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Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Mardi 17 juillet 2007

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 04

Présidence de Pierre Méhaignerie Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur le projet de loi relatif aux libertés et aux responsabilités des universités – n° 71 2

– Examen du projet de loi, adopté par le Sénat, après déclaration d’urgence, relatif aux libertés et responsabilités des universités – n° 71 (M. Benoist Apparu, rapporteur)

– Information relative à la commission

La commission a procédé à l’audition, ouverte à la presse, de Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, après déclaration d’urgence, relatif aux libertés et responsabilités des universités – n° 71.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, après avoir salué ses anciens collègues de la commission des affaires culturelles ainsi que les nouveaux parlementaires qui y siègent, a indiqué que le projet de loi sur les libertés des universités se situe dans la continuité des travaux de la dernière session et, en particulier, du pacte pour la recherche de 2006.

La future loi sur les libertés, l’autonomie et la gouvernance des universités constitue le socle d’une vaste réforme de l’enseignement supérieur qui nécessitera du temps, l’autonomie complète des universités, notamment sur le plan budgétaire, étant prévue d’ici cinq ans.

Au-delà de cette loi, cinq chantiers ont déjà été ouverts : les conditions de vie des étudiants, l’immobilier universitaire, la réussite au niveau de la licence, le statut des jeunes chercheurs et des enseignants-chercheurs, la carrière des personnels de l’université.

Le constat global fait ressortir une orientation par l’échec et une mauvaise insertion professionnelle qui impliquent une réaction d’autant plus rapide qu’elles touchent les milieux les moins favorisés, surreprésentés à l’université quand les enfants de cadres le sont dans les grandes écoles. Or c’est bien à l’université que se fait la promotion sociale par le mérite. En outre, deux étudiants sur trois en première année universitaire préféreraient être inscrits en filière sélective courte ou en classe préparatoire aux grandes écoles. L’université, trop souvent, est donc un choix par défaut. À cela s’ajoute le fait que 50 % de ces jeunes échouent à la fin de la première année et que 90 000 étudiants quittent chaque année l’université sans diplôme. Par ailleurs, la moitié des diplômés de l’université qui sont à bac plus quatre n’ont toujours pas trouvé un travail un après leur sortie de l’enseignement supérieur.

L’université est morcelée, suradministrée et sous-dotée financièrement.

On dénombre ainsi 85 universités dans notre pays, situation unique en Europe. La loi de 2006, à travers les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) – une dizaine sont à ce jour constitués – a opéré des regroupements avec des résultats souvent remarquables mais il faut aller plus loin. Il importe, bien entendu, de ne pas laisser les petites universités à l’écart, mais de créer des pôles puissants dans lesquels elles s’intégreront. Surtout, il convient de créer des universités avec des labels attractifs et reconnus.

La plupart des procédures sont lourdes, dévoreuses de temps et d’énergie : ainsi, l’élection d’un président demande parfois jusqu’à vingt-trois tours de scrutin ! Dans ce contexte, le président n’est pas un chef d’équipe ou un porteur de projets mais l’homme du consensus autour du plus petit dénominateur commun. Les conseils d’administration, de la même manière, ont des effectifs pléthoriques et sont saisis du moindre petit problème de vie universitaire. Enfin, les recrutements des enseignants sont parfois très longs, jusqu’à dix-huit mois dans certaines universités.

C’est le rayonnement intellectuel de la France qui pâtit de cette situation. Quelles que soient les réserves que l’on peut avoir à l’endroit du classement de Shanghai, force est de constater la baisse d’attractivité des universités françaises : la première d’entre elles, dans le domaine scientifique, est classée quarante-cinquième seulement ; la première dans le domaine de la santé est classée cent-unième. S’agissant de l’accueil des étudiants étrangers, notre pays n’est de surcroît que le cinquième sur le plan mondial.

Le rapport de MM. Claeys et Bouvard, dans le cadre de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC), faisait état de vingt et une propositions pour l’université : ce projet, fondé sur deux axes – la réforme de la gouvernance universitaire et les nouvelles compétences octroyées aux universités – en reprend dix-neuf.

Le conseil d’administration, tout d’abord, doit être limité à vingt ou trente membres tout en étant plus représentatif et plus stratégique dans l’organisation de ses missions. Il comprendra des enseignants-chercheurs, des étudiants et un ancien étudiant, des membres d’autres catégories de personnels, des personnalités issues du monde social et économique et des collectivités locales. Il manque notamment aux universités un lien entre les générations, comme ont su le tisser les grandes écoles : il n’existe pas d’annuaire des anciens étudiants ; aucune université ne peut faire des statistiques sur le débouchés trouvés par ses anciens étudiants qu’elle perd de toute façon de vue en moins de deux mois.

Le président Pierre Méhaignerie a souligné cette lacune et fait remarquer que même deux mois après son départ de l’université l’étudiant est souvent perdu de vue.

La ministre a poursuivi en jugeant qu’il importe avant tout de mettre en place un dispositif souple, différent selon les universités, l’autonomie n’étant effective que si la loi ne « verrouille » pas d’emblée le recrutement des différentes personnalités qualifiées. Le président sera légitimé car élu par le conseil d’administration ; il sera en outre un véritable porteur de projet et un animateur d’équipe ; enfin, il sera jugé sur ses résultats à partir d’un bilan sur lequel le conseil d’administration sera appelé à se prononcer. Les personnalités qualifiées, quant à elles, ne prendront pas part à son élection. Ces nouvelles règles de gouvernance seront applicables d’ici un an.

Dans ce schéma de gouvernance, le choix du mode de désignation des personnalités qualifiées s’avère crucial. Or il faut renoncer au mythe de l’élection des personnes qualifiées car on ne voit pas bien comment celle-ci pourrait être organisée. De même, une désignation de ces personnes par des corps constitués est problématique car il faudrait alors identifiés ces organismes. De plus, ce mode de désignation est susceptible de déboucher sur de l’absentéisme, car les choix pourraient se porter sur des personnes peu motivées. Au total, le meilleur système est celui dans lequel le président de l’université fait appel à des personnalités extérieures pour appuyer sa politique de formation et de recherche.

En ce qui concerne les modes d’élection des membres du conseil d’administration, il reposera sur un scrutin de liste sans panachage, celui-ci donnant lieu parfois à des résultats improbables, et reposera sur l’attribution d’une prime majoritaire à la liste des enseignants-chercheurs arrivée en tête. Cette dernière règle est destinée à favoriser des majorités stables, permettant d’élire un président qui devrait disposer ainsi de l’appui nécessaire pour conduire sa politique.

S’agissant des responsabilités nouvelles, les conseils d’administration pourront créer ou supprimer des formations tout comme ils pourront raccourcir le délai de recrutement des professeurs. Les universités seront en outre responsables de l’orientation active auprès des lycéens – ce chantier sera engagé dès l’automne prochain – et d’une mission d’insertion professionnelle chargée, par exemple, de trouver des stages.

Le projet conforte même la liberté d’inscription dans les universités ainsi que la création de fondations dans un cadre à la fois souple et contrôlé permettant de trouver de nouveaux financements. C’est en quelque sorte le pendant universitaire de l’assouplissement de la carte scolaire.

Enfin, le président disposera d’un droit de veto sur les recrutements sur la base d’un avis motivé. Le Conseil d’Etat a estimé que ce nouveau pouvoir ne posait pas de problèmes d’inconstitutionnalité au regard du principe d’indépendance des professeurs d’université ni ne remettait en cause les principes de la fonction publique. Tel qu’il est conçu, ce droit de veto ne devrait être utilisé que lorsque la personne pressentie pour occuper un poste ne correspond pas au profil recherché.

D’autres responsabilités seront conférées aux universités d’ici cinq ans, notamment la gestion de l’intégralité de leur budget ainsi que de leurs ressources humaines. Elles pourront ainsi disposer plus librement de leurs crédits de fonctionnement et d’investissement. Par ailleurs, leur président pourra recruter des contractuels exerçant des fonctions d’enseignement et de recherche et le conseil d’administration pourra moduler les obligations de service des enseignants-chercheurs, ce qui pourrait mettre fin au paradoxe français qui interdit aux jeunes chercheurs de chercher et aux chercheurs expérimentés de se consacrer davantage à l’enseignement. Le contrôle de l’État continuera à s’exercer néanmoins de façon vigilante lors de l’affectation de la dotation globale.

Les universités pourront, dans le cadre de la seule compétence optionnelle prévue par le projet de loi, demander à devenir propriétaires du patrimoine immobilier qui leur est mis à disposition par l’État. Un état des lieux du patrimoine immobilier des universités sera alors organisé et les universités pourront alors décider de leur politique de gestion en la matière. Une mise en sécurité des locaux, après expertise contradictoire, sera enfin mise en place.

En conclusion, on peut dire que la concertation, notamment avec les étudiants, a porté ses fruits.

Il y a une vrai évolution des mentalités parmi les étudiants sur la question de l’université : celle-ci ne doit pas être uniquement le lieu de l’acquisition des connaissances mais également avoir pour mission l’insertion professionnelle. Il faut transformer son savoir en compétence pour réussir professionnellement.

Le rôle de l’État est réaffirmé comme partenaire et garant de l’autonomie. Un contrat pluriannuel sera conclu tous les quatre ans avec l’État. Son application donnera lieu à une évaluation sur laquelle s’appuiera la définition de l’allocation de moyens. Il s’agit d’un amendement adopté sur la proposition du groupe socialiste du Sénat qui souhaite que les normes dites de San Remo soient révisées et qu’un bilan des dotations globales de fonctionnement des universités soit dressé.

MM. Alain Néri et Alain Claeys ont protesté contre cette interprétation de la position du groupe socialiste du Sénat.

La ministre a indiqué que le groupe socialiste du Sénat a demandé la présentation d’un rapport sur les modalités de calcul de la dotation globale de fonctionnement qui proposerait toutes les pistes de réforme. L’objectif était que les normes de San Remo ne s’appliquent plus. La lecture du compte rendu des débats du Sénat confirmera cette interprétation.

L’Etat restera garant de la nouvelle université puisque les diplômes conserveront leur caractère national, les formations seront définies à l’échelon national, comme les frais d’inscription. Enfin, un comité de suivi annuel de la réforme sera mis en place. Les étudiants, ainsi, seront vraiment les acteurs de leur réussite !

Un débat a suivi l’exposé de la ministre.

M. Benoist Apparu, rapporteur, a précisé que le présent projet de loi, première étape d’une réforme globale, est le fruit d’une large concertation. Un amendement important sera proposé qui visera à revenir au texte initial du gouvernement s’agissant de l’élection du président et de la désignation des personnalités qualifiées car c’est bien au président d’exprimer son choix et ses orientations : si, par exemple, l’université veut favoriser le développement de l’insertion professionnelle, ce sont des représentants des entreprises qui devront être choisis. C’est au président de nommer les personnalités qualifiées, lesquelles ne sauraient donc participer à son élection.

Au-delà de la réforme des universités, il est nécessaire de réformer la direction générale de l’enseignement supérieur. Sa vocation actuelle de gérer et encadrer doit s’effacer devant de nouvelles missions tournées vers l’accompagnement et le contrôle a posteriori des universités. Elle doit devenir un instrument de pilotage stratégique des universités.

M. Alain Claeys s’est défini comme un militant de la réforme universitaire dans le respect des spécificités françaises. Si l’échec à l’université est insupportable, de même que le sous-encadrement, le sous-financement, le morcellement, la non-visibilité de nos universités à l’étranger, ce projet ne répond pas pour autant à cette situation puisqu’il se limite à la question de la gouvernance, laquelle devrait être le point d’aboutissement et non de départ de la réforme de l’enseignement supérieur. Non seulement la nécessaire réforme consensuelle n’est pas au rendez-vous, mais le gouvernement ne débloque pas un seul centime pour l’université et la recherche.

L’enjeu est donc de moderniser les relations entre l’État et les universités. Qu’en est-il vraiment du sort réservé au rapport de la MEC, selon lequel le préalable à une réforme efficace de la gouvernance commande de partir de la situation d’échec de nombreux étudiants et du déblocage de nouveaux moyens financiers ? Qu’en est-il des postes contractuels, de l’expérimentation, des dotations budgétaires ?

Mme Muriel Marland-Militello a salué ce projet courageux. Les classes préparatoires, très efficaces car fondées sur la sélection, relèveront-elles toujours de la responsabilité des lycées ou seront-elles intégrées dans les universités ? Actuellement, les médecins et les professeurs des centres hospitalo-universitaires (CHU) choisissent les enseignants dans les facultés de médecine. Conserveront-ils cette prérogative ? Par ailleurs, sur la question de la sélection, il faut rappeler que toutes les universités étrangères pratiquent la sélection à l’entrée du cursus étudiant.

M. Jean-Pierre Door, se déclarant satisfait d’un projet qui sera rapidement opérationnel, a remercié la ministre pour son exposé. Si les universités françaises ne sont plus à la hauteur, n’est-ce pas en raison de leur trop grand nombre ? Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) sont, de ce point de vue, indispensables et sans doute leur évaluation serait-elle nécessaire. Enfin, le gouvernement tiendra-t-il compte du rapport Hetzel, préconisant une meilleure orientation en amont des étudiants et soulignant un manque de suivi de ces derniers ?

M. Yves Bur a considéré que cette réforme est urgente et que l’échec des étudiants en première année est le défi majeur qui est posé. Une meilleure orientation en amont suffira-t-elle ou faut-il se rendre à une évidence : tous les bacheliers n’ont pas vocation à aller à l’université ? Comment, pratiquement, les universités pourront-elles fusionner ?

En réponse aux intervenants, la ministre a affirmé que la direction générale de l’enseignement supérieur devra se restructurer. Tous les ministres ont d’ailleurs reçu une feuille de route afin que les départs de fonctionnaires en retraite ne soient pas tous remplacés et que l’ensemble des politiques publiques soit réévalué. À la différence de ce que prétend M. Claeys, des dépenses ont été engagées en faveur de l’université puisque les bourses universitaires ont augmenté de 2,5% dès cet été, ce qui représente tout de même 54 millions d’euros.

M. Alain Claeys s’est à nouveau étonné que le collectif budgétaire n’ait pas prévu l’augmentation des crédits de l’université alors que l’Assemblée nationale a débattu pendant une semaine du bouclier fiscal et d’avantages fiscaux d’un montant de 12 milliards d’euros.

La ministre lui a rappelé que cinq chantiers ont été ouverts et qu’ils seront traités, pour certains, dans le projet de loi de finances pour 2008. Poursuivant ses réponses, elle a indiqué que, pour lutter contre l’échec, il conviendra de repenser les enseignements fondamentaux en première année et d’envisager aussi la mise en place de cours de méthode. Cette loi est un préalable nécessaire et tout ne peut se réduire à une question de moyens. Il importe, en outre, que les postes contractuels représentent une petite minorité. C’est une volonté que le gouvernement a voulu marquer lors de l’examen du projet de loi au Sénat. Ce sera inscrit dans les contrats pluriannuels.

M. Alain Claeys a jugé à ce propos que la rédaction du texte issue du Sénat était particulièrement dangereuse.

La ministre a rétorqué que cette mesure a été inspirée par le groupe socialiste du Sénat.

M. Alain Claeys a nié une telle inspiration.

La ministre a indiqué qu’il s’agissait d’un amendement que le groupe socialiste a retiré quand celui-ci a constaté que le rapporteur reprenait la proposition.

M. Alain Claeys a considéré qu’il s’agit d’un mensonge et que les propos de la ministre ne sont pas acceptables.

La ministre a précisé que le groupe socialiste a ensuite demandé par un amendement la publication d’un décret sur le sujet. Sur les deux amendements, le gouvernement en a retenu un. Le compte rendu des débats du Sénat prouvera qu’il n’y a pas de mensonge. M. Alain Claeys doit retirer ses propos.

M. Alain Claeys a indiqué qu’il souhaitait rétablir la vérité. C’est sur le sujet de la fixation, par le contrat pluriannuel, du pourcentage de la masse salariale consacré au recrutement des enseignants-chercheurs contractuels que les sénateurs socialistes se sont opposés. Ce dispositif n’était pas celui de l’amendement socialiste du Sénat.

La ministre a indiqué que le groupe socialiste avait retiré son amendement et n’avait pas voté l’amendement du gouvernement, mais le dispositif de l’amendement du groupe socialiste était celui décrit.

Le président Pierre Méhaignerie a considéré que l’incident était clos. M. Alain Claeys a donné une autre interprétation à ses propos, ce qui retire son propos initial.

La ministre a récusé l’idée selon laquelle le gouvernement a voulu limiter les expérimentations, rappelant que M. Nicolas Sarkozy a assuré aux différents acteurs du monde universitaire que l’autonomie, voulue par tous, y compris le Collège de France ou l’École normale supérieure, serait effective pour tous d’ici cinq ans. Poursuivant ses réponses, elle a apporté les précisions suivantes :

– Les classes préparatoires, désormais incluses dans le cursus licence-master-doctorat, continueront néanmoins à relever des lycées. Tout ne va pas pour le mieux dans l’organisation actuelle des facultés de médecine puisque nos meilleurs professeurs consacrent peu de temps à la recherche. Or les médecins des CHU doivent être intégrés dans une stratégie universitaire de recherche et travailler en liaison avec des spécialistes d’autres disciplines. Ce sont les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé qui décideront de la création des postes dans les CHU, lesquels seront ensuite affectés à l’université.

– Non seulement il n’est pas exact de prétendre que la sélection est généralisée dans les autres pays, mais elle existe déjà en France puisqu’il faut avoir le bac pour accéder à l’université. En outre, la France n’a pas assez d’étudiants. Le problème majeur est celui de la sélection par l’échec, surtout en première année. Seuls 37 % d’une classe d’âge arrive en année de licence alors que le rapport annexé au projet de loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école proposait de faire accéder la moitié d’une classe d’âge au moins à la licence. Seule une meilleure orientation pourra modifier la donne.

– Les PRES constituent un outil précieux pour réunir universités, grandes écoles et centres de recherches. La fusion, et c’est actuellement la politique des universités de Strasbourg avec un pôle allemand, conduit à d’excellents résultats.

– Le projet gouvernemental se situe dans la droite ligne des préconisations du rapport Hetzel, toute la difficulté étant la mise en œuvre concrète de l’orientation active et de la préinscription dans une université.

– Le gouvernement est favorable à la fusion des universités dès lors qu’elles le souhaitent mais l’outil principal de regroupement demeure les PRES.

M. Olivier Jardé a rappelé que, si l’université doit permettre d’acquérir des savoirs, elle doit également favoriser l’obtention d’une formation professionnelle. Une révision des effectifs sera nécessaire dans les facultés de médecine compte tenu de la double appartenance des praticiens à l’université et à l’hôpital. Ces derniers doivent avoir une affectation lors de leur nomination et leur retour doit être assuré dans les facultés. C’est au Conseil national des universités (CNU) de veiller au bon déroulement de ce processus.

M. Claude Goasguen a qualifié ce texte de courageux et a salué la mise en place d’un programme pluriannuel pour les universités. Toutes les universités doivent veiller au maintien d’une pluridisciplinarité effective, quelle que soit la spécialité du président. Ce dernier doit-il maîtriser l’ensemble des moyens alloués au risque de brimer une UFR minoritaire ? Faut-il, en matière de postes et compte tenu du droit de veto du président, remettre en cause les agrégations du supérieur ?

En outre, afin d’éviter tout clanisme, la mobilité doit être institutionnalisée. Comme il n’est pas raisonnable de compter 85 universités, la loi doit encourager les regroupements indépendamment des PRES. Enfin, le ministère de l’enseignement supérieur doit disposer d’une direction des affaires financières indépendante de la rue de Grenelle.

M. Bernard Debré s’est félicité de cette nécessaire réforme, qui n’a que trop tardé. À l’avenir, un président d’université pourra-t-il être issu d’un corps ou d’un milieu professionnel différents ? Les financements supplémentaires issus des fondations ou des entreprises s’ajouteront-ils à la dotation globale ou viendront-ils en remplacement de crédits d’Etat supprimés ? Quel sera le statut des professeurs étrangers associés ? Seront-ils payés comme les enseignants français ? Un président d’université pourra-t-il décider d’un effort financier supplémentaire pour s’attacher tel ou tel enseignant ?

En outre, afin d’attirer les étudiants étrangers, les visas devront être accordés plus facilement. Compte tenu de l’état dramatique des locaux universitaires, l’État prendra-t-il à sa charge les travaux de reconstruction ? Enfin, les professeurs d’université – praticiens hospitaliers peuvent être nommés par les présidents des universités. Un avis de la commission médicale d’établissement est toutefois indispensable et on voit mal un président d’université aller contre cet avis.

M. Yvan Lachaud a jugé très favorablement ce projet. Le premier cycle universitaire étant inadapté, comme en témoignent les nombreux échecs des étudiants, il convient de revoir les méthodes pédagogiques, de favoriser le développement du contrôle continu et de veiller à ce que les étudiants aient plus de cours, à l’instar des formations en IUT ou en STS. Il faut en outre élaborer un véritable statut de l’étudiant tant leur situation est souvent précaires. Enfin, les jeunes sortant de formations courtes avec un BTS ou un DUT doivent avoir d’autres perspectives que celle de la licence professionnelle.

La ministre a estimé que M. Olivier Jardé n’avait aucune raison de s’inquiéter s’agissant des effectifs dans les facultés de médecine. Puis elle a apporté les éléments de précision suivants :

– Il n’est pas pensable qu’un président d’université se livre à une chasse aux sorcières sachant qu’un refus d’affectation peut être soumis au tribunal administratif et censuré s’il est mal motivé ; l’agrégation nationale est, quant à elle exclue, du veto motivé du président.

– En matière de regroupement, les PRES demeurent des outils efficaces.

– En ce qui concerne la direction générale financière, il demeure très difficile de s’affranchir de la tutelle de la rue de Grenelle.

– La mobilité est souhaitable mais son organisation doit être examinée dans le cadre global du chantier des carrières actuellement ouvert. L’existence d’une prime peut même être envisagée. Il convient également de réfléchir à l’accession des femmes aux postes de professeur.

– La situation n’est pas encore mûre pour que des personnes non issues de l’université puissent accéder à une présidence, même si un professionnel ayant quitté le monde universitaire peut fort bien être élu.

– Les professeurs étrangers pourront être rémunérés, grâce au budget global, en dehors de la grille de la fonction publique.

– Le projet de loi de finances pour 2008 comprendra un volet sur la rénovation immobilière des universités.

– Une association comme Campus France, créée en mars 2007, œuvre d’ores et déjà, notamment auprès des consulats, pour attirer les meilleurs étudiants étrangers en France.

La ministre a par ailleurs exprimé son accord total avec les propos de M. Yvan Lachaud.

M. Daniel Fasquelle s’est félicité de l’action de la ministre, car gagner la bataille de l’intelligence suppose de faire de l’enseignement supérieur une priorité et de favoriser une plus grande liberté. S’agissant de la pluridisciplinarité, il est nécessaire d’instaurer un dialogue au sein de l’université entre les UFR et le conseil d’administration afin que toutes les disciplines soient équitablement représentées. En outre, les universités de proximité étant régulièrement menacées alors qu’elles dispensent des formations de qualité en relation avec les besoins des territoires, qu’en sera-t-il de leur pérennité ?

M. Jean-Yves Le Déaut a considéré que nombre de questions continuent de se poser : morcellement des universités, échec des étudiants, absence de visibilité internationale, manque d’encadrement. En dépit des 54 millions supplémentaires annoncés, le collectif budgétaire ne comporte aucune avancée significative en faveur de l’enseignement et de la recherche quand le bouclier fiscal, lui, a bel et bien été voté. Le déploiement dans le temps de 5 milliards d’euros a certes été annoncé, mais ne semble prévu pour agir ici et maintenant. Il serait par exemple bienvenu d’améliorer la situation financière dans laquelle se trouve les doctorants, qui est indigne du pays ; une amélioration immédiate est indispensable ; une augmentation significative de la rémunération des doctorants ne mobiliserait que 150 à 200 millions d’euros.

Par ailleurs, l’amendement du Sénat concernant le recrutement des personnels contractuels est dangereux car il ouvre la voie à l’expérimentation alors que d’autres voies sont possibles. Aussi le groupe socialiste proposera-t-il une autre rédaction du dispositif. Il importe, enfin, de donner toute leur place aux personnels ingénieurs, administratifs, techniques, ouvriers et de services (IATOS) et aux ingénieurs administratifs au sein de la gouvernance universitaire.

M. Pierre Cohen a souligné que la ministre avait parlé d’urgence tout en renvoyant, par exemple, l’affectation des moyens financiers au projet de loi de finances pour 2008. Il aurait été préférable d’élaborer dans la concertation une loi globale cohérente. En outre, la contradiction est patente entre la lettre de cadrage du Président de la République selon laquelle il ne faut pas remplacer tous les départs de fonctionnaires à la retraite et le projet pour les universités qui impliquera le déblocage de nouveaux moyens. Les contraintes budgétaires finiront par mettre en cause l’existence du service public des universités.

Le président Pierre Méhaignerie s’est interrogé sur la possible utilisation par l’université des 23 milliards d’euros dont dispose la formation permanente.

En réponse aux différents intervenants, la ministre a donné les éléments d’information suivants :

– Les universités de proximité sont importantes. Elles jouent un rôle essentiel dans les territoires et répondent à de véritables besoins. L’État continuera à fixer des objectifs et se montrera vigilant.

– Ainsi que le Président de la République l’a indiqué : « faites d’abord les réformes, les moyens suivront ». La gouvernance des universités est un verrou qu’il faut débloquer. L’examen du projet de loi a de surcroît été trop longtemps reportée alors que la réforme, déjà préparée par M. Claude Allègre puis M. Luc Ferry, est urgente. Les grandes lois globales, quant à elles, ne changent guère les situations concrètes. Avec plus de soixante heures de concertation, l’urgence n’a en rien oblitéré le débat comme le prouve d’ailleurs la discussion au Sénat qui s’est terminée plus tôt que prévu.

– Le gouvernement réfléchit à une meilleure rémunération des doctorants, laquelle devrait être rapidement effective.

– S’agissant des emplois contractuels, dont la part doit être la plus ténue possible, la souplesse s’impose de manière à pouvoir faire face à la diversité des situations qui se présenteront.

– Malgré les contraintes budgétaires et la nécessaire maîtrise des dépenses publiques, ce sont 3 % du PIB qui doivent être consacrés à la recherche, ce qui implique bien entendu l’octroi de nouveaux crédits.

– Le Président de la République a affirmé qu’il souhaitait, l’an prochain, une grande réforme de la formation permanente.

Le président Pierre Méhaignerie a souhaité que les parlementaires y soient associés.

La ministre s’y est montrée très favorable. L’université doit être le lieu de la formation tout au long de la vie, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Le président Pierre Méhaignerie a constaté que les étudiants d’un IUT de chimie dans laquelle il s’est récemment rendu souhaitent prolonger leurs études au-delà des deux ans car, une fois le diplôme obtenu, les perspectives semblent irrémédiablement fixées faute d’une véritable formation permanente toute la vie.

La ministre a considéré que l’expérience acquise devait pouvoir faire l’objet d’une validation universitaire. Elle a conclu en soulignant l’importance de la formation universitaire et des diplômes qui sont délivrés.

Le président Pierre Méhaignerie l’a remerciée de sa disponibilité.

*

Puis la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné, sur le rapport de M. Benoist Apparu, le projet de loi, adopté par le Sénat, après déclaration d’urgence, relatif aux libertés et responsabilités des universités – n° 71.

La commission est passée à l’examen des articles.

Le président Pierre Méhaignerie a rappelé que la commission n’examine pas les amendements qui ne sont pas soutenus par leurs auteurs, rappelant en outre qu’il n’est pas possible aux autres commissaires de les reprendre.

TITRE Ier

LES MISSIONS DU SERVICE PUBLIC DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Article 1er : Missions du service public de l’enseignement supérieur

La commission a examiné un amendement de M. Daniel Fasquelle tendant à ce que les missions du service public de l’enseignement supérieur soient exercées avec le souci de son accessibilité sur l’ensemble du territoire national et de la participation de l’université au développement économique et social local

Le rapporteur a donné un avis défavorable à cet amendement, faisant valoir que la ministre venait de tenir des propos rassurants sur les universités de proximité et qu’il convenait ne pas alourdir les missions que la loi confie aux universités.

Tout en adhérant au souci exprimé par le rapporteur de ne pas alourdir le texte, le président Pierre Méhaignerie a souligné l’importance de la question soulevée par l’amendement, ne serait-ce qu’en termes de démocratisation de l’accès à l’université.

Le président s’étant engagé avec le rapporteur à ce que la question soit abordée en séance, M. Daniel Fasquelle a retiré l’amendement.

La commission a adopté l’article 1er sans modification.

TITRE II

la gouvernance des universitÉs

Chapitre Ier

Organisation et administration

Article 2 : Statuts des établissements

Après que le rapporteur, exprimant son accord sur le fond, a fait valoir que les conseils d’administration des universités doivent pouvoir définir leurs structures internes, M. Daniel Fasquelle a retiré deux amendements visant à inciter les universités à prendre en compte, dans leurs statuts, les besoins et l’identité des grands secteurs de formation et de recherche.

La commission a adopté l’article 2 sans modification.

Article 3 : Création d’une section intitulée « Gouvernance »

La commission a adopté l’article 3 sans modification.

Article 4 : Administration de l’université

La commission a examiné un amendement de M. Daniel Fasquelle tendant à ménager la possibilité de confier au conseil scientifique un pouvoir de proposition. Soutenu par Mme Françoise Hostalier, il a fait valoir que cette extension de compétences n’est pas considérable et qu’elle s’inspire de l’expérience de nombreuses universités étrangères.

Le rapporteur a plaidé pour que soit préservée l’architecture du texte, qui instaure une gouvernance forte en attribuant les pouvoirs de décision au conseil d’administration et en accordant au conseil scientifique et au conseil des études et de la vie universitaire, lesquels ne doivent pas intervenir trop fréquemment dans le fonctionnement de l’université, la faculté de rendre des avis. Il sera loisible aux universités qui le souhaitent d’étendre dans leurs statuts les pouvoirs du conseil scientifique.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.

Le rapporteur ayant souligné qu’il convenait d’aborder cette question ultérieurement dans le texte, M. Daniel Fasquelle a retiré un amendement visant à organiser la participation des responsables de composantes à l’administration globale de l’université.

La commission a adopté l’article 4 sans modification.

Chapitre II

Le président

Article 5 : Élection, mandat et compétences du président

La commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à rétablir le texte initial du projet de loi afin que le président du conseil d’administration soit élu par les membres élus du conseil d’administration.

M. Daniel Fasquelle a ensuite présenté un amendement visant à ce que les statuts de l’université déterminent les conditions dans lesquelles le président anime, en concertation avec les composantes de l’établissement, l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de la politique de l’université.

Le rapporteur ayant rappelé que les contrats pluriannuels imposeront en tout état de cause le dialogue avec les composantes et estimé, en accord avec le président Pierre Méhaignerie et avec Mme Valérie Rosso-Debord, qu’il n’était pas opportun de mettre en place un dispositif trop contraignant, la commission a rejeté l’amendement.

Puis la commission a examiné un amendement du rapporteur tendant à confier au président du conseil d’administration la compétence d’établir la liste des emplois vacants ou demandés pour lesquels l’ouverture d’un concours est demandée à un ministre.

Le rapporteur a indiqué que, compte tenu de la nouvelle architecture de l’université proposée par le projet de loi, il serait plus cohérent que le pouvoir d’arrêter la liste d’emplois à ouvrir par concours soit détenu par le président et non par le conseil d’administration comme c’est le cas actuellement.

M. Alain Claeys a considéré qu’une telle proposition se traduirait par un excès de présidentialisation.

La commission a rejeté l’amendement.

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Information relative à la commission

La commission a désigné Mme Martine Billard rapporteure pour avis du projet de loi de finances pour 2008 (« Sécurité sanitaire »), en remplacement de Mme Catherine Génisson démissionnaire.