0,6 %

ND

Départements

+ 4,3 %

+ 5 %

+ 1,4 %

+ 1,2 %

+ 6,2 %

Régions

+ 21,1 %

+ 7,5 %

+ 2,4 %

+ 1,6 %

+ 0,7 %

Ensemble des collectivités

+ 3,2 %

+ 2,7 %

+ 0,8 %

+ 0,8 %

ND

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009

Les indications parcellaires dont on dispose pour l’année 2009 montrent que cette tendance pourrait s’inverser, puisque les taux d’imposition votés par les départements ont augmenté en moyenne, pour les quatre taxes, de 6,2 %, et que la taxe d’habitation comme la taxe sur le foncier bâti connaissent une augmentation supérieure à 10 % dans de nombreuses grandes villes. La crainte d’une érosion des recettes substituées en 2010 à l’actuelle taxe professionnelle, conjuguée à la chute brutale du produit des DMTO versé aux départements, risque de conforter cette évolution vers une pression fiscale accrue, au détriment de ménages qui ont été, souvent, eux-mêmes frappés par la crise économique, notamment dans leur emploi.

B. DES DÉPENSES LOCALES ENCORE ACCRUES

Le dynamisme des dépenses des administrations publiques locales, qui représentent 11,3 % du produit intérieur brut (PIB) et environ 20 % de l’ensemble des dépenses publiques, joue un rôle économique essentiel pour soutenir l’activité économique en période de crise. Toutefois, cette évolution pèse évidemment sur l’équilibre des budgets locaux, qui ne peut être obtenu que par un accroissement du recours à l’emprunt et un renforcement de la pression fiscale. Les dépenses totales des collectivités territoriales ont atteint 181,3 milliards d’euros en 2008, contre 176,5 milliards d’euros en 2007, soit une hausse de 2,7 %. Leur progression a été ininterrompue depuis 2001, où elles représentaient 126,1 milliards d’euros : elles ont donc augmenté de 43,8 % en sept ans (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DEPUIS 2001

(en milliards d’euros)

Dépenses concernées

2001

2003

2005

2006

2007

2008

Évolution
2001-2008

Dépenses de fonctionnement (15)

80,5

89,8

105,2

110,8

118,3

124,4

+ 54,5 %

Dépenses d’investissement (16)

45,6

47,8

51,5

55

58,2

57

+ 25 %

Ensemble des dépenses

126,1

137,6

156,7

165,9

176,5

181,3

+ 43,8 %

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009 (résultats provisoires pour 2008).

Même s’il convient de respecter les choix de gestion effectués librement par les élus de chaque collectivité, l’évolution des finances locales dans leur ensemble ne peut être déconnectée de celle des finances publiques en général, dont elles sont une composante, notamment au regard des engagements européens pris par la France en matière budgétaire. Il n’est donc pas inutile de poursuivre la réflexion sur les moyens les plus efficaces et les mieux acceptés de favoriser une modération de la progression des dépenses des collectivités locales.

La nouvelle Commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) joue déjà un rôle très utile pour limiter l’impact structurel de la réglementation nationale sur l’augmentation des dépenses locales. Ainsi, cette instance du Comité des finances locales (CFL) s’est déjà réunie à quinze reprises depuis le mois d’octobre 2008, ce qui lui a permis d’examiner 170 textes et, grâce aux avis qu’elle a émis les concernant, d’éviter aux collectivités locales environ 360 millions d’euros de dépenses obligatoires dont l’utilité n’était pas avérée.

Il est aujourd’hui souhaitable d’aller plus loin, même si l’on peut douter que la fixation d’une norme nationale indicative pour l’évolution des dépenses locales, démarche d’apparence cohérente, produise des effets déterminants dans la pratique. Une approche complémentaire pourrait consister à mettre en place, au service des élus locaux comme des électeurs, de nouveaux outils nationaux de communication et de transparence, tel qu’un site Internet, adossé à l’Observatoire des finances locales, qui permettrait de comparer la situation budgétaire et financière d’une collectivité à celle des collectivités de la même strate. Votre rapporteur rappelle également qu’il serait favorable à ce que la compétence de la CCEN soit étendue à l’évaluation de l’impact financier des projets de loi (avant que n’y soit jointe l’étude d’impact qui doit désormais les accompagner), ainsi qu’au stock des règlements déjà applicables – cette dernière tâche représentant, en raison de sa lourdeur matérielle, un travail de longue haleine, fastidieux mais certainement fécond. Enfin, une clarification de la répartition des compétences entre les différents échelons d’administration locale, visant à réduire l’importance des concurrences et chevauchements dans leurs interventions respectives, contribuerait à alléger le niveau global des dépenses locales.

Rappelons que les dépenses des collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre se répartissent comme suit entre les différents échelons :

- 89,7 milliards d’euros pour les communes, soit 43,5 % du total ;

- 24,9 milliards d’euros pour les EPCI à fiscalité propre, soit 12,1 % du total ;

- 65,1 milliards d’euros pour les départements, soit 31,6 % du total ;

- 26,6 milliards d’euros pour les régions, soit 12,9 % du total.

RÉPARTITION DES DÉPENSES DES COLLECTIVITÉS LOCALES EN 2008

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales 2009.

Indépendamment de l’impact récent de la conjoncture et du plan de relance sur les dépenses d’intervention et d’investissement, la hausse durable des dépenses de fonctionnement des collectivités locales se poursuit, notamment du fait des transferts de personnel prévus par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Ainsi, depuis 2001, ces dépenses ont augmenté de 54,5 %, passant de 80,5 à 124,4 milliards d’euros.

1. Un soutien à l’investissement utile mais coûteux

Les collectivités locales assurent aujourd’hui 73 % de l’investissement public en France, ce qui rend leur concours d’autant plus incontournable en période de récession économique : en stimulant l’activité économique par les projets qu’elles soutiennent, elles contribuent à préserver l’emploi et les perspectives de croissance. Le budget consacré par les collectivités territoriales aux dépenses d’investissement (remboursement de la dette compris) a légèrement diminué pour atteindre 57 milliards d’euros en 2008, ce qui ne remet nullement en cause sa progression durable – laquelle atteint 25 % depuis 2001.

Alors que l’investissement des communes avait connu une croissance exceptionnelle de 10,2 % en 2007, il a enregistré en 2008 un recul de 5,9 %, ce qui s’explique largement par le contexte particulier créé cette année-là par les élections municipales. Les régions ont en revanche fait augmenter de 9,5 % leurs dépenses d’investissement en 2008, tandis que les départements ont réussi à maintenir ces dépenses au niveau de 2007 en recourrant davantage à l’emprunt.

Le Gouvernement s’est efforcé d’inciter les collectivités à maintenir ou accentuer leur effort d’équipement en 2009, dans le cadre du plan de relance mis en place en réaction à la grave crise économique et financière survenue depuis l’automne 2008. Cette incitation, décidée dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2009 (17), a pris la forme de versements anticipés du Fonds de compensation de la valeur ajoutée (FCTVA) pour les collectivités locales ayant accepté, avant le 15 mai 2009, de faire progresser leurs dépenses réelles d’équipement au-delà de leur niveau moyen, constaté sur la période 2004-2007.

Cette mobilisation des collectivités locales au service de la relance de notre économie a été effective, puisque 19 515 conventions ont été conclues et que les investissements publics prévus dans ce cadre pour 2009 représentent 54,5 milliards d’euros. Selon les informations recueillies par votre rapporteur lors de l’audition de M. Eric Jalon, directeur général des collectivités locales au ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, des conventions ont notamment pu être signées avec 17 000 communes, 90 départements et 23 régions, ce qui devrait conduire ces collectivités à faire croître de plus de 50 % le montant prévisionnel de leurs investissements. Le coût de ce plan pour l’État s’élève, quant à lui, à 3,7 milliards d’euros en 2009.

Il convient de rappeler que ces soutiens publics, aussi nécessaires soient-ils, contribueront à accroître l’endettement de certaines collectivités territoriales et de l’État au cours des prochaines années ; une vigilance particulière s’impose donc quant à la pertinence économique des projets à soutenir.

2. La croissance inévitable des dépenses sociales

La transmission de la crise financière de l’automne 2008 à l’économie productive a conduit à une forte dégradation de la situation de l’emploi, qui ne peut qu’entraîner un alourdissement des dépenses liées à la prise en charge des personnes les plus exposées au chômage ou à l’exclusion sociale. Cette situation risque de dégrader la situation financière des départements, échelon d’administration dont le rôle est prépondérant dans ce domaine.

Le nombre d’allocataires du revenu minimum d’insertion (RMI), géré par les départements depuis le 1er janvier 2004, a certes diminué, pour la seconde année consécutive, de 2,6 % – ce nombre a été ramené à 1,14 million de personnes au 31 décembre 2008, pour un coût de 7,25 milliards d’euros. Toutefois, la généralisation, depuis le 1er juin 2009, du revenu de solidarité active (RSA), nouvel outil de lutte contre l’exclusion professionnelle et sociale créé par une loi du 1er décembre 2008 (18), que les départements sont chargés d’attribuer, conduit à leur confier des dépenses qui risquent de progresser fortement en 2009 et 2010 en raison de la dégradation de la situation de l’emploi. Rappelons que les départements supportent la charge de la partie forfaitaire du RSA (RSA « socle » distribué aux personnes sans ressources en remplacement du RMI et de l’allocation parent isolé (19)), tandis que l’État finance la part du RSA cumulable avec les revenus d’activité (RSA « chapeau »).

À ces charges durables s’ajoutent d’autres dépenses sociales en faveur des personnes âgées ou handicapées, charges qui s’avèrent également très dynamiques depuis qu’elles ont été confiées aux départements. Tel est notamment le cas de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), servie depuis 2002 par les départements aux personnages âgées dépendantes, pour un coût net qui a plus que triplé en six ans, passant de 1,1 à 3,4 milliards d’euros (voir tableau ci-après). Cette évolution pèse d’autant plus fortement sur les dépenses sociales des départements que l’affaiblissement des recettes de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) devrait conduire à ramener les concours qu’elle verse aux départements de 1,6 milliard d’euros en 2008 à 1,53 milliard d’euros en 2009. Or, rappelons que, selon les prévisions démographiques, le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans devrait être porté, d’ici à 2015, de 1,3 à 2 millions, ce qui laisse augurer un alourdissement structurel des charges départementales qu’il paraîtrait légitime de compenser.

ÉVOLUTION DES CHARGES DE L’APA ENTRE 2002 ET 2009

(en milliards d’euros)

Année

Dépense totale

Charges nettes pour les départements

2002

1,86

1,06

2003

3,21

1,88

2004

3,59

2,25

2005

3,93

2,59

2006

4,24

2,83

2007

4,56

3,04

2008 (20)

4,85

3,39

Source : Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL)

Une évolution de même nature est constatée pour la nouvelle prestation de compensation du handicap (PCH), mise en place en 2006 pour remplacer progressivement l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP). Les dépenses engagées par les départements au titre de la PCH, qui a été étendue aux enfants depuis le 1er avril 2008, ont atteint 568 millions d’euros en 2008, chiffre deux fois plus élevé qu’en 2007 ; les données provisoires pour l’année 2009 font déjà apparaître, au 31 juillet, une nouvelle progression de 62 % de ces dépenses par rapport à l’année 2008. Ajoutons, enfin, que le nombre cumulé de bénéficiaires de la PCH et de l’ACTP est passé de 136 608 au 31 décembre 2005 à 162 500 au 31 décembre 2008, soit une hausse de 19 % en trois ans (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DE L’APA, DE LA PCH ET DE L’ACTP
DEPUIS 2005

(en milliers de personnes)

Date

Bénéficiaires de l’APA

Cumul des bénéficiaires de l’ACTP ou de la PCH

31 décembre 2005

938

137

31 décembre 2006

1 008

139

31 décembre 2007

1 078

146

31 décembre 2008

1 115

162

Source : Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL)

Enfin, même si cela représente une moindre part de leurs dépenses, les communes et leurs groupements seront vraisemblablement amenés à accroître en 2009 et 2010 leurs dépenses d’action sociale du fait de l’augmentation du nombre de personnes en situation précaire à la suite d’un licenciement. Les régions ne devraient pas non plus être épargnées par les conséquences de la dégradation de la situation sur le marché du travail, puisque la prise en charge de besoins accrus de formation professionnelle entre dans leurs compétences.

3. Des dépenses de personnel alourdies par les transferts de compétences

Les dépenses de personnel des collectivités locales ont continué à croître très rapidement en 2008, comme les années précédentes, ce qui s’explique largement, mais pas uniquement, par l’importance des transferts de personnel intervenus dans le cadre de la mise en œuvre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Selon des résultats encore provisoires, l’ensemble des collectivités territoriales devraient avoir dépensé 43,49 milliards d’euros (dont 31,2 milliards pour les seules communes) à ce titre en 2008 : la progression atteint donc 7,9 %, après une hausse de 9,4 % en 2007 et 5 % en 2006. En cinq ans, ces frais auront donc progressé de 37,1 % (voir tableau ci-après).

ÉVOLUTION DES FRAIS DE PERSONNEL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
DEPUIS 2003

(en milliards d’euros)

Collectivités territoriales

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Évolution 2003-2008

Communes

26

26,85

27,9

29

30,4

31,2

+ 20 %

Départements

5,21

6,13

6,56

7,07

8,33

9,93

+ 90,6 %

Régions

0,52

0,57

0,62

0,78

1,6

2,35

+ 351,9 %

Total

31,73

33,55

35,07

36,84

40,31

43,49

+ 37,1 %

Sources : Ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL) et Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009

La hausse des dépenses de personnel a été particulièrement spectaculaire dans les départements (+ 90,6 % depuis 2003 et, notamment, + 19,1 % en 2008) et, surtout, pour les régions, dont les frais de personnel ont plus que quadruplé depuis 2003 (+ 103,7 % en 2007 et + 47 % en 2008). La revalorisation du point d’indice de la fonction publique ayant été inférieure à l’inflation, cette croissance s’explique évidemment par celle des effectifs, qui avaient déjà, entre 2005 et 2007, triplé dans les régions et augmenté de 24 % dans les départements.

Rappelons qu’en application de la loi précitée du 13 août 2004, 130 000 agents de l’État, dont 94 000 relèvent de l’éducation nationale et 31 500 de l’équipement, devaient être transférés aux départements (à hauteur de 80 000) et aux régions (à hauteur de 50 000). Ces dépenses supplémentaires, lorsqu’elles résultaient directement des transferts, ont été formellement compensées par l’État (21), qui attribue chaque année aux départements et aux régions plus de 3,5 milliards d’euros au titre de la prise en charge de la situation individuelle des agents (voir tableau ci-après).

COMPENSATION DES CHARGES RÉSULTANT DE LA LOI DU 13 AOÛT 2004 (22)

(en millions d’euros)

Domaine concerné par les charges

Communes

EPCI

Départements

Régions (23)

Total par domaine

Formation professionnelle

0

0

0

583

583

Voirie

15,4

0

192,2

19,8

227,4

Ports et aérodromes civils

0,6

8,4

11,7

22,3

42,9

Transports franciliens

0

0

42,4

518,1 (24)

560,5

Solidarité et santé

0

0

62,8

801,2 (25)

864

Enseignement

0

0

99,4

72,6

172

Patrimoine

0,2

0

6,1

2,4

8,7

Prise en charge de la situation individuelle des agents

0

0

2 082,6

1 419,4

3 502

Total par collectivités

16,2

8,4

2 497,2

3 438,8

5 960,5

Source : Ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités locales.

L’effectif des 1 412 770 personnes employées par les collectivités territoriales en 2007 se répartit de la manière suivante :

- 1 117 284 personnes dans les communes, soit 83 % du total ;

- 245 966 personnes dans les départements, soit 17,4 % du total ;

- 47 513 personnes dans les régions, soit 3,4 % du total.

L’alourdissement de ces dépenses de fonctionnement, ajouté à la hausse sensible des dépenses sociales et à la participation des collectivités à l’effort national de relance économique par l’investissement, explique ainsi l’essentiel de la hausse de la dépense locale. La situation ainsi créée pour les collectivités, dont certaines recettes fiscales ont diminué, tandis que les dotations qui leur étaient versées par l’État étaient stabilisées au niveau de l’inflation, conduit naturellement à s’interroger sur leur situation financière.

C. UNE SITUATION FINANCIÈRE QUI DEMEURE GÉNÉRALEMENT SAINE

Les charges croissantes précédemment évoquées et, depuis l’automne 2008, la dégradation de l’environnement économique dans lequel évoluent les collectivités territoriales, conduisent globalement les collectivités locales à emprunter davantage pour équilibrer leurs budgets. La Cour des comptes remarquait, en juin dernier, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, qu’en 2008, « les dépenses de fonctionnement [des administrations locales], malgré une légère inflexion, ont continué à augmenter nettement plus vite que leurs recettes de fonctionnement », notamment dans les départements. Si le besoin de financement qui en a résulté constitue assurément « un handicap pour l’avenir » des collectivités locales, l’endettement accru qu’il a provoqué « reste soutenable au regard de leurs ressources ». En outre, le ratio d’autofinancement des collectivités locales connaît depuis 2003 une dégradation sensible pour l’ensemble des collectivités locales (voir graphique ci-après).

ÉVOLUTION DU RATIO D’AUTOFINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS LOCALES
DEPUIS 1996
 
(26)

Sources : Ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État (DGFiP), Ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (DGCL)

Certes, l’autonomie financière des collectivités demeure respectée et leurs finances globalement saines et structurellement équilibrées, ne serait-ce qu’en raison des contraintes légales. Toutefois, leur endettement croissant risque de peser davantage, à l’avenir, sur leurs capacités budgétaires, ce qui impose une vigilance particulière, d’autant que le niveau actuel des taux d’intérêt peut être trompeur.

