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Compte rendu

Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Mardi 6 mai 2008

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 43

Présidence de Pierre Méhaignerie Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Michel Boyon, président de Conseil supérieur de l’audiovisuel, et de M. Paul Champsaur, président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, sur le dividende numérique 2

– Informations relatives à la commission 14

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a procédé à l’audition, ouverte à la presse, de M. Michel Boyon, président de Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), et de M. Paul Champsaur, président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), sur le dividende numérique.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a remercié M. Michel Boyon et M. Paul Champsaur de leur présence. Après un moment d’hésitation, la commission a en effet décidé de les auditionner ensemble sur le dividende numérique. C’est une ressource très convoitée, d’une valeur économique, culturelle et sociale considérable. Comme l’avait fait remarquer M. Paul Champsaur, nul ne doit être exclu des nouveaux services parce qu’il habite dans un territoire qui ne serait pas couvert. Il faut par ailleurs reconnaître qu’une occasion aussi exceptionnelle que la réaffectation des fréquences tirées de l’extinction de la diffusion en mode analogique risque de ne pas se présenter à nouveau avant plusieurs décennies.

La commission du dividende numérique, qui est composée de parlementaires, fera des propositions. Mais il convenait auparavant de prendre en compte le travail déjà effectué par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et de connaître les orientations préconisées par ces deux instances. Plus précisément, quels sont les objectifs du CSA à moyen terme ? Quelle est la valeur estimée du dividende numérique ? Quels sont les besoins respectifs des acteurs de l’audiovisuel et des télécommunications ? Quelle est l’approche de la Commission européenne sur la question de la gestion du dividende numérique ? Telles sont les premières questions.

M. Michel Boyon, président du Conseil supérieur de l’audiovisuel, a indiqué que le CSA ne se situe pas dans une logique d’affrontement entre le secteur des télécommunications et le secteur de l’audiovisuel. Il n’est pas là pour défendre quelque « pré carré » des opérateurs de l’audiovisuel, quelque champ de compétences politico-administratives. Il est conscient que les fréquences hertziennes sont une ressource rare. Sa seule préoccupation est qu’elles puissent être exploitées au mieux de l’intérêt du pays. Il prône la sérénité et la transparence.

La question du dividende numérique ne peut pas être séparée de son cadre général : le passage de l’audiovisuel au « tout-numérique ». La loi du 5 mars 2007 considère comme un ensemble l’arrêt de la diffusion analogique de la télévision, le développement de nouveaux services audiovisuels et l’obtention d’un dividende constitué des fréquences audiovisuelles rendues disponibles. Le CSA appréhende le sujet au regard des trois impératifs qui guident son action quotidienne : le respect de la loi, la volonté de répondre aux attentes du public, l’exigence de tirer le meilleur parti de la croissance permise par les nouvelles technologies. Ces priorités sont aussi celles de la représentation nationale.

Quelle est la méthode la plus pertinente pour favoriser la constitution du dividende numérique ?

L’extinction de la diffusion analogique est nécessaire pour plusieurs raisons : garantir l’extension de la télévision numérique terrestre et assurer une continuité de service au téléspectateur ; mettre fin à une double diffusion, analogique et numérique, extrêmement coûteuse pour les chaînes ; développer de nouveaux services utilisant la ressource hertzienne : la haute définition, la télévision mobile personnelle, la radio numérique, mais aussi des applications liées aux télécommunications.

L’extinction de la diffusion analogique n’aura lieu de façon pertinente que si plusieurs conditions sont remplies : commencer suffisamment tôt pour permettre la poursuite de l’extension de la diffusion numérique terrestre, que les élus et la population réclament ; adopter la progressivité afin d’assurer la maîtrise technique du processus ainsi que la communication auprès du public ; se fixer pour horizon le plan-cible, c’est-à-dire le plan définitif des fréquences, pour permettre à tous les usages numériques d’y prendre place, sans que le dividende numérique ne se trouve compromis par des choix prématurés.

Le CSA insiste sur l’importance de commencer l’extinction de la diffusion en mode analogique au plus tôt, dès 2009 pour deux régions, dans un souci de pédagogie à l’intention des Français, de réduction des coûts pour les diffuseurs, de continuité de service pour les téléspectateurs. Il est fondamental de mettre le téléspectateur au cœur du processus, de le faire pleinement adhérer à la démarche dans laquelle il aura un rôle personnel à jouer. À cette fin, le conseil entend apporter trois garanties : une garantie de continuité dans la réception des services de télévision ; une garantie de simplicité, avec un processus d’extinction reproduisant largement le découpage des régions de France 3, pour faciliter l’information du public et l’action du groupement d’intérêt public « France Télé numérique » ; une garantie de moindre coût, avec la mise en œuvre du fonds d’accompagnement du numérique, qui évitera toute fracture d’ordre social.

La méthode proposée est pragmatique. Elle permet notamment de mieux préparer la libération effective des fréquences, comme le souhaite la commission du dividende numérique. Si nous engageons le processus suffisamment tôt, en particulier si le schéma d’extinction de la diffusion analogique, qui relève de la compétence du Premier ministre, est adopté à l’été 2008, les opérations pourront être menées à bien dans les meilleures conditions. Si ce schéma n’était pas encore approuvé au mois de septembre 2008 et si la préférence était donnée à une formule dans laquelle le basculement se ferait d’une seule traite en fin de processus, il deviendrait très difficile de respecter l’échéance du 30 novembre 2011 fixée par la loi, donc de rendre disponible un dividende numérique à cette date.

