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N
° 1967

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2009

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 27

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

Rapporteur spécial : Mme Béatrice PAVY

Député

____

SYNTHÈSE 5

I.– UNE ADMINISTRATION D’ÉTAT-MAJOR PILOTE D’UNE POLITIQUE INTERMINISTÉRIELLE 7

A.– L’EFFORT FINANCIER DE L’ÉTAT EN 2010, REFLET DES RÉALITÉS MIGRATOIRES ET DES PRIORITÉS DE LA MISSION IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION 7

1.– Un rebasage des crédits par rapport à la loi de programmation triennale 7

2.– Les priorités de la mission pour 2010 9

B.– UNE ADMINISTRATION PILOTE OPÉRANT EN SYNERGIE AVEC LES AUTRES DÉPARTEMENTS MINISTÉRIELS 9

1.– Les délégations de gestion : un outil nécessaire 9

2.– Le document de politique transversale : pour une vision d’ensemble de la politique d’immigration, d’asile et d’intégration 11

II.– LE PROGRAMME 303 IMMIGRATION ET ASILE : UNE DOTATION QUI RESTE TRIBUTAIRE DE L’ÉVOLUTION DE LA DEMANDE D’ASILE 13

A.– CIRCULATION DES ÉTRANGERS ET POLITIQUE DES VISAS : LE DÉPLOIEMENT DES VISAS BIOMÉTRIQUES 13

1.– Le développement de la biométrie dans un cadre concerté au niveau européen : les vertus du VIS 13

2.– La poursuite du rééquilibrage en faveur de l’immigration économique 17

B.– GARANTIE DE L’EXERCICE DU DROIT D’ASILE : UN ABONDEMENT SUBSTANTIEL POUR FAIRE FACE À LA MONTÉE DES DEMANDES 18

1.– La demande d’asile : une variable difficilement prévisible 18

2.– Le traitement de la demande d’asile : déconcentration de l’admission au séjour et renforcement du dispositif d’accueil 21

a) La régionalisation de l’admission au séjour : une généralisation de l’expérimentation 21

b) L’hébergement et l’accompagnement social des demandeurs d’asile : un effort qui se poursuit avec la création de 1 000 places en CADA et l’abondement de l’ATA 22

c) L’OFPRA : opérateur dédié du ministère 25

d) Le rattachement de la CNDA au Conseil d’État 27

C.– L’ACTION LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE DEMEURE UNE PRIORITÉ DU MINISTÈRE 28

1.– Les lieux de rétention et d’attente : une clarification des compétences en faveur du MIIINDS 28

2.– L’éloignement des étrangers en situation irrégulière : le renseignement d’un coût quasi complet des reconduites 31

D.– L’ACTION SOUTIEN : UN RÉAJUSTEMENT DES DÉPENSES DE PERSONNEL 34

III.– LES CRÉDITS DU PROGRAMME 104 INTÉGRATION ET ACCÈS À LA NATIONALITÉ FRANÇAISE : UN RENFORCEMENT DE L’OFFICE FRANÇAIS DE L’IMMIGRATION ET DE L’INTÉGRATION 35

A.– DES ACTIONS NATIONALES D’ACCUEIL DES ÉTRANGERS PRIMO-ARRIVANTS ET DE FORMATION LINGUISTIQUE PORTÉES PAR L’OFII 35

B.– LES ACTIONS D’INTÉGRATION DES ÉTRANGERS EN SITUATION RÉGULIÈRE ET DES RÉFUGIÉS : DES DISPOSITIFS NÉCESSAIRES 40

C.– L’AIDE AU RETOUR ET À LA RÉINSERTION : UN DISPOSITIF QUI TARDE À SE CONCRÉTISER 41

D.– L’ACTION NATURALISATION ET ACCÈS À LA NATIONALITÉ : LA RÉFORME DE L’INSTRUCTION DES DEMANDES 42

EXAMEN EN COMMISSION 45

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 47

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, seulement 65 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial. L’an dernier, à la même date, ce taux était de 94 %. Par conséquent, le Rapporteur spécial ne peut qu’enjoindre au ministère de respecter le délai organique à l’avenir.

SYNTHÈSE

Les crédits demandés pour 2010 au titre de la mission Immigration, asile et intégration atteignent 568,8 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 560,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP), des montants témoignant d’une hausse substantielle respective de + 12 % et + 9,7 % par rapport aux crédits initiaux pour 2009.

Une telle revalorisation, excédant le plafond prévu par la loi de programmation triennale à hauteur d’environ 11 % en AE et 9 % en CP, s’explique notamment par :

– un rebasage des crédits compte tenu de l’évolution de la demande d’asile, laquelle poursuit une tendance à la hausse. Ayant fortement augmenté en 2008 de 19,7 %, elle a progressé de 16,5 % au premier semestre 2009, invalidant de fait les hypothèses sur lesquelles reposait la loi de programmation des finances publiques ;

– le transfert du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales vers le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire de la compétence en matière immobilière pour les centres de rétention administrative (CRA) ;

– une évolution des crédits de personnel du titre 2 du fait d’un réajustement de la masse salariale du ministère.

En 2010, le dispositif national d’accueil devrait se voir renforcé par la création de 1 000 places supplémentaires en centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA), ce dont le Rapporteur spécial se réjouit.

Par ailleurs, le ministère poursuit l’expérimentation de la régionalisation en matière d’admission au séjour en faisant de l’Office national de l’immigration et de l’intégration (OFII) le pilote du dispositif au niveau national. En outre, celui-ci doit conclure son premier contrat d’objectifs et de moyens d’ici la fin de l’année.

Le Rapporteur spécial constate que les crédits alloués à l’hébergement d’urgence seraient reconduits à leur niveau de l’année précédente, soit 30 millions d’euros. Or l’analyse des budgets antérieurs montre que le dispositif souffre d’une sous-budgétisation chronique qui appelle systématiquement des mesures d’abondement en gestion. Par conséquent, il conviendrait d’opérer un rebasage de ces crédits dès la loi de finances initiale.

La salle d’audience aménagée dans la zone d’attente des personnes en instance de Roissy reste inutilisée. Aussi le Rapporteur spécial renouvelle-t-il son observation de l’an dernier. Si une telle situation devait perdurer, il faudrait envisager une réaffectation de cette salle à d’autres usages, comme l’accueil de mineurs isolés.

Le Rapporteur spécial souhaite également voir se dénouer dans les meilleurs délais la procédure d’appel à projets pour assistance aux étrangers en CRA. Entamée en août 2008 elle a connu de multiples rebondissements juridiques jusqu’à la suspension de l’exécution des contrats en mai 2009. Il conviendra, le cas échéant, d’indemniser les candidats initialement retenus et qui avaient commencé à engager d’importants moyens humains et financiers.

Enfin, le Rapporteur spécial se félicite que le ministère ait fait procéder à une étude quasi-exhaustive du coût d’un éloignement, répondant ainsi à la demande de nombreux parlementaires.

I.– UNE ADMINISTRATION D’ÉTAT-MAJOR PILOTE D’UNE POLITIQUE INTERMINISTÉRIELLE

A.– L’EFFORT FINANCIER DE L’ÉTAT EN 2010, REFLET DES RÉALITÉS MIGRATOIRES ET DES PRIORITÉS DE LA MISSION IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

1.– Un rebasage des crédits par rapport à la loi de programmation triennale

Le présent projet de loi de finances (PLF) propose de doter (1) la mission Immigration, asile et intégration de 568,8 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 560,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP), des montants témoignant d’une augmentation respective de + 12 % et + 9,7 % par rapport aux crédits initiaux pour 2009.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

(en euros)

Programme/Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes
en LFI
pour 2009

Demandées pour 2010

Évolution
(en %)

Ouverts
en LFI
pour 2009

Demandés pour 2010

Évolution
(en %)

303. Immigration et asile

434 696 353

488 957 704

+ 12,5

437 496 353

480 557 704

+ 9,8

Circulation des étrangers et politique des visas

2 600 000

2 600 000

=

2 600 000 

2 600 000

=

Garantie de l’exercice du droit d’asile

289 100 000

318 070 760

+ 10

289 100 000

318 070 760

+ 10

Lutte contre l’immigration irrégulière

80 800 000

104 384 240

+ 29

80 800 000

94 384 20

+ 17

Soutien

62 196 353

63 902 704

+ 2,7

64 996 353

65 502 704

+ 1

104. Intégration et accès à la nationalité française

73 108 092

79 845 000

+ 9,2

73 108 092

79 845 000

+ 9,2

Actions nationales d’accueil des étrangers primo arrivants et formation linguistique (libelle modifié)

10 303 592

15 000 000

+ 45,6

10 303 592

15 000 000

+ 45,6

Actions d’intégration des étrangers en situation régulière et des réfugiés (libellé modifié)

59 504 500

61 345 000

+ 3

59 504 500

61 345 000

+ 3

Aide au retour et à la réinsertion

1 500 000

1 500 000

=

1 500 000

1 500 000

=

Naturalisation et accès à la nationalité

1 800 000

2 000 000

+ 11

1 800 000

2 000 000

+ 11

TOTAL MISSION

507 804 445

568 802 704

+ 12

510 604 445

560 402 704

+ 9,7

Source : Projet annuel de performances 2010.

Rappelons que, aux termes de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2011, les crédits consacrés à la mission Immigration, asile et intégration devaient connaître l’évolution suivante, les plafonds étant fermes pour la mission, mais indicatifs au niveau des programmes la constituant.

PROGRAMMATION TRIENNALE DE LA MISSION

(en euros)

Mission/Programme

 

PLF 2009

2010

2011

Immigration, asile et intégration

Plafond AE

511 038 836

512 896 349

508 628 080

Plafond CP

513 838 836

514 496 349

508 628 080

Immigration et asile

AE

433 238 836

432 896 349

428 428 080

CP

436 038 836

434 496 349

428 428 080

Intégration et accès à la nationalité française

AE

77 800 000

80 000 000

80 200 000

CP

77 800 000

80 000 000

80 200 000

On note donc que le plafond « ferme » pour la mission a en réalité fait preuve de souplesse. Ainsi, l’écart entre le montant d’AE programmés et celui proposé dans le présent projet atteint près de 11 % (+ 10,9 %, soit 55,9 millions d’euros) tandis que la différence entre les CP est de + 9 % environ (+ 8,9 %, soit 45,9 millions d’euros).

Un tel abondement de crédits par rapport à la loi de programmation des finances publiques s’explique par :

– un rebasage des crédits tenant compte de l’évolution de la demande d’asile, réévaluation dont le Rapporteur spécial se félicite puisqu’elle devrait permettre d’éviter des mouvements trop importants en gestion comme les années précédentes. Ainsi, les crédits relatifs à l’allocation temporaire d’attente (ATA) et la subvention pour charges de service public de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) connaîtraient une croissance en rapport avec la progression observée de la demande d’asile (+ 16,5 % au premier semestre 2009 après les + 19,7 % observés en 2008), laquelle invalide les hypothèses sur lesquelles reposait la loi de programmation des finances publiques ;

– le transfert du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales vers le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire (MIIINDS) de la compétence en matière immobilière pour les centres de rétention administrative (CRA) ;

– une évolution des crédits de personnel du titre 2 du fait d’un réajustement de la masse salariale du MIIINDS.

2.– Les priorités de la mission pour 2010

Les priorités poursuivies par la mission Immigration, asile et intégration se déclinent selon les axes suivants :

– maîtriser les flux migratoires, un objectif dont la réalisation est poursuivie via deux principes d’action majeurs. D'une part le renforcement des efforts dans la lutte contre l’immigration illégale (notamment les filières), le travail illégal et les fraudes. D'autre part, une meilleure organisation de l'immigration légale afin notamment de rééquilibrer les flux migratoires au profit de l’immigration professionnelle ;

– conduire une politique d’intégration fondée sur l’institution d’un véritable parcours individuel d’intégration pendant les cinq premières années de la présence régulière de l’étranger en France. L’intégration des migrants en situation régulière repose, dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration (CAI), sur l’apprentissage de la langue française et sur un accompagnement adapté favorisant l’accès à l’emploi et au logement ;

– conforter la politique séculaire d’accueil des réfugiés politiques, dans le respect de la tradition républicaine de l’asile ;

– poursuivre une politique de concertation avec les pays d'émigration, notamment au moyen d'accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire avec ces pays. Les actions menées dans ce cadre étant entreprises en complément de celles relevant de la présente mission puisqu’elles sont rattachées budgétairement au programme 301 Développement solidaire et migrations de la mission Aide publique au développement. Pour un commentaire détaillé des actions conduites à ce titre, on se reportera au rapport spécial de notre collègue Henri Emmanuelli (2).

B.– UNE ADMINISTRATION PILOTE OPÉRANT EN SYNERGIE AVEC LES AUTRES DÉPARTEMENTS MINISTÉRIELS

1.– Les délégations de gestion : un outil nécessaire

Le ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire (MIIINDS) se définit principalement comme une administration « d’état-major » dont la mission est de concevoir et de piloter une politique publique.