1. Un équilibre structurel nécessairement préservé

Les finances des collectivités locales sont d’ores et déjà soumises, contrairement à celles de l’État, à une « règle d’or » qui permet de prévenir efficacement une dérive excessive de leurs comptes. Rappelons, en effet, que la loi oblige les assemblées délibérantes des collectivités territoriales à adopter des budgets en équilibre (27), recettes et dépenses étant évaluées de façon sincère dans chacune des deux sections (fonctionnement et investissement) et ne leur permet de recourir à l’emprunt que pour financer des investissements. En outre, le remboursement en capital des annuités d’emprunt doit être assuré grâce à des ressources propres définitives, et non par de nouveaux emprunts, cette règle garantissant un équilibre financier endogène. Cet encadrement des budgets locaux n’empêche pas l’apparition de déficits au sens de la comptabilité nationale (28), qui correspondent aux besoins de financement couverts par l’endettement.

Or, le déficit global des administrations public locales, apparu pour la première fois en 2004 à hauteur de 2,4 milliards d’euros, s’est progressivement aggravé depuis lors pour atteindre 8,6 milliards d’euros en 2008 (voir tableau et graphique ci-après), soit 13 % de la totalité des déficits publics – le déficit de l’État s’est lui aussi accru, beaucoup plus fortement, pour atteindre 54,4 milliards d’euros en 2008 et, selon les prévisions, 140 milliards d’euros en 2009.

ÉVOLUTION DES DÉFICITS DE L’ÉTAT ET DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES
DE 2004 À 2008

(en milliards d’euros)

Année

2004

2005

2006

2007

2008

Évolution 2007-2008

Déficit de l’État

52,8

52,2

48,3

39,7

54,4

+ 37 %

Déficit des administrations publiques locales

2,4

3,3

3,1

7,7

8,6

+ 11,7 %

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009

ÉVOLUTION DES DÉFICITS DE L’ÉTAT
ET DES ADMINISTRATIONS
PUBLIQUES LOCALES DE 2004 À 2008

(en milliards d’euros)

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009

Cette évolution des budgets locaux signifie que l’endettement des collectivités territoriales, s’il doit être relativisé puisqu’il ne représente que 11 % de l’ensemble de la dette publique, progresse de plus en plus rapidement.

Les collectivités locales conservent les moyens de réduire cet endettement, qu’elles privilégient une modération de leurs dépenses ou un accroissement de leurs recettes. En effet, même si les concours financiers versés par l’État aux collectivités territoriales se caractérisent actuellement par leur stabilité, l’autonomie financière qui leur est garantie peut leur offrir des marges de manœuvre, pourvu qu’elles conservent une maîtrise suffisante des taux d’imposition pour les principaux impôts dont elles disposent – votre rapporteur reviendra ultérieurement sur cette question de la responsabilité fiscale, qui doit être examinée conjointement avec celle de la péréquation.

Bien que de nombreux élus locaux s’inquiètent d’une remise en cause de l’autonomie financière des collectivités territoriales, les statistiques disponibles montrent que celle-ci est largement respectée (voir tableau ci-après).

RATIO D’AUTONOMIE FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Catégorie de collectivités territoriales

2003

(année de référence)

2004

2005

2006

2007

Communes et EPCI (29)

60,8 %

61,3 %

61,2 %

61,8 %

62 %

Départements

58,6 %

63,4 %

66,4 %

65,5 %

66 %

Régions

41,7 %

40,8 %

44,1 %

48,1 %

53,2 %

Source : Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

Rappelons qu’en vertu du troisième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution (30), issu de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 (31) et dont les conditions d’application ont été précisées par une loi organique du 29 juillet 2004 (32), les « recettes fiscales et autres ressources propres » de chaque catégorie de collectivités territoriales doivent être au moins égales au taux constaté en 2003. Or, ce ratio d’autonomie s’est amélioré pour toutes les collectivités en 2007 ; il se situe légèrement au-dessus du niveau de référence pour les communes (1,2 point d’écart), la marge étant beaucoup plus forte pour les départements et les régions (respectivement 7,4 et 11,5 points d’écart).

Par ailleurs, la capacité de désendettement des collectivités, qui exprime en années le rapport entre l’encours de leur dette et l’excédent de la section de fonctionnement de leur budget, demeure globalement raisonnable – même si la signification réelle de ce ratio doit être relativisée. Le rapport précité de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques estime que cette capacité est « de l’ordre de 2 à 3 ans pour les départements et les régions, de 5 à 8 ans pour les villes » et ajoute qu’à cet égard, « la situation financière des collectivités locales demeure plus saine qu’il y a 15 ans ».

2. Un endettement alourdi et inégalement réparti

Après avoir diminué entre 1996 et 2003, l’endettement des collectivités locales a recommencé à s’accroître. Ainsi, l’encours total de la dette des collectivités territoriales et des groupements de communes à fiscalité propre est passé de 90,6 milliards d’euros en 2004 à 112,6 milliards d’euros en 2008, ce qui représente une hausse de 24,3 % en seulement quatre ans (voir tableau et graphique ci-après).

ÉVOLUTION DE L’ENCOURS DE LA DETTE DES COLLECTIVITÉS LOCALES
ENTRE 2004 ET 2008

(en milliards d’euros)

Années

2004

2005

2006

2007

2008

Évolution
2004-2008

Communes

50,9

52

53,4

55,5

57,5

+ 13 %

Groupements de communes à fiscalité propre

12

12,3

13,6

15

16,3

+ 35,8 %

Départements

18,2

19,3

20,5

21,9

24,8

+ 36,3 %

Régions

9,4

10,1

11,1

12,7

14,1

+ 50 %

Dette totale

90,6

93,7

98,6

105

112,6

+ 24,3 %

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009

ÉVOLUTION DE L’ENCOURS DE LA DETTE DES COLLECTIVITÉS LOCALES
ENTRE 2004 ET 2008

(en milliards d’euros)

Source : Rapport de l’Observatoire des finances locales, 2009

Cette augmentation régulière de l’endettement a concerné chaque échelon d’administration locale, même si la progression la plus forte concerne les régions, dont la dette a augmenté de moitié en quatre ans. Il convient également de souligner que le capital emprunté, rapporté aux recettes de fonctionnement, demeure beaucoup plus important pour les communes que pour les autres catégories de collectivités.

Le poids que cette dette croissante fait peser sur les budgets locaux s’est logiquement renforcé au fil des années. En effet, les dépenses engagées chaque année par les collectivités locales pour le paiement des seuls intérêts de la dette ont continuellement progressé entre 2005 et 2008, passant :

- de 2,1 à 2,4 milliards d’euros pour les communes ;

- de 0,4 à 0,7 milliard d’euros pour les groupements de communes à fiscalité propre ;

- de 0,6 à 0,9 milliard d’euros pour les départements ;

- de 0,4 à 0,6 milliard d’euros pour les régions.

La tendance esquissée pour 2009 (au vu des estimations établies à partir de l’évolution des budgets primitifs départementaux et régionaux en 2008 et 2009), semble de même nature pour les départements et les régions. Ainsi, le montant dû au titre des intérêts de la dette en 2009 devrait grimper à 1 milliard d’euros pour les départements et à 0,7 milliard d’euros pour les régions.

Or, la crise financière survenue à partir de l’automne 2009 a entraîné des difficultés d’accès au crédit bancaire pour les collectivités, faisant craindre une possible augmentation des taux d’intérêt et, partant, un alourdissement plus marqué encore du coût de ces intérêts. À cette conjoncture dégradée s’ajoute un resserrement des marges de manœuvre offertes par la fiscalité locale, directe ou indirecte – les taux ayant déjà augmenté depuis cinq ans, alors que certaines bases d’imposition ont beaucoup chuté récemment, notamment pour les départements.

Dans ces conditions, certaines collectivités locales, telles que les villes de Laval, Rouen, Saint-Étienne et Tulle, ou encore une dizaine de départements, dont celui de la Seine-Saint-Denis, connaissent actuellement une situation financière difficile. L’évolution de cette situation, inégalement répartie sur le territoire national, fait l’objet d’un suivi spécifique par les services de l’État, mais est d’autant plus incertaine que les collectivités dont les finances sont fragilisées n’ont pas toujours bien anticipé les conséquences potentielles d’un recours à des emprunts à taux variables, caractérisés par des formules d’indexation complexes et risquées (33).

Votre rapporteur tient, à cet égard, à rappeler que les emprunts à taux variables ont longtemps pu s’avérer moins onéreux que les emprunts à taux fixes et qu’il est abusif d’assimiler, par principe, les emprunts dits « structurés » à des emprunts toxiques. Toutefois, le recours à de tels produits financiers suppose une bonne évaluation du risque pris pour l’équilibre du budget local et un suivi permanent, par des équipes spécialisées. Aussi, pour les collectivités qui ne peuvent mettre en place de telles équipes, est-il plus sage de s’en tenir à des emprunts dont la gestion sera plus simple, « lisible » et prévisible.

Plus généralement, l’assainissement de l’endettement local suppose, de la part des banques, mais aussi des exécutifs locaux, un réel effort pour présenter plus clairement les risques potentiels. La conclusion attendue d’une « charte de bonne conduite » entre les collectivités locales et les banques pourrait être une première étape dans cette direction, en contraignant les établissements bancaires à ne plus proposer d’emprunts structurés à effet « boule de neige » ou trop dangereux et à élaborer une classification des produits financiers qu’elles proposent, en fonction de l’importance du risque que la collectivité emprunteuse sera amenée à supporter. Il serait souhaitable que les collectivités locales, de leur côté, assurent également une plus grande transparence démocratique dans ce domaine, grâce à une plus large diffusion des informations :

- en leur sein même, ce qui pourrait passer par une clarification de la nomenclature budgétaire, ainsi que par l’obligation, pour les exécutifs locaux, de présenter régulièrement aux assemblées délibérantes les orientations envisagées pour leur politique d’emprunt et de gestion de la dette ;

- mais aussi à l’égard des électeurs, qui demeurent les mieux placés pour sanctionner une gestion imprudente des deniers publics. Pour qu’elle dispose des moyens d’en juger, la population devrait être tenue informée de l’évolution des principales données relatives à leur situation financière, données qui devraient pouvoir être comparées avec celles de collectivités présentant des caractéristiques géographiques, économiques et sociales proches. De ce point de vue, la mise en place, envisagée par le Gouvernement, d’un Observatoire de la dépense locale chargé d’élaborer, avec l’aide chercheurs de l’INSEE, une base de données accessible au plus grand nombre de nos concitoyens, constitue une piste intéressante. La réussite de cette démarche dépendra notamment de la capacité de cet observatoire à élaborer, en toute indépendance, des critères objectifs pour le groupement des collectivités et la définition de ratios de gestion, et supposera sans doute la mise en place d’un site Internet spécifique.

III. L’EFFORT ENGAGÉ POUR CLARIFIER LA DÉCENTRALISATION

L’examen pour avis des crédits de l’État destinés aux collectivités territoriales doit également conduire la commission des Lois à analyser, plus largement, la nature et la pertinence des réformes accomplies ou projetées, au cours de l’année écoulée, pour améliorer le fonctionnement de la décentralisation. La récente adoption d’un projet de loi visant à transférer aux principales collectivités gestionnaires des infrastructures routières les parcs de l’équipement, outil indispensable à leur entretien, permet opportunément de tirer l’une des dernières conséquences du renforcement de la décentralisation décidé dans ce domaine en 2004.

Le Parlement est aujourd’hui saisi d’une entreprise plus ambitieuse : rénover les finances locales pour qu’elles ne freinent pas le développement économique et réintroduire dans notre organisation territoriale la cohérence et la clarté qui lui font défaut. Ces réformes appellent une réflexion dépassionnée, objective et constructive de l’ensemble de la représentation nationale, car leur réussite permettra de mieux identifier les responsabilités locales et de renforcer l’efficience du service rendu aux citoyens et aux entreprises.

A. LE TRANSFERT DES PARCS DE L’ÉQUIPEMENT AUX DÉPARTEMENTS, ULTIME ÉTAPE DE L’« ACTE II » DE LA DÉCENTRALISATION

1. La conséquence logique des transferts décidés en 2004

L’État avait, en 2006, conformément à la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (34), transféré aux départements la gestion de 18 000 kilomètres de voirie supplémentaire – pour ne conserver la charge que de 11 800 kilomètres de routes nationales et autoroutes non concédées. Cet élargissement matériel de leur compétence en matière d’infrastructures routières ne s’était pas, alors, accompagné du transfert des personnels et matériels des parcs de l’équipement, qui assurent concrètement la construction et l’entretien de ce réseau. En effet, la singularité du statut juridique de ces éléments du service public dont le fonctionnement ressemble à celui d’une entreprise, comme la diversité des situations et aspirations locales, avaient conduit à privilégier l’organisation préalable d’une réflexion juridique et d’une vaste concertation avec les départements comme les personnels concernés.

Cette phase préparatoire a été menée à son terme, notamment grâce aux rapports de MM. Gérard Valère et Jean Courtial et à l’élaboration avec les conseils généraux de documents d’orientation stratégique (DOS) pendant l’année 2007. Le projet de loi déposé au Sénat par le Gouvernement le 14 octobre 2008 organise donc ce transfert, qui devra intervenir au plus tard le 1er janvier 2011. Le texte, adopté par le Sénat puis l’Assemblée nationale les 2 avril et 22 septembre derniers, tend à favoriser un transfert global des parcs de l’équipement aux départements, sans pour autant le leur imposer. Il devrait en outre permettre aux parcs transférés de continuer à fournir aux communes, sans mise en concurrence, certaines prestations (déneigement ou salage des routes par exemple) nécessaires pour assurer la continuité du service public. Enfin, le texte adopté par la représentation nationale préserve les intérêts des personnels, actuellement agents publics relevant d’un régime particulier, en leur permettant d’opter pour une intégration dans la fonction publique territoriale.

2. Des modalités de transfert respectueuses des souhaits locaux

La concertation locale conduite en 2007 par le Gouvernement a confirmé que les moyens matériels et l’importance de l’activité des parcs de l’équipement variaient beaucoup d’un département à l’autre et que tous les conseils généraux ne souhaitaient pas disposer de cet outil dans sa totalité – bien qu’ils aient majoritairement exprimé leur adhésion au transfert proposé. Le projet de loi a donc privilégié la souplesse, en permettant d’adapter le calendrier et l’ampleur du transfert aux souhaits de chaque département, la conclusion de conventions celui-ci et l’État étant recherchée. Ces conventions devront être conclues au plus tard avant le 1er janvier 2010 et préciser notamment le nombre et la nature des emplois transférés à la collectivité, afin de faciliter la préparation de ce changement. Il convient également de souligner que les particularités géographiques ou institutionnelles de l’outre-mer et de la Corse ont été pleinement prises en compte par le législateur : en Guyane, le transfert du parc est exclu parce que l’État gère la quasi-totalité des routes, tandis que, dans les autres départements d’outre-mer et en Corse, le parc pourra, le cas échéant, être transféré à l’échelon régional.

En cas d’échec d’un transfert négocié, l’État pourra décider par arrêté d’un transfert qui interviendra au 1er janvier 2011, mais la loi apporte aux élus une importante garantie quant à l’ampleur de tels transferts unilatéraux : seule la partie du parc de l’équipement correspondant à la proportion de l’activité qu’il a effectué pour le compte du département en 2006 lui sera transférée. En outre, l’arrêté de transfert lui-même ne pourra intervenir qu’après l’avis d’une commission nationale de conciliation paritairement composée de représentants de l’État et des collectivités, ce qui offrira une chance supplémentaire à une approche consensuelle.

La répartition des biens du parc sera déterminée par accord entre l’État et le département et tiendra compte, là encore, de leur affectation antérieure. Il est également prévu que la collectivité territoriale qui le souhaitera pourra bénéficier du transfert gratuit, en pleine propriété, des biens immobiliers mis à sa disposition. Enfin, les charges qui résulteront, pour les collectivités, des transferts de biens et de personnels leur seront intégralement compensées sous le contrôle de la commission consultative pour l’évaluation des charges (CCEC). L’ensemble des garanties ainsi apportées aux élus locaux est de nature à favoriser un transfert apaisé des parcs de l’équipement, lequel est désormais très attendu sur le terrain.

B. LA PRÉPARATION CONCERTÉE D’UNE RÉORGANISATION TERRITORIALE MAJEURE

Par un décret du 22 octobre 2008 (35), le président de la République Nicolas Sarkozy avait créé un comité pour la réforme des collectivités locales, instance pluraliste composée de dix membres et présidé par l’ancien Premier ministre Édouard Balladur, qui était chargée d’étudier en particulier « les mesures propres à simplifier les structures des collectivités locales, à clarifier la répartition de leurs compétences et à permettre une meilleure allocation de leurs moyens financiers ». Les vingt propositions formulées par ce comité, dans son rapport rendu public le 5 mars 2009, rejoignent largement les constats dressés et perspectives déjà dessinées, le 8 octobre 2008 par la mission d’information que votre Commission avait, dès le 20 novembre 2007, constituée sur cette question (36). Depuis lors, ces travaux ont été complétés par le rapport d’information présenté, le 17 juin dernier, par M. Yves Krattinger et Mme Jacqueline Gourault au nom de la mission temporaire du Sénat sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales.