La méthode recommandée par le CSA permettra de parvenir à un plan-cible libérant des fréquences pour de nouveaux usages. Lors de la Conférence mondiale des radiocommunications de Genève en 2007, une sous-bande de neuf canaux a été définie à l’échelle européenne, dans le haut de la bande UHF. Elle doit être libérée au plus tard en 2015 afin d’accueillir des usages audiovisuels ou de télécommunications, à la différence du reste de la bande UHF qui continue à relever d’usages strictement audiovisuels. Le dividende numérique, sur lequel porte la concurrence entre plusieurs catégories d’usages, concerne donc ces mêmes canaux de la sous-bande. Celle-ci doit d’ailleurs être encore stabilisée au niveau international ; en effet, le plan-cible initial de basculement vers le numérique incluait ces canaux, et certains pays comme la Suisse, le Royaume-Uni ou l’Espagne en ont affecté définitivement une partie à la TNT, suscitant des risques importants de brouillages si des usages autres qu’audiovisuels prenaient place sur ces fréquences en France.

C’est donc la libération de ces fréquences, en France en 2012, en Europe au plus tard en 2015, qui permettra d’envisager de nouveaux usages audiovisuels ou de télécommunications.

Quels sont les besoins exprimés auxquels le dividende numérique pourrait apporter une réponse ?

Ceux de l’audiovisuel sont clairs : les nouveaux services sont déjà en place, ils correspondent aux attentes du public, outre leur impact social et culturel, ils représentent une croissance économique immédiate. La loi du 5 mars 2007 prévoit l’enrichissement de l’offre en télévision numérique terrestre et le développement de nouveaux services audiovisuels. Cet objectif ne pourra être atteint si l’on n’y consacre pas une partie du dividende numérique. Cette donnée était parfaitement connue au moment de l’adoption de la loi, qui dispose que la majorité des fréquences libérées par l’extinction de la diffusion analogique reste affectée à l’audiovisuel. Le CSA est déterminé à donner son plein effet à la loi, qui érige en objectifs d’intérêt national le développement des télévisions locales, le passage à la haute définition, le lancement de la télévision mobile personnelle et l’essor de la radio numérique. Telles sont en effet les attentes fortement exprimées par nos concitoyens.

La gratuité et l’accès pour tous que la diffusion hertzienne terrestre apporte dans le domaine de l’audiovisuel sont essentiels. Les Français ont une culture de la réception hertzienne de la télévision ; ce n’est pas le cas des pays voisins, pour des raisons techniques dues à leur taille relativement modeste, ou pour des raisons tenant à l’organisation du système audiovisuel. Et cette réception est traditionnellement gratuite. Il faut le prendre en compte. La télévision hertzienne terrestre doit bénéficier pleinement des innovations résultant du numérique. Réserver les innovations au câble, au satellite ou à l’ADSL créerait une fracture numérique sociale, et serait hasardeux à l’heure où l’on constate le poids croissant des nouvelles technologies dans le budget des ménages.

Quelle évaluation en découle-t-il en termes de fréquences ? L’évaluation de ces besoins ne peut être faite aujourd’hui avec une précision suffisante : elle dépend des gains de compression de la haute définition, mais aussi du nombre des fréquences nécessaires pour parvenir à une couverture optimale de notre territoire, afin d’éviter toute fracture numérique territoriale.

Selon les progrès de la compression MPEG-4, le besoin pour la TNT en haute définition s’élève à huit, neuf ou dix multiplex, avec trois ou quatre chaînes par multiplex, pour une vingtaine de chaînes gratuites et une dizaine de chaînes payantes, ce qui correspond au paysage actuel et aux « chaînes bonus » prévues par la loi. Personne ne conteste aujourd’hui la nécessité pour les chaînes de la TNT de passer en haute définition.

Il faut ajouter deux multiplex de télévision mobile personnelle (TMP), car le nombre des réponses au premier appel à candidatures lancé par le CSA montre que les opérateurs croient au succès de la mobilité, aux potentialités de croissance que celle-ci représente pour l’audiovisuel comme pour les télécommunications. Pour treize canaux disponibles, le CSA a reçu 36 dossiers sérieux.

Enfin, réserver un multiplex pour les télévisions locales semble assez souhaitable au regard des besoins de plus en plus exprimés par les collectivités territoriales.

Le besoin en fréquences dépend aussi de la couverture souhaitée. Si l’on veut garantir le taux de couverture prévu par la loi pour la TNT (95 % de la population métropolitaine), une partie des canaux de la sous-bande sera nécessaire. Plus le nombre des canaux laissé à l’audiovisuel dans la sous-bande sera important, meilleure sera la couverture territoriale. Il faut donc fixer le niveau acceptable socialement et politiquement en sachant que l’hypothèse maximaliste (un prélèvement de neuf canaux) compromettrait fortement les objectifs énoncés par la loi. Pour autant, le CSA est tout à fait disposé à déplacer le curseur entre la bande qui lui est affectée et celle qui est ouverte au secteur des télécommunications, pour permettre le développement de nouveaux usages dans ce secteur.