De fait, la mise en œuvre de cette politique est largement assurée par des services opérationnels extérieurs au MIIINDS : services déconcentrés d'autres ministères (préfectures, ambassades et postes consulaires, police nationale, gendarmerie nationale, direction du Travail et de la formation professionnelle, direction des Affaires sanitaires et sociales, etc.), opérateurs (OFPRA (3), OFII (4) notamment), autres organismes (plates formes associatives d’aide aux demandeurs d’asile par exemple). Ainsi, le ministère a conclu plusieurs conventions de délégations de gestion avec les différents ministères concernés (ministères de l’Intérieur, de la Défense, des Affaires étrangères et ministères chargés des affaires sociales et des finances).

● En matière de gestion des personnels

La loi de finances 2008 avait autorisé le transfert de 509 emplois des ministères partenaires, répartis en 140 équivalents temps plein travaillé (ETPT) du ministère des Affaires étrangères et européennes, 110 ETPT du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, 239 ETPT du ministère de la Santé, de la jeunesse et des sports, ainsi que 20 ETPT du ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État. Elle avait également permis la création de 100 nouveaux emplois pour compléter les effectifs.

Toutefois, cette redistribution des personnels ne s’est pas accompagnée de la création de corps propres à la nouvelle administration. Le MIIINDS et les départements ministériels partenaires sont ainsi convenus de partager la gestion des agents en réservant aux ministères d’origine les actes de gestion à portée statutaire ou ceux faisant intervenir les commissions administratives paritaires et en confiant tous les autres actes de gestion de proximité au MIIINDS.

De fait, quatre conventions générales de délégation de gestion des personnels ont été signées avec les ministères partenaires : le 10 juillet 2008 avec les ministères sociaux, le 4 février 2008 avec le ministère de l’Intérieur, le 21 mai 2008 avec le MAEE et le 6 janvier 2008 avec les ministères économique et financier. En outre, une délégation de gestion a été signée le 14 avril 2009 avec l’INSEE, concernant 4 agents.

Ces dispositions autorisent en particulier le ministère gestionnaire à prélever les crédits nécessaires aux rémunérations des agents sur les budgets opérationnels de programme sur le titre 2 du programme 303.

● En matière de soutien

Au sens du décret n° 2004-1085 du 14 octobre 2004, plusieurs conventions de délégation de gestion concernant la mise à disposition de locaux (charges immobilières) et les soutiens logistique, bureautique et informatique ont été conclues entre le MIIINDS et les ministères partenaires.

● En matière de gestion des crédits de rétention administrative et d'éloignement des étrangers en situation irrégulière

Plus spécifiques, ces conventions de délégation de gestion précisent les conditions de gestion effective des mesures confiées à la direction générale de la police nationale d'une part et à la gendarmerie nationale d'autre part, la lutte contre l’immigration irrégulière relevant en grande partie de l’action de ces différents services.

En revanche, comme indiqué précédemment, le MIINDS reprendra, au 1er janvier 2010, les compétences immobilières relatives aux CRA actuellement dévolues au ministère de l'Intérieur. L'article R. 553-9 du code de l’entrée séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) (5) qui exclut aujourd'hui cette compétence, est en voie d'être modifié en ce sens.

2.– Le document de politique transversale : pour une vision d’ensemble de la politique d’immigration, d’asile et d’intégration

Rappelons qu’un document de politique transversale (DPT) consacré à la Politique française de l’immigration et de l’intégration est désormais transmis chaque année au Parlement dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances. Ce document, essentiel à l’appréciation globale de la politique d’immigration et d’intégration, avait été obtenu à l’initiative de notre collègue sénateur André Ferrand, qui avait déposé un amendement en ce sens au projet de loi de finances pour 2008.

Dix ministères participent à la mise en œuvre de cette politique, via quinze programmes répartis dans onze missions différentes au sein du budget général de l’État.

ÉVALUATION DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA POLITIQUE TRANSVERSALE

(en euros)

 

Numéro et intitulé du programme ou de l’action

Exécution 2008

LFI 2009

PLF 2010

   

AE

CP

AE

CP

AE

CP

151

Français à l’étranger et affaires consulaires

50 962 443

50 962 443

38 846 042

38 846 042

38 593 746

38 593 746

03

Instruction des demandes de visas

50 962 443

50 962 443

38 846 042

38 846 042

38 593 746

38 593 746

165

Conseil d’État et autres juridictions administratives

0

15 970 618

24 553 411

20 688 295

28 635 745

20 258 828

07

Cour nationale du droit d’asile

0

15 970 618

24 553 411

20 688 295

28 635 745

20 258 828

224

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

7 324 000

7 511 000

7 170 000

7 485 000

6 741 000

6 741 000

02

Soutien à l’éducation artistique et culturelle

2 732 000

2 655 000

2 649 000

2 649 000

2 741 000

2 741 000

04

Actions en faveur de l’accès à la culture

4 592 000

4 856 000

4 521 000

4 836 000

4 000 000

4 000 000

104

Intégration et accès à la nationalité française

143 286 596

142 092 608

73 108 092

73 108 092

79 845 000

79 485 000

11

Actions nationales d’accueil des étrangers primo-arrivants et de formation linguistique (libellé modifié)

9 358

9 358

10 303 592

10 303 592

15 000 000

15 000 000

12

Actions d’intégration des étrangers en situations régulière et des réfugiés (libellé modifié)

124 350 659

124 326 757

59 504 500

59 504 500

61 345 000

61 345 000

13

Aide au retour et à la réinsertion

80 000

80 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

14

Naturalisation et accès à la nationalité française

1 865 152

1 865 152

1 800 000

1 800 000

2 000 000

2 000 000

15

Soutien du programme « intégration et accès à la nationalité »

16 981 427

15 811 351

0

0

0

0

303

Immigration et asile

455 740 831

441 681 058

434 696 353

437 496 353

488 957 704

480 557 704

01

Circulation des étrangers et politiques des visas

778

478

2 600 000

2 600 000

2 600 000

2 600 000

02

Garantie de l’exercice du droit d’asile

340 333 005

340 090 783

289 100 000

289 100 000

318 070 760

318 070 760

03

Lutte contre l’immigration irrégulière

75 737 826

73 573 535

80 800 000

80 800 000

104 384 240

94 384 240

04

Soutien

39 669 220

28 016 262

62 196 353

64 996 353

63 902 704

65 502 704

101

Accès au droit et à la justice

5 776 261

5 776 261

8 900 000

8 900 000

9 000 000

9 000 000

01

Aide juridictionnelle

5 776 261

5 776 261

8 900 000

8 900 000

9 000 000

9 000 000

150

Formations supérieures et recherche universitaire

723 190 480

723 190 480

1 575 150 000

1 575 150 000

1 575 150 000

1 575 150 000

183

Protection maladie

513 069 819

513 065 757

490 000 000

490 000 000

535 000 000

535 000 000

02

Aide médicale de l’État

513 069 819

513 065 757

490 000 000

490 000 000

535 000 000

535 000 000

152

Gendarmerie nationale

68 131 562

66 591 825

67 544 819

67 507 269

71 010 575

69 967 677

01

Ordre et sécurité publics

68 131 562

66 591 825

67 544 819

67 507 269

71 010 575

69 967 677

176

Police nationale

609 823 189

609 652 637

609 820 773

610 036 773

612 565 391

612 565 391

04

Police des étrangers et sûreté des transports internationaux

609 823 189

609 652 637

609 820 773

610 036 773

612 565 391

612 565 391

155

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

14 469 875

13 882 347

14 469 875

13 882 347

16 681 781

16 463 728

02

Gestion du programme « accès et retour à l’emploi »

7 725 460

7 725 460

7 725 460

7 725 460

9 515 802

9 515 802

04

Gestion du programme « amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail »

1 827 661

1 827 661

1 827 661

1 827 661

2 669 153

2 669 153

05

Soutien

4 916 754

4 329 226

4 916 754

4 329 226

4 496 806

4 278 773

147

Politique de la ville

0

0

40 000 000

40 000 000

60 000 000

60 000 000

01

Prévention et développement social

0

0

40 000 000

40 000 000

60 000 000

60 000 000

307

Administration territoriale (libellé modifié)

97 650 790

97 650 790

96 485 354

96 485 354

98 147 500

98 147 500

02

Garantie de l’identité et de la nationalité, délivrance de titres

97 650 790

97 650 790

96 485 354

96 485 354

98 147 500

98 147 500

TOTAUX

2 689 425 846

2 688 027 824

3 480 744 719

3 479 585 525

3 620 328 422

3 602 290 574

Source : Document de politique transversale pour 2010.

II.– LE PROGRAMME 303 IMMIGRATION ET ASILE : UNE DOTATION QUI RESTE TRIBUTAIRE DE L’ÉVOLUTION DE LA DEMANDE D’ASILE

A.– CIRCULATION DES ÉTRANGERS ET POLITIQUE DES VISAS : LE DÉPLOIEMENT DES VISAS BIOMÉTRIQUES

1.– Le développement de la biométrie dans un cadre concerté au niveau européen : les vertus du VIS

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, il est proposé de reconduire à leur niveau de 2009 les crédits de l’action n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas, soit 2,6 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP).

Rappelons que l’action est mise en œuvre par la sous-direction des visas du MIIINDS. À ce titre, elle supervise l’activité des services des visas des postes diplomatiques et consulaires français, lesquels auront traité quelque 2,3 millions de demandes en 2008.

ÉVOLUTION DES DEMANDES DE VISAS 2004-2009

 

2004

2005

2006

2007

2008

1er semestre 2009

Total des demandes

2 514 429

2 411 370

2 344 617

2 350 706

2 336 779

1 053 403

Refus de visas

391 410

307 575

250 476

240 233

224 991

106 336

Taux de refus

15,6 %

12,8 %

10,7 %

10,4 %

9,6 %

10,1 %

Total des délivrances

2 059 460

2 051 334

2 038 888

2 070 705

2 069 531

919 749

Source : Ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire

Notons que le taux de refus global masque des réalités très hétérogènes. Les écarts entre pays soulignent des différences considérables, le taux de refus pouvant ainsi varier de 2,5 % en Russie à 20 ou 30 % pour certains pays du continent africain.

Priorité de la sous-direction des visas, le déploiement de la biométrie dans les ambassades et consulats, entamé en 2005, se poursuit. En 2008, près d’un tiers des visas délivrés auront été des visas biométriques.

ÉVOLUTION DU NOMBRE ET DE LA NATURE DES VISAS DÉLIVRÉS

 

2005

2006

2007

2008

Nombre d’ambassades et de consulats équipés

5

20

19

57

Nombre de visas biométriques délivrés

61 698

93 545

347 486

599 623

Pourcentage de visas biométriques par rapport à l’ensemble des visas délivrés

3 %

4,6 %

16,8 %

29 %

Source : MIIINDS

Au terme de l’année 2009, 63 nouveaux postes devaient être équipés, ce qui devrait porter le taux de délivrance des visas biométriques à près de 50 % en fin d’année.

En 2010 et 2011, il restera à équiper 32 ambassades ou consulats qui traitent environ la moitié des visas délivrés (6). La poursuite du programme reposera sur l’externalisation de la biométrie, prévue pour débuter à la mi-2010 dans les trois consulats généraux d’Alger, Istanbul et Londres. Ces trois postes traitent ensemble environ 300 000 demandes de visas par an, soit quelque 15 % de la demande mondiale. Si cette expérimentation est concluante, la biométrie pourra être déployée dans les postes diplomatiques en Russie (7) et en Chine (8).

Parallèlement, les travaux de développement du système européen d’information sur les visas (VIS), qui a fait l’objet du règlement CE n° 767/2008 du 9 juillet 2008 du Parlement européen et du Conseil, se poursuivent. Celui-ci a pour a objectif de collecter, transférer, stocker et traiter les données, notamment biométriques, relatives à tous les dossiers, visas accordés ou refusés, par les États de l’Union européenne. Il doit contribuer à l’amélioration de la délivrance des visas et, indirectement, permettre de renforcer la sécurité intérieure de chaque État membre et la lutte contre le terrorisme.

L’architecture du VIS comporte un système central « C-VIS », en cours de réalisation sous la maîtrise d’œuvre de la Commission européenne, et, pour chaque État membre, un système « N-VIS » spécifique d’interface du C-VIS avec son système national de traitement informatique des demandes de visas et d’enregistrement des données biométriques.

Le calendrier actuel prévoit une première étape de mise en œuvre du VIS vers le milieu de l’année 2010 avec l’entrée en fonction du système central et le raccordement des représentations des États membres dans les pays d’Afrique du nord. La généralisation de la connexion au VIS de l’ensemble des représentations consulaires des États membres s’effectuera ensuite en plusieurs étapes, chacune correspondant à une extension à une zone géographique donnée.

En 2009, le MIIINDS avait alloué un budget de 2,2 millions d’euros au déploiement de la biométrie (équipements matériels et logiciels, l’installation dans les ambassades et les consulats). Pour 2010, le ministère de l’immigration prévoit un budget de 400 000 euros pour l’expérimentation de l’externalisation du recueil des données biométriques dans les consulats d’Alger, Istanbul et Londres, et 750 000 euros pour renforcer l’équipement des ambassades et consulats déjà équipés.

Le ministère s’attache à mettre en œuvre la biométrie à effectifs constants nonobstant la charge supplémentaire que représente le recueil des données biométriques. De fait, il apparaît nécessaire de pouvoir externaliser cette tâche dans les ambassades et consulats traitant un grand nombre de demandes de visas, principalement en Russie, Chine et Inde.

Soulignons que, pour la collecte des dossiers, des centres communs de « co-externalisation » ont pu être mis en place avec d’autres États membres de l’Espace Schengen notamment à Alger, en Inde (Bombay (9), New Delhi (10), Pondichéry (11)) et en Russie (12) (Ekaterinbourg, Saint-Pétersbourg). Cette co-externalisation pourrait être étendue au recueil des données biométriques.

L’EXTERNALISATION DES TÂCHES ANNEXES
À LA DÉLIVRANCE DES VISAS

Principes de l’externalisation

L’externalisation des tâches annexes à l’instruction des demandes de visa s’inscrit dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (mesure n° 164) ; elle est mise en œuvre conjointement par le ministère de l’Immigration et le ministère des Affaires étrangères et européennes (MAEE).

Pour l’heure, trois niveaux d’externalisation sont mis en œuvre dans le réseau consulaire :

– le premier niveau se limite à l’externalisation de l’accueil téléphonique des usagers et de la prise de rendez-vous pour déposer une demande de visa ;

– le deuxième niveau comprend notamment l’externalisation de la collecte des dossiers (vérification que le dossier contient toutes les pièces exigées par le consulat : formulaire de demande rempli et signé, document de voyage en cours de validité, photos aux normes, justificatifs de l’objet du voyage, justificatifs de ressources, etc.), l’encaissement des frais de dossier, la restitution, sous enveloppe fermée, du document de voyage avec ou sans le visa sollicité ;

– le troisième niveau comprend en plus la saisie informatique sécurisée du contenu du formulaire de demande de visa.

L’externalisation doit permettre une amélioration du service rendu :

– les demandeurs sont reçus dans des locaux adaptés par un personnel suffisamment nombreux, les délais d’attente sont réduits voire supprimés ;

– les services consulaires peuvent se consacrer à l’examen des dossiers, sans être mobilisés par des tâches de moindre valeur ajoutée comme la vérification de la simple présence de certains justificatifs ou la collecte des frais de dossiers. Ils peuvent ainsi dégager du temps pour un examen des documents produits et, le cas échéant, pour des entretiens individuels avec les requérants. Dans les pays à forte pression migratoire notamment, ils sont ainsi mieux à même de lutter contre les fraudes.

L’externalisation du recueil des données biométriques : l’expérimentation dans trois consulats

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a été saisie le 26 septembre 2008, conjointement par le MAEE et le MIIINDS, d’une demande d’avis relative à un projet de décret modifiant les articles R. 611-10 et R. 611-13 du CESEDA dans le but de pouvoir confier à des prestataires agréés le recueil des données biométriques des demandeurs de visa.

Le 13 mars 2009, la CNIL a sollicité, sous forme d’un questionnaire, un complément d’information sur ce projet de décret. Une réponse lui a été adressée par les deux ministères le 19 mai 2009.

La CNIL a examiné le dossier au cours de sa séance du 10 septembre 2009 et a rendu un avis favorable. Le dossier a ensuite été transmis au Conseil d'État.

Cette expérimentation sera menée dans les consulats généraux de France à Alger, Londres et Istanbul. En effet :

– d’une part, en raison du volume de la demande (117 284 demandes à Alger en 2008, 103 737 à Istanbul), deux de ces trois postes ont déjà mis en œuvre l’externalisation de certaines tâches, notamment la saisie informatique des données alphanumériques du formulaire de demande ; d’autre part, ces consulats sont soumis à une forte pression migratoire, ce qui rend d’autant plus nécessaire le recentrage des agents consulaires sur l’instruction proprement dite des demandes ;

– ces trois postes ne disposent pas des locaux qui leur permettraient d’accueillir les demandeurs dans de bonnes conditions de confort et de sécurité pour le recueil des données biométriques. Dans les trois cas, l’installation du dispositif de la biométrie dans de nouveaux locaux qui devraient être construits ne pourrait se faire qu’à un coût très élevé ;

– dans le cas de la Turquie, le prestataire auquel il a été fait appel serait à même d’installer une antenne à Izmir pour le recueil des données biométriques, ce qui éviterait un long déplacement aux usagers résidant dans cette région ;

– le chiffrement des données transmises par les réseaux locaux, indispensable pour l’externalisation de la biométrie, est autorisé dans les trois pays concernés ;

– enfin, ces postes sont géographiquement peu éloignés de la France, ce qui présente l’avantage de limiter le coût des missions qui pourront s’avérer nécessaires à la mise au point du dispositif.

Le bilan de l’expérimentation sera effectué début 2011. Une éventuelle extension à d’autres pays ne pourra être prévue qu’à l’issue de cette phase expérimentale et au vu des conditions de mise en œuvre qui pourraient être recommandées par la CNIL lors d’une nouvelle consultation.

Au total, le VIS permettra de fiabiliser la délivrance des visas et de lutter beaucoup plus efficacement contre l’immigration irrégulière. En effet, la consultation du VIS permettra :

– de vérifier, lors de l’instruction des demandes de visas, si le requérant s’est déjà vu délivrer ou refuser un ou plusieurs visas par des États Schengen ;

– de détecter les usurpations d’identité lors des contrôles aux frontières ou sur les territoires des États membres.

LE BUREAU D’APPUI EUROPÉEN EN MATIÈRE D’ASILE

Sur la base du projet de règlement portant création du Bureau d’appui européen (BAE), déposé par la Commission européenne en février 2009, les négociations au sein du Conseil de l'Union européenne ont débuté sous présidence tchèque et se poursuivent sous présidence suédoise. Le Parlement européen s'est prononcé en première lecture le 6 mai dernier et les négociations visant à parvenir à un accord en seconde lecture devraient commencer à l'automne, l'objectif étant d'aboutir d'ici la fin de l'année 2009. Le Pacte européen sur l'immigration et l'asile mentionne en effet cette échéance qui devrait être respectée compte tenu du fort engagement politique de l'ensemble des acteurs institutionnels européens s'agissant de la mise en œuvre concrète et rapide de cet organe de coopération pratique en matière d'asile.

Les négociations au sein du Conseil de l'Union européenne visant à l'instauration, d'ici 2012 au plus tard, d'une procédure d'asile unique n'ont pas encore débuté, la Commission européenne ayant retardé à plusieurs reprises la présentation du projet de directive modifiant la directive du Conseil du 1er décembre 2005 relative aux normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (dite « directive procédure »). La présentation de ce texte devait intervenir en octobre 2009. Pour autant, des consultations plus informelles entre experts des États membres visant à recueillir l'avis des délégations et à dégager de premières orientations ont été organisées sous l'égide de la Commission européenne.

2.– La poursuite du rééquilibrage en faveur de l’immigration économique

Le rééquilibrage de l’immigration en faveur de l’immigration économique est un engagement fort du Président de la République. La lettre de mission au ministre de l’Immigration invite ce dernier à porter cette forme d’immigration à 50 % du flux total des entrées à fin d’installation durable en France. Le retournement de conjoncture lié à la crise économique et financière actuelle pourrait provisoirement contrarier cet objectif.

Les dernières années ont vu se réaliser un rééquilibrage entre l'immigration familiale et l'immigration professionnelle. Ainsi, entre 2006 et 2008, les parts respectives de l'immigration familiale et de l'immigration professionnelle dans l'immigration durable (hors saisonniers et étudiants) sont passées de 81,2 % et 17,6 % à 65 % et 24,4 %.

Entre 2007 et 2008, s’est opérée une augmentation substantielle de + 33 % du flux d’immigration professionnelle « salarié ». Au premier semestre 2009, cette croissance est nettement plus modérée – inférieure à 5 % selon les premières estimations en raison d’une situation économique déprimée. Quant aux titres de séjour délivrés entre 2007 et 2008, on note une progression de 54,5 % de ceux accordés pour motifs professionnels avec quelque 27 994 titres délivrés sur ce fondement en 2008 contre 18 119 l’année précédente.

La carte de séjour « salarié en mission » a été délivrée à 1 839 ressortissants étrangers en 2008. Sur les sept premiers mois de l’année 2009, elle a bénéficié à 1 247 ressortissants étrangers contre 685 sur la même période en 2008, soit une progression de 82 %.

En revanche, la carte de séjour « saisonnier » accuse une nette baisse. Ainsi, sur les sept premiers mois de l’année 2009, elle avait été délivrée à 1 780 ressortissants étrangers contre 3 173 sur la même période en 2008, soit une diminution de 44 %. L’une des explications de cette diminution peut résider dans le fait que les employeurs agricoles recrutent habituellement les mêmes saisonniers d’année en année. Or, la carte étant triennale, ceux qui ont acquis la carte « saisonnier » l’année dernière n’ont pas eu besoin de solliciter un nouveau titre cette année.

La carte de séjour « compétences et talents » a été délivrée à 470 ressortissants étrangers en 2008. Sur les sept premiers mois de l’année 2009, elle a bénéficié à 326 ressortissants étrangers contre 112 sur la même période l’année précédente, soit une progression de 191 %.

Rappelons que le rééquilibrage des flux en faveur de l’immigration professionnelle passe également par des actions menées en amont en direction des étudiants étrangers. À ce titre, en 2008, 68 647 visas de long séjour pour études ont été délivrés à des ressortissants étrangers, soit une hausse de 12 % par rapport à 2007, ce qui a montre un regain de l’attractivité des études en France. Sur cinq ans, de 2004 à 2008, la hausse est de + 7,2 %.

B.– GARANTIE DE L’EXERCICE DU DROIT D’ASILE : UN ABONDEMENT SUBSTANTIEL POUR FAIRE FACE À LA MONTÉE DES DEMANDES

1.– La demande d’asile : une variable difficilement prévisible

Le Rapporteur spécial rappelle, à titre liminaire, que l’action n° 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile reste la plus dotée du programme 303, rassemblant près des deux tiers des crédits alloués à celui-ci (65 %). Atteignant 318 millions d’euros (AE=CP), la dotation à cette action serait revalorisée de 10 % par rapport à l’année précédente (289 millions d’euros), afin de répondre à la tendance haussière de la demande d’asile observée en 2008 (+ 19,7 % sur l’année) et au premier semestre 2009 (+ 16,5 %).

Le Rapporteur spécial ne peut que se féliciter d’une telle revalorisation, ayant souligné, à l’occasion de la loi de règlement pour 2008 (13) et au vu tant des délais de traitement devant l’OFPRA et la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) que de la croissance de la demande d’asile : « il paraît évident qu’un rebasage des crédits relatifs à la politique de l’asile s’avérera nécessaire dans le cadre du prochain projet de loi de finances ».

La baisse de la demande d'asile amorcée en 2005 s’était accélérée en 2006 (- 33 %) et poursuivie en 2007 mais à un moindre rythme (– 10 %). En 2008, la tendance s’est inversée : la demande d’asile ayant augmenté de près de 20 % par rapport à l’année 2007, avec 42 599 demandes enregistrées. Ce sont les demandes de mineurs accompagnants (+ 49 %) qui ont connu la plus forte augmentation, les réexamens et les premières demandes ayant également crû sur la période (respectivement + 17 % et + 14 %).

S’il est difficile d’opérer une évaluation fine a priori de l’évolution de la demande d’asile, celle-ci étant largement liée à des événements par nature difficilement prévisibles, la persistance de conflits armés (Afghanistan, Irak notamment), les risques géostratégiques et les conséquences de la crise économique et financière actuelle doivent sans doute amener à un rebasage pérenne des crédits afférents pour les années à venir. En tout état de cause, le Rapporteur spécial se félicite que le présent projet de loi de finances propose une croissance de la dotation, laquelle devrait permettre d’éviter des mouvements de crédits ultérieurs en gestion.

Si depuis 2006, les principaux pays de provenance restent globalement les mêmes – Turquie, Kosovo, Russie (Tchétchénie notamment), République démocratique du Congo (RDC), Sri Lanka et Arménie – la hiérarchie au sein de cette liste se trouve modifiée. Ainsi, après une baisse de la demande serbe et kosovare en 2007 et 2008 (- 8 %), celle-ci repart à la hausse au 1er semestre 2009, faisant de la zone Serbie-Kosovo (14) la première zone de provenance avec 1 601 premières demandes, soit un doublement par rapport à la même période l’année précédente (779 demandes). La Russie, premier pays de provenance au premier semestre de l’an dernier avec 1 057 demandes, présente une baisse de 20 % de celles-ci et devient ainsi la sixième zone de provenance sur les six premiers mois de 2009.

PRINCIPAUX PAYS DE PROVENANCE DES PRIMO-DEMANDEURS D’ASILE

(AU PREMIER SEMESTRE 2009)

Pays

Nombre de
primo-demandes d’asile

Serbie-Kosovo

1 601

Sri Lanka

1 301

Arménie

1 077

RDC

996

Turquie

887

Russie

848

Bangladesh

761

Chine

746

Guinée-Conakry

656

Mauritanie

618

Autres pays

6 353

Total

15 844

Source : MIIINDS

En 2008, la France devient à nouveau le premier pays destinataire de demandeurs d'asile en Europe, avec un nombre de demandes légèrement supérieur à celui observé au Royaume-Uni. Soulignons qu’en Grèce et en Suède, les demandes d'asile sont en baisse alors qu'elles avaient connu une forte augmentation l'année précédente.

PLACE DE LA FRANCE PARMI LES PAYS DE DESTINATION DES DEMANDES D’ASILE

(DONNÉES AU 31 DÉCEMBRE 2008)

Pays

2007

2008

Évolution 2008 / 2007

1. France

32 520

42 599

+ 19,9 %

2. Royaume-Uni

42 355

41 215

- 2,7 %

3. Allemagne

30 303

28 018

- 7,5 %

4. Suède

38 347

24 860

- 35,2 %

5. Grèce

26 735

20 000

- 25,2 %

6. Suisse

10 387

16 606

+ 59,9 %

7. Autriche

11 879

12 809

+ 7,8 %

8. Belgique

11 115

12 252

+ 10,2 %

Source : MIIINDS

2.– Le traitement de la demande d’asile : déconcentration de l’admission au séjour et renforcement du dispositif d’accueil

a) La régionalisation de l’admission au séjour : une généralisation de l’expérimentation

En juin 2006, à l’initiative du Comité interministériel de contrôle de l’immigration (CICI), une expérimentation visant à faire du préfet du département chef-lieu de région l’unique « point d’entrée » pour les primo-demandeurs d’asile de la région considérée avait été menée en Haute-Normandie et en Bretagne.

Quatorze arrêtés des ministres de l’Intérieur et de l’Immigration, publiés au Journal officiel les 19 et 20 mars 2009, pérennisent le dispositif dans six autres régions – Poitou-Charentes, Franche-Comté, Auvergne, Picardie, Limousin et Lorraine – et lancent une nouvelle expérimentation dans 8 nouvelles régions
– Nord-Pas-de-Calais, Bourgogne, Centre, Languedoc-Roussillon, Pays-de-la-Loire, Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur – pour une durée d’un an.

Cette réforme vise à mettre en cohérence l’organisation de l’accueil en préfecture des demandeurs d’asile et le rôle dévolu aux préfets de région par la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration quant à la gestion des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et de l’allocation temporaire d’attente (ATA).

Au terme de cette réforme, toutes les préfectures de chef-lieu de région seraient alors préfectures centralisatrices des demandes d’asile. Le préfet du département chef-lieu de région serait seul compétent pour délivrer ou refuser l’autorisation provisoire de séjour aux demandeurs d’asile, après prise d’empreintes sur la borne Eurodac, pour engager éventuellement une procédure de remise à un autre État membre en application du règlement « Dublin II » (15), ou pour faire une offre d’hébergement en CADA.

Des éléments de souplesse doivent toutefois être introduits dans le nouveau dispositif. Ainsi, du fait de l’importance des flux de demandes d’asile qui y sont accueillis, la région Île-de-France ne serait pas concernée par la centralisation. Par ailleurs, les régions Alsace, Midi-Pyrénées, PACA et Rhône-Alpes, qui accueillent également des flux significatifs, devraient compter deux préfectures centralisatrices afin de répartir la charge administrative entre deux pôles régionaux. Enfin, la région Corse, en raison de la faiblesse des flux de demandes d’asile sur son territoire, ne serait pas concernée par la réforme.

Les plates-formes associatives qui assuraient dans les départements une mission de premier accueil et d’accompagnement des demandeurs d’asile seraient progressivement supprimées au profit de plates-formes régionales gérées :

– par les directions territoriales de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) ;

– par une structure associative conventionnée par l’OFII dans le cadre d’une mise en concurrence préalable des associations, afin de garantir la qualité du service rendu et l’utilisation optimale des fonds publics ;

– par les directions territoriales de l’OFII en complémentarité avec une association conventionnée.

L’OFII assurerait alors le pilotage du dispositif au niveau national.

b) L’hébergement et l’accompagnement social des demandeurs d’asile : un effort qui se poursuit avec la création de 1 000 places en CADA et l’abondement de l’ATA

● Au 31 décembre 2008, le dispositif national d’accueil (DNA) comptait 20 410 places réparties sur 271 centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) (16). Rappelons que le parc comprenait 5 282 places au 1er janvier 2001. En sept ans, la capacité d’hébergement des demandeurs d’asile en CADA a donc quasiment été multipliée par 4. Soulignons qu’en plus de l’hébergement, les CADA assurent également un accompagnement social et administratif des demandeurs d'asile en cours de procédure devant l’OFPRA ou la CNDA.

Aux côtés des CADA, deux centres de transit, totalisant 246 places, accueillent également des étrangers sollicitant l’asile en France, durant la période nécessaire à l’établissement de leur situation administrative. Par ailleurs, un centre d’accueil et d’orientation pour mineurs isolés demandeurs d’asile (CAOMIDA), d’une capacité d’accueil de 33 places, a été créé en 1999 pour répondre au problème de la prise en charge de certains mineurs isolés demandeurs d’asile.

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, il est prévu de créer 1 000 nouvelles places de CADA pour un total de 21 410 places, représentant un investissement de 4,7 millions d’euros. Un appel à projets doit être lancé à l’automne 2009, sur le fondement duquel les candidatures seront examinées au premier semestre 2010, pour une création effective des places dans le courant du second semestre. L’ensemble du dispositif national d’accueil se verrait doté de 202,63 millions d’euros (AE=CP).

La progression du nombre d’admissions en CADA se confirme et de plus en plus de demandeurs sont en mesure d’être accueillis au sein de ces centres. Ainsi, le pourcentage d’hébergement en CADA des demandeurs d’asile en cours de procédure (17) est en constante progression, passant de 46 % en 2006 à 55 % au 30 juin 2009. Le taux d’occupation des places se maintient également à un niveau élevé, supérieur à 98,4 % à la même date. Il s’agit probablement d’un plafond difficilement dépassable compte tenu du taux de vacance « frictionnelle », incompressible sur un parc de cette importance, et du fait des difficultés issues de la possible inadéquation entre les places disponibles et la composition familiale des personnes hébergées.

Notons que la durée moyenne de séjour en CADA a augmenté de 1,6 % par rapport à 2007 (557 jours en 2008 contre 548 en 2007), cet allongement résultant directement de celui des délais d’instruction des recours formés contre les décisions de rejet de l’OFPRA. Parallèlement, les délais moyens de sortie des réfugiés et déboutés sont en baisse par rapport à 2007, respectivement de 10 % et de 31 %.

Néanmoins, cette durée de prise en charge résulte également des difficultés persistantes rencontrées pour trouver des solutions de sortie rapide aux personnes qui ne devraient plus être hébergées en CADA, réfugiées ou déboutées. Le pilotage renforcé du dispositif national d’accueil a néanmoins permis des évolutions favorables, de même que les actions menées en faveur de l’intégration des réfugiés (accès à l’emploi et au logement) et le développement de l’aide au retour volontaire des déboutés. La mise en œuvre effective des nouvelles règles, fixées par le décret n° 2007-399 du 23 mars 2007 relatif aux CADA (18), a facilité la sortie des centres : la durée de maintien en leur sein après la notification de la décision définitive sur la demande d’asile est désormais limitée à trois mois renouvelable une fois avec l’accord du préfet s’agissant des réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire, et à un mois pour les personnes dont la demande d’asile a fait l’objet d’une décision définitive défavorable (déboutés).

Les réfugiés statutaires ou bénéficiaires de la protection subsidiaire en présence indue représentaient 3,5 % de la population totale hébergée en CADA au 30 juin 2009 (4 % au 31 décembre 2007 et 3,1 % au 31 décembre 2008). À la même date, le taux de présence indue des déboutés s’établissait à 5,2 % (contre 7,2 % au 31 décembre 2007 et 5,1 % au 31 décembre 2008).

Il est certes particulièrement difficile de faire sortir du dispositif des personnes qui n’ont pas nécessairement de solution d’hébergement alternative. Toutefois, au total, ce sont près de 9 % des places de CADA qui sont occupées par des personnes n’ayant pas vocation à être présentes, et ce au détriment des demandeurs d’asile et de la fluidité du dispositif. Il conviendrait donc d’une part de renforcer le développement de partenariats permettant l’accès au logement et à l’emploi de ces publics (réfugiés statutaires et personnes sous protection subsidiaire), ce à quoi le MIIINDS s’attache par ailleurs (19), et d’autre part de revaloriser les crédits d’hébergement d’urgence, dispositif structurellement sous-doté.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS RELATIFS À L’HÉBERGEMENT D’URGENCE

(en euros)

 

Montant des crédits (nationaux et déconcentrés)

Année

LFI

Exécution

2003

19 029 917

124 316 950

2004

27 994 292

143 775 492

2005

27 994 292

140 892 202

2006

44 500 000

103 723 237

2007

40 369 782

57 160 338

2008

35 300 00

53 090 762

2009 (au 31 juillet)

30 000 000

45 404 303

Source : MIIINDS

Le montant des crédits relatifs à l’hébergement d’urgence inscrits au présent projet s’élève à 30 millions d’euros. Un tel niveau de dotation repose sur les hypothèses d’une diminution des délais d’instruction de la demande d’asile (notamment devant l’OFPRA et le cas échéant la CNDA), la pleine utilisation d’un parc de places en CADA renforcé (avec 1 000 places supplémentaires), et un pilotage amélioré du DNA permis par la régionalisation (cf. supra).

Pour autant, il n’est pas acquis que ces évolutions permettent de « neutraliser » les effets d’une demande d’asile en forte hausse au premier semestre 2009 (+ 16,5 %) et notamment la forte tension que celle-ci ne manquera pas de produire sur le DNA. Le MIINDS affirme que « si ces hypothèses n’étaient pas vérifiées et la demande d’asile continuait à progresser en 2010, le ministère [...] a reçu l’assurance que des moyens complémentaires lui seraient alloués en gestion ». L’inscription d’une revalorisation des crédits dès la loi de finances initiale serait néanmoins plus sécurisante, plus lisible budgétairement, et plus conforme à la bonne information du Parlement.

Rappelons que le dispositif d’hébergement d’urgence complète le parc de CADA avec une capacité évaluée à 5 478 places en 2010 dont 1 500 sont gérées par Adoma au niveau national. Ont vocation à bénéficier de ce dispositif mes demandeurs d’asile ne pouvant bénéficier ni d’un hébergement en CADA, ni de l’ATA, soit notamment les personnes placées en procédure prioritaire (20) ou en « procédure Dublin » (21), qui ne disposent pas d’un titre de séjour provisoire.

● L’allocation temporaire d’attente (ATA) a remplacé l’allocation d’insertion à la faveur de la loi de finances pour 2006 et du décret n° 2006-1380 du 13 novembre 2006. Rappelons que l’ATA est versée aux demandeurs d’asile pendant toute la durée de la procédure d’instruction de leur demande (y compris le recours éventuel devant la CNDA). Elle bénéficie aux demandeurs d’asile ne pouvant être hébergés en CADA alors qu’ils ont accepté l’offre de prise en charge. De fait, le refus de prise en charge entraîne la perte des droits à l’ATA.

La loi de finances pour 2009 avait procédé à la révision des conditions d’accès à l’ATA suite à l’annulation partielle du décret de mise en œuvre de l’allocation par le Conseil d’État. Il s’agissait d’une part d’étendre le bénéfice de l’ATA aux demandeurs provenant de pays d’origine sûrs et aux demandeurs auxquels s’applique le 5 du C de l’article 1er de la convention de Genève, lequel stipule que ladite convention cesse de s’appliquer aux personnes qui ne peuvent plus refuser la protection du pays dont elles ont la nationalité du fait de l’extinction des circonstances à la suite desquelles la qualité de réfugié leur a été reconnue. Par ailleurs, se trouvaient exclus du bénéfice de l’ATA les demandeurs d’asile qui ont déjà introduit une demande en France.

En 2009, 30 millions d’euros avaient été prévus au titre de l’ATA, le Rapporteur spécial ayant formulé la même remarque qu’au titre de l’hébergement d’urgence en soulignant le risque de sous-budgétisation. Dans le cadre du présent projet de loi de finances et eu égard à plusieurs facteurs, notamment la hausse de la demande d’asile et la stabilisation de la durée de la procédure devant l’OFPRA et la CNDA, lesquels entraînent d’une part une augmentation du nombre de bénéficiaires potentiels et d’autre part un allongement de la durée de perception de l’allocation, il est proposé de doter l’ATA à hauteur de 53 millions d’euros, soit une hausse de + 77 % dont le Rapporteur spécial ne peut que se féliciter. D’après le projet annuel de performances, cette dotation devrait permettre de financer un nombre annuel moyen de 13 150 bénéficiaires pour une durée moyenne de versement de l’allocation de 12 mois. Néanmoins, l’augmentation du nombre de places en CADA et l’amélioration de la fluidité du parc devraient, à moyen terme, conduire à l’allègement des tensions pesant sur le financement de l’ATA.

c) L’OFPRA : opérateur dédié du ministère

L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) est l’opérateur dédié en matière d’asile. Au 31 décembre 2008, 139 212 personnes (hors mineurs accompagnants) étaient placées sous sa protection, dont
3 111 personnes placées sous protection subsidiaire (
22). L'Asie reste le premier continent de provenance des réfugiés (41 % du total), suivi de l'Europe (29 %), de l'Afrique (27 %) et de l'Amérique (3 %).

En 2008, face à une augmentation de près de 20 % de la demande d’asile, l’OFPRA a rendu plus de 43 000 décisions soit un accroissement de 15 % par rapport à l’année 2007.

Au premier semestre 2009, les décisions prises (hors mineurs accompagnants) se sont accrues de 9,5 % par rapport à la même période de l’année précédente. Toutefois, ce nouvel effort reste en deçà de l’augmentation des nouvelles premières demandes (+ 33,5 %). Notons que les contraintes liées à l’instruction des premières demandes (audition quasi-systématique, dactylographie des comptes rendus d’entretien en vue de leur communication extérieure en application du décret du 15 juillet 2008) pèsent de plus en plus sur les indicateurs de productivité de l’OFPRA. Par ailleurs, les évolutions prévisibles dans le cadre de la communautarisation du droit d’asile (procès-verbal d’entretien, assistance d’un tiers aux entretiens avec utilisation obligatoire d’un interprète, recours systématique à l’information sur les pays d’origine, meilleure information du demandeur d’asile etc.) laissent présager un alourdissement de la charge de l’instruction et, par conséquent, une chute des ratios de productivité.

Rappelons que depuis le 1er janvier 2009, l'OFPRA n'assure plus la gestion directe des moyens et personnels de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui relève désormais du Conseil d'État (cf. infra). Au terme de la partition des emplois correspondants, le nombre des emplois gérés par l'OFPRA a ainsi été ramené de 633,1 ETPT en 2008 à 412 ETPT. La subvention versée à l’OFPRA atteindrait 32 millions d’euros en 2010.

Le 9 décembre 2008, conformément aux objectifs assignés au MIIINDS dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, l’OFPRA a conclu un contrat d’objectifs et de moyens (COM) avec les ministres chargés de l’immigration et du budget, ce dont le Rapporteur spécial se réjouit. Au-delà de la visibilité financière qu’il confère à l’Office (23), ce COM précise les axes et orientations stratégiques de l’établissement pour les années 2009 à 2011. Le COM s’organise en six chapitres et enjoint à l’OFRA :

– d’apporter, en temps réel, une réponse de qualité à la demande d’asile ;

– d’assurer une meilleure protection des réfugiés ;

– de garantir la qualité de l’avis donné en matière d’admission sur le territoire au titre de l’asile à la frontière ;

– de développer la qualité de services d’appui au traitement de la demande d’asile ;

– de développer et faire reconnaître l’expertise de l’Office ;

– de mettre en place un contrôle interne comptable.

d) Le rattachement de la CNDA au Conseil d’État

La Cour nationale du droit d’asile (CNDA) est une juridiction administrative spécialisée. Anciennement dénommée Commission des recours des réfugiés, créée par la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, elle est devenue « Cour nationale du droit d’asile » en vertu de l’article 29 de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile.

Elle est compétente pour statuer :

– sur les recours formés contre les décisions de l’OFPRA accordant ou refusant le bénéfice de l’asile, retirant ou mettant fin au bénéfice de l’asile ;

– sur les recours en révision dans le cas où il est soutenu que la décision de la Cour a résulté d’une fraude ;

– sur les recours formés contre les décisions portant rejet d’une demande de réexamen.

Jusqu’au 31 décembre 2008, le budget de CNDA était inscrit dans le budget de l’OFPRA. Depuis le 1er janvier 2009, en vertu du décret n° 2008-1481 du 30 décembre 2008, la CNDA est rattachée au Conseil d’État et fait désormais partie du programme 165 Conseil d’État et autres juridictions administratives de la mission conseil et contrôle de l’État. Le présent projet de loi de finances propose de lui allouer 16,9 millions d’euros.

Conformément aux engagements du Gouvernement et depuis le 1er septembre 2008, dix présidents de section (24) sont affectés à plein temps à la CNDA.

Après une baisse importante et continue depuis 2005, le nombre de recours enregistrés devant la CNDA est reparti à la hausse depuis le 1er juillet 2008, la tendance étant vraisemblablement appelée à se poursuivre. Ainsi, la comparaison des premiers semestres 2008 et 2009 fait ressortir une augmentation de près de 11 %. L’OFPRA faisant également face à une telle évolution du fait de l’augmentation de la demande d’asile, la Cour devrait connaître le même phénomène avec un « effet retard » à partir de la fin de l’année 2009 et en 2010.

En 2008, la Cour a été saisie de 21 636 recours et a rendu 25 067 décisions. Le taux de recours des décisions de l’OFPRA devant la CNDA a toujours été particulièrement élevé. Au premier semestre, il atteint environ 82 %. Le taux d’annulation sur la même période est de 26,4 %.

C.– L’ACTION LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE DEMEURE UNE PRIORITÉ DU MINISTÈRE

Le présent projet de loi de finances propose de doter l’action n° 3 Lutte contre l’immigration irrégulière à hauteur de 104,38 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 94,38 millions en crédits de paiement (CP), soit une hausse respective de + 29 % et + 17 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2009. Cette croissance de 24 millions d’euros en AE et 14 millions d’euros en CP doit couvrir les coûts relatifs à la reprise par le MIIINDS des compétences précédemment exercées par le ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales en matière de gestion immobilière des centres de rétention administrative (CRA). Le montant revalorisé inclut un transfert de 4,5 millions d’euros en provenance du ministère de l’Intérieur.

1.– Les lieux de rétention et d’attente : une clarification des compétences en faveur du MIIINDS

Les CRA ont vocation à accueillir les étrangers en situation irrégulière sur le territoire français, dans l’attente de leur reconduite.

À l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2008, le Rapporteur spécial appelait de ses vœux une rationalisation de la gestion des CRA, tendant au rapatriement dans la mission Immigration, asile et intégration de l’ensemble des crédits les concernant. En effet, en application de l’article R. 553-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), les crédits relatifs à la construction et à l’entretien immobilier des CRA sont inscrits aux budgets des ministères de l’Intérieur et de la Défense, tandis que les dépenses de fonctionnement courant sont prises en charge par le budget du MIIINDS. Cet éclatement des crédits ne permettant pas d’avoir une vision globale du coût des CRA, le Rapporteur spécial jugeait souhaitable qu’un regroupement soit opéré au profit de la mission Immigration.

Comme indiqué précédemment, le présent projet de loi de finances répond à cette attente en abondant les crédits de l’action n° 3 à hauteur de 24 millions d’euros supplémentaires en AE et 14 millions d’euros en CP, correspondant aux charges financières induites par le transfert de compétence au profit du MIINDS en matière de gestion immobilière.

Le nombre de places en CRA est passé de 1 071 en juin 2005 à 1 659 au 31 juillet 2009 (+ 55 % environ), soit pour la métropole, une croissance de 944 à 1 515 places, et dans les départements et territoires d'outre-mer une augmentation de 127 à 144 places.

Ainsi, en métropole, de nouveaux établissements ont été mis en service notamment, les centres de Plaisir (32 places), Marseille-le Canet (136 places), Cornebarrieu (126 places), Lille Lesquin II (96 places), Paris II (140 places), Nîmes (128 places), Rennes (70 places), Perpignan (48 places), Hendaye (30 places) et Metz (95 places). Outre-mer, la capacité du centre de Morne Vergain en Guadeloupe a été portée de 20 à 40 places.

Rappelons qu’en 2008 et 2009, l'extension du parc immobilier s'est trouvée limitée du fait de l'indisponibilité de trois centres consécutive à des incendies ayant touché :

– le 22 juin 2008, les CRA de Paris I et II, soit deux fois 140 places. La reconstruction partielle de Paris I n'a offert que 60 places qui devaient être portées à 120 dès la rentrée 2009 avec la création d'une extension provisoire ;

– le 19 janvier 2009, le CRA de Bordeaux, soit 20 places.

Par ailleurs, la fermeture pour vétusté de certains établissements a engendré une perte de places. Le CRA de Toulouse (39 places) a été déclassé en février 2009. Le CRA de Nantes (20 places) a fermé en janvier 2009 pour permettre sa reconstruction. Sa réouverture est prévue au cours du 1er trimestre 2010, le CRA devant compter 19 places.

En 2010, le parc immobilier devrait atteindre 2 058 places, avec d'une part, la réouverture des centres de Nantes et de Bordeaux (19 et 20 places), et d'autre part, la mise en service des centres du Mesnil Amelot II (120 places dont 60 ouvertes dès septembre 2009) et III (120 places), et de Paris II (60 places) et III (60 places). L'extension provisoire du centre de Paris I sera fermée à l'ouverture de ces deux structures.

Le taux d'occupation moyen des CRA était de 68 % en 2008 et atteint 63 % au premier semestre 2009. La durée moyenne de rétention, soit 10 jours, reste stable.

Rappelons que les personnes retenues en CRA bénéficient d’une assistance sanitaire et sociale pour laquelle 11,5 millions d’euros sont prévus au présent projet de loi de finances (AE=CP). Ces actions, sont actuellement exercées par la Cimade (25), dont le contrat avec l’État s’achevait fin 2008. Le MIIINDS a alors décidé de passer un appel d’offres par allotissement afin de mettre en concurrence plusieurs personnes morales agissant dans le domaine juridico-humanitaire. Compte tenu de multiples actions contentieuses, le marché n’a toujours pas été attribué. Dans le cadre de la préparation du présent rapport, le Rapporteur spécial aura rencontré, outre la Cimade, les cinq associations concernées par cet appel d’offres : l’Assfam (26), le Collectif Respect, Forum Réfugiés, France Terre d’Asile et l’Ordre de Malte. Toutes s’étaient préparées à la mission qui devait leur être confiée, en engageant des moyens humains et financiers parfois substantiels. Aussi, la suspension de l’exécution des contrats par le juge des référés a pu créer une situation délicate pour ces structures. Il n’est donc pas inenvisageable que se pose la question de leur éventuelle indemnisation, ce que confirme le PAP, lequel précise que « compte tenu de l’annulation contentieuse de ce marché, des indemnités devront être versées aux candidats initialement retenus par l’administration ».

L’ASSISTANCE AUX ÉTRANGERS EN CRA : SORTIR DE L’IMPASSE

Le 23 août 2008, a été publié un décret modifiant l’article R. 553-14 (27) du CESEDA afin de permettre de passer une convention avec « une ou plusieurs personnes morales » au lieu d’une seule association antérieurement, pour l’assistance aux étrangers placés en rétention en vue de l’exercice de leurs droits.

Un premier appel d’offres lancé le 30 août 2008 et pour lequel les centres de rétention avaient été répartis, sur une base géographique, en 8 lots, a été annulé le 14 octobre 2008 par le Tribunal administratif de Paris.

Un nouvel appel d’offres, avec la même répartition en 8 lots, a été lancé le 18 décembre 2008. Il a fait l’objet d’un référé précontractuel formé par la Cimade. Le juge des référés auprès du Tribunal administratif de Paris a suspendu la signature des marchés jusqu’au 7 mai 2009. Les contrats avec les associations attributaires des lots ont été signés le 10 mai. À la suite de deux recours en référé suspension formés par le GISTI (28) et par la Cimade, le juge des référés a suspendu l’exécution des contrats par ordonnance du 30 mai 2009. Un pourvoi en cassation contre cette ordonnance a été déposé le 12 juin 2009 devant le Conseil d’État.

Dans l’attente de la décision du Conseil d'État, le MIIINDS a demandé à la Cimade, qui assurait l'ensemble des prestations jusqu'au 2 juin 2009, de poursuivre son intervention dans les CRA.

Soulignons enfin que le cas les problèmes afférents à l’utilisation de la salle d’audience réalisée au sein de la ZAPI (29) de Roissy n’ont toujours pas été réglés. Se fondant sur trois arrêts rendus par la Cour de cassation qui avaient censuré la tenue d’audiences dans les salles spécialement aménagées dans l’enceinte des CRA (30) et en étendant, par analogie, les principes à la ZAPI de Roissy, les magistrats ayant vocation à rendre justice dans ladite salle d’audience (31) ont refusé d’y siéger. Le ministère de l’Intérieur a alors étudié un projet d’extension, validé par le ministère de la Justice en mai 2007. L’opération, évaluée à 2,4 millions d’euros, n’a toujours pas débuté, les financements n’ayant pas été mis en place. La salle d’audience demeure donc sans affectation. Aussi, le Rapporteur spécial ne peut que rappeler la nécessité de parvenir à une solution de ce problème rapidement, le cas échéant en envisageant la réaffectation de la salle d’audience à d’autres usages.

2.– L’éloignement des étrangers en situation irrégulière : le renseignement d’un coût quasi complet des reconduites

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, 37,5 millions d’euros (AE=CP) seraient alloués afin de couvrir les frais d’éloignement des migrants en situation irrégulière. Rappelons que ces crédits financent essentiellement les frais de billetterie (avion, train, bateau) ainsi que les coûts afférents aux deux aéronefs de type Beechcraft mobilisés pour les reconduites, les autres dépenses relatives aux reconduites figurant à différentes missions. Ainsi, à titre d’exemple, rappelons que les crédits liés à la rémunération des participants à l’escorte des personnes éloignés sont inscrits à la mission Sécurité.

Après 29 796 reconduites à la frontière réalisées depuis la métropole exécutées en 2008 (32), le MIIINDS s’assigne un objectif de 27 000 mesures d’éloignement pour 2010. Le taux d’exécution reste inférieur à 30 %, les deux principales causes de non-exécution étant :

– le défaut de délivrance d’un laissez-passer consulaire (LPC) dans les temps de la rétention administrative (refus de délivrance, délivrance tardive, absence de représentation consulaire), qui compte pour plus de 31 % des mesures non-exécutées ;

– la libération d’étrangers retenus en CRA par le juge des libertés et de la détention (JLD) dans le cadre des demandes de prolongation de rétention, correspondant à plus de 26 % des mesures non-exécutées.

Afin d’y remédier, deux pistes sont particulièrement explorées :

– assurer une meilleure représentation de l’État devant les juridictions judiciaires et administratives afin d’exprimer plus efficacement sa position devant le JLD ;

– agir à destination des pays dont les taux de délivrance des LPC ne sont pas satisfaisant. La poursuite de la conclusion d’accord de gestion concertée des flux migratoires (33) peut notamment permettre une meilleure prise en compte de cette problématique.

ÉVOLUTION DES RECONDUITES À LA FRONTIÈRE

 

2005

2006

2007

2008

1er semestre 2009

 

Prononcées

Exécutées

Prononcées

Exécutées

Prononcées

Exécutées

Prononcées

Exécutées

Prononcées

Exécutées

Interdictions du territoire

5 278

2 250

4 697

1 892

3 580

1 544

1 421

720

1 015

649

OQTF*

46 263

1 816

18 280

1 546

21 063

2 462

APRF**

61 595

14 897

64 609

16 616

50 771

11 891

24 076

5 655

21 904

5 500

Arrêtés d’expulsion

285

252

292

223

258

206

130

83

110

***112

Décisions de réadmission

6 547

2 442

11 348

3 681

11 138

4 428

5 779

2 820

6 445

2 001

Départs volontaires

Non disponible

1 419

3 311

6 386

4 120

Totaux

73 705

19 841

80 672

23 831

112 010

23 196

49 686

17 210

50 537

14 844

* : obligation de quitter le territoire français

** : arrêté préfectoral de reconduite à la frontière

*** : des mesures exécutées en année N peuvent avoir été prononcées en année N-1

Source : MIIINDS.

Le coût complet d’une reconduite à la frontière n’est toujours pas renseigné dans le PAP. Toutefois, conformément aux engagements du MIIINDS, une mission a été confiée à l'Inspection générale de l'administration, mandatée pour évaluer le coût analytique global de l'éloignement d'un étranger (34). La mission a rendu son rapport fin octobre. Le Rapporteur spécial se félicite qu’une telle analyse ait enfin été conduite.

Les principaux enseignements en sont les suivants :

– le coût global de la politique de reconduite à la frontière peut être évalué à 232 millions d’euros, avec la précision méthodologique suivante : les coûts afférents aux différentes juridictions (charge de travail des instances judiciaires, frais de justice spécifiques à ce contentieux) ne sont pas inclus dans le champ de l’étude ;

– sur le fondement du coût global et sur la base de 18 300 personnes reconduites en 2008 (35), le coût unitaire moyen d’une reconduite est de 12 645 euros ;

– l’analyse par segments d’action fait apparaître des résultats différents. Cette méthode consiste à calculer le coût de chaque reconduite non pas par rapport au coût global mais par rapport au coût unitaire de chaque étape du processus, celui-ci étant déterminé eu égard au nombre de personnes effectivement concernées à chacun des phases dudit processus. La mission a ainsi identifié trois phases – interpellation, garde à vue et procédure administrative, puis placement en centre de rétention et enfin reconduite. Le coût des interpellations est alors calculé sur la base des quelque 90 000 personnes en ayant fait l’objet, le coût du placement en CRA par rapport aux 35 000 personnes effectivement placées, et la reconduite sur la base de 18 300 personnes, comme indiqué précédemment, en distinguant par ailleurs celles qui ont fait l’objet d’une escorte. Au total, selon cette méthode de calcul, le coût moyen total est de 6 300 euros ;

– une troisième approche tend à calculer le coût unitaire de différents « parcours types », lesquels s’échelonnent, pour les deux scénarios extrêmes, de 385 euros pour une personne interpellée, placée en garde à vue puis remise en liberté, à 8 600 euros pour une personne interpellée, placée en CRA durant 10 jours et reconduite avec escorte (36) ;

– les coûts fixes (coûts d’infrastructures et de fonctionnement des CRA notamment) et les coûts semi-variables (dépenses de personnes principalement) comptent pour 172 millions d’euros, soit près de trois quarts du coût total ;

– près de 3 000 fonctionnaires participent à cette politique (en ETPT).

Signalons en outre que le Coût moyen d’une reconduite à la frontière, qui faisait précédemment l’objet d’un indicateur dans le PAP (37), figure désormais en justification au premier euro (JPE) et indique un montant de 1 390 euros qui, comme indiqué précédemment, ne couvre qu’une partie des coûts.

MAYOTTE : PREMIÈRE ZONE DE PRESSION MIGRATOIRE

Suite à la consultation du 29 mars 2009, Mayotte deviendra, en 2011, le 101ème département français. Une fois le statut départemental en vigueur, Mayotte sera régie par le principe d’identité législative, y compris pour les matières qui en étaient auparavant exclues, dont l’entrée et le séjour des étrangers et le droit d’asile.

Ce statut ne devrait toutefois pas faire obstacle au maintien de l’essentiel des nombreuses dérogations au droit commun de l’entrée et séjour des étrangers en vigueur à Mayotte du fait de la pression migratoire particulière que connaît la collectivité, l’article 73 de la Constitution permettant des adaptations au droit métropolitain « justifiées par les caractéristiques et contraintes particulières de la collectivité ».

Rappelons que l’INSEE évalue la part des étrangers à 41 % de la population de Mayotte, dont la majorité serait en situation irrégulière. En 2008, la préfecture de Mayotte a reconduit à la frontière plus de 16 000 étrangers en situation irrégulière, ce qui représente 50 % des reconduites effectuées à partir de l’ensemble du territoire métropolitain. Près de 6 000 d’entre eux ont été interceptés en mer, dans des embarcations de fortune (kwassas), 10 000 personnes ayant donc été interpellées sur le territoire mahorais.

Dans le cadre de la préparation à la départementalisation de Mayotte, il est apparu nécessaire de fiabiliser l’état civil des Mahorais, et les services du secrétariat d’État à l’outre-mer ont recherché les moyens d’améliorer le fonctionnement de la commission de révision de l’état civil (CREC).

Après audit diligenté par le préfet de Mayotte en fin d’année 2008 auprès de l’ensemble des communes, plusieurs de ses propositions ont été concrétisées par les actions suivantes :

– la nomination d’un secrétaire général, devant coordonner l’activité des rapporteurs chargés de l’enregistrement des demandes et de la préparation des décisions individuelles ;

– la réforme de l’ordonnance du 8 mars 2000 afin de simplifier la procédure et d’optimiser les travaux de la commission d’ici avril 2011. L’article 57 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer a prévu :

1) de nommer le préfet vice-président de la commission ;

2) de permettre au président de statuer seul, sauf dans les cas les plus complexes et de simplifier les conditions de la collégialité lorsque celle-ci reste nécessaire ;

3) de limiter dans le temps la possibilité de saisir la CREC : les Mahorais devront accomplir cette formalité avant le 31 juillet 2010.

Devant la difficulté à désigner un candidat, la présidence de la CREC est demeurée vacante pendant plusieurs mois, entre août 2008 et mai 2009. Elle est actuellement présidée par un magistrat du siège.

D.– L’ACTION SOUTIEN : UN RÉAJUSTEMENT DES DÉPENSES DE PERSONNEL

Les crédits de l'action n° 4 Soutien (63,9 millions d’euros en AE et 65,5 millions d’euros en CP) couvrent notamment les crédits de titre 2 (38,46 millions d’euros), la dotation de fonctionnement du cabinet et des services (6,95 millions d’euros en AE et 5,96 millions d’euros en CP) et les loyers budgétaires (4,99 millions d’euros en AE=CP).

Un rebasage des crédits de personnel du titre 2 a été opéré afin de réajuster la masse salariale du ministère au niveau des dépenses effectives, ce dont le Rapporteur spécial se félicite. Par ailleurs, des mesures de transferts de 10 emplois sont également intervenues, auxquelles s'ajoute un transfert de crédits de 400 000 euros (hors compte d’affectation spéciale Pensions) en provenance du ministère des Affaires étrangères et européennes dans le cadre de mesures catégorielles 2009 (100 000 euros) et afin de compenser une insuffisance de base des crédits de la loi de finances initiales pour 2008, non compensée en la loi de finances initiales pour 2009 (300 000 euros).

Par ailleurs, 13,24 millions d’euros en AE et 14,84 millions en CP seraient affectés à des dépenses d’investissement principalement consacrées au projet AGDREF 2 et à l’équipement biométrique des consulats. Rappelons qu’AGDREF 2 (anciennement GREGOIRE) procède à une refonte de l’application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF). Elle remplacera d’une part l’actuelle AGDREF, d’autre part l'application ELOI, qui traite de l'éloignement des étrangers se maintenant sans droit sur le territoire français. AGDREF 2 vise notamment à :

– permettre un traitement interministériel des dossiers par les préfectures (38;

– poursuivre l’introduction de la biométrie à des fins de lutte contre la fraude ;

– constituer une base de données statistique sur l’évolution des flux migratoires.

III.– LES CRÉDITS DU PROGRAMME 104 INTÉGRATION ET ACCÈS À LA NATIONALITÉ FRANÇAISE : UN RENFORCEMENT DE L’OFFICE FRANÇAIS DE L’IMMIGRATION ET DE L’INTÉGRATION

Par rapport à la loi de finances initiale pour 2009, les crédits du programme 104 Intégration et accès à la nationalité progresseraient de 6,74 millions d’euros (en AE=CP) pour l’essentiel en raison d’une augmentation de la subvention pour charges de service public versée à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (+ 4,7 millions d’euros) ainsi qu’à un abondement des dotations relatives aux actions d’intégration des étrangers en situation régulière (+ 1,85 million d’euros). Les crédits augmenteraient ainsi de 9,2 % en 2010.

A.– DES ACTIONS NATIONALES D’ACCUEIL DES ÉTRANGERS PRIMO-ARRIVANTS ET DE FORMATION LINGUISTIQUE PORTÉES PAR L’OFII

L’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), créé par le décret n° 2009-331 du 25 mars 2009, est chargé de la mise en œuvre des politiques d'intégration du MIIINDS, laquelle était auparavant assurée par deux établissements publics aux compétences enchevêtrées, l’Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) et l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSÉ).

Dans un souci de rationalisation, le conseil de modernisation des politiques publiques a décidé la suppression des doublons entre ces deux agences et la création, sur la base de l’ANAEM, d'un nouvel opérateur en matière d’immigration et d’intégration : l’OFII.

L’OFII est chargé de la mise en œuvre de l’ensemble du parcours d’intégration, c’est-à-dire des actions d’accueil et de formation conduites en faveur des étrangers primo-arrivants pendant les cinq premières années de leur séjour en France. Ces actions comportent notamment la mise en œuvre des dispositifs d'apprentissage de la langue française adaptés aux besoins d'intégration des personnes de nationalité étrangère via le diplôme initial en langue française (DILF).

La loi de finances initiale pour 2009 a réformé le système des ressources propres de l’opérateur, d’une part en remplaçant les redevances dont il bénéficiait par des taxes, et d’autre part en supprimant des exonérations devenues obsolètes. Cette réforme visait à une simplification et une homogénéisation des ressources propres de l'OFII ainsi que leur augmentation significative. Le décret n° 2009-2 du 2 janvier 2009 relatif au montant des taxes prévues aux articles L. 311-13, L. 311-14 et L. 311-15 du CESEDA en a précisé les conditions d’application.

Après une phase de montée en charge, le rendement du nouveau système de taxes s’est redressé et l’exécution des recettes de l’OFII, au 30 juin 2009 est de 51,9 millions d’euros pour une prévision annuelle de recettes propres de 110,9 millions d’euros. Pour 2010, il est prévu d’allouer à l’OFII une subvention d’un montant de 15 millions d’euros.

En termes d’emplois, l’OFII doit réaliser un effort substantiel et repenser son organisation puisque, entre 2009 et 2011, son plafond d’emplois doit avoir diminué de 40 personnes, passant ainsi de 890 à 850, tout en accueillant des personnels de l’ACSÉ dont l’article 67 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 prévoit le transfert (39).

La première activité de l’OFII reste le pilotage du contrat d’accueil et d’intégration (CAI). Proposé à 104 336 personnes en 2008 (101 770 personnes en 2007), le nombre de signataires s’élève à 103 952 personnes (101 217 en 2007) représentant une hausse de 2,7 % par rapport à l’année dernière et correspondant à un taux d’adhésion de 99,6 %. Il intègre diverses formations :

– la formation civique (40) ;

– la session d’information sur la vie en France (41) ;

– le dispositif d’apprentissage du français (42) ;

– le diplôme initial en langue française (43).

Rappelons que l’article L. 311-9 du CESEDA introduit un lien entre le premier renouvellement de la carte de séjour et le respect des stipulations du CAI : « Lors du premier renouvellement de la carte de séjour, l’autorité administrative tient compte du non-respect, manifesté par une volonté caractérisée, par l'étranger, des stipulations du contrat d'accueil et d'intégration. »

De même, l’article L. 314-2 du même code prévoit que, pour la délivrance d'une première carte de résident, l'autorité administrative tient compte de la souscription du CAI par l'étranger et du respect de ses stipulations.

La circulaire du 19 mars 2008 relative au « suivi individualisé des contrats d’accueil et d’intégration et [aux] conséquences à tirer de la méconnaissance de ce contrat sur le droit au séjour » a donné aux préfets des instructions sur ce point. L'impact de cette mesure n'est pas encore connu, d'une part parce que les formations linguistiques, qui sont les plus susceptibles de faire l'objet de défaillances, peuvent se dérouler sur deux ans, d'autre part du fait de la nécessité de créer préalablement à ces constats un dispositif informatique de suivi de cette mesure.

Les nouvelles compétences de l’OFII en matière d’intégration sont relatives au :

– bilan de compétence : durant 3 mois, fin 2008, fut expérimenté dans trois départements (44) un bilan de compétences à destination de signataires CAI. 309 signataires CAI en ont bénéficié. Le dispositif a été étendu à toute la France en 2009 ;

– dispositif d’évaluation et de formation à l’étranger : le CESEDA dispose que le conjoint de Français âgé de moins de 65 ans ainsi que le ressortissant étranger âgé de plus de 16 ans et de moins de 65 ans pour lequel le regroupement familial a été sollicité bénéficient, dans le pays de demande du visa, d’une évaluation des connaissances de la langue et des valeurs de la République (45).

Au-delà de sa mission d’intégration, l’OFII entreprend quatre types d’actions concernant :

– les aides au retour et à la réinstallation : les aides au retour (ARV (46) et ARH (47)) sont versées en France et dans le pays de retour et ont pour objectif d’organiser l’éloignement des étrangers en situation irrégulière ou le départ d’étrangers en situation régulière mais en situation de dénuement (48). Les aides à la réinstallation (aide aux projets conçus et financés dans le pays de retour) visent à soutenir les initiatives économiques des migrants dans leur pays d’origine, quelle que soit leur situation, régulière ou non, au regard du séjour en France (49;

 la promotion de l'immigration professionnelle ;

– la participation à la gestion des flux migratoires, notamment via la gestion des visites médicales passées dans le cadre du déroulement des procédures, le certificat de contrôle médical étant, à quelques exceptions près, l’une des pièces à produire lors de la demande de titre de séjour ;

– la participation à la prise en charge sociale des demandeurs d’asile : notamment dans le cadre de la régionalisation de l’admission au séjour (cf. supra).

Enfin, soulignons que d’ici la fin de l’année, l’OFII doit signer son contrat d’objectifs et de performance avec le ministère. Il devrait traiter des points suivants :

– la mise en œuvre du visa de long séjour valant titre de séjour ;

– la mise en œuvre de la gestion des flux migratoires : immigration professionnelle et le regroupement familial ;

– l’accueil et l’intégration des étrangers en situation régulière s'installant durablement en France ;

– la gestion sur tout le territoire du premier accueil des demandeurs d’asile ;

– la mise en œuvre du dispositif des aides au retour et à la réinsertion ;

– l’adaptation des moyens de l’établissement aux compétences transférées ou supprimées ;

– l’intégration des agents et des compétences de l’ACSÉ relatives à l’intégration ;

– la modernisation de ses méthodes de gestion.

L’INSERTION PROFESSIONNELLE DES MIGRANTS : UNE MOBILISATION DE L’ENSEMBLE DES ACTEURS ÉCONOMIQUES

Les étrangers signataires du contrat d’accueil et d’intégration (CAI) rencontrent de nombreux obstacles dans leur insertion professionnelle. En outre, ils occupent souvent des emplois qui ne correspondent pas à leurs qualifications ou à l'expérience professionnelle acquise dans le pays d’origine.

Parallèlement, des entreprises, notamment dans des secteurs économiques en développement ou à fort potentiel en main-d’œuvre, ne trouvent pas à pourvoir des emplois disponibles.

Il est donc nécessaire de mieux orienter les demandeurs d'emploi signataires du CAI et de raccourcir les délais d'accès à l'emploi, en mobilisant le Pôle emploi, les branches professionnelles confrontées à des difficultés de recrutement et les grands réseaux économiques.

Dans la suite du bilan de compétences professionnelles institué par la loi du 20 novembre 2007 sur la maîtrise de l'immigration et mis en place par le décret n° 2008-1115 du 30 octobre 2008, des accords de partenariat ont ainsi été conclus en 2008 entre l’État et :

– d'une part, des représentants de branches professionnelles connaissant des difficultés de recrutement (Agence nationale des services à la personne, Association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports AFT-IFTIM) en vue de faire bénéficier des signataires du CAI de formations en relation avec ces métiers ou de mesures d'accès à l'emploi dans ces secteurs économiques ;

– d'autre part, de grands réseaux économiques, comme l'Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH) ou la Fondation agir contre l'exclusion (FACE), pour expérimenter dans quelques départements des solutions directes d'accès à l'emploi dans des entreprises ;

– enfin, de grands groupes industriels, comme Vinci pour les métiers du BTP, de l'énergie et des concessions, afin de tester des méthodes d'intégration rapide de primo-arrivants dans les filiales du groupe. Ces expérimentations devraient être étendues au cours de l'année 2009 à d'autres grandes entreprises dans d'autres secteurs économiques.

Les accords expérimentaux initiés fin 2008 ou début 2009 par le MIIINDS ont commencé à être mis en œuvre au printemps 2009. Actuellement cinq projets sont en cours. Le public retenu concerne des signataires du CAI demandeurs d'emploi ayant un niveau de français au moins équivalent au diplôme initial de langue française (DILF).

B.– LES ACTIONS D’INTÉGRATION DES ÉTRANGERS EN SITUATION RÉGULIÈRE ET DES RÉFUGIÉS : DES DISPOSITIFS NÉCESSAIRES

Ces actions regroupent plus des trois quarts des crédits du programme 104 (61,34 millions d’euros, soit 76,8 %) et forment un ensemble composite visant à renforcer l’intégration des immigrés en situation régulière et des réfugiés et à encourager leur promotion sociale et professionnelle.

● Les dispositifs en faveur de l’intégration des réfugiés

Ils devraient être abondés à hauteur de 15,1 millions d’euros (AE=CP) et financent à titre principal à hauteur de 12,7 millions d’euros les centres provisoires d’hébergement des réfugiés (CPH). Ces 28 centres, d’une capacité de 1 083 places, répondent aux obligations découlant de la Convention de Genève et de l’application de l’article L. 345-1 du code de l’action sociale et des familles pris sur ce fondement. Ils permettent une prise en charge transitoire de personnes bénéficiaires d’une protection internationale et présentant des difficultés d’insertion.

Des aides sont par ailleurs destinées à ce public, qui prennent notamment la forme de projets d’aide à l’accès au logement et à l’emploi (2,4 millions d’euros).

● La promotion sociale professionnelle des étrangers primo-arrivants

Elle se décline en actions entreprises au niveau central comme au niveau déconcentré et se verrait allouer 30,5 millions d’euros (AE=CP).

Au niveau central, les crédits visent à soutenir, via des subventions, l’action d’acteurs économiques et sociaux (grandes entreprises, groupements d’entreprises, associations etc.). Par ailleurs, l’année 2009 a vu l’expérimentation ou la poursuite de deux dispositifs :

– une aide financière intitulée « parcours de réussite professionnelle » (PARP) qui permet de soutenir, en sus des bourses au mérite et pendant les trois ans de leurs études supérieures, les meilleurs étudiants étrangers s’engageant dans un parcours universitaire professionnalisant. Elle a été mise en place à la rentrée 2009 ;

– l’opération « ouvrir l’école aux parents », engagée en 2008 conjointement avec le ministère de l’Éducation nationale et testée dans 12 départements, elle propose aux parents d’élèves étrangers et immigrés des formations dispensées dans les établissements scolaires afin de favoriser leur intégration par une meilleure maîtrise de la langue, une compréhension plus poussée des principes et des valeurs de la République, et une connaissance de l’institution scolaire, des droits et devoirs des élèves et de leurs parents.

● Le soutien aux résidents en foyers de travailleurs migrants (FTM)

Pour 2010, 12,74 millions d’euros seraient consacrés aux FTM. Ils sont destinés d’une part à la transformation du bâti (réhabilitation ou production), d’autre part à l’accompagnement social des résidents.

● Faire évoluer la représentation de l’immigration et souligner son apport à la société française : la Cité nationale de l’immigration (CNHI)

La CNHI devrait disposer de 3 millions d’euros (AE=CP) au titre de cette action. Établissement public administratif créé en novembre 2006 (50), elle est placée sous la tutelle des ministères chargés de la culture, de l’intégration, de l’éducation nationale et de la recherche. Elle a vocation à « rassembler, sauvegarder, mettre en valeur et rendre accessible les éléments relatifs à l’histoire de l’immigration en France, notamment depuis le XIXème siècle ; de contribuer à la reconnaissance des parcours d’intégration des populations immigrées dans la société française et de faire évoluer les regards et les mentalités sur l’immigration en France ».

C.– L’AIDE AU RETOUR ET À LA RÉINSERTION : UN DISPOSITIF QUI TARDE À SE CONCRÉTISER

La conduite de l’action Aide au retour et à la réinsertion supposait la mise en œuvre de l’article 58 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 relative au droit au logement opposable, lequel a créé un nouvel article L. 1173 au code de l’action sociale et des familles.

Cet article nouveau prévoyait l’ouverture d’une aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d’origine (51). Or la mise en place de cette aide a été suspendue du fait de son incompatibilité avec la réglementation communautaire.

Il a donc été choisi d’expérimenter ce dispositif par voie d’accords bilatéraux avec les pays concernés. À ce jour, aucun accord n’a été signé et la montée en charge de dispositif est moins rapide que prévue. Les crédits ouverts en 2009 seraient par conséquent reconduits en 2010 à hauteur de 1,5 million d’euros (AE=CP).

D.– L’ACTION NATURALISATION ET ACCÈS À LA NATIONALITÉ : LA RÉFORME DE L’INSTRUCTION DES DEMANDES

Les crédits inscrits à l’action Naturalisation et accès à la nationalité ont vocation à couvrir les dépenses de fonctionnement de la sous-direction de l’accès à la nationalité française. Ainsi que l’indiquait le Rapporteur spécial l’an dernier, il serait sans doute plus logique de rattacher ces crédits à l’action Soutien du programme 303.

En 2008, 108 131 personnes ont acquis la nationalité française : 91 918 par décret, 16 213 par mariage avec un conjoint français. Sur les six premiers mois de 2009, 56 368 acquisitions ont été actées.

S’agissant de la réforme du traitement des demandes de naturalisation par décret, rappelons que le conseil de modernisation des politiques publiques, dans sa décision du 12 décembre 2007, avait estimé nécessaire de « supprimer le double niveau d’instruction, ce qui permettra de réduire les délais tout en préservant l’égalité de traitement ».

Le ministère de l’Immigration a alors chargé la direction générale de la Modernisation de l'État (DGME) de mener une étude qui a mis en évidence les points suivants :

– le délai de traitement est extrêmement variable d’une préfecture à l’autre, le délai moyen de traitement étant de 20 mois ;

– l’état des stocks, tant en préfecture qu’en administration centrale, est important ; aussi, quelle que soit la solution retenue, la réussite de la réforme passe par la résorption préalable des stocks ;

– des doublons existent dans l’instruction des dossiers entre les préfectures et l’administration centrale.

Au vu de ces conclusions, le MIIINDS a arrêté les principes suivants. Les décisions de naturalisation seront toujours prises au niveau national par décret du Premier ministre, sur rapport du ministre chargé des naturalisations (52) mais sur proposition des préfets. Le ministère n'assurera pas de contrôle d'opportunité, mais s'assurera de la recevabilité de ces propositions avant l’inscription des noms des postulants dans un décret de naturalisations. Quant aux décisions défavorables (53), elles seront désormais prises par les préfets, mais transmises à l'administration centrale, garante de l’homogénéité de la politique des naturalisations sur l’ensemble du territoire.

Par ailleurs, les recours contentieux devront être précédés par un recours administratif préalable obligatoire traité par l'administration centrale.

Enfin, la sous-direction de l'accès à la nationalité française du MIIINDS devra :

– assurer le pilotage et le contrôle du dispositif, en veillant à la qualité de l’instruction des dossiers par les préfectures ;

– traiter les recours hiérarchiques et contentieux ;

– élaborer les décrets de naturalisation ;

– assurer la conservation des dossiers et décisions ;

– veiller à l’uniformité de la politique de naturalisation sur le territoire national.

La mise en œuvre de la réforme s’est d’abord traduite par un effort de résorption des stocks de dossiers de demande de naturalisation en attente d’instruction, tant dans les préfectures (60 600 au 1er juillet 2009) qu'à la sous-direction de l'accès à la nationalité française (33 400 au 1er juillet 2009). De fait, au 30 juin 2009, les stocks avaient été réduits de 17,4 % pour la sous-direction de l’accès à la nationalité français et de 9,4 % pour les préfectures par rapport à la situation constatée au 1er janvier 2009.

Par ailleurs, une expérimentation sera menée dès le 1er janvier 2010 dans vingt et une préfectures (54). La généralisation de l’ensemble du dispositif devrait intervenir au 1er juillet 2010. Dans cette perspective, plusieurs mesures ont été engagées :

– le projet de décret définissant les modalités et le périmètre de l’expérimentation a été soumis à l’avis du Conseil d’État en septembre 2009 et sera suivi de la diffusion d’une circulaire d’application aux préfets ;

– l’adaptation de l’outil informatique PRENAT (55), qui devrait être opérationnelle au 1er janvier 2010 ;

– la formation des agents des préfectures expérimentatrices sera organisée dans le courant du mois de novembre 2009.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Éric Besson, ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, sur les crédits de la mission Immigration, asile et intégration (voir compte rendu analytique officiel de la réunion du 29 octobre 2009 à 21 heures : http://www.assemblee-nationale.fr/13/budget/plf2010/commissions_elargies/cr/C007.asp ), lors de la commission élargie, la commission des Finances adopte les crédits de cette mission, conformément à l’avis favorable de Mme Béatrice Pavy, Rapporteur spécial.

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ANNEXE :
LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire

M. Éric Besson, ministre de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire

M. Stéphane Fratacci, secrétaire général

M. Philippe Duboscq, conseiller budgétaire du ministre

M. Michel Aubouin, directeur de l’asile, de l’intégration et de la citoyenneté

Mme Sylvie Moreau, adjoint au directeur

M. Francis Etienne, directeur de l’immigration

M. Pierre Bourgeois, responsable de la mission de la performance et du contrôle de gestion

M. Rémy-Charles Marion, chef du service des affaires générales et des finances

M. David Kamano chef du bureau de la synthèse budgétaire

M. Jean-Pierre Guardiola, chef du service de l’asile

Mme Julia Capel-Dunn, chef du département des réfugiés et de l’accueil des demandeurs d’asile

M. Guy Rossignol, chef du département du pilotage et de la gestion des systèmes d’information

M. Jean-Patrick Bernard chef du département des statistiques, des études et de la documentation

M. Stéphane Gallet, département du développement solidaire

Cour nationale du droit d’asile

Mme Martine Denis-Linton, présidente

Mme Nadine Guilbaud, secrétaire générale

Office français de l’immigration et l’intégration

M. Philippe Bas, président du conseil d’administration

M. Jean Godfroid, directeur général

Assfam (Association service social familial migrants)

M. Jean-Marie Pauti, président

M. Christian Laruelle, directeur

Cimade

M. Patrick Peugeot, président

M. Damien Nantes, responsable de la défense des étrangers

Collectif Respect

M. Jean Butschie-Mulumba, président

Mme Maryse Lechene, chargée de la coordination

M. Didier Mouliom, chargé de la communication

Forum Réfugiés

M. Julien Poncet, directeur adjoint DSI et relations extérieures

Mme Suzanna Crassard, chargée des relations extérieures

France Terre d’Asile

M. Pierre Henry, directeur général

Ordre de Malte

Mme Édith de Rotalier, directrice des actions de secours et de solidarité

© Assemblée nationale

1 () Hors fonds de concours et attribution de produits.

2 () Rapport général n° 1967, annexe n° 5.

3 () Office français de protection des réfugiés et apatrides.

4 () Office français de l’immigration et de l’intégration.

5 () Article R. 553-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : «  Les crédits relatifs à la construction et à l'entretien immobilier des centres et locaux de rétention sont inscrits aux budgets des ministères de l'intérieur et de la défense, chacun en ce qui le concerne. ».

6 () Le règlement n° 390/2009 du 23 avril 2009 du Parlement européen et du Conseil a précisé les conditions de mise en œuvre de la biométrie dans les représentations consulaires des États membres.

7 () 350 000 demandes de visas par an.

8 () 160 000 demandes de visas par an.

9 () Avec les pays partenaires suivants : Autriche, Belgique, Italie, Pays-Bas et Suisse.

10 () Avec les pays partenaires suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Grèce, Italie, Pays-Bas, Portugal, Suède et Suisse.

11 () Avec l’Allemagne.

12 () Avec la Bulgarie et la Grèce (Ekaterinbourg), la Belgique, le Pays-Bas, l’Espagne et le Danemark (Saint-Petersbourg).

13 () Rapport n° 1775 tome 2 Règlement des comptes et rapport de gestion pour 2008.

14 () Le Kosovo est indépendant depuis le 17 février 2008 mais, pour des questions de comparabilité avec 2007, il reste comptabilisé avec la Serbie en 2008 et 2009.

15 () Règlement n° 343/2003 du Conseil de l’Union européenne du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers.

16 () L’ensemble des départements métropolitains, à l’exception de ceux de la Corse, dispose de capacités d’accueil en CADA.

17 () Indicateur 2.1 du programme 303 Immigration et asile.

18 () Article R. 348-3 du code de l’action sociale et des familles.

19 () En 2009 et pour la deuxième fois, le MIIINDS a lancé un appel à projet relatif à des actions d’aide à l’accès au logement et à l’emploi des réfugiés.

20 () Procédure définie à l’article L. 723-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

21 () Personnes déjà identifiées dans un autre État membre de l’Union européenne et en instance de réadmission dans cet État.

22 () Article L. 712-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit s’asile :

« Sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes :

a) La peine de mort ;

b) La torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

c) S'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international. ».

23 () Le COM garantit l’engagement financier de l’État à hauteur de 30,5 millions d’euros en 2009, 32 millions d’euros en 2010 et 33,6 millions d’euros en 2011.

24 () Soit sept magistrats de l’ordre administratif et trois de l’ordre judiciaire.

25 () Comité inter-mouvements auprès des évacués.

26 () Association service social familial migrants.

27 () Article R. 553-14 du CESEDA : « Pour permettre l'exercice effectif de leurs droits par les étrangers maintenus dans un centre de rétention administrative, le ministre chargé de l'immigration conclut une convention avec une ou plusieurs personnes morales ayant pour mission d'informer les étrangers et de les aider à exercer leurs droits. A cette fin, la personne morale assure, dans chaque centre dans lequel elle est chargée d'intervenir, des prestations d'information, par l'organisation de permanences et la mise à disposition de documentation. Ces prestations sont assurées par une seule personne morale par centre. Les étrangers retenus en bénéficient sans formalité dans les conditions prévues par le règlement intérieur. »

28 () Groupe d’information et de soutien aux immigrés.

29 () Zone d’attente pour des personnes en instance.

30 () Arrêts du 16 avril 2008, première chambre civile de la Cour de cassation.

31 () Réalisée pour un coût de 1,4 million d’euros, elle a été livrée en 2001.

32 () Soit 19 724 retours forcés et 10 072 retours volontaires.

33 () Le premier accord a été signé en 2006 avec le Sénégal. Trois accords ont été signés en 2007 avec le Gabon, le Congo-Brazzaville et le Bénin, deux en 2008 avec la Tunisie et le Cap-Vert, et deux avec le Cameroun et le Burkina-Faso. À ce jour, seuls les accords avec le Gabon, la Tunisie, le Congo-Brazzaville et le Sénégal sont entrés en vigueur. Des négociations sont actuellement menées avec le Mali et l’Égypte.

34 () Non seulement les coûts de fonctionnement des CRA et les frais de billetterie, mais également les frais de procédure, de fonctionnement courant et les frais de personnel afférents à chaque étape.

35 () Sur les 29 796 personnes ayant fait l’objet d’une reconduite forcée en 2008, l’étude exclut du champ de l’analyse : les 10 072 personnes ayant bénéficié d’une aide au retour de l’OFII et les 1 386 personnes reconduites dans le cadre d’une interdiction du territoire français.

36 () Les deux autres « parcours types » identifiés étant :

– personne interpellée, placée en CRA pendant 10 jours et remise en liberté sans reconduite : 3 880 euros ;

–  personne interpellée, placée en CRA pendant 10 jours et reconduite sans escorte : 4 850  euros. 

37 () Indicateur 4.1.

38 () Avec un extension du périmètre à tous les services dont la mission nécessite la vérification préalable de la régularité du séjour d’un étranger, notamment les consulats, services de police et unités de gendarmeries, opérateurs (OFII et OFPRA), organismes sociaux et Pôle emploi.

39 () Sur la réorganisation de l’OFII et ses modalités, voir les arrêtés 29 avril 2009 et du 5 août 2009.

40 () En 2008, 4 961 séances de formation civique ont été réalisées contre 4 323 en 2007. Elles ont concerné l’intégralité des signataires.

41 () En 2008, 36,3 % contre 38,39 % en 2007 du public signataire d’un CAI a bénéficié d’une inscription à une session de 6 heures ayant donné lieu à la réalisation de 2 053 séances de formation.

42 () En 2008, 22 338 personnes (contre 26 121 en 2007), soit 21,5 % des signataires (contre 25,8 % en 2007) se sont vues prescrire une formation linguistique. Les formations prescrites aux 22 338 signataires représentent un total de 6 780 493 heures correspondant à une prescription moyenne de 304 heures par bénéficiaire.

43 () En 2008, 858 sessions d’examen au diplôme initial en langue française (DILF) ont été organisées (contre 180 en 2007).

44 () Alpes Maritimes, Paris et Puy de Dôme.

45 () Applicable au 1er décembre 2008, ce dispositif est mis en place selon deux modalités. Dans les pays où l’OFII est représenté (Maroc, Tunisie, Turquie, Mali, Sénégal, et Canada) celui-ci prend en charge le dispositif. Dans les pays où l’OFII n’est pas représenté, l’autorité diplomatique et consulaire du pays propose à l'OFII un organisme délégataire avec lequel celui-ci passera une convention. Ce dispositif n’est pas encore mis en place.

46 () Aide au retour volontaire.

47 () Aide au retour humanitaire.

48 () En 2008, 2 227 personnes ont bénéficié de l’ARV, et 10 191 de l’ARH.

49 () En 2008, 409 projets économiques ont été acceptés en financement, représentant un engagement financier de 2,3 millions d’euros.

50 () Décret n° 2006-1388 du 16 novembre 2006.

51 () Il s’agit d’aider les étrangers non communautaires, de plus de 65 ans, vivant seuls et résidant régulièrement en France depuis au moins 15 ans, à retourner régulièrement dans leur pays d’origine s’ils le souhaitent. Pour ce faire, leurs ressources sont complétées par une aide.

52 () Article 21-15 du code civil : « la naturalisation est accordée par décret »,

53 () Irrecevabilité, ajournement ou rejet.

54 () Ont été retenues les préfectures suivantes : Préfecture de police de Paris, Bouches-du-Rhône, Hérault, Isère, Loire-Atlantique, Loiret, Moselle, Nord, Oise, Orne, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Rhône, Seine-Maritime, Seine-et-Marne, Yvelines, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Val-d’Oise.

55 () PRÉfectures / NATuralisations : application de gestion des demandes de naturalisations.