Si toutes les solutions envisagées dans ces enceintes ne sont pas nécessairement consensuelles ou convergentes, l’ensemble des acteurs de ces réflexions préparatoires aux projets de loi bientôt soumis à la représentation nationale s’accorde à reconnaître que l’organisation retenue pour notre décentralisation demeure perfectible à bien des égards. Le rapport thématique de la Cour des Comptes sur « la conduite par l’État de la décentralisation », rendu public le 27 octobre dernier, souligne que le renforcement de la décentralisation a été effectué, après 2003, « au bénéfice de collectivités dont l’organisation sur le territoire national n’a pas été revue malgré un constat très partagé d’obsolescence, ni préalablement adaptée à ce nouveau partage de responsabilités publiques », avant de conclure : « Ainsi la décentralisation, qui aurait pu être accompagnée d’un remodelage de l’organisation territoriale cohérent avec une vision nouvelle de l’action publique, a dû s’accommoder d’une organisation territoriale jugée peu rationnelle et insuffisamment réformée ».

Les pistes de réforme sur lesquelles il est aujourd’hui nécessaire de progresser, afin d’améliorer le bilan du service rendu aux citoyens et aux entreprises, sont aujourd’hui largement connues : outre la nécessité de mieux prendre en compte la situation particulière de l’agglomération parisienne, l’effort de modernisation et de clarification devra porter remède à la multiplication des structures territoriales, à l’enchevêtrement de leurs compétences et au recours excessif aux financements croisés.

1. La simplification de l’architecture territoriale

Depuis un quart de siècle, de nouvelles structures territoriales (régions, intercommunalités, pays) ont émergé en France, en complément et non en remplacement des échelons traditionnels d’administration locale que constituent, en France, le département et la commune. En multipliant les cadres d’exercice de responsabilités locales sous les formes les plus variées, cette évolution, que les gouvernements successifs n’ont pas su « penser » dans sa globalité, n’a pas contribué à améliorer l’efficience et l’intelligibilité de la décentralisation. Le rapport que votre commission a consacré à cette question voilà un an souligne bien les risques de cette dérive progressive : « Au fil du temps et des initiatives locales, les modalités d’administration de la France se sont compliquées et alourdies. Face à l’empilement des structures et à la prolifération des nouvelles entités territoriales, le citoyen égaré, la puissance publique affaiblie et la compétitivité des entreprises amoindries » (37). Dresser ce constat ne revient nullement à mettre en cause l’action des collectivités territoriales – qui financent près des trois quarts des investissements en France –, mais rappelle la nécessité de rationaliser notre organisation territoriale.

La suppression d’une catégorie de collectivités territoriales est rapidement apparue comme une solution simpliste et inadaptée ; les travaux conduits par les différentes instances de réflexion se sont donc concentrés sur les moyens de favoriser les regroupements volontaires de collectivités et de développer les synergies entre les différents échelons d’administration. Des projets d’union de régions voisines, voire de fusion de certains départements d’une même région, pourraient être élaborés localement et approuvés par référendum ou par les élus concernés selon des modalités plus souples qu’aujourd’hui : une incitation financière permettrait certainement, comme cela avait été fait pour les regroupements intercommunaux, de stimuler ces initiatives qui, en réduisant le nombre de structures, constitueraient un gisement d’économies pour l’avenir.

Par ailleurs, il apparaît que l’un des moyens les plus habiles de renforcer l’efficience et la cohérence des actions menées par le « couple » administratif formé par les échelons intermédiaires que constituent les régions et les départements consiste à mutualiser leurs organes délibérants. Sans remettre en cause les structures existantes, la probabilité d’approches complémentaires ou concordantes serait ainsi renforcée, et chacune des deux administrations devrait naturellement tendre à spécialiser son action. Tel et le sens du projet consistant à substituer aux actuels conseillers généraux et conseillers régionaux des « conseillers territoriaux », qui ne seraient élus qu’en 2014, selon un mode de scrutin mixte, comprenant une part de scrutin majoritaire – comme aujourd’hui pour l’élection des conseillers généraux – et une part de scrutin proportionnel – à l’instar du mode actuel d’élection des conseillers régionaux.

Enfin, les efforts de regroupement intercommunal devront être amplifiés, car l’émiettement intercommunal (38) demeure une particularité française qui, comme le rappelle le rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, est « souvent présentée comme une « richesse » [mais] constitue en fait une source d’augmentation de la dépense publique ». Cela suppose d’abord que la coopération intercommunale, qui concerne déjà 91 % des 36 686 communes au 1er janvier 2009 (voir carte ci-après), soit généralisée.

CARTE DES INTERCOMMUNALITÉS AU 1ER JANVIER 2009


Source : Assemblée des communautés de France (ADCF).

Toutes les communes pourraient ainsi être tenues d’adhérer, avant une date butoir fixée par exemple à la fin de l’année 2011, à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, sous le contrôle de commissions départementales de la coopération intercommunale (CDCI) aux pouvoirs renforcés. Il conviendrait en outre de permettre aux intercommunalités existantes de se transformer, dans les plus grandes aires urbaines (39), en « métropoles » qui pourraient aussi exercer les compétences du département (voir carte ci-après pour une simulation d’une métropole de plus de 450 000 habitants, seuil proposé par le projet de loi de réforme des collectivités territoriales) et, dans les autres cas, en « communes nouvelles », au sein desquelles des « conseils d’arrondissement » pourraient subsister à l’instar de l’organisation déjà mise en place pour Paris, Lyon et Marseille.

CARTE POSSIBLE DES FUTURES MÉTROPOLES
(
intercommunalités comptant plus de 450 000 habitants en 2008)

Sources : Assemblée des communautés de France (ADCF) et INSEE.

Dans tous les cas, les membres de l’organe délibérant de l’EPCI, de la commune ou de la métropole pourraient être élus, dans leur commune d’origine, sur les mêmes listes que les « simples » conseillers municipaux ou d’arrondissement. Grâce à ce système de « fléchage », nos concitoyens pourraient mieux identifier les élus qui exercent actuellement des responsabilités croissantes au sein des intercommunalités : votre rapporteur est convaincu qu’il s’agit d’une évolution incontournable pour notre démocratie locale.

2. La limitation des compétences concurrentes

L’intervention simultanée des différents échelons d’administration territoriale sur les mêmes domaines est un facteur d’alourdissement de la dépense publique, de confusion des responsabilités et de ralentissement des décisions, car elle nécessite un effort permanent de coordination entre les diverses autorités impliquées. La tendance de chaque niveau de collectivités à mener des projets en tout domaine s’explique bien sûr par la tendance naturelle des assemblées locales à occuper l’ensemble du spectre politique sur leur territoire, mais peut aussi s’appuyer sur notre législation, qui partage de nombreuses compétences entre différents échelons – loin de l’objectif de définition de « blocs de compétences » énoncé au début des années 1980 – et attribue à chaque catégorie de collectivités territoriales une compétence générale pour les « affaires » relatives à leur territoire. Le bon fonctionnement de la démocratie locale et la bonne gestion de la démocratie locale doivent conduire à clarifier notre droit, pour permettre aux différents acteurs (élus et fonctionnaires, mais aussi et entreprises et citoyens) de savoir, pour chaque politique, quelle est l’administration responsable. Comme le souligne le rapport précité de la Cour des Comptes du 27 octobre dernier, « face aux risques de confusion et d’enchevêtrement des compétences, la clarification passe par la spécialisation de chaque échelon de collectivités ».

La représentation nationale devrait donc affirmer avec force sa volonté de « désenchevêtrer » les compétences locales en attribuant le plus grand nombre possible d’entre elles à un seul niveau de collectivités. Votre rapporteur est convaincu que cette démarche, fastidieuse du fait de sa technicité, mais juridiquement féconde, ne pourra être menée avec succès que si le législateur s’efforce, en permanence, en examinant chaque compétence et les suggestions spécifiques et détaillées de ceux qui les exercent, de conserver une vision synthétique de l’architecture globale des compétences qui en résultera. Les rapports publiés sur cette question au cours des dernières années convergent largement pour considérer que l’échelon régional est le plus pertinent pour les grands projets d’infrastructures et de développement économique, ou encore la formation professionnelle et la recherche, les départements devant l’emporter en matière d’action sociale et sanitaire, d’environnement et d’aménagement du territoire, tandis que le rôle des communes est prédominant en matière d’urbanisme et de logement, ainsi que pour les équipements et politiques de proximité.

La spécialisation des compétences des collectivités territoriales ne devrait pas rencontrer d’obstacle constitutionnel insurmontable, sous réserve qu’aucune catégorie de collectivités ne voie ses compétences réduites à un champ d’intervention trop étroit : le rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales considère qu’en l’absence de jurisprudence constitutionnelle contraire, il semble possible de modifier les dispositions législatives attribuant à chaque échelon une clause générale de compétence, « à la condition que la collectivité locale concernée conserve un ensemble de compétences suffisamment important et diversifié pour ne pas être si peu que ce soit, assimilée à un établissement public ».

Le projet de loi de réforme des collectivités locales dont notre assemblée sera bientôt saisie s’inscrit dans cette logique pour les départements et les régions, tout en préservant la clause générale de compétence pour les communes. Cette formule rejoint l’orientation proposée, voici deux ans, dans le rapport du sénateur Alain Lambert sur les relations entre l’État et les collectivités locales (40). L’absence de spécialisation des communes est motivée par leur rôle bien particulier d’échelon de proximité par excellence, qui pourra au besoin remédier, avec souplesse et pragmatisme, au caractère potentiellement incomplet de certaines politiques des régions et départements.

La méthode privilégiée par le Gouvernement consiste à procéder en deux étapes : le projet de réforme des collectivités locales rationaliserait les structures tout en retenant le principe de la spécialisation des départements et des régions, puis une seconde loi, prise dans un délai d’un an, attribuerait des compétences exclusives à ces collectivités, la définition d’une nouvelle répartition des compétences étant une tâche particulièrement lourde qui nécessite un inventaire précis et une vaste coordination administrative. Il conviendra de veiller à ce qu’il soit bien procédé à l’attribution ultérieure de compétences exclusives à ces collectivités, car le fait de différer cet effort de clarification présente inévitablement le risque d’un futur enlisement de la réforme. Or, la rationalisation de nos structures territoriales, telle qu’elle est envisagée, ne pourra pas se substituer à la clarification de leurs compétences.

3. L’encadrement des cofinancements

En l’absence d’une répartition claire des compétences, la coordination de l’action des collectivités locales prend souvent la forme de mécanismes contractuels. Ce recours à des interventions locales concertées, privilégiant en principe la souplesse, constitue en réalité une lourdeur administrative supplémentaire – elle impose de réunir fréquemment les autorités concernées pour préserver un consensus dans les décisions prises –, mais aussi une incitation supplémentaire à la dépense publique, chaque échelon étant appelé à participer financièrement à des projets dont il n’a pas la maîtrise.

Certes, la spécialisation envisagée des compétences des départements et des régions devrait limiter le nombre de cas où leurs domaines d’intervention se chevauchent. Toutefois, il restera nécessaire, dans les domaines de compétence partagée, d’éviter une utilisation excessive des financements croisés entre les différents échelons locaux, ainsi qu’en ceux-ci et l’État. Cette régulation pourrait prendre la forme d’une règle (assortie d’exceptions notamment pour les petites communes, dont les capacités financières sont limitées), imposant à la collectivité maître d’ouvrage de financer au moins la moitié des charges d’investissement et de fonctionnement d’un projet. Cette solution, que le Gouvernement semble aujourd’hui privilégier, est inspirée d’une proposition formulée par M. Pierre Richard en 2006 (41) et a le mérite de renforcer le lien organique la décision et son financement, ce qui va dans le sens d’une meilleure identification des responsabilités locales.

Votre commission avait pour sa part, dans son rapport précité du 8 octobre 2008, préconisé de limiter à un seul niveau de collectivités locales la participation au financement d’un projet conduit par une collectivité d’un autre niveau – en assortissant, là aussi, cette règle d’exceptions au profit des communes regroupant une faible population. Une telle règle aurait l’avantage de réduire le nombre d’acteurs participant à une même opération et la complexité administrative qui en résulte, mais pourrait être délicate à contrôler pour les services de l’État, dont l’information sur chaque opération risquerait d’être insuffisante. La difficulté de l’exercice explique sans doute que ni la mission temporaire du Sénat, ni le Comité pour la réforme des collectivités locales, ne soient parvenus à élaborer des propositions à ce sujet. Si la réflexion devra se poursuivre quant à la forme juridique précise à donner à cet encadrement des financements croisés, il reste en tout état de cause souhaitable d’infléchir les pratiques qui prévalent actuellement dans ce domaine.

4. Les conditions d’émergence d’un « Grand Paris »

La modernisation de l’organisation territoriale de la France demeurerait incomplète si la situation particulière de la région parisienne n’était pas prise en compte à la mesure de son importance dans la vie politique, administrative, économique et culturelle de notre pays.

Le Parlement, qui sera bientôt saisi à ce sujet d’un projet de loi spécifique, doit aujourd’hui rechercher le meilleur moyen d’améliorer la gouvernance de l’agglomération parisienne. Celle-ci est à l’évidence perfectible, puisque Paris et les départements de la petite couronne forment, à eux seuls, une même aire urbaine de plus de six millions d’habitants, dont l’administration est en revanche partagée entre quatre départements et 124 communes. Comme le souligne le rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, « le besoin d’une structure de coordination [   ] se fait aujourd’hui sentir » dans cette vaste zone urbaine, qui « présente la double particularité d’être à la fois sur-administrée et, sur certains points de son territoire, sous-équipée, du fait notamment de la rareté des structures de coopération intercommunale ».

La récente installation, le 10 juin 2009, à l’initiative de 87 collectivités et EPCI essentiellement situés dans l’unité urbaine parisienne (dont la totalité des communes des départements jouxtant Paris), du syndicat mixte dénommé « Paris métropole », doté d’un budget d’un million d’euros, constitue assurément une première étape vers une mutualisation des moyens. Toutefois, il n’est pas certain que cette initiative locale suffise à assurer la simplification attendue dans la gestion du nouvel ensemble parisien, compte tenu de la complexité qui caractérise le statut juridique des syndicats mixtes ouverts (42) (dont les règles sont codifiées à l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales).

Plusieurs solutions plus ambitieuses ont, en effet, été envisagées pour faciliter la conduite de politiques communes dans cet espace singulier. Ainsi, un rapport du sénateur Philippe Dallier a préconisé, dès le 8 avril 2008, d’adopter dès 2010 une « loi portant fusion des départements de la petite couronne » (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne) avec Paris, tous les EPCI à fiscalité propre étant parallèlement supprimés sur ce périmètre. Le rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales propose, quant à lui, que le législateur substitue à ces quatre départements, ainsi qu’aux EPCI à fiscalité propre qui y ont été créés, « une collectivité territoriale à statut particulier, dénommée « Grand Paris » », qui exercerait les compétences des départements, ainsi que certaines compétences communales, en particulier en matière de logement, d’urbanisme et de transports.

Le projet de loi spécifique élaboré par le Gouvernement retient une solution encore différente : la création d’une Société du Grand Paris, établissement public national à caractère industriel et commercial (EPIC), qui mettrait en œuvre des orientations définies par décret en matière de construction et d’aménagement de transports collectifs et d’aménagement urbain, en particulier pour la construction d’un métro automatique autour de Paris. La création d’un second établissement public national étant envisagée pour aménager le plateau de Saclay et y développer l’enseignement, la recherche et l’innovation, une logique de projets mieux ciblés pourrait désormais l’emporter sur la construction d’un « mécano institutionnel » telle qu’elle avait été précédemment envisagée. Sans préjuger des missions qui seront précisément assignées à ces établissements, votre rapporteur considère que cette orientation est probablement la plus judicieuse, au moins dans un premier temps, pour mettre en œuvre rapidement les projets attendus. Il convient toutefois de souligner que la légitimité de cette réforme d’intérêt national suppose, d’une part, que le législateur exerce pleinement sa compétence, en limitant l’étendue des renvois qu’il opérera aux futurs décrets et, d’autre part, qu’une concertation approfondie soit maintenue avec les collectivités locales concernées.

C. DE LA TAXE PROFESSIONNELLE À LA COTISATION ÉCONOMIQUE TERRITORIALE : LA NÉCESSAIRE MODERNISATION DES FINANCES LOCALES

La réforme des collectivités locales doit être aussi l’occasion de rénover les outils fiscaux dont elles disposent pour équilibrer leurs budgets. À cet égard, la suppression de la taxe professionnelle, qui devrait être compensée principalement par d’autres impositions d’avenir, ouvre la voie à une réforme plus globale de la fiscalité locale. Il en résultera une nouvelle répartition du potentiel fiscal entre collectivités, qu’il est encore difficile d’anticiper mais qui conduira logiquement à repenser les mécanismes sur lesquels repose actuellement la péréquation, comme votre rapporteur a déjà eu l’occasion de le préconiser (43).

1. Une fiscalité locale dont les outils sont aujourd’hui dépassés

La taxe professionnelle, les deux taxes foncières et la taxe d’habitation demeurent les principales recettes fiscales des collectivités locales : en 2008, les deux tiers de celles-ci provenaient de ces quatre impôts locaux traditionnels, dont le produit voté s’est élevé à 63,9 milliards d’euros, dont 28,1 milliards d’euros pour la seule taxe professionnelle. Or, ces anciennes taxes, dont l’assiette n’a pas été modernisée, apparaissent aujourd’hui peu en phase avec les réalités économiques locales et, trop souvent, socialement injustes ou absurdes.

Ainsi, l’assiette des taxes foncières repose sur des valeurs locatives cadastrales qui n’ont pas été révisées depuis 1970 pour les propriétés bâties, et 1961 pour les propriétés non bâties. Cette absence de prise en compte des constructions intervenues depuis lors et, plus généralement, de l’évolution variable des prix d’une commune à une autre, a progressivement engendré des inégalités de plus en plus fortes entre contribuables – l’assiette actuelle conduit à imposer plus lourdement, par exemple, des logements datant des années 1950 et aujourd’hui défraîchis que des logements anciens, construit au début du XXème siècle et bien rénovés dans les dernières décennies. Il est donc aujourd’hui indispensable de ne plus différer, comme cela a été le cas depuis près de vingt ans, la révision de la valeur des biens retenue pour le calcul de l’assiette de ces deux taxes. Votre rapporteur se réjouit donc que le Gouvernement se prépare à engager cette réforme et rappelle, à cet égard, qu’il préconise de retenir la valeur vénale réelle de ces biens, telle qu’elle est déclarée lors d’une mutation (vente, succession ou donation), ce qui conduirait à une mise en œuvre progressive de la révision.

La taxe d’habitation présente le même problème de mise à jour des valeurs locatives, auquel s’ajoute une interrogation tenant à la légitimité même d’un tel impôt, qui consiste à taxer la nécessaire occupation d’un logement, sans prendre en compte la situation patrimoniale de celui qui y réside. Votre rapporteur considère qu’une modernisation ambitieuse de la fiscalité locale pourrait consister, dans ce domaine, à remplacer cette taxe par un reversement, pour un montant comparable, d’une partie du produit de la contribution sociale généralisée, imposition à la fois neutre et pérenne, qui se caractérise par une assiette large et productive.

Enfin, la taxe professionnelle, si elle ne nuit plus directement à l’emploi puisqu’elle n’impose plus la masse salariale depuis 2003, pénalise l’investissement matériel, lequel conditionne la croissance économique sur longue période. Elle crée, en outre, des distorsions injustifiées entre les principaux secteurs économiques, au détriment de l’industrie et au bénéfice des services, notamment financiers. Le récent rapport de nos collègues Jean-Pierre Balligand et Marc Laffineur rappelle ainsi que la taxe professionnelle représente moins de 1 % de leur valeur ajoutée pour 571 000 entreprises, contre plus de 3 % de leur valeur ajoutée pour 403 200 entreprises ; ce même rapport ajoute que « la détérioration du partage du poids de la taxe professionnelle au détriment de l’industrie est également déconnectée de la répartition des bénéfices dégagés entre les secteurs d’activité » (44). Cette taxe souffre, enfin, d’une complexité de gestion excessive en raison des multiples dégrèvements, exonérations et compensations qui se sont empilés au fil des années. Ces constats, ajoutés au fait que la loi de finances rectificative pour 2008 a exonéré les investissements nouveaux, militent assurément pour la suppression la part « investissements productifs » de la taxe professionnelle – sa part foncière, dont le produit est estimé à 5,8 milliards d’euros, conservant en revanche sa pertinence.

2. Les incertitudes et inquiétudes liées à la réforme de la taxe professionnelle

En dépit de sa pertinence économique, le projet de suppression de la taxe professionnelle a suscité chez les élus locaux une grande inquiétude, dont leurs associations représentatives se sont largement fait l’écho. Le contexte d’incertitude créé par l’important délai qui s’est écoulé entre l’annonce par le Président de la République, le 5 février dernier, du projet de suppression de cette taxe (45), d’une part, et la présentation devant le Comité des finances locales (CFL) du 29 septembre dernier, des nouveaux impôts locaux appelés à la remplacer, d’autre part, a pu renforcer les doutes sur les modalités de compensation de la suppression de l’impôt local le plus productif. Il est vrai que les sommes en jeu sont considérables, puisque, la taxe professionnelle ayant rapporté aux collectivités 28,1 milliards d’euros en 2008, la perte de recettes engendrée par la seule suppression de l’imposition des investissements productifs a été évaluée à 22,6 milliards d’euros par le Gouvernement.

De nombreux élus craignaient que cette compensation ne soit pas complète, qu’elle prenne la forme de dotations budgétaires – réduisant d’autant l’autonomie financière des collectivités locales –, ou encore que soient attribués aux collectivités des impôts dont le produit déclinerait. Le communiqué commun publié, le 24 février dernier, par neuf associations d’élus communaux et intercommunaux, appelait ainsi à « maintenir le lien fiscal entre les entreprises et les territoires » et jugeait qu’un remplacement par une taxe carbone acquittée par les ménages serait d’autant moins satisfaisant que la « finalité même » d’une telle imposition écologique « est de disparaître » (46).

Les souhaits de ces élus semblent avoir été, pour l’essentiel, bien entendus grâce à cette longue phase de réflexion et de concertation avec leurs associations. Ainsi, le Gouvernement a proposé, dans le projet de loi de finances pour 2010 :

- de compenser entièrement aux collectivités locales, en 2010, la perte de recettes résultant, pour elles, de la suppression de la taxe professionnelle. Cette mesure prendra la forme de la création exceptionnelle, pour la seule année 2010, d’une « compensation-relais de la suppression de la taxe professionnelle », dont les crédits, qui figurent parmi les prélèvements sur recettes versés aux collectivités locales, devraient s’élever à 31,6 milliards d’euros. En pratique, les collectivités devraient percevoir de l’État un montant correspondant, selon le cas (la formule qui leur sera la plus favorable leur étant appliquée), au produit perçu en 2009 au titre de la taxe professionnelle, ou au produit obtenu en appliquant aux bases de taxe professionnelle de l’année 2010 les taux votés pour cet impôt en 2008 – ce décalage chronologique étant destiné à éviter tout effet d’aubaine lors du vote des taux de cet impôt par les assemblées locales ;

- à compter de l’année 2011, l’essentiel de la taxe professionnelle sera remplacé par la création de nouveaux impôts locaux, dont le produit représenterait près de 20 milliards d’euros. Ces taxes imposeraient les valeurs locatives foncières (cotisation locale d’activité), les entreprises de réseau (imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau) et, surtout, la valeur ajoutée des entreprises (cotisation complémentaire). Elles devraient, à la différence d’une taxe carbone ou d’une TIPP dont les bases ont vocation à s’affaiblir, se caractériser par un bon dynamisme et préserver un lien entre l’activité économique et le territoire administré par une collectivité locale. Le reste de la compensation financière serait effectué grâce au transfert par l’État d’environ 10 milliards d’euros de ressources, dont 3,9 millions seulement prendraient la forme de dotations budgétaires (47).

3. La mise en place de ressources pérennes pour préserver l’autonomie financière des collectivités locales

La suppression de la taxe professionnelle aura forcément un impact sur l’autonomie financière des collectivités locales, garantie par le troisième alinéa de l’article 72-2 de notre Constitution, dans la mesure où un impôt local sera, même si ce n’est que très partiellement, remplacé par des dotations budgétaires qui ne font pas partie des ressources propres des collectivités territoriales. Toutefois, les dernières statistiques disponibles montrent que toutes les collectivités bénéficient actuellement d’un ratio d’autonomie financière nettement supérieur au seuil résultant de la loi organique du 29 juillet 2004 – la différence s’élevant à 1,2 point pour les communes, 7,4 points pour les départements et 11,5 points pour les régions. Le risque qu’une diminution excessive de l’autonomie financière ne soulève des difficultés juridiques paraît donc limité, sauf peut-être pour les communes.

Toutefois, votre rapporteur a pu constater, lors des auditions qu’il a menées, que les représentants des différentes collectivités territoriales sont attachés à la préservation du niveau d’autonomie fiscale dont elles disposent, plus encore qu’au respect du principe d’autonomie financière. Les élus locaux souhaitent, à juste titre, pouvoir conserver la maîtrise des taux de plusieurs impôts, dont les bases seraient appelées à prospérer et ne taxeraient pas seulement les ménages, mais aussi les entreprises implantées sur leur territoire.

Or, de ce point de vue, la réforme proposée par le Gouvernement paraissait perfectible. Ainsi, les communes auraient perdu le bénéfice d’une fiscalité taxant l’activité économique et auraient vu leur imposition concentrée sur les ménages, par le biais de la nouvelle cotisation locale d’activité (remplaçant les bases foncières de la taxe professionnelle), ce qui aurait eu notamment pour conséquence d’avantager fortement les communes touristiques au détriment des communes plus industrielles. De leur côté, les départements auraient perdu une grande partie de la marge de manœuvre fiscale dont ils disposent actuellement, pour les impôts liés à l’activité économique, avec la taxe professionnelle. En effet, la cotisation complémentaire, dont ils auraient perdu les trois quarts du produit (estimé à 11,4 millions d’euros), aurait taxé la valeur ajoutée des entreprises dont le chiffre d’affaire excède un million d’euros, selon un barème progressif échappant à la décision locale. Les bases d’une telle imposition auraient été, en outre, très inégalement réparties entre les départements. Enfin, la suppression de la taxe professionnelle risquait, du même coup, de retirer aux collectivités situées sur des territoires fragiles le bénéfice des exonérations fiscales dont elles bénéficiaient en vertu des zonages (zones urbaines sensibles, zones franches urbaines, zones de revitalisation rurale et, outre-mer, zones franches globales d’activité).

Afin de corriger ces effets pervers, cette réforme a donc été largement amendée en séance publique, à l’initiative de notre collègue Gilles Carrez, rapporteur général du budget, et en étroite concertation avec le Gouvernement. Les principales modifications apportées au dispositif ont consisté à :

- ramener de 75 % à 55 % la part du produit de la cotisation complémentaire attribuée aux départements, ceux-ci bénéficiant, en contrepartie, d’autres impositions pesant sur les ménages (taxes foncières et droits de mutation à titre onéreux) ;

- attribuer ce surcroît de cotisation complémentaire aux communes et intercommunalités ;

- transposer dans le régime de la cotisation locale d’activité et de la cotisation complémentaire les zonages actuellement appliqués pour les exonérations de taxe professionnelle ;

- redistribuer une partie du produit de la cotisation complémentaire au profit des départements et des régions dont les bases de valeur ajoutée seraient les moins dynamiques.

Compte tenu de l’évolution de ces débats et de la navette parlementaire, il est, bien entendu, difficile de faire des projections chiffrées sur le produit de chacun des nouveaux impôts appelés à remplacer la taxe professionnelle, ainsi que sur la façon dont s’opérera réellement sa répartition entre les collectivités locales. En revanche, l’autonomie financière des collectivités locales, et la capacité de chaque échelon à gérer un « panier » d’impôts pesant tant sur l’activité économique que sur les ménages, semblent devoir être préservées. Enfin et surtout, votre rapporteur se réjouit que le principe même de la suppression de la taxe professionnelle n’ait pas été remis en cause, ce qui permettra de conforter l’investissement des entreprises, conformément aux intentions exprimées par le Gouvernement.

4. Des mécanismes péréquateurs dont la cohérence et l’efficacité doivent être renforcées

La modernisation des finances locales passe également par une rénovation des mécanismes de péréquation, qui se sont fossilisés au fil du temps dans de multiples dotations et souffrent actuellement d’une dispersion excessive, d’un pilotage incertain et d’une efficacité inégale.

Le rapport public thématique sur « la conduite par l’État de la décentralisation », présenté par la Cour des Comptes le 27 octobre dernier, analyse les causes profondes de cette évolution, en notant qu’en matière financière, le processus de décentralisation est « principalement axé sur la recherche d’instruments permettant de concilier compensation des charges et autonomie financière ». La prédominance de cette seule logique aurait progressivement fait passer l’importance des mécanismes de péréquation au second plan : bien qu’il ait acquis depuis 2003 une valeur constitutionnelle, « l’objectif de péréquation est resté en effet secondaire et ne s’est pas inscrit dans un processus dynamique et prospectif de meilleure correction des inégalités entre collectivités ».

Cette orientation a progressivement produit des conséquences administratives regrettables, qui handicapent aujourd’hui la conduite d’une politique nationale ambitieuse pour la péréquation. Ainsi, l’empilement de dispositifs péréquateurs, obéissant chacun à des critères de ressources et de charge originaux, forme un ensemble à la fois peu « lisible » et peu cohérent :

- la péréquation dite « verticale », consistant à distribuer aux collectivités locales des dotations d’autant plus élevées que leurs ressources sont faibles au regard de leurs charges, repose sur dix dotations différentes (dont sept au sein de la dotation globale de fonctionnement) (48) ;

- la péréquation dite « horizontale », qui consiste à prélever une partie des ressources des collectivités locales les plus favorisées pour le redistribuer aux autres, repose, quant à elle, sur trois outils distincts (49).

Par ailleurs, une étude présentée devant le Comité des finances locales (CFL), le 28 octobre 2008, par les professeurs Guy Gilbert et Alain Guengant a montré qu’entre 2001 et 2006, l’efficacité de la péréquation verticale avait certes progressé pour les régions, mais avait diminué pour les départements et les communes. Les travaux menés par ces experts ont également montré qu’en fonction des critères de ressources et de charges qui les caractérisent, l’efficacité péréquatrice intrinsèque d’une dotation peut être faible (cas de la dotation de solidarité urbaine ou de la dotation de solidarité rurale) ou, au contraire, très forte (cas de la dotation nationale de péréquation ou de la dotation de péréquation des régions).

La réforme de la fiscalité locale, désormais largement engagée avec la suppression de la taxe professionnelle, bouleversera la carte du potentiel fiscal des collectivités et constitue donc une opportunité unique pour repenser globalement notre système de péréquation. Le rapport précité de nos collègues Jean-Pierre Balligand et Marc Laffineur sur les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales a également dressé ce constat, en soulignant que « la refonte du système fiscal local doit impérativement s’accompagner de la création de nouveaux instruments de péréquation ». En effet, la suppression de la taxe professionnelle entraînera celle des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), outil de péréquation horizontale important puisque le cumul national de ces enveloppes représentait 918 millions d’euros en 2007. De manière plus générale, le « nouveau système fiscal engendrera de nouvelles inégalités territoriales que la péréquation doit s’efforcer de corriger ».

Votre rapporteur ne peut donc que renouveler, sur ce sujet, les propositions qu’il a déjà formulées, le 25 juin dernier, dans son rapport d’information consacré à l’efficacité péréquatrice des dotations versées aux collectivités territoriales. Celles-ci peuvent être regroupées en trois grandes orientations :

- mieux connaître et évaluer les effets de la péréquation, notamment grâce à la création d’un indicateur annuel de péréquation, renseignant, dans les documents budgétaires, chaque année et pour chaque catégorie de collectivités territoriales, le taux global de correction des inégalités de pouvoir d’achat entre celles-ci ;

- mettre en place un pilotage clair et volontariste des politiques nationales de péréquation, en faisant adopter chaque année par le CFL un objectif indicatif de péréquation pour les dotations versées par l’État à chaque catégorie de collectivités locales, et en regroupant les actuelles dotations péréquatrices de façon à n’en avoir plus qu’une seule, intensément péréquatrice, par échelon de collectivités ;

- préserver la responsabilité des élus dans la gestion des finances locales, en retenant, pour le calcul des dotations péréquatrices, le critère du potentiel fiscal s’agissant des ressources, et des critères correspondant uniquement à des handicaps structurels (tels qu’une géographie accidentée, l’éloignement ou l’enclavement, ou le niveau de revenu de la population) s’agissant des charges.

Une telle réforme représente, sans nul doute, un chantier plus vaste, et sans doute encore plus complexe, que celui de la suppression de la taxe professionnelle, mais constitue aujourd’hui une impérieuse nécessité. En effet, un affaiblissement progressif des mécanismes de la péréquation, dont la fonction est de préserver la solidarité territoriale, finirait par fragiliser le processus de décentralisation lui-même.

EFFORT FINANCIER DE L’ÉTAT EN FAVEUR DES COLLECTIVITÉS LOCALES

(autorisations d’engagement en millions d’euros, hors fiscalité transférée, hors dégrèvements, hors « réserve parlementaire » et hors subventions diverses des ministères)

Crédits concernés

LFI 2009

PLF 2010 à périmètre courant

PLF 2010 à périmètre constant

Évolution
2009-2010 à périmètre constant

Dotation globale de fonctionnement

40 847

41 091

41 092

+ 0,6 %

Dotation spéciale instituteur

38

28

28

- 26 %

Dotation élu local

65

65

65

+ 0,6 %

Dotation départementale d’équipement des collèges

326

330

330

+ 1,2 %

Dotation régionale d’équipement scolaire

661

669

669

+ 1,2 %

Dotation globale d’équipement scolaire

3

3

3

+ 1,2 %

Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

5 855

6 228

6 228

+ 6,4 %

Prélèvement au titre de la police de la circulation

600

640

640

+ 6,7 %

Fonds de solidarité pour les catastrophes naturelles

10

20

20

+ 101,2 %

Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion

500

500

500

+ 0 %

Reversement de taxe intérieure sur les produits pétroliers à la Corse

44

41

41

- 6,9 %

Dotation de compensation de la taxe professionnelle (50)

638

603

603

- 5,5 %

Compensation relais de la réforme de la taxe professionnelle

0

31 558

0

+ 0 %

Autres compensations de fiscalité locale

2 664

2 837

2 672

+ 0,3 %

Total prélèvements sur recettes

52 251

84 613

52 891

+ 1,2 %

Dotation globale d’équipement des communes

484

490

490

+ 1,2 %

Dotation globale d’équipement des départements

224

227

227

+ 1,2 %

Dotation générale de décentralisation (mission « relation avec les collectivités territoriales »)

1 415

1 505

1 423

+ 0,6 %

Dotation de développement urbain

50

50

50

+ 0 %

Dotation pour les titres sécurisés

6

19

19

+ 197,5 %

Fonds de soutien pour le redéploiement territorial des armées

5

10

10

+ 100 %

Dotation globale de compensation

0,3

0

0

-

Dotation de régisseur police municipale

0,5

1

0,5

+ 0 %

Subventions diverses

104

106

105

+ 1 %

Dotation de développement rural

131

133

133

+ 1,2 %

Total mission « relation avec les collectivités territoriales »

2 420

2 541

2 457

+ 1,5 %

Dotation générale de décentralisation formation professionnelle (mission « travail et emploi »)

1 686

1 712

1 706

+ 1,2 %

Total général

56 357

88 866

57 054

+ 1,2 %

Source : « Effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales », annexe au projet de loi de finances pour 2010 (tableau présenté par le Gouvernement au Comité des finances locales du 29 septembre 2009).

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 6 novembre 2009, la Commission procède, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l'Intérieur et aux collectivités territoriales, sur les crédits de la mission « relations avec les collectivités territoriales » pour 2010.

M. le président Didier Migaud. Monsieur le secrétaire d’État chargé de l’intérieur et des collectivités territoriales, M. Jean-Luc Warsmann, président de la Commission des lois, et moi-même sommes heureux de vous accueillir à nouveau en commission élargie, afin de vous entendre, cette fois, sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte d’avances aux collectivités territoriales.

Nous avons déjà beaucoup parlé des collectivités territoriales et de la fiscalité locale au cours de l’examen de la première partie du projet de loi de finances. La réunion de ce jour nous permet de prolonger ce débat, la seconde partie portant davantage sur les dotations de l’État aux collectivités territoriales et sur les relations entre les deux, sujets ô combien d’actualité.

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial de la Commission des finances sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte d’avances aux collectivités territoriales. Les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » augmentent à périmètre constant de 1,5 % par rapport à 2009. Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, l’Assemblée nationale a réaménagé certaines sommes au sein du périmètre normé, avec pour conséquence, notamment, que certaines dotations doivent être gelées. En guise de question liminaire, je me permets donc, monsieur le secrétaire d’État, de vous demander de confirmer que le Gouvernement présentera les amendements de coordination permettant d’ajuster les crédits de la mission aux votes sur la première partie.

Toutefois, les crédits de la mission ne représentant que 4 % des sommes versées par l’État aux collectivités territoriales, je souhaiterais aborder avec vous des questions plus générales.

Toutes les collectivités sont inquiètes de la façon dont la suppression de la taxe professionnelle sera compensée dès 2010. Je sais que le Gouvernement s’est engagé à une compensation exacte. Néanmoins, je ne peux que constater que le compte « Avances aux collectivités territoriales », qui retrace habituellement le produit de la taxe professionnelle, accusera l’an prochain une baisse de 22 milliards d’euros. Si la compensation aux collectivités locales n’emprunte pas les canaux habituels, pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d’État, quelle forme elle prendra ?

Deuxièmement, en tant que rapporteur spécial comme en tant que simple parlementaire membre de la Commission des finances, je ne peux pas me satisfaire de l’information qui nous a été fournie relativement aux collectivités territoriales. Je vous rappelle qu’en 2007, le Parlement a expressément modifié la LOLF pour prévoir que l’annexe au projet de loi de finances relative à l’effort financier en faveur des collectivités locales serait déposée à temps pour l’examen de la première partie. En 2008, le Gouvernement avait respecté ce délai, dont je n’ignore pas qu’il est contraignant. En revanche, cette année, qui voit la plus importante réforme de l’histoire des finances locales, l’information budgétaire nous est parvenue avec six jours francs de retard sur le délai prescrit par la LOLF, et quatre jours de retard sur le débat en séance publique sur la réforme de la taxe professionnelle. Cette information sera sans doute utile au Sénat, tandis que l’Assemblée aura dû, une fois de plus, se contenter de l’exposé sommaire des articles. Une telle différence n’a pas lieu d’être. Je souhaite avoir une réponse de votre part, monsieur le secrétaire d’État, à ce sujet.

Ma troisième question porte sur le fonds de compensation de la TVA – FCTVA – pour le « plan de relance ».

Pour que le versement anticipé soit acquis, les collectivités devaient s’engager sur une progression en 2009 de leurs dépenses réelles d’équipements par rapport à la moyenne de celles constatées dans leurs comptes sur la période 2004-2007. Or, compte tenu des délais stricts de certaines procédures de commande publique, il semble que de nombreuses collectivités territoriales se soient trouvées contraintes de retarder la réalisation de leur programme prévisionnel d’investissements.

Le Gouvernement a laissé entendre que quelque chose pourrait être fait. J’ai déposé un amendement afin de tenter de régler ce problème, mais il a été déclaré irrecevable. Le Gouvernement a-t-il l’intention de prendre un engagement en faveur des collectivités qui accusent un retard mais ont pris des engagements d’investissements pour 2009 ?

Quatrièmement, la réforme de la taxe professionnelle va opérer un changement massif dans les budgets des collectivités locales et pose, à ce titre, la question de la viabilité des autres pans du système fiscal local. Par exemple, l’obsolescence des assiettes des impôts locaux va devenir rapidement d’autant plus insoutenable qu’elle ne concernera, principalement, plus que le bloc communal. Notre Commission des finances a adopté, à l’unanimité et à trois reprises à l’occasion de trois précédents projets de loi de finances ou projets de loi de finances rectificative, un amendement du rapporteur spécial organisant une nouvelle révision des valeurs locatives. À trois reprises, le Gouvernement a demandé le report de cette discussion.

J’ai entendu dire qu’il y aurait, dans le projet de loi de finances rectificative, des avancées sur ce point. Je me permets d’insister. La Commission des finances de l’Assemblée nationale comme tous les députés sont soucieux que ce dossier progresse.

Je constate aussi que l’article 57 du présent projet de loi de finances a pour objet de reconduire la dotation de développement urbain – DDU – à hauteur de 50 millions d’euros en 2010, à destination de cent communes particulièrement défavorisées. Cette dotation, créée l’année dernière, a toutefois connu des débuts difficiles. La circulaire précisant ses modalités d’attribution et les objectifs prioritaires que poursuit le Gouvernement à travers elle n’a été publiée que le 15 juin 2009. À ce jour, selon les informations transmises par vos services, il apparaît que 46 conventions attributives de subventions ont été signées et que 51 sont en cours de signature. Par conséquent, seulement 37 % des autorisations d’engagement et 5 % des crédits de paiement de 2009 ont été consommés.

M. François Pupponi. Bravo ! Félicitations !

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial. Pouvez-vous nous préciser, monsieur le secrétaire d’État, si le reliquat des crédits pour 2009 pourra être reporté sur 2010 ? Pouvez-vous également nous éclairer sur la nature des projets qui auront vocation à être financés en 2009 et 2010 grâce à cette dotation ?

À propos de celle-ci, le Gouvernement avait exprimé une volonté forte l’année dernière. Lors du débat que nous avons eu à ce sujet, les parlementaires étaient soucieux de savoir à quoi cette dotation serait utilisée. Nous sommes tout à fait d’accord pour qu’elle serve à la politique de la ville. Encore faut-il qu’elle puisse être consommée. Nous aimerions avoir des informations sur ce point.

Sixième et dernière question : l’article 58 du présent projet de loi de finances prévoit le doublement du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées, le FSCT institué en 2009. Ce fonds de soutien est très important pour des collectivités très fragilisées par le départ des militaires. C’est pourquoi je suis surpris qu’aucun crédit de paiement n’ait été consommé à ce titre en 2009. Quelles en sont les raisons, monsieur le secrétaire d’État ? Vous conviendrez qu’il est paradoxal de demander au Parlement de doubler un fonds qui n’est pas consommé. Je crains que cette aide très importante ne soit en souffrance pour des motifs administratifs. Sur le terrain en effet, on freine de tous les côtés pour empêcher les élus locaux de dépenser. Pouvez-vous nous rassurer à ce sujet, monsieur le secrétaire d’État ?

M. Bernard Derosier. Mission impossible !

M. François Pupponi. Le verbe « rassurer » est un gros mot pour le Gouvernement !

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial. Je sais que le Gouvernement est aussi préoccupé que nous par cette question et qu’il sera vigilant. Il comprendra que les parlementaires souhaitent être informés de la consommation des crédits du FSCT.

M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis pour la Commission des lois sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Les collectivités territoriales étant en prise directe sur la vie quotidienne de nos concitoyens et l’activité des entreprises, il n’est pas étonnant qu’elles ressentent, tout comme l’État, les effets de la crise économique depuis l’automne 2008. Ce contexte tendu doit nous inviter à regarder l’évolution des finances locales avec d’autant plus d’objectivité et de responsabilité.

Je constate d’abord que l’État maintiendra l’an prochain le soutien qu’il accorde aux collectivités. Certes, les concours qui leur sont versés n’augmenteront globalement que de 1,2 %, c’est-à-dire en moyenne au rythme de l’inflation prévisionnelle, comme les dépenses de l’État, ce qui suscitera probablement des critiques de la part de nos adversaires, mais ce cadre se révèle finalement protecteur pour les collectivités : en effet, l’application des règles d’indexation de l’ancien « contrat de croissance et de solidarité » auraient conduit à une baisse des dotations, du fait du recul de la croissance et de l’investissement.

Au sein des prélèvements sur recettes, les crédits consacrés au Fonds de compensation sur la valeur ajoutée – FCTVA – devraient augmenter de 6,4 %, ce qui signifie que, comme les années précédentes, ils absorberont l’essentiel de la hausse des crédits – même si leur progression pourrait finalement se révéler inférieure aux besoins constatés.

La dotation globale de fonctionnement – DGF –, qui représente à elle seule 41,1 milliards d’euros, connaîtra en revanche une légère érosion en volume, puisque le projet de loi de finances n’accroît ses crédits que de 0,6 %, c’est-à-dire de la moitié de l’érosion monétaire prévue pour 2010.

La croissance des dotations de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sera, elle aussi, limitée, puisque ses crédits de paiement seront portés de 2,49 à 2,51 milliards d’euros. Le montant des crédits alloués à la dotation de développement urbain – DDU – sera certes gelé – avec toutefois un bonus pour les communes ultramarines. Ce gel prendra fin pour la dotation globale d’équipement – DGE –, que le projet de loi prévoit de faire progresser de 1,2 %, comme pour la dotation générale de décentralisation – DGD –, promise à une hausse limitée à 0,6 %. On peut aussi remarquer que les dotations destinées à accompagner la réforme de la « carte militaire » et la mise en place des titres d’identité sécurisés progressent sensiblement pour 2010.

S’agissant du fonctionnement de l’administration centrale, les indicateurs disponibles ne donnent qu’une vue parcellaire de l’activité de la DGCL, mais ils montrent une amélioration appréciable des délais de réponse aux questions posées par les pouvoirs publics. Il me semble toutefois dommage que les indicateurs relatifs à la fréquentation du site Internet aient été supprimés. Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous éclairer sur les raisons de cette suppression et sur la possibilité de rétablir l’an prochain ces indicateurs de performance ?

Plus fondamentalement, je crois qu’indépendamment du soutien public aux collectivités locales, les budgets locaux ont été fragilisés par la crise économique. Ainsi, les recettes fiscales de certaines collectivités, en particulier celles des départements, ont été particulièrement exposées à la conjoncture : en 2008, le produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers – TIPP – a déjà chuté de 5,9 % et celui des droits de mutation à titre onéreux – DMTO – de 8,6 %, et les premiers chiffres pour l’année 2009 montrent que cette tendance s’est encore aggravée. Dans le même temps, les dépenses locales poursuivent leur progression, tirées, non seulement par les transferts de personnel et l’investissement dans le cadre du « plan de relance », mais aussi par l’alourdissement des dépenses sociales, supportées notamment, là encore, par les départements.

L’endettement des collectivités reste, certes, assez modeste – de l’ordre de 112,6 milliards d’euros en 2008, soit 11 % de l’ensemble de la dette publique –, mais il s’est accru de presque 25 % en quatre ans. Cela signifie que les charges d’intérêt de la dette pèseront chaque année de plus en plus sur les budgets des collectivités, surtout dans l’hypothèse d’une hausse future des taux d’intérêt. La situation financière des collectivités territoriales devra donc être suivie avec attention : je pense, en particulier, à celle de certaines grandes villes et de quelques départements, qui est aujourd’hui d’autant plus délicate que des emprunts structurés ont été contractés sans que le risque en soit bien géré.

À ce propos, monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous indiquer les mesures que le Gouvernement envisage de prendre pour promouvoir davantage, au sein des assemblées délibérantes comme auprès de la population dans son ensemble, une transparence renforcée sur la situation financière des collectivités et, tout particulièrement, sur la gestion de leur endettement ? Je souhaiterais également que vous puissiez nous préciser la nature des engagements pris par les banques dans le cadre de la « charte de bonne conduite » qu’elles étaient appelées à conclure avec les collectivités.

Enfin, au-delà des aspects strictement budgétaires, il me semble nécessaire de revenir sur l’effort sans précédent qui est engagé pour clarifier et améliorer le fonctionnement de la décentralisation. « L’acte II » de celle-ci a, certes, permis, depuis 2003, de transférer de nouvelles compétences aux collectivités et de leur garantir de nouveaux droits. Mais, comme le remarque le rapport de la Cour des comptes sur « la conduite par l’État de la décentralisation », rendu public le 27 octobre dernier, ce renforcement de la décentralisation « a dû s’accommoder d’une organisation territoriale jugée peu rationnelle et insuffisamment réformée ». Nous avons adopté cet automne un projet de loi organisant le transfert aux départements des parcs de l’équipement, ce qui nous a permis de tirer la dernière grande conséquence de la loi du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales : cette ultime étape de l’acte II de la décentralisation franchie, il nous faut regarder vers l’avenir.

Et cet avenir, c’est la préparation d’une réorganisation territoriale majeure, qui devrait notamment nous conduire, premièrement, à rénover notre architecture territoriale – ce qui passe notamment par l’achèvement de la carte intercommunale et la création de véritables métropoles – ; deuxièmement, à simplifier la « gouvernance » des collectivités locales – ce qui pourra être obtenu grâce à l’élection au suffrage universel direct des délégués des communes siégeant dans les intercommunalités, ou encore grâce aux synergies créées par l’institution de « conseillers territoriaux » communs aux régions et aux départements – et, troisièmement, à favoriser l’émergence d’un Grand Paris, qui sera avant tout fondée sur des projets concrets, d’intérêt général, tel que la création d’un moyen de transport collectif sûr et rapide reliant les principaux pôles d’activité économique autour de la capitale.

Cette entreprise de modernisation, salutaire et courageuse, devrait être abordée par tous sans a priori partisan, et suppose donc de poursuivre une concertation renforcée avec l’ensemble des élus locaux, dont j’ai moi-même rencontré les principaux représentants.

Mais il me semble qu’une telle réforme ne portera vraiment ses fruits, du point de vue de la démocratie locale et de l’évolution des dépenses publiques, que si l’on porte remède à l’enchevêtrement des compétences et des financements, qui réduit la lisibilité et donc l’efficacité de la politique locale. Il me semble que, sur ce point, les projets présentés par le Gouvernement et bientôt examinés par le Sénat demeurent un peu en retrait ou renvoient le problème à plus tard, alors qu’il existe de réelles marges de progression pour conforter la spécialisation de chaque échelon d’administration.

Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous indiquer dans quelle mesure ces projets de loi permettront réellement de limiter les compétences concurrentes et d’encadrer les cofinancements, sans bien sûr porter atteinte à la libre administration des collectivités territoriales ? Pourriez-vous également nous donner de premières indications sur le calendrier selon lequel notre assemblée sera saisie de cette vaste reforme ?

S’agissant, enfin, de la modernisation des finances locales, je crois que nous sommes finalement parvenus à une solution relativement équilibrée pour le remplacement de la taxe professionnelle par d’autres impositions, qui préserveront, autant que possible, les marges de manœuvre fiscales de chaque niveau de collectivités. Le principe d’autonomie financière des collectivités territoriales est aujourd’hui largement respecté, notamment pour les départements et les régions, et ne me paraît pas réellement menacé. Mais cette réforme, aussi ambitieuse et complexe soit-elle, n’épuise pas le sujet : il reste nécessaire, pour la taxe d’habitation et la taxe foncière, de mettre à jour des valeurs locatives vieilles de plus de 35 ans. De même, le remplacement de la taxe professionnelle par de nouveaux impôts crée une opportunité unique pour rénover entièrement l’architecture de la péréquation, qui repose aujourd’hui sur treize dotations ou fonds distincts, obéissant chacun à des règles originales, ce qui est illisible, voire incompréhensible, et ne permet pas de mener une politique cohérente.

Là encore, le dernier rapport public de la Cour des comptes appelle à agir sans plus tarder pour remettre de l’ordre et de la clarté. Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, où en est aujourd’hui la réflexion du Gouvernement sur ce sujet essentiel pour la cohésion territoriale ? Que pense-t-il, en particulier, des deux propositions que j’ai formulées, le 25 juin dernier, en présentant un rapport sur ce sujet devant la Commission des lois ? La première tend à mesurer chaque année et à faire figurer dans les documents budgétaires, pour chaque catégorie de collectivités, le taux global de correction des inégalités de pouvoir d’achat entre collectivités locales ; la seconde vise à regrouper les dix dotations de péréquation verticale en quatre grandes dotations intensément péréquatrices – une par niveau de collectivité ?

J’ajoute qu’il me paraît nécessaire de poursuivre la réflexion sur la définition, pour les dotations péréquatrices, de critères de ressources et de charges permettant de compenser les handicaps structurels, sans interférer avec des données qui peuvent résulter de choix de gestion des collectivités.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans un contexte économique très incertain, le projet de budget qui nous est soumis permettra globalement de reconduire en 2010 le soutien financier accordé par l’État aux collectivités locales, qui conserveront, nous l’avons vu, des outils diversifiés pour équilibrer leurs finances. C’est pourquoi j’inviterai tout à l’heure la Commission des lois à adopter les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » pour 2010.

M. Jean-Claude Flory. Je tiens, tout d’abord, à saluer le travail remarquable accompli, comme chaque année, par nos rapporteurs. Au cours de l’année, nous avons eu, sur le sujet qui nous occupe aujourd’hui, des réflexions intenses, que vos services, monsieur le secrétaire d’État, ont largement accompagnées, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. Je tiens également à saluer leur travail.

Je souhaite revenir sur un sujet que j’ai évoqué hier matin en commission élargie, à savoir le classement en catastrophe naturelle.

Je salue la réactivité de vos services en la matière, monsieur le secrétaire d’État, et la rapidité avec laquelle des sinistres sont classés au titre de catastrophes naturelles, mon département ayant été concerné au cours de l’année 2008.

Un dispositif très réactif a été mis en place, il y a deux ans, lorsque les dégâts causés sont inférieurs à 4 millions d’euros. Lorsqu’ils sont plus importants, la démarche est, malheureusement, beaucoup plus lourde pour les collectivités locales. Une adaptation serait-elle possible pour la rendre plus facile dans ce cas et, notamment, pour réduire le temps des audits ?

Mme Marietta Karamanli. Mon propos, qui ne saurait être plus réaliste ni plus dur que celui du rapporteur spécial, sera centré sur trois constats.

Le premier est celui de l’insuffisance des compensations apportées par les dotations liées aux compétences transférées par les dernières lois de décentralisation. En effet, l’ensemble des concours aux collectivités territoriales ne devrait augmenter que de 0,70 % en 2010, alors que l’inflation prévisible est estimée par la Banque centrale européenne à 1,2 % et pourrait même atteindre 1,4 %. Ainsi l’évolution de la dotation générale de décentralisation sera-t-elle inférieure à l’inflation, avec des taux de 0,56 % pour les départements et 0,60 % pour les collectivités.

Si l’on additionne les manques à gagner résultant de la non-indexation des dotations de décentralisation sur l’évolution de l’inflation et de la non-indexation des dotations générales de fonctionnement, dont l’augmentation est plafonnée pour 2010 à 0,6 % – soit la moitié de l’inflation prévisionnelle –, ce sont environ 300 millions d’euros qui font défaut à la nécessaire compensation des charges nées de la décentralisation.

Ces 300 millions d’euros s’ajoutent aux effets mêmes de la décentralisation telle qu’elle a été conçue en 2004. Prenant pour référence le coût historique des transferts, celle-ci n’a en effet pas prévu d’instrument de stabilisation permettant de tenir compte des évolutions, notamment économiques et démographiques, observées dans certains territoires.

Pour ne prendre que l’exemple de l’APA, la Cour des comptes a rappelé dans son rapport thématique sur la décentralisation, en octobre 2009, que la dépense globale pour 2008 aura été de 4,8 milliards d’euros, laissant aux départements une charge nette de 3,2 milliards d’euros.

Gilles Carrez constatait lui-même en mai 2009 que « les dépenses suivent leur propre dynamique, alors que les recettes censées les compenser ne suivent pas nécessairement la même évolution ».

Ainsi, l’insuffisance de la réévaluation des dotations liées à la décentralisation et l’absence de solution d’ensemble dans le cadre d’une autonomie fiscale réelle vont mettre en difficulté de nombreuses collectivités territoriales, et ce non pas dans quelques mois ou quelques années, mais dans quelques semaines.

Mon deuxième constat est celui de la stagnation des dotations d’investissement, de la limitation des dotations de fonctionnement et de la nécessité, pour l’État, d’un changement de perspective à l’égard du Fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA.

Pour ce qui concerne les principales dotations d’investissement, il convient de signaler que, si la DGE des départements augmente de 1,20 % en autorisations d’engagement, elle décroît de 0,34 % en crédits de paiement, ce qui limite le paiement des dépenses engagées, et que la DGE des communes et des EPCI, bien qu’elle connaisse, avec une augmentation de 1,15 %, une évolution légèrement inférieure à l’évolution prévisible de l’inflation en autorisations d’engagement, diminue significativement en crédits de paiements, avec une baisse de 31,41 %.

Quant au FCTVA, son traitement par les trois dernières lois de finances donne matière à réflexion. Laissé hors de l’enveloppe normée en 2008, il y a été intégré en 2009 et son évolution est annoncée comme indexée sur l’inflation pour 2010. En fait, si l’on retire le FCTVA de l’enveloppe normée, l’évolution réelle des dotations de fonctionnement en 2010 est seulement de 0,6 %, soit 245 millions d’euros, niveau là encore bien inférieur à l’inflation.

Le FCTVA est par ailleurs calculé avec un taux de compensation forfaitaire de 15,482 % appliqué aux dépenses d’investissement. Autrement dit, l’État perçoit une marge entre ce qui lui est versé par les collectivités et ce qu’il leur rembourse. Ce qui est « empoché » de la sorte, de l’ordre de 380 millions d’euros en 2010, correspondra à plus de 50 % de l’augmentation de l’ensemble des dotations aux collectivités, y compris au titre du FCTVA. Abstraction faite du principe d’universalité, c’est donc à partir des ressources et des investissements des collectivités territoriales que l’État assurera pour moitié le maintien minimal des dotations à ces collectivités.

Cette situation anormale implique un changement de perspective pour que le FCTVA soit considéré comme un remboursement sur des dépenses d’investissement et d’avenir, et non comme une variable d’ajustement de l’évolution des dotations aux collectivités.

En outre, avec l’adoption de la contribution économique territoriale, les collectivités risquent de moins investir, n’ayant plus la sécurité financière que leur garantissait un véritable impôt économique local. Pour investir, elles doivent en effet percevoir des impôts, et non des dotations. La réforme se traduit donc par la certitude d’une perte sur la poursuite des investissements civils des collectivités locales et l’éventualité d’un gain sur les investissements réalisés par des entreprises dont les marges seront rétablies ou restaurées.

J’en viens au troisième constat : celui du caractère très partiel de la péréquation.

La péréquation vise à réduire les écarts de richesse, et donc les inégalités, entre les différentes collectivités territoriales et la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 en a fait un objectif constitutionnel, l’article 72-2 de la Constitution disposant que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales ». Or, il existe aujourd’hui de fortes inégalités de richesse entre les collectivités et le résultat de la péréquation apparaît insuffisant.

Le projet de loi qui nous est soumis ménage peu de marges de manœuvre en faveur de la péréquation. Ainsi, la réforme de la dotation de solidarité urbaine, ou DSU, est gelée et le montant de la dotation de développement urbain, ou DDU, est limité à sa valeur de l’année dernière. Je ne peux que le regretter.

Je terminerai par une interrogation. Le produit des taxes locales ne peut être utilisé seul pour comparer la richesse des territoires. En effet, ce produit dépend non seulement de la base fiscale sur laquelle il s’appuie, mais aussi du taux d’imposition qui lui est appliqué. Chaque collectivité adopte ainsi un profil de taxation qui lui est propre. Certaines communes n’ont pas d’investissement particulier à réaliser et ont des taux bas, tandis que d’autres doivent assumer le financement de projets spécifiques, ce qui peut nécessiter, quelle que soit la richesse de leur population, des taux élevés. Pour mieux répartir les dotations à visée de péréquation, ne serait-il pas utile de répartir les dotations en prenant en compte non seulement un indice de ressources, mais aussi un indice d’effort fiscal identifiant ce que les collectivités locales retirent ou retireraient des taxes en appliquant des taux moyens d’imposition ?

Comme vous l’avez compris, nous estimons que ce budget manque de justice, tant dans la façon dont les réformes sont menées que dans la répartition des efforts et des moyens qui nous est proposée.

M. Marc Francina. Ma première question, d’ordre général, porte sur la prise en compte des résidences secondaires dans le calcul de la DGF. Depuis une dizaine d’années, les communes touristiques réclament l’augmentation du chiffre de leur population, actuellement calculée sur la base d’un habitant par résidence secondaire, alors que les habitudes de nos concitoyens ont changé et que les résidences secondaires sont souvent occupées plus de six mois par an, notamment par les nouveaux retraités. Cependant, la demande répétée des communes touristiques que soit retenu le chiffre de deux habitants par résidence secondaire n’a jamais reçu satisfaction.

Ma deuxième question est plus technique. Les nombreuses communes qui ont procédé à des recensements complémentaires après 2006 en vue du calcul de la DGF et qui ont perçu en 2008 une dotation calculée sur cette base ont eu cette année la désagréable surprise de voir ce montant diminuer, le Comité des finances locales s’étant fondé cette fois sur les chiffres de 2006. Dans certaines communes, cette diminution atteint 300 000 euros.

Bien que certains les considèrent comme nanties, n’oublions pas que les communes touristiques doivent réaliser des infrastructures destinées à une population importante et qui ne sont souvent utilisées que quelques mois par an.

M. François Pupponi. Mes deux questions porteront sur la DSU et la DDU.

Monsieur le secrétaire d’État, votre Gouvernement a demandé en 2008 une grande réforme de la DSU, se fondant sur le constat que 75 % des communes de plus de 10 000 habitants dans ce pays touchaient cette dotation, y compris des villes que l’on peut difficilement décrire comme pauvres, telles qu’Aix-en-Provence, Toulouse, Montpellier ou Lyon – et même Chantilly, comme je le rappelais récemment à M. Woerth. Le chantier de cette grande réforme s’est ouvert l’année dernière et, les propositions du Gouvernement ayant été refusées par un front uni de tous les élus, nous sommes parvenus en 2009 à un consensus consistant, dans l’attente de la réforme, à réserver l’augmentation annuelle de la DSU aux 150 premières communes. Le groupe de travail du Comité des finances locales a commencé à élaborer le projet de réforme et, après l’interruption de cet été, il nous a été proposé un statu quo pour 2010, la grande réforme étant reportée à 2011.

Cette réforme est d’autant plus indispensable que la réforme de la taxe professionnelle fait disparaître les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle et le fonds de solidarité de l’Île-de-France. Le fait que les dotations de péréquation soient figées ou supprimées touche tout particulièrement les communes les plus pauvres. Lors de l’examen en séance publique de la première partie de la loi de finances, voici quelques jours, le ministre a d’ailleurs accepté qu’un groupe de travail se mette immédiatement à la recherche d’une solution, afin d’éviter un recul de la péréquation.

Pour ce qui concerne la DSU, nous avons eu la surprise de constater que, contrairement aux engagements pris, la réforme n’est pas gelée, car le projet de loi de finances propose une augmentation linéaire de cette dotation pour toutes les communes éligibles, ce qui contredit l’accord de l’année dernière selon lequel, je le répète, seules les 150 premières communes devaient bénéficier de l’augmentation de 70 millions d’euros – et je dois d’ailleurs régulièrement détromper à ce propos les ministres que je rencontre, qui en étaient restés à ce dispositif. Je ne comprends pas pourquoi vous remettez en cause cet accord unanime et vous demande donc si vous acceptez de revenir à l’amendement gouvernemental de 2009.

Quant à la DDU, nous avions dénoncé le fait qu’il s’agissait d’une fausse dotation – en réalité une subvention. C’est une bonne chose que de donner de l’argent aux villes les plus pauvres, mais il est absurde qu’elles ne puissent pas le dépenser pour des raisons administratives. De fait, comme l’a très justement souligné M. Laffineur, la quasi-totalité des communes éligibles n’ont toujours pas reçu leur notification de DDU et ne pourront donc dépenser qu’en 2010 des fonds dont elles ont absolument besoin et qui ont en outre été votés par le Parlement à l’automne 2008. Nous vous le demandons : affectez cet argent à ces communes sous forme de dotation, vérifiez-en l’emploi si vous voulez, mais ne les empêchez pas de le dépenser. Il n’est pas normal que les préfets limitent l’application de dispositions votées par la représentation nationale.

M. Guy Geoffroy. Nous sommes ici nombreux à être maires, et comme tels très sensibles à ce que les moyens mis à la disposition des collectivités par l’État soient aussi substantiels que possible. Cependant, face à la psychologie du verre à moitié vide que choisissent certains, je tiens à rappeler que l’exercice 2010 est difficile à tous égards et que l’effort réalisé dans ce contexte par l’État en faveur de toutes les collectivités est loin d’être négligeable – il manifeste même, en ces temps de vaches maigres, une volonté de poursuivre une relation aussi équilibrée que possible.

La commune dont je suis maire ne recevra certainement pas de grosses sommes cette année, mais, dans la période que nous traversons, tous les pouvoirs publics devraient adopter dans leur langage un minimum de solidarité, afin que nos concitoyens n’aient pas le sentiment que nous faisons le grand écart entre un État notoirement impécunieux et des collectivités qui ne voudraient pas prendre acte du fait que les temps sont durs pour tout le monde.

Après cette remarque, je reviendrai sur une question qui m’importe particulièrement en ma qualité de rapporteur de la loi organique relative à l’autonomie financière des collectivités locales, qui a été pour un grand nombre d’entre nous une vraie bonne nouvelle et un élément réellement salutaire de clarification des relations entre l’État et les collectivités territoriales.

Quoi que l’on dise des chambardements en cours, le jour viendra où ils seront salués pour les effets qu’ils auront produits en matière de refonte des fiscalités locales – je pense en particulier à la suppression de la taxe professionnelle et à son remplacement, difficile mais voué au succès, par de nouvelles contributions économiques territoriales. La question qui se pose est celle de notre capacité à respecter à la fois l’esprit et la lettre de notre Constitution et à la décliner dans la loi organique sur l’autonomie des collectivités territoriales.

Je tiens donc, à l’occasion de l’examen de ces crédits, à demander au Gouvernement quelles pistes il compte suivre pour assurer de manière pérenne le respect intégral des dispositions indispensables pour assurer cette autonomie financière.

M. Olivier Dussopt. Je poserai trois questions sur la mission que nous examinons.

Tout d’abord, le fait que, comme l’observait Mme Karamanli, l’augmentation des dotations – hors FCTVA – se limite à 0,6 %, soit bien moins que l’inflation, aura pour conséquence une baisse de la capacité d’épargne des collectivités locales et, par conséquent, de leur capacité ultérieure à investir. Cette situation se traduira aussi par des difficultés accrues au niveau des budgets de fonctionnement. Dans ce contexte, quelles sont les intentions de l’État pour ce qui concerne notamment le point d’indice de la fonction publique, qui s’applique à la fonction publique territoriale ? Quel sera l’écart entre l’évolution de cet indice – et de tous ceux que fixe le Gouvernement – et celle des dotations de l’État ? Ne peut-on craindre un effet de ciseaux ?

En second lieu, on constate que, comme c’est déjà le cas depuis plusieurs années, les crédits de la mission se caractérisent par une absence de volonté de péréquation. Quelles sont vos perspectives en matière de péréquation, notamment dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle – cruellement déficiente à cet égard – et quelles suites entendez-vous donner à la proposition de Mme Karamanli de prendre en compte l’effort fiscal, le niveau d’endettement et les efforts déjà consentis par les contribuables et les collectivités des territoires connaissant des situations difficiles pour le calcul des dotations qui leur sont attribuées ?

Enfin, la suppression de la taxe professionnelle suscite des craintes et aura des conséquences sur les possibilités de financement des collectivités. De fait, la stagnation, voire la baisse, de certaines des dotations entraînera un effet cumulatif qui freinera l’investissement réalisé par les collectivités – qui représente, je le rappelle, 75 % de l’investissement public. En un temps où l’on agite sans cesse l’étendard de la relance et où l’on célèbre avec fracas un millième projet sans s’intéresser aux 999 autres qui l’ont précédé, pouvez-vous nous rassurer sur la contradiction qui se manifeste entre un budget de rigueur et d’austérité – pour ne pas dire : d’asphyxie – en matière de dotations aux collectivités locales et la volonté d’une relance qui s’appuierait sur ces dernières ?

Par ailleurs, que pouvez-vous nous proposer à propos du versement anticipé du FCTVA ? En effet, certaines communes qui ont souscrit à ce dispositif se heurtent à des difficultés administratives et à des contraintes techniques. Certaines ont également subi à la fin de l’année 2008, comme cela a été rappelé tout à l’heure, des intempéries majeures qui se sont traduites par des difficultés de prévision et de programmation au début de l’année 2009, et parfois par des retards. Envisagez-vous de laisser une journée comptable supplémentaire ou prévoyez-vous un dispositif dérogatoire, afin de permettre à toutes les communes manifestant une bonne volonté en matière d’investissement de continuer à bénéficier de ce dispositif ?

M. Jean-Yves Cousin. La suppression de la taxe professionnelle est une bonne chose. Dans la situation économique actuelle, la priorité est en effet d’aider notre tissu de production.

Du point de vue des collectivités, bien que nous soyons rassurés pour 2010, où l’État assurera les compensations, pouvez-vous déjà indiquer quel sera le mécanisme mis en place pour assurer l’autonomie financière des collectivités territoriales ?

M. Marc Goua. Je tiens à insister sur les problèmes de la DSU et de la péréquation.

Toutes les études indiquent que l’effet de péréquation exercé par la DSU est très limité, ce qui milite pour une concentration de cette dotation sur les communes les plus en difficulté, dont les revenus et les charges présentent des écarts énormes avec ceux des communes « ordinaires ».

Par ailleurs, la réforme des bases des impôts locaux, qui est certes une idée intéressante, pourrait avoir un effet dévastateur si elle se limitait au périmètre des communes. De fait, les communes qui connaissent déjà des difficultés du fait d’un grand nombre de logements sociaux pourraient se trouver en situation de cessation de paiements. La solidarité entre pauvres et plus pauvres – qui, même si elle existe déjà, n’est pas une solution – n’en serait que renforcée, au détriment de la mixité sociale que l’on s’efforce de faire prévaloir. Il faut donc tenir compte de l’effort fiscal et assurer une péréquation qui dépasse le niveau de la commune. Où en est le Gouvernement dans ce domaine ?

M. Claude Bartolone. N’en déplaise à l’un de nos collègues qui a suggéré tout à l’heure que les collectivités locales devaient partager la situation économique de l’État, ce ne sera nullement le cas cette année, car ce sont précisément les collectivités qui subissent de plein fouet l’augmentation des dépenses sociales et l’écroulement des recettes qui leur étaient affectées à cet effet par les dernières lois de décentralisation Raffarin.

C’est une bien mauvaise nouvelle que d’apprendre que la dotation générale de décentralisation, qui était la variable d’ajustement pour les départements et les aidait à prendre en charge les conséquences des lois de décentralisation ou des nouveaux transferts qui leur incombaient, ne progressera que de la moitié de l’inflation prévisible et du tiers de l’inflation qui risque d’être constatée, alors même que nous allons devoir subir la dernière tranche de transfert des personnels TOS et DDE. Quel est, monsieur le secrétaire d’État, votre avis sur cette question ?

Pour ce qui concerne la péréquation, je tiens à souligner l’injustice que représente pour certaines collectivités le ticket modérateur, en particulier au moment où l’on envisage la suppression de la taxe professionnelle. De fait, le ticket modérateur a été institué pour faire face aux déductions accordées à certaines entreprises, de manière à éviter les effets de l’augmentation trop importante de cette taxe. Son maintien malgré la suppression de la taxe professionnelle est une véritable injustice, qui oppose des départements ayant des charges importantes à d’autres départements qui n’ont pas ces charges.

Permettez-moi de citer un exemple que je connais bien : cette année, le département de la Seine-Saint-Denis, qui compte de nombreux Rmistes, devra payer 37 millions d’euros au titre du ticket modérateur, alors que le département des Hauts-de-Seine n’aura rien à payer à ce titre. On voit bien que ce système pénalise les départements où les personnes âgées sont nombreuses, qui ont d’importantes dépenses d’APA, ou ceux qui ont des charges sociales élevées, au titre notamment du RMI ou du RSA. Monsieur le secrétaire d’État, la suppression du ticket modérateur pourrait être dès maintenant une première étape de la péréquation, et je souhaiterais connaître votre sentiment en la matière.

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial. Monsieur le secrétaire d’État, je me félicite de l’effort de l’État, qui, malgré une baisse de 20 % de ses recettes en 2009 par rapport en 2008, a réussi à augmenter légèrement les dotations aux collectivités locales. N’oublions pas que, si les collectivités souffrent, les difficultés touchent tout notre pays – et l’ensemble de l’Europe.

M. le président Didier Migaud. L’État paie beaucoup de choses à crédit. C’est une faculté que n’ont pas les collectivités territoriales.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Ce qui est donné est déjà payé à crédit : cela relativise les demandes de ceux qui veulent toujours plus !

L’État ne ferait donc pas d’effort en faveur de l’investissement des collectivités locales ? Je rêve ! Avec le plan de relance, via le FCTVA, ce ne sont pas moins de 3,8 milliards supplémentaires qu’il y consacre et cela est sans précédent !

Par ailleurs, pour certains, l’aide de l’État devrait être proportionnée à la fiscalité locale : autrement dit, il faudrait la subordonner à la hausse des impôts locaux !

M. François Pupponi. Mais non !

M. Marc Goua. Ce n’est pas ce que nous disons !

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial. Mais si ! Et ce n’est pas une bonne conception de la péréquation !

Je me félicite, en revanche, de la création de la DSU par M. Alain Juppé, de même que de la réforme de cette dernière par le gouvernement Fillon, qui a conduit à son augmentation sensible pour les 150 communes dont la situation est la plus délicate. Cet effort est d’ailleurs maintenu cette année.

M. François Pupponi. Non !

M. Marc Laffineur, rapporteur spécial. J’insiste : les collectivités territoriales percevront la même somme que l’an dernier alors que nous traversons une période particulièrement difficile.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. Je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre Hortefeux.

L’examen de cette mission est toujours particulier car il ne retrace qu’une petite partie de l’effort financier de l’Etat en faveur des collectivités territoriales,…

M. Claude Bartolone. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. …la majeure partie figurant dans la première partie de la loi de finances. De fait, la mission que nous examinons « pèse » à peine 2,6 milliards quand les prélèvements opérés en première partie sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales en atteignent 84,6.

Les concours de l’État aux collectivités locales s’élèvent donc à plus de 57 milliards, ce qui représente une hausse de 1,2 % ; l’effort financier hors fiscalité transférée dépasse quant à lui 78 milliards, en augmentation de 3,5 % et, enfin, l’effort financier avec fiscalité transférée atteint 97,5 milliards – presque cent milliards !. Cela représente un effort d’autant plus considérable que les recettes de l’État sont en baisse et que la plupart de nos partenaires de l’Union – Allemagne, Grande-Bretagne, Espagne – diminuent leurs dotations aux Länder ou aux provinces.

Ce projet de loi de finances s’inscrivant de surcroît dans le contexte particulier de la réforme de la taxe professionnelle, je souhaite insister sur trois points et, en premier lieu, sur l’impact de cette réforme sur les collectivités territoriales.

Comme Marc Laffineur l’a rappelé, le Gouvernement s’est engagé à compenser intégralement la perte de la TP pour chaque collectivité. Je précise, d’une part, que la compensation relais prévue en 2010, année blanche, figure à l’état A du PLF et je remarque, d’autre part, que votre Assemblée a profondément remanié le texte, sous l’impulsion de votre rapporteur général Gilles Carrez, en décidant notamment d’affecter une part de la cotisation complémentaire au bloc communal, ce dont je ne peux que me réjouir à titre personnel car vous rétablissez de la sorte un lien fort entre les entreprises et le niveau de collectivité en charge de l’aménagement économique. Ce mouvement est par ailleurs conforme à mon objectif de conforter l’intercommunalité dans le cadre du projet de réforme des collectivités territoriales.

Bien entendu, je sais que toutes les difficultés ne sont pas levées pour autant. Faut-il donc renforcer cette affectation d’impôt économique au bloc communal ? Faut-il envisager, pour les départements, une fiscalité en phase avec la montée en puissance de leurs dépenses sociales ? Quoi qu’il en soit, je ne doute pas que les débats se poursuivront au Sénat dans le même esprit constructif qu’à l’Assemblée et vous savez que le Gouvernement se montrera quant à lui ouvert.

Deuxième point : ce grand chantier ne doit pas occulter nos efforts en faveur de la péréquation, dont témoignent plusieurs articles du PLF rattachés à cette mission. L’exercice s’est en l’occurrence révélé plus contraint cette année en raison de la volonté d’associer les collectivités territoriales à l’effort de maîtrise des dépenses publiques, lequel nous a conduits à indexer la DGF à plus 0,6 % en 2010.

Afin de conserver des marges d’augmentation de la péréquation, l’article 55 prévoyait d’écrêter de 3,5 % le complément de garantie de la DGF des communes, mais, à l’initiative de M. Gilles Carrez, vous avez abondé la DGF de 131 millions lors de l’examen de la première partie du PLF – à ce propos, je précise à M. Laffineur qu’à la suite de cet amendement, le Gouvernement présentera bien entendu des amendements de coordination sur les crédits budgétaires de la mission. Ainsi, comme le suggère M. le rapporteur spécial, il semble désormais possible d’afficher une augmentation de la péréquation communale sans avoir besoin d’abaisser aussi fortement le complément de garantie des communes. Enfin, le Gouvernement proposera en toute logique une position de « sagesse » vis-à-vis de cet amendement.

Je prends également acte qu’en 2010, il restera au Comité des finances locales des marges d’indexation pour ces dotations de péréquation communales que sont la dotation de solidarité urbaine (DSU), la dotation de solidarité rurale (DSR) et la dotation nationale de péréquation (DNP).

S’agissant des dotations de péréquation elles-mêmes, nous avons choisi de reporter la réforme de fond de la DSU à l’an prochain. En effet, à l’issue des travaux du groupe de travail présidé par M. Carrez, il nous a semblé difficile que ce second volet de la réforme ne soit pas mené en cohérence avec la révision du zonage prioritaire de la politique de la ville. Pour 2010, les attributions individuelles seront donc reconduites et indexées en fonction du choix que fera le Comité des finances locales en février prochain – tel est précisément l’objet de l’article 56 du projet de loi qui, au demeurant, permet de conserver les évolutions de dotations enregistrées cette année.

Enfin, le Gouvernement reconduit la dotation de développement urbain créée l’année dernière, laquelle bénéficiera d’une nouvelle tranche de 50 millions en crédits budgétaires. Je vous renvoie, à ce propos, à l’article 57. Monsieur Laffineur, il est logique que la mise en place de cette dotation ait été un peu longue : outre qu’elle n’a été créée que dans le cadre PLF pour 2009, il a fallu attendre la publication du décret d’application, qui devait être obligatoirement soumis à l’avis de plusieurs instances, pour répartir la dotation entre la centaine de communes éligibles. Si les crédits n’ont donc été disponibles qu’en juin, nous avons toutefois demandé aux préfets de prendre rapidement contact avec ces communes afin de déterminer les projets pouvant être retenus. Mon objectif est que la totalité des autorisations d’engagement soit mobilisée cette année.

Par ailleurs, l’article 58 prévoit d’abonder le fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées à hauteur de dix millions, somme qui s’ajoutera aux cinq millions ouverts en 2009. Là encore, la mise en place des crédits est très tardive mais c’est aussi que le redéploiement territorial des armées ne s’est pas traduit en 2009 par des pertes de population ou de recettes fiscales significatives pour les collectivités concernées. J’ajoute que seuls cinq contrats de redynamisation des sites de la défense (CRDS) ont été signés depuis cet été, en l’occurrence à Givet, Arras, Barcelonnette, Provins et Briançon. Sachez également que je suis en permanence ce dossier avec M. le ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire Michel Mercier et que nous venons d’adresser une circulaire commune aux préfets concernés.

J’en viens à quelques précisons sur la compensation financière des transferts de compétences. Vous avez adopté en première partie du projet de loi de finances les articles 17 et 18 visant à attribuer une fraction de TIPP aux départements et aux régions en compensation de ces transferts. Au total, la fiscalité transférée pour compenser les charges de la décentralisation s’élève à 2,78 milliards pour les premiers et 3,18 milliards pour les secondes. L’article 15 reconduit également le fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI), qui sera doté de 500 millions en 2010. Je précise, en outre, que plusieurs ajustements au profit des régions seront effectués en loi de finances rectificative pour 2009, en matière de formations sanitaires et de formation professionnelle des jeunes de moins de 26 ans.

Je tiens à saluer le remarquable travail de la commission consultative d’évaluation des charges (CCEC), présidée par M. Thierry Carcenac, qui a permis d’affiner avec les ministères concernés le coût exact de ces transferts de compétences. De la même manière, je n’aurai garde d’oublier la commission consultative d’évaluation des normes, présidée par M. Alain Lambert.

Enfin, le Gouvernement a tenu compte du contexte particulier de la généralisation du RSA pour les départements en décidant de ne pas appliquer l’ajustement qui avait été prévu sur la base des données d’exécution de l’année 2008, ce qui a conduit à accorder un versement exceptionnel de 45 millions en 2010.

Monsieur Laffineur, l’amendement relatif à la mesure de versement anticipé de FCTVA prise dans le cadre du plan de relance pourrait en effet exclure les collectivités du bénéfice de ce fonds en 2010 alors qu’elles auront participé au plan de relance en 2009. J’ajoute que l’engagement de plus de 19 000 d’entre elles avec l’État dans le cadre de ce plan a permis de dégager plus de 55 milliards d’investissement. Au 30 septembre, 36 % des collectivités signataires – soit près de 7 000 – n’avaient pas encore dépensé en investissement la moitié de leur moyenne de référence ; si elles n’y parviennent pas à la fin de l’année, 2010 pourrait être pour elles une année blanche. Or, il est évident que les difficultés qu’elles rencontrent proviennent bien souvent d’impondérables : météo, lissage du plan de charge des entreprises de BTP au-delà de la fin de 2009, etc. Dans ce contexte, l’amendement proposé par M. Laffineur apporte une solution équilibrée mais je me demande si son emplacement est judicieux – il relève plutôt, me semble-t-il, de la première partie du budget. Quoi qu’il en soit, je laisse à la commission le soin de statuer.

Si, Messieurs Laffineur et Aeschlimann, la révision des valeurs locatives cadastrales ne constitue pas un préalable indispensable à la suppression de la taxe professionnelle, la réforme de la fiscalité locale soulève en revanche la question, ces bases constituant le fondement des impôts des collectivités locales – c’est notamment sur elles que sera assise la future cotisation locale d’activité des entreprises. Or, elles n’ont jamais été réévaluées depuis 1970, mais simplement revalorisées forfaitairement, sans tenir compte des évolutions des territoires communaux. Elles sont donc non seulement une source d’iniquité dans la répartition de la charge fiscale, mais aussi un motif de contentieux important, s’agissant particulièrement des locaux commerciaux. Si aucune orientation n’a été à ce stade arrêtée par le Gouvernement, plusieurs modes de réactualisation – dont nous devons débattre – sont envisageables, depuis l’actualisation des valeurs cadastrales jusqu’au passage aux valeurs vénales ou à la référence aux loyers de marché. Par ailleurs, faut-il mettre en place cette réforme depuis Paris ou bien laisser aux élus locaux des marges de manœuvre ? En tout cas, le Président de la République et le Premier ministre ont annoncé que le Gouvernement allait ouvrir une phase de concertation préalable – le plus tôt possible, je l’espère – avec les parlementaires des deux Assemblées et les associations d’élus locaux.

Monsieur Aeschlimann, outre que le Gouvernement a cherché à limiter le nombre global d’indicateurs, c’est la mission d’évaluation des politiques publiques qui a supprimé celui concernant le nombre de consultations du site Internet de la DGCL dans le projet annuel de performance. Si, s’agissant de la transparence quant à la situation financière des collectivités et, en particulier, à la gestion de leur endettement, le Gouvernement n’entend pas réglementer – il respecte en effet les principes de libre administration et de responsabilité des collectivités –, le ministère de l’Intérieur a toutefois commencé depuis un an, avec les banques et les associations d’élus, un important travail qui se traduira par la signature d’une charte de bonne conduite. Celle-ci comportera plusieurs engagements, tant pour les banques – information sur les produits structurés – que pour les collectivités territoriales – transparence sur la gestion de leur dette. Parallèlement, une circulaire reprendra les principaux principes de droit devant guider le comportement des collectivités territoriales en matière de stratégie d’emprunt.

M. Aeschlimann, de plus, a rappelé ses propositions s’agissant de l’évaluation de l’efficacité des dotations de péréquation. L’actualisation de l’étude des universitaires Gilbert et Guengant, utilisée par la DGCL pour mesurer l’intensité « péréquatrice » de ces dotations, devrait quant à elle pouvoir être remise avant la mi-décembre. Par ailleurs, la DGCL vise à se doter d’un outil lui permettant de mesurer plus régulièrement ces données essentielles.

J’ajoute que des réflexions sont en cours – notamment dans le cadre du Comité des finances locales – en ce qui concerne les évolutions de la péréquation. Je ne puis que vous rejoindre sur l’opportunité que représente la réforme de la TP de réévaluer l’ensemble de ces dispositifs, étant entendu que ce réexamen doit être abordé sans parti pris.

Le Président de la République a rappelé à Saint-Dizier combien la clarification des compétences est nécessaire afin de mettre un terme aux redondances et à la complexité des financements croisés. Le PLF prévoit ainsi que l’exercice de clarification sera achevé dans un an à compter de la promulgation de la loi ; il doit reposer sur des principes clairs et simples, l’objectif étant de cerner les compétences de chaque collectivité, d’en dresser la liste et d’interdire à toute collectivité d’exercer une compétence attribuée à une autre, tout en préservant néanmoins des domaines de compétences partagés.

Monsieur Laffineur, le « jaune » budgétaire est en ligne depuis une semaine et la version papier vient d’être imprimée. Le délai s’explique par le volume du PLF, en particulier par celui des dispositions relatives à la suppression de la taxe professionnelle.

Conformément au principe constitutionnel issu de la révision de 2003 de notre texte fondamental, Monsieur Aeschlimann, l’État tient à organiser une péréquation efficace en faveur des territoires défavorisés. La part de la DGF consacrée à la péréquation augmente ainsi constamment : respectivement, en 2005 et 2008, elle représentait pour les communes 19 % et 22 %, pour les départements 9,2 % et 11 % et, enfin, pour les régions 1,9 % et 2,9 %. Cet effort sera poursuivi en 2010, l’indexation de la DGF à plus 0,6 % demeurant compatible avec une meilleure péréquation. A cette fin, outre que le Gouvernement a proposé un écrêtement du complément de garantie de la dotation forfaitaire des communes, de nouvelles marges sont possibles grâce à l’abondement exceptionnel de DGF réalisé en première partie de budget à travers les 131 millions que j’évoquais à l’instant.

S’agissant des catastrophes naturelles, Monsieur Jean-Claude Flory, le dispositif créé voilà deux ans et dont l’Ardèche a d’ailleurs bénéficié s’est révélé très efficace. S’il n’est en effet activé que lorsque les dégâts sont inférieurs à quatre millions, c’est ensuite l’ouverture par le Gouvernement de crédits exceptionnels qui prend le relais. Avec M. Hortefeux, nous avons ainsi fait en sorte que l’État soit plus réactif, des crédits exceptionnels à hauteur de 45 millions ayant été ouverts au début de l’été suite aux intempéries survenues à la fin de 2008 et au début de 2009.

L’article 72-2 de la Constitution, Madame Karamanli, Monsieur Bartolone, dispose en effet que l’État compense financièrement tout transfert de compétences aux collectivités locales. Les modalités de cette compensation ont en l’occurrence été fixées par la loi du 13 août 2004 et répondent à quatre principes cardinaux : elle doit être en effet intégrale,…

M. Claude Bartolone. C’est un gag !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. …concomitante, contrôlée – la CCEC donne son avis préalablement à tout transfert de charges – et, enfin, conforme au principe constitutionnel d’autonomie financière des collectivités. À ce jour, 94 % des ressources transférées l’ont été sous une forme fiscale : la TIPP, principalement attribuée aux régions mais, également, aux départements pour le transfert du RMI, et la TSCA pour les départements. En outre, afin de conforter l’autonomie financière des régions, un processus de régionalisation de la TIPP a été mis en place ; j’ajoute que, depuis 2007, les régions peuvent, dans certaines limites, moduler les fractions des tarifs de TIPP, avec l’accord unanime des États membres de l’Union européenne jusqu’en 2009 ; enfin, pour des transferts très ponctuels, la compensation est versée sous forme de dotation.

En 2010, les compensations s’élèveront à 2,78 milliards pour les départements, 3,18 milliards pour les régions et 117 millions pour les régions d’outre-mer qui, en effet, ne perçoivent pas de TIPP.

S’agissant, cette fois, de la compensation des dépenses sociales, le Gouvernement a été au-delà de ses obligations constitutionnelles comme en témoigne la reconduction de l’abondement du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI) à hauteur de 500 millions. Le taux de couverture assuré par l’État est supérieur à 90 % pour le RMI et la prestation de compensation du handicap alors qu’il est d’à peine un tiers pour l’APA, instaurée en 2001, soit avant la révision constitutionnelle.

De surcroît, l’ensemble des dotations de l’État, pour 2010, évolueront selon le même rythme de dépense que s’impose l’État, c’est-à-dire en fonction de l’inflation prévisionnelle, soit 1,2 %. L’enveloppe globale dépassera donc 57 milliards : 676 millions de plus que pour l’exercice budgétaire de 2009.

Le FCTVA progresse de 6 %. Le Gouvernement a consenti un effort massif puisqu’il a versé, en plus de l’enveloppe traditionnelle, plus de 3,8 milliards d’euros au titre du remboursement anticipé du FCTVA dans le cadre du plan de relance.

Marc Francina a soulevé le problème de la fiscalité des résidences secondaires. Je crois qu’il faut relativiser un peu les difficultés en la matière. La nouvelle méthode de recensement glissant prévue par la loi Vaillant de 2002 pose des problèmes aux collectivités parce que la population évolue très vite, que les communes changent de strate et que les indemnités des élus sont aussi sujettes à modification, dans un sens comme dans l’autre. Du coup, des contentieux surgissent un peu partout. Il me semble donc qu’il faut mener une réflexion collective sur la façon dont on devrait faire évoluer cette loi.

Le décalage dû à l’année de référence 2006 est provisoire. L’augmentation de la population sera bien enregistrée lors des deux prochaines années, puisqu’on procède désormais chaque année à une actualisation. Le Gouvernement et le Parlement ont eu le souci de ménager une année de transition pour les communes qui perdraient une part importante de leur population. Le Gouvernement a donc donné un avis favorable à un amendement émanant de l’Assemblée nationale, qui limite la perte de dotation forfaitaire pour les communes dont la population baisse de 10 % ou plus. Pas moins de 1 869 communes ont bénéficié de cette garantie, dont environ 500 ont procédé à un recensement complémentaire en 2006 ou en 2007. Le Gouvernement a également accepté un amendement de vos collègues sénateurs, qui permet aux communes les plus défavorisés et qui ont conduit récemment un recensement complémentaire de bénéficier d’un complément de dotation forfaitaire. Cette disposition a bénéficié à 23 communes pour un montant de près de 4 millions d’euros. Les résidences secondaires demeurent comptabilisées pour un habitant. La DGF 2010 prendra en compte l’extension des recensements aux résidences secondaires.

Monsieur Pupponi, le Gouvernement a souhaité engager une réforme d’ampleur de la DSU, en cohérence évidente avec d’autres chantiers : la réforme de la taxe professionnelle, qui nécessitera en 2010 des calculs de richesse comparée entre les collectivités territoriales, et la réforme des zonages prioritaires, qui doit également aboutir l’an prochain.

Les acquis de la répartition de la DSU pour 2009 seront préservés dans la répartition pour l’année 2010. Chaque commune…

M. François Pupponi. C’est bien le problème !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. ...devrait voir sa DSU augmenter d’au moins 3 %.

S’il y a une anomalie en ce qui concerne votre commune, venez donc nous voir !

M. François Pupponi. Nous allons venir nombreux car vous déclarez tout simplement la guerre aux communes de banlieue !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. Conformément aux engagements pris lors de l’adoption de la loi de cohésion sociale, le montant de la DSU mis en répartition a quasiment doublé, passant de 635 millions d’euros en 2004 à 1,163 milliard en 2009, soit une progression globale de 83 % – excusez du peu !

Mais il peut y avoir des anomalies…

M. François Pupponi. Il y en a pour toutes les villes de banlieue. C’est bien un choix politique que vous faites !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. Je répondrai par trois réflexions personnelles aux questions de M. Dussopt sur la taxe professionnelle.

Tout d’abord, dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale, je veillerai bien évidemment à ce que les objectifs de la péréquation soient totalement poursuivis : c’est un impératif pour assurer l’égalité des chances entre les territoires.

Ensuite, il s’agit d’un chantier que nous devons mener à partir de 2010 pour le faire aboutir en 2011 ou en 2012, lorsque les collectivités territoriales percevront les ressources de substitution à la TP.

Enfin, il faut également envisager un dispositif plus audacieux. L’Assemblée a d’ailleurs apporté des contributions notables en la matière, avec l’initiative de Gilles Carrez en faveur d’une péréquation départementale et régionale sur la cotisation complémentaire, ainsi qu’avec celle de Marc Laffineur relative aux droits de mutation à titre onéreux.

L’autonomie financière des collectivités territoriales qu’a évoquée M. Cousin est une exigence de la loi organique que le Gouvernement veillera bien évidemment à respecter, d’autant qu’un contrôle constitutionnel est désormais prévu.

M. Dussopt m’a interrogé sur la prise en compte du reste à réaliser dans le FCTVA. Il faudrait en effet éviter que les collectivités locales, qui n’en sont pas responsables, subissent une année « blanche ». C’est l’esprit de l’amendement qu’a déposé M. Laffineur. Le Premier ministre l’a indiqué en réponse aux questions qui lui avaient été posées à l’Assemblée nationale et au Sénat, nous avons demandé aux préfets de faire preuve à ce sujet de la plus grande souplesse possible. Soyez assuré que j’y veillerai personnellement car il serait quand même malvenu que les collectivités locales soient, pour des raisons totalement indépendantes de leur volonté, gênées dans leurs investissements, alors qu’elles sont un des piliers du plan de relance et qu’elles ont joué le jeu puisque 20 000 d’entre elles ont signé à ce titre une convention avec l’État.

Enfin, M. Bartolone a évoqué le ticket modérateur, qui a été maintenu à l’issue de l’examen du texte par l’Assemblée. Je précise toutefois que le projet de loi de finances remet les compteurs à zéro en 2010, en ne faisant porter le ticket modérateur que sur la contribution locale d’activité. Il faut en outre relativiser la portée de ce dispositif, qui ne représente que moins de 750 millions d’euros sur un total de 28 milliards, soit un pourcentage assez faible.

M. Claude Bartolone. Tout dépend de qui paye !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. L’État est le premier contributeur, à hauteur de 40 %.

*

* *

La Commission examine alors, sur le rapport de M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »  pour 2010.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission pour 2010.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS (51)

• Ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales

—  M. Éric JALON, directeur général des collectivités locales (DGCL)

—  M. Jean-Christophe MORAUD, sous-directeur des finances locales et de l’action économique

—  Mme Carole PUIG, adjointe au chef du bureau des concours financiers de l’État

• Assemblée des communautés de France (ADCF)

—  M. Nicolas PORTIER, délégué général

—  Mme Claire DELPECH, responsable des finances

• Assemblée des départements de France (ADF)

—  M. Thierry CARCENAC, vice-président de l’ADF, député et président du conseil général du Tarn

—  M. Guillaume DENIS, chef du service finances

—  Mme Marylène JOUVIEN, responsable des relations avec le Parlement

• Association des régions de France (ARF)

—  M. Alain ROUSSET, président de l’ARF, député et président du conseil régional d’Aquitaine

—  M. François LANGLOIS, délégué général

© Assemblée nationale

1 () En comptabilité publique, le solde des administrations publiques locales, calculé conformément aux critères prévus par les engagements européens de la France, peut être négatif lorsqu’il correspond un besoin de financement. Il convient toutefois de rappeler que, contrairement à l’Etat, les collectivités territoriales ne sont autorisées à s’endetter que pour financer des dépenses d’investissement, et non des dépenses de fonctionnement.

2 () Selon les chiffres transmis à votre rapporteur par le ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, ces autorisations d’engagements connaîtraient toutefois, à périmètre constant, une baisse de 4,9 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Le document présenté par le Gouvernement devant le Comité des finances locales (CFL), le 29 septembre dernier, faisait quant à lui état d’une augmentation de 1,5 % de ces crédits à périmètre constant.

3 () Progression de 1,2 % à périmètre constant.

4 () Évolution des autorisations d’engagement des crédits de la mission « relations avec les collectivités territoriales », à périmètre courant, entre les lois de finances initiales pour 2008 et 2009, ainsi qu’entre la loi de finances initiale pour 2009 et le projet de loi de finances pour 2010.

5 () Calcul effectué en excluant du montant des prélèvements sur recettes pour 2010 les crédits exceptionnels destinés à la compensation-relais de la taxe professionnelle.

6 () Moyenne annuelle de l’indice des prix à la consommation calculé par l’INSEE pour les années 2005 à 2008 et, pour l’année 2009, prévision d’inflation inscrite au projet de loi de finances pour 2010.

7 () Selon les éléments communiqués à votre rapporteur par le ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités locales (DGCL), les crédits de paiement de la mission devraient passer, à périmètre constant, de 2,34 milliards d’euros en 2009 à 2,23 milliards d’euros en 2010, soit une baisse de 4,6 %. Le document remis par le Gouvernement aux membres du Comité des finances locales le 29 septembre dernier parvenait, pour sa part, à une progression de 1,5 % de ces mêmes crédits à périmètre constant !

8 () Projet de loi de finances pour 2010.

9 () Total incluant la DGD de droit commun des régions, la DGD de la collectivité territoriale de Corse et la DGD du Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF).

10 () Passeport biométrique ou carte nationale d’identité électronique.

11 () Prévision actualisée.

12 () Prévision.

13 () Au cours des dix dernières années, à législation constante et en euros courants, les bases de la taxe d’habitation et de la taxe sur les propriétés foncières bâties ont augmenté régulièrement d’environ 3,5 % par an, contre 1,4 % par an pour celles de la taxe sur les propriétés foncières non bâties.

14 () Près des trois quarts du produit des DMTO affectés aux collectivités locales est perçu par les départements, par le biais de la taxe départementale de publicité foncière, du droit départemental d’enregistrement et de la taxe additionnelle aux droits de mutation.

15 () Intérêts de la dette compris.

16 () Remboursements de la dette compris.

17 () Loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009 (article 1er, qui a modifié l’article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales).

18 () Loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion.

19 () Le droit à compensation antérieur des départements au titre du RMI a été complété, depuis le mois de juillet 2009, par une compensation supplémentaire au titre de la prise en charge des personnes qui bénéficiaient de l’allocation parent isolé, à hauteur de 322 millions d’euros pour 2009. Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit exceptionnellement, pour maintenir ce niveau de compensation, de neutraliser la diminution de 45 millions d’euros qu’entraînerait la stricte application des règles de compensation qui avaient été fixées en loi de finances initiale pour 2009.

20 () Prévisions.

21 () Le montant de la compensation financière, inscrit en loi de finances initiale pour 2009 au titre des transferts de personnel intervenus depuis 2006, s’élève à 2,68 milliards d’euros pour les personnels techniques, ouvriers et de service (TOS) du ministère chargé de l’éducation nationale et à 0,89 milliard d’euros pour les personnels du ministère chargé de l’équipement et des transports.

22 () Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

23 () Régions d’outre-mer comprises.

24 () Total intégrant également les charges compensées au Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF), à hauteur de 126,6 millions d’euros.

25 () Dont 545,7 millions d’euros au titre du financement des écoles et instituts de formation des professions paramédicales et de sages-femmes

26 () Ratio épargne brute/dépenses réelles d’investissement (estimations à partir des budgets primitifs des collectivités locales pour l’évolution 2008-2009).

27 () Les ressources, emprunts compris, doivent donc être au moins égales aux dépenses (dans lesquelles est inclus le remboursement annuel du capital emprunté). L’article L. 1612-14 du code général des collectivités territoriales autorise en revanche une exécution déficitaire, dans la limite de 5 à 10 % des recettes de fonctionnement selon la taille de la collectivité concernée.

28 () En comptabilité nationale, l’excédent ou le déficit public correspond à l’écart entre les recettes (emprunt exclu) et les dépenses (remboursement du capital emprunté exclu).

29 () Établissements publics de coopération intercommunales.

30 () Cet alinéa prévoit notamment que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources », tout en renvoyant à une loi organique le soin de préciser les conditions d’application de cette règle.

31 () Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République.

32 () Loi organique n° 2004-758 du 29 juillet 2004 prise en application de l’article 72-2 de la Constitution relative à l’autonomie financière des collectivités territoriales.

33 () Selon l’Association des régions de France (ARF), dont votre rapporteur a entendu le président, notre collègue Alain Rousset, les régions n’ont, en revanche, guère eu recours aux produits financiers structurés. La crise financière aurait donc, les concernant, eu un impact limité, obligeant seulement certaines d’entre elles à différer certains emprunts.

34 () Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

35 () Décret n° 2008-1078 du 22 octobre 2008 portant création du comité pour la réforme des collectivités locales.

36 () Rapport d’information (n° 1 153), présenté le 8 octobre 2008 par nos collègues Didier Quentin et Jean-Jacques Urvoas, au nom de la commission des Lois, sur la clarification des compétences des collectivités territoriales.

37 () Rapport précité du 8 octobre 2008 (p.82).

38 () Au 1er janvier 2009, la France compte 36 686 communes, c’est-à-dire plus de quatre fois plus que les pays européens de taille comparable.

39 () Le rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales propose que la loi érige directement en métropole les onze intercommunalités les plus peuplées (population supérieure ou égale à 400 000 habitants), c’est-à-dire les communautés urbaines de Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice et Strasbourg, ainsi que les communautés d’agglomération de Rouen, Toulon et Rennes.

40 () « Les relations entre l’Etat et les collectivités locales », rapport du groupe de travail présidé par le sénateur Alain Lambert dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, novembre 2007.

41 () M. Pierre Richard, « Solidarité et performance, les enjeux de la maîtrise des dépenses publiques locales », décembre 2006.

42 () Les modalités de création et d’administration des syndicats mixtes ouverts sont codifiées à l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales, qui précise notamment les règles de répartition des sièges au sein du comité syndical en l’absence de dispositions statutaires spécifiques. L’article 6.2 des statuts du syndicat mixte « Paris métropole » prévoie que toutes les personnes morales qui en sont membres participent au comité syndical.

43 () Rapport d’information (n° 1784) de la commission des Lois sur l’efficacité péréquatrice des dotations versées aux collectivités territoriales, présenté par M. Manuel Aeschlimann et enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 25 juin 2009.

44 () Rapport d’information (n° 1859) de la commission des Finances sur les relations financières entre l’Etat et les collectivités territoriales, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 21 juillet 2009 et présenté par MM. Jean-Pierre Balligand et Marc Laffineur.

45 () La logique de compétitivité économique, justifiant le choix de soumettre ce projet au Parlement, a bien été explicitée devant les Français par Président de la République, le 5 février 2009 : « On supprimera la taxe professionnelle dès 2010, parce que je veux que l’on garde nos usines en France ».

46 () Communiqué publié conjointement, le 24 février 2009, par l’Association des maires de France (AMF), l’Association des maires de grandes villes de France (AMGVF), l’Association des maires des petites villes de France (APVF), la Fédération des maires des villes moyennes (FMVM), l’Association des maires ruraux de France (AMRF), l’Association des villes et banlieues de France (AVBF), l’Association des communautés urbaines de France (ACUF), l’Assemblée des communautés de France (ADCF) et l’Association des maires d’Ile-de-France (AMIF).

47 () Les autres ressources transférées par l’Etat seraient constituées du solde de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA), de la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom), d’une fraction des frais de gestion perçus par l’Etat sur le produit des impôts directs locaux, ainsi que du reliquat de droits de mutation à titre onéreux actuellement affecté au budget général de l’Etat.

48 () Dotation de développement rural (DSR), dotation globale d’équipement (DGE), dotation de développement urbain (DDU) et, surtout, au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF), les sept dotations suivantes : dotation de solidarité urbaine (DSU), dotation de solidarité rurale (DSR), dotation nationale de péréquation (DNP), dotation d’intercommunalité, dotation de péréquation urbaine (DPU), dotation de fonctionnement minimal (DFM) et dotation de péréquation des régions.

49 () Fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), Fonds de solidarité de la région Ile-de-France (FSRIF) et dotation de solidarité communautaire (DSC).

50 () Réduction pour création d’établissement comprise.

51 () L’association des maires de France (AMF), sollicitée pour une audition, a préféré adresser au rapporteur une contribution écrite en réponse aux questions qu’il projetait de poser à ses représentants.