Les besoins exprimés par les télécommunications sont tout aussi importants pour l’avenir de notre pays mais leur développement peut se faire également sur d’autres bases. Le développement du très haut débit, qu’il soit fixe avec la fibre optique – laquelle n’utilise pas de fréquences – et le Wimax, ou qu’il soit mobile avec la « 4 G », est un enjeu pour la croissance et l’aménagement du territoire.

La question que pose le dividende numérique est en fait relativement marginale par rapport à cet enjeu :

– parce qu’elle correspond à une faible partie du spectre qui peut être utilisée pour les usages de télécommunication ;

– parce que le dividende numérique n’est pas nécessaire pour couvrir en GSM ou en 3 G les « zones blanches » des campagnes, où de nombreuses fréquences restent disponibles ,la seule raison pour laquelle ces zones ne sont pas desservies aujourd’hui étant financière ;

– parce que la 4 G n’existe pas encore et qu’elle ne sera pas stabilisée ni développée avant plusieurs années.

La 4 G est de surcroît présentée par certains comme une grande innovation pour la fourniture de contenus audiovisuels ; or la candidature d’Orange à deux canaux de TMP montre que la technologie la plus adaptée à l’heure actuelle pour cet usage est bien celle que développe le CSA.

L’enjeu économique du dividende numérique est lié à la valorisation de la ressource hertzienne. Dans un contexte de rareté de la ressource hertzienne, l’innovation est essentielle pour développer le maximum de nouveaux services. Le secteur de l’audiovisuel a mené une croissance que l’on peut qualifier d’intensive car le passage au numérique permet de développer la haute définition, de lancer la mobilité, d’enrichir l’offre de programmes, sans recourir à de nouvelles fréquences, mais tout simplement en investissant dans le progrès technologique.

L’investissement massif dans la numérisation puis l’extinction de la diffusion analogique permettront de libérer des fréquences. Cela coûte très cher car il faut procéder à de nombreux réaménagements de fréquences, extrêmement onéreux. Il serait donc normal que ceux qui profiteront des fréquences libérées, s’ils n’ont pas financé l’ensemble du processus comme l’auront fait les opérateurs audiovisuels, contribuent financièrement à l’extinction de la diffusion analogique et, à l’arrivée, au plan-cible. Les opérateurs de télécommunications doivent être partie prenante du processus s’ils veulent en bénéficier.

Cet effort d’intensification doit être accompli sur l’ensemble du spectre. Le dividende n’est pas l’ultima ratio de l’optimisation du spectre, il n’est pas le dernier espoir de développement de services audiovisuels ou de télécommunications par voie hertzienne dans notre pays. Rien ne permet d’établir que c’est maintenant, ou dans quarante ans. Bien au contraire, c’est une opération qui ouvre de nouvelles perspectives.

La gestion du spectre des fréquences audiovisuelles, qui est affecté au CSA, peut être qualifiée d’optimale, en ce sens que toute fréquence libre doit être attribuée à un opérateur dès qu’il le demande. Dans ce domaine, il n’y a pas de jachère.

La valorisation économique des fréquences ne doit pas être vue seulement sous un angle financier de court terme.

La question de la valorisation des fréquences est régulièrement évoquée. Les opérateurs de la télévision numérique terrestre bénéficient gratuitement de fréquences, mais ils sont soumis en contrepartie à des obligations ayant notamment trait au financement de la création. Le poids de ces obligations est estimé à environ 25 % de leur chiffre d’affaires. C’est donc une valorisation des fréquences, économique, sociale et culturelle, une valorisation de long terme, que permet aujourd’hui le mode d’attribution des fréquences audiovisuelles dans notre pays. Certains souhaitent un système de mise aux enchères, qui laisse entrevoir les profits économiques les plus immédiats. Mais faisons attention aux calculs trop simples, et privilégions les bénéfices de long terme pour notre société.

Enfin, l’audiovisuel est un secteur innovant, de pointe, qui investit dans les nouvelles technologies.

C’est un secteur économique à part entière. Il est le fait d’entreprises, privées ou publiques, grands groupes ou PME, qui œuvrent dans le domaine de la production, de la diffusion ou dans la filière technique. Il rassemble aujourd’hui plus de 250 000 emplois, et continue d’en créer. Il doit donc être traité comme toute industrie. Les exemples donnés prouvent son caractère innovant. Nous sommes parmi les tous premiers dans le monde pour la généralisation de la TNT, pour la télévision mobile personnelle. Nous serons probablement les premiers pour le passage à la haute définition. C’est un secteur qui investit et qui crée. En un mot, ce n’est pas un secteur « ringard ».

C’est avec la connaissance de la ressource disponible, du dividende numérique utile au sein de la sous-bande, avec une vision claire des projets actuels et futurs et de leurs besoins en fréquences, avec une anticipation des progrès technologiques à venir, que le débat pourra continuer à se dérouler dans la sérénité et la transparence. De ce point de vue, depuis bientôt un an, l’apport de la commission du dividende numérique, les travaux du comité stratégique pour le numérique, du CSA, de l’Agence nationale des fréquences, de l’ARCEP permettent le rapprochement des points de vue.

L’été dernier, certains pensaient qu’il fallait très vite prendre parti sur l’usage du dividende numérique. Le CSA, en revanche, considérait qu’il n’y avait pas à trancher la question, qu’il valait mieux laisser travailler les experts et qu’au bout d’un certain temps, on y verrait plus clair quant aux besoins des uns et des autres. Les faits lui ont donné raison. Avant la fin 2008, on devrait pouvoir aboutir à une analyse consensuelle ou quasiment consensuelle s’agissant des besoins en fréquences des différents utilisateurs potentiels.

Si l’on dispose de ce diagnostic partagé et si l’on continue de progresser dans la sérénité et dans la transparence, on pourra prendre de la manière la plus utile des décisions judicieuses pour notre pays.

Le président Pierre Méhaignerie a remercié M. Michel Boyon pour ses déclarations fermes et claires.

M. Paul Champsaur, président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), a d’abord tenu à remercier la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de lui donner l’occasion de présenter l’analyse de l’ARCEP sur cette question essentielle qu’est le dividende numérique.

Le spectre hertzien constitue un actif immatériel de l’État extrêmement précieux. Selon le rapport de la Commission sur l’économie de l’immatériel, les revenus générés par l’utilisation du spectre sont estimés à plus de 200 milliards d’euros en Europe par an, soit près de 2 % du PIB européen. L’usage de cette ressource conduit aujourd’hui à un constat de rareté, qui freine le développement de solutions technologiques sans fil innovantes sur l’ensemble du territoire. Cette situation renforce l’exigence d’une utilisation plus efficace du spectre.

J’adhère complètement aux grands principes posés par Michel Boyon au tout début de son intervention.

La fourniture sur l’ensemble du territoire de l’accès à très haut débit mobile est un enjeu économique, culturel et social majeur, qui nécessite la mise à disposition de fréquences basses.

Les services de communications mobiles s’apprêtent à suivre le même chemin que les services fixes, c’est-à-dire une transition accélérée vers l’accès à haut et très haut débit. Une explosion du marché, comparable à celle observée sur le marché du haut débit fixe, est prévisible.

L’accès mobile devrait naturellement s’inscrire dans le prolongement des offres Internet fixe, pour assurer au consommateur - particulier ou professionnel - la continuité et l’ubiquité de l’accès personnel aux services Internet, sur une grande diversité de terminaux, en dehors de son domicile ou de son entreprise, avec le même confort d’utilisation et la même richesse d’usages que les accès filaires performants.

L’UMTS a désormais pris son essor. Les principales raisons sont bien connues. D’abord la montée en débit s’accélère. Les débits proposés aujourd’hui sont dix fois supérieurs à ceux des premières offres UMTS lancées fin 2004. Ils sont désormais analogues à ceux de l’entrée de gamme des réseaux filaires à haut débit ADSL. Ensuite, la croissance du trafic est stimulée par les nouveaux modes de tarification, l’accès devenant progressivement illimité. À cet égard, une étape importante a été franchie avec les nouvelles offres lancées fin 2007. Enfin, le développement des usages est favorisé par les nouveaux terminaux conçus pour l’Internet mobile, allant du téléphone intelligent à l’ordinateur nomade, en passant par le baladeur audio ou vidéo connecté à l’Internet.

Ces tendances se poursuivent. Les technologies mobiles qui prendront la succession de l’UMTS et permettront de fournir des débits encore plus élevés sont d’ores et déjà en développement. Ainsi, dès le début de la prochaine décennie sont attendus des systèmes dits 3G LTE – LTE signifiant « évolution de long terme » – permettant des débits d’une à plusieurs dizaines de mégabits par seconde et après 2015 des débits autour de 100 Mbit/s. Tout cela entraîne des enjeux économiques, culturels et sociétaux majeurs.

L’Internet à haut débit mobile est un levier de croissance économique. En contribuant au développement de la productivité de nos entreprises, la fourniture sur l’ensemble du territoire de l’Internet à très haut débit mobile aura un impact positif sur le PIB. Ce nouveau vecteur de distribution de contenus culturels, musicaux et audiovisuels est à même de répondre à l’évolution de la consommation vers un mode plus individualisé, interactif, délinéarisé et nomade. Il va sans aucun doute engendrer de profondes mutations dans la façon d’accéder à la culture et aux contenus. Enfin, en renouvelant la façon de communiquer, l’Internet à haut débit mobile est un facteur important de présence, d’accès et d’inclusion sociale. Les technologies à haut débit sans fil ont un rôle important à jouer pour réduire les inégalités entre territoires.

Voilà pourquoi la couverture du territoire en accès à haut et très haut débit mobile constitue un objectif politique de premier plan. Mais pour que les réseaux à très haut débit 3G LTE puissent être déployés sur l’ensemble du territoire, il est indispensable que leur soient allouées de nouvelles fréquences basses, c’est-à-dire inférieures à 1 GHz.

De fait, toutes les fréquences ne sont pas équivalentes. Les fréquences basses - souvent désignées sous l’appellation de « fréquences en or » - présentent des propriétés physiques de propagation bien meilleures que les fréquences hautes. Pour déployer un réseau mobile, il est nécessaire de disposer d’une part des fréquences basses - indispensables à la réalisation d’une couverture étendue du territoire - et d’autre part des fréquences hautes - pour répondre aux besoins de capacité en zones denses.

Les fréquences basses à 900 MHz ont rendu possible la réalisation de la couverture mobile GSM et leur réutilisation va permettre l’extension de l’UMTS au-delà des zones denses couvertes actuellement grâce aux fréquences hautes à 2,1 GHz. Mais – ceci vaut pour la France et la plupart des pays dans le monde – la bande de fréquences à 900 MHz est beaucoup trop étroite pour accueillir les technologies 3G LTE qui prendront la succession de l’UMTS pour la fourniture de l’accès à Internet mobile aux débits attendus au début de la prochaine décennie. Sans fréquences basses additionnelles, les services à très haut débit mobile vont donc se trouver dans une situation de pénurie grave de fréquences, qui limitera leur déploiement aux seules zones denses correspondant à environ 70 % de la population et 30 % du territoire de toute manière couvertes grâce à l’emploi de fréquences hautes à 2,6 GHz. Une nouvelle fracture numérique apparaîtra entre les zones où le très haut débit mobile sera disponible et le reste du territoire.

Par ailleurs, l’affectation d’une part du dividende numérique aux services mobiles représente une chance historique et un enjeu majeur d’aménagement du territoire. Pour mettre à disposition les fréquences basses indispensables à la couverture du territoire en très haut débit mobile, la libération du dividende numérique représente une occasion unique dans le contexte actuel de pénurie.

La répartition des fréquences basses en vigueur aujourd’hui est le produit de l’histoire, au cours de laquelle les meilleures fréquences furent affectées au fur et à mesure de l’apparition des nouveaux usages. C’est ainsi que la radiodiffusion hertzienne utilise les fréquences dites UHF, comprises entre 470 et 830 MHz.

La numérisation de la télévision hertzienne terrestre va libérer, à l’extinction de l’analogique, une quantité considérable de fréquences, dont le lancement de nouveaux services audiovisuels est le principal bénéficiaire. En effet, à définition comparable, la diffusion d’une chaîne en numérique nécessite six fois moins de ressources qu’en analogique. Mais l’affectation de ce dividende numérique n’est pas une question spécifiquement française : elle s’inscrit dans un contexte éminemment international, en raison des enjeux d’harmonisation et de coordination aux frontières.

Une étape très importante a été franchie en novembre 2007 : la conférence mondiale des radiocommunications - la CMR - a identifié une partie de la bande UHF pour les services de communications mobiles : il s’agit de la sous-bande 790-862 MHz pour la région Europe, Afrique et Moyen-Orient.

Cette décision comporte certaines limites. D’abord, la quantité de spectre identifiée pour l’Europe est de 72 MHz : elle est faible par rapport aux besoins de 150 MHz évalués pour le secteur des communications électroniques et en retrait par rapport à celle identifiée dans d’autres régions du monde : la sous-bande pour l’Amérique, la Chine, le Japon, la Corée et l’Inde va de 698 à 806 MHz, soit une quantité de 108 MHz, en complément des fréquences 806 à 862 MHz déjà identifiées dans ces régions pour le service mobile. En outre, la décision de la CMR a un caractère non contraignant. Pour lui donner une portée effective, il faut des négociations bilatérales de « coordination aux frontières » entre pays voisins.

Malgré tout, cette décision est essentielle. Elle lève une hypothèque et ouvre des perspectives crédibles au développement pour tous et partout du haut débit mobile. Il est désormais essentiel de la mettre en œuvre, c’est-à-dire de décider aujourd’hui de l’affectation à titre exclusif dès l’arrêt de l’analogique de ces fréquences basses aux services mobiles.

Cette décision permettra à l’Agence nationale des fréquences de mener avec un mandat clair les négociations bilatérales de coordination aux frontières qui sont de toute manière indispensables pour coordonner les opérations de basculement vers la diffusion numérique entre pays voisins. Elle permettra à l’ARCEP d’engager dès 2009 la préparation de l’attribution de licences pour le très haut débit mobile, en prenant en compte simultanément les fréquences basses issues du dividende numérique pour les besoins de couverture et les fréquences hautes à 2,6 GHz pour la capacité en zones denses. Ces dernières ont déjà fait l’objet d’une harmonisation européenne. Elle donnera aux acteurs, opérateurs et constructeurs, la visibilité et les garanties qui leur sont indispensables pour engager sans attendre sur le plan industriel et économique la préparation des investissements nécessaires, dans un contexte de compétition mondiale.

Cette décision laisse largement ouvertes les possibilités de développement des services audiovisuels. En effet, la sous-bande 790-862 MHz ne représente qu’une part très minoritaire du dividende numérique. Elle n’entre qu’à hauteur de 40 MHz en recouvrement avec la bande 470-830 MHz affectée à la radiodiffusion et se situe dans une plage peu utilisée. Les 32 MHz compris entre 830 et 862 MHz sont affectés au ministère de la défense, avec lequel des discussions constructives sont déjà engagées pour examiner les modalités de migration vers des fréquences plus hautes.

De plus, les études techniques disponibles montrent qu’une densification de l’utilisation de la bande UHF bien au-delà des seuls sept multiplexes audiovisuels actuellement prévus est aisément réalisable. Elles montrent ainsi que, tout en affectant la sous-bande 790-862 MHz aux services mobiles, il est possible de mettre en œuvre 12 multiplexes audiovisuels, soit 10 multiplexes de TNT et 2 multiplexes de télévision mobile DVB-H.

Troisièmement, la libération de la bande 790-862 MHz à l’arrêt de l’analogique doit être garantie par le schéma d’arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique.

L’extinction de la diffusion analogique est une opération complexe et coûteuse. Pour le téléspectateur, le passage obligatoire au numérique à l’arrêt de l’analogique implique un coût correspondant à l’achat d’un récepteur numérique, mais également dans de nombreux cas à l’intervention d’un professionnel en vue de l’adaptation des installations de réception. Des actions de communication massives seront nécessaires afin que l’opération se déroule dans de bonnes conditions. Mais une modification importante des caractéristiques techniques de diffusion de la TNT postérieurement à l’extinction de l’analogique impliquerait une opération supplémentaire, dont l’ampleur engendrerait des surcoûts, présenterait des enjeux délicats de continuité de service et rendrait nécessaire une nouvelle vague d’interventions chez les téléspectateurs.

Ainsi que le souligne le CSA dans sa contribution rendue publique le 16 avril dernier, au-delà de la seule réinitialisation des décodeurs numériques, une intervention de professionnels serait nécessaire chez certains téléspectateurs pour mettre en conformité avec de nouvelles conditions de réception de la TNT les antennes sur le toit ou les filtres et amplificateurs du système antennaire, notamment en habitat collectif. Or un réaménagement de grande ampleur est nécessaire en France, car plus de 80 % des fréquences mises en œuvre pour le déploiement de la TNT ne sont pas compatibles avec le plan défini lors de la conférence régionale de la radiodiffusion de Genève en 2006. Aussi convient-il de coupler autant que possible l’arrêt de l’analogique et la migration vers le plan cible de fréquences utilisées par la TNT, et d’éviter qu’une insuffisante anticipation conduise à des vagues de réaménagements de fréquences supplémentaires. Le schéma d’arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique appelé à être approuvé par le Premier ministre devrait donc être conçu en tenant compte du schéma cible d’affectation des fréquences.

En l’absence de l’établissement rapide d’un plan cible complet, le schéma devrait alors garantir que l’extinction de la diffusion analogique s’accompagne sans délai de la libération de la sous-bande 790-862 MHz, ce qui n’affectera que très peu le schéma national d’arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique.

M. Christian Kert a estimé que si la question de la répartition des fréquences semble abordée avec sérénité par les deux régulateurs, il leur faudra bien néanmoins choisir entre favoriser l’image ou les télécommunications. Comment les deux institutions envisagent-elles de résoudre ce problème ?

Quant aux opérateurs qui se lancent dans la course à l’image par l’intermédiaire de la télévision mobile – même si certains estiment qu’elle ne rencontrera pas le même succès que la TNT – et de la création de chaînes, ils semblent échapper à toute réglementation. Le CSA a-t-il le souci d’une réglementation homogène en matière de télévision ?

M. Christian Paul a fait observer que le dividende numérique n’est qu’en apparence un sujet technique car il soulève également des problèmes d’ordre économique, politique et culturel. Il a souhaité soumettre aux deux régulateurs quelques hypothèses dégagées par la commission du dividende numérique dont il est membre.

Les deux déploiements de l’Internet haut débit et de la télévision haute définition paraissent indispensables. Les régulateurs estiment-ils, à l’instar de la commission du dividende numérique, qu’il n’est pas forcément impossible de parvenir à un partage équilibré de la ressource, tout en servant l’essentiel des demandes ? La commission du dividende numérique a le sentiment qu’avec quelques arbitrages à la marge, on pourra servir l’essentiel des demandes.

S’agissant par ailleurs de la constitution de la ressource disponible, quelle est la chronologie prévue pour l’élaboration du plan cible ? Le plan-cible ne doit pas être arrêté trop tôt, au risque de ne pas être adapté, ni trop tard, au risque de poser des problèmes de sécurisation des émissions. Quel est le scénario idéal articulant l’adoption du plan-cible et l’extinction de la diffusion analogique ?

Enfin, quelles seront, pour les opérateurs de l’audiovisuel comme des télécommunications, les conditions de cession et de valorisation des fréquences en termes de contreparties ? L’hypothèse d’une mise aux enchères paraît brutale mais ces fréquences sont un élément du domaine public qui peut être cédé selon des critères très variés.

M. Michel Herbillon a indiqué faire sienne la question de M. Christian Kert concernant une réglementation homogène face à la création de chaînes de télévision par les opérateurs de télécommunications. Il convient vraiment de développer la pédagogie en direction du téléspectateur afin de le mettre au cœur de la démarche et de faciliter ainsi son adhésion au processus de basculement vers le numérique. Qui conduira le dispositif imaginé en la matière, et quel sera notamment le rôle du CSA en la matière ?

M. Patrick Roy a appelé l’attention sur la situation de la presse écrite régionale, qui est essentielle dans notre démocratie, et pour laquelle la télévision régionale représente un réel espoir. À cet égard, comment le CSA conçoit-il, sur le plan national, le paysage futur de la télévision locale ?

Le président Pierre Méhaignerie a déclaré que la commission des affaires culturelles est très attentive à l’évolution de l’audiovisuel mais également aux besoins futurs de la société en matière de services à la fois en termes d’efficacité économique, d’aménagement du territoire et d’égalité des chances. Aussi veillera-t-elle à l’équilibre entre les télévisions, l’Internet et le secteur de la presse écrite et du livre.

M. Paul Champsaur a indiqué que l’affectation des rares ressources en fréquences entre les grands usages – audiovisuel, télécommunications, sécurité ou armées – relève du niveau politique. Il serait vain, voire risqué, d’attendre d’institutions administratives qu’elles fassent des choix fondamentaux en la matière. Certes, certains pays, notamment anglo-saxons, ont fusionné l’équivalent des deux institutions, CSA et ARCEP, ce qui leur a permis d’effectuer ces choix plus tôt, mais ils n’ont pu pour autant éviter un certain manque de transparence. La répartition doit aussi s’envisager au niveau européen car nos pays sont beaucoup trop petits : outre que les fréquences passent les frontières, les matériels ne sont pas développés pour des diffusions à une échelle aussi petite que les Etats européens.

S’agissant de l’incursion des opérateurs de télécommunications dans l’audiovisuel, elle n’est pas considérée avec sympathie par le régulateur des télécommunications du fait des effets de levier possibles pour les très gros opérateurs de télécommunications.

M. Michel Herbillon a fait observer que c’est déjà le cas.

M. Paul Champsaur a reconnu qu’il n’existe pas en France d’institution bien adaptée pour traiter ce problème. Cependant, le régulateur des télécommunications n’est pas non plus favorable à ce que certains gros opérateurs de l’audiovisuel puissent imposer leurs conditions à des opérateurs de télécommunications.

La culture des télécommunications est de permettre l’accès de tout le monde à tout, y compris à des contenus audiovisuels.

Ainsi que le soulignait M. Christian Paul, le sujet du dividende numérique est technique, mais il a trait à la vie quotidienne de nos concitoyens. Les investissements que les changements impliquent, les jeunes s’y lancent déjà. Aussi n’y a-t-il pas d’alternative pour le monde politique que d’intervenir.

Quant aux déploiements, il est parfaitement possible de fournir à la fois une offre audiovisuelle très large, couvrant tout le territoire, et un dividende numérique pour les télécommunications.

La question de la cession et de la valorisation des fréquences relève clairement, non de l’ARCEP, mais du Gouvernement, à qui il revient, lorsque des fréquences sont attribuées, de préciser les conditions financières applicables. Tel devrait être le cas, en 2009, pour le très haut débit mobile.

Enfin, s’il y a de plus en plus de technologies, elles sont parfois mieux adaptées à certains usages qu’à d’autres. Ainsi, s’agissant des télévisions locales, le seul moyen pour capter à Paris une chaîne diffusée dans les Alpes, par exemple, est de passer soit par le satellite soit par l’ADSL.

M. Michel Boyon a, en réponse à M. Christian Kert, confirmé que les éléments d’une répartition consensuelle du dividende numérique sur la base de données objectives seront dégagés à l’automne 2008.

Quant à l’intervention des opérateurs de télécommunications dans l’audiovisuel, la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle dispose que, quel que soit le mode diffusion, tout service qui s’adresse simultanément au public ou à une catégorie du public et qui est composé d’une série ordonnée d’émissions constituant un programme doit être regardé comme un service de télévision. Tous les services de télévision diffusés sur le même support sont soumis aux mêmes règles, et donc tout opérateur de téléphonie fournissant un service présentant les caractéristiques d’un service de télévision sera soumis aux mêmes quotas de diffusion ou encore aux mêmes engagements d’investissement que les autres.

Si tel ou tel grand opérateur de télécommunications peut susciter la crainte du fait de sa puissance financière, la loi française, contrairement à certains pays, ne permet pas de s’opposer à ce qu’il devienne un nouvel éditeur de services audiovisuels. Encore faut-il que la compétition soit égale, que le droit de la concurrence soit respecté et qu’un transfert de charges au sein d’un même groupe ne fausse pas la compétition. C’est un point auquel le CSA, avec le Conseil de la concurrence, sera particulièrement attentif.

Si l’on veut par ailleurs l’extinction de la télévision analogique, il convient, comme le soulignait M. Michel Herbillon, de mettre le téléspectateur au cœur de la démarche, en faisant en sorte qu’il soit d’accord pour s’équiper. Il faut donc beaucoup de pédagogie, en soulignant, en particulier, combien l’audiovisuel est simple. En Grande-Bretagne, où la diffusion de l’analogique a été arrêtée dans deux régions, 85 % des 25 000 foyers interrogés ont déclaré avoir réglé leurs problèmes par eux-mêmes, 50 % d’entre eux ayant même trouvé cela plus facile que prévu. Le ménage français ne peut que faire au moins aussi bien que le ménage britannique. La communication en la matière sera coordonnée par le Groupement d’intérêt public France Télé Numérique, mais tous les acteurs devront y participer – les chaînes elles-mêmes, le CSA, les collectivités locales, etc.

L’enjeu n’est pas neutre. C’est ainsi que, toujours en Grande-Bretagne, le coût de la communication pédagogique à l’attention de la population est évalué à 300 millions d’euros, et celui de l’aide financière aux personnes de plus de soixante-quinze ans et aux personnes handicapées rencontrant des difficultés pour s’équiper à 900 millions d’euros.

S’agissant des télévisions locales hertziennes, force est de reconnaître que la France n’est pas en avance en la matière à la différence des autres domaines. Au début de l’année, en effet, on comptait 130 services locaux de télévision diffusés sur le câble, principalement dans le Nord et l’Est, et seulement 25 télévisions locales, dont seules deux présentent des comptes équilibrés – TV8 Mont-Blanc et Canal 32 à Troyes. Seule une télévision locale bien gérée et proposant un programme digne de ce nom peut parvenir à l’équilibre financier.

L’objectif du CSA n’est pas de créer des centaines de télévisions locales, comme il en existe dans les pays voisins, mais de lier les fréquences hertziennes disponibles à un projet. À la fin de l’année, environ quarante-cinq télévisions locales seront ainsi autorisées à diffuser sur le mode numérique et le total devrait atteindre quatre-vingt-dix à la fin 2011. Il est vraisemblablement que c’est un plafond et que l’on n’ira pas au-delà d’une centaine de télévisions hertziennes locales.

Le président Pierre Méhaignerie a demandé si le contribuable finançait les télévisions locales dans les pays voisins.

M. Michel Boyon a répondu par la négative, à condition de ne pas englober dans le terme télévisions locales les télévisions publiques qui, par exemple en Allemagne, constituent ensemble la première chaîne de télévision du pays, même si elles diffusent également leurs propres programmes. Les télévisions locales, en tout cas, finiront, pour la plupart, par trouver un certain équilibre économique, et nombreux sont les candidats qui croient à leur projet.

Pour ce qui est de l’apparition possible d’une sorte de réseau de télévisions locales, il est vrai que des groupes ont acquis un savoir-faire incontestable dans la gestion de télévisions locales, tel le Groupe Hersant Média. Cependant, les tours de table sont assez diversifiés en la matière. En effet, indépendamment de l’opérateur lui-même, on retrouve souvent dans le capital des sociétés exploitant des télévisions locales, un ou deux des trois groupes que constituent le Crédit Mutuel, le Crédit agricole et les Caisses d’épargne, de même que la presse quotidienne régionale et départementale, qui a longtemps considéré la télévision locale comme une ennemie.

S’agissant, plus généralement, de la tarification des fréquences, c’est grâce à la quasi-gratuité de ces dernières qu’il est possible d’imposer aux opérateurs audiovisuels des obligations de contenu, des engagements d’investissement dans la production, des quotas de diffusion, le respect de règles relatives au pluralisme politique et aux principes qui constituent le socle de notre société, ou encore des contraintes pour rendre accessibles les programmes aux personnes malentendantes et demain, grâce à la technique de l’audiovision, aux personnes qui souffrent de handicaps visuels. Si l’on portait atteinte à ce régime, c’est tout le système de la régulation de l’audiovisuel qui s’écroulerait.

D’ailleurs, dans les pays ou les fréquences audiovisuelles sont mises aux enchères et où n’existe pas d’obligation de contenus, le résultat n’est pas très glorieux en termes quantitatifs, alors que la production audiovisuelle française a une notoriété sans commune mesure avec les productions britanniques ou scandinaves.

Mme Élisabeth Flüry-Hérard, membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel, a ajouté que si des interrogations peuvent s’exprimer en matière de télévision mobile personnelle, la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur précise que si l’opérateur de multiplex est constitué des éditeurs de services de télévision, il est également ouvert également aux opérateurs de réseaux de télécommunications. La télévision mobile personnelle est donc un véritable laboratoire permettant de faire travailler ensemble tous les intervenants.

Elle constitue un peu, également, un dividende numérique anticipé puisque l’on donne à des opérateurs de télécommunications la possibilité d’offrir, dans des conditions techniques et économiques très intéressantes, la télévision au plus grand nombre et en même temps, ce que les techniques 2G, 3G ou 4G ne permettent pas On peut donc être plutôt optimiste concernant cette technologie.

M. Gilles Brégant, directeur des technologies du Conseil supérieur de l’audiovisuel, a indiqué que s’agissant de la chronologie du plan-cible, il convient d’abord de savoir que le réseau TNT couvre maintenant toute la France. Les travaux de planification ont permis de comprendre comment cette technologie fonctionnera sur la durée. Par ailleurs, des plans régionaux des fréquences nécessaires pour couvrir chacune des régions – dont les besoins en fréquences sont très hétérogènes – seront publiés à l’automne 2008. À l’issue de cette opération, on aura une idée précise du reliquat de fréquences disponibles dont l’affectation pourra alors être décidée en fin d’année. Mandat pourra ainsi être donné à l’Agence nationale des fréquences pour négocier la coordination des fréquences avec les pays voisins, ce qui peut être très complexe notamment dans le cas de l’Espagne qui a placé toute sa TNT dans la sous-bande UHF dégagée par la Conférence de Genève. Nous aurons alors une vision claire du système, sachant que l’arrêt de l’analogique, en permettant aux chaînes de dépenser moins, leur donnera la possibilité d’investir dans la diffusion en mode numérique.

Ainsi, en 2009 ou au plus tard en 2010, le plan-cible sera stabilisé et progressivement mis en place, seules quelques fréquences restant à ajuster en 2011.

En tout cas, le financement de la TNT reposant en partie sur l’extinction de la diffusion en mode analogique, il convient de commencer très tôt ce dernier processus, d’autant qu’au fur et à mesure de l’extinction les problèmes de coordination entre les fréquences affectées à l’usage audiovisuel se simplifieront.

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Information relative à la commission

La commission a désigné M. Benoist Apparu rapporteur pour avis sur le projet de loi constitutionnelle (article 17) de modernisation des institutions de la Ve République – n° 